Page 184 - Dictionnaire de la Bible de J.A. Bost 1849 - 2014

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culte les langues païennes, et reprirent en hébreu, mais non sans y mêler du caldéen et des expressions
rabbiniques, leurs lectures et leurs prières, comme ils font encore aujourd'hui.
L’histoire de la Septante est un mythe composé d’une légende qui se retrouve dans un apocryphe de l’Ancien
Testament. Il n’existe aucune preuve de l’existence d’une Bible complète en Grec avant le troisième siècle. La
Septante provient en effet de la cinquième colonne de l’Hexaple d’Origène d’Alexandrie, nous la retrouvons dans les
Codex Vaticanus et Sinaïticus qui firent partis des 50 bibles oécuméniques composés par Eusèbe de Césaré sous
l’ordre de Constantin.
La version de la Vulgate fut commencée (385 après J.-C.) par saint Jérôme, qui avait reconnu les fautes de
la version latine Itala, traduite sur le texte déjà défectueux des Septante; mais quoiqu'il eût été encouragé
dans son travail par quelques-uns de ses amis les plus distingués, entre autres l'évêque Chromatius, sa
traduction fut généralement mal accueillie, et ne fut guère approuvée que des sémipélagiens. Grégoire-le-
Grand l'appuya plus tard, et au temps d'Isidore (VIIe siècle), elle était reçue et estimée à l'égal de l'Itala.
Mentionnons que la version de l’Itala ne provenait pas de la Septante mais des manuscrits originaux d’Antioche. Sa
traduction réalisée par l’église Italique ou église Vaudoise, fut accomplie vers l’an 161. Il fut reconnu que Jérôme
falsifia le texte de l’Itala dans le but de l’accorder avec les textes corrompus d’Origène.
Alcuin, chargé par Charlemagne d'en faire la révision, compara entre eux les nombreux manuscrits qu'il
put se procurer, et les confronta avec le texte hébreu. Au onzième siècle, une nouvelle révision fut jugée
nécessaire, et Lanfranc, archevêque de Cantorbéry, lui donna son nom. De même, le cardinal Nicolas au
douzième siècle. La Sorbonne fit faire ce travail par ses élèves, mais les dominicains (1256) le firent
interdire. Hugues de Sainte-Chair fut plus heureux; mais tous ces essais presque individuels ne firent
qu'accroître la confusion. La découverte de l'imprimerie, dans la seconde moitié du quinzième siècle, vint
ranimer les espérances que l'on avait conçues de conduire à fin l'énorme entreprise d'une traduction
latine de la Bible: la première édition parut à Mayence en 1462, et constata les nombreuses corruptions du
texte. En 1502, le cardinal Ximénès publia sa fameuse Bible d'Alcala, et, en mettant la Vulgate entre le
texte grec et le texte hébreu, il dit dans sa préface «que c'est le Christ entre les deux larrons!» Gumelli
(Paris 1504) et Castellanus (Venise 1511) publièrent la traduction et ses variantes. Robert Étienne en fit
huit éditions successives, et corrigea la version latine d'après l'hébreu. Jean Benoît (1541) et Isidore
Clarius (1542) firent un travail analogue, et ce dernier se plaignit assez librement des innombrables
erreurs dont fourmillait la traduction de Jérôme, amendée, corrigée, changée depuis des siècles. Le
concile de Trente arrive. Après bien des débats, il nomme une commission d'examen qui ne fait rien. Vers
la fin du concile, Pie IV nomma une autre commission, mais à Rome, et sous ses yeux. Pie V la renouvelle
et en accélère les travaux. Douze ans après (1589), Sixte-Quint s'impatiente en voyant l'œuvre à peine
ébauchée. Il en fait son affaire, et la nouvelle Vulgate s'imprime au Vatican, sous ses yeux (1590). Lui-
même il revoit les épreuves: Nostrâ nos ipsi manu correximus. Hélas! l’ouvrage du saint-père prêtait non
seulement à la critique, ce qui était grave, mais à la plaisanterie, ce qui était pire. Hebrœi pour ebrii
(Hébreux, pour ivres), pecoribus pour prioribus (les bestiaux, pour les premiers), etc. D'autres méprises
semblables firent comprendre que le travail ne pouvait pas être ainsi lancé dans le monde; et pour ne pas
perdre l'édition, on se mit à raturer, on corrigea à la plume, et l'on recouvrit un grand nombre de
passages avec des bandelettes de papier sur lesquelles on avait imprimé des corrections nouvelles. Ce
travail, qui n'en fut pas moins maintenu dans son privilège de version authentique, était à refaire.
Grégoire XIV, successeur de Sixte-Quint, se remet immédiatement à l'ouvrage, et Clément VIII a le
bonheur (1592) de publier enfin le texte qu'on ne corrigera plus. Elle diffère par six mille détails, et par
une centaine de corrections importantes, de l'édition de Sixte-Quint, dont les papes cherchent à anéantir
les exemplaires, et Bellarmin, en mettant sur le compte de l'imprimeur les fautes de l'édition sixtine,
avoue encore dans sa préface, que les réviseurs de la nouvelle édition ont laissé passer bien des choses
qui auraient eu besoin d'un examen plus rigoureux. La Vulgate existe enfin; elle a déjà près de deux cent-
soixante ans: son enfantement a été laborieux. Elle est née dans un temps d'orage, elle a respiré dès lors
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