Page 159 - LE MANUEL DE LA BIBLE
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l'Evangile dans l'Eglise primitive sont bien connus, et les Epîtres nous les
révèlent incidemment. Paul nous raconte ce qui se passait à Corinthe et à
Ephèse, et Pierre nous parle de l'influence de la vérité dans le Pont et la Galatie
(1 Cor., VI, 11. Ephés., IV, 19; Il, 1. 1 Pierre, IV, 3). A une époque dissolue, et
sous le plus mauvais de tous les gouvernements, les chrétiens, qui ne valaient
d'abord pas mieux que ceux qui les entouraient, avaient atteint un degré de
moralité et de vertu qui n'a peut-être jamais été dépassé.
On trouve des témoignages analogues dans les écrits des premiers apologistes.
Clément de Rome, dans son épître aux Corinthiens, l'an 100, fait l'éloge de
leurs vertus: “Et qui, s'écrie-t-il, a pu vivre, au milieu de vous, sans admirer
votre piété sobre et modérée, votre large hospitalité. Vous êtes humbles et point
orgueilleux, vous êtes contents du pain quotidien que Dieu vous envoie, vous
écoutez diligemment sa Parole et vous croissez en charité.” - Justin Martyr, qui
avait été un philosophe platonicien, dit de même dans son Apologie, l'an 165:
“Nous qui nous complaisions autrefois dans l'adultère, nous vivons aujourd'hui
dans la plus grande chasteté; nous qui nous adonnions à la magie, nous ne
connaissons plus que le vrai Dieu; nous qui mettions l'argent et le gain au-
dessus de toutes choses, nous possédons maintenant tout en commun et nous
donnons à chacun suivant ses besoins.” - “Et vous, dit Minutius Félix à son
adversaire païen, vous ne punissez le mal que lorsqu'il s'est traduit en faits
extérieurs, tandis que nous regardons comme un péché même de nourrir des
pensées coupables. Ce sont les vôtres qui remplissent vos prisons; vous n'y
trouverez pas un seul chrétien,- à moins que ce ne soit un apostat, ou un
confesseur de la vérité.” - Tertullien, le premier écrivain ecclésiastique latin
dont les oeuvres soient parvenues jusqu'à nous (l'an 220) tient un langage
semblable et parle de multitudes nombreuses qui, dans l'empire romain,
avaient subi l'influence morale de la conversion. Origène, dans sa réponse à
Celse (246), Lactance, le précepteur de Constantin, reproduisent les mêmes
faits, et il n'y a pas jusqu'à l'empereur Julien l'apostat qui l'offre les chrétiens
en modèles aux païens sous le rapport de l'amour du prochain, de l'amour des
ennemis et de la sainteté de la vie.

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