représenterait une chambre des députés par opposition aux trois premiers systèmes qui, reposant sur
l'hérédité, rappelleraient nos anciennes chambres des pairs ou la chambre des lords. Cette organisation de
la nation juive, que Diodore de Sicile attribue à tort à Moïse, existait déjà en Égypte; elle était simple et
naturelle: Moïse n'eut qu'à l'accepter et à la mettre en harmonie avec la constitution qu'il donna au
peuple. Pendant la période des juges, le lien qui unissait les tribus, la religion de leurs pères, s'étant
excessivement relâché, les tribus cessèrent, en quelque sorte, de former une confédération, et non
seulement elles pourvurent isolément à leur sûreté personnelle, mais encore elles en vinrent à des
hostilités ouvertes, dans lesquelles la jalousie politique des grandes tribus se déploya sans réserve, Juges
8:1-2; 12:4; 20:11. L'établissement de la monarchie semblait devoir fondre tous les intérêts en un seul; mais
la constitution ancienne ne se laissa pas absorber par la nouvelle forme du gouvernement: les
représentants des tribus continuèrent de se réunir comme les États de la nation, et intervinrent parfois
avec une grande énergie dans les affaires du pays, 1 Samuel 10:20; 2 Samuel 3:17; 5:1; 1 Rois 12, 2
Chroniques 24:17. Il paraîtrait même, d'après 1 Chroniques 5:19-20, que, pendant le règne de Saül, une
tribu fit, tout à fait isolée, et pour son propre compte, la guerre à un état voisin; de même pendant le
règne d'Ézéchias, 1 Chroniques 4:41. L'influence de l'esprit de tribu était surtout évidente dans les
élections des rois, et cet esprit surexcité à la mort de Salomon, sans que rien le retint, perdit à la fois le
royaume et les tribus; il n'y eut plus un royaume, il n'y eut plus douze tribus, il y eut deux royaumes,
représentant chacun le principal fragment dont ils étaient composés, Éphraïm et Juda; c'est à ce dernier
que se réunirent les Lévites; ils suivirent la légitimité, et dans une théocratie, ils eurent raison, 2
Chroniques 11:13; cf. 1 Rois 12:31.
La séparation des tribus parait être demeurée entière pendant l'exil, et les Israélites pieux semblent avoir
désiré ne contracter d'alliances qu'avec des membres de leurs tribus, Tobie 1:9; 4:13; 6:12; 7:14; cependant
cf. 3:15. En l'absence d'un territoire qui garantissait l'existence et l'intégrité de la tribu, la pureté des
mariages pouvait suppléera cette lacune et amener un résultat semblable. L'attachement à cette antique
séparation était si profond en Israël, que dans les premières années de l'exil, un prophète annonçant la
restauration du pays et le rétablissement de sa nationalité, pose la division du nouveau territoire en
douze portions comme un des faits fondamentaux de ce nouvel ordre de choses, Ézéchiel 47 et 48. Mais
lorsque le décret royal eut été promulgué, il n'y eut guère, outre les Lévites, que des hommes de Juda et
de Benjamin qui en profitèrent, Néhémie 11:4: ce furent eux qui restèrent chargés du poids de la
nationalité tout entière, et comme ils ne représentaient pas les douze tribus, l'idée même de la tribu
commença à déchoir, d'autant plus que depuis longtemps les Benjamites avaient dû s'habituer à n'être
traités que comme une fraction de la tribu de Juda; c'est de là que vint, pour désigner le peuple entier, le
nom de Judéen ou de Juif. Dès lors aussi, les familles et non plus la tribu, devinrent la base des
généalogies, Esdras 8, Néhémie 7, et les chefs de ces familles furent nécessairement considérés comme des
représentants du peuple, Néhémie 10. Cependant les familles conservèrent encore, soit par leurs
anciennes tables généalogiques, soit par la tradition, le souvenir des tribus dont elles étaient originaires,
cf. Luc 2:36; Actes 13:21; Romains 11:1; Philippiens 3:5, et les espérances d'Israël se rattachent encore
comme à une base nécessaire, au type primitif des douze tribus, Apocalypse 5:5,9; 7:4.
Quant aux dix tribus dont le retour en Palestine n'est pas raconté par les historiens sacrés, leur sort est
inconnu, mais les hypothèses pour le découvrir, n'ont pas manqué. Les uns pensent qu'elles ont Uni, petit
à petit et lentement, par rentrer clans leur pays, tellement qu'aux jours de saint Pierre, 1 Pierre 1:1, il n'en
restait plus qu'un petit nombre dispersés dans l'exil; d'autres croient qu'elles ont fini par se fondre dans
les familles des vainqueurs; d'autres, qu'elles habitent encore les montagnes de la Perse, ou qu'elles se
sont répandues dans l'Inde, dans la Chine, qu'elles ont passé en Amérique où l'on peut retrouver leurs
traces chez les Indiens du Nord et chez les Mexicains. Ces suppositions auxquelles Calmet a consacré un
article intitulé Transmigrations, et que plusieurs auteurs modernes ont développées avec plus ou moins
de talent, et souvent dans un but dogmatique, ne sont que des hypothèses, et ne valent pas une sincère
déclaration d'ignorance.
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