Page 1066 - Dictionnaire de la Bible J.A. Bost

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combattant pour la vérité, mais abandonné de ceux qui l'auraient dû défendre, il a souffert en son Âme de
son isolement, et ses faiblesses s'expliquent sans l'excuser. Si Dieu ne lui a jamais fait défaut, c'est que le
juge d'Israël n'a jamais manqué; l'homme a péri, le juge a triomphé. La foi de Samson brille en quelque
sorte d'un éclat d'autant plus vif que ses fautes comme individu ont été plus grandes, et si l'apôtre Paul le
compte au nombre des héros de la foi, Hébreux 11:32, ce n'est bien sûrement pas à cause de ses fautes,
mais parce que malgré ses fautes il n'a jamais désespéré des promesses et de la fidélité divines. La foi du
chrétien, c'est de croire que Dieu est toujours fidèle, alors même que nous cessons de l'être.
4.
La chute si prompte et si complète du temple de Dagon, occasionnée par le seul ébranlement de
deux piliers, peut à juste titre causer une surprise mêlée de doute, lorsqu'on se représente ce bâtiment
construit dans les conditions ordinaires de l'architecture moderne. Mais il est facile de se représenter une
construction et une architecture différente: le voyageur Shaw raconte qu'il a vu, à Alger et ailleurs, des
maisons et même de grands édifices construits de telle sorte que le tout croulait si les colonnes du centre
étaient enlevées; l'architecte Christophe Wren a décrit la manière dont une pareille construction pouvait
se faire, et Pline mentionne un théâtre immense construit à Rome par Curion partisan de César, et dont
toute la solidité dépendait de celle d'une simple charnière. (— Voir: mes Juges d'Israël, page 96-112)
5.
Les cheveux de Samson ne faisaient pas sa force; ils en étaient l'emblème naturel, car la force de
l'homme est presque toujours accompagnée d'un grand développement chevelu; ils en étaient en outre le
sceau divin, car ils étaient le signe de son nazaréat, de la mission dont il était revêtu, et de l'assistance que
Dieu devait lui prêter: en perdant ses cheveux, Samson n'a perdu ses forces que parce qu'il sentait qu'il
avait mérité d'être abandonné de Dieu; il n'avait plus de foi en Dieu, ni peut-être de foi en lui-même, et
l'on sait que la foi en soi-même double et triple les forces.
6.
Il est dit, à plusieurs reprises, que l'Esprit de Dieu fut sur Samson quand il s'apprêtait à faire le
mal, ou que ses inclinations vicieuses venaient de l'Éternel: la réponse à cette difficulté est du ressort de la
dogmatique; disons seulement que si l'Éternel dirige le cœur de l'homme comme des ruisseaux d'eau, il
ne lui enlève point sa liberté. L'homme, esclave naturel du péché, suivait les désirs de la chair, et Dieu le
laissait faire, sachant qu'il tirerait le bien du mal.
7.
La force miraculeuse du fils de Manoah, a été regardée par plusieurs comme une force fabuleuse,
et peu s'en faut que les rationalistes n'aient fait de Samson un être imaginaire, un héros fantastique, un
mythe, comme on dit de nos jours. De ce que presque toutes les nations ont conservé le souvenir d'un
homme aux exploits prodigieux, on a failli conclure qu'il n'y a jamais eu de Samson, ou tout au moins, et
c'est alors une critique et une exégèse à part (on pourrait dire rétroactive), que le Samson des Juges a été
emprunté à l'Ovide des Romains, aux traditions grecques sur Hercule, ou au Rama des Indiens. Le lion de
Némée, en effet, la biche de Diane, le taureau crétois, la défaite de l'armée d'Ergine par Hercule et sa
massue, la naissance miraculeuse d'Hercule, Hercule aux pieds d'Omphale, le Crotoniate Milon, les
exploits de Thésée qui charge sur ses épaules un taureau vivant et le porte à Athènes, l'histoire du roi
Nisus de Mégare qui perd ses forces avec les boucles rouges de son éclatante chevelure, la source
d'Aganippe qui jaillit sous les pieds de Pégase, les énigmes que Rama propose à ses amis de noce, la
source miraculeuse qui jaillit à ses côtés pour apaiser son ardente soif, les renards sauvages qu'on avait
l'habitude de lâcher à Rome, au milieu du théâtre, avec des brandons attachés à la queue pour célébrer la
fête d'Hercule, tous ces détails, et d'autres encore que nous racontent les anciens poètes, rappellent à
divers titres l'histoire de Samson, et quant aux usages dont Ovide dit qu'il n'en connaît pas l'origine, il
aurait pu la trouver dans les livres sacrés des Hébreux. Si l'on veut nier absolument la possibilité des faits,
à la bonne heure; c'est un système, et Vatke a pu démontrer comme quoi Samson n'avait jamais existé,
comme quoi Samson est une allégorie, un type du soleil, comme Napoléon. Mais si l'on admet la
possibilité de la chose, qu'on en laisse au moins, avec l'histoire, l'initiative au peuple hébreu; qu'on
reconnaisse que ce ne sont pas les plus anciens qui ont emprunté leurs traditions aux plus modernes, les
Juifs aux Romains, les Juges à Diodore de Sicile.
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