Page 167 - LES DEUX BABYLONES

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plus beaux habits, brillants de santé, la figure remplie de cette vive animation et
de cet excès de joie qui caractérisent la foule enthousiaste de ce pays. Je n'avais
jamais rien vu de semblable ; et je fus enchantée de voir ces figures jolies,
intelligentes, joyeuses, la mine fière des hommes, et la contenance folâtre mais
modeste des jeunes filles, la vivacité des vieillards, et la gaieté folle des enfants.
Le feu allumé, un jet brillant de flamme s'élança dans les airs ; et pendant un
moment ils le contemplèrent immobiles, la figure étrangement altérée par la vive
lumière qui éclata quand on jeta les roseaux dans le feu. Au bout de quelques
instants, on fit place autour d'un vieux musicien aveugle, un type idéal d'énergie,
de bouffonnerie, de malice, qui, assis sur une chaise basse, une cruche bien
remplie à portée de sa main, éleva son chalumeau aux notes les plus gaies, et
une gigue interminable commença. Mais il se produisit un incident qui me
surprit fort. Quand le feu eut brûlé pendant quelques heures et qu'il se fut
abaissé, alors eut lieu une partie indispensable de la cérémonie. Chacun des
assistants s'élança au travers du feu, et plusieurs enfants furent jetés au travers
des cendres étincelantes ; puis on apporta un appareil en bois de huit pieds de
long, terminé par une tête de cheval fixée à une extrémité et recouvert d'un grand
drap blanc qui cachait le bois et l'homme qui le portait sur sa tête. Ce
mannequin fut acclamé aux cris bruyants de Cheval blanc ; et après avoir
plusieurs fois lestement traversé le feu sans encombre, grâce à l'adresse de celui
qui le portait, il se mit à poursuivre la foule qui s'enfuyait dans toutes les
directions. Je demandai ce que signifiait ce cheval, on me dit qu'il représentait
tout le bétail."
"C'était là, ajoute l'auteur, l'ancien culte païen de Baal, sinon de
Moloch lui-même, pratiqué ouvertement et par tous, au coeur d'une nation qui se
dit chrétienne, et par des millions qui professaient nominalement le
christianisme ! J'étais stupéfaite, car je ne savais pas encore que la papauté n'est
qu'une adroite adaptation des idolâtries païennes à son propre système
"
Telle est la fête de la veille de la Saint-Jean, qu'on célèbre pendant deux jours en
France et dans la catholique Irlande. Telle est la manière dont les sectateurs de
Rome prétendent commémorer la naissance de celui qui vint
"préparer la voie du
Seigneur"
en détournant son ancien peuple de toutes ses vaines manières de