Idumée, les courses de Rézon en Syrie, 1 Rois 11:14, les oracles d'Ahija, les sourdes menées de Jéroboam,
tout grondait, et Salomon dut comprendre que sa gloire était passée. Sa vie ne fut point prolongée ainsi
que Dieu le lui avait promis; il mourut âgé d'environ soixante ans, laissant une immense réputation dans
tout l'Orient, et rappelant à tous les Israélites pieux que celui qui est debout doit prendre garde qu'il ne
tombe.
Quelques observations détachées achèveront de faire comprendre son règne et son histoire.
1.
Le nom de Salomon qui signifie le paisible, le pacifique, était, comme les noms de David et de
Saül, parfaitement d'accord avec le caractère et la vie de celui qui le portait; il correspond à l'allemand
Friederich. Salomon paraît avoir été d'un naturel tranquille et doux, plus ami de l'éclat que du bruit, des
fêtes religieuses que des réjouissances politiques, des études paisibles que des glorieuses aventures;
plutôt porté à la clémence qu'à la sévérité; modeste, mais sage et ferme, ayant toutes les qualités qui
peuvent assurer à un monarque la conservation de ses frontières, et le calme à l'intérieur. Ses études et ses
travaux littéraires furent immenses; outre les Proverbes, l'Ecclésiaste et le Cantique, dont il est parlé en
leur place, il a écrit des ouvrages d'histoire naturelle dont la science plus que la foi peut regretter la perte,
cinq mille cantiques, ou chants lyriques destinés au culte, dont le psaume 127 et peut-être le 45 ont seuls
survécu, enfin trois mille paraboles, fables, apologues ou sentences, dont les unes ont été conservées sans
doute dans le recueil des Proverbes, les autres peut-être dans les fables orientales auxquelles Pilpay, puis
Ésope, ont plus tard donné leur nom, 1 Rois 4:32. Sa sagesse se montra encore dans ses jugements, et son
esprit, ami des luttes pacifiques, dans les jeux d'énigmes auxquels il se livrait avec les rois voisins, comme
on le voit par l'histoire de la reine de Séba: la tradition veut même que des correspondances de ce genre
entre Hiram et Salomon aient longtemps été conservées dans les archives de la ville de Tyr, et Flavius
Josèphe cite à cet égard les assertions de Dion et de Ménandre.
2.
La sagesse que Dieu accorda à la demande de Salomon, et qui ne l'empêcha pas de succomber
aux plus déplorables tentations, n'était point cette sagesse dont il est parlé Jacques 1:5, c'était purement et
simplement la sagesse administrative et gouvernementale; Salomon n'en avait pas demandé davantage, 1
Rois 3:9: c'était une sagesse terrestre qui pouvait être sensuelle et diabolique, Jacques 3:15. Le roi était
sage, l'esprit de l'homme pouvait l'être aussi; le cœur ne l'était pas nécessairement, et la splendide histoire
de ce règne de quarante ans ne le prouve que trop: Dieu éclaira son esprit, agrandit ses vues, développa
son intelligence, remplaça pour lui l'expérience par une profonde sagesse et par une connaissance
instinctive des affaires, mais laissa son cœur libre, et ne contraignit sa volonté ni vers le bien, ni vers le
mal. On comprend dès lors que le plus sage des rois ait pu devenir le plus faible des hommes, et que
l'idolâtrie ait pu s'y glisser pour un temps à la faveur de la volupté. À la sagesse politique Salomon
joignait des talents particuliers, et sa facilité naturelle pour apprendre trouva de grands avantages dans
les loisirs de la paix, dans les découvertes des voyageurs, dans les rapports qui l'unissaient avec les rois
des contrées voisines, dans les produits étrangers que lui apportaient d'année en année ses navires de
commerce, et dans les impôts en nature ou dans les cadeaux que les pays tributaires faisaient affluer à sa
cour. La richesse vint en aide à la science.
3.
Quant au commerce de Salomon, quant aux pays d'Ophir, de Tarsis, et aux produits ou aux objets
de ce commerce, on trouvera aux articles spéciaux les détails et éclaircissements nécessaires. Nous
croyons seulement que toutes ces belles entreprises furent plus conformes à la sagesse humaine qu'à la
sagesse divine; plusieurs étaient positivement contraires au texte de la loi, notamment les amas de
chevaux que Salomon faisait venir d'Égypte, et si l'administration sembla d'abord y trouver une source de
prospérité, le royaume ne tarda pas à apprendre que ce n'est pas impunément qu'on transgresse les
ordres de Dieu. L'industrie vint à la suite du commerce, les arts et métiers fleurirent; les constructions
nombreuses entreprises par Salomon favorisèrent le développement de l'architecture, de la sculpture, de
l'ébénisterie, de l'orfèvrerie, de la bijouterie, et si les travaux les plus fins et les plus délicats furent
d'abord confiés à des étrangers, il est bien probable que ceux-ci laissèrent des élèves, et que l'industrie
devint nationale en Israël.
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