Page 166 - dictionnaire westphal
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et là, Aaron  est présenté sous un jour défavorable. Le verset 34 pourrait  être  une

     allusion à l'exil de 722, considéré comme une punition du culte des veaux d'or dans le
     royaume du Nord.
    2°  Dans  le  document deutéronomique, trois  textes  mentionnent Aaron, mais  jamais
     comme prêtre: De 9:20, qui paraît provenir d'un réviseur qui voulait faire comprendre
     que, si Aaron n'avait pas été puni lors de l'affaire  du veau d'or, c'était grâce à

     l'intercession de Moïse; De 10:6, qui est une adjonction plus récente, interrompant la
     suite du discours de Moïse;  et  De  32:50, une allusion  à la  mort  d'Aaron (placée  au
      mont  Hor,  comme  dans P).  On  sait  d'ailleurs  que D  «n'a connu ni  distinction  entre

     prêtres et lévites,  ni  hiérarchie  parmi  les  familles  de la  tribu  de Lévi»  (A.  Westphal,
     Sources, t. II, p. 203).
    3° On peut enfin constater, dans ceux  des livres  historiques qui n'ont pas subi
     l'influence de P, et dans les récits des prophètes, (voy. 1Sa 12:6,Mic 6:4) que les rares
     textes qui citent le nom d'Aaron ne le mentionnent jamais comme prêtre, mais qu'ils

     lui  attribuent le  même  rôle  que J  et  E.  Et  Ézéchiel,  parlant  de  l'organisation
      sacerdotale  de  l'avenir, ne cite jamais Aaron comme chef des prêtres, mais désigne
     toujours  ceux-ci comme «race» ou «fils  de Tsadok» (Eze 43 19 44:16), et ignore

      totalement  la  fonction  de  grand-prêtre.  Les  deux ou  trois  passages des  livres
      historiques  qui parlent d'un grand-prêtre: 2Ro 12:11 22:4 23:4, sont certainement
     interpolés.
    La conception traditionnelle  du rôle d'Aaron, considéré comme chef et ancêtre du
     sacerdoce israélite, repose donc exclusivement sur P (le document le plus récent); c'est

     lui qui a établi la hiérarchie bien connue: au sommet, Aaron, premier de la série des
      grands-prêtres;  sous ses  ordres,  ses  fils  et  leurs  successeurs, formant  le  sacerdoce
     ordinaire régulier; au-dessous d'eux, les lévites, remplissant les fonctions subalternes.
     Or, la lecture des livres historiques autres que les Chroniques, ouvrage plus récent et

     tout imprégné de l'esprit  de P (1Ch  12:28 emploie  même le  nom d'Aaron tout court
     pour désigner collectivement les prêtres qui accompagnèrent David à Hébron), montre
      nettement  que la  réalité  ne  correspond nullement  à cette  construction tardive  de
      l'édifice  cultuel  d'Israël;  dans ces  livres  «on  chercherait en vain le clergé si bien

     organisé de P». (Benzinger, Hébreu  Archoeol.,  p.  405.)  Et  Wellhausen  (Proleg.  zur
      Gesch.  Isr.,  1899, p.  139) a  montré que l'on serait même en droit de trouver dans
     certains passages l'indice que les deux lignées sacerdotales héréditaires: celle de Dan,
     qui descendait de ce Jonathan petit-fils de Moïse, mentionné Jug 17 et Jug 18:30, et

     celle de la maison d'Héli à Silo, 1Sa 1 et 1Sa 2:27, auraient fait remonter leur origine
     jusqu'à Moïse (ce dernier texte paraît bien désigner Moïse, et non pas Aaron, comme
     ayant été l'intermédiaire de la révélation accordée à la maison d'Héli et de la mission
     sacerdotale confiée à celle-ci); qu'enfin De 33:8 indique assez clairement que tous les

     prêtres voyaient en Moïse leur commun ancêtre (point de vue qui trouverait un appui
     dans Ex 33:7-11).
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