Page 64 - Les jours de Noé et du Déluge
P. 64

64

produit la mort !... Que n’était-il possible à l’art de décrire cette
fontaine de saphir, dont les ruisseaux argentins et tortueux, roulant
sur des pierres orientales et sur des sables d’or, formaient des
labyrinthes infinis sous les ombrages qui les couvraient, en versant
le nectar sur toutes les plantes, et nourrissant des fleurs dignes du
paradis ! Elles n’étaient point rangées en compartiments
symétriques, ni en bouquets façonnés par l’art. La nature
bienfaisante les avait répandues avec profusion, sur les collines,
dans les vallons, dans les plaines découvertes qu’échauffaient
doucement les rayons du soleil, et dans ces berceaux où des
ombrages épais conservaient pendant l’ardeur du jour une agréable
fraîcheur. Cette heureuse et champêtre habitation charmait les yeux
par sa variété: la nature, encore dans son enfance, et méprisant
l’art et les règles y déployait toutes ses grâces et toute sa liberté.
On y voyait des champs et des tapis verts admirablement nuancés,
et environnés de riches bocages remplis d ’arbres de la plus grande
beauté: des uns coulaient les baumes précieux, la myrrhe, et les
gommes odoriférantes; aux autres étaient suspendus des fruits
brillants et dorés, qui charmaient l’œil et le goût... Ici, les palmiers
couvraient de jolis monticules, là des ruisseaux serpentaient dans
le sein d’un vallon couvert de fleurs et de roses sans épines.»
Spécifions que le jardin d'Éden de John Milton a été fortement
agrémenté par son imagination et, quoique plaisant à lire, ne peut
être considéré comme étant crédible.
   59   60   61   62   63   64   65   66   67   68   69