Page 122 - TOUT SAVOIR SUR LE PARLER EN LANGUES
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La vieille horloge
Quand j’étais un jeune garçon, mon père revint un jour à la
maison avec une antiquité. C’était une horloge en bronze ciselé
sous globe en verre, représentant une scène et des personnages
champêtres. Chaque visiteur avait droit à une contemplation de
l’objet, accompagnée de commentaires sur cette précieuse œuvre
d’art. On remontait le mécanisme avec d’infinies précautions.
C’était un cérémonial quasi religieux. Pendant quinze ans cette
pièce d’orfèvrerie a trôné sur la cheminée du salon, faisant bien
des envieux. Je passais de longs moments à contempler cette
merveille qui sonnait les heures et les demies. Elle prenait bien
vingt minutes d’avance entre deux remontages, mais ça on le
gardait pour nous. Vénérable pendule qui depuis si longtemps
supportait le temps tout en le traversant et le marquant. Elle fut
notre fierté pendant quinze ans. Quand mon père mourut, il fallut
s’en séparer. Ma mère et moi, avons pris conseil d’un spécialiste
pour en fixer le montant. L’homme en indiqua un prix tellement
dérisoire que nous en fûmes choqués. Comment, une antiquité de
bronze travaillé pour une croûte de pain ! Avec un sourire navré,
l’expert prit le trésor dans ses mains, l’inclina et me fit voir
l’intérieur. Ce n’était que de l’étain coulé recouvert de dorure !
L’authentique était tout en toc ! Ce n’était qu’une imitation sans
valeur réelle. On a eu quand même le cœur gros de la voir partir,
elle qui nous avait donné de la joie, du rêve, du bonheur même
et surtout l’illusion d’une certaine richesse, d’un "plus" qui,
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