puisque Genèse 10:4, Tarsis, qui est situé en Espagne, est nommé parmi des peuplades qui appartiennent
évidemment à la Grèce.
La seconde preuve mise en avant, c'est le nom d'Ophir, El Ophir ou Ophar, que Seetzen a trouvé dans la
province d'Oman, au sud-est de l'Arabie. On peut ajouter que selon Eupolemus dont un fragment nous a
été conservé par Eusèbe (Prép. évang. 9:30), Ouphré (Calmet porte Durphé) serait une île de la mer
Rouge, et cet auteur la regarde comme une partie du pays d'Ophir.
Selon d'autres commentateurs c'est dans les Indes qu'il faut aller chercher cette contrée. Ils s'appuient sur
ce que les Septante écrivent toujours Sophir, nom que les Cophtes donnent encore aux Indes; sur ce que la
version arabe traduit Ophir par El Hend; sur ce que dit Flavius Josèphe (Arch. 8, 20, 4) que Sophira est
une contrée de l'Inde; sur ce que les objets que Salomon tira d'Ophir sont des produits que l'on trouve en
effet dans les Indes; et que les noms donnés aux singes et aux paons sont des noms indiens (koph est le
sanscrit kapi, thukiim est le tokei de Malabar); sur le temps que prenait ce voyage, puisque le retour
n'avait lieu qu'au bout de trois ans, ou si l'on veut, dans le cours de la troisième année; enfin sur ce qu'il y
avait près de Goa dans l'Inde, un endroit nommé Suppara, et chez les Arabes Souphara, ce qui
expliquerait l'orthographe suivie par les Septante.
D'autres ont cru qu'il s'agissait de l'Afrique, et ils trouvent Ophir sur la côte orientale, à Sofala, vis-à-vis
de l'île de Madagascar; on assure que les habitants de cette contrée ont des traditions et même des livres
qui portent que Salomon y envoyait une flotte tous les trois ans pour chercher de l'or; le portugais Jean
dos Santos ajoute qu'il y a, non loin de là, une montagne abondante en minerai d'or et qui porte le nom
d'Afura. Si l'on pouvait se fier à ces données, elles seraient certainement intéressantes; toutefois le nom de
Sofala dans lequel on pourrait, à toute rigueur, trouver celui d'Ophir, rappelle plutôt dans les langues
sémitiques le nom de shephélah qui signifie côte, rivage; ce serait ainsi une désignation tout à fait
générale, un nom que tous les pays maritimes pourraient revendiquer.
Au milieu de ces incertitudes, il faut commencer par réduire à leur juste valeur deux données dont on a
exagéré l'importance. Ophir pouvait fort bien n'être qu'une ville, de commerce abondamment pourvue de
tous les produits de l'Orient et du Midi, et dans laquelle Salomon envoyait régulièrement et à des
époques déterminées, des vaisseaux pour approvisionner sa cour, son harem et son royaume. L'or
d'Ophir (évidemment déjà travaillé, ou tout au moins épuré), pouvait avoir reçu ce nom, sans être un
produit du pays, mais parce que c'était là qu'il était le mieux purifié et le mieux mis en œuvre. D'ailleurs,
comme on l'a vu plus haut, le nombre des pays où l'on trouve de l'or est assez grand pour que ce
caractère doive cesser d'être un guide dans les recherches.
— En second lieu, la durée du voyage ne peut pas non plus servir à fixer même d'une manière
approximative la distance à laquelle Ophir devait être de Jérusalem, car l'or arrivait dans le pays chaque
année, 1 Rois 10:14; 2 Chroniques 9:13; il n'est pas dit que le voyage de trois ans fût le voyage d'Ophir, 1
Rois 10:22; quand cela serait encore, cela ne prouverait rien, attendu l'extrême lenteur de la navigation
des temps anciens, les détours possibles, les séjours plus ou moins prolongés que les vaisseaux pouvaient
faire dans les ports intermédiaires pour attendre soit des vents favorables, soit des vaisseaux en retard ou
n'arrivant qu'une fois par année. Saint Jérôme nous dit (Ep. 95), que dans le cas le plus favorable, un
vaisseau avait besoin d'au moins six mois pour parcourir le golfe arabique dans sa plus grande longueur,
et de nos jours encore, les vaisseaux marchands ne font qu'une fois par année le voyage de Suez à Jidda.
— Il résulte de ces observations, que si les produits retirés d'Ophir ne peuvent servir à faire reconnaître ce
pays, sa distance elle-même reste problématique; il faut donc s'en tenir à son nom et à ce que la tradition
nous donne comme le plus probable. Sous ce rapport, nous nous rapprocherons volontiers de l'opinion de
Bochart, modifiée par Heeren et par quelques autres modernes. Bochart croit que le nom d'Ophir a été
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