Page 180 - Dictionnaire de la Bible de J.A. Bost 1849 - 2014

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conservation pour les livres saints. C'est à Esdras que les Juifs attribuent l'honneur d'avoir, sous la
direction de l'Esprit d'en haut, recueilli et rédigé les livres du canon actuel, ou les trois parties du code
sacré, en retranchant les écrits inauthentiques, en comparant les manuscrits les uns avec les autres, en
corrigeant les inexactitudes qui, avec le temps, avaient pu se glisser dans l'une ou l'autre des copies. Il fut
secondé dans ce travail par une réunion d'hommes savants et pieux, Josué, Zorobabel, Aggée, Zacharie,
Malachie, Néhémie, Simon le juste, etc., qui, au nombre de cent-vingt, formèrent le grand collège ou la
grande synagogue. De là vient le profond respect et la vénération que les Juifs ont pour Esdras; ils aiment
à le comparer avec Moïse: «Moïse, disent-ils, a donné la loi, mais Esdras l'a restaurée.» (— Voir:
Hævernick, Hist. du canon de l'Ancien Testament, Mél. de Théol. réf., 2e cahier, 1834).
Quant à la collection des livres du Nouveau Testament, il est bien naturel de supposer que les Églises
primitives, liées entre elles par les liens d'une même foi et d'un même amour, se soient communiqué les
unes aux autres les ouvrages, lettres ou autres écrits, qu'elles possédaient et qu'elles avaient reçus des
apôtres et des évangélistes. Rien de plus naturel encore que la supposition qu'on copiait souvent dans les
Églises chrétiennes des ouvrages d'une telle importance. De cette manière, les exemplaires se répandirent
promptement, et les collections se multiplièrent. Il s'en fit un grand nombre, mais elles conservèrent un
caractère privé, inofficiel, jusqu'à ce qu'enfin, lors du concile de Nicée, la collection que nous possédons
actuellement reçut le caractère d'autorité et d'authenticité nécessaire pour la constituer en canon inspiré.
Il n'est pas nécessaire de supposer qu'il y ait eu sur ce sujet des délibérations régulières, en forme, ni un
arrêté exprès, et l'on comprend que la réunion des évêques et des théologiens les plus distingués de tous
les pays de l'empire pouvait par elle-même conduire à ce résultat (— Voir: pour plus de détails l'ouvrage
de Steiger cité plus haut).
C'est ici que s'arrête notre tâche; elle a été ingrate et sèche. Il en resterait une plus belle, mais qui
n'appartient plus au plan de notre Dictionnaire: ce serait de dire les beautés innombrables que renferme
ce livre dont nous n'avons touché que la forme matérielle. C'est avec regret que nous devons abandonner
à d'autres ce beau travail: à d'autres, le soin d'en montrer la divinité; à d'autres, démontrer la richesse de
l'ensemble et la richesse des détails; à d'autres, de faire ressortir cette empreinte céleste et ce parfum
d'antique sainteté; à d'autres, d'en faire voir la majesté pleine d'onction, la douceur sérieuse, la tendre
sévérité, l'inépuisable profondeur et l'éblouissante clarté. Disons seulement que ce livre, riche de faits et
de poésie, sublime de morale, le seul exact et vrai dans ses prophéties, présente le phénomène
remarquable d'un recueil dont les fragments, composés à plus de mille ans d'intervalle, ne laissent en
aucune manière apercevoir la différence des dates, et consacrent par-out une seule et même doctrine:
l'harmonie la plus parfaite se rencontre depuis la Genèse jusqu'à Malachie, dans les dogmes, dans
l'élévation et dans la direction d'esprit de ces écrivains: c'est que le vrai beau, le vrai bon, le vrai grand, est
le même toujours comme chez tous les peuples, car il ne peut venir directement que de Dieu.
Aussi la Bible a-t-elle eu toujours ses admirateurs en dehors même du peuple des croyants, mais des
admirateurs de divers genres. Tous ont compris au moins une des faces du livre sacré, et l'ont mise en
saillie, au détriment peut-être de ce qui fait l'essence même de la Révélation. La morale en a paru sublime
à Jean-Jacques, et la poésie à Chateaubriand; l'un et l'autre de ces deux grands écrivains ont cru rendre
hommage à la vérité divine, mais leur intelligence ne l'avait pas comprise, l'un admirait les résultats,
l'autre la forme extérieure; ils ont loué le christianisme et la révélation, en partant du point de vue de
l'homme, du bon humain, du beau humain, et c'est en le comparant avec ces notions terrestres, avec les
maximes, avec l'esthétique humaine, qu'ils ont pu le trouver divin, mais d'une divinité relative, et non
point absolue Ce volume de la loi sainte n'a pas eu force de loi pour eux, leur théologie et leur morale
sont connues.
On ne doit pas s'étonner, toutefois, de voir les hommages rendus à ce livre par ceux-là même qui lui
refusent obéissance; il est fait pour captiver, pour enchaîner les plus grands génies. Universel, à la portée
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