rendre compte, et quelques divergences, pour lesquelles il faut consulter les ouvrages spéciaux,
notamment Des Vignoles et les commentateurs modernes Dahler sur Jérémie, Hævernick sur Daniel et
Ézéchiel. Les traits de la vie de Nébucadnetsar étant épars dans plusieurs livres de la Bible, les uns
prédits, les autres racontés, souvent sans suite et sans ordre chronologique, il est arrivé que plusieurs des
faits attribués par les uns à l'une de ses expéditions, sont d'après d'autres, attribués à une autre, et que
l'on ne peut se faire toujours une idée juste des détails dont chaque cadre doit être rempli: nous avons
suivi l'ordre qui nous a paru le plus probable; Dahler et Winer arrangent les événements d'une manière
différente, et Calmet, par exemple, place l'histoire de la statue d'or ainsi que le supplice des trois jeunes
Hébreux, à la fin de la vie de Nébucadnetsar et après son retour à la raison.
Ce qui frappe le plus dans la vie militaire de ce conquérant, ce sont ses attaques sans cesse renouvelées
contre le faible royaume de Juda, attaques toujours suivies de victoires et toujours plus douloureuses
dans leurs résultats; la première fois, il fait de Jéhojakim son vassal, et n'emmène avec une partie des
trésors du temple que des otages; la seconde fois, il dépouille le temple, emprisonne le roi infidèle,
emmène l'élite des Juifs, mais laisse encore à ceux qui restent un roi de leur nation; la troisième fois enfin,
il exporte les habitants en masse, fait mettre à mort les principaux d'entre eux et charge leur roi de
chaînes après l'avoir privé de la vue. Autant de secousses successives devaient faire comprendre aux Juifs
que c'était bien de la part de leur Dieu que Nébucadnetsar ruinait ainsi leurs forces et leur vie nationale;
et véritablement, à lire les écrivains sacrés, il semble que ce roi de Babylone n'ait eu, en effet, d'autre
mission que d'accomplir les prophéties et les vengeances divines; c'est à cela que se réduit sa biographie,
et ses coups prolongés pendant une carrière de quarante-trois années devaient faire réfléchir les Juifs plus
que n'eussent fait les coups épars de rois qui se seraient succédé sur le même trône; Nébucadnetsar devait
être pour les Juifs l'homme de la fatalité, et l'on pense involontairement à la vieille et glorieuse figure de
Louis XIV, qui a été l'épreuve du peuple de Dieu, comme le roi de Babylone en avait été le châtiment.
La conduite de Nébucadnetsar à l'égard des mages, n'est autre que celle d'un autocrate oriental; la tête de
quelques mages n'était rien pour lui; satisfaire un caprice au prix de plusieurs vies était peu de chose. Le
songe qu'il avait oublié, ces hommes devaient le lui dire; et leur charlatanisme spéculateur devait être la
cause de leur propre ruine; ils étaient punis par où ils avaient péché. Un prophète seul pouvait, après
avoir prié son Dieu, connaître ce songe, le rappeler au roi et lui raconter la succession des quatre
monarchies; il est remarquable que Daniel ait eu lui-même, bien des années après, la même vision céleste,
le même songe sous d'autres symboles, Daniel 7. La première puissance était celle de Nébucadnetsar lui-
même; la seconde était celle des Perses qui vinrent sous Cyrus, 538 avant J.-C., renverser l'empire de
Babylone; après eux vinrent les Grecs conduits par le puissant et rapide Alexandre, représenté dans le
songe de Daniel sous la figure d'une panthère ailée à quatre têtes, qui signifient les quatre royaumes qui
sortirent de la mort d'Alexandre et se divisèrent en restant unis. La quatrième puissance enfin, c'est
l'empire de Rome. Il y a, pour ainsi dire, unanimité parmi les interprètes sur la signification de ces deux
songes, et l'on peut consulter presque indifféremment les divers travaux ou commentaires qui ont paru
sur ce sujet;
— Voir: le Morgenland de Preiswerk, I, p. 39, sq., le Commentaire de Hævernick, Gaussen sur Daniel, etc.
Le second songe de Nébucadnetsar, plus clairement encore expliqué et accompli, n'a pas besoin d'être
développé davantage. Remarquons seulement que le terme employé pour marquer la durée de sa terrible
maladie, est celui de sept temps; on entend ordinairement par là sept années, mais on peut l'entendre
autrement encore, et sept années de folie ne prennent pas facilement place dans la vie si occupée de
Nébucadnetsar: l'année asiatique se divisant en six termes de deux mois chacun, on pourrait entendre les
sept temps de sept de ces doubles mois, de sorte que la maladie de Nébucadnetsar n'aurait duré que
quatorze mois; selon d'autres, il aurait été malade trois ans et demi, selon d'autres encore, seulement sept
mois. Quant à la nature de cette maladie, on pense généralement qu'il s'agit de l'insania canina ou lupina,
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