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A cet effet, le prestige et l'autorité de la religion étaient une fois de
plus utilisés sans scrupules. "Les Pères", c'est-à-dire les divers
pères catholiques que l'archevêché de Zagreb avait dûment
attachés aux bandes terroristes oustachis illégales, allaient de
cachette en cachette, encourageant les troupes impatientes des
Oustachis à endurer un peu plus longtemps. Les Britanniques et
les Américains venaient juste de venir. Mais ils doivent être
patients, car, naturellement, planifier une bonne expédition
militaire a pris du temps. Les assurances des padres catholiques
se répètent jour après jour, jusqu'à devenir un refrain pour les
boucles oustachi, s'attendant à ce que «le jour» soit
simultanément leur jour de délivrance et le nouvel anniversaire
d'une Croatie oustachi plus glorieuse. Ce n'était pas simplement
la conviction des formations souterraines Oustachi ou celle des
prêtres. C'était celui de Stepinac lui-même, sûr qu'une fois les
Alliés intervenus, les Oustachi seraient aidés par les paysans, qui
«s'élèveront un jour».[4]
L'archevêque ne se contentait pas d'anéantir la Yougoslavie en
tant qu'unité politique pour assurer la résurgence d'une nouvelle
Croatie catholique. Il était séduit par des visions d'une grandeur
superbe - rien de moins qu'une intervention alliée ne serait un
tremplin qui les conduirait à Belgrade et, ensuite, à Moscou. La
question, selon les prévisions conservatrices, reposait sur des
armes militaires conventionnelles. Cependant, Stepinac, quoique
archevêque catholique, était un homme d'idées progressistes. Il
croyait en la puissance des réalisations scientifiques, telles que
l'énergie atomique récemment découverte. Les bombes atomiques
larguées sans avertissement sur Hiroshima et Nagasaki avaient
effacé en quelques secondes 100 000 hommes, femmes et enfants.
La Providence catholique n'avait pas donné les bombes atomiques
chrétiennes occidentales pour rien. C'était le devoir des alliés