Page 868 - Dictionnaire de la Bible de J.A. Bost 1849 - 2014

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renonçassent au culte de Bahal et des veaux de Dan et de Béthel. Dans la supposition la plus favorable,
Osée ne pouvait leur apparaître que comme un enthousiaste, un fanatique bien intentionné.
— Les mœurs devaient naturellement se ressentir et de l'anarchie politique, et de l'apostasie religieuse. La
puissance que le royaume avait un instant recouvrée sous Jéhu, n'avait servi qu'à frayer la voie à tous les
vices: en s'enrichissant, le peuple s'était corrompu; avec le relâchement des liens civils, les autres liens
s'étaient également relâchés; la religion n'avait plus d'influence sur les cœurs, parce que ceux qui l'avaient
faite l'avaient, comme toujours, modelée sur les passions de la multitude, et façonnée au gré du grand
nombre. La mesure était comble. De là le caractère particulier des oracles du prophète. S'il rappelle Amos
en plusieurs passages (cf. Osée 4:15; Amos 5:5; Osée 5:5; 7:10; Amos 6:8; Osée 10:4; Amos 6:12; 5:7; Osée
8:14; Amos 2:5), c'est comme Ésaïe 2, rappelle Michée 4; comme 2 Pierre rappelle Jude; son individualité,
son caractère ne disparaît pas sous ces rapprochements. Il ne vient pas tant pour consoler son peuple et
lui ouvrir des perspectives de bonheur, que pour l'instruire, l'avertir et le censurer; car l'homme enflé de
sa propre sagesse n'aspire pas vers des temps meilleurs; il faut surtout chercher à le convaincre de
l'immoralité de ses actions, afin d'en déduire clairement son appauvrissement spirituel sur lequel il se fait
illusion. C'est probablement avec Osée que commence la transition de la prophétie parlée, à la prophétie
écrite, et l'on a tout lieu de croire qu'il est le premier qui ait rédigé et recueilli ses oracles. Tout chez lui
semble indiquer non le commencement d'une ère nouvelle, mais la fin de l'ancienne. Il reste éminemment
juif; sa mission se borne au royaume d'Éphraïm; ce n'est qu'en passant qu'il parle de celui de Juda, et,
quant aux nations étrangères, il n'a rien pour elles, pas même des menaces. Des menaces seraient, en effet,
déjà un avertissement, par conséquent une marque d'intérêt, et les prophètes postérieurs s'occupent des
païens sous ce rapport; puis, après les menaces, viennent aussi peu à peu les promesses. La transition est
à la fois naturelle, intelligible, et bien appropriée aux besoins et aux préjugés des Juifs. Mais les oracles
relatifs aux Gentils ne pouvaient leur être adressés de vive voix; ils devaient être écrits. Osée, en écrivant
ses prophéties pour les Juifs, prépare ainsi la voie à ceux qui écriront pour Tyr, l'Arabie, et les nations
plus éloignées.
Il embrasse moins l'avenir que le présent, dont il fait un tableau varié, vivant, et remarquablement coloré.
Son style lyrique est obscur et difficile, composé de phrases sentencieuses, courtes et saccadées, qui
indiquent plutôt qu'elles n'expliquent la pensée du prophète. Il semble parler parfois en hiéroglyphes, et
l'on se surprend souvent à désirer qu'il développe et coordonne les idées qu'il ne présente que détachées
et comme voilées. Le recueil de ses prophéties se divise en deux parties principales: la première, chapitres
1-3, est en prose: elle date du commencement de son ministère, 1:2, et contient l'histoire de ses rapports
avec deux femmes, dont l'une, Gomer, fille de Diblajim, fut son épouse légitime, et lui donna plusieurs
fils; l'autre, femme d'une conduite irrégulière, conclut avec lui un marché par lequel elle consentait à
habiter dans sa maison, mais sans aucun autre rapport que celui de la protection qu'Osée lui promettait.
La signification symbolique de cette double relation devait rappeler aux Juifs, d'une manière frappante,
les rapports de Dieu avec eux, et leur défection représentée souvent comme un adultère dans les oracles
des prophètes. Un grand nombre d'auteurs, Calvin entre autres, scandalisés de l'interprétation littérale de
ces premiers chapitres, ont voulu n'y voir qu'une simple parabole. Hengstenberg et Hævernick vont un
peu plus loin, et pensent que ces faits ont dû se passer réellement, mais pas extérieurement, dans l'esprit
et non dans la vie du prophète, qui raconte ici des expériences intimes, et les développe à l'usage du
peuple. II serait trop long d'entrer ici dans la réfutation de ces systèmes allégoriques; nous renvoyons aux
articles de Preiswerk dans le Morgenland (1841, p. 129 et suivant, 161 et suivant), et traduits en français
sous le titre de: «Les douze petits prophètes», par la Société de Neuchâtel; nous nous bornerons à faire
remarquer que si le fait lui-même était de toute autre nature, on n'aurait pas eu l'idée d'en nier la réalité;
qu'il s'agit pour Osée d'un mariage réel; que Gomer peut aussi bien avoir été une femme idolâtre, païenne
ou juive, qu'une femme débauchée; que, dans les rapports d'Osée avec la seconde femme, rien n'indique
qu'il y ait eu commerce intime et illégitime; que les détails donnés par le prophète sur le nom de la
première femme et de son père, le prix de la seconde, le sexe des enfants, seraient tout à fait oiseux si
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