PRÉFACE

Le décès du doyen Burgon en 1888, déploré par un grand nombre de personnes d’autre part. de l’autre côté de l’Atlantique ainsi que sur celui-ci, lui coupa la parole au début d’une tâche pour lequel il s’était préparé pendant plus de trente ans. Il a posé les fondements de son système avec beaucoup de soin et de prudence, en discutant avec ses amis, tels que feu le comte de Selborne, à qui il a dédicacé les Douze derniers vers, et l’actuel comte de Cranbrook à qui il a dédié La Révision révisée, dans le but de sonder la profondeur du sujet, et d’être sûr qu’il reposait sur un roc solide. Dans afin d’élargir la base générale de la Critique textuelle sacrée, et de traiter de scientifiquement et de manière exhaustive, il a examiné les manuscrits en faisant de nombreuses découvertes au pays et dans les bibliothèques étrangères ; a rassemblé quelques lui-même et en a fait rassembler beaucoup par d’autres érudits ; encouragé les nouvelles et les critiques éditions de quelques-unes des principales versions ; et surtout, il a conçu et supervisé un recueil de citations du Nouveau Testament que l’on trouve dans dans les œuvres des Pères et dans d’autres écrits ecclésiastiques, allant bien au-delà index ordinaires, que l’on peut trouver en seize gros volumes parmi les trésors du British Museum. Divers événements l’ont amené au cours de sa vie à puiser dans ses réserves et à les publier, comme dans ses Douze derniers versets de St. Mark, ses fameuses Lettres au Dr Scrivener dans le journal The Guardian, et dans The Revision Revised. Mais il a consciencieusement amassé des matériaux pour le plus grand traité jusqu’à l’époque de sa mort.

Il fut alors profondément impressionné par l’état incomplet de ses documents ; et a donné instructions positives uniquement pour la publication de son texte des Évangiles dans la marge de l’une des éditions du Nouveau Testament de Scrivener, de sa dissertation sur le « rayon de miel » qui, comme exhibant un spécimen de son admirable méthode de critique se trouvera à l’Appendice I de ce volume, et peut-être sur Ὄξος dans l’Appendice II, laissant toute la question de la publication du reste à son neveu, le révérend W. F. Rose, avec l’aide de moi-même, si je voulais bien entreprendre l’édition requise, et d’autres.

Les papiers séparés, qui m’ont été confiés en février 1889, étaient contenus dans quarante portfolios, et, d’après mon catalogue, s’élevaient à 2,383. Ils ont été regroupés sous différentes rubriques, et certains ont été placés dans un ensemble en tant que « matière d’introduction » prêt pour l’imprimeur. La plupart avaient été recopiés d’une main claire, en particulier par « M.W. » mentionné dans la préface de la révision révisée, à qui je suis également grandement redevable d’en avoir copié d’autres. Les articles étaient d’une longueur variant de quatorze pages ou plus à une seule phrase ou à une seule référence. Certains étaient presque des doublons, et quelques-uns des triples.

Après avoir catalogué les plans, j’ai fait mon rapport à M. Rose, en lui suggérant de choisir entre trois plans, à savoir :

1. Publier séparément, selon les instructions du doyen, les articles qui ont été jugé propre à la publication, et laissant le reste :

2. Rassembler un ouvrage sur les principes de la critique textuelle à partir des manuscrits, Aussi loin qu’ils iraient :

3. Faire ce qui était prêt et tenir dans un livre, en fournissant du reste des matériaux et d’ailleurs ce qui manquait, en plus de combler les lacunes du mieux que je pouvais, et du reste (ainsi que des travaux publiés par le doyen) pour construire de brèves notes sur le texte que nous devions publier.

Ce rapport fut envoyé au Dr Scrivener, au doyen Goulburn, à Sir Edward Maunde Thompson et à d’autres savants distingués, et l’opinion unanime fut exprimée que le troisième de ces plans devait être adopté.

Ne pas aimer rencontrer

Tot et tanta negotia solus,

J’ai invité à l’ouverture de 1890 le révérend G. H. Gwilliam, membre du Hertford College, et le révérend Dr Waller, directeur de St. John’s Hall, Highbury — un homme d’exactitude mathématique — de relire chez moi la première ébauche d’une grande partie du tome I. À ma grande perte, le Dr Waller a été trop occupé depuis ce temps-là pour m’apporter de l’aide, sauf ce que l’on peut trouver dans sa précieuse comparaison des textes du Peshitto et Curetonian imprimé dans l’Appendice VI : mais M. Gwilliam a toujours été prêt à me donner des conseils et des secours qui m’ont été du plus grand avantage, surtout sur la partie syriaque du sujet, et il a parcouru toutes les premières épreuves de ce volume.

Par la suite, on m’a forcé à penser que, si possible, les Index des Pères devraient être inclus dans l’ouvrage. En effet, aucun livre ne pourrait représenter adéquatement les travaux du doyen Burgon qui n’incluait son apparatus criticus (appareil critique) dans cette province de la critique textuelle, dans laquelle il s’est montré si facile princeps, que personne en Angleterre, en Allemagne ou ailleurs, n’a encore été capable de l’approcher. Avec l’aimable aide de Sir E. Maunde Thompson, j’ai pu faire copier dactylographié la partie des Index qui se rapporte aux Évangiles, et ils seront publiés avec le temps, si Dieu le veut, si le monde savant manifeste suffisamment d’intérêt pour leur publication.

Malheureusement, lorsqu’en 1890 j’eus achevé un premier arrangement du tome II, ma santé déclina ; et après avoir vainement essayé pendant un an de combiner ce dur labeur avec la conduite d’un gagne-pain, j’ai démissionné de ce dernier et je me suis installé à Oxford pour me consacrer exclusivement à l’important travail de transformation des résultats inédits de l’habile fidélité et de l’infatigable érudition de ce « grand érudit » — pour employer l’expression du Dr Scrivener — vers l’établissement des principes qui doivent régir la détermination des Paroles Divines constituant le Nouveau Testament.

La difficulté à surmonter résidait dans le fait qu’après avoir recueilli dans les restes du Doyen tout ce qui convenait à cet usage, et lorsque des lacunes de plus ou moins grande taille étaient comblées, comme cela a été fait tout au long de la série des manuscrits inachevés et non reliés, il restait encore un grand espace à couvrir sans l’aide du Maître pour le couvrir.

Le temps, la recherche et la réflexion étaient également nécessaires. En conséquence, sur mon conseil, j’ai accepté l’offre d’éditer la quatrième édition de l’Introduction simple de Scrivener, et bien que cette réalisation extrêmement laborieuse ait pris beaucoup plus de temps que prévu, elle a cependant grandement aidé à l’exécution de ma tâche. Jamais, avant ou depuis la mort du doyen Burgon, il n’y a eu une telle occasion que celle d’aujourd’hui. L’appareil critique général s’est considérablement accru, le champ de la paléographie s’est considérablement élargi grâce aux découvertes faites en Égypte, et l’on a le sentiment à l’étranger que nous sommes sur le point d’améliorer les systèmes et les théories récemment en vogue.

En revenant à l’ouvrage, j’ai trouvé que la clé de l’élimination de la principale difficulté dans la voie d’une telle amélioration résidait dans un afflux de lumière sur ce que l’on peut peut-être appeler, en ce qui concerne ce sujet, la période pré-manuscrite. — jusqu’à l’âge sombre du textualisme sacré, qui précède ce qui fut jadis « l’an un » de la paléographie. En conséquence, j’ai fait un examen laborieux par moi-même des citations qui se trouvent dans les écrits des Pères avant saint Chrysostome, ou comme je les ai définis, afin de tracer une ligne agissant d’elles-mêmes, de ceux qui sont morts avant 400 après J.-C., de sorte que le Texte traditionnel se trouve dans la proportion générale de 3 : 2 contre d’autres variations, et dans une proportion beaucoup plus élevée sur trente passages d’essai. Par la suite, ne me contentant pas de fonder mon argumentation sur un seul examen, j’ai relu les écrits des soixante-seize Pères concernés (avec les limites expliquées dans ce livre), ainsi que d’autres qui n’ont donné aucune preuve, et j’ai trouvé que, bien que plusieurs autres exemples aient été inscrits dans mon carnet, les résultats généraux sont restés à peu près les mêmes. Je ne me flatte pas d’avoir déjà enregistré tous les exemples qu’on pourrait citer : — Quiconque connaît réellement ce travail sait qu’un tel exploit est absolument impossible, parce qu’une telle perfection ne peut être obtenue qu’après de nombreux efforts réitérés. Mais je prétends, non seulement que mes tentatives ont été honnêtes et justes jusqu’à l’abnégation de moi-même, mais que les résultats généraux, qui sont beaucoup plus que ce qui est requis par mon argumentation, comme il est expliqué dans le corps de cet ouvrage, établissent abondamment l’antiquité du texte traditionnel, en prouvant la supériorité de son acceptation pendant la période en jeu par rapport à celle de tout autre.

En effet, ces examens m’ont semblé, non seulement ramener le Texte traditionnel d’une manière satisfaisante au premier âge, mais aussi conduire à la solution de plusieurs problèmes difficiles, qui sont maintenant présentés à nos lecteurs. La richesse des manuscrits que les Pères nous présentent de seconde main ne peut être comprise que par ceux qui peuvent parcourir les écrits de beaucoup d’entre eux dans cette perspective ; et dépasse en nombre de toutes les années antérieures à l’an 1000 tous les manuscrits grecs contemporains qui nous sont parvenus, sans parler des années auxquelles aucun manuscrit existant aujourd’hui n’appartient, de l’avis de tous les experts.

C’est à la fois au doyen Burgon et à moi-même que je dois dire que nous nous sommes réunis après avoir travaillé sur des lignes indépendantes, bien que je sois obligé de reconnaître ma grande dette envers ses écrits. Au début, nous n’étions pas tout à fait d’accord sur notre opinion, mais j’ai découvert par la suite qu’il avait raison et que j’avais tort. C’est une preuve de la puissance unificatrice de nos principes, que sur notre système il n’y a plus absolument de différence entre nous, quoique sur des points mineurs, généralement en dehors de ce sujet immédiat, nous ne soyons pas toujours exactement d’accord. Bien que j’aie l’exemple du doyen pour avoir modifié ses écrits en grande partie, même lorsqu’ils étaient en caractères, comme il n’a jamais manqué de le faire, cependant, par loyauté, j’ai retardé les modifications aussi longtemps que j’ai pu, et je ne les ai faites que lorsque j’étais certain d’introduire quelque amélioration, et le plus souvent sur les conseils que m’offraient d’autres personnes.

Notre coïncidence s’explique peut-être par le fait que nous sommes nés à une époque où le sérieux évangélique affectait toute la vie religieuse, que nous avons été formés par le mouvement de la Haute Église, et au moins dans mon cas, adoucis par l’élargissement plus modéré causé par les influences qui ont prévalu à Oxford pendant quelques années après 1848. Certes, l’intégralité et l’exhaustivité — probablement à l’imitation de la méthode allemande — qui avait déjà caractérisé le traitement de n’importe quel sujet par le Dr Pusey, et qui a trouvé un exemple dans les recherches historiques du professeur Freeman, et qui était, comme je pense, dans l’action des meilleurs esprits de l’Oxford de 1848-1856 — pour citer ma propre expérience, — était à la racine et constituait la vie du système de Burgon, et le maintien de ces principes autant que nous le pouvions, à quelque prix que ce soit, formait le lien entre nous. Rejeter au moins dix-neuf vingtièmes de la preuve sur certains points et tirer des conclusions du petit reste, nous semble n’être nécessairement rien moins qu’un crime et un péché, non seulement en raison de la destruction sacrilège qu’elle exerce sur l’Écriture sainte, mais aussi parce qu’une telle méthode est incompatible avec l’exhaustivité consciencieuse et la méthode logique. Connaissant parfaitement tout ce qui peut être avancé et ce qui est avancé en faveur d’un tel procédé, ne devrions-nous pas dire qu’il n’y a guère de modèle pire que celui-ci dans les recherches et les conclusions qui pourraient se présenter aux jeunes gens au moment critique où ils prennent l’habitude de former des jugements qui doivent les porter toute leur vie ? L’excès de spécialisation qui a été en vogue ces dernières années a-t-il favorisé l’acceptation de la théorie que nous avons sous les yeux, parce qu’elle a peut-être été oubliée sous des influences spécialisées, que l’homme vraiment accompli devrait viser à savoir quelque chose de tout le reste aussi bien que tout savoir de la chose à laquelle il se consacre, puisque l’étroitesse dans l’investigation et la négligence de tout, sauf d’une théorie favorite, sont susceptibles de résulter d’une attitude aussi exclusive ?

L’importance de la question en jeu est souvent sous-estimée. Dr. Philip Schaff dans son célèbre « Compagnon » (p. 176), — comme l’a souligné le Dr E. Nestlé, d’Ulm, dans l’une de ses brochures (« Ein ceterum censeo zur neutestamentlichen Textkritik ») qu’il a bien voulu m’envoyer, — observe que, tandis que Mill estimait que les variations s’élevaient à 30,000, et que Scrivener supposait qu’elles ont depuis augmenté jusqu’à quatre fois plus, elles « ne peuvent pas être aujourd’hui bien inférieures à 150,000 ». Ce montant est épouvantable, et la plupart d’entre eux sont d’un caractère mesquin. Mais certains impliquent des passages très importants, et même Hort a estimé (Introduction, p. 2) que les exemples contestés atteignent environ un huitième de l’ensemble. Est-il donc trop fort de dire que nous vivons au-dessus d’un volcan, avec une croûte de terre d’une épaisseur pas trop grande entre les deux ?

La première moitié de notre cas est maintenant présentée dans ce volume, qui est un traité complet en lui-même. Une seconde suivra, je l’espère, à une date rapprochée, contenant une dissertation sur les causes de la corruption du texte traditionnel ; et, je suis heureux de le dire, se composera presque exclusivement des propres compositions de Dean Burgon. Je demande aux critiques qui ne sont peut-être pas d’accord avec toutes nos conclusions un examen franc de notre cas, qui repose uniquement sur l’argumentation et la raison. Cette explication faite par le Doyen de son système en des temps plus calmes et sous une forme plus didactique ne peut, à mon avis, manquer d’écarter beaucoup de préjugés. Si, à première vue, nous semblons passer du raisonnement au dogmatisme, nos lecteurs découvriront, je crois, après une nouvelle observation, qu’il n’en est rien, du moins de notre point de vue. Si nous semblons parler trop positivement, nous l’avons fait, non pas par confiance dans un jugement privé, mais parce que nous sommes sûrs, au moins dans notre propre esprit, que nous exprimons le verdict de tous les âges et de tous les pays.

Que le grand Chef de l’Église bénisse nos efforts en faveur de l’intégrité de Sa Sainte Parole, si ce n’est pas selon notre plan et notre but, mais de la manière qui Lui semble la meilleure !

EDWARD MILLER.

9 Bradmore Road, Oxford : Épiphanie 1896.

 

INTRODUCTION.

Quelques remarques au début de ce traité, qui a été laissé imparfait par le doyen Burgon à sa mort inattendue, peuvent en rendre l’objet et la portée plus intelligibles pour beaucoup de lecteurs.

La critique textuelle du Nouveau Testament est une enquête approfondie sur ce qu’est le grec authentique — le texte véritable des saints Évangiles, des Actes des Apôtres, des Épîtres pauliniennes et apostoliques et de l’Apocalypse. Dans la mesure où il ne concerne que le texte, il est confiné à la Critique inférieure selon la nomenclature allemande, de même qu’un examen critique du sens, avec toutes les références et les connexions qui l’accompagnent, constituerait la Haute Critique. C’est donc le prélude nécessaire de toute recherche scientifique sur la langue, le contenu et l’enseignement des divers livres du Nouveau Testament, et doit elle-même être conduite sur des principes précis et scientifiques. L’objet de ce traité est de conduire à un règlement général de ces principes. Dans ce but, le Doyen a dépouillé la discussion de tout déguisement fortuit, et l’a poursuivie avec lucidité dans de multiples détails, afin qu’aucun emploi de termes difficiles ou de phrases compliquées ne puisse jeter quelque mystification sur les questions discutées, et que toutes les personnes intelligentes qui s’intéressent à ces questions — et qui ne l’est pas ? — peut en comprendre les enjeux et les preuves.

Dans les temps les plus reculés, il y a eu beaucoup de variations dans le texte du Nouveau Testament, et en particulier dans les saints Évangiles — car nous traiterons principalement de ces quatre livres comme constituant la province la plus importante, et comme offrant une superficie plus petite, et étant ainsi plus commode pour la présente enquête : — une grande diversité de paroles et d’expressions, dis-je, est née dans l’Église. En conséquence, l’école de théologie scientifique d’Alexandrie, en la personne d’Origène, jugea d’abord nécessaire de s’occuper de la question. Quand Origène s’installa à Césarée, il emporta avec lui ses manuscrits, et ils semblent avoir formé la base de la célèbre bibliothèque de cette ville, qui fut ensuite augmentée par Pamphile et Eusèbe, et aussi par Acacius et Euzoius1, qui furent successivement évêques du lieu. Du vivant d’Eusèbe, s’il n’était pas sous son contrôle, les deux plus anciens manuscrits onciaux qui existaient jusqu’à présent, connus sous le nom de B et א, ou Vatican et Sinaïtique, ont été exécutés sous une belle forme et une calligraphie exquise. Mais peu de temps après, vers le milieu du IVe siècle — comme les deux écoles de critiques textuelles s’accordent à dire — un texte différent de celui de B et de א progressé dans l’acceptation générale ; et, augmentant jusqu’au VIIIe siècle dans la prédominance acquise à la fin du IVe, devint si répandu dans la chrétienté, que le petit nombre de manuscrits d’accord avec B et א ne forme aucune sorte de comparaison avec les nombreux qui diffèrent de ces deux-là. Ainsi, le problème du IVe siècle anticipait le problème du XIXe. Faut-il que le texte authentique du Nouveau Testament aille au Vatican et aux manuscrits du Sinaïtique et aux quelques autres qui sont principalement d’accord avec eux, ou devons-nous suivre le corps principal des manuscrits du Nouveau Testament qui, à la fin du siècle au cours duquel ces deux manuscrits ont été produits, sont entrés en possession du champ de discorde, et l’ont occupé depuis ? C’est le problème que le traité suivant se propose de résoudre, c’est-à-dire lequel de ces deux textes ou séries de lectures est le mieux attesté, et peut être retracé par les preuves les plus solides jusqu’aux autographes originaux.

1 Voir Jérôme, Epist. 34 (Migne. xxii. p. 448). Morue. V. de Philon porte l’inscription suivante : — Εύζόϊος πίσκοπος ν σωματίοις νενεώσατο, c’est-à-dire transcrit sur vélin à partir de papyrus. Édition de Philon par Leopold Cohn, De Opiticiis Mundi, Vratislaw, 1889.

Quelques mots sont maintenant nécessaires pour décrire et rendre compte de la situation actuelle de la controverse.

Après la découverte de l’imprimerie en Europe, la critique textuelle a commencé à se développer. Sa carrière peut être divisée en quatre stades, que l’on peut appeler respectivement la petite enfance, l’enfance, la jeunesse et la maturité naissante 1.

1 Voir mon Guide de la critique textuelle du Nouveau Testament, pp. 7-37. George Bell et fils. Année 1886.

I. Érasme en 1516 a édité le Nouveau Testament à partir d’un très petit nombre de manuscrits, probablement seulement cinq, réputés à l’époque ; et six ans après parut l’édition complutensienne sous le cardinal Ximenès, qui avait été imprimée deux ans avant celle d’Érasme. Robert Stephen, Théodore de Bèze et les Elzévirs publièrent aussi, comme on le sait, leurs propres éditions. Dans la dernière édition des Elzévirs, publiée en 1633, apparaît pour la première fois l’expression largement utilisée « Textus Receptus ». Le seul but de cette période était de s’en tenir fidèlement au texte reçu partout.

II. Dans la suivante, des preuves tirées de manuscrits, de versions et de pères ont été recueillies, principalement par Mill et Wetstein. Bentley songea à remonter au IVe siècle pour en trouver des preuves décisives. Bengel et Griesbach ont mis l’accent sur les familles et les recensions de manuscrits, et ont ouvert la voie en s’écartant de la norme reçue. La collation des manuscrits a été effectuée par ces deux critiques et par d’autres érudits compétents, et en grande partie par Scholz. Il y a donc eu une amplification des matériaux, et une moisson de théories. Beaucoup de choses vagues et élémentaires étaient mêlées à la promesse de beaucoup de choses qui s’avéreraient plus satisfaisantes à l’avenir.

III. Le chef de file de l’avancée suivante fut Lachmann, qui commença à rejeter les lectures du Texte reçu, en supposant qu’il n’avait que deux siècles. Les autorités étant déjà devenues incommodément nombreuses, il borna son attention à quelques-unes qui s’accordaient avec les onciales les plus anciennes, à savoir, L ou le Regius de Paris, un ou deux autres fragments d’onciales, quelques cursives, les anciens manuscrits latins et quelques-uns des plus anciens Pères, formant généralement six ou sept en tout sur chaque lecture séparée. Tischendorf, le découvreur de א, la sœur jumelle de B, et le collateur d’un grand nombre de manuscrits.2, le suivit dans l’ensemble, ainsi que Tregelles. Et le Dr Hort, qui, avec l’évêque Westcott, a commencé à théoriser et à travailler lorsque l’influence de Lachmann était à son apogée, a soutenu dans une introduction des plus ingénieuses et des plus élaborées la cause des deux plus anciennes onciales — en particulier B — et leur petit groupe d’adeptes. Admettant que le texte reçu remonte au milieu du IVe siècle, Hort a fait valoir qu’il a été séparé de plus de deux siècles et demi des Autographes originaux, et qu’en fait il a pris naissance à Antioche et devrait être appelé « syrien », malgré la prédominance dont il a reconnu qu’il jouissait depuis la fin du IVe siècle. Il a appelé les lectures dont B et א sont les principaux représentants « le texte neutre », et a soutenu que ce texte peut être retracé jusqu’aux autographes authentiques3.

2 Pour une estimation de l’œuvre considérable de Tischendorf, voir un article sur le Testament grec de Tischendorf dans la Quarterly Review de juillet 1895.

3 La théorie de M. Hort, qui est généralement considérée comme fournissant l’explication philosophique des principes maintenus dans l’école des critiques qui soutiennent B et א comme sources prééminentes du texte correct, peut être étudiée dans son introduction. C'est également expliqué et controversé dans mon Guide textuel, pp. 38-59 ; et a été vigoureusement critiqué par le doyen Burgon dans la révision révisée, article III, ou dans le n° 306 de la Quarterly Review, sans réponse.

IV. J’ai placé les doctrines de l’école opposée en dernier comme montrant des signes de maturité naissante dans la science, non pas parce qu’elles sont admises comme telles, ce qui n’est pas le cas, mais à cause de leurs mérites intrinsèques, qui seront développés dans ce volume, et à cause de l’immense addition récemment faite d’autorités à notre magasin. ainsi qu’en raison de l’influence indirecte exercée dans ces derniers temps par des découvertes poursuivies dans d’autres milieux4En effet, on cherche à établir un stock plus large d’autorités dirigeantes, et une méthode plus saine dans l’utilisation de celles-ci. Les chefs de file dans la défense de ce système ont été le Dr Scrivener à un degré modifié, et en particulier le doyen Burgon. Tout d’abord, qu’il soit bien entendu que nous ne prônons pas la perfection dans le Textus Receptus. Nous admettons qu’ici et là, il faut le réviser. Dans le texte laissé par le doyen Burgon5environ 150 corrections ont été suggérés par lui dans l’Évangile de saint Matthieu. Ce que nous maintenons, c’est le texte traditionnel. Et nous remontons aux âges les plus reculés dont il soit fait mention. Nous nous en remettons au témoignage le plus complet et à la vision la plus éclairée de toutes les preuves. Dans une humble dépendance de Dieu le Saint-Esprit, dont nous croyons qu’il a multiplié les témoins à travers les âges de l’Église, et dont nous croyons plaider la cause, nous appelons solennellement ces nombreux étudiants de la Bible en ces jours qui recherchent sérieusement la vérité à peser sans préjugés ce que nous disons, dans la prière, afin qu’il puisse contribuer à la détermination des vraies expressions employées dans la véritable Parole de Dieu.

4 Quarterly Review, juillet 1895. « Le Testament grec de Tischendorf ».

5 Voir Préface.

 

CHAPITRE I.

Motifs préliminaires.

§1 .

Dans les pages qui suivent, je me propose de discuter d’un problème de la plus haute dignité et de la plus haute importance6 : à savoir : Sur quels principes le vrai texte des Écritures du Nouveau Testament doit-il être vérifié ? Mon sujet est le texte grec de ces Écritures, en particulier des quatre Évangiles ; Mon but, c’est d’établir ce texte sur une base intelligible et digne de confiance.

6 Il est remarquable que, dans les milieux où nous aurions dû chercher une procédure plus scientifique, l’importance de la critique textuelle du Nouveau Testament soit sous-estimée, sous prétexte que la doctrine théologique peut être établie sur des passages autres que ceux dont le texte a été attaqué par l’école destructrice. Cependant, (a) dans tous les cas, l’examen du texte d’un auteur doit nécessairement précéder l’examen des inférences à partir du texte — La Critique Inférieure doit être le fondement de la Critique Supérieure ; (6) les passages confirmatifs ne peuvent être écartés devant les attaques contre la doctrine de tous les caractères possibles ; (c) L’Écriture Sainte est trop unique et trop précieuse pour admettre que l’étude de plusieurs mots de celle-ci soit intéressante plutôt qu’importante ; (d) beaucoup de passages que la critique moderne effacerait ou soupçonnerait — comme les douze derniers versets de saint Marc, le première Parole de la Croix, et la description palpitante de la profondeur de l’Agonie, parmi beaucoup d’autres — ont une valeur extrême ; et, d’une manière générale, il est impossible de prononcer, surtout au milieu de la pensée et de la vie qui bouillonnent partout autour de nous, quelle partie de l’Écriture Sainte n’est pas, ou ne peut pas être, de la plus haute importance et du plus grand intérêt. — E. M.

Qu’il n’y ait pas eu de principes fixes avant 1880, c’est prouvé par le fait que les critiques les plus célèbres différaient non seulement considérablement les uns des autres, mais aussi d’eux-mêmes. Jusque-là, tout n’était que de l’empirisme dans ce département. Une section, un chapitre, un article, une brochure, une tentative d’essai — tout cela paraissait de temps en temps, et quelques-uns étaient excellents en leur genre. Mais nous avons besoin de quelque chose de beaucoup plus méthodique, argumentatif et complet, que ce qui est compatible avec des limites aussi étroites. Même lorsqu’un exposé des faits était plus long et donné avec beaucoup de plénitude et d’exactitude, il manquait un principe scientifique suffisant pour guider les étudiants vers une détermination satisfaisante et saine des questions difficiles. Les deux dernières éditions de Tischendorf diffèrent l’une de l’autre par pas moins de 3 572 détails. Il renverse à chaque page en 1872 ce qu’il offrait en 1859 comme résultat de son jugement délibéré. Chacun, pour parler clairement, qu’il fût expert ou simple débutant, semblait se considérer comme capable de prononcer une sentence sur toute nouvelle lecture qui se présentait à son attention. On nous a dit que, « d’après tous les principes d’une saine critique, ce mot devait être retenu, celui qu’il fallait rejeter ; mais jusqu’à l’apparition de la dissertation du docteur Hort, personne n’a eu l’obligeance de nous dire quels sont les principes auxquels on fait allusion avec confiance, et par l’application loyale desquels nous aurions pu arriver au même résultat pour nous-mêmes. Et la théorie de Hort, comme on le verra plus loin, implique trop de violation des principes généralement reçus, et est trop dépourvue de toute preuve semblable pour jamais gagner l’acceptation universelle. Comme il est facile de le vérifier, il est en contradiction avec le jugement porté par l’Église à travers les âges, et à bien des égards il ne s’accorde pas avec l’enseignement des critiques les plus célèbres du siècle qui l’ont précédé.

J’espère qu’on me pardonnera si, dans la poursuite de la présente enquête, j’ose sortir des sentiers battus et conduire mon lecteur dans un style un peu plus humble que celui qui a été habituel avec mes prédécesseurs. Toutes les fois qu’ils sont entrés dans l’examen des principes, ils ont toujours commencé par poser de leur propre autorité un ensemble de propositions, dont quelques-unes, loin d’être axiomatiques, répugnent à notre jugement, et se trouvent même fausses. Il est vrai que je devrai aussi commencer par demander mon assentiment à quelques positions fondamentales : mais j’ose promettre que tout cela ira de soi. Je me trompe fort s’ils ne nous conduisent pas aussi à des résultats très différents de ceux qui ont été récemment en faveur auprès de beaucoup d’écrivains et de professeurs parmi les plus avant-gardistes.

Par-dessus tout, je prétends de la part de tout lecteur réfléchi qu’il s’efforcera d’aborder ce sujet dans un état d’esprit impartial. Il était déraisonnable de s’attendre à ce qu’il réussisse à se défaire de toute idée préconçue sur ce qui est probable ou non. Mais il est invité au moins à porter ses préjugés aussi lâchement qu’il le peut à son sujet ; d’être prêt à les rejeter s’il lui a été démontré qu’elles sont fondées sur un malentendu ; de prendre la résolution de ne rien tenir pour acquis qui admette d’être prouvé comme étant vrai ou faux. Et, pour répondre à une objection qui ne manquera pas d’être invoquée contre moi, par preuve, je n’entends évidemment que l’approche la plus proche de la démonstration, ce qui est possible dans le sujet actuel.

C’est pourquoi je demande qu’en dehors d’une preuve quelconque, il ne soit pas tenu pour acquis qu’une copie du Nouveau Testament écrite au IVe ou au Ve siècle présentera un texte plus digne de confiance qu’un texte écrit au XIe ou au XIIe. Qu’en effet, de deux documents anciens, on n’ait pas pu raisonnablement s’attendre à ce que le plus ancien se révèle le plus digne de foi, je ne me soucie pas de le contester, et je ne discuterai pas ici une telle question ; Mais les probabilités de l’affaire ne sont en tout cas pas axiomatiques. Bien plus, on trouvera, comme j’ai l’audace de le dire, que, dans bien des cas, une copie des Évangiles du quatorzième siècle peut montrer la vérité de l’Écriture, tandis que la copie du quatrième siècle s’avère dans tous ces cas être la dépositaire d’un texte fabriqué. Je n’ai qu’à demander que, jusqu’à ce que le sujet ait été complètement étudié, les hommes suspendent leur jugement sur ce point : ne rien tenir pour acquis qui admette une preuve, et ne considérer comme certainement vrai ou faux rien qui n’ait été démontré comme tel.

§2 .

Ce qui distingue la science sacrée de toutes les autres sciences que l’on peut nommer, c’est qu’elle est divine, et qu’elle se rapporte à un livre inspiré ; c’est-à-dire dont le véritable Auteur est Dieu. Car nous supposons que la Bible doit être considérée comme inspirée, et non pas considérée sur le même plan que les Livres de l’Orient, qui sont considérés comme sacrés par leurs adeptes. C’est principalement par inattention à cette circonstance que l’idée fausse prévaut dans ce département de la Science Sacrée connu sous le nom de « Critique textuelle ». Conscients que le Nouveau Testament ne ressemble à aucun autre livre par son origine, son contenu, son histoire, beaucoup de critiques d’aujourd’hui se permettent néanmoins de raisonner sur son texte, comme s’ils ne se doutaient pas que les mots et les phrases qui le composent étaient destinés à connaître aussi un sort extraordinaire. Ils ne tiennent pas compte du fait que des influences d’un genre entièrement différent de toutes celles que connaît la littérature profane se sont fait sentir dans ce domaine, et que, par conséquent, même les principes de la critique textuelle qui, dans le cas des auteurs profanes, sont considérés comme fondamentaux, ne sont souvent pas à leur place ici.

Il est impossible que tout cela puisse être trop clairement appréhendé. En fait, tant que ceux qui étudient les paroles du Nouveau Testament ne seront pas convaincus qu’ils se meuvent dans une région qui ne ressemble à aucune autre, où des phénomènes uniques les attendent à chaque pas, et où, il y a dix-sept cent cinquante ans, des causes dépravantes inconnues dans tous les autres domaines de l’érudition étaient activement à l’œuvre, il ne peut y avoir de progrès dans la présente discussion. Les hommes doivent par tous les moyens détromper leur esprit des préjugés qu’inspire l’étude de la littérature profane. Permettez-moi d’expliquer cette question un peu plus en détail, et d’établir le caractère raisonnable de ce qui précède par quelques considérations évidentes qui, je pense, doivent obtenir l’assentiment. Je n’ai pas l’intention d’émettre des opinions, mais seulement d’en appeler à certains faits indéniables. Ce que je déprécie, ce n’est pas un usage discriminant de la critique révérencieuse, mais une confusion maladroite de points essentiellement différents.

À peine l’œuvre des évangélistes et des apôtres a-t-elle été reconnue comme la contrepartie et le complément nécessaires des anciennes Écritures de Dieu et devint le « Nouveau Testament », que l'on s'aperçut qu'elle recevait dans le monde un accueil très semblable à Celui qu'avait connu Celui qui fait l'objet de ces pages. La calomnie et la fausse représentation, la persécution et la haine meurtrière l’assaillaient continuellement. Et la Parole écrite de la même manière, dans les premiers âges de tous, a été honteusement manipulée par l’humanité. Non seulement elle a été confondue par l’infirmité et l’incompréhension humaines, mais elle est aussi devenue l’objet d’une malice inquiète et d’assauts impitoyables. Marcion, Valentin, Basilide, Héracléon, Ménandre, Asclépiade, Théodote, Hermophile, Apollonide et d’autres hérétiques, adaptèrent les Évangiles à leurs propres idées. Tatien, et plus tard Ammonius, ont créé la confusion en essayant de combiner les quatre évangiles soit dans un diatessaron, soit sur un arrangement complexe fait par sections, en vertu de laquelle les paroles d’un évangile ont été assimilées à celles d’un autre7Le manque de familiarité avec les mots sacrés dans les premiers âges, la négligence des scribes, l’enseignement incompétent et l’ignorance du grec en Occident, ont conduit à une corruption supplémentaire du texte sacré. Puis, du fait qu’il existait un grand nombre de copies corrompues, surgit immédiatement le besoin de la Recension, qui fut poursuivi par Origène et son école. C’était une nécessité fatale que de se faire sentir dans un siècle où les premiers principes de la Science n’étaient pas compris ; car « corriger » était trop souvent, à cette époque, un autre mot pour « corrompre ? Et c’est la première chose qu’il faut expliquer brièvement et faire respecter : mais plus qu’un contrepoids a été fourni sous la Providence dominante de Dieu.

7 Voir ci-dessous, vol. II, et un passage remarquable cité de Caius ou Gaius par le doyen Burgon dans The Revision Revised (Quarterly Review, n° 306), pp. 323-324.

 

§3 .

Avant que notre Seigneur ne monte au ciel, il a dit à ses disciples qu’il leur enverrait le Saint-Esprit, qui pourvoirait à sa place et demeurerait avec son Église pour toujours. Il ajouta la promesse que ce serait l’office de cet Esprit inspirateur, non seulement « de leur rappeler tout ce qu’il leur avait dit 8 », mais aussi de « conduire » son Église « dans toute la Vérité » ou « la vérité entière9 » (πσαν τν λήθειαν). C’est ainsi que la première grande réalisation de cette époque a été accomplie en donnant à l’Église les Écritures du Nouveau Testament, dans lesquelles l’enseignement autorisé était inscrit sous forme écrite. Et d’abord, parmi les nombreux Évangiles que des personnes incompétentes avaient « pris en main » pour écrire ou compiler à partir d’une grande quantité de matière flottante de nature orale ou écrite, il les guida pour discerner que quatre étaient tout à fait différents des autres — étaient la Parole même de Dieu.

8 Saint Jean xiv. 26.

9 Saint Jean xvi. 13.

Il n’y a aucune raison de supposer que l’Agent Divin, qui en premier lieu a ainsi donné à l’humanité les Écritures de la Vérité, a immédiatement abdiqué Sa fonction, n’a plus pris soin de Son œuvre, a abandonné ces précieux écrits à leur sort. Qu’un miracle perpétuel s’est opéré pour leur conservation — que les copistes étaient protégés contre le risque de l’erreur, ou que les méchants étaient empêchés de falsifier honteusement des copies du Dépôt — Personne, présume-t-on, n’est assez faible pour le supposer. Mais c’est tout autre chose que d’affirmer que, tout au long des âges, les écrits sacrés ont dû nécessairement être la sollicitude particulière de Dieu, que l’Église, sous sa direction, les a surveillés avec intelligence et habileté, qu’elle a reconnu quelles copies présentent un texte fabriqué et qu’un texte honnêtement transcrit, qu’elle a généralement approuvé l’un et généralement désavoué l’autre. Je suis tout à fait réticent à croire — tant cela semble grossièrement improbable — qu’à la fin de 1800 ans, 995 exemplaires sur mille, supposons, s’avéreront indignes de foi ; et que l’un, deux, trois, quatre ou cinq qui restent, dont le contenu était jusqu’à hier à peu près inconnu, se trouvera avoir conservé le secret de ce que le Saint-Esprit a inspiré à l’origine. Je suis tout à fait incapable de croire, en un mot, que la promesse de Dieu ait si complètement échoué, qu’à la fin de 1800 ans, une grande partie du texte de l’Évangile ait dû être choisie par un critique allemand dans une corbeille à papier dans le couvent de Sainte-Catherine ; et que le texte entier devait être remodelé d’après le modèle établi par quelques copies qui étaient restées à l’abandon pendant quinze siècles, et qui avaient probablement dû leur survie à cette négligence ; tandis que des centaines d’autres avaient été mis en pièces, et avaient légué leur témoignage à des copies faites d’eux.

J’ai adressé ce qui précède à des personnes qui sympathisent avec moi dans ma croyance. Pour d’autres, l’argument devrait être présenté d’une manière différente. Rappelons-nous donc qu’il y avait une abondance de copies dans les premiers temps ; que le besoin d’un soin zélé des Saintes Écritures s’est toujours fait sentir dans l’Église ; que ce n’est que de l’Église que nous avons appris quels sont les livres de la Bible et lesquels ne le sont pas ; qu’à l’époque où le Canon a été établi, et que beaucoup de critiques supposent avoir introduit un texte corrompu, la plus grande partie de l’intellect de l’Empire romain se trouvait dans l’Église, et était dirigée vers des questions controversées ; que, dans les siècles suivants, l’art de transcrire a été porté à un haut degré de perfection ; et que le verdict de toutes les périodes qui se sont écoulées depuis la production de ces deux manuscrits a été rendu jusqu’à il y a quelques années en faveur du texte qui a été rendu : — Que l’on se souvienne encore que le témoignage n’est pas seulement celui de tous les âges, mais de tous les pays, et qu’à tout le moins il s’ensuivra une présomption si forte en faveur du texte traditionnel, qu’il faudra en effet construire un argument puissant pour le renverser. Elle ne peut être vaincue par des théories fondées sur des considérations internes — souvent seulement un autre nom pour les goûts personnels — ou pour les goûts ou les aversions des érudits, ou sur des recensions fictives, ou sur un choix arbitraire de manuscrits préférés, ou sur une division tendue des autorités en familles ou en groupes, ou sur une application déformée du principe de la généalogie. Dans la détermination des faits du Texte Sacré, les lois de la preuve doivent être strictement suivies. Dans les questions relatives à la Parole inspirée, la simple spéculation et la déraison n’ont pas leur place. En un mot, le texte traditionnel, fondé sur la grande majorité des autorités et sur le rocher de l’Église du Christ, sera, si je ne me trompe, trouvé à l’examen qu’il est hors de toute comparaison supérieur à un texte du dix-neuvième siècle, quelle que soit l’habileté et l’ingéniosité qui aient pu être dépensées pour le produire ou le défendre.

§4 .

Car l'attention voulue n'a jamais encore été accordée à une circonstance qui, correctement appréhendée, contribuera grandement à établir le texte des Écritures du Nouveau Testament sur une base solide. Je veux parler du fait qu’une certaine exposition du Texte sacré — cette exposition que nous connaissons tous le mieux — repose sur l’autorité ecclésiastique. D’une manière générale, le texte traditionnel des Écritures du Nouveau Testament, tout comme le canon du Nouveau Testament, repose sur l’autorité de l’Église catholique. « Qu’on le veuille ou qu’on ne l’aime pas » (remarquait un savant écrivain du premier quart du dix-neuvième siècle), « le canon actuel du Nouveau Testament n’est ni plus ni moins que l'approbation des évêques chrétiens orthodoxes, et ceux non seulement du premier et du second, mais du troisième et du quatrième, et même des suivants siècles10De la même manière, que les hommes le veuillent ou non, il est évident que le texte grec traditionnel du Nouveau Testament n’est ni plus ni moins que l'approbation des évêques chrétiens grecs orthodoxes, et ceux, sinon comme nous le soutenons du premier et du second, ou du troisième, du moins incontestablement du quatrième et du cinquième siècle, et même les siècles suivants.

10 Sermon du révérend John Oxlee sur Luc, xxii. 28-30 (1821), p. 91 (Trois sermons sur le pouvoir, l’origine et la succession de la hiérarchie chrétienne, et en particulier celle de l’Église d’Angleterre).

Car heureusement, il s’agit là d’un point sur lequel les disciples de l’école moderne la plus avancée sont entièrement d’accord avec nous. Le Dr Hort déclare que « le texte fondamental des manuscrits grecs récents qui nous sont parvenus est généralement, sans aucun doute, identique au texte antiochien ou gréco-syrien dominant de la seconde moitié du IVe siècle. La majeure partie des manuscrits existants, écrits d’environ trois, quatre à dix ou onze siècles plus tard, doivent avoir eu, dans le plus grand nombre de variantes existantes, un original commun, soit contemporain de nos manuscrits les plus anciens, soit plus ancien que celui-ci. 11 Et encore : « Avant la fin du IVe siècle, comme nous l’avons dit, un texte grec, ne différant pas matériellement du texte presque universel du IXe siècle et du Moyen Âge, dominait, probablement par autorité, à Antioche, et exerçait beaucoup d’influence ailleurs12. » La mention d’Antioche est, de manière caractéristique de l’auteur, purement arbitraire. Un seul et même texte traditionnel, à l’exception de quelques détails relativement rares, a prévalu dans l’Église depuis le commencement jusqu’à présent. Ce qui mérite particulièrement l’attention, c’est l’aveu que le texte en question est du IVe siècle, auquel appartiennent les deux plus anciens de nos Codex sacrés (B et א). On observe qu’il existe dans les Lectionnaires de l’Église exactement le même phénomène. Ils ont prévalu dans un accord ininterrompu à d’autres égards depuis les temps les plus reculés, probablement depuis l’époque de saint Chrysostome13et ont conservé dans l’ensemble, sans changement, la forme des mots dans laquelle ils ont été jetés à l’origine dans l’Orient immuable.

11 Westcott et Hort, Introduction, p. 92.

12 Ibid., p. 142.

13 Scrivener, Plain Introduction, éd. 4, vol. I, p. 75-76.

Et c’est vraiment le problème qui se pose à nous. (Dieu soit loué !) sous une forme singulièrement commode, singulièrement intelligible. Depuis le XVIe siècle — nous le devons aussi à la bonne Providence de Dieu — un seul et même texte des Écritures du Nouveau Testament a été généralement reçu. Je ne défends pas le « Textus Receptus » ; Je ne fais qu’énoncer le fait de son existence. Qu’il n’ait pas le pouvoir de lier, qu’il exige une révision habile dans toutes ses parties, c’est ce qu’on admet volontiers. Je ne crois pas qu’il soit absolument identique au vrai texte traditionnel. Son existence, néanmoins, est un fait auquel il n’y a pas d’échappatoire. Heureusement, la chrétienté occidentale s’est contentée d’utiliser un seul et même texte pendant plus de trois cents ans. Si l’on fait l’objection, comme elle le sera probablement, voulez-vous donc vous arrêter sur les cinq manuscrits utilisés par Érasme ? Je réponds que les copies employées ont été choisies parce qu’on savait qu’elles représentaient avec exactitude la Parole sacrée ; que la descendance du texte était évidemment gardée avec un soin jaloux, de même que la généalogie humaine de Notre-Seigneur était conservée ; qu’elle repose principalement sur les témoignages les plus larges ; et que lorsqu’une partie de celle-ci est en contradiction avec les preuves les plus complètes possibles, je crois qu’elle appelle une correction.

La question qui se pose donc, et à laquelle il faut répondre par l’affirmative avant de déplacer une seule syllabe du texte actuel, sera toujours la même, à savoir celle-ci : Est-il certain que les preuves en faveur de la nouvelle lecture proposée sont suffisantes pour justifier l’innovation ? Car j’espère que nous serons tous d’accord pour dire qu’en l’absence d’une réponse affirmative à cette question, le texte ne pourra en aucun cas être modifié. À tort ou à raison, elle a reçu l’approbation de la chrétienté occidentale pendant trois siècles, et elle est en ce moment en possession du champ. Par conséquent, la question qui nous occupe pourrait s’énoncer à peu près comme suit : Quelles considérations devraient déterminer notre acceptation d’une lecture qui ne se trouve pas dans le texte reçu, ou, pour l’énoncer plus généralement et plus fondamentalement, notre préférence pour une lecture plutôt qu’une autre ? Car tant qu’on n’est pas parvenu à une sorte d’entente sur ce point, il est impossible de progresser. Il ne peut y avoir de science de la critique textuelle, je le répète — et donc aucune sécurité pour la Parole inspirée — tant qu’il est permis au jugement subjectif, qui peut facilement dégénérer en caprice individuel, de déterminer quelles lectures doivent être rejetées, lesquelles doivent être retenues.

Dans le chapitre suivant, je discuterai des principes qui doivent former le fondement de la Science. En attendant, quelques mots sont nécessaires pour expliquer le problème qui m’oppose à ces critiques avec lesquels je ne puis être d’accord. Il faut, si je le peux, que je m’entende avec eux ; et j’emploierai toute la clarté de mon discours afin que mon sens et ma position puissent être bien compris.

§5 .

Aussi étrange que cela puisse paraître, il est indéniablement vrai que toute la controverse peut se réduire à la question étroite suivante : la vérité du texte de l’Écriture habite-t-elle avec la multitude immense de copies, onciales et cursives, au sujet desquelles rien n’est plus remarquable que le merveilleux accord qui subsiste entre elles ? Ou bien faut-il plutôt supposer que la vérité ne s’arrête qu’à une très petite poignée de manuscrits, qui diffèrent à la fois de la grande masse des témoins, et — étrange à dire — aussi entre eux ?

Les défenseurs du Texte Traditionnel insistent sur le fait que le Consentement sans Concert de tant de centaines d’exemplaires, exécutés par différentes personnes, à des époques diverses, dans des régions très éloignées de l’Église, est une preuve présumée de leur fiabilité, que rien ne peut invalider, si ce n’est une sorte de démonstration qu’ils ne sont après tout que des guides dignes de confiance.

Les défenseurs des anciennes onciales — car c’est le texte exposé par un ou plusieurs des cinq codex onciaux connus sous le nom de ABאCD qui est mis en place avec tant de confiance — prétendent que la vérité doit nécessairement résider exclusivement dans les objets de leur choix. Ils semblent fonder leur revendication sur ' antiquité ' ; Mais la véritable confiance de beaucoup d’entre eux réside évidemment dans une prétention à la divination subtile, qui leur permet de reconnaître une vraie lecture ou le vrai texte lorsqu’ils le voient. Il est étrange qu’il ne semble pas avoir frappé de tels critiques qu’ils supposent la chose même qui doit être prouvée. Quoi qu’il en soit, en fait, les lectures que l’on ne trouve que dans le Cod. B, ou Cod. א, ou Cod. D sont parfois adoptés comme corrects. Ni Cod. A ni Cod. C sont toujours connus pour inspirer une confiance similaire. Mais l’adhésion des deux ou de l’un ou de l’autre en tant que témoin est toujours acceptable. Or, il est remarquable que les cinq Codex que nous venons de mentionner ne se trouvent jamais, sauf erreur de ma part, exclusivement en accord.

Cette question sera discutée plus en détail dans le traité suivant. Ici, il est seulement nécessaire d’insister davantage sur le fait que, d’une manière générale, il est impossible de faire des compromis sur ces questions. De nos jours, la plupart des gens sont enclins à faire remarquer à propos de toute controverse que la vérité réside entre les deux combattants, et la plupart d’entre nous aimeraient rencontrer nos adversaires à mi-chemin. Malheureusement, la présente prétention n’admet pas une telle décision. La connaissance réelle des nombreux points en jeu doit révéler l’impossibilité d’un tel règlement. Elle dépend, non pas de l’attitude, du tempérament ou de l’intelligence des parties adverses, mais des éléments sévères et incongrus de l’objet de la lutte. Bien que nous puissions le regretter, il n’y a positivement pas d’autre solution.

En effet, il n’existe que deux écoles rivales de critique textuelle. Et ceux-ci sont irréconciliablement opposés. Finalement, l’un d’entre eux devra céder : et, vae victis ! La reddition inconditionnelle sera sa seule ressource. Quand l’un a été reconnu comme le droit, il n’y a pas de place pour l’autre. Il devra être écarté de l’attention comme étant une chose totalement et désespérément dans l'erreur14.

14 Bien entendu, ce passage tranchant ne se réfère qu’aux principes de l’école s’est avéré défaillant. Une école peut laisser des fruits, d’une recherche d’un genre des plus précieux, et pourtant se tromper complètement quant aux inférences qu’impliquent de telles et d’autres Faits. Le doyen Burgon l’a amplement admis. L’extrait suivant de l’un des nombreux papiers détachés laissés par l’auteur sont annexés comme possédant à la fois Intérêt illustratif et personnel : —

« Aussi familiers que soient tous les détails que le présent doit nécessairement prouver à ceux qui ont fait de la critique textuelle leur étude, ils ne peuvent en aucun cas être retenus. Je ne m’adresse pas seulement aux savants. Je me propose, avant de prendre la plume, de faire participer les personnes instruites, où qu’elles se trouvent, à ma profonde conviction que, pour la plupart, il est possible d’obtenir des certitudes sur ce sujet ; mais que les décrets de l’école populaire — à la tête de laquelle se trouvent beaucoup de grands critiques de la chrétienté — se trompent complètement. Fondées, comme j’ose le croire, sur des prémisses entièrement fausses, leurs conclusions sont presque invariablement tout à fait fausses. Et c’est ce que je tiens pour démontrable ; et je me propose dans les pages qui suivent d’établir le fait. Si je n’y parviens pas, je paierai le prix de ma présomption et de ma folie. Mais si je réussis — et je désire avoir pour juges des juristes et des personnes versées dans le droit de la preuve, ou du moins des personnes réfléchies et impartiales, où qu’elles se trouvent, et pas d’autres, pour mes juges, — si j’établis ma position, dis-je, que l’Église du Christ se souvienne avec bonté de mon père et du fils de ma mère lorsqu’il sera parti."

CHAPITRE II.

Principes.

§1 .

L’objet de la critique textuelle, lorsqu’elle est appliquée aux Écritures du Nouveau Testament, est de déterminer ce que les apôtres et les évangélistes du Christ ont réellement écrit — les mots précis qu’ils employaient, et l’ordre même de ceux-ci. C’est donc l’un des sujets les plus importants que l’on puisse proposer à l’examen ; et, à moins qu’il ne soit mal traité, il ne devrait pas manquer d’intérêt vivant. De plus, il est clair qu’il a la priorité, dans l’ordre synthétique de la pensée, sur tous les autres départements de la Science Sacrée, dans la mesure où ils reposent sur le grand pilier de l’Écriture Sainte.

Or, la critique textuelle s’occupe principalement de deux branches distinctes de recherche. (1) Son premier objet est de recueillir, d’enquêter et d’arranger les preuves fournies par les manuscrits, les versions, les pères. Et c’est là une tâche peu glorieuse, qui exige un travail prodigieux, une précision sévère, une attention infatigable, et qui ne peut jamais être menée à bien sans une quantité considérable d’une solide instruction. (2) Son deuxième objet est de tirer des inférences critiques ; en d’autres termes, découvrir la vérité du texte — les paroles authentiques de l’Écriture Sainte. Et c’est là une fonction tout à fait plus élevée, qui exige l’exercice de dons beaucoup plus élevés. Rien ne peut être accompli avec succès ici sans une connaissance large et exacte, sans parti pris et préjugés. Par-dessus tout, il doit y avoir une compréhension claire et judiciaire. La faculté logique dans la perfection doit s’énergiser continuellement, ou le résultat ne peut être que des erreurs, qui peuvent facilement s’avérer calamiteuses.

Ma prochaine étape est de déclarer ce qui a été fait jusqu’à présent dans l’un ou l’autre de ces départements, et d’en caractériser les résultats. Dans la première branche du sujet, jusqu’à ces derniers temps, très peu de choses ont été tentées, mais ce peu a été extrêmement bien fait. Beaucoup d’autres résultats ont été ajoutés au cours des treize dernières années : une grande quantité de preuves supplémentaires ont été découvertes, mais seule une petite partie de celles-ci a été soigneusement examinée et rassemblée. Dans cette dernière branche, beaucoup de choses ont été tentées : mais le résultat s’avère plein de déception pour ceux qui en auguraient beaucoup. Les critiques de ce siècle ont été trop pressés. Ils se sont précipités vers des conjurations, se fiant aux preuves qui étaient déjà entre leurs mains, oubliant que seules peuvent être scientifiquement valables les conclusions tirées de tous les matériaux existants. Les recherches d’un genre plus large auraient dû être antérieures à la décision. Permettez-moi d’expliquer et d’établir ce que j’ai dit.

§2 .

Il était seulement prévisible que l’Auteur de l’Évangile éternel — ce chef-d’œuvre de la sagesse divine, ce miracle d’une habileté surhumaine — se montrerait extrêmement attentif à la protection et à la conservation de sa propre œuvre principale. Chaque nouvelle découverte de la beauté et de la préciosité du Dépôt dans sa structure essentielle ne sert qu’à approfondir la conviction qu’une disposition merveilleuse a dû être faite dans les conseils éternels de Dieu pour la conservation efficace du Texte inspiré.

Pourtant, il n’est pas exagéré d’affirmer que rien de ce que l’habileté inventive de l’homme aurait pu concevoir n’arrive à la vérité réelle de la question. Prenons une vue d’ensemble de ce qui, après enquête, s’avère avoir été la méthode divine en ce qui concerne les Écritures du Nouveau Testament.

I. Par la nécessité même de l’affaire, les copies des Évangiles et des Épîtres dans l’original grec se sont multipliées dans une mesure extraordinaire à travers les âges et dans toutes les parties de l’Église chrétienne. Il en est résulté que, bien que toutes les plus anciennes aient péri, il reste encore aujourd’hui un nombre prodigieux de transcriptions de ce genre ; certains d’entre eux sont d’une très haute antiquité. En les examinant avec soin, nous découvrons qu’ils ont dû être (a) produits dans des pays différents, (b) exécutés à intervalles réguliers pendant l’espace de mille ans, (c) copiés à partir d’originaux qui n’existent plus. Et c’est ainsi qu’un ensemble de preuves a été accumulé quant à ce qu’est le texte réel de l’Écriture, tel qu’il est totalement inaccessible par rapport à tout autre écrit dans le monde16. On en connaît aujourd’hui (1888) plus de deux mille copies manuscrites17.

16 Il existe cependant environ 200 manuscrits de l’Iliade et de l’Odyssée d’Homère, et environ 150 de Virgile. Mais dans le cas de nombreux livres, les autorités existantes ne sont que rares. Ainsi il n’y a pas beaucoup plus de trente d’Eschyle, et ils sont tous dits par W. Dindorf comme dérivant d’un du XIe siècle : seulement quelques-uns de Démosthène, dont les plus anciens sont du Xe ou du XIe siècle : une seule autorité pour les six premiers livres des Annales de Tacite (voir aussi l’Introduction de Madvig) : un seul des Clémentins : un seul des Didachè, etc. Voir Gow’s Companion to School Classics, Macmillan & Co. 1888.

17 « J’avais déjà aidé mon ami le prébendier Scrivener à agrandir considérablement la liste de Scholz. Nous avions, en effet, porté le nombre de « Evangelia » à 621 ; celui des « Actes et Épîtres catholiques » à 239 ; celui de « Paul » à 281 ; celui de l'« Apocalypse » à J 08 ; celui des « Evangelistaria » [Lectionnaires des Évangiles] à 299 ; celui du livre appelé « Apostolos » à 81 — ce qui fait un total de 1629. Mais au terme d’une correspondance longue et quelque peu laborieuse avec les gardiens d’un grand nombre de grandes bibliothèques continentales, je suis en mesure d’affirmer que nos " Evangelia " disponibles s’élèvent à au moins 739 : nos " Actes et Cath. Epp. " à 261 ; notre " Paul " à 338 : notre " Apoc " à 122 : notre " Evst. " à 415 : nos exemplaires des " Apostolos " à 128 — soit un total de 2003. Cela montre une augmentation de trois cent soixante-quatorze. Révision révisée, p. 521. Mais depuis la publication des Prolégomènes du Dr Gregory, et de la quatrième édition de l’Introduction simple à la critique du Nouveau Testament du Dr Scrivener, après la mort du doyen Burgon, la liste s’est considérablement allongée. Dans la quatrième édition de l’Introduction (Appendice F, p. 397), le nombre total des six classes d’Evangelia, des Actes et des Épîtres catholiques, de saint Paul, de l’Apocalypse, de l’Evangelistaria et de l’Apostolos, s’élève à environ 3 829, et on peut l’évaluer à plus de 4 000 lorsque tous les deux sont arrivés. Les manuscrits séparés (dont certains dans le calcul qui vient d’être donné ont été comptés plus d’une fois) sont déjà plus de 3 000.

Il convient d’ajouter que la pratique de lire les Écritures à haute voix devant l’assemblée — une pratique qui a prévalu dès l’âge apostolique — a eu pour résultat d’accroître la sécurité du dépôt : car (1) elle a conduit à la multiplication, par l’autorité, des livres contenant les leçons de l’Église ; et (2) elle a obtenu un témoignage vivant de l’ipsissima verba de l’Esprit — dans toutes les Églises de la chrétienté. On observe que l’oreille, une fois bien familiarisée avec les paroles de l’Écriture, s’indigne de la moindre déviation du type établi. Quant à tolérer des changements importants, c’est tout à fait hors de question.

II. Ensuite, à mesure que l’Évangile se répandait de pays en pays, il fut traduit dans les différentes langues du monde antique. Car, bien que le grec fût largement compris, le commerce et la prédominance intellectuelle des Grecs, et les conquêtes d’Alexandre l’ayant fait parler presque dans tout l’empire romain, les versions syriaque et latine étaient également nécessaires pour la lecture ordinaire, probablement même à l’époque même des apôtres. Et c’est ainsi que ces trois langues dans lesquelles « le titre de son accusation » était écrit au-dessus de sa croix — de ne pas insister sur une identité absolue entre le syriaque de l’époque et l'« hébreu » de Jérusalem de l’époque — devinrent dès les temps les plus reculés les dépositaires de l’Évangile du Rédempteur du monde. Le syriaque était étroitement apparenté à l’araméen vernaculaire de Palestine et était parlé dans la région voisine, tandis que le latin était l’idiome familier de toutes les Églises d’Occident.

C’est ainsi que, dès le début, dans leurs assemblées publiques, les Orientaux et les Occidentaux ont l’habitude de lire à haute voix les écrits des évangélistes et des apôtres. Avant les IVe et Ve siècles, l’Évangile avait été traduit dans les idiomes particuliers de la Basse et de la Haute-Égypte, dans ce qu’on appelle aujourd’hui les versions bohaïrique et sahidique. — de l’Ethiopie et de l’Arménie, — du Gothland. Le texte ainsi embaumé dans tant de langues nouvelles était clairement, dans une large mesure, protégé contre le risque d’une nouvelle modification ; et ces diverses traductions sont restées jusqu’à ce jour comme témoins de ce qui a été trouvé dans les copies du Nouveau Testament qui ont péri depuis longtemps.

III. Mais il reste à décrire la disposition la plus singulière pour conserver la mémoire de ce qui était autrefois lu comme des Écritures inspirées. La Science Sacrée se vante d’une littérature sans équivalent dans aucun autre domaine de la connaissance humaine. Les Pères de l’Église, les évêques et les docteurs de la chrétienté primitive, ont été dans certains cas des écrivains volumineux, dont les œuvres sont parvenues en grande partie jusqu’à nos jours. Ces hommes commentent souvent, citent librement, se réfèrent habituellement aux paroles de l’Inspiration, de sorte qu’il arrive qu’une foule de témoins insoupçonnés de la vérité de l’Écriture sont parfois productible. Les citations de passages par les Pères sont des preuves des lectures qu’ils ont trouvées dans les copies qu’ils ont utilisées. Ils témoignent donc dans des citations ordinaires, quoique ce soit de seconde main, et quelquefois leur témoignage a plus de valeur qu’à l’ordinaire lorsqu’ils argumentent ou commentent le passage en question. En effet, très souvent les manuscrits qu’ils ont entre les mains, et qui jusqu’à présent vivent dans leurs citations, sont plus anciens — peut-être plus vieux de plusieurs siècles — que toutes les copies qui subsistent aujourd’hui. De cette façon, on s’apercevra qu’une triple garantie a été apportée pour l’intégrité du Gisement : — Copies, — Versions, — Pères. Sur la relation de chacun d’eux se dirige vers l’autre quelque chose Il s’agit maintenant d’un certain nombre de mesures à prendre.

§3.

Les copies manuscrites sont généralement divisées en onciales, c’est-à-dire celles qui sont écrites en majuscules, et Cursives ou « minuscules », c'est-à-dire celles qui sont écrites en «  écriture courante » ou en petite main. Cette division, bien que pratique, est trompeuse. Les plus anciennes des cursives sont plus anciennes que les plus récentes des ' Onciales ' de cent ans.15 Le corps postérieur des Onciales appartient virtuellement, comme on le prouvera, au corps des Cursives. Il n’y a aucun mérite, pour ainsi dire, à ce qu’un manuscrit soit écrit en caractères onciaux. Le nombre des onciales est largement inférieur à celui des cursives, bien qu’elles aient généralement une antiquité beaucoup plus élevée. On verra dans un chapitre ultérieur qu’il y a maintenant, en présence des découvertes récentes de manuscrits de papyrus en Égypte, beaucoup de raisons d’inférer que les manuscrits cursifs étaient en grande partie dérivés des manuscrits sur papyrus, tout comme les onciales elles-mêmes, et que la prévalence des onciales pendant quelques siècles a pris son essor dans la bibliothèque locale de Césarée. Pour un compte rendu complet de ces différents Codex, et pour beaucoup d’autres détails dans le Sacred Textual Criticism, le lecteur est renvoyé à Scriveners Introduction, 1894.

15 Evan. 481 est daté de l’an 835 ; Evan. S. est daté de 949 apr. J.-C.

Or, ce n’est pas tant une exagération qu’une estimation tout à fait erronée de l’importance des décrets textuels des cinq plus anciennes de ces copies onciales, qui est à la base de la plupart des critiques des cinquante dernières années. En conséquence, nous sommes contraints d’accorder à certains une attention disproportionnée à ces cinq Codex, à savoir le Codex B du Vatican et le Codex Sinaïtique א, qui sont censés être tous deux du IVe siècle : le Codex A alexandrin et le Codex C parisien fragmentaire, qui sont attribués au cinquième : et enfin D, le Codex Bezae à Cambridge, qui est censé avoir été écrit dans le sixième. On peut y ajouter, en ce qui concerne saint Matthieu et saint Marc, le Codex Beratinus Φ et le Codex Rossanensian Σ, tous deux du début du VIe siècle ou de la fin du Ve siècle. Mais ces deux-là témoignent généralement contre les deux plus anciens, et n’ont pas encore reçu toute l’attention qu’ils méritent. On verra à la fin que nous n’avons pas exagéré en caractérisant d’emblée B, א et D au départ, comme trois des copies les plus corrompues qui existent. Que l’on ne s’imagine pas que l’âge de ces cinq manuscrits les place sur un piédestal plus élevé que tous les autres. On peut prouver qu’ils ont tort à maintes reprises par la preuve d’une période antérieure à celle dont ils peuvent se vanter.

En effet, que les copies de l’Écriture, en tant que classe, soient les instruments les plus importants de la critique textuelle, c’est ce qu’aucune personne compétente ne niera. Les principales raisons en sont leur texte continu, leur incarnation conçue de la Parole écrite, leur nombre et leur variété. Mais nous faisons aussi un si grand cas des manuscrits, parce que (1) ils fournissent des preuves ininterrompues du texte de l’Écriture depuis une date reculée dans l’histoire jusqu’à l’invention de l’imprimerie ; 2° on les observe parsemés dans tous les siècles de l’Église après les trois premiers ; (3) ils sont le produit unifié de tous les patriarcats de la chrétienté. Il ne peut donc y avoir eu collusion dans la préparation de cette catégorie de jurisprudence. Le risque de transcription erronée a été réduit au niveau le plus bas possible. La prévalence de la fraude dans une mesure universelle est tout simplement impossible. Les corrections conjecturales du texte sont à peu près sûres, à long terme, d’avoir été effectivement exclues. Au contraire, le témoignage des Pères est fragmentaire, non voulu, bien que souvent pour cette raison il soit le plus précieux, et en effet, comme on l’a déjà dit, il est souvent introuvable ; mais elle est quelquefois très précieuse, soit par l’antiquité éminente, soit par la clarté de leur verdict : tandis que les Versions, bien qu’elles fournissent une preuve collatérale des plus précieuses sur des détails plus importants, sont cependant incapables par leur nature de rendre service sur beaucoup de points de détail importants. En effet, en ce qui concerne l’ipsissima verba de l’Écriture, l’évidence des versions dans d’autres langues doit être précaire à un haut degré.

Il est indéniable qu’en ce qui concerne le primitif, certaines versions, et un grand nombre de Pères, jettent tout à fait les manuscrits dans l’ombre. Nous ne possédons aucune copie réelle du Nouveau Testament aussi ancienne que les versions syriaque et latine de plus de deux cents ans. On peut peut-être dire quelque chose de semblable des versions faites dans les langues de la Basse-Égypte et de la Haute-Égypte, qui sont peut-être du IIIe siècle16Il est raisonnable aussi de supposer qu’en aucun cas une version ancienne n’a été exécutée d’après un seul exemplaire grec : par conséquent, les versions ont joui, à la fois dans leur origine et dans leur acceptation, de plus de publicité qu’il n’en faut nécessairement pour une copie individuelle. Et il est indéniable qu’en d’innombrables occasions, le témoignage d’une traduction, en raison de la clarté de son témoignage, est tout aussi satisfaisant que celui d’une copie réelle du grec.

16 Ou, comme certains le pensent, à la fin du IIe siècle.

Mais je voudrais surtout rappeler à mes lecteurs le précepte d’or de Bentley, à savoir que « Le vrai texte des écrivains sacrés ne se trouve plus, puisque les originaux ont été perdus depuis si longtemps, dans un manuscrit ou une édition, mais il est dispersé dans tous. » Cette vérité, qui était évidente pour l’intellect puissant de ce grand savant, est à la racine de toute saine critique textuelle. S’en tenir au verdict des deux, ou cinq, ou sept manuscrits les plus anciens, est à première vue plausible, et c’est le refuge naturel des étudiants qui sont superficiels, ou qui veulent rendre leur tâche aussi facile et simple que possible. Mais écarter les témoins gênants est contraire à tous les principes de justice et de science. Le problème est plus complexe et ne doit pas être résolu aussi facilement. Les preuves d’un caractère fort et varié ne peuvent pas être rejetées en toute sécurité, comme si elles étaient sans valeur.