résultat d'aigrir toujours plus l'une contre l'autre deux populations qui n'avaient déjà pas trop déraisons
pour se voir d'un bon œil, et l'irritation finit par une scission complète, politique et religieuse. Les
Samaritains élevèrent sur le mont Guérizim, près de Sichem, un temple rival de celui de Jérusalem, et y
établirent leur culte: ce fut au temps d'Alexandre le Grand. Manassé, frère du souverain sacrificateur
Jaddæus, ayant épousé la fille de Samballat, le gouverneur persan, se retira dans la Samarie avec un
grand nombre de Juifs qui avaient, comme lui, épousé des femmes païennes au mépris de la loi de Moïse,
et qui refusaient de s'en séparer; avec la permission d'Alexandre, ils bâtirent leur temple, et Manassé en
devint le premier prêtre; c'est peut-être de lui qu'il est question Néhémie 13:28, quoique son nom ne soit
pas indiqué. Dès lors la haine nationale s'accrut au point qu'il n'y eut plus, entre les Juifs et les
Samaritains, aucune communication, Ecclésiastique 80:26-27. Une malédiction prononcée publiquement à
Jérusalem contre ces derniers, interdit aux Juifs toute relation avec eux, déclara aussi impures que la chair
du porc toutes les productions de leur pays (nam quicumque comedit buccellam samaritanam, est ac si
comedat carnem porcinam), et leur refusa même le droit dont jouissaient tous les autres peuples païens,
d'embrasser, en qualité de prosélytes, la religion judaïque.
— Voir: Jean 4:9:27.
Le nom de Samaritain devint, parmi les Juifs, une injure (8:48), et l'on voit des Samaritains refuser de
recevoir Jésus, parce qu'il se rendait à Jérusalem pour y faire la pâque, Luc 9:52-56. Notre Seigneur, par
ses actes, a protesté contre ces haines nationales, quelque justifiées qu'elles pussent paraître, et, non
seulement il a accepté l'hospitalité que lui offrirent des Samaritains dont la foi le reconnaissait pour le
Sauveur du monde, Jean 4:40,42, mais il avait auparavant envoyé chez eux ses disciples pour acheter des
vivres, verset 8.
— Sous Alexandre, les Samaritains, avec Sichem, leur capitale, furent sujets macédoniens; à sa mort, ils
partagèrent le sort du reste de la Palestine, mais esquivèrent, sous Antiochus Épiphanes, les mauvais
traitements de la domination syrienne, en consacrant leur temple à Jupiter Hellénius. Plus tard, le roi juif
Jean Hyrcan s'empara de la Samarie, prit Sichem, détruisit le temple qui subsistait depuis deux siècles, et
finit par démolir la ville même de Samarie. Sous le roi juif Alexandre, la Samarie fut de nouveau le
théâtre de la guerre: elle retomba au pouvoir des Juifs jusqu'au moment où Pompée vint rétablir
l'indépendance des Samaritains. Cette période romaine ne fut pas plus favorable à l'une qu'à l'autre des
deux nationalités; la Samarie devint une province du royaume d'Hérode, qui en rétablit la capitale, et la
peupla de soldats. Pendant les dix années suivantes, elle appartint à Archélaüs, puis fut donnée à la Syrie.
Sujets immédiats de Rome, les Samaritains eurent quelquefois l'occasion d'éprouver la dureté de leurs
chefs provinciaux; mais il faut avouer aussi qu'ils surent la mériter. Claude ne fit des Juifs et des
Samaritains qu'un lot, qu'il adjugea à Hérode Agrippa, que Caligula avait déjà établi roi sur le nord de la
Palestine. Ces rapports ne durèrent que peu d'années, et la Samarie, séparée de la Judée, fut associée dans
son histoire aux autres provinces romaines de l'Asie antérieure.
Depuis la destruction du temple des Samaritains, la montagne de Guérizim, sur laquelle ils l'avaient bâti,
continua d'être pour eux un lieu saint, le centre de leur culte, bien qu'ils possédassent, en d'autres
endroits, des maisons de prières: ils avaient abandonné le culte des faux dieux, ils adoraient l'Éternel,
mais ils ne le connaissaient pas. Comme les Juifs, ils attendaient le Messie, et Jésus a trouvé parmi eux
beaucoup de personnes bien disposées, Jean 4, Luc 17:11-20. On pourrait presque conclure de quelques-
uns de ces passages,
— Voir: surtout Luc 10:33,
que la haine nationale était moins forte chez eux que chez les Juifs, et que les intolérantes mesures de ces
derniers continuaient seules à maintenir entre les deux peuples une barrière que les Samaritains auraient
1060