en latin, telle qu'elle se trouve dans la Vulgate, et il a un certain intérêt à l'établir; mais sauf ces deux
tentatives désespérées, l'ancienne tradition est restée généralement admise, que saint Paul a écrit en grec.
La circonstance que l'apôtre écrivait en Grèce, dans une ville entièrement grecque, et l'examen du texte
dont le style trahit un travail original, seraient, lors même qu'il n'y aurait pas de tradition, des arguments
suffisants pour répondre à toutes les inductions contraires. La langue grecque était d'ailleurs
parfaitement connue à Rome, et chacun la comprenait (Suet., Claude, 4. Dial, des Orat. c. 29. Juvénal, Sat.
IV, 185)
Si l'on se rappelle que cette épître a été écrite avant le voyage de Paul à Rome, on s'étonnera que, lors de
son arrivée, les Juifs parlent à l'apôtre comme ne sachant rien de cette secte, sinon qu'on la contredit
partout, Actes 28:22. Comment les chrétiens de Rome qui avaient attiré l'attention de l'apôtre-
missionnaire absent, et qui étaient assez nombreux pour avoir plusieurs lieux de culte, qui s'étaient même
avancés jusque près des marches du trône, comment pouvaient-ils n'être pas connus, surtout des
principaux d'entre les Juifs? L'Église n'était-elle composée que de païens convertis? même dans ce cas elle
n'eût pu rester cachée. Ce n'est d'ailleurs pas probable, et l'Épître aux Romains semble indiquer que
parmi ceux auxquels l'apôtre s'adresse, il y avait sinon des divisions et des divergences de vues, tout au
moins des positions et des origines différentes, des païens et des Juifs. L'ignorance des chefs de la
synagogue à leur égard, a donc lieu de surprendre, et les théologiens ont essayé de l'expliquer de diverses
manières; Tholuck et Reiche pensent que les Juifs feignaient seulement de n'en avoir pas entendu parler;
d'autres, comme Olshausen dans sa première édition, croient que par suite des persécutions de Claude, la
petite Église avait été dispersée et presque anéantie; mais on ne comprend pas les motifs qui auraient pu
porter les Juifs à feindre, et quanta la persécution de Claude, comme elle avait eu lieu avant la rédaction
de l'Épître aux Romains, et qu'à cette époque l'Église paraît de nouveau constituée, elle ne peut non plus
expliquer l'ignorance des principaux des Juifs. Il vaut donc mieux admettre avec Olshausen, dans son
Introduction à l'Épître aux Romains (1835), que les Juifs ne connaissaient pas l'existence des chrétiens,
parce que ceux-ci avaient cru devoir, peut-être par des motifs politiques, se séparer entièrement et
catégoriquement du parti juif, afin d'échapper aux mesures de proscription auxquelles ceux-ci étaient
exposés sous Claude: les chrétiens, même les judéo-chrétiens, ne voulaient pas être confondus avec les
Juifs, comme plus tard aussi, lors du siège de Jérusalem, ils durent se séparer d'eux d'une manière
ostensible, pour pouvoir se réfugier dans la citadelle d'Ælia, cette séparation qui leur était dictée par leur
intérêt, fut peut-être facilitée au point de vue dogmatique, par l'influence de quelques disciples de saint
Paul qui enseignaient la complète rupture avec les traditions juives.
En admettant cette explication, l'on comprend aussi que les questions qui s'agitaient ailleurs, et les
divisions entre judéo et pagano-chrétiens, ne fussent pas à l'ordre du jour dans l'Église de Rome. L'apôtre,
en écrivant aux frères, reste donc sur le terrain abstrait de l'exposition, et ne parle de la position que
l'Évangile fait aux Juifs et aux païens que d'une manière générale, sans que rien dans les circonstances de
l'Église ait provoqué ces observations. Les rapports de la loi et de l'Évangile sont le sujet de sa lettre. Dans
les dix-sept premiers versets il introduit et expose son sujet, savoir que l'Évangile est la puissance de
Dieu, en salut à tout croyant, et que la justice de Dieu se révèle en lui pleinement de foi en foi. La seconde
partie va de 1:18; à 41:36; elle est consacrée aux développements dogmatiques, et forme comme le noyau
de l'épître. Dans la troisième (12:1-15:33), Paul examine les conséquences morales et pratiques de la
justification par la foi. Le chapitre 16 enfin est un épilogue qui renferme les vœux de l'apôtre, et de
nombreuses salutations.
L'importance de l'Épître aux Romains a été sentie de tout temps; c'est ce qui lui a valu d'être placée en tête
des autres épîtres, quoiqu'elle ne soit pas la première en date. La grandeur du sujet, la profondeur des
pensées, l'énergie du langage, la puissance du raisonnement, la clarté et la précision de la doctrine, font
de cette lettre une lettre à part, et lui assignent aux yeux des chrétiens, une place spéciale dans le canon
du Nouveau Testament; et si le sermon sur la montagne a été considéré comme le commencement de
1026