Page 380 - Dictionnaire de la Bible J.A. Bost

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Cependant il se relève de cet abîme, il prêche la crainte de Dieu et le contentement d'esprit, et déjà,
s'élevant vers les sublimes hauteurs de l'Évangile, il proclame le néant de tous les biens terrestres, 6:7, et
la béatitude de la souffrance, 6:12, 7:1-7.
Mais il ne se soutient que peu d'instants à ces hauteurs, et il s'abat sur l'humble colline qu'Aristote
choisira plus tard pour sa demeure: La vertu, dit-il, est le milieu entre deux extrêmes, 7:11-22.
Son cœur, sa conscience, l'avertit de son erreur, et le voilà, comme Diogène le cynique, cherchant partout
un homme et ne le trouvant pas, 7:28.
L'impunité du crime, l'adversité des gens de bien, la parfaite indifférence avec laquelle Dieu traite les
justes et les injustes, font de lui un déiste qui se persuade que Dieu ne peut qu'approuver tout ce que font
les hommes, et que la pensée de l'immortalité ne doit influer en rien sur notre conduite et ne troubler
aucune de nos joies, chapitre 8 et 9.
Enfin, après bien des doutes encore et des hésitations, il croit que la sagesse est préférable à tout, parce
qu'elle contient les plus grandes chances de bonheur, et il anticipe de vingt-sept siècles sur l'utilitarisme
moderne, chapitre 10 et 11.
Cependant les accents qui dominent dans le discours philosophique de l'Ecclésiaste, sont ceux de
l'eudémonisme. Aussi cet écrit n'offre-t-il que fort peu de points de comparaison avec les autres livres
inspirés (tandis que sa conclusion est le résumé de tout l'Ancien Testament), et ses vrais parallèles se
trouvent dans les ouvrages des philosophes païens, et en particulier chez les Épicuriens et chez Horace.
L'Ecclésiaste et Horace recommandent constamment de modérer et restreindre ses désirs, et l'un comme
l'autre fait l'éloge de la vie des champs, et décrit toutes les inquiétudes des grandes richesses, cf.
Ecclésiaste 4:4,8; 5:9-12, Épodes 2, Sat. 2, 6; Odes 2, 18; 16; 3:1; 16.
Pour être heureux, dit l'Ecclésiaste, il faut saisir la joie quand elle se présente et ne pas regimber contre
l'adversité, 2:24; 5:18; 7:14, etc. Horace parle de même: «Le seul mortel heureux est celui qui, maître de
soi, peut dire chaque jour: J'ai vécu.» Odes 3, 29; puis 1, 9; 11.
Tu quameumque Deus tibi fortunaverit horam,
Gratâ sume manu, nec dulcia differ in annom.
Quod petis, hic est,
Est Ulubris, animus si te non déficit œquus.
(Epist. 1, 11)
Omnem crede diem tibi diluxisse supremum:
Grata superveniet, quæ non sperabitur, hora.
(Epist. 1, 4)
L'Ecclésiaste dit: «Ne sois ni trop sage ni trop méchant», 7:16-17. Prends le juste milieu: Inter utrumque
tene; ne quid nimis; ou avec Horace:
Insani sapiens nomen ferat, æquus iniqui,
Ultra quam satis est virtutem si petat ipsam.
Virtus est médium vitiorum et utrimque reductum.
(Epist. 1, 6)
Horace veut des vêtements blancs aux jours de fête, Sat. 2, 2, et l'Ecclésiaste en tout temps, 9:8.
L'Ecclésiaste sait que l'argent répond a tous nos désirs, 10:19, et Horace paraphrase ainsi cette pensée,
Éphésiens 1:6:
Scilicet uxorem cum dote fidemque et amicos
Et genus et formam regina pecunia donat.
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