Page 657 - Dictionnaire de la Bible de J.A. Bost 1849 - 2014

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l'Idumée, l'Arabie, la Syrie et la Mésopotamie, et il est mort tranquillement à Édesse. Les auteurs syriens
le font mourir martyr à Bayrouth, en Syrie. Selon les écrivains de l'Église latine, il a pénétré en Perse, où il
a succombé aux fureurs des mages. Eusèbe raconte qu'un des soixante-dix disciples, nommé Thaddée, a
été envoyé par Thomas à Édesse, et la tradition syriaque parle également d'un Addée ou Thaddée qui
aurait évangélisé la Mésopotamie, mais qui ne serait pas un des douze. Enfin, selon Hégésippe, les petits-
fils de Jude auraient été dénoncés à Domitien comme sectateurs de Christ, prétendu roi d'Orient et
descendant de David; mais l'empereur, voyant leur pauvreté et leur profonde ignorance politique, les
aurait fait relâcher aussitôt.
Épître de Jude. L'auteur lui-même se nomme Jude, serviteur de Jésus-Christ, frère de Jacques. Plusieurs
opinions ont été mises en avant; cependant celle qui regarde Jude l'apôtre comme auteur de l'épître
l'emporte de beaucoup sur les autres, soit par l'unanimité de la tradition, soit par l'autorité des
théologiens nombreux qui l'ont adoptée, soit enfin, par l'évidence des arguments qui militent en sa
faveur.
1.
De Wette, et d'autres avec lui, voient l'auteur de l'épître dans Jude frère de Jacques et fils
d'Alphée, mais différent de celui qui est surnommé Lebbée ou Thaddée, lequel Jude selon eux devrait
être entendu comme fils et non frère de Jacques, Luc 6:16; Actes 1:13. Jude Lebbée serait ainsi fils d'un
Jacques inconnu. Ils s'appuient, entre autres, sur ce que l'auteur de l'épître ne prend pas le nom d'apôtre.
Mais on peut répondre que l'auteur était libre de se désigner comme il l'entendait, et qu'il a omis son titre
d'apôtre comme Paul, Philippiens 1:1. Il a préféré se faire connaître quant à son autorité par le titre de
serviteur de Christ, et quant à son individualité par celui de frère de Jacques.
2.
Welker a pris Jude pour Judas Barsabas, et Schott, lisant Judas Bar-Zébed, ferait de ce Jude un
troisième fils de Zébédée, opinion qui n'a pas même besoin d'être réfutée.
3.
Grotius, qui voudrait voir dans cette épître une allusion à la secte gnostique des carpocratiens,
l'attribue à un Jude évêque de Jérusalem sous Adrien, vers 130, et retranche en conséquence les mots
«frère de Jacques», contre l'autorité de tous les manuscrits.
4.
Enfin, l'opinion à laquelle nous n'hésitons pas à nous ranger, attribue l'épître à l'apôtre Jude
surnommé Lebbée et Thaddée, frère de l'apôtre Jacques et fils d'Alphée. Jacques, l'évêque de Jérusalem, si
connu et si estimé dans l'antiquité chrétienne, était le seul qui eût assez de célébrité pour que Jude pût se
servir de son nom comme d'une recommandation suffisante, et si Jude n'y a pas ajouté le nom de son
père, c'est qu'Alphée était peu connu et qu'il n'a servi à distinguer les deux Jacques qu'aussi longtemps
que le fils de Zébédée était encore en vie.
On ne sait rien de positif sur l'époque de la composition de cette épître, non plus que sur l'occasion qui lui
a donné naissance. Il y a un rapport intime entre cette lettre et la seconde de Pierre, et nous en reparlerons
à propos de cette dernière. Il est probable que c'est aux mêmes lecteurs que l'une et l'autre ont été
adressées; elles ont toutes deux le même but, celui qui est indiqué versets 3 et 4. Un mal immense s'était
glissé dans les Églises, mal semé par les faux chrétiens qui poussèrent les doctrines de l'Évangile, et
notamment celles de Paul sur la lin de la loi et sur la liberté, jusqu'à la licence dans la conduite, en
propageant des idées qui plus tard se développèrent dans le gnosticisme, et selon lesquelles le Dieu des
Juifs, organisateur de l'univers et objet du culte judaïque, aurait été un esprit subordonné et même malin;
c'était en un mot une satire faite sur la doctrine de Paul. Pierre et Jude, qui habitèrent longtemps l'Orient,
virent le mal et s'y opposèrent. Jude commença, et Pierre vint plus tard le soutenir de son autorité plus
connue sinon plus réelle, en développant la lettre de Jude à laquelle il a emprunté plusieurs détails.
— L'authenticité de cette épître n'a jamais été sérieusement contestée; elle ne fut reçue dans le canon
syrien qu'au quatrième siècle, et Eusèbe raconte qu'elle était reçue par les uns et lue dans les Églises, mais
que d'autres ne la reconnaissaient point, non plus que celle de Jacques et les deux dernières de Jean. On
comprend facilement qu'une si petite lettre, qui de plus n'était pas de la main de Paul, et qui fut adressée
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