criminel des Juifs, et qu'ils avaient profité, pour le faire, des souvenirs nationaux qui s'y rattachaient dans
l'esprit des Hébreux. Cette coutume n'a de surprenant que l'usage qui en a été fait dans cette circonstance
spéciale, car du reste, chez presque toutes les nations, en Orient et en Occident, il est assez d'usage lors de
certaines fêtes, à la naissance d'un prince, ou à son avènement, de proclamer une amnistie partielle ou
entière, mesure tout ensemble de politique et de générosité.
C'est une question qui n'est point encore résolue que celle de savoir si notre Sauveur a célébré la pâque
légale et judaïque la dernière année de sa vie. Les trois premiers évangélistes semblent la décider
affirmativement, Matthieu 26:17; Marc 14:12; Luc 22:7, tandis que Jean 13:1; appuie fortement le sentiment
opposé. Sans entrer ici dans l'examen d'une question qui ne nous a pas paru résolue, nous indiquerons,
comme résumant la discussion, les trois hypothèses principales.
1.
L'ancienne église grecque admettait, de même que plusieurs modernes, entre autres Lamy, que
Jésus, n'avait pas célébré la pâque juive, mais qu'il l'avait comme anticipée en la faisant dans un repas
particulier, pour être offert lui-même le lendemain, 14 nisan, comme le véritable agneau pascal. Cette
opinion, fondée sur saint Jean, est en contradiction avec les termes des trois autres évangiles.
2.
Selon d'autres,
— Voir: Calmet, Dict. III, 546,
Jésus a bien fait la pâque, mais il ne l'a pas célébrée en même temps que les autres Juifs, soit que
prévoyant que la méchanceté de ses ennemis lui enlèverait avant le soir du 14 nisan la liberté de se réunir
avec ses disciples pour manger l'agneau pascal, il ait en sa qualité de Messie, choisi la veille, le 13, pour
faire ce repas; soit au contraire que Jésus, conformément au texte de la loi, ait célébré la fête le soir du 14
nisan, tandis que les Juifs l'auraient renvoyée au lendemain soir, 15 du mois, vendredi, peut-être pour
une plus grande exactitude astronomique, et sur les calculs de leur calendrier; c'est l'opinion de Cyrille
d'Alex., Chrysostôme, Épiphanes, etc. Ils appuient entre autres sur ce qui est dit, Luc 22:7, que c'était le
jour où il fallait sacrifier la pâque, voyant dans ces paroles une présomption que ce n'était pas le jour où
on l'avait fait.
3.
Enfin ceux qui pensent que Jésus a célébré la pâque juive en même temps que les Juifs, admettent,
les uns, que la fête avait été renvoyée du 14 au 15 nisan, et que le 14 (vendredi), qui commençait la veille
au soir (jeudi), n'avait été que la préparation de la fête dans laquelle on avait mangé l'agneau pascal, Jean
19:14; explication qui est presque généralement rejetée; les autres donnent aux expressions manger la
pâque et préparation de la pâque, Jean 18:28; 19:14, un autre sens que celui dans lequel on les prend
ordinairement, expliquant la première de l'un ou de l'autre des différents sacrifices journaliers qui se
faisaient dans le courant de la semaine sainte, et la seconde de la préparation qui se faisait la veille du
sabbat de pâque: explications un peu dures et contraires à l'usage général.
Au milieu de ces incertitudes, il paraît plus vraisemblable que Jésus n'a pas fait la pâque avec ses
disciples, d'autant plus que s'il l'eût faite, il eût agi contre les observances juives en quittant le même soir,
pendant la nuit, la maison et la ville de Jérusalem, Matthieu 26:30; Marc 14:26; Luc 22:39.
— Voir: sur cette question le commentaire d'Olshausen sur la Passion de notre Seigneur, d'après les
quatre évangélistes, traduit de l'allemand par le professeur Chappuis.
Quoi qu'il en soit, du reste, la pâque chrétienne à succédé à la pâque juive; elle a pris sa place dans l'année
et dans le cœur de ceux qui ne sont plus sous la loi, mais sous la grâce. Il n'importe pas que Jésus-Christ
l'ait célébrée ou indiquée avant sa mort; il l'a fondée par sa mort, comme cela ressort non seulement de
cette parole de l'apôtre: «Christ, notre pâque, a été sacrifié pour nous», 1 Corinthiens 5:7, mais encore des
rapports évidents et nombreux qui ont fait de son sacrifice l'accomplissement perpétuel de ceux qui
devaient être offerts par les Juifs. Π serait trop long d'énumérer ici tous ces rapports entre le Christ et
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