Page 563 - Dictionnaire de la Bible J.A. Bost

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parti de s'éloigner encore davantage et se rendit dans les plaines de Béer-Sébah. Là Dieu lui apparut, la
nuit même de son arrivée, et lui confirma les promesses qu'il avait faites à son père; un autel fut élevé, le
nom de l'Éternel fut invoqué et les bénédictions abondèrent. Abimélec s'empressa de revenir auprès
d'Isaac, avec son plus intime conseiller et son général d'armée, et comme Isaac se montrait surpris de les
voir le rechercher, Abimélec lui répondit: Nous avons vu clairement que l'Éternel est avec toi, et nous
avens dit: «Qu'il y ait maintenant un serment solennel entre nous, et traitons alliance avec toi.» Isaac reçut
avec joie cette proposition, il offrit un festin à ses nouveaux alliés, et le lendemain ils se séparèrent en
paix.
Isaac étant devenu vieux, Genèse 27:1, et ses yeux s'étant fermés tellement qu'il ne pouvait plus voir, il
sentit qu'il devait s'attendre à une mort prochaine, et ne voulut pas différer davantage de donner sa
bénédiction à l'aîné de ses fils. Ignorant la cession du droit d'aînesse faite par Ésaü à Jacob, ignorant aussi,
et peut-être par un manque de foi, que Dieu avait aimé Jacob et haï Ésaü, il allait bénir l'enfant qu'il
préférait, et voulut d'abord se procurer encore une fois cette sensuelle jouissance qui influençait peut-être
chez lui l'affection paternelle: il fit venir Ésaü et lui commanda d'aller à la chasse chercher quelque pièce
de gibier. «Apprête-moi des viandes d'appétit, comme je les aime, et apporte-les-moi afin que j'en
mange.» Mais Dieu avait réservé à Jacob les droits de primogéniture. Jacob se les était acquis en abusant
de la fatigue et de l'impétuosité de son frère: ces droits étaient à lui, mais au lieu de s'en remettre à celui
qui est fidèle, au lieu de laisser Dieu agir, il voulut intervenir, et sa mère, plus rusée encore, hâta, par un
mensonge sans excuse, l'exécution du plan divin. Jacob, âgé de soixante-dix-sept ans, se moqua d'un
vieux père aveugle et lui soutira par son déguisement la grande bénédiction qu'Isaac voulait donner à
Ésaü. Isaac, trop confiant, soupçonna une ruse, et se laissa néanmoins convaincre: il entendait la voix de
Jacob et touchait la barbe du velu chasseur; mais les plats étaient là, et pendant qu'Ésaü courait après le
gibier, son frère cadet, dont le nom en hébreu signifie supplantent, recevait les bénédictions paternelles.
Grande fut la douleur du père en découvrant qu'il avait été trompé, mais il ne pouvait retirer sa
bénédiction: «J'ai béni ton frère, dit-il, et aussi il sera béni.»
— «Et ne m'as-tu point réservé de bénédiction? s'écria Ésaü, plein de désespoir et d'amertume: n'as-tu
qu'une bénédiction, mon père? Bénis-moi aussi, bénis-moi, mon père!» Dieu permit qu'Isaac pût encore
donner à son fils bien-aimé quelques promesses de consolation:» Ton habitation sera en la graisse de la
terre, lui dit-il, et en la rosée des deux d'en haut: tu vivras par ton épée, et tu seras asservi à ton frère;
mais il arrivera qu'étant devenu maître, tu briseras son joug de dessus ton cou.»
Isaac comprit cependant qu'il n'avait été que l'instrument de la volonté du Dieu des cieux; il se soumit à
cette dispensation providentielle, et conserva toute son amitié à Jacob. La colère d'Ésaü était à craindre
pour le frère supplanteur, et Isaac, soit pour ce motif, soit pour éviter que Jacob épousât des païennes et
amenât dans la maison des germes de querelles, comme avait fait Ésaü «26:35, engagea le fils béni à se
rendre en Mésopotamie auprès des parents de Rébecca. Cette absence dura plus de vingt ans; mais Isaac
eut encore avant de mourir la joie de revoir ce fils qui était devenu pour lui un successeur théocratique, et
le chef de sa postérité; il mourut entre ses bras à l'âge de cent quatre-vingts ans, et fut recueilli avec ses
peuples. Ésaü et Jacob l'ensevelirent dans la grotte de Macpéla, 35:27-28; 49:31.
Abraham, Isaac et Jacob sont trois figures d'élection qui sont fréquemment rappelées ensemble dans
l'Écriture: celle d'Abraham est la plus belle, celle de Jacob ne peut être comprise que par la foi, par le sens
chrétien; celle d'Isaac est davantage passive. Ce qu'il y a de grand en lui, c'est sa naissance miraculeuse,
c'est aussi l'ordre donné à Abraham de le sacrifier sur Morija; c'est enfin, si l'on ose le dire, sa bénédiction
surprise et déplacée. Dans ces trois faits il est passif, dans tout le reste de sa vie il paraît nul. Dieu veut
que les colonnes de son édifice visible n'aient pas d'autre gloire, pas d'autre action que la sienne; et
comme la force des fidèles est de se tenir tranquilles pendant que l'Éternel combat pour eux, leur gloire
est aussi de disparaître derrière l'image de celui dont ils ne doivent que refléter les vertus et la splendeur.
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