DICTIONNAIRE

D'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE

 

CONTENANT EN ABRÉGÉ

L'HISTOIRE DE TOUS LES PAPES ET ÀNTIPAPES, CELLE DES CONCILE8, DES PÈRES DE L'ÉGLISE, DES PRINCIPAUX DOCTEURS, DES HÉRÉTIQUES ET DES HÉRÉSIES, DES SECTES, DES MISSIONNAIRES, DES MARTYRS, DE8 PRÉCURSEURS DE LA RÉFORME, DES THÉOLOGIENS, DES VILLES QUI ONT JOUÉ UN RÔLE DANS L'HISTOIRE DE L'ÉGLISE, ETC.

 

JEAN-AUGUSTIN BOST

PASTEUR

 

1886

 


 

PRÉFACE

On sait le développement extraordinaire qu'ont pris depuis une cinquantaine d'années les sciences historiques. Le monde ancien, le moyen âge, les documents originaux, les vieilles chartes, ont été exhumés; on a fouillé les couvents et les archives, on a déchiffré les manuscrits; les découvertes ont abondé; des faits nouveaux ont été mis au jour, de belles légendes ont dû disparaître,- et les excellents manuels qu'on nous faisait apprendre si consciencieusement il y a un demi-siècle, ne sont plus bons à consulter que pour mémoire, et pour établir la comparaison entre le présent et le passé.

 

L'Église a eu sa part dans ce mouvement de réveil, et si peut-être, comme cela était naturel, la Réformation a fixé d'abord l'attention sympathique de nos savants et de nos écrivains, d'autres périodes ont été également élucidées; les monographies, les études spéciales, les biographies, se sont multipliées, dues à d'humbles ou à d'éminents chercheurs, dont les noms sont Légion (l'Encyclopédie des sciences religieuses n'a pas compté moins de cent soixante et douze collaborateurs), et cet ensemble d'esquisses, de fragments détachés sur les sujets les plus divers, histoire proprement dite, édification, missions, dogmes, controverse, constitue un fond sûr et solide, assez considérable pour qu'il soit permis de dire que nous possédons enfin une histoire ecclésiastique. *

 

Le livre que je présente aujourd'hui me paraît être la suite naturelle et désirable des travaux publiés ces dernières années, et presque la conséquence de l'accueil qui leur a été fait. Notre siècle aime les Dictionnaires. L'ordre alphabétique n'est x sans doute ni logique, ni profond, et il ne prête pas & de grands développements philosophiques ou littéraires, mais il est simple et commode au point de vue des recherches.

 

Naturellement un Dictionnaire ne peut pas tout donner, et il ne faut pas non plus tout lui demander. Je m'en suis tenu aux faits matériels et extérieurs, aux hommes et aux choses, et si quelques-unes des catégories comprises dans mon travail sont précises et bien déterminées, il en est d'autres qui sont plus élastiques; lorsqu'on parle par exemple des principaux théologiens d'un pays, ou de ses meilleurs orateurs religieux, il est clair que la limite à fixer entre ceux qui sont plus connus et ceux qui le sont moins, dépend beaucoup du pays où l'on écrit et des lecteurs auxquels on s'adresse. Il y a tel écrivain anglais, allemand, romain ou russe, qui jouit d'une certaine notoriété dans son pays ou dans son Église et qui ailleurs est absolument inconnu. J'ai dû élaguer ainsi des noms qui figurent dans la Real-Encyclopaedia de Herzog, ou dans le Dictionnaire des Sciences ecclésiastiques de l'abbé Glaire, et en revanche revoir et compléter la liste des noms protestants français, qui chez eux est plus ou moins écourtée. On peut demander la liste complète des papes, mais non celle des martyrs ou des missionnaires.

 

En outre, sur chaque individu l'on ne peut pas tout dire, et le volume lui-même, s'il avait la prétention de faire de chaque article une monographie complète, manquerait son but et cesserait d'être populaire, soit comme usage, soit comme prix. Ce n'est pas une Encyclopédie que j'ai voulu faire; sous ce rapport nous sommes déjà servis, et bien; mais un livre d'un emploi courant, à la portée de tous, et qui résume ce qu'il y a d'essentiel sur chaque sujet. Dans mon intention, ce livre rendra des services non seulement aux pasteurs qui connaissent déjà leur histoire ecclésiastique, aux évangélistes, aux instituteurs, aux directeurs d'écoles du dimanche, mais aux simples fidèles, aux lecteurs de la Bible, aux dames, à toute personne un peu cultivée, qui veut éclaircir un point oublié ou inconnu. J'ai cherché à dire beaucoup de choses en peu de mots, sans phrases, sacrifiant au besoin l'élégance à la clarté et à la concision du style. Je ne saurais mieux donner une idée de mon travail qu'en l'appelant un Bouillet ecclésiastique, bien que je donne plus de développements à certains articles généraux.

 

Lorsque je mis la main à l'œuvre et que j'écrivis les premières lignes de ce travail, le 9 mai 1865, je comptais un peu sur divers collaborateurs qui, par écrit ou de vive voix, m'avaient promis leur concours et me permettaient même de les nommer. Il y en avait ainsi plus de quarante, et je conserve avec reconnaissance leurs précieux autographes. Mais leur concours a été surtout moral, et leurs bons conseils ne m'ont pas manqué, assez semblables pour le fond, mais un peu différents dans la forme, depuis M. Merle d'Aubigné qui me recommandait de tenir haut et ferme le drapeau de l'Évangile, jusqu'à M. Éd. Sayous qui m'engageait à être aussi objectif que possible: «Même en faisant effort dans ce sens, ajoutait-il, le subjectif percera toujours assez.» Je crois avoir profité de ces bons conseils, mais quant à l'espoir d'une collaboration active j'ai bien vite vu qu'il fallait y renoncer, et sauf quelques amis de la dernière heure, je ne puis nommer comme m'ayant secondé d'une manière efficace et un peu suivie que mon regretté fils, le pasteur Hermann Bost, à Anduze, qui, chargé d'une immense paroisse et d'une Consistoriale à relever, trouvait cependant encore le moyen de m'envoyer, surtout sur la patristique, des articles qui seront appréciés.

 

Du reste, en imposant à l'auteur une charge plus lourde et plus longue, l'absence de collaborateurs aura eu l'avantage de donner à son travail plus d'unité, et le lecteur ne sera pas exposé à voir le pour et le contre sur un même personnage, lui être offert dans toute la beauté du scepticisme moral et scientifique, a c'est un fanatique, » nous dit Herzog en parlant de Judas Maccabée; et plus loin le même Maccabée est appelé «un témoin de la foi.» Que chacun se fasse son opinion, c'est très bien; mais en général on n'aime pas voir sortir de la même fontaine le doux et l'amer, l'affirmation et la négation. Dans tous les cas un Dictionnaire ne saurait sous ce rapport prendre les mêmes libertés qu'une Encyclopédie.

 

Je ne ferai pas l'énumération des ouvrages auxquels j'ai dû recourir; la liste en serait aussi longue que peu intéressante; je les cite brièvement au fur et à mesure que je suis appelé à m'en servir, mais il n'en est aucun dont je puisse dire qu'il a servi de base à mon travail. Celui que j'ai le plus souvent utilisé, le Theologisches Universal-Lexicon, d'Elberfeld 1874, est un excellent dictionnaire, surtout pour la théologie allemande, mais il présente de graves lacunes pour tout ce qui concerne les noms et l'histoire de la Réforme française.

 

Des lacunes, hélas ! où n'y en a-t-il pas ? C'est toujours l'auteur lui-même qui les sent le plus vivement, et je serais presque tenté, maintenant que j'ai sous les yeux ces deux mille colonnes, de me mettre à en faire la critique. J'y renonce, parce que d'autres feront ce travail, je suppose; les uns me reprocheront d'avoir omis des noms importants, ou de n'avoir pas assez développé certains points; d'autres trouveront qu'il y en a d'inutiles, que j'aurais pu laisser de côté sans inconvénient. Tout cela est possible, et je reconnais d'avance que chaque critique aura raison à son point de vue. Tout ce que je puis dire, c'est que j'ai fait de mon mieux, avec le désir délaisser à l'Église un souvenir utile, avec l'espoir que malgré ses imperfections mon travail sera reçu avec la même bienveillance qu'à rencontrée il y a trente ans mon Dictionnaire de la Bible.

 

Je remercie tous ceux qui m'ont encouragé et soutenu de leurs sympathies, et en particulier ceux qui, hommes ou journaux, ont bien voulu présenter mon travail au public.

 

La partie typographique, si importante pour un ouvrage de ce genre, a été l'objet des soins les plus scrupuleux et les plus minutieux, et je dois en témoigner ma reconnaissance à l'imprimerie de M. Schuchardt.

 

Je bénis Dieu qui m'a conservé les forces dont j'avais besoin, et c'est du fond du cœur que je m'approprie les paroles du vieux Samuel: Jusqu'ici l'Éternel nous a secourus.

Genève, 19 mai 1884.

J.-Aug. Bost.

 

Pour les personnes qui n'ont pas l'habitude de certaines abréviations, j'indique ici la signification de celles qui apparaissent quelquefois dans ce Dictionnaire.

t

veut dire:

mort, ou: il mourut.

acad.

=

académie.

ecclés.

=

ecclésiastique.

égl.

=

église.

emp.

=

empereur, ou empire.

irnp.

impératrice.

Dr

=

docteur.

mss.

=

manuscrits.

philol.

=

philologie, ou théologien.

philos.

=

philosophie.

prof.

=

professeur.

théol.

=

théologie.

univ.

- =

université.

 


 

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D'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE

 

ABAISSEMENT de J.-C. v. État.

 

ABARBANEL (don R.-Isaac), aussi nommé Xbrabanel, Abravanel, Barbanella, Barbinellus et Ramnelia„ célèbre rabbin portugais, né à Lisbonne 1437, d'une famille noble qui prétendait descendre du roi David, et dont l'émigration datait de la première destruction du temple. Son père, Juda ben Samuel, lui fit donner une éducation distinguée qui, jointe à ses talents naturels et à son extérieur aimable, lui attira successivement la faveur d'Alphonse V, roi de Portugal, et celle de Ferdinand de Castille (1484-1492). Les juifs ayant été bannis d'Espagne, il se réfugia à Naples, en 1493, où le roi Ferdinand d'abord, puis le roi Alphonse l'accueillirent parfaitement. Ce dernier ayant dû fuir devant Charles VIII. se retira à Messine où Abarbanel l'accompagna. Après la mort de son protecteur, le rabbin se rendit à Corfou, puis à Monopoli en Apulie, où il composa la plupart de ses écrits; enfin à Venise, comme médiateur entre cette république et le Portugal. Il + 1508 a l'tye de 81 ans, et fut enterré à Padoue où les Vénitiens lai firent de splendides funérailles. Il a laissé de nombreux écrits, qui se distinguent par une vaste érudition, un style facile et une critique relativement indépendante, mais aussi par une regrettable prolixité et par des développements trop considérables donnés à des détails. Ses principaux ouvrages sont: Une dissertation sur la Création du monde; un Traité de la prophétie; une dissertation sur les prophètes messianiques; un travail sur les différents articles de la foi des Juifs; enfin plusieurs commentaires sur l'A. T.. le Pentateuque, les livres historiques, les grands prophètes et les douze petits prophètes. Presque tous ses écrits ont été traduits en latin. On regrette l'amertume constante de sa polémique contre les chrétiens, que les persécutions exercées contre son peuple expliquent sans la justifier.

 

ABAUZIT, Firmin, né 1679 à Uzès (Gard), à l'époque des persécutions, fut, après la mort de son père, enlevé fort jeune à sa mère pour être élevé dans la religion catholique. Sa mère réussit à le faire évader et l'envoya à Genève, 1689, mais elle expia par plusieurs années de prison le crime qu'elle avait commis de reprendre possession de son enfant. Le jeune Abauzit, vif et intelligent, s'adonna avec ardeur à l'étude des lettres, des sciences et de la théologie. Pour compléter ses études, il voyagea, se lia en Hollande avec Bayle, fit la connaissance de Basnage et de Jurieu; vit de près en Angleterre Newton qui le tint plus tard en haute estime, et refusa les offres de Guillaume III qui aurait voulu le retenir. Il revint à Genève à la demande de sa mère, prit une part active & la nouvelle traduction du N. T. qui parut en 1726, et mérita les remerciements de la Compagnie des pasteurs. Il fut nommé en 1727 bourgeois d'honneur. L'Académie lui offrit une place de professeur de philosophie, mais il préféra garder son indépendance. Il se contenta du titre de bibliothécaire honoraire qui lui fut décerné, et en 1767, âgé de 87 ans (notice de Végobre). — Il avait cultivé avec succès les sciences naturelles; on lui attribue même plusieurs découvertes que d'autres se seraient plus tard appropriées, abusant de son désintéressement à tous égards. Mais c'est surtout dans la théologie qu'il se fraya des voies nouvelles, et son Essai sur l'Apocalypse fit époque; il est le premier qui, délaissant l'ancienne méthode d'interprétation, émit l'idée que ce livre mystérieux pourrait bien avoir été écrit sous Néron et n'être que la paraphrase poétique du discours de Jésus sur la ruine de Jérusalem, Matth. 24. Parmi ses autres ouvrages, qui ne furent publiés (1770) qu'après sa mort, on en remarque deux, l'un sur la Connaissance du Christ, l'autre sur l'Honneur qui lui est dû, qui paraissent avoir inspiré dans YÉmile la Confession de foi du vicaire savoyard. Rousseau avait une grande estime pour Abauzit, qu'il comparait à Socrate; Voltaire lui-même l'admirait, d'où cependant il serait injuste de conclure qu'Abauzit eût adopté l'ensemble des idées philosophiques et religieuses qui avaient cours au 18me siècle.

 

ABBÀDIE, Jaques, né 1654 à Nay? Béarn, t à Mary-le-Bone, Londres, 1727. Il étudia d'abord dans sa ville natale, sous les soins du ministre J. de la Placette. puis à Puylaurens, à Saumur et à Sedan où il fut reçu docteur en théologie. Les églises durent faire les frais de son éducation. Bien que l'édit de Nantes ne fût pas encore entièrement révoqué, les persécutions grandissaient chaque jour et provoquaient de nombreuses émigrations. Frédéric-Guillaume, électeur de Brandebourg, accueillait avec bienveillance les réfugiés, et bientôt il chargea son grand écuyer, le comte d'Espense, en ambassade à Paris, de lui procurer un ministre pour la colonie naissante. Abbadie fut choisi et se rendit à Berlin où il mit son influence au service de ses malheureux compatriotes proscrits. Il fit plusieurs voyages en Hollande. Après la mort de Frédéric-Guillaume 1688, il accompagna le maréchal de Schomberg en Angleterre, à la suite du prince d'Orange, qui devint Guillaume III. Il fut nommé pasteur de l'église dite de Savoye, à Londres (aujourd'hui allemande-luthérienne), puis doyen de Killabow, Irlande; retourna à Amsterdam pour y soigner la réimpression de ses œuvres, et mourut à son retour à l'âge de 73 ans. — Outre plusieurs sermons, discours et panégyriques officiels, il a publié divers ouvrages de théologie, dont le plus célèbre est son livre d'apologétique: La vérité de la religion chrétienne (Rotterdam, 2 vol. 8<> et 4°, 1684), qui a été réimprimé plusieurs fois, qui a été traduit en plusieurs langues et qui a obtenu un succès de vogue tel que les catholiques eux-mêmes, à la cour de Louis XIV, le lisaient avec admiration. Madame de Sévigné, Bussy-Rabutin, le duc de Montausier en parlaient avec le même enthousiasme que Bayle, qui le plaçait au-dessus de tous les autres ouvrages du même genre. Il s'y trouvait des digressions dogmatiques ou polémiques qui ont disparu dans plusieurs éditions subséquentes, de manière à ce que le livre pût devenir le patrimoine, non d'une secte religieuse, mais de tous les chrétiens. — Il est davantage controversiste dans: Les caractères du chrétien et du christianisme, et dans: La vérité de la religion chrétienne réformée, suivi du: Triomphe de la Providence et de la religion, ou l'Ouverture des sept sceaux. — L'Art de se connaître soi-même, ou Recherche sur les sources de la morale, montre dans le vrai amour de soi le principe des actions vertueuses; D. Lami lui a reproché de faire l'éloge de l'égoïsme, mais Malebranche l'a victorieusement défendu sur ce point. Il avait écrit aussi des notes sur les Commentaires philosophiques de Bayle. et une Nouvelle manière de prouver l'immortalité de l'âme, mais on ne les a pas retrouvées dans ses papiers.

 

ABBÉ, Abbesse, Abbaye. Le mot syriaque Abba a passé dans presque toutes les langues d'Europe avec la signification de père. On s'en servit de bonne heure dans l'église comme distinction honorifique; on le donna d'abord à tous les moines, puis, vers le 5me siècle, on le restreignit aux chefs ou supérieurs des couvents seuls. Dans la règle de St-Benoit siècle) on trouve déjà le nom d'Abbat, d'où les Allemands ont fait Abt, et les Français abbé. Presque vers la même époque on fit le féminin abbesse (abbatissa) pour la supérieure d'un couvent de femmes, et le mot abbaye (abbateia) pour la maison et pour l'institution. Avec le temps le nom se généralisa dans le sens de président, ou directeur; il y eut l'abbé du palais, de la cour, des cloches, des écoles, etc. D'un autre côté, des mots différents prirent la place de celui d'abbé; dans l'église grecque, le chef d'un couvent, d'après la règle de St-Basile, s'appelle l'archimandrite; cbez les dominicains, les augustins. les carmélites, il s'appelle le prieur ou le préposé; chez les franciscains, le custode, ou gardien; chez les jésuites, le recteur; chez les camaldules, le major; ailleurs l'igoumène, etc. Les bénédictins conservèrent le nom d'abbé, mais depuis la réforme de Clugny ils le réservèrent pour le chef de la maison-mère, et donnèrent le nom de co-abbés à ceux des succursales. Le supérieur du couvent du Mont-Cassin portait, à cause de certains privilèges, le titre de abbas abbatum, abbé des abbés. Dans d'autres ordres il porte le nom d'abbé général, ou simplement général. Dans les couvents de femmes il y a eu de même des archi-mandritesses, des prieuresses, etc.

On distingue les abbés en réguliers et séculiers. Ces derniers sont des ecclésiastiques séculiers qui jouissent d'une abbaye comme d'un bénéfice, mais qui se font remplacer pour tout ce qui touche aux règles, ou aux fonctions de l'ordre, par un moine qui est leur vicaire. Si c'est un abbé qui n'a reçu que les premiers ordres, s'il n'est que tonsuré, par exemple comme les anciens abbés de France, il doit se faire remplacer pour toutes ses fonctions, mais il en est autrement si c'est un ecclésiastique d'un degré supérieur, un évêque surtout. Ordinairement, le bénéfice n'est qu'à terme; dans ce cas le commandataire n'a droit qu'aux revenus et aux honneurs, et c'est l'abbé régulier qui reste chargé de l'administration et de la juridiction; mais s'il est à vie, le commandataire peut aussi exercer tous les droits. Les rois ont souvent récompensé des laïques par la collation de bénéfices; du 8™ au iOme siècle on trouve fréquemment en France de ces abbés-soldats, qu'il ne faut pas confondre avec les abbés de camp qui étaient des aumôniers militaires. On dut renoncer aux abbés-laïques, lorsqu'il fallut rétablir. au besoin par la force, la discipline des couvents, qu'ils avaient entièrement comprenne.

Les abbés réguliers sont de vrais moines, appartenant à l'ordre, au couvent, et régulièrement nommés, à temps ou à vie, soit parles pères du couvent, soit par le chapitre provincial. Ils sont, comme les couvents eux-mêmes, presque toujours placés sous la juridiction de l'évoque du diocèse. Quelquefois cependant, anciennement surtout, ils avaient rang d'évêque avec line juridiction quasi-épiscopale; de là aussi la mitre et la crosse qu'ils avaient le droit de porter et qui figurent parmi leurs insignes. Quel-queuns avaient des droits sur certains territoires. et s'appelaient princes-abbés, ce qui leur donnait aussi (à Fulda et ailleurs), comme à plusieurs abbesses, voix délibératives dans les assemblées du royaume.

Les droits et les devoirs des abbés sont fixés par le droit canon et par les règlements de chaque ordre. En général, ils ne peuvent être installés ni exercer aucune fonction avant d'avoir reçu la bénédiction épiscopale, sauf exceptions par privilège spécial du pape. L'abbé a la discipline du couvent et l'administration de ses biens; dans les cas graves, il doit être assisté de son chapitre. Pour les abbesses, la loi exige qu'elles soient filles légitimes, âgées de 40 ans au moins, et qu'elles soient dans les ordres depuis 8 ans. Ces deux chiffres peuvent être réduits à 30 et à 5 ans, en cas de nécessité. Elles sont élues au scrutin secret; l'évêque les installe solennellement et leur remet la crosse et le pectoral. Les religieuses doivent obéir à l'abbesse comme à une mère. Une abbesse doit se faire représenter par un vicaire pour toutes les fonctions que son sexe ne lui permet pas de remplir en personne. Des honneurs spéciaux ont été conférés à quelques-unes d'entre elles; le titre même d'évêque, qucopa, a été décerné à Tune d'elles; plusieurs ont eu le droit d'assister aux synodes.

Le nom d'abbé a fini par se donner aussi aux prêtres catholiques sans charge d'âme, et on l'a conservé dans quelques églises protestantes pour des dignitaires ecclésiastiques mis en jouissance des bénéfices d'anciennes abbayes.

ABBON de Fleury, un des rares savants qui dans la décadence du lO"® siècle, cherchèrent à relever les études dans les couvents et amenèrent le règne de la scolastique. Né dans la Fran-conie occidentale, il fut envoyé fort jeune au couvent de Fleury et c ntinua ses études dans les célèbres écoles de Reims et de Paris, où il cultiva fortement la philosophie, l'astronomie et les mathématiques. L'archevêque Oswald de York lui confia, en 985, une chaire dans l'abbaye de Ramsey, mais, au bout de deux ans, il retourna à Fleury, dont il fut nommé abbé, ajouta un nouveau lustre à la réputation de cette école et prit une part active aux débats religieux de son temps; il fut même envoyé à Rome comme représentant du roi Robert. Son zèle pour le rétablissement de la discipline dans les couvents lui coûta la vie; il fut tué d'un coup de lance, 13 novembre 1004. dans une émeute de moines, à La Réole, en Gascogne, ce qui lui valut la réputation d'un martyr et d'un saint. Il reste de lui des lettres et des traités manuscrits, sur l'histoire (la vie de 91 papes), la langue, les mathématiques, etc. Le célèbre moine Aimoin, historien, était son élève et a écrit sa vie.

ABBOT, Georges, né à Guilford 29 oct. 1564, fils d'un tisserand, se rendit 1578 à Oxford, où il passa 30 années, d'abord comme élève, puis comme docteur, professeur et prédicateur de l'université. Il fut trois fois vice-chancelier, à la satisfaction de tous. La part qu'il prit à la revision de la Bible (version anglaise actuelle) attira sur lui l'attention, puis la faveur de Jacques 1er. En 1608, il fut chargé, avec deux autres théologiens, de travailler à l'union des églises d'Angleterre et d'Écosse, et il réussit à décider un certain nombre de presbytériens qui se rattachèrent à la forme épiscopale. Il correspondit aussi avec Duraeus et avec Cyrille Lucar. Son tact, sa modération, ses talents, lui valurent, en 1609, l'évêché de Lichfield et Coven-try, en 1610, celui de Londres, et bientôt après il fut appelé à l'archevêché de Cantorbéry avec le titre de primat et de métropolitain pour toute l'Angleterre. Il continua de se montrer favorable aux presbytériens, s'opposa aux mesures de rigueur projetées contre les puritains, combattit le ritualisme et les tendances catholiques d'une partie du clergé, entretint arec les églises protestantes du continent les meilleures relations, travailla de toutes ses forces à marier la princesse Elisabeth avec un prince protestant, l'électeur palatin, Frédéric V qui devint roi de Bohême, empêcha le mariage du prince de Galles (Charles Iw) avec une princesse espagnole, et maintint les droits de l'Église avec une courageuse fermeté. Le roi ayant fait, en 1618, une Déclaration autorisant certains plaisirs bruyants du Dimanche, il en interdit la lecture dans son église de Croydon. Àbbot protesta non moins vivement et publiquement contre le divorce du comte d'Essex, que le roi avait autorisé par faiblesse, et n'en conserva pas moins la faveur royale. Il assista le roi Jacques à son lit de mort, 27 mars 1625, et couronna son successeur. Charles Mais les tendances absolutistes du nouveau monarque et l'hostilité d'une camarilla catholique et dissolue, à la tête de laquelle se trouvaient la reine et le duc de Buc-kingham, devaient tôt ou tard amener un conflit. On reprochait au prélat d'être trop sévère vis-à-vis du haut clergé et de ses tentatives ri-tualistes, trop indulgent pour les fidèles qui ne mettaient pas leur salut dans les formes du Common-prayer-Book; il aggrava noblement ses torts en refusant le permis d'imprimer à un sermon du Dr Sibthorp, qui plaçait l'autorité royale au-dessus de tout contrôle et qui ne laissait aux sujets que l'obéissance passive. C'était l'époque où le parlement luttait déjà pour ses franchises. Buckingham et l'évêque Laud, de Londres, jetèrent de l'huile sur le feu, et Abbot fut suspendu 1628; on n'alla pas jusqu'à le destituer, par crainte du peuple et du parlement, mais on remit à une commission l'administration de son diocèse, et ce fut Laud qui eut l'honneur de baptiser le prince de Galles (Charles II). Il mourut à Croydon, le 4 août 1633, en pleine disgrâce, à l'âge de 71 ans. — 2° Son frère Robert, évêque de Salisbury, f 1617, s'était fait une réputation par ses ouvrages de controverse. — 3° Jacob Abbot, né 1813, aux États-Unis, pasteur congrégationaliste, puis professeur d'un collège de la Nouvelle-Angleterre; f 1879. Auteur du Jeune chretien et d'une trentaine d'autres volumes pour la jeunesse, histoires et voyages, plusieurs composés avec la collaboration de son frère John, aussi pasteur indépendant. <

ABÉLARD ou Abailard. Au plus fort des débats entre les réalistes et les nominaux, vers le commencement du 12^® siècle, apparut un homme remarquable par sa vaste érudition, son attachement à la logique et son talent de dialecticien. Pierre Abailard. Né 1079 près de Nantes, ou à Tours, il étudia sous Guill. de Cham-peaux, son adversaire à venir, et devint bientôt célèbre à son tour par ses leçons philosophico-théologiques; il fut suivi par un grand nombre d'élèves des deux sexes. Dans le nombre, une jeune femme, la triste Héloïse, s'éprit pour lui d'une violente passion. Abélard avait reçu déjà les ordres: il répondit cependant à son amour, l'enleva, la conduisit en Bretagne où elle lui donna un fils, Astrolabius, et pendant quelque temps ils vécurent tranquilles. Mais Fulbert, l'oncle d'Héloïse, découvrit l'intrigue, surprit Abélard dans la nuit et le fit affreusement mutiler. Héloïse se retira dans un couvent, et Abélard vint fonder une école à Paris dès qu'il eut recouvré sa liberté. Il obtint un immense succès. Mais ses leçons, basées sur le conceptua-lisme, système qui conciliait le réalisme et le nominalisme et qui s'efforçait de démontrer la vérité du christianisme par la philosophie et non par l'autorité de l'Église, le firent condamner une première fois par le concile de Soissons, 1122. Ses 3000 élèves lui fournirent les moyens de rouvrir son école loin de Paris, à Nogent sur-Seine. Sa dialectique poursuivait, du fond de sa retraite, les mystiques et les autoritaires. On envoya saint Bernard pour le combattre, mf^s celui-ci n'osa engager la lutte contre un aussi formidable* adversaire. Attaqué de nouveau, persécuté par le clergé et le pouvoir civil, condamné comme hérétique par un second concile, Sens 1140, Abélard eut l'idée de se rendre à Rome, mais le pape lui donna tort. Pour éviter d'être enfermé ou assassiné, il dut promettre de se taire. Mais dès qu'il fut libre, il se retira dans le monastère de Cluny, auprès de Pierre le Vénérable, où il passa ses derniers jours et d'où il continua de foudroyer ses adversaires. Il mourut dans cette retraite vers 1142. Abélard peut être considéré comme le fondateur de la scolastique. Orthodoxe non suspect quant au fond de la doctrine, mais logicien implacable quant à la méthode et jaloux des droits de la raison, il s'efforça de concilier la religion et la philosophie en démontrant celle-là par celle-ci, sans s'apercevoir du danger que cette méthode faisait courir à l'Église. On lui doit plusieurs ouvrages considérables: une Introduction à la Théol., une Théol. chrétienne, de Trinitate, et particulièrement le Sic et non qui ne fut connu que longtemps après sa mort. Il y expose chaque dogme catholique avec les différents arguments pour (sic) et contre'(nan) et termine par la conclusion, toujours favorable à Rome. Toutefois, son indépendance et son peu de soumission le firent persécuter. Il fut l'un des premiers martyrs de la liberté de penser. Plusieurs de ses ouvrages sont malheureusement perdus. — Vie, par dom Gervaise. Biographie, par Ch. de Rému-sat, Cousin, Jacobi, etc. H. B.

ABÉLITES, ou Abèloniens; petite secte du Nord de l'Afrique, n'est connue que par ce qu'en dit Augustin (de Hœres. ch. 86). Ils prétendaient se rattacher à Abel; comme lui, disaient-ils. ils admettaient le mariage, mais sans en remplir les conditions. Ils adoptaient un garçon et une fille, et si l'un d'eux venait à mourir, ils le remplaçaient par un enfant du même sexe. Cette secte, qui dura peu et qui ne s'éten* dit guère au delà des environs de Hippo-Regius, était nne émanation des vieilles sectes gnostiques, peut-être aussi un dernier reste du système manichéen.

ABÉLY ou Abelli, évêque de Rhodez, auteur d'une biographie de Vincent de Paul et d'un traité dogmatique serni-pélagien, la Medulla theo-loffica, qui lui a valu d'être surnommé le Moelleux par les Jansénistes, ses adversaires. Ce surnom lui a été conservé par Boileau, Lutrin, IV. II a écrit aussi sur le culte de Marie, prouvé par la tradition. Il mourut, à l'&ge de 88 ans, le 14 oct. 1691, dans le couvent de Saint-Lazare fondé à Paris par Vincent de Paul.

ÀBEN-ESRÀ. ou plutôt Abraham ben rabbi Meyer ben r. Esra, né à Tolède vers 1093, voyagea beaucoup en Angleterre, en France et en Orient, et se distingua comme rabbin par sa science et par ses commentaires sur TA. T. Ses coreligionnaires l'avaient surnommé le Sage. Il avait un grand bon sens critique, et un caractère indépendant; il repousse l'exégèse allégorique. Il a écrit aussi sur la grammaire, l'astronomie, la morale, et on a de lui quelques poésies. f vers 1168 ou 74, à Rhodes ou à Rome.

ABGARE (syriaque boiteux), nom de plusieurs rois d'Edesse. Le plus connu est le 14m*, surnommé Oukhômé, ou le iVotr, qui vécut sous Auguste et Tibère, et auquel une vieille tradition prête d'avoir correspondu avec Jésus. Il lui aurait demandé de venir le guérir d'une grave maladie, et Jésus, en le félicitant de croire sans avoir vu. lui aurait répondu qu'il ne pouvait se rendre auprès de lui, mais qu'après son ascension il lui enverrait un de ses disciples; il lui aurait en effet envoyé Thaddée. Malgré l'autorité d'Eusèbe, cette correspondance n'a jamais été regardée sérieusement comme authentique, non plus que le portrait que Jésus aurait envoyé à Abgare, et dont Gênes et Rome se disputent l'original La prétention de quelques théologiens modernes, de joindre la lettre de Jésus au canon sacré, est une fantaisie d'amateur plutôt qu'une conviction critique. Deux mss. récemment découverts, l'un eu arménien, l'autre en syriaque, désignent Labou-bna comme l'auteur, et le feraient contemporain df Abgare; en tout cas la tradition est fort ancienne, mais les documents sont interpolés.

ABOUL-FARADJ, Aboul-Fèda, v. Abul-F.

ABRABANEL, v. Abarbanel.

ABRAHAM DE SAINTE-CLAIRE, qui s'appelait de son nom de famille Ulrich Megerle, né 4 juin 1642 à Krahenheimstetten, g.-duché de Bade, entra en 1662 dans l'ordre des capu-cins-augustins et y occupa plusieurs charges importantes. Sa réputation d'orateur le fit appeler i Vienne comme prédicateur de la cour, en 1699, et il y resta jusqu'à sa f 1*' déc. 1709. Il n'agit pas seulement par sa parole, mais aussi par ses écrits, qui ont été réimprimés à Vienne 1846, à Passau et à Lindau. de 1833-50. C'était un orateur puissant, original, cotoyant souvent le burlesque, le dépassant parfois et qui se faisait en tendre de tous, princes ou vulgaire, disant à chacun la vérité, ne flattant ni la cour, ni le peuple. Il connaissait les replis du cœur humain et ses mystères; en chaire il les dévoilait avec une crudité de langage que lui seul pouvait se permettre; ses prédications appartenaient à la même tendance religieuse qui a fait la fête des fous et celle des ânes, mais si beaucoup de ses auditeurs venaient l'entendre pour s'amuser, tous y trouvaient des appels pour leur conscience. Son style est quelquefois noble et pur; il s'élève avec la pensée. Comme catholique il retient les superstitions les plus grossières; il s'attache à ce qu'il y a de plus matériel dans la religion et son culte pour Marie a quelque chose de fabuleux. Parmi ses écrits on remarque: la Grammaire religieuse, Mic-mac salutaire, la Fête des fous, Hui et pfui au Monde. Judas le chef des scélérats (der Erzschelm); Range-toi, Quelque chose pour tous. etc.

ABRAHAMITES 1<> v. Pauliciens; 2<> déistes de Bohême, qui se rangeaient à la foi d'Abraham avant la circoncision; ils n'admettaient que la foi en Dieu, les dix commandements et Notre Père. Refusant de se dire chrétiens ou juifs, ils se trouvèrent exclus des bienfaits de l'édit de tolérance rendu en 1782 par Joseph II et ils furent transportés jusqu'aux frontières de l'empire; les hommes même furent incorporés dans les bataillons de frontière. Quelques-uns se firent catholiques; le plus grand nombre restèrent fidèles à leur foi, mais sans la transmettre à leurs enfants, et la secte ne tarda pas à s'éteindre.

ABRAXAS, nom mystérieux, d'origine égyptienne (?), et que les gnostiques donnaient à l'Être suprême, soit au Dieu-Soleil considéré comme embrassant toutes les intelligences pures, soit à l'ensemble des 365 intelligences qui ne sont que le développement du Dieu-lumière, Dieu-soleil. Dieu-plérôma. (Les lettres du mot Abraxas représentent en chiffres le nombre 365.) On a été amené peu à peu, dès l'époque des gnostiques, à donner le nomd'abraxas à des pierres précieuses ornées de dessins, de gravures, d'inscriptions ou de devises; puis, par extension, on a groupé sous ce nom des plaques de métal, des ornements, des tablettes d'or, d'argent, de cuivre, de plomb, et tous les monuments gnostiques dont la signification mystérieuse a échappé jusqu'ici aux recherches des savants. Parmi les écrivains qui ont étudié ce sujet, il faut noter Chiflet, qui a eu le tort d'attribuer aux basilidiens toutes le» pierres gravées qu'il a pu trouver; puis Fabretti, Ca-pello. de Venise, dont l'archéologie n'est que de l'arbitraire; Montfaucon, plus exact dans ses - descriptions, mais sans méthode; Maffée; Gor-lée, Cabinet de pierres antiques; Bachmann; Belermann, précis dans ses dessins; Gori. Spon, Recherches curieuses sur l'antiquité; Matter, Hist. du gnostic, t. II. et planches; etc. Les pièces désignées sous le nom d'Abra-xas, sont loin d'avoir toutes droit à ce titre, attendu que les unes ne sont ni des pierres précieuses, ni même des pierres quelconques, et que les autres ne sont pas des abraxas, mais de simples œuvres d'art ou d'imagination, sans caractère symbolique ni religieux. On ne doit comprendre sous cette désignation que les objets qui, dès le 2me siècle et jusqu'au moyen âge, ont été travaillés avec l'intention de représenter les idées gnostiques. et pou vant au besoin servir d'amulettes. Or jusqu'ici les amateurs d'antiquités se sont préoccupés surtout du désir d'accroître les collections, plutôt que du besoin d'établir l'authenticité et la signification réelle des pièces recueillies. Matter, qui aie plus étudié ce sujet, fait ressortir (Encycl. de Herzog) l'impossibilité où Ton est d'établir une classification, aussi longtemps que l'on n'aura pas expliqué le sens exact des inscriptions et des symboles. Il propose pour le moment de distinguer io L'abraxas pur, une figure k tête d'épervier ou de coq. finissant en serpent, avec bouclier, fouet, sceptre, etc. 2° L'abr. avec d'autres puissances gnostiques, Éons, etc. 3° L'abr. avec des puissances juives, Jéhovah. Adonaï. Sabaoth, Gabriel, Raphaël, etc. 4° Le même avec des puissances perses, Mithras. 5° Id. égyptiennes: le Phre conduisant son chariot, ou assis sur un crocodile, un lion: Isis, Horus, Thot, Harpo-crate dans le calice du lotus. 6° Puissances grecques: planètes. Jupiter, Vénus. 7* Voyage vers un monde supérieur, à travers les espaces stel-laires. 8° Le jugement: Anubis pèse les cœurs. 9° Culte et consécration. 10° Groupe astrologique. 11° Inscriptions (qui se subdivisent elles-mêmes en plusieurs classes).

ABRÉV1ATEURS, nom qu'on donnait aux employés de la chancellerie romaine, souvent de hauts dignitaires, chargés de rédiger ou d'expédier les lettres, brefs et bulles du pape. Ce nom se trouve pour la première fois dans une bulle de Benoît XII, au commencement du 14m« siècle. La charge fut supprimée par Paul II à la suite d'abus commis.

ABSALON, nom ecclésiastique d'Axel, né 1128 à Soroé. Danemark. Il étudia à Paris en 1148, voyagea beaucoup et à son retour servit puissamment l'Église et l'État. Il avait manié l'épée, il maniait également bien le glaive de la parole; on dit de lui qu'il parlait comme un dieu. Le roi Waldemar, dont il avait aidé à fonder la dynastie, le nomma en 1156 évêque de Rœskilde. En 1177 le chapitre de Lundeo le nomma archevêque et primat de l'Église de Suède. Absalon refusa énergiquement; on en vint aux mains et il y eut des coups de poing donnés. A la fin le pape dut intervenir et il se prononça en faveur du chapitre. Absalon dut accepter, sous peine d'excommunication; il fut installé, 1178, comme primat de Suède et légat du saint-siège. Il conserva cependant aussi son diocèse de Rœskilde, dans lequel il fonda quelques couvents, et f 1201 dans le monastère de Soroé où il s'était rendu avec le pressentiment de sa fin prochaine. Il avait travaillé activement à la conversion et à la conquête des îles voisines, de Rugen, etc. Il a posé les fondements de Copenhague, et concouru à fonder l'unité de l'Église danoise, surtout en y établissant par la force le célibat des prêtres. Il se montra très rigoureux pour la perception des dîmes, et fit fermer les églises qui se disposaient à les refuser. Les cisterciens, qu'il appela à Soroé en remplacement des bénédictins, furent chargés par lui d'écrire l'histoire du pays, et l'un d'entre eux, Saxon le grammairien, nous a laissé en outre l'histoire d'Absalon lui-même.

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ABSIDE, ou Apside, en grec Apsis, voûte; la partie d'une église où est placé le sanctuaire, derrière et y compris le chœur; elle est ordinairement demi-circulaire, quelquefois cependant carrée, ou polygonale. Comme les châsses renfermant des reliques sont presque toujours placées dans le chœur ou dans les cryptes, on les désigne aussi quelquefois sous le nom d'absides. mais par une simple extension du mot.

ABSOLUTION, rémission des péchés prononcée par le prêtre après la confession; v. Pénitence. Se dit aussi de l'acte par lequel sont levées certaines irrégularités, empêchements ou obstacles à l'exercice de droits ou de fonctions ecclésiastiques.

ABSOUTE, cérémonie et aspersions qui accompagnent l'enterrement d'un mort ou le service fait à son intention.

ABSTINENCE, vertu qui est moins que le jeûne, mais plus que la simple sobriété. Elle porte non seulement sur la nourriture et la boisson, mais sur toute jouissance sensuelle. L'instinct chrétien la recommande comme un moyen d'affranchir l'esprit en mortifiant la chair, mais l'Évangile n'en fait nulle part une prescription, v. Tempérance.

ABUKARA, Théodore, disciple de Jean de Damas au 8"* siècle, a écrit: Questions et Réponses.

ABUL-FARADJ, dont le vrai nom syriaque était Grégoire, né 1226 à Malathia (Mélitène),

ville de Cappadoce. Il était fils d'un médecin juif qui avait embrassé le christianisme et s'était rattaché à la secte des Jacobites. Versé de bonne heure dans la connaissance du syriaque, de l'arabe et du grec, ii étudia la philosophie, la médecine et la théologie, et a composé dans ces trois branches des écrits qui lui ont lait une grande réputation. Mais il est surtout connu par son Histoire universelle, que Pococke a traduite et publiée en latin 2 vol., Oxford, 1665. Lors de l'invasion des hordes tartares, il s'enfuit à Antioche avec sa famille et vécut en ermite dans une caverne près de cette ville. Il se rendit ensuite à Tripoli pour y étudier l'éloquence et la médecine auprès d'un sage nesto-rien nommé Jacob, et de là le patriarche David, qui le connaissait d'Antioche, l'appela au siège épiscopal de Gubos, non loin de Malathia. Par des services qu'il rendit à Denys Angur, successeur de David, il mérita1' d'être nommé évê-que d'Alep. Denys ayant été tué par son propre clergé pendant le service divin, 18 févr. 1261, son rival Jean bar Maadani fut reconnu sans contestation comme patriarche par tous les Jacobites, et comme il avait une grande considération pour Abul-Faradj, quoique celui-ei l'eût toujours combattu, il le nomma mafrten, titre ecclésiastique qui lui assurait la juridiction absolue sur les églises de la Galdée, de l'Assyrie et de la Mésopotamie. Le mafriennat, qui datait de 629, était l'acheminement au patriarcat; il avait pour siège Takrit, sur les bords du Tigre. Les troubles de l'époque empêchèrent Abul-Faradj de se rendre immédiatement à son poste; il ne put en prendre possession qu'en 1266, sous le nouveau patriarche Josué (Ignace III). Son frère Bar Çauma, et lui-même, ont écrit l'histoire de son ministère, mais bien que l'Église syriaque eût encore des missions en Chine et en Mongolie, les deux frères se bornèrent surtout, semble-t-il, à fonder des couvents, à bâtir des églises, à traduire Euclide et à commenter l'Almageste de Ptolémée. Il protesta contre l'élection faite, en 1283, d'un patriarche d'Antioche sans qu'il eût été consulté, mais en déclarant qu'il ne réclamait rien pour lui-même, étant rassasié de charges et d'honneurs. Il attendait sa fin pour l'an 1286. Je suis né, dit-il, dans une année où Jupiter et Vénus étaient en conjonction dans le Verseau; 20 ans après, ils étaient dans la Balance, et je fus nommé évê-que; 20 ans après, dans les Gémeaux, et je fus élu mafrien; ils vont se trouver dans le Verseau après 20 nouvelles années, et je dois partir. Il mourut en effet le 30 juillet 1286 à Maraga, après une courte maladie, pendant laquelle il conserva toute sa sérénité, honoré et pleuré des Arméniens, des Grecs, des Nesto-riens et des Jacobites. — On le désigne quel- j

quefois, à cause de son père, de sa race et de sa profession, sous le nom de bar Ahrun (fils d'Aa-ron), bar Ebraja (fils d'hébreu), ou ibn Hakiou (fils d'un médecin). — Ce qu'il a laissé de plus important en théologie, c'est le Trésor des secrets, explication des passages les plus difficiles de l'A. et du N. T. Il s'est servi du canon des monophysites, où manquent Néhémie, Esdras, Ester, les Chroniques, la 2® de Pierre, les 2<* et 3« de Jean et l'Apocalypse; en revanche on y trouve l'Ecclésiastique, la Sapience de Salomon, l'histoire de Suzanne et celles de Bel et du Dragon. Il paraît n'avoir eu sous les yeux qu'un mauvais mss. de la Peshito.

ABUL-FÉDA, né à Damas 1273. f 1331, joua un rôle dans les croisades, comme guerrier, puis comme écrivain (Hist. abrégée du genre humain; Vraie situation des pays). Successivement gouverneur, puis prince de Hamath, Syrie.

ABYSSINS, l'Église abyssine. Une des grandes fractions de l'Église d'Orient, très rapprochée des coptes, mais qui ne doit pas se confondre avec eux. L'Abyssinie actuelle, ancienne Ethiopie, se divise en trois provinces principales, Tigré, Amhara et Shoa, réunies sous le sceptre d'un empereur. La population, que les estimations diverses évaluent de 4 à 6 millions d'habitants, est en grande majorité chrétienne; on compte cependant 2 à 300.000 juifs et un certain nombre de mahométans. Les juifs sont considérés; ils jouissent de plusieurs privilèges et d'une grande indépendance. Leur nom, Fé-lashas (les exilés) s'explique par les traditions, dont les unes font remonter la première émigration au temps de Menihélek, fils de Salomon et de la reine de Scéba; les autres placent l'arrivée des Juifs en Éthiopie à l'époque des .conquêtes d'Alexandre, quelques-unes même après la destruction du temple par les Romains. On a été jusqu'à donner aux Abyssins eux-mêmes une origine juive, parce que l'on retrouve chez eux. même chez les chrétiens, des coutumes et des habitudes judaïques, circoncision, sabbat, aliments purs et impurs, jeûnes, partage de l'église en compartiments distincts, etc. On croit généralement que le christianisme fut apporté en Abyssinie par l'officier de la reine Candace, Act. 8; mais c'est seulement au commencement du 4™ siècle qu'eut lieu la conversion en masse des Éthiopiens, par le ministère de l'un d'entr'eux, Frumentius, qui fut consacré à Alexandrie par Athanase, 326. Ils tiennent à cette origine non moins qu'à leur filiation apostolique. Ils ont coutume de dire: «Nous buvons à la source du patriarche d'Alexandrie, 9 et ils se servent, pour le baptême, du symbole de Nicée et non du symbole des apôtres. C'est encore chez les Coptes, auprès du patriarche d'Alexandrie, qu'ils vont chercher leur chef ou primat, auquel ils donnent le titre d'Abouna, Notre Père.

Perdus pendant des siècles et séparés du reste de la chrétienté, les chrétiens abyssins furent en quelque sorte découverts par les Portugais vers la fin du lo^e siècle. La cour de Rome essaya de se les rattacher; ses missionnaires, les jésuites, furent d'abord favorablement accueillis, au moins par l'empereur, qui se sépara du patriarcat d'Alexandrie et fit sa soumission au patriarche Mendez, légat du pape. Mais, à la suite d'intrigues politiques, le peuple se souleva, chassa les jésuites 1634, et revint à son patriarche traditionnel. Les relations avec l'Europe furent de nouveau interrompues pendant près de deux siècles. En 1808, le consul de France, M. d'Asselin, chargea le vaillant Abyssin Abreka, le compagnon de Bruce, de traduire l'A. et le N. T. de l'éthiopien en amharique; ce mss. fut acheté par la Soc. biblique de Londres. M. Jowett fit ensuite traduire deux évangiles dans la langue du Tigré, et il fut amené peu à peu à l'idée d'une mission épiscopale dans ces contrées. MM. Gobât et Kugler y furent envoyés en 1826, mais ne purent arriver qu'en 1830, v. sur cette mission: Gobât, Journal d'un séjour en Abyss., Paris 1835. Des missionnaires catholiques arrivèrent à leur tour en 1838, firent de la politique, opposèrent l'influence française à l'influence anglaise, firent chasser les missionnaires protestants et fermer leur mission; puis, l'an d'après. 1839, ils furent eux-mêmes renvoyés du pays. Ces rivalités durèrent quelques années et firent plus de mal que de bien; la brillante expédition anglaise de 1868 aura eu du moins pour résultat de réduire à néant les tentatives d'intervention politique et d'assurer aux missionnaires et à l'église abyssine elle-même une plus grande indépendance.

Les Abyssins sont monophysites, comme les coptes, et ils se complaisent dans les diseussions les plus puériles sur les différentes natures de Christ, sur ses différentes naissances, dont ils comptent trois: sa naissance coéternelle avec le Père, sa conception et sa naissance terrestre, sa naissance par le St-Esprit dans le sein de sa mère. Les provinces ne sont pas d'accord sur ces points, et parfois l'empereur et l'abounaont eu de violentes contestations, dans lesquelles leurs partisans en sont venus aux mains. Il est probable qu'ils ne comprennent pas toujours très bien ce qu'ils disent, et que le sens réel de la discussion leur échappe. Ils admettent les trois premiers conciles, mais rejettent celui de Chalcédoine. Outre les livres apocryphes des Latins, ils ont encore le livre d'Enoch et le 4* d'Esdras. Leur exégèse a quelque chose d'enfantin; ainsi Matih. 8. 20. Ils entendent que les renards sont les rois et les princes, tandis que les oiseaux du ciel sont les prêtres et les évêques, parce que leurs prières s'élèvent vers Dieu; Matth. 5, 29. l'œil, c'est la femme, ou l'enfant; la main, c'est le serviteur, ou l'esclave (Krapfs Journal).

Leur principal livre de dévotion, après leur Bible qui est en langue geez et qui date du ou du 5me siècle, est un recueil intitulé La foi des pères (Heimanst Abutk). où se trouvent des paroles des apôtres, des maximes des pères, les Constitutions apostoliques, le symbole de Nicée, etc. Ils adorent les saints, au nombre de 105, choisis dans l'A. et le N. T. et dans les Églises grecque, copte, abyssine, et la Vierge comme créatrice du monde et mère de Dieu. Ils prient pour les morts; baptisent par immersion, après la circoncision; le mercredi et le vendredi sont des jours de communion, par conséquent de jeûne; ceux qui ont communié ne peuvent manger ce jour-là que du pain et des pousses d'ortie. Ils commencent en février leur carême, ou Kabala, qui dure 40 jours; en juin, ou dès Pentecôte, un jeûne de 12 à 25 jours; en juillet, 3 jours; en août, 16; puis viennent les jeûnes de l'Assomption et en dé-cemboe ceux de l'Avant; en tout, plus de 200 par année. Inutile de dire qu'il y a bien peu de fidèles qui s'astreignent à ces macérations. Ils font de fréquents pèlerinages, soit à leurs couvents, soit surtout à Jérusalem. La magie et les amulettes abondent chez eux comme chez les païens et les musulmans. Ils regardent comme souillés tous les aliments déclarés tels dans l'A. T.; ils y ont joint même le café, pour n'avoir rien de commun avec les sectateurs de llslam; on assure toutefois qu'ils s'en dédommagent en secret. L'aumône est considérée comme une des principales vertus, et ils la multiplient sous ses formes les plus variées, donnant aux prêtres, aux pauvres, aux moines, aux couvents, aux pèlerins. Le mariage se célèbre sans aucune cérémonie religieuse et ses liens ne sont pas très solides. Le divorce est facile, mais un homme ne peut se divorcer que quatre fois. Si le mariage a été accompagné de la sainte communion, il devient par là presque indissoluble, et le divorce ne peut être prononcé que par le prêtre. Celui qui a été marié quatre fois doit entrer dans un ordre de moines, sous peine d'excommunication. Il arrive aussi qu'un homme entre dans un couvent, sans prévenir, et abandonne sa femme et ses enfants. La polygamie n'est pas permise, mais les puissants se mettent au-dessus de la loi, et ils ont, comme les musulmans, jusqu'à quatre femmes légitimes sans parler des autres.

Sur le point de mourir, on fait venir le prêtre pour se confesser et recevoir l'absolution.

Les Abyssins admettent la transsubstantia-lion on, comme ils disent, le Malawat, le changement dn pain et du vin. Ils attachent une grande importance aux cérémonies et aux sacrements, notamment à celui de l'Eucharistie, et se figurent que les anges interviennent en personne dans la préparation du pain sacré, qui se fabrique et se cuit dans un four spécial attenant an temple.

Leurs temples sont en général bâtis sur des hauteurs, entourés d'arbres, simples, presque mesquins, recouverts de toits de chaume de forme conique et ceints d'un parvis qui sert en même temps de cimetière. A l'intérieur ils sont divisés. comme celui de Jérusalem, en deux compartiments, le Lieu Saint et le Très Saint; dans ce dernier une table. Taba (arche, coffre) représente l'arche de l'alliance et sert pour la communion. Beaucoup d'images sur les portes, de colossales figures d'anges. Point de sièges; on se tient debout ou à genoux. Pour cloches, des pierres que l'on frappe. Ils ont un clergé ignorant et pauvre, dont la seule ressource est dans le casuel qu'il perçoit pour les absolutions et les funérailles. Les prêtres, une fois consacrés, ne peuvent plus se marier. Ils n'ont pas de costume officiel et ne portent d'autres insignes, quand ils sortent, qu'une croix qu'ils donnent à baiser. 11 faut qu'ils sachent lire l'éthiopien, chanter les hymnes du Yared, et qu'ils aient la barbe. Le patriarche les consacre en soufflant sur eux et en faisant sur eux le signe de la croix; il reçoit pour cela 40 à 50 c. Le chef du clergé est l'Abuna. toujours un étranger, désigné par le sort ou par le patriarche copte, et choisi parmi les moines coptes, souvent malgré sa volonté; il réside dans un magnifique palais à tiondar, et n'a au-dessus de lui que l'empereur. Puis viennent les évêques. Komur, dont l'unique devoir est d'entretenir les églises en bon état; pais l'Alaka, qui perçoit et administre les deniers de la communauté; enfin les prêtres, qui peuvent seuls entrer dans le Lieu très saint, d'où les diacres sont exclus.

Comme rang, TEtchégué, ou chef des moines, vient immédiatement après l'Abuna; c'est le grand-prieur du célèbre couvent de Debra-Liba-nos, érigé dans le Shoah au 13"»® siècle, par la sainte Tekla Haimanet. 11 est le supérieur, non seulement de tous les couvents de son ordre, mais encore des couvents de Saint-Eusta-the* quoique ceux-ci aient aussi leurs abbés. Les occupations de tous ces moines sont ce qu'elles étaient en Europe au moyen âge; ils mendient, ils lisent leurs bréviaires, ils aident quelquefois à la desserte des églises, ils se promènent, et ils disputent à l'infini sur les questions de dogme doit ii a été parlé plus haut. Ils font vœu de cé-liiot.

L'Église abyssine a gardé pendant des siècles la foi en la divinité de J.-C., mais par suite de son isolement elle est tombée dans un état de langueur spirituelle qui nécessite un prompt remède et qui appelle la sollicitude des autres églises plus vivantes, v. les Journaux de missions. etc.

ACACIUS ou Acace* 1° Disciple d'Eusèbe et depuis 340, son successeur comme évêque de Césarée. Il était surnommé le Borgne. Il fut l'un des chefs du parti arien pur, rejetant à la fois l'identité de nature et la ressemblance de nature du Père et du Fils (v. Homoiousiens), et fut, pour cela même déposé par les synodes d'An-tioche 341 et de Séleucie 359. Ses partisans peu nombreux s'appelèrent de son nom. les Acariens. Il s1 brouilla ensuite avec les Ano-méens et se rangea aux décisions du concile de Nicée, qu'il recommanda par un écrit à l'empereur Jovien. 11 mourut en 363 ou 36o. laissant la réputation d'un caractère intrigant, ambitieux et versatile. Protégé par l'empereur Constance, il avait fait déposer saint Cyrille, et plus tard exiler le pape Libère. Ses ouvrages sont perdus.

2° Acacius, anachorète, né vers 322, adhérent du symbole de Nicée, fut envoyé k Rome auprès de Damase. puis nommé en 378 évêque de Bérée et de Syrie; l'un des plus violents ennemis de ChrysosWme, il l'accusa d'origénisme et sollicita sa condamnation. Plus tard cependant, et peut-être sous l'influence de Rome, il revint à d'autres sentiments et fit rétablir son nom sur les registres de (Constantinople. 11 se montra hésitant dans l'affaire de Nestorius, le fit condamner à Éphèse 431 par son suppléant, l'évêque d'Emesa, mais ne put marcher d'accord non plus avec Cyrille et son parti. + vers 436, âgé de 110 ans. C'était un homme énergique, mais d'humeur changeante.

3<> Évêque et patriarche de Constantinople. de 471-488. Zélé défenseur de ses prérogatives hiérarchiques, il adhéra aux décisions du concile de Chalcédoine contre Eutyches et le mo-nophysisme, mais refusa de rompre avec les patriarches d'Alexandrie et d'Antioche qui n'avaient pas adhéré. Il essaya de concilier les uns et les autres dans l'espoir de les absorber, et ne fit que susciter de nouveaux troubles. Il chercha aussi à s'affranchir de l'autorité du pape; cependant, ayant à lutter contre l'empereur Basilisque et les hérésies d'Eutyches, il demanda l'appui du pape Simplicius. Il réussit à soulever le peuple de Constantinople et à détrôner l'empereur avec l'aide de l'usurpateur Zénon. Basilisque s'enfuit dans une église, mais Acacius l'en fit arracher et le livra à son ennemi. Fort alors de l'appui du nouvel empereur, il se tourna de nouveau contre le pape, et, en 485, fit porter par Zénon un édit d'union avec les Eutychéens. Cet édit, favorable à la secte d'Eutyches, reçut le nom d'Hénoticon q. v. Anathématisé par le pape Félix III, et cité devant un petit concile à Rome, il dut se soumettre; mais à peine de retour àConstantinople, il anathématisé de son côté Félix III, persécute ouvertement les orthodoxes et met sur tous les sièges épiscopaux de son ressort des prélats euty-chéens. En 4S6, il joua un rôle plus noble et plus digne de sa charge; l'empereur Zénon voulait faire périr sa femme Ariadne, lorsqu'Aca-cius accourt, fait des reproches sévères au prince et le détourne de son projet criminel. Il mourut tranquillement sur son siège en 489. On n'a de lui que deux Lettres.

4o Acacius, évêque d'Amide sur le Tigre, né au milieu du siècle, fut mêlé aux affaires de la persécution de Varane. roi de Perse, persécution suscitée par l'excès de zèle de l'évêque mésopotamien Abdas. Il se signala par un acte de générosité en vendant les vases d'or et d'argent de son église pour racheter 7,000 esclaves persans tombés entre les mains de Théodose-le-Jeune; il les secourut dans leur misère et les renvoya au roi. Varane. admirant cet acte de charité chrétienne, demandi à Acacius un entretien qui amena probablement la fin des persécutions et la paix signée peu après entre les deux monarques.

ACCEPTANTS, nom qui fut donné en France, par opposition aux Appelants, à ceux des membres du clergé qui reçurent, après la mort de Louis XIV, la bulle Unigenitus de Clément XI. tandis que ceux qui la rejetèrent ou qui subordonnèrent leur adhésion à la décision d'un concile prirent le nom d'Appelants. Les Acceptants reçurent aussi le nom de Constitutionnels.

ACCÈS 1° Recueil de prières de préparation pour les prêtres avant le sacrifice de la messe. 2° Dans l'élection de hauts dignitaires ecclésiastiques. des papes en particulier, on désigne sous ce nom les voix qui, ayant été d'abord données à un autre, l'abandonnent pour arriver à former la majorité nécessaire.

ACCLAMATION, ou quasi-inspiration; réu-i^on de toutes les voix, sans entente préalable, pour l'élection d'un pape ou d'un évêque.

ACCOMMODATION. On appelle ainsi d'une manière générale la condescendance d'un supérieur envers un inférieur, le premier témoignant par actes ou par paroles, pour ne point blesser ou froisser le second, une indulgence passive ou active, pour ses idées, ses préjugés ou ses goûts. Jésus-Christ s'ac^mmodait à la faiblesse de la multitude, quand il lui parlait en paraboles, et à la faiblesse de ses disciples, quand il réservait pour l'avenir ce qu'il avait encore à leur dire. Matth. 13, 11. Jean 16, 13. Il entrait dans leurs vues, sans les réfuter ni les rectifier directement, quand il disait aux disciples de Jean, que leur maître était l'Élie qui devait venir. Matth. 11, 14. Paul s'accommodait aux préjugés des judéo-chrétiens, quand il faisait circoncire Timothée, et qu'il se joignit à Jérusalem aux hommes qui avaient fait un vœu, Act. 16. 1-3. 21. 17-26.; il leur parlait comme à des enfants en Christ, s'asservissant à tous, afin de les gagner, 1 Cor. 3, 1. 9,19. cf. Hébr. 5,11-14. Il donne Rom. 14. I et suiv. la théorie de cette condescendance chrétienne, mais il montre aussi. Gai. 2, 11-13. qu'il y a des limites à l'accommodation, et qu'elle ne doit être un acte ni de timidité, ni d'hypocrisie. Supporter une erreur ou une faiblesse ne doit pas aller jusqu'à la justifier ou la sanctionner.

Les pères de l'Église ont déjà connu la chose et le mot. Clément d'Alexandrie dit que s'il y a, pour un auditeur, quelque intérêt à ne pas tout lui expliquer, on peut taire certaines choses, mais il ajoute que ce silence ne peut porter que sur les points secondaires. De même Tertullien. Origène, saint Jérôme, Chrysostome, etc. Saint Augustin au contraire repousse cette prudence, comme un manque de respect et d'amour pour la vérité. La question de l'accommodation, qui, pendant longtemps, n'a présenté qu'un intérêt assez médiocre, a pris au commencement da ce siècle une importance toute particulière. Avec le développement de la critique historique, on s'est demandé si plusieurs des faits racontés dans l'Écriture ne seraient pas simplement une accommodation à des idées régnantes au temps de Jésus-Christ. Partant du fait que les anthro-pomorphismes de l'A. T. ne peuvent guère être envisagés autrement que comme une accommodation; constatant une accommodation dans le judaïsme lui-même et dans la plupart de ses institutions, les théologiens qui désiraient se débarrasser de certaines difficultés, sans trop porter atteinte à l'autorité des Écritures, ont tenté d'expliquer différents passages au moyen de cette théorie; ainsi la doctrine du diable et des anges, celle de l'expiation, de nombreuses apparitions, la messianicité de beaucoup d'oracles, qui, selon eux, n'avaient aucun rapport avec le Messie, mais que Jésus-Christ s'est appliqués à lui-même, parce que le peuple les interprétait dans ce sens. Avec ce système on n'allait à rien moins qu'à ruiner l'autorité des Écritures; aussi Mosheim, Storr, Knapp, Reinhard le combattirent vivement. Mais il tomba de lui-même, quand on crut n'en avoir plus besoin et que l'exégèse critique se décida franchement à traiter d'erreur ce qu'elle ne pouvait pas expliquer. La vie de Jésus, de Strauss, en traitant de fables ou de mythes les principaux faits de l'histoire évangélique, a donné du courage aux timides, et les a dispensés de la tâche ingrate et laborieuse de mettre d'accord leur respect pour l'Écriture avec leur droit d'en rejeter les faits ou les enseignements.

ACÉMÈTES, moines du 5*e siècle, qui s'étaient imposé de ne jamais dormir, ou de dormir aussi peu que possible, et d'avoir nuit et jour des services religieux. L'exemple donné par Marcel d'Apamée, en Orient, trouva aussi des imitateurs en Occident. Leurs deux principaux couvents étaient, l'un à Constantinople, l'autre à Agaunum, ville des Nantuates, aujourd'hui Saint-Maurice (Valais) dont l'abbaye fut fondée par Sigismond, roi de Bourgogne.

ACÉPHALES (Sans tête). Quand l'empereur Zénon eut réussi, par son Henotikon, à faire vivre quelque temps en paix les mono-physites et les orthodoxes, quelques-uns des roonophysites les plus résolus, se séparèrent de leur patriarche, Pierre Mongus, et comme ils n'avaient plus de chef (de tête), on les appela Acéphales. Plus tard ils se rallièrent autour de Sévère et de Pierre Fullo. v. Monophysites.

ACHÉRY, don J.-Luc d' — v. Dachéry.

ACOLYTHE, serviteur chargé d'accompagner son maître quand il sortait. Peu à peu le sens étymologique changea, on donna ce nom aux serviteurs de l'évêque, chargés du service de l'autel; le formulaire de leur consécration mentionne encore aujourd'hui le soin des cier ges et des lumières, la préparation de l'eau et du vin pour l'eucharistie. Puis quand ces fonctions eurent passé aux enfants de chœur, le titre seul resta, mais il n'est plus qu'un degré, le dans l'ordre de la prêtrise, le plus élevé des ordres mineurs chez les catholiques.

ACOSTA, Uriel, prit plus tard le nom de Gabriel; Portugais, né 1594 à Porto, d'une famille juive de la noblesse, convertie au christianisme depuis plusieurs générations. Il fut baptisé catholique et étudia avec zèle les Évangiles et plusieurs livres traitant de la religion; mais la théorie des Indulgences l'irrita et lui rendit le christianisme suspect; il finit par abandonner une position lucrative qu'il avait obtenue au collège, et sous prétexte que les juifs et les chrétiens étaient d'accord à recevoir l'A. T.. tandis que les chrétiens seuls adoptaient le N., il se décida à rentrer dans le judaïsme d'où sa famille était sortie. La chose n'était pas possible en Portugal; il s'enfuit à Amsterdam où il se fit circoncire et reconnaître juif. Mais le pharisaïsme de ses nouveaux coreligionnaires ne le satisfit pas non plus, et il professa ouvertement les maximes de l'incrédulité sadducéenne. Il fut accusé de nier Dieu et l'immortalité de l'âme, affirmant (1623) que sur ce dernier point la loi de Moïse était muette. Le Dr Samuel de Sylva lui répondit. L'autorité fit emprisonner Acosta, qui au bout de 8 à 10 jours obtint sous caution d'être remis en liberté, mais en payant une amende de 300 florins; son livre aussi fut condamné à être détruit. En même temps la synagogue le mit à l'interdit, et il resta sept ans sous le poids de cette excommunication, ne voulant pas se soumettre aux conditions qu'on lui imposait pour le réintégrer. Il céda cependant, et dans son autobiographie (Exempter vitœ humanœ) il raconte d'une manière assez lamentable les humiliations qu'il eut à subir, les 39 coups de fouet qu'on lui administra, tout nu, en pleine synagogue, et comment il dut se coucher sur le seuil de la porte pour être foulé aux pieds par les juifs. Il n'abandonna d'ailleurs aucune de ses convictions, et ne voulut reconnaître d'autre loi que la loi naturelle, f 1640, ou 1647; le bruit courut qu'il s'était suicidé; mais ce n'est pas prouvé.

ACTES DES MARTYRS, Acta Martyrum et plus tard Actes des Saints, Acta Sanctorum. On désigne sous ce nom les notices plus ou moins complètes, plus ou moins authentiques, et, dans tous les cas, de valeur fort diverse, qui ont paru à différentes époques sur les hommes illustres de l'Église chrétienne. On comprend que dès l'origine chaque église ait tenu à honneur de conserver la mémoire de ceux de ses membres martyrs, qui avaient payé de leur vie leur fidélité; puis on y a joint les noms des confesseurs. c'est-à-dire de ceux qui, au risque de la mort, avaient bravé l'autorité romaine et s'étaient déclarés chrétiens, quoiqu'il y eût du danger à le faire. On y ajouta ensuite la liste de ceux qui avaient été persécutés pour l'Évangile, des saints qui avaient honoré l'Église par leur sainteté, par leur dévouement, par leur ascétisme ou par leur activité. Tout cela se fit lentement, peu à peu. naturellement, sans plan densemble et sans parti pris. Chaque église avait sa liste, et elle y ajoutait à l'occasion quelques noms des églises voisines, au fur et à mesure qu'elle en avait connaissance par des lettres ou des communications. Ainsi l'église de Smyrne écrivit à celle de Philadelphie le martyre de plusieurs des siens et finalement celui de son évêque Polycarpe; les églises de Lyon et de Vienne racontent leurs malheurs aux chrétiens d'Asie et de Phrygie; Denys d'Alexandrie écrit à Fabien d'Antioche; Cyprien est rempli de détails de même sorte, et Ponce, le biographe de Cyprien. explique ce qui l'a amené à raconter la vie et la mort d'un si grand évêque. A mesure que ces listes grossissaient, on devait y mettre un peu d'ordre, el Ton classait volontiers les martyrs d'après la date de leur mort, de manière à ce que chaque jour de chaque mois eût son saint ou son martyr. En même temps, à mesure qu'on s'éloignait de l'époque où le souvenir était encore vivant, on complétait par des détails et par des notices plus développées la simple mention qui avait suffi dans l'origine, afin de conserver aux générations suivantes des mémoires et des exemples précieux. De là deux espèces de listes: les ca-lendaria, simples catalogues des noms rangés suivant l'ordre des jours de l'année, et les mar-tyrologia qui formaient des espèces de notices biographiques d'un caractère général, destinées à l'édification des chrétiens. Les diptycha présentaient plutôt un intérêt local; on y inscrivait les noms des pasteurs et des évêques de l'endroit, et cette liste était complétée par les noms de personnages qui avaient illustré la localité, ou par coux d'hommes vénérés de l'Église entière. On eut ensuite les passionalia (le latin se gâte déjà), histoires de martyrs proprement dits, et enfin les legenda, fragments qui devaient être lus aux anniversaires de la mort de ceux dont on racontait l'histoire. Ces derniers n'avaient pas le caractère d'une simple notice; ils étaient soignés, ornés, et avec le temps on se permit de les embellir au point qu'il fut difficile de distinguer la réalité de la fiction; ce furent les légendes des saints.

La plupart de ces documents historiques furent malheureusement détruits lors des persécutions de Dioctétien, et tout fut à refaire, en partie de souvenir, quand le premier empereur chrétien eut assuré le triomphe du christianisme. Eusèbe écrivit un livre sur les martyrs de la Palestine, et un autre plus général sur les martyrs de l'Église chrétienne, mais ses livres se sont perdus de bonne heure. Vers la fin du siècle, sous Grégoire I, il est question d'un martyrologe qui se lisait à Rome, et dont un double se trouvait à Alexandrie; on l'attribuait, mais sans preuves, à saint Jérôme, comme on mettait volontiers sous le nom du traducteur de la Bible, beaucoup d'écrits dont l'auteur était inconnu. Cassiodore recommande plusieurs écrits de même nature, Vies des pères, Confessions des fidèles, Passion des martyrs, comme formant une littérature assez considérable, destinée à édifier, à affermir la foi et à servir d'exemples. Mais déjà le pape Gélase devait s'opposer à ce que ces livres fussent lus dans les églises sans avoir été préalablement contrôlés; plusieurs étaient anonymes, et un grand nombre étaient de pures et simples compositions littéraires, sans aucune valeur historique. Adrien I«r, fin du 8rae siècle, dit positivement que, outre les Saintes Écritures, il est permis de lire publiquement les Vies des pères, mais seulement si elles ont été écrites par des auteurs orthodoxes. Ces Vies des pères, qui servent en quelque sorte de transition entre les Actes des ^fartyrs et les Actes des Saints.

étaient le récit en général authentique et vrai de l'histoire de la propagation du christianisme; on y trouvait l'histoire de Séverin, celles de Boniface, de Jonas, de Gall, etc. A l'heure qu'il est encore, c'est une source précieuse à consulter: chez les Latins, dans le catalogue dit de saint Jérôme, dans les 14 hymnes de Prudence, dans la Collatio patrum de Cassien, dans les œuvres de Grégoire de Tours, etc.; chez les Grecs, dans Palladius, Héraclide, Jean Mos-chus, Siméon Métaphraste. quoique ce dernier soit déjà sujet à caution comme exactitude.

Un martyrologe publié par ordre de Sixte V est à peu près sans valeur, car il n'est guère que la reproduction du travail attribué à Jérôme. Bède, Florus, Wandelbert (qui mit l'histoire en vers), Rhaban Maur, Adon, archevêque de Vienne, Usuard enfin et Notker, développèrent et enrichirent de détails historiques les anciens martyrologes, et constituent un progrès. A partir du 9™ siècle, il y a chute et décadence. Toutes les Églises veulent remonter aux apôtres ou à leurs successeurs immédiats, et les moines font l'histoire à cette intention; les légendes s'élèvent jusqu'à la fraude et à la puérilité; c'est l'époque où saint Denis, martyr, s'en va, sa tête à la main, fonder l'église des rois de France, qui porte son nom. Mais le souffle de la Renaissance et l'étude de l'antiquité dissipent aux lime et lo^e siècles cette érudition fantastique; des travaux sérieux sont entrepris; on compile les documents, on cherche à dégager le vrai du faux, et les Bollan-distes entreprennent l'œuvre colossale, encore inachevée, qui se rattache à leur école. Jean Bolland (1596-1665) reçut des jésuites, à la mort de Heribert Rosweyd (1629) les nombreuses pièces et les manuscrits rassemblés par celui-ci, et il fut chargé de rédiger les Acta Sanctorum, sur le plan des anciens calendaires, mais en donnant à chaque notice tous les développements possibles. Avec les immenses ressources que l'ordre avait à sa disposition, trésors de toute nature, relations dans toutes les parties du monde, Bolland se mit à l'œuvre, et il trouva des collaborateurs dignes de lui dans les pères Gottfried Henschen (1600-1681) et Daniel Papebroch (1628-1714). qui, sous le patronage du pape Alexandre VII, visitèrent vers 1662 une grande partie de l'Europe. On avait compté sur environ 18 volumes in-folio; le Martyrologe donna pour le mois de janvier seul 2 vol., pour février, mars et avril, chacun 3. mai 8, juin et juillet chacun 7, août 6, septembre 6, octobre (l^ volume, jusqu'au 14) 6 volumes; en tout 53. L'œuvre fut alors interrompue par la suppression de l'ordre, en 1773, et la maison des bollandistes à Anvers fut convertie en une école militaire; mais ils réussirent à poursuivre leur travail dans l'abbaye de Can-denberg. L'empereur Joseph II, qui n'aimait pas les jésuites, donna l'ordre aux bollandistes de publier à l'avenir un volume par année et d'avoir tout fini dans l'espace de 10 ans. En 1788 cette association de savants fut dissoute, et ils n'eurent plus qu'une préoccupation, mettre leurs trésors historiques et littéraires à fabri. Ils y réussirent par une vente fictive à rabbaye des Prémontrés, de Tougerloe, 1791. A l'arrivée des Français, qui proclamèrent en Belgique lecir république et qui déclarèrent biens nationaux tous les biens du clergé, les bollandistes durent s'enfuir, et une partie seulement de leurs collections littéraires put être sauvée, grâce au voisinage de la Westphilie. La Restauration permit aux religieux de Tougerloe de retrouver quelques-uns de leurs documents, et les jésuites reprirent leur travail. En 1845 parut le 7c e volume d'octobre, comprenant les 15 et 16 du mois, en 1189 pages in-folio. L'ensemble de la collection ne compte pas moins de 25,000 biographies. Mais les derniers volumes n'ont pas la valeur des précédents, et, malgré bien des circonstances favorables, l'ordre semble avoir perdu le sentiment de sa dignité ancienne. La vie de sainte Thérèse en particulier est un tissu de puérilités, aussi dépourvues d'intérêt que de critique, et n'offre aucune garantie pour Theureux achèvement de l'œuvre. — Il a paru à Venise en 52 vol., une réimpression de l'édition d'Anvers, mais elle est peu correcte.

ADALARD, ou Adalhard, ou Adelard, né 753. et WALA, deux cousins germains de Charlemagne, petits-fils de Charles Martel par le comte Bernard, furent soigneusement écartés des affaires et de la vie publique à l'avènement de leur parent au trône. On craignait leur influence, et ils furent enfermés dans un cloître, Adalard à Corbie, où il fut d'abord condamné aux travaux les plus vulgaires, mais dont il finit par devenir abbé, après avoir réussi une première fois à s'enfuir au Mont-Cassin. Cependant vers 796, leur position changea; Charlema-gne donna Adelard comme conseiller à son fils Pépin, nommé roi d'Italie; Wala reçut le gouvernement de la Saxe. Un troisième frère, Bernard, fut nommé abbé de Corbie. Mais de nouveaux changements politiques et les incertitudes de la succession de Charles troublèrent à plusieurs reprises l'existence de ces trois frères. Ils maintinrent énergiquement l'unité du royaume, en soutenant, tantôt avec Louis-le-Débonnaire, tantôt contre lui, que la couronne devait revenir au fils ainé, tandis que d'autres voulaient un partage égal du royaume entre les fils. Grégoire IV ayant voulu intervenir à Worms dans ces questions de politique intérieure, les évéques résistèrent et menacèrent même le pape de le faire déposer. Wala, mandé par Lothaire, vint de Noirmoutiers avec son ami Radbert. et tous deux donnèrent connaissance au pape (qui les ignorait) d'anciens documents, ordonnances papales, décrets de conciles, qui établissaient le pape comme juge de tout le monde, sans que personne pût le juger. Ces pièces, qui voyaient le jour pour la première fois, étaient un «acheminement à la production des fausses Décrétâtes. Le parti de l'unité du royaume triompha un moment, mais Lothaire ne sut pas profiter des circonstances; les siens l'abandonnèrent, et Wala, découragé, se retira dans son couvent lombard de Robbio, où il f 836. Adalard mourut la même année.

ADALBERT lo Évêque de Prague, puis missionnaire en Prusse et en Pologne. Woycech, ou Woytech, né vers 950, fils d'un des plus puissants woy wodes de la Bohême, avait étudié à Mag-debourg d'où il avait rapporté une bibliothèque fort nombreuse. L'archevêque de cette ville, Adal-bert. lui avait donné son nom, par attachement, et c'est sous ce nom seulement qu'il est connu. Appelé à l'épiscopat par ses compatriotes qui désiraient voir un des leurs occuper ces hautes fonctions, il ne tarda pas à les froisser par son caractère trop rigoureux et surtout par sa soumission trop absolue à la cour de Rome. Sous prétexte d'un pèlerinage au Saint-Sépulcre, il partit pour Rome, 984, où il passa quelques années dans un couvent, avec son ami Gauden-tius. Rappelé par sa paroisse, 993, il consentit sur l'ordre du pape à y retourner, mais son exagération des pratiques romaines indisposa toujours plus Je peuple, et malgré l'appui du duc Boleslav, il vit son autorité méconnue, déposa de nouveau sa crosse et retourna à Rome, 995. En chemin, il baptisa le jeune Waïk, qui plus tard, sous le nom d'Etienne, devint roi de Hongrie. L'année d'après, sur les instances de l'empereur, il essaya une troisième fois de reprendre son évêché, 996, mais il fut si mal reçu qu'il y renonça définitivement et se décida à aller chercher la couronne du martyre chez les païens de la Pologne, puis en Prusse. Il se fixa successivement à Cracovie et à Gnèse, avec son ami Gaudentius, puis à Dantzik, et là, pendant une tournée d'évangélisation, il fut attaqué par une troupe de païens furieux et tomba percé de sept coups de lances, 23 avril 993. La semence sacrée ne devait lever que 250 ans plus tard. Son corps fut réclamé par Boleslav. qui le fit déposer dans la cathédrale de Gnèse et lui fit de magnifiques funérailles. Le bruit ne tarda pas à se répandre que des miracles avaient lieu sur son tombeau.

2<> Adalbert, archevêque de Brème, 1045, d'une famille considérable d'Allemagne. Il faisait déjà parler de lui quand il était sous-diacre de l'archev. Hermann. 1032-35. et son caractère altier inspirait des inquiétudes. Nommé ar-ehevêq. par Henri III, il joua un grand rôle sous ce monarque et sous son successeur Henri IV, qui tous les deux ans travaillant à établir leur domination en Allemagne, et ne le pouvant qu'avec l'appui des papes, trouvèrent en Adalbert l'instrument qu'il leur fallait. C'est par lui qu'ils parvinrent à faire nommer trois papes allemands, Clément II, Damase II et Léon IX. En même temps ils distribuèrent à un certain nombre de familles romaines les biens qui, depuis Charlemagne, appartenaient à l'Église, et ils réduisirent autant qu'ils le purent les revenus de la curie, de manière à la rendre dépendante de l'empire. Adalbert poussa à l'érection d'un patriarcat du nord, avec résidence à Brème, comme l'église de Milan avait été de son côté érigée en patriarcat, et par conséquent rendue indépendante de Rome. Henri III obligea Clément II, sa créature, à regarder Adalbert comme son égal. Un moment, dit l'historien Adam, la petite Brème fut comme une seconde Rome, où affluaient les envoyés de tous les pays du nord, des Orcades de l'Islande, du Groenland, venant demander des missionnaires. A la mort de Henri III (5 oct. 1056) les choses changèrent de face; il s'agissait de tenir tête aux haines déchaînées par la tyrannie du roi mort. Adalbert réussit à s'emparer de Ja régence du jeune Henri IV, et il gouverna souverainement pendant quelques années, mais en 1066 il fut précipité du pouvoir et dut se retirer modestement dans son diocèse. En 1069 il réussit à reconquérir un peu de son ancienne influence auprès du roi, et il allait se venger de ses ennemis, notamment des Billungen, quand il f 1072.

ADALGAR, second successeur de saint Ansgar sur le siège archiépiscopal de Brème, 888. Il eut le chagrin de voir, 890 et 895. son siège réduit par les intrigues de Heriman, archev. de Cologne, à un simple évêché. 11 réussit un moment, sous Serge III, févr. 905, à rentrei dans ses anciennes prérogatives, mais l'accord de l'archev. de Cologne avec celui de Mayence, Hatto, les lui fit perdre de nouveau, et définitivement. Brème, en perdant les missions du nord, qui en avaient fait une véritable métropole, avait en réalité diminué d'importance, et l'on redoutait pour l'unité de l'empire, surtout avec un empereur de 6 ans, Louis IV, dit l'Enfant, sa trop grande prépondérance, f 9 mai 909. Son successeur, Hoger, reçut de Rome tous les honneurs personnels, mais ne put reconstituer l'arche-

véché.

ADALHARD, v. Adalard.

ADAM 1° de Brème; chanoine saxon, vint à Brème 1068 sous Adalbert; il est déjà mentionné, 14 juin 1069, comme magister schola-rum; auteur d'une Hist. des églises de Hambourg, Brème, etc., et d'uneGéogr. de la Scandinavie. En général exact, même dans les notes qui y ont été ajoutées plus tard, mais partial contre les ducs de Saxe, qui étaient en hostilité avec Brème. Edit. abrégée de Lappenberg, Hanovre, 1846.

2° Melchior Adam, né à Grotkau, Silésie, fit de bonnes études à Brieg. puis à Heidelberg, ou il soutint ses thèses 1601, fut couronné et devint recteur du gymnase et professeur de l'université. Il mourut pasteur à Hoppenheim, 1622. C'était un travailleur et un collectionneur intrépide. Il a écrit des Vies des savants allemands, philosophes, théologiens, médecins, etc., au nombre de 136. et deux Décades, ou 20 Vies de théologiens étrangers, Cranmer, Calvin. Farel, Knox, etc. Ces notices sont sans doute de valeur inégale, mais l'ensemble forme une collection intéressante pour l'hist. de la Réformation.

ADAMITES, petite secte du nord de l'Afrique, au 3™ siècle; mélange d'ascétisme et de gnosticisme; en vivant nus comme Adam avant la chute; ils pensaient établir leur innocence. Ils furent excommuniés. Une secte semblable surgit encore au 15™e siècle parmi les Beghards; ils furent persécutés par les Hussites que l'on affectait de confondre avec eux. De pareilles manifestations ne durent pas.

ADELBERT, personnage singulier, un peu mystérieux, qui parut jouir en France, à la cour de Carloman, d'un assez grand crédit, ainsi que son ami Clément: il fut nommé évêque, mais sans diocèse, et eut pour constant adversaire l'apôtre de l'Allemagne, Boniface, par qui seul nous le connaissons. Les reproches qui lui sont faits sont contradictoires. Il semble qu'il ait condamné les pèlerinages, la confession obligatoire. la consécration des églises aux apôtres et aux martyrs. D'autre part, on l'accuse d'avoir présenté ses ongles et ses cheveux à l'adoration des fidèles, d'avoir exploité une lettre du Christ, qui lui aurait été envoyée du ciel, d'avoir composé des prières au nom d'anges inconnus. Condamné dans un synode à Soissons, 744, puis dans un concile à Rome, 25 sep. 745. il ne paraît pas avoir beaucoup souffert de ces deux sentences, et le pape Zacharie, en remettant la question à l'étude, 747, infirmait moralement la condamnation prononcée. Carloman n'abandonnait pas volontiers ses protégés, mais, après son abdication, Pépin qui avait besoin du secours de Rome, se prononça contre l'ennemi de Boniface. A la suite d'une discussion publique à Mayence, Adelbert aurait été officiellement condamné, puis dégradé et enfermé au couvent de Fulda; s'étant évadé, il aurait été assommé par des porchers.

ADÉODAT, v. Dieu-donné.

ADIAPHORA. Nom scientifique donné en théologie à la question des choses indifférentes. En existe-t-il dans la doctrine? Et en morale? De même que les stoïciens, les chrétiens des premiers siècles se sont posé la question, et l'ont résolue diversement, suivant leur tendance personnelle et leur manière d'envisager la vie et la sainteté. Schleiermacher, 1826, a établi qu'endroit positif, et vis-à-vis de toute législation humaine, il y a des actions qui ne méritent ni éloge, ni blâme: ainsi les jouissances artistiques, les délassements après le travail, etc., tandis qu'au point de vue de la morale stricte, il n'est aucune action qui ne se rattache directement ou indirectement à l'accomplissement d'un devoir. A cet égard il y a eu des controverses, presque à toutes les époques de Fhistoire. Parmi les plus modernes on peut citer celles qui éclatèrent à l'occasion de Plnte-rim de Leipsic 1548, trêve imposée aux évan-géliques et aux romains, et qui ménageait plus que l'Intérim d'Augsbourg les doctrines protestantes. Toutefois il maintenait encore la juridiction des évêques. plusieurs parties de la messe, l'extrême-oncton, les 7 sacrements, la confirmation, les cierges, les prières pour les morts, etc., que l'Intérim déclarait être des choses indifférentes, adiaphora; Mélanchthon les accepta comme telles; d'autres, notamment Flaeius, les repoussèrent énergiquement. La latte dura dix ans, jusqu'à la paix d'Augsbourg 1555, et se prolongea même jusqu'en 1577 où la Formule de concorde y mit un terme. — L'autre controverse se rattache au réveil religieux de Spener. qui condamna comme contraires à la sainteté de la vie tous les plaisirs mondains, les jeux, danses, théâtres, promenades, plaisanteries, luxe dans la nourriture ou dans les vêtements. Il n'avait en vue que certains excès dont il avait été témoin, mais il y avait de l'excès dans son jugement trop absolu, et ses adhérents allèrent plus loin encore que lui. La lutte éclata en 1692 par une violente brochure anonyme d'un piétiste. En 1698 nouvelle brochure, avec préface de Franck. Les opposants, cependant orthodoxes, maintinrent qu'il existe des choses indifférentes, et ils en dressèrent la liste; mais ils exagérèrent à leur tour, et quelques-uns de leurs arguments laissent beaucoup à désirer; ainsi, quand Stier, à propos de Luc 15, 25. prétend que les paysans ne comprendront pas la parabole de l'enfant prodigue, si on leur retire leurs danses et leur musique. Cette controverse a duré longtemps, elle n'est même pas terminée, et par sa nature même elle échappe à une solution: c'est à la conscience chrétienne de chacun de la résoudre pour son propre compte, v. 1 Cor. 10, 31.

ADO, archevêque de Vienne, né vers 800 sous

Charlemagne, f 16 décembre 875. D'une famille considérée des environs de Sens, il étudia dans les couvents de Ferrière et de Prilm et fit de bonne heure un voyage en Italie où il se lia avec Claude de Turin. Pendant les 16 ans de son épiscopat, il travailla pour l'affermissement de la hiérarchie papale dans le sud de la France. Nicolas I et Adrien II le traitent dans leurs lettres comme un intime. Il a laissé une Histoire du monde depuis la création jusqu'au 9®e siècle, et un Martyrologe, bien supérieur à ceux de Florus et de Raban Maur.,etc.

ADOPTIANISME, doctrine qui eut au 8me siècle pour principaux représentants l'archev. Elipand de Tolède et l'évêque Félix d'Urgel. C'était une espèce de nestorianisme mitigé, adapté aux besoins d'esprit de l'Occident. Poursuivi du besoin de s'expliquer les deux natures qui sont en Christ et ne réussissant pas à les comprendre, Elipand en était venu à cette idée que quant à sa nature divine, Christ est réellement le fils de Dieu, mais que quant à sa nature humaine il n'est que son fils par adoption. C'était respectueux, mais ce n'était pas orthodoxe. Elipand, qui vivait à Tolède, sous le joug des musulmans, ne fut pas inquiété par eux pour ses opinions, mais Félix, qui habitait une partie de l'Espagne incorporée à la France depuis 778. eut à rendre compte de ses nouvelles idées dans plusieurs conciles: à Narbonne d'abord 788, où rien ne fut décidé, puis à Ratis-bonne 792. où il confessa son erreur et se rétracta. De retour en Espagne et sur les sollicitations de ses amis, il revint à l'adoptianisme. Charlemagne, au lieu de le condamner comme récidiviste, chargea Alcuinde l'éclairer. Dans un concile de 300 évêques, tenu à Francfort 794. mais où Félix ne comparât pas, il fut condamné; à Aix-la-Chapelle enfin, à la suite d'une conférence avec Alcuin, il abjura de nouveau, 799. Dès lors il resta à Lyon placé sous la surveillance de l'archevêque, jusqu'à sa f 816. Elipand continua de prêcher et d'avoir des adhérents, mais la secte fut bientôt oubliée.

ADRETS (baron des), v. Reaumont.

ADRIEN. On connaît sous ce nom plusieurs saints: un officier de l'armée de Galère, converti par l'héroïsme des martyrs chrétiens, et martyr lui-même à Nicomédie 306; un martyr à Césarée 309; un missionnaire en Gr. Rreta-gne, envoyé par le p. Vitalien, f 720; le év. de Saint-André, Écosse; martyr 874. — En outre 6 papns:

1° Adrien I, né à Rome, 772-95. Inquiété par Didier, roi des Lombards, il est protégé et vengé par Charlemagne, qui détruit le peu qui restait encore de la souveraineté des empereurs grecs. Le 7me (0u 8™) concile écuménique. 2rae de Nicée, convoqué par Adrien 787, consacre pour la première fois l'invocation des saints; il introduit aussi le culte des images, qui est cependant bientôt derechef condamné par le concile de Francfort; id. le culte des reliques.

2° Adrien II, né à Rome, 867-72, avait refusé deux fois le pontificat. Il prend parti pour Louis, frère de Lothaire, contre Charles-ie-Chauve, et lève l'excommunication lancée contre Lothaire, qui avait répudié sa femme. Les évêques français lui répondent, 870, que le pape ne peut être à la fois roi et évêque. Hinc-mar de Reims résiste également et appelle les Décrètales une invention de l'enfer. Hincmar île Lion, son neveu, tient pour le pape; Charles-le-Chauve le fait emprisonner et le prive de la vue: les rois ne sont pas encore très obéissants. Adrien tient un concile à Rome 863, où Pho-tius est excommunié; ce jugement est confirmé par le 8rne concile écuménique, tenu à Constantinople 869, après un conflit avec l'empereur Basile et le patriarche Ignace. Adrien a aussi des difficultés avec Charles-le-Chauve, à l'occasion d'un évêque condamné en France.

3° Adrien III, de Rome, 884-85, maintient les résolutions prises à Constantinople contre Photius.

4° Adrien IV, Nicolas Breakspear. né à Abbots-Langley, Hertfordshire, le seul pape anglais, était tîls d'un mendiant, et quelques temps réduit à mendier lui-même. Honteux de ce rôle il passa en France, entra comme domestique chez les chanoines de Saint-Ruf. près d'Avignon; se fit recevoir comme religieux dans ce couvent, et finit par en devenir le supérieur. Eugène III le créa cardinal d'Albano et l'envoya comme légat en Danemark et en Nor-wège pour y achever l'œuvre de la conversion de ces peuples. Élu pape à son retour 1154, il eut des démêlés avec les Romains au sujet d'Arnaud de Brescia; avec Guillaume, roi de Sicile, et avec l'empereur d'Allemagne. Frédéric étant venu à Rome pour rétablir les droits impériaux depuis longtemps oubliés, Adrien le couronne, mais bientôt, à propos d'un pèlerin, il écrit à Frédéric: De qui tiens-tu ton empire, si ce n'est de Ion seigneur le pape (a domino Papâ)? Les légats du pape sont immédiatement renvoyés, et Adrien f 1159, au moment où il va excommunier l'empereur. Trois papes lui succèdent à la fois.

5° Adrien V, de Gênes, neveu d'Innocent IV, élu 1276, ne régna qu'un mois.

6° Adrien VI. Adrien Florentio, fils d'un tisserand d'Utrecht, né 1459, prof, de théologie à Louvain et vice-chancelier de l'université, précepteur de Charles-Quint, évêque deTortose, vice-roi en Espagne, fut élu pape sans être bien connu, grâce à la protection de Charles-Quint.

Honnête et droit, il voulait réformer l'Église en dehors de la Réforme. Il fit divers essais, mais ses cardinaux et toute la curie lui représentèrent qu'une réforme ferait trop de plaisir au parti de Luther, que ce serait confesser que l'Église avait failli. Il recommanda donc, an peu malgré lui, l'usage du fer et du feu contre les hérétiques, une croisade. Il reconnaissait qu'il y avait de grands abus à la cour de Rome et que le siège du mal était là. La Diète germanique pensait de même et le fit connaître par la publication des Cent griefs. Il mourut, 14 sept. 1523, peu regretté en cour de Rome, où l'on redoutait sa probité et ses intentions sincères d'une réforme.

^EGIDIUS 1° Grec d'origine, vint d'Athènes dans les Gaules, s'attacha à Césaire d'Arles et fonda à St-Gilles un couvent dont il fut le premier abbé; sa réputation de sainteté a fait de l'église où ses cendres reposent un pèlerinage très recherché. Il vécut, selon les uns. au commencement du 6roe siècle; selon les autres, il serait f vers 720 ou 725.

2° iEgidius Colonna, de Rome, célèbre sco-lastique, surnommé Doctor fundatissimas et theologorum princepe, 1247-1316. D'abord ermite, puis professeur à Paris et général des au-gustins, il avait étudié sous Thomas d'Aquin et Bonaventure. Chargé de l'éducation de Philippe-le-Bel, il composa pour lui un ouvrage De régi-mine principum, et beaucoup d'écrits, qui ne sont pas tous imprimés. Il fut nommé 1295 archevêque de Bourges.

MUA CAPITOLINA, nom qui fut donné à Jérusalem après qu'elle eut été reconstruite sous Adrien, et qu'un temple y eut été élevé à Jupiter-Capitolin, vers 136.

AEPINUS, Hoch Jean, né 1499 dans le Brandebourg; théologien allemand qui, après avoir embrassé la réforme et étudié à Wittemberg, se rendit, après un court voyage en Angleterre, à Hambourg, où il introduisit la réforme. 1525, fut nommé pasteur 1529 et surintendant 1532. Il avait des talents et un caractère bien équilibré. Il publia quelques écrits sur la descente de Christ aux enfers, et prit parti contre l'Intérim et ses trop nombreuses concessions, mais ne chercha pas à passionner la discussion, f 13 mai 1553.

iERIUS, ami d'enfance d'Eustache qui devint plus tard évêque de Sebaste, Pont. Ils avaient mené ensemble une vie d'ascètes. Depuis l'élévation de son ami, 355, jErius, nommé par lui ancien et directeur d'une maison de pauvres, se tourna contre lui, par jalousie peut-être, et lui reprocha d'avoir renié son passé et de ne plus penser qu'à l'argent. Ils se séparèrent, 360, et iErius se mit à prêcher partout où il trouvait des auditeurs; les adhérents ne loi manquèrent pas. Il enseignait l'égalité des anciens et des évêques, et condamnait les jeûnes forcés et les prières pour les morts. Ce mouvement dura peu et n'eut pas de suites directes.

AÉTIUS, fondateur de la secte des Anoméens, était syrien d'origine, probablement d'Antioche, ouvrier en cuivre, d'un esprit dégagé, peu instruit, mais désireux de s'instruire; d'un caractère difficile, ergoteur; il fit de la philosophie, de la médecine, de la théologie. C'était l'époque des luttes ariennes, il prit parti pour 1 aria-nisme et se promena d'Antioche à Tarse, à Anazarbe, à Alexandrie, à Sirmium, à Constan-tinople, se faisant partout mettre à la porte pour son outrecuidance ou excommunier pour ses doctrines. Condamné dans plusieurs conciles, exilé par Constance, il eut le bonheur de trouver un protecteur et un ami en Julien l'apostat, qui lui donna une propriété dans l'île de Lesbos. Il fut môme consacré évêque, mais sans diocèse, et il profita de cette position pour consacrer à son tour des évéques ariens. Sa vie fut plus d'une fois menacée, pour cause de caractère ou de politique. Il + 366 à Constanti-nople dans les bras de son ami Eunomius. Ses partisans reçurent le nom (Vaétiens, quelques-uns le transformèrent en athées; on les appelait aussi anoméens, v. Arianisme. Il a laissé plus de 300 lettres ou dissertations, dont une a été conservée et réfutée par Êpiphane, sur la non-conception du Verbe.

AFFRE (d'), Deni$-Auguste, né 1793 à Saint-Rome, Aveyron, étudia à Saint-Sulpice, fut successivement prof, de philos, et de théol. à Nantes et à Paris, aumônier des Enfants-trouvés, vicaire général à Luçon et à Amiens, combattit Lamennais, accepta en 1840 l'archevêché de Paris, sans reconnaître officiellement la dynastie de juillet, se prononça conlre les tendances philosophiques de Cousin, et f 17 juin 1848 tué sur les barricades, en demandant de n'être pas vengé. Un des rédacteurs de la France chrétienne, il a écrit: Traité de l'administration temporelle des paroisses, 1827 et Essai historiq. et critiq. sur la suprématie temporelle des papes et de l'Eglise.

AFRA (sainte), chrétienne qui fut brûlée à Augsbourg pendant la persécution dioclétienne, 304. Ses antécédents sont obscurs, et les récits contradictoires. Les uns disent qu'avant sa conversion, elle vivait dans le désordre (Aschbach, d'après les Act. Martyr.); les autres le nient (Tillemont, Rettberg).

ÀFRICANUS. v. Julius.

AFRIQUE. C'est ordinairement de la côte septentrionale de l'Afrique, l'Algérie actuelle, que l'on parle, quand on mentionne les églises d'Afrique. Il faut y joindre cependant TÉgypte, l'Abyssinie, et quelques autres localités, que l'on trouvera sous leurs rubriques spéciales, ainsi que les églises africaines plus modernes.

AGAPES, repas fraternels que les premiers chrétiens célébraient en même temps que la sainte Cène, et souvent comme demi» acte de ce repas sacré, d'abord tous les jours, et habituellement le soir. On sait les abus qui s'y glissèrent bientôt, notamment dans l'église de Corinthe, où, chacun apportant sa nourriture, la différence entre riches et pauvres qui aurait dû ne pas exister, se produisait au contraire d'une manière choquante. Quoique parfaitement inoffensives au point de vue politique, les agapes éveillèrent les soupçons des gouverneurs romains, qui y virent comme une résurrection des hétairies païennes. Pline s'en préoccupe dans son rapport à Trajan (Ép. L. X, 96). Au siècle, les agapes sont séparées de la Cène, qui reste exclusivement un acte de culte, et elles ne sont plus que des repas chrétiens, accompagnés de prières et de conversations édifiantes; mais là encore on retrouve les inconvénients signalés à Corinthe (Tertul-lien, Clément d'Alex.). Les riches pieux commencent à s'abstenir d'y paraître. L'institution tombe en decadence et dans une sorte de mépris, et le concile de Gangre doit les réhabiliter; elles reprennent quelque faveur, mais ce ne sont bientôt plus que des repas d'amis, offerts aux pauvres par les riches. Plusieurs conciles durent défendre la célébration des agapes dans les églises. Par leur caractère même, les agapes sont une institution qui a reparu souvent dans l'Église, notamment aux époques de réveil.

AGAPET 1° Romain, fils du prêtre Gordien, élu pape en 535, ne régna que dix mois, mais non sans gloire. Il fut envoyé comme député auprès de Justinien, à Constantinople, par Théodat, roi des Ostrogoths, qui avait fait mourir sa cousine et femme Amalasonte, et contre qui Justinien, pour venger ce meurtre, et aussi pour chasser les barbares, avait envoyé Réli-saire. Agapet trouva la cour divisée. Justinien tenait pour le concile de Chalcédoine et pour les deux natures en Christ; c'était l'opinion reçue dans l'Église latine. Mais Théodora sa femme était monophysite et avait fait nommer au siège de Constantinople un prêtre de son opinion, Anthime, précédemment évêque de Trébizonde. Agapet, pour gagner la faveur du roi, et aussi par conviction, déposa Anthime et le remplaça par Mennas. Il écrivit à l'église de Jérusalem que Mennas, sacré par un pape, devait être considéré comme l'égal de ceux qu'avait établis saint Pierre lui-même. Satisfait de son ambassade. il se remit en route pour Rome, mais une maladie l'emporta en peu de jours pendant le voyage, à la fin d'avril ou septembre 536.

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2° Agapet II, Romain, élu pape en juin 946. Marousia et Théodora étaient mortes, mais leur esprit vivait encore dans la personne de leur rejeton, le prince Albéric, soutenu par toute la noblesse romaine. Pour secouer ce joug ignoble, Agapet fit alliance avec Othon 1er, d'Allemagne, et concourut ainsi pour sa bonne part à assurer la prééminence à cet empire. Il eut également à intervenir dans les affaires de la France, à propos des rivalités qui éclatèrent, pour la repourvue de l'archevêché de Reims, entre Hugues et Artold (ou Artaud). Il se prononça tour à tour pour l'un et pour l'autre, suivant en cela les conseils de la modération ou de la prudence, et finit par donner le siège à Artold, le protégé de l'Allemagne, quand il se vit absolument délivré de la domination d'Albéric. Il mourut à la fin de 955. Son successeur Jean XII, fils d'Albéric, compléta sans le vouloir le triomphe de l'Allemagne, en forçant par ses désordres Othon de revenir à Rome.

3<> Agapet, diacre de Constantinople, auteur d'un livre De officio régis (ou Scheda regia) dédié à l'empereur Justinien, sur les devoirs des rois. Venise, 1509, grec-latin, 8<>. Trad. plusieurs fois en français, entre autres par Louis XIII, Paris 1612.

AGATHE, vierge sicilienne, qui subit le martyre à Catane 251, sous Décius.

AGATHON, pape 678 ou 79, f 682, condamna les monothélètes dans un concile, et refusa le premier de payer le tribut que les papes avaient coutume de payer aux empereurs lors de leur élection.

AGENDE, formulaire déterminant l'ordre du culte public; ce mot est surtout usité en Allemagne, où les différentes agendes locales ont été en partie remplacées, sous l'influence de Bunsen, avec l'exemple et l'autorité du roi de Prusse, par une agende commune, la même pour toutes, ce qui amena de nombreuses protestations et une controverse passionnée, 1822 à 29.

AGIER, Pierre-Jean, né 28 déc. 1748, f 22 sept. 1823; janséniste célèbre, président de cour à Paris; défenseur énergique de la constitution civile du clergé. Il a écrit un Traité sur le mariage, 1800, et plusieurs traductions ou commentaires sur la Bible, notamment sur l'Apocalypse, 1823. Napoléon dit de lui, en le voyant: Voilà un magistrat !

AGNÈS, jeune chrétienne appartenant à une noble famille romaine. A l'âge de 13 ans, elle attira les regards du fils du préteur Symphro-nius, qui lui demanda sa main. Elle refusa, ayant, disait-elle, un autre fiancé, Jésus-Christ. Symphronius lui fit de belles promesses, puis des menaces en exhibant devant ses yeux ses appareils de supplice. Voyant qu'elle ne s'effrayait pas, il lui donna le choix entre se faire prétresse de Vesta ou être déshonorée publiquement. La jeune fille, pleine de foi, lui répondit: € L'ange du Seigneur est auprès de moi, il me gardera. » Entièrement dépouillée de ses vêtements, elle fut conduite dans un lieu de prostitution. Là, le fils de Symphronius voulut s'approcher d'elle, mais avant qu'il pût seulement la toucher, il tomba comme frappé de la foudre. Symphronius effrayé n'osa continuer son œuvre de persécution et remit la jeune héroïne à son remplaçant Aspasius, qui la fit égorger, 21 janvier 306. Elle a été chantée par Prudence.

AGNOÈTES, secte du 6*e siècle, qui prit naissance pendant les querelles monophysites. Christ, comme homme, savait-il toutes choses, ou y a-t-il des choses qu'il ignorait? Thémis-tius, diacre d'Alexandrie, se prononça dans ce dernier sens; il fut combattu par le patriarche Timothée et par son successeur Théodosius, qui donna aux Thémistiens le surnom d'Agnoètes (qui ignore). Grégoire-le-G. condamna la secte; elle s'éteignit au 8"ne siècle.

AGNUS DEL 1* Vieux chant d'église; vient à la fin de la messe; ordinairement très doux. Dans l'Église grecque, il se chantait le matin. Vers l'an 1120, l'usage s'introduisit de répéter 3 fois Agnus Dei, répétition dont les évêques et les commentateurs donnent les explications les plus diverses. Luther le traduisit (O Lamm Gottes untchuldig) 1523, et l'introduisit dans sa messe allemande, 1526, pour être entonné aussitôt après la consécration des espèces, au moment où les communiantss'approchentde l'autel.

2° On donne aussi ce nom à de petits agneaux en cire, fabriqués avec les restes des cierges. Le pape les bénit le mardi après Pâques, la i™ et la 7n" année de son règne et la distribue comme amulettes à de hauts personnages; ils doivent préserver de la foudre.

AGOBARD, né en Espagne, 779, archevêq. de Lyon, 816, appartient à cette pléiade d'hommes distingués qui brillèrent au temps de Char-lemagne. Il restaura les églises et les couvents, enrichit le culte, fonda des écoles et des bibliothèques, et combattit plusieurs des superstitions de son temps; il fit abroger la loi Gombettequi autorisait les duels judiciaires, il fit la guerre aux épreuves dites Jugement de Dieu, à la sorcellerie, à l'adoration des images. Il travailla à l'amélioration du chant sacré. Il émit sur la doctrine de l'inspiration des Écritures des idées saines et modérées. Il joua enfin un rôle considérable dans les luttes de Louis-le-Débonnaire avec ses fils, et prit parti contre le père dans l'intérêt de l'unité du royaume, en maintenant la loi de succession telle que Louis l'avait donnée en 817, tandis que l'impératrice Judith voulait la faire modifier en faveur de son fils Charles. Il concourut à la double humiliation qui fat infligée k Louis 833, et qui devait le rendre inapte à régner. Déposé pour ce fait, en 835, par le concile de Thionville, il se réconcilia cependant avec Louis et fut réintégré dans son diocèse de Lyon, f 840- Œuvres publiées par Baluze, Paris 4666.

AGONISANTS, v. Pères.

AGR£DA (Marie d'). Célèbre visionnaire née, 1602, à Agreda, Vieille-Castille, d'une famille pieuse nommée Coronel. Elle fit ses vœux dans le couvent de l'Immaculée conception 1620, dont elle devint abbesse, 1627; passe pour être fauteur de la Mistica Ciudad (cité) de Dios, qui parut à Madrid, 1655. et qui renferme la biographie de la Mère de Dieu, tissu d'absurdités et parfois d'indécences. Elle raconte l'enfance de la Vierge qui, plusieurs fois, fut transportée dans l'empyrée; qui avait sous ses ordres, pour la servir, 900 anges commandés par l'archange Michel; qui aurait parfaitement pu parler dès sa naissance, mais ne voulut pas; qui est la princesse célébrée Prov. 8, etc. Le livre fut condamné par la Sorbonne, mis à l'index par l'Inquisition, interdit en Espagne et en Portugal, sans toutefois qu'aucun pape se soit prononcé catégoriquement. Marie d'Agreda était protégée par les franciscains, à l'ordre desquels elle appartenait, et quand, après plus d'un siècle de discussions, le pape fut mis en demeure de se prononcer, il ne réussit à éluder la difficulté qu'en demandant d'abord des preuves authentiques établissant que Marie était bien l'auteur du livre. On avait été moins scrupuleux et plus expéditif pour lancer l'Unigenitus contre Jansénius et contre le p. Quesnel, 1710. Marie f 1665. Son livre a été trad. en fr. par le p. Crozet, 3 vol. Marseille, 1696.

AGRICOLA. 1° Rodolphe, né 1443 en Hollande, étudia à Zwoll chez les Frères de la vie commune, sous A. Kempis, et travailla en Allemagne au relèvement des études, f 1485 à Heidelberg où il était professeur. Auteur d'un traité De inventione dialecticâ, qui a une direction pratique.

2o Jean, né à Eisleben le 4 avril 1492, étudia à Wittemberg et fut le commensal et l'ami de Luther. Il assista comme secrétaire à la dispute de Leipsic, 1509, fut qlq. temps professeur à Wittemberg. puis pasteur à Francfort, et prédicateur à Eisleben, où il obtint un grand succès. Il insistait sur la justification par la foi, au point de dire que la loi était inutile pour être sauvé, et l'on donna à ses sectateurs le nom d'antino-miens. D enseignait que sous la nouvelle alliance la loi ne devait plus être prêchée 1537, et il se brouilla momentanément avec Luther et Mé-lanchthon qui trouvaient du danger dans la ma nièredont il accentuait, en l'exagérant, la vérité évangélique. Il contribua à l'Intérim d'Augs* bourg 1548, où les intérêts de la Réforme étaient étrangement sacrifiés; on l'accusa même d'avoir reçu pour cela 700 couronnes, mais cette calomnie ne trouva pas de crédit. Il + de la peste à Berlin, 22 déc. 1566, âgé de 75 ans. Ses ennemis firent courir le bruit qu'il s'était suicidé. Outre ses sermons et traités de théologie, il a laissé un recueil de 750 proverbes allemands, avec un Commentaire qui lui assigne une bonne place dans la littérature de son pays.

AGRIPPA, Henri-Corneille, dit de Nettes-heirn; né à Cologne 1487, f à Grenoble 1535; savant, presque un géni\ un des hommes qui ont le plus fait pour les progrès de la science de son temps, mais d'un esprit inquiet, aventureux, mal équilibré, espèce de mélange d'Érasme et du chevalier de Hutten. Il eut une carrière digne de son caractère, parcourut presque tous les pays de l'Europe, servit le roi de France, puis Louise de Savoie comme médecin, puis Marguerite de Hollande, se rendit ensuite en Angleterre, de là à Cologne, puis à Wurz-bourg, en Suisse, à Venise, à Pavie où, docteur en théologie, il se fit aussi recevoir docteur en droit et en médecine, et où il se maria. Syndic de Metz en 1518, il entre en relation avec Lefe-vre d'Étaples, sauve une sorcière des mains de l'inquisition, retourne à Cologne, vient à Genève où il se remarie, est nommé médecin de la ville de Fribourg, etc. Il comptait finir ses jours à Cologne, mais dans une excursion qu'il fait à Lyon il est arrêté, puis, mis en liberté, il meurt en passant à Grenoble. Ses principaux ouvrages sont (tous en latin) un Traité sur l'incertitude et la vanité des sciences, trad. en fr. par Tur-quet 1682; un livre sur la Philosophie occulte, qui l'a fait accuser de magie et emprisonner à Bruxelles, une apologie (Declamatio) du sexe féminin, écrite pour faire sa cour à Marguerite, trad. p. Gueude ville. Édition complète de ses œuvres, Leyde 1560 et 1600. Partout on croit trouver déjà le souffle de la réforme, mais scepticisme, défaut de caractère ou manque de convictions, il ne se prononça jamais.

AGUIRRE (Joseph Saënz d') né 1630 à Logro-gno. Espagne; bénédictin, prof, de théol. à Salamanque, secrétaire de l'Inquisition, fait cardinal par Innocent XI, défendit dans deux ouvrages considérables l'autorité du pape contre les libertés gallicanes, f 1699 à Rome.

AHASVÉRUS, v. Juif errant.

AICHSPALT, ou Aspelt, Pierre, né près de Trêves vers 1250. f 5 juillet 1320, fut successivement chancelier de Bohême et archevêq. de Mayence. Partisan des Habsbourg jusqu'en 1303, il devint dès lors leur plus ardent ennemi et suscita contre eux l'alliance de Wenzel, roi de Bohême avec Philippe, roi de France. Intrigant et cupide il sut jouer un rôle dans l'histoire de son pays et se fit bien venir des papes auxquels il eut à faire. De mœurs régulières, il fut sévère sous ce rapport avec son clergé.

AILLY 1° Pierre d'Ailly, né à Gompiègne de parents pauvres 1330, s'éleva par son travail et ses talents aux plus hautes positions. C'était l'époque oti la philosophie scolastique commençait à baisser, et il se rangea parmi les nomina-lis'.es les plus décidés. Il a écrit un grand nombre d'ouvrages, entre autres sur l'astronomie; dans ce dernier, 1414, il cherche à montrer qu'il y a concordance entre l'histoire du monde et la conjonction des planètes, et l'on y trouve entre autres une curieuse prophétie sur les grands changements qu'il annonce pour 1789, t si le monde dure encore jusqu'à cette époque. » Notons aussi plusieurs livres philosophiques, sur la Trinité, l'âme, le but de la vie, la vertu; des commentaires sur les Psaumes, le Cantique. l'Oraison dominicale, et un grand nombre de lettres et brochures de circonstance. Sous-diacre il jouissait déjà d'une telle considération qu'il fut délégué 1357 au Concile provincial d'Am-boise. En 1362 il fut nommé docteur en théologie et dans son discours de réception il prit pour sujet l'étude de l'Écriture Sainte, comme la pierre sur laquelle le Christ a promis d'édifier son Église. C'était hardi, et toute sa vie il poursuivit le môme but, la réforme de l'Église dans son chef et dans ses membres. Il fut nommé successivement grand-maître du collège de No-varre (comptant parmi ses élèves Gerson et Clémangis) 1384. chancelier de l'Université de Paris 1389 (à la suite d'une mission réussie à Avignon), évêque du Puy 1397 et de Cambrai 1398. confesseur de Charles VI, et enfin cardinal 1411, nommé par Jean XXIII. Il souffrait beaucoup du schisme, auquel par ses différentes missions il s'était trouvé mêlé. Il avait connu P. de Lune, quand il n'était que légat à Paris 1393, il le reconnut et le fit reconnaître par la France, lorsqu'il fut devenu le pape Benoît XIII. mais il finit par l'engager, ainsi que Jean XXIII à donner sa démission. Il prit part au concile de Pise, mais malgré sa modération, ne put en obtenir aucune réforme. En 1414, envoyé comme légat en Allemagne, il écrivit encore pour demander la démission volontaire des trois papes, et il finit par arriver le 17 nov. à Constance, 5 mois après l'ouverture du Concile. Il obtint que les votes auraient lieu par nations, et non par têtes, ce qui consterna le parti ultra -montain. Il stimula le zèle des princes. Il fit voter la supériorité des conciles sur les papes, et assura ainsi la démission ou la déposition des trois papes qui se partageaient le pouvoir. Tout allait bien et l'on pouvait entrevoir une réforme comme la conclusion de tant d'efforts, quand d'Ailly, par une de ces inconséquences qui abondent dans sa vie, fit tout échouer. Sigismond, les princes allemands, Gerson et beaucoup d'autres, voulaient que le concile s'occupât immédiatement de la réforme de l'Église avant l'élection d'un nouveau pape; d'Ailly se joignit aux cardinaux qui voulaient au contraire que l'on commençât par l'élection du pape; il assura ainsi le succès du parti romain et peut revendiquer le triste honneur d'avoir compromis l'œuvre du concile. Il concourut à la sentence contre Huss. qu'il condamna non comme réaliste, mais comme disciple de Wicleff. II. demanda avec Gerson, mais en vain, la condamnation de Jean-Petit qui avait essayé de justifier l'assassinat du duc d'Orléans, et proposa entre-temps une réforme du calendrier. Mécontent de l'issue du concile, et peut-être aussi mécontent de lui-même, il retourna à Cambrai où il passa les dernières années et d'où il continua de s'occuper avec intérêt du collège de Navarre. Envoyé en mission par Martin V en Allemagne, il f en route 1420; son corps fut transporté à Cambrai et enterré dans la cathédrale. Les catholiques l'ont surnommé l'Aigle de France et le Marteau de ceux qui s'écartent de la vérité; les protestants le comptent parmi les précurseurs de la Réforme. Les uns et les autres vont peut-être trop loin. Ses principaux écrits ont été publiés à Strasbourg, 1490, in-fol.

ATT,

2° D'Ailly, noble famille de Picardie, dont les titres remontent à 1090, et qui a donné à la Réforme deux capitaines, Louis et Charles, tués l'un et l'autre à la bataille de Saint-Denis 1567, et une fille, Marguerite, qui épousa 1581 François de Châtillon, 4me fils de l'Amiral, femme de tête et de courage qui, en l'absence de son mari, repoussa en personne les ligueurs commandés par Salard et fit leur capitaine prison-nier 1590. Le d'Ailly de laHenriade, liv. VIII, n'est qu'une fiction bien réussie.

AIMOIN ou Aymoin 1<> moine de Saint-Germain des Prés, f 889, auteur de plusieurs vies de saints qui ne sont pas sans valeur.

2<> Chroniqueur français, né à Villefranche, Périgord, vers 950, f 1008, disciple d'Abbo de Fleury, a écrit une Hist. des Francs de 353-654, en cinq livres. Les deux derniers, qui sont les meilleurs, paraissent être d'une main étrangère.

AIX-LA-CHAPELLE. Ville célèbre déjà bien connue des Romains, puisqu'on y retrouve partout leurs traces sous la forme de monnaies, de bains, d'inscriptions, d'aqueducs, mais qui est nommée pour la première fois dans une donation de Pépin 754. Cette donation est datée des Aquis Grani palatio, du palais d'eaux de Gra-nus, soit que Granus fût le propriétaire du palais, soit que, remontant beaucoup plus haut, comme quelques-uns le pensent, ce soit un Romain, Gratins, qui ait fondé la ville sous Adrien, vers 124. Son nom d'Aix, Aqua, vient incontestablement des eaux thermales sulfureuses et ferrugineuses que Ton y trouvait en abondance, et qui décidèrent Gharlemagne à s'y fixer et à s'y faire bâtir une chapelle. Une des tours de l'hôtel de ville porte encore aujourd'hui le nom de Gr&nus. Aix-la-Chapelle doit aux Carlovin-giens toute sa grandeur, et ce n'est guère que par eux qu'elle touche à l'histoire de l'Église. Pépin y possédait un palais, et il y passa les fêtes de NoPl 765 et celles de Pâques. Gharlemagne y célébra Noël en 768 et y passa dès lors tons les hivers, quand il n'était pas retenu par de lointaines expéditions. Il y fit construire la cathédrale de Sainte-Marie, seul reste aujourd'hui de la grande architecture carlovingienne, pour laquelle Adrien lui envoya de Ravenne des colonnes, du marbre et des mosaïques. Elle fut achevée vers 796, et inaugurée, dit-on, par Léon III. Elle est construite en rotonde, dans le style byzantin, et non dans le style des basiliques romaines. Un certain nombre de reliques, aussi curieuses que problématiques, y sont renfermées; les petites, clous, morceaux de la croix, épines, dent de sainte Catherine, cheveux de Jean-Baptiste, etc., sont dans des vases de vermeil, facilement abordables pour les visiteurs; les autres, les grandes, langes du Christ, robe de la Vierge avec quelques taches de son lait, linge dans lequel fut enveloppée la tête de Jean-Baptiste, le linge enfin qui ceignait 1? corps du Seigneur sur la croix, ne s'exposent que tous les 7 ans et avec une pompe qui attire une foule de pèlerins, dont les offrandes forment un des gros revenus du chapitre. Mais ce qui a donné à Aix-la-Chapelle sa plus grande notoriété, ce sont les nombreux capitulaires (ou lois), environ 65, que Gharlemagne publia, réédita, ou fit élaborer par ses assemblées générales, notamment le 23 mars 789, le 28 oct. 797, en avril et oct. 802, en nov. 809, etc. On discutait de tout dans ces assemblées, mais Charlemagne décidait seul. On s'occupait d'administration et de législation, parfois de l'État, souvent de l'Église, de sa discipline, de son organisation, de ses dogmes. En 811 Gharlemagne se plaint des difficultés qu'il rencontre dans son œuvre et du peu de concours qu'il trouve chez les ecclésiastiques et chez les laïques. En 813 il convoque des synodes à Mayence. Reims. Chalon-sur-Saône, Arles et Tours, qui doivent préparer des travaux pour une assemblée générale convoquée à Aix-la-Chapelle la même année. Il f le 28 janvier 814, et il est enterré dans l'église de Sainte-Marie. L'an 1000, à Pentecôte, Othon III fait rechercher son tombeau dans l'église que les Nor-| mands avait saccagée en 881, et il donne à l'archevêque de Cologne les divers ornements qu'il y trouve, couronne, croix, sceptre, épée, etc. En 1165 Frédéric I** fait rouvrir le tombeau et veille à ce que les restes de Charles soient recueillis par l'archevêque de Cologne et l'évêque de Liège et soigneusement conservés dans un cercueil spécial. — Louis-le-Débonnaire continua de résider à Aix-la-Chapelle. Il y avait été couronné; il y convoqua 816 une assemblée ecclésiastique chargée de régler sur certains points les détails de la vie des religieux, hommes et femmes, chanoines et chanoinesses; ces prescriptions ne comptent pas moins de 80 chapitres, et furent promulguées en 817. D'autres assemblées y furent tenues encore en 819, en 825 pour la translation des os de saint Hubert en 831 pour la justification de l'impératrice Judith; enfin enS40un concile est appelé à juger Lothaire et le dépose. A partir de ce moment l'unité du royaume disparaît pour un temps et l'importance d'Aix-la-Chapelle diminue; ce n'est plus que par un reste de respect traditionnel qu'à partir du 10™e siècle on y couronnera les empereurs d'Allemagne; d'Othon I«r 936 à Ferdinand I«r 1558. on n'en compte pas moins de 29. — Il faut encore mentionner parmi les souvenirs religieux de cette ville la cathédrale où reposent les restes d'Adalbert; commencée par Othon III. elle ne fut achevée que sous Henri II, 1005.

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AKIBA, célèbre rabbin juif, qui vivait vers l'an 100; directeur d'une école à Bani-Brak, auteur d'un livre sur la loi. d'une étude sur la création et d'un traité sur l'alphabet; ces deux derniers ont fait de lui un des pères de la cabbale. Il s'attacha à la révolte de Bar-Kochba. Les Romains l'ayant fait prisonnier, le mirent k mort de la manière la plus cruelle; ils lui arrachèrent la peau avec des crochets de fer; il avait 120 ans. Le Talmud de Jérusalem nomme comme son bourreau Jursus Rufus qui était gouverneur de Palestine l'an 135. Dix autres savants juifs souffrirent le martyre avec lui.

ALACOQUE, Marie, née le 22 juillet 1647 à Hautecour, diocèse d'Autun, fut mise au couvent à 8 ans et entra à Paray-le-Monial dans Tordre des salésiennes, ou visitandines, le 25 mai 1671. Elle devint de bonne heure célè-' bre par ses extases. Ayant été guérie d'une paralysie, elle l'attribua à la Vierge et, pour lui faire honneur, prit dès lors le nom de Marie au lieu de celui de Marguerite, qu'elle tenait de sa marraine. Ses visions et ses entretiens avec Dieu se multiplièrent. Elle a inauguré le culte du Sacré-Cœur par son petit livre: La dévotion au cœur de Jésus (publ. par le P. Crozet 1698), qui, développé par le jésuite Gallifet, est devenu le point de départ d'un culte nouveau qui a eu sa vogue. Elle s'était entaillé le nom de Jésus sur la poitrine, + 17 oct. 1690, le jour qu'elle avait fixé. Canonisée 24 juin 1864. — v. 4 Chants, dans Vert-Vert, de Gresset, Amsterdam 1748. Vie, par l'abbé Daras.

ALAIN. Il y a eu plusieurs théologiens et philosophes de ce nom: Alain de Lodio (du Puy) méridional; Alain, évêque d'Auxerre, et Alain de Lille, ou de l'Isle (de Insulis), ces deux derniers pouvant bien aussi n'être qu'un seul et même personnage. L'incertitude sur l'identité jette aussi quelque confusion sur la vie. On se demande si Alain de l'Isle est né à Lille en Flandre, ou dans le Bordelais, ou dans le comtat Venaissin; on le fait même naître à Ryssel, Flandre. Il aurait été moine cistercien et aurait passé une partie de sa vie en Angleterre. Selon d'autres, il aurait enseigné la théologie à Paris, avec grand succès, et aurait cultivé la philosophie sous la forme gracieuse de la poésie, f 1203. Ses œuvres complètes ont été publiées par Ch. de Visch. Anvers 1654. Dans le nombre il faut compter l'Anti-Claudien, poème allégorique en 9 livres, dans lequel il traite des devoirs de l'homme bon et parfait; il dit que la raison peut bien par ses seules forces découvrir les vérités de l'ordre physique, mais que pour les questions religieuses elle doit se soumettre à la foi; De planctu naturœ, des soupirs de la création, où il déplore l'immoralité de son temps; De arte calholicœ fidei, 5 livres où il cherche à démontrer qu'il faut combattre les hérétiques non par la force seulement, mais par la raison, point de vue étonnant pour le 12me siècle, et en désaccord avec celui de l'Anti-Claudien; une étude, qui n'est pas sans valeur, sur l'histoire de l'Angleterre jusqu'à Henri IL Deux autres ouvrages, une Vie de saint Bernard et une Summa quadripartite réfutation en 4 livres, contre les hérétiques (cathares), les vau-dois, les juifs et les païens, qui sont publiés parmi ses œuvres, devraient plutôt être attribués à l'évêque d'Auxerre. La Summa, dédiée à Guillaume, comte de Montpellier, serait même, selon quelques-uns, l'œuvre d'Alain de Podio, Provençal, dont un traité de morale a été découvert il y a une quarantaine d'années dans les bibliothèques de France. * ALBAN ou Albain 1° Soldat romain, de Veru-lam. le l«r martyr de l'Angleterre, f 302 dans la persécution dioclétienne. 2° A. deMayence, martyr du 4™ siècle. Originaire de Namsia, il fut envoyé par Ambroise dans les Gaules où il trouva la mort. Il a porté sa tête jusqu'au lieu choisi pour sa sépulture; il n'est pas le premier qui ait fait ça. Une église lui fut élevée par Charle-magne, pour en faire le tombeau de sa femme Fastrade 805. Plus tard le couvent devint un chapitre noble, avec droit de battre monnaie.

ALBE, Fernand-Alvarez (duc d'), né 1508, général espagnol sous Charles-Quint et Philippe II. Négociateur habile et militaire distingué, il fit les campagnes de Hongrie, de Tunis, d'Allemagne (Miihlberg) contre les protestants, et fut nommé 1567 gouverneur des Pays-Bas avec mission spéciale d'écraser les hérétiques. Il réussit; en 4 ans il en fit périr 18,000 sur l'échafaud. v. Hollande, Gueux. Il tomba en disgrâce à cause du mariage de son fils 1579, et f 12 décembre 1582. Granvelle regrette pour lui sa mission en Hollande.

ALBER ou Aulbert, Matthieu, né à Reutlin-gen 11 déc. 1495, épousa Clara Baier 1524, f 2 déc. 1570, entouré de ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants. Il compte parmi les plus zélés réformateurs du sud de l'Allemagne. Sa jeunesse fut difficile; comme Luther, il dut chanter dans les rues pour gagner sa vie. A 18 ans il obtint à Tubingue une place qui lui permit d'étudier en échange de leçons qu'il donnait, et dès 1516, sa ville natale, sur la recommandation de Mélanchthon, lui vota une bourse pour l'achèvement de ses études. Consacré à Constance, il fut appelé comme prêtre à Reutlingen et se mit à prêcher l'Évangile, sans se rendre bien compte encore du mouvement qui l'entraînait. Il finit par être interdit; l'évêque, le pape et l'empereur lancèrent contre lui leur sentence, qui fut affichée le même jour aux portes de toutes les églises. Il se décida à comparaître à Esslingen devant le tribunal de l'empire; 68 hérésies lui étaient reprochées; il en avoua 67 et les justifia, mais il nia d'avoir parlé avec mépris de la Vierge et de l'avoir appelée une blanchisseuse. La franchise de ses explications lui gagna le cœur de ses juges qui, au bout de trois jours, le laissèrent aller. Il avait dit: « Le pardon du pape nettoie les bourses, le pardon de Christ nettoie les consciences. » Il se montra ferme dans la révolte des paysans et réussit à maintenir à Reutlingen l'ordre et la tranquillité. Malgré ses bonnes relations avec Zwingle, il resta fidèle à la doctrine des sacrements de Luther. Il fit la connaissance du grand réformateur seulement en 1536. En 39 Tubingue lui conféra le titre de docteur. Ne voulant pas accepter l'Intérim, il quitta Reutlingen le 25 juin 1548 et fut nommé pasteur, antistès et conseiller ecclésiastique à Stuttgart par les ducs Ulrich et Christophe; enfin en 63 abbé de Blaubeuren. On a de lui quelques sermons et un catéchisme.

ALBERT lo célèbre philosophe scolastique, surnommé le Grand à cause de l'étendue et de la variété de ses connaissances. Né entre 1193 et 1205 à Lauingen, Souabe, de la famille des comtes de Bollstœdt, f Cologne 1280. Il étudia à Padoue et à Paris, entra 12Î21 dans l'ordre des dominicains, enseigna à Paris, fut nommé provincial de son ordre à Cologne, où il continua d'enseigner la philosophie; puis évéque de Ra-tisbonne 1260; il n'y resta que 3 ans et se hâta de venir reprendre sa cellule à Cologne, pour se consacrer exclusivement à l'étude. Il était si savant que ses contemporains lui firent, bien à tort, la réputation de sorcier qu'il a conservée jusqu'à ce jour, et lui prêtèrent une foule d'histoires merveilleuses. Ses œuvres ont été publiées par Jammy, Lyon 1651, 21 vol. fol. Son principal mérite est d'avoir fait connaître les œuvres d'Aristote, qu'il étudia sur des mss. traduits de l'arabe. Il est essentiellement scolastique; pour lui la foi est purement objective; c'est l'adhésion au symbole de l'Église; le travail de l'âme, de la conscience et de l'intelligence n'y entrent pour rien. La version de la Vulgate est seule authentique. Les pères de l'Église étaient inspirés, c'est pour cela qu'ils portent le titre de saints. Les magiciens d'Égypte ont fait de vrais miracles, mais seulement en précipitant l'action de la nature, car la verge de Moïse aurait pu tôt ou tard se changer en serpent par le seul fait de la décomposition et de la moisissure; les démons n%ont fait que hâter le procédé ordinaire. Les astres n'exercent pas une influence directe sur l'histoire, mais indirecte, en agissant sur la végétation, la température et le climat. Il se pose des questions difficiles: Celui qui a fait que Dieu soit en même temps homme, peut-il faire aussi que le noir soit blanc? Les démons sont-ils tous tombés volontairement, ou Lucifer les a-t-il entraînés ? Etait-il plus difficile à Dieu de faire le monde ou de le racheter ? On remarque cependant aussi chez Albert quelques traces de néo-platonisme, et il est probable qu'elles tiennent à ce que les œuvres d'Aristote ne lui étaient parvenues qu'en latin, et dans des traductions faites de l'arabe. En somme, s'il est vrai qu'il ait été l'un des scolastiques les plus savants de son temps, il est également vrai que ses connaissances n'étaient ni bien digérées, ni bien réglées; c'étaient des matériaux péniblement rassemblés, mais non coordonnés et par conséquent sans emploi. Ce qu'il a fait et laissé de mieux, c'est son élève Thomas d'Aquin.

2° Albert, antipape; v. Pascal II.

3° Albert, ou Albrecht; v. Albrecht.

ALBIGEOIS. La secte des cathares (Ketzer), ou bonshommes, s'était rapidement répandue dans le sud de la France, en particulier dans le comté de Toulouse et dans la contrée d'Albi. Elle avait en même temps changé de nom, soit à cause de certaines transformations dans sa doctrine, soit à cause de sa prédominance numérique et de ses nombreux adhérents dans le pays. Le nom d'albigeois devint l'appellation générale de tous ceux qui s'opposaient au cléricalisme romain, et les historiens catholiques eux-mêmes travaillèrent à entretenir la confusion en comprenant sous un seul nom les sectes les plus diverses. Puy Laurens ne connaît d'ennemis que les ariens et les vaudois, ou lyonnais; pour lui les albigeois rentraient donc dans la désignation de lyonnais, et cette erreur s'est accréditée au point que Basnage lui-même la partage. Ce qui dans tous les cas rend la confusion plus facile encore, c'est que tous les livres et documents des albigeois ont été détruits par leurs ennemis et que nous ne les connaissons que par ceux qui les ont condamnés. Quelques faits cependant paraissent établis, c'est que lorsque des vaudois et des albigeois se rencontraient, ils fraternisaient, étant unis par une pensée commune; c'est que sous le nom d'albigeois se rencontraient les tendances les plus diverses, au moins quant aux chefs et docteurs, au point qu'on a cru reconnaître chez les uns des tendances manichéennes et dualistes, chez les autres l'influence gnostique, et chez la plupart un ascétisme prononcé ou inconscient. Enfin ils possédaient l'Écriture, au moins le N. T., et la tenaient en honneur; le principal reproche que leur font leurs adversaires, c'est précisément d'avoir repoussé les dogmes et les pratiques romaines, le purgatoire, les prières pour les morts, le pouvoir temporel des papes, les richesses du clergé, les ornements d'église, les statues, les images, les crucifix, le culte de Marie et des saints, la messe, la transsubstantiation, la confession obligatoire, le sacrement de la prêtrise, etc. Dans tous les temps on a vu les mêmes empiétements provoquer les mêmes résistances, et les pauliciens, les bulgares, les bogomiles, les patarins, les publicans, les albigeois, les vaudois et la Réforme, ont pu se succéder dans l'histoire sans qu'il y ait cependant entre eux d'autre lien que l'analogie de leurs tendances, et sans qu'on puisse les faire découler les uns des autres. Le clergé d'alors était d'ailleurs tellement décrié qu'il était de mode de s'en détourner avec affectation, et, quand on voulait exprimer une répugnance invincible, au lieu de la locution traditionnelle: J'aimerais mieux être un juif, on avait coutume de dire en jouant: J'aimerais mieux être un chapelain. Des causes externes et internes expliquent donc le nombre considérable d'albigeois qui se trouvaient alors dans le midi de la France, en même temps que la diversité de vues, de caractères et de personnalités qui se groupaient sous ce nom. On comprend aussi qu'il ait fallu à la papauté 50 années d'efforts, et l'emploi de toutes ses armes spirituelles et temporelles, pour venir à bout de cette protestation des consciences et pour maîtriser cette tentative de réforme. — Trois phases caractérisent la campagne entreprise par Rome contre les albigeois; la 1", qui fat la plus courte, fut celle des prédications et des excommunications; la 2®* fut la croisade, la plus meurtrière; la rétablissement de l'Inquisition, la plus cruelle et la plus odieuse. Les papes Alexandre III, Innocent III, Honoré III et Grégoire IX rivalisèrent d'ardeur dans cette lutte d'extermination. C'est une longue et lamentable histoire, dans laquelle on vit des villes de 40 et de 60.000 âmes passées au fil de l'épée, et qui ne fit pas moins d'un million de victimes; nous ne saurions la raconter en détail. C'est Alexandre III qui avait le premier excommunié Valdo et ses adhérents. Lucius III renchérissait sur lui et lançait «l'éternel anathème » 1181. Mais cela n'aboutissait à rien. Innocent III comprit qu'il y avait mieux à faire, et il envoya en France deux légats, Reinerius Saccho, et Guido le fondateur des Hospitaliers, pour stimuler, surveiller et informer. Le beau-frère du roi d'Angleterre, Raymond VI, était alors comte de Toulouse; quoique catholique, il ne voulait pas de persécution contre ses sujets albigeois; il résiste aux ordres du pape et est excommunié. Douze abbés de Cîteaux accompagnent partout les légats, et renonçant à des prédications qui ne convertissent pas, ils prêchent la croisade, sous la direction de deux nouveaux légats, cisterciens comme eux, Pierre de Castelnau (Château-neuf) et Raoul, bientôt renforcés par l'arrivée de leur abbé, le terrible Arnaud (ou Arnold) Amaury 1204. Un nouvel aide leur est donné en la personne de Folquet, troubadour converti, qu'Innocent nomme évêque de Toulouse et qui se propose d'expier aux dépens des albigeois les scandalep de sa vie passée. Mais rien ne bouge encore, ni peuples, ni princes. A ce moment viennent à passer deux Espagnols. Diégo. évêque d'Ossuna et son sous-prieur Dominique. Voyant les légats découragés par l'inutilité de leurs efforts: Allez à pied, leur disent-ils, sans argent, sans or, imitant en tout les frères apostoliques, en pauvre appareil, comme les parfaits. Eux-mêmes donnèrent l'exemple, et ils allèrent de lieu en lieu avec Raoul et Castelnau, s'entre-tenant avec les hérétiques et notant toutes les circonstances dont ils pouvaient avoir à se servir plus tard. C'était le commencement de l'Inquisition. Mais ni la parole ni les prières ne suffisant encore, il était facile d'entrevoir le moment prochain où il serait fait appel à la force brutale. Un accident trancha la question. Le légat Castelnau ayant insulté en face Raymond VI, un des gentilshommes du comte le frappa de son épée et le tua. Innocent y répondit par un cri de fureur et par l'appel à une croisade; 30.000 hommes furent bientôt sur pied contre Raymond et contre les albigeois.

Raymond épouvanté fait sa paix aux conditions les plus humiliantes; il est amené presque nu à la porte de l'église de Saint-Gilles, où il est introduit par le légat qui le frappe de verges, et il s'engage à se joindre aux persécuteurs. Quant aux albigeois, ils sont massacrés sans merci. Que devons-nous faire? demandent les croisés, vêtus de noir et blanc. Nous ne pouvons pas toujours distinguer les bons et les mauvais. — Tuez-les tous, répond le légat; le Seigneur reconnaîtra ceux qui sont siens. Ainsi tombèrent successivement Béziers 1209, Carcassone. Minerve. Narbonne; et bientôt Toulouse, puis Avignon 1226, en même temps que les campagnes étaient systématiquement saccagées et détruites. avec les récoltes de l'avenir, par ces furieux qu'aveuglait le fanatisme. Après le légat cistercien, après Arnaud, le pape avait remis l'exécution de ses ordres à un ancien croisé. Simon, comte de Montfort, homme aussi féroce qu'ambitieux, et qui apporta aux malheureux persécutés le pillage, l'incendie, le viol et l'assassinat. Il périt lui-même dans le second siège de Toulouse, écrasé par un bloc lancé sur lui 1218. Son fils Amaury reprit son œuvre avec ardeur 1219, aidé par le nouveau roi de France Louis VIII, et béni par le nouveau pape Honoré III. C'était une nouvelle génération qui commençait; il ne lui restait plus beaucoup de lauriers à cueillir; elle renouvela àMarmande les massacres de Béziers, et tout fut dit, ou à peu près. Le fils de Raymond, qui avait succédé à son père, fut réduit comme lui à sauver par des lâchetés sa vie et l'ombre qui lui restait de son pouvoir. Le pays était détruit et l'Inquisition s'installa sur ses ruines, dans un château des environs de Narbonne, pour achever ce qu'une guerre de 20 ans n'avait pu faire. Dès ce moment les albigeois déclinèrent visiblement en France; ils avaient été exterminés, mais non vaincus, encore moins persuadés. Ceux qui échappèrent aux massacres, ne pouvant plus obtenir d'asile en France chez aucun des princes régnants, se dispersèrent en divers lieux: on les retrouve à la fin du 13me siècle en Italie, surtout en Calabre, en Lombardie et dans les vallées; ils étaient nombreux à Milan, ville que Mathieu Pâris appelle le refuge et le réceptacle de tous les hérétiques. On en trouve également en Espagne, en Allemagne et en Bulgarie. Ils vivaient dans une grande union, jusqu'au moment où ils se divisèrent sur la doctrine des deux principes. A la longue ils disparurent, ou se fondirent soit dans les vaudois, soit dans les sectes de la Bohême.

ALBO, Joseph, rabbin juif qui vivait en Cas-tille vers 1425; auteur d'un traité fort estimé Ikaritn, c.-à-d. les éléments de la foi. En opposition à Maïmonides qui en comptait 13, il n'en compte que 3, qui selon loi résument toute la religion juive: l'existence de Dieu, la révélation et la rétribution.

ALBRECHT (en franç. Albert) 1<> Apôtre de la Iivonie. Il était chanoine à Brème quand, à l'ouïe des fâcheuses nouvelles de la Baltique, son archevêque décida de l'envoyer comme missionnaire chez les Livoniens. Avec les mœurs du temps, il s'agissait d'une expédition militaire autant que religieuse, et Aibrecbt, avant de s'embarquer, visita les cours de Danemark et d'Allemagne, qui lui fournirent une flotte de 23 vaisseaux et un grand nombre de soldats. Arrivé à l'embouchure de la Dwina, il y fonde la ville de Riga, qui devait être et qui devint après quelques années le boulevard de l'Église dans ces contrées. Il remporte quelques succès militaires et en profite pour prêcher la foi; mais à chaque instant des révoltes mettent en péril la mission, et il en vient à l'idée de fonder un ordre de chevalerie, qui sera une armée permanente sous les ordres de l'évêque, v. Frères de la milice, ou de l'épée. C'était une imitation de Tordre des templiers. Dès lors et pendant de longues années la vie d'Albrecht. monotone dans son agitation, ne présente plus qu'une suite de petites batailles, interrompues par d'incessants voyages en Allemagne et à Rome, à la recherche de chevaliers et de moines. La mission est compromise par les mesquines rivalités des Russes, des Danois, des Suédois, qui contestent les droits des Allemands. Le pape lui-même ne sait plus à qui donner raison. Enfin la paix 9e fait 1224. et le pays est divisé en 5 évêchés. Aibrecbt f 1229, après un ministère laborieux et dévoué de 30 années, laissant à son frère Her-mann l'évêché de Dorpat.

2° Albrecht, fils de Jean, électeur de Brandebourg. né 1490, f 24 sept. 1545, fut nommé en 1513 archevêque de Magdebourg (à 23 ans) et en 1514 archevêque de Mayence, cumul jusqu'alors sans exemple, et que le pape n'autorisa qu'en l'obligeant à faire lui-même les frais du Pallium, le chapitre de Mayence n'étant pas en état de les supporter. C'était une somme de 30,000 ducats; la maison Fugger lui en fit l'avance, et c'est pour pouvoir la rembourser qu'il prit à ferme la vente des indulgences dont il confia l'exploitation à un certain nombre d'individus, entr'autres Tetzel. D entra en lutte avec Luther, dont il dédaigna d'ailleurs de lire les écrits, laissant, dit-il, ce soin à de plus savants. Il fut nommé cardinal à la diète d'Augs-bourg 1518, et concourut pour sa part à l'élection de Charles-Quint 28 juin 1519. Il aimait les beaux-arts, les ornements d'église, les lettres et les sciences. Il était l'ami d'Erasme et reçut chez lui Capito en visite. Ni méchant, ni vicieux, mais sans aucune espèce de convictions.

Il avait fondé en 1506 l'université de Francfort-sur-l'Oder.

3° Albrecht de Brandebourg, margrave de Brandebourg, premier duc de Prusse, né 17 mai 1490, destiné de bonne heure à l'état ecclésiastique, entra le 13 févr. 1511 dans l'ordre teutonique et en fut nommé grand-maître quelques jours après, ayant à peine 21 ans. Après une courte guerre entre le roi de Pologne et la Russie 1519, bientôt suivie d'une trêve de 4 années, il vint en Allemagne et ne tarda pas à se convaincre que l'ordre avait fait son temps et que sa résurrection morale était impossible. Luther lui conseilla d'en finir avec une antiquité qui n'avait plus de sens, de se marier et de séculariser son duché. Le prédicateur Osiandçr. de Nuremberg, exerça sur lui une grande influence dans le même sens, mais ce ne fut qu'en 1525. et après s'être mis en règle avec le roi de Pologne, qu'il se décida à donner sa démission de grand-maître, à se joindre au mouvement de la réforme et à en favoriser l'introduction dans ses États, sans toutefois jamais rien faire contre les catholiques. Il épousa en 1526 Anna-Dorothée, fille du roi de Danemark. Le roi de Pologne, Sigismond, son oncle, lui donna la Prusse inférieure et le titre de duc; il le soutint aussi contre Charles-Quint qui le sommait de restituer à l'ordre les domaines de Prusse qu'il prétendait lui appartenir de droit. La jalousie d'une partie de la noblesse, les animosités cléricales, les revendications teu-toniques et impériales, un soulèvement des paysans, les sectes qui s'établirent autour de lui, assombrirent ses dernières années. Il perdit en 1547 sa femme bien-aimée et épousa en secondes noces Anne-Marie, fille du duc de Brunswick. Il défendit toujours la liberté religieuse et organisa en 1549 la ligue des princes contre l'intolérance de l'empereur; il soutint les Fr. moraves aussi longtemps qu'il le put, mais fut contraint à la fin de leur imposer la confession d'Augsbourg, ce qui en décida un grand nombre à émigrer. Avec l'âge, et dans des circonstances exceptionnellement difficiles, son énergie fléchit et il se laissa arracher par une commission polonaise le gouvernement et l'administration de son duché, dont il ne fut plus pendant quelques années que le malheureux titulaire, + le 20 mars 1568, âgé de 78 ans, après avoir régné 57 ans. C'est de lui que date réellement la Prusse actuelle.

ALBRET, v. Jeanne.

ALCANTARA, nom arabe, qui signifie pont, passage, et qui a été donné ainsi à plusieurs localités, en Egypte, en Algérie et ailleurs. La ville de ce nom la plus connue est située sur le Tage, en Estramadure; elle est célèbre par son beau pont de pierre construit sous Trajan. Alphonse IX, de Castille, prit cette ville sur les Maures en 1213 et la donna aux chevaliers de Calatrava, qui la remirent à leur tour à Nuno Fernandez, 3^e grand-maître de Tordre de Saint-Julien du Poirier. Les deux ordres vécurent quelque temps en bonne harmonie, mais ils se divisèrent à propos de l'élection d'un grand -maître, et les derniers venus se groupèrent sous le nom d'Ordre d'Alcantara. ordre exclusivement militaire, occupé contre les Maures, et qui compta 37 grands-maîtres; le dernier, Juan de Zuniga, donna sa démission 1495, et fut nommé archevêque de Séville et cardinal. Leur drapeau portait sur fond d'or la croix de l'ordre, les armes de Castille et Léon, et le poirier. Ils étaient soumis à la règle de saint Benoît, sous la forme cistercienne. Paul III leur permit de se marier, mais une fois seulement. Leurs vœux portaient sur trois points: Obedientia. castitas conjugalis, et conversio Morum. Le roi Joseph supprima 1808 les revenus de cet ordre, qui a été lui-même définitivement supprimé 1835.

ALCUIN naquit à York, d'une famille distinguée, 726 ou 735. Élevé dans le monastère de sa ville natale, où les études étaient très soignées, il eut pour maîtres Bède-le-Vénérable, l'archevêque Egbert et le savant Aelbert. Celui-ci ayant été nommé archevêque, Alcuin lui succéda comme directeur et réussit à maintenir la haute réputation de cette école. Il fit en 766 et en 780 le voyage de Rome, et rencontrai Parme Charlemagne qui le pressa de venir s'établir en France. Il y vint en effet 782 et reçut aussitôt 3 abbayes, qui devaient assurer sa position. Dès lors il fut aussi le confident et le conseiller du monarque, son premier ministre, chargé de l'organisation du culte et de l'impulsion à donner à l'instruction publique à tous les degrés. II fonda des écoles à Paris, à Tours, à Aix-la-Cha-pelle, et dirigea lui-même l'École du Palais, destinée à l'empereur et k son entourage, et qui l'accompagnait partout où il allait, classe de conversation plus que d'enseignement méthodique, dont les auditeurs étaient les princes et les princesses de la famille, frères, sœurs, fils et filles. Pour donner une base à l'enseignement, aux maîtres et aux élèves, il s'occupa de multiplier le nombre des manuscrits, mais il fallut avant tout les restaurer, car la plupart étaient dans un état déplorable. Ce fut un de ses premiers travaux, et il s'en occupa toute sa vie. Il procéda lui-même à la revision des livres sacrés, dont il fit hommage à l'empereur, mais il ne travailla pas avec moins de zèle à la restauration des mss. de la littérature profane; il revit entre autres et copia les comédies de Térence. Enfin ses Lettres (on en possède 232) et ses nombreux ouvrages sur les sujets les plus divers, montrent combien était vaste ce génie auquel Charlemagne avait confié les branches les plus importantes de son administration. La théologie, la jurisprudence, l'astronomie, les lettres lui ont également familières et l'on reconnaît partout son influence dans les célèbres capitulaires. Charlemagne lui confia de nombreuses missions, et Alcuin s'y distingua par son tact autant que par sa modération. Mais quelle que fût l'estime que lui portait l'empereur , le voisinage d'un grand fatigue à la longue le subordonné, et Alcuin, rassasié d'honneurs, souffrant d'infirmités, sollicita la permission de se retirer de la cour et d'aller vivre dans la retraite 796. Charlemagne finit par le lui accorder et lui donna l'abbaye de Saint-Martin de Tours, une des plus riches du royaume. Ce ne fut pas une vie oisive. Alcuin rétablit la règle et l'ordre, enrichit la bibliothèque, et continua d'enseigner; il compta parmi ses auditeurs Amalaire et Raban Maur. Charles essaya plusieurs fois de le rappeler à sa cour; il eût voulu même, 800, l'emmener à Rome pour son couronnement; mais Alcuin resta inflexible, sa santé ne lui permettait plus aucun déplacement; il renonça peu à peu à toute activité, se démit de ses abbayes 801, et ne s'occupa plus que de se préparer « à paraître devant le juge éternel. * f 19 mai 804. Ses œuvres ont été publiées par Duchesne, Paris 1617, et par Froben. Ratis-bonne 1777. — II signait quelquefois Flaccus Albinus, nom de guerre qu'il avait pris à l'École du Palais, de même que Charles s'appelait David, Amalaire Symphosius, Gisla Lucie, etc.

ALDE, imprimeur vénitien, un des premiers éditeurs du N. T. grec 1518 d'après le texte d'Érasme. C'est lui qui mit en relations le savant bâlois avec celui qui fut plus tard le cardinal Aléandre.

ALDEGONDE, sainte, de race royale, née 630 en Hainaut, célèbre par ses vertus et ses visions, fonda le couvent de Maubeuge auquel elle légua ses biens, et f 684.

ALEANDRE, Jérôme, né 13 févr. 1480 à La Mothe, sur les frontières du Frioul et de l'Is-trie, se distingua de bonne heure par sa mémoire et ses vastes connaissances dans les langues, les mathématiques, la médecine et la théologie. A Venise, les Aide le mirent en relation avec Érasme. Il passa quelque temps à la cour d'Alexandre VI. Louis XII l'appela en 1508 à Paris, comme professeur de belles-lettres, puis comme recteur de l'université. Léon X le nomma successivement secrétaire du cardinal de Médicis. bibliothécaire du Vatican, et enfin légat en Allemagne. C'est en cette qualité qu'il siégea à Worms contre Ldther 1521; il parla pendant 3 heures pour s'opposer à l'appel de Luther à la diète et pour demander que ses line* fassent brûlés. On lui attribue la rédaction de Fédit de Worms. Il combattit violemment la réforme dans les Pays-Bas et fit brûler à Bruxelles 2 moines augustins d'Anvers. Clément VII le nomma archevêque de Brindes 1524 et lui confia plusieurs missions. Fait prisonnier à Pavie à la suite de François il se racheta pour 500 écus d'or. Paul III le nomma cardinal et lenvoya une 3®«foisen Allemagne, mais sans succès, f 31 janvier 1542. — Auteur d'un Lexicon grœco-latinum, Paris 1512.

ALÉGAMBA, jésuite, né 1592 à Bruxelles, t à Rome 1651, fut prof, de théol. à Gratz 1629, visita presque toute l'Europe avec son élève, le fils du prince d'Eggemberg, devint secrétaire, puis préfet de la maison professe des jésuites à Rome. On a de lui une Bibliothèque des écrivains jésuites, Anvers 1643, plus ou moins impartiale, et un catalogue des martyrs de la Société.

ALEMANI; sélon les uns, confédération d'hommes appartenant à divers peuples (Aile Mânner); selon d'autres, tels que Griinm, les hommes les plus distingués, les vrais hommes. Ce nom qui, par extension, a fini par désigner toute l'Allemagne, ne s'appliquait dans l'origine qu'aux contrées, probablement parentes des Suèves, situées entre le Neckar et le lac de Constance, c.-à-d. le grand-duché de Bade, le Wurtemberg, et par moments les pays riverains, FAisace et le nord de la Suisse. Dion Cassius est le premier écrivain chez lequel on trouve ce nom; Caracalla essaya, mais sans y réussir, de soumettre à Rome les Alemani; le nom d'Ale-manicus qu'il crut pouvoir prendre consacre ses intentions, mais nullement son triomphe. La haine entre les Alemani et les Romains était si intense, que toute évangélisation venant de Rome était impossible. Vaincus à Tolbiac par les Francs, 496, les Allemani se montrèrent moins hostiles au christianisme quand il leur fut présenté par le moine irlandais Fridolin. Vers 517 on voit déjà un évêque de Constance au synode de Vindonissa ( Windisch); Fridolin fonde à Seckingen un couvent de femmes; Colomban et Gallus obtiennent de nombreuses conversions; en 750 on trouve 7 ou 8 églises dans le Wurtemberg et dans la Forêt-Noire, à Calw, Heilbronn, Hirschau, etc. Trudbert, autre irlandais, Landolin, écossais, Pirmin, et enfin Boniface travaillèrent successivement dans ces contrées et les amenèrent à la profession du christianisme. L'influence romaine, complètement nulle à l'origine, s'y fit sentir plus tard, quand l'Église éprouva le besoin de se constituer en une forte unité pour résister à ses nombreux ennemis. V. les différ. art.

ALEXANDRE. L'histoire de l'Église compte un grand nombre de personnages de ce nom.

saints, savants, évêques et papes. Voici d'abord la liste de ces derniers:

1° Alexandre, év. de Rome vers 109 ou 110, souffrit le martyre sous Adrien 119. On lui attribue à tort l'introduction de l'eau bénite dans l'église et l'usage de mêler de l'eau au vin de la communion; ces deux rites lui sont de beaucoup postérieurs. Sa fête est fixée au 3 mai.

2° Anselme de Baggio, né à Milan, év. de Lucques, célèbre par sa piété, élu pape sous le nom d'Alexandre II 1061 sous l'influence de Hildebrand, en concurrence avec Honoré II nommé par l'empereur. Il fit restituer au saint-siège les terres que les Normands lui avaient enlevées et protégea les juifs contre les persécutions des chrétiens. Par l'énergie avec laquelle il combattit la simonie et s'opposa au divorce d'Henri IV, il se montra le digne prédécesseur d'Hildebrand. f 21 avril 1073.

3° Alexandre III. Roland Rainuce, de Sienne, 1159-81, monta sur le siège pontifical dans des circonstances difficiles. Adrien IV venait de se brouiller avec l'empereur Frédéric Barberousse, qui, pour soutenir les droits du pouvoir séculier, ne suscita pas au nouveau pape moins de 4 concurrents les uns après les autres dans les personnes de Victor IV 1160, Pascal U11164, Calixte III1168. et Innocent III 1178. Les succès de l'empereur en Italie obligèrent Alexandre à se réfugier momentanément en France 1162, où il resta jusqu'en 1165. La division des modérés augmente les forces du parti hiérarchique; les Lombards, ligués dès 1164, battent à Legnano le 29 mai 1176, Frédéric qui dès lors abandonne son pape et doit se résigner à recevoir d'Alex. III, après lui avoir baisé les pieds, l'absolution la plus humiliante. Alexandre l'emporte également en Angleterre sur Henri H qui, après avoir fait mourir Becket 1170, est bientôt contraint par son peuple et par sa famille, de venir faire pénitence, nus-pieds, sur le tombeau de son ennemi nouvellement canonisé, et d'offrir son dos à la flagellation des prêtres. La force d'Alex, lui vint, d'abord de ce qu'il avait pour lui tous les ordres religieux, cisterciens, chartreux, etc.; ensuite de son alliance avec les Lombards. Dans le domaine religieux il enleva au peuple et au clergé romain tout droit d'intervention dans l'élection des papes, la réservant aux cardinaux seuls, et stipulant qu'à l'avenir celui qui aurait réuni les deux tiers des voix serait élu et que son concurrent, s'il essayait de se maintenir serait excommunié. La résidence n'est plus ecclesia, mais curia romana, c'est une cour. Il tint 3™ concile de Latran, 11™ écu-ménique, enleva aux évêques le droit de canonisation, comme appartenant aux causes majeures, introduisit l'usage des monitoires, porta à 7 le nombre des sacrements, et peut être considéré comme le véritable fondateur de l'inquisition, qu'il fit fonctionner activement dans le midi de la France, + 30 août 1181, aimé et respecté.

4° Alexandre IV; Rinaldi, comte de Segna, évêque d'Ostie et de Velletri, pape de 1254-61. Il se laissa gouverner par ses flatteurs, prodigua les dispenses, protégea les ordres mendiants, publia en leur faveur sa bulle De Sancto amore 1256, établit des inquisiteurs en France à la demande de saint Louis 1255, succomba dans la lutte des guelfes et des gibelins et dut s enfuir à Viterbe; obtint quelques succès en Allemagne où il prit parti naturellement contre Con-radin, et donna moyennant finances la couronne de Sicile à Henri III d'Angleterre, qui n'eut plus qu'à la conquérir et n'y réussit pas. Il travailla à l'union des églises grecque et latine, mais sans succès, f à Viterbe 1261.

5° Alexandre V; Pierre Philargi, né à Candie, pauvre mendiant qui n'avait connu ni père, ni mère, élevé dans son ordre par un cor-delier franciscain, étudia à Oxford et à Paris; nommé archev. de Milan par Galeas Visconti, cardinal par Innocent VIL il prit part au concile de Pise 1409 qui maintint la supériorité des conciles sur les papes, et après que Grégoire XII et Benoît XIII eurent été destitués comme hérétiques, schismatiques et parjures, il fut élu à leur place par les cardinaux réunis; il avait 70 ans. Il aimait beaucoup la bonne chère, et tenait à plaire à chacun, ce qui l'empêcha de travailler à la réformation de l'Église, comme il avait juré de le faire. Il dit de lui-même: J'étais un riche évêque, je suis devenu un cardinal moyen, et finalement un pauvre pape. Il congédia les membres du concile, 7 avril 1409, et dominé ou mené par Balthazar Cossa (Jean XXIII) il favorisa tous les abus au lieu de les détruire; il multiplia les charges afin de pouvoir en donner beaucoup aux franciscains ses protégés. Les deux papes qu'il avait évincés se relevèrent à l'aide de leurs partisans. L'Église se trouva un moment avec trois papes. Alex, mourut bientôt après à Bologne 1410, empoisonné selon toute apparence par son ami Cossa, qui fut son successeur.

6° Alexandre VI; Rodrigue-Alex. Borgia, Espagnol, né à Valence, neveu de Calixte III, successivement archev. de Valence, cardinal-évêque de Porto 1455. et vice-chancelier; un des hommes les plus corrompus qui aient occupé le trône pontifical. Après la mort d'Innocent V1H. 1492, il se fit nommer pape à force d'argent. Débauché dès sa jeunesse, il avait eu d'une dame romaine nommée Rose Vanozza cinq bâtards, dont 4 fils: Louis, César, Jean, Gottfried, et une fille, la fameuse Lucrèce On assure que cette dame eut encore quatre maris, dont trois au moins furent assassinés par elle. On a accusé Alexandre d'avoir eu des relations incestueuses avec sa fille, de même que son fils César, mais la preuve matérielle manque; c'est déjà trop qu'on ait pu l'en soupçonner, que ses ennemis de Naples l'en aient accusé et que le peuple l'ait cru. Sa vie fut une suite de débauches et d'empoisonnements. Son but unique fut de bien établir et d'enrichir sa nombreuse famille, et surtout son fils César, le plus grand des scélérats, l'idéal de Machiavel, dont on a dit qu'il ne donnait d'audience qu'à son bourreau. Sous ce pape, tout Rome craignait d'être assassiné. Il eut affaire à Charles VIII et à Louis XII, rois de France; malheureux avec le premier et obligé de se cacher, il eut le bonheur de contracter avec le second une alliance à la faveur de laquelle il réussit à dépouiller les princes voisins et à agrandir ses États. On a dit de lui qu'il foula aux pieds toutes les lois divines et humaines. Sa fin fut digne de sa vie; il avait invité à dîner Adrien de Corneto, l'un des plus riches cardinaux de sa cour, et il comptait s'en débarrasser par le poison; le cuisinier, gagné par le cardinal, servit au pape le plat destiné à sa victime, et Alex, mourut presque aussitôt, 18 août 1503. Le fait est contesté, mais vraisemblable (Vie, par Burchard 1697. par Gordon en anglais 1729; trad. franç. 1732. etc.).

Alexandre VII; Fabio Chigi, de Sienne, né 1599, pape 8 avril 1655. + 22 mai 1667. Nommé sous l'influence d'un parti indépendant, dit l'Escadron volant, en opposition aux influences étrangères qui avaient fait les précédentes élections, Chigi s'était montré l'ennemi des abus et bien décidé à combattre le népotisme. Ces belles intentions ne durèrent pas un an. Rusé et dissimulé, d'un esprit médiocre et inconstant, incapable de persévérer dans une entreprise de longue haleine, il avait cependant bien débuté, et fait concevoir des espérances qu'il ne devait pas réaliser. Envoyé comme légat à Munster pour les négociations de la paix, il avait fait preuve d'intelligence et Innocent X avait pu lui confier d'autres missions importantes. Pendant son séjour en Allemagne, il avait cependant formé le projet d'embrasser le protestantisme; mais il en fut détourné par l'exemple de son frère, empoisonné à Lyon pour l'avoir fait; il fut affermi dans ses craintives et prudentes dispositions par son élévation au cardinalat. La première année de son pontificat en fut aussi la plus sage et la plus heureuse; il embellit Rome, réforma quelques abus, baptisa un prince marocain, reçut l'abjuration de la reine Christine (qui lui causa plus tard beaucoup d'ennuis), confirma les décisions de ses deux prédécesseurs contre les 5 prétendues affirmations de Jansénius et prescrivit le fameux formulaire; tout cela en 1656. Mais il tomba bientôt entre les mains des Jésuites et dès lors tout changea; d'ascète il tourna au sybaritisme; le p. Oliva lui fit croire que c'était un péché à loi de ne pas prendre soin de sa famille, et il se mit à donner des places à ses frères, à ses neveux et à ses cousins; il fît faire les magnifiques colonnades de la place Saint-Pierre, et se lança dans la poésie (Philomathi labores juve-*ile$n Paris 1656). La garde corse ayant insulté à Rame l'ambassadeur de France, duc de Cré-qui, Louis XIV exigea et obtint d'Alex, que cette garde fût cassée et qu'une pyramide fût élevée à l'endroit même où avait eu lieu l'offense, avec une inscription constatant l'outrage H sa réparation; ce monument disparut cependant quelques années plus tard avec le consentement de Louis XIV. Alex, a canonisé François de Sales et l'Espagnol Thomas de Villa-Nova.

8« Alexandre VIII; Pierre Ottoboni, né 4610, élu le 6 oct. 1689, f 1 fév. 1691. 11 était de Venise et prodigua des secours d'argent à cette ville contre les Turcs. Agé de 80 ans quand il monta sur le siège, il laissa, par sa criminelle indolence, retomber l'Église au point où elle en était avant son prédécesseur, Innocent XI. Il vida les caisses publiques en cadeaux à ses parents. Il acheta la bibliothèque de la reine Christine et la réunit à celle du Vatican. 11 résista aux demandes de la France qui réclamait pour ses ambassadeurs et pour leur palais le droit d'asile et la franchise de l'exterritorialité; la France céda sur ce point et abandonna en outre Avignon. Malgré tant de condescendance, et quoiqu'il dût en partie à la France son élévation, le caractère papal était si fort chez Alex, qu'il publia une bulle contre les 4 art. de l'assemblée du clergé de 1682, relatifs aux libertés de l'Église gallicane et disgracia les prélats qui avaient fait partie de cette assemblée. Quoique ennemi des jansénistes il se montra indépendant vis-à-vis des jésuites, et condamna 1690 la doctrine du p. Bougot sur le « péché philosophique. »

Voici maintenant les noms d'autres Alexandre qui, sans être papes, n'en ont pas moins joué un certain rôle dans l'histoire:

|0 Evêque de Jérusalem, f en prison à Césa-rée sous Décius, vers 251.

2o Evêq. et patriarche d'Alexandrie en 312 ou 313; il succéda à Aquila ou Achilles; il est connu surtout par le zèle avec lequel il combattit les erreurs d'Arius. Il lui écrivit pour l'engager à se rétracter et, sur son refus, rassembla en 321 à Alexandrie un concile d'une centaine d'évéq. d'Égypte et de Lydie, où Arius fut excommunié. Constantin ayant essayé d'intervenir, mais sans succès, convoqua en 325 un concile à Nicée; Alexandre, avec son diacre

Athanase, y joua un rôle prépondérant, mais il n'y survécut que quelques mois, f 326. Il écrivit de pombreuses lettres sur la question; une a été conservée par Théodoret.

3® Patriarche de Constantinople pendant les troubles ariens 317-340. Il vota les résolutions du concile de Nicée et les défendit toujours courageusement. Arius ayant réussi, à l'aide des semi-ariens, à obtenir sa rentrée dans l'Église, grâce à un symbole équivoque qu'il jura, et l'empereur voulant contraindre le patriarche à recevoir à la communion un homme que celui-ci en jugeait indigne, le pieux Alexandre vivement troublé demanda à Dieu de le retirer de ce monde, lui ou Arius. Arius mourut subitement la veille du jour fixé pour sa réintégration. Un grand éloge d'Alexandre a été fait par Grégoire de Naziance, quand il monta sur le siège de Constantinople.

4° Alexandre, év. d'Hiérapolis et primat de la province d'Euphrate, fut délégué 431 au concile d'Ephèse par Jean d'Antioche qui s'excusa de ne pouvoir s'y rendre lui-même. Alexandre tenait pour Nestorius, et quand celui-ci écrivit à Théodose pour demander un nouveau concile sans les évêques égyptiens, il signa cette lettre avec 8 autres évêques. Il ne voulut avoir aucun rapport avec Cyrille. Il en appela aussi au pape Sixte III. Son caractère inquiet finit par le faire destituer; l'empereur l'envoya en exil à Fa-mothis, Égypte. Il avait du talent, comme le prouvent 23 lettres de lui, et un Traité sur; Ce que le Christ a apporté de nouveau dans le monde.

5<> Alexandre de Haies (Halesius), ainsi nommé d'un couvent du comté de Glocester, où il fit ses études, et où il fut nommé archidiacre. Il enseigna avec succès la philosophie scolasti-que à Paris et mérita le surnom de docteur irréfragable. f 1245. Il était entré chez les fr. mineurs en 1222. Un des premiers qui aient su mettre à profit les œuvres d'Aristote, traduites par les Arabes, il inaugura en quelque sorte la seconde période de la scolastique et composa une Summa theologica et un Comment, des sentences de P. Lombard, qui ont été plusieurs fois réimprimés. On y reconnaît aussi l'influence de l'esprit franciscain dans la manière dont il traite de l'Immaculée Conception de Marie, et surtout dans l'éloge qu'il fait des frères mendiants et même de la mendicité.

6* Alexandre Natalis,ou Noël; v. Natalis.

7° Alexandre Netcsky, le saint; fils du grand-duc Jaroslaw II; né 1218 à Wladimir. Après la mort de son frère, et bien qu'âgé de 20 ans seulement, il fut appelé au gouvernement du duché de Nowogorod que les Mongols n'avaient pas encore envahi. Il remporta en 1241 de brillantes victoires sur les Suédois, les Danois et les chevaliers teutoniques. Son père étant mort 1247 il hérita du grand-duché de Kiew, vainquit les Tartares, affranchit la Moscovie du tribut qu'elle payait aux successeurs de Gengiskhan. et régna avec tant de sagesse que la reconnaissance populaire le mit au nombre des saints. Il mourut le 14 nov. 1263; dans les dernières années de sa vie, il avait revêtu le cilice et la robe des moines. Le pape Innocent IV avait essayé à plusieurs reprises de l'attirer à la foi romaine 1246 et 1248, mais il resta fidèle aux traditions de l'Église grecque et fonda plusieurs évêchés. Sa mort fut un deuil universel. Pierre-le-Grand fit élever un couvent à son honneur 1715 à l'endroit où il avait remporté sa plus grande victoire, à Saint-Pétersbourg; Catherine I fonda l'ordre d'Alexandre Newsky, et tous les czars jusqu'à Nicolas ont célébré sa fête en grande pompe.

8° Alexandre, Aies. ou de Alès, né à Edimbourg 23 avril 1500, chanoine de Saint-André, attiré par la réforme, fut mis en prison et réussit à s'enfuir en Allemagne 1532, où il fit la connaissance de Luther et de Mélanchthon. Rappelé par Henri VIII qui le nomma prof, de théol. à Cambridge 1535, on le trouva trop avancé. Il revint à Londres où il exerça la médecine pendant quelques années, puis il retourna en Allemagne où il se fixa définitivement, d'abord à Francfort - s.-0., ensuite à Leipsic où il f 17 mars 1565. Sa tournure d'esprit conciliante et scientifique le mirent surtout en rapports avec Mélanchthon. Il traduisit en latin, à la demande de Cran mer, le Common Prayer Book, et publia divers ouvrages, en-tr'autres une Epistola sur le devoir des laïques de lire la Bible 1533.

9o V. Lambert 3<>.

ALEXANDRIE. Une tradition rapportée par par Eusèbe, dit que cette ville célèbre, la plus grande de l'empire après Rome, déjà peuplée de Juifs nombreux, grâce à la tolérance des Ptolémée d'abord, puis des Romains, et centre d'un grand mouvement intellectuel, fut évan-gélisée par saint Marc, qui y aurait fondé une église considérable. La chose est possible, mais n'est pas établie, et pendant longtemps les auteurs qui parlent de l'église de Carthage ne disent rien de celle d'Alexandrie. C'est seulement à la fin du 2™« siècle que l'on voit l'Évangile s'établir et les églises se multiplier dans la Basse-Égypte, et Alexandrie en particulier prendre un développement, acquérir une influence, et devenir un centre important pour l'histoire de la vie chrétienne. Les sciences sacrées qui y étaient cultivées avec succès depuis des siècles, et qui avaient spécialement pour objet l'A. T., devaient favoriser les progrès du christianisme dans ces contrées, et concourir à transformer l'école d'Alexandrie en lui donnant une direction nouvelle. C'est ce qui arriva, et sans parler d'Athénagore dont quelques-uns font un des premiers catéchèses d'Alexandrie, on peut faire remonter au moins à Pantène, vers 180, la fondation définitive de cette école qui pendant deux siècles, devait rendre tant de services à la chrétienté. Pantène q. v. eut pour élève, puis pour collègue, et enfin pour successeur Clément, à la fois professeur et écrivain distingué; puis Origène, et après lui Denys et Héraclès. Ce fut la belle époque. Dès lors Eusèbe mentionne encore les noms d'Achil-las, de Pierius, de Théognoste et de Sérapion; peut-être aussi faut-il compter parmi ces maîtres l'évêque et martyr Pierre, le moine Ma-caire, et enfin Arius lui-même. L'aveugle, mais savant et pieux Didyme. aurait aussi rempli les fonctions de catéchiste pendant le long espace de 340-395, et relevé pour un temps la réputation de cette école un moment compromise par les controverses origénistes. et qui devait l'être bientôt encore par les discussions nestoriennes et monophysites.

La destination première de l'école catéchéti-que d'Al. avait été sans doute d'instruire les païens. Il n'y avait probablement d'abord qu'un seul catéchiste chargé d'enseigner les éléments de la foi chrétienne aux néophytes, et peut-être aux enfants des chrétiens. Mais on sentit bientôt aussi le besoin d'avoir un homme instruit et habile, qui pût défendre la foi contre les attaques et les subtilités de la philosophie. De là à une institution capable de former des pasteurs il n'y avait qu'un pas, et il fut rapidement franchi; aussi l'on peut considérer cette école comme la première pépinière des missions chrétiennes. Elle évangélisa directement les abords immédiats de l'Égypte, puis l'Arabie, l'Éthiopie et les Indfes. Si l'Égypte, avant le christianisme, avait été déjà la terre des merveilles, elle ne cessa pas sous l'influence chrétienne d'être encore la terre des hautes recherches, et la pensée humaine ne cessa d'y élaborer des systèmes. Un syncrétisme platoni-sant, qui rappelle celui de Philon, se glissa dans l'Église et, en développant à quelques égards le sentiment religieux, exerça une fâcheuse influence sur l'enseignement proprement dit. Deux courants distincts se dessinèrent: l'un évangé-lique, représenté par Origène et Clément, par Dénys, Athanase et Cyrille, qui relevait en Christ le côté divin, même dans les exagérations de l'eutychianisme; l'autre relâché et fantaisiste, tel qu'il apparaît dans le gnosticisme, chez les docètes, les sabelliens et les ariens, qui sont des produits purs de l'Égypte.

On trouve chez Eusèbe les noms des évêq. d'Alex, et des détails sur l'école et les catéchistes; et chez Denys l'histoire des souffrances de cette église pendant les persécutions de Décius, de Valérien et de Dioclétien.

ALEXIENS, société religieuse qui vers 1300 s'était formée à Anvers pour s'occuper des devoirs à remplir envers les malades, les pauvres et les morts. Ils tiraient leur nom de leur patron, Alexius, fils d'un riche sénateur romain, qui vivait au 5me siècle dans une pauvreté volontaire, qui mourut sur le Mont Aventin, et dont les os furent découverts en 1216. Ils s'appelaient aussi cellitede cella, tombe, parce qu'ils enterraient les morts. Enfin, plus communément, on les désignait sous le nom de Lollards, de lollen murmurer, parler ou chanter à voix basse. Leur costume était noir, et les femmes avaient été surnommées les sœurs noires: mais ils ne s'étaient affiliés à aucun ordre, probablement à cause du discrédit dans lequel étaient tombés à cette époque, à cause de leur inconduite, la plupart des ordres religieux. Leur prétention de vivre ^ part, en laïques pieux, leur attira des ennemis; ils furent calomniés; un chanoine de Liège 1348 les traite de vagabonds, et peut-être que dans le nombre il y avait un mélange de bons et de mauvais. On les confondit aussi avec les Begghards, et il ne fallut rien moins qu'une bulle de Grégoire XI, 1377, pour assurer leur tranquillité.

ALEXIUS, v. Alexiens.

ALFRED, justement surnommé le Grand (proprement jElf-rœd> conseiller des elfes), né 849, 6®« roi de la dynastie saxonne d'Angleterre, succéda à son père Ethelwolf et à ses deux frères aînés Ethelbert et Ethelred. Désireux de s'instruire, il apprit à lire de bonne heure et fit, très jeune encore le voyage de Rome avec son père qui allait demander la bénédiction de Léon IV. C'était l'époque des invasions danoises et l'Angleterre fut plus d'une fois à la veille d'une complète invasion. Alfred avait 22 ans quand il monta sur le trône 871. Vainqueur d'abord il ne tarda pas à être défait et il dut s'enfuir; il passa quelque temps chez un berger comme simple valet et garda les troupeaux. Plus tard, déguisé en ménestrel, il pénétra avec sa harpe jusque dans le camp et dans la tente de Gothrum, chef de l'armée ennemie, et suffisamment éclairé par ses observations il reprit l'offensive et défit les Danois. Il fut modéré dans sa victoire, fit grâce aux prisonniers et leur céda une partie du pays sotfs la seule condition, acceptée par eux, qu'ils embrasseraient le christianisme. Il employa dès lors 15 années de paix à réorganiser l'administration, à développer l'instruction publique, à relever les églises et les monastères pillés, détruits, incendiés par les Danois, et à réformer le culte et le clergé lui-même, qui avaient beaucoup souffert au point de vue religieux de l'absence de tout gouvernement régulier. En 893 une nouvelle expédition tentée par Hastings. avec 250 voiles, faillit de nouveau tout compromettre, mais Alfred fondit sur les ennemis avec la rapidité de la foudre et par la hardiesse de ses manœuvres déjoua une tentative menaçante dont les suites auraient pu être fatales. Le pays jouit dès lors d'un repos durable et Alfred put consacrer ses dernières années aux travaux paisibles de la civilisation. Il f 28 oct. 901, âgé de 51 ans, après en avoir régné 29. D'une santé délicate. habituellement malade, sujet à des évanouissements inexpliqués, Alfred fit face à tout à force d'énergie morale. Musicien, poète, savant, passionné des arts de la paix, il avait en même temps le génie militaire et le courage du soldat. On l'a souvent comparé au roi David. C'est un des souverains qui ont laissé dans l'histoire de l'Angleterre les traces les plus profondes et les plus bénies. On lui doit l'université d'Oxford 872 et les trois grandes halles bâties à l'honneur « des trois personnes de la divinité. « Il fit venir de l'étranger des hommes savants et pieux, Grimbald, moine de Reims. Jean, ci-devant abbé de laNouvelle-Corbie. etc. Il étudiait lui-même avec son ami Asser, évêque de Saint-David; à l'âge de 38 ans il se mit à apprendre le latin et fit des progrès rapides. L'étude des saintes Écritures l'absorbait au point qu'il se faisait quelquefois réveiller la nuit pour élever son âme à Dieu pendant que le silence régnait autour de lui. Il gagna le cœur de ses ennemis par sa générosité, quand il renvoya à Hastings les prisonniers qu'il lui avait faits, ajoutant « qu'il ne faisait pas la guerre à des femmes, ni à des chrétiens. » Quant à son peuple il fit tout pour le relever, l'instruire et le moraliser, et cet homme dont le règne fut difficile, dont la santé était chancelante, qui n'a pas livré moins de 56 batailles rangées, qui a étendu le commerce de l'Angleterre jusqu'aux Indes, qui s'occupa de tous les détails de la vie publique, cet homme extraordinaire a encore trouvé le temps d'écrire ou de traduire lui-même. pour les écoles ou pour l'Église un grand nombre d'ouvrages, parmi lesquels il faut citer: un Code, publié à Londres 1658; les Consolations de la philosophie, de Boèce, Londres 1829; Hist, ecclés. des Anglo-Saxons, de Bède, Cambridge 1722; des extraits de l'Histoire, d'Orose, avec plusieurs chapitres originaux, entr'autres une description géographique et ethnographiques de l'Allemagne; l'Instruction pastorale de Grégoire-le-Grand, qu'il fit envoyer à tous les évêques, et dont on connaît encore 3 ex. dont un, parfaitement conservé, à la Bibliothèque de Cambridge; un recueil de Proverbes et une traduction des Fables d'Ésope lui sont également attribués, mais sans preuves suffisantes; une traduction des Psaumes de David, inachevée; enfin son Testament, conservé dans sa Vie, écrite par Asser. On y trouve entre autres cette phrase qui caractérise à la fois l'anglais et le chrétien: Je désire que mon peuple reste toujours aussi libre que le sont ses pensées.

ALGIERI, Pomponio, de Nôle, près Naples, étudiant à Padoue, converti de bonne heure, se fit avec enthousiasme l'apôtre de la doctrine évangélique. Dénoncé puis arrêté à Padoue, il répondit avec clarté et fermeté à tous les interrogatoires, et au bout de quelques mois fut transféré à Venise. Après de vains efforts pour l'amener à se rétracter, les juges, quoique à regret, le condamnèrent aux galères; mais ce n'était pas assez pour Délia Casa. Paul IV qui venait de monter sur le trône, obtint qu'on lui livrât l'hérétique, dont la fermeté pendant une longue détention avait fait l'admiration de l'Italie, et le martyr peu après son arrivée fut envoyé au bûcher, vers la fin de 1555. Il subit son supplice comme il subit son cachot, avec une joyeuse sérénité, s'étonnant lui-même et rendant grâce à Dieu, de ce qu'il pouvait trouver t tant de paix et de douceur dans la gueule du dragon. •

ALLATIUS, Léon, natif de Chios, né 1586, f à Rome 1669; jésuite, professeur au collège des Grecs à Rome, bibliothécaire du Vatican 1661; auteur de plusieurs ouvrages d'une érudition un peu lourde, notamment sur les rapports des églises d'Orient et d'Occident.

ALLEMAGNE. Après avoir été longtemps une simple expression géographique, réunissant au cœur de l'Europe des peuples divers sans autre unité que leur position centrale et les rudiments d'une langue encore peu formée, la patrie d'Arminius se développant de siècle en siècle et se constituant fortement au moyen âge sous les Hohenstaufen, est arrivée par Luther au sentiment de l'unité morale et a fini de nos jours par réaliser l'unité politique. Il n'y a donc pas d'histoire ecclésiastique pour l'Allemagne prise dans son ensemble, ni quant aux missions, ni quant au mouvement religieux, quoiqu'il ait été considérable, et c'est aux articles spéciaux d'hommes ou de villes qu'on trouvera les indications principales. Ici quelques lignes seulement de statistique. La population de l'empire étant d'environ 43 millions d'âmes, se décompose en 26 millions de protestants, 15 millions de catholiques, plus de 500,000 juife et cent mille dissidents divers, grecs, mennonites, wes-leyens, etc. Dans la plupart des États qui forment partie de l'empire, la majorité est protestante; elle est catholique en Bavière, dans le duché de Bade, et dans rAlsace-Lorraine. Les protestants sont en majorité luthériens ou unis.

Il y a une lutte incessante entre le gouvernement civil et le clergé romain qui revendique une autorité absolue dans son domaine, ce domaine devant comprendre les écoles, les mariages, les cimetières, etc. Il y a lutte enfin contre les juifs, qui ont accaparé par leur travail une grande partie de la fortune publique et qui disposent des journaux les plus importants. Le rationalisme et le socialisme rongent l'Allemagne et menacent son avenir; mais les chrétiens n'oublient pas leur devoir; de nombreuses sociétés religieuses, des pasteurs, des professeurs, des hommes d'État éminents, de simples laïques, combattent avec énergie l'incrédulité matérialiste, dont le triomphe serait la fin de la société.

ALLEMAND (cardinal Louis d'), archev. d'Arles, le seul de son rang qui, au concile de Bâle, défendit avec énergie les droits du concile contre les empiétements de Rome; il resta à Bâle après que les partisans du pape eurent décidé de s'en aller 1437. Homme de talent et sans reproche, peut-être ambitieux.

ALLEN 1°, ou Alan, ou Allyn, Guillaume, né à Rossai, Lancaster, 1532, sous Henri VIII, fréquenta l'université d'Oxford sous Édouard VI, 1547, au moment où l'archev. Cranmer donnait à l'Église anglicane sa nouvelle constitution. Il se montra hostile à la réforme, salua avec joie la réaction qui se produisit sous Marie et profita des bonnes dispositions de cette reine pour se faire donner des places honorifiques et lucratives; il fut nommé chanoine d'York 1558. Cela changea sous Élisabeth et Allen consacra toutes ses forces à la défense du catholicisme romain. Il s'enfuit d'abord à Louvain 1560. où il passa 5 années, écrivant des brochures de controverse. Il revint en Angleterre 1565 et passa 3 ans, caché aux environs d'Oxford, intriguant contre la religion de son pays; découvert en 1568 il s'enfuit de nouveau, vint à Malines d'abord, puis à Douai où il fonda un collège anglais qui réussit parfaitement, mais qu'il fallut transférer à Reims 1578, la reine en ayant interdit la fréquentation à ses sujets. Le pape le chargea de fonder à Rome et à Madrid des institutions analogues. Allen continua d'écrire, et déclara dans une de ses brochures, que des parents qui deviennent hérétiques perdent leurs droits naturels sur leurs enfants, de même qu'un souverain perd toute son autorité du moment où il renie la foi. Il justifie le meurtre d'un tyran, provoque le passage à l'ennemi de Stanley à Deventer, fait des vœux pour Philippe II et son Armada, obtient du roi d'Espagne une des riches abbayes de Naples, et de Sixte V le ch* peau de cardinal 1587. Il publie à Anvers en 1588un pamphlet injurieux contre Élisabeth,destiné à être distribué aux soldats espagnols quand lis débarqueront. L'expédition ayant échoué, on détruisit toute l'édition et il est aujourd'hui assez difficile d'en trouver un ex. Philippe lai donna l'archevêché de Matines avec résidence à Rome. Une lettre de lui, de 1593, dans laquelle il se réjouit de la tolérance accordée aux catholiques, et sa f survenue en 1594 et attribuée au poison, ont été exploitées en sa faveur, comme s'il fût revenu à des sentiments plus humains et un peu plus patriotiques; c'est beaucoup dire; sa cause étant perdue, il était naturel qu'il se réjouit d'avoir au moins la tolérance.

Guillaume A., philanthrope distingué, né 29 août 1770 à Londres, + 30 déc. 1843, quaker. industriel, visita 8 fois le continent pour plaider les causes auxquelles il s'intéressait, visita Oberlin et l'emp. Alexandre, fonda des écoles populaires, des caisses d'épargne, des pénitenciers, des colonies agricoles, intervint en faveur des Vaudois, des Grecs et des Irlandais. — Vie, par de Félice.

ALLIANCE 1° Sainte Alliance, nom sous lequel la Russie, l'Autriche et la Prusse signèrent à Paris, le 26 sept. 1815. après la seconde abdication de Napoléon, un traité auquel adhérèrent ensuite presque tous les souverains de l'Europe, et qui avait pour but de garantir aux rois leur autorité, et à l'Europe la paix et la religion. Il n'était guère question des peuples. Elle fut appelée sainte à cause des sentiments de sérieux chrétien et de piété qui l'avaient inspirée aux contractants et notamment à l'emp. Alexandre.

2° Alliance évangélique. Vaste association religieuse fondée en Angleterre en 1846 dans le but d'unir sur un terrain commun les chrétiens souvent divisés par des questions secondaires, d'église ou de doctrine, et de provoquer au besoin une action commune en faveur de la liberté de conscience. Elle a envoyé des députations pour cet objet à Madrid, à Stockholm, à Constantinople et à Saint-Pétersbourg. Elle a à des intervalles réguliers, tous les 4 ou 5 ans environ une Assemblée générale à laquelle sont convoqués des délégués des différentes sections; ainsi à Londres 1851, à Paris 1855, à Berlin 1857, à Genève 1861, à La Haye 1867, à New-York 1873. Des rapports sont lus sur la situation générale des différentes églises et sur leurs besoins. Un des résultats immédiats les plus clairs de cette société a été de diminuer considérablement le nombre des controverses et tout au moins d'en adoucir le caractère.

AlAAXj Pierre, savant controversiste français, né 1641 à Alençon où son père était pasteur, fut appelé à Charenton, après avoir desservi d'abord une égtise de Normandie (ou de Champagne). Il succédait à Daillé et travailla avec

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Claude à une nouvelle version de la Bible. A la Révocation il dut s'enfuir en Angleterre où Jaques II lui permit de fonder une église française du rit anglican; en 1690 il fut nommé chanoine de Salisbury, et les universités d'Oxford et de Cambridge lui conférèrent le titre de docteur. Il était versé dans toutes les sciences, et le clergé d'Angl. le chargea d écrire une Hist. des Conciles; cet ouvrage, qui devait avoir 7 vol. f°. n'a jamais paru. Il f à Londres 1717. Agé de 76 ans. Il a beaucoup écrit, en latin, en français et en anglais, sur l'histoire, la controverse et même la prophétie; ses œuvres sont rares et avaient surtout le mérite de l'actualité. Deux ouvrages, sur les vaudois. et sur les albigeois, ont de la valeur, mais il attribue aux vaudois une origine apostolique, et il confond trop les albigeois avec leurs devanciers des Vallées. Son fils devint doyen d'Ely 1734. Le nom d'Allix existe encore en Angleterre.

ALMACHIUS. saint espagnol (?), moine, lapidé 403 à Rome, parce qu'il protesta contre un combat de gladiateurs et voulut s'y opposer; 1er janv. des bollandistes.

ALOGES. ou Alogiens, secte de l'Asie Mineure, vivant à la fin du 2""* siècle, connue seulement par Épiphanes. Ils rejetaient la doctrine du Paraclet et celle du Logos (Verbe), comme conduisant au gnosticisme (de là leur nom qui signifie sans Logos, mais qu'on peut traduire aussi par sans logique). Ils rejetaient par conséquent l'Évangile de Jean, ainsi que le chiliasme et la perpétuité des charismes.

ALOYS, ou Louis, de Gonzague. né près de Mantoue 1568, de la famille des princes de Cas-tiglione; distingué dès son enfance par la piété et la rigueur de ses mœurs; il entra 1587 dans l'ordre des jésuites et + 1591 à Rome, victime de son dévouement pendant une épidémie. Déclaré bienheureux par Grégoire XV 1621, il fut canonisé par Benoît XIII 1726.

ALSTED, Jean-Henri, né 1388, prof, à Her-born, puis à Wissembourg où il f 1638. Il représenta l'église de Nassau au synode de Dor-drecht 1618-1619. Son érudition était immense. Il a publié une Encyclopédie universelle en 2 vol. f°, et une Encyclopédie philosophique; en outre, divers traités: sur la Chronologie, la Messe, le Règne de mille ans qui doit commencer en 1694, etc. On lui a reproché de s'être parfois copié lui-même, ce qui à la rigueur est pardonnable, mais surtout d'avoir copié les autres, notamment Casaubon; il ne faut cependant pas exagérer la gravité de ces emprunts.

ALTENSTEIN (Charles, baron de Stein d'), né à Ansbach 7 oct. 1770, f 14 mai 1840, exerça en Prusse une grande influence comme ministre des cultes, de la médecine et de l'instruction publique. Après avoir étudié à Erlan-

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gen, où il avait reçu déjà des impressions religieuses, il entra dans l'administration dès 1799, se retira à Konigsberg en 1806 après les malheurs de son pays, et s'occupa, avec le baron de Stein, de son relèvement. Il remplaça Stein en 1808 comme ministre des finances, fut en 1813 gouverneur de Silésie, et fut chargé en 1817 du ministère difficile auquel il consacra les dernières années de sa vie. C'est lui qui dans sa loi de 1819 décréta l'instruction primaire obligatoire. Il releva les hautes études à Bonn et à Berlin où il appela Hegel. Au milieu des crises qui menacèrent plus d'une fois sa position, il ne cessa d'avoir en vue le relèvement de la piété, et il pensait, comme son ami Stein, que tout ce que l'on peut faire pour l'éducation d'un peuple n'est rien, si l'on n y joint un esprit religieux. Il rencontra surtout des difficultés de la part des catholiques. C'était un esprit lucide, un caractère énergique, un travailleur infatigable et un homme modeste.

ALTHAMMER, André, né 1498 f 1564, un des premiers prédicateurs de la Réforme à Ans-bach, conseiller intime du margrave Georges de Brandebourg; prit part à la dispute de Berne sur les sacrements 1528, et au colloque de Nuremberg 1539; homme fort instruit, auteur d'un catéchisme encore estimé et d'un essai de conciliation des passages de l'Écriture qui semblent se contredire.

ALT1NG. Jean-Henri, théologien réformé, né à Embden 1583, fit l'éducation de plusieurs jeunes princes, dont un devint roi de Bohême. En 1627 il fut nommé prof, de théol. à Groningue. où il t 1644- — S°u fils Jaques, né à Heidel-berg 1618, versé dans les langues orientales, succéda à Gomar pour l'hébreu à Groningue 1643, et aussi pour la théologie 1667. f 1697. Ses œuvres, concernant surtout la langue hébraïque, ont été publiées à Amsterdam en 5 vol. fol. 1687.

ALUMNEUM, collège ou séminaire, destiné à former et à préparer des jeunes gens pour la carrière ecclésiastique. L'admission des élèves suppose déjà leurs aptitudes et leur ferme résolution de se consacrer au service de l'Église, et dans plusieurs endroits ils sont astreints à prêter un serment d'entrée. Les élèves portent le nom iïalumnats.

AMALA1RE, surnommé Symphosius, né en Austrasie, diacre, prêtre à Metz, abbé de Horn-bach, chef de l'École du palais, homme de confiance de Louis-le-Débonnaire, f 837. Il a écrit un grand Traité des offices ecclésiastiques en 4 livres, important pour la connaissance dn culte à cette époque; une Règle des chanoines, et plusieurs lettres. Il se complaît un peu trop dans une symbolique exagérée, cherchant le sens exact des moindres pièces du vêtement ecclésiastique, mais c'était dans le goût du temps. Il n'entendait la présence réelle que dans le sens spirituel ad vivificandam animant. Il a écrit contre Agobard et contre ses tentatives de réforme du chant sacré.

AMALRI, dit Sanglar, natif de Montpellier, chef des protestants pendant les guerres de religion, se distingua par sa belle défense d'Agde 1562. de Montpellier 1567 et de Sommières 1573. Fait prisonnier dans une reconnaissance, il fut pendu par les catholiques 1575 et sa tête promenée au bout d'une pique.

AMALRIC 1° Philosophe et théologien du 12ra<> siècle, né à Bène, près Chartres. Il porte aussi le nom d'Amaury. Il enseignait la théologie à Paris et compta un grand nombre de disciples. Il avait puisé dans les écrits de Scot Erigène une sorte de panthéisme mystique pour lequel il fut condamné par l'université de Paris 1204. Il fit le voyage de Rome et en appela à Innocent Ul, mais celui-ci confirma la sentence 1207, et Amalric de retour à Paris dut se rétracter publiquement. Il f 1209, de chagrin, dit-on. Un synode réuni à Paris condamna ses disciples; 12 furent brûlés, et 4 emmurés. Lui-même, malgré sa rétractation, fut exhumé, ses os brûlés et ses cendres jetées au vent. Le synode défendit en outre l'étude des œuvres d'Erigène. Le concile de Latran 1215 confirma toutes ses sentences.

2° Amalric, Arnaud, abbé de Citeaux, choisi par Innocent UI pour prêcher la croisade contre les albigeois 1204. Il rassembla jusqu'à 500,000 hommes sous les ordres de Montfort, et commit tant de cruautés au siège de Béziers qu'il dût être révoqué 1209. Il fut nommé archev. de Narbonne 1212, et passa ensuite en Espagne où il fit la guerre aux Maures. Il a écrit Thist. de cette expédition, + 1225.

AMAND 1° évêque et natif de Bordeaux, renommé pour son zèle, sa vigilance et sa sainteté; vivait au commencement du 5m<> siècle. Jérôme nous a conservé des fragments intéressants d'une Lettre de lui.

2° Apôtre de la Belgique. Né à Nantes vers 590, et chassé de la Gaule par Dagobert, qu'il avait censuré à cause de ses désordres; il se rendit d'abord comme missionnaire sur les bords du Danube et chez les Slaves 626, mais repoussé par ces populations, il accepta l'appel de saint Eloi qui l'envoyait chez les Frisons; se fixa d'abord à Gandavum (Gand), avec l'appui de Dagoberty mais il renonça bientôt à cette protection, et recourant à la douceur, il obtint de grands succès malgré certaines intempérances de zèle; il bâtit des églises et des couvents, remua toutes les Flandres, devint évéq. de Mœstriclit, et f 675, très âgé. On lui prêta des miracles, même de son vivant, entre autres d'avoir ressuscité un pendu, ce qu'il nia toujours.

AMBOISE (Conjuration d'), complot ourdi à Nantes le l«r févr. 1560. par les protestants exaspérés de Tasservissement de la royauté par les Guises, et des nombreux supplices infligés à leurs coreligionnaires. Blâmé par Coiigny et par Calvin, ce complot qui avait pour chef muet le prince de Condé et pour chef avoué le seigneur de la Renaudie, fut secrètement dénoncé aux Guises, qui emmenèrent le roi de Blois à Am-boise. La Renaudie n'en poursuivit pas moins son projet, mais il fut vaincu et périt en combattant; ses partisans furent massacrés, de nombreuses exécutions eurent lieu et de lâches atrocités ajoutèrent à la haine que les Guises ne cessaient d'amasser contre eux. Beaucoup de nobles eurent la tête tranchée dans la cour du château.

AMBON. mot grec, employé dans l'antiquité chrétienne pour désigner une espèce de tribune ou destrade, élevée de quelques pieds et placée au milieu de l'église, capable de recevoir une cinquantaine de personnes, chantres ou lecteurs. Les prédicateurs, et même les évêq. s'y plaçaient aussi quelquefois pour être mieux entendus du public. A mesure que les églises devenaient plus grandes, ce qui n'était d'abord que l'exception devint la règle; vers le 13ra« siècle il y avait des ambons partout; ils se modifièrent suivant les besoins, et on finit par en faire les chaires et les lutrins.

AMBROISE 1° un des pères les plus remarquables de l'Église latine, né à Trêves vers 340, pendant que son père était gouverneur des Gaules. Venu à Rome, il s'y distingua bientôt dans les arts et les sciences, et fut nommé gouverneur de la Ligurie, 370. Il résidait à Milan lorsqu'à la mort de l'èvêque de cette ville, les divers partis entrèrent en lutte pour le choix de son successeur. Ambroise eut assez d'influence pour rétablir la paix, mais comme on ne pouvait se mettre d'accord sur la nomination de Tévêque, une voix d'enfant s'écria: Ambroise èvêque ! Les partis, charmés de ses vertus et de ses talents, furent frappés de ce mot et s'unirent pour le prier d'accepter l'épiscopat, 374. Effrayé de la grandeur de la tâche, il refusa d'abord; le peuple insista, et le gouverneur, pour échapper à ses instances, s'enfuit de nuit. Mais s'étant égaré, il se retrouva le lendemain en face de Milan; prenant cela pour un avis céleste, il accepta enfin. Il n'était cependant pas encore chrétien; il n'était que catéchumène; en une semaine il fut baptisé, ordonné prêtre et consacré èvêque. Dès lors il s'adonna entièrement aux soins de son troupeau, remplissant en personne toutes ses fonctions, prêchant régulièrement, recevant tout le monde, les plus petits comme les plus grands, donnant l'exemple des vertus et de l'austérité, et composant en même temps des écrits sur divers sujets à l'ordre du jour. Au moment de son élection, il avait distribué tous ses biens à l'Église et aux pauvres, et il vivait avec la plus grande simplicité. Aimé de son troupeau, entraînant par sa prédication onctueuse et oratoire, il lit le plus grand bien autour de lui. 11 joua aussi un rôle dans la polémique contre les païens et dans la politique. En 381 ou 383 Maxime, gouverneur des Gaules, lit assassiner Gratien, emp. d'occident, usurpa le trône et marcha sur l'Italie pour la soumettre. Ambroise alla à sa rencontre et négocia pour le dissuader de franchir les Alpes. Son éloquence obtint gain de cause au point que Maxime l'accusa de l'avoir ensorcelé. A ce moment cependant le paganisme relevait la tête; le rhéteur Symniaque reçut la mission de plaider sa cause et d'obtenir du sénat le rétablissement de la statue de la Victoire. Ce fut encore Ambroise qui réfuta son plaidoyer. Dans les querelles ariennes, il fut au côté de l'orthodoxie. Il entra même en lutte à ce sujet avec la cour impériale et a\ec Justine, mère et tutrice de Valentinien II, à laquelle il refusa tout, même « une église sur tant. » Il montra une fermeté inébranlable: menaces, voies de fait, condamnation à l'exil, rien ne put l'intimider, il resta maître de la situation. Ce fut à cette occasion qu'il établit pour ses fidèles et dans son église qu'on voulait lui enlever de force, le chanl antiphonique auquel il donna son nom. En 387. nouvelle interxention auprès de Maxime. Celui-ci ayant franchi les Alpes, fut battu par Théo-dose; Ambroise réussit à arrêter l'effusion du sang. Il eut aussi l'occasion de montrer son intrépidité et sa fermeté, en s'attaquant à Théo-dose-le-Grand lui-même. Celui-ci avait livré la ville de Thessalonique à la discrétion de ses soldats; 7000 habitants, dit-on, furent massacrés. Ambroise écrivit à l'empereur pour le blâmer de sa conduite et l'exhorter à la repen-tance. Théodose vint cependant se présenter sur le seuil du sanctuaire pour prendre part à l'eucharistie, mais Ambroise lui barra le passage, en déclarant qu'il ne lui donnerait la communion qu'après qu'il se serait soumis publiquement à la pénitence et aurait reçu l'absolution. Théodose, lorsqu'il revit plus tard Nectaire, patriarche de Constantinople, lui dit: Ambroise m'a appris ce que doit être un èvêque. En 392. nouvelle réaction païenne, qui dura 27 mois. Ambroise la combattit vivement, et Théodose vainquit par ses armes Eugène, l'empereur païen. Il f en 397 et fut enseveli à Milan. A la fois savant et orateur, il a laissé un grand nombre d'ouvrages remarquables par le style, l'élégance et l'entraînement; des sermons, des traités, des lettres où se trouvent des morceaux de la plus haute éloquence, des travaux sur l'Écriture sainte, des livres de morale et de théologie, des oraisons funèbres, en particulier celles de Théodose-le-Grand et de Valentinien, des hymnes, etc. C'est à tort peut-être qu'on lui a attribué le Te Deum, dont les paroles sont de saint Augustin; mais le Detis creatoromnium est bien de lui. On a traduit en français un de ses principaux ouvrages, le De offkiis ministro-rum Dei. Il avait organisé à Milan une liturgie particulière avec une échelle musicale appropriée au chant d'église, qui reçut le nom de rif ambi-osien en opposition au rit romain, et dont l'église de Milan se sert encore aujourd'hui (v. Marcillac, Hist. de la musique), il piraît avoir eu un don exceptionnel de persuasion. Il prêcha l'ascétisme et la virginité perpétuelle; on accourait d'Afrique po ir l'entendre, et les mères, à Milan, enfermaient leurs filles de peur qu'elles ne fussent entraînées au célibat si elles entendaient la parj!e persuasive de leur évê-que. Son traité de la Virginité compte parmi s*s œuvres les mieux travaillées. Sa haute renommée lui valut la visite de souverains étrangers. chrétiens ou barbares, qui venaient de loin pour le voir. H. B.

2° Ambroise, de l'ordre des camaldules, né 1386 à Portico, prés Florence, &bbe général de son ordre depuis 1431, se distingua par ses essais de réformes intérieures, et comme légat d'Eugène IV à Bâle 1433. Il s'occupa aussi de réconcilier l'Église grecque avec l'Église latine, et publia plusieurs ouvrages en grec et en latin. Il était profondément dévoué à la papauté.

AMBROSIASTER; nom sous lequel on désigne l'auteur inconnu d'un Commentaire sur les 13 Épitres de Paul, qui se trouve dans l'édition bénédictine des œuvres d'Ambroise. mais que Ion a plusieurs motifs d'attribuer à d'autres qu'à l'évêque de Milan. Ce commentaire anonyme a été écrit du temps de Damase, et peut-éire par le diacre Hilairede Rome, quoique cette hypothèse soulève aussi quelques difficultés de doctrine.

AMBROSIEN, chant et rit; v. Ambroise.

AMBROSIENXE (Bibliothèque), fonde* au 17^ siècle à Milan, par le cardinal Fréd. Bor-romée. et nommée ainsi en l'honneur de l'évê-que patron de la ville.

AMESILÎS, Guillaume, né 1576, théologien anglais, étudia à Cambridge sous Perkins. Puritain zélé, il dut renoncer à se faire une position dans sa patrie, et se rendit en Hollande, où il fut successivement aumônier militaire à La Haye, membre influent du synode de Dordrecht (les États généraux lui votèrent 4 fl. par jour, pour qu'il pût vivre à Dordrecht et assister de

conseils le président du Synode), inspecteur des étudiants boursiers d'Amsterdam et de Leyde, professeur à Franeker, et enfin prédicateur à Rotterdam. Il f 1633 dans cette dernière ville peu après son arrivée, des suites d'une inondation. Il a écrit de nombreux ouvrages, dont la Medulla theologica est le principal; d'autres sur le sabbat, la conscience, les rapports de la métaphysique et de la morale avec la théolopie^ des comment, sur les Psaumes et les Ép. de Pierre, ainsi que plusieurs discours et des traités de controverse. Œuvres compl. en latin, Amsterdam 1658, 5 vol. in-42.

AMIS (les), 1° v. Quakers. 2° Amis des lumières, v. Lumières. 3° Les amis d» Dieu, v. Nicolas 10*.

A M MIEN-M ARCELLIX, auteur d'une Histoire de Rome de Nerva à Valens, 91-378. en 31 livres, dont les 13 premiers sont perdus. Ceux qui restent commencent à l'an 333 et comprennent l'histoire de l'emp. Julien et de ses successeurs, c.-à-d. les événements dont Amrnien a été le contemporain. Grec de naissance, ayant fait de fortes études, il entra dans l'armée sous Constantin, accompagna Julien dans la guerre contre les Perses, et visita tour à tour, comme soldat. l'Orient et l'Occident. Quand il prit sa retraite il se fixa à Rome et se remit à ses études de prédilection, f vers 410 so is Théodose. Dans son Histoire il fait preuve d'un grand sens politique, d'une grande tolérance et de beaucoup de modération. Il touche à l'histoire ecclésiastique par les détails qu'il donne sur Julien, sur l'église de Rome et sur les luttes ariennes. Longtemps on a cru qu'il était chrétien, mais cette idée est aujourd'hui presque gènéralem. abandonnée; rien ne prouve qu'il ait été baptisé, ni qu'il ait fait une profession de foi chrétienne, bien qu'il s'intéresse à l'Église et qu'il semble prendre parti pour l'orthodoxie contre l'aria-nisme. Mais il n'était plus païen; il admet l'action d une divinité supérieure qui dirige les événements, et il se rapproche d'Hérodote et surtout de Sophocle par les tendances monothéistes qui percent dans ses récits.

AMMON, Christophe-Fréd. (d'). 1766-1849. prof, à Erlangen et à Gottingue, puis prédicateur de la cour à Dresde, a publié des sermons et quelques ouvrages de dogmatique d un rationalisme vulgaire. Par ses talents il a pu exercer une certaine influence, mais il n'a pas servi la cause protestante. Il niait les miracles et les prophéties.

AMOLO, ou Amulo, disciple d'Agobard, et dès 840 son successeur à l'archevêché de Lyon: f 832. Il honora l'Église par ses lumières et son caractère et combattit les superstitions, comme beaucoup d'autres évêques de l'époque carlo-vingienne. Son livre contre les Juifs, faussement attribué à Raban Maur, ne vaut pas son écrit sur les Reliques. Il prit parti contre Godescalc au sujet de la prédestination, et pour mieux le réfuter, lui prêta des idées qui n'étaient pas les siennes ou qu il exagéra.

AMORTISATION ou Amortissement (lois d'). On désigne sous le nom de mainmorte des biens qui passent d'un propriétaire personnel entre les mains d'un propriétaire impersonnel, collectif, et qui sortent ainsi de la circulation. Ce sont surtout les établissements religieux, églises, ordres, couvents, qui sont susceptibles de posséder de cette manière, soit par acquisitions, soit par dons ou héritages. Dans ces conditions les propriétés sont soustraites pour longtemps, si ce n'est pour toujours, à différents impôts, tels que le droit de mutation, sans même parler du privilège dont ont joui pendant des siècles* dans différents pays, les biens ecclésiastiques, d'être exemptés de tout impôt. Les inconvénients d'un pareil ordre de choses ont fini par se faire sentir, là surtout où la richesse foncière de l'Église atteignait et dépassait certaines bornes. En France, à l'époque de la Révolution, le clergé possédait le tiers du pays; dans plusieurs États de l'Allemagne, il en possédait la moitié. Il résultait de là que les impôts pesaient toujours plus lourdement sur ceux qui étaient moins riches, et sous l'influence du mécontentement général, les gouvernements ont été amenés à faire ce qu'ils auraient dû faire par simple esprit de justice; ils ont édicté des lois spéciales sur les biens de mainmorte, lois qui varient naturellement suivant les pays; tantôt faisant payer un droit de mutation à une époque déterminée, alors même qu'il n'y a pas de mutation; tantôt prélevant un droit sur les revenus; tantôt réservant aux pauvres un quart des legs fait aux établissements religieux, tantôt et c'est le cas presque partout où il y a eu résistance, en rattachant au domaine public des propriétés dont l'origine est équivoque, dont l'usage a été détourné de sa destination première, ou qui sont exploitées d'une façon défectueuse. Il n'est aucun pays en Europe qui n'ait dû recourir à des lots de ce genre; l'Espagne même a dû par ses nombreuses incamérations ou amortisations, remédier au tort immense que lui causait la mainmorte. Cette opération s'appelle ordinairement sécularisation, parce qu'elle rend au siècle, au monde, des valeurs qui en avaient été distraites.

AMPHILOQUE, rhéteur et avocat de Cappa-doce; puis ascète et solitaire, nommé évêque d lconieet métropolitain deLycaonie vers 375. prit part au 2®* concile de Constantinople 381. se montra l'adversaire résolu des ariens et obtint de Théodose que les discussions publiques sur les points relatifs à la nature de Christ fussent interdites, f vers 392. La plupart des écrits publiés sous son nom, Paris 1644, sont inauthentiques, sauf peut-être une lettre synodale en faveur de la doctrine de la Trinité.

AMPOULE (Sainte-). On désigne sous ce notn (amplum vas, ou ampla olla) une fiole sacrée que les anges apportèrent à saint Rémi pour le sacre de Clovis, la fiole ordinaire ayant manqué pour une raison quelconque. C'est Hincmar de Reims qui le premier, trois siècles après l'événement, s'est amusé à raconter cette légende. L'ampoule n'en a pas moins été regardée dès lors comme authentique, et son huile intarrissable a servi au sacre des rois de France, jusqu'au moment où Ruhl, représentant du peuple la brisa, en 1793, quand il aurait dû la conserver soigneusement pour la mettre dans le musée des superstitions du moyen âge. Elle se retrouva intacte en 1824, comme elle s'était retrouvée en 1179, après une éelipse de 600 ans.

AMSDORF (Nicolas d'); né près de Wilrzen le 3 déc. 1483, d'une bonne famille. Parent de Staupitz par sa mère, il se destina de bonne heure à l'état ecclésiastique, étudia d'abord à Leipsic, et fut en 1502 un des premiers inscrits à l'université de Witlenberg qui venait d'être fondée. Grande capacité de travail, profonde piété, esprit de prière, dévouement à la vérité, volonté de fer, il avait tout ce qu'il fallait pour devenir un des piliers de la Réforme, et il mérita d'être appelé un secoud Luther, aussi bien par ses adversaires que par ses amis. Il fut dès 1517 un des plus fervents disciples du Réformateur, l'appuya dans sa thèse, l'accompagna à Worms et à la Wartbourg; et après avoir quelque temps professé à Wittenberg, il devint successivement pasteur à Magdebourg, puis évêque de ISaumbourg-Zeitz. Son caractère impétueux le fit vers la fin de sa \ie îomber en disgrâce auprès des princes, dont il combattit sans relâche le penchant aux compromis. Dans sa lutte contre les antinomiens, il alla jusqu'à dire que les bonnes œuvres pouvaient être dangereuses pour le salut, f 14 mai 1565.

AMUN, cénobite égyptien, ami et contemporain de saint Antoine. A22 ans ilépousaune jeune fille noble, mais en prenant l'un et l'autre l'engagement de vivre dans la chasteté; elle f au bout de 18 ans de cette espèce de mariage, et il se retira dans les déserts de la Hte-Égypte où, avec saint Antoine, ils fondèrent un nouveau couvent.

AMYRAUT. Moïse, né à Bourgueil, Tou-raine, en sept. 1596, la même année et dans la même province que Descartes. Il appartenait à une famille honorable. Son père l'envoya d'abord à Poitiers faire ses études de droit; il y fut reçu licencié à l'âge de 20 ans, mais la lecture de l'Institution de Calvin le décida à entrer dans le ministère. Il se rendit donc à Sau-mur, où il étudia sous Caméron, fut nommé pasteur à Saint-Aignan, Maine, puis en 1626 à Saumur en remplacement de Daillé nommé à (!harenton (Rouen et Tours appelaient Amyraut dans le même moment). En 1631 il fut délégué au synode de Charenton, qui le chargea avec François de Montauban de Rambanlt, ancien de Gap, de présenter à Louis XIII les plaintes des églises sur les infractions à l'édit de Nantes. Il refusa, malgré l'insistance de Richelieu, de se conformer au cérémonial qui voulait que les députés des églises parlassent au roi à genoux, et sa harangue plut si bien au cardinal-ministre que celui-ci, comme témoignage d'estime, le consulta sur son projet d'union des deux Églises. Amyraut fut nommé professeur en 1633, en même temps que L. Cappel et Jos. de La Place, et se trouva dès lors engagé dans une série de luttes auxquelles on donna beaucoup plus d'importance que la question n'en méritait. Prouvant, comme Caméron, qu'on avait outré la doctrine de la prédestination, il essaya d'en adoucir les angles et de se porter comme médiateur entre les arminiens et les gomaristes, en appuyant toutefois dans le sens orthodoxe. Mais les souvenirs de Dordrecht étaient encore trop récents pour permettre aucun compromis, et Amyraut fut regardé comme suspect par l'école de Sedan, et par les hommes les plus marquants de l'Église, A. Rivet, Spannheim, Heidegger, Du Moulin, Jurieu. etc. Sa théorie, connue sous le nom d'Universalisme hypothétique. et contre laquelle en 1675. c.-à-d. onze ans après sa mort, fut rédigée la formule du Consensus, revenait à dire que Dieu veut que tous les hommes soient sauvés, que tous peuvent l'être par la foi en J.-C.; que Dieu ne refuse à personne le pouvoir de croire, mais que s'il donne à quelques-uns la grâce et le secours nécessaires pour cela, il ne les donne pas à tous, de sorte que ceux qui sont perdus le sont par leur faute, sans pouvoir accuser Dieu de les avoir exclus du salut. On le voit, c'est bien subtil. Amyraut et son ami le pasteur Testard, de Blois, furent dénoncés comme penchant vers le pélagianisme et l'arminianisme, et le synode d'Alençon 1637 fut nanti de plaintes venues surtout du dehors, notamment de Leyde et de Genève. Le synode, dont la majorité ne saisissait probablement pas bien la question, accepta les explications d'Amyraut et de Testard et se borna à leur recommander la prudence, en imposant aux deux partis le silence sur ces problèmes. Même solution à Charenton 1641 et 1645. Peu à peu cependant les idées d'Amyraut firent leur chemin, et malgré les 1856 pages que Spannheim écrivit contre lui sur la grâce universelle, Guill. Riwt, Vincent de la Rochelle, Du Moulin lui-même se réconcilièrent avec lui; le synode de Loudun 1659 lui rendit tout honneur, et lui confia la publication de la Discipline des églises réformées. +8 janv. 1664. D'un caractère ferme et bienveillant, et d'une charité inépuisable, il était estimé et aimé de tous, et si le procureur général lui retira par un arrêt le titre de docteur en théologie (comme à tous les ministres), il ne put lui ôter la considération dont il jouit auprès de Richelieu, de Maza-rin, et de plusieurs notabilités militaires ou de robe du parti catholique. Amyraut a beaucoup écrit et dans toutes les branches de la théologie, sermons, dissertations, commentaires, controverse, etc. Son principal ouvrage est un traité de la Morale chrétienne, premier essai d'un système complet; Saumur, 1652. 6 vol. in-8°.

ANABAPTISTES (rebaptiseurs), désignation inexacte des chrétiens qui, plus ou moins nombreux à diverses époques, refusaient le baptême aux enfants, le regardant comme nul aussi longtemps que la foi ne le justifiait pas; en conséquence ils rebaptisaient ceux qui étaient convertis, n'admettant pas que leur premier baptême eût aucune valeur. C'est à l'époque de la Réformation qu'ils se constituèrent en parti distinct. A côté de vues très justes, ils avaient des tendances mystiques exagérées qui obligèrent les réformateurs à les combattre. Ils voyaient dans la Réforme une œuvre manquée, qui s'était arrêtée à moitié chemin; le respect de la Parole leur paraissait être le culte de la lettre; l'appui de l'autorité temporelle était pour eux l'alliance de Christ et de Bélial; dans la modération et les ménagements dont on usait envers les faibles, ils ne voyaient qu'une coupable complicité. L'Église étant l'assemblage des saints, ils se constituèrent peu à peu, tout naturellement, en une société spirituelle, sur le modèle de l'Église apostolique. Ils eurent des apôtres, ils eurent la communauté des biens, et la misère des temps leur ayant procuré de nombreux disciples parmi ceux qui n'avaient pas le nécessaire, ils se trouvèrent engagés dans la guerre des paysans 1520, sous la conduite de Thomas Mttnzer et de ses amis, et succombèrent avec eux comme parti, lorsque les princes eurent étouffé cette révolte. On a peine à comprendre les inconséquences dont ils se rendirent coupables; ils avaient commencé par l'esprit, ils finirent par la chair; ils condamnaient la guerre et ils firent la guerre; le pillage, le meurtre, la débauche déshonorèrent leurs armées, et Luther les stigmatisa avec la plus grande énergie. Purifiés par l'épreuve, les anabaptistes d'Allemagne renoncèrent à des alliances contre nature et redevinrent ce qu'ils étaient à l'origine, un parti exclusivement religieux, représentant au sein de la Réforme le progrès et la spiritualité. Le Palatinat leur offrit un refuge, pendant qu'ailleurs on continua de les persécuter jusqu'à la mort; ils souffrirent le martyre avec courage, l'n ancien prêtre, amené à la connaissance de TÉvangile par la lecture des écrits de Luther et de Bueer, Menno Simons, exerça sur les sectaires trop fanatisés une salutaire influence, et s'il calma un enthousiasme malsain, il contribua d'autant plus à convertir des âmes et à fonder de nouvelles congrégations. Les églises se multiplièrent. grâce à son zèle vraiment apostolique, et elles finirent par prendre, du nom de leur fondateur, le nom de mennonites, moins compromis que celui d'anabaptistes. C'est sur-ton t dans le nord de l'Allemagne et dans les Pays-Bas qu'elles s'établirent. Un mouvement semblable s'était produit en Suisse, sous la direction de Hubmeier, mais ses excès le perdirent, et Zwingle, qui s'était montré un moment indécis sur la question du baptême des enfants, rompit avec les novateurs. Des discussions publiques, suivant la vieille coutume, tournèrent contre les anabaptistes et paralysèrent leur progrès. En Moravie le parti, soutenu par la noblesse, obtint quelques succès, mais le gouvernement, poussé par les prêtres, persécuta de telle sorte les adhérents des idées nouvelles, qu'ils durent bientôt se disperser et s'enfuir. L'Angleterre d'abord, puis les États-Unis, reçurent un grand nombre de proscrits, et l'anabap-tisroe transporté sur ces terres libres y prospéra. y fit de nombreux prosélytes, mais s'y modifia dans un sens plus spirituel et plus modéré. V. Baptistes, Menno, Jean de Leyde, etc.

ANACHORÈTES (grec: ceux qui se retirent), nom que l'on donna dès les premiers siècles du christianisme à ceux qui abandonnaient le roonde pour travailler à leur sanctification, et qui s'enfuyaient dans les déserts pour y vivre loin des habitations. On peut ranger les prophètes Élie et Élisée, ainsi que Jean-Baptiste, dans cette catégorie. Les persécutions des empereurs firent éclater beaucoup de vocations semblables. Ils demeuraient dans des cavernes de montagnes, pratiquaient l'abstinence, et même s'infligeaient des macérations exagérées pour dompter la chair. Quelques-uns restaient exposés longtemps à la neige et au froid; d'autres s'imposaient pendant des années un silence absolu, s'interdisant même la prière à haute voix; quelques-uns se privaient pendant un long temps de «ommeil ou de nourriture, ou tenaient leurs mains élevées vers le ciel, ou restaient debout sur une colonne, etc. Plusieurs ont eu leurs légendes. L'Inde possède de même ses fakirs. Mais si l'on s'en tient aux anachotëtes, ascètes, ermites ou solitaires plus sérieux, on en voit qui, dans des temps de trouble, ont momentanément abandonné la vie solitaire pour venir exercer sur le monde l'influence de leur caractère ou de leur parole. Télesphore en 128 et saint Denis en 259 furent même élevés au pontificat; Marcion se fit anachorète, quand il quitta l'Église. Un grand nombre sortirent de leurs retraites pour rappeler aux peuples et aux princes leurs devoirs. Julien Sabba fut appelé par Acacius en 370, pour combattre l'arianisme. Thraates parut devant Valens et fit des miracles. Le stylite Daniel, poussé par l'Esprit, vint en 476 à Constantinople pour défendre la foi contre l'empereur Basilisque, qui refusa d'abord de le recevoir et finit par tomber à ses pieds. Les anachorètes forment la transition à la vie monacale; ils se réunirent d'abord dans de petites cabanes isolées, avec une chapelle centrale, et peu à peu s'entendirent pour n'avoir qu'une seule maison avec une règle intérieure très sévère. La première laura (communauté) connue fut fondée en 340 par Chariton à Pharan, non loin de la mer Morte; puis une autre par Eu-thyme, près de Jérusalem, vers 400; puis saint Saba, Quiriacus et d'autres suivirent cet exemple. Cependant la vie solitaire continua d'avoir ses adhérents, et Cassien les place au-dessus des moines vivant en commun. Le Mont Athos renferme encore aujourd'hui des uns et des autres. Le concile de Trull. 692, ordonne que celui qui veut être anachorète fasse d'abord un stage dans un couvent. Plusieurs fondateurs d'ordres ont commencé par être anachorètes, et un couvent du Dauphiné avait coutume de désigner le meilleur de ses membres, pour qu'il vécût solitaire et qu'il se consacrât exclusivement à la prière. — v. Bolteau, Hist. monast. d'Orient; Hélyot, Hist. des ordres monast.

ANACLET 1° ou simplement Clet, grec d'Athènes, disciple de Pierre et successeur de Linus, d'après Irénée; de Clément, d'après saint Augustin; de Clet, d'après saint Jérôme. Donc complètement inconnu (78 à 91). Son martyre est fixé au 26 avril. Hégisippe nomme un Annenclet qui aurait été év. de Rome de 80 à 93.

2° Anaclet II, ou Pierre de Léon, élu pape en 1130, par une partie des cardinaux en concurrence avec Innocent II, fut reconnu par Rome et l'Italie et soutenu par Roger, roi de Sicile, tandis que son rival était reconnu par le reste de la chrétienté. Il fut excommunié par le concile de Pise, 1134, et f 1138. Ses partisans le remplacèrent par Victor IV, qui ne joua aucun rôle.

ANAGNOSTE, v. Lecteurs.

ANAPHORA, portion de la liturgie qui, chez les grecs, répond au canon de la Messe des latins, c'est-à-dire au moment de la consécration des espèces. On désignait aussi sous ce nom le volume qui renfermait la liturgie d&4a Cène.

ANASTASE 1er io pape romain 368-402, combattit les donatistes et se prononça contre Rufin dans les luttes de celui-ci contre saint Jérôme. Il condamna Origène au point de vue dogmatique. Homme pieux, il appelle les Églises chrétiennes des membres de son propre corps; il veut qu'on écoute debout la lecture de l'Évangile dans le culte liturgique, et s'oppose à la consécration ecclésiastique de personnes atteintes de difformités. Le culte des saints commence à poindre. Il réconcilie les orientaux avec l'église de Rome.

2° Anastase II, romain 496-98. Après avoir adhéré d'abord à la condamnation d'Acace, dans une lettre adressée à son homonyme l'empereur Anastase le Silentiaire, il parut plus tard vouloir revenir en arrière, mais il mourut avant d'avoir pu retirer le décret lancé par ses prédécesseurs contre le patriarche eutychien de Constantinople. Il salua avec joie la conversion de Clovis et lui écrivit pour l'engager à agir de telle sorte que l'église de Rome n'eût jamais qu'à se réjouir de cet événement.

3° Anastase Hl, 911-13. pape sous l'ignoble gouvernement des Théodora et deMarrouzia; il subordonne à l'archevêché de Brème celui de Cologne, dont le titulaire a concouru à détacher la Lorraine de l'Allemagne.

4° Anastase IV, 1153-54. lit sa cour à Frédéric 1er. en reconnaissant Wichmann, l'évê-que de Magdebourg. que son prédécesseur n'avait pas voulu reconnaître. Il se montra charitable dans une grande famine, restaura le Panthéon et a écrit un ouvrage sur la Trinité.

5<> Cénobite, connu sous le nom d'Anastase le Sinaïte, qui fut élu évêque et patriarche d'Antioche, fut ensuite banni 572 et f 599. D'autres moines de ce nom et de ce surnom moururent en 606, 609 et 678; on ne sait auquel attribuer quelques ouvrages, d'ailleurs sans grande valeur.

6° Prêtre de Constantinople, ami de Nesto-rius, né 478, le premier qui nia dans un sermon. que Marie fût la mère de Dieu.

7o Persan qui. sous le nom de Magundat, servit dans les troupes de Cosroès. Après sa conversion il prêcha l'Évangile en Assyrie et fut martyrisé 628.

8° Moine, abbé d'un couvent romain et bibliothécaire, fut envoyé par Louis II au concile écuménique de Constantinople 869, dont il traduisit les actes en latin. Il a écrit une Hist. ecclésiastiq. et un Liber Pontificalis, ou Vie des papes jusqu'à Nicolas I«r. f 886.

ANASTASIE, fille d'un père païen et d'une mère chrétienne, fut élevée dans la foi, mais son père la contraignit d'épouser un païen qui lui interdit tous rapports avec ses coreligionnaires. Après la mort de son mari, elle consacra toute sa fortune au bien de l'Église, et fut brûlée pendant la persécution de Dioclétien en Illy-rie 304. Les bollandistes fixent au 25 déc. le jour de sa mort.

ANATHÊME. Les écrivains classiques donnent à ce mot le sens de: offert, présenté à Dieu. Dans le N. T. il s'y joint l'idée de sacrifice: retranché, mis à part, sacrifié. C'était le retranchement de l'Église, l'excommunication, peine tout ecclésiastique, mais qui pouvait entraîner des châtiments et même la malédiction divine. Le mot passa dans ce sens dans le langage ecclésiastique, les conciles d'Elvire 303 et de Laodicée 357 l'emploient pour frapper des délits religieux; celui de Nicée 325 prononce l'anathème contre les propagateurs des doctrines ariennes, et dès ce moment il fut employé couramment dans les sentences des papes et des conciles, jusqu'au concile de Trente et jusqu'au Syllabus.

ANATOLE lo théologien du 3®e siècle, né à Alexandrie de parents chrétiens, était disciple d'Origène. Il avait montré dans sa prédication des talents rares, et obtint les plus grands succès. Nommé évêque de Laodicée en 269, il pro- • pagea hors de l'Egypte les idées d'Origène. On a de lui un traité sur l'époque où il faut célébrer la Pâques, et dix livres sur l'arithmétique.

2<> Un autre Anatole, aussi d'Alexandrie, nommé patriarche de Constantinople 449 sous Théodose. Il entre en rivalité avec Léon-le-Grand, et convoque en 450 le concile de Chal-cédoine où. après avoir condamné l'eutychia-nisme, il fait déclarer son siège patriarcal l'égal de celui de Rouie, malgré les évêques d'Alexandrie et d'Antioche et les légats du pape. Léon menace deux fois Anatole de l'excommunier, mais sur les instances de l'euip. Marcien et sur les explications d'Anatole qui se lava du reproche d'ambition, la chose n'eut pas de suite. Anatole f 458.

ANCIENS v. Presbytériens.

ANCILLON. célèbre famille protestante, née française, que les persécutions chassèrent en Allemagne où elle finit par se naturaliser. 1° Son chef était président à mortier et sacrifia sa charge à ses convictions religieuses. 2° Son fils Georgin fut un des fondateurs de l'église de Metz, il eut pour fils 3° Abraham, « habile en droit. • et celui-ci à son tour fut père de 4<> David Ancillon, né à Metz 1617, étudia d'abord chez les jésuites, ne pouvant le faire ailleurs; vint à Genève 1633 sous Spanheim, Diodati et Tronchin; nommé pasteur à Meaux 1641, où il épousa Marie Macaire de Paris, et où il se lit comme homifieet comme prédicateur une excellente réputation; puis 1653 à Metz, où il resta jusqu'à la révocation 1685. Il dut alors partir, abandonnant au pillage sa riche bibliothèque; fut nommé à Hanau. où il passa un an, puis à Potsdam où le graud-duc électeur Frédéric-

Guillaume l'accueillit avec un affectueux respect. Nommé pasteur à Berlin, il travailla jusqu'à la fin, eut la joie de voir ses enfants établis autour de lui, et + âgé de 75 ans, 1692. On a de lui une Vie de Farel, quelques traités et quelques sermons, ainsi que des Mélanges sur toutes sortes de sujets, publiés par son fils Charles et fort appréciés de Bayle.

5* Charles, son fils, né 28 juillet 1659 à Metz, f à Berlin le 5 juillet 1715; fit ses études de droit à Marbourg, Genève et Paris, plaida contre Louvois la cause des proscrits lors de la Révocation, et suivit sa famille à Berlin, où il fut nommé juge et directeur de la colonie française, puis juge supérieur, conseiller de cour et de lé-gation^ enfin historiographe de Frédéric Ier. Il a écrit trois ouvrages sur la Révocation, une Hist. des réfugiés en Brandebourg, une Hist. de Soliman II, un Éloge de Danckelmann, des Mélanges en souvenir de son père, et quelques autres traités sur différents sujets. Il se recommande par la pensée plus que par le style.

6* Louis-Frédéric, petit-fils de Charles, f le 13 juin 1814, âgé de 70 ans, pasteur, membre de la Soc. royale de Berlin, auteur de quelques Oraisons funèbres, éloges et dissertations.

7° Jean-Pierre-Frédéric, né 30 avril 1767, 119 avril 1837; fils du précédent. Après avoir achevé ses études universitaires sous les yeux de son père, il visita quelque temps Genève, puis Paris, au moment où la Révolution commençait. Nommé pasteur du Werder à Berlin, admis dans l'intimité du prince Henri, d'une éloquence entraînante, il vit sa réputation grandir d'année en année. Mais son aptitude pour les sciences historiques et pour la philosophie devait lui donner une autre célébrité. Il était déjà, depuis 1791, professeur d'histoire à l'Académie militaire; en 1796 il publiait des Considérations sur la philosophie de l'histoire; en 18(M une Iutrod. à l'Hist. des révolutions du système de l'Europe; puis des Mélanges de politique et de littérature. En 1803 il fut nommé historiographe de la Prusse; en 1810 précep-tenr du prince royal (et de l'empereur actuel, Guillaume; puis conseiller à l'Instruction publique et aux affaires étrangères; enfin en 1834 ministre en remplacement du comte de Bernstorff. Son influence dans les conseils fut bientôt prépondérante. Comme caractère il resta modeste, affectueux, un peu faible et toujours très conservateur. Ses principaux ouvrages de politique, de littérature et de philosophie ont été réuuis en une édition en 4 vol. Paris 1832.

8® David, frère de Charles (5°), second fils de David (è°), né à Metz le 2 févr. 1670. f à Berlin le 16 nov. 1723, de la gravelle. Il étudiait à Genève quand son père fut forcé de quitter Metz; il le rejoignit bientôt à Berlin, où il témoigna le désir d'entrer dans l'armée, mais le Grand-Électeur l'en détourna, pourvut à l'achèvement de ses études, le donna en 1689 à son père comme collègue et le nomma son successeur eu 1692. Le jeune ministre avait tout ce qu'il faut pour réussir comme prédicateur, et il réussit. Il fut en outre chargé de plusieurs missions diplomatiques en Hollande, en Angleterre, en Suisse, en Pologne, en Autriche, et finalement à Neuchâtel: il s'en acquitta dignement, et sans jamais oublier qu'il était avant tout un ministre de l'Évangile. Il avait épousé Susanne Meus-nier, de Paris; il en eut douze filles et cinq fils, dont l'aîné fut directeur de l'Hôtel de Refuge; le second, Manassé, pasteur à Prentzlow; le troisième, Alexandre, pasteur à Kônigsberg.

9° Joseph, frère de David (4°), né 1626, avocat, l'orgueil du barreau, eut sa carrière brisée par la Révocation. C est au péril de sa vie qu'il rejoignit son frère à Berlin, où il fut nommé juge supérieur des colonies françaises, et conseiller de cour et de revision. Il est regardé comme le fondateur des justices françaises dans le Brandebourg, v. Haag. — On peut juger par cette seule famille de la perte immense que causa à la France la criminelle folie du vieux roi, et le nom de Metz qui reparait si souvent dans cette biographie appelle bien des réflexions.

ANDERSON, ou Andreœ, Laurence, né 1480, favorisa l'introduction de la Réforme en Suède, fut chancelier sous Gustave Wasa, mais fut condamné à mort sous prétexte de conspiration, v. Petersen. Le roi lui fit grâce de la vie. mais lui retira ses emplois, f 1552.

ANDRÉ, lo notable protestant du Pont-de-Montvert, persécuté, traqué dans les bois 1685; découvert et tué par les dragons, il mourut en pardonnant à son meurtrier. L'abbé du Chaila s'empara de sa maison et en fit pendant plus de 15 ans le cachot de ceux qu'il ne réussissait pas à convertir. Une attaque de cette maison, la nuit du 24 au 25 juillet 1702, fut le signal de la guerre des Camisards. Cette maison exisle encore et sert aujourd'hui d'auberge. — 2° v. Moser. — 3° v. Sarto.

ANDRE^E, 1° v. Anderson.— 2° Jacques Andréa*, né 25 mars 1528, à Waiblingen, Wurtemberg, f 7 janvier 1590 à Tubingen, où il était professeur et chancelier de l'université, fut un des hommes les plus actifs et les plus décidés de son temps. Fils d'un maréchal (d'où on l'appelait quelquefois Schmidlin), il fit ses études aux frais de la ville à Stuttgart et à Tu-bingue; nommé diacre à Stuttgart à l'âge de 18 ans, il fut chargé de nombreuses missions en France et à l'étranger; écrivit plus de 150 traités ou brochures, presque tous de polémique, qui jettent un jour intéressant sur l'état religieux de l'époque, et prit une part importante à la rédaction de la formule de Concorde q. v. Il fut en correspondance avec Calvin, en relations personnelles avec Bèze, et jouit de la confiance de plusieurs princes; l'emp. Maximilien lui-même lui témoigna une grande estime. Sa lin fut paisible et confiante.

3° Jean-Valentin, né à Herrenberg 17 août 1586, f à Stuttgart 27 juin 1654; petit-fils du précédent, fils de Jean, pasteur à Herrenberg. Ses études achevées, il visita comme précepteur de jeunes nobles, l'Allemagne, la Suisse, la France et l'Italie, puis passa encore quelques années à Tubingue dans l'enseignement. Son premier poste de pasteur fut Baihingen 1614, oïi il passa 6 ans; il fut appelé ensuite à Calw 1620, où il vit toutes les horreurs de la guerre tle Trente ans, la ville incendiée, sa bibliothèque détruite, la population presque anéantie, lui-même complètement ruiné. En 1639 il vint à Stuttgart comme prédicateur de la cour, et fut nommé prélat en 1654. C'était un homme ardent, plein de sens et d'esprit, versé dans tou~ tes les littératures; avec cela bon et dévoué au soulagement de toutes les misères, et qui, pendant la peste de Calw, soignait les malades, ensevelissait les morts et adoptait les orphelins. Herder l'a délini: Une belle âme, comme on en voit peu; et Spener a dit: Si je pouvais ressusciter quelqu'un, c'est Val. Andréa? que je choisirais. pour le bien de l'Église. Il a laissé plus de 100 écrits, en prose et en vers, la plupart peu considérables, mais dont quelques-uns ont fait sensation; entre autres: Menippus, ou une centaine de dialogues satiriques, contre l'orthodoxie morte; Alethœa exul, dans lequel il défend la philosophie et les sciences naturelles contre leurs détracteurs et contre la tendance cabalistique et les excès du mysticisme. Mais sps deux principaux livres sont sa Fama fra-ternitatis. et Judiciorum de fraternitate Rosa-ceœ crucis chaos, 1619, que plusieurs ont pris au sérieux, et qui ne furent qu'une innocente mystification. Il y fait intervenir les 7 sages de la Grèce, Sénèque et Caton, qui exposent successivement leurs vues sur les meilleurs moyens k employer pour le bonheur et l'amélioration morale de l'humanité: ainsi, le partage des biens, la suppression des monnaies d'or et d'argent, la suppression du fer, avec plus juste répartition des emplois publics, etc. Enfin, sur la proposition des sages d'Europe, on décide de s'en tenir aii Code de fraternité qu'un certain Christian, rose-croix, qui fit au 14m<> siècle le pèlerinage du Saint Sépulcre, rapporta de la Terre Sainte, avec une collection de formules magiques. Mais qu'est-ce que c'était que ce contrat d'alliance? Où se trouvait-il? On le chercha partout, sans s'apercevoir que l'auteur avait voulu se moquer des superstitions existantes, et sans comprendre les allusions qu'il avait faites à la Bible comme seule règle de la vie et seule garantie de bonheur. Quoiqu'il eût gardé l'anonyme, on le soupçonna d'être l'auteur de ces écrits, et on l'accusa d'avoir voulu restaurer l'ordre des Rose-croix.

ANE (fête de 1'), célébrée au moyen âge dans plusieurs églises. C'était plutôt un divertissement. où les prêtres et le peuple s'amusaient à braire les différentes parties de l'office, au lieu de les chanter. Un âne y représentait tour à tour l'ânesse de Balaam ou la fuite de l'enfant Jésus en Égypte. Cette cérémonie profane fut supprimée par le parlement.

ANGELA, ou Angèle, v. Merici.

ANGÉLIQUE (la mère), de son vrai nom Jac-queline-Marie Arnauld, née 1591, f 6 août 1661, fille d'Antoine Arnauld q. v. et abbesse de Port-Royal q. v. Aussi distinguée par ses talents qne par ses vertus. Auteur de Lettres, de Mémoires et de Conférences.

ANGÉLIQUES (ordre des), fondé 1530 par Louise Torrelli, comtesse de Guastalla, déjà deux fois veuve à 25 ans. Les religieuses s'engageaient à vivre dans la pureté des anges (de là leur nom; on les appelait aussi Guastallines, d'après leur fondatrice). Elles furent reconnues en 1534 par Paul III, rattachées à la règle de saint Augustin, soumises aux barnabites de Milan, mais sans être obligées à la vie cloîtrée. Elles accompagnaient dans leurs missions les religieux barnabites; aussi, malgré leurs vêtements grossiers, leur croix de bois sur la poitrine, leur corde autour du cou, elles furent bientôt compromises, et pour en finir avec ces scandales, elles furent tenues d'entrer dans des couvents et d'y rester.

ANGILBRET, un des conseillers et secrétaire de Charlemagne, auteur de quelques poésies et de documents sur l'abbaye de Saint-Riquier, où il se retira et dont il devint abbé. Il était de la Neustrie et avait été le premier conseiller de Pépin, roi d'Italie. Ami d'Alcuin. f 814.

ANG1LRAM, év. de Metz 768-91, abbé deSe-nones (bénédictins), appelé dès 789 au titre d'archevêque, purement honorifique, car Metz n'était pas une métropole. On lui attribue la continuation de la Chronique de Frédegaire jusqu'en 796, année de sa mort; mais il est surtout connu en droit canon par des chapitres ajoutés aux fausses décrétâtes et qui portent son nom. C'est pendant les luttes de Hincmar de Reims contre son neveu de Laon, que ces statuts ecclésiastiques apparaissent pour la première fois sous le nom d'Angilram; il en existe deux éditions; la 2** paraît seule authentique; elle aurait été remise le 19 sept. 785 à Angilram par le pape Adrien lui-même, lors de son procès relatif à la résidence.

ANGLETERRE. On comprend historiquement sons ce nom, à moins de désignation spéciale contraire, l'ensemble des Iles Britanniques. Des témoignages fort nombreux établissent que le christianisme y fut introduit dès les premiers temps de l'Église, et au 6me siècle on voit ces îles former le centre principal des missions du moyen âge. Les Triades welches, le livre de Gil-das-le-Sage, et l'histoire de Bède-le-Vénérable, sont utiles à consulter pour l'histoire ancienne de la Grande-Bretagne. Une légende, ou une tradition rapporte que lorsque Caractacus. prince breton, vaincu par Claude, fut amené prisonnier à Rome, il y fut converti, ainsi que son père, par l'apôtre Paul (vers 53), et que lorsqu'il leur fut permis de retourner en Angleterre, ils y devinrent les premiers prédicateurs de l'Évangile. Vers 180, on trouve Lucius qui fonde â Llandaff la première église chrétienne. Des persécutions éclatent vers 303, et l'on cite les noms de trois martyrs, Alban, Jules et Aaron. Au concile d'Arles, on compte déjà 3 évêq. bretons. Le moine irlandais, Pélage. date de 400; l'Irlande est appelée l'Ile des saints. Mais les pirates Anglo-Saxons détruisent presque en entier l'œuvre de l'Évangile. Augustin, avec quelques moines, l'y ramène en 600, mais les Danois viennent encore une fois fouler aux pieds ce champ des missions, et ce n'est qu'après l'an 1000, sous les règnes de Suénon et de Canut-le-Grand qu'on peut considérer l'île comme décidément conquise à la foi chrétienne. C'est Guillaume le Conquérant, 1066, qui, en mettant fin aux rivalités des différentes familles royales, constitua l'Angleterre dans les conditions d'unité qu'elle a gardées dès lors. Mais pendant longtemps deux courants différents se firent sentir dans la direction de l'Église, l'un représentant l'indépendance nationale, l'autre la soumission à Rome. Les fidèles au nom d#e la foi, les rois au nom de leurs droits, résistèrent aux empiétements ultramontains, mais Jean-sans-terre dut se soumettre à Innocent III, 1213, et ses successeurs ne purent recouvrer que par une lutte incessante, quelques parcelles de leurs prérogatives, jusqu'au moment où la dynastie desTudor, en la personne de Henri VIII, proclama la Réforme, qui ne consista d'abord qu'à faire passer entre les mains du roi l'autorité du pape. Comme acte politique, cette revendication de liberté fut hautement acclamée, mais le côté religieux de la Réforme ne prévalut que lentement et Henri VIII fut plutôt le persécuteur que le protecteur de l'Église. Son fils Édouard VI. chrétien vivant, prit la Réforme au sérieux, mais il mourut jeune et laissa le trône à sa sœur, Marie-la-Sanguinaire. qui ralluma les bûchers et releva les échafauds; Latimer, Ridley, Cranmer, Saunders, Bradfort, Leafe, Elisabeth Folkes, et des centaines d'autres, furent brûlés par ses ordres, pendant que Wishart, Hamilton et un grand nombre de martyrs étaient suppliciés en Ecosse. Sa sœur Elisabeth. fille d'Anna Boleyn, lui succéda, 1558, et s >n avènement fit toutes choses nouvelles. C'est à cette grande reine qu'on peut rattacher le triomphe définitif de la réforme en Angleterre, dans les conditions modérées qu'elle a adoptées. L'esprit catholique essaya sans doute plus d'une fois, par ruse ou par force, de reprendre ses positions; il faillit réussir au 17me siècle, grâce aux Stuart, Jacques 1er et Charles 1er, mais l'opinion publique se souleva et le protectorat de Cromwell mit fin à ces velléités de réaction. Les Stuart rappelés s'étant montrés incorrigibles, furent remplacés, 1689, par la maison d'Orange qui avait donné des preuves éclatantes de son attachement aux doctrines de la Réforme. L'Église anglicane demeura la religion nationale officielle, mais la liberté de culte fut accordée aux églises indépendantes, sauf à l'égl. catholique dont on avait trop éprouvé la puissance d'intrigues; ce n'est qu'en 1829 qu'elle est rentrée dans le droit commun. Déjà avant Henri VIII, sous l'influence des écrits de Wicleff et de Luther, le besoin d'une réforme se faisait vivement sentir. Tynda1,Bilney et d'autres, venaient de traduire le N. T., et leurs adeptes se multipliaient. Le roi et le cardinal Wolsey,son favori, se montrèrent hostiles à ce mouvement et persécutèrent les fidèles. Mais en dépit de toutes les prohibitions, la Bible circula et fit son œuvre habituelle. Quand le roi proclama sa réforme, il mécontenta les catholiques, mais il ne contenta pas ceux qui demandaient une réforme plus complète et plus évangélique et qui auraient voulu purifier l'Eglise de tous ses restes de catholicisme. De là le nom de Puritains qui leur fut donné; on les appela aussi Non-conformistes à cause de leur refus de se soumettre à l'Acte d'uniformité de 1562, qui prétendait couler toutes les croyances et les cérémonies dans un même moule. Lrts uns restèrent dans l'Église pour travailler à sa régénération, les autres se constituèrent en Églises indépendantes et furent affreusement persécutés. En Écosse ils prirent le nom de Covenantaires q. v., et le 24 août 1560 un parlement libre réuni à Édimbourg, abolit l'autorité papale, révoqua les lois portées contre la religion réformée, et déclara le presbytérianisme la religion nationale.

ANGLICANE (Église). Au moment oii la Réforme se produisait avec le plus d'éclat sur le continent, et oti le besoin d'une réforme se faisait le plus vivement sentir en Angleterre, l'attachement du peuple à son église traditionnelle était encore assez puissant pour que l'on pût douter du succès d'un mouvement religieux. Déjà plusieurs avaient payé de leur vie leur

tentative, lorsque le roi et plusieurs membres de la noblesse, sous l'influence de leurs passions, rompirent avec le pape et avec l'Église romaine; Henri VIII, parce que le pape s'opposa à son divorce avec Catherine d'Aragon; les nobles, par déférence pour les caprices du souverain, et parce qu'ils comptaient s enrichir des dépouilles des couvents et des abbayes. Telle fut l'origine extérieure et matérielle de cette Église qui. sans rompre avec l'Eglise universelle, prit le nom de nationale, ou anglicane, par opposition au nom de romaine qui rappelait des traditions, une histoire, et surtout une dépendance dont elle voulait s'affranchir. Ce fut donc avant tout, dans son principe, une œuvre politique. Mais il ne suffisait pas de rompre, il fallait réorganiser, et pour justifier la mesure qu'il avait prise, le roi (lut la colorer de quelques réformes, mais le moins nombreuses possible. 11 avait à tenir compte à la fois des vœux de ceux qui demandaient une réforme, et de l'opposition de ceux qui n'en voulaient point. De là le caractère de compromis qui frappe dans la constitution de cette Église. L'archev. Cranmer, qui devait périr plus tard sous Marie, fut un de ceux qui prirent la part personnelle la plus active à la réforme, pendant que le roi et ses amis s'occupaient surtout de s'approprier les biens des (160) couvents. dont les revenus seuls dépassaient le chiffre de huit millions. Après quelques alternatives de prospérité sous Edouard, de persécutions sanglantes sous Marie. l'Église anglicane fut définitivement constituée sous Élisabeth, mais sans être cependant acceptée de tous; les puritains et les presbytériens ne cessèrent de demander des réformes plus radicales. L'Église anglicane compte environ 25 millions d'adhérents, dont 15 dans les Trois-royaumes; les autres sont disséminés dans le Canada, aux États-Unis, aux Indes, et partout où flotte le drapeau britannique. 11 est toutefois difficile d'en affirmer le nombre exact. En Angleterre même, la moitié de la population est anglicane; l'autre moitié se compose de dissidents sous toutes les formes. depuis les baptistes jusqu'aux catholiques. Riîunie à l'État, salariée et privilégiée, dans la plupart des colonies anglaises, cette Église est indépendante dans d'autres et vit de contributions volontaires. Ses principaux livres de piété sont: un Catéchisme, extrêmement court, clair et précis, qui part de l'idée que l'enfant a été baptisé; le Livre des Homélies, ou sermons, que l'on attribue généralement à Cranmer. mais auquel d'autres ont travaillé, notamment Latimer et Ridley. et qui devait suppléer dans le temps à l'ignorance des prédicateurs ou à leur pénurie; les XXXIX articles, et le Prayer-Book ou recueil liturgique. Les 39 articles furent rédigés * d'abord par Cranmer, avec l'aide de Ridley, en

1551; il y en avait primitivement 42; ils furent publiés en latin et en anglais en 1553. Une revision eut lieu en 1562, en latin; c'est alors qu'ils furent réduits à 39. En 1571 ils furent votés par les deux chambres en latin et en anglais. Les originaux, signés par les membres du parlement périrent dans l'incendie de Londrest mais l'exactitude du texte n'a jamais été contestée. Ce document, plus bref que la plupart des confessions de foi protestantes, se rapproche le plus, pour la doctrine, de celles de l'Eglise réformée, au point qu'on a cru y reconnaître l'influence de Calvin; pour le Canon des Écritures, pour le baptême et pour la confession, elle se rapprocherait cependant davantage de Luther, et les arminiens eux-mêmes y trouvent des articles qu'ils peuvent signer; de sorte que si la réforme anglaise a été un compromis entr* le passé et le présent, on peut dire que les 39 articles sont un compromis entre les diverses tendances protestantes. Quant au Book of Com-mon Prayer, c'est le manuel liturgique de l'Église anglicane; il renferme les chants, les prières, les lectures et toute l'ordonnance du culte; on le lit dans les familles, chacun l'apporte au temple pour pouvoir suivre et même réciter les prières avec le ministre. Il fut rédigé en i548 par Cranmer et quelques autres théologiens, sur la base des anciennes liturgies de Bangor, York. Salisbury, et avec l'aide des travaux de Bucer et de Mélanchthon. L'acte d'uniformité lui donna force de loi 1549. Quelques changements y furent introduits en 1552; d'autres en 160\ et en 1662. Ce livre est la fidèle expression de la foi de l'Église; on y trouve des traces d'uni-versalisme. des restes du catholicisme, et parfois l'empreinte de passions politiques. On pourrait croire que l'attachement des Anglais pour ce volume dût nuire à leur respect pour la Bible, mais les faits sont là pour établir le contraire, et aucun peuple n'a fait pour la propagation de l'Écriture autant que l'Angleterre.

L'Église anglicane a conservé l'épiscopaL comme plusieurs autres Églises protestantes, les moraves, les wesleyens, les luthériens en certains endroits, mais en insistant plus que les autres sur l'idée de la succession apostolique, ce qui la rapproche du catholicisme. Elle reconnaît, avec une foule de subdivisions, trois ordres principaux dans l'Église, les évêques, les pasteurs et les diacres; il y a en outre des chanoines pour le service des cathédrales, des doyens et des archidiacres. Les évêques siègent a la chambre des lords comme barons du royaume. L'archevêque de Cantorbéry a le titre de primat; il est le premier pair et membre du Conseil privé; les évêques l'assistent comme employés. doyen, chancelier, etc. C'est lui qui a le privilège de couronner le roi, l'archevêque

d'ïork vient en second, et couronne l'épouse da roi. II est également membre dti Conseil privé. L'un et l'antre passent avant les ducs. I/>s évêques suivent immédiatement les vicomtes. Les prélats irlandais sont lords tour k tour, chaque fois un archevêque et 3 évêq. Les évê-qaes des colonies peuvent être nommés directement par les ar^hevêq., sans l'intervention de la couronne, mais leur titre ne vaut que dans te colonies. Celui de Jérusalem est nommé alternativement par la reine d'Angleterre et par

roi de Prusse.

On a dit de l'Église anglicane, que sa doctrine était protestante et ses formes catholiques. Ce contraste explique les nombreuses sécessions qui ont eu lieu dans son sein k diverses époques, tantôt dans le sens d'un protestantisme plus arcentué. tantôt, et de nos jours surtout, dans U sens du catholicisme. On distingue en fait, sinon officiellement, trois pnrtis dans l'Église d'Angleterre: la Low church, qui est plus protestante. plus évangélique, moins attachée aux formes; la Broad church, ou Église large, qui tient surtout à l'établissement comme tel. k l'ap-pii de l'État, k ses richesses et k ses privilèges, et qui est assez latitudinaire en matière de doctrine; enfin la High church, la haute Église, qui attacha une plus grande importance aux termes catholiques du culte qu'à son caractère évangélique; elle accentue l'épiscopat. la succession apostolique, les sacrements, le rituel, (lette dernière tendance a toujours existé, mais elle a pris un développement extraordinaire de-pois environ 40 ans sons l'influence du Dr Pu-s*y; elle est connue sous les différents noms de pméime d'après son plus ardent défenseur; de trwtarianisme, k cause des « Traités pour le temps » par lesquels elle se révéla d'abord; de rituali&me. à cause de son penchant pour les manifestations extérieures et les cérémonies du culte, cierges en plein midi, processions, prières pour les morts, etc. Le résultat le plus net de ce mouvement a été la conversion franche au catholicisme de quelques-uns de ceux qui s'étaient laissé entraîner sur cette pente. Posey n'a pas abjuré, mais plusieurs de ses collaborateurs. Les protestants ont essayé de réagir contre ce danger; malheureusement, avec tout son appareil de fonctionnaires, l'Église anglicane ne possède aucune autorité réelle, le souverain n'étant que le chef nominal et politique de l'Église, les archevêques n'ayant aucune compétence en dehors de leurs diocèses, chaque évêque ne relevant que de lui-même, et les pasteurs ou recteurs jouissant d'une assez grande indépendance relative. La législation qui règle les rapports de l'Église avec l'État est si compliquée, que des sentences rendues par des évêques sont restées à l'état de lettre morte. Des conférences fraternelles, mais sans caractère officiel, ont réuni, sous la présidence de l'ar-chevêq. de Cantorbiry. jusqu'à 76 prélats; des résolutions générales ont été prises, et quoiqu'elles n'aient pas force de loi, elles sont de nature k fortifier les rapports des églises entre elles. D'autres conférences ont eu lieu entre des ministres et des prélats anglicans et des dignitaires de l'Église grecque, tendant k établir des communications entre ces deux grandes branches de la société chrétienne.

Les revenus de l'Égl. anglicane s'élèvent k plus de cent millions de francs, il répartir entre 18.000 ministres, 25 évêques et 2 arehev. L'ar-chev. de Cantorbéry reçoit à lui seul 375,000 fr. et possède le patronage de 177 bénéfices. Mais si la richesse est un moyen d'influence, elle présente aussi bien des dangers, dont le moindre est de faire du ministère une profession lucrative et une carrière.

En Irlande l'Église a cessé depuis le 1er janvier 1871. et grâce ît M. Gladstone, d'être unie à l'État. Elle comptait 2 archev. (Armagh et Dublin). 10 évêques et 2000 ministres, pour environ 600.000 anglicans. Les revenus étaient de plus de 15 millions (en capital 400 millions). Cette somme a été diminuée de moitié; le reste a été affecté k des établissements de charité, et l'Église a reçu la liberté en échange de ses privilèges. Sa seconde gloire, a dit M. Gladstone, sera plus grande que sa première.

ANHALT. petite principauté allemande, enclavée dans la Prusse, et datant de 1211. A l'époque de la Réformation, l'abbesse Elisabeth de Weyda fit venir Etienne Molitor 1521. qui prêcha hardiment l'Évangile et mit lin à bien des abus. Il fut puissammeut secondé par le noble et généreux prince Wolfgang, et ensuite par le* trois grands frères, les princes Jean, Georges et Joachim. Ce dernier hérita des enfants de ses frères, mais après lui la principauté se partagea en 4 branches, Dessau. Bernbourg, Kœ-then et Zerbst. Wolfgang, qui appartenait à une première branche, fut l'intime ami de Luther; il protesta à Spire 1529, signa la confession de foi d'Augsbourg 1530, pleura au lit de mort de Luther, et resta fidèle jusqu'à la fin, ■f 1566

ANICET, H ®e évêque de Rome, 157-168, martyr sous Marc-Aurèle. C'est pendant son pontificat que la différence qui existait entre l'Église d'Orient et celle d'Occident sur le jour où l'on célébrait la Pâque, attira pour la première fois l'attention; v. Polycarpe. Ces deux hommes, animés d'une vraie piété, n'en restèrent pas moins, malgré cette divergence, en communion fraternelle et célébrèrent ensemble la sainte Cène, Polycarpe se conformant dans cette circonstance aux habitudes de l'endroit où il se trouvait, tout en maintenant le mode oriental comme seul apostolique.

ANNATES. On appelait ainsi la redevance que payaient au pape les évêques nouvellement élus. Peu à peu on les a confondus avec les servitia communia, les présents offerts au con-sécrateur par le consacré. Comme en définitive tout remonte au pape, les deux offrandes ont fini souvent par n'en faire plus qu'une. Les annates payables directement au pape représentaient en moyenne un semestre de traitement; les servitia, payables aux évêques, une année entière. Plusieurs fois les conciles eurent à s'occuper de la question des annates qui avaient donné lieu à de nombreux abus, notamment le concile de Bâle. L'usage prévalut peu à peu de négocier avec le pape et de lui offrir une somme ronde, un peu inférieure au revenu réel de la place. Un décret du parlement les a supprimées en France 1789.

ANNE, v. Comnène.

ANNEAU du pêcheur. Chaque évêque, en entrant en charge, reçoit un anneau, symbole de son mariage avec l'Église. Le pape reçoit un anneau semblable, sur lequel est gravée la pêche miraculeuse de saint Pierre.

ANNIVERSAIRES. Dès le second siècle les églises se mirent à solenniser les anniversaires de la mort des martyrs. L'usage s'étendit et les familles célébrèrent le souvenir de la mort de leurs membres. De là les fêtes des saints, et les riches offrandes faites en ces occasions. Comme les riches seuls pouvaient faire d'abondantes aumônes aussi multipliées, on institua pour les pauvres la Fête des Morts, ou de Toutes-Ames, le 2 nov., et l'on y rattacha l'idée de messes pour délivrer les morts du purgatoire.

ANSBACH, margraviat des environs de Nuremberg, embrassa de bonne heure la Réforme sous l'influence de Casimir f 1527, qui demandait seulement que l'Évangile fût prêché, et laissant subsister d'ailleurs toutes les cérémonies catholiques. Son frère Georges, qui lui succéda, se montra plus énergique, rompit avec toutes les traditions romaines et résista même à l'empereur. Il fit partie de la ligue de Smal-calde. f 4343.

ANSCHAR. v. Ansgar.

ANSÉG1SE io fils de l'évêque Arnulf, de Metz, 7'ûs siècle, et père de Pépin d'Héristal. — — 2o d'une famille noble de Bourgogne, élevé dans un couvent des environs de Lyon, passa dans le diocèse de Rouen, où il avait un parent abbé, se fit moine vers 787. devint successivement abbé de Saint-Germer de Flay 807, de Luxeuil 817 et de Fontenelle 823. Charlemagne l'appela à sa cour à Aix-la-ChapeHe, le nomma intendant de ses bâtiments sous Eginhardt, et lui confia diverses missions difficiles, notamment en Espagne. Outre plusieurs écrits de théologie qu'il fit faire par ses moines, on lui doit le premier recueil des capitulaires de Charlemagne et de Louis-le-Débonnaire, en 4 livres, 827. Ce volume a fait sa réputation, f 20 juill. 833. — 3° Inconnu jusqu'en 870 on voit alors un Anségise abbé de Saint-Michel, ambassadeur à Rome pour le compte de Charles-le-Chauve. Ayant obtenu de Jean VIII qu'il couronnât Charles empereur 875, il reçut l'archevêché de Sens et devint l'instrument le plus actif de la papauté contre le clergé français et le conseiller intime du roi. Jean VIII le nomma 876 primat de l'Église franque et vicaire général du siège apostolique, en dépit des archevêques et de Hincmar en particulier, qui écrivit contre lui et ne voulut le reconnaître que comme métropolitain. Il ne jouit qu'un an de ses dignités, car Charles qui la lui avait procurée mourut l'année suivante. Au sacre de Louis-le-Bègue il n'apparaît que comme simple archevêque, et au concile de Troyes 878 l'arch. de Reims a de nouveau le pas sur lui. f 25 nov. 882. On inscrivit sur sa tombe Primus Gallorum papa, mais aucun de ses successeurs ne revendiqua ce titre. — 4° Évêque de Troyes entre 925 et 959, partit plusieurs fois contre les Normands, fut chassé de son diocèse en 959, le recouvra, grâce à l'arche v. de Cologne, et par ses connaissances lui donna les reliques de saint Patrocle.

ANSELME 1° savant et pieux théologien du 11m® siècle, surnommé de Cantorbéry, du nom de son archevêché. Né 1033 à Aoste, d'une famille lombarde illustre, il voulut de bonne heure entrer dans la vie monastique, mais son père l'en détourna et le lança dans le monde. Redevenu libre après plusieurs années de dissipation, il se rendit au couvent du Bec, Normandie, pour y étudier, s'y fit recevoir moine à l'âge de 27 ans, en fut nommé successivement prieur, puis abbé 1078; fit, dans l'intérêt de son couvent, plusieurs voyages en Angleterre, pendant lesquels il forma d'aimables et hautes relations, et gagna l'estime de Guillaume I^ dans les choses temporelles, comme il possédait celle de Grégoire VII en matières spirituelles. Appelé, lors d'un nouveau voyage, à l'archevêché de Cantorbéry, il n'accepta, après de longues hésitations, que parce qu'il s'agissait de défendre les droits de l'Église contre l'arbitraire tyrannique de Guillaume II. Mais bientôt il dut s'enfuir, passa quelques années en exil, tantôt à Rome et aux environs, tantôt à Lyon, employant ses loisirs forcés à la composition de traités de théologie sur les sujets les plus importants de la foi, et maintenant toujours l'autorité absolue du pape et du clergé en fait de doctrine. Henri W le rappela à la mort de son frère, mais Anselme ayant refusé le serment 1103, dut de nouveau reprendre le chemin de l'exil jusqu'au moment où, par un commun accord, le roi renonça à son droit d'investiture par la crosse et l'anneau, et le pape Pascal 11 céda sur la question du serment. Dès lors Anselme ne cessa de jouir de la confiance la plus absolue de son souverain qui, une fois même, pendant une absence prolongée, lui confia la régence du royaume. Mais tout en soccupant des prérogatives et des droits de l'Église et spécialement de l'Église d'Angleterre dont il défendit l'indépendance vis-à-vis du pape lui-même, il travailla à la réformer dans ses laïques et dans son clergé; il fit observer surtout le célibat ecclésiastique et la discipline des mœurs dans les couvents. Son activité s'étendait sur les trois royaumes et même au delà, mais les soucis*matériels et administratifs ne l'empêchèrent jamais de mettre la piété personnelle au-dessus de tout le reste. Sa vie était rigoureusement ascétique. Il f à l'âge de 75 ans, 26 avril 4109. — On l'a souvent comparé a saint Augustin. Il est généralement considéré comme le père de la scolastique et l'initiateur de ce mouvement des esprits qui pendant plusieurs siècles réagit seul en Occident contre la torpeur dont la pression romaine menaçait les consciences et les intelligences. Ses principaux ou>rages sont: un Dialogue sur la grammaire; un Monologue sur Dieu: Cur Deus homo (pourquoi Dieu s'est-il fait homme?), traité sur la rtdemption; un Traité sur la foi, ou l'Incarnation du Verbe; un sur la Procession du Saint-Esprit, des Méditations, des Prières, des Lettres, etc. Foncièrement catholique et prêtre, il s'élevait au-dessus des préjugés de son Église et de son temps, même quand il les partageait, v. Ch. Rémusat, Anselme, etc.

2° Evêque de Havelberg, envoyé à Constan-tinople par Lothaire II, 1135, connu surtout par sa tentative pour amener un rapprochement entre les Églises grecque et latine. Sa controverse avec Nicétas, archev. de Nicomédie, est aussi remarquable par la modération de la forme que par la vigueur des arguments. Il la rédigea 1145 sur la demande d'Eugène III, à Rome, et fait aux Grecs d'importantes concessions.

3* Anselme de Laon, étudia au Bec sous le grand Anselme, puis à Paris. Il ouvrit ensuite dans sa ville natale une école qui devint célèbre et compta Abélard parmi ses disciples. Archidiacre, il refusa plus d'une fois les fonctions épiscopales, pour pouvoir se livrer tout entier à l'enseignement, f 1117. Il est surnommé l'Éco-iâtre et aussi le Docteur des docteurs. Sa Vul-gate interlignée a donné une fâcheuse direction à l'exégèse du moyen âge.

AKSGAR, ou An*cAar(=Oscar?) l'apôtre du Jiord, né 801 dans le nord de la France d'une famille distinguée, étudia au couvent de Corvey (Corbie), Picardie, et se consacra de bonne heure à l'œuvre des missions. Parti en 826 pour le Jutland. avec son ami Autbert et avec Harald, l'ancien roi du Hadeby (Schleswig), il dut en 829 renoncer à tout espoir de succès immédiat. Il se rendit en Suède sur l'appel d'Eric Bjôrn, roi du pays, et après bien des vicissitudes et des dangers, il arriva à Birka 830; il y fut accueilli les bras ouverts, et un grand nombre. nobles ou esclaves, se convertirent à sa voix. Dans une diète présidée par l'emp. Louis 831, il fut nommé archev. de Hambourg, se rendit à Rome, et fut confirmé en cette qualité 834 par Grégoire IV. Ebbo de Reims lui donna pour coadjuteur un sien neveu, Gautbert, qui fut sacré èvêque de Suède, et pendant quelques années la mission parût prospérer. La plus grande partie du Holstein professait le christianisme, quoique les îles danoises, sous l'intluence du roi Gorm, restassent les ennemies de la nouvelle foi. Mais les rois du Jutland et de la Suède s'unirent pour une descente sur les côtes du continent, pillèrent tout, jusqu'à Paris, et ruinèrent Hambourg; l'église, le couvent, la bibliothèque d'Ansgar. furent livrés aux flammes et son troupeau dispersé ou réduit en esclavage, 845. Lui-même trouva un refuge à 3 milles de là. Les pirates persécutèrent aussi les chrétiens de Suède; Nidhart fut tué; Gautbert emprisonné, puis exilé. Tout était à refaire. Ansgar se remit à l'œuvre avec courage 847; il fut placé 850 à la tête des évêchés réunis de Brème et de Hambourg et reprit ses missions dans le nord. Le missionnaire Ardgar et le gouverneur Hérigar f 852. obtinrent des succès considérables, et Ansgar, chargé d'une mission de l'emp. Louis, vint avec son ami Rimbert (qui fut plus tard son historien), traiter lui-même avec le roi Olaf des conditions de la nouvelle église. Il y installa Erimbert et ses compagnons et repartit 856 pour son vaste diocèse. Il s'occupa de former des ouvriers fidèles et capables, combattit jusqu'à la fin le commerce des esclaves, en racheta un grand nombre, s'occupa des pauvres, des malades, des étrangers, et mérita par son activité, non moins que par son humilité et son désintéressement, d'être mis au rang des saints, f à Brème le 3 févr. 865. Sa vie se passa dans les austérités de la règle de saint Benoit; il ne se nourrissait que de pain et d'eau, et travailla de ses mains à faire des filets, aussi longtemps qu'il le put. La tradition lui prêta des miracles, mais il dit lui-même: « Si j'étais digne que Dieu fît pour moi un miracle, je lui demanderais de faire de moi un homme parfait. » La principale église de Brème porte encore aujourd'hui le nom de saint Anschar.

ANSO. moine du couvent de Lobbes (Lau-biensis). en fut l'abbé entre 776 et 800, et maintint les droits de son couvent qui ne tomba qu'en 889 sous la présidence de l'évêque de Liège. Il a écrit plusieurs biographies, qui ont uté utilisées par les bollandistes ou reproduites par Mabillon. C'était un homme intègre et actif, mais il n'a guère de valeur scientifique.

ANTÈRE, ou Anthère, pape inconnu, 235; mis à mort après un mois de règne, dit la légende, parce qu'il voulait qu'on fit un recueil des Actes des martyrs.

ANTHIME. v. Agapet 1<>.

ANTHROPOMORPHISME. On désigne sous ce nom tout essai de représenter Dieu sous une forme humaine, comme étant limité dans l'espace, ayant un extérieur, des dimensions, une ressemblance, des traits, des organes, des yeux, des bras, une bouche, etc. L'esprit de l'homme, incapable de contempler ce qui n'a pas de formes, donne involontairement à Dieu certaines formes, les siennes; mais ce même esprit redresse naturellement ce qu'il y a de faux dans cette représentation de la pensée et convient qu'il n'y a là qu'une simple adaptation à la faiblesse de sa nature. Il en est de même de l'an-thropopathisme, assimilation de Dieu à l'homme quant au sentiment, comme si Dieu était susceptible de jalousie, de colère, de vengeance, de repentir, etc. Les religions païennes sont toutes tombées dans ce double excès; le judaïsme et le christianisme l'ont évité au point de vue de l'enseignement et comme dogme, et c'est d'une manière tout à fait symbolique qu'ils emploient le langage de l'anthropomorphisme pour faire comprendre la relation de Dieu avec l'homme par l'analogie des choses connues. S'il y a erreur dogmatique à donner à Dieu, esprit pur, une forme quelconque, l'Écriture autorise par son langage une assimilation purement symbolique et de convention. Une secte d'anthropo-morphites fit quelque bruit au siècle; ils s'appelaient aussi Audiens, du nom d'Audi us leur chef, prêtre sévère et intègre de la Mésopotamie, qui flagella un clergé corrompu; ayant été maltraité par des prêtres, il sortit de l'église avec quelques amis, se fit consacrer évêque et fut exilé par l'empereur en Scvthie où il continua de prêcher jusqu'à sa f 372. Il s'appuyait de divers passages de l'A. T., pris à la lettre, et notamment de Gen. 4, 26, pour attribuer à Dieu la forme humaine. La secte, laborieuse et pure, mais tournant à l'exagération, s'éteignit au ome siècle.

ANTIDICOMARIANITES. Epiphanes appelle ainsi ceux qui, vers la fin du 4®* siècle, et sans former une secte à part, niaient la virginité perpétuelle de Marie et commençaient une sorte de réaction contre le culte de la Vierge. Ils n'étaient pas nombreux, parce que la mariolatrie n'existait encore qu'en germe. Ils eurent pour adversaires les Collyridiens, qui adoraient la Vierge et lui offraient des gâteaux, ou collyres: petite secte arabe, qui dura peu.

ANTIENNE, v. Antiphones.

ANTILÉGOMÈNES. C'est ainsi qu'Eusèbe, dans un fragment qui n'est pas très clair, désigne certains écrits apostoliques, reconnus comme tels par le plus grand nombre d'églises et d'écrivains, mais contestés, ou plutôt non connus de l'universalité. C'étaient 2 Pierre, 2 ou 3 Jean, Jaques et Jude, que leur caractère ou leur peu d'étendue, peut-être aussi leur contenu, avait empêché d'être aussi répandues que les autres. S'il les oppose aux Homologoumènes, reconnus de tous, il les oppose aussi aux No-tha, aux illégitimes, inauthentiques, édifiants peut-être, mais non apostoliques, tels que le Pasteur d'Hermas, les Actes de Paul, les Constitutions apostoliques, et aux écrits mauvais, entièrement rejetés, comme les faux évangiles de Pierre, de Thomas, les Actes d'André, etc.

ANTINOMIANISME (opposition à la loi). Plusieurs assertions de Luther et de Mélanchton. exagérées dans la forme, contre la valeur de la loi de Moïse, contre l'A. T., et contre les bonnes œuvres, poussèrent Agricola à exagérer davantage encore, et à établir une contradiction dogmatique là où il n'y avait à l'origine qu'une succession et un développement historique. Au lieu de voir dans l'Évangile l'accomplissement de la loi, il voulut y voir son entière abolition. 11 insista sur la justification par la foi seule, et quand il entendit, 1527, les deux réformateurs, dans leurs visites d'églises, recommander aux pasteurs la lecture, l'explication et l'observation des 10 commandements, il protesta contre ce qu'il appelait une chute, leur rappela leurs pro près paroles et leur reprocha leur inconséquence. Dans une conférence tenue à Torgau, décembre 1527, on s'expliqua, Agricola maintenant que la foi doit précéder la repentance. et les réformateurs concédant que sous le nom de repentance on peut comprendre aussi la foi. Le calme succéda momentanément à la guerre, mais comme Mélanchthon l'écrivit à Jonas, Agricola paraissait plutôt vaincu que persuadé. La dispute éclata de nouveau en 1537 à l'occasion de thèses, d'ailleurs modérées et fraternelles, qu'il publia en arrivant à Wittenberg pour y enseigner comme professeur. Mais si les thèses étaient modérées, les développements en étaient passionnés. Luther y répondit par quatre conférences, plus tard suivies d'une cinquième 1559, dans laquelle il malmena Agricola en l'assimilant à MUnzer. Mais Agricola fut appelé à Berlin comme prédicateur de la cour par le duc de Brandebourg, qui travailla et réussit à réconcilier les deux amis, déc. 1540. Après la f de Luther, Flacius essaya de ranimer le débat, mais Agricola n'y prêta pas les mains. Ses ennemis renouvelèrent leurs attaques en 1562, à propos d'un sermon sur Luc 7, 37-49, mais encore sans succès. D'autres prêchèrent après lui l'antinomianisme, Amsdorf, Otton de Nordhau-sen, jusqu'au moment où la Formule de Concorde les réduisit au silence, en établissant que la loi est faite pour réveiller les consciences, et qne l'Évangile qui peut les réveiller aussi, doit en même temps les consoler en les amenant à la foi. Le protestantisme était d'autant plus obligé de combattre l'antinom, que ses adversaires ne se faisaient pas faute de lui reprocher de mépriser les bonnes œuvres. Du reste l'antin. qui n'est qne l'exagération de la doctrine évangéli-que sur l'affranchissement du chrétien, a été de tous les temps. Il y a eu des antinomiens chez les pins fervents comme chez les plus relâchés; les baptistes anglais de 1689 penchaient vers Fantinomianisme, et aujourd'hui encore plusieurs sectes en sont atteintes. Leur grande erreur est d'opposer la Loi à l'Évangile, quand l'Évangile fait le contraire. Cette question, en théorie, peut n'être parfois qu'une dispute de mots entre chrétiens qui s'entendent au fond; dans la pratique elle peut avoir de dangereuses conséquences.

ANTIOCHE, v. Dict. Bibl. Cette ville célèbre. située sur l'Oronte en Syrie, devint de bonne heure comme une seconde capitale de la chrétienté, et servit de centre aux fidèles après que Jérusalem eut été détruite. Elle eut en outre l'avantage, comme métropole, d'être plus libre dans ses allures et dégagée de l'influence judaïsante. Elle compta parmi ses évêques Ignace et Chrysostome et vit plusieurs conciles se réunir dans ses murs; en 252 contre les no-vatiens, trois au sujet de Paul de Samosate, un en 341 au sujet des controverses ariennes (qui confirma les décrets de Nicée, moins le mot homoousias), etc. Ses théologiens, dans les discussions monophysites, s'appliquèrent à trouver un moyen terme, en distinguant les deux natu-res, mais sans les séparer. L'invasion de l'islamisme mit fin, 637, à l'influence qu'Antioche exerçait sur la chrétienté. A l'époque des croisades, Boëmond de Tarente s'en fit une principauté. Antioche est peut-être après Jérusalem et Damas la ville qui a été le plus souvent détruite et qui a le plus souffert de la peste, de la famine, de l'épée, du feu et des tremblements de terre; l'un des derniers et des plus violents a eu lieu le 13 août 1821 et a complété l'œuvre des siècles. Antakieh ne compte plus guère aujourd'hui que 8 à 10,000 habitants. — On désigne sous le nom d'École d'Antioche, ou plus exactement École de Syrie, une école célèbre, fondée au commencement du 4^6 siècle à Antioche et qui ne tarda pas à former autour d'elle en Syrie d'autres institutions semblables, notamment à Edesse. C'étaient des théologiens qui se livraient avec zèle à l'étude des saints Livres, et dont la tendance exégétique était également éloignée d'un littéralisme étroit et de la manie allégorique de certains commentateurs. Une critique indépendante et la distinction des deux natures en Christ caractérisent surtout cette école, dont Dorothée et Lucien furent les chefs, et qui compta parmi ses disciples Théodore d'Héraclée, Eusèbe d'Emèse, Cyrille de Jérusalem, Apollinaire de Laodicée, Ephrem d'Edesse, Diodore de Tarse, enfin Chrysostome, Théodore de Mopsueste et même Kestorius.

Il faut distinguer encore dans l'histoire de l'Église une autre Antioche, sur le Méandre, en Carie; résidence épiscopale, où se réunirent en 365 et 378 deux synodes relatifs à l'aria -nisme.

ANTIPHONES, chants alternés, ou double chœur, dont le second reproduisait comme un écho, mais dans un autre ton, ce qu'avait chanté le premier. C'est de là probablement que s'est formé le mot d'antienne. On attribue d'ordinaire à Ambroise l'introduction des antiphones, mais à tort. Ce mode était plus ancien, déjà connu des Grecs, et presque certainement des Hébreux, comme l'indique le contenu de plusieurs psaumes. Ambroise le réforma, le régularisa, et le vulgarisa. Il ne faut pas confondre les antiphones avec les répons; quoique l'effet musical fût quelquefois le même, le sens ne l'était pas; l'un était une répétition de la pensée, l'autre en était le complément.

ANTITACTES, nom commun à plusieurs sectes gnostiques, basilidiens, valentiniens, etc. ainsi qu'aux carpocrates qui, regardant la matière comme la source de tout mal, ne pensaient pas pouvoir mieux lui témoigner leur mépris qu'en tuant le corps par tous les excès possibles et en foulant aux pieds, sciemment et volontairement, la loi qui était l'œuvre du démiurge, pour bien constater que leur esprit était au-dessus de la chair.

ANTITRINITAIRES, v. Unitaires.

ANTOINE, !• célèbre religieux qui fut, après Paul de Thèbes, l'initiateur de la vie monastique. Né 251 à Coma, d'une riche famille de la Thébaïde, il ne reçut qu'une culture incomplète, sa tendance contemplative l'ayant toujours dé^ tourné de l'étude du grec. Mais il goûtait la Parole de Dieu et savait même la lire dans le grand livre de la nature. Ayant entendu un jour l'histoire du jeune homme riche, il se dépouilla de tous ses biens et n'en garda que ce qui lui était strictement nécessaire pour vivre, lui et sa sœur. Une autre fois il entend ces paroles: Ne vous

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inquiétez de rien; il se décide alors à se dépouiller de ce qui lui reste, confie sa sœur à une association de jeunes chrétiennes, et va s'établir seul en face de la maison paternelle, vivant de son travail et donnant aux pauvres le surplus de ce qu'il gagnait. Mais cette espèce d'oisiveté relative avait ses dangers et toutes les tentations l'assaillirent, sans parler môme de l'orgueil spirituel. Il se vit entouré de dénions sous diverses formes et se battit avec eux. Il crut remédier au mal par plus d'ascétisme encore et se retira dans une grotte solitaire au pied d'un rocher, où il pratiqua un jeûne excessif, mais les démons l'y maltraitèrent tellement qu'on le rapporta presque mort dans son village. Il vécut ensuite dix ans dans les ruines d'un vieux château de montagne, ou de saines occupations mirent fin au règne des démons. Il était devenu le conducteur spirituel d'un grand nombre de jeunes ascètes, dont les cellules peuplaient le désert autour de lui, et l'on accourait de tous côtés pour l'honorer ou pour le consulter. Il reculait toujours plus avant dans le désert, mais la foule l'y suivait, on lui amenait des malades pour qu'il les guérit et il prêchait avec force. Dans les occasions solennelles et importantes il reparaissait dans le monde; on le vit en 311 à Alexandrie, lors des persécutions de Maximin, exhortant les fidèles à persévérer; puis en 325 il apparut de nouveau pour combattre l'arianisme. Sa présence produisait toujours un grand effet. Respecté des païens, et même honoré des empereurs, il f 356 à l'âge de 105 ans, n'ayant cessé de croître en renoncement à lui-même et en humilité. Ne nous affligeons pas de nos fautes, disait-il, comme si nous n'étions pas rachetés, mais soyons toujours joyeux, afin que le Malin qui nous fait broncher s'enfuie. Sévère envers lui-même, il était indulgent pour les autres. Avant de mourir il ordonna de tenir secret le lieu de sa sépulture, pour enlever tout prétexte à une recherche superstitieuse de ses restes. On a de lui 7 lettres, une Règle et des Sermons. Plusieurs de ses disciples fondèrent des couvents en Libye et dans la Haute-Égypte; l'un d'eux, Hilarion de Tamata, en fonda un à Gaza en Palestine. La vie monastique, importation de l'Orient, était décidément installée dans l'Église chrétienne. — La vie d'Antoine a été écrite par Athanase, qui a reproduit sans les discuter les faits et les légendes qu'il avait recueillis, s'en rapportant peut-être au sens critique de ses lecteurs pour faire la part du réel et de l'imaginaire, de l'objectif et du subjectif, dans la description des luttes du saint contre les démons; il est possible cependant qu'il ait admis lui-même la réalité de ces combats.

2o Antoine, dit de Padoue, parce que ses reliques sont conservées dans cette ville, est l'un des plus illustres successeurs de François d'Assise. Né à Lisbonne 1195 de parents nobles, il reçut une éducation distinguée et se fit religieux dès l'âge de 15 ans. Après une tentative man-quée pour l'évangélisation des Maures d'Afrique, il fut poussé par une tempête en Italie où il se fit bientôt remarquer par sa science comme théologien et par ses talents comme prédicateur. La légende porte même que les poissons se dressaient près du rivage pour l'entendre. Successivement professeur à Bologne, Toulouse, Montpellier et Padoue, il finit par se vouer uniquement à la prédication. Il s'opposa à l'adoucissement de la règle de saint François, que le second général de l'ordre, Élie, damandait d'accord avec un certain nombre de custodes. Provincial de la Romagne, il renonça à ces fonctions dans ses dernières années et f Padoue 1231. Il a laissé quelques sermons et une Concord. morale de la Bible, de peu de valeur.

3° Antoine de Lebrixa, Andalousie. 4444-1522, littérateur espagnol, un des plus utiles collaborateurs de la Bible polyglotte du cardinal Ximénès.

4° Antoine (Marc-) de Dominù, né 1556 à Arbe, Dalmatie; de la famille des Théobald de Plaisance, étudia chez les jésuites de Padoue et fut employé par eux comme professeur de mathématiques et de philosophie. On dit même qu'en dépit du cardinal Aldobrandini, il se lit secrètement recevoir membre de l'ordre. Il fut nommé évêque de Segni, archev. de Spalatro, primat de Dalmatie, par l'influence du cardinal Borghèse, qui désirait l'éloigner de Rome où il était trop intime avec plusieurs grandes dames. Les négociations entre Rome et Venise l'amenèrent à étudier de plus près l'histoire de la constitution de l'Église. La rencontre qu'il fit de deux Anglais, lui inspira des doutes sur les doctrines de Rome. Assez mal reçu par le pape, censuré par l'inquisition, il partit pour l'Angleterre, où il publia une brochure latine, avec l'exposé de tout ce qu'il ne croyait pas: sacrifice de la messe, transsubstantiation, purgatoire, confession, culte des reliques, etc. Il abjura 1616 dans la cathédrale de Saint-Paul, et Jaques 1er lui donna de riches bénéfices. Toutefois on ne se fiait pas à lui. L'archevêque de York étant mort, il postula la place 1618, et ne l'ayant pas obtenue, il quitta l'Angleterre. Il se refit catholique en traversant Bruxelles, dut faire pénitence à Saint-Pierre de Rome, la corde au cou, reçut l'absolution après de rudes épreuves, mais resta toujours suspect d'indifférentisme ecclésiastique. Arrêté de nouveau 1623 pour quelques paroles imprudentes, il fut enfermé au château Saint-Ange, où il f 1624, vraisemblablement assassiné. Son corps fut traîné dans les rues, brûlé par le bourreau, et ses cendres jetées dans le Tibre. On a de lui un Traité de la république chrétienne, contre le pape; une édition anglaise de FHist. du conc. de Trente, de Sarpi; quelques opuscules, et un curieux traité de 1611 De radiis visu* et lucis, dans lequel, au milieu de beaucoup d'erreurs, il émet le premier une juste explication de l'arc-en-ciel.

L'ordre de Saint-Antoine. Vers 1070 sévissait en France une maladie que le peuple avait baptisée du nom de Feu sacré (sacer mor-bus), ou feu de Saint-Antoine. Plus tard, un gentilhomme du Dauphiné, Gaston, voyant son fils atteint de ce mal, se rendit en pèlerinage à Saint-Didier, près Vienne, Provence, où l'on conservait les reliques du saint (?), et fit vœu, si son fils se rétablissait, de consacrer au saint toute sa fortune pour la fondation d'un ordre spécialement chargé de soigner ce genre de maladies. L'enfant guérit, le père tint sa promesse, ouvrit un hôpital, obtint le concours de huit compagnons, fut autorisé par Innocent III à bâtir une église 1208; Honoré III leur permit de prononcer des vœux 1228, et Boniface VIII les reconnut comme chanoines réguliers sous la règle de saint Augustin. Ils portaient une robe noire, semée de T bleu de ciel, cf. Ezéch. 9, 4, et une petite clochette au cou lorsqu'ils faisaient la quête. Le peuple leur offrait chaque année un cochon, animal que l'on croyait, à cause de ses rapports avec les démons (Matt. 8), être plus particulièrement consacré à saint Antoine. L'ordre se répandit en Allemagne, en France et en Italie; mais à l'époque de la Réformation il était tombé en un complet discrédit; il se fondit au 45"* siècle dans l'ordre de Malte et fut supprimé avec lui, 1789.

ANTONIENS, pelite secte bernoise, ainsi nommée d'après son fondateur Antoine Unternâhrer, né 1761 dans l'Entlibuch, Lucerne, et élevé catholique. De marmiton il voulut devenir peintre; puis menuisier, marchand ambulant, médecin. enfin théologien. Il se prenait pour une seconde incarnation de Dieu, s'établit à Amsol-dingen près de Thoune, 1799, prêcha toutes les libertés, enseigna que le seul mal était de distinguer entre le bien et le mal; que le seul bien était l'amour, surtout l'amour des femmes, composa une quinzaine de brochures, la plupart anonymes, se fit mettre plusieurs fois en prison ou exiler, et f à Berne 1824. Il avait réuni autour de lui quelques disciples, surtout dans les cantons de Berne, Lucerne. Argovie et Zurich, mais la secte lui survécut peu.

ANTCKNIN 1° le Pieux, né à Lanuvium l'an 36, adopté par Adrien, et son successeur au trône 138-161, fut un des meilleurs empereurs romains, et mérita d'être surnommé le Père de la patrie. Il disait qu'il aimait mieux sauver un citoyen que voir périr mille ennemis. Les chrétiens eurent aussi part aux douceurs de son règne, quoique le fanatisme des prêtres réussit encore parfois à faire parmi eux de nouvelles victimes, entre autres l'év. Publius d'Athènes. Il les défendit dans un décret remarquable contre l'absurde imputation d'être responsables des fléaux publics, tremblements de terre, inondations, famines, etc. C'est vers la fin de son règne que parut l'Apologie de Justin martyr. II eut pour successeur Marc-Aurèle.

2® Antonin, né 1389, dominicain 1405, bientôt prieur, puis vicaire-général, s'occupa de réformes, travailla au concile de Florence 1439 à la réunion avec les grecs, fut nommé arche v. de cette ville en 1446 et f 1459. Canonisé 1523. Distingué par son intelligence et par sa largeur d'esprit, il ne le fut pas moins par son caractère et sa générosité. On a de lui un Manuel de théologie morale, une Summa confessionalis, et un Abrégé d'histoire où il reconnaît entre autres que la donation de Constantin n'est pas à l'abri de toute contestation.

3° v. Marc-Aurèle.

APELLÈS, v. Marcion.

APHTHARTODOCÈTES, ceux qui enseignaient l'incorruptibilité du corps de rChrist. une des nombreuses sectes issues du monophy-sitisme; on les nommait aussi julianistes, du nom de Julien, évêque d'Halicarnasse, qui avait suggéré cette idée. L'emp. Justinien I les déclara orthodoxes, mais sa f 565 mit fin à la secte et à la controverse.

APION, Égyptien de l'oasis, qui passe pour un Alexandrin parce qu'il étudia à Alexandrie sous Apollonius ,et Didyme. Il vint à Rome et enseigna sous Tibère, Caligula et Claude. C'était un fort travailleur, versé dans la littérature grecque, éloquent, bon dialecticien, mais très vaniteux. Il se vantait d'assurer l'immortalité de ceux à qui il dédiait ses livres, et tous sont perdus, il n'en reste que des fragments conservés pour la plupart dans les écrits de ses adversaires. Son livre contre les juifs a provoqué la réfutation de Josèphe contra Apionem, qui seule a sauvé son nom de l'oubli. Il avait aussi écrit sur Homère, et une Hist. d'Égypte.

APOCRISAIRES, délégués officiels des patriarches auprès des empereurs, et leurs intermédiaires naturels pour les communications et présentations, depuis l'époque où les empereurs devenus chrétiens se crurent le droit d'intervenir dans les questions d'organisation ecclésiastique. L'év. de Rome eut lui-même son apocri-saire à Constantinople pendant un aertain temps.

APOLINAIRE, Claude, évêque d'Hiérapolis en Égypte, contemporain de Méliton, apolo-gète et adversaire du montanisme, 160-80; écrivain fécond, d'une belle culture hellénique.

De tous ses ouvrages qui furent fort répandus: aux Grecs, aux Juifs, de la Vérité, de ia Piété, Apologie adressée à Marc-Aurèle, il ne reste plus que des fragments incomplets. Comme il est fait mention dans l'Apologie de la pluie accordée à la Légion foudroyante, et qui sauva l'armée de Marc-Aurèle, 174, l'Apologie est nécessairement postérieure à cette date.

APOLLINAIRE 1<> VAncien, né à Alexandrie de parents païens, vers la fin du 3n»e siècle. D'abord rhéteur et grammairien, il embrassa le christianisme. Après avoir professé à Béryte et à Laodicée, il fut ordonné prêtre dans cette dernière ville et s'y maria. Ses relations avec des rhéteurs païens le firent exclure de l'Église, mais il ne tarda pas à y être réintégré après avoir fait pénitence. Il écrivit de nombreux ouvrages en vers et en prose, qui presque tous sont perdus.

2® le Jeune, fils du précédent, né à Laodicée, surpassa son père. Il enseigna successivement à Béryte et à Laodicée, puis fut diacre dans cette dernière ville 335. Ses rapports avec le rhéteur païen Libanius et avec Epiphane le firent exclure de l'Église comme son père, mais il fut bientôt réintégré comme lui. Plus tard il eut encore des démêlés avec son évêque à propos de ses relations avec Athanase. Apollinaire avait pris une part active à la rédaction du Symbole de Nicée. Quand l'arianisme triompha, il partagea la disgrâce d'Athanase, mais cela dura peu. En 362 il fut nommé évêque de Laodicée. Julien l'Apostat était alors sur le trône, et avait enlevé aux chrétiens le droit d'enseigner dans les écoles de grammaire et de rhétorique; pour subvenir à cet inconvénient, les deux Apollinaire écrivirent des livres élémentaires, des Dialogues, des Hymnes, des Odes, etc. sur des sujets d'histoire sainte ou des sujets profanes à l'usage des écoles. Sozomène compare ces œuvres aux chants d'Homère. Plus tard, niant qu'il y eût rien d'humain dans l'âme de Christ, il fut accusé de sabellianisme et condamné par plusieurs conciles, notamment par celui de Rome 381. Il mourut fort avancé en âge, vers 390. Littérateur, poète, savant et éloquent, instruit en hébreu, Apollinaire écrivit beaucoup, entre autres des ouvrages d'exégèse. De toutes ses œuvres il ne reste qu'une Interprétation des Psaumes, en vers, et une tragédie, le Christ souffrant (Paris 1552 et 1580).

Sidoine Apollinaire, auteur et poète latin, né 431 à Lyon, d'une des principales familles de cette ville. Il se destina d'abord à la carrière militaire, fut en grande faveur à Rome et protégé par l'empereur Avitus son beau-père, ainsi que par Majorien et Anthémius; devint successivement préfet du prétoire, patrice, sénateur, et remplit en plusieurs circonstances les fonctions d'ambassadeur. En 472, quoique laïque et marié, il fut nommé évêque de Clermont-Fer-rand; après avoir refusé quelque temps, il se décida cependant à accepter. En 475 les Goths attaquèrent Clermont; Sidoine se resouvint de ses talents militaires et les mit vaillamment an service de la ville, qui cependant fut prise et détruite, f entre 482 et 488. Il a laissé 9 livres de Lettres, précieuses pour la connaissance des mœurs ecclésiastiques du temps, et 24 poëmes, panégyriques, épithalames, etc. Ses œuvres ont été trad., assez mal. par Sauvigny, 1786, et mieux plus tard, 1836, par Grégoire et Col-lombet. H. B.

APOLLONIA, vierge; diaconesse; probablement d'un certain âge, qui souffrit le martyre 249 à Alexandrie pendant les persécutions de Décius. Connue par une lettre de Denys à Fabien d'Antioche. Elle reçut tant de soufflets et si violents, que ses dents tombèrent. Puis conduite devant le bûcher, on la menaça de l'y jeter, si elle ne maudissait pas son Christ. Après avoir paru se recueillir quelques instants, elle se leva et se précipita elle-même dans le feu. Il est probable qu'elle redoutait des outrages pires que (a mort. Quelques écrivains ont voulu établir par cet exemple, qu'il était permis aux chrétiens de se soustraire aux supplices par le suicide dans les temps de persécution. Augustin croit au contraire qu'Apollonia a pu agir ainsi par une impulsion secrète de l'Esprit, sans que cela puisse faire règle pour d'autres. L'exemple de Samson ne prouve pas davantage. Les catholiques invoquent Apollonia, ou sainte Apolline, contre les maux de dents.

APOLLONIUS 1° de Thyane, mage, philosophe et thaumaturge célèbre de la fin du 1er siè-cle, né à Thyane en Cappadoce, de la secte de Pythagore, voyagea beaucoup, visita l'Euphrate, Babylone et les Indes, puis la Grèce et l'Italie, s'instruisant partout, arrachant à chaque peuple quelques parcelles de vérité. Il faisait des cures merveilleuses, et on lui attribuait le don de seconde vue. Chassé de Rome par Néron, il retourna en Orient, se lia avec Vespasien, ouvrit à Éphèse une école pythagoricienne, et l'on raconte qu'il s'interrompit au milieu d'une de ses leçons pour dire: t Courage, Stephanus, tue le tyran. • C'était le moment même où Domi-tien périssait à Rome. Il f à Éphèse en 97 dans un âge avancé. Son ami fidèle Damis a écrit ses mémoires, qui ne parurent d'ailleurs, par les soins du sophiste Flav. Philostrate, qu'un siècle plus tard, singulièrement ornés de fables et de commentaires incroyables, et certainement dans une intention polémique. Son ascétisme, se» connaissances prodigieuses, ses actes, les persécutions qu'il eut à subir, sa doctrine, sa mort même, qui est plutôt décrite comme une assomption, sont racontés de manière à établir forcément un parallèle avec Jésus-Christ. Baur a voulu y voir un premier essai de syncrétisme, comme si le rhéteur païen avait voulu établir qu'il y a du bien dans toutes les religions, et des grands hommes chez les païens comme chez les chrétiens. Rieckher pense au contraire qu'il y a eu là une attaque indirecte contre le christianisme, et que l'auteur s'est proposé en glorifiant Apollonius de détourner de Christ l'attention des masses en leur présentant le spectacle d'un païen possédant toutes les vertus et tous les pouvoirs.

2° Écrivain du 2"* siècle, qui écrivit contre le montanisme; cité par Eusèbe et par Jérôme.

3° Sénateur distingué, respecté des chrétiens de Rome à cause de sa culture scientifique et philosophique, prononça un discours en leur faveur devant le sénat, et f 186 martyr sous l'empereur Commode.

APOLOGÈTES, Apologétique, Apologie.—Dès les premiers temps du christianisme, la doctrine et les faits chrétiens ont été un signe auquel le monde devait contredire, Luc 2, 34. On l'a attaqué dans son berceau, on l'a poursuivi jusqu'à la croix, et pour cette guerre impie toutes les armes ont paru bonnes, la violence et le mensonge, la moquerie et la raison. De bonne heure aussi les disciples comprirent que c'était leur devoir de défendre leur foi et d'en aflBrmer les motifs. Le mot dont se sert saint Paul Act. 22, i, signifie défense; il se retrouve 22, 16. et ailleurs comme verbe dans le même sens. C'est le même mot aussi qui est employé Luc 12, 11. 21, 14 pour: se défendre devant les tribunaux. Enfin l'apôtre recommande aux fidèles 1 Pier. 3, 15 d'être prêts « pour toute apologie. » Dans un sens les chrétiens doivent donc être tous des apologètes, mais il est clair aussi que cette tâche incombe plus particulièrement à ceux que leurs dons, leurs talents et leur position a davantage qualifiés pour cela. Le mot d'Apologie désigne la défense proprement dite, par parole ou par écrit, et celui d'Apologétique désigne la science qui expose les principes d'après lesquels, suivant les temps et les circonstances, la défense doit être entreprise et conduite. La défense dépendra naturellement toujours du genre des attaques; il pourra même survenir tel cas où le chrétien se rappellera qu'il ne faut pas jeter les perles devant les pourceaux; mais en général la réponse est un devoir. Les premiers chrétiens n'y ont pas manqué, et comme les accusations étaient politiques et entraînaient après elles des persécutions, la défense le fut de même, et s'appliqua à prouver le caractère inoffensif des chrétiens et leur soumission aux lois. Plus tard on attaqua le côté moral du christianisme et ses principes; les calomnies abondèrent; il fallut les repousser. Il fallait se défendre tantôt contre les juifs, tantôt contre les païens et chaque fois le point de vue changeant, la défense devait se placer sur un terrain différent. Vis-à-vis des juifs en particulier, il fallait prouver que le Christ était bien le Messie annoncé par l'A. T., et les apologètes dépassèrent parfois le but par une exégèse pressurée et par l'abus de l'interprétation allégorique. Il reste peu de chose des exégètes de la primitive Église. Eusèbe cite une Adresse de Quadratus et d'Aristide à Adrien; des fragments de Miltiade, Méliton de Sardes et Claude Apolinaire sous Marc-Aurèle. L'époque d'An-tonin-le-Pieux fut féconde en écrits de ce genre; ainsi les deux Apologies de Justin Martyr, Tatien le Syrien, Athénagore, Théophile d'Antioche, Hermias; en Occident Tertullien, Minutius Félix, Cyprien; en Afrique Arnobe et Lactance. Plus tard le côté scientifique commence à prévaloir; Origène répond à Celse, Mé-thodius à Porphyre, Eusèbe de Césarée à Hié-roclès. L'apostasie de Julien amène dans la lice Cyrille d'Alexandrie et Grégoire de Naziance. Puis viennent Théodoret, Augustin, Orose; au 9m© siècle Agobard de Lyon, au 13m® Raymond Martin; puis Anselme, Savonarole, Vivès, jusqu'au moment où la Réformation, en créant un esprit nouveau, imprime à l'apologétique un nouveau caractère, dont Duplessis-Mornay. Amyraut, Grotius, Pascal sont les représentants les plus remarquables. Aux 17et 18™* siècles les déistes, les naturalistes, les philosophes, les libres-penseurs, sont combattus en Angleterre par Boyle, Richard Baxter, Clarke, Locke, Le-land, Lardner, Addison. etc.; en France par A. Turretin, Abbadie, Guénée, Jaquelot, Ver-net, Bonnet et même Rousseau. De nos jours enfin les attaques les plus diverses ont été repoussées par des hommes et par des arguments également divers et de valeurs bien différentes, depuis Châteaubriand jusqu'à Erskine, Chal-mers, Sack, Schleiermacher, Tholuck, Bruch, Frayssinous et Vinet. — Le nom d'apologètes est cependant employé d'une manière plus spéciale en parlant des pères des premiers siècles, v. Viguié.

APOSTASIE, abandon de la foi, du latin apostatare, violer, transgresser. Délit purement ecclésiastique, qui se punissait naturellement par l'excommunication, et quelquefois suivant les temps et Jes circonstances, exposait le délinquant à des peines plus graves et plus matérielles, de la part soit de l'Église, soit même de l'État. Les catholiques romains donnent aussi le nom d'apostats (a supererogatione) aux religieux qui abandonnent leur ordre sans autorisation et aux prêtres qui rentrent dans la vie laïque (Talleyrand, etc.) L'apostasie a fide (de la foi) a toujours été considérée comme la plus grave, et dans les premiers temps de l'Église, elle l'était en effet par son caractère, le reniement public du nom de Christ, et par ses conséquences, le retranchement définitif de la communion de l'Église, au moins jusqu'à l'article de la mort. 6n comprend qu'à une époque de persécutions, l'attention fût davantage éveillée sur ce point; les païens tenaient à constater avec éclat leur victoire, et l'Église ne tenait pas moins à constater sa réprobation; le nom d'Apostat était ainsi devenu une injure. Les passages de l'Écriture qui se rapportent à ce sujet sont surtout Hébr. 3,12. 6,4-9.10,26-29. Pier. 22, 15-21. Luc 12, 9. 2 Jean 9. On distinguait ceux qui. devenus chrétiens, retournaient au judaïsme, et ceux qui retombaient dans le paganisme; on distinguait aussi ceux qui désavouaient le Livre, ceux qui sacrifiaient aux idoles, et ceux qui allaient jusqu'à maudire Jésus-Christ... mais on comprend que ces nuances dans l'apostasie dépendaient beaucoup plus des bourreaux que des victimes. De grandes controverses eurent lieu, surtout au 3m<> siècle, sur la conduite à tenir avec les apostats, qu'on appelait alors fajm,les tombés; de nos jours, et dans les pays dits chrétiens, l'apostasie n'a plus de raisons pour s'afficher, ni par conséquent l'excommunication pour sévir; il n'y a guère que l'Église catholique qui recoure encore de temps en temps à ce procédé, et seulement contre des prêtres qui l'abandonnent, ou contre des gouvernements qui compromettent ses intérêts. mais même alors l'excommunication n'a pas de suites fâcheuses, à moins que l'Église ne soit maitresse absolue. L'Écriture sainte annonce pour les derniers temps une apostasie finale et générale, l'abandon de la foi par ceux mêmes qui en auront conservé les apparences, et le triomphe momentané d'une incrédulité prodigieuse sous le règne de l'Antéchrist.

APOSTOLIQUE (Symbole), ou Credo. Vénéré dans l'ancienne Église au point qu'Ambroise et Rufin lui assignent pour auteur, sinon Jésus-Christ lui-même, du moins les douze apôtres, ce vieux document de la foi chrétienne s'est formé peu à peu. Il eut pour point de départ la formule du baptême, la foi aux trois personnes de la Trinité, et il se développa au fur et à mesure que le besjin s'en faisait sentir, soit comme explication, soit dans un intérêt polémique au point de vue des questions contemporaines. C'était la règle de la foi; les pères la reproduisent souvent, mais avec de nombreuses variantes. L'art, relatif à la Rémission des péchés y est introduit en vue des lapsi qu'un parti trop rigoureux refusait de réadmettre dans l'Église. D'autres articles visent les gnostiques. On croit que c'est saint Augustin qui rédigea le Credo sous sa forme actuelle, sauf la Descente aux enfers et la Communion des Saints, qui n'y furent insérés que plus tard, vers la fin du 5®« siècle, v. Viguié, Coquerel et Nicolas. Incomplet, quant à la valeur de la Bible et à l'œuvre rédemptrice de J.-C.,ce symbole est admis par l'Église catholique et par la plupart des EgL protestantes comme le résumé le plus ancien et le plus authentique des affirmations et de la foi chrétiennes.

APOSTOLIQUES (Canons). On entendait par là d'une manière générale les règles laissées par les apôtres, telles qu'on les trouve dans leurs écrits et dans la tradition; puis, dans un sens plus restreint certains recueils, ou collections^ où ces règles étaient récapitulées. L'un de ces recueils, comprenant 85 règles, est spécialement désigné sous ce nom, tantôt à part, tantôt comme appendice des Constitutions apostoliques. Il est cité pour la première fois dans les actes du concile de Constantinople 394, puis à Éphèse 431 et à Chalcédoine 451. Il était généralement reconnu à la fin du 5me siècle. L'Église grecque l'admet comme authentique, et Jean de Damas n'est pas loin de lui donner la même autorité qu'aux écrits de Paul. L'Église d'Occident n'a reconnu comme apostoliques que les 50 premières de ces règles, et encore difficilement. Ces canons forment un corps à peu près complet de discipline ecclésiastique, à l'usage du clergé. On a lieu de croire que c'est en Syrie que la collection s'est formée. D'autres collections, plus anonymes encore et postérieures, jouissent d'une beaucoup moins grande autorité.

APOSTOLIQUES (Constitutions), en grec Didascnlia, enseignements; recueil de maximes et de directions ecclésiastiques, en huit livres; n'est mentionné pour la première fois d'une manière positive que par Epiphane. vers 400; une fois dès le dernier des canons apostoliques, plusieurs fois dès le 6m« et le siècle. Ce recueil n'a jamais été reconnu dans l'Église d'Occident, surtout à cause des interpolations dont il fourmille. L'Église grecque a été moins difficile, mais c'est dans l'Église épiscopale d'Angleterre qu'il a trouvé, avec quelques réserves, le plus de faveur. Stapleton, Pearson, Whiston le font remonter, les uns aux apôtres, sinon à J.-C. lui-même, les autres à Clément de Rome, et presque tous le regardent comme antérieur au concile de Nicée. Les six premiers livres, d'après Rothe, forment un tout et constituent la base du recueil; ils auraient été écrits par un judéo-chrétien, peut-être un ébionite, en Syrie, vers la fin du 3*ne siècle. Le 7 me livre formerait également un tout distinct; il donne des directions pour la vie chrétienne et l'action de grâces; on y trouve quelques traces de sabellia-nisme, qui mettraient sa composition entre 300 et 325. Enfin le 8™ livre, qui a pu dans l'origine servir de rituel aux évêques, renferme divers formulaires liturgiques, et le style en est plus précis, plus bref, que celui des livres précédents: les chap. 4 et suiv. se retrouvent à part dans plusieurs mss. sous le titre de: Directions des saints apôtres touchant l'ordination, par Hippolyte (évêque vers la fin du 2m« siècle). Mais il est difficile de dire si l'auteur des Constitutions s'est approprié l'ouvrage d'Hippolyte, ou si c'est au contraire un extrait du 8®« livre qu'on a publié plus tard en le plaçant sous le patronage d'Hippolyte. On possède, en plus ou inoins bon état, des versions syriaques, arabes et éthiopiennes des premiers livres des Constitutions. La meilleure édition est celle de Cotelerius, Amsterdam, 1724.

APOSTOLIQUES (Frères), secte de la fin du 13m« siècle. Elle prit naissance dans la Haute-Italie, et resta inoffensive aussi longtemps que l'Église s'abstint de la persécuter. Gérard Sega-relli son fondateur, était d'Alzano. près Parme, et ouvrier. Mécontent de tout ce qu'il voyait dans le monde et dans l'Église, et probablement aussi mauvais ouvrier, il voulut entrer dans l'ordre des franciscains, mais fut refusé. Un tableau, qui représentait les apôtres nu-pieds et nu-tête, le frappa et il se décida à imiter la vie pauvre des premiers disciples; il réussit même à s'adjoindre quelques compagnons, et dès 1260, ayant liquidé le peu qu'il avait, il se mit à parcourir le pays en prêchant la repentance. L'évêque de Parme le fit arrêter en 1280, mais n'ayant rien trouvé d'hérétique en lui, il se contenta de le faire surveiller comme maniaque; en 1286 il le bannit de son diocèse. Honoré IV interdit toutes les réunions qui ne seraient pas spécialement autorisées, et Nicolas IV. 1290, renouvela cette défense. De ce moment date l'opposition avouée de Segarelli contre la hiérarchie et contre Rome qu'il traite de Babylone; le pauvre homme n'était pas de taille à lutter. Arrêté en 1294, il ne put se sauver qu'en se rétractant: il fut brûlé comme relaps en 1300. Son œuvre fut continuée parDolcino, q. v., intelligence beaucoup supérieure, et survécut même à ce dernier, puisqu'on voit des synodes les condamner, à Lavaur, Provence 1368, et Narbonne 1374. Cette secte, qui avait une tendance plutôt morale que théologique, s'allia plusieurs fois avec les fraticelles et les béghards; des manifestations du même genre sont fréquentes au moyen

APOTRES (Symbole des), v. Apostoliq.

APPEL, moyen de droit accepté dans l'Église catholique, avec effet suspensif. C'est en 347, au concile de Sardique, et sur la proposition des évôques Osius et Gaudence, qu'il fut décidé pour la ire fois qu'un évêque condamné pourrait en appeler au primat de Rome. Cette décision ne fut cependant pas admise généralement. En 404 la faculté d'appel fut restreinte aux causes majeures, mais étendue en ce sens que ce n'étaient pas les évêques seuls qui avaient le droit d'en appeler, mais toutes les personnes qui se croyaient lésées. Plusieurs passages du faux Isidore établissent que les évêq. peuvent en appeler au pape pour tout; qu'ils ne peuvent être jugés que par le pape et non par des tribunaux épiscopaux pour les choses graves; que les actions intentées contre les évêques, à propos de quoi que ce soit, grave ou non grave, ne peuvent être jugées que par le pape; enfin, qu'il peut être fait appel au pape par tout le monde et à propos de n'importe quelle cause; en un mot, que si le pape n'était pas nécessairement le juge dans toutes les causes, il était certainement le juge en dernier ressort. Ce fut la règle dès le 12®* siècle; Alexandre III et Innocent III la confirmèrent et la développèrent. Aussi le nombre des appels à Rome alla tellement en augmentant, que l'excès amena une réaction; les conciles de Constance et de Bâle s'appliquèrent à restreindre les cas d'appel, sans diminuer l'autorité du saint-siège, et le concile de Trente a nettement fixé la législation moderne sur ce point en décidant: d'abord, qu'il n'y aurait recours à Rome que pour des sentences rendues, et non pour des causes pendantes; puis qu'il n'y aurait appel que pour des questions graves, causœ majores; le reste devait être jugé par les évêques, par des légats ou par des tribunaux ecclésiastiques provinciaux. Ce sont les prétentions du moyen âge, mais régularisées. Mais les États de l'Europe, catholiques aussi bien que protestants, ont depuis longtemps, et même avant l'empereur Joseph, mis fin à cet ordre de choses en établissant leurs tribunaux civils et nationaux et en interdisant tout appel à Rome. Aujourd'hui ces appels n'ont plus de valeur légale et n'ont de signification que celle que leur donnent volontairement ceux qui y recourent. — VAppel comme d'abus, qui date de saint Louis, est le recours au roi ou au parlement contre une sentence ecclésiastique; il n'a pas de sanction et n'est qu'on simple désaveu sans portée.

APPELANTS, v. Acceptants.

APPROBATION de livres. Le concile de Trente, reproduisant un décret du 5® de Latran 1512. a décidé que, sous peine d'amende et d'excommunication, aucun livre de théologie ne serait imprimé sans l'autorisation de l'évêque du diocèse. Cette règle subsiste encore et a été étendue à tous les livres sans distinction. Les religieux des différents ordres doivent soumettre leurs livres à leur général. L'autorisation est toujours indiquée sur le titre de l'ouvrage.

Il y a à Rome un Conseil d'approbation, comme il y a une Congrégation de l'Index. Les Églises protestantes n'ont rien de pareil.

AQUAVIVA (ou Acquaviva), Claude, né en octobre 1543, fils du prince Jean-Antoine Aquaviva, duc d'Atri, et d'Isabelle Spinelli; élu le 19 février 1581 général des jésuites. D'un caractère souple mais énergique, il vit son ordre atteindre à sa plus haute prospérité matérielle, en même temps qu'il présida au commencement de sa décadence morale. La discorde était à l'intérieur. L'Espagnol Mariana soutenait la doctrine du régicide. Il combattait aussi la tyrannie du général et des supérieurs de l'ordre. Aquaviva le condamna en défendant toute discussion sur le meurtre des tyrans. Les missions étrangères s'étendirent considérablement sous son administration, mais sans rien produire de durable. Il eut à se défendre contre les franciscains et les dominicains, et en vint à bout à force d'habileté, d'intrigues et de persévérance. On a de lui l'ordonnance dite Ratio studiorum. où il régla les études, f 1615.

AQUILA Gaspard (français Aigle), né 7 août 1488 à Augsbourg, dont son père, Léonard Ad-ler, patricien, était syndic. Après de bonnes études il parcourut l'Italie pour voir ses hommes célèbres, rencontra Érasme à Berne et se lia avec lui. Nommé prédicateur à Berne, il n'y resta pas longtemps. En 1514 il est à Leipsic, en 1515 il acèompagne comme aumônier l'armée de son ami François de Sickingen; en 1516 il est nommé curé de Jenga, près d'Augsbourg et se marie. Il prêche bientôt les doctrines de Luther, et il expie cette double hardiesse par 6 mois de cachot. Condamné à mort il est sauvé par l'intercession de la sœur de Charles-Quint, Marie reine de Hongrie, mais il doit s'enfuir, laissant tout ce qu'il possède. Il s'établit d'abord à Wittenberg, puis à Eisenach et à Saalfeld. Il compte parmi les meilleurs amis de Luther, qui dit de lui: Quand toute la Bible serait perdue, je la retrouverais chez Aquila. Il assiste en 1530 à la diète d'Augsbourg. Plus tard il écrit très vivement contre l'Intérim, et Charles-Quint promet 5000 écus à qui le lui livrera mort ou vif. Il passe ses dernières années à Saalfeld et +12 nov. 1560.11 s'était remarié 1539 et eut 4 fils qui embrassèrent tous le ministère évangélique. Il a laissé sune vingtaine d'écrits, courts, mais substantiels, entre autres 11 Sermons pour les enfants.

AQUILÉE, ville d'Illyrie. située au N. de l'Adriatique, près des lagunes deMarano; compte à peine auj. 1600 hab. Elle eut de bonne heure son évêque, et celui-ci ne cessa de revendiquer ses droits de patriarche contre les prétentions de l'év. de Rome. Pour avoir la paix, et pour exercer au moins l'une de ses prérogatives. Honoré l*r consacra l'évêque d'Aquilée patriarche de Grado, petite île où il s'était réfugié lors de l'invasion des Lombards en Italie 568. En 1451 le patriarcat fut transféré à Venise, et enfin 1751 supprimé et remplacé par les deux archevêchés d'Udine et de Gôrtz. — Trois conciles furent réunis à Aquilée: le premier le 3 sept. 381, dirigé par Ambroise, déposa Palladius, év. d'Illyrie, et Secundinus, prêtre, comme convaincus d'arianisme; le second, 698, se prononça contre la condamnation des Trois chapitres, q. v.. et ne fut pas reconnu par l'Église; le troisième, 1409, convoqué par Grégoire XII, anathéma-tisa ses deux rivaux. Benoît et Alexandre V, ce qui n'empêcha pas ce dernier d'être élu pape à l'unanimité par le concile de Pise. Le symbole d'Aquilée se distingue des autres par l'addition des mots invisibili et impassibili qui terminent le premier article; c'était une protestation énergique contre les patripassiens qui, ne voyant dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit que des manifestations différentes du Dieu unique, semblaient admettre que le Père avait été vu en chair et avait souffert. Il renferme aussi les mots descendit ad inferna, qui ne se trouvent pas dans les symboles des trois premiers siècles.

AQUIN, v. Thomas.

ARABIE. Sauf la mention de Gai. 1,17. qui a donné lieu à plusieurs légendes, on n'a sur le christianisme en Arabie que fort peu de détails. Vers l'an 200 un chef arabe demanda à Deme-trius, év. d'Alexandrie, de lui donner Origène pour l'instruire dans la religion chrétienne. Eu 244, au synode de Bostra, Origène ramène à la foi Bérylle, évéq. de Bostra, qui s'en était écarté; d'après Eusèbe il y avait encore plusieurs autres évêques dans la contrée. En 250 nouveau voyage d'Origène; il va combattre les hérétiques Arabiens, secte qui prétendait que l'àme meurt avec le corps, mais pour ressusciter avec lui. Sous les empereurs chrétiens plusieurs tentatives de missions furent faites pour évan-géliser l'Arabie; Constance y envoya Ananes Théjphile, mais sans grand succès. Plus tard on y trouve des nestoriens et des monophysites. L'avènement de l'islamisme mit fin à l'existence des églises chrétiennes, et jusqu'à ce jour les efforts des missionnaires et des sociétés religieuses n'ont abouti à aucun résultat.

ARABIENS, v, l'art, précédent.

ARBA KANNEPHOTH, c.-à-d. les quatre coins; pièce d'étoffe carrée que les juifs d'aujourd'hui portent au-dessus de la chemise sur l'épaule, avec des franges de laine bleue aux quatre extrémités. Cet usage, qui se rattache à Nomb. 15, 38.39 a pour but de rappeler à celui qui l'observe, les commandements de Dieu.

ARCHÉOLOGIE. On appelle ainsi, ou Antiquités chrétiennes, le tableau de l'Église primi tive, considérée dans tes divers éléments de son existence, c'est-à-dire l'exposition de l'ensemble de ce qui constituait la vie des premiers chrétiens, les principes, les développements, les résultats de cette vie. Par archéol., les Grecs entendaient les faits et l'histoire, aussi bien que les institutions (v. Platon, Hippias), tandis que l'archol. chrétienne s'en tient aux institutions seules, à la vie intérieure; elle est sans doute le tableau du christianisme primitif, mais dans un sens elle devrait être le tableau du christianisme de nos jours. Elle comprend quatre branches ou éléments principaux: l<> les personnes des premiers chrétiens, les membres de l'Église; 2° l'organisation de ces membres en société; 3° le culte que les chrétiens ainsi réunis rendaient à Dieu; 4<> la vie religieuse, ou les mœurs qui se développaient au sein de cette association. L'histoire s'occupe de ces faits; la tâche de l'archéol. est de les grouper, de réunir en un seul faisceau tous les éléments épars qui se trouvent çà et là dans l'Église, de développer ce que l'histoire ne fait qu'esquisser, et de montrer ainsi la manière d'être de l'Église primitive. Le point oti commence l'archéol. chrétienne est facile à déterminer; c'est le commencement du christianisme lui-même, mais on n'est pas d'accord sur le point où elle finit; Walch l'arrête à Constantin, d'autres à Grégoire 1er, Grégoire VII, et plus bas encore. La première de ces dates est aussi la plus naturelle, parce que lorsque l'Église commença à dominer il s'y introduisit tant de choses impures que son caractère en fut altéré. Il faut distinguer, même dans l'Église primitive, l'époque apostolique proprement dite et celle qui suivit immédiatement, et qui fut marquée par une prompte dégénération, sous l'influence de peuples ou d'individualités prononcées. Comme sources, consulter les écrits des pères, les actes de conciles, les monuments, les monnaies, les inscriptions, notamment celles des catacombes. V. aussi Bingham, Orig. ecclésiast. Londres 1708, Halle 1722; Cave. Primit. Chris-tianity; Nicolaï, Antiq. eccle*.; Augusti, Denk-wûrdigkeiten; Mamachii, Orig. et Antiq. christ, lib. XX; Fleury, Mœurs des chrétiens; Nean-der, Guericke. etc.

ARCHEVÊQUE, v. évêque.

ARCHICHAPELAIN. Le grec archi, qui indique une prééminence, se trouve en tête d'un certain nombre de mots composés dont il accentue la signification. Ici nous avons le chapelain par excellence, titre donné au principal des ecclésiastiques attachés à la cour un peu nomade des anciens rois francs. Entre eux tous ils formaient la Chapelle du roi, et leur chef, complètement indépendant de Rome, jouissait de toutes les prérogatives d'un prélat, en même temps qu'il exerçait sur les affaires politiques une influence qui n'était pas à dédaigner. Plus d'une fois il joignit à ses fonctions celles d'archichan-celier. Le roi revêtait ordinairement de cette charge un archevêque. A partir du 13™* siècle les archichapelains furent remplacés par les aumôniers. q. v.

ARCHIDIACRES et archiprêtres. A partir du 4m« siècle, on trouve dans presque tous les diocèses ces deux assistants de l'évêque, le premier chargé surtout de l'administration extérieure, le second du service religieux et du personnel ecclésiastique. Le premier, l'archidiacre* par la multiplicité de ses fonctions, et aussi par leur nature, maniement des fonds, président des diacres et du clergé inférieur, inspecteur des études, surveillant des aspirants à la prêtrise, acquit de bonne heure une grande influence et s'éleva au-dessus de tous les prêtres du diocèse, Tarchiprêtre compris. À mesure que l'Église s'étendit, le nombre des desservants de tous grades allant croissant, l'évêque multiplia ses représentants, la hiérarchie se compliqua, il y eut des chapitres pour les cathédrales, et les archiprêtres de la campagne devinrent les doyens d'aujourd'hui.

ARCHIMANDRITE (chef, ou surveillant du troupeau), titre qui apparaît dès le 5™ siècle pour désigner les supérieurs des couvents. II est employé surtout dans l'Église grecque, mais pas exclusivement. Il s'appliquait aussi quelquefois aux prélats.

ARCHITECTURE. Presque tous les peuples ont eu des monuments religieux, destinés soit à honorer la divinité, soit à rassembler les fidèles, et ces monuments ont plus ou moins reflété par leurs formes et leur disposition le caractère de la religion à laquelle ils étaient destinés. On peut dire en général qu'ils révèlent une civilisation. L'Inde a taillé ses temples dans le flanc des montagnes et les a ornés de figures fantastiques colossales. L'Égypte les fait immenses, dominant l'horizon, regardant vers le Nil, avec des avenues de sphynx, de lourdes colonnades et de mystérieux hiéroglyphes. Les Phéniciens, pour leur Moloch et leur Bahal, n'avaient guère que des autels en plein champ; s'ils avaient des édifices spéciaux à Tyr ou à Sidon. l'on ne connaît rien de leur style. Pour les Hébreux monothéistes, il n'y avait qu'un seul temple, et il était magnifique par son architecture et par les matériaux qui avaient servi à sa construction sous Salomon. Les Grecs, plus artistes, eurent les premiers l'idée du goût, du beau, des justes proportions, et ils se distinguèrent surtout par la disposition de leurs portiques, la grâce de leurs colonnes et la beauté humaine de leurs dieux, qu'on admire dans leurs trois ordres, dorique, ionique et corinthien; leurs temples étaient presque des musées. Les

Romains les imitèrent, mais en copistes intelligents, et ils inventèrent les arcades et la voûte plein - cintre. Qnand le christianisme arriva, religion en esprit et en vérité, il ne sentit pas d'abord le besoin d'avoir des édifices spéciaux, et d'ailleurs ses disciples n'en auraient eu ni le droit, ni les moyens. Ils sont eux-mêmes des temples vivants, disait Origène d'après saint Paul. Partout où ils étaient réunis, ils pouvaient célébrer leur culte: dans une chambre haute, dans une maison sans apparence, au bord de la mer ou de la rivière, dans une caverne. A Rome et à Naples les catacombes servirent de temples pendant les persécutions, et les tombeaux des martyrs furent l'autel. Depuis Constantin les choses changèrent et les disciples du Crucifié purent élever autel contre autel. Ce qu'il leur fallait, c'était moins un sanctuaire et une habitation pour la divinité qu'un lieu de réunion pour la communauté; ni les temples grecs, ni celui des Hébreux, ne pouvaient leur suffire; la synagogue répondait davantage à leurs besoins, ainsi que la basilique romaine avec ses quatre murs, son portique sur la rue, sa tribune et son espace central. Ce fut la forme qu'on choisit, mais en la couvrant, à Rome d'une charpente en bois, à Bysance d'une voûte, et en l'éclairant de fenêtres percées dans le mur d'enceinte. Si les églises construites à Constantinople, Damas, Jérusalem et Bethlèhem. conservèrent la forme d'un rectangle, cependant le Style bysantin rechercha plutôt la forme concentrique, octogone ou ronde, avec une voûte en coupole, comme Sainte-Sophie qui en est le type le plus remarquable. Plus tard les coupoles se multiplièrent, ainsi que les ornements intérieurs, dorures et mosaïques, et le sanctuaire, icanostasis, fut séparé de l'enceinte sacrée. En Occident on conserva plus longtemps le style de la basilique, mais une fois qu'on s'en fut écarté, on alla de changement en changement, et l'architecture porta aux différentes époques le cachet de la théologie. Il y eut d'abord le style latin, le moins éloigné de la basilique, avec nef, abside, sacristies latérales, autel au-dessus d'une crypte souterraine, chœur pour les chantres, ambons pour les lecteurs, baptistère, transepts ou nef transversale pour agrandir l'édifice; la décoration est riche; tout est en marbre ou en pierre, la charpente des plafonds seule est en bois, mais cachée sous de brillantes peintures où l'or abonde. Le style roman date de la fin du 10*"® siècle; il est beaucoup plus varié et compte plusieurs écoles, lombarde, pisane, sicilienne, auvergnate; les moines se font architectes; à côté de la nef centrale on élève des nefs latérales; il y a quelquefois deux transepts et l'égl. affecte la forme d'une croix de Lorraine; les murs sont consolidés par des contreforts extérieurs, le clocher est réuni au corps de l'église; la voûte est en pierre pour mettre l'édifice à l'abri du feu. Ce style est un peu lourd, il est sombre. Le style gothique, ou ogival, qui surgit au 12me siècle dans l'Ile-de-France, le remplace avantageusement. et devient bientôt populaire; les architectes laïques et les francs-maçons en font leur affaire, et ne se gênent pas, à l'occasion, pour faire la satire de l'Église dans les sculptures qui doivent l'embellir. L'arc en ogive sert de base aux voûtes, les piliers sont moins larges, les fenêtres plus grandes, de belles rosaces ornent les portails d'entrée et donnent une lumière que des vitraux coloriés tamisent heureusement. Mais déjà la décadence se fait sentir au 15*ne siècle, et Brunelleschi, à Florence, inaugure un style nouveau, dit de la Renaissance, qui combine l'art antique et les traditions chrétiennes, et qui, par le luxe des matériaux et par le génie des Michel-Ange et des Bramante, réussit pendant un siècle à se faire pardonner ses inconséquences. L'ornementation intérieure et les fresques, la voûte en berceau et la double coupole, en sont les traits caractéristiques, mais le style lui-même varie beaucoup suivant les pays et se montre dans les détails plus que dans l'ensemble. Saint-Pierre de Rome, Saint-Paul de Londres, les Invalides et le Panthéon de Paris, en sont les principaux spécimens. Le 19m* siècle, qui n'a pas d'idéal, n'a pas d'architecture spéciale, ou plutôt il emploie tous les styles et les combine, sans avoir rien inventé de neuf, du moins comme architecture religieuse. Il a fait à Paris la Madeleine comme un temple grec, >ainte-Clotilde comme une église gothique, et la Trinité en style Renaissance. Le protestantisme n'a pas d'architecture, et ses temples, simples et sévères, sont faits en vue de l'acoustique plutôt que de la beauté; cependant quelques églises modernes ont des prétentions artistiques, et les styles roman, gothique et Renaissance ont quelques représentants.

ARCHONTIQUE, secte gnostique détachée des valentiniens, connue par Epiphane et Augustin. Selon eux, l'univers se compose de 7 cieux qui ont pour mère Photine, la lumière incréée. Zabaoth, le créateur de la tenv, archonte inférieur, a été le père de Caïn et d'Abel et les a enflammés d'une passion incestueuse pour leur sœur. Seth et ses 7 fils échappèrent à son influence, et ont laissé à la secte les livres sur lesquels se fondent leurs croyances. Ils rejettent la résurrection.

ARCIMBOLI. Jean-Angèle, fils d'un sénateur de Milan, docteur en droit, fut envoyé 1517 en Suède comme protonotaire apostolique par Léon X pour prêcher le commerce des indulgences. La Scandinavie était alors, depuis le traité de Calmar 1398, réunie sous le sceptre du Danemark, impatiemment supporté par le parti national suédois. Arcimboli obtint de Christian 11 l'autorisation de faire son commerce en Suède; il s'était donné pour un fort partisan de l'union, mais en Suède il se joignit au parti national et s'attira la colère du roi. Il dut revenir à Rome où. après une disgrâce de quelques années, il fut nommé év. de Novare 1525. ar-chev. de Milan 1550. + 1855.

ARETIUS, Benoît, théologien bernois, étudia à Marbourg où il devint professeur, revint à Berne, professeur au gymnase 1549, en théologie 1563, f 1574. Auteur de plusieurs ouvrages: Tkeotogiœ problemata, Genev. 1579, très retimé; Examen theologicum, qui a eu 6 éditions en 14 ans; divers Comment, sur le N. T.. le Pentateuq., les Psaumes. Il a aussi écrit une Flore des Alp. bern., un Comment, sur Pindare, une histoire justificative de la condamnation de Gentilis, et un traité contre les Catabaptistes de Pologne. ARIANISME, Ariens, v. Arius. ARISTIDE, philosophe chrétien, natif d'Athènes. Il n'est connu que par la fameuse Apologie qu'il adressa à Adrien pendant une persécution, 125. C'est après avoir reçu cette Apologie que l'empereur fit paraître un édit en vertu duquel il était défendu de se porter contre un chrétien à des voies de fait sans avoir obtenu contre lui une condamnation légale. Cet ouvrage, qui ne nous est pas parvenu, paraît avoir été écrit dans un style éloquent et spirituel.

AWUS, célèbre hérésiarque du 4m<> siècle, naquit vers 270 dans la Lybie cyrénaïque. La vie de cet homme remarquable se lie étroitement à ses opinions et aux progrès qu'il leur fit laire. de telle sorte qu'en dehors des discussions théologiques qu'il souleva, nous ne savons presque rien de lui. Taille avantageuse, figure maigre, pâle, imposante, chevelure abondante, maintien grave; abord gracieux, affable et prévenant; sa conversation était douce et agréable, fine et vive à la fois, ses mœurs austères; il avait une grande connaissance de tous les auteurs profanes et ecclésiastiques; intelligence prodigieuse, talent rare et penchant prononcé pour la dialectique et la controverse. Il fut successivement diacre et prêtre à Alexandrie. A la mortd'Achillas. son évêque, il espérait lui succéder, mais Alexandre l'emporta, 313. Arius avait sur la nature de Jésus des opinions particulières. Selon lui, la seconde personne de la Trinité n'était point éternelle, mais elle avait été créée par la première, tirée du néant, par conséquent sujette à faiblir et à changer. Ces idées qu'il prêchait avec succès et ouvertement dans la ville et les campagnes, trouvèrent d'énergiques adversaires dans Alexandre et Athanase. Deux fois Arius fut cité à comparaître devant son évêque et le clergé d'Alexandrie, mais on ne put le convaincre d'erreur ni lui faire rien rétracter. Alexandre n'ayant pu le ramener, ni par la persuasion, ni par la discussion, le fit condamner lui et 15 de ses partisans par un concile réuni à Alexandrie. 320. Arius, chassé de l'Église et de la ville, alla travailler ailleurs: le nombre de ses partisans, subjugués par la puissance de sa parole, augmentait de jour en jour. Il gagna même à ses opinions des évêques influents, entre autres Eusèbe de Nicomédie. Eu-sèbe réunit un concile en Rithynie, qui cassa les décisions de celui d'Alexandrie et réhabilita Arius. Celui-ci, qui conservait à Alexandrie des partisans, se créait de jour en jour de nouvelles relations. Grand acharnement et grand déploiement d'activité de part et d'autre; bientôt tout l'Orient fut divisé. L'empereur Constantin s'émut de tant de bruit et envoya Hosius en Asie pour examiner la querelle. Le rapport d'Hosius fut défavorable à Arius et aux ariens. Arius continuait à se défendre vaillamment; une émeute éclata même à Alexandrie, où les ariens, qu'on voulait opprimer, brisèrent les statues de l'empereur. L'Orient tout entier était en feu. Ce fut pour apaiser cet incendie théologique que se réunit, en juin 325, le premier concile œcuménique, à Nicée; plus de 300 évêques s'y étaient rendus, l'empereur en était le chef. Arius y vint avec ses partisans. On y voit aussi Athanase, le plus ferme boulevard de l'orthodoxie, champion aussi ardent qu'habile et expérimenté. Mais il trouva dans Arius un athlète de sa force. Avant d'ouvrir les sessions du concile, on tint des conférences particulières, où l'on discuta longtemps. Arius soutint avec fermeté ses idées: Christ, disait-il, est bien l'une des trois personnes de la Trinité, mais il n'a ni l'éternité, ni l'identité de substance avec (ePère. On ne put rien lui faire rétracter. Le concile lui présenta successivement plusieurs confessions de foi, en lui demandant de les signer; il les rejeta toutes en tant qu'elles impliquaient la coéternité et la consubstantialité du Père et du Fils. Il comptait parmi ses partisans les deux Eusèbe, celui de Nicomédie et celui de Césarée; mais les ariens étaient en minorité et l'empereur était contre eux. Après de longs débats contradictoires et une défense savante, Arius et s?s opinions furent anathématisés. Eones, Ce-cilius et lui furent relégués en Illyrie; trois mois après Eusèbe et Théognis dans les Gaules. Un édit de Constantin ordonna de brûler ses écrits et menaça de mort ceux qui les cacheraient ou les conserveraient. Arius ne baissa pas la tête; il travailla de loin à rendre la victoire à son parti: il y réussit, grâce à l'appui de Constance, sœur de Constantin et veuve de Li-cinius. En 328 il fut rétabli dans ses fonctions de prêtre à Alexandrie. Athanase, son ancien adversaire, patriarche dans cette dernière ville, refusa de le recevoir. Nouveaux débats, nouvelles discussions. Arius proteste de son attachement à TÉcriture et à la doctrine du Père, du Saint-Esprit et du Fils par qui toutes choses ont été faites. Enfin en 335. deux conciles, réunis à Tyr et à Jérusalem à l'occasion de la consécration du Saint-Sépulcre condamnent Athanase, et réhabilitent Arius. La querelle continua cependant, et en 336 le pieux Alexandre, patriarche de Constantinople, reçut l'ordre de Constantin, d'admettre Arius dans son Église; il refusa d'abord, mais Arius souleva le peuple qui l'écouta avec enthousiasme et l'accompagna en foule vers la cathédrale. Alors Alexandre se jeta à genoux demandant à Dieu un miracle: Seigneur, disait-il, ne permets pas que ton héritage soit livré à l'opprobre, ne souffre pas qu'il soit souillé par la présence de l'hérésiarque. Il préférait mourir. Le lendemain matin, dimanche, Arius fut saisi tout à coup de douleurs violentes, et mourut 336. Le bruit courut qu'il avait été empoisonné, mais ce peut n'être qu'une calomnie de parti. De tous les écrits d'Arius il ne nous est rien parvenu. Sa tendance ne succomba pas avec lui; il avait de trop puissantes racines soit dans l'esprit du siècle, soit dans le nombre et les talents de ses adhérents. Les ariens furent le parti prédominant de l'Église et de l'État pendant assez longtemps. Mais, puissants par leur union, ils s'affaiblirent par des dissensions intérieures. Les ariens, les semi-ariens, les eu-nomiens (ariens outrés, disciples d'Eunomius) se disputaient la prééminence entre eux et contre les orthodoxes. En vain les nouveaux maîtres de l'empire, Osthrogoths, Visigoths, Lombards, Vandales, Burgondes,etc.. embrassèrent-ils l'arianisme; au 5ra* siècle déjà le parti, devenu plutôt politique, était presque ruiné; il disparut à la fin du 6me, sous la pression de l'unité romaine, mais pour renaître à diverses époques et sous diverses formes, qui chaque fois réduisaient à de plus petites proportions le chef de l'Église et le Sauveur des chrétiens. H. B.

ARLES, quelque temps la résidence de Constantin, a vu quatre conciles; celui de 314, qui confirma la condamnation des donatistes prononcée au concile de Rome 313 et rétablit l'évêque Cécilien; il condamna aussi en 22 canons plusieurs abus de discipline ecclésiastique; celui de 353, convoqué par Constance, qui prit parti pour les ariens et condamna Athanase; celui de 452 qui reproduisit en partie les décisions du conc. de Nicée, et celui de 475 qui se prononça pour le semi-pélagianisme.

ARMÉNIE, Arméniens. Bien que ses limites n'aient jamais été bien définies et que son territoire ait souvent varié, on désigne sous le nom général d'Arménie le haut plateau compris entre la mer Noire et la mer Caspienne, le Taurus et le Caucase; la montagne la plus connue est l'Ararat; ses principales villes, Erzeroûm, Kars, Van, Erivan. Climat varié, neiges éternelles sur les plus hautes cimes, printemps perpétuel dans ses riches vallées. C'est là que prennent leur source l'Euphrate, le Tigre, l'Araxe et le Cyrus. L'A. T. y place l'Éden des premiers hommes. Les Juifs des dix tribus s'y trouvaient en grand nombre à l'époque de la captivité de Babylone, et bien peu profitèrent de l'édit de Cyrus pour retourner dans leur pays. — L'Évangile fut introduit de bonne heure en Arménie par Abgare, roi d'Edesse, q. v. Ce qui est plus sûr, c'est que l'Évangile était connu dans cette contrée au 2"^ siècle, mais il ne s'y établit définitivement qu'au 4rae, grâce à la conversion de Grégoire, prêtre païen, qui devint l'instrument d'un grand réveil et mérita d'être appelé l'Illuminateur. Les Arméniens firent d'abord partie de l'Église orthodoxe d'Orient, mais ils rejetèrent les décrets du concile de Chalcédoin* 451, qui ne leur paraissaient pas affirmer assez clairement la divinité de J.-C„ et dans un synode tenu à Walashapat, penchant vers les doctrines monophysites ou eutychianisme, ils se constituèrent en église séparée. Souvent persécutés, soit par l'Église d'Orient, soit surtout par les mahométans, les Arméniens se sont toujours distingués par leur culture théologique et littéraire; ils ont eu de riches et importantes imprimeries à Venise, Vienne, Moscou et Ispahau. Ils possèdent encore aujourd'hui plusieurs journaux, et recherchent volontiers des relations avec les autres églises. Sauf la nuance indiquée, leur doctrine est strictement orthodoxe orientale. Il en est de même de leur culte; ils admettent 7 sacrements, la transubstantiation, le culte de la Vierge et des saints. Ils comptent 9 degrés dans le sacerdoce; leurs prêtres se forment soit à Tiflis, soit dans les couvents; ils sont en général peu payés. Le principal revenu du patriarche consiste dans la fabrication et la vente de l'huile sainte. Le patriarche porte le nom de Catholicos (universel) et réside au pied de l'Ararat dans le riche couvent d'Eschmiatzin. Il a pour aide un grand vicaire et, depuis 1802, un conseil composé de 5 ou 6 dignitaires, évêques ou wartabeds (docteurs). Eschmiatzin étant dans les États russes, l'empereur est le protecteur naturel des Arméniens, c.-à-d. qu'il agrée le patriarche élu par les délégués de l'Église; le patriarche à son tour nomme les évêques. Il a sous sa juridiction les patriarches arméniens de Constantinople et de Jérusalem. Le* couvents sont nombreux; outre celui d'Esch-miatzin, riche en livres, manuscrits et reliques, il faut nommer celui de Jérusalem. Les Arméniens sont an nombre d'environ cinq millions; leur vie religieuse est déchue; ils retiennent les formes et les cérémonies, mais ils ne connaissent presque pas la Bible. Un réveil s'est manifesté chez eux il y a quelques années et plusieurs milliers se sont convertis au protestantisme. On appelle Arméniens-Unis ceux qui se sont dès 1439 rattachés à l'Église de Rome; ils ont un archevêque à Lemberg, Autriche; à Venise, un couvent fameux, celui de Saint-Lazare, de l'ordre des méchitaristes, qui possède une vaste imprimerie. Ils sont 46,000 en Turquie, dont la moitié à Constantinople. — v. S. Martin, Mémoires hist. sur l'Arménie, 2 vol. Paris 1819, et plusieurs livraisons du Mag. des missions de Bile.

ARMINIANISME, Arminius. On désigne sous ce nom une tendance théologique qui se fit jour vers la fin du 16™ siècle, et qui d'abord très modérée, finit par s'accentuer davantage et dépassa de beaucoup les intentions de celui qui avait commencé le mouvement. Jacques Arminius. on Harmensen, ou Hermanns, né 1560 à Oudewater sur l'Yssel, Hollande, fils d'un coutelier, perdit son père de bonne heure, mais fut encouragé par de nombreux amis à continuer ses études à Utrecht, Marbourg, Rotterdam et Leyde. H visita ensuite Genève où il entendit Bèze, et Rome où il crut reconnaître le mystère d'iniquité. Disciple de P. la Ramée, il fut accueilli avec défiance à Genève; il fut plus heureux à Bâle où la faculté lui offrit le titre de docteur en théologie; il n'avait que 22 ans et fut assez modeste pour refuser. En 1583 il fut nommé pasteur à Amsterdam, et en 1603 professeur à Leyde. f 19 oct. 1609. C'est à Amsterdam qu'il émit pour la première fois en public ses opinions infralapsaires, par opposition aux sapralapsaires qui soutiennent que Dieu, même avant la chute, a destiné les uns au bonheur, les autres au malheur éternel, non par la prescience de ce qu'ils deviendraient, mais par un acte libre de sa volonté souveraine. Il crut pouvoir adoucir ce qu'il y avait de trop absolu dans les doctrines d'Augustin, de Gottschalk et de Calvin, tout en restant dans les limites du catéch. de Heidelberg, de la confession de foi hollandaise, de Bèze et de Zwingle. Deux fois il fut appelé à donner des explications en conseil sur des sermons qu'il avait prononcés, sur Rom. 7, 14. et Rom. 9, et ses explications forent jugées satisfaisantes, sans cependant le blanchir entièrement aux yeux de ses adversaires. Une conférence avec son futur collègue Gomar constata qu'il repoussait le pélagianisme; mais en 1604 les difficultés recommencèrent, Arminius ayant dit qu'il fallait se garder non seulement du pélagianisme. mais aussi du manichéisme et d'autres erreurs semblables qui | aboutissaient à faire Dieu auteur du mal et du péché. Un synode en 1606, puis une conférence entre Arminius et Gomar 1608, n'amenèrent aucun résultat. L'année d'après le savant uni-versaliste était retiré de ce monde. Ses œuvres compl. ont paru à Leyde 1629; sa Vie a été écrite par Gaspard Brandt, avec des notes de Mosheim. La doctrine d'Arminius ne différait de celle de Calvin et des Églises réformées en général que sur le seul point que nous avons indiqué: il ne niait pas l'élection, mais il niait qu'elle fût inconditionnelle et absolue; il maintenait la liberté de l'homme et sa responsabilité; il estimait que J.-C. est mort pour tous, que Dieu veut que tous les hommes soient sauvés. La prédestination était seulement un acte de la prescience de Dieu, qui savait à l'avance quels seraient ceux qui croiraient.

Les disciples d'Arminius, ou prétendus tels, qui prirent son nom pour drapeau, allèrent beaucoup plus loin que lui et le compromirent par leurs excès. A peine il était mort qu'ils se constituèrent en secte ou société religieuse distincte. Ils attaquèrent la valeur des livres symboliques, firent alliance avec le socinianisme, et peu à peu glissèrent dans la politique et devinrent un parti. En 1610 ils adressèrent aux États de Hollande une remontrance en 5 articles (de là leur nom de Remontrants) où ils exposaient leurs vues sur la grâce; en 1611 ils y ajoutaient comme supplément que les régénérés peuvent perdre la grâce de Dieu. En somme ils ne s'éloignaient pas beaucoup d'une orthodoxie mitigée. Leurs adversaires répondirent par une contre-remontrance, et comme les passions populaires s'en mêlaient, les États défendirent 1614 toute discussion sur ce sujet. Le synode de Dordrecht (13 nov. 1618 — 9 mai 1619) trancha toutes les questions contre les arminiens, rejeta leurs 5 propositions, déposa plus de 200 pasteurs et précisa les bases dogmatiques de l'Église de Hollande. Il provoqua indirectement l'emprisonnement de Grotius et l'exécution de Olden Barnevelt. Les remontrants destitués, presque tous pasteurs à Amsterdam ou aux environs, publièrent un mémoire pour se justifier de toute participation à un complot contre le prince-stathouder Maurice de Nassau. Ce mémoire et la publication des Actes du synode de Dordrecht 1620 adoucirent en leur faveur l'autorité, et à l'avènement d'Henri, frère de Maurice 1625, ils furent d'abord tolérés, puis 1630 officiellement autorisés à s'établir en Hollande partout où ils voudraient. Ils en profitèrent pour avoir à Amsterdam et à Rotterdam des églises et des écoles, mais la tolérance leur fut aussi fatale que la persécution leur avait été favorable. Quant à ceux qui avaient préféré quitter le pays en 1621, ils avaient trouvé dans le Schleswig un prince bienveillant qui leur avait permis de s'établir dans ses États; ils se bâtirent une ville qu'ils appelèrent Fridrichstadt, du nom de leur protecteur, et dans laquelle se trouve encore aujourd'hui une petite communauté arminienne. Parmi les représentants les plus autorisés de cette tendance, il faut nommer Épiscopius 1583-1643, Curcellaeus f 1645, Hugo Grotius, Lim-borch 1633-1714, Cattenburgh f 1737, Jean le Clerc 1657-1736, Wettstein f 1754, etc.

ARNÀULD, ou Arnaud, Arnaut, Arnold, nom qui revient souvent, et avec des orthographes différentes, dans l'histoire de l'Église chrétienne. Les jésuites veulent le faire dériver du grec arnoumai, renier; ce n'est pas très spirituel.

1<> Arnold ou Arnaud de Brescia, né vers 1100 probablement, dans la ville dont il a gardé le nom. Il embrassa de bonne heure la carrière ecclésiastique et remplit dans sa ville natale les modestes fonctions de lecteur. D'une intelligence vive, d'une éloquence impétueuse, originale, d'un caractère élevé, d'un dévouement absolu à ce qu'il regarde comme la vérité, il avait l'esprit tourné vers la pratique plutôt que vers la spéculation. Jeune encore il vint en France, où il suivit les leçons d'Abélard. à Saint-Denis d'abord, puis à Nogent et dans les solitudes du Paraclet, et l'influence du maître fut grande sur ses disciples. De retour en Jtalie, Arnold revêtit le costume monastique et se jeta avec ardeur dans la lutte que lui imposaient les désordres du clergé. Il combattit par la parole et par la plume. Ses écrits malheureusement sont perdus; Innocent II les fit brûler, et il n'est plus possible de reconstituer d'une manière sûre l'ensemble des doctrines et le système dont Arnold fut le représentant. On sait seulement qu'il voulait le retour aux œuvres et à la vie de la primitive Église. Ses discours passionnés, tombant au cœur d'une multitude inflammable, trouvèrent un écho dans la population de Brescia et des environs; la guerre civile éclata; une faction nombreuse, dirigée par Rebaldus et Persicus, s'insurgea contre l'évêque Manfred, et celui-ci recourut auprès du concile de Latran qui était assemblé 1139. Sans parler de ses doctrines, Innocent II condamna Arnold, le bannit et lui imposa le silence. Contraint de s'expatrier de nouveau. Arnold passe une seconde fois les Alpes, il revient en France, à temps pour assister au synode de Sens, juin 1140, où Abélard et saint Bernard doivent se rencontrer; mais Abélard a vieilli (stat magni nominis umbra), et au moment de la lutte, malgré la présence d'Arnold, il se dérobe en en appelant à Rome. Les deux amis ne se verront plus; un rescrit du pape, juillet 1140, ordonne qu'ils seront enfermés séparément dans deux maisons religieuses, mais Abélard trouva l'hospitalité à Cluny, chez Pierre-le-Vénérable, et Arnold réussit à se sauver en Suisse. Il prêche à Zurich, où il obtient de grands succès. Saint Bernard alarmé le dénonce à l'évêque de Constance, mais le légat du pape, Gui de Castello, le futur Célestin II, ancien élève d'Abélard, lui assure un asile. A son tour Gui reçoit une lettre menaçante de saint Bernard, et le proscrit disparaît pour quelques années. Il finit, vers 1146, par retourner à Brescia, et même à Rome, « avec une armée de Suisses, » dit un de ses historiens par trop fantaisiste. Pendant son absence la lutte avait continué entre les papes et le peuple de Rome, et Eugène III avait dû se réfugier en France. Arnold a de puissants amis; si ses doctrines sont peu populaires et mai comprises, le fait politique de son opposition lui crée de nombreux adhérents. 11 rêve la restauration de l'ancienne Rome et son indépendance comme ville; le sénat et le peuple seuls seront les maîtres; le pape conservera son pouvoir spirituel. Adrien IV, 1155, refuse de sanctionner le nouvel ordre de choses, et se retire à Orvieto d'où il excommunie Arnold et lance l'interdit sur Rome. Les Romains épouvantés, voyant approcher le terrible Frédéric I«r, Bar-berousse, abandonnent Arnold qui doit quitter la ville et se mettre en sûreté dans un château de la Campanie. Adrien obtient de Frédéric la promesse qu'il lui fera livrer l'agitateur, et Frédéric qui désire être sacré par le pape tient sa promesse. Sans bruit, avant le jour, par crainte du peuple, Arnold est conduit à la Porta del popolo où il est pendu, puis son corps brûlé et ses cendres jetées au Tibre. Un moment après, ses amis accourent en armes pour le délivrer, mais trop tard; on leur avait laissé ignorer le moment de l'exécution. — On a cherché à expliquer les doctrines d'Arnold par l'influence d'Abélard (Néander); d'autres, par ses rapports avec les albigeôis, les cathares, les vaudois (Buheus et Léger); d'autres enfin y voient un mélange de mysticisme panthéiste, ou dualiste, qu'ils rattachent à l'ancien gnosti-cisme (Raumer, Hurter). Toutes ces hypothèses sont de trop; Arnold était homme à juger par lui-même, et ce que l'on connaît de ses opinions s'explique par le fait seul des abus qui régnaient de son temps. Il voyait dans de trop grandes richesses la source de la corruption du clergé; il ne regardait comme prêtre que celui qui justifiait sa prédication par sa vie; il voulait séparer les pouvoirs temporel et spirituel; il insistait enfin sur l'inutilité du baptême et de l'eucharistie sans la conversion du cœur. — v. Othon de Freysingen, fragments; quelques fragments de saint Bernard; Muratori; Gui bal,

A. de Bresce et les Hohenstaufen. Son nom est aussi lun des plus populaires de l'Italie; Nico-linien a fait un draine, Tantardini de Milan lui a élevé une statue, Brescia et Rome ont honoré sa mémoire. Le nom d'Arnoldistes, mentionné dans un décret de Lucius III, 1184, et dans un décret de l'empereur, désigne moins peut-être une secte proprement dite, que les tendances antihiérarchiques si nombreuses qui se manifestèrent au moyen âge, surtout au nord de l'Italie. Sans doute Arnold laissa quelques disciples, mais ils ne s'organisèrent pas et durèrent peu.

Nicolas Arnold, né en Pologne 17 déc. 1618, f 15 octobre 1680 à Franeker, où il était pasteur et professeur. Successeur de Cocceius, il a publié les œuvres de Maccovius et écrit lui-même divers ouvrages contre le millénium de Gomenius, qui devait commencer en 1672, contre le papisme et contre le socinianisme.

3o Gottfried Arnold. né 1665 en Saxe, à An-naberg où son père était maître d'école, fit de bonnes études à Wittenberg, se lia à Dresde avec Spener, 1689, fut un piétiste ardent, se jeta dans le mysticisme, grâce aux œuvres de Bœhme, combattit le mariage comme incompatible avec la sagesse supérieure (sophia), se maria, \700, fut un séparatiste décidé, se calma avec làge, fut successivement précepteur, professeur à Giessen. prédicateur de la cour à All-staedt, historiographe de Frédéric l«r, enfin pasteur et inspecteur à Werben, puis à Perleberg, où il t 1714. Malgré la mobilité de son caractère et ses fréquents changements d'opinion, il s'était concilié le respect et l'estime par sa droiture de conscience et par sa piété. Il a publié de nombreux ouvrages historiques, mystiques, polémiques et d'édification. Alb. Knapp en a réimprimé quelques-uns, avec une vie d'Arnold, Stuttgart 1845.

Les Arnaud de France. Famille noble d'Auvergne, originaire de Provence, établie à Paris vers 1547, en majorité protestante.

Antoine, f 1585, auditeur à la Chambre des comptes. Il eut un fils d'un premier mariage, et en secondes noces onze enfants, dont 7 fils et 4 filles. L'aîné de ceux-ci, également

2o Antoine, né 5 août 1560, f 29 déc. 1619, avocat au parlement de Paris, d'un désintéressement rare, d'une éloquence passionnée, se fit une réputation européenne par le discours qu'il prononça le 12 juillet 1594 pour l'université de Paris contre les jésuites. En 1602 il adressa un Mémoire au roi. plusieurs fois réimprimé dès lors, pour empêcher le rappel de cette redoutable Compagnie. On a de lui un grand nombre de brochures politiques. Il eut 20 ou 22 enfants, qui paraissent tous, et peut-être lui-même aussi, avoir laissé la réforme pour le jansénisme, entre autres Jaqueline, la célèbre abbesse de Port-Royal, Robert Arnaud d'Andilly, Henri, èvêque d'Angers, etc. Le plus célèbre et le plus jeune des 20, s'appelait aussi

Antoine; c'est celui que les jansénistes ont surnommé le grand Arnaud. Né le 6 février 1612, il étudia d'abord le droit, puis, sous l'influence de Saint-Cyran, la théologie, fut reçu prêtre 1641, et docteur en Sorbonne 1643. Il se fit connaître de bonne heure par son livre De la fréquente Communion, qui eut bientôt sept éditions, livre d'édification, qui était en même temps une déclaration de guerre aux jésuites et à leur manière expéditive de simplifier la confession et la communion. Il veut que les actes religieux soient accomplis sérieusement. Ce n'était pas beaucoup; c'en était trop cependant pour les confesseurs jésuites. Le clergé de France se divisa à ce sujet; les uns prirent parti pour, les autres contre, et les sermons du carême furent une mêlée où l'on faillit en venir aux mains. Les jésuites en appelèrent au pape; la reine Anne voulait livrer Arnaud à Rome, le parlement s'y opposa au nom des libertés gallicanes; la reine persista et Arnaud n'échappa à ce voyage qu'en se cachant. Dans la querelle sur la grâce,

11 prit parti pour Jansénius et publia deux Apologies de cet èvêque 1644 et 45; en 1655, une Lettre à une personne de qualité (le duc de la Rochefoucault-Liancourt). La Sorbonne, où les jésuites, alliés aux thomistes, aux dominicains, aux semi-pélagiens, formaient la majorité, le censura et prononça son exclusion, 31 janvier 1656; 80 docteurs sortirent avec lui. Ce fut à cette occasion que Pascal écrivit ses Provinciales. Arnaud s'enferma à Port-Royal, où il resta

12 ans avec Lancelot, Nicole, Pascal, écrivant, seul ou avec ses amis, ces ouvrages de théologie, de morale, de grammaire, de physique et autres, qui ont fait de Port-Royal un centre littéraire et philosophique si brillant. Il prit une grande part à la traduction du N. T., édit. de Mons, v. Saci. En 1668, lors de la paix dite de Clément XI, le nonce et le roi le prièrent de mettre sa plume d'or au service de l'Église en écrivant contre les réformés. I)e là ses deux volumes et ses deux éditions sur la Perpétuité de la foi, où il s'appuie sur les droits de la prescription pour prouver que l'Église catholique est la véritable. L'argument laissait à désirer. Il faut dire à la décharge d'Arnauld qu'il n'a écrit que le 1er chapitre de cet ouvrage, dont le reste appartient à Nicole. Les jésuites, pour lui nuire, affectèrent de dédaigner ce volume, en entravèrent la circulation, et firent un grand éloge de la réfutation que Claude lui opposa. Peu encouragé, Arnauld cessa momentanément d'écrire contre les reformés, d'autant plus que la persécution sévissait contre eux cruellement. Devenu suspect il se cacha à Paris, mais se sentant entouré d'espions, sachant ses correspondances ouvertes, il s'enfuit sous un déguisement le 18 juin 1679, à l'âge de 68 ans, et se retira à Bruxelles où il passa ses 15 dernières années. Il fut en correspondance avec Leibnitz qu'il espérait convertir; il attaqua la doctrine de Mallebran-che sur la providence, la grâce et la vision en Dieu 1683; il eut de vifs démêlés avec le ministre Jurieu qui ne le ménagea guère. Il était cartésien et eut le malheur, en philosophie comme en religion, de représenter des tendances qui ne pouvaient plaire aux esprits extrêmes. Il fut mal avec les protestants, sans pouvoir se concilier les catholiques; son neveu, le marquis de Pomponne, dut le prévenir qu'on ferait tout pour s'emparer de sa personne et qu'il ne serait en sûreté qu'à Amsterdam. 11 ne cessa de réclamer les libertés de l'Église, l'autorité des conciles et la lecture de la Bible en langue vulgaire. Il écrivit d'Utrecht contre « Guillaume d'Orange, le nouvel Absalon, Hérode et Cromwell. • Plusieurs cardinaux lui fournirent des matériaux pour son livre: Morale pratique des jésuites. Le compagnon dévoué de ses dernières années, depuis 1685. fut le pèreQuesnel; il mourut dans ses bras le 8 août 1694, après une courte maladie. âgé de 82 !/i ans: « ainsi délivré, dit-il, de son double exil. » Son cœur fut porté à Port-Royal; son corps conservé dans l'égl. de ^inte-Catherine, à Bruxelles. Il est à regretter que l'amour "de la discussion l'ait entraîné trop loin; c'était une maladie de son esprit. Vers la fin de sa vie, Nicole lui exprimant son besoin de se reposer après tant de luttes: Hé ! lui répondit Arnaud, n'aurez-vous pas toute l'éternité pour vous reposer ! — Il a énormément écrit, mais rien de saillant. Ses ouvrages, au nombre de 320, avec ses lettres, des préfaces et des introductions, forment 135 volumes. On les a réunis en 48 tomes 4°, Lausanne 1773-83.

Robert A. d'Andilly, frère aîné du précédent, 1589-1674, gentilhomme de cour, ne se servit de son crédit que pour faire le bien. A 55 ans il se retira à Port-Royal. On a de lui une trad. de Josèphe, des Confessions de saint Augustin, des OEuvres de sainte Thérèse, etc. Son fils, marquis de Pomponne, fut ministre de Louis XIV.

5° etc. Plusieurs pasteurs de ce nom. un à La Rochelle vers 1650, deux au synode d'Alen-çon 1637, un à Montaren 1603, un au Désert, pendu 1718, et d'autres. V. la France prot.

ARNAUD, Henri, pasteur et colonel des vaudois, né vers 1640 aux environs de Die, Dau-phiné; il quitta son pays pour se soustraire aux persécutions iniques de Louis XIV, se battit courageusement contre Catinat lors des Pâques piémontaises de 1688, accompagna les Vaudois dans leur exil 1686/87, présida à leur rentrée 89. Pasteur et modérateur-adjoint en 1692, il fut obligé de nouveau de quitter les Vallées par suite du décret du 1er juillet 1698, qui en bannissait tous les habitants d'origine étrangère. II se retira en Allemagne, et fut d'abord pasteur à Dttrmentz. Les circonstances lui ayant permis de reprendre du service dans les Vallées, on le retrouve 1706 pasteur de Saint-Jean. En 1707 il est à Londres, où Van Somer fait et grave son portrait. Étant revenu dans les Vallées, il est exilé de nouveau en 1709. Guillaume III l'engagea à venir à sa cour et lui offrit un brevet de colonel, mais Arnaud préféra retourner en Allemagne où la reine Anne lui fit une pension de 226 L. st. (5650 fr.). f 1721 à Schfin-berg, à 80 ans. Il a écrit La glorieuse rentrée des vaudois MDCCX, devenu très rare, réimpr. 1845 à Neuchâtel, avec préf. de Fréd. de Rou-gemont.

ARNDT, Jean, auteur d'un livre célèbre et justement populaire, intitulé Le vrai christianisme. Spener disait de lui: Sans doute Luther lui est supérieur par l'étendue de l'œuvre que Dieu lui a donnée à faire, mais Arndt le suit de bien près, et je ne suis pas sûr que par ses écrits il ne soit pas destiné à une œuvre également importante. Arndt naquit 1555 à Ballen-stœdt, Anhalt; étudia àHelmstedt, en 1577 àWit-tenberg; vint de là à Strasbourg, puis à Bâle, 1579, où il suivit les cours de morale et de médecine de Tbéod. Zwinger, célèbre médecin chrétien. Rentré dans son pays, il fut successivement pasteur à Badeborn, Quedlimbourg 1590, Brunswick 1599; il publie en 1605 le premier livre de son Vrai christianisme, qui est accueilli partout avec enthousiasme, excepté par ses collègues de Brunswick. Il combat dans ce livre la foi morte, la sèche scolastique, même orthodoxe; il veut réveiller les étudiants et les prédicateurs, et que le chrétien puisse dire en réalité: Ce n'est plus moi qui vit, c'est Christ qui vit en moi. En 1608 il donne la fin de son manuscrit à son ami et fils spirituel Gerhard, publie 1609 l'ouvrage entier, passe à Eisleben, et enfin 1611 à Zell, comme prédicateur de la cour et surintendant. Son activité, prédications, visites d'églises. furent bénies non seulement pour sa paroisse, mais pour tout le Lunebourg, comme ses livres pour toute l'Allemagne, f 1621. Il eut toujours une grande prédilection pour les écrits mystiques d'A'Kempis, Tauler et Staupitz.

ARNO, évêque et premier archev. de Salz-bourg, entre 785 et 800. Il était de la famille des Freysingen, et se consacra à l'Église encore eufant 758, diacre et prêtre 778, abbé de Saint-Amand, Belgique, 782, et grand ami d'Alçuin. Après l'incorporation de la Bavière à l'empire des Francs 788, il se concilia la faveur de Char-lemagne, et fut employé par lui soit pour des missions à Rome, soit pour la conversion des Slaves et des Avares. C'est Léon III qui érigea Sakbourg en métropole de la Bavière. Arno est plus d'une fois délégué (missus) de l'empereur pour des intérêts temporels. Il assiste au testament de Charles et au concile de Mayence 813; il n'assiste pas à celui d'Aix-la-Chapelle pour la réforme des ordres religieux 817, et Louis lai eu communique par écrit les résolutions, f 821.

ARiNOBE 1° VAncien, célèbre apologiste chrétien de l'Afrique proconsulaire occidentale, né à Sicque en Numidie, vers le milieu du 3me siècle, de parents païens. Il enseigna assez longtemps la rhétorique et la grammaire, combattit le christianisme et s'acquit une réputation considérable comme savant et orateur. D'ûn esprit enclin à la superstition, il était travaillé intérieurement par le sentiment qu'il faisait fausse route; il hésita longtemps avant d'embrasser le christianisme; enfin il se décida. Comme il avait combattu les chrétiens publiquement, son évêque exigea, avant de l'admettre au baptême, qu'il fit un acte public de conversion. C'est alors, qu'au milieu des persécutions dioclétien-nes, 304, il écrivit une profession éclatante de sa foi:VII Livre» contre les païens: Disputationes adœriw gentiles. On ne sait s'il fut ecclésiastique; quelques-uns l'ont cru, mais sans preuve. Son style est dur, inégal, obscur souvent, mais parfois aussi agréable, élégant et énergique. Il a de fines railleries et des attaques virulentes contre le polythéisme et contre ceux qui le soutiennent par des allégories; en général il cite peu les saintes Écritures; on lui reproche des subtilités et des idées étranges sur l'origine du mal, qu'il rapporte à un être inférieur à Dieu. D eut pour disciple Lac tance.

î° le Jeune, théologien du 5m« siècle, dont on ne connaît ni le lieu, ni la date de naissance, ni la vie. Il écrivit un Comment, sur les Psaume qu'on a faussement attribué au précédent, et qui renferme une attaque assez forte contre Augustin.

ARNOLD 1° de Bresce, etc., v. Arnaud. — 2° Geoffroy, né 1666 en Saxe, étudia la théol. à Wittenberg. entra 1689 en relation avec Spe-ner, fut prof, un an à Giessen et occupa successivement plusieurs places de pasteur, refusa de signer la formule de Concorde, fut banni de Saxe et nommé pasteur à Terleberg, il y f 1714. Auteur de divers ouvrages mystiq. et historiq.. cantiq. et sermons qui lui ont valu une réputation méritée.

» Thomas, né 13 juin 1795, f juin 1842. Élève d'Oxford, théologien anglais, prédicateur et pédagogue distingué, a fait de Rugby une école chrétienne. A publié une édition de Thucydide, une Hist. romaine, 5 vol. de Sermons, une brochure sur la conscience chrétienne, une Étude sur l'interprét. des Écritures, etc. H tenait rÉgl. et l'État comme deux domaines devant se confondre l'un dans l'autre, et réclamait l'école chrétienne et un gouvernement chrétien. — Son fils Matthew est connu surtout comme publiciste éminent.

ARNOLDI, Barthélémy, d'Using, moine au-gustin, professeur de philosophie et de théologie à Erfurt, un des maîtres de Luther, l'approuva dans ses débuts, mais trouva qu'il allait trop loin. Il assista à la diète d'Augsbourg 1530 et f à Erfurt 1532. A laissé de nombreux ouvrages.

ARNULPH 1° évêque de Metz 614, avait été jusque-là laïque et marié, majordome à la cour franque d'Austrie. Quand il entra dans les ordres, sa femme prit le voile à Trêves. Leur fils Anségis épousa Begga, fille de Pépin, dont il eut Pépin d'Héristal. Après avoir siégé dans les conseils de Clotaire et de Dagobert, il sollicita sa retraite 625, et se rendit au couvent de Re-miremont. Vosges, où il f 641. — 2° v. Jean 12<>.

ARSÈNE lo diacre romain, très instruit et distingué, recommandé par Damase à Théodose pour l'éducation de son fils Arcadius. Mais le jeune prince, faible et méchant, irrité de devoir se tenir debout devant son maître assis, lui jura une haine mortelle, et celui-ci dut s'enfuir dans les déserts de l'Égypte, où il atteignit jusqu'à 95, quelques-uns disent même 120 ans. f 445.

2° Moine de Nicée, solitaire du mont Athos, enfin patriarche de Constantinople, chargé par Théodore Lascaris II de la tutelle de son fils Jean 1255/59, excommunia l'usurpateur Michel Paléologue, qui à son tour le fit déposer et bannir par un synode convoqué à Constantinople. Il f 1267 dans une île de la Propontide; Michel se fit relever de son excommunication en 1268, mais Arsène conserva beaucoup d'adhérents dans le clergé grec et fut canonisé 1312.

ARTÉMON, vivait à Rome à la fin du 2*e siècle, et soutenait que Jésus n'était qu'un homme; il admettait cependant sa naissance surnaturelle et sa parfaite sainteté.

ASCÈTES, ascétisme. Mot grec d'origine, qui signifie exercice et qui s'employait spécialement en parlant des athlètes. Dans le langage chrétien il s'appliqua aux exercices spirituels. Clément d'Alex, donne ce nom aux hommes de l'A. T. qui menaient une vie austère. Peu à peu il se dit des personnes, hommes ou femmes, qui s'imposaient des privations physiques dans la pensée d'affranchir l'esprit; il finit par désigner surtout les religieux, les moines et la vie monastique.

ASCHE, rabbin célèbre, un des principaux rédacteurs du Talmud, enseignait à Sura, Eu-

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phrate. et f 427. Il eut pour successeurs Àbina et José, qui mirent la dernière main à l'œuvre et l'ont laissée telle qu'elle est aujourd'hui. Il avait divisé son travail en 60 parts, dont chacune devait être achevée dans l'espace d'un semestre.

ASGIDAS, v. Théodore.

ASILE, v. Asyle.

ASINAIRES (les), proprement les adorateurs, ou les disciples de l'âne, sobriquet donné d'abord aux juifs, puis aux chrétiens, à la suite d'une caricature où, d'après le rapport de Ter-tulien, le Dieu des chrétiens était représenté sous l'image d'un homme à oreilles d'âne, ayant un sabot au pied, un livre à la main et revêtu d'une toge. Tacite raconte aussi que les juifs adoraient un âne, Hist. Y. 4., par confusion avec l'urne à deux anses qui renfermait la manne.

ASSEBOURG, Rosemonde-Juliane (d'j, demoiselle allemande, née 1672 d'une famille noble des environs de Magdebourg. Célèbre par sa piété, elle déclara en 1691 que dès sa 7™« année elle avait eu de temps en temps, et surtout pendant ses prières, des visions merveilleuses, et qu'elle avait reçu de Dieu de grandes révélations relatives à l'état glorieux de l'Égl. future et au Millenium. Le surintendant Petersen la recueillit dans sa maison, l'admira, fit valoir ses révélations dans un livre intitulé Species facti; mais l'un et l'autre furent bannis 1692 sur la plainte du clergé, et Ton n'entendit plus parler de la visionnaire. Leibnitz, qui l'avait connue, rend hommage à son caractère.

ASSEMANI, famille de savants qui ont rendu de grands services à la littérature orientale et ecclésiastique; ils étaient maronites, originaires du Liban; plusieurs ont étudié au collège des maronites à Rome, et sans renoncer à leurs traditions orientales, ils se sont développés dans l'esprit de l'occident. Les plus célèbres sont:

io Joseph Simon, docteur en théol., chanoine de Saint-Pierre à Rome, référendaire du pape, custode de la bibliothèque du Vatican, travailleur infatigable, qui a ouvert la voie aux études sur l'histoire des églises de Syrie. Clément XI l'envoya en orient 1715 pour se procurer des manuscrits; il en trouva beaucoup en Égypte, moins à Damas, et il allait partir pour la Mésopotamie, quand il fut rappelé. Il rentra à Rome 1717 avec 150 manuscrits de valeur, et le pape fut si content de son travail qu'il résolut de lui confier une seconde mission, mais il ne parait pas qu'il y ait été donné suite. Il retourna cependant en Syrie en 1735, avec de grosses sommes d'argent, mais sans autre mission que de venir en aide aux catholiques du Liban, maltraités par les Turcs, et de fournir aux maronites les moyens de se construire un nouveau couvent. Il présida en 1736, comme légat du pape, un synode convoqué par le patriarche maronite Jean-Pierre de Gaza, dont il rédigea les délibérations en arabe et les traduisit ensuite en latin. Il n'oublia pas ses collections, recueillit plus de 2000 vieilles médailles et pièces de monnaie, une quantité de manuscrits et sur des plaques de cuivre le texte des privilèges que Domitien avait octroyés aux Égyptiens. Au bout de 3 ans il revint à Rome, et c'est à cette occasion qu'il fut nommé custode, ou gardien de la Bibliothèque qu'il avait enrichie 1730. Le 18 févr. 1740 il fut chargé de faire le discours qui précède d'ordinaire l'élection d'un pape et il recommanda aux cardinaux de choisir un homme à la fois savant, sage et pieux, f 31 janvier 1768. Son principal ouvrage est la Bibtioth. orientait* Clementino-Vaticana, 3 vol. f», 1719-1728 qui contient l'histoire des écrivains syriens, orthodoxes et monophysites. celle des nestoriens, et des détails sur l'hist. de l'Église dans les différents pays de l'orient, depuis l'Arabie jusqu'en Chine. Abrégé par Pfeif-fer, Erlangen 1776. Il a écrit aussi une Grammaire arabe, une Chronique orientale, et commencé sous le titre de Kalendaria ecclesiœ universœ une œuvre digne des bollandistes, renfermant l'histoire de tous les saints de l'orient et de l'occident, dont il n'a paru que 6 vol. 4® comprenant seulement les Slaves et les Grecs. Il publia aussi les œuvres d'Ephrem Sy-rus, et fut aidé dans ce travail d'abord par Pietro Benedetti, puis par son cousin Evode.

2° Joseph Aloys, frère du précédent; prof, de langues orientales au collège de Rome, f 9 févr. 1789. Connu surtout par son Codex liturgicus Ecclesiœ unit?., 13 vol. 4°, ouvrage inachevé, Rome 1749-1766.

3° Etienne-Evode, cousin des précédents, ar-chev. titulaire d'Apamée, Syrie, possédant les plus riches prébendes de l'Italie; orientaliste distingué, jiommé membre correspondant de la Société royale britannique des sciences, concourut avec son parent Joseph Simon à la publication des œuvres d'Ephrem, écrivit les Actes des saints martyrs de l'orient, une Histoire des persécutions romaines, la description d'un certain nombre de mss., et surtout fit un catalog. des mss. orientaux de la biblioth. Mediceo-Lauren-tine.

4° Simon, de la même famille, né en Syrie 1752. f Padoue 1821, a écrit un Essai sur les Arabes avant Mahomet, un Catalogue des mss. orientaux du comte de Nani, et quelques ouvrages sur la littérature orientale.

ASTÉRIUS 1° disciple de Lucien, l'un des écrivains qui furent le plus habiles à défendre l'arianisme. f 330.

2<> Évêque d'Amasie, d»ns le Pont, t surnommé Philalèthe, ami de la vérité. On a peu

de détails sur sa vie; tout ce que Ton sait, c'est qu'il lut un vaillant défenseur de l'orthodoxie. Presque inconnu jusqu'au i7m« siècle, il prit place tout à coup parmi les orateurs les plus remarquables de son temps, grâce à la découverte de 5 de ses sermons; on en trouva plus tard d'autres encore, dont quelques-uns préchés au concile deNicée, et une dizaine de morceaux inachevés, entre autres un éloge d'Étienne, qu'on a cru longtemps l'œuvre de Proclus, patr. de Constantinople. On lui a attribué à tort plusieurs autres écrits. Il parait avoir joui d'une grande considération en orient. Trad. par Mau-croix et l'abbé Bellegarde.

ASTRUC, Jean, 1684-1766, médecin, fils d'un pasteur français, du Languedoc, qui avait abjuré à la suite des persécutions. Il était habile comme médecin et fut attaché au service d'Auguste de Pologne et de Louis XV. puis prof, à Paris. Connu surtout par ses Conjectures sur la Genèse et les documents dont Moïse s'est servi pour la rédiger.

ASYLE, endroit inviolable, placé sous la protection d'une puissance supérieure. Chez tous les peuples on a considéré comme tels les lieux consacrés au culte. H y avait là un préjugé populaire, qui fut partout sanctionné par les lois et qui était un frein salutaire contre l'arbitraire, la vengeance et la passion. La loi de Moïse avait ses villes de refuge pour les meurtriers involontaires. Les Grecs et les Romains avaient aussi leurs temples et leurs autels, qui protégeaient ceux qui leur demandaient un refuge. Là où Dieu était, s'arrêtait le pouvoir des hommes et leur droit de juger. Les temples chrétiens bénéficièrent de ces traditions, et les empereurs les réglèrent, tantôt pour les étendre, tantôt pour les restreindre. Théodose II et Honoré, 414 assimilèrent au crime de lèse-majesté la violation du droit d'asyle. Théodose II étendit même ce droit aux parvis, aux cours, aux cellules, aux jardins des temples, à tout ce qui était compris dans l'enceinte des murailles extérieures, 431. Léon I®"1, tout en confirmant ce décret 466, ajouta que le droit d'asyle ne pouvait pas suspendre l'action de la justice. Justinien refusa de l'étendre aux meurtriers et aux adultères. L'Église a toujours regardé comme son devoir de défendre ceux qui recherchaient sa protection. Le concile de Sardique 347 et celui d'Orange 441, ont posé en principe que ceux qui cherchaient un asyle dans les temples ne pouvaient pas être livrés. Le concile d'Orléans 511 confère les mêmes droits à la demeure de l'évéque. Le concile de Tolède 681 décide que les abords des églises, jusqu'à 30 pas, sont également inviolables, et Jean VIII donne à ces 30 pas l'autorité de son nom. Nicolas II. 1059, dit même que pour les grandes églises il faut compter quarante pas. L'Allemagne exclut du droit d'asyle les criminels, et plusieurs papes firent de même. Innocent IU 1200, Grégoire IX 1234, Martin V 1418, Jules II 1504. Le conc. de Trente maintint le principe, mais dès lors, dans la pratique, les rois et les papes le restreignirent de plus en plus, et la loi Siccard, Turin 9 avril 1850, Ta complètement supprimé, avec cette seule réserve que, vu la sainteté du lieu, l'arrestation des criminels doit se faire avec le plus de convenance possible.

ATHANASE, patriarche d'Alexandrie, le plus illustre des docteurs de l'Église grecque, et peut-être le plus grand des pères de l'Église, né vers 296 à Alexandrie. Il reçut une éducation libérale et chrétienne, et montra de bonne heure les dispositions les plus remarquables. Il fut reçu dans la maison d'Alexandre, plus tard patriarche, qui le dirigea dans ses études et le nomma son secrétaire. Puis il alla quelque temps vivre avec saint Antoine et retourna à Alexandrie. Nommé successivement sous-diacre 319, puis diacre, il était à l'âge de 20 ans le confident et le conseiller de son évêque Alexandre. Il eut pour collègue Arius dont il dévoila l'hérésie, et en 325 il alla comme simple prêtre au concile de Nicée, où il fut le défenseur le plus puissant de l'orthodoxie. Son talent et son éloquence frappèrent les pères d'admiration, et c'est à lui qu'on doit en grande partie la rédaction du Symbole de Nicèe et la condamnation d'Arius. Un rôle aussi considérable soutenu victorieusement par un jeune prêtre, ne pouvait manquer d'attirer sur lui l'attention publique; aussi lorsque Alexandre mourut, 326, il le désigna comme son successeur au patriarchat. Ce vœu fut approuvé à l'unanimité par le peuple et le clergé. Toutefois Athanase ne tarda pas à trouver des ennemis. Les ariens, qui ne lui pardonnèrent jamais la condamnation de leur chef et de leurs doctrines, s'unirent aux mélé-ciens pour l'accuser, le diffamer et le calomnier auprès de Constantin. Celui-ci reconnut la fausseté de toutes ces accusations, mais travaillé sourdement par les ennemis d'Athanase et par sa sœur mourante, il cita le patriarche devant les conciles de Césarée 334, où il refusa de comparaître, de Tyr et de Jérusalem 335, où il trouva des juges fortement prévenus contre lui; mais il se défendit avec tant d'habileté et de talent qu'il confondit ses calomniateurs. Cependant il ne réussit pas complètement. Ce dernier concile, placé sous diverses influences, prononça l'exil contre lui et il dut se retirer dans les Gaules, à Trêves. Mais cet exil qui dura deux ans, fut pour lui une sorte de triomphe. En 337 Constantin mourut; Athanase fut rappelé à Alexandrie l'année suivante par Constance. De toutes parts on accourait sur son passage, et à son entrée à Alexandrie il fut reçu avec un enthousiasme indescriptible. Il ne resta pas longtemps en repos. Accusé d'immoralité et de crimes, il fut déclaré coupable par un concile de 90 évêques ariens réunis à Antioche et de nouveau exilé pendânt 7 ans; un concile de 100 évêques convoqué à Alexandrie le déclara innocent. Les ariens en appelèrent à Rome; le pape Jules et 50 évêques se prononcèrent en faveur d'Athanase et leur verdict fut confirmé au concile deSardique par 300 évêques d'orient et d'occident. 347. Athanase fut reçu à Alexandrie au milieu des mêmes scènes touchantes qui avaient signalé son premier retour, 348. Bientôt l'emp. Constance, dont l'arianisme avait été modéré par son frère Constant, resta seul au pouvoir. Deux conciles ariens se réunirent sous son patronage à Arles, 353, et à Milan 355, et déposèrent Athanase; il y eut contre lui un renouvellement d'animosité et d'acharnement. Mais le courage du vaillant évêque grandissait avec l'imminence du péril. Il refuse cette fois de partir; le gouverneur d'Alexandrie reçoit l'ordre de le chasser par la force et tandis qu'Athanase officie tranquillement dans l'église, 5,000 soldats apparaissent et le cernent tout à coup; on presse l'évêque de s'échapper, il refuse, ses amis l'entourent, le saisissent et le dérobent aux regards des soldats. Exilé et fugitif pour la troisième fois, le patriarche d'Alexandrie va rejoindre les moines d'Égypte. On le poursuit, on le cherche, les solitaires le cachent et se laissent torturer et massacrer plutôt que de dénoncer le lieu de sa retraite. Enfin, pour les sauver et les débarrasser de sa redoutable présence, Athanase partit et se retira dans les déserts inhabités de l'Égypte, où il resta avec un seul serviteur. Ce troisième exil dura 6 ans pendant lesquels le courageux défenseur de la foi nicéenne composa un grand nombre d'écrits. En 361 Julien l'Apostat monta sur le trône et rappela tous les évêques chassés par son prédécesseur. Athanase revint donc à Alexandrie et sa prédication convertit un si grand nombre d'ariens et d'idolâtres, que les prêtres païens écrivirent à Julien, lui déclarant que si Athanase restait plus longtemps à Alexandrie, on n'y verrait bientôt plus aucun adorateur des dieux. Julien envoya donc l'ordre de chasser l'évêque de la ville, et le gouverneur apposta sur les routes des assassins pour le massacrer. Athanase venait de s'embarquer sur le Nil pour se rendre dans la Thébaïde; tout à coup il change de résolution, il ne quittera pas Alexandrie: Non, dit-il, je veux leur montrer que Celui qui est avec moi est plus fort que ceux qui me persécutent; et il ordonne courageusement à ses rameurs de retourner en arrière. Bientôt ils croisent les assassins envoyés à sa poursuite. Ceux-ci leur demandent s'ils ne l'ont pas vu: Il est tout près, répond Athanase; vous n'avez qu'à bien ramer. Le patriarche rentre à Alexandrie, mais à la prière dés siens il reste caché dans les environs jusqu'à la mort de Julien, qui le tira de ce nouvel exil. Rappelé par Jovien, il fut de nouveau banni par Valens; toutefois il ne partit pas, mais se retira simplement dans les tombeaux, où il demeura 4 mois; au bout de ce temps, Valens effrayé du mécontentement populaire, se décida à le rappeler 367. Dès lors, Athanase, après la vie la plus tourmentée et la plus agitée, resta en possession paisible de son siège jusqu'à sa mort, 373. Il avait été évêque 46 ans; il en avait passé 20 en exil, en sept différentes condamnations. Petit de taille, et d'un extérieur peu remarquable, mais doué de talents hors ligne, Athanase avait un esprit vif, un jugement solide, des connais* sances étendues et une rare éloquence. Cœur généreux, intrépide et bon, ce géant de vie et de foi s'était acquis l'affection sans bornes de son troupeau. La Bletterie le considère comme le plus grand homme de son siècle et peut-être de l'Église. Il a laissé de nombreux ouvrages de controverse, d'histoire, de morale et d'édification; le plus considérable est peut-être son Apologie à l'emp. Constance; on cite encore son Épître aux solitaires, sa Lettre circulaire aux évêques, ses 7 homélies, etc. Fort jeune il avait écrit déjà son traité de l'Incarnation du Verbe, résumé de la doctrine chrétienne. Son style n'est pas toujours élégant, mais il est clair et entraînant. Les auteurs qui lui succédèrent ont souvent puisé dans ses écrits. H. B.

Quant au Symbole d'Athanase, dit aussi le symbole Quicunque parce qu'il commence par les mots Quicunque vult salvus esse, il ne mérite le nom d'Athanase que dans le même sens et de la même manière que le Symbole des apôtres mérite le sien, c.-à-d. qu'il résume sa doctrine. mais sans avoir été écrit ni rédigé par lui. Les œuvres d'Athanase ne le mentionnent nulle part; plusieurs articles du symbole font allusion à des questions qui furent soulevées seulement le siècle suivant, entre autres celles relatives à la procession du Saint-Esprit; enfin il ressort de la comparaison du texte grec et *du texte latin, que ce dernier est l'original, mais où, quand, par qui a-t-il été composé? Les opinions divergent beaucoup là-dessus. Le plus probable, c'est que c'est l'œuvre de Vigile de Tapse, qui vivait au nord de l'Afrique à la fin du 5m« siècle. Gieseler cependant le place plus tard, au 7®« ou au 8™ siècle, et suppose qu'il a été composé en Espagne. Quoi qu'il en soit, c'est un magnifique document de la foi chrétienne, et il restera précieux alors même que la science théologique viendrait à formuler autrement et d'une manière moins absolue certaines doc-trines.

ATHÉISME. C'est la négation de l'existence de Dieu ou des dieux; les anciens païens avaient déjà leurs athées. L'athéisme peut se présenter dans la théorie comme un système, soit affirmatif, soit négatif; dans la pratique comme une règle de vie morale et de conduite. 11 se confond nécessairement avec le matérialisme, et en admettant l'éternité de la matière, puisqu'aucune puissance intelligente n'était là pour la créer, il doit admettre aussi l'éternité du mouvement, puisqu'on ne saurait comprendre ancune cause qui l'aurait déterminé; il doit admettre enfin l'éternité de toutes les espèces, de l'homme, des animaux et des plantes, avec la seule réserve des modifications que les circonstances extérieures peuvent produire à la longue. Si l'insensé peut dire en son coeur: Il n'y a pas de Dieu, la question reste toujours de savoir s'il y a vraiment jamais eu de véritable athée, et si l'on ne doit pas plutôt comprendre sous une désignation générale et vague les conceptions les plus diverses d'un théisme inconscient ou du panthéisme. Le caractère essentiellement négatif de l'athéisme le réduit à ne pouvoir s'établir par des preuves; il n'est pas une doctrine et n'appartient par aucun côté à la philosophie. Il n'est pas davantage une morale. et il doit dans la théorie faire abstraction de h conscience; l'intérêt personnel tient lieu du devoir, chaque individu résume en lui-même le monde et la vie, tout doit se rapporter à lui comme centre unique, et l'égoïsme est la conclusion logique du système. Ce n'est que par une heureuse inconséquence que les athées peuvent valoir souvent mieux que leurs principes.

ATHÉNAGORE, païen de naissance et philosophe platonicien, ou plutôt éclectique, né à Athènes au 2me siècle. Il se disposait à écrire contre les chrétiens et se mit à lire leurs livres; cette lecture fut pour lui une révélation; il abandonna le polythéisme, étant encore assez jeune, et se fit chrétien. Il ouvrit à Alexandrie une éœle dont il fut le directeur. L'époque de sa mort est inconnue. Quelques-uns le regardent, à la suite de Philippe Sidétès, comme le fondateur de l'École catéchétique d'Alexandrie, mais à tort; Eusèbe dit formellement que ce fut Pantène. On a de lui une Apologie de la religion chrétienne adressée 177 aux empereurs Mare-Aurèle et Commode, et un traité sur la Résurrection des morts.

ATHOS (Mont-), montagne célèbre, qui a près de 2000® de hauteur et 115 kilom. de circonférence à la base; elle est située dans la Roumélie, à l'extrémité sud de la plus orientale des trois langues de terre qui terminent la presqu'île macédonienne. De temps immémorial, et déjà chez les Thraces, elle a été connue sous le nom de Sainte-Montagne, Monte-Santo; des souvenirs classiques s'y rattachent, ainsi que des souvenirs chrétiens, et les nombreux couvents qui s'y trouvent en recueillent soigneusement les traditions. L'histoire du Mont-Athos, longtemps mystérieuse, n'est sortie de son obscurité que vers le commencement de ce siècle, mais il reste encore bien des questions à élucider, des points à déchiffrer, sur les origines de cet immense groupement d'institutions religieuses monastiques. C'est sous Michel HI, vers 857, qu'il est fait mention pour la première fois des solitaires du Mont-Athos. Vers 960 Atha-nase-Auranias entreprend de civiliser les sauvages habitants de la contrée en les soumettant à une règle. Il prédit à Phocas la victoire sur les Sarasins et reçoit en récompense l'abbaye de Laura, la plus ancienne du pays, ou à peu près. Vers 1045 le patriarche de Constantinople donne à ces monastères une constitution, et proscrit en particulier de la minière la plus sévère la présence de femmes dans la colonie. Les grands couvents de Batipodion et de Xénophon datent probablement de cette époque. Alexis Comnène les combla de privilèges: son nom y est encore en grand honneur, et l'on assure que lui-même y a été enterré, ainsi que Zonaras son secrétaire d'État. En tout cas pendant longtemps ces couvents furent distraits de l'autorité épisco-pale et ne relevèrent que de l'empire. Les croisades décidèrent les orgueilleux moines grecs à se soumettre aux papes, et Innocent IU leur accorda sa protection, mais en les rattachant au siège de Rome. On ne comptait alors pas moins de 300 couvents, grands et petits, dans le territoire de la montagne. Les Paléologues. au XIVme siècle, revendiquèrent leurs anciens droits, placèrent les couvents sons la direction du patriarche de Constantinople et les ramenèrent de nouveau à l'Église grecque. Aujourd'hui l'on compte 21 ou 22 villages ou groupes principaux de monastères, couvents, cellules, construits la plupart au bord de la mer. ayant chacun ses limites bien déterminées, sa rade, sa pêche et son industrie, voir même une citadelle et un arsenal. Les couvents proprement dits ont l'air de forteresses, et quelques-uns sont riches et magnifiques. Le nombre des moines est d'au moins 6000. sans comptér les simples frères laïques; la plupart vivent en commun dans les monastères, mais beaucoup vivent seuls dans des ermitages simples et modestes, dans des cavernes ou dans les bois. Ces derniers, les anachorètes, les ascètes, dont la vie est plus dure, passent aussi pour être plus près de la perfection. La règle n'est pas la même dans tous les couvents. Chez les uns il y a abdication complète de toute volonté entre les mains-de l'abbé, chef, ou Igoumène. Les autres au contraire élisent chaque année une sorte de bureau et décident les questions graves en assemblée générale. Cette organisation démocratique semble même être fort ancienne, et les tentatives des empereurs n'ont jamais pu la faire disparaître entièrement. Aujourd'hui encore cette république de moines, en laissant chaque agglomération se gouverner comme elle l'entend, a pour autorité centrale, non un chef, mais un conseil renouvelé chaque année et qui se réunit dans la charmante petite ville de Karyœs, où il statue sur toutes les questions de discipline et d'administration. Les moines vivent des produits du sol, vin, huile, fruits, légumes; la pêche et diverses industries ajoutent à leurs revenus; mais comme ils ont à payer à la Porte un impôt qui varie de 25 à 100,000 fr. par année, ils ont des collecteurs à l'étranger, sur les rives du Danube, à Moscou, et jusqu'à Tiflis, dont les recettes ne sont pas à dédaigner. Ainsi préoccupés de soucis matériels, les solitaires du Mont-Athos ont perdu leurs traditions scientifiques dont ils étaient si fiers au temps de Zonaras, et ils en sont venus au point que très peu d'entre eux savent lire; ils s'en tiennent à la connaissance du dogme grec-orthodoxe, et aux légendes plus ou moins historiques de la Sain te-Montagne; ils ont aussi la passion de l'Apocalypse. Un essai fait sous Catherine II par Eugène Bul-garis, de Corfou (né en 1716), de relever l'état intellectuel de ces solitaires en fondant au milieu d'eux une maison d'éducation, n'aboutit pas. L'institut alla jusqu'à 200 élèves, mais la jalousie des ignorants suscita de telles difficultés que le patriarche Cyrille de Constantinople dut faire fermer la maison. Eugène partit, se fit une réputation en Russie par ses écrits philosophiques. mathématiques et politiques, demanda en 1774 l'expulsion des Osmans d'Europe, et f 1806 à Pétersbourg, revêtu de la dignité archiépiscopale. L'ignorance continua de régner au Mont-Athos. — De nombreux mss. et de riches peintures ont fait à cette aggrégation de monastères une réputation méritée. Cependant il ne faut pas s'en exagérer l'importance; depuis Walpole, qui en a retiré ce qu'il y avait de meilleur, les collections ont beaucoup perdu de leur valeur première. Déjà lors de la conquête de Constantinople, * les proscrits enlevèrent, pour les transporter en Occident, les mss. qui avaient la plus grande notoriété; ainsi les biblio thèques de Paris et de Moscou possèdent deux des mss. du N. T. du 6m« et du 8me siècle, en lettres onciales et majuscules, qui comptent parmi les plus importants. Il reste peu de chose en fait de mss. classiques, latins ou grecs; davantage en fait de patristique et de monuments ecclésiastiques, mais surtout liturgiques, relativement récents et de peu d'intérêt; quelques mss. de la Bible, une Septante richement ornée, des discours de Grégoire de Naziance, de J. Da-mascène, de Chrysostôme, etc. II y a aussi une collection considérable de livres appartenant à la Réforme en France. Il serait à désirer qu'on pût avoir le catalogue général de toutes ces collections, éparses dans les différents couvents. — L'abord en est relativement facile.

ATTO. ou Hattan, second évêque de ce nom à Vercelli, Piémont, f 960. Il vécut dans la plus sombre période de l'Église d'occident, et ses nombreux écrits n'en méritent que plus de fixer l'attention. Outre des Lettres, des Sermons et un Comment, sur les ép. de Paul, il a laissé un Traité de morale, une Protestation contre les empiétements du pouvoir civil, et une collection de Canons qui jettent du jour sur l'état de l'Église de son temps.

ATTRITION. C'est dans l'Église catholique la première forme, et la plus imparfaite, de la contrition ou repentance proprement dite; elle provient de la crainte du châtiment. C'est peu de chose, mais cela vaut mieux déjà que l'endurcissement; d'après Hilger, elle correspondrait aux terreurs de conscience des protestants. C'est un minimum, qui peut déjà conduire à la grâce.

AUBERLEN, Charles-Aug., né 1824 près de Stuttgart, fils d'un instituteur, étudia à Blau-beuren et à Tubingue, et après deux suffragan-ces, dont l'une avec Hofacker, il fut appelé comme prof, de théol. à Bâle 1851, où il f 1864. Distingué comme prédicateur évangéli-que; auteur d'une Étude (trad. en fr.), sur Daniel et l'Apocalypse, et d'un ouvrage d'apologétique, inachevé: La Révélation divine.

AUBERTIN, Edme, né 1595 à Chftlons-sur-Marne, pasteur à Chartres, puis à Paris 1631; connu surtout par son livre sur l'Eucharistie; 2me éd. Genève 1633. f 5 avril 1652.

AUBERY, Benjamin, seigneur Du Maurier, ambassadeur en Hollande 1613, conseiller d'État 1615, s'occupa de concilier les partis au synode de Dordrecht 1617-1620, refusa de servir les desseins de Maurice et ne put sauver Barnevelt; ami de Du Plessis-Mornay et de Grotius. f 1636. Il eut onze enfants, dont 9 lui survécurent, 4 fils et 5 filles, presque tous distingués par leurs talents et leur caractère, mais dont un abjura. |

AUBIGNÉ (d') lo Théodore-Agrippa, né à Saint-Maury, près de Pons, le 8 févr. 1552, + à Genève 29 avril 1630, l'un des plus illustres champions de la Réforme, fils de Jean, seigneur de Brie, Saintonge, lequel descendait des d'Au-bigny d'Anjou, ce qui lui fit donner par quelques-uns le nom de d'Aubigny, au lieu de d'Au-bigné. Sa mère était Catherine de PEstang. Jean fut un des chefs de la conjuration d'Amboise,

et il fat si irrité de l'exécution de ses amis qu*il fit le serment solennel de les venger. Il ne s'y épargna pas, mais la mort l'enleva 4563, avant qu'il eût pu tenir son serment. Le jeune Théodore montra de bonne heure les meilleures dispositions pour l'étude; à 6 ans il lisait le français, le latin, le grec et l'hébreu; à 7 Vi ans il traduisait le Criton de Platon. Après la mort de son père, son curateur l'envoya à Genève, où son esprit lui valut la faveur de Bèze, mais son indiscipline les rigueurs de ses professeurs. D s'enfuit à Lyon, où sa misère devint telle qu'il fut sur le point de se suicider. Dès 1567, âgé de 16 ans, il voulut s'enrôler dans les guerres de religion, mais son tuteur l'en empêcha; ce ne fut qu'en 1568 qu'il réussit à s'évader, presque nu, et en 1574 seulement qu'il entra au service du roi de Navarre, d'abord comme éeuyer on aide de camp, plus tard comme maréchal de camp, comme gouverneur d'Oleron et de Maillerais, enfin comme vice-amiral des côtes du Poitou, de la Saintonge et de Bretagne. Il gagna tous ses grades à la pointe de l'èpée et sur les champs de bataille, par son courage indomptable, la sûreté de son coup d'œil, ses talents stratégiques, et par un dévouement k toute épreuve, qui ne fut jamais bien apprécié ni récompensé. Il avait la parole trop sarcastique et trop hardie. Après les batailles de Jonsac, de Jarnac et de Cognac, il se rendit à Paris, et il aurait péri avec tant d'autres à la Saint-Barthélémy s'il n'eût dû s'enfuir à la suite d'un duel où il avait servi de témoin. Il avait reçu douze blessures au service d'Henri IV, lorsqu'il se brouilla pour la première fois avec ce léger et capricienx monarque, dont il n'avait pas voulu servir les illégitimes amours, 1577. Il se réconcilia cependant avec lui pour la guerre dite des Amonreux, épousa en 1583 Suzanne de Lézav, se brouilla de nouveau à La Rochelle avec Henri à cause de « toutes ses picoteries, » et se retira pour 6 mois dans ses terres. Il reprit du service en 1590, assista au combat d'Arqués, aux denx sièges de Paris, à la bataille d'Ivry,au siège de Rouen, mais quitta définitivement la cour pour plusieurs années après l'abjuration d'Henri IV. En 1596 il jura l'Union protestante à Loudun, et se montra dans les assemblées de Vendôme, Saumur et Chatellerault, parmi les trois ou quatre t qui s'affrontèrent le plus hardiment » avec les députés du roi. En 1600 il discuta pendant 5 heures avec l'évêque d'Évreux, devant plus de 400 personnes de marque des deux religions, et composa à cette occasion un traité De di$$idii$ Patrum (des contradictions des pères) qui est malheureusement perdu. Il s'opposa au projet d'accord entre les deux religions, que le roi avait préparé, et réussit à le faire échouer; il avait entrevu le piège, et acculé le cardinal Du Perron au pied du mur. Lors des affaires de la succession de Clèves et de Juliers, il fut chargé de diriger une expédition au cœur même de l'Espagne; il prit congé du roi 1610; il ne devait plus le revoir. A son retour la reine était régente; d'Aubigné l'assura, au nom des églises, de leur parfaite soumission à la régence, « étant d'une religion en laquelle personne ne pouvait les dispenser de la subjec-tion qu'on doit aux rois selon la Parole de Dieu, » ce qui fit dresser les oreilles au p. Cot-ton. L'exemple d'Henri IV avait trouvé des imitateurs; un grand nombre d'apostasies se produisirent par les soins de la reine et de La Varenne; quelques ministres même furent enlevés par la contagion. D'Aubigné resta fidèle, et prononça 1615 k Nîmes le serment d'union, mais après le traité de Loudun, qui fut « comme une foire publique de perfidies et de lâchetés, il se démit de toutes ses fonctions et partit pour Genève, où il arriva, non sans peine et sans périls, le

I sept. 1620. Il y fut reçu avec de grands honneurs, banquets, etc., ainsi qu'à Berne et k Bâle, deux villes pour les fortifications desquelles il fut consulté et écouté. L'ambassadeur de France en Suisse lui suscita des difficultés de toute nature, mais ne put empêcher son mariage avec Renée Burlamachi. Il passa ses dernière* années paisiblement à Genève et s'éteignit dans sa 80m« année; il fut enterré dans le cloître de la cathédrale. — Parmi ses ouvrages, outre le De dimdiis dont il a été parlé, il faut nommer le Printemps (publié par Ch. Read), la tragédie de Circé, auj. perdue; les Tragiques, long poème satirique de 9000 vers, en 7 livres, plein de vigueur, mais médiocre comme œuvre d'art; la Confession cathol. du Sr de Saucy, qui abjura deux fois, mordante satire; les Aventures du baron Fœneste, où il met en scène le duc d'Alençon, mignon d'Henri III; son Hist. universelle de 1550-1601, très hardie, mais plus française qu'universelle; son autobiographie, Hist. secrète de Théod.-A. d'Aubigné, et divers autres ouvrages moins considérables.

2° Constant d'A., son fils aîné, fils de Su-sanne de Lézay, né 1584, f 1645 k la Martinique, déshonora son nom par ses dépenses, ses débauches et ses trahisons. Devenu catholique, il obtint du pape un bref qui lui permettait « d'assister au prêche et de participer à la Cène des Réformés, » de manière k pouvoir surprendre leurs secrets et trahir son père; il prononça même le serment d'union à Nîmes 1615.

II livra à Schomberg ce qu'il avait appris du gouvernement anglais quant à l'expédition do La Rochelle, et son père le voua dès lors k l'exécration de sa famille et rompit pour toujours avec lui. Après avoir tué sa première femme, Anne Mansaud, il épousa le 27 oct.

1627, Jeanne de Cardillac, avec laquelle il par-tit 1639 pour la Martinique, où il joua et perdit tout ce qu'il possédait. 11 fut père de Charles, gouverneur du Berry, et de Françoise, née le 27 nov. 1635, qui devint plus tard la marquise de Main tenon et la femme de Scarron. Constant mourut dans la misère vers 1645.

3° Nathan d'A., fils cadet, illégitime, de Théodore, et de dame Jaquette Chayer, né 1600 à Nancray, Gâtinais, vint à Genève 1620, fut reçu médecin à Fribourg en Brisgau 1626, épousa Claire Palissari 1621, puis Anne Crespin en secondes noces 1632, fut appelé au conseil des CC. 11 f 1669, laissant plusieurs enfants, dont un fils, Tite, né à Genève 1634, exerça la médecine, et un autre, Samuel, fut successivement pasteur à Renan, Bévillars et Val de Tavan-nes; + 1710. Nathan a écrit quelques traités sur la chimie, v. Notice sur la famille Dubois 1883. C'est par les femmes que s'est conservée à Genève et à Vevey la descendance de Nathan, dans les familles Dubois, Merle, etc.

AUDIENS, Audius, v. Anthropomorphisme.

AUGER, Édouard, jésuite, né 1515 à Alle-man, près de Troyes, commença sa carrière à Rome comme garçon de cuisine dans un couvent de jésuites et fut admis dans l'ordre par Ignace lui-même. De retour en France, il se distingua par son zèle à convertir les protestants, combattit Viret, tomba entre les mains du baron des Adrets, mais réussit, grâce aux pasteurs, à avoir la vie sauve, et devint confesseur d'Henri III. Les ligueurs le forcèrent à quitter la France, f à Côme 1591. Auteur du Catéchisme français 1563.

AUGIER, pasteur à Châlons-sur-Marne 1685, abjura sous le coup des menaces de l'Éditde révocation, et pour ne pas se voir séparé de sa femme et de ses 4 enfants. Mais à peine libre il se regarda comme dégagé d'une promesse arrachée par la violence. Il se réfugia à Berlin où il donna « des marques d'un repentir fort édifiant. » Il fut nommé pasteur à Halle 1688.

AUGSBOURG, ville de Bavière, ancienne cité impériale jusqu'en 1806, célèbre dans l'histoire ecclésiastique par les événements importants dont elle a été le témoin:

Diète d'Augsbourg. En suite de la protestation des princes allemands à la diète de Spire, le 20 avril 1529, l'empereur fut amené à convoquer une nouvelle diète à Augsbourg, mais dans l'intervalle il avait fait la paix avec la France et s'était réconcilié avec Clément VII, s'engageant & réprimer le mouvement réformateur en Allemagne. Il avait été couronné empereur et roi de Lombardie, à Bologne, par le pape lui-même, le 24 févr. 1530, et n'était guère bien disposé en faveur des protestants. Cependant il convoqua les princes le 21 janvier pour le 8 avril, insistant beaucoup plus dans sa lettre de convocation sur la question des Turcs qui venaient de menacer Vienne, que sur la question religieuse. L'électeur Jean de Saxe chargea Luther, Jonas, Bugenhagen et Mélanch-thon de rédiger les points de doctrine et de foi sur lesquels il importait le plus de fixer l'attention de la diète. En réalité c'est Mélanchthon qui fit seul ce travail, en s'aidant des conseils de ses amis. Il l'intitula Apologie; mais l'histoire en a appelé le résumé

La Confession de foi d'Augsbourg. L'électeur partit le 3 avril avec plusieurs princes et une suite de 160 personnes. Ils arrivèrent le 16 à Cobourg, où l'électeur laissa Luther en arrière, soit par égard pour l'empereur, soit qu'il redoutât l'éloquence passionnée du réformateur, soit plutôt qu'il craignît pour ses jours. L'empereur n'arriva que le 15 juin; la Fête-Dieu avait lieu le 16, les princes protestants refusèrent de se joindre â la procession. La diète s'ouvrit le 20 par une messe; les princes y assistèrent, mais ne s'agenouillèrent pas. Les ambassadeurs d'Autriche et de Carinthie furent entendus les premiers sur la question turque. Quant à l'Apologie, rédigée en allemand et en latin, et déjà signée à double par les princes évangéliques (Jean de Saxe, Georges de Brandebourg, Ernest de Lttnebourg, Philippe de Hesse, Jean-Frédéric de Saxe. François de Lttnebourg, Wolfgang d'Anhalt, et les magistrats de Nuremberg et de Reutlingen), le parti catholique fit tout pour en obtenir le simple dépôt et pour en empêcher la lecture. Les princes ayant insisté à trois reprises, Charles leur accorda leur demande, mais à condition qu'on ne lirait que le texte latin; nouvelle discussion, les princes voulant au contraire que leur déclaration fût lue en allemand. On finit par le leur accorder, mais en transférant l'assemblée de la grande salle de l'Hôtel de ville dans une petite chapelle qui ne pouvait contenir que 200 personnes. C'est le samedi 25 juin à 4 h. que le Dr Christian Bayer commença sa lecture, au nom de l'électeur de Saxe, et d'une voix si haute et si distincte qu'il put se faire entendre de tous ceux qui se pressaient dans la cour et aux abords de la chapelle. La lecture dura deux heures, et produisit une immense impression. Après avoir rappelé l'autorité des SS. Écritures et la tradition des premiers siècles, le mémoire établissait que les protestants étaient les seuls vrais catholiques. Les signataires animés d'un esprit de paix et désireux, comme l'empereur, de travailler à maintenir la concorde dans le pays, se déclaraient disposés à remettre leur travail pour être examiné soit par la présente, soit par une future diète, ou, si Ion préférait, par « un concile général, libre et chrétien, t Le document se terminait par an exposé en 21 articles de la doctrine évangélique, sans affectation de formules théoloffiques, et par 7 articles relatifs aux abus de l'Eglise romaine. Le prince Albert de Mayence reçut l'exemplaire allemand; l'empereur prit l'exemplaire latin et l'emporta avec lui à Bruxelles. Ces deux exemplaires ont disparu. L'empereur dit qu'il l'examinerait, et que provisoirement il en interdisait l'impression; mais une copie inexacte en ayant été publiée quelques jours après, les princes durent, avant que la diète se séparât, en publier le texte authentique. Les théologiens catholiques en présentèrent le 12 juillet à l'empereur une réfutation, mais conçue en termes si violents que celui-ci la déchira en morceaux; de 280 feuillets il n'en échappa que 12. Une autre Confutation, rédigée en grec et en latin, plus modérée de forme, fut lue le 3 août, mais si faible de fonds qu'on n'osa pas en communiquer le texte aux évangé-liques; elle fut imprimée en allemand 1572, en latin 1573. Érasme, qu'on avait consulté dans l'intervalle, avait conseillé aux catholiques, et notamment au cardinal Campegio, de céder sur le célibat des prêtres, les vœux monastiques et la communion sous les deux espèces. L'empereur, se réservant toute décision ultérieure, décida que provisoirement les États évangéliques devaient rester soumis à la foi romaine. Mais cette décision resta sans effet; les princes protestèrent; Philippe de Hesse partit le 6 août, impatienté; ceux qui restèrent jusqu'à la dernière session, 29 nov., ne firent aucune concession et s'ils n'obtinrent aucun résultat matériel, ils eurent le double avantage, d'abord d'avoir affermi leur position, en se faisant mieux connaître, puis d'avoir acquis dans la Confession et dans l'Apologie deux livres symboliques, qui, avec les catéchismes de Luther, forment aujourd'hui encore la base et le point de ralliement des églises luthériennes.

Intérim d'Augsbourg. Le concile de Trente ayant été convoqué par le pape et placé sous sa direction immédiate, il ne pouvait être reconnu par les protestants; moins encore après qu'il eut été transféré à Bologne, mars 1547. L'empereur dut renoncer à l'espoir qu'il avait de voir ce concile amener une pacification des esprits, et les princes protestants ayant déclaré à la diète d'Augsbourg, sept. 1547, qu'ils s'en remettaient à lui du soin de maintenir l'ordre et de fixer un mode de vivre jusqu'à la réunion d'un concile indépendant du pape, Charles, après avoir consulté des ecclésiastiques des deox cultes, publia le 15 mai 1548, sous le nom d'Intérim d'Augsbourg, une ordonnance en 26 articles, faisant la part de chacun et par conséquent ne pouvant satisfaire ni l'un, ni l'autre. Les protestants étaient plus ou moins sacrifiés;

cependant on leur accordait le mariage des prêtres, la communion sous les deux espèces, et la jouissance des églises et biens ecclésiastiques dont ils étaient en possession. Quant aux catholiques, ils en voulaient à l'empereur de ces concessions, et surtout du droit qu'il s'était arrogé de trancher des questions religieuses. Plusieurs princes évangéliques se soumirent à l'Intérim, quoique à regret; les autres s'y refusèrent, et l'empereur essaya de la force pour les contraindre. Les troupes impériales occupèrent les provinces et les villes récalcitrantes, et un grand nombre de pasteurs durent s'enfuir, plus de 400 dans les seules provinces du nord. Le peuple se moquait de l'Intérim, où il trouvait l'anagramme de mentiri; d'autres l'appelaient interitus; à Magdebourg on prêchait que l'homme ne serait sauvé ni par intérim ni par exterim, mais par la Parole de Dieu seule. Les princes protestants ajoutaient que, si on laissait faire, on les obligerait bientôt à apprendre aussi l'espagnol. Aussi, malgré les rigueurs impériales, l'opposition fut assez forte de part et d'autre, protestants et catholiques, pour que l'Intérim n'ait pas été partout scrupuleusement respecté.

Paix d'Augsbourg, ou 2 '^ paix de religion. Fatigué de luttes où son autorité temporelle s'était montrée impuissante, et n'entrevoyant aucun moyen de réduire les princes évangéliques, Charles-Quint pressé par les Français, comme Ferdinand l'était par les Turcs, finit par comprendre que ce qu'il avait de mieux à faire, c'était de ne pas diviser son royaume, et de laisser à tous les princes leur liberté en matière de religion. Il s'y décida à la diète qui s'ouvrit le 5 févr. 1555. La position des princes était devenue moralement plus forte: ils avaient pour eux le temps et le fait accompli; ils avaient avec eux les populations; la question d'un concile était abandonnée; il ne restait plus qu'à régler certains détails relatifs aux propriétés ecclésiastiques, et elles furent réglées dans le sens de la possession. Le décret de liberté, mais pour les catholiques et pour les évangéliques seuls, prit la date du 25 sept., et malgré plusieurs réserves, il fut salué par les protestants comme un grand bienfait: il accordait ce que Luther avait demandé dès le commencement à la conférence de Leipzig, l'indépendance vis-à-vis du pape et des conciles.

AUGURIUS, v. Fructuosus.

AUGUSTI, Jean-Christian-Wilhelm, né 1772 à Eschenberg, petit-fils d'un prosélyte juif, prof, à Iéna, à Breslau et à Bonn, f 1841. Théologien fécond, auteur d'une Archéologie chrét., et d'une Hist. des dogmes. Sans être strictement orthodoxe, il a des instincts conservateurs et ne s'écarte guère du dogme et de la liturgie admis par l'égl. du pays.

AUGUSTIN 1° Aurelius Augustinus, sans contredit le pins illustre des pères de l'Église latine, supérieur à son maître Ambroise, par l'étendue de ses connaissances et la profondeur de son esprit; à saint Jérôme par son double caractère théologique et philosophique; à Gré-goire-le-Grand, parce que c'est son génie chrétien qui Ta formé. Il apparaît au moyen âge comme le père de la théologie scolastique, et il est également réclamé par l'école mystique. L'Église latine le révère comme son plus grand docteur, et les églises évangéliques le regardent comme un des leurs. Luther fut en quelque sorte son disciple immédiat, et le jansénisme est né sous son influence. Il a l'énergie de Tertul-lien, le zèle et la prudence de Cyprien, ses deux prédécesseurs sur la terre d'Afrique. Augustin naquit le 15 nov. 354, à Tagaste en Numidie, d'un père païen, Patricius, qui lui légua un caractère passionné, et d'une mère chrétienne, Monique, pour laquelle il conserva toute sa vie le plus tendre respect. L'orgueil et l'amour des plaisirs furent de bonne heure les dangers de son âme ardente; l'étude, avec la perspective de devenir un illustre rhéteur, fut un autre piège; les voluptés de Carthage et du culte d'Astarté, lui furent fatales. A 19 ans il était père, et dans le pieux sentiment des devoirs que lui imposait cette paternité irrégulière, il nomma son fils Adéodat (donné de Dieu = Diodati, Théodore, Dorothée, etc.). De ce moment aussi il devint plus sérieux; il chercha la sagesse, non seulement celle de l'intelligence, mais celle qui régit la vie et qui garde le cœur. Le manichéisme le séduisit d abord par ses fallacieuses promesses et par son caractère esthétique; mais il en vit bientôt le fond, et l'immoralité des initiés le détourna de la doctrine. Il espérait trouver dans le néo-platonisme plus de paix; il devint idéaliste, mais là aussi il ne rencontra que le vide; il se sentait sans force dans la lutte de l'esprit contre la chair. Il passa 11 ans dans cet état, faisant les expériences que saint Paul raconte Rom. 7, jusqu'à ce qu'enfin il comprit le besoin qu'il avait d'un Rédempteur. Les souvenirs de sa jeunesse et les prières de sa mère l'amenèrent à sentir ses péchés et à se donner à Jésus-Christ. Après avoir successivement enseigné la rhétorique à Tagaste et à Carthage, il se rendit par Rome à Milan où il entendit Ambroise. Un de ses compatriotes, Simplicien, lui raconta la conversion d'un ami, le platonicien Victorin; un soldat, Pontitien, lui raconta la vie d'Antoine-le-solitaire; des voix d'enfants qui criaient ou chantaient: Prends et lis! tout concourut à tourner ses pensées vers l'étude des Écritures; il devint catéchumène, et à l'âge de 33 ans, à Pâques 387, il fut baptisé par Ambroise, ainsi qu'Alypius son ami d'enfance et son jeune fils

Adéodat. Il passa ensuite 10 mois à Rome, où il perdit sa mère, puis retourna en Afrique après avoir vendu ses biens au profit des pauvres. Il y vécut dans les environs de Tagaste avec quelques jeunes amis, s'adonnant à la prière, au jeûne et à la méditation. Consacré prêtre en 391 malgré sa résistance, il fut bientôt appelé, à la suite d'une prédication de son évêque Valère, à partager avec lui les fonctions épiscopales, et en 395 il lui succéda définitivement à Hippone. Il continua sa vie ascétique, vivant avec les jeunes chrétiens qu'il préparait au saint ministère, écrivant, prêchant, improvisant d'ordinaire pour répondre aux besoins du moment, et il fut l'instrument d'un grand nombre de conversions, de celle entre autres d'un marchand manichéen. En 396 il avait désigné Héraclius pour son successeur, mais il vécut encore 33 ans, et f à Hippone le 28 août 430, âgé de 76 ans, pendant que la ville était assiégée par les Vandales. Il a énormément écrit; il avait déjà commencé à Milan, et il continua jusqu'à la fin. Outre ses ouvrages polémiques contre les donatistes, les manichéens et les pélagiens, on a de lui des Lettres, des Sermons, de nombreux Commentaires, des Traités sur la grâce et le libre arbitre, qui l'ont fait surnommer le Docteur de la grâce; la Cité de Dieu, qui est son chef-d'œuvre, et ses Confessions, son livre le plus populaire, dans lequel il raconte ses luttes, ses péchés, ses doutes et l'histoire de sa conversion. Les bénédictins ont publié ses Œuvres complètes en 10 vol. fl>. Paris, 1679; les frères Gaume les ont réimprimées en 11 vol. grand 8°, Paris 1835-40. Plusieurs ouvrages ont été publiés à part, entre autres les Confessions, par Arnaud d'Andilly. Sa Vie a été écrite par son jeune ami Possidius, plus tard par Tillemont. Rome et Pavie se disputent l'honneur de posséder ses restes. La corruption de l'homme et l'influence sanctifiante de Dieu sont les idées dominantes de la dogmatique d'Augustin. Cependant il faut distinguer en lui deux périodes. Dans la première il avait devant lui les manichéens, et il crut devoir accorder quelque chose à l'activité de l'homme; il établit qu'il dépend de la volonté de l'homme de se rendre propre par la foi à recevoir la grâce divine, ou de se soustraire à cette grâce par la résistance et l'incrédulité; la prédestination ne serait autre chose que la prescience de Dieu. Dans la seconde, 396-430, il se fit un changement intime dans sa théologie; il reconnut que la foi est purement l'œuvre de Dieu et de cette opération irrésistible quœ ita $uadet ut persuadait, qui conseille de telle sorte qu'elle persuade. C'est dans ce sens qu'il s'exprima aux deux conciles d'Afrique, Carthage 412 et Milève où le pélagiamsme fut condamné.

Augustin, apôtre de l'Angleterre, fut envoyé de Rome par Grégoire, avec Laurent, Pierre et une quarantaine d'autres missionnaires, pour évangéliser ce pays encore barbare et dont ils ne comprenaient pas même la langue. Ils arrivèrent en Angleterre en 597, et après avoir surmonté les premiers découragements, ils annoncèrent rÉvangile au roi saxon, Ethelbert, qni leur répondit: Vos paroles sont belles, mais entièrement nouvelles, et avant de croire, nous devons d'abord examiner. Il leur permit de s'installer à Doroborn (Cantorbéry), lieu de sa résidence, il mit à leur disposition une ancienne chapelle qui s'y trouvait, et bientôt beaucoup d'âmes se convertirent. Le roi lui-même se fit baptiser, et son exemple, sans qu'il exerçât (Tailleurs aucune pression sur son peuple, trouva de nombreux imitateurs; Grégoire parle de dix mille qui auraient été baptisés le jour de NoSl. De retour en France, Aug. reçut de l'archevêq. d'Arles la consécration épiscopale, et envoya deux de ses collègues à Grégoire pour lui donner des détails sur l'œuvre. Grégoire, répondit par Penvoi de nouveaux collaborateurs, de moines et de livres, Bibles ou fragments du N. T. Augustin fut nommé primat de l'Angleterre, consacra plusieurs évêques et fixa son 9iège à Cantorbéry. Grégoire avait donné à ses missionnaires l'excellent conseil de ne pas trop s'astreindre au culte et aux rites romains, mais il avait maintenu la hiérarchie et Aug. alla plus loin encore dans cette voie. Il désirait réunir les nouveaux chrétiens avec les anciens bretons; une première conférence eut lieu, mais n'aboutit pas. Un concile fut ensuite convoqué sur la frontière du Wessex, mais il fut sans succès encore, parce que lorsque les évêques de l'ancienne église bretonne se présentèrent, Aug. les reçut assis, au lieu de se lever pour leur faire honneur; ils se retirèrent blessés; Aug. les poursuivit de paroles violentes et leur déclara la guerre, t laissant sa succession à Laurent.

AUGUSTINS (les). Ordre de religieux mendiants, qui prétendent remonter à Augustin lui-même et à la société de jeunes ascètes qu'il avait réunis à Tagaste et qu'il continua de protéger quand il fut devenu èvêque. Cette origine est très improbable. C'est au 12me siècle qu'ils apparaissent pour la lr« fois; Innocent IV, le 17 janv. 1244 leur donne la règle dite de saint Augustin; Alexandre IV, en 1256, réunit en un seul corps les religieux qui suivaient à peu près la même règle et leur donna Lanfranc pour général et le cardinal Richard pour protecteur. Le costume était noir. L'ordre finit par compter jusqu'à 42 provinces, 2000 couvents et 30,000 membres. Entre autres privilèges que leur concédèrent les papes, il faut compter celui de fournir le sacristain de la chapelle papale. Les au-gustins ont produit quelques saints qui ont été canonisés; c'est aussi de leur sein qu'est sorti Martin Luther. En 1574, Thomas de Jésus rétablit en Portugal la rigueur de l'ordre, et donna naissance aux augustins déchaussés qui se répandirent en Espagne, en France, en Italie, et même au Japon. Les principaux couvents des augustins étaient celui de Rome, fondé 1483 par l'archev. de Rouen, et celui des Grands-Augustins (ou Vieux-Aug.) fondé à Paris 1259.

Les Augustines sont des religieuses qui disent remonter à Perpétua, la sœur de saint Augustin, et suivre la règle donnée par ce père. Elles se consacrent au soin des malades et au service des hôpitaux. Leur plus ancien couvent fut fondé à Venise 1177 lors du séjour d'Alexandre III; la princesse Julie, fille de Frédéric I*', en fut la première abbesse. Elles se subdivisent en plusieurs sous-ordres: augustines déchaussées, sœurs de la Recollection, de Saint-Thomas de Villeneuve, etc.

AUMONIER, Aumônerie. Charge que l'on trouve, dès le 13^6 siècle, à la cour des rois de France; il y avait tantôt un, tantôt plusieurs aumôniers, chargés de distribuer les libéralités du monarque. Au 15*n« siècle, le grand aumônier était Jean de Bely, èvêque d'Angers. Tout le clergé de la cour lui était soumis; il avait en outre à donner son préavis sur la repourvue des évêchés et des bénéfices vacants, ce qui lui assurait une grande influence. Ces fonctions furent supprimées à la Révolution.

AURELIEN, Lucius Domitius, emp. romain 270, f 275 assassiné. Toujours en guerre, il prit Palmyre et enchaîna Zénobie à son char de triomphe. D'abord favorable aux chrétiens, il finit par rendre contre eux de sévères édits.

AURELIUS de Carthage, d'abord diacre dans cette ville, en fut nommé archevêque en 388. Il était ami d'Augustin, et sur ses conseils, réunit en 412 un concile à Carthage contre les do-natistes. Ce fut aussi dans ce concile que, pour la première fois, le pélagianisme fut condamné dans la personne de Célestius, disciple de Pé-lage. En 416 Aurélius réunit un nouveau concile où Pélage lui-même fut condamné, f 423, entouré du respect et de la considération des siens.

AURÉOLE, v. Nimbe.

AURIFABER, l'édite^ des Propos de table de Luther, s'appelait Goldschmidt, Jean, né 1519, il étudia à Wittenberg, se montra toujours ardent luthérien, et f 1575 pasteur à Erfurt.

AUSTRALIE, v. Polynésie.

AUTBERT, moine qui accompagna Anschar dans sa mission en Danemark, vers 826, mais qui dut bientôt se retirer pour cause de santé, 829. Il mourut peu après au couvent de la Nouvelle-Corbie.

AUTEL, sorte de table originairement destinée aux sacrifices, et qui se retrouve parmi les objets du culte dans tous les temps depuis Abel, et dans tous les pays. On l'élevait souvent en plein air, et il consacrait ainsi la colline ou le bois où il était dressé; de là les hauts*lieux et les bosquets païens de TA. T. Il était fait quelquefois de terre gazonnée; chez les Hébreux, de pierres brutes; plus tard et notamment dans l'Église primitive (2me et 3m* siècles) de bois, plus ou moins ornementé. L'Église latine, à dater de Constantin, fit ses autels en marbre; l'Église grecque continua de les avoir en bois. La forme en était d'ordinaire carrée, forme symbolique chez tous les peuples; cependant quelquefois ronde, chez les Grecs et les Romains. Les autels sont le plus souvent fixes, trop considérables pour être transportés; quelquefois mobiles et portatifs, suivant les besoins. En occident il pouvait y avoir dans une même église 3 ou 4 autels; chez les grecs, un seul; et si pour une fête ou pour une cérémonie, il en fallait plus d'un, on se servait iïantimenses (remplaçant la table), espèce de drap consacré, qu'on étendait sur une table et qui avait le don de la transformer momentanément en autel. L'ornement de ces objets du culte se trouvait soit dans leur architecture, soit dans la matière dont ils étaient faits, soit dans les statuettes, crucifix, lustres, calices, tapis, dont ils étaient couverts; enfin dans les tableaux dont ils étaient entourés. Chez les chrétiens, le vendredi-saint tous ces ornements disparaissent ou sont recouverts d'un drap noir. Les anglicans et surtout les luthériens ont seuls, parmi les protestants, conservé le symbole de l'autel, qui n'est autre chose d'ailleurs que ce qu'on appelle en général la Table de communion. Les catholiques y voient un autel véritable sur lequel les prêtres offrent le sacrifice de la messe. Des reliques sont souvent enfermées dans leurs châsses, au-dessous ou dans l'intérieur de l'autel. On appelle maitre-autel celui qui est placé dans le chœur, et l'on a donné le nom d'autels privilégiés à ceux où il est permis de célébrer la messe des morts les jours où l'on ne peut la dire aux autres autels.

AUTO-DA-FÉ, mot espagnol qui signifie Acte de foi. C'est ainsi que le clergé espagnol d'abord, puis le peuple, appelaient l'exécution solennelle des sentences prononcées par l'inquisition contre les hérétiques condamnés au supplice du feu. Ces affreux spectacles, habituellement précédés d'un sermon, avaient lieu en général le dimanche au lever du soleil; ils étaient encore plus courus que les combats de taureaux; la cour et le peuple les recherchaient avidement. Après le service à l'église, les malheureux qui n'avaient pas abjuré étaient livrés au bras séculier, revêtus de robes et de bonnets jaunes couleur soufre, ornés de diables noirs et de flammes , dits sanbénito, et conduits au lieu de l'exécution sur des ânes ou accompagnés d'al-guazils. Les hurlements des victimes étaient couverts par les applaudissements de la foule. Ce gente de fêtes a cessé à la fin du siècle dernier, mais l'Espagne actuelle en porte encore le châtiment et le portera probablement toujours. Les autodafés du Portugal, de l'Italie et de la France différaient de ceux de l'Espagne par certains détails; en tout cas ils furent moins nombreux et ne se sont pas fait la même réputation.

AUTRICHE. Ce petit archiduché qui a fini par devenir un grand empire, au point qu'il a pu prendre pour devise les cinq voyelles et les traduire en latin par Austriœ Est Imperare Orbi Universo ( A l'Autriche il appartient de commander au monde entier), a eu l'heureuse fortune de s'agrandir par des alliances et non par des conquêtes. De là cet alexandrin:

Bell* garant aUi, ta, îclix Aastria, nube !

(Que d'autres guerroient; toi, l'heureuse Autriche, épouse!). On verra aux articles spéciaux ce qui concerne les divers pays de cette puissante monarchie. Nous nous bornons ici à quelques indications de statistique religieuse. La population totale de l'empire étant de 36 millions d'habitants, elle se décompose en 24 millions de cathol. latins, 4 millions de cath. grecs-unis, 3,400,000 protestants, dont à peu près les deux tiers sont réformés; 3 millions de grecs-orientaux, 1,276,000 israélites. On compte dans l'empire 11 archevêchés et 41 évêchés. Un concordat du 18 août 1855 règle les rapports de l'Église avec l'État, mais tous les cultes jouissent d'une certaine liberté, surtout depuis 1867.

AUXENCE, deux noms compromis dans les controverses ariennes. 1° Cappadocien, nommé évêque de Milan en remplacement de l'orthodoxe Denis exilé par Constance 355. Les orthodoxes ayant repris le dessus sous Damase 369, condamnèrent i'arianisme dans un concile, mais n'osèrent pas prononcer l'anathème contre le protégé de Valentinien Ier. Il garda son siège jusqu'à sa f 374, et fut remplacé par Ambroise.

2° Scythe d'origine, nommé Mercurin, appelé à l'évêché de Milan par Justine, veuve de Valentinien 1er et tutrice de Valentinien II. Elle exigea d'Ambroise, à Pâques 385, qu'il cédât une de ses églises à Mercurin et envoya des soldats pour l'y contraindre, mais sans succès. En 386, édit impérial proclamant I'arianisme religion de l'État, et peine de mort contre ceux qui résisteraient. Ambroise résista et le peuple avec lui. Là-dessus Mercurin, qui avait pris le nom épiscopal d'Auxence, invita Ambroise à une discussion qui aurait lieu au château avec l'empereur pour juge. La ruse était trop grossière; Ambroise évita de se constituer prisonnier et répondit qu'en matière de foi c'était aux conciles et non aux empereurs de décider. Dès lors il ne fut plus question de ce faux évêque et Justine dut abandonner son projet.

AVE MARIA. « Je te salue, Marie, » Luc 1, 28. Cette salutation de l'ange à Marie est devenue, à une époque relativement moderne, la prière la plus populaire de l'Église catholique. (Test dans la moitié du il1* siècle que Pierre Damiani cite pour la ire fois le fait isolé d'un prêtre qui récitait tous les jours la salutation tout entière. Bientôt on se contenta des deux premiers mots. Odon, évêque de Paris, la recommanda vers 1196 avec le Pater et le Credo comme exercice journalier. Au 13me siècle elle devint une règle générale, et les Vaudois refusèrent de s'y soumettre en faisant observer que ce n'était pas une prière. A la formule primitive on ajouta peu à peu les mots de Luc 1,42, puis d'autres pour donner un sens à la salutation. L'ave forme la base de la dévotion du rosaire. Depuis la fin du 15®e siècle, les prédicateurs prirent l'habitude de prononcer un Ave après l exorde; sous Louis XIV c'était même devenu la règle et l'on en voulut à Fénelon d'avoir tenté de s'en dispenser. La répétition d'un certain nombre d'ave est devenue une pénitence.

ÀVENT, latin adventus, approche, arrivée. On appelle ainsi les 4 semaines qui précèdent Noël. La plus ancienne mention de cet usage ecclésiastique se trouve dans 2 sermons de César d'Arelate, f 542, et dans un décret du concile de Lerida 524 qui interdit les mariages pendant le carême et l'aven t. Le synode de Tours 367 imposa le jeûne aux moines pendant ces fêtes de préparation, et le synode de Mâcon 581 l'ordonna aux laïques, au moins 3 fois par semaine (lundi, mercr., vend.). On supprima même le Gloria dans la messe, et l'on se demanda si l'on ne ferait pas bien de supprimer aussi les orgues. Il fallut un arrêté spécial du saint-siège, 15 avril 1753, pour rassurer à cet égard les consciences timorées. Les images sont voilées, les autels et les murailles sont recouverts de tentures violettes, couleur du deuil ecclésiastique. Le rose n'est admis que le dernier dimanche de l'A vent. Pendant longtemps en France l'A vent a duré 40 jours; il commençait le 11 nov. avec la Saint-Martin. Chez les grecs et dans le rite ambrosien il commence le 14. Aujourd'hui c'est, dans l'Égl. catholiq., le dimanche après la Saint-André (dO nov.) qu'il est censé commencer; chez les luthériens, de même; les anglicans jeûnent à partir du 13 déc.

AVICENNE (Abou-Ibn-Sina), célèbre philos, et médecin arabe; né vers 980 à Chiraz, Perse, étudia à Bokhara, se fit une immense réputation en Asie, fut vizir et médecin de plusieurs princes, étudia Aristote l'un des premiers, composa plusieurs ouvrages de logique, métaphysique, médecine, et f 1037 à Hamadan, épuisé à la fois de travail et de débauches. On l'appelle l'Hip-pocrate et l'Aristote des Arabes. OEuvr. publ., Venise 1483/95. Rome 1593. Paris 1658.

AVIGNON, chef-1. du dép. de Vaucluse, célèbre par la beauté de ses sites et la douceur de son climat. Fondée par les Phocéens 539 av. C., c'était une espèce de république sous les comtes de Toulouse et de Provence; elle perdit son indépendance lors des guerres des albigeois et finit par devenir la propriété de Philippe-le-Bel, puis de Charles d'Anjou. A la suite du conflit de Boniface VIII et de Philippe-le-Bel, Clément V, pour complaire au roi de France, transporta momentanément son siège de Rome à Avignon 1305, sans prévoir que cet exil de la papauté durera 72 ans, jusqu'à 1377, et sera traité de captivité babylonienne par les écrivains subséquents. Sept papes s'y succédèrent. Clément V, Jean XXH, Benoît XII, Clément VI (qui acheta le comtat d'Avignon à la comtesse de Provence Jeanne de Sicile 1348), Innocent VI, Urbain V qui essaya un moment de retourner à Rome, et Grégoire XI qui, sous l'influence de Catherine de Sienne et pour ne pas perdre ses possessions, ramena la papauté au lieu de son origine. Mais un schisme nouveau ne tarde pas à éclater, et les antipapes trouvent dans Avignon un centre naturel qui a déjà ses palais et ses traditions; Benoît XIII s'y fit assiéger. — La vie des papes d'Avignon fut facile et voluptueuse et contribua à discréditer le système aux yeux de la chrétienté. Pétrarque appelle Avignon la 3me Babylone et le 5«ne labyrinthe. Il y eut plusieurs conciles dans cette ville; les plus connus sont ceux de 1326 et 1337. Après leur départ, les papes administrèrent Avignon par des légats; Louis XIV s'en empara 1662 pour se venger de l'offense faite par Alexandre VII à son ambassadeur, le duc de Créqui, mais il la rendit à la paix de Pise 1663. Elle fut définitivement réunie à la France en 1791.

AVIS (ordre d'). Ordre militaire religieux fondé 1146 à Coïmbre par des particuliers, organisé 1162 par Alphonse 1er. Après la prise d'Evora 1165, le roi chargea les chevaliers de cet ordre de la défense de la ville et Alphonse II leur céda en outre 1181 la ville d'Avis; de là les différents noms de Nouvelle Milice, Ordre d'Evora, ordre d'Avis. Innocent III 1204 confirma ses statuts religieux, qu'avait élaborés Jean Civita, abbé de Citeaux. C'est contre les Maures que l'ordre s'était formé; il contribua puissamment à leur expulsion et fut réuni 1213 à celui de Calatrava. Depuis 1789 il est devenu exclusivement militaire, et les vœux religieux qui étaient tombés en désuétude depuis longtemps, surtout celui de chasteté, furent abolis.

AVIT ou Avitus 1® Flavius Avitus, né dans les Gaules, proclamé empereur romain après la mort de Maxime 455, ne régna que 4 mois. Battu à Plaisance il n'échappa à la mort qu'en recevant les ordres, fut fait évéq. de Plaisance, et f 456 dans un voyage qu'il fit pour se rendre en Auvergne. Beau-père de Sidoine Apollinaire.

2° Sextus Alcimus Ecditius, savant et pieux arche v. de Vienne, Dauphiné, neveu du précédent, sacré 490, f le 5 févr. 525; d'une famille gallo-romaine considérable; également distingué par son activité pratique et par ses travaux littéraires. Dans une conférence qui eut lieu 499 avec les théologiens ariens, il défendit la doctrine orthodoxe et gagna la confiance de Gondebaud, qui se serait probablement prononcé pour la foi évangélique, si Clovis ne l'avait pas déshonorée par ses œuvres. Le fils et successeur de Gondebaud, Sigismond, 515, avait répudié l'arianisme, et convoqua un concile à Épaone 517, qui se tint sous la présidence d'Avitus, et où furent prises plusieurs mesures contre les dérèglements du clergé. Avitus est connu par 80 Lettres à différents rois francs et burgondes, à des évêques des Gaules, de Milan, de Constantinople, de Jérusalem, etc. 11 résista aux prétentions des évéq. de Rome. Le jésuite Sirmond a publié plusieurs fragments de ses Homélies. Enfin, comme poète, Avitus a laissé, en vers hexamètres, un poème en 5 chants: la Création, la Chute, le Déluge, la mer Rouge, et une Ép. sur la chasteté; ses vers sont très supérieurs à sa prose. — OEuvr. publ. par Sirmond, Paris 1643.

3° Abbé de Micy, près Orléans, sous Clovis; fils d'un laboureur et d'une femme qui était venue d'Austrasie en mendiant. Il prédit à Clodo-mirsa fin prochaine, s'il faisait périr Sigismond de Bourgogne.

AVOCAT, préfet laïque chargé de défendre les intérêts temporels de l'Église. Le droit général était que l'intéressé lui-même défendît sa cause par tous les moyens, et au besoin par les armes. Mais s'il s'agissait d'une personne incapable de se défendre, femme, enfant, vieillard, malade, elle pouvait recourir à un défenseur, qui était d'ordinaire son plus proche parent. L'Église avait droit à un privilège du même genre et choisissait volontiers un seigneur voisin du lieu où se débattaient ses intérêts, et ces seigneurs parlaient au nom de leur roi; mais il résultait aussi de cette protection accordée une espèce de patronage, et par conséquent une dépendance qui n'était pas toujours du goût des protégés; à la longue il fallut régler les droits et les honoraires des protecteurs, et l'on voit, au 12me siècle, un arrêt portant que l'avocat, outre le serment de fidélité du roi, devra prêter à l'abbé d'un couvent le triple serment de se contenter du tiers des revenus, de ne se foire remplacer par personne sans autorisation, de ne point faire de concessions, et de se tenir toujours au service de l'abbé avec 12 hommes et 12 chevaux. Les avocats des couvents et des églises devinrent peu à peu les patrons, et le droit de patronage s'introduisit ainsi dans l'Église comme la récompense de services rendus ou à rendre. — On appelle avocats de Dieu et du diable les orateurs chargés de faire valoir, dans les questions de canonisation, les arguments pour et contre.

AZYMITES. Du grec zumè fermenté et azumé, non fermenté, non levé, qui s'appliquait surtout au pain, le patriarche grec Michel Cerularius avait fait au ll^e siècle le nom d'azymites, pour désigner les chrétiens occidentaux qui communiaient avec du pain sans levain, de même que les arméniens et les maronites. Cette question, bien secondaire, contribua pour beaucoup au schisme des Églises grecque et laline.

B

BAADER, François, né 27 mars 1765 à Munich, étudia la médecine et la minéralogie, visita l'Angleterre 1792 à 1796, et fut à son retour nommé conseiller des mines en Bavière, puis président du conseil jusqu'en 1820; en 1826 prof, de philos, et de théol. spéculative à Munich. Il avait été appelé en 1822 à Péters-bourg, mais cette affaire n'eut pas de suites, f 23 mars 1841. Un des premiers philos, de l'Allemagne, B. était spiritualiste, catholique et mystique. Il avait étudié Rousseau, dont le déisme lui avait paru insuffisant; puis Kant, qu'il trouvait trop subjectif. Il leur préféra saint Martin, Bœhme, Paracelse, Thomas d'Aquin, Jacobi, Schelling, mais il ne s'attacha exclusivement à aucun. Il n'admettait pas qu'il y eût contradiction entre la nature et la foi; il voit dans l'homme l'intermédiaire entre le créateur et la création, mais l'homme ayant péché, c'est Jésus-Christ qui l'a remplacé comme intermédiaire. Il n'aimait ni Luther, ni le protestantisme; mais il ne regardait pas la papauté comme essentielle dans le catholicisme; il combattit les prétentions romaines et les indulgences, demandait la communion sous les deux espèces, et sympathisait avec l'Église grecque. En politique il était conservateur, mais éclairé; il demanda aux monarques alliés la reconstitution de la Pologne libre, et voyait une union possible et désirable entre la politique et la religion. OEuvr. compl. publ. par Hoffmann, 16 vol. Leipsig 1851-1860.

BAANES, v. Pauliciens.

BÀBYLAS, év. d'Antioche vers 237, f 231 en prison, par suite des mauvais traitements qu'il aurait snbis sons Décius. Chrysostôme raconte qu'il refusa l'entrée de l'église à un empereur, il ne dit pas lequel, à cause de ses crimes, et que le monarque, ému de cette courageuse fidélité, se convertit. Aucun autre historien ne mentionne ce fait.

BACCANARI, ou plutôt Paccanari, Tyrolien des environs de Trente, fils de parents pauvres, qui, après avoir essayé de plusieurs métiers, soldat, commerçant, montreur de curiosités, entreprit de relever sous une autre forme et Mus un autre nom l'ordre des jésuites supprimé en 1773. Il s'aboucha avec Pie VI à Florence, obtint pour lui et ses 12 compagnons les privilèges dont il avait besoin, se rendit 1799 à Rome pour protéger les élèves de la Propagande, dont la république française venait de fermer le collège et fut emprisonné au château Saint-Ange. Remis en liberté il se rendit à Vienne pour tâcher de fusionner sa société avec celle du Cœur de Jésus, mais l'œuvre périclita; la discorde s'y mit, les couvents refusèrent l'obéissance à Baccanari, et en 1814 les membres survivants, quittant le nom de baccanaris-tes, ou de pères de la foi, se firent recetoir tout simplement dans l'ordre des jésuites qui venait d'être rétabli.

BACH, Jean-Sébastien, né 21 mars 1685 à Eisenach, d'une famille qui avait dû quitter la Hongrie pour cause de religion, et qui, dans l'espace de 2 siècles, a fourni plus de 200 musiciens distingués, peut être considéré comme un des pères de la musique sacrée moderne. Orphelin de bonne heure il fut élevé par un oncle qui l'initia aux principes de l'orgue et du clavecin. Il fut successivement organiste, chantre et maître de chapelle à Arnstadt, Mulhouse, Weimar, Anhalt-Côthen et Leipsig. f 30 juill. 1730, aveugle et après une douloureuse maladie. Marié 2 fois il eut 20 enfants, dont 11 fils, tous excellents musiciens. Il a énormément écrit, et dans presque tous les genres; il a rajeuni le style fugué, et l'a même appliqué au choral; il a beaucoup de mélodie, mais elle se penl presque dans l'ensemble harmonique. Ses principales œuvres sont une composition pour lafête commémorative de la Confession d'Augsbourg 1730, ses deux Passions, l'une sur saint Jean, l'autre sur saint Mathieu, ses Hymnes et Cantates, et ses Messes dont l'une en si mineur est peut-être son chef-d'œuvre. Célèbre de son vivant, au point que les souverains se disputaient ses visites, il fut un moment presque oublié après sa mort, et c'est en partie à Mozart, et à une visite que celui-ci fit à Leipsig en 1789, que sont dues la découverte de ses grandes compositions d'église et la renommée dont il jouit aujourd'hui comme chef d'école.

BACON lo Roger Bacon, né 1214 à Ilchester, Sommerset, f 1294, l'une des plus grandes lumières du moyen âge. Après avoir étudié à Oxford et à Paris, il fut frappé du vice fondamental de l'étude des sciences et entreprit de réagir en leur donnant pour base l'observation et l'expérience. Il se livra au travail avec ardeur, acquit bientôt une instruction supérieure dans tous les domaines, mathématiques, physique, optique, géographie, grammaire, astronomie, chronologie, histoire, logique, médecine, métaphysique, théologie. Il ne reculait devant aucun idéal à poursuivre, et dans les questions religieuses il peut être considéré déjà comme un des précurseurs de la Réforme par la place qu'il donnait à la Bible et par sa méthode d'interprétation. Son génie, aidé de son travail et de ses études, lui fit faire d'étonnantes décou -vertes; dès 1267 il avait demandé la réforme dn calendrier. On lui attribue aussi la découverte de la poudre, des verres à grossir, du télescope, de la pompe à air, d'une substance combustible analogue au phosphore. Il avait compris la puissance de la vapeur et entrevu des vaisseaux et des voitures marchant avec la plus grande rapidité sans hommes ni bêtes pour les traîner. Il n'aimait pas Aristote, dont il ne connaissait d'ailleurs que des éditions fort mauvaises: « Si je le pouvais, disait-il, je ferais brûler tous ces livres. » Par ses critiques sur le texte altéré de la Vulgate, il provoqua la revision qui en fut faite par Hugo de Saint-Chair. Il paya cependant son tribut aux erreurs de son temps; il croyait à l'alchimie et à l'astrologie, à l'influence des astres et de leurs conjonctions. L'histoire de ce grand génie fut ce qu'elle devait être dans un siècle de ténèbres. Moine, il appartenait à l'ordre des franciscains, et sa science prodigieuse le fit surnommer le Docteur admirable. Mais il s'était fait des envieux par sa gloire, et des ennemis par ses protestations contre le relâchement des mœurs du clergé, On l'accusa, injustement, de sorcellerie; il fut condamné et passa de nombreuses années en prison. Clément IV qui l'avait en grande estime lui rendit la liberté, mais après la mort de ce pape il fut de nouveau arrêté, et enfermé à Paris dans la prison du couvent des franciscains, où il passa de nouveau 10 années, sans que Nicolas IV daignât entendre ses requêtes. Il fallut l'intervention de quelques nobles pour le délivrer; il se hâta de quitter la France et termina ses dernières années à Oxford. Son prin -cipal ouvrage est VOpus Majus qu'il composa et adressa à Clément IV pour lui exposer toute sa doctrine et se justifier ainsi des imputations calomnieuses dont on avait essayé de le noircir.

II le refondit sous le titre d'Opus Minus, puis une troisième fois sous celui d'Opus Tertium. Ses autres ouvrages, sur le Secret de la nature, la Vieillesse, le Miroir d'alchimie, l'Éloge de l'Écriture sainte, ont moins de valeur.

2° François Bacon, grand chancelier d'Angleterre, baron de Vérulam et vicomte de Saint-Alban, n'appartient qu'indirectement à l'hist. ecclésiastique. Né 1561, f 1626, il se fit remarquer de bonne heure par la précocité de son génie, entra dans la diplomatie où il fournit une courte mais brillante carrière, s'attacha malheureusement au sort de Jacques I et de Buckingham, dont il favorisa les folles prodigalités, fut condamné par le parlement et vécut dès lors dans la retraite, se consacrant tout entier à ses études philosophiques et littéraires. Il était frappé comme son homonyme, de la méthode déplorable employée pour l'étude des sciences physiques et naturelles, et il travailla k substituer l'observation aux inductions syl-logistiques, les choses aux mots et les réalités aux divagations. Il fut ainsi le réformateur de la philosophie expérimentale. Ses principales idées sont exposées dans son Novum Organum 1620, De dignitate et augmentis scientiarum 1605, Sylva sylvarum 1627, etc. dont l'ensemble devait former un vaste ouvrage, resté inachevé, nommé Instauratio magna. Il existe en français plusieurs éditions et traductions de ses œuvres, par Lassalle, Bouillet, Lorquet, J. de Maistre, etc.

BADE, ou Baden, grand duché de l'empire d'Allemagne, dont les limites actuelles sont nettement déterminées, mais qui anciennement, par suite d'alliances, de mariages, de morcellement et d'annexions, variait en étendue, se limitant au simple margraviat de Bade, ou s'étendant de Constance à Strasbourg, de la vallée du Neckar au Palatinat. D'une manière générale, c'est le pays des anciens Allemani, évangélisé vers les 7™e et 8me siècles par Frido-lin, Trudprat et Pirmin. Les Zâhringen y élevèrent au 13me siècle la cathédrale de Fribourg. Les universités de Heidelberg 1386 et de Fribourg 1456 exercèrent une grande influence sur la culture intellectuelle du pays. Tauler et Suso le réveillèrent par leurs puissantes prédications et le préparèrent à la Réforme. Jérôme de Prague enseignait 1406 à Heidelberg avec une franchise qui préludait à son rôle de réformateur-martyr, et bientôt l'on voit apparaître les noms de Reuchlin, d'Agricola, Capiton, Mélanchthon, Bucer, etc. Luther se fit entendre en avril 1518, et dès 1520 la Réforme pouvait être regardée comme accomplie. Les évêques de Spire, Wttrz-bourg et Mayence firent naturellement ce qu'ils purent pour l'entraver; 2000 volumes évangéli-ques furent brûlés à Fribourg par la main du bourreau, mais à Constance la population résista, même aux ordres de l'empereur; elle abolit le célibat des prêtres et renvoya son évêque en 1525, pendant qu'à Fribourg on noyait froidement le pa&teur Spengler parce qu'il prêchait l'Évangile. Plusieurs villes de Bade se joignirent en 1529 à la protestation de la diète de Spire, et renouvelèrent leurs démarches à Augs-bourg 1530. La moitié du pays avait embrassé la Réforme; les persécutions de 1548-55 rédui-sèrent ce nombre de près d'un tiers; puis vinrent les disputes confessionnelles entre les luthériens et la réforme helvétique. Enfin le rationalisme officiellement enseigné par le vieux Paulus acheva l'œuvre, et le protestantisme n'eut plus que le bruit de vivre. Une conférence eut lieu en 1821 sons les auspices du grand-duc Louis, qui réunit les deux confessions en une seule par un Acte d'union en plusieurs articles. Quelques professeurs, Umbreit, Ullmann, Ro-the; quelques pasteurs, Mann, Frômmel, Bey-schlag, Plitt, maintinrent dans l'Église le flambeau de la foi évangélique, tandis que d'autres, du dehors, essayèrent d'en ranimer l'éclat en s'organisant en sociétés évangéliques ou de mission intérieure.

BADEN (Colloque de). Assemblée ecclésiastique, convoquée à Baden (Argovie), par les cantons catholiques pour mettre fin par une discussion publique aux hésitations que les premières tentatives de réforme entretenaient dans les esprits. Zurich n'y parut point, il était tout décidé; les 12 autres cantons y étaient représentés. Les délibérations s'ouvrirent le 21 mai 1526 en présence des 4 évêques suisses et d'une nombreuse et brillante assemblée. Fa-ber, le docteur Eck, et Murner de Lucerne, furent les principaux orateurs du parti catholique; Œcolampade, du côté réformé, porta presque seul tout le poids de la discussion. Haller de Berne y fut envoyé, non pour discuter, mais pour rendre compte de ce qui s'y serait passé. Le nombre des combattants et certains détails de mise en scène assurèrent la victoire des catholiques; les adhésions lui arrivaient de toutes parts et dans les moments les plus critiques. Les Articles de Bade parurent donc être la condamnation de la Réforme; cependant ils ne réussirent pas à prévaloir contre l'opinion, et bientôt Berne déclara ne pas les reconnaître. En outre le caractère équivoque de la publication qui en fut faite, la préface et les commentaires dont ils furent accompagnés, ne tardèrent pas à leur enlever tout crédit, et plusieurs, à Berne comme à Bâle, déclarèrent ne pouvoir tenir aucun compte des Actes imprimés, aussi longtemps qu'ils n'auraient pas pu les confronter avec l'original.

BADER, Augustin, anabaptiste fanatique du 16®« siècle, originaire d'Augsbourg, qui se croyait le roi du règne de mille ans, 1529. Il se fit faire une couronne, un scepire et une épée, et s'établit dans les environs d'Ulm. Il fut exécuté 1530, quand on aurait dû simplement renfermer comme fou. Dans quelques notices il est appelé Weber.

BADUEL, Claude, né à Nîmes, humaniste distingué, protégé par Marguerite de Valois, visita Paris, Louvain, Wittenberg et Strasbourg, fut nommé recteur du collège des Arts à Rimes, 1540, mais soupçonné de luthéranisme, il dut s'enfuir et vint à Genève 1551, où il travailla avec R. Estienne, fut reçu bourgeois, pasteur à Russin et Vandœuvres, et enfin prof, de philos, et mathématiq. f 1561. Auteur d'une vingtaine d'écrits et dissert, latins. — Son fils Paul fut pasteur à Bergerac.

BAGNOUENS, v. Cathares.

BAHRDT, Ch.-Fréd., né 1741, théologien érudit, mais superficiel et sans convictions, étudia à Leipzig sous Crusius, dont l'orthodoxie dépassait la Bible et tous les symboles; il fit l'orthodoxe avec lui et fut nommé catéchète, puis suppléant de son père qui était prof, de dogmatique. II ne manquait pas d'une certaine faconde, et pendant quelque temps il eut des auditeurs; mais il eut aussi des aventures, et menacé d'une recherche en paternité, il donna sa démission 1768, et se lança en plein dans le rationalisme le plus grossier. Il occupa successivement plusieurs places à Erfurt, Giessen, Marschlins (Grisons, Suisse), Durckheim, etc. Mais renvoyé de partout à cause de son caractère, de ses extravagances, de ses doctrines ou de ses mœurs, il finit par se fixer à Halle 1779, où Se m 1er lui fit obtenir une pension de 200 ècus, à condition qu'il se tînt tranquille. Mais tout alla de mal en pis. Non content de faire de la littérature et des conférences, sur Tacite, Ju-vénal, la métaphysique et la morale, il ouvrit une taverne dans la banlieue de Halle, et après avoir enseigné la morale le matin, il allait le soir tenir le cabaret avec sa servante (sa femme, dont il était séparé, vivait toujours). Cela dura dix ans; il finit par être compromis dans une bande d'escrocs, écrivit une comédie contre le roi (rÉdit de religion), fut mis en prison, et peu d^ temps après avoir été relâché, f 1792 d'une konteuse maladie. Ses principaux ouvrages sont: un Essai de dogmat. bibliq., Nouv. révélation de Dieu, Profession de foi, Almanach des hérétiques, enfin une Autobiographie, mélange de mensonge et de cynisme. Tholuck lui a consacré quelques pages.

BAIUS, v. Bay (de).

BALDAQUIN (de Baldak, un des noms de la ville de Babylone au moyen âge); étoffe précieuse pour tapis ou vêtements. On désignait ainsi 1° le ciel dont on recouvrait le trône du maître-autel dans les grandes solennités, pour le préserver de la poussière; 2<> le ciel ou dais portatif dont on se sert dans les processions, pour honorer le sacrement et le protéger contre les intempéries de l'air ou contre le soleil.

BALDE 1û ou BaUli, savant italien, abbé de Guastalla, né 1553, f 1617, connu par ses travaux sur les sciences, et par un poème sur la navigation.

2° Jean-Jacques B., l'Horace de son temps, né à Ensisheim, près Colmar 1603. Fils de parents pauvres, il fut élevé à Ingolstadt, où il étudia le droit et obtint de brillants succès. Ayant en vain cherché à toucher le cœur d'une jeune boulangère, il fut surpris, pendant qu'il lui donnait une dernière sérénade, par le son des cloches d'un couvent voisin. Une pensée le frappa: Voilà des hommes qui se lèvent la nuit pour chanter les louanges de Dieu, et moi je perds mes nuits à rechercher l'amour d'une pauvre créature mortelle ! Assez chanté comme ça, brisons la mandoline! Et il entra dans l'ordre des jésuites le 1er juillet 1624. Il ne tarda pas à se faire une grande réputation, d'abord comme professeur à Ingolstadt, puis comme prédicateur de la cour à Munich 1638-1648. Mais éprouvé dans sa santé, il dut chercher un climat plus doux, se rendit à Landshut et à Am-berg, où il essaya plusieurs fois de remonter en chaire; enfin à Neubourg, sur le Danube, où il passa ses 14 dernières années, et où il s'éteignit doucement le 9 août 1668, aimé et regretté de tous, même des protestants, qu'il avait aimés comme il aimait tous les hommes, enfants du même Père. C'est par ses poésies latines qu'il est surtout connu, et des juges compétents l'apprécient à l'égal d'Horace, avec plus de cœur et de profondeur. Il a fait des Odes, des Élégies, une Tragédie (la fille de Jephthé), des Éloges, des Satyres; il a chanté Wallenstein et Tilly, et critiqué les fautes politiques de la guerre de Trente ans. Son principal ouvrage, en vers élégiaques, Urania Victrix (le triomphe de l'amour divin sur les vanités humaines) 1663, lui valut une médaille d'or d'Alexandre VII à qui il l'avait dédié. Ses poésies allemandes, moins appréciées, sont aussi loin de valoir celles de Paul Gerhard.

BALE, longtemps ville impériale, jusqu'au moment, 1501, où elle fut réunie à la Suisse* Elle est surtout célèbre dans l'histoire ecclésiastique par le Concile qui s'y réunit du 27 août 1431 au 7 mai 1449. Le conc. de Constance, cédant à la pression de l'opinion publique et des empereurs, avait par un décret, nommé Fréquent, tranché la question de l'autorité suprême des conciles et décidé leur périodicité. Ce double vote, dirigé surtout contre les abus de la

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papauté, était plus dangereux encore qu'une réforme aux yeux de la curie romaine, qui fit tout pour le rendre illusoire. Elle trouva moyen de dissoudre le concile de Sienne avant qu'il eût commencé ses travaux, mais de toutes parts on réclama: les cours et les universités demandèrent que le concile eût lieu, et l'on ajouta cette fois qu'il devait se réunir dans une ville libre, hors de l'Italie, en dehors de l'influence du pape. L'indomptable soulèvement de la Bohême décida Martin V à ne pas résister plus longtemps, et peu avant sa mort il convoqua un concile écuménique à Bâle. Les évêques de la chrétienté hésitaient devant cette convocation, ne sachant s'ils devaient la prendre au sérieux. Il fallut qu'Eugène IV la renouvelât, et Julien Cesarini, cardinal saint Ange, qui tenait à une réforme, mais qui voulait aussi ramener les Hussites à l'unité de l'Église, fut chargé de l'organisation du concile. Les évêques n'arrivaient que lentement; ils se méfiaient; mais à mesure qu'ils virent s'installer à Bâle des notabilités romaines, et surtout Sigismond s'y faire représenter, ils comprirent que la chose devenait sérieuse et ils affluèrent des contrées les plus éloignées de l'Europe. Au commencement, tout alla bien, et si bien qu'Eugène envoya le 17 déc. une bulle à Cesarini pour l'engager à dissoudre le concile sous n'importe quel prétexte. Mais cette bulle se heurta contre les scrupules du cardinal, contre l'opposition du roi et contre la volonté bien arrêtée du concile lui-même, qui déclara n'être que la suite de celui de Constance, et chargé de poursuivre son œuvre. Il cita même le pape à comparaître et lui fit des conditions assez dures. Le concile avait heureusement évité le grand écueil du vote par nations, qui avait entravé les délibérations de Constance, mais il s'était compliqué d'un autre mode de discussion qui embarrassait singulièrement la marche des affaires. Il s'était partagé en quatre sections, ou délégations formées des différentes classes de dignitaires, l'une s'occupant des choses de la foi, l'autre de la réforme, une autre de la paix, la dernière des affaires courantes. Pour qu'une résolution fût valable, il fallait qu'elle fût adoptée par trois sections au moins, et proclamée en assemblée générale. Les juristes, les moines et les prélats français étaient les orateurs les plus hardis. Mais Cesarini l'emportait sur tous par la science, l'éloquence, la grâce et le désir sincère de travailler au bien de l'Église. Le pape continuait d'agir en dessous contre le concile, quoiqu'il l'eût de nouveau reconnu par une bulle du 12 oct. 1433. Le 4 janv. 1433 Procope, la terreur de la chrétienté, Rocky-zane, Episcopius et d'autres délégués de la Bohême étaient arrivés, chargés par leur pays de réclamer certaines réformes. On leur accorda quatre points principaux (Compactata), entre autres la Cène sous les deux espèces et le culte en langue vulgaire. Mais le désir de s'entendre avait amené Cesarini d'une part et Rockyzane de l'autre à se servir d'expressions vagues que, des deux côtés, l'on ne trouva pas assez précises. Les taborites protestèrent contre cet accord fallacieux, Eugène en parla avec dédain, et ses successeurs refusèrent de le ratifier. — En 1435 le concile s'occupa de réformes de détail sur les annates, les taxes, les bénéfices, les réserves des papes quant à la nomination des chanoines; autant de mesures qui blessaient la curie dans ses revenus. Mais on ne toucha pas aux questions plus graves de la moralité du clergé, des désordres monacaux, des fêtes ridicules qui se célébraient dans les églises, etc. A partir de ce moment la guerre est déclarée entre le concile et la curie atteinte dans ses moyens d'existence; le pape multiplie ses déclarations, ses menaces et ses intrigues. Cesarini lui-même et quelques hommes modérés trouvent que le concile a été trop loin. Une circonstance favorable se présente pour tourner les difficultés en déplaçant le centre des préoccupations. Les grecs s'adres-sent au pape et au concile avec le vœu que les deux Églises d'orient et d'occident arrivent à s'entendre. Ce serait une belle chose; mais les deux partis voudraient en avoir l'honneur, le concile en examinant la question, le pape en la faisant décider en Italie dans un concile spécial présidé par lui. Le 6 et le 7 mars 1437 les discussions sont montées à un tel degré de violence qu'on n'entend plus les orateurs; on en vient aux voies de fait, et les bourgeois de Bâle doivent intervenir en armes pour empêcher qu'il y ait du sang répandu. La majorité déclare alors que le concile est dissous; Cesarini quitte Bâle avec ses amis; la minorité demeure, ayant à sa tête Louis d'Allemand, cardinal-archev. d'Arles. Le pap3 appelle cette minorité une bande de Satan; le concile le déclare hérétique, le dépose solennellement 7 juillet 1439 et nomme à sa place Félix V, Amédée duc de Savoie. La Pragmatique Sanction 1438 reconnaît les décrets de Bâle comme concile écuménique, mais ne va pas jusqu'à reconnaître le nouveau pape. Il y a de l'hésitation chez les puissances. Eugène compromet sa cause par des excès de pouvoir; ses finances sont en mauvais état; il finit cependant par l'emporter, Félix n'étant pas qualifié pour lui opposer une sérieuse concurrence. Eugène f 14 févr. 1447, et ses cardinaux lui donnent pour successeur Nicolas V. Le 25 juin 1448 le concile de Bâle décide sa translation à Lausanne, où Félix résidait depuis longtemps. Puis Félix fatigué de sa papauté contestée, ayant donné sa démission à la sollicitation du roi de France, le concile, également fatigué d'une latte sans objet, reporte ses voix sur Nicolas qui a été élu à Rome et se dissout après ce dernier acte d'un semblant d'autorité. Ainsi finit cette assemblée, qui avait donné d'abord de si belles espérances; elle servit du moins à faire comprendre toujours mieux la nécessité d'une réforme, et l'impossibilité de l'obtenir par les voies régulières.

— Les origines du christianisme à Bâle sont peu connues. C'est en 616 qu'on voit mentionné un premier évêque, Ragnacaire; un premier concile s'y réunit en 1061. L'université fut fondée par Pie II. La réforme n'y pénétra et ne s'y établit que lentement, sous l'influence d'OEco-lampade, Capiton, Hèdion, Pellican; Farel y prêcha en 1524, Calvin en 1536. En janvier 1529 les Conseils de la ville furent renouvelés, et 3000 protestants contre 800 catholiques décidèrent l'introduction de la Réforme. La confession de foi, rédigée par Myconius, porte quelquefois le nom de Première Conf. helvétique; elle est modérée, plutôt zwinglienne, et fut adoptée par Mulhouse. Un grand nombre de réfugiés français, entre autres plusieurs membres de la famille de Coligny, s'étant établis à Bàle, une église française y fut fondée, qui subsiste encore. Parmi les proscrits italiens on cite les noms des Curione et des Socin.

BALLERINI, deux frères de Vérone, nés: Pierre le 7 septembre 1698, f 1769, Jérôme le 29 janv. 1702, élevés par les jésuites, distingués par leurs travaux ecclésiastiques, historiques, théologiques et en droit canon. Ils se complétaient l'un l'autre et leurs discussions, souvent vives, aboutissaient toujours à une entente commune. Pierre fut dès 1748 attaché comme conseiller à l'ambassade de Venise, et Benoît XIV le combla de faveurs. Ils ont publié les discours de Zénon, les œuvres de Léon-le-Grand, un traité sur les pouvoirs réciproques des papes et des conciles, et beaucoup d'autres ouvrages, dont quelques-uns sont anonymes.

BALSAMON, Théodore, un des canonistes les plus connus de l'Égl. grecque, diacre à Sainte-Sophie de Constantinople, élevé 1193 au patriar-chat d'Antioche, f à la fin du 12^® siècle. Il a écrit de nombreux ouvrages sur les règlements ecclésiastiques et s'est appliqué à prouver que ce sont les Basiliques, q. v. et non la Compilation de Justinien, qui font loi et autorité chez les grecs.

BALUE, Jean (La), ministre d'État sous Louis XI, né en Poitou 1421, f en Italie 1491, réussit par ses intrigues à faire abolir la Pragmatique Sanction,contre les intérêtsdu royaume; reçut le chapeau de cardinal en récompense de ses bons offices; correspondit avec les ducs de Berry et de Bourgogne, leur livrant les secrets de l'Etat; fut découvert 1469 et enfermé 11 ans dans une cage de fer, et n'obtint enfin sa liberté qu'à la sollicitation du pape. A Rome il fut comblé d'honneurs et nommé légat a latere en France 1484, mais cette mission dura peu, le légat ayant été mal reçu.

BALUZE, Etienne, né à Tulle 24 nov. 1630, t Paris 28 juin 1718. Élevé pour l'étude du droit, il avait plus de goût pour les recherches historiques, et il s'y consacra dès qu'il le put, dès sa 20me année jusqu'à sa mort, s'occupant de rassembler les documents, d'en rétablir le texte authentique, de les comparer et de les publier. Son premier ouvrage, Antifrizonius, contre Frizon et ses erreurs historiques, 1652, lui fit une grande réputation. En fait de caractère ecclésiastique, il n'alla que jusqu'à la tonsure. Il eut le bonheur de trouver un Mécène en Pierre de Marca, archevêq. de Paris 1656/62. Le chancelier Le Tellier l'attacha comme chanoine à son fils l'archev. de Reims. Colbert en fit son bibliothécaire 1667-1700, et mit à sa disposition l'une des plus riches collections de livres qui existassent. Professeur de droit-canon au Collège de France depuis 1670, il en fut nommé le directeur en 1707; mais ayant fait pour le cardinal de Bouillon une Hist. généalogique de la maison d'Auvergne, dont quelques passages semblaient favoriser les prétentions des Bouillon pour ce comté, il tomba en disgrâce; Louis XIV le priva de sa chaire et de son traitement et l'exila de Paris sans aucune forme de procès ou de jugement. Il ne put revenir qu'au bout de 5 ans, après le traité d'Utrecht 1713, son innocence ayant été pleinement reconnue. Il travailla encore pendant 5 ans et fut enterré à Saint-Sulpice. — Ses principaux ouvrages sont: Les Capitulaires des rois francs, 2 vol. f° 1677, réimpr. 1780 avec des notes et additions par Chiniac; une Nouv. collect. des conciles, 1683, 1 vol. fol.; une Vie des papes d'Avignon, 1693, et des Mélanges, 7 vol. 8<>, 1678-1715. Au moment de sa mort il venait d'achever une édition des Œuvres de Cyprien. Il a publié aussi plusieurs écrits de Marc, dont il avait été le collaborateur, entre autres des Dissertations sur les libertés de l'Égl. gallicane. Le nombre de ses écrits s'élève à 45; celui de ses réimpressions à plus de 115.

BAN, proclamation, bannum nuptiale. C'est Innocent III qui a le premier fixé, au 4m® concile de Latran 1215, et c'est le concile de Trente qui a établi comme règle générale, que les noms des époux devaient être proclamés publiquement du haut de la chaire 3 dimanches consécutifs. L'usage en était plus ancien; il avait primitivement pour but de recommander les fiancés aux prières des fidèles; plus tard il servit à consacrer la publicité des promesses et à mettre les intéressés en mesure d'intervenir et, s'il y avait lien, de s'opposer à des alliances de mineurs ou autres, interdites par l'Église ou par l'État. Avec l'introduction du mariage civil, les publications en chaire ont perdu presque toute signification et ne sont plus réclamées par les autorités, alors même qu'elles ont eu lieu. Les législations varient d'un pays à l'autre sur la publicité à donner aux fiançailles avant qu'il soit procédé au mariage; elles varient également sur la nature des dispenses à accorder.

Le mol Ban s'emploie aussi dans le sens d'excommunication et dans celui de bannissement.

BAPTISTÈRES. Jusqu'à l'avènement de Constantin on baptisait où et quand on pouvait, toujours par immersion. Mais peu à peu l'usage s'introduisit de donner à celte cérémonie une grande solennité et de réserver près des églises, puisque les catéchumènes ne pouvaient pas entrer dans les églises avant d'avoir été baptisés, des locaux spéciaux à cette destination. C'étaient dans le principe des chapelles, reliées par une galerie couverte à l'égl. proprement dite: L'év. ayant seul le droit de baptiser, comme aujourd'hui celui de confirmer, il n'y avait dans le diocèse qu'une seule église baptismale, comme il n'y a qu'une seule cathédrale. Les baptêmes se faisaient en masse les veilles de Pâques, de Pentecôte, et plus tard, de Noël. La forme du bâtiment était indiquée par sa destination; il fallait un réservoir d'eau, une piscine (du latin piscis, poisson, nom symbolique du Christ) avec un espace circulaire suffisant pour les parents et les amis du néophyte. La rotonde était ainsi naturellement indiquée comme forme, et elle avait en outre cet avantage que beaucoup de temples romains étant construits sur ce modèle, ils pouvaient être facilement aménagés pour servir de baptistères. Plus tard, par goût ou pour d'autres motifs, on choisit la forme polygonale et surtout octogone, que le cardinal Ch. Borromée regardait comme la plus parfaite de toutes, en allusion aux octaves des fêtes chrétiennes. Les principaux ornements des baptistères étaient, outre le poisson déjà nommé, une colombe d'or ou d'argent, symbole du T5aint-Esprit; un cerf altéré (Ps. 42,*1), des tableaux ou des reliefs représentant Jean-Baptiste, le baptême du Sauveur, Philippe et l'eunuque de Candace, etc. Le bassin devait être en pierre, parce que J.-C. n'est pas seulement l'eau qui vivifie, il est aussi le rocher, etc. Quand, aux 5me et ô"3© siècles, on décida de baptiser aussi les petits enfants, il fallut renoncer à bien des règles gênantes et à des prescriptions trop rigoureuses, à l'immersion, aux dates réservées, au baptême par l'évêque; les conciles résistèrent longtemps à ces innovations, mais à la lin la nécessité l'emporta, et les immenses baptistères des premiers temps (sous Damase un enfant s'y noya et son corps ne fut retrouvé qu'au bout d'une heure, Baron, Annal.) furent remplacés par de simples bassins, qui conservèrent la forme antique, ronde ou octogone, et qui furent placés d'ordinaire à l'entrée des églises pour rappeler que c'est par le baptême qu'on entre dans le royaume des cieux. Ils sont souvent fermés d'un couvercle en forme de coupole, soit à cause de la poussière, soit en vue de l'usage profane ou superstitieux qu'on en pourrait faire. L'eau lustrale, chez les catholiques du moins, ne doit pas être puisée avec la main, mais au moyen d'un goupillon, presque toujours en argent. La plupart de ces formes sont ignorées des protestants, qui n'ont conservé du baptême que sa signification primitive.

BAPTISTES, secte chrétienne prolestante qui se caractérise, comme son nom l'indique, par ses vues particulières sur le baptême. S'en tenant aux textes du N.-T. et à la tradition des cinq premiers siècles, elle estime qu'il n'y a de vrai baptême que celui qui a lieu par immersion, et que le baptême ne peut être administré qu'aux croyants, par conséquent pas aux enfants. De tout temps il y a eu des docteurs soutenant ces vues, mais c'est seulement vers 1521, avec les anabaptistes, que le baptisme a pris corps comme doctrine positive, et si la secte fut détruite 1535 à cause de ses excès, quelques survivants, honnêtes, doux et laborieux, échappèrent et s'établirent en Hollande et en Angleterre, où ils réussirent à subsister, malgré les persécutions. En 1518 on trouve déjà une église baptiste organisée en Angleterre, mais c'est surtout depuis l'Acte de tolérance qu'ils se multiplièrent. Ils s'établirent aussi en Amérique et y prospérèrent. La plupart sont calvinistes stricts; ce sont les plus vivants et les plus zélés; les autres sont arminiens, et quelques-uns ariens et même sociniens. Les baptistes stricts, en particulier, comptent 6 séminaires dans le Royaume-Uni, et plus de cent mille communiants, formant 1300 églises; ils ont eu des hommes distingués, Robert Hall, le missionn. Carey, Baptist Noël, Spurgeon, etc. Aux États-Unis, partagés en plusieurs branches, ils sont plus de 3 millions et comptent plus de 8,001) congrégations. Chaque église est absolument indépendante, mais elles s'associent en général pour l'œuvre missionnaire, à laquelle elles s'intéressent vivement, et qui a obtenu de brillants succès, notamment aux Indes et dans les Antilles. Il y a quelques églises baptistes sur le continent, en Suède, Allemagne, Danemark, Suisse, France, etc.; mais trop d'autres questions graves préoccupent les esprits, pour que la question spéciale du baptisme ait jamais réussi à produire un grand mouvement, v. BainL Bennet, Roger Williams.

BARBARA, ou Barbe, vierge d'une grande beauté, convertie au christianisme, chercha à convertir son père, Dioscore, mais celui-ci la dénonça, et comme les supplices les plus cruels ne réussirent pas à l'ébranler, il lui trancha lui-même la tête, et mourut ensuite frappé de la foudre. Baronius place cette histoire en Nico-médie, sous Maximin 235-38; Assemani la place à Héliopolis en Égyj^e, sous Galerius 306. On ajoute que Henri Stock, à Gorkum en Hollande, à. moitié consumé par les flammes, ayant invoqué sainte Barbara, vécut encore assez pour pouvoir recevoir le saint sacrement. Les catholiq. l'invoquent contre l'orage, la foudre et le feu. Elle est patronne des artilleurs. Sa fête est le 4 déc.

BARBEROUSSE. v. Frédéric.

BARBEYRAC, Jean, d'une famille noble de Béziers, fils du pasteur Antoine B. réfugié à Lausanne. Né à Béziers 15 mars 1674, il réussit à grand'peine à rejoindre à Lausanne sa famille exilée, étudia à Lausanne, Genève et Francfort-s.-O., fut nommé en 1697 prof, au collège des Réfugiés à Berlin, et renonça à la théol. pour suivre le droit et les lettres. En 1710 il fut appelé à Lausanne comme prof, d'histoire et de droit,et de 1714 à 1717 recteur de l'Académie. Il passa de là à Groningue, ayant refusé de signer la Formule du Consensus, et f 3 mars 1744, ayant perdu sa femme et sa fille unique. Il était membre de l'Acad. de Berlin. Il a laissé de nombreux ouvrages, presque tous d'érudition, entre autres des traductions de PufFendorf et de Grotius, une trad. du livre latin de Noodt sur la Liberté de conscience, un Traité de la morale des Pères de l'Église.

BARCLAY lo William, né à Aberdeen, grand ami de Marie Stuart, légiste cathol., vécut en France et écrivit contre la Ligue et contre les théories démocratiques qu'elle émettait avec l'approbation du pape. Bellarmin lui répondit, f 1609.

2° Robert, d'une vieille famille écossaise, fils d'un officier qui s'était distingué dans les guerres d'Allemagne et de Suède. Né à Édin-bourg 1648 il fut envoyé pour son éducation à Paris, où le frère de sa mère le convertit au catholicisme. Le père, qui appartenait à la Société des Amis, le rappela aussitôt, et après une longue résistance, fréquentant les assemblées des quakers, Robert fut gagné à leur doctrine et devint l'un de leurs représentants les plus convaincus. H voyagea en Angleterre, en Hollande et en Allemagne, cherchant à faire des prosélytes, + 1690. Son principal ouvrage est l'Apologie de la véritable théol. chrétienne, telle que la professent ceux que par dérision on appelle Quakers (latin), dédiée à Charles H, Amsterdam 1676. Il a le mérite de présenter sous une forme systématique le spiritualisme mystique de la secte. Son ami G. Penn publia en 1692 ses œuvres complètes.

BAR-COCHBA, ou Bar-Cocab, fils de l'étoile, chef juif de l'insurrection qui éclata vers 131 après C. sous Adrien, en Palestine, et qui se termina malheureusement par sa défaite et sa f 135. Il se faisait passer pour le Messie, fit quelques semblants de miracles, s'imposa par la terreur aux juifs et aux chrétiens, séduisit le célèbre rabbin Akiba, prétendit être né le jour de la destruction du temple, revendiqua pour lui la prophétie de Balaam Nomb. 24, 17., réalisa la prophétie de Marc 13, 21. 22., et après avoir attiré sur son peuple de nouveaux malheurs, il mérita d'être appelé par dérision Bar-Cosiba, fils du mensonge.

BARDES ANES, v. Valentin, et Gnosticisme.

BARI (Synode de), convoqué par Urbain II 1098; 183 évêques sont présents, dont Anselme de Cantorbéry, qui expose ses vues sur la Procession du Saint-Esprit; le roi Guillaume-le-Roux est presque excommunié.

BARLA AM1° v. Hésychastes. 2° moine de l'ordre de saint Basile, né à Séminara, Calabre, vers 1300,t vers 1348. Étant allé en Grèce, il embrassa la religion grecque et fut en grande faveur auprès de l'empereur Andronique-le-Jeune qui lui confia plusieurs missions et le chargea de travailler à l'union des deux Églises. Mais ayant eu le malheur d'attaquer les moines du Mont-Athos qui croyaient que la lumière du Mont Tabor était la gloire incréée de Dieu, il dut repartir pour l'Italie et rentra dans le giron du catholicisme. Clément VI le nomma év. de Gé-race. Il a laissé une Biblioth. des Pères, 6 livres d'Arithmétiq. algébrique, 2 livres sur la Morale des stoïciens et un traité Contre la primauté du pape.

BARLETTA, prédicateur dominicain du 15™ siècle. Il s'appelait Gabriel, mais prit peu à peu le nom de Barletta, sa ville natale. Il se fit une grande réputation, vers 1480, surtout dans le nord de l'Italie, par la vérité, la profondeur et l'originalité de ses discours, autant pour le fond que pour la forme. Il avait brisé le moule scolastique et recherchait dans la prédication le naturel, sans reculer devant le satirique, le comique et même le grotesque. On disait proverbialement que t celui qui ne sait pas barlet-ter, ne sait pas prêcher. » Patriote, il pleurait sur la grandeur éclipsée de l'Italie. Dominicain, il a combattu le dogme de l'Immaculée conception. Ses sermons, presque tous sur des sujets moraux, ont eu plus de 20 éditions.

BARNABAS. L'épître connue sous le nom de cet apôtre, retrouvée seulement en 1645, moitié en grec, moitié en latin, appartient incontestablement à l'école d'Alexandrie, peut-être à un disciple de ce nom; mais, malgré le témoignage de Clément qui la cite comme étant de l'apôtre, malgré sa présence en entier dans le mss. du Sinaï, elle renferme une opposition trop vive contre le judaïsme et contient trop d'erreurs sur les cérémonies du culte pour qu'on puisse l'attribuer au compagnon de Paul, au lévite de l'Ile de Chypre. Si elle était authentique, il faudrait admettre qu'elle a été interpolée et que seuls les chap. i à 6, 13, 14 et 17 sont de l'apôtre. C'est l'opinion de Schenkel, mais même dans cette hypothèse les difficultés subsistent. Elle jouit longtemps d'un grand crédit dans l'Église.

BARNABITES. Ordre religieux fondé à Milan à l'époque des guerres de François te* et de Charles-Quint contre l'immoralité croissante des armées, contre les idées nouvelles apportées par les soldats allemands et à l'occasion d'une épidémie grave qui éclata dans la ville et frappa le tiers de la population. Fondée par Antoine-Ma-rie-Zacharie, l'association fut autorisée par Clément VII, 1533, et reconnue avec privilèges par Paul III, 1535, sous le nom de congrégation de saint Paul. Ils reçurent le nom de barnabites de l'église dédiée à Barnabas, qui fut mise à leur disposition. Ils s'occupaient des missions, d'enseignement et de prédication. Ils se répandirent rapidement au dehors et fondèrent de grands collèges dans la plupart des pays de l'Europe. Aujourd'hui on ne les trouve plus guère qu'en Autriche, en Espagne et en Italie. Leur centre est à Rome. — Déjà sous Grégoire XI, 1370-78, un ordre de barnabites s'était formé, qu'Eugène IV avait reconnu comme association 1441; Ch. Borromée opéra leur fusion avec les barnabites de Milan, et Paul V 1606 confirma cette réunion. — Quant aux religieuses barnabites, v. Angéliques.

BARNES, Robert, docteur en théol., s'attira la défaveur d'Henri VIII par ses tendances luthériennes, abjura des lèvres pour sortir de prison, se déclara de nouveau pour la Réforme et s'enfuit à Wittenberg 1530. Le roi s'étant à son tour prononcé contre le pape, Barnes revint, fut nommé chapelain de la cour 1535, servit d'intermédiaire pour le mariage d'Henri avec Anne de Clèves, et fut condamné comme hérétique par le parlement, à la demande du roi qui voulut se venger sur le négociateur de la lassitude que lui causait sa 5© ou 6° épouse, f 1540 sur l'échafaud. Il a laissé quelques écrits, entre autres une Vie des pontifes romains.

BARNEVELDT, Jean-Olden, né à Amers-foort 1549; grand pensionnaire de Hollande, magistrat intègre, négociateur habile, eut la gloire de conclure avec l'Espagne 1609 le traité qui assurait l'indépendance de son pays. Jaloux des libertés de la république il s'opposa aux entreprises ambitieuses de Maurice de Nassau, et se vit en butte aux attaques les plus violentes. Dénoncé comme hérétique au synode de Dordrecht, il fut condamné comme arminien; cela, et l'absurde accusation d'avoir voulu livrer la Hollande aux Espagnols, suffit pour le faire condamner à mort. Il fut exécuté 13 mai 1619 et subit avec fermeté l'injuste supplice; il mourait pour la liberté.

BARON ou Baronius, César, né 31 oct. 1538, à Sora, roy. de Naples, peut être considéré comme un des pères de l'histoire ecclésiastique catholique. Il étudia le droit et la théologie, vint à Rome avec son père 1557, en un moment de réaction politique et religieuse, se fît recevoir membre de la congrégation de l'Oratoire, dont il devint le général en 1593, s'adonna pour son instruction et son édification à la lecture des biographies chrétiennes et des ouvrages d'histoire ecclésiastique et finit par entreprendre le recueil auquel il a donné son nom. Il mit 30 ans à réunir ses matériaux. Pendant ce temps, chargé d'écrire une Histoire de l'Église en réponse aux Centuries de Magde-bourg, il fut plus d'une fois arraché à ses paisibles travaux par les honneurs que lui imposait la curie romaine dont il était la gloire. Il fut successivement nommé protonotaire du siège apostolique, confesseur de Clément VIII, cardinal 15 juin 1596, bibliothécaire, membre de la congrégation des rites et de la typographie du Vatican. Deux fois, après la mort de Clément VIII et après celle de Léon XI, il fut sur le point d'être nommé pape; les Espagnols firent échouer son élection, à cause de son écrit sur la Monarchie de Sicile. Il reprit joyeusement ses travaux littéraires, dormant 4 h. par jour, ne mangeant que ce qu'il faut pour vivre et f le 30 juin 1607, succombant sous le poids de ses occupations multipliées. Ses Annales eo clésiastiques, qui vont de l'an 1 à l'an 1198, sont moins une histoire qu'une chronique, une compilation et un ensemble de documents officiels; sauf quelques erreurs de chronologie et de critique, c'est un répertoire unique en son genre et que doivent consulter tous ceux qui veulent écrire l'histoire. Baronius ne fait pas de controverse directe; il s'en rapporte aux faits, qui lui semblent suffisants dès qu'ils sont établis par l'autorité de l'Église. Son ouvrage a été continué par Rainaldi et Laderchi. Anvers 1610,12 vol. f* (Le t. XI, où se trouve le traité sur la monarchie de Sicile, fut interdit par Philippe HI dans toute l'étendue de ses États). Lucques. 42 vol. fo 1738-1757.

BARSUMAS lo évêq. deNisibis, v. Nestoriens. — 2° archimandrite de Syrie, chef du parti eu-tychéen parmi les moines de Syrie, l'un des souliens les plus violents de Dioscore au concile des brigands d'Éphèse 449. f 458. Les jacobites lui prêtent plusieurs miracles.

BARTH, Chrétien-Gottlob, né 1799 à Stuttgart, étudia la théol. à Tubingue; pasteur à Mœtlingen, et depuis 1838 à Calw; auteur de plus de trente ouvrages populaires chrétiens, Hist. bibl. des missions, Journal pour la jeunesse, Géogr. bibl., Poésies, etc. Un des plus ardents soutiens de l'œuvre des missions et d'une Société de traités, f 1862. Chrétien èvan-gélique, il était aussi théosophe, publia des extraits de Bengel et d'OEtinger et croyait au rétablissement final.

BARTHÉLEMITES 1<> Moines arméniens de l'ordre de saint Basile, accueillis à, Gènes 1307, où ils se bâtirent une église qu'ils consacrèrent à saint Barthélémy. Clément V leur permit de célébrer leur culte d'après leur rite. Ils fondèrent plusieurs couvents en Italie et prospérèrent quelque temps. Mais leur nombre étant Venu à diminuer notablement, Innocent X les supprima 1560.

Clercs séculiers vivant en commun, ils tiraient leur nom de Barthélémy Holzhauser, né 1613 à Langenau, consacré prêtre 1639, puis chanoine à Salzbourg, où il fonda un ordre, ou espèce de séminaire, dont la réputation fut bientôt si solidement établie que l'év. de Coire 1644 ordonna à ses doyens de s'y faire affilier; <joe les évéques de Ratisbonne, Osnabrtlck et Mayence, 1653-1654, ne voulurent d'autres prêtres que ceux qui y avaient été élevés; que la Hongrie, l'Espagne, ta Pologne y recrutèrent également leur clergé. Le nonce à Cologne appelait les règles de Holzhauser « la moelle des canons. » Les services rendus par cet ordre lui valurent la protection de Léopold et d'Innocent XL Holzhauser f 1658, doyen et curé à Bingen. Son œuvre tenait à sa personnalité et périclita rapidement après lui; en 1795 l'ordre avait cessé d'exister.

BARTHÉLÉMY 1<> Apôtre. — 2o de Bresce, prof, de droit canon à Bologne, connu surtout par ses Comment, sur le décret de Gratien 1236, et par quelques autres écrits sur le droit. — 3° Barth. de Las Casas, v. Casas. — 4° l'abbé J.-J. Barthélémy, auteur du voyage du j. Ana-charsis, 1716-1795, savant dans les langues orientales, s'est peu occupé de théologie. — 5* Barthélémy des Martyrs, célèbre év. portugais, l'un des hommes les plus pieux et les plus considérés de son temps et de son Église. Né 1514 à Lisbonne, baptisé dans l'église N. D. des Martyrs, d'où lui vient son nom. Il entra à 14 ans dans l'ordre des dominicains, fut précepteur de don Antonio, neveu du roi Jean III, fut nommé archev. de Braga 1559, se montra zélé partisan d'une réforme, soit au conc. de Trente, soit dans son diocèse; fonda un séminaire de prêtres, réunit un concile provincial 1566, ouvrit des hospices pour les malades et pour les pauvres, déploya le plus grand dévouement pendant la peste et la famine 1567-1575, et obtint de Grégoire XIII la permission de se démettre de, tous ses honneurs et fonctions 1582. Il se retira dans le couvent de Viana, et

I 1590 en odeur de sainteté. Il a laissé plusieurs commentaires, un catéchisme, un Com-pendium de la vie spirituelle, les Devoirs des év. de Rome, 1727. 2 vol. f* éd. d'Inguimbert.

BARTHÉLÉMY (Massacre de la Saint-). Cette exécution collective des réformés de France, précédée par les exécutions d'Amboise, par le massacre de Vassy, par la tentative contre Co-ligny, peut-être par la mort de Jeanne d'Albret et par d'autres essais criminels, fut décidée par la cour de France sous les auspices de Catherine de Médicis et de Charles IX. Elle commença dans la nuit du samedi au dimanche 24 août 1572, jour de la fête de saint Barthélémy. Parmi les complices de ce massacre se trouvaient les ducs d'Anjou et de Nevers, Henri d'Angou-lême, le maréchal de Tavannes, René de Bira-gue, Albert de Gondi, le duc de Guise, etc. Les assassins avaient pour signe de ralliement une écharpe au bras gauche et une croix blanche au chapeau. La plupart des chefs de la réforme avaient été attirés et retenus à Paris sous prétexte des noces du prince de Béarn avec la sœur du roi, Marguerite. Plusieurs d'entre eux se méfiaient des faveurs dont ils étaient comblés: les catholiques au contraire s'en irritaient; le légat du pape s'en plaignit ouvertement, et le roi dut le calmer en lui disant: • S'il m'était permis de m'expliquer davantage sur tout ce que je sais ! Dans peu le succès obligera le pape à louer mes desseins, ma piété et mon zèle ardent pour la religion. • Les massacres commencèrent dans presque toute la France le dimanche au point du jour,à Paris dès 2 h. du matin. Les têtes les plus illustres tombèrent dans cette affreuse boucherie. Coligny, Téligni, Pardail-lan, Piles, Caumont de la Force, Jean Goujon, Ramus, La Rochefoucault, Soubise, Brion, La Place, etc. Ces égorgements se prolongèrent pendant 8 jours à Paris et dans la province. Pé-réfixe, archev. de Paris, compte qu'il n'y eut pas moins de cent mille personnes ainsi assassinées; à Paris même, plus de 4000; les plus notables furent exhibés au gibet de Montfaucon,

II y en aurait eu davantage encore si plusieurs commandants de province n'eussent refusé d'obéir, les uns sous prétexte qu'ils ne pouvaient croire que ce fussent les ordres du roi, d'autres alléguant qu'ils avaient sous leurs ordres des soldats, mais point de bourreaux. II est difficile de fixer exactement le nombre des victimes; les uns le réduisent à 60,000, les au-très le portent à plus de 200,000; évidemment on n'a pas osé faire la statistique de cette monstruosité inouïe dans l'histoire. Le roi de Navarre et le prince de Condé furent épargnés, comme princes du sang, ce que Philippe II regretta beaucoup. La nouvelle de ces horreurs se répandit rapidement. En France on frappa des médailles d'or et d'argent en l'honneur du roi. A Rome la joie tint du délire; on chanta des Te Deum, on tira le canon du château Saint-Ange, on alluma des feux de joie, on multiplia les glorieuses inscriptions, on frappa une médaille à l'effigie du pape, avec un ange frappant les protestants, et ces mots: Hugonotorum Strages 1572. — Une foule de questions critiques, historiques et politiques se rattachent à ce lugubre événement, une des hontes de la France et de la monarchie, qui trouva une expiation partielle dans les massacres de 1791 et de 1793. Les explications des écrivains catholiques ne réussiront jamais ni à pallier le crime, ni en atténuer les fatales conséquences. V. Qui-net, Michelet, Mignet, Soldan, de Félice, Coque-rel, Crottet, Bulletin du Prot. fir. 1856 et 1873.

BARTON, Élisabeth, dite la Sainte, ou la Vierge de Kent, jeune fanatique, ou visionnaire, qui parut en Angleterre au commencement de la réformation. Née vers 1500 dans le comté de Kent, elle entra comme religieuse au couvent du Saint-Sépulcre, à Cantorbéry, et passa de bonne heure pour avoir des révélations. Son confesseur, Richard Masters, l'exploita; elle fit des miracles et la chapelle d'Aldington devint un lieu de pèlerinage. Elle reçut de Marie-Madeleine une lettre en caractères d'or, et quand il fut question du divorce d'Henri VIII, elle s'avisa de prédire qu'il perdrait sa couronne et qu'il mourrait dans l'espace de 7 mois. L'év. Jean Fisher et le chancelier Thomas Morus furent ses dupes; ce dernier cependant finit par voir clair, mais ils n'en périrent pas moins l'un et l'autre, après que Henri VIII irrité de ces intrigues catholiques eut fait arrêter, juger et condamner à mort la nonne avec ses sectateurs, Masters, etc. avril 1534. Elle avoua la supercherie et en rejeta la faute sur ses savants complices, qui avaient abusé de son état maladif pour lui dicter des paroles, qu'ils mettaient sur le compte du Saint-Esprit.

BASILE lo le Grand, d'une ancienne famille chrétienne distinguée, né 329 à Césarée en Cappadoce; un des plus remarquables des pères de l'Égl. grecque. Son éducation fut confiée à un de ses parents, partisan de Grégoire Thaumaturge. Plus tard son père se chargea pendant quelque temps de son instruction, puis l'envoya successivement étudier à Césarée et à Constantinople. Ce fut dans cette dernière ville qu'il entra en relation avec le païen Libanius, qui professait pour lui la plus haute admiration. En 351, à Athènes, il reprit ses études, encore sous la dire tion de professeurs païens. Il y commença une liaison, qui dura toute sa vie, avec le célèbre Grégoire de Naziance. Il s'y lia également avec le prince Julien (plus tard J. l'Apostat) qui se prit pour lui d'une vive affection. En 356, de retour à Césarée. il se distingua comme professeur et avocat. Ce n'est qu'alors, sur les instances de sa sœur, qu'il se fit baptiser; il vendit tous ses biens et renonça au monde pour se donner à Christ. Il se retira, avec son ami Grégoire, dans une solitude sur les bords de l'Iris, Pont, et s'y livra avec lui à l'étude des saintes Écritures. Grégoire, d'un esprit plus actif et plus ardent que Basile, n'y resta pas longtemps. Basile, une fois seul, organisa la communauté monastique qui s'était groupée autour de lui dans sa propriété de la Basiliade, que Grégoire appelle une petite ville, et les règles qu'il établit servirent de modèle à presque tous les monastères de l'orient. Son éloquence attira des centaines et des milliers de chrétiens dans le silence des cloîtres. Mais il n'était pas au bout de sa carrière active. Il se mit à visiter les couvents de Syrie, de Mésopotamie et d'Égypte. Puis en 362, Eusèbe év. de Césarée, ayant besoin d'un homme éloquent et instruit, appela Basile auprès de lui, l'ordonna prêtre et le chargea de la prédication. Il y obtint de tels succès qu'Eu -sèbe jaloux lui suscita des embarras qui l'obligèrent à s'éloigner. Basile était depuis trois ans dans sa retraite auprès de Grégoire de Naziance, lorsque des dissensions s'élevèrent à Césarée; pour les apaiser on ne crut pouvoir mieux faire que de rappeler Basile. Celui-ci réussit par sa délicatesse et sa prudence à ramener la paix, et ce ne fut pas le seul service qu'il rendit. Lors d'une famine terrible, il plaida avec tant d'éloquence la cause des pauvres, que les plus riches s'empressèrent de leur venir en aide. Aussi, en 370, à la mort de l'évêque, ce fut Basile qu'on choisit pour le remplacer. Il avait contre lui plusieurs évêques du voisinage, mais il l'emporta, gr&ce à Grégoire de Naziance et à son père. Dès lors il se donna tout entier aux soins de son troupeau; l'exhorter, l'instruire, visiter les malades et les affligés, prêcher, fonder des institutions pour les malheureux, telles étaient ses occupations. Comme Ambroise de Milan et d'autres, Basile s'astreignit à un genre de vie sévère, pour pouvoir d'autant mieux venir en aide aux indigents. Et au rebours de tant d'évêques contemporains qui méritaient si bien le mot de son ami Grégoire de Naziance: « Lions auprès des petits, rampants auprès des grands, » Basile, si compatissant envers ceux qui souffraient, résistait courageusement aux injustices des puissants de la terre. C'est ainsi qu'il ne se fit nul souci de l'hostilité des évêques qui s'étaient opposés à sa nomination à Césarée; c'est ainsi qu'il résista au gouverneur de la ville, lequel, voulant épouser une femme, l'avait arrachée de force au temple où elle avait cherché un refuge contre ses obsessions. Le peuple, admirant le courage de son évêque, voulait massacrer le gouverneur, et l'aurait fait, sans l'intervention de Basile. Celui-ci eut aussi à lutter contre les hérésies d'Anus et d'Apollinaire; modéré dans ces débats, il s'attira les inimitiés de quelques orthodoxes; mais il finit par se les concilier à force de douceur et de patience. f 1er janvier 379, après 9 ans d'épisco-pat, pleuré et regretté de tous, des païens comme des chrétiens. Basile est le fondateur du plus ancien des ordres religieux, celui qui porte son nom. Il l'avait établi et organisé en 358 dans les solitudes du Pont, sur le fleuve Iris, en face d'une communauté de religieuses fondée par sa sœur. La règle qu'il y établi tétait, eo thèse générale, moins sévère que celle de Benoît en occident; il n'établit pas la perpétuité des voeux; il n'admettait les enfants qo'avec l'autorisation de leurs parents, et les esclaves avec celle de leurs maîtres; les personnes mariées ne pouvaient entrer dans la communauté qu'avec le consentement des deux conjoints; l'étude et le recueillement y étaient strictement observés; les travaux manuels, moins recommandés qu'en occident, étaient surtout ceux de l'agriculture; quant à la nourriture et aux vêtements, ils devaient être de la plus grande simplicité. Basile fit aussi une règle pour les communautés de femmes. Malheureusement l'ordre déclina pendant les ténèbres du moyen âge et Grégoire XIII dut le réformer en 1579. Plusieurs savants en sortirent, entre autres Bessarion et Barlaam. Basile a beaucoup écrit, mais plusieurs de ses ouvrages sont perdus. Ceux qui restent dénotent un talent rare. U a du charme, du coloris, de l'élégance, de l'imagination. Ses Lettres sont particulièrement intéressantes; il y en a 428; puis viennent ses Homélies (l'Hexamèron), ses traités ascétiques (Moratia), des Comment, sur les Écritures, et divers écrits contre les hérésies. H. B.

2® Basile, médecin, fut appelé par l'influence d'Eusèbe, à l'évéché d'Ancyre 336, et devint l'un des chefs des semi-ariens, qui prirent de lui le nom de basiliens. Les ariens stricts le firent déposer 360. Ses écrits, contre Marcellus d'Ancyre et sur la virginité, sont perdus. Il était instruit et éloquent.

3° Basile, év. de Séleucie en Isaurie, connu surtout par ses hésitations dans les controverses eutychiennes. Au concile de Constantino-ple 448, il fut contre Eutyches; il fut pour au concile des brigands, Éphèse 449; le concile de

Chalcédoine 451 le déposa pour ce fait, mais il obtint le retrait de cette sentence en assurant qu'à Éphèse il avait dû céder à la violence. Il reste de lui 40 sermons, une Vie de Thécla et une Notice sur ses miracles; impr. Heidelberg 1596 et 1605, Paris 1622. Il n'est cependant pas sûr que les écrits sur Thécla soient de lui.

4° Basile, le Bogomile, v. Cathares.

BASILIDES, gnostique célèbre, né dans le l«r siècle, vécut sous Adrien et t vers 125 ou 130. Épiphane le fait originaire de Syrie. U enseigna en Égypte et en Perse. C'est à Alexandrie qu'il se forma et qu'il conçut l'idée de son système. Isidore, son fils, chercha à le compléter par ses écrits. Sa doctrine nous est surtout connue* par Clément d'Alex., Irénée, Épi-phanes et Hippolyte, l'auteur des Philosophou-mena. A la base de son système se trouvent le dualisme et une doctrine d'émanations. Dieu et la matière sont éternels. Le Dieu suprême, ineffable, est un abîme incompréhensible; il se manifeste par 7 forces, dont 4 intellectuelles: l'esprit (noûs), le verbe, l'intelligence, la sagesse; une force effective, la force, dynamis; et 2 forces morales, la justice et la paix. Dieu et ses 7 Eont forment l'octave parfait. De ce premier royaume des esprits, il en émane un second, un peu inférieur, et ainsi de suite jusqu'au 365«ne, tous habités par des intelligences de différents degrés; notre monde a été créé par des intelligences du dernier ordre, ce qui explique la présence du mal au milieu de nous. C'est le Dieu manifesté de cette manière que Basilide explique par le symbole, ou talisman d'Abraxas, dont les lettres additionnées font 365. Du mélange de l'esprit avec la matière naquit la disharmonie, et partout « la rouille est attachée au fer. > Il n'y a rien de mort dans la nature, pas même les pierres. L'âme sera purifiée en passant successivement de la pierre dans la plante, puis dans l'homme jusqu'à Dieu. Le premier ange du 365®e ciel, VArchôn est le créateur du monde. Les créatures auraient pu s'élever jusqu'à lui, mais le Dieu souverain voulant nous élever plus haut encore et nous rapprocher de lui, le noûs s'unit au baptême dans l'homme Jésus. Quand l'archôn le vit pour la Ire fois il fut effrayé; il avait cru être le plus grand sur la terre et il voyait des hommes capables de s'unir au noûs; il les laissa librement sortir de son royaume. Tout péché doit être expié et l'homme Jésus dut mourir pour les siens. Quant à la morale, Épiphane et Irénée le font ennemi de la vertu, en lui attribuant l'abus que quelques-uns de ses disciples ont fait de sa doctrine; il semble au contraire, d'après Clément d'Alex, qu'il se faisait de la vertu un idéal très élevé, mais dont l'ascétisme n'excluait pas nécessairement le mariage. Basiiides regardait l'homme comme un petit monde, réunissant toutes les qualités et tous les défauts du grand. Mais il lui donnait trop de force pour résister au mal. Il admettait 2 états de vie intérieure, la prière avant le combat, et l'action de grâces après la victoire. Il avait rédigé un évangile, qui est perdu. Il eut beaucoup de disciples, qu'on appela basilidiens; le plus célèbre fut Marcion.

BASILIENS, v. Basile.

BASILIQUES io Collection d'ordonnances publiées à diverses époques par les empereurs romains et destinée d'abord à l'orient. La première fut faite par Justinien 528-535, en latin, puis traduite en grec. Les traductions et les abrégés qui en furent faits altérèrent peu à peu le texte, et il fallut aviser à une rédaction authentique. L'emp. Basile le Macédonien s'en occupa, pour fixer la législation 878; puis Léon VI le Philosophe 886 y mit la dernière main, en s'entourant de savants autorisés. Ce dernier recueil, divisé en 60 livres, comprend en outre tout le corps du droit romain, les Institutes, le Digeste, le Code, etc. On sait, mais sans autres détails, que Constantin Por-phyrogenitus fit procéder vers 911 à une nouvelle re vision.

2<> L'antiquité désigna longtemps sous ce nom, qui signifie royal, tous les monuments publics d'une étendue considérable et d'un aspect grandiose, quelle que fût d'ailleurs leur destination; ainsi les palais où se rendait la justice, les constructions couvertes destinées aux marchés et au monde des affaires. Il y en avait à Rome un grand nombre. Leur architecture était en général fort simple; à l'extérieur une longue suite de fenêtres à plein cintre; à l'intérieur deux rangées de colonnes dans le sens de la longueur; à l'extrémité un hémicycle où siégeait le président. Lorsque les chrétiens furent admis à célébrer leur culte en public, avec la protection des empereurs, ils s'emparèrent des basiliques dont la forme était appropriée à leur culte et qui n'avaient pas été profanées par l'adoration des faux dieux, et depuis le jusqu'au 9m« siècle, l'architecture chrétienne ne s'éloigna guère de ce style emprunté aux Grecs et aux Romains. L'hémicycle devint naturellement le chœur; l'espace compris entre les colonnes fut la grande nef; à droite et à gauche, les bas côtés. En souvenir de la croix on ajouta deux nefs transversales, le transept ou les croisées. Des galeries supérieures furent ajoutées, appelées travées, pour augmenter le nombre des places, plutôt que comme ornement, quoiqu'elles servent aussi à l'ornementation. En face de l'autel, les places des membres du clergé, ou presbyterium. Les néophytes non baptisés, qui n'avaient pas le droit de pénétrer dans l'église, se tenaient dehors sous le porche (atrium ou narthex), sur une petite place que l'on appelait, et que l'on appelle encore parvis, et où étaient primitivement le bénitier et le baptistère, aujourd'hui transférés à l'entrée de l'église. Au moyen âge on réserva plus particulièrement le nom de basiliques pour des églises desservies par des moines, ou pour des monuments royaux.-Aujourd'hui on l'emploie surtout en parlant de grandes cathédrales, celles de Saint-Pierre, de Saint-Paul, etc.; le mot appartient au style élevé.

BASNAGE, famille noble de Normandie, qui a fourni à l'Église plusieurs illustrations:

1° Basnage, pasteur à Norwich, puis à Ca-rentan, Normandie.

2° Son fils, Benjamin Basnage, né 1580, pasteur à Carentan, représentant de sa province à la plupart des synodes de son époque. Il avait été délégué en Angleterre et en Hollande 1621 pour « avertir les pays étrangers de la persécution. > Louis XIII ne l'aimait pas et essaya, mais en vain, d'empêcher son admission à l'assemblée de La Rochelle. Modérateur au synode d'Alençon 1637, il résista énergiquement au commissaire du roi, Saint-Marc, qui voulait l'obliger à mettre en tête du cahier des plaintes les mots de religion prétendue réformée, f 1652. Il a laissé un traité: De l'état visible et invisible de l'Église, etc., contre la fable du Purgatoire. La Roch. 1612.

3° Antoine, son fils, sieur de Flottemanville, né 1610, pasteur à Bayeux 1637, arrêté 1685, emprisonné au Havre, déporté en Hollande. Nommé pasteur à Zutphen, f 1691. Il eut deux fils; François, le plus jeune, suivit la carrière des armes et f 1685; l'autre fut

4° Samuel, né à Bayeux 1638, desservit cette église avec son père jusqu'en 1685, l'accompagna en Hollande, lui succéda à Zutphen, et f 1721. Il a laissé des Exercices critico-historiques, in-4° qui sont une critique ingénieuse et savante des Annales de Baronius; des Annales politico-ecclésiastiques depuis Auguste jusqu'à Phocas, un peu diffus, mais recommandable par son exactitude; enfin une Morale théol. et politique sur les vertus et les vices de l'homme, Amst. 1703, 2 vol. in-12, où il essaie de séparer la morale de la dogmatique, sans arriver toutefois à des conclusions bien satisfaisantes; son analyse des vices et des vertus est la meilleure partie de l'ouvrage.

5° Henri, oncle du précédent, second fils de Benjamin, et frère d'Antoine; né 16 oct. 1615, t à Rouen 20 oct. 1695: avocat distingué du barreau de Rouen, généralement estimé, fut en 1677 commissaire pour les affaires de la religion, montra beaucoup de zèle, et cependant ne fut nullement inquiété lors de la Révocation. A écrit un Traité des hypothèq. et des Comment, sur les contâmes du pays et duché de Normandie. Il eut une fille qui épousa Paul Bauldri, prof, d'hist. eccl. à Utrecht, et 2 fils:

6® L'alné, Jaques, né à Rouen le 6 ou 8 août 1653, dit de Beau val, étudia la théologie successivement à Saumur, Genève et Sedan. Nommé pasteur à Rouen 1676, il fut chargé en 1679 du sermon d'ouverture du synode de Saint-Lô. En 1684 il épousa Suzanne Du Moulin, fille du pasteur de Chateaudun et petite fille du célèbre Pierre Du Moulin. Travailleur infatigable il s'occupait surtout d'études historiques et acquit bientôt la réputation d'un savant consommé. Son église ayant été supprimée en 1685, il obtint par la grâce du roi la permission de s'exiler en Hollande, où il fut nommé pasteur de Rotterdam 1691, et en 1709 pasteur de Lia Haye. II avait de grandes aptitudes comme homme d'État: l'observation est de Voltaire; il réussit dans plusieurs négociations importantes dont il fut chargé par le grand pensionnaire Heinsius, et rendit des services signalés à l'abbé Dubois 1716 quand celui-ci vint à La Haye pour y négocier le traité de la triple alliance; il en fut récompensé par la restitution de ses biens. Historiographe attitré des États-Généraux il écrivit les Annales des Provinces-Unies, 2 vol. f°, auxquelles on ne reproche que son ardent patriotisme pour la France. Il eol plusieurs fois à intervenir par ses conseils dans les affaires des religionnaires français; il blâma l'insurrection des camisards, ce qui acheva de le mettre mal avec son ancien professeur et beau-frère Jurieu. Il recommanda Antoine Court au cabinet du Palais-Royal, et adressa à ses coreligionnaires une instruction pastorale qui fut imprimée à Paris par ordre de la cour et répandue à profusion dans les prorinces. Accablé par les fatigues encore plus que par l'âge, il dut dans ses dernières années concentrer toute son activité sur ses fonctions d'historiographe et sur la correspondance qu'il entretenait avec les princes, les magistrats et les savants de toutes les parties de l'Europe, f 22 déc. 1723, ne laissant qu'une fille, mariée au conseiller de La Sarraz, et dont le petit-fils était naguère ministre d'État du roi des Pays-Bas. D'un caractère affable, généreux et plein de droiture, il fut aimé et regretté même de ceux dont il était l'adversaire politique ou religieux. Il a laissé de nombreux ouvrages, Sermons, Entretiens sur la religion, Traité de la conscience, Lettres pastorales, livres de controverse, Notes sur lfA. et le N. T. etc. Les plus considérables sont, outre les Annales des Prov.-Unies, son examen des méthodes proposées pour la réunion des protestants avec l'Égl. rom.; son Traité des préjugés, son Traité de la communion, très apprécié même des catholiq.; son Hist. deségl. réformées, Rotterd. 1690; son Hist. de l'Égl. depuis J.-C. jusqu'à présent, etc. Enfin la Biblioth. nationale de Paris possède un mss. de lui, en latin, sur la République et cité de Genève, intéressant pour l'histoire des réfugiés. V. Haag.

7<> Henri, second fils d'Henri (5°) né 7 août 1656 à Rouen, f 29 mars 1710 à La Haye; reçu avocat à 20 ans, se fit une brillante réputation à Rouen, mais dut quitter la France à la Révocation et se rendit en Hollande 1687. Il a laissé un Dictionn. universel, 3 vol. f&; un livre sur la Tolérance des religions, et plusieurs écrits polémiques, notamment contre Jurieu, avec qui il ne se réconcilia que sur son lit de mort. — La maison des Basnage est marquée par un marbre à Rouen, rue de l'Écureuil.

BASTHOLM, Dr en théol. né 1740, t pasteur à Copenhague, prédicateur de la cour, et inspecteur de l'académie des cadets; auteur de plusieurs écrits sur l'histoire juive, les doctrines philosophico-religieuses des anciens peuples, l'amélioration du culte public, la religion naturelle, etc. Une certaine indécision dogmatique l'a empêché d'exercer l'influence à laquelle ses talents et son érudition lui auraient donné des droits.

BATH-KOL, fille de la voix, c.-à-d. de la voix de Dieu, mode de révélation que les talmu-distes rattachent à certaines manifestations de l'A. et même du N. T. Ce serait comme l'écho d'une voix venue du ciel. Les rabbins admettent qu'entre les temps des prophètes et leur époque, il y a une différence, et que cette différence se traduit aussi et surtout par une révélation moins distincte de la volonté de Dieu; ils n'ont plus la prophétie, mais il reste encore une certaine voix, un esprit, un souffle, quelque chose d'analogue à ce qui est mentionné Deut. 4, 12. 36. 1 Rois 19, 13. Matt. 3, 17. 17, 5. On pourrait l'appeler intuition, pressentiment, seconde vue, ou voix intérieure: ce n'est plus la prophétie proprement dite, mais c'est l'accomplissement de cette parole: Dieu, ne s'est jamais laissé sans témoignage, Act. 14, 17. A chacun de comprendre quand Dieu lui parle, et de saisir les appels les plus indirects, qui peuvent être pour lui, sous une apparence fortuite, la voix du ciel. Ainsi quand Augustin entendit à Milan les enfants chanter: Prends et lis.

BAUER, Bruno, né 6 septembre 1809 à Ei-senberg, Saxe-Altenbourg, fils d'un peintre sur porcelaine, étudia à Berlin où il professa quelque temps, puis fut nommé 1839 prof, extraordinaire à Bonn, où il brilla comme un des coryphées de la gauche hégélienne. Sa critique négative, dirigée en 1840 contre l'évang. de

Jean9 puis contre les synoptiques, lui valut l'interdiction de continuer son enseignement. II ne voyait dans les récits bibliques que des inventions arbitraires, sans fondement et pleins de contradiction. 11 revint à Berlin en 1842, fit imprimer à Zurich en 1843 son christianisme dévoilé, qui fut poursuivi même par le gouvernement libéral de ce canton. Il s'oppose à l'émancipation des juifs, et se montre partisan en politique du système césarien. En 1850 il publie sa critique des Lettres de Paul, et va plus loin que l'école de Tubingue en niant l'authenticité de ses principales épîtres. Schwartz voit en lui la victime d'une logique enragée, f à Rixdorf 10 avril 1882, à peu près oublié de ses contemporains, qu'il méprisait.—Outre son frère Edgar, qui partageait les mêmes idées, il faut nommer encore Aurel-Reinhard-Egin B. qui, après avoir été pasteur catholique-allemand à Dresde, rentra en 1849 dans l'église protestante; auteur d'écrits populaires sur les réformateurs; et Georges-Laurent B., prof, de théol. à Altdorf et Heidelberg, rationaliste, auteur d'une Théol. de l'A. T., d'une Mythologie de l'A. et du N. T., d'Antiquités hébraïques, etc.

BAUMGARTEiV, Sigismond-Jaques, né 1706 à Wollmirstâdt, f à Halle 1757, théologien allemand qui peut être considéré comme formant la transition entre l'école de Spener et de Franke et le rationalisme moderne, sans qu'on puisse toutefois lui reprocher ni hésitation, ni tergiversation, ni abandon de la foi chrétienne. Mais il maintint les droits et la nécessité de la science, contre les disciples successeurs de Spener et de Franke, qui paraissaient en faire bon marché. Élevé dans la maison de Halle, dont son père avait été directeur, il fit toute sa carrière à Halle, comme maître de latin, puis vicaire, professeur suppléant, pasteur et enfin professeur de théologie. Il obtint en cette qualité d'immenses succès et ne compta jamais moins de 3 à 400 élèves. Doué d'une grande facilité de travail et d'une vaste érudition, il a composé beaucoup d'ouvrages dont la plupart n'ont été publiés qu'après .«a mort: les 16 premiers volumes d'une Hist. univ., un abrégé de l'Hist. de l'Église, une Dogmatique chrétienne en 3 vol.; une Dissertation sur la conversion non instantanée, en réponse à quelques exagérations, etc. Sa vie a été écrite par Semler. — Son frère plus jeune, Gottlieb, 1714-1762, se distingua dans la philos, et les beaux-arts.

B AUMG ARTEN - CBUSIUS, Louis - Fréd. -Ot-ton, né 31 juilL 1788 à Mersebourg, fils du pasteur et surintendant de la ville, qui avait joint à son nom celui de son beau-père. Élevé dans la crainte de Dieu, il étudia d'abord à Grimma, puis à Leipzig, où il prit ses grades comme philologue, philosophe et théologien, et fut appelé en 1812 à léna, où il parcourut une brillante carrière. Il professa sur presque toutes les branches de la théologie, sauf l'histoire ecclésiastique, et exerça une bonne influence sur le séminaire. Il écrivit en faveur de la liberté religieuse et combattit vivement le rationalisme vulgaire. 11 se rapprochait des idées de Schleier-macher, et sur plusieurs points de Schelling. Ses travaux sur l'Hist. des Dogmes ont fait époque 1832-1840. f 31 mai 1843, d'une attaque d'apoplexie, laissant plusieurs ouvrages inachevés sur Jean, les synoptiques, les Romains, etc., qui furent cependant publiés 1844 par les soins de ses collègues et de ses élèves. Hase acheva son Hist. des Dogmes 1845. Sans avoir pris une position dogmatique bien tranchée, il resta toujours sur la base de l'Évangile, comme seule puissance de Dieu à salut.

BAUMGiERTNER, Augustin, ou Paumgart-ner, d'une famille noble de Bavière, né à Munich 1531, f chancelier à Landshut le 18 avril 1599; fit ses études à Ingolstadt et fut reçu docteur en droit. Il se distingua surtout au concile de Trente 1562, où il fut envoyé par l'archiduc Albert avec le jésuite Cavillon. Après avoir témoigné de tout son zèle pour la défense de l'Église catholique, il énuméra les dangers que lui faisait courir < la peste des novateurs, » et il entra dans le vif de son sujet en montrant comment les vices du clergé étaient la principale cause du succès des évangéliques. < Sur cent prêtres bavarois, une enquête récente Ta prouvé, il en est à peine 3 ou 4 qui n'aient pas de concubine, etc. » On lui répondit par des compliments et de vagues promesses; l'influence de Cavillon l'emporta au concile et dans le pays, où les jésuites regagnèrent bientôt le terrain qu'ils avaient cru perdu.

BAUR, Ferd.-Christian, le chef de l'école de Tubingue, né 21 juin 1792 à Cannstadt, étudia au séminaire de Blaubeuren où il passa en 1817 comme professeur; appelé à 1826 à Tubingue comme prof, de théol., il y resta jusqu'à sa f 2 déc. 1860. D'abord disciple de Schleierma-cher, il subit peu à peu l'influence de Hegel, et après avoir défendu la révélation, la résurrection de J.-C. et les faits évangéliques, il en vint à ne plus voir dans le christianisme qu'une des formes du développement religieux de l'humanité. Dans sa Symbolique et Mythologie 1824 on voit percer déjà cette tendance à rattacher la doctrine du Christ aux religions païennes, et dans le christianisme lui-même il distingue, dès son apparition, deux courants distincts, l'un judéo-chrétien, représenté par Pierre; l'autre gnostique, représenté par Paul. De là aussi une critique de tendance, qui lui fait classer les écrits du N. T. d'après le parti auquel ils appartiennent. Mais par la force des choses le conflit cesse, la Intte prend fin; les partis s'unissent pour résister au paganisme; il se fait entre eux une conciliation, un compromis, qui devient le catholicisme vers 170, et qui plus tard sera le protestantisme. Si les 4 grandes épîtres de Paul condamnent le judaïsme, l'Apocalypse prend sa défense, et les Actes cherchent à tenir la balance égale entre les uns et les autres; d'où il résulte, selon Baur, que les Actes appartiennent à une époque plus récente. Logicien impitoyable, Baur a pu faire l'expérience qu'en religion la logique ne suffit pas- Ses disciples eux-mêmes avouent qu'il a dû forcer certains textes pour les adapter à son système historique, et après l'avoir suivi avec enthousiasme dans son travail de démolition, ils se divisèrent quand il fut question de reconstruire. On peut dire que cette école a duré de 1842 à 1857; Strauss pour sa part concourut à la discréditer en exagérant ou en précipitant ses conclusions, mais si Baur a désavoué Strauss, qui faisait de Jésus un mythe, il s'est exposé lui-même au reproche de l'avoir pour ainsi dire laissé dans l'ombre, et d'avoir donné plus d'importance aux discours de ses disciples. On n'en doit pas moins reconnaître qu'il a rendu de grands services à la science théologique en élargissant ses cadres et en lui frayant des voies nouvelles. Son principal ouvrage est l'Histoire de l'Église dans les 3 premiers siècles. Il a publié en outre une revue, Theol. Jahrbucher, one dissertation sur le Parti de Christ (1 Cor. 1,12), le Manichéisme, la Gnose chrétienne, les soi-disant Épîtres pastorales, Doctrine de la Rédemption, Doctr. de la Trinité, Recherches critiques sur les Évang. canoniques, et une foule d'autres ouvrages, sans parler de plusieurs écrits posthumes qui ont de la valeur. Parmi ses disciples on compte Zeller et Schwegler, qui l'un et l'autre finirent par abandonner la théologie. C'est le prof. Beck qui inaugura la réaction contre l'intellectualisme pur de Baur.

BAVIÈRE. Cette contrée, encore presque déserte du temps de César, connue d'Auguste sous les noms de Norique et de Vindélicie, mais avec des frontières mal déterminées; peuplée au 5®e siècle de Boïes, ou Boïares, venus de Bohême, conquise par les Francs sous Dago-bert, se constitua en royaume indépendant 743 sous Odilon. Après une histoire des plus accidentées, tour à tour empire et duché, elle prit une certaine consistance homogène en 1507 sous Albert H, duc et électeur, et ne fut de nouveau érigée en royaume qu'en 1806. L'établissement du christianisme y date environ du 3m« ou du 4me siècle. Constantius y prêcha l'Évangile au commencement du 5*»©, et quand Séve-rin y arriva, vers 454. il trouva partout des temples et le culte organisé; il fut l'ange gardien de l'Église contre les barbares et contre l'arianisme. Au 8m* siècle c'est Boniface qui évangélise, et déjà de nombreux couvents et des évêchés prouvent que le christianisme a poussé de profondes racines. La Réformation fut d'abord bien accueillie du peuple, du clergé, des États du pays et du prince lui-même. Mais après la Diète de Worms, le duc Guillaume, réconcilié avec l'empereur, se tourna contre Luther et introduisit dans le pays l'inquisition avec toutes ses rigueurs; nombre de personnes furent brûlées; en quelques endroits, par humanité, on se contenta de les noyer; à Munich 29 d'un coup. Si quelques parties de la Bavière durent attendre le 19me siècle pour avoir un peu de liberté religieuse, certaines villes, comme Nuremberg. Augsbourg, Ratisbonne, Spire, furent plus privilégiées et adoptèrent la réforme, en tout ou partie, avec l'agrément ou par la protection spéciale des princes évangéliques. En 1549 le duc Guillaume appela les jésuites à son aide. Son successeur, Albert V, 1550-79, se montra d'abord assez modéré; il aurait voulu une réforme et appuya à Trente la communion sous les deux espèces et le mariage des prêtres, mais ne l'ayant pas obtenue il s'inclina devant les décrets du concile et devint un des plus ardents persécuteurs des protestants; il introduisit l'inquisition malgré les protestations des États du pays. Maximitien II obtint de l'empereur, après la guerre de Trente ans, le titre d'électeur, comme récompense de l'énergie qu'il avait déployée contre la réforme. Sous les princes suivants il y eut des alternatives de rigueur et de tolérance, jusqu'à ce qu'enfin, sous • Joseph II et le ministère de Monpélar la tolérance devint la règle, et qu'en 1818 la charte consacra les droits des protestants, tout en leur refusant le titre d'évangéliques. La Constitution actuelle de l'Eglise reconnaît le roi comme èvêque suprême, avec un synode général et des synodes diocésains. Erlangen possède une faculté de théologie protestante qui a parfois brillé d'un vif éclat.

BAVON, ou Bav, ermite, patron de la ville de Gand, + vers 650, avait mené d'abord une vie mondaine. Ayant reconnu plus tard un homme qu'il avait fait vendre comme esclave, il n'eut de repos que lorsque cet homme eut consenti à le punir de son crime en le battant, et en le faisant Conduire en prison après lui avoir rasé la tête.

BAXTER, Richard, né à Rowdon, Shrop-shire, le 12 nov. 1615, + à Londres le 8 déc. 1691; auteur du Repos éternel des saints, du Pasteur réformé, d'un Appel aux inconvertis, et de divers autres ouvrages. Son éducation fut incomplète, par suite de sa pauvreté et de sa mauvaise santé. Pasteur à Kidderminster 1640,

il se joignit, malgré son affection pour la famille royale, à l'armée parlementaire et devint 1642 le chapelain de Cromwell, cherchant à inspirer aux chefs et aux soldats un esprit dç modération. Il blâma sévèrement l'exécution du roi et le bannissement de sa famille. A la restauration il intervint pour amener une réconciliation entre les épiscopaux et les presbytériens, mais il échoua. L'acte d'uniformité fut promulgué en 1662, et Baxter dut quitter l'Église avec 2000 autres non-conformistes. Il se retira à Àcton, Middlesex, où il se consacra surtout à des travaux littéraires. L'Acte d'indulgence 1672 lui ayant rendu le droit de prêcher, il s'établit à Londres, mais fut de nouveau en butte aux tracasseries du pouvoir, et en 1685 il fut condamné par le lord chef de justice Jeffries à une amende et à la prison. En nov. 1686, après 18 mois de prison, il fut gracié par l'intercession de lord Powis, et termina en paix ses jours.

BAXTERIANISME. On désigne sous ce nom en Angleterre le calvinisme mitigé, dont Baxter était le représentant. C'est moins une école proprement dite, ou une secte, qu'une tendance. Dieu a bien élu un certain nombre d'hommes pour le salut, mais il n'en a point déterminé pour la condamnation.

BAY (Michel de), ou Bains, né à Mélin, Hai-naut, 1313, étudia à Louvain, où il se distingua par son zèle, son sérieux et sa piété. D'abord directeur d'un établissement de bienfaisance, il fut nommé en 1551 docteur et prof, provisoire de théologie à Louvain. Il substitua k la scolas-tique pélagienne des scotistes la doctrine de la Bible, des pères et de saint Augustin en particulier, sur la grâce, préludant ainsi aux controverses jansénistes. Le professeur titulaire, à son retour de Trente, s'écria que le diable seul avait pu introduire de pareilles nouveautés dans l'enseignement, et il obtint de la Sorbonne la condamnation de 18 de ses thèses. De Bay répliqua vivement et prouva par l'Écriture l'incapacité de l'homme pour faire le bien et l'impossibilité du salut par les œuvres. Ce qui rendait la lutte plus sérieuse, c'est que ces deux doctrines étaient précisément celles qui caractérisaient la Réformation. En dépit du légat papal, De Bay fut envoyé à Trente par Philippe II, ou plutôt par Granvelle, 1563, comme délégué du roi, et il se fit remarquer au concile par son éloquence et par son caractère, mais sans avoir eu l'occasion de mettre en avant ses vues particulières. A son retour la dispute commença. Ses adversaires ne purent obtenir sa condamnation par l'université de Louvain, mais après plusieurs tentatives ils réussirent à faire condamner par Pie V, bulle du 1** oct. 1567, 76 propositions tirées de ses ouvrages, comme reproductions adoucies des doctrines d'Augustin. En 1569 il publia un mémoire justificatif et prouva que les propositions qu'on lui imputait n'étaient pas de lui. La bulle n'en fut pas moins publiée, mais l'université de Louvain refusa de la recevoir, conserva à De Bay sa position, le nomma doyen, puis chancelier, quoiqu'il maintint que les évêques tirent leur pouvoir directement de Dieu. II fut même nommé inquisiteur général. Sixte Y lui fut plutôt favorable et se borna à imposer silence aux 2 partis, f 16 sept. 1589. universellement respecté. Ses ouvrages, presque tous polémiques, ont été publiés après sa mort par le bénédictin Gerbéron, 2 vol. 4°.

BAYLE, Pierre, né 18 nov. 1647, au Carlat, comté de Foix, d'une honorable famille de Montauban. Son père, Jean, Guillaume, ou Jacob, était pasteur au Carlat; + 30 mars 1685, laissant 3 fils: Jacob, qui fut le collègue de son père et fut enfermé dans un cachot où il mourut le 12 nov. 1685; Pierre, dont il est ici question, et Joseph, qui, après avoir étudié à Puy Laurens et à Genève, précepteur chez le marquis de Benac à Paris, f le 9 mai 1684. — Pierre, jusqu'à 19 ans, n'eut d'autre maître que son père. Il tomba deux fois malade, à Puy Laurens et à Saverdun. pour avoir trop travaillé. En février 1669 il se rendit à l'université de Toulouse, où, sous l'influence d'un jésuite, il abjura le protestantisme le 19 mars; mais au bout de 18 mois, comprenant qu'il avait fait une œuvre précipitée, ne pouvant admettre le culte de la créature, ni le mystère de la transsubstantiation; cédant aux raisons de son cousin Naudis de Bruguières et de son frère Jacob, il quitta Toulouse le 19 août 1670, abjura le 21, et partit pour Genève où il arriva le 2 sept. Nommé régent de seconde en 1671, puis précepteur à Rouen d'abord, et ensuite à Paris, il fut appelé comme professeur à Sedan en nov. 1675, et y resta jusqu'au moment où l'université fut fermée par arrêt du conseil, 9 juillet 1681. La ville de Rotterdam fonda immédiatement pour lui et pour Jurieu. deux chaires réunies sous le nom d'École illustre. Il venait de publier des Pensées diverses k l'occasion de la Comète qui parut en 1680, pour combattre le préjugé vulgaire qui voyait dans ces météores des présages effrayants. En 1682, il publiait à Amsterdam sa remarquable Critique de l'Hist. du calvinisme par Maimbourg. Il entreprenait en 1684 sa célèbre revue littéraire: Nouvelles de la républ. des Lettres, qui lui fit tant d'admirateurs et tant d'ennemis, et qui inaugura la véritable critique française. Enfin il parut en 1690 à Amsterdam, sans nom d'auteur un Avis important aux réfugiés sur leur prochain retour en France, qu'on attribua à Bayle quoiqu'il le désavouât, et qui était une fine et spirituelle critique du travail de Jurieu qui avait prédit pour 1689 la fin des persécnlions. Jnrieu irrité s'en prit à Bayle, et après trois années de répliques, de dupliques et de disputes peu édifiantes, Jurieu qui avait eu le dessous, mais qui avait pour lui la majorité du Consistoire, les préventions de Louis XIV et les terreurs chimériques de Guillaume d'Orange, obtint le 30 oct. 1693 que Bayle fût privé de sa charge et de son traitement, et qu'il lui fût interdit d'enseigner. Bayle qui avait des goûts modestes et à qui ses livres fournissaient le nécessaire, ne s'émut pas beaucoup de ces loisirs forcés, et des offres très avantageuses lui ayant été faites d'autre part, il les refusa, ne se souciant plus de s'exposer à ces « entremangeries professorales. » A partir de ce moment il se consacra tout entier à ses travaux littéraires, et notamment à la composition de son grand Dictionnaire historique et critique, dont il avait déjà publié le Projet en 1692, et dont la ire édition parut 1695-97. Il en a paru onze éditions, sans parler des abrégés, et des traductions en anglais et en allemand. Cet ouvrage aussi remarquable par la sagacité critique et par l'étendue des connaissances, que par l'agrément du style, par son bon sens et par son esprit plein de saillies, eut un immense succès et concilia à Bayle de nombreux admirateurs. Mais d'un autre côté certains passages obscènes, la recherche de la vulgarité, l'affectation d'an scepticisme outré, la complaisance avec laquelle l'auteur semblait mettre en relief les objections soulevées contre la Providence, la révélation, le christianisme et la doctrine évan-ffélique, lui suscitèrent des ennemis acharnés. A l'instigation de Jurieu, le Consistoire de Rotterdam chargea une commission de voir Bayle et de lui demander des explications. L'entrevue fat courtoise, et Bayle, après s'être justifié d'une manière générale, surtout quant à son intention d'attaquer les dogmes chrétiens, s'engagea à tenir compte des observations qui lui étaient faites, soit par des changements d'expressions, soit par des retranchements ou des additions. C'est ce qu'il fit en quelque mesure dans sa 2e éd. 1702, 3 vol. f°, mais, comme on le comprend, certaines modifications de détail ne pouvaient pas changer l'esprit général du livre, qui reste aujourd'hui, avec tout ce qu'il renferme de richesses, l'un des arsenaux les mieux fournis de la critique négative. Il semble que Bayle, se rappelant la double abjuration de sa jeunesse, ait voulu se mettre en garde contre toute affirmation prématurée et qu'il se soit infligé comme pénitence le Que sais-je? de Montaigne, dont il avait fait ses premières lectures, et dont il avait si mal profité. Il se défendit toute sa vie d'être un incrédule ou un athée; il ne cessa de remplir ses devoirs religieux; quelques-unes de ses pages trahissent une foi simple et vraie à l'Évangile, et c'est par l'esprit, et non par le cœur, qu'il se laissa entraîner souvent à faire ressortir les difficultés incontestables que présentent, pour la raison, certains faits ou certaines doctrines que l'Église elle-même déclare être des mystères incompréhensibles. Quoi qu'il en soit, et comme il touchait à tous les sujets, ses ennemis eurent beau jeu à détacher des fragments de son travail et à en poursuivre la condamnation. Jurieu, en particulier, après l'avoir dénoncé comme impie au Consistoire et au synode de Delft (qui n'y fit aucune attention), le dénonça au prince d'Orange, devenu roi d'Angleterre, comme ennemi de l'État et comme partisan secret de la France; il ne fallut rien moins que la protection de lord Shaftes-bury pour le mettre à l'abri de nouvelles persécutions. Bayle continua donc ses travaux, développant et complétant son Dictionnaire, et comme il lui restait un grand nombre de notes et de notices littéraires, historiques ou autres, qui ne pouvaient entrer dans son cadre, il les publia à part sous le titre de: Réponse aux questions d'un provincial, Rotterd. 1703-06. Le 28 déc. 1706 on le trouvait mort tout habillé dans son lit; il soufTrait depuis plusieurs mois d'une affection de poitrine, mais n'avait rien voulu faire pour la guérir; toujours sceptique. — La révocation de l'Édit de Nantes et les persécutions religieuses furent le seul point sur lequel il manifesta clairement ses opinions. Indigné de ces mesures iniques, auxquelles il dut en partie la mort de son frère, il écrivit en 1685: Ce que c'est que la France toute catholique sous le règne de Louis-le-Grand; et en 16186: Comment, philosophique sur ces paroles de J.-C.: Contrains-les d'entrer, ou Traité de la tolérance universelle. Il niait la compétence de l'État dans les questions religieuses, ce qui fit bien vite mettre son livre à l'index chez les catholiques; mais ses idées ne trouvèrent pas même grâce chez certains protestants, comme Jurieu, qui ne voyaient dans la tolérance qu'une indifférence déguisée. Ses œuvres diverses, presque toutes inédites, ont été publiées à La Haye 1727, par Des Maizeaux, 4 vol. f°. L'édition la plus récente de son Dictionn. est celle de Beuchot, 16 vol. 8°. 1820-24.

BÉÀRN (Le), province de France enclavée auj. dans le département des Basses-Pyrénées, faisait autrefois partie du royaume de Navarre. C'est sous le règne de Henri II d'Albret et de Marguerite sa femme, sœur de François que la Réforme s'y introduisit. Marot, Calvin, Mé-lanchthon, Lefèvre d'Étaples, Gérard Roussel trouvaient au château de Pau un accueil empressé et une retraite sûre. Marguerite, sans avoir franchement embrassé la religion réformée, écoutait cependant le prêche, chantait les

psaumes, et tolérait l'exercice du culte huguenot; les gens de la cour pouvaient y assister; les nouvelles doctrines se répandirent peu k peu de la cour dans la ville et de celle-ci dans les campagnes. Mais Antoine de Bourbon et Jeanne d'Albret, fille de Marguerite, favorisèrent d'une manière plus énergique le développement de la Réforme dans leurs États. Antoine s'était déclaré l'adhérent du calvinisme. Des ministres zélés, Vignaux, David, Boisnormant venu de Genève sur la demande expresse du roi, prêchaient publiquement, élevaient des temples nombreux; beaucoup de jeunes gens partaient pour la Suisse afin de s'y former aux fonctions du ministère. Lorsque Antoine, circonvenu par les intrigues de Catherine de Médicis, eut abandonné son parti, Jeanne d'Albret ne faiblit pas. Grâce à une sage administration, grâce aux efforts des prédicateurs toujours plus nombreux, un grand changement s'opéra dans le Béarn. L'Évangile se répandit comme une traînée de poudre d'un bout à l'autre de la province, sauf chez les Basques qui ne voulurent pas répudier leurs anciennes traditions. Mais dans le reste du pays, des districts entiers passèrent au protestantisme; les curés durent abandonner leurs par roisses. Un changement moral correspondit à ce changement religieux; par des lois souvent un peu sévères, Jeanne réprima la paresse, l'ivrognerie et la mendicité qui en est la conséquence. En 1566 fut fondée une Académie célèbre, d'abord à Lescar, puis à Orthez, où, sous les yeux de maîtres illustres, Viret, Nicolas des Gallars, Lambert Daneau, les jeunes Béarnais purent recevoir une éducation classique complète; la théologie, la philosophie, leur étaient enseignées aussi bieu que le latin et le grec; celte académie forma de nombreux pasteurs. Deux révoltes successives des seigneurs catholiques, 1569 et 1570, faillirent compromettre la é cause de la Réforme. Jusque-là les deux cultes avaient été tolérés et avaient vécu paisiblement côte à côte, et, chose inouïe au 16^ siècle, ils se célébraient parfois dans le même édifice. Mais Jeanne crut sa sécurité compromise, etaprèsavoir vaincu la révolte, elle interdit l'exercice public delà religion catholique; les revenus des prêtres et des moines furent affectés à des œuvres de charité et aux frais du culte; les couvents transformés en hôpitaux et en établissements d'instruction. Toutefois, cette interdiction dura peu. A la mort de Jeanne, son fils Henri, plus tard Henri IV, lui succéda, et sous son règne, même après qu'il fut monté sur le trône de France en abjurant, les huguenots n'eurent rien à craindre. Il n'en fut plus de même sous Louis XIII son fils et successeur. Malgré les protestations des notables et en particulier de Lescun, il proclama l'édit de réunion qui annexait le Béarn à

la France 1617, et à la tête d'une armée il entra dans sa nouvelle province, fit fermer les lieux de culte, chassa les pasteurs et rétablit le culte catholique. Ces mesures de rigueur ne suffirent cependant pas; car sous Louis XIV on voit Foucault dragonner le Béarn. La plupart des gentilshommes abandonnèrent la foi de leurs ancêtres ou s'expatrièrent. Cette foi se conserva pourtant de famille en famille dans mainte humble cabane, jusqu'au moment où elle put relever la tête, en recouvrant ses temples et ses pasteurs, 1789. Dans ce pays autrefois presque tout réformé il ne reste plus auj. que 4 à 5000 protestants, 8 églises et 16 annexes, qui composent la consistoriale d'Orthez. L. B.

BÉAT, ou Beatus, diacre d'Osma, au 8®e siècle, qui avec l'év. Etherius, s'opposa le plus énergiquement aux erreurs de l'Adoptianisme q. v., professées par l'archev. de Tolède.

BÉATIFICATION, v. Canonisation.

BEATON, David, né 1494, de la famille des comtes de Fife; élevé en France. Il remplaça son oncle, l'archev. de Saint-André, Écosse, quand celui-ci f 1539. Jaques V le nomma son garde des sceaux; il avait négocié le mariage de ce prince, d'abord avec Marguerite de France 1533, puis avec Marie de Lorraine 1538. Nommé cardinal la même année. A la mort du roi 1542, il se fit nommer légat du pape et grand chancelier de Marie Stuart, sous le nom et en l'autorité de laquelle il commit beaucoup de cruautés. Il est connu par la part qu'il prit au supplice de Wishart. A la fin sa tyrannie étant devenue insupportable, une conspiration se forma contre lui et il fut assassiné de nuit dans son château ✓ de Saint-André, 1546 ou 1547, peu de mois après Wishart.

BEAUMONT, François (de), baron des Adrets, né 1513 en Dauphiné, fit ses premières armes en Italie sous Lautrec, et fut nommé 1555 colonel des légionnaires du Dauphiné. Engagé dans une capitulation qu'il n'avait pas consentie, il réclama de d'Ailly auprès de François II la restitution du prix qu'il avait dû payer pour sa rançon, mais il fut débouté de sa demande par l'influence des Guise, qui n'aimaient pas en lui le protestant. Des Adrets, de son côté, tenait contre les Guise et pour la famille çoyale, Catherine et François; comme religionnaire il était surtout en rapports avec le prince de Condé, et c'est de lui qu'il prétendait tenir ses pouvoirs. Ayant appris les cruautés commises k Valence par le gouverneur de cette ville, la Motte-Gon-drin, et le soulèvement du peuple indigné de tant d'horreurs, 1562, Des Adrets accourut de Lyon avec une troupe d'insurgés, assiégea Gon-drin, mit le feu k l'hôtel où il s'était réfugié, et fit mettre à mort tous ceux qui essayèrent de s'enfuir. Le baron fit ensuite de Valence son

quartier-général; il reçut de Condé le titre de son «lieutenant en l'armée chrétienne, assemblée pour le service de Dieu, » interdit l'exercice du culte catholique dans le Dauphiné et commença pour la délivrance des églises opprimées une série d'expéditions où il se signala par la vigueur et la vertigineuse rapidité de ses manœuvres, par la hardiesse de ses entreprises, par Theureuse chance qui les couronna, non moins que par le caractère implacable de ses représailles. Il avait sous ses ordres des soldats qui avaient à venger leurs pères, leurs frères, leurs femmes, leurs amis, impitoyablement massacrés, volés ou déshonorés depuis des années, pt il ne lui fut pas toujours facile de calmer cette soif de vengeance. Il avait d'ailleurs coutume de dire que « le seul moyen de faire cesser les barbaries des ennemis est de leur rendre des revanches, » et que « pour réduire les catholiques aux lois de la bonne guerre, il fallait leur faire voir que les réformés savaient faire la mauvaise aussi bien qu'eux. » Personne sans doute ne songera à justifier Des Adrets des cruautés qui ont déshonoré ses victoires, mais il faut, pour le juger, se placer au point de vue de son temps et des circonstances où il se battait, se rappeler qu'il avait contre lui le féroce bourreau Montluc, se rappeler aussi qu'il ne faussa jamais sa parole, et que lorsqu'il avait promis à une garnison la vie sauve, il ne se crut pas, comme Montluc, autorisé par sa religion à violer les engagements pris. «Après Valence, Des Adrets entra à Lyon, où il proclama la liberté de conscience, et plaça la ville sous la garde de 2000 protestants; puis à Grenoble, où le culte réformé fut célébré le 3 mai 1562; puis à Vienne, avec le concours du magistrat Gabet. A la nouvelle des massacres d'Orange (5 juin), dont Varillas dit « qu'on n'avait jamais eu pareil exemple chez les chrétiens, » Des Adrets quitte Grenoble, se rend à Montélimar et à Pierrelatte où il rassemble en bâte 3 à 4000 hommes, dont 300 échappés aux massacres, et il fond sur la ville. La garnison épouvantée se réfugie dans le château et demande à capituler; mais ceux d'Orange, dit Brizard, furieux du massacre de leurs concitoyens, enfoncent les portes, fondent sur l'ennemi et ne font aucun quartier; les uns sont précipités du rocher, les autres passés au fil de l'épée. Des Adrets marche ensuite sur Bourg et Pont-Saint-Esprit, où il met des garnisons; sur Boulène, qui résiste et est mis à mort. Il revient sur Grenoble qui s'est soulevée, qui capitule à son approche, et qu'il épargne sans qu'il y ait eu ni sang versé, ni aucun désordre commis. Il traverse Lyon, dont il change le gouverneur, et marche sur Montbrison qu'il enlève avec sa furie ordinaire, 16 juillet. La garnison ayant tenté de résister, est passée par les armes; ceux qui ont échappé sont contraints de se précipiter du haut de la citadelle et Des Adrets s'amuse de ce jeu infâme. De retour à Lyon il apprend que le seigneur de Soubise vient d'y arriver, 19 juillet, comme lieutenant-général du prince de Condé. A cette première mortification s'en ajoute une seconde sous la forme d'observations sur sa conduite. Des éloges exagérés n'empêchent pas le baron de sentir l'amertume des reproches qui lui sont adressés; on lui recommande un peu plus de douceur envers les vaincus. Dissimulant son irritation il se prépare à rentrer en campagne, et remporte de nouveaux succès sur les bords du Rhône, jusqu'à Sorgues, mais il échoue devant Carpentras et doit ramener à Valence ses troupes harassées. Il laisse succomber Siste-ron, vole au secours de Montpellier, mais sans succès; veut courir au secours de Vienne, de Grenoble et de Lyon, mais se laisse surprendre par Nemours, et comprend que son étoile a pâli. Lui-même, froissé peut-être dans son amour-propre, n'a plus le feu sacré. Il s'abouche avec Nemours, et sous prétexte qu'il a toujours été au service du roi contre les Guise, il cesse d'être le chef des protestants pour n'être plus que le serviteur de la monarchie. Nemours attise dans son cœur le mécontentement en exagérant la sévérité avec laquelle il est jugé dans son propre parti, et après de longues et laborieuses négociations, après une courte captivité à Montpellier et à Nîmes, il rompt avec les protestants, reconnaît qu'il a traité avec Nemours, non par cupidité, mais « par vengeance et après l'ingratitude redoublée, « et se retire dans sa terre de La Frette 1563, où il abjure en apparence le protestantisme. Sa carrière comme chef huguenot avait à peine duré une année. Il reprit du service en 1567, mais les catholiques n'eurent jamais pleine confiance en lui; il fut même emprisonné comme suspect, et l'édit de pacification le tira seul du danger; le roi même lui rendit sa faveur. De Thou le vit à Grenoble en 1571, vieux, maigre, mais vigoureux et l'air d'un véritable homme de guerre. Après la Saint-Barthélemy, Des Adrets qui était resté protestant de cœur demanda sa retraite: il refusa 1577 d'entrer dans la Ligue, et f 1586 après avoir fait acte de catholicisme, ayant perdu la confiance des uns sans réussir à gagner celle des autres. Il fut enterré dans une chapelle de l'église paroissiale. Il avait survécu à ses 3 fils et ne laissa que 2 filles.

BEAUSOBRE, Isaac, né à Niort 1659, f à Berlin 1738. Savant ministre protestant, élève de Saumur, il était pasteur à Châtillon-sur-Indre quand la persécution éclata. Son église fut fermée; il brisa les sceaux qui y avaient été apposés, et dut s'enfuir. Il se rendit d'abord en

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Hollande, puis à Dessau auprès de la princesse d'Auhalt, où il écrivit sa Défense de la doctrine des réformés (contre des attaques luthériennes), et eniin à Berlin où il exerça pendant 46 ans les fonctions pastorales, également recommandable par sa piété et par son éloquence qui lui avait valu l'admiration du grand Frédéric. Il cumulait à la tin de ses jours tous les titres et fonctions compatibles avec son ministère. Il fut chargé avec son collègue Lenfant de reviser le recueil des Psaumes 1701, mais ce travail devenu nécessaire fut d'abord mal reçu des réfugiés; plusieurs regardaient comme inadmissible que des ministres berlinois sussent mieux le français que le roi David lui-même. Il publia ensuite, aussi avec Lenfant, une nouvelle version du N. T. 1718; les Remarques historiques qui devaient l'accompagner ne parurent qu'après sa mort, La Haye 1742. Il s'occupa surtout de Thist. de la Réformation, dont 4 vol. furent publiés en 1783, comprenant les années 1517-1530. Ce volumineux ouvrage devait être précédé d'une hist. des précurseurs de la Réforme, c.-à-d. de toutes les sectes qui dans tous les temps avaient nié l'autorité de Rome, pauli-ciens, bogomiles, vaudois, etc. Lenfant s'était chargé des hu sites. Beausobre n'a mené à bonne lin que l'Hist. du manichéisme, 2 vol. 4<> Ams-terd. 1734-39. ouvrage encore aujourd'hui très estimé. Un de ses (ils, également pasteur à Berlin, a publié à Lausanne 1755, 4 vol. des serinons de Beausobre. L'autre, Louis, a écrit Le Pyrrhonisme du sage, Berlin 1754.

BEBEL, Henri, né à Justingen en Souabe vers 1472 ou 1480, étudia à Cracovie la théologie et le droit, fut professeur à Bâle, puis curé dans sa ville natale, enfin 1497 prof, d'éloquence et de poésie à Tubingue. Il fut, avec Erasme, Reuchlin et Mélanchthon, un des restaurateurs de la culture classique. 11 flagella les vices de son temps, sans ménager le clergé, et reçut de Maximilien 1er, pour ses poésies latines, la couronne de laurier, 1501. Malgré le caractère licencieux de quelques-uns de ses écrits, entre autres du Triomphe de Vénus, qui le faisait assez bien venir dans les couvents, il appartient par sa science et par ses études critiques à cette phalange d'hommes distingués qui préparèrent les voies à la Réforme en faisant la guerre aux légendes, aux superstitions et aux mensonges. Il a écrit encore un Comment, sur la langue latine, un Traité sur l'Antiquité des Germains, un Éloge des Suéves, et des Facéties en 3 livr. f 1516.

BEBENBURG, Léopold (de), est un des hommes du 14®e siècle qui ont le mieux compris les droits de l'Etat. Destiné à la carrière ecclésiastique, il étudia à Bologne surtout le droit canon, et après avoir pris ses grades il fut appelé à Mayence, à WUrzbourg, comme chanoine et enfin à Bamberg comme évêque 1352. f 1363. Il prit le parti de Louis de Bavière dans sa lutte contre Jean XXII et Benoît XII, et le représenta à la diète de Francfort 1338. Il soutenait, non par des abstractions philosophiques, mais par l'histoire, que les rois et les empereurs tenaient leurs pouvoirs, non de l'évêquede Rome, mais du choix des électeurs. Ses motifs n'avaient aucun caractère de rébellion, et il resta par là dans les meilleurs termes avec Innocent VI, qui lui donna à Avignon la consécration épisco-pale.

BECCARELLI, v. Quiétistes.

BECCUS, v. Jean X, patriarche de Constan-tinople.

BECK 1° Jean, missionn. au Groenland, né 7 juin 1706 à Kreuzendorf, Silésie supérieure. Converti par la lecture du N. T., mis en prison pour ses convictions, il s'échappa et se réfugia à Herrnhut, où Christian David l'encouragea à aller dans le Groenland. Il y alla en effet en 1734 avec Frédéric Bohnisch. Ses premiers succès datent de 1738, lorsque le 3 juin il reçut à Neu-Herrnhut quelques Groënlandais du sud, parmi lesquels Kajarnak qui se convertit avec toute sa famille. II y eut encore un réveil en 1742. f au Groenland 19 mai 1777.

2° Jaq.-Christophe, né 1711 à Bâle, f 1785, prof, d'histoire et de dogmatiq., auteur d'un Dict. bibliq., d'une Synopsis sur les différentes branches de la théol., et de plusieurs dissertations et traités sur le Déluge, le Séparatisme, etc. Orthodoxe, mais sans raideur et avec une tendance libérale.

BECKET, Thomas, figure énergique et remarquable, plutôt que noble et sympathique. Né 1119 à Londres, cet homme élevé par des parents peu aisés, fut l'artisan de sa propre fortune, et ne dut la grandeur de sa brillante carrière qu'à ses talents, à sa souplesse et à sa force de volonté. Il fit ses études à Paris; de retour à Londres, il attira l'attention de Théo-bald, archev. de Cantorbéry, qui se l'attacha, l'emmena avec lui à Rome, l'y envoya seul une seconde fois avec une missiou de confiance, et le récompensa par le titre d'archidiacre et par le bénéfice de Beverley. C'était l'époque où les rapports étaient le plus tendus en Angleterre entre le pouvoir civil et le pouvoir spirituel sur les limites respectives de leurs attributions. Becket se consacra entièrement à son ministère et se rendit si recommandable que Henri II, sur la recommandation de Théobald, le nomma grand chancelier du royaume et précepteur de son fils. Dans ses nouvelles fonctions, Becket fit tout pour plaire au roi; il fut courtisan, politique, mondain, complaisant, et quand l'archevêché de Cantorbéry fut devenu vacant..

Henri II intima au chapitre l'ordre de porter ses voix sur son favori. Le chapitre obéit en mnrmurant, et Becket fut nommé, 1162. Mais immédiatement, par une métamorphose que rien ne faisait pressentir et qui fut un scandale pour le royaume et pour le roi, il se tourna contre son souverain, lui contesta toute compétence ecclésiastique, se rendit à Tours ou le pape se trouvait 1163, pour lui remettre le pal-lium, ne voulant tenir que de lui son archevêché, revint à Londres, où dans une assemblée du clergé il refusa lui seul, de reconnaître les anciens droits de la couronne, à moins qu'on y ajoutât une réserve en faveur des droits de l Église. Il se fait condamner comme rebelle par le parlement, s'enfuit le 2 nov. 1164, se rend à Sens où était le pape, puis au couvent de Pon-tigny, et se fait bienvenir de Louis-le-Jeune. Mais le pape a compris qu'il fallait faire des concessions; Becket, qui les condamne avec violence en profite cependant pour rentrer en Angleterre, mais il y rentre en ennemi bien résolu de reconquérir le terrain abandonné par le pape. Il recommence à attaquer les statuts de Clarendon qu'il avait jurés; il attaque les droits d'Henri, et 4 gentilshommes, fondant îur lui dans la cathédrale, le percent de leurs ^pèes, 29 déc. 1170. On a voulu faire le roi complice de ce crime, mais il l'a formellement désavoué. Becket fut canonisé par Alex, qui l'avait poussé à la résistance, et Henri dut faire pénitence sur son tombeau, mais Henri VIII le raya de son calendrier.

BÉDE, surnommé le Vénérable, né à Wear-mouth, Durham, 672, f 26 mai 735 dans son couvent de Jarrow, fut par sa vie, ses talents et sa piété, une des gloires de l'Angleterre et de son époque. Ses parents l'envoyèrent dès l'âge de 7 ans étudier dans le monastère du célèbre Benoit. On a peu de détails sur sa vie- Il fut ronsacré diacre à 19 ans, et fut bientôt si considéré que le pape Serge l'appela à Rome, mais il refusa. Il ne quitta son couvent qu'une seule fois dans les dernières années de sa vie. Il passait son temps à enseigner et à lire la Bible; des rois lui faisaient la cour, ses élèves devenaient évêques et archevêques, et il resta toujours un simple frère. Sa fin fut aussi paisible que sa vie; souffrant et malade, il chantait et priait pendant ses insomnies; le jour, dans son lit, il donnait encore ses leçons. Il avait entrepris la traduction de l'Évangile de Jean; le jour de l'Ascension il n'avait plus qu'un chapitre à dicter; après qu'il eut fini le dernier verset, il expira en disant: « Gloire soit au Père, au Fils et au Saint-Esprit. » Il a laissé une foule d'ouvrages sur presque toutes les branches, grammaire, exégèse, physique, histoire, astronomie, poésie, biographies, etc. Les principaux sont: son Hist. ecclésiastique de l'Angleterre, en 5 livres; sa Chronique, ou les Six Ages du monde; son Martyrologe, son Manuel de dialectique, des Psaumes et Cantiques, et ses Commentaires. Ses œuvres ont été souvent réimprimées, Paris 1544, Bâle 1563, Cologne 1612 et 1688, Londres 1843, par Giles. Son surnom ne lui fut donné qu'après sa mort.

BEETHOVEN, Louis (van), né 29 déc. 1770 à Bonn, d'une famille hollandaise, protestante et musicienne; le plus grand des symphonistes depuis Bach, il appartient à la musique religieuse par son: Christ au Mont des Oliviers 1800; une Messe 1810, et sa Missa solemnis 1818; peut-être aussi par son Hymne à la joie, de Schiller. Patronné par le prince Lichnowski, il se fixa dès 1787 à Vienne, où il f 24 mars 1827. Sa surdité avait influé sur son caractère, mais ses amis lui pardonnaient son humeur farouche à cause de son génie et de ses souffrances.

BEGGARS, Beghards, ou Béguins, religieux des deux sexes, qui parurent vers la fin du 12rae siècle et qui, sans faire de vœux proprement dits, s'associaient pour vivre ensemble et pratiquer les vertus chrétiennes. Il y avait plus d'agglomérations de femmes, ce qui s'explique par les croisades qui avaient fait beaucoup de veuves ou de filles délaissées, notamment dans les hautes classes; c'était aussi une bonne époque pour la vie contemplative. Peu à peu ces religieux s'affilièrent aux tiers ordres, les uns des dominicains, les autres surtout des franciscains; ils apprirent à mendier, à vagabonder, à former ci et là des relations faciles, ne craignirent pas de s'aboucher même avec des hérétiques, si bien qu'à la longue leur nom devint un sobriquet et fut pris comme synonyme d'hypocrites, d'hérétiques, et parfois de sorciers. Clément V lança contre eux deux bulles, 1311. Jean XXH protégea les béguines fidèles, et Grégoire XI étendit la même protection aux beghards qui offraient des garanties. On ne sait d'où vient leur nom; les uns le dérivent de beg, ou beggen, demander, mendier; les autres de sainte Bègue, sœur de sainte Gertrude et fille de Pépin; les autres enfin, avec Moréri, de Lambert-le-Bègue, prêtre de Liège vers 1180, qui aurait été leur fondateur. On nomme béguinage un ensemble de petites maisons indépendantes, réunies dans un enclos commun, où vivent ces religieuses, chacune conservant sa liberté personnelle, la plupart faisant de petits ouvrages pour accroître le bien-être de la communauté, et se réunissant pour les repas ou pour les exercices du culte. Il existe encore beaucoup de béguinages en Allemagne, en Hollande et en Belgique.

BEKKER, Balthasar, né 1634 à Metslaurier,

Frise occidentale, + juin 1698 à Amsterdam, cartésien, fut pasteur dans plusieurs églises de la Hollande, combattit l'astrologie et notamment la crainte des comètes 1682 et 1685, la foi aux possessions, aux démons, à la sorcellerie, à la magie; expliqua par l'accommodation les histoires de la Bible qui supposent l'existence du diable, rapporta à Néron le lion rugissant de 1 Pier. 5, 8., et se montra par la hardiesse de ses affirmations et par la frivolité de quelques-unes de ses pensées un des précurseurs du rationalisme moderne. Il fut d'abord suspendu, puis destitué. Son principal ouvrage a pour titre: Le Monde ensorcelé, 1691, trad. en franc. 1694.

BELGIQUE. Ce pays, qui n'existe comme royaume que depuis une cinquantaine d'années, mais qui a toujours eu son individualité distincte et dont la population se compose d'éléments celtes, germains et même romains, semble avoir été évangélisé déjà par les disciples immédiats des apôtres; on nomme Eucharius, l'un des 70 disciples qui serait arrivé l'an 42 de Rome à Trêves, avec Valerius et Maternus. Ce dernier, que la tradition identifie avec Je jeune ressuscité de Naïn, et qui serait ressuscité une seconde fois en Belgique, aurait fondé les églises de Tongres, de Maastricht, de Namur et de Dinant. + 130. Après Constantin, on trouve dans la Belgique orientale 4 évêchés: Trêves, Metz, Toul et Verdun; et dans la Belgique occidentale 10 évêchés, dont Cambrai, Tournai, Morin ou Thérouenne, avec Reims pour archevêché. Sous les Mérovingiens de nombreux prélats se distinguent par leurs talents et leurs vertus, saint Éloy, saint Médard, saint Hubert. Les églises et les couvents se multiplient sous les premiers Carlovingiens. Les irruptions normandes font des martyrs, et les reliques doivent être transportées de monastère en monastère, jusqu'au moment où les Normands bien installés se civilisent et se convertissent à leur tour. Puis viennent les luttes de la noblesse contre les bourgeois, et celle, des évêques contre les communes. Les croisades rallient les familles désunies, et l'on voit à Jérusalem Gode-froy de Bouillon, Robert de Flandres et Baudouin du Hainaut. L'évêché souverain de Liège brille par son ambition, mais aussi par les talents de ses titulaires et par leur libéralité dans les moments difficiles, ainsi dans la famine de 1045. Les beggars d'abord, puis, au 14™e siècle, les lollards trouvent dans la Belgique une terre hospitalière. Des sectes panthéistes travaillent à ruiner l'Église, mais les Jean de Ruysbrœck, les Gerhard Groot, les frères de la vie commune, les Érasme préparent de diverses manières les voies à la Réformation. La doctrine de Luther est saluée avec joie par le peuple, et quand les controverses deviennent trop violentes, les magistrats croient tout calmer en demandant qu'on se borne à prêcher l'Évangile. Avec Charles-Quint s'ouvre l'ère des martyrs. Henri Boes et Jean Esch sont brûlés les premiers le 1er juill. 1523. La persécution se poursuit sous Philippe II qui, lorsque les calvinistes lui présentent 1562 leur confession de foi, Con-fessio belgica, leur répond par un renvoi pur et simple aux articles du Conc. de Trente. Le duc d'Albe compte par milliers ses victimes, mais sa politique aboutit à la révolte et à la perte définitive des sept Provinces-Unies. L'université de Louvain maintient encore la doctrine augus-tinienne en opposition au semi-pélagianisme catholique; Baïus et le jansénisme reslent fidèles. Les jésuites sont la ruine dy pays, mais les savants travaux des bollandistes sauvent un peu l'honneur de la Société. L'édit de tolérance de Joseph H, 13 oct. 1781, permet aux prolestants de se bâtir un temple à Bruxelles, En 1783 introduction du mariage civil et suppression des ordres purement contemplatifs. Mais Léopold II rétablit les choses dans l'état où elles étaient sous Marie-Thérèse. En 1795, annexion à la République française. Après la chute de Napoléon, la Belgique est réunie aux provinces hollandaises, sous le nom de royaume des Pays-Bas et la liberté des cultes est garantie. Le parti catholique s'agite et par son alliance momentanée avec les libéraux il obtient en 1830 l'indépendance du royaume. La Belgique compte aujourd'hui près de 5 millions d'habitants, tous catholiques, sauf 25 à 30,000 protestants, juifs ou libres-penseurs déclarés tels. L'Église ne lient à l'Etat que par le salaire, mais elle a réussi à prendre pour un temps la haute main dans les affaires publiques. L'archev. de Ma-lines est l'autorité suprême, ne relevant que du pape. Le nonce a des fonctions exclusivement politiques. Il y a des évêques à Liège, Namur, Tournay, Gand et Bruges, chacun indépendant dans son diocèse. Les ordres religieux foisonnent, les couvents se multiplient et d'immenses richesses s'accumulent dans leurs mains. L'Église protestante officielle est régie par un synode. A côté d'elle, et faisant des progrès chaque année, la Société évangélique, ou Église missionnaire belge, travaille par la presse et par des prédications à répandre l'Évangile dans les villes et dans les campagnes, au milieu de populations que le catholicisme ne satisfait plua et qui cependant tiennent encore au christianisme. Les juifs ont 5 synagogues.

BELLARMIN, Robert-François-Romulus, nè 4 oct. 1542 à Montepulciano, Toscane, f 27 sept. 1621 au collège de Saint-André à Rome. Son père était d'une famille noble, mais ruinée; sa mère, Oynthia Cervina, sœur du pape

Marcel II, très distinguée par sa piété, exerça ooe grande influence sur Robert, le 3m« de ses iils qui, tout enfant, s'essayait déjà à la prédication, et qui, après un an passé à l'université de Padoue, se décida à entrer dans Tordre des jésuites et commença son noviciat à Rome en 1560. Sa tendance était plutôt scolastique et intellectuelle que mystique. Après avoir complété ses études de latin et de sciences par deux années de théologie à Padoue, il fut envoyé à Louvain 1569 où il enseigna la scolastique et l'hébreu, où il étudia à fond les Pères et où il passa 7 ans. Consacré prêtre 1570 par Jansenius laîné, év. de Gand, il fut chargé de réfuter Bains, mais il le fit avec d'autant plus de modération qu'il n'était pas loin de partager les idées qu'il combattait. Il eut aussi l'occasion de voir de près le protestantisme. A l'approche de (Jnillaume d'Orange, il s'enfuit à Douai, d'où Grégoire Xlil le fit venir à Rome pour y enseigner la conlroverse dans le Collège romain nouvellement fondé. Ce cours dura 12 ans et fat publié sous le titre de: Disputationes de cmtroversiis christianœ fidei, 3 vol. f° Rome 1581, 1582 et 1593; réimpr. 4 vol. f° Paris 1688; Prague 1721. C'est l'arsenal le plus complet de la foi catholique, et il a la même importance pour l'élude du dogme, que les Annales de Baronius pour l'histoire. Il y fut répondu de divers cotés, entre autres par Martius Chem-nifa, Jean Gerhard et Charnier. Une grande clarté dans le plan et dans l'exposition, une foule de citations des pères et des docteurs du moyen âge forment les principaux mérites de cet immense ouvrage; ajoutoos-y la loyauté scrupuleuse avec laquelle il reproduit les arguments des protestants, exactitude telle qu'elle a inspiré des doutes sur la coovenance de répandre ce live. A partir de 1590 il cessa d'être professeur et devint un homme public, chargé demissioos plus ou moins considérables. Sixte V l'envoya à Paris comme adjoint au légat H. Gaétan, pour conférer avec les chefs de la ligue et fiire de la controverse avec les protestants; il vit le siège de Paris. Grégoire XIV l'employa pour la revision de la Yulgate. Clément VIII le nomma son théologien et le créa cardinal 1598, en le priant de ne pas lui déguiser la vérité; en 1602 il lai donna l'archev. de Capoue, où Bel-larmin, pendant trois ans, chercha à faire prévaloir dans le clergé et les couvents les principes d'une réforme morale qu'il avait déjà recommandés à Clément. En 1605 il fut deux fois sur le point d'être nommé pape, en concurrence avec Léon XI et avec Paul V; la crainte qu'inspirait la puissance croissante des jésuites empêcha seule son élection. Nommé par Paul V bibliothécaire du Vatican, il renonça à son archevêché par fidélité à ses principes; il avait toujours prêché la résidence. Il écrivit contre Blackwell, l'archev. catholique d'Angleterre qui, malgré la défense du pape, avait prêté le serment d'allégeance exigé de Jaques à la suite de la conjuration des poudres. Il prit parti contre le doge et le sénat de Venise dans les affaires italiennes et fit valoir avec une grande puissance le droit des papes contre le pouvoir temporel des princes. L'abondance de ses arguments, une certaine logique, et même sa modération apparente font de lui le principal théologien de l'ultramontanisme. Il fut amené peu à peu à développer davantage encore son système et en vint jusqu'à dire, dans sa controverse avec Barcley à l'occasion de la Ligue, que les papes ont le droit de prescrire aux princes les lois quils doiveot faire ou abroger. Sixte-Quint aurait même voulu davantage, mais il fallut se contenter de cela. Il soutenait en outre que les rois tiennent leur pouvoir du peuple, en ajoutant que les peuples ne peuvent voter que sous la direction du pape. Les catholiques les plus fervents ne voient plus dans ces idées qu'une doctrine du temps passé. Les conséquences naturelles de celte confusion du temporel et du spirituel sont la persécution religieuse. Cepeodant Bellarmin ne paraît pas être allé jusque-là; on dit même qu'il fit prévenir Sarpi, son adversaire, des embûches qui lui étaient dressées pour le tuer, et dans le collège des cardinaux il opina toujours plutôt dans un sens pacifique. Après avoir encore administré 4 ans le diocèse de Montepulciano, il se démit de cet emploi, son âge ne lui permettant plus d'en remplir les devoirs, et il se retira dans le couvent de Saint-André, où il passa ses dernières années, ne s'occupant plus que de recueillement, d'édification et de préparation à la mort. Il laissa une réputation incontestée de piété, de zèle et de désintéressement. 11 fut plus d'une fois question de le canoniser, mais on recula devant la crainte de froisser les cours catholiques, peu amies des jésuites. Sa vie a été écrite par plusieurs, en vue de sa canonisation. Il lavait aussi écrite lui-même 1613 à la demande de son généra), mais elle est presque introuvable. Outre ses Disputations, on a encore de lui un Catéchisme, ou Doctrine chrétienne, le plus connu de ses ouvrages: un traité Depotestate summi Ponlif.; un ouvrage historique de controverse: De Iranslatione imperii Romani a Grœci$ ad Francoet plusieurs livres d'édification sur les Sept paroles, l'Élévation du cœur à Dieu, le Bonheur éternel des saints, l'Art de bien mourir, les Plaintes de la colombe, où il déplore l'abaissement moral des ordres religieux, etc. Il a laissé aussi des hymnes religieux. — Condamné en France comme ultramontain, on lui fit sentir plus d'une fois à Rome qu'il était trop modéré.

BÉNÉDICTINS, ordre religieux fondé par saint Benoît de Nursie, q. v. Dans sa vie solitaire Benoît avait appris à connaître les dangers de l'isolement et d'un ascétisme exagéré; à Vicevaro, les dangers d'une vie contemplative sans contrepoids, poussant par l'oisiveté à l'indiscipline et aux désordres. Il comprit que ce qui pouvait se faire en Orient n'était pas bon en Occident, et il s'occupa d'organiser la vie monacale dans des conditions nouvelles. Il esquissa pour son couvent un ensemble de règles qui furent complétées plus tard, qui portent son nom, et qui, par leur sagesse, ont traversé les siècles et font encore autorité aujourd'hui dans plusieurs congrégations. Les meilleures éditions sont celles de dom Martène, Paris 1690, et de dom Calmet, Paris 1734, 2 vol. 4°. En voici les principales dispositions. L'abbé d'un couvent est choisi par les moines eux-mêmes, qui lui doivent une obéissance absolue; il porte le titre de père et doit le justifier par son gouvernement. Si les moines, qui ont le titre de dom (dominas) sont nombreux, chaque dizaine est sous la direction d'un doyen, par lequel ils communiquent avec le père; c'est celui-ci qui nomme le prieur. Les néophytes s'engagent à la stabilité, c'est-à-dire à persévérer dans leur vocation; à la conversion des mœurs, c'est-à-dire à renoncer à la vie mondaine; et à l'obéissance. Le vêtement et la nourriture seront austères, mais sans excès. Trois heures par jour sont consacrées à la lecture et à la méditation, mais sept au travail manuel. Chaque couvent doit avoir sa vie propre et se suffire à lui-même, pour n'avoir avec le monde extérieur que le moins de rapports possibles; de là la règle qui permet d'admettre comme novices de jeunes enfants et de les préparer pour devenir moines. De là aussi l'admission de prêtres, et les privilèges qui rendent les couvents indépendants du clergé séculier, au moins du clergé inférieur. Comme l'ordre répondait à des besoins et qu'il rendait de réels services, il se répandit rapidement et couvrit bientôt l'Europe entière; il était civilisateur sans être agressif ou militant. Chacun suivant ses aptitudes avait sa tâche spéciale; ils furent défricheurs, agriculteurs, éleveurs, copistes, prédicateurs, missionnaires, compilateurs, et ils se sont fait une telle réputation que le nom même de bénédictin est devenu synonyme de travailleur. Parmi leurs principaux couvents on peut nommer Glanfeuil et Le Bec, Corbie, Saint-Denis, Saint-Germain-des-Prés, Lérins, Cluny, Einsiedeln, Reichenau, Fritzlar, Fulda, la nouvelle Corbie, etc. Grégoire II leur prêta le puissant appui de son influence en Italie, et le fait qu'ils introduisirent les premiers la vie monacale parmi les Angles et les Saxons, leur assura dans le nord une prépondérance longtemps sans rivale. Ils recherchaient volontiers les jeunes gens riches et de noble naissance, et leur donnèrent une brillante éducation dans les lettres, les arts et les sciences. C'est aux 12®* et 13»© siècles que se place l'époque de leur plus grande prospérité, mais leurs richesses mêmes leur furent fatales, non seulement en leur attirant des envieux et des ennemis, mais encore en faisant de la charge d'abbé un poste et un bénéfice recherché par les ambitions mondaines. Des gens qui n'y avaient aucun titre furent souvent appelés à ces fonctions; quelquefois de riches laïques s'en emparaient comme d'une sinécure à exploiter, et les rois en faisaient la récompense de services rendus ou espérés. Cependant ils se soutinrent, grâce au tiers-ordre des laïques, et quelques réformes partielles leur conservèrent en partie leur crédit. Des hommes éminents en grand nombre illustrèrent cet ordre: Cassiodore, Bè-de-le-Vénérable, Elfric, Ethelwold, Sturm, Bo-niface, Ansgar, Adalgar, Dunstan, Damien, Innocent III lui-même, etc. Grâce à l'indépendance réciproque des couvents, si les uns perdaient de leur vie intellectuelle ou religieuse* les autres maintenaient les traditions; si quel-ques-uns éprouvaient le besoin d'une réforme, ils y procédaient librement, et ceux qui désiraient une centralisation plus forte s'organisaient en congrégations, ce qui amena peu à peu la création d'ordres, ou de sous-ordres nouveaux. Déjà Benoît d'Aniane avait commencé: Bernon fit la même chose en fondant Cluny. Les cisterciens, les camaldules, la Vallom-breuse, et beaucoup d'autres encore ne sont que des variétés de l'ordre principal qui se distingua toujours par son costume (d'où le nom de moines noirs donné aux bénédictins). La formation des ordres mendiants, plus mobiles, plus bruyants, plus en vue, leur porta préjudice, et le concile de Trente (session 25), en les obligeant à se réunir en congrégations, leur ôta quelque chose de leur indépendance, mais les amena à s'adonner toujours plus aux travaux qui ont fait leur gloire, à l'enseignement et aux recherches scientifiques. Parmi ces congrégations les plus connues sont celles des Flandres, de Bourgogne, des Pays-Bas, de Saint-Vannes, de Verdun, et surtout de Saint-Maur. q. v. Leurs ramifications furent innombrables, et plusieurs luttèrent avec succès contre les jésuites, v. Montalembert, Guizot, etc. — Il y eut aussi des bénédictines, que l'on fait remon* ter à tort à Scolastique, la sœur de saint Benoit: celui-ci n'avait pas pensé à elles, et Héloïse s'en plaint dans plusieurs lettres. La décadence de cet ordre de religieuses fut rapide: plusieurs de leurs couvents ne furent bieiitôt plus que des retraites avantageuses pour des dames nobles, sans qu'il y eût de vœux prononcés; d'autres se réformèrent sous l'impulsion de vigoureuses abbesses, ou se transformèrent en d'autres congrégations.

BÉNÉDICTIONS. A côté du sens général et scripturaire de ce mot, l'Église romaine a conservé, notamment depuis le concile de Trull, 692, certains usages religieux, signes, cérémonies, prières, par lesquels elle implore sur les personnes et même sur les choses une bénédiction particulière de Dieu. Ce ne sont ni des consécrations proprement dites, ni des dédicaces de temples, ni des confirmations, ni des actes sacramentels, mais des invocations dans des circonstances qui appartiennent plutôt à la vie privée; on bénit une maison nouvellement construite, un four, une barque, un vaisseau. L'Élise protestante ne connaît pas cette cérémonie comme telle, mais elle donne à ces actes religieux le nom ordinaire de prière. Le prêtre, chez les catholiques, peut bénir le peuple, mais il ne peut pas bénir l'évêque, à cause de Hébr. 7, 7.

BÉNÉFICES. On comprend d'une manière générale sous ce nom certains revenus et avantages temporels correspondant à certaines charges et fonctions ecclésiastiques, les deux choses étant si intimément unies que le mot peut désigner indifféremment l'une ou l'autre, ou toutes les denx à la fois. Le revenu peut affecter toutes les formes, rentes, dîmes, fruits, vignobles, chasse, pèche, maison d'habitation. Son institution repose sur le droit de chacun de vivre de son travail, Luc 9, 7; 1 Cor. 9, 14; elle est donc à la fois juste et naturelle, et du jour où l'Église s'organisa civilement, il fut pourvu à ce que ses ministres, réguliers ou séculiers, eussent leur existence assurée. Dans le principe, l'évêque seul était possesseur de biens ou de bénéfices, et il donnait à chacun de ses prêtres on moines le nécessaire; mais dans un diocèse an peu étendu, c'était un mode de faire qui, à la longue, devenait impraticable, et dès le 6me siècle on voit les évêques procéder à des dotations de paroisses, de fabriques ou de monastères, fixes, mais toutefois révocables, choisissant en même temps les hommes les plus méritants pour remplir les fonctions et en percevoir les revenus. Plus tard, ce sont quelquefois les princes, ou de riches et pieux particuliers, parfois de grands pécheurs désireux d'expier un crime, qui font à certaines paroisses ou couvents, des dotations, en stipulant des conditions qui varient d'un endroit à l'autre, mais qui supposent presque toutes le droit de nommer le titulaire, toute réserve faite quant à l'approbation épis-copale. De là le patronage tel qu'il existe encore pour beaucoup d'églises en Angleterre. On distinguait alors la nomination ou désignation, qui appartenait au fondateur et à sa famille, et la collation ou institution proprement dite, qui appartenait à l'évêque. Malgré ce qu'il y a de juste et de simple en théorie dans ce mode de procéder, les nombreux abus qui en résultèrent ne tardèrent pas à ouvrir les yeux sur les inconvénients de ces propriétés ecclésiastiques. Souvent on les adjugeait à des gens incapables ou indignes, uniquement comme prix de services rendus; parfois aussi on les multipliait entre les mains d'un seul bénéficiaire, qui trouvait lk un moyen facile d'accroître rapidement sa fortune, mais qui ne pouvant desservir ses nombreuses paroisses, les négligeait, ou les faisait desservir au rabais, par des hommes peu qualifiés. Des règles durent être posées, soit aux patrons, soit aux autorités ecclésiastiques, pour déterminer les conditions de l'élection, mais elles furent facilement éludées par ceux qui avaient intérêt à le faire, et à l'époque de la réformation ce fut une des traditions avec lesquelles les princes purent rompre sans exciter le moindre mécontentement. Il va sans dire aussi que les bénéficiaires n'ayant que l'usufruit, et non la propriété, ils étaient tenus de rendre terres et maisons en bon état et de faire à leurs frais les réparations nécessaires. On a longtemps discuté la question de savoir si le surplus d'un bénéfice, et par conséquent les économies réalisées, appartenaient de droit au titulaire et s'il pouvait en disposer par legs ou donation en faveur de ses proches; la conscience et les circonstances influeront nécessairement sur la réponse à faire, et il est impossible de fixer une règle uniforme.

— On appelle bénéfice de compétence, en droit canon, le privilège accordé à un débiteur de ne pouvoir être condamné à une amende plus forte que ce qu'il possède au moment de sa condamnation. On a compris aussi sous ce nom le droit du débiteur, s'il est condamné à une amende, de réserver ce qui lui est strictement nécessaire pour vivre; cela s'applique en particulier à la saisie des traitements; dans plusieurs pays la loi a précisé les chiffres et le maximum des saisies suivant les cas et les individus.

BÉNÉZET. lo Jeune pâtre de 12 ans, qui en 1177, un jour d'éclipsé de soleil, eut une vision du Christ qui lui ordonnait de construire le pont d'Avignon, f 1184. — 2° Antoine B., né 31 janvier 1713 à Saint-Quentin, réfugié en Hollande, quaker en 1727, passa en Amérique où il se fixa. S'occupa le premier des sourds-muets, et surtout de l'abolition de l'esclavage et de la traite; exerça une gr. influence par ses lettres et ses écrits, sur Clarkson, l'abbé Raynal, et les reines d'Angl., de France et de Portugal, f 17 mai 1784. — 3° François, né 1726 à Montpellier, assista Rabaut comme proposant et fut arrêté 30 janv. 1752 près du Vigan. Convaincu d'avoir prêché l'Évangile, il fut condamné à mort et pendu le 27 mars; il f en chantant le Ps. 51. Une complainte en vers a célébré son martyre.

BENGEL, Jean-Albrecht, célèbre théologien wurtembergeois. Né 24 juin 1687 à Winnenden, t à Stuttgard le 2 nov. 1751. Il perdit de bonne heure son père, qui était diacre à Winnenden, et peu de temps après, les Français ayant incendié et détruit sa ville natale, il fut emmené à Stuttgard et y fit ses études au gymnase 1699-1703. Il partit de là pour Tubingue, où il se distingua bientôt comme théologien et comme prédicateur. Élevé dans l'amour et le respect des choses saintes, il eut toujours une prédilection pour les théologiens qui donnaient à la piété la place principale, Spener, Arndt, Chemnitz, Franke, etc. Mais la piété n'est pas incompatible avec la science; Bengel suffirait à le prouver. La direction du séminaire de Denkendorf, qu'il prit en 1713 après un long et fructueux voyage en Allemagne, l'appela naturellement à une étude approfondie de la Bible dans les textes originaux. Il ne négligeait pas les classiques, ni les Pères de l'Église, comme le montrent ses premières publications, sur Cicéron 1719, sur Grégoire le Thaumaturge 1722, sur Chrysostome 1723, mais il faisait passer avant tout le reste l'étude de l'Écriture, et sans se douter de l'importance de ses travaux, il donna à la science biblique une direction toute nouvelle qui le fit presque passer pour un révolutionnaire. Il avait remarqué dans une édition du N. T. d'Oxford les variantes qui accompagnaient le texte, et pour se rendre compte de la nature et de l'importance de ces variantes, il résolut de recourir aux mss. originaux. Il en collationna au moins une trentaine, de différentes familles, il en apprécia la valeur respective, et publia en 1734 son Apparatus criticus où il expose les principes qui, selon lui, doivent être prépondérants dans le choix des variantes. La leçon la plus difficile, dit-il, doit généralement être préférée à la leçon plus facile; lorsqu'il y a accord entre les mss. latins et celui d'Alexandrie, le texte doit être considéré comme authentique; les mss. et les pères latins présentent en général un texte plus ancien que le texte grec ordinaire, etc. Des observations très variées et de nombreuses réserves adoucissaient ce qu'il y avait d'un peu absolu dans ses principes. Néanmoins une clameur immense accueillit le travail du modeste savant; protestants et catholiques réclamèrent contre la prétention de changer l'œuvre d'Érasme par une nouvelle étude des textes originaux, pendant que, de son côté, Wettstein reprochait à Bengel de n'avoir pas été aussi loin que ses prémisses le requéraient. Bengel compléta son œuvre en publiant 1742, en latin, un Commentaire sur tout le N. T., le Gnomon Novi T., qui a été dès lors réimprimé plusieurs fois et traduit en plusieurs langues. Il ne se proposait pas d'expliquer lui-même la Parole, mais simplement d'inspirer à tous le désir de la lire, en leur fournissant quelques indications sommaires et en élucidant des textes obscurs. Il avait publié en 1741 son Ordo temporum, une suite des périodes de l'histoire, d'après les chiffres nombreux qui se trouvent dans les prophètes, et par une série de calculs plus ingénieux que solides, il était arrivé à conclure que notre terre avec sa constitution actuelle durerait 7777 ans; le millénium devait commencer en 1836. Des Discours édifiants sur ÏApocau nombre de 60, destinés à populariser ses vues, parurent 1747. et obtinrent un immense succès; ils furent réimprimés souvent, et traduits en anglais, en danois, en suédois, etc. Les chiffres se sont trouvés faux, et cela devait être; lui-même l'avait pressenti. Mais il avait fait preuve d'une modération, et en même temps d'une sagacité remarquable dans la manière presque prophétique dont il annonçait le développement social dont nous sommes aujourd'hui les témoins. Le temps vient, dit-il, où l'adultère se masquera sous le nom de galanterie. Nous marchons vers le règne du scepticisme et du naturalisme. La nature et la raison seront bientôt élevées à une telle hauteur, qu'on ne saura plus distinguer ce qui est surnaturel. Les hommes qui attaqueront avec la plume la religion chrétienne recevront de riches pensions et feront fortune; les grands et les petits seront moqueurs et libres-penseurs. Qui sait si dans 60 ans la France n'aura pas échangé ses rois pour des empereurs? La carte de notre globe sera entièrement remaniée. La religion naturelle et le fanatisme se donneront la main contre la Bible, et ceux qui n'auront pas en eux-mêmes le critère de la vérité se rejetteront dans le papisme. C'est une grande faute que l'Église protestante n'ait pas entrepris pins tôt l'œuvre des missions, etc. — Bengel écrivit encore en latin et en allemand quelques autres ouvrages dans le même sens, puis une Harmonie des 4 Évangiles, et quelques traites de polémique et de controverse. Il entretint avec Zinzendorf d'excellents rapports, ainsi qu'avec les moraves et les dissidents en général; il s'opposa à toutes les mesures administratives qu'on aurait essayé de prendre contre eux, les défendit au besoin, et par son esprit de tolérance, sa piété, son amour, exerça sur eux une influence salutaire en les mettant en garde contre leurs propres exagérations. Nommé prélat d'abord à Herbrechtingen 1741, puis à Alpirsbach avec residence à Stuttgard 1749, il reçut en 1751 le titre de docteur en théol. de 'université de Tubingue, qui ne fut pour lui qu'un encouragement de plus à travailler sans se lasser. Il touchait d'ailleurs au terme de sa carrière: une fluxion de poitrine l'enleva à l'âge de 65 ans. Sa fin fut ce qu'avait été sa vie, paisible, calme et sans ostentation; ses dernières paroles furent: Seigneur Jésus, je suis à toi à vivre et à mourir. Il avait épousé en 1714 Jeanne-Bégina Seeger, qui lui donna 12 enfants, dont 6 moururent jeunes; ses 4 filles contractèrent d'heureux mariages; son fils aîné, Victor, étudia la médecine et ne survécut que 7 ans à son père; le plus jeune, Ernest, fut doyen à Tubingue. Bengel avait demandé à Dieu de lui conserver sa compagne jusqu'à la fin de son pèlerinage et il fut exaucé. Sa vie a été écrite par son élève et ami Oetinger, par son fils, par Moser, par Fresenius, et enfin par son arrière-petit-fils Burk, archidiacre à Stuttgard 1831. Le nom de Bengel reste un des plus purs, des plus populaires et des plus vénérés de la théol. allemande.

BENIGNUS aurait été, d'après la tradition, au disciple immédiat de Polycarpe; il aurait préché l'Évangile à Autun, Langres et Dijon, et aurait souffert le martyre. Une abbaye porte son nom à Dijon.

BENJAMIN de Tudela, rabbin espagnol, f 1175, auteur d'un Itinéraire (Mazaloth) en Palestine, qui ne brille pas par l'exactitude des renseignements.

BENNO, né 1010 à Goslar d'une famille noble; fut moine en 1028, diacre en 1035, prêtre en 1040. Il fut appelé en 1051, à la fois par Henri et Léon, à la direction du couvent-sémi -naire de Goslar, jusqu'en 1066. En 1067, év. de Meissen, par la protection d'Henri IV. Il joua an rôle équivoque dans la révolte des Saxons 1073, fut mis en prison et ne fut relâché qu'en 1076 après avoir de nouveau prêté serment de fidélité à l'empereur. Toutefois ses intrigues politiques ne cessèrent qu'en 1088, et tout en restant fidèle aux maximes ecclésiastiques de Grégoire VII, il se consacra dès lors presque exclusivement aux devoirs de sa charge, à l'administration de sa paroisse et à l'évangélisation des Slaves, + le juin 1106. Canonisé en 1523; ses prétendus restes furent, après de longues pérégrinations, transportés à Munich dont il devint le patron, 1576.

BENOIT. Quatorze papes de ce nom: 1® Benoit Ier, surnommé Bonose, 574-578. Inconnu.

2* Benoit II, romain, 684-85.

3° Benoît IH, élu malgré les envoyés impériaux de Lothaire et de Louis, qui veulent en vain lui substituer Anastase. Il succéda à Léon IV 855, ou à la papesse Jeanne 857, si l'épisode de cette femme est authentique.

4* Benoit IV, romain, 900-903, gouverna sagement. Il couronna Louis de Provence emp. de Rome.

5° Benoît V, romain, 964-965, élu par le parti opposé à Léon VIII, que l'emp. avait fait nommer en remplacement de Jean XII. Othon irrité le fait détenir à Hambourg, où il meurt.

6° Benoît VI, romain, élu 972 concurremment avec son successeur Boniface VII; sa conduite scandaleuse le fait jeter en prison, où il périt d'une manière cruelle, empoisonné ou étranglé, par ordre de son rival.

7o Benoit VU, 975-983, parent d'Albéric, eut à lutter contre Boniface VII l'antipape.

8° Benoît VIII, pape 1012-1024, en concurrence avec Grégoire VI qui le contraignit à sortir de Rome, mais il remonta sur son siège a l'aide de l'emp. Henri II. Il combattit 1016 les Sarrasins qui avaient envahi ses États, et le> extermina.

9° Benoît IX, abominable petit garçon de 10 à 12 ans, nommé Théophylacte, élu 1033 en qualité de neveu ou cousin des deux papes qui l'avaient précédé. Il était fils d'Albéric, comte de Tusculum. Pape, il vécut dans la plus crasse dissolution et se livra à toutes les infamies, adultères, etc. Il commit de sa propre main plusieurs assassinats. Les Romains dégoûtés 1<> chassèrent; Conrad le rétablit, mais en 4044 il fut de nouveau chassé et remplacé par Sylvestre II. Il réussit à revenir encore, mais se voyant si fort haï du peuple, il vendit sa papauté à un homme de bien nommé Gratien, qui prit le nom de Grégoire VI; puis, cela fait, il garda l'argent et la papauté, jusqu'au moment où, forcé par un concile convoqué par Henri III. il donna plus ou moins volontairement sa démission, 1048.

10* Benoît X, Jean de Velletri, élu 1058 par le parti épiscopal, malgré l'opposition de Da-miani et d'autres. Il fut chassé quelques mois après par les Romains qui, avec le concours de l'Allemagne et l'appui d'Hildebrand, élurent Gérard de Florence, Nicolas II. Benoît s'humilia et f 1059.

11° Benoît XI, oct. 1303-6 juillet 1304; fils d'un berger de Trévise, il fut d'abord maître d'école, puis général des frères-prêcheurs.Homme d'un caractère doux, appelé à remplacer Boni-face VIII, il trouva bien des fautes à réparer; il annula les bulles de son prédécesseur contre Philippe-le-Bel, mais il mourut bientôt, empoisonné dans des figues, à ce que l'on dit, et sans avoir pu achever ce qu'il avait commencé. Son successeur fut le premier pape d'Avignon.

12o Benoît XH, 1334-1342. Jacques Fouruier, fils d'un boulanger de Saverdun, a plus de bonnes intentions que de puissance. Un des papes d'Avignon. Il se porta comme arbitre pour terminer les contestations de plusieurs princes. Il aimait à récompenser le mérite. Il s'attira de violents ennemis en voulant réformer son clergé. Commentateur des Écritures, il passa pour ignorant parce qu'il était modeste et qu'il n'était pas juriste. La procession du saint sacre* ment s'établit.

13o Benoît XIII; Pierre de Lune, né en Aragon d'une famille distinguée, passa successivement de la carrière du droit à celle des armes, puis il reprit l'enseignement du droit dans l'université de Montpellier. Nommé cardinal 1375 par Grégoire XI, le dernier des papes d'Avignon, il fut élu pape 1394 à la mort de Clément VII par les cardinaux avignonnais, en concurrence avec Boniface IX. Avant son élection, il s'est engagé à abdiquer au besoin, dans l'intérêt de la paix, ses titres et ses droits provisoires. Une fois pape, il oublie ses serments; il amuse Charles VI, roi de France, et les autres princes de l'Europe par de belles promesses, et finit par leur déclarer qu'il garde la tiare. Dès lors il n'est plus qu'un schismatique, on l'assiège dans Avignon 1398; il s'échappe et s'enfuit, d'abord à Château-Renard, près d'Avignon, puis à Peniscola dans le royaume de Valence. La France lui retire son obéissance. II est même question d'offrir la papauté k Charles V, mais cela n'aboutit pas, et le parti français le reconnaît de nouveau. Benoît continue de garder son titre et de lancer ses foudres sur la terre, pendant qu'Alexandre V lui fait concurrence k Bologne et Grégoire XII à Rome. A la fin le concile de Constance les renvoie tous, et Benoit, le plus opiniâtre de tous, cède à son tour, abdique et f 1424, âgé de 90 ans.

14<> Benoît XIII bis; romain, de la famille des Ursins (Orsini) pape 1724-30. Ne reconnaissant pas la papauté de Pierre de Lune (ci-dessus), il garde pour son nom le chiffre XIII. Dominicain, successivement év. de Manfredonia, de Césène et de Bénévent. Il confirme le rappel de Bitschi concédé par son prédécesseur et refuse au roi de Portugal de nommer son nonce cardinal avant qu'il ait quitté Lisbonne; les relations entre Rome et le Portugal sont ainsi interrompues 1725; la rupture s'accentue en 1729. Il se montre zélé pour la discipline et bien intentionné, mais d'un esprit un peu étroit et sans intelligence des besoins de son temps. Il autorise l'enseignement de la doctrine de saint Thomas sur la grâce et la prédestination, et confirme par une bulle la Constitution Unigenitus. Il tient un concile à Latran 1725 pour la réforme de l'Église, mais il s'y fait peu de chose. Il a le tort de nommer au cardinalat un homme indigne, son domestique Nicolas Coscia. Il veut canoniser Grégoire Vil, 1729, mais toute l'Europe s'alarme, et il f 1730. Auteur d'Homélies sur l'Exode.

15o Benoît XIV, 1740-1758. Prosper Lamber-tini, né k Bologne 1675, évêque d'Ancône, puis archev. de Bologne. Homme instruit, éclairé, conciliant, k idées libérales, convaincu que les principes de la papauté ne pouvaient plus 9e produire dans toute la rigueur du moyen âge, il montra par sa conduite qu'il renonçait k des prérogatives surannées, vécut en bonne harmonie avec toutes les cours, pourvut k une meilleure éducation du clergé, fonda 4 académies à Rome, veilla à ce que les places vacantes fussent consciencieusement repourvues et chercha à répandre dans les missions l'espoir du véritable christianisme. C'est par la charité, dit-il, et en leur faisant du bien, qu'il faut amener k la foi les infidèles. Il voulut diminuer le nombre des fêtes, mais il se heurta k trop de résistances. Il lâcha de calmer les querelles religieuses, adoucit les rigueurs que l'on exerçait à l'occasion de la bulle Unigenitus, réforma les jésuites du Portugal, et cultiva lui-même les lettres et les sciences. Voltaire lui dédia son Mahomet, qui est une apologie de la tolérance, et reçut en retour ses éloges et sa bénédiction. Il + au moment où il allait s'occuper de la suppression de l'ordre des jésuites, réclamée par le Portugal, v. Pombal, et les jésuites alarmés firent tous leurs efforts pour acquérir une influence décisive dans l'élection du nouveau pontife; ils y réussirent et Clément XIU fut nommé. Benoît a laissé de nombreux ouvrages, entre autres: De la Béatification, de la Messe, des Synodes, etc.

Autres personnages de ce nom:

1° Benoît de Nursie9 fondateur de l'ordre des bénédictins; né 480 k Nursie, dans la Sabine; envoyé de bonne heure à Rome pour ses études, mais dégoûté de la vie licencieuse qu'il y trouva, il s'enfuit déjà en 494 pour aller vivre dans la solitude, n'ayant auprès de lui qu*un moine, Romanus, qui pendant 30 ans pourvut à son austère nourriture. Il occupait à Subiaco une grotte presque inaccessible. Sa vie à partir de ce moment est peu connue; écrite par Gré-goire-le-Grand sur le rapport de 4 de ses disciples, elle est pleine de légendes et de miracles; il fait flotter la hache qu'un Goth a laissée tomber au fond du lac; il permet à son ami Maur de marcher sur les eaux pour aller sauver Placide qui se noie, etc. Ce qui subsiste comme authentique, c'est que les paysans païens des environs, effrayés de son apparence peu soignée, le prirent souvent pour une bête fauve. Mais les chrétiens admirèrent sa sainteté, et les moines de Vicovaro le choisirent pour leur abbé. Us s'en repentirent bientôt, trouvant sa discipline trop sévère, et ils cherchèrent à l'empoisonner; mais il fit le signe de la croix sur la coupe qu'il allait boire et elle se brisa en morceaux. II se rendît alors au Mont-Cassin, au nord de Naples, cime escarpée dominant de fertiles plaines et de sombres vallées, et il y passa les 14 dernières années de sa vie. Il permit à d'autres solitaires de se joindre à lui, mais à la condition de se soumettre à ses directions et de travailler. Ils évangélisèrent autour d'eux, démolirent un ancien temple d'Apollon, construisirent de leurs propres mains le monastère qu'ils devaient habiter et qu'ils ont rendu si célèbre au moyen âge, et protégèrent les populations du voisinage, une fois contre la famine, une autre fois contre les attaques des barbares. Benoît eut en 548 une rencontre avec Totila, le vaincu de Bé-lisaire et de Narsès,et lui annonça ses prochains triomphes, ses revers et sa mort. Lui-même f 21 mars 543, en prière devant sa fosse qu'il avait fait préparer. — V. Bénédictins.

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2° B. d"Aniane. Witiza, fils du comte Goth Ai-jmlfe de Maguelone, naquit en Languedoc 750. Jouissant de la faveur de Pépin et de Gharlemagne, il voyait un brillant avenir s'ouvrir devant loi, lorsque, pendant un voyage en Italie, son frère étant sur le point de se noyer, il fit le vœu, s'il était sauvé, de renoncer à tous les intérêts terrestres. Il tint parole 774, et se jeta dès lors dans la vie monastique avec tout le zèle et tonte l'ardeur dont il était capable. Il résolut d'égaler et si possible de surpasser le patriarche des ordres religieux latins; il prit son nom de Benoit, et après quelques années passées au couvent du Saint-Sequanus, près deLangres, qu'il travailla à réformer, il résolut, pour être plus libre dans son action, de fonder un monastère snr les domaines paternels, sur les bords de YAniane en Languedoc 780. Il en fut l'abbé naturel et y introduisit la règle de saint Benoît, mais avec quelques changements empruntés à Pàcome et à Basile. Le respect du peuple et la reconnaissance des moines firent bientôt de lui une des personnalités les plus considérables de l'Aquitaine. Charles et son fils Louis-le-Débon-naire le comblèrent de faveurs; Alcuin l'employa pour combattre l'adoptianisme, concile de Francfort 794, mais la dogmatique n'était pas son fort, et les écrits qu'il a laissés sur ce snjet n'ont guère de valeur. Ses ouvrages sur la vie monastique sont plus importants, Codex regularum, Concordia regularum, etc. lia écrit de même un recueil sur les différents modes de pénitences. Louis, qui l'établit chef de tous les monastères de son empire, sut exploiter aussi la puissance et la popularité de Benoît en vue de sa succession au trône paternel, et c'est bien lui qui décida Gharlemagne, malgré les efforts contraires d'Adalbert et de Wala. Le règne de Lonis fut l'apogée de son pouvoir, mais malgré les avantages de sa position politique il ne cessa jamais de se préoccuper des intérêts du mona-chisme; il les fit valoir entre autres à la diète d'Aix-la-Chapelle 817. Après sa mort, 12 févr. 821, ses adversaires politiques reprirent le dessus, et la vie religieuse dont il avait été le réformateur et le représentant perdit beaucoup de sa ferveur, de son prestige et de son crédit.

3° B. le Lévite, ou le diacre, de l'archevêché de Mayence, sous Autgar ou Otger, 825-847; auteur d'un recueil de capitulaires publiés sous les noms de Pépin, Charlemagne et Louis, donnés comme la suite (chap. 5, 6 et 7) des capitulaires d'Anselgis, longtemps acceptés comme authentiques, dénoncés comme suspects par Blondel, défendus par Baluze, et maintenant, depuis Savigny, reconnus comme l'œuvre d'er-clé iastiques faussaires, aux gages des archev. Riculphe 786-813 et Autgar. On ne peut dire si Benoît fut lui-même le complice de ces fraudes, ou s'il ne fut que le rédacteur innocent, mais dans tous les cas malhabile, de cette compilation dont les procédés et la tendance rappellent les fausses décrétales. Le but immédiat fut peut-être de relever par ce travail la réputation compromise du diocèse et de faire rendre à l'archevêque le titre de primat; mais il était surtout de revendiquer les droits du clergé contre le pouvoir civil et temporel. Ce but ne fut réellement pas atteint, l'œuvre du faux Isidore étant survenue pour faire plus et mieux dans l'intérêt de la hiérarchie, et si deux siècles plus tard quelques évêques mentionnent encore les Capitulaires de Benoît, leur effet ne fut que local et momentané.

René B., prêtre, docteur en Sorbonne, publia en 1566, avec des réflexions, une trad. française de la Bible, pour laquelle il utilisa la version de Genève. Plusieurs passages soulevèrent des plaintes; l'ouvrage fut mis à l'index et condamné; l'auteur lui-même fut renvoyé de la Sorbonne, et ne fut réhabilité qu'au bout de 20 ans et après sêtre rétracté.

Élie B., né à Paris 20 janv. 1640; jeunesse agitée, étudia à Montauban, fut consacré en 1664 et successivement nommé pasteur dans la Beauce et à Alençon. Son zèle et ses talents lui valurent la haine des jésuites. La Révocation le força de quitter la France; il fut appelé à Delft comme prédicateur et f 15 nov. 1728. Il avait épousé une mégère qui le tourmenta pendant 47 ans. Son principal ouvrage est une Hist. de l'édit de Nantes, un peu lourde, mais riche en documents officiels, pleins d'intérêt. Il a laissé aussi divers mélanges et lettres de circonstance, sans parler de 12 ou 15 dissertations en mss. encore inédits.

Jean, prof, de grec à Saumur entre 1630 et 1650, auteur de quelques travaux sur les Psaumes et le Cantique.

Marc-Antoine, pasteur à Montauban 1610, eut des difficultés avec sou collègue Beraud, et tous les deux furent condamnés par le synode d'AIais à changer de résidence.

80 N. Benoît, ouvrier en soie, réfugié en Angleterre, auteur d'un Avis à Archippe, où il professe et défend les vues baptistes.

BENTLEY, Richard, théol. anglais, né 1662 à Oulton. Yorkshire, doyen du collège de la Trinité à Cambridge, 1700, et prof, de théol. 1716. Connu comme critique et philologue, il s'occupa de comparer les meilleurs mss. du N. T., ainsi que les meilleures versions. II en avait déjà annoncé la publication, mais il y renonça en présence des attaques violentes soulevées par son projet. On a de lui des Sermons et un ouvrage apologétique contre Collins. f 1742.

BÉRENGER 1° de Tours, né à Tours vers 998, f 1088, élève de Fulbert de Chartres, esprit indépendant, nommé en 1030 scolas tique, ou maître d'école et professeur dans sa ville natale, étudia d'abord les classiques latins, puis la Bible, les pères et surtout Augustin. Son enseignement obtint un grand succès, parce qu'il amenait ses élèves à penser par eux-mêmes et à examiner avant d'accepter les paroles du maître. Archidiacre d'Angers 1039, il revint à son école l'année suivante comme principal directeur, et par sa science, ses manières et son mode d'enseignement, il se concilia l'amour et le respect de ses élèves à un degré qui tenait de l'enthousiasme. Vers cette époque Paschase Radbert travaillait à faire prévaloir la nouvelle doctrine de la transsubstantiation; Scot Erigène la combattait, et Bérenger, dans une lettre à son ami Lanfranc, prieur du couvent de Bec, soutint que le pain et le vin ne changeaient pas de nature dans l'eucharistie, mais conservaient leurs qualités essentielles et n'étaient que le symbole du corps et du sang de Christ. Cette lettre tomba en d'autres mains à Rome, et un concile fut convoqué aussitôt, 1050, où Lanfranc, ami de Bérenger, mais mécontent d'être compromis par cette lettre, se porta lui-même comme son accusateur. Bérenger fut condamné sans avoir été ni entendu, ni même cité. Un second concile convoqué le sept, de la même année à Vercelli, et auquel Bérenger eût assisté si Henri 1er de France ne l'eût fait mettre en prison à Paris, le condamna également. Le pape fit même saisir deux de ses amis, ecclésiastiques d'Angers, qui avaient essayé de le défendre, et le livre de Ratram fut lacéré. Hil-debrand vint à Tours comme légat du pape; il ne tenait pas beaucoup à la transsubstantiation, il aurait voulu qu'on se bornât à une définition générale, sans s'arrêter au comment; il s'entendit avec Bérenger dans ce sens, et Bérenger, pour l'amour de la paix, signa que le pain et le \in étaient le corps et le sang du Sauveur;

c'étaient les paroles mêmes de l'institution et il ne s'aventurait pas. Mais Henri, malgré la protection du comte Gaufried d'Anjou, ne lui rendit ni ses biens, ni son bénéfice, ni aucune indemnité. En 1059, sous Nicolas II, Bérenger vint à Rome, comptant sur l'influence et la bonne volonté d'Hildebrand, mais le parti contraire était devenu si puissant et si audacieux qu'Hildebrand lui-même n'osa pas résister, et sous la pression de l'év. Humbert, Bérenger fut contraint d'anathématiser son opinion. Dans une lettre à Lanfranc il compare sa rétractation au reniement de saint Pierre. De retour en France il continua d'enseigner, en appelant la transsubstantiation une folie du pape. Il a toujours des amis et des partisans, mais son protecteur Gaufried meurt, Eusèbe Bruno d'Angers se retire de lui; on lui recommande tout au moins plus de modération, puisque à Rome même on use de ménagements à son égard; mais Lanfranc ayant écrit contre lut, il lui répond, vers 1069, par sa Dèfevse, qui a été longtemps perdue et que Lessing a retrouvée dans la biblioth. de WolfenbUtiel (publ. par Vischer, 1834). Au concile de Poitiers 1076, les passions étaient si excitées qu'on faillU se battre. Grégoire Vif, fatigué de celte discussion qui entravait ses plans et son activité, chercha à terminer la chose un peu à l'amiable. Bérenger ayant reconnu que le pain après sa consécration était le vrai corps de Christ, sans dire comment, Grégoire dît que cela suffisait; il prétendit même qu'un jeune prêtre avait eu une vision de la Vierge et qu'elle lui aurait dit qu'il fallait s'en tenir aux Écritures autenthiques, contre lesquelles Béranger ne disait rien. Ce dernier avait oflert d'en appeler au jugement de Dieu, à l'épreuve du fer rouge, mais le pape ne le permit pas. Dans un nouveau concile 1079 il dut confesser que le pain est substantiellement changé en la vraie chair de Christ; il prit le mot dans le même sens que Luther, c'est-à-dire salvâ sua substantiâ, et signa, mais les évêques acharnés après leur proie, exigèrent qu'il prit le mot dans le même sens qu'eux; Grégoire effrayé l'exigea de même, et le pauvre vieillard dut s'exécuter. Grégoire leva l'excommunication. Bérenger rentra en France, pleurant sa faiblesse et ce qu'il appelait son sacrilège. Las d'une lutte qu'il ne se sentait plus la force de poursuivre, il se retira dans l'île de Saint-Côme près de Tours, où il passa ses dernières années dans la prière, le jeûne et le repentir, persévérant dans ses convictions jusqu'à la fin, et laissant dans l'esprit du peuple l'impression d'une sainteté extraordinaire. Sa doctrine sur la cène, sur la messe, sur l'Église et sur l'autorité des Écritures est celle des Églises évangéliques.

2° Jean, né 1730 au hameau des Ferrands

près Valence, proposant en 1749, étudiant à Lausanne 1750-1752, dès lors pasteur en Dau-phiné sous le nom de Colombe (allusion à Can-tiq. 2, 14), consacré avril 1758, condamné à mort 7 sept. 1759, exécuté à Mens en effigie, condamné de nouveau et rependu en 1766 à Grenoble. 11 lui naquit à Mens 8 avril 1767 un fils Jean, qui devint médecin, député, comte et en6n pair de France. Bérenger fut modérateur-adjoint du synode de 1777, il assista à celai de 1783, et il eut le bonheur de connaître l'édit de nov. 17S7 par lequel Louis XVI permettait aux protestants de naître, de se marier et de mourir. Le Concordat de Tan x leur donna davantage. Enfin un décret du 25 fructidor an xm (sept. 1805) accorda une consistoriale à Mens, et Berenger en fut nommé président; mais il était âgé, et il donna bientôt sa démission. Après an court séjour à Paris, auprès de son fils, il revint à Mens où il + 1813.

BGRGMJS, Jean, prédicateur du Brandebourg, né 1587 à Stettin, étudia à Heidelberg *t Strasbourg, voyagea avec des élèves en France, Angleterre et Pays-Bas, puis en Pologne, fut nommé professeur de théol. réformée à Francfort s. 0. 1616, et prit part avec Calixte an colloque de Thorn 1642. Il était plutôt unioniste que calviniste rigide, et se montra fraternel enrers les luthériens, malgré leurs attaques passionnées. Ses sermons se distinguent avantageusement par le tact, le goût et la modération, f 1658. — Son frère Conrad lui succéda 1624 à Francfort, et passa en 1629 à Brème comme directeur du Collège illustre. L'un et l'autre jouirent de la faveur des princes. Ils étaient oniversalistes et prétendaient même que c'était là la doctrine réformée.

BBRLEBURG (Bible de). Édition, version et commentaire de la Bible, qui parut à Berle-burg, Westphalie, de 1726-39. C'est l'œuvre d'auteurs inconnus, évangéliques, mais ennemis de l'Église établie et de l'orthodoxie courante, avec une tendance mystique très prononcée et la prétention, sans une connaissance suffisante des textes originaux, de donner une traduction meilleure et une explication plus claire et plus profonde des passages difficiles. A côté d'un littéralisme parfois heureux, parfois ridicule à force d'être exagéré, on y remarque un excès de spiritualisme qui n'a pas môme le mérite de l'unité; les tendances de M"»e Guyon y coudoient les hardiesses d'Origène, et l'on reconnaît facilement que les divers auteurs, d'accord sur certains points sans doute, ne l'étaient pas sur d'autres, môme des plus importants. En général ils rejettent la prédestination, ils voient la rédemption dans le fait de la solidarité plus que dans l'expiation; ils admettent le rétablissement de toutes choses, ils ont un chiliasme très prononcé, ils méconnaissent la doctrine du péché; ils placent l'homme primitif à une hauteur immense, ils prouvent qu'Adam n'avait point de sexe, eic. Les questions les plus puériles sont traitées avec le même sérieux que les plus graves, et l'incohérence de ce travail, au milieu d'excellents fragments, explique le prompt discrédit dans lequel il est tombé. Cette version est presque introuvable. Slier a de nouveau attiré l'attention sur le travail des anonymes de Berleburg.

BERNARD, ou Bemhardt. 1<> de Menthon. fondateur de l'hospice du Saint-Bernard, à la fois forteresse et maison hospitalière; créateur de la route destinée à franchir le col qui abouti! aux plaines de l'Italie; son nom fut donné en signe de reconnaissance au Grand et au Petit-Saint-Bernard qui dominent le passage de l'hospice. Né 923 au château de Menthon, près d'Annecy; archidiacre d'Aoste, f 1008. On a sur lui plusieurs notices, mais qui ne concordent pas; les unes le font fils d'un noble et d'une mère pieuse; d'autres le font fils du duc de Savoie. Il fut élevé par son oncle ecclésiastique, et il s'éprit d'une vive admiration pour Nicolas de Myra qui avait détruit un temple païen de Lycie. La légende lui prête une foule de miracles.

2<> Bernard deClairvaux, né 1091 à Fontaine en Bourgogne; 3®« fils d'une famille noble, chevaleresque et pieuse, subit plus que ses frères l'influence bénie de sa mère Aletb, qui l'avait consacré h Dieu déjà avant sa naissance. Il se distingua à Châtillon, où il étudiait, par une intelligence vive, mais il était recueilli, silencieux, et frayant peu avec ses camarades. Sa résolution était prise de se faire moine; sa famille essaya en vain de lui montrer dans la théologie, comme dérivatif, une carrière analogue, offrant plus d'avantages et moins d'inconvénients. Il persista, se persuadant à lui-même que c'était le dernier vœu de sa mère, et il réussit si bien à faire des prosélytes à sa cause, que bientôt, en 1113, n'ayant que 22 ans, il se présenta à la porte du couvent de Cîteaux avec une trentaine d'amis, dont 4 de ses frères et un oncle, tous demandant d'être reçus comme novices. L'abbaye, fondée en 1098 près de Dijon, effrayait par la sévérité de sa règle; elle n'en attirait pas moins grand nombre de religieux, et il fallut penser à s'étendre. Deux ans après, Bernard, qui avait scrupuleusement rempli tous ses devoirs de novice et de moine, se transportait 1115 à quelques lieues de là dans une claire vallée de la Haute-Bourgogne, clara vallis, Clairvaux, et fut le premier abbé du nouveau monastère. Il vivait de rien, de racines et de feuilles d'arbres, ne dormait presque pas, et portait jour et nuit un cilice qu'il dut cependant abandonner quand la chose fut découverte. Il consacrait son temps à la prière et à la lecture. La Bible était son étude favorite, et il avait coutume de dire qu'il aimait mieux puiser à la source que plus bas dans des canaux latéraux. Il finit par tomber malade à force de macérations ascétiques; son ami, l'év. de Châlons-sur-Marne, Guillaume, d'accord avec le chapitre de Tordre, le condamna à un an de repos, et lui-même ne comprit que plus tard, quand il se vit prématurément affaibli et vieilli, que s'il y a un devoir dans la sobriété, c'est aussi un devoir que de soigner ses forces et sa santé. Il savait si bien vivre en dehors des choses visibles, absorbé dans la contemplation, qu'il longea, dit-on, pendant tout un jour le lac de Genève, sans en avoir rien aperçu. Mais à côté de la vie intérieure il y avait en lui une grande activité pratique, et il se consacrait tour à tour tellement à l'une et à l'autre qu'il ne savait plus, disait-il, s'il était ecclésiastique ou laïque. Ses sermons, sa nombreuse correspondance, les 160 couvents qu'il fonda et organisa, la règle de l'ordre qu'il réforma, ses écrits sur différents sujets, sur Malachie, la Vie contemplative, les Erreurs d'Abélard, les Devoirs de la papauté, sont une preuve du zèle avec lequel il savait au besoin payer de sa personne, mais il y en a d'autres preuves encore et pendant plus de vingt années on le vit sur la brèche, mêlé aux plus graves événements de son temps, parlant avec la même hardiesse aux rois, aux peuples et aux papes, prenant le parti des petits et des opprimés, et s'opposant au moine Raoul, qui ne demandait rien moins que le massacre de tous les juifs. Parmi les faits les plus saillants de sa carrière publique il faut noter son intervention dans l'élection simultanée d'Innocent II et d'Anacletll à la papauté, 1130. Appelé à donner son avis, il se prononça sans hésiter pour le premier, et pendant cette lutte qui dura 8 ans et qui se termina par la mort d'Anaclet, il ga-}ïna de nombreux adhérents au pape qu'il protégeait. Dans les voyages qu'il fit à cette occasion en Italie, en Allemagne et en France, il électrisait les populations, et ses biographes racontent de lui des faits qui tiennent du miracle. Puis vinrent ses luttes contre Abélard. Ces deux grandes natures devaient nécessairement entrer en conflit, mais leur terrain n'était pas le même, et le conflit ne pouvait aboutir. Bernard l'emporta, mais il n'eut pas toujours le beau rôle. Il poursuivit de même de toute sa fougue Pierre de Bruys, Arnold de Brescia, et ceux de leurs disciples qui, sous une forme quelconque, tentaient uue réforme de l'Église. C'est lui enfin qui prêcha, à Pâques Hi6, au concile de Véze-lay, la croisade à laquelle prirent part Louis-le-jeune et Conrad IÛ, et qui, malgré ses glorieux pressentiments, finit d'une manière si malheureuse. Il prit parti aussi 1147 et 1148 contre les albigeois, mais sans grand succès. Il attaqua l'évêque de Poitiers, Gilbert de la Porée, au concile de Reims, sous prétexte de trithéisme 1148, mais Gilbert ne put être convaincu de ce dont il était accusé. Enfin épuisé de fatigue, Bernard tomba malade et fut emporté en quelques jours. Il vit venir la mort avec sérénité et f 20 août 1153. Il fut canonisé 20 ans après par Alexandre III, 1173. Ses Œuvres ont été publ. par Mabillon 1690, 2 vol, f°. — Bernard était aussi poète, et c'est comme tel, aussi bien que comme orateur, qu'il a mérité le surnom de mellifluus; parmi ses hymnes, l'une des plus connues est celle qui commence par: Salve ca-put cruentatum, que Paul Gerhard 1659 a si bien reproduite dans son: O Haupt voll Blut und Wunden.

3« Bernard, dit de Tolède, né à Agen, f 1125; d'abord soldat, puis bénédictin, abbé du couvent de Sahaguneen Castille, 1080, contribua plus que personne à faire prévaloir en Espagne les doctrines absolutistes de Grégoire VII et d'Alphonse VI. Après la prise de Tolède sur les Maures, il fut nommé archev. de cette ville, puis en 1187 cardinal et primat d'Espagne. Le roi et une partie du clergé finirent par trouver qu'il allait trop loin dans sa revendication de l'autorité papale. Il se proposait de se mettre à la tête d'une nouvelle croisade, mais Pascal II s'y opposa.

4° Bernard de Botone, né à Parme d'une famille considérée, étudia à Bologne, devint professeur et chanoine, enseigna à Rome et à Bologne, et f 1288. Il a surtout étudié les Décrétâtes, qu'il a commentées dans sa Glotsa ordinaria.

5° Bernard de Compostelle, archidiacre, chargé à Rome sous Innocent III de recueillir les décrétâtes de ce pape, mais comme son travail renfermait quelques pièces qui ne convenaient pas à la curie, il fut supprimé. — Un autre B., aussi de Compostelle, a commenté les décrétâtes d'Innocent VI et de Grégoire IX.

6° Bernard de Pavie, évêque vers 1190, a recueilli sous le nom d'Extravagantes des lois et décrets publiés après Gratien, et qui sont hors du cours du droit.

7<> Bernard, espagnol, se rendit de Rome en Poméranie pour évangéliser ce pays, 1122. Il arriva en pauvre état à Julin et fut mal reçu par les habitants; on le traita de gueux parce qu'il était mal mis; de fou parce qu'il offrait de rester dans une maison à laquelle on mettrait le feu. Il essaya d'abattre l'arbre sacré de Joui, alors on le chassa et il se sauva à Bamberg où il passa la fin desès jours à prier pour lesPomé-raniens. Il désigna, pour reprendre son œuvre, l'év. Otton, qui réussit en effet mieux que lui.

8* Bernard, Claude, surnommé le Pauvre prêtre, un des hommes les plus pieux de son Église. Né à Dijon 1588, lils d'un magistrat distingué; après une jeunesse orageuse, il raconte qu'à la suite d'une vision dans laquelle son père l'exhortait à se convertir, il changea de vie, entra dans les ordres, se fixa à Paris, et se consacra pendant 20 ans aux malades, aux pauvres, aux condamnés et à la prédication. Il distribua en libéralités immédiates un héritage de 400,000 fr. f 164* d'une maladie dont il fut atteint en accompagnant au gibet un scélérat endurci.

9° Samuel, célèbre comme peintre sur émail, né8 nov. 1615, f 24 juin 1687. Un des fondateurs de l'Acad. de peinture de Paris; abjura. Son fils Samuel, joaillier, fut un financier célèbre et abjura aussi. Ses nombreux enfants s'allièrent à la noblesse dont ils redorèrent les blasons; lesMolé, Lamoignon, Clermont-Tonnerre en descendent.

10° Jaques B. né 1 sept. 1658 à Nyons, pasteur à Venterol, puis à Vinzobres, proscrit en 1683, s'enfuit à Lausanne où il donna des leçons, et de là en Hollande, oii il rédigea la Bibl. Univ. et la suite des Nouvelles de la républ. des Lettres; pasteur et prof, à Leyde depuis 1705; t 27 avril 1718; publiciste plus laborieux que distingué.

— V. aussi Bernon et Bernward.

BERNARDIN 1* le saint, né 1380 à Massa Carrara, d'une famille distinguée de Sienne, entra dans l'ordre des franciscains de l'étroite observance, après avoir fait ses preuves auprès des malades, et montré pendant la peste de 1400 un admirable dévouement. Il se fit aussi une réputation comme prédicateur, devint vicaire-général de son ordre, qu'il travailla à réformer, et refusa successivement les évêchés de Sienne, Ferrare et Urbin. Il f 1444 pendant une mission dans les Abruzzes, et fut canonisé déjà 1450 par Nicolas Y. Ses œuvres, d'un caractère mystique, 5 vol. ont été publ. à Venise 1591, Paris 1636, Venise 1745.

2° Bernardin Ocbino, v. Ochino.

BERNARDINS, nom des religieux de Cîteaux depuis les nouvelles règles que leur donna saint Bernard; ils sont cependant plus connus sous le nom de cisterciens, q. v.

BERNE. Les tendances conservatrices de la population agricole de ce puissant canton n'offraient pas à la Réforme un terrain facile, mais les désordres des dominicains 1507-1509, puis la vente scandaleuse des indulgences par Jetzer 1518 éveillèrent l'attention. Un certain nombre de prêtres pieux protestèrent, Kolb, Séb. Meyer, Berthold et Jean Ilaller. Déjà Luther et Zwingle en avaient appelé aux Écritures, et si la majorité des magistrats et du clergé bernois étaient hostiles aux nouvelles idées, une minorité respectable commençait à penser qu'il y avait quelque chose à faire. La conférence de Bade 1526 s'était prononcée catégoriquement contre toute réforme et la cause semblait perdue, mais plusieurs prêtres évangéliques, Berthold Haller en tête, refusèrent de se soumettre, et pour différents motifs le gouvernement s'abstint de les inquiéter. La controverse s'envenima. Les 7 cantons catholiques ayant eu l'imprudence d'intervenir d'une manière comminatoire. Berne en prit ombrage et décida de liquider seul la question pour son propre compte. Le Grand Conseil, séance du 17 nov. 1527, convoqua pour les premiers jours de l'année suiv ante une conférence ecclésiastique, à laquelle les évêques de Constance, Valais, Bàle et Lausanne furent invités à se rendre, sous peine, s'ils ne venaient pas, de perdre tous les droits et bénéfices qu'ils possédaient dans ce canton. Il était convenu qu'on discuterait sur la seule base de l'A. et du N. Testament; que d'ailleurs la discussion serait libre, que personne ne serait inquiété pour ses opinions, ni nationaux, ni étrangers, et que les résolutions ne seraient imposées à personne. Cette conférence connue sous le nom de Dispute de Berne s'ouvrit le 7 janv. 1528 dans l'église des franciscains. Les évêques avaient refusé d'y paraître, mais ils y étaient représentés par des amis et des savants de leur bord. Cependant les partisans d'une réforme y possédaient la majorité numérique, et en outre une supériorité morale et intellectuelle incontestable. On y remarquait entre autres le bourgmestre de Zurich. Rœust, Zwingle avec une quarantaine de prêtres. Œcolampade de Bàle, Blaarer de Constance, Bucer et Capiton de Strasbourg. Six des cantons catholiques, s'en référant à la conférence de Bade blâmèrent vivement cette nouvelle tentative; Eck et Cochlâus la condamnèrent, et Charles-Quint en témoigna par lettre du 27 déc. 1527 son mécontentement, mais ces difficultés n'arrêtèrent ni le gouvernement, ni les partisans d'une amélioration, bin thèses furent successivement introduites par Haller ou par Kolb, et discutées par les hommes les plus marquants des 2 partis. 1° Christ seul chef de l'Eglise, 2° l'Église n'a pas le droit d'imposer d'autres commandements que ceux qui sont dans la Bible; 3° Christ est notre seule justice et sanctification; 4° Le corps et le sang de Christ ne se trouvent pas en substance dans le sacrement; 5° La messe est contraire à l'Écriture, un blasphème contre le sacrifice de Christ et une abomination par ses abus; 6° Christ est le seul médiateur et intercesseur; 7° contre le purgatoire; 8° contre les images; 9° contre le célibat forcé; 10° les péchés contre la chasteté ne sont préjudiciables à aucune classe autant qu'aux ec-désiastiques. Ces dix points furent adoptés en 20 séances et le 26 janv. Haller prononça le discours de clôture. Le 7 févr. un édit de l'autorité civile donnait force de loi à l'œuvre de la conférence, la Réformation était proclamée; le

13 févr. les paroisses étaient consultées et se prononçaient presque toutes affirmativement; les vallées bernoises ne se décidèrent que plus tard. Bâle, Bienne, Schaffouse et d'autres villes ressentirent le contre-coup de celte paisible et sérieuse discussion; plus tard Genève 1535 et Lausanne 1536 devaient suivre le même exemple. Les actes originaux, avec les signatures, sont encore à la biblioth. de la ville en double exemplaire. Mais il ne suffisait pas d'avoir décrété la Réforme, il fallait encore l'organiser, la régulariser, la faire pénétrer dans les mœurs, et ce n'est pas l'affaire d'un jour. Longtemps on vit les paroisses réformées, surtout à la campagne, conserver les traditions anciennes; le clergé lui-même n'était pas à la hauteur de sa mission. Les désordres dans l'Oberland 1528, et les deux guerres de religion de 1529 et 1531, retardèrent le travail d'organisation, dont la nécessité se faisait cependant sentir de jour en jour davantage. Enfin après la paix du 24 nov. 1531 on décida de se mettre à l'œuvre, et le 9 janv. 1532 le synode se réunit; 230 ou 240 pasteurs étaient présents, et Capiton qui venait d'arriver de Strasbourg, fut inûté à diriger les débats. Après avoir réduit au silence la faction trop belliqueuse du clergé et rappelé dans quel esprit Christ doit être prêché, il introduisit le grave et principal sujet pour lequel le synode était convoqué, l'organisation de l'Église, sa discipline et ses rapports avec les magistrats. Capiton lui-même rédigea les articles, et il montra tant de lumières et de sagesse qu'il entraîna même des hommes encore opposés à la Réformation. Il suffit de 4 à 5 jours pour s'entendre (du 9 au

14 janv.) et pour élever un monument qui demeurera toujours cher à l'église de Berne. Les Actes du synode de Berne sont le toit sous lequel cette église s'est abritée, la règle qui a fait sa gloire et sa prospérité. Ils forment, avec les dix conclusions de la dispute, ses livres symboliques, et pendant plus de 3 siècles ils ont été vénérés comme la bannière et comme l'un des plus beaux monuments de l'époque de la Réformation. C'est un vrai chef-d'œuvre, même pour notre temps, dit Hundeshagen. Et Vulliemin ajoute: Ne nous figurons pas une aride et froide ordonnance; c'est une œuvre d'inspiration, toute vivante de la piété de ses auteurs, de la sage modération de Capiton, de l'onctueuse douceur de Haller. — Ces Actes du synode reçurent la sanction du Grand Conseil le jour même où le synode eut achevé son travail, 14 janvier et ils furent imprimés officiellement à Bâle la même année, puis 1728 et 1775.

BERNIS, François-Joachim De Pierre (de), cardinal français, né 1715 à Saint-Marcel, Ar-dèche, archev. d'Albi, + * Rome 1794, connu par ses petits vers, sa galanterie, la protection de Mad. de Pompadour, et la part qu'il prit à l'expulsion des jésuites et à l'alliance autrichienne. Ses poésies affectées le firent surnommer par Voltaire Babet la Bouquetière. Son poème la Religion vengée ne fut publ. qu'après sa mort et n'a pas réussi. Bernis avait été reçu de l'Acad. franç. à l'âge de 29 ans à cause des grâces de son esprit et de sa personne.

BERNON 1° noble bourguignon, premier abbé de Cluny et réformateur de plusieurs autres monastères, f 927. — 2° Bernon, appelé aussi Bern, ou Bernard, moine d'un couvent de bénédictins près Trêves, nommé 1008 par Henri II abbé de Reichenau, géra cette abbaye pendant 40 ans et lui rendit son lustre compromis par Immo son prédécesseur. Il était savant, poète et musicien. Il enrichit sa bibliothèque, releva le niveau des études, travailla à l'amélioration du chant sacré, + H a écrit quelques livres sur les fêtes chrétiennes et quelques biographies.

BERNWARD, ou Bernard, 13e évêque de Hildesheim, près Hanovre, d'une famille noble, neveu de l'électeur palatin Adalberon. Après de brillantes études il devint 987 précepteur du jeune Otton III et chapelain impérial. Nomme évêque 993, il protégea sa ville contre les invasions des Normans par un ensemble de tours et de murailles et mérita d'être appelé le second fondateur de Hildesheim. Il défendit pendant 7 ans et avec succès les droits de son évêché contre l'archev. de Mayence, et eut le bonheur, dans un voyage à Rome, de calmer une émeute contre le pape. Il possédait une riche bibliothèque et s'intéressait à la théol., à la philosophie, aux mathématiques et aux beaux-arts. Après l'an 1000, quand on eut cessé de croire à la fin du monde, il fit bâtir à ses frais une magnifique abbaye des bénédictins, qu'il plaça sous le vocable de saint Michel, et il f 1022, peu après avoir fait la dédicace de son église. Canonisé 1193.

BERQUIN, Louis (de), gentilhomme artésien, né 1490, brûlé à Paris le 22 avril 1529 pour cause de religion. Aussi remarquable par la pureté de ses mœurs que par son amour de l'étude, Berquin avait adopté avec ardeur les principes de la Réforme et publia entre 1523 et 1529 un certain nombre de petits ouvrages de controverse qui lui valurent l'amitié d'Erasme, un peu la faveur du roi, et beaucoup la haine des moines et de la Sorbonne. Arrêté une première fois le août 1523 à la suite d'une descente de la police dans sa maison et de la saisie de ses livres et papiers, il fut relâché le 8 par l'intervention de François 1er. La Sorbonne lai en voulait surtout à cause du mépris avec lequel il parlait de l'ignorance des docteurs et des subtilités de l'école. Arrêté une seconde fois, mai 1523, sur la plainte de l'év. d'Amiens, il est condamné comme hérétique par les délégués du pape, sur des traductions falsifiées de quelques-unes de ses propositions; le parlement hésite avant de confirmer cette sentence, et le roi attirant la cause à lui, le fait relâcher, nov. 1526. Erasme lui écrivait de se modérer, de se foire donner une ambassade royale qui lui permit de s'éloigner, de ne pas se fier davantage à la protection du roi, de « laisser bourdonner les frôlons et de se renfermer dans les douceurs de l'étude; » conseils inutiles. Ber-quin resta sur la brèche, traduisant Erasme, Luther et Mélanchthon. Une image de la vierge ayant été mutilée dans un des carrefours de Paris, les sorbonnistes s'emparèrent de l'incident pour émouvoir le peuple, le parlement et le roi. Quoique Berquin n'y fût pour rien, on affecta de voir en lui le chef des hérétiques et des briseurs d'images. Douze juges commissaires, délégués par le parlement, le condamnèrent à être étranglé, puis brûlé sur la place de Grève. Il ne s'attendait pas à une sentence aussi rigoureuse, mais il n'en parut point ému, refusa toute rétractation et se rendit au supplice avec une entière et chrétienne sérénité. Sa voix fat étouffée sur l'échafaud par les clameurs d'hommes apostés par les moines. Le religieux qui l'accompagnait tâcha de faire croire qu'en mourant Berquin avait reconnu son erreur.

BERRUYER, Joseph-Isaac, né à Rouen 1681, t à Paris 1758, jésuite, élève du paradoxal Har-douin; auteur d'une Hist. du peuple de Dieu, qui parut en 3 fois, 1728, 1753 et 1758, et qui reproduit en les paraphrasant de la manière la plus frivole, et parfois la plus licencieuse les principaux événements racontés dans J'Écri-ture. Ce livre, surtout la partie, obtint un succès de scandale, digne du 18^ siècle. Il fut blâmé par l'Église et même par les jésuites; plusieurs évêques le condamnèrent, Benoît XIV le mit à l'index, et l'Inquisition, sous Clément XIV, condamna deux écrits qui essayaient de le justifier. Il n'en eut pas moins de chauds partisans à une époque où il était de mode d'attaquer le christianisme. Berruyer avait peut-être pour but de discréditer la Bible pour en empêcher la lecture.

BERTHIER, Guill.-François, né à Issoudun 1704, f à Bourges 1782, jésuite, successivement professeur à Blois, Rennes, Rouen et Paris, continua l'Hist. de l'Église gallicane, commencée par Longueval 1730, puis par Fontenay et

Brumoy, et y ajouta 6 vol. qui vont jusqu'à 1529. Il rédigea depuis 1745 le Journal de Trévoux, dirigé contre l'incrédulité, et eut de vifs démêlés avec Voltaire et les encyclopédistes. Après la suppression de son ordre, il se retira à Offenbourg d'abord, puis à Bourges, où il écrivit une réfutation du Contrat social et diverses œuvres théologiques et spirituelles. En 1762 il avait été nommé garde de la bibliothèq. royale et précepteur de Louis XVI.

BERTHOLD 1° abbé d'un couvent de la Basse-Saxe, appelé comme missionnaire en Li-vonie, homme dévoué et résolu, mais trop belliqueux, organise une espèce de croisade pour la conversion des Lives, remporte sur eux une victoire; mais est tué dans la bataille, 1198.

2° Archev. de Mayence, 1485-1504, comte de Henneberg, exerça une grande influence dans l'empire, et s'occupa avec zèle de rétablir la discipline et l'ordre dans les couvents.

3° Célèbre prédicateur franciscain. Berthold Lechs, né à Ratisbonne vers l'an 1220, enterre le 19 déc. 1272, étudia la théologie sous le pieux frère David, qui en fit son ami et qui, lui ayant reconnu des talents remarquables, l'engagea à se consacrer à la prédication. Il visita comme frère prêcheur l'Allemanie, les Grisons (Pfeffers), Augsbourg, l'Autriche, la Moravie, la Thuringe. Sa parole était puissante; on raconte que pendant qu'il parlait il semblait qu'il eût sur le front des couronnes resplendissantes; ses auditoires étaient immenses; la statistique du temps parie de 60, de 100, même de 200 mille auditeurs. Quelques-uns de ses sermons, qui ont été conservés, publiés par Kling en 1824, puis par Stolz, et plus complètement par Gœbel, d'après les mss. de la biblioth. de Hei-delberg, se font remarquer par une grande simplicité pratique, par leur onction, l'amour de Dieu et des âmes, la pureté de la doctrine et de fréquents appels à la conversion.

4o Berthold de Rohrbach, prédicateur laïque du 14m<5 siècle, prétendait avoir reçu de Dieu des révélations particulières. Après avoir été arrêté une première fois à Wtlrzbourg 1356, et s'être rétracté, il tomba une seconde fois entre les mains de l'Inquisition à Spire et fut brûlé; il souffrit courageusement le supplice. C'était un mystique, selon les uns un beghar. selon les autres un ami des vaudois. U prêchait contre les abus et la corruption de l'Église, et disait qu'un laïque pieux peut faire plus de bien qu'un prêtre qui n'a pas l'esprit de Dieu.

4° Un des fondateurs de l'ordre des carmélites, q. v.

6° Berthold Pirsbinger, né à Salzbourg 1465, év. de Chiemsee sur l'Isar 1508, s'occupa sérieusement de la réformation de l'Église. On lui attribue le Onus eccleêiœ, la charge de l'Église,

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qui parut à Landshut 1521, et qui par la vigueur avec laquelle il dénon;a la corruption de TÉglise et la nécessité de la réformer dans son chef et dans ses membres, produisit une grande sensation parmi les catholiques et parmi les protestants. Il résigna 1525 ses fonctions épis-copales, peut-être à cause du bruit que son livre avait fait et se retira dans la solitude où il se consacra à l'étude. Il écrivit entre autres une Théologie allemande, qui parut à Munich 1528, mais qui était plutôt un recul. En présence de la Réforme commencée, craignant d'être compromis, il rétracta quelques-unes de ses anciennes thèses et parla durement des évangéli-ques. f 19 juillet 1543 à Saalfelden. Son Onu* a été réimprimé, mais falsifié 1620; Gerhard en a rétabli le vrai texte dans sa Confessio catho-lica. Longtemps oublié, Berthold a été comme exhumé vers 1850 pour les besoins de la controverse.

BERTI, Jean-Lorenzo, né 1696 à Saravezzo, Toscane, f à Pise 1765, ermite de l'ordre des petits-augustins, puis professeur de dogmatique, auteur d'une Théologie historique, dogmatique et scolastique, 10 vol. fo, Rome 1739-47, Munich 1749; abrégé, Bamberg 1770. Il fut assez disciple de saint Augustin pour avoir dû se disculper à plusieurs reprises d'être janséniste.

BERTRAM, v. Ratram.

BÉRLILLE. Pierre (de), né 1575 au château de Sérilly, près Troyes, fondateur de l'ordre des carmélites et de la congrégation de l'Oratoire. jouit de la confiance de Louis XIII et de la reine-mère, fut chargé de plusieurs missions importantes, sollicita à Rome la dispense pour le mariage d'Henriette de France avec le prince de Galles, fut nommé cardinal 1627, et f subitement 1629 en célébrant la messe. Homme éclairé, il encouragea Descartes, et favorisa la publication de la Bible polyglotte de Lejay. Ses œuvres ont été publ. par le père Bourgoing, 1644.

BÉRYLLE, év. de Bostra, Arabie, vers 240; gouverna son égl. avec autant de zèle que de talent. Il pencha un moment vers le sabellia-nisme, disant que J.-G. n'existait pas avant l'incarnation; mais Origène le ramena à la foi 244.

BESOLD, Christophe, né à Tubingue 1577, prof, de droit, étudia aussi la théol. et l'hébreu. Il connaissait 8 langues. Après la bataille de NOrdlingen 1634, quand la cause évangélique paraissait perdue, il abjura publiquement le protestantisme, qu'il avait déjà abjuré en secret le 12 août 1630, et il mit au service de la Bavière et de l'Autriche toute sa science et son intelligence, pour revendiquer en faveur de ces pays les biens des couvents wurtembergeois sécularisés à l'époque de la réformation. Son retour au catholicisme, très exploité, trouva peu d'imitateurs. Il fut récompensé de sa défection par une place de professeur à Ingolstadt, et il venait d'être appelé par le pape en cette même qualité à Bologne, avec un traitement de 4000 ducats, lorsqu'il f le 15 sept. 1633. * Il est pourtant dur de mourir, » dit-il en sentant sa fin prochaine.

BESSARION, Jean, né 1395 à Trébizonde, de parents pauvres, étudia à Constantinople, puis dans le Péloponèse, entra 1423 dans l'ordre de saint Basile où il quitta son nom grec pour celui de l'anachorète égyptien dont il a écrit la légende. Nommé archev. de Nicée 1437 par l'emp. Jean VII Paléologue, qui ne voyait plus contre les Turcs d'autre remède qu'une alliance étroite avec l'Occident et qui désirait à cause de cela la réunion des deux Églises, il accompagna son souverain en Italie avec quelques autres savants théologiens de son pays. L'union fut prononcée au concile de Florence, grâce à l'esprit conciliant de Bessarion, qui reçut d'Eugène IV pour sa récompense le chapeau de cardinal. Mais celte union factice n'eut d'autre résultat que d'aliéner à l'empereur la sympathie de son peuple et de compliquer par des dissensions intestines l'état déjà critique de l'empire. Bessarion resta dès lors en Italie où, par son goût et ses connaissances variées, il devint le centre de ceux qui cultivaient les lettres, et l'un des précurseurs de la Renaissance. 11 fut deux fois sur le point d'être nommé pape; la jalousie de l'év. d'Avignon le fit seule échouer. Il ne cessa d'ailleurs de travailler au bien de son pays, soit à Mantoue et en Allemagne en essayant d'organiser une croisade contre les Turcs, soit en acceptant le titre de patriarche de Constantinople qui lui paraissait devoir étendre sa bienfaisante influence sur son ancienne patrie. Chargé de plusieurs missions importantes, il réussit dans presque toutes et revint comblé d'honneurs. Mais il échoua dans sa tentative pour réconcilier Louis XJ avec le duc de Bourgogne; il en conçut un tel déplaisir qu'il f à son retour, en passant à Ravenne, 19 nov. 1472. II légua à Venise sa bibliothèque, l'une des plus riches de l'Europe. Son mausolée est à Rome dans l'église des Saints-Apôtres. Ses écrits, qui sont nombreux, n'ont pas encore tous été publiés; on ne possède encore, en latin, que son livre: Contre le calomniateur de Platon, ses Discours en faveur d'une croisade contre les Turcs, une trad. du Socrate de Xéno-phon, et une trad. de la Métaphysique d'Aristote. Il avait travaillé à réveiller en Italie le goût pour la philos, de Platon. Sa position, ses talents, son caractère font de Bessarion le lift» naturel entre l'Orient et l'Occident, comme entre le moyen âge et le monde moderne.

RESSEL, une des gloires de l'ordre des bénédictins , savant, de manières agréables et d'une éloquence insinuante; né 5 sept. 1662 à Buchheim, il entra au couvent 1692, prononça ses vœux en 1693, fut reçu docteur en théol. à Vienne 1696, et f 1749, trois ans après avoir célébré le jubilé de son professorat. Il est connu surtout comme ayant décidé l'abjuration du duc Antoine-Ulrich de Brunswick, 10 janv. 1710. Auteur de plusieurs ouvrages d'Hist. eeclésias-tiq. et de controverse.

BETHLÉHÉMITES, moines anglais du 13** siècle, peu importants. Ceux d'Amérique, du même nom, sont une confrérie de franciscains, fondée surtout en vue du soin des malades et de l'éducation de l'enfance, par Pierre de Béthen-court vers 1660. Innocent XI 1687, et Clément XI 1707, reconnurent cette congrégation et lui assurèrent des privilèges; elle compte auj. 40 maisons, presque toutes dans les îles Canaries; le général et la maison-mère sont à Guatimala. Une branche féminine s'est formée aussi sous le patronage de Marie-Anne del Galdo.

BETKINS, Joachim, né à Berlin 1601, pasteur à Linnen où il resta 30 ans, f 1663. Son histoire est importante surtout au point de vue du piétisrne, dont il fut une des manifestations les plus énergiques et les plus décidées. Elle sert aussi à faire connaître l'état des esprits pendant et après la guerre de 30 ans. Il appelait la chrétienté un anti-christianisme, parce que tout était anti-chrétien, et il en rejetait la responsabilité sur le clergé, qui prêchait la justification comme s'il n'y avait pas de sanctification. Ses écrits sont pleins de fougue et d'originalité; il faut nommer surtout, malheureusement en latin, 1° Christianismus ethnicus, Berlin 1633; 2° le Mystère de la croix 1637; 3° le Sacerdoce, ou la Sacrificature royale du N. T. comparée à l'absence actuelle du vrai Sacerdoce, 1640; 4<> la Mesure vraie du Christianisme et du pastoral en Allemagne; 5° l'Anti-christianisme; 6® Irenicum, ou le Courage de la paix, exhortation aux chrétiens à l'occasion de la guerre des Turcs; 7° la Participation des chrétiens aux souffrances de Christ leur chef; 8° La perte de l'Allemagne, Excidium Germaniœ, publ. après sa mort, 1666, par Breckling qui s'appelle son fils spirituel.

BEVERIDGE, Guill., né 1638 à Barrow, Lei-cester, f 5 mars 1708, comme év. de Saint-Asaph. distingué par sa science et par sa piété; auteur de plusieurs livres d'hist. ecclésiastique, de chronologie et de droit canon.

BÈZE (Théodore de), ou plutôt Besze, né 24 juin 1519 à Vézelay, Nivernais, d'une famille riche et considérée; son père était bailli. Un de ses oncles, conseiller au parlement de Paris, se chargea de son avenir, le prit auprès de lui, lui donna pour maître Melchior Wolmar, qu'il suivit à Orléans, puis à Bourges, mais que son père ne lui permit pas de suivre quand il fut appelé en Allemagne 1535. Il fit son droit à Orléans, prit son grade de licencié à Paris 1539, et obtint bientôt par la protection d'un autre oncle, l'abbé de Froidmont, le prieuré de Long-jumeau et un autre bénéfice. Tout en étudiant les Pandectes, il lisait Catulle et Ovide; il alla jusqu'à tenter de les imiter et ses essais ne tardèrent pas à lui faire une réputation. Il cultiva la poésie légère, dans un temps où elle était à la mode et où des reines même ne reculaient pas devant une littérature hazardée et licencieuse. Ses ennemis lui reprochèrent plus tard ces péchés de jeunesse, Juvenilia, et voulurent en tirer des conclusions contre la pureté de ses mœurs; ils exploitèrent entre autres une Dubia et une Candidu qu'il a chantées, mais qui n'ont jamais existé, ainsi qu'une charmante pièce la-line préconisant la supériorité de l'amitié sur l'amour, où ces pudiques censeurs crurent trouver l'éloge des crimes de Sodome. Sans nier qu'un jeune homme riche, beau, spirituel, abandonné à lui-même sur le pavé de Paris, ait pu se laisser entraîner au libertinage, on peut dire que rien ne le prouve, attendu que les assertions du p. Maimbourg ne sont pas des preuves, et que Bèze repousse avec toute l'énergie d'une âme honnête ces ignobles accusations. Le seul fait à sa charge et que l'on a dénaturé, c'est le prétendu enlèvement de la femme d'un tailleur nommé Claude, qu'il aurait séduite et épousée à Genève du vivant de son mari. Or voici l'histoire vraie. Violemment épris d'une jeune fille d'une condition inférieure, mais chaste et vertueuse, Claudine Denosse, il la décida à un mariage de conscience, s'engageant à ne jamais prendre les ordres, ce qui compromettait ses bénéfices, et à légitimer leur union dès que ce serait possible. C'était en 1544, il avait 25 ans. Il recula longtemps, mais en 1548 pendant une maladie dangereuse, il se rappela les leçons de Wolmar, sa piété se ranima et il résolut de vivre à l'avenir selon les préceptes de l'Évangile. C'était se condamner à l'exil, mais il n'hésita pas. Abandonnant ses bénéfices et sa fortune particulière, il partit avec sa femme pour Genève où ils arrivèrent le 24 oct. 1548. Après avoir fait légaliser son mariage, il s'occupa de se procurer des moyens d'existence. Il pensa d'abord à monter une imprimerie avec Crespin, mais à la suite d'un voyage à Tubin-gue auprès de son ami Wolmar, il accepta une place de prof, de grec dans la nouvelle académie de Lausanne, et se trouva par là en relations ordinaires avec Viret, Merlin, Hotman, Mathurin Cordier. Il se mit aussi à foire des lectures sur le N. T. pour l'instruction des réfugiés qui affluaient de France, et à publier des écrits de théologie, de controverse et d'édification. Mais dès 1557 il fut appelé à intervenir autrement que par la plume ou par la parole dans la grande guerre de l'époque. Il dut se rendre avec Farel auprès des cantons évangéli-ques et des princes protestants de l'Allemagne, pour plaider la cause des vaudois persécutés. Il refit encore deux fois le même voyage pour demander l'intervention des princes en faveur des prisonniers protestants de Paris. Dans un de ces voyages il avait fait à Worms la connaissance de Mélanchthon, et il s'était engagé vis-à-vis de quelques docteurs luthériens, quant à ia Cène, dans un système de concessions qui lui fut vivement reproché. De retour à Lausanne il eut à intervenir dans le débat soulevé contre Viret par l'État de Berne; il prit parti pour le réformateur, et pour éviter une destitution il donna sa démission et vint à Genève, où Calvin l'attirait 1548. Il fut d'abord nommé bourgeois, puis pasteur, professeur et enfin recteur de l'académie naissante. En 1560 il dut se rendre auprès de l'électeur palatin, pour l'intéresser au sort du malheureux Dubourg, puis immédiatement après à Nérac, à la demande de Condé, pour tâcher de rattacher le roi de Navarre au parti protestant. En 1561 il assiste au Colloque de Poissy, dont il est le principal orateur, et sur les instances de la reine de Navarre, il prolonge de 3 à 4 mois son séjour à Paris, mais sans que la conciliation des deux Églises fasse aucun progrès. Il y est encore quand a lieu le 1er mars 1562 le massacre de Vassy; il est délégué avec Francour à Monceaux où étaient les princes; assez bien reçu par la reine, il l'est très mal par le roi de Navarre qui lui dit que tout c?la est de la faute des protestants, et que lui-même, Bèze, mériterait d'être pendu. Ce fut la guerre. Condé se mit à la tête des protestants; Bèze lui servit de chancelier à Meaux et à Orléans, parcourut les bords de la Loire pour secouer les tièdes, revint à Paris pour le 3e synode national, partit pour l'Allemagne et les cantons suisses afin de justifier la prise d'armes des protestants, passa à Genève au mois de septembre, mais en repartit bientôt comme aumônier de l'armée huguenote, assista à la bataille de Dreux et ne rentra à Genève qu'après la paix. Calvin étant mort, il fut nommé à sa place modérateur de la Vén. Compagnie des pasteurs, et conserva ces difficiles fonctions jusqu'en 1580, cumulant ses fonctions pastorales avec celles de professeur, recevant les réfugiés, correspondant avec toutes les Églises, intervenant dans les luttes théologiques, multipliant ses écrits de toute nature. Il avait à peine 45 ans. En 1571, sur la demande de Coligny, il assista au synode de La Rochelle, dont il fut élu président; puis à Nimes à un nouveau synode national, et à peine de retour à Genève il vil accourir en foule les victimes de la Saint-Barthélémy et dut aviser à les recevoir, les loger, les nourrir et les consoler. Le 21 mars 1586 il était à Montbéliard, appelé par le prince Frédéric pour tenter un rapprochement entre les deux Eglises protestantes, et si les discussions n'aboutirent pas, Bèze eut du moins, grâce à son esprit de conciliation, la joie de voir avant son départ les luthériens et les réformés prendre la Cène en commun. Il fit encore beaucoup d'autres voyages, en Bourgogne dans l'intérêt de ses neveux, à Strasbourg pour s'entendre avec Henri de Condé, en Allemagne pour faire comprendre aux princes la solidarité qui liait leurs intérêts à ceux des réformés français; à Berne pour faire prévaloir des idées de paix et d'union 1588. Mais les affaires, à Genève, n'allaient pas; le trésor était à sec, l'académie menaçait ruine. Bèze se chargea de tous les cours pendant 2 ans, sans négliger ses autres devoirs, malgré son âge et les vertiges dont il souffrait. Il quitta l'enseignement en 1600, à l'âge de 81 ans, fit encore une visite à Henri IV à l'Eluiset, Savoie; il eut le bonheur de célébrer la journée de l'Escalade, 12 déc. 1602, et f le 13 oct. 1605. Sa femme étant morte de la peste en 1588, après 40 ans d'une heureuse union, ses amis le décidèrent à se remarier avec Catherine del Piano, veuve d'un Génois. Il ne laissait pas d'enfants. Il fut enterré non à Plainpa-lais, mais dans le cloître de Saint-Pierre, par crainte des Savoyards qui avaient menacé de l'exhumer et d'envoyer son corps à Rome. — Quand on pense à la richesse de cette vie si agitée, si remplie d'occupations de tous genres, missions diplomatiques, enseignement, prédications, voyages, conférences, on se demande comment un seul homme a pu suffire à tant de travaux; mais l'étonnement augmente quand on ajoute à ces preuves d'une activité extérieure prodigieuse tout ce qu'il a fait encore comme homme de cabinet, les volumes nombreux et considérables qu'il a composés La liste seule ne prend pas moins de 20 colonnes dans Haag, et nous ne la reproduirons pas; mentionnons seulement ses Poèmes, odes, sylves, épigram-mes, élégies, etc.; sa tragédie d'Abraham sacrifiant; sa comédie du Pape malade; son édition du N. T. grec, revue d'après de nombreux mss. originaux (entre autres le fameux codex qui porte son nom et qu'il donna à l'université de Cambridge), ses trad. du N. T. en latin et en français; ses Notes ou Comment, sur le N. T. (folio, 6 éditions de son vivant); ses écrits sur la Cène, ses essais de Confessions de foi, sa trad. des Psaumes, ses Discours ou Harangues prononcées en divers lieux; ses traités contre Castalion, Baudouin, Brentius, Gentilis, Xain-tes, Andreâ, etc.; sa Vie de Calvin, son Hist. des égl. réf. de France; divers comment, sur l'A. T., et une quantité innombrable de lettres, dont les unes sont conservées à Genève (3 ou 4 vol.), d'autres à Berne, Saint-Gall, Paris, et dans une foule d'autres biblioth. publiques et particulières. M. Baum, dans son Thêod. de Bèze, a reproduit un choix fort bien fait et assez complet des principales brochures, d'ailleurs presque introuvables, de ce riche et fécond écrivain; plusieurs auraient suffi à faire une réputation. Le caractère satyrique, et même sarcastique, de quelques-uns de ses écrits s'est adouci avec l'âge, mais rien ne dépasse les limites de ce que se permettaient les controversistes d'alors. Quant à sa trad. des Psaumes, v. Marot. — Si Bèze a soutenu le droit de l'État d'intervenir dans les questions d'hérésie, c'est une inconséquence qu'il a partagée avec tous les hommes de son temps; il n'avait pas encore entièrement rompu avec toutes les traditions romaines.

BIBERÀCH, Nicolas (de), témoin inconnu de la vérité; vécut dans la 2« moitié du 13me siècle, visita Rome et séjourna quelque temps à Erfurt. Il a écrit dans un mélange de vers et de prose contre la corruption du clergé (De aver-tendomato, et: Occultus), mais rien contre les erreurs de l'Église.

BIBIANA, sainte, martyre à Rome sous Julien. Le préfet Apropianus ayant perdu un œil l'attribua aux sortilèges des chrétiens et les persécuta cruellement; il tomba surtout sur la famille du chevalier Flavien dont tous les membres furent mis à mort; Bibiana, attachée à un poteau, fut tuée lentement à coups de verges. Une église fut érigée au 5®e siècle sur son tombeau, près la porte Saint-Laurent; Urbain VIII la fit restaurer 4625 par Bernini; la statue de la sainte passe pour le chef-d'œuvre de ce maître.

BIBLIANDER (l'homme du livre), Théodore, né à Bischofzell, Thurgovie, vers 1505, collègue de Myconius à Zurich, puis successeur de Zwingle comme professeur de l'A. T.; très versé dans l'hébreu et dans les langues sémitiques, ce qui lui amena de nombreux élèves, entre autres Bullinger. Il combattit les doctrines calvinistes sur la prédestination, et attaqua Pierre-Martyr avec une aigreur si passionnée 1356, qu'il s'aliéna les esprits et reçut sa démission 1560. f de la peste 26 nov. 1564.

BïCKELL, Jean-Guill., né 2 nov. 1799 à Marbourg, prof, de droit en 1826, juge et président de la cour d'appel à Cassel, ministre de la justice en 1846, et l'un des soutiens les plus décidés du ministère Hassenpflug. f 1848. Conservateur en politique, il prit une part active aux luttes ecclés. de la Hesse, demanda le régime synodal et combattit le rationalisme. Auteur d'une Hist. du droit ecclésiastique.

BIDDLE, ou Bidelle. premier chef d*s unitaires anglais, né 1615 à Watton. écrivit 1647 douze arguments contre la déité du Saint-Esprit, se rétracta, puis recommença ses attaques contre la Trinité, en s'appuyant de témoignages des Pères, fut condamné à la prison par la cour presbytérienne de Westminster, fut relâché 1651, publia de nouveau 2 catéchismes hétérodoxes qui furent brûlés par la main du bourreau, et lui-même enfermé par ordre de Cromwell dans une des Sorlingues. De retour à Londres il reprit ses petites réunions, mais la Restauration le renvoya en prison 1662, où il mourut dans le courant de l'année. Sa moralité était irréprochable. Il admettait la personnalité, mais non la divinité du Saint-Esprit.

BIEL, Gabriel, né à Spire, f P*ss»

pour le dernier des scolastiques; il étudia à Er-furt 1442, fut prédicateur à Mayence. concourut à la fondation de l'université de Tubingue 1477, fit un voyage à Rome, et après avoir enseigné quelques années la philos, et la théologie à Tubingue, obtint d'Eberhard un canonicat dans le nouveau couvent de Saint-Pierre à SchSnauerwald où il mourut. Il approuvait les décrets du conc. de Bâle, mettait les conciles au-dessus du pape, condamnait la corruption de l'Église, et prétendait que c'est Dieu, et non le prêtre, qui donne l'absolution. Dailleurs très catholique, comme le prouvent ses Sermons et son Exposition du canon de la sainte messe.

BILLICAN, Théobald. dont le vrai nom était Gerlach, né à Billigheim, près Landau, à la fin du 15m® siècle; reçu bachelier à Heidelberg 1512, se convertit k la réforme après le congrès du 26 avril 1518, présidé à Heidelberg par Luther. Il se maria et l'université lui refusa le titre de docteur; il prêcha contre le purgatoire et sur Christ seul médiateur et il dut quitter la ville. Après une douzaine d'années passées à Nôrdlingen, qu'il amena à la foi évangélique, il se décida 1535 à retourner à Heidelberg, où il y avait un milieu intellectuel plus approprié à ses besoins. L'université ne le vit pas revenir avec plaisir, et des démarches furent faites pour le forcer à s'éloigner, mais le prince s'y refusa en alléguant que Billican ne revenait pas comme théologien, mais comme juriste. Il donna en effet des cours sur les Décrétales et le Droit féodal, mais ne fut pas reconnu comme prof, régulier. Le nouveau duc, Frédéric II, lui fut encore moins favorable. Après quelques mois de prison, sans jugement, 1544, il fut relâché, et finit ses jours à Marbourg comme prof, de rhétorique, f 8 août 1554. Il a laissé des travaux sur Michée, Aris-tote et la Communion sous les deux espèces. Il était très luthérien.

BINGHAM, Joseph, né 1668 à Wakefield, élève d'Oxford, bachelier 1687, maître ès arts 1690, pasteur d'abord près de Winchester, puis 1712 à Havart, près Portsmouth, où il f 1723. Il est connu par 2 vol. de Sermons et par ses Origines ecclés. ou Antiquités de l'Égl. .chrétienne 1708-1722; la 2e éd. 1724 forme 2 v. R Cet ouvrage, d'une grande valeur pour le temps, fut bientôt traduit en plusieurs langues. 11 conduit le lecteur jusqu'à lafde Grégoire-le-Grand.

BLAARER, Ambroise, d'une famille patricienne, né 12 avril 1492 à Constance. Plac£ de bonne heure en Souabe dans un couvent de bénédictins, il se rendit ensuite à Tubingue où il se lia avec Mélanchthon et fit de bonnes études classiques. De retour au couvent 1515 il fut nommé prieur et prédicateur. Il essaya d'introduire dans le culte la lecture de la Bible; mais cela déplut à l'abbé, et le 8 juin 1521 il dut quitter le couvent et retourna à Constance. Il ne parait pas être intervenu activement dans les premiers essais de réforme, mais déjà en 1524, à la demande du Conseil, il prêche contre le culte de Marie et il est nommé pasteur. Sa tendance était modérée; à plus d'une reprise il intervint comme conciliateur entre Luther et les théologiens suisses à propos de la Cène, des images, des autels et des orgues. Il se maria en 1533 et fut appelé l'année suivante comme pré-dicateui à Stutlgard, après avoir fait adopter le 2 août 1534 une formule de concorde, qui satisfaisait également les Suisses et les luthériens et qui introduisit en Wurtemberg une Église unie plus de 2 siècles avant que la Prusse en fût dotée. Il s'établit ensuite à Tubingue d'où il rayonna dans la partie méridionale du pays. Les difficultés qu'il rencontra de la part des catholiques, et surtout de la part des luthériens stricts, l'entravant dans son œuvre, il retourna 1538 à Constance, où l'attiraient un frère et une sœur bien-aimés. Il avait servi le Wurtemberg 4 ans sans rien recevoir; à bout de ressources, ayant sacrifié tout son patrimoine, il fut obligé à cause de sa famille de demander un modeste traitement, et le Conseil lui alloua 75 livres. Il evangélisa le sud de la Bavière, de Lindau à Augsbourg, prit part à de nombreuses conférences, se rendit en 1548 à Winterthour, prêcha à Bienne et en Thurgovie de 1551-1559, et revint à Winterthour où, après avoir refusé de bonnes positions à Bâle, Berne et Gemmingen, il f le 6 déc. 1564. Il a composé en vers et en prose plusieurs petits ouvrages d'édification, de controverse et d'actualités. C'était un homme de cœur, un penseur et un excellent prédicateur; il s'attachait plus à l'essentiel qu'aux choses secondaires.

BLAIR, Hugh, célèbre prédicateur, profess. d'éloquence sacrée et de rhétorique. Né 2 avril 1718 à Édimbourg, membre de l'église presbytérienne, il fut après un court ministère dans le comté de Fife, rappelé dans sa ville natale où il fut successivement pasteur à Canon-gate, dans la Cité, et enfin de 1758-1800, à la cathédrale. En 1757 il avait aussi été nommé docteur, et en 1762 prof, d'éloquence et de belles-lettres, fonctions qu'il conserva jusqu'en 1783. Ses 5 vol. de Sermons, publiés à Londres 1777 sont très bien travaillés, de vrais morceaux de rhétorique, mais froids, et l'on n'y sent pas le christianisme vivant; ils obtinrent un immense succès, et furent trad. en allemand, français, hollandais, italien et slavon. Ses Lectures sur la rhétorique et les belles-lettres, 3 vol. 8°, sont pleines d'observations fines sur la véritable éloquence; il blâme sévèrement l'usage anglais de lire les sermons. Il avait aussi publié en 1763 une Dissert. crit. sur les poèmes d'Ossian.

BLAISE, saint, év. de Sébaste en Arménie, martyr sous Dioclétien 316. Par ses prières, il sauva un enfant qui avait une arête dans le cou, et dès lors, le jour de sa fête, 3 févr., les catholiques font des cérémonies qui doivent les préserver des maux de gorge. Comma le martyr fut déchiré avec des peignes de fer, les cardeurs. l'ont pris pour leur patron.

BLANDINE, vierge martyre à Lyon, sous Marc-Aurèle 177. Après avoir été torturée un jour entier par des bourreaux qui s'en fatiguèrent, elle fut exposée aux bêtes féroces, mais celles-ci, plus humaines, l'épargnèrent. Au bout de quelques jours elle fut ramenée dans le cirque, assista au supplice de ses frères dans la foi, fut de nouveau fouettée de verges, puis assise sur la chaise ardente et enfin livrée aux taureaux de l'arène qui mirent un terme à ses souffrances en la lançant en l'air avec leurs cornes. Les païens eux-mêmes avouèrent n'avoir jamais vu une femme subir tant de cruautés avec autant de constance.

BLANDRATA, Georges, ital. Biandrata; né 1515 d'une famille noble de Saluces, qui avait toujours marqué parmi les adversaires de l'Égl. de Rome. Il étudia la médecine, mais bientôt devenu suspect de protestantisme, il s'enfuit en Pologne, puis vint à Genève où il eut avec Calvin pendant plusieurs années des entretiens, qui ne réussirent pas à dissiper ses doutes sur la Trinité. Calvin, fatigué d'un scepticisme qui ne lui paraissait pas sérieux, cessa de le voir. Biandrata se rendit à Zurich auprès de Vermi-gli, mais sans plus de succès. Il se décida enfin à retourner en Pologne 1558, où il trouva, outre la clientèle du roi Étienne Bathori, des amis partisans de ses doutes et de ses idées religieuses. Mais toujours poursuivi par Calvin et par les théologiens suisses, il renonça à la lutte, se retira en Transylvanie 1563 auprès de Jean Si-gimond, fut accusé, probablement à tort, d'avoir favorisé l'établissement des jésuites dans le pays, et f vers 1590, étouffé dans son lit, dit-on, par un neveu qui convoitait son héritage.

BLAS1E (Sainte-), célèbre abbaye de bénédictins dans la Forêt-Noire, fondée au 8"" siècle sur les bords de l'Âlbe et sous le patronage du couvent de Rheinau, qui lui fit don d'abord des os de saint Biaise, mais qui se les fit restituer plus tard, sauf un bras. Enrichie par le comte Régimbert de Seldenburen, elle devint indépendante, eut son propre abbé 945 et se construisit un couvent 948. Sa prospérité ne cessa d'aller croissant; son abbé était prince de l'empire en 1746. Après la paix de Presbourg, l'abbaye fut sécularisée et donnée au duché de Bade. Elle a toujours eu un renom scientifique, mais plus histoire qu'en théologie. Plusieurs de ses tûoines sont devenus célèbres, Herrgott, Chuno, Ekhhorn, Neutgart, etc.

BLASTARÈS, prêtre, puis moine de l'ordre de saint Basile, auteur vers 1335 d'un Gompen-diam de toutes les lois et règles ecclésiastiques et civiles, rangées par ordre alphabétique des matières sous 303 titres, d'après le recueil de Photius et les Gomment, de Zenaras et Balsa-ffloo. Ce travail répondait à un besoin et fut reço avec reconnaissance par le clergé d'orient.

BLEEK, Fréd., 1793-1859. Originaire du Holstein, il étudia à Kiel et à Berlin, fut pri-vat-docent sous Schleiermacher 1818, et prof, de critique sacrée à Bonn depuis 1829. Auteur dune Introd. à l'ép. aux Hébreux, id. à l'A. et auN. T., Essais de critique évangélique, Explication des trois évang. synoptiques, Comment. sttrl'Apocal. Esprit sagace et lucide, il défend les droits de la science, mais n'abandonne pas le terrain de la foi.

BLEMMYDÉS, savant grec du 13™ siècle, qui travailla avec ardeur à la réunion des Églises grecque et romaine. Il était moine et prêtre en Macédoine, lorsque l'emp. Ducas Batazès, 1222-1255 convoqua une discussion religieuse à Nicée, résidence des empereurs grecs, pendant que les latins occupaient Constantinople. Blem-mydès y prit part 1233 et défendit avec érudition le dogme latin de la procession du Saint-Esprit. Il fut nommé plus tard patr. honoraire de Constantinople, mais il resta et f dans son coivent. Il a laissé 2 Traités sur la doctrine la-line.

BLONDEL, David, né 6avril 1591 à Châlons-sar-Marne, fit de brillantes études et fut rtommé 1614, pasteur à Hou dan, Seiue-et-Oise, où il resta une trentaine d'années, très considéré, quoique sans talents bien remarquables pour la prédication. Il assista, presque toi^jours comme secrétaire, à une vingtaine de synodes provinciaux et à 4 synodes nationaux, refusa en 1631 la place de professeur à Saumur, fut autorisé en 1644 à venir résider à Paris, où il pouvait rendre plus de services à l'Église par ses écrils que par sa prédication; accepta en 1650 la chaire de prof, d'histoire à Amsterdam, vacante par la mort de Vossius, mais perdit bientôt la vue sous la double influence d'un travail excessif et d'un climat trop humide. 11 n'en continua pas moins ses études, dictant puisqu'il ne pouvait plus écrire, et f le 6 avril 1655. Suspecté tour à tour de latitudinarisme, d'universalisme et d'arminianisme, il n'a mérité ces reproches que parce qu'il a blâmé l'aigreur ou la violence des controverses sur ces questions. L'importance de ses travaux historiq. et critiques lui valut du synode de Castres un don de mille francs pour achat de livres; du synode national de Charen-ton 1645 un supplément de traitement de mille francs, et de la cour de France, mais dans In dernière année de sa vie, une pension de 3000 livres, dont il jouit peu. Ses ouvrages, qui sont en général lourdement écrits, les phrases incidentes s'enchevêtrant les unes dans les autres, sont en revanche appréciés pour leur excellenle •méthode, la sûreté des renseignements, la profondeur de la science, la clarté de la critique et l'impartialité des jugements. Il y en a une vingtaine, d'étendue et de valeur diverses. Le premier fut une Modeste déclaration de la sincérité et vérité des égl. réf. de Fr. Sedan 1619, 8° en réponse à l'év. de Luçon, qui fut depuis Richelieu. Vint ensuite, Genève 1628, 4°, son Pseudo-Isidorus, où il démontre contre le jésuite Torrès, d'Espagne, l'imposture des Fausses décrétâtes. Son traité folio, Genève 1641, De la primauté en l'Église, est une réfutation magistrale du liv® du cardinal Du Perron 1620, revendiquant contre Jaques 1er d'Angleterre la suprématie absolue du pape. En 1646 il prouve dans son Apologie, que les mots de prêtre et d'évêque désignaient à l'origine les mêmes fonctions. Mentionnons encore son Familier éclaircissement, dans lequel il combat l'un des premiers, l'histoire de la papesse Jeanne, Amst. 1647-1649-1657, souvent réimpr. et trad., combattu par Coignard, Des Marets et Spanheim, approuvé par Charnier et Du Moulin, et accueilli avec joie par les catholiques; son livre contre les oracles Des Sibylles: son Convnoni -torium en faveur de la liberté de conscience, et ses Généalogies de France, en latin, 2 vol. contre Chifflet, sur les généalogies des rois de France; c'est pour ce livre, composé lorsqu'il était déjà aveugle, que la cour lui aurait faitune pension de 3000 livres. Il a publié aussi un recueil des Actes authentiq. des égl. réf. de

France, Germanie, etc. Amst. 1655, in-4<> et un certain nombre de dissertations sur des points particuliers. — L'aîné de ses frères, Moïse, fut pasteur à Meaux, puis à Londres; le second, Aaron, à Etaples et & Imécourt. — Un autre Blondel, né à Paris 1665, f ^ Londres 4 oct. 1734, médecin distingué, ne paraît pas avoir appartenu à la même famille.

BLOUNT, Charles, déiste anglais, qui fit grand bruit et obtint un succès de scandale par quelques-uns de ses écrits. Né 1654; se suicida 1693, parce que, devenu veuf, il ne put obtenir la main de sa belle-sœur. Ses principaux ouvrages sont: Anima mundi, traitant de l'état des âmes après la mort, 1679; la Vie d'Apollonius de Thyanes, avec notes, 1680; Origine de l'idolâtrie 1680; la Religion des laïques 1683; les Oracles de la raison, et le Manuel des Déistes, posthumes.

BLUMHARDT i<> Chrétien-Gottlieb, né 1779 k Stuttgard; il eut une enfance et une jeunesse matériellement difficiles, réussit cependant à achever ses études à Tubingue, vint à Bâle 1803 comme secrétaire de la Société chrétienne allemande, concourut 1804 à la fondation de la Soc. biblique; rappelé chez lui en 1807, il fut jusqu'en 1816 pasteur à Burg, mais il revint à Bâle comme directeur de la maison des missions, qui venait de se fonder et il sut leur donner une énergique et bonne impulsion, réveillant en même temps dans toute l'Allemagne l'intérêt missionnaire, et multipliant les sociétés auxiliaires. Il établit des rapports réguliers avec la Church Missionary Society de Londres, qui se chargea des élèves formés à Bâle, et il décida son Comité à se créer aussi une mission indépendante, en Russie d'abord et dans le Caucase. Mais les missionnaires ayant été bannis en 1836, elle tourna son activité vers les Indes orientales et vers la côte occidental^ d'Afrique, f 19 déc. 1838. On lui doit le Magasin des Missions, revue trimestrielle très bien rédigée et une Hist. génér. des missions, dont la trad. franç. mieux ordonnée, a pour titre Hist. de l'établissement du christianisme, etc. 4 vol. Genève 1838.

2o Jean-Christophe, né 1805 à Stuttgard, fils d'un boulanger, maître à la maison des missions de Bâle, puis pasteur à Môttlingen, près Calw. En 1852 il acheta les bains de Boll, près de Goppingen, dont il fit un établissement de santé pour le traitement des maladies physiques, mentales et morales par le repos, le régime, la prière et une cure d'âme attentive. Il a obtenu des résultats remarquables et a été pour beaucoup d'âmes le messager du salut, pour beaucoup de malades l'instrument de leur gué-rison. f à Boll, 25 févr. 1880.

BOCHART, ou Bouchard, famille de robe,

originaire de Bourgogne, mais établie à Paris.

1<> Jean, avocat au Parlement sous François

2° Son fils Etienne, avocat général à la chambre des comptes et conseiller au Parlement, épousa en secondes noces Jaqueline Luillier, dont il eut 7 enfants, entre autres Christophe, avocat, père du pasteur Matthieu, et René, père de Samuel.

3° René, pasteur, d'abord en Angleterre, puis à Dieppe 1590 et depuis 1594 à Rouen, où il fait construire un temple pouvant contenir 7 à 8000 personnes. Il épouse 1595 Ester Du Moulin, sœur de Pierre, dont il a une fille et un fils, le célèbre Samuel, + 1614 après un ministère de 23 ans.

4<> Samuel, né à Rouen 30 mai 1599, fait ses premières études avec son père, puis à Paris, â Sedan, à Saumur; accompagne Caméron à Oxford, se rend à Leyde où il étudie encore la théol. sous André Rivet et les langues orientales sous Erpénius, et rentre en France où il ne tarde pas à être nommé pasteur à Caen. Le jésuite Véron l'ayant provoqué à une discussion publique, Bochart dut accepter et choisit comme assistant son collègue Baillehache (pasteur de Caen 1626-1664). La conférence dura 9 jours, du 22 sept, au 3 oct. 1628, et roula sur tous les points controversés. Véron en ayant publié une relation tronquée, Bochart rétablit les faits dans ses Actes de la Conférence, 1630, 2 vol.. et le jésuite lui ayant répondu par des libelles diffamatoires, le parlement indigné lui imposa silence. Bochart put reprendre en paix ses savantes recherches, et publia 1646 la partie de sa Geographia sacra, le Phaleg, qui traite de la dispersion des peuples à la suite de la confusion des langues; la 2®o, intitulée Chanaan, parut en 1651 et traite surtout des Phéniciens et de leurs colonies. Son enthousiasme pour les langues orientales lui faisant voir de l'hébreu ou du phénicien partout, il se laissa entraîner à des étymoiogies et k des hypothèses chimériques; son livre est aujourd'hui dépassé sous plusieurs rapports et doit être rectifié sous d'autres, mais il était pour le moment un immense progrès et il obtint un succès tel que Christine de Suède, désirant en connaître l'auteur, l'invita à venir à Stockholm. Il fit ce voyage en 1652, avec son élève Huet, le futur évêque d'Avran-ches, mais revint bientôt à Caen pour y reprendre ses modestes fonctions. En 1660 il fut délégué par la Normandie au synode de Loudun. Il faisait partie de l'académie de Caen fondée en 1652; c'est pendant une de ses séances, en dis-cutant avec Huet, qu'il fut frappé d'une attaque d'apoplexie, et f le 16 mai 1667. Sa réputation était immense comme théologien, naturaliste, philologue et géographe. Outre les ouvrages cités, il faut mentionner encore sa Lettre à tf. Morley, chapelain du roi d'Angleterre sur 3 questions controversées, Vendôme 1650; sa Réponse au P. La Barre, jésuite, Genève 1662; son Hierozdcon. suite de monographies sur les divers animaux nommés dans la Bible, vrais ou allégoriques, Londres 1663, 2 vol. f<>: 3 vol. de sermons, publ. après sa mort. Dans la collection de ses œuvres, Leyde 1675, on trouve aussi de curieuses dissertations sur des sujets bibliques, et une Lettre à Segrais, 1663, pour prouver qu'Énée n'est jamais venu en Italie.

5° Matthieu, petit-fils d'Etienne, par Christophe sieur du Ménillet, donc cousin-germain de Samuel; pasteur à Alençon, auteur de plusieurs ouvrages de controverse estimés, f 20 fév. 1662.

BOCKHOLD, ou Bockehohn, Jean, plusconnn sous le nom de Jean de Leyde, était originaire de La Haye. Né vers 1510. Après avoir visité l'Angleterre, le Portugal et Lubeck, comme ouvrier tailleur, il s'établit en cette qualité à Leyde, où il se maria et où il ouvrit en outre aux portes de la ville une petite taverne. Il avait bonne façon, chantait bien, faisait des vers, composait au besoin des comédies-bouffes, et donnait de l'entrain au métier. C'était un libre-penseur à la mode de son temps. Il se rendit deux fois en 1533 à Munster, Westphalie, où les anabaptistes enthousiastes de la Hollande s'étaient réfugiés à cause des persécutions: il fit la connaissance de Matthiesen, qui le décida à se joindre! eux comme apôtre. 1534. Il avait alors de 21 à 30 ans. Matthiesen ayant expié par sa mort une folle imprudence commise à Pâques contre l'Église, Bockhold, en vertu d'une prétendue révélation, réclama sa charge, sa succession et sa femme; il établit dans la ville une constitution théocratique avec un conseil de douze anciens, chassa l'év. Waldeck. se fit proclamer prophète et roi, reconnut la polygamie et tous les désordres, plongea Munster dans l'anarchie, et quand, après un siège de 6 mois la ville fut prise par trahison et retomba entre les mains de Waldeck, Jean fut livré au supplice des tenailles rougies 1535, et ne se montra pas dans la torture à la hauteur de ce qu'il avait été dans la victoire. Il est difficile de faire la part exacte de ce qu'il y eut de conviction et d'impasture chez ce fanatique, mais l'imposture semble dominer.

BOECE lo Anicius Manlius Torquatus Seve-rmus Bo&tius, né à Rome entre 470 et 475, d'une des familles les plus illustres du pays, étudia à Athènes chez Proclus et cultiva avec succès les lettres et la philos, grecques. Nommé consul vers 508, comme son père l'avait été avant lui, il se montra le digne représentant des grandes traditions romaines. Il fut témoin des événements politiques de l'Italie et y joua même un certain rôle. Théodoric et ses Ostrogoths surent l'apprécier et le consultèrent souvent. Il ne se servit de son influence que pour faire du bien, mais la considération dont il jouissait finit par lui attirer des envieux, et sous prétexte de haute trahison il fut dépouillé de ses charges et honneurs, emprisonné à Pavie et finalement mis à mort au milieu de cruels supplices, 524. Les catholiques, par une singulière méprise, en ont voulu faire un saint et un martyr, croyant que c'était par son orthodoxie qu'il s'était attiré la haine de l'arien Théodoric. Sans nier qu'il ait pu se trouver sous des influences chrétiennes, il est resté païen. La tendance de son esprit le poussa toujours à chercher dans la philosophie une trêve aux maux qui suivent les invasions des barbares. Son ouvrage le plus remarquable est intitulé: De consolatione philosophiœ; nous le possédons encore. Il a traduit aussi quelques ouvrages de Porphyre, d'Aristote. etc. La vieille division des Arts et sciences en Trivium et Quadrivium, si fort à la mode au moyen âge, se réclame de lui. 11 avait quelque tendance au néo-platonisme, quoique du reste il fut plutôt péripatéticien.

2° M. Sébastien, théologien allemand, né 1515 à Guben, f à Halle 1573; recteur à Eisenach 1536, étudia à Wittenberg, et fut successivement pasteur à Mulhouse, puis diacre et surintendant à Halle, où H s'occupa avec soin des écoles et fonda ia biblioth. de Sainte-Marie. Il appartenait avec Chemnitz, au parti strict luthérien, et eut une bonne part dans la conversion de l'archev. Sigismond. Il a écrit un Index de quelques erreurs de Zwingle.

BŒHME, Jacob, théosophe chrétien protestant, né 1575 à Altseidenberg, près de Gôrlitz. Silésie. Fils de paysans, il apprit à lire et à écrire, fit un apprentissage de cordonnier, voyagea comme tel jusqu'en 1594, s'établit à Gor-litz, épousa la fille d'un charcutier dont il eut

4 fils, fut banni en mai 1624 à l'instigation du pasteur Richter, se rendit à Dresde où il tomba malade et fut ramené à Gôrlitz, où il f le 17 nov. de la même année. Richter était mort, son successeur refusa de célébrer les funérailles de Bœhme; ce fut un diacre qui s'en chargea, en ayant soin de dire qu'il aurait mieux aimé faire

5 lieues que d'avoir à présider à ce service funèbre. — Bœhme rechercha de bonne heure la

vie en Dieu, et sa piété, intime mais pleine de •

force, lui valut souvent les moqueries de ses camarades et les censures de ses maîtres. Les discussions théologiques dont il fut témoin dans ses voyages le poussèrent à la conquête de la vérité. Ce fut la grande affaire de sa vie. Il étudia Paracelse, des astrologues, des mystiques, des chimistes; il se lia avec Balthasar Walter qui venait de passer 6 ans en Orient à la recherche de la sagesse et qui déclara l'avoir enfin

trouvée dans l'échope du cordonnier; Walter appelait Bœhme le philotopkus teutonicus. Mais après tout on peut dire que Bœhme n'eut d'autre maitre que la Bible. Sa faculté de s'absorber était si puissante que 4 fois il eut des extases touchant à la vision, qui le transportèrent dans un autre monde. Une première fois ce fut pendant ses voyages: il se vit entouré d'une lumière divine et demeura 7 jours dans cette contemplation céleste. Le seconde fois, en 1600, la même lumière lui apparut et il put lire jusqu'au fond des cœurs et déchiffrer les secrets de la nature. En 1612 et 1619 nouvelles vivions. Il parlait peu, ne s'en glorifiait pas, mais elles déteignaient sur toute sa théologie, si même elles n'en étaient pas le produit, et tous ses livres s'en ressentent. Dans son premier, l'Aurore, il raconte comment il a appris à connaître toutes ces choses, et comment il a été amené à les écrire; il ne voulait pas jeter sur le saint mystère un coup d'œil indiscret; il voulait seulement connaître le cœur de Jésus et s'y cacher entièrement. C'est alors, ajoute-t-il, que les portes se sont ouvertes pour moi, tellement que j'en ai plus vu et appris en un quart d'heure que je n'en eusse appris pendant des années dans les plus hautes écoles de ce monde. » Outre l'Aurore il a écrit dans les 5 dernières années de sa vie: Les trois principes de l'essence divine, la Triple vie de l'homme, Quarante questions sur l'âme (ou Psychologia vera), le Miroir de l'éternité, la Contemplation de Dieu, l'Incarnation de Jésus-Christ, et plus de 20 autres traités ou dissertations sur des sujets de vie intérieure. Il n'a du reste rien publié lui-même; c'est son disciple Abr. de Frankenberg qui a réuni et édité ses œuvres complètes pour la première fois, Amsterd. 1682, 10 vol. Plusieurs de ses écrits ont été trad. en français par Saint-Martin dès 1669. Les idées mystiques.de B. avaient fait de rapides conquêtes, surtout en Hollande et en Angleterre. Un fils de Richter, chose curieuse, s'en fit l'ardent propagateur. Charles 1er, 1646, fit traduire ses œuvres en anglais. Elles trouvèrent aussi de violents adversaires et la discussion en vint un moment à passionner le public, au point qu'à Hambourg en 1690 il y eut des troubles populaires contre trois pasteurs suspects de bœhmisme. Parmi ceux qui lui ont rendu un beau témoignage, malgré quelques réserves, il faut nommer Spe-ner et Fréd. Schlegel. On ferait une longue liste des livres écrits à son sujet dans la plupart des langues de l'Europe.

BOGATSKY, Ch.-Henri (de), né d'une famille russe de la Basse-Silésie le 7 sept. 1690; élevé par une mère pieuse qui lui communiqua sa foi en la prière, il apprit jeune encore à cher-cher en Dieu sa force et le bonheur. Son père voulut lui faire embrasser la carrière militaire, niais il ne se sentait pour les armes aucune vacation; il se rendit à Iéna en 1713 pour faire ses études de droit, et dans une courte visite à Halle il eut l'occasion de voir et d'entendre Francke, Freylinghausen et d'autres piétistes, contre lesquels il avait des préventions, mais qui exercèrent sur sa vie une influence décisive. Il résolut d'abandonner le droit et de se consacrer entièrement au service de Dieu; il quitta Iéna, se rendit à Halle 1715 pour y faire sa théologie et comprit toujours mieux ce que c'est que la justification d'après l'Écriture: t Je lisais avec foi la Bible, dit-il, pour y trouver sa pure morale, et j'y trouvai de plus en plus Christ et son doux Évangile. > Mais sa mauvaise santé le contraignit d'abandonner les études, 1718; il retourna en Silésie, et sans brevets ni parchemins exerça pendant le reste de sa vie l'humble et paisible ministère d'un témoignage fidèle rendu en temps et hors de temps, prêchant Christ dans les familles nobles qui le recevaient, le prêchant encore dans ses promenades et dans ses voyages. Il épousa en 1726 sa cousine Eléo-nore de Felss, dont il eut deux fils, mais qui mourut déjà en 1734. Ses fils ayant été placés dans des établissements d'éducation, il accepta en 1740 la charge de pasteur et directeur spirituel à la cour du duc de Saalfeld, et à la mort du duc, 1746, il revint à Halle où le jeune Francke lui offrit l'hospitalité dans la Maison des Orphelins. Il y passa en paix ses 28 dernières années jusqu'à sa f 15 juin 1774, se rendant utile à la maison par son influence et ses cultes domestiques, aux étudiants de l'université par ses conférences et ses conseils, à l'église par ses cantiques et ses ouvrages d'édification. Le Dr Knapp de Halle a publié sa Biographie 1801, et plusieurs de ses livres ont été plusieurs fois réimprimés, entre autres son Trésor pour chaque jour. Son travail le plus considérable, ce sont ses Considérations sur le N. T. 7 vol. 1755-1761. Ses cantiques, fort nombreux, sont plutôt faits pour le culte privé que pour le culte public.

BOGOMILES, hérétiques de Bulgarie; v. Cathares.

BOGORIS, roi des Bulgares, q. v.

BOHÈME. Grande contrée du centre de l'Europe, habitée en partie par des Slaves, ou Tschè-ques. Elle fut évangélisée au 9®* siècle, sous l'influence grecque, par Cyrille et Méthodius, et conserva longtemps le culte en langue vulgaire. Mais à partir de Boleslaw 1er rinfluence romaine se fit sentir, l'évêché de Prague fut détaché de l'arche v. de Ratisbonne; la Bohême elle-même, séparée de la Bavière, fut rattachée à la Saxe, et Jean XIII y établit définitivement la hiérarchie romaine 967, avec tous les abus de son Église. Les protestations ne manquèrent jamais d'autant plus que la question religieuse je compliquait d'une question de race, et l'on vit successivement Militsch, Stickna, Janowsky et d'autres, préparer les voies à Jean Huss et à ses compagnons. Les supplices de Constance excitèrent les passions au lieu d'arrêter le mouvement de réforme. La suppression de la wape dans la Cène devint un signe de ralliement. Les hussites prirent les armes et se divisèrent bientôt en calixtins ou utraquistes, plus modérés, qui ne réclamaient que le rétablissement du calice et quelques réformes de détail, et taborites, qui insistaient pour l'abolition de loates les erreurs de doctrine, ou autres, non justifiées par l'Écriture. Le concile de Bâle en faisant par ses Compactata certaines concessions aux calixtins 1433, assura pour un siècle environ une paix relative. Les taborites en revanche s'unirent davantage aux chrétiens de la Moravie; ils formèrent avec eux une alliance fraternelle. Des penseurs distingués, des prédicateurs, des savants, des nobles illustrèrent ce petit troupeau des frères de Bohême (c'est le nom qu'ils prirent), et ils comptèrent bientôt jusqu'à 200 lieux de culte. L'avènement de Luther les trouva prêts, et en 1519 ils ont déjà leurs églises et leurs docteurs luthériens, saus qu'on puisse préciser le moment oit ils passèrent d'une confession dans l'autre, la transition ayant té en quelque sorte toute naturelle. Un grand nombre d'églises réformées existaient aussi en Bohême vers 1620. Mais les jésuites, qui étaient a Vienne depuis 1551, furent lâchés contre la Bohême pour la ramener à l'unité romaine, et ils y réussirent en partie, grâce à l'appui de Ferdinand II. À force de vexations ils exaspérèrent les protestants et leur firent commettre des fautes qui devaient être durement châtiées. Rodolphe 11 avait publié en faveur des frères des Lettres patentes de tolérance, qui leur garantissaient le libre exercice de leur culte; les catholiques tirent en sorte que cet édit resta à l'état de lettre morte, et quand le comte de Thurn réclama au nom de l'édit royal, les catholiq. lui firent une réponse dérisoire, qui mit le feu aux poudres; les mécontents montèrent au château de Prague et suivant, parait-il, un vieil usage de la Bohême, ils jetèrent les gouverneurs par la fenêtre. C'était le 23 mai 1618; ce fnt le commencement de la guerre de Trente ans, qui aboutit aux traités de Westphalie et à la proclamation de la liberté religieuse. Malheureusement la Bohême profita peu; elle avait perdu par la mort, l'exil ou l'émigration, un grand nombre de ses habitants et des meilleurs, qui avaient été porter en Saxe et dans les pays libres de l'Allemagne leur travail, leur intelligence et leur industrie. La contre-réfjrmation décrétée par Ferdinand continua son œuvre de proscription, de confiscations, d'enlèvements d enfants, de dragonades. et ce n'est que lorsque Joseph II eut rendu un nouvel édit de tolérance. 13 octobre 1781, que les protestants recommencèrent à se montrer, d'abord timidement, puis plus nombreux; ils restaurèrent leur culte, firent venir des pasteurs à leurs frais, mais, ruinés comme ils l'étaient, ils ne purent, et ne peuvent encore aujourd'hui pourvoir qu'à grand'peine au strict nécessaire de leurs conducteurs spirituels. — v. Morans, et Palacky, Hist. de Bohême.

BOISSARD, Georges-David-Fréd., né 16 août 1783 à Monlbéliard, pasteur réformé à Lillr* 1805, à Nancy 1807, appelé à Paris 1809 comme premier pasteur et fondateur de l'égl. de la Conf. d'Augsbourg. f subitement 1836. Auteur d'une Hist. de la Bible, estimée; d'un Précis de l'hist. de l'égl.; d'un recueil de Prières pour le culte domestiq., livres de chants, catéchismes; Observations sur la Loi du sacrilège; divers articles et biographies dans l'Encyclop. des gens du monde, et dans le Musée des protestants célèbres. Son caractère large, éloigné de tout esprit de secte, lui valut ce quatrain du pasteur Marron:

Qui neqne Calvinum, nec te, Luthere, wsgistros Invocat; o puro et aacro fonte petit,

Unius in Christi jura tua verba, tabellâ

BoisôàrduB carnm spirat in h&cce eaput.

Son fils unique, né Ie»* mars 1811, a été successivement pasteur dans le Loiret et la Marne. — Un pasteur de la même famille, Louis B., f 1872 à Glay, a laissé 2 vol. sur l'Égl. de Russie, 1867.

BOLINGBROCKE. Henri Saint-Jean (de), né 1672 à Battersea, f 1751, célèbre ministr d'État-anglais sous la reine Anne 1704, conclut la paix d'Utrecht 1713, combattit dix ans le ministère Walpole 1725-1735, mais n'a rien fond.' de stable; son caractère mobile y prêtait peu. Il fit plusieurs séjours en France, il épousa même en secondes noces une française, nièce de Mme de Maintenon. Il a écrit un certain nombre d'ouvrages sur la politique et la philosophie: dans ses derniers écrits en français, il afficha un déisme sans réserve qui lui valut les éloges et l'amitié de Voltaire. Sa position élevée, ses talents et sa tournure d'esprit l'avaient mis en relation avec les plus grands écrivains de son époque, Prior, Swift, Pope à qui il donna l'idée de son Essai sur l'homme, etc. Ses œuvres, réunies par Mallet 1754, ont été réimpr. en 1809, 8 vol. 8o.

BOLIVIE, État de l'Amérique du Sud, compris entre le Pérou, le Brésil, la Plata et le Paraguay; c'est l'ancien Haut Pérou devenu libre depuis la déclaration d'indépendance du 6 août 1825; doit son nom au général Bolivar qui l'affranchit. Population, environ deux millions. La religion officielle est le catholicisme, mais sans exclusion d'aucun culte; les couvents y pullulent; des novices y sont reçus, avec la seule réserve, malheureusement illusoire, qu'ils seront libres de rentrer dans le monde quand ils voudront. Le sénat est chargé des affaires religieuses. Le peuple est très dévot, les mœurs très relâchées; le mariage est peu respecté, les incestes sont fréquents; l'ivrognerie et le jeu ruinent les santés et les familles.

BOLLÀNDISTES, v. Acta Martyr.

BOLSEC, Jérôme-Hermès, né à Paris, d'abord carme vers 1543, puis médecin, attaché au service du seigneur de Falais, demeurait à Veigy, Chablais, sur les terres de Berne, à 3 lieues de Genève. Il avait embrassé la réforme, s'était marié, et s'occupait un peu de théologie. En 1551 il rompit en visière avec Calvin au sujet de la prédestination, fut cité devant la Vén. <x>mpagnie le 8 mars, puis ayant récidivé en public le 16 oct., fut conduit en prison par J. de la Maisonneuve, et une procédure fut instruite contre lui. Après une discussion publique entre lui et Calvin, le Conseil décide de consulter les églises suisses, et après leurs réponses qui penchent en général pour la modération, Bolsec est condamné le 22 déc. au bannissement. Plus tard, il fut aussi expulsé des terres bernoises. En avril 1562 il confessa ses erreurs et ses torts devant le synode d'Orléans, dédiant à Charles IX son Mirouer de Vérité, avec son autobiographie en vers; puis il rompit de nouveau avec l'Egl-, qui ne lui avait pas rendu sa confiance et rentra dans le giron romain. Pour se venger et pour plaire au clergé de Lyon, il composa 1577 une Vie de Calvin et 1582 une Hist. de la vie et des débordements de Théod. de Bèze, deux pamphlets infâmes et sans aucune valeur historique. Il f à Annecy vers 1584. v. Haag, la France l>rotart. de H. Bordier.

BONA, Jean, né 10 oct. 1609 ù Mondovi, Piémont de la même famille que le connétable François de Bonne. Entré 1624 dans un couvent de cisterciens, il fut nommé général de l'ordre en 1661, et cardinal en 1669. C'était un homme pieux et très instruit. Après la mort de Clément IX, 1670, plusieurs espéraient qu'il serait élu à sa place; le poète Daugières composa même à ce sujet une poésie où l'on trouve entre autres ce vers: Esset papa bonus, si Bona papa foret. Mais ce vœu ne se réalisa pas. f 27 oct. 1674. Outre sa collaboration au recueil des hollandistes, on a de lui un grand nombre de traités ascétiques; ils ont été publiés à Turin 1747 en 4 vol. f°. Les principaux sont (en latin), un Guide vers le ciel, l'Horloge ascétique, les Principes de la vie chrétienne, un Traité de la divine Psalmodie, deux livres sur les Liturgies et sur les Pains azymes, etc. Plusieurs ont été trad. en français.

BONAVENTURE, de son vrai nom Jean Fi-denza, né 1221 à Bagnarre, Toscane, d'une famille distinguée et pieuse. A l'âge de 4 ans il tomba gravement malade; sa mère le recommanda à l'intercession de saint François, et l'enfant guéri s'écria: 0, la bonne aventure ! De là son surnom, qui en grec correspond au nom d'Eutyches. Il entra chez les franciscains en 1243, et devint général en 1255. Il avait été nommé prof, de scolastique à Paris 1253, et rivalisait (le science avec Thomas d'Aquin, mais sa réputation de sainteté l'emportait encore sur sa renommée comme savant. Haies disait de lui: Il ne semble pas qu'Adam ait pu pécher en Bonaventure. Il gouvernait avec tant de prudence que son opinion était recherchée de tout le monde. Le docteur et chanoine Guill. de Saint-Amour, ayant écrit contre les ordres mendiants au nom de l'université de Paris, Bon. para le coup et fit condamner le livre. Appelé à l'archevêché d'York, il refusa. A la mort de Clément IV, les cardinaux divisés sur le choix de son successeur, s'engagèrent à nommer celui qu'il désignerait; son choix se fixa sur Thibaut, qui devint Grégoire X, et qui par reconnaissance le nomma cardinal 1272, et év. d'Albano. f le 15 juillet 1274 à Lyon, où il avait été suivre les discussions d'un concile relatives à la réunion de l'Égl. de Rome avec l'Égl. grecque. Il fut canonisé 1482 par Sixte IV, et Sixte V lui décerna le titre de docteur sèraphi-que. Bonaventure essaya, comme ses contemporains, de concilier la mystique qui doit fournir la matière, avec la scolastique qui doit donner la forme. Son idée dominante était celle d'un renoncement absolu pour se livrer entièrement à Dieu et pour vivre de la vie en Christ en détruisant tous les penchants naturels. Il a écrit des commentaires sur le maître des sentences de P. Lombard, et plusieurs autres ouvrages et comment, sur divers sujets, surtout mystiques. Ses œuvres compl. publ. à Rome 1586-1596, forment 6 vol. fo.

BONIFACE lo pape 418-422, nommé en concurrence avec Eulalius. Augustin lui dédia ses 4 livres contre le pélagianisme.

2<> Boniface II, goth, et nommé sous l'influence des Ostrogoths, 530-532. On a de lui une Lettre à saint Césaire d'Arles, dans les Epist. rom. Pontif. de D. Constant.

3<> Boniface III, romain, élu et f 607, obtient de Phocas que le patr. de Constantinople ne prendra plus le titre d'évéque universel, réservé à l'év. de Rome seul, ce qui, d'après l'opinion de son antéprédécesseur Grégoire, faisait de ce dernier un précurseur de l'Antéchrist.

4° Boniface IV, 608-614. Ayant reçu de Phocas le Panthéon, il l'appelle Sainte-Marie de la Rotonde, le consacre à Dieu sous l'invocation de la Vierge et de tous les saints, et y fait porter 28 voitures d'ossements sacrés extraits des catacombes.

5o Boniface V, 617-625. Il défend aux juges de poursuivre ceux qui ont cherché dans les églises un droit d'asile. Sous son pontificat, Édouard, roi de Northumberland, devient chrétien, gagné par les missionnaires de l'Évangile. Cantorbéry devient siège métropolitain.

60 Boniface VI, romain, fils d'un évêque, 896, ne régna que 15 jours. Quelques-uns en font un antipape; la majorité le tient pour un vrai pape. Comme il ne fit rien, c'est peu important.

7o Boniface VII, 974-985; Francon; regardé par quelques-uns comme un antipape. Il fit mourir son prédécesseur Benoît VI, et s'enfuit a Constantinople après avoir volé l'Église. Domnus II, Benoît VII et Jean XIV le remplacent successivement, bien qu'il n'ait pas donné sa démission. Après la mort d'Othon II, il revient 985, tue son collègue Jean XIV et conserve quelque temps encore le saint-siège. Après sa mort 985, son corps fut traîné par les pieds et abandonné sur une place publique.

80 Boniface VIII; Benoît Cajetan d'Anagni, d'abord avocat et notaire du pape à Rome, cardinal en 1281, élu pape 1294 en remplacement deCèlestin V démissionnaire. Accusé d'incrédulité, d'un caractère impérieux et violent, il eut pour ennemis les gibelins, et à leur tête les Colonne; il eut des démêlés avec l'Allemagne, l'Angleterre et la France. Arbitre entre Édouard I®' et Philippe IV, le Bel, il prononce en faveur de ce dernier et unit les deux rois par des mariages. Philippe, pour faire face aux frais de la guerre, ayant levé des contributions sur les biens ecclésiastiques et souvent abusé du droit de régale, Boniface se brouille avec lui. En 1296 le pape publie sa bulle CleHcis Idkm, mais Philippe l'ayant repoussée, Boniface cède. En 1298, il prend une décision qui déplaît au roi; celui-ci s'unit aux Colonne et fait arrêter l'év. de Pamiers qui avait répandu dans son 'diocèse des propos séditieux sur son compte. Boniface convoque un concile à Rome, Philippe défend à ses prélats de s'y rendre. Le pape lui écrit une première lettre, courte et sèche, mais qu'il rétracte bientôt; puis une seconde, plus longue, Ausculta, fiH, que Philippe furieux fait brûler, d'accord avec les États du royaume réunis le 10 avril 1302. Le pape y répond par sa bulle Unam sanctam, dans laquelle, sous prétexte que le corps de l'Église ne peut avoir deux têtes, il revendique pour lui toute l'autorité. Il excommunie Philippe le 13 avril 1303. Les États de Paris sont convoqués une seconde fois; ils appellent le pape un hereticus perfcctui, parce que, dit-on, il ne croyait pas même à l'immortalité de l'âme, et

Boniface s'enfuit à Anagni, où bientôt il est arrêté et fait prisonnier par le chancelier de France Guill. de Nogaret, assisté de Sciarra Co-lonna, qui frappe le vieillard au visage de son gantelet de fer. Le pape se montre grand dans son malheur: Prêt à mourir, dit-il, du moins je mourrai pape. Le roi voulait le faire juger par un concile, mais 4 jours après son arrestation, Boniface est délivré par le peuple d'Anagni. Un mois après, il meurt à Rome, des suites de son saisissement et de la colère qu'il avait éprouvée, mais après avoir de nouveau délié les sujets du roi du serment de fidélité. 11 oct. 1308. Il avait 86 ans. Avec lui s'accentua la lutte de l'esprit laïque qui veut s'affranchir, contre l'autorité spirituelle dont on commence a moins s'effrayer.

9û Boniface IX, noble napolitain, cardinal 1381, pape 1389, + 4404. Il se signale par de nombreuses exactions, par son avarice, et par sa complaisance pour les dérèglements de sa famille. Il établit des annates perpétuelles, et se fait payer la promesse de charges et de bénéfices non encore vacants.

10° Boniface, ou Winfried, né 683 à Kir ton, De-vonshire, reçut de bonne heure des impressions religieuses et renonçai une haute position pour entrer successivement dans plusieurs monastères. C'est là que, vers l'âge de 35 ans, il se sentit intérieurement poussé à prêcher l'Évangile en Germanie. L'échec de ses travaux en Frise, suite de guerres qui désolaient ce pays, le conduisit à chercher l'appui de Rome, d'où muni d'une recommandation du pape Grégoire II il se rendit en Thuringe, ou l'Évangile avait été précédemment prêché par Willibrord et quelques autres missionnaires. Dans un second voyage que B. fit à Rome, Grégoire parvint à l'engager, quant à son œuvre et à l'organisation des églises de Germanie, à une dépendance complète vis-à-vis du siège papal. Investi par là d'une sorte de position officielle, il parcourut la Hesse, la Thuringe, la Franconie, affrontant toutes sortes de périls au milieu de populations presque sauvages, renversant une multitude d'idoles et fondant partout des églises et des monastères, entre autres le célèbre couvent de Fulda, élevé sous sa direction en 744 par un de ses compagnons d'œuvre du nom de Sturm. Favorisé d'ailleurs par quelques-uns des chefs du pays il obtint de magnifiques succès, en même temps que par l'influence du christianisme, la civilisation s'introduisait dans toute cette contrée où plus de cent mille habitants embrassèrent la foi. En Bavière où le christianisme était déjà professé, il organisa l'Église, rétablit la discipline et fonda plusieurs évê-chés. Par sa nomination comme archev. de Mayence, Boniface était devenu le vrai chef des églises de l'Allemagne, quand, à l'âge de 73 ans, il voulut reprendre ses travaux au milieu des païens. Il remit sa charge et ses fonctions d'archev. à Lullus son disciple favori, et se rendit de nouveau au milieu des Frisons, pour y travailler comme simple missionnaire. Déjà il y avait obtenu de remarquables succès quand en 755 il fut massacré par une troupe de païens au moment où il allait célébrer un service religieux. Par son zèle apostolique et les fruits merveilleux de sa prédication, Boniface a mérité d'être appelé l'apôtre des Allemands. Il a été en même temps par sa soumission au siège de Rome, et la rigueur avec laquelle il lit prévaloir son organisation ecclésiastique, un des plus puissants auxiliaires de la papauté. Mais tout en participant sur ce point aux erreurs de son temps, il fit constamment preuve quant à sa personne d'une courageuse indépendance, par exemple vis-à-vis du pape Zacbarie, et par son humilité, sa piété intime et la sainteté de sa vie, il reste une des plus grandes figures missionnaires de l'Église au moyen âge. «V. Bost, Hist. de l'établ. du christianisme, torne II. Néander. La vie chrétienne dans les premiers siècles de l'Église). H. N.

11°, v. Bruno.

BONIVARD, ou Bonnivard, François, né 1493 à Seyssel, fut élevé par un oncle, chanoine de Saint-Pierre et prieur de Saint-Victor à Genève, qui lui destinait tous ses bénéfices et qui, f 1514, lui laissa en effet le riche prieuré de Saint-Victor, fondation très ancienne, dépendante de C!uny,et possédant plusieurs villages. Bonivard avait visité l'Italie, où il avait gagné le titre de poète lauréat; il avait appris l'allemand et étudié le droit à Fribourg-en-Brisgau; un séjour à Rome l'avait prédisposé en faveur d'une rèfor-mation. D'un naturel inquiet, agité, d'un caractère généreux, facile, primesautier, Bonivard prenait volontiers le parti des faibles contre les puissants. Il prit parti pour les libertés ae la république genevoise contre les évêques et les notables de la Savoie, et porta un jour un toast: • A Genève libre ! • qui lui valut pour réponse ces paroles prophétiques de Phil. Berthelier: « A ce jeu vous perdrez vos bénéfices et moi ma tête. » Emprisonné 1519 par le duc de Savoie, qui le trouvait surtout incommode, il ne fut relâché qu'au bout de 2 ans; mais comme son opposition ardente et parfois tracassière continua de se manifester d'autant plus que le duc détenait son prieuré, il fut de nouveau arrêté 1530, malgré son sauf-conduit,, et mené garrotté au château de Chillon où il passa 6 ans. H fat délivré en 1536 quand les Bernois, après avoir conquis le pays de Vaud, firent le siège de Chillon avec une flottille genevoise. Dans l'intervalle la réforme avait été proclamée à Genève, mais le cloître et l'église Saint-Victor, ainsi que tous les faubourgs, avaient dû être démolis par mesure de sûreté. Bonivard fut reçu bourgeois et nommé membre du Conseil des CC; en outre on lui donna comme indemnité 800 écus d'or et une pension viagère de 140. Il fut marié 4 fois, mais ne fut pas heureux avec ses femmes; la dernière, convaincue d'adultère, fut noyée. Ses dernières années fu- }; rent solitaires et pénibles, f 1570, instituant j pour ses héritiers le collège, la ville et la biblio- j thèque. Si son nom a été rendu populaire en Suisse par son patriotisme et sa capacité, il n'a pas acquis des titres moins durables par ses travaux historiques et littéraires. Ses Chroniques de la ville de Genève, commencées en 1542, sur la demande des magistrats, étaient trop pleines d'esprit, de malice et de satires contemporaines, pour qu'on osât les publier; on craignait de froisser tout le monde, mais surtout Berne et Fribourg; il en parut un résumé dans la Cosmographie de Munster, mais le mss. original s'égara et ne fut rendu à la ville qu'eu 1724. M. G. Revilliod en a enfin publié le texte. Bonivard a encore écrit contre les Libertins son livre sur l'Ancienne et la nouvelle police de Genève; ses études d'hist. générale, sous le titre de: Avis et devis de noblesse; puis: Avis et devis de la source de l'idolâtrie et tyrannie papale, contre les faux miracles; enfin: Amarti-génée, étude des origines du péché dans le monde.

BONNET, Charles, né 13 mars 1720 à Genève, f 1793; d'abord naturaliste, puis philosophe; fils de réfugiés, d'une famille riche et distinguée. Une surdité précoce l'obligea de quitter les écoles publiques pour prendre des leçons particulières. Le Spectacle de la nature, de l'abbé Pluche, fut pour lui une révélation; il lut ensuite Newton, Fontenelle, Malebranche, les Mémoires de Réaumur sur les Insectes; il se mit à observer lui-même, d'abord les chenilles 1738, et en 1740 les pucerons et leur mode de reproduction, travail qui lui valut, à l'âge <ft 20 ans, le titre de correspondant de l'Acad. des sciences. Son père lui permit alors de renoncer à l'étude du droit. En 1745 parut son Insecto-logie, dont l'idée-mère est que tous les êtres font partie d'un même système et forment une chaîne immense qui relie toutes les parties de l'univers. En 1754, Recherches sur l'usage des feuilles, quant à la nutrition des plantes et au rôle de l'air et de la lumière. Mais des ma«s d'yeux le forcent à abandonner la loupe et le microscope; il se retire en lui-même et se tourne vers la philosophie. Son Essai de psychologie date aussi de 1754, puis vient en 1760 son Essai analytique sur les facultés de l'âme, où il se rencontre avec Condillac pour imaginer

une statue qui recevrait successivement les différents sens. Il accorde une grande place aux fibres, au cerveau, à l'organisation, et il s'expose à Are regardé comme un sensualiste ou un matérialiste, mais il s'en défend avec énergie dans m Considérations sur les corps organisés 1762, *t dans sa Contemplation de la nature 1764. Ce dernier ouvrage obtint un immense succès dans toute l'Europe. Sa Palingénésie, 1769, traite de la vie à venir, non seulement pour l'homme, mais pour les animaux eux-mêmes; c'est en quelque sorte le résumé de tous ses travaux et l'expression mûrie de ses convictions et de ses croyances. C'était une protestation contre l'esprit du siècle et de l'Encyclopédie; elle lui valut les sarcasmes de Voltaire et les éloges de Haller, d'Euler, et d'autres grands esprits. Enfin en 1770 il publia son dernier ouvrage: Recherches philos, sur les preuves du christianisme, insistant sur les données de la tradition évan-eelique. « Les miracles, dit-il, sont le langage de Dieu. • Il suivait avec attention les moindres opuscules de Voltaire et mettait ses amis en garde contre le • poison fernésien, » criblant des traits les plus acérés le nouveau Lucien, le Brochurier, le grand faiseur de si et de mais, tout eu lui rendant justice quand il faisait le bieû. —Œuvres compl. Neuchâtel 1779, 8 vol.

ou 18 vol. 8°.

B0JÏ0SE, év. de Sardique, Illyrie, soutint que Marie aurait eu plusieurs enfants après la naissance de Jésus, son fils premier-né. Condamné pour ce fait au synode de Capoue 391, pois par le pape Siricius, il fut déposé de ses fonctions, et f peu de temps après. Ses partisans allèrent plus loin que lui et furent condamnés comme ariens et comme photiniens au eone. d'Arles 4i5, qui cependant reconnaissait encore leur baptême comme valable. Plus tard les passions s'en mêlèrent; Gennadius et Grég.-le-Grand ne reconnurent plus leur baptême, et ceux-ci en firent autant de leur côté.

BONSHOMMES, Boni homines, surnom de plusieurs ordres religieux q. v.; 1° les moines de Grammont, et surtout les minimes; 3<> des chanoines portugais se rattachant aux bénédictins 1433, et envoyés comme missionnaires aux Indes et en Ethiopie; 4° des cordeliers anglais; 5® les cathares et les vaudois.

BOOS, Martin, un des prêtres les plus évan-géliques du mouvement réformateur qui, vers la ân du siècle dernier, semblait annoncer un réveil au sein du catholicisme et la continuation de l'œuvre dont Fénelon d'une part, et de l'autre, mais avec plus de courage, les jansénistes avaient pris l'initiative. Il naquit la nuit de No« 1762 à Huttenried, sur la frontière de la Bavière et de la Souabe, d'une famille de paysans aisés; il était le 14™ de 16 enfants. Son père et sa mère furent emportés par une épidémie, comme il n'avait que 4 ans. Un oncle, conseiller ecclésiastique à Augsbourg, se chargea de lui, l'envoya à l'école, et lui donna le choix entre la carrière de curé et l'état de cordonnier. Le jeune garçon qui avait appris tout seul les éléments du latin n'hésita pas; il fit d'excellentes études à Dillingen, où les jésuites auraient bien voulu l'empêcher d'aller entendre Sailer, Zimmer et Weber, et le jour où il dit sa première messe, son oncle célébra cet heureux événement en organisant un tir à la cible qui dura 3 jours et qui parut au jeune prêtre n'avoir aucun rapport avec le sérieux de la situation. Il raconte ainsi dans son journal le travail qui s'était fait en lui: c Je me suis donné énormément de peine pour devenir pieux; je me couchais souvent, même en hiver, sur le sol froid à côté de mon lit; je me flagellais jusqu'au sang, j'étais criblé de cilices, je jeûnais et donnais mon pain aux pauvres; je me confessais et je communiais presque tous les 8 jours; bref j'étais si dévot que les étudiants d'Augsbourg me nommèrent à l'unanimité préfet de la congrégation. Mais... M. le préfet, la tête basse, devenait tous les jours plus triste et plus angoissé. Il s'écriait: Qui rne délivrera ? Et il n'y avait personne pour lui répondre; la grâce d»* de N. S. Jésus-Christ. Personne pour luirappe 1er que: Le juste vivra parla foi. » Ces paroles qu'il apprit à connaître et h comprendre à Dillingen, devaient être et furent en effet le text*1 de toute sa vie. L'idée ne lui vint pas de quitter son église, mais il n'hésita jamais h fraterniser avec les chrétiens d'autres communions. Sans donner prise à aucune accusation d'hérésie, il fut toujours suspect; on lui saisit ses papiers, on lui fit subir de nombreux interrogatoires, il fut mis en prison, déplacé, suspendu de ses fonctions, tracassé de mille manières, et enfin exilé, sans que jamais sa douce nature se révoltât. Il fit cinq places en Bavière et dut s'enfuir en 1799. L'év. Gall de Linz, Autriche, le reçut fraternellement et lui assura onze années de tranquillité; mais les persécutions recommencèrent en 1812, et malgré la protection avouée de Femp. François, il fut enfermé en février 1816 dans un couvent de carmélites et ne put obtenir la paix qu'en quittant le pays. Le gouvernement prussien lui offrit une place 1817 dans les environs de Cologne, et c'est là qu'après plusieurs années d'un travail difficile, mais abondamment béni, il f 29 août 1825. Il n'a pas toujours moissonné où il avait semé, mais son œuvre n'a pas été vaine.

BORA, Catherine (de), femme de Luther. Née 29 janv. 1499, de l'ancienne famille des Bora de Stein-Laussig, elle avait été mise au couvent de Nimptseh, mais pour échapper à la corrup-tiou de cette maison, elle s'enfuit avec 8 de ses amies dans la nuit du samedi avant Pâques, du 4 au 5 avril 1523, et arriva à Wittenberg le 7. Elles furent placées par les réformateurs dans des maisons honnêtes et tranquilles; Catherine chez Phil. Reichenbach, secrétaire puis bourgmestre de la ville. Deux ans plus tard, après avoir essayé vainement de la marier à d'autres, Luther se décida à l'épouser. Le mariage eut lieu le 13 juin 1525; ce fut Bugenhagen qui le bénit, Kranach était un des témoins. Malgré les épreuves ordinaires de la vie, cette union fut heureuse. Ils eurent six enfants: Hans, ou Jean, né 7 juin 1526; Élisabeth, née 10 déc. 1527, f 3 août 1528; Magdeleine, née le 4 mai 1529, f 20 oct. 1542; Martin, 7 nov. 1531; Paul 28 janv. 1533, médecin distingué, f 8 mars 1593; enfin en 1534, Marguerite. La mort de Magdeleine fut une de leurs plus cruelles épreuves; l'enfant avait 14 ans, et se distinguait par ses qualités de cœur et d'esprit. Catherine survécut 7 ans à Luther et vit des jours difficiles; la guerre de Smalcalde supprima un moment toutes ses ressources, et souvent elle dut réclamer pour elle et ses enfants les secours de ceux qui devaient tant à son mari. Elle f à Torgau 20 déc. 1552. C'était une femme de cœur et de foi, qui en plus d'une circonstance releva le courage de son mari, et qui se montra toujours digne de lui par l'élévation de son caractère, par son dévouement et par sa soumission. Sans être une beauté accomplie, les portraits de Kranach la représentent comme une belle personne, distinguée de traits et de tenue.

BORBORITES, ou Borborien*, gnostiques, une des sous-divisions des nicolaïtes, dont les restes subsistaient encore au temps d'Épipha-nes. Ils passaient pour se vautrer dans la fange afin de bien établir leur inépris pour le corps. Us se vantaient de posséder des livres saints tout particuliers, un évangile d'Ève, un livre de Noria femme de Noé, des révélations d'Adam, etc. Ils ne comptaient pas moins de huit ciels; le 7« avait pour chef l'Eternel Zebaoth, le Créateur, sous la forme d'un âne ou d'un cochon; dans le 8* étaient Barbelo, la mère des vivants, le Père de toutes choses, le Dieu souverain et le Christ. Leur morale était ignoble.

BORDELUM, petite secte du Schleswig-Hol-stein, excroissance malsaine du piétisme, qui se forma en 1739 à Bordelum, près de Flensburg, et se constitua au nombre de 15 à 20 personnes, sous la direction d'un candidat saxon du nom de Bâhr. Ils méprisaient l'Église établie, qu'ils appelaient la maison du diable; ils ne voulaient ni du dimanche, ni de la cène, ni du baptême, ni du mariage. Bâhr s'enfuit avec la femme d'un de ses amis, Borbenius avec la femme d'un autre, et finit cependant par se marier pour son compte. Ils furent persécutés en Danemark, non pour cause de religion, mais pour immoralité. Bâhr f misérablement à Bred-stâdt dans l'hiver de 1743, sans que le pasteur Schonborn ait pu le ramener à de meilleurs sentimenls. La secte s'éteignit bientôt.

BOREL, ou Borrel, Adam, né 1603 dans le Séeland, f 1667, hébraïsant distingué, non moins connu comme prédicateur, donna sa démission de pasteur, estimant que l'Église officielle avait perdu son caractère chrétien, et réunit à Amsterdam 1645 le petit troupeau de ses adhérents en assemblées religieuses. Son principal écrit; Ad legern et testimonium fit sensation; c'était un appel à l'autorité absolue des Écritures. II publia en 1664 un Traité de la religion des frères, et 1667 un livre sur la Vérité de Thist. évangélique.

BORGIA, famille romaine, originaire de Borja, en Espagne, figure à plus juste titre dans l'histoire profane que dans l'histoire de l'Église, bien que plusieurs de ses membres aient porté la pourpre ou la tiare. Nous mentionnerons les suivants: 1° Alphonse-Borgia, v. Calixte III. 2° Roderic-Lenzuoli, v. Alexandre VI. 3° César, fils du précédent et frère de Lucrèce, nommé cardinal 1493, puis sécularisé et redevenu laïque; épousa une fille de Jean d'Albret, prit 1501 le titre de duc de la Romagne, et après une vie très accidentée, fut tué au siège de Viana, Espagne, 1507. Modèle du tyran, d'après Machiavel. 4° François, duc de Gandie, grand d'Espagne, né 1510 à Gandie, Valence, vécut d'abord dans le monde, puis jouit de la faveur de Charles-Quint, qui le nomma vice-roi de la Catalogne. Ayant perdu sa femme qui lui avait donné 8 enfants, il renonça au monde, entra dans l'ordre des jésuites, en fut nommé 3m* général, malgré sa résistance 1565, et se distingua des Borgia par ses vertus. Canonisé par Clément IX. Le duc de Lerme, ministre de Philippe III, était son petit-fils.

BORRHAUS, v. Cellarius.

BORRI, ou Borro, Burrhus, François-Joseph, alchimiste, enthousiaste et aventurier; né à Milan 1627, étudia à Rome chez les jésuites, entra au service de la cour et se mit à chercher la pierre philosophale. Puis, changeant de carrière, il dénonça la corruption romaine et annonça une réforme dont il serait le promoteur, sous la direction du pape. Il raconta des visions qu'il aurait eues et prêcha de nouvelles doctrines sur la divinité de Marie, l'incarnation du Saint-Esprit, etc. Mais quand il vit que l'Inquisition commençait à s'occuper de lui, il ne se sentit plus en sûreté à Rome et retourna à Milan; il réunit en congrégation un certain nombre d'adhérents, leur imposa le vœu de pauvreté, prit leur argent et ne rêva rien moins que de s'emparer de ta ville et d'en devenir le dictateur. Son projet ne réussit pas, il dut s'enfuir, et comme il était condamné au feu, il se rendit chez la reine Christine en Suède, puis chez Frédéric III de Danemark, et enfin en Turquie, se taisant richement payer des souverains qui l'employaient. Arrété par ordre de l'empereur il fut conduit à Vienne, extradé sur la demande du nonce, condamné à se rétracter 1673, et enfermé pour la vie au château Saint -Ange, où on lui fit la vie facile, f 1695.

BORROMÉE, Charles (comte de), né 2 oct. 1538 à Arona, d'une famille distinguée de la Lombardie, f à Milan le 3 nov. 1584. Sa mère était une Médicis, sœur de Pie IV. Tout jeune il montra du goût pour le sacerdoce. Après ses premières études, faites à Arona, il passa à l'université de Pavie, prit son grade de docteur en droit à 22 ans, et fut nommé la même année 1560 arehev. de Milan et cardinal, par le pape son oncle. Il n'était pas même prêtre. Cette élévation rapide d'un cardinal imberbe fit beaucoup crier, mais sa modestie et ses vertus désarmèrent les envieux. Il resta encore 6 ans à Rome, chargé de l'administration des Romaines, de la marche d'Ancône, des provinces étrangères (Portugal, Suisse et Pays-Bas), et de l'inspection générale des franciscains, des carmélites et des chevaliers de Malte. Il se fit ordonner prêtre en secret 1562, pour échapper aux obsessions de ses parents et même de son oncle, qui le pressaient de se marier et de donna- des héritiers à une famille menacée de s'éteindre. En 1565 il prit possession de son diocèse, dut retourner un moment à Rome pour tecevoir le dernier soupir de son oncle, et revint à Milan pour s'y consacrer tout entier. Ses biographes ne tarissent pas en éloges sur ses talents, son zèle, son activité pratique et son dévouement; il paya non pas de sa fortune seulement, mais de sa personne, lors de la famine de 1570 et de la peste de 1576. Il chercha partout à ranimer la vie religieuse, et travailla avec une grande énergie à réformer les ordres qui s'étaient écartés de leur règle. L'ordre des Humiliés, peu reconnaissant de tant de discipline, aposta des hommes pour l'assassiner, le 25 oet. 1569, devant l'autel, mais la balle ne fit qu'effleurer la peau. Il visitait lui-même, quelle que Ait la saison, les villages les plus éloignés de sa paroisse, et fonda des séminaires pour l'instruction de son clergé. Son temps se partageait entre l'étude, les exercices de dévotion et les soins de son diocèse. Malheureusement il eut les défauts de ses qualités, et son zèle catholique l'inspira mal dans ses campagnes contre les protestants et contre les libertés suisses. Il foada à Milan un séminaire helvétique pour doter la Suisse de prêtres imbus des doctrines ul-tramontaines; il fit en 1570 un voyage en Suisse, parcourant à pied les hameaux des montagnes, recommandant et faisant adopter les décrets du conc. de Trente, installant un nonce à Lucarne; les jésuites à. Porrentruy, à Fribourg, à Sion, à Brigue; les capucins à Lugano, Lu-cerne, Uri et Unterwald. Il posait enfin les bases d'une ligue réactionnaire, qui ne se réalisa qu'après sa mort, et qui prit le nom de Ligue d'or, ou Ligue Borromée, par laquelle les cantons catholiques s'engageaient, 1er oct. 1586, à prendre les armes contre ceux qui toléreraient l'hérésie sur leur territoire; c'était la guerre civile. Borromée mourut à 46 ans, épuisé de fa-tignes et d'austérités. Son tombeau est dans la cathédrale de Milan, sa statue de bronze à Arona. Canonisé par Paul V, 1610. Ses œuvres forment 5 vol. f». Milan 1747. — Son neveu Frédéric 1564-1631, aussi cardinal et archev. de Milan, fut plus tolérant et plus éclairé; il fonda à Milan la biblioth. ambroisienne.

BOR

BOSSUET, Jaques-Bénigne, né 27 sept. 1627 à Dijon, d'une famille de robe. Il est appelé par La Bruyère le dernier des pères de l'Église, et occupe incontestablement une des premières places parmi les orateurs et les écrivains du 17me siècle. Ambitieux et égoïste, il fut le flatteur de Lonis XIV, de ses maltresses et de ses confesseurs; le champion de toutes les causes du roi et l'ennemi de tous ses ennemis. Il combattit l'ultramontanisme parce que Louis ne voulait pas d'autorité au-dessus ou à côté de la sienne; il combattit le protestantisme, le jansénisme et le quiétisme, parce que le roi ne voulait qu'une religion dans le royaume. Son caractère fut loin d'être à la hauteur de son talent, mais en constatant les vices du premier, cela n'empêche pas de reconnaître l'ampleur et la richesse du second. Après avoir étudié d'abord chez les jésuites à Dijon, Bossuet entra au collège de Navarre à Paris, se rattacha en philos, à la méthode de Descartes, en théol. au système de Thomas d'Aquin et à la doctrine d'Augustin. Il soutint sa première thèse à 16 ans, et son talent était déjà si remarquable qu'on le pria un soir d'improviser un sermon dans les salons Rambouillet. En 1648 il soutint sa seconde thèse devant le prince de Condé à qui elle était dédiée. En 1652 il fut ordonné prêtre et passa docteur en théol. Il travailla quelques mois à Saint-Lazare sous la direction de Vincent de Paule, puis il vint à Metz où il avait des parents et un bénéfice, et où il fit ses premières armes contre les protestants, sous la forme d'une: Réfutation du catéchisme du pasteur P. Ferry, 1655. Il allait souvent à Paris, où la cour le faisait prêcher, pour entendre de belles paroles plutôt que de bonnes vérités. Turenne et Dan-geau mirent leur conversion sur le compte de son éloquence, et sa réputation grandit d'autant. Il fît presque coup sur coup l'oraison funèbre d'Anne d'Autriche, de la reine d'Angleterre et d'Henriette, duchesse d'Orléans, et fut dans l'intervalle, appelé à l'évêché de Condom 1669. En 1670 il fut chargé de la tâche ingrate d'élever le dauphin, et écrivit pour ce jeune prince un de ses chefs-d'œuvre, le Traité de la connaissance de Dieu et de soi-même, Paris 1709; un autre chef-d'œuvre, malgré ses défauts, le discours sur l'Hisl. univ., et sa Politique tirée de l'Écriture sainte, qui n'a presque pas de valeur. Il continuait en même temps sa guerre de plume, de controverse, d'intrigues et de négociations contre les protestants. En 1671 il publie son Exposition de la doctrine de l'Égl. cathol.; en 1682 son Traité de la communion sous les deux espèces; en 1688 son Hist. des variations de l'Egl. prot. en réponse au pasteur La Bastide qui lui avait reproché, non sans raison, d'avoir varié lui-même et d'avoir présenté la doctrine catholique sous une forme que l'Église ne pouvait pas reconnaître; c'était aussi l'opinion du p. Maimbourg et d'autres. Il eut en 1678 une conférence avec Claude, à la demande d'une dame De Duras, qui voulait au moins colorer sa conversion; les deux adversaires en publièrent le compte rendu, 1682 et 1683. Enfin en 1681, après l'achèvement de l'éducation du dauphin, Bossuet reçut pour sa récompense l'évêché de Meaux, et il inaugura son entrée en fonctions par une Lettre pastorale et par son Catéchisme de Meaux, qui ne parurent que plus tard, 1686 et 1687. En 1682, à l'assemblée du clergé qui eut lieu k l'occasion des prétentions du pape, il dirigea les débats et rédigea les 4 propositions, qui sont la plus fidèle expression de ce qu'on appelle les Libertés gallicanes; il les défendit plus tard sur la demande du roi, dans sa Defen-sio declarationis, qui ne parut qu'après sa mort. Il eut à répondre aussi à Jurieu et à Basnage, et il le fit dans plusieurs écrits entre 1689 et 1701. Il prit une part active à la Révocation de l'édit de Nantes, mesure impolitique autant qu'injuste, où il voit « le plus bel usage de l'autorité. » Il correspondit plusieurs années avec Leibnitz, lui dans l'espoir de ramener les protestants au catholicisme, Leibnitz dans le désir impossible de fondre les deux communions en une seule Église universelle, 1690. Ses dernières années furent consacrées à poursuivre le quié-tisme dans la personne de Mad. Guyon et dans celle de Fénelon. Son Instruction contre les erreurs des faux mystiques, 1697, est ecrite avec une aigreur qui fut dépassée encore dans sa Relation sur le Quiétisme, 1698, et sa conduite envers Fénelon, même après que celui-ci eut eu la faiblesse de se rétracter, fut blâmée par plusieurs de ses amis comme trop personnelle et peu généreuse. Le roi le nomma conseiller en 1697, et aumônier de la dauphine en 1698. En 1700, dans l'assemblée du clergé, il s'éleva avec la même énergie contre la morale relâchée des jésuites et contre le jansénisme qui apparaissait de nouveau. Il écrivit encore contre la version du N. T. de Richard Simon 1703, et une explication de Es. 7, 14, sur l'Enfantement de la Vierge 1704. f à Paris le 12 avril 1704. Ses Oraisons funèbres sont ce qu'il a fait de mieux, au point de vue littéraire, mais au point de vue religieux on y sent plus le courtisan que If chrétien. Quant à ses sermons et discours, La Harpe estime avec raison qu'on en a exagéré la valeur, mais il s'y trouve des morceaux, entre autres le Panégyrique de saint Paul, qui appartiennent aux plus belles productions de la chaire chrétienne. Bossuet est embaumé dans un caveau de la cathédr. de Meaux; il a été exposé il y a quelques années k la vue des fidèles. Ce grand champion du catholicisme n'a pas éh* canonisé. Sa Vie a été écrite par le cardinal de Bausset. Son éloge (il avait élé reçu de TAcad. française en 1671) a été prononcé ou écrit par de nombreux panégyristes, Saint-MaroGirardin. Patin, etc. Ses Œuvres complètes ont eu de nombreuses éditions. — Il avait un neveu, du même nom, qui fut év. de Troyes, et qui a publié après sa mort plusieurs de ses ouvrages inédits.

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BOST 1» Pau I - A m i-Isaac - David, né 10 juin 1790 à Genève; après 4 années passées k Neu-wied, il fit ses études à Genève et fui consacré en 1814. Encore étudiant il s'était attaché an réveil religieux de son église, et ne cessa de lui rester fidèle, sans toutefois en accepter complètement ni les doctrines, ni l'organisation. Il fut 2anssuffragant àMoutiers-Grandval, Berne, et 7 ans agent de la Soc. continentale de Londres, comme missionnaire en France ot en Allemagne. De retour en 1825 il accepta successivement une place de pasteur dissident à Genève et k Carouge; fut condamné pour attaques contre la Compagn. des pasteurs, qu'il accusait d'avoir peu k peu dénaturé la foi de l'Église, et continua de se livrer à des courses missionnaires et à des travaux littéraires considérables. En 1840 il rentra dans l'Égl. nationale et prit du service en France, d'abord pasteur à Bourges, puis aumônier à Melun. En 1848 il se retira à Paris, et quelques années après à Laforce où il f 24 déc. 1874, quatre mois après avoir célébré ses noces de diamant. Parmi les nombreux ouvrages qu'il a laissés, on remarque: Hist. des Fr. de Bohême et de Moravie; Hist. de l'établissement du christianisme, d'après Blumhardt; Mémoires pouvant servir à l'histoire relig. des égl. etc.; Christianisme et théologie; Recherches sur la Constitution de l'Égl.; Genève religieuse;

Défense des fidèles; Procès: plusieurs traités de «controverse, et un recueil de Chœurs et cantiques, dont plusieurs sont devenus rapidement populaires. Il avait eu une fille et dix fils, dont six pasteurs. Le plus connu est

2° John (Jean-Marc) né 4 mars 1817 à Mou-tiers-Grandval; d'une constitution délicate, d'une àme ardente, il tenta à plusieurs reprises de faire des études régulières, mais sa santé ne le lui permit pas. Les médecins l'obligèrent à se îiiettre à des travaux manuels, et il se lit relieur, l u grand talent pour la musique lui ouvrit cependant une autre carrière; il vint à Paris, accepta un préceptorat très avantageux en Irlande; mais toujours désireux de se vouer au ministère, il voulut essayer de nouveau des études et vint à Montauban, où il passa 18 mois. Encore une fois il fut arrêté par la maladie. L'égl. évangélique de Laforce, Dordogne, l'ap-l>ela tel qu'il était; ses professeurs l'engagèrent accepter, et il fut consacré à Orléans, 1844. C'est là, pendant un ministère de 35 années, qu'il a fondé les 9 établissements qui aujourd'hui portent son nom. et qui lui valurent, en 1861 le prix Monthyon de 3,000 fr. et en 1866 la croix d'honneur. Une grande charité, un remarquable talent d'administration et une volonté énergique, lui ont permis de vaincre les difficultés nombreuses qu'il a rencontrées sur sa route, et de s'assurer des aides bien qualifiés et dévoués, f 1er n0v. 1881 à Paris; enterré à Laforce. Notice par Bouvier.

BOUHOURS, Dominique, jésuite né à Paris 1628,11702, connu seulement par une traduction aussi médiocre que prétentieuse du N. T. d'après la Vulgate; il y mit 15 ans.

BOURBONNAIS, ancienne province correspondant au département actuel de l'Allier. Il y avait déjà des luthériens à Moulins en 1562, et le 6 avril le ministre Cougnat était emprisonné, ainsi que le seigneur de Foulet dans le château duquel il avait prêché. De nombreuses persécutions eurent lieu pour cause de religion par le gouverneur Mon taré, qui appelait le bourreau son compère et le faisait manger à sa table. Après l'édit de Nantes plusieurs égl. se constituèrent, Moulins, Hérisson, Saint-Amand, formant un colloque avec le Berry et le Nivernais. La difficulté était toujours de se procurer des lieux de culte, et c'est dans les faubourgs qu'ils etaient ordinairement relégués, grâce au mauvais vouloir des populations et des gouverneurs. Des mesures vexatoires, notamment sous Marie de Médicis, les ruinèrent peu à peu, même avant la révocation, qui ne trouva plus rien à détruire. Avec germinal on put constater qu'il était resté du feu sous la cendre; de modestes assemblées reparurent. Aujourd'hui le Bourbonnais forme une paroisse protestante officielle, rattachée au Consist. de Bourges et à la 3mc circonscription synodale. Il y a des tem pies à Vichy, à Moulins et à Montluçon, avec des écoles prospères, d'importantes annexes à Commentry et Bézenet, et un culte régulier en été aux stations thermales de Vichy et de Néris.

BOURDALOUE, Louis, né à Bourges, 20 août 1632, f 13 mai 1704, entra de bonne heure dans la Société des jésuites, se fit remarquer par des talents oratoires hors ligne, et ne tarda pas à être envoyé à Paris, où il obtint un immense succès. Il prêcha dix fois le Carême ou l'Aven t devant Louis XIV et sa cour. Après la révoc. de l'édit de Nantes, il fut chargé d'éclairer les protestants du Languedoc, et montra dans cette mission un tact et une modération qui lui font honneur. Il n'avait du reste d'un jésuite que le nom. De retour à Paris, il consacra ses dernières années aux pauvres, aux hôpitaux et aux prisons. Moins sublime que Bossuet, moins onctueux que Massillon, il est plus dialecticien et meilleur logicien; ses plans sont meilleurs et plus clairs. On peut le considérer comme le restaurateur de la chaire catholique française; il est le premier qui ait rompu avec le mauvais goût des anciennes trivialités et avec le goût plus moderne d'une afféterie prétentieuse; il est grave, sérieux, simple et instruit. Son sermon sur la Passion est particulièrement estimé.

BOURDIN. Maurice, v. Grégoire VIII.

BOURGES, v. Pragmatique Sanction.

BOURIGNON, Antoinette, née à Lille 1616; laide et contrefaite; sa famille eut un moment l'idee de l'étouffer comme un monstre. Elle se jeta dans des dévotions déréglées, faillit se marier à 20 ans, mais se sauva au moment où la noce allait être célébrée, fut recueillie dans un couvent de Cambrai, mais s'enfuit encore, toujours poursuivie par des visions. On lui confia à Lille la direction d'un hôpital, et cette activité pratique mit un terme momentané à ses divagations. Mais ses accès recommencèrent; elle ne voyait partout que démons et possédés. Elle partit pour la Hollande, puis pour une île du Holstein où elle monta une imprimerie et publia une foule de traités mystiques en allemand, français et flamand. Après beaucoup de tribulations et d'aventures elle revint à Frane-ker où elle f 1680, laissant son bien à l'hôpital de Lille. Les adeptes qu'elle avait recrutés disparurent avec elle. Ses traités ne forment pas moins de 21 vol. 8°. Amsterd. 1679. Son idée fixe était de réformer l'Église, mais les moyens qu'elle employait compromirent son œuvre. Malgré sa laideur elle fit plusieurs passions. Ses principaux écrits sont: Traité de l'aveuglement des hommes, Traité du nouveau ciel, Renouvellement de l'esprit évangélique, l'Innocence reconnue, etc.

BOWER, Archibald, né 1686 à Dundee, étndia à Douai, entra à Rome dans l'ordre des jésuites, fut successivement professeur d'histoire, de philos, et de rhétorique, et en même temps conseiller du saint-office; s'enfuit tout k coup en Angleterre 1726, se joignit à l'Église anglicane, devint en 1747 bibliothécaire de la reine par la protection de lord Littleton, et consacra ses dernières années à des travaux littéraires et historiques. Il avait épousé une femme riche et de bonne famille, f 6 sept. 1766. Son principal ouvrage est une Hist. des papes, 7 vol. 4° dont la publication commença en 1750. Les motifs de sa conversion n'ont jamais été tirés au clair, et sa personne n'a pas inspiré une grande confiance à ses nouveaux coreligionnaires.

BOYLE 1° Richard, 1566-1643, né à Gantor-béry, s'éleva par son seul mérite d'une position médiocre aux plus hautes dignités de son pays sous Élisabeth et fut nommé comte de Cork. Il eut 15 enfants, dont 7 fils, presque tous distingués. Le plus jeune fut

2o Robert, né 25 janv. 1626 à Lisborn, Irlande; naturaliste distingué, aussi pieux que savant, l'un des fondateurs de la Soc. royale des sciences de Londres, 1645, primitivement Collège philosophique. Si les sciences physiques lui doivent de nombreuses observations et d'intéressantes découvertes, il ne travailla pas avec moins de zèle k la propagation et à la défense du christianisme. Président de la Société fondée en 1647 pour l'évangélisation de la Nouvelle Angleterre, il rendit de grands services k l'œuvre des missions; il fit imprimer k Oxford à 500 ex. une traduction des Evangiles et des Actes en langue malaise, des Bibles en celte vulgaire pour l'Irlande et le pays de Galles, le N. T. en arabe, ainsi que le traité de Grotius sur la Vérité de la relig. chrét. Il écrivit lui-même plusieurs ouvrages d'apologétique contre les déistes, entre autres des Considérations phy-sico-théol. sur la possibilité de la résurrection, 1675, un Résumé (summa) de la théol. chrét. 1682, Conciliation de la raison et de la religion, le Chrétien naturaliste, le Virtuose chrétien, etc. Œuvres compl. Londres 1744, 5 vol. f°, t 26 sept. 1691. Par testament il laissait sous le titre de Fondation Boyle une somme suffisante pour donner chaque année une rémunération de 50 livres à un prédicateur désigné par ses exécuteurs testamentaires, qui ferait dans une église désignée 8 conférences sur les vérités de la religion révélée ët contre les non-croyants, comprenant sous ce titre aussi bien les déistes et tes athées, que les païens, les juife ou les musulmans.

BRADWARDINE, Thomas (de), né vers 1290 k Hartfield, Suffolk, fit ses études k Merton-

College, Oxford, et se distingua en mathématiques, en philos, et en théologie. Il composa des. tables astronomiques, et 3 ouvrages sur l'arithmétique, la géométrie et les proportions. Mais c'est surtout comme théologien et comme réformateur qu'il s'est fait connaître. Après avoir enseigné comme docteur à l'univ. d'Oxford, il fut nommé chancelier de Saint-Paul à Londres, puis chapelain et confesseur d*Édouard III qu'il accompagna dans ses campagnes en France. Il fut ensuite nommé archev. de Cantorbéry, mais f avant d'avoir pris possession de son siège, 22août 1349. La simplicité presque rustique de ses manières lui avait valu les moqueries dédaigneuses des prélats romains k Avignon où il avait été consacré. Il fut k son époque un des rares témoins qui défendirent contre les pélagiens la doctrine de la grâce. Son livre: De causé Dei contra Pelagium, Londres 1344, publié 1618 par Savilius, est une éloquente revendication des droits de Dieu dans le salut de l'homme et de sa souveraineté absolue, contre ceux qui font t de la volonté de l'homme la maîtresse, et de la volonté de Dieu la servante. »

BRAINERD, David, missionnaire auprès des Indiens de New-Jersey; plein de zèle et d'abnégation. f 1747.

BRANDEBOURG, ancien état de l'emp. germanique, sans frontières naturelles et dont les limites varièrent souvent. Occupé d'abord par les Varins, puis par les Wilzes, il fut conquis par Charlemagne qui en prit la capitale, la peupla de colons allemands, et en confia la garde k une famille célèbre de chevaliers. Ceftit l'origine de l'introduction du christianisme dans ce pays. Un siècle plus tard on y trouvait encore une église chrétienne, mais les païens la détruisirent plusieurs fois. Le culte y fut rétabli sous Henri l'Oiseleur, vers 932, par Bernard Ier, margrave de la contrée; Otton y met un évêché, qui devient un centre missionnaire, 948. Après beaucoup de vicissitudes territoriales, religieuses et politiques, le margraviat est vendu par le duc de Luxembourg 1415 au hur-grave de Nuremberg, Frédéric, de la branche cadette des Hohenzollern, qui dès lors ne l'ont plus lâché et l'ont successivement agrandi. Jean-Sigismond 1618 en fit le duché de Prusse; en 1700 Fréd. III en fit un royaume et prit le nom de Fréd. Ier; dès lors l'histoire de Brandebourg se fond dans celle de la Prusse. — La réformation y trouva un terrain bien préparé; déjà dès le 14m® siècle les vaudois, puis les bohèmes et les hussites avaient travaillé les esprits; l'autorité du pape n'y était pas solide, et si le prince-électeur Joachim ne se montra pas dès l'abord favorable à Luther, ce fut plutôt par la crainte des excès que par crainte d'une réforme; la guerre des paysans le fit encore reculer davantage. Cependant les villes se prononçaient les unes après les antres, et les jeunes princes qui avaient appris à connaître Luther, qui l'avaient vu à Worms, qui avaient correspondu avec lui, étaient entrés dans le mouvement, ainsi que leur pieuse mère. Aussi, lorsque Joachim II monta sur le trône en 1535, son parti était pris, mais il ne voulut rien faire à la légère, ni user de violence. Les communes furent consultées, des conférences eurent lieu, des prédicateurs distingués furent appelés, Mélanchthon intervint avec ses tendances conciliatrices, et Luther lui-même se montra modéré, accordant aux scrupules du savant, évangélique et un peu timoré prédicateur George Buchholz, tout ce que celui-ci pouvait désirer, un crucifix d'argent et même d'or, s il le voulait; un surplis ou une chasuble de lin, de soie ou de velours; « et si le prince trouve qu'une procession autour de l'église ne suffise pas, qu'on en fasse sept, pourvu qu'on se rappelle que cela n'a rien à faire avec le salut. » Après de nouvelles négociations et quelques changements proposés par Bugenhagen et Mélanchthon, les États examinèrent de nouveau en 1540 la constitution de réforme ecclésiastique, qui fut enfin définitivement adoptée en 1542.

BRANDT 1° v. Struensée. 2° plusieurs pasteurs arminiens de ce nom, à Amsterdam; ainsi Gérard B., auteur d'une Vie de Buy ter, 1690; Gaspard B., auteur d'une Vie de Grotius et d'une Vie d'Arminius, 1724.

BRANT, Sébastien, né 1458 à Strasbourg dans un cabaret; prof, de droit à Bâle où il demeura 30 ans, puis syndic à Strasbourg sous Maximilien 1er. Auteur d'une satire la Nef des fous <Narrenschiff), 1494, qui donne une juste idée de l'état des mœurs de son temps. Pour lui la société est un carnaval où tous les vices agitent leurs grelots, et les hommes sont assez fous pour s'y laisser prendre. Il y a aussi des traits contre l'Église, mais il n'est pas irréligieux.

BRECKLING. Fréd., né 1629 en Schleswig, 11711 à La Haye, eut une vie assez agitée; il étudia la théologie successivement à Rostock, Kônigsberg, Helmstâdt, Wittenberg, Leipzig, Iéna, Giessen. C'est à Hambourg qu'il reçut les plus vives impressions religieuses et cela d'un marchand herboriste. Après avoir servi quelque temps l'Église du Danemark, sans vouloir rien recevoir, il publia contre le relâchement du clergé une brochure qui lui valut des ennemis et des persécutions. Il dut fuir, accepta une place de pasteur en Hollande 1660, mais la quitta bientôt pour être entièrement libre, et se fixa à Amsterdam où il se lia avec tous les enthousiastes et sectaires, bons ou mauvais, qui s'y donnaient volontiers rendez-vous, sans toutefois tomber lui-même dans les excès des visionnaires; on lui reproche surtout ses opinions chiliastes. Il gagnait sa vie comme correcteur d'imprimerie. Il eut de puissants protecteurs, entre autres la princesse Marie, femme de Guillaume III, qui lui lit une pension de 400 florins, à condition qu'il se fixerait à La Haye. La princesse de Saxe lui fit aussi plus tard une pension de 80 fi. Enfin Spener, Reimar. Elsner et d'autres notabilités évangéliques ne cessèrent jusqu'à la fin de lui témoigner leur sympathie. Il s'était marié en Hollande et laissa plusieurs enfants. Son neveu Jean Moller a publié sa Vie et la liste de ses 64 ouvrages, qui respirent tous un bon esprit, mais dont le style lâche et diffus rend la lecture difficile.

BREF. Ce mot qui rappelle le latin brevis, court, et selon d'autres étymologistes, l'allemand Brief, lettre, s'emploie en style de chancellerie papale pour désigner certaines communications, moins développées que les Bulles, d'un intérêt local ou temporaire, écrites sur du papier ou du parchemin ordinaire, en caractères cursifs, comme moins solennels et visant moins à la postérité. Au lieu du sceau et de la signature du pape, ils ne sont signés que du secrétariat. On trouve les principales de ces pièces dans les Bullaires publiés à diverses époques par les deux Cherubini, Barbora, Guerra, et plus récemment par Eisenschmidt 1831.

BREITHAUPT, Joachim-Juste, le premier professeur de Funiv. naissante de Halle, celui qui lui a donné la direction évangélique à laquelle elle n'a cessé dès lors d'être fidèle. Né en février 1658 à Nordheim,orphelin de bonne heure, il fut appelé 1680 à la sous-direction de l'école de Wolfenbuttel, continua en 1681 ses études de théologie à Kiel, lit à Francfort la connaissance de Spener avec qui il se lia pour la vie, puis fut successivement prof, d'homilé-tique à Kiel, pasteur à Meiningen, pasteur et professeur à Erfurt en 1687. Il déploya une activité extraordinaire, se multipliant pour subvenir à tous les devoirs officiels et inofficiels de ses fonctions, prêchant, donnant des conférences, tenant des assemblées religieuses, et ameutant contre lui, non seulement les catholiques qui plus d'une fois mirent sa vie en danger, mais encore les protestants froids, et surtout les tièdes, qui désapprouvaient son zèle. L'arrivée de son ami Francke 1690 lui fut un précieux encouragement, mais déjà en 1691 Francke était destitué. Breithaupt protesta du haut de la chaire contre cette mesure, et accepta l'appel qui lui fut adressé de Halle, pomme prof, de théologie et directeur du séminaire à fonder. Il commença ses cours en nov. 1691, se fit bientôt adjoindre Francke comme prof, de langues orientales, puis en 1695 Paul Antoine. A eux trois ils firent la réputation de l'université, n'étant qu'un cœur et qu'une âme, des hommes de prière, des chrétiens de la Bible, donnant aux étudiants des soins paternels et leur faisant connaître la vraie théologie, celle de la foi, de la science et de la vie. Appelé en 1705 il Magdebourg comme surintendant général des églises du duché, et en 1715 comme abbé du cloître de Bergen, il conserva toujours sa place et une résidence à Halle. Sa correspondance était immense, et il remplissait avec un soin scrupuleux tous ses devoirs de pasteur et de surintendant. La consécration d'un ministre était surtout l'objet de préoccupations qui allaient jusqu'à l'angoisse; rien n'aurait pu le décider à imposer les mains à nn candidat non croyant ou douteux. Bien que souffrant, il travailla jusqu'à la lin, toujours actif et consciencieux, et f à Bergen 16 mars 1732. — Parmi ses ouvrages, on cite surtout ses: Institutiones theologicœ, 2 vol. 4°, et ses Poemata-miscella-nea, Magdeb. 1720.

BREITINGER, Jean-Jaques, né 19 avril 1575 à Zurich; après quelques années passées dans l'enseignement, il fut appelé 1609 comme pasteur à Zurich, se distingua par son dévouement pendant la peste, par son courage à censurer les autorités quand elles manquaient à leurs devoirs, par son zèle et sa générosité à secourir les persécutés de la religion et les réfugiés de la guerre de Trente ans. Il représenta Zurich au synode de Dordrecht, et se prononça contre les Remontrants. Eloquent, évangélique, patriote, il fut le digne successeur de Zwingle et de Bullinger. f 1645.

BRÈME, v. Anschar.

BRENZ, Jean (latin Brentitis), le réformateur de la Souabe et du Wurtemberg. Né 24 juin 1499 à Weil, en Souabe, f H sept. 1570 à Stuttgard. II étudia à Heidelberg, où il se lia avec Mélanchthon, OEcolampade, Bucer, Billi-can, dont quelques-uns furent ses maîtres, les autres ses condisciples. En avril 1518 il entendit les conférences de Luther, dont les 95 thèses étaient déjà connues de toute l'Allemagne, et il se joignit à lui, ainsi que ses amis, sans que personne soupçonnât encore la grandeur et l'avenir de ce mouvement réformateur. Consacré par l'év. de Spire, il donna quelques cours à Heidelberg, mais bientôt devenu suspect à cause de la franchise de son enseignement, il fut heureux d'accepter l'appel de l'église de Hall, Souabe; c'est le 8 sept. 1522 qu'il y fit son premier sermon; et il y resta 25 années, avec un traitement de 80 florins, ayant refusé plusieurs places plus avantageuses. On le consultait de toutes parts; son instruction, son tact, sa modération, sa fermeté, faisaient rechercher et apprécier ses conseils. Luther le tenait en haute estime à cause de sa profonde piété et de l'équilibre remarquable de ses facultés. Lors de la révolte des paysans, Brenz réussit à préserver la ville, faisant comprendre aux révoltés leur péché, aux grands et aux riches leur responsabilité et leur devoir. Infatigable comme théologien et comme écrivain (plus de 8 vol. f°), il savait se multiplier aussi comme organisateur, et si son pays lui doit la Confemo wirtembergica, il travailla également, et d'une manière décisive, à doter d'une (institution ecclésiastique d'autres États de l'Allemagne, notamment le Brandebourg^ lâche d'autant plus difficile, que tout était à créer et qu'il fallait tenir compte des habitudes et des mœurs de chaque pays. Il s'attachait à l'essentiel et savait au besoin céder sur les détails secondaires. Luthérien sur la doctrine de la Cène, il était cependant moins absolu que plusieurs de ses contemporains; les concessions qu'il crut devoir faire, ou les explications qu'il donna, l'ont fait considérer comme nn de* chefs des Ubiquitaires. La guerre de Trente an* le força de fuir en grande hâte, déc. 1546; il se rendit à Bâle, où il apprit la mort de sa femme,. Marguerite Grâter, dont il avait eu 6 enfants. Inquiet sur le sort de ces derniers, et protège par les ducs Ulrich et Christophe, il rentra à Stuttgard, mais dut pendant plus d'un an se-cacher pour échapper aux recherches. Il raconta lui-même que dans le grenier d'une maison oîi il avait trouvé un refuge, mais rien déplus, une poule vint chaque jour pondre un œuf auprès de sa cachette, seule ressource dont il ait vécu pendant une semaine. En sept. 1550 il se remaria avec Catherine, fille de son amr le pasteur Isenmann, dont il eut 12 enfants. Envoyé en mission auprès du Concile de Trente, il revint sans seulement avoir été entendu, et le duc Christophe le nomma recteur de l'égl. paroissiale de Stuttgard. C'est là qu'il passa ses. dernières années, soignant les intérêts généraux de l'Église, en Suisse et en France, comme en Allemagne, mais sans négliger sa propre paroisse à laquelle il se devait avant tout. Sa fin fut édifiante comme avait été sa vie, à la foi* modeste, désintéressée et bien remplie.

BRÉSIL. La population de cet empire s'éiè\>v à environ douze millions d'âmes; la grande majorité est catholique, mais d'un catholicisme puéril, matériel et grossier, comme partout où des conversions en masse se sont produites sous l'influence des jésuites. La liberté des cultes date de 1810. Depuis 1820 les privilèges des couvents et du clergé ont été successivement réduits, et le gouvernement a montré une grande fermete contre les usurpations de pouvoir des évêques. Il y a un archevêché à Bahia ou San-Salvador, avec 11 évêchés, 12 vicariats généraux, H séminaires et environ 1300 paroisses. Le cierge est ignorant, peu moral et mal payé. Le nombre des couvents a été réduit à 20, et aucun novice ne peut être admis, sans l'autorisation de l'empereur. La population protestante défasse le chiffre de 60 mille, mais ne peut être exactement fixée; un certain nombre de communautés se sont fondées sous le protectorat de la Prusse; il y en a aussi de hollandaises, d'anglaises, de suisses et de vaudoises du Piémont.

BRETSCHNEIDER, Charles-Gottlieb, théol. allemand, né à Gersdorf 11 févr. 1776, f à Gotha 22 janv. 1848; connu par son Dictionn. grec-latin du N. T., par plusieurs travaux sur les Apocryphes, par son édition des œuvres des réformateurs, par divers essais dogmatiques, par des brochures de circonstance, par des articles de journaux, et par sa collaboration au Dictionn. de la conversation de Brockhaus. Sa tendance était plutôt rationaliste que mystique, sans aller cependant jusqu'à rejeter le surnaturel. Un des premiers il éleva quelques doutes *or l'authenticité de l'Évangile de Jean. Il entra dans le ministère sans en avoir la vocation, comme il l'avoue lui-même, et ne céda qu'aux conseils de Reinhard qui n'y regardait pas de m près. Consacré à Dresde, il professa quelques temps à l'univ. de Wittenberg. La guerre de 1806 le décida à prendre une paroisse, et il finit par accepter en 1816 la place de pasteur-surintendant à Gotha, qu'il ne quitta plus. Il a rendu pins de services par ses travaux exégétiques et historiques que par sa prédication un peu sèche et qui ne touchait pas au fond de la vie religieuse; on eût dit qu'il ne regardait la théologie que du dehors, et qu'il en parlât comme si elle ne le concernait pas. Son autobiographie, publiée par son fils en 1848, laisse l'impression d'une âme droite, qui a fait le bien dans la mesure de ses aptitudes.

BRÉVIAIRE, c.-à-d. abrégé; recueil de prières qui dans l'origine, c.-à-d. vers le 91»® siècle, était écrit à l'usage de tous, par opposition au plenarium, ou pléniaire, qui était le missel, ou livre de messe, à l'usage des prêtres seuls. Sa rédaction a beaucoup varié suivant les temps et les lieux; les papes sont intervenus à plusieurs reprises, mais aussi longtemps qu'il ne s'agissait que d'extraits copiés à la main, il était difficile d'arriver à une uniformité même relative. Chacun faisait plus ou moins son choix. Le bréviaire renferme ordinairement 4 parties: «les Psaumes pour les différentes heures du jour; des fragments pour les fêtes relatives à Christ; des prières pour les fêtes des Saints; ^nfin une partie d'édification générale. Puis viennent les Appendix: l'office de Marie, les psaumes des degrés, les psaumes pénitentiaux, des bénédictions, etc. Si l'apôtre a dit: Priez sans cesse, l'Écriture semble indiquer spécialement certaines heures pour la prière, Dan. 6, 10. 13. Ps. 53, 18. Act. 2, 15. 3, 1. 10, 9. 16, 25.; c'est en vue de satisfaire à ce devoir et à ce besoin que l'Église a eu l'idée d'un livre de ce genre. La lecture journalière en est imposée à tous les prêtres, et à tous ceux qui possèdent des bénéfices ou qui ont fait des vœux.

BRIÇONNET, 1° Guillaume, cardinal, év. de Saint-Malô, puis archev. de Reims et premier ministre de Charles VIII, inspira la malheureuse campagne de ce roi contre l'Italie; il fut excommunié par Jules II, et f 1514. Avant d'entrer dans les ordres il avait été marié et avait eu 2 fils, qui furent évêques:

2o L'un à Toulouse,

3° L'autre, le plus célèbre, aussi Guillaume, d'abord à Lodève, puis à Meaux. Il fut envoyé par Louis XII comme ambassadeur auprès de Jules II, et il assista 1511 au conc. de Pise, qui avait surtout pour mission de limiter les pouvoirs des papes. Mis par son père en possession de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, il essaya, 1514, mais sans succès, d'y faire revivre les anciennes règles de l'ordre. Il se consola de son échec en accordant une paisible hospitalité à des savants et à des hommes pieux, tels que Lefèvre d'Étaples, Vatable, Pontanus, Farel, etc. Nommé 1516 à l'évêché de Meaux, il fut envoyé la même année comme ambassadeur à la cour de Léon X. A son retour, deux ans après, il voulut essayer aussi de réformer son diocèse, mais il se heurta contre la violente opposition de ses curés qui voulaient continuer de vivre à Paris, et des cordeliers dont il troublait la paresseuse oisiveté. Il cessa d'agir en public, mais il poursuivit, surtout avec Lefèvre et Farel, l'étude des Écritures. 11 leur offrit un asile en 1521, quand ils se virent menacés de persécutions, et il leur permit même de monter en chaire et de distribuer des Bibles. Il entretenait avec la sœur du roi, Marguerite, la future reine de Navarre, une correspondance, dont quelques fragments ont été publiés par M. Génin, et qui jette une singulière lumière sur les dispositions de la cour d'alors. Mais Farel allant toujours plus loin dans ses affirmations évangt* liques et dans la guerre aux abus, Briçonnet déjà suspect d'hérésie prit peur, d'autant plus que le mouvement s'accentuait davantage en Allemagne. Farel, le premier, dut quitter Meaux, où la réforme comptait déjà de nombreux adhérents, et le faible prélat, voyant l'orage s'avancer, fit tout pour le conjurer. Il rendit coup sur coup plusieurs décrets pour rétablir sa réputation d'orthodoxie, 15 oct. et 13 déc. 1523; et comme cela ne suffisait pas, il demanda que le parlement nommât une commission d'enquête et fit visiter son diocèse. La Bible de Lefèvre fut condamnée au feu, et plusieurs personnages considérables furent décrétés de prise de corps; ils réussirent à gagner Stras* bourg ou Bâle. Briçonnet se justifia de son mieux, laissant persécuter ses anciens amis, et f 25 janvier 1534. Ses ouvrages se réduisent à quelques discours dans lesquels, désirant une réforme, il ne la veut pas au prix d'un schisme. II était pieux, mais n'était pas à la hauteur des besoins de son temps.

BRIDAINE, Jaques, célèbre prédicateur catholique, né 21 mars 1701 près d'Uzès, avait toute la fougue méridionale, une foi vivante, l'amour des âmes, une imagination colorée, une éloquence populaire. Il fit jusqu'à 256 missions et fut même appelé à Paris, où il prêcha à Saint-Sulpice quelques-uns de ses meilleurs sermons, un entre autres sur l'éternité, qui fit une immense impression et dont La Harpe cite l'exorde comme un chef-d'œuvre; de môme son sermon sur l'aumône. L'abbé Carron en a publié quelques fragments, avec une Notice sur sa vie, intitulée Le modèle des Prêtres, Paris 1804. Cinq volumes de sermons ont paru dès lors, 1823. qui rappellent comme genre les sermons de Spurgeon; mais le catholicisme s'y fait sentir, + 22 sept. 1767 à Roquemaure.

BRIGITTE 1° ou Brigide, sainte irlandaise, née 467 à Fochard, Ârmagh, fondatrice de Kil-dare et de plusieurs couvents dont elle fut l'abbesse. Patronne de l'Irlande, f 523.

2° Fille de Birger, prince suédois, de la vieille famille royale des Brahé. Née 1302, elle se sentait appelée à la vie ascétique, mais à l'âge de 16 ans, pour obéir à son père, elle épousa Wulpho-Gudmarson, prince de Néricie, qui avait les mêmes penchants qu'elle. Ils se firent recevoir du tiers-ordre des franciscains, et vécurent religieusement. Ils eurent 8 enfants, s'adonnèrent aux œuvres de bienfaisance, fondèrent un hôpital et visitèrent eux-mêmes les malades. Son mari + 1344, ayant voulu faire un voyage à Saint-Jacques de Compostelle, et étant entré en Suède dans un couvent de cisterciens. Elle partagea alors ses biens à ses enfants, fonda 1363 à Wadstena, Linkô-f>ing, un couvent pour 60 religieuses, avec 13 moines pour directeurs, et partit en 1365 pour Rome, où elle fonda une maison pour les étudiants et les pèlerins suédois. Elle fit ensuite à 69 ans le pèlerinage de Jérusalem, et revint mourir à Rome 1373, après avoir dicté ses Révélations à ses deux confesseurs, Pierre, prieur d'Alvastre, et Mathias, chanoine de Linkôping. Son corps fut transporté & Wadstena. Elle fut béatifiée 7 octobre 1391 par Boniface IX, et canonisée 1419 par Martin V, malgré Gerson. Son recueil de Révélations, suspect dès le premier jour, fut déclaré authentique par le conc. de Bâle, sur le rapport du cardinal Turrecre-inata, et il a été souvent réimprimé, mais il porte en lui-même le cachet des prêtres, l>eau-coup plus que celui de la religieuse. On y voit jusqu'au fanatisme le culte de la Vierge immaculée, et l'éloge du célibat, avec des détails puérils mis dans la bouche du Sauveur.

L'ordre de sainte Brigitte, appelé aussi Ordre du Sauveur, fondé par la sainte suédoise, fut reconnu par Urbain VI, 1370. Il se compose de moines et de nonnes, sous la conduite d'une abbesse qui est censée représenter Marie* Il se répandit surtout dans le nord, mais eut aussi quelques maisons en France et en Italie. OEco-lampade fit partie d'un de ces couvents, près d'Augsbourg, 1520-1522. Au commencement du 17m* siècle quelques maisons de cet ordre furent fondées en Espagne sous le nom de Recol-lecti, ou les Recueillis.

BRILL, Jacob, né 21 janv. 1639, f à Leyde, 28 janv. 1700. Philos, et théol. mystique et plus ou moins panthéiste, auteur d'une quarantaine de petits écrits où, à force de chercher la vie cachée avec Christ en Dieu, il finit par oublier le Christ mort pour nous; le renoncement qu'il rêve aboutit presque à l'anéantissement de l'âme par son absorption en Dieu.

BRITTINIENS, variété des ermites augustins, ainsi nommés de leur établissement à Brittini, marche d'Ancône. Ils furent reconnus par Grégoire IX.

BROGNI, Jean (de), év. d'Ostie, cardinal de Viviers, natif d'un village des environs d'Annecy, présida le concile de Constance, en l'absence des papes déposés ou en fuite, dans la séance où Jean Huss fut condamné au* bûcher.

BROMLEY, Thomas, né 1er féy. 1629 à Worcester, f 13 avril 169i. II vécut à l'époque des grandes agitations politiques et religieuses de l'Angleterre, lit sous Cromwell d'excellentes études à Oxford, où il obtint même un bénéfice au collège de Toutes-Ames; mais il le perdit sous Charles II, ayant refusé de signer la liturgie anglicane. Disciple de Bôhme, il forma avec Pordage, Jeanne Leade, et quelques amis, une société d'amour fraternel, recherchant la sanctification et proscrivant jusqu'au mariage. Ils attendaient, mais sans impatience, la seconde venue de Christ, ayant des visions célestes, et quelques-uns même le don de prophétie. Son écrit le plus important a pour sujet les Progrès de l'âme chrétienne depuis sa nouvelle naissance jusqu'à son entière sanctification, sujet qu'il a traité encore dans son livre du Voyage des enfants d'Israël dans le désert, où le non) de chaque campement et les événements qui s'y rattachent lui fournissent l'occasion de rapprochements spirituels et mystiques. Sans avoir été consacré il remplit jusqu'à la lin le ministère actif de la parole, et s'endormit en paix, en répétant: Veillez ! veillez !

BROSSE, Salomon (de), architecte soi»

Henri IV et Louis XUI; né à Verneuil-sur-Oise, f 9 déc. 1626 à Paris, laissant un fils et 5 filles. Ses descendants retournèrent au catholicisme. On lui doit entre autres le Palais du Luxembourg, et il avait bâti pour ses coreligionnaires le temple de Charenton.

BROUSSON, Claude, né à Nîmes 1647, y fit ses premières études et y fut reçu avocat. Il s'établît en cette qualité à Castres, puis à Cas-telnaudary et à Toulouse, où les protestants trouvèrent toujours en lui un défenseur dévoué. Il reçut dans sa maison les seize directeurs des églises, et se compromit au point qu'il fut obligé de s'enfuir 1683. Il vint d'abord à Nîmes, mais dut se réfugier en Suisse. Il fut pendu en effigie le 3 juillet 1684. Il exerçait en paix sa profession d'avocat à Lausanne, avec ss femme N. Combeile, et son fils unique, Barthélémy; mais souffrant de savoir ses frères exposés k toutes les horreurs des persécutions, il revint dans les Cévennes sous le pseudonyme de Beausocle, et sans autre consécration que celle que lui avaient donnée les prophètes en *ept. 1695, il fit de nombreuses tournées missionnaires, inaugurant le culte du Désert, prêchant le jour et la nuit, dans les cavernes et dans les bois. Sa tête fut mise à prix, d'abord pour ÎOO, puis pour 500 et 600 louis; pourchassé par les hommes de Basville, il changeait >ans cesse de résidence. Après plusieurs voyages et missions en Suisse et en Hollande, il revint encore visiter les églises du midi, et finit par être arrêté à Oléron, Béarn, le 19 sept. 1698; il fut transféré à Pau, puis dans la citadelle de Montpellier le 30 oct. Basville, dans la crainte d'un soulèvement, le traita avec une douceur relative et lui accorda la grâce d'être pendu avant d'être roué, le 4 nov. 1698. Bouil-let répète après d'autres, quoique le fait ait été exagéré et dénaturé, qu'il avait préparé avec Schomherg un projet d'invasion contre la France. — On a de Brousson 3 vol. sur l'État des réformés de Fr., plusieurs Lettres au clergé, aux catholiq. etc.; la Manne mystiq. du désert, collection d'homélies, et un certain nombre d'opuscules.

BROWN, Robert; théol. anglais, né vers 1550 à Northampton, fit de bonnes études à Cambridge, mais s'y distingua déjà par le caractère inquiet qui fit le malheur de sa vie, et par ses attaques contre la hiérarchie anglicane qui furent le fond de sa théologie. Il se joignit aux anabaptistes hollandais de Norwich dont il ne tarda pas à devenir le chef, et sa prédication fougueuse grossit bientôt le nombre de ses partisans. A ses vues sur l'Église et sur les sacrements se mêlaient des tendances républicaines, qui lui valurent la prison. Relâché en 1580, par la protection de lord Burleigh son parent, il s'enfuit à Middlebourg avec un certain nombre de ses adhérents; il y publia un volume intitulé La réformation sans concessions, demandant le retour pur et simple au christianisme primitif. A la longue la division se mit dans son troupeau, qui s'était considérablement accru, et il retourna en Angleterre, où après des alternatives de soumission, de révoltes, d'excommunication et de prison, il obtint une petite paroisse dans son comté natal. Il f 1630, à l'âge de 80 ans, se vantant d'avoir été arrêté 32 fois, et plusieurs fois mis dans des cachots où il ne pouvait pas même voir sa main en la plaçant devant ses yeux. Ses sectateurs voyaient en lui un saint, sans que rien explique ou justifie cet enthousiasme. En tout cas ils restèrent plus fidèles que lui à ses doctrines, et sous le nom de — Brownistes — bravèrent les persécutions, s'établirent en Angleterre, en Hollande et en Amérique, et repoussèrent toute espèce d'organisation ecclésiastique, presbytérienne aussi bien qu'épiscopale, ne connaissant d'autre église que la réunion des chrétiens d'un même endroit, la majorité faisant la loi et exerçant la discipline.

— Il ne faut confondre ce Brown, ni avec le ministre du même nom, James, écrivain distingué 1715-1764, ni avec le docteur Jean Brown, médecin écossais 1736-1788, qui fit école et qui eut aussi des disciples appelés brownist&s expliquant tout par sa théorie de l'excitabilité.

BRUCIOLI, Antonio, né à Florence vers la fin du 15m« siècle, banni à la suite d'une conspiration contre les Médicis. visite la France et l'Allemagne, étudie les Écritures et peut rentrer à Florence 1527. Arrêté en 1529 comme luthérien, il réussit à s'enfuir à Venise, où il publie sa traduction du N. T., faite avec l'aide de ses cousins Francesco et Alessandro, et dédiée à Anne d'Esté; en 1536 il publie aussi l'A. T. Après quelques années de tranquillité il fut recherché de nouveau, et trois procès troublèrent sa vieillesse. Il fut incarcéré et signa une rétractation, le 22 juin 1555, sous l'influence de sa nombreuse famille, f 4 oct. 1566 dans la misère. Il avait composé contre le clergé des Dialogues, dédiés à Max. Sforza.

BRUEYS, famille languedocienne, dont le nom s'écrit aussi Bruès, Bruex, Brueix. Elle se composait de plusieurs branches, et a produit quelques hommes distingués. Malheureusement elle a produit aussi 1° un traître, Alexandre, qui feignit de se jeter dans le parti des cami-sards, qui surprit leurs secrets et les dénonça à Basville. Il mourut aux galères 1707, pour avoir tué sa femme; 2° un renégat, David-Augustin, né à Aix 1640, qui étudia d'abord le droit, puis la théologie; il se fixa à Montpellier, écrivit contre Bossuet 1681 une Réponse remarquable, se laissa ensuite convertir par Bossuet 1682, puis essaya de se réfuter lui-même, mais sans succès, 1683; se fit ordonner prêtre pour plaire à Louis XIV; entreprit de prouver aux protestants qu'ils avaient tort de se plaindre dn régime paternel auquel les soumettait le roi, et quittant définitivement la théologie, il se mit à faire des comédies, de compte à demi avec Palaprat. On lui doit entre autres l'Avocat Patelin, le Grondeur, la Force du sang, le Concert ridicule, etc. f à Montpellier le 27 nov. 1723.

BRUNO 1* appelé aussi Brun; 3™ fils de Henri l'Oiseleur et frère d'Othon I«r, né 925, fut destiné à la carrière ecclésiastique et envoyé de bonne heure à Utrecht, où il reçut une éducation soignée. Ses dispositions religieuses et morales étaient à la hauteur de ses talents, et il ne cessa d'employer son influence pour le bien. Son frère Othon fut à peine monté sur le trône qu'il le fit venir auprès de lui 939; il le fit son chapelain et le mit à la tête d'une école palatine, à laquelle furent appelés les professeurs les plus célèbres. Bruno eut aussi, comme chancelier, la surveillance des églises et des couvents, et il y fit observer les règles des différents ordres. En 951 il accompagna Othon en Italie, où il se montra négociateur habile. Il eut plusieurs fois à apaiser des révoltes contre l'autorité royale, qu'il estimait venue de Dieu. Wigfried, archev. de Cologne, étant mort en juillet 953, Bruno lui succéda et son frère lui donna en même temps les pouvoirs et le titre d'archiduc, afin d'humilier ou d'affaiblir le parti ducal, en le subordonnant à un ecclésiastique prince du sang. Bruno prit encore une part active aux complications du règne de son frère, vis-à-vis de l'Italie, de la Hongrie, de la Lorraine et du pape lui-même. U fut à diverses reprises envoyé en France, tantôt seul, tantôt avec une armée. pour y défendre les droits des rois mérovingiens. Les contestations entre les cousins rivaux ayant recommencé, Bruno se mit en route pour Compiègne, mais il tomba malade à Reims, où il f 11 oct. 965. Son corps fut transporté à Cologne, dans l'égl. de Saint-Panta-léon. 11 avait reçu de ses contemporains le titre de Grand et de Pacificateur; l'Eglise y ajouta celui de Saint, mais ce ne fut pas sans quelques difficultés, car on lui reprochait d'avoir trop cultivé les lettres et surtout la philosophie; l'intervention de l'apôtre Paul auprès de Christ, aurait seule vaincu la résistance.

2° Bruno, l'apôtre de la Prusse, plus connu sous son nom adoptif de Boniface; né 970, d'une famille considérable de la Saxe, de laquelle devaient sortir plus tard l'emp. Lothaire III, fut destiné à l'état ecclésiastique, pour lequel il avait une vocation sérieuse. Nommé chanoine de Saint-Maurice à Magdebourg, il vit la cour de près, accompagna Othon III en Italie, s'enthousiasma des souvenirs de Boniface, et à son retour, ayant appris la mort d'Adalbert, il ne rêva plus que le martyre, se retira du monde, se fit moine, vécut dans les bois avec quelques amis, et accepta l'appel qui lui fut adresse d'aller évangéliser la Pologne. Il s'y rendit en 1004, ayant reçu du pape et d'Henri II le titr* d'archevêque; après une visite en Hongrie, il retourna en Pologne, avec 18 de ses amis, écrivit une vie d'Adalbert, et entreprit d'évangéli-ser aussi la Prusse, pendant que ce pays était en guerre avec Boleslav. Faits prisonniers, lui et ses amis, ils eurent la tête tranchée 14 févr. 1009. Boleslav réclama leurs corps. La ville d* Braunsberg (mont de Brun) s'éleva plus tard à l'endroit où les martyrs avaient péri.

3° Bruno, fondateur de l'ordre des Chartreux; né à Cologne vers 1030, t en Calabre 6 oct. 1101. Entré dans le sacerdoce et revêtu de plusieurs dignités ecclésiastiques, il se sentit attire par la vie monastique, refusa i'archevéché de Reims 1080, et se rendit avec six de ses amis dans les solitudes montagneuses des environs de Grenoble, en un désert appelé la Chartreuse, où il fonda un monastère soumis à une règle rigoureuse 1084. Appelé à Rome 1089 par son ancien disciple, Urbain II, il l'assista de ses conseils, sans exercer toutefois une grande influence, refusa toute récompense, entre autres l'archev. de Reggio, et se retira 2 ans après dans la Calabre, où il fonda une nouvelle Chartreuse, sou* le nom de Saint-Étienne, et où il finit ses jours dans les exercices de la piété. Il a laissé quelques écrits de théol. Canonisé en 1514. Sa vie a été écrite par le p. de Tracy, 1786.

4o Bruno d'Asti, né à Soleria, év. de Segui, f 1125. Auteur de quelques ouvrages de théol.^ traités, commentaires, etc.

5° Bruno le Saxon, écrivit vers 1082 une histoire des guerres que les princes saxons eurent à soutenir contre Henri IV; il prend chaudement le parti de son pays, mais ne peut être accusé d'avoir sciemment altéré les faits. Le style est coloré, rapide, vivant. Il n'eu reste plus qu'un seul mss. connu, mais de nombreux fragments dans la Chronique de Magdebourg. L'original a été impr. en 1600, et dès lors plu -sieurs fois.

6° Jordano Bruno, v. Jordano.

BRUYS ou Brueys, Pierre (de), prêtre languedocien, répandit la vérité dans plusieurs contrées du midi de la France, notamment dans le Dauphiné. la Provence et le Languedoc; il travailla courageusement pendant 20 ans, 1104-1124, combattant les vieilles cérémonies romaines et les doctrines contraires à l'Écriture. Il alla un peu loin, et manqua de modération et de prudence. Il s'élevait contre léchant, contre le baptême des enfants, contre la construction de temples matériels; il n'admettait pas que le corps de Christ fût dans la Cène; il fit brûler publiquement des crucifix, mangeait de la viande en carême, etc. Il fut brûlé à Saint-Gilles, Gard, par le peuple furieux excité par les prêtres 1130. Ses disciples, appelés de son nom Pétrobruriens, demeurèrent après lui; le plus célèbre fut Henri de Lausanne, avec lequel on Ta quelquefois confondu, et qui eut ses propres partisans.

BUCER, Martin, de son vrai nom Butzer, \u il traduit quelquefois en latin par emunctor; né 1491 à Schlestadt; le plus célèbre des réformateurs de l'Alsace, non par ses talents ou par sa science seulement, mais aussi par son caractère et l'équilibre de ses facultés. A 15 ans il entra comme élève chez les dominicains; puis, lorsqu'il eut prononcé ses vœux, on l'envoya à Heidelberg oii il se passionna pour le grec et rhébreu, et finit par étudier la théologie. Il acheva ses études k Mayence, oti il reçut l'ordination, et revint à Heidelberg comme surveillant des jeunes frères qui suivaient les cours. Mais il devint bientôt suspect; non seulement il était fort en grec et en latin, mais il recommandait à ses élèves l'étude de la Bible; il approuva publiquement les doctrines de Luther à la conférence de Heidelberg 1518. Sa dispute contre Cochlâus, Francfort 1520, son enthousiasme pour Érasme, son admiration pour Luther à Worms, achevèrent de le perdre. Une enquête fut ordonnée contre lui, en même temps qu'il demandait à Léon X la permission de quitter wn ordre. Il s'enfuit d'abord à Louvain, puis *hez l'électeur palatin Frédéric qui le nomma son chapelain, puis chez François de Sickingen qui lui donna la cure de Landstuhl. C'est alors que, rompant définitivement avec Rome, il épousa une religieuse, Élisabeth Pallass, qui avait quitté son couvent, 1522. Mais la guerre le força de partir; il se rendit à Wissembourg où l'appelaient les partisans de la réforme, et à la fin de mai 1523, chassé de nouveau par la guerre et par l'excommunication de l'év. de Spire, il arriva à Strasbourg où déjà Zell, Capiton et d'autres prêchaient hardiment l'Évangile. H était dans un état complet de dénûment. Après bien des difficultés il fut reçu bourgeois de la ville, autorisé à prêcher et à faire des lectures publiques, et en 1524 nommé par l'Église et confirmé par le Sénat comme pasteur de Sainte-Aurélie. En 1528 il assista à la dispute de Berne, en 1529 au colloque de Mar-wurg; en 1530 il fut élu à la place de saint Thomas, et en 1531 nommé président du Consistoire. Il ne réforma le culte que successivement, avec beaucoup de prudence, au fur et à mesure que l'occasion s'en présentait, et autant que possible, d'accord avec la majorité de ses paroissiens. Il eut fréquemment à intervenir auprès des théologiens étrangers à propos des différends sur la Cène; tout en étant à peu près luthérien quant à la doctrine, il n'attachait pas la même importance que Luther à l'unité de vues sur ce point, et il fit ses efforts pour maintenir l'union. C'est lui qui rédigea, pour être présentée à Charles-Quint à la diète d'Augs-bourg, la fameuse confession dite tètrapolitaine, des 4 villes de Strasbourg, Constance, Memmin-gen et Lindau: il obtint ainsi pour ces villes qu'elles fussent admises provisoirement dans la ligne de Smalcalde 1531. Il fut appelé à presque toutes les conférences qui eurent pour but d'amener une entente entre les théologiens réformés suisses et les allemands, à Leipsic, Ha-guenau, Spire, Worms, Ratisbonne, mais ses tentatives de conciliation échouèrent contre l'obstination des luthériens; elles n'eurent d'autre résultat, grâce aux formules vagues qu'il proposait, que de le faire accuser de faiblesse par les uns, de duplicité par las autres. Nommé doyen du chapitre de Saint-Thomas, 1544, après avoir passé 3 ou 4 aqs à Bonn et à Cologne, cherchant à y établir la Réforme, il refusa en 1548 de signer l'Intérim et dut quitter secrètement Augsbonrg. La colère de l'emp. le poursuivit à Strasbourg et obtint sa déposition, ainsi que celle de son ami et collègue Fagius; après avoir hésité entre Wittenberg et Genève, où ils étaient appelés par Mélanchthon et Calvin, les deux amis se décidèrent pour l'Angleterre, où Cranmer leur offrait du travail et une position. Ils quittèrent Strasbourg le 5 avril 1549, arrivèrent le 25 à Londres, et se mirent à reviser la version de la Bible et la liturgie anglicane. Bucer nommé prof, k Cambridge et docteur de l'université, ne pouvait cependant se faire ni au climat, ni à la langue, ni aux habitudes du pays; il se disposait à repartir pour Strasbourg, quand la maladie l'enleva, 28 févr. 1551, peu de mois après la mort de Fagius. La duchesse de Suffolk le soigna dans sa maladie. Il fut enterré avec une pompe extraordinaire. Marie la Sanguinaire le fit exhumer en 1554, ainsi que Fagius, et brûler leurs os, mais Élisabeth, en 1560, répara cet indigne outrage en faisant recueillir pieusement les cendres de ces illustres étrangers. Bucer avait eu d'Élis. Pallas 13 enfants, dont 5 moururent de la peste eu 1541, ainsi que sa femme; il se remaria en 1542 avec la veuve de son collègue Capiton. Les anabaptistes troublèrent un moment l'église et la ville de Strasbourg, 1533-1539; des conférences et des mesures de rigueur ne produisirent aucun bien; le calme ne se rétablit que lorsqu'un synode eut décidé que les parents ne seraient pas obligés de faire baptiser leurs enfants.

pourvu qu'il les élevassent chrétiennement. Bu-cer a laissé beaucoup de livres, la valeur de

10 in-f°, mais on n'en a aucune édition complète, et c'est à peine si l'on en a une liste un peu exacte; v. Haag. Le plus important est son: De regno Christi, dédié au roi Édouard; le reste se compose de commentaires, de sermons, dissert, sur la Gène, Lettres, etc.

BUCHANAN, Claudius, missionnaire aux Indes, né 12 mars 1766 à Cambuslang, près Glasgow. Fils de parents pieux, il eut cependant une jeunesse dissipée et vagabonde. A Londres ses souvenirs d'enfance se réveillèrent; il eut le bonheur d'entendre et de voir de près le célèbre prédicateur John Newton; il se convertit; un ami lui fournit les moyens de se rendre à Cambridge, où il fit de brillantes études, mettant toujours la Parole de Dieu au-dessus de toute autre science. Après 4 années il fut nommé chapelain de la Compagnie des Indes à Barrack-pore, près de Calcutta, où il arriva le 11 mars 1797. C'était une sinécure; au bout de 18 mois

11 n'avait pas encore pu prêcher une seule fois; les officiers aimaient mieux employer leurs dimanches à des courses (Je chevaux. 11 appelle néanmoins cette station son Patmos, à cause de sa solitude spirituelle, et surtout parce qu'il put se livrer à son étude favorite des Écritures dans les langues originales; il profita également de ce temps pour apprendre l'indoustani et le persan. En 1800 il fut envoyé à Calcutta comme chapelain et comme professeur au collège de Fort-William, dont il devint ensuite vice-prévôt. Lord Wellesley, plus tard Wellington, était alors gouverneur-générai, et exceptionnellement bien disposé en faveur de l'Evangile. Buchanan écrivit un Mémoire sur la convenance de donner aux Indes une constitution ecclésiastique, réclamant pour la première fois la division du pays en diocèses, avec des évéques et des ministres. Il ne cessa de travailler par tous les moyens à obtenir ce résultat. Il visita en mai 1806 les églises syriennes de Malabar, et fut très satisfait de son voyage; il le fut moins de son passage à Goa, où il vit le grand inquisiteur portugais et la dernière retraite des autodafés. Il fraternisa en route avec les missionnaires luthériens, baptistes, et autres, qu'il rencontra. De retour à Calcutta en 1807, il vit avec regret lord Minto remplacer lord Wellesley, et la Compagnie devenir toujours plus hostile à tout essai d'œuvre religieuse. Il comprit que c'était en Angleterre môme qu'il devait venir plaider cette cause et il y arriva au printemps de 1808. La lutte fut longue et difficile, mais enfin en 1813 le parlement décida que l'Inde aurait son évêque, assisté de trois archidiacres; Mid-d le ton fut le premier élu, puis vinrent Heber, James, Turner, Wilson, etc. L'œuvre de Buchanan était achevée; il f en paix 9 février 1815.

BUCHLEIN, Paul, plus connu sous sou nom latin de Fagiu*; né 1504 à Rheinzabern où son père était instituteur, montra d'étonnantes dispositions pour l'étude, mais eut à lutter longtemps contre la pauvreté. A 11 ans il partit pour Heidelberg, à 18 pour Strasbourg où il trouva en Capiton un bon professeur et en Bu-cer un ami, mais en 1527 il dut renoncer à la vie universitaire et accepter une place de maître d'école à Isny, Souabe, où il se maria et où, en exerçant le ministère depuis 1537, il put monter une imprimerie hébraïque qui ne publia pas moins de 15 ouvrages en 2 ans, réimpr. de Kimhi, travaux originaux de Fagius et de son ami Élie Levita. La peste de 1541 prouva que le savant était aussi un pasteur dévoué. Un triple appel qui lui fut adressé en 1542 montre la réputation dont il jouissait; il refusa la place de prof, à Marbourg, accepta pour 2 ans celle de pasteur à Constance, puis définitivement celle de prof, à Strasbourg en remplacement de Capiton. Il y arriva en 1544, et y resta (sauf une courte absence en 1546 pour réorganiser l'université de Heidelberg) jusqu'en 1549. époque à laquelle, ayant refusé de signer l'Intérim, il fut déposé et se rendit avec Bucer en Angleterre. A peine nommé prof, d'hébreuà Cambridge, il f le 13 nov. 1549, probablement empoisonné. V. Bucer. Ses écrits, au nombre de 18, intéressent plus la science que la religion; le style en est sobre, plus exact qu'élégant.

BUDDÉE (Buddœus), Jean-François, ne 25 juin 1667 à Anclam, Poméranie, où sou père était pasteur, fut un des thèol. les plus universels de son temps, ce qui dit à la fois son côté fort et son côté faible. D'une piété vivante qui en fit l'ami de Spener et de Zinzendorf. il avait un tempérament éclectique, qui le rendit quelquefois suspect et lui causa des difficultés a Halle. Les langues orientales, la philologie, la philos., la théol., le droit, lui étaient également familiers. Il enseigna successivement à Witten-berg, Iéna, Cobourg, Halle 1693-1705, et enfin de nouveau à Iéna jusqu'à sa f 19 nov. 1729. Quelle que fût la branche qu'il enseignât, il prêchait volontiers et fréquemment. Il regardait la pratique de la foi comme le but et la fiu de toute théologie. Ses écrits, dissertations, programmes universitaires, etc., dépassent la centaine: mentionnons seulement ses Éléments de philos, pratique, 1697; Institutions de philos. éclectique 1705; Instit. de théol. morale 1711; Hist. ecclés. de l'A. T. 1715; Thèses sur l'athéisme et la superstition; Introductions, Église apostolique, etc.

BUDE, Guillaume (de), né 1467 à Paris, f 1540; le plus célèbre humaniste et helléniste de s«n temps, ami d'Érasme qui l'appelait le Prodige de la France à came de sa vaste érudition. Apprécié par Louis XII, il fat nommé par François Ier son bibliothécaire et maître des requêtes; il décida la fondation du Collège royal, aujourd'hui Collège de France. Ses divers écrits ne lui assignent aucune place dans l'hist. ecclésiastique; il n'y figure que comme ami d'Érasme, et parce que différents indices ont Eut supposer que cet émiuent jurisconsulte serait mort protestant. En tout cas sa femme et la plupart de ses enfants embrassèrent la réforme. Une partie de ses descendants se fixèrent à Genève. où quelques-uns occupèrent des places éminentes dans l'enseignement et la magistrature.

BUGENHAGEN, Jean, surnommé Pomera-**s, le Poméranien, de son lieu d'origine. Né à Wollin, 24 juin 1485. Après de bonnes études a Stettin et à Greifswald, il entra dans l'enseignement, à Treptow comme recteur en 1805, à Bel bac k en 1517 comme prof, de théol. chargé de faire connaître aux moines l'Écriture sainte. 11 composa pour eux une Harmonie des Év., qoi fat imprimée en 1530. Il fut chargé par Frèdéric-le-Sage de visiter les villes, les châteaux et les couvents de la Pomèranie, et le résolut de ses recherches fat pnblié en 1528 sons le titre de Pomerania; k côté d'un grand talent d'observation, et dans un style remarquable pour l'époque, on reconnaît dans ce travail le penseur chrétien, nourri de la Bible dès sa jeunesse. Le livre de Luther sur la Captivité de Babylone, 1520, le scandalisa d'abord, comme l'œuvre d'un hérétique, mais an bout de peu de jours il revint sur cette impression, se déclara poor la réforme, et y décida môme son abbé, Jean Bolduan. En 1521 il vit à Wittenherg Lather et Mélanchthon, et leur plut tellement qu'ils le retinrent et lui confièrent un enseignement public. Ses leçons sur les Psaumes, qui n'ont encore rien perdu de leur valeur, parurent en 1524. En 1523 il était nommé pasteur et prof, et en 1536 surintendant. C'est lui qui bénit le mariage de Luther, dont il était devenu l'ami le plus intime. Il refusa dès lors toutes les places qui lui furent offertes, même en 1514 l'évêché de Pomèranie; mais, tout en continuant de résider à Wittenberg, il ne recula pas dans les fort nombreuses missions dont il fut chargé sa dehors: à Brunswick, sept. 1528 pour or-puiser la nouvelle église; à Hambourg, à Lu-beck, en Pomèranie; en Danemark, dont il couronna le 12 août 1537 le roi Christian III et la reine, et où il passa, sauf quelques interruptions, presque 5 années; dans le Schleswig-Holstein, etc. Savant distingué, il était encore organisateur et administrateur, et rendit comme tel de grands services k la réforme. Son nom se trouve mélé aux principaux événements de son temps et toujours dans le sens de la modération: k la controverse avec les Suisses, à la rédaction des 17 articles d'AufBbonrg, k la formule de Concorde de Wittenberg, aux discussions de Smalcalde, et surtout k la trad. de la Bible: en allemand d'abord avec Luther, puis seul en bas-saxon pour la Pomèranie. Ses dernières années furent douloureuses; la mort de Luther fat pour lui un coup terrible. Puis vint la guerre de Smalcalde; pendant le siège de Wittenberg, et malgré toutes les menaces, il resta fidèle k son poste et mérita l'estime de ses ennemis eux-mêmes. Pendant l'Intérim de Leip-sig il refusa de rien changer à l'organisation du culte: Le pays, dit-il, peut avoir un autre maître, mais l'Église reste la même. Il prit aussi peu de part que possible aux controverses religieuses, et quand il fut trop affaibli pour pouvoir encore prêcher, il continua de se rendre au culte voulant prier jusqu'à la fin pour son église. Il s'éteignit en paix le 20 avril 1558. Outre ceux de ses écrits qui ont été déjà mentionnés, il faut citer divers écrits de circonstance, et des réflexions pratiques sur Job, le Deutéronomp, les Rois, Samuel, les Actes, les Épîtres, etc.

BULGARES, peuple scythique ou tartare d'origine, mais qui, ayant quitté au 5"»® siècle les bords du Volga pour s'établir le long de la mer Noire et sur les rives de la mer d'Azof, finit par adopter la langue slave et un peu les mœurs de sa nouvelle patrie. Son territoire fut longtemps indéterminé et ses limites varièrent. Au 9rae siècle les Bulgares occupaient l'ancienne Dacie, la Mésie inférieure et une partie de la Hongrie. Un grand nombre d'entre eux s'étaient faits mahométans, mais ceux qui émigrèrent du côté du Pruth et du Danube, mis en contact avec le christianisme, se convertirent peu à peu sous l'influence des missionnaires grecs et romains. La lutte dura trois siècles entre les Bulgares et l'empire d'Orient. En 811 ils arrivèrent jusqu'aux portes de Constantinople, firent périr Nicéphore, prirent Andrinople, massacrèrent des milliers d'habitants, et en emmenèrent une foule d'autres comme esclaves, entre autres le pieux archev. Manuel, qui paya de sa vie la tentative qu'il fit d'évangéliser autour de lui. Mais en 842 Bogoris monta sur le trône des Bulgares, en môme temps que Théodora sur celui de Constantinople; obligé de demander la paix, il la conclut avec un échange de prisonniers, et il recouvra ainsi sa sœur, qui était devenue chrétienne pendant sa captivité. Menacé d'une famine et d'une guerre en 845, il écouta les conseils de sa sœur, s'adressa au Dieu des chrétiens et fut délivré de ses dangers. L'arrivée de Cyrille et de Méthodius, vers 860, concourut à décider sa conversion. On raconte en particulier que Mélhodius, ayant fait un tableau saisissant qui représentait le jugement dernier, le roi, déjà ébranlé dans sa conscience, se fit instruire et demanda le baptême. Il fut baptisé de nuit et reçut le nom de Michel qui régnait alors à Constantinople 861. En 866, soit ignorance de la rivalité qui régnait entre les grecs et les latins, soit crainte d'être placé trop directement sous la dépendance de Constantinople, il fit demander au pape Nicolas des docteurs chrétiens; celui-ci envoya Paul et Formose, et c'est ainsi que la Bulgarie se trouva engagée dans le grand conflit ecclésiastique du siècle. — Le nom de Bulgare ayant fini par prendre le sens d'hérétique ou de schismatique, le moyen âge l'appliqua aux cathares et aux albigeois; puis en altérant le mot dans sa forme (boulgres ou bougres) on en fit le synonyme ou le symbole des plus grossiers péchés; les vieilles versions de la Bible l'emploient quelquefois dans cette acception. \. Lombard, Les Pauliciens.

BULL, Georges, né 1637 à Wels, f 1710, év. de Saint-David, docteur d'Oxford, auteur d'une Défense de la foi de Nicée, qui lui valut les éloges de Bossuet, et d'une Harmonie apostolique où il prouve l'accord de Paul et d^ Jacques.

BULLE (de l'italien bollare mettre un sceau, ou de la forme même du sceau), nom donné aux lettres et communications officielles du pape à la chrétienté, quand elles ont une certaine importance et un intérêt général, par opposition aux Brefs q. v., dont l'importance est moindre. La bulle est rédigée en chancellerie, en latin, sur parchemin, en lettres gothiques, souvent avec la traduction en grec ou en italien; elle se termine par la date, marquée en vieux < style, calendes, ides, etc. et mentionne Tannée du pape. Elle est signée du pape et de quelques cardinaux. En tête figure le nom du pape et son chiffre, ou le titre en latin de: Serviteur des serviteurs de Dieu. Le sceau est en plomb et pend à un cordon de chanvre, ou de soie rouge et jaune, suivant le contenu de la bulle; il porte l'empreinte de lap. Pierre jetant le filet. Le s;eau est en or dans certaines circonstances particulières, et dans ce cas la bulle est appelée une Bulle d'or. Les bulles portent en général le nom des mots par lesquels elles commencent; ainsi Ausculta, fili, et Clericis laïcos, contre Philippe le Bel; Exsurge, Domine, contre Luther; Unige-nitus, contre le p. Quesnel. Une des plus célèbres est la B. In cœna Domini, qui se lit habituellement le Jeudi-Saint à Rome contre les hérétiques et tous ceux qui sont rebelles au saint-siège, protestants, usuriers, pirates, faussaires, juifs, etc. L'excommunication sous sa forme actuelle date d'Urbain II, 1627. Clément XIV l'avait momentanément suspendue, 1770. On appelle BuUaires les recueils de bulles; le plus complet, B. magnum, n'a pas moins de 20 vol. f° et va de Léon 1er à Benoît XIII.

BULLINGER, Jean-Henri, né 1504 à Brern-garten, d'un père curé qui avait fait dans sa jeunesse un mariage, dit de conscience, qu'il régularisa plus tard. L'enfant échappa trois fois miraculeusement à la mort. 11 étudia à Emme-rich, puis à Cologne; la lecture de P. Lombard le conduisit à lire les Pères, puis les Écritures, et quand parurent les premiers écrits de Luther, il les dévora. Nommé maître au couvent de Cappel 1523, il enseignait le latin, Virgile, Cicéron, les Loci communes de Mélanchthon, le N. Testament; fidèle au culte il cessa bientôt d'assister à la messe; le couvent se réformait peu à peu. En 1528 il fut consacré au saint-ministère: il avait fait la connaissance de Zwingle et de Pellican et assisté à la dispute de Berne-Il épousa en 1529 Anna Adlischweiler, dont il eut onze enfants. En nov. 1531, après la bataille où Zwingle perdit la vie, Bullinger dut quitter Bremgarten où il avait remplacé son père comme pasteur. Il vint à Zurich et après une première prédication à la cathédrale, il fut le 9 déc. nommé d'emblée pasteur-antistès (président) de l'église de la ville, en même temps que Bibliander remplaçait Zwingle comme professeur. Sa réputation grandissait; sans être un homme de luttes, il eut longtemps à lutter: contre les Conseils du canton, qui voulaient empiéter sur les droits de l'Église; contre les catholiques, contre les luthériens extrêmes (î! refusa de signer la Formule de concorde de Wittenberg, 1536); il apaisa par le Consensus tigurinus, mai 1549, la mésintelligence qui menaçait de diviser Genève et Zurich au sujet de la Cène; il fut modéré dans son préavis sur l'affaire de Bolsec, mais très catégorique dans celle de Servet, donnant raison à Calvin. Il accueillit avec une affectueuse sympathie les proscrits de Marie d'Angleterre et ceux de Lo-carno. Il s'entremit pour calmer l'agitatiou produite à Genève par le parti des Libertins. En un mot, pasteur fidèle dans sa paroisse, il rayonna comme une lumière bienfaisante partout où on fit appel à son dévouement. L'arrivée de Ver-migli à Zurich, en 1556, lui fut un grand secours et un précieux renfort, f le sept 1575, et enterré dans le cloître de la cathédrale. — Ses principaux ouvrages sont ses Décades, recueil de sermons; cent discours sur l'Apocalypse, Chronique sur l'hist. de la Suisse jusqu'en 1532, beaucoup de lettres, et enfin la deuxième Confession helvétique, rédigée par lui de concert avec Vermigli 1562, chef-d'œuvre de clarté, de force et de modération.

BUNGENER, Félix, né 1814 à Marseille d'une funille allemande, étudia la théol. à Genève et s'y fixa, se livrant d'abord et surtout à l'enseignement. Régent de première en 1843, il fut destitué en 1848 par le gouvernement radical, niais il continua, soit par des cours publics, soit fu particulier, de donner des leçons, tantôt sur des sujets d'histoire, tantôt et de préférence sur h littérature. Sans ministère régulier, il a toujours servi l'Église; il prêchait souvent, et ne reculait pas devant une controverse incisive. Écrivain distingué, fécond, il a publié des ouvrages dans les genres les plus divers, romans, fermons, biographies, histoire, qui ont presque tous obtenu un grand et légitime succès (saint Paul, Calvin, Lincoln; Conc. de Trente; Rome et la Bible; Récits de Noël, etc). Les plus remarquables sont: Un sermon sous Louis XIV, et Trois sermons sous Louis XV. Julien, ou la Fin d'un siècle a moins bien réussi. — Nature sobre, froide et sévère, B. avait une grande facilité de travail, de l'initiative et de l'originalité. 114 juin 1874.

BUNSEN, Chrétien-Ch.-Josias (de), né 25 août 1791 à Corbach, Waldeck, d'une famille modeste, étudia la théol. àMarbourg, la philologie a Gôttingue, donnant des leçons, et il se chargea de l'éducation du jeune américain Astor. Après avoir visité le Danemark et la Hollande, il vint à Paris pour étudier le persan et l'arabe sous S. de Sacy. A Rome, où il épousa Frances Waddington, il retrouva Niebuhr qu'il avait connu à Berlin, fut son secrétaire d'ambassade, puis son successeur comme chargé d'affaires, et en 1834 ministre plénipotentiaire de Prusse. Il eut à négocier avec la cour papale la question des mariages mixtes, qui ne réussit pas, et qui aboutit le 1er avril 1838 à son rappel, et à l'emprisonnement de l'archev. Droste de Vischering. En 1839 il fut nommé ambassadeur à Berne, puis à Londres où il travailla à l'érection de l'évêché protestant de Jérusalem. Il fut rappelé en 1854 à l'occasion de la guerre de Crimée, pour avoir trop insisté sur l'alliance de l'Allemagne avec l'Angleterre. Ce fut la fin de sa carrière diplomatique. Il passa ses dernières années à Heidelberg, Cannes et Bonn où il f 28 nov. 1860. L'influence que Bunsen a exercée est considérable; son caractère, ses talents, son activité, sa piété l'expliquent suffisamment. On lui doit l'érection d'une chapelle protestante à l'ambassade de Rome; des hôpitaux évangéli-ques à Rome et à Londres; la création de l'Institut archéologique; des études sur Rome et les anciennes basiliques. La littérature chrétienne lui doit surtout un Recueil liturgique, une notice sur Élis. Fry, une Constitution pour • Égl. de l'avenir, deux volumes sur l'Égypte, m ouvrage sur les lettres d'Ignace, Hippolyte et sou époque, un article sur Luther, les Signes des temps, Dieu dans l'histoire, plusieurs brochures de circonstance, enfin son Bibelwerk, trad. et comment, de la Bible, qu'il n'a pu achever lui-même. Nature éminemment sympathique, il a eu d'illustres amitiés (entre autres Fréd.-Guill. IV), et il a soulevé d'ardentes inimitiés; on lui a reproché tour à tour de pencher vers le catholicisme et de fournir des armes au rationalisme; c'était un cœur large et un esprit chrétien.

BUNYAN, John, né 1628 à Elston près Bed-ford, fils de pauvres chaudronniers, dont il apprit le métier. Il entra dans l'armée parlementaire et combattit Charles 1er. Sa jeunesse fut misérable, moralement et matériellement; quand il se maria pour la première fois, ils n'avaient ni écuelle, ni cuiller; sa femme ne lui apporta en dot que 2 livres de dévotion, mais ils suffirent pour réveiller en lui les enseignements pieux qu'il avait reçus de ses parents, et ces souvenirs de jeunesse le ramenèrent dans le chemin du devoir et de la piété. Il se joignit à l'église baptiste 1655, et ne tarda pas à s'y faire une position considérable par sa connaissance des Ecritures et par son éloquence d'un caractère éminemment populaire. Nommé pasteur, il vit sa congrégation s'accroître de jour en jour, et sa réputation grandir et arriver jusqu'aux oreilles de Charles II. Il fut, avec Howe et Baxter, un des prédicateurs les plus courus; aussi fut-il un des premiers atteints par la persécution: arrêté en 1660, il ne sortit de prison qu'après 12 V* ans, en 1672, par l'intercession de l'év. Barlow de Lincoln. C'est pendant sa captivité qu'il composa son admirable allégorie du Voyage du Chrétien (et de la chrétienne, 2»»e partie), aujourd'hui trad. dans presque toutes les langues. Il reprit le cours de ses prédications, sans cesse harcelé et menacé par l'autorité, jusqu'au moment où l'Acte d'indulgence du catholique Jacques U, 18 mars 1687, lui garantit une entière liberté. C'est par milliers qu'il comptait les membres de sa paroisse. L'argent afflua quand il s'agit de construire une église plus vaste. Bunyan refusa les avances du roi qui aurait voulu enrôler les non-conformistes dans sa campagne contre l'Égl. anglicane, f 31 août 1688, des suites d'un refroidissement survenu pendant un voyage dans le Berkshire pour réconcilier un fils avec son père.

BURGONDÉS, peuple germanique, primitivement campé entre l'Oder et la Vistule, parent des Goths et des Vandales, très diversement jugé par Ammien Marcellin, Socrate, Sidoine Apollinaire, qui n'avaient pas les éléments pour bien juger. Poussés par le torrent de l'invasion, ils s'avancèrent vers la fin du 3®* siècle jusque dans le voisinage des Allemani, passèrent le Rhin, et s'établirent, avec des frontières qui variaient continuellement, dans les contrées situées entre la Forêt-Noire, les Vosges, l'Aar et le Jura, détendant parfois à l'ouest jusqu'à Dijon, au sud jusqu'à Lyon et Arles, avançant ou reculant suivant le sort de la guerre et les besoins de la vie. Leur grand-prêtre, ou sinnist, était chef absolu; leur roi, ou hendin, pouvait être renvoyé d'un jour à l'autre, pour une bataille perdue, ou pour une mauvaise récolte. Ils furent amenés à la foi chrétienne vers 413, et vécurent dès lors comme des frères avec les Gaulois vaincus. Valentinien III leur permit de s'établir dans les pays du Rhône supérieur, et même des Alpes jusqu'en Provence. Leur royaume dura plus d'un siècle dans ces conditions. Après Gundioc ses 4 fils régnèrent, Godegi-sel, à Lausanne et Besançon, Gondemar à Vienne, Gondebaud à Lyon, et Chilpéric II à Genève. Mais l'empire romain croulait et Gondebaud s'empara du pouvoir et fit périr ses frères. Clo-vis épousa la fille de Chilpéric, Clotilde, chrétienne fervente, et s'en fit un appoint pour s'assurer l'appui des papes. Il semble en effet qu'une partie des Burgondes se soit laissé entraîner à l'arianisme depuis la fin du 5®* siècle, sans que cependant ce soit prouvé de la nation tout entière. Mais Clotilde exploita les haines religieuses contre les meurtriers de son père, et se fit de l'asservissement de ce peuple un devoir de conscience. Gondebaud resta arien jusqu'à sa f 516. Son fils Sigismond embrassa franchement le christianisme, et convoqua le concile d'Epaone 517, sous l'influence d'Avitus. Vers 534 la Bourgogne fut réunie à l'empire des Francs.

BURIDAN, Jean, né à Béthune, Artois, vers 1300, f vers 1360, ardent nominaliste, plus philos, que théologien, prof, et recteur à l'université de Paris. Persécuté par les réalistes, il se retira en Allemagne, et fonda l'univ. de Vienne. Il était préoccupé surtout des mystères de la volonté et de la liberté, qui lui suggérèrent la célèbre allégorie de l'âne, attiré également par une mesure d'avoine et par un seau d'eau. Une légende sans valeur le compromet dans les débordements de la tour de Nesle.

BURNET, Gilbert, né 13 sept. 1643 à Édim-bourg, f 17 mars 1715 à Salisbury; fils d'un juriste, il étudia le droit et la théol. avec succès et se décida enfin pour la carrière ecclésiastique. Après un voyage en France et en Hollande, il fut nommé pasteur à Salton, puis prof, à Glas-cow. Épiscopal, il blâmait les persécutions dirigées contre les non-conformistes; le véritable ennemi était pour lui le catholicisme, et quand Charles H l'eut appelé à Londres comme son chapelain, il résista aux séductions de la cour et du roi, qu'il voyait engagés dans les filets de la réaction papiste, et donna sa démission. Sa disgrâce augmenta encore sous Jacques U dont il combattit l'accession au trône; il courut de grands dangers et dut s'enfuir sur le continent; il visita la France, la Suisse, l'Italie, se fixa en Hollande où il fut parfaitement reçu par le prince d'Orange, et travailla de toutes ses forces à le faire monter sur le trône d'Angleterre; il y réussit et Guillaume III par reconnaissance le nomma év. de Salisbury. Peu de révolutions furent aussi paisibles que celle-là; il n'y eut ni réaction, ni violences, ni vengeances; l'Égl. épiscopale garda ses droits en Angleterre, la presbytérienne en Écosse; les dissidents et les catholiques furent protégés. Burnet a écrit l'histoire des Hamilton, une Hist. de la Réform. en Angleterre, 1679,1715, trad. en fr. par Ro-semond 1683, et une Hist. de mon temps, depuis Charles II, ouvrage posthume publié par son fils 1724. Notice par Guizot.

BURSFELD, non loin de Minden et près de Gôttingue; abbaye de bénédictins fondée 1093, complètement déchue en 1430, se releva entre 1439 et 1469 parles soins de Busch,f 1479, qui la réunit à quelques autres couvents en décadence et les soumit à la stricte observance des statuts bénédictins. A Fépoque du concile de Bâle ils étaient réunis en congrégation au nombre de 36 couvents d'hommes et plusieurs de femmes, et Pie H les reconnut. La Réforme mit fin à leur existence comme cloîtres.

BUSCH, Jean, v. Bursfeld.

BUSENBAUM, Hermann, célèbre jésuite et casuiste, né 1600 en Westphalie, f 31 janv. 1668; auteur des Lys entre les Épines, des Vierges consacrées à Dieu, et d'une Moélle (ilfe-dulla) de théol. morale qui, malgré ses 15 éditions, ne fit pas d'abond beaucoup de bruit, mais qui, commentée par le p. Lacroix, attira l'attention publique. Sans qu'elles y fussent clairement contenues, on pouvait en déduire sur le mariage, sur l'assassinat, et surtout sur le régicide des maximes dangereuses. La chose était d'autant plus grave que la publication de ces commentaires coïncidait avec l'assassinat de Damiens. Le parlement de Paris condamna le livre; celui de Toulouse le fit brûler, et le p. Zacharia, italien, ayant essayé de le défendre, ce fut le point de départ de l'orage qui finit par éclater sous Choiseul et qui aboutit à la suppression de l'ordre 1762.

BUTTLAR, Eva (de), née 1670 à Eschwege, liesse; ses parents étaient âgés quand elle vint au monde; sa mère avait 52 ans, et la jeune fille en profita plus tard pour dire qu'elle était née non selon la chair, mais selon l'esprit. Mariée à 17 ans à un Français réfugié, de Vérins, maître de danse à Eisenach, elle l'abandonna au bout de 10 ans, 1697, pour s'attacher au mouvement piétiste qui commençait à remuer les populations dans les environs de Gotha. De piétiste elle devînt séparatiste, pnis chiliaste, visionnaire, et finit par tomber dans les excès les plus hideux. Après avoir tenu quelque temps des réunions religieuses où l'on chantait encore des cantiques de Néander et de Lampe, admirée, adulée par des enthousiastes qui voyaient en elle l'incarnation de la sagesse divine, de la sophia éternelle, et qui appréciaient sa beauté autant que son esprit, elle se laissa entraîner à fonder, 2 janv. 1702, la société chrétienne et philadelphique, qu'on appela aussi de son nom: les Éviste*, ou les Buttlaristo, qui rejetait le mariage et la propriété, mais qui permettait la communauté des femmes et celle îles biens. Poursuivis pour des actes criants et publics d'immoralité, les buttlaristes, qui ne dépassaient guère le chiffre de 40 personnes, furent obligés de s'enfuir. A Cologne ils se firent catholiques pour échapper à la juridiction civile et se plongèrent de plus en plus dans un dévergondage d'excès de tous genres. Le c papa » Winter fut appelé le Père; mais le 2 janv. 1706 commença le règne du fils en la personne d'Ap-penfeller ou Léander; Ichtershaufen devint bientôt la Colombe ou le Saint-Esprit, et Eva qui appartenait tour à tour à chacun, et à d'autres encore, fut déclarée le centre, le résumé, ou la Sainte-Trinité. Arrêtés le 22 févr. 1706, ils forent condamnés à différentes peines, mais réassirent à s'évader et se rendirent à Wetzlar, pais à Altona, où Léander sous le nom de Brach-feld s'établit comme médecin, après avoir préalablement éponsé Eva, qui n'en continua pas moins de fanatiser son entourage. La date exacte de sa mort est inconnue; elle vivait encore en 1717. Cette petite secte, malgré son peu d'importance, a compromis un moment le réveil de la piété et même l'œuvre des moraves, que les incrédules et les indifférents affectaient de rendre solidaire des folies hystériques d'Éva.

BUTTMANN, François, théol. hollandais, né à Leyde 1632, f 12 nov. 1679. Fils d'un pasteur réfugié du Palatinat, il fut successivement prof, à Leyde et prédicateur à Utrecht. Tête bien organisée, disciple de Cocceius, modéré dans ses opinions, il a publié des Comment, sur l'A. T. et Synopsù theologiœ, etc. 1661.

BUXTOBF (Bockstrop), famille distinguée d'hébraïsants, originaire de Westphalie. — Ie Jean, né 25 déc. 1564 à Camen, où son père était pasteur. Il étudia dans plusieurs universités, Marbourg, Heidelberg, etc., entendit Pisca-tor à Herborn, Grynâus à Bâle, Bullinger à Zurich, Bèze à Genève; revint à Bâle comme précepteur des enfants de Léon Curione, fet promu maître ès arts, fut nommé prof, d'hébreu, épousa en 1592 Marguerite, fille de Curione, qui lui donna 5 fils, dont 3 en une fois, et 6 filles, et mérita de nombreux honneurs académiques. Il refusa des places à Saumur et à Leyde, et f de la peste 13 sept. 1629. On le compte parmi les plus célèbres hébraïsants du protestantisme; il lisait tons les livres hébreux et rabbiniques et fut en relations suivies avec une quantité de notabilités juives, ce qui le rendit même un peu suspect à des protestants scrupuleux. Ayant assisté comme témoin à la circoncision d'un petit juif, il fut condamné pour ce fait à une amende de 100 florins. Sa profonde connaissance de la langue et des traditions juives lui permit de parler avec autorité du texte sacré et d'en défendre l'origine, l'authenticité et l'intégrité. Il fit ressortir le soin minutieux avec lequel les copistes l'avaient reproduit, puisqu'ils en respectaient même les irrégularités déformé, et il en tira contre les Septante et contre la Vulgate la conclusion que l'hébreu seul pouvait faire autorité en cas de besoin. C'était une thèse importante, à une époque où la Béforme en appelait à l'Écriture dans toutes ses controverses, et Buxtorf exerça sous ce rapport une grande influence. Sa collection de livres juifs, encore augmentée par ses fils et petits-fils, fut achetée en 1705 par la biblioth. de Bâle pour la somme de 1000 écus, avec une masse de lettres de savants juifs et chrétiens à lui adressées. Ses principaux ouvrages sont: le Manuel hébraïque 1602; la Synagogue juive, 1603; Lexi-con hebr. et chald. 1607; les Abréviations de l'hébreu, 1613; Biblia hebr. 1618; Tiberias,ou Comment, masorétique, 1620, etc.; tous souvent réimprimés. Il a laissé inachevés une Concordance hébr. de la Bible, et un Dictionn. chald. talmudique et rabbinique, que son fils Jean a continués et publ. en 1632 et 1639.

2<> Jean, son fils, né 13 août 1599; prodige de science dès son enfance, maître ès arts à 16 ans; se rendit en 1617 à Heidelberg, assista au synode de Dordrecht. visita de là, avec les députés de Bâle, la Hollande et l'Angleterre, revint par la France et publia à 23 ans son Dictionn. chaldéen et syriaque, 1622. En 1623 il vint à Genève, où il entendit Turretin, Diodati et Tronchin. Il refusa une place de prof, de logique à Lausanne, et remplit de 1624-1630 les fonctions de diacre à régi, de Saint-Pierre à Bâle. Il accepta alors la chaire de prof, d'hébreu, vacante par la mort de son père. Pour le remercier d'avoir refusé un double appel à Gro-ningue et à Leyde on créa pour lui une nouvelle chaire des Lieux communs et des Controverses, et en 1654 on lui donna l'exégèse de l'A. T. Il fut marié 4 fois; deux de ses enfants lui survécurent seuls, Jean du 3me mariage, et Jean-Jaques, du 4m«, qui lui succéda comme prof, d'hébreu, f 17 août 1664. Relevant et accentuant encore les idées de son père, Jean Bux-

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torf défendit avec énergie contre Louis Capelle la haute antiquité et l'autorité des points-voyel-)es du texte hébreu, les faisant remonter à Moïse, ou tout au moins à Esdras, tandis que Capelle les faisait remonter seulement au 6me siècle de l'ère chrétienne, et niait môme l'antiquité des lettres carrées de l'alphabet hébreu. Ces deux questions, qui sont aujourd'hui vidées dans le sens de Capelle ou à peu près, passionnaient les savants de l'époque, parce qu'elles touchaient à l'inspiration de la Bible, et donnèrent naissance pendant plus de 20 ans à toute une littérature. Buxtorf en particulier se fit remarquer par sa vivacité, dans son Traité de l'origine des points-voyelles, 1648, et si les savants allemands ne prirent que faiblement son parti, il eut la consolation de voir le Con-sensu* helvétique, rédigé en 1675 par Heidegger, consacrer ses idées dans son 2®* canon.

3o Jean-Jaques, fils du précédent, né 4 sept. 1645. A 8 ans il savait l'hébreu; à 16 ans il était étudiant en théologie; à 19 ans il était nommé prof, suppléant à la chaire d'hébreu, ce qui lui assurait la succession de son père, et la même année en effet, 1664, son père étant mort, il fut chargé de le remplacer. Il consacra 3 ou 4 ans à des voyages, visita la France, la Hollande, Londres, Oxford et Cambridge, et fut reçu partout avec la sympathie due à un grand nom. En 1669 il revint à Bâle, où il cumula avec ses fonctions de prof, d'hébreu, celles de bibliothécaire de l'université. D'une santé délicate, il f l«r avril 1704, aimé et considéré de tous. Travailleur infatigable et excellent professeur, il a peu écrit; on n'a de lui qu'une préface au Tiberias de son grand-père, et une nouvelle édition de la Synagogue juive du même, avec quelques corrections et développements, 1680.

4° Jean, neveu du précédent, fils de Jean, le fils de la 3m« femme de Jean (2o), né 8 janv. 1663, f 1732. Après avoir été quelque temps pasteur dans les environs de B&le, il fut nommé prof, d'hébreu en 1704 et conserva ces fonctions toute sa vie. Aucune de ses publications n'a une importance particulière; la plus intéressante, ce sont ses Catalecta philol. theologica, avec l'indication des principales lettres d'hommes célèbres adressées aux deux premiers Buxtorf.

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Voyez à la lettre K les noms, surtout les noms étrangers, qui ne se trouveraient pas à la lettre C; ainsi: CABALE, v. Kabale. CAGOTS, v. Caqueux.

CAINITES, une des branches des Gnosti^ues Ophites, q. v. C'étaient de fanatiques antino-miens, pleins de haine pour le Dieu de l'A. T. Ils aimaient tous ses ennemis, depuis Caïn jusqu'à Judas Iscariot.

CAIIJS lo év. de Rome 283-296; n'est connu que par le faux martyrologe de sainte Susanne et par une fausse décrétale citée par Har-douin I, 209.

2° Presbytre romain, vécut du temps de Tév. Zéphyrin et sous Caracalla. Photius l'appelle l'év. des Gentils, et Eusèbe: un homme très éloquent II écrivit contre les montanistes, et se montra l'adversaire décidé du chiliasme, reprochant même à Cérinthe d'avoir trompé le monde avec l'Apocalypse de Jean pour accréditer sa doctrine du règne de mille ans. Il ne dit cependant pas que l'Apocalypse soit l'œuvre â? Cérinthe.

CAJETAN, lo de Thiène, v. Théatins. — 2o Jacques de Vio, né 1469 à GaBte, d'où son nom de Gaétan, ou Cajetan, prit aussi le prénom de Thomas, en l'honneur de son maître Thomas d'Aquin. Il entra à l'âge de 16 ans dans l'ordre des dominicains, où ses grands talents, son érudition et sa conduite sans reproche lui méritèrent uu rapide avancement. En 1508 il était nommé général de l'ordre, en 1517 cardinal. Déjà au concile de Pise 1511 il avait défendu l'autorité absolue du pape; il rendit encore de grands services à Jules H pour la convocation d'un concile ultramontain à La Iran 1512. Envoyé comme légat en Allemagne à l'occasion de la guerre des Turcs il assista à l'élection de Charles-Quint à Francfort, à l'élection d'Adrien VI, aux affaires de Hongrie, à la diète d'Augsbourg 1518, et jouit de la confiance de Clément VII jusqu'à sa f 1534. Sa dispute avec Luther ne lui fut pas inutile à lui-même; il reconnut loyalement que sur le terrain biblique l'hérétique l'emportait sur lui, et il se mit à l'étude des Écritures, sans s'en laisser détourner par rien, s'adressant à des juifs pour l'hébreu, à Érasme pour le grec, et ne craignant pas de corriger la Vulgate. Il ne rejette pas la tradition, mais sa critique est indépendante et éclairée; il rejette Jean 8, 1. sq.; il voit dans le serpent du paradis un symbole; le feu de l'enfer n'est pas matériel: il admet le divorce en cas d'adultère, la prière en langue vulgaire, et ne tient pas aux commandements de l'Eglise sur ce qu'on peut manger. Mais avec tout cela, point de principe supérieur; le pape reste le maître unique, et cela paralyse ses velléités d'émancipation. D a laissé un Comment, sur la Bible, dés Comment, sur Aristote, et divers écrits ecclésiastiques. Ses œuvres ont été publ. à Lyon 1639, mais on en a adouci les passages trop hardis. V. R. Simon, Hist. critique du N. T.

CALAS, Jean, né i9 mars 1698 à la Caba-rède, près Mazamet; marchand d'indiennes à Toulouse, marié en 1731 avec Anne-Rose Cabi-bel, eut 4 fils et 2 filles. Le Lonis, se fit catholique; l'aîné, Marc-Antoine, aurait voulu être avocat, mais les édite de religion ne le permettaient pas: il eut ensuite l'idée de se consacrer au ministère, mais un ami l'en dissuada, en lui disant: C'est le chemin de l'échafaud. D'un caractère mélancolique, sans état, sans avenir, et sans occupation, il devint de plus en plus sombre, se prit à rêver de suicide, et finit par se pendre à la porte du magasin de son père, le soir du 13 oct. 1761. Son frère puiné Jean-Pierre, reconduisant un ami, La Vaïsse, que son père avait retenu à souper, aperçut le premier le cadavre. Le père et la mère accourent; on fait chercher un chirurgien; les secours sont inutiles, le deuil est dans la maison, les capi-louis (conseillers municipaux) constatent le suicide, la foule s'amasse, et tout à coup une voix accuse le vieux père d'avoir étranglé son fils pour l'empêcher d'abjurer. Il n'en fallut pas davantage pour amener l'arrestation de toute la famille; y compris une vieille servante, bonne catholique, qui était dans la maison depuis 30 ans. Plus une accusation est monstrueuse, plos elle a de chances d'être admise par une population fanatisée. Les prévenus restèrent près de 5 mois en prison et furent soumis à la <{uestion ordinaire et extraordinaire. Le clergé lit tout pour monter et chauffer l'opinion. Le corps du suicidé fut exposé dans la cathédrale, orné des palmes du martyre; services funèbres, sermons, processions de cordeliers et de pénitents, mémoire de l'archevêque, apothéose, tout fut mis en œuvre. Le fils renégat lui-même chargea 9es parents, en jurant que les protestants étaient obligés d'étrangler leurs enfants infidèles (il était la preuve du contraire). Mais ni la question, ni les mauvais traitements, ni la durée de la détention ne purent ébranler aucun des prisonniers; La Vaïsse lui-même et la vieille servante restèrent fidèles à la vérité. Enfin le 9 mars 1762, malgré la belle défense de l'avocat Sndre, Calas fut condamné par la Chambre de la Tournelle (8 voix contre 5), à 4*tre rompu vif, puis son corps livré aux flammes. L'exécution eut lieu le lendemain et le vieillard souffrit huit heures avec une fermeté <kmce et chrétienne qui arracha des larmes à plusieurs de ceux qui avaient demandé sa mort. En vain, d'une voix paterne, le dominicain chargé de l'accompagner le supplia d'avouer son crime. Calas ne cessa de protester de son innocence. Une réaction se faisait dans l'opinion publique, et les juges mal à l'aise n'eurent d'autre consolation que l'espoir qu'il reconnaîtrait son crime dans les tourments d'une horrible agonie;

mais cette pauvre consolation, le dominicain lui-même la leur ôta. Ils tranquillisèrent leur conscience en relâchant M1»* Calas, la servante et La Vaïsse; les deux filles furent enfermées au couvent de la Visitation: Pierre, banni, puis repris et enfermé dans le couvent des jacobins, put s'enfuir et vint à Genève où se trouvait déjà son plus jeune frère Louis-Donat. Voltaire voulut voir ces jeunes gens, et après s'être exactement informé des faits, il entreprit la campagne bien connue qui, grâce au talent dévoué de Mariette, E. de Beaumont et Loiseau de Mauléon, aboutit à la revision du procès, à la cassation du jugement, et le 9 mars 1765 à la réhabilitation de Calas par un tribunal unanime de maîtres des requêtes, jour pour jour trois ans après l'arrêt inique de la condamnation. Ses biens furent rendus à la famille, les filles furent retirées du couvent et de nombreux dons prouvèrent aux héritiers du nom de Calas que la France tenait à laver les fautes d'un tribunal fanatisé. Une délégation de ce tribunal ayant été mandée à Paris, crut s'excuser en disant k Louis XV: Sire, il n'y a si bon cheval qui ne bronche. — Un cheVal, je ne dis pas, répondit le roi, mais toute une écurie ! M^ Calas mourut à Paris en 1792. Sa fille Anne, mariée au chapelain de Hollande, Duvoisin, eut pour fils Alexandre Du voisin-Calas, secrétaire de Joseph Bonaparte f 1832. — Cette histoire tragique a inspiré Lemierre, Laya, Chénier, P. Rabaut, Court, Peyrat, Coquerel, Bungener et d'autres.

CALASANZA, v. Piaristes.

CALATRAVA (Ordre de); ordre religieux et militaire d'Espagne, fondé en 1158 par des chevaliers cisterciens auxquels Sanche III roi de Castille confia la défense de Calatrava contre les Maures. Don Gardas en fut le premier grand-maître. Alexandre III reconnut l'ordre avec de nouveaux statuts moins rigoureux. En 1487 la grand'maîtrise fut réunie à la couronne, et l'ordre n'ayant plus de raison d'être, le titre de chevalier n'est depuis 1808 qu'une distinction honorifique.

CALDÉRON (don Pedro délia Barca), poète dramatique espagnol, né 17 janvier 1601 à Madrid d'une vieille et noble famille, f 1687, écri vit plus de mille pièces, dont 121 comédies; fit la campagne de Flandre, puis 1652 entra dans les ordres, devint chanoine de Tolède, et ne composa plus dès lors que des pièces religieuses ou autos sacr amentales, actes sacramentaux,, tels que la Dévotion de la croix, etc. Il représente parfaitement l'esprit et le caractère de son pays, qui était alors au comble de la prospérité.

CALENDES (frères des), sociétés de secours mutuels et de bonnes œuvres, clercs et laïques, sous le patronage de l'évêque; organisés en Allemagne vers 1220. Leurs conférences se terminaient par un banquet, les calendes dégénérèrent et la réformation mit fin à leurs abus.

CALICE, mot latin, plus ordinairement traduit par coupe en français. Il s'emploie surtout en parlant de la Cène. Jésus en l'instituant dit à ses disciples: Buvez en tous, Matt. 26, 27. L'institution fut respectée jusque vers la fin du 8m* siècle. On commença alors, par excès de précaution, à se servir de tuyaux, de chalumeaux, de brins de paille, pour boire le vin de l'eucharistie; puis on l'interdit complètement aux enfants; enfin, grâce à la doctrine scolastique de la concomitancey on finit vers la fin du 12®® siècle, par retirer la coupe à tous les laïques, sauf quelques exceptions en faveur des princes. Ce fut une innovation malheureuse, et peu de questions troublèrent davantage l'Égl. romaine. Elle servit de prétexte aux réclamations des calixtins. Le concile de Constance maintint le retranchement de la coupe; celui de Bâle admit que dans certaines circonstances on pourrait céder sur ce point, et dès lors presque toutes les crises religieuses ont fait de la communion sous les deux espèces l'un des articles de leur programme. La chose Va pas même été discutée dans les Églises évangéliques, tant elle allait de soi. Quelques conciles ont examiné sérieusement la forme des calices et la matière dont ils devaient être faits; ils se sont prononcés pour l'argent ou l'or; il est évident que la chose importe peu.

CALIXTE lo ou Calliste év. de Rome 219; passe pour avoir été martyrisé 222. Origine et vie inconnue. On croit que c'est à lui que remonte la catacoinbe qui existe à Rome sous le nom de Saint-Sébastien; il en était peut-être le gardien.

2° Calixte II, fils de Guillaume, comte de Bourgogne; archev. de Vienne, élu pape 1118, se débarrasse de son ennemi l'antipape Grégoire VIII et le fait prisonnier. Après le concile de Reims 1119, le Concordat de Worms met fin aux querelles sur les Investitures 23 sept. 1122, en déclarant que si les princes n'ont pas le droit de conférence spirituelle, ils ont droit, après la consécration, de donner par l'investiture royale la concession de certains bénéfices, possessions, biens terrestres, etc. L'investiture ne devait donc plus avoir lieu par la crosse et l'anneau, symboles ecclésiastiques, mais par le sceptre, symbole tout civil. Concordat ratifié par le premier concile écuménique de Latran 1123, t 1124.

3° Calixte III; Jean de Strume, élu 1159 concurremment avec Alexandre III et Victor IV; antipape qui ne joua aucun rôle.

4° Calixte III, Alphonse de Borgia, espagnol, né à Xativa, près Valence, élu 8 avril 1455 à l'âge de 80 ans, f 6 août 1458. Il pratiqua le népotisme sur une grande et lamentable échelle qui le rendit impopulaire. Fort et courageux, il envoya une douzaine de galères contre les Turcs, mais sans succès durable. Il fit reviser le procès de Jeanne d'Arc par une commission, qui la déclara martyre. Les princes allemands exigent de lui qu'il reconnaisse les libertés de leur Église.

5o Calixte, Georges, théologien luthérien, né 14 déc. 1586 à Médelby, Holstein; prof, de théologie à Helmstaedt pendant près d'un demi-siècle. Il compte parmi les théologiens les plus indépendants et les plus influents de l'Égl. luthérienne, qui le regarde comme le vrai successeur deMélanchthon. Après avoir fait de bonnes études philos, et philologiques sous Casélius, il se mit à la théologie en 1607, mais en dehors de toute influence, et voyagea ensuite de 1609-1613, non en amateur, mais en travailleur sérieux et en observateur. Il visita la Belgique, l'Angleterre où il vit Casaubon, et la France; il passa un hiver à Cologne, où il vit le catholicisme de près et apprit à en distinguer les bons et les mauvais côtés. Son horizon intellectuel s'étendit, et c'est ainsi préparé qu'il pût prendre, sous les auspices du duc Ulrich de Brunswick, les fonctions de professeur dans lesquelles il se distingua par l'étendue de la science et par la clarté de l'exposition, autant que par l'esprit paisible et modéré de son enseignement, — Ses ouvrages sont nombreux, mais en général peu travaillés; ce sont pour la plupart des traités de théol., des dissertations ou des écrits de circonstance. Les luthériens stricts s'étaient déclarés ses adversaires, lui reprochant son syncrétisme, q. v. et l'accusant parfois de n'être qu'un papiste déguisé.

CALIXTINS, lo nom de la branche hussite La plus modérée, mais aussi la plus tiède, v. Bohême. Ils se bornaient presque exclusivement à demander l'usage de la coupe, du calice (de là leur nom) dans la Cène; ils voulaient communier sous l'une et l'autre espèce, en latin sub utrâque, ce qui les fit aussi appeler utraquiste*. Le conc. de Bâle, dans ses Compactata céda sur ce pjint, ainsi que sur quelques autres, sous l'influence de Rockyzane. Les taboristes, ne s'étant pas déclarés satisfaits des concessions bâ-loises, les calixtins finirent par se tourner contre eux et se joignirent aux catholiques pour les écraser; quelques-uns cependant comprirent que la demi-réforme octroyée n'était qu'un leurre; ils se rapprochèrent des taborites, et obtinrent du roi Podiebrad la concession du district deLitizsur les frontières de la Moravie, où un grand nombre de bourgeois, de nobles, d'ecclésiastiques, se réunirent dès 1453 pour y jouir de la liberté de conscience, sans être exposés à la tentation de recourir aux armes pour défendre leurs droits. Ce fut un des noyaux de régi, des Frères moraves.

2# Disciples de Georges Calixte, q. v.; ils essayèrent de réunir en une seule toutes les églises de la réforme; on les appelait aussi à cause de cela syncrétistes (ceux qoi travaillent à la réunion).

CALLENBERG, Jean-Henri, né 12 janv. 1694 dans le duché de Gotha, successivement prof, de philos, et de théologie à Halle, f 1760; est connu surtout par l'institution qu'il fonda en 1728, et qui porta son nom, pour l'évangé-lisation des juifs. C'était une espèce de séminaire des missions, avec une imprimerie hébraïque. Il envoya des missionnaires dans presque toutes les contrées de l'Europe, en Orient, et jusqu'en Afrique; dans le nombre il faut nommer Tychsen, qui fut plus tard prof, de langues orientales à Rostock, f 1816, et Et. Schulze, qui prit la direction du séminaire après la mort de son fondateur. En 1791 l'institution fut réunie aux autres établissements philanthropiques de Francke, avec une clause en faveur des étudiants juifs. Les écrits de Callenberg méritent à peine une mention; ce qu'ils offrent de plus intéressant, ce sont les récits des missionnaires auprès des juifs et des musulmans; publ. de 4728-1791.

CALMET (dom Augustin), né 26 févr. 1672 a Mesnil-la-Horgne, diocèse de Toul, bénédictin de la congrégation de Saint-Vannes, étudia à Breuil, apprit l'hébreu du pasteur Fabre, fut chargé d'expliquer les S. Écritures, d'abord aux élèves de Moyen-Moutier dans len Vosges, puis à Munster; fut nommé abbé de Saint-Léopold de Nancy 1718, et dix ans après, abbé de Séno-nes, oti il f *757. Sa facilité de travail était extraordinaire et sa fécondité littéraire fut immense. Sans parler de son Hist. de Lorraine, 4 vol., ni de son Traité sur l'apparition des esprits, vampires, etc. il faut nommer son Comment. littéral et critique delà Bible, 23 vol. 4°, réimpr. en 8 in-f®; son Dictionn. histor. et critique de la Bible, 2 vol. f°, ou 4 in-fo; ses Dissertations, ou Trésor d'antiquités sacrées et profanes; 12 vol.; son Hist. sainte de l'A. et du N. T. et des juifs; son Hist. universelle sacrée et profane, 17 vol. etc. Son érudition est remarquable, et l'on trouve dans ses ouvrages de grandes richesses, mais il n'avait pas le sens critique; sa subordination à la doctrine catholique et aux principes herméneutiques du conc. de Trente, ne lui laissait pas l'indépendance d'esprit dont il aurait eu besoin pour bien juger.

CALOV, un des théologiens les plus distingués, mais aussi les plus entiers de l'Église luthérienne. Il naquit, comme Herder, à Mohrun-gen,. Prusse orientale, 1612, fit ses premières études à Konigsberg, passa à Rostock en 1634, ayant déjà écrit contre les réformés, obtint une suppléance à Kônigsberg, fut nommé en 1643 directeur du grand gymnase de Dantzig, dont il augmenta encore la réputation par la supériorité de son enseignement; assista au colloque de Thorn, où il rompit plus d'une lance contre le syncrétisme de Calixte, et fut appelé en 1630 à Wittenberg, la capitale de la stricte orthodoxie luthérienne; ami du prince Georges II et de l'opulent prédicateur de la cour, Weller. il fut bientôt nommé surintendant général et premier pasteur. Peu d'hommes ont compté autant de deuils que lui dans leur famille; il eut la douleur de perdre 13 enfants et 5 femmes. Quatre mois après la mort de la 5me, en 1684, ayant déjà 72 ans, il en épousait une 6ra®, la fille encore jeune de son collègue Quenstedt, mais avec laquelle il ne vécut que 2 ans. + 1686. C'était un homme puissant, fortement charpenté, taillé en hercule, passionné à froid, d'une ténacité que ne pouvaient ébranler ni les larmes, ni les prières. On eût fait de lui un excellent dominicain. ou un non moins excellent terroriste. Pour lui le salut de l'Église (telle qu'il la concevait) était la loi suprême. Il ne voyait que son but et il y courait sans s'inquiéter des obstacles. Au milieu de ses plus grandes douleurs, il faisait encore de la polémique et de la controverse, et l'on apprécierait cette fidélité de sa foi si l'on y voyait davantage le sentiment et la conviction. La lutte était chez lui un besoin de nature; il écrivit à peu près contre tout le monde, et attaqua successivement, toujours avec violence, mais sans les personnalités habituelles,, les catholiques, les réformés, les arminiens, lessvn-crétistes, et jusqu'à Boehme. La lecture de ses écrits en devient fatigante. Son Comment, sur la Bible, ou Biblia illustrata, n'est qu'une réfutation perpétuelle des Commentaires de Grotius; il y fait preuve de beaucoup de sagacité, mais il n'a garde de s'écarter des symboles luthériens, ni même du Consensus; sa dogmatique est celle de Gerhardt sur l'inspiration identique de l'A. et du N. T., d'Ester et de saint Jean; il trouve la Trinité, l'immortalité de l'âme, la nature et l'œuvre de Christ, exposées aussi clairement dans l'un et dans l'autre livre. Son Systema lo-corum theolen 12 vol., qui semblerait devoir n'être que l'exposé de ses vues, est le triomphe de la scolastique luthérienne, et porte également le cachet de sa nature polémique; il met sans scrupule au compte de ses adversaires les conséquences qu'ils n'ont pas tirées, mais qu'on pourrait tirer de leurs doctrines. Son style n'a rien d'agréable; c'est verbeux, et ses derniers écrits, notamment celui contre Boehme, sentent tellement le vieillard que ses amis eux-mêmes cherchèrent à en empêcher la publication.

CALVARISTES, ou prêtres du Mont-Cal-vaire; congrégation fondée en 1633 dans le diocèse d'Auch, puis transférée à la demande de Louis XIII, sur le Mont-Valérien, près Paris, qui prit de là le nom de Calvaire. — Il y avait aussi un ordre de religieuses de ce nom, fondé par Antoinette d'Orléans, sous la direction du p. du Tremblai.

CALVIN, Caulvin, ou Chauvin, Jean, né 18 juill. 1509 à Noyon, Picardie, le plus émi-nent des réformateurs français et le plus grand théologien de son siècle. D'une famille de moyenne bourgeoisie, il étudia d'abord à Noyon, puis vint à Paris, où il entra successivement au collège La Marche (sous Mathurin Cordier) et au coll. Mon lai gu, où il put se rencontrer avec Loyola. Grâce k son père qui était syndic du chapitre de Noyon, il avait obtenu quelques bénéfices qui l'aidaient à vivre, mais il ne tarda pas à abandonner la théol. pour le droit, et se rendit 1528 k Bourges pour y entendre Alciat, et l'an d'après k Orléans pour entendre P. de l'Estoile. Il perdit son père 26 mai 1531, et fut r^eçu docteur en juin 1533. En avril 1532, il ptibliason premier livre, un Comment, latin sur la Clémence de Sénèque. Malgré ses relations affectueuses et suivies avec son cousin Olivetan et avec le pieux Wolmar, il ne paraît pas encore à cette époque s'être joint au mouvement de réforme qui se faisait sentir si puissamment en* France; le droit l'occupait seul. Un discours sur la foi justifiante, qu'il prépara pour le recteur Nicolas Cop, et qui fut prononcé le 1er nov. 1533, laisse bien entrevoir une réaction contre le dogme catholique, mais c'est seulement en mars 1534 qu'il accentue le changement qui s'est fait en lui. Il doit fuir comme Cop, et se retire en Saintonge chez son ami le curé L. du Tillet. Il visite ensuite Nérac, Noyon où il va résigner ses bénéfices, Poitiers, Orléans, Bourges, peut-être aussi Strasbourg, Paris, où il rencontre Servet une Ire fois. Après l'affaire des placards contre la messe, 18 oct. 1534, la persécution l'oblige k s'enfuir k Strasbourg, puis k Bâle où, sous l'anagramme de Lucanius, il se consacre tout entier à l'étude. C'est là qu'il écrit en latin ce petit c livret • qui devint en mars 1536 l'Institution chrétienne, mais qui n'est pour le moment qu'une espèce de catéchisme; il lui donne pour préface, datée de Bâle 23 août 1535, cette admirable épître à François 1er, 0ù il plaide la cause de ses frères les martyrs;et le livre lui-même, un des chefs-d'œuvre de la langue et l'œuvre capitale de la théol. réformée, se réimprime du vivant de l'auteur en 10 éditions latines et en 14 traductions françaises, avec des additions et chaque fois des développements nouveaux. Sous le nom de Charles d'Espeville, et avec son ami du Tillet, seigneur de Hautmont, il visite l'Italie et voit à Ferrare Renée de France avec laquelle il étudie les questions religieuses qui agitent les esprits. En juin 1536 il retourne à Noyon pour mettre ordre à ses affaires, et décide son frère Antoine à l'accompagner à Strasbourg et Bâle; mais à cause de la guerre ils doivent passer par Genève, et là Farel l'arrête par un appel solennel et pressant. En septembre il ouvre ses leçons de théol. et en décembre il est nommé pasteur. Son esprit vaste et lucide, sa volonté de fer lui assurent bientôt une autorité incontestée, comme on le voit k la dispute de Lausanne et au synode de Berne. Le 1er janv. 1537, mémoire présente au Conseil de la ville sur le gouvernement de l'Église; bientôt après publication d'un petit Catéchisme en français. Mais les Libertins lèvent la tête; ils ne veulent rien de la discipline dont ils sont menacés. Le 4 janv. 1538 les Conseils décident que la Cène ne pourra être refusée k personne, et comme les pasteurs résistent, ils sont bannis. Calvin se rend à Strasbourg où il organise des leçons et des prédications dès le mois de septembre. Il est reçu bourgeois, et en sept. 1540 il épouse Idelette de Bure. Il entre en rapports avec les protestants d'Allemagne, assiste aux conférences de Worms et de Ratisbonne, marque par son livre sur la Cène 1540 la différence de leurs vues sur ce point de dogme, mais n'en est pas moins apprécié par Luther. Rappelé à Genève, il accepte malgré lui ce poste de péril et de combats, et dès son retour 13 sept. 1541 il fait rédiger les Ordonnances ecclésiastiques, assurant au Consistoire l'autorité d'un tribunal des mœurs, mais sans compétence pécuniaire ou matérielle. C'est ce que quelques-uns ont cru pouvoir appeler une espèce de théocratie, bien que l'Etat comme tel n'ait jamais été placé ni sous la direction, ni sous le contrôle de l'Église; le contraire plutôt serait vrai, puisque les écrits de Calvin lui-même devaient être soumis à une commission du Conseil avant d'être imprimés, et que ses prédications ont plus d'une fois été censurées. L'influence de Calvin s'exerçait surtout au sein de l'Église et sur les individus, sans distinction de grands ou de petits. Castalion, Ameaux, le pasteur H. de la Mare, Bolsec, Trolliet, les italiens Alciat, Blandrata et Gentilis; Gruet, sentirent tour k tour les effets de son pouvoir; les uns pour cause d'hérésie, les autres pour paroles légères ou méchantes calomnies. V. les différ. articles. La condamnation de Servet a laissé sur sa mémoire une tache d'autant plus voyante qu'elle est isolée dans l'histoire de la réforme. Les libertins luttèrent avec énergie contre l'influence croissante de Calvin; ils se donnaient l'iipparence d'être le parti genevois contre l'étranger, mais en réalité ils n'étaient pas un parti religieux, et plusieurs de leurs actes relevaient de la morale plus que du dogme. Les réfugiés qui affluaient à Genève et qui étaient admis à la bourgeoisie (1360 entre 1548 et et 1554) fortifiaient le parti de Calvin, et vers 1555 on peut dire qu'il était le maître de la situation. Le 5 juin 1559 il fonda l'Académie, qui devait pendant longtemps fournir des pasteurs aux églises de France et qui jeta sur Genève un si grand lustre. Il comprenait, comme tous les réformateurs, que l'instruction était l'auxiliaire indispensable de leur œuvre, et que pour être efficace elle devait reposer sur la Bible. Des milliers de savants et de martyrs sont venus s'inspirer de son esprit, pour reporter non seulement en France, mais en Angleterre, en Écosse, dans les Pays-Bas, le long du Rhin, et dans toute l'Europe les fruits de l'enseignement qu'ils avaient reçu. Sa femme était morte en 1540; elle ne lui avait donné qu'un fils, mort en bas Âge; on peut se demander l'influence qu'aurait eue sur ce caractère si plein de tendresse la vie de ce petit enfant. Mais lui-même déclinait, usé par les luttes, le travail et les maladies. Le 30 mars 1564 il siégea pour la dernière fois en Consistoire; le 27 avril il fait ses adieux aux membres du Conseil qui sont venus le voir; le 28 à ses collègues; le samedi 27 mai il € s'en alla à Dieu, » comme disent les registres. Le lendemain à 2 h. il était enterré à Plain-palais sans pompe et sans appareil; c'est à peine si l'on croit savoir auj. où il repose. On a peine à se représenter l'œuvre immense à laquelle il a consacré sa vie et ses forces: prédications, leçons, voyages, commissions législatives, luttes, visites, correspondances avec les princes, avec les églises sous la croix, avec les prisonniers et les martyrs (on a de lui 2,025 sermons mss., et ses lettres se comptent par milliers). Ajoutez à cela ses admirables et nombreux commentaires sur presque tous les livres de la Bible, et une foule de traités et brochures de circonstance, dont la seule énumération prendrait des pages. Un grand nombre de ses ouvrages ont été souvent réimprimés, plusieurs ont vu le jour pour la 4 w fois ces dernières années; ses Lettres, par Jules Bonnet, sa Correspondance par Hermin-jard; ses Comment, sur les Psaumes, par L. Pi-latte; ses QEuvr. compl. par Baum, Cunitz et Reuss. Sa Vie a été écrite par Th. de Bèze, Henry, Kampschulte, Merle d'Aubigné, Bunge-ner, Stâhelin, Guizot, Hoff. V. aussi divers écrits de MM. Haag, Vulliemin, Gaberel, Am. Roget, Sayoux, Galiffe, Puaux, Rilliet, etc. — La dogmatique de Calvin a le mérite, et aussi le tort, d'être tout d'une pièce, absolue, logique, trop logique, et d'acéentuer outre mesure le dogme de la prédestination et celui de la complète incapacité de l'homme dans l'œuvre

de son salut. Mais si le reproche est fondé en théorie, il cesse de l'être dans la pratique, et les êgl. calvinistes sont précisément celles qui agissent le plus, qui prêchent avec le plus de force le devoir et l'importance de la conversion, et qui ont maintenu le plus fidèlement la foi à l'Évangile; tandis que celles qui font à l'homme une plus grande part de liberté et qui semblent faire dépendre son salut de ses efforts, tombent rapidement dans le latitudinarisme doctrinal et dans une morale relâchée; v. les jésuites. — Les peintres ont fixé sur leurs toiles plusieurs souvenirs de l'hist. de Calvin, notamment Hor • nung et Lugardon.

CAMALDULES, ordre de religieux fondé vers 1012 ou 1018 à Camaldoli, près Florence, par Romuald q. v. Il dut sa prospérité peut-être k son isolement, k sa position escarpée, au petit nombre de ses membres et k la sévérité de sa règle. L'évêque Théobald d'Areao le dota richement. La réputation de Romuald grandit et devint bientôt populaire, et les couvents qui s'établirent après sa mort sous le patronage de son nom, furent considérés comme des succursales de Camaldoli, sanctionnés comme tels par le pape et reconnus sous le nom de camaldules. C'était surtout un ordre consacré k la vie contemplative et à la pénitence; les flagellations y jouaient un grand rôle. Le prieur portait le titre de major; les membres logeaient et mangeaient séparément; le jeûne était rigoureux, le silence encore plus. Le 4*e major, Rodolphe, en 1102, donna une règle écrite et adoucit les premières rigueurs qui dépassaient le but et ne pouvaient toujours être observées. Eugène IV, * 1431, ordonna une réforme. Des difficultés et des rivalités intérieures finirent par dissoudre moralement cette institution qui ne répondait plus aux vues de son fondateur, et après de nombreux changements dans la règle, dans l'organisation, dans l'administration et dans le siège de l'autorité centrale, elle fut en 1642 transférée k Grosbois, près Paris, où une abbaye de cet ordre existait encore en 1789. Les camaldules supprimés en Autriche en 1782, furent rétablis à Naples en 1822. Grégoire XVI était camaldule.

CAMBRIDGE, une des plus vieilles univ. de l'Angleterre, à 20 lieues de Londres, doit son nom k un pont (bridge) bâti sur la Cam. On fait dater sa fondation de Sigebert, roi de l'Est-Anglie, au 7m<> siècle. Elle forme 17 collèges, ou halls, avec jardins; chacun ayant son administration particulière, ses fonds, sa bibliothèque, sa chapelle. Le plus riche est Trinity-College, fondé par Henri VIII; c'est là que descendent les rois quand ils visitent Cambridge. La biblioth. centrale a 170 mille volumes, et 4,000 mss. dont quelques-uns fort précieux, entre autres le

Cantabriensû donné par Th. de Bèze. Le nombre des étudiants varie de 4 à 5 mille. On y étudie surtout la théol. et les mathématiques, tandis qu'Oxford brille pour les langues anciennes. Cambridge se glorifie d'avoir eu pour élèves Til-lotson, W. Pitt, Harvey, N. Bacon, Cranmer, Milton, Byron, Macaulay, Newton, Cromwell, Flamsteed, etc. On a dit pour caractériser les deux universités: Cambridge a fait Latimer et Ridley, Oxford les a brûlés. Ce jugement est un peu sommaire, mais il marque bien l'esprit plus avancé de Cambridge, et l'attachement d'Oxford à ses traditions.

CAMÉR ARIUS, Joachim, s'appelait Liebhard; le surnom fut donné à sa famille parce qu'elle avait fourni plusieurs chambellans. Il naquit 12 avril 1500 à Bamberg, d'où son autre surnom de Papepergensis. Il cultiva les lettres avec succès, notamment le grec, et après avoir visité plusieurs universités, prit ses grades en 1521 et professa avec distinction à Erfurt d'abord, puis à Wittenberg où il connut Luther et se lia avec Mélanchthon; un des premiers il embrassa la Réforme. En 1525 il visita Érasme à Bâle, fut nommé prof, à Nuremberg, envoyé 1530 à Augsbourg comme délégué du sénat à la diète, travailla de 1535 à 1541 à relever l'université de Tubingue, et fut appelé en 1547 à Leipsic. Chargé de plusieurs missions ecclésiastiques à Naumbourg, Augsbourg, Nuremberg, Vienne, il les remplit avec la fermeté calme et pleine de douceur qui faisait le fonds de son caractère. Il assista Mélanchthon à ses derniers moments et f 17 avril 1574, après avoir été précédé dans la tombe par sa femme et la plupart de ses amis. Il avait servi l'Église, indirectement par ses nombreux travaux classiques et par ses traductions des principaux auteurs grecs; directement par ses écrits théologiques, Vie de Mélanchthon, Hist. des Fr. moraves, Hist. de J.-C., Symbole de Nicée; par la part qu'il prit à la rédaction de la Confession d'Augsbourg. et par le crédit dont il jouit auprès de Charles-Quint, de Maximilien, qui lui offrit la place de conseiller impérial, et des ducs de Saxe, Henri et Maurice. Il laissait 5 fils, qui se firent tous avantageusement connaître dans les sciences et les lettres, entre autres Joachim, médecin et botaniste, auteur du Hortus medicus 1654.

CAMÉRON 1° Jean, théologien prolestant, né à Glasgow vers 1580. Il vint à Bordeaux en 1600; l'Église pourvut aux frais de ses études et lui procura d'abord une place de grec et de latin au collège de Bergerac, puis une chaire de philos, à Sedan, mais elle le rappela 1608 comme pasteur. Il fut parmi les zélés qui protestèrent contre le désarmement des protestants, et il entraîna un vote du consistoire dans ce sens; deux avocats, Saint-Angel et Lauvergnac opinèrent seuls pour l'abstention du consistoire dans une affaire qui n'était pas de son ressort; ils furent excommuniés, mais le parlement cassa cette sentence et Caméron dut payer une légère amende. En 1618, après des examens passés devant le synode du Mans, il fut nommé prof, de dogmatique à Saumur en remplacement de Gomar, et il fallut les instances de Du Pies-sis et l'autorité du synode d'Alais pour décider l'égl. de Bordeaux à le céder. Ses idées sur la grâce et le libre arbitre, connues sous le nom d'Universalisme hypothétique, ne tardèrent pas à lui susciter d'ardents adversaires, et il dut retourner en Angleterre où Jaques Ier le nomma principal du collège de Glasgow et prof, de théol.; mais mal payé, ou pas payé, il revint en France. A Saumur il lui fut défendu d'enseigner publiquement, mais cette interdiction fut levée en 1624, et il fut placé comme prof, à Mon tau -ban. Opposé au parti de la guerre il passa pour tiède et les zélateurs, sans doute pour prouver leur patriotisme et leurs sentiments religieux, le maltraitèrent tellement qu'il dut se retirer quelque temps à Moissac pour se remettre. Il revint à Montauban. mais il y mourut bientôt de langueur et de chagrin 1626. Le synode de Castres vota à ses 3 filles une modeste pension. En se réclamant de Caméron, Amyraut lui fit beaucoup d'honneur, car Caméron n'alla pas assez loin, même dans les discussions publiques, pour devenir chef d'école. C'était un homme d'esprit, instruit, généreux, mais entier dans ses opinions, inquiet et paradoxal; il dit entre autres que la Réforme avait besoin d'une nouvelle réforme. 11 a publié quelques thèses, des Remarques sur le N. T., qui sont estimées, et des Lectures théol. 3 vol. 4<> où il expose ses idées sur la grâce; Saumur 1626, réimpr. par Spanheim, Genève 1642, fl>.

2° Archibald Caméron, ministre écossais, d une éloquence populaire, ardent partisan du système presbytérien, plus ardent adversaire du catholicisme, refusa d'accepter l'acte d'Indulgence de juillet 1669 qui maintenait la suprématie ecclésiastique du roi, et, les persécutions ayant continué avec des excès inouis de cruauté, sous l'archev. renégat Sharp et sous le ministère de Lauderdale, Caméron, Cargill et d'autres demandèrent la destitution de Charles II et firent le 25 mai 1678 une démonstration publique à Rutherglen, brûlant les actes du parlement, ce qui ralluma la guerre civile. Vingt d'entre eux, escortés de 40 fantassins et de 26 cavaliers seulement, affichèrent le 22 juin 1680, à Sanquhar, la « Déclaration du véritable parti presbytérien, anti-épiscopal, anti-éras-tien. » Surpris par des forces supérieures, ils résolurent de vendre chèrement leur vie; Caméron tomba l'un des premiers, à côté de son frère. Sa téte et ses mains placés au bout d'une pique, ornèrent le triomphe des vainqueurs. Plusieurs de ses amis, faits prisonniers, furent suppliciés.

CAMÉRONIENS1° disciples de Jean C., cherchant à atténuer ce que la doctrine de Calvin sur l'élection avait de trop absolu. Ils soutenaient que le salut est offert à tous les hommes et qu'il dépend d'eux de le recevoir. Ils admettaient aussi qu'on peut être sauvé dans l'Égl. romaine.

2° Partisans d'Archibald C. Ils survécurent plusieurs années à leur chef, toujours fortement unis, el ne contribuèrent pas peu à consolider le trône de Guillaume d'Orange après la chute de Jacques II, mais ils s'abstinrent de tout pillage et de toutes représailles. Cependant même, sous Guillaume ils maintinrent leurs principes dans toute leur rigueur et causèrent plus d'une fois des embarras au gouvernement. Ils s'opposèrent également en 1709 à la réunion de l'Ecosse et de l'Angleterre, même sous la reine Anne, et si la plupart des presbytériens se résignèrent au rétablissement du patronage, moyennant quelques concessions, 1712, les ca-méroniens demeurèrent inébranlables, appelèrent comme pasteur Mac-Millan, et renouvelèrent leCovenant. En 1743 ils se constituèrent définitivement en égl. presbytérienne séparée, et déposèrent les armes en échange d'une tolérance absolue qui leur fut garantie. Ils regardaient l'épiscopat comme un péché, et le système presbytérien comme d'institution divine. W. Scott les a mis en scène dans ses Puritains.

CAMISARDS, montagnards des Cévennes qui résistèrent pendant 10 ans à Louis XIV pour maintenir leur droit à professer la doctrine évangélique; ils finirent par ê!re écrasés sous le nombre. — On a donné au mot de camisards plusieurs étymologies, sans parler de celle qui tronye dans Moréri le nom de Camis, idole japonaise, et qui suppose que les huguenots étaient des brûleurs d'idoles, Camis-ard. Le mot appartient au patois languedocien. Camis veut dire chemin; camisade veut dire attaque nocturne; camisé veut dire chemise. Voilà 3 mots entre lesquels on peut choisir. Cavalier s'attache à ce dernier, et raconte qu'en 1703 les Cévenols, maîtres de Ganges, s'emparèrent de toutes les chemises de l'endroit. Mais comme le mot est déjà employé en décembre 1702, il faut lui chercher une autre origine. Voici la plus probable. Peu avant l'attaque du Pont de Mont-vert, des Cévenols, tant protestants que catholiques, pendirent à des arbres quelques receveurs d'impôts qui s'étaient montrés trop âpres et trop durs dans le recouvremeut des taxes; pour ne pas être reconnus, ils passèrent une chemise sur leurs vêtements et une autre sur leur tête;

on les appela Camisards. Ce mot, qui était dans toutes les bouches, on le donna à ceux qui mirent à mort l'abbé du Chayla, sans faire la part des circonstances différentes, et il est resté aux malheureux soulevés contre la tyrannie religieuse, en même temps qu'on continuait de l'appliquer à des détrousseurs de grands chemins. — La cause éloignée du soulèvement des Cévenols fut la révocation de l'édit de Nantes; la cause plus rapprochée, ce furent les mesures de rigueur, qui avaient déjà commencé en 1681; la cause immédiate fut l'arrestation en juillet 1702, près de Mende, d'une petite caravane de fugitifs en route pour Genève. Ils furent délivrés par une bande de 40 à 50 de leurs amis conduits par le prophète Séguier. L'abbé du Chayla fut tué; ce fut le vrai commencement de la guerre. Le comte de Broglie, gouverneur général du Languedoc, ne réussit pas à se saisir des meurtriers, mais Paul, son lieutenant, battit les insurgés et fit prisonnier Séguier qui fut brûlé vif au Pont de Montvert. Partout se dressent des gibets ou des bûchers; à défaut des coupables on frappe des innocents: la terreur est générale, l'ordre est sur le point de régner dans ces contrées désolées. Mais Laporte parait, l'oncle, maître de forges, ancien soldat, orateur populaire, âme droite, honnête, dévouée; il offre aux Cévenols de se mettre à leur tête, c.-à-d. d'assumer tous les dangers. Son courage est contagieux; bientôt cinq nouvelles troupes se forment, commandées par Roland, Castanet, Joany, Couderc et Cavalier, août 1702. Le dinde Broglie est battu dans plusieurs rencontres. Laporte a été tué, mais Roland son neveu le remplace, et de brillantes victoires favorisent les armes des camisards. Le duc de Broglie, incapable et cruel, est remplacé par le maréchal de Montrevel, 13 févr. 1703. Celui-ci qui ne vaut pas mieux, est battu aux Devoirs de Mar-tignargue, et doit à son tour céder la place à l'illustre Villars; il ne faut pas moins que le premier maréchal de France pour réduire ces paysans des Cévennes, et encore essaie-1-il de la douceur et de la persuasion, peut-être de la ruse, pour en venir à bout. Il traite avec Cavalier et réussit à le détacher de son parti. Mais Roland, Catinat et Ravanel continuent d'errer dans les Hautes-Cévennes, comme un sombre nuage. Ils espèrent toujours. Ils comptent entre autres sur une flotte qui doit arriver de Nice et leur apporter des hommes, des armes et des vivres. Mais la flotte est battue par la tempête, dispersée ou jetée à la côte. Plusieurs chefs découragés se rendent à discrétion, et Villars leur permet de se rendre à Genève. Les autres restent • inébranlables; mais Roland est trahi et meurt en combattant seul contre un détachement, août 1704. En avril 1703 Catinat et Ravanel

sont brûlés vifs à Nîmes. Quelques-uns de leurs lieutenants s'expatrièrent, puis revinrent continuer la lutte dans leurs montagnes, avec des chances diverses, vainqueurs à Saint-Fortunat et à Saint-Pierreville, défaits près de Vernoux et dans le Vivarais, écrasés enfin par le nombre. Mazel fut tué, Claris roué, Chambon pendu. Enfin la paix d'Utrecht, et l'envoi de gouverneurs plus conciliants, mirent fin à cette guerre atroce, qui avait duré 9 ans, 1702-1711, et qui avait ruiné toute une contrée. Le caractère exclusivement religieux et défensif de cette insurrection ressort, non seulement des conditions auxquelles les camisards offrirent de mfettre bas les armes, mais encore de l'organisation théocratique de leurs bandes. Ils se traitaient de frères, s'appelaient l'armée des Enfants de Dieu, vaquaient à leurs chants de psaumes et à leurs exercices de piété, consultaient leurs prophètes, et observaient la discipline la plus pure et la plus rigoureuse, v. Court, Hist. des troubles des Cév.; Mison (réimpr, par Bost, avec notes), Théâtre sacré des Cév.; Puaux, Cavalier, etc. Cette gigantesque insurrection, quelque opinion qu'on ait sur sa légitimité, a rendu à la cause protestante des services qu'on ne peut méconnaître, et la correspondance du secrétaire d'État Saint-Florentin prouve que les terribles souvenirs qu'elle a laissés ont empêché le retour du fatal régime qu'avaient rêvé les gouverneurs dont on vient de lire les exploits.

CAMPANELLA, v. Thomas 7<>.

CAMPEGIUS lo Lorenzo Campeggi, d'abord juriste à Padoue, fit un chemin rapide après qu'il fut entré dans les ordres. Nonce de Jules II en Allemagne, il fut envoyé en la même qualité, et avec la dignité de cardinal en Angleterre, 1519, où il reçut aussi l'évéché de Salis-bury. Sa connaissance des affaires allemandes, son habileté et son dévouement à la cour de Rome, le firent nommer par Clément VII son légat à la diète de Nuremberg 1324, mais il y joua un rôle qui ne fut ni beau, ni brillant; sa présence excita, plutôt qu'elle n'effraya le parti évangélique, et le légat put se convaincre qu'il n'était pas sur un terrain favorable. Il se fit d'ailleurs mépriser par son avarice et son manque de loyauté, non moins que par son obstination à repousser toute réforme; mais il comprit qu'il fallait avoir lair de céder quelque chose k l'opinion, et fort de l'appui de l'orateur impérial, il fit adopter quelques résolutions dans ce sens. Quant à ses tentatives de corruption auprès de Mélanchthon, elles furent repoussées avec le mépris qu'elles méritaient. En 1528 il retourna en Angleterre, chargé d'arranger avec Wolsey la question du divorce d'Henri VIII, mais les victoires de Charles-Quint modifièrent la politique du pape, et la bulle fut brûlée sans avoir servi. A la diète d'Augsbourg il prononce le 24 juin 1530 un discours, mais son rôle est encore plus effacé, et les circonstances sont trop sérieuses pour ses petites équivoques diplomatiques. f 1539. Il eut un frère ou neveu

2° Thomas, qui prit part au colloque de Worms 1540, et qui joua un certain rôle au conc. de Trente, + 1564.

CAMPION, v. Parson.

CANISIUS, Pierre, né à Nimègoe 8 mai 1524. Ses parents s appelaient de Hotidt (le chien), d'où son nom latin. Élevé à Cologne, il fut gagné au jésuitisme par le p. Faber 1543, et se montra l'adversaire le plus décidé de toute réforme. U contrecarra les efforts de l'archev. Hermann. de Cologne, qui aurait voulu réformer l'Église par l'Eglise. Recteur et vice-chan-celier de l'université d'ingolstadt, il favorise son ordre et lui donne les collèges d'Augsbourg et de Dillingen. A Vienne en 1551 il est nommé recteur du collège des jésuites et prédicateur de Ferdinand IIl assiste au conc. de Trente, et après avoir fait sentir son influence jusqu'en Suisse, où il fonde le collège de Fribourg 1581, il y f 21 déc. 1597. On lui attribua des miracles; les jésuites en font le second apôtre de l'Allemagne; en tout cas il fut l'ennemi de la Réformation. A la demande de l'empereur il composa un catéchisme en deux éditions, l'une plus développée, Summa doctrinœ 1554, l'autre plus abrégée, Institutiones pietatis christ. 1566, où il groupe avec beaucoup d'art toutes les doctrines catholiques autour des trois vertus théologales. Canonisé par Pie IX.

CANONISATION. On eut de bonne heure dans plusieurs églises l'habitude de lire aux services religieux les noms des saints et des martyrs dont l'Église pouvait s'honorer, mais on ne les invoquait pas (non invocantur, dit saint Augustin). Des abus étant survenus, et des saints tout au moins douteux figurant sur les listes de quelques églises, (Gharlemagne décida dans 2 capitulaires. que pour qu'un homme fût reconnu saint il fallait une déclaration de l'Église et en particulier de Pév. du diocèse. La tendance centralisatrice du moyen âge amena Alexandre UI, 1181, k se réserver le monopole des canonisations, et Innocent III étendit ce privilège des papes jusqu'à la constatation de l'authenticité des reliques, 1215. Cependant la rigueur de la règle a fléchi quelquefois devant la force des choses. — Quant à la canonisation, d'ailleurs toujours dispendieuse, voici la marche suivie d'ordinaire. Si un homme est mort avec la réputation d avoir mené une vie sainte et sans tache, il est appelé de pieuse mémoire et serviteur de Dieu. Une enquête s'ouvre aussitôt, et si elle établit que sa vie a été réellement sainte et qu'il a fait des miracles, il est béatifié, déclaré bienheureux; dans la règle cela n'a lieu que 50 ans après le décès, sur la demande de l'évôque intéressé et après une triple enquête de la congrégation des rites. La proclamation est faite au Vatican; le béatifié n'appartient encore qu'à son diocèse, et son culte est autorisé, mais non ordonné. Après de nouveaux miracles et de nouvelles enquêtes le bienheureux est définitivement canonisé d'une manière solennelle, e cathedra, au Vatican; son culte devient alors obligatoire et général.

CANSTEIN, Charles Hildebrand (comte de), né 1667 d'une des plus nobles familles de l'Allemagne, perdit son père en 1680, mais continua d'être élevé par sa mère dans les principes chrétiens; fit son droit à Francfort s/0, visita la Hollande, l'Angleterre, la France et l'Italie; entra à la cour, puis à l'armée, fit la campagne des Flandres, où une grave maladie le fit rentrer en lui-même; se lia en 1691 avec Speneret Francke; se maria en 1707 avec Bartha de Kro-sigk. qui mourut en 1718 sans lui avoir donné d'enfants, et f 19 août 1719, assisté des prières de son ami Francke. Ses funérailles, qui eurent lieu à Berlin, furent solennelles; c'était un bienfaiteur de l'humanité qui venait de disparaître. On a de lui une Harmonie des 4 Évangiles, encore très estimée; mais ce qui a surtout rempli sa vie, ce sont les efforts qu'il a faits pour propager la Bible et la mettre, par la typographie, à la portée des plus modestes bourses. Il voulait le N. T. à 2 gros, et la Bible à 6. Un premier appel aux chrétiens allemands produisit au delà de 4,000 thalers; en 1712 on mettait la main à l'œuvre, et avant sa mort il pouvait compter, en différents formats, plus de 100,000 N. T. imprimés, et 40,000 Bibles. La fondation biblique de Canstein passa après sa mort à Francke; il s'y joignit bientôt une imprimerie, et la Bible fut imprimée dans plusieurs langues. Cette institution existe encore à Halle; elle a répandu depuis son origine plus de 5 millions d'exemplaires des Livres saints.

CANTIQUES, v. Hymnes.

CANTORBÉRY, l'ancien Durovemum, ou Cantuaria; petite ville de 15 à 18,000 hah., à 70 kil. de Londres, chef-lieu du comté de Kent, premier siège épiscopal de l'Angleterre, fondé 597 sous Ethelbert, archevêché dont le titulaire est le primat de l'Église anglicane et le premier pair du royaume. On remarque dans sa cathédrale le tombeau de Becket.

CANUS, Melchior, né à Tarançon, Tolède; entra à Salamanque chez les dominicains, étudia sous le célèbre réaliste Fr. Victoria, et lui succéda dans sa chaire. Il assista au conc. de Trente et s'y distingua par la maturité de son jugement et par son éloquence. Il était très bien vu de Philippe II, qui l'appela à l'évêché des lies Canaries, mais moins de Paul IV, parce qu'il soutenait que les rois peuvent faire la guerre même aux papes. Il était provincial de son ordre pour la Castille. f 1560. On a de lui des Loci theologici, manuel de dogmatique en 12 livres, où l'on constate une certaine indépendance d'esprit; il n'admet pas toutes les légendes, ne croit pas le pape infaillible, et voit dans l'ordre des jésuites un précurseur de l'Antéchrist. Scholastique sans être très dogmatique, il est. malgré quelques libertés, rigoureusement romain.

CANUT, ou plutôt Knud, nom de plusieurs rois danois, qui furent en même temps rois d'Angleterre par droit de conquête. Le plus connu et le plus digne de l'être est Canut qui fut surnommé le Grand. Baptisé dans sa jeunesse, il succéda en 1014 à son père S vend, ou Suénon, qui lui recommanda de continuer à répandre le christianisme. Il suivit ce conseil, protégea le culte, multiplia les établissements d'éducation en Angleterre, et comprit qu'une nation civilisée, même quand elle a été conquise les armes à la main, ne peut pas être gouvernée comme un pays barbare. Quand il retourna en Danemark, 1019, il se fit accompagner de missionnaires, construisit des églises, érigea des évêchés, et eut la satisfaction de voir le christianisme remplacer définitivement le paganisme dans ses états. L'ancien pirate, violent et sanguinaire, était devenu un homme nouveau, bien que sa foi fût encore voilée de bien des ténèbres. Il se fit aimer de ses peuples, auxquels il s'appliqua à donner une législation chrétienne; il défendit de vendre des chrétiens comme esclaves; il demanda que chacun sût au moins l'oraison dominicale et le credo, et il donna de touchantes preuves de son humilité. Il se fit même scrupule de porter la couronne royale et la plaça dans un couvent de Winchester sur une image de Christ. En 1027 il fit un voyage à Rome, visitant sur sa route les pèlerinages les plus célèbres et laissant à tous des marques de sa magnificence. Il fut très bien reçu par le pape Jean et l'emp. Conrad, ainsi que par le roi Rodolphe, et en obtint pour ses sujets des deux royaumes des exemptions de taxes, qui étaient réclamées depuis longtemps, et la promesse de meilleurs traitements pour l'avenir. Il revint en Danemark d'abord pour donner ses instructions à ses évêques et à ses juges, puis en Angleterre où il f 1035. Dans l'intérêt de la paix, et pour donner un bon exemple à ses sujets, il avait épousé la veuve du malheureux roi Ethel-red que son père avait déposé, et par cette satisfaction donnée à l'opinion publique il s'était si bien concilié les esprits qu'il put sans crainte, en 1028, quitter le pays pour aller vaincre les Suédois et conquérir la Norwège, — Ses fils Ha-rold et Hardi-Canut (Hardeknut, Canut le fort) obtinrent par héritage, le premier l'Angleterre, le second le Danemark, mais les Anglais ayant ajouté à la part de Canut le pays situé au S. de la Tamise, il en résulta des rivalités, qui se terminèrent par la f de Harold. Canut IL seul maître du pays, avare et cruel, accabla le peuple d'impôts et fit jeter le cadavre de son frère dans la Tamise, f 1041 d'une apoplexie foudroyante. La race des Canut s'éteignit avec lui, car le Harold, roi d'Angl., qui périt 1066 à la bataille d'Hastings, était fils du comte Godwin et ne devait qu'à des souvenirs son nom de Harold.

CAPISTRAN. ou plutôt Jean, de Capistrano, Abruzzes, né 1385. juriste jusqu'à sa 30»»® année, entra alors chez les franciscains et se distingua par son zèle, sa ferveur et son éloquence. Il prêcha avec succès en Italie, Allemagne, Moravie, Pologne et Hongrie, combattit le schisme des fraticelles, recommanda l'observation plus exacte des règles de l'ordre, fut nommé vicaire général des franciscains pour l'Italie; fut appelé à diverses missions par Mariin V et Eugène IV, fut envoyé par Nicolas V, 1450, auprès des hussites, dont il ramena un certain nombre à la foi en Moravie, mais moins en Bohême où son influence fut neutralisée par Rockyzane et Podiebrad; et excita en Silésie une violente persécution contre les juifs. N'ayant réussi ni à Francfort, ni à Neustadt 1454 et 1455, à organiser une croisade des princes allemands, il fit un appel direct aux populations qui le regardaient comme un saint, et à la tête d'une petite armée il se porta au secours de Jean Corvin Hunyade enfermé dans Belgrade, et concourut pour sa part à refouler Mahomet II et à le forcer de lever le siège, 1456. Il mourut la même année, et fut canonisé 1724 par Benoît XIII; Alexandre VHI l'avait déjà béatifié 1690.

CAPITON io v. Grosse-Tête. 2^ Un des réformateurs de l'Alsace, Son vrai nom était Kœpflein (petite tête), Wolfgang-Fabrice. NéàHaguenau en 1448, il étudia la médecine à Pforzheim, le droit et la théol. à Fribourg, oii il fut nommé professeur, après avoir soutenu avec éclat sa thèse de docteur sous la présidence de Jean Eck, 1506. Fatigué de la théol. scolastique, il accepta en 1512 la cure de Bruchsal où il passa 3 ans. En 1515 il vint à Bftle, appelé par l'évêque, et y remplit les fonctions de prédicateur à la cathédrale, de prof, de théologie, puis de recteur de l'université; il s'y lia avec Erasme et renoua connaissance avec GEcolampade qu'il avait connu à Heidelberg, et qui le mit en relation avec Zwingle. Ils commencèrent ensemble une œuvre de réformation, avant même que Luther eût paru. Il prit 1520 le grade de docteur en droit à Mayence, et passa 3 ans dans cette ville comme chapelain et chancelier de l'électeur-archev. Albert, qui penchait vers la Réforme. Enfin il fut appelé à Strasbourg comme prof, et prédicateur, et il accepta pour se sentir plus libre dans son ministère, et pour ne plus être tenu à des ménagements qui lui avaient valu l'année précédente une lettre sévère de Luther. Charles-Quint lui avait donné des lettres de noblesse à la diète de Nuremberg, et Leipsic lui offrait une chaire de professeur; il refusa, se fit recevoir bourgeois de Strasbourg, et travailla à y affermir l'œuvre de la réformation; il desservit les paroisses de Saint-Thomas et de Saint-Pierre-le-Jeune. Il évangélisa Haguenau, mais sans grand succès: assista en 1528 à la dispute de Berne, en 1530 à la diète d'Augsbourg où il présenta, avec Bucer. la Confession tétrapoli-taine; en 1536 à la conférence de Bâle, et en général à presque toutes les diètes ou conférences où il était question de pacifier les différends. A son retour de la diète de Ratisbonne il tomba malade, et f 2 nov. 1541 (selon d'autres le 10 janv. 1542). Il avait épousé le 1** août 1524 Agnès, fille du conseiller Hans Ulrich; déjà veuf en 1531, ses amis le marièrent en 1332 avec la veuve d'Œcolampade. Il ne laissait rien, et Bucer dut se charger de l'éducation de ses enfants, en même temps qu'il épousait sa veuve. Capiton était à la fois un grand savant et un grand cœur, il sut être ferme au besoin et conciliant toujours. Il a publié des Comment, sur Habacuc, Osée, et les Psaumes; une Vie d'Œcolampade, un traité sur l'enseignement religieux des enfants (De formando puero thèologo), un Livre sur les Institutions des Hébreux, et divers ouvrages de polémique dans un esprit de modération bien rare pour l'époque. Ses rela-tions avec Cellarius le firent accuser d'arianisme. mais sans que rien justifie cette assertion.

CAPITULAIRES. On désigne sous ce nom toutes les lois des rois francs; c'étaient des capitula, de petits chapitres, des articles. Ceux de la première race sont peu importants, et quand on en parle en général, c'est ordinairement de ceux de la seconde race qu'il est question. On en compte 152 en tout, soit 5 de Pépin -le-Bref, 65 de Charlemagne, 20 de Louis-le-Débonnaire, 52 de Charles-le-Chauve? etc. Ils nous sont parvenus sous deux formes différentes: les uns épars dans les mss. avec ou sans date, les autres coordonnés dans un recueil du 9®« siècle, divisé en 7 livres. Les 4 premiers livres sont l'ouvrage d'Anségise, abbé de Fon-tenelle, et ont une grande valeur historique; Charles-le-Chauve les cite comme un code officiel. Les trois autres, îéunis par Benoît k Lévite, vers 842, contiennent 1319 documents de toute nature, même de nature équivoque, tels que des fragments des fausses Décrétales. Enfin 4 suppléments postérieurs sont venus porter à 2,100 le nombre total des morceaux connus sous le nom de Capitulaires. Ces documents, qui traitent des sujets les plus variés, lois, décrets, arrêtés, jugements, circulaires, morale, notes, tarifs, dispositions de police, ont été publiés plusieurs fois, par Lindenbrog, Pithou, Herold, du Tillet, etc. La meilleure édition est celle de Baluze, 2 vol. f° Paris 1677. réimpr. dès lors à plusieurs reprises, notamment par Chiniac 1780, puis, avec de notables additions par Pertz, dans ses Monumenta Ger-maniœ, Hanovre 1835.

CAPPEL, famille de savants, pasteurs, professeurs et théol. français, qui pendant deux siècles ont servi et honoré la Réforme. Jacques Cappel, f 1541, était avocat du roi au parlement de Paris; il laissa 9 enfants, dont 3 embrassèrent le protestantisme: 1° Jacques U, sieur du Tilloy, né 1529, f 21 mai 1586, savant jurisconsulte, conseiller au parlement de Rennes, destitué par Charles IX. Il fut le père de Jacques in, pasteur à Sedan, Marie, Olivier et Louis, le célèbre hébraïsant.

2° Louis, surnommé de Moriambert, né à Paris 15 janv. 1534, 5me fils du premier Jacques, risqua plusieurs fois sa vie pour l'Évangile, fut pasteur à Meaux, puis pasteur et prof, de théologie à Sedan, où il f le 6 janv. 1586.

3° Ange Cappel, seigneur du Luat, né 1537, fut secretaire de Henri IV et ami de Sully, t 1623. — L'histoire de cette famille liée à tant d'événements est assez intéressante pour donner une valeur réelle à la notice de Louis (Rappel: De Capellorum gente. Les deux hommes les plus importants, au point de vue de l'hist. ecclésiastique, sont le troisième Jacques et le second Louis.

Jacques, né à Rennes en mars 1570, avait 16 ans quand son père mourut. 11 étudiait la théol. à Sedan. Sa mère, veuve avec 3 enfants en bas âge, se laissa persuader d'abjurer pour rentrer en possession de ses biens du Tilloy, mais ce fut pour elle une si dure épreuve qu'elle en tomba malade et mourut peu après. Les trois enfants mineurs furent mis au couvent par un de leurs oncles, ligueur déclaré, et n'en sortirent qu'au retour de Jacques en 1593. Olivier fut envoyé à Montpellier pour y étudier la médecine; il y mourut avant d'avoir achevé. Marie épousa en 1610 Sigibert Alpée, pasteur de Saint-Mars, dont elle eut un fils, Jacques, pasteur à Ay et à Saint-Mars. Quant à Jacques, il se fit consacrer à Sedan où, après un ministère volontaire de quelques années au Tilloy, il fut appelé en 1599 par le duc de Bouillon, comme pasteur et prof, d'hébreu, et où il f 7 sept. 1624. Il avait été délégué en 1607 au synode de La Rochelle. Exégète, philologue, historien et antiquaire, il a laissé un certain nombre d'ouvrages de critique, d'exégèse et d'histoire, un catéchisme apprécié, des thèses, des dissertations et des écrits de controverse.

Louis, son frère, le plus célèbre de tous, né 15 oct. 1585 à Saint-Elier, non loin de Sedan, pendant que ses parents forcés de fuir étaient sur le chemin de l'exil. Il avait 8 mois quand il perdit son père, 2 ou 3 ans quand sa mère mourut. Son frère Jacques pourvut à son éducation. A 20 ans il fut choisi par le duc de Bouillon comme précepteur de sa fille. A 24 ans, sur la recommandation de Caméron, l'égl. de Bordeaux lui fournit les moyens de visiter les universités d'Angleterre, de Hollande et d'Allemagne; il consacra 2 ans à Oxford où il étudia les langues orientales et surtout l'arabe. En 1614 il fut nommé prof, d'hébreu à Saumur, accepta pour 3 ans d'être en même temps pasteur de l'Église, mais dut renoncer à ces fonctions qu'il regardait comme inconciliables avec son enseignement. Nommé à la chaire de théol. en 1633 il l'occupa fidèlement jusqu'à sa f 18 juin 1658. Chrétien de cœur et savant consciencieux, Louis Cappel ne craignait pas de voir la foi compromise par les vérités historiques et critiques; il ne pensait pas qu'une chose vraie pût compromettre l'avenir de l'Évangile, et sans trop se préoccuper d'attaques passionnées, il posa les bases de la critique moderne en établissant dans divers ouvrages, que les points-voyelles des Bibles hébraïques ne remontent ni à Adam, ni à Moïse, ni à Esdras, mais très probablement aux massorètes du 6">e siècle de l'ère chrétienne; que l'écriture carrée hébraïque, aujourd'hui en usage, n'était pas connue des anciens Hébreux, qui se servaient des caractères samaritains; que le texte reçu n'est pas toujours le texte primitif, et qu'il a pu être altéré avec le temps par les copistes ou par d'autres circonstances. Ces assertions, toutes nouvelles, soulevèrent de vives et longues controverses, comme si Cappel avait voulu attaquer l'autorité des Écritures. Les théol. de la Suisse et de l'Allemagne se prononcèrent presque unanimement contre lui, tandis qu'il rencontra de nombreux adhérents en Angleterre, en Hollande et en France, surtout à Saumur où il pouvait donner de vive voix plus de développements à sa pensée et des explications sur les malentendus possibles. Aujourd'hui les résultats de sa critique sont généralement admis, et s'il est juste de lui en faire honneur, il faut dire aussi qu'il n'est pas responsable du bruit qui se fit autour de son nom. Il procéda lentement et avec prudence. Son premier ouvrage, Arcanum punc-tuationis, terminé en 1623 fut envoyé d'abord en mss. à Buxtorf père qui, en reconnaissant les difficultés de la question, l'engagea à n'y pas donner de suite pour le moment à cause des conclusions dangereuses que Ton en pourrait tirer. Erpenius, de Leyde, à qui il l'avait également communiqué, se montra moins scrupuleux, et le publia 1624 sans nom d'auteur en déclarant qu'il en assnmait toute la responsa-bilité.Ce ne fut que 20 ans plus tard, comme Cappel s'apprêtait à le réimprimer avec son nom, que Buxtorf, le fils, l'attaqua durement dans son Traité de l'origine des points-voyelles. Cappel y répondit dans ses Vindiciœ, réfutation qui ne parut d'ailleurs qu'après sa mort, dans ses œuvres posthumes publ. par son fils Jacques 1689. Un autre ouvrage de Louis Cappel, qui fit grand bruit, est sa Critica sacra, achevée en octobre 1634, et qui ne parut qu'en 1650. Il y traite surtout des variantes de l'A. T. et il compare le texte hébreu avec les Septante, la Vulgate, le Pentateuque samaritain et les para-phrastes chaldéens. Il fait preuve d'une grande indépendance, mais il exagère sans nécessité le nombre et l'importance des variantes, et Eichhorn a pu lui reprocher d'avoir été superficiel dans ses recherches, n'ayant consulté aucun mss. hébreu, et peu circonspect dans ses assertions. Il fut longtemps sans trouver d'éditeur pour un travail aussi hardi, et par une singulière coïncidence, ce fut son fils aîné, Jean, qui était retourné au catholicisme et qui s'était fait prêtre de l'Oratoire, qui obtint du roi, avec 3 autres moines, Petau, Morin et Mersenne, l'autorisation de le publier. L'occasion était trop belle pour qu'on la laissât échapper, et dans leurs attaques contre la Bible, des prêtres étaient heureux de s'assurer le concours apparent d'un protestant célèbre. Louis Cappel a publié aussi des thèses et dissertations sur des sujets dogmatiques; collègue de La Place et d'Amyraut, il fit avec eux la réputation de l'école de Saumur. Dans un recueil, Syntagma, espèce de revue théologique, il traite des dogmes de la grâce et de l'élection, et il le fait au point de vue augustinien et calviniste, mais en adoucissant un peu la doctrine de Dordrecht: on a encore de lui un travail sur le dimanche et un sur la sanctification des fêtes chrétiennes, un traité d'apologétique: le Pivot de la foi, et un certain nombre de Notes sur des passages difficiles. Louis a eu 6 enfants; son 3me fils, Jacques (4™e du nom), né le 13 août 1639, fut nommé prof. d?hébreu à 19 ans; il fut l'éditeur des œuvres posthumes de son père et de son oncle, et probablement l'auteur de la Notice sur les Cappel. Chassé par la Révocation il se retira en Angleterre où il devint prof, de latin et f 1722. La famille s'éteignit avec lui.

CAPPEL, petite bourgade d'environ 800 hab. sur la route de Zurich à Zug, au pied de TA1-bis. Elle possède un ancien couvent de l'ordre de Citeaux, fondé 1185, où il y avait à l'époque de la Béformation une école savante. Bul-linger y enseigna, et avec tant de succès que tous les frères embrassèrent la réforme. Église du 13®e siècle en forme de croix. Ce qui a surtout rendu cet endroit célèbre, c'est la bataille du 11 oct. 1531, dans laquelle l'élite des guerriers de Zurich, Zwingle à leur tête, tombèrent sons les coups de leurs adversaires catholiques des cinq cantons primitifs. La place où le réformateur blessé fut tué par un soldat d'Unter-wald qui ne le connaissait pas, est encore aujourd'hui marquée par une plaque de métal adaptée au rocher. Cappel est la patrie de Léonard Meister.

CAPUCINS. Le besoin de réformes qui se faisait sentir au commencement du 16m® siècle avait atteint même les ordres religieux; les frères mineurs en particulier avaient à plusieurs reprises modifié leurs règles, et il en était résulté un certain nombre de branches assez distinctes, parfois même hostiles, au point que LéonX crut devoir mettre un frein à cette lièvre d'améliorations. Mais les succès obtenus par Giustiniani dans l'ordre des camaldules encouragèrent Matthieu de Bassi, moine de Mon-tefiascone, à tenter quelque chose d'analogue chez les franciscains; il laissa pousser sa barbe en pointe, se fit faire un énorme capuchon et se présenta dans cet équipage à Clément VII, qui lui accorda 1526 le droit de porter ce costume, de vivre en ermite, et de prêcher où il voudrait, pourvu que chaque année il se présentât une fois au chapitre provincial de l'Observance. Quelques hommes se joignirent bientôt à lui, entre autres Louis de Fossombrone et son frère Raphaël. Ils s'engagèrent à l'observation rigoureuse des règles de saint François, notamment à la pauvreté la plus absolue. Mais leur vie d'ermite cessa naturellement à mesure qu'ils se multiplièrent, et ils durent donner des statuts particuliers à leur congrégation. Une bulle de Clément VU du 18 juillet 1528, leur reconnut une existence indépendante, sous la direction d'un vicaite général, et ils commencèrent leurs missions. Les enfants se moquaient de leurs longs capuchons et désignèrent les nouveaux lazzaristes sous le nom de capucins. que ceux-ci eurent le bon esprit d'accepter sans se fâcher. En tout cas ils ne pouvaient plus s'appeler ermites, puisqu'ils avaient accepté la vie commune, et qu'en 1529 ils avaient déjà 4 couvents, sous le patronage de la duchesse de Camerino, nièce du pape. Ils durent en 1536 et 1575 modifier de nouveau leurs statuts, mais en maintenant toujours la simplicité pauvre et sobré de l'ordre. Matthieu de Bassi fut leur premier vicaire général, mais il abdiqua au bout de deux mois. Louis de Fossombrone fut le second, mais il fut remplacé en 1535 par Bernard d'Asti, ce qui amena une crise, à la suite de laquelle les deux fondateurs de l'ordre cessèrent d'en faire partie, ne pouvant ni commander, ni obéir. Bernard Occhin, nommé malgré lui vicaire-général en 1538, et réélu en 1541, était un de leurs hommes les plus pieux et les plus humbles, un de leurs prédicateurs les plus puissants et les plus populaires; il jeta un grand lustre sur l'ordre tout entier; mais quand il eut embrassé la réforme, le pape irrité ne parla de rien moins que de supprimer l'ordre, et provisoirement il lui interdit toute prédication et toute action religieuse. Cependant à force de soumission et d'humbles prières ils obtinrent que le droit de prêcher leur fût rendu, 1545, et la papauté n'eut pas à s'en repentir, car si les jésuites, à Tun des bouts de l'échelle, ont rendu de grands services à la cause, à l'autre bout les capucins ne l'ont pas moins bien servie par l'originalité de leur éloquence populaire, tantôt fine, tantôt grotesque ou rustique, presque toujours appropriée à l'auditoire, ce qui est à la fois un éloge et une critique. Longtemps confinés en Italie, les capucins furent appelés en France par Charles IX, 1573, et ils s'y multiplièrent rapidement; en 1592 ils vinrent en Allemagne et en Suisse, en 1606 en Espagne et en Portugal, dou ils envoyèrent des missionnaires en diverses parties du monde. Supprimés vers la fin du 18™« siècle, ils ont recommencé à fleurir dans la plupart des pays catholiques. —Il y avait déjà eu en 1426 un ordre de la capuche, de la Capusiola, en Italie, mais l'essai échoua au bout de 8 ans, 1434.

Les Capucines ou Filles de la Passion, du tiers-ordre de saint François, s'étaient consti-tuéesà Naples en 1534, au nombre d'une vingtaine, sous la direction de Marie - Laurence Longa, devenue veuve; elles desservirent l'hospice des incurables à Naples et fondèrent un couvent à Jérusalem. Après les théatins, les capucins devinrent leurs directeurs spirituels. En 1575 elles s'établirent à Rome; sous Borromée, à Milan. Elles ont eu jusqu'à 12 couvents en Suisse, jamais plus de 8 dans tous les autres pays réunis.

CAPUTIENS, Capuciati, parti de religieux qui, en 1182, dans les montagnes de l'Auvergne, résistèrent à l'autorité sous prétexte de rendre aux hommes leur liberté primitive. Ils obéissaient à un charpentier nommé Durand, qui se vantait d'avoir des révélations de la sainte Vierge. L'év. Hugo, d'Auxerre, marcha en armes contre eux, les fit tous prisonniers, et les relâcha après leur avoir fait couper leurs capuchons; ils devaient ainsi rester tête nue toute une année, mais l'archev. de Sens obtint leur grâce. Le parti ne se releva pas.

CAQUEUX, ou Cagots, nommés encore Gaf-fos, Gezitas. Gahetas, mystérieux parias que l'on trouvait au moyen âge dans les environs des Pyrénées, et qui, bien que bons catholiques et d'une belle race, n'en étaient pas moins pour tous un objet de mépris et de dégoût; ils ne pouvaient entrer dans les églises par la grande porte et étaient soumis à toutes sortes d'humiliations et de vexations. Ils étaient signalés à l'attention publique par une patte de canard qu'ils devaient porter sur leurs vêtements, et qui leur avait aussi fait donner le surnom de canards. On en a fait tour à tour, mais à tort, des crétins et des lépreux. Le plus probable est qu'ils descendaient des Goths, anciens maîtres de l'Aquitaine, et qu'on leur aurait donné par haine le nom injurieux de Chiens goths (Caas goths) pour rappeler leur origine. Le surnom de Collibert (liberti, esclaves affranchis) rappellerait également une époque où ils auraient été asservis. Il s'en trouve encore quelques restes dans l'ouôst et le sud de la France, toujours méprisés, mais, avec les progrès de la civilisation et le développement de l'intelligence, ils tendent peu à peu à reprendre dans la société la place à laquelle ils ont droit.

CARACCIOLI, illustre famille napolitaine, qui a fourni deux hommes à la Réforme: 1° Jean-Antoine, 3m« fils de Jean, prince de Mel-phe, maréchal de France. Né à Melphe au commencement du 16m« siècle, il eut une jeunesse agitée. Présenté à la cour de François I«r, mais trop pauvre pour y faire figure, il se retira au désert de La Baume pour y faire pénitence; il prit l'habit de chartreux, puis il entra 1538 chez les chanoines réguliers de Saint-Victor, dont il devint abbé en 1543, et abbé plus que léger. Ses complaisances pour Diane de Poitiers lui valurent l'évêché de Troyes 1551. Il se montra ouvertement favorable à la Réforme et obtint de grands succès comme prédicateur, mais en 1552 il fut forcé de se rétracter publiquement. En 1557 il se rendit à Rome auprès de Sixte IV, son parent (Camusat dit qu'il sollicitait le chapeau de cardinal). A son retour, par Genève, il vit Bèze et Calvin. Au colloque de Poissy il est encore prélat romain, mais il est ébranlé; en 1561 il abjure de nouveau, signe la confession de foi des églises réformées, et demande au Consistoire d'être confirmé dans ses fonctions épiscopales par les suffrages des fidèles, ce qui eut lieu, raconte Pithou. Dès lors il prêcha régulièrement dans la chapelle épis-copale, à la fois évêque et pasteur, mais les autres évêques le firent destituer, et il se retira à Châteauneuf-sur-Loire où il f 1569; il fut enterré dans l'église paroissiale. C'était un homme instruit, éloquent, mais gâté par les moeurs de l'époque. Il a laissé quelques écrits de circonstance, de jolies poésies et un Mi-rouer de la vraie religion, Paris 1544, in-16.

Galeazzo, comte, marquis de Vico, né à Xaples 1517, fils de Nicolas-Antoine et d'une sœur du cardinal Caraffa qui devint Paul IV. A l'âge de 20 ans il épousa Victoria, fille du duc de Nocera, dont il eut 4 fils et 2 filles. Il fut présenté à Charles-Quint par son père qui jouissait d'un grand crédit à la cour. Son ami Ca-serta le mit en relation avec un noble espagnol, Juan Valdez, converti à l'Évangile, et avec Ver-migli, de Florence, qui faisait des lectures publiques sur lesÉp. aux Corinthiens. Il alla les entendre, plutôt par curiosité que par un besoin de conscience, mais bientôt il comprit tout ce qu'il y avait de vérité dans ce nouvel enseignement, et il se mit à étudier avec soin l'Écriture. En vain son père et sa femme, voyant leur avenir compromis, le supplièrent de rompre avec la nouvelle secte; en vain ils en appelèrent à ses enfants, dont l'aîné avait 15 ans. Ses voyages en Allemagne, son séjour à Strasbourg où il retrouva Vermigli, surtout un séjour à Rome où il vit l'Égl. de près, triomphèrent de ses longues hésitations, et le 21 mars 1551, à 34 ans, il quitta Naples pour Genève, où il arriva le 8 juin. Toutes les démarches tentées pour le faire revenir en arrière furent inutiles; il revit son père à Vérone et à Mantoue; son oncle, devenu pape en 1555, l'engagea à se fixer à Venise en lui promettant toute la liberté religieuse; en 1558 il revit à Vico sa femme et ses enfants, dont les larmes le rendirent triste à en mourir, mais il ne se laissa pas ébranler. Sa femme, de son côté, ayant refusé de vivre avec lui et ayant rompu le mariage de fait, par ordre de son confesseur, le divorce fut déclaré par les magistrats, après qu'ils eurent pris l'avis de Calvin et des théologiens, et Caraccioli se remaria, janvier 1560, avec une veuve de Rouen, AnnaFra-mière, avec laquelle il passa en paix ses dernières années dans une demi-aisance, plus proche de la pauvreté. Il fréquentait assidûment le culte public, remplissait en conscience ses devoirs d'ancien, était la providence de ses compatriotes émigrés, et fut un modèle pour l'Église. Un moine théatin vint le troubler encore une fois pour le supplier de rentrer dans le giron de Rome, afin de ne pas compromettre la position d'un de ses fils, qui aspirait au cardinalat; il jeta la lettre au feu. Vers la fin il souffrait beaucoup d'oppression, passant des nuits sans sommeil. f 7 mai 4386- En dédiant son Comment. sur les Corinthiens, Calvin a montré l'estime qu'il avait pour lui.

CARAITES, Carèens ou Caraïmites, secte juive qui date probablement du 7me siècle, qu'on fait remonter à un certain Anan, fils de David, qui vivait vers l'an 640; son caractère principal consiste dans son opposition constante et énergique aux traditions talmudiques, à celles que l'Écriture appelle les traditions des anciens, Matt. 15, 2. Ils regardent comme des fables les légendes relatives à l'origine sinaïtique de la tradition orale; ils s'en tiennent au texte de la Bible, mettent la Loi au-dessus des prophètes, et peuvent être considérés comme les successeurs des sadducéens. Leur théologie est très pauvre: Dieu est le créateur de toutes choses dans l'univers; il a envoyé Moïse et a donné par lui une loi parfaite au monde; il ressuscitera les morts au dernier jour et rendra à chacun selon ses œuvres; il n'a pas entièrement rejeté son peuple, mais il le rétablira quand le Messie, fils de David, apparaîtra. Ils sont honnêtes, sobres, laborieux, consciencieux en affaires, très considérés, et jouissent de grands privilèges en Russie et en Turquie. Leur nombre est peu considérable; 560 dans le gouvernement de Wilna, 150 en Gallicie, 200 à Odessa, 4,000 en Crimée; il y en a aussi à Constantinople, à Jérusalem, en Egypte et en Perse. Ils sont restés presque inconnus en Europe jusque vers la fin du 17m« siècle, où Peringer d'Upsal et Triegland de Leyde sont entrés en rapports avec eux et ont publié des notices sur leur histoire et leurs doctrines.

CARDINAUX, du latin cardo, gond, pivot, nom donné déjà chez les Romains, et notamment depuis Théodose, à des fonctionnaires supérieurs, généraux, préfets, qui occupaient dans l'empire des charges considérables. Il passa peu à peu dans l'Église, et servit d'abord à désigner des prêtres à poste fixe, ayant paroisse, par opposition à ceux qui n'avaient qu'une mission temporaire. Quand il y avait plusieurs prêtres dans une ville, leur réunion formait un collège, presbytère ou consistoire. Avec le temps, et vu l'importance croissante de l'Égl. de Rome, ses prêtres finirent par attirer à eux seuls cette dignité; ils étaient 25 à la fin du 4m« siècle, sous Marcel. Sous Clément 1er la ville fut divisée en 7 régions ecclésiastiques, chacune avec un diacre régionnaire qui faisait partie du Collège de Latran, mais ces cardinaux étaient alors inférieurs aux évêques; ils ne leur devinrent supérieurs que lorsque les circonstances eurent mis entre leurs mains l'élection du pape, 1181, à l'exclusion des évêques et du peuple. Leur nombre varia beaucoup; il était de 30 au 12°" siècle; au i3|,r»e il tomba à 7; en 1516 il y en avait 13; sous Pie IV, 1559, il s'éleva tout à coup à 70. Le conc. de Bâle le fixa à 24; Sixte V, 13 déc. 1586, le fixa au chiffre normal de 70, en souvenir des 70 anciens de Moïse et des 70 disciples, et décida qu'il comprendrait 6 évêques, 50 prêtres et 14 diacres; mais ce chiffre n'a presque jamais été au complet; en 1853 seulement l'effectif a été atteint par la création soudaine de 8 cardinaux. C'est vers le 13"* siècle aussi que le titre changea de signification et s'étendit par l'élection papale à d'autres qu'aux desservants de la ville éternelle. Le conc. de Trente a déterminé les attributions des cardinaux et les conditions de leur éligibilité, naissance immaculée, activité de service d'un an au moins, etc. Les souverains catholiques ont un certain droit de présentation; les cardinaux peuvent être choisis dans toutes les nationalités, mais par la nature des choses les Italiens seront toujours les plus nombreux (en 1850, sur 67 card. il y avait 51 italiens et 16 étrangers). Le pape les désigne d'abord en consistoire secret; puis il les reçoit en séance publique, et leur remet le chapeau. A la séance suivante il leur ferme la bouche pour constater qu'ils n'ont pas encore le droit d'émettre leur avis, et ce n'est qu'à la fin de la séance qu'il la leur ouvre [Aperimus vobis a*), en leur conférant tous les droits attachés à leur nouvelle dignité. D'après Eugène IV, 26 oct. 1431, ils ne sont rien avant cette dernière formalité; d'après Pie V, 26 janv. 1571, ils ont au contraire tous les droits dès le moment où ils sont nommés. Hiérarchiquement ils ont rang immédiatement après le pape. Us sont seuls papables (éligibles à la papauté), et sente aussi depuis Nicolas II, 1059, ils ont le droit d'élire. Le chapeau rouge et la barette leur ont été donnés par Innocent IV en 1245; le vêtement pourpre par Paul II, 1464; et le titre d'Éminentissime par Urbain VIII, 1630. Ce dernier nom qui ne se donnait qu'aux princes allemands et au grand-maître des templiers, lésa ainsi assimilés aux princes régnants. Quant à leurs droits, juridiction, privilèges, attributions, ils sont nombreux; on en énumère plus de 300. Les cardinaux-évêques ont le pas sur les autres; le plus ancien, parmi ceux qui résident à Rome, est le doyen du sacré collège, qui sert de Conseil au pape, et qui se réunit de droit en conclave, quand il s'agit de procéder à l'élection d'un nouveau pape. A cause du caractère mixte des ci-devant États de l'Égl., toutes les charges étaient entre les mains des dignitaires ecclésiastiques, notamment des cardinaux; cependant Pie IX en 1846 s'est écarté de la règle en nommant des civils pour gouverneur de Rome, ministre de la guerre, majordome, etc. Les autres fonctions sont exclusivement entre les mains des cardinaux: le Camerlingue a les finances et la justice; en cas de vacance, c'est lui qui gouverne; un secrétaire d'État a l'intérieur et la justice dans les provinces; il y a encore le vice-ehancelier, le secrétaire des brefs, le pénitentiaire, etc. D'autres président des commissions, ou congrégations, tantôt temporaires, tantôt permanentes, celles des rites, du concile, de l'inquisition, de l'index, des examens, etc. Il en est une qui est spécialement chargée d'interpréter le conc. de Trente; ses Actes comptent déjà 103 vol. 4<>. La congrég. de la Propagande, fondée par Grégoire XV, 1622, et développée par Urbain VIII, 1627, a un cardinal pour président, 24 cardinaux, 30 consulteurs, etc.; d'autres enfin s'occupent de canalisation, d'aqueducs, de l'entretien de Saint-Pierre, etc. On voit que tout se tient dans le système, et que les cardinaux sont réellement la base et la cheville ouvrière de toute l'organisation.

CARÊME, jeûne qui précède la Pâque; le mot vient du latin carere, manquer de, être privé. Il est censé rappeler les 40 jours que Jésus passa au désert, et il s'est introduit peu à peu dans l'Égl. catholique. Comme les dimanches ne comptent pas, il commence avec le mercredi des Cendres, et embrasse l'espace de 6 semaines, plus les 4 premiers jours. Les 6 dimanches du carême s'appellent Quadragésimes, et se distinguent, soit par leur rang d'ordre: premier, second, etc., soit par les premiers mots du texte du jour: Invocavit, Reminiscere, Oculi, Lœtare, Judica (Passion), Palmaram (Rameaux).

CARÉNA, abrégé de quadragena (Du Cange). jeûne ou pénitence de 40 jours, qu'un év. peut imposer à ses clercs, un abbé à ses moines. Le même mot désigne aussi la dispense de cette même peine.

CAREY, William, missionnaire baptiste, né 1761 à Paulersbury, Northampton. Réveillé de bonne heure et devenu membre d'une Église qu'il édifiait quelquefois par sa parole, il continua son état de cordonnier pour subvenir à son entretien et apprit ainsi un peu les langues de la Bible. Dans une assemblée qui eut lieu à Nottingham en faveur des missions, il sentit naître en lui le désir de se consacrer à cette œuvre, et en nov. 1792, après un discours de lui, la Soc. des missions baptistes fut fondée. Il en fut le premier missionnaire et partit pour le Bengale, 1793. Tout était à créer. Il débuta comme inspecteur d'une plantation d'indigo parmi les Indous, puis en acheta une pour son propre compte, 1799, mais la revendit bientôt. Il s'établit à Serampore, qui appartenait aux Danois, et fut ensuite nommé professeur au collège de Fort William, Calcutta. Il s'était proposé une activité plus directe pour la conversion des Indous, mais en lui assignant ce poste en apparence purement scientifique, Dieu lui assurait une influence beaucoup plus étendue qu'il ne l'avait espéré. Carey était en quelque sorte possesseur de toute la science des Indes, où l'on ne compte pas moins de 50 dialectes différents. Les savants accouraient de toutes parts auprès

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de lui, et il les utilisait pour la mission. Il traduisit lui-même la Bible en bengalais, puis en sanscrit, et publia des grammaires et des dictionnaires pour plusieurs langues de l'Inde. Ward et Marshmann comptaient au nombre de ses collaborateurs. Comme il avait acquis à Se-rampore des propriétés pour le compte de l'œuvre missionnaire, et que Serampore était danois (il ne fut cédé aux Anglais qu'en 1845), il se sépara de la Société de Londres. A sa f 1834 il légua à l'œuvre de Serampore toute sa fortune, qui était considérable.

CARINTHIE, ancienne province des États autrichiens, à peu près l'Illyrie actuelle; évan-gélisée par Rupert et Amand, puis par Modeste après que Charlemagne l'eut conquise. Évêché à Laibach depuis 1461, La réforme y fut prê-chée par Truber, et les deux cultes s'y célébraient en 1572. Mais le protestantisme fut écrasé par la persécution, et ne s'est relevé qu'à l'aide de la Soc. de Gustave-Adolphe. Il compte aujourd'hui 17 églises.

CARLSTADT, ou Carlostadt 1<> André Bo-denstein, ainsi nommé de sa ville natale, ami de Luther, prof, et recteur à l'univ. de Wittenberg, un des premiers qui se marièrent publiquement; finit par se séparer de Luther sur la question de la Cène, et fût un des chefs des sa-cramentaires. V. Zwickau. f Bâle 1541.

2° Jean Drack, ou Draconites, né 1494, ami de Luther depuis Erfurt 1521. occupa divers postes comme pasteur et comme prof, de théol., Marbourg, Lubeck,etc., mais dut se retirer devant l'opposition des luthériens stricts, et f 1566 à Wittenberg. Auteur d'une Biblia penta-pla, inachevée, et de quelques Comment, sur la Genèse, Abdias, les Ps. et Daniel.

CARMES, au féminin Carmélites. Cet ordre célèbre, qui sert de transition entre le mona-chisme de l'orient et celui de l'occident, tire son nom du Mont-Carmel où il a pris naissance. Longtemps il a cru pouvoir faire remonter ses origines au prophète Élie, dont les esséens auraient été les successeurs immédiats, puis les ermites et enfin les carmes. Il y eut en effet, vers l'an 400, quelques ermites dans les grottes du Carmel, comme il y en avait en une foule de lieux, et les souvenirs bibliques devaient parler à leur imagination; le patr. Jean, de Jérusalem, les couvrit même de son patronage et a pu leur donner des directions ou des règles. Mais le jésuite Papebroch 1668 a soufflé sur ces prétentions et solidement prouvé que l'ordre ne date que du 12m« siècle. II s'appuie de l'autorité de Jean Phocas qui, dans un voyage fait en Palestine 1165, raconte qu'il a vu sur le Carmel la grotte d'Élie, et qu'un moine calabrais s'y était établi quelques années auparavant avec une dizaine de religieux. Ce moine, Berthold, de l'armée de Godefroi de Bouillon, avait réussi à défendre Antioche contre les Sarrasins de beaucoup supérieurs en nombre, et conformément au vœu qu'il avait fait, s'il obtenait la victoire, de se consacrer entièrement à Dieu, il s'était retiré sur la montagne, où il mourut après avoir dirigé comme supérieur ceux qui se joignirent à lui. Brocard, qui lui succéda, voyant augmenter le nombre de ses moines, demanda à Albert, patr. de Jérusalem, de leur donner une règle, ce qu'il fit 1205, ou 1209, les organisant en cellules distinctes, ou laures, plutôt qu'en monas tère. L'abstention totale de viande, les travaux manuels et la méditation étaient les principaux traits de cette règle, qui rappelait celle de saint Basile et qui fut confirmée 1254 par Honoré 111. Pressé par les conquêtes des Sarrasins, et mécontents du traité conclu par Frédéric II, 1229, la plupart des carmes, sous la direction d'Alain, leur 5me général, quittèrent la Terre-Sainte 1238, et s'établirent en Chypre, en Sicile, à Marseille, à Bruxelles et jusqu'en Angleterre; ils se propagèrent rapidement, et dans beaucoup de villes on trouve encore une rue des Cannes, ou une église des Carmes. Saint Louis, qui le* protégeait, leur donna un couvent à Paris. Un certain nombre cependant restèrent au Carmel. qui ne fut jamais entièrement abandonné. Le monastère occupe aujourd'hui, non loin du sommet, une plateforme qui domine la mer de 2 à 300 mètres; au centre est l'église, consacrée au prophète; au-dessous du maître-autel est une grotte où l'on dit qu'Élie se cacha pour échapper aux poursuites de Jésabel; près de là une petite chapelle consacrée à la Vierge. Les moines exercent largement l'hospitalité, comme presque tous les couvents de l'orient. En 1247 Innocent IV modifia sur quelques points la règle pour les carmes établis en Europe; il leur imposa le vœu de chasteté, qui avait bien été sous-entendu, mais non précisé, et il changea leurs laures en monastères. Leur costume se composait d'une tunique brune et d'un surtout à deux teintes plus ou moins claires, disposées en bandes parallèles; d'autres avaient un vêtement blanc avec des barres d'une autre couleur, d'où leur est venu le surnom de barrés. Vers le milieu du 13m« siècle, sous le généralat de Simon Stock, ils gagnèrent un grand nombre d'adhérents par l'invention du scapulaire. Au 14®« siècle la faveur publique s'attacha à eux. les dons affluèrent et ils devinrent très riches; la reine Blanche, veuve de Philippe VI, leur légua un magnifique reliquaire en or, enrichi de pierres précieuses, et leur prestige s'accrut d'autant. Mais la décadence morale ne tarda pas à se faire sentir; le schisme de l'Église, 1378-1428, les divisa eux-mêmes; il y eut deux partis, ils élurent deux généraux, et l'unité ne se rétablît qu'au chapitre de 1430. Eugène IV adoucit la règle, autorisa l'usage de la viande 3 fois par semaine, la conversation à certains moments et la promenade dans les cloîtres au lieu du séjour continuel dans les cellules. Pie II permit même aux généraux de dispenser du jeûne. Ceux qui acceptèrent ces adoucissements portent le nom de carmes conventuels, mitigés, ou BiUettes (du nom de leur couvent); mais d'autres s'y refusèrent et s'appellent C. de la stricte observance. Parmi ces derniers on remarque surtout ceux de la Congrégation de Man-loue, fondés sous l'influence d'un Français, Thomas Connecte, de Rennes, homme d'une grande piété, fort éloquent, très populaire, qui rêvait de réformer, non seulement son ordre, mais l'Église elle-même, et qui fut brûlé à Rome comme hérétique 1443 sous Eugène IV. Sixte IV institua l'ordre des Tertiaires, 1476. Une nouvelle tentative de réforme fut faite par Soreth, q. v. et n'aboutit pas davantage. C'est à lui qu'on doit l'ordre féminin des carmélites 1452, qu'illustra et réforma sainte Thérèse, secondée par Jean de la Croix. Elle institua les déchaus-sées, qui furent suivies bientôt aussi des C. de-thaussés, allant pieds-nus. Ces derniers finirent 1383 par avoir leur général à part, et même deux généraux, pour leurs deux provinces d'Espagne et d'Italie, ce qui porta à 4 le nombre des généraux de l'ordre. Mais peu à peu la chair remporta sur l'esprit; l'intempérance et la luxure remplacèrent les règles, et le nom de carme devint proverbial pourdésigner un homme adonné à ces passions. Ils furent plusieurs fois censurés et condamnés par le parlement de Paris. Supprimés en 1780, ils se sont un peu relevés dès lors, mais leurs deux maisons, de Montélimar et de Montpellier, qui comptaient en tout une quinzaine de religieux, ont de nouveau été fermées.

CARNAVAL, trois jours de divertissements et de folies, qui précèdent le mercredi des Cendres, et par lesquels les fidèles se préparent à supporter mieux les privations et les austérités du carême. L'Égl. catholique n'a jamais sanctionné, mais elle n'a pas non plus interdit ces réjouissances souvent grotesques. On a voulu faire dériver ce mot du latin: Caro, vale (Adieu, viande), mais c'est étymologiquement peu probable. D'autres le font venir de Car novale (chariot naval) et le rattachent à un vieux sanctuaire germanique, espèce de char nautique, que les populations du Ras-Rhin promenaient en procession dans quelques-unes de leurs solennités religieuses.

CAROLINS (livres). Adrien 1er ayant envoyé, 787, en traduction latine, les décrets du 2®e concile de Nicée à l'emp. <îharlemagne, celui-ci les lit examiner par une commission de ses théologiens; leur préavis, qui fat défavorable, fut adopté au conc. de Francfort par les Anglo-Saxons et par les Francs. Ce préavis, avec les capitulaires du conc. de Francfort, dus en grande partie à Charlemagne, forme ce qu'on appelle les Livres Carolins. Ils furent publiés pour la première fois par Jean Tileus, qui fut plus tard év. de Mende. Leur authenticité est prouvée par le fait que Hincmar de Reims les mentionne et les cite. Us condamnent et réfutent plusieurs résolutions du conc. de Nicée comme étant en contradiction avec la Bible et la tradition, et comme empreintes de servilité vis-à-vis de l'empereur; ils repoussent en particulier le décret relatif aux images. Ils donnent l'idée de ce qu'était alors l'état religieux de la France, mais quelques-unes de leurs critiques tombent à faux, parce que la traduction qu'il* avaient des Actes du conc. de Nicée était elle-même défectueuse. Leur influence ne fut pas de longue durée, et le culte des images fut rétabli à la suite d'une lettre d'Adrien, réfutant les erreurs commises au conc. de Francfort. CARPENTARIUS, v. Wagner. CARPOCRATE, et son fils Épiphanes, hérétiques gnostiques, vivaient à Alexandrie au 2»* siècle. Selon eux l'homme Jésus, dont ils niaient la divinité, avait enseigné aux gnostiques à se délivrer du démiurge pour s'unir à la divinité souveraine, à la Monade. Leurs temples renfermaient les portraits de Platon, d'Aristote, de Jésus, etc. La foi seule et l'amour avaient quelque efficace; ils étaient antinomiens. Épiphanes mort à 17 ans, ils lui érigèrent un temple à Céphalonie.

CARPZOV, famille allemande qui a fourni à la théologie et au droit un grand nombre d'hommes distingués.

lo Le chef de cette famille est Benoît (ou Bè-nédict) Carpzov, né en Brandebourg 1565, f prof, de droit à Wittenberg 1624; il laissa 5 fils, qui tous se firent un nom; entre autres 2° Benoit, prof, de droit à Leipzig, f 1666, luthérien pieux mais rigide, partisan du système épiscopal, criminaliste impitoyable, qu'on rend responsable de 20,000 condamnations à mort; lecteur assidu de la Bible, non moins assidu au culte public. 11 eut pour fils

3° Jean-Benoit Carpzov 1er, pasteur et prof, à Leipzig, + 1657, auteur d'une Introduction aux livres symboliques des Égi. luthériennes. Son fils est:

4° Jean-Benoît Carpzov II, pasteur et prof, d'hébreu, puis de dogmatique à Leipzig, f 1699, s'occupa surtout d'homilétique. Il combattit Spener et ses « réunions de piété. » Ses publications sont sans importance; il eut pour fils 5° Jean-Benoît III, prof, d'hist. à Leipzig. 6o Samuel-Benoît, frère de Jean-Benoit II, f 1707; fut d'abord prof, de poésie à Witten-berg, puis 1674 prédicateur de la cour à Dresde; très sympathique à Spener, il finit cependant, sous l'influence de son frère, par se tourner contre lui.

7o Son fds Jean-Gottlob, né 1679 à Dresde, f 1767, pasteur et prof, à Leipzig, puis 1730 surintendant à Lttbeck; le plus considérable des théologiens de la famille. Il hérita de son père et de son oncle leur répugnance contre les novateurs de toute nature, et publia même en 1742 un travail contre les Frères moraves. Ses principaux ouvrages sont une Introduction aux livres de l'A. T. 1721, sa Critique sacrée 1728, et son Étude sur les Antiq. de l'A. T. 1748. On y remarque une science de bon aloi, une grande clarté d'exposition et beaucoup de méthode. Il combattit Richard Simon, Leclerc et Spinosa. Son point de vue est celui de Buxtorf et de Hottinger; il admet l'inspiration littérale du texte sacré, son intégrité absolue, l'absence de toute erreur, et l'antique autorité des points-voyelles. Son orthodoxie extrême lui valut une double vocation à Dantzig et à Lttbeck; il accepta cette dernière et fut heureux de voir le culte des réformés confiné hors des portes de la ville, les moraves bannis et les conventicules frappés d'amendes.

8° Jean-Benoît IV, fils de Jean-Benoit III, prof, de poésie et de grec à Helmstâdt, puis abbé de Kônigshutter; f 1803. C'est le dernier des grands théologiens de la famille. Élève de Gessner et d'Ernesti, à Leipzig, il fut appelé comme prof, à Helmstâdt, où les travaux de Teller, entachés de libéralisme critique, ayant compromis la réputation d'orthodoxie de l'université, le prince chargea Carpzov de la relever en publiant un manuel populaire d'instruction religieuse, ce qu'il fit 1768 dans son Liber doctrinale theologiœpurioris. Il s'occupa d'ailleurs plus volontiers dejphilologie, profane et sacrée, écrivit sur les Hébreux, les Romains et les ép. catholiques, et donna sa fille en mariage à l'historien Henke, lejsuccesseur de Teller dans sa tendance libérale.

CARRANZA, Barthélémy, souvent appelé de Miranda, du lieu de sa naissance; né 1503; étudia à Alcala, entra 1520 dans l'ordre des dominicains, s'illustra par ses talents et son érudition, fut délégué à Rome en 1539 pour prendre part à un chapitre de son ordre, fut consulté à plusieurs reprises par l'Inquisition dans des cas difficiles, jouit de l'entière confiance de Charles-Quint, fut le confesseur de Philippe qu'il accompagna en Flandre, et refusa trois évêchés. Au conc. de Trente, où il se rendit par deux fois, il soutint avec énergie le droit divin des «■vêques contre les légats qui soulevèrent à cette occasion de violents débats; les Espagnols n'en tinrent pas moins bon jusqu'à la fin. Il accompagna en Angleterre l'infant Philippe lorsqu'il épousa, juillet 1554, Marie-la-Sanglante et profita de son séjour pour activer un peu les persécutions contre les protestants. Marie le nomma son confesseur. A son retour en Espagne il accepta l'archevêché de Tolède 1557; fut la fin de ses triomphes. Charles-Quint étant mort, et, à ce que l'on dit, dans les sentiments de la Réforme, Carranza fut accusé par ses ennemis de n'avoir pas été étranger à cette apostasie de l'ex-empereur. Il fut arrêté par l'Inquisition 1559 et mis en prison; en dépit de sou appel au pape il y passa 8 ans; transféré à Rome en 1567, il y passa de nouveau 9 ans eu prison, et quand enfin on lui fit son procès, en 1576, on constata qu'on ne pouvait le convaincre d'hérésie, mais il resta assez suspect pour qu'on lui infligeât une rétractation publique et une nouvelle suspension de 5 ans de ses fonctions archiépiscopales; il fut placé dans le couvent délia Minerva, où il f 22 mai 1576, âgé de 73 ans. Dans sa prison il écrivit un traité sur la Résidence obligée des évêques. On a encore de lui divers écrits: sur l'Autorité des papes et des conciles, Abrégé des conciles et des papes depuis Pierre jusqu Jules III, Instruction sur la Messe, Catéchisme, etc. Inconséquent, il a prêché la justification par la foi, Jésus seul Sauveur, et il a été le persécuteur acharné des protestants.. v. Droin.

CAS 1° de conscience, v. Casuistique. 2° Cas réservés. On appelle de ce nom certains péchés, ou transgressions, pour lesquels un confesseur ordinaire n'est pas en mesure de donner l'absolution. Soit par leur gravité, soit simplement par leur nature, ils relèvent d'une autorité supérieure, des évêques, des généraux d'ordre, ou même du pape. Le conc. de Trente mentionne spécialement les crimes graves et atroces. Ce n'est que peu à peu, au fur et à mesure des besoins et des expériences, que la législation s'est formée et complétée sur ce point. Les cas réservés au pape sont surtout énumérés dans la bulle In ceenâ Domini; ce sont les offenses contre les autorités ecclésiastiques, tous les péchés entraînant l'excommunication, les empiétements du pouvoir temporel sur le spirituel, et aussi d'autres péchés qui ne supposent pas nécessairement l'excommunication, tels que la simonie, des accusations calomnieuses contre un prêtre, etc. Parmi les cas réservés aux évêques on doit ranger presque tous les crimes de droit commun, assassinats, péchés de la chair, violation du secret de la confession, etc.; mais les év. peuvent déléguer leurs droits aux doyens. La violation des vœux monastiq. et les délits qui s'y rattachent, sont réservés aux abbés et aux supérieurs réguliers. Toutefois, quand il y a danger de mort, toutes ces réserves cessent, et le premier prêtre venu peut donner l'absolution au mourant qui se confesse et se repent. Le conc. de Trente est précis dans ses anathèmes sur ces différents points; il y a cependant des canonistes qui soutiennent que l'absolution d'un prêtre est toujours valable, même s'il s'agit de cas réservés.

CASAS, Barthélémy (de Las), ou plus ordinairement Las Casas, né à Séville 1474, f à Madrid 1566, consacra sa vie entière à protéger les Indiens de l'Amérique contre les cruautés et la rapacité de leurs envahisseurs. Son père, Antonio, avait accompagné Christophe Colomb à bon premier voyage; il y trouva les ressources nécessaires pour faire étudier à son fds la théol. et le droit à Salamanque. Le jeune Barthélémy lit partie de la seconde expédition 1498, et ne cessa dès lors, pendant un ministère de 50 années, de défendre contre ses compatriotes la population douce et inoffensive dont il s'était fait le père et qu'il s'efforça d'amener à l'Évangile par la douceur et la persuasion. C'est à iiaint-Domingue, 1510, qu'il remplit pour la première fois les fonctions ecclésiastiques; il entra en 1524 dans l'ordre des dominicains, vit accourir à ses appels des prêtres, des missionnaires et des évêques, parcourut tontes les Antilles, et l'Amérique centrale depuis le Mexique jusqu'au Pérou, et obtint parmi les naturels du pays une telle popularité, qu'un mot de sa uiain faisait plus qu'une troupe de soldats. Mais les conquérants compromettaient son œuvre par leurs exactions; ils pillaient et volaient, ils se distribuaient les Indiens comme du bétail et les exploitaient comme des esclaves, les faisant travailler dans les mines et les ruinant sans scrupule pour senrichir le plus possible. Las Casas compte par millions ceux qui périrent en peu d'années, victimes des cruautés des Espagnols. Il fit jusqu'à 7 fois le voyage d'Espagne, pour demander justice envers ses protégés; il vit le roi, la reine, les ministres, le Conseil des Indes, le cardinal Ximénès; il intéressa à sa cause Paul III et Charles-Quint; il obtint tous les pouvoirs, tous les titres, mais il échouait chaque fois contre les passions surexcitées, contre la soif de l'or et contre le mauvais vouloir des gouverneurs et des aventuriers qui ne songeaient qu'à faire fortune. Il avait refusé le riche diocèse de Cuzco; à 70 ans il accepta celui de €hiapa, beaucoup plus modeste, et comme il refusa les sacrements et l'absolution à ceux qui refusaient de se conduire en chrétiens vis-à-vis des Indiens, il souleva de n >mbreuses inimitiés qui se firent jour dans un mémoire publié par l'avocat Prias Albornas; on réussit à faire soupçonner sa fidélité envers la couronne, et le vénérable vieillard dut se remettre une 7»® fois en route pour l'Europe 1547, non plus comme représentant de la cause des Indiens, mais comme accusé. Le pays et la cour étaient divisés en deux camps ennemis: on était pour ou contre Las Casas. Une assemblée de prélats, de théologiens, de juristes, devait traiter la question devant le Conseil des Indes réuni à Valla-dolid. Sépulveda se porta comme accusateur; Las Casas lui répondit et n'eut pas de peine à gagner sa cause. Charles-Quint défendit d'une manière absolue toute atteinte à la liberté des Indiens, et prit les mesures nécessaires pour que cette résolution ne fût pas une lettre morte. Le pieux philanthrope avait réalisé le rêve de sa vie. Il avait écrit une vingtaine d'ouvrages et mémoires plus ou moins considérables, la plupart à la demande du roi ou du Conseil des Indes, entre autres, en 1524, à Saint-Domingue, un traité latin sur le seul moyen de convertir les Indiens, savoir la charité; un autre sur les moyens légaux et chrétiens d'assurer aux Indes la domination des rois d'Espagne; en 1552 une Brève relation de la destruction des Indiens; une Hist. des Indes occid. depuis leur découverte jusqu'en 1520; à l'âge de 90 ans il écrivit encore en faveur des Péruviens. Ces différents ouvrages, auxquels les intéressés reprochent des exagérations, ont du moins été reconnus exacts sur tous les points où la vérification a été possible; tout au plus peut-on reprocher à l'auteur une certaine partialité en faveur des malheureux dont il prenait la défense. Quant à l'accusation portée contre lui d'avoir introduit en Amérique l'esclavage des nègres pour soulager les Indiens, elle tombe devant le fait que les Portugais faisaient déjà la traite vers le milieu du 15»© siècle, et que ce commerce fut interdit en 1506 à cause des dangers qu'il présentait au point de vue politique. Las Casas mourut dans un couvent des environs de Madrid, à 92 ans, après une courte maladie, 1566.

CASELIUS, Jean, d'une famille de Hollandais réfugiés pour cause de religion; né à Gëttingue 1533, f à Helmstàdt 9 avril 1613; fut un des humanistes les plus distingués de son temps, un des élèves préférés de Mélanchthon. Après deux voyages en Italie, d'où il revint en 1566 avec le titre de docteur en droit, et une réputation qui lui valut de l'emp. Maximilien des lettres de noblesse, il s'attacha à la personne du duc Jean-Albert de Mecklembourg, qui lui confia l'éducation de ses deux fils à Rostock; il y resta de 1570-1589 et regarda toujours ces années comme les plus belles de sa vie. Il refusa une vocation à la nouvelle université de Helmst&dt, parce qu'il ne pouvait signer la Confession de foi obligée; mais 14 ans plus tard, son élève Jules étant arrivé au gouvernement et l'ayant dispensé de la signature, il accepta les fonctions de professeur, qu'il remplit pendant 35 années. Malheureusement pour lui les temps avaient changé; lés esprits, tout à la guerre ou à la théol., ne savaient plus apprécier la belle littérature. Sa réputation européenne, l'amitié de Scaliger et de Casaubon, la protection du duc, ses talents, son latin classique, son caractère môme, ne réussirent pas à lui épargner des déboires que lui préparait la position incertaine qu'il avait prise dans les luttes théologiques. Son collègue Daniel Hoffmann écrivit contre lui en 1598, pour lui reprocher la place trop grande qu'il faisait à la philos, et à la raison; il y répondit par des écrits pleins de finesse et d'une élégance toute romaine, mais qui manquaient d'énergie et d'actualité. 11 a publié un assez grand nombre d'ouvrages sur la grammaire, la rhétorique, la pédagogie et la politique, se plaignant de la décadence des lettres et du retour de la barbarie. Il s'éteignit à 80 ans, comme un vieux savant déclassé dans un monde qui n'est plus le sien.

CÀSSÀiNDER, Georges, né 24 août 1513 à Cazdand près Bruges, un des savants catholiques les plus paisibles du 16"1* siècle. Après avoir étudié à Bruges, à Gand et à Cologne, il fut appelé par le duc Guillaume de Clèves à réconcilier les anabaptistes avec l'Église romaine, et il publia à cette occasion un travail sur le baptême des enfants. L'emp. Ferdinand l'employa ensuite à une œuvre plus difficile; reconnaissant l'inaptitude du conc. de Trente à rapprocher les Églises, il entreprit d'y aviser lui-même directement, et il s'entoura de théologiens modérés, parmi lesquels Cassandre figurait au premier rang, s'étant déjà fait connaître en 1551 par un écrit sur la conciliation, et par la modération avec laquelle il avait répondu à Calvin et à Bèze. Sa santé l'ayant empêché de se rendre à Vienne sur l'invitation de l'empereur, il envoya de Cologne une Consultation, dédiée à Maximilien (Ferdinand étant mort dans l'intervalle). Son point de vue est celui d'une conciliation sur le terrain des anciens conciles, de Constantin à Léon ou à Grégoire-le-Grand. Il n'abandonne pas la tradition; il admet le schisme en ce qui touche à la personne de Christ. Mais il veut l'union dans la charité pour les divergences sur les rites, opinions et cérémonies. Strictement orthodoxe en ce qui le concerne, il voudrait que Rome cédât sur la question de la coupe, de la valeur inégale des sacrements, et du mariage des prêtres. C'est un peu ce que demande aujourd'hui la réforme catholique. f 1566. L'Église essaya en vain d'obtenir de lui une rétractation, et depuis 1616, sur l'initiative de Louvain, ses œuvres sont à Tindex.

CASSEL (Colloque de), conférence qui eut lieu en 1661 par l'initiative personnelle du landgrave de Hesse, Guillaume VI, et dans laquelle les théologiens réformés de Marbourg et les luthériens de Rinteln examinèrent en paixr du 1er au 9 juin, les points sur lesquels ils étaient d'accord et ceux sur lesquels ils différaient. Musée et Heunichen d'un côté, disciples de Calixte, et de l'autre Curtius et Hein, anciens élèves des académies suisses et hollandaises, poursuivirent ainsi sous les yeux des commissaires du duc l'œuvre de pacification rêvée par Calixte et l'écossais Dury. Ils s'entretinrent de la Cène, du baptême, de la prédestination et de l'union des deux natures en Christ; ils reconnurent à l'unanimité que leurs divergences ne touchaient pas au fondement de la foi, et conclurent à la convocation d'un congrès oti les théol. des contrées voisines auraient à ratifier les propositions d'union qui leur seraient présentées. Malheureusement le duc f 1663, avant d'avoir pu donner suite à ce projet, qui s'éteignit avec lui.

CASSIEN, Jean, contemporain de Jérôme et d'Augustin, écrivain ascétique, né vers le milieu du 4me siècle en Gaule, probablement en Provence; selon d'autres, en Chypre. Il entra fort jeune dans un monastère de Bethléhem, sous les auspices de son ami l'abbé Germain. Ils visitèrent ensemble en 390 les solitaires de la Thébaïde, et après un second voyage en Égypte, se rendirent à Constantinople où Chrysostome venait d'être nommé patriarche. Chrysostome attacha Cassien à son église, Cassien prit le parti de son supérieur dans les discussions dont celui-ci fut victime. Il plaida sa cause auprès d'Innocent 1er, et resta quelque temps k Rome. 11 en fut chassé par l'invasion des Goths, et s'établit vers 415 à Marseille où il fonda 2 couvents, dont un à Apt. Après la condamnation de Pélage, Cassien releva quelques-unes de ses idées qui lui paraissaient justes, et se mit à la tête d'une opinion moyenne, connue sous le nom de semi-pèlagianisme. Il reconnaissait la corruption humaine comme suite de la chute d'Adam. Le combat de la chair contre l'esprit est aussi une suite de la chute, mais il doit être dirigé de Dieu pour préserver l'homme de paresse et d'orgueil et concourir à son développement. Cassien maintenait contre Pélage l'insuffisance dn libre arbitre, et contre Augustin il soutenait que l'influence de la grâce est déterminée par le libre assentiment de la volonté humaine. Il estimait que l'homme, depuis la chute, est malade, mais pas mort. Il f vers 440, très avancé en âge. On a de lui un Traité des institutions monastiques en 12 livres, 420,. dédié à son ami Castor, év. d'Apt; un travail plus considérable sur le même sujet: 24 confér. des Pères du désert, et un traité de l'incarnation, écrit à la demande de Léon-le-grand, contre Xestorius. Il n'a pas été canonisé; cependant quelques diocèses le fêtent le 23 juillet, et Thomas d'Aquin appréciait extrêmement ses écrits, dont le style, d'ailleurs clair et persuasif, ne manque pas d'une certaine élégance.

CASSIN, v. Mont-Cassin.

CASSIODORE, Magnus Aurelius, né entre 468 et 480 à Squillace, Calabre, d'une vieille famille romaine, remplit avec distinction sous Théodoric, roi des Goths, et sous ses successeurs, plusieurs hautes fonctions, préfet du prétoire, consul, etc., comme son père l'avait fait avant lui sous Odoacre. Avec l'âge il abandonna les affaires publiques, et se retira dans le couvent de Viviers, près de sa ville natale, où il continua de se rendre utile à ses contemporains par sa piété, son influence sur les moines et ses travaux littéraires; il rassemblait et faisait copier les plus précieux mss. de l'antiquité, f vers 575, presque centenaire. On a de lui un Traité de l'Âme, 4 livres sur les Arts libéraux, 12 livres de Lettres, un Comment, sur les Psaumes, une Hist. des Goths, enfin une Hist. de l'Église en 12 livres, extraite de Socrate, Sozo-mène et Théodoret (d'après la trad. de son ami Épipbane-le-Scolastique). Cet ouvrage, avec Mist. d'Eusèbe, a été au moyen âge la principale source et autorité en matière d'hist. ecclésiastique. Eloge et Vie, par le bénédictin Sainte-Marthe. Ed. de ses QEuvres, D. Garet, Rouen 1729.

CASTALION, Sébastien, CasteUion, ou plus exactement ChateiUon (c'est lui qui changea son nom, par allusion sans doute à la poétique source de Castalie). Né 1515 en Savoie, selon d'autres en Dauphiné, ou près de Nantua; f à Bàle 29 déc. 1563, de privations et de misère. Il doit surtout sa réputation à ses luttes avec Calvin. D'une famille respectable, mais trop pauvre pour pourvoir à ses études, il eut le bonheur d'être chargé de l'éducation de 3 jeunes nobles qu'il accompagna à Lyon, où il sut mettre son temps à profit. En 1540 il est à Strasbourg, où Calvin le loge dans sa maison, en attendant que, de retour à Genève, il lui procure me place de régent au collège. Philologue plus que théologien, avec plus de goût que de profondeur, ne jugeant les choses qu au point de vue critique, il ne tarda pas à se brouiller avec m amis par la manière tranchante avec laquelle il se prononçait sur des questions qu'il n'avait pas suffisamment étudiées: ainsi sur le Cantique des Cantiques, qu'il traitait d'obscène; sur la descente de Christ aux enfers; sur l'élection, cela va sans dire. Il avait entrepris une nouvelle version de la Bible en français et en latin, mais Calvin lui fit plusieurs observations qui achevèrent de le froisser et rendirent impossible la continuation de leurs rapports. Casta-lion résigna ses fonctions de régent, mais demanda en même temps d'être agrégé au clergé genevois; il y avait quelques titres par son instruction, par les soins qu'il avait donnés à l'égl. de Vandœuvres, et par le dévouement avec lequel il avait offert ses services pour l'hôpital pendant la peste de 1543; mais ses opinions particulières, sa vanité, ses attaques violentes contre les pasteurs empêchèrent sa nomination. Il quitta Grenève 14 juillet 1544, et se rendit à Bàle, où il vécut quelques années dans une grande pauvreté, labourant la terre ou ramassant le bois flotté, faisant tout pour entretenir sa famille, et publiant de temps à autre quelques écrits, dont les premiers n'eurent d'autre résultat que de le faire connaître et de lui procurer enfin, en 1552, une place de prof, de grec. Le libraire Oporin fut à la fois son protecteur et son éditeur. Les ouvrages de Castalion sont nombreux. Les plus remarquables sont ses Dialogues sur l'Uist. sainte, en latin, qui eurent de nombreuses éditions en plusieurs langues; sa trad. de la Bible, en latin, Bàle 1551, à laquelle on reproche surtout d'avoir sacrifié l'exactitude à l'élégance, et d'avoir modernisé certaines ex pressions (ainsi il dit lotion pour baptême, génies pour anges, république pour église, collège pour synagogue, etc.); ces expressions bizarres ont disparu dans les éditions subséquentes; sa trad. de la Bible en français, avec annotations, Bàle 1555, moins élégante que la précédente, et d'un français souvent vulgaire, quoiqu'on en ait exagéré les défauts; une trad. de la Théo-logia germanica, l'un des ouvrages les plus considérables du mysticisme allemand; plusieurs traités de controverse, notamment contre Bèze et Calvin, un entre autres à propos du supplice de Servet; des Comment, sur diverses portions des Écritures, diverses trad. d'auteurs grecs, etc. Il fut enterré dans les tombeaux des Gryn&us, et plusieurs épitaphes furent composées en son honneur. Il laissa 4 filles et 4 garçons; le plus jeune, Frédéric, né 1552, d'abord pasteur à Huningue, puis prof, de grec et de rhétorique à Bâle, f d'apoplexie 16 mai 1613.

CASUEL, se dit en général du revenu que procure au prêtre l'accomplissement de cérémonies, baptêmes, mariages, enterrements, pour lesquelles il revêt son étole (d'où le nom allemand de Stolgebuhren). L'ancienne Égl. ne connaissait rien de semblable, mais elle recevait des dons volontaires, qui servaient à l'instruction du clergé. Il était bien entendu que ce n'était pas le prix d'un acte religieux, Matth., 10, 8., que par conséquent il n'y avait pas simonie. Mais peu à peu on y attacha l'idée de témoignages de reconnaissance, et on réussit à les concilier avec Matth. 10, 10. Luc 10, 7. 1

Cor. 9, 11. On fit un pas de plus avec Innocent III, et leconc. de Latran 1215, en stipulant que les ecclésiastiques devaient remplir leurs fonctions gratuitement, ajouta que les fidèles devaient aussi de leur côté conserver la vieille coutume d'offrir un cadeau à l'officiant. Plus tard on y ajouta pour le prêtre le droit de se plaindre si on lui refusait l'offrande. L'importance du cadeau était d'abord déterminée par l'état de fortune du fidèle, mais comme il y eut des abus de part et d'autre, on finit par établir un tarif fixe, que chacun pouvait dépasser, s'il le voulait, mais qui représentait bien le prix de la cérémonie. La distribution de l'eucharistie, l'extrême onction, l'ordination et le sacrement de la pénitence n'étaient pas tarifés et le don dépendait de la fortune ou de la générosité du donateur. Le revenu appartenait au titulaire de la paroisse; si Ton jugeait bon de recourir au ministère d'un étranger, il y avait double casuel à payer, l'un à l'ordinaire, l'autre à l'officiant. L'Egl. ne veut pas considérer cet impôt comme le payement d'une cérémonie spéciale, mais elle y voit l'accomplissement du devoir imposé à chacun de concourir aux dépenses de la paroisse dans la mesure même où il y est intéressé; il est interdit au prêtre de se faire payer d'avance; il trouvera toujours moyen de se faire payer après, si même il y avait quelque velléité de refus. Il est parfaitement juste que chacun vive de son travail, et l'on ne peut dire que les humbles prêtres soient en général trop payés; mais la forme de cet impôt est humiliante pour celui qui le perçoit, souvent vexa-toire pour celui qui le paye, et elle est certainement peu conforme à l'esprit de l'Évangile. Les égl. luthériennes l'ont aboli presque partout; les églises réformées partout.

CASUISTIQUE. On donne ce nom d'une manière générale à l'étude des difficultés qui peuvent se présenter quelquefois dans l'application des principes de la morale, ces principes d'ailleurs n'étant jamais contestés, ni mis en question. Les cas dont il s'agit sont rares, et bien des personnes peuvent traverser la vie entière sans se trouver en face d'une question qui embarrasse leur conscience; l'homme honnête et droit de cœur peut être aux prises entre son devoir et son intérêt, mais habituellement son devoir est assez clairement tracé pour que l'hésitation ne soit pas possible, et à quelque résolution qu'il s'arrête, il sait s'il a bien ou mal agi. Dans certains cas cependant, et surtout quand il y a lutte entre deux devoirs qui semblent contradictoires, la conscience peut hésiter; plus ou moins éclairée, elle peut se demander tour à tour: Est-il permis de guérir un homme le jour du sabbat? Est-il permis de payer le tribut à Cés^r? Fait-on bien de se marier?

Luc 14, 3. Matt. 22, 17. 1 Cor. 7, 8. Et si l'Écriture nous présente ces exemples, la vie en offre d'autres, qu'il serait facile de multiplier. Sans parler des cas très clairs, où il n'y a d'incertitude que si l'on est décidé de faire le mal, il y a des cas difficiles à résoudre dans le commerce; il y en a pour le mariage; il y en a pour le pasteur, changements de poste, concessions à faire, conciliation de la fidélité et de la charité, etc* C'est à l'âme chrétienne elle-même qu'il appartient de résoudre ces difficultés, mais quelquefois elle peut avoir besoin de directions, et l'Eglise, déjà vers le 4™e et le 5™ siècle, fut appelée à se prononcer sur diverses questions importantes sur lesquelles les docteurs n'étaient pas d'accord. Cyprien, Tertullien, Augustin les examinèrent à divers points de vue, la question des apostasies momentanées, p. ex.; et peu à peu les membres de l'Égl. prirent la commode habitude de consulter leurs conducteurs, et ceux-ci de donner des conseils et des directions. Au moyen âge c'était devenu une carrière, une spécialité et même une littérature. Les livres pénitentiaux abordaient naturellement ces sujets, et à mesure qu'on voulut les perfectionner en les complétant, on s'enfonça davantage dans les minuties, et l'on en vint à ces distinctions subtiles qui furent le dernier mot de la casuistique, l'un des plus grands dangers de la morale. D'un côté l'étude du droit canon, de l'autre la méthode scolastique, P. Lombard, Alex, de Haies. Thomas d'Aquin (surtout dans sa Summa) concoururent à faire de la casuistique une science, et quand la confession auriculaire eut été introduite dans l'Égl., 1215, les anciens manuels ne suffisant plus, on en fit de nouveaux, dans lesquels étaient prévus autant que possible tous les cas, de manière à gêner d'une part l'expansion spontanée de la vie chrétienne, de l'autre à tranquilliser les consciences en remplaçant par une pénitence plus ou moins équivalente les dispositions intérieures que l'Evangile réclame. Ce que le christianisme n'avait pas voulu faire, la casuistique l'entreprit. Raymond de Pennaforte au 13mesiècle; au 14me et au 15me un grand nombre de moralistes, casuistes ou summistes; au 16m® Sylvestre Prierias, firent des travaux considérables, rangeant souvent par ordre alphabétique la liste des péchés, des vertus, des incidents et des cas de conscience qu'un bon confesseur doit connaître. Mais les casuistes n'étaient pas toujours d'accord; les uns plus indulgents absolvaient ce que d'autres condamnaient, et il en résulta un scepticisme moral auquel il devint urgenl de remédier. On crut y parvenir par la doctrine des probabilités, mais le remède fut encore pire que le mal, et la conscience en vint à ne plus regarder comme mauvais que les actes condamnés par les docteurs unanimes; s'il y avait un docteur qui hésitât, on s'autorisait de son nom pour se permettre ce qu'au fond du cœur on condamnait soi-même. La Réforme vit le danger, mais elle ne sut pas, surtout l'Égl. luthérienne, y échapper complètement. Perkins, de Cambridge (1558-1602), écrivit une Anatomie de la conscience, et même des Cas de conscience; Amesius, sous forme de catéchisme, écrit 5 livres sur la Conscience et ses cas; Fréd. Bal-duin, de Wittenberg (1575-1627) de même. Tous ont grand soin de protester contre les abus de la casuistique romaine et de s'en tenir aux questions vraiment graves et difficiles, mais le pas est glissant, les scrupules théol. se mêlent aux réflexions morales, et les superstitions elles-mêmes finissent par trouver place dans cette littérature factice, qui devrait ne relever tout entière que de la prudence pastorale. Les théologiens protestants comprennent peu à peu re qu'il y a de feux dans cette réglementation mécanique de la vie chrétienne. Osiander est beaucoup plus sobre, Spener est plus spirituel, et avec Buddeus la théol. morale se débarrasse complètement de la casuistique comme branche distincte et comme enseignement spécial. En revanche, les théol. catholiques se lancèrent avec une ardeur toute nouvelle dans cette voie dangereuse, et les jésuites en particulier, notamment Mariana, Suarez, Molina, Sanchez et Escobar, poussèrent les subtilités si loin qu'on ne sait plus si c'est le hideux ou le ridicule qui remporte dans leurs manuels dits de morale. Ils furent combattus avec une rare énergie par les solitaires de Port-Royal, par Arnaud, Pascal, Nicole, qui s'illustrèrent dans cette campagne en faveur de l'honnêteté vulgaire; ils furent abandonnés même par leurs amis, les Mabillon ^t les Du Pin, et s'ils perdirent leur cause devant l'opinion, ils se vengèrent en faisant raser Port-Royal. Ils ont d'ailleurs de telles racines dans la corruption naturelle du cœur, qu'il leur a été facile de recommencer, et de nos jours le p. Gury s'est fait l'auteur d'un manuel tel qu'il est difficile d'en citer des fragments, même en latin; les gouvernements de plusieurs cantons suisses ont dû, dans l'intérêt des mœurs, en interdire l'usage dans les établissements publics où les jésuites l'avaient introduit comme livre de lecture pour leurs séminaristes.

CATACOMBES. Ce mot, tiré du grec, signifie d'après son étymologie: cavité d'en bas, combe inférieure. Il a servi d'abord à désigner des galeries souterraines faites en vue de l'extraction du sable et de la pouzzolane aux environs de Rome. On y enterrait aussi les esclaves. Ces carrières ayant été abandonnées pour un motif quelconque, peut-être parce qu'elles ne présentaient plus un intérêt suffisant comme exploitation, les juifs d'abord, puis les chrétiens les utilisèrent comme nécropoles. On y tailla dans le tuf des rues plus ou moins régulières, bordées de couchettes étroites ou de caveaux plus considérables, et percées de niches perpendiculaires à l'axe de la voie. On fit naturellement une place d'honneur aux martyrs, et comme on avait l'occasion de se réunir souvent pour les honorer, on prit l'habitude d'y célébrer le culte, d'y distribuer la Cène, et au besoin de s'y réfugier dans les temps de persécutions. Le respect des Romains pour les tombeaux faisait de ces galeries funéraires une retraite relativement sûre. Si d'année en année le nombre des tombes allait en se multipliant et rendait nécessaires de nouvelles rues, on s'occupait aussi d'orner et surtout de distinguer certaines tombes; les familles avaient les leurs, l'Égl. avait les siennes. Elles étaient fermées par des tables de marbre ou de brique, sur lesquelles on gravait ou dessinait soit les noms et les titres du défunt, soit des symboles ou de simples ornements. Le manque d'air et de lumière, joint à ce qu'il y avait de malsain dans le fait de la décomposition des corps, ne permet cependant pas de croire qu'il s'y tint des réunions nombreuses et prolongées en dehors des cas d'absolue nécessité. Calixte fait creuser une catacombe sous la basilique di> Saint-Sébastien, mais déjà Léon-le-Grand est enterré hors des catacombes, 461. Puis au-dessus des tombeaux des martyrs on élève des églises et des chapelles, en communication avec la crypte, mais de manière à ce que les fidèles ne soient pas obligés d'y descendre. Tantôt utilisées, tantôt interdites ou délaissées. les catacombes cessèrent enfin au 7me siècle d'être officiellement employées par l'Église. L'approcha des barbares avait d'ailleurs décidé les évêques à retirer de leurs tombeaux les corps des saints et des martyrs, pour les mettre à l'abri de toute profanation dans les temples de la capitale, ou en leur élevant des chapelles particulières. Peu à peu l'oubli se fit sur les catacombes; au 15™ siècle on n'y pensait plus. Enfin Jean Lheureux (Macarius) et Bosio, 1593-1600, leur rendirent quelque notoriété, les visitèrent et publièrent ce qu'ils connaissaient de cette Rome souterraine, et dès lors les fouilles se sont continuées avec intelligence et activité. Auj. de nombreux ouvrages ont paru qui en donnent une description détaillée; Bellermann 1839, Perret 1852-1856, de Rossi 1864-1867, Roller 2 vol. 4° avec 100 planches. Il n'est pas facile de donner le plan exact des catacombes; elles s'entre-croisent sous terre et sont quelquefois superposées les unes aux autres jusqu'à une profondeur de 25 mètres; leur étendue totale est évaluée à environ mille kilomètres, mais sur plusieurs points elles sont obstruées par des amas de matériaux entassés ou éboulés. Les principales sont celles de Calixte, de Domitilla, de Sainte-Agnès, de Saint-Sébastien; sur la route d'Ostie on montre celle de saint Paul; on croit que sous le Vatican il y en a une où repose saint Pierre, etc. Klles sont placées sous la direction de la congrégation des indulgences et des reliques, qui peut puiser dans cet inappréciable trésor toutes les reliques qui lui sont demandées pour les églises nouvelles, soit des corps entiers, soit des fragments de corps des saints. L'étude des catacombes présente nn grand intérêt pour l'archéologie chrétienne; on y prend sur le vif ce qu'étaient la vie, la foi et les espérances de la primitive Église. Les symboles abondent: le poisson, dont les 5 lettres en grec sont les initiales de: Jésus-Christ, de Dieu le fils Unique, Sauveur; la colombe, image de l'esprit; l'agneau, image du chrétien; le paon, le cheval, la palme, le vaisseau, etc.; point de crucifix, des croix seulement à partir des 4*ne et 5me siècles. Parmi les inscriptions, aucune allusion au culte de la Vierge ou à l'intercession des saints; le monogramme du Christ; quelques mots, tels que, In pace, et Dormit, etc. Comme peintures, la vigne et ses sarments, Daniel dans la fosse aux lions, le bon berger portant sa brebis, Suzanne calomniée et réhabilitée. Des lampes de terre cuite, quelques fioles de verre avec un dépôt rougeâlre que l'on avait pris d'abord pour du sang de martyrs, mais qui paraît être plutôt du vin eucharistique, etc. Il existe des catacombes en beaucoup d'autres lieux, à Naples, à Florence, à Lucques, à Ca-nossa, en Sicile; celles de Syracuse forent jadis les célèbres Latomies ou carrières de Denys-le-Tyran, qui y fit enfermer Philoxène. Les catacombes qui s'étendent sous Paris ne furent d'abord que des carrières d'extraction; en 1786 on y réunit comme dans un vaste ossuaire les débris des cimetières de toute la ville, et un grand nombre de ceux qui étaient enterrés dans les églises. En 1792 on y ajouta les cadavres des victimes delà passion révolutionnaire.

CATAFALQUE. Ce mot d'une étymologie douteuse (peut-être de l'italien balco) désigne l'estrade ou l'échafaudage, ordinairement élevé dans une église, sur lequel est déposé avant la sépulture, le cercueil d'un mort pendant le service et les prières funèbres. Souvent richement orné, il est entouré de cierges et aspergé d'eau bénite.

CATAPHRYGIENS, v. Montanistes.

CATERKAMP, ou Katerkamp, Jean-Théodore Hermann, né à Hochtrup 17 janv. 1764, f à Munster, 8 juillet 1834; théol. cathol., chanoine de la cathédrale de Munster, après avoir été prof, d'hist. ecclésiastique et de droit canon dans c^tte même ville, où il avait fait ses premières études. Un préceptorat dans la faintttede Droste-Vischering, en lui faisant faine un voyage de 2 ans en Suisse et en Italie, avait élargi le cercle de ses idées et de ses connaissances, et s'il resta catholique jusqu'à la fin, il n'eut jamais les idées étroites de l'esprit de secte. Il a laissé une Hist. ecclés. estimée, «ne Notice sur le comte de Stolberg, un traité sur la primauté de Pierre, une Vie d'Amélie de Gallitzin, etc.

CATÉCHÉTIQUE, ensemble des règles adoptées pour l'enseignement de la religion aux enfants, et, d'une manière plus générale, à ceux qui n'étant pas encore chrétiens désirent apprendre à connaître le christianisme: Ce mot vient d'un mot grec qui signifie instruire par la parole et qui se trouve dans l'original de Luc 1,4. Act. 18, 25. Rom. 2, i8.1 Cor. 14,19. Gai. 6,6. Plus tard il s'y ajouta l'idée de l'enseignement par demandes et réponses. On appelle catéchumènes ceux qui reçoivent l'instruction, catéchistes ou catèchètes ceux qui la donnent (il y a eu transposition dans l'usage de ces termes, car autrefois c'étaient les disciples qui étaient dits catèchètes, comme on le voit dans Léon de Juda); catéchisme le livre plus ou moins développé, ordinairement assez court, qui résume la matière de l'enseignement, et catéchèse l'enseignement oral qui accompagne, pour l'expliquer et le développer, l'enseignement écrit du catéchisme. Cette branche de l'homilétique est dans la nature des choses et date de loin; l'Hébreu devait apprendre à ses enfants l'histoire de son peuple et leur faire connaître la loi ligne après ligne, commandement après commandement; le N. T. nous montre le maître des simples et le docteur des ignorants, et dès les premiers siècles de l'Égl. chrétienne l'enseignement des catéchumènes occupe une grande place dans l'école, dans l'activité pastorale et dans l'œuvre missionnaire. On connaît en particulier l'importance que ne tarda pas à acquérir l'école catéch. d'Alexandrie, qui remplissait la double mission d'instruire les prosélytes et de former des catéchistes. Au moyen âge, et quand le baptême des petits enfants eut fait disparaître l'ancienne notion des prosélytes, (puisque tous les baptisés étaient de droit membres de l'Église), l'idée du catéchuménat se modifia; on ne l'appliqua plus qu'aux populations païennes qu'il s'agissait de convertir, et, pour leur faciliter l'entrée dans l'Église, on réduisit toute l'instruction religieuse et toute condition requise pour le baptême à la seule déclaration par laquelle le prosélyte demandait à être baptisé, en s'engageant à suivre le culte et à se soumettre à la discipline. Les sectes en revanche attachèrent touj. une grande importance à ce que leurs disciples pussent rendre raison de leur foi. Gerson a traité ce sujet, mais uniquement au point de vue des confesseurs et du confessional. Depuis la Réformation les choses ont changé: l'enseignement religieux de l'enfance et de la jennesse est devenu l'une des principales branches de l'activité pastorale, et il s'est formé une littérature catéchétique si volumineuse que la seule nomenclature en ferait des volumes. Outre les catéchismes de Luther, de Heidelberg, de Calvin, il faut mentionner au moins les travaux de Spener et de Francke. En Allemagne, en Angleterre et en France, chaque année voit eclore de nouveaux essais, et l'Église catholique elle-même, depuis Canisius, est entrée dans cette voie.

CATHARES. Ce nom, qui signifie purs, puritains, et d'où est venu l'allemand Ket-ztr, hérétique, a pu désigner dans l'origine Je vrais hérétiques, tenant du manichéisme, mais il n'a pas tardé à s'employer d'une manière générale pour désigner les sectes nombreuses qui surgirent vers le siècle dans le midi de la France et au nord de l'Italie, où d'une part l'opposition des seigneurs à la hiérarchie, de l'autre les luttes des emp. contre les papes favorisaient la liberté de la pensée. Les cathares, appelés aussi gazares, ou publicains, bons hommes, patarins (qui se contentent du Pater), tisserands « à cause de la profession que plusieurs d'entre eux exercent » (Egbert, abbé de Schttnauge), se propageaient en secret, sans affecter un caractère de secte. Un d'eux faillit même être canonisé. On les trouve en 1101 à Agen, en 1115 à Soissons, en 1140àPérigueux. Ils étaient ennemis des formes. Quelque rustre 'pie l'on soit, dit Egbert, si l'on se joint à eux on devient en huit jours si expert qu'on peut raisonner de tout et répondre à tout. En 1121 ils sont à Trêves et à Cologne. Everinus, prévôt de Steinfield, dioc. de Cologne, écrit à Bernard de Clairvaux pour se plaindre de leur voisinage; il ne sait trop que penser d'eux; il constate leur connaissance des Écritures et admire leur courage en présence du bûcher et dans les flammes. Plusieurs passèrent en Angleterre en 1159. On essaya contre eux de la persuasion, de la prison, des croisades, même de la peine de mort (malgré Bernard); tout fut inutile. Ceux qui rentrèrent dans l'Église dirent qu'ils étaient fort nombreux, et qu'ils comptaient des adhérents même parmi les moines et dans le clergé; tous étaient d'accord à dire qu'ils dataient de loin et que leur doctrine existait en Grèce et dans d'autres pays (pauliciens, hogomiles). Les uns admettaient 2 principes: les autres, un principe et un ange déchu. Plusieurs concluaient de la parole: Venez, les bénis de mon père, • et de Eph. 4, 13 « l'homme parfait, » que les femmes n'iraient pas au ciel.

D'après Everinus, 1163, un de leurs principes fondamentaux était que tout ce qui ne procède pas de Christ et des apôtres est une superstition: ils ne baptisaient que les adultes, n'autorisaient le mariage qu'entre vierges, s'opposaient à l'intercession des saints et aux macérations, niaient le purgatoire et l'efficace des prières pour les morts. — Quant aux sectes orientales, c'est probablement des pauliciens réfugiés en B ilgarie que sortirent les bogomiles, dont le nom, slave d'origine, signifie grâce de Dieu (Bog = Dieu, Milié = pitié), parce que dans leurs prières ils imploraient la miséricorde de Dieu (de même que les euchytes au 5mc siècle, et les beggars plus tard). Ils se propagèrent en silence et sous l'habit de moines. Le principal d'entre eux, à Constantinople, était Basile, vieillard, moine et médecin. Alexis Comnène, par un honteux stratagème, lui fit rendre compte de toute sa doctrine; puis il fit dresser deux bûchers, dont l'un avec une croix, et menaça d'y faire jeter tous les bogomiles; ceux qui s'approchèrent de la croix furent acquittés, les autres furent condamnés à une prison perpétuelle; Basile seul fut exécuté, 1116. Selon eux, l'ancien et mauvais principe, Nathanaël, aurait porté les anges à la révolte, et aurait ensuite cherché à se soumettre, par le mosaïsme, les hommes de Dieu. Le Dieu suprême envoya alors Christ, ou l'homme-Dieu, incarné dans un corps d'une nature supérieure, qui n'était qu'en apparence soumis aux besoins des sens. Délivrés par lui, les hommes se dépouillent dans le sommeil de la mort de la vie du péché, et sont ainsi glorifiés et rendus participants du règne de Dieu. Les bogomiles rejetaient toutes les cérémonies de l'Église, les sciences, le mariage; ils jeûnaient. Chrysomane, successeur de Basile, fut condamné au feu k Constantinople, 1140. On donna du reste le nom de bogomiles k tous les chrétiens plus spirituels et plus indépendants des rites ou des traditions; deux év. deCappadoce furent condamnés comme tels, ainsi que le moine Niphon et un patr. de Constantinople. On n'assigne aucune date précise k la disparution de ces sectes, qui se transformèrent plus qu'elles ne s'éteignirent, et dont la partie la plus saine se fondit dans la Réforme.

CATHERINE, nom que les uns dérivent du grec catharf pur; les autres du syriaque kéthar, couronne, en le rattachant à la triple couronne de la première des Catherine: science, martyre et virginité.

1° Jeune fille d'Alexandrie, de race royale, dit-on, qui souffrit le martyre sous Maximin Daza, vers 312. Il n'en est parlé que depuis le 9m<> siècle, où l'on découvrit sur le Sinaï son corps parfaitement conservé. On en fait la patronne des écoles de filles, et même des élèves en philos», parce qu'on prétend qu'à 17 ans elle convertit plusieurs des 50 philosophes que l'empereur lui avait envoyés pour la ramener au paganisme. On dit aussi que son nom était Dorothée, et qu'on le changea pour rappeler sa triple couronne. Elle est représentée s'appuyant sur une roue brisée et teinte de sang.

2° Catherine, de Sienne, fille d'un teinturier nommé Jacob Benincasa; née 1347; entra à 20 uns clans l'ordre des sœurs de Dominique, où « Ile eut des révélations et composa des écrits mystiques qui lui firent une grande célébrité. Elle se distingua aussi par sa piété et par une charité active. Elle réconcilia les Florentins avec le pape Grégoire XI d'Avignon, joua un Krand rôle dans l'histoire du schisme, écrivit en faveur d'Urbain VI contre Clément VII, et + 29 avril 1380, à 33 aus, exténuée par ses austérités. Canonisée 1461. On a d'elle des correspondances remarquables, des poésies, six traités <le dévotion dialogués, en latin, et divers autres ouvrages spirituels pleins d'éloquence et de feu. La meilleure éd. de ses œuvres est celle de Gigli, Sienne et Lucques 1707-1713,4 vol. 4<>, où se trouve le Dialogue entre le Père éternel et sainte Catherine, qu'elle dicta 1378 étant en extase. Le sénateur Stefano, de Sienne, a écrit sa Vie. Le pape Pie II disait d'elle, qu'on ne pouvait pas s'en approcher sans devenir meilleur. Pendant la peste de 1374, elle se multiplia pour soigner les malades, en même temps qu'elle prêchait à tous la nécessité de la repentance.

3o Sainte de Bologne, 1413-1463; — 4o Sainte «le Gênes, fille du vice-roi de Naples, 1448-1510, toutes deux célèbres par leur mysticisme et leurs écrits.

5o Catherine d'Aragon, fille de Ferdinand V <?t d'Isabelle, épousa en 1501 Arthur, fils aîné <le Henri VII, puis, en 1509, avec dispense, le frère d'Arthur, qui devint plus tard Henri VIII, dont elle eut la sanguinaire Marie. Henri VIII la répudia pour épouser Anne de Boleyn. f 1536.

6° Catherine de Médicis, fille de Laurent II <le Médicis, née 1519, f 4589; vint à 14 ans < n France où elle épousa le dauphin, qui fut Henri II. Elle eut 10 enfants dont plusieurs moururent jeunes, et 3 montèrent sur le trône; c'est à elle que la dynastie des Valois dut le discrédit dans lequel elle tomba. L'intrigue et l'ambition la conduisirent à toutes les lâchetés H à tous les crimes. Elle subit les maîtresses de son mari pour mieux assurer sa puissance absolue; elle essaya de régner sous son fils François II en lui faisant épouser Marie Stuart, mais Wle dut partager le pouvoir avec les Guise; elle sempara de la régence pendant la minorité de Charles IX, fomenta la guerre civile, affecta de favoriser les protestants pour mieux les perdre <lans un massacre général, mais se brouilla ensuite avec Charles IX qui ne lui pardonnait pas les crimes qu'elle lui avait fait commettre. A la mort de ce prince et en attendant l'arrivée de son frère et successeur Henri III, roi de Pologne, Cath. reprit d'une main ferme les rênes du gouvernement, mais pour les remettre bientôt à son fils, et dès ce moment, perdue entre les différents partis, à la foi méprisée et redoutée des Guise, des mignons d'Henri III, des catholiques politiques du duc d'Alençon, son4""> fils, et des protestants dont son gendre Henri IV était le chef réel, il lui fallut en dépit de tous ses efforts, renonçer à l'espoir d'exercer désormais aucune influence. Ses complaisances forcées pour les Guise avaient précipité le royaume dans l'anarchie; l'assassinat du Balafré, dont elle fut probablement innocente, détendit un peu la situation. Sa mort fut accueillie par tous les partis comme une délivrance. Sa beauté, non moins que sa grande intelligence, en avait fait l'ornement de la cour de son père; elle eut en France un court moment de popularité, mais son ambition démesurée, son esprit de ruse et son absence de tout scrupule et de tout sentiment moral la compromirent bientôt et d'une façon irrémédiable. On la compara à César Bor-gia. Les Italiens dont elle s'entourait, et notamment Ruggieri l'astrologue, ne contribuèrent pas à la relever dans l'opinion. On vante son goût pour les arts; elle fit commencer les Tuileries et construire le château de Monceaux, mais quand on a dans son dossier la Saint-Barthélémy et la complicité des crimes de 4 règnes, l'amour de la belle architecture est un détail qui se noie dans l'ensemble et qu'on ne peut guère relever sans une espèce d'ironie. — Sa fille Marguerite avait épousé Henri IV.

7° Catherine de Ricci, née à Florence 1522, entra à 14 ans dans le couvent des dominicains de Prato; elle jeûnait 2 ou 3 jours par semaine, se flagellait et portait un cilice de fer; à 25 ans elle fut nommée prieure. La renommée de sa piété lui attira de nombreuses visites de princes, d'évêques et de cardinaux. Elle fut plusieurs années en correspondance avec Philippe de Néri. f 2 févr. 1589. On a d'elle une cinquantaine de Lettres.

CATHOLIQUE, catholicisme, mots grecs qui signifient universel, universalité, et qui s'emploient souvent en parlant des choses et des institutions religieuses. Il est évident que le christianisme, professé seulement par le quart ou le tiers des habitants du globe, ne saurai! s'appeler la religion universelle, ou catholique; il est plus évident encore que, même au sein de la chrétienté divisée en plusieurs grandes branches ou familles, ce titre ne saurait appartenir de droit ni à l'une, ni à l'autre. Dans ce sens i! n'y a donc point de religion proprement catholique. Si d'un autre côté l'on se rappelle que h christianisme est fait pour tous les peuples de la terre et qu'il se propose d'amener tous les hommes à Christ, chaque église, dans la mesure même où elle se croit en possession de la vérité, peut réclamer le nom de catholique, parce qu'elle espère être le centre humain autour duquel les autres viendront se grouper; cette aspiration est légitime, et le titre de catholique, si elle le prend, n'est plus que le symbole ou le drapeau de ses espérances. Seulement il ne détermine rien, parce que plusieurs églises différentes revendiquent le môme droit, et elles doivent pour se distinguer compléter leur nom en y ajoutant une désignation particulière; ainsi église cath. orientale, ou grecque, ou latine, ou romaine, ou gallicane, ou française. Cependant l'usage a prévalu, au moins dans l'Europe occidentale, de réserver le nom de catholique à TÉglise romaine seule, et en fait de langue ( usage est un maître. On désigne donc sous ce nom, et sans discuter la légitimité de ses prétentions, l'Église qui a son siège à Rome, qui admet le pape comme vicaire de Jésus-Christ, infaillible avec ou même sans les conciles; qui reconnaît l'autorité de la tradition, croit à la transsubstantiation, interdit le mariage des prêtres, maintient le culte en langue latine, défend au peuple la lecture de la Bible, a ses commandements spéciaux, etc. Toutefois, comme il n'y a rien d'absolu, le même usage fléchit dans la pratique, et l'on peut comprendre sous cette désignation bien des gens qui ne repondent en aucune manière à la définition traditionnelle, même des incrédules, pourvu qu'ils aient été baptisés dans le sein de l'Église en question et qu'ils ne l'aient jamais reniée officiellement ou collectivement. Les variations, ou les développements successifs qu'a subis l'Égl. latine, et les concessions qu'elle a dû faire en plusieurs pays, notamment en Orient, laissent une marge assez grande pour que des hommes, et même des ecclésiastiques, puissent demeurer dans l'Église sans en accepter toutes les doctrines ou toutes les ordonnances. Les anciens gallicans, tels que Bossuet, et les libéraux modernes, tels que Montalembert, Ozanam, l'abbé Cœur, ne sont pas des catholiques de la même espèce que les pères du dernier concile, et l'on est obligé d'accepter des nuances. Mais il est difficile de préciser le point exact où la nuance cesse d'être légitime. La question se pose au 17^* siècle à propos des jansénistes; elle se pose aujourd'hui à l'occasion de la réforme catholique en Allemagne et en Suisse, et l'on est fondé à se demander si des théologiens et des populations qui étaient bons catholiques en 1869, et qui n'ont pas varié ni changé dès lors, qui sont restés vieux-catholiques, ont cessé d'avoir droit à ce titre parce que le conc. de 1870 a fait un mouvement dans une nouvelle direction. Tous les conciles, ou à peu près, ont été suivis d'un schisme plus ou moins grave, et toujours les dissidents ont constaté qu'ils restaient seuls fidèles aux vieilles traditions, ce qui n'a jamais empêché la majorité de rester en possession du titre, de telle sorte que ce sont en fait ceux qui ont le plus varié qui détiennent aujourd'hui le nom qui devrait représenter la tradition exacte et constante de l'Église primitive.

— Sept épîtres du N. T. sont appelées catholiques, parce qu'elles sont adressées aux chrétiens en général, et non à une église particulière.

— Majesté catholique: titre d'honneur conféré par Alexandre VI aux rois d'Espagne, depuis Ferdinand IV, en récompense de l'expulsion des Maures et de la proscription des Juifs.

— Ligues catholiques, v. Ligue.

CAVALIER, Jean, le chef le plus brillant

des camisards, né 1680 à Ribaute. près d'An-duze; d'abord valet de berger, puis boulanger: menacé de deux procès pour cause de religion, il s'enfuit à Genève 1701, mais rentra l'année suivante dans son pays que désolaient les férocités de l'abbé du Chayla. Il prit part au meurtre de cet archiprêtre, qui donna le signal de l'insurrection, et il commença avec une vingtaine de jeunes gens de Ribaute la guerre de 2 ans qui a illustré son nom. Brave autant que prudent, il fit, avec ses troupes improvisées, des prodiges qui étonnaient même le maréchal de Villars, se portant d'un point à l'autre avec une incroyable rapidité, enlevant les convois, surprenant l'ennemi, le fatigant d'escarmouches, s'emparant des châteaux, désarmant les garnisons, détruisant les bandes de brigands connues sous le nom de Florentins, ou Cadets de la Croix, et s'arrêtant de temps à autre pour prêcher. A la fois capitaine et prophète, il exerçait sur ses troupes une influence merveilleuse et il obtint, soit par son habileté, soit par sa rare intrépidité, soit par d'étranges stratagèmes, des succès qui furent pour les camisards la preuve que Dieu était avec eux, et pour leurs ennemis. Montrevel, Basville, Broglie, Villars, un indice qu'ils gagneraient plus à négocier qu'à poursuivre la campagne. Cavalier ayant subi une défaite dans les environs de Nîmes, le 16 avril 1704, après un combat de 7 heures contre des troupes cinq fois plus nombreuses, il se décida à écouter les propositions que lui fit Villars. Il se rendit à Nimes le 16 mai et fit connaître ses conditions au général. La première stipulait la liberté de conscience pour les protestants; c'était la plus importante; elle fut rejetée par le roi. Les autres furent accordées, soit un brevet de colonel, une pension de 1200 livres et la formation d'an régiment de camisards à destination de l'Espagne. Ce n'était pas assez, mais en traitant, Cavalier s'était presque désarmé; il dut prendre ce qu'on lui donnait. Les camisards refusèrent, sauf 40, de déposer les armes. Ainsi désavoué par les siens, et mécontent, il fut envoyé par Villars à Lyon, sous bonne escorte; de là à Màcon, puis à Neuf-Brisac, d'où il réussit à gagner la Suisse, 1 sept. 1704. Il avait 24 ans; sa carrière était finie comme héroïsme. Il vécut encore 34 ans, colonel en Savoie, en Angleterre, en Espagne, le plus souvent vaincu et sans grand succès. De retour en Angleterre, il épousa Mselle Du Noyer et fut nommé major-général et gouverneur de Jersey, + 1740 à Chelsea. Il a dicté à Galli ses Mémoires sur la guerre des Cévennes, 1726, sincères, mais quelquefois peu exacts, parce qu'il dictait de souvenir. Petit de taille, trapu, ramassé, grosse tête, yeux bleus et vifs, cheveux blonds, abondants et flottants, il y avait du génie dans sa figure et il fascinait ses troupes. Malesherbe en parle avec une espèce d'enthousiasme. L'apostat Brueys seul l'appelle un gueux qui tranchait du général.

CAVE, théologien anglais, né 1637 à Picevel, Leicester, étudia à Oxford, devint chapelain de Charles II, puis pasteur d'Islington, enfin chanoine de Windsor ^>ù il f 1713. II a composé de nombreux ouvrages, dont quelques-uns ont encore de la valeur; le principal est (en latin) son Hist. littéraire des écrivains ecclésiastiques, Londres 1688, avec un Appendice de Wharton: les deux furent réimpr. Genève 1694. Cave a publié plus tard une seconde partie de son travail, qui, avec la première, a eu à Genève de nombreuses éditions. Attaqué par plusieurs critiques, notamment par Leclerc, Cave s'est défendu dans son Epistola apologetica, Londres 1700.

CECIL, William, né 1520, f 1598, secrétaire d'État en Angleterre sous Édoaurd VI et sous Élisabeth, fit convoquer un parlement pour régler les questions religieuses, et prit une part active à la rédaction des 39 articles de l'Egl. anglicane.

CÉCILE, la patronne des musiciens chez les catholiques. On la fête le 22 nov., mais on n'a rien de certain sur sa vie. On la dit vierge et martyre; Fortunat la fait vivre en Sicile et f vers 176; Métaphraste, dans une de ses 122 biographies plus ou moins légendaires, lui fait subir le supplice à Rome vers 230 sous Alexandre Sévère: enfin une légende du 14®© siècle, sans indiquer ni lieu, ni date, porte qu'en se rendant à l'échafaud, elle pria Dieu de lui permettre de chanter encore une fois ses louanges avec accompagnement de l'orgue; cette grâce lui fut accordée; après avoir chanté elle détériora l'instrument pour qu'il ne pût plus servir à de* usages profanes, et elle se livra joyeusement au b inrreau; mais celui-ci tout ému n'osa porter la main sur elle et se convertit. Sa fête se célèbre à Londres chaque année; c'est pour elle que Hândel a composé son Messie, et Mendelsohn son Paulus. Plusieurs poètes l'ont chantée. Dryden, etc. La légende la plus accréditée la fait vivre à Rome, où son père l'aurait fiancée, malgré elle, au jeune et noble Valérien; mais elle obtint par ses ardentes prières la conversion de ce jeune homme et de son frère Tiburee: Valérien renonça à l'épouser; les deux frères furent baptisés par Urbain et furent martyrisés; elle-même dut avoir la tête tranchée, mais le bourreau dut s'y reprendre it 3 fois, et encore elle ne mourut que 3 jours après, des suites dises blessures.

CÉCILIEN, év. de Carthage pendant le schisme des donatistes, fut déposé par Donat à cause de son indulgence pour les lapsi, les traditeurs ou tombés, vers 312.

CÉLANO, v. Thomas.

CÉLESTIN 1° pape 422-432 condamne la doctrine de Nestorius, et envoie des missionnaires en Irlande. Dans une discussion avec les év. africains au sujet d'un vieillard qui avait été excommunié et qui en avait appelé au pape, Célestin produisit des actes de conciles établissant qu'un appel à Rome était permis. Mais les év. de Carthage ne trouvèrent ces actes ni dans les archives du conc. de Nicée, ni à Antioche. ni à Alexandrie. Voyant sa fraude découverte. Célestin n'en maintint pas moins son jugement à l'égard du vieillard; mais, contre toute attente, dans une assemblée d'évêques qui eut lieu en Afrique, le vieillard confessa ses fautes. On a de Célestin quelques Lettres. Il appelle les églises chrétiennes » nos membres, • se mettant sans scrupule à la place de celui qui est le chef.

2<> Célestin II, Gui du Chastel, français; ami d'Abélard et protecteur d'Arnold de Bresce. élu pape 1143, f 1144.

3*> Célestin III, connu d'abord sous le nom de cardinal Hyacinthe, élu pape 1191 à l'âge-de 85 ans; homme faible et affaibli; sacre l'emp. Henri VI et l'impératrice Constance; il donne la Sicile à leur fils Frédéric, malgré lui et à condition que celui-ci lui paie un tribut; il fait prêcher des croisades et encourage ces entreprises dignes de leur temps et du saint-siège. Il reste de lui 17 Lettres, f 1198.

4° Célestin IV, Geoffroy de Castiglione, élu 1241, ne fat pape que 18 jours.

5o Célestin V, Pierre de Murrone, né dans la Pouille, bénédictin, fondateur de l'ordre des Célestins, élu 1294. Il vivait dans la retraite, se livrant aux plus dures austérités, quand on lui apporta la tiare. Gauche, inexpérimenté, ne connaissant rien du monde, sans prétention â l'infaillibilité, il commit fautes sur fautes, et linit au bout de 5 mois par donner sa démis-sion. Son successeur Boniface VÏII le fit enfermer dans une tour du château de Fumone, en Cainpanie, où il f au bout de 2 ans. Il a laissé quelques Opuscules. Clément Y le canonisa.

&> Célestin I bis, antipape, nommé en 1124, ne garda le pouvoir que 24 h. et fut remplacé par Honoré II.

CÉLESTINS, ordre religieux fondé 1254 par P. de Murrone, plus tard Célestin V. Il habitait solitaire le mont Magelle, dans les Abruzzes; c'est là qu'il établit son premier couvent, lui donnant la règle de saint Benoît, un peu modifiée. Les célestins se répandirent rapidement en Italie, France, Allemagne et Hollande. Philippe-le-Bel les introduisit en France vers 1300; ils forent supprimés 1788 à cause de divers désordres; on n'en trouve plus guère qu'en Italie.

GÉLESTIUS, avocat, puis moine, né en Cam-panie à la fin du 4me siècle, chaud partisan de Pélage, engagea courageusement la lutte. En 411 il se prései)ta à Carthage pour une place d'ancien, mais en 412 le diacre Paulin l'accusa devant un concile, à Carthage, d'avoir soutenu que la chute d'Adam n'avait eu de suites que pour lui, et que les enfants naissaient dans le même état qu'Adam avant la chute; il fut excommunié. Il en appela à Rome et obtint du feible et superficiel Sozime un jugement favorable à Pélage; mais après plus ample informe, le pape voulut prendre de nouveaux renseignements, et Cèlestius, cité de nouveau, refusa de comparaître.

CELIBAT. L'antiquité païenne offre quelques exemples, mais rares, de personnes ou de classes vouées au célibat. Rome a eu ses Vestales, la Grèce ses Hiérophantes, l'Égypte quelques prêtres. Mais la religion mosaïque n'a rien connu de semblable, les seules réserves qu'elle fesse ont trait à la respectabilité des femmes qu'épousaient les prêtres et le souv. sacrificateur. Le N. T. est plus explicite encore, non seulement en ce qu'il affirme la sainteté du mariage, mais encore et surtout en ce qu'il flétrit d'avance toute tentative qui pourrait être faite contre cette institution à la fois naturelle, morale et divine. S'il félicite, eu égard aux malheurs des temps, ceux qui peuvent vivre dans le célibat, l'apôtre n'en maintient pas moins le droit et la liberté de chacun, et il va jusqu'à conseiller le mariage à ceux qui n'ont pas le don de la continence. Mais les prophéties de l'apâtre ne devaient pas tarder à s'accomplir, 4 Tim. 4, 3. Ce furent les hérétiques les premiers, les gnostiques et les manichéens, qui entrèrent dans cette voie, et l'Église les condamna. Mais peu à peu, sous l'influence d'une fausse idée de la sainteté, et s'altérant au contact de la philos, et du paganisme, une partie de l'Église en vint à regarder le célibat comme supérieur au mariage, et des propositions furent faites à diverses reprises dans les conciles pour l'imposer au clergé. Les conciles repoussèrent cette innovation, à Gangres 324, à Nicée 325, etc. Plusieurs pères de l'Église, des moines môme protestèrent contre l'esprit qui inspirait les novateurs et contre les conséquences fatales que pourrait avoir une résolution dans ce sens. Mais la question était posée et pendant plus de six siècles encore elle fut l'objet de débats, parfois violents, de luttes, de résolutions contradictoires, jusqu'au moment où la main de fer de Grégoire VII l'imposa de force au clergé, 1074. La résistance à ce décret fut immense: plusieurs conciles, notamment en Allemagne, Erfurth, Mayence, Worms, refusèrent de s'y soumettre, mais les coups d'État frappés vigoureusement finissent touj. par entraîner les faibles, et peu à peu ce qui n'avait été accueilli que comme une usurpation devint la loi; on se soumit en murmurant, et l'Église latine s'inclina sous le joug du célibat, tandis que l'Égl. grecque continua d'avoir ses prêtres mariés. Le but poursuivi par Grégoire VII était essentiellement politique; il voulait avoir à son service une armée d'hommes entièrement dévoués à sa cause et qui n'eussent aucun intérêt étranger, ni patrie, ni famille. Il réussit, mais au prix de désordres tels que pendant tout le moyen âge ce ne fut qu'un cri contre l'immoralité du clergé, depuis saint Bernard qui déplore des désordres « qu'il est honteux de nommer, » jusqu'à Clémengis qui fait la description la plus déplorable d s infamies qui se commettent dans les monastères; jusqu'aux conciles de Valladolid et de Tolède, 1322 et 1473, qui représentent le clergé comme vivant dans la débauche; jusqu'aux emp. d'Allemagne, Sigismond, Ferdinand, Maximilien, Charles-Quint lui-même, qui importunent le pape pour obtenir l'abolition du célibat forcé des prêtres, dans l'intérêt des mœurs et pour la garantie des honnêtes femmes. C'était la grande réforme réclamée par l'Europe; un pape même, Pie II, en donnait le signal quand il disait: si par de bonnes raisons on a ôté le mariage aux prêtres, par de meilleures il faudrait le leur rendre. Néanmoins le conc. de Trente se refusa sur ce point à toute concession, malgré les instances réitérées de l'ambassadeur de France et de tous les États de l'Europe. La question en est là aujourd'hui. La cour de Rome a permis le mariage à ses prêtres orientaux, maronites, grecs catholiques et autres, mais elle continue de l'interdire à ceux de l'occident. Une corde trop tendue finit par se rompre, et en dépit de l'appui que les gouvernements temporels donnent encore aux décrets des conciles, la conscience et le bon sens public revendiquent leurs droits; bien des prêtres se marient, et d'éloquents plaidoyers s'écrivent et se publient en faveur d'une cause qui n'a contre elle que les traditions, la ioutine et l'intérêt du souverain pontife, tandis qu'elle a pour elle les expériences faites, l'Écriture Sainte, les plus anciens conciles, les plus illustres docteurs, et les réclamations presque unanimes de la moralité publique, v. Le Célibat des Prêtres et ses conséquences, par l'abbé Chavard, Genève, 1874. D«" Schulte, de Bonn: Der Cœlibatszwang und dessen Aufhebung, Bonn 1876.

CELLARIUS, allemand Kellner, appelé aussi Martin Borrhaus, né 1499 à Stuttgard, élève de Keuchlin à Tubingue, gradué à Heidelberg, se lia intimément avec Mélanchthon à Witten-berg. Sous l'influence de Stubner, et malgré les efforts de Mélanchthon et de Luther, il embrassa les vues de l'anabaptisme 1522, mais on 1527 il avait déjà rompu, sinon avec la doctrine, du moins avec ses exagérations; il publia un traité sur l'œuvre de Dieu dans l'élection et la réprobation, avec une préface de Capiton et fut recommandé à Zwingle par OEcolampade. Il s'établit 1536 à Bâle, s'y maria et gagna sa vie en faisant des fenêtres, jusqu'à ce que la fortune lui sourit de nouveau; il fut nommé prof, de rhétorique, puis de théol., docteur en 1549, et f de la peste 11 oct. 1564. 11 légua sa biblioth. à la ville. Il a écrit aussi des Comment, sur l'A. T. — Ce nom a été porté par plusieurs savants allemands, entre autres Christophore, philologue, né à Smalcalde 1638 f 1707.

CELLÉRIER 1° Jean-Isaac-Samuel, né 1753 à Crans, près Nyon, Vaud, d'une famille de cultivateurs pieux, consacré à Genève 1776, fréquenta les pères de l'Oratoire à Paris, fut nommé en 1783 pasteur de Satigny, près Genève, et conserva ces fonctions jusqu'en 1814. Il passa ses dernières années à Genève, et f 1844, entouré de l'estime universelle. Prédicateur éminent, évangélique, onctueux et populaire, il a écrit 480 sermons, dont 141 ont paru de son vivant, et 23 après sa mort. On a aussi de lui un Cathéchisme ou Cours d'instruction religieuse. Il avait réimprimé, avec Gaussen, la Conf. de fois helvétique. Vie par Diodati.

2° Jacob-Élisée, son fils unique, né 1785, consacré 1808, aida son père dans son ministère de Satigny. En 1816 il fut nommé prof, d'hébreu et d'exégèse de l'A. T. à Genève, chaire qu'il échangea en 1825 pour celle d'exégèse du N. T. Chrétien par tempérament, par éducation et par conviction, il appartient au libéralisme par certains instincts et par sa tournure d'esprit, et il a concouru pour sa part à des mesures hostiles au réveil religieux, telles que le règlement du 3 mai 1817. Il a collaboré au journal Le protestant de Genève et à la version du N. T de 1835. Mais il se détacha du libéralisme, quand celui-ci fut devenu essentiellement négatif. Il maintint avec énergie l'inspiration divine des Écritures et la foi aux miracles. Sa position théol. était indécise; il se définissait lui-même un homme de transition, un Robinson. f 1862. Il a publié de nombreux ouvrages qui, dépassés aujourd'hui, ont été un progrès et ont fait du bien au moment où ils ont paru: Gramm. hébraïque, d'après Gese-nius, 1820; Introd. critique au N. T., d'après Hug, 1823; Introd. à l'A. T. 1832; Esprit de la législation mosaïque, d'après Michaëlis, mais original, 1837; Comment, sur saint Jacques, 1850, Manuel d'Herméneutique, 1852; outre un grand nombre de Discours pour les étudiants, sermons, opuscules, articles de journaux ou de revues, biographies, et en 1835, pour la jeunesse, Histoire d'autrefois, à l'occasion du jubilé de la Réformation.

CELLITES, v. Alexiens.

CELSE, philos, du 2">e siècle, vécut sous Trajan et ses successeurs. On n'a aucun détail sur sa vie. Eclectique, ou inconséquent platonicien, quelques-uns l'ont confondu, probablement à tort, avec un autre Celse, épicurien, ami de Lucien. Il fut le Voltaire de son temps et combattit le christianisme avec les armes de la logique et celles du ridicule. Le livre qu'il composa sous le titre prétentieux de Discours vrai est perdu, mais Origène, qui le réfuta, nous en a conservé des fragments, qui donnent une idée assez juste du christianisme de cette époque, au travers des préjugés et des erreurs dont le livre est plein. Son principal grief contre les chrétiens, c'est la simplicité de leur foi et leur humilité. Il ne comprend pas la rédemption et dit que Dieu n'a pas besoin, comme nous, de reloucher ses ouvrages. Jésus est pour lui le fils d'une pauvre Juive répudiée pour cause d'adultère; il a appris les arts magiques en Égypte, où sa mère s'était enfuie pour gagner sa vie comme servante.

CENDRES (mercredi des), le premier jour du Carême, succédant aux folies du carnaval qui finissent avec le Mardi-gras. On ignore l'époque à laquelle furent introduites ces cérémonies d'une licence exagérée et d'une abstinence minutieusement réglementée que l'esprit de l'Écriture ne sanctionne pas et que les premiers siècles n'ont pas connues. Elles sont fort anciennes et remontent probablement à l'époque où le paganisme vaincu fit irruption dans l'Église. Les écrivains catholiques eux-mêmes rapprochent ces fêtes des fêtes païennes, bacchanales, saturnales, etc. Les anciens appelaient le mercredi des cendres Caput jejunii, le commencement du jeûne. C'était le jour des pénitences publiques; les fidèles se présentaient devant le prêtre la téte couverte de cendres, en signe de deuil et de purification. Aujourd'hui le prêtre se borne à leur faire une croix sur le front avec de la cendre et à leur dire, en latin: 0 homme, souviens-loi que tu n'es que poudre et que tu retourneras dans la poudre.

CÉNOBITES, moines qui vivaient en commun, par opposition aux anachorètes qui vivaient seuls. V. Moines.

CÉNOTIQUES, du grec Kenôsis abaissement. Pendant près d'un siècle les théologiens allemands ont discuté l'insoluble question de la nature de J.-C. sur la terre. S'était-il réellement abaissé, en dépouillant ses attributs divins? C'est ce que soutenaient les cênotiques, représentés par l'univ. deGiessen, en s appuyant sur l'histoire évangélique. Ou bien avait-il seulement voilé, caché l'éclat de sa divinité? C'est ce qu'affirmaient les cryptiques (cacher) de l'école de Tabingue, en s'appuyant de la logique. Il est difficile de comprendre qu'on ait pu se passionner pour de pareils débats.

CENSURE (des livres). L'influence de la littérature sous toutes ses formes est assez puissante pour que l'État et l'Église s'en soient toujours préoccupés, et avec raison. Ils ont eu recours, tantôt aux mesures répressives, c.-à-d. à la condamnation des mauvais livres, et de leurs auteurs, quand c'était possible; tantôt aux mesures préventives, k l'interdiction de rien imprimer ou de rien mettre en vente avant d'en avoir reçu l'autorisation de l'autorité compétente, c.-à-d. à la censure. Ces deux moyens ont prévalu tour à tour, et quelquefois simultanément, c.-à-d. que la censure préalable existait, et elle existe encore dans certains pays, sans détriment des peines qui peuvent frapper après coup l'auteur, même après autorisation. Les apôtres mettaient les fidèles en garde contre les mauvais livres, et ils obtinrent par la persuasion l'étonnant succès rapporté Act. 19, 19. Constantin fit brûler les écrits d'Arius, et le moyen âge fournit un grand nombre de lois et de règlements plus ou moins sévères contre les mauvais livres, leurs auteurs et leurs lecteurs. Depuis l'invention de l'imprimerie, les anciennes règles étant devenues insuffisantes durent être renforcées, et les papes publièrent coup sur coup plusieurs édits et bulles, revendiquant pour eux-mêmes ou pour leurs délégués le droit de permettre ou d'interdire certaines publications. Le conc. de Trente jugea convenable de charger une commission spéciale de faire un travail sur la question. Pie IV sanctionna dix règles qui devaient présider au travail de cette commission, et plus tard d'autres papes y ajoutèrent d'autres règles en même temps qu'ils dressèrent la liste des ouvrages condamnés et proscrits. Ces règles et ces listes ne furent d'ailleurs jamais reconnues, ni en France, ni en Allemagne. Auj. la congrégation de l'Index (v. Cardinaux) partage son travail en trois parts 1° les livres mis décidément à l'index, 2° les livres expurgés, 3° les livres à expurger. Il y a en outre les livres permis au clergé et interdits au peuple, et les livres pour la lecture desquels on peut obtenir une dispense. Les égl. protestantes, princes et docteurs, ont à plusieurs reprises décrété des mesures contre la mauvaise presse, hérétique ou licencieuse, mais en général c'est plutôt par la persuasion qu'ils ont cherché à agir, et en favorisant la bonne littérature; les voies répressives ont l'inconvénient d'attirer l'attention, et l'on sait qu'une prohibition de l'Index n'est trop souvent qu'une recommandation. Les livres défendus sont très recherchés.

CENTURIES, v. Magdebourg.

CERDON, gnostique syrien de la fin du 1er siècle, probablement né païen; il admettait deux principes, ne voyait dans le judaïsme que l'œuvre de Satan, rejetait la plus grande partie des Écritures et prétendait que J.-C. n'avait eu qu'un corps fantastique. On ne sait s'il se sépara lui-même de l'Église ou s'il en fut retranché; en tout cas Hygin l'excommunia. Il eut pour disciple Marcion, qui compléta et développa son système.

CÉRINTHE, juif d'origine malgré son nom grec, né peut-être en Égypte où il reçut sa culture, vint plus tard en Asie Mineure et rencontra à Éphèse l'ap. Jean qui, d'après une vieille tradition, quitta précipitamment un bain public où ils se trouvaient ensemble, de peur que la maison ne s'écroulât sur l'hérétique. Les uns en font un ébionite, les autres un gnostique; en réalité il représente un mélange des deux doctrines, et plutôt la transition de l'une à l'autre. C'est surtout par Irénée et parÉpiphanes qu'il est connu. Une force subordonnée, ou des anges auraient été le moyen par lequel Dieu aurait créé le monde. Jésus, fils de Joseph et de Marie, était un juif comme les autres, ne se distinguant de ses contemporains que par sa piété, quand tout à coup, à son baptême, le Verbe se plongea en lui. Dès lors il fit des miracles et chercha à amener le peuple à la connaissance de Dieu. Ses souffrances ni sa mort n'auraient aucun rapport avec la rédemption. D'après Irénée, Cérinthe aurait enseigné la résurrection de Christ; selon Épi -phanes, il l'aurait renvoyée au millénium.S'ap-puyant de Ps. 90, 4. et de l'analogie du 7me jour après la création, plusieurs de ses disciples pensaient qu'après 6000 ans de luttes il y aurait

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un règne de mille ans de paix. Il semble aussi que Cèrinlhe baptisât des hommes vivants, à la place d'hommes morts. Il eut des adhérents dans l'Asie Mineure jusque dans le 2®« siècle, mais les cérinthiens dépassèrent quelquefois la doctrine de leur maître. On croit que Jean écri vit son Évangile par opposition à Cérinthe; cependant ce ne fut évidemment pas sa seule raison.

CÉRON, ou Kèrold, moine de Saint-Gall, qui vivait vers 750 ou 760, et auquel on attribue diverses compositions en prose et en vers, et une traduction en langue alémanique de la règle de saint Benoît, des hymnes, du Pater et du Credo. Sa langue est bien informe encore, mais elle indique le travail qui commençait à se faire et qui a contribué à la haute réputation de cette abbaye.

CÈRULARIUS, Michel, patr. de Constantino-ple vers 1043, recommença la lutte que la différence des tempéraments avait rendue inévitable entre Rome et l'Église orientale. Sous Léon le philosophe 886, il y avait eu un apaisement momentané, mais les prétentions et les ambitions rivales, plus encore que les questions de doctrine, ravivaient à chaque instant les ani-mosités. On s'était dès les premiers temps servi de pain ordinaire pour la sainte Cène. Au 9m* siècle, en Occident, on commença à prendre du pain sans levain (ou azyme), et au 11 me Cé-rularius accusa les azymites de judaïsme et d'hérésie; il écrivit dans ce sens à Léon, le métropolitain de la Bulgarie, et supprima de son autorilé ce qui restait de rites latins dans ces églises. Sa lettre tomba entre les mains du violent cardinal Humbert, de Rome, qui la communiqua à Léon IX. Celui-ci y répondit avec amertume. Le faible Constantin Monomaque, désireux pour beaucoup d^ raisons de conserver la paix, envoya un délégué à Rome avec une lettre de réconciliation. Sur sa demande le pape envoya à son tour plusieurs députés à Constantinople, ayant à leur téte l'archidiacre Frédéric, et pour principal orateur le cardinal Humbert. L'abbé Nicetas Pectoratus publia contre l'Église latine un violent manifeste; Humbert répondit à cet dne, et l'emp. contraignit Nicetas à désavouer et à brûler lui-même son écrit; mais Cérularius se refusa à tout rapprochement. Cependant Humbert entra dans Sainte-Sophie, juillet 1054, et déposa sur l'autel même la bulle d'excommunication de son adversaire; celui-ci la fit enlever et la remplaça par une excommunication d'Humbert. Dès lors le schisme fut consommé. Pierre d'Antioche éleva seul encore la voix pour l'union. Faiblement soutenu par Constantin, Cérularius put encore se maintenir sous sa veuve Théodora, mais l'emp. Isaac Comnène le condamna à

l'exil 1059, et il ne tarda pas à mourir sur la terre étrangère. Cérularius n'en a pas moins laissé un bon souvenir à cause de son attachement à l'orthodoxie grecque.

CÉSAIRE lo Césaire d'Arles, fils du comte de Chalon-sur-Saône, né 470. entra en 490 an couvent de Lérins où il passa plusieurs années. Obligé par sa santé de se rendre à Arles, il y j remplit d'abord les fonctions de diacre 501, puis fut élevé malgré lui au siège archiép. de ! cette ville 502. Il l'occupa avec distinction pendant 40 ans et f 27 août 542. Pendant ce temps | il fut le plus influent des évêques de la Gaule méridionale, autant par sa fidélité et son énergie que par son éloquence, dont les 130 sermon* qu'il a laissés ont conservé le souvenir. Il fonda de nombreux couvents, des hôpitaux pour les malades et les blessés, et fit des collectes pour racheter les prisonniers francs retenus par les i Gofhs. Il présida 4 conciles dans le sens du I maintien de la saine doctrine. Suspect aux sou- j verains barbares qui avaient envahi la Provence, il eut à comparaître plusieurs fois devant eux, fut exilé par Alaric et emprisonné par Théodo-ric, mais finit par se concilier leur estime et leur resppet. L'év. de Rome, Symmaque, lui envoya le pallium et le nomma son vicaire pour les Gaules. Il écrivit une Règle en 26 articles pour les communautés d'hommes, et une autre, beaucoup plus détaillée, pleine de minuties, pour les monastères de femmes. A Arles même il fit élever un couvent de femmes, dont sa sœur Cé-sarie fut pendant 30 ans l'abbesse, et qui ne compta pas moins de 200 religieuses. Il s'y fit transporter lui-même avant de mourir, pour y faire ses derniers adieux à la vie, à la Provence et à ses sœurs.

2° Césaire de Naziance, frère cadet de Grégoire, mathématicien, naturaliste et médecin, connu surtout par l'oraison funèbre que son fr. prononça sur sa tombe, 369. Il fut le médecin de Constantin, quitta la cour sous l'emp. Julien, mais reprit son service sous Jovien et Valens; ce dernier le nomma en outre directeur du trésor en Bithynie. Il se fit baptiser un an avant sa mort et légua ses biens aux pauvres. On a sous son nom quelques traités de théol. et de philosophie, mais l'authenticité en paraît don-teuse.

3° Césaire de Heisterbach, près Bonn, moine et prieur d'un couvent de cisterciens au 13®* siècle, auteur de plusieurs écrits théol. et historiques, remarquables par le mouvement et h fraîcheur du style. On a souvent réimprimé son Grand Dialogue (latin) sur les visions et les miracles, en 12 livres, où il parle de la tentation, des démons, de l'eucharistie, de la sainte Vierge, de la mort et de l'état des âmes après la mort.

4o Un autre moine Césaire, de la fin du 13me siècle, a écrit une Explication des choses et des mots, que Leibnitz a consultée avec intérêt dans .ses recherches sur les étymologies.

CÉSÀRÀNGUSTÀ, ancien nom de Saragosse. Il s'y tint en 380 un concile contre les Priscil-liens; 1111 eu 592 à l'occasion de la conversion des Visigoths à l'orthodoxie. Une légende fait de l'ap. Jacques le fondateur de cette église. L'univ. date de 1474.

CÉVENNES, groupe ou chaîne de montagnes qui relie les Pyrénées aux Vosges, et dont le Mont de Lozère, 2120m, peut être considéré comme le centre. Des gorges abruptes alternent avec de gras pâturages, d'épaisses forêts, de profonds ravins et des cavernes presque impénétrables. Ce qu'on appelle le pays, ou la contrée des Cévennes, s'étend ainsi sur les départements actuels de l'Ardèche, de la Lozère, du Gard et de l'Hérault, et formait les diocèses de Nîmes, Uzès, Viviers, Mende, Alais et Montpellier. Célèbre par la guerre des camisards, et riche de souvenirs qui ont conservé toute leur fraîcheur dans la mémoire et dans les récits des Cévenols, ses habitants, cette contrée ravagée par une guerre de dix ans, par des massacres et par des incendies, a vu renaître peu à peu sa prospérité par Tordre et le travail et se livre auj. à l'agriculture et à de modestes fabrications.

CHAILA (Du), v. Chayla.

CHAIRE. Dans les temps anciens, quand lev. était spécialement chargé de parler au peuple, il le faisait ordinairement de sa place à l'extrémité du chœur, de son siège, de son fol-distolium (fauteuil). Peu à peu les orateurs durent se rapprocher de leur auditoire, et l'im-j>ortance que prit la prédication décida les Augustin et les Chrysostome à parler du haut de la tribune, ou ambo q. v., pour être mieux entendus. Puis on ajouta à la tribune elle-même un appendix mobile, plus élevé, que l'on pfit suivant les besoins avancer ou reculer; que l'on fixait contre une des colonnes dans les églises à plusieurs nefs, ou à moilié longueur du grand côté dans les petites églises. Ce siège garni d'un treillis s'appelait en latin cancelli, d'où est venu l'allemand KanzeL On y ajouta bientôt des ornements, un escalier, un dais, des figures symboliques, les 4 évangélistes, la colombe comme symbole de l'Esprit-Saint, etc. L'ornementation des chaires devint dès lors, à partir du 15^ siècle, une partie essentielle de l'architecture catholique. Souvent on enterra sous une chaire les hommes qui l'avaient illustrée: Luther à Wittenberç, Brenz à Stuttgard, Gailer de Kaisersberç à Strasbourg.

CHALCEDOINE, ville de Bitbynie, sur le Bosphore, en face de Constantinople, non loin du Scutari d'Asie; auj. Kadi-Keni. Après la f de Théodose II, 450, sa sœur Pulchérie, héritière de l'empire, ayant épousé Marcien, déjà sexagénaire, opéra toute une révolution dans la politique et dans la théol. de son prédécesseur. Elle convoqua un conc. à Nysse 451, et 630 évêq. s'y trouvèrent, mais les moines ayant recommencé leurs agissements et leurs violences d'Éphèse, le synode pour être plus libre dut se rapprocher de la capitale et se réunit à Chalcédoine. Ce fut le 4m* ou 5m* conc. écuménique. Théodoret, qui avait été condamné à Éphèse, se présenta et fut justifié. Les faibles évêques qui avaient voté les décrets d'Éphèse s'écrièrent: Nous avons tous péché. On proposa sur les deux natures du Christ diverses formules, entre autres: t Christ est composé de deux natures, » qui fut rejetée comme ambiguë. Les menaces des év. romains et celle de l'emp. accélèrent les votes. Les députés de l'emp. posèrent clairement la question: t Dioscure dit que Christ est bien composé de 2 natures, mais qu'il n'y a pas 2 natures en lui; Léon dit qu'il y a 2 natures en lui, mais sans mélange dans le même Christ; avec lequel êtes-vous d'accord ?» Le concile se prononça dans le sens de Léon. Dioscure ayant refusé de signer fut excommunié. Théodoret pour être pleinement réhabilité fut obligé de crier anathème à Nes-torius. Le concile condamna donc à la fois l'eutychianisme et le nestorianisme. Il établit aussi, malgré l'opposition des députés de Léon, l'égalité de droits du patr. de Constantinople et de l'év. de Rome, avec réserve quant au rang. L'empereur avait nommé 6 délégués pour le représenter; il n'assista lui-même, ainsi que l'impératrice, qu'à la 6me session. — C'est dans un faubourg de Chalcédoine, appelé Le Chine, que s'était déjà réuni en 403, sous la présidence de Théophile d'Alexandrie, le synode qui avait déposé Chrysostome.

CHALMERS, Thomas, né le 17 mars 1780 à East-Anstruther, comté de Kife, Écosse, d'une vieille et pieuse famille puritaine. Il fit ses études de théol. à Saint-André, et fut nommé pasteur en 1803 à Kilmany, mais son intelligence semblait spécialement ouverte aux mathématiques, aux sciences naturelles et à la philosophie. Il fit des lectures sur la théorie de la chaleur, fut nommé prof, de mathém. à Édimbourg 1805, se fit remarquer par le patriotisme de ses prédications, lorsqu'on put craindre une descente de l'empereur en Angleterre, publia en 1808 une statistique sur les ressources du pays, mais fut ramené en 1810 par une longue et sérieuse maladie à mettre les choses de Dieu au-dessus de celles du monde. Il venait aussi de faire l'art. Christianisme pour l'Encyclopédie de David Brewster. Sans abandonner aucune de ses études favorites, il les subordonna à la seule chose nécessaire, et tout en réclamant pour elle une entière indépendance, il reconnut qu'elles ont toutes une limite que l'esprit de l'homme ne peut dépasser; il définit le rôle de la philos., de la science, de la morale, de la théologie, et réussit dans chaque branche à captiver l'attention des simples aussi bien que celle du public le plus éclairé. Nommé pasteur à Glasgow en 1815, prof, à Saint-André en 1823, enfin pasteur et prof, à Édimbourg en 1828, il obtint partout d'immenses succès, dus à la profondeur, mais aussi au caractère pratique de sa parole et de son ministère. Il était frappé de voir la population des grands centres industriels se développer rapidement, sans qu'il y eût d'augmentation ni dans le nombre des tomples et chapelles, ni dans celui de leurs desservants; aussi beaucoup de familles vivaient-elles dans un état voisin du paganisme. Il porta sur ce point son attention, son énergie et son activité. Pour Glasgow seulement il fallait au moins 20 églises de plus; pasteur de l'Égl. nationale, il estimait que c'était à l'État d'y pourvoir, mais il fit appel en même temps au zèle individuel et sollicita non seulement les dons des fidèles, mais la participation active des laïques à l'œuvre de l'évangélisation des masses, sous la direction des pasteurs et des diacres. C'était ce qu'on a appelé plus tard la mission intérieure. Il publiait alors des séries de sermons: l'une sur la Révélation dans ses rapports avec l'astronomie; l'autre sur le Christianisme appliqué au commerce et aux affaires ordinaires de la vie, 1817 et 1820. Mais c'est à partir de si nomination à Édimbourg que son influence devint surtout prépondérante. Non seulement il y publia ses ouvrages de théol. les plus considérables (Évidences du Christianisme, Théol. naturelle, Esquisses de philos., Lectures sur les Romains, etc.), mais il continua ses travaux de statistique et d'économie politique au point de vue de l'inégalité des classes sous tous les rapports, et des remèdes à apporter à un état de choses qui menaçait de creuser un abîme entre les citoyens d'un même pays; il voyait les intérêts matériels compromis en la même mesure que les intérêts moraux et spirituels, et les mémoires qu'il écrivit sur ces questions attirèrent la sérieuse attention des hommes d'État et même des souverains étrangers. En 1834 il fit voter dans une assemblée générale de l'Église d'Écosse la construction de 200 nouvelles églises. En une année plus de 60,000 L. st. étaient recueillies pour cet objet: en 7 ans, plus de 306,000 (7,650,000 fr.), et 205 églises furent bâties. 11 continuait de défendre avec ardeur le système des Églises nationales, estimant que l'État doit au peuple l'éducation et l'instruction religieuse. Il eut contre lui l'économiste Smith qui soutenait que l'Etat ne doit pas plus intervenir dans la direction morale des individus qu'il n'intervient pour la satisfaction de leurs besoins personnels et matériels. Mais si l'État refusa les nouvelles charges qu'on voulait lui imposer, il n'entendait pas renoncer à son droit de gouverner l'Église, et l'occasion s'étant présentée en 1834 de faire acte d'autorité, il s'empressa de la saisir. L'assemblée générale de l'Église d'Écosse vota, sous l'influence de Chalmers, Y Acte de Veto qui restreignait le droit de patronage et réservait l'indépendance des paroisses. L'État refusa de le sanctionner, et une lutte s'engagea, qui dura 9 ans, entre le gouvernement et l'Égl. d'Écosse. Le gouvernement refusa toute concession, et le 18 mai 1843, l'assemblée, sous la présidence de Chalmers, se constitua en Église libre d'Écosse, au nombre de 125 ecclésiastiques et de 77 anciens. Pendant 4 ans encore il put assister au développement de cette œuvre immense, dont il avait été l'un des instruments les plus distingués, et il s'endormit eu paix le 31 mai 1847. Ses Œuvres complètes forment 25 vol . plus 9 vol. d'oeuvres posthumes. Sa vie a été écrite par son gendre Hanna.

CHALON-sur-Saône, évangélisé par Marcel et Valérien, d'après la légende; on n'y trouve qu'en 470 un premier évêque. Conc. peu importants en 579 et 646.

CHALONS sur Marne, évangélisé par Memi ou Menge, disciple de Pierre? plus vraisemblablement par Alpin. Lumier vers 580 fut persécuté par Brunehaut, mais il résista à cette reine cruelle, et l'œil dont il la regarda a été trouvé intact dans son tombeau. Les év. de Châlons furent pairs de France depuis Charlemagne; on distingue dans le nombre Guill. de Champeaux et Louis de Noailles. Il s'y tint plusieurs conciles. Patrie de Clémengis.

CHAMBRE apostolique (italien: Caméra flo-mana apostolica); le département des finances du gouvernement papal. A sa tête est placé le cardi nal-camer I in gue.

CHAMIER, 1° Adrien, docteur en droit-ca-non, se convertit au protestantisme au retour d'un voyage à Rome, et fut nommé pasteur à Romans 1560. Il desservit ensuite Nîmes, Le Pouzin, Privas et Montélimar, et prêchait encore ayant plus de cent ans; il se noya en revenant d'un colloque. Il eut 5 filles, dont une épousa le prof, et pasteur La Faye, de Genève, et un fils, le célèbre

2° Daniel, né 1565. Il fit ses premières études à Orange, fut nommé à 16 ans régent de 4e à Nîmes, vint à Genève en 1583 pour y étudier sous Théod. de Bèze, fut ensuite nommé successivement pasteur aux Vans, à Aubenas et enfin à Montélimar 1596, avant la mort de son père. Bayle le qualifie de raide, inflexible et intraitable. C'était un homme comme il en fallait à cette époque. Henri IV lui-même se montra peu aimable pour ce rude champion de la réforme, et lui fit faire une fois une antichambre de 5 mois avant de consentir à le recevoir. Charnier fut délégué à plusieurs synodes; il fut modérateur de celui de Gap 1603 et de celui de Privas 1612. Les missions dont il fut à diverses reprises chargé par les synodes à Loudun, à Paris, en Hollande, à Sainte-Foy, à Saumur, servirent de prétexte à ses ennemis pour le faire remplacer à Montélimar 1611, et quoiqu'il y fût rappelé, par ordre de l'assemblée politique de Saumur, il n'y retourna pas, mais il accepta les fonctions qui lui étaient offertes pour la 4° fois, de pasteur et de prof, à Montauban. Il réorganisa l'académie, tout en continuant de travailler dans l'intérêt général des églises; il fut notamment chargé d'élaborer, avec Du Plessis-Mor-nay et quelques autres, un projet d'union, que malheureusement les circonstances forcèrent d'ajourner. La guerre ayant éclaté, l'armée royale mit le siège devant Montauban, où plusieurs pasteurs s'étaient réfugiés, et dans un assaut, Charnier s'étant avancé sur les remparts, fut tué d'un coup de canon, 17 oct. 1621. Les protestants pleurèrent sa perte comme s'ils avaient perdu une de leurs meilleures places de sûreté; les catholiques s'en réjouirent et se moquèrent de l'obésité de l'illustre prédicateur. Il a laissé plusieurs ouvrages: une Dispute de la vocation des ministres: Epistolœ jesuiticœ; Con-fasion des disputes papistes: De œcumenico pontifice; la Honte de Babylone; Panstratiœ ca-tholicœ, en 4 vol. f°, arsenal de controverse avec tous les arguments de la Bible, des pères pt de l'histoire; Corpus theologicum. inachevé comme le précédent, et non moins estimé; une Gramm. hébraïque, mss. conservé à Metz. Charnier eut 3 filles et un fils.

3* Adrien, né 1580. pasteur à Montélirnar, édita plusieurs mss. de son père; et f 1671 à 91 ans. Il eut pour fils Jacques et Daniel;

4° Jacques, avocatà Montélirnar,pèred'Adrien, pasteur dans l'Essex, et de Moïse (ou Antoine) martyrisé à 28 ans;

3° Daniel, né 1628, fr. du précédent, pasteur àBeaumont 1655, puis à Montélirnar; +29 juin 1676.

La famille, fort nombreuse, fut dispersée par les persécutions; les uns se réfugièrent à Genève, d'autres à Neuchâtel, la plupart en Angleterre, où l'on comptait encore en 1848 un Henry Charnier, secrétaire-général pour les possessions anglaises dans l'Inde, et en 1853 un pasteur William Charnier, ministre anglican à Paris.

CHAMPEAUX, Guillaume (de), né à Cham-peaux en Brie, d'une famille de cultivateurs;

un des principaux chefs de l'école réaliste, archidiacre à Paris, prof, à l'école du cloître de Notre-Dame, puis à celle de Saint-Victor, eut pour disciple Abélard, qui plus tard le combattit et le réfuta victorieusement dans une dispute sur les idées générales. Il renonça dès lors à ses leçons, fut nommé 1113 év. de Châlons, se fit cistercien 1119 et f 1121. On a de lui un Traité de l'origine de l'âme et un Livre des sentences.

CHANCELLERIE papale, v. Curie.

CHANDELEUR (la), fête qui se célèbre le 2 févr. en l'honneur de la purification de Mario, 40 jours après la naissance du Sauveur, Luc 2, 22-31. On l'appelait aussi fête de Siméon^ parce que ce vieillard était le héros du jour où Jésus ftit présenté au temple; et comme l'enfant fut appelé la Lumière des Gentils, on choisit cette fête pour allumer, bénir et exorciser les cierges, ou chandelles, d'où est venu son nom. C'est à l'emp. Justinien, à la suite de tremblements de terre et d'autres phénomènes, que l'Église orientale doit cette solennité, 5i2, qui d'ailleurs concordait avec la place toujours plus grande que le culte de Marie commençait à prendre dans l'Église. D'après Baronius, le pape Gélase aurait déjà établi cette fête vers 492, et l'on sait que les Romains, déjà du temps de Numa, avaient fait du mois de février le mois de la grande purification, februatio. Luther a conservé la Chandeleur comme jour de la présentation de Jésus au temple, mais elle n'est plus guère célébrée dans aucune église protestante.

CHANDIEU, Antoine (de), seigneur de La Roche-Chandieu, né dans le Mâconnais vers 1534, f à Genève 23 févr. 1591. Destiné d'abord au droit, il se décida après sa conversion pour la théologie, connut Bèze et Calvin à Genève, et fut nommé pasteur de Paris à 20 ans. Arrêté par la police, il fut réclamé par Ant. de Bourbon, mais, par prudence, dut quitter la capitale. Il fut chargé d'une mission dans le Poitou et concourut à la convocation du synode de 1559, mais rien ne prouve qu'il y ait assisté. En 1562 il est nommé modérateur du synode d'Orléans. En 1563 il est de nouveau pasteur à Paris, mais pour peu de temps. Son frère aîné étant mort à Dreux, il se trouva à la tête d'une grande fortune et se consacra à l'évangélisation du Lyonnais et de la Bourgogne. Obligé de fuir les persécutions catholiques, il vint à Lausanne où il enseigna la théologie, puis à Genève où il fut nommé pasteur et prof, d'hébreu, et où il resta jusqu'à sa fin, avec de rares absences, motivées par des missions à l'étranger; en 1587, appelé comme chapelain par Henri de Navarre, il assista à la bataille de Coutras, mais ne tarda pas à rentrer à Genève. C'était un homme très modeste, instruit et d'un grand talent oratoire. Il a publié une vingtaine d'ouvrages plus ou moins considérables (quelques-uns sons les noms hébreux, de Sadeel ou de Zamariel, qui sont la traduction de Chant de Dieu); la plupart sont en latin et tiennent à la controverse. Il eut 13 enfants, dont le 8«, Pierre, fut pasteur dans le Béarn; les autres suivirent presque tous la carrière des armes.

CHANNLNG, William-EHery, né à Newport 7 avril 1780, d'une vieille et pieuse famille puritaine, étudia à Harvard, fut 2 ans précepteur en Virginie, et en 1803 pasteur de régi- con-grégationaliste de Fédéral-Street à Boston; il y resta jusqu'à sa f 2 oct. 1842, ne l'ayant quittée qu'en 4822 pour un voyage de santé en Europe. Sérieux et doux, petit de taille, d'une constitution délicate, il eut une vie simple et pure, sans épisodes; tout se passait chez lui dans le monde moral. Répugnant à la « terrible théologie » calviniste, il éprouvait encore plus de répulsion pour le déisme voltairien et pour les platitudes du rationalisme inauguré par Priest-ley et Belsham. Il se joignit aux unitaires, lors de la crise religieuse du Massachusets 1810, et ne tarda pas à devenir leur chef, mais avec l'espoir d'être aussi leur réformateur et d'infuser un peu de vie et de chaleur à cette froide théologie. Supranaturaliste décidé, il croyait aux miracles et à la religion révélée. Dieu était pour lui le Père céleste, toujours bon, plutôt qu'un roi et un juge. Il voyait en Christ un être céleste préexistant, qui avait fait des miracles et des prophéties et qui était ressuscité, un ami des pécheurs, le seul médiateur entre eux et Dieu, mais il n'admettait ni sa divinité, ni son sacrifice expiatoire. Il ne croyait pas non plus au péché, tel que la Bible le représente; pour lui le mal n'était qu'une faiblesse, une infirmité, un retard dans le développement, l'homme n'avait pas besoin d'être converti, mais seulement amélioré et ramené au bien. Sa vie personnelle et son caractère l'empêchaient peut-être de sentir vivement les lacunes et les luttes du cœur humain. En revanche il souffrait de la souffrance de son prochain, et sa sensibilité ne resta jamais inactive. Il s'occupa des classes pauvres, non seulement pour les soulager, mais pour les instruire par des leçons et des lectures publiques et pour les moraliser par des délassements honnêtes. Il combattit également l'esclavage, à une époque où il y avait du danger à le faire, et publia en 1835 son Traité de l'esclavage qui suffirait à lui seul à honorer sa mémoire. Sans être un orateur de premier ordre, ni un écrivain sans défaut, ni un penseur profond, ni un théologien bien au courant des questions, il a exercé une grande et saine influence par son caractère élevé et par l'exquise distinction de ses sentiments, v. Bunsen, La-boulaye et Rémusat.

CHANOINES, chanoinesses. Cette institution comme telle remonte à Chrodegang, év. de Metz, vers 760. Plus anciennement, et déjà du temps d'Augustin, on donnait le nom de chanoines (canonici) aux ecclésiastiques spécialement attachés à une église et vivant, sinon d'une vie commune, au moins d'après certaines règles, ou canons. Ils ne prononçaient pas de vœux proprement dits, et plusieurs conservaient leur liberté et vivaient dans le monde, sans avoir des fonctions spéciales, mais en observant les règles canoniques. La plupart se réunissaient chaque jour dans l'église cathédrale, sous la présidence de l'évêque pour étudier ensemble; ils prenaient leurs repas en commun et habitaient le même bâtiment. Avec Chrodegang ce qui n'était qu'un fait et une habitude devint une institution; il y eut des chanoines et une vie canonique. Dans l'intérêt de la discipline, les ecclésiastiques attachés à une cathédrale reçurent un règlement en 34 articles, qui les soumettait à l'autorité épiscopale, leur imposait la vie commune et les 3 vœux monacaux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance; les obligeait à des exercices religieux particuliers, et leur assurait leur entretien sur les dîmes et les revenus de la cathédrale, sans cependant les priver entièrement du droit de posséder. Charlemagne et Louis-le-Déb. confirmèrent ce règlement aux conciles d'Aix-la-Cha-pelle, 789 et 816, en le développant jusqu'à 86 articles; et là où les moyens de leur subsistance étaient assurés, les chanoines formèrent une vraie corporation, dans laquelle on distingua ceux qui relevaient d'une cathédrale et ceux qui appartenaient à une simple collégiale. Mais de nombreux abus se firent sentir, et déjà au 10me siècle les chanoines de Trêves se partageaient les biens de la fondation. Les papes et les conciles intervinrent à plusieurs reprises, mais inutilement. Benoît XIII, en 1339, fixa leur costume (noir, brun ou blanc) et les soumit à la règle d'Augustin; ceux qui se soumirent forent appelés réguliers, les autres séculiers. Plusieurs étaient laïques, bien que les règlements exigeassent qu'ils fussent au moins sous-dia-cres; les cadets de famille s'en firent une carrière, et le recrutement se fit, non plus d'après le mérite, mais d'après les quartiers de noblesse et la part de fortune qu'on apportait. Le conc. de Bâle décida que la moitié des places seraient données à des ecclésiastiques et à des hommes connus pour leurs qualités ou pour leur instruction; ailleurs on fixa le nombre des chanoines pour prévenir l'envahissement des nobles; toutes ces précautions furent inutiles; en bien des lieux les chapitres devinrent des puissances, et il y eut des chanoines qui siégèrent dans les diètes de l'empire. Lors de la Réforme beaucoup de chapitres furent supprimés et tours biens sécularisés; en quelques endroits les chanoines tétant tous convertis conservèrent leurs privilèges, leurs fondations et leurs revenus, qui devinrent peu à peu l'apanage de jeunes nobles. Il y eut même, à Lubeck et à Osnabrtick, des chapitres mixtes, qui avaient alternativement à leur téte un év. catholique et un prince protestant. La réorganisation des chanoines des deux communions fut laborieuse en Allemagne; elle fut plus simple en France, où l'autorité ecclésiastique s'en occupa seule, à quelques exceptions près où le pouvoir civil institua des chapitres, afin de pouvoir donner des places de chanoines, soit comme retraite, soit comme récompense. Aujourd'hui les titulaires se recommandent plus par leur valeur personnelle que par leurs ancêtres ou leur fortune. — Chrode-gang avait aussi institué des chanoinesses, vivant en commun et soumises à la règle d'Augustin, mais elles se fondirent peu à peu dans les béguines. Les séculières, de familles nobles, conservaient le droit de se marier. Plusieurs églises protestantes, en Allemagne surtout et en Danemark, ont conservé cette institution, qui est purement honorifique, et qui peut être considérée comme une retraite pour des jeunes fdles nobles; quelques-unes de ces fondations, pien dotées, se consacrent à l'enseignement et rendent de véritables services.

CHANT, v. Ambroise, Grégorien, Hymnes, etc.

CHANTAL 1° Martyr protestant français, maître de la monnaie à Villeneuve d'Avignon; il recevait dans sa maison ses coreligionnaires, au nombre d'une douzaine. Les soldats du pape traversèrent le Rhône, tuèrent 7 de ces hommes, précipitèrent Chantai de sa fenêtre dans la rue et le traînèrent jusqu'au fleuve, 1561. C'était une violation de territoire; le roi de France ne s'en plaignit pas.

Jeanne-Françoise Frémiot, dame de Chantai, née à Dijon 1572, f 1641. Veuve de Christophe de Rabutin, elle refusa de se remarier et consacra sa vie à des œuvres de dévotion. Elle se fit le bras droit de François de Sales, concourut avec lui à créer l'ordre de la Visitation, et en fonda le premier couvent à Annecy 1610. Grand'mère de M™0 de Sévigné, elle a laissé des Lettres qui ont été publiées 1660. Canonisée par Clément XI, 1767.

CHAPELAIN, ecclésiastique attaché à une chapelle. Sa position était naturellement différente suivant que la chapelle elle-même était une fondation indépendante, ou qu'elle se rattachait comme annexe à une autre église. Il y avait des chapelains simples suffragants ou vicaires d'un curé, et d'autres chapelains relevant directement d'un seigneur, d'un prince ou d'un souverain. Quelques-uns avaient des fonctions spéciales, à l'armée, à la cour; aujourd'hui encore on les distingue suivant les services qu'ils sont appelés à remplir, dans les lycées, les prisons, etc. Les évêques ont leurs chapelains, qui leur servent ordinairement de secrétaires, et les papes eux-mêmes en ont, soit pour les assister dans leurs cérémonies, soit pour leur dire la messe ou pour les confesser. Dans les égl. protestantes les fonctions de chapelain sont assez indéterminées, locales, spéciales et temporaires; suivant leurs aptitudes, c'est le soin des malades, l'enseignement de la jeunesse ou la prédication qui leur sont plus particulièrement confiés; ils relèvent tantôt de l'État, tantôt des pasteurs titulaires, tantôt des corps ecclésiastiques.

CHAPELET, v. Rosaire.

CHAPELLES. Lorsque, sous Constantin, on affecta au culte du vrai Dieu les basiliques des villes, on comprit la nécessité de multiplier aussi dans les villes et dans les campagnes les édifices du culte, et l'on érigea des autels à la desserte desquels étaient préposés des diacres ou des clercs d'un rang inférieur. Ce n'étaient d'abord que de simples oratoires, ou lieux de prières; la messe ne s'y célébrait pas, si ce n'est dans des circonstances exceptionnelles. Le mot de chapelle n'apparaît guère qu'au 7m« ou au siècle; on donnait le nom de Cappa à la couverture en bois qui, destinée primitivement à protéger l'autel seul, avait été peu à peu agrandie et étendue de manière à protéger aussi les assistants contre la pluie ou contre le soleil, et le nom de chapelles en dériva pour désigner ces modestes églises, comme celui de chapelains leurs modestes desservants. On a cherché à ce mot une autre étymologie dans la cappe, ou grossier capuchon de saint Martin de Tours, que l'on appelait plutôt capella, à cause de sa petitesse, et qui donna son nom à l'église où la la cour de France conservait cette relique comme un palladium national. Des ecclésiastiques spéciaux en avaient la garde et reçurent le nom de chapelains. Aussi dans l'origine le nom de chapelles est-il employé surtout pour désigner des églises privées appartenant à des familles princières. Peu à peu le mot se prit dans un sens plus général et s'appliqua à toutes les églises non paroissiales, construites pour leur usage personnel par des rois, barons ou seigneurs. L'église de Saint-Marc à Venise ne fut d'abord que la chapelle des doges; la chapelle Sixtine à Rome, la Sainte-Chapelle à Paris, l'église du château à Wittenberg, etc. ont commencé par n'être que de simples chapelles, dont les droits augmentèrent à la longue par des né-gociaCions et des concessions successives. Les couvents obtinrent de même pour leurs chapelles des privilèges, et celui d'y lire la messe finit par assimiler à de véritables églises paroissiales des bâtiments qui dans l'intention première des fondateurs, n'étaient que de simples oratoires. Les églises proprement dites se sont cependant réservé en général les baptêmes et les enterrements, ainsi que la grande messe des jours de fête. — On désigne encore sous le nom de chapelles des compartiments particuliers qui dans les églises sont réservés, soit à une famille qui en fait les frais, soit à un saint dont on veut honorer le souvenir; elles sont quelquefois souterraines, et dans ce cas on les appelle cryptes; plus ordinairement latérales, ou disposées autour du chœur, garnies d'un autel et de divers ornements, reliques, bancs pour la famille ou pour les fidèles. Dans certaines églises elles sont fort nombreuses; l'église du Saint-Sépul-cre, à Jérusalem, n'en compte pas moins d'une vingtaine. — On comprend encore sous ce nom l'ensemble des vêtements ecclésiastiques requis pour la célébration de certains actes religieux, à la condition qu'ils soient de la même forme, étoffe et couleur (qui peut varier suivant la liturgie); et aussi le personnel vocal et instrumental chargé de la musique d'église dans les cathédrales.

CHAPITRE; d'une manière générale toute corporation religieuse, vivant sous une même règle et poursuivant un but déterminé; plus spécialement l'ensemble des chanoines rattachés à une cathédrale et servant de conseil à l'évêque. C'était d'abord la règle elle-même, le canon et ses différents chapitres, que l'on appelait ainsi; puis la salle où il en était fait lecture; enfin les titulaires eux-mêmes, ecclésiastiques et parfois laïques. Du temps d'Augustin on réunissait sous ce nom tous les ecclésiastiques, prêtres, diacres et employés d'une cathédrale; leurs conférences étaient régies par des règlements. Sous Chrodegang l'institution prit quelque chose de plus spécial; ses fonctions, ses privilèges et ses droits furent plus nettement déterminés, et les avantages l'emportaient tellement sur les charges, que ceux qui en avaient le moyen faisaient tout pour parvenir à occuper ces places; elles devinrent l'apanage des riches, surtout des nobles, et les chapitres s'arrogeant le droit de se recruter eux-mêmes finirent par devenir de véritables puissances avec lesquelles les rois et les évêques durent compter. Les conciles et les papes intervinrent plus d'une fois pour mettre un terme îi de criants abus, mais ils n'y réussirent qu'imparfaitement. La réforme, et concurremment avec elle le conc. de Trente, diminuèrent ce qu'il y avait d'exagéré soit dans les richesses, soit dans les prétentions de ces corps, dont quelques-uns jouissaient de t>iens très considérables, et la valeur matérielle des canonicats cessa d'atteindre les proportions scandaleuses auxquelles elles avaient été portées. En même temps le mode et les conditions de l'élection furent modifiés, et les pouvoirs des chapitres furent restreints. Un chapitre n'est plus auj. qu'un conseil chargé d'assister l'évêque dans ses fonctions, de le remplacer en son absence, et d'élire son successeur sous réserve de la ratification du gouvernement et de celle du pape. L'Égl. anglicane a conservé les chapitres et les chanoines au service de ses cathédrales. En Allemagne Luther lui-même a essayé de conserver cette institution qui, bien comprise, peut avoir sa raison d'être, mais elle est peu en harmonie avec l'esprit du protestantisme, et Tépiscopat étant supprimé les canonicats ont successivement disparu et les biens des chapitres ont été sécularisés; le peu qui en subsistent encore ne sont plus que des fondations sans caractère ecclésiastique.

CHAPPUIS, Jean-Samuel, né 16 juill. 1809 à Rivaz, Vaud; suffragant à Montreux et à Bâle, prof, de dogmatique à Lausanne en 1838, démissionnaire lors de la crise de 1845, un des théol. les plus distingués et des hommes les plus influents de l'Égl. libre vaudoise; professeur de la faculté libre réorganisée, directeur du Chrétien èvang., président du synode, f 3 avril 1870. Auteur d'une thèse remarquable: l'Ane. Test, dans ses rapports avec le christianisme, et de% nombreux articles. Élève de Néander et ami de Yinet; animé d'une foi vivante et d'un grand respect pour la Bible; théologien indépendant.

CHARENTON, petit village des environs de Paris, au confluent de la Marne et de la Seine, où Henri IV permit, 1er août 1606, aux protestants de Paris de s'assembler pour célébrer leur culte. Le 27 août 3000 fidèles s'y réunissaient dans un local provisoire. Le local, bien aménagé, fut pillé et incendié 21 sept. 1621 à la nouvelle de la mort de Mayenne. En 1625 il était reconstruit par les soins de S. de Brosse, long de 104 pieds, large de 66, avec 81 croisées, 3 étages de galeries soutenues par 20 colonnes doriques, et pouvant contenir plus de 4000 personnes. Le service s'y faisait le dimanche de 9 à 11, et de 1 à 3 h., et le lendemain des jours fériés. La population, dressée par le seigneur le Bossu, était généralement hostile. Après plusieurs tentatives d'incendie, le temple fut démoli par ordre du parlement, à la suite de la Révoc. de l'édit de Nantes, 22 oct. 1685. Plusieurs synodes avaient été tonus à Charenton.

CHARITÉ (La), une des 4 places fortes données aux protestants par te traité de Saint-Ger-main-en-Laye; une des 6 de la trêve de Chantilly; 20 personnes y furent tuées à la Saint-Barthélémy. Bourg de la Nièvre.

CHARITÉ (du latin carus, cher), s'emploie dans le langage vulgaire pour désigner les secours accordés par un plus riche à un plus pauvre. Il se dit aussi du sentiment qui porte à la bienfaisance. Dans un sens plus relevé il caractérise la bienveillance en général, une disposition à juger favorablement, à ne pas soupçonner le mal, à l'atténuer ou à l'excuser. Mais dans le langage religieux il a une signification tout autrement grande, puisque après avoir énuméré les principales vertus chrétiennes, l'apôtre ajoute qoe la plus excellente c'est la charité, 1 Cor. 13. Seulement il faut noter ici que le mot grec employé dans ce passage et dans presque tout le X. T., signifie amour et vient du verbe aimer; c'est donc ainsi qu'il devrait être traduit, et qu'il l'aurait été certainement, si le mot français ne prêtait pas de son côté à des équivoques. De là aussi dans la plupart de nos verrons une hésitation sur le mot à employer; elles mettent tantôt charité, tantôt amour, ce qui enlève à la doctrine chrétienne sur ce point quelque chose de son ampleur et de sa précision. - Cette doctrine pénètre la révélation tout entière. Elle se présente sous les formes les plus diverses: l'amour de Dieu pour son peuple et pour les hommes, l'amour que les hommes lui doivent en retour du sien, l'amour des hommes te uns pour les autres, l'amour spécial des chrétiens pour leurs frères, l'amour des chrétiens pour ceux qui ne connaissent pas l'Évangile, l'amour dans les relations de famille, l'affection provenant d'une sympathie naturelle, etc. On peut remarquer l'excellence de cette vertu dans le fait qu'elle résume la loi tout entière; Wle en est le sommaire, le premier et le second commandement; elle est le nom même de Dieu 1 Jean 4, 16; l'accomplissement de la loi, l'abrégé de l'histoire et de la doctrine évangéli-que, la pierre de touche de la foi, l'objet de Tétonnement des apôtres Rom. H, 33. 1 Jean

I. et de l'admiration des anges, 1 Pier. 1, 12; elle couvre une multitude de péchés.

CHARITÉ (Frères de la), v. Frères. — Les de charité, appelées aussi sœurs grises à cause de leur costume, sont une congrégation de religieuses, fondée 1617 par Vincent de Paule et Mad. Legras. Elles desservent souvent te hôpitaux; il y en a d'excellentes, mais il en <*t qui par un faux zèle sont une plaie pour te pauvres patients qui leur sont confiés.

CHARLEMAGNE, ou Ch. -le-Grand, un des pins grands hommes qui aient jamais été à la tête des nations, et qui, malgré ses guerres continuelles et ses conquêtes, n'a cessé d'avoir en vue le bien de son peuple, les progrès de la ci-\ilisation et la propagation du christianisme. Fils de Pépin, premier roi des Francs, et de Bertrade. il naquit le 2 avril 742 à Aix-la-Cha-pelle; selon d'autres, au château de Salzbourg, Haute-Bavière. On sait peu de chose de sa jeunesse. D'une taille fort au-dessus de la moyenne, et rompu à tous les exercices du corps, il avait ce qu'il fallait pour régner à cette époque; il était en outre profondément religieux. A H ans, en nov. 753, il fut envoyé à la rencontre du pape Étienne II, qui l'année suivante, au couronnement de son père, le sacra, lui et son fr. Carloman, comme futurs rois des Francs. A 19 ans il se signala par sa valeur dans une campagne contre le duc d'Aquitaine. En 768, son père étant mort, il monta sur le trône et partagea d'abord le royaume avec son fr. Carloman, qui avait l'Austrasie et une partie de l'Aquitaine. La mort de ce dernier, 4 déc 771, coupa court à des rivalités naissantes; Charlemagne usurpa les États de ses neveux qui s'enfuirent avec leur mère Gerberge en Lombardie, auprès de leur aïeul Didier, déjà irrité contre Charlemagne qui, d'accord avec le pape, avait répudié sa fille Désirée pour épouser Hildegarde de Souabe. Dès lors la vie de Charlemagne n'est plus, pendant une trentaine d'années, qu'une vie de batailles et d'expéditions militaires, dont le détail, étranger à l'histoire de l'Église, occuperait des volumes. En 774 il fit Didier prisonnier, s'annexa ses États, et se rendit à Rome auprès du pape qu'il avait délivré. En 778 il passe en Espagne, remporte plusieurs victoires sur les Sarrasins, mais voit son arrière-garde massacrée à Ronce vaux, où périt Roland. Il doit recommencer la guerre contre les Saxons. Irois fois soumis et trois fois révoltés à l'appel de l'héroïque Witi-kind; il les soumet de nouveau 782, et pour les punir de leur manque de foi, fait trancher la tête à 4,500 d'entre eux, ne faisant grâce qu'à ceux qui se décident à embrasser la foi chrétienne. Cet acte cruel les exaspère davantage encore; ils sont de nouveau battus et c'est en 785 seulement que Witikind met enfin bas les armes et vient à Attigny rendre hommage au roi des Francs. De 791-96 il combat les Avares et détruit leur empire. Enfin il se soumet Rome et son territoire qui était censé appartenir encore à l'emp. de Constantinople, bien qu'en réalité il fût tombé entre les mains des papes, et Léon III lui rend hommage comme à son suzerain légitime. En 800, à Noël, Léon place sur sa tête la couronne et le proclame emp. d'Occident. Il aurait voulu épouser l'impératrice Irène, de Constantinople. pour fondre en un les deux empires, mais Irène fut détrônée et ce projet n'eut pas de suite. Charles d'ailleurs était assez puissant; presque toute l'Europe lui était soumise, et il put se consacrer plus entièrement à l'œuvre de réorganisation qu'il n'avait jamais perdue de vue, mais qu'il avait dû plus d'une fois interrompre. En 813 il associa à l'empire son fils Louis-le-Déb. et f 28 janv. 814 à Aix-la-Chapelle où il fut enterré. — Les institutions dont il dota son pays prouvent à la fois l'étendue de son génie et l'élévation de ses sentiments. Il fut le restaurateur des lettres et s'entoura de savants qu'il fit venir de divers pays, qu'il mit à la tête des écoles, dont il suivit lui-même les leçons, ainsi que les princes et les princesses de sa famille. Alcuin, Pierre de Pise, Rhaban Maur, Adelhard, et d'autres hommes illustres composaient cette académie royale, dont les membres aimaient à prendre des noms de fantaisie: Horace, Augustin, etc. Le roi avait pris le nom de David, dont les psaumes étaient une de ses lectures favorites. C'est aussi au point de vue de l'enseignement, et pas seulement au point de vue religieux, qu'il favorisa les couvents, désirant relever le niveau moral et intellectuel du clergé et des populations. Il fit composer ou traduire dans le même but un certain nombre d'écrits, fragments de la Bible, extraits de biographies, grammaires, etc. Un des livres qu'il appréciait le plus était la Cité de Dieu d'Augustin. Il voyait aussi dans la Bible un puissant moyen de civilisation, et il en imposa la lecture journalière à tout le clergé jusqu'à ses derniers rangs. Les mesures qu'il prit pour la conversion des Saxons ne peuvent pas être jugées sainement de notre point de vue ordinaire. D'abord il ne leur fit pas la guerre pour les convertir, mais pour les soumettre et pour délivrer son pays des incursions incessantes et dévastatrices de ces barbares; défensive au début la guerre devint peu à peu offensive, comme il arrive souvent, mais le point de départ était dans les attaques renouvelées depuis deux siècles des Saxons contre les frontières franques. S'il mêla ensuite les missions à la guerre, c'est qu'il crut voir dans la foi chrétienne le moyen le plus sûr et le plus efficace d'assouplir moralement des caractères indomptés et sauvages. On peut dire qu'il s'y prit mal, et Alcuin déjà lui fit des observations à ce sujet, mais à la distance où nous sommes, et dans le milieu où nous vivons, il est difficile de juger. Il ne faut pas oublier non plus que s'il envoyait des soldats contre les soldats, il envoyait aussi des missionnaires, des évangélistes et des évêques, pour instruire et pour persuader, à Ehresbourg, Mayence, Fulda, Wurzbourg, Os-nabruck, Minden, Hanovre, Brème, etc. L'état du clergé laissait beaucoup à désirer sous le rapport de l'instruction, du zèle et du dévouement. On trouvait même des ecclésiastiques qui ne savaient pas lire. Ce fut une des principales préoccupations du monarque, de remédier à un pareil état de choses, et il convoqua plusieurs conciles pour aviser. Le recueil de ses Capitu-laires, q. v., contient à cet égard des lois, des décrets et des ordonnances, qui prouvent jusqu'à quel point il s'intéressait au relèvement de son clergé, comme à tous les détails de sa vaste administration, agriculture, marine, ports, beaux-arts, police, finances, etc. Outre se» Lettres, et une grammaire qu'on lui attribue, on connaît encore sous son nom quelques écrits de théol., entre autres les livres Carolins, q. v. Sa Vie a été écrite par son secrétaire Eginhard, et dès lors par un grand nombre d'écrivains. La légende n'a pas tardé non plus à s'emparer de cette colossale figure, et les poètes lui ont prêté des voyages imaginaires à Constantinople et au tombeau du Christ à Jérusalem. Ses dernières années furent troublées par des chagrins domestiques, par la conduite de ses filles, par la mort de ses deux fils aînés Charles et Pépin, et par la faiblesse de caractère du seul survivant, Louis, roi d'Aquitaine, qu'il associa à son trône la dernière année de sa vie, mais avec le pressentiment, trop justifié, qu'il ne serait pas de force à maintenir l'intégrité de l'empire, v. Wyss, Monnier, Mullinger, Capefigue, Gaston Pàris.

CHARLES-QUINT, né à Gand 24 févr. 1500, fils aîné de Philippe-le-Beau, archiduc d'Autriche et de Jeanne, dite la Folle (peut-être à cause de l'indépendance de ses idées religieuses), était petit-fils de l'emp. Maximilien, de Ferdinand le Catholique et d'Isabelle de Castille. Il avait dans les veines du sang allemand, espagnol, portugais, italien, hollandais et anglais, curieux mélange quri devait faire de lui l'étrange souverain que l'on connaît. A 16 ans la mort de son père le fit roi d'Espagne, de Naples, de Sardai-gne, de Sicile, d'Autriche, de Bourgogne et des «entrées nouvellement découvertes au delà de l'Atlantique, le Mexique et le Pérou. Son grand-père étant f 12 janv. 1519, il fut élu à sa place à l'empire, ayant eu pour principal compétiteur François 1er, qUi prodigua l'or pour se faire élire, mais qui fut évincé, sous l'influence prépondérante de Frédéric-le-Sage, électeur de Saxe. Il fut couronné à Aix-la-Chapelle 23 oct. 1520. Il avait promis de défendre les Cent griefs de la nation allemande contre la cour de Rome, mais le besoin qu'il avait du pape lui fit bientôt oublier ses engagements. La rivalité qui existait entre lui et François dura autant que leur vie et donna naissance à quatre guerres qui, après des alternatives diverses, aboutirent à la défaite du roi de France à Pavie 1525, à la prise de Rome 1527, à la paix de Crespy 1544, et à une vaine tentative contre Metz 1552. Par politique Charles passa sa vie à faire la guerre aux protestants, car l'alliance du pape lui était nécessaire contre la France, et elle menaçait à chaque instant de lui échapper. Cependant les Turcs d'une part, représentés par Soliman, et d? l'autre les pirates de la Méditerranée, dans la personne des deux frères Barberoussse, l'obligèrent plus d'une fois à concéder à ses sujets une liberté de conscience momentanée, pour poovoir réunir toutes ses forces contre l'ennemi du dehors. C'est à la diète de Worms 1521 qu'il se trouva pour la première fois en présence des idées nouvelles et de Luther. L'édit de Worms qu'il publia à cette occasion lui fut probablement inspiré par le légat Àléandre, mais la guerre l'empêcha d'y donner suite. En mars 1529 la diète de Spire confirme l'édit de Worms et décide que les choses resteront en l'état jusqu'au prochain concile; les villes et les princes évangéliques déposent le 19 avril une protestation solennelle contre ce vote et sont dès lors appelés les Protestants. Charles les accueille si mal que le bouillant Philippe de Hesse est sur le point d'organiser une Ligue de la résistance. En 1530 a lieu la diète d'Augsbourg, où Ch. a pour conseiller Granvelle; malgré le mauvais vouloir de l'emp. les princes évangéliques déposent le 25 juin la célèbre Confession de foi (Au-gustana) rédigée par Mélanchthon, qui produit une impression extraordinaire, même sur les princes catholiques. Il y est répondu au bout de quelques jours par une Confutatio très faible et insuffisante, dont Mélanchthon n'a pas de peine à démontrer la pauvreté dans sa remarquable Apologie de la Confession. Mais la majorité est là, et le légat du pape. Charles ordonne aux évangéliques de se soumettre jusqu'au prochain concile, et il leur donne 7 mois pour se réconcilier avec l'Église. En même temps il cherche à faire nommer roi de Rome l'archiduc Ferdinand, son frère, mais Jean de Saxe et Philippe de Hesse ont quitté la ville sans prendre congé et le 24 déc. 1530 ils posent les premières bases de la Ligue de Smaicalde, qu'ils confirment définitivement le 27févr. 1531 pourôans. L'approche des Turcs décide Charles à signer à Nuremberg le 23 juillet la première paix de religion, paix trompeuse et forcée, mais qui permit aux évangéliques de poursuivre en paix leur œuvre pendant une dizaine d'années. L'Intérim de Ratisbonne 1541 leur donna encore quelques loisirs, quoique l'empereur, dans son discours de clôture, se montrât encore leur ennemi. Mais après que Paul III eut convoqué le concile à TVente, l'emp. se crut en droit de contraindre les protestants par les armes, et en 1547 il les avait réduits à capituler. Chose étrange, et qui montre combien la politique l'emportait chez lui sur la question religieuse, à ceux qui lui cédaient leurs États il garantissait la liberte de conscience, et quand, à Wittenberg, le duc d'Albe et l'év. d'Arras lui proposèrent de faire exhumer Luther et d'en jeter les cendres au vent, il répondit: Je fais la guerre aux vivants, mais pas aux morts. La même année, à Augs-bourg, il déclara son intention de maintenir la paix de l'empire par la tolérance accordée aux dissidents. Ceux-ci avaient à peu près promis de se rendre au conc. de Trente, mais par une fatalité malheureuse le pape venait de le transférer à Bologne et refusait de donner aux protestants aucune garantie, ce qui les déliait de leur promesse vis-à-vis de Charles et déliait eu même temps celui-ci de ses engagements envers le pape. Décidé d'accorder la liberté de culte, l'emp. crut devoir régler l'exercice de cette liberté par un décret, connu sous le nom d'Intérim d'Augsbourg, qui ne satisfit naturellement aucune des deux parties, et qui était si peu favorable aux évangéliques que les princes songèrent un moment à le remplacer par l'Intérim de Leipsic. La prétention de Charles de faire donner la couronne impériale à son fils Philippe II, et d'étendre les prérogatives du souverain en matières religieuses, contribua encore à augmenter la méfiance générale. Son fidèle allié, Maurice de Saxe, dont il retenait en prison, malgré la foi jurée, le beau-père Philippe de Hesse, finit par se tourner contre lui, s'empara de Magdebourg, et avec l'aide de quelques princes, contraignit Charles à signer le 2 août 1552 la paix ou transaction de Passau, qui rendait la liberté aux prisonniers, restituait les provinces conquises et garantissait la liberté de conscience. En même temps Charles perdait en France Metz, Toul et Verdun; il devait lever le siège de Metz, et s'écriait, en arrivant à Bruxelles: Décidément la fortune est une femme; elle m'était favorable quand j'étais jeune, elle m'abandonne à présent que je vieillis. Il tomba dans une profonde mélancolie, refusa d'assister à la diète d'Augsbourg où fut signée enfin la Paix de religion, 21 sept. 1555, et comme les médecins lui conseillaient un climat plus chaud, il abdiqua le 25 oct. à Bruxelles, dans la même salle où il avait été proclamé empereur 40 ans auparavant, et se retira en Espagne, au couvent de Saint-Just, Estramadure, où il se fit construire une maison avec les dépendances nécessaires, et où il partagea son temps pendant 3 ans entre l'horlogerie, le jardinage et les exercices de dévotion. Il continuait de s'intéresser à ce qui se passait, et entretenait une correspondance suivie avec son fils Philippe II, qu'il avait fait roi d'Espagne et souverain des Pays-Bas. Il apprit ainsi les progrès incessants du protestantisme et il put comprendre que les convictions religieuses ne s'imposent pas par la violence. Il vit même les idées de la réforme pénétrer en Espagne; son confesseur Augustin Cazalla les embrassa; un autte de ses confesseurs, l'archev. Carranza, dominicain, fut également suspect de les avoir embrassées, et mourut en prison. Enfin Charles-Quint lui-même fut accusé d'avoir penché vers le protestantisme et de s'être converti, sous l'influence de son maître d'horlogerie qui était protestant. Parmi les fantaisies qu'il se passa dans ses dernières années, on cite le simulacre de ses funérailles auxquelles il assista de derrière un vitrage. Il mourut le 21 sept. 1558, âgé de 59 ans et 7 mois. Son génie était incontestable; sa dissimulation n'est pas moins connue; personne ne put jamais se fier à lui. Il a eu de nombreux biographes. Parmi ses enfants illégitimes, le plus connu et le plus distingué fut le célèbre don Juan d'Autriche.

CHARLES IX, roi de France, l'avant-der-nier des Valois: 2m« lils d'Henri II et de Catherine de Médicis, né 1550, succéda en 1560 à son fr. François II. Sa minorité fut troublée par les intrigues de sa mère, par l'ambition des Guise, et par les guerres de religion. Le colloque de Poissy auquel il assista en personne 1561, n'ayant pas abouti, les protestants durent songer à se défendre. L'édit du 17 janv. 1562, quoique rédigé par le chancelier de l'Hôpital, ne leur offrait pas assez de garanties, et la guerre fut déclarée. Sans en être directement responsable Charles IX compte dans son dossier le massacre de Vassy, 1er mars 1562. Les protestants furent battus successivement: à Dreux par le duc de Guise 1562, à Saint-Denis par Montmorency 1567, à Jarnac et à Moncontour par le duc d'Anjou 1569. Enfin la paix fut signée à Saint-Germain, 15 août 1570; les protestants reçurent 4 places de sûreté, et le mariage de Marguerite, sœur de Charles IX, avec le roi de Navarre, Henri IV, 16 août 1572, pouvait faire espérer une réconciliation durable, quand, 6 jours après, le 24 août, eut lieu l'horrible massacre de la Saint-Barthélémy. Le rôle de Charles IX fut équivoque; il voulut un moment anêter les massacres, puis, comme enivré par l'odeur du sang, il s'y associa bientôt et envoya de nouveaux ordres en province pour y organiser les exécutions; il ne fit grâce qu'au roi de Navarre, au prince de Condé et à son médecin Ambroise Paré. Deux jours après il se rendit à Montfaucon pour y voir les restes de l'amiral, et comme on lui fit observer qu'ils sentaient déjà: Oh, dit-il, le corps d'un ennemi mort sent toujours bon. Mais ces assassinats ne pacifièrent pas le royaume: les réformés coururent aux armes avec l'énergie du désespoir; un grand nombre de catholiques se joignirent à eux par horreur du crime, et une insurrection formidable, encouragée par le parti des Mal-contents, menaçait d'être victorieuse, quand le 30 mai 1574, après 3 jours de maladie, Charles IX mourut d'une violente hémorragie; le sang suintait de sa peau. Depuis la Saint-Bar-thèlemy il était déchiré de remords et poursuivi par des songes affreux, qui achevèrent de miner une constitution déjà usée par les excès et les débauches. Sa nourrice, une huguenote, qu'il aimait beaucoup, l'assista seule à son lit de mort et lui annonçait la grâce promise à ceux qui se repentent. Comme sa mère, Charles aimait les beaux-arts; on a des vers de lui.

CHARLIER, v. Gerson.

CHARPENTIER 1° Pierre, toulousain, feignit d'embrasser la foi réformée, pour pouvoir servir d'espion à Catherine de Médicis, et il réussit à se placer à Genève comme prof, de droit civil, 1566; il partit en 1570 sans payer ses dettes, vint à Paris où il se posa comme intermédiaire entre les huguenots et le conseil privé, échappa à la Saint-Barthélémy et fut démasqué à Strasbourg. N'ayant plus rien à ménager, il publia le 15 sept. 1572 sa Lettre à Portus, de 72 pages, déjà probablement rédigée d'avance, où il cherche par les plus énormes arguments à justifier les massacres du 24 août. Ce méprisable mouchard, nommé avocat du roi, après avoir servi la Ligue, joua la comédie d'une nouvelle abjuration, le 16 janv. 1604, comme s'il avait jamais été protestant, fut nommé doyen de l'école de droit à Pont-à-Mousson, et f mai 1612, méprisé de tous les partis. Il a publié encore un Avertissement « sainet et chrétien » 1575, pour engager les protestants à déposer les armes, et des Discours académiques, 1608.

2° Charpentier de Ruffec, martyr de l'An-goumois, 1685. Les dragons lui firent avaler 25 à 30 verres d'eau, et firent dégoutter dans ses yeux le suif d'une chandelle allumée. Il mourut dans d'horribles souffrances. Son fils se réfugia en Angleterre, où il était pasteur à Cantorbéry vers 1710.

CHARRON, Pierre, penseur et philos., né 1541 à Paris, d'un père libraire qui avait 25 enfants. D'abord avocat, puis prêtre, il prêcha dans le midi avec succès, se lia à Bordeaux avec Montaigne, fut nommé vicaire-général de l'év. de Cahors, délégué par sa province à l'assemblée du clergé de France, qui le choisit pour secrétaire, et f subitement à Paris 1603. Son meilleur ouvrage, provoqué sans doute par l'excellent traité apologétique de DuPlessis-Momay, a pour titre: Traité des trois vérités; il prouve 1° contre les athées, l'existence de Dieu, 2° contre les juifs et les musulmans, que la religion chrétienne est la vraie, 3° contre les hérétiques, protestants et autres, qu'il n'y a de salut que dans l'Égl. catholique. Il a aussi publié 16 Discours chrétiens, et un Traité de la Sagesse, souvent réimprimé.

CHARTREUX, ordre de religieux très sévère, fondé vers 1084 dans les environs de Grenoble par Bruno, q. v. Les solitaires se bâtirent d'abord quelques cellules, puis un oratoire. Ils étaient vêtus de blanc et s'assujettissaient au silence le plus absolu; leur régime était de la plus stricte sobriété, leurs occupations consistaient dans la prière et dans la copie d'ouvrages religieux. Jusqu'en H30 ils n'eurent pas de règle écrite. L«ur 5»® prieur, Guigon (le 1er avait été Bruno) leur donna alors ses Coutumes des Chartreux. Bernard de la Tour réunit en 1238 les résolutions prises en chapitre général depuis 1141; d'autres collections furent réunies en 1367, en 1509 et en 1581. L'ordre, reconnu en 1170 par Alexandre, avait pour principal caractère la séparation la plus entière du monde et de ses tentations; ils ne s'intéressaient à rien de terrestre, et même ils frayaient peu entre eux; ils anticipaient sur le système pensylva-nien. Leur vie calme, sans émotion, leur sobriété, leur permettait d'atteindre un âge très avancé. Leur isolement les mit aussi à l'abri des changements successifs qui se produisaient dans les autres ordres, au point qu'ils sont auj. comme une pétrification bien conservée de ce qu'ils étaient à l'origine. Ils perdirent de bonne heure leurs fondations calabraises, qui passèrent aux cisterciens; ils faisaient peu de propagande; en 1137 ils ne comptaient que 4 maisons, toutes en France; en 1151 ils en avaient 14, mais en 1258, grâce à la faveur des papes, ils en comptaient 56. Pour éviter des rivalités qui s'étaient produites, Jules II décida 1508 que le prieur de la Grande-Chartreuse serait touj. le général de l'ordre. En 1513 on renditaux chartreux le couvent de Saint-É tienne. Calabre, où reposait leur fondateur, et au commencement du 18me siècle l'ordre possédait 170 maisons, dont 75 en France. Supprimé en 1790 par la révolution, l'ordre se releva en 1814; en 1819 la Gr. Chartreuse était de nouveau habitée, et c'est de cette époque à peu près qne date la célèbre industrie qui a popularisé ces religieux, la fabrique des différentes espèces de chartreuses. Ils n'ont plus en France que cette seule maison, mais ils en ont 92 dans les autres pays catholiques, et en outre 5 communautés de femmes, dont 3 en France. Les couvents des chartreuses datent déjà des 13me et 14"* siècles; leur règle est un peu moins sévère; elles peuvent manger ensemble et même parler; elles ont pour confesseurs des chartreux, qui demeurent avec quelques frères lais dans de petites maisons voisines. — Les chartreux ne se sont jamais donnés pour faire des miracles; mais un de leurs historiens, regrettant cette-lacune, y a pourvu par une légende sur l'origine de l'ordre. Raymond de Paris, docteur en théol. et chanoine de N. Dame, étant + 1082, on lui fit des funérailles dignes de sa position; mais par trois fois, pendant la lecture de l'office, le défunt ressuscita et se dressa sur son séant pour dire à l'assemblée, d'abord: C'est par le juste jugement de Dieu que je suis accusé, puis: Que je suis jugé; et la dernière fois, d'une voix terrible: Que je suis condamné! C'est à la suite de cette scène, dont il fut témoin, que Bruno se convertit et abandonna le monde.

CHASSIDIM. On nommait ainsi chez les juifs tous ceux qui s'adonnaient à des exercices extraordinaires de piété; c'étaient les saints par excellence. Il y en a eu de tout temps de vrais, chez les juifs comme chez tous les peuples, et on les trouve déjà mentionnés 1 Macc. 7, 13., mais la considération et les avantages qui s'attachaient à la personne de ces hommes distingués produisirent leurs effets accoutumés, et l'on vit de bonne heure aussi des individus faire de la piété une industrie, un moyen de gagner, en même temps que d'autres, plus consciencieux peut-être, mais fanatisés, s'adonnaient à des arts occultes et se posaiënt en faiseurs de miracles. Plusieurs, par un spiritualisme exagéré, passèrent au christianisme sans y croire, mais en interprétant d'une manière allégorique les récits du N. T. et en les faisant servir d'enveloppe à leurs idées philosophico-religieuses. — Dans un sens plus restreint on a donné ce nom à une secte qui parut vers 1740 en Pologne et en Podolie et qui eut pjur fondateur un certain Israël Baal Schem, surnommé Bescht. Cet homme réussit à se faire une réputation de sainteté, grâce à sa vie contemplative, à ses études, à ses fréquentes ablutions et à sa bienfaisance. A l'inverse des ascètes il fit de la satisfaction des besoins matériels un aide plutôt qu'un obstacle au développement de la piété, el il obtint ainsi de nombreux disciples. Il inventa sur sa naissance et sa jeunesse des légendes, qui furent publiées en 1815 par son petit-fils Bœr Linez, et il fit de l'attachement à sa personne la première condition de la communion avec Dieu. Il prit pour lui et pour ses successeurs le titre de Tsadik, saint, pieux; il exigea de ses fidèles la foi en son infaillibilité et des cadeaux sans nombre sous toutes les formes; celui qui pouvait toucher la chemise du Tsadik était absous, même d'un meurtre. Quant aux simples Chassidim, saints, fidèles, ils devaient s'estimer heureux de pouvoir faire quelque chose en faveur de leur chef; ils ne pouvaient rien entreprendre sans le consulter, et cela coûtait cher; s'ils se ruinaient pour lui, c'était un grand honneur. Bescht et ses sectateurs furent anathé-matisés et persécutés par la synagogue, mais ils n'en continuèrent pas moins de subsister comme secte, gardant le Talmud comme règle de leurs cérémonies et de leur foi, mais préférant les livres de prières espagnols et orientaux aux allemands et aux polonais. Partout où il y a des Chassidim ils se constituent en association, ou Klossel. Les règles et doctrines de la secte restèrent secrètes jusqu'après la f de Bescht 1760; dès lors les affiliés se répandirent jusqu'en Moldavie, en Valachie, en Hongrie et en Galicie. Ils sont auj. peu nombreux. On a remarqué la grande analogie qui existe entre leur organisation et leurs prétentions cléricales et celles de la hiérarchie romaine.

CHASUBLE, ornement que le prêtre met pardessus l'aube et l'étole, quand il dit la messe. Innocent III y voit l'image de l'Église universelle. Chez les diacres elle s'appelle dalma-tique.

CHATEL, Ferd.-François (l'abbé), né 179S à Gannat, vicaire k Moulins, puis aumônier de la garde, fondateur d'une Église catholique française qui, dépouillée des vérités chrétiennes, n'admettait que la loi naturelle. Il fleurit sous Louis-Philippe, écrivit la Conf. de foi de son église, un Catéchisme, le Code de l'humanité; se lit consacrer Primat des Gaules par le grand maître des Templiers, Fabre-Palaprat; et, ses chapelles ayant été fermées par la police en 1842, il entra dans l'administration des postes. 11 voulut recommencer après 1848, mais ne réussit pas davantage, f 1857.

CHATELAIN, Jean, ou Chastellain, moine au-gustin et docteur, converti par une étude personnelle de la Bible. Il prêcha dans le duché de Lorraine, en particulier à Metz, où il y avait alors environ 900 prêtres. Il en fut bientôt craint et détesté, grâce à la popularité qu'il s'était acquise en annonçant la vérité et en l'opposant aux messes et autres cérémonies cléricales. Comme ils craignaient le peuple, les prêtres jugèrent prudent de n'arrêter Châtelain qu'après l'avoir fait sortir de la ville. Ils l'enlevèrent 5 mai 1524 (jour de l'Ascension) et le laissèrent languir plus de 8 mois enchaîné dans un cachot. Menaces, promesses, discussions, rien ne put l'ébranler; la parole de Dieu restait victorieuse. On le dégrada de sa qualité de prêtre, et l'évêque de Metz le livra au juge, disant: « Nous nous en remettons à votre clémence pour que ce pauvre homme ne soit ni mis à mort, ni maltraité. > Le juge comprit et Châtelain fut condamné au bûcher. En s'y rendant il disait: « Je n'ai rien prêché qu'Augustin ou Ambroise n'aient prêché avant moi. > Il mourut, priant et chantant des cantiques, 12 janv. 1525. Il est l'auteur d'une Chronique de Metz en vers. Châtelain était le grand ami de Lambert d'Avignon.

CIIATELLION, v. Castalion.

CHATILLON, illustre famille de France, dont l'origine remonte au 9®« siècle, et qui a compté parmi ses membres un pape, Urbain II; un sénéchal de Bourgogne f 1219, qui accompagna Philippe-Auguste en Terre-Sainte; un connétable, Gaucher, 1250-1329, qui fut ministre de

Louis X; un duc de Bretagne, Charles de Blois, etc. Un de ses descendants fut:

lo Gaspard de Châtillon et de Coligny, maréchal de France, qui servit avec distinction sous François 1er, et f 1322, en allant au secours de Fontarabie. Il avait épousé Louise, sœur du connétable de Montmorency, et la laissa veuve avec 4 fils: 1° Pierre, qui mourut jeune 1534, Odet, Gaspard et François. 2<> Odet, né 10 juillet 1517, avait plus de goût pour la diplomatie ou pour l'Église que pour la carrière des armes. Il accepta avec reconnaissance le chapeau de cardinal que lui offrit son oncle de Montmorency; il avait à peine 16 ans quand Clément VII le revêtit de la pourpre, 7 nov. 1533. Il fut en même temps fait archev. de Toulouse et enrichi de nombreuses abbayes. Il assista à l'élection de Paul HI, fut appelé en 1535 à l'évêché de Beau-vais, entra à la cour des pairs en 1538, concourut à l'élection de Jules III, et promulgua en 1554 ses Constitutions synodales contre différents abus ecclésiastiques. Plusieurs membres de sa famille s'étaient convertis au protestantisme; il ne tarda pas à faire comme eux 1561, renonça à ses dignités ecclésiastiques, prit le nom de comte de Beau vais, suivit Condé à Orléans et travailla à faire accepter dans le midi l'édit d'Amboise. Cité devant l'Inquisition, il reprit sa soutane rouge, et assista dans ce costume au lit de justice où Charles IX fut déclaré majeur; il se maria, aussi dans ce costume, avec Elisabeth de Hauteville, 1er déc. 1564. Aprèsde longues et inutiles négociations avec Catherine qui voulait seulement traîner en longueur, il dut fuir en Angleterre, où il fut magnifiquement reçu par Élisabeth, € ainsi que Madame la cardinale, » et où il put rendre de grands services à ses coreligionnaires. Condamné par le parlement comme rebelle et coupable de lèse-majesté, il fut empoisonné par un de ses domestiques et f 14 févr. 1571; enterré à Cantorbéry. Il ne laissait pas d'enfants. Brantôme, deThou et La Faille rendent le plus bel hommage à son intelligence et à son caractère.

3° Gaspard, comte de Coligny, v. Coligny.

4° François, frère des précédents, sieur d'An-delot, né 18 avril 1521 à Châtillon-sur-Loing; génie actif, entreprenant et généreux, se distingua à Landrecies, Cérisoles et Carignan, épousa Claude de Rieux le 19 mars 1547, et fut nomme inspecteur-général de l'infanterie, par la faveur de son oncle le connétable. Fait prisonnier en Italie, il fut enfermé dans le château de Milan, où il employa ses loisirs à lire les œuvres de Calvin; il en fut si vivement frappé qu'il embrassa avec ardeur ses opinions et travailla à les faire partager à ses frères. Libéré en 1556, il rendit de grands services au roi k Saint-Quentin, Calais et Guines, mais excita par cela même la jalousie des Guise, qui travaillèrent à le perdre et y réussirent en l'accusant d'hérésie. Il fut enfermé au château de Melun et n'en put sortir qu'après avoir autorisé une messe dite dans sa chambre, ce dont il fut sévèrement repris par Calvin. Dès lors il se trouve mêlé à toutes les guerres de religion, dont il fut un des plus actifs organisateurs, et malgré une santé compromise il se multiplie dans les négociations comme dans les batailles, à Orléans, à Dreux, dans le midi. En 1564 il épouse Anne de Salm. Peu après la bataille de Jarnac il se rendit à Saintes, où il + en peu de jours, 7 mai 1569, probablement empoisonné. Il fut inhumé provisoirement à La Rochelle. Il laissait de ses deux femmes 4 filles et 4 fils, dont 3 moururent la même semaine, avril 1586, après le combat de Taillebourg; le dernier, Guy-Paul de Laval, né le 13 août 1555, ne laissa qu'un fils, Guy de Coligny, qui f le 30 déc. 1605, sans postérité, et avec lequel s'éteignit la famille d'Andelot.

CHAYLA (l'abbé du), originaire du Haut-Gé-vaudau, cadet de la maison Langlade du Chayla, destiné dès son enfance à entrer dans les ordres, avait des aptitudes plus militaires que pastorales, et fut enrôlé d'abord dans les missions étrangères. Il fit ses premières armes dans le royaume de Siam contre les sectateurs de Boudha. De retour en France peu après la révocation de l'édit de Nantes, il fut nommé archiprê-tredes Cévennes et inspecteur des missions du Gévaudan. Son ministère fut une longue suite d'atroces persécutions; il remplit les prisons et les bagnes, multiplia les supplices et fut le fléau de la contrée. Ses crimes finirent par trouver leur châtiment. Quelques-unes de ses victimes étaient renfermées dans les caves de sa maison du Pont de Montvert quand, un soir, une petite troupe de 50 hommes, conduite par Esprit Sé-guier, se précipite sur la maison pour délivrer les captifs, dont les pieds sont bientôt débarrassés des ceps qui les enserrent. Ils sont libres. Les Cévenols mettent le feu à la prison; l'abbé essaie de fuir avec ses gens; il tente inutilement de fléchir ses ennemis, personne ne croit à ses paroles et à ses promesses, et il tombe frappé de 50 coups, dont 20 étaient mortels. Ce fut l'origiue de la guerre des camisards. Ce meurtre fat cruellement vengé; le 12 août Séguier était brûlé vif au Pont de Montvert, après avoir eu le poing coupé; un autre prisonnier était roué à Ladevèze. un troisième pendu à Saint-André de Lancize.

CHAZARES, v. Cyrille.

CHEMNITZ, Martin, né 15 nov. 1522 à Treun-Britzen, Brandebourg. Il eut une jeunesse difficile et dut interrompre à plusieurs reprises ses études pour gagner sa vie; il fut 3 fois maître d'école. La protection de Mélanchthon lui procura à Kônigsberg 1547 une bonne place auprès du duc Albert de Prusse, d'abord comme précepteur de quelques enfants nobles, puis comme bibliothécaire, ce qui lui permit de se mettre vigoureusement à la théologie. Il avait surtout jusque-là étudié les langues, les mathématiques et l'astrologie; il tirait même des horoscopes. Mais le duc ayant appelé Osiander à Kônigsberg lors des luttes sur les rapports de la loi et de l'Évangile, Chemnitz prit parti contre Osiander, et quoique son opposition fût très modérée, il comprit que sa position était fausse vis-à-vis du prince, qui regardait Osiander comme son père spirituel. Il donna sa démission, vers la fin de 1552, et son protecteur ne le laissa partir qu'à regret. lise rendit à Wittenberg où, sur le conseil de Mélanchthon, il donna un cours de dogmatique; son succès fut immense; il aurait pu se faire une carrière dans le professorat, mais ayant été appelé comme pasteur à Brunswick, il se décida à accepter cette vocation, 16 déc. 1554. Il épousa le 19 août suivant la fille d'un juriste nommé Jeger. A partir de ce moment la polémique prit une grande place dans sa vie. Il donne des cours de dogmatique et d'exégèse. Il prend parti, avec Môrlin, l'adversaire d'Osiander, contre Hardenberg de Brème, et publie plusieurs écrits sur la Cène du Seigneur. Il est très luthérien, mais il veut qu'on s'en tienne aux paroles de l'institution; il admet la présence réelle, mais il ne veut pas qu'on l'explique; il y voit un acte spécial de Dieu en faveur de ceux à qui le Christ veut se donner; ce n'est pas de l'ubiquité, c'est de la muUivoliprê-sence. La peur du calvinisme ne lui fait cependant pas oublier d'autres ennemis; il écrit ses Principaux chapitres de la théol. des jésuites, car il a compris que les jésuites sont une arme de guerre contre le protestantisme. Un jésuite du conc. de Trente, nommé Andradius, lui ayant répondu, il est amené à faire une étude des travaux et des décrets de cette grande assemblée, et il publie successivement, dans l'espace de dix années, 4 vol. in-folio: Examen du conc. de Trente (latin), qui est son principal ouvrage et qui a encore auj. de la valeur. Il est nommé surintendant, puis docteur. Par son tact il vient à bout des difficultés qu'il rencontre dans l'application de la discipline dans l'Église. Malheureusement il apporte un esprit trop entier dans les conflits confessionnels, et s'imagine qu'on peut maintenir l'unité par la rigueur des formulaires; il attaque avec violence toutes les doctrines qui lui paraissaient entachées de calvinisme; il condamne sons des formes polies les tendances de Mélanchthon; il donne un préavis sévère contre le catéchisme de Wittenberg, et se montre en tout un luthérien rigide. Il a pour lui le surintendant général Sel-necker et le pasteur et prof- Andréa, ainsi que la majorité du clergé allemand, et il fait passer à Torgau, 21 mai 1576, une première rédaction de la Formule de concorde. Mais bientôt il doit reconnaître que ce chemin mène droit à Rome; la discorde résulte de la formule de Concorde. Il essaie d'en adoucir un peu les angles, en mai 1577, mais il s'est usé dans ces luttes stériles, et le 9 sept. 1584 il donne sa démission, sentant ses forces diminuer et sa mémoire s'affaiblir. f 8 avril 1586. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages; citons encore ses Lieux communs do dogmatique, son Harmonie des évangiles, son Traité des indulgences, et plusieurs mss. conservés à la biblioth. de Wolfenbtittel. Vie, par Rethmeyer. — Son fils Martin fut chancelier du prince duc de Holstein-Gottorp.

CHENEVIÈRE, J.-J. Caton, né 1783 à Genève, f 5 févr. 1871. Pasteur à Marseille, puis pasteur et prof, de théol. à Genève, orateur éloquent et populaire, il se distingua surtout par son opposition au réveil religieux, et fut touj. unitaire, mais supranaturaliste. Auteur d'Essais théol., d'Observations sur Saurin, d'une trad. de rintrod. de Michaëlis au N. T., d'un Précis des débats théol., de Sermons, et de plusieurs écrits polémiques contre Strauss, Schérer. — Son fils Charles (né 16 oct. 1813, + 1er déc. 1877) a laissé un Mémoire sur Farel, Froment. Viret (couronné), des sermons et des mélanges.

CHEVALIERS, v. Christ, Frères 6°, Teuto-nique, etc.

CHILI, pays de l'Amérique du Sud, constitué en république depuis 1817; le catholicisme est la religion nationale, mais la liberté des cultes est garantie par la constitution de 1833. L'État se réserve la haute main en religion; il a réduit à H les jours fériés, et interdit les processions, sauf le jour de la Fête-Dieu. Le nombre des couvents est limité et diminue chaque année. Un peu plus de 2 millions d'habitants. On ne prévoit pas les changements qu'amèneront les nouvelles circonstances issues de la guerre avec le Pérou.

CHILIASME, mot dérivé du grec kilios, mille (môme racine que pour les kilos du système métrique), et servant à désigner la doctrine plus connue chez nous sous son nom latin de millenium. Cette doctrine, qui ne repose que sur un seul texte précis, Apoc. 20, 1-6. peut se développer d'après un grand nombre d'autres textes suivant qu'on l'entend dans un sens plus ou moins spirituel: ainsi Gen. 12, 1. 15, 5. 27, 27, sq. Matt. 5, 5. 19, 29. Luc 14, 14. 1 Cor. 15, 25, etc. L'idée d'un règne temporel de Christ sur la terre a eu à toutes les époques des partisans décidés, sans toutefois qu'ils aient formé une secte à part, et sans que leur doctrine ait pu trouver place dans le symbole d'aucune Église. Ce fait tient à la double circonstance qu'un règne de mille ans est bien annoncé d'une manière positive, mais qu'il n'y a rien de précis quant au mode de son avènement et de sa manifestation. Les écrivains se sont donné libre carrière à cet égard, et les opinions les plus divergentes, même les plus étranges, se sont produites, de sorte que plusieurs pères de l'Église ont pu paraître combattre le chiliasme, quand ils n'en combattaient que les exagérations ou les conceptions trop charnelles. Barnabas, le pasteur d'Hermas, les Ebionites, l'hérétique Cérinthe, Papias, Iré-née, Tertullicn, renferment de nombreux passages chiliastes; mais Caïus de Rome, et surtout l'école d'Alexandrie, Origène, Népos, les combattent vivement, et la discussion aurait même abouti à un schisme sans l'intervention de Denys qui réussit par sa modération à calmer les esprits. Le triomphe de l'Égl. sous Constantin, succédant à l'ère dos martyrs, mit un terme aux excentricités chiliastes, et depuis Augustin on admit comme établi que l'Église était le règne de Dieu sur la terre; mais le moyen âge, avec ses dogmes, ses institutions et son clergé corrompus, ramena l'idée d'un triomphe plus pur et plus vrai; Joachim de Flore fut à la tête de nouveaux millénaires rêvant d'un retour de Christ qui rendrait au monde l'Évangile éternel. Avec la réformation s'inaugure une seconde période pour cette doctrine. La Bible est abondamment répandue, on la lit, on l'explique; on trouve dans l'Apocalypse l'histoire prophétique de l'Église: la haine de Rome déteint sur l'interprétation, et une foule de visionnaires se forgent un monde à venir qu'ils justifient par l'Ecriture en en sollicitant doucement ou violemment les textes; ainsi les anabaptistes, Joris, Bœhme, Weigel, et d'autres. Au 17me siècle, et peut-être sous l'influence des guerres de religion, l'év. Comenius, P. Jurieu, les Laba-distes, Antoinette Bourignon, Poiret, Joseph Mède, Jane Leade, Th. Burnet, se consolent du présent par l'espoir d'un rétablissement final qui a pour base le chiliasme. Dans l'Égl. luthérienne le piétisme fonde ses espérances sur un règne de mille ans emprunté à l'anglais Peter-sen; Spener n'y reste pas étranger; Joachim Lange et la Bible de Berlehourg le popularisent; au commencement du 18m* siècle tout le monde y croit. Bengel commence une 3e période, plus scientifique, plus ecclésiastique, plus compliquée aussi de calculs sur la fin des temps; mais chacun présente son système avec une précision toujours croissante et avec des détails toujours plus complets, depuis le prélat Œtinger, jusqu'à Hahn, Stilling, Lavater, Hess, et dans notre siècle Irving, Cumming. les mormons. Les excès des uns, contrebalancés par les excès des autres, ne doivent pas faire rejeter le tout, et s'ils renferment un appel à la prudence, ils n'autorisent pas la négation. On lira avec fruit: Bogue sur le Millenium, trad. de l'anglais; Guère, faragl aux derniers jours; Rougemont, la Révél. de saint Jean.

CHINE. Cette vaste contrée fut mise pour la première fois en rapport avec le christianisme par les nestoriens vers l'an 636, sous l'influence dn patriarche Jésujasub, qui y envoya des missionnaires. On mentionne un métropolitain vers NSW; Assemani en nomme un vers 520, et Ar-nobe parle même de conversions qui auraient eu lieu au commencement du 3me siècle parmi les Sères, qui ne sont autres que les Chinois. Mais ces origines anciennes sont un peu sujettes à caution à cause de l'imperfection des connaissances géographiques chez les anciens. Ce qui parait presque hors de doute, c'est qu'il y eut un mouvement chrétien sérieux dans une province de l'empire, de 636 à 781. Mais à partir du 9®e siècle ce mouvement s'arrête pour ne reprendre an moment que vers 1202 après les conquêtes de Gengiskan. Nicolas III, en réponse à une ambassade spéciale, envoie aux Mongols et en Chine une nombreuse mission de moines, parmi lesquels Marco PqIo; vers 1290 Nicolas IV en emroie d'autres, et dans le nombre Monte Cor-vino, franciscain pieux et distingué, qui entra en rivalité avec les nestoriens, fit venir de nouveaux missionnaires, et fut nommé archev. de Kambalu. Il fut remplacé par Nicolas, accompagné de 26 prêtres et moines; d'autre* arrivèrent encore en 1342 et en 1353, mais en 1368, a la suite d'une révolution, la mission fut dissoute, et l'on n'en entendit plus parler. Les Portugais ne trouvèrent plus trace d'Égl. chrétienne, quand ils renouèrent en 1522 leurs relations commerciales avec ce pays, mais en 1588 les jésuites Ricci et Schall reprirent la mission, et ils comptaient déjà en 1651 plus de 150,000 adhérents. Malheureusement, soit par leurs intrigues, soit par leurs luttes avec les dominicains, ils perdirent le terrain qu'ils avaient con-qnis, et des édits persécuteurs les frappèrent en 1684 et en 1747. Enfin le 19*e siècle a vu renaître, sur une plus grande échelle et dans de meilleures conditions, cette œuvre si importante et si difficile. Les catholiques ont eu le père Hue et d'autres hommes non moins zélés et dévoués, mais qui ont compromis plus d'une fois lear mission par la manière dont ils ont voulu l'imposer. Les protestants ont leur Morrison, qui avec l'aide de Leang-A-Fa, a traduit la Bible en chinois; leur Gutzlaff, 1826, qui s'est élevé par ses talents et par la confiance qu'il a inspirée, jusqu'aux plus hautes charges du mandarinat; les noms d'Abeel, Medhurst, Yates, sont devenus populaires, et plus de cent indigènes prêchent auj. l'Évangile à leurs compatriotes.

Depuis 1845 la religion chrétienne est officiellement tolérée. La révolte des Taïpings qui, un moment, avait paru devoir favoriser l'œuvre des missions, était trop politique pour qu'on en pût rien espérer.

CHOEUR. L'architecture chrétienne réserve à l'une des extrémités des églises un espace plus ou moins grand pour l'autel, pour le clergé et pour les chantres; c'est le chœur. C'est là que se célèbre le service public liturgique, chants et prières. On a appelé ensuite de ce nom les hommes chargés du chant. Enfin chez les moraves, Zinzendorf a divisé en chœurs les membres de l'église suivant les circonstances, leurs fonctions ou leur position.

CHORAL. Cantique ou chant à quatre parties qui, par son harmonie et par une heureuse succession d'accords consonants et dissonants, charme l'oreille et saisit le cœur, plus que no pouvaient faire soit l'unisson, soit les arides et laborieux enchevêtrements de notes des temps anciens. C'est à Luther que l'on doit le choral, qui fut une révolution dans le chant d'église: il remplaça par un chant vrai, libre et pur, par le chant de tous, ce que Michelet appelle le morne chant du moyen âge et son prétendu unisson. Après avoir écrit son Éloge de la musique lEukomion), il se mit à l'œuvre, et s'éclai-rant des conseils de Rumpf et de Walther, il composa lui-même quelques-uns de ces chorals qui ont électrisé l'Église, Ein feste Burg, etc. . Pour ses premiers cantiques il a puisé dans les hymnes déjà connus, dans les chants de Marie, dans les cantiques moraves et dans les Lieder populaires. L'un des caractères du choral c'est l'accompagnement note pour note, que l'Italie appelle le style familier; en d'autres termes la valeur des notes dans l'accompagnement se mesure sur les notes de la partie principale, de manière à ce que la mélodie ne disparaisse pas sous l'entrecroisement des voix. La eonférence d'Eisenach 1853 s'est montrée favorable à un chant plus mouvementé.

CHRIST (Ordre du), ordre portugais fondé en 1317 par Denis pour la défense des frontières des Algarves contre les Maures. Il comptait au 16™ siècle jusqu'à 450 maisons et possédait d'immenses revenus. Ce n'est plus auj. qu'un titre honorifique; le roi est le grand-maître depuis 1550.

CHRIST (Chevaliers du), v. Frères 6°.

CHRISTIAN, ou Chrétien l<> né à Freyenwald, Poméranie, entra fort jeune au couvent d'Oliva, et se sentit pressé d'aller convertir les païens. Pieux, instruit et bien doué, il se rendit d'abord dans le pays de Culm. Prusse, où il fut bien reçu par le duc Conrad et sa cour, 1209; plusieurs personnes se firent baptiser. Pour mieux assurer son œuvre, il crut bien faire d'aller à

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Rome demander l'appui du pape. Innocent III l'accueillit parfaitement et le recommanda à l'archev. de Gnèse. Deux princes prussiens s'étant convertis 1214, il retourna à Rome avec eux porter cette bonne nouvelle; les princes offraient leur territoire au pape en reconnaissance de ce qu'il les érigeait en évêché. Mais le peuple, en grande partie encore païen, fut irrité de cette cession, se révolta, mit tout à feu et à sang, et la mission fut interrompue. Christian eut un moment Pidée d'organiser une croisade, mais il revint à des sentiments meilleurs, et au lieu de soldats il fit venir des évangélistes. Cependant en 1218 un nouveau soulèvement eut lieu, et de nombreuses églises furent détruites. Alors Honoré III ordonna la croisade, et Conrad céda à l'évéque son territoire de Culm en toute propriété, 1223. A peine les croisés partis, les massacres recommencèrent, et Christian recourut aux chevaliers du Christ, ou de Do-brin, qui se firent tuer inutilement, puis à l'ordre Teutonique, plus nombreux et plus puissant, qui après 60 ans de guerres, finit par exterminer les Prussiens en en convertissant quelques-uns par la force. Ce fut une triste époque, mélée de succès et de revers. Christian fait prisonnier en 1233, puis libéré, vit conclure la paix en 1243. Il f 12i4, regrettant sans doute d'avoir fait intervenir Rome et sa politiq. dans son œuvre missionnaire.

Christian III, roi danois, né 12 août 1303, fils de Frédéric 1er, duc de Holstein, qui monta sur le trône de Danemark en 1523 après la déchéance de Christian II. Il reçut une bonne éducation, et se rendit pour la compléter chez son oncle Joachim I«r, électeur de Brandebourg; il assistai la diète de Worms en 1521, et fut gagné à la cause évangélique. Do retour dans le Holstein- il exerça une bonne influence, même sur son père, et lui succéda en 1533 malgré les agissements du clergé qui lui opposait son jeune frère âgé de 10 ans. Mais ce ne fut qu'en 1536 qu'il arriva réellement au pouvoir, après la prise de Copenhague qui lui avait été longuement disputée. Le 12 août 1537 eut lieu son couronnement, auquel présida Bugenhagen. La cérémonie fut simple, mais solennelle. Christian profita de la presence de cet homme émi-nent pour organiser l'Égl. protestante en Danemark; il fonda des écoles supérieures et donna tous ses soins au choix de bons professeurs. Il se joignit à la ligue de Smalcalde. Il fit traduire la Bible en danois, 1550, et veilla à ce que chaque église en eût un exemplaire. Il était d'une piété, d'une simplicité et d'une sincérité remarquables. f 1559.

CHRISTOLOGIE. De même qu'on appelle théologie l'ensemble des études qui traitent de Dieu, on appelle christologie les études relatives à J.-C., à sa personne, à ses deux natures, à son œuvre, à la rédemption. C'est dans un sens l'étude du christianisme tout entier, mai* on peut dire aussi que suivant les époques, suivant les attaques des adversaires, et suivant les besoins spirituels des églises, chaque siècle a insisté plus ou moins sur tel point particulier de la doctrine de Christ. L'âge apostolique le présente surtout comme l'homme-Dieu, seul Médiateur entre Dieu et les hommes, 1 Tim. 2,5., seul Seigneur, Eph. 4,5., seul nom donné aux hommes pour les sauver, Act. 4,12. C'étaient là les rudiments de la foi. Les questions de l'école sont venues ensuite, et les docteurs onl désiré mieux connaître. Si la personne de Christ est une et sans pareille, elle n'est pas simple, mais mixte et composée, ce qui n'a rien d'étrang» pour l'homme qui est lui-même un être mixte, un composé de matière et d'esprit. Dans quelle mesure ces deux natures sont-elles unies ou combinées? Demeurent-elles distinctes, ou forment-elles par leur union une troisième nature intermédiaire f La divinité est-elle complète ? L'humanité est-elle réelle ou apparente ? Y avait-il en Christ une où deux volontés ? Dans quel sens faut-il entendre la rédemption? Le docétisme, le sabellianisme et l'arianisme onl rempli de leurs disputes les 2m«, 3me et 4»»e siè cles; puis sont venues les controverses nesto-riennes et eutychéennes. Au moyen âge, d'Augustin jusqu'à Anselme, la christologie revêt en Occident un caractère plus anthropologique; ce n'est plus de la nature même de Christ qu'il s'agit, mais de son œuvre et de ce qu'elle a été pour l'homme, l'expiation des péchés, la substitution de l'innocent au coupable, la satisfaction donnée à la justice divine. Avec la Réformation commence une ère nouvelle, plus complète plus critique, plus historique et en même teni|» plus profonde. Les anciennes formules sont abandonnées, ainsi que les discussions qu'elle> avaient provoquées; les questions sont saisie> dans leur ensemble. Ce que l'on étudiera surtout, c'est l'œuvre personnelle du Christ dans toute sa vie, œuvre rédemptrice dont la passion et la mort sont les moments suprêmes, mais qui commence avec son entrée dans le monde, avec sa manifestation en chair, et qui se poursuit dans tous les détails de sa vie et de son ministère. La christologie se résume dès lors dans la Vie de Jésus, et c'est à l'histoire que les théologiens rattachent auj. presque toute la doctrine de Christ; concilier sa divinité et son humanité, telles que les Évangiles les révèlent, c'est la vraie christologie.

CHRISTO SACRUM (consacré à Dieu), petite secte fondée à Delft, Hollande, 1797, dans le but de réunir en une seule société religieuse le> chrétiens des diverses dénominations sur I* base du christianisme positif, de la foi en la divinité de J.-C., et en l'efficace rédemptrice de sa mort. Le gouvernement leur accorda 1802, la liberté religieuse. Ils se recrutèrent jusqu'au chiffre d'environ 3000, la plupart mennonites. En 1822 ils célébrèrent leur premier jubilé, mais déjà en 1827 Fliedner n'en comptait plus qu'on fort petit nombre.

CHRISTOPHE, pape de nov. 903 à juin 904, lil enfermer son prédécesseur Léon V, et fut pareillement mis en prison par son successeur Serge 111.

CHRISl'OPHOHE (porte-Christ), saint et martyr, honoré des grecs et des latins, mais d'une origine et d'une époque inconnues. Des égl. et des couvents portaient son nom au 6m« siècle. S'il a réellement existé, c'est en Lycie et sous Décius vers 250 qu'il aurait vécu et serait mort. U légende dorée lui prête une foule de choses incroyables, une taille gigantesque, 12 coudées, une force herculéenne; il aurait porté le Christ nurses épaules: de là son nom. Statue colossale à N.-D. de Paris avant 1789, et à Berne iquelquefois appelée aussi Tour de Goliath). Patron des porte-faix. #

CHRODEGANG, ou Grodegang, Rodigang, iils de Sigiramne et de Landrade, d'une des plus nobles familles des Francs Ripuaires, né au commencement du 8<ne siècle, d'abord prêtre, puismajordonne, référendaire, enfin év. de Metz depuis 742, contribua à rétablir les rapports eutre Rome et la cour de France. Pépin le chargea en 753 d'aller en Italie au-devant détienne II pressé par les Lombards et de l'accompagner en France, ce qui lui valut le titre d'archevêque et les honneurs du cardinalat. Il employa ses grandes richesses à secourir les pauvres, à fonder des couvents, à bâtir et orner des églises. En 764 il se rendit à Rome pour y chercher des reliques, et Paul III lui donna trois squelettes sous les noms de Gordon, Nabor et Nazaire, qu'il partagea entre 3 de ses couvents. Il s'occupa beaucoup de discipliner son clergé et il y réussit surtout en l'organisant en chapitres; c'est à lui qu'on doit l'institution ou la réorganisation des chanoines, q. v. f 6 mars 766; inhumé an couvent de liorze.

GHRYSANTHE, patr. grec de Jérusalem au commencement du 18®® siècle, successeur de parent Dosithée. Il avait étudié à Constan-tiuople et en Italie et parcouru toute l'Europe; savant, versé dans les mathématiques, les classiques et les pères. Il obtint du sultan la percussion de faire restaurer le Saint-Sépulcre, et publia à Bucharest 1710 la Ire éd. de la Panoplie de Zigabenns. Il a écrit aussi quelques ouvrages sur la confession, etc. 4

CHRYS1PPE, de Cappadoce, frère de Cosmas et de Gabriel, vivait en Syrie et se rendit à Jérusalem pour y suivre les leçons de l'abbé Enthyme. Abbé du couvent de Laura 455, puis attaché à l'égl. de la Résurrection, il fut pendant 10 ans un des custodes de ia Sainte-Croix. On a de lui un sermon imagé sur la Vierge mère de Dieu.

CHRYSOLOGUE, surnom de Pierre de Ra-venne. Né 406 à Tirnola près de Rome, il fut élevé par l'év. Cornélius pour l'état ecclésiastique. fût nommé 433 à l'évêché de Ravenne et sacré par Sixte III. Il se distingua par ses talents et son austérité, défendit la doctrine de l'Eglise contre les ariens, intervint par lettres dans les luttes eutychéennes, et mérita par son éloquence son surnom, qui signifie: parole d'or; f vers 450. On a sous son nom 175 discours, dont 160 seulement paraissent authentiques; rèimpr. plusieurs fois.

CHRYSOSTOME (bouche d'or), le plus éloquent peut-être des pères de l'Église, brillant comme caractère, comme pasteur fidèle et comme prédicateur, comme théologien pratique et non comme savant ou chef d'école. Né à Antioche 347, il était fils du général Second et de la pieuse Anthuse qui. veuve de bonne heure, exerça sur lui une influence qui dura toute sa vie. Il étudia sous le rhéteur païen Libanius et devint avocat, mais dégoûté de la corruption du monde il se voua à l'étude des choses divines et suivit pendant 3 ans les leçons du vénérable év. Meletius qui, après l'avoir instruit, lui conféra le baptême et le nomma anagnoste, c.-à-d. lecteur. Il fut même sur le point d'être nommé évêque, mais ne se sentant pas mûr pour ces hautes fonctions, il réussit à faire nommer à sa place son ami Basile et, après la mort de sa mère, il se retira dans les montagnes des environs d'Antioche. où il passa 6 ans avec quelques jeunes amis, parmi lesquels se trouvait Théodore de Mopsueste. Ils étudiaient sous la direction du savant abbé Diodore, le père de l'exégèse simple et anti-origéniste, qui concourut à donner à sa théol. le caractère pratique qui le distingue. Sa santé épuisée le contraignit à revenir à Antioche 380, où Meletius le consacra diacre. U composa vers cette époque plusieurs ouvrages, entre autres une Vie du martyr Babylas, pour montrer aux païens que le christianisme a sa vie en lui-même, et non comme le paganisme dans les moyens extérieurs; puis deux autres écrits, l'un sur la Contrition, l'autre sur le Sacerdoce, dans lequel, au milieu de vues exagérées dans le sens ecclésiastique, il émet des idées pleines de sens et de vérité; il combat entre autres la recherche des effets oratoires. En 386 Flavien, successeur de Meletius, consacra Jean comme ancien, ou prêtre, et lui confia spécialement les fonctions de prédicateur.

Jean prêchait tantôt après une complète préparation, tantôt après une simple mais consciencieuse méditation; tantôt même il devait improviser. En 387, Théodose ayant établi de nouveaux impôts, les Antiochiens se révoltèrent et les statues impériales furent renversées. Deux délégués de l'emp. vinrent de Constantinople âAn-tioche. Flavien se rendit dans la capitale pour intercéder; Chrysostome prononça ses beaux Discours sur les statues, dans lesquels il censure le peuple, mais engage chacun à faire un examen de conscience, et Théodose pardonna. Chrysost. aimait les petites assemblées plus que les foules qui s'entassent par (lots; il condamnait 1rs applaudissements, disant que l'Église n'est pas un théâtre; il recommandait le culte domestique, le culte individuel et surtout la lecture de la Bible. A l'occasion du schisme qui avait éclaté entre les orthodoxes larges et les rigides, il voulait qu'on jetât l'hameçon de la charité. Des ariens étant venus à Antioche, il ne les attaqua pas d'abord, mais comme ils le prièrent d'exposer les raisons de ses vues, il le fit. Il eut aussi affaire à des païens, et il accuse les chrétiens d'être souvent un obstacle à la conversion de ceux-ci; il n'en appelait qu'à la douceur, à l'amour et à la persuasion. Il s'exprime avec force sur la nécessité de la communion avec Christ: Il est la vie, et nous sommes les vivants. Eutrope, le favori d'Arcadius, l'ayant entendu, le lit nommer malgré lui év. et pair, de Constantinople, 397. 11 fut atliré par surprise hors d'Antioche et enlevé ainsi à son troupeau qu'il avait conduit pendant 12 ans. Sa présence ranima ceux qui étaient susceptibles de recevoir une bonne influence, mais il excita les murmures des autres, d'abord parce qu'il institua des services du soir, puis à cause de sa vie simple, frugale et pieuse. Il entra en rapports avec quelques veuves chrétiennes, en particulier avec la pieuse Olynthia, dont il administra les biens. Théophile d'Alexandrie s'était opposé à son élection, et ne devait pas tarder, bien que Chrysostome lui eût tendu une main fraternelle, à devenir son ennemi acharné. Les ariens de Const., n'ayant pas de temple, se réunissaient en dehors de la ville sous des colonnades vers lesquelles ils se rendaient en procession. Jean organisa des processions semblables, et les deux partis s'étant rencontrés, il y eut du sang versé et les processions furent interdites. Il combattit la sainteté prétendue des no-vatiens et des cathares. Il s'occupa toute sa vie des missions étrangères. Il fit un jour célébrer dans Saint-Paul le culte en langue gothe par un prêtre goth, puis monta en chaire pour faire remarquer la force divine du christianisme qui a pénétré jusque chez ces barbares. Il envoya des missionnaires en Phénicie et fit couper les bois sacrés. Eutrope avait compté que Jean serait sa créature; il s'était trompé. Le pieux et ferme pontife censurait sans crainte, avec douceur, tout ce qui devait être censuré. Cet eunuque, haï de tous, dut s'enfuir et se réfugia dans Sainte-Sophie; malheureusement pour lui il avait travaillé peu auparavant à enlever aux églises le droit d'asile, et le peuple l'y suivit. Mais Chrys. le défendit du haut de la chaire, dans son sermon sur Vanité des vanités, et il refusa jusque devant l'empereur de le livrer, comme il refusa plus tard au terrible général goth, Gainas, le temple qu'il demandait. Cependant l'orage approchait. Il y avait en Egypte, dans le désert de Nitri, des moines appelés les Grands Frères: Théophile en enrôla quelques-uns à son service; l'un comme économe de son collège, un autre comme év. d'Hiérapolis, mais révoltés de son avarice ils le quittèrent bientôt. Furieux, il résolut de se venger, les accusa d'origénisme et convoqua 399 à Alexandrie un synode où ils furent condamnés et les livres d'Origène, dont ils étaient enthousiastes, prohibés. Ils réclamèrent; Théoph. marcha contiv eux avec des soldats; 80 fle ces pauvres solitaires réussirent à s'échapper et s'enfuirent à Constantinople auprès de Chrysostome, qui les reçut avec bonté, avec compassion, mais aver sagesse. Il écrivit à Théoph. pour prendre des informations; celui-ci envoya quelques moines, ses créatures, mais sur l'ordre d'Eudoxie, il dut comparaître lui-même devant un tribunal, présidé par Chrysostome. Épiphane, pieux évêqu* de Chypre, était venu rempli de préventions, et il avait attisé le feu contre Jean, mais gagne par sa bonté et éclairé par les explications des Grands frères, il comprit qu'il avait fait fausse route et repartit précipitamment. En attendant, Théoph. continuait de tout préparer pour intervertir les rôles; d'accusé il allait devenir accusateur; il avait pour lui quelques évêques, un moine nommé Jacques, quelques femmes de distinction, et enfin Eudoxie. Quand Théophile arriva, avec son cortège et ses richesses 403, un concile fut convoqué dans un des faubourgs de Chalcédoine, et Chrys. y fut accusé d'une foule de méfaits: d'avoir conféré les ordres à des gens corrompus, de dissiper les revenus de l'Église, de n'être pas hospitalier, de s'habiller et de se déshabiller sur le siège épiscopal en mangeant un gâteau, de ne pas prier eu se rendant à l'église, de porter les pécheurs à la sécurité, d'exciter le peuple â la révolte, d'avoir traité Eudoxie de Jésabel, etc. Jean était dans son palais épiscopal, entouré de plus de 40 évêques qu'il cherchait à consoler, lorsque 2 évêques lydiens et un secrétaire de Théoph. virtrent le sommer de comparaître. Sa condamnation était certaine, étant donnée la composition du concile; il fut livré à l'emp. comme coupable de lèse-majesté. Le peuple entoura sa maison pour le défendre, et Ghrys. ne se rendit que lorsqu'il vit approcher les soldats. Quelque temps après, un tremblement de terre ayant causé de grands ravages, Eudoxie épouvantée le rappela de son exil aux acclamations du peuple. Mais le fidèle évêque ayant prêché contre l'érection d'une statue d'Eudoxie près de Sainte-Sophie, la haine de l'impératrice se réveilla. Il prêcha ensuite sur la danse d'Hérodiade et le supplice de Jean-Baptiste; on y vit des personnalités. Il fut de nouveau condamné par le concile même qu'il avait convoqué pour sa réintégration. Le jour de Pâques 401, à minuit, le temple était plein et 3000 catéchumènes devaient être baptisés; une troupe de soldats thraces dispersèrent les fidèles. L'Église se réunit de nouveau le lendemain autour de son pasteur près d'une maison de bains, mais les >oldats étaient là; Jean fut saisi; il put prier encore une fois dans le temple, fit ses adieux à m amis, aux évêques, aux diaconesses, puis monta sur sa mule et partit avec les soldats qui «levaient l'accompagner. Il se rendit d'abord à Micée, Bithynie, oii il s'occupa d'évangélisa-lion. Eudoxie le fit reléguer à Cucusus, sur la frontière de l'Arménie. Son voyage fut pénible. H écrivit de Cucusus à ses amis persécutés de Constantinople, et s'occupa des missions en Syrie. eu Phénicie et panni les Goths. Honorius et beaucoup d'autres hommes influents écrivirent en sa faveur, mais ils ne faisaient qu'exciter davantage ses ennemis. On le relégua plus loin encore, aux dernières limites de l'empire, a Pityus, chez les barbares; mais il n'atteignit pas ce dernier terme de son exil; il f en che-mien, près de Comana, dans l'égl. de Saint-Ba-siliscus, 14 sept. 407. Théodose II, 30 ans plus tard, lit ramener ses cendres à Constantinople. Ce n'est qu'au siècle que le nom de Chrysostome lui fut donné; jusque-là il n'est connu qne sous le nom de Jean. On l'a surnommé l'Homère des orateurs; il y a chez lui la vigueur ^Démosthèneset l'élégance de Cicéron. Comme père de l'Église sa place est à côté d'Origène, d'Athanase, d'Ambroise et d'Augustin. Outre les ouvrages déjà cités, on a de lui de nombreuses Lettres, des Homélies, des Sermons de circonstance, un Traité de la Virginité, un de la Providence, etc. Biog. par Palladius, du Pin, Érasme, Tiilemont, Néander, etc. Ses œuvres ont été réunies par Montfaucon, Paris 1718-4738, Guillon 1834, et plusieurs de ses ouvrages séparés ont eu de nombreuses éditions, par Ant. Lemaistre, Bengel, Auger, Bellegarde, etc. Bccker a publié à Leipzig 1838, cinq Homélies jusqu'alors inédites. Il combattit la confession obligatoire, la primauté de Pierre, l'adoration des saints, la doctrine du Purgatoire, et recommanda la lecture de la Bible à tous les chrétiens.

CHYTRÉE, David, théol. allemand né à In-gelfingen 26 févr. 1530, f 25 juin 1600, élève de Camerarius et de Mélanchthon, voyagea en Italie, fut nommé prof, à Rostock, fut appelé à organiser l'Église êvangélique en Autriche et en Styrie 1569; docteur en théol. 1570; un des fondateurs de Tuniv. de Helmstâdt 1576, et un des 6 rédacteurs de la Formule de concorde. II a laissé de nombreux ouvrages, fort bien écrits, entre autres un Onomasticon theol., une Éthique d'après les principes de Mélanchthon, et une Hist. de la Conf. d'Augsbourg.

CIBOIRE (saiut), de cibus, nourriture. Vase dans lequel les hosties sont conservées; il est ordinairement en argent, en vermeil ou en or, et a la forme d'un calice, avec un couvercle. Ce mot désigne aussi la petite armoire qui renferme le calice et les hosties, et dans l'Égl. grecque le dais qui surmonte l'autel.

CIERGES. L'habitude de brûler des cierges peudant le service divin était déjà générale au 4«»e siècle et remonte peut-être aux souvenirs des catacombes où elle était une nécessité. Elle se rattache à la symbolique du chandelier à 7 branches de l'A. T. et à la signification de la lumière dans l'Écriture. Il est de règle qu'il y ait au .moins 2 cierges allumés pendant la messe; ils doivent être de bonne cire vierge et avoir été bénits à la Chandeleur. On en brûle aussi devant les reliques, devant les images des saints, aux processions, aux mariages, aux funérailles; quelquefois on les porte dans les cérémonies sans les allumer. L'Égl. luthérienne a conservé en certains endroits l'usage des cierges pendant la célébration du repas eucharistique. Les puséistes d'Angleterre ont donné à ce mode d'éclairage un développement exagéré.

CILICE, étoffe de poil de chèvre, que portaient anciennement les paysans et les matelots. Elle se fabriquait surtout en Cilicie, d'où son nom. Les moines et les ascètes en firent leur costume et le portaient sur la peau. Jean Cas-sien ne l'approuvait pas pour les moines, parce que cela les gênait dans leur travail; cependant peu à peu l'usage s en établit, au moins pour quelques jours par semaine. Puis on réduisit cette portion de vêtement à une simple ceinture. Dans les couvents de stricte observance, cette ceinture est en mailles de fil de fer et parfois garnie de pointes. On pense réaliser ainsi la parole de l'apôtre: Je châtie rudement mon corps.

CIMABUÉ, Giovanni-Gualtiere, né 1240, f 1310; Florentin, peintre et architecte, restaurateur du grand art en Italie, eut pour maîtres des peintres grecs, et pour élève Giotto qu'il devina et qui devait le surpasser. Connu surtout par une Madone, la Vierge et Jésus avec des groupes d'anges, et les fresques de l'église de Saint-François à Assise.

CIMETIÈRES, mot dérivé du grec, qui signifie proprement dortoir, lieu où l'on dort. Le mot allemand Kirchhof signifie cour de l'église. C'est, d'après les anciens canons, l'espace qui entoure l'église ot qui doit être séparé de la voie publique par un mur ou par une haie. Les corps devant être, d'après les lois romaines, enterrés hors des villes, ot les martyrs chrétiens étant fort nombreux, les égl. ou chapelles qui s'élevèrent sur leurs tombeaux furent naturellement désignées, avec leur cour extérieure ou parvis, pour lieux de sépulture, et l'idée de la communion qui persiste entre les morts et les vivants y trouva sa satisfaction, l/enceinte funèbre fut déclarée sainte, et toute profanation de l'égl. rendait nécessaire une nouvelle consécration du champ du repos. La législation civile ayant transporté hors des villes les cimetières, ceux-ci. quoique indépendants de l'égl.. ont continué presque partout d'être régis par les lois ecclésiastiques, mais les abus qui en sont résultés en divers pays, notamment en France et en Angleterre, ont amené, ou amèneront peu à peu la sécularisation complète de ce dernier asile de l'homme. Les cathol. ont conservé partout où ils l'ont pu, des coins réservés pour les enfants morts sans baptême, pour les suicidés et pour les hérétiques. Distinctions que n'admet nulle part l'autorité civile, ni dans les pays protestants, ni même, quand elle est assez forte, dans les pays catholiques. Ordinairement une croix, on une chapelle, rappelle la pensée religieuse de la inort. En tout cas des mesures sont prises partout pour faire régner l'ordre et la décence dans ces sombres demeures, qu'embellissent même des monuments couverts de pieuses inscriptions, et des arbres ou des fleurs symboliques, destinés à rappeler la vanité des choses terrestres et les espérances du chrétien.

CIRCONCELLIONS. ou Circumcellions, ascètes du nord de l'Afrique; ils se réunirent aux donatistes, et protestant contre les faveurs dont jouissait l'Église, rattachant à sa prospérité matérielle les misères spirituelles dont elle souffrait, ils se mirent à parcourir le pays en mendiant, et sous la conduite de leurs chefs Fasir et Axid déclarèrent la guerre à tous ceux qui possédaient. On dut employer la force pour les réduire, 3i5, et souvent on les vit, dans leur mépris pour l'existence, rechercher volontairement la mort. Leur nom leur fut donné par leurs ennemis; ils s'appelaient eux-mêmes Agonistici, les combattants de Christ.

CIRCONCISION (fête de la). C'est l'octave de la fête de NoPl. Les enfants de\aient être circoncis 8 jours après leur naissance. Mais comme cette fête tombait sur le nouvel an des Romains et que des collisions étaieut à craindre, on évita longtemps de la célébrer. Elle ne fut introduite que sous Grégoire-le-Gr. et c'est seulement au 10me siècle qu'elle fut officiellement admise au nombre des fêtes ecclésiastiques. Elle se confondit avec la fête du nouvel an quand l'Église fit dater du l*r janvier le commencement de l'année, c.-à-d. en France 1564, Écosse 1600, Angleterre 1756.

CIRCONSCRIPTION (Bulle de), décret, ou constitution du pape, déterminant l'étendue d'un diocèse et certains détails de son administration. Une bulle de ce genre, ou toute autre, tendant à modifier ou k étendre la circonscription d'un diocèse, supprimant ou dédoublant une circonscription existante, ne peut être promulguée qu'avec l'assentiment des gouvernements intéressés.

CISTERCIENS, nom dérivé de Cistercium ou Citeaux, village de la Côte-D'or, k 22 kil. de Beaune et près du Clos Vougeot. Ordre religieux fondé 1098 par Robert, dit de Champagne (1024, f H10), prieur de l'abbaye bénédictine de Molesmes, qu'il avait également fondée 1075. Réélu abbé de Molesmes 1099, il fut remplacé k Citeaux par Albéric qui donna à sa maison les Statuts cisterciens. Les libéralités du vicomte de Beaune facilitèrent les commencements de l'ordre et l'érection d'un monastère: mais la sévérité de la règle menaçait, sons Étienne Harding, son 3* abbé, l'existence même de la jeune institution, quand en 1113 saint Bernard vint, avec quelques amis, lui apporter l'appui de son zèle, de ses vertus et de son autorité. L'ordre prit dès lors une rapide extension, et ses membres furent désignés souvent sous le nom de bernardins; au bout d'un siècle il comptait déjà plus de 500 abbayes. Étienne lui avait donné en 1119 une constitution sous le titre de Charta caritatts, et une organisation qui le rendait indépendant des évêques. Les 4 premières filles de Citeaux, ou abbayes fondées par Étienne, furent La Ferté, Pontigny, Mori-mond et Clairvaux dont Bernard fut le premier abbé. L'administration générale de l'ordre était confiée à un collège de 25 membres choisis parmi les abbés et présidés par celui de Citeaux. L'ascétisme et l'activité militante de plusieurs de ses membres, et l'intérêt qu'ils prirent aux croisades, leur donnèrent une grande influence sur le peuple et même sur quelques ordres militaires d'Espagne et de Portugal. Le relâchement de la règle accentua an 13™ siècle la décadence de l'ordre; de nombreuses tentatives de réformes eurent lieu, qui donnèrent naissance à des divisions intestines, à des luttes et a la formation de nouveaux ordres, dont les feuillants et les trappistes sont les plus considérables. Il n'existe plus guère auj. de cisterciens qu'en Espagne, Pologne, Autriche, Saxe rt même en Angleterre. Leur uniforme est une robe blanche avec une ceinture noire. — Il y «ut aussi des religieuses de Giteaux, ou feeroar-dines, ou clairettes, fondées probablement par Etienne, et soumises aux mêmes règles que les moines; elles furent instituées en 1120 à Tart, près Langres, mais se séparèrent aussi en plusieurs branches. Leurs maisons les plus célèbres furent celles du faubourg Saint-Antoine à Paris et de Port-Royal.

CITE AUX, v. Cisterciens.

CLAIRE (sainte), né 1193 à Assise, d'une famille riche et distinguée, s'enfuit du domicile paternel sur le conseil de saint François 1212, renonça à sa fortune, prononça les vœux de rhasteté et d'obéissance, et se soumit, avec quelques-unes de ses amies qui partageaient ses sentiments, aux directions de François, qui leur imposa la règle de saint Benoît. Elles fondèrent ainsi Tordre de sainte Claire ou des clarisses9 qui fut en 1224 reconnu par le pape, et se répandit d'Italie en Allemagne et en France. Il comptait an 18®* siècle 900 maisons. D'abord purement contemplatif, l'ordre s'est plus récemment voué a l'éducation de la jeunesse. Les clarisses ont quelquefois porté le nom de damianistines, du nom de l'église de Saint-Damien, oti Clara se réfugia d'abord.

CLARENDON, ville d'Angleterre non loin de Salisbnry. On y voit encore les ruines d'un palais, séjour favori d'Henri II, célèbre dans l'hist. de l'Égl. d'Angleterre; c'est là que ce monarque lit signer à ses barons, évêques et prélats, en janvier 1164, les résolutions en 16 chapitres votées à Westminster par le parlement, tendant a régler en les restreignant les droits du clergé et la juridiction des tribunaux ecclésiastiques. Beeket lui-même signa, mais voulut retirer ensuite sa signature et donna lieu par là au conflit qoi finit par sa mort, 1170. Henri II, pour rentrer en grâce, dut retirer ou modifier quelques-uns des articles de ces Constitutions de Clarenr àon qui avaient le plus excité la susceptibilité de la cour de Rome.

CLARKE, Samuel, philos, et théol. anglais, «é à Norwich 11 oct. 1675, f 1729. Il fut 12 ans chapelain de l'év. de Norwich, en 1706 chapelain de la reine Anne et pasteur de Saint-Bennet, en 1709 recteur de Saint-James. Partisan de la philosophie newtonienne, il fut en rapports avec les hommes les plus célèbres de son temps, et correspondit avec Leibnitz sur les problèmes de l'espace, de la nécessité et de la liberté; cette correspondance fut publiée en 1717. Il est surtout connu par sa démonstration de l'existence et des attributs de

Dieu, série de sermons prononcés pour la fondation de Boyle, où il n'emploie que des arguments métaphysiques et a priori. démontrant que Dieu, la vertu et l'immortalité sont des postulats de la raison pure, et fondant ainsi la nécessité d'une révélation. Par la nature de ses preuves il peut être considéré comme le fondateur du snpranaturalisme rationnel. Ses vues sur la Trinité, dont il ne reconnaît pas l'immanence, le tirent suspecter d'arianisme et il eut à s'en justifier devant la Convocation. Il combattit Hobbes, Spinosa, Dodwell et Collins. Outre ses sermons, trad. par Ricotier, on a encore de lui divers ouvrages de physique, et d'excellentes éditions de César et d'Homère. — Son frère Jean, f 1759, pasteur à Norwich, chapelain du roi, et doyen de Salisbury, a traduit et développé le traité de King sur l'Origine du mal.

— L'Angleterre compte encore d'autres théologiens de même nom: Samuel 1599-1682, destitué comme non-conformiste, martyrologe distingué; — Son fils Samuel, auteur de Notes sur la Bible, — le frère de celui-ci, Dr John Clarke, doyen de Westminster, — Samuel Clarke, 1623-1669, orientaliste. — William, né 1696, savant dans les antiquités. — Adam Clarke, 1760-1832, prédicateur wesleyen, auteur d'un Comment, sur la Bible: il ne voit en J.-C. le fils du Père que dans son incarnation.

CLASSES. On désigne ainsi dans plusieurs égl. réformées les synodes de district; elles se composent des pasteurs et d'un ou deux anciens par paroisse. Plusieurs classes réunies forment le colloque ou synode provincial. Les classes portent quelquefois aussi le nom de Consistoires: le mode de leur composition et leur organisation varient suivant les églises.

CLAUDE, 1° emp. romain de l'âge apostolique, f 54.

2° Claude Apollinaire, v. Apollinaire.

3° de Turin; espagnol de naissance, disciple de l'adoptien Félix d'Urgel, quoiqu'il n'en partageât par les idées particulières; fut appelé par Louis-le-Déb. à la cour d'Aquitaine pour expliquer la Bible, et quand Louis eut été nommé empereur, désireux de combattre l'idolâtrie dans ses provinces, il le nomma év. de Turin 820, son diocèse comprenant les Vallées, la Provence et le Dauphiné. Génébrard, archev. d'Aix au 16™ siècle, traite Claude de calviniste. On peut en effet le regarder comme un protestant de son époque, car il combattit avec énergie toutes les superstitions, le culte des image*, l'adoration des reliques, les pèlerinages à Rome, etc. Ayant fait abattre des croix, on l'accusa de vouloir introduire une nouvelle religion, quand il voulait seulement en revenir au culte en esprit et en vérité. Pascal I" l'attaqua, puis l'abbé Théodemir, ou Theutmir, un ancien ami, auquel il répondit par une Apologie De cultu imaginum: « Faut-il adorer la croix, ou la porter?... Si l'on adore la croix, pourquoi pas aussi les crèches, les langes, les bateaux, les ânes? » Dungal de Saint-Denis, moine écossais, Jonas d'Orléans, et d'autres encore se prononcèrent contre lui, et l'emp. assembla quelques évêques pour le juger et terminer les différents; mais Claude refusa de comparaître devant une « assemblée d'ânes. • Les év. n'osèrent pas passer outre, il ne fut pas jugé; Louis lui laissa son évêché, le pape ne l'excommunia pas, et aucun soupçon d'hérésie ne pèse sur sa mémoire (Bossuet). On en a voulu faire, mais à tort, le premier fondateur de lfégl. des Vaudois. Il a écrit plusieurs comment, sur différents livres des Ecritures, composés en partie de citations des Pères pour établir que ses doctrines ne sont pas nouvelles; on leur donna même le nom de Catena patrum, La chaîne des Pères, précisément à cause de ce but spécial qu'il poursuivait, de se rattacher à l'Église primitive. Il appartenait dogmatiquement à l'école d'Augustin, f 839- Ses sectateurs étaient nombreux, et après sa mort on en trouva longtemps encore dans le Milanais.

4o Jean Claude, né 1619 à La Sauvetat, où son père était pasteur, étudia à Montauban, fut consacré à 26 ans, et occupa successivement les postes de Latreyne, Sainte-Affrique, Nîmes 1654 (doû il fut banni pour avoir combattu en synode 1661 un projet de réunion présenté par Conti au nom de la cour), Montauban, et enfin Paris-Charenton 1666, où il demeura 19 ans. Le 21 oct. 1685 il reçut l'ordre de quitter la France dans les 24 heures parce qu'il avait déjoué une comédie ourdie par l'archevêché. Le temple de Charenton devait être entouré de soldats; deux prélats devaient monter en chaire et prêcher l'union; des hommes gagés devaient se convertir à la voix des évêques; ceux-ci donnaient l'absolution à la congrégation entière et le tour était joué. On fit prévenir les pasteurs qu'ils pouvaient prêcher tranquillement et que même on leur donnerait des gardes pour leur sûreté, mais Claude prévoyant un piège fit annoncer aux fidèles qu'il n'y aurait pas de service. M®e de Maintenon traite cet acte de séditieux; en tout cas Claude fut banni pour ce fait, et quelques jours après le temple de Charenton était rasé jusqu'à la base. A La Haye Claude reçut deux appels comme prof., l'un à Francfort-sur-Oder, l'autre à Groningue; mais le prince réussit par ses sollicitations et en lui assurant les moyens de vivre, à le retenir à La Haye, où il continua de servir l'Égl. par sa plume et par sa parole. Il prêcha pour la dernière fois à No'él 1686, tomba malade en descendant de chaire et f 13 janv. 1687. Claude est regardé à juste titre comme un des pasteurs les plus influents de son temps. Il eut des controverses à soutenir avec Arnaud, Nicole et Bossuet, et fut consulté dans des cas difficiles qui exigeaient un homme de résolution ou un habile dialecticien. Il a laissé de nombreux ouvrages, parmi lesquels les plus connus et les plus importants sont ses Rép. aux Traités de Nicole et d'Arnaud sur l'eucharistie 1665, 1669 et 1670; sa Défense de la Réformation 1673; Plaintes des protestants cruellement opprimés en France, Cologne 1686; Réponse à Bossuet, donnant une version différente de la conférence qu'ils avaient eue ensemble en 4678, et un certain nombre de sermons d'un style ferme, correct et souvent majestueux. — Son fils Isaac né à Sainte-Affrique 5 mars 1653, publia en 5 vol. les Œuvres posthumes de son père, et f pasteur à La Haye 29 juillet 1695; il eut deux fils qui furent l'un et l'autre pasteurs en Angleterre.

CLAUDIEN Mamert, prêtre du diocèse de Vienne, frère de l'év. Mainert; auteur de plusieurs poésies estimées et notamment du Ponge lingua gloriosi, qui est dans le Bréviaire, + vers 470. Il a écrit aussi un Traité sur la nature de l'âme. Son ami Sidoine Apollinaire le regardait comme le plus beau génie de son siècle.

CLAUDIUS, Matthias, écrivain et poète allemand, surnommé le Messager de Wandsbeck. Né 15 août 1740 à Rheinfeld, Holstein, il étudia à Iéna et passa presque toute sa vie à Wandsbeck, f 21 janv. 1815 à Hambourg. Humoristique et sarcastique, il est en même temps grave et sérieux, et prend à cœur les questions religieuses; avec le temps même sa direction dogmatique s'accentua et il attaqua vivement le rationalisme. De 1770-1775 il publia un recueil, le Messager de Wandsbeck, collection de variétés et d'actualités, qui a fait sa réputation. Ses œuvres ont été rassemblées par lui en 8 vol. sous le titre de: Asmus omnia sua secum portant. Son chant: Le vin du Rhin, est encore populaire aujourd'hui.

CLÉMENGES, ou Clemangis. Matthieu-Nicolas, né 1360 à Clémanges, Champagne, fit ses études au collège de Navarre à Paris, sous d'Ailly etGerson; en 1391 il était bachelier, en 1393 recteur de l'université. C'est comme tel qu'il fut appelé à intervenir dans les débats soulevés par le schisme, et la plupart des adresses et mémoires envoyés aux rois et aux papes ont été rédigés par lui. L'univ. de Paris ayant proposé comme remède l'abdication des deux papes rivaux, et Benoît XIII ayant été élu pour les remplacer, Clémangis fut choisi par lui pour être son secrétaire, mais soupçonné d'avoir pris part 1407 à la rédaction de la bulle qui excommuniait Charles VI et la France, il nia le fait, quitta la cour papale et se retira à Langres, d'abord comme chanoine, puis chez les chartreux de Valprofonds, et enfin chez ceux de Fon-taine-du-Bosc. C'est là que s'étant remis à l'étude de la Bible, et en correspondance avec d'Ailly, Gerson et d'autres illustres amis, il composa ses meilleurs ouvrages: De fructu eremi, De fructu rerum advei'sarum, De novit festivitatibus. De studio theolDe concilio generali. Il écrivit aux pères du conc. de Constance pour leur recommander l'union et leur rappeler que le concile est supérieur au pape. Appelé à Bayeux il quitta Langres à regret et renonça à son canonicat, ne se croyant pas le droit de cumuler deux bénéfices. En 1421 il défendit publiquement à Chartres les libertés de l'Égl. gallicane. En 1425 il reprit au collège de Navarre ses cours d'éloquence et de théol., et + vers 1435, peu après le conc. de Bâle. Outre les écrits déjà cités on a encore de lui de belles poésies latines, des traités sur la Simonie, sur les Annates; des Lettres adressées à des prélats, à des cardinaux, à Henri V d'Angleterre, etc. Le traité de la Corruption de l'Église, paru en 1401, qui lui a été attribué, ne saurait être de lui, soit à cause de son mauvais latin, soit à cause de ses attaques contre Benoit XIII dont il était le secrétaire et l'ami. Cléinenges est resté fidèle à l'Égl. catholique jusqu'à la fin, mais il n'a cessé d'en combattre les abus. Il a déploré la décadence de l'Église, qu'il attribue à l'oubli de la Parole de Dieu. Les pères de l'Égl., dit-il, sont des ruisseaux qui découlent de la Bible, et ils doivent v ramener. Il ajoute: Le but de toutes les études théol. est pratique et non spéculatif; il consiste à se conduire soi-même et et les autres a a salut. Il n'admettait l'autorité des conciles que si ceux qui les composaient étaient de vrais croyants. Quant aux messes, processions, fêtes et autres cérémonies, elles n'ont de valeur que ni les cœurs sont purifiés par la foi.

CLÉMENT d'Alexandrie. Titus Flavius, d'Athènes ou d'Alexandrie, philos, platonicien, né et élevé dans le paganisme, se convertit plus tard au christianisme, après avoir beaucoup voyagé, étudié et connu les maîtres les plus célébra de son temps. Le désir de tout savoir lui fit aussi étudier les livres des juifs et des chrétiens. Lorsque Pantène partit pour les Indes, Clément le remplaça, d'abord comme catéchiste, pois comme pasteur ou évêque. Lors des persécutions de Septime Sévère 202, il dut quitter son école et Alexandrie; on croit qu'il y revint plus tard, qu'il reprit ses fonctions et qu'il y f en Î17 ou 220, mais Fhist. de ses dernières années est incertaine. Pour lui le christianisme était l'accomplissement de la connaissance. Sa méthode était l'examen, et il la recommandait à ses auditeurs. Il mêla la sagesse de Dieu à celle de l'homme. Selon lui, le Logos amène d'abord les hommes à la foi, puis il les sanctifie, enfin il les élève à une connaissance plus su blime des choses de Dieu. Il admet une tradition intérieure qui fait comprendre le sens allégorique de la lettre et qui produit une connaissance et une spiritualité que n'atteindront jamais ceux qui ne saisissent que le sens littéral. Ses trois principaux ouvrages sont: le Protreptricos, exhortation aux gentils, où il leur montre la vanité de leurs croyances; le Pédagogue, qui est surtout un traité de morale, et les Stromates (broderies, tapisseries) en 8 livres, mais le est inauthentique, recueil très intéressant de pensées chrétiennes et de maximes philos.; ses Adumbrationes (Esquisses), trad. par Rufin, sont en grande partie perdues. Il faut noter aussi son beau travail, d'un ascétisme élevé: Comment le riche pourrait-il être sauvé? — Édit. compl. de Potter, Oxford 1715. Public, partielles de Klotz, Piper, Olshausen. etc.

CLÉMENT. Plusieurs papes de ce nom: lo disciple de Pierre et successeur de Lin on d'AnacIet au siège épiscopal de Rome, connu sous le nom de Clément Romain. était probablement juif d'origine. 11 est possible, mais douteux, que ce soit le même dont il est parlé Philipp. 4, 3. Auteur un peu prolixe, mais estimé, d'une Épître de paix et de concorde qu'il écrivit aux Corinthiens divisés; il parle au nom de l'Égl. de Rome, et non comme chef de l'Égl. univ. Le ton en est onctueux, vif. grave et réellement digne. On lui attribue aussi, peut-êUv pour les faire paraître plus anciens, divers écrits du 3®o siècle, dont la morale est sévère, mais qui renferment plusieurs exagérations de la dignité èpiscopale; ainsi que les canons apostoliques, les Clémentines, une 2« aux Corinthiens, etc. — La tradition est si confuse qu'on ignore s'il fut év. 9 ou 33 ans. + vers l'an 100 (23 nov.?). Quelques-uns l'identifient avec le consul Flavius Clemens, neveu de Domitien, martyr.

2° Suidger, allemand de naissance, év. de Bamberg, nommé nape sous le nom de Clément II au concile de Sutri convoqué par Henri-le-Noir en 1046. Il fut élu, dit l'histoire, parce qu'il n'y avait pas dans toute l'Église de Rome un homme digne de remplir ces hautes fonctions. f 1047.

3° Paulin Scolaro, romain, év. de Préneste, élu 1187 sous le nom de Clément III, publia une croisade contre les Sarrasins. Frédéric II, surnommé Barberousse, part pour la Terre Sainte et se noie à Tarse dans le Cvdnus, 1190. Son fils Henri IL le Cruel, est l'ennemi acharné du pape Clément f 27 mars 1191.

4# Sous le même nom de Clément III, Gui-bert, év. bavarois, archev. de Ravenne, antipape, fut promu par un concile, sous la protection de l'emp. Henri IV, à la dignité pontificale, 1080, en opposition à Grégoire VIL II réussit à se maintenir en face de son puissant adversaire, grâce à la faveur impériale, et chassa même de Home ses deux successeurs, Victor III et Urbain II; mais Urbain ayant fait proclamer la lrc croisade au conc. de Clermont, 1095, l'autorité pontificale en reçut un nouveau lustre, et l'antipape, ainsi que son protecteur, en éprouva Ip contrecoup. Clément III tomba en défaveur, et en 1100, sous Pascal II, il fut définitivement expulsé de Rome, f la même année à Citta di Caste! lo.

5° Clément IV, de Saint-Gilles sur le Rhône, s'appelait Foulques, en italien Guido Fulcodi. Il fut d'abord militaire, puis jurisconsulte, enfin secrétaire de saint Louis. Après la mort de sa femme il entra dans les ordres et devint successivement arche v. de Narbonne, cardinal-év. do Sabine et légat en Angleterre. Il fut élu pape à Pérouse 1265 et f à Viterbe trois ans après, 1268. Son pontificat vit tomber sous la hache du bourreau la tête du dernier des Hohenstau-fen, le jeune Conradin. Ainsi fut atteint, dit Clément, un but longtemps poursuivi par les papes. Rome l'emportait sur l'Allemagne. Personnellement il était doux, modeste et désintéressé: il concourut avec saint Louis à l'élaboration de la célèbre Pragmatique Sanction qui, fondant les libertés gallicanes, mit fin pour un temps aux luttes qui divisaient Rome et la France.

6° Clémpnt V; Bertrand de Got on d'Agoust, né à Villandrand, archev. de Bordeaux en 1300, fut élu k Pérouse, 1305, par le parti français en opposition aux trois candidats présentés par le parti de Boniface VIII. U accepta la liane aux conditions qui lui furent imposées par Philippe-le-Bel, et dont la sixième et dernière ne lui fut pas même communiquée. Cette dernière n'était autre que la suppression de l'ordre des Templiers. Chargé de cette humiliante couronne, il canonisa Célestin V persécuté par Boniface VIII, et modifia ou plutôt retira la bulle de Boniface qui condamnait Philippe, et vint fixer son siège d'abord k Carpentras 1308, puis à Avignon. 1309. C'est Ip schisme d'Occident qui commence. Pour plaire k son souverain, le pape le seconde dans ses persécutions contre les templiers, il convoque dans ce but un conc. général h Vienne 1310, et dit que si l'on ne peut pas les détruire par les voies légales, on trouvera bien d'autres moyens. L'inquisition s'pn charge. Clément cherche à se dédommager sur d'autres princes de la portion de pouvoir qu'il a aliénée entre les inains de Philippe: il excommunie Henri d'Allemagne et met Venise à l'interdit, f 1314. On a de lui des constitutions dites Clémentines, formant le 7e livre des fausses Décrétâtes, Mayence 1460, qui font partie du droit canonique. Avec lui commence la confiscation de la papauté au profit d'une nation; la science y gagna. Ses mœurs passent pour avoir été légères et même licencieuses; on l'accuse aussi d'avarice et de simonie. La légende a exploité et exagéré sa haute taille que l'on porte à 8 pieds. Son pontificat fut suivi d'un interrègne de 2 ans.

7o Clément VI; Pierre de Rogier, de Limoges, docteur de Paris, élu pape en 1342, f 1352. avait été bénédictin, puis archev. de Rouen et cardinal. Poco reltgioso, dit un de ses biographes, mais savant et doué d'une mémoire prodigieuse. Il représenta surtout l'esprit français. Un des papes d'Avignon, il résista aux sollicitations des Romains qui, Rienzi en tête, le suppliaient de revenir à Rome. Il défendit énergiquement les intérêts de son Église, défendit contre le roi d'Angleterre le droit d'investiture, et réduisit à 50 ans le retour périodique du jubilé qui n'avait lieu que tous les 100 ans. Léger, mais courageux, il visite les malades pendant la peste et protège les juifs contre le préjugé qui leur impute ce fléau. En politique il essaya, sans y réussir, de nommer Charles de Bohême à la place de Louis.

8° Clément VII; Jules de Médicis, cousin d^ Léon X, élu pape après la mort d'Adrien VI. 1523 f 1534. Moins vertueux, mais plus fin que son prédécesseur, il ne reconnut pas aussi franchement que lui des désordres auxquels il était résolu de ne pas toucher. Il abandonne pour 6 mois à son cousin Hippolyte tous les bénéfices de la chrétienté qui viendront k vaquer, et fait offrir à la diète germanique la ré-formation du petit clergé. Les princes demandent celle du grand clergé, des hauts dignitaires, et reproduisent leurs Cent griefs. La diète statue la prochaine convocation d'un concile, chose que Clément redoute par-dessus tout. Il ménage tour à tour Charles-Quint et François Ier. Il finit par se liguer avec François, les princes d'Italie et le roi d'Angleterre contre l'empereur; cette ligue, appelée Sainte parce que le pape en est le chef, ne lui procure que des infortunes. Il publie contre le cardinal Pompée des Colonnes un monitoire, que cependant il doit bientôt rétracter. Attaqué par les troupes de ce cardinal, il se réfugie dans son château, d'où il voit piller Saint-Pierre et le Vatican. Par un accord perfide, il obtient que ces troupes ennemies s'éloignent, puis il excommunie Pompée. Celui-ci en appelle à un concile, mais Clément n'en veut rien parce qu'il est bâtard et qu'il a obtenu la tiare par simonie. Les hostilités continuent. Le pape est assiégé dans Rome par le prince connétable de Bourbon qui le relient 7 mois prisonnier, 1527; il s'enfuit à la faveur d'un déguisement. Charles lui rend les villes qui ont fait défection, lui promet son secours contre les luthériens et demande un concile. Clément continue d'éluder ce sujet. Diète de Spire, 1529, contre laquelle les princes protestent, parce qu'elle t défend à quiconque de se faire luthérien. » Diète d'Augsbourg, 1530, où le pouvoir temporel de Charles tranche les questions, ce qui déplaît au pape comme aux luthériens. Ligue de Smalcalde, 1531. Lassé des refus et des détours de Clément, Charles proclame la liberté religieuse jusqu'à l'ouverture d'un concile. Clément à son tour, fatigué de tant d'instances, affecté de voir la moitié de l'Europe embrasser la Réforme, excommunie Henri VIU, roi d'Angleterre, 1534, et f la même année. — (lomme administration intérieure, il avait autorisé deux branches de franciscains, les capucins 1525, et les récollets 1532.

9o Clément VII, antipape; Robert de Genève, ev. de Thérouanne, cardinal -archev de Cambrai, éln pape en 1378 par 15 cardinaux qui avaient nommé Urbain VI quelques mois auparavant. Il fut reconnu par la France, la Lorraine, la Savoie, l'Ecosse, la Sicile, la Castille et l'Aragon, pendant que le reste de l'Europe continuait de reconnaître Urbain. Il réside à Avignon. Cette double élection cause un schisme, qui se prolonge longtemps après sa mort. Il survit 5 ans à son collègue et f d'apoplexie 1394.

10° Clément VIII, Hippolyte Aldobrandini, né à Fano dans les États de l'Église, élu 1592, 11605 à 69 ans. De rares talents secondaient

politique insidieuse et son désir d'en finir avec le protestantisme. Il s'attacha à faire revivre la piété dans l'Église et favorisa la science. Il condamna les duels, présida à l'abjuration d'Henri IV, et concourut à la paix de Ver vins, 1998. Il éleva au cardinalat Baronius, Bellar-min, Tolet, d'Ossat, Du Perron et d'autres hommes distingués. Sous son pontificat surgit la fameuse querelle de la grâce, à propos du livre de Molina, mais il évita de se prononcer, Il fit faire un abrégé du conc. de Trente, et commit une fatale imprudence en publiant une édition de la Vulgate, fort différente de celle de Sixte V, corrigée et retouchée, ce qui mettait en question l'autorité de l'une ou de l'autre.

11° Gilles de Munoz, chanoine de Barcelone, éln antipape sous le nom de Clément VUI, par les cardinaux dissidents, après la démission et •a mort de l'antipape Benoît XIII, 1424, s'établit à Peniscola. Le roi d'Aragon, Alphonse V, tétant réconcilié avec le pape Martin V, il invita Munoz à donner sa démission, 1439, ce qui mit (in au schisme qui durait depuis 51 ans. Munoz reçut l'évêché de Majorque en récompense de sa docilité; il n'avait d'ailleurs jamais eu que l'apparence de l'autorité pontificale.

12° Clément IX; Jules Rospigliosi, d'une famille de Pistoie en Toscane, né 1599, élu 1667, f 1669, se montra ennemi du népotisme, ami de la justice et de la paix. Il gouverna sagement, travailla à l'union des princes chrétiens, essaya mais inutilement de secourir les Vénitiens contre les Turcs qui assiégeaient Candie, et vit cette place importante tomber entre les mains du croissant. Il mit fin à l'affaire de la signature du Formulaire par un accord qui reçut le nom de Paix de l'Église, 1668.

13° Clément X; Émile Altieri, successeur du précédent, élu en 1670 à l'âge de 80 ans après une vacance de plusieurs mois. Trop âgé pour rien faire par lui-même, il abandonna le gouvernement au cardinal Antoine Paluzzi qui n'en abusa pas.

14° Clément XI; J.-Franc;. Albano, né à Pe-saro 1649, élu 1700, f 19 mars 1721. Il surpassait tous ses cardinaux par son savoir et ne le céda à aucun de ses prédécesseurs dans l'art de bien gouverner, mais il ne sut pas s'opposer à la corruption générale et s'occupa seulement de la grandeur apparente de l'Église. Il se mêla de politique et prit des mesures qui no lui réussirent pas. Exalté par les dernières victoires de la papauté, il tenta de renouveler les droits du pape au moyen âge. Son règne n'est qu'une série de chutes et d'échecs. Avec Joseph I«r, emp. d'Allemagne, qui réclame le jus primariarum precum comme son droit et le duché de Parme comme son fief, Clément essaie d'abord de l'excommunication, mais en vain, puis des armes séculières, mais sans plus de succès. Le conflit se termine par un compromis, 1709, qui est à l'avantage de l'empereur. En Sicile le duc de Savoie refuse de céder des droits ecclésiastiques qui lui appartiennent; le pape veut l'y contraindre, mais il échoue. Il proteste enfin contre la dignité royale donnée aux électeurs de Brandebourg (rois de Prusse),mais inutilement. C'est par suite de ses luttes avec Joseph qu'eut lieu la guerre d'Espagne, dans laquelle il se prononça pour la France. Il obtient un succès négatif en Portugal, et refuse au roi le rappel du nonce apostolique Vincent Bitschi, qui s'était conduit d'une manière répréhensible. Il crut mettre un terme aux troubles de l'Église de France en expliquant le conc. de Trente, eu confirmant la condamnation des cinq fameuses propositions de Jansénius par la bulle Vincam Domini Sabaoth et en donnant la fameuse constitution Unigenitus qui condamnait 101 propositions du P. Quesnel.

15° Clément XII; Laurent Corsini, élu en 1730, f 1740 à 88 ans, diminua les impôts et punit ceux qui avaient abusé de la faiblesse de son prédécesseur Benoît XIII pour prévariquer dans leurs fonctions, notamment Nicolas Cos-cia. Son règne fut sage, mais sans éclat.

16° Clément XIII; Charles Rezzonico, né à Venise 1693, élu pape 1758; homme tout d'une pièce et véritable représentant du moyen âge, l'opposé de son prédécesseur Benoît XIV. Protégé par les jésuites, il les protégea à son tour et les maintint solennellement contre les États de Portugal, de Naples, d'Espagne et de France. En dépit de sa bulle des milliers de jésuites furent expulsés, mais Clément les repoussa quand ils voulurent mettre pied à terre; il regardait leur expulsion comme non avenue, et les malheureux durent errer longtemps sur la mer. Trop faible pour lutter contre Pombal et Choiseuil, Clément se tourna contre un prince plus faible, le duc de Parme, qui avait limité la puissance et les revenus du clergé. Le duc de Parme était un Bourbon; les cours de sa famille prirent parti pour lui; le pape perdit le comtat d'Avignon et la principauté de Béné-vent 1768 et mourut la même année sans s'être vengé.

17<> Clément XIV, successeur du précédent, mais porté par le parti libéral; Laurent Ganga-nelli, né en 1705 dans le duché d'Urbin, élu en 1769 sous J'influence de la France. Son père était chirurgien. Animé du même esprit que Benoît XIV il rétablit de bons rapports avec toutes les cours, renonça aux prétentions de son prédécesseur sur le duché de Parme, recouvra Avignon et Bénévent, et recueillit les heureux fruits d'une politique conciliante. Cédant aux sollicitations de plusieurs princes, il supprima (21 juillet 1773) l'ordre des jésuites qui, banni de tous les pays catholiques, ne subsista plus que dans l'empire grec et la Prusse, c.-à.-d. chez des princes schismatiques et héretiques. Sa bulle Dominus ac Redemptor noster est un chef-d'œuvre de droit canon. Il mourut peu de mois après, 1774, et le bruit courut, non sans apparence, qu'il avait été empoisonné par les jésuites. Caraccioli a publié sa vie en français, 1775, avec un recueil de Lettres, mais dont l'authenticité est contestée.

CLÉMENTINES. On réunit sous ce nom plusieurs compositions du milieu ou de la fin du 2®e siècle, écrites dans un même esprit, et attribuées, mais à tort, à Clément de Rome. Elles renferment l'exposé comparatif de la foi des judéo-chrétiens et de la foi des chrétiens d'entre les gentils, concluant en faveur des premiers. Parmi ces écrits il faut distinguer

4<* les Homélies de Clément Romain, soit une lettre de Pierre à Jacques, une de Clément à Jacques après la mort de Pierre, et 20 homélies ou discours qui ont dû être écrits à la demande de l'apôtre et qui, sous une forme très fine, souvent élégante, racontent les voyages de Pierre, ses discussions avec Simon le magicien, avec Appien, avec Athénodore, etc. Une série d'épisodes relèvent l'intérêt du récit, qui d'ailleurs est un simple cadre où l'auteur fait parler ses interlocuteurs et réfute les objections que Ton peut faire à sa doctrine.

2« Les Récognitions, qui ne nous sont parvenues que dans la traduction de Rufin, sont un développement dti précédent ouvrage, mais moins tranché quant à la doctrine. Il raconte aussi, et probablement après avoir puisé aux mêmes sources, les nombreuses pérégrinations de l'apôtre; Clément est encore son compagnon de voyage; Clément retrouve son père, sa mère, ses deux frères qu'il avait perdus, et tous se convertissent. Pierre a une discussion de 3 jours avec le magicien; il le retrouve plus tard à Laodicée et lui inflige une nouvelle défaite, etc. Pierre soutient un christianisme mélangé d'ébionitisme, en opposition à Simon qui représente les vues de saint Paul sur les pa-gano-ch ré tiens; on a pu même se demander si l'auteur n'a pas voulu introduire sous le masque de Simon l'apôtre des gentils. La doctrine est monothéiste, mais avec une tendance à laisser la pensée de Dieu se développer dans le jeu des contrastes, l'homme représentant le bon principe et la femme le mauvais. L'Adam-Christ est le principe éternel, toujours le même, de l'immuable vérité. Le Christ n'est donc ainsi que le modèle parfait du prophète inspiré de l ieu, et son œuvre a consisté simplement à révéler aux hommes la doctrine secrète de Moïse telle qu'elle s'était conservée à travers les siècles malgré quelques altérations. La morale des Clémentines se résume tout entière dans l'ascétisme.

3° L'Epitome; encore un extrait, abrégé et défectueux, des Homélies, avec quelques additions où figurent les noms de Siméon Méta-phraste et d'Éphraïm. év. de Cherson. qui aident à fixer les dates.

4o Enfin, quelques autres Fragments isolés, découverts plus tard, dont l'authenticité est controversée, et qui rappellent de loin les Homélies et les Récognitions.

Tous ces ouvrages paraissent avoir été écrits dans la Syrie orientale, où les sectes ont toujours été nombreuses; plusieurs peuvent avoir été retouchés à Rome. Aucun n'est antérieur à l'an 150, plusieurs sont postérieurs à 170, ce qui exclut toute participation de Clément Romain. La plus ancienne mention que l'on en trouve est d'Origène, vers 230. Cette littérature pseudo-clémentine ne manque pas d'un certain intérêt; elle a été étudiée avec soin par Baur et l'école de Tubingue.

CLERC (Le), v. Leclerc.

CLERC, tout ecclésiastique depuis le momeut où il reçoit la tonsure.

CLERGÉ, mot dérivé du grec clèroe, qui ne se trouve appliqué au ministère dans le N. T. que Act. 1, 17. 25. oii il est traduit par toi, part ou partage, et n'a rien du sens que l'usage lui a donné par la suite. Il désigne auj. l'ensemble des hommes directement attachés au service de l'Église, ou d'une église, et il n'y aurait aucun inconvénient à s'en servir pour eviter une périphrase, si des idées fausses ne lui avaient donné un sens et un caractère qu'il n avait pas à l'origine. Dans l'Égl. primitive l'idée du sacerdoce universel était une réalité; chaque chrétien était, dans la mesure de ses dons et de ses forces, un ecclésiastique, un prêtre, un témoin. A mesure que la vie religieuse s'altéra, on s'habitua à confier à des hommes spéciaux les différents ministères de l'Église, et une fois sur celte voie on ne s'arrêta plus. Déjà vers la tin du 3me siècle on voit s'accentuer l'idée d'une caste sacerdotale. Le célibat des prêtres, qui n'est encore qu'en germe, favorisera cette tendance en même temps qu'il sera favorisé par elle, et s'il lui faut 8 siècles pour arriver, il y mettra 8 siècles. A cela se joindra l'idée fatale de l'influence magique de la consécration; elle sera pernicieuse en ce que, la capacité d'un pastear ne dépendant plus de sa personne mais de sa consécration, les ecclésiastiques en vinrent promptement à négliger soit les études, soit même l'exercice de la piété. Enfin la hiérarchie ^organisant peu à peu depuis le simple prêtre jusqu'à Tévêque, au métropolitain et au pape, l'élection des pasteurs finit par être enlevée aux paroisses et tomba entre les mains des évêques. A la vérité l'eglise-peuple, ayant perdu sa sainteté première, était dominée par des passions et des partis, et plusieurs fois les élections avaient été signalées par des émeutes. Les privilèges qui devinrent peu à peu et tout naturellement l'apanage des ecclésiastiques, altérèrent l'idée de lenr ministère et leur donnèrent à la fois un pouvoir et un caractère temporel, avec des prétentions à l'autorité, qui, plus que tout autre chose, concoururent à leur faire d'implacables ennemis. La réformation a supprimé l'abus en théorie, mais elle n'a pas réussi partout à le supprimer entièrement dans la pratique.

CLÉS (Pouvoir des); expression qui désigne dans régi, cathol. le droit de lier et de délier que J.-C. a donné à l'apôtre Pierre, Matt. 16,19: • Je te donnerai les clés du royaume descieux, » et dont les év. de Rome prétendent avoir hérité. Au 9m« siècle on montrait encore à Rome deux grosses clés d'argent que l'on affirmait être celles que Jésus avait remises à l'apôtre. Toute la théorie de l'absolution repose sur le passage cité. Saint Pierre, et depuis lui les papes, et par leur délégation les prêtres, ont le droit de lier et de délier, c.-à-d. de retenir ou de remettre les péchés, et cela d'une manière absolue, par le seul fait de leur autorité, sans aucune condition morale, à la seule exception des cas réservés. Sans doute ils peuvent demander le repentir, mais ils peuvent aussi s'en dispenser, comme l'a prouvé le scandaleux trafic des indulgences. La principale difficulté, qui a fait rejeter ce pouvoir par les égl. de la réforme, c'est que le droit de lier et de délier n'a pas été donné à Pierre seul, mais à tous les apôtres, comme on le voit par Jean 20, 19. qui d'un consentement unanime, présente le même sens que les paroles adressées à Pierre, et même à tous les disciples, comme cela ressort du passage parallèle Luc 24, 34. où l'on voit Jésus se montrant aux onze assemblés et à ceux qui étaient avec eux. Le vrai pouvoir des clés n'appartient donc ni à un homme, ni à une classe d'hommes, mais à tous les disciples, et cela non dans le sens d'une autorité particulière résidant en eux, mais dans la mesure de leur foi et pour autant qu'ils annoncent la Parole de Dieu et rappellent la prédication de la croix. La nourrice huge-note de Charles IX avait le pouvoir des clés, quand elle disait à ce pauvre mourant: Croyez que Dieu couvrira vos péchés du manteau de la justice de son Fils. — L'interprétation cathol. actuelle des paroles de Jésus à Pierre n'était admise ni par Tertullien, ni par Cyprien; ce dernier dit positivement que les pasteurs ne peuvent pas conférer l'absolution des péchés, mais seulement amener les Ames à la connaissance de leurs fautes et à chercher leur pardon auprès du Seigneur. Saint Jérôme, Augustin, Théodore!, P. Lombard, Adrien VI, tiennent le même langage; l'homme ne peut pas pardonner les péchés, il ne peut qu'annoncer le pardon en J.-C. C'est encore auj. la doctrine de l'Égl. grecque et de toutes les églises d'orient. Thomas d'Aquin est le premier qui ait formulé et précisé la doctrine actuelle du pouvoir des clés, telle qu'elle a été proclamée par le conc. de Trente.

CLÈVES, v. Juliers-Clèves.

CLOCHES. On trouve déjà chez les Romains, les Égyptiens et les Juifs quelques traces d'une espèce de sonnerie, cloches ou clochettes, pour les convocations religieuses; cependant on peut dire que l'usage régulier des cloches est d'origine chrétienne. On l'attribue généralement à l'év. Paulin, de Nola, quoique dans la description qu'il a laissée des églises, il n'y fasse aucune allusion. C'est au 7roe siècle qu'il est pour la première fois fait mention de cloches, à Rome et à Orléans. Charlemagne en répandit l'usage. Les cloches étaient d'abord faites d'un alliage de cuivre et d'étain; plus récemment on en a coulé en fer fondu, et même on a fait entrer aussi de l'argent dans leur composition. Jean XIV eut le premier, 965, l'idée de baptiser une cloche, à laquelle il donna son nom; c'est la grosse cloche de Saint-Jean de Latran, et dès lors le baptême des cloches fut introduit et s'est perpétué jusqu'à ce jour; l'idée n'était que le développement exagéré d'une pensée vraie, mais elle ne tarda pas à dégénérer en une grossière superstition, comme si la cloche, bénite et baptisée, pouvait par elle-même produire de bons sentiments, chasser les démons et conjurer les fléaux. On lit sur la grosse cloche de Saint-Pierre à Genève: Pestent fugo, pello deemones. En tout cas elle ne chasse pas les orages, elle les attire plutôt. — L'usage de sonner les cloches le soir pour Y Angélus Domini remonte à Urbain II et visait particulièrement les Turcs; il s est conservé après le danger passé; les catholiques récitent alors trois Ave Maria. La sonnerie du matin et de midi est plus récente. Plusieurs égl. évangéliques ont conservé les cloches du soir.

CLOVIS, ou Chlodowig (Ludwig. Louis), fils de Childéric et de Basine, femme d'un roi thu-ringien, qu'il avait séduite et qu'il finit par épouser, fut le fondateur de la monarchie fran-que. Né 465, roi 481, f 511. D'un caractère rude et violent, à moitié barbare, dévoré d'ambition, il trouvait trop petit son royaume qui était borné par l'Escaut, Boulogne et Cambrai; il prit Soissons sur Siagrius et poussa jusqu'à Paris 493. La même année il épousa Clotilde, et 3 ans après, à sa sollicitation, ayant gagné sur les Allemands la bataille de Tolbiac 496, il se déclara chrétien et se fit baptiser par Rémi. Sans être exclusivement une manœuvre politique, sa conversion favorisa ses desseins; elle assura sa prépondérance sur les populations chrétiennes, et son catholicisme orthodoxe lui permit de combattre les princes ariens, notamment Alaric et les Visigoths, Arrêté dans ses conquêtes par le grand Théodoric, il n'en re;ut pas moins de l'emp. Anastase les insignes de patrice et de consul, mais il souilla ses dernières années par des assassinats dont le nombre et l'atrocité effraient l'imagination; il fit massacrer les rois de Boulogne, du Mans et de Cambrai pour s'approprier leurs royaumes. Il venait enfin de convoquer le premier concile de France, quand il mourut, laissant ses États à ses 4 fils. Grégoire de Tours loue la sincérité de son cœur et met sur le compte de la bénédiction divine l'agrandissement successif de son royaume; c'est un jugement bien partial et superficiel, mais il n'en est pas moins vrai que la conversion de Clovis, quelle qu'elle ait été au fond, est une date importante, à la fois pour l'hist. de France et pour l'hist. du christianisme.

CLUN Y, ou Clugny, célèbre abbaye de Saône-et-Loire, fondée 910 par Guillaume d'Aquitaine et par Bernon, abbé du couvent de Beaume; elle appartenait à la règle stricte de l'ordre de saint Benoît, et ne relevait que du pape. Réformée 930 par Odon, successeur de Bernon, elle compta bientôt plusieurs couvents, et de puissants abbés accrurent la considération dont elle jouissait. Dans le nombre il faut compter surtout Pierre-le-Vénérable 1122-1156, l'adversaire de Pierre de Bruys, mais protecteur d'Abélard contre Bernard de Clairvaux; c'est à lui qu'on doit les Coutumes de Cluny qui transformèrent en règles ce qui n'était que coutumes et organisèrent en congrégation les nombreux couvents qui se rattachaient à la maison. Au 12^® siècle l'abbaye atteignit le plus haut point de prospé ri té; elle ne comptait pas moins de 2000 couvents, et son chef portait le titre d'Abbé des Abbés, mais ce titre ayant été donné à l'abbé du Mont-Cassin par un concile de Rome 1126, l'abbé de Cluny prit celui d'Archi-abbé. Les richesses, la puissance, les privilèges ne tardèrent cependant pas à porter leurs fruits accoutumés; la discipline se relâcha, les divisions au dedans, les jalousies au dehors menacèrent jusqu'à l'existence de la congrégation, et l'abbaye, pour se soustraire aux dangers, se mit sous la protection des rois de France, qui devinrent ses maîtres en même temps que ses protecteurs. En 1528 Cluny tombait entre les mains des Guise dans la personne du cardinal Jean de Lorraine; puis venait le cardinal Char les, puis Claude de Guise f 1612, puis le cardinal Louis de Lorraine + 1621; quelques essais de réforme eurent lieu, mais sans aboutir ,* le parti des vieux l'emporta sur celui des jeunes, surnommés les Réformats; ces derniers obtinrent cependant de l'abbé prince de Conti 1645 le droit d'avoir un chapitre annuel, avec un su périeurde leur choix; déjà en 1634 ils s'étaieni rattachés aux bénédictins de Saint-Maur. Maza rin condamna le parti des jeunes, mais comprit la nécessité d'introduire quelques réformes. Dès lors les divisions ne firent que s'accentuer, l'ordre déclina, et lorsqu'en 1790 la révolution supprima l'abbaye, dont le dernier abbé fut un La Rochefoucault, ce n'était plus qu'un riche bénéfice, une prébende sans action, ni autorité. Ses reliques et ses ornements précieux furent vendus, et sa riche bibliothèque fut réunie au domaine public; elle fait auj. partie de la Bi-blioth. nationale.

COADJUTEUR, aide d'un ecclésiastique empêché par l'âge, la maladie ou d'autres motifs, de remplir tout ou partie de ses fonctions. Son entretien lui est assuré sur les revenus de la place, et le plus souvent la survivance lui est promise. D'après le Conc. de Trente, c'est l'év.

qui nomme le coadjuteur d'un curé. Dans la rè-jçle les évéques n'ont point de coadjuteurs; en cas d'empêchement, ce sont les év. voisins, ou l'év. provincial qui le remplacent, mais en pratique et dans des cas d'urgence on sait touj. faire fléchir la règle, en ayant soin que le coadjuteur remplisse toutes les conditions requises d'un évêque réel et qu'il possède le titre d'un autre évêché, souvent fictif (ainsi le comte de Wessenberg à Constance, Geissel à Cologne). Même alors le coadjuteur n'a le droit ni d'aliéner, ni de dénaturer les biens du diocèse. Il faut pour la nomination d'un coadjuteur episcopal le choix du chapitre, le placet du gouvernement et la confirmation du pape.

COCCÉIUS (Jean Koch), né à Brème 1603, fils du secrétaire de la ville, qui était un homme craignant Dieu. Il fit ses études à Brème, à Hambourg, enfin à Franeker sous Amesius et A marna. En 1629 il fut nommé prof, de philologie biblique à Brème, en 1636 à Franeker, entin de dogmatique à Leyde, où il + 1669. Il a fait école, et ses disciples furent appelés Coc-cèiens. Il a rendu des services à la théol. en général par la largeur de ses vues et la profondeur de ses aperçus; à l'Égl. réformée par sa conception claire de la liberté dans le développement de la foi, et à l'esprit religieux par l'importance qu'il attachait à la piété dans ses rapports avec les formules théologiques. Strictement orthodoxe réformé il n'aimait pas la scolastique et la rendait responsable, à cause de la subtilité de ses distinctions, des luttes qui existaient au sein des égl. protestantes. En exégèse il a posé le principe qu'un texte de l'Écriture doit s'expliquer par le contexte et, contrairement à l'exégèse traditionnelle, qu'il doit signifier tout ce qu'il peut signifier dans ce contexte, alors même que cette explication dérangerait certaines idées reçues; Vitringa, son élève, a prouvé l'excellence de ce principe. Mais c'est dans h dogmatique surtout qu'il a innové. Au lieu de prendre son point de départ dans le N. T. seul et dans la doctrine du salut, il le prend à l'ori-gine, dans les rapports de Dieu avec l'homme, dans les alliances successives qu'il a contractées avec Phomme, savoir: Avant la chute, alliance en quelque sorte unilatérale, où Dieu donne tout et l'homme reçoit tout; après la chute, alliance de grâce et de restauration, qui se divise en 3 périodes: Avant la loi, sous la loi, après la loi, ou économie de la conscience, de la loi et de l'Évangile. Coccéius avait laissé le chemin traditionnel de l'école, pour inaugurer la théol. biblique; il prenait l'histoire sainte pour fil conducteur et suivait dans l'histoire le développement de la doctrine. Son principal ouvrage est intitulé: Summa doctrinœ de fœdere et testamento Dei 1648, et le mot de fœdere (alliance) a servi à désigner son système, qu'on a appelé la théologie fédéraliste, ou des alliances. Très vivement attaqué par les orthodoxes rigides, notamment par VoPtius, comme ayant une tendance vers l'arminianisme et comme n'affirmant pas suffisamment la prédestination, le fédéralisme devint un champ de bataille qui en 1672 menaçait de sortir des bornes de la simple discussion; les esprits s'échauffaient et il fallut le synode d'Amsterdam 1677 pour assurer à la doctrine de Coccéius le droit de vivrr et de s'affirmer dans le pays et dans l'Église. On a du même auteur un Lexicon et Comment. Serrn. hebraici et chaldaici. Œuvres compl. publ. par son fils.

COCHLiEUS (Jean Dobeneck), théol. catholique de l'époque de la Réformation. Né à Wen-delstein, près Nuremberg 1503, il fut nommé doyen à Francfort, puis à Mayence, chapelain et secrétaire du duc Georges de Saxe à Dresde, enfin chanoine à Breslau où il f 1552. II avait beaucoup voyagé. Un des agents les plus passionnés de la controverse contre les protestants, il trouva moyen de se mêler à diverses négociations importantes. Déjà par la protection du légat Aléandre, il put assister à Worms à la conférence de Luther avec le prince électeur de Trêves, 24 avril 1521. A Augsbourg 1530 il prit part à la rédaction de la Confutation de l'Augustana. Il fut présent à la conférence de Haguenau 1540, et au Colloque de Ratisbonne 1546. Ses ouvrages sont peu importants; il ne voit dans la Réforme qu'une question d'intérêts personnels. Son Hist. des hussites est le plus utile à consulter, par le nombre des sources qu'il a eues à sa disposition.

COELLN, Daniel-Georges, né 1788, f 1833, prof, de théol. à Breslau, rationaliste modéré, auteur d'une Théologie biblique. Il écrivit contre Hengstenberg pour réclamer l'entière liberté d'enseignement.

CŒUR (Fête du sacré-) de Jésus. Il y avait déjà la Fête-Dieu, Corporis Christi. Un mystique du siècle dernier, Joseph de Galiffet (1663-1745), provincial des jésuites de Lyon, étant tombé malade, s'engagea, s'il guérissait, à se consacrer tout entier à la gloire du sacré cœur de Jésus. Il publia en effet un traité latin sur ce sujet, qui parut à Rome 1726, avec un mémoire approbatif et enthousiaste des visions de la mère Marie Alacoque q. v. Nouvelle édition française du traité, Paris 1733, sous le titre de: Excellence de la dévotion au Cœur adorable de Jésus, étrange composé de spiritualisme matérialiste et d'aspirations charnelles. De nombreux théologiens et le conc. de Pistoie condamnèrent cette innovation et ce culte rendu à la nature humaine du Sauveur; mais les jésuites étaient là, les vieilles fêtes ne suffisaient plus pour ranimer le zèle des fidèles, il fallait du nouveau; Clément XIII autorisa, Pie VI dans sa bnlle Auctorum fidei, recommanda la fête, et maintenant, quoiqu'elle ne soit pas encore ordonnée, elle a pour elle la mode; c'est en son nom que sp font les miracles, que s'organisent les pèlerinages et que se fondent les églises. Elle se célèbre ordinairement à l'octave de la Fête-Dieu.

La Congrégation du Sacré-Cœur date de 1794; elle se forma sous les auspices des abbés Charles de Broglie et Tournelly. De Louvain les circonstances politiques la forcèrent de se rendre à Augsbourg, puis à Vienne où, en 1799, elle se fusionna avec les paccanaristes, aulre branche des jésuites. Le conc. de Pistoie se prononça contre eux. Une congrégation de femmes, du même nom, fut fondée à Paris 1800 par MUc Barat. Léon XII la reconnut 1826. Elle s'occupe surtout de l'éducation de la jeunesse, et compte des succursales dans presque tous les pays du monde.

COLENSO, J.-W.; né 1814 dans le Cor-uouailles, étudia à Cambridge où il fut agrégé à Saint-John's Collège. De 1836 à 1842 il fut inaitre-adjoint au collège de Harrow, passa ensuite 4 ans k Cambridge, 7 ans à Norfolk comme pasteur et se distingua surtout par ses traités d'arithmétique et d'algèbre. En 1853 il fut nommé év. de Natal, et en 1855 commença une série de publications, dont la plus importante, contre le Pentateuque et Josué, amena en 1864 sa révocation par les 2 chambres de la convocation de Cantorbéry. Il tint bon, soutenu par le Conseil privé, et ses adhérents lui firent de riches cadeaux. Sa destitution fut de nouveau ratifiée par le Conseil pan-anglican, et l'év. Gray, du Cap, lui donna un rival en la personne du Dr Macrorie. Il y eut ainsi 2 évêques dans la contrée, ce dernier soutenu par les colons et l'Église; Colenso surtout par les Zoulous, dont il avait défendu les droits, f 20 juin 1883 à Natal. Il repoussait le dogme de l'inévitable damnation des païens, et l'obligation imposée aux convertis de renoncer k la polygamie.

COLÈRE de Dieu, l'une des expressions an-thropopathiques le plus souvent employées dans la Bible, surtout dans l'A. T., pour représenter en langage d'homme le sentiment qu'inspire à Dieu la vue du mal et du péché. La colère est ordinairement l'expression d'un sentiment mauvais; cependant elle peut être quelquefois considérée comme juste, légitime et sainte; dans ce cas on emploierait plutôt le mot d'indignation, mais c'est à peu près la même chose. En parlant de Dieu les auteurs sacrés veulent désigner simplement, de manière à le faire comprendre à l'homme, le déplaisir que lui causent des actes contraires à sa sainteté et au but qu'il se propose dans le gouvernement du monde; il s'y rattache en même temp& jme idée de justice, par conséquent de châtiment, v. Ex. 32, 10. Jug. 6, 39. Job 9, 13. Matt. 3, 7. Rom. 1, 18. Eph. 5, 6. cf 4, 26. Apoc. 6, 16.

COLIGNY. Gaspard, comte de Coligny, devenu chef de la maison de Ch&tillon par l'entrée de son frère Odet dans les ordres, naquit à Châ-tillon-sur-Loing, 16 févr. 1518. Il fut présenté de bonne heure à la cour par son oncle le connétable, et se lia d'amitié avec François de Lorraine qui, plus tard, devenu duc de Guise, devint son plus implacable ennemi. On trouvera partout l'histoire de sa carrière militaire, que nous n'avons pas k raconter. Il servit son pays comme soldat pendant plus de 40 ans, et versa son sang sur maint champ de bataille avant d'être assassiné par ordre de son roi. 11 reçut sa première blessure au siège de Montmédv 1542. En 1543 il était à Landrecies, en 1544 à Cérisoles, puis à Carignan. En 1551 il fut nommé gouverneur de la Champagne, puis amiral de France. Après la campagne de 1552-1555 qui donna k la France Metz, Toul et Verdun, il défendit Saint-Quentin avec vigueur, en 1556, retint les Espagnols pendant 3 semaines, ce qui les empêcha de marcher sur Paris, mais dut enfin capituler et fut fait prisonnier. 11 passa 2 ans au château de Gand, où il lit une grave maladie. Il employa ses loisirs à écrire l'hist. du siège qu'il avait soutenu, et à étudier La Bible et divers livres de controverse. En 1558 il se convertit au protestantisme et, quand il eut recouvré sa liberté, il abjura publiquement le catholicisme, avec sa famille; la noble Charlotte de Laval, qu'il avait épousée en 1547, partageait ses convictions. Dès ce moment, et plus désintéressé que Condé, il se consacra tout entier au service de l'Église, ne demandant au roi que le libre exercice du culte pour les réformés, et l'observation des édits rendus en leur faveur, deux choses qu'on ne se lassa pas do leur accorder en apparence et de leur refuser dans la pratique. De là ces 25 années de guerres de religion, qui aboutirent à la Saint-Barthé-lerny. On essaya, mais en vain, de le faire passer pour compromis dans la conjuration d'Am-boise; ni le roi, ni la reine, ni les Guise, ni Brantôme ne le crurent. Mais navrés des affreuses exécutions dont ils avaient été les témoins, Coligny et Andelot demandèrent à la reine la permission de quitter la cour, et Coligny fut chargé d'une mission en Normandie: il fortifia Dieppe, comme il avait fortifié Boulogne, et prépara les voies à un essai de colonisation dans la Floride. Rappelé à Fontainebleau, pour y assister à une assemblée des Notables, il travailla, d'accord avec le chancelier de L'Hospital, à procurer la paix du pays « troublée par la diversité de religion et par la lourdeur des impôts. » Les év. Montluc et Marillac forent d'accord à blâmer les persécutions, mais les Guise manœuvrèrent de manière à empêcher tonte résolution positive. Les États d'Orléans et le colloque de Poissy n'aboutirent pas davantage. Le massacre de Vassy donna le signal de la reprise des hostilités, et Coligny fut élu lieu-tenant-général des armées protestantes, sous les ordres deCondé. Il s'opposa à toute demande de secours aux puissances étrangères, laissant aux Guise le triste honneur de vaincre des Français avec des troupes espagnoles. Il empêcha la bataille de Dreux de se changer en une véritable déroute, et envahit la Normandie, maintenant dans son année la plus stricte discipline. Accusé par ses ennemis de complicité dans l'assassinat du duc de Guise par Poltrot, il n'eut pas de peine à prouver son innocence; son grand caractère suffisait pour le mettre à l'abri de tout soupçon, et le Conseil privé, en 1566, le déchargea officiellement d'une participation quelconque à ce crime. — La paix d'Amboise ne dura pas longtemps. Coligny dut reprendre les armes en 1567, et son armée fut presque détruite à la bataille de Saint-Denis; lui-même, emporté par son cheval, faillit être fait prisonnier. Il était sous les murs d'Orléans quand il apprit que sa femme était à toute extrémité; elle était tombée malade en soignant les soldats dans les hôpitaux; elle mourut 7 mars 1568. Après la petite Paix de Longjumeau, les intrigues des Guise lirent recommencer les persécutions; Coligny fortifia La Rochelle, et après la malheureuse bataille de Jarnac, où Condé fut tué, il fut nommé général en chef. Battu de nouveau à Moncontour, il répara promptement ses brèches, et se jeta sur le midi, prit Toulouse, Nîmes, Aubenas, Saint-Étienne. Mais épuisé de fatigues, souffrant de ses blessures, accablé de soucis, il tomba gravement malade. Le roi venait de le faire pendre en effigie, et d'offrir 30,000 écus d'or à qui le lui livrerait « mort ou vif. * A peine en convalescence, Coligny battit le maréchal Brissac à Arnay-le-Duc 27 juin 1570, et se mit en marche sur Paris. La cour effrayée accepta la paix qui lui était offerte, et le traite de Saint-Germain fut signé le 8 août, garantissant aux réformés la liberté de conscience, ^i Coligny, ni Télignyson gendre ne pouvaient croire que ce ne fût qu'un leurre et une infâme perfidie. L'amiral congédia ses troupes étrangères; cependant il céda aux conseils de la prudence en se retirant à La Rochelle, où il assista comme député an synode d'avril 1571. Mais la cour le rappela k Blois; il y arriva en septembre. Charles IX le reçut comme son père, le combla d'honneurs, lui rendit ses charges et parla de lui confier le commandement de la

guerre de Flandres. En vain ses amis lui conseillaient de se méfier des Guise et de la cour: tous les avertissements étaient inutiles. Le 7 août 1572 il écrivait encore au prudent capitaine Blosset: Nous avons un bon roi. Celui-ci lui répondit: Il nous est trop bon, c'est pourquoi j'ai envie de m'en aller. Le 22 août, comme il sortait de chez le roi, Coligny reçut deux coups d'arquebuse de Maurevel, le tueur du roi, et Paré dut faire l'amputation de l'index de la main droite. Le roi témoigna une grande colère contre l'assassin, fit placer ses propres gardes k la porte de l'hôtel de Coligny, et deux nuits après, donnait le signal du massacre des protestants. Le 24 août à 2 h. du matin le tocsin sonnait à Saint-Germain l'Auxerrois, et inaugurait cette nuit fatale, qui déshonorait une monarchie et une Église. Coligny fut assassiné par les gardes mêmes que le roi lui avait donnés; percé ^ de coups, son corps fut jeté dans la cour où Guise vint bientôt le reconnaître et le repoussa du pied en disant: C'est bien lui. La tête de l'amiral fut d'abord portee au roi, puis embaumée et envoyée au pape; le corps mutilé fut pendu à Montfaucon où le roi se donna le plaisir de l'aller voir; il en rêva jusqu'à sa mort. Le maréchal de Montmorency fit transporter secrètement le cadavre à Chantilly, jusqu'à ce que en 1599 il put être inhumé dans le tombeau de la famille à Châtillon-sur-Loing. Coligny, dont la mémoire fut déclarée infâme par le parlement de Charles IX, est resté une des plus belles et des plus pures gloires de la France, à la fois grand capitaine, grand diplomate, grand citoyen et humble chrétien. Il a laissé une Relation du siège de Saint-Quentin, une de la bataille de Dreux, une réponse à l'interrogatoire de Poltrot, un discours sur la guerre des Flandres, des Ordonnances sur la discipline militaire, etc. — De sa première femme il eut 6 fils et 2 filles; plusieurs moururent en bas âge; François né le 28 avril 1557, soutint dignement la réputation du nom paternel; sa sœur Louise, femme de Téligny, puis de Guillaume de Nassau, fut la trisaïeule de Frédéric-Guillaume roi de-Prusse, duquel est issue la duchesse Hélène d'Orléans, mère du comte de Paris. De sa seconde femme, Jaqueline de Montbel, il n'eut qu'une fille, posthume, Béatrice, qui fut arrachée à sa mère et élevée dans la religion catholique. — V. Haag, Tessier, J. Delaborde, Bersier. — Un monument vient de lui être élevé à Paris, au chevet de l'Oratoire, non loin de l'égl. Saint-Germain-l'Auxerrois qui donna le signal des massacres.

COLLECTES a deux sens: lo Quêtes pour un objet déterminé ou d'intérêt général; déjà connues dès les temps apostoliques, Rom. 15, 25. Act. 24, 17, etc., elles se sont continuées dans

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tous les âges, parce qu'elles répondent à des besoins réels; parfois elles se sont multipliées abusivement, et l'usage a dû en être réglé soit par l'État, soit par l'autorité ecclésiastique supérieure. Dans l'Égl. réformée les collectes pour ce qu'on peut appeler les objets de luxe, cloches, clochers, orgues, etc., ont été longtemps interdites. — 2° Courtes prières qui se font encore à l'autel avant la lecture de l'Évangile ou des Épîtres.

COLLÈGES. On désigne sous ce nom toute association ou fondation qui a pour objet l'instruction publique ou le bien de l'Église. Les collèges nationaux ou pontificaux sont destinés, dans les pays non catholiques, à former un clergé qui, exclusivement soumis a Rome, prend soin de ses intérêts, provoque des conversions, surveille les ecclésiastiques, leur donne le ton dans les moments difficiles et représente la mé-* tropole au milieu des infidèles. Quand ces collèges ont une destination particulière, ils prennent le nom de la nation dans laquelle, ou pour laquelle ils sont créés. Ainsi: le Collège germanique fondé en 1552 par Loyola pour combattre la réforme en Allemagne; déchu, puis relevé par Grégoire XIII, 1573, qui fonda aussi un collège grec, un anglais, un maronite, etc. Ces établissements étaient tous placés sous la direction de la congrég. pour la propagation de la foi. — Les ecclésiastiques d'une église paroissiale, s'organisant sur une base commune, comme les employés d'une cathédrale, forment un collège, et leur église prend le nom de collégiale; les deux peuvent coexister dans une même ville, et historiquement l'on peut dire que si les chanoines représentaient en général la noblesse et l'aristocratie, les collégiales représentaient plu-têt la bourgeoisie.— Spener avait fondé, sous le nom de Collèges de piété des conférences ou réunions d'édification, qui valurent à ceux qui en faisaient partie le surnom de piètistes. On donne aussi le nom de collégiants à une fraction d'arminiens qui, à l'époque des persécutions, se réunissaient pour étudier la Bible. Les trois frères De Codde de Leyde, en étaient les chefs; les orateurs s'appelaient des prophètes. Ils ne tardèrent pas à se fondre dans les qnakers ou dans les anabaptistes. La secte s'éteignit vers 1800.

COLLYRIDIENS. v. Antidicomarianites.

COLOGNE, ancienne capitale des Ubïens, 37 ans av. C., puis de la Germanie inférieure, enfin des Francs Ripuaires, fut embellie par la fille de Britannicus, femme de Claude, qui y était née 51 ap. C. et reçut d'elle les noms de Colonia Claudia Augusta Agrippina, dont le premier seul, Colonie ou Cologne, lui est resté. La légende lui donne pour premier èvêque Materne, le jeune ressuscité de Nain; l'histoire

accepte le nom de Materne, mais le place au 4me siècle sous Constantin vers 313; Materne intervint dans les discussions donatistes et signa les actes du conc. d'Arles 314. En tout cas la légende de sainte Ursule, celle des trois mages, celle des onze mille vierges et d'autres encore prouvent que l'Évangile s'introduisit de bonne heure dans cette colonie, mais il n'y régna sans conteste qu'à dater de Clovis et de l'incorporation de la ville à l'empire franc. Après quelques hésitations de Boniface qui avait fini par se décider pour Mayence, Cologne devint cependant sous Charlemagne le siège de l'archevêché pour les contrées du Rhin, comprenant les év. de Liège, Utrecht, Osnabrllck, Minden, Munster et Brème. Plusieurs archevêques jouèrent dès lors un rôle politique important, entre autres Bruno, le frère d'Othon 1er, 953-965, qui la fit déclarer ville libre et impériale. La faveur des papes et des emp. augmenta la considération dont jouissaient ces prélats privilégiés, et la dignité électorale qui leur fut définitivement conférée en 1357, mais qu'ils avaient déjà possédée à plusieurs reprises, ajouta à l'importance politique de leur rôle. Les richesses qu'ils avaient acquises et l'étendue du territoire sur lequel ils régnaient, leur suscitèrent de nombreuses difficultés de juridiction avec les seigneurs dont les terres et les châteaux étaient enclavés dans le j diocèse. L'Église, comme telle, eut beaucoup à en souffrir pendant 2 siècles, et il ne fallut rien moins que la Réformation pour apporter un remède à cet état de choses. La ville de Cologne, par une curieuse anomalie, était restée ville libre et n'appartenait pas à l'électorat; elle était devenue un centre littéraire et intellectuel, comme elle était déjà un centre commercial. La Réforme y pénétra, mais y fut en partie étouffée par les princes de la maison de Bavière, après que l'archev. Gebhard de Wildburg eut épousé Agnès de Mansfeld; on n'admettait pas que dans ces conditions il pût conserver son siège. — Parmi les prélats qui ont honoré le diocèse, il faut nommer saint Séverin f 408, Cunibert 631 663 qui fut presque régent d'Austrasie sous Dagobert et Sigebert; Bruno I**, Annon II, Réginald de Dassel 1159-1167, qui reçut de Frédéric I^r de nombreux domaines en Italie, ainsi que les têtes des trois mages et plusieurs os de Félix, de Nabor, d'Apollinaire, etc.; saint An-getbert de Berg, assassiné par le comte d'Isen-bourg; Conrad de Hochstaden, qui posa les fondements de la cathédrale 1248; Hermann Vde Wied, qui se prononça pour la Réform. et fat chassé 1546. Le diocèse n'a cessé d'aller dès lors en déclinant. Louis XIV s'en empara un moment. Les Français le prirent de nouveau en 1795. Le dernier électeur, Maximilien-François-Xavier f 1801, était frère de Marie-Antoinette.

En 1803 l'électorat fut sécularisé, et depuis 1814 Cologne appartient à la Prusse. La bulle De sa-Jute animarum a reconstitué en 1821 le diocèse qui avait été désorganisé, et qui comprend auj. les év. de Munster, Paderborn, Trêves et Osna-JbrUck. Droste-Vischering q. v. vint ensuite, puis Geissel, Paulus, et auj. M. Melchers.

Les égl. protestantes datent de la domination franç. et se rattachent au consist. de Coblence.

COLOMBA, ou Columba surnommé Columkill (de kill, cellule, couvent, parce qu'il fonda de nombreux couvents), s'appelait proprement Krimthan. Né 7 dec. 521 à Gartan, Irlande, d'une famille noble, il fonda 546 le couvent au tour duquel s'éleva plus tard la ville de Lon-donderry, et s'embarqua 565 pour l'Ecosse: le roi Conall lui ayant donné l'île de Hy, ou Jona (dès lors Icolmkill) il y fonda un couvent, qui devint le centre d'un mouvement missionnaire remarquable, en particulier pour les Hébrides, la Calédonie et les Culdéens. Il fut à la fois le fondateur de l'Église chez les Scots et les Pietés et leur législateur, aussi distingué par sa douceur que par son énergie et son activité, f 9 août 597. La légende lui attribue une foule de miracles.

COLOMBAN, ou Columban, né en Irlande ou en Angleterre, vers 525, d'autres disent vers 545 ou 550, passa ses premières années dans le couvent de Jona, en Écosse, puis dans celui de Bangor, en Irlande, où il ne s'occupa d'abord que d'études et d'exercices de piété. Assez tard, il se sentit pressé de se rendre sur le continent pour y travailler à la conversion des païens. Il partit vers 585 avec 12 compagnons, parmi lesquels Gallus, ou saint Gall, et se rendit dans la contrée des Vosges, Plombières, etc. Là tout en travaillant à défricher le sol, il réunit un grand nombre de disciples pour lesquels il construisit plusieurs couvents, entre autres ceux d'Annegray et de Luxeuil, qu'il soumit à une discipline sévère et à la règle de saint Benoit, mais où régnait en même temps une profonde piété. Les <lémêlés qu'il eut avec le clergé bourguignon sur la question du jour de la Pâque. et surtout sa franchise à censurer les débordements de Bru-nehaut et de son petit-fils Thierry II, roi de Bourgogne, l'obligèrent à quitter le pays en 610. Contraint de se rembarquer pour l'Irlande, il prophétisa, dit-on, la ruine de ses persécuteurs ^t la conquête du royaume de Bourgogne par Clotaire II, qui eut lieu en effet 3 ans après. Rejeté par une tempête sur les côtes de la tiaule, il traversa l'Helvètie, séjourna quelque temps sur les bords du lac de Constance à Bre-genz, et put enfin se rendre dans la Haute-Italie pour y porter l'Évangile aux Lombards. Arrivé à Milan il y baptisa le roi Agilulf et une grande partie de son peuple, tout en tenant tête avec une inébranlable fermeté au pape Boniface IV, qui voulait lui imposer les rites romains. Après avoir fondé encore le couvent de Bobbio, il y f 616 (15 nov.?). Il a laissé quelques poésies et plusieurs écrits contre les ariens.

COLOMBIE, républ. fédérative de l'Amérique du Sud, formée en 1819 et 1821 de neuf provinces arrachées par Bolivar à l'Espagne, cessa d'exister en 1831 et se partagea en 3 républiques indépendantes, celles de la Nouv.-Grenade, de l'Equateur et de Vénézuela, qui portent le nom de Conféd. des Ét.-Unis de l'Amérique du Sud. Les catholiques y sont en immense majorité, mais ils pratiquent peu, ils méprisent leur religion et leurs couvents, s'amusent de leurs processions, font des lois contre les jésuites et maintiennent les droits de l'État contre le clergé. Leur principal lieu de pèlerinage est Chinquin-quira, où il y a de riches madones magnifiquement ornées. A Santa-Fé de B >gota la Vierge porte 1358 diamants, 1259 émeraudes, 59 améthystes, 1 topaze, 1 hyacinthe et 372 perles; le piédestal est orné de 609 améthystes.

COMENIUS, Jean-Amos, né 1592 à Komnia, Moravie, grammairien et pédagogue, auteur de plusieurs ouvrages sur l'étude des langues (/a-nua linguarum, 1631, trad. dans presque toutes les langues; Novissvna methodus 1648, Orbis sensualium pictus 1650) est plus connu dans le, monde religieux par son zèle et sa piété. Recteur à Prerau 1614, puis pasteur de l'égl. mo-rave à Fulneck, il fut frappé par Fédit de persécution et se réfugia à Lissa où il publia son premier écrit qui le rendit bientôt célèbre. On le demanda en Suède, en Angleterre, en Transylvanie pour y organiser les écoles. Ses principaux séjours furent Elbingen et Lissa, où il travailla pendant ses loisirs à une encyclopédie de toutes les sciences; mais Fincendie de cette dernière ville 1655 ayant détruit tous ses livres, il se rendit à Francfort-sur-FOder, puis à Hambourg, enfin à Amsterdam, où il donna des leçons et publia ses ouvrages philosophiques. Il avait été consacré évêque au synode de Lissa 1632, et ne cessa pendant la guerre de Trente ans de plaider la cause des égl. de Moravie et d'espérer. Il publia en 1648 et 1649 l'Hist. de l'origine des Frères, écrite en latin par Lasitius, et il y ajouta un 8« chapitre sur leurs mœurs et leurs institutions; plus tard 1661, un Catéchisme. Le malheur des temps le disposa à admettre certaines prophéties et visions qui faisaient beaucoup de bruit; on croit volontiers ce qu'on désire; on annonçait le règne de mille ans pour 1672, et il imprima quelques-unes de ces prédictions en 1657 sous le titre de Lux in tene-bris, mais il reconnut ses erreurs dans un livre sur la Seule Chose nécessaire, 1668. Il fit agréer et consacrer comme évêque son gendre

Pierre Jablonskv, puis, a la mort de ce dernier, son petit-fils Daniel Ernest. Il f à Amsterdam 15 nov. 1671. Son fils mourut aussi à Amsterdam, pasteur des Bohémiens réfugiés.

COMESTOR, le dévoreur, Pierre, ainsi nommé parce qu'il avait lu beaucoup de livres; né à Troves, doyen de cette ville, directeur de l'école de théol. de Paris pendant 5 ans, + & l'abbaye de Saint-Victor vers 1178 ou 1198, auteur d'un abrégé annoté des S. Écritures, intitulé Historia scholastim, qui fut plus tard trad. en français et servit de base au Comment, de Guiar.

COMMANDEMENTS de l'Église. On comprend sous ce nom 5 ou 6 règles de conduite ajoutées avec le temps aux dix commandements de Moïse. Ils portent en substance sur 1° la célébration des fêtes, 2° la fréquentation de la messe, 3° les jeflnes et la distinction des aliments, 4° la confession une fois l'an au moins, et 5° la communion, aussi une fois l'an. Ces deux derniers points sont quelquefois réunis en un seul, et le 5me serait l'interdiction de toute noce pendant les fêtes ecclésiastiques. Bellarmin en ajoute un 6m« sur la dîme.

COMMENDES, bénéfices ecclés. dont le titulaire n'était pas obligé de remplir lui-même les fonctions; quelquefois aussi la simple jouissance des revenus pendant une vacance. Des abbayes étaient souvent données comme commences à des ecclésiastiques séculiers. On trouvait ainsi le moyen d'éluder, au moins pour la forme, les dispositions sur le cumul des bénéfices. L'abus des commendes, si scandaleux sous les papes d'Avignon, a été restreint sinon supprimé par le conc. de Trente. Le délégué d'un abbe commendataire s'appelait prieur claustral, et devait résider; il avait le pouvoir spirituel.

COMMODE, emp. romain 180-192, fils de Marc-Aurèle, monstre de cruauté et d'impudi-eité, ne persécuta du moins pas les chrétiens; on dit que son indulgence sous ce rapport fut due à l'influence de Marcia, sa maîtresse, la même qui le fit empoisonner pour éviter la mort.

COMMODIEN, poète chrétien du 3™ siècle: né païen en Afrique. Son poème: Instructions contre les dieux des gentils, est un des plus vieux documents de la poésie chrétienne; il po-lémise contre le paganisme et a des tendances chiliastes prononcées. Ed. de Ludwig, Leipzig 1877.

COMMON Prayer-Book, v. Anglicane.

COMMUNICATION des idiâmes, terme de théol. luthérienne, affirmant que les deux natures en Christ se sont tellement unies qu'elles se sont communiqué l'une à l'autre leurs propriétés respectives; ainsi la divinité est devenue mortelle, l'humanité possède la toute science, etc. Les théol. réformés ont combattu cette doctrine comme menant au nionophysitisme; ils s'exposaient eux-mêmes à se voir traités de nes-toriens. On commence à comprendre la puérilité de semblables discussions.

COMMUNION, se prend dans plusieurs sens différents. Il est synonyme de sainte Cène, et l'on en a fait dériver le verbe communier, tantôt neutre, tantôt même actif pour: donner la communion. Chez les catholiques on dit la Communion laique, pour l'ensemble des fidèles, par opposition aux ecclésiastiques; un prêtre n'y peut rentrer que par dispense spéciale, ou par destitution. La communo pereyrina (étrangère) est une espèce de suspension; le prêtre qui y est condamné est assimilé k un prêtre étranger qui ne peut produire aucune pièce justificative; il conserve la jouissance de ses revenus, mais ne peut remplir aucune fonction ecclésiastique. — Dans Je Symbole des apôtres la Communion des saints est mentionnée dès le 5me siècle comme article de foi et suit immédiatement la mention de l'Église; elle consacre l'idée de l'Égl. invisible, mais il est difficile de préciser exactement la nuance qui sépare les deux articles. — Les livres de C. ont touj. été nombreux. Chez les cathol. il faut citer le chap. IV de l'Imitation de J.-C.; chez les luthériens Luther, Osiander. Fresenius; chez les anglicans. Bradshaw; chez les réformés en France, le Voyage de Beth-EI, Saumur 1677; et plus récemment Ad. Monod, Grandpierre, L. Bonnet, (ionthier, Pilet, Goût, etc. — V. Eucharistie.

COMMUNISME et socialisme. Deux mots qoi dans la langue vulgaire se confondent fréquemment, bien qu'ils représentent des tendances absolument contraires; ils n'ont de commun que le désir et la prétention de remédier aux lacunes de l'organisation sociale, telle qu'elle résulte des différences de forces, de talents, d'aptitudes et de besoins qui se rencontrent dans Phumanité. Ils sont l'un et l'autre la négation de la liberté et la subordination de l'individu à l'intérêt général. Nous n'avons à les mentionner ici que par le fait, très curieux, que ces tendances se sont produites à presque toutes les époques sous le manteau de l'Église et comme sectes religieuses, depuis les circoncellions, les pastoureaux et les heggars jusqu'aux anabaptistes, tandis que de nos jours elles affectent plutôt l'irréligion la plus caractérisée et le matérialisme le plus grossier. Cela tient à ce que le christianisme est la source de tout progrès et de toute amélioration, ce qui a surexcilé les espérances des malheureux et des opprimés; mats comme il procède lentement et qu'il condamne les moyens violents, les malheureux se sont cru abandonnés; ils ont vu dans le christianisme un ennemi, parce qu'il leur conseillait la patience et la résignation; des récriminations réciproques ont aigri les esprits des deux côtés et la séparation s'est faite et tranchée de plus en plus. L'économie politique prouve que le communisme n'est pas réalisable à la longue, mai? les rêves du socialisme humanitaire ne sont pas tous des chimères, et ceux qui s'en font un épou-vantail, au lieu d'examiner toutes choses pour retenir ce qui est bon, vont à rencontre du but qu'ils se proposent; ils aggravent le mal au lieu de l'empêcher, et ne servent ni l'Église, ni l'ordre, ni l'humanité. La société vraiment religieuse en Allemagne, en Suisse, en Angleterre, a compris que ne pouvant supprimer le problème de la misère et de la souffrance, ni le nier, ni le résoudre, la sagesse ne consistait pas à fermer les yeux ou à se croiser les bras, mais à travailler de manière à adoucir le mal le plus possible el à combattre tout ce qui était de nature à l'envenimer. La charité est au fond le grand remède, et comme forme, non l'aumône, mais l'association, la coopération et la mutualité. Les sociétés coopératives et la mission intérieure dans plusieurs de ses branches ont fait plus de bien, et en tout cas moins de inal, que les théories des Babœuf, des Darthé, des La Mennais, des Cabet et des Proudhon.

COMPACTAT A de Bàle; articles formulant les concessions faites on 1433 par le concile de Bâle aux réclamations des fr. de Bohême, savoir 1° la Cène sous les deux espèces, la libre prédication de la Parole de Dieu par des ecclésiastiques réguliers, 3<> l'administration des biens par le clergé, mais non la possession, V> rétablissement d'une discipline rigoureuse, applicable aux ecclésiastiques aussi bien qu'au troupeau.

COMPÉTENCE, droit d'exercer certaines fonctions ou une juridiction attachée à une charge déterminée; dans un sens plus restreint, droit de jouir des revenus d'un bénéfice.

COMPIÈGNE; plusieurs synodes; le principal, 833, eut lieu pour condamner Louis-le-Débonnaire. Vieilles ruines de l'abbaye fondée par Ch.rie-Chauve 918. C'est là que Jeanne d'Are fut faite prisonnière.

COMPLUTENSIS, édition polyglotte de la Bible, impr. 1513-1517 h Alcala (Complutum) par plusieurs savants espagnols, aux frais et par l'initiative du cardinal Ximénès; approuvée par Léon X. Elle contient le texte hébreu du N. T., le Targurn dOnkélos sur le Penta-teuque, les Septante, la Vulgate, le N. T. grec, ^t une trad. latine du Targum et des Septante. Plus, un dictionn. hébreu-chaldéen.

COMPOSTELLE, Saint-Jacques (de), aussi connu sous le nom de Santiago, le lieu de pèlerinage le plus célèbre après Rome et Jérusalem. Saint Jacques doit y avoir été enterré; du moins Théodomir y a retrouvé son corps en 808, et

Ion raconte qu'à la bataille de Logrono, Jacques apparut lui-même, monté sur un cheval blanc et décida le sort de la bataille contre Abderhaman; dès lors tout propriétaire fut obligé de lui payer une redevance annuelle, ce qui fit de l'archevêché l'un des plus riches de l'Espagne; il possédait plus de 80,000 ducats de revenu. L'ordre de Saint-Jacques, fondé 1161 pour la protection des pèlerins, et surtout pour leur faciliter le passage des rivières, fut supprimé en 1835. La charge de grand-maître était depuis 1439 un apanage de la couronne.

CONCEPTION Immaculée. Cette apothéose de la Vierge, promulguée comme dogme par Pie IX le 8 déc. 1854, n'est que la conséquence naturelle du développement que le culte de Marie n'a cessé de prendre dans l'Égl. de Rome; on la trouve déjà, comme germe dans la théol. du siècle. Au 12me siècle elle compte en France des adeptes passionnés, mais elle rencontre en Bernard de Clairvaux un adversaire énergique. Les franciscains, à la suite de Duns Scot, en font le trait distinclif de leurs luttes contre les dominicains. Sixte IV consacre cette innovation et introduit une Fête de l'Immaculée C., mais avec défense expresse de traiter d'hérésie l'opinion contraire. Dans le même esprit Pie V interdit de porter la question en chaire, el le conc. de Trente s'abstient également de se prononcer. Ce sont les jésuites qui, embrassant avec ferveur la doctrine des franciscains, l'ont enfin amenée à maturité. Lors de l'encyclique du pape aux évêques, ces derniers se sont prononces en très grande partie en faveur du nouveau dogme. Le conc. de 1870 l'a définitivement consacré. — Un ordre de ce nom fut fondé 1484 par Béatrice de Silva. en accomplissement d'un vœu de chasteté qu'elle avait fait, lorsque la reine Isabelle, par jalousie, la fit enfermer et la laissa 3 jours sans nourriture. Cisterciennes d'abord, elle passèrent ensuite aux clarissines.

CONCILE, réunion d'ecclésiastiques s'occu-pant de régler les questions relatives à la doctrine, à la discipline et aux mœurs. Le premier qu'on désigne sous ce nom, mais improprement, fut celui de Jérusalem, Act. 15, supérieur à tous les autres par la présence des apôtres, plus vrai comme assemblée d'Église par la présence des anciens. Les |m?rsécutions des premiers siècles ne permirent pas la convocation d'assemblées régulièrement convoquées, bien que les circonstances fussent de nature à les faire désirer. C'est en 325 seulement que se réunit le premier concile, et dès lors ils se suivirent, à des intervalles plus ou moins réguliers. On distingue: 1° les Conc. Ecumêniques q. v., où se traitent les intérêts généraux de la chrétienté; 2° Les C. nationaux, comme ceux de Carthage sur le baptême, ceux d'Espagne sur l'organisation de l'Égl., celui d'Aix-la-Chapelle sur le filioque, celui de Paris sur le culte des images, maintenaient les droits et l'indépendance de chaque église. Mais ils perdirent de leur importance à mesure que le pouvoir se centralisait dans la cour de Rome; l'assemblée de Bourges 1438 fut pour la France à peu près le dernier conc. national, car on ne peut donner ce noin aux assemblées du clergé qui suivirent, pas même à l'essai de N. D., Paris, juillet 1811, quoiqu'il y figurât 89 év., 9 archev. et 6 cardinaux; 3° Les C. provinciaux, prescrits comme triennaux et réglés par le conc. de Trente malgré Lainez; ils perdirent vite toute raison d'être, n'ayant aucune autorité. Borromée essaya en vain de les galvaniser, et pour la France la tentative d'un conc. de la prov. de Tours, faite en 1851, suffit à prouver qu'il ne saurait plus en être question.

CONCLAVE, réunion des cardinaux pour l'élection d'un pape; et aussi le lieu où se tient cette réunion. On appelle conclavistes les serviteurs des cardinaux qui sont admis à accompagner leurs maîtres. Les règles du conclave datent de 1274, mais elles ont été souvent modifiées, plus souvent encore violées. Les cardinaux, seuls électeurs, ne peuvent sortir du palais avant qu'un nouveau pape soit élu par les deux tiers des voix.

CONCOMITANCE (accompagnement), terme scolastique imaginé par Thomas d'Aquin pour exprimer la doctrine de P. Lombard sur l'eucharistie. Il signifie proprement que le sang de Christ accompagne toujours son corps dans l'hostie, si bien que l'usage de la coupe en devient plus ou moins superflu. Cette doctrine est la conséquence de la transsubstantiation; elle se rattache à la fois comme cause et comme effet à la suppression de la coupe. L'idée de concomitance implique le caractère accessoire de la chose concomitante par rapport â la principale qui est essentielle.

CONCORDANCE, livre sous forme de dictionnaire, dans lequel tous les mots sont rangés par ordre alphabétique, avec l'indication des livre, chapitre et verset où ils se trouvent. Ce sont des concordances verbales. On en fait d'autres, sur les divers points de doctrine ou de morale, qui marquent tous les passages qui s'y rapportent; ce sont des Concordances réelles, ou de matières. La plus vieille concordance connue est celle de Hugo de Saint-Chair d'après la Vulgate, 1244; il fut assisté, dit-on, par 50() moines. Il y en a une de Lankisch 1677, en allemand, hébreu et grec; édition de Reineccius, Leipzig 1718, la meilleure de toutes; une de Crudens en anglais, et plusieurs en français (Mackenzie, Lambert, etc.).

CONCORDATS: les transactions ou traités conclus par voie de concessions réciproques entre les papes et les souverains temporels. Ils sont un mode de vivre, plutôt qu'un abandon de principes, entre des autorités de natures différentes, appelées à coexister, et ne pouvant ni l'une ni l'autre abdiquer le caractère absolu de leurs droits. Dans ces conditions, à moins de luttes permanentes et stériles, le bon sens veut que l'on s'accorde sur certains détails pour rendre possible la vie commune. Il arrivera cependant que le plus tenace des deux contractants cherchera peu à peu à retirer ses concessions et ravivera les conflits que l'on s'était proposé d'écarter. C'est l'hist. de la plupart des concordats conclus avec Rome, la curie n'admettant pas qu'on puisse traiter avec elle d'égal à égal et se réservant de ne voir dans ces contrats que des concessions octroyées par elle* qu'elle est libre de modifier à son gré. Lorsque pour divers motifs un État se refuse à faire un concordat, il peut y être suppléé par des Bulles de circonscription, fixant l'étendue et les limites du diocèse; l'acceptation et la promulgation (le ces bulles par l'État, équivalant de fait à un concordat. — Le plus ancien concordat connu est celui de Worms (ou de Calixte), 23 sept. 1122, qui mit fin à la querelle des Investitures. Il fut conclu entre Henri V et Calixte II, l'emp. renonçant à donner l'investiture par la croix et l'anneau, et le pape renonçant à percevoir les droits de régale sur les bénéfices vacants. — Un autre concordat, fort intéressant pour la France, fut conclu le 15 août 1516 entre François I^r et Léon X, par l'intermédiaire du chancelier Duprat; il annulait de fait la Pragmatique, promulguée en 1439 par Charles VII, et froissa vivement l'épiscopat français; le Parlement ne se décida qu'en 1518 à l'enregistrer, et seulement sur le « très exprès commandement du roi. • Le monarque devint seul le grand électeur des évêques et il en abusait pour donner des places à ses amis; ainsi Crillon, sous Henri IV, se trouva posséder les archev. d'Arles et de Sens, les évêchés de Fréjus, Toulon et Saint-Papoul, et l'abbaye de l'île Barbe. — Le concordat du 15 juillet 1801, négocié entre Joseph Bonaparte et le cardinal Consalvi, qui, promulgué le 8 avril 1802 avec les Articles organiques, reconstitua l'Égl. de France que la révolution avait officiellement supprimée; il établissait 10 archevêchés et 50 évêchés, les titulaires étant à la nomination du gouvernement, mais avec confirmation par le pape; en revanche le pape reconnaissait l'aliénation des biens du clergé, la suppression des ordres monastiques, l'annulation des vœux monastiques et la tenue des registres de l'état civil par les> autorités civiles. Cette convention, a\ec le*

Articles organiques qui en précisaient le sens, fut présentée au corps législatif avec un exposé de Portalis et devint loi d'État en 1802. Le clergé ultramonlain n'a cessé d'en combattre l'esprit et les principales dispositions, notamment sous Louis-Philippe, et l'on peut dire que auj. ce n'est plus guère qu'une lettre morte, aucun gouvernement ne s'étant soucié d'entrer en guerre ouverte avec Rome depuis le Syllabus et le Concile. Divers concordats ont encore été signés: en 1817 avec la Bavière, en 1827 avec les provinces du Rhin et les Pays-Bas, en 1845 avec l'Espagne, en 1847 avec la Russie, en 1855 avec l'Autriche, en 1857 avec le Wurtemberg, mais aucun des États contractants n'a eu à s'en féliciter.

CONCORDE (Formule de). Les commencements de la réformation en Allemagne furent plusieurs fois troublés par de violentes discussions dogmatiques, au nombre desquelles nous rappellerons: les vues d'Agricola sur la prédication de l'Évangile seul, par opposition à la loi; la manière presque juridique et un peu matérielle d'Osiander, d'envisager la doctrine de la justification; les exagérations de Major et d'autres sur le danger des bonnes œuvres; les rapports entre la liberté de l'homme et la souveraineté de Dieu, poussant à la prédestination calviniste; les discussions sur la Cène, Mélanchthon essayant de prendre une position intermédiaire entre Luther et Calvin. On ne tarda pas à comprendre les inconvénients qui résultaient de ces divisions; on comprit aussi qu'il y avait beaucoup de malentendus à la base même de quelques-unes des divergences les plus apparentes, et l'on résolut, sur l'initiative du prof. Andréa, appuyé par le prince-électeur Auguste de Saxe, de travailler pacifiquement à la solution des difficultés, de préciser les points controversés, et d'arriver si possible à une entente commune. Ce but excellent ne fut pas atteint. Après une série de travaux préliminaires, un certain nombre de théologiens, des plus distingués, Andreâ, Chemnitz, Selnecker, Chytrâus, Musculus, Kôrner, se réunirent au couvent de Bergen près Magdebourg, et, sous la direction spéciale des trois premiers, rédigèrent en 12 articles le formulaire dit Livre de Berg, ou Formule de Concorde, qui fut achevé le 28 mai 1577, et qui accentue, bien loin de les adoucir, la plupart des doctrines contenues dans la conf. d'Augsbourg. Les 12 articles traitent: Du péché originel, du libre arbitre, de la justification par la foi, des bonnes œuvres, des rapports de la loi et de l'Évang., du troisième usage de la loi, de la Cène, de la personne du Christ, de la descente du Christ aux enfers, des cérémonies ecclésiastiques vulgairement dites adiaphora (indifférentes), de la prédestination éternelle et de l'élection; enfin de quelques autres hérésies et sectes. Ce document fut signé par 86 villes ou princes souverains, mais rejeté par Brème, Hesse, Nassau, Poméranie, Holstein, Nuremberg. Il fut joint dans le Concordienbuch aux symboles écuméniques, à la Conf. d'Augsbourg, à l'Apologie, aux articles de Smalcalde, et aux catéchismes de Luther, le tout formant la grande charte du luthéranisme allemand. Cependant plusieurs États s'en détachèrent peu après et l'électeur de Saxe seul lui resta fidèle: il en profita même pour faire périr sur l'échafaud Crell, son chancelier 1601. Ce travail fait h bonne intention aboutit si peu que quelques-uns l'appelèrent Formule de discorde.

CONCUBINAGE, relations habituelles d'un homme et d'une femme en dehors du mariage; vie en commun, cohabitation sans engagement de part et d'autre. Ce fut évidemment la première forme du mariage, avant qu'aucune société civile et religieuse fût constituée, et si cette cohabitation durait toute la vie, elle équivalait presque au mariage. Dans le vieux droit romain il était en quelque sorte autorisé, en ce sens que les enfants qui en naissaient, quoique placés au-dessous des enfants légitimes, étaient cependant reconnus comme naturels. et placés au-dessus de ceux qui pouvaient naître d'une cohabitation illicite ou d'un caprice passager. Is-maPl, fils d'Agar, fut l'héritier, aussi longtemps que Sara ne donna pas un fils légitime au patriarche. Chez les Francs Thierry I** hérita de Clovis, quoique bâtard, au même titre que Clo-taire, Clodomir et Sigebert. Léon-le-philos. en Orient fut le premier à ordonner en 873 la célébration solennelle du mariage et à proscrire le concubinage; en Occident il faut descendre jusqu'au 16™* siècle et au conc. de Trente pour trouver des prescriptions fermes sur ce point. Jusqu'alors on admettait tacitement la différence qui existe entre un mariage régulier et le concubinage; il y avait une sorte de tolérance, et c'est grâce à cette tolérance qu'il a été possible d'imposer aux prêtres un célibat qui n'en était plus un. A partir du 16"^ siècle toutes relations d'un homme avec une femme sont condamnées comme coupables, si elles ne sont pas sanctionnées par un engagement positif qui. suivant les pays, est religieux ou exclusivement civil. Quant à la prétention de l'Égl. catholique de flétrir sous le nom de concubinage le mariage purement civil, elle est attentatoire au droit moderne, et pourrait être frappée par les lois.

CONFÉRENCES. 1° Discours religieux, plus libre et souvent plus nourri que le sermon proprement dit, sur un sujet plus vaste ou plus actuel; Massillon, Frayssinous, Ravignan, Lacor-daire se sont distingués dans ce genre; et parmi les protestants, Gasparin, Merle d'Aubigné, Munier, Martin, de Pressensé. — 2<> Conseil des weslevens anglais, anciennement composé de cent pasteurs, réglant toutes les affaires de l'Église, missions, finances, élections, contentieux, etc. — 3° Assemblée religieuse périodique ou non, consacrée à l'étude de certains faits, à la recherche de certains moyens, à la poursuite d'un but plus ou moins déterminé. Ainsi les conf. pastorales, les conf. fraternelles, les conf. de l'Alliance évangélique, celles de la Société pour l'observation du dimanche, les conf. missionnaires; en Allemagne le Kirchentag, le Gustave-Adolphs-Verein, l'Evang. Kirchen-conferenz, etc.

CONFESSION, lo Déclaration de sa foi, acte personnel, qui dans les premiers siècles exposait à la persécution, aux supplices et à la mort. De là le nom de confesseurs donné à ceux qui avaient payé de leur vie leur attachement à l'Évangile; de là aussi le respect dont on entourait leur nom et la personne de ceux qui avaient survécu à la torture. — 2<> Aveu de ses péchés à un prêtre: c'est ce qu'on appelle le sacrement de la pénitence. Cette pratique est plus ancienne que le christianisme; on la trouvait déjà chez les païens de Samothrace; on la trouve encore de nos jours au Pérou, à Madagascar et dans plusieurs endroits de la Chine et du Japon. L'Écriture sainte ne contient que 3 passages qu'on ait essayé d'invoquer en faveur de la confession telle qu'elle existe actuellement, Matl. 16, 19. Act. 19, 18. Jaq. 5, 16., mais il suffit de les lire pour se convaincre qu'ils n'ont aucun rapport, même éloigné, avec l'institution catholique. Les pères et les docteurs de la primitive Eglise n'en parlent pas; ils ne mentionnent que la confession publique, faite devant l'Église, pour des fautes publiques et notoires. Chrysos-tome, Tertullien, Cyprien, Jérôme, Augustin, Cassien, Hilaire, non seulement ne savent rien d'une confession minutieuse et individuelle, mais ils ne veulent rien non plus de la confession au prêtre: « Que Dieu seul voie ta confession. > « Ne le dis pas même à ton ami, mais à Dieu qui seul pénètre ton cœur. » Au9me siècle le conc. de Châlons ne sait pas encore si c'est à Dieu seul, ou aux prêtres aussi, qu'il faut confesser ses fautes; et au 12m« le Maître des sentences rappelle que David fut absous, quoiqu'il n'eût confessé son péché qu'à Dieu. C'est Innocent III qui décréta le premier la conf. auriculaire (à Yoreille du prêtre), et cette innovation, dont on ne prévoyait cependant pas encore les effrayantes conséquences morales, fut longtemps combattue par les docteurs les plus estimés de Home, Michel de Bologne, Semeca, Pierre d'Osma, Jean Scot, Panormitanus, Caje-tan, Ca<sandor, Canus, etc. Le conc. de Trente l'a enfin consacrée comme une institution apostolique et divine, et comme le moyen le plus Court et le plus sûr de venir à bout des hérésies; en même temps il l'a couverte du sceau du plus profond secret, sauf certaines réserves. Les prêtres honnêtes, et ils sont nombreux, sont d'accord à dire que le confessional est un des plus mauvais lieux qui existent au monde; il s'y dit et il s'y enseigne des choses qu'on ne dirait pas dans les antres de la débauche, et les manuels à l'usage des confesseurs sont pleins de questions, à l'adresse des femmes, mariées ou vierges, qui ne peuvent pas se reproduire, même en latin. On'les enseigne cependant dans beaucoup de séminaires, au grand détriment des confesseurs et de leurs pénitents des deux sexes. Le conc. de Latran, en imposant la confession dans son canon Omnis utriusque sexus, la rendue obligatoire au moins une fois l'an et spécialement à Pâques; le billet de confession est une attestation donnée par le prêtre, que cet acte a été accompli et que le porteur est apte à communier. Le confessionnal est une espèce de guérite qui doit dans chaque église être placée bien en vue; le pénitent est séparé du confesseur par une paroi dans laquelle est pratiquée une ouverture grillée, qui permet d'entendre, mais presque pas de voir; chaque église a autant de confessionnaux que de confesseurs, c.-à-d. de curés ou de prêtres autorisés.

3° Une Conf. de foi est l'énumération des articles admis par une Église comme l'exposé plus ou moins complet de ses croyances, et que déclarent accepter aussi ceux qui désirent en devenir membres. Ce sont en quelque sorte ses statuts, et comme personne n'est obligé, ni moralement, ni autrement, d'entrer dans cette Église, il n'y a pas plus d'intolérance à demander aux protestants s'ils adoptent ce symbole, qu'il n'y en a à présenter les règlements d'uue société quelconque, artistique, militaire ou commerciale, au candidat qui eu sollicite l'entrée. Les principales conf. de foi, outre les anciens symboles, sont: la conf. anglicane, dite des 39 articles 1552, 1563 et 1571; celle d'An-halt 1579, celle de Strasbourg ou Tetrapolilaine 1530, celle d'Augsbourg 1530, celle de Bàle 1534, appelée aussi de Mulhouse; celle de Belgique, remise à Philippe II en 1562 par les réformés des Pays-Bas; celle de Bohême 1575; la conf, de foi de La Rochelle 1559, celle de Genève, rédigée par Farel 1558; celle de La Marck 1568-1571, 1614.

4e Société religieuse, ou église, fondée sur une certaine conf. de foi. On dit: la confession luthérienne, les différentes confessions, uu changement de confession; l'Église chrétienne est une, mais elle renferme diverses confessions, dont aucune ne possède la vérité absolue et qui se doivent un respect mutuel. Le droit de changer de confession, longtemps contesté, est aujourd'hui reconnu; mais l'usage n'en est respecté que lorsque les motifs en sont sérieux et respectables.

CONFESSIONALISME, tendance exagérée à s'attacher, en matière de doctrine ou de discipline ecclésiastique, aux points qui divisent plutôt qu'à ceux qui rapprochent. Cette tendance est née de l'exagération contraire qui affale de faire bon marché de la doctrine ou de l'Égl. à laquelle on appartient.

CONFIRMATION, un des sept sacrements de l'Égl. romaiue, et l'un de ceux qu'elle a été le plus embarrassée à préciser et à justifier. Cette cérémonie a pour but de confirmer les grâces du baptême chez le jeune adulte de 10 ou 11 ans et de le rendre « parfait chrétien » en lui communiquant t l'abondance des dons et des grâces du Saint-Esprit. » C'est l'év. seul qui peut y procéder, et il le fait par l'imposition des mains, le signe de la croix, l'onction du saint chrême (huile parfumée), et un léger soufflet *ur la joue, avec ces mots: La paix soit avec \ous! Lorsque P. Lombard eut le premier l'idée de compter 7 sacrements, et d'y comprendre la confirmation, il fut mù par l'idée de restituer en partie aux évêques le privilège qu'ils avaient à l'origine, d'administrer seuls le baptême; les circonstances ayant fait passer à tous les prêtres le droit de baptiser, et d'introduire ainsi des âmes dans l'Église, il s agit de rendre aux évêques quelque autorité pour relever aux jeux du peuple le prestige de la hiérarchie, et I on rappela Jésus bénissant les enfants, les apôtres oignant d'huile les malades, le Saint-Esprit descendant sur les iidèles de Samarie, etc. Ce mélange de passages (levait composer le ri -M de la cérémonie, mais il fallait aussi en fixer l'origine, et les uns la cherchèrent dans la colombe du baptême de Jésus venant confirmer x>n baptême; les autres dans les langues de feu de la Pentecôte, les autres enfin, plus hardis, dans la tradition seule, sans autre explication.

conc. de Trente semble ne s'être décidé qu'à regret à voter une innovation, que déjà Jean Huss traitait de puérile. — Ce qu'on appelle <>>ntirmation dans les égl. protestantes n'a donc aucun rapport avec le sacrement de ce nom; au de la vertu sanctitiante du baptême d'eau, ^lle suppose au contraire la foi personnelle au Sauveur, par conséquent la connaissance et l'intelligence des faits évangéliques. Ce n'est cependant que peu à peu que l'idée d'une instruction religieuse régulière et spéciale s'est frayé son chemin, et Spener est le premier qui (,n a formulé nettement le devoir. La confirmation est ainsi le dernier terme de l'instruction catechétique et l'acte officiel de l'introduction dans l'Eglise; elle doit être précédée d'uue épreuve ou exameu, fait en présence de l'Église ou de ses représentants, et constatant que le catéchumène remplit les conditions voulues pour son admission. S'il est admis il ne suit pas nécessairement qu'il soit converti, ni qu'il doive communier aussitôt; sa communion est un acte qui ne relève que de sa conscience, et la plupart des églises ont le tort d'établir une relation presque forcée entre la réception des catéchumènes et leur première communion; les deux choses doivent rester distinctes. La cérémonie de la confirmation est d'ailleurs des plus simples, et ne comprend qu'une déclaration de foi des récipiendaires, une exhortation et uue prière du pasteur. La tendance de quelques luthériens à réserver la confirmation au surintendant, et des anglicans à la réserver à l'évêque, n'est pas évangélique; elle marque un pas vers le catholicisme, et une importance magique donnée à un fait religieux. — En droit ecclésiastique la continu. est la reconnaissance par l'État d'une présentation ou d'une élection faite par l'autorité religieuse.

CONFRÉRIES. Associations soumises à des statuts et se distinguant d'autres corporations par le caractère religieux, moral et philanthropique du but qu'elles poursuivaient. Elles ne formaient pas de \œux et n'étaient unies que par la communauté des sentiments. Elles datent du moyen âge, où l'on a vu la confr. des pénitents blancs, ou noirs, ou bleus: celle du sacré-cœur; celle du saint-sacrement. La plus ancienne est peut-être celle de Notre-Dame, fondée 1168, pour aider à l'œuvre des croisades. Puis vint celle des Gonfaloniers, sorte d'ofli-eiers de justice, autorisée par Clément IV. 1265-1271 (le gonfanon était une bannière ornée de fanons). La plus célèbre fut la Sainte-Hermandad (de gevmanitas, fraternité), association d'ofliciers de police, chargée d'abord de \eiller à la sûreté des routes, puis mise au service de l'inquisition; son siège principal fut d'abord en Castille,;ï Tolède, 1486, puis à Madrid. Les jésuites et les franciscains ont également organisé des confréries, surtout en vue de la propagande.

CONFUCIUS, ou Kong-Fu-Tseu (le sage), né 551 av. C. à Tséhou-y, province de Lou, Chine, d'une famille considérable qui remontait à Hoang-Ti, législateur de la Chine, s'occupa surtout de réformer les mœurs de son pays, et recommanda pour cela l'étude des Kings, livres sacrés des Chinois, q i'il mit en ordre, abrégea et commenta. Nommé gouverneur à 24 ans, il s'occupa avec succès d'agriculture; il réussit moins bien avec les hommes qu'avec les champs, et après la mort de sa mère qu'il aimait et vénérait, il se retira des affaires pour* se livrer à la méditation et travailler à la régénération du pays. Il se fit de nombreux amis et disciples, et le roi de Lou le nomma son premier ministre; mais la pureté de ses mœurs, le sérieux de ses réformes, la sévérité de ses maximes éloignèrent de lui ceux qu'avait un moment séduits sa haute sagesse. À la mort du roi Ting-Kung, il fut forcé de s'éloigner de la cour; il rentra dans la vie privée, se remit à parcourir les provinces pour y recommander la morale et consacra ses loisirs à écrire les livres qui ont immortalisé son nom et qui comptent encore parmi les Quatre livres classiques des Chinois, f 479 av. C. âgé de 73 ans. Ses disciples lui vouèrent une sorte de culte et sa réputation n'a fait que grandir. On lui rendit justice après sa mort; sa doctrine se propagea rapidement, grâce à ses élèves et notamment à Meng-Tseou (Mencius), et en 203 elle était reconnue comme religion d'État, bien qu'au sens propre du mot ce ne soit pas une religion, mais plutôt un code de morale. Sans doute il recommande la crainte de Dieu, mais il ne faut pas trop s'approcher de lui par la pensée. Le ciel est honoré comme le père des vivants, la terre comme leur mère; il n'est pas question d'un culte à leur rendre. Le sentiment religieux se traduit surtout par la piété envers les parents et les ancêtres, surtout envers l'empereur, fils de la divinité. Confucius prêche l'amour du prochain, le perfectionnement graduel, la modération en toutes choses, une vie éloignée de tous les extrêmes (un de ses livres a pour titre Le juste milieu), l'harmonie de l'âme et l'accomplissement consciencieux de ses devoirs. Outre le Tchou-King, qui est un abrégé des Kings, et qui renferme les maximes des anciens sages, il a résumé sa inorale dans divers écrits, ou, ce qui est plus probable, ses disciples Font reproduite dans des livres qui portent le nom du maître.

CONGRÉGATION, lo V. Cardinaux. 2o Se dit aussi d'une assemblée relig. régulière, d'une paroisse, d'un troupeau. 3° Association d'ecclésiastiques, ni séculiers, ni religieux, mais qui tiennent de l'un et de l'autre: les congr. de l'Oratoire, de la Doctrine chrétienne, des Pia-ristes, de Saint-Lazare, des Eudistes; on l'étend même aux bénédictins, qui sont cependant des religieux. Ces congr. ont beaucoup d'analogie avec les confréries, et se distinguent des ordres proprement dits, en ce que leurs membres ne prononcent pas de vœux. 4° Les congr» d'ordres sont une réunion de couvents soumis à une même règle et à une même autorité, et se distinguant de leur ordre par des réformes et par une discipline plus sévère. 5° Sous la Restauration on avait donné ce nom à une association politico-religieuse dirigée par les jésuites, et qui travaillait à ruiner le libéralisme. 6<> Service religieux simple et familier, qui se tient plus habituellement les jours ouvrables et qui ne sort pas de l'instruction et de la pure édification.

CONGRÉGATIONALISTES, v. Indépendants,

CONNECTE, v. Carmes.

CONON lo pape 686-687. Sous son pontificat le missionnaire Kilian partit pour la Thuringe. — 2o Év. de Tarse en Cilicie, 6»« siècle, qui s'était attaché à la doctrine de Jean Philopone et s'exposa comme lui au reproche de tri-théisme. Ses partisans reeurent le nom de Co-nonites.

CONRAD 1° de Marbourg, dominicain allemand, plein d'un zèle farouche pour sa religion, fut chargé par Grégoire IX de plus, missions disciplinaires, visites de couvents, etc., dont il s'acquitta avec une grande rigueur. Il fit mourir, à force de dures pénitences, la pieuse Elisabeth de Thuringe et la fit ensuite canoniser. Promu aux fonctions d'inquisiteur général en Allemagne, il s'entoura d'assistants, parmi lesquels se trouvaient de vrais scélérats, et sur leur simple dénonciation il lit brûler une quantité de personnes. Ayant attaqué publiquement la noblesse à Mayence, et ayant commencé un procès en sorcellerie contre le comte de Sayn. il finit par être assassiné 30 juill. 1233. Le pape s'étonnait que les Allemands l'eussent supporté aussi longtemps. — 2o C. de Waldhausen, ar-chev. de Prague, successeur de Sbynko, fut l'un des adversaires de Huss, mais sans croire qne les choses pussent aller jusqu'au supplice. lise convertit plus tard et embrassa la cause des hussites.

CON RING, llermann, savant de premier ordre dans toutes les branches des connaissances humaines. Né à Noorden, Frise Orientale, 9 nov. 1606, il étudia à Helmstâdt et à Leyde, fut nommé prof, de philos, naturelle en 1632, puis de médecine en 1637 à Helmstâdt, et s'occupa en même temps de droit politique et de droit canon; il exerça une influence considérable et fut souvent consulté par les princes, notamment par le duc de Brunswick. Il a écrit sur le droit, la politique, l'hist., la physique, la médecine et la théologie. En matières ecclés. il fut le respectueux disciple de Calixte, qu'il défendit contre ses adversaires. Il a soutenu le droit de l'État dans ses rapports avec l'Égl., et s'est occupé des rapports des diverses confessions entre elles: De Constitutione episcoparwn Germaniep, De conciliis. Ses écrits polémiques sont très remarquables: Defensio eccleriœ pro-testantiurn, Fundamentorum fidei pontificœ co cussio. Il a écrit aussi De origine jurisgermanici, De imperio Germanorum romano, De finibus imperii Gei*manici, une Introd. à l'art médical, un travail sur Paracelse, sur la médeciue égyptienne, des traités, des dissertations, des Lettres.

112 déc. 1680- Ses Œuvres compl. ne forment pas moins de 7 vol. Brunswick 1730.

CONSALVI, Hercule, cardinal et homme d'État, né à Rome 8 juin 1757. Admis en 1786 dans laprélature romaine, il fut successivement auditeur de rote, juge au tribunal de la signature, et ministre de la guerre sous Pie VI. Ennemi déclaré de la révolution, il fut plusieurs fois arrêté par les Français maîtres de Rome, et finalement dut quitter la ville. Secrétaire! du conclave qui nomma Pie VII, il reçut on 1800 le chapeau de cardinal; envoyé en France 1801 il signa le concordat; mais Napoléon qui connaissait son hostilité, le fit éloigner des affaires en 1806,et interner à Béziers. Il retourna en Italie 1814, fut délégué au congrès de Vienne comme nonce, lit restituer au saint-siège les marches de Bénévent et de Ponte-Corvo, employa toute son influence dans le sens de l'absolutisme extrême, et f 1824, préfet de la Propagande. Il avait conclu des concordats avec qnelques princes allemands.

CONSCIENCE, faculté de l'âme qui, en donnant à l'homme le sentiment de son individualité, le met aussi en mesure, au point de \uc soit de la raison, soit de la sensibilité, de comparer les faits, de les apprécier et de les ju-?er dans leurs rapports avec ce qui est vrai, juste et bon. Sans être parfaite on peut dire qa iJ y a chez tous une conscience naturelle innée; elle soblitère par l'éducation ou par l'habitude de faire le mal; elle peut devenir plus délicate, plus sensible, par l'éducation rhrétienne, par la réflexion et par l'habitude de faire le bien. Elle peut devenir maladive, timorée, sous l'empire d'idées fausses et de préjugés; Hle peut enfin se fausser et n'être plus qu'artificielle suivant la direction qui lui aura été imprimée. Si les philos, matérialistes, depuis Kpicure jusqu'à Helvétius et jusqu'à nos jours, ont paru nier la conscience en niant la distinction du bien et du mal. la consc. humaine n'a c^ssé de protester contre cette dégradante doctrine et Rousseau s'est fait l'éloquent interprète de cette protestation. L'ap. Paul fait l'éloge de la conscience, en même temps qu'il en trace les limites et qu'il en constate l'impuissance relative, Kom. 1 et 2. — Uue secte dite des Con-*nenciaires apparut un instant vers la fin du siècle dernier; elle avait pour chef un certain Matthias Knutsen, du Schleswig, candidat en Ihéol., qui vint à Iéna 1774, publia quelques brochures athées, nia jusqu'à l'immortalité de l'âme et déclara ne reconnaître d'autre règle que la conscience. U rejetait le mariage comme une souillure. Le sénat académique réfuta ses théories dans un travail spécial qui décida le malheureux à disparaître de la scène et à ne plus faire parler de lui.

CONSÉCRATION, acte par lequel on destine au service de Dieu une chose ou une personne. On consacre le pain et le vin de l'eucharistie par la prière et en prononçant les paroles de l'institution. On consacre des croix lorsqu'on les élève dans des lieux publics pour les offrir aux méditations des fidèles. On consacre les pasteurs et les prêtres au service de Dieu par l'imposition des mains, v. Ordination. Lorsqu'il s'agit d'un édifice religieux on dit plutôt la Dédicace, et les catholiques emploient le mot de bénédiction, soit quand il s'agit de choses matérielles, un four, une maison, une récolte, soit lorsqu'il s'agit de l'installation d'un abbé de couvent qui, n'étant pas nécessairement prêtre, ne peut pas être consacré. — La consécr. d'un évêque doit se faire un dimanche ou le jour de la fête d'un apôtre, par trois évêques, dont l'un est le consècrateur et les deux autres ses assistants.

CONSEILS 1° Corps chargés de représenter certains intérêts politiques ou religieux: Grand Conseil, Conseil aulique, Conseil des Cinq-Cents, etc. Dans l'Égl. réformée le Conseil presbytéral est le représentant officiel de la paroisse. — 2" Conseils évangéliques. On nomme ainsi dans l'Égl. catholique les œuvres recommandées comme honnes, sans être imposées comme obligatoires; mais celui qui les fait s'acquiert un plus grand mérite. Ce n'est pas la Loi, ce sont de simples conseils à suivre. La pauvreté, la chasteté et l'obéissance sont les trois principaux. Les Reformateurs se sont élevés avec énergie contre cette distinction, qui repose sur la théorie des œuvres surérogatoires, et ils lui ont opposé la doctrine scripturaire de l'incapacité de l'homme à accomplir toute la volonté de Dieu. L'homme, devenu par la foi une nouvelle créature, doit aimer, pratiquer et réaliser tout ce qui est bien et devenir parfait en toutes choses.

CONSENSUS (consentement, accord) nom donné à plusieurs confessions de foi de l'époque de la Réformation, qui prétendaient, les unes être des formules de concorde en adoucissant les divergences; les autres, au contraire, affirmer plus nettement la foi de l'Égl. universelle. Parmi les premières on note le Cons. de Sen-domir 1570, le Cons. Tigurinus 1549, ceux de Genève 1554, de Dresde 1562, Helvétique 1575, etc. Même les plus modérés des théologiens prétendaient cependant maintenir dans l'Égl. une certaine foi commune.

CONSISTOIRES 1<> Dans l'ancienne Rome, lieu oïi se traitaient les affaires publiques: Conseil secret des empereurs. 2<> Tribunal supérieur de la cour pontificale; réunion des cardinaux dans la grande salle 'du palais de Saint-Pierre. — Cons. secret; réunion des cardinaux dans un appartement retiré; on y préconise les év. et nomme les cardinaux. 3° Dans les églises réformées, c'est la représentation supérieure de plusieurs paroisses réunies, un intermédiaire entre les paroisses et les synodes. Bien que le mode de sa composition et de ses attributions ait varié, il a toujours été composé de pasteurs et de laïques, ces derniers étant au inoins en nombre double. En l'absence de synode le consist. était le lien entre l'Égl. et l'État. D'après la loi de germinal il devait y avoir un Consistoire par 6000 Ames, mais dans la pratique il n'était pas possible de s'en tenir ii la rigueur des chiffres. En certains départements les protestants étaient trop disséminés iArdennes. Côte-d'Or). pour qu'on pùt sans inconvénient faire un groupement de 6000: ailleurs au contraire (Seine, Gard, etc.) ils étaient beaucoup plus nombreux, et il n'était pas possible de disjoindre leurs intérêts. La constitution synodale présente, comme toutes les choses administratives, des inconvénients a coté de ses avantages, et plusieurs fois elle a menacé l'indépendance et la vie propre de la paroisse. On s'empressera sans doute d'y renoncer, quand on aura trouvé un système qui ne présente aucun inconvénient. Au-dessus des consistoires il y a, suivant les pays, le synode, un consist. supérieur, ou le Ministre des cultes.

CONSTANCE Emp. romain, surnommé Chlore (le pAle), nommé césar par Maximien 292 et auguste en 305; f 306 à York. Gouvernement sage et bon; il ménagea les chrétiens et fit cesser les persécutions. Mari d'Hélène, qui lut mère de Constantin, il la répudia pour épouser Théodora, fille de Maximien. Il nomma cependant Constantin césar en mourant. — Constance II, second tils de Constantin, partagea le pouvoir avec ses frères 337, mais à leur mort devint seul maître de l'empire 350. Faible et incapable, il n'en fut pas moins passionné d'autorité, voulut gouverner l'Égl. il sa manière, avoir la haute main en tout. Il rendit une loi contre les païens, lit fermer leurs temples et interdit leurs sacrifices sous peine de mort. Hi-laire lui reprocha de se servir de l'épée pour avancer la religion, et de détruire les temples païens pour enrichir de leurs trésors ses cour-tisaus. Il persécuta de même, au profit des ariens, les adhérents du conc. de Nicée, et bannit Athanase, Lucifer, Hosius, Libère, et tous ceux qui refusèrent, aux conc. d'Arles 353 et de Milan 356 convoqués par lui, de condamner Athanase: il sortit même son épée à Milan, pour faire voter les évêques. 11 s'était rendu si odieux que les troupes se révoltèrent et nommèrent à sa place son cousin Julien; Constance marcha contre lui dans l'Asie Mineure, mais il f 361 à Mopsucrène, au pied du Taurus.

3° Ville située sur le Rhin à sa sortie du lac de Constance; bâtie par le père de Constantin. Longtemps ville impériale et le plus grand évé-ché de l'Allemagne, elle compta quelquefois plus de 100,000 habitants, mais elle est bien déchue et n'en a plus guère auj. que 6 à 7000; l'herbe croît dans quelques-unes de ses rues. Elle est en voie de se relever. Ses habitants eux-mêmes flétrissent les souvenirs du conc. de 1414 qui lui a fait une si terrible réputation et ils ont^levé un monument à la mémoire de Huss et de Jérôme de Prague. La réform. s'v introduisit de bonne heure; la ville signa la protestation de Spire 1529, ainsi que la conf. tétrapolitaine; se joignit à la Ligue de Sinal-cade 1530, et s'opposa à l'Intérim, ce qui lui lit perdre ses franchises. Son dernier évéque fut Dalberg, assisté par Wessenberg, jusqu'en 1821.

Concile de Constance. Ouvert 5 nov. 1414. clos 22 avril 1418. Réclamé depuis longtemps par l'opinion, il fut enfin convoqué par le roi Sigismond et le pape Jean XXIII. pour mettre fin au schisme qui désolait l'Égl. par la simultanéité de 3 papes se disputant le pouvoir; pour av iser à la réforme de l'Égl. dans son chef et dans ses membres; enfin pour examiner et apaiser le mouvement produit par les doctrines de Wicleff et de Huss. Ce concile impuissant, qui comptait cependant parmi ses membres de> d'Ailly et des Gerson, ne sut rien faire pour le bien de l'Église, et ne sut pas profiter d'une occasion presque unique pour mettre un terme aux désordres existants. Le supplice de Huss et de Jérôme, en dépit de la foi jurée et des saufs-conduits délivrés, pèse encore sur sa mémoire, et les habitants ont longtemps attribué la décadence de la vieille cité impériale à ce crime, dont elle était cependant innocente. Les votes du conc. avaient lieu par nations: il yen avait 5: allemands, français, anglais, italiens, espagnols. Le conc. a maintenu, et il ne pouvait guère autrement, la supériorité des conciles sur les papes; il a décidé la périodicité, tous les dix ans, de ces assemblées écuméniques; il a déposé les trois papes, Jean qui s'enfuit, accusé de nombreux crimes; Grégoire, qui donna sa démission, et Benoît qui finit aussi par abdiquer. Le parti impérial, et Sigismond en tête, aurait voulu qu'on s'occupât immédiatement, et avant l'élection d'un autre pape, des réformes promises; mais le parti ultramontain l'emporta; on décida d'élire d'abord Martin V, 11 nov. 1417. et ensuite, il ne fut plus question de réformes; on amusa les Allemands, les Français et les Anglais par des promesses et de belles paroles; on les leurra d'un prochain conc. à Pavie. on négocia des concordats particuliers, et les réformes, dont on ne voulait pas. furent indéfiniment ajournées, après que des mesures de rigueur eurent encore été décidées contre les hussites.

5<> La Tour de Constance, à Aigues-Mortes, citadelle construite par saint Louis, et formée de i chambres circulaires superposées, communiquant par une ouverture ronde à la voûte; mure de plusieurs mètres d'épaisseur. Plus tard on en lit une prison d'État pour les prolestants. Le pasteur H. de Bosquet 1360 y fut enfermé et pendu. De 1686 à 1717 on y enferma les hommes, ainsi Mazel, Salindre; l'un d'eux*écrivit sur la muraille: Récistez. Depuis 1717 les femmes, dont le nombre varia de 22 à 33. C'était nn tombeau infect. Plusieurs y passèrent 38 ans. On connaît surtout Isabeau Menet et Mario Durand. Le prince de Bauveau prit sur lui, au risque d'une disgrâce, de faire vider et mûrer cette prison, H janv. 1767-juillet 1769. Ce n'est plus anj. qu'un but de pieux pèlerinage pour les descendants des martyrs. V. Borel, Frossard, Lombard et Recolin.

CONSTANT 1er, 3me fUs de Constantin, emp. avec ses deux frères 337-330, eut en partage l'Italie et l'Afrique, appliqua la loi de Constance contre le paganisme, chercha à gagner les Cir-coneellions par la persuasion et par des aumônes et recourut ensuite à la force. 11 protégea Athanase, mais se fit haïr par sa fierté et ses déhanches. Il fut assassiné par Magnence.

CONSTANTIN 1° le Grand, fils de Constance Chlore et d'Hélène, né 274 à Naisse, Dardanie, appelé auguste et césar à la mort de son père, partagea d'abord l'emp. avec Maxence, Maxime et Licinius, mais ne vit en eux que des rivaux, et, après leur avoir imposé ses principes de tolérance pour le christianisme, il finit par se débarrasser d'eux les uns après les autres. Plein d une ambition justifiée par ses talents et son courage, il rêvait d'être seul maître et les fautes de ses adversaires lui fournirent les prétextes dont il avait besoin. Son beau-frère, le tyran Maxence, qui régnait à Rome, avait exaspéré le peuple; le sénat et la ville prièrent Constantin de les délivrer, et celui-ci, bien qu'inférieur en forces, accepta la lutte, 312. La veille même de la bataille, au coucher du soleil, il vit, raconte Eusèbe, briller aux cieux de l'éclat du soleil, une croix immense sur laquelle étaient écrits en letUtsde flammes ces mots: Par ce signe tu vaincras. Constantin ajoute que la nuit suivante le Seigneur lui apparut lui-même en songe, portant la croix à la main et qu'il lui ordonna de faire faire pour l'armée un étendard de la même forme avec la même inscription. Il le fit, adopta ce signe pour drapeau, sous le nom de labarum, et défit successivement à Turin et à Rome son ennemi, qui périt dans les eaux du Tibre. Y a-t-il eu vision réelle, ou simple songe, comme le supposent Lactance et Ruffinî Peut-on n'y voir qu'un phénomène psychologique, ou le fait d'une imagination depuis longtemps travaillée et préoccupée? C'est ce qu'il n'est pas facile de dire, mais la question de bonne foi paraît hors de doute; si l'on sait peu de chose du développement religieux de Constantin, on sait au moins que sous l'influence de sa mère il penchait déjà vers les idées chrétiennes; en 310 il n'adorait déjà qu'un seul Dieu, et Apollon ou Christ pour son organe. Quoi qu'il en soit, il vainquit Maxence et se déclara dès lors franchement chrétien. D'accord avec Licinius il publia un premier décret accordant la liberté religieuse ii toutes les sectes, mais tolérant aussi les autres cultes, 312. On voulut l'exploiter, comme interdisant le prosélytisme. En 313 nouvel édit qui proclame le christianisme religion de l'État, et autorise par conséquent les conversions, Maximin doit permettre aux chrétiens d'Asie de reconstruire leurs temples. En 321 il rend une loi qui recommande la solennisation du Dimanche, comme dies venerabilis. Mais en 315 Constantin s'étant brouillé avec Licinius, cette guerre d'ambition devint une guerre de religion. Constantin victorieux reste en 323 seul maître de l'empire romain. Il en profite pour rendre diverses lois tendant à rétablissement définitif du christianisme dans ses États; il interdit la célébration des fêtes païennes, ordonne l'agrandissement des temples chrétiens, et convoque à Nicée une assemblée des év. et des prêtres les plus distingués de l'empire, 325. Il orne Rome d'églises magnifiques, mais décide en même temps de se construire sur les rives de la mer Noire une seconde Rome, plus splendide encore; c'est Bvzance; elle s'appellera de son nom, Constantinople, et il y transporte 330 le siège de son empire. Les temples païens sont dépouillés pour l'enrichir; mais le bien mal acquis ne profite jamais, et sous son double nom la ville nouvelle n'a pas fait honneur au christianisme. Du reste Constantin lui-même ne lui faisait pas non plus grand honneur. Il avait fait périr son beau-père Maximien Hercule, Maxence, Bassien, mari d'une de ses sœurs; Licinius, mari de son autre sœur. Il fera mourir après le concile, 326, son fils Crispus, né d'un premier mariage, jeune et brillant général, dont Fausta, sa seconde femme, a réussi à le rendre jaloux; puis Fausta elle-même, quand il a reconnu l'injustice de ses dénonciations. 11 a aussi laissé mettre à mort son neveu, le fils de Licinius, un enfant de 12 à 13 ans, qui était un rival possible. On comprend que tout en professant le christianisme, il hésitât à se faire baptiser. Il sentait vaguement d'ailleurs qu'en protégeant le christianisme, comme il le faisait, il encourageait l'hypocrisie; il s'en était plaint aux év. de Nicée; Eusèbe le lui reprochait, et ses hésitations dans sa conduite vis-à-vis des ariens, parfois ses tergiversations, et surtout son penchant à imposer sa volonté en matière de foi, prouvent qu'il n'avait pas encore compris ce qu'est le christianisme. Le païen Sosime assure que Const. ayant demandé l'absolution de ses crimes aux païens, qui la lui refusèrent, ne se tourna que pour ce motif vers le christianisme; en tout cas Hosius ne peut lui montrer d'absolution qu'en Jésus-Christ. Il fit faire pour différentes égl. 50 copies complètes de la Bible en grec, puis après avoir tracassé tour à tour Arius et Athanase au nom de l'unité de la foi, qu'il jugeait nécessaire à l'unité de l'empire, sentant sa fin venir, il demanda le baptême à Eusèbe de Nicoioédie et fut baptisé sur son lit de mort 337, dans la 3ime année de son long et glorieux règne. On a longtemps surfait la grandeur de son caractère chrétien et l'importance de son œuvre: auj. l'on tombe dans l'excès contraire en niant sa sincérité et en rabaissant les services qu'il a rendus au christianisme. II y a eu, comme presque partout. un mélange de bien et de mal, et il faut se rappeler que le temps où il a vécu ne comportait ni les habitudes, ni les principes d'un autre siècle.

2° Pape 708-715, syrien de naissance, combattit le monothéisme. Il revendiqua la suprématie papale sur les archev. de Ravenne~et de Milan. Justinien, l'ayant mandé en Nicomédie, le reçut en lui baisant les pieds; la mode s'en est dès lors conservée.

3° Constantin II, un des antipapes nommés en concurrence avec Étienne III (ou IV) après la mort de Paul 1er, 767. Il monta sur le trône, mais il en fut bientôt précipité, fut chassé de Rome 6 avril 769, et finit ses jours dans un monastère où on l'enferma après lui avoir crevé les yeux.

CONST ANTINOPLE, primitivement Byzance, fondée par des Grecs, dans une situation admirable, et successivement occupée par Darius, Xercès, la Macédoine et les Romains; détruite 196 par Septime Sévère, relevée par Caracalla, ne prit définitivement un rang dans l'histoire qu'à dater de Constantin qui l'embellit, l'agrandit, en fit la rivale de Rome, y fixa sa résidence impériale et lui donna son nom. Ce fut la première ville officiellement chrétienne et qui ne souffrit dans son enceinte aucun temple païen, sauf pendant un court intervalle sous Julien. Lors du partage de l'emp. romain 395, elle devint la capitale naturelle de l'Orient et ne tarda pas à l'emporter sur Rome en magnificence. Dès lors elle acquit une importance exceptionnelle, non seulement au point de vue politique, mais encore comme centre religieux et comme foyer d'une vie ecclésiastique indépendante de Rome, de ses conditions et de ses prétentions. Son caractère semble avoir été de concilier davantage la vie civile avec l'esprit de Christ, de rendre la vie religieuse en quelque sorte plus laïque et de sauvegarder l'indépendance de l'Égl. tout en maintenant sa subordination à l'État. Sans rien de particulièrement créateur, elle a conservé fidèlement les vieilles traditions, la vieille culture grecque, les souvenirs de l'art et de la science, cherchant à les mettre en harmonie avec l'esprit du christianisme, et les recueillant avec un soin jaloux pour pouvoir, quand le temps serait venu, les faire servir au relèvement et au rajeunissement de l'Église trop longtemps endormie et pétrifiée. L'importance de Const. pour le développement de la civilisation et comme sentinelle avancée contre les invasions de l'esprit asiatique, ressort des circonstances mêmes de son histoire si mouvementée; elle fut assiégée 29 fois et prise 7 fois avant de tomber définitivement la 8<ne fois entre les mains des Turcs 1453. Les suites de cette conquête ont été si considérables qu'elle forme une des grandes dates de l'histoire du monde et le passage du moyen âge aux temps modernes. — Après avoir été un simple évêché (et parmi sesév. elle eut l'honneur de compter Chrysostome), elle s'éleva rapidement au rang de patriarcat et partagea avec Rome le titre d'écuménique. De nombreux conciles ont été tenus dans ses murs ou à ses portes: 1<> Le 2* écuménique 381, qui condamna les ariens et les apollinaires, confirma les décrets de Nicée, assigna à l'év. de Constantinople le premier rang après celui de Rome, et essaya, mais sans y réussir, de mettre fin au schisme d'Antioche; 2° en 553, sur la question des Trois chapitres, où furent condamnés le> trois nestoriens, Ibbas d'Édesse, Théodore! de Cyr et Théodore de Mopsueste; 3° en 680, où furent condamnés le pape Honorius et les patriarches monothélètes; 4° le 8™ écuménique. en deux sessions: l'une 869, convoquée par le pape Nicolas, où Photius fut anathématise; seul reconnu à Rome, et l'autre en 879. reconnu par les Grecs seuls, où Nicolas fut à son tour excommunié; 5° le conc. de Trull, ou Quini-Sexte, 691, pour compléter les décrets des et 6m« conciles: non reconnu par les papes: 6° deux conc. des iconoclastes 730 et 759; 7° deux conc. contre Cyrille Lucaris, <638 et 1642. — Constantinople faisait remonter son épiscopat à l'apôtre André; l'évêché releva longtemps du métropolitain d'Héraclée; la grandeur politique de Const. fit aussi sa grandeur ecclésiastique, le 2* conc. écuménique la plaça immédiatement après Rome; le conc. de Chai-cédoine la fit l'égale de Rome, en étendant sa juridiction sur tout l'Orient; en 587 les patr. prirent le titre d'écuménique et ils l'ont conservé jusqu'à ce jour; si quelquefois ils en appelèrent à Rome comme arbitre; ce ne fut qu'exceptionnellement et dans des cas spéciaux. Dans U controverse des images Léon l'Isaurien réunit l'Illyrie à Constantinople, et les rivalités mûrirent jusqu'au moment où le schisme éclata sous Photius. La conquête des Turcs, bien loin d'affaiblir l'autorité patriarcale, la fortifia en faisant passer entre ses mains un certain nombre d'attributions civiles. Au 16m* siècle l'Égl. russe se sépara de Const. par l'établissement d'un patriarcat à Moscou, puis par l'établissement d'un saint synode. Il s'était aussi formé un patriarcat serbe au 14^ siècle, mais qui fut supprimé 1763. La Grèce s'est de même séparée du patriarcat écuménique par suite de sa fondation en royaume indépendant, 4 août 1833. La conquête de Const. par les latins 1204 eut pour conséquence l'érection d'un patriarcat latin, qui dura jusqu'en 1261 sous l'autorité du saint-siège; il s'est continué dès lors sons la forme d'un patriarcat-vicariat, ou vekil, qui exerce tous les droits métropolitains sur les catholiques de la Turquie et de l'Asie Mineure.

CONSTITUTION. D'une manière générale, la loi qui détermine la forme d'un gouvernement et règle les droits politiques des citoyens. Chaque pays a sa constitution qui lui est propre, écrite ou non écrite. Les Églises ont aussi les leurs, octroyées par l'autorité temporelle, ou élaborées par les autorités ecclésiastiques, synodes, consistoire supérieur, etc. — Les Consistions apostoliques q. v. sont un recueil de règlements faussement attribués aux apôtres. — On appelle aussi de ce nom, emprunté à la langue du droit, toutes les ordonnances, lois et règlements donnés par les papes. — Le consti-tutionalisme ecclésiastique désigne le système représentatif ou synodal appliqué à l'Égl.; c'est un presbvtérianisme mitigé.

C0NSÛBSTANTIAT10N, doctrine de Luther qui, pour adoucir sans la rejeter entièrement la doctrine de la transsubstantiation, admet qu'après la consécration le pain n'est pas transformé en corps de Christ, mais qu'il continue d'exister comme pain avec le corps, les deux substances conservant leurs propriétés, v. Durand, La question eucharistique.

CONSUBSTANTIEL, expression latine correspondant au grec homo-ousios, et fréquemment employée dans les controverses ariennes, pour indiquer l'identité d'essence du Père et du Fils, par opposition au mot homoî-ousios marquant seulement la ressemblance.

CONTARI, Cyrille, év. de Bérée 1635, le grand adversaire du patr. Cyrille Lucaris.

CONTARINI, Gaspard, né à Venise 16 oct. 1483, d'une fapiille illustre qui avait donné 7 doges à la république. Il fut envoyé par son pays auprès de Charles-Quint, et après avoir servi avec distinction, fut, quoique laïque, élevé au cardinalat 1535. Il travailla avec Caraffa, Sadolet et Pôle, à un projet de réforme, visant la suppression des abus les plus criants et une limitation plus exacte de l'arbitraire papal, mais ce projet n'aboutit pas. Comme légat à la diète de Ratisbonne 1541, il fit de vains efforts pour rapprocher les partis, et fit des concessions réelles aux évangèliques, mais fut débordé par les théol. et les princes catholiques. Il n'en conserva pas moins la confiance du pape, qui le nomma cardinal-légat à Bologne, où il f 24 août 1542. U a laissé de nombreuses lettres, un Traité sur la Justification, et un ouvrage sur l'Immortalité de l'âme, contre Pompanare, son maître. Vie, par Beccatello.

CONTEMPLATION, recueillement, concentration de la pensée, spécialement sur des sujets de l'ordre intellectuel; recherche, avec une nuance d'admiration; absorption dans l'étude d'un phénomène ou d'un problème particulier. La contemplation, tantôt instinctive, tantôt réfléchie, volontaire, habituelle, ou forcée, est un des procédés du génie, une des conditions du progrès, et souvent la cause de grandes aberrations intellectuelles ou morales. L'homme se dédouble en quelque sorte et, en arrachant son esprit aux choses extérieures, il se soustrait à l'influence de la matière, ce qui est un bien, et au sentiment de la réalité, ce qui est un mai. On a souvent voulu, dans le domaine de la religion, faire de la contemplation le degré le plus élevé; tout dépend de ce qui fait l'objet de la contemplation. Marie contemplait Jésus; Ignace de Loyola, la reine des cieux; le fakir des Indes, son nombril. Dans les meilleures conditions la contemplation présente encore du danger, si elle se prolonge aux dépens de la vie active.

CONTRITION, une des formes de la repen-tance, d'après la théol. catholique. Le premier degré est l'attrition, qui mécontente l'intelligence et produit du déplaisir; le second est la contrition, qui se passe dans le cœur. Le premier peut n'être produit que par la crainte de l'enfer; cependant, tel quel, il peut déjà suffire: le second vaut mieux; c'est le regret d'avoir déplu à Dieu et la crainte d'avoir perdu sa faveur. L'un et l'autre supposent la confession, une pénitence et l'absolution. Rien dans l'Évangile n'autorise ces distinctions qui, par leur subtilité, ne tendent à rien moins qu'à remplacer par des manifestations extérieures un changement de dispositions et de vie qui devrait être tout intérieur.

CONVENTICULES, petites assemblées religieuses, provoquées ou organisées comme les Collegia pietalis de Spener. Elles avaient pour objet spécial l'édification mutuelle et n'étaient pas tonj. présidées par un ecclésiastique attitré. Souvent interdits et persécutés, on essaya plus souvent encore de les compromettre par le ridicule; mais comme ils répondent à des besoins réels, ils ont survécu à toutes les attaques. Auj. grâce au droit de réunion et au triomphe de la liberté des cultes, ils sont rentrés dans le droit commun, et n'ont plus à se défendre que contre leurs propres excès en fait de zèle ou d'étroitesse.

CONVENTION d'Altranstadt (village de la Saxe prussienne, près de Lutzen); traité imposé par Charles XII à l'empereur 1707, pour restituer aux évangéliques de Silésie le libre exercice de leur culte que la paix de Westphalie leur avait garanti. Cette convention fut annulée en fait 1709 par la défaite de Charles XII à Pul-tava.

CONVERS, frère ou sœur; s'emploie dans le langage des ordres religieux, pour désigner les hommes ou les femmes plus spécialement chargés des travaux servi les du couvent; presque touj. laïques; on les appelle frères, et non pères; ils ne sont soumis qu'aux vœux d'obéissance et de chasteté, pas à celui de pauvreté. Ils peuvent servir de guides aux pèlerins.

CONVERSION, changement d'une chose en une autre; à Cana. changement de l'eau en vin. Changement de direction. Se dit du passage d'une religion à une autre, quels que soient les motifs qui l'amènent, persuasion, intérêt, contrainte, faiblesse d'esprit, ambition, etc. D'après l'Écriture et les théol. protestants, on peut la définir: la mort du vieil homme et la naissance du nouvel homme, le passage des ténèbres à la lumière, la communion intime avec Christ, Christ vivant en nous. C'est tout ensemble la reconnaissance de la révélation, la repentance et la foi, des choses qui semblent distinctes dans la forme, mais qui en réalité n'en font qu'une, puisque la repentance ne peut exister sans la foi, et que la foi sans repentarae ne serait qu'une foi morte. Les catholiques donnent le nom de convertis spécialement aux protestants qui reviennent à eux et qui ont à prononcer le Serment des convertis en adhérant aux décrets doctrinaires du Conc. de Trente.

CONVOCATION, assemblée génér. du clergé anglican; elle se compose de deux Chambres, les évêques qui forment la Chambre haute, et le clergé inférieur ou Chambre basse. Elle se réunit sur l'ordre du souverain et exerce le pouvoir législatif ecclésiastique. Ce n'est plus depuis 1717 qu'une formalité, le vrai pouvoir ayant passé aux mains du parlement.

CONVOITISE, désir immodéré de choses, d'ailleurs légitimes, telles que le manger ou le boire. C'est le triomphe des sens sur l'esprit et la preuve que Féquilibre régulier des facultés est rompu. La Bihle distingue la convoitise des yeux et celle de la chair, 1 Jean 2, 16; ailleurs les désirs de la chair et ceux de la pensée Éph. 2, 3. La morale chrétienne demande que ces convoitises soient réprimées et l'esprit de l'Évangile donne à l'homme les forces nécessaires. Rom. 6, 12. Gai. 5, 24. Col. 3, 5. Matt. 18, 9.

CONVULSIONNAIRES,enthousiastes du parti janséniste, qui, après les persécutions que leur ordre avait subies, et après la mort du diacre Pâris 1724, se rendaient sur le tombeau de ce saint homme, au cimetière de Saint-Médard, et cédant à une excitation fébrile et malsaine, comme il s'en produit quelquefois aux époques de troubles, se livraient à une gymnastique convulsive et nerveuse qui excitait l'admiration de la foule, la curiosité des physiologistes et les inquiétudes du gouvernement. Des cure* surprenantes eurent lieu, en même temps que des scènes extravagantes, et le cimetière fut fermé par ordre supérieur. Un plaisant afficha sur la porte ces deux vers:

De par la loi défense A Dieu De faire miracle en oe lien.

Des phénomènes de ce genre accompagnent souvent les manifestations religieuses; ils sont difficiles à expliquer, mais on ne peut ni le* nier, ni les dédaigner; on peut encore moins n'y voir qu'une jonglerie on de la prestidigitation.

COPHTE (église), v. Abyssins.

COPI ATS, hommes de peine, ou fossoyeurs; on nommait ainsi dans l'ancienne Église les fonctionnaires chargés des inhumations; ils appartenaient au clergé et formaient même, à Constantinople, une corporation spéciale, v. Pa-raholains.

COQUEREL 1° Athanase-Laurent-Ch. ne 25 août 1795 à Paris, pasteur à Amsterdam 12 ans, à Paris 38 ans, prédicateur distingué, homme de société, membre de la Constituante en 1848, député en 1849. f 2 janv. 1868. Auteur d'une Biographie Sacrée et de l'Orthodoxie moderne, le Christianisme expérimental, Chris-tologie, Sermons, Rép. à Strauss, articles de journaux, etc. Il a honoré et servi le protestantisme, il a défendu le supranaturalisme, mais il appartenait au libéralisme militant, et son attitude autoritaire, parfois provocatrice, a amené des conflits personnels qu'un esprit plus conciliant n'aurait pas fait naître, et qui ont jeté l'église de Paris dans un long malaise.

2° Son fr. Ch.-Augustin, 17avril 1797f l«rfév. 1851, savant et littérateur, auteur d'une Hist. des égl. du désert, d'un Annuaire prot., et fondateur de plusieurs revues pqptestantes.

3<> Athanase-Josné,filsdu i«r, né 16 juin 1810 à Amsterdam, étudia à Genève, fut consacré &

Nîmes en 1843, où il exerça le ministère pendant 5 ans. En 1848 il vint à Paris comme aumônier et suffragant, et se fit apprécier comme prédicateur et catéchiste. Esprit brillant, charmant causeur, doué de talents remarquables et d'un aimable caractère, il se laissa engager dans une lutte ardente contre le Consistoire, et perdit sa position. Il ouvrit une égl. libérale et f 24 juill. 1875 àFismes, Marne. Auteur de Calas, les Arts et le Protestantisme, Hist. de l'égl. réf. de Paris, Sermons, Catéchisme, etc.

CORAN ou avec l'article, Al Coran: ce qui est écrit, l'Écriture, le livre sacré des musulmans; suite des prétendues révélations que Mahomet aurait reçues à des intervalles irregu-liers par l'ange Gabriel. Il se compose de 114 fragments, ou sures, de valeur ou de longueur très inégales, dont chacun a un titre (la vache, les femmes, Abraham, la lune, l'éléphant, etc.) qui n'indique nullement son contenu, mais simplement un des objets qui s'y trouvent mentionnés, ou même le premier mot du chapitre. C'est un pêle-mêle de dogmes, de morale, d'histoire, de légendes, de préceptes, de controverses et de doxologies; les anachro-nismes et les contradictions y abondent, ce qui tient à la manière même dont le livre a été composé, c.-à-d. au furet à mesure des besoins et suivant les nécessités du moment. Ces fragments, tous littéralement inspirés, dit-on, furent recueillis d'abord, et sans aucun ordre, par Abou Beker. Il s'en fit un certain nombre de copies, complétées ou amendées ci et là par les souvenirs de la tradition orale, et par conséquent différentes les unes des autres. Le calife Omar, ou Othman, fit recueillir ce qu'il put trouver de manuscrits, les collationna, en tira un texte unique et authentique et fit détruire tous les exemplaires avec variantes, de manière à assurer la conservation du texte corrigé; auj. sauf des erreurs de copistes, le Coran a son texte reçu, qui est le même partout et pour tous. Il est écrit dans l'arabe le plus pur (dialecte du Hedjaz), mais, vers ou prose, il n'en est pas moins d'une lecture difficile, souvent obscure, sans rien de saillant comme idée religieuse. Sa dogmatique, ou islam, ne comprend que deux points: l'unité de Dieu, avec Mahomet pour prophète, et le jugement à venir; en d'autres termes le symbole des hommes de 1793: l'Etre suprême et l'immortalité de l'âme. C'est la foi des déistes en général, et Mahomet fut du moins assez logique pour ne pas revendiquer le titre de chrétien dans ces conditions. Le Coran voit en J.-C. le fils de Marie, simple homme, mais grand prophète, envoyé de Dieu, sa parole et son esprit. L'Orient compte par milliers les Comment, qui en ont été faits; les meilleurs sont ceux de Azzamachschari et de Beidhâwi, trad. en latin par Ribliander; en franç. par Duryer, Savary; en allemand par le rabbin Ullmann; en angl. par Rodwell.

CORAS lo Jean, né 1513 à Réalmont (ou Toulouse, ou Lauserte), un des plus savants jurisconsultes de son temps; prof, à Angers, Orléans, Paris» Padoue, VaJence, Ferrare, enfin Toulouse où il compta jusqu'à 4000 auditeurs. Nommé par Henri II conseiller au parlement de Toulouse; converti à la réforme, il fut plusieurs fois en danger, et finit par être massacré 4 oct. 1572, avec deux autres conseillers au parlement, comme épilogue, froidement calculé après coup, des massacres de la Saint-Barthé-lemy; on les pendit ensuite, avec leurs robes rouges, à l'orme du palais. C'était un esprit aussi lucide que ferme et entreprenant. Il a laissé une quinzaine d'écrits sur le droit.

2° Jacques, petit ou arrière-petit-fils du précédent, né à Toulouse vers 1630; d'abord cadet aux armes, puis étudiant en théol., exerça quelques fonctions pastorales, fut un moment aumônier de Turenne, puis abjura 1665 à Agen, après s'être bien fait marchander. Poète médiocre, auteur de Jonas, Josué, Samson, David, il n'est connu que par les satires de Boileau. f 1677. Le clergé lui faisait une pension de 800 livres. Sa femme, ayant refusé d'abjurer, fut transportée en Amérique avec quelques centaines d'autres, dont la plupart périrent en route.

CORBIE, célèbre abbaye de bénédictins, fondée vers 660, et pépinière de missionnaires; elle était située en Picardie, à 15 kil. d'Amiens. Louis-le-Débonnaire, dès la première année de son règne, 815, fit bâtir à Hechi, près Cassel, un monastère qu'il donna d'abord à des moines de Corbie, qui reçut en conséquence le nom de Corbie, ou Neto-Corvey, mais qui, dans l'intérêt de l'œuvre des missions, fut peu après transféré plus bas, en descendant le Weser, au pied de la forêt de Sollinge. Placée d'abord sous la direction immédiate d'Adalart, l'abbé de Corbie, la nouvelle création, à la mort de celui-ci, 826, eut son propre abbé en la personne de Warin; elle obtint la translation des os de saint Vit de Saint-Denis, et fut richement dotée. Elle dut surtout son importance croissante à la fondation d'une école en vue de l'évangéli-sation des Saxons, et il s'y forma un grand nombre d'hommes distingués, Anschar, etc. Mais la corruption générale des mœurs au moyen âge l'atteignit, comme presque tous les couvents, et sa décadence fut rapide. La guerre de Trente ans lui fut fatale. En 1794 son abbé reçut le rang d'évôque qu'il perdit en 1803, quand son territoire fut donné au prince d'Orange; elle passa en 1807 à la Westphalie, en 1815 à la Prusse; elle est auj. complètement sécularisée.

CORBIÈRE, Pierre de; v. Nicolas V.

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CORBIN1EN, né vers 680 à Chartres, f 8 sept. 730. Fondateur de l'évêché de Freisingen, Bavière.

CORDELIERS, v. François i<>.

CORDIER 1° Mathurin, né 1479, probablement en Normandie; amené à la réforme par Rob. Estienne; remarquable par son caractère, son érudition, son goût classique et ses dons pour l'enseignement. Régent à Paris dans les collèges de La Marche et de Navarre, il eut pour élève Calvin, qui plus tard lui dédia son Comment. sur 1 Thessal. Il quitta la i" classe pour prendre modestement la 4^ estimant que, pour la suite des études, il importait surtout de bien poser les premiers éléments de la grammaire. Devenu prêtre vers 1528, et chargé d'une église à Rouen, il ne tarda cependant pas à reprendre sa première carrière, enseigna à Nevers et à Bordeaux 1534-1536, vint à Genève en 1538, puis à Neuchâtel 1540. à Lausanne 1550-1557, et finit par revenir au poste qu'il avait déjà occupé au collège de Genève, f 8 sept. 1564, âgé d 4 85 ans, 4 jours après sa dernière leçon, et peu de mois après Calvin. Sa mémoire est restée populaire à Grenève, où il continue d'être considéré comme le modèle des pédagogues et comme le premier organisateur du vieux collège. Il a laissé une douzaine de petits écrits, presque toussur l'enseignement ou pour l'édification; ses Colloques sont le plus important, et ils ont été trad. dans plus, langues et souvent réimprimés.

2° Balthasar, né 1592 à Anvers, f 1650 à Rome; auteur de quelques comment, sur Job, Psaumes, Luc et Jean; éditeur de quelques pères grecs.

CORDOUE, célèbre ville d'Espagne, qui prospéra surtout sous l'administration des Maures, depuis Abdérame Ier 756, et qui atteignit l'apogée de sa splendeur sous Hakim II 980. C'est aux Maures qu'elle dut ses magnifiques monuments, ses immenses richesses, ses écoles et ses savants, au nombre desquels brillèrent Abulka-ris, Averroës, Maïmonides. Sa gloire commença à décliner quand elle retomba 1236 entre les mains de Ferdinand III. Patrie des deux Sénè-que et de Lucain sous les Romains, elle a donné 1.* jour dans les temps modernes au général Gonzalve, à des poètes et à des peintres. Il s'y tint en 852 un concile, qui se prononça contre la recherche exagérée du martyre lors des persécutions musulmanes.

CORDUS, Eurice, médecin et humaniste distingué de l'époque de la Réforme. Né 1486 à Weiter, il accompagna Luther à Worms, s'établit comme médecin à Brunswick, puis comme prof, à Marbourg 1527 et à Brème 1534. f 1535. Connu par de charmantes et fines satires htines contre les moines mendiants et les désordres de son temps.

CORNEILLE 1° centenier, Act. chap. 10; une tradition le fait év. de Césarée et martyr.

— 2° pape. Il monta sur le siège épiscopal de Rome vers 251, après un interrègne de 16 mois causé par les luttes sur la conduite à tenir à l'égard de ceux qui avaient renié leur foi pendant la persécution. Il représentait le parti de la douceur. Mais son élection donna lieu au schisme de Novatien, qu'une partie de l'assemblée nomma et essaya, mais en vain, de maintenir. Cyprien reconnut Corneille, malgré leurs divergences ecclésiastiques; Denys d'Alexandrie de même. L'év. d'Antioche refusa. L'emp. Gai-lus exila Corneille à Centum Cellae (Civita-Vee-chia) où il + 252, après 17 mois de pontificat.

— 3° Corneille de la Pierre (Cornélius a lapide. van den Steen), jésuite, exégète encore estiim des catholiq. Né 1598 près de Liège, il fut prof, à Louvain et à Rome, + 12 mars 1637. Ses Gomment, sont diffus, mais renferment beaucoup d'extraits des pères.

CORNELIUS 1° Pierre (de), né 1787, f 1867, peintre célèbre par la hardiesse de ses conceptions; il a peint pour plusieurs égl. des sujets religieux. Son Jugement dernier est à Munich: plusieurs cartons d'un Campo Santo sont à Berlin. — 2° v. Lapide.

CORON ATI, les quatre couronnes: quatre frères, Sévère, Séverin, Carpophore et Victorin, qui subirent le martyre 304. La légende porte qu'on leur enfonça sur la tête des couronnes garnies de pointes.

CORPORAL, linge sur lequel on dépose l'hos tie; anciennement il était assez grand pour recouvrir l'hostie et le calice, et on l'appelait palla.

CORPUS DOCTRINE, corps de doctrine, nom de convention donné, surtout chez les luthériens, à des recueils contenant, outre la confession, l'Apologie, les catéch. de Luther, et les articles de Smalcalde qui manquent rarement, des documents plus spéciaux ayant pour but de renforcer, d'atténuer ou simplement d'expliquer la doctrine reçue. Ainsi le Corpus doctr. misnicum, ou philippicum, 1559, publié en Saxe, renfermait les écrits confessionnels de Mélanchthon; le Corp. de Hambourg 1560 contenait cinq déclarations, très raides dans l'esprit luthérien, sur la cène et l'adiaphorisme. Celui de Brandebourg, rédigé par Musculus, contenait des fragments de Luther sur les points controversés; celui de Hesse y avait joint la formule de Concorde de Wittenberg, etc.

CORPUS EVANGELICORUM, nom sous lequel se constitua, le 22 juill. 1653, à Ratis-bonne, sous la présidence de l'élect. de Saxe, une représentation régulière des États évangéli-ques, sur la base du jus eundi in partes garanti par le traité de Westphalie. Sa mission était de veiller aux intérêts du protestantisme; il fut reconnu par l'empereur. Les catholiq. avaient de même, sous les auspices de l'élect. de Mayen-ce, un corpus cathol., moins formellement organisé, mais qui figure cependant sous ce titre dans des documents officiels. L'un et l'autre cessèrent d'exister en 1806, mais furent remplacés officieusement, l'un par le Kirchentag, l'autre par la confér. d'Eisenach, dans la mesure où le besoin pouvait s'en faire sentir.

CORRECTEURS: collège de savants, fondé par Pie IV 1563, sur l'initiative du conc. de Trente, pour reviser et publier le Décret de Gratien. Ce travail aboutit à une Editio romatia, 1582.

CORRECTION (maisons de). Les catholiques ont des établissements où les ecclésiastiques peuvent être enfermés à la suite de grosses fautes disciplinaires, pour un temps plus ou moins iong. Les couvents sont habituellement utilisés pour ces exercices de pénitence. Quand il s'agit, non d'un prêtre qui a failli, mais d'un individu complètement indigne du ministère, et qu'on veut pour l'honneur de l'Égl. le soustraire aux yeux du monde, on appelle ces établissements des maisons de démérite. Plusieurs concordats reconnaissent ces maisons, mais en limitant le droit des év. quant à la nature et à l'application des peines. Les Égl. protestantes n'ont rien de semblable, attendu qu'un ecclésiastique perdrait son influence avec son caractère, par le fait d'une faute qui entraînerait son incarcération.

CORRÈGE, Antonio Allegri (di), de Modène, né 1494, f 1534, peintre d'église et de sujets religieux, comme presque tous les peintres de son époque, mais passablement naturaliste et voluptueux. Il vécut surtout à Parme. Ses deux plus belles fresques sont une Adoration du Christ, et une Assomption de la Vierge. Le Louvre, Dresde et Florence possèdent quelques-uns de ses tableaux, dont une Descente de croix, une Madone, une Fuite en Égypte. un Jérôme (sur bois), et une jolie Madeleine, mais qui n'a pas l'air de se repentir. Dessin correct, coloriste distingué, peintre gracieux, mais sensuel.

CORRODI, Henri. Né 31 juill. 1752 à Zurich; fils d'un pasteur. S'attacha à Halle à Sem-ler et travailla à Zurich dans le même esprit <omme prof, de droit naturel et de morale, f 1793.11 a écrit une Hist. du chiliasme 1781, et des Consid. sur l'hist. du canon, 2 vol. 1792.

CORVEY (New), v. Corbie.

CORVIN lo Jean, v. Hunyade. 2o Mathias, roi de Hongrie, fils de Jean, élu 1458 à 15 ans. t 1490; le souverain le plus illustre de son temps comme militaire et comme législateur. Attaqué par tous ses voisins, Autriche, Bohême. Pologne, Transylvanie, Moldavie, Valachie, il lit face à tous, et fut en outre le boulevard de la chrétienté contre les Turcs. Il introduisit l'imprimerie, fit élever un observatoire, fonda une université à Bude, et y réunit une des plus magnifiques bibliothèques du monde. Quand les Turcs se furent emparés de la ville, 1530, ils en détruisirent ou en dispersèrent les précieuses collections. Ce n'est qu'en 1877 qu'ils se décidèrent à rendre à la Hongrie ce qu'ils avaient conservé, une trentaine de riches volumes, de la biblioth. de Matth. Corvin.

3° Antoine, Rœbener (le corbeau, Corvinus), théol. du temps de la réforme, né 27 févr. 1501 à Warbourg, fut chassé de son couvent à cause de ses principes évangéliques, étudia à Wittenberg, prit part aux conférences de Smalcalde, fut chargé par Philippe de Hesse de parler aux anabaptistes prisonniers à Munster, s opposa à la tentative d'Eric II, redevenu catholique, de rétablir l'Intérim; passa 3 ans en prison pour sa fidélité, et f 1553. — 4° v. Monte Corvino.

COSME, ou Cosmos. 1° Arabe de naissance, ainsi que son frère Damien; patrons des chirurgiens et des apothicaires; ils exerçaient leur art gratuitement et furent martyrisés vers la fin du 3^0 siècle. — 2° Marchand d'Alexandrie, surnommé Indicopleustes, parce qu'il fit le voyage des Indes. Devenu moine, et relativement plus instruit, surtout en géographie, que la plupart de ses confrères, il eut l'idée de se faire une réputation comme géographe et écrivit, vers 536, sa Topogr. chrétienne, avec cartes et illustrations, qui est l'une des plus bizarres que l'homme ait imaginées. La terre est une grande cage dont les cieux forment le toit. La description de Ceylan est la meilleure partie du livre. — 3° Baseilhac, surnommé frère Cosme ou Cô-me, un des plus habiles chirurgiens du siècle dernier; inventeur du lithotome caché. Né 1703 près Tarbes, f 1781; était entré 1729 dans l'ordre des feuillants, qui lui donnèrent son nom.

COSRI, ou Cosari, titre d'un ouvrage du rabbin Juda Hallevi, vers 1400, dans lequel, sous la forme d'une conversation du roi Cosar avec un philosophe, un chrétien, un mahométan, un caréen et un rabbin, l'auteur s'applique à démontrer la supériorité du judaïsme rabbinique sur tous les autres systèmes ou religions. Écrit en arabe il a été trad. en hébreu, puis publ. par Buxtorf 1660.

COTELERIUS, Jean-Baptiste, né à Nîmes, déc. 1627, docteur à la Sorbonne 1648, fut chargé de cataloguer et de mettre en ordre les mss. grecs de la Biblioth. royale, f 19 août 1686, étant prof, de grec. On lui doit une édition des Pères 1672, réimpr. par LeClerc 1698; les Monuments de l'Égl. grecque, des Homélies, etc.

COUPE, v. Calice.

COURCELLES, Étienne (de), fils de Firmin d'Amiens, né à Genève 2 mai 1586, f à Amsterdam 22 mai 1659. Il fît de bonnes études, fut consacré en 1614 et fut successivement pasteur à Fontainebleau, Amiens, Heiltz-le-Maurupt, Vitry, et enfin prof, de théol. à Amsterdam. Arminien de cœur, il n'eut pas toujours l'énergie de ses convictions, et les renia pour éviter des difficultés. Mais ayant trouvé en Hollande un meilleur terrain, et protégé par Épiscopius, il vint à Amsterdam où il put professer plus librement ses opinions. On a de lui une bonne édition grecque du N. T. avec notes et variantes, plusieurs fois réimprimée; une Institution de la relig. chrét., inachevée; une étude sur la papesse Jeanne, de Blondel; et un grand nombre de dissertations et de Lettres. Il eut de sa femme Susanne Fleurigeon un fils, Gédéon, qui fut pasteur des Remontrants à La Haye.

COURLANDE, pays des Cures, ou Coures, qui avec les Esthes, les Lives et les Lettes, formait la race finnoise. Ces peuplades habitaient les (Mites orientales de la Baltique. Presque inconnus jusqu'au 13me siècle, les Cures furent conquis à l'Évangile par les Frères de l'épée, mais dans leur lutte pour leur indépendance, ils succombèrent presque tous; des Esthes et des Lettes prirent leur place, mais les conquérants allemands continuèrent de former la majorité de la population. Ils relevaient de Pév. de Riga. La réformation s'y établit par les soins du gouverneur de Livonie, Walther de Plettenberg. Son successeur Gotthard Kettler l'obtint à titre héréditaire, lors du traité de Wilna 1561, sous le protectorat de la Pologne, et dès lors la réforme y fut généralement professée, avec une constitution ecclés. donnée par le surintendant Ein-horn 1570. Vers la fin du 17me siècle la liberté religieuse y fut proclamée, et des catholiques purent s'y établir, aussi bien que des réformés, à côté des luthériens. L'état religieux était d'autant plus triste que les pasteurs ne connaissaient pas la langue de leurs paroissiens, et ne pouvaient ni les instruire, ni les exhorter. Réunie à la Russie 1795, la Courlande fut mieux protégée que les autres provinces contre les empiétements de la religion grecque: ce n'est toutefois qu'en 1865 que fut révoquée la loi qui donnait à la religion grecque tous les enfants issus de mariages mixtes. Les missions baptis-tes y ont obtenu de grands succès; les moraves, moins qu'en Livonie. Sur 500,000 habitants, on compte 400,000 luthériens et 50,000 catholiques; le reste se compose de réformés, de bap-tîstes, de juifs, etc.

COURONNEMENT. Cette cérémonie, telle qu'elle est racontée 2 Rois 11, 12. et qui symbolise le droit divin du monarque, mais aussi, en passant par les mains de l'Église, la prédominance de l'Égl. et la subordination de l'État, s'est introduite en Europe avec les premiers rois chrétiens, et notamment avec les emp. germaniques. Les princes protestants y ont renoncé les premiers, en supprimant l'onction d'huile et en plaçant eux-mêmes sur leur tête, sans l'intermédiaire du prêtre, la couronne, symbole de leur pouvoir temporel. Le couronnement du pape a lieu le dimanche qui suit son élection; c'est le plus âgé des cardinaux-diacres qui \ préside, conformément au cérémonial romain: Reçois, lui dit-il en latin, reçois cette tiare ornée de 3 couronnes, et souviens-toi que tu es le Père des princes et le chef (rectorem) des rois de ce monde, sur la terre le Vicaire de N. Sauveur J.-C., à qui soient l'honneur et la gloire aux siècles des siècles. Amen.

COURT, lo Antoine, que l'on peut appeler le grand restaurateur du protestantisme en France. Né 1696 à Villeneuve-de-Berg, Vivarais, il conçut le dessein de ressusciter une Église que le Néron du 17me siècle avait déclarée morte, el que ses persécutions avaient tuée. Il n'y avait plus de culte, il ne restait ci et là que des protestants isolés, un c reste qui s'en va mourir. » La guerre des camisards touchait à sa fin; le combat allait finir, faute de combattants; ils étaient presque tous morts, ou sur les galères, ou bannis. C'est un jeune homme de 17 ans qui rêva le relèvement de cette pauvre Église; doué d'un esprit droit et ferme, intrépide et prudent à la fois; navré de la lâcheté des uns, qui se rendaient à la messe par peur; effrayé du fanatisme maladif des autres, qui compromettaient la réforme par leurs écarts, il prêchait la Mit dans les solitudes rocheuses du Vivarais. Sans éducation classique, il s'efforçait de réparer cette lacune par le travail et la méditation. A19 ans il fut appelé à desservir l'égl. de Nîmes, el il y trouva sous d'autres formes les mêmes désordres que dans les montagnes. Il résolut de mettre la main à l'œuvre, et poursuivit le triple but lo de multiplier le nombre des assemblées, pour ranimer le zèle et raffermir la foi des fidèles; 2° de rétablir l'ancienne discipline, en réorganisant les consistoires, les colloques el les synodes; 3° de former de jeunes prédicateurs. et d'appeler, si possible, en attendant, des pasteurs et des ministres étrangers. Il commença par le Vivarais, et fut à la fois le président et le secrétaire d'un premier synode provincial tenu le 26 août 1715. Le « Vainqueur de l'hérésie » allait mourir, mais il devait constater avant son agonie, que l'Égl. qu'il avait juré d'anéantir n'était pas morte. Second synode en Dauphiné, 22 août 1716; 3»« en Lan- | guedoc, 2 mars 1717. Sur le conseil de Basnage, le régent duc d'Orléans fit sonder Court pour j savoir s'il y avait à craindre un soulèvement

des réformés du midi. Court répondit qu'il n'y aurait de révolte à craindre qu'en cas de persécution, et refusa la pension que le gouvernement lui fit offrir. Il fut consacré en 1718, par Corteis qui venait de l'être à Zurich. En 1722 il épousa Étiennette Pagès, d'Uzès, « qui édifiait fort l'Église par son zèle et sa débonnaireté. » Après un court séjour à Genève il revint en France, cédant aux sollicitations des églises, et il reprit ses périlleux travaux; plusieurs fois il faillit être arrêté, mais il échappa à toutes les poursuites. En 1729 cependant il se décida à se fixer en Suisse, où il avait envoyé quelques mois auparavant sa femme et ses enfants, craignant qu'ils ne lui fussent enlevés. Il choisit Lausanne comme le lieu le plus convenable pour la fondation d'un séminaire, et il put l'ouvrir la même année, sous la direction d'un comité résidant à Genève, avec le concours du gouvernement bernois et l'aide de W. Wake, archev. de Cautorbéry. Il ne cessa dès lors de rendre d'importants services aux églises, comme leur député général, par ses conseils, ses lettres qui étaient fort nombreuses, et son intervention sous les formes les plus diverses; + 1760. II reste de lui plusieurs ouvrages, dont les plus importants sont: Le patriote français 1751. Lettre d'un patriote 1756, Hist. des Guerres des Cévennes, ou guerre des camisards 1760, réimpr. 1819. On conserve en outre à la Biblioth. publ. de Genève 116 vol. mss. et plusieurs liasses de papiers appartenant à la succession de Court. 11 eut de sa femme trois enfants, une fille aînée qui f 1731 à 7 ans; une seconde, Pauline, née 1727, qui épousa Étienne Solier, et un fils. — Vie et lettres, par Edmond Hugues; Dar-dier, etc.

2° Court de Gébelin, fils du précédent, né 1728, ajouta au nom de son père celui de sa grand'mère paternelle. Il fit ses études au séminaire de Lausanne, où il fut reçu ministre. Sa mère étant morte presque subitement 1755, et son père étant accablé de douleur, Gébelin le soulagea autant qu'il le put, se chargea de sa correspondance, prit soin des églises, mais il avait ses propres occupations, comme prof, au séminaire, et ses aptitudes étaient plutôt littéraires et scientifiques. A la mort de son père il le remplaça comme représentant des égl., et en 1763 il vint se fixer à Paris où, en continuant <le s'occuper avec zèle et dévouement des intérêts des églises, il put se livrer à des travaux plus conformes à ses goûts, se fit estimer des hommes de tous les partis, fut couronné 2 fois par TAcad. française, intervint avec succès dans la revision des procès de Calas et de Sirven, fut nommé censeur royal, quoique protestant et pasteur, et fut élu directeur du Musée, que les de lettres venaient de fonder. Ses dernières années furent attristées par des rivalités littéraires, des chagrins domestiques, des embarras financiers, et des reproches injustes des égl. pour lesquelles cependant il sacrifiait sa fortune, son crédit et sa gloire. Sa santé s'altéra; il chercha dans le magnétisme un soulagement momentané, et f 10 mai 1784. Il a écrit les Toulousaines, 30 lettres en faveur des réformés, 1763; en collaboration avec Franklin, un écrit périodique intitulé: Les affaires de l'Angl. et de K Amérique 1776; l'année de sa mort, Lettre sur le magnétisme animal, qui fit sensation. Mais le livre qui a fait sa réputation, quoiqu'il soitauj. complètement dépassé, c'est son gigantesque Monde primitif analysé et comparé, 9 vol. 4° 1773-1784. Il admettait une langue primitive unique, dont les dialectes actuels n'étaient que des modifications, et il espérait la reconstituer et en retrouver les éléments en remontant d'idiôme en idiôme. Il expliquait aussi les religions païennes par des allégories. Cet immense travail reposait sur une idée juste et géniale, mais la science n'était pas assez avancée pour fournir des bases suffisantes à l'édifice. Quand il mourut il lui restait encore des matériaux pour 6 ou 7 vol.; il n'eut pas le temps de les mettre en ordre et il chargea de ce soin son ami le savant pasteur Moulinié de Genève. Les circonstances ne permirent pas qu'il y fût donné suite. Court de Gébelin était un homme doux, aimable, laborieux, d'un esprit hardi et d'un cœur large. Il a eu des vues heureuses sur l'antiquité, mais n'a pas toujours su en tirer parti.

COUVENTS, maisons dans lesquelles habitent, soumis à la même règle, un nombre plus ou moins considérable d'individus, hommes ou femmes. Ils datent du temps où les religieux, renonçant à la vie solitaire, décidèrent de se grouper dans l'intérêt de leur sûreté on pour associer leurs forces et leurs travaux. La forme primitive du couvent fut la Laure (place, village) qui, dans l'origine se composait de cellules rapprochées, mais isolées, réunies autour de la cellule ou cabane d'un supérieur. A mesure qu'on sentit le besoin de se grouper davantage, les cellules se rapprochèrent, et finirent par ne plus former qu'un seul bâtiment, dont ta dispotion intérieure varia suivant les lieux et les circonstances. Dans les plus anciens couvents tout était d'abord en commun, même le dortoir ou le lit de l'abbé, placé au milieu, était entouré des couchettes des moines. Puis on donna à chaque moine sa cellule pour concilier les avantages de la solitude avec ceux de la vie commune; quelquefois aussi des ermites se construisaient une cabane dans le voisinage immédiat du couvent dont ils relevaient. Ou bien l'on élevait simultanément deux maisons, l'une pour les hommes, l'autre pour les femmes, séparées par une clôture, mais soumises à une même règle et à un même abbé. C'est l'Égl. orientale qui a le mieux conservé les anciennes formes de la vie conventuelle; ainsi le Sinaï, les monastères du Mont-Àthos (où il y a encore une Sainte-Laure), Etschmiatsin en Arménie. Dans l'occident les couvents sont toujours restés, plus ou moins, à l'état de bâtiments isolés et fermés. La forme architecturale varie naturellement beaucoup, mais partout on retrouve régi, avec son chœur, son autel, son lutrin, le chemin de la croix, le charnier ou cimetière (si Pégl. elle-même n'est pas utilisée pour cela), le réfectoire, la salle du chapitre, des cellules, un dortoir, et dans les couvents de femmes un parloir; puis des confessionnaux et des salles de malades. Les riches couvents ont en outre des bibliothèques, des salles de collections, et quelquefois dans l'enceinte même de leurs murailles, les bâtiments et dépendances nécessaires aux diverses exploitations, agricoles ou autres, de la maison: dépendances qui sont plus ordinairement placées en dehors, sous le nom de grangia (granges), et qui ne jouissent pas des privilèges accordés à la maison religieuse. Dans le principe chaque couvent formait un monde à part, indépendant, gouverné par un abbé ou prieur, sous l'inspection ecclésiastique de l'évêque. Peu à peu les plus importants obtinrent d'être soustraits à la juridiction épiscopale et de ne relever que du pape seul. Sous une apparence inoffensive ce fut une immense révolution. Les papes se procurèrent de la sorte une véritable armée; les couvents se multiplièrent, et les ordres religieux ne s'affranchirent de l'autorité diocésaine que pour être enrôlés directement au service pontifical. Des privilèges de toute nature leur furent accordés, et par le fait même de leur puissance, ils finirent par se rendre indépendants de l'autorité temporelle. Ils eurent leurs avocats, des intendants, des économes; leurs domaines s'étendirent, leurs richesses se multiplièrent, ils réussirent, déjà sous Charles Martel, à exercer une influence politique; les bénéfices dont ils disposaient, leur procurèrent des créatures; ils abandonnèrent les solitudes pour s'installer au milieu des villes et contrebalancèrent la puissance des seigneurs. Mais avec le luxe et la richesse, les mœurs et la discipline se relâchèrent; ce qui avait été la retraite de la piété, du travail et de l'étude, ne devint trop souvent que le repaire du vice, de la paresse, de la débauche et de la sensualité. La vie devint facile et mondaine, on en fit une carrière pour les jeunes nobles, et l'auréole de sainteté qui entourait les premiers monastères disparut, quand on vit combien ils avaient dégénéré. La Réformation leur porta un coup fatal, en prouvant qu'ils ne faisaient plus que se survivre à eux-mêmes. Les jésuites ne songèrent pas à en fonder de nouveaux: ce n'était plus nécessaire, ni au point de vue de l'œuvre des missions, ni comme centres pour les hautes études. Le christianisme était déjà représenté dans presque toutes les contrées du monde, et à cette époque troublée Rome avait besoin d'autres auxiliaires que ces moines méditatifs ou mendiants, qui avaient fait la fortune des monastères au moyen âge. O n'est pas seulement dans les pays évangéliques, c'est encore dans la plupart des pays soumis à Rome, que les couvents furent alors sécularisés ou supprimés, et ceux qui ne purent être affectés à d'autres destinations, ne tardèrent pas à tomber en ruines; plusieurs furent détruits ou brûlés pendant les guerres de religion en France, en Angleterre ou en Allemagne. L'emp. Joseph en supprima plus de 800 en Autriche. Enfin la rèvol. française leur porta le dernier coup en déclarant biens nationaux tous les établissements et propriétés ecclesiastiques. En Espagne même, sur cette terre privilégiée, et après que l'invasion française eut déjà réduit considérablement le nombre des maisons religieuses, 900 couvents furent encore supprimés en 1835, parce qu'ils ne comptaient pas plus de 12 membres. Napoléon n'octroya de nouveau en 1807 le droit de se réunir en corporations, qu'aux sœurs de charité. La Restauration de 1814 fut une réaction violente contre les mesures violentes dont on avait usé envers l'Église. L'Espagne et le Portugal autorisèrent les ordres religieux à se reconstituer, et leur rendirent une partie de leurs biens. Les couvents se relevèrent en France et en Relgique, ainsi qu'en Bavière et en Westphalie. Chaque année en vit surgir de nouveaux. Plusieurs des cantons cathol. de la. Suisse les laissèrent se multiplier sans obstacles. Les couvents de femmes s'occupèrent en général d'éducation ou du soin des malades, et quelques-uns se firent une réputation justement méritée. Le décret du conc. de Trente, qui, tout en plaçant les couvents sous la dépendance du pape, assure auxév. le droit d'inspection, a été, depuis la Restauration, d'autant plus facile à observer que les intérêts des év. se sont plus entièrement confondus et identifiés avec ceux de la papauté. Après avoir rendu de vrais services à la civilisation, les couvents ont cessé, même les meilleurs, de répondre à leur destination première, et il ne faut pas se dissimuler qu'auj., tout en en respectant l'idée, et sans aucun sentiment irréligieux, l'opinion générale leur est plutôt hostile. D'un côté les privilèges-exorbitants qui leur ont été concédés; de l'autre les avantages immenses que leur assure le fait de l'association, leurs richesses croissantes* leur caractère d'État dans l'État, leurs rapports, avec Rome; souvent leurs intrigues politiques;

la concurrence ruineuse qu'ils font à l'industrie privée, comme éducateurs, liquoristes, fabricants de fleurs ou de dentelles, couturières; le poids enfin dont ils pèsent sur l'enseignement public, et leurs méthodes surannées, pour dire le moins, tout a concouru à les rendre suspects d'abord, puis à attirer sur eux l'attention vigilante de l'autorité. De là des règlements, des mesures de police, des suppressions, des inca-mérations, et dans plusieurs pays le retour à l'état de biens, tantôt mal administrés, tantôt mal employés. Les couvents qui, par leur respectabilité ou par les services qu'ils rendent, continuent de justifier leur droit de vivre, échapperont encore aux dangers que court cette institution des temps anciens; ainsi Einsiedeln, le Saint-Bernard, les couvents de l'Orient. Mais l'esprit public est éveillé, et ce n'est plus qu'à force de le mériter que ces établissements pourront prolonger leur existence. — Des trois mots qui servent en français à désigner à peu près la même chose, le mot grec monastère rappelle davantage l'idée de solitude, de retraite; couvent, dérivé du latin, exprime l'idée de communauté; enfin cloître, aussi latin, l'idée de clôture, de séquestration. On s'enferme dans un cloître, on se retire dans un monastère, on entre dans un couvent.

COVENANT, Covenantaires. Marie de Guise étant devenue régente d'Écosse 1555, s'étant entourée de-soldats français, et menaçant de faire de l'Écosse une dépendance de la France, en même temps qu'elle travaillait à relever le catholicisme, les protestants inquiets prièrent Knox de revenir en grande hâte, et sur son refus de quitter Genève pour une affaire qui présentait une apparence politique trop accentuée, les chefs du parti protestant se réunirent à Édimbourg pour faire une manifestation solennelle de leur attachement à la foi évangélique. Ils rédigèrent et signèrent 3 déc. 1557 un traité d'alliance pour la défense de leur religion, un Cwenant, ou convention (qui fut appelé ensuite le Premier)y s'engageant à consacrer leurs forces au service de Dieu, à faire au besoin le sacrifice de leurs vies pour combattre ceux qui troubleraient l'Église, à ne rechercher que les enseignements de la Parole de Dieu, à entretenir et i protéger des ministres fidèles, etc. Ce document est la première pièce officielle du protestantisme en Ecosse; il donna à l'Égl. une position qui lui permit de traiter directement avec l'État. Comme le mot de congrégation, au lieu d'église, revenait assez souvent dans le texte, on donna le titre de Seigneurs (Lords) de la Congrégation, à ceux qui l'avaient signé, les comtes d'Argyle, Glencairn, Morton, lord Lorn, Erskine de Dun, etc. La régente jetant de plus en plus le masque, et Knox étant arrivé en

Écosse, comme les troupes françaises allaient attaquer Perth, les lords de la Congrég. se réunirent de nouveau pour renouveler leur engagement d'être fidèles dans la défense de leur foi. Ce fut le Second Covenant, 31 mai 1559. Dans l'un comme dans l'autre, il n'y avait alliance qu'entre les membres de la congrégation. Plus tard on comprit que pour assurer le respect de ces droits, il fallait en faire l'objet d'un traité entre l'Égl. et l'État et lui donner le caractère d'un contrat. Le premier Covenant national, préparé par Craig, fut rédigé et publié en 1581 sur la base de la Confession de 1560, à l'occasion de l'arrivée de plusieurs jésuites et des dangers dont Lennox à l'intérieur et Philippe II au dehors menaçaient la foi de l'Église. Le roi Jacques le signa, à contre-cœur et sans conviction; la noblesse dut en faire autant, mais tous avec l'arrière-pensée de ne pas tenir leur parole. Ce Covenant fiit renouvelé en 1638, le 28 févr. de la manière la plus solennelle, à Édimbourg, comme protestation contre les criminelles entreprises de Charles I«r qui voulait rétablir en Écosse l'épiscopat et la liturgie catholique. Il fut en quelques jours couvert de milliers de signatures, et les covenantaires, abandonnés du roi, purent se glorifier d'avoir sauvé le pays; les non-covenantaires ne se doutaient pas qu'ils élevaient lentement l'échafaud sur lequel devait bientôt périr l'aveugle et perfide monarque. Lors de la restauration des Stuarts le Covenant, que le Parlement anglais avait garanti 1639, fut formellement supprimé 1663, mais les presbytériens ne se découragèrent pas et continuèrent de lutter jusqu'au moment où 1689 ils eurent conquis une liberté de croyance pleine et en -tière. On trouve encore auj. en Écosse des adhérents rigides du vieux Covenant.

CRAMER, Jean-André, plus connu comme poète que comme théologien; né 29 janv. 1723, nommé en 1754 prédicateur de la cour à Copenhague, et en 1765 prof, de théologie; renvoyé en 1771 par Struensée, surintendant à Lubeck, enfin recteur et prof, à Kiel. + 12 juin 1788. Ami intime de Klopstock. Il a publié 250 cantiques, dont plusieurs se chantent encore.

CRANMER, Thomas, archev. de Cantorbéry et l'un des réformateurs de l'Angleterre. Né 2 juill. 1489 à Aslacton, comté de Nottingham, il était en 1523 prof, de théol. et prédicateur de l'université à Oxford. Quoique prêtre, et malgré la loi, il s'était marié en 1519. Il prit parti pour Henri VIII, quand celui-ci demanda en 1530 que son mariage avec Catherine d'Aragon fût déclaré nul, et il se rendit à Rome pour solliciter du pape la dissolution de ce mariage. Il fut envoyé en 1531 en Allemagne, où il se remaria avec la nièce d'Osiander, mais secrètement.

L'année suivante il prononça, sur le refus du pape, le divorce de Henri VIII, 23 mai, et bénit le 1er juin son union avec Anne de Boleyn. C'est sur son conseil que le roi secoua l'autorité du pape, se déclara lui-même chef de l'Église d'Angleterre 3 nov. 1534 et procéda à l'œuvre de la Réformation. Le synode de 1536 fixa les Dix articles de la religion; en 1537 il fut procédé à une nouvelle traduction de la Bible. Il résista énergiquement en 1538 à la réaction catholique, et poursuivit avec vigueur la réforme sous Édouard VI, avec le concours de Bucer, Lasky, Ochin, J. Martyr, Jonas, etc. Les 42 articles (réduits plus tard à 39 furent sanctionnés en 1542 par le roi, ainsi que la liturgie revisée. Accusé de haute trahison sous Marie-la-Sanglante, et condamné après une procédure irrégulière, Cranmer se laissa entraîner par faiblesse à signer une rétractation des vérités qu'il avait enseignées, mais il se releva bientôt de cette chute, désavoua publiquement sa rétractation, et subit avec courage et avec joie le supplice du feu, 21 mai 1556. Sa défaillance momentanée s'explique par sa soumission à l'autorité royale, mais il ne put se décider à lui sacrifier ses convictions religieuses.

CRATON de Crafftheim; de son vrai nom, Jean Craton, médecin distingué de l'époque de la Réformation. Né à Breslau 22 nov. 1519, + 19 oct. 1585. Il fut auprès de Maximilien le défenseur des protestants contre les jésuites. Ami de Bèze et de Mélanchthon, il fut touj. pour le parti de la modération, et pour l'union.

CRAW, Paul, brûlé à Saint-André, Écosse, 1432, pour avoir cherché à répandre les doctrines de Huss.

CRÉDENCE, de l'ital. credenza, buffet; petite table, près de l'autel, où, dans les grandes cérémonies, on place les burettes et autres objets nécessaires à l'office.

CREDNER, Auguste, né à Waldershausen 10 janv. 1797, successivement prof, de théol. à Iéna et à Giessen, f 1857; auteur de plus, ouvrages d'exégèse et de critique sacrée, hist. du Canon, etc. Il défendit avec ardeur les principes de la liberté scientifique.

CRELL, 1<> Nicolas, né à Leipzig 1551, prof, de droit 1575; précepteur du prince royal Christian; nommé par lui chancelier 1585. Il réprima les disputes théologiques, favorisa les philippistes ou crypto-calvinistes, s'attira la haine de la noblesse en prenant parti pour la suppression de l'exorcisme dans la formule du baptême 1591, fut emprisonné, accusé de haute trahison, irrégulièrement jugé à Prague et exécuté 9 oct. 1601. — 2° Paul, prof, de théol. à Wittenberg, auteur d'une Harmonie des 4 évangiles 1566, et d'une nouvelle éd. de la Bible latine de Wittenberg 1574. — 3° Jean, unitaire, disciple de Socin, né 1590 près Nuremberg, pasteur à Cracovie, f 1633; auteur d'un livre sur l'unité de Dieu 1631, et d'un travail posthume sur la liberté relig. 1637. Son fils Christophe a travaillé dans le même sens, ainsi que son petit-fils — 4° Samuel, né 1660, élevé chez les arminiens à Amsterdam, f 1747; auteur, sous le pseudonyme d'Artémon, d'un travail sur le prologue de Jean. C'est aussi lui qui rédigea la Conf. de foi des unitaires 1716. Il a écrit: Nouvelles pensées sur le premier et le second Adam, et un livre sur: La foi des premiers chrétiens, 1697.

CRESCONIUS, év. d'Afrique vers 690, colla-tionna et mit en ordre les Canons de Denys, sous le titre de: Concordia canonum. On les connaît sous le nom de: Breviarum Cresconii.

CRESPIN lo Jean (ou Crùpin), fils d'un avocat d'Arras. fut reçu lui-même avocat à Paris, mais lié d'amitié avec Bèze, dont il partageait les convictions religieuses, il vint à Genève 1548, et y fonda la célèbre imprimerie qui porta son nom. Son fils Samuel, et ses deux gendres, Vignon et Chouet, suivirent la même profession; c'est Eustache Vignon qui lui succéda. f de la peste 1572. Une des filles de Samuel, Anne, épousa Nathan d'Aubigné. Crespin était un savant, un écrivain et un homme de goût. Il a écrit lui-même un: Livre des martyrs ou Martyrologe, 1554, souvent réimpr. et dont on prépare une nouv. édition; l'Estat de l'Égl. depuis les Apôtres, 1562; le Marchand converti, tragédie de controverse, etc. — 2° Théodore Crespin, sieur de la Chabosselaye, pasteur de Marennes; auteur d'une thèse sur les indulgences; délégué par les égl. de la Saintonge, pour obtenir justice contre le lieutenant-général de Saintes, il échoua dans sa mission, et en conçut tant de chagrin qu'il tomba malade et f à Chatellerault 1679.

CROATIE. Cette contrée, auj. comprise entre rillyrie, l'Esclavonie et la Bosnie, fut enlevée aux Avares vers 640 par la peuplade slave des Croates, qui la possédèrent sous le protectorat des emp. grecs. Soumis aux Francs sous Charlemagne, les Croates recouvrèrent leur indépendance vers 830 et se constituèrent en royaume. Ladislas 1er 8e les assujettit 1091, et les réunit à la couronne de Hongrie, à laquelle ils n'ont cessé dès lors d'appartenir, sauf une partie qui fut conquise par les Turcs. Le christianisme y fut introduit par Héraclius, mais il ne fut définitivement établi que lorsque les Croates se furent déclarés indépendants; ils se tournèrent alors vers Rome pour se soustraire à toute tentative du côté de Constantinople. Cependant ils acceptèrent des Bulgares 868 la liturgie slave de Méthodius, et pendant plus d'un siècle ils flottèrent entre le pape et l'empereur. En 1035 ils se décidèrent enfin ponr Rome, mais en conservant longtemps encore leur liturgie. Ils eurent jusqu'à 5 évêchés. Auj. il n'y a plus que celui d'Agram. Outre les catholiques, la Croatie aetaelle compte des grecs-unis, qui relèvent de l'év. de Kreuz, et des grecs-orthodoxes qui se rattachent à l'arche v. de Carlowitz. La Réforme y pénétra par le fidèle ministère du pasteur Xichael Butschitsch, mais le clergé réussit 1607-1640 à en fermer les temples et à en proscrire les ministres. C'est une œuvre de foi tout à recommencer.

CROISADES, expéditions militaires et religieuses qui ont rempli les 12®e et 13™® siècles. H yen a eu contre les Maures d'Espagne, contre les Prussiens, contre les albigeois et contre les hussites; mais le mot s'emploie plus spécialement en parlant des armées de l'Europe courant à la délivrance du saint sépulcre. Le nom vient de la croix d'étoffe rouge, que portaient sur l'épaule droite tous ceux qui se joignaient à l'expédition. Provoquées tantôt par les papes, tantôt par la France, l'Angleterre ou l'Allema-gne, les croisades se succédèrent à des intervalles irréguliers pendant 2 siècles, quelquefois distinctes, souvent se confondant les unes dans les autres, si bien qu'on ne saurait dire s'il y en a eu 5, 6, 7, 8 ou 9. Les historiens en comptent généralement 8 distinctes. Grégoire VII en avait eu la première idée, mais il ne put la réaliser. Voici la liste des principales: !<> Pierre l'Ermite, d'Amiens, après un pèlerinage à Jérusalem, outré de voir le saint sépulcre aux mains des musulmans, revient, persuade Urbain II, se fait recommander à tous les princes chrétiens, parcourt l'Occident, soulève les populations, s'adresse aux petits et aux grands, leur demande de délivrer les saints lieux, leur promet le ciel en récompense de leurs efforts, et obtient en 1095 la convocation d'un concile à Cler-roont, Auvergne, où Urbain II se rend en personne et harangue la foule en lui faisant le tableau le plus pathétique des maux que les chrétiens souffrent en Palestine. L'entraînement est général; la foule s'écrie: c Marchons ! Dieu le veut !» et ce cri devient le cri de ralliement de l'entreprise. Le départ est fixé au printemps 1096 et deux bandes partent en avant, conduites Pune par P. l'Ermite, l'autre par le chevalier Gauthier-Sans-Avoir. Sans ordre, ni discipline, ces vagabonds massacrent les juifs sur leur chemin, pillent partout et périssent presque tous avant d'être arrivés en Terre sainte. Mais les chevaliers et les princes, mieux organisés en trois formidables armées, partent sous les ordres de Robert Courte-Heuse, duc de Normandie, Raymond de Saint-Gilles et Godefroy de Bouillon, ce dernier proclamé général en chef. Eustache et Baudouin, frères de Godefroy,

Hugues de Vermandois, Robert II, Boëmond de Tarente et Tancrède son neveu comptent parmi les principaux chefs de l'expédition. Ils arrivent à grand'peine à Constantinople, sont reçus avec méfiance par Alexis Comnène à qui ils prêtent le serment d'hommage, traversent en hâte le Bosphore, défont les musulmans à Dorylée, prennent Nicée et Édesse, Antioche, enfin Jérusalem 1099, où ils fondent un royaume chrétien. Godefroy en est nommé roi, mais il ne veut connaître d'autre roi de Jérusalem que Jésus-Christ, et il se contente du titre de baron du saint sépulcre. La royauté n'en est pas moins maintenue et comptera pour rois, outre Godefroy, Baudouin et II, Foulques, Baudouin III. Amaury, Baudouin IV et V, et enfin Guy de Lusignan. La féodalité est organisée à la mode franque (Assises et bons usages du roy. de Jé-rus.); il y eut un baron de Sidon, un prince de Galilée, ou de Tibériade (Tancrède), un marquis de Jaffa, etc.

2® croisade. La chute d'Édesse et le massacre des chrétiens par le sultan Zenghi 1144 en furent l'occasion. Bernard de Clairvaux la prêcha sous Célestin II et Eug. III avec autant de succès que d'enthousiasme; Louis VII la commande en personne 1147; il a cent mille hommes sous ses ordres. Conrad III d'Allemagne Ta précédé. Mais ils n'éprouvent l'un et l'autre que des revers. Sur le point de prendre Damas, ils en sont empêchés par des rivalités intestines; ils lèvent le siège et reviennent en Europe avec les débris de leurs armées presque anéanties.

3«. Saladin-le-Grand ayant vaincu les chrétiens dans la célèbre bataille de Tibériade et repris Jérusalem sur Lusignan, 1187, Guillaume de Tyr, sous Clément III, fait un nouvel appel aux fidèles de l'Occident, et trois puissants monarques se liguent pour reconquérir les lieux saints: Frédéric Barberousse, Richard Cœur-de-Lion et Philippe-Auguste. Ils partent avec de nombreuses armées; mais le premier se noie près de Séleucie, et les deux autres se brouillent au siège de Saint-Jean d'Acre; Philippe abandonne la partie; Richard poursuit seul la campagne, se distingue par son héroïsme; remporte d'éclatantes mais inutiles victoires, et n'obtient pour prix de ses efforts qu'une trêve de 3 ans, la possession des plaines de la Judée et la liberté du pèlerinage de Jérusalem, 1193. Guy de Lusignan conserva l'île de Ghypre, sous le titre de royaume.

4®. Prêchée par Foulques, curé de Neuilly, sous Innocent III et Phil.-Auguste. Les comtes de Flandres et de Champagne en furent les principaux chefs, mais en réalité, ce fut le vieux doge aveugle Dandolo qui dirigea l'expédition. Il conduisit les croisés à Zara, Dalmatie, dont il s'empara pour le compte de Venise, et conduisit les armées par terre jusqu'à Constantinople; ils chassèrent Alexis l'Ange, se débarrassèrent du vieil empereur, nommèrent à sa place Baudouin de Flandre, descendant de Charlemagne, et fondèrent l'emp. latin de Constantinople, qui devait durer 57 ans. La croisade dura de 1201-1204 et ne dépassa pas le Bosphore; quelques bandes seules se rendirent en Palestine, mais ne purent rien y faire.

5«. Sous le pontificat d'Honoré III, 1217, croisade conduite par Jean de Brienne, roi titulaire de Jésus; par Guillaume de Hollande, plusieurs princes allemands et André H, roi de Hongrie. Ce dernier ayant dû revenir, à cause d'une révolte de ses magnats, Jean continua sa marche avec le reste de l'armée, descendit en Égypte, prit Damiette 1219, mais dut l'abandonner 1221 et signer un traité avec le sultan Kamel.

6«. Frédéric II, d'Allemagne, qui par sa femme Yolande avait des droits à la couronne de Jérus. et qui s'était engagé vis-à-vis d'Innocent III, 1215, à combattre les infidèles, avait violé son serment et n'avait pas pris part à cette croisade. Excommunié pour ce fait par Grégoire IX, il se décida enfin à partir, s'embarqua à Brindes 1227. et obtint à prix d'or, sans combat, un armistice de 10 ans, qui lui permit de se faire couronner roi de Jérusalem, 1229.

7e et 8®. Elles appartiennent l'une et l'autre à saint Louis et à la France. La première 1248-1254 eut lieu sous Innocent IV, et fut spécialement dirigée contre l'Égypte, dont le sultan avait ruiné les établissements chrétiens de Gaza, d'Askélon et du sud de la Syrie. Louis prit Damiette et Mansura, 1250, mais la peste se mit dans son armée; il fut vaincu et fait prisonnier; il n'obtint sa liberté que moyennant 400,000 livres et à la condition d'abandonner ses conquêtes et de quitter l'Egypte. Il passa 4 ans en Palestine, occupé à fortifier quelques places, et rentra en France en 1254 après la mort de la reine Blanche, sa mère. Il s'embarqua une seconde fois en 1270 à Aigues-Mortes, sous Clément IV; son frère Charles d'Anjou et le prince Édouard d'Angleterre l'accompagnent ou le rejoignent à Tunis, mais la chaleur et la peste les paralysent; à peine arrivé devant cette ville, il voit son armée décimée par la maladie; son second fils, le comte de Nevers, succombe; lui-même au bout d'un mois est atteint, et meurt après avoir donné à Philippe III son 3ro« fils et héritier des conseils de patriotisme, de bienfaisance et de piété, 25 août 1270. Charles d'Anjou prit le commandement de l'armée, remporta quelquçs avantages, mais dut se contenter de faire payer à Mohammed les frais de la guerre, et revint en France.

Ce fut la fin des grandes croisades. Les colonies chrétiennes établies en Orient ne firent dès lors que péricliter, et bientôt la Palestine tout entière retomba sous le joug, malgré quelques tentatives isolées et infructueuses pour leur venir en aide et recommencer la lutte. On a porté sur les croisades les jugements les plus divers, mais quoi qu'on puisse penser et dire de ces entreprises qui sacrifiaient tant de trésors et tant de vies pour la simple conquête d'un tombeau vide, on est d'accord à reconnaître qu'elles étaient un progrès sur la barbarie païenne, puisqu'elles poursuivaient un but spirituel; qu'elles ont affermi le pouvoir temporel de l'Église, puisqu'elles unissaient les rois et les peuples sous la puissante direction des papes; enfin qu'elles ont servi la cause de la civilisation, en mettant en contact les hommes, les peuples, les rois, les climats et les institutions les plus diverses.

CROIX. Il y a dans l'église du Saint-Sépulcre, à Jérusalem, une chapelle dite de l'Invention (découverte) de la croix. La légende qui s'y rapporte date de Paulin. Une vision ayant révélé à l'impér. Hélène, que la croix devait se trouver dans les lieux profanés par Julien, des fouilles y furent faites et trois croix furent trouvées au fond d'un puits; l'une fut reconnue pour être la croix de Christ, parce que son attouchement procura la guérison d'une femme malade. La plus grande partie de la croix, auj. recouverte d'argent, fut conservée au saint sépulcre; le reste fut découpé en morceaux et distribué comme reliques. On possède de ces fragments la charge de dix hommes. La fête*de l'Invention de la croix, 3 mai, fut déjà célébrée par Hélène, mais elle ne s'introduisit en Occident qu'au 4me siècle et ne fut formellement établie qu'en 1376 par Grégoire XI. — L'élévation de la croix, 14 sept., fut établie sous Hé-raclius 628, à l'occasion de sa victoire sur les Perses, qui lui rendit la croix enlevée 614 lors de la conquête de Jérusalem. La croix fut rapportée en grande pompe au saint sépulcre. Honoré I introduisit cette fête en Occident. Selon d'autres elle serait même plus ancienne, et remonterait au signe merveilleux que Constantin vit dans le ciel. — L'usage du signe de la croix dans le culte public ou privé parait remonter très haut. Les grecs le font de droite à gauche, les latins de gauche à droite. Comme ce geste symbolique est destiné à rappeler le nom du Rédempteur, Luther avait cru pouvoir le conserver; mais la superstition s'en mêlant, l'Égl. luthérienne a fini presque partout par l'abandonner. Les réformés ne l'ont jamais admis. — On donne dans les monastères le nom de Chemin de la croix au préau couvert et généralement cintré ou voûté qui entoure le cimetière; ce préau destiné à la promenade et à l'exercice par les temps pluvieux ou froids, servait aussi aux processions, et comme la croix précédait, elle a donné son nom à cette partie de l'édifice, souvent d'une grande beauté architecturale. On désigne aussi de ce nom la procession faite aux 14 tableaux qui rappellent le chemin parcouru par le Sauveur, quand il fut conduit du Prétoire au Calvaire. — La Bulle de la croix (cruzada) publiée en 1457 par Calixte III, accordait des indulgences à tous ceux qui se battraient contre les Maures ou qui fourniraient à Henri de Castille des secours en argent. Le roi exploita cette bulle et ses indulgences et s'en fit un revenu considérable qui dura près de trois siècles, grâce au renouvellement périodique de la bulle, qu'on ne laissa pas périmer. Elle ne prit fin qu'en 1753.

CROMWELL, Olivier, protecteur d'Angleterre, né 25 avril 1599 à Huntingdon, d'une famille de gentilshommes campagnards; puritain; député en 1640 par l'univ. de Cambridge au Long Parlement, combattit avec énergie les tendances catholiques de la cour et du roi et démasqua sans ménagement les intrigues de Charles avec la cour de France. Quand la guerre éclata entre le roi et le parlement, il leva à ses frais un régiment de cavalerie, puis, nommé à un grade supérieur dans l'armée, il remporta les victoires de Marston-Moor et de Naseby, 1644 et 1645, qui ruinèrent le parti royaliste et amenèrent les malheurs du roi. Il exclut du parlement les membres douteux ou suspects, et après avoir ainsi façonné le parlement à son image, il s'en servit pour l'accomplissement de tous ses desseins. Politique habile autant que brillant général, il ne recula devant rien pour sauver son pays des dangers qui le menaçaient, et après avoir obtenu du parlement la condamnation de Charles 1649 et la proclamation de la république, il accepta en 1652 le titre de Protecteur, sous lequel, pendant 6 ans de règne, il exerça un pouvoir absolu. Son administration fut une des plus brillantes qui aient illustré l'Angleterre; on peut dire en un sens qu'il lui a donné son empreinte avec ses qualités et ses défauts. II enleva la Jamaïque aux Espagnols, il abaissa la marine hollandaise, il fit fleurir le commerce et respecter les lois; il nomma pour juges des hommes honnêtes et éclairés. Presque toutes les puissances reconnurent son autorité et recherchèrent son alliance. Il profita de sa position pour intervenir en faveur des vaudois et des huguenots persécutés et fit même sentir son influence dans les Pays-Bas, où il rendit possible plus tard l'avènement de Guillaume III. Épuisé par ses luttes contre le papisme et contre les exagérations politiques etrelig. de son propre parti, attristé par des conflits au sein de sa propre famille, brisé enfin par la mort d'une fille bien-ai-mée, il f 3 sept. 1658 et fut enterré à Westminster. Son fils Richard, désigné pour lui succéder, n'était pas à la hauteur de sa tâche; d'un caractère faible il abdiqua en 1659 devant l'arrivée des troupes de Charles II et vécut dans la retraite jusqu'à sa f 1712. Bien que l'œuvre de Crom-well sous la forme qu'il lui avait donnée, c.-à-d. comme république, ne lui ait pas longtemps survécu, on peut dire qu'elle subsiste encore auj. dans ce qu'elle a eu de réel et d'essentiel. C'est lui qui a fait l'Angleterre protestante et libre; il l'a faite aussi commerçante et maritime; et si le christianisme évangélique en Europe doit beaucoup à l'Angleterre, il ne saurait oublier qu'il le doit par cela même à Cromwell. Le caractère du Protecteur a été fort diversement jugé par ses amis ou par ses adversaires politiques et religieux. Il a compté des partisans enthousiastes et rencontré des détracteurs pleins de haine; il est bien évident que ni les catholiques, ni les vieux royalistes ne pouvaient lui être fovorables, et que d'un autre côté les puritains et l'ensemble du grand parti libéral ont dû fermer plus d'une fois les yeux sur les imperfections et sur les fautes de celui qui avait sauvé le pays de la ruine. Longtemps on n'a vu en lui qu'un vulgaire ambitieux drapé d'hypocrisie, mais depuis les Guizot et les Macaulay. depuis les Carlyle et les Ranke, ce jugement s'est singulièrement modifié; Merle d'Aubigné a peut-être exagéré en sens contraire en allant presque jusqu'à en faire un saint de l'Égl. presbytérienne. Sous l'influence des nécessités politiques et militaires Cromwell s'est laissé entraîner à des actes cruels que rien n'excuse, mais il se croyait sincèrement chargé de Dieu d'une grande mission, et les fourberies de la cour royale peuvent expliquer les mesures extrêmes auxquelles il crut devoir recourir. Les haines épis-copales et royalistes n'ont pu voir en lui qu'un fanatique, mais sa piété était réelle, sa foi était humble et \ivante.

CROMWELL, Thomas, né vers la fin du 15m« siècle, d'abord secrétaire du chancelier WQlsey et employé par lui pour la suppression de quelques couvents; puis dès 1529 conseiller du roi, concourut avec Cranmer à l'établissement de la réforme, mais se tourna de nouveau vers le catholicisme quand la réaction éclata, et participa à la confection des lois sanglantes de 1539. Tombé en disgrâce, il fut décapité le 10 juin 1540.

CROSSE, virga pastoralis, canne ou bâton de métal recourbée à son extrémité supérieure, symbole de l'autorité épiscopale. Elle est faite quelquefois de matériaux précieux et richement ornée: on connaît le mot de Savonarole: Crosses d'or, évêques de bois. D'après la tradition la crosse remonte au moins au 7 me siècle; elle est nommée au conc. de Tolède 633 parmi les insignes de l'épiscopat. Certains abbés, et même des abbesses, ont aussi le droit de porter la crosse, comme signe de leur autorité, mais entourée d'une espèce de suaire pour marquer leur dépendance de la juridiction épiscopale. Un évêque, dans un diocèse étranger, n'a pas le droit de porter la crosse sans la permission de l'ordinaire. Dans l'Égl. grecque la crosse des archev. se termine par une croix, celle des patriarches par une double croix.

CRUCIFIX (celui qui est fixé à la croix). La croix avec la représentation du divin crucifié n'a pas été connue dans l'Église avant le 7 m® siècle; on ne connaissait guère que la croix simple, quelquefois avec l'image d'un agneau à ses pieds, et le conc. de Trull 692 se prononça même contre cette manière symbolique de figurer le Christ. Les plus anciens crucifix connus n'avaient que le buste; le corps entier vint ensuite et l'usage en devint bientôt général. Le moyen âge y ajouta, dans les tableaux, le groupe au pied de la croix. L'Égl. luthérienne accepte le crucifix sur l'autel; l'Égl. réformée l'a touj. repoussé.

CRUCIGER, famille distinguée de théologiens du 16®e siècle. 1° Gaspard, né à Leipzig l«r janv. 1504, étudia à Wittenberg la botanique, les mathématiques et la théol., fut nommé recteur de l'école de Magdebourg 1524 à 1528, et revint à Wittenberg comme prof, et prédicateur du château. Il travailla avec Luther à la traduction de la Bible, prit part au colloque de Mar-bourg, à l'acte de concorde de Wittenberg, à la conférence de Smalcalde, et à l'assemblée de Worms 1540. Il était recteur de l'univ. pendant la guerre de Smalcalde. f 16 nov. 1548. — 2° Son fils Gaspard II, né 19 mars 1525, prof, de théol. à Wittenberg, refusa de signer les articles du synode de Thorgau contre la doctrine de Mélanchton, fut arrêté comme philippiste 1574, privé de sa chaire et exilé. Recueilli par le landgrave Guillaume, il fut nommé prédicateur à Cassel 1597. — 3° Georges son fils, né 24 sept. 1575, fut précepteur du jeune landgrave Maurice, qui le nomma prof, de théol. à Mar-bourg 1605. Il assista au svnode de Dordrecht. t 1637.

CRUSIUS (Krauss) 1<> Martin, né à Grabern prèsGrafeuberg, étudia la philologie et la théol. à Ulm, Strasbourg et Tubingue, fut recteur de Memmingen 1554, puis prof, de grec et de latin à Tubingue. Appuyé par Andreâ il entama 1575 une correspondance avec le patr. Jérémie II de Constantinople pour gagner à la Réforme les sympathies des grecs, et traduisit en grec plusieurs ouvrages évangéliques, le Compendium de Heerbrand, des sermons de Luther, etc. On a encore de lui plusieurs ouvrages de philologie.

f 1607. — 2* Chrétien-Auguste, né 10 janv. 1715 à Leuna près Mersebourg; disciple de Ru-diger; en 1744 prof, de philos, à Leipzig, en 1750 prof, de théol. Son système philos, est opposé à celui de Wolf, et indépendant de toute orthodoxie préconçue. Il a écrit une Esquisse des vérités essentielles à la raison 1745, une Logique 1747, une Étude sur les prophètes 1764, et un Traité de philos, morale, 1767, qui a joui d'une grande autorité, quoiqu'il donne pour base à la morale la volonté arbitraire de Dieu.

CRYPTES, chapelles souterraines, taillées dans le roc ou maçonnées, placées dans le chœur d'anciennes égl., et destinées à rappeler soit les catacombes, soit les grottes dans lesquelles avaient été enterrés les martyrs, et où les fidèles se réunissaient la nuit pour communier. Tantôt une église a été élevée plus tard sur l'endroit même où reposait le saint, et la grotte a été conservée comme chapelle; tantôt au contraire régi, ayant été consacrée à un ou à plusieurs saints, on a déposé subséquemment leurs corps et autres reliques dans une chapelle réservée d'avance pour cet objet. On y dit la messe plus ou moins régulièrement. On cite comme particulièrement remarquables la crypte de Saint-Sébastien à Rome, celle de la Nativité à Bethléhem, celles de Bamberg, de Paderborn, de Gand, de Trêves, de Spire, de Bâle, etc. L'architecture gothique les a en général fait disparaître.

CRYPTIQUES, v. Cénotiques.

CRYPTOCALVINISME, tendance au calvinisme, que les luthériens stricts reprochaient à tort à Mélanchthon, à cause de ses dispositions conciliantes. On l'appelait aussi Philippisme, du nom de Philippe Mélanchthon. Après la mort de ce pieux et savant réformateur, trois partis se dessinèrent dans l'Égl. et se firent une guerre qui dura près de 40 ans: les flaciens, qui maintenaient surtout, et avec leurs conséquences les plus énormes, les doctrines luthériennes du péché originel et de la cène; ils avaient pour eux l'univ. de Iéna et le duc Jean-Frédéric de Saxe; les wurtembergeois, inspirés par Brenz et protégés par le duc Christophe, qui insistaient sur le fait de l'ubiquité pour défendre la doctrine de la présence réelle de Christ dans l'eucharistie; et les mélanchthoniens, ou phtiippiêtes, qui cherchaient par une interprétation plus large et plus intelligente, à maintenir l'union des églises, et faisaient même aux réformés de la Suisse des avances et des concessions, qui les firent accuser d'être des calvinistes déguisés. Les différences de texte qui se trouvent entre les éditions de la Conf. d'Augsbourg de 1530et de 1540 avaient passé presque inaperçues; le jésuite Canisius les mit en relief au synode de 1557 pour essayer de diviser les protestants, et il y réassit en partie. La discorde éclata de nouveau. Les princes, dans un intérêt politique facile à comprendre, mais qui n'excluait ni le bon sens ni le sentiment chrétien, cherchèrent à maintenir la paix et multiplièrent les conférences pour arriver à une entente commune; mais si les théol. parvinrent quelquefois, Francfort 4558, Naumbourg 1561, à trouver une formule satisfaisante dans le sens de la paix, les populations strictement luthériennes résistèrent à ces efforts et obligèrent leurs princes à céder. Après de longues discussions, pleines de petites passions et d'incidents, un synode fut convoqué àTorgau 1574, et une nouvelle conf. de foi fut élaborée et votée, sous l'influence de Mirus, qui condamnait lecryptocàlvinisme. Crucigeret quelques-uns de ses amis, n'ayant consenti à la signer qu'avec des réserves, fnrent destitués et bannis, et le philippisme cessa d'avoir une existence officielle.

CRYPTOCATHOLICISME, ou catholicisme caché. On l'a reproché à Calixte et à l'école de Helmstâdt, parce qu'ils demandaient que les protestants reconnussent ce qu'il y avait d'éléments chrétiens dans le catholicisme (Cryptopa-pismus novœ theol. Helmstœdt, 1640). Le reproche était injuste. On l'adresse avec plus de raison au parti ritualiste de l'Égl. anglicane et aux nltra-luthériens, qui veulent revenir à la doctrine cathol. sur les sacrements, l'église et la hiérarchie.

CUDWORTH, Ralph (ou Rodolphe), né à Aller, Sommerset 1617, f 1688, docteur en théologie, successivement pasteur de campagne, puis prof, d'hébreu 1645 et recteur du collège de Christ à Cambridge 1654, s'occupa surtout d'antiquités, de philos, et de littérature. Il combattit toute sa vie le déisme. Ses deux principaux ouvrages, Le vrai système intellectuel de l'Univers, et l'Immutabilité des idées morales, ont été trad. par Mosheim. 11 admettait sous le nom de Natures plastiques des forces aveugles, êtres distincts de l'âme et du corps, chargées de Dieu d'organiser la manière inerte. Il se rapprochait de Platon quant aux idées, ou types primitifs, et prétendait que ce philos, avait dû connaître les livres de Moïse. — Sa fille, lady Mursham, était amie de Locke, qui passa chez die ses dernières années.

CULDÉENS, nom des premiers chrétiens qui s'étaient enfuis en Écosse pour se dérober aux persécutions des emp. romains. Quelques auteurs font dériver leur nom de Cultores Dei, d'autres du gaëlique ou du celte, GiU De (serviteurs de Dieu), d'autres du mot Cuil, retraite. Le parti catholique romain, conduit par le moine Augustin, 597, fit de si rapides progrès que les culdéens se réfugièrent en grand nombre dans l'Ile de lona sur la côte occidentale dp l'Écosse; cet asile même leur fut bientôt enlevé par l'établissement d'un monastère romain, fis se dispersèrent alors dans l'est de l'Écosse et s'y maintinrent jusqu'à l'apparition des lollards. Leur dernier établissement fut supprimé en 1297. Quant au dogme, ils n'espéraient le salut que de la miséricorde de Dieu par la foi en Christ, rejetaient la confession auriculaire, la présence réelle, le culte des anges et des saints; ils désavouaient l'obligation du célibat des prêtres et affirmaient l'égalité de tous les ministres de l'Évangile.

CULTE, du latin colere, se dit de l'ensemble des actes religieux par lesquels l'hohime manifeste sa foi, son adoration et son amour envers le Créateur. Toutes les religions ont un culte; le judaïsme y joint la notion de crainte et d'humiliation; le christianisme va plus loin, il y ajoute la reconnaissance et l'action de grâces. Le culte, qui est l'expression extérieure des sentiments les plus intimes, varie naturellement suivant le caractère, le point de vue, le tempérament des peuples, des religions et des individus. On ne peut attendre de tous un même sentiment, ni surtout la même expression pour des sentiments qui varient à l'infini. La seule règle générale que donne l'Écriture, c'est que le culte soit célébré en esprit et en vérité. Il est évident que sans la sincérité il n'y a pas de culte. Quant à sa spiritualité, elle est également nécessaire, mais elle ne saurait être absolue; dès que quelques personnes se réunissent, un certain ordre doit présider à leur réunion; de là des règles, des formes, des habitudes, qui se ressentiront d'une foule de circonstances extérieures, climat, richesses, éducation, doctrine, etc. De là aussi las services liturgiques q. v. qui, par leur constante et uniforme répétition, semblent être le contraire de la spiritualité, mais n'en rendent pas moins de grands services à l'Égl. en maintenant à la fois les traditions de la foi chrétienne et l'unité de la vie religieuse. Il est très difficile de dire exactement où commence l'abus dans tout ce qui n'est pas la simple prière ou la simple méditation de la Parole de Dieu. Le sermon lui-même appartient à l'enseignement, et n'est que dans des conditions très rares un acte de culte, dans le vrai sens du mot. Si les quakers et quelques autres sectes ont réduit à leur plus simple expression leurs assemblées religieuses, au point d'en proscrire le chant et les sacrements, ils l'ont fait par le besoin de réagir contre des excès contraires, mais il n'est pas sûr qu'ils aient obtenu de bons résultats, et dans tous les cas ils ne peuvent prétendre avoir suivi l'exemple apostolique. Dans l'Égl. primitive, indépendamment de toute organisation, on voit que les fidèles célébraient le culte public, le seul dont il soit ici question, par le chant de psaumes et de cantiques, par la lecture et l'exhortation, par la prière et par la fraction du pain. C'est là le modèle, mais il y aurait de l'exagération à condamner ceux qui plus tard ont cherché à relever le culte par des ornements et par plus de symboles. Seulement, entrées dans cette voie, plusieurs égl. ont poussé si loin l'amour des innovations et les surcharges symboliques, en cérémonies, vêtements, représentation de tous genres, que le culte a fini par être dénaturé et que la vérité a été étouffée par les additions qui devaient la mettre en relief. Une réaction est devenué nécessaire, et peut-être a-t-elle à son tour dépassé les justes bornes. Après les splendeurs d'une mise en scène empruntée au paganisme est venue la réaction puritaine, et si parfois on peut avoir l'impression que les égl. réformées sont bien nues, que leur culte est sec, leurs cérémonies un peu froides, on reconnaîtra tout au moins qu'elles donnent du repos à l'âme, qu'elles invitent au recueillement et qu elles n'ont rien qui puisse distraire la pensée des saints et grands objets dans lesquels elle doit s'absorber. Toutefois ici encore il n'est pas facile de tracer la ligne de démarcation qui sépare le bien du mal et l'usage de l'excès; la simplicité peut dégénérer en vulgarité, et le goût en mondaine affectation. La simple croix, qui est le symbole le plus naturel du christianisme, peut n'être pins qu'une forme, et la Bible elle-même, qui rappelle la révélation de Dieu à l'homme peut tomber à l'état de lettre morte. Il importe donc de rappeler que le seul culte digne de ce nom est celui de l'âme qui se recueille devant Dieu pour l'adorer et le bénir.

CUMAINS, ou Couinant, ou Kuns, peuplade asiatique des bords de la mer Caspienne, qui vers 888 s'établit entre le Volga et l'Oural, et qui envahit la Hongrie au li™* siècle. Ladislas-le-Saint les battit en plusieurs rencontres, 4077-1093, et permit à ceux qui se convertirent de s'établir dans la Jazygie actuelle, non loin de Pesth. Une seconde invasion eut lieu en 1239 sous Bela IV, quand les Mongoles -refoulèrent les Cumains; l'archev. de Grau travailla à leur conversion; le pape Nicolas III confia la mission aux minorités, sous la direction de son légat, l'év. Philippe de Fermo 1278. Celui-ci réussit à décider Ladislas IV (f 1290; qui avait jusqu'alors favorisé les Cumains, à prendre des mesures énergiques contre les mœurs grossières et les usages païens qu'ils avaient encore conservés, mais l'entreprise échoua en partie et Nicolas I vr fut sur le point d'ouvrir une croisade contre les païens rebelles. Au 14rae siècle les minorités renouvelèrent leurs efforts, mais ce n'est que lorsque les Cumains se furent fondus dans les Magyares, qu'ils renoncèrent entièrement au paganisme en perdant leur nationalité.

CUMMEAN, ou Cornean rédacteur inconnu d'un livre des pénitences intitulé Judicia Cu-meani. On croit qu'il vécut en Italie et que le livre fut écrit vers 668.

CUMUL des bénéfices. La réunion de plusieurs charges, fonctions et revenus en une seule main, a toujours été défendu par les lois ecclésiastiques, mais il a touj. été pratiqué sous divers prétextes et il a touj. donné lieu aux plaintes et aux réclamations les plus vives.

CUNIBERT lo Év. de Cologne 623. jouit d'une grande influence à la cour des Mérovingiens et fut mêlé à quelques négociations importantes. Plus tard il se retira dans son diocèse. Honoré le 12 nov. L'égl. qui porte son nom k Cologne, date du 13™® siècle. — 2o Cu-nibert, roi des Lombards, surnommé le Pieux; détrôné par Alachis 690, il fut rappelé par ses sujets, f 700.

CUNIGONDE, femme de Henri II dit le Saint, qui fonda le royaume de Hongrie, 1002-1024. Fille du comte Siegfried de Luxembourg, elle n'épousa Henri qu'après avoir de son consentement fait vœu de chasteté. Celui-ci l'ayant plus tard accusée d'avoir violé son serment avec des prêtres, elle en appela au jugement de Dieu et marcha sur des fers rougis au feu. Après la mort de son mari, elle entra au couvent de Kauffungen 1025. f 3 mars 1040. Béatifiée par Innocent III, 1200.

CURE lo Bâtiment affecté au logement de l'ecclésiastique chargé d'une paroisse. — 2oCure d'âme; ensemble des soins spirituels que le gardien d'une paroisse doit k ceux qui lui sont confiés; il est chargé de réveiller chez l'individu le sentiment religieux, de l'eutretenir et de le développer. Ce que le catéchisme et la prédication sont pour la collectivité, la cure d'âme l'est pour chacun en particulier. Le paganisme n'a jamais connu, avec tous ses systèmes de dieux et de prêtres, rien qui ressemble à l'enseignement ou au relèvement moral du peuple, et le judaïsme lui-même, avec ses prêtres et ses prophètes, ne s'est guère occupé, sauf de rares exceptions, que du peuple pris en masse, et non de l'exhortation ou de la direction individuelle. Le christianisme seulj parce qu'il sait ce que vaut une âme, a compris le devoir de s'adresser k chacune prise à part, et de lui apporter au nom de Dieu, suivant ses besoins, des paroles de vie, de réveil, d encouragement, d'avertissement ou de consolation. Il y a là un devoir qui incombe non k une fonction spéciale, mais à tous les membres de l'Église les uns vis-à-vis des autres, Hébr. 10, 24. Rom. 14, 19. 15, 2. Gai. 6, 1. et dont l'importance est relevée Jaq. 5,19. 20. C'est cependant aussi d'une manière plus particulière le devoir de ceux qui sont appelés à paître le troupeau de Christ. Des associations peuvent se former dans l'Église, comme unions, missions intérieures ou sous d'autres titres, pour suppléer à ce que l'activité individuelle ne saurait faire à elle seule. La cure d'âme vise tous les âges, toutes les conditions et tous les états spirituels indistinctement; elle a en outre à s'occuper de cas spéciaux, tels que les pauvres, les malades, les esprits troublés ou timorés, les condamnés, les prisonniers. C'est toute une étude, une branche de ce que la théologie comprend sous le nom de Prudence pastorale. La cure d'âme est nécessairement compromise, comme superflue, à mesure que l'Église accentue davantage son caractère autoritaire ou la nature magique de ses sacrements; quand des actes extérieurs peuvent remplacer la vie intérieure, il n'est plus besoin de se préoccuper autant de l'âme, et l'Église catholique a fini par réduire dans beaucoup de cas toute la cure d'âme aux étroites limites du con-fessional. De leur côté les jésuites ont dénaturé la cure d'âme par la manière dont ils ont rabaissé la morale, la subordonnant aux intérêts de leur ordre et faisant bon marché du reste. Leurs manuels, leurs directions spirituelles, leurs cas de conscience sont connus.L'Égl. luthérienne a touj. reconnu la nécessité de la cure d'âme, mais elle l'a parfois trop réduite au devoir de la confession privée et à la profession d'une rigoureuse orthodoxie, insistant outre mesure sur le droit du pasteur de remettre les péchés. L'égl. réformée a été plus sobre, plus scriptu-raire et plus sévère, et la cure d'âme, compliquée de l'idée de discipline, a été considérée, non comme l'affaire du pasteur seul, mais comme celle du collège des anciens. Ajoutons que pendant longtemps c'est surtout au point de vue de la participation à la sainte Cène que s'est exercée la cure d'âme; le 19m« siècle est le premier qui se soit rendu compte bien clairement de la nécessité de cette discipline relig. pour le développement normal de la vie chrétienne et pour l'affermissement de la foi dans l'Église, v. Herder, Harms, Vinet, KUndig, Spra-gue, Hoffmann, Palmer, Burck, Nitzsch, etc.

CURÉ. C'était dans l'origine le possesseur d'un bien qui entraînait comme obligation une d'âmes, beneficium curatum; sa maison était la cure. Plus tard on désigna sous ce nom l'ecclésiastique chargé des fonctions spirituelles, là où les biens avaient passé à des couvents ou à d'autres fondations. Le revenu continua d'en être affecté 4 au prêtre ou au desservant, mais celui-ci releva directement de l'évêque; au lieu de dépendre de ceux qui pourvoyaient à sa subsistance.

CURIE romaine, administration de la cour de Rome, ce qu'ailleurs on nomme gouvernement, ou ministère. Il y a quelques années la ville de Rome et les États de l'Égl. étaient administrés par les autorités ecclésiastiques; auj. la curie entière s'est retirée au Vatican, et c'est de là que, protégée par la Loi des garanties, elle continue d'exercer son pouvoir dans sa sphère et de gouverner l'Église. Ses principaux départements sont les finances, l'intérieur, les affaires étrangères, la justice et la propagande. Parmi ses dignitaires on compte un archidiacre, un camerlingue, un cardinal-vicaire, un pénitentiaire, etc. Les affaires sont régies par un certain nombre de conseils, ou congrégations: 1° La rote, q. v. 2° la Signatura justitiœ, qui prononce sur les appels, les cas de nullité, les conflits de compétence; 3° la Commission des grâces, sous la présidence immédiate du pape; 4<> la Dataria, chargée primitivement de l'expédition des bulles, et qui tranche auj. les questions de dispenses et l'affectation des bénéfices réservés; 5° le Pénitentiaire, qui statue sur les instances en absolution, et le Collège des cardinaux, qui se divise à son tour en trois sections: a le secrétariat d'État, qui traite les affaires ecclésiastiques avec les puissances étrangères, b le secrétariat des brefs, et c la chambre apostolique (caméra romana), spécialement chargée de l'administration financière. La compétence de ces différentes chambres n'étant pas bien déterminée, et plusieurs empiétant l'une sur l'autre, l'expédition des affaires est fort lente, parce qu'elles sont quelquefois obligées de se renvoyer le travail l'une à l'autre, et que les mémoires risquent de s'arrêter dans les cartons. En outre chaque chambre agissant d'une manière indépendante, et les instances devant être ouvertes personnellement, il y a toute une série de fonctionnaires spéciaux, procurateurs, agents-expéditeurs, qui s'interposent entre les chambres et le public, de façon à ralentir encore la marche des affaires et à en augmenter considérablement les frais.

CURION, Coelius Secundus. Né 1er mai 1503 à Saint-Chirique près de Turin, il fit de brillantes études, se familiarisa avec les écrits des réformateurs, fut gagné à l'Évangile et finalement arrêté et emprisonné dans un couvent. Ayant réussi à s'enfuir il passa plus, années à Milan, Pavie, Ferrare et Lucques, où il connut Ver-migli, enseignant et propageant les idées de la réforme, en dépit de tous les dangers. Cependant traqué de toutes parts il se vit contraint de quitter le pays; il vint en Suisse avec sa famille, trouva une place à Lausanne 1542, et fut nommé prof, d'éloquence à Bâle 1547. Sans être théologien il prit une part active aux discussions théol. de son temps, et s'aliéna Calvin et ses amis par une trop grande hardiesse de pensées. Maximilien II et le pape Paul IV lui lirent des offres brillantes, qu'il repoussa. Son principal ouvrage est une satire contre les abus de Borne, Pasquillus ecstaticus, souvent réimpr. et traduit en plusieurs langues. On a aussi de lui une Brève Institution de la relig. chrét. 1349, desConsidér. sur l'heureux royaume de Dieu, et divers opuscules, f 24 nov. 1569.

CURTIUS, Valentin, né 6 janv. 1493 à Lebus, Brandebourg; moine franciscain très zélé à Rostock, fut gagné à la Réforme par l'étude qu'il en fit, devint pasteur de l'égl. du Saint-Esprit à Rostock même, 1523, se maria, passa à Ltlbeck, où il fut nommé surintendant, et f 27 nov. 1573. Luthérien prononcé et partisan de Flacius, il prit part aux conférences de Brunswick et de Lunebourg, et pour assurer l'orthodoxie de son diocèse, il rédigea la Formula consensus 1560, que tous les pasteurs étaient obligés de signer et qui fut en vigueur jusqu'en 1685.

CUSANUS, ou Nicolas le Cusain, né à Cues sur les bords de la Moselle 1401. était fils d'un pêcheur nommé Jean Crebs. Il étudia d'abord le droit et les mathématiques, puis la théol., fut doyen de Coblence 1430, puis archidiacre à Liège. En cette qualité il assista au Conc. de Bàle, où il défendit d'abord les idées libérales, la supériorité des conciles sur les papes et l'indépendance des princes à l'égard de la cour romaine; il publia même deux mémoires sur ces questions. Mais plus tard il changea et prit le parti des papes. Eugène IV, Nicolas V et Pie II le chargèrent de plusieurs missions. Il assista comme légat à la diète de Francfort, fut nommé cardinal en 1448, et év. de Brixen, Tyrol, en 1450. Ses négociations avec les Fr. de Bohême échouèrent. Il travailla à la réforme des couvents de son diocèse, mais souleva par là le mécontentement des moines. L'archiduc Sigismond III le fit mettre en prison; relâché au bout de 2 ans, il se retira à Todi, Ombrie, où il f de la peste 1461. Ses œuvres foraient 3 vol. fo Bàle 1565. Il penchait vers le mysticisme et emprunta plusieurs idées à Pythagore; Jordan Bruno lui a pris sa théorie de Dieu considéré comme le maximum et le minimum absolus.

CURRER BELL, pseudonyme de Charlotte Brontê, fille d'un pasteur du Yorkshire, née 21 avril 1816; auteur de Jane Eyre, de Shirley, et de Villette. Elle épousa en 1854 le pasteur Nicholls, mais f déjà 30 mars 1855. Élevée à l'école de la souffrance, elle mûrit de bonne heure, mais comprit aussi les consolations de l'Évangile. Vie, par Mme Gaskell; trad. par M»e Ambr. Tardieu.

CUTHBERT 1* patron du nord de l'Angleterre. Né vers 635 près Melrose. Distingué par sa piété et son zèle missionnaire, il fut envoyé à Lindisfarne pour y réformer le couvent dans le sens romain; puis il y fut appelé comme év. 684, f 687. On assure que son corps fut retrouvé 400 ans plus tard parfaitement intact; il fut canonisé et son tombeau devint un lieu de pèlerinage. En 876 son cadavre fut caché pour n'être pas profané par les Normands, quand ils détruisirent Lindisfarne; on l'exhuma de nouveau 999 pour l'enterrer à Danholm (Durham), et l'on construisit une magnifique cathédrale sur cet emplacement. Le cercueil fut de nouveau ouvert le 17 mai 1827. — 2° Savant et pieux archev. de Cantorbéry; il combattit éner-giquement les superstitions qui menaçaient d'envahir l'Égl., et demanda à ses disciples, quand il serait mort 758, de l'ensevelir en secret pour dérober son corps à l'adoration que lui réservaient les moines augustins. Il avait présidé le conc. de Cloveshoos, dont les canons respirent une sagesse tout évangélique. On lui doit entre autres une Vie de Bède.

CUVIER, Charles, né 1800, f 17 avril 1881 (Pâques), à Montbéliard; étudia à Strasbourg, fut quelques années secrétaire de l'illustre Cu-vier, puis prof, d'histoire et doyen de la faculté des lettres à Strasbourg; il fut même chargé des fonctions de recteur, mais sans le titre, sa qualité de protestant inspirant des scrupules au gouvernement de Napoléon. Auteur d'un Cours d'études histor. et de plus, ouvrages d'édification. L'annexion de l'Alsace l'amena eu Suisse, el finalement à Montbéliard, son lieu d'origine.

CYPRIEN. Thascius Câcilius, païen, né vers 200 à Carthage d'une famille considérable, étudia l'éloquence et le droit, et fut d'abord prof, de rhétorique. Converti en 245, baptisé l'année suivante, il fut en 248 élu év. de Carthage par le peuple, contre Maxime que portaient par jalousie 5 ou 6 anciens, qui ne cessèrent dès lors de lui faire opposition. Il maintint ses droits contre Novatus qui avait consacré Félicissimus, et contre Fortunatus que les mécontents avaient choisi pour évéque. La persécution de Décius ayant éclaté, Cyprien s'éloigna pour quelque temps, ce que ses ennemis ne manquèrent pas d'exploiter contre lui; mais à son retour il sut leur fermer la bouche. D prit le parti de la sévérité contre les tombés (lapsi), quoique son cœur d'évêque fût ému. Il se montra également sévère contre le luxe et dans l'exercice de la discipline, ce qui lui suscita de nouveaux ennemis; mais sa douceur et sa fermeté ramenèrent enfin la paix. Il soutint dans un conc. à Carthage 261, que le baptême administré par les hérétiques n'était pas valable, ce qui l'engagea dans une discussion assez vive avec le pape Étienne de Rome. On décida aussi que les lapsi repentants pourraient recevoir la communion sur leur lit de mort. Sous Valérien qui fit enlever les évêques et fermer les temples, Cyprien fut exilé àCurubis; il devait être conduit à Utique, mais il se cacha, ne voulant pas succomber ailleurs qu'au milieu de son troupeau. Par ordre du proconsul Galerius il fut arrêté dans sa maison, et ayant refusé de rien rétracter, il eut la tête tranchée, 14 sept. 258, sur la place publique de Carthage, en présence d'une foule immense et vivement impressionnée. Cyprien s'était formé sur son prédécesseur Tertullien. On peut lui reprocher de manquer de simplicité et d'avoir été trop hiérarchique. Ses principaux ouvrages, traités et lettres, ont été réimpr. plusieurs fois et ont eu de nombreux traducteurs. Les meilleures éditions sont celles de Baluze, Paris 1725, et de Goldhorn, I^ipzig 1838. Il faut noter surtout ses Traités de la grâce de Dieu, de l'Unité de l'Église, des Tombés, De l'oraison dominicale, De la patience, Du zèle, Des vêtements, Ép. àDonat, à Demetrianus, etc. v. Cyprien par RufTet.

CYRAN (Saint-) 1<> Célèbre abbaye située à Brenne, Loiret, connue surtout pour avoir donné son nom à l'abbé Duvergier. — 2° Jean Du-vergier de Hauranne, né à Bayonne 1581, suivit les cours de l'univ. de Louvain où il se lia intimement avec Jansénius, dont il devint l'ami et le disciple. Ils s'entendirent pour combattre la scolastique parisienne et pour propager la doctrine de saint Augustin. Nommé abbé de Saint-Cyran vers 1620, il obtint à Paris de grands succès comme directeur des consciences, et compta beaucoup de disciples et d'amis, qu'il gagna à ses vues jansénistes, entre autres parmi les solitaires de Port-Royal 1636, Arnauld son contemporain, Lemaistre de Sacy, Bignon. Il combattit les jésuites dans plus, écrits, tels que: Somme des fautes et faussetés contenues dans la Somme théol. du p. Garasse; dans Petrus Au-relxus, pseudonyme, il attaque le p. Sirmond, défend la hiérarchie et fait le procès des ordres religieux. Ses Considérations sur la mort chrétienne appartiennent à l'édification pure. Dénoncé à Richelieu, il fut mis en prison à Vin-cennes et y passa 4 ans 1638-1643. f Peu aPrès sa libération, le H oct. 1643. Il avait refusé plusieurs évêchés.

CYRIACUS ou Cyriaque lo doit avoir été pape et avoir abandonné son siège pour suivre sainte Ursule jusqu'à Cologne, où il souffrit le martyre avec elle. Toutefois dans le catalogue des papes il n'y a pas de place pour lui, et la tradition sous ce rapport paraît être légendaire. Ses os sont à Neuhauseu, près "Worms. — 2® Patr. de Constantinople 595. U avait, comme ses prédécesseurs, accepté du synode le titre de patriarche cuœménique, ou universel, mais sur la demande du pape Grégoire, l'emp. Phocas défendit de donner ce litre à un autre év. qu'à celui de Rome seul. Cyriaque dut donc y renoncer et il en f de chagrin 606.

CYRILLE lo de Jérusalem, père de l'Église d'Orient, né vers 315, fut consacré prêtre en 345, et nommé patriarche en 350. Il se distingua par sa modération dans les controverses ariennes qui étaient alors à leur apogée; on l'a accusé, mais à tort, de semi-arianisme. Il eut de longs démêlés avec Acacius, év. de Césarée, qui prétendait à la suprématie sur l'év. de Jérusalem. Cyrille, grâce aux intrigues de son rival, fut déposé en 357 par un emp. arien, et réintégré à son poste par le conc. de Séleucie. Chassé de nouveau par Constance, il passa quelque temps à Tarse, puis fut replacé sur son siège. Exilé encore une fois, il fut rappelé par Julien l'apostat; enfin, banni une dernière fois par Valens, il fut définitivement rétabli dans ses fonctions par Théodose-le-Grand 367. Il mourut à un âge avancé, en 386. Ses ouvrages sont remarquables par la clarté et l'élégance; on y reconnaît la plume d'un homme qui a beaucoup observé, beaucoup expérimenté et qui connaît bien les Écritures, mais il manque de profondeur. Il nous reste de lui 23 Catéchèses dont l'authenticité n'est guère douteuse, sauf peut-être les 5 dernières; les 18 premières exposent par ordre la doctrine chrétienne; c'est un monument précieux pour étudier l'instruction ca-téchétique de cette époque; à l'exception de Clément d'Alexandrie, aucun père n'avait encore fait ce travail systématique et synthétique sur la dogmatique chrétienne. H. B.

2° Cyrille d'Alexandrie, patr. depuis 412, avait été d'abord moine dans les solitudes de la Nitrie. ou Natron. Ardent contre les juifs et les païens, et d'un caractère inflexible, il chassa d'Alexandrie les novatiens et les juifs, malgré le préfet d'Égypte, et suscita ainsi des troubles violents au milieu desquels périt entre autres la célèbre Hypatie. Il écrivit contre Julien une Défense du christianisme. Il prit parti contre Nestorius et voulut qu'on appelât Marie la mère de Dieu; son zèle dans ce sens alla même si loin qu'on put l'accuser de mariolatrie. Il con -fondait les deux natures de Christ, et dans une lettre aux moines d'Égypte, Paschalia Gram-mata, il cherche à prouver que l'union naturelle et essentielle peut seule entraîner l'union des attributs. Après une réconciliation momentanée, il fit prononcer par un conc. d'Alexandrie 430, douze anathèmes contre Nestorius et ses partisans. Dans un nouveau concile, à Éphèse 431, il obtint contre Nest. une nouvelle sentence, mais il s'était prononcé avec tant de passion et il avait procédé avec tant d'arbitraire que l'emp. le destitua; il fut cependant réinté-

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gré plus tard et se convertit à la doctrine des deux natures, f 444. Ses œuvres forment 7 vol. fol. édition d'Aubert 1638. Son traité Le Trésor est particulièrement apprécié.

3® Cyrille et Méthodius son frère, apôtres des Slaves, nés à Thessalonique d'une famille sénatoriale, dans le premier quart du 9"* siècle; leur père, le patricien leur fit donner une éducation distinguée; outre le grec, ils apprirent le latin et l'esclavon. Cyrille, qui s'appelait d'abocd Constantin, et qui fut surnommé le philosophe, entra de bonne heure dans un couvent sur les bonds de la mer Noire. Méthodius qui avait servi dans l'armée et qui y avait gagné des grades, se retira à son tour dans un couvent du mont Olympe. Vers 837, étant retourné à Constantinople, Cyrille reçut un appel du prince des Chazares de la Crimée pour aller évangéliser ce peuple, et il accepta avec empressement. En 860, accompagné de Méthodius, il commença une nouvelle mission en Bulgarie, et se rendit de là, à la demande du roi Rastislav, en Bohême et en Moravie. De nombreuses conversions furent le fruit de leurs efforts. Cyrille donna aux Slaves un alphabet et traduisit pour eux une partie au moins des S. Écritures; il fonda à Bude une espèce de séminaire ou d'académie pour former des prédicateurs. Quoique grecs, ils furent amenés parles circonstances à rattacher leur Église à l'év. de Rome, non sans avoir expressément stipulé et réservé auprès d'Adrien II, qu'ils continueraient de célébrer leur culte en langue vulgaire, 868. Leurs négociations personnelles avec le pape avaient été longues, mais elles avaient heureusement abouti; il allait être procédé à l'ordination épiscopale des deux missionnaires, quand Cyrille tomba malade à Rome et f 24 févr. 869. Méthodius poursuivit seul son œuvre. Nommé ar-chev. de Pannonie, il continua d'être un zélé missionnaire, appartenant en fait aux deux communions, grecque et latine, dont la rupture n'était pas encore complète et s'occupant de prêcher l'Évang. plus que des conflits politiques ou des rivalités ecclésiastiques qui s'agitaieut autour de lui. Mais les archev. et les prêtres allemands lui en voulaient de ce qu'il avait empiété sur ce qu'ils considéraient comme leurs diocèses, et sous prétexte qu'il était resté grec et qu'il continuait le service en langue slave, ils le dénoncèrent au pape. Il dut se rendre à Rome pour se justifier; Jean VIII fut tellement édifié et charmé de ses explications qu'il le renvoya comblé d'honneurs et inuni de pleins pouvoirs, 881. Méthodius se remit courageusement à l'œuvre. mais l'histoire se tait sur son activité ultérieure. On croit qu'il f vers 883. Après sa mort le parti allemand reprit le dessus et chassa les prêtres slaves, qui s'enfuirent auprès des Bulgares.

4<> Cyrille Lucar, v. Lucar.

CZERSKI, Jean, né 12 mai 1813, dans la Prusse occidentale, prêtre en 1842, se rattacha au mouvement de Ronge, mais sans se jeter dans les extrêmes. Il maintint la foi au symbole apostolique. A écrit quelques brochures pour justifier sa position nouvelle, entre autres une Lettre aux Égl. chrétiennes apostoliques.

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DACH, Simon, né à Memel 29 juili. 1605, t 15 avril 1659, commença ses études à Wittenberg, puis à Magdebourg; il fit sa philologie et sa théol. à Konigsberg, oii de grade en grade il finit par devenir prof, de poésie. Connu surtout comme poète, il a écrit Anne de Tharau, et des Odes: l'Aigle, la Rose, etc. Mais ses chants d'église sont supérieurs à ses autres compositions; plusieurs lui ont été inspirés par les circonstances; il traite souvent de la mort et de l'espérance. La biblioth. de Breslau possède de lui 6 cahiers ou volumes mss. de poésies inédites. Il faisait partie du cercle poétique de Kônigsberg, avec Mylius, Roberthin, Thilo, Albert, etc.

DACHÉRY, ou d'Achèry, Jean-Luc, né 1609 à Saint-Quentin, entra chez les bénédictins, et en 1632 dans la congrég. de Saint-Maur. Nomme bibliothécaire à l'abbaye de Saint-Germain des Prés, il rechercha et publia avec le plus grand soin les documents et les mss. relatifs à l'hist. ecclésiastique et rendit ainsi de vrais services à la science, + 1685. Il a fourni à Mabillon les matériaux pour ses Acta Sanctorwn. Son principal ouvrage est le Spicilegiumvet. Scriptorum, 14 vol. 4<>. Il faut noter aussi l'Ép. de Barna-bas, les Œuvres de Lanfranc, la Règle des Solitaires, etc.

DACOSTA, Isaac, 1798-1860, juif converti, l'émule de Bilderdyk, l'un des plus grands poètes de la Hollande, fut aussi l'un des champions les plus ardents et les plus convaincus de la foi évangélique. Il a donné à Amsterdam, où il vivait, de nombreuses conférences bibliques; mais ses ouvrages de théol. n'ont pas eu le même succès que ses poésies. Il faut mentionner cependant ses Considér. sur l'esprit du temps 1823, et son volume: Israël et les nations.

DAILLÉ, Jean (en latin Dallœus), né à Cbt-tellerault 6 janv. 1594, f à Paris 1670. Il perdit ses parents de bonne heure, fit ses études à Saint-Maixent, Poitiers, Chàtellerault, et venait d'entrer en théol. à Saumur, quand Du Plessis-Mornay lui confia l'éducation de ses deux petits-fils Fontenay-Husson. En 1619 il visita avec ^ux l'Italie, perdit l'un d'eux, Philippe-Samson, à Bologne, et ne réussit à soustraire son corps à l'Inquisition qu'en l'expédiant en France comme ballot de marchandises. Il vit à Venise Sarpi et Asselineau, parcourut ensuite la Suisse, l'Allemagne, la Hollande et l'Angleterre, et revint en France, fin de 1621, pour y reprendre ses études. Reçu ministre en 1623, il fut d'abord chapelain de Du Plessis à La Forêt sur Sèvre, puis successivement pasteur à Saumur 1625, et à Paris depuis 1626; il y resta 44 ans. Il assista au synode d'Alençon en 1637, et présida en 1639 celui de Loudun, le dernier qui fut autorisé par le gouvernement. Marié à Saumur en 1625, il perdit sa femme en 1631; leur unique enfant, Jean-Adrien (ou Horace), fut consacré m 1653, appelé comme pasteur à La Rochelle, puis en 1658 à Charenton où il fut pendant 12 ans le collègue de son père; il f à Zurich 1690, \ictirne de la Révocation. La fin de la vie de Daillé fut paisible et sans épisode. D'nn caractère facile, mais qui n'excluait pas la fermeté, habituellement gai, ouvert, plein d'entrain, il était instruit et éloquent. Il a écrit 724 sermons; on en a 20 volumes. Ses principaux ouvrages sont: un Traité de l'emploi des Pères, que Bayle qualifie de chef-d'œuvre; une Apologie pour les égl. réformées; un travail sur les Traditions des Latins quant aux cérémonies de leur culte; une Apologie des synodes d'Alençon et de Charenton, où il défend contre les calvinistes rigides ces deux synodes qui avaient refusé de condamner Amyraut, et où il se prononce en faveur de la grâce universelle; un grand nombre d'écrits de circonstance, discours, méditations, etc. Son style est doux et gracieux, mais manque d'élan. Daillé était l'ami de Con-rart, et Balzac l'appelle un grand docteur. — Deux autres Daillé sont nommés comme ayant fondé l'un l'égl. de Vevey, l'autre celle de Boston; d'ailleurs inconnus.

DAISENBERGER, v. Ober-Ammergau.

DALBERG (de), Charles-Théodore-Antoine-Marie, comte de l'empire, né 8 févr. 1744 à Hernsheim près Worms, chanoine, gouverneur d'Erfurt 1772, s'occupa très soigneusement des écoles, et en général de tout ce qui pouvait servir an développement et au progrès, même en dehors de sa sphère d'action directe. Coadjuteur dejtfayence 1787, év. de Constance 1788, il fut ordonné archev. de Tarse, il se proposait l'organisation d'une Égl. cathol. nationale allemande, et fit préparer différents travaux dans ce sens. En 1789 il abandonna Constance aux soins de son coadjuteur, le célèbre Wessenberg. En 1$02 il devint électeur de Mayence, archev. deRatisbonne et d'Aschaffenbourg et archichan-celier de l'empire. Il présida les dernières diètes d'Allemagne, résista d'abord aux envahissements de Napoléon, se soumit ensuite à ce qu'il ne pouvait empêcher, se rallia à la France, assista au couronnement, donna l'idée de la con-féd. du Rhin, dont il devint le président, 1806; fut nommé grand-duc de Francfort, avec Ha-nau et Fulda pour annexes, 1810, et désigna pour son successeur éventuel Eugène Beauhar-nais. Après le désastre de Leipzig il resta fidèle à Napoléon, résigna ses pouvoirs administratifs et ne garda que son évêché de Ratisbonne, où il se retira et f 10 févr. 1817. Quelque jugement qu'on porte sur sa politique, ce fut un grand caractère, plein de zèle et de désintéressement, et une noble intelligence. Le meilleur de ses ouvrages est intitulé: Méditation sur l'Univers; il a eu de nombreuses éditions. — Son neveu, Emmeric de Dalberg, 1773-1833, se fit naturaliser Français; il fut membre du gouvernement provisoire après la chute de Napoléon, et accompagna Talleyrand au congrès de Vienne. Il passe pour avoir collaboré à l'Hist. de la Restauration, de Capefigue.

DALMAT1QUE, pièce de vêtement à manches, que les diacres romains portent les jours de grandes fêtes, par-dessus l'aube et l'étole. Elle est faite d'étoffes précieuses; d'ordinaire blanche et bordée de pourpre. On la fait remonter au 4me siècle.

DAMASCÈNE, Jean, ou Jean de Damas; moine grec né à Damas, d'où il tire son nom, vers 676, f entre 754 et 787. La légende s'est tellement emparée de lui que son histoire en est devenue très incertaine. Fils d'un fonctionnaire nommé Sergius, il fut instruit dans toutes les sciences • par le moine italien Cosmas, et quoique chrétien il fut nommé gouverneur de Damas par les califes. Mais compromis dans une intrigue, il perdit les bonnes grâces de Léon Isaurien, pour avoir écrit en faveur du culte des images, et il se retira au couvent de Marsaba, ou Saint-Saba, près de Jérusalem, où il fut ordonné prêtre. Un lion, dit la légende, lui céda sa caverne. Il se consacra dans sa cellule aux études de théol. et devint le saint Thomas de l'Égl. grecque. Il travailla dans toute la Syrie, et jusqu'à Constanti-nople, à combattre les iconoclastes, ainsi que les jacobites, les sarrasins, les manichéens, les nestoriens et les monothélètes. Il écrivit aussi des traités sur la Trinité, le Jeûne, les (huit) Péchés capitaux, des Hymnes, des Odes; des Commentaires, en grande partie extraits de Chrysostome, avec abus des allégories; une espèce de roman chrétien, Barlaam et Josaphat. où l'on voit un roi indien converti par l'ermite Barlaam, etc. Son principal ouvrage est: la Source de la connaissance; il se compose de trois livres distincts: lo la Dialectique, en 68 chapitres, principes de philos., d'après Aris-tote et Platon. 2° Des Hérésies, leur exposé, en 103 articles, les 80 premiers d'après Épiphanes; 3° Exposition de la foi orthodoxe, en 100 fragments, d'après les conciles et les pères. Ses Œuvres ont été publ. k Paris 1712, grec-latin, par Lequien, avec la collaboration de Léon Alla-tius; réimpr. Vérone 1748.

DAMASE I, né en Portugal, élu 366 en remplacement de Libère, et en concurrence avec Ursicin, protégea saint Jérôme et le fit son secrétaire. Il veilla à la conservation des mœurs et au maintien de la discipline ecclésiastique. Valentinien lui donna le droit de trancher les différents entre évêques. Il convoqua plusieurs conciles contre les ariens; en 381 conc. de Constantinople, qui confirme celui de Nicée; 150 évêques, dont i de l'occident. Le culte des saints commence à poindre. Il anathématisa Ursace, Valens, Auxence, Apollinaire, Vital et Timo-thee, hérétiques ou schismatiques. f 384. Sa vie et ses écrits sont impr., Paris 1672. — 2° Da-mase II, allemand, év. de Brixen, Tyrol, élu 1048, ne fut pape que 23 jours, f à Palestrina.

DAMIANISSINES, v. Clarissines.

DAMIEN 1° patr. d'Alexandrie, f 601, enseignait que les hypostases de la Trinité ne sont pas Dieu par elles-mêmes, et (pie leur réunion seule fait la divinité. Ses partisans reçurent les noms de damianites, de angélites (d'Angelium, lieu de leur réunion), ou de tétradites(4 dieux). — 2° V. Cosmas. — 3° Damien. ou Damiani, Pierre, né à Ravenne vers 988 ou 1007, garda les pourceaux dans sa jeunesse, mais recueilli par un de ses frères, archidiacre de Ravenne, il profita si bien des leçons qui lui furent données qu'il put à son tour se livrer à l'enseignement et qu'il y trouva honneurs et richesses. Cependant il quitta le monde et se retira au couvent de Font-Avellana, Ombrie, dont il fut bientôt nommé abbé, 1041. L'austérité de sa vie et sa sévérité envers les autres le firent considérer lîomme un saint. Il écrivit contre les débordements du clergé son Livre de Gomorrhe 1051, qui lui valut l'attention et l'attachement de Hil-debrand. Étienne IX (ou X) le fit cardinal-év. d'Ostie, et l'employa à diverses missions pour préparer le peuple et les moines k la guerre que les papes devaient incessamment ouvrir contre les empereurs en faveur du pouvoir temporel de la cour de Rome. Damien joua un grand rôle au conc. de Latran 1059, et réussit k faire pisser le décret interdisant aux fidèles d'entendre la messe d'un prêtre marié. N'ayant pas réussi à son gré dans une mission dont il avait été chargé par le pape à Milan, il renonça à la pourpre et rentra dans son couvent comme simple religieux. Il n'en continua pas moins de rendre d'importants services à la papauté; il assura l'élection d'Alexandre II contre Honoré II, et comme confesseur d'Agnès, il décida Henri IV à reprendre Berthe sa femme 1069. Il fut le précurseur énergique et l'heureux champion de la hiérarchie dans la lutte qui éclata entre Grégoire VII et Henri IV et qui aboutit à Canossa. Mais, même au milieu des cours, il vécut toujours dans une extrême pauvreté. Œuvres, 4 vol. fl>, publ. par (iajetan, Rome 1606; réimpr. à Paris et k Venise.

DANEAU, Lambert, né 1530 à Beaugency,f à Castres 15 nov. 1595; étudia d'abord le droit à Orléans sous Anne Dubourg, puis la théol. à Genève 1560. Il fut nommé pasteur a Gien, puis à Vandœuvres près Genève 1572, en même temps que prof, de théologie; il passa ensuite comme prof, à Leyde, mais compromis dans des intrigues politiques, il s'enfuit k Gand 1582, fut appelé comme pasteui k Orthez, et enfin comme pasteur et prof, à Castres. Savant et intelligent, plus universel que profond, calviniste rigide, il a publié un grand nombre d'ouvrages, qui furent appréciés, mais qui n'ont plus beaucoup de valeur auj. sur les Hérésies, l'Antéchrist, les Sorciers, la Physique chrétienne, les Jeux de hazard, etc. Les principaux sont, outre ses Commentaires, son Éthique, fondée sur le Décalogue: le premier il sépara la dogmatique de la morale; ses Lieux communs, avec une préface de Bèze; sa Politique chrétienne; son examen du livre de Chemnitz sur les deux natures en Christ, etc. Marié deux fois, il n'eut qu'un fils, Josias, qui lui succéda comme pasteur de Castres. — Vie et Œuvres, par P. de Félice.

DANEMARK. Après une tentative infructueuse de Willibrord 699 pour établir le christianisme dans ce pays, dont les limites n'étaient d'ailleurs pas nettement déterminées, puisqu'il comprenait la Norwège et une partie de la Suède, l'archev. Ebbo de Reims reprit cette tâche sous Louis-le-Déb. et k la demande du roi Harald Klak, qui se fit baptiser en 826 avec beaucoup de ses gens. Anschar continua l'œuvre avec autant de succès que de zèle. Mais le parti païen reprit le dessus sous Eric III, qui ravagea les églises, détruisit les couvents, et inaugura une ère d* persécutions et de pillage qui dura près d'un siècle et atteignit les contrées du Rhin, les Pays-Bas, les côtes de France et l'Angleterre, 880. On attendait la fin du monde. Le vieux Gorm, qui lui succéda 883, se montra aussi le cruel ennemi des chrétiens, mais vaincu par Henri 934, il dut acheter la paix en permettant à l'archev. Unnis, de Brème, de relever les temples et d'envoyer dans le pays des missionnaires. Son fils Harald-Blaatand (dent bleue), qui régna de 941-995, favorisa le christianisme; il releva les évêchés de Schleswig, Ribe et Aarhuns, et en fonda un nouveau à Odensée, mais lui-même ne se convertit que dans un âge avancé, et il refusa d'imposer le christianisme comme religion officielle. Après sa f 996, son fds Svend, ou Suénon, re-nouvella les persécutions, mais avec des alternatives motivées par sa politique. En mourant il recommanda à son fils, le grand Canut, de ne pas suivre ses traces, et c'est en effet de ce dernier que date l'établissement définitif du christ, en Danemark; l'île de Bornholm fut gagnée la dernière, 1060. La situation était curieuse; l'Égl. danoise était desservie par des ecclésiastiques anglais, et soumise à la juridiction d'un allemand, l'archev. de Brème. Cette anomalie cessa en 1104 par la création de l'archev. de Lund, avec Ascer pour titulaire. Son successeur Absalon, sous Waldemar I«r, fixa la Constitution de l'Église; Canut, dit le Saint, fixa sa position sociale et détermina ses attributions temporelles en donnant aux év. le titre de ducs, le droit des dîmes et la juridiction ecclésiastique; le clergé ne tarda pas à s'emparer de toute l'autorité civile, ce qui amena de fréquents conflits avec la couronne. Christophe II, 1320, puis l'union de Calmar 1397, régularisèrent la situation en faisant la part du clergé, en le rendant plus ou moins indépendant de Rome, et en assurant les droits du souverain, qui alors régnait sur les trois royaumes scandinaves. Les bénéfices ecclés. devinrent le partage des nobles. La Réformation trouva en Danemark un terrain bien préparé; Christian II la favorisa 1521 en faisant traduire la Bible; la noblesse, ies diètes, plusieurs prédicateurs et supérieurs de couvents se prononcèrent dans le sens de Luther, d'Érasme ou de Carlstadt; Copenhague, Wibourg et Malmoë proclamèrent l'Évangile; la diète d'Odensée 1527 permit le mariage des prêtres, enleva aux év. leur juridiction et vota la liberté religieuse jusqu'au prochain concile. Le mouvement s'accentua sous Christian III, 4534, et fut définitivement consacré par la diète d'Odensée 1539. Le 14 nov. 1660, sous Frédéric III, le roi fut déclaré chef absolu de l'Égl., avec l'Augustana et les deux catéchismes de Luther pour bases. Les réformés furent cependant reconnus, ou du moins tolérés en 1747; les catholiques et les juifs en 1814, les baptistes en 1842. La constitution de 1848 proclama fentière liberté de conscience; le roi seul est obligé d'être luthérien. L'œuvre des missions a toujours été populaire en Danemark; depuis 1710, une Société s'occupe du Groenland, de Tranquebar, des côtes de Guinée et des Indes occidentales, mais avec une attache officielle qui l'a souvent paralysée. Une autre Société travaille depuis 1850 à l'évangélisation de la Chine. Une Soc. biblique fondée en 1811 s'occupe de répandre la Bible dans les colonies. La mission intérieure prospère. Les baptistes et les méthodistes ont plusieurs églises; les catholiques en ont une à Copenhague; les mormons ont aussi fait des recrues. La diète ecclés., ou Kirchentag, désirerait unir en une seule les égl. des trois royaumes scandinaves.

DANIEL lo Stylite, le successeur immédiat de Siméon, q. v., né 410 à Maratha, près Sa-mosate, il vécut plusieurs années à Constantinople sur une magnifique colonne, dans la contemplation; il reçut à diverses reprises la visite de Léon I©', et ne descendit un jour de son établissement que pour faire entendre à l'emp. Basilique des censures et des menaces au sujet des mesures qu'il avait prises contre le conc. de Chalcédoine en faveur des monophysites 476. On lui attribue des miracles, des guérisons et des prophéties. Il avait été abbé de son couvent, s'était rendu en pèlerinage en Palestine, et c'est là qu'une vision l'aurait dirigé sur Constantinople. f 490- — Moine à Malmes-bury, puis év. de Winchester 705; envoya Boniface en Allemagne, avec une lettre pour tous les chrétiens, évêques et rois, que l'on possède encore. De retour en 721 d'un voyage à Rome, il donna à Bède les matériaux de son histoire de Wessex, et devenu aveugle, se retira dans son couvent, + 745. — 3° Gabriel, jésuite, dit le père Daniel, né à Rouen 1649, f 1728, auteur d'une Hist. de France, 3 vol. fol. 1713, plusieurs fois réimpr., entre autres par Griffet, longue et ennuyeuse, mais exacte; d'un Voyage du monde de Descartes, où il combat le système des tourbillons, 1690; et d'un Entretien de Cléandre et d'Eudoxe sur les Provinciales 1694, où il essaie de défendre les jésuites contre Pascal. — 4° Hermann-Adel-berg, né à Kiithen 18 nov. 1812, prof, à Halle, auteur de quelques ouvrages de géographie, et de travaux liturgiq. appréciés: Thésaurus hyrn-nologicus, Codex liturg. etc.

DANNHAUER. Conrad, né 1603 en Brisgau, prof, et pasteur à la cathédrale de Strasbourg, f 7 nov. 1666. Luthérien zélé, un des maîtres de Spener, il lui inocula son hostilité contre le calvinisme. Auteur de plus, écrits de controverse, d'une Dogmatique intitulée Hodosophia, d'un livre de la Conscience, de la Theol. casualis, et d'un travail catéchétique en 10 forts vol. in-4».

DANOVIUS, Ernest-Jacob, né 12 mars 1741 près de Dantzig, prof, de théol. à Iéna 1768, se noya dans un accès de mélancolie en 1782. Ami de Semler et d'Ernesti, il s'éloignait sur plusieurs points de la doctrine reçue. Il aurait voulu l'union avec les réformés; il se rapprochait d'eux pour la prédestination, mais pas pour la christologie. Auteur d'une Institutio theol dogmat. et de quelques petits ouvrages; a traduit les sermons de Roustan.

DANSEURS. De même que l'islamisme a ses dévots tourneurs et hurleurs, le catholicisme du moyen âge, avec ses tendances matérialistes, avec son culte sensualiste, avait enfanté la curieuse secte des danseurs, chorisantes, dansato-res, triptidiantes. On les voit apparaître vers 1374 sur les bords du Rhin, à Metz, Liège, Cologne, Utrecht, gens des deux sexes, des classes inférieures, se mettant tout à coup à danser en pleine rue, pénétrant dans les égl. et poussant des cris extatiques jusqu'à tomber sur le sol à moitié morts. Souvent saisis de maux d'entrailles, ils se faisaient guérir à coups de poings par ceux qui les entouraient, ou bien ils se serraient le ventre avec des cordes pour calmer la douleur. Cette affection était épidémique, lorsqu'elle se produisait, et il en résultait des excès de tous genres; à Cologne ils étaient plus de 500; ils se réunissaient la nuit, et plus de cent jeunes filles en revinrent enceintes. Ils se nommaient les disciples de Saint-Jean, mais sans être d'accord sur le patron dont ils prétendaient relever. Le clergé finit par intervenir, d'abord par des exorcismes, puis par des procédés plus efficaces. On retrouve encore de ces danseurs à Strasbourg en 1418; on essaya de les guérir en les transportant, pour y entendre la messe, dans Tégl. de Saint-Vit, d'où est venu le nom de danse de Saint-Vit pour désigner une affection physique qui n'a d'ailleurs rien de commun avec la folie chorégraphique du moyen âge.

DANTE Alighieri, né à Florence 12 mai 1265 d'un père guelfe, qu'il perdit de bonne heure. Il fut élevé par Brunetto Latini, qui le fit instruire dans toutes les sciences connues de son temps. A l'âge de 9 ans il vit dans une réunion de famille la jeune Persinari, Béatrice, dont l'amour le suivit toute sa vie, bien que par déférence pour les siens elle eût épousé le chevalier di Bardi; elle f 1290. Il compta parmi ses amis le peintre Giotto,Cavalcante, Arnolfo le jumeau de Cimabué, Casella, etc. Il étudia à Bologne, puis à Padoue; entra dans l'armée comme guelfe et battit les gibelins à Campaldino 1289, puis entra dans le parti des gibelins et servit son pays dans la magistrature; il fut pendant 2 mois l'un des prieurs, ou consuls de Florence, après avoir rempli avec succès plusieurs missions politiques. La division s'étant mise dans son parti, il se range du côté des blancs contre les noirs, qui l'emportent; il est accusé de malversations dans l'exercice de la justice et dans l'administration des finances, et condamné d'abord à l'exil, 17 janv. 1302, puis au bûcher le 10 mars suivant. Quoique Gemma, sa fem-ma, l6t de la famille des Donali, ses biens furent confisqués, et elle dut quitter sa maison avec ses enfants, Pierre, Jacopo et Béatrice, et fut obligée de travailler de ses mains pour vivre. Le poète exilé erra de ville en ville, à. Sienne, à Vérone, plongé dans la misère. Il vint à Paris 1307, passa brillamment son examen de docteur, mais n'en reçut pas le titre parce qu'il n'avait pas de quoi payer son diplôme; il revint en Italie, et après de longues souffrances et d'inutiles démarches pour sa réhabilitation, tantôt dans les couvents, tantôt dans les palais, il prit son dernier repos à Ravenne, chez Guido Novello, seigneur de Polenta, où il f 27 juin 1321. Contemporain des plus grands événements du moyen âge, il a vu la dernière croisade, la chute des Hohenstaufen, le commencement du schisme d'Avignon. Déjà célèbre comme poète, prosateur, philos, et homme d'État, par ses poésies lyriques, son Traité de l'éloquence, son Banquet, son livre de la Monarchie, sa Vita nuova (histoire de sa jeunesse)9 ses églogues virgiliennes, il mit le sceau à sa gloire par l'œuvre de son exil, la Divine Comédie, œuvre amère d'un rhapsode proscrit, un des chefs-d'œuvre de l'esprit humain, non moins grandiose par ses clartés que par ses obscurités calculées L'homme de génie, méconnu des uns, redouté des autres, poursuivi par les enfants dans les rues, s'en va partout cherchant la paix. Sous la conduite de Virgile, dans l'Enfer et le Purgatoire, il rencontre ceux qu'il accuse d'être les auteurs de ses maux, les méchants, ses ennemis, les ennemis de son pays,, le clergé dans son chef et dans ses membres. Dans le Paradis, conduit cette fois par Béatrice, il trouve dans l'amour de Dieu la paix et le salut. Partout les tendances et les idées de son époque sont incarnées dans des personnalités contemporaines, et comme un grand nombre sont inconnues, les allusions qui les concernent font de ce livre une énigme perpétuelle. Aussi des chaires spéciales furent-elles fondées peu après sa mort, à Pise, à Bologne, à Florence, pour expliquer et commenter son œuvre; un religieux l'expliquait même en 1430 dans la cathédrale de Florence, et Michel*Ange s'en est inspiré dans son Jugement dernier. II reposé à Ravenne. Sa légende commença aussitôt après sa mort. La république de Florence fit remettre, par Boccace, dix florins d'or à sa fille Béatrice, religieuse au couvent d'Oliva. Les éditions et les commentaires de la Divine Comédie sont innombrables: v. Colomb de Batines, Bibliogr. Dantesca, 1845; Baumgarten-Crusius, Ozanaiu, Hegel, Artaud, Villemain, Tommasco, etc. On a pu se demander si Dante n'était pas un des précurseurs de la Réforme; on n'a jamais tranché la question de savoir s'il est mort catholique-romain ou hérétique, mais il a été enterré dans. Tégl. des franciscains, revêtu de la robe des cénobites, et il lui fut fait de splendides funérailles. Florence se repentit trop tard de l'avoir exilé; il manque à l'égl. de Santa-Croce, où dorment Michel-Ange, Machiavel, Galilée et Alfieri.

DANTZICK, Gedanum Dantiscum, ville connue déjà au 10me siècle, évangélisée par Adal-bert. La réformation y fut prêchée par Jacq. Knade 1518 et par le franciscain Alexandre, mais des troubles politiques l'empêchèrent de s'établir, jusqu'en 1529 où Pancrace Klemme, soutenu par les conseils de la ville, réussit à la faire proclamer dans des conditions plus favorables.

DARBY, J.-Nelson, né 18 nov. 1800, d'une bonne famille d'Irlande, fut d'abord avocat, puis étudia la théol. contre le gré de son père et devint pasteur. La doctrine de la succession apostolique porta en lui des fruits négatifs, c.-à-d. qu'ayant conçu des doutes sur la régularité de cette succession et par conséquent sur la validité de sa propre consécration, et ne voyant aucun moyen de prouver historiquement le fait d'une transmission non interrompue des dons apostoliques, quand en réalité ces dons n'existaient plus, il se jeta dans un autre extrême et prétendit que l'Egl. et toutes ses charges ou ministères avaient cessé d'exister. L'apostasie de l'Égl. avait commencé de bonne heure; tout dans ses institutions, culte, organisation, sacrements, avait été satanisé; il ne restait plus que des chrétiens isolés, égrenés, dont le seul devoir était de se réunir pour s'édifier mutuellement, en faisant servir au bien de tous les dons de quelques-uns. Il y avait déjà depuis quelques années à Plymouth un petit noyau de fidèles qui, mécontents de l'Égl. anglicane, ne s'étaient cependant réunis à aucune autre Église; ils voyaient partout des lacunes ou des erreurs, et à force de tâtonnements, ne trouvant la perfection nulle part, ils s'étaient décidés à se grouper entre eux, sans aucune espèce d'organisation, sous le modeste titre de frères de Plymouth. Ses principaux chefs étaient Newton, Harris et Tregelles. Des assemblées du même genre se formèrent en bien des lieux, Dublin, Londres, etc., et quand Darby arriva, il obtint par son caractère et par la précision de ses idées une influence telle que son nom servit à désigner la secte; on dit le darbysme, les darbistes, appellation qui n'a rien de dédaigneux et qui a J'avantage d'être plus claire et plus exacte que celle de frères, qui peut s'app'iquer à tous les chrétiens. En 1838 Darby résolut d'annoncer sa doctrine sur le continent; il vint à Paris, à Genève, à Lausanne, et réussit dans les villes et dans les campagnes à former de petites congrégations, recrutées surtout parmi les dissidents iatigués des luttes ecclésiastiques. La simplicité de son système, ses explications bibliques, ses vues sur la prophétie, la piété sincère de plusieurs, et peut-être aussi le relief légitime qu'il donnait aux fidèles bien doués pour l'édification, lui procurèrent de nombreux adhérents. Malheureusement il arriva ce qui arrive touj. dans ces morcellements de l'Église, c'est que les petits troupeaux continuèrent de s'émietter sous l'influence d'un individualisme sans bornes* et que, dans la même ville, à Plymouth, à Bristol et ailleurs, les frères se divisèrent en trois partis distincts et hostiles, sous les noms de Darby, de Newton et de Béthesda (lieu de réunion à Bristol), qui s'excommunièrent les uns les autres. Malgré le zèle infatigable de Darby, qui n'a pas craint, à l'âge de 70 ans, d'aller prêcher sa doctrine jusqu'en Australie, la secte a subi une sorte d'arrêt, mais ses fondateurs auront toujours le mérite d'avoir réveillé l'attention des chrétiens sur quelques doctrines trop longtemps négligées, sur la Formation de l'Église, le Ministère, le Sacerdoce universel, l'Attente actuelle de l'Égl. et les prophéties qui l'établissent. La littérature darbyste est assez nombreuse, mais d'une lecture difficile, soit à cause du style, soit à cause des idées; il faut noter cependant l'Apocalypse de Rossier, le Témoignage de Recordon, et plusieurs commentaires sur l'A. T. traduits de l'anglais. Parmi les réponses ou réfutations, très nombreusses aussi, indiquons Herzog, Guers, Merle, Godet, Duplan, Krllger. f 29 avril 1882 à Bourne-mouth, Hampshire.

DATAIRE, Datarius, président de la commission des bulles, chargé ipr la curie romaine d'y mettre la date et de les expédier. Si c'est un cardinal, il porte le titre de prodataire. L'office s'appelle Daterie.

DAUB, Charles, né à Cassel le 20 mars 1765, prof, à Marbourg, Hanau, puis 1795 à Heidel-berg, où il f 1836 d'apoplexie pendant une de ses leçons. Successivement disciple de Kant, de Schelling et de Hegel, il chercha à donner au sentiment religieux une base scientifique. Auteur de plusieurs ouvrages de théol., entre autres Judas Iscarioth 1816, où il étudie l'origine du mal; Theologumena 1806, etc.

DAUT, Jean-Maximilien, né à Niederroden à la fin du 17me siècle; se rendit à Francfort comme garçon cordonnier, et publia sous le titre de Helle Donner-Stimme (Voix de tonnerre) un livre chiliaste et mystique plein de reproches contre l'Égl, et le clergé. Banni, il trouva à Schwarzenau, puis à Ulm, de nombreux adhérents. Il rentra plus tard dans l'Église.

DAVID lo patron du pays de Galles, né vers 458 ou 480, f 544, fils d'un prince du Cardigan; il prêcha l'Évang. dans le sud de la Gr. -Bretagne, fonda 12 couvents et fut évêq. de Ménévia, qui prit de lui le nom de Saint-David.

2° Philos, arménien du 6m« siècle, parent et disciple de Moïse de Khoren, recueillit un grand nombre de mss. en Asie Mineure, étudia à Athènes et a commenté Aristote, Porphyre, etc.

3° David de Dinant, auteur d'un écrit intitulé Quaternuli qui fut condamné au conc. de Paris 1209. Il nommait Dieu la matière première par laquelle tout existe. Connu seulement par le grand Albert et Thomas d'Aquin.

4° David d'Augsbourg, né entre 1210 et 1220, f le 15 nov. 1271, prof, de théol. au couvent des carmes à Ratisbonne, et depuis 1243 à Augsbourg; écrivain ascétique, bon latiniste, auteur de plusieurs traités allemands qui ont eu de la réputation.

5° Christian David, l'un des hommes les plus marquants de l'unité des Fr., né 31 déc. 1690 à Senftleben, Moravie; cathol. zélé, sujet autrichien, charpentier de profession; fut éveillé dans sa conscience par la vue des persécutions, fut remué par le chant des cantiques évangéliques, se convertit à Berlin, fut persécuté à son tour et s'enrôla contre Charles XII; il assista au siège de Stralsund. En 1717 il revint à Gôr-litz, où il fit la connaissance de chrétiens distingués, Schâffer, Schwedler, etc. Il s'y maria et commença dès lors sa vie de missionnaire. C'est lui qui engagea ses amis à émigrer, et qui négocia avec Zinzendorf leur établissement à Herrnhut 1721. Il ne cessa d'exercer une grande influence sur la communauté. Après un mouvement séparatiste provoqué par Krttger, il élabora avec Zinzendorf les statuts qui devaient servir de règle à l'élise 1727, fut envoyé comme délégué des frères dans les provinces de la Baltique, et, après plusieurs voyages missionnaires, dont trois au Groenland, 1733, 1747 et 1749, il revint à Herrnhut où il f le 3 févr. 1751. Il a composé un grand nombre de cantiques d'un style très élevé, des Lettres et une Notice sur Herrnhut.

DAVIDIS, François; recteur, puis prédicateur de la cour à Klausenbourg. D'abord luthérien, ensuite calviniste, enfin unitaire. Il soutenait que Jésus n'étanl qu'un homme, il ne fallait pas l'adorer. Condamné par le synode de Torda, 1568, et vainement sollicité par Socin lui-même, il finit par être jeté en prison (à l'instigation de Socin?); il y languit plusieurs années et y f 1579 dans un âge avancé.

DÉBRECZIN, ville de Hongrie, sur la Theiss. Le synode de 1567 condamna les antitrinitaires dans une Brève confession de foi, et dans ses Articles de la parole de Dieu, qui furent reconnus comme l'autorité de l'Égl. de Hongrie, et qui renfermaient aussi la 2* conf. de foi helvétique.

DÉCIUS 1° Caïus Quintus Messius, surnommé par le sénat Trajanus et Optimus, né d'une famille obscure en Pannonie, avait été envoyé en Mésie comme gouverneur par Philippe l'Arabe 249, quand ses soldats le contraignirent d'accepter la dignité impériale; d'ailleurs il tua lui-même Philippe qui lui livra bataille près de Vérone. Son règne de 2 ans est célèbre par les cruelles persécutions qu'il ordonna contre les chrétiens, et dans lesquelles souffrirent le martyre Cyprien, Origènes, les sept jeunes gens d'Éphèse et des milliers d'autres. On a cru l'excuser en disant qne ces persécutions lui furent dictées, non par l'intolérance ou la cruauté, mais par la raison d'État et par la politique; il voulait rétablir l'unité de l'empire, compromise, pensait-il, par le christianisme. De cette manière on pourrait aussi réhabiliter Louis XJY. Il fut tué 251 en combattant contre les Goths. — 2° Nicolas Décius, moine à Stetterburg, puis prof, à Brunswick et pasteur à Stettin; auteur de plusieurs beaux cantiques, f 1529. — 3° Philippe Décius, canoniste italien; né 1454 à Milan; prof, à Sienne, Padoue et Pise; auditeur de la Rote. C'est sur son avis que Louis XII convoqua le concile de Pise 1511, le pape s'ètant absolument refusé à toute réforme. Après la défaite des Français il partit avec eux, fut prof, à Bourges, membre du parlement de Grenoble, et recouvra sa position à Pise 1515. f 1535 à Sienne. Il avait été précepteur de Léon X.

DÉCRET 1° de Gratien. On désigne sous ce nom une Compilation de textes des Écritures, canons des apôtres et des conciles, extraits des pères et des livres pontificaux, décrets des papes, recueillis et commentés vers 1150 par un célèbre canoniste, Gratien, né à Chiusi, Toscane, f 1161, camaldule ou bénédictin du couvent de Saint-Félix, Bologne, et qui, sans reconnaissance officielle d'aucune sorte, a rapidement acquis une grande autorité dans l'Église. On l'appelle aussi Concordia canonum discor-dantium, parce qu'il cherche à concilier les textes en apparence ou en réalité contradictoires. Impr. Strasbourg 1471, réimpr. 1572 par ordre de Grégoire XIII.

2<> L'év. Ivo, de Chartres, fils de Hugo d'Au-teuil, né vers 1040, d'abord chanoine à Nesle, puis abbé à Saint-Quentin; f 1115, canonisé 1570, connu par l'énergie de sa résistance à Philippe au sujet de son divorce, est plus connu encore par sa double collection de canons, le Décret en 17 livres, publié à Louvain 1561, et la Pannormia en 8 livres, Bâle 1439. Le Décret cependant est contesté.

DÉCRÉTALES. L'Église s'occupa de bonne heure de collationner les canons et les décrets de l'autorité ecclésiastique, conciles et autres. Sans parler des Constitutions apostoliques dont l'authenticité n'est plus défendue par personne, la plus ancienne mention d'un recueil de ce genre se trouve dans le conc. de Chalcédoine, où sont reproduites les résolutions des conc. de Nicée, Antioche, Ancyre, Césarée et Gangres. Le patr. Photius en fit faire une collection à l'usage de l'Égl. orientale 883, qui fut plus tard complétée et commentée par Balsamon. En occident la première fut faite au 6me siècle par Denys-le Petit; elle devint un code ecclésiastique et trouva des imitateurs et des continuateurs. L'Espagne eut sa collection particulière, à laquelle on donna le nom d'Isidore, quoique ce dernier, év. de Séville, n'y ait pris aucune part. Elle était plus étendue que celle de Denys et contenait un plus grand nombre de lettres de papes, et plus de canons de conciles, surtout espagnols. Elle se répandit hors d'Espagne, notamment en France où, augmentée d'autres documents, elle jouit d'un grand crédit. Ces recueils traitent naturellement des questions les plus diverses, relatives à l'administration de l'Église, mais avec une tendance touj. plus prononcée à relever l'autorité du clergé au détriment du pouvoir civil. Tout à coup, dans la lre moitié du 9®e siècle, apparaît une collection de nouveaux canons dont personne encore n'avait entendu parler. C'est Benoît-le-Lévite, l'auteur du second recueil des capitulaires, qui la mentionne le premier et cherche à lui donner de l'autorité. Comme c'est surtout dans les diocèses de Trêves et de Mayence qu'on la rencontre d'abord, il est probable que ce fût là son berceau, et que le collectionneur Benoît en fut, sinon l'auteur unique, au moins l'éditeur responsable. Ces Fausses décrétales, induement publiées sous le nom d'Isidore, comme celles qui avaient acquis dans l'Égl. une si légitime considération, contiennent, dans le latin du 9m« siècle, une quantité de pièces évidemment fausses, qui trahissent la fraude et la supercherie. Ainsi les papes du 2rae et du siècle se servent de la traduction de saint Jérôme, qui ne parut qu'au 4™; ils font allusion à des faits ou à des écrits du 6rae et du 7me siècles, qu'ils ne pouvaient pas connaître, etc. Après une préface faussement attribuée aussi à Isidore et des correspondances inauthentiques entre Aurèle, Jérôme et Damase, la collection donne 60 lettres, également apocryphes, des plus anciens évêques de Rome, depuis Clément jusqu'à Mel-chiade; un écrit sur la primitive Église et sur le conc. de Nicée; la fameuse donation de Constantin; des décrets de conc. grecs, africains, gaulois, espagnols. Le but de l'auteur, qui a peut-être cru bien faire dans l'intérêt de la religion, est l'exaltation du clergé. Il y tend par de fausses citations, et il cherche à établir ces trois principes: 1<> L'Église est indépendante de la juridiction civile; le clergé est une caste; un évêque ne peut être condamné que par 72 évêques; l'accuser, c'est accuser Dieu; les ev. sont les protecteurs du peuple. 2° La puissance des métropolitains est inférieure à celle des primats; elle est bornée à cause de leurs trop grands rapports avec le gouvernement. 3° L'Égl. romaine lire son autorité immédiatement de J.-C., et c'est d'elle seule, par le pape, que les év. doivent attendre la leur. Quant à la date où parut ce recueil de fausses pièces, elle se détermine à peu près par le fait qu'il contient un décret du conc. de Paris 829, et qu'il est déjà cité comme autorité au conc. d'Aix-la-Chapelle 836; sa publication se placerait donc dans l'intervalle; mais il y a toujours à se méfier des interpolations postérieures. En 845, Benoît en cite des fragments; en 853 les amis d'Ebbon l'invoquent comme autorité; Nicolas I s'en sert 865 dans la lutte d'Hincmar contre Rothade. C'est donc à peu près vers ce temps qu'il faut placer les Fausses décrétales; elles étaient écrites en faveur des évêques, et ceux-ci n'y regardèrent pas de trop près quant à l'authenticité; les uns n'y virent que la vieille collection d'Isidore, les autres n'en examinèrent peut-être pas même le contenu. Il fallut la Réforme pour démasquer la fraude. Calvin le premier la pressentit et la dévoila; les Centuries de Magde-bourg en dévoilèrent la fausseté. Peu de théologiens prirent parti pour ces décrets supposés. Augustin, archev. de Sarragosse, Bellarmin, Baronius les abandonnèrent. Blondel donna le coup de mort à leur solidité. —V. Liber 3°.

DÉFENSEUR de l'Eglise, v. Avocat. — Il y a aussi, et surtout il y avait auprès des cours matrimoniales ecclésiastiques, des Def. malri-monii, chargés de prononcer sur les cas de nullité en fait de mariage. Ils pouvaient agir sur la demande des parties, et même d'office et contre elles, et annuler ainsi légalement un mariage qu'ils n'estimaient pas valable. C'étaient une sorte de procureurs généraux, poursuivant au nom de l'Égl. les infractions à ses lois. Avec l'état civil cette institution n'a plus de raison d'être.

DÉGRADATION, cérémonie par laquelle en cas de crime, ou pour des raisons graves, un ecclésiastique était solennellement dépouillé de ses titres et attributions, avant d'être livré au bras séculier. Elle ne pouvait être pratiquée que par un évêque avec l'assistance de trois autres. Auj. elle peut être faite par un simple vote du chapitre sans autre formalité. Dans la dégradation officielle le condamné était successivement dépouillé de tous ses vêtements et ornements ecclésiastiques, l'onction sacrée lui était retirée par un acte symbolique, et sa tonsure disparaissait sous les ciseaux.

DEI GRATIA (par la grâce de Dieu), formule d'humilité, destinée aussi à relever la grandeur de leurs fonctions, que les évêques joignaient à leur titre au moyen âge. Félix II, 356, l'emploie en s'adressant à Cunibert de Cologne. Plus tard, quand, à l'exemple de Pépin, les princes adoptèrent la même formule, moins par humilité sans doute que pour affirmer leurs droits et leur indépendance, les év. y renoncèrent peu à peu et finirent par la remplacer, environ vers 1250, par ces mots: Divind et apos-tolicœ sedis gratiâ, ou une phrase analogue.

DÉISME. Système philos, plutôt que religieux. Il reconnaît un Dieu quelconque sans révélation, ou bien il réduit la révélation, s'il conserve le mot, au développement et aux progrès de la raison humaine; tantôt il soutient une prétendue religion naturelle, qu'il considère comme ayant existé de tout temps, et qui exclut les autres; tantôt il s'en tient à la simple possibilité de découvertes illimitées encore à venir et pleinement suffisantes, par la seule raison. Il nie le Dieu actif, vivant, agissant sur le monde, et il en fait une pure abstraction, une concession de l'esprit. L'idée de l'univers ^t la foi religieuse sont une seule et même chose. Le théisme, qui lui ressemble par certains points et notamment comme le contraire de l'athéisme, s'en distingue par une affirmation plus nette de l'action de Dieu sur le monde et de ses rapports avec la Création; il admet une révélation, une source première d'où s'est répandue la connaissance de Dieu, un livre, des prophéties, les miracles même. Il reçoit la foi en Dieu, tandis que le déisme ne croit qu'au Dieu qu'il crée lui-même. Le théisme peut être une religion; le judaïsme, qui portait en lui-même le germe d'un développement ultérieur, était théiste; de même l'ancien sabéisme, et auj. l'islamisme. Quant au déisme, conception sans principe et sans conséquence, tronc sans racine et sans fruit, il n'a de signification que par l'influence négative qu'il a exercée sur le développement du dogme chrétien. Réduisant les faits évang. à d'ingénieuses allégories et la doctrine à la morale, il est devenu le père de ce qu'on appelle le rationalisme vulgaire, acceptant tout, prêchant sur tout, mais expliquant tout à son point de vue restreint, et ne conservant du chrislianisme que les mots et l'apparence, si même il les conserve. Préparé par l'empirisme de Bacon et de Locke, il a tout ramené aux idées de Dieu, de vertu et de récompense, idées communes, admises comme axiô-mes par toutes les religions, acceptées par Voltaire dans ses bons moments, plus encore par Rousseau, et traduites dans la vie des peuples en 1793 par la proclamation de l'Être suprême, et de l'immortalité de l'âme. C'est en Angleterre surtout, aux 17®e et 18"* siècles, que le déisme s'est le plus sérieusement affirmé comme école, mais comme une école dont les disciples vont toujours plus loin que le maître. Ses principaux représentants ont été Ed. Herbert t 1648, auteur de deux écrits: La Vérité, et La Religion des Gentils; Ch. Blount + 1693; John Toland f 1722, auteur du Christianisme non mystérieux; Ant. Collins + 1729, auteur d'un Disc, sur la Libre pensée, et d'un Disc, sur les bases et les raisons de la relig. chrét.; Matt. Tindal, + 1733, auteur de: Le Christianisme aussi vieux que la création, etc. L'influence de l'école de Hobbes et de Hume donna an déisme anglais un caractère plus critique et plus sceptique que celui du rationalisme allemand qui se traîna plus d'une fois terre à terre. L'avènement du méthodisme wesleyen mit fin au crédit longtemps incontesté du déisme anglais. V. Chal-mers, Preuves du Christ; Lechler, Hist. du Déisme anglais; Rémusat, Hist. de la philos, en Angl., etc.

DELESSERT, famille protestante distinguée, originaire du C. de Vaud. Un de ses membres s'établit à Lyon vers 1718. Là naquit Étienne 30 août 1735, qui se fixa à Paris, fonda la Caisse d'escompte, épousa Mlle Boy de la Tour à qui Rousseau dédia ses lettres sur la Botanique, et f 18 juin 1816. 11 laissa 3 fils: Benjamin, 7 fois dépulé, 1773-1847,financier et philanthrope; Gabriel, 1786-1858, général et préfet de police; François, né 2 avril 1780, f 15 oct. 1868, député de 1831 à 1848, membre du Con-sist. de Paris pendant 53 ans, membre de l'Institut, président de la Caisse d'épargne, collectionneur plein de goût, généreux, et s'intéressant à toutes les œuvres philanthropiques et religieuses.

DÉMÉTRIUS. Outre les hommes de ce nom, dont la place est dans leDict. de la Bible, l'histoire ecclés. mentionne un év. d'Alexandrie 189, d'abord vigneron, que l'év. Jean, à la suite d'une apparition d'ange, aurait nommé son successeur après que Démétrius, par l'épreuve du feu, aurait constaté sa virginité et celle de sa femme. C'est lui qui appela Origènes à la place de catéchiste, et lui fit faire un voyage de mission en Arabie; mais celui-ci s'étant fait ordonner prêtre pendant un voyage en Palestine par les év. du pays, Démétrius prit la chose en mal, comme contraire aux usages de l'Église, et l'excommunia 232.

DÉMIURGE, v. Gnosticisme.

DENK, Jean. Né en Bavière, correcteur d'imprimerie à Bâle 1521, il suivit les leçons d'GEcolampade, fut nommé en 1523 recteur de l'école de Sebald à Nuremberg, où il fit la connaissance de Mllnzer. Banni pour ses opinions anabaptistes, il se fit encore bannir d'Augsbourg, puis de Strasbourg, travailla dans le Palatinat, et revint à Bâle où il f de la peste 1528. Sa doétrîne était un mélange de mysticisme et de raison; il regardait le péché comme une folie; il croyait à la voix intérieure, et n'attachait qu'une importance moindre à la Bible et aux sàfcrements. Il niait la préexistence de Christ, insistait sur la communion des saints et admettait le rétablissement final.

DÉNONCIATION èvangèlique. Les paroles Matt. 18, 15-17 ont été exploitées dans l'Égl. pour étendre la juridiction ecclésiastique et papale à toutes les questions d'intérêt temporel, où le plaignant estimerait que son frère a péché contre lui. Innocent III invoqua ce texte 1204 pour régler le difTérend entre Philippe de France et Jean d'Angleterre. Toutefois, et malgré l'appui des Décrétâtes, cet énorme empiétement sur la compétence des tribunaux civils, n'a pas obtenu la sanction de la pluralité des canonistes.

DENTIÈRE, Marie, abbesse d'un couvent dans les Flandres, renvoyée à cause de ses opinions religieuses, accentuées peut-être par un caractère difficile, trouva un asile provisoire chez la reine de Navarre, et épousa, croit-on, d'abord un nommé Robert, ancien curé de Tournay, dont elle eut 5 enfants, puis en secondes noces le réformateur Froment, qu elle no rendit pas heureux. Elle a écrit une « Épistre très utile, » adressée à la reine de Navarre, où elle prouve par des citations bibliques que la femme a autant de droits que l'homme « d'es-crire chose sainte et bonne. » Il est probable aussi qu'on lui doit la Chronique du Marchand de Genève, qui raconte en 21 pages, dans un style vif et leste La Guerre et la Deslivrance de la ville de Genesve (réimpr. 1881 avec notes, par Alb. Rilliet). Ce livre fait la contrepartie de la Chronique de Jeanne de Jussie.

DENYS. Outre l'Aréopagite, qu'une légende faitév. de Saint-Denis, l'hist. ecclés. mentionne plusieurs hommes de ce nom. 1° L'év. de Co-rinthe, 170, dont Eusèbe a conservé quelques fragments, lettres, circulaires aux égl. etc. — 2° Denys d'Alexandrie, dit le Grand; ami et disciple d'Origène, il poussa très loin la méthode alexandrine, étridiant les auteurs païens et les hérétiqiles. Il cite la parole, apocryphe, de Jésus: que le chrétien doit mener une vie de changeur. Directeur de l'école des catéchètes 233, nommé évéque 248. Pendant la persécution de Dècius, des paysans amis l'enlevèrent de force et malgré lui et l'emmenèrent en Lybie jusqu'en 251. Sous Valérien il fut de nouveau exilé en Lybie 257, revint à Alexandrie 260 et 126V II intervint dans les controverses contre Novatien et Paul de Samosate et écrivit contre le chiliasme. Dans sa lutte contre les sabelliens il distingua trop les trois personnes de la Trinité et refusa d'employer le mot de homo'ousios en parlant du Fils, ne le trouvant pas dans la Bible. Devenu suspect il se justifia et constata par deux écrits sa communauté de foi avec l'Église. Il n'admettait pas l'identité de Jean l'Évangéliste avèc celui de l'Apocalypse. Il ne reste que des fragments de lui, conservés par Eusèbe. — 3° Denys de Calabre, anachorète, nommé pape 259 après un an d'interrègne. On a 3 lettres de lui, une sur le baptême des hérétiques, dans l'esprit de son prédécesseur Étienne; une, dans un sens contraire, sur la Trinité, adressée aux év. d'Égypte (l'Éternité du Fils dans le Père); et une à l'égl. de Césa-rée, Cappadoce, pour la consoler dans l'épreuve. — 4° Apôtre des Gaules, si légendaire que son existence même n'est pas certaine; il est simplement nommé par Grégoire de Tours. On le fait arriver de Rome vers 250; il fonda plus, églises; il aurait souffert le martyr avec Rustique et Éleuthères, sous Valérien, 272, et quelques-uns ajoutent que c'est lui qui aurait porté sa tête entre ses mains après sa décollation. Son supplice aurait eu lieu à Paris, Saint-Denis, ou Montmartre (mon* martyrum). — 5° Denys, surnommé Le Petit, soit à cause de sa taille, soit par modestie, Scythe d'origine, vint à Rome vers 500, fut nommé abbé d'un monastère, fit un Recueil de canons apostoliques, Décrétâtes, etc.; traduisit en latin plusieurs ouvrages grecs, tels que Pacôme; écrivit sur la discipline ecclés., et f 540 ou 556. Il est surtout connu par ses travaux de chronologie; c'est lui qui a introduit l'ère actuelle, dite dyo-nisienne, d'après laquelle on compte les années depuis la naissance de Christ (ab incarnaliotie), qu'il fait tomber sur l'an 754 de Rome, avec une erreur probable de 4 ans; c'est l'an 750 qu'admettent auj. les chronologistes.

DÉN

DÉPOSITION, acte par lequel un ecclésiastique était déchu de ses fonctions et quelquefois de son titre; v. Dégradation.

DÉPOUILLES. On appelle ainsi dans TÉgl. ce qu'un ecclés. laisse de biens en mourant, peu ou beaucoup; de bonne heure l'usage s'introduisit tout naturellement de considérer comme acquise à l'église cette propriété du défunt; on créa ce qu'on appelait le droit aux dépouilles, jus spolii vel exuviarum, véritable spoliation déguisée. C'était d'abord en faveur des pauvres que s'exerçait cette confiscation; puis on en étendit tes bienfaits à l'entretien de l'église. Le 3me concile de Carthage 397 régla la chose, et ne permit aux clercs de disposer par testament que de ce qu'ils avaient reçu par voie d'héritage ou comme don personnel; le reste revenait de droit à l'église. Le code Jus-tinien reproduisit une disposition semblable. Mais la cupidité sut rendre illusoires ces ordonnances, et les abus se multiplièrent au point que des clercs se précipitaient sur ce que pouvait laisser un de leurs confrères, mort, ou près dè mourir, et se l'appropriaient sans pudeur. De nombreux conciles durent intervenir, Chal-cédoine 451, Taracco 516, Paris 615. Grégoire de Tours signale à cet égard des faits scandaleux; un év. de Marseille fut complètement dépouillé par son entourage, môme avant d'avoir expiré. Un capitulaire de Charles-le-Chauye et surtout la centralisation croissante de l'Égl. contribuèrent à réprimer ces excès, mais ce qui fut plus efficace encore, ce fut l'intervention du pouvoir temporel, qui revendiqua pour son propre compte et comme faisant partie de sa régale, les biens laissés par un ecclésiastique sans qu'il en eût disposé d'une manière formelle. Les seigneurs, grands et petits, abusèrent à leur tour de cette façon de s'enrichir, et l'Égl. protesta dans plusieurs conciles, Clermont 1095, Latran 1139. Les empereurs depuis Frédéric 1er renoncèrent en apparence à leur droit, mais ils ne cessèrent réellement pas de l'exercer quand ils le purent; les princes, les évêques, les abbés, les chapitres, les papes en firent autant de leur côté, et pendant plusieurs siècles, en dépit des lois et des décrets, ce fut à qui mettrait la main sur les héritages abandonnés; les familles seules semblaient n'avoir aucun droit. Innocent IV fut repoussé dans ses prétentions par le roi d'Angleterre 1246, mais Clement V fut plus heureux dans ses négociations avec le duc d'Anjou, à qui il abandonna une part des bénéfices. Toutefois Charles VI reprit ses droits 1385, et dès lors la France n'a plus permis qu'il y fût porté atteinte; Louis XI repoussa ènergiquement les tentatives de Pie II 1464. C'est surtout depuis le conc. de Constance que le droit de tester a été généralement rendu ou reconnu aux ecclésiastiques de tous ordres, avec la seule réserve qu'ils léguassent aussi quelque chose à l'Église. On sait, toutefois que les papes ont souvent trouvé moyen d'hériter de leurs cardinaux, mais cela relève du code civil et criminel plutôt que d'une institution régulière.

DÉP

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DERVICHES, du persan dervis, pauvre; religieux musulmans, qui rappellent les moines du catholicisme, avec cette différence qu'ils ne font pas de vœux éternels, quoiqu'ils soient censés vivre dans la tempérance et la chasteté. Les uns pratiquent la vie commune dans des monastères; les autres vivent isolés et se livrent à la contemplation; d'autres voyagent, prêchent ou enseignent. Plusieurs mendient, et pour mériter les aumônes qu'ils réclament, ils font des tours d'adresse et amusent les fidèles. L'institution date des premiers temps de l'Islam, et comme elle est dans la nature des choses, son introduction a été facile. Les derviches se divisent en un certain nombre d'ordres différents. Leur principal couvent est à Koniéh, Ca-ramanie; ils en ont un beau à Damas.

DESCARTES (latin Cartesius), René, célèbre philos., homme universel, adversaire décidé d'Aristote. NéàLahaye, Touraine, 1596; caractère réfléchi, inquiet, mécontent dès l'enfance; toujours à la recherche de quelque chose. L'étude ne lui suffisant pas, il se jeta dans les plaisirs; ce fut pire encore. Il embrassa la carrière des armes et servit sous Maurice de Nassau et sous le duc de Bavière, mais il n'y trouva que le vide. Il se mit à voyager, visita l'Italie, l'Allemagne et la Hollande, et après avoir partout appris quelque chose et partout observé, il prit la résolution de tout oublier et de reconstruire pour son propre compte tout l'édifice de la science. Il partit de son célèbre enthymême: Je pense, donc je suis, qui a donné lieu a tant d'interprétations différentes; et c'est de cette idée qu'il est arrivé à l'idée de Dieu. Les idées sont innées, mais elles correspondent à une réalité. Le doute c'est l'imperfection, mais il suppose la perfection, et l'être qui seul réalise cet idéal, c'est Dieu, En dehors de Dieu il y a l'univers, c.-à-d. l'esprit et la matière, deux substances distinctes qu'on ne peut nier, quoiqu'on ne puisse expliquer leur action réciproque; de là une tendance au dualisme, qui s'est accentuée davantage encore chez quelques-uns de ses disciples. C'est en Hollande surtout qu'il travailla et qu'il publia ses principaux ouvrages, notamment son Disc, sur la Méthode 1637. C'est aussi là qu'il rencontra ses plus redoutables adversaires, à la tête desquels était Voétius d'Utrecht, qui alla jusqu'à l'accuser d'athéisme 1643. L'étude de ses livres fut interdite en Hollande, en Suisse et dans plusieurs parties de l'Allemagne, en sorte qu'elie a exercé peu d'influence sur la théol. protestante. Il a écrit sur une foule d'autres sujets étrangers à la théol., sur la physique, les mathématiques, l'astronomie, etc. Très estimé dans le monde savant, respecté de ses adversaires, recherché par plusieurs têtes couronnées, pensionné de Maza-rin, il accepta l'invitation de Christine de Suède et arriva à Stockholm vers la fin de 1649, mais l'hiver lui fut fatal et peu de mois après il succombait à la rigueur du climat, f 1650- Ses restes furent ramenés en France 1667 et déposés avec honneur, mais sans oraison funèbre, dans l'égl. de Sainte-Geneviève (auj. Panthéon). Port-Royal a suivi sa méthode, sans accepter son système; on peut en dire autant de Féue-lon, de Bossuet et de Bayle, qui furent cartésiens par l'esprit, tout en aboutissant à des conclusions différentes. Vie par Baillet 1691, Éloge par Thomas 1761, Œuvres réimpr. par Cousin, Paris 1824-1826.

DESCENTE de Christ aux enfers. Cet article dn symbole, qu'on a cherché à justifier par Rom. 10, 7. Act. 2, 31. Eph. 4, 8-10 et surtout pari Pier. 3, 19. ne s'est introduit que lentement dans l'Église. Il apparut pour la Ire fois an 4me siècle dans le symbole d'Aquilée, et ne fut généralement admis qu'au 7me. H signifiait qn'entre sa mort et sa résurrection le Seigneur était descendu dans le séjour des morts. On y ajouta l'idée qu'il était allé pour délivrer les bons juifs et les païens vertueux; c'est encore en ce sens que l'entend l'Égl. grecque. Plus tard, avec les nouveaux dogmes du purgatoire et des limbes, l'Égl. romaine entendit que Jésus avait été dans ces sombres régions pour délivrer ceux qui y étaient retenus par la puissance du démon. L'Égl. réformée n'y vit qu'une mention de la mort en général, avec ses angoisses et ses terreurs. L'Égl. luthérienne y vit une descente triomphante, Jésus se montrant aux morts comme vainqueur de la mort, et aux damnés comme leur juge victorieux; tandis que d'autres y voyaient au contraire le dernier degré de l'abaissement, la dernière étape de l'œuvre expiatoire. Schleiermacher ne voit qu'un mythe dans le passage de Pierre; d'autres y cherchent un sens figuré. Plusieurs enfin croient que Jésus n'est pas descendu seulement aux enfers, aux lieux inférieurs, mais réellement en enfer, pour souffrir les tourments en lieu et place des rachetés (Formule de Concorde). Pour quelques-uns le passage de Pierre laisserait entrevoir les perspectives d'un rétablissement final. Toutes ces questions eschatologiques restent bien obscures.

DÉSERT (Église du), nom que l'on donna à l'Église réformée de France, après que la révocation de l'Édit de Nantes eut réduit les prolestants à ne plus se réunir que la nuit ou dans des lieux écartés; v. Camisards, etc.

DES MARETS, v. Marets.

DESSERVANT, nom que les Articles organiques du 8 avril 1802, rédigés en application da Concordat de 1801, donnent aux prêtres nommés directement par les év. pour aider les rurés chargés de paroisses trop populeuses ou trop disséminées. La loi ne stipulait qu'un seul curé par canton, payé par l'État, mais elle prévoyait que cela ne pouvait suffire, et elle antorisait l'évêque à nommer autant de desservants, succursalistes ou vicaires, que les besoins l'exigeraient. Payés indirectement par les communes ou par l'État, qui met des fonds à la disposition de l'évêque, ils sont révocables par ce dernier qui peut les envoyer où il veut et n'a de comptes à rendre à personne. Cet état d'infériorité et de dépendance du bas-clergé, qui n'a qu'un recours illusoire auprès du synode provincial, soulève de grandes objections et présente de nombreux inconvénients, parmi lesquels on cite l'abus qui a été fait des mandats fictifs, l'évêque recevant des allocations pour plus de desservants qu'il n'en emploie.

DESUBAS, v. Majal.

DÉTERMINISME et Indêterminisme. Il est difficile, pour ne pas dire impossible, de préciser exactement les rapports qui existent entre la volonté de Dieu et celle de l'homme, la souveraineté absolue de l'un étant aussi évidente pour l'esprit que la liberté de l'autre est évidente pour la conscience. Les théol. de tous les temps se sont heurtés à ce problème, et ils n'ont pu donner une solution quelconque sans sacrifier l'un ou l'autre des deux termes. Si l'on admet que la volonté soit le produit direct et spontané de la liberté morale de l'homme, c'est de Fin-déterminisme. Le déterminisme admet au contraire que la volonté, ou ce que l'on nomme ainsi, est le résultat inconscient, mais nécessaire et fatal, et comme la simple résultante de causes extérieures et étrangères, telles que le tempérament, l'éducation, les circonstances, en sorte que l'homme ne serait plus réellement libre. Luther et Schleiermacher sont déterministes dans un esprit religieux, en ce sens que Dieu est bien Fauteur de tous les mouvements de notre volonté; mais Augustin et Calvin vont plus loin, et donnant à leur pensée une forme dogmatique, ils ont accentué dans la doctrine de la prédestination l'expression la plus tranchante du déterminisme. Et plus on formule d'une manière mécanique la nature des rapports de Dieu avec l'homme, plus aussi l'on se rapproche du fatalisme musulman, qui aboutit à faire de l'homme une machine inerte et sans volonté. Les philos, ont rivalisé avec les théologiens pour expliquer ce mystère et, chose étrange, ceux qui repoussent le plus en religion la prédestination, semblent l'admettre en philosophie et dans la pratique, soit, comme Leihnitz, au nom de l'harmonie générale qui ne saurait être troublée par la liberté de l'individu; soit, comme les panthéistes, parce que l'individu n'est qu'une manifestation de l'ensemble; soit, comme les matérialistes, parce qu'ils estiment que la volonté n'est que la traduction des modifications de la matière, du sang ou du cerveau, diversement influencés. L'homme sage fera bien d'ajourner à plus tard la conciliation de ces deux vérités aujourd'hui inconciliables, et de s'en tenir dans la pratique à ce que sa conscience lui dit de sa liberté et de sa responsabilité morale.

DEUSDEDIT, v. Dieudonné.

DEUTÉROCANONIQUE (canonique de second ordre), nom donné par les catholiques aux Apocryphes de FA. T. Quelques critiques protestants désignent aussi sous ce nom les livres du

N. T. qui, selon eux, n'ont pas pour auteur un apôtre, ainsi l'Ép. aux Hébreux.

DEUTSCHMANN, Jean, né 1625, f 12 août 1706, prof, à Wittenberg 1662, gendre de Ca-lov; essaya de prouver que la théologie d'Adam (Th. paradisiaca) était la même que celle de la Formule de concorde. Adversaire de Calixte II et de Spener, il leur trouva 263 hérésies.

DEVAY, ou plutôt Matthias Biro, le réformateur de la Hongrie. Né à Déva, Transylvanie, au commencement du 16m« siècle, il étudia à Cracovie, reçut les ordres et se fit moine. Sous l'influence des idées de la Réform. il se rendit à Wittenberg 1529 et devint le commensal de Luther. Nommé pasteur à Ofen 1531, il déploya une grande activité, si bien qu'il fut arrêté, conduit à Vienne pour être examiné par l'év. Faber, et par deux fois jeté en prison 1532-1534. La protection du comte Nadasdy le fil élargir et il reprit son ministère comme pasteur et doyen à Debreczin. Lors de l'invasion des Turcs il dut s'enfuir, 1541, vint à Bâle où il avait déjà vu Grynâus en 1537, puis à Zurich, où il adopta les idées zwingliennes, et c'est à son influence qu'il faut attribuer le caractère spécial de la réf. en Hongrie. Il retourna dans son pays où il f, on ne sait à quelle époque, en tout cas avant 1547. Il a trad. le N. T. 1531, et composé plusieurs ouvrages élémentaires de religion, étude du Décalogue, du Symbole, de Notre Père, etc. Son livre Le sommeil des saints eut un très grand succès.

DÉVOLUTION (droitde). Lorsque le titulaire ou l'ayant droit d'un bénéfice ecclés. n'entre pas en jouissance, ou n'y pourvoit pas dans un délai déterminé, son supérieur immédiat a le droit, de par les décrets des deux Latran 1179 et 1215, d'y pourvoir à sa place ex jure devo-luto. D'après le concordat de Vienne 1418, le droit de nomination à un évêché passait au pape et non à l'archev., si l'év. présenté n'avait pas été élu suivant les règles canoniques. En revanche, si le supérieur en question laisse passer 3 mois sans faire usige de son droit, ce droit fait retour au titulaire ex jure postlimini. D'une manière générale le droit de dévolution consiste dans le droit donné au supérieur d'aviser pour le mieux lorsque, pour divers motifs, l'intéressé direct néglige des démarches qui lui incombent.

DE WETTE, v. Wette.

DEXTER, Flavius Lucius, fils de l'év. Pacian, de Barcelone. Jérôme le compte au nombre de ses amis, et lui attribue un livre intitulé Omni-modum historia. Le jésuite La Higuera prétendit en avoir découvert le mss. à Fulda et le fit imprimer, mais la fraude fut bientôt dévoilée.

DEZA, successeur de Torquemada comme grand inquisiteur, fit brûler 2592 suspects d'hérésie; 896 furent en outre brûlés en effigie et 34,952 personnes condamnées à des peines graves ou infamantes.

DEU

DIACRES, Diaconesses, Diaconie. Indépendamment des diacres, dont l'institution est racontée Act. 6, et dont le service était essentiellement matériel, l'Église eut de bonne heure une catégorie d'ecclésiastiques subalternes chargés d'assister le prêtre dans la distribution de la Cène et de veiller à l'entretien des vaisseaux sacrés et à l'ordre du service. Ils sont mentionnés dans ce sens par Justin. Plus tard leurs attributions s'étendirent, ils eurent le soin des pauvres, et on les rangea parmi les membres du clergé, mais sous la juridiction immédiate de l'évêque. Ils appartenaient aux ordres majeurs, et furen! soumis au célibat comme les autres, quand celte règle prévalut. Ils sont considérés comme les aides des prêtres, et on leur confie souvent la prédication. Ils reçoivent la consécration de l'év. par l'imposition des mains, mais sans onction d'huile. L'Égl. luthérienne a conservé cette institution, de même que l'Égl. anglicane; elles ont aussi des sous-diacres et des archidiacres. Dans l'Égl. réformée on rattache ces fonctions à l'institution apostolique, et les diacres sont surtout appelés à rendre des services d'un ordre temporel; parfois ils siègent comme anciens dans les conseils de l'Église. — Quant aux diaconesses, mentionnées seulement Rom. 16, 2., il n'en est plus question depuis les conc. d'Orange 441 et d'Épaone 507, sauf dans l'Égl. grecque où elles se sout conservées jusqu'au 12«*e siècle. — Ce qu'on appelle auj. diaconesses, ce sont des dames qui, après une éducation spéciale, se consacrent soit au soiu des malades, soit à l'enseignement. L'idée avait déjà reçu un commencement d'exécution sous les La Mark à Sedan, vers 1620. Le malheur des temps l'empêcha de se développer. Auj. il existe plusieurs maisons-mères sur le continent; la plus ancienne est celle de Kaisers-werth, fondée en 1836 par le pasteur Fliedner f 1864; elle ne compte pas moins de 110 stations dans diverses parties du monde; quelques-unes sont splendides, en Syrie, Égypte, etc. D'autres maisons existent encore, et parmi les plus anciennes il faut nommer Paris 1841. S iint-Loup 1842, Strasbourg 1842, Dresde 1844, etc. — On donne le nom de diaconat tantôt à un conseil de diacres, tantôt à une dépendance de l'église, destinée à recevoir les ustensiles, vêtements, livres de culte; tantôt enfin chez les grecs, au manuel qui indique les fonctions des diacres.

DIASPORA, mot grec qui signifie dispersion, ou les dispersés, et qui est employé dans ce sens Jean 7, 35. Jacq. 1, 1. 1 Pier. 1, 1. pour désigner les juifs demeurant hors de Jérusalem et disséminés dans l'empire. Les Fr. moraves l'ont adopté pour désigner de même ceux de Jeuirs membres qui vivent éloignés des centres et dispersés dans le monde. Il s'emploie par extension, dans les Égl. évangéliques, en parlant des protestants disséminés parmi les populations catholiques.

DIA

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DIAZ, Jean, né à Cuença, Cas tille, étudia à Paris, où il se convertit au protestantisme, 1540; vint à Genève avec Budé et Crespin, chaudement recommandé à Calvin; passa de là à Strasbourg, où Bucer se l'adjoignit pour l'accompagner à la diète de Ratisbonne, déc. 1545. L'avocat du pape, Malvenda, lit tous ses efforts pour le ramener au catholicisme, et n'ayant pas roussi, il excita Alphonse, fr. aîné de Jean, à le faire assassiner. Celui-ci partit de Rome avec un bourreau solide, qui d'un seul coup de hache assomma Jean à Neubourg, sur le Danube, la nuit du 27 mars 1546. Les deux assassins furent arrêtes à Augsbourg, et ils allaient être jugés quand l'emp. et le pape évoquèrent la cause à Rome, sous prétexte que le fratricide était un ecclésiastique. Les assassins furent acquittés, presque avec des éloges, mais Alphonse finit par se pendre à Trente 1551. Portrait par Bèze, dans ses Icônes.

DICTATUS GREGORH, livre sur le gouvernement de l'Egl. et le droit ecclésiastique, faussement attribué à Grégoire VII.

DIDEROT, Denis, fils d'un coutelier, né à Langres 1713, f 1784. Destiné à l'état ecclésiastique et élève des jésuites, il préféra plus tard l'étude du droit, et finit par suivre son goût pour la littérature et les sciences. Après quelques trad. de l'anglais, il publia ses Pensées philos., fonda un Dictionn. universel de médecine; écrivit quelques drames et quelques romans, composa sur commande des Sermons pour vivre, et fut avec d'Alembert le fondateur et le principal auteur de l'Encyclopédie. Athée et matérialiste, il mit son enthousiasme et son imagination au service de ses négations. Sa fille, de Vandeuil, a écrit des Mémoires sur sa vie.

DIDYME, le jumeau, surnom de Thomas, a été aussi le nom ou le surnom de plusieurs hommes: 1° Y Aveugle, né 308 à Alexandrie, f 395, fut malgré sa cécité l'un des plus grands savants de son temps, et pendant 50 ans le directeur des catéchistes d'Alexandrie. Ennemi des ariens, il fut condamné comme hérétique au 2d conc. de Nicée, pour n'avoir pas pris parti contre Origène. Presque tous ses écrits sont perdus; on a cependant encore son livre Du Saint-Esprit, trad. par Jérôme, un travail sur la Trinité, un traité contre les manichéens. — 2° Gabriel, né 1487 à Joachimsthal, Bohême, ermite 1502, prêtre 1513, se convertit à la réforme et prêcha à Zwickau. Un des premiers à Wiitenberg il travailla à la suppression de la messe, et en 1521, au couvent des Augustins, il demanda que les portes en fussent ouvertes. Successivement pasteur à Altenbourg et à Tor-gau, il eut des difficultés à cause de son caractère inquiet et de ses relations trop intimes avec Carlstadt et More, fut déposé par Maurice de Saxe 1549, pour avoir refusé l'Intérim, et f 1553 dans la misère.

DIEPENBROCK, Melchior (comte de), né à Bocholt 6 janv. 1798. Élève de l'école militaire de Bonn, il fit la campagne de 1814, fut renvoyé du service pour cause d'insubordination, rencontra Sailer en 1817, qui le décida à faire ses études au séminaire de Mayence et l'appela auprès de lui à Ratisbonne 1521. Consacré prêtre en 1823, chanoine en 1830, vicaire-général en 1842, Diepenbrock fut nommé prince-évêque de Breslau en 1845, cardinal en 1850, f 1853. De l'école de Sailer, à la fois mystique et pratique, il se prononça contre le dogme de l'Immaculée conception. On a de lui quelques Traités et des Sermons.

DIES FIXA. Quand une fête mobile tombe sur un autre jour de fête, ce dernier, si on ne peut le faire coïncider avec le premier, est ajourné à un jour autre, qui prend le nom de die* fixa, jour fixé.

DIES IRiE, séquence, ou final de la messe pour la Toussaint et la fête des morts. Ce chant date du 13">e siècle et était déjà en usage dans l'Égl. au 14me. On l'attribue à Thomas de Cé-lano, vers 1230; d'autres cependant l'attribuent à Bonaventure, Grégoire4e-Grand, saint Bernard ou au cardinal Ursins. Il a été souvent traduit ou imité.

DIETHER, d'Issenbourg, év. de Mayence, 1459-1482, fonda l'université de cette ville.

DIETRICH, Veit, né 1506 à Nuremberg, étudia à Wittenberg, fut de 1527 à 1535 le secrétaire de Luther qui l'emmena avec lui à Co-bourg et à Augsbourg; fut nommé pasteur à Nuremberg, eut des difficultés avec Osiander, parce qu'il voulait l'absolution collective et qu'il avait renoncé à l'élévation de l'hostie; refusa de se soumettre à l'Intérim d'Augsbourg, et son conseil ayant été contraint d'y adhérer, il était sur le point de donner sa démission, quand il f 1549. Outre plusieurs travaux et explications bibliques, il a publié un Guide à l'usage des pasteurs de campagne, qui a longtemps servi et dont on se sert encore dans quelques districts de Bavière.

DIEU (Louis de), v. Jean.

DIEUDONNÉ, deux papes de ce nom, l'un et l'autre presque inconnus: lo Deus-dedit 615-618, fils d'un sous-diacre; la légende lui attribue la guérison de plusieurs lépreux. Deux décrétâtes inauthentiques sont placées sous son nom: Tune sur le mariage entre parrains, l'autre sur l'élection des papes. — 2° A deo datas, ou Déodat 672-676; ardent défenseur des deux volontés en Christ.

DIGNITÉ, terme à peu près synonyme de prélature, se dit de charges ecclèsiast. importantes, ayant une juridiction spéciale ou un caractère permanent, avec droit à certains honneurs et même à des privilèges civils. Les papes ont les dignités pontificales; les cardinaux, les nonces et les abbés mittrés ont des dignités secondaires; les doyens de chapitres, qui n'ont pas de juridiction, n'ont que des dignités honoraires.

DILLER, Jean-Michel; prévôt du couvent des carmes à Spire, prêchait l'Évangile dès 1529, mais sans quitter son poste; son conseil était avec lui contre l'évêque. Il dut s'enfuir en 1548 quand l'emp. vint à Spire, et se réfugia en Suisse; il trouva une place à Bâle; mais appelé en 1552 à Neubourg, Bavière, puis à Heidelberg, il travailla à la réforme avec Brenz, et fut chargé sous Frédéric III de plusieurs missions importantes, à Worms 1557, Poissy 1561, Maulbronn 1564. f 1570.

DIMANCHE. V. les Actes du congrès pour la santific. du Dimanche. Genève 1877.

DIMANCHE (Écoles du). On comprend sous ce nom des institutions et des organisations assez différentes. Charles Borromée avait fondé comme œuvre de bienfaisance, des écoles où l'on enseignait le dimanche les premiers éléments à des enfants qui ne pouvaient suivre l'école pendant les jours ouvrables. En Allemagne, depuis l'époque de la Réformation, on réunit les enfants le dimanche pour leur donner une instruction adaptée à leur âge. Ailleurs ce sont des répétitions intéressantes du travail fait pendant la semaine; l'abbé Felbiger de Sagan, Silésie, avait établi en 1774 des classes de ce genre en Autriche et dans l'Allemagne catholique. Mais l'œuvre immense qui porte aujourd'hui le nom d'Éc. du Dimanche remonte à un imprimeur de Glocester, nommé Robert Raikes, qui en 1782 eut le premier l'idée de réunir ainsi quelques enfants pour les entretenir de leur salut et leur faire connaître la Bible. Le succès fut presque immédiat; en 1791 toute l'Angleterre et presque tout le nord de l'Amérique étaient couverts d'écoles du dimanche, et elles se répandirent de là sur Brème, Hambourg, la Hollande, la France, la Suisse; partout où il y avait quelque vie religieuse, l'école devint une annexe de l'église et sa meilleure pépinière. Des laïques pieux, hommes et femmes, se consacrent à cette tâche sous la direction du pasteur, et les magistrats les plus haut placés, des présidents des États-Unis ou de la Chambre des Lords n'ont pas regardé comme indigne d'eux d'être moniteurs dans ces écoles et d'avoir un groupe d'élèves à surveiller, à interroger et à faire réciter. Quelques-unes de ces écoles sont fort nombreuses et demandent par conséquent un plus grand nombre de moniteurs et de monitrices, et quand les travaux dans les groupes sont terminés, le président les réunit pour récapituler la leçon et leur adresser quelques exhortations pratiques. Plusieurs systèmes sont employés. Il y a déjà, même en français, toute une littérature et des journaux pour les écoles. Lausanne et Paris en sont les principaux centres.

DIMES, ou décimes. Les redevances que les Hébreux devaient payer à leurs prêtres et lévi-les passèrent bientôt et assez naturellement dans l'Égl. chrétienne; pas dès l'abord cependant, puisque la distinction entre laïques et ecclésiastiques n'existait pas, et que plusieurs apôtres tenaient à honneur de gagner leur vie, mais aussitôt que les égl. constituées comprirent que leur devoir était de subvenir aux besoins de leurs conducteurs. Les dons volontaires étaient dans la nature des choses; ils se traduisirent en dîmes par souvenir et par la tradition de l'A. T. C'est dans les Gaules qu'apparaissent à cet égard les premières prescriptions positives; le conc. de Tours 567 les recommande, celui de Mâcon 585 les ordonne sous peine d'excommunication; les pénitenciaux dès cette époque mentionnent comme un péché la fraude sur les dîmes. Les fermiers d'une terre appartenant à l'Égl. devaient lui payer la double dîme, sans détriment du cens dû à l'État. Pépin et surtout Charlemagne firent payer rigoureusement ce tribut dû à l'Église, et l'imposèrent même aux peuples vaincus; de là de fréquents soulèvements, parce que ces peuples le jugeaient déshonorant. A la longue la dîme perdit son caractère ecclésiastique; elle ne fut plus qu'une redevance, un bénéfice, une rente qui pouvait passer entre les mains d'un seigneur ou d'un laïque quelconque. Les abus se multiplièrent au point que le 3®* conc. de Latran 1179. voulant y porter remède, n'osa pas toucher aux droits acquis, et se borna à stipuler qu'à l'avenir les dîmes ne pourraient plus être usurpées par des laïques. Prélevées d'ordinaire par les évêques, elles passèrent ensuite dans les mains des prêtres, qui devaient en présence de témoins en faire trois parts, rune pour leur entretien, l'autre pour l'église, l'autre pour les pauvres. Lors de la réforme les anabaptistes de la Suisse en prêchèrent l'abolition, mais ceux d'Allemagne maintinrent le principe que les paroisses doivent à leurs pasteurs un entretien convenable. Luther approuvait aussi la dlme, mais il voulait qu'elle fût remise au gouvernement chargé de pourvoir à tous les frais du culte. La révol. française la supprima définitivement, tantôt avec, tantôt sans indemnité. Le moyen âge avait déjà permis, dans certaines circonstances, le rachat de la dîme pour une somme déterminée.

— La Dime de Saladin est l'impôt que préleva Clément III en 1188, pour faire face aux frais de la 3me croisade, contre Saladin. Il demanda de tout prêtre ayant un bénéfice, et qui ne prendrait pas part à l'expédition, la dîme de son revenu d'une année.

DIMINUTION de bénéfice (en latinderninutio). Toute obligation nouvelle, ou servitude, mise à la charge d'un bénéfice, lui ôte nalurellement de sa valeur, le déprécie, le diminue. L'équité demande que des changements de ce genre n'aient lieu que lors de la vacance d'un bénéfice ou d'accord avec les intéressés.

DIMISSORIÀLE, attestation qu'un prêtre donne à un paroissien pour l'autoriser à s'adresser au prêtre d'une autre paroisse pour l'accomplissement d'un acte religieux, mariage, baptême, etc. Cette pièce ne peut être refusée, si d'ailleurs la question financière est liquidée. Les prêtres ont également besoin d'une dimis-sorialede leur èvêque, s'ils veulent fonctionner, *>t surtout s'ils veulent être consacrés dans un autre diocèse. Le conc. de Trente a des prescriptions sur la matière.

DINTER, Gustave-Frédéric, né à Borna 29 févr. 1760, pasteur à Dresde, puis à Kônigs-berg, prof, de théol. f 1831. S'occupa beaucoup d'éducation d'après les principes de Lancaster et de Pestalozzi; il eut un moment une grande popularité, mais est auj. tombé dans l'oubli. Rationaliste, mais* animé de sentiments religieux, il a publié une Bible pour les écoles qui a soulevé de nombreuses objections.

DIOCÈSE, district, ou circonscription sur laquelle s'étend l'autorité d'un èvêque. Le fait que primitivement l'év. avait seul le droit de baptiser, prouve que le diocèse et la paroisse n'étaient qu'une seule et même chose, et que c'est l'accroissement du nombre des fidèles qui seul, en obligeant d'augmenter le nombre des pasteurs, a donné un certain relief, mais pas plus d'autorité, au pasteur de l'église-mère. De là aussi les nombreux évêchés de l'Italie et de Htàent, qui se sont formés à une époque où Tépiscopat n'était pas essentiellement un des degrés de la hiérarchie. Dans les Gaules et en Allemagne ils représentaient davantage l'administration ecclésiastique, et les diocèses sont aussi beaucoup plus étendus. La création d'un évêché est un droit réservé du pape, mais la sanction de l'État est nécessaire pour fixer la circonscription. Les constitutions diocésaines, ou statuts qui règlent l'administration de chaque diocèse, devraient être élaborés par les synodes diocésains, mais comme ceux-ci ne fonctionnent presque plus, c'est l'év. qui y pourvoit par des lettres pastorales et des ordonnances, sous sa propre responsabilité et sans qu'il soit besoin de la ratification du pape.

DIOCLÉTIEN, C.-Valerius-Jovius-Aurelius, né 245 à Dioclès, près Salone, Dalmatie, était fils d'un affranchi et servit comme simple soldat. Après le meurtre de l'emp. Nuniérien et de son fils Car us 284, il tua de sa propre main Aper le meurtrier et fut proclamé empereur par les soldats à Nicomédie. Il s'adjoignit Maximien comme auguste en occident, Galère et Constance Chlore comme césars, c.-à-d. comme héritiers éventuels, 292, et s'appliqua à consolider l'empire qui s'en allait. Il protegea d'abord les chrétiens par politique; mais son gendre Galère, homme sans principes, le persuada que les chrétiens nuisaient à l'unité de l'empire et il commença à les persécuter en privant de leurs places ceux de ses employés, officiers et autres, qui refuseraient de sacrifier aux dieux. En 303, sous la même influence, il commença cette persécution cruelle qui dura dix ans; elle éclata le 23 févr., jour d'une fête païenne. Le lendemain un édit ordonna la destruction de tous les exemplaires de la Bible. Plusieurs chrétiens fléchirent; ils furent appelés traditores (livreurs) et excommuniés. Les magistrats des provinces furent peu rigoureux, et Mensurius, év. de Carthage, livra, au lieu de la Bible, les livres des hérétiques. Un second édit condamna les ecclésiastiques à la prison; un 3me les condamna à sacrifier ou à mourir; un 4m® étendit cette mesure à tous les chrétiens. Hiéroclès, gouverneur de la Bithynie, attisait ce zèle persécuteur, et bientôt on crut le christianisme détruit. Mais l'occident fut ménagé par Const. Chlore, et en 306 par Maxence. Un édit de Galère, malade, 311, mit fin aux persécutions en occident; elles continuèrent en Italie jusqu'à la défaite de Maxence 312, et en orient jusqu'à la paix de Licinius avec Constantin 314. Dioclé-tien malade avait dû abdiquer 305 devant les menaces de Galère. Il se retira à Salone où il vécut d'une vie tranquille et champêtre; il prétendait n'avoir commencé à vivre que depuis son abdication, et refusa les offres qui lui furent faites de reprendre la couronne, f 313; le bruit courut qu'il s'était empoisonné.

DIODATI lo Charles, né 1511, baptisé par Paul III et tenu sur les fonts baptismaux par Charles-Quint. Réfugié italien à Genève. — 2° Jean né à Genève 3 juin 1576, fils du précédent. Il fait de très bonnes études à Genève où il est docteur en théologie à 19 ans, et prof, d'hébreu à 21. En 1600 il épouse Madeleine Burlamaqui. En 1603 il publie sa célèbre Bible italienne, fidèle, claire, élégante, encore auj.

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généralement employée en Italie. S'intéressant beaucoup à Venise qui devenait un centre de réforme, il s'y rend en 1605 à la demande d'Henry Wotton, ambassadeur d'Angleterre, et trouve des aides en Fra Paolo Sarpi et Fra Ful-gentio, qui y entretenaient une certaine animo-sitè vis-à-vis des papes. II y retourna fin 1608, et fut encore consacré cette même année à Genève (4 nov.) Une lettre de Diodati au pasteur Durand à Paris, interceptée par le confesseur d'Henri IV, faillit gâter son œuvre; la mort de ce roi la compromit tout à fait, et Diodati dut se borner à des correspondances avec ses amis de Venise. En 1611 envoyé en France pour demander un secours financier aux réformés (Genève craignait une attaque de la Savoie), il fut bien reçu partout, et Marie de Médicis lui accorda sa protection. Le 21 nov. 1618 délégué avec Théod. Tronchin au synode de Dordrecht, il prit vigoureusement le parti des gomaristes et contribua à leur victoire. Il avait été en rapport avec Du Plessis-Mornay, Wotton, Casaubon, et d'autres illustrations de son époque. Son influence à Genève comme à l'étranger était grande; sa parole sinon très châtiée était énergique et véhémente. Il parlait mieux l'italien. Il écrivit encore une traduction française de l'Histoire du concile de Trente par Paolo Sarpi (1620), une Bible française (1644) avec' de nombreuses annotations; une Traduction italienne, en vers, des Psaumes, 1608, des Glossœ in sanctd Biblid 1644; annotations in Bibhd 1607, plus une foule de brochures, traités et dissertations en latin. Ses dernières années furent troublées par des démêlés avec les conseillers et les syndics. Il f respecté et regretté le 3 oct. 1649. Vie par E. de Budé.

DIODORE, év. de Tarse, né à Antioche, reçut à Athènes une culture classique. Appelé comme ancien dans sa ville natale, il distingua dans la lutte contre les ariens, prit soin de l'Égl. pendant l'exil de l'ét. Meletius, jusqu'à ce qu'il dut s'enfuir lui-même 372. Nommé év. de Tarse 378, il assista au conc. de Constantinople 381, f 394. Sa piété et ses nombreux écrits lui attirèrent l'estime de ses contemporains. Ses ennemis lui reprochèrent d'avoir approuvé le manque de patole de Flavien lors de la succession de Meletius. Cyrille suspecté son orthodoxie, et plusieurs voient en lui le vrai père du nesto-rianisme, parce qu'il n'admettait en Jésus qu'une unité morale et non substantielle des deux naturel. Il ne reste que des fragments épars de1 jses livres. Il eut pour disciples les deux hommes les plus considérables de l'école d'Antioche, Théodore de Mopsueste et Chrysostome.

DIOGNÈTE. La lettre à Diognète est considérée comme un des plus beaux monuments de l'antiquité chrétienne. Un païen d'un rang considérable demande à un ami de lui exposer ce qu'est le christianisme, et celui-ci lui répond; après avoir d'abord fait la caractéristique du paganisme et du judaïsme (qu'il met un peu trop sur le même rang). On a longtemps attribué cette lettre à Justin Martyr, mais quoique plusieurs idées soient dignes de lui, d'autres sont étrangères ou même contraires à sa théol., et ce n'est pas son style. Elle doit avoir été écrite entre 120 et 150. Bunsen regarde les 2 dernier chap. comme inauthentiques.

DIO

DIPPEL, Jean Conrad, né à Fraftkenstein 1673, étudia à Giessen, enseigna la philos., donna à Strasbourg des leçons d'astrologie, combattit le piétisme de Spener, et fit des extravagances, dansa, se battit, joua, pour prouver qu'il n'était pas orthodoxe. Plus tard il devint mystique et séparatiste exalté, toujours exagéré et plein d'orgueil. Il ne put tenir ni à Berlin, ni en Hollande, ni à Altona, ni à Stockholm, se fit arrêter plusieurs fois, et 'f 1734 dans l'Asile des enthousiastes à Berleburg. Ses écrits théol. portent le cachet de son caractère, notamment: L'orthodoxie des orthodoxes, le papistrte des protestants, elc. Il a rendu plus de services comme chimiste; on lui doit le bleu de Prusse et l'huile animale qui porte son nom.

DIPTYCHES, registre ou liste de noms de personnes, vivantes ou décédées, pour lesquelles le prêtre doit prier en disant la messe, chez les gréfcs et les arméniens. Cet usage n'existe plus chez les latins; le prêtre se borne à faire une pau&e pendant laquelle il est censé prier, ainsi que les assistants, pour ceux qui lui sont recommandés.

DISCIPLINE lo L'Égl. a désigné sous le nom d'Arcana disciplina, discipline secrète, depuis lei jours de' Tertullien jusqu'au 8ra« siècle environ, certains actes ou objets de culte, considérés comme mystérieux et que, pour des motifs de prudence, ou de vénération, elle tenait à déréber à la vue et à la connaissance des profanes; ainsi les sacrements du baptême et de la Cène, l'huile sainte, l'eau lustrale et même la prière du Seigneur. Le scrupule était poussé si loin qu'on évitait toute allusion à ces mystères symboliques, en présence des non-baptisés. On ignore l'origine de cette grande réserve; peut-être se rattache-t-elle aux traditions juives, peut-être faut-il la chercher simplement dans les persécutions et dans les conditions du caté-chuménat. Le juif ou le païen qui demandait à être reçu dans l'Égl. n'était pas admis sans une espèce de stage préliminaire qui, en assurant son instruction, devait aussi fournir la preuve de sa sincérité dans ces temps de trouble où l'espionnage était à craindre. De là deux classes de chrétiens, ceux qui étaient baptisés et ' ceux qui ne Tétaient pas, les premiers étant seul* initiés à tous les mystères de la doctrine et du culte. Tous assistaient indistinctement à la prière, à la prédication, au culte public; mais lorsque arrivait le moment de la communion, les catéchumènes étaient congédiés. La dogmatique romaine attache une grande importance au fait de cette discipline secrète, parce qu'elle lui sert à établir au moins la possibilité de l'origine apostolique de certains dogmes et pratiques, tels que l'invocation des saints, la transsubstantiation, le culte des images, dont les Pères ne disent rien, parce que, dit l'Église, il leur était interdit d'en entretenir le public. Y. sur ce sujet Rothe, De discipliné, arcani 1841, Credner 1&16.

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La discipline ecclésiastique repose sur le droit que possède toute société de faire respecter ses principes, ses statuts et ses règlements. Elle se distingua du châtiment en ce qu'elle n'a pas d'autre objet que de réserver ses droits et son existence, et d'inviter le défaillant à rentrer en lui-même et à réfléchir. Dans l'Égl. catholique elle a pris cependant peu à peu le caractère d'une pénalité, à mesure que, confondant le spirituel et le temporel, l'Égl. a usurpé l'autorité civile et s'est arrogé le droit de punir et de statuer sur certains délits. À Genève et dans plusieurs autres Églises réformées le même pbènomène s'est présenté à cause de la confusion des deux pouvoirs, et parce que l'État avait pris un caractère religieux. Le vrai système:d'une dise, ecclés. purement morale, et cependant effective, se trouve dans l'ancienne Égl. réformée et dans toutes les Églises indépendantes de l'État. Là s'appliquent les prescriptions de Matt. 18, 15-17. dans les divers degrés de l'exhortation, de la censure et de l'expulsion. Mais le relâchement général Ta fait tomber en désuétude dans la plupart d£s Égl. réformées. Il en est de même pour l'Égl. luthérienne, où elle n'a jamais été bien comprise, parce que, là, la direction de la paroisse étant entre les mains, non d'un conseil ou d'un synode, mais des ecclésiastiques seuls, ou des princes, la peine spirituelle prenait aussitôt le caractère d'un châtiment temporel. Il y avait contradiction par la nature même des choses et par la force de la situation. La discipline suppose que l'Égl. a des droits SUr l'individu, <pi'elle peut à son gré l'admettre ou le repousser; mais quand l'individu est incorporé de force à l'ÊgHse, par le baptême ou par la loi, il ne peut plus être question de l'exclure par mesure disciplinaire, car souvent on lui accorderait par là précisément ce que l'on veut empêcher, le droit de se séparer. D'ailleurs on apprit d'autant plus à se passer de la discipline ecclésiastique, à mesure que la compétence de l'État devenait plus grànde, qu'elle n'avait sefrvi pendant longtemps qu'à suppléer ën fait à l'absence d'une législation positive quant à certains crimes et délits. Àuj. là où elle subsiste encore en droit; elle n'est plus guèï-e que nominale et ne s'exerôe qu'en cas de scandale grave. Après avoir pratiqué l'excommunication personnelle, l'Église réformée a fini par se contenter d'excommunier en général les pécheurs scandaleux; puis elle les a simplement déclarés indignes de commnnier; elle se borne maintenant à les conjurer de s'abstenir. Les égl. dissidentes elles-mêmes se sont radoucies sur ce point, et l'on peut dire que, sauf des cas exceptionnels, la discipline ne consiste plus que dans l'exhortation du pasteur et dans des observations fraternelles adressées à des membres de l'Égl. qui se dérangent ou qui causent du scandale. Le clergé catholique allemand a essayé de donner à l'excommunication un caractère, tantôt infamant, tantôt pénal, mais il a été poursuivi au civil par les intéressés, et il a dû renoncer à cet empiétement sur la juridiction temporelle.

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3» On appelle délits disciplinaires les négligences, abus ou excès de pouvoir des ecclésiastiques dans l'exercice de leurs fonctions. Ils relèvent, chez les catholiques, de l'ordinaire; chez les protestants, du consistoire, et en seconde instance, du synode. Ils sont punis soit par une censure, soit par une peine proprement dite, qui peut être une amende, les arrêts, la suspension, la révocation ou la dégradation. Les Égl. protestantes ne connaissent que la censure, la suspension à temps et la destitution; encore, pour ces deux dernières peines, faut-il la sanction de l'État.

4° Le livre de la Discipline est, pour l'Égl. d'Écosse, le recueil et code de lois qui fut élaboré en 1560 par Knox, Jean Row et d'autres ecclés. pour la constitution et la discipline de l'Église; il fut ratifié en janv. 1561, sans être cependant généralement reconnu. On s'occupa de le reviser, et en 1578 parut le second livre de la Discipline, qui fut définitivement adopté par l'Assemblée, ratifié par le parlement, et n'a cessé d'être dès lors la règle de l'Égl. d'Écosse. Il repose sur l'indépendance complète de l'Égl. quant à la doctrine et à l'administration.

5° Petit instrument de flagellation, fouet de cordelettes ou des petites chaînes, à l'usage des religieux; il Sert à mortifier la chair ou à expier des péchés.

DISCRÉTION (âge de). De même que pour certains actes civils, l'État demande un minimum d'âge, l'Égl. en demande un pour les actes religieux, polir la! tonsure, la prêtrise, l'épiscopat. Nul ne peut être ordonné prêtre avant 25 «ns; on peut obtenir un bénéfice déjà à 14. Pour prononcer des vœux effectifs, l'État exige la pleine majorité. Pour le changement de religion il se contente de 14 ans, ce qu'on appelle l'âge de discrétion, parce qu'on suppose qu'à cet âge un enfant sait ce qu'il fait. Pour la confirmation les Égl. protestantes ont adopté l'âge minimum de 14 ans; les catholiques descendent beaucoup au-dessous et peuvent aller jusqu'à 7. *

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D1SIBOD, saint irlandais, qui prêcha l'Évangile sur la Nahe. près Bingen, et y fonda un couvent, vers 545, ou entre 670 et 690. Ce couvent passa 1108 aux bénédictins, et 1159 aux cisterciens. Sécularisé lors de la Réforme.

DISPENSES, autorisations provisoires ou personnelles de s'affranchir de certaines obligations; elles ne peuvent porter que sur des faits disciplinaires, et sont depuis Innocent III l'apanage exclusif des papes, par l'intermédiaire des dataires ou des pénitentiaires. En cas d'urgence les év. peuvent cependant accorder certaines dispenses prévues par les canons. Pour remédier aux nombreux et scandaleux abus qui avaient été signalés, le conc. de Trente décida que les dispenses ne pourraient être données que pour des raisons graves et sérieuses, et gratis, ce qui n'excluait pas les témoignages spontanés de reconnaissance. Ces dispenses sont nombreuses dans l'Église catholique, puisqu'elles portent sur la nourriture et qu'elles vont jusqu'à relever un prêtre de ses vœux et lui permettre de se marier; se réduisent chez les protestants à de simples dispenses d'âge pour la confirmation ou la consécration.

DISSENTERS, nom qu'on donne en anglais à tous ceux qui n'appartiennent pas à l'Egl. nationale; ainsi en Angleterre à tous ceux qui ne sont pas épiscopaux, en Écosse à ceux qui ne sont pas presbytériens; la logique voudrait qu'en Irlande il désignât ceux qui ne sont pas catholiques.

DISSIDENTS, ceux qui se séparent; c'est à peu près l'équivalent du mot anglais dissenters. Il désigne en religion ceux qui se sont séparés de l'Égl. nationale, soit par principe et refusant toute intervention, protection et immixtion de PÉtat; soit pour motifs de doctrine, quand l'établissement officiel ne professe plus la foi évangélique; soit enfin par besoins religieux, quand la vie chrétienne s'est alanguie et qu'elle a été remplacée par le formalisme, l'orthodoxie morte et l'indifférence. La Suisse romande a été, sur le continent, l'un des centres principaux de la dissidence dans le sens restreint du mot, et de nombreuses brochures et volumes ont été publiés en sa faveur depuis une cinquantaine d'années. La discipline intérieure, assez stricte d'abord, s'est sensiblement relâchée ou radoucie. En Pologne le nom de dissidents fut donné à tous ceux qui n'étaient pas restés catholiques.

Leurs droits furent fixés par le conc. national de Petrikau 1555; ils furent étendus et leur égalité de droits avec les catholiques fut consacrée en 1573 par la Paix des dissidents, qui cependant ne fut jamais bien observée. Ils furent à plus, reprises persécutés, notamment en 1717 et 1733, ce qui amena l'intervention tour à tour de la Russie et de la Prusse, et finalement le partage de la Pologne, dont la responsabilité retombe ainsi sur les persécuteurs.

DIVORCE. L'Évangile ne l'autorise que dans le c»sd'adultère, le mariage étant rompu parce fait même. L'Égl. chrétienne ne peut sous ce rapport aller plus loin que son maître, et elle ne peut sanctionner le divorce dans d'autres conditions. Mais la question n'eh reste pas moins complexe et difficile dans la société moderne qui, malgré son nom de chrétienté et malgré l'influence du christianisme sur sa législation, compte une si petite minorité de chrétiens. Du moment où le mariage est devenu un acte relevant de l'état civil et que l'État a cessé d'être nécessairement religieux et chrétien, peut-il encore, et surtout vis-à-vis de ses ressortissants qui déclarent n'être pas ou n'être plus chrétiens, invoquer la loi chrétienne dans ses lois et ses ordonnances? Évidemment il y aurait contradiction. Cependant plusieurs pays acceptent cette inconséquence, à cause du bien moral qui en résulte pour la famille et la religion. Mais d'un autre côté les rapports des époux peuvent devenir par leurs vices personnels on par incompatibilité d'humeur, si mauvais ou si dangereux, que plusieurs législations ont adopté comme moyen terme la séparation de corps et de biens, demi-mesure qui n'est plus le mariage, qui n'est pas encore le divorce, et qui ne satisfait ni les intérêts, ni le devoir. Pour les chrétiens la question est tranchée à cause des principes et par la vie nouvelle; mais pour la société civile elle doit se trancher, et l'on n'a pas le droit d'imposer à ceux qui ne croient pas un joug et une discipline qu'ils ne sauraient supporter. S'il y a des dangers à prévoir, c'est à la législation d'aviser en stipulant ses conditions et des délais convenables, au besoin même des pénalités pour des demandes de divorce non justifiées.

DITHMAR, Dietmar ou Thitmar, né25juilL 976, fils du comte de Wallbeck; chanoine de Saint-Maurice 989, év de Meraebourg 1009, t 1 déc. 1018; auteur d'une chronique d'Allemagne 988-1018, importante surtout pour l'hist. d'Henri H et pour celle des contrées slaves situées au delà de l'Elbe. Publiée partiellement par Lappenberg. Laurent, Leibnitz et Wagner.

DITHMARSIÉ, petit district du Holstein, longtemps rattaché comme république à l'archev. de Brème. La réformation y fut combattue par les paysans soulevés par le dominicain Augustin Forneborch. Le pasteur Nicolas Boje fut misérablement assassiné 1524, mais ce meurtre provoqua une réaction et en 1532 la doctrine luthérienne fut adoptée comme religion de l'État.

DOBER lo Martin, né en Souabe 1703, ami du comte Zinzendorf, descendait de parents pieux, qui avaient quitté la Bohême pour cause de religion. Potier de son état. Il arriva à Herrnhut en 1724, fit de solides études, entra dans renseignement, passa en 1736 un bon examen devant le Consistoire de Copenhague, composa de beaux cantiques, fut un puissant prédicateur en 17.40 et 1741; depuis 1744 en Angleterre et en Wetteravie; resta jusqu'à la lin un témoin et un aide fidèle dans l'œuvre de Dieu.

2° Léonard, hernoute, désireux d'évangéliser les nègres de Saint-Thomas, Antilles, même au risque de devenir esclave, partit en août 1732, après beaucoup de difficultés, et s'embarqua à Copenhague le 8 oct. avec Nitschmann. Ce dernier dut le quitter l'année suivante. Lui-même gagna sa vie, d'abord comme maître d'hôtel chez le gouverneur, puis comme intendant chez un planteur, tout en évangélisant. Il fut relevé de ses fonctions par l'arrivée de 3 frères, Leupold, Schenk et Miksch, et rentra à Herrnhut, 5 févr. 1735, où il était rappelé comme ancien à la place de Linner. Il put suffire quelques années à ses fonctions, mais lorsqu'il s'y ajouta la surveillance de toutes les égl. et des stations missionnaires, il donna sa démission, 1741, f 1766.

DOBRIN, v. Frères 6<>.

DOCÈTES, Docétisme. On comprend sous ce nom tous les systèmes qui, maintenant la divinité de J.-C., ont plus ou moins réduit son humanité jusqu'à n'en laisser subsister que l'apparence. C'est ce que signifie en grec le nom même de docètes. Ainsi l'homme Jésus n'aurait souffert et ne serait mort qu'en apparence. Le docétisme était la contrepartie de l'ébionitisrne; procédant de Philon, il devait aboutir au gnos-ticisme. Les simoniens, Basilides, Bardesanes, Valentinien, étaient docètes, et le système conduisait forcément au dualisme. Bien que l'Égl. t'ait condamné et positivement rejeté, le docétisme a tonjours eu des représentants conscients ou inconscients, entre autres parmi les pauli-ciens et les albigeois, parce qu'il répond à certains besoins de la conscience et de l'exégèse, mais il est contraire à la doctrine chrét. de la rédemption.

DOCTEUR en théologie. C'est le grade le plus ^levé que puissent décerner les facultés de théologie. Un peu déprécié par l'abus qui en a été fait, il était autrefois très recherché et jouissait de plusieurs droits et privilèges, mais il devait être régulièrement obtenu et réellement mérité. Auj. c'est surtout un titre honorifique, décerné pour services rendus à l'Égl.; dans plusieurs facultés on l'exige comme condition de l'enseignement supérieur. Le recteur en délivre les diplômes en séance solennelle; une barette ou bonnet en était autrefois l'insigne extérieur. Parmi les scolastiques les plus Célèbres, Thomas d'Aquin avait reçu le titre de docteur Angélique; Gerson de Très-chrétien; Wesel était docteur des Controverses; Occam était le docteur Invincible, Haies était Irréfragable, Tauler Illuminé, Bernard de Clairvaux Melliflue, Bacon Admirable, Albert-le-Grand Sublime, Duns Scot Subtile, etc.

DOCTRINE (Frères de la) chrétienne; deux ordres de ce nom, voués l'un et l'autre à l'enseignement du catéchisme aux classes pauvres. 1° Congrég. religieuse fondée en Italie 1562 par Marc de Sadis Cusano; elle comprenait des laïques et des ecclésiastiques, César de Bus, à Avignon, fit quelque chose de semblable 1592. Après avoir commencé parles écoles, ils eurent des collèges et des établissements florissants. Bellarmin rédigea pour eux un catéchisme. 2° En France les fr. des écoles chrét.. plus connus sous* le nom d'Ignorantins, sont des religieux non ecclésiastiques, dont l'origine remonte à J.-B. de la Salle, chanoine de Reims 1680. Approuvé par Benoît XIII, 1724, cet ordre a pris une très grande extension et a survécu à la suppression des ordres religieux. Un moment il a menacé d'envahir toutes les écoles de France et de remplacer les maîtres laïques. Il enseigne surtout bien la calligraphie et la discipline, mais il comprime l'esprit d'initiative. Plusieurs de ses membres se sont fait par leurs mœurs ou leur brutalité une triste célébrité. Les ignoran-tins portent le tricorne et une robe de bure noire avec le rabat blanc.

DODDRIDGE. Philippe, né à Londres 26 juin 1702, f à Lisbonne 1751, fils d'un pasteur non-conformiste, fut lui-même pasteur indépendant à Market-Harborough 1722, puis à Northamp-ton 1729 où il fonda un séminaire de théologie. Prédicateur distingué, docteur et bon écrivain, il a laissé plusieurs ouvrages qui se lisent encore, des Sermons pour l'enfance et la jeunesse, un Cours de lectures et surtout: Naissance et progrès de la vraie piété dans l'âme, trad. par Vernède, Bâle 1754.

DODWELL, Henri, né à Dublin 1641, prof, d'hist. à Oxford 1688, se fit destituer parce qu'il refusa de prêter serment à Guillaume III, et se retira à Shotterbrook. Il avait étudié la philologie et la chronol.; quoique laïque il se livra aussi avec ardeur aux sciences ecclésiastiques, écrivit sur Irénée et Cyprien, et s'engagea dans de longues controverses avec Clarke, Norris,

Burnet, Baxter, à cause de ses vues paradoxales suç l'immortalité da l?âme et le pardon des péchés. Il plaçaiV sous Trpjsn la rédaction des 4 Évangiles. Sop fils Henri attaqua le christiaiiis-m^^arpme nop fondé en preuves 1743; son second fi |s, William (1709-1788), archidiacre de Berk, a publié divers ouvrages d'apologétique, entre autres une réponse 4 son frère.

( DOEDERLEIN, Jean-Christophe, auteur de plpsieurs Comment, sur Ésaïe, le Cantique, les Prpverbes, et d'une Institution de la théol. chrét; né 20 jan\. 1745 à Windsheim, Fran-conie; il fut prof.de théol. k Altdorf 1772, puis à, léna 1782. f 1792. Tendance orthodoxe, exégèse claire et serrée.

DQELLINGER, Jean-Joseph-Ignace, né à Bamberg le 20 févr. 1799; prof, d'hist. ecclés. à Munich; un des représentants les plus autorisés du catholicisme libéral. A écrit sur; Les Mariages mixtes 1838, la Réformation 1846-1848, Luther 1851, Hippolyte et Calliste 1853, le Christianisme et l'Eglise 1860, l'Égl. et les églises 1861; Paganisme et judaïsme, etc. Il est docteur en théol., président de l'Acad. royale des sciences, et conservateur des collections scientifiq.de la Bavière.

DOGMES, Dogmatique. Le mot grec dogma signifiait dans l'origine une opinion, ce que* l'on croit, et s'employait même en philosophie. Il a pris peu à peu un sens plus précis et mieux déterminé, avec le double caractère d'une vérité reîig. ou morale révélée de Dieu, et d'une vérité faisant règle pour un certain ensemble d'adhérents. C'est le mot que la plupart de nos versions traduisent par ordonnances Act. 16, 4. Éph. 2, 15. Col. 2, 14. Josèphe appelle le contenu des livres hébreux les dogmes de Dieu, et Origène désigne les apôtres et les évangélistes comme les maîtres (professeurs) du dogme. L'idée du dogme est entièrement objective. Elle suppose une Église chargée de le formuler, de l'enseigner et de le sauvegarder; elle suppose m même temps une science théol. ayant pour mission de préciser en termes scientifiques les idées relig. de la communauté. Le christianisme se compose de faits et de maximes dont le Christ est à la fois le sujet, le centre, l'auteur et l'objet; on ne peut ni les changer, ni les modifier; mais on peut les préciser, les grouper et en tirer les conséquences. Ce travail de systématisation et de coordination est l'œuvre de la Dogmatique, science qui n'a rien à inventer, qui par conséquent doit aboutir au même résultat dans tous les temps, et qui doit se borner à exposer la vérité chrétienne et à la démontrer d'après la Bible ou d'après la tradition, suivant le principe fondamental admis par chaque église. C'est cette foi collective qui est l'objet des sym-boleft et qui devient un point de ralliement pour un corps visible de croyants. La Bible n'ayant pas de système proprement dit, le principe de classification des dogmes dépend du pomt de vue et des habitudes d'esprit des théologiens; il a quelcjue chose de forcément arbitraire, et l'on a distingué tour à tour, et même simultanément, la méthode scolastique, qui comprend l'analyse et la synthèse; la môth. fédérale, d'après les alliances oui économies; la môth. comparative, ou historico-biblique, où l'on compare sur certains points la Bible avec les écrivains profanes; la méth. des causes, ou philosophique; la méth. critique, ou philologique. — Si le dogme est immuable par lui-même, la manière dont il a été compris et exposé ne l'est pas. Les successeurs immédiats des apôtres, pas plus que les apôtres eux-mêmes, n'ont pensé à réduire en un corps de doctrines les vérités qu'ils annonçaient au monde et qui les exposaient aux railleries et aux. persécutions. C'est seulement quand la théol. chrétienne fut mise en contact avec la philos, platonicienne, qu'elle revêtit; un caractère spéculatif, dont Origène, Grégoire de Nysse, puis Augustin, furent les premiers représentants. Après eux vint Jean, Damascène, moins apologète, moins préoccupé des luttes religieuses, et plus essentiellement théorique et dogmatique; il ne se préoccupe que d'exposer et d'affirmer le dogme. Au moyen âge la scolastique s'efforce, à l'aide de la philos. d'Aristote, de prouver l'accord de la théol. avec la raison; avec Anselme de Cantorbéry cette tentative est sur le point de réussir, mais elle est menacée par Abélard, et finalement, après P. Lombard, Haies, Thomas d'Aquin, Duns Scott, Hugo et Richard de Saint-Victor, elle roule dans le scepticisme avec le comment. d'Occam sur le Livre des sentences. La Réformatiou relève la dogma^ tique et la délivre de ses entraves en la rame* nant à sa source, c.-à-d. à la Bible. C'est dès lors seulement qu'il y a, en dehors de la philos, une dogmatique chrétienne vraiment digne de ce nom. Mélanchthon dans ses Lieux communs et Calvin dans son Institution, en sont les plus illustres représentants, et leurs successeurs ont été nombreux dans toutes les Égl., faisant préf valoir tour à tour le point de vue objectif ou le côté subjectif de la doctrine, mettant l'accent les uns sur la Bible, les autres sur la raison, quelques-uns essayant de la conciliation. L'étude de ces différents systèmes s'appelle l'Hist. de la dogmatique; c'est l'histoire des méthodes. Ce qu'on appelle Hist. des dogmes en diffère en ce qu'elle montre à chaque époque l'état de la pensée chrétienne, le développement relatif et parfois l'altération de certaines doctrines sous des influences extér. ou intérieures; science toute nouvelle, puisque au moyen âge le dogme était considéré comme absolu, et que tout ce qui s'en écartait était purement et simplement traité d'hérésie et sommairement condamné comme tel. L'essai d'Abélard, Sic et non, est la meilleure preuve que la discussion du dogme étajt impossible; et si l'Égl. romaine s'est crue ,en droit d'ajouter de nouvelles doctrines à ses symboles, elle a toujours eu soin de prétendre qu'elle se bornait à développer sans innover, et qu'avec une formule différente elle ne faisait que rendre plus claires des doctrines anciennes; ainsi pour l'Immaculée Conception, l'Infaillibilité du pape, etc. — v. l'Hist. de la Théol. protest., en particulier en Allemagne, par Borner, trad. par M. A. Paumier; Hase, Hist. des Dogmes; Dogmatique chrét., de Martensen, trad. par Ducros.

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DOLCINO, fils d'un prêtre marié du Milanais, devint, après le supplice de Segarelli 1300, le chef des fr. apostoliques auxquels il appartenait depuis 1291. Il distinguait dans l'Égl. 4 périodes: 1° une avant Christ; 2° l'Égl. pauvre et persécutée, mais saine et pure; 3° l'Égl. pure encore, mais devenue riche par l'entrée des païens; 4° l'Égl. riche, mais pleine de méphan-ceté, le mauvais esprit faisant toujours plus de progrès. Les fr. apost. devaient présider à la dernière période et ramener l'âge d'or. Chassé du Tyrol, Dolcino vint en Lombardie et s'annonça comme prophète; il passa ensuite en Dalmatie, puis revint en 1304; des partisans se joignirent à lui par milliers. Ils s'établirent $ur une montagne de l'évêché de Novare. Pour échapper à la famine, ils firent des excursions jusque dans les villes. Vaincu enfin à Zebello prèsVerceil, il fut pris et brûlé le 1er juin 1307 (ou 1309) ainsi que la noble Margarita qui l'accompagnait. Il avait annoncé pour 1303 ou 1304 le règne du Saint-Esprit avec les apôtres, comme dernière époque de l'Église. La secte ne périt pas avec ses chefs, v. Al. Lombard, Les Pauli-qens.

DOLET, Étienne, savant humaniste; littérateur et imprimeur français, né 1509 à Orléans, brûlé à Paris 3 août 1546. Il étudia à Paris et à Padoue, fut pendant un an secrétaire du Du Bellay à Venise, vint vers 1530 achever ses études à Toulouse, souleva la ville par la manière dont il résista au parlement, fut incarcéré d'abord, puis banni, et s'établit à Lyon comme imprimeur, avec privilège de François I«r. Accusé à tort d'athéisme, il était plutôt sceptique; ses presses étaient au service de quiconque les demandait, et il imprima plusieurs ouvrages au moins suspects. Il fut accusé de faire gras le vendredi et d'aller plus souvent au prêche qu'à la messe. Son orgueil et son caractère impétueux lui firent de nombreux ennemis, et ceux-ci, après l'avoir fait arrêter plusieurs fois, réussirent à le Caire condamner à mort. On assure qu'en se rendant au bûcher, et yoyj^t Ja foule émue il dit:

Non dolet ipse Dolet, sed pia tprba, dolpt.

Il a laissé 0e nombreux écrits en prose et en vers, latins et français, d'un style facile et souvent élégant; ils ne disent rien de ses opinions relig., car s'il attaque violemment les luthériens, il n'est pas moins acéré contre les abus de son Église. Les principaux sont un Commentaire de la langue latine en 2 vol., une Étude sur les locutions latines, un Traité sur l'art de traduire, un travail sur Cicéron (contre Érasme), son second Enfer (son second emprisonnement) dédié à François Ier, des études sur Platon et Térence, une Exhortation à la lecture des sainctes Lettres (préface à un livre de Le Fèvre d'Étaples), un poème didactique, Genethiacum, traité d'éducation à l'usage de son jeune fils Claude, etc.

DOMINICAINS. Ordre célèbre des frères prêcheurs, d'après la règle de saint Augustin, fondé en 1215 à Toulouse par saint Dominique et reconnu la même année, non sans peine, par Innocent III, au conc. de Latran, comme upe société de chanoines réguliers; Honorius III y ajouta 1216 la mission de prêcher et de convertir les hérétiques. En 1220 ils obtinrent le privilège d'être considérés comme un ordre meji-diant. Ils se donnèrent une constitution, un général, des provinciaux, des définiteurs et des prieurs. En 1230 ils avaient déjà assez d'influence pour s'être fait donner une chaire de théol. à Paris, où leurs empietements trouvèrent une forte opposition, notamment de la part de Guill. de Saint-Amour. Enfin les fonctions in-quisitoriales qui leur furent confiées 1233, leur assurèrent une puissance terrible, qui en fit un objet de terreur pour les pays où ils réussirent à s'implanter. Ils produisirent un grand nombre d'hommes célèbres parmi les scolastiques, Thomas d'Aquin, Albert-le-Grand, Cajetan, Dominique Soto, et fournirent à TÉgl. plus de 800 évêques, 150 archev., 60 cardinaux, 4 papes, etc. L'ordre fut longtemps en rivalité avec les franciscains, notamment sur la question de l'Immaculée Conception de la Vierge, que ces derniers commençaient à préparer. Supprimés 1789 en France, où ils n'existent qu'à l'état d'exception (Lacordaire, etc.), les dominicains, dont le siège est à Rome, n'ont plus guère dé couvents qu'en Autriche-Hongrie, en Italie, en Espagne et en Amérique; les jésuites les ont remplacés, mais en employant d'autres armes. Leur costume est blanc avec capuchon noir et manteau noir. On les appelait aussi jacobins à Paris, parce que leur premier couvent fut bâti dans la rue Saint-Jacques. — Dominique avait également fondé 1206 à ProuiUe, près Carcas-sonne, un monastère de religieuses dominicaines, qui compta parmi ses prieures des dames de ia plus haute naissance, des Bourbon et des Lorraine, et qui fut supprimé en 1789. — Les tertiaires des deux sexes, 1422, avaient pour tâche spéciale de combattre les hérétiques.

DOMINICI, Bernard, né à Metz 1517, prêtre en 1535, converti momentanément à la réforme, fut regagné par le cardinal de Lorraine et tourna toute son éloquence contre les protestants. Il en fut récompensé par le titre de prédicateur de la cathédrale à Metz 1549, et fut nommé en 1570 général de son ordre.

DOMINIQUE 1° fondateur de Tordre des dominicains, né 1170 à Calervoga, ou à Calahorra, Vieille-Castille, d'une famille distinguée, que quelques-uns croient être celle des Ousman. Jeune prêtre il se distingua par sa piété, son ascétisme et ses talents de prédicateur; il fut d'abord prof, de théol. à Palencia, puis chanoine à Osma où il se fit remarquer par son zèle missionnaire contre les Maures et les hérétiques. En 1204 il accompagna à Paris l'év. d'Osma, Diego, chargé d'une négociation auprès de la cour de France. A leur retour par le Languedoc et le midi, frappé de la nécessité d'avoir des ouvriers qui recommandassent l'Égl. par la simplicité de leur vie et l'ardeur de leur foi, il fonda 1206 à Prouille une société de religieuses, à laquelle ne tarda pas à se joindre une réunion d'hommes choisis, comme l'avait demandé Innocent III, parmi les plus propres à la prédication et à la confession. Il suivit comme aumônier la croisade de Simon de Montfort contre les albigeois, et tout en professant qu'on ne devait employer contre les hérétiques d'autres armes que la prière, la persuasion et l'exemple, il accepta la charge d'inquisiteur qui lui valut de cruels et sanglants triomphes. L'ordre des frères prêcheurs qu'il avait fondé à Toulouse, prit de lui le nom de dominicains. De là il vint à Rome où Honorius III le nomma Maître du sacré palais, avec charge d'avoir au Vatican une école spirituelle et de choisir les prédicateurs. Il s'occupa surtout dès lors de réorganiser son ordre, d'en nommer les fonctionnaires et d'en multiplier les couvents en Italie, en France et en Espagne, f à Bologne 1221; canonisé 1234 par Grégoire IX. Vie par Lacordaire 1841.

2° Dominique YEncuirateè (Loricatus), disciple de Damiens, doit son surnom à ce que, au lieu d'un simple cilice de crin, il en portait sur la peau un de mailles de fer. 11 ne l'ôtait que pour se flageller, suivant la règle, et au lieu de réciter les Psaumes pendant cette opération, il se bornait à prier de cœur, ce qui lui permettait d'aller plus vite et de multiplier le nombre des coups. Il vivait de pain et d'eau, au milieu des déserts des Apennins, f vers 1060.

DOMINIS, Antonio (de), né 1556 à Arbe. Dalmatie; élève des jésuites, prof, d'éloquence.

év. de Segni, archev. de Spalatro; se fit protestant, passa en Angleterre 1516, écrivit contre le pape son De republicd christianâ, reçut de Jaques I«r de riches bénéfices, puis se refit catholique, s'enfuit en cachette, revint à Rome où il abjura publiquement; mais pour être plus sûr de lui, on l'enferma au château Saint-Ange, où il f 1624. on ne dit pas de quoi. Il passe pour avoir le premier trouvé l'explication de Parc-en-ciel, De radiis in vitris, Venise 1611. Descartes n'a fait que perfectionner sa théorie.

DOMITIEN, né en 51, fils de Vespasien et fr. de Titus, monta sur le trône en 81, et après un commencement juste et libéral, se jeta dans la carrière du crime et s'illustra par des infamies et des cruautés qui ne respectèrent ni l'âge, ni le sexe, ni le rang. Il fit mettre à mort des sénateurs pour s'emparer de leurs biens, séduisit sa nièce, menaça sa femme, proscrivit les littérateurs et les philosophes, se fit élever des autels comme à un dieu, fit mourir Flavius Clemens son cousin, exila Flavia Domitilla, et organisa contre les chrétiens une sanglante persécution, sous prétexte que quelques païens s'étaient convertis au judaïsme. 11 exila saint Jean à Patmos, et d'après Eusèbe un grand nombre de chrétiens furent martyrisés. Il fit venir de Judée des parents de Jésus, qu'on lui avait dénoncés comme suspects et dangereux pour le trône, mais ayant vu leurs mains calleuses, il fut rassuré et les renvoya dédaigneusement. f 96 assassiné par ordre de Domitia Longina, sa femme, qui craignait pour elle-même.

DONAT toute personne qui, sans faire de vœux, se donne, elle et tout ce qu'elle possède, à un couvent, pour y demeurer et se séparer du monde. Les donats remontent à l'abbé Guillaume, dit le Bienheureux, 1069-1091. — 2° V. Donatus.

DONATION de Constantin. L'Égl. de Rome prétend que cet empereur donna au pape Sylvestre la campagne des environs de Rome, qui aurait été le premier noyau des États de l'Église. Cette affirmation ne repose que sur un passage du faux Isidore, dont personne auj. n'ose plus défendre l'authenticité. La fausseté de la légende a été démontrée par Laureut Val la. La seule chose vraie, c'est quen 321 Constantin permit à la paroisse de Rome de recevoir des dons et la jouissance de biens-fonds situés sur son territoire. Quand Charlemagne confirma et augmenta la donation faite au saint-siège par Pépin, Adrien l'appela un nouveau Constantin très chrétien.

DONATUS et Donatistes, schismaliques de l'Égl. d'Afrique, rigoureux observateurs de la discipline, et représentants de la dissidence dans ce qu'elle a de dur et d'excessif. Ils se donnaient comme l'Égl. des purs, condamnaient d'une façon irrémissible ceux qui étaient tombés, ceux qui avaient livré les Écritures pendant les persécutions, et refusaient de reconnaître comme valables des cérémonies ou actes religieux accomplis par des prêtres qui avaient démérité. Ils représentaient la réaction contre les mesures un peu molles et relâchées de la généralité du clergé. Ce schisme éclata à l'occasion de Mensurius, év. de Carthage, qui pensa tout concilier en livrant, au lieu de la Bible, des livres hérétiques dont on n'eut pas l'idée de vérifier le contenu; il s'opposait également a une adoration superstitieuse des confesseurs de la foi, retenus dans les prisons. Accusé à Ceuta 305 par Secundus de Tigisis, primat des Égl. de Numidie, il échappa à toute censure; l'affaire fut étouffée, trop d'autres évêques étant dans le même cas. Mandé plus tard à Rome, il se justifia pleinement, mais f au retour, 311. Son parti se hâta de le remplacer par un homme du même bord, Cécilien, qui avait été consacré par l'év. Félix d'Aptunga, suspect d'avoir été un traditeur, Le parti des rigoureux déclara cette élection non valable, et choisit à sa place Majorin, puis celui-ci étant mort, Donatus, év. des Cases-Noires, Numidie, 314. Melchiade de Rome, appelé comme arbitre par Cécilien, donna tort à Donatus; les partisans de celui-ci eu appelèrent à l'empereur païen, qui se prononça également contre eux, les traita de rebelles et bannit les év. récalcitrants, 316. Un autre évêque du même nom, et pareillement rigide, lui succéda, et s'allia avec les circoncel-lions; la guerre civile ravagea le nord de l'Afrique. Constantin, après leur avoir envoye un comte (cornes) pour les rallier à l'Égl., chercha k les gagner par ses libéralités, puis il crut devoir recourir à la force et un grand nombre subirent le martyre. En 347 Paul et Macaire, commissaires impér., recommencèrent leurs largesses, mais les év. et le peuple exaspérés reprirent les armes, parcourant le pays comme des chevaliers errants, protégeant les débiteurs contre leurs créanciers et se livrant à toutes sortes d'excès. Les donatistes purs finirent eux-mêmes par appeler l'État à leur secours, en séparant leur cause de celle de leurs fanatiques amis. Ils recouvrèrent la liberté sous Julien et firent remettre à neuf leurs temples, comme ayant été souillés par les orthodoxes. A la tête de leurs adversaires il faut nommer Augustin (Contra partem Donati); cependant il s'opposa à l'emploi des mesures de rigueur contre eux et obtint même d'Honorius le dégrèvement des impôts qui pesaient sur leurs év. et leurs lieux de culte. Vaincus au concile de Carthage 411, où ils avaieut espéré avoir la majorité, ils continuèrent de se constituer à part, mais après leur alliance momentanée avec les circoncel-lions, leur nombre alla en diminuant; il s'en trouvait cependant encore quelques-uns vers 600, lors de l'invasion des Vandales, qui persécutèrent sans distinction orthodoxes et schis-matiques.

DONS spirituels, ou CHARISMES, 1 Cor. 12, 4. sq. C'est le nom que le N. T. donne à certaines facultés, ou dons naturels, qui. sanctifiés et développés par le Saint-Esprit, sont mis au service de Dieu et de l'Église. Ces dons sont de tous les temps; ce qu'ils eurent de miraculeux à l'époque apostolique, et parfois à d'autres moments de l'histoire, doit être considéré non comme un caractère inhérent à ces dons eux-mêmes, mais comme le produit spécial des circonstances et comme une manifestation particulière de la puissance de Dieu en un temps difficile et en présence de dangers exceptionnels. Si l'on ne voit que le côté miraculeux, on pourrait dire d'une manière générale que les dons ont cessé, mais ce serait ne les comprendre que par le petit coté; ils subsisteront jusqu'à la fin pour l'édification de l'Église, et ils seront d'autant plus grands et puissants que l'Égl. elle-même sera plus vivante. En temps de ferveur Dieu suscitera les uns pour être docteurs, les autres évangélistes, pour enseigner, instruire, exhorter, distribuer, présider. Dans des temps de tiédeur et de relâchement, les dons seront remplacés par des fonctions; c'est moins que le don, mais c'est plus que rien, et en l'absence du souffle de l'Esprit il vaut encore mieux avoir des prières lues et des serinons travaillés, que des improvisations sans vie et sans esprit.

DONUS, deux papes de ce nom, l'un de 676-678, l'autre 974, mort après quelques mois; tous deux à peu près inconnus.

DORDRECHT (ou Dort), la plus vieille ville de la Hollande, fondée 994 sur une île de la Meuse, à 15 kil. de Rotterdam; patrie des deux De Witt et de D. Vossius. Elle est surtout connue par le synode qui s'y tint du 13 nov. 1618 au 9 mai 1619. Convoqué par les États-Géné-raux de Hollande pour combattre l'arminia-nismc, il invita à ses séances les théol. les plus éminents de l'Angl terre, de l'Allemagne, de la Suisse et de Genève, désireux de profiter de leurs lumières. Les Remontrants, appelés à se justifier, chargèrent Épiscopius de présenter l'apologie de leur doctrine, mais ils furent repoussés le 14 janv. comme menteurs el publiquement censurés. Le synode, contrairement aux vues des théol. anglais et allemands, formula dans le sens le plus déterministe la doctrine de l'élection de grâce, adopta le Catéch. de Heidelberg comme livre symbolique, décida une nouvelle traduction de la Bible et prit quelques autres résolutions d'organisation intérieure. Ses résolutions, qui ne furént adoptées en Allemagne que sous toutes réserves en ce qui regardait l'arminianisme, marquent le premier pas du protestantisme réformé dans la voie de l'absolutisme confessionnel, et tout en respectant ce qu'il y a eu de fidèle et de consciencieux dans la fermeté des théol. de Dordrecht, on peut regretter que leur raideur ait fermé la porte aux essais de conciliation. Actes du Synode, Dordrecht 1620. Les mêmes, par les Remontrants, Harderwy 1620.

DORMANTS (Les sept). Une légende grecque, rapportée d'abord par Grégoire de Tours, puis enjolivée par la tradition, dit que pendant la persécution de Décius sept frères d'Éphèse (dont les noms varient) se réfugièrent dans une caverne et qu'ils y furent murés vivants par les païens 231. Ils y dormirent deux siècles et ne se réveillèrent qu'en 408, ou même 447 sous Théodose II. L'un d'eux se rendit de nuit à la ville pour acheter du pain, croyant n'avoir dormi qu'une nuit. L'év. et l'empereur accoururent pour constater le miracle, mais au même moment les 7 frères tombèrent morts. Un des narrateurs dit que Dieu fit ce miracle pour convaincre de l'immortalité de l'âme un év. qui en doutait. Le Coran a une légende semblable, d'après laquelle les 7 frères et leur chien seraient devenus les patrons delà marine turque. Y aurait-il une allusion aux Pléiades ?

DORNER, Isaac-Auguste, théol. contemporain, auteur de nombreux écrits, entre autres d'une Hist. de la théol. prot., est né à Neuhau-sen ob Eck, Wurtemberg, le 20 juin 1809, et a été successivement prof, à Tubingue, Kiel, Kônigsberg, Bonn, Gotlingue; finalement membre du Consistoire supérieur et prof, à Beriin, depuis le ministère de Bethmann-Hollweg. Retraité. Son fils, docteur en théol. est prof, au séminaire de Wittenberg.

DOROTHÉE 1° vierge deCappadoce, martyre sous Maximin 311, fut dépouillée de ses biens et bannie. 2° Sainte de Prusse, vécut après son mariage 1394 dans une cellule de Marienwerder; elle faillit être canonisée 1404, mais la chose n'eut pas de suite, parce qu'il paraît qu'elle avait dit du mal de l'ordre teutonique. 3° Ev. de Tyr, martyrisé 362, auteur d'un livre sur la vie et la mort des apôtres. 4° Disciple du moine Jean le prophète, maître de Dosithée, et chef d'un monastère près de Gaza; a laissé des Lettres et des Sermons.

DOSITHÉE 1° ou Dusis, rabbin juif très instruit du 1er siècle, qui passait pour magicien; il mit contre lui les pharisiens à cause de la manière rigoureuse dont il interprétait les Écritures. H se fit un parti d'une trentaine de disciples parmi les samaritains, et en vint jusqu'à se faire passer pour le Messie. Il menait une vie austère et observait strictement la loi. Ses ennemis lui reprochèrent d'avoir falsifié le Pentateuque. Chassé et persécuté il sp retira dans une caverne près de Jérusalem, où il mourut pour avoir trop jeûné. Il avait encore quelques disciples au 4m« siècle. 2° Dosithée, d'après une tradition, serait le nom du sacrificateur envoyé par Sanchérib à Samarie, 2 Rois 17, 27-28. 3<> Lévite qui apporta de Jérusalem en Égypte une édition grecque, embellie, du livre d'Ester. 4° Disciple de Dorothée, canonisé. 5° Général juif sous Philométor.

DOR

DOXOLOGIE, parole ou formule de louange à l'honneur de Dieu. La plus ancienne est celle des anges Luc 2, 14. qui fut longtemps introduite dans le service liturgique, et souvent développée par des additions de circonstance. L'Égl. grecque la chante entre le Kyrié et la lecture de la Bible tous les dimanches et jour? de fête. L'Égl. luthérienne l'avait d'abord conservée; elle l'a ensuite remplacée par l'hymne: A Dieu seul dans les cieux soit honneur. On appelle petite doxologie celle de la Trinité: Gloire au Père, au Fils et à l'Esprit saint aux siècles des siècles, dans laquelle on a introduit, à cause de l'arianisme, les mots: « tel qu'il était au commencement, et maintenant, et toujours, aux siècles, etc. > La doxologie qui termine l'oraison dominicale est évidemment un appendice dû à l'usage liturgique de ce formulaire (Godet): elle n'est dans aucun mss. de Luc et manque dans les plus anciens de Matthieu.

DOYEN, président d'un chapitre; on dit ainsi le cardinal doyen. Les curés doyens de campagne portent le nom d'archiprêtres; les présidents s'appellent en Allemagne surintendants; en Angleterre ils ont conservé le titre de doyens. En France on le réserve pour les curés d'un chef-lieu de canton et pour les prof, qui président une faculté. L'âge, l'ancienneté ou l'élection peuvent le conférer; c'est tantôt un honneur, tantôt une fonction.

DRABICIUS, Nicolas, né 1585 en Moravie, prédicateur de l'Égl. des frères en 1616, banni 1629, s'établit en Hongrie comme marchand de drap. En 1638 il crut avoir reçu de Dieu des révélations. Comenius les fit imprimer 1657, mais comme l'une d'elles annonçait la fin de l'empire d'Autriche, Drabicius fut arrêté et exécuté 1672 à Pressburg pour crime de haute-trahison.

DRACONITÈS, Jean, surnommé aussi Carl-stadt, de son lieu de naissance; Drack était sou vrai nom. Né 1494 il prit part à la réception de Luther comme chanoine et maître à Erfurt 1521, perdit par là son emploi, passa quelque temps à Wittenberg, et fut nommé pasteur à Milenberg 1523, puis à Waltershausen. Prédicateur et prof, à Marbourg 1534, il donna sa démission en 1547, redevint prof, de théol. à Rostook 4551, et fat contraint parlés luthériens rigides de renoncer à sa surintendance, 1560. Il se retira à Wittenberg où il + 1566. On a de lui sa Pentaple, ou Bible en cinq langues (hébr., cald., grec, latin et allem.) qui n'est pas achevée et divers comment, sur la Genèse, les Psaumes, Abdias et Daniel.

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DRjESEKE, Jean-Henri-Bernard, né à Brunswick 1774; étudia à Helmstâdt, fut pasteur à Môlln 1798, à Brème 1814, et enfin surintendant et év. à Magdebourg 1832. Démissionnaire en 1843, f 1849. Un des plus puissants orateurs de la chaire allemande, il ne s'inféoda à aucun parti et chercha à mettre en relief tout ce qui dans l'Évangile s'adresse directement au cœur et à la conscience. Il fut attaqué par les Amis des Lumières, qui avaient cru pouvoir compter sur lui, et se joignit à la protestation des partisans de Schleiermacher contre la Gazette Évang. de Hengstenberg 1845.

DRAGONADES. Moyen de conversion employé par le gouvernement de Louis XIV, pour obliger les protestants à faire profession de catholicisme. Le procédé était aussi ingénieux que cruel. On logeait un certain nombre dragons chez ceux que l'on voulait persuader, et ils les pressuraient, les tourmentaient, les molestaient, vivant à leur dépens, jusqu'à ce qu'ils fussent suffisamment convaincus des mérites et de la beauté de la religion romaine. Ce fut une des spécialités du règne du grand roi.

DRAMES spirituels, ou Mystères. Sans parler des ressources que pouvaient offrir à l'art dramatique les faits et les idées de l'histoire et de la vérité chrétienne, tels qu'ils furent exploités entre autres par Roswitha, le culte chrétien donna directement naissance à toute une littérature dramatique; c'est surtout au moyen âge qu'elle fleurit. Le culte cathol. est lui-même me représentation sans cesse renouvelée du mystère de la rédemption. Dans les jours de grandes fêtes on ajoutait au culte ordinaire des scènes tirées de l'histoire biblique, tantôt l'hist. d'Adam et d'Ève, le Paradis, la Tentation où un grand serpent de carton s'enroulait autour d'un arbre, la chute; tantôt l'histoire de Tobie; plus souvent la naissance J.-C. avec les quatre animaux de rigueur, le coq chantant: Ckriàtus est: le bœuf mugissant: Ubi: la chèvre ou4a brebis bêlant: Bethléhem, et l'âne concluant: Ea, Eamus ! Souvent c'était l'entrée de de Jésus à Jérusalem, où l'âne jouait encore son rôle; ou les scènes de la Passion, avec des soldats romains, habillés et armés à la gauloise. Des chœurs et des antiphonies, chantés ou récités par des prêtres, donnaient l'explication des tableaux. Peu* k peu toute cette mimique passa des mains du clergé dans celles des laïques. Innocent III, 1210, défendit aux prêtres de figurer à ces représentations, au moins dans les églises, car au 45** siècle on les voit encore parader avec letirs élèves ou leurs confréries dans ce genre de spectacles, qui étaient fort populaires, et les planches ou tréteaux s'élèvent sur les places publiques, adossés aux églises qui leur servent de coulisses et de vestiaires. Les foules accourent. On peut leur faire connaître, suivant les dispositions des auteurs et des acteurs, les grands faits évangéliques ou les désordres du clergé: le drame est une bonne occasion pour tout dire, et la Fête des ânes, celle des Fous, celle des Diacres-saoûls, paraissent avoir été bien plus une critique qu'un moyen d'édification. La transition du drame religieux au drame mondain fut rapide et naturelle; ce dernier finit par régner presque seul. Au moment de la Réform. le drame biblique reprit quelque faveur et refoula, du moins pour un temps, les imitations des comédies grecques et latines. En 1807 on conservait encore à Valenciennes l'habitude de représenter le mystère de la Passion; il n'en reste plus auj. que la solennité décennale d'Oberammergau, q. v.

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DRESDE, ville de 80,000 habitants, dont la grandeur date du siècle dernier. Célèbre par ses belles galeries, par la victoire de Napoléon et par la mort de Moreau 1813. Deux synodes y furent tenus 1562 et 1571, dans lesquels les théol. de la cour de Saxe formulèrent dans un esprit philippiste, le Consensus de Dresde, sans toutefois mettre trop en saillie l'opposition au luthéranisme, qui se manifesta plus tard. L'ubiquité en est exclue.

DREXEL, Jérémie, ne à Augsbourg 1581; jésuite et chapelain de Maximilien I«r depuis 1615, f 1638. Le peuple le considérait comme un saint. Ses ouvrages d'édification furent appréciés même des protestants; souv. réimprimés.

DROGON, fils naturel de Charlemagne, archev. de Metz; les év. de la Gaule franque refusèrent, 844, de le reconnaître comme vicaire de Serge II, qui lui en avait donné le diplôme. Il introduisit dans son diocèse le chant grégorien. Il se noya 855 à Luxeuil, en péchant dans un étang.

DROIT aux dépouilles, v. Dépouilles. Droit de l'Étole, v. Étole.

DROSTE - VISCHERING, Clément-Auguste, comte (de), archev. de Cologne, le représentant le plus actif de l'ultramontanisme en Prusse et en Allemagne. Né à Vorhelm, près Munster, 22 janv. 1773; vicaire-général 1805, administrateur du diocèse 1807, il agit toujours dans l'idée de l'indépendance absolue de l'Eglise, il interdit la fréquentation de l'univ. de Bonn et prit contre les mariages mixtes les mesures les plus autoritaires, 1817. Déposé en 1820 à la suite de ses conflits avec l'État, il fut nouimé archev. de Cologne 1835 sur sa déclaration qu'il respecterait quant aux mariages mixtes une convention conclue par l'État avec son prédécesseur; mais une fois nommé il déclara ne reconnaître que le bref du pape du 25 mars 1830, et il fut interné à Min-den d'abord 1837, puis à Munster. Il fut rendu à la liberté 1841, mais à la condition de prendre pour coadjuteur l'archev. de Spire, Geissel, et de lui abandonner l'administration de son diocèse. Il lit un voyage à Rome 1844, et f 1845.

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DRO

DRUSES, peuplade de Syrie, qui habite les régions du Liban et de l'Antiliban, au nord du pachalik d'Acre; ils sont presque partout mêlés aux Maronites, quoique ennemis les uns des autres. Leur nombre est de 80 à 120,000 environ; la statistique orientale ne permet pas une appréciation plus exacte. Ils sont censés relever du pacha d'Égypte, mais en réalité ils sont à peu près indépendants. Leur ville principale est Déir-el-Kammar, où réside aussi leur chef, ou hakem. Leur religion, mélange d'islamisme, de judaïsme et de lambeaux de christianisme, est peu connue; ils en font plus ou moins mystère, et prétendent, par une interprétation allégorique, la trouver dans le Coran. Ils honorent, comme une incarnation de Dieu, et comme la dernière, le calife fatimite Hakem Biamrillahi, 995-1020, qui fut assassiné par sa sœur en secret, et qu'ils assurent n'être pas mort. Ils voient en Hainsa-ben-Ahmed le fondateur de leur culte, le premier médiateur, l'intelligence de Dieu, qui seul peut révéler la vérité. Avant lui déjà ils avaient eu pour chef Mohamed-Darasi, ou Dursi, un des premiers apôtres de Hakem, qui conduisit en Syrie ses partisans persécutés en Égypte; c'est de lui probablement que dérive leur nom. Ils croient au Dieu unique; la vérité et l'obéissance apprennent à le connaître; par une sorte de métempsycose, l'homme atteint aux degrés supérieurs. Leur culte est simple; les profanes n'y sont pas admis; il y figure un veau d'or dont le rôle n'est pas bien connu (v. Sylv. de Sacy, Exposé de la relig. des Druses). Peuplade énergique et belliqueuse, ils se sont rendus célèbres par le massacre des chrétiens en 1860.

DRUSIUS, Jean, savant exégète et orientaliste, né à Oudenarde, Flandre, 28 juin 1550. Son vrai nom était Van den Driesche. II suivit à Londres son père proscrit pour cause de religion 1564, étudia à Cambridge (l'hébreu sous Chevalier), fut nommé prof, à Oxford 1572, rentra dans son pays après l'édit de pacification de Gand 1576, et devint prof, de langues orientales, d'abord à Leyde 1577, puis à Franeker 1585, où il f 12 févr. 1616. Il avait été chargé en 1600, par les États-généraux, de faire des Annotations sur l'A. T. Ce travail, à peu près achevé, fut publié après sa mort par Amama, et a paru dans les Critici sacri. Vie par son gendre Abel Curiander 1616.

DRUTHMAR, Chrétien; moine à l'abbaye de Corbie, puis à Stabio près Liège, vers 840. Auteur d'un Commentaire sur saint Matthieu, assez bon au point de vue grammatical et historique. Dans l'édition de Secer, Haguenau 1530. le passage sur la Cène est expliqué dans un sens tout protestant; les catholiques ont découvert un autre mss. qui donne une variante conforme à leur exégèse.

DUALISME, système philos, ou religieux qui, remontant à l'origine des choses, admet deux principes contraires, l'un et l'autre éternels, p. ex. le bien et le mal, l'esprit et la matière, l'idéal et le réel. Ce système est essentiellement païen; on le trouve chez les Perses sous les noms d'Ormuzd et d'Ahriman, et quoique le christianisme ne reconnaisse qu'un seul Dieu, créateur, éternel, par qui toutes choses subsistent, le dualisme s'est fait jour à plus d'une reprise dans le développement du dogme chrétien, non seulement d'une manière grossière eî matérielle, comme chez les gnostiques et les manichéens, mais d'une façon plus subtile dans les discussions d'Augustin et de Pélage, à l'occasion de l'origine du mal, dans les élucubra-tions des sectes spiritualistes et antinomienne> du moyen âge, et dans la conception du diable, telle que l'admettent et l'Égl. catholique et même beaucoup de théol. protestants.

DUBOIS, Guill., né 1656. fils d'un apothicaire de Brives-la-Gaillarde, d'abord domestique du principal du collège de Saint-Michel, Paris, profita de sa position pour étudier, fit des progrès rapides, obtint la faveur de Louis XIV. devint précepteur de celui qui fut plus tard le régent, flatta ses vices, entra dans les ordres pour faire oublier son origine, et se lança dans la diplomatie, où ses succès qui furent nombreux, furent récompensés par des charges politiques et religieuses. Homme sans principes et sans moralité, il fut nommé archev. de Cambrai, cardinal, et premier ministre du régent, f 10 août 1723 d'un abcès.

DUBOSC lo Jean, sieur d'Esmendreville, avocat, conseiller au parlement de Rouen, exécuté 1er nov. 1562, son corps partagé en 4 quartiers et pendu à 4 potences aux avenues de la ville, pour avoir défendu Rouen contre les triumvirs. Neuf autres furent condamnés avec lui.

2° Pierre, né 21 févr. 1623 à Bayeux, le plus éloquent des prédicateurs réformés du 17®« siècle; instruit, philosophe, d'un extérieur agréable. Nommé pasteur à Caen en 1646, il fut à pluà-reprises sollicité de venir à Paris. Turenne et Laforce insistèrent auprès de lui pour cela, et de son côté l'archev. de Paris se rendit exprès vers le roi pour s'opposer k cette nomination, comme s'il craignait un rival pour Bourdaloue et Bossuet. Accusé de s'être servi de termes injurieux en parlant de la confession, Dubosc fut exilé à Châlons 1664. Souvent envoyé auprès dn roi par les Églises, il fut en 1668 chargé de demander le maintien des chambres de Pédit, el Louis XIV déclara n'avoir jamais « ouï bien parler. » Chassé 1685 par la Révoc. de l èdit de Nantes, il fut appelé comme pasteur à Rotterdam où il f 2 janv. 1692. OEuvr. et Notice par Legendre. v. Vinet. Il est connu aussi sous le nom de Thomines.

DUBOURG, Anne, né 1521 k Riom, Auvergne, d'une famille distinguée, diacre et sous-diacre, puis prof, de droit à Orléans, membre du parlement 1557, s'était converti au protestantisme et se rattachait k Pégl. secrète de Paris. Il demanda pour ses coreligionnaires au moins la tolérance et un traitement plus doux, mais encourut pour cela la défaveur de Henri II et la haine du card. de Lorraine. Ce dernier le dénonça k la chambre ardente et ne négligea rien pour hâter sa condamnation. En vain les frères de Dubourg intercédèrent, en vain Dubourg lui-même exposa l'illégalité de son arrestation et la violation des lois en sa personne; en vain il fit ressortir ce qu'il y a d'étrange k condamner « ceux qui invoquent au milieu des flammes le nom de J.-Chr.; » l'amant de Diane de Poitiers le fit arrêter séance tenante par le capitaine de Montgommery (le même qui le tua un mois plus tard par accident). Dubourg, dans sa prison où il passa 4 mois, écrivit non pour se défendre, mais pour défendre la vérité, une profession de foi qui est un beau monument de sa vie religieuse. Distrait de ses juges naturels et remis entre les mains d'un tribunal ecclésiastique, sa condamnation n'était plus qu'une affaire de forme; dégradé d'abord de ses ordres, il fut 21 déc. 1559 condamné k être pendu, son corps brûlé et ses biens confisqués. La sentence fut exécutée le surlendemain 23, le cardinal de Lorraine ayant insisté pour que tout se fit rapidement, car il savait que des députés du comte palatin étaient en route pour demander au roi Henri de lui céder ce jeune et noble savant, comme prof, de droit à Heidelberg. La fin courageuse de Dubourg et les paroles qu'il adressa au peuple avant son supplice, produisirent une vive impression dans toute la France et provoquèrent indirectement la conjuration d'Am-boise. Ses deux frères, Claude et Gabriel, étaient protestants comme lui; un fils de ce dernier, Georges, a même joué un rôle dans les assemblées politiques, comme commissaire de Henri IV, et dans les synodes nationaux de Gap et de Saint-Maxent.

DUCANGE, v. Dufresne.

DU CHEYLA, v. Chayla.

DUCHOBORZES, secte dualiste et mystique de l'Égl. russe. Ils rejettent les sacrements et la prêtrise, et regardent le corps terrestre comme une des conséquences de la chute de Pâme; la rédemption doit ramener les choses k leur état primitif. Persécutés par Catherine II à leur origine, vers 1780, ils obtinrent d'Alexandre I«r un édit de tolérance. Leurs principales colonies sont dans la Tauride.

DUDITH, André, né à Ofen 1533; év. de Tinninie, conseiller secret à la chancellerie de Vienne, il assista au conc. de Trente, où il prononça 5 discours. En 1565 il renonça à toutes ses charges, pour épouser nne demoiselle de la cour, polonaise, Regina Shass, qu'il aimait. Son portrait fut brûlé k Rome, et lui-même excommunié. Maximilien et Rodolphe lui confièrent encore quelques missions politiques, mais il se retira des affaires pour se consacrer aux études 1579 et f à Breslau 1589. Il a écrit sur le mariage et d'autres travaux historiq. Vie parStief, 1756.

DUEL. C'est du droit germanique que le duel a passé dans les mœurs de l'Europe chrétienne; c'était encore la vengeance, mais régularisée et à armes égales, succédant au guet-apens et k l'assassinat. A quelques égards c'est donc un progrès sur l'état sauvage et sur la vendetta. Mais ce n'en est pas moins un acte coupable, puisqu'il remet aux chances du hasard, de la force ou de l'adresse, la solution d'une question de droit et la réparation d'une injustice; et par ce qu'il a de chevaleresque il est insensé, puisqu'il expose le provocateur k un nouveau dommage qui s'ajoute k l'ancien, comme unique satisfaction. Le christianisme l'a toujours condamné; dans l'Égl. catholique il entraine l'excommunication immédiate, dont Dieu seul peut relever le coupable. Si, avec les mœurs relâchées et avec la législation imparfaite de notre civilisation, le duel peut quelquefois s'expliquer ou plaider les circonstances atténuantes, il ne peut jamais se justifier.

DU FRESNE, ou Du Fresne, lo Charles, seigneur du Cange, ou Ducange, né à Amiens 10 déc. 1610, f à Paris 23 oct. 1688, célèbre historien et glossateur, était trésorier de France à Amiens, mais quitta sa place pour pouvoir se livrer entièrement k ses études 1668. On a de lui son Glossarium, 2 vol. fo, indispensable pour l'étude de la basse latinité; un Glossaire semblable pouf le grec; une Hist. du moyen âge, des études sur l'hist. de France, et une Hist. de Constantinople sous les emp. français. — 2o Samuel, natif de Normandie, suspendu de la Cène 1616 à cause de ses vues sur le jugement dernier; appelé comme pasteur à Viane 1620, déposé de nouveau en 1637 par le synode du Haut-Languedoc, à cause de sa chute (sains autre explication);.réhabilité à Charenton 1645 et envoyé comme pasteur à Issoire. — Un réfugié de ce nom, aussi d'Issoire, avait été reçu bourgeois de Genève, 3 oct. 1582.

DU GUET, Jacques-Joseph, né à Montbrison 9 déc. 1649, f à Paris 25 oct. 1733, était entré dans la congrég. de l'Oratoire, 1667, mais ayant refusé de souscrire à la bulle Unigenitus, il en fut expulsé 1686. Attaché aux principes du jansénisme, personnellement lié avec Quesnel et Arnaud, il passa en Hollande, puis revint à Troyes et à Paris, où il consacra ses dernières années à des travaux littéraires de morale, d'hist. et d'exégèse. Les principaux sont: un Traité sur les devoirs d'un évéque 1710, Traité des scrupules 1717, Lettres sur divers sujets de morale et de piété 1718; Institution d'un prince (pour le duc de Savoie) 1739 \ Confér. ecclésias-tiques 1742. On a publié 1764 l'Esprit de M. Duguet. V. aussi Gonthier, Choix de Lettr. chrét., t. 3.

DU JON, François, v. Junius.

DU MOULIN, Du Moliou De Molin, en latin Molinœust famille considérable de l'Ile de France, dont deux branches qui embrassèrent la réforme, descendaient de Denis du Moulin, archev. de Toulouse 1447 et de Marie de Cour-tenay.

A. Branche de Migneaux. Elle était alliée à la famille d'Anne de Boleyn. Son représentant le plus illustre fut le célèbre jurisconsulte Charles Du Moulin qui, né à Paris 1500, fit de brillantes études de droit, fut reçu avocat en 1522, dut renoncer à plaider à cause d'un bégaiement insurmontable et se borna à la consultation. Il rendit un grand service à Henri III par son Comment, sur l'Édit des petites dates, en prouvant que le roi avait le droit d'empêcher qu'on envoyât de l'argent à Rome. Mais comme il était protestant, le roi se crut dispensé de toute reconnaissance et laissa piller la maison de son défenseur à 4 reprises différentes. Persécuté par la cour de Rome il dut s'enfuir en Allemagne et professa le droit avec distinction à Tubingue; il visita aussi Genève, Neuchâtel, Bâle et Strasbourg, demeura quelque temps à Montbéliard, revint à Paris, et après de nouveaux voyages et de nouvelles persécutions, y t 27 déc. 1566. Il avait été marié 2 fois, et ^vait qu 3 enfants, Charles (sieur d'Al-lone .par sa mère), ,qui f hydropique 1570; IjOuîs, f de la peste à Orléans 1562, et Anne, qui fut assassinée 1572. Homme plein de talent, d'instruction, d'un caractère entier, mais vaniteux. La liste de ses ouvrages dépasse le chiffre de 50; la plupart ont trait au droit français; quelques-uns se rapportent aux difficultés qu'il eut à plus d'une reprise avec les ministres réformés,

B. Branche de Lorme-Grenier. l^Joachim Du Moulin, dont on ignore le degré de parenté avec le précédent, épousa Jeanne de Houville, dont il eut un fils. 2° Joachim, qui devint protestant, pasteur à Orléans, président de plusieurs synodes provinciaux 1605, 1610. Il se retira 1615, après 56 ans de ministère, et f peu après à Saumur. Il avait eu de sa première femme, Françoise Gabet, douairière Du Plessis. plusieurs enfants, dont le plus distingué fut 3o Pierre Du Moulin, né 18 oct. 1568 au château de Buhy. Sauvé de la Saint-Barthélémy par une servante, il étudia à Sedan, Cambridge. Leyde; fut nommé prof, de philos, à Leyde 1592, pasteur à Charenton 1599. La princesse Catherine de Bar se l'attacha un moment comme chapelain, quand elle se rendit en Lorraine 1609. Il desservit Charenton 21 ans, au milieu de tous les dangers; fut appelé en Angleterre par le roi Jaques 1615, pour travailler à l'union des diverses égl. protestantes; fut député par les égl. au synode de Dordrecht, mais Louis XIII lui ayant défendu de s'y rendre, il s'y fit représenter par un mémoire très accentué contre l'arminianisme; présida 1620 le synode d'Alais où il fit sanctionner les décisions de Dordrecht; Craignant d'être arrêté sur une dénonciation de Buckingham, il s'enfuit à Sedan où, après deux voyages à Londres et une tentative inutile pour rentrer à Paris, il fut nommé pasteur et prof, de théol. et où il f 10 mars 1658, âgé de 90 ans. D'une grande vivacité d'esprit, travailleur infatigable, savant, plein de zèle et d'ardeur, cal* viniste convaincu, mais d unenature impérieuse et violente, son tempérament le poussait à la polémique, et il passa une partie de sa vie à combattre non seulement les catholiques, mais encore beaucoup de protestants, tels que Gro-tius. qu'il avait eu comme élève à Leyde, Tile-nus, Amyraut. Il a publié plus de 80 ouvrages, grands ou petits, et ne s'est pas toujours tenu dans les bornes de la modération; le synode d'Alençon 1637 mit un terme à ce que cette polémique entre protestants avait de pénible et de dangereux. Ses principaux écrits sont: la Nouveauté du Papisme 1627, l'Anatomie de la Messe 1636, l'Anatomie de l'Armianisme 1619. la Défense de la Tel. réformée 1617, le Bouclier de la foi 1618, De Monarchid temporali pont, romani 1614, dix Décades de sermons 1648-1654, etc. Marié 1599 avec Marie de Colignon, il en eut 3 fils, Pierre, Louis et Cyrua; ce dernier fut nommé pasteur de Châteaudun 1637, et sa fille Suzanne épousa Basnage. Pierre* docteur des univers, de Leyde, Oxford et Cambridge, fol nommé chapelain de Charles II 1660, puis prébendaire de Cantorbéry, où il f 20 oct. 1684. Louis, né en France, fut presbytérien, se voua à la médecine, fut nommé pàr Cromwell prof, d'hist. à Oxford, et, destitué à la Restauration, se retira à Westminster où f 20 oct. 1683; i) a publié une vingtaine d'ouvrages sur divers sujets, hist., controverse, discipliné, etc.

DUNIN, Martin (de), archev. de Gnesen-Po-sen en 1831. Né en Pologne H now 1774, élève du Collège germanique, il se montra intraitable sur la question des droits de l'Église. Par sa Lettre pastorale du 27 févr. 1838, il interdit quant aux màriagés mixtes l'indulgence pratique dont on avait usé jusqu'alors; condamné pour ce fait il fut déposé et interné à Berlin. Étant retourné à Posen sans autorisation, il fut enfermé dans la forteresse de Kol-berg. Il promit quelques adoucissements à sa circulaire et fut rétabli dans ses fonctions 1840. f 1842. Par sa fermeté, en présence des hésitations du pouvoir temporel, il a, comme Droste, ajouté au prestige dés principes romains.

DUNS Scot, Jean; le Docteur subtil; né 1266 ou 1275, à Dunston, Écosse, ou à Dunstance, Northumberland, d'où ses deux noms, entra dans l'ordre des franciscains-cordeliers, enseigna avec éclat à Oxford, à Paris 1301, et Cologne, où il f 1308, jeune encore. Il a énormément écrit; ses œuvres compl. publ. à Lyon par Wadding, 1639, forment 12 vol. f*. C'était un des plus habiles disputeurs de son temps, ce qui lui valut son sumôm. Il s'opposa en philos. àThomas d'Aquin et aux dominicains, et défendit contre ces derniers l'Immaculée Conception de Marie. Contre Thomas il défendit le libre arbitre et plaça le centre de la religion non dans la contiaissànèe de Dieu, mais dans la volonté, faisant ainsi de la foi une chose pratique et non desimpie spéculation. A ce point de vue la volonté de Dieu aurait quelque chose d'arbitraire; ce que Dieu veut est bon, ce qu'il ne veut pas est mauvais, et l'Égl. a le droit, comme dépositaire de la révélation, de décider ce qui est péché et ce qui ne l'est pas. Ses idées sur Tlndividuation (ou Hœccéité) furent fort goûtées et lui attirèrent un grand nombre de disciples. Il élevait les qualités individuelles au rang d'es-seftces distinctes, de sorte que chacun était composé de 2 parties, l'une générale, appartenant à tous, l'autre spéciale, distincte, n'appartenant qu'à lui et pouvant être envisagée en elle-même (entité). Il était réaliste, et l'école, attentive à ces débats, se partagea en deux camjps, les thomistes et les scotistes, ces derniers abusant outre mesure des distinctions et des subtilités.

DUNSTAN, saint anglais, né 925 près du couvent de Glastonbury, dont il devint plus tard abbé, introduisit dans son couvent la règle de saint Benoît, et jouit d'une grande autorité sous les règnes d'Athelstan, Edmond et Edred. Banni par Edwy, ou Hedwig (955-971), pour avoir maintenu les lois de Rome sur le mariage, il fut rappelé par son successeur Edgar-le-Pacifique et nommé d'abord év. de Worcester et de Londres, puis 959 archev. de Cantorbéry, enfin légat de Jean XII pour réformer les couvents en Angleterre. Il les soumit à la règle de saint Benoît, et y introduisit, non sans peine, le célibat. A la mort d'Edgar 975, les moines se soulevèrent contre lui, mais la diète de Calne mit fin aux troubles, f 19 mai 988. L'invasion da -noise renversa ce qu'il avait fait pour l'État et pour l'Église.

DUPANLOUP. Félix-Antoine-Philibert, né 3 janv. 18Q2 à Saint-Félix, Savoie; prof, en Sorbonne 1841, rédacteur de l'Ami de la Religion, év. d'Orléans depuis 1849; décoré 1850, membre de l'Acad. française 1854; assiste au concile de 1870 comme opposant d'abord, puis comme adhérent; sénateur inamovible en 1873; auteur <fun nombre considérable d'écrits sur la religion, l'éducation, oraisons funèbres, etc. Un des fauteurs les plus en vue, de la crise dite de l'Ordre moral 1873.

DtfPERRON, Jacques-Davy, né 1556 à Orbe, Vaud, de parents protestants, fit de bonnes études, devint lecteur de Henri III, se fit catholique, entra dans les ordres, rendit quelques services à Henri IV lors de son abjuration, et fut nomm$ par lui év. d'Évreux. Envoyé à Rome, il réussit à faire lever l'interdit qui pesait sur la France. A son retour il fit à Fontainebleau 1600 deux conférences contre le calvinisme défendu pàr Du Plessis-Mornay et d'Aubigné, et reçut comme récompense le chapeau de cardinal 1604; en 1606 il fut nommé grand-aumônier de France et archev. de Sens, pour avoir réconcilié le pape avec les Vénitiens. Comme membre de la congrég.De auxiliis il se prononça en faveur de Rome dans les discussions molinistes, et combattit à la diète de 1614 les principes gallicans, f 1618. Peu délicat sur les moyens de réussir, il avait du goût en littérature et parlait facilement. Il a laissé plusieurs ouvrages de controverse, et d'autres relatifs à ses négociations diplomatiques. 3 vol. f° Paris 1622.

DUPIN, Louis-Ellies, né à Paris 1657 d'une famille noble de Normandie, prof, de philos.au collège de France, auteur de la Biblioth. nouvelle des auteurs ecclésiastiques, 58 vçl. publiés de 1686 à 1704. Son indépendance de cœur et de caractère et la franchise de sa critique sur iyi si grand nombre de sujets et d'auteurs, lui suscitèrent beaucoup d'ennuis de la part des théol., et notamment de Bossuet. En outre s'étant prononcé contre la bulle Unigenitus, il fut privé de sa chaire et relégué à Châtellerault. Ses relations avec les jansénistes et sa correspondance avec l'archev. de Cantorbéry pour essayer d'un rapprochement entre les Égl. grecque, latine et anglicane, lui attirèrent de nouvelles contrariétés. f 1719. On a de lui une Hist. de l'Égl. en abrégé, une Biblioth. des historiens, un travail sur l'Antique discipline de l'Égl. et plusieurs réimpressions.

DU PLESSIS-MORNAY, ou plus exactement Philippe de Mornay, seigneur Du Plessis-Marly, né 5 nov. 1549 à Buhy, dans le Vexin français, d'une ancienne famille du Berry. Son père était catholique et le fit élever par un catholique fervent, le destinant à l'état ecclésiastique; mais sa mère, Françoise Du Bec-Crespin, penchait pour la réforme et l'embrassa ouvertement après la mort de son mari 1559. Elle rappela Philippe, auquel deux oncles, le doyen de M auvais et l'év. de Nantes, réservaient de riches bénéfices, et elle lui apprit, comme il ses 3 frères et à ses 2 soeurs, à prier « à la mode de Genève. » Plus tard la lecture du N. T. (édition catholique) le décida en faveur du protestantisme, auquel il consacra dès lors ses talents, son influence et sa vie tout entière. Ses études finies, il voyagea, vit h Suisse, Heidelberg, Francfort, l'Italie, Venise, Padoue, Rome, la Hongrie, les Pays-Bas, l'Angleterre, passa l'hiver de 1571-1572 à Cologne, où il débuta dans la controverse par un traité contre Ximénès, et dans la politique par une Adresse aux insurgés des Pays-Bas. Il rêva l'abaissement de la puissance espagnole, et le vieux Coligny frappé de son travail se proposait de l'envoyer en mission auprès du prince d'Orange, quand la Saint-Marthélemy coupa court à ce projet. Mornay échappa à grand'peine au massacre et réussit à gagner l'Angleterre. La Noue le décida à revenir en France et même à prendre part à l'affaire de Saint-Germain, quoique Mornay désapprouvât qu'on mêlât les intérêts de l'Égl. avec celles du duc d'Alençon. Il épousa à Sedan Mlle de la Borde, veuve du seigneur de Feuquières, 3 janv. 1576, mais dut aussitôt se remettre en campagne, vit le roi de Navarre qui le fit entrer dans son conseil, et fut chargé par lui d'une mission auprès des princes protestants d'Angleterre, d'Ecosse, de Hollande et d'Allemagne. A son retour, au bout de 2 ans, Henri IV déclara ne plus vouloir se séparer de lui, et Mornay fut à partir de ce moment et jusqu'à l'abjuration du roi l'âme de son conseil; guerrier habile, profond politique, bon administrateur, écrivain infatigable, il lui rendit tous les services, même les plus intimes, qu'un roi pouvait attendre du plus fidèle et du plus distingué de ses serviteurs. Il fut tour à tour ambassadeur en Angleterre, surintendant général de la Navarre, gouverner de Saumur; il réussit à enlever aux ligueurs le vieux cardinal de Bourbon qu'ils voulaient faire roi; en 1592 il traita avec Mayenne; et comme les ligueurs mettaient pour première condition de la paix la conversion du roi, Henri IV ayant promis d'étudier la question et de se faire instruire, Mornay, qui était de bonne foi, prit la chose au sérieux et organisa tout pour une conférence ou pour un concile où les deux parties seraient entendues, ne doutant nullement que le Béarnais n'attachât son nom à une réforme fondamentale de l'Égl. de France. Mais Henri s'était joué de lui; il abjura à Saint-Denis 15 juill. 1593 après une instruction d'une demi-journee, et si ce fut le coup de mort pour la ligue, ce fut également un coup de foudre pour le protestantisme, qui ne pouvait croire ni à cette lâcheté, ni à cette trahison. Les rudes observations de Mornay amenèrent sa disgrâce, mais n'altérèrent pas sa fidélité au roi, et ne refroidirent en rien son zèle pour les intérêts de l'Église. Après avoir obtenu de l'assemblée de Sainte-Foy l'institution d'un conseil général 1594, il finit par obtenir du roi 30 avril 1598 le célèbre Édit de Nantes. La publication que Du Pl. fit la même année de son Institution de l'Eucharistie déchaîna contre lui tous ses ennemis, la Sorbonne, les prédicateurs de Paris, le pape, le roi lui-même qui rompit définitivement avec son conseiller, et provoqua en avril 1600 la conférence de Fontainebleau, où Mornay eut le tort de comparaître contre Du Perron dans les conditions défavorables qui lui étaient faites. On l'accusait d'avoir falsifié 500 passages, et on lui remit seulement à minuit la liste des 62 sur lesquels il devait se justifier; on lui remit en même temps les livres dont il avait besoin, mais qu'on fit reprendre à 6 h. du matin, et à la conférence on se servit d'autres éditions pour achever de le dérouter. Le roi fut complice de ces manœuvres, la conférence n'aboutit pas, Mornay tomba gravement malade, et le médecin le contraignit de repartir pour Saumur. Il perdit 1605 son fils unique, tué à l'attaque de Guel-dre; bientôt après, sa femme, 15 mai 1606, qui fit une fin édifiante, recommandant à son mari de ne pas se relâcher de ses soins à l'Église par le deuil de sa mort. Le roi le rappela à Paris pour divers règlements, et le reçut bien, n'ayant plus à ménager le pape. Ils ne se revirent plus. Henri IV ayant été assassiné le 14 mai 1610, Mornay le pleura sincèrement, mais il avait prévu la catastrophe; il connaissait les jésuites, et il avait pris d'avance les mesures nécessaires pour l'intérêt des Églises. Il présida l'assemblée de Saumur, où fut renouvelée la députation générale. Le duc de Bouillon, qui avait brigué la présidence, irrité de son échec, desservit l'assemblée auprès de la reine-mère et lui suscita de nombreuses difficultés. Dépouillé par ruse de son gouvernement de Saumur, que Louis XIII s'engagea cependant à lui rendre dans les 3 mois, rçais sans tenir sa parole, Mornay refusa le bâton de maréchal et 100,000 écus qu'on lui promit pour donner sa démission, 1620, et se retira dans son château de La Forêt-sur-Sèvre, où il f 11 nov. 1623. De son mariage avec Charlotte Àrbaleste il avait eu 6 enfants, entre autres Marthe, qui épousa Jean de Jaucourt; Philippe déjà mentionné, et Anne, qui épousa en secondes noces Jacques-Nompar de Caumont, duc de La Force. Du Plessis-Mornay reste, avec Coligny, une des plus nobles figures du protestantisme français, aussi distingué par le cœur que par l'esprit, par le génie que par le désintéressement; aussi fidèle à son pays et à son roi qu'à son Dieu et à l'Église. Son influence fut considérable pendant près d'un demi-siècle; elle porta même ombrage à Sully, et si quelques pasteurs rappelèrent un jour, en riant, le pape des protestants, à cause du rôle prépondérant qu'il jouait dans leurs assemblées, ce titre lui est resté comme souvenir d'une influence légitime et presque illimitée. Parmi plus de 30 ouvrages qu'il a laissés, nous mentionnerons, outre ceux qui ont déjà été cités: Son Traité de larelig. chrét., un de ses meilleurs écrits, et différentes réponses relatives à la conférence de Fontainebleau; ses Mémoires, correspondances, etc., son Testament; diverses Méditations; le Mystère d'iniquité, où Mornay trouva dans les lettres numerales de paVLo Y VICe-Deo, le chiffre de la bête 666, livre condamné par le parlement comme exécrable; Traité de l'Égl.; discours et mémoires politiques, etc. Jja Biblioth. de la Sorbonne possède 11 vol. de ses Mémoires.

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DUR^EUS, Jean, ou Dury, né 1596 à Édin-bourg, fils d'un pasteur presbytérien, accepta 1625 le poste de pasteur de réfugiés anglais à Elbing, sous la domination suédoise. Il chercha, avec l'agrément d'Abbot, archev. de Cantorbéry, à réunir les diverses fractions de lfÉgl. protestante, et fit dans ce but plusieurs voyages en Allemagne, Suède et Danemark. Après s'être joint aux épiscopaux 1634, il passa de nouveau aux presbytériens, entreprit sous le patronage de Cromwell un nouveau voyage sur le continent 1654-1657, mais le protecteur étant mort, il quitta définitivement l'Angl. et se fixa à Cassel, où il travailla, mais en vain, à l'union des luthériens et des réformés, f 1680.

DURAND 1° Guillaume, surnommé de Saint-Pourçain, bourg d'Auvergne, où il naquit; dominicain, devenu célèbre par son enseignement seolastique à Paris ét à Avignon. Il est le premier nominaliste qui, partant de l'idée que l'homme ne peut de lui-même connaître la loi divine, en tira une conclusion en faveur de l'autorité absolue de l'Égl., ce qui lui valut le titre de doctor resolutissimus. Maître du sacré palais, év. d'Annecy 1318, de Meaux 1326, il fut mandé à Rome pour un Traité sur l'état des âmes après la mort, que Jean XXII crut dirigé contre lui, mais le roi de France détourna le coup. Auteur de Comment, sur P. Lombard, et de quelques écrits sur la juridiction ecclésiast. f vers 1333.

2<> Beaucoup de pasteurs français de ce nom: un pasteur de Sedan 1622; un pasteur de Berg-holtz, appelé à Baireuth, 1691; un Jacques de Durand, ministre à Bristol 1713; un Audibert, pasteur à Saint-Jean-d'Angély, qui apostasia 1685 pour une place et une pension, et n'obtint ni l'une ni l'autre; François, ministre de l'Égl. franç. de Cantorbéry 1767; Jacques-François, né 1727 à Sémalé, près d'Alençon, qui vint à Lausanne 1754, s'y convertit, fut consacré 1760, et s'y fit une grande réputation comme prof., prédicateur et littérateur, f avril 1814; Durand, past. àSommières, fàNeuchâtel, avril 1695; son fils Daniel, né 1681 à Saint-Pargoire, Languedoc, fit ses études à Bâle, fut attaché comme chapelain à un régiment de réfugiés que la Hollande envoyait en Espagne. Après de grands dangers il put s'échapper, vint à Genève, puis à Rotterdam où il se lia avec Bayle, et enfin, en Angleterre, où il fut pasteur d'abord de Saint-Martin's Lane, puis de l'égl. de Sa-voye; il a laissé plus, sermons, une Vie de Vanini, un livre estimé sur La religion des mahométans, une Histoire du 16me siècle, etc.

3° V. Villegagnon.

4° Pierre D. né 12 sept. 1700, collaborateur d'Ant. Court, pasteur du désert, pendu 22 avril 1732 à Montpellier. — Sa sœur Marie D. enfermée à 15 ans dans la Tour de Constance pour le crime de son fr., y passa 38 ans et ne fut délivrée qu'en 1768, avec ses compagnes; elle retourna dans son village, mais sa cabane était en ruine; les arbres de son verger étaient coupés.

DUSIS, probablement le même que Dosi-thée 1°, q. v.

DUTOIT-MEMBRINI, Jean-Philippe, célèbre mystique vaudois, né à Moudon 1721, consacré en 1747, mais d'une constitution délicate qui ne lui permit pas d'accepter les fonctions pastorales; une maladie de poitrine le décida même 1759 à renoncer complètement au ministère. Les écrits de M™« Guyon le portèrent au mysticisme, et il se fit un système religieux auquel sa piété sincère ét vivante gagna quelques disciples. Il donna aussi quelques cours comme prof, f 1793. Il a écrit Philos, divine par Keleph ben Nathan 1793, ét Philos, chrétienne 1800.

DU VERGIER de Hauranne, v. Saint-Cyran.

DWIGHT, Timothée, théol. et prédicateur

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américain trè9 populaire. Né dans le Massachu-sets 14 mai 1752, f Après avoir été chapelain de régiment, puis pasteur congrégationa-liste, il fut nommé directeur du collège de Yale. — Son petit-fils, portant les mêmes noms, remplit auj. les mêmes fonctions dans la même église.

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EADMER, Edmer, ou Ediner, moine de Cantorbéry, ami et compagnon d'Anselme, nommé 1120 év. de Saint-André, Écosse, abandonna bientôt son évêché à la suite de difficultés survenues avec le roi Alexandre, et rentra dans son couvent. L'auteur le pltis considérable de son temps, il a écrit Historia Novorum en 6 livres, et des Notices sur Anselme, Bregwin, Gswald, Odo, Wilfrid, etc.

EAU bénite, ou lustrale. L'usage en remonte dans l'Égl. aux ablutions greco-romaines et môme à celles des Hébreux. Il se trouvait à l'entrée des temples une cuve, grande ou petite, pleine d'eau, et les chrétiens du 4m« siècle en conservèrent l'emploi en accentuant sa signification symbolique; ils s'en aspergeaient au moyen d'un rameau en entrant dans le sanctuaire, pour marquer la purification intérieure. Mais la superstition, qui avait déjà altéré la notion du baptême, s'empara aussi de l'eau lustrale et voulut en faire une arme contre la puissance des démons; on l'exploita pour les exorcismes. On en trouve déjà des traces dans les Constit. Clément, quoique l'usage n'en soit devenu général en occident qu'au 9me siècle. C'est alors aussi, touj. en s'appuyant du faux Isidore, qu'on se mit à mêler du sel à l'eau, parfois de l'huile et même de la salive. Puis vint Thomas d'Aquin, s'appliquant à expliquer d'une manière psychologique l'action sacramentelle de l'eau bénite, et enfin Scot qui trouva la formule de l'action ex opere operato. La bénédiction est donnée tous les dimanches à l'eau et au sel par le prêtre revêtu du surplis et de l'étole; le diacre lui remet ensuite l'aspersoir, avec lequel il s'asperge, ainsi que l'autel et l'assistance. Les vertus de l'eau bénite étant fort nombreuses, contre l'incendie, la mort subite, etc., beaucoup de familles fidèles ont l'habitude d'en avoir chez elles une petite provision. L'Égl. grecque connaît aussi l'eau bénite et paraît même l'avoir pratiquée encore plus anciennement.

EBBON, Saxon de naissance, archev. de Reims par la protection de Louis le-Déb., renonça à sa brillante position pour se dévouer à l'évangélisation des peuples du nord, obtint à Rome la sanction de Pascal I«r, revint à Aix-la-Chapelle 822, où il trouva auprès de Louis les députés du roi de Jutland, Harald, et il partit avec eux pour le Danemark, chargé de riches présents. Sa mission dura 5 ans, avec des alter* natives de revers et de succès. Harald se fit baptiser 826, mais uniquement par politique et pour plaire à Louis; cela ne lui réussit pas, car ses sujets le renvoyèrent comme indigne. Après avoir fondé les égl. de Hambourg, Heili-gensteten et Schenefeld, Ebbo fatigué retourna à son évêché de Reims. S'étant mêlé à la conju ration des fils de Louis contre leur père, il fut enfermé dans un couvent, 835, puis appelé a l'év. de Hildesheim, près Hanovre où il f 851.

ÉBED-JÉSU (serviteur de Jésus), lo surnommé Bar Berika, fils du béni; né vers 1285 dans l'île de Gozarta, Tigre; nestorien de Sind-schar, év. métropolitain de Nisibis, f 1318, a laissé une vingtaine d'écrits sur l'exégèse, la philos, et la dogmatique, et un poème le Paradis d'Éden.—2° patr. nestorien, qui passa au catholicisme à Rome 1582.

EBEL, Jean, né à Passenheim, docteur en théol., pasteur à Hermsdorf et à Konigsberg 1816, prédicateur puissant, ne tarda pas à réunir autour de lui tous ceux qui, dégoûtés d'une foi morte, cherchaient le Dieu vivant en Christ. Ce mouvement de vie religieuse alla s'accen-tuant touj. davantage, si bien qu'Ébel, et sou collègue Diestel qui s'était joint à lui 1835-1842, finirent par être accusés devant les magistrats; on leur reprochait de faire une secte, d'enseigner l'erreur, de troubler la paix des familles, et l'on y ajouta bientôt la vieille imputation de se servir du manteau de la religion pour se livrer en secret à toutes sortes de désordres. Ils furent condamnés comme ayant manqué à leurs devoirs, et les considérants publiés furent choi sis de manière à faire croire que c'était pour cause d'immoralité qu'ils avaient été frappés. Ebel f 1861 à Hoheneck, près Ludwigsbourg: Distel f 1854. Ils furent vengés et réhabilités plus tard, trop tard pour eux, par le comte de Kanitz, membre du tribunal, qui prouva par des documents authentiques, leur parfaite honorabilité et le caractère exclusivement religieux du procès qui leur avait été fait, ainsi que la fausseté des calomnies dont ils avaient été les victimes. Kanitz fait ressortir aussi la partialité des juges, qui ont permis à la calomnie de se répandre et qui ont empêché autant qu'ils le pouvaient la justification de se produire. L'orthodoxie d'Ebel et de Diestel ressort d'ailleurs de leurs nombreux écrits et sermons, et le seul grief fondé, si c'en est un, que l'on put faire valoir contre eux, ce sont leurs relations affectueuses avec Schônherr, q. v.

EBER, Paul, un des amis de Luther et de Mélanchthon. Né i5ii à Kitzingen, Franconie, il étudia à Wittenberg, et y passa quelques années comme prof, de philos., puis de latin et d'hébreu. Il fut ensuite nommé pasteur et surintendant; il assista aux colloques de Worms et d'Allenburg 1557 et 1568; avantageusement connu comme prédicateur, poète et écrivain: Biblia latina, Èxpositio Evangeliorum domini-talium.

EBERLIN, Antoine, moine et prédicateur franciscain, à Tubingue, puis 1519 à Ulm, où il prêcha la doctrine de Luther; banni 1521, il trouva un refuge chez Sickingen et publia quelques écrits dans le genre de Hutten. A Wittenberg 1522 il rétracta quelques exagérations, passa un an à Erfurt 1524, combattit avec énergie la révolte des paysans, et fut nommé 1526 pasteur à Wertheim. Auteur d'une Théologie pastorale.

EBIONITES. Ce nom, d'après Tertullien, Jérôme et Augustin, dériverait d'un certain Ebion qui, après la fuiteàPelia, aurait résumé et fixé les doctrines de cette secte judéo-chrétienne. Mais cet Ebion est inconnu, et il est plus vraisemblable que le nom dérive de l'hébr. Ebion, qui signifie pauvre, soit qu'on l'entende avec Origène de la pauvreté de leur système, soit plutôt qu'il désigne la pauvreté matérielle dont ils faisaient profession et qu'ils regardaient comme un état de perfection. Beaucoup d'Esséniens s'étant joints à eux influèrent sur le développement de leur système. Ils nièrent des premiers la divinité de J.-C., sans qu'on puisse dire s'ils étaient plutôt juifs que chrétiens. Origène en parle comme de juifs s'approchaut du christianisme, croyant en Christ mais comme homme. Il les divise en 2 classes, les uns niant la naissance surnaturelle de Jésus, les autres l'admettant. Les premiers, connus sous le nom d'Elkètaites, représentent la transition au gnosticisme; ils croyaient qu'Adam, Moïse et J.-C. étaient pour ainsi dire le même individu; ils méprisaient la prophétie et dénigraient le mariage. Les seconds regardaient Jésus comme l'agent du Messie céleste, du Christ d'en haut; ils ne regardaient pas la loi comme obligatoire pour les païens; enfin ils avaient un Evangile de Matthieu différent du nôtre et 4e celui des Nazaréens.

EBRARD lo de Bèthune, auteur du 13™ siècle, a écrit contre les cathares un livre, Anti-Jutresis, qui fait connaître leurs doctrines, mais qu'on ne doit consulter qu'avec prudence, puisque c'est un ennemi qui parle. On se servait aussi, au moyen âge, de son Grœcumus, poème otx il traite de la rhétorique, de la logique, de la syntaxe et de la grammaire. 2° Jean-Henri-Aug.f né à Erlangen, 18 janvier 1818, prof, à

Erlangen, puis pasteur à Spire 1853-1861, de nouveau prof, à Erlangen; auteur d'une dogmatique et de plus, ouvrages théologiques estimés.

ECCHELLENSIS, Abraham, né à Eckel à la fin du 16me siècle; formé à Rome au collège des Maronites, prof, d'arabe et de syriaque au collège de la Propagande; laborieux, mais superficiel; collaborateur à la Polyglotte de Le Jai 1640-1653, et à la Concordance d'Allatius sur les dogmes des nations catholiques de l'Orient. Auteur d'une Gramm. syriaque , d'une Chronique orientale, etc.

ECCLESIA Christi, titre de la bulle du août 1801, qui sanctionne le Concordat français.

ECCLESIAS quœ antiquitate, commencement et titre de la bulle de 1823, publiant le Concordat avec la Suisse.

ECCLÉSIASTIQUE, tout ce qui appartient à l'Église; par conséquent, dans le sens vrai, les laïques pieux aussi bien que les fonctionnaires et les ministres du culte. Ce mot désigne cependant, par abus, plus particulièrement ces derniers, prêtres ou pasteurs, dans la plupart des communautés religieuses. — Les Biens ecclésiastiques sont tout ce qui, meubles ou immeubles, appartient à l'Église, temples, presbytères, bien-fonds, revenus, etc. Les édits de Licinius 313 et de Constantin 321, avaient accordé à l'Égl. le droit d'hériter, mais les abus furent si rapides, que déjà Valentinien dut le restreindre et le régler. La législation française se montra très favorable au développement de la richesse du clergé, mais à toutes les époques, dans tous les pays, les gouvernements ont cédé à la tentation de s'approprier certaines parties de ces biens, quand la conscience ou le bon sens protestaient contre la dangereuse et trop grande accumulation de richesses entre les mains d'une société dont le chef a été pauvre, qui fait profession d'être à la fois pauvre et spirituelle, et qui n'a jamais été à la hauteur de son mandat que lorsque les hommes, en la dépouillant, l'ont ramenée aux conditions normales de son origine et de son mandat. La réforme a rendu sous ce rapport de grands services à l'Égl. et à la société, mais il reste encore beaucoup à faire, et l'Angleterre elle-même semble être à la veille de mettre la main à la réforme d'abus séculaires. — On appelle Histoire ecclésiastique l'hist. de l'Église de J.-C. depuis sa fondation jusqu'à nos jours. Pour l'étudier on la divise en périodes. Rien de plus irrationnel que la division par siècles, adoptée par Mosheim et par Milner, et surtout que la subdivision en événements heureux et év. malheureux, adoptée par Mosheim (dans quelle classe rangerait-on la mort du Sauveur?). Chaque période doit renfermer ce qui est le produit le plus immédiat de l'esprit de Dieu, et passer par degrés à ce qui a été produit par l'esprit des ténèbres. C'est l'hist. de la vie et de la foi dans l'Église et au dehors; puis les schismes, les hérésies, les attaques et les persécutions. Comme sciences préparatoires

11 faut indiquer l'hist. politique, celle des religions, de la littérature et de la philosophie. Les sources immédiates sont les écrits des pères, las lois des divers États, les décrets des papes et des conciles, les règles monastiques, les monuments, les inscriptions, les tombeaux, etc. Les sources médiates sont les histoires de l'Égl. et les monographies, composées sur les sources immédiates. La liste en est fort nombreuse; parmi les plus anciennes nous citerons: Hégé-sippe, au 2™ siècle, vers 160, connu par quelques fragments conservés par Eusèbe; Eusèbe, dix livres sur l'hist. ecclés., et 4 sur Constantin; Socrate, au siècle; Sozomène, à Constantinople; Théodoret; Philostorgius, arien,

12 livres. Chez les latins: Rufin. pasteur d'Aquilée; Sulpicius Severus, en Gaule, depuis la création jusqu'à l'an 400. Au moyen âge, Grégoire de Tours, Bède-le-Vénérable, Adam de Brème. A l'époque de la Renaissance, Laurent Valla. En Allemagne la Réformation a donné les Centuries de Magdebourg, par Matth. Flac-cius, jusqu'au 13m« siècle; en France, surtout au point de vue de la controverse, Du Plessis-Mornay, Daillé, Casaubon, Du Moulin, les Bas-nage; plus tard Matter, Chastel; en Angleterre, Bingham, Milner; en Suisse, Hottinger; en Hollande, Spannheim, Leclercq; en Allemagne, Calixte au 17me siècle, Gottfried Arnold, qui s'attacha à faire ressortir ce qu'il y avait de vérité chez les hérétiques; Weissmann, Mosheim, Semler qui rationalise, Schrôder, Néander, Gie-seler, Ranke, Guerike, etc. Chez les catholiques: Baronius, contre les Centuries; Timon, janséniste; Dupin, Fleury, Athanase de Mtfh-ler, etc.

On divise généralement l'hist. ecclés. en 4 grandes périodes: 1° des apôtres à Constantin 1-320; 2« la période des pères ou des controverses 320-602; 3° de Rome ou du moyen âge 604, à la Réform. 1517; 4° des temps nouveaux jusqu'à nos jours.

On a compris de bonne heure sous le titre de Livres ecclésiastiques, outre les liturgies et les symboles, les catalogues des martyrs et les listes des membres de l'Église. Au 15m« siècle vers 1450 on voit apparaître les registres des baptêmes et des décès. François 1er en 1539 réclame du clergé un registre exact des naissances, dans l'intérêt de l'État. Le conc. de Trente impose un registre des baptêmes et des mariages. L'importance de ces documents amène l'État à en confier la rédaction aux hommes les plus capables; c'était alors le clergé, leurs actes font foi

et ont un caractère officiel. Plus tard les circonstances, la diversité des confessions relig., les progrès de l'instruction publique et certaines méfiances décident les gouvernements à remettre ces registres à des fonctionnaires spéciaux, civils, à décharger ainsi les ecclésiastiques d'une occupation et d'une responsabilité qui n'appartient pas à leur ministère, et à séculariser une statistique qui ne correspond plus au mouvement de la population dans l'Église.

ECK, ou plutôt Jean Mater, l'un des adversaires les plus décidés de la Réformation, né à Eck, Souabe, 13 nov. 1486, vint à Heidelberg à 12 ans et étudia la théol. à Tubingue, Cologne et Fribourg. Plus disert qu'éloquent, plus habile que profond, il se fit vite une réputation par son talent de discussion, fut nommé prof, de théol. à Ingolstadt, en 1510 chanoine d'Eich-stâdt, prochancelier de l'université, inquisiteur pour les procès de sorcellerie. Il ouvrit en 1558 la lutte contre Luther par ses Obélisques, auxquels Carlstadt répondit par 308 thèses. La dispute de Leipzig 27 juin 1519 attira Luther lui-même dans la lice et fournit à Eck le prétexte désiré pour le dénoncer comme hérétique et ennemi du pape, mais ce fut aussi ce qui décida l'entier affranchissement de Luther. Irrité des railleries dont Luther l'accabla, il poursuivit à Rome sa condamnation et en rapporta 1520 la fameuse bulle qui fut brûlée. Touj. plus en colère. il prit part successivement à toutes les conférences organisées contre les protestants, Ratisbonne, Baden, Worms, etc. A la diète d'Augsbourg il fut un des principaux auteurs de la Confutation. f 1548. Il a beaucoup écrit, mais sauf Le sacrifice de la messe 1528, ses ouvrages n'ont guère de valeur. — Il ne faut pas le confondre avec le chancelier bavarois Léonard d'Eck, qui, à la diète de Spire, s'opposa avec énergie à toute espèce d'accommodement.

ECKART, mystique allemand, profondément religieux malgré le panthéisme apparent de son système, était un moine dominicain, prof, à Paris, provincial de son ordre en Saxe, vicairc général pour la Bohême, puis de nouveau prof, à Strasbourg, Francfort et Cologne. Il prêchait en langue vulgaire; ses relations avec les fr. du Libre Esprit le rendirent suspect. L'archev. de Cologne le cita à comparaître devant le tribunal de l'Inquisition, 13 févr. 1327. Eckart se déclara prêt à se rétracter si Ton trouvait dans ses écrits quelque chose d'erroné. Évidemment ce n'était pas une rétractation et il dut comparaître devant le pape; il mourut en chemin, mais la justice de l'Egl. n'en 'fut pas désarmée; une bulle du 27 mars 1329 condamna après sa mort 28 de ses thèses, qui furent de nouveau condamnées l'année suivante comme résumant la ! doctrine des ftr. du Libre Esprit. La mémoire

d'JSckart n'en fut pas moins tenue en vénération; on se passait ses écrits de couvents en couvents; Henri Suson et Nicolas-le-Cusain les regardaient comme une des sources de la sa-

ÉCOLESdu dimanche, v. Dimanche etRaikes. ÉCONOME. Dans les premiers temps les év. administraient eux-mêmes les biens et les revenus de l'Égl., qui étaient peu considérables; mais à partir du 4®* siècle ils se choisirent parmi les membres du chapitre un ou plusieurs hommes spécialement chargés de la direction du matériel. Le conc. de Chalcédoine 451 en fit nne règle obligatoire, qui ne tarda pas à être généralement adoptée. Quand les biens de l'évê-ché furent séparés de ceux du chapitre, il dut y avoir aussi deux économes distincts, et toutes les fois qu'un év. vient à mourir, le chapitre doit nommer un ou plusieurs intendants chargés de dresser l'inventaire de sa fortune. Dans les simples paroisses, les prêtres ou les conseils de fabrique se chargent de l'économat. Les couvents ont aussi des économes pour l'administration de leurs biens.

ÉCONOMIE. On entend sous ce nom le plan de Dieu, considéré sous deux faces distinctes, suivant qu'il s'agit de l'Égl. ou de l'humanité dans son ensemble, ou de chaque individu en particulier. C'est la dispensation, le mode d'action par lequel Dieu se révèle peu à peu, les moyens qu'il emploie pour attirer les hommes à lui, pour les faire passer des ténèbres à la lumière. Quant au monde on a distingué l'économie patriarcale, l'éc. mosaïque et l'éc. chrétienne. On peut distinguer aussi l'éc. du Père, c.-à-d. l'Ane. Test., celle du Fils, qui est l'économie actuelle, et celle de l'Esprit, qui est l'éc. à venir. Plusieurs systèmes ont été proposés, plusieurs idées émises, mais ils n'ont de valeur que dans la mesure où ils rendent plus clair le développement du plan de la rédemption. On a souvent abusé de l'idée des économies successives, en exagérant leurs différences et en les opposant l'une à l'autre comme contradictoires. Eu ce qui concerne le travail de la grâce de Dieu chez l'individu, on a distingué (les luthériens surtout) cinq phases successives: l'appel que Dieu adresse à l'âme par sa Parole et par les sacrements; le réveil, ou l'illumination, effet de l'action du Saint-Esprit; la conversion, qui suppose tout ensemble la repentance et la foi au pardon; la sanctification, qui est le produit naturel et nécessaire de la justification, enfin l'union intime avec Dieu, qui est l'œuvre parfaite. Mais ces cinq moments ne sont pas toujours aussi accentués dans la vie réelle, ni dans la Bible, qu'ils le sont dans les traités de dogmatique, et bien des âmes sont venues à Dieu sans se donter de ces différentes phases, auxquelles d'ailleurs l'Écriture ne donne nulle part le nom d'économie.

ÉCOSSE, L'Évangile y pénétra au2me siècle, mais les chrétiens durent se réfugier dans les montagnes et les îles voisines. En 451 Célestin de Rome envoya Palladius pour chef des chrétiens, puis vint saint Patrik. Les fidèles persécutés portent le nom de Culdees. Colomban évangélise avec autant de succès que de zèle 563, mais l'arrivée du moine Augustin et de ses aides 597, amène la prépondérance de Rome, et les prêtres culdees se retirent à Iona. Le conc. de Ceale-Hythe 816 travaille à introduire l'épis-copat et à mondaniser l'Église. La lutte est longue; enfin 1297, pour échapper à la domination des prélats anglais, l'Église d'Écosse accepte celle du pape et fait sa soumission; le remède était pire que le mai, et l'asservissement fut complet. Robert Bruce ne fut reconnu roi par le pape, 1324, qu'à la condition de détruire tous les restes de l'hérésie. Cependant les témoins fidèles ne cessent de protester; Retley est brûlé 1422, Craw en 1432. Partout la cruauté et la rapacité du clergé indisposent les esprits et préparent une réaction. Jacques III, 1471, rend une ordonnance pour sauvegarder les droits de la royauté et pour empêcher une trop grande accumulation de la fortune publique entre les mains des prêtres. Quand la Réform. pénétra dans l'Écosse, elle y trouva un terrain bien préparé; n'ayant contre elle que les prébendai-res et tous ceux dont les intérêts étaient directement menacés, entre autres les possesseurs de bénéfices et ceux qui jouissaient des droits de patronage; mais ils étaient forts de leurs positions acquises. Le parlement interdit 1525 l'importation des livres de Luther et le N. T. de # Tyndale; en 1528 le clergé, c.-à-d. l'archev. Beaton, fit brûler le jeune Hamilton, et l'ère des supplices commença: elle se poursuivit, avec quelques rares interruptions nécessitées par ta politique, pendant un grand nombre d'années. Le cardinal Beaton continua l'œuvre que son oncle avait commencée: il fit brûler, pendre et noyer des hommes et des femmes, et après avoir fait exécuter Wishart 2 mai 1546, il fut lui-même tué par des conjurés qui l'empêchèrent ainsi de commettre de nouveaux crimes. Knox parut en 1547, prêchant avec puissance; le parti catholique, effrayé, se tourna vers la France, qui lui envoya des troupes. Les Écossais avaient ainsi à lutter contre la France, contre l'Angleterre et contre les faux frères qui étaient parmi eux, entre autres le faible comte d'Arran. L'avènement de Marie de Guise amena de nouvelles persécutions, mais développa aussi de nouvelles énergies, et les protestants se réunirent en secret à Édimbourg 1556 pour aviser. Une seconde réunion aboutit à la signature du

premier Covenant 1557, et l'on put considérer de ce moment la cause de la réforme comme gagnée. Cependant elle eut encore bien des luttes à soutenir, jusqu'à la chute de Marie 1567, et même sous Jacques VI, que ses attaches épis-copales (no bishop, no king) et surtout la question des patronages empêchèrent de se prononcer bien nettement. En 1603 Jacques, devenu roi d'Angleterre, essaya de rétablir deux sièges épiscopaux en Écosse, et Charles 1er, dès 1625, accentua la même politique, mais l'assemblée décida de résister, le parlement l'appuya, et Charles dut céder. La restauration, qui suivit le protectorat de Cromwell, crut pouvoir restaurer aussi Pépiscopat, grâce à la division des presbytériens en modérés et intransigeants; les covenantaires furent persécutés, et la paix ne se rétablit qu'avec l'Acte de tolérance de Jacques II 1687, renouvelé par la reine Anne 1707. Cet Acte, qui tolérait, sans la garantir, l'indépendance de l'Égl., ne suffisait pas aux hommes de principe, et le rétablissement illégal du patronage, violation de l'Acte de sécurité, ralluma les luttes ecclésiastiques. Plusieurs sécessions éclatèrent à différents intervalles, sous Mac Millan 1713, Erskine 1733, Gillespie 1752-1761, et grâce au droit de patronage, l'histoire de l'Égl. d'Écosse ne présenta pendant plusieurs années qu'une suite de luttes mesquines soulevées par des querelles locales; l'erreur et l'hérésie en profitèrent pour entrer dans la place. En 1796 une Société des missions fut fondée à Glasgow et à Édimbourg sous la présidence du vénérable D*1 Erskine, et l'assemblée générale, mise en demeure de s'en occuper, se prononça énergiquement, par 58 voix contre 44, contre • cette innovation qui fut qualifiée d'absurde. Dés lors les choses ont bien changé; l'esprit chrétien l'a emporté sur le faux modérantisme qui menaçait d'emporter l'Église. Le parti évang. vota en 1834 le fameux Acte de Veto qui, en reconnaissant le droit de patronage, le restreignait en lui opposant le droit de la majorité des paroissiens, dans le cas où le candidat présenté ne serait pas agréé. Les ministres comte d'Aberdeen 1840, et sir James Graham, 1842, essayèrent en vain de résister à l'entraînement général; les assemblées se succédèrent en accentuant toujours plus leur opposition, sous les auspices de Chalmers,Cuningham,Cand-lish, Gordon, Guthrie, etc. Et quand, en 1843, l'État se fut de la manière la plus blessante refusé à toute concession, l'Égl. libre d'Écosse se constitua pour ainsi dire instantanément; le 18 mai plus de 400 ministres et une foule d'anciens quittaient solennellement l'église de Saint-André où l'assemblée était réunie sous la présidence du marquis de Bute, commissaire royal, et renonçant à leurs bénéfices ils recouvraient leur indépendance. Cet acte est une des pages les plus belles de l'Égl. d'Écosse, et rappelle la grandeur des temps covenantaires. L'Égl. libre n'a cessé depuis sa fondation de croître et de se développer, grâce à la vérité de ses principes, à la supériorité de ses pasteurs, et docteurs, et au dévouement de ses membres. A côté d'elle cependant l'Égl. presbytérienne officielle continue d'être puissante et riche, en même temps qu'elle s'est développée sous le rapport de la vie et qu'elle a gagné quelque chose comme indépendance. L'Égl. épiscopale, autorisée depuis 1712 et plus encore depuis 1792, compte pour 200,000 membres, 5 év. dont le primat est celui de Saint-André; elle a ses principaux adhérents parmi la noblesse. Toutes les sectes anglaises sont d'ailleurs représentées en Écosse, baptistes, wesleyens, quakers, unitaires, swedenborgiens, catholiques, etc. Outre les missions écossaises qui sont nombreuses et bénies, il y a des églises écossaises à Londres et sur beaucoup de points du continent. V. Merle d'Aubigné, 3 siècles de luttes en Écosse; Wilks, Hist. de l'Égl. d'Écosse.

ÉCUMÉNIQITE, signifie universel; se dit des conciles où a été représentée l'Église chrétienne tout entière, et qui sont acceptés par elle comme faisant autorité. Ainsi: le conc. de Nicée 325 contre Arius; le premier de Constantinople 381 sur le Saint-Esprit; celui d'Éphèse 431 contre Nestorius; celui de Chalcédoine 452 contre Eu-tychès; les 2me et 3™ de Constantinople 553 contre Théodore, Ibas, et Théodoret, et 680, contre Honorius et les monothélètes. Quelques-uns y ajoutent le 2me de Nicée 787 contre les Iconoclastes et le 4™© de Constantinople 869 contre Photius,qui sont douteux, puisque l'Égl. entière n'y avait pas été représentée. D'ailleurs dans les 6 premiers, qui sont le plus généralement reconnus, ce sont les évêques d'orient qui dominent, et sous l'influence des emp. d'Orient; ainsi à Nicée il y a 315 orientaux contre 3 occidentaux; à Constantinople 149 contre 1, à Éphèse 67 contre 1, à Chalcédoine 350 contre 3, au 2ra« de Const. 158 contre 6, au 3m® 51 contre 5. On ne peut davantage reconnaître un caractère bien écuménique aux conc. suivants, où l'Égl. d'occident a seule eu la parole: les4 de Latran, 1123,1139, H79etl215; les 2 de Lyon 1245 et 1274; celui de Vienne 1312, ceux de Pise, Constance et Bâle 1409 * 1438, celui de Latran 1512, ceux de Ferrare et Florence 1438, celui de Trente 1545, et celui du Vatican 1869-1870. — On appelle Symboles ècum. les confessions de foi admises par l'Égl. primitive et par les premiers grands conciles; ils accentuent les traits caractéristiques, les points fondamentaux de la foi et sont obligatoires pour tous les fidèles; ainsi: le symb. de

Nicée, celui de Constantinople, et ceux qui portent le nom d'Athanase ou celui des Apôtres. La Réformation les a conservés à titre de symboles et de documents ecclésiastiques. — Le patriarche Jean Nesteutès (le jeûneur) prit le titre d'év. universel, ou écuménique, dans un concile où il eut à juger le patr. Grégoire d'Antioche, 588. Pélage II en fut si irrité qu'il déclara ce conc. nul et non avenu, et Grégoire

déclara le patr. déchu de la communion de l'Église.

ECUMÉNIUS, év. de Tricca, Thessalie, vers la fin du 10®« siècle; auteur de comment, exégét. suivis sur les Actes, les Ép. de Paul et lesEp. catholiques. Il emprunte beaucoup aux pp. grecs, mais ne paraît pas avoir bien saisi la doctrine de Paul.

EDELMANN, Jean-Christian, né le 9 juill. 1698, étudia la théol. à Iéna, mais se vit repoussé tour à tour par les orthodoxes, les pié-tistes, les moraves, les séparatistes et les inspirés de Rock. Il mit la main à la Bible de Berle-burg, puis se brouilla avec Haug. Esprit inquiet, mais religieux, il avait sur la Bible et sur l'Égl. des vues particulières, qu'il publia dans divers écrits, et qui amenèrent un déluge de réponses. Il travailla à Neuwied, Altona, Hambourg et Berlin, où il f 1767.

EDESIUS, v. Frumentius.

EDESSE, sur le Scirte, en Mésopotamie, sur la rive gauche à 40 kilom. de l'Euphrate; auj. Orfa, 50,000 hab. Son origine remonte à la domination macédonienne; elle fut fondée par Seleucus Nicator, et porta les noms de Callirhoé ou d'Antioche Mixobarbara. Indépendante après les Séleucides et capitale de l'Osrhoène, elle eut pendant 3 ou 4 siècles des rois particuliers, nommés Abgar, dont l'un, d'après Eusèbe, aurait été en correspondance avec Jésus; le christianisme aurait ainsi été introduit dans ses États vers l'an 45. En 217 Caracalla fitd'Edesse une province romaine. Elle fut conquise par les Arabes en 637. En 1097 Baudoin en fit un comté chrétien, qu'il donna à Josselin de Cour-tenay, mais Noureddin le reprit 1146. Edesse appartient auj. à la Turquie d'Asie. Parmi les souvenirs ecclésiastiques de cette ville, on compte l'influence du gnostique Bardesanes à la cour du roi, la célèbre école fondée par Ephrem le Syrien, le triomphe momentané des ariens, plus tard celle des nestoriens qui en firent leur principal siège et le centre de leurs missions. Il s'y trouvait encore au 16m« siècle un évéché jacobite, mais qui ne tarda pas à disparaître.

EDILTHRYDA, sainte d'Angleterre, qui, mariée deux fois, n'en conserva pas moins sa virginité par suite d'un vœu qu'elle avait fait. S'ètant séparée de son époux 671, elle fonda dans une île des environs d'EIy un double couvent, dont elle fut l'abbesse jusqu'à sa f 679.

EDIFICATION, signifie proprement construction d'un édifice; dans le sens religieux il se dit du développement de la foi et de la vie chrétienne dans une âme ou dans une Église. L'origine de cette locution se trouve dans les passages qui comparent l'Église de Dieu à une maison que l'on bâtit, 1 Tim. 3, 15. Eph. 2, 21. 1 Pier. 2, 5. 4, 17. 1 Cor. 3, 9. D'après son étymologie même, on peut comprendre qu'il ne s'agit pas de simples impressions intérieures, mais d'une action réelle. Il ne s'agit pas de lire ou d'écouter, mais de faire et de devenir. Le culte public et le culte particulier sont les moyens de provoquer l'édification, mais elle n'existe réellement que dans le résultat produit par ce culte, et dans la pratique des vérités enseignées et reçues. Si tous les livres religieux et élevés peuvent être considérés en un sens comme des livres d'édification, on a cependant réservé ce nom pour ceux qui tendent tout spécialement et directement à ce but. Les Psaumes sont le plus ancien spécimen du genre, comme dans toutes les églises, les prières, les hymnes et les cantiques sont la forme la plus populaire du livre d'édification. Puis on doit noter, parmi les écrits que l'Égl. a longtemps honorés d'une prédilection particulière, le Ber-gerd'Hermas, les Confessions de saint Augustin, les ouvrages de saint Bernard, les livres mystiques, l'Imitation de J.-C.. etc. La Réformation a donné une impulsion considérable à ce genre de littérature, et si la controverse a absorbé quelques forces vives, nécessitées par le besoin de s'affirmer et de se défendre, les pères de la réforme ont compris aussi qu'un de leurs premiers devoirs était de nourrir les âmes en leur exposant la vérité. Ni Luther, ni Calvin n'y ont manqué; presque tous les théologiens ont résumé en paroles d'édification les résultats de leurs travaux scientifiques. Le 17me siècle, avec ses guerres et ses luttes, poussait les chrétiens à chercher les choses qui sont en haut; l'Allemagne avait Jacob Bôhme, Muller, Arndt, Scriver; l'Angleterre avait Bunyan, Baxter; la France, Fénelon, Port-Royal et les grands maîtres protestants. Au 18«>e siècle, Lavater, Stil-ling, Abbadie. De nos jours enfin, avec la reprise des recherches et des fortes études, l'édification n'a rien perdu et les meilleurs théologiens ne sont pâs restés les derniers pour fournir à l'Égl. l'aliment spirituel dont elle a besoin. Sans parler d'Ostervald, que l'on a trop déprécié, de Zschokke dont on a surfait la valeur, de Bunsen qui a exagéré le côté liturgique du culte public et particulier, on peut dire que presque tous les écrivains religieux ont fait une part à l'édification; en Allemagne Schleiermacher, Néan-der, Tholuck, Borner, Stier, Krummacher, Sander, etc.; en Angleterre, Hamilton, Cum-raing, Bonar; en France et en Suisse, presque tous les hommes du premier et du second réveil, trop nombreux pour qu'il y ait de l'intérêt à les nommer. II faut ajouter que le genre sermon, ou méditation, qui a été plus généralement cultivé, n'est pas celui qui a été le plus goûté, ni celui qui a produit le plus de fruits réels. Si l'édification suppose le développement d'une idée pratique ou religieuse, une anecdote, une simple pensée amènent souvent ce résultat bien plus qu'une série d'observations plus ou moins suivies et délayées. Le public sait maintenant une foule de choses qu'il n'est plus nécessaire de lui répéter. Les Recueils de passages, les Pain-Quotidien, les Années chrétiennes, plusieurs journaux religieux, plusieurs almanachs, des traités, quelques bonnes nouvelles peuvent produire l'édification, non moins sûrement que les meilleurs sermons et que bien des livres de prière. L'Année Biblique, par son excellente rédaction mérite cependant une mention spéciale.

ÉDITS, proclamations, arrêtés royaux. Les principaux sont: lo L'Édit de Milan, 313, par lequel Constantin et Licinius garantissent aux chrétiens le libre exercice de la religion, et la restitution des biens ecclésiastiques. — 2° De Hampton-Court, 28 juillet 1661; Charles II d'Angleterre accueille les réfugiés français et leur accorde divers privilèges. — 3° De Worms, rédigé 26 mai 1521, après la célèbre diète, mais antidaté, comme s'il avait été formulé le 6, avant le départ de presque tous les députés des États; il condamne Luther et ses adhérents et les met au ban de l'empire. — 4° Les édits de pacification, fort nombreux au 16m« siècle, et spécialement — 5° L'Édit de Nantes, publié par Henri IV, 13 avril 1598, en faveur des huguenots. Tout en affirmant le catholicisme comme la religion de l'État, il assure aux réformés en 92 articles, plus 56 secrets, la liberté de conscience, les droits civils, et la liberté de culte moyennant certaines réserves qu'il fallut subir. Il leur accordait aussi une certaine indépendance politique et plusieurs places de sûreté, mais l'Édit de Nîmes, de Louis XIII, 1629 leur retira ces dernières garanties, et après que l'Édit de Nantes eut été successivement réduit à néant par une série de décrets que le clergé obtenait du roi moyennant finances, Louis XIV révoqua dans son ensemble le peu qui en restait, c.-à-d. le titre (v. Lanfrey) 1685, et mit ainsi hors la loi tous les protestants de France, les obligeant de fait à s'enfuir à l'étranger, en même temps qu'un autre décret leur interdisait de sortir du royaume. — 6° L'Édit de Potsdam, 29 oct. 1685, li ouvre aux réfugiés de France les États prussiens et leur accorde de notables privilèges. — 7<> L'Édit de Versailles, nov. 1787, qui rend aux réformés tous leurs droits civils et supprime les mesures violentes contraires à l'esprit du christianisme. — 8° v. Nemours. — 9° L'Édit de Restitution, décrété après la paix de Lubeek, 6 mars 1629, par Ferdinand II, sur la suggestion du nonce Caraifa et du jésuite Lamorain, avec la complicité cachée de la France. Sous prétexte d'interpréter la paixde religion d'Augsbourg, il condamnait les évangéliques à restituer tous les biens, églises et couvents, qui avaient été sécularisés depuis le traité de Passau 1552. L'arrivée de Gustave-Adolphe empêcha la mise en vigueur de cet édit, et l'emp. essaya vainement, février 1631, d'entraîner les protestants à une nouvelle conférence.

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EDMOND lo Roi de l'Est-Anglie 855, vaincn 870 et mis à mort par les princes danois Hin-guar et Hubba, dont il ne voulut pas accepter une paix honteuse. Considéré comme un martyr, il fut canonisé et devint le patron des rois d'Angleterre, dont plusieurs ont porté son nom. On le fête le 20 nov.— 2<> ou Edme, prof, de philos, à Oxford 1219-1226, archev. de Cantorbéry 1234. Ses Constitutions lui attirèrent la colère de Henri III; il dut s'enfuir, et passa en France, où il f 16 nov. 1242.

EDWARDS, Jonathan, théol. américain, le réformateur des États-Unis au dernier siècle; né 5 oct. 1703 à East-Windsor, Connecticut, fils et petit-fils de pasteurs, étudia à Yale-College, fut d'abord pasteur dans l'État de New-York, puis en Massachusetts, enfin à Northampton, Connecticut. Le relâchement religieux était général; lui-même en souffrait et y cherchait le remède. Une courte mission de Whitefield en Amérique, 1743, lui ouvrit les yeux. S'il avait à lutter contre les exagérations fanatiques de quelques dissidents, Davenport, etc., il comprit que cependant le vrai danger n'était pas là, mais dans la confusion établie entre l'Église et le monde. Quand ce qui n'était d'abord qu'une impression fut devenu chez lui une conviction, il publia ses vues à cet égard et les communiqua officiellement à sa paroisse 1749. Ce n'était pas l'étroitesse de la stricte dissidence, mais ce n'était plus le relâchement systématique; il ne pouvait plus admettre indistinctement tous ses paroissiens à l'entière et complète communion de l'Église. Ce fut toute une révolution; l'année suivante il dut donner sa démission et, quoique père de 8 jeunes enfants, il n'hésita pas. En se retirant il publia un Traité dans lequel il développait ses vues, et peu d'années après elles étaient acceptées par presque toutes les égl. d'Amérique. Il passa quelques années comme missionnaire à Stockbridge, parmi les Indiens de l'Houston 1751 à 1757, fut nommé président du collège de New-Jersey, et f peu après, ea 1768. Il prêchait la liberté de l'homme, sa responsabilité absolue, et la sanctification comme suite et corollaire de la justification; c'était la doctrine de Calvin; c'est elle qui a relevé les égl. mortes ou mourantes des puritains dégénérés. Parmi les disciples les pins connus d'Edwards, il faut citer son fils Jonathan + 1801, Sam Hopkins f 4803, Bellamy f 1790, Dwight f 1817. Edwards a laissé 1400 mss., dont un grand nombre inédits, v. Astié, Hist. des Etats-Unis, t. D, chap. XIV.

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EGBERT 1® premier roi d'Angleterre 800, f 836, descendait de Gerdie, un des premiers rois de l'Heptarchie. — 2° Anglo-Saxon, établi dans un monastère d'Irlande; atteint de la peste, il ût vœu de glorifier Dieu, s'il se rétablissait. Il partit en effet avec quelques frères pour la Frise, malgré ses amis qui auraient désiré conserver auprès d'eux un homme d'un aussi grand mérite. Mais une tempête les ayant fait rentrer an port, il crut y voir une direction de Dieu, et envoya à sa place le moine Wichbert et quelques années plus tard 12 autres missionnaires, entre autres Willibrord, Willibald, les deux Ewald, Marcellin, Wernfried, Adelbert, qui arrivèrent au milieu des Frisons vers 690 ou 692, et obtinrent de grands succès. Egbert f 729. — 3» Disciple et ami de Beda; maître à l'école de la cathédrale d'York, il compta Alcuin parmi ses élèves. Nommé èvêque 731, il obtint que son siège d'York fût érigé en archevêché 735. Son érudition était si grande qu'on l'appelait un armrium (arsenal) omnium liberalium artium.

ÉGÈDE Haru (Jean), premier missionnaire au Groenland, né le 31 janv. 1686 en Norwège. On ne sait rien sur ses premières années; on le voit pour la première fois en 1707 pasteur à Vaagen. Pressé depuis longtemps du désir d'ôvangéliser le Groenland, malgré la lutte qu'il soutenait intérieurement en pensant à sa femme et à son enfant, il finit par prier les év. de Bergen et de Drontheim de solliciter l'appui du roi Frédéric IV. Il l'obtint et parvint à réunir 10,000 thalers pour son expédition. En 1717 il donna sa démission de pasteur, partit pour Bergen, et se mit à étudier la topographie du pays et divers métiers qu'il prévoyait devoir lui être utiles. Le passage Matth. 10, 37. fit taire toutes ta incertitudes qu'il avait à l'égard de sa famille, et sa femme, la courageuse tiertrude Rask se déclara prête à l'accompagner. Le 10 mai 1721 leur vaisseau l'Espérance quitta Bergen, le 12 juin ils aperçurent le Groenland, et le 3 juillet ils abordèrent à l'Ile d'Imeriksok. Égède eut beaucoup à faire pour vaincre le caractère apathique et méfiant des Esquimaux. Longtemps il travailla sans succès; mais ses enfants, et en particulier son fils aîné Paul, lui furent des aides puissante, en parlant avec les indigènes et en leur racontant de leur mieux des faits bibliques. En 1723 Égède fit un voyage dans l'intérieur, et la glace ayant été ainsi rompue, les habitants se montrèrent aussi hospitaliers et empressés qu'ils avaient été défiants. En 1724 il baptisa le premier enfant groenlandais; en 1729 il fonda une école à laquelle il put donner un instituteur indigène chrétien. De toutes parts on l'appelait pour l'entendre parler du vrai Dieu et de la vie éternelle. Mais en 1730 Frédéric IV étant mort, son successeur Christian VI retira les subsides accordés à la mission, et Égède resta seul au Groenland avec sa famille et dix matelots. En 1733 et 1734 une épidémie cruelle décima la population; le dévouement d'Egèdo en cette occasion augmenta sa popularité et ouvrit de nouvelles portes au christianisme. Il perdit sa femme en 1735. Le 28 juillet 1736 il lit son sermon d'adieu sur Es. 49, 4. et arriva le 24 sept, à Copenhague. Il y fonda un collège destiné à former des missionnaires pour le Groenland. Peu encouragé il en abandonna la direction en 1747; il partit pour Stubbekjâking dans l'île de Falster, où il f » nov. 1758. Les Groenlandais l'appellent encore aujourd'hui c leur père. > On écrit aussi son nom Egédé.

ÉGINHARD, ou Einhard, de race franque, élève d'Alcuin, entré fort jeune au service de Charlemagne, dont il resta toute sa vie le secrétaire, le confident et l'ami. Une tradition populaire, puisée dans une chronique contemporaine du monastère de Lauresheim, lui donne pour épouse une fille de Charleinagne, Emma ou Imma, dont l'amour pour lui se serait manifesté d'une manière aussi originale que providentielle. Cette gracieuse histoire, où quelques-uns ne voient qu'une légende, peut être authentique; en tout cas elle caractérise l'époque. Éginhard, préposé à ce que nous appelons les travaux publics, routes, canaux, bâtiments de toute sorte, vivait avec son maître dans la plus grande intimité; celui-ci le gardait constamment auprès de lui et ne l'envoya en mission qu'une seule fois, à Rome 806, pour faire confirmer son testament par le pape. Il jouit de la même faveur sous Louis-le-Déb., mais ne put se plier à ce triste gouvernement et quitta la cour. Sa femme s'étant retirée dans un couvent, il fit de même 816, fonda le monastère de Seligenstadt et y f 839, trois ans après avoir appris la mort de celle qu'il avait toujours tendrement aimée. Ses dernières années avaient été troublées par la maladie et les chagrins. Il a laissé 63 Lettres, des Annales qui n'ont qu'une valeur de chronique, et une Vie de Charlemagne, qui est une vraie composition historique et littéraire, aussi remarquable par la forme et le plan, qu'intéressante et instructive par le fond; c'est tout ensemble une biographie et une histoire.

ÉGLIN, ou Iconius, dont le vrai nom était Raphaël Gôtz. né 28 déc. 1559 à Russicon, Zurich, étudia à Zurich, Genève et Bâle, fut quelque temps instituteur dans la Valteline, puis, chassé par les prêtres, fut nommé pasteur et prof, de théol. à Zurich 1583, et à Marbourg 1606. f 1622. Il fit prévaloir dans la Hesse la théologie calviniste. C'est à son goût pour la chimie qu'il dut surtout la faveur du landgrave Maurice.

ÉGLISE. Pour cet article, qui résumerait à lui seul la moitié d'un dictionn. ecclésiastiq., v. le Dictionn. de la Bible, et les articles spéciaux: architecture, anglicane, gallicane, copte, ecclésiastique, etc. Nous consignerons seulement ici les faits qui n'ont pas lenr place ailleurs. Le mot français église dérive du grec ecclesia qui signifie assemblée et ne s'emploie guère que dans un sens religieux. Le mot correspondant, en allemand Kirche, ou en anglais church, a une étymologie beaucoup plus disputée, attendu que les uns le dérivent du grec ky-riakè (dominical, ou du Seigneur), ce qui est le plus probable; les autres du latin curia, d'autres de circus, d'autres du celte Cyrch (centre, point central). Notre Seigneur ne nomme l'église que Matt. 16, 18. 18, 17. où il a d'une part en vue l'œuvre générale qu'il est venu fonder sous le nom de royaume de Dieu; d'autre part les organisations locales qui pourront se former avec le temps, et qui seront la représentation visible et nécessairement incomplète de l'ensemble. Dans le langage apostolique tout groupement de fidèles porte le nom d'Eglise. Dans le langage de Paul on voit apparaître l'idéal: l'Égl. est un grand corps dont Christ est la tête; rÉgl. est la colonne et l'appui de la vérité; elle est sainte, et ce caractère rejaillit sur tous ses membres, qui sont appelés saints. Malgré bien des désordres ce point de vue pouvait se justifier à une époque où la qualité de membre de l'Égl. supposait la foi personnelle s'affirmant en face des persécutions. On le retrouve encore dans les lettres d'Ignace et chez Irénée, mais déjà la notion d'Égl. s'est modifiée sous l'influence de l'idée épiscopale; elle a pris une forme extérieure; ce n'est plus la foi qui fait le chrétien, mais le fait d'appartenir à une congrégation. De là cette parole d'Irénèe: Là où est l'Église, là est l'Esprit, et où est l'Esprit, là est l'Eglise (Adv. Hœres. 3, 3); et plus tard cette autre parole de Cyprien; Hors de l'Église, point de salut (De unit. eccles.). Comme il n'y a qu'un Dieu et un Sauveur, on veut aussi qu'il n'y ait qu'une Église, et ce rêve deviendra une réalité pendant huit siècles, à la condition qu'on supprime par l'excommunication tous ceux, hérétiques ou autres, qui n'appartiendront pas à la majorité, montanistes, donatistes, ariens, etc.;

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tous ceux qui repousseront la discipline comme trop relâchée, ou la doctrine comme trop accentuée. La centralisation sera de plus en plus ta conséquence logique de cette manière d'envisager l'Eglise et l'unité se fera sur la personne de l'év. de Rome, le plus considérable de tous depuis que l'islamisme a ravagé l'Orient. On est assez d'accord à regarder cette concentration comme un événement heureux pour le christianisme dans les circonstances où se trouvait l'Europe, foulée par les barbares, menacée par les Maures, et minée par les luttes qui allaient remplir le moyen âge. Mais quand on se rappelle que cette autorité a eu besoin du mensonge pour s'établir, des fausses décrétâtes; qu'elle s'est soutenue par des moyens humains; qu'elle a étouffé partout et toujours la vie religieuse et le mouvement philos., la libre pensée, les sciences, on est fondé à croire qu'elle a contribué à faire les ténèbres du moyen âge, autant au moins qu'à les dissiper. Si les moines ont sauvé quelques mss. de l'antiquité, ils en ont détruit plus encore, et d'ailleurs ils subissaient moins que le clergé séculier l'influence du pouvoir central. En tout cas l'Égl. orientale refusa de se soumettre à l'unité romaine, et ce grand schisme brisa la prétendue catholicité de l'une et de l'autre de ces deux moitiés. La division d'ailleurs était dans le camp romain, et se manifestait sans relâche sous les formes les plus diverses. Claude de Turin, les vaudois, Valdo, les cathares, les albigeois, Arnold de Brescia, Pierre de Bruys, Wikleff, Huss, sont les anneaux de cette chaîne, et chez tous la protestation se manifeste comme une opposition à la fausse idée qui confond l'Église de Christ avec l'Égl. traditionnelle de Rome. L'Angleterre et la France aspirèrent longtemps à réaliser un catholicisme national. C'est la Réformation qui la première distingua nettement l'Égl. visible et l'Église invisible, voyant dans l'une des infirmités, des devoirs, des aspirations et des espérances. dans l'autre seule la sainteté parfaite et l'accomplissement. Les différentes ÉgL protestantes se sont développées librement en ce qui regarde leur organisation, suivant leurs circonstances, leur origine et les besoins de leur caractère national, mais il leur a fallu du temps, à elles aussi, pour comprendre que là où il y a l'unité de la foi, la diversité de la forme importe peu.

EGYPTE, v. Dict. de la Bible. Si important que soit le rôle de ce pays dans l'Hist. des Hébreux, il ne l'est pas moins dans l'histoire du christianisme, qui y a trouvé comme un second berceau. Déjà dès l'époque apostolique la lutte s'y produit entre le vieux monde et les temps nouveaux; Lucien, Celse et Porphyre la personnifient. Puis viennent les principaux systèmes gnostiques, représentés par Basilides, Valentin, Carpocrate. L'école d'Alexandrie s'illustre par ses Panténe, Clément, Origène, Heraclas, De-nys. La réaction s'accentue par le sabellianisme et l'arianisme. Puis vient la période la plus glorieuse de son existence, la lutte pour la foi et la vie religieuse. D'un côté la doctrine chrétienne mise en évidence et défendue par Athanase, Théophile, Cyrille, Dioscure; de l'autre le monachisme, incarné dans Antoine, puis le fanatisme populaire et le meurtre d'Hypatie; puis les divisions résultant des luttes monophy-sites, et l'animosité croissante entre les cophtes et les melchites (royalistes et orthodoxes), qui finit par livrer le pays désarmé aux soldats de l'Islam. Dés lors, les cophtes perdant du terrain de jour en jour, opprimés ou déchus, divisés entre eux, sans vie religieuse, le mahométisme est devenu le maître du pàys, et il en a fait le centre et le foyer d'une civilisation qui a brillé pendant deux siècles du plus vif éclat, dans les arts et dans les sciences, de Bagdad jusqu'en Espagne, pour ne laisser que des cendres en s'éleignant. L'Égypte actuelle, sous l'impulsion de Méhémet-Ali, semble avoir repris la conscience d'elle-même; elle est devenue le chemin des Indes et le point de départ des grandes explorations africaines; par cela même elle est devenue pour les industriels, les commerçants et les spéculateurs européens un centre, comme elle l'est depuis longtemps pour les savants, les archéologues et les antiquaires. Un grand nombre de sociétés de missions y entretiennent des stations, des égl. et des écoles, tjui jouissent d'une grande influence et d'une considération justement méritée. Les Anglais, les Écossais, les Américains, les Allemands, la Crishona de Bâle, travaillent avec succès au milieu des cophtes, des juifs, des musulmans et des chrétiens indigènes ou étrangers. L'Angleterre qui vient de s'y établir donnera un peu de fixité à ce pays trop longtemps le jouet des convoitises diverses et le malheureux vassal de la Turquie.

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EICHHORN 1° Jean-Gottfried, théologien, connu surtout par ses nombreux travaux sur la littérature biblique et orientale, Introd. à l'A. T. 1781-1783, et au Nouveau 1804-1814, auj. un peu démodées, mais qui ont frayé la voie. Né 16 oct. 1752 à Dtfrrenzimmern, fils d'un pasteur, étudia à Gttttingue, et après un court pastoral, fut prof, de langues orientales à Iéna 1775, puis de philos. 1788 à GOttingue, où il t 27 juin 1825.

2° Son fils Charles-Fréd.; né à Iéna 30 nov. 1781, s'occupa surtout de droit, et fut membre du tribunal supérieur et de la commission législative à Berlin, f 1854. Son principal ouvrage est intitulé: Principes du droit ecclésiastiq. des protestants et des cathol. en Allemagne 1831.

3° Jean-Albert-Frédéric Eichhorn, ministre des cultes à Berlin 1840-1848. Né à Wertheim 2 mars 1779, il étudia à Gôttingue et entra 1801 au service du roi. Officier pendant la guerre d'indépendance, il fut sous Stein membre du gouvernement des pays conquis et passa ensuite au département des affaires étrangères, jusqu'au moment où la confiance de Fréd.-Guillaume IV l'appela au ministère. Son ardent désir, comme celui de ses amis Stein et Schleiermacher, était de soustraire l'Égl. aux funestes influences de la politique, mais il n'osa prendre que des demi-mesures, toujours retenu par la crainte que l'Égl., affranchie de la protection de l'État chrétien, ne devint la victime de majorités incrédules et l'instrument d'une réaction antichrétienne. Cet homme excellent finit par avoir tous les partis contre lui. f 16 janv. 1856.

EINHARD, v. Éginhard.

EINS1EDELN, célèbre monastère du canton de Schwytz, situé au-dessus de la ville du même nom, dans une sauvage vallée traversée par l'Alpbach. Sa fondation remonte aux temps de Charlemagne. Ce fut d'abord Meinrad, comte de Sulgen, qui se fit construire une chapelle, pour y conserver une image merveilleuse de la Vierge, que lui avait donnée Hildegarde, abbesse de N. D. à Zurich. Meinrad ayant été assassiné 861, sa réputation de sainteté s'en accrut, et sur le lieu de sa cellule on éleva un couvent de bénédictins; plus tard une église. Une légende rapporte que lorsque l'év. de Constance voulut consacrer cette église, le dim. 14 sept. 948, une voix du ciel l'avertit que le Sauveur lui-même l'avait déjà consacrée, et une bulle de Léon VIII confirma le miracle. Dès lors l'égl. du couvent devint un lieu de pèlerinage très fréquenté, le plus riche de la Suisse après Saint-Gall, et ve* nant immédiatement après Saint-Jacques de Compostelle, N.-D. de Lorette, et avant Maria-zell pour le nombre des pèlerins. Il en compte en moyenne 150,000 par an. Il est habité par 60 prêtres et 20 frères bénédictins, sans parler du personnel employé aux travaux de la ferme. L'abbé d'Einsiedeln avait été élevé en 1274 au rang de prince de l'empire, et dans plusieurs cantons on l'appelle encore le prince d'Einsiedeln. Quand les Français occupèrent le pays 1798, ils s'emparèrent d'une partie des trésors de l'abbaye, mais ils n'emportèrent qu'une copie de l'image de la vierge de Meinhard, l'original ayant été mis à l'abri de leurs atteintes et expédié en Tyrol. Les Français croient cependant encore avoir l'original. Le couvent actuel, reamstruit à la suite d'un incendie 1719, a 135" de long; l'église 38. On y fait un commerce considérable d'objets de dévotion. Les religieux du couvent se sont peu compromis dans les mouvements politiques; ils s'occupent plutôt d'enseignement, de sciences et d'agriculture; ils ont entre autres un très bon haras. Zwingle fut curé d'Einsiedeln 1515-1519; en 1517 il prêcha avec tant de succès que les moines quittèrent leurs cellules et le couvent fut quelque temps inoccupé; Einsiedeln est la patrie de Paracelse.

EISENACH, v. Luther.

EKKEHARD. Famille saint-galloise qui a donné au couvent de cette ville cinq moines d'un certain mérite. 1» Directeur de l'école et doyen du couvent, a laissé des hymnes, des biographies et des notices historiques, f 973. 2® Son neveu, directeur de l'école, chapelain d'Othon I«r, précepteur d'Othon II, f chanoine h Mayence 990. 3° Savant de premier ordre, collègue et disciple du précédent, doyen de Saint-Gall. 4» Né 980, élevé à Saint-Gall, directeur de l'école de Mayence, auteur d'une Chronique et d'un Livre des bénédictions, f 1036. 5« Auteur d'une Vie de Notker, vers 1210.

ÉLEUTHÈRE lo 13®e pape 177-192, diacre d'Anicet avant d'être évêque; montaniste (Du Pin, de Antiqud Eccl. disciplina). Il gouverna l'Égl. sous Marc-Aurèle et sous Commode, combattit les erreurs de Valentinien, envoya, à la demande du roi anglais Lucius, des missionnaires dans la Gr.-Bretagne. C'est sous son pontificat qu'Irénée écrivit sa lettre sur les martyrs. 2° Diacre, compagnon des saints Denys et Rustique, martyrisé et canonisé avec eux vers l'an 272; sous Valérien; peut-être sous Maximien-Hercule. 3» Év. de Tournai, l'un des premiers qui apportèrent le christianisme à la Gaule Belgique; dix ans avant le baptême de Clovis il avait déjà baptisé un grand nombre de païens, f 532. 4<> Rivière qui sépare la Syrie de la Phé-nicie.

ÉLEUTHÉROPOLIS, ville de Palestine, citée par Eusèbe, entre Jérusalem et Gaza, D'après Robinson ce serait l'ancienne Baïtogabra et la Beit-Dschibrin d'aujourd'hui. Siège célèbre d'un èvêché, elle fut détruite 796 par les Sarrasins. Pendant les croisades le roi Falcon y bâtit une forteresse qui fut ensuite remise aux hospitaliers.

ÉLÉVATION, rite qui consiste, dans la célébration de la messe, quand l'hostie est consacrée, à l'élever pour la montrer au peuple, qui l'adore en se prosternant. En usage chez les grecs déjà au 8®® siècle, cet acte était plutôt dans l'origine un symbole de l'élévation de Christ. Il fut conservé quelque temps par Luther, non sans opposition, et ne fut enfin aboli que par Veit Dietrich à Nuremberg. f

ELFRIC, bénédictin anglais, archev. de Cantorbéry, f 1005; travailla avec Dunstan et Ethelwold à soumettre l'Égl. d'Angleterre à l'autorité de Rome. II se donna beaucoup de peine pour répandre la Bible et pour relever l'état ecclésiastique. Il a laissé une Liturgie et quelques Homélies.

ÉLIE 1° de Cortone, moine franciscain, souleva de longues et violentes discussions dans l'intérieur de son ordre, par ses efforts pour adoucir la sévérité de la règle, 1219. Nommé général par François d'Assise, il fut déposé 1320. Réélu 1227, il fut déposé 1230 par le pape. Réélu de nouveau 1236 il fut confirmé, mais le parti de Jean Parent refusa de le reconnaître et réussit en 1239 à le faire écarter de nouveau. En 1244 il fut décidément rayé de l'ordre. Partisan de Fréd. II, il fut envoyé par lui comme ambassadeur à Constantinople; il se retira ensuite à Cortone, où il f 1253. — 2<> Élie le Lévite, savant juif, né 1472 à Neustadt an der Aich, quitta son pays à la suite de persécutions contre les juifs et vint 1504 à Padoue, où il enseigna l'hébreu; il y resta jusqu'à la destruction de cette ville 1500. Il s'enfuit à Rome; son Comm. sur la Grammaire de Kimchi lui procura un bon accueil de la part du cardinal jEgi-dius de Viterbe, 1512. En 1527 il vint à Venise, touj. comme prof, d'hébreu; en 1540 il fut appelé à Isny par l'imprimeur Paul Fage, qu'il aida à monter une imprimerie hébraïque et à publier divers livres en hébreu. Suspect d'avoir changé de religion, il publia pour rassurer ses frères son livre sur la Massorah, critique du texte sacré de l'Écriture, dans lequel il nie l'antiquité des points-voyelles et combat l'opinion qui était généralement reçue. Ce livre, très remarquable, est encore auj. fort apprécié, quoiqu'il ait donné lieu à bien des discussions. On a encore de lui un Traité des lettres serviles, une Explication des mots irréguliers du texte sacré, et un Dictionn. chaldéo-rabbinique. f à Venise 1547.

ÉLIOT, John, surnommé l'apôtre des Indiens de l'Amérique du Nord, l'un des missionnaires les plus remarquables des temps modernes par son zèle et par ses travaux; né en Angleterre 1603. Inquiété pour ses opinions non-conformistes, il se rendit en Amérique 1631, et devint pasteur de l'Égl. de Roxbury près Boston. Après avoir consacré 15 années à étudier la langue des Indiens, il commença ses travaux au milieu d'eux sans abandonner son ancienne paroisse. Les succès de sa prédication furent prodigieux. Des milliers d'Indiens furent gagnés à la foi évangélique, renoncèrent à la vie sauvage et formèrent des colonies dites d'Indiens priants, dont le nombre s'éleva jusqu'à 14, et qui étaient régies par une organisation calquée sur celle du peuple d'Israël. Soutenu par les contributions de la Société pour la propag. du christianisne, fondée en Angleterre 1649, il fit paraître de 1661 à 1663 une traduction de la Bible du* un des dialectes indiens. Toutefois cette florissante mission n'a pas laissé par la suite de traces très appréciables. Déjà du vivant d'Éliot des guerres avec les Européens dévastèrent la plus grande partie de son champ de travail, et les populations au milieu desquelles il agit sont aujourd'hui presque complètement éteintes, f à 87 ans 1690, après avoir annoncé l'Évangile jusqu'à son dernier moment.

ÉLIPAND, év. de Tolède, enseigna l'adoptia-oisme, comme Félix d'Urgel.

ÉUSABETH lo de Hongrie, canonisée. Née à Presbourg 1207; elle était fille d'André II, roi de Hongrie. On lui fit épouser à 14 ans le landgrave de Thuringe Louis IV, avec qui elle avait été élevée à la Wartbourg. Son inépuisable charité pour les pauvres, son amour pour son mari et l'austérité de ses mœurs, rendue plus sévère encore par les directions de son confesseur Conrad de Marbourg, en font une des personnifications les plus pures de la piété au moyen âge. La légende s'en est emparée et ne l'a pas toujours embellie. Une de ses plus jolies créations est celle des morceaux de pain changés en roses dans son tablier. Après la mort de son mari 1227, bannie par son beau-frère Henri Haspe, elle trouva un refuge à Kit-zingen, jusqu'à ce que le château de Marbourg *ut été préparé pour la recevoir. Elle y fonda un hôpital, où elle f 1231. Canonisée 19nov. 1235. Son tombeau est dans l'égl. Sainte-Élisabeth à Marbourg, que Conrad de Thuringe fit élever en mémoire d'elle. Philippe le Magnanime fit enlever ses os pour qu'ils ne devinssent pas l'objet d'un culte superstitieux. Vie par Monta-lembert.

2° Élisabeth Woodville, fille de Richard Woodville, qui devint lord Rivers, épousa en noces Édouard IV d'Angleterre, dont elle eut ces deux malheureux enfants, si connus sous le nom d'enfants d'Édouard, et qui furent assassinés 1483 par ordre du duc de Glocester. Enfermée dans un couvent, elle y f 1486.

3o Fille d'Henri VIII et d'Anne de Boleyn, née 1533, déclarée d'abord illégitime et incapable de régner, puis réhabilitée par le testament de son père. Elle monta sur le trône 1558 à la mort de sa sœur la cruelle Marie, et s'efforça aussitôt de réparer ce qui pouvait se réparer encore dans les actes de sa devancière. On ne pouvait ressusciter les 300 victimes de son fanatisme, mais Élisabeth rappella les proscrits, restitua les biens confisqués, rétablit le culte protestant, et par l'acte du 1er févr. 1559 rendit à l'autorité royale les privilèges auxquels Marie avait renoncé en matières ecclésiastiques. Elle partait de l'idée que l'État et l'Église forment un même ensemble de citoyens, et grâce à cette confnsion, qui était dans l'esprit du temps, elle régla par plusieurs actes d'uniformité tout ce qui regardait le culte et la religion, le Prayer Book, l'épiscopat, les visites d'église. Elle s'occupa aussi de la prospérité de son pays, de l'agriculture, du commerce, de la marine, des finances. Elle fit mettre à mort sa parente, Marie Stuart, que ses désordres, non moins que son attachement au catholicisme, avaient fait chasser du trône d'Écosse, et qui s'était réfugiée en Angleterre où elle continuait d'intriguer. Élisabeth elle-même, grande et sèche, génie royal plutôt que féminin, éprouva des passions plutôt qu'elle n'en fit naître; elle aima surtout Dudley de Leicester, et Robert d'Essex; elle fit mettre à mort ce dernier. Elle avait refusé la main de plusieurs souverains. Elle eut à lutter contre Philippe II d'Espagne et contre son invincible armada, qui fut dispersée par la tempête , contre l'Irlande qui s'était révoltée; elle donna des secours à Henri IV, et vint en aide aux Pays-Bas attaqués par l'Espagne, f 1603. Elle occupe une place plus distinguée comme reine que comme femme, et l'Angl. peut faire dater de son règne le commencement de sa grandeur historique. Les protestants n'oublieront pas l'appui que leurs droits ont touj. trouvé auprès d'elle, et l'on sait l'accueil glacial et funèbre qu'elle fit avec sa cour aux délégués de Charles IX, qui avaient été envoyés en Angleterre pour justifier et atténuer les massacres de la Saint-Barthélemy.

4o Femme de Joachim I, électeur de Brandebourg, le fougueux adversaire du protestantisme. Elle eut occasion de connaître les écrits de Luther par son oncle, l'électeur de Saxe, au grand déplaisir de son mari. A Pâques 1528 elle prit avec ses deux fils la communion sous les deux espèces; l'électeur l'ayant appris, la retint prisonnière dans sa chambre; quelques-uns disent même qu'il voulait l'y murer. Elle demanda du secours à son frère Christian II, de Danemark, qui la fit évader, déguisée en paysanne, dans une mauvaise voiture, et son oncle l'Électeur l'installa dans le château de Lichtenburg, près de Wittenberg. C'est là qu'elle fortifia sa foi par ses entretiens avec Luther. Peu à peu la colère de son mari s'apaisa, et ses fils purent venir la visiter.

5° Élisabeth-Albertine, princesse palatine, fille de Frédéric V, roi de Bohême et d'Elisabeth Stuart; née 16 déc. 1618. Après une jeunesse troublée par les malheurs de ses parents, elle passa quelques années dans les cours de Berlin, Heidelberg et Cassel 1662, cherchant dans l'étude un dérivatif à ses douleurs, et passionnée pour les sciences. Elle reçut à Leyde les leçons de Descartes, qui dit dans la dédicace de ses Principes de philos., qu'elle est la seule personne qui ait eu une intelligence parfaite de ses ouvrages. Son amour pour l'étude lui fit refuser la main du roi de Pologne Wladislas IV. Elle se fixa en Allemagne, dans l'abbaye luthér. d'Hervorden qui relevait immédiatement de l'empire 1667 et en devint l'abbesse; elle y f 1680. Elle avait un moment protégé les labadis-tes persécutés; plus tard elle se lia avec Penn et Barclay et ouvrit aux quakers un asile dans ses domaines, ce qui attira sur le pays la bénédiction divine et en fit un foyer de vie religieuse.

6° Visionnaire; v. Barton.

7° Élis, de Schônau, abbesse du couvent des bénédictines de Schônau, dioc. de Trêves, où elle était entrée dès sa 12m« année. Souffrante de corps, elle eut des visions et des révélations, que son frère Egbert, abbé d'un couvent du même endroit a mises par éciit 1185. f 1165. Plusieurs de ses révélations sont reproduites dans le Liber 3 virorum et 3 spiritualium vir-ginum. Pans 1515. Cologne 1628.

ÉLISÉE lo ou Egishé, célèbre théol. et hist. arménien. Év. d'Amatunik, il assista au synode d'Artashat 449, où les chrétiens eurent à s'occuper du péril dont les menaçait le parsisme. Ses ouvrages de théol., comment., sermons, etc. ont moins de valeur que son Hist. des guerres de religion, auxquelles il prit part comme secrétaire du général en chef. — 2o Jean-François Copel, dit le p. Élisée, né 1726 à Besançon, carmélite, chargé de l'instruction des novices, vint à Paris en 1751 et Diderot lui fit une telle réputation qu'il fut invité à prêcher à la cour, f Pontarlier 1783. Il a laissé beaucoup de sermons, dont plusieurs excellents. — 3o Élisée Talachon, aussi surnommé le p. Élisée, 1733-1817, avait pris l'habit des Fr. de la Charité. Émigré, chirurgien en chef de l'armée des Princes, il jouit de la faveur de Louis XVIII qui se l'attacha.

ELKÉSAITES, ou Elcèsaïtes, v. Ébionites.

ELME (saint), v. Érasme lo.

ELOI, Eligius, né 588 à Cadillac, près Limoges, de parents gallo-romains, d'une famille chrétienne. Après quelques années d'apprentissage chez un orfèvre estimé de Limoges, \l visita la France, les Flandres et la Frise. Il fit pour Clotaire II deux sièges d'or enrichis de pierres précieuses, et gagna la faveur du roi par sa probité non moins que par son talent. Le roi se l'attacha et lui faisait fréquemment des présents considérables en argent. Eloi qui consacrait ses loisirs à la méditation de la parole de Dieu, n'appréciait les richesses que pour le bon usage qu'il en pouvait faire, et il les employait surtout au rachat des esclaves, pour la plupart de sauvages Saxons faits prisonniers. Il les laissait libres de retourner chez eux, ou de rester auprès de lui pour recevoir une éducation chrétienne et pour apprendre un métier à l'école de certains couvents. Plusieurs devinrent missionnaires ou lecteurs de la Bible: Baudrich, Tituan, Buchin, etc. Dagobert 1er lai continua la faveur paternelle, malgré la jalousie marquée des courtisans, et facilita l'érection de deux couvents, l'un près de Limoges, l'autre à Paris, pour des œuvres de bienfaisance et d'évangéli-sation. Saint Éloi lui-même, fatigué du monde, s'était retiré dans un monastère, mais il ne put y rester longtemps; il fut appelé à l'évêché de de Noyon et Tournai, qui avait déjà usé les forces de Médard, et Clovis II consentit, quoique à regret, à se séparer de lui, 640. Ce fut une paroisse, et en même temps une œuvre missionnaire. Un grand nombre de Suèves et de Frisons se convertirent à sa parole pénétrante; et chaque année, à Pâques, il en baptisait une multitude, adultes ou jeunes gens, qu'il avait amenés à la connaissance du Sauveur, continuant après cela de prendre soin d'eux comme un bon berger. Après un long et laborieux ministère, il fut atteint de la fièvre qui devait l'emporter; il vit venir sa fin, et sans renoncer à ses travaux, s'ai-dant d'un appui pour faire ses visites et ses prédications, il fit ses adieux à ses amis et à ses disciples et s'endormit en paix, en priant, lerdéc. 659. Patron des orfèvres et des maréchaux, il a donné lieu à de nombreuses légendes. On ignore l'origine de la chanson du roi Dagobert.

ÉLI

ÉLOQUENCE. On appelle ainsi l'art ou le talent d'éveiller par la parole certains sentiments dans le cœur de ceux auquels on s'adresse, ou de les persuader, de les convaincre de choses qu'ils se refusent à admettre. Quand on parle, c'est évidemment dans l'intention d'obtenir un résultat, et pour cela il n'est pas indifférent de présenter ses motifs sous une forme plutôt que sous une autre. La première condition pour persuader, c'est d'être persuadé soi-même. Comme elle manque souvent et que le public en a l'instinct, il en a rejailli quelquefois sur l'éloquence un mauvais renom, comme si elle n'était que l'art de jeter de la poudre aux yeux. On a vu des hommes d'État défendre les maximes les plus opposées, des avocats plaider sans conviction des causes mauvaises, des prédicateurs prêcher des vérités auxquelles ils ne croyaient pas, et l'on s'est méfié de l'éloquence, comme si l'abus prouvait quelque chose contre l'usage. Le mauvais emploi qu'on peut faire d'une faculté ne prouve pas que cette faculté soit mauvaise, et l'éloquence sera toujours hautement appréciée, soit comme talent naturel, soit comme talent développé par l'étude et par la pratique. On a essayé de faire valoir contre le travail de la parole et contre la préparation soignée des discours religieux, ce mot de J. - Christ: Ne vous inquiétez pas de ce que vous aurez à dire, Marc 13, il., mais outre qu'il fait allusion à une circonstance toute particulière, il parle à des hommes en qui sera la plénitude du Saint-Esprit, et dans ces conditions on comprend qu'il soit fait abstraction de tout talent et de toute préparation. Cette puissance de la parole était sensible chez les prophètes, chez les apôtres, chez les évangélistes; on en est frappé chez Étienne et chez Paul; le maître surtout étonnait ses contemporains par l'autorité de ses discours, et toutes les fois qu'un homme parlera étant poussé par l'esprit de Dieu, on ne pensera pas à lui demander l'observation des règles de l'éloquence humaine. Mais là où cette impulsion fait défaut, en tout ou en partie, l'orateur fait bien d'y suppléer par l'étude, par le travail et par la méthode; en ce cas son plus grand art sera de se faire oublier lui-même et de fixer l'attention sur l'importance des choses qu'il annonce.

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ELO

ELVIRE, l'anc. Illiberis, ou Helena, près de la Grenade actuelle. Un concile y fut tenu de 303 à 309, où assista l'év. Hosius de Cordoue. Les résolutions qui y furent prises caractérisent la tendance morale, mais déjà rude et exagérée de l'Égl. espagnole d'alors: le mariage défendu aux prêtres, interdiction du culte des images, cas nombreux d'excommunication, etc.

ELZEVIER, Elseverius, famille de libraires et imprimeurs hollandais, célèbres par la beauté el la netteté de leurs éditions, la plupart en petit format. Les plus connus sont les frères Bo-naventure el Abraham établis à Leyde 1618-1653; le dernier est Daniel, fils deBonaventure 1617, f 1680 qui se fixa à Amsterdam. Leurs éditions du N. T. 1624 et 1633, fruits des travaux de Robert Étienne et de Théod. de Bèze, furent acceptées sous le nom de Texte reçu el demeurèrent longtemps comme seul texte authentique.

ÉMERITE, titre d'honneur ou de déférénce, donné à un pasteur que son âge, ses infirmités, ou toute autre cause respectable amène à se démettre de ses fonctions, qu'il ne peut plus remplir. Dans ce cas sa démission n'est pas une disgr&ce; il conserve son titre et souvent une partie de ses honoraires. L'éméritat est une récompense pour des services rendus. Les cathol. ont aussi donné le nom d'éméritat à des maisons spécialement consacrées à de vieux prêtres, malades et hors de service; ils ont leur logement, presque touj. la nourriture; ou s'il n'y a pas d'établissement de ce genre, on leur assure une pension équivalente; c'est même le mode ordinaire dans les pays protestants. En France une Caisse de secours assure le sort des veuves et des orphelins; elle est alimentée par une retenue sur le très modeste traitement des pasteurs.

EMINENCE, titre d'honneur donné en 1630 par Urbain VIÏI aux cardinaux et aux électeurs ecclésiastiques; avec ce titre ils prennent rang immédiatement après les rois.

ÉMMANUEL, empereur; v. Manuel.

EMMERAM, év. de Poitiers, voulut se rendre comme missionnaire chez les Avares et en Pannonie, mais il fut retenu au passage par le pieux duc de Bavière, et il travailla dans ce pays à répandre l'Évangile et à affermir l'Église. Assassiné au bout de 3 ans, le 6 sept. 652, par Théodore Lambert, qui l'accusait à tort du déshonneur de sa sœur, il devint l'objet de la vénération des fidèles. Son couvent, à Ratis-bonne, avait pour abbé l'évêque lui-même 793. Mais à la suite de difficultés qui éclatèrent sous Wolfgang f 994, le pape affranchit le couvent de la juridiction épiscopale et donna à l'abbé la crosse et la mitre. Ce sont les princes de Thurn et Taxis qui le possèdent aujourd'hui.

EMMERICH, Anne-Catherine, fille de paysans pieux de Kœsfeld, Westphalie, née 1774, entra 1803 au couvent d'Agnatenberg, qui fut supprimé 1811. Pieuse, humble, sans prétentions, touj. maladive, elle devint stigmatisée après la suppression de son couvent, et l'on put voir sur son corps les plaies du Sauveur. La foule accourut; les médecins constatèrent le fait sans pouvoir l'expliquer et ne découvrirent aucune supercherie. A sa prière elle guérit en 1819; le vendredi seulement on continua de remarquer encore quelques rougeurs à la peau. C'est un des cas nombreux de ces phénomènes physiologiques inexpliqués pour les savants eux-mêmes.

EMPEYTAZ, Henri-Louis, né à Genève 1790, affilié aux moraves, se lia 1813 avec la baronne de Krudener qu'il accompagna 3 7* ans dans ses voyages d'évangélisation en Allemagne, en France et en Suisse; fut rayé du rôle des étudiants en théol. à cause de ses relations et de ses tendances religieuses; vit à Heidelberg et à Paris l'emp. Alexandre avec lequel il eut de sérieux entretiens, et, de retour à Genève, se joignit à l'égl. dissidente du Bourg-de-Four, dont il ne tarda pas à devenir pasteur, 1818. f 23 avril 1883. C'était une nature aimable, douce et dévouée, un caractère à la fois mystique et jovial. On lui doit: Notice sur Alexandre, Réflexions édif. sur le Cant. des Cantiques, et l'hymne: Grand Dieu, nous te bénissons.

EMS (Congrès d'). Les empiétements des papes et de leurs nonces sur l'autorité spirituelle des archev. ayant depuis longtemps soulevé des plaintes légitimes, et le pape n'en tenant aucun compte, malgré le danger qu'il courait de voir l'Égl. catholique d'Allemagne secouer définitivement le joug de Rome, les archev. de Mayen-ce, Trêves, Cologne et Salzbourg, à l'occasion d'un nouvel empiétement du nonce Zoglio sur le métropolitain de Munich, se réunirent aux bains d'Ems et formulèrent 25 août 1786 un plan de réformes en 23 chapitres, qui limitait les droits des nonces et opposait l'autorité archiépiscopale à celle du pape. Ce document, connu sous le nom de Punctation d'Ems, fut approuvé par l'empereur, mais les nonces Ca-orara, Pacca et Zoglio réussirent par leurs intrigues, d'abord à désintéresser l'emp. et à obtenir sa neutralité, puis à effrayer les év. en leur faisant croire que le plan d'Ems n'avait d'autre objet que de restreindre leurs droits en les subordonnant toujours plus k leurs archevêques. La cour de Bavière étant toute gagnée k Rome, Temp. étant mort, les archev. s'étant divisés, il fut facile à Pie VI de refuser sa sanction au plan d'Ems.

ENCENS, substance odoriférante produite par divers arbres, dont les plus appréciés viennent de l'Arabie et de la côte d'Afrique qui lui fait face. Outre l'arbre d'encens proprement dit, dont on compte trois variétés, on peut se servir pour les fumigations de la plupart des arbres & résine, tels que le genévrier; l'Égl. russe emploie aussi, surtout dans les campagnes, le Pi-nus laricio. Bien que l'encens fût consacré par la loi juive dans diverses cérémonies, l'Egl. chrétienne a longtemps répugné à l'introduire dans son culte, probablement parce que les païens otfraient de l'encens aux statues de leurs dieux et de leurs empereurs, et condamnaient les chrétiens à les imiter comme gage de leur abjuration. C'est au siècle seulement qu'on voit cette coutume s'introduire dans l'Égl. d'occident (conc. de Rouen 878). Pour le service de la messe l'encens est préalablement bénit lui-même; puis l'autel et le célébrant reçoivent avant l'introït les premiers coups d'encensoir; une seconde bénédiction, avant la lecture de l'Évangile, est pour le livre et le lecteur; une devant l'offertoire, pour l'autel et pour le sacrement; enfin une 4®*, et finale, pour les officiants et le public. Il y a aussi des fumigations aux processions, services funèbres, etc.

ENCONTRE, Daniel, né à Nîmes 1762, fils de Pierre Encontre, pasteur de Saint-Geniès, étudia d'abord dans des circonstances difficiles et montra surtout pour les mathématiques une grande aptitude. Il cultiva également avec ardeur et succès l'hébreu, le grec et le latin. Enfin vers 1781 il put venir étudier à Lausanne et à Genève, où il subit un moment l'influence de Voltaire. Il se fit aimer par son caractère et apprécier par ses talents. De retour en France il fut nommé proposant pour le bas Languedoc et le Vivarais, et lorsqu'il eut l'âge requis il fut consacré au Désert, on ne sait exactement ni où ni par qui. Mais il était plutôt fait pour l'enseignement que pour la prédication; son physique n'était pas favorable et sa voix était faible. Après un voyage à Paris, qui le mit en relation avec le monde scientifique, Montgol-fier, etc., il revint à Montpellier, fut nommé prof, de mathém. transcendantes et doyen delà faculté des sciences, membre de plus, sociétés savantes et composa toute une série de travaux et de mémoires sur les mathém., la botanique, la littérature latine, le système du monde, etc. Enfin en 1814 il fut appelé comme prof, à Montauban, après la mort de Gasc, et bien que tous ses intérêts fussent k Montpellier, il accepta et fut aussitôt nommé doyen. Son influence fut immense et bienfaisante. Malheureusement il était k bout de forces, et après 4 mois de maladie, il f 16 sept. 1818 k Montpellier où il s'était fait transporter mourant. Sa Lettre à M. Combes-Dounous reste un modèle d'apologétique chrétienne, 1811.

ENC

ENCRATITES, parti, secte ou tendance gnostique, distinguée par sa continence et sa sobriété. Leur théorie dualiste les portait k réduire autant que possible le rôle de la matière, et dans la Cène ils ne prenaient que de l'eau au lieu de vin, ce qui leur fit donner le nom d'hy-droparastates, ou aquariens. Parmi leurs chefs on compte Tatien, Cassien et Sévère. Ce nom se retrouve au 12»* siècle, appliqué aux bogomiles comme synonyme d'hérétiques.

ENCYCLIQUE, v. Syllabus.

ENCYCLOPÉDIE, branche d'étude qui a pour objet de classer et de résumer tout l'ensemble des sciences théol. au point de vue religieux, moral, critique, historique, spirituel et matériel. C'est le groupement des différentes branches de la théol., avec une introduction spéciale k chacune; c'est pour le commençant une initiation générale à tout ce qu'il devra faire et apprendre; pour l'initié, c'est la récapitulation méthodique de ses études. Suivant le but direct qu'on se propose l'encyclopédie aura un caractère plus ou moins scientifique, et revêtira la forme d'un manuel ou celle d'un dictionnaire. Les plus anciens travaux de ce genre se bornent à résumer l'ensemble des connaissances qui peuvent servir k l'exercice pratique du ministère. C'est Érasme qui a le premier, dans sa Ratio ou Methodus perveniendi ad veram theol., entrevu l'idée d'une classification systématique des différentes branches de la théol.; puis Mélanch-thon dans sa Brevis ratio 1541. A,-G. d'Ypres a réalisé cette idée dans son Theologus 1572. An 18me siècle il faut mentionner dans ce genre les travaux de Semler 1765, et de Herder 1785. Ils abondent dans notre siècle; Schleiermachor a tracé de main de maître les grands contours de cette étude; Berthold, Stiudlin et d'autres se sont occupés surtout à en rassembler les matériaux. Le livre de Hagenbach, k la fois scientifique et pratique, a eu les honneurs de 7 éditions de 1833 à 1864. Citons encore l'encyclop. de Rosenkranz, hégélienne; celle de Harless, luthérienne; celle de Lange, rationaliste, et les travaux catholiq. d'Oberthur, Drey, Stauden-maier, Buchner, etc. Les grands dictionn. de Herzog, en allemand, et de Lichtenberg, en français, ne sont pas des encyclopédies dans le sens propre du mot; Tordre alphabétique exclut Tordre logique; mais ils méritent ce nom parce qu'ils embrassent tous les sujets théol. et qu'ils les traitent d'une manière complète et approfondie; ils sont l'étoffe d'une encycl. systématique.

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ENC

ENCYCLOPÉDISTES, nom collectif des savants auteurs et collaborateurs de l'Encyclopédie qui, dans la seconde moitié du dernier siècle, a eu un si grand retentissement par la manière libre et hardie avec laquelle ont été abordées les questions politiques et relig. les plus délicates, Paris 1751-1777. Diderot et d'Alembert en forent les principaux rédacteurs; ils furent aidés entre autres par Rousseau, Marmontel, Condorcet, Voltaire, etc. L'abbé Bergier était chargé des articles théologiques. Cet immense travail représente nettement dans sa tendance Tesprit du siècle où il a paru, et il a contribué à le fixer en lui donnant un corps; il a systématisé ce qui n'était qu'un instinct, et il a tiré toutes les conséquences de principes qui n'étaient encore que pressentis et qui ont fini par devenir des maximes et presque des axiomes. On a reproché à ce recueil d'être athée et matérialiste; la religion révélée et le christianisme y sont honorés et défendus dans de nombreux articles, mais en les lisant on a l'impression que ce n'est pas sérieux, qu'il n'y a là ni foi, ni conviction; le public ne s'y est pas trompé; l'usage conservait encore l'apparence des formes religieuses, mais en réalité il n'y avait plus ni religion, ni morale. A chaque page on pouvait entrevoir l'approche des temps nouveaux et le grand travail qui se faisait dans les esprits; l'Encycl. a préparé pour sa part la révolution française dans ce qu'elle a eu de grand et dans ce qu'elle a eu de faux. La tempête que souleva son apparition, et qui en suspendit même quelque temps la publication, fut causée bien moins par les vues irréligieuses qu'elle exprimait, que par son attitude dans les questions d'administration ecclésiastique et notamment par ses attaques contre les jésuites.

ÉNÈE i<> év. de Paris vers 870; défendit dans son livre contre les grecs ôt contre Photius la doctrine cathol. de la procession du Saint -Esprit. — 2* Énée Sylvius, v. Pie II.

ENERGUMÈNES, synon. de possédés dans l'ancienne Égl., qui avait contre eux une discipline particulière et les plaçait sous la surveillance des exorcistes.

ENC

ENFANTIN (Le père), Barthélemy-Prosper, né à Paris 6 févr. 1796, directeur en 1825 de la caisse hypothécaire, s'attacha aux doctrines de Saint-Simon et devint un des prêtres de l'école. Il alla plus loin que son maître, prêcha la communauté des femmes, se déclara le Père suprême et compromit par ses exagérations, non moins que par l'immorale pratique de son système, l'avenir de la société qu'avait rêvée Saint-Simon; il se fit mettre en prison. La secte fut interdite en 1833. Il alla prêcher ses théories en Égypte, où il passa 2 ans, mais sans succès. De retour en 1839, et un peu calmé, il devint maître de poste près Lyon, et en 1845 directeur d'un chemin de fer.

ENFANTS. Le baptême des enfants n'est pas mentionné dans le N. T.; cependant il paraît s'être introduit assez vite dans l'Égl., probablement dans Tesprit et sous l'influence de passages tels que 1 Cor. 7, 14. A mesure que la tradition s'est affermie dans ce sens, la législation ecclés. s'est complétée en édictant des mesures pour les cas spéciaux; ainsi il est défendu de baptiser un enfant mort-né; Luther comme Augustin s'en tient au canon disant que « pour être né de nouveau, il faut d'abord être né. » Les conc. de Cologne et de Bamberg autorisent cependant, s'il y a danger de mort, à baptiser la tête ou le membre qui sort avant la naissance complète. Les enfants trouvés, et ceux dont on ignore s'ils ont été baptisés, doivent aussi, dans l'incertitude, être baptisés sous condition. — Quant à la communion, on a des preuves que déjà au 3™« siècle on avait coutume de la donner aux petits enfants, et cela dura jusqu'au 9m« siècle avec l'autorisation de plusieurs conciles. Augustin justifie cet usage par Jean 6, 53. et par les rapports de la Cène avec le baptême. Paschase Radbert le premier souleva des objections, et peu à peu, à mesure que Ton comprit mieux le sens de ce sacrement, surtout quand on le rattacha à la confession, TÉgl. renonça à faire communier les enfants, et le conc. de Trente en condamna la pratique. L'Égl. orientale Ta conservée jusqu'à ce jour. Le roi Canut 1032 avait décidé qu'on ne donnerait la communion aux enfants que lorsqu'ils sauraient par cœur le Pater et le Credo. L'Égl. romaine a fixé à 12 ou 13 ans, parfois moins, l'âge de la Ire communion. Dans la plupart des Égl. protestantes cet âge est de 15 ou 16 ans.

fiNGELBRECHT, ouvrier drapier de Brunswick, né 1590; longtemps souffrant de corps ^t d'esprit, il crut 1627 avoir des révélations, prêcha contre les désordres du clergé, vit «es assemblées interdites, ce qui lui attira touj. plus d'auditeurs, et fut emprisonné à Hambourg, f 1644. Sa Vie et ses révélations ont ité impr. en hollandais 1697.

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ENG

ENGELHARDT, Jean-Georges-Veit, prof, de théol. et prédicateur de l'université d'Erlangen; né 12 nov. 1791, f 1855; distingué surtout par ses travaux d'histoire ecclésiastique; il a étudié à fond le mysticisme.

ENNODIUS, Magnus-Félix, né 473 à Arles ou Milan, de parents pauvres; enrichi par son mariage il se voua à la théol. et accompagna comme diacre l'év. Épiphane de Paris dans un voyage missionnaire en Bourgogne. Nommé év. de Pavie 510, il fit à la demande du pape 2 fois le voyage de Constantinople, pour travailler à l'union des Églises, mais sans succès, f 521. Écrivain fécond, ses Œuvres donnent une idée juste de Phist. de son temps et servent à faire connaître quelques tribus germaniques. Il est le premier qui ait donné à Pév. de Rome le titre de pape.

ENTHOUSIASME, état d'âme dans lequel le sentiment et l'imagination s'emparent tellement de la personnalité qu'elle en perd plus ou moins la conscience d'elle-même, et que les autres facultés, logique ou raison, en sont parfois paralysées. C'est tantôt un engouement excessif et non motivé pour une chose ou pour une personne; tantôt un état physique désordonné, comme celui des sybilles, qui écumaient et poussaient des cris; tantôt une admiration vive et passionnée, causée par la vue ou le récit de grandes choses; tantôt le transport intérieur d'un poète ou d'un artiste qui, préoccupé du seul sujet qui l'intéresse, ne voit rien au delà; le monde extérieur n'existe plus pour lui. Le mot se prend en général en bonne part; il suppose une force et des capacités morales élevées. Rien ne se fait sans un peu d'enthousiasme, a dit Voltaire; dans le domaine religieux, comme ailleurs, il se manifeste par une sorte de rupture avec les choses visibles, et s'il a le privilège d'élever l'âme au-dessus de la terre et de la matière, il présente le danger de l'introduire dans le domaine de la fantaisie et de la livrer sans défense à toutes les illusions et à toutes les séductions. Il y a les vrais et les faux prophètes, les hommes inspirés et les rêveurs, fanatiques ou mystiques. La tendance actuelle de l'humanité n'est pas vers l'excès d'enthousiasme, moins encore pour les choses religieuses que pour les autres, et si l'on doit craindre les exagérations du spiritualisme, celles du matérialisme ne sont pas moins à redouter. On affecte de citer des cas isolés de folie religieuse; il faut les comparer à ceux que produisent la boisson, la débauche, le jeu, la fièvre du gain, l'agiotage, des ruines ou des fortunes subites.

ÉON, ou Eude de Stella, gentilhomme breton qui, s'appliquant à lui-même les mots « Celui qui doit venir pour juger le monde, • se mit à prêcher avec violence contre l'Église et contre la hiérarchie, donnant le baptême du Saint-Esprit par l'imposition des mains, niant la résurrection et le sacrement du mariage. Il avait quelques idées cathares. Il fut combattu par le légat Albèric d'Ostie 1145, par les écrits de Hugo de Reims, et plus efficacement par des troupes et par des échafauds. Lui-même fut simplement enfermé comme fou 1148.

EONS, êtres émanant de la divinité, du Dieu éternel et souverain, destinés à servir d'intermédiaires, d'après les systèmes gnostiques, soit entre le vrai Dieu et le Jéhovah des Juifs, soit entre le Père et le Fils, soit entre le Christ et les hommes. C'étaient des incarnations symboliques, non éternelles, mais fort anciennes (àe là leur nom, qui signifie âge), qui réalisaient certaines abstractions, la Sagesse, la Force, la Foi, etc. Il y en avait suivant les uns jusqu 365, selon d'autres beaucoup moins. V. Gnostiques.

ÉPAONE, non loin devienne (Dauphiné),connue par un conc. tenu sous Sigisinond de Bourgogne 517 et présidé par Avitus; Iena en Savoie, d'après Guizot; peut-être Yenne, près Belley. Il y fut décidé qu'un homme ne pouvait pas être nommé diacre, s'il était marié en secondes noces; qu'un homme ne pouvait épouser la sœur de sa défunte femme; qu'un ecclésiastique ne pouvait pas aller à la chasse avec faucons et chiens; qu'il ne fallait se montrer inexorable envers aucune espèce de pécheurs, etc. De ces 40 canons, 13 furent reproduits par le synode d'Agde 506 et ont ainsi obtenu force de loi.

ÉPARCHIES; les grecs désignaient sous ce nom les provinces qui étaient la subdivision d'un diocèse, et comme l'organisation ecclésiastique se rattachait à l'organisation civile, les présidents ou chefs d'une éparchie étaient, en qualité de métropolitains, placés entre les év. des localités et les patr. du diocèse. Auj. chez les grecs la distinction n'existe presque plus, et le mot d'éparchie sert à désigner le diocèse.

ÉPHÈSE. Il s'y est tenu deux conciles. !<>En 431, par convocation de Théodose II el de Va-lentinien III, 3m« concile écuménique, pour régler la question de Nestorius, qui divisait l'Église. Cyrille d'Alex, s'y rendit avec une foule de créatures; Nestorius avec une garde qu'il avait demandée. Avant que Jean d'Antio-che et beaucoup d'autres partisans de Nestorius, retenus par les pluies, fussent arrivés, Cyrille et Memnon, métropolitain de la ville, refusant de les attendre, ouvrirent le concile le 22 juin avec 200 év., et Nestorius fut condamné; l'unité hypostatique des deux natures en Christ fut proclamée. Jean, de son côté, arrivé peu après, tint un contre-concile qui annula les décrets du précédent. La division entre les antiochiens et les alexandrins dura plusieurs années; les premiers finirent par se soumettre à la conférence de 433. — 2<> Conc. de 449. convoqué par Théodose II. On n'y admit que des monophysites ou eutychéens. Fla-vien de Constantinople et ses amis y durent comparaître comme accusés. Dioscure d'Alex, présidait, assisté d'un commissaire impérial et d'une soldatesque brutale. Des moines criaient: Coupez Eusèbe en deux, comme il veut partager en deux Jésus-Christ. Des violences furent exercées. Eutycbe fut rétabli dans ses dignités; Eusébe de Dorylée ne fut pas même écouté; une lettre de Léon de Rome ne fut pas lue; Flavien, Eusèbe, Théodoret et Domnus d'Antioche furent destitués. En vain le diacre Hi-laire protesta; en vain Flavien en appela; Dioscure fit venir des soldats, Hilaire dut s'enfuir et Flavien fut tellement maltraité qu'il en mourut. Théodoret relégué dans un couvent manqua souvent du nécessaire. Enfin la mort de Théodose 436, mit fin à ces soi-disant discussions d'un concile qui a mérité le nom de conc. de brigands (conc. latrocinium), et l'avènement de Pulchérie, femme de Marcien, permit la convocation d'un concile plus libre et plus sérieux, qui mit à néant les résol. de celui d'Éphèse.

ÉPHREM le Syrien, le plus grand des pères et des théol. de son pays. Né probablement avant 300, de parents païens selon les uns, chrétiens et martyrs suivant d'autres, à Nisibis en Mésopotamie, il fut élevé par l'évêque de cette ville, qui après l'avoir instruit et baptisé, l'employa comme maître dans son école et s'en fit accompagner, à ce qu'on croit, au conc. de Nicée. Son instruction le fit bientôt avantageusement connaître. Nisibis étant tombée entre les mains des Perses, il se retira dans un désert, puis dans le voisinage d'Édesse, où il prêcha avec succès et fut bientôt entouré d'un grand nombre de disciples, sans qu'on puisse dire qu'il fonda une école proprement dite. Quelques - uns ajoutent qu'il visita les solitaires d'Égypte et Basile de Césarée. f 375 ou 379. Il a écrit des Comment., des poésies sacrées, des discours, et plusieurs traités de controverse contre Bardesane, Marcien, Manès. Ses ouvrages, écrits en syriaque ne nous sont parvenus en grande partie que dans la traduction grecque. Il ne reste de lui que 90 discours, qui sont des sermons plutôt que des homélies, sur l'ascétisme, les devoirs des riches en temps de disette, le dévouement, etc. Ses écrits ont été frad. et publ. en français, Paris 1840. Le mss. du N. T. connu sous le nom de Codex Ephrem est ainsi nommé parce que, vers le H1™ siècle, des copistes ignorants détruisirent autant qu'ils le purent le texte sacré pour le remplacer par un écrit d'Éphrem; heureusement ils n'ont réussi qu'à moitié à détruire le premier texte.

ÉPIPHANE lo docteur de l'Égl. grecque, ne entre 310 et 320 à Besand, près d'Éleuthéropo-lis, Palestine; fut élevé par des moines d'Égypte, devint lui-même moine à 20 ans, fonda de retour dans sa patrie un couvent dont il fut longtemps l'abbé, et fut appelé 367 à l'évêché dt> Constantia, ou Salamine, Chypre, f 403. Pieux, mais peu logique, il se laissa influencer par le moine Hilarion. Son zèle, qui ne fut pas touj. éclairé, se manifesta surtout dans l'organisation du monachisme et dans la guerre à l'hérésie. Il combattit l'anthropomorphisme, I'arianisme, l'origénisme, et ne constata pas moins de 80 hérésies. Il fit exprès le voyage de Bethléem pour mettre les moines en garde contre les erreurs de l'év. Jean de Jérusalem; il ordonna prêtre un frère de saint Jérôme, ce qui divisa ces deux hommes. Enfin il mourut à son retour d'un voyage inutile qu'il avait fait à Constantinople pour essayer de décider Chrysostome à condamner Origène. Son principal ouvrage est le Panarion, énumération et réfutation de toutes les hérésies, y compris la philos, païenne, source précieuse pour l'étude de l'hist. et de la théol. des temps anciens. Il a écrit aussi un Traité des poids et mesures des juifs, et un volume intitulé l'Ancre, destiné à fortifier la foi des faibles. Il laisse à désirer comme style, mais il écrit avec vigueur et conviction. Œuvres publ. par le p. Pètau, Paris 1622. Vie par Gervais, Paris 1738. — 2o Év. de Pavie, né 439 d'une famille distinguée, diacre à 18 ans, év. à 27, jouissait d'une telle influence qu'il put intervenir, à cette époque troublée de la décadence romaine, tantôt pour réconcilier des princes, comme Euric et Nepos, tantôt pour obtenir une protection contre l'invasion de son diocèse, sous Odoacre et Théodoric; tantôt pour obtenir de Gondebaud qu'il relâchât les Liguriens prisonniers. f 497. — 3<> Épiphane le scholastique, vivait en Italie vers 510. Il traduisit en latin les œuvres de Socrate, Sozomène et Théodoret, à la demande de Cassiodore qui les retravailla, les condensa et les publia sous le titre de Histo-ria tripartita. On lui attribue aussi un Recueil de lettres synodales à Léon I«r, quelques comment. et la trad. latine des Antiquités juives de Josèphe.

ÉPISCOPAT, v. Hiérarchie.

EPISCOPIUS, proprement Simon Bischop (ou évêque), théol. remontrant, né 1583 à Rotterdam, étudia depuis 1600 à Leyde sous Armi-nius et Gomar. en 1609 à Franeker, fut nommé pasteur à Bleyswich 1610, fut appelé comme prof, en 1612 en remplacement de Gomar, défendit au synode de Dordrecht la doctrine arminienne, fut obligé de résigner ses fonctions, se retira en Belgique d'abord, puis en Francr où Grotius l'accueillit parfaitement 1621. Eu 1626 il put rentrer en Hollande, fut nommé en 1634 prof, de théol. au collège arminien d'Amsterdam, et f 1643. Ses œuvres forment 2 vol. f», Amsterd. 1680; elles se composent de comment., de traités dogmatiques et de controverse.

ÉRASME 1<> plus connu, en Italie surtout, sous le nom de saint Ëlme, un des 14 principaux anges de secours. On se recommande à lui pour les coliques, et pour les épidémies du bétail. D'après les bollandistes il aurait été év. d'Antioche sous Dioclétien, aurait beaucoup souffert et serait mort à Formies en Campanie. Ses os sont à Ga'éte et ailleurs.

2» Didier, ou Désiré, 1e célèbre écrivain du 15®« siècle, était enfant naturel. Né à Rotterdam 28 oct. 1467, il fut d'abord enfant de chœur, entra au couvent d'Emmafls 1486, reçut les ordres en 1492, mais se sentant peu de goût pour la carrière ecclésiastique, il vint finir ses études au collège Montaigu à Paris, visita l'Angleterre et l'Italie, revint à Londres où Henri VIII lui fit un brillant accueil et où il se lia avec Thomas Morns; il enseigna successivement le grec à Oxford et à Cambridge, en même temps qu'il était nommé pasteur à Aldington. Il fut précepteur d'un fils naturel de Jacques IV d'Écosse, avec lequel il visita l'Italie. Nommé docteur en théol. à Bologne 1806, il se rendit pins tard à Rome où Léon X, qui aimait les beaux esprits, essaya de le retenir. François I lui offrit aussi la direction du collège de France; Charles-Quint lui donna le titre de conseiller et une pension. Mais tous ces honneurs ne purent prévaloir contre ses goûts de savant et d'humaniste, et en 1521 il se fixa définitivement à Bâte, auprès de son ami l'imprimeur Froben, pour y surveiller l'impr. ou la réimpression de ses ou vrages. Vers 1529 il passa quelques années à Fribourg en Brisgati, mécontent qu'il était du mouvement réformateur, mais il revint à Bâle où il f 1536. Paul III avait failli le nommer cardinal. Les rapports d'Érasme avec les réformateurs furent assez nombreux et assez intimes pour qne quelques-uns aient cru qu'il appartenait aussi à ce mouvement. Cependant il ne se décida jamais; ses aspirations étaient religieuses, sa piété personnelle était appréciée, ses instincts le poussaient vers une réforme, il fit même 'des ouvertures dans ce sens à Léon X; mais il ne put jamais se décider. Son tempérament l'éloignait de toute mesure énergique; il craignait que la réforme ne se fit au détriment des belles-lettres; ses luttes personnelles avec Hutten, puis avec Luther, l'éloignèrent davantage encore. Il aurait voulu prendre une position intermédiaire et ne réussit qu'à se rendre suspedt à tous. Mais, malgré lui, il a rendu de grands services à la cause de la réforme, d'abord par ses éditions grecques du N. T.,

ÉRA

Bâle 1516, 19, 22, 27 et 35, qui servirent de base au travail de Luther; puis par ses paraphrases du N. T. et par de nombreux discours, dissert, et traités fort estimés. Il publia aussi un essai d'Encyclopédie et une Homilétique. Enfin il édita les œuvres de plusieurs pères de l'Église, quelques-uns avec une traduction latine fort élégante. Nommons encore ses Colloques, ses Adages, ses Apophthegmes, l'Éloge de la Folie et de nombreux ouvr. qui n'appartiennent pas à la théologie. Œuvres, Bâle, 9 vol. f° 1540. Vie, par Burigny, Paris 1757.

ÉRASTE, Thomas; de son vrai nom Liebler, né 1524 à Baden, Suisse, ou près de Baden wei-ler, étudia la théol. à Bâle, puis la philos, et la médecine à Bologne, fut nommé prof, de médecine à Heidelberg 1558, médecin d'Othon Henri, membre du Conseil ecclés. du grand-duché sous Frédéric in. Il défendit la théorie de Zwingle sur la Cène, se rendit suspect d'arianisme, fut excommunié à cause de ses rapports avec les unitaires et dut quitter Heidelberg 1580. Il fut appelé à Bâle comme prof, de morale et y f 1583. Irrité de la « tyrannie ► des presbytériens, il écrivit contre eux un volume: Explicatio, etc., qui ne parut qu'après sa mort et qui, réfuté par Bèze, obtint en Angleterre un grand succès et de nombreux adhérents. Dans ce livre il établit la doctrine que l'Égl. doit être subordonnée à l'État, notamment en ce qui regarde le droit d'excommunication; c'est ce qu'on appelle Éraétianime.

ÉRASTIANISME, v. Eraste.

ÈRE, date fixe à partir de laquelle on compte l»»s années. La première connue dans la Bible est celle des Séleucides; on la trouve dans les Maccabées; elle commence avec le mois de Tisri (septembre) 312 av. C.; les différences que l'on remarque entre les chronologies de ces deux livres s'expliquent peut-être par l'hypothèse que le 1er des Machabées fait commencer l'année, comme les Romains, par le mois de janvier, ou thébet. Avant cela les Juifs n'ont aucune date précise; dans le Pentateuque tonte leur chronol. est basée sur les listes généalogiques. Plus tard ils comptent depuis la sortie d'Égypte; plus tard encore, depuis l'exil; quelquefois d'après les années de leurs rois, ou celles de letars oppresseurs. Cependant déjà chez Josèphe on voit des calculs faits d'après l'ère do monde, et plusieurs historiens ecclés. ont adopté ce mode de compter, même postérieurement à la Réformation. Mais il a fallu y renoncer depuis qà'On s'est aperçu des différences qu'il y avait suivant les textes dont on se servait. L'ère du moine Pandore, qui a servi longtemps pour la fixation de la Pâque, place la naissance de Christ l'an 5493 du monde; celle d'Anien. dont se servent encore les chrétiens abyssins.

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ÈRE

l'an 5501; celle de Byzance, dont se sont servis les ernp. de Constantinople, et les Russes jusqu'à Pierre-le-Grand, l'an 5509, en commençant l'année avec le 1er sept. L'ère dioclétienne, ou des martyrs, imaginée à Alexandrie à l'usage des chrétiens d'Égypte et d'Éthiopie, datait de 284 ou de 276. On a fini par y renoncer aussi, et c'est auj. l'ère dionysienne qui prévaut généralement; v. Denys. Quant aux musulmans, leur ère date de l'hégire, ou de la fuite de Mahomet, 622.

ERFURT, vieille ville des États prussiens. A l'époque de Charlemagne elle était déjà considérable par son commerce. Elle joignait l'Italie à la Baltique et entra dans la ligue hanséatique. Sa population a varié entre 20,000 et 60,000 hab.; 58,000 lors de la Réforme. Université célèbre, datant de 1392; plus de mille étudiants. Principaux monuments: la cathédr., l'égl. de Saint-Sévère, avec ses 3 flèches, cinq grandes places, forteresse, jardins, ponts sur la Géra. Erfurt est surtout connue par l'hist. de Luther; il y arriva en 1501, vit une première fois la Bible dans la biblioth. de l'univ. 1503, une seconde fois au couvent des augustins 1505. C'est entre Erfurt et Stotterheim que la foudre, étant tombée près de lui, il se décida à se faire moine. Le couvent des aug. où il passa 3 ans, 1505 à 1508 a été transformé en un orphelinat qui a pris de lui son nom de Martinstift, fondation Martin, et dont une partie a été détruite il y a quelques années par un incendie. C'est là qu'il rencontra Staupitz, et qu'il fut ordonné prêtre. 11 y prêcha en passant, quand il se rendit à Worms 1521, et en 1525 toute la ville avait passé à la Réforme. Le travail religieux avait été préparé par les travaux des humanistes, et déjà l'univ. avait empêché la publication de la bulle d'excommunication du Dr Eck en 1520. Luther s'y rendit encore pour réprimer les excès des MUnzer et des Carlstadt, qui menaçaient son œuvre. L'univ. a été supprimée en 1816.

ERHARD, Thomas Aquinas, év. de Ratis-bonne au 7®e ou 8m« siècle, fondateur du couvent de Niedermunster, et peut-être frère de l'év. Hildulf de Trêves.

ÉRIGÈNE, v. Scot.

ÉRIMBERT, choisi par Anschar pour l'accompagner dans sa 2me mission en Suède, 852, fut nommé évéque de Birka, et après quelques années d'un rude travail, revint dans son pays pour s'y reposer dans un couvent. Il fut remplacé par Ansfrid.

EJRMITE, mot dérivé du grec êrèmos, désert, désigne ceux des religieux qui, fuyant le monde pour vivre dans 1a prière et le recueillement, préféraient la vie solitaire à la vie en commun du souvent, v. Anachorètes. Ils réglaient leur vie comme ils l'entendaient, avec phw ou moin» d'ascétisme, et faisaient ce qu'ils voulaient, sans vœux ni obligations d'aucune sorte. C'étaient de simples solitaires, perdus dans les bois, dans les déserts ou dans les cavernes des montagnes, et qui ne s'interdisaient pas de rentrer dans le monde en certaines circonstances, ni de s'associer à d'autres ermites pour certains travaux, tels que l'aménagement de leur cellule, ou ermitage. Quelques-uns même, tels que les ermites-augustins, finirent par former de véritables confréries, qui n'avaient plus d'ermites que le nom et certaines habitudes.

ERiNESTI, Jean-Auguste, né 4 août 1707 à Tennstadt, Thuringe, fils d'un pasteur, étudia à Wittenberg et à Leipzig, où il fut nommé 1734 recteur de l'école de Saint-Thomas, 1742 prof, de littérature ancienne, 1756 prof, d'éloquence sacrée, en 1758 docteur, prof, de théol. et prédicateur de la cathédrale à Meissen. f 1781. Distingué comme philologue, il a publié de nombreuses éditions de classiques grecs et latins, Homère, Callimaque, Polybe, Cicéron, Tacite, Suétone, etc. Il a établi, mais en l'exagérant, le principe vrai en exégèse, qu'il faut appliquer à la Bible, pour la détermination du sens des mots, les mêmes règles qu'à tous les autres livres, et il est devenu ainsi le père de la vraie méthode grammaticale historique. Dans ses Profusion** de theol. hist. etdogm. il a posé les bases d'une hist. de la dogmatique. Ses autres ouvrages, Explicat. du N. T., Initia doctrinœ soli-dioris, opuscules, etc., ont également de la valeur. Il a oublié seulement que lorsqu'une nouv. religion est introduite, les mots dont elle doit se servir doivent avoir un nouveau sens; ainsi Logos dans Saint-Jean.

ERNESTINE (Bible), édition très estimée d'une Bible avec notes et gravures, faite sous les auspices du duc Ernest 1 de Saxe par 29 théologiens de la Thuringe. Commencée en 1636, elle fut achevée en 1640; on l'appelle aussi Bible de Weimar, Gotha, Iéna et Nuremberg.

ERPEN1US, Thomas d'Erpe, savant orientaliste hollandais, né 1584 à Gorcum, étudia sous Scaliger à Leyde, se forma par de nombreux voyages, fut nommé prof, de langues orientales à Leyde 1613, d'hébreu 1619; f 1624. On lui doit une Gramm. arabe, une éd. des Fables de Lochmann, la publication d'un Pentateuque arabe, une éd. arabe-latine, posthume, de l'Hist. des Sarasins, d'Elmazrin.

ERTHAL, François-Louis (d'), un des plus nobles représentants des tendances libérales de son Égl. au 18®* siècle. Il s'occupa avec soin des écoles et du développement intellectuel et moral de son peuple, maintint avec fermeté les stipulations de laPunctytion d'Ems et se moptra large dans ses rapports avec le$ protestants. Né 16 sept. 1730, chanoine de Wtlrzbourg 1762, prince-év. de WUrzbourg et Bamberg 1779. f 14 février 1795.

ESCHATOLOGIE. On appelle ainsi cette partie de la dogmatique qui traite des dernières choses, des dernières dispensations de Dieu, des derniers temps. Cette étude comprend ainsi des sujets très variés, lemillenium, la fin du monde, le jugement, les nouveaux cieux et la nouvelle terre, l'état des âmes après la mort, etc. Quelques-uns y joignent même la doctrine de l'Église, comme une institution qui n'existait pas du temps de Jésus et qui, pour lui, appartenait à l'avenir; cependant il est plus naturel de rattacher l'Égl. à l'œuvre de son fondateur, et de réserver la rubrique d'eschatologie aux questions complexes qui traitent des destinées futures de notre race et de l'état des âmes dans l'économie à venir. L'Évangile annoncé à toute la terre, le peuple d'Israël converti, une apostasie dans l'Egl. sous l'influence de faux docteurs, des bouleversements extraordinaires dans le monde, précéderont la dernière crise; puis viendra la fin, c.-à-d. l'avènement du Seigneur et la destruction des choses visibles. L'étude de ces questions est difficile, parce que la Bible est sobre de détails; l'imagination se donne trop volontiers libre carrière.

ESCLAVAGE. L'Égl. chrétienne à son apparition trouva l'esclavage existant dans le monde romain et sanctionné par quelques prescriptions de la loi juive. Sa tâche était de le faire disparaître, et elle n'y faillit pas. Mais le christianisme est une influence, un principe de libre développement moral; il est un esprit des lois, bien plus qu'une loi, et il ne condamne pas directement l'esclavage; il semble même le reconnaître, 1 Cor. 7, 21 et Ep. à Philémon. Mais en disant aux hommes: Vous êtes tous frères, elle posait, sinon un principe scientifique sur l'unité de la race, au moins le principe moral de l'égalité; et les conséquences devaient s'en faire sentir, non subitement, mais à la longue et par degrés. Le maître païen se convertissant et trouvant son esclave parmi les membres de l'Église, ne pouvait plus le considérer comme une chose; et si l'esclave remplissait une charge dans l'Église, lecteur, chantre, catéchiste, pasteur même, il ne pouvait plus le regarder comme son inférieur. Il se fit donc un travail dans les esprits d'abord, puis dans les mœurs, avant que l'Egl. en vint à se poser nettement la question de la légitimité de l'esclavage. De vieilles traditions, de vieilles habitudes ne se déracinent pas aisément. Il y eut d'abord un adoucissement dans les rapports des maîtres avec les esclaves, quelque chose de plus humain dans leurs relations, des exigences moins grandes, des peines moins dures, plus d'égards personnels; puis une limitation dans le nombre des esclaves. Le maître ne pouvait en posséder que deux; il devait apprendre un métier aux autres et les affranchir. Puis défense de vendre un esclave, chrétien ou non, à un maître juif ou païen, qui l'empêcherait de se convertir. Chrysostome, Ambroiser Augustin parlent dans ce sens. Des év. et des papes ont encore des esclaves, mais on considère déjà comme une bonne œuvre l'acte de leur rendre la liberté. L'emp. Constantin proclame l'égalité des esclaves et des hommes libres devant la loi. A partir du 6*« siècle plusieurs couvents, surtout parmi les grecs, s'imposent comme règle de ne plus avoir d'esclaves; les conc. de Mâcon, de Rome et de Meaux, 581, 743 et 845. s'occupent de la question dans un sens favorable, et l'on regarde comme une œuvre pie le rachat de ces malheureux; Ambroise, Grégoire I, Agobard de Lyon, Raymond Non Natus de Catalogne s'y appliquent avec zèle. L'ordre des trinitaires et celui de la Merci furent fondés dans ce but exprès. L'Angleterre se distingua dans cette paisible croisade; d'abord l'év. Wulstan de Worcester, f 1096; puis le synode de Londres, sous la présidence d'Anselme de Cantorbéry 1102, enfin le synode d'Armagh 1171, empêchèrent les ventes humaines et finirent par obtenir l'entière suppression de l'esclavage. En plusieurs pays, France, Suède, Bohême, il fut momentanément remplacé par le servage. Mais pendant qu'il diminuait dans les pays chrétiens, l'islamisme le rétablissait sur une grande échelle et sous les formes les plus odieuses; c'était le bénéfice le plus net de la piraterie et chaque année des milliers de chrétiens étaient emmenés captifs et vendus dans les États barbaresques. La France et l'Angleterre formèrent en 1270 une sainte alliance pour y mettre un terme; Philippe-le-Hardi, de Bourgogne, fit une descente à Tunis, mais le mal continua d'aller en empirant jusqu'à ce que, au commencement de ce siècle, une chasse régulière fut organisée contre les pirates par l'Angleterre, les États-Unis et l'Espagne. La conquête d'Alger par la France, 1830, porta le dernier coup au brigandage des mers. Quant à la traite des nègres, imaginée à si bonne intention par Las Cases, elle a atteint et même dépassé toutes les limites de l'horreur, et la chrétienté tout entière s'est émue des récits et des descriptions qu'en ont faits les écrivains, philanthropes ou simples littérateurs. Ce sont les quakers qui ont les premiers élevé la voix, Burlin, Lay, Bénézet. En 1772 Granville Sharp fit voter par le parlement la loi: Tout esclave qui touche le sol anglais est libre. Wellesley, Wilberforce, Clarkson posèrent enfin la question dans ses vrais termes: Pitt et Fox s'y intéressèrent, et après de longs débats, souvent entravés par les sophismes et le mauvais vouloir des propriétaires d'esclaves, Buxton obtint enfin en 1833 du parlement anglais le décret d'émancipation, avec une indemnité de 20 millions de livres sterling pour les colonies. En France l'émancipation fut décrétée par le gouvernement provisoire de 1848. Les États-Unis n'y sont arrivés que par la guerre de sécession, 31 janv. 1864; le Brésil en oct. 1871, l'Espagne en 1873. Les craintes qu'on avait manifestées d'une émancipation trop subite, ne se sont pas réalisées, et s'il y a eu des désordres, ils n'ont été que locaux, personnels et momentanés. Cependant la traite n'est pas encore abolie, et aussi longtemps qu'il y aura des États à esclaves, comme dans les Antilles et dans l'Amérique centrale, il y aura des chasseurs de nègres et des vaisseaux négriers. Li-vingstone a dénoncé les crimes qui se commettent au coeur de l'Afrique sur une vaste échelle, avec la complicité du sultan de Zanzibar, et ses appels, comme ceux de Stanley, porteront le dernier coup, il faut l'espérer, à ce commerce contre nature, où les vendeurs sont musulmans, les vendus païens, et les acheteurs chrétiens de nom. — V. Pressensé, Hist. des prem. siècles, t. VI; Gasparin, Esclavage et traite; Vies de Buxton, Wiiberforce, Livingstone, Clarkson; de Félice, Ozanam, Schœlcher, etc.

ESCOBAR y Mendoza, Antoine, né 1589 à Valladolid, f * juill. 1669; de l'ordre des jésuites, prédicateur distingué. Il a le triste honneur d'avoir donné son nom aux vérités équivoques et aux détours de langage, dits escobarderies. On a de lui près de 40 volumes fo, un poème sur Loyola, une théol. morale et surtout un traité des cas de conscience, Summula casuum con$c.9 qui a fait sa réputation. On a dit qu'il valait mieux que son système; ce n'est pas difficile. Sa théorie c'est le probabilisme; la diversité des opinions lui apparaît comme une grâce particulière de Dieu, qui a voulu ainsi rendre plus léger le joug de Jésus-Christ. Pascal l'a flétri et rendu ridicule dans ses Provinciales.

ESCURIAL, ville d'Espagne, à 35 kil. N. de Madrid, connue surtout par le célèbre couvent bâti par Philippe U en souvenir de la bataille de saint Quentin et en exécution d'un vœu fait à Saint-Laurent, qui était le saint du jour, iO août 1557. L'édifice a la forme d'un gril, et le gril y est sculpté partout en souvenir du martyre de ce saint. On trouve dans l'Escurial 17 couvents, des jardins, un parc immense, une galerie de tableaux, et une magnifique bibliothèque, fondée et enrichie par les soins de Gonflés Pérez, de Mendoza et de l'archev. Anto-nino-Augustin; elle est riche en mss., surtout arabes; le plus remarquable est le Codex aureus. La cour d'Espagne y a sa résidence d'automne, et les caveaux funéraires de ses rois.

ESNIK, Eznik, ou Esnag, év. de Bagrewand, célèbre théol. arménien du 5me siècle, a traduit un grand nombre de pères grecs et collaboré à une traduction de la Bible, Son principal ouvrage est la Réfutation des hérésies en 4 livres (les païens, les Parses, les philos, grecs et les marcionites), qui est devenu classique dans son Église, et qui a été plusieurs fois réimprimé.

ESPAGNE. On n'a aucune donnée précise sur le moment de l'introduction du christianisme en Espagne. Le projet de l'ap. Paul, de visiter ce pays, Rom. 15, 28. est la seule indication que l'on trouve soit dans la Bible, soit dans l'histoire, et elle est bien vague. Une ancienne tradition porte que Jacques, fr. de Jean, souffrit le martyre à Compostelle, et que d'autres disciples furent envoyés en Espagne par Pierre et Paul. C'est en Andalousie qu'on rencontre les premiers chrétiens; l'Évangile leur était sans doute venu de Rome. Au 4** siècle l'Égl. parait être solidement établie, et compte 4 évéchés; le Portugal, un. Le plus ancien synode connu est celui d'Illiberris, 305. Les priscilliens troublèrent pendant près de 2 siècles la paix et la foi de l'Église. La reconnaissance de Rome comme siège principal du christianisme en occident fut précipitée, toute réserve faite des droits des év. et des métropolitains, par les invasions des Alains et des Vandales, et surtout par celle des Visigoths ariens. Cependant l'Égl. d'Espagne maintint son caractère national, et avec d'autant plus d'énergie que Tolède venait de remplacer la Nouvelle-Carthage comme siège métropolitain. Le choix des év., longtemps réservé aux paroisses, passa peu à peu entre les mains du roi qui devait pour cela s'entendre avec l'archev. de Tolède. Les couvents, fort nombreux dès le siècle, relevaient directement de l'év., qui jugeait en outre de tous les différents entre ecclésiastiques. Un moment compromise par la guerre et l'établissement des Maures, l'Égl. se releva, les évêques revinrent à leur poste; vainqueurs et vaincus s'entendirent pour un mode de vivre, et les chrétiens furent tolérés à la condition de ne rien entreprendre contre la foi des conquérants. La plupart se soumirent à ce régime; ils fréquentèrent les écoles, acceptèrent des fonctions publiques, se rallièrent au fait accompli. Mais d'imprudents zélateurs ayant blasphémé contre le prophète, à la fin du règne d'Abd-El-Rhaman II, vers 850, une persécution éclata, qui dura plus, années. Les discussions sur Padoptianisme appartiennent à cette époque. Les siècles suivants virent la création de plusieurs ordres religieux ou de chevalerie destinés, les uns au rachat des captifs, les autres à la guerre contre les Maures. La bataille de Tolosa, sous Alphonse IX1212, porta un coup terrible à la puissance musul-marne qui, minée par des dissensions intérieures, ne cessa d'aller en déclinant, jusqu'au moment où leur dernier territoire, le royaume de Grenade, leur fut définitivement arraché par Ferdinand d'Aragon, 1492. Mais dans l'intervalle les liens qui unissaient l'Espagne à Rome s'étaient resserrés, et le pays délivré des Maures tomba sous un joug si dur qu'il fit plus d'une fois regretter l'ancien. La réaction contre les ennemis de la foi prit un caractère inouï de violence; la royauté, l'Église et le peuple regardèrent comme ennemi tout ce qui n'était pas strictement orthodoxe, et Rome attisa le feu dans l'intérêt de sa domination, Les franciscains établis en Espagne depuis 1206 y avaient multiplié leurs couvents qui, vers 1500, étaient déjà au nombre de 200. Mais leurs rivaux, les dominicains, jaloux de leurs lauriers, s'étaient donné la tâche de ramener à la foi tous ceux qui s'en écartaient; ils s'étaient fait les convertisseurs de tous les hérétiques, et à force de zèle ils avaient fini par obtenir du roi et du pape la reconnaissance officielle de leur mission, qui consistait à rechercher partout, sous toutes les formes et par tous les moyens, ceux dont la doctrine pouvait avoir quelque chose d'équivoque. Cette inquisition des consciences devint l'Inquisition, q. v. Les maures, les juifs, les hérétiques, les tièdes, surtout s'ils étaient riches, devinrent la proie de cet établissement. A l'époque de la Réformation, quelques hommes travaillèrent au relèvement des études et des lettres, en particulier le cardinal Ximénès et le célèbre humaniste Antoine de Lérija, prof, à Salamanque, f 1552, qui faillit tomber entre les mains de l'Inquis. parce qu'il avait signalé quelques fautes dans la Vulgate. La réforme pénétra en Espagne par des marchands d'Amsterdam qui y faisaient des envois de livres luthériens, et aussi par les séjours de Charles-Quint en Allemagne, où les idées réformatrices étaient à l'ordre du jour et pénétraient jusqu'à son entourage. Plusieurs bénédictins, plusieurs nobles, des prêtres, des évêq. même qui lisaient la Bible, devinrent suspects. Des réunions bibliq. s'étaient formées, elles furent poursuivies et leurs chefs durent s'enfuir. Les échafauds se dressèrent. Un négociant, François Saint-Roman, fut brûlé le premier, 1544. Juan Diaz, q. v., fut assassiné 1546. Mais le protestantisme n'en fit pas moins de rapides progrès, et des égl. se fondèrent à Valladolid, Séville, Sara-gosse. L'Inquis. stimulée par Philippe II redoubla d'énergie; elle fit main basse sur des milliers de personnes, même sur le métropolitain de Tolède, Carranza, et sur les favoris de Charles-Quint, son confesseur, ses chapelains. Depuis l'autodafé de Valladolid, 21 mai 1559, il ne se passa pas d'année qu'il n'y eût une ou plusieurs de ces horribles représentations. En 1570 la réforme pouvait être regardée comme étouffée; un petit nombre de chrétiens fidèles avaient réussi, dans l'intervalle, à fuir à l'étranger, à Anvers, Genève, Londres (où ils publièrent en 1559 la Confemo... a quibutd. fidel. Hispanis). et à la fin du siècle l'Esp. était tombée pieds et poings liés sous le joug le plus absolu de Rome, ou plutôt de l'Inquisition. Les dominicains en étaient si bien les maîtres que les jésuites, quoique ce fût leur patrie d'origine, ne réussirent jamais à s'y implanter. Pendant les deux siècles qui suivirent, tout alla en déclinant; l'Esp. s'était mortellement blessée en frappant la réforme et en aliénant toutes ses libertés; sciences, littérature, commerce, prospérité nationale, la décadence était complète, presque irrémédiable. Seules les missions étrangères du nouveau monde semblaient trahir un reste de vie, et encore avaient-elles moins pour objet de convertir les âmes que d'étendre l'influence et l'autorité de l'Égl. romaine. Ces brutales missions compromirent au loin le bon renom du christianisme et firent haïr un évangile qu'on ne connaissait que par ses indignes prêtres. Cependant en 1761 des raisons politiques décidèrent le ministre Aranda à restreindre les pouvoirs de l'Inquisition, l'ordre des jésuites fut proscrit en 1765. et les mouvements révolutionnaires delà fin du siècle modifièrent profondément les rapports de l'Égl. avec la monarchie. Le roi Joseph 1808-1813 supprima l'Inquis. et un grand nombre de couvents (il y en avait 2,128 avec un personnel de 77,000 religieux). La Restauration fut cléricale, et alla jusqu'à rétablir le Saint-Office. La révolution de 1833 fut accompagnée de persécutions contre les prêtres; le nonce partit en 1835, la juridiction de la nonciature fut supprimée en 1848. Mais Isabelle chercha à renouer de bons rapports avec Rome; le concordat de 1851 rendit au clergé les biens ecclésiastiques non vendus et une indemnité pour les autres; le nombre des évôchés fut réduit à 6; les év. eurent la surveillance des écoles et la censure; le catholicisme recouvra ses privilèges. En 1852, loi contre les protestants. En 1851, les cultes étrangers sont tolérés. En 1860 commencèrent de nouvelles persécutions contre les protestants; plus de 100 personnes furent jetées en prison. Enfin la révolution de 1868 (Caste-lar, Etchegaray) proclama la liberté des cultes, qui dès lors et malgré le retour de la monarchie, n'a pas encore été supprimée. En 1872 le synode de Madrid constatait l'existence de 20 églises avec leurs pasteurs, formant un total de plus de 10.000 membres communiants.v. Droin. La Réf. en Espagne.

ESPEN, Zeger Bernard (d'j, né à Louvain 9 juill. 1646, étudia la théol. et le droit canon;

prêtre 1673, prof, en 1675. Dans son principal ouvrage, Jus eccles. unitersum, Lonvain 1700, il défend le système épiscopal (contre les exagérations du syst. papal) et le jansénisme, ce qui lui valut d'être mis à l'index 1704. La publicité donnée à son préavis en faveur de la validité de l'élection de l'archev. janséniste d'Utrecht, l'obligea à quitter Louvain. f Amers-fort 1782.

ESPÉRANCE. La conviction qu'il y a ane providence de Dieu, et que ce n'est pas le hasard qui régit nos destinées, renferme en elle-même la confiance que les épreuves du juste ne sauraient durer et qu'elles doivent en définitive tourner à son avantage. Cette disposition de l'esprit à sortir du présent pour regarder à l'avenir, c'est l'espérance. Elle est naturelle chez l'homme, en tant qu'il aspire à la perfection, mais elle n'acquiert tonte sa vie et sa force que par la foi chrétienne. Pour les fidèles de l'A. T. elle n'avait guère d'autre objet que la délivrance des maux présents, Job 19, 10. Ps. 9, 18. 62, 5. 119, 126. L'Évangile au contraire dirige la pensée vers la rédemption dont l'accomplissement dans son ensemble et dans ses détails doit combler les vœux du chrétien, v. 1 Cor. 13, 12. 13. Mais outre les perspectives d'un avenir purement eschatologique, le fidèle espère en Celui qui ne l'abandonnera pas, qui ne laissera pas sa postérité mendier son pain, qui a les promesses de la vie présente et de la Yie à venir, et qui fait concourir toutes choses au bien de ceux qui l'aiment, Ps. 37, 25. 28. 1 Tim. 4, 8. Rom. 8, 27.

ESPRIT (Ordre du Saint-). Ordre de chevalerie français fondé le 31 déc. 1574 par Henri III, en souvenir de son élection au trône de Pologne et de son avènement au trône de France, qui avait eu lieu le jour de Pentecôte. Le nombre des chevaliers était fixé à 100, dont 8 ecclésiastiques. Pour en faire partie, il fallait être catholique. Les chevaliers devaient assister tous les jours à la messe et communier au moins deux fois l'an. Le roi en était le grand-maître. Les insignes étaient une croix portant l'image du Saint-Esprit, suspendue par un cordon bleu. Par l'initiative de l'abbé Desplaces, l'ordre institua 1701 une œuvre missionnaire pour la conversion des païens aux Indes, en Chine et en Afrique. En 1588 les chanoines du Saint-Etprit avaient fondé une congrég. pour renseignement. Supprimé en 1789, l'ordre fut rétabli par h Restauration et reçut même 1818-1830des subventions de l'État, mais il fut définitivement supprimé en 1830.

ESS (van) 1° Jean-Henri-Leander; né à War-bôurç 15 févr. 1772; entra chez les bénédictins de Neuinunster près Paderborn, fut ordonné prêtre 1796, et nommé curé de Cioster 1799.

Plus tard il étudia les langues orientales; nommé curé et prof, à Marbourg 1812, il démissionna 1822 pour se consacrer à ses travaux bibliques. 11847 à Affolderbach, Odenwald. 11 traduisit le N. T. avec son cousin Charles 1807; l'A. T., seul, 1822-1836; repassa la Bible entière avec Wetzer 1840. Il a publié en outre des éditions de la Vulgate 1822, des Septante 1824, et du N. T. grec 1827, ainsi que plus, écrits pour recommander la lecture de la Bible. Quoique prêtre il était membre de la Soc. bibl. de Ratis-bonne et agent de la Soc. britannique. Il a ainsi puissamment contribué aux succès des prêtres évangéliques, Booz, Lindl, Gossner, etc, — 2* Son cousin Charles, né 1770 à Warbourg, bénédictin 1788, puis prieur 1801 du couvent de Huysbourg, près Halberstadt, nommé curé et commissaire épiscopal à Magdebourg 1804, f 1824; s'était d'abord associé aux travaux bibliques de son cousin, mais effrayé par l'opposition de Rome, il recula, et il écrivit même 1817 contre la Réforme avec une certaine violence, ce qui n'empêcha pas son livre d'être brûlé à cause de quelques phrases encore trop bienveillantes pour le protestantisme.

ESSEENS, ou Esséniens, secte, classe, ou tendance juive, dont le nom s'explique de diverses manières. Les uns le font dériver du syriaque; il signifierait bon, pieux (Philon, De Wette); les autres lui donnent une étymologie chaldéenne qui rappellerait leurs aptitudes médicales. Leur origine est peu connue. On pense que pendant les guerres des syriens contre les juifs, des hommes pieux, pour se soustraire à la tyrannie des ennemis, se retirèrent momentanément dans les déserts et que, satisfaits de cette vie paisible et religieuse, ils ne voulurent plus l'abandonner, même quand les temps furent redevenus meilleurs. D'autres, éprouvant lé besoin de se retirer du monde, les rejoignirent dans leurs solitudes. C'est surtout dans les environs de la mer Morte qu'on les trouva d'abord, et dans les montagnes caverneuses du désert de Juda, mais ils s'étendirent peu à peu dans les contrées avoisinantes. s'occupant d'agriculture et de médecine. On en comptait environ 4000 lors de la venue de Jésus. La tempérance, le travail, l'obéissance à leurs supérieurs étaient les principaux caractères de l'association. Il fallait un long et sérieux noviciat avant d'être admis dans leurs rangs. Ils fuyaient les plaisirs des sens et renonçaient au mariage. Leur culte consistait en ablutions et sacrifices symboliques non sanglants; ils étaient hostiles aux sacrifices proprement dits et à l'ensemble des cérémonies du temple juif. L'esséisme n'était pas sans rapport avec les thérapeutes égyptiens; l'idée juive d'une sanctification lévitique de la vie avait été transformée par la philos, alexandrine. On a

aussi vu dans les esséens les successeurs des assidéens, et par conséquent une espèce de secte affiliée aux pharisiens. D'autres encore les comparent soit aux prophètes juifs, soit aux mages perses; ou bien l'on en fait des précurseurs du christianisme par une sorte de pénétration de l'élément païen dans la doctrine juive. Toutes ces hypothèses ont quelque chose de vrai, mais en réalité ils ont été, sous des formes diverses, la manifestation de ce besoin qu'éprouvent touj. certains hommes dans tous les temps et dans toutes les religions, de s'abstraire du monde et des choses qui passent, pour se consacrer entièrement à la contemplation et à la méditation des choses invisibles et éternelles. Juifs de naissance et d'éducation, ils cherchaient autre chose et mieux que ce qu'ils avaient appris et s'appli quaient à faire le bien.

ESTHONÏE, v. Livonie.

ESTO MIHi, v. Fêtes.

ËTATS. On distingue en termes d'école et en s'appuyant sur Phil. 2, 5-9. deux formes, conditions, ou états de J.-C., celui de son abaissement, humiliation (Kénôsis), et celui de sa gloire ou exaltation. Le premier ne comprend pas le fait de l'incarnation comme tel, car la Parole aurait pu se manifester en l'homme dans toute sa gloire, et d'ailleurs l'humanité de J.-C. subsiste encore dans le sein du Père; mais il consiste en ce que devenant homme il a pris la forme d'un serviteur, la forme de l'homme dans ses conditions actuelles de misère, telles que le péché les a faites. On distingue dans l'état d'abaissement quatre degrés: la naissance, la • vie laborieuse, la mort et la descente aux enfers. Cependant la théol. luthérienne range ce dernier point parmi les degrés de l'état d'exaltation, qui comprendrait ainsi: la descente aux enfers, la résurrection, l'ascension, la place à la droite du Père, et le retour pour juger les vivants et les morts. Dans l'un et l'autre de ces états il s'agit des deux natures: dans l'abaissement la nature humaine a été moins glorieuse qu'elle n'a été chez d'autres hommes et la majesté divine était voilée; dans le relèvement la nature humaine a reçu une récompense proportionnée k son dévouement, une consolation proportionnée à ses souffrances, une réponse à ses prières et à ses larmes, et la nature divine a reçu une réparation, une exaltation, une manifestation d'autant plus éclatante que sa majesté avait été plus éclipsée. Une autre question sur ce point a également préoccupé les théol. de l'Allemagne, surtout pendant la guerre de Trente ans. Le Christ dans son état d'abaissement sur la terre, a-t-ilfait usage de sa puissance divine? l'université de Tubingue a répondu oui; celle de Giessen, non. Voilà où l'on en vient quand on veut en savoir au delà de ce qui est écrit. V. Cryptiques.

ÉTHIOPIE (Égl. d'), v. Abyssins.

ÉTIENNE io pape 253-257. Orgueilleux et dominateur, il combattit les novatiens; il re* connut comme frères et fit réintégrer par un concile deux év. espagnols, Basilides et Martial, que Corneille son prédécesseur avait condamnés (lequel des deux était dans le vrai?). On agita sous son pontificat la validité du baptême donné par les hérétiques, et il rompit la communion avec les Égl. d'Afrique. La légende le fait f martyr sous Valérien 257.

2° Étienne II, 752. L'exarchat de Ravenne est menacé par les Lombards; la Grèce refuse au pape son secours et les processions ne servent de rien. Étienne s'adresse inutilement à Pépin, puis il se tourne vers l'hérétique, le briseur d'images, Constantin Copronyme. Ce pape ayant été élu, mais non consacré, quelques auteurs l'omettent (Douillet) ou le confondent avec son successeur, de sorte que les papes suivants du môme nom doivent être comptés avec un numéro inférieur.

3° Étienne III, ou II bis, 752-757. Menacé par Astolphe, roi des Lombards, il invoque l'assistance de Pépin qui l'aide de ses troupes, chasse les Lombards, lui fait rendre ce qui lui a été enlevé et lui cède solennellement, par document écrit, ces villes et provinces, comme possession propre du saint-siège. C'est le premier noyau des États du pape 754. Étienne reconnaissant vient en France sacrer Pépin à Saint-Denis, 28 juill. 754. La même année le j conc. de Constantinople condamne l'invocation des saints.

4<> Étienne IV, sicilien, 768, après une vacance de i3 mois. Il fit condamner dans un concile l'antipape Constantin, qui avait été élu par l'influence de son frère le duc Toto. Triste règne.

5° Étienne V ou IV, romain, vient en France sacrer Louis-le-Débonnaire. Élu 816, f 817.

6° Étienne VI, ou V, romain, 885-891, couronne Guido de Spolette, emp. d'Italie. Il soulagea le peuple pendant une cruelle famine.

7° Étienne VII, ou VI, 896. Il se prononce pour l'emp. Lambert, fils de Guido, qui a recouvré sa puissance, et lui témoigne une si humble déférence qu'il va jusqu'à faire exhumer son antiprédécesseur, le pape Formose. Il fait comparaître devant un concile ce cadavre revêtu des ornements pontificaux, l'accuse d'avoir usurpé le siège de Rome, lui fait couper par le bourreau la tête et les trois doigts avec lesquels il donnait la bénédiction, et fait jeter son corps dans le Tibre. Cette vengeance souleva le peuple. De la part du serviteur de Dieu, c'était trop se montrer le serviteur de l'empereur. Les Romains le jetèrent en prison, où il f étranglé, 897. Il n'avait régné que 14 mois.

80 Étienne VIII, ou VII, 122« pape, romain, de l'époque de la pornocratie, 929-931, insignifiant.

Étienne IX; allemand, parent de l'emp. Othon, élevé au pontificat, malgré les cardinaux, par la protection de Hugues, roi d'Italie, 939. t 942. Bafoué par le peuple, insulté et frappé au visage dans une émeute, il n'osait plus sortir de chez lui, mais il fit d'autant plus de politique étrangère.

iOo Étienne X, ou IX. Frédéric, ex-chancelier du saint-siège, abbé du Mont-Cassin, frère de Godefroy-Ie-Barbu, duc de Lorraine, fut élu pape en l'absence d'Hildebrand, mais confirmé par lui 1057, car il était dans le sens de son parti, hostile aux partis d'Italie. Il s'opposa au mariage des prêtres, f 20 mars 1058 pendant une absence d'Hildebrand, qu'il avaitenvoyé vers Agnès, veuve d'Henri III et tutrice d'Henri IV son fils.

— Parmi les autres personnages qui ont porté le nom d'Étienne, il faut noter:

lo Étienne de Bysance, grammairien du 5me siècle, auteur d'un Dictionn. d'histoire et de géographie.

2<> Étienne de Bellavilla, on de Borbone, dominicain à Lyon, qui prêcha contre les cathares à Valence et fut nommé inquisiteur, f 1261. Son livre Des 7 dons du Saint-Esprit, qu'on possède en mss. en anglais, en français et en espagnol, n?a été publié que par fragments; c'est une source intéressante pour l'hist. des cathares et des vaudois.

3° Étienne de Tigerne, ou Grandmont, 1073-1083, diacre de l'év. Milo de Bénévent, qui l'avait élevé, obtint de Grégoire VII l'autorisation de fonder un ordre à l'instar des moines calabrais. Quelques moines se réunirent autour de lui dans les environs de Limoges, f H24. Les augustins d'Ambazoc Muret prirent aussi de lui le Grandmontenses. L'ordre subsista jusqu'à la révolution, mais son histoire n'offre rien de particulier.

4® Étienne de Tournay, né 1135 à Orléans, abbé de Saint-Éverte, puft de Sainte-Geneviève à Paris, + 1203 év. de Tournay. Homme instruit, mais étroit, il ne vit dans la scolastique qu'un moyen d'alimenter l'esprit de discussion et de troubler les esprits. Ses Lettres et dise., publ. par Molinet 1679, font connaître l'esprit de son temps. Il a écrit une Summa de decretidont il ne reste que la préface.

80 Étienne Ide Hongrie, surnommé le Saint, fils de Geysa et de Sarolta. Né 983, il futd'abord nommé Waik, ou Voik, fut baptisé plus tard par Adalbert qui lui donna le nom d'Étienne; élevé par l'excellent Pappatès, il monta sur le trône 997. Il épousa Gisèle, fille d'Henri duc de Bavière et sœur d'Henri II. Son règne de 41 ans fut pour la Hongrie une époque de gloire et de bonheur. Il fit du christianisme la religion du pays, bannit quelques mécontents, fonda dans sa capitale de Gran un archevêché, qui vit naître en peu de temps dix évêchés et plusieurs monastères indépendants, et crut devoir envoyer l'abbé Astrich à Rome, pour demander à Sylvestre II sa bénédiction et sa reconnaissance. Le pape lui accorda tout ce qu'il demandait, et en outre le titre d'apôtre de Christ et le droit de faire porter devant lui une croix comme insignes de son apostolat. Il lui fit aussi don d'une couronne d'or, qui sert encore aujourd'hui pour le sacre des rois de Hongrie. Étienne fut couronné l'an 1000 ou 1001 dans une assemblée de ses évêques, sous la présidence du légat Veta, qui fut nommé archev. de Gran. L'Égl. fut sous son règne comblée de tant de faveurs, et le clergé de tant de privilèges, qu'on aurait de la peine à trouver ailleurs l'exemple d'un clergé qui ait été plus puissant; mais la réaction devait être d'autant plus terrible à la mort du roi. Onze ans d'anarchie et quarante ans de troubles et de persécutions firent expier à l'Église le bien-être temporel dont elle avait joui, toutefois sans pouvoir détruire le christianisme, qui avait poussé de trop profondes racines dans les mœurs. Étienne rédigea pour son peuple un code de lois, qui faisait encore il y a peu d'années la base de la constitution hongroise, et qu'il dédia à son fils Emmerich. jeune homme plein d'espérances, mais qui mourut avant son père (il a été canonisé). Les dernières années d'Étienne furent troublées par de violentes oppositions et même par des attentats contre sa vie, f 1038. La Hongrie le regarde comme son saint national.

6<> Étienne Martin, v. Stephan.

— Un Ordre de Saint-Étienne a été fondé 1562 par Cosme 1er de Médicis, pour combattre les Turcs et notamment les pirates de la Méditerranée, et pour travailler à la délivrance et au rachat des esclaves chrétiens. L'ordre était organisé sur le modèle des chevaliers de Malte et suivait la règle de saint Benoît. Le siège en était à Pise. Il y avait aussi à Florence un couvent de femmes du même ordre, consacré à l'Immaculée Conception. Les chevaliers contribuèrent à sauver Venise en 1684. En 1817 l'ordre a été réorganisé sur des bases plus conformes à l'esprit moderne. Le costume était blanc avec doublure rouge; le signe était une croix d'or sur émail, avec une couronne royale et des lys aux quatre angles.

Les Étienne, famille d'impi-imeurs.

C'est presque l'histoire d'une dynastie que celle de ces célèbres typographes, dont les noms vont de pair avec ceux desManuce, des Giunta, des Piantin et des Elzevier; tes historiens ne lui ont pas manqué, depuis Almeloveen, Mait-taire, Londres 1709; jusqu'à Renouard, Haag,

Didot, Reuss, etc. Le chef de ta famille 1° Henri-Étienne, ou plutôt Estienne, naquit à Paris 1470, et f 1520. C'est surtout depuis 1503 qu'il sa fit connaître par plusieurs éditions, et notamment par la publication des œuvres de Le Fèvre d'Étaples. Il laissa une veuve et 3 fils mineurs, dont deux, Robert et Charles, soutinrent glorieusement l'honneur de la maison. — 2° Robert, né à Paris 1503 (selon d'autres 1499), après de brillantes et laborieuses études de langues, fit son apprentissage typographique sous les auspices du second mari de sa mère remariée, Simon de Colines, graveur de caractères, qui avait repris la suite de l'imprimerie Étienne. Ses débuts furent un coup de maître et décidèrent de sa vie entière. Il fit paraître en 1523 une éd. du N. T. en latin, avec correction des passages altérés ou mal traduits. La Sorbonne y vit un acte de révolte plein d'hérésie et ne cessa, pendant 30 ans, de poursuivre de sa haine et de ses rancunes le jeune et savant critique, sans que celui reculât une seule fois devant les comparutions, interrogatoires et menaces auxquels il fut soumis. Il ne fallut rien moins que la protection énergique de François 1er, et plus tard celle, plus timide, d'Henri II, pour sauver du bûcher l'intrépide et consciencieux imprimeur, et ce n'est que lorsqu'il vit tout appui lui échapper, qu'il se décida à se retirer à Genève, nov. 1550, où il se rattacha à la Réforme, devint aini de Calvin et de Bèze, et reçut 4 déc. 1556 la bourgeoisie d'honneur, f 7 sept. 1559. Son érudition était immense; tout était savant autour de lui; femmes, enfants, ouvriers, hommes de service, tous parlaient latin. Il était en outre doué d'un sens critique naturel qui devint presque une passion et qui lui inspira de bonne heure des travaux remarquables. Après avoir aidé quelque temps son beau-père, il s'établit pour son compte en 1526, et publia de nombreuses éditions de l'A. et du N. T., qui lui valurent d'être surnommé le prince des typographes, et le droit de signer typographe royal. Ses éditions hébr. portent les dates de 1539 et 1543. Ses éditions du N. T. grec, correctes, caractères modèles, format commode, eurent un succès immense. Outre l'éd. de 1523, il en publia de nouvelles en 1546, 1549, 1550 et 1551, touj. au risque d'être persécuté, et plus d'une fois sa maison fut envahie par des visites domiciliaires. Il publia la Bible en latin 1528, d'après la Vulgate, mais collationnée et corrigée; puis en 1532, et une 3me éd. fol. en 1540, avec 18 gravures sur bois, où pour la lre fois il fit suivre son nom de la qualification de typographe royal. Elle était ornée d'annotations choisies d'après les meilleurs interprètes, entre autres de Valable, ce qui ranima contre Étienne l'ardeur des t forcenés sorbonistes. » Les éd. de

Genève sont moins belles; c'est dans son N. T. de 1551 qu'il introduisit pour la 1" fois (texte d'Érasme et Vulgate) la division en versets chiffrés, dont l'idée lui vint, dit-on, pendant qu'il se rendait à cheval de Paris à Genève. Il fit la même chose en 1555 et 1556 pour ses éd. de la Bible. Il tenait tellement à la correction de ses livres, qu'il en exposait publiquement les épreuves en offrant une récompense à tous ceux qui lui signaleraient des fautes. Les services qu'il a rendus aux belles-lettres sont inappréciables; on lui doit une foule de bons livres élémentaires; la publication de huit ouvrages grecs considérables, tels que Eusèbe, Denys d'Halicar-nasse, Dion Cassius, etc.; un Dictionn. latin -français, et surtout son Thésaurus ling. lalinœ, chacun de ces ouvrages supposant une quantité de travail et de recherches tout autre que ce qu'il faudrait aujourd'hui. Le P. Simon le range parmi les meilleurs critiques. L'histoire a fait justice de la calomnie du bénédictin Génébrard qui l'accusait d'avoir volé les types et caractères royaux en se rendant à Genève; en fait personne ne les lui a jamais réclamés, et sa loyauté, son désintéressement l'eussent mis au-dessus d'une pareille imputation. Ce n'est que 60 ans plus tard que la question de ces caractères fut soulevée, et Louis XUI les fit racheter en 1619 pour 3000 livres. Robert fut marié deux fois. Il eut de sa première femme Perrette Bade, fille du savant Jodocus Badius et sœur de l'imprimeur Conrad Badius, 9 enfants; 1° Henri, qui suit; 2° Robert né 1530, qui abjura; 3° Charles, qui abjura aussi, mais revint à la foi évangélique; f à Genève 1570; 4<> François, né vers 1540, étudia à Strasbourg et à Lausanne, travailla à Genève, chez son père, monta une imprimerie en 1562, publia le traité d'Hubert Languet contre les tyrans, et ne fut longtemps qu'un protestant douteux; 5° Jeanne, qui épousa Jean Anastase; 6° Catherine, née 5 mars 1541, femme distinguée qui épousa Étienne Anastase; 7° Jean, né 23 juin 1543; 8° Marie, née 31 jauv. 1544; 9° Simon, 22 août 1546. Perrette étant morte en 1547, il épousa en déc. 1550 Marguerite Des Champs, ou Du Chemin, déjà veuve de deux maris. Sa marque d'imprimeur était un olivier entouré d'un serpent, avec la devise: Noli altum sapere9 Rom. 11, 20.

3o Henri, fils aîné de Robert, né Paris 1528, plus distingué encore que son père, passionna de bonne heure pour la littérature grecque, fut chargé à 17 ans de collationner les mss. de Denys d'Halicarnasse, rendit de grands services à l'imprimerie, et commença à 19 ans une série de voyages en Italie, Angleterre, Hollande, apprenant les langues, visitant les biblioth., explorant les mss., s'entretenant avec les savants, bien accueilli par Édouard VI. En 1560 il se rend avec son père à Genève; en 1554 il est à Paris, puis chez Manuce à Venise, puis à Rome. En 1555, de retour à Genève, il épouse Marguerite Pillot, fille de la seconde femme de son père. En 1557 il prend le titre de typographe, ce qtii suppose soit une association avec son père, soit l'acquisition d'une imprimerie indépendante, ce que rendrait probable le nom qu'il se donna de typographus parisiensis. Mais en 1558 ses affaires n'étaient pas brillantes; il accepta une pension des riches Fugger d'Augsbourg et leur témoigna sa reconnaissance en ^'intitulant IUustris viri Huldrici Fuggeri typographus. À la mort de son père il hérita de son imprimerie, comme ses frères devenus catholiques avaient été mis en possession de l'ancienne maison de Paris. Il était malheureusement presque toujours eïi voyage, ce qui était préjudiciable à ses intérêts. Il réussit aussi à se mettre mal avec les autorités de Genève par quelques écrits humoristiques, satiriques et plus ou moins licencieux, notamment par son Introd. au traité de la conformité des merveilles anciennes avec les modernes, 1566, et par ses Deux dialogues (ta notiveau langage français italianisé, 1578. Il fut excommunié plusieurs fois, une fois même incarcéré, mais Henri III le protégeait; il le fît élargir, lui fit bon accueil à Paris 1578, lui octroya pour son livre sur la Précellence de la langue française un mandat de 3000 livres, qui ne lui fut pas payé, puis une pension de 300 livres qui le fut très mal. A son retour à Genève 1580 il fut excommunié et évincé du Conseil des CC dont il faisait partie depuis 1567. La fin de sa vie fut encore plus agitée; censuré de nouveau en 1581, il est à Paris en 1585, il se décide en 1587 à réorganiser son imprimerie, en 1590 il est à Bâle, en 1592 prof, de grec à Lausanne, en 1593 à Heidelberg, en 1597 chez son gendre Casaubon à Montpellier. En sortant de là il visita encore plus, villes, puis tomba malade à Lyon, se fit porter à l'hôpital et y f 1598. Il avait été marié 3 fois. De sa Ire femme il eut 4 enfants. Henri, Judith, Eèther, Isaac; Judith seule lui survécut, et épousa le libraire-imprimeur François-le-Preux. Sa seconde femme, Barbe de Wille, d'origine écossaise, qu'il épousa 15 mars 1565 ou 1566, lui donna 8 enfants, entre autres Florence qui épousa Casaubon et lui survécut, après lui avoir donné 20 enfants; et Paul qui continua l'illustration de la maison, mais déjà avec moins d'éclat; on ne compte que 27 ouvrages sortis de ses presses. Sa position politique à Genève fW compromise et il se retira à Paris, vers 1608, où plusieurs de ses enfants abjurèrent. La 3®e fettme d'Henri, Abigaïl Pouppart, lui dôtma 2 fils, David et Jacques. Quant à ses publications, elles sont aussi correctes, mais moins belles que celles de Robert. On peut les classer sofu8 3 chefs: Ses premières éditions, d'après les mss.; ainsi les Odes d'Anacréon, Athéna-gore, Théophraste, Diodore de Sicile, plusieurs poètes grecs, quelques pères, l'épltre t Diog-nète, etc. Ses éditions annotées, Horace, Athé-nagore, les tragédies d'Eschyle, Xénophon avec trad. lat., Virgile, le N. T. grec, etc. Enfin ses ouvrages originaux et ses traductions annotées, au nombre de plus de 54, tant en vers qu'en prose, sur des sujets littéraires, critiques, médicaux, histor., philologiques et religieux. Le plus remarquable est son Thésaurus de la langue grecque, 5 vol. f°, qui reste encore un chef-d'œuvre et que les Didot ont réimprimé 1831 à 1865; les notes sur Sophocle et sur Euripide; sa trad. d'Anacréon en vers latins, très estimée; des Psaumes de David en vers grecs et en vers latins. On ne sait ce qu'on doit le plus admirer, de la prodigieuse érudition de cet homme, ou de son étonnante activité. On regrette d'aïltant plus que son caractère inquiet l'ait souvent brouillé avec ses amis naturels, et qu'ayant une famille nombreuse qui l'aimait, il soit mort solitaire dans un hôpital étranger (Le Discours merveilleux sur la vie et les déportements de Cath. de Médicis, 1575, qui a eu plusieurs éditions, lui est généralement attribué, quoique d'autres l'attribuent à Th. de Bèze).

4<> Charles, fr. de Robert, resta catholique. Après avoir été précepteur chez l'ambassadeur Baïf, il s'établit imprimeur 1551, fit de mauvaises affaires, et f 1564. La maison passa aux mains de son neveu Robert.

ÉTOLE (stola), pièce de vêtement, tombant à droite et à gauche de l'épaule jusqu'à terre, ou se croisant sur la poitrine, que le prêtre met pour la célébration de certains offices, baptêmes, mariages, enterrements, etc. De là le nom de droit de l'étole donné au casuel que le prêtre perçoit lorsqu'il doit revêtir cet ornement.

EUCHARISTIE. Ce mot, dérivé du grec, signifie actions de grâces, remerciement. Il s'employa d'abord pour désigner les prières qui se faisaient avant et après la communion; il a fini par s'appliquer à la cérémonie elle-même dans son ensemble, et quelques-uns vont jusqu'à donner ce nom aux éléments du repas sacré. V. sur la Question eucharistique l'ouvrage capital de L. Durand, aussi savant que logique et spirituel, Genève et Paris 1883.

EUCHARIUS, ou Euchaire, aurait été d'après la légende un des 70 disciples; envoyé par Pierre dans les Gaules, avec Valère et Materne, il y aurait prêché l'Évangile et serait devenu év. de Trêves.

EUCHÈRE, ou Eucherio d'une famille gallo-romaine considérable, converti de bonne heure, ainsi que son épouse Galla et ses deut fils, se retira dans l'île de Lérins pour s'y préparer au ministère et à l'évangélisation. Il y composa un Éloge de la Solitude, et un livre sur le Mépris du monde, qui ont encore de la valeur; trad. par Argauld d'Andilly. Appelé 434 à l'évêché de Lyon, il lui consacra ses forces et le reste de sa vie. Il assista 441 au concile d'Orange, f 460. Un des meilleurs écrivains du 5me siècle. On a aussi de lui une Hist. des martyrs de la légion thébaine, et quelques livres ascétiques. Ses deux fils, formés au ministère à Lérins, continuèrent son œuvre avec zèle et succès. — 2° Év. d'Orléans 721-743.

EUCIIITES, surnom des enthousiastes messa-liens.

EUCHOLOGE, rituel de l'Égl. grecque, renfermant ordinairement les liturgies de la messe de Chrysostôme et de Basile, le formulaire de la messe pour les dimanches de carême et la consécration des éléments, le formulaire des divers sacrements et quelques prières.

EUDÉMONISME, tout système qui pose comme dernier but du travail et des efforts de l'homme, la jouissance, spirituelle ou morale aussi bien que matérielle. L'eudémonisme sert de base aux systèmes d'Aristippe et d'Épicure, ainsi qu'au matérialisme moderne. Kant lui a opposé la théorie morale du bien qui doit se faire pour l'amour même du bien, et le christianisme montre dans l'amour de Dieu le mobile de tout bien comme la garantie de tout bonheur.

EUDISTES, prêtres de la mission, congrég. religieuse fondée à Gaen 1644 par Eudes, prêtre de l'Oratoire, né à Mézeray 1601, frère de l'historien Mézeray. L'institution avait pour but de former des ecclésiastiques et des missionnaires. Connu aussi sous le nom de congrég. de Jésus et de Marie, l'ordre fut restauré en 1826; il n'a jamais eu grande importance; il a encore une maison à Rennes.

EUDO de Stella, v. Éon.

EUDOXE flotta longtemps entre les semi-ariens et les ariens purs. Ev. de Germanicie, Syrie, 341, il s'empara 357 du siège d'Antioche vacant par la mort de Léontius, et se mit avec Aëtius et Eunomiu* à la tête du parti arien. Banni par le conc. d'Ancyre 358 il ne tarda pas à revenir. Le conc. semi-arien de Séleucie 359 le destitua de nouveau, mais l'emp. le protégea. Enfin l'arianisme l'emporta au conc. de Constantinople, et Eudoxe fut nommé patriarche de cette Église, 360. Il baptisa et instruisit l'emp. Valens dans l'arianisme.

EUGENDE, ou Augende, abbé du couvent de Condat, dans le Jura, au 5™ siècle; simple et sobre, favorisa l'œuvre de Romain et de Lu-picin 440. Il n'était pas prêtre, + vers 510. Dates incertaines.

EUC

EUGÈNE lo pape 654-657, élu du vivant de Martin 1er, déposé et exilé par l'empereur. Il fit de vains efforts pour ramener les monothé-lètes.

2o Eugène II. 824-827, travailla sous Louis-le-Débonnaire et sous Lothaire à augmenter le pouvoir des papes, mais sans beaucoup de succès. Lothaire se rend à Rome et fait plusieurs ordonnances; il fixe entre autres le serment que le pape, le clergé et le peuple devront prêter; le pape nouvellement élu, avec le consentement des empereurs, ne sera consacré qu'après avoir prêté ce serment en présence des députés impériaux et du peuple. Eugène tint un concile à Rome 826 pour la réforme du clergé. Le conc. de Paris 825 s'était prononcé contre le culte des images.

3o Eugène III, 1145-1153; d'abord moine a Clairvaux. Il se retire en France, craignant les dangers que peut lui susciter à Rome l'opinion générale, favorable à Arnold de Bresce. Il tient à Paris un conc. pour examiner les doctrines de Gilbert de la Porée. Il donne le signai d'une seconde croisade, et Bernard de Clairvaux parcourt la France et l'Allemagne dans ce but; cela rend quelque popularité au pape, qui peut retourner à Rome. Bernard lui conseille de se contenter de l'apostolat sans la domination: Car, lui dit-il, si tu les veux tenir tous les deux, tu les perdras tous les deux; sage conseil qui ne fut pas suivi.

4o Eugène IV, de Venise, neveu de Grégoire XII, 1431-1447. Comme il s'aperçoit que le conc. de Bâle travaille sérieusement à la réforme de l'Église, il le dissout pour le transporter à Bologne, sous son influence. Mais le concile résiste et continue ses travaux; il affirme qu'un conc. écuménique tient sa puissance im* médiatement de Christ, et que le pape même doit s'y soumettre. La Pragmatique Sanction se fait à Bourges dans le même sens. Le pape cède 1434. Mais bientôt, appuyé par les grecs avec lesquels il a contracté une union peu durable, il convoque un nouveau conc. à Ferrare, puis à Florence 1438-1439. Les deux conciles simultanés prétendent chacun représenter l'Église entière. Celui de Bâle dépose Eugène et le remplace par Félix V; Eugène compromet encore sa cause par des abus de pouvoir et par ses intrigues politiques. Il a contre lui successivement les hussites, les Romains et le roi d'Aragon. Il finit cependant par se faire reconnaître, et f 1447, en même temps que Félix abdique. Le purgatoire lui doit son existence légale, 1439.

5o Év. de Carthage 480, après une vacance de 20 ans. Il fut persécuté par le roi vandale arien Huneric, à cause de son attachement à la foi; rappelé par Gundamond 484, il fut de nouveau banni par Thrasimond 496, et f 505 dans an monastère d'Albi, Languedoc. Il reste de lui quelques fragments: une Exposition de la foi, une Exhort. aux fidèles de Carthage, une Apologétique, une Réfut. de Tarianisme, etc.

302

EUG

6° Archev. de Tolède, 647-658. Moine, il dut son élévation au roi Chindaswinth, et se distingua par son zèle pour la discipline et par son activité littéraire; il retoucha le poème de Dra-conce sur les 6 jours de la création et écrivit un livre sur la Trinité.

EUGÉNIE, sainte, qui doit avoir souffert le martyre à Rome sous Valérien, 258. Les latins la fêtent le 25, les grecs le 21 décembre.

EUGIPPE, ou Eugype, disciple et biographe de Saint-Séverin, était auprès de lui quand il mourut au couvent Faviana 482, et accompagna ses restes en Italie r il les déposa au Cas-trum Lucullanum et y construisit un couvent dont il fut le second abbé, après la mort du premier, Marcien. Sa règle ne s'éloignait pas beaucoup de celle d'Augustin. Outre la vie de Séverin il a écrit un Thésaurus, traité dédié à la jeune Proba, de Rome, où il enseigne la doctrine d'Augustin.

EULALIE, de Merida, Estramadure; elle chercha le martyre sousDioclétien. D'une piété exaltée, à l'âge de 12 ans elle quitta la maison paternelle pour aller braver les juges et cracher sur les idoles. Après de vains efforts pour la ramener, on la livra au supplice 308. C'est probablement la môme qu'Eulalie de Barcelone.

EULALIUS, élu pape à la mort de Sozirne, par un parti à la tête duquel se trouvait Sym-maque, le préfet de Rome; le parti contraire nomma Boniface I*r. Honorius ayant été choisi comme arbitre, et Eulalius refusant de se soumettre aux conditions de l'arbitrage, il fut chassé de la ville comme un intrus, et mourut év. de Nepe.

EULOGIUS !• V. Frumentius. — 2* Patr. d'Alexandrie 581 -608,Grégoire 1er ie loue comme un défenseur éclairé de la doctrine chrétienne. — 3° De Cordoue, archev. de Tolède, exécuté par les Maures 859. On a de lui un Memoriale Sanc-torum.

EUNOMIUS fut avec Aétius un des chefs les plus décidés du parti arien. Né à Dacora, Cap-padoce, disciple et aide d'APtius à Alexandrie, puis év. de Cycique, il fut destitué à cause de sa doctrine 360, et se lixa à Constantinople sous Julien. Banni de nouveau, puis rappelé, il fut définitivement banni par Théodose 383, et f 396 dans son pays. Ses deux Apologies, de 36j et 379, sont surtout connues par les réponses de Basile et de Grégoire, ainsi que son Exposé de la foi. Condamnés comme hérétiques par deux conc. généraux, ses sectateurs se retirèrent de la communion de l'Église; au lieu de baptiser au nom de la Trinité, ils le faisaient sur la mort de Christ.

EUPHÉMIE, souffrit le martyre à Chalcé-doine sous Dioctétien 305. Dans l'égl. qui lui fut consacrée se réunit le concile de Chalcédoine. Paulin de Nola et Fortunatus l'ont chantée.

EUPHÉMITES, v. Messaliens.

EUPHRASIE, religieuse de la Thébaïde, f vers 410. Elle était fille d'Antigone, gouverneur de la Lycie et parent de Théodose l'An -cien.

EUPHROSYNE, sainte du siècle. Pour échapper à un mariage détesté, elle revêtit des habits d'homme et entra dans un couvent sous le nom de Smaragdas.

EUSÈBE (pieux) lo pape, élu et f 310. D'après une épitaphe incertaine, il aurait vu se renouveler les anciennes disputes sur la conduite à tenir envers les tombés, et Maxence l'aurait pour cela relégué en Sicile.

2<> Eus. de Dorylée, v. Eutyches.

3° év. de Laodicée, Syrie. Comme simple diacre à Alexandrie, il s'était distingué par sa bonté et son dévouement, pendant la persécution valérienne 257, pendant l'épidémie qui éclata sous Gallus, et pendant l^guerre civile de 263. En 264 il représenta son évêque, Denys, au concile d'Antioche. Sa personnalité fut tellement appréciée qu'il fut appelé à l'évêché de Laodicée, où il f 269.

4° Eusèbe, év. de Vercelli, ou Verceil, né en Sardaigne et baptisé par le pape Eugène, 311. Il était simple lecteur à Rome, quand il fut appelé à l'évêché de Vercelli. D'accord avec Lucifer de Cagliari, et à l'instigation de Libère, il demanda à l'emp. Constance d'en finir avec les difficultés ariennes, et il dut naturellement prendre part aux discussions du synode de Milan 355. Ayant refusé d'en reconnaître les résolutions et de condamner Athanase, il fut exilé à Scythopolis et traité durement. Remis en liberté par Julien, il se rendit à Alexandrie auprès d'Athanase. Ses efforts pour mettre un terme au schisme de Mélèce à Antioche furent rendus inutiles par le zèle irréfléchi de Lucifer, et il rentra dans son diocèse où il continua de combattre l'arianisme, Le premier il essaya de soumettre ses prêtres à la vie commune des cénobites, et il passe avec saint Augustin pour le fondateur de l'institution des chanoines. Ses écrits contre l'arianisme et le récit de ses souffrances ont été reproduits en partie dans le recueil de Galland. Un mss. des Évang. conserve dans la cathédrale de Verceil, lui est attribué, f 370 tué par les ariens.

qo Eusèbe de Nicomédie. D'une famille noble et jouissant de la faveur impériale, il atteignit le but de son ambition en obtenant de changer son évêché de Béryte contre celui de Nicomé-die, puis contre le siège de Constantinople, quand la famille impér. s'y fut fixée. Ami d'enfance d'Arius, il ne cessa de le protéger et se fit le champion énergique de ses idées. Il crut malgré cela pouvoir signer le symbole de Nicée, mais non les anathèmes contre son ami. Exilé dans les Gaules il fut rappelé au bout de quelques mois par Constance, travailla k la ruine d'Athanase et à la réintégration d'Arius, et obtint au conc. d'Antioche 341 la reconnaissance formelle du semi-arianisme. Après sa mort Pév. Paul essaya de remonter sur son siège à Constantinople, mais les eusébiens l'envoyèrent dans les déserts de la Tauride et, usant de violence, mirent à sa place Macédonius, 341.

6° Eusèbe de Césarée, le théologien le plus savant de son siècle. Né vers 270 à Césarée en Palestine, il étudia à Jérusalem, k Antioche et k Césarée. Il eut plusieurs maîtres, parmi lesquels on nomme Melétius et Dorothée. Après de fortes études, il fut ordonné prêtre k Césarée et y ouvrit une école, k l'imitation de Pamphile, pour expliquer les saintes Écritures. Il s'était lié fort jeune encore avec Pamphile, dans la bibliothèque duquel il puisait largement; c'est en grande partie fprftce k lui qu'il connut les auteurs innombrables dont il nous a conservé de si précieux fragments, et c'est en témoignage de sa reconnaissance qu'il adopta le surnom de Pamphile. Lors de la persécution de Maximin, Pamphile fut arrêté 307, et subit le martyre 309; Eusèbe fut arrêté aussi peu après et envoyé en exil. C'est alors qu'il visita les solitaires de l'Égypte et de la Thèbaïde. Il /ut accusé au conc. de Tyr, d'avoir pendant ce temps abjuré le christianisme; mais tous les écrivains, sauf un, rejettent cette accusation. Devenu libre k l'avènement de Constantin, il fut nommé év. de Césarée 315. Jouissant de la confiance entière de l'empereur, il refusa cependant plusieurs dignités, entre autres celle d'év. d'Antioche. En 325 il présida, k la droite de Constantin, le premier conc. écuménique, celui de Nicée, où il exerça une grattde influence. Arius et ses partisans furent défaits; mais Eusèbe penchait lui-même vers I'arianisme, et en 330, au conc. d'Antioche, il réussit à faire exiler Eustathe qui le premier avait écrit contre Arius: puis en 336 il fit rappeler Arius et exiler Athanase. En 337 Constantin mourut, et Eusèbe prononça son oraison funèbre, f 340. — Il a laissé de nombreux écrits; savant, consciencieux, impartial, ayant beaucoup voyagé, ayant k sa disposition une foule de matériaux, ses ouvrages sont d'un prix inestimable pour presque toutes les branches de la théologie. Il écrivit en grec et a été traduit en latin, et en partie en français. Ses principaux ouvrages sont sa Préparation et sa Démonstration évangéliqu»; Vie de Constantin;

EUS

Panégyrique de Constantin-le-Grand; un livre sur la Pâque; la Vie de Pamphile; VOnomattir 9on; des livres de Dogmatique; des Sermons, des Traités, des Lettres; puis sa Chronique qui va du commencement du monde à la 20®« année du règne de Constantin; cet ouvrage, dont l'original est perdu, a été trad. par Jérôme, mais trop librement; on en a trouvé en 1784 une bonne trad. arménienne; — enfin et surtout son Histoire ecclésiastique, en 10 livres. Mentionnons encore une Concordance des saintes Écritures, en 10 colonnes, sous le nom de Ca-nones. L'Apologie d'Origène qu'on lui a attribuée n'est pas de lui, mais de Pamphile. H.-B.

7° Eusèbe d'Émèse, né à Édesse vers la fin du 3me siècle, étudia sous Eus. de Césarée et sous Patrophile de Scythopolis, puis k Alexandrie et à Antioche. Il refusa le patriarcat d'A-lexandrie qui lui fut offert après le bannissement d'Athanase et devint év. d'Emèse dans le Liban. Favori de Constance, il l'accompagna dans plus, de ses campagnes et f 359. De ses nombreux écrits il ne reste que 3 discours et quelques fragments, Il était semi-arien. Il combattit l'exégèse allégorique d'Origène et se rattacha plus tard à l'interprétation historique de l'école d'Antioche.

8o Eusèbe d'Alexandrie. On connaît sous ce nom 21 homélies, qui datent du 5°* ou du 6** siècle, et qui ont été publ. par Philo et Mai. Dans quelques-unes le discours prend la forme d'une réponse, le plus souvent à un Alexandre. L'auteur est inconnu; selon Thilo ce serait un des Longs frères, q. v., ou un prêtre de la cour de Justinien.

9o Eusèbe, év. de Samosate, sur l'Euphrate, s'opposa énergiquement aux mesures de violence de Constance et de Valens en faveur de I'arianisme, et il fut toujours l'intrépide champion de la foi orthodoxe. Il parcourut la Syrie, déguisé en soldat, pour consacrer des prêtres évangéliques. Il travailla à faire nommer Basile év. de C&arée, il prit part aux démarches tentées 372 et 373 pour faire prévaloir en Orient, avec l'appui de l'Occident, l'autorité des décrets de Nicée. Il vécut en exil 373 à 378. Chargé 378 par le conc. d'Antioche, de réorganiser les diocèses de Syrie, il f le 21 juin 379, tué par une pierre que lui lança une furieuse arienne.

10o Eusèbe, archev. de Thessalonique, vers 600, combattit les monophysites et écrivit 10 livres contre les aphtarthodocètes; Photius eu parle avec éloge.

Ho surnommé Bruno, év. d'Anjou vers 1047, f 1081. Il fut le principal adhérent et défenseur de Bérenger de Tours jusqu'en 1062. Plus taiti il se sépara de lui; effrayé peut-être par la grande foule des contradicteurs, refroidi peut-être aussi par l'attitude même de Bérenger. Il aurait voulu, comme il l'écrivit à Bérenger 1063-1066, qu'au lieu de discuter sur le comment et le pourquoi de l'eucharistie, on s'en tint simplement aux paroles de l'institution.

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EUSTACHE, général romain, converti par une apparition merveilleuse, s'appelait Placide avant son baptême. Son histoire est pleine de légendes. Il souffrit le martyre sous Adrien, vers 130, ainsi que sa femme et ses 2 fils. Les égl. cathol. d'Aleraanie en font un des 14 saints gardiens, ou protecteurs. Ses Actes ont été publ. en grec par Combelle 1660.

EUSTASE, abbé de Luxeuil au 7 me siècle, nommé avec Virgile, ou Agil, parmi les disciples de Colomban, comme ayant évangélisé la Bavière; tout ce qu'on en raconte est d'origine postérieure.

EUSTATHE lo cappadocien, év. de Sébaste, Arménie, vers 350. f 380. Il introduisit dans son diocèse le moi&chisme et chercha à donner à toute la vie religieuse une direction monastique. Ses tendances hiérarchiques le brouillèrent avec son ami A'érius. Il manqua de fermeté dans les controverses ariennes. On donna le nom d'eustathiens à ses disciples, en petit nombre, qui voulurent réaliser ses principes ascétiques. — 2° Év. de Bérèe, puis d'Antioche 323. Né vers la fin du 3"* siècle; un des premiers qui combattirent Arius; exilé en Thrace vers 337 sous l'accusation de sabellianisme. Ses adhérents refusèrent de recevoir des év. ariens, et formèrent jusqu'au 5rae siècle des égl. indépendantes. On a de lui un Traité sur la Py thonisse, Lyon, 1629. — 3<> Eustathe de Constantinople, né dans cette ville au commencement du 12m« siècle; entra au couvent de Saint-Florus, et mérita par son érudition tous les honneurs civils et ecclésiastiques. Maître des orateurs, chargé d'expliquer au peuple les livres saints, il écrivit en outre de nombreux ouvrages, un comment, sur Homère, un autre sur Pindare. des Remarques sur Denys le Périégète, etc. Appelé à l'évêché de Myra, Lycie, 1174, il fut ensuite nommé par l'emp. à celui de Thessaloni-que. Lors de l'invasion des Normands sous Guillaume de Sicile 1185, il intervint avec succès en faveur de sa ville. Il maintint énergique-ment contre Manuel 1180 la dignité de ses fonctions, et combattit le relâchement des mœurs des couvents. On a de lui un Traité sur l'hypocrisie et des Considér. sur le monachisme, qui jettent une vive lumière sur l'état religieux du pays à l'époque des Comnène.

EUSTOCHE, fille de Paula. Elle accompagna sa mère en Égypte et en Palestine, lorsque celle-ci suivit saint Jérôme qui avait demeuré chez elles à Rome, et elles s'établirent à Beth-léhem où Paula, de sa fortune particulière, fonda 4 couvents dont elles prirent la direction.

Elle échappa à grand'peine à la mort, quand les pélagiens détruisirent son couvent, f 419. Jérôme la mentionne plusieurs fois avec éloge dans ses Lettres.

EUTHALIUS, év. de Sulca vers 450. On lui doit la division des Actes et des Épîtres de Paul en stiques, et les accents. Le mss. de Clermont est ponctué d'après son système.

EUTHARIUS, ou Euthaire, lo év. de Lau-rencum vers 286, qui doit avoir prêché l'Évang. à Fabiana (Vienne); 2° év. de Pannonie, assista au conc. de Sardique 347. 3° chambellan impérial, nommé précepteur de Julien.

EUTHYME lo précepteur de saint Saba, fonda au 5me siècle un des premiers ermitages des environs de Jérusalem; 2o un des quatre grands Fr. q.v. 3o Euth.Zigadenus, ou Zigabenus, moine d'un couvent près de Constantinople. A la demande d'Alexis, il écrivit une hist. complète de toutes les hérésies, depuis Simon le magicien jusqu'au mahométisme, avec réfutations tirées des pères. Son Comment, sur les 4 Évang., publié par Matthaei 1792 a plus de valeur; celui sur les Psaumes 1763 en a moins et ne tient pas assez compte des textes.

EUTYCHÈS. ou Eutyche, prêtre et archimandrite d'un couvent grec près de Constantinople, jouissait d'une très grande considération. Comme Dalmatius il quitta sa cellule pour venir défendre la foi; il accusa Nestorius et l'école d'Antioche qui distinguaient en Christ 2 personnes et 2 natures. Mais il tomba lui-même dans l'excès contraire; il ne voyait en Christ deux natures que dans un sens abstrait, c.-à-d. qu'il les niait. Il n'admettait en Dieu fait chair qu'une seule nature, et contestait que le corps de Christ fût semblable à celui des autres hommes. Théodoret le combattit dans son Éra-nistès,et répondit avec beaucoup de modération à Dioscure qui lui reprochait de partager le Seigneur en deux fils de Dieu. Eusèbe de Do-rylée le dénonça au conc. de Constantinople, présidé par le patr. Flavien, qui l'excommunia. Par 3 fois le conc. l'avait invité à comparaître; il s'y décida enfin, mais accompagné de soldats et de moines, sous la protection d'un licteur que l'emp. lui avait donné pour le garder. Après avoir répondu longtemps: Je confesse Christ comme mon Dieu, sans me permettre de vouloir comprendre sa nature, il déclara qu'il admettait 2 natures avant l'incarnation, mais une seule après. Il fut condamné comme complice de Valentin et d'Apollinaire. Eutvchès, appuyé par Chrysapius et d'autres personnages influents de la cour, demanda la revision de la sentence pour défaut de forme. Il obtint gain de cause au Synode des brigands 449, mais fut de nouveau et définitivement condamné au conc. de Chalcédoine 451. Léon-le-Grand, dans

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une lettre très sage à Flavien, approuva les actes du synode. Banni, Eutychès mourut peu de temps après, Âgé de 75 ans. Ses adhérents, nommés eutycheens, ou monophysites, se multiplièrent après sa mort, mais forent aussi persécutés.

EUTYCHIEN io le 27®e év. de Rome, 274-283; martyr, dit-on. Deux décrétales qu'on lui prête sont inauthentiques. 2° moine novatien, dont on raconte des miracles.

EUTYCHIUS, né 876 à Fostat; patriarche des melchites à Alexandrie 933, f 940. Il a écrit en arabe une chronique de la création; publ. 1658 par Pococke.

ÉVAGRIUS io Ponticus, né en Ibérie sur les bords de la mer Noire, archidiacre à Constantinople sous Grégoire de Naziance, qu'il accompagna 385 à Jérusalem. Partisan d'Origène, ses écrits n'ont obtenu qu'un succès partiel: publ. par Galland, Bibl. Patr. — 2° Scholasticus, historien ecclésiastique, ne 537 à Épiphania. Juriste à Antioche, il était lié avec l'év. Grégoire, qu'il défendit à Constantinople. Son hist. de de l'Égl. 431-594 est une source sûre d'informations. Ses jugements sur les hérétiques sont à la fois exacts et modérés. En revanche il admet tous les miracles des moines comme authentiq. Publ. par Robert Étienne, Paris, 1544, etc.

ÉVANGÉLIAIRE, ou Évangèlistaire, livre d'église qui renferme les fragments (péricopes) destinés à être lus au culte public. Dans l'Egl. grecque c'est la simple indication de ces fragments, avec les notes liturgiques nécessaires.

ÉVANGÉLISTES (Les 4). Ils ont été représentés dans les premiers temps sous la forme de 4 volumes roulés, avec la personne de Christ pla cée au milieu d'eux; puis sous la forme de 4 fleuves descendan t d'une montagne, qui est elle-même désignée par le monogramme du Christ. Plus tard enfin on leur donna pour symboles les 4 animaux de l'Apoc. 4, 7, Ez. i, 5, mais sans être d'accord sur la désignation spéciale de chacun. L'opinion de Jérôme a fini par prévaloir, qui fait de l'homme Matthieu, parce que son livre commence par une généalogie; du lion, Marc, la voix qui crie dans le désert; du bœuf, Luc, à cause du sacrifice; et de l'aigle, Jean, parce qu'il plane.

ÉVANGILE éternel, v. Joachim de Flores.

ÉVARISTE d'Antioche, 5e év. de Rome, 101-109 d'après Eusèbe, 102 à 121 d'après Baronius; donc complètement inconnu. On le fait grec, mais fils d'un juif; il doit avoir divisé Rome en paroisses; deux lettres lui sont attribuées par le faux Isidore, vénéré comme martyr. Quelques-uns disent que c'est sous lui qu'arriva la persécution de Trajan.

ÉVÊQUE in partibns, sous entendu infide-lium, titre honorifique délivré parle pape à des prêtres qui lui ont rendu des services, mais qui ne sont pas aptes à diriger un diocèse, ou que d'autres occupations empêchent de remplir des fonctions pastorales. Ainsi il y a des év. de Sura, d'Hébron, de Scythopolis, etc., où il n'existe plus auj. de chrétiens, mais où il y en a eu dans les temps anciens, v. Hiérarchie.

EWALD 1° Deux frères anglais, dits le Blanc et le Noir, qui évangélisèrent, au 7m« siècle, la Westphalie, furent mis à mort et sont regardés comme les patrons du pays. Leurs os, retrouvés 1074, sont à Cologne dans l'égl. de Saint-Cuni-bert. 2° Georges-Henri-Auguste, un des orientalistes les plus distingués de notre temps. Né à Gôttingue 16 nov. 1803, prof, de philos, depuis 1831; destitué et banni avec 6 de ses collègues en 1837, il se retira à Tubingne; en 1848 il put rentrer à Gôttingue, f 1875. Ses grammaires hébraïques le placèrent dès l'abord très haut parmi les savants, puis sa gAmm. arabe et son traité sur la métrique arabe. Comme exégèse on lui doit des Comment, sur le cantique, les livres poétiq. de l'A. T., les Prophètes, l'Apocalypse, les 3 Synoptiques, quelques lettres de Paul; enfin une Hist. du peuple juif jusqu'à Bar-Kochba, 8 vol. 8°, 1843 à 1848. Tendance plutôt rationaliste.

EXALTATION, v. États.

EXCLUSION (droit d'). On désigne ainsi le droit qu'avaient et qu'ont encore plusieurs souverains cathol. de notifier au conclave des cardinaux lors de l'élection d'un pape, l'exclusion d'une personnalité déplaisante. Ce droit est contraire aux principes même de l'Église, et il n'a aucun rapport avec l'ancien droit des empereurs de confirmer une éleclion papale. On ne peut y voir qu'un d* ces compromis si fréquents dans l'histoire, et justifiés par des circonstances et des intérêts bien plus que par la nature d*s choses. La France, la Bavière, la Prusse, ont un droit semblable en ce qui concerne les évêques. Mais on tend à ne pas en user, à mesure que l'on comprend mieux l'indépendance réciproque des deux pouvoirs.

EXÉDRA, proprement un siège apporté du dehors; puis la chaire, et le siège épiscopal. Le pluriel marque les sièges voisins dans les grandes églises.

EXÉGÈSE, nom scientifique, employé surtout en theol. et synonyme d'explication, ou d'interprétation, ou d'herméneutique. Faire l'exégèse d'un livre, ou d'un passage de l'Écri-lure, c'est chercher le sens exact que l'auteur i voulu lui donner. Ce travail, quelquefois très simple, peut à l'occasion se compliquer de difficultés critiques; il faut savoir si tel mot est bien authentique, s'il est correctement écrit, s'il n'est pas susceptible de sens différents, si le contexte n'impose pas un sens plutdl qu'un autre; quelles sont les conséquences de dogme ou de morale qni en découlent. Plus l'exégèse est simple, plus elle a de chances d'être vraie. L'école d'Alexandrie cherchait surtout des sens allégoriques. Origène distinguait le sens littéral, le sens moral et le sens spirituel. Augustin et Crégoire-le-Gr. ne comptent pas moins de 4 sens dans un passage: littéral, tropologique ou moral, allégorique et anagogique. Les théol. romains se sont attachés surtout au sens typique, dont le principal inconvénient consiste surtout en ce qu'on met dans un passage ce qu'on veut y trouver. La vraie méthodp, à la fois philologique, grammaticale et historique, entrevue déjà par l'école d'Antioche, Chrysostome, Éphrem, Théodoret, a repris faveur à la Renaissmce; Érasme et Lefèvre d'Étaples la représentent, nuis Calvin et Bèze dont les comment, sont des chefs-d'œuvre; Grotius,Ernesti, Gesenius, D^ Wette, Tholuk, Olshausen, pour ne citer que les plus célèbres; en France Reuss,Oltramire et Godet. Tout essai d'explication des Écritures est un travail exégétique, mais on réserve spécialement ce nom pour les travaux scientifiques plutôt que pour les études dogmatiques ou morales.

EXEMPTION, privilège, dispense accordée à certains ordres et monastères qui, établis dans un diocèse, étaient affranchis de toute obligation vis-à-vis de l'autorité épiscopale et ne relevaient directement que du pape. Il en résultait divers inconvénients, affaiblissement du pouvoir épis-«opal, diminution des revenus, froissements, conflits; aussi les conciles de Constance et de Trente, se sont-ils appliqués à diminuer le nombre des exemptions.

EXERCICES, actes de dévotion et pratiques religieuses, recommandés surtout par les jésuites, et consistant en méditations, considérations, recueillement, prières, examen de conscience, confession, communion. Ces actes, sauf dispense, doivent se faire dans des couvents ou dans des maisons religieuses, pour avoir toute leur efficace. Ils sont surtout prescrits avant une ordination et avant l'entree définitive dans l » vie monastique.

EXORCISME. La puissance de chasser les démons était regardée dans les premiers temps comme appartenant à tous les chrétiens, suivant Matt. 10, 8. Luc 9, i. Marc 16, 17. Peu à peu on en fit l'apanage du clergé seul, et comme on ne saurait s'y prendre trop tôt, on exorcisa les enfants avant de les baptiser. L'Égl. romaine a conservé en principe la charge d'exorciste, et elle a un rituel particulier pour cela. Depuis le siècle, et à la suite des Égl. d'Afrique, l'exorcisme est devenu pour quelques Églises une partie intégrante du baptême. L'insufflation et la salive, ou de la boue faite avec la salive furent admis d'après Marc 7, 33. comme la forme extérieure de l'exorcisme; il s'y joignit aussi une renonciation formelle au diable et à ses suppôts, que l'enfant et, à son défaut, ses parrains devaient prononcer. On y attachait l'idée d'un acte réel et non pas seulement symbolique. L'Égl. réformée a dès le début supprimé tous les exorcismes; l'Égl. lutherienne les a pendant quelque temps conservés en les mitigéant; elle a fini par y renoncer aussi presque partout; la formule de renonciation seule subsiste encore en quelques endroits.

EXPECTANCE, état d'attente. Dans les premiers temps on ne consacrait qu'en vue d'une fonction, d'une place déterminée. Plus tard on consacra sans emploi, mais avec l'engagement réciproque que la première place vacante serait donnée par le consacrant et acceptée par le consacré; c'était surtout le cas pour les fondations. Il en résulta des abus que ni Boniface VIII ni le conc. de Trente ne purent entièrement réprimer. Tantôt c'était le pape, tantôt le roi qui, pour récompenser des services, par faveur ou pour argent, promettaient certains bénéfices, qui prenaient alors le nom d'expectances. Le seul droit de ce genre que connaissent les Égl. protestantes est le droit d'ancienneté; encore est-il rendu presque nul par le droit d'élection remis aux paroisses.

EXSUPÈRE, év. de Toulouse, 405 à 415 dont Jérôme vante la bienfaisance et à qui il a dédié son Comment, par Z^charie.

EXTRAVAGANTES, nom donné au Décret de Gratien, aux décrétales de Grégoire IX, aux Clémentines et à deux collections de Jean XXII, qui longtemps dispersées et n'ayant jamais été reçues dans le Cor pu* juris sont restées errant dehors, extra-vagantes, tout en conservant une certaine valeur historique et juridique.

EXTRÊME - Onction, v. Onction.

EXUCONTIENS, surnom bizarre donné aux ariens stricts, pirce qu'ils disaient que le Fils avait été créé de rien, ex ouk ontôn.

EX-VOTO, tout objet utile ou d'ornement, donné à une église, à la suite d'un vœu formé dans un moment de ferveur, de crise ou de danger.

EYLERT, Ruhlemann-Fréd. né à Hamm le 5 avril 1770, f 1852, prédicateur, conseiller intime de Guillaume III à Potsdam, auteur de plusieurs ouvrages d'édification, sermons, articles, etc. Il a travaillé àrUnion des égl. en Prusse.

EYMERIC, Nicolas, né à Gironne, Catalogne, 1320. Dominicain, il fut en 1356 inquisiteur général en Aragon. Il a écrit quelques ouvrages, entre autres un Directorium inquisitorum, manuel à l'usage des inquisiteurs, plus, fois réimprimé, et auquel Pegna a ajouté un Commentaire. Venise 1607.

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FABER, Fabre, ou Facre, noms qui se confondent souvent, surtout par suite de leur emploi, tantôt en latin, tantôt en français. Ils ont été portés par un grand nombre de personnages; les plus connus dans l'hist. ecclés. sont: 1° Félix Fabri, dominicain, né à Zurich 1441, prédicateur au couvent d'Ulm, t 1502; auteur d'un Voyage à Jérusalem et d'un au Sinaï et en Égypte (Evagatorium), écrit par lui en allemand et en latin, et encore estimé malgré plus, erreurs. — 2° Basile, théol. et pédagogue luthérien, né 1520 à Soran; antiphilippiste. recteur d'Erfurt, f 1575; collabora aux Centuries de Magdebourg et publia le Thésaurus de l'érudition scolastique. — 3° Guido, Fèvre de la Boderie, né 1541, secrétaire du duc d'Alençon, f 1598. Philologue distingué, il collabora à la Polyglotte d'Anvers, et a composé une gramm. rhaldéenne, une syriaque, et un dict. syro-chaldéen. — 4° F. Stapulemis, v. Lefèvre d'Éta-ples. — 5° Jean, de Heilbronn, né 1504, dominicain, prédicateur à Augsbourg, attaqua violemment la Réforme dans plusieurs écrits, f 1557. _ Qo Jean, év. de Vienne, s'appelait Heigerlin. Né 1478 à Leutkirch, il s'éleva rapidement par ses talents et ses connaissances et fut nommé 1518 vicaire-général et protonotaire papal à Constance. Comme humaniste il se montra d'abord favorable à la Réforme et entretint de bons rapports avec quelques-uns de ses chefs, mais à la suite d'un voyage à Rome 1521, il revint entièrement retourné et publia coup sur coup plus, écrits de controverse, entre autres le Malleus hœreticorum. Il assista à la dispute de Zurich lo23, et aux diètes de Spire et d'Augsbourg 1526, 1529 et 1530; il fut un des rédacteurs de la Confutation. Év. de Vienne depuis 1530 et administrateur de Neustadt, il prêta la main aux persécutions et présenta au pape et à l'emp. plusieurs projets astucieux pour ramener les luthériens. Mais il comprit aussi que pour réussir il fallait relever la cure d'âme et la prédication dans sa propre Égl. et il travailla dans ce sens, f 21 mai 1561. Ses ouvrages ont été impr. à Leipzig 1537, Cologne 1537-1541. — 7° Jean Augustan, né à Fribourg, prieur dominicain à Augsbourg, prof, à Bologne 1516, un des chapelains et des confesseurs de Maximilien et de Charles-Quint; d'abord ami d'Érasme, essaya de concilier les affaires de la Réforme, mais se jeta ensuite tout à fait du côté de la curie. — 8<> Nicolas, né à Paris 1514, précepteur du prince de Condé, puis de

Louis XIII, a collaboré à l'hist. ecclés. de Baro-nius. — 9° Pierre, né 1506à Villarette, Savoie; le premier disciple de Loyola, qui l'accompagna 1537 à Rome. Il avait été délégué au conc. de Trente, mais f 1546. — 10° Jean, né et prof, de théol. à Strasbourg, a publié quelques Orationes; f 19 mai 1623. — Ho Pierre, auvergnat, élève de Turuèbe, puis précepteur des fils de Coligny, principal du collège de la Rochelle, et prof, d'hébreu, f 1615 à 80 ans; auteur de quelques Comment, sur Cicéron, etc.— 12° N. Fabre, notaire à Clarensac, violent et fougueux, se fit condamner aux galères 1635 pour mauvais traitements contre le curé; puis de nouveau en 1663 il maltraita le prêtre Gros, et compromit avec lui son frère, ses fils, le pasteur et d'autres personnes. — 13° Jean Fabre. né à Nîmes 1717; célèbre par son dévouement filial. Le 1er janvier 1756, son père ayant été arrêté à la suite d'une assemblée du désert surprise, il demanda la faveur de le remplacer et rama six ans à Toulon sur les galères de l'État. Le duc de Choiseul ayant appris son histoire, obtint sa grâce, malgré les efforts contraires du comte de Saint-Florentin. Son retour dans sa famille, le 21 mai 1662, causa au père une joie si vive qu'il en mourut quelques jours après. 11 fut réhabilité, grâce au prince de Beauvau. Marmontel vit là le sujet d'un drame intéressant, et Fenouillot de Falbaire écrivit, sous son inspiration, la pièce de l'Honnête criminel, qui fut jouée à Paris et dans toute l'Europe. Fabre se retira à Ganges, puis à Cette où il f le 31 mai 1797.—14° Capitaine huguenot,connu seulement par l'embuscade dans laquelle il surprit les cathol. qui avaient essayé de le séduire pour se faire ouvrir traîtreusement les portes de Nîmes. — 15° Pierre-Joseph, né à Saint-Barthélémy, Vaud, au commencement du 18®* siècle, accompagna dans un voyage d'inspection en Cochinchine, François de la Baume, év. d'Ha-liearnasse, et raconta ses impressions dans ses Lettres édifiantes, Bienne 1746. Il dévoilait en même temps les intrigues des jésuites, qui avaient fait manquer le but de son voyage. Son livre fut brûlé à Fribourg par le bourreau; les jésuites en achetèrent les exemplaires et les détruisirent. — 16° Vitus, né 1528 à Toulouse, conseiller au parlement, délégué français au conc. de Trente; connu par une apologie des massacres de la Saint-Barthélemy. f 1584. — 17° N. Fabre d'Olivet, parent de Jean 13°, né à Ganges 8 déc. 1768, f Paris 1825, eut une certaine réputation comme romancier, musicien et poète dramatique; il réussit moins comme philologue. Il s'occupa de trop de choses à la fois et n'en mena aucune d'une manière entièrement satisfaisante. Trois ou quatre comédies, des récits en vers, une étude sur la surdi-mutité, des recherches sur le rythme et le mode hellénique, la langue hébr. restituée, quelques romances, un quatuor, un oratorio pour le couronnement de Napoléon, ont été applaudis en leur temps et bientôt oubliés, Sa femme a écrit Conseils à mon amie sur l'éducation physique et morale des enfants, Paris 1820. Ce ménage des deux auteurs ne paraît pas avoir élé heureux.

FABIEN, 20me pape. Eusèbe raconte qu'a près la mort d'Anthère, Fabien étant venu de la campagne à Rome, et tous les frères s'étant réunis dans une égl. pour choisir un nouvel èvêque, la plupart jetaient les yeux sur des hommes distingués par leur position sans que personne songeât à Fabien, lorsque tout à coup un pigeon vint se poser sur sa tête. Le peuple entraîné par cette apparition, le proclama aussitôt et le plaça sur le siège pontifical 236. Cyprien en fait le plus grand éloge. C'est cette même année que pour la première fois, dans un conc. tenu à Icône, les év. de Phrygie et de Galatie déclarèrent nul le baptême donné par des hérétiques. Fabien, contre les statuts ecclésiastiques, nomma pasteur Novatien qui avait été baptisé pendant une maladie. Après la f de Fabien, dé-cipité en 250, l'évêché resta vacant pendant 16 mois, à cause des persécutions de Décius.

FABRI, v. Faber lo.

FABRICIUS lo Théodore, né 1501 à Anhalt-sur-l'Yssel, un des premiers adhérents de la Réforme, étudia à Wittenberg, donna dès 1526 à Cologne des cours très suivis, fut emprisonné à cause de son zèle pour la propagation de ses idées, devint surintendant à Zerbst, et f 1559. Il a publié des Institutiones grammaticœ in lin-guam sanctam, et des Artic. pro evang. doctr. — 2o Jean-Jacques, né 1620, àLennep, converti pendant ses études à Rostock, prêcha un mysticisme exagéré et publia sur Le christianisme en paroles un écrit qui le fit poursuivre et bannir. Appelé à Zwolle, puis à Sultzbach 1660, il se mit à dos les orthodoxes morts, et malgré le bon témoignage du magistrat, il dut de nouveau quitter la place, et se retira à Amsterdam, où il f 1673. — 3o Jean, né 11 févr. 1644 à Alt-dorf, près de Nuremberg, d'une famille de théologiens; étudia à Helmstœdt, visita l'Allemagne et l'Italie, fut pasteur à Venise, puis prof, à Altdorf et à Helmstœdt et f 1729. Dans ses Considérations sur les Controverses, il se montra très large; il le fut plus encore dans l'approbation qu'il donna 1704 à l'abjuration de la princesse Élisabeth-Christinequi épousait Charles VI d'Espagne. « ce mariage devant être utile, non seulement à la principauté, mais encore à la religion et à la paix confessionnelle. » Il reçut sa retraite 1709, mais resta inspecteur des écoles jusqu'à sa fin. — 4o Jean-Albert, né à Leipzig le 11 nov. 1668, étudia à Leipzig la philologie, la théol., la philos, et l'histoire, vécut à Hambourg, remplaça Vincent Placcius comme prof, d'éloquence et de poésie 1699, fut nommé recteur de l'école de Saint-Jean 1708 et t 1736. Il a laissé plus de 100 ouvrages, dont les plus appréciés sont sa Biblioth. latine, sa Biblioth. grecque, sa Biblioth. ecclés., son Codex apocr. N. T., son Codex épigr. V. T., et diverses éditions de Mabillon, Placcius, etc.

FABRIQUE, d'une manière générale, la propriété, les biens d'une église. Le Conseil de fabr. est le corps chargé d'administrer ces biens, de les faire valoir et de les employer pour l'entretien de l'église, bâtiment et mobilier. Ce conseil est nommé soit par les électeurs de la paroisse, soit par l'autorité ecclésiastique.

FACULTÉ lo v. Université. — 2o Droit qu'un supérieur accorde à un inférieur d'exercer certaines fonctions. Ainsi les facultés quinquennales des évêques; depuis le 17">e siècle le pape leur transfère pour un terme de 5 ans le droit de prononcer sur des cas réservés. L'év. de son côté confère des droits à un doyen ou à un vicaire général, dans l'intérêt du culte. La consécration donne le pouvoir d'administrer les sacrements, mais pour en user le prêtre a besoin que l'év. lui en donne l'autorisation, ou la faculté. Ces pouvoirs, dans la règle, doivent être renouvelés tous les 5 ans.

FACUNDUS, év. d'Hermiane, au nord de l'Afrique. Il écrivit pendant le conflit des Trois chapitres pour les défendre, en même temps qu'il censura l'amour des discussions dogmatiques chez ses contemporains. Il a encore écrit contre le scolastique Mucianus, et une Épître sur la foi catholique. V. Galland, Biblioth.

FAGET, Ambroise, s'appelait Jehan Garde -puys. Il changea de nom, quand il vint à Genève fuyant la persécution 1557. Il s'en expliqua loyalement avec le Consistoire et les magistrats. En 1558 il reprit ses dangereuses fonctions, fut pasteur à Orléans, puis en 1560 à La Rochelle, où son zèle lui concilia l'affection du troupeau, mais non les sympathies du gouvernement. Il dut quitter la ville, et ne put y rentrer que lorsque les protestants s'en furent emparés.

FAGIUS, v. BQchlein.

FAGNANI, Prosper, canoniste distingué, né 1598, fut à Rome l'avocat et le secrétaire du Congrès chargé d'interpréter le conc. de Trente. Il fut ensuite prof, de droit canon. Il était déjà aveugle quand il rédigea son Comment, sur les Décréta les, Rome 1691.

FALKENSTEIN, Jean-Henri (de), né 1682 en Silésie, étudia en Allemagne et en Hollande; directeur de l'acad. des chevaliers d'Erlangen 1715; passa au catholicisme et entra au service de l'év. d'Eichstâdt et du margrave de Brandebourg. f 1760 à Schwabach. On a de lui quelques écrits sur les antiquités norwégiennes, sur la Thuringe et la Bavière.

FAMILISTES, secte hollandaise du 16™ siècle, aussi nommée la maison d'amour. Son fondateur, Henri Nicolas, né 1502 à Munster, vécut à Amsterdam et à Emden. Il avait des tendances anabaptistes et mystiques et les propagea dans de nombreux petits écrits. Son chiliasme était grossier; il divinisait l'homme et rêvait d'un royaume des justes, dont il prétendait être le prophète, se disant en relation directe avec Dieu et avec Christ par des révélations et des visions. La secte était organisée hiérarchiquement et se mêlait des plus petits détails de la vie de ses membres. Elle se répandit en Angleterre, où elle fut persécutée par Marie et par Elisabeth. Elle était presque éteinte en Hollande à la fin du 17®e siècle; des divisions intérieures lui avaient enlevé ses dernières chances.

FAMILLE. Dans le sens le plus restreint, c'est l'union de deux époux et des enfants issus de leur mariage; c'est l'école de l'amour vrai, puis celle de l'amour protecteur, celle du support mutuel et celle du respect. Pour être ce qu'elle doit être elle doit reposer sur des principes et des sentiments, et pas seulement sur les intérêts ou la passion. Les alliances contractées entre plus, familles étendent la signification du mot et sont le commencement de la société, de la vie sociale, le terrain sur lequel sont appelées à se développer les énergies et les vertus de l'individu. L'homme sera dans la vie publique ce qu'il aura été dans la vie de famille. La reconnaissance de la personnalité et de l'égalité de la femme, par conséquent la monogamie, est la condition d'existence de la famille; aussi le christianisme l'a-t-il seul véritablement comprise et fondée, quoique déjà le mosaïsme l'eût entrevue, et qu'au milieu des peuples anciens les Hébreux l'aient en quelque mesure réalisée.

Les Tombeaux de famille datent de l'antiquité la plus reculée, Gen. 23, 17. 50, 13. 1 Rois 3, 13. Les mœurs romaines les reconnaissaient, et l'usage s'en est introduit dans l'Égl. chrétienne: il y a eu des tombeaux de famille soit dans les temples mêmes, soit dans les cimetières adjacents, soit dans des propriétés particulières. La propriété cessait de droit, soit avec l'extinction des familles, soit avec leur départ, et les tombeaux faisaient retour, soit aux paroisses, soit aux héritiers ou acquéreurs du sol.

FANATISME, du latin fanum, lieu de révélation. On désigne ainsi un sentiment religieux à la fois surexcité et fourvoyé qui, s'attachant avec ardeur à un fait plus ou moins authentique, bien ou mal compris, et en tirant des conclusions fantaisistes, se refusant à toute constatation et à tout raisonnement, poursuit avec une passion souvent haineuse tout ce qui ne se soumet pas aveuglément à son autorité. L'histoire de l'Égl. et l'hist. des religions en présentent des multitudes d'exemples; les sectes, aussi bien que les égl. établies ont sous ce rapport payé un large tribut à ce travers de l'intelligence et du cœur; l'irréligion elle-même a son fanatisme.

FAREL, Guillaume, né à Gap 1489, le plus intrépide et le plus fougueux des réformateurs, l'un des plus actifs et les plus décidés. D'une famille noble il était destiné à la carrière des armes, mais il préféra les études et vint à Paris où Le Fèvre d'Étaples exerça sur lui une grande influence. Éclairé par la lecture du N. T. il se rangea du côté de la Réforme, et après une courte mission à Meaux et un voyage à Gap, il vint à Bâle, visita Zurich et Constance, se lia avec Zwingle et Myconius, se fit un ennemi d'Érasme dont il ne ménagea pas les tergiversations; fit peut-être un voyage à Wittenberg pour voir Luther, et vint à Montbéliard pour y prêcher l'Évangile, juin 1524. Un excès de zèle et des actes téméraires, blâmés par GEcolam-pade, le contraignirent de partir au printemps de 1525. Après un séjour d'un an à Strasbourg il revint en Suisse, visita Bâle, Neuchâtel, Berne; évangélisa Aigle, Morat, le Vully, laissant partout des traces de son passage. Il prêcha avec succès la Réforme à Serrières, à Neuchâtel, à Valengin, où il faillit périr massacré, 1530. Il était à la fois pasteur d'Aigle, de Morat et de Neuchâtel. En 1532 il fut délégué au synode des vaudois du Piémont. A son retour, passant ! par Genève, il y tint de petites assemblées et décida Froment à les diriger en son absence, mais il y revint à plus, reprises, plaida la cause de la Réforme dans plusieurs disputes publiques, obtint de nombreuses adhésions, monta en chaire à la Madelaine et à Saint-Gervais, malgré l'opposition du Conseil qui craignait de mé-conteuter ses alliés de Fribourg, et finit 8 août 1535 par prêcher à Saint-Pierre au milieu d'une foule électrisée. Le 27 du même mois paraissait l'édit de réformation, et peu de temps après ce vaillant ouvrier, ayant remis aux mains de 1 Calvin la tâche de continuer et d'affermir l'œuvre qu'il avait fondée, reprit ses travaux missionnaires. C'est sur lui que reposa surtout la dispute de Lausanne, octobre 1537. Reçu bour- | geois de Genève avec deux de ses frères, il fut j banni l'année suivante, 1538, ainsi que Calvin,; par le parti des Libertins. Il retrouva les mêmes difficultés à Neuchâtel et ne réussit que le 1er févr. 1542 à faire adopter les Ordonnances ecclésiastiques. On le voit dès lors, touj. infatigable, faisant une mission de plusieurs mois à Metz, où les troupes de Claude de Guise dispersent son assemblée, tuent les uns, noient les autres et le blessent lui-même; puis à Pont-à-Mousson et à Strasbourg où Calvin vient le voir. En nov. 1543 le Conseil de Genève lui fait faire des habits neufs. En 1549 il est à Zurich avec Calvin pour la négociation du Consensus. En 1553 il vient à Genève et s'y trouve le 23 oct., jour du bûcher de Servet. Il accompagne Bèze dans sa mission en Allemagne, puis reprend ses voyages missionnaires dans le Jura et le Mont-béliard; épouse à Neuchâtel, 20 déc. 1553, Marie Torel, de Rouen, ce qui étonna tout le monde, mais ne ralentit ni son zèle ni son activité. Après une nouvelle mission en Allemagne, puis à Metz, il revint visiter Gap, juillet 1561, prêcha malgré les menaces, les interdictions et les persécutions, fonda une Église; en 1564 il vint à Genève voir Calvin mourant, et après un dernier voyage à Metz, avec Favargier, il rentra chez lui fatigué et malade et f à Neuchâtel 13 sept. 1565. Son fils unique Jean ne lui survécut que 3 ans. Sayous rattache l'admirable influence qu'il a exercée sur la réforme, à son long apostolat tout rempli de périls et de misères, à son intrépidité naïve, à ses énergiques vertus et à son grand cœur. Mignet l'appelle le plus entraînant des réformés français; il lui accorde l'éloquence populaire et l'intrépidité héroïque de Luther, mais non sa prudence politique. Aussi calviniste que Calvin, il était moins absolu en dogmatique et plus tolérant; il regardait comme oiseuses bien des discussions qui passionnaient son temps. Malgré ses défauts, ses vivacités, sa violence parfois, Farel n'en reste pas moins une des plus grandes figures de la Réf. et l'un des hommes qui ont agi avec le plus de puissance sur leurs contemporains; son action s'est fait sentir depuis le Dauphiné jusqu'en Lorraine, mais surtout dans la Franche-Comté et dans la Suisse romande. Si les gouvernements l'ont souvent tracassé, le Sénat de Berne a l'honneur de l'avoir toujours défendu. Farel a peu écrit, quelques traités, épîtres, sermons, qui n'avaient guère qu'une valeur de circonstance. — Neuchâtel lui a élevé une statue en 1865; le peintre Homung le fait figurer dans deux de ses compositions. V. Sayous, Schmidt, Goguel, et surtout Junod.

FARNOVIUS, proprement Stanislas Far-nowski, chef d'une secte polonaise unitaire, avec tendance arienne, qui se fondit plus tard dans le socinianisme. Il avait étudié à Heidelberg, fut disciple de Gonestus et f 1614 dans sa paroisse de Sandek.

FATALISME. C'est la foi en un sort immuable, absolu, déterminé d'avance, implacable, tel que l'admettaient les stoïciens et auj. les maho-métans; le fatum des anciens. Il se distingue du déterminisme des déistes et du naturalisme des matérialistes, en ce qu'il admet comme dominant toutes choses une puissance, une espèce de divinité, mais sourde et aveugle. Il se distingue de la doctrine chrét. en ce qu'il n'admet ni un ordre moral du monde, ni l'amour d'un Dieu personnel. Par plus, points il touche il la doctrine de la prédestination telle que la définissent imprudemment des théol. exagérés.

FAUST, lo Jean, docteur en théol, né à Strasbourg 22 sept. 1612, f d'apoplexie 1er juill. 1695, prof, de logique, métaphysique et théol., doyen de Saint-Thomas; très savant auteur d'une vingtaine de dissertations; c'est de lui que Gœthe s'est inspiré. 2° Isaac, son frère, né

10 juin 1631, f 30 nov. 1702; 65 dissertations et traités; savant en grec et en hébreu.

FAUSTA, femme de Constantin-le-Grand, qui accusa faussement Crispus son beau-fils d'avoir voulu la violer, causa la mort de ce jeune prince, et fut étouffée dans un bain chaud 327, quand la vérité fut découverte.

FAUSTE, lo né Breton, vint dans le midi de la Gaule, se fit moine dans l'abbaye de Lérins, et en devint abbé, 433. Év. de Riez, 462. Esprit actif, un peu brouillon, il prit parti pour le semi-pélagianisme et contre les prédestinations.

11 se prononça pour la matérialité de l'âme, comme chose créée, et fut réfuté par le prêtre Mamert Claudien, frère de saint Mamert. f 493. — 2o v. Faustus. — 3° v. Socin.

FAUSTIN, prêtre de Rome, qui, après la mort de Libère, se joignit au parti d'Ursicin. On a de lui un Traité contre les ariens, un écrit sur la Foi. et un petit Livre de prières; vers 366.

FAUSTUS, manichéen, néàMilève, Numidie, connu surtout par le travail que publia contre lui Saint-Augustin (Contra Faustum), qui dans sa jeunesse avait été chercher auprès de lui de la science et qui s'en détourna après avoir constaté sa superficialité.

FEBRONIUS, v. Hontheim.

FEDER, Jean-Michel, fécond écrivain cathol., né 1753 à OEllingen, prêtre en 1777, prof, à Wurzbourg 1784, président des Compagnons de Marie 1794, conseiller ecclés. 1798, bibliothécaire de l'Univ. 1804, f 1824.

FÉDÉRALE (théologie), v. Économies.

FELGENHAUER, Paul, théosophe mystique et chiliaste, né à Puschwitz, Bohême, exilé, se rendit à Amsterdam d'où il répandit ses écrits mystico-alchimistes, dans lesquels il accusait surtout l'Égl. établie et le clergé. Banni, persécuté, emprisonné, il publia à Hambourg ses derniers écrits, et f 1660.

FÉLICE, Guill.-Adam (de), né 1803 à Otter-berg (dép. de Mont-Tonnerre), de parents vaudois; publiciste distingué, plus connu encore comme prédicateur et théologien. Pasteur à Bolbec 1828, il fut nommé en 1838 prof, de morale et d'éloquence sacrée à la fac. de Montau-ban, où il resta jusqu'en 1870; doyen depuis 1865. f 23 oct. 1871 à Lausanne. Auteur d'un grand nombre d'ouvrages, entre autres: Appel en faveur des nègres émancipés, Appel d'un chrétien aux gens de lettres, Hist. des synodes nationaux, Hist. des Prot. de France (couronné), sermons, poésies; sans parler d'une foule d'articles dans les Archiv. du christ., le Semeur, la Presse, l'Espérance, YÉvang. Christendom, le New- York Observer, etc. Il avait quelque chose de magistral dans le débit, de soigné dans la forme, d'un peu lent dans l'expression. II compte au premier rang des prédicateurs contemporains. Notice par Pédézert; Œuvr. posthumes, publiées par son fils.

FÉLICISSIMUS, chrétien de Carthage, consacré diacre par le prêtre No valus malgré l'opposition de Cyprien. Il était pour le parti de la douceur envers les tombés, se prévalant des libellipacis distribués par les martyrs, et s'opposa aux mesures en sens contraire prises par deux év. envoyés par Cyprien. Lui et ses adhérents furent excommuniés au conc. de Carthage 251, mais appuyés par 2 év. africains ils résistèrent, se choisirent pour év. un des 5 pasteurs mécontents, Fortunatus, et se constituèrent à part. Ils recherchèrent l'alliance de Rome, sans réussir à l'obtenir, et ne végétèrent que peu de temps; on ne sait comment ils finirent. — Un autre Félicissimus subit à Rome le martyre sous Décius.

FÉLICITÉ 1° Illustre veuve romaine, martyrisée avec ses 7 fils sous Antonin 150; d'autres disent sous Marc-Aurèle 170 ou 164; 162 d'après Rossi; les uns la fêtent le 10 juill., les autres le 23 nov. — 2° Servante de Carthage, mon ta-niste, qui souffrit le martyre avec son fr. Revo-catus et avec Perpetua 202 ou 203; à peine relevant de couches, selon d'autres étant encore enceinte, elle fut livrée à une vache furieuse. Vivia Perpetua, fille d'une mère chrétienne, mais d'un père païen, avait été baptisée dans la prison. Des anges et des visions la fortifièrent dans les tortures et dans la mort.

FÉLIX 1er io Pape 269-274. Son règne a vu l'hérésie de Paul de Samosate et la persécution d'Aurélien. Il encouragea les fidèles à la persévérance et au martyre et leur prêcha d'exemple. Il f en prison et fut considéré comme martyr. Fêté le 30 mai.

2<> Félix II, 355, hérétique, arien, au dire de l'hist. Socrate (Hist. Eccl. II, 37). Archidiacre, il fut nommé pape par l'emp. Constance, pendant l'exil de son prédécesseur, puis chassé trois ans après et remplacé de nouveau par Libère. On le considère plutôt comme antipape.

3° Félix III, né à Rome, élu 483, rejeta l'édit d'union des deux Églises publié par l'emp. Zé-non, condamna Acace, év. de Constantinople, et d'autres hérétiques, et assembla un conc. à Rome 487. f 492.

4o Félix IV, le saint, de Bénévent, élu 526 par la faveur de Théodoric; gouverna sagement, f 530. On a de lui une Lettre à Césaire d'Arles, sur les examens à faire passer aux laïques avant de les consacrer.

5o Félix V, antipape, nommé 1439 au conc. de Bâle q. y. Il était duc de Savoie et avait gouverné ses États sous le nom d'Amédée VIII. Fatigué d'une papauté contestée, il abdiqua bientôt et retourna dans son heureux village de Ripaille.

6° v. Minutius.

7o Manichéen, contemporain d'Augustin, vint à Hippone pour y répandre sa doctrine; mais après une discussion publique qui dura 2 jours, il fut si bien éclairé par Augustin, qu'il abjura solennellement ses erreurs.

8° Martyr, ainsi que sa femme Régula; ils évangélisèrent Glaris et les rives du lac de Zurich; mis à mort sous Décius, le 11 sept. Il a longtemps passé, avec Exsuperantius, pour le patron de la ville de Zurich. La légende a orné son histoire et lui donne une place dans la légion thébaine.

9° Félix, de Nola, Campanie, fils d'un soldat syrien nommé Hermias, donna tous ses biens aux pauvres et se mit au service de l'Église. L'év. Maximus ayant échappé aux persécutions de Décius, les soldats se jetèrent sur Félix et lui mirent des chaînes aux mains et aux pieds. La légende raconte que soudain dans son sombre cachot il vit, éclairé d'une lumière céleste, son évêque demandant du secours. Ses fers tombèrent et un ange le conduisit auprès fa Maximus mourant. Après l'avoir ranimé avec le jus de quelques raisins qui se trouvaient par hasard sur un buisson d'épines, il le porta sur ses épaules jusque chez lui avant le lever du soleil. II eut beaucoup de peine à échapper aux persécutions suivantes, et passa six mois dans une citerne desséchée, nourri par une vieille femme. A la mort de Décius 251, il rentra au milieu de ses fidèles, vivant des produits de son jardin. + 14 janv. 256 dans un âge avancé. Son tombeau fut longtemps un lieu de pèlerinage.

10° év. de Thibaris 247-303. Dioclétien ayant publié un édit pour que tous les livres sacrés fussent brûlés, Magnilien, gouv. de Thibaris, ordonna à Félix de livrer ceux qu'il possédait. « Voici mon corps, répondit-il, brûle-le. » Envoyé là-dessus chez le proconsul de Carthage, et de là chez le préfet Prétorius, il fut enchaîné et mené en Italie. Il resta quatre jours sans manger ni boire, jusqu'à ce qu'il aborda à Agri-gente. A Venosa on lui fit subir les plus cruelles tortures, et Prétorius voyant qu'il n'en obtiendrait jamais rien, lui fit trancher la téte. Félix mourut, rendant grâces à Dieu.

H® F. d'Aptunga, v. Donatistes.

12° F. d'Urgel, v. Adoptianisme.

13o F. de Cantalicio, né 1513 dans les États romains; d'abord berger, puis frère-lai chez les capucins, jouit de l'amitié de Philippe de Néri. Canonisé 1612 pour ses vertus monastiques.

FELLER, François-Xavier, écrivain cathol. très abondant. Né à Bruxelles 18 août 1735, il entra dans l'ordre des jésuites, fit un long séjour en Hongrie, fut nommé orateur de l'ordre à Nivelle, puis à Liège. A la suppression de l'ordre il se remit à voyager; il écrivit contre les réformes de Joseph et contre la Punctation d'Ems. En 1796 il fut placé à la cour épiscopale de Freising, et f 23 mai 1802 à Ratisbonne. Ses principaux ouvrages sont son Dictionn. hist. et son Journal hist. et littér. 1774-1794; 60 vol. U a écrit aussi sous le pseudonyme de Flexier de Reval.

FÉNELON (François de Salignac de La-mothe-), né au château de Fénelon, Querci, 6 août 1651, d'une famille noble et ancienne, fut destiné fort jeune à l'état ecclés. et prêchait déjà à 15 ans. Élève de Saint-Sulpice, ordonné prêtre en 1675, il fut chargé par l'archev. de Paris, de diriger l'instruction des nouvelles catholiques, jeunes filles arrachées à leurs parents protestants pour être élevées dans la religion de Louis XIV, et il composa pour elles son livre de l'Éducation des filles. Le roi l'envoya ensuite comme missionnaire au milieu des réformés du Poitou, chez lesquels il obtint plus de succès par ses paroles éloquentes et affectueuses qu'il n'eût fait par l'emploi de la force. Il fut appelé, 1689, sur le conseil de Mme de Maintenon, comme précepteur des petits-fils du roi, spécialement du duc de Bourgogne, pour qui il écrivit un grand nombre d'ouvrages, dont malheureusement plusieurs furent brûlés par ordre de Louis XIV. C'est aussi pour son jeune élève qu'il composa Télémaque, poème ou roman, plein de directions judicieuses sur le rôle et les devoirs de la royauté, fiction destinée à instruire en amusant, et qui, soustraite par un serviteur infidèle, fut imprimé à Londres à l'insu de l'auteur et lui valut sa disgrâce, le roi y ayant vu la satire de son règne et de sa personne. Le jeune duc de Bourgogne conserva jusqu'à la fin pour son maître la même respectueuse affection. Nommé 1694 à l'archev. de Cambrai, Fénelon y rencontra de nouvelles luttes. Sa théol., plus tendre que vigoureuse, plus pratique que dogmatique, plus spirituelle que polémique, lui fit accueillir avec sympathie les idées de Mro* Guyon, ce qui lui attira les vives attaques de Bossuet, qui avait été jusque-là son ami. Pour se justifier il écrivit Les maximes des saints, ouvrage d'un quiétisme dangereux, mais qui cependant ne poussait pas à l'extrême ses conséquences. Il n'en fut pas moins condamné à Rome 1699, et Fénelon, avec une humilité qui a été diversement jugée, lut lui-même en chaire le bref qui le condamnait et déclara se soumettre à la sentence. C'est vers le même moment que paraissait son Télémaque; et le noble archev. était frappé à la fois par la censure papale et par la disgrâce royale. Mais rien ne le découragea dans l'accomplissement de ses devoirs pastoraux; il s'y consacra de plus en plus avec un entier dévouement, et tout en faisant de la controverse avec les protestants de son ressort, il sut gagner leur respect et leur affection, comme il s'était concilié les jansénistes. Sa bonté, sa générosité, son désintéressement lui mérita pendant le cruel hiver de 1709 et pendant la guerre de succession l'admiration de ceux qui le virent à l'œuvre; il se dépouilla de tout pour soulager les pauvres soldats de l'armée française campée aux environs de Cambrai. S'il avait perdu la faveur du roi, il avait gagné celle du peuple; sa réputation était faite comme chrétien et comme littérateur; on venait de loin pour le voir et le consulter, et l'opinion publique le consola des amertumes officielles, f 7 janv. 1715, universellement regretté. On a encore de lui des Fables, les Dialogues des Morts. Dial. sur l'éloquence, Lettre à l'Âcad. française. Examen de la conscience d'un roi, Démonstration de l'existence de Dieu, Sermons, Œuvres spirituelles, eic. Moins grandiose que Bossuet, il a plus de charme, plus d'onction; son style est plus pur et plus classique, et de tous les écrivains français, c'est celui qui rappelle le plus l'idéal des grands écrivains de l'ancienne Grèce. — Vie par Ramsay 1725, Querbœuf 1787, de Bausset 1808, Gandar 1864; Éloge, par LaHarpe, Maury, Lamartine, etc.

FERDINAND lo emp. d'Allemagne 1556-1564; frère de Charles-Quint; né 1503 à Alcala, Castille; roi de Bohême 1526, puis roi de Hongrie, et roi des Romains 1531; succéda à son frère après l'abdication de celui-ci, mais ne fut pas reconnu par Paul IV, sous prétexte qu'on ne l'avait consulté ni pour l'abdication de l'un, ni pour l'élection de l'autre. Dès lors les empereurs se sont habitués à se passer de la confirmation des papes. Ce que son fr. avait fait par politique, il le fit par sentiment religieux: il combattit la Réforme, mais il poussa à la réformation de l'Égl. et favorisa dans ce but le conc. de Trente. Son règne fut relativement paisible: il se montra tolérant et doux envers ses sujets protestants; cependant c'est lui qui avait pris l'initiative de la première ligue des princes cathol. à Ratisbonne 1524. Ses dernières années furent consacrées à des tentatives de conciliation. f 1564 à Vienne.

2° Ferd. Il, petit-fils du précédent; fils de l'archiduc Charles de Styrie et Carinthie, né 4 juill. 1578; roi de Bohême en 1617, de Hon-rie en 1618, emp. en 1619. Élève des jésuites d'Ingolstadt, il avait juré l'anéantissement du protestantisme dans ses États. Dès que la guerre de Bohême fut finie et qu'il se crut maître de la situation, il se fit un devoir de tenir son serment et commença par son fameux Édit de restitution, mais les armées de Gustave-Adolphe lui firent éprouver à Leipzig et à Lutzen de tels revers qu'il dut renoncer à ses projets et se contenter de conventions amiables avec quelques-uns de ses ennemis, f 1637. Il fit mettre à mort Wallenstein.

3o Ferd.-le-Saint, ou Ferd. III, né 1198, fils d'Alphonse IX, roi de Léon, et de Bérangère, reine de Castille. Il hérita 1230 des 2 royaumes, qui dès lors ne furent plus séparés. Il fit la guerre aux Maures, les chassa de Cordoue, Sé-ville et Cadix et se les rendit tributaires 1248. Doux envers les juifs et les musulmans qu'il désirait gagner, il persécuta les hérétiques. Dévoué à Rome, dont il avait besoin pour faire sanctionner ses victoires, il fit construire la magnifique cathédrale de Tolède, et mérita d'être canonisé par Clément X, 1671. On lui doit l'univ. de Salamanque, un recueil de lois et la traduction du Code de lois des Maures de Cordoue. f 30 mai 1252.

4° Ferd.-le-Catholique, né 1452. Roi d'Aragon, il réunit à ses États héréditaires ceux de sa femme Isabelle de Castille, après que celle-ci fut morte et que leur fille Jeanne-la-Folle eut été déclarée déchue de ses droits., Il possédait ainsi presque toute l'Espagne et devait la léguer à Charles-Quint. Il chassa le dernier roi maure, Boabdil, 1492. Le royaume de Naples, qu'il prit aux Français 1504 et la Navarre espagnole 1512, augmentèrent sa puissance, qui était déjà devenue considérable depuis que Colomb avait pris possession en son nom des Antilles et du continent américain. L'adresse avec laquelle il avait su flatter la cour de Rome, surtout en introduisant l'Inquisition dans ses États, servit merveilleusement sa politique; il eut soin de ne donner aucune publicité aux brefs qui autorisaient le saint-office; l'opinion publique se serait révoltée. Il a mérité le surnom de Rusé par sa fourberie, et Louis XII de France ne sut jamais s'il avait en lui un ami ou un ennemi, f 1516. Gonzalve de Cordoue, Ximénès, et surtout sa femme Isabelle sont les principales gloires de ce règne.

5° Ferd.-le-Persévérant, infant de Portugal, fils de Jean I, né 1402 à Santarem, doit son surnom et sa canonisation au courage avec lequel il subit son esclavage chez les Maures de Fez. Dès l'âge de 14 ans il combattit les Maures en Afrique et fit le siège de Tanger. Il fut ensuite retenu comme ôtage jusqu'au moment où les Espagnols rendraient Ceuta 1437, mais comme les Espagnols ne la rendirent pas, il mourut de misère dans sa captivité 1443. Son héroïsme et ses malheurs sont devenus une légende populaire et sont racontés dans la Chronique du p. Jérôme Ramas, Lisbonne 1577.

FERGUSON, Adam, né 1724 près de Perth, aumônier d'un régiment écossais, puis prof, de philos, naturelle et de philos, morale, fut envoyé 1778 en Amérique avec la commission chargée de traiter avèc les insurgés. En 1785 il renonça à ses fonctions de prof., voyagea en Italie, et vécut dans la retraite jusqu'à sa f 1816. Sa philos, est sensualiste; il met la connaissance dans l'observation des faits et dans la recherche de leurs causes, et il ne voit d'autre principe de morale que le besoin universel de bonheur.

FERMENTAIRES, surnom donné par les Latins aux Grecs qui se servaient pour la Cène de pain levé.

FERNEX, ou Ferney, connu comme séjour de Voltaire qui y a fait élever une petite église, dédiée Deo maximo et optimo, qu'on voit encore, est auj. le débris le plus considérable qui soit resté du protestantisme dans le pays de Gex. Le culte public y fut rétabli en 1795, et officiellement en 1819; école en 1818, temple en 1825. Les stations annexes, au nombre de 8, sont: Bourg, Divonne, Oyonnaz, Naritua, Bel-ley, Saint-Genis, Bellegarde et Farges; en tout 15 à 1600 protestants.

FERRARE - Florence (Concile de). Eugène IV, contre le gré de la majorité, et pour l'avoir davantage sous sa main, décida le transfert du conc. de Bâle à Ferrare, 18 sept. 1437, sous prétexte de pouvoir mieux s'entendre avec les grecs pour le projet de réunion des Églises. Le parti papal accepta cette translation et se rendit à Ferrare, où se trouvaient aussi un grand nombre de prélats grecs, l'empereur, et le métropolitain russe Isidore. La première session ne s'ouvrit que le 8 oct. 1438; mais le pape ne tarda pas à le déplacer de nouveau, et malgré l'opposition des grecs il l'envoya siéger à Florence, où du 26 févr. au 8 juin on discota le le grand point dogmatique du filioque, de la procession du Saint-Esprit, qui sépare le plus, en apparence, les deux Églises. On fut sur le point de s'entendre, grâce d'une part au dominicain Schwarzenberg, de l'autre au cardinal grec Bessarion, Marcus en revanche protesta jusqu'à la fin. On finit par tomber d'accord aussi, mais avec toutes sortes d'équivoques et de réserves, sur les sacrements, le purgatoire et la primauté du pape. L'Acte d'Union fut signé le 6 juill. 1439 par tous les membres du concile, sauf Marc d'Éphèse. Mais les suites ne répondirent pas à ce qu'on croyait pouvoir en espérer. Le grand-duc dépouilla Isidore de son titre de métropolitain et le fit enfermer dans nn couvent. Le prisonnier réussit à fuir, et pour le consoler de sa disgrâce le pape le nomma patr. de Constantinople et cardinal. Le parti de Marcus l'emporta en Grèce, et l'emp. ayant voulu, avec le patr. Théophanes, prendre des mesures contre les récalcitrants, ils y répondirent en destituant tous les prêtres latinisants. Le but politique était ainsi manqué, les Turcs conservaient leurs avantages et l'empire n'avait rien gagné à ces pourparlers. Le concile échoua de même dans ses tentatives auprès des arméniens et des jacobi-tes. Au fond cela lui importait peu; il s'agissait surtout d'éluder ou d'ajourner la question brûlante des réformes. Il se prolongea encore 6 ans après le départ des grecs, et tint 7 sessions, dont les 2 dernières à Rome depuis 1442. Ses Actes ont été publ. en grec et en latin. C'est un des conciles qui, ayant le plus voyagé, puisqu'il a fait 4 étapes, a le mieux réussi à éluder l'objet même de sa convocation.

FERRER, Vincent, né 23 janv. 1357 à Valence, de parents chrétiens, étudia à Barcelone et à Lérida, et mérita par de nombreux écrits le titre de Dr théol. Le pape Benoît XIII, P. de Lune, l'appela auprès de lui à Avignon, après qu'il eut été le confesseur de la reine Yolande et le nomma cardinal 1395. A partir de ce moment cet homme jusque-là distingué par sa piété intime et par sa tendance philos, et théologique, prit à cœur, malgré les conseils de Gerson et de ses partisans, de se mettre k voyager en conviant le monde k la repentance. Muni des pouvoirs d'un légat spécial il se consacra k cette œuvre depuis 1397 jusqu'à sa f 5 avril 1419. Les foules se rassemblaient à sa voix, et il leur imposait des prescriptions et des exercices de piété qui ont peut-être été l'origine de la secte des flagellants en Italie, vers 1400. Il improvisait avec puissance; plusieurs de ses discours ont été recueillis et publiés. Tenu pour un saint pendant sa vie, il fut canonisé par Calixte III, 1455.

FERTO, ou Fertum pro autore, offrande ou tribut que tous les clercs étaient tenus de donner à l'év. par héritage; c'était un reste de l'ancien Droit des dépouilles.

FERUS, nom latin de Wild, q. v.

FESCH, Joseph, cardinal; d'origine suisse, oncle par alliance de Napoléon I®r; né à Ajaccio 1763. Élevé dans un séminaire ecclés., il prit les armes au commencement de la révolution, redevint prêtre après le Concordat, fut nommé archev. de Lyon en 1802, cardinal 1803, puis ambassadeur à Rome jusqu'en 1806. En sa qualité de grand aumônier de l'empire il bénit le mariage de l'empereur et assista à son couronnement. Il refusa le titre de primat d'Allemagne, comme coadjuteur de Dalberg, et refusa de même l'archev. de Paris 1806. Plus soucieux des intérêts de l'Égl. que des projets de son neveu, il ne craignit pas au conc. national de 1810, qu'il présidait à Paris, de s'opposer aux volontés de Napoléon à l'égard de Pie VII, et il tomba en disgrâce. Il se retira dans son diocèse de Lyon jusqu'en 1814. Après l'abdication de l'emp. il se rendit à Rome, où il resta jusqu'à sa f 1839, cultivant les lettres et les arts, et sans renoncer à son archevêché, que les Bourbons auraient bien voulu lui enlever.

FESSLER, Ignace-Aurèle, né 18 mai 1756 à Czorendorf, Hongrie. D'abord élève des jésuites, puis jésuite lui-même, il fut frappé de la corruption générale des mœurs, et la lecture des encyclopédistes lui rendit insupportable la vie monastique. Joseph II le délivra de la règle du couvent en le nommant prof, de langues orientales et d'exégèse à Lemberg. Un procès de presse l'obligea de s'enfuir en Silésie; il s'y convertit et entra en relations avec les fr. mo-raves, qui exercèrent sur lui une heureuse influence. En 1809 il fut appelé à Pétershourg comme prof, de langues orientales; de là il se rendit à Sarepta, puis à Saratow comme surintendant; en 1819 il était év. de la Nouvelle-Finlande. f 1839. Outre son Hist. de Hongrie, en 10 vol., et d'autres écrits moins importants, romans, etc., il a écrit sa propre biographie sous le titre de Souvenirs d'un pèlerinage de 70 ans, dans laquelle il raconte sa vie, ses expériences et sa conversion.

FÊTES. Chez tous les peuples les fêtes ont un caractère religieux et tendent à ramener l'homme au sentiment de sa dépendance envers Dieu. Elles se rattachent soit à des faits d'ordre naturel, tels que les nouvelles lunes, le retour du soleil, les moissons; soit à des événements histor., patriotiques ou religieux; soit à une combinaison, une association de l'un et de l'autre. tels que la Pàque, le Sabbat, la Fête des tabernacles. De toutes les fêtes juives les chrétiens n'en ont conservé que deux, la Pâque et la Pentecôte; encore en ont-ils modifié ou élargi la signification. La Pàque a été dédoublée; on en a fait deux solennités, celle de la crucifixion et celle de la résurrection. On y a ajouté ensuite celle de l'Epiphanie et celle de l'Ascension; plus tard celle de Noël. L'Octave, ou le renouvellement de la fête au bout de huit jours, a augmenté le nombre des solennités, et l'on y a ajouté pour Noël et pour Pâques un temps spécial de préparation et de retraite spirituelle, l'Avent et le Carême. Il s'est ainsi formé un cycle de fêtes, qui comprend presque toute

Tannée ecclésiastique. Plusieurs égl. distinguent ainsi les dimanches qui précèdent Pâques, sous les noms suivants, empruntés aux Psaumes du jour: lo Esto mihi (Sois moi, Ps. 31, 2). 2o In-vocavit, Ps. 91, 15. 3o Reminiscere, 25, 6. 4° Oculi, 25, 15. 5o Lœtare, Es. 54, 1. 6o Judica, Ps. 43, 1. 7o Palmarum, Matl. 21. Viennent ensuite les dimanches de Quasimodo-geniti, ou Dominica in albis, Act. 1, 10. 1 Pier. 2, 2., Jfwmcordûw domini Ps. 89, 1. Jubilate 66, 1. Cantate 98, 1. Rogate Es. 48, 20., Exaudi, Ps. 27, 7., que suivent l'Ascension, la Pentecôte et la Trinité. Les cathol. ajoutent à ce Semestre Domini la fête du saint sacrement ou Fête-Dieu, le jeudi après la Trinité, fête qui est d'ordinaire remise au dimanche suivant. Un grand nombre de fêtes s'établirent en outre peu à peu en souvenir de saints personnages, des apôtres, de Marie, des martyrs, des évangélistes, de saint Michel, de la Toussaint, etc. Il fut même convenu que tous les jours qui rappelleraient le souvenir d'un saint, deviendraient par là même jours fériés. On s'est heurté ainsi à une impossibilité matérielle, et l'on a dû distinguer entre les fêtes du chœur, c.-à-d. du clergé seul, et celles du peuple. On a distingué encore les fêtes entières et les demi-fêtes, suivant qu'elles prenaient la journée entière, ou seulement la matinée. Le nombre excessif de ces jours de chômage avait déjà soulevé de nombreuses plaintes avant la réformation. Luther les réduisit considérablement, et ne garda, outre les fêtes bibliques, que celles de Marie et de Jean-Baptiste, qui même tombèrent bientôt plus ou moins en désuétude. L'Égl. réformée, plus radicale, ne garda que les fêtes relatives au Sauveur et au Saint-Esprit, soit No'él, Pâques, l'Ascension et Pentecôte. Peu à peu on y ajouta la fête de la Réformation et un jour de jeûne, ce dernier d'abord en souvenir de la Saint-Barthélémy, puis comme simple jour de pénitence et de recueillement. Le jour de Pan, fête civile, est cependant férié dans plusieurs égl. par un service religieux; il en est de même en France des fêtes catholiques, lorsqu'elles coïncident avec les fêtes patronales, dites kermesses ou ducas-ses. On distingue les fêtes immobiles, qui ont lieu à un jour fixe du mois et de l'année, et les fêtes mobiles qui dépendent de Pâques et de la lune de mars. Les conciles ont décidé que la Pâque aurait lieu le dimanche qui suit la première pleine lune après l'équinoxe du printemps. Si l'équinoxe commence après la lune de mars, c'est celle d'avril qui détermine la date de la Pâque. Lorsqu'une fête est reconnue par le gouvernement, le jour est dit férié, chômé ou carillonné; les travaux publics sont suspendus, les écoles et les tribunaux chôment, les banques ferment et les effets échus ne peuvent

être tirés que le lendemain. Avant 1789 on en comptait 82 par an, dimanches compris.

La fête du Saint-Sacrement, qui se célèbre le jeudi après la Trinité, est la plus brillante du catholicisme. Le riluel en est pompeux et remonte à Thomas d'Aquin. Une procession en dehors de l'église, précédée de la sainte hostie, en constitue la partie essentielle; il y a 4 stations principales, ou reposoirs; on y lit le commencement des 4 Évangiles et des prières spéciales. Établie par une bulle d'Urbain IV 1264, la fête fut confirmée par Clément V à Vienne 1311. Elle repose sur la doctrine de la transsubstantiation et fut célébrée, pour la première fois dans le diocèse de Liège par l'év. Robert et le légat Hugo 1247. C'est une vision de la | prieure Julienne qui lui donna naissance; cette religieuse vit en songe une échancrure à la lune, et la Vierge lui révéla que cette échancrure indiquait une lacune, il manquait une fête à l'Église; celle du sacrement fut instituée.

La fête des Anges gardiens date du 16me siècle et vient d'Espagne où elle fut célébrée d'abord le le mars, mais elle a subi de nombreuses vicissitudes. En France on la mit au premier jour i libre après la Saint-Michel. Paul V la reconnut par une bulle du 27 sept. 1608; Clément X en 1670 la fixa au 2 oct. et en fit une fête générale, duplex cum octavâ. Finalement les papes l'ont mise au premier dimanche de septembre.

FÉTICHISME. C'est la forme la plus inférieure de la religion, l'adoration d'un fétiche, c.-à-d. d'un objet naturel ou fabriqué, feu, arbres, fleuves, ossements, auquel on attribue des vertus magiques et dont on fait le centre d'un culte idolâtre. Il n'est pas même nécessaire que l'objet soit beau, ou qu'il ait aucun charme extérieur; presque toujours il est indifférent, sinon grossier et hideux. Le fétichisme appartient à un état de civilisation et de développement tout primitif, où l'idée instinctive de Dieu se confond encore avec la matière et ne peut s'élever au-dessus du monde visible. La distinction entre le naturel et le surnaturel est si confuse qu'après avoir adoré son fétiche, le même homme pourra le maltraiter et le détruire s'il n'a pas répondu à ses espérances. C'est surtout chez les nègres que se trouvent les fétichistes; il y en a cependant aussi en Amérique, les manitous, et en Sibérie, les burkhans.

FEU. lo Le baptême de feu, Matt. 3, 11. Luc 3, 16. s'entend ordinairement du martyre; cf. Matt. 20, 22. 23. — 2o Le jugement par le feu, v. Jugement. — 3o Le supplice du feu, généralement préféré par l'Église, en vertu de sa maxime: t L'Égl. a horreur du sang. » Elle aurait pu aussi pendre ou noyer, ce qui eût été moins crael.

FEUERBACH, Louis-André, né à Ansbach 28 juill. 1804. Prof, à Erlangen 1828, il rentra bientôt dans la vie privée pour se consacrer tout entier à ses travaux littéraires. Il exagéra encore le.* idées de Strauss, en tira les conclusions logiques, déclara que la religion n'était qu'une illusion, et peut être considéré comme un des pères du nihilisme. Il a écrit une Hist. de la philos, depuis Bacon jusqu'à Spinosa, une Vie de Bayle, les Principes de la philos, de l'avenir, une Critique de Leibnitz, Etudes sur le christianisme, Essence de la religion, Pensées sur la mort et l'immortalité, Théogonie, etc. Philos, hégélien, il l'a été d'une manière grossière. f 1872.

FEUILLANTS, Folietani, congrég. de l'ordre des cisterciens, fondée à l'abbaye de Feuillant, près de Toulouse, par l'abbé Jean de la Barrière, né 1544, qui l'avait reçue comme com-inende après que son prédécesseur, l'abbé Crus-sol, eut passé au protestantisme, 1562. Sa réforme fut sévère et rencontra une vive opposition. Les feuillants devaient rester tête et pieds nus, coucher sur des planches, manger à genoux et s'imposer diverses autres privations inhumaines. Le pape ne les en reconnut pas moins 1585 et 1587, et Clément VIII donna à la congrég. tous les droits et les caractères d'un véritable ordre. La règle ayant été adoucie en 1595, le nombre des cloîtres se multiplia tellement qu'Urbain VIII partagea l'ordre en deux congrégations, la française et l'italienne, chacune avec son général. Il y eut aussi des sœurs feuillantines, dont les principaux couvents étaient à Moutesquiou, Toulouse et Paris; Anne d'Autriche les protégea. — Le parti modéré du club des jacobins, 1789, s'appelait club des Feuillants, parce qu'il s'était établi au couvent de ce nom, près des Tuileries.

FÈVRE(Le), v. Faber, Lefèvre d'Étaples, etc.

FICHTE 1° Jean-Gottlieb, né 19 mai 1762 à Rammenau, Haute-Lusace, étudia d'abord la théol. à Iéna, 1780, puis l'abandonna pour la philosophie. Précepteur en Saxe, en Suisse, à Varsovie, à Kœnigsberg, il se lia dans cette dernière ville avec Kant, ét publia sa Critique des Révélations, 1792. En 1793 il écrivit sur la Ré-vol. française. En 1794 il fut appelé comme prof, à Iéna, où il obtint un grand succès par son éloquence et la nouveauté de ses idées philosophiques. A cette époque de sa vie se rattachent ses principaux ouvrages: Doctrine de la science; Droit naturel; Système de morale. Accusé d'athéisme pour un passage mal interprété d'une étude sur les motifs de notre foi à une providence divine, il donna sa démission 1799 et se retira à Berlin où il enseigna pendant quelques années comme prof, libre. En 1805 il fut nommé à Erlangen, mais continua de donner de temps en temps des conférences à

Berlin; ses Discours à la nation allemande 1807 contribuèrent beaucoup à réveiller l'esprit public lors de l'invasion des Français. Enfin en 1809 il fut définitivement appelé à l'univ. de Berlin comme prof, et recteur, et il y resta jusqu'à sa f 28 janv. 1814. Il fut enlevé par une épidémie due aux misères de la guerre. Son système est connu sous le nom d'idéalisme trans-cendental. La notion absolue, c'est le moi. Le moi se pose, se reconnaît lui-même par son action intérieure. De là il passe à la notion de l'existence en elle-même, de la vie indépendante du moi; puis à l'Être qui réalise cette existence, Dieu. Cet être universel se répand, non seulement sur le moi pensant, mais sur une foule d'objets et d'individualités différents, ce qui fait naître la notion d'univers. Malgré ses lacunes, cette théorie exposée avec beaucoup d'art a fait la réputation de Fichte, mais il s'est rendu plus populaire encore par son action politique; il a travaillé à l'émancipation de l'Allemagne et a concouru à l'insurrection de 1813 contre Bonaparte. S'il s'est justifié du reproche d'athéisme, il n'a pu se laver de l'accusation d'une espèce de panthéisme. Il a eu de nombreux disciples, entre autresSchelling, qui plus tard se tourna contre lui. — 2° Son fils Erama-nuel-Hermann, né à Iéna 18 juill. 1797, prof, de philos, à Tubingue en 1842, puis à Bonn. Il a écrit une Vie de son père, une Ontologie, une Théol. spéculative, une Morale, et a travaillé à concilier la spéculation avec le Christianisme véritable.

FICIN, Marsile, né à Florence 19 oct. 1433, fils du médecin de Cosme de Médicis, devint à 18 ans le précepteur des jeunes princes et étudia avec passion la littér. grecque et la philos, platonicienne, qu'il finit par enseigner publiquement au milieu d[an grand concours de disciples, parmi lesquels Pic de la Mirandole. Il entra dans les ordres, toujours comblé des bontés de la famille Médicis, fut recteur de deux égl. de Florence, chanoine de la cathédrale et prédicateur distingué, f 1499. Il croyait à l'astrologie, à l'alchimie et à la divination. Ne distinguant pas la philos, platonicienne et la néo-platonicienne, il essaya de prouver leur accord avec le christianisme. Ses principaux ouvrages tendent à ce but: Theol. platonica, De relig. christianâ, Institutions ad Plat. disciplinant; ils ont eu de nombr. éditions, trad. et commentaires.

FIDÈLE (roi très), ou roi très croyant; rex fidelissimus, titre d'honneur donné aux rois de Portugal par Benoît XIV.

FIDJI (îles), dites aussi Archipel de Viti, dans le Grand océan équinoxial; population de cannibales sauvages et farouches. Ces îles, évangé-lisées depuis 1822 par les wesleyens, sont auj. un des plus beaux fleurons de leurs missions.

Elles professent toutes le christianisme évangélique.

FILIOQUE (et du Fils). C'est au conc. de Tolède 598 que l'Égl. décida pour la première fois que le Saint-Esprit, personne divine, ne procède pas seulement du Père, mais aussi du Fils, ce qui amena entre l'Égl. d'Occident qui acceptait, et celle d'Orient qui repoussait cette addition, une controverse d'autant plus vive et plus longue que, de part et d'autre, on ne devait pas comprendre bien clairement l'objet même de la discussion. Auy encore la question n'est pas tranchée; le monde romain tient pour le filioque; l'Égl. grecque le repousse; les Égl. protestantes n'y attachent pas d'importance et n'en parlent pas.

FILLEUL, Jean, menuisier de Sancerre, et son ami Julien Léveillé quittaient Nevers en 1554 pour échapper à la persécution, et se rendre à Genève où leurs femmes étaient déjà. Découverts ils eurent à subir un véritable interrogatoire et ils déclarèrent ouvertement leur foi en la religion évangélique, ce qui les fit condamner à mort. Le 15 janv. 1555, après avoir eu la langue coupée, ils furent brûlés vifs.

FINLANDE, Finnois. Originaires du nord de l'Asie, probablement une branche des Huns, les Finnois s'étaient fixés entre la Vistule et les monts Carpathes ou le Volga, lorsque l'arrivée des Goths les refoula jusque dans la Sarmatie septentrionale et la Scandinavie, contrées décrites par Strabon et Pomponius Mêla avec des exagérations ridicules, mais déjà mieux connues par Tacite. La piraterie leur offrait plus de ressources que la culture d'un sol ingrat; leurs mœurs étaient grossières, leurs idées religieuses presque nulles; à peine un pressentiment de l'immortalité. Les efforts d'Anschar n'étaient pas arrivés jusqu'à eux, et il fallut comme souvent ailleurs, y revenir à plus d'une reprise avant que ces tribus se convertissent. Leur défaite et la conquête du pays par les Suédois fut même le moyen matériel qu'employèrent les missionnaires pour les soumettre à l'Évangile. Eric IX, dit Jedvarson, surnommé le saint, roi de Suède, se mit en campagne 1157, accompagné du belliqueux év. Henri d'Upsal, somma les habitants de se soumettre, les battit, et après d'affreux massacres fit baptiser les survivants. Il fonda à Rendamecki un évéché, qui en 1360 fut transféré à Abo. L'év. Henri qui irritait le peuple par son arrogance, fut assassiné 1158 par un gentilhomme qu'il avait offensé; canonisé pour ce prétendu martyre, il devint le patron de la Suède et de la Finlande. L'œuvre de la mission n'avança que lentement et rencontra la plus vive résistance de la part des Cures et des Tawastes. Nouvelle croisade du comte suédois Birger 1249. Enfin, avec le concours du pape et de ses indulgences, le maréchal Torkel, vers 1293, finit par écraser le pays, poussa ses conquêtes jusqu'au lac Ladoga, et soumit définitivement ces populations au christianisme. L'év. Pierre, de Westeraes, comprit heureusement qu'il fallait traiter les habitants avec plus d'humanité, et en leur donnant des lois, il leur laissa leur langue et leurs mœurs. De nombreux couvents s'élévèrent; le chapitre et l'école d'Abo devinrent le centre distingué d'un mouvement intellectuel et religieux. C'est aussi de Suède que la Réforme pénétra en Finlande; l'Égl. est luthérienne et possède des évêques à Abo, Borga et Kuopio.

FIRMILIEN, év. de Césarée en Cappadoce, ami d'Origène et très considéré de ses contemporains. f à Tarse 269. On a de lui une lettre trad. en latin, dans les œuvres de Cyprien; il se prononce contre la validité du baptême des hérétiques et contre la doctrine de Rome.

FISCHER, v. Piscator.

FISHER, Jean, év. de Rochester, né à Be-verley, près d'York, en 1455 ou 1459, fut chancelier de l'univ. de Cambridge, confesseur de là mère d'Henri VII, et assista Henri VIII, qui l'appréciait, dans la rédaction de son traité Des sept sacrements. Il s'opposa au divorce d'Henri VIII avec Catherine. Ses relations avec la prétendue prophétesse Élis. Barton le rendirent suspect; accusé de haute trahison il fut emprisonné. Sa nomination au cardinalat servit à Henri de prétexte pour lui faire trancher la tête, comme ayant méconnu l'autorité royale. Il f 1535 avec un courage chrétien. Ses écrits contre la Réforme ont été publ. à Wtirzbourg 1597.

FISTULE, petit roseau, chalumeau, brin de paille, au moyen duquel les fidèles aspiraient le vin de la communion, avant que la coupe leur eût été retranchée. On évitait ainsi que le vin du sacrement se répandit sur le sol.

FLACIUS, Matthias Flacich, IllyiHcus, strict luthérien, né 1520 à Albona, Illyrie, aurait voulu par zèle religieux se renfermer dans un couvent, mais un de ses parents, Lupetinus, provincial des minorités, secrètement attaché à la réforme, l'engagea à se rendre en Allemagne 1539. Il traversa Bâle, Tubingue, Ratisbonne, et arriva à Wittenberg, où il s'attacha à Luther. Il devint en 1545 prof, de l'A. T., et se maria. A la suite de la guerre de Smalcalde sa vie fut troublée. Il dut s'enfuir à Brunswick. A peine de retour, il quitta sa place à cause de l'Intérim de Leipzig et se rendit à Magdebourg. En 1557 prof, à Iéna, il donna sa démission 1561, parce qu'il ne voulait pas accepter que la censure du Consistoire restreignît sa liberté d'enseignement. Il passa ses dernières années à errer de Ratisbonne à Amsterdam, Francfort et Strasbourg, accablé de soucis matériels, et f 1575 dans un hôpital de Francfort, réduit au pins complet dénuement. Il ne cessa de défendre avec le plus infatigable désintéressement, mais d'une manière outrée, la vérité, telle qu'il l'avait reçue de Luther, et il combattit les doctrines modérées d'Osiander et de Schwenkfeld avec la même passion que le philippisme et l'Intérim de Mélanchthon. On lui doit la publication des Centuries de Magdehourg, plusieurs écrits de polémique, une Clavis Scripturœ sa-rnp, un exposé de la doctrine du Péché originel, qu'il exagéra au point de se faire accuser de manichéisme, etc.

FLAGELLANTS, Flagellatio On voit apparaître déjà dès le lime siècle des processions d'hommes, nus jusqu'à la ceinture, et armés d'un fouet dont ils se frappent sans miséricorde, en chantant des psaumes et voyageant de ville en ville, se réunissant sur les places publiques et dans les égl. pour exhorter les hommes à la repentance. Dès 1268 ils forment une véritable secte, fanatique produit de prédications insensées et d'appels à une pénitence mal entendue. Les malheurs des temps et l'attente de la fin du monde excitaient les esprits; c'était comme une épidémie, servie et entretenue par de puissants prédicateurs populaires, le dominicain Reinier de Pérouse, Antoine de Padoue, Vincent Ferrer, etc. Les principales crises eurent lieu en 1261 à Pérouse et au sud de l'Allemagne, appuyées de visions et d'ordres célestes; en 1398-1399 sur le littéral de Gênes (Bianchi, pèlerins blancs, à cause de leur costume); à Magdebourg et en Alsace 1347-1349, à l'occasion d'une grande peste; il ne fallut rien moins que l'intervention de la Fran ce, une bu'le du pape, et même quelques bûchers pour y mettre ordre. De nouveaux cas se présentèrent encore à S >n-gerhausen en 1434 et 1481. On s'explique difficilement la persistance de cette folie, mais Henri III lui-même et sa cour, peu suspects d'une piété trop austère, se pa sèrent aussi cette fantaisie 1574 et s'enrôlèrent momentanément dans la confrérie. On trouvait encore des flagellants en Italie et au sud de la France au milieu du siècle dernier.

FLAMINIUS, M.-Antoine, né à Bologne 1536; ecclésiastique, savant et poète, vécut à Viterbe et à Ferrare et se rangea parmi les amis de la Keforme. Il refusa la présidence du conc. de Trente, et sur son lit de mort, redisant sa confession de foi, il omit le mot de transsubstantiation. A la demande du cardinal Polus, il avait traduit les Psaumes en vers latins, mais avec des notes qui rappellent le Bienfait de Christ et l'Institution de Calvin.

FLATT lo Jean-Fréd., né à Tubingue 20 févr. 1759, prof, de philos, en 1785, de théol. morale en 1792, f 24 nov. 1821. Élève de Storr, il était supranaturaliste, mais avec une tendance éclectique, cherchant à concilier les résultats de la science et de la philos, avec la foi positive. Il introduisit à Tubingue la philos, de Kant. Ses œuvres ont été publ. par Steudel 1823. — 2o Charles-Chrétien, son frère, né 1772 à Stuttgard, prof, de théol. à Tubingue, disciple de Storr, dont il traduisit la Doctrina christ membre du Conseil ecclés. supérieur 1812, directeur du Conseil d'instruction publique et surintendant général d'Ulm, 1829. f 1843.

FLATTICH, Jean-Fréd. né 3 oct. 1713 à Bei-hingen, aumônier militaire à Aspergl742, puis pasteur en divers lieux, fut un des chefs et des représentants les plus accrédités du pié-tisme wurtembergeois pratique. Il s'est surtout occupé de pédagogie, et avec autant de succès que de sagesse dans les principes; f 1797. V. Ledderhose.

FLAVIEN lo Clément, fils d'un fr. de Ves-pasien, penchait vers le christianisme, ainsi que Domitilla son épouse. Domitien le fit mettre à mort 96 sous prétexte d'impiété. Cette mort fut vengée par celle de Domitien, assassiné par Étienne, affranchi et intendant de Domitilla. — 2° Pair, d'Antioche, adversaire de l'arianisme, élu 381 comme successeur de Meletius, et du vivant encore de Paulin, l'év. des eustathiens, ce qui prolongea jusqn'au 5m« siècle le schisme dans l'Égl. de Syrie. Soutenu par les Orientaux contre les Occidentaux, Flavien réussit à se maintenir. Il finit par être reconnu de tous 393, après la f d'Évagrius, 392, qui avait lui-même succédé à Paulin f 388. Il persécuta durement les messaliens, ou euchytes. Il plaida auprès de l'emp. Théodose la cause de ses ressortissants qui dans une émeute avaient renversé les statues impériales, et obtint leur grâce, f 404. Chrysostôme fait son éloge et lui attribue un beau discours. — 3° Patr. de Constantino-ole 447, présida le concile où Eutyches fut condamné 448. Malgré l'adhésion de l'év. de Rome 449, il dut à son tour comparaître comme accusé au conc. d'Éphèse, convoqué par l'empereur; il fut déposé comme fauteur de troubles, et comme il protestait, Dioscure qui présidait ce concile de brigands le maltraita si fort qu'il en f 449.

FLÉCHÈRE (De la), v. Fletcher.

FLÉCH1ER, Esprit, né 10 juin 1632 à Per-nes, comtat d'Avignon, d'une famille obscure et pauvre, fut élevé par un oncle, le p. Audifret, supérieur général de la congrég. des doctrinaires, qui l'y fit entrer à l'âge de 16 ans. A la mort de son oncle il vint à Paris, composa une pièce de vers latins sur le carrousel de 1662, fut nommé d'abord précepteur du jeune Cau-martin, puis, par la protection du duc de Mon-tausier, lecteur du dauphin. Il s'était déjà fait une réputation comme orateur; à la f de la duchesse de Montausier (Julie de Rambouillet) 1672, il fut chargé de faire son oraison funèbre; il fit aussi celle de la duchesse d'Aiguillon 1675, et en 1676 celle de Turenne. Nommé membre de l'Acad. française en 1675, le même jour que Racine, il obtint un grand succès. Le roi lui donna en 1585 l'évéché de Lavaur, et en 1587 celui de Nîmes, où il sut. malgré la révoc. de l'Édit de Nantes, se concilier l'estime et l'affection de tous, même des protestants. En 1690 il écrivit encore l'oraison funèbre de son ancien protecteur le duc de Montausier. Il passa 23 ans à Nîmes; la guerre et les persécutions des ca-misards eurent lieu sous son épiscopat, sans qu'on voie qu'il y soit guère intervenu, ni en bien, ni en mal. + 16 févr. 1710 à Montpellier. Outre ses 6 Oraisons funèbres qui l'égalent presque à Rossuet, il a laissé des Sermons, des Panégyriques de saints, une Vie de Commendon, deux écrits contre lescamisards et leurs prophètes, une Hist. de Théodose un peu panégyrique, une Vie du cardinal Ximénès, et des Mém. sur les grands jours de Clermont. Son style est pur, mais un peu maniéré.

FLETCHER, ou plutôt Flécher e (De La), Jean-Guill., plus connu sous son nom anglais de William Fletcher, né à Nyon 12 sept. 1729 d'une famille distinguée, alliée de loin à la maison régnante de Sardaigne, étudia à Genève, apprit l'allemand à Lutzbourg, et entra momentanément au service militaire en Hollande. Il accepta ensuite un préceptorat chez M. Hill M. P., et ses vues le portèrent de nouveau vers le ministère, qui avait été sa première et modeste ambition. En 1756 il perdit son père, en mars 1757 il fut consacré suivant le rite anglican. Les instances de sa mère, veuve et isolée, ne purent le décider à venir s'établir en Suisse. En 1759 il fut nommé pasteur à Madeley, église pauvre et très chargée, et malgré les offres les plus brillantes, il ne voulut jamais l'abandonner. Quoique élégant, distingué, délicat, il était simple de goûts et de manières. U concourut, avec Wesley et Whitfield, à ranimer le zèle religieux en Angleterre; sa prédication était entraînante comme la leur, quoique plus simple. En 1769 et 1770 il visita le midi de la France, les Gévennes, Marseille, l'Italie jusqu'à Rome et Naples, et revint par la Suisse. Il prêcha plus, fois à Nyon. De retour en Angleterre, il fut chargé de l'inspection du séminaire de Trevecca, mais l'excès de travail altéra sa santé. Il dut prendre un nouveau congé, visita le midi de la France et la Suisse, et rentra dans sa paroisse en 1781. Il se maria, à 52 ans, pour avoir une aide dans ses travaux de pasteur, mais sa santé était trop éprouvée, et ayant voulu prêcher un dimanche malgré une violente fièvre, il f le dim. suivant, 11 août 1785, âgé de 56 ans, en pleine paix. Quoiqu'il n'aimât pas la controverse* il avait été appelé à en faire. Dans la question des colonies américaines se refusant à payer certains impôts, il s'était prononcé en leur faveur. Il a publié des sermons, quelques ouvrages d'édification, et un poème La Louange.

FLEURY 1° ville et abbaye du dioc. d'Orléans, fondée 610 par l'abbé Leodebot; elle s'acquit bientôt par la possession des reliques de de saint Benoit une grande considération, qui s'augmenta encore par la fondation d'un Hospi-taie nobilium et pauperum. L'abbaye fut brûlée par les Normands 865, mais les moines prirent leur revanche en 878, et lors d'une 3™ attaque, une simple apparition de saint Benoît fit reculer le duc envahisseur. Dans le désarroi général la discipline s'était aussi relâchée; Odo de Glugny réussit à la rétablir en dépit de l'opposition des moines, et dès lors l'école se releva et compta jusqu'à 5000 disciples. La riche biblioth. fut détruite pendant les guerres de religion et les moines de Fleury se rattachèrent à la congrég. de Saint-Maur.

2° L'abbé Claude, né à Paris 6 déc. 1680, avocat au parlement à 18 ans, y resta 9 ans, embrassa 1667 la carrière ecclésiastique, fut nommé 1672 précepteur des princes de Conti, puis abbé de Loc-Dieu, et en 1689 sous-précepteur des enfants de France dont Fénelon était gouverneur. En 1696 il entra à l'Acad. Le prieuré d'Argenteuil lui fut donné 1706; nommé confesseur de Louis XV en 1716, il donna sa démission en 1722, et f 14 juill. 1723. Savant et modeste, il ne fut ni moliniste, ni janséniste, ni ultramontain; il défendit l'Égl. contre les rois, et le pouvoir épiscopal contre les entreprises des papes. Il a écrit un Catéch. historiq. 1679; Mœurs des israélites, M. des chrétiens; du Choix des études, etc. Mais son plus important ouvrage est son Hist. ecclés., en 20 vol., qui va jusqu'en 1414, et que Voltaire lui-même appréciait pour l'impartialité des jugements, pour l'exactitude du récit et pour le naturel du style.

3o André-Hercule de Fleury, né à Lodève 1653, aumônier de Louis XIV, év. de Fréjus, puis cardinal et ministre, ne joua aucun rôle religieux; bon administrateur à l'intérieur et aux finances, il fut faible dans la politique étrangère, f 1743.

FLIEDNER, Théod., fondateur de l'œuvre des diaconesses de Kaiserswerth, né 21 janv. 1800 à Epstein où son père était pasteur. Il étudia à Giessen 1817, fut précepteur à Cologne en 1820, et nommé pasteur à Kaiserswerth en 1821. Uo voyage de collecte qu'il fit en Hollande et en Angleterre pour sa pauvre église, le mit en évidence. Plusieurs personnes, et entre autres Élis.

Fry, exercèrent sur lui une grande influence, et doué lui-même d'une activité extraordinaire, il résolut d'utiliser pour le bien des pauvres et des malades les femmes croyantes, en donnant â leur charité une occupation régulière. Il commença par un asile pour les Madeleines repentantes. En 1836 il fonda la maison de diaconesses, à laquelle il adjoignit successivement un hôpital, un orphelinat, une école normale, et au bout de peu d'années il compta en Allemagne. en Amérique, en Orient un grand nombre de succursales, hospices, maisons d'éducation, etc., administrées par des élèves de la maison-mère, et placées sous sa direction plus ou moins immédiate. La maison de Duisbourg a aussi été fondée par lui. f 4 oct. 1864.

FLODOAKD, bénédictin, né à Épernuy 894. Son attachement à l'archev. Artold lui lit perdre sa place; il était chanoine à Reims. Louis IVrefusa de le nommer à l'évêché de Noyon et Tournai, où il avait été appelé. C'est un chroniqueur de premier ordre. Sans parler de son Hist. des papes en vers, qui va jusqu'en 936, il a écrit une Hist. de Reims, en latin, et des Annales, ou Chronicon, de l'hist. de France de 919 à 966 (réimpr. en français dans la Collect. des Mém. de Guizot). FLORE. Joachim (de), v. Joachim. FLORENCE (synode de), v. Ferrare. FLORENCE, ou Florent. Plusieurs hommes de ce nom: 1° un év. de Vienne, f 3 janv. 258;

un év. de Numidie, f 30 avril 259; 3<> un saint de Pérouse, f 1 juin? 4° un saint de Sé-ville, +23 févr. 485; 5°év. africain que le cruel Hunéric. arien, exila en Corse pour avoir combattu larianisme; 6<> év. de Strasbourg, successeur d'Arbogast, 633-675; abbé anglais, a écrit la vie du martyr Jodocus; 8° prêtre d'Aos-te, f 632, auteur d'une Vie de sainte Rusticule; 9° moine de Worcester, aussi nommé Bavo-nius, f 1118, auteur d'une Chroniq. générale qui fait de lui, après Bède, la principale source pour l'hist. d'Angleterre; il y a inséré presque toute la chronique de Marianus Ses tus, et de nombreux documents empruntés à Asser sur la \ie d'Alfred et sur d'autres sujets. Son travail va jusqu'à l'année de sa mort. Un moine du même couvent l'a continué jusqu'en 1141; 10* Florent Radwin, un des fondateurs des fr. de la vie commune, q. v. Né 1350, f 1400.

FLORIACIENS, congrégation fondée par l'abbé Joachim de Flore, q. v.

FLORLAN, soldat romain qui, pendant la persécution dioclétienne, se dénonça lui-même comme chrétien et fut noyé dans l'Ens, Haute-Autriche. Sur sa tombe s'éleva un couvent qui devint un fief des chanoines réguliers.

FLORUS, Drepanius, diacre de Lyon au 9*« siècle, écrivit contre la transsubstantiation et en

faveur de la prédestination de Gottschalk 852. S'inspirant d'Augustin il composa son Comment. sur les Ép. de Paul, qui fut longtemps attribué à Bède.

FLUE (Nicolas de), v. Nicolas.

FLYSTEDEN, v. Klarenbach.

FODRUM, redevance en argent que le prêtre doit à son èvêque; elle se règle ordinairement lors des visites d'églises.

FOI. D'une manière générale c'est une conviction intime, une confiance absolue, et le mot s'emploie en parlant des personnes, de soi-même, de la patrie, d'un maître. On a foi, on croit au patriotisme, au droit, à la vérité. C'est surtout dans le domaine religieux que le mot acquiert, par la nature même des choses, toute sa valeur et son importance. La foi en Dieu est à la base de toutes les religions. Mais comme dans chacune l'idée et le sentiment religieux revêtent nécessairement un caractère subjectif, par conséquent différent, soit traditionnel, soit individuel et personnel, le même mot a fini par prendre un sens, non plus absolu, mais relatif, et par s'appliquer soit à l'ensemble des conceptions relig. d'un peuple ou d'un culte, soit même à des systèmes particuliers. C'est en ce sens qu'on peut parler de la foi des juifs, de celle des musulmans, etc. Le christianisme a relevé, en la complétant, l'idée de la foi, et a précisé son double caractère intellectuel et moral. Croire en Dieu, c'est le connaître, mais c'est aussi lui obéir et l'aimer. Ce n'est pas seulement croire qu'il existe, mais c'est croire à sa puissance, à sa providence, à son amour, à son œuvre dans le monde, à ses manifestations, à ses révélations; par la foi les montagnes peuvent être transportées et les malades guéris; c'est manquer de foi que d'avoir peur au milieu de la tempête. Parmi les écrivains du N. T. c'est Paul qui a le plus nettement précisé la nature de la foi chrétienne, en l'opposant surtout à la conception judaïque. Dans les deux économies le but est le même, la recherche de la justice, la poursuite de la sainteté; mais l'ancienne veut y arriver par l'observation de la loi, et elle a fait l'expérience qu'elle ne pouvait réussir; la nouvelle part de l'idée de la grâce et de l'œuvre rédemptrice accomplie par Jésus-Christ. Dès lors les œuvres ne peuvent plus être envisagées comme un moyen de justification, mais comme de simples actes par lesquels le croyant reconnaît qu'il a été racheté et qu'il se doit tout entier à son Sauveur. Saint Jean accentue moins les divergences entre les deux testaments, mais il insiste de la même manière sur le fait que nous appartenons à Celui qui nous a sauvés, et que nous devons lui être unis en l'aimant comme il nous a aimés le premier. Saint Jacques combat la foi morte, de même que Ta fait saint

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Paul, et il insiste sur le fait qu'une foi sans œuvres n'est pas la foi et qu'elle ne peut sauver; les démons môme croient en Dieu, mais ils en frissonnent. Dans l'Ép. aux Hébreux, la foi a davantage les caractères de l'espérance; elle rend visibles les choses qu'on espère; elle est simple dans sa définition. Croire que Dieu est, et qu'il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent; en apparence c'est peu, en réalité c'est immense. — L'Église au moyen Age ayant peu à peu rendu aux œuvres le caractère juif de méritoires, la Réforme dut s'appliquer à relever surtout la doctrine évang. de la foi seule justifiante, du salut par la foi, en même temps qu'elle insistait sur la nécessité des œuvres comme preuve et justification de la vraie foi. L'école d'Amsdorf exagéra l'idée protestante jusqu'au paradoxe, en prétendant que les bonnes œuvres pouvaient être nuisibles au salut; elle aurait dft se contenter de dire qu'elles risquent de fàirè naître de dangereuses illusions. La doct. évangélique distingue en tout cas la foi générale que chacun admet plus ou inoins de confiance, par habitude, par tradition, et qui peut faire une Égl. ou un peuple chrétien, et la foi personnelle qui seule fait des chrétiens. Les esprits sont en général trop paresseux ou trop indifférents pour se donner la peine de rechercher par eux-mêmes ce qu'ils doivent et peuvent croire; c'est un effort à faire, et il faut le réveil de la conscience pour les y décider. Aussi reste-t-il toujours dans les populations dites chrétiennes, même chez les ecclésiastiques, chez les orthodoxes comme chez les rationalistes, un fort noyau de gens qui en sont encore à une espèce de catholicisme, c.-à-d. à la foi d'autorité. L s différents objets ou sujets sur lesquels peut se porter la conception ou la conviction religieuse, forment un tout, un ensemble, qui se décompose en un certain nombre de chefs ou de points principaux, qui ont reçu le nom d'articles de foi. Les uns sont essentiels au salut; les autres, malgré leur importance, ne sont pas essentiels, de même que dans le corps où tout est important, il y a des organes sans lesquels on peut cependant vivre, et d'autres dont la privation entraîne immédiatement la mort. A côté de la foi qui sauve, et qui est le centre de la doctrine, il y a des points de détail qui intéressent le progrès, la sanctification, le développement chrétien, et qui ont d'autant plus d'importance qu'ils touchent de plus près à la doctrine centrale, mais sur lesquels on peut varier ou ne pas être au clair, sans être pour cela en dehors de la foi. On les a par conséquent distingués, surtout depuis Nie. Hunnius, en points fondamentaux et non fondamentaux; puis les premiers en primaires et secondaires, et enfin les primaires en conservatifs et constitutifs. Ces distinctions, rejetées par l'Égl. cathol., ont souvent quelque chose d'arbitraire et d'artificiel, mais elles ne sont pas antiscripturaires et le bon sens les impose; il est évident que les articles relatifs à l'œuvre du Sauveur ont plus d'importance pour le salut que l'interprétation, p. ex. de telle ou telle prophétie. La réunion des divers articles de la foi d'une Église sonl désignés sous le nom de Confession de foi, ou Symbole, q. v. Chaque Église a la sienne, qui la distingue des autres.

FONSÈQUA 1° Rodrigue, év. de Burços, conseiller de la r. Isabelle, né à Séville 1452. f 1530, entrava autant qu'il le put l'expédition de Christ. Colomb, et s'opposa ensuite aux efforts de Las Casas pour l'amélioration du sort des Indiens. — 2° Pierre, jésuite, né 1528 à Cortizada, f 4599, professa à Evora et à Lisbonne, atteignit les plus hautes dignités de son ordre, fut ministre de Philippe II, et chargé par Grégoire XIII de plusieurs missions. Surnommé l'Aristote portugais, à cause de son Comment, sur la métaphysique d'Aristote, il a écrit en outre des Institutions dialectiques, et une théorie de la Science moyenne, Scientia média Dei, où il essaie de concilier le libre arbitre avec la Providence; Molina retravailla et compléta cette idée. On lui doit aussi un livre: De concordait-tid Providentiœ.

FONTÉVRAULD (ordre de). Le fondateur de cette riche abbaye de bénédictins, à 13 kil. de Saumur, fut Robert d'Arbrissel, né 1047, -f- i Coadjuteur de l'év. de Rennes, il travailla éner-giquement à la réforme des mœurs. Après la mort de l'év. il enseigna la théol. à Angers, puis vécut en solitaire dans la forêt de Craon. Ses appels à la repentance lui attirèrent beaucoup de monde, surtout des femmes, et il leur éleva plusieurs monastères, dont le princijul fut celui de la Fontaine d'Ebrald, fom Ebraldi. qui était double et comprenait un couvent d'hommes, un couvent de femmes, et un refuge pour les repenties. Toute communication entre les deux sexes était sévèrement interdile. A la tête de la communauté se trouvait une ab-besse, comme représentante visible de la sainte Vierge, sous le patronage de laquelle lordre était placé. La discipline était rigoureuse; le silence était absolu. L'ordre fut reconnu et cou-firmé en 1106 et 1113, mais il se répandit peu hors de France, et déclina rapidement. La der nière abbesse est f 1799, presque dans la misère. Depuis 1801 l'abbaye a été convertie en maison de détention; elle peut renfermer 2000détenus.

FONZIO, Bartolomeo, prédicateur éinineut de l'ordre des fr. mineurs, attaché aux doctrines évangéliques, fut condamné à Venise, 26 juin 1562, à être étranglé, puis brûlé. Mais les seigneurs de Venise, qui n'aimaient pas le bruit, obtinrent que la sentence fût modifiée, et le 4 août suivant, il fut noyé selon l'usage. Il mourut en paix.

FORERIUS, Forére, ou Fourier, Pierre, né 1565 k Mirecourt, curé à Matincourt, fondateur d'une Congrég. de pauvres sœurs enseignantes, qu'il avait d'abord organisée pour sa paroisse avec l'aide de quelques jeunes filles, et qui fut reconnue par Paul V, 1615 et 1616.

FORMOSE, pape 891-896; d'abord év. de Porto, puis missionnaire chez les Bulgares. Mêlé aux luttes de son temps, il se prononce d'abord par force pour l'emp. Lambert, iils de Guido, duc de Spolèle, qu'il sacre, puis contre lui et le remplace par Arnoul. roi de Germanie <ju'il couronne 896. Il condamne Photius. Etienne VI (ou Vil) fait déterrer son cadavre pour lui faire son procès; Jean IX le réhabilite, 898. Il a pour antipape Serge. Les actes du conc. qui l'avait condamné furent brûles.

FORMULE lo Pour la formule du Consensus helvétique, v. Helvétique. — 2° Le pape Pie IV, 1564, a prescrit une formule de serment, dit > du Conc. de Trente, parce qu'elle en renferme la doctrine, ainsi que les symboles de Nicée et de (Constantinople, avec rengagement de rester fidèle aux traditions apostoliques et aux ordonnances de l'Église. Ce serment est imposé à tous les hauts dignitaires et bénéficiaires de l'Église, ainsi qu'aux protestants qui passent au catholicisme. — v. Concorde.

FORSTER 1° Barthélémy, né 12 août 1753, curé d'Altenottingen, adversaire déclaré des superstitions; a écrit contre le culte des reliques, Munich 1803, et contre les indulgences. Il fut prof, de réthorique et de grec k Landshut. — 2° Jean, un des collaborateurs de Luther pour sa traduction de la Bible. Né à Augsbourg 1495, prof, d'hébreu k Zwickau; pasteur d'Augsbourg 1535, il perdit sa place en 1538, et une place de prof, k Tubingue en 1541, k la suite de difficultés avec des pasteurs à tendance zwinglienne, établit la réforme k Ratisbonne et k Schleusin-gen, succéda k Cruciger à Wittenberg, et prit part avec Mélanchthon au colloque de Naum-bourg sur le contlit d'Osiander. Il a écrit un bon Dict. hébreu, f 1556. — 3° Jean, né 1576 à Ansbaeh, surintendant à Manafeld, auteur d'un système des problèmes de la théol. f 1613. —

Jean-André, né k Hirschau 6 févr. 1759, prof, et directeur des séminaires de Ratisbonne et de Pfaffenhausen, puis pasteur près de Landau et conseiller intime du grand-duc; auteur d'un traité sur la Cure d'âme. — 5° Valentin, né 1530 k Wittenberg, élève de Luther et d'Eber, prof, de droit à Heidelberg, puis k Helmstàdt. f 28 oct. 1608. — 6o J.-Reinhold, né 1729 à Dirschau, Prusse, pasteur à Dantzig, puis directeur des colonies k Saratow, passa en Angleterre, accompagna Cook dans son second voyage, en qualité de naturaliste, enfin 1780 prof, d'hist. naturelle à Halle, f 1793. Auteur de quelques récita de voyage, d'observations géogr. et d'études sur les plantes australes. — 7o Jean-Georges-Adam, fils du précédent, né 1754. f en 1794 à Paris, a écrit la relation du voyage qu'il fit, comme son père, a\ec le cap. Cook, et divers Mélangés. — 8^ Georges, voyageur anglais, attache à la comp. des Indes, verse dans les langues orientales, f à Allahabad 1792.

FORTUNAT 1° Venantius-Honorius-Clemen-tianus, né 530 k Cenada, prèsTrévise, passa en Gaule vers 565, peu avant la désolation du nord de l'Italie par les Lombards, assista au mariage de Sigebert avec Bruneh aut, demeura quelque temps avec eux comme poète de cour; se rendit ensuite à Tours pour y faire ses dévotions, se lia avec Radegonde, femme de Clotaire, qui venait d'y fonder un monastère de filles, entra dans les ordres, devint son confesseur et l'aumônier du couvent, édifia le monde par ses vertus et ses poésies sacrées, et fut élu év. de Poitiers 7 ou H ans après la mort de Radegonde. Il f 609. On a de lui 7 Vies de saints, quelques traités de théol., des lettres et 249 pièces de vers, dont plusieurs sur des sujets religieux, entre autres, Vexilla Hegis, et le plus grand nombre, adressées à Radegonde ou à Agnès, sur les sujets les plus puérils et les plus frivoles, des fleurs, des violettes, du lait, des châtaignes, un bon repas, etc. C'étaient les mœurs du temps; il n'y a rien de risqué, ni d'équivoque au point de vue des mœurs, mais beaucoup de verve, le laisser aller d'une vie oisive, et un peu de gourmandise. On a pu y voir sans injustice une continuation d'Ausone, et l'origine de ces fabliaux qui devaient aboutir k Vert-Vert, k Ma-rot et à Gresset.

2° Patr. deGrado, Istrie. (Comme il prit parti pour Charlemagne dans l'empire de qui se trouvait son diocèse, contre les Grecs auxquels tenait Venise, il passa la plus grande partie de sa vie près de Charles. Rendu suspect k Louis-le-Déb. 821 il s'enfuit auprès de leinp. Michel; â son retour 824, Louis l'envoya au pape pour se justifier, et il f peu après.

FOSCARADI, né k Bologne 27 janv. 1512, év. de Modène 1550, envoyé au conc. de Trente 1551 et 1552; accusé d'hérésie sous Paul IV, il passa 7 mois dans les prisons de l'Inquisition. Libéré 1560, Pie IV l'envoya de nouveau à Trente, où il fut chargé de la rédaction des Canons. Il vota pour la concession du calice et pour la diminution du nombre des ecclésiastiques. En 1563 il entra dans la commission de la rédaction du catéch. et du brév iaire, f 1564.

FOURIER, v. Forerius.

FOUS (Fête des). Se rattachant aux anciennes saturnales qui s'étaient glissées ou maintenues dans l'Égl. comme fêtes de décembre ou de tin d'année, des jeux soi-disant solennels s'établirent, notamment en France, dans les écoles des couvents et des chapitres, où des enfants déguisés en prêtres, en abbés, en évêques, s'amusèrent à faire des processions et à imiter les cérémonies relig., d'abord tranquillement et sans malice, mais peu à peu avec un accompagnement de plaisanteries qui dégénérèrent bien vite en profanation, en satire ou en scandale. Les choses saintes furent tournées en ridicule, et l'Égl. dut intervenir. En 1198 le légat Charles-Pierre, en 1210 Innocent III, en 1212 le conc. de Paris interdirent ces folies, mais comme on n'obtenait rien, on se borna à les interdire aux ecclésiastiques et aux écoliers plus âgés. Le conc. de Bâle renouvela l'interdiction de la manière la plus absolue, 1435, ce qui n'empêcha pas l'usage de se maintenir jusqu'après les jours de la Ké-formation dans les pays restés catholiques. Le plus ancien écrivain qui en parle est Beleth, dans la 2™e moitié du 12me siècle, prof, do théol. à Paris (Summa de divinis officiis); il l'appelle Festum stultorum. Plus tard elle reçut les noms de Festum fatuorum, ou follorum, ou encore parce qu'elle avait lieu ordinairement le 4<ne dimanche de Noël, féte des Enfants innocents. DuCange en a conservé un rituel.

FOX lo Richard, né 1466, f 1324, conseiller de Henri VII, g.irde des sceaux, secrétaire d'État, entin év. d'Exeter et de Winchester, se retira des affaires à l'avènement de Henri VIII; il a fondé à Oxford le collège Corjrns Christi. — 2o théol. anglais, non conformiste, né 1517 à Boston, Lincolnshire, persécuté sous Marie-la-Sanguinaire, se fit correcteur d'imprimerie à Bâle et ne rentra qu'après la mort de Marie. II. fut précepteur du duc de Norfolk, qui lui procura une prébende. Auteur de plus, livres de controverse, dont le plus connu est son Martyrologe, ou Actes et monuments de l'Égl., appelé par les cathol. la Légende dorée. — 3° Georges, fondateur de la secte des quakers, q. v.

FRAGMENTS de Wolfenbuttel, traités et dissertations publiés à VVolfenbiittel par Lessing 1774 et 1778. On en a longtemps ignoré l'auteur; il a fini par être découvert en la personne du prof. Hermann-Samuel Reimar, de Hambourg. L'ouvrage entier n'a jamais été complètement publié; le mss. qui est à la biblioth de Hambourg a 4000 pages. La tendance en est franchement déiste; l'auteur nie la révélation et s'applique k relever les contradictions qui se trouvent dans l'A. T. Il estime que la substance du christianisme a été présentée par son fondateur et ses apôtres sous une forme mystique, et que pour la découvrir il faut la dépouiller de ses mystères et de son enveloppe. La publication de ces fragments fît sensation en Allemagne; ils sont restés comme le point de départ d'un développement nouveau, ou d'un nouvel essai pour concilier la raison avec la révélation, mais en donnant à la raison le dernier mot. Une controverse très vive entre Lessing et Gotze, pasteur principal de Hambourg, suivit de près l'apparition des premiers fragments. Il en a été publié d'autres par Klose 1850, mais qui n'ont pas obtenu le même genre de succès.

FRANCE, v. Gaules. On peut regarder Meaux comme le premier berceau de la Réforme, et presque Briconnet comme celui qui en fut lr promoteur. C'est là que se formèrent les premières assemblées, qu'eurent lieu les premières persécutions et que tombèrent les premiers martyrs. Les frères Leclerc 1523 et 1546, Pa-vannes 1525, Wolmar, Roussel, Lefèvre inaugurèrent le mouvement auquel Farel, Calvin et IJèze donnèrent ensuite une nouvelle impulsion et une direction positive. Les violenls édits d? François s'adoucirent pendant que Henri II cherchait des alliés parmi les princes de l'Allemagne, mais l'influence des Guise, ennemis de la maison de Navarre, provoqua l'édit de 1555 contre les hérétiques, et les Chambres ardentes suivirent aussitôt. La résistance aux Guise amena la conjuration d'Amboise 1560 et les exécutions auxquelles elle servit de prétexte. L'édit de Ro-morantin, mai 15t>0, proposé par les Guise, et que le parlement ne se décida qu'avec peine à enregistrer, remit aux prélats seuls la connaissance du crime d'hérésie et la repression des assemblées religieuses. Catherine, jalouse du triumvirat, accorda quelque répit aux protestants; le Colloque de Poissy, sans aboutir, leur rend espérance et courage. En sept. 1561 ils comptent déjà 2,150 églises. L'édit du 17 janv. 1562 leur donne la liberté de conscience, et aux nobles le droit de célébrer leur culte dans leurs domaines. Mais la fureur des Guise organise le massacre de Vassy, qui ouvre la 1™ guerre de religion, mare 1562; bataille de Dreux 19 déc. 1562; la paix se conclut à Amboise, 19 mars 1563. La non observation en pratique des libertés promises, leur restriction officielle par l'édit de Roussillon, 1564, et le danger prochain d'une ligue des Guise avec l'Espagne pour l'extermination des réformés, décidèrent Condé et Coli-gny à reprendre les armes; ce fut la 2<ie guerre de religion, sept. 1567; bataille de Saint-Denis, 10 nov.; la paix se conclut par la Convention de Longjumeau, 20 mars 1568. Mais elle est dite mal assise; la reine n en respecte pas les conditions, et une 3me guerre recommence le 25 août de la même année; elle est marquée par les batailles de Jarnac 13 mars 1569, de liiçon et de Moncontour; le prince de Condé blessé est assassiné, d'Andelot meurt, et Coligny, aidé de renforts anglais et allemands, marche sur Paris. La paix est signée à Saint-Germain, 8/ii août 1570. Elle assure aux protestants l'amnistie et la liberté religieuse, et leur accorde 4 places de sûreté; ils choisissent La Rochelle, Montauban, (Cognac et La Charité. Cette mesure, qui était une garantie nécessaire, fut cependant pour eux une cause d'affaiblissement; elle les constituait en parti politique, elle en faisait un État dans l'État et les condamnait par cela même à périr fatalement dans un délai plus ou moins rapproché. En outre, si elle les protégeait contre un coup de force en temps de guerre, elle ne les protégeait pas contre le crime et la trahison. La Saint-Barthélémy le leur prouva, 24 août 1572. Ces massacres sont le signal de la 4me guerre civile qui, après l'héroïque résistance de La Rochelle et de Sancerre, aboutit à la paix de La Rochelle, juin 1573, ratifiée 6 juillet 1574, mais n'autorise le culte public qu'à Montauban, Nîmes et La Rochelle. Ce n'était évidemment pas assez pour les protestants, mais c'était encore trop pour les catholiques, et une nouvelle guerre, la 5®e3 recommence avec l'appui des politiques et du duc d'Alençon, sept. 1574. La paix se fait à Beaulieu 8 mai 1576; elle porte le nom de Paix de Monsieur, et accorde d'autant plus d'avantages aux protestants, qu'on est plus décidé à en violer toutes les clauses aussitôt qu'on le pourra. La 6me guerre, à l'occasion de la Sainte-Ligue, se termine par la paix de Bergerac, 17 sept. 1577, Henri III traitant directement et ne supportant qu'avec neine les allures ambitieuses des Guise; l'édit de Poitiers en est la conséquence. La 7^®, appelée guerre des amoureux, commence en févr. 1580, et finit par le traité de Fleix, Périgord, 16 déc., après que les réformés victorieux ont pris Cahors et La Fère; leurs anciens droits leur sont reconnus, avec quelques avantages nouveaux, qui deviennent plus tard la base de l'édit de Nantes publié par Henri IV après la 8™e guerre; 15 avril 1598. Enfin la 9me guerre de religion 1620-1628, provoquée par la conversion forcée du Béarn, et marquée surtout par la chute de La Rochelle, mit fin au caractère politique du parti huguenot. La paix fut conclue à Alais 28 juin 1629, et l'Édit de grâce de Nîmes, juillet, en proclamant l'amnistie et en rétablissant les réformés dans toutes leurs libertés, leur rendit leur caractère d'Église, et leur permit de concentrer leurs efforts sur le développement de l'organisation et de la vie intérieure. Ce fut le beau temps de la théol. française réformée, des académies de Sedan, Saumur et Montauban. Mais l'absolutisme bigot de Louis XIV, ses besoins d'argent et d'absolutions, inaugurèrent un règne de persécutions, qui selon lui devait être un régne d'écrasement, et l'on vit apparaître successivement les conversions forcées, les enlèvements d'enfants, les missions bottées, les dra-gonades, la suppression l'une après l'autre de tontes les clauses de l'Édit de Nantes, et enfin, quand il n'en resta plus rien, en 1685, la suppression, ou la révocation du titre même de cet édit, qui restait encore aux malheureux comme une dernière espérance, une dernière illusion. Des émigrations en masse répondirent à cet acte sauvage, et ruinèrent le pays pour longtemps, sinon irrémédiablement. La guerre des Céven-nes, ou des camisards, 1702-1706, mit un terme à ces excès de la monarchie et eut pour résultat d'amener une espèce de tolérance tacite pour ceux qui étaient demeurés de reste en France.

Le 1er synode national, tenu à Paris en 1559, donna à l'Égl. réformée sa Discipline ecclésiastique, et sa profession de foi, dite Confession gallicane, en 40 articles, qui ratifiée en avril 1571 au synode de La Rochelle, le premier qui ait été tenu avec l'autorisation royale, fut dès lors connue sous le nom de Confess. de foi de La Rochelle. Son principe est la souveraineté de chaque Égl. et l'égalité de tous ses membres; elle est démocratique, par opposition à la constitution de l'Égl. de Genève, qui était davantage théocratique. La paroisse est administrée par un Consistoire qui, en cas de vacance, se renouvelle lui-même en soumettant ses choix à l'Assemblée. Un synode provincial, composé des pasteurs du ressort et d'un ancien par paroisse, se réunit deux fois par an. Le synode national est formé des délégués des provinces et ne se réunit que dans des cas d'intérêt général. La loi de 1795 et celle du 18 germinal an X ont respecté cette organisation, mais en supprimant de fait ce qui constituait la force des égl., c'est-à-dire leur unité dans une foi et une discipline commune. Ce n'est plus l'église, ce sont les églises réf. de France, chacune plus ou moins maîtresse absolue dans son ressort, sans autorité compétente en cas de conflit. Le désordre touchait à l'anarchie, et comme le gouvernement ne voulait pas entendre parler de synodes, il crut remédier au mal par son décret du 26 mars 1851 sur la réorganisation des Égl. protestantes. Ce décret et les lois qui en découlèrent portent le caractère d'une sagesse éclairée et concilient les besoins des temps nouveaux avec le respect des vieilles traditions; ils furent généralement bien accueillis, à l'exception d'une clause qui remplaçait les synodes, organes de l'Égl., par un conseil central, organe de l'État. Un synode convoqué en 1872 par M. Jules Simon, pendant la présidence de M. Thiers, n'a pas donné d'abord tous les heureux résultats qu'on était en droit d'en attendre; mais il a sauvé le double principe de l'autonomie de l'Église et de la nécessité d'une déclaration de sa foi. L'égl. réf. compte auj. 100 consistoires et 525 paroisses, avec 914 temples et 667 annexes.

De nombreuses égl. indépendantes existent en France, en dehors de l'Égl. officielle. Les méthodistes-wesleyens possèdent de florissantes congrégations dans plusieurs départements, notamment au midi et dans l'ouest. Les dissidents stricts avaient, déjà sous Louis-Philippe, des chapelles dans les principales villes. La Soc. évangélique, fondée en 1833, pour missionner surtout parmi les catholiques, a créé de nombreuses stations qui se sont peîi à peu érigées en églises, mais séparées de l'État, sous l'influence des chefs du mouvement dont le principal organe était alors le Semeur, rédigé par M. Lutteroth, sons la signature de M. Déhaut de Pressensé et avec la collaboration de Vinet. Les sociétés relig. se multiplièrent considérablement, ayant pour objet surtout de combler certaines lacunes de rétablissement officiel: missions chez les païens et les juifs, instruction primaire, traités, bibles, évangélisation des catholiques, protestants disséminés, liberté religieuse, intérêts généraux du protestantisme, diaconesses, aumôniers militaires, colonie de Sainte-Foy, orphelinats, alliance évangélique, histoire du protestantisme français, etc. V. le* écrits de Browning, de Félice, Puaux, Drion, Polenz, Ranke, Bruch, Crottet, Merle d'Aubigné, Miche-let, Sayous, Read, Bersier, etc. Carte de la Fr. protest., par Nègre, q. v.

Le luthéranisme comme tel n'a jamais pris racine en France, excepté dans le Montbéliard et sur les bords du Rhin. Mais à la longue, avec la liberté d'établissement, beaucoup de luthériens se sont fixés à Paris et dans d'autres villes, en assez grand nombre pour nécessiter la nomination de plusieurs pasteurs. Ils sont placés sous l'inspection d'un conseil supérieur, ou directoire, qui a son siège à Paris.

Après avoir été un moment supprimée par la révolution, l'Égl. catholique a été réorganisée par le Concordat et les lois organiques. Elle est dépendante de l'État et salariée par lui; mais ses rapports avec Rome et le pape sont libres et il n'y a de limitation qu'en cas d'abus. Les év. sont nommés par le pape sur la présentation du gouvernement; ils sont maîtres absolus dans leurs diocèses, et peuvent destituer à leur gré, sinon les curés titulaires, au moins leurs desservants. Les 15 archev. n'ont sur les 69 év. d'autre autorité que le droit de convoquer les synodes. La restauration a fa\orisé l'élection ou la résurrection d'une multitude d'ordres que les gouvernements précédents avaient supprimés, ou réduits à des limites déterminées, jésuites, dominicains, bénédictins, trappistes, ordres d'hommes et de femmes, les uns militants, les antres voués à l'enseignement ou à la bienfaisance. Par la complicité de l'empire, qui désirait s'assurer le concours ou tout au moins la bienveillance de la curie romaine et du clergé, ces ordres ont pris peu à peu un développement immense et ont fini par accaparer l'instruction publique à presque tous ses degrés. Quand on vit le danger, le mal avait fait tant de progrès que les efforts tentés par la République pour y remédier ont pris les proportions d'une véritable bataille, dont le résultat immédiat a été de diviser la France en deux camps. Il est à regretter que ceux qui ont voulu ramener l'Égl. au droit commun, aient alfecté de le faire au nom de l'irréligion; ils se sont affaiblis. L'enseignement de la théol. est sans contestation réservé au clergé, qui lui donne une direction toujours plus ultramontaine, bien qu'il renferme encore quelques timides représentants du gallicanisme. Les évêques ont la direction exclusive de leurs séminaires; les facultés de Paris, Lyon, Rouen, Bordeaux, sont peu fréquentées. La liturgie romaine a été introduite presque partout. Les missions étrangères sont activement poursuivies par les prêtres de la mission, le séminaire des miss, étrangères et les con-grég. du Sacré-Cœur et du Saint-Esprit.

FRANCFORT lo sur le Mein. Un conc. y fut tenu en 794, et se prononça contre l'adoptia-nisme et le culte des images. Sa grandeur date du siècle où de simple capitale de. la Fran-conie, elle devint presque la capitale de l'emp. germanique après les Carlovingiens. Plusieurs synodes s'y réunirent; celui de 1007 décida Féreclion de l'évêché de Bamberg. On appelle Concordat de Francfort, ou du Prince, l'acte par lequel le 5 oct. 1446, le prince-électeur s'entendit avec le légat papal au sujet des décrets du conc. de Bâle. La réforme fut facilitée à Fr. par la grande culture littéraire de cette ville. Une société d'hommes éminents s'y était formée, qui accueillit Luther en 1521 avec beaucoup de distinction. C'est elle qui en 1522 fit ouvrir la chaire du couvent de Sainte-Catherine au premier prédicateur évangélique, Hartmann Ibach. Les bourgeois chassèrent leur curé en 1524 et autorisèrent les prédicateurs de la Réforme. Enfin après plusieurs années de luttes passionnées, la ville entra dans l'alliance de Smalcalde 1536. D'abord zwinglien le mouvement se rattacha peu à peu au luthéranisme, sous l'influence de Beyer et de Westphal, et ce qui contribua surtout à accentuer ce caractère, ce fut l'opposition aux protestants venus du dehors. Il y eut en effet dès 1553 une égl. calviniste française, composée de réfugiés wallons venus d'Angleterre avec leur pasteur Valerien Pola-nus; puis des Anglais avec Willingham et Knox; puis de nouveau en 1555 des Flamands avec Dalhen et Lasky. Ils hésitaient entre la liturgie de Genève et celle d'Angleterre, quand les prédicateurs de la ville voulurent leur imposer celle d'Augsbourg, et sur leur refus de l'accepter, plusieurs de ces égl. furent fermées; les Flamands s'établirent non loin de là, à Boc-kenheim. Ce n'est qu'en 1786 que les Allemands et les Français réformés obtinrent le droit de se bâtir deux temples; des droits plus étendus leur furent encore concédés en 1814 par l'Acte de constitution. Une égl. française luthérienne, composée d'Anversois, s'était formée en 1576. La présidence du collège des pasteurs, touj. confiée à un étranger (elle le fut à Spener), s'appelait Séniorat. Le dernier senior fut le Dr Hufnagel f 1822. Depuis 1857 le sénat de la ville a accordé à la communauté sa représentation légitime dans les conseils de l'Église. —On appelle Recès de Francfort la réunion qui eut lieu 18 mars 1558 entre les princes électeurs de Saxe, de Brandebourg et du Palatinat, le duc de Wurtemberg, les c mites palatins de Deux-Ponts et Simmern, le landgrave de Hesse et le margrave de Bade, pour rétablir l'union ou l'unité dans l'Égl. évang. allemande. Ils rappelèrent les anciennes prescriptions relatives aux controverses adiaphoristiques et eucharistiques, soumirent lés livres à la censure et décidèrent que les questions qui pourraient fournir matière à discussion seraient soumises aux consistoires. L'opposition d'Andreâ, des théologiens de la Basse-Saxe et de plusieurs autres, fit échouer cette tentative de conciliation autoritaire.

Francfort sur l'Oder; ville universitaire depuis 1506; elle s'opposa de toutes ses forces, sous Wimpina, à la réformation, et tomba rapidement. Pour la relever Joachim employa tous les revenus du couvent des chartreux, qui avait été sécularisé, mais c'était trop tard. La ville ne recouvra jamais son importance perdue; pendant la guerre de 30 ans elle ne comptait plus qu'un prof, de théol. En 1816 son univ. fut réunie à celle de Breslau.

FRANCISCAINS, v. François lo.

FRANCKE, Auguste-Hermann, né à Lubeck 23 mars 1663, étudia dès 1679 à Erfurt, Kiel et Leipzig, le grec, l'hébreu et la théol. Converti pendant un séjour chez le surintendant Sandhagen à LUnebourg, il ouvrit en 1688 une école à Hambourg, et tint 1689 et 1690 à Leipzig des confér. bibliques, qui valurent à ceux qui les fréquentèrent le surnom de piétistes. Elles^urent interdites. Diacre à Erfurt 1690 et 1691, il fut destitué à la demande de ses collègues et des catholiques, comme fondateur d'une secte nouvelle. Enfin appelé 1691 à Halle, comme pasteur du faubourg de Glaucha et prof, de grec et de langues orientales à la nouvelle université, il trouva le vrai champ de son ardente activité. D'accord avec ses collègues Breit-haupt, Lange, llerrenschmidt, il travailla dans l'esprit de Spener à conduire les étudiants dans la voie d'une conception vraie de l'Évangile et à imprimer à leur piété une direction pratique, au lieu de leur inoculer simplement les sèches et arides formules d'une orthodoxie morte. Il consacra à cet objet ses Lectiones parœneticœ, dont la l^e série parut en 1726, et sa Méthode pour l'étude de la théol. Quelques membres du clergé lui suscitèrent de nouvelles difficultés, mais elles furent écartées par une commission de la cour et finalement par sa nomination comme pasteur à l'égl. Saint-Ulrich 1715. Sans fortune personnelle il fonda d'abord une maison d'orphelins, dont il raconte les origines dans sa brochure: Les sentiers de bénédiction du Dieu vivant, 1709. Il avait commencé une collecte pour payer les écolagesd'enfants pauvres; cette collecte fut accueillie avec tant de faveur qu'en peu de temps il put construire un institut pour ces enfants, un autre pour les orphelins, une maison pour les étudiants qui avaient besoin de secours, un séminaire d'instituteurs et de missionnaires. Au bout de peu de temps ces établissements formaient une rue de 860 pieds de longueur. Il n'eut jamais aucune subvention de l'État. La charité chrét. suffit à tout. Il y ajouta les ressources du travail, une librairie, une imprimerie, héritage du baron de Canstein, qui n'avait pas moins de 12 presses occupées au tirage des saintes Écritures, et qui compte par millions les exemplaires qu'elle a publiés; une pharmacie, avec une collection de recettes plus ou moins efficaces, etc. + 8 juin 1727. — Son filsGotthelf et son gendre Freylinghausen continuèrent son œuvre qui compte auj. 9 écoles, outre l'orphelinat, et qui n'instruit pas moins de 3380 enfants.

FRANCO, ou Francm, v. Boniface 7°.

FRANÇOIS 1° d'Assise, fondateur de l'ordre des franciscains. Fils d'un riche marchand d'Assisi, Ombrie, nommé Bernardon, il naquit 1182. Destiné d'abord au commerce, il apprit le français et réussit à le parler si bien qu'on lui donna à cause de cela, dit-on, ce nom de François sous lequel il est généralement connu. A l'âge de 24 ans, ayant entendu lire dans l'Évangile l'histoire de la vocation des apôtres, il résolut de les imiter, renonça au monde, abandonna tous ses biens, se mit à prêcher avec force la repentance, rassembla quelques disciples, leur enseigna le mépris des richesses et des voluptés, et les envoya 2 à 2 comme évangélistes au milieu de la chrétienté corrompue. Porticella, près d'Assise, est d'abord le centre de son activité; c'est là qu'il réunit et forme ses disciples. En 1208 il en fait un ordre et leur impose, comme gage d'humilité, le nom de frères mineurs ou minorités; par réaction contre le luxe el la mollesse de la vie des couvents, il astreint ceux qui veulent le suivre à donner aux pauvres tout ce qu'ils possèdent et à se faire pauvres eux-mêmes dans le sens le plus absolu du mot; il faudra qu'ils vivent d'aumônes. Comme il insitsait sur une stricte obéissance au siège apostolique, il devint bientôt l'objet d'une adoration superstitieuse et de nombreux miracles lui furent attribués. Innocent III se moqua d'abord de son projet, mais en 1209, voyant que l'ordre commençait à réussir, il le reconnut verbalement 1212; le conc. de Latran 1215 ratifia ses statuts, et Honoré III le confirma solennellement 1223. L'ordre fit des progrès rapides; l'exemple des frères, présidés par des ministri, invitait les grands à les imiter; leur mendicité les mettait en contact avec des hommes de tous les états; ils devinrent les confesseurs des princes et ceux du plus bas peuple. Désireux de convertir les païens et les infidèles, Fr. fit dans ce but le voyage de la Syrie et de la Palestine, 1219. Fait t prisonnier par le sultan il lui annonça l'Évangile, et fut remis en liberté. En 1224, après un long jeûne, sur une montagne où il s'était retiré, il eut. la veille de l'exaltation de la croix, une vision étrange. Il vit descendre du ciel un séraphin crucifié, et il sentit en même temps des clous imprimer aux différentes parties de son corps les stigmates, ou marques des blessures de la crucifixion de Christ; il en conserva les cicatrices jusqu'à sa mort. Ce fait, dont l'histoire cite quelques autres exemples et que la physiologie médicale explique en une certaine mesure, a pu être exagéré ou dénaturé par le besoin de merveilleux qui caractérisait l'époque. En tout cas les légendes se sont attachées tout particulièrement à la personne de cet éminent missionnaire, plus zélé que théologien, et de son vivant déjà l'on racontait qu'il avait converti un loup des environs de Naples, qu'il parlait aux oiseaux de la forêt, et que lorsqu'il prêchait, les poissons se rangeaient par ordre de taille au bord du rivage pour mieux l'entendre. Il f 4 oct. 1226 dans l'égl. de Portiuncula, d'Assisi, où il avait été converti. L'égl. a gardé son corps, et de nombreux privilèges lui ont été accordés. Canonisé 1228 par Grégoire IX. Le culte qu'on lui rendit prit rapidement de telles proportions que l'Index dut mettre un frein à la multiplication exagérée de ses miracles. Déjà en 1212 il avait fondé avec Claire d'Assise, l'ordre des Clarissines, auquel il donna une règle 1224. Pour mieux assurer leur influence, il avait aussi créé en 1221 une organisation en sous-ordre, à la portée des séculiers qui, sous le nom de tertiaires, ou tiercelins, pouvaient suivre la règle sans renoncer à la vie civile, et que Léon XIII recommande de nouveau par encyclique du 17 sept. 1882. Ce qui distingue les franciscains de la plupart des ordres du même genre, ce n'est pas seulement leur pauvreté et leur vœu de mendicité, ni même le droit qu'ils ont de renoncer à la vie conventuelle pour se répandre dans le monde, mais c'est surtout le côté démocratique de leur organisation. Ainsi les custodes sont nommés par leurs pairs, et pour 2 ans seulement: à leur tour ils nomment les provinciaux, et ceux-ci le général. Leur costume se compose d'une ample robe gris-brun, couleur minime, retenue par une ceinture de corde, d'où leur est venu le nom de cordeliers. Aussitôt après la reconnaissance formelle de l'ordre, 1223, les papes leur multiplièrent des faveurs et des droits, et leur accordèrent l'autorisation de prêcher en tous lieux, même sans le consentement des curés et des évêques, ainsi que le pouvoir de confesser et d'absoudre, ce qui augmenta de beaucoup leur influence, naturellement aux dépens de celle du clergé. Bientôt, et déjà du vivant de François, une tendance plus relâchée se maui-festa sous la direction d'Élie de Cortone, le premier général de l'ordre; elle fut vivement combattue par Antoine de Padoùe. La grande question était de savoir si l'ordre pouvait posséder des maisons et des terres et [se faire construire de magnifiques églises. On finit par se demander si Jésus et les apôtres avaient jamais rien possédé en propre, affirmation que le pape condamna 1322 comme hérétique. Cependant les papes prirent généralement parti pour les relâchés qui les censuraient moins, tandis que les rigides, ou spirituels, ne se gênaient pas à l'occasion pour prononcer l'anathème contre la papauté. Cette division intérieure aboutit à la formation de congrégations, et à la distinction entre les observants, ou pères de l'Observance, parti des rigides organisé par Paolucci de Foligno, 1368, et les Conventuels renfermant tous ceux qui vivaient en communauté, par opposition aux ermites. Lorsqu'en 1517 chacune de ces tendances eut obtenu son général, le nom collectif servit à désigner la tendance modérée ou relâchée. Contrairement aux prévisions, et peut-être aux intentions de son fondateur, l'ordre eut des hommes distingués, qui se livrèrent à l'enseignement de la philos., de la poésie et de la théologie: Bonaventure, Roger Bacon, Alex, de Haies, Duns Sco^t, Ce-lano, l'auteur du Dies irœ; Jacopone, 1 auteur du Stabat, etc. Mais ce ne fut pas sans peine qu'ils obtinrent le droit d'enseigner à l'univ. de Paris 1244, et les papes durent intervenir en leur faveur. En rivalité avec les dominicains, ils commencèrent à soutenir contre eux la doctrine de l'Immaculée conception de Marie. Scott fut leur champion dans cette lutte, où il eut pour principal adversaire Thomas d'Aquin; de là les noms de scotistes et thomistes. Parmi les papes plusieurs avaient appartenu à l'ordre des franciscains, Nicolas IV, Alexandre V, Sixte IV et V, Clément XIV, etc. Avec des habitudes mystiques, qui donnèrent naissance aux fraticelles, les franciscains se montrèrent pratiques par leur zèle missionnaire, et ils ont auj. encore en Orient des maisons qui rendent de vrais services.

2° François de Paule, né 1416 à Paula, Cala-bre, fut voué tout enfant à saint François, dont on lui donna le nom, et vécut 20 ans seul dans une grotte des montagnes de la Calabre, Sa vie austère lui lit une réputation de sainteté qui lui attira de nombreux disciples; il fonda un couvent et donna à ses membres le nom de minimes (les plus petits de tous, plus petits encore que les mineurs), leur imposant les règles les plus sévères de l'ordre des franciscains, leur interdisant toute nourriture animale, l'usage du lin dans leurs vêtements, et leur recommandant l'exercice de la charité. L'ordre fut autorisé par Sixte IV, 1474. F. de Paule passant pour faire des miracles, Louis XI, en danger de mort, le lit venir pour lui demander sa guéri-son 1483, mais il n'en obtint qu'un soulagement moral. Paule resta en France, protégé par Charles VIII et Louis XII, qui favorisèrent son œuvre et lui permirent de construire plusieurs maisons, + 1307 au monastère de Plessis-lès-Tours. — Connus d'abord sous le nom d'ermites de saint-François 1436, ses disciples furent appelés en France les bons hommes, parce que leur fondateur était regardé comme le Bon homme par excellence; en Espagne on les appela les pères de la victoire, parce qu'on attribuait à leurs prières la prise de Malaga par Ferdinand 1484. Leur règle fut plus, fois modifiée, entre autres par Jules II qui lui donna sa forme actuelle pour les religieux, les nonnes et les tertiaires. Ils comptaient encore 450 maisons le siècle dernier, mais le nombre en a bien diminué. Les minimes ont pour ceinture une corde à deux nœuds.

3° François Xavier, né 7 avril 1506 au château de Xavier, près Pampelune. Il eut à Paris pour compagnon d'études Ignace de Loyola, qui avait 15 ans de plus que lui. Malgré cette différence d'âge, il devint l'un de ses plus intimes amis, l'un des 6 dont l'alliance aboutit à la formation de l'ordre des jésuites. Il entra lui-même dans l'ordre, fit ses preuves de dévouement à l'hospice des Incurables à Venise et s'engagea dès 1534 à travailler à la conversion des païens. Après avoir passé quelque temps au Brésil, eomme missionnaire, il partit en 1541, avec deux compagnons, pour les Indes orientales, et s'occupa de réveiller les Portugais, en même temps qu'il évangélisait les païens, les juifs et les musulmans. Il obtint, surtout àGoa, de brillants succès; des villages entiers se convertissaient à sa voix, et il leur facilitait ce changement par des concessions qui lui paraissaient peu importantes, mais qui à la longue devaient ruiner son œuvre et les ramener au paganisme. C'est ainsi qu'il baptisa force indigènes à Goa. Cochin, Tranquebar, Ceylan, Malaeca. Il composa un catéchisme et installa des prêtres et des instituteurs pour continuer la mission commencée. Malheureusement il eut aussi recours à l'Inquisition (qui possédait encore naguère à Goa, en 1815, une chambre des tortures). Il se rendit ensuite au Japon, puis en Chine, malgré la sévérité des édits, et finit par être arrêté et mis à mort dans file Santhian, 2 déc. 1552, comme il était sur le chemin du retour. Il est enterré à Goa, et fut canonisé 1622. Benoit XIV lui décerna 1747 1 titre de Protecteur des Indes. Vie, par Turselini. Lettres, publ. par Bartolus. On lui prête de nombreux miracles et même la résurrection de morts enterrés depuis plusieurs jours. Remarquable par son zèle et son dévouement, il n'avait qu'une vague et fausse idée de la foi qui sauve.

4° François de Suies, né 20 août 1567 au château de Sales, près d'Annecy, Savoie, d'une famille distinguée, reçut une brillante éducation et fut consacré prêtre en 1593. Nommé prévost du chapitre de Genève, puis coadjuteur, il se fit bientôt remarquer par ses talents et par des qualités personnelles qu'il mit au service d'un zèle ardent pour le rétablissement de l'autorité catholique. Il travailla énergiquement, surtout dès 1594 et dans le Chablais, à la destruction du protestantisme, employant tour à tour avec une grande habileté, tantôt les procédés de la discussion, tantôt, s'ils ne réussissaient pas, ceux de la violence, et ne craignant pas, au besoin, de payer les abjurations. On connaît la somme qu'il fit offrir à Bèze lui-même, s'il voulait rentrer dans l'Égl. de Rome, 4,000 écus d'or. Il ne recula devant aucun moyen pour atteindre son but, emprisonnements,bannissements, violation des traités. Les historiens catholiques évaluent à 72,000 le nombre des conversions obtenues par lui, soit en Savoie, soit à Lyon et à Paris où il prêcha plusieurs carêmes. La récompense ne devait pas tarder. En 1602 il fut appelé par le pape à l'évêshé de Genève; c'était peu de jours avant la fameuse Escalade, qui, si elle eût réussi, aurait été le couronnement de son édifice. De sa résidence d'Annecy, il continua de déployer un grand zèle missionnaire, venant souvent en France, où Henri IV et Louis XIU lui témoignèrent toujours beaucoup d'égards, et couvant des yeux Genève, qui cependant devait échapper à toutes ses intrigues. Il s'occupa aussi de relever le niveau intellectuel du clergé de son diocèse, surtout au point de vue des études qui laissaient à désirer. Ses relations avec Port-Royal prouvent qu'il avait une piété réelle, quoique étroite. Il fonda en 1610 l'ordre de la Visitation, dont le premier couvent, à Annecy, fut placé sous la direction de la pieuse Mm(à de Chantai (aïeule de M'n<> de Sévigné). Vincent de Paule était aussi de ses amis, f à Lyon 28 déc. 1622. Canonisé 1665; on le fête h 29 janv. Ses œuvres, en général dans le fienre onctueux, ont été publ. en 1822, et Paris 1830-1834, complétées par Baudry; les principales sont: l'introd. à la vie dévote, et le Traite de l'amour de Dieu. Vies, par Marsolier, Bensing et Hudry-Ménos.

5° François de Paris, plus connu sous le nom de diacre Paris, né 161)0 à Ch&tillon, Seine, fils d'un conseiller au parlement. Janséniste, il fut un des appelants contre la bulle Unigenitus, et refusa une cure qui l'aurait obligé à signer le formulaire. Il se ruina en œuvres de bienfaisance, fut réduit à faire des bas pour vivre, et f 1727 exténué de privations, pauvre et victime deses austérités, laissant la réputation d'un saint, et persévérant jusqu'au bout dans son opposition à la bulle. D^s cures merveilleuses, et d'autres phénomènes plus merveilleux encore, des scènes extravagantes même se produisirent sur son tombeau, au cimetière de Saint-Médard, sous l'influence de l'enthousiasme et de la passion. Le gouvernement constata ces faits étranges, sans pouvoir les expliquer, et il y coupa court en faisant fermer le cimetière; v. Convulsionnâmes. Les jansénistes prirent fait et cause pour leur diacre, dont les miracles ont été recueillis en un volume par Carré de Montge-ron, 1734.

6'» François i^r, roi de Franco, connu par son amour des lettres, ses galanteries et sa duplicité, lit en 1516 avec le pape un concordat par lequel il renonçait à la Pragmatique Sanction de Louis IX; il rendait au pape l'immense revenu des annates, mais conservait les réserves et les grâces expectatives, ainsi que le droit d'élection des prélats, évêques et abbés. Le parlement et l'univ. n'acceptèrent le concordai que sous le coup de menaces. L'atti tude de François 1er dans les questions rolig. à l'époque de la Réforme, fut entièrement dictée par des considérations politiques; il persécuta les protestants en France pour s'assurer l'appui du pape, et les favorisa en Allemagne pour affaiblir l'emp. de Charles-Quint. Né 1494, fils de Charles d'Orléans et de l'immorale Louise de Savoie, frère de Marguerite de Navarre, il monta sur le trône 1515, et + 1547, ne laissant qu'un fils,

Henri II, qu'il avait eu de Claude, la Bonne Reine, fille de Louis XII.

FRANÇOISE, lo 1384-1440, dame romaine, épous^ et mère vertueuse, fondatrice de l'œuvre des Ohlates, 1425. — 2<> v. Rimini.

FRANEKER, charmante et paisible ville, univ. de U Frise hollandaise, fondée par Louis de Nassau 15S3, supprimée 1811, a compté d'habiles professeurs, tels que Amesius, Amama, Coccejus, Lubbertus qui rédigea la formule condamnant Arminius, Bogermanu qui présida le synode de Dordrecht, etc. Elle eut de nombreux rapports avec les univ. suisses, surtout avec Genève qui lui envoya comme professeurs dans ses diverses facultés plusieurs hommes distingués, Vedelius, Ant. Tronchin, Steinberg, Ko-nig, Garcin. Parmi les dix mille élèves qu'elle forma, l'un des plus illustres fut Descartes. L'univ. sombra pendan1 la tourmente révolutionnaire; Noël et Cuvier ne purent que consta* ter son décès. Ses bâtiments ont été transformés auj. en un hospice d'aliénés.

FRANK, Sébastien, libre-penseur de l'époque de la Réforme: né vers 1500 à Donauwerth. Il vécut dans plus, villes du sud de l'Allemagne, Nuremberg, Strasbourg, Ulm, Bâle, tour à tour imprimeur ou savonnier, gagnant péniblement sa vie, jusqu'à ce qu'il f 1545 à Bàle. Sa doctrine de la lumière intérieure le rendait indifférent à la notion d'Église et même à l'idée du Christ historique. Il disait qu'un homme peut posséder le Dieu vivant, même sans le secours de la Parole. Son idéalisme et son panthéisme le séparèrent de Luther, avec qui il avait eu quelques relations. Il a traduit une Chronique et Description de la Turquie, écrite par un Transsylvain qui avait été 22 ans prisonnier dans ce pays. Ses vues philos, sont résumées dans ses Paradoxa 1535. On a aussi de lui des Pro s erbes.

FRATERNITÉ, v. Confréries.

FRATICELLES, ou FratricelUs, surnom donné aux franciscains rigides et spirituels qui, s'étant séparés sous la conduite de P. d'Oliva, se constituèrent en congrégation particulière, avec l'agrément de Célestin V. Boniface VIII leur retira cette autorisation. Ils résistèrent, et chassèrent les franciscains de plusieurs couvents. En 1317, l'Inquisition procéda contre eux, et dans leur colère ils s'adonnèrent aux visions et aux prophéties; ils finirent par se joindre aux béghards. La persécutiou dura de 1318 à 1352; dès lors ils disparaissent.

FRAYSSINOUS, Denis (comte de), né 9 mai 1765 à Curières, Gascogne; prêtre sous Napoléon, chanoine de Notre-Dame; en 1815 membre du Conseil d'Instr. publique, év. d'Herroo-polis, un des précurseurs de la restauration ecclés. dans le sens ultramontain; pair et ministre des cultes 1824-1828. Il refusa le serment à Louis-Philippe, et dirigea sous Charles X l'éducation du duc de Bordeaux, f 1841. A écrit: Les vrais principes de l'Égl. gallicane, et Défense du Christianisme.

FRÉDÉGAIRE, surnommé le Scholastique, ou le savant, Bourguignon, probablement moine, f vers 660, a laissé une Chronique générale en 5 livres, dont les trois premiers, empruntés k Eusèbe et Jules Africain, vont jusqu'à Bélisaire 361; le 4«>e, abrégé de Grégoire de Tours, va jusqu'à 584; le seul est original, niais n'a de valeur que parce qu'il est presque le seul qui traite de cette époque. Il va jusqu'en 641 et contient des renseignements sur Clotaire 11, Dagobert I^ et Clovis-le-Jeune. Frédégaire n'a plus le souffle de l'antiquité; il est ignorant et grossier, ne voyant pas plus loin que les murs de son couvent. Réimpr. par Guizot.

FRÉDÉRIC. Plusieurs personnages considérables ont porté ce nom. Nous ne citerons que ceux qui ont joué un rôle dans l'hist. ecclés.

Frédéric 1er, emp. d'Allemagne, surnommé Barberousse; excommunié par Alex. III, 1160, il finit par lui baiser les pieds k Venise 1176. 11 se croisa en 1188 à la voix de Guillaume de Tyr, perdit presque toute son armée, et f à Tarse 1190, glacé par les eaux du Calycadnus.

2<> Frédéric II, son petit-fils, avait fait à 2 papes la promesse d'une croisade pour 1227, mais il prétexta la peste et refusa de partir. Grégoire l'excommunia 1228. Frédéric écrivit à tous les rois chrétiens pour leur représenter le danger qu'ils couraient si les papes pouvaient ainsi les priver de leurs droits. Il n'en commença pas moins une 5'»e croisade, mais en son nom, « ou plutôt au nom de Dieu. » A prix d'or il conclut bientôt avec Meledin une trêve de dix ans. Il se couronna lui-même roi de Jérusalem. Quelques-uns disent qu'il embrassa l'islamisme. Après une réconciliation momentanée avec le pape, la guerre recommença plus terrible, ils publièrent l'un contre l'autre des circulaires; le pape accusait Fréd. d'avoir écrit Les Trois Imposteurs. 11 est difficile de dire si les superstitions régnantes amenèrent Fréd. à une incrédulité absolue, ou s'il se borna à combattre les abus. Le pape cherchant k soulever des ennemis à Fréd., celui-ci envahit ses États, et lui prit même ses vaisseaux pour l'empêcher de convoquer un concile. Innocent IV, ami de Fréd., ayant été nommé pape, on pouvait espérer la paix; mais Fréd. voulait rentrer dans la communion de l'Égl. avant de remplir les conditions du traité; le pape voulait les conditions avant l'absolution. Innocent s'enfuit à Lyon, d'où il excommunia Fréd. pour la 3me fois. Au conc. de 1245 Taddei de Suessa soutint seul l'empereur. Fréd. refusa de comparaître devant une assemblée, remplie contre lui d'une aveugle fureur, et le pape délia de nouveau ses sujets du serment de fidélité. Fréd. écrivit aux rois de France et d'Angleterre, pour leur proposer de ramener les ecclés. romains à l'ancienne simplicité apostolique, en leur enlevant leurs richesses. La lutte continua, s'envenima, et finit avec la f de Fréd. 1250, qui expira à Firen-zuela, accablé de soucis et de fatigues, mais sans avoir rien cédé.

3o Fréd. 1er, roi de Danemark, né 1471, f 1533; politique sage et habile; lit alliance avec Gustave Wasa et introduisit la Réform. dans son pays.

4° Frédéric III, grand-duc électeur de Saxe 1486-1525; né 1463, lit en 1493 un pèlerinage k Jérusalem. En 1496 il fut nommé vicaire de l'empire et lit preuve d'une grande sagesse pratique dans son administration; mais il montra plus de sagesse encore, et c'est ce qui lui mérita le surnom de Sage, en refusant la couronne impériale après la mort de Maximilien 1516, et en la faisant donner à Charles V. 11 conserva dés lors touj. une influence considérable sur les affaires de l'empire, et la réputation d'un prince aussi éclairé que désintéressé. En 1502 il avait fondé l'université de Wittenberg, prévoyant peu la gloire qui l'attendait. Un des premiers il s'émut des prédications de Tetzel, qui drainait le pays au profit de Rome, et il encouragea les protestations de Luther. A la conférence d'Augsbourg, oct. 1518, Cajetan, à bout de raisons, pria Fréd. de chasser Luther, mais l'électeur demanda qu'on lui prouvât d'abord que Luther avait tort. La protection dont il ne cessa de couvrir le réformateur fut à la fois énergique et modérée. Fort de l'appui d'Érasme, il refusa de laisser condamner l'éminent prof, de Wittenberg avant que celui-ci eût été convaincu, et à la diète de Worms, quand le pape fit demander au jeune empereur de faire exécuter la sentence d'excommunication, ce fut Fréd., qui venait d'administrer tout le nord de l'Allemagne pendant l'interrègne, qui s'opposa à ce que la diète se fit l'exécuteur des haines romaines, et il pourvut à ce qu'un sauf-conduit fût expédié au réformateur pour qu'il pût venir plaider sa cause; il sut aussi faire respecter ce sauf-conduit. Après la diète Fréd. fil enlever Luther par des cavaliers masqués, et le fit enfermer à la Wart-burg, pour le dérober à ses ennemis et à ses amis. Il fut prévenu de l'évasion de son prisonnier, par Luther lui même qui voulut sauver la Réforme compromise par les excès des anabaptistes. C'est vers la fin de cette guerre des paysans que Frédéric f 5 mai 1525, après avoir communié sous les deux espèces. Ami de la réforme, d'abord par politique, puis comme protecteur de son université de Wittenberg, il linit par en être le partisan fervent et convaincu, et sa modération ne donne que plus de poids à son adhésion définitive.

5<> Fréd. III, électeur palatin de la branche de Simmern. Né 1515, élevé catholique, il se prononça en 1537 pour la réforme, et se joignit en 1560, après le colloque de Heidelberg et après le préavis de Mélanchthon, à l'Égl. calviniste. Il lit rédiger par ses théol. Olivien et Ur-sins le célèbre catéchisme qui porta le nom de Heidelberg, et qu'il défendit en personne au colloque de Maulbronn 1564 et à la diète d'Augsbourg 1566. Il envoya en aide aux huguenots, en 1567 son fils Jean Casimir; aux Pays-Bas, Christophe, qui f 1564. Lui-même f 26 oct. 1576, laissant une mémoire honorée. Son fils et successeur Louis était resté luthérien.

6° Frédéric-Auguste 1er, duc-électeur de Saxe, de la ligne albertine, 1694-1733, abjura le protestantisme 1697 entre les mains de son cousin l'év. Christophe de Raab. pour pouvoir devenir en même temps roi de Pologne sous le nom d'Auguste II, ce qui l'engagea dans une suile de guerres malheureuses avec Charles XII, roi de Suède. Il n'en garantit pas moins îi ses sujets saxons, en 1697 et 1699, le maintien de la liberté évangélique. Son fils Fréd.-Auguste II, après quelques hésitations, abjura aussi secrètement à Bologne 1712, puis publiquement en 1717, et devint à son tour roi de Pologne sous le titre d'Auguste III, 1733.

FRERES, 1° moraves, v. Bohême, Hussites, Moravie, etc.

2° Les quatre Longs frères, moines du désert nitrique, ainsi surnommés à cause de leur taille, et qui dans les luttes anthropomorphistes avec le patr. Théophile, furent persécutés et entraînèrent Chrysostôme avec eux dans le conflit.

3° Frères joyeux (gaudentes), ordre de chevalerie créé parmi la noblesse pour venir en aide aux veuves, aux orphelins, aux opprimés, à l'époque des luttes entre les guelfes et les gibelins, lorsque toute sécurité d'avenir avait disparu, 1261. La règle leur permettait le mariage et le droit de propriété; mais il en résulta bientôt une vie libre et facile, qui mérita aux chevaliers, an lieu de leur nom primitif de ma-rianiens, celui de frères joyeux, et qui ne tarda pas à amener l'entière dissolution de l'ordre.

40 Fr. apostoliques, v. Apostoliques.

5o Fr. de la doctr. chrét., v. Doctrine.

6° Frères de l'épée, ou Porte-glaives, ou de la Milice de Christ, ordre militaire et religieux, fondé 1202 par l'év. Albert de Riga et par l'abbé Dietrich de Thoreide de Dunamunde, pour assurer la conversion des Livoniens et leur persévérance dans la foi. On les appelait aussi chevaliers de Dobrin, du nom de leur principale forteresse et résidence. Calqué sur le modèle des templiers, et suivant la règle relig. des cisterciens, l'ordre fut reconnu par Innocent III. Il reçut pour premier grand-maître le chevalier Winno de Rohrbach, bon militaire, mais qui fut déjà assassiné 1208 et remplacé par Volquin, ou Fulco Schenk. Le costume des chevaliers consistait en un manteau blanc, avec deux épèes en sautoir sur la poitrine et une étoile de drap rouge. Ils avaient pour leur entretien le tiers des terres, non seulement de celles qui appartenaient déjà à l'évêque, mais de toutes celles qu'ils pouvaient conquérir encore. Ce mélange de temporel et de spirituel, de militaire et de missionnaire, leur attira des difficultés inattendues, et si pendant quelque temps ils reçurent d'Allemagne des renforts considérables, ils s'affaiblirent par leurs guerres sans fin, soit contre les Lives, les Cures et les Esthes, soit contre les Danois et les Russes. Des rivalités éclatent aussi entre les év. et les chevaliers, et le pape, après quelque temps, finit par se prononcer contre l'év. Albert et par restreindre son pouvoir. Mais le triomphe des chevaliers 11e fut pas de longue durée, et après que l'év. eut fait reconnaître en Esthonie son droit à la moitié des terres, le second grand-maître, Fulco, comprit qu'il n'avait rien de mieux à faire qu'à fondre son ordre dans celui des chevaliers teu-toniques, ce qui s'effectua en 1237, après quelques hésitations de la part d'Hermann de Salza et de stériles négociations k Marbourg. Le pape arrangea l'affaire en faisant des porte-glaive une maîtrise et en leur donnant pour chef un maître provincial. Cette dépendance dura jusqu'en 1525 où Walterde Plettenberg racheta le duché de Livonie et reconstitua l'ordre. Le 50®e provincial, Gotlar Kettler, embrassa le protestantisme et devint duc de Courlande 1562.

7° Frères tertiaires, ou tiercelins, ou tiers-ordre, nom qu'on donnait aux séculiers qui s'attachaient k un ordre sans renoncer à la vie civile; v. François 1°.

8° Frères mineurs, v. François.

9° Fr. prêcheurs, v. Dominique.

10° Frères, ou Pères de la mort, solitaires prenant aussi le nom de pauliniens en souvenir de Paul, le premier ermite; ordre datant du 13rae siècle. Eusèbe, chanoine de la cathédrale de Gran, Hongrie, de famille noble, vendit et distribua s^s biens, renonça à son canonicat et se retira 1246 dans un lieu désert près de Pisi-lie, où il vécut dans l'austérité la plus rigoureuse et dans la constante contemplation de la mort. Il réunit bientôt quelques amis, et en 1250 ils possédaient déjà un couvent et une église. En 1215 l'év. Barthélémy de Cinq-Églises avait organisé une sorte de confrérie suivant la règle do saint Jacques de Patach; Eusèbe fondit les deux en une seule, dont il devint le supérieur, sous le patronage de Paul de Thèbes, et avec l'assentiment de l'év. Ladislas de Cinq-Églises. Après la f d'Kusèbe 1270, l'ordre adopta la règle d'Augustin, se lit de nouveaux statuts et se nomma un général avec l'autorisation de Jean XXII. Il se répandit rapidement en Hongrie, Autriche, Croatie, Pologne, même Suède; grâce aux nombreux privilèges dont il jouissait; mais au I8rae siècle il avait presque entièrement disparu. Son uniforme consistait en une robe brun-clair avec capuche, ceinture noire, à l'occasion manteau et chapeau, scapulaire, etc. Les pères de cet ordre en France, avec des statuts donnés par Guill. Callier, et agréés 1620 par Paul V, visitaient les malades et les prisonniers, assistaient les mourants et accompagnaient les condamnés à l'échafaud; ils avaient une robe grise avec capuchon noir, un scapulaire noir avec une tête de mort: Memento mori était leur unique salutation.

1 lo Frères de la Charité ou de la Miséricorde. Un Portugais, Jean Ciudad, né 1495. après une vie agitée, forma le dessein de servir Dieu dans la personne des malades, et en 1540 il ouvrit à Grenade, dans une salle louée, un hôpital dont lui et quelques amis devaient être les infirmiers. En 1572 Pie V leur donna la règle d'Augustin. En 1600 le fondateur fut canonisé sous le nom de saint Jean de Dieu. Au 17me siècle l'ordre se divisa en deux branches distinctes, sans aucuns rapports, l'une ayant son général à Grenade, fautre à Rouie.

12° Les fr. d'Albrecht, petite secte méthodiste américaine, inspiree par un laïque pieux, mais sans culture. Elle est célèbre par ses bancs d'angoisse, où les conversions sont accompagnées de soupirs et de manifestations physiques. Ils estiment que le Décalogue ne concerne que les inconvertis.

13° Frères de la vie commune, v. Groot.

FREYLINGHAUSEN, Jean-Anastase, un des hommes les plus dislingués du piétisme allemand. Né 11 déc. 1670 à Gandersheim, près Wolfenblittel, d'un père marchand et bourg-maistre de son endroit, il étudia à Iéna, se rendit à Erfurt pour y voir Francke, s'attacha à lui, l'accompagna à Halle comme son élève 1691, devint son aide 1696, son gendre 1715, son successeur 1727 comme pasteur de Saint-Ulrich et directeur des établissements; f 12 ievr. 1739. Sa piété, son éloquence, son dé-voùment désintéressé lui assignent une haute place dans l'Église; son talent de poète chrétien et de chantre sacré le rendit de bonne heure populaire. On a de lui 43 cantiques, dont plusieurs composés pendant les souffrances d'une santé délabrée.

FRIDOLIN, d'une bonne famille irlandaise, élevé dans un couvent, zélé pour le règne de

Dieu, évangélisa d'abord autour de lui, passa en Gaule où il s'assura la protection de Clovis, s'arrêta quelque temps dans un couvent de Poitiers, partit pour la Forêt-Noire, en emportant quelques-uns des os de saint Hilaire, descendit la Moselle, remonta le Rhin jusqu'à Bâle, et trouva non loin d'Augusta, près du Sickingen actuel, une petite île dont il lit le centre de sa mission. Après de nombreuses difficultés, et avec l'aide de quelques moines de Bourgogne, il y bâtit un couvent et posa ainsi les premier-fondements de l'Égl. chrétienne en Allemand. Il vint aussi à Glaris et bâtit quelques lieux d<* culte sous le vocable de saint Hilaire. f vers 538. Vie écrite par le moine Walter ou Balthor vers 1000. On a soulevé quelques doutes sur son histoire et tout au inoins sur sa date. Hefolr les a réfutés.

FR1ES, Jaq.-Fréd., philos.; né 23 août 1773 à Barbv, prof, à Iéna, destitué 1817 pour motifs ou soupçons politiques; prof, à Heidelberg, f 10 août 1843. Il enseignait la philos, kantienne, complétée par des éléments empruntés a Jacobi. Pour lui la matière, le visible étaient Fobjet de la connaissance; l'invisible, l'objet de la foi; le pressentiment était l'organe par lequel l'homme reconnaît le surnaturel.

FRISE. On désignait anciennement sous ce nom toute la contrée située depuis les bouches de l'Escaut jusqu'à celles de la Weser. Les Frisons étaient une race germanique fort ancienne qui, au siècle, se confondît avec les Saxons. Leurs premiers missionnaires furent Amand 626 et Éloi Wulfram 641; puis Wilfrid, Wigbert, Willibrord. Les libertés civiles et politiques du pays exercèrent leur influence sur les habitudes religieuses, et les Frisons ne connurent ni la dîme, ni le célibat forcé. Lors de la réformation le gouvernement laissa le champ libre aux prédicateurs. Les idées réformées gagnèrent du terrain; les idées luthériennes un moment favorisées par le mouvement de Carlstadt et par le duc de Gueldre, ne purent cependant résister à l'influence constante des immigrants reformés de France et d'Angleterre. Le synode de 1571 fut décisif pour l'Égl. réf. d'Allemagne.

FR1TH, Jean, le collaborateur de Tyndal dans la trad. de la Bible anglaise, membre du collège de Christ-Church; il fut arrêté à cause de ses convictions évangéliques, s'enfuit à Anvers auprès de Tyndal. fut arrêté de nouveau à son retour et brûlé à Londres 1533.

FRITIGERN, roi des Goths, sous lequel ceux-ci embrassèrent l'arianisme: vers 375.

FRITIGILD, reine des Marcornans, qui obtint d'Ambroise un catéchisme spécialement rédigé pour elle.

FRITSCHE lo D.-Christian, né 1776 à Nauen-dorf, pasteur à Steinbach, surintendant à Halle, prof, de théol. 1827-1848. f 1830. — 2o Ch.-Fréd.-Aug., son fils, né à Steinbach 16 déc. 1801, prof, k Leipzig, puis à Rostock, enfin à Giessen. f 1846. Rationaliste; ses Comment, sur Matth., Marc, Romains, ont plutôt un caractère philologique et grammatical.

FR1TZLAR, église, é *ole et monastère, fondé 732 en Hesse par Boniface. Wigbert et Sturrn en furent abbés, L'évêché de Burabourg y fut transféré 786, el les charges d'év. et d'abbé réunies. Quand Paderborn eut été constitué en évêché, le diocèse de Fritzlar fut rattaché à celui de Mayence.

FROMENT, ou Fromment, Anthoine, né vers 1510 au val de Trièves près Grenoble, accompagna en Suisse son compatriote Farel et fut chargé de l'église d'Yvonand. Farel ayant dû quitter Genève pour se soustraire aux violences des prêtres. Froment \int prendre sa place. Il s'annonça comme enseignant à lire et à écrire à l'enseigne de la Croix-d'Or, et guérissant beaucoup de maladies pour néant, 3 nov. 1532. Ses affiches et ses talents lui amenèrent beaucoup d'élèves de tout âge et condition, et il eu profita pour leur expliquer l'Évangile. Le 1er janv. 1533 la foule était si grande dans la salle d'école et sur les escaliers, que ses partisans l'en traînèrent au Molard et le placèrent sur une borne pour que tout le inonde pût l'entendre. Il prêcha sur Matt. 7, 15. 16. Mais le Conseil ayant donné l'ordre de l'arrêter, il fut obligé de s'enfuir. C'est â peu près ici la lin de sa vie de réformateur. On ne sait pas au juste quand il revint à Genève. On croit qu'en 1534 il prêchait sous la protection bernoise. Il fut pasteur à Saint-Gervais et à Massongier (Chablais). En 1552 il est de retour à Genève, mais l'incon-duite de sa femme le compromet aux veux du public; il renonce à l'état ecclés., se fait recevoir notaire 31 déc. 1552, est reçu bourgeois en 1553, et élu membre des CC en 1559. En même temps il travaille avec Bonivard à son Hist. de Genève, niais accusé d'immoralité, il est mis en prison, destitué et banni 1562. 11 erre longtemps k l'étranger, revient après 10 ans d'exil, et en 1574 est réintégré dans sa place de notaire. On ne sait quand il mourut. II reste de lui 2 épîtres et 1 sermon rnss. à la Biblioth. de Genève, et ses Actes et Gestes merveilleux de la Cité de Genève, iinpr. 1851 par J.-G. Fick, sous la direction de G. Revilliod. —Triste exemple d'un homme qui avait commencé par l'esprit et qui a fini par la chair. — v. Dentière.

FRONTON-LE-DUC (Ducaeus), savant jésuite, né à Bordeaux 1558. Prof, de théol. et bibliothécaire k Paris, il a laissé 3 vol. de controverse sur la s. Cène, contre Du Plessis. f 1624.

FRUCTUOSUS l°Év. de Tarragone (Espagne) parlait tranquillement avec deux diacres Augu-rius et Eulogius d^s temps de persécution qu'ils traversaient sous Valérien, lorsque six soldats vinrent les prendre et les jetèrent en prison. Ils continuèrent leurs prières et même Fructuosus baptisa l'un de ses compagnons de captivité nommé Rogatien. Six jours après ils furent sommés d abjurer devant le juge Émilien, mais Fructuosus répondit qu'il ne croyait qu'au « Dieu qui a fait le ciel et la terre ». Tous trois furent condamnés k être brûlés vifs. Quand le feu eut consumé les liens qui les retenaient, ils levèrent leurs mains libres vers le ciel, et se jetèrent à genoux, f 21 janv. 259. — 2° Archev. de Braga 647, auteur d'une règle monastique très rigoureuse, qui prescrit l'obéissance absolue aux ordres des supérieurs.

FRUMENTIUS et Edesius, nev eux du philos, tyrien Merope, qui les emmena avec lui dans un voyage en Ethiopie. Le bâtiment fut pris dans un port de la mer Rouge et l'équipage massacré. Seuls ces jeunes gens furent épargnés, et vendus au roi d'Axum, qui fît d'Edèse son échanson, de Frumentius son trésorier et les affranchit à sa mort. La reine leur accorda sa confiance et ils en profitèrent pour attirer en Abyssinie des amis et des négociants chrétiens d'Égypte, qui honorèrent l'Évangile par leur vie et formèrent le noyau d'une église. Edésius devint plus tard év. de Tyr; Frumentius fut sacré év. d'Ethiopie par Athanase, et resta fidèle au patr. d'Alexandrie, malgré tous les efforts que l'on fit pour l'en détacher. Il travailla en paix jusqu sa f 360.

FRY, Elisabeth, née k Norwich 21 mai 1780. fille d'un riche propriétaire, John Gurney, quaker. Elle épousa 1810 un négociant nommé Fry. Son amour des pauvres, son dévouement, son activité, ses dons lui valurent dans sa communauté le litre de témoin de la parole, et pins tard elle en vint à prendre la parole en publie et dans les assemblées, pour prier et pour exhorter. Une visite qu'elle fit en 1816 dans les prisons de Newgate lui révéla l'affreuse condition des femmes qui y étaient détenues, et elle résolut dès ce moment de travailler à l'amélioration de leur sort au double point de vue moral et matériel. Elle entreprit de longs et nombreux voyages sur le continent,et cherchai gagner à sa cause des princes et des personnages importants, Alexandre, Louis-Philippe, provoqua des conférences et des assemblées où les différentes questions pénitentiaires furent sérieusement examinées et débattues. Elle obtint que la Bible et des soins religieux fussent mis à la portée des détenus, et par ses visites dans les prisons elle essaya d'agir directement sur leurs cœurs et leurs consciences.Sabienfaisante activité s'étendit éga-lement sur d'autres classes pauvres et soufflantes de la société, + 1845. Vie par Suz. Corder.

FULBERT 1°surnommé leSocrate des Francs. D'abord maître à la cél. école de Chartres qu'il avait lui-même fondée 990, il fut nommé év. de celte ville 1007, + 4 avril 1029, et canonisé. Il avait eu pour maître Gerbert, qui devint pape, et pour protecteur le roi Robert. Béranger de Tours fut un de ses élèves. Ses œuvres se composent de sermons, d'hymnes et de lettres; elles ont été recueillies 1595 par Papire Masson. On lui attribue entre autres la prière: Sancla Maria, Succurre miseris. — 2° Chanoine à Paris, oncle d'IIéloïse, n'est connu que par l'ignoble vengeance qu'il exerça sur Abélard.

FULCHER, de Chartres, ou Foucher, chapelain de Baudouin de Jérusalem, a écrit une Hist. des croisades jusqu'en 1127.

FULCON 1° Un des prédicateurs populaires les plus distingués du moyen âge. D'abord simple chapelain àNeuilly, il se mit assez tard aux études et suivit à Paris les levons des maîtres. Son talent oratoire s étant manifesté avec éclat dans une prédication qu'il fit a Paris 1192, il fut chargé pendant 2 ans de parcourir la France et de prêcher au peuple la repentance. En 1198, Innocent III le chargea de prêcher une croisade, et 200,000 hommes répondirent à son appel, entre autres les comtes De Montfort et Baudouin de Flandres. De retour à Neuilly, il y f 1202. — 2° Second et dernier grand-maître des Porte-glaive; v. Frères, 5°.

FULDA, ou Foulda, célèbre couvent, fondé 744 sur une hauteur, près de la rivière de ce nom, à 8 ou 10 kilom. de Hesse-Cassel, par Sturm, un des élèves de Boniface. Carîoman lit aux religieux le don du terrain; ses successeurs y ajoutèrent d'autres revenus encore. Placé sous la règle de saint Benoît, le couvent s'ouvrit avec 7 moines, et en compta bientôt plus de 400, après que Sturin eut fait le voyage de Rome et visité les monastères qu'il trouva sur son chemin. Parmi les hommes qui l'illustrèrent, comme maîtres ou comme élèves, on cite Alcuin. Raban Maur, Ilaymon, etc. Boniface désira d'y être enterré. Fulda fut en son temps, le foyer d'où les lumières se répandirent sur toute la contrée, mais il ne valut guère, comme institution que ce que valaient ses directeurs, et à la longue il subit le sort de toutes les choses humaines; il déclina, mais l'abbaye conserva ses richesses, et en 1331 elle était assez forte pour repousser une attaque d s bourgeois de Fulda. En 1513 elle fut réunie àHersfeld. La réforraa-tion y pénétra sous l'abbé Jean 1542, mais i! y eut une réaction énergique sous Balthasar 1573. L'abbaye fut érigée en évêché sous Benoit XIV, 1732. En 1803 elle fut sécularisée, et donnée au prince de Nassau-Orange. Depuis 1866 elle appartient à la Prusse.

FULGENCE 1° Ferrand, diacre de Carthage qui, banni en même temps que Fulgencede Rus-pe, se retira à Cagliari dans le couvent de Saint-Saturnin, où il resta jusqu'à son retour à Carthage 523. Dans la dispute des Trois Chapitres il préavisa énergiquement contre l'édit de l'emp. 5^6. On a de lui une collection de décrets synodaux, Breviatio, elun bon traité de morale, De 1 innocentiœ regulis.

2° Fabius Claudius, év. de Ruspe, ou liiis-pina, Afrique; né vers 470 àTélepte; intendant romain dans sa province; fut converti par la lecture de quelques écrits d'Augustin, et devint l'un des écrivains les plus goûtés, l'un des défenseurs les plus habiles et les plus intrépides de la foi évang. au 6ine siècle. Il entra dans les ordres, lit un voyage h Rome 500, fut nommé év. de Ruspe. mais à cause du malheur des temps et des invasions barbares, il fut dès lors presque toujours en voyage, errant ou proscrit. Le vandale Thrasimond le bannit, Hildé-ric le rappela. Il fonda en Sardaigne un couvent d'après la règle d'Augustin, f 533 dans son cloître de Ruspe. Outre son traité sur la vérité de la prédestination, écrit contre Fauste, il a laissé plus, ouvrages de controverse, dont il ne resta que des fragments: contre les ariens, les nesto-riens, leseutychéens.les semi-pélagiens, etc. Par son style, non moins que par son zèle et sa doctrine, il a mérité d'être appelé l'Augustin d^ son temps. On a aussi de lui quelques fahles et des essais littéraires.

3° Planciade, év. de Carthage au commencement du 6me siècle, auteur de quelques écrits littéraires et moraux, v. Gottschalk.

FUNK, Jean, gendre d'Osiander. Privé de sa place de pasteur à Nuremberg, à cause de l'Intérim, il fut nommé prédicateur à la cour d'Albert de Prusse, et poussa à la persécution contre les luthériens rigides. Plus tard,;;ppelé dans les conseils de la duchesse et chargé du ministère des finances qu'il cumulait avec le pastorat, il fut accusé de trahison et d'hérésie et exécuté 26 oct. 1566.

FUNÈBRES (Oraisons). On distingue, assez arbitrairement du reste, les discours mortuaires prononcés à la maison, dans le temple ou sur le cimetière, et l'on réserve plutôt le nom d'oraison funèbre pour celui qui est prononcé dans le temple, lorsqu'il a pour objet principal la vie ou l'éloge de défunt. L'usage de ces discours date des premiers temps de l'Égl., comme protestation contre le matérialisme païen. Lo catholicisme a renchéri au nom du purgatoire, de la terre sainte et de l'eau bénite. Le service a été longtemps liturgique, et ce n'est qu'à l'occasion de morts illustres que les orateurs chrétiens ont abordé le genre littéraire qui a fait la gloire de l'école française depuis Bossuet jusqu'à La-cordaire; Fléchier, Massillon, Bourdaloue se sont également illustrés dans ce genre. L'Égl. protestante l'a moins cultivé; elle y a vu un danger pour le prédicateur, tenté d'amplifier pour produire plus d'effet, et un danger pour la famille, dont l'orgueil chercherait à se satisfaire aux dépens de la vérité. Mais il y a du danger partout, et l'on ne ferait rien si l'on reculait devant toutes les difficultés; le service liturgique simple n'est pas non plus sans inconvénients, et l'on peut dire sous ce rapport, que les circonstances et le tact individuel sont des guides dont il faut tenir compte.

FURSCUS, ou Fourzy, moine irlandais; après;»voir fondé un couvent dans son pays, il passa dans l'Ost-Anglie où il en éleva un autre, 6;>0, qu'il remit à son frère, pour retourner ensuite dans la solitude. Pendant les persécutions de Penda, roi de Mercie, il s'enfuit en France, où il fonda le monastère de Lagny. f 650 ou 654. Les bollandistes lui attribuent plus, visions.

G

GABLER, Jean-Philippe, théol. rationaliste, né à Francfort sur Main 4 juin 1753, étudia à Iena sous Griesbach; successivement prof, de théol. à Altdorf, Francfort sur l'Oder, GOttin-gue, enlin à Iéna où il f 1826. Connu par sa collaboration à l'Hist. primitive d'Eichhorn et à plusieurs Revues de théol. où ses articles de critique et d'exégèse eurent du succès.

GACHE, Raymond, né 1616 à Castres où il fut pasleur 1648, puis à Charenton 1654 jusqu'à sa f déc. 1668; prédicateur de mérite, apprécié par Vinet. A publ. aussi quelques poésies.

GAETAN, v. Théatins.

GAIANIENS, ou Julianistes, apthartodocètes, secte monophysite fondée par Jules d'Halicar-nasse; ils enseignaient l'incorruptibilité du corps de Christ, même avant sa résurrection.

GALÈRE, gendre et corégent de Dioclétien; il fut le principal auteur de la persécution de 303; déjà en 298 il voulait contraindre les soldats chrétiens à sacrifier aux idoles, et c'est lors d'une rencontre avec l'emp. àNicomédie, qu'il le décida à des mesures générales. D'après Lactance il serait mort de la même maladie qu'Antiochus Épiphanes, et Hèrode-Agrippa.

GALFRIED de Monmouth, év. d'Asaph en 1152, dut renoncer à. son diocèse 1175 pour avoir abandonné le pays de Galles pendant des troubles et pour s'être réfugié auprès de Henri II. Il a écrit une Hist. des Bretons et plus, ouvrages d'exégèse et de dogmatique, ainsi que des poésies.

GALL, 1° Nicolas; de son vrai nom Hahn (coq); né à Kôthen 1516; prédicateur à M;ms-feld et à Ratisbonne; après la guerre de Smal-calde il remplaça Cruciger à Wittenberg, combattit l'Intérim avec Flacius, et l'accompagna à Magdebourg, où il devint pasteur 1550, puis surintendant. Plus tard il retourna à Ratisbonne, et se montra toujours un luthérien infatigable dans les discussions osiandriennes et autres, t 1570. — 2o Saint-GaiI, v. Gallus.

GALLANDI, André, abbé de la Congrég. de l'Oratoire à Venise, f 1779; connu par diverses Collections de vieux canons, pères, écrivains ecclés., etc. On trouve dans sa Bibliotheca 380 écrivains des 7 premiers siècles.

GALLICANISME, Église gallicane; système d'indépendance nationale que l'Égl. cathol. de France a longtemps professé vis-à-vis de Rome. Quand les emj). d'Allemagne avaient renoncé à presque tous leurs droits, les souverains de France et d'Angleterre, d'accord avec la majorité de leur clergé, prétendaient rester les maîtres chez eux et ne reconnaître au pape que certains droits qu'ils se réservaient de déterminer eux-mêmes. Cet esprit d'indépendance date déjà de Pépin et de Charlemagne, qui s'occupent sérieusement de réformes religieuses, règlent les affaires du clergé, stimulent les év. et convoquent des conc. nationaux. Louis IX, le roi canonisé, se montra un vrai roi français, indépendant et ferme, en publiant 1269 la lr® Pragmatique Sanction, q. v. Charles VII publiadans le même esprit la seconde à Bourges 1438. Louis XI l'abolit en haine de son père, et aussi sans doute en haine de la liberté. François I** la rétablit en partie, puis l'abandonna par son Concordat avec Léon X. Le clergé enfin, sous Louis XIV, formula et fixa les principes du gallicanisme dans sa célèbre déclaration de 1682, rédigée par Bossuet, portant en substance que: lo le pape n'a aucun pouvoir sur le temporel des princes; 2o le conc. général est supérieur au pape; 3° l'exercice du pouvoir papal doit être réglé ou tempéré par les canons et les usages des égl. particulières; 4o même en matière de foi les décrets des papes ne sont pas indéformables et réclament le consentement de l'Église. Le pape condamna ces 4 articles, mais ils n'en furent pas moins enregistrés par les parlements. Le Concordat et les articles organiques de l'an X (1801) maintinrent les 4 articles, et après le concordat de 1817 le roi demanda au clergé de France d'y adhérer formellement. Les principaux représentants du gallicanisme sont Hinc-mar, Gerson, l'abbé Fleury, Bossuet, Pithou, le card. de la Luzerne, Frayssinous, Guillon, etc. Ses adversaires furent les jésuites et Bellarmin, et depuis le dernier concile, presque tout le clergé contemporain.

GALLIEN, fils et successeur de Valérien, emp. romain 259-268, publia 261 un Édit de tolérance qui, non seulement accordait aux communautés chrétiennes le libre exercice de leur religion, mais encore leur reconnaissait le droit de posséder des immeubles, ce qui équivalait à leur donner le caractère officiel et faisait du christianisme une religion licite.

GALLIFET, v. Sacré Cœur.

GALLION1SME, indifférence pour les choses et les vérités de la religion, ainsi nommée de la conduite du proconsul Gallion, Act. 18, 12.

GALLUS !» emp. romain 251-253, qui cédant à la pression populaire lors d'une peste qui ravageait le pays, ordonna la persécution contre les chrétiens qui refuseraient de sacrifier aux idoles.

2° Gai lus, ou Saint-Gall, Gallun, Gilian, né en Irlande vers 560, d'une famille distinguée, étudia dans le couvent de Bangor, avec Colom-ban dont il fut à la fois le disciple et le compagnon. Ils s'embarquèrent en 585 ou 590 (chro-nol. douteuse) pour évangéliser d'abord les Gaules, les Vosges, l'Alsace, puis en 610 l'Alle-manie, Bade, Zurich, Tuggen, Bregentz. Pendant que Colomban poursuivait sa route en Italie, Gall, tombé malade à Arbon, continuait de prêcher Christ aux idolâtres riverains du lac de Constance. Bientôt il chercha une solitude oii il pût se fixer, et sans crainte des loups ou des ours il s'établit dans une forêt près du Stei-nacb, où un couvent ne tarda pas à s'élever 614. puis une ville, qui prit le nom de son fondateur. Beaucoup de païens se convertirent, entre autres le duc Kunz, ou Gunzo, et l'évêché de Constance étant devenu vacant, Kunz nomma Gallus à ce poste. Mais Gall refusa, soit attachement à sa solitude ou à son œuvre, soit déférence pour Colomban qui lui avait fait promettre de ne pas dire de messe parmi les Allernans aussi longtemps que lui, Colomban, vivrait. Il fit nommer k sa place son disciple Jean, et consacra le reste de sa vie à évangéliser, soit directement, soit par ses nombreux élèves formés dans les divers monastères qu'il avait fondés. Colomban lui rendit le droit de lire la messe. Gall f 16 oct. 627, 640 ou 655, chez son vieil ami Willimar d'Arbon; il avait 95 ans, et fut enterré dans sa cellule. Une foule de légendes ont illustré son nom. Le couvent de Saint-Gall, enrichi par les dons des pèlerins, devint un des établissements les plus florissants pour la propagation du christianisme. Les maisons qui s'élevèrent dans son voisinage furent ceintes de murailles en 953, et leurs habitants entrèrent en lutte avec les abbés pour maintenir leur indépendance, qui, malgré l'appui des empereurs, et quoique la ville fût alliée de la Suisse depuis 1454, ne fut définitive qu'au 17ne siècle. L'abbaye, évacuée en 1805, renferme une belle biblioth., avec plus de mille mss. anciens.

3<> Le moine de Saint-Gall, auteur anonyme des Gestes de Charlemagne, ouvrage* plein de fables ridicules et dédié à Charles-le-Gros. Tout ce qu'on sait de cet écrivain, c'est qu'il était moine de l'abbaye de Saint-Gall.

GANGANELLI, v. Clément XIV.

GANGRA, ancienne capitale de la Paphlago-nie. Il s'y tint entre 362 et 370 un conc. qui repoussa en 20 canons les principes ascétiques exagérés d'Eustache de Sébaste, notamment en ce qui concerne l'interdiction du mariage.

GARASSE, François, né 1585 à Angoulême; prédicateur jésuite, connu par les violences et les personnalités qui abondent dans ses écrits et ses sermons. Envoyé en province, il + 14 juin 1631 à Poitiers, d'une maladie contagieuse contractée pendant qu'il soignait avec dévouement les victimes de l'épidémie. Auteur de plusieurs écrits de controverse de mauvais goût.

GARCIA de Loaysa, général des dominicains, confesseur et conseiller de Charles-Quint, qui le nomma successivement év. d'Orma, 1524, cardinal 1530, arch. de Seguença, puis de Sé-ville, et commissaire général de l'Inquisition. Ses Lettres àCh.-Quint, impr. Berlin 1848. sont importantes pour l'hist. de la Réformation.

GARDIEN, ou Custode, titre que les franciscains et les capucins donnent aux abbés de leurs couvents. Les custodes sont en général nommés pour 3 ans par les membres effectifs de la communauté. En Angleterre on désigne sons ce nom l'administrateur d'un évêché pendant la vacance du siège.

GARDINER, Étienne, né 1483, fils naturel de Woodwill, beau-fr. d'Edouard IV. Doué de connaissances riches et variées, il fut secrétaire sous le card. Wolsey, se concilia la faveur d'Henri VIII par son zèle à faciliter son divorce, fut nommé conseiller du roi 1529 et év. de Winchester 1533. Tout en étant le défenseur énergique des prérogatives royales, il s'opposa à toutes les tentatives de réforme, moins peut-être par conviction que par ambition et esprit d'intrigue. Déjà peu en faveur dans les dernières années d'Henri VIII, il fut déposé et emprisonné sous Édouard. Marie lui rendit son évêché, et il persécuta à outrance les protestants, f 1555.

GARNIER lo Jean, né à Paris 1612, f 16 oct. 1681. Savant jésuite, auteur de plusieurs ouvrages de dogm. historique, notes sur le pélagianis-me, abrégé des controv. nestoriennes et euty-chéennes, édition de Marins Mercator, etc. 2° Julien, né 1670; de l'ordre des maurins depuis 1691; chargé de publier les œuvres de Basile, il ne put en achever que les 2 premiers vol. f 1725. Prudent Maran publia le 3™.

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GARVE Ch.-Bernard, né 4 janv. 1763 près de Hanovre; élevé chez les moraves à Zeyst et à Neuwied, puis maître au séminaire de Nies-ky, occupa plus, postes de pasteur, notamment à Berlin 1810-1816. f 1841 à Herrnhut. Auteur d'un grand nombre de cantiques estimés, dont 51 se trouvent dans le recueil de Knapp.

GASC, Esaïe, né 13 mai 1748 à Genève, pas-teur-catéchiste en 1781, s'occupa trop de politique, fut puni de son opposition par 6 ans d'exil, pasteur à Constance, revint en 1789 à Genève, fut nommé syndic pendant les tristes jours de 1793, et vit sa carrière brisée lors de l'annexion à la France. En 1810 il fut appelé comme prof, de théol. à Montauban; ses antécédents radicaux, son caractère peu souple, ses opinions rationalisantes, en le rendant suspect, lui firent une position difficile, et les pasteurs du midi demandèrent son éloignement. Tout s'arrangea par un compromis, + d'apoplexie 28 oct. 1813. Vie par Ch. Dardier.

GASPARIN, Agénor (de), né 12 juill. 1810 à Orange; chef de cabinet à l'agriculture, puis à l'intérieur, sous Louis-Philippe; maître des requêtes, député depuis 1842, mit une parole ardente au service des plus nobles causes, et se distingua au premier rang des défenseurs de la liberté religieuse. Fondateur en 1843 de la Soc. des Intérêts généraux du Protestantisme français. Voyage en Orient 1847. Attaché aux Orléans, il refusa de servir le gouvernement qui renversa Louis-Philippe, et se retira en Suisse, oii il vécut 23 ans, se partageant entre Genève et Vaud. Ce ne fut pas un temps perdu; ses nombreuses publications, ses livres, ses articles, ses conférences qui electrisaient ses auditoires, au cirque, à la salle de la Réformation et ailleurs, exerçaient une action puissante sur l'opinion. Brisé des désastres de la France, il se dévoua aux internés malades. etfS mai 1871. Au synode de Paris, août 1848, il demanda pour l'Égl. une foi déterminée, et ne l'ayant pas obtenue il se retira avec Fréd. Monod et fonda l'Union des églises èvang. Auteur fécond, il a écrit sur les sujets les plus divers. Vie par Théod. Borel.

GASS lo Joachim-Christian, né 26 mai 1766 à Auklam, Poméranie; pasteur à Stettin et à Berlin; prof, de théol. à Breslau depuis 1810 jusqu'à sa+ 19 févr. 1831, auteur de plus, livres d'édification et de prudence pastorale; sa cor-resp. avec Schleiermacher, publ. 1852, est intéressante. 2° Son fils Wilhelm fut prof, de théol. d'abord à Giessen, puis à Heidelberg. Il a écrit sur les deux noms de J.-C. dans le N. T. comme fils de Dieu et fils de l'homme; sur le Platonisme et I'Aristotélisme dans l'Égl. grecque, sur Calixte, et une Hist. de la théol. protestante, 1854-67.

GASSNER, Jean-Joseph, né 20 août 1727 à Branz près Pludenz, frontières de Souabe. Curé depuis 1758 à KIôsterle, près de Coire, il obtint quelques guérisons par la prière en 1773; il se donna dès lors comme chassant les démons et faisant des miracles, et parcourut en cette qualité la Suisse et l'Allemagne. Appelé à Ratisbonne par le prince-évêque, il y occupa quelque temps l'attention publique, jusqu'à ce qu'un ordre impérial le bannit de la ville et lui interdit tout exorcisme. Il f 1779 à Bonndorf où il avait été nommé doyen. On a de lui 2 traités sur la manière de chasser le diable. Il était soutenu par Lavater.

GASTON, v. Antoine 5o.

GAUDENTIUS, ou Gaudence, de Bresce, successeur de l'év. Philastrius, dont il a écrit la vie. Ami d'Ambroise, il se rendit 404 à Con-stantinople avec d'autres évêques, pour intercéder en faveur de Chrysostome. f 427. Il reste de lui 10 discours, impr. à Bresce 1738.

GAUDIORUM Mariœ festum; la fête des joies de Marie, se célébrait autrefois le 27 sept.

GAULE, ancien nom de la contrée, mal limitée d'ailleurs, qui forme auj. le territoire de la France et des Flandres; dans un sens plus restreint, c'était surtout la partie sud-est de celte contrée, la province par excellence; auj. la Provence. Au pluriel, les Gaules comprenaient en outre l'Italie septentrionale, une partie de l'Allemagne, les Iles britanniques et l'Espagne ou Hispanie, en un mot l'Europe occidentale. Les légendes les plus pittoresques ont couru sur l'introduction de l'Évang. dans les Gaules. Sans parler de 2 Tim. 4, 10. où une variante assez accréditée porte Gaule, au lieu de Galatie, une vieille tradition nous montre Lazare, Marthe et Marie, avec deux servantes et deux disciples, jetés dans une barque par les juifs, et poussés miraculeusement sur les côtes de la Provence. Marseille, Aix, Tarascon, d'autres villes, d'autres diocèses réclament de même une origine apostolique; mais ce n'est réellement que vers l'an 177 que l'on peut constater par une lettre d'Irénée, la présence à Vienne et à Lyon de communautés chrétiennes, de persécutions el de martyrs. Puis vers 250, d'après Grégoire de Tours, 7 nouveaux diocèses. V. France.

GAUSSEN. Franç.-Sam.-Robert-Louis né à Genève 25 août 1790, pasteur à Satiguy 1816-1831, prédicateur aussi distingué par la beauté de la forme que par l'élévation de la pensée, un des représentants les plus autorisés de la doctrine orthodoxe, telle qu'elle est contenue dans la 2<™ Conf. helvétique, qu'il fit réimpr. eu 1819 avec Cellérier père. Suspendu et destitué par le Consistoire 30 sept. 1831, pour avoir employé la Bible dans l'enseignement de ses catéchumènes et pour avoir tenu des réunions relig. en dehors des temples, il fonda avec Merle, Galland et plusieurs amis la Soc. évangélique et l'École de théol. dont il fut pendant près de 25 ans un des prof, les plus influents. Mais il brilla surtout comme catéchiste et par le charme avec lequel il savait captiver les enfants. f 18 juin 1863. On a de lui: la Théop-neustie, les Livres canoniq. du N. T., une Dogmalique (autographiée), plus. vol. de sermons, des Leçons sur Daniel, la Genèse, l'Exode, Luc, les Proverbes, etc.

GAUTIER (ou Gauthier, ou Walther) de Saint-Victor, sous-prieur, puis prieur de l'abbaye de ce nom; élève et successeur de Hugo de Saint-Victor, et f 1180. Il avait hérité de ses prédécesseurs leur répugnance pour la sco-lastique, mais non leur piété intime et vivante. Son style est lourd. Dans un curieux traité, écrit vers 1180, sous le titre Les quatre Labyrinthes, il combat certaines opinions d'Abélard, de Gilbert, de P. Lombard et de Pierre de Poitiers. Ses œuvres ne sont qu'en mss.

GAUZBERT, neveu d'Ebbon de Reims, fut envoyé par Ansgar en Suède, pour y continuer l'œuvre de l'évangélisation, mais en 840 la persécution le contraignît d'abandonner son diocèse. Il fut appelé à l'évêché d'OsnabrUek, mais en 858 on le voit exercer encore en Suède avec Ansgar les droits épiscopaux, par l'intermédiaire d'un prêtre son mandataire.

GEBHARD 1° le Saint. Év. de Constance, construisit Petershausen. f 995. Canonisé 1134, il est invoqué par les femmes en mal d'enfant.

2o Truchsess de Waldbourg, archev, de Cologne, né 10 nov. 1547. il fut successivement chanoine à Augsbourg, Stnsbourget Cologne. Son élection au siège archiépiscopal fut combattue par le parti espagnol, qui lui préférait Ernest de Bavière. D'anciennes dispositions pour la réforme, et sou amour pour Agnès de Mansfeld, qu'il finit par épouser 1583, le décidèrent à abjurer, et il travailla activement à répandre dans son diocèse les doctrines évangéliques. Il fut destitué et remplacé par le duc Ernest. Ses efforts pour se maintenir à l'archev. furent inutiles. Il s'enfuit à Delft 1584, chercha en vain 1589 à intéresser les Anglais à sa cause, et f 21 mai 1601 à Strasbourg où il avait obtenu une place comme chanoine de la cathédrale.

GEODES, Alexandre, prêtre cathol. écossais, né 1737 à Arradowl. Son indépendance d'esprit lui fit quitter sa place de curé 1779, il vécut dès lors à Londres de ses travaux littéraires, comme chapelain <Je l'ambassade, et enfin de leçons particulières. Il a fait une trad. de la Bible, 1792-1797, pour laquelle il s'est servi d'Eichhorn, de Michaelis et d« Paulus; dans la préface il nie nettement l'inspiration.

GE1BEL, Jean, né à Hanau 1er avril 1776, pasteur réf. à Lubeck 1797; défenseur énergique de la vérité contre le rationalisme, prit une part active aux luttes que son fils Charles eut à soutenir en 1830 contre son égl. de Brunswick et en 1832 contre le synode réformé, conflit qui se termina par la retraite imposée à Charles, mais avec conservation de son traitement, f 1853.

GEIGER, François-Tiburce, né 1755 à Har-ting, près Ratisbonne. Élevé par les jésuites et les bénédictins, il entra 1772 dans Tordre des franciscains, étudia à Wurzbourg et occupa plusieurs chaires, jusqu'à ce qu'il fut appelé comme prof, à Lucerne, avec le titre de théologien de la nonciature. 11 travailla activement dans le sens de l'ultramontanisine, et combattit par plusieurs écrits le protestantisme, qu'il ne connaissait et ne comprenait pas. f 1843.

GEILER de Kaisersberg, cél. prédicateur populaire, né à Schalfhousp 16 mars 1445, docteur ès arts à Fribourg, puis doyen de la faculté des arts; il étudia la théol. à Bàle et y fut nommé docteur et prof, en 1476. Il refusa la place de prédicateur à Wurzbourg, et accepta 1478 celle qui lui fut offerte à la cathéd. de de Strasbourg, f 1510. Ses discours se distinguent par la pureté de la langue, un sentiment chrétien vrai, quoique mélangé de mysticisme, et quelques restes de scolastique dans la forme. Il reconnaissait les désordres (le l'Égl. et désirait y remédier, mais tout en la préparant, il était loin de penser à une réforme. Sa prédication était originale, énergique et sérieuse; il prenait souvent ses textes en dehors de la Bible; ainsi il a prêché 1474 sur le Vaisseau des fous, de Séb. Brand, et plus tard sur le Mont des contemplations, de Gerson.

GEISSEL (Jean de). Év. de Spire; en 1841 coadjuteur de l'archev. Droste-Vischering, de Cologne, et son successeur en 45. f 1864.

GÉLASE pape 492-496. confirma les actes de son prédécesseur Félix III contre Acacins: il refusa la communion d'Euphémius, patr. de Constantinople, qui ne voulait pas condamner la mémoire de cet hérésiarque; il combattit les erreurs des eutychéens, et convoqua à Rome, dit-on, un concile 494, où aurait été dressé un prétendu canon des saintes Écritures, dont la première mention ne se trouve que 300 ans plus tard, sous la plume du faussaire Isidore. — Voici comment Gélase entendait l'Eucharistie: « Le sacrement du corps et du sang de Christ est vraiment une chose divine; mais le pain et le vin y demeurent dans leur substance en nature de pain et de vin, et la célébration du saint mystère n'est autre chose assurément qu'une image ou une similitude du sacrifice du corps et du sang de Jésus » (De duabus naturis. Bi-blioth. Patrum. t. VIII, Lyon 1677). C'est aussi la doctrine d'Augustin, Contra Adimant Chap. 12, p. 124, t. VIII. Luther n'aurait pas mieux dit.

2° Gélase II, Jean de Gaëte, né à Gaëte, élu 1118, se trouve, aussitôt après son élection, en présence d'un pape rival, Grégoire VIII, élu sous l'influence de Cencio Frangipani, consul de Rome, qui, de concert avec Henri V, l'oblige à sortir de Rome. Il se retire à Gaëte, d'où il excommunie l'antipape et son parti. Il rentre un instant dans Rome, mais doit s'enfuir de nouveau et se réfugie en France, où il est reçu avec honneur et f dans l'abbaye de Cluny 1119.

GELLERT, Christian-FOrchtegott, ne 1715 à Haynichen, Saxe, fils d'un pasteur, étudia la théol. à Leipzig 1734, mais s'abstint par scrupule de prendre des fonctions pastorales pour lesquelles il ne se sentait pas assez de vocation, et se voua à l'enseignement. Il professa avec succès à Leipzig l'éloquence, la poésie et la philos, morale, et f 1769. Ses talents comme prof, et comme écrivain et sa piété lui assurèrent une influence qui s'étendit bien au delà des limites de l'université, et si les uns s'adressaient à lui à cause de sa générosité, d'autres voyaient en lui un conseiller et presque un confesseur. Ses cantiques spirituels et ses fables appartiennent au domaine public. Il a écrit aussi des leçons de morale, des comédies, des dissert, littéraires, etc. QEuvr. compl. 10 vol. Leipzig 1770. — Son fr. Christlieb était un métallurgiste distingué.

GEMARA, v. Talmud.

GEMBLOUX, latin Geminiacum, ancienne abbaye de bénédictins, près Namur, fondée par Guibert, et longtemps distinguée par sa science. Sa Chronique a été écrite par Sigebert 1030-1112, et continuée par son disciple Anselme; elle est utile à consulter pour 1'époque de Henri IV.

GÉNÉRAL, v. Ordres religieux.

GENESIUS, comédien romain qui, d'après la légende, se convertit pendant qu'il recevait un baptême fictif en jouant sur les planches une comédie blasphématoire; il fut exécuté sous Dioclètien 290. La légende, qui n'a rien d'extraordinaire, ne se concilie cependant pas avec l'histoire.

GENÈVE. Vieille ville qui, avant l'invasion romaine, était déjà l'une des principales cités des Allobroges. César l'incorpora à l'empire, et Rome lui donna, en échange de son indépendance, des institutions municipales. Les Bur-gundes s'en emparèrent au 5me siècle, puis les Goths, puis les Francs. Le christianisme y fut apporté de Lyon, à ce que l'on croit, dès le 2me siècle, et l'on nomme Diogène 381 comme son premier évêque. En 773 Charlemagne accorda l'investiture à l'év., qui possédait déjà le pouvoir politique, en même temps qu'il confirmait les franchises et privilèges des citoyens. Le comte Aymon, 1124, passa à l'évêque les droits qu'il pensait avoir sur Genève, et après des luttes séculaires entre les évêques, les comtes du Genevois, les ducs de Savoie et le peuple de Genève, ce dernier finit par triompher; l'év. Pierre de la Baume dut s'enfuir nuitamment 1534; les ducs avaient déjà abandonné en 1524 leurs prétentions, tout en se réservant de reprendre, quand ils le pourraient, un pouvoir auquel ils n'avaient renoncé qu'en apparence; l'entreprise manquée du 12 déc. 1602, dite l'Escalade, fut sous ce rapport leur dernière et leur plus malheureuse tentative. Après que la Réforme eut fait ses premières conquêtes en Allemagne, en France et dans plus, cantons de la Suisse, elle pénétra aussi à Genève, non sans une violente résistance de l'évêché contre Farel, Saunier, Froment, qui furent à plusieurs reprises menacés d'être jetés au Rhône. Mais le parti de la Réforme grossissait de jour en jour, et si La Baume, le duc de Savoie et le canton de Fri-bourg effrayaient les Conseils de la ville, l'appui de Berne neutralisait en partie cette pression. L'édit de Réformation parut le 27 août 1535. Calvin arriva en juillet 1536, et imprima son cachet à l'Église, à la législation et aux mœurs de la petite cité, qui devint dès lors la capitale d'une grande opinion (Mignet). Bèze fut le digne continuateur de Calvin, et maintint au milieu de beaucoup de difficultés l'unien presque intime de la société relig. et de la société civile, qui donnait l'apparence d'une théocratie à l'organisation ecclés. de la Rome protestante. Malgré ses erreurs, ce fut la grande époque de Genève. Avec le 17me siècle la vie relig. diminue, mais on se cramponne d'autant plus étroitement aux formules théologiques. C'est le siècle du synode de Dordrecht; à Genève l'orthodoxie est représentée par Th. Tronchin et par François Turrettini. Les fils de ces deux hommes, Louis Tronchin et Jean-Alph. Turrettini inaugurent le 18°^ siècle en attaquant le formalisme légal du clergé et le règne des formules dogmatiques; ils comprennent que ce n'est pas la phrase qui fait la vie mais ils semblent croire que la vie se trouvera dans la suppression de la phrase, et cela aussi est un formalisme. Bén. Pic-tet et Ant. Maurice maintiennent plus fidèlement les traditions évang. et ne donnent aucun gage à l'esprit encyclopédiste et voltairien qui exploite à merveille les concessions que Ton fait à la libre pensée et au libre examen. Un article de l'encyclopédie fait des ministres de Genève un éloge perfide en les représentant comme de francs sociniens dont le principe est de ne rien proposer qui heurte l'intelligence. La Compagnie protesta énergiquement contre cette calomnie, mais elle avait mis les apparences contre elle par une série de concessions à l'esprit du siècle, notamment en 1706 dans l'affaire Vial, et surtout le 17 juin 1725 en supprimant tous les symboles et en recommandant sur cette affaire c le silence le plus absolu. » Dans tous les cas la crainte du dogmatisme poussait toujours plus le clergé à négliger, si ce n'est à cacher les vérités mystérieuses du christianisme, c.-à-d. les miracles et la doctrine. Les sermons, ceux même de Vernet, n'ont plus la sève évan-gélique, et ils s'appliquent à racheter par la beauté de la forme la pauvreté du fond. Lullin a encore quelque chose de la doctrine chrétienne, mais ses successeurs, même Laget, s'en tiennent déplus en plus à la simple morale. La vie relig? est en baisse, les temples se vident; à mesure que les pasteurs abandonnent la doctrine, les troupeaux abandonnent les pasteurs. Cependant, sauf quelques rares exceptions, les pasteurs restent la représentation la plus exacte, non seulement de la science et de la gloire, mais encore de la nationalité genevoise. Sous la domination franc., c.-à-d. sous l'épreuve, et sous la restauration, c.-à-d. après la délivrance, le sentiment religieux se réveille à la voix et sous l'influence des Cellérier, des Moulinié, des Martin, des Peschier et des Demellayer. Plus tard la Compagnie des pasteurs s'effraie d'un mouvement qui se produit en dehors d'elle et qui paraît vouloir se développer sous des formes nouvelles. Elle craint le mysticisme, l'esprit morave. les doctrines arrêtées. Après plusieurs demi-mesures, prises depuis 1810, elle se décide à imposer son fameux règlement du 3 mai 1817, confession de foi négative, qui fut l'origine d'une lutte de 20 années. A partir de ce moment les égl. indépendantes et les écoles libres se multiplièrent à Genève. Sur l'hist. de ce réveil, v. les différents écrits de Guers, Malan, Bost, Goltz. Genève, qui paraît être la terre prédestinée des expériences sociales, morales, religieuses et théologiques, après avoir presque adopté en 1847 la séparation de l'Égl. et de l'État, s est jetée dans l'excès contraire en acceptant pendant quelques années la protection et par conséquent la tutelle de l'État pour l'établissement du libéralisme théol. sous sa double forme protestante et catholique. En théorie tous les cultes y sont libres, et l'on compte auj. à c^lé de l'Égl. officielle, des chapelles et des communautés indépendantes , wesleyenne, luthérienne, anglicane, russe, américaine, darbyste, salutiste, etc. Le catholicisme y jouit absolument des mêmes droits que le protestantisme, parfois avec une disposition à en réclamer davantage.

Une église catholique-libérale, nationale ou chrétienne, s'est fondée à Genève en 1873. L'État était sur la défensive depuis qu'en 1864, le curé Mermillod avait été nommé év. d'Hé-bron; mais l'év. de Fribourg ayant (par ordre) déclaré en 1871 qu'il n'était plus l'év. de Genève, et qu'il fallait s'adresser à M. Mermillod pour la repourvue des places vacantes, le gouvernement genevois refusa de se soumettre à cette irrégularité. Il aurait pu persévérer dans son attitude défensive et laisser les vacances se produire et se prolonger jusqu'au moment où l'év. jugerait bon de les repourvoir; il préféra charger les paroisses elles-mêmes d'élire leurs curés. Mais pour cela il fallut remanier toute la loi. Ce qu'on avait fait pour les protestants on le fit pour les catholiques, et en 1873, 19 févr. et 27 août, la nouvelle Égl. était constituée; le 25 oct. 1876 elle se rattachait à l'évêché cathol. chrétien suisse. Elle avait eu le bonheur de rencontrer dans le p. Hyacinthe un orateur puissant et sympathique, et pendant plus, mois la nouvelle Égl. parut réussir; elle comptait aussi quelques prêtres distingués. Mais elle eut le double malheur d'être trop protégée par l'État, et de compter plus d'électeurs que de fidèles. Les cathol. romains se sont constitués en culte dissident; leurs couvents ont été supprimés;, mais, quoi qu'on en ait dit, s'il y a eu des tracasseries, il n'y a pas eu de persécutions.

Quant au Consensus de Genève, de 1554, plus ou moins calqué sur celui de Zurich 1540, il avait été peu à peu modifié, mais il subsistait touj. dans son esprit, et vers 1649 il avait été renouvelé avec une tendance plus calviniste encore que le synode de Dordrecht, ce qui motiva le départ de plus, hommes distingués, amena de nombreux froissements, et justifia la réaction qui se produisit sous Alph. Turrettini, q. v.

GENEVIÈVE 1° en latin Genovefa; la sainte et légendaire patronne de Paris. On croit que c'était une simple bergère, née à Nanterre vers 423, et qui, sur le conseil de saint Germain d'Auxerre, aurait fait vœu de virginité. Après la mort de ses parents, elle vint demeurer à Paris chez sa marraine, où elle vécut dans la plus grande abstinence. A l'approche d'Attila 451, elle rassura les Parisiens effrayés et leur dit qu'ils n'avaient rien à craindre. Une autre fois, pendant une disette, elle leur procura des vivres. Sa piété, sa bienfaisance, la sainteté de sa vie, ses visions même, lui valurent, en dépit de la calomnie, la réputation d'une sainte, qui s'accrut encore par tous les miracles qu'on lui prêta. A sa prière Clovis fit bâtir en l'honneur des saints Pierre et Paul l'église qui plus tard porta le nom de la sainte, et où ses reliques furent déposées, f 3 janv. 512.

2° Geneviève de Brabant, dont la touchante légende a inspiré tant de poésies et de romans, Tieck, Muller, etc. Faussement accusée d'adultère par Golo, elle fut pendant 6 ans nourrie par une biche, ainsi que son enfant, jusqu'au moment où son mari, Siffroy, la retrouva, grâce à la biche providentielle, et reconnut son innocence, 737. Elle fit élever la chapelle de Frauen-kirchen à l'endroit où elle fut retrouvée.

GENGIS-KHAN, célèbre prince mongol, né 1164, f 1227, d'abord chef d'une simple horde, agrandit son héritage par des conquêtes et finit par être le maître de toutes les contrées situées entre la mer Caspienne et Pékin. Il partagea son empire entre ses 4 fils. Inhumain et barbare, suivant les mœurs de son temps, il détruisit Sa-marcande et Boukara, ainsi qu'une foule de riches monuments à Pékin, v. Prêtres-Jean.

GENNADIUS 1° prêtre de Marseille du >e siècle. C'est à tort que quelques-uns l'ont fait év. de Marseille. Il se distingua parmi les défenseurs du semi-pélagianisme par son érudition. f 495. On a de lui un ouvrage sur la foi, De Dogmatibus, et un autre sur les écrivains ecclésiast., De Viris illustribtts. Il n'a pas été traduit. — 2° patr. de Constantinople, s'appelait George, et avait reçu le surnom de Schola-rius; théologien fécond et considérable de l'Égl. grecque. Envoyé au conc. de Florence-Ferrare, il se prononça d'abord pour la réunion des 2 Églises, contre l'opinion du savant Gèmiste Plé-thon. Mais de retour à Constantinople, cédant à l'opinion publique, il se prononça contre l'union, se fit moine et fut nommé patriarche. Il fit remettre au sultan, Mahomet II, une confession de foi, souvent imprimée, écrivit quelques autres ouvrages dogmatiques, donna sa démission, et f 1464. 11 tenait pour Aristote et écrivit contre Pléthon, platonicien.

GÉNOVÉFAINS, chanoines de l'abbave de Sainte-Geneviève, institués probablement par Clovis vers 500, et connus aussi sous le nom de Congrég. de France. Ils subirent, comme tous les ordres et toutes les abbayes, plusieurs réformes: notamment en 1148 par 12 chanoines de Saint-Victor, et en 1614-1626 par le p. Ch. Faure, qui fut nommé supérieur et qui se distinguait par sa piété. L'ordre s'occupait des malades et de l'enseignement; il avait à sa tête un général; plusieurs de ses membres se sont illustrés dans les lettres. Ils avaient pour centre l'édifice dont on a fait depuis la biblioth. Sainte-Geneviève et le collège Henri IV. A la fin du 18me siècle, ils comptaient 107 maisons et plus de 1300 membres; leur église devint pendant la révolution le siège du club des jacobins. — Quant aux femmes, v. Miramion.

GENSÉRIC, roi des Vandales, 2<* fils de Go-dégisile et successeur de Gundéric, son frère, conquit le nord de l'Afrique 429-439, et en persécuta avec rage l'Église, qu'il haïssait comme arien. En 455 il prit Rome et la pilla pendant 15 jours; tout ce que Léon 1er put obtenir, ce fut qu'il ne la détruisît pas. Il emmena même Eudoxie en captivité, f 477.

GENTILIACUM, ou Gentilly, ancienne résidence des rois de France de la l** et de la 2<i* race. Pépin y fit bâtir un château auj. détruit. Propriété de l'évêché de Paris depuis 878. Il s'y tint en 767 une assemblée nationale à laquelle assistèrent des délégués grecs et romains, et où l'on discuta la question des États de l'Égl. en Italie, celle des images, la doctrine arienne sur la Trinité, et diverses autres actualités.

GENTILIS, Jean-Valentin, né à Cosenza, Na-ples, dut quitter son pays à cause de ses opinions, vint à Genève où il se joignit k la colonie des réfugiés italiens et signa 1558 la confession de foi qui condamne les doctrines antitrinitaires. Cependant, soit k Genève même, une première fois, soit en Pologne, où il s'était enfui, et notamment au synode de Pinczow, il s'exprima comme arien et même comme socinien. Arrêté k Genève il se rétracta, réussit k s'enfuir en France, puis en Moravie et à Vienne, et finit par retenir en Suisse. Il fut de nouveau arrêté k Gex, conduit à Berne et condamné pour rupture de ban et à cause de ses attaques contre la Trinité. Il eut la tête tranchée le 9 sept. 1566 et mourut courageusement, victime de son caractère inquiet et de l'intolérance de son temps. — Procès, par H. Fazy.

GENTILLET, Innocent, savant jurisconsulte, né k Vienne, Dauphiné, date inconnue. Après avoir siégé comme conseiller dans la chambre mi-partie du Dauphiné, il fut jusqu'en 1585 président de la même chambre k Grenoble et se rendit probablement de là à Genève, où il avait déjà figuré comme avocat sur les registres du 23 oct. 1572, après la Saint-Barthélemy. Il a publié de nombreux écrits, entre autres une Apol. de la foi réformée 1578, un Disc, contre Machiavel, une Étude sur le conc. de Trente, qui en est la réfutation au point de vue juridique.

GENTILLY, v. Gentiliacum.

GÉNUFLEXION. L'acte de fléchir les genoux était considéré dans l'ancienne Égl. comme le symbole de la plus profonde humiliation, car d'ordinaire on priait debout. Peu à peu cependant l'usage s'en est introduit dans le culte; l'Égl. catholique l'a imposé pour l'eucharistie et en présence du saint sacrement. Plus. Égl. protestantes ont également pris l'habitude de communier à genoux; de même pour la confirmation, pour la consécration, pour une bénédiction spéciale. D'autres n'ont pas cette coutume. Le formalisme consisterait à attacher une importance trop grande à la présence ou à l'absence de cette pratique.

GEORGES lo le saint: patron des chevaliers et de l'Angleterre, doit avoir été un jeune et beau prince de Cappadoce, officier dans l'armée romaine, qui, lors de la persécution dioclé-tienne, donna sa démission et souffrit le martyre, 303- On l'honora de bonne heure, déjà sous Constantin. On en fait un Persée chrétien, qui tua un dragon furieux et délivra ainsi la fille d'un roi qu'il allait dévorer. C'est surtout sous cette forme qu'on le représente, mais comme les actes qui racontent sa vie sont faux, il est à croire qu'il n'a jamais existé, et que sa légende n'est que la reproduction chrétienne de la fable persane de Mithras, la personnification d'Ormuzd, plongeant son glaive dans la gorge d'un taureau qui représente les ténèbres. Plusieurs ordres religieux ont été fondés sous ce nom: en Allemagne et en Italie, mais ils ont peu duré; en Bavière, dès le 12™ siècle, au retour des croisades, renouvelé 1729 par Charles-Albert; enfin en Russie, le grand ordre militaire, institué 1769 par Catherine II, pour des faits d'armes. La décoration est une croix d'or, avec un écusson central figurant saint Georges à cheval terrassant le dragon.

2° G. de Laodicée; clerc d'Alexandrie, excommunié comme arien par l'év. Alexandre. Ses partisans irrités le nommèrent év. de Laodicée. mais il ne put aller aussi loin qu'eux et il forma avec Basile d'Ancyre le parti des Ho-moïousiens, ou semi-ariens. Il gagna l'emp. Constance aux résolutions du conc. d'Ancyre 358, confirmées par 3 autres synodes, où les intrigues de la cour, bien plus que les textes bibliques, proclamèrent le semi-arianisme comme vérité légale.

3<> G. le Syncelle (cellule commune), ainsi nommé parce qu'il partageait la même cellule que Taraise, patr. de Constantinople; historien grec, auteur d'une Chronographie, composée en partie d'après Jules Africain, f vers 800. . 4o G. de Trébizonde, né 1396 en Crète, mais d'une famille originaire de Trébizonde, vint 1420 en Italie, à Venise d'abord, puis à Rome sur la demande d'Eugène. Il enseignait la philosophie d'Aristote et entra en conflit avec Bes-sarion et Pléthon, qui étaient platoniciens, ce qui lui fit perdre la faveur du pape Nicolas. Chargé de quelques traductions du grec en latin, il apporta à ce travail de la négligence, peut-être même une infidélité volontaire, de sorte que malgré toute sa science il ne réussit pas. fà Rome 1486.

5° Georges-le-Barbu, duc de Saxe, l'adversaire de Luther; né 4 août 1471, monta sur le trône 1500, provoqua 1519 la Dispute de Leipzig entre Eck et Luther, çt ne put pardonner à ce dernier la violence de sa polémique. Il persécuta les évangéliques, mais il fut heureux de pouvoir consoler son fils et de se fortifier lui-même sur son lit de mort par les seuls mérites du Sauveur.

6° G. de Polenz, le premier év. protestant.

Né 1478 il fut secrétaire de Jules II, entra dans l'ordre teutonique et fut nommé 1518 év. de Samland. En 1523 il se prononça pour la Réforme, fit venir à KOnigsberg le ci-devant franciscain Brissmann, le prit pour assistant, ordonna en 1524 que le culte serait célébré en langue vulgaire et recommanda la trad. de la Bible de Luther. En 1525, if remit au duc Albert l'administration temporelle du duché et se consacra avec Brissmann à l'œuvre purement spirituelle. Il se maria, et f 1550 après un ministère béni.

7o G.-le-Confesseur, ou le-Pieux, marquis de Brandebourg, fils de Fréd.-le-Vieux. Né 4 mars 1484, il régna de 1525 à 1527 avec son fr. Casimir, puis seul, f 17 déc. 1543. 11 se prononça dès 1524 pour la Réforme, qu'il introduisit dans ses États suivant les articles de Visitation de Mélanchthon de 1528, sur la base des ordonnances de 1526 de son frère. En 1529 il était à Spire, en 1530 à Augsbourg au nombre des princes les plus décidés. Par ses paroles et par ses actes il prêta le plus énergique appui à ses cousins en Brandebourg et à son fr. en Prusse.

8° G. d'Anhalt, né 13 août 1507; chanoine à Mersebourg, étudia à Leipsig, fut déjà ordonné prêtre en 1524. nommé doyen à Magdebourg en 1526. Il étudia soigneusement les Écritures pour se préserver des nouvelles doctrines, et arriva par ce moyen à un résultat contraire; en 1530, comme son cousin Wolfgang, il devint luthérien. Après la f de l'év. de Mersebourg 1544, Maurice de Saxe le nomma coadjuteur, et en 1545 lui conféra la dignité épiscopale, mais sans les charges du temporel. La bataille de Mtlhl-berg le déposséda, et Michel Helding fut nommé à sa place. Il prit part aux conférences relatives à l'Intérim et+ à Dessau 1553.

GÉRARD ou Gerhard lo év. de Toul, 963-994, fonda des écoles et protégea les savants.

2o Le Saint; d'une famille noble de Namur; bâtit en 918 le couvent de Brogne à la suite d'une vision, entra comme moine à Saint-De-nis, introduisit la règle de saint Benoît dans plus, couvents, f 957. Canonisé par Innocent II.

3° Moine vénitien né au commencement du Hme siècle, prédicateur distingué. Pour se rendre au Saint-Sépulcre il passa par la Hongrie, et se décida sur les instances du roi Étienne à s'y fixer pour travailler à la conversion des idolâtres. Il accepta l'évêché d'Ozanad, avec son travail, ses peines et la perspective du martyre. Il obtint quelques succès, mais ses dernières années furent troublées; André, successeur d'Étienne, persécuta les chrétiens, et Gérard fut lapidé avec deux de ses collègues, 1046.

4o Gérard, né 1040 dans l'île de Martigue, sur les côtes de Provence; nommé vers 1080 supérieur d'un hôpital pour les pèlerins à Jérusalem, fondateur en 1100 et grand-maître de Tordre hospitalier de Saint-Jean, f 4421.

5o G. Segarelli, v. Apostoliques (Frères).

6® Jean, né 1582 à Quedlinbourg, élevé sous l'influence d'Arndt, un des théol. les plus remarquables et les plus influents de l'Allemagne au 17roe siècle. Il vint à Wittenberg 1599, étudia d'abord la médecine, puis la théol. à Iéna et à Marbourg. A 24 ans il était Dr théol. et surintendant à Heldbourg. En 1615 il revint à Iéna comme prof., et occupa sans conteste le premier rang parmi les théol. contemporains par ses talents et sa piété. Il possédait la confiance des princes et présidait les conférences des ecclésiastiques saxons, f 1637. Il a écrit plus, ouvrages latins, reposant sur une foi absolue dans la vérité des Ecritures.

7o Paul, né vers 1606, diacre à Berlin 1657, tête peu équilibrée; destitué 1667, pour n'avoir pas voulu s'engager k plus de modération dans ses sermons de controverse contre les réformés. En 1669 il fut nommé archidiacre à Lubben. f 7 janv. 1675. Il avait du talent comme poète et plus, de ses cantiques sonl très populaires; après Luther il est peut-être encore le plus estimé des poètes religieux de l'Allemagne.

80 Philippe-Louis, né à Paris 1737, f 1813, eut une jeunesse orageuse, se convertit, devint prêtre, fut enfermé pendant la révolution; auteur de plusieurs écrits intéressants, entre autres: le Comte de Valmont, ou les Égarements de la Raison, 6 vol. 20 éditions; et l'Esprit du Christianisme, avec ses preuves, etc. 1803.

9° Gérard, v. Lucius.

10o G. Groot, et Gérardiens; v. Groot.

GERBERON, Dom Gabriel, né 1628 k Saint-Calais, Maine, entra 1649 dans la Congrég. de Saint-Maur, qu'il honora par sa science, et vécut à Corbie depuis 1675. Défenseur des droits du pape dans la discussion des régales, il dut fuir pour n'être pas arrêté. A Bruxelles il publia les œuvres de Bajus et écrivit une Hist. du jansénisme en se prononçant sur la prédestination et sur la grâce de Dieu comme il l'avait déjà fait en 1676, dans le sens janséniste. Arrêté 1703 et excommunié, il resta en prison jusqu'en 1710. Sur son lit de f 1711 il rétracta la rétractation qu'il avait été contraint de faire.

GERBERT 1° pape; v. Sylvestre II. 2° Martin, bénédictin, abbé de Saint-Biaise, né 1720 f 1793; auteur de plus, écrits sur l'histoire et la musique d'église. Son couvent ayant été incendié, il le fit reconstruire avec un grand luxe.

GERHOCK, ou Gerock de Reichersberg. adversaire d'Abailard et de la scolastique. Dévoué au parti d'Hildebrand, il se donna pour tâche de réformer le clergé et notamment les chanoines sécularisés par le capitulaire de Louis-le-Déb. Son rigorisme l'exposa à bien des luttes et il dut souvent changer de résidence. Né 1093 à Polling, près Weilheim, il fut chanoine à Augsbourg, coadjuteur de l'év. Cuno de Ratisbonne, prêtre en plusieurs lieux, et finalement doyen de Reichersberg sur l'Inn. f 1169.

GERLACH, Otton (de). Né 1801 à Berlin, il étudia d abord le droit, puis 1820 la théol.; en 1828 il se lit connaître comme privat-docent à Berlin, fut nommé pasteur de Sainte-Élisabeth en 1834, membre du Consistoire, enfin prédicateur de la cour et de la cathédrale; f 1849. Distingué par ses talents non moins que par le caractère pratique de son activité pastorale, cure d'âmes, soin des pauvres, il fit en 1842 un voyage en Angleterre et se développa plus encore dans le même sens sous l'influence de Chalmers. Il exerça également une grande action sur l'Égl. de Prusse, et fit preuve d'indépendance en refusant de marier des divorcés, ce qu'on lui a reproché comme un encouragement à mettre la conviction particulière du pasteur au-dessus de la loi. On a de lui une Bible, avec notes et introductions, des traductions de Baxter, des Œuvres choisies de Luther, etc.

GERMAIN 1° dit d'Auxerre, né dans cette ville 380; nommé év. 418 à la mort d'Amator (il était auparavant gouverneur de la province). Il se rendit 2 fois en Grande-Bretagne pour y combattre le pélagianisme, 428 et 446. Lors de l'invasion des Alains en Armorique, il se rendit au-devant du général païen, et obtint de lui qu'il épargnerait la province, s'il obtenait de la cour impériale le pardon des habitants. Germain se rendit à Ravenne 011 était Valentinien UI; il fut très bien reçu, comblé d'honneurs, et obtint la faveur demandée, mais l'heure de la mort sonna pour lui sur la terre étrangère, f juillet 448.

2° Dit de Paris, né à Autun 496, év. de Paris 554, f 28 mai 576, fondateur de l'égl. de Saint-Germain-des-Prés, fut en grande faveur auprès de Childebert et de Clotaire, excommunia Caribert pour ses débordements, et essaya en vain de réconcilier Sigebert et Chilpéric, désunis par Frédégonde. Il est connu surtout par son zèle pour le rachat des esclaves et par ses efforts contre l'immoralité.

3° Patr. de Constantinople sous l'emp. JeanUI. Lors des luttes entre les papes et les Orientaux, il écrivit à Honorius IU une lettre fort soumise 1223, mais aux cardinaux une autre lettre où il traite Rome de marâtre et attribue à ses exactions la scission des deux Églises.

4° Saint-Germain-en-Laye, ville de Seine-et-Oise, qui doit son origine à un monastère que Robert fit bâtir l'an 1000 dans la forêt de Laye en l'honneur de Saint-Germain de Paris. Elle possède un château célèbre où sont nés Henri II, Charles IX, Marguerite de Navarre, Louis XIV, et où séjourna Jacques II d'Angleterre, qui y est enterré. Une paix y fut signée le 8 août 1570 entre les cathol. et les protestants, et mit fin à la 3""» guerre de religion. Elle garantissait aux réformés l'amnistie, la liberté de conscience, le droit de célébrer leur culte partout où il existait le 1er août, dans les châteaux des seigneurs et dans deux villes de chaque gouvernement. En outre le traité leur confirmait pour 2 ans comme places de sûreté La Rochelle, Montauban, Cognac et La Charité. Deux ans après avait lieu la Saint-Barthélémy.

GERMANIQUE, v. Théologie.

GERMOND. Louis, né 23 avril 1795 à Lova-tens, Vaud; consacré 1819, pasteur à Sainte-Croix et à Yvonand, démissionnaire à la sécession de 1845. Fondateur de l'œuvre des diacon-nesses d'abord à Échallens, puis à Saint-Loup, il y f 1868. Prédicateur éminent, il a peu écrit. Il a laissé 3 fils, Henri qui l'a remplacé à Saint-Loup f 1882; Louis, pasteur et directeur d'une école normale de tilles à Lulry, et Paul, 23 ans missionnaire au sud de l'Afrique.

GERNLER, Luc, né 1625 à Bâle, y fut successivement diacre, puis second et premier pasteur, et enfin antistès, Dr en théol. et prof. Il était strict orthodoxe réformé. Il est avec Bux-torff et Wettstein un des auteurs du Syllabus controversiarum, manuel pour les étudiants. C'est lui qui a rédigé le premier projet du Consensus helvétique, 1671. f 1675.

GÉROCK, v. Gerhock.

GERSEN, Jean, moine bénédictin de Cava-glia, Piémont, un de ceux à qui l'on attribua le livre de l'Imitation, entre 1220 et 1240.

GERSON, Jean Charlier (de), surnommé le Docteur très chrétien; né 14 déc. 1363 à Gerson près de Réthel et Reims; l'aîné de 12 enfants; il fit ses études au collège de Navarre à Paris, fut licencié ès arts 1381, fit sa théol. sous d'Ailly et accompagna 1387 la députation de l'univ. auprès de la cour papale à Avignon, où il put se rendre compte par lui-même de la situation de l'Église. En 1392 il fut nommé Dr en théol., et en 1395 chancelier de l'univ. en remplacement de d'Ailly; en 1408 curé de Saint-Jean en Grève. Sage et courageux dans l'exercice de ces fonctions, il n'hésita pas, lors de l'assassinat du duc d'Orléans, à condamner le duc de Bourgogne qui en était l'auteur, et l'abbé Petit, qui s'en faisait l'apologiste. Ses talents comme politique ecclésiastique se révélèrent surtout à l'occasion du schisme, et des trois conc. de Pise, de Bâle et de Constance. Il se montra le ferme défenseur des maximes et des libertés gallicanes, et combattit avec la même résolution l'hérésie là où il croyait la voir et les désordres de la papauté. Dans ses écrits et dans ses discours il exposa les fautes de l'Église, la démoralisation du clergé, les vices des papes. Il soutenait que les conciles étaient les vrais représentants de l'Égl., que le pape était subordonné au concile, et pour mettre un terme aux divisions qui déchiraient la chrétienté, il demanda et obtint à Constance le renvoi des 2 papes régnants. Il n'y avait pas en lui l'étoffe d'un réformateur; il en avait la bonne volonté, mais ni la foi, ni les idées précises et arrêtées; il voulait bien qu'on lût la Bible, mais moyennant qu'on l'expliquât selon l'Église. Cependant il attaqua fortement la hiérarchie et plusieurs superstitions qui défiguraient le christianisme; il s'opposa à la canonisation de sainte Brigitte; il combattit la casuistique sophistique que les franciscains mirent surtout en avant au sujet du meurtre du duc d'Orléans. 11 fut exilé, et sa conduite à Constance ne servit pas à le réhabiliter; il avait voté la mort de J. Huss, mais dans l'intérêt de la piété il prit le parti des fr. de la Vie commune et se prononça contre la fausse religiosité de moines tels que les flagellants. La haine du duc de Bourgogne lui fermant le retour en France, il resta en Bavière jusqu'à la mort de son ennemi 1419, et se retira ensuite à Lyon, au couvent des célestins, dont son fr. était le prieur. Il y employa les dernières années de sa vie à prier, à écrire et à instruire de petits enfants dans les vérités chrétiennes; « car, disait-il, c'est par eux que la réformation doit commencer. » f *429. Sa tendance était mystique, mais sans rien du panthéisme qui caractérisait le mysticisme allemand: il faisait consister la religion dans la contemplation produisant l'amour et réglant la volonté de l'homme sur la volonté de Dieu. En philos, il était nominaliste, et sa méthode était scolastique. Il a composé de nombreux ouvrages, la plupart d'édification pure, entre autres: les Consolations de la théol., en 4 livres, écrit pendant son exil; Théol. mystique; Sur les intuitions de l'âme appliquées aux choses du ciel; Sur le droit des conc. de suspendre les papes, etc. Plusieurs auteurs, et des plus graves, lui attribuent aussi, mais à tort, le livre de l'Imitation, q. v. — Éloge de Gerson, par Faugère 1838.

GERTRUDE 1<> fille de Pépin de Landen, maire du palais des rois d'Austrasie, et d'IIde-berge. Née 626, elle se consacra à Dieu à 10 ans, fonda le couvent de Nivelle, dont elle fut la première abbesse, et f 659. — 2° sœur de saint Melchtildis; née à Eisleben, se fit religieuse 1294 chez les bénédictines de Rodersdorf et d'Helvelfucht, dont elle devint l'abbesse. f 1334. Elle eut des visions qui la rendirent célèbre, et qu'elle écrivit elle-même en latin sous le titre de Révélations. Les adeptes placent ce livre à côté de ceux de sainte Thérèse. Il a été publié d'abord par le chartreux Lanspergius f 1539, puis trad. en fr. par Mège 1674.

GERVAIS lo fils de Vital et de Valérie, a souffert le martyre, ainsi que son fr. Protais, à la fin du 1er siècle. Complètement inconnus l'un et l'autre, ils apparurent à saint Ambroise pour lui révéler le lieu où ils avaient été enterrés. L'év. de Milan ayant découvert ces restes, les plaça dans la basilique qu'il faisait construire, et qui porte encore auj. son nom. D'autres égl. à Paris, Genève, etc., portent le nom de ce saint, dont elles ont cru posséder quelques débris. — 2° Anglais de naissance, devenu abbé de Beau-vais 1195, et général des prémontrés 1206. f 1228. Auteur de Comment, sur les Petits prophètes et les Psaumes.

GESEMUS lo Juste, né 6 juill. 1601 à Es-beck, étudia à Helmstâdt, fut précepteur àléna, puis pasteur k Brunswick 1629, à Hildesheim 1636, et k Hanovre 1640, f 1673. Il est connu surtout par de beaux cantiques et par un Petit catéchisme qui a été longtemps en usage en Allemagne, quoiqu'on lui ait reproché une tendance cryptocatholique. — 2o Guillaume, né 3 févr. 1785 k Nordhausen, étudia à Helmstâdt et à Gottingue la théol. et la philologie, fut répétiteur et maître à Gottingue et Nordhausen, et depuis 1810 prof, de théol. à Halle; en 1827 il fut nommé conseiller consistorial. f 1842. Il fut avec Wegscheider un des chefs du rationalisme à Halle. Il a surtout rendu des services comme hébraïsant. Sa Grainm. héhr. a eu plus de 20 éditions; son Dict. hebr. allem. 1810 en a eu plus de 6: son Dict. hébr. lat. est très estimé. Ses Études sur la gramm. hébr. et son Comment, sur Ésaïe sont également importants.

GEX (Pays de). Cette petite contrée, située à l'extrémité du département de l'Ain et confinant k la Suisse, fut conquise en 1536 par les Bernois, qui y introduisirent la réforme et y placèrent des pasteurs. Rétrocédée au duc de Savoie en 1567, puis vers la fin du 16™* siècle, possédée par les Genevois, elle devint française en 1601. François de Sales, qui bientôt occupa le siège épiscopal d'Annecy, se hâta d'installer quelques curés dans le pays de Gex, où il réussit k enlever aux protestants leurs 25 églises, que ceux-ci remplacèrent par de nouveaux lieux de culte. Quoiqu'on en ait dit, l'illustre prélat n'obtint guère d'autres succès. Malgré ses efforts et ceux de ses successeurs, la masse de la population, rattachée au faisceau des Égl. réformées de France, et dirigée par des conducteurs spirituels dévoués, demeura fidèle aux croyances evangéliques. La démolition de 23 de leurs temples, acteinique accomplien 1662 parLouis XIV, qui préludait ainsi k la révoc. de l'Édit de Nantes, ne réussit point à ébranler les huguenots du pays de Gex. Un comité secret se constitua même pour prendre en main les intérêts de leurs églises, et rendit de précieux services. En 1685 tombèrent les deux derniers temples, et l'appréhension des dragonnades détermina les deux tiers des habitants k prendre la fuite. Les réformés qui n'émigrèrent pas furent peu à peu reconquis par l'Égl. romaine. Vers la fin du siècle suivant, quelques protestants sont rentrés dans la contrée. Auj. leurs égl. commencent k renaître; v. Fernex, et Hist. des égl. réf. du pays de Gex, par Th. Claparède.

GEYSA, 4me duc de Hongrie, fils du général Toxus exécuté en 955, monta sur le trône 972. Sa femme Sarolta, probablement fille du pieux chef Gylas, s'était convertie après une jeunesse un peu fougueuse, et ils travaillèrent ensemble à la propagation du christianisme. Sous l'influence de l'év. Piligrin, il entretint de bons rapports avec Othon I«r, mais l'avènement d'Othon II changea momentanément la face des affaires. Geysa eut un fils 983, qu'il nomma Waik et qui lui succéda sous le nom d'Étienne. | 997.

GHERLANDI, Giulio, de Sprezzano, dans le Trévisan, était membre d'une congrégation évangélique. Arrêté en 1559 d'abord, puis en 1561, il fut jugé à Venise et condamné à mort le 16 oct. 1562. Il fut noyé; ses dernières paroles furent: Au revoir, par delà!

GIBELINS, et Guelfes, noms des puissants partis qui, après avoir pris naissance en Allemagne, se transportèrent en Italie et la divisèrent du 12me au 14me siècle. Si l'on veut les caractériser d'un mot emprunté à la politique contemporaine, on dira que les guelfes étaient les cléricaux de l'époque, et les gibelins les libéraux ou les représentants de la société civile et laïque. Mais cette définition, vraie dans son ensemble, ne peut l'être dans ses détails; les partis subissent toujours certaines métamorphoses, ils se transforment avec les circonstances, et dans tous les temps on en a vu qui s'étaient organisés au nom de la liberté, la renier pour se maintenir. Les guelfes ont pu avoir le beau rôle, quand les papes luttaient pour la liberté des peuples contre le despotisme des rois et l'aristocratie féodale. A l'origine la lutte entre ces deux partis ne fut qu'une lutte d'ambition entre deux familles, dont les chefs se disputaient la couronne impériale. D'une part Conrad, fils de Fréd. de Hohenstaufen, seigneur de Waiblingen, ou Wiblingen, d'où par corruption est venu le nom de gibelin; de l'autre Henri-le-Superbe, duc de Saxe, neveu de Welf, ou Guelfe II, duc de Bavière. Conrad fut élu 1138, mais les guelfes refusèrent de le reconnaître, et à la bataille de Weinsberg, 1140, les noms des deux familles servirent pour la première fois comme cris de ralliement aux deux armées. Quelques années après, Guelfe III se réconcilia avec Conrad, et la maison renonçait à la lutte; sous Frédéric II Othon, dit l'Enfant, recevait le titre de duc de Brunswick, et les guelfes se sont maintenus jusqu'à nos jours dans les maisons de Brunswick, de Hanovre et d'Angleterre. Mais la paix faite en Allemagne, la division continua longtemps encore en Italie, où les guelfes étaient alliés à la puissante famille d'Esté. Un grand nombre de villes, lasses du joug des empereurs, entre autres Milan et celles de Lombardie, se proclamèrent libres et formèrent une ligue guelfe. Le pape se joignit à elles, pour se venger de l'emp. et de son rôle dans la question des Investitures. Cette ligue provoqua une ligue contraire, par l'initiative de Pavie, qui se déclara fidèle à l'empereur et se mit à la tête des gibelins. La guerre éclata en 1459, pour finir en 1250 par la défaite du parti impérial; mais trop de passions avaient été remuées pour que le calme pût renaître aussitôt, et la lutte continua, quoique sous une moindre échelle, entre des villes ou entre des familles, et c'est là que les circonstances particulières, les intérêts personnels, les jalousies, purent se donner carrière sous le masque de l'intérêt public, an point qu'il n'est pas toujours facile de dire lequel des deux partis servait la grande cause de l'indépendance nationale, quoiqu'elle fût plutôt représentée par les guelfes, et lequel était le plus soucieux de la dignité humaine et de la liberté religieuse, quoiqu'elle fût davantage dans le programme des gibelins. Le même homme, comme Dante, pouvait tour à tour appartenir à l'un et à l'autre parti; et la même ville, comme Florence ou Milan, pouvait voir les deux partis triompher l'un après l'autre; Rome même flotta entre les deux, et Rienzi lui donna un moment une constitution guelfe et démocratique. A la fin ces noms ne furent plus que des drapeaux, et ces puériles rivalités ne cessèrent que devant le danger commun, l'invasion française, 1495.

GICHTEL, Jean-George, né à Ratisbonne 14 mars 1638, étudia d'abord la théol. puis le droit, et s'établit comme avocat successivement à Spire et à Ratisbonne. Essentiellement mystique, nourri de Bœhme, il ne voulut plus connaître d'autre révélation que celle de Dieu en nous, et il s'attira les persécutions du clergé qui le fit emprisonner, bannir, et confisquer ses biens. Il se retira en Hollande, où il essaya de grouper quelques sectateurs, mais ils ne s'entendirent pas. Son désintéressement lui fit refuser des offres brillantes, et il + pauvre et abandonné 1710. Il a écrit Theosophia practica.

GIESELER, Jean-Ch.-Louis, né 3 mars 1795 à Petershagen près Minden; élevé à l'orphelinat de Halle, puis sous-maître; fit la guerre d'indépendance; sous-directeur au gymnase de

Minden 1817; directeur à Clèves 1818, Dr théol. et prof, à Bonn 1819, et à Gôttingue 8 juill. 1831. f 1851. Connu par son importante Hist. ecclés. et par ses recherches historiques puisées aux sources mêmes. Redepenning a publié les tomes V et VI de son Histoire.

GIESSEN, univ. fondée 1607 parle landgrave Louis (un moment transférée à Marbourg 1625), a représenté le luthéranisme pur, par opposition à Marbourg qui était réformé, et s'est fait un nom par la vivacité de sa dispute avec les théol. de Tubingue sur la doctrine de Christ et de son abaissement. Sa faculté cathol. reçut un coup fatal, lorsque l'év. Ketteler fonda à Mayence son séminaire de théol. 1851.

GIFTTHEIL, Louis-Fréd., Souabe qui, dans l'esprit de Breckling, écrivit pour la séparation de l'Égl. et de l'État. Il adressa aussi des exhortations aux princes et aux peuples contre la guerre et l'effusion du sang, f 1661.

GILBERT lo év. de Meaux 995, + 1015; canonisé. — 2° noble auvergnat, qui accompagna Louis-le-Jeune à la croisade de 1146; à son retour il se fit moine, fonda l'abbaye de Neuf-Fontaines, qui depuis porta son nom de Saint-Gilbert, et f 6 juin 1152. — 3<> (ou Guilbert) religieux anglais, né 1083 à Sempringham, Lin-colnshire, fonda l'ordre des gilbertins qui, tout en maintenant une séparation extér. rigoureuse, réunissait les couvents par paires, soumettait les nonnes à la règle de saint Benoît, et les hommes à celle d'Augustin, f 1189. L'institution ne sortit pas des limites de l'Angleterre. — kfi G. de la Porrée, Porretarws; né à Poitiers vers 1070, prof, de philos, et de théol. à Chartres, Paris et Poitiers; enfin év. de Poitiers 1142, f H54. Il s'était mis à la tête des Réalistes contre les Nominaux. Pour éviter toute apparence de sabellianisme, il croyait devoir distinguer la substance même de ta divinité des attributs qui en caractérisent les différentes personnes. Ses adversaires, entre autres Bernard de Clairvaux, l'accusèrent de trithéisme, mais sans pouvoir l'en convaincre. Le pape Eugène se contenta de décider qu'on ne peut séparer Dieu de sa divinité, ni sa personne de sa nature. Le conc. de Reims 1148 condamna quelques-unes de ses propositions; mais Gilbert était un vrai philosophe; il se rétracta pour pouvoir vivre en paix, et ne s'occupa plus que des soins à donner à sa paroisse. Son livre le plus remarqué est intitulé: Des six principes.

GILDAS lo saint, né 494 en Bretagne, + 570 ou 580, fonda près de Vannes le monastère de Rhuis, dont Afcélard fut abbé. — 2° autre saint, écossais, même époque; a laissé des ouvrages de piété. — 3o G. Cormac, moine de Bangor, Galles, né 516; le plus ancien écrivain connu de la Gr. Bretagne; a écrit une Hist. de la ruine de l'Angl., et une Lettre où il voit un châtiment de Dieu dans l'invasion du pays par les Anglo-Saxons, dont il fait un tableau effrayant. — Peut-être que ces trois n'en font qu'un.

GIR ALDUS Cambrensis. Silvestre Girald de Cambrie, vieil écrivain anglais, né 1146 à Mai-narpir, près Pembroke, Galles, étudia à Paris jusqu'en 1172 et fut nommé 1175 légat archié-pisc. pour le pays de Galles, et év. de Brechene. En 1184 il était chapelain de Henri II et conseiller du prince Jean. Il prêcha la croix pour Richard Cœur-de-Lion, mais ne se croisa pas lui-même, et fut adjoint au chancelier pour gouverner le pays en l'absence du roi. Nommé év. de Menevia, il ne put obtenir la confirmation royale, et f vers 1220. Il a écrit une Topog. de l'Irlande, un Itinéraire du p. de Galles, un Journal de sa vie (assez prétentieux), un Miroir de l'Égl., où il censure sévèrement les vices des moines, etc.

GIRARD, Jean-Bapt., pédagogue suisse, né 17 déc. 1765 à Fribourg, lit de bonnes études classiques chez les cordeliers de Lucerne, et montra de l'aptitude pour la philos, et les sciences naturelles. Il étudia la théol. à Wurzbourg, mais fut repoussé par la sécheresse des formules de l'école, et se mit à étudier l'Évangile, qui exerça sur lui une grande influence. Ordonné prêtre en 1790 par le prince év. de Wurzbourg, il remplit ses fonctions à Fribourg, et depuis 1799 à Berne, où Stapfer l'avait appelé. Son canton lui confia dès lors la direction de l'école primaire, et par son Cours de langue maternelle, par sa méthode d'enseignement, qui obtint un immense succès, il souleva les méfiances du clergé, et son école lui fut retirée 4 juin 1823. Prof, de philos, à Lucerne jusqu'en 1835. A 70 ans il rentra dans son couvent de Fribourg, retravailla son cours, touj. avec la pensée que la famille et la religion doivent être à la base de l'enseignement. Couronné par l'Acad. franç. 1844, décoré par Cousin, + 6 mars 1850. Statue à Fribourg. Notice, par E. Naville. Vie, par Daguet.

GISLEMAR, moine de Corbie, compagnon d'Ansgar dans sa mission du nord; il resta en Danemark, pendant qu'Ansgar se rendait en Suède.

GLAREANUS, c.-à-d. le Glaronnais; surnom de Henri Loriti, né 1488 à Mollis, Gla-ris. Humaniste comme Érasme, il sympathisa d'abord avec les réformateurs, mais plus par l'intelligence que par un sentiment religieux, et quand la réforme lui parut dépasser les bornes qu'il aurait voulu lui fixer, il se retourna contre elle, se brouilla avec Zwingle, Myconius, QEcolampade, et se retira de Bâle à Fribourg, à Cologne, enfin à Paris où il fonda un pensionnat pour les étudiants, auxquels il expliquait les anciens. Il enseigna aussi les belles-lettres au Collège de France 1526. Retraité 1560, il f à Fribourg 1563. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages sur la musique, la géographie, etc.

GLARIS. La Réformation y fut introduite en 1529; chaque paroisse fut laissée libre de choisir entre la confession catholique et la conf. réformée; cette dernière l'emporta dans presque toutes les communes. Grâce au ministère de Zwingle, l'Égl. se rattacha au synode de Zurich; depuis 1621, elle a son synode particulier. Nouv. Constit. ecclés. depuis 1846.

GLASSIUS, Salomon, hébraïsant connu par ses Philologia sacra, Dr théol. à Iéna, surintendant à Gotha, seconda le duc Ernest dans ses efforts pour réformer l'Égl. et l'instruction publique. Né 1593 à Sondershausen, f 1656.

GLOSE, courtes réflexions explicatives, écrites en marge des mss. des saints livres, et qui parfois se sont glissées dans le texte, intentionnellement ou par une distraction du copiste. On donne aussi le nom de Glose à une collection de ces notes marginales, telles que celle de Walfroi de Reichenau. Des notes plus courtes encore, et ne portant que sur un mot, s'intercalaient entre les lignes et sont appelées gloses interlinéaires; ainsi celles d'Anselme de Laon. Les gloses n'étaient pas seulement exégétiques; elles pouvaient être histor. et dogmatiques. Plus tard, dans les mss. de la Bible, les gloses furent mises immédiatement à la suite du texte ou du fragment auquel elles se rapportaient.

GLOSSATEURS. On appelle ainsi tous ceux qui, non seulement pour la Bible et pour les classiques, mais pour les livres de droit canonique et romain, ont interprété les textes au moyen de notes marginales ou interlinéaires, comme l'ont fait, p. ex. les disciples de Gratien à Bologne pour la Ire partie du Corpus juris. Une collection raisonnée de ce genre de gloses fut tentée 1212 par Jean le Teuton, f 1240 comme doyen d'Halberstadt. Son travail, perfectionné 1236 par Barthélémy de Brescia, fut généralement admis comme glose ordinaire. 11 y a de même une glose ordinaire pour les autres parties du Corpus juris; celle de Bernard de Botono, f 1266, pour la collection des décrétais de Grégoire IX; celle de Jean Andreâ, t 1348, pour 1 eLiberSextus et les Clémentines, etc.

GNADENFELD, colonie morave de la Haute-Silésie, fondée 1781. Le séminaire de théol., qui était à Barby depuis 1754, y a été transporté 1818. Plusieurs stations missionnaires de l'Amérique du Nord ont reçu ce même nom, qui signifie champ de grâce.

GNAPHiEUS (de Volder), né à La Haye 1493, recteur en 1522. Persécuté et deux fois emprisonné pour ses convictions évang., il quitta son pays et fut successivement recteur à

Elbing 1536-1543, et à Kônigsberg. Là encore il fut tracassé par le luthéranisme outré de Sta-phylus, puis excommunié 9 juin 1547, et privé de sa place, f Norden 1568.

GNESEN, la plus ancienne ville de la Pologne, doit sa notoriété ecclésiastique aux funérailles d'Adalbert 987. Elle fut détachée de Magdebourg et érigée en archevêché Pan 1000, lors du pèlerinage de l'emp. Othon. L'archev. Henri introduisit le célibat des prêtres dans son diocèse en 1200, et reçut à cette occasion pour lui et ses successeurs le titre de légat-né. Nicolas obtint en 1416 le titre de primat, auquel s'adjoignit plus tard, dans le royaume devenu électif, la qualité d'administrateur du royaume. L'archevêché disparut avec le partage de la Pologne, et le pape réunit le diocèse à celui de Posen par sa bulle De salute anim., tout en lui laissant son chapitre distinct et un év.suffrag.

GNOSTIC1SME, Gnostiques. Dérivé du mot grec gnôsis, connaissance plus approfondie de l'essence et des rapports intimes des doctrines religieuses, ce nom n'a rien en lui-même qui froisse l'idée chrétienne. Mais ceux qui se le sont attribué, l'ont distrait de son sens naturel, et lui ont donné une signification que l'on doit repousser pour trois motifs. Ils entendaient par là une science des parfaits, qui ne pouvait être comprise que des spirituels, en opposition à la foi d'autorité commandée aux simples et qui ne visait que l'enveloppe symbolique des idées; cette tendance est condamnée par Matt. 5, 3.11, 25. 1 Cor. 1, 19. Ils distinguaient deux sortes de personnes, les spirituels et la multitude. Ils regardaient la révélation comme insuffisante et croyaient pouvoir la compléter ou la redresser, soit par de vieilles traditions dont ils avaient le secret, soit par ce qu'ils appelaient la lumière intérieure. Enfin ils appliquaient leur gnôsis à la connaissance des choses immuables, telles que la substance émanée de Dieu, l'origine du monde, celle du mal, tandis que Paul cherchait en Christ tous les trésors de la sagesse et ne voulait connaître autre chose que Christ crucifié. Le gnost. n'est donc pas un système unique et précis, mais une direction de l'esprit humain; il est antérieur au christianisme, et l'on en retrouve les éléments dans la cabale juive, comme dans la philos, grecque et dans la métaphysique orientale. L'homme a besoin de s'expliquer même ce qui lui échappe; l'école d'Alexandrie, puis le néo-platonisme naquirent de ce besoin, et le christianisme lui-même entra dans cette voie, son caractère pratique ne répondant pas aux nombreuses questions que soulève l'étude de l'infini, et Ton s'habitua peu à peu, même au sein de l'Église, et tout spécialement à Alexandrie, à mettre au-dessus de la foi, bonne pour la masse, la science, la gnôsis, comme un organe mieux fait pour s'assimiler les vérités éternelles. La philos, néo-platonicienne est plutôt la sœur que la mère du gnosticisme, enfanls l'un et l'autre de la philos, orientale. Ce qui caractérise le gnost. chrétien, ce qui le distingue des autres systèmes, c'est qu'il s'empara de la doctrine de la rédemption; sa grande idée est celle de la restauration de l'harmonie détruite de l'univers, le retour d'une création déchue à son état primitif, la réunion du ciel et de la terre, la manifestation d'une vie divine dans l'humanité, idées toutes chrétiennes, mais qui devenaient méconnaissables par les additions dont on les compliquait. En général les gnostiques distinguaient trois natures humaines, ou trois classes d'hommes: les pneumatiques, ou spirituels; les psychiques, ou ceux de la foi moyenne et aveugle; et les hyli-ques, ou purement matériels. Quant à leurs erreurs, il faut distinguer celles qui n'avaient aucun rapport avec le christianisme, et celles qui étaient propres aux gnost. chrétiens. Les premières, communes à tous les gnostiques, étaient de deux sortes: 1° métaphysiques; ils reconnaissaient 2 êtres éternels, Dieu éloigné de tout mal, et la matière, étrangère à Dieu, sinon ennemie; avec une 3™e autorité, le démiurge, créateur du monde, dont l'intervention amène tout le drame de la chute et de la rédemption; 2° morales: ils estimaient que le mal a son principe dans la constitution du corps, dans la satisfaction des convoitises sensuelles. Ils admettaient en général: les Syriens, la doctrine d'Ahriman; les Alexandrins, l'opposition, mais sans hostilité, de la matière à l'esprit; du néant, du kèn&ma, au plêrôma, à la plénitude de la vie divine; l'ombre à côté de la lumière. De Dieu sortent des émanations, ou éons, en plus ou moins grand nombre, qui représentent des vertus, des puissances, et qui vont se perfectionnant sans cesse. A l'échelon inférieur se trouve l'être qui. aveuglé par l'orgueil, jaillissant dans le chaos qui l'avoisine, vivifie la matière morte, et forme ainsi une création, mais défectueuse, en dehors du monde des émanations; c'est Satan. C'est le dualisme oriental que la philos, occidentale a cherché à ramener à l'unité. Dans le monde ainsi créé se trouvent donc les trois éléments, pneumatique, psychique et matériel, entre lesquels les hommes eux-mêmes sont partagés, et dont le second forme le domaine propre du démiurge qui l'a créé, et que plusieurs font le Dieu des juifs.

Si le démiurge a troublé l'harmonie de l'ensemble, l'éon Christ a pour mission de rassembler les éléments divins dispersés dans le monde et de les restaurer dans leur état primitif. Pour cela il doit s'unir à l'homme Jésus et recevoir la communication de la conscience divine, ou gnôsis. Selon les juifs d'Alex, le Dieu souverain gouvernerait le monde au moyen d'anges, dont le chef, un dieu subordonné, un dieu en second, régirait la terre par des lois que lui-môme ne connaîtrait pas; le peuple de la théocratie aurait été remis au démiurge, suivant Deut. 32, 8. 9. Le monde de l'A. T. ne serait que le symbole d'un ordre de choses très supérieur. L'Israël selon la chair, ou les psychiques, ne l'auraient pas compris, et auraient confondu le Dieu souverain avec le créateur du monde; les spirituels au contraire, ou gnosti-ques, auraient contemplé les choses divines. C'est le christianisme qui a dévoilé et réalisé l'idée supérieure de la théocratie. Quant à la morale, les uns reconnaissaient que les choses terrestres venaient de Dieu et lui étaient consacrées; les autres, et notamment ceux qui avaient été d'abord opposés à toutes les religions populaires, comme les Perses, affectaient un profond mépris et une haine décidée pour le monde, et se livraient les uns à un ascétisme exagéré, les autres à toutes leurs convoitises pour braver la matière et montrer combien peu ils se laissaient troubler par elle. Ces résultats opposés expliquent peut-être certaines contradictions apparentes des écrivains ecclésiastiques. Voilà pour les dualistes. Quant aux panthéistes, qui faisaient tout découler de l'être divin et incompréhensible, et qui regardaient tout le reste comme indifférent, soit bien, soit mal, ils se livraient aux plus honteux désordres au milieu de leurs contemplations; v. Porphyr. De abstin. Leur prétention de s'appuyer sur la Bible aboutissait à y chercher des preuves à l'appui de leur système formé d'avance, et ils distinguaient entre les discours de l'homme Jésus et ceux de l'Intelligence suprême qui était en lui. Malgré cela ils ne voulaient pas se séparer de l'Église et ils se plaignaient que des chrétiens rompissent sans motifs la communion avec eux. — On a diversement classé les systèmes gnostiques. Gieseler les divise en alexandrins, avec prédominance du parsisme, ou dualisme. Nèander distingue les judaïsants, comme Cérinthe, Basilides, Valent in, Bardesanes, et les non-judaïsants. Ces derniers à leur tour se partagent en paganisants, comme les ophites, les pseudobasilidiens, les caïnites, les séthites, Carpocrates, et christianisants, comme Saturnin, Tatien, les encratites, Marcion. Baur(1835) distingue ceux qui veulent concilier le christianisme au paganisme et au judaïsme, tels que Basilide, Valentinien, etc. 2<> Ceux qui l'opposent aux deux autres, comme Marcion, et 3° ceux qui, identifiant le christianisme et le judaïsme, les opposent l'un et l'autre au paganisme, comme les Clémentines. V. les diff. art., et Matter, Hist. critique du Gnosticisme, 1843.

GO AH 1° Jacques, savant dominicain, né 1601 à Paris, prof, de philos, à Toul, prieur des dominicains à Chios 1631, vit de près l'Égl. grecque, publia l'Euchologe des Grecs, passa à Rome comme prieur 1640, et s'établit enfin à Paris où il f 1653 vicaire général de son ordre. — io Ermite du 9m« siècle, que la légende fait vivre sous Childebert 1er sur les bords du Rhin, prêchant aux païens et exerçant l'hospitalité. Accusé auprès de l'év. Rusticus de Trêves, il se justifia par des miracles et retourna dans sa cellule. Son corps repose dans la crypte de la cathédrale. Charlemagne donna le couvent de Saint-Goar à l'abbaye de Prîlm. — 3° La ville de Saint-Goar reçut la réformation 1527 parles soins d'Adam Kraft. Prise par les Espagnols 1629-1631,elle fut délivrée par Gustave-Adolphe.

GOBAT, Samuel, né 26 janv. 1799 àCrémine, Jura bernois, entra en 1821 à l'Institut des missions de Bâle, en 1823 à celui de Paris, puis â Londres pour étudier l'arabe, l'éthiopien et l'amharique. Il passa ensuite avec son ami Kug-ler, au service de la Church Missionnary Society qui l'envoya de 1829-1833 à Gondar, Abyssinie, mais son séjour ne produisit pas de résultats apparents, à cause des circonstances défavorables dans lesquelles il se trouvait. Il y revint plus tard, sans beaucoup plus de succès. En 1845, après un repos de quelques années, la Soc. des missions de Londres le nomma directeur de son gymnase missionn. à Malte où il eut à diriger et à surveiller aussi la traduction et l'impression de la Bible en arabe. Enfin en 1846 le roi de Prusse Fréd.-Guill. IV, qui était son ami, l'appela, d'accord avec Bunsen, au siège épiscopal protestant de Jérusalem. Cet immense évêché, le plus grand du monde, comprend F Abyssinie, l'Égvpte, l'Arabie, la Syrie et la Caldée, mais avec un nombre peu considérable de ressortissants. Gobât l'a administré pendant 33 ans avec un tact et une fidélité à toute épreuve, épiscopal quant à son ministère officiel, mais large et libre d'allures dans ses rapports avec tous les chrétiens de Jérusalem. Les patriarches grec et latin l'estimaient, le pacha le consultait volontiers. L'orphelinat syrien, l'hôpital des lépreux et d'autres œuvres d'un caractère général, restent comme un monument de son passage. En 1878 il fit un dernier voyage en Europe et t le dimanche 11 mai 1879 peu après son retour à Jérusalem. Sa femme était la fille du vénérable Zeller de Beuggen. Il a laissé plusieurs enfants qui sont tous au serv ice de Dieu.

GOCH, Jean-Pupper, un des précurseurs de la Réforme. Né à Goch au commencement du 15me siècle, il devint inoineà Malines, et passa en 1451 comme recteur et confesseur au couvent de diaconesses qu'il avait fondé à Tabor. f 1475. Il a écrit, en latin: Des quatre erreurs, et De la liberté chrétienne; sa tendance est franchement biblique et augustinienne, et il a combattu avec vigueur le cathol. romain et le pélagianisme de son époque, v. Ullmann, les Réformateurs avant la Réforme.

GODARD lo ou Gildard, év. de Rouen au 6™ siècle, assista au conc. d'Orléans 511, et déploya un grand zèle dans son diocèse, f vers 525. Enterré à Rouen dans une égl. qui porte encore son nom. Quelques-uns le font frère de saint Médard, mais sans preuves suffisantes.

2o Godard, ou Gothard, saint très peu connu, qui a donné son nom à Tune des plus hautes montagnes de la Suisse. Né vers 960 à Reiten-bach, Bavière; puis moine et abbé du couvent deNieder-Altaich. Sur l'appel d'Henri 11, il réforma plusieurs couvents, Hersfeld, Tegernsee, Kremsmunster, et succéda comme év. à Bernard de Hildesheim, dont il continua les traditions d activité et de piété, f 1038. Déjà de son vivant on lui attribuait des miracles; canonisé 1132.

GODEAU, Antoine, né 1605 à Dreux. Spirituel et tournant bien les vers, il se fit une réputation à l'hôtel Rambouillet et gagna la protection de Richelieu. Il traduisit en vers pour le puissant ministre le Benedicite, ou les Grâces que l'on prononce à table, et pour sa récompense, jouant sur le mot, Richelieu le nomme év. de Grasse. Sa trad. des Psaumes en vers n'a pas grande valeur, mais il a composé d'autres ouvrages plus sérieux, qui valent mieux; son Hist. de l'Église est appréciée, f év. de Vence 1672.

GODEFROI de Bouillon, né 1061 à Bézy, près Nivelle, Flandre; fils d'Eustache de Boulogne, et neveu du duc Godefroi de Lorraine, duc de Bouillon, qui le fit son héritier. Il combattit fort jeune pour Henri IV contre le pape, fit des merveilles à la bataille d'Unstrut 1080 et entra dans Rome les armes à la main. A la suite d'une grave maladie il fit vœu de servir la cause de l'Égl. chrétienne, et il fut l'un des premiers k se croiser à rappel de Pierre 1 ermite. Il vendit son duché de Bouillon, partit 1096 pour la Terre-Sainte, fut bientôt reconnu chef de la Ire croisade, q. v., et arriva à Jérusalem 1099. Nommé protecteur du Saint-Sépulcre, il s'assura par la bataille d'Askelon la possession de la partie méridionale du pays. Proclamé roi de la ville sainte, il se contenta du titre de baron, et laissa au patr., comme à son seigneur légitime, l'autorité, même temporelle, du nouveau royaume. Il donna à ses sujets un code de lois, les Assises de Jérusalem, + 18juill. 1100, eu revenant d'une expédition contre le sultan de Damas; on croit qu'il fut empoisonné. La légende raconte- de lui des faits d'armes extraordinaires. Le Tasse en a fait le héros de sa Jérusalem délivrée.

GODE^CALC, v. Gottschalk.

GOERRES, Joseph, né à Coblence 25 janv. 1776, fut dans la première partie de sa vie le représentant inspiré de l'indépendance de son pays, dans la seconde le représentant le plus autorisé du cathol. moderne avec ses prétentions et ses tendances réactionnaires. En 1796, sous l'influence des idées françaises, il publia la Feuille rouge, qui lui valut en 1799 d'être envoyé à Paris, où il put voir de plus près ce que l'Allemagne avait à attendre de la France. De 1814-1816 il rédigea le Mercure du Rhin, qui lui fit perdre sa place de directeur de l'instruction publique à Coblence. Ses études sur la mystique du catholicisme, sur la cathédr. deCologne, etc., tournèrent ses pensées vers le romantisme religieux du moyen âge, et il espéra qu'il pourrait peut être ainsi réaliser son idéal politique, l'Allemagne sous l'Autriche. Prof, d'hist. à Munich dès 1827, il ne cessa pas d'écrire et de faire écrire, dans un style touj. plus fougueux, jusqu'à sa f 27 janv. 1848. — Son fils Guido (1805 à 1852) continua la publication de ses Feuilles historico-politiques, et y ajouta des Chants de Marie, l'Assaut diabolique, etc.

GOESCHEL, Ch.-Fréd., né 7 oct. 1784 à Lan-gensalza; juriste, auteur d'une Chronique de sa ville natale 1818, conseiller au ministère de la justice, présid. de consistoire à Magdebourg; connu par plusieurs écrits importants sur Dante, contre Strauss, sur l'Accord de la philos, de Hegel avec le christianisme, etc. Sa tendance devint de plus en plus confessionnelle et ecclésiastique; il se prononça énergiquement contre Wislicenus, Uhlich et les Amis des lumières; donna sa démission quand on leur eut accordé l'usage en commun d'un des temples de la ville, et dut quitter Magdebourg devant l'irritation de la population, 1848. Il se retira à Naumbourg, où il f 22 sept. 1862.

GŒTTINGUE. L'auc. principauté de Kalen-berg, dont Gcittingue faisait partie, fut réformée par la femme d'Erich, Élisabeth, fille de Joachim de Brandebourg, qui appela Corvinus comme surintendant. Les États adoptèrent la Réformation 1540, et les ordonnances ecclés. 1542. L'univ. fut fondée 1733 et inaugurée 17 sept. 1757.

GOETZE, Jean Melchior, né 15 oct. 1717 à Halberstadt, élève de Iéna et de Halle, pasteur à Magdebourg, puis à Hambourg; connu surtout par sa controverse avec Lessing, au sujet des Fragments de Wolfenbuttel. Chretien convaincu, il était aussi un savant de premier ordre. f1786.

GOMAR, François, né à Bruges 30janv. 1563, étudia à Strasbourg sous Sturm, puis à Neustadt et à Heidelberg, fut pasteur à Francfort s. M. 1587-1594, puis prof, de théol. à Leyde, à Saumur, 1614, et à Groningue 1618. f 1641. Il est connu par la persévérance avec laquelle il ne cessa de combattre les doctrines de son collègue Arminius, et par le rôle prépondérant qu'il joua au synode de Dordrecht. Ses partisans furent nommés gomaristes. OEuvr. compl. Amsterdam 1645 et 1664.

GONDI, v. Retz.

GONFALONIER, v. Confréries.

GONTHIER, Franr.-Aug.-AIph., né 21 déc. 1773 à Yverdon, étudia la théol. à Lausanne; pasteur à Nimes 1805, puis à Ballaigues et à Saint-Cergues, dans le Jura vaudois. D'une santé délicate, il redescendit dans la plaine, fut 3 ans pasteur à Rolle, en 1821 diacre à Nyon. Peu il peu il c^ssa de prêcher et se contenta (récrire, f 1834. On Fa comparé à Fénelon à cause de sa piété douce et de son éloquence persuasive. Sa théol. était celle du réveil. Auteur de quelques Nouvelles, de Lettres et de Lectures chrét. et d'une Petite biblioth. des Pères de l'Égl. Notice par L. Vulliemin.

GONZAGUE, v. AIoïs.

GONZALO de Berceo, prêtre séculier espagnol 1198-1268. On a conservé de lui 9 poèmes: sur la messe, le jugement dernier, la vierge Marie, la vie de Dominique, etc., que Fon regarde comme ayant une vraie valeur, et comme ayant inauguré la poésie relig. espagnole et frayé la voie à la poésie catholique.

GORDIUS, ou Gordien, capitaine à Césarée; chassé par les persécutions de Dioclétien, il passa quelque temps dans la solitude, ofi il fortifia sa loi. Il profita d'une fête en l'honneur de Mars, qui avait rassemblé beaucoup de monde, pour reprocher à la foule ses goûts idolâtres. Le juge essaya en vain de le faire sacrifier aux idoles; promesses, menaces, rien ne servit; il périt sur le bûcher, en vrai soldat de Jésus-Christ, 3 janv. 306.

GORIUN, contemporain d'Esnik, l'un et l'autre disciples de Mesrope, év. de Georgie. Il fut un de ceux qui furent envoyés d'Arménie à Constantinople pour acheter et trad. des ouvrages grecs. Auteur d'une Vie de Saint-Mesrope; v. de Wette.

GOSSNER, Jean-Evangelista, né à Hausen, près Augsbourg en 1773, étudia à Dillingen sous Sailer et Zimmer, entra au collège d'Ingolstadt 1793, et en sortit 1797 comme chapelain auxiliaire. Il prenait au sérieux les questions de la vie et de la foi chrétiennes, et ses rapports avec Martin Boos ne firent que l'affermir davantage, sans que les persécutions des jésuites réussissent à l'ébranler. Curé de Dirlewang 1804-1811, il vint ensuite à Munich où il vécut d'un petit bénéfice, écrivant et prêchant beaucoup. Déposé 1817 à cause de ses sentiments religieux, il fut en 1819 nommé maître de religion à Dusseldorf. De 1820-1824 il vécut à Pétersbourg où la communauté l'avait appelé comme son pasteur. De là il vint à Leipzig, où il abjura formellement le catholicisme 1826. En 1827 il fut nommé pasteur de Fégl. de Bethléhem à Berlin, f 20 mars 1858. Son influence s'est étendue bien au delà des frontières de sa paroisse et de son pays. Son Catholicisme primitif a été trad. dans presque toutes les langues de l'Europe; il entretenait 140 missionnaires dans les pays païens; il avait formé de nombreuses associations d'hommes et de femmes; son journal L'Abeille (Die Biene) ranimait chaque mois le zèle et la piété de ses lecteurs; son Petit trésor (Schatz Kœ$tlein 1824), et ses Grains d'or (Goldkœrner 1859) se trouvaient dans toutes les maisons pieuses; ses prédications attiraient la foule, et même les grands de la cour. Gossner est un exemple de plus de ces hommes pieux qui ont rêvé la réforme de leur Église et qui ont fini par comprendre qu'ils rêvaient l'impossible.

GOTHS. Peuplade germanique, que l'on rencontre pour la Ire fois sur les bords de la Vis-tu le, ou dans le pays des Boïens, Boiohemum (Bohême? Bavière?); elle s'empara bientôt de la Scandinavie centrale et méridionale, où son nom s'est perpétué sous la double forme de Go thie et de Jutland; elle porla ensuite le nom de Gothons dans ce qui est aujourd'hui la Prusse, puis celui de Gètes sur les rives du Danube. La vraie date et le berceau de cette tribu se perdent naturellement dans les ténèbres d'une époque où il n'y avait pas de géographes pour les constater. Leur histoire ne commence guère qu'au siècle. De la mer Noire et du Danube ils menacèrent de bonne heure Femp. romain. Caracalla les repoussa 215, mais ils renouvelèrent à plus, reprises leurs incursions, soit en Europe, soit en Asie, et les empereurs eurent fort à faire à protéger leurs États. Valérien dut rassembler contre eux toutes ses légions; Claude II les refoula dans la Dacie trajane et reçut pour ses victoires le surnom de Gothique. C'était la vieille lutte de la civilisation contre l'état sauvage; mais il y eut plus encore. De part et d'autre on faisait des prisonniers, et les Goths se trouvaient ainsi en contact direct avec les chrétiens. Philostorge et Sozomène parlent déjà de Goths convertis, et Basile précise davantage en disant que l'Évang. leur fut apporté par un docteur chrétien, prisonnier, nommé Eutyche. Constantin les battit en plusieurs rencontres, puis il fit la paix avec eux et chercha à se les attacher comme alliés, en en prenant 40,000 à sa solde; il s'en servit aussi pour rétablissement de Constantinople, et le fait même de cette noa-velle capitale multiplia les rapports entre les Goths et les chrétiens et détermina de nombreuses conversions, qui réjouissaient Athanase. Des églises se multipliaient parmi ces pépies; un évêqne goth, Théodosë, assistait au conc. de Nicée, et Ghrysostome à la fin du 4®* siècle fait bâtir un temple spécialement destiné au culte en langue gothique. Cyrille de Jérusalem avait déjà constaté, 343, que les Goths avaient des évêques, des prêtres, des moines, des religieuses et des martyrs. Les persécutions sous les emp. ariens, en exilant les pasteurs chrétiens, en avaient fait des missionnaires et avaient ainsi contribué à l'évangélisation des peuples de l'Asie Mineure; l'év. Audius en particulier avait travaillé parmi les Goths. C'est à peu près à ce moment, vers 355, que parut Ulprfiilas; fuyant les persécutions, il vint avec un grand nombre de chrétiens chercher un refuge sur le territoire romain. Athanaric fit des martyrs 370. Son rival, Fritiger, roi des Visigoths, persécuta aussi les chrétiens, mais faiblement et peu soucieux de se brouiller avec Constantinople. Il finit même par se convertir et son peuple le suivit, mais Valens, en traitant avec les délégués visigoths, et en leur donnant des terres en Mésie, exigea qu'ils se fissent ariens; Ulphilas y consentit par faiblesse plus que par conviction. En 380 Théodose conclut un traité de paix avec Athanaric, successeur de Fritiger. Depuis deux siècles, par le fait de leur nombre et de leur extrême dispersion, les Goths, tout en n'étant qu'un peuple, s'étaient partagés en 3 branches distinctes, qui correspondaient d'abord à la position qu'ils occupaient: les Ostrogoths à l'est, ou orient, du Borysthène (Dnieper) au Tanaïs; les Visigoths à l'ouest, du Tibisque au Borysthène, et les Gepides près des sources de la Vis-tule, sur le revers des Carpathes. Poussés par les Ostrogoths qui fuyaient devant les Huns, les Visigoths avaient cherché un refuge sur le territoire romain, mais ces réfugiés ne tardèrent pas à parler en maîtres, et après la défaite de Valens 378 ils conservèrent la Thrace et la Mésie, et firent, sous la conduite d'Alaric, une marche conquérante par le Péloponèse et l'Illy-rie snr Rome et l'Italie méridionale, donnant au paganisme le dernier coup par la destruction de ses temples dont ils s'appropriaient les trésors. Ataulf, frère et successeur d'Alaric, fonde une monarchie passagère dans la Gaule méridionale et en Hispanie, avec Toulouse pour capitale. La question religieuse fait sa faiblesse. Les catholiques supportent impatiemment un joug arien, Clovis exploite cette cause de division^ et la bataille de Vouillé 507 met fin au royaume visigoth des Gaules, qui biendtt transporte son siège en Espagne. Tolède est sa nouvelle capitale et plusieurs conciles s'y réunissent; les év. sont un peu les maîtres; Reccared, fils de Léovigild et d'une mère catholique, convoque un synode, renonce à l'arianisme, se déclare soumis à l'Église; les év. ariens en font autant et l'unité religieuse règne dans tout le royaume. Mais, dans cette monarchie presque élective, la puissance du clergé va croissant; les rois qui se succèdent sont renversés ou rais de côté s'ils essaient de rétablir une certaine discipline, comme Reccasuinthe. ou de limiter au spirituel la compétence des évêques, comme Witiza qui interdit les persécutions des juife et qui s'empara de quelques biens ecclésiastiques. Il en résulta une guerre civile; les fils de Witiza appelèrent à leur aide le calife Musa, et les Arabes mirent fin au royaume visigoth, dont les faibles restes se réfugièrent dans les montagnes des Asturies et de la Galice. Quant aux Ostrogoths, vaincus par les Huns, ils reprirent leur liberté à la mort d'Attila 453 et se fixèrent en Pannonie et en Thrace, continuant de guerroyer sous leurs rois Casimir, Théodemir et Widimir, jusqu'au jour où Théodoric-le-Grand, sous le règne nominal de Zénon, détruisit en Italie le royaume d'Odoacre et fonda le royaume ostrogoth 475. Après 30 années de prospérité la décadence commença, la décomposition fut rapide; Bélisaire fit prisonnier le roi Vitigès 540; en 556 Narsès défit Totilas; les Ostrogoths passèrent en Norique et cessèrent dès lors d'exister comme nation. Sauf quelques tribus évangéli-ques restées en Crimée et auxquelles Chrysos-tome avait envoyé un èvêque, les Ostrogoths étaient ariens comme les Visigoths, et ce fait a contribué peut-être à précipiter leur fin, en poussant les cathol. à s'unir touj. plus intimement avec ceux de Constantinople, tandis que les Goths restaient isolés au milieu de l'empire.

GOT

— Version gothique de la Bible, v. Ulphilas.

— On appelle improprement style gothique un genre d'architecture où l'arabe se joint au roman, et où l'ogive qui lui sert de base permet de donner à l'édifice quelque chose de fin et d'élancé. La forme même de l'ogive agit et déteint sur tous les autres détails de l'architecture, frises, piliers, arceaux, fenêtres, rosaces, tours, etc. Les colonnes, en particulier, par la richesse et la variété de leurs formes, ont quelque chose de svelte qui fait oublier leur force pour ne laisser voir que leur élégance; la masse disparaît sous la richesse des ornements. Les plus vieilles égl. gothiques sont Notre-Dame de Trêves 1227 à 1244, et Sainte-Élisabeth de Marbourg 1235. Les plus remarquables sont celles de Cologne, commencée 1218, et de Strasbourg 1275.

GOTHARD, v. Godart.

GOTTSCHALK 1° ou Godescalc, ou Gotescalc, moine saxon, né vers 806, vécut d'abord dans l'abbaye de Fulde, sous la direction de Raban Maur, qu'il supportait impatiemment, et finit par entrer au couvent d'Orbais, près Soissons. Nourri de la lecture de saint Augustin dès sa jeunesse, il fit de la doctrine de la prédestination l'âme de sa vie chrétienne, et reçut le nom de Fulgence à cause de son zèle pour la répandre. En 847, revenant d'un pèlerinage à Rome, il s'arrêta dans une vallée du Piémont chez le comte Eberhardt, gentilhomme de la cour de Lothaire, où il trouva aussi Nothing, év. de Vérone. 11 exposa à ses amis ses vues sur une double prédestination, dépassant peut-être en cela la doctrine d'Augustin qui appelle les uns prœdestinati, les autres seulement presciti; mais déjà avant lui un autre Fulgence 520 et Isidore de Séville 595 avaient employé l'expression de prœdistinatio duplex. Nothing dénonça Gott-schalk à Raban devenu archev. de Mayence, et celui-ci, dans deux lettres très amères, condamna l'hérésie de Gottschalk. L'accusé s'empressa de se rendre à Mayence pour se justifier 848, mais il fut condamné la mêmè année par un concile auquel assistait l'empereur, et il dut comparaître devant son métropolitain, Hinc-mar, comme un moine vagabond qui sème des opinions funestes. Hincmar convoqua un concile à Kiersy-sur-Oise 849, et Gottschalk fut condamné à être battu de verges publiquement et à se rétracter. La première partie de la peine était plus facile à exécuter que la seconde. Il fut jeté dans les prisons du couvent de Haut-villiers et traité avec une extrême rigueur. Hincmar essaya de le ramener en lui envoyant des confessions de foi ambiguës, mais il ne se laissa pas séduire et demeura inébranlable. Il offrit même à ses ennemis de passer par l'épreuve du feu (4 vases d'huile bouillante), mais ils refusèrent, peut-être par crainte. Pendant qu'il était en prison, la controverse soulevée à l'occasion de sa doctrine continuait; plusieurs év. prirent parti, sinon pour lui, au moins contre Hincmar. L'archev. de Lyon, le conc. de Valence 855, furent favorables au prisonnier. Remi flétrit comme t un exemple inouï d'irréligiosité » la flagellation infligée à Gottschalk. Un plaidoyer de Jean Scott fit plus de tort à Hincmar que tous ses adversaires réunis. Le pape évita jusqu'à la fin de se prononcer, mais parut pencher vers les idées de Gottschalk et pour les canons de Valence, confirmés 859 par le conc. de Langres (deux conciles se prononçant pour un schismatique!). Le prisonnier ne s'affligeait ni de ses peines ni de ses souffrances; il craignait seulement que sa honte ne rejaillît snr la vérité. Enfin, après 19 ans de cachot, il tomba sérieusement malade; Hincmar prévenu donna l'ordre de lui refuser la confession et les sacrements, à moins qu'il ne se rétractât, et le martyr mourut sous le poids de ces rigueurs, 30 oct. 868 ou 869. v. Usserius, Weizsâcker, Nean-der, Kurtz.

GOT

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2° Gottschalk, prince des Wendes, petit-fils

de Mistewoy, et fils d'Udb. Élevé au couvent de Saint-Michel deLunebourg, il en sortit lorsqu'il apprit que son père avait été assassiné, et il se mit à ravager l'Albingie, 1032. Fait prisonnier par Bernard II de la basse Saxe, il fut converti, fit une profession solennelle de sa foi, sortit de prison 1039 et se rendit auprès de Canut en Angleterre. Étant rentré en possession de ses États, 1043, il s'occupa de les évangéliser, prêcha lui-même, traduisit des livres chrétiens, et finit par être assassiné dans un soulèvement des païens 1066. Sa mort fut le signal d'une insurrection générale et de persécutions qui durèrent jusqu'au moment où son fils Henri 1105-1127, put rétablir de nouveau le royaume obotrite de son père.

GOUDIMEL, Claude, né en Franche-Comté, probablement à Besançon, vers 1510. Sa vie est peu connue. En 1540 il était à Rome où il avait ouvert une école de musique, et il comptait Pa-lestrina parmi ses élèves. Il composa des messes jusqu'en 1558, ce qui prouve qu'il était encore catholique. Plusieurs de ses mss. sont à Rome, dans des bibliothèques. En 1555 il est à Paris où il publie ses Odes d'Horace, mises en musique. On ne sait exactement quand il vint à Genève; c'est en 1562 que parurent pour la première fois ses: Psaumes de David (au nombre de 16) mis en musique en 4 parties en forme de motets, par Goudimel, où l'harmonie était travaillée en style fugué et en contre-point figuré. Le recueil entier des Psaumes parut en 1565 à Paris, et la même année à Genève, mais avec une harmonie plus simple et dans le style familier. C'est vers ce temps qu'il embrassa les doctrines de la réforme. On lui a longtemps attribué la mélodie des psaumes, ou de plusieurs psaumes, mais à tort; lui-même s'en défend: l'harmonie seule lui appartient. II se proposait aussi de mettre en musique le Symbole, quand des intérêts l'obligèrent de se rendre à Besançon; il y tomba malade, et quand il revint à Lyon où il était établi au moins depuis 1570, ce fut pour y être égorgé avec 1500 ou 1800 de ses coreligionnaires, la nuit du 28 au 29 août 1572, victimes attardées de la Saint-Barthélemy.

GOUJON, Jean, le représentant le plus pur du génie français, sculpteur plein de force, de grâce et de délicatesse, qui sut combiner le génie antique avec celui de l'école florentine; celui qui mérita d'être appelé le Phidias français et le Corrège de la sculpture; le savant annotateur d'une traduction de Vitruve, l'auteur de tant de chefs-d'œuvre, de la Fontaine des Innocents, de la tribune des Cariatides, du groupe de Diane; le restaurateur de tant de beaux monuments, à Alençon, Rouen, Paris, château d'Ecouen, château d'Anet, Louvre, Saint-Denis; ce protégé du connétable de Montmorency et d'Henri II, mais non de la reine-mère; cet homme, une des gloires de la France, on ne sait presque rien de lui, ni où ni quand il est né (à Alençon, à Saint-Laurent de Condéel, à Paris? vers 1520?), ni où il a étudié et s'il visita l'Italie, ce qui est peu probable. On sait seulement qu'il fut tué à la Saint-Barthelemy, d'un coup d'arquebuse, pendant qu'il travaillait sur son échafaud à la restauration du vieux Louvre; et cela même quelques-uns veulent le nier auj., sous prétexte que son nom ne figure nulle part sur la liste des morts, comme si à ce moment d'orgie on avait pu se préoccuper beaucoup de faire un catalogue bien exact des victimes. Goujon était l'ami intime de trois autres grands artistes, huguenots comme lui, Cousin, Bullant et Palissy. — Un autre Jean Goujon, ouvrier en laines à Meaux, martyrisé à Senlis, 5 déc. 1562. Un ministre, Isaac Goujon, du Périgord, dut fuir à l'étranger.

GOULARD, ou Goulart, Simon, né à Senlis 20 oct. 1543; théol. distingué, poète de mérite, écrivain remarquable, correct et fécond. Il vint à Genève 25 mars 1566 et fut consacré 20 oct.; le 24 nov. il était nommé à Chancy-Cartigny; en 1571 il était appelé à Genève et reçu bourgeois. II fut, suivant l'ancien usage, prêté à diverses reprises à des égl. de France, momentanément sans prédicateurs, mais touj. k condition qu'il reviendrait. Anvers l'ayant demandé pour pasteur 1580, et Lausanne pour prof, de théol. 1586, le Consistoire le refusa absolument. En 1594 il faillit même aller à Montpellier, mais il finit par céder aux instances de la Compagnie et resta. D'un caractère indépendant il savait blâmer en chaire les actes du gouvernement, et même t le train qu'il voyait en la justice. * Une fois, prêchant à Saint-Gervais, il traita Gabrielle d'Estrées de courtisane, ce qui lui valut, sur la plainte de l'ambassadeur de France, 8 jours de prison et une censure du Consistoire. En 1600 il fut envoyé à la cour de Catherine de Navarre. En 1602 il était à Genève; témoin de l'Escalade, dont il écrivit la relation. En 1603, il fut nommé pasteur de l'égl. de Saint-Pierre; en 1605, prêté 3 mois à Grenoble; en 1607, modérateur de la Compagnie, en remplacement de Bèze, il le fut jusqu'en 1612. Tombé malade 23 janv. 1628, il put recevoir le Consistoire présidé par Dio-dati, et f 3 févr. dans une foi joyeuse et constante. On a de lui des livres d'histoire, des traductions, des poésies, des récits, des discours, des mémoires sur la Ligue, une Hist. du Portugal, une réimpression du Plutarque d'Amyot, une Hist. des martyrs, de Crespin, avec suite; un Trésor d'hist. admirables, etc. Goulard a laissé 3 fils, Simon qui fut pasteur à Amsterdam et arminien, + 1628; Jacques qui a dressé une carte du Lac de Genève, et Jean qui a fait un plan de Genève et écrit Antiq. genevoises;

il a aussi publ. des Extraits de la Chronique du pays de Vaud.

GRAAL, ou Gréai (le Saint-); célèbre vase légendaire, mentionné par Percival, par Wolfram d'Eschenbach et d'autres, comme taillé dans une pierre précieuse, descendu du ciel, et ayant servi de coupe à la dernière cène du Sauveur. Ce vase aurait aussi recueilli l'eau et le sang découlant de son côté, Jean 19, 14. Enfin Joseph d'Arimathée, mis en prison et emmuré, l'aurait merveilleusement conservé avec lui et s'en serait servi pour procurer sa délivrance et faire beaucoup d'autres miracles. Avec ce talisman rien n'était impossible; Joseph put même faire dans une nuit le voyage d'Orient en Angleterre et c'est dans la Grande Bretagne qu'il déposa la précieuse relique. Plus tard elle s'égara; de nombreuses expéditions eurent lieu pour tâcher de la retrouver. Les chevaliers de la Table ronde, entre autres, se donnèrent une peine inouïe pour cela. Une autre légende porte que les Templiers la conservaient avec soin sur le Mont Salvas. L'idée première de cette légende paraît avoir été de relever le mystère de l'eucharistie, et la fable a brodé sur le fait chrétien pour le dénaturer.

GRABE, Jean-Ernest, né 10 juill. 1666 à Kônigsberg. Persuadé de la nécessité de la succession apostolique dans le sacerdoce, il était à Vienne sur le point de passer au catholicisme, quand Spener qui avait connu et réfuté ses idées, lui montra dans l'Égl. anglicane cette succession si désirée. Cela lui suffit; il se rendit en Angleterre, se joignit à l'Église et vécut de travaux littéraires. Outre ses études d'hist. ecclés., il faut noter son édition des LXX d'après le mss. Alex, + 1711.

GRACE, lo On appelle Lettres de grâce les rescrits par lesquels les papes accordent à un pétitionnaire une faveur, une dispense ou un bénéfice. Le droit ecclés. a dû les régulariser: le Conc. de Trente en particulier a interdit les expectances, ou promesses de bénéfices futurs. 2° Moyens de grâces; tous les moyens indiqués de Dieu pour procurer le salut, la paix, la sanctification. Ainsi la prière, l'étude de la Bible, les exercices religieux, les sacrements, etc. L'Église elle-même est considérée par quelques-uns comme un moyen de grâce et comme le canal essentiel, par lequel Dieu révèle et com -munique le salut.

GRADUEL, courte portion de psaume, qui se lit pendant la messe entre l'Évangile etl'Épître, pendant que l'officiant monte les marches de l'autel. On l'appelait anciennement et à tort l'antiphonie. Le graduel est chanté par le chœur et le lutrin.

GRjEBER, François-Fréd., surintendant général de la Westphalie, élevé à ce poste â cause du tact et du zèle avec lequel il avait défendu le caractère presbytérien et les libertés des égl. rhénanes. Né 1784, il avait étudié à Duisburg et à Halle, f 1857.

GRAMMONT, ou Grandmont, v. Étienne 3°.

GRANDE BRETAGNE, v. Angleterre, Écosse, Irlande.

GRANDIER. Urbain, né à Rovère, près Sablé, Maine, élevé chez les jésuites de Bordeaux, curé de Saint-Pierre de Loudun et chanoine de l'église de Sainte-Croix. Prédicateur brillant, homme du monde, un peu léger et libertin, connu par des relations trop intimes avec de belles pénitentes, il se présenta en 1632 pour succéder, comme directeur des consciences, au p. Moussault, dans un couvent d'ursulines établi dans sa paroisse. Il avait pour concurrent un collègue, Mignon, fanatique, jaloux, haineux, qui avait son parti, qui avait appris en confession bien des choses contre Grandier et qui les exploita. Deux partis se formèrent, dans la ville et dans le couvent, et la passion s'en mêla. A ce moment de surexcitation il se produisit parmi les religieuses et leurs pensionnaires des crises hystériques, contagieuses comme toujours, et se rattachant à des préoccupations religieuses, qui ne manquèrent pas d'être considérées comme des possessions. On parla d'abord de fantômes, puis de démons, de diable et d'anté-christ. Mignon mit tout sur le compte de Grandier. Laubardemont, d'accord avec Richelieu, se chargea de l'affaire, qui traînait trop; fit arrêter Grandier 7 nov. 1633, et commença contre lui une instruction, qui serait amusante, si elle n'était pas terrible. On en a conservé la procédure. Des religieuses, qui ne connaissaient pas Grandier, l'accusaient d'avoir fait entrer dans leur corps Asmodée, Astaroth, ou tel autre démon; elles parlaient un latin absurde, et disaient des obscénités. Deux pasteurs protestants, appelés à intervenir, refusèrent, ne voulant pas se commettre dans une affaire odieuse et ridicule. Soumis aux plus terribles tortures, Grandier ne put rien avouer de son commerce avec les diables, et les paternes exhortations du p. Tranquille n'obtinrent rien non plus. Grandier n'en fut pas moins condamné à être brûlé vif, avec son livre sur le célibat des prêtres, et la sentence fut exécutée le même jour, 18 août 1634, v. Aubin, Hist. des diables de Loudun; La Ménardaye, le p. Surin, Figuier, Michelet, la Sorcière, etc.

GRANDPIERRE, Henri, de Neuch&tel, pasteur à Bâle en 1823, directeur de la maison des missions de Paris, pasteur libre à la chapelle Taitbout, entra dans l'Égl. nationale; pasteur et président du Consist. de Paris, décoré, + 1874 à Lausanne. Auteur de plus, volumes d'explications bibliques et de sermons: Tristesse et

Consolation. Guide du fidèle à la Table sacrée, Aspirations chrét., etc. Orateur estimé, il avait donné ses plus belles années à l'Égl. libre, et c'est dans ce milieu qu'il est arrivé à son plus entier développement; mais c'est surtout à son influence comme directeur des missions qu'il doit sa réputation.

GRANVELLE (de) lo Nicolas Perrenot, né 1486 à Ornans, près Besançon, était avocat; membre du parlement à Dôle 1518, il passa au service de Charles-Quint, devint ministre en 1530 après la mort de Gattinara, représenta les intérêts de l'emp. et de la religion aux diètes de Worms el de Ratisbonne, et présenta aux États Tlnterim qu'il avait rédigé. Il assista à l'ouverture du Conc. de Trente et f à la diète d'Augsbourg 1550. 2o Antoine Perrenot, fils du précédent, né à Ornans 20 août 1517, év. d'Ar-ras en 1540. Instruit et orgueilleux, habile et dévoré d'ambition, il eut l'occasion de déployer ses talents diplomatiques aux diètes de Worms et de Ratisbonne où il assistait son père, et il gagna les bonnes grâces de l'emp. qui le nomma garde des sceaux 1544, à 27 ans. Il réussit en 1553 à conclure contre la réforme l'alliance de l'Espagne et de l'Angleterre par le mariage de Philippe II et de Marie-la-Sanglante, mais cette alliance fut rompue par l'avènement d'Élisabeth, et Granvelle se retourna vers la France où le traité de Cateau-Cambrésis 1559 procura à l'Espagne des avantages considérables. Philippe II lui continua la confiance et le bon vouloir de son père; il le donna comme ministre à Marguerite de Parme, gouvernante des Pays-Bas, avec la mission de pousser de toutes ses forces à l'écrasement des hérétiques. Granvelle y travailla si bien et avec un zèle si violent, que Marguerite désapprouvant ses excès finit par demander le rappel du trop cruel et compromettant ministre 1564. Il avait travaillé à faire rouvrir le conc. de Trente, et avait obtenu le chapeau de cardinal. Après quelques années de repos à Besançon, Philippe l'envoya à Naples comme vice-roi 1570, et le nomma en 1575 président de son conseil à Madrid où il + 1586. Il a laissé des Mémoires, qui sont à la bibliothèque de Besançon, et qui ont été publ. à Paris 1839 et suiv., sous le titre de: Papiers du card. Granvelle. Sa réputation eût gagné à ne pas être chargé de tant de missions où il fallait allier la cruauté à la duplicité.

GRAPHEUS, Corneille, né en Flandre 1482, secrétaire de la ville d'Anvers, traduisit 1520 le livre de Goch sur La liberté chrétienne, avec une préface très vive sur l'état de l'Égl. catholique. Emprisonné pour ce fait 1521, il dut se rétracter et perdit son emploi. Il rentra dans la vie privée, vécut de sa plume et f 1558.

GRATIEN lo v. décrets. 2o Emp. d'Occident, né à Sir mi u m 359, succéda à son père 375 et s'occupa avec son jeune fr. Valentinien II de reconstruire l'emp. romain ébranlé. Il repoussa les Allemands et les Goths, éleva sur le trône de Constantinople Théodose, le meilleur de ses généraux et, s'il permit encore le culte païen, il fit cependant quelques pas de plus que ses prédécesseurs. Il renonça le premier au titre et aux ornements pontificaux que les empereurs avaient touj. conservés jusqu'à lui, et fit enlever un autel de la Victoire sur lequel les sénateurs avaient coutume de prêter serment. Enfin il confisqua les terres qui servaient à l'entretien du culte et des prêtres païens. Il se rendit par là odieux aux Romains; Symmachus réclama, mais Ambroise fit une contre-requête et eut le dessus. Gratien travailla à la convocation du 2d conc. de Constantinople, et dans une contestation qui eut lieu à Rome il donna à l'év. le droit de trancher le différend. Ces faveurs à l'Église le perdirent. Son peuple se tourna contre lui, quand Maxime se fut fait proclamer en Gr. Bretagne; il fut battu et tué près de Lyon par Andragathius, lieut. de Maxime, 383. Élève d'Ausone il aimait les lettres.

GRATRY (le père), né 30 mars 1805 à Lille, fils d'un employé à l'intendance militaire, sa mère n'avait que 17 ans quand il naquit. Doué d'une belle intelligence, d'un cœur d'élite et d'une grande force de volonté, il fit de bonnes études à Tours et au collège de Henri IV, traversa une phase d'incrédulité, dont la sécheresse même le ramena à la foi. Il était passionné de mathématiques et sortit de l'école polytechnique officier d'artillerie avec l'épaulette d'or. Mais déjà il avait décidé de se faire prêtre; il se rendit à Strasbourg chez l'abbé Bautain, fit un noviciat d'un an au couvent de Bischenberg, enseigna pendant dix ans au petit séminaire de Strasbourg, et prit en 1842 la direction du coll. Stanislas à Paris. Le 18 août 1852 il ressuscitait l'ancien ordre de l'Oratoire, avec quelques amis, et il se mit à écrire. Sans vivre dans le monde, il le connaissait à fond. Son livre La connaissance de Dieu, fut couronné par l'Acad. Il écrivit aussi La connaiss. de l'âme, la Logique, les Sources, Lettres sur la religion, la Morale et la Loi de l'hist., La crise de la foi, Perrcyve, etc. Reçu 26 mars 1868 à l'Acad. franç. par Vitet. H combattit vivement le dogme de l'infaillibilité « comme si Dieu avait besoin de nos mensonges, > et l'accepta ensuite docilement. Malade, il vint à Montreux, où il f 7 févr. 1872. Grand prédicateur, penseur, écrivain, il a été chrétien par sa vie; il faut être catholique pour comprendre qu'il ait pu soumettre son intelligence et sa conscience à ce qu'il savait être faux.

GRAUL, Charles, né 6 févr. 1814, bon latiniste, directeur de la maison des missions de

Dresde 1842; tendance luthér., plutôt hostile au piétisme, cherchant moins des conversions individuelles que des conversions en masse de peuples ou de tribus. Pour cela il lui fallait surtout des hommes instruits et cultivés, ce qui le décida à transporter sa maison à Leipzig, pour la rapprocher de l'université, 1848. Il fit un voyage aux Indes 1853 à 1855, qui aboutit à un travail sur la philos, des Védas et à une grammaire tamule, mais la maladie le força de donner sa démission 1860; il se retira à Erlangen, où il f 10 nov. 1864.

GRAVAMINA Centum, v. Griefs.

GRECS, Église grecque ou d'Orient. La différence des caractères et des tempéraments qui existe entre l'Orient et l'Occident avait de bonne heure introduit des divergences dans la doctrine et la discipline entre les deux Églises. Mais en y regardant de près, on peut se convaincre que la plupart de ces divergences sont aussi bien la conséquence que la cause du schisme. Déjà le conc. Quini-Sextum avait été nanti des questions de discipline 681. Quant à la doctrine le principal point de controverse était le mode de procession du Saint-Esprit; les grecs reprochaient aux latins d'avoir altéré le dogme en ajoutant au symbole de Nicée les mots filioque. Ils maintenaient que le Saint-Esprit procédait du Père comme principe premier; les latins, à cause de Jean 15, 26., estimaient qu'il procédait aussi du Fils, à quoi les orientaux répondaient qu'il faut distinguer entre la mission et la procession, les uns et les autres attachant à leur formule des conséquences qu'ils regardaient comme importantes, mais qui nous paraissent avoir perdu beaucoup de leur valeur et même de leur signification. C'est l'Égl. des Goths, en Espagne, dont le concile au 6rae siècle ajouta le filioque. Toutefois la cause du schisme fut moins dans le dogme que dans les prétentions romaines. Ignace, patr. de Constantinople, ayant courageusement protesté 857 contre la corruption de la cour de Michel III, fut déposé et remplacé par l'habile et savant, mais laïque Photius. Le schisme éclata; Michel en ayant appelé au pape Nicolas, celui-ci blâma Photius et l'excommunia 860; mais Photius à son tour excommunia Nicolas, et dans un concile composé d'amis fidèles, il contraignit Ignace à signer lui-même sa destitution. Dans un nouveau conc. tenu à Rome, Nicolas excommunia de rechef Photius, et destitua ses propres légats qui n'avaient pas montré à Constantinople la fermeté nécessaire. Il y avait aussi la question bulgare. Les deux Égl. rivales regardaient la Bulgarie comme étant sous leur dépendance. En 867 Photius avait convoqué un concile, où Nicolas avait été excommunié en dépit des efforts des occidentaux, Odon, Ratran, Aeneas, etc. Mais Michel ayant été assassiné, Basile-le-Macédonien lui succéda et rétablit Ignace, qui renoua aussitôt avec Adrien II de Rome. Ignace f 878, et Pho-tius remonta sur le trône patriarcal. Jean VIII déclara qu'il voulait bien, en vertu de son pouvoir pontifical, reconnaître Photius comme patr. légitime, si celui-ci donnait une satisfaction convenable en restituant promptement la Bulgarie « qui, dit-il, fait partie de notre diocèse. t Les lettres du pape furent lues devant un concile 879, mais adoucies dans la forme. Photius, sans s'en inquiéter, condamna les conciles qui avaient eu lieu sous l'influence d'Ignace. Le pape, déçu dans son espoir de ravoir la Bulgarie, excommunia publiquement Photius et ceux qui lui resteraient attachés. Mais en 886, sous Léon-le-Philos., le parti d'Ignace, ayant eu le dessus, rétablit momentanément l'union avec Rome. La lutte recommença vers le milieu du iirae siècle, en 1043, sous Michel Gérularius, q. v., et le schisme fut cette fois définitif. La prise de Constantinople par les croisés 4204, et l'établissement dans cette ville d'un empire latin, qui dura jusqu'en 1261, ne fit qu'envenimer les rapports des deux Églises. Des tentatives d'union se renouvelèrent dès lors assez souvent, mais sans succès; ainsi celles de Pierre Chrysolanus 1110, du conc. de Constantinople 1168, du conc. de Lyon 1274, du conc. de Flo-rence-Ferrare 1438. Ils aboutirent à un rapprochement de quelques théologiens, mais non à celles des Églises. Quelques communautés seulement se rattachèrent à Rome, mais en maintenant le mariage des prêtres, la communion sous les deux espèces, et le cuit*1 en langue vulgaire; elles portent le nom de Grecs-Unis et se trouvent surtout dans l'emp. d'Autriche, en Pologne, en Hongrie, Transylvanie, Galicie, etc. En faisant à d'autres ces mêmes concessions, Rome se serait épargné bien des mécomptes. Des efforts ont été faits aussi, mais sans plus de succès, pour amener une entente entre les grecs et les Egl, de la Réforme. Mélanchthon en 1559, Andreâ et les théologiens de Tubingue en 1373, enfin Cyrille Lucar en 1621, cherchèrent un moyen de rapprochement, mais ils échouèrent n'ayant pas une base commune; les sacrements et l'invocation des saints étaient surtout le grand obstacle. L'Égl. grecque, par un trop grand attachement à la forme, ne pouvait comprendre que la justification par la foi pût servir de base et de principe à une Église; elle ne comprenait pas davantage ce qu'il y avait d'énorme dans la vente des indulgences. Toutefois dans la pratique les rapports des grecs avec les protestants sont assez faciles, soit à cause de leur opposition commune aux prétentions romaines, soit parce qu'il ne se mêle aucun souvenir irritant à l'hist. de leurs relations depuis 3 siècles. La doctrine de l'Égl. grecque orthodoxe est exposée officiellement dans la Déclar. de la foi des Russes, rédigée 1642 par P. Magilas, et adoptée 1672 par le synode de Jérusalem. Elle se résume dans les trois symboles dits des Apôtres, de Nicée et d'Athanase; elle est ainsi rigoureusement orthodoxe sur les dogmes fondamentaux de la Trinité, de la divinité de J.-C., de l'Incarnation et de la Rédemption. Quant à l'autorité doctrinale, elle la met dans les mains de l'Église, c.-à-d. de l'universalité des fidèles. Les sacrements sont des grâces communiquées, et non prêchées, ou symbolisées seulement; la transsubstantiation est prise dans son sens le plus absolu, le plus matériel. Quant au culte, il est surtout extérieur et cérémoniel; la prédication est reléguée à l'arrière-plan; souvent même elle n'existe pas. La hiérarchie ecclés. est très compliquée; le bas clergé doit être marié, mais non le haut clergé, qui se recrute par conséquent surtout dans les monastères. La vie intellectuelle et scientifique n'a fait que décliner depuis Jean Damascène 780; on peut citer cependant QEcumenius, vers l'an 1000, Théophylacte f 1107; Euthyme Zigabenusf 1118, Nicetas Chômâtes f 1216, Nicolas de Méthone, Cyrille Lucar, Pierre Mogilas, métropolitain de Kiew, et quelques autres. La subordination de l'Égl. à l'État est un des traits les plus caractéristiques, sinon les plus glorieux, de l'Égl. grecque, et il en est résulté naturellement des divisions intérieures suivant les pays. Lors de la conquête de Constantinople par les Turcs, certains droits civils ou d'administration passèrent au clergé, et un synode permanent fut adjoint au patriarche. En Russie où le patr. de Moscou représentait depuis 1588 l'autorité spirituelle, Pierre-le-Grand l'a transférée 1702 à un synode nommé par lui, de sorte qu'en fait l'empereur en est devenu le chef réel. La Grèce de même, depuis la déclaration d'indépendance, a rompu ses rapports ecclés. avec le patr. de Constantinople 1827, et c'est un synode nommé par le roi chaque année qui en remplit les fonctions. C'est un césaréopapisme peu déguisé. Le patr. de Constantinople étend sa juridiction sur ceux d'An-tioche, de Jérusalem et d'Alexandrie; ceux-ci nomment leurs év. et leurs archevêques. Depuis les luttes christologiques qui amenèrent la séparation de l'Égl. arménienne et de l'Égl. cophte, et depuis le grand schisme de Photius, la senle secte qui se soit détachée de l'Égl. grecque est celle des grecs-unis. Cependant cette branche considérable de la chrétienté n'a depuis longtemps exercé aucune influence appréciable ni sur la théol., ni sur la vie religieuse de l'Église. Elle est à la fois méconnue et peu connue. Ses rapports avec les États, c.-à-d. avec la politique, lui ont fait une position fausse, qui a entravé son développement spirituel; le clergé est nombreux, mais pauvre, mal payé, souvent peu instruit, sauf les grands dignitaires. Diverses tentatives faites à plus, reprises pour réveiller les pasteurs et les troupeaux se sont brisées contre rattachement aux formes et aux traditions, ou contre la susceptibilité politique de quelques souverains qui craignaient de voir la liberté se dresser derrière le réveil du sentiment religieux. L'irréligion leur a donné le nihilisme, et Ton commence à comprendre que ce danger est pourtant plus grand que celui de la foi.

GRÉGOIRE lo le Thaumaturge, ou faiseur de miracles; il s'appelait Théodore. Né de parents païens à Néo-Césarée, Pont, il devint chrétien à l'âge de 14 ans après avoir perdu son père. Dans un voyage qu'il fit en Palestine, se rendant à Rome, 231, il apprit à connaître Origène à Césarée et s'attacha à lui comme disciple jusqu'en 239. Il se proposait d'embrasser la vie solitaire et de vivre en ermite dans le Pont, mais il fut appelé à l'évéché de Néo-Césarée 244 et il accepta cette tâche comme un devoir. Grâce à son activité, de nombreuses conversions eurent lieu et le paganisme disparut presque entièrement de la province. Persécuté par Décius, il échappa miraculeusement à la mort. La légende s'est emparée de sa personne et lui prête des miracles extraordinaires, jusqu'à en faire un second Moïse, f 264 ou 270. Parmi ses écrits se trouvent un Panégyrique d'Origène et une Conf. de foi, comme résumé de la doctr. chrét., qui lui aurait été dictée en vision par l'ap. Jean, mais qui dans tous les cas porte des traces évidentes d'interpolations, v. Grég. de Nysse, Vie de G.-le-Thaum.

2o Grég. Lousavoritch, c.-à-d. Vllluminateur, ou l'Éclaireur; fondateur de l'Égl. arménienne, et premier patr. de cette Église à Césarée. Né vers 207, selon d'autres en 257, il était fils d'un prince parthe. Élevé comme chrétien à Césarée, il gagna par la fermeté de sa foi le roi Tiri-date d'Arménie, qui se convertit, lui et tout son peuple, et il fut chargé d'organiser l'Église. Au conc. deNicée (est-ce bien le même?) il se fit remplacer par son fils Aristax, à qui dès son retour il remit définitivement ses fonctions, et se retira dans une caverne de la Daranalie, où il mourut. Les méchitaristes ont publ. de lui quelques Homélies, Venise 1737 et 1848.

3o Grégoire de Naziance, dit le Théologien, fils du précédent év. de Naziance, et l'un des pères les plus distingués de l'Égl. grecque. Né vers 330 à Naziance où son père était évêque (et non en 300, comme le dit Papebrook dans les Acta Sanctorum). Sa mère, la pieuse Nonna, l'avait, même avant qu'il fût né, consacré au service de Dieu. Il commença par l'étude des lettres profanes et visita successivement Césarée de Cappadoce, Césarée de Palestine, Alexandrie et Athènes. Comme il se rendait dans cette dernière ville, le vaisseau sur lequel il se trouvait essuya une violente tempête. Il fit vœu, s'il échappait à la mort, de se consacrer à Christ. La tempête s'apaisa, et à la vue de ce prodige, non seulement il se convertit en effet, mais encore, est-il dit, tous les passagers se convertirent.

C'est à Athènes qu'il se lia avec Basile-le-Grand, et il le mit en garde contre les prévenances de Julien, plus tard l'Apostat. Après le départ de Basile, il continua encore pendant un an ses études avec le plus brillant succès, puis revint en 356 à Naziance où il se fit baptiser. Il hésitait depuis longtemps entre la vie active et la vie d'anachorète: il choisit un juste milieu, se distinguant à la fois par son zèle et son austérité. Ses compatriotes le pressaient vivement d'accepter un poste de professeur de rhétorique, mais il refusa et alla rejoindre son ami Basile dans sa solitude, près de l'Iris, où ils se livrèrent à l'étude des Écritures et de quelques pères, et plus spécialement d'Origène. Il retourna ensuite auprès de son père, à Naziance. et se chargea de quelques-unes de ses fonctions; mais pendant une fête de Noël, son père l'ayant par surprise ordonné prêtre, Grégoire s'enfuit, ne se trouvant pas digne d'une charge aussi considérable. Il revint en 362 et fit un discours remarquable pour se justifier d'avoir pris la fuite. — Il fut nommé d'abord év. à Sosima et dès le début se signala par ses talents oratoires, remarquables même à cette époque brillante, aussi bien que par son zèle, sa charité et sa franchise. En 363 il se rendit à Constantinople, où se trouvait son frère Césaire, médecin distingué, très aimé de Julien qui cherchait à le détourner du christianisme. Peu satisfait de cette intimité entre l'empereur païen et son frère, Grégoire exhorta celui-ci à se défier de Julien et réussit à empêcher son abjuration. Après la mort de Julien, malgré la force que ce prince avait rendue à son parti, Grégoire prononça deux discours véhéments contre l'empereur et les païens, toutefois en recommandant aux chrétiens l'indulgence et la tolérance. En 374, à la mort de son père, il exerça comme coadjuteur les fonctions d'év. de Naziance, puis se retira à Séleucie jusqu'en 379. Appelé à Constantinople pour y combattre les ariens et l'emp. Valens, il y alla plein d'appréhensions, effrayé de la responsabilité d'un poste où depuis 40 ans les troubles se succédaient sans interruption. Grâce à ses talents, à son onction et à son zèle, et quoiqu'il n'eût qu'un salon pour lieu de culte, il ramena un grand nombre d'ariens au sein de l'Égl. et fit prédominer la foi du conc. de Nicée. Des difficultés de tous genres l'avaient assailli, mais le succès le récompensa de ses efforts et de son courage. Cependant les intrigues et la calomnie aggravèrent sa position; fatigué et abreuvé de dégoûts, il était décidé k partir et à quitter un poste aussi ingrat. Lorsque le peuple apprit cette résolution, plein de sollicitude et d'amour pour son évêque, il l'entoura pour s'opposer à son départ, et Grégoire à la vue de ses fidèles qui, les larmes aux yeux, le suppliaient de rester, céda k leurs instances. Sa persévérance, pleine de douceur, fut enfin couronnée d'un succès éclatant. Théodose se déclara en sa faveur et ses adversaires furent réduits au silence. Voyant que ceux de sa croyance n'avaient qu'une salle pour lieu de réunion, l'empereur ordonna à l'év. arien Hémophile de céder la place, et Grég. fut conduit en grande pompe à la cathédrale. Aussitôt la paix rétablie 380, Grégoire fut consacré patriarche de Constantinople dans un conseil présidé par Meletius d'Antioche. Dès lors il s'adonna k la prédication, secourant les faibles et les opprimés, disant hautement leurs vérités aux grands de la terre. Mais sa modération et sa tolérance envers les hérétiques lui firent de nouveaux ennemis qui se liguèrent pour le renverser et cherchèrent même k le faire assassiner. En 381 s'assembla à Constantinople le 2d conc. œcuménique. Appelé à le présider, Grégoire refusa. « Je fuis, disait-il, toute réunion d'évêques, car je n'y ai jamais vu régner que l'animosité et l'ambition. Elles enveniment ce qu'elles devraient guérir. » Il dut céder cependant aux sollicitations de son parti; mais de nouvelles tribulations l'attendaient. Le schisme mélétien avait éclaté k Antioche; Grég. proposa de nommer k l'évêché de cette ville Paulin que soutenaient également le savant Jérôme et le pape Damase. Jérôme n'avait eu de repos qu'après avoir fait la connaissance de Grégoire et avoir obtenu son appui. Devant ces divisions Grégoire se retira, traitant les pères du concile de « troupeau de grues; » il voulait abandonner l'épiscopat. Ce fut encore le peuple qui intervint en le suppliant de rester. Mais les év. de Macédoine et surtout ceux d'Egypte envenimèrent le débat. Grégoire offrit de nouveau sa démission; elle fut enfin acceptée cette fois, même par Théodose qui rendit cependant hommage à son dévouement, k son désintéressement et à son intrépidité. Indigné de toutes ces cabales et de l'avidité du sacerdoce, Grég. se retira dans sa patrie, appelant les évêques de son temps des hommes à double face, adulateurs de femmes, lions auprès des petits et rampants auprès des grands, des trafiquants de Christ, insouciants de toute chose hormis du mal. Il exerça encore pendant quelque temps les fonctions d'év. de Naziance, puis se retira définitivement et + 389. Doué de talents hors ligne comme orateur, Grég. de Naziance ne brille pas moins par ses écrits; les caractères distinctifs de son style sont le coloris, l'abondance, la grâce, la facilité; il est remarquable à la fois par son imagination, ses vues philos, et son talent poétique. On a de lui 50 ou 55 Sermons ou discours, parmi lesquels 5 sur la Trinité, et sa prédication d'adieu à son troupeau de Constantinople. Il excelle dans le panégyrique et l'oraison funèbre; il prononça celle de son fr. Césaire, de sa sœur Gorgonie, de son père, de Basile. Puis 243 lettres caractérisées par une sensibilité vive et une riche imagination; plus, poèmes empreints de mélancolie religieuse et des satyres des plus piquantes où il trace un portrait peu flatteur des év. et des conciles de son temps. Citons entre autres son Carmen de se ipso, trad. par Lefranc de Pompi-gnan, où il raconte les vicissitudes de sa vie. J. Planche a fait paraître, Paris 1827, un Choix de poésies et de lettres de saint Grégoire de Naziance, avec trad. franç. H. B.

4° Grégoire de Nysse, fils du rhéteur Basile etd'Emmelie; né vers 335 à Sébaste, Cappa-doce, était frère cadet de Basile-le-Grand. Il épousa Eusebéia qui mourut de bonne heure, et il écrivit plus tard pour le célibat. Il fut successivement lecteur dans l'église, prof, de rhétorique et év. à Nysse 372. Il entra, comme son frère, en lutte avec Valens, qui le força de quitter son siège épiscopal et d'abandonner sa place à un misérable esclave arien. Il vécut quelque temps dans la solitude, et fut réintégré à son poste par Théodose. En 379 il assista au conc. d'Antioche et joua un rôle prépondérant, 381, au conc. œcuménique de Constantinople; le symbole qui y fut adopté est mis sous son nom. f entre 394 et 400. On a de lui un grand nombre d'ouvrages; des Comment, sur l'Écriture sainte, des Oraisons funèbres, entre autres celle de l'impér. Flaccille et de sa fille Pulché-rie, des traités de morale et de dogmatique, une Vie de Grégoire-le-Thaumaturge, des catéchèses et des sermons. Ses œuvres ont eu plusieurs éditions; ses sermons ont été trad. en fr. par Goulu. Il est surtout remarquable par l'abondance, l'imagination et l'élévation. H. B.

5° Grégoire, dit de Tours; né en Auvergne 30 nov. 539, d'une famille sénatoriale qui avait donné à l'Égl. plusieurs évêques. Petit, chétif, mais d'une intelligence supérieure et d'une grande indépendance d'espril. Il s'appelait Georges Florentius, mais prit le nom de Grégoire de son bisaïeul, év. de Langres. Il fit un voyage à Tours, au tombeau de saint Martin, dans l'intérêt de sa santé, revint k peu près guéri à la cour de Sigebert, fut appelé k Tours comme évêque et sacré le 22 août 577. Au conc. de Paris il défendit l'archev. Prétextât de Rouen contre Chilpéric et Frédégonde, et intervint en 585 et 588 entre Gontran et Childebert II pour apaiser leurs querelles. Il fit un voyage à Rome ( ce n'est cependant pas absolument prouvé) 592, et + presque au retour, le 17 nov. 594. Il a écrit: la Gloire des martyrs, 107 chap.; la Gloire des Confesseurs, 112; une Vie des Pères, 20; les Miracles de saint Julien, év. de Brioude, 50; les Miracles de saint Martin de Tours, ceux de saint André. Ces livres légendaires ont fait sa réputation de son temps; mais celui qui l'a conservéexjusqu'à nous, c'est son Hist. ecclésiastique des Francs, d'une composition défectueuse, mais d'un grand mérite de narration. Elle commence en 377 à la mort de saint Martin, et va jusqu'en 591. Le plan en est à la fois civil, laïque et religieux. Réimpr. dans la Collection des Mémoires relatifs à l'Hist. de France, de Guizot.

6° Grégoire d'Utrecht, né vers 707, disciple de Boniface; il avait fait sa connaissance 722, au couvent de Pfalzel, près Trêves, dont sa grand'mère à lui, Aedula, était abbesse. Il fut tellement captivé par les exhortations du missionnaire, qu'il résolut de le suivre; il l'accompagna dans tous ses voyages et ses peines, et après sa mort, quoiqu'il n'eût pas reçu l'ordination, il prit la direction de l'évêché d'Utrecht et s'installa comme abbé dans son célèbre couvent, dont il fit une école florissante d'évangé-listes. Aimé de ses disciples, il travailla longtemps parmi eux avec joie, préparant des ouvriers pour la mission en Angleterre, en Frise, en Thuringe, en Saxe. Quand il sentit sa fin venir, il se fit conduire à l'église devant l'autel, s'agenouilla, pria, communia et f a°ût 776, ou 781.

7<> Grégoire Magisdros, prince arménien, de la race des Arsacides, conseiller, administrateur, général au service des rois d'Arménie, vers 1030; persécuta les sectaires arméniens soumis à sa puissance, pour les contraindre d'embrasser le christianisme, f 1058. Auteur d'un poème en mille vers renfermant TA. et le N. T.

8° Grégoire de Heimburg, juriste allemand, qui s'est fait un nom par son énergique et persévérante résistance aux prétentions papales. Il était secrétaire d'Aeneas Sylvius au conc. de Bàle, mais se sépara de lui quand il fut devenu le pape Pie II. Comme syndic de Nuremberg il fut à la tête de la dèputation des princes allemands qui s'adressèrent 1446 à Eugène IV; il écrivit à cette occasion sa Remontrance, ou Ad-monilio de injustis usurpât, paparum. Au service de Sigismond d'Autriche il travailla contre Pie II à la conférence de Mantoue, et dans le conflit de son maître avec Cusan il conseilla à Sigismond d'en appeler à un concile. Excommunié, puis abandonné par ceux qu'il avait servis, il se retira auprès de Podiebrad en Bohême.

f à Dresde 1472, avec l'absolution de Sixte IV. Ses ouvrages ont été publ. à Francf. 1608 sous le titre: Scripta nervosa justitiœque plena.

9° Grégoire, Henri, connu sous le nom d'abbé Grégoire; né à Vého, près Lunéville 4 déc. 1750; élevé par les jésuites de Nancy; se fit connaître en 1788 par un Essai sur la Régénération des juifs. Cette tendance libérale et tolérante était dans le goût du siècle, et lui valut d'être envoyé aux États généraux pour représenter le clergé de Lorraine. Il présida la séance du 14 juill. 1789 où les députés se déclarèrent eq permanence, et prêta serment le premier à la constitution civile du clergé, qu'il avait concouru à élaborer, 1791, ce qui lui valut l'évêché constitutionnel de Blois. Il demanda l'abolition de la peine de mort, et adhéra par écrit à la mort du roi, n'ayant pas assisté à la séance où elle fut décrétée. Comme évêque il défendit la religion et l'Égl. et remplit activement ses fonctions. En 1794 il fit un discours en faveur de la liberté de conscience et de culte. En 1797 il présida le premier conc. national réclamant la restauration de l'Église; il chercha dans un 2me concile à faire prévaloir ses idées relig. qui se rattachaient d'une part au jansénisme, de l'autre aux traditions de l'Égl. gallicane. Le concordat lui enleva son évêché, mais il fut fait comte et sénateur 1801. Il osa résister à l'empereur. Élu député de l'Isère 1819, il fut exclu de la Chambre comme indigne à cause de son vote contre le roi. Il passa le reste de sa vie dans la retraite et f 28 mai 1831 à Paris. Comme il refusa de rétracter son serment de 1791, l'archev. de Paris lui refusa les sacrements et la sépulture ecclésiastique; un prêtre bienveillant lui donna cependant l'extrême-onction, et 20,000 citoyens l'accompagnèrent au cimetière. Outre ses Mémoires, publ. 1837 par Hipp. Car-not, il a laissé beaucoup d'ouvrages sur des questions ecclés., sur les Arbres de liberté, les Sectes relig., les Confesseurs des rois, le Mariage des prêtres, etc.

Seize papes et deux antipapes ont aussi porté ce nom:

lo Grégoire I«r, dit le Grand, né à Rome vers 540, d'une famille distinguée, f 60fc, revêtit le froc par goût et s'enferma de bonne heure dans un couvent. D'abord préteur et gouverneur impérial, puis diacre à Rome, il vit vendre de jeunes esclaves saxons (angli), dont la beauté le frappa. Ayant appris qu'ils étaient encore païens, il forma le dessein d'aller évangéliser l'Angleterre et supplia Pélage n de l'y envoyer comme missionnaire; mais ce projet n'eut pas de suite, Pélage l'ayant envoyé comme légat à Constantinople, et il ne put se réaliser que lorsque lui-même eut été appelé au pontificat 590. Il envoya alors Augustin et 40 autres moines auprès d'Éthelbert, roi du Kent, époux de Ber-the, française et chrétienne. Il s'occupa aussi de l'évangélisation des Goths ariens. Vraiment grand de caractère, il fonda de nombreux couvents et fit observer une discipline sévère par le clergé; il prenait soin des pauvres, leur distribuant des dons en abondance et ne voulant rien recevoir lui-même. Il faut, écrivait-il à un évêque, renoncer à certains usages qui sont onéreux aux églises, afin qu'elles ne soient point obligées d'envoyer de l'argent à celle de Rome, de laquelle elles devraient plutôt en recevoir. Nous vous défendons de nous rien donner à l'avenir. — Jean-le-Jeûneur, de Constantinople ayant pris en 588 le titre d'év. universel, Grégoire écrivit à l'emp. Maurice une lettre où, tout en réservant les droits supérieurs de Rome et la succession de saint Pierre, il proteste contre l'usurpation blasphématoire d'un titre qui ne saurait appartenir à personne: Je déclare positivement et librement que quiconque s'appelle évêque univ., ou veut qu'on lui donne un pareil titre, a l'orgueil et le caractère de l'anté-christ, dont il est le précurseur (Epist. Lib. I, ep. 30). Ailleurs il combat la simonie: J'ai appris cette nouvelle terrible, qu'on vend des places ecclés. pour de l'argent. C'est une véritable peste! Il s'opposa aussi à une adoration superstitieuse des images, en opposition avec Pélage son prédécesseur; il fit la guerre aux livres païens et passe pour avoir détruit des monuments idolâtres. Sa doctrine sur la grâce était pure. Job, dit-il, ne se fiait point aux mérites de sa justice, mais il se tournait vers la seule espérance de ses prières... Dieu les a sauvés sans qu'ils eussent aucun mérite... La félicité des saints est une grâce et ne s'acquiert point par des mérites. — Il s'occupa avec zèle et succès de la conversion des Lombards qui venaient d'envahir le nord de l'Italie, et envoya à Agi-lulf leur roi la célèbre couronne d'or avec un anneau de fer, quia traversé les siècles jusqu'à nos jours. Il réussit à faire avec eux une paix honorable 595, grâce à l'intervention de la pieuse Théodolinde, femme d'Agilulf après avoir été la femme d'Antharis. Il eut aussi à correspondre avec la trop fameuse Brunehaut à l'occasion des scandales du clergé franc. Grégoire était habituellement souffrant, entre autres de la poitrine; souvent alité; mais il ne cessa de lutter avec courage contre ce mal, pendant les 13 l/« ans de son pontificat. Il exerça une grande et bonne influence sur son epoque. C'est à lui qu'on doit en musique le Rit grégorien. Il a laissé de nombreux ouvrages, Paris 1705, 4 vol. folio; et Lettres choisies,par H. Gondrin.

2° Grégoire II, romain, 715-731, successeur de Constantin, envoie des ambassadeurs à

Charles Martel 726, et paraît traiter avec lui de prince à prince, sans souci de son pouvoir spirituel. Il convoque 729 un conc. contre les iconoclastes, et envoie Boniface prêcher l'Évangile en Allemagne.

3<> Grégoire III, prêtre syrien, élu par le peuple pendant les funérailles de Grégoire II 731-741. Il appelle Charles Martel à son secours contre les Lombards. 11 continua la lutte contre les iconoclastes, mais sans réussir. Sa charité le fit surnommer l'ami des pauvres.

4o Grégoire IV, fils d'un patricien de Rome, 827-844, ne fut consacré qu'avec l'approbation des envoyés impériaux. Cependant il prit parti pour la rebellion des fils de Louis-le-Déb. Ayant menacé d'excommunication l'emp. et ses évêques, ceux-ci répondirent: Qu'il vienne excommuniant, il s'en retournera excommunié. Ola sentait déjà de loin les libertés gallicanes. C'est sous son règne que Paschase Radbert imagina le dogme de la transsubstantiation, aussitôt combattu comme une monstrueuse innovation par Raban Maur, Ratram, Agobard de Lyon, Claude de Turin, Druthmar, etc.

5<> Grégoire V, Brunon, neveu de l'emp. Othon III, élu 996, fait destituer Gerbert et rend l'archevêché de Reims au traître Arnulf. Il fait chasser de Rome l'antipape Jean XVI, 997 et met à l'interdit Robert, roi de France, qui a épousé Berthe, sa cousine au 4me degré, et qui refuse de s'en séparer. Robert excommunié n'a plus autour de lui que deux domestiques fidèles, qui jettent au feu tous les plats dont il a mangé, pour ne pas être compris dans son interdit. A la fin il cède, renvoie Berthe, et épouse Constance 998. Grégoire f 999.

6° Grég. VI, antip., v. Léon IX et Benoit VIII.

7° Grég. VI, Jean Gratien, acheta de Benoît IX sa papauté 1044, éloigna à force d'or les autres antipapes, et ne se fit pardonner ces actes de simonie que par le bon usage qu'il essaya de faire du pouvoir, en mettant fin par une bonne administration et par un bon exemple aux horreurs que présentait le pontificat. Des cardinaux ambitieux et l'emp. Henri III, dit le Noir, l'entravèrent dans ses tentatives, et de découragement il donna sa démission 1046.

8° Grégoire VII; Hildebrand, né vers 1013, fils d'un charpentier de Soana (Toscane), fut le partisan et l'ami de Grégoire VI, qu'il regarda toujours comme le seul pape légitime, à l'époque où il y avait trois papes. Il était entré comme moine bénédictin à l'abbaye de Cluny, et c'est lors d'une mission à Rome qu'il fit la connaissance de Gratien. Après la mort de Clément Il et de Damase II, plusieurs princes et évêques réunis à Worms ayant élu Bruno, év. de Toul, Hildebrand l'arrêta à son passage à Cluny, et lui fit déposer son titre et ses vêtements pontificaux, sous prétexte que son élection, faite par des laïques, n'était pas régulière. Bruno dut aller demander à Rome le droit de s'appeler Léon IX, et Hildebrand, déjà sous-diacre, reçut de ses mains le cardinalat. Son influence alla croissant sous les papes qui suivirent et à l'élection desquels il ne fut pas étranger. C'est lui qui, malgré l'empereur, fit nommer sous le nom de Victor II, Guebhard qui avait refusé du secours à Léon. Il confirma Étienne IX nommé en son absence. A Benoît X, nommé par le parti épiscopal, il opposa et fit prévaloir Nicolas II (Gérard de Florence), puis Alexandre II (Anselme), et ce n'est qu'après avoir connu, aimé, patronné ou fait élire huit papes, qu'il se décida à ceindre enfin lui-même cette tiare pour laquelle il avait tant travaillé, 1073. De lui date le système de la papauté, tel qu'il s'est maintenu avec peu de variations jusqu'à nos jours: système de domination séculière, au nom de l'Église; système de pou voir temporel et d'oppression des consciences, au nom de la foi. Les puissances civiles sont mises en régie, les libertés de tous genres sont confisquées, les droits de l'homme sont anéantis, le clergé lui-même n'est plus qu'une machine à obéir, et l'on peut presque dire que la papauté a détruit l'humanité. Pape tout d'une pièce, Grégoire a pu être de bonne foi. Dans leur course au pouvoir, les uns étaient mus par l'ambition, les autres par le désir de faire du bien à l'Égl. et par l'Eglise; Hildebrand l'était peut-être par les deux choses à la fois. Dans tous les cas il était convaincu de la justice de sa cause. Seulement il partait d'une première idée fausse, la théocratie papale, qui l'entraîna dans bien des erreurs, lui fit faire bien des actions blâmables et, en consolidant la cause des papes, ébranla celle du christianisme. Tantôt prompt, tantôt lent, tantôt il était inflexible, tantôt il sacrifiait même la vérité à l'idée qui le dominait, comme il fit à l'égard de Béranger, soit lorsque, à propos de la transsubstantiation qu'il n'aimait pas, il voulut se contenter des paroles sacramentelles sans entrer dans la question du comment; soit au contraire lorsque, effrayé par les menaces des évêques, il exigea que son ami Béranger signât une confession qu'il ne croyait pas. A peine sur le trône il mit en avant des prétentions sur les royaumes d'occident, considérant les uns comme des propriétés immédiates de saint Pierre, les autres comme lui étant tributaires. C'est dans ce sens qu'il écrivit en 4073 aux princes d'Espagne, en 1074 aux rois de Saxe et de Hongrie. La France, dit-il, lui devait un tribut annuel, et la Gr.-Bretagne, sa servante et vassale, lui devait les arrérages du denier de saint Pierre, et ses hommages. Guillaume-le-Conquérant lui paya le premier, mais refusa nettement les seconds, déclarant qu'il ne tenait son empire que de Dieu et de son épée. Grég. comprenait d'ailleurs très bien qu'il ne suffit pas d'afficher des prétentions, et il commença résolument une triple campagne contre la simonie, le mariage des prêtres et le droit d'investiture des princes. Il fut puissamment aidé dans ses luttes par l'appui de Ma-thilde, fille de Boniface, duc de Toscane, avec laquelle il entretenait les relations les plus intimes et qui l'institua son unique héritier. Dans un conc. tenu à Rome 4074, il interdit les égl. aux ecclésiastiques mariés et défendit au peuple d'assister au culte célébré par eux. Grande rumeur parmi les prêtres et évêques; émeutes dans le peuple; les légats du pape parcourent le pays, enlevant partout aux ecclésiastiques leurs femmes qu'ils traitent de concubines. La violence lui assure la victoire; il a suivi la méthode de Mahomet. En 4075 nouveau concile, à Rome encore. 11 voulut séparer entièrement l'Égl. de l'État, ou tout an moins se subordonner ce dernier. Jusqu'alors les souverains possédaient le droit de conférer les dignités cléricales, en présentant à leurs élus la crosse et l'anneau. Ils en avaient parfois abusé en trafiquant des bénéfices ecclésiastiques. Grégoire déclara qu'à l'avenir l'Égl. seule aurait le droit d'investiture, et il excommunia d'un coup les laïques investisseurs et les ecclésiastiques investis. II excommunia entre autres cinq conseillers d'Henri IV, comme convaincus de simonie, et menaça de la même peine Philippe, roi de France. Henri IV, homme faible, déréglé, mal élevé, fier d'avoir vaincu les Saxons 4075, voulut prendre la défense de ses conseillers; il reconnut son tort d'avoir facilité le commerce des charges ecclésiastiques, mais il refusa toute concession quant au droit d'investiture. Grégoire le somma de comparaître à Rome devant un concile; sa lettre commençait par: Bénédiction au roi Henri, s'il se montre (ils obéissant de l'Église, etc. Henri, après l'avoir déposé dans un conc. convoqué à Worms, lui répondit, 4076: Henri, roi par la pieuse volonté de Dieu, à Hildebrand qui n'est plus pape, mais un faux monarque, moine apostat, l'antéchrist s'élevant dans le temple de Dieu, etc. Henri fut solennellement excommunié la même année; l'émotion fut grande en Allemagne et s'il avait su saisir avec courage le moment favorable, s'il n'eût pas laissé passer la première indignation, il eût pu résister. Mais il traîna en longueur; le nombre de ses adversaires et de ses nobles mécontents s'accrut; deux partis se dessinent, et ses partisans eux-mêmes décident en octobre de la même année que s'il n'est pas rétabli dans la communion de l'Égl. avant la diète d'Augsbourg qui doit se réunir l'année suivante, ils se choisiront un autre empereur. Force lui est d'aller chercher le pardon du pape. Il part, traverse les Alpes par l'hiver le plus rigoureux, arrive en février 1077 à Ca-nossa où Grégoire résidait auprès de Mathilde. Grégoire le laisse passer et pleurer trois jours dans sa cour, en haillons, pieds nus, foulant la neige, et ce n'est qu'après cette grande humiliation que le saint-père finit par lui donner l'absolution, en stipulant qu'il ne gouvernera pas jusqu'à la prochaine diète. En attendant, quelques princes allemands ont choisi un autre empereur, Rodolphe de Souabe. Mais les év. et les princes italiens, les Lombards entre autres, outrés et indignés de la conduite de Grég., reviennent à Henri en stipulant qu'il n'acceptera pas les conditions que le pape lui a imposées. Ce parti s'accroît bientôt. Grégoire prendra le parti du plus fort et apprenant qu'Henri a perdu une bataille, il prononce de nouveau son excommunication et sa déchéance, et le « condamne à n'être jamais victorieux. » Henri, coutumier de la chose et sachant ce que coûte un pardon de Grégoire, réunit plusieurs conciles, à Bruxelles, Mayence, etc., qui condamnent Grégoire comme coupable de parjure et disciple de Béranger, et nomment à sa place, sous le nom de Clément III, Guibert, év. bavarois, 1080. Rodolphe ayant été vaincu et tué, le parti d'Henri augmente encore; il marche sur l'Italie, défait en trois rencontres les troupes de Mathilde, assiège trois fois Rome et s'en empare 1084. Grégoire a peur et se réconcilie avec le vaillant Robert Guiscard, duc de Calabre, qu'il avait excommunié en 1074. Il tient encore dans le château Saint-Ange où il s'est réfugié; Guiscard réussit à faire lever le siège de cette forteresse et il ramène Grégoire en triomphe dans Rome. Mais comme il s'était aliéné le cœur des Romains, l'impétueux pontife ne se croit plus en sûreté dans sa capitale et il se fait conduire à Salerne, où il f 25 mai 1083, en disant: J'ai aimé la justice et j'ai haï l'iniquité, c'est pourquoi je meurs en exil. Selon d'autres il aurait exprimé le regret d'avoir, à l'instigation du diable, allumé la discorde et la guerre. Il peut très bien avoir dit les deux choses, suivant les moments et à des points de vue différents. Il avait conciencieusement soustrait la papauté à la domination des puissances temporelles, et il laissait l'Europe plongée dans les plus cruelles calamités. Une simple pierre noire, avec son nom Hildebrand, marque depuis huit siècles le lieu où il repose, — On a de lui des Lettres, un recueil de maximes intitulé Dictatu* papœ, qui renferme toute sa politique et le germe de la future infaillibilité; et un Comment, sur les Psaumes pénitentiaux. Hist. par Voigt, de Halle, Weimar 1815; trad. par Jager, de Nancy, 1839.

9° Grégoire VIII, antip.. v. Calixte 2°.

10° Grégoire VIII; Albert de Spinacchia, successeur d'Urbain HI, élu 1187, ne règne que

2 mois. Troisième croisade.

Ho Grégoire IX; Ugolino de Conti, cardinal et év. d'Ostie, élu 1227, succ. d'Honoré III, veut exiger de Frédéric II l'accomplissement de la promesse qu'il a faite à son prédécesseur, de partir en croisade. Fréd., prétextant la peste, refuse de partir; il est excommunié 1228. Grégoire lui suscite des ennemis en Italie, une fois qu'il s'est enfin décidé de partir, et Frédéric, qui s'est couronné roi de Jérusalem, marche contre lui et le contraint de quitter Rome en fugitif. Grég. f 1241, âgé de cent ans, plein de haine, et sans avoir pu se venger ni réunir un conc. écuménique. Il avait fulminé 1231 une bulle d'extermination contre les malheureux vaudois du Piémont. On lui doit la clochette de la messe 1127. Il a réuni un certain nombre de décisions papales sous le nom de Décrétales de Grégoire IX, qui sont une des principales parties du Corps de droit canonique.

12° Grégoire X; Thibaut Visconti, archidiacre de Liège, élu 1271, après un interrègne de

3 ans, pendant lequel les cardinaux n'avaient pu s'entendre, f 1276. Il pi-end, à Lyon, des mesures pour qu'à l'avenir ces fâcheux interrègnes ne se renouvellent plus; les cardinaux seront pris par la famine; enfermés pendant la durée de l'élection, ils verront leurs rations diminuer dès le 3m* jour à un degré alarmant. Les cardinaux surent se soustraire cependant à ce qu'il y avait de trop vigoureux dans cette mesure. Il tint à Lyon un conc. général, 1272. auquel assistèrent les ambassadeurs de presque tous les princes d'Europe et de quelques-uns d'Asie; on s'y occupa de la réunion des Égl. grecque et latine, d'envoyer des secours en Orient, et de fixer quelques règles de discipline, entre autres, comme on l'a vu, d'accélérer les élections. — Rodolphe IV de Habsbourg, ami des papes, est élu empereur 1273.

13° Grégoire XI; Pierre de Rogier, de Limoges, né 1332. Neveu de Clément VI, il est élu pape à Avignon à 36 ans, succédant 1370 à Urbain V. Il essaie en vain de gouverner au moyen de bulles d'excommunication; les villes florentines n'en font pas de cas. Pour ne pas perdre ses possessions italiennes, il résolut, malgré bien des dangers et malgré les sollicitations de la France, de retourner à Rome, et il y f l'année suivante 1378. Rome ne comptait plus alors que 17000 habitants. C'était l'époque de Wicleff. C'était aussi celle de sainte Brigitte, Catherine de Sienne, et autres illuminées.

14° Grégoire XII; Angelo Corrario, d'une des premières familles de Venise, év. de cette ville, élu 1406 après la mort d'Innocent VII, comme pape d'Italie, pendant qne Benoît XIII continue d'être le pape de France. Il accepte un rendez-vous à Savone avec son co-pape pour arranger ce déplorable conflit, mais ils ne s'y rendent ni l'un ni l'autre. Les partisans des deux papes, lassés de tant d'intrigues, d'ambition et de mauvaise foi, se réunissent à Livourne, commencent par abandonner Grégoire, que les cardinaux déclarent hérétique, et méditent d'en faire autant de Benoît. Le conc. de Pise 1409 établit le principe que les conciles sont au-dessus des papes et qu'ils peuvent, non seulement les destituer, mais aussi régler et limiter leur puissance; puis on destitue solennellement les deux titulaires comme hérétiques, schismatiques et parjures, et on élit à leur place Alexandre V. Grégoire conserva cependant le titre de doyen des cardinaux, f 1417, âgé de 91 ans.

15° Grégoire XIII; Hugue Buoncompagnoni, versé dans la jurisprudence, prof, de droit très distingué à Bologne, sa patrie, élu 1572. Il protégea les pères de l'Oratoire. C'est à lui qu'échut le triste honneur de faire célébrer à Rome des fêtes solennelles et de faire frapper une médaille à l'occasion des massacres de la Saint-Barthé-lemy, l'année même de son avènement. Il envoya aussi des troupes et de l'argent à Henri III contre les réformés, secours que dès lors la France a rendus à Rome avec usure. Il aimait les arts et embellit Rome de plus, édifices. On lui doit surtout le calendrier actuel, qui est adopté auj. dans presque toute l'Europe, et qui est connu sous le nom de calendrier grégorien, f 1585 à 83 ans.

16° Grégoire XIV; Nicolas Sfondrato, élu 1590, ne régna que 10 mois; il n'est guère connu que par l'excommunication qu'il lança contre Henri IV, et par les secours de toute nature qu'il envoya aux ligueurs contre les réformés.

17® Grégoire XV; Alessandro Ludovisio, archev. de Bologne, sa patrie, puis cardinal, élu pape 1621, à l'âge de 67 ans. Plus doux, mais aussi injuste que ses prédécesseurs envers les réformés; il fonda le collège de la Propagande, érigea l'évêché de Paris en archevêché métropolitain, fournit des secours à l'empereur contre les protestants, canonisa Ignace de Loyola, et reçut l'abjuration du duc de Lesdiguières qui lui avait promis de se faire catholique s'il devenait pape, f 1623, pleuré des pauvres.

18° Grégoire XVI; Mauro Capellari, né à Bellune, près Venise, 18 sept. 176K, élu 1831, f 2 juin 1846. Ancien capucin, camaldule, préfet de la propagande; homme d'esprit, il cherche à maintenir intacte sa puissance, et ne demande ni ne commande presque rien, pour ne pas s'exposer à des refus ou à des conflits dont l'issue pourrait ne pas lui être favorable. Son règne fût marqué par de nombreux soulèvements contre le pouvoir temporel de la curie, à Bologne 1831 et 1832, à Rimini 1845. Il lui fallut, pour vaincre, l'intervention armée de l'Autriche et de la France; il punit les révoltés avec la plus grande rigueur, mais il n'en fut pas moins rudement éprouvé dans son administration intér. et dans ses finances. Son encyclique de 1832 avait déclaré la guerre à toutes les idées modernes, et grâce à son énergie, grâce aussi aux talents du card. Lambruschini, il obtint des succès en Allemagne, prépara le rétablissement de la hiérarchie en Angleterre, maintint sa position en France et en Espagne, et n'échoua pleinement qu'en Russie, contre l'emp. Nicolas.

GRÉGORIEN (Chant). De tout temps l'Égl. a chanté, et dès l'époque apostolique on en trouve le précepte et des exemples. Mais aussi chaque époque a eu des goûts et des besoins divers. Ambroise de Milan avait introduit un chant mélodique, et toute l'Église chantait. Une • réaction, qui se faisait déjà sentir au temps de Jérôme, se produisit plus entièrement sous Grégoire I*r. Soit besoin d'unité, et pour introduire dans toutes les égl. le même rite et le même chant; soit pour relever l'importance du chant en le faisant l'apanage des prêtres seuls; soit enfin qu'il estimât les mélodies trop mondaines et qu'il voulut réduire la musique d'église autant que possible à n'être qu'une harmonie, il ressuscita les vieilles psalmodies qui ne savent pour ainsi dire pas ce que c'est que la mesure. et qui, soit en majeur, soit en mineur, ne connaissent qu'un nombre de notes très restreint. Ce fut le plain-chant, le chant plane, égal, uni, qui pendant 12 siècles a servi de base au chant cathol., mais sans que l'on puisse dire exactement ce qu'il était à l'origine, et par conséquent sans que l'on puisse se prononcer sur sa valeur absolue. Après avoir réglé le tonal, c.-à-d. les 8 tons, 4 authentiques et 4 plagaux, du chant d'église, Grégoire fit un recueil de chants liturgiques, mélodies grecques et latines, mystères de Cérès Éleusine, hymnes d'Ambroise, et quand cet Anttphonarius Cento fut complet, il le lit sceller au maître-autel de la cathédrale, avec défense d'y rien changer. Il fonda 2 écoles, l'une près de Saint-Pierre, l'autre près du La-tran, destinées à former des chantres capables, et il ne craignit pas d'y enseigner en personne. On lui attribue aussi l'honneur d'avoir remplacé dans la notation les anciennes lettres de l'alphabet par les neumes, ou notes romaines, espèce de virgules, de points, ou de traits, que l'on mettait au-dessus du texte; il est cependant probable qu'il les a empruntés aux Romains. Malgré les précautions qu'avait prises Grég. pour assurer la durée de son œuvre, et quoique le moine Augustin l'eût popularisée en Gaule et en Gr. Bretagne, il était dians la nature des choses qu'elle subit l'influence du temps et des circonstances. L'incertitude de la notation, la monotonie du chant, le caprice d'un chantre habile ou vaniteux, tout concourait à modifier la musique dans son texte par l'addition d'un chant figuré. Le désordre était si grand à l'époque de Charlemagneque, par deux fois, il dut faire venir de Rome deux chantres pour corriger le chant français: la fois Théodore et Bénédict, l'un à Soissons, l'autre à Metz; la fois, 3 ans plus tard, deux chantres munis d'antiphonaires officiels. L'un d'eux, nommé Romain, tomba malade à Saint-Gall et s'y arrêta; c'est de lui que la ville a hérité le précieux exemplaire qu'elle conserve dans sa bibliothèque.

GRELLET, Étienne (de), né à Limoges 2 févr. 1773, d'une famille riche et noble. Son père faisait partie de la maison de Louis XVI. Il émigra à la révolution, vint à Coblence, prit part à plusieurs batailles, et finit par se rendre en Amérique, où il fut converti, se fit quaker, se maria, et se consacra à l'évangélisation et à la défense de toutes les causes philanthropiques. 11 fit entre autres 4 voyages en Europe, visitant les rois et les archev., et cherchant à tourner leurs pensées vers le bien, f 16 nov. 1855.

GRENIER, nom de 3 frères, gentilshommes verriers, de Gabre, comté de Foix, les sieurs de Commet, Sarradon et Lourmade, qui, arrêtés par des soldats et des chiens de boucher, et suspects d'avoir voulu délivrer le pasteur Ro-chette, furent condamnés à mort par le parlement de Toulouse, malgré l'intervention de Rabaut et de Voltaire; Rousseau refusa d'intervenir. Le pasteur fut pendu, les 3 gentilshommes eurent la tête tranchée, 18 févr. 1762. On leur avait offert d'abjurer pour sauver leur vie, ils moururent courageusement. Plusieurs complaintes rappellent leur martyre. Le nom de Grenier est encore auj. porté avec honneur par plus, familles protestantes, notamment par un pasteur. Celui de Riquet de Bonrepos, le procureur-général a disparu; sa campagne même de Bonrepos a passé entre les mains de la famille prot. des Courtois de Toulouse.

GRETSER, Jacob, né 1650 à Markdorf, près Constance, jésuite en 1677, prof, de théol. k Ingolstadt, f 1725. Auteur de près de 150 ouvrages de philos, et de théol.; un des plus savants hommes de son temps, il dut surtout sa réputation k des controverses contre les protestants, et fut délégué 1701 k la confér. de Ratisbonne. Humble et pieux autant que savant.

GREY, Jane, née 1537, décapitée 12 févr. 1554, k 17 ans par ordre de Marie-la-Sanglante. Elle n'avait fait que passer sur le trône et malgré elle, son beau-père le chancelier Dudley ayant intrigué pour faire exclure las deux sœurs d'Édouard VI et pour assurer sa succession à

Jane, qui venait d'épouser son fils Guilford. Elle ne céda qu'avec larmes k la force, mais vaincue par Marie, elle périt comme elle l'avait prévu; elle marcha à l'échafaud, sa Bible à la main et récitant le Ps. 51. Savante et humble chrétienne, elle brille dans l'hist. de la réforme par sa grâce autant que par ses malheurs. Tableau par P. Delaroche.

GRIBALDO, Matteo, piémontais, jurisconsulte à Padoue; membre de la communauté italienne de Genève, 1554, combattit le dogme de la Trinité, nia l'identité d'essence du Père et du Fils, dut s'enfuir, trouva k Tubingue une place de prof., mais proscrit de nouveau, vint à Berne, et finit par se rétracter, au moins en apparence, pour éviter de plus grands maux.

GRIEFS (Les cent). Centum gravamina. Les empiétements des papes et du clergé sur le pouvoir des rois et des peuples et sur la vie civile, avaient soulevé un mécontentement général et un besoin de réforme que les conc. de Bâle et de Constance n'avaient qu'imparfaitement satisfait. Ce mécontentement trouva sous Maximi-lien son expression officielle dans l'énumération des Cent griefs de la nation allemande, et la nécessité d'y faire droit compta parmi les négociations qui donnèrent l'empire k Charles-Quint. Il en fut de nouveau question à la diète de Spire. La Réformation d'un côté, le développement de l'indépendance nationale, et enfin le conc. de Trente lui-même, ont satisfait en quelque mesure à la plupart de ces réclamatiens.

GRIESBACH, Jean-Jacques, né 4 janv. 1743 à Butzbach, Hesse, étudia d'abord à Francfort où son père était pasteur, puis k Tubingue, Leipzig et Halle, où il prit ses degrés et où il fut nommé prof, en 1773; de là il vint à léna en 1775, fut nommé conseiller ecclésiastiq. et f 24 mars 1812. Très bien doué comme talent, science et caractère, très actif, il comptait d'illustres amis, entre autres Schiller. Stimulé par Semler, il se consacra surtout à l'étude et à la critique du texte. Il généralisa, peut-être un peu arbitrairement, ses observations sur les récen-sions, ou familles de mss., et accentua trop la différence entre les occidentaux et les orientaux. Ses recherches et ses nombreux voyages aboutirent à la célèbre édition du N. T., qui porte son nom; la Ire parut en 1774; elles se sont dès lors multipliées, et malgré des découvertes plus modernes, elles conservent encore leur valeur. Griesbach a aussi écrit: Symboke criticœ. 1793, Comment. criticus, 1794, etc.

GROENLAND, contrée reculée du continent américain, dont elle est cependant séparée par une mer intérieure et des détroits. Son nom. qui signifie pays verts, lui fut donné à cause des pâturages qu'il possédait anciennement, et non à cause de la couleur vert d'eau de ses habitants, comme le dit Adam de Brème. Découvert 982 par l'islandais Erich Raude (le rouge), le Gr. fut évangélisé dès 986 par de nombreux colons qui s'y établirent. Leif, fils d'Erich, fut envoyé 999 en Norwège auprès d'Olaf Trygwesen, et il en revint l'année suivante, chrétien et baptisé, accompagné de quelques missionnaires; il prêcha lui-même aux Esquimaux en plus de 50 endroits et bâtit plusieurs églises. Adalbert de Brème y envoya 1055 Albert pour év., et Victor H, en 1057, confirma cette extension du diocèse de Hambourg. En 1122 le diocèse fut rendu indépendant. Mais dès ce moment aussi les relations s'affaiblissent avec la Norwège, pour cesser ensuite presque entièrement jusqu'aux premières années du 18™e siècle. C'est en 1721 que le norwégien Égede entreprit de nouveau l'évangélisation de ce pays profondément déchu, et il n'y retrouva ni la nature verdoyante des temps anciens, ni aucun vestige de la race islandaise qui l'avait peuplée, ni aucun reste des égl. chrétiennes qui y avaient été fondées, soit que la mort noire, soit que des invasions d'Esquimaux eussent détruit les descendants de la race nordmane, séparés de leur terre d'origine par le refroidissement graduel de ces contrées. Dès lors ce sont les fr. moraves qui se sont chargés surtout de cette mission. Stach etBœh-misch s'embarquèrent 10 avril 1733 à Copenhague avec les bénédictions de la famille royale. En 1839 on comptait environ 1800 membres de l'Égl. répartis dans 4 stations.

GROOT, Gerhard (de), né oct. 1340 à Deven-ter (Hollande), fils de Werner Groot, consul de la ville. Prof, à Cologne, puis prêtre et chanoine à Utrecht et à Aix-la-Chapelle, il vivait d'une vie facile et mondaine lorsque, réveillé par les avertissements d'un chrétien fidèle, il se convertit et renonça aux avantages d'une belle fortune et d'une position élevée, pour se consacrer aux travaux plus humbles de son ministère. Après 3 années passées dans la retraite d'un couvent, il se présenta au peuple comme prédicateur. Puis, ayant fait la connaissance de Ruysbrook et de sa mystique, il fonda, de concert aveo son ami Florence Radewyn, une espèce d'ordre, ou d'institut, connu sous le nom de Frères de la vie commune, qui devait concilier les besoins de la vie contemplative avec les exigences laborieuses de la vie pratique. Ils portaient un capuchon gris, ce qui les fit surnommer KugeUwrren par le peuple. C'est à De-venter, en 1376, et avec l'approbation du pape, qu'il ouvrit sa maison qui, plus tard, fut transférée à Windesheim. Le noyau principal se composait de chanoines réguliers, auxquels s'adjoignirent des frères, vivant ensemble sans faire de vœux et mettant en commun leurs biens, sous la direction d'un chef ou président choisi par eux-mêmes. Ils consacraient leur temps à la prière, à des exercices d'édification et à la reproduction de bons manuscrits. L'ordre se propagea rapidement, surtout dans les Pays-Bas, et par son influence, par ses travaux littéraires et scientifiques, par son caractère populaire et vraiment religieux, il peut être regardé comme ayant concouru à préparer la réformation. Une des maisons les plus importantes de l'ordre fut celle du Mont-Sainte-Agnès, près Zwoll. Les fr. de la vie commune ont donné aux lettres des hommes tels que Hermann Busth, Agricola, Erasme; ils ont donné à la religion Thomas à Kempis, Gerlach, Petersen, Jean Wes-sel. De pareils noms font l'éloge de l'esprit qui a dirigé l'institution. Groot a organisé aussi des associations de femmes dans des conditions semblables. Il gouverna lui-même la première maison qu'il avait fondée à Deventer, et il \ resta jusqu'à sa f 20 août 1384. Auteur de plusieurs livres de piété et d'un travail sur les Fr. de la vie commune.

GROPPER, Jean, né 1502 à Soest. Dr théol. et chanoine à Cologne, puis doyen â Bonn et ensuite à Cologne. Savant et bien disposé, il se montra quelque temps favorable à la Réforme et seconda l'archev. Hermann; il rédigea même l'Intérim de Ratisbonne pour une conférence qui eut lieu 1541 entre Eck et Pflug d'un côté, Bucer et Pistorius de l'autre. Mais quand il comprit que les évangéliques ne rentreraieut plus dans l'Égl. de Rome, il se tourna contre eux; contre Bucer d'abord, qu'il avait fait venir à Bonn en 1541 et qu'il combattit dans son Anti-didagma; puis contre l'archev. Hermann. Il assista au conc. de Trente et publia en 1550 son Grand catéchisme. Ses services lui avaient mérité le chapeau de cardinal, mais il le refusa. Il f subitement 12 mars 1558 dans un voyage d'affaires k Rome.

GROSSE-TÈTE. Robert Capiton, surnommé en anglais Great-Head; né vers 1175 dans le comté de Lincoln; ami et contemporain de Roger Bacon; étudia à Cambridge, Oxford et Paris, enseigna avec succès dans plus, universités, commenta Aristote, et fut nommé év. de Lincoln 1235. Hostile aux deux grands ordres qui venaient de se fonder, il les serra d'assez près pour qu'ils dussent implorer l'intervention d'Innocent IV, et celui-ci, qui était à Lyon, obligea le vieil év. à faire le voyage et à se présenter devant lui. Grosse-tête profita de l'occasion pour faire entendre au pape et à sa cour d'amè-res, mais excellentes vérités, sur la fidélité aux engagements pris, et sur la puissance de l'argent, car, gagné par l'argent des moines, Innocent leur avait donné raison. De retour dans son diocèse, Grosse-tête entra de nouveau en lutte avec le pape au sujet d'un riche canonicat devenu vacant dans la cathédrale de Lincoln, et auquel le pape prétendit nommer de son autorité privée un jeune garçon qui était son neveu. L'év. s'y opposa avec énergie et n'hésita pas à qualifier d'horrible scandale le procédé du pape. Innocent, furieux contre ce « vieux radoteur, » parlait de le dénoncer au roi d'Angleterre. Il voulait même lancer contre lui une sentence d'excommunication; mais ses cardinaux l'en empêchèrent, car, lui dirent-ils, « il est plus saint que nous. • L'év. f vers la fin de la même année 1253, en paisible possession de son diocèse, ce qui fut une grande joie pour Innocent, qui d'ailleurs le suivit quelques mois plus tard. Les écrits de Grosse-tête prouvent une grande spiritualité et la foi au salut gratuit. II signait modestement: Robert, par la permission divine, le pauvre ministre de l'égl. de Lincoln.

GROTIUS, Hugues, ou Hugo de Groot, né 10 avril 1383 à Delft; un des hommes les plus universels des temps modernes. A 8 ans il composait des vers latins; à 16 il publiait un travail sur Marcien Capella, et d'autres travaux de philologie. Il étudia à Leyde les lettres, la philos., la théol. et le droit, et il devait se faire une place honorable dans toutes ces branches. A 15 ans il accompagnait à la cour de France l'ambassadeur Barnevelt, et se faisait remarquer par Henri IV. A son retour il publiait des poésies latines et des ouvrages d'érudition sur Sé-nèque-Ie-Tragique, Lucain, Aratus; une Anthologie grecque, des fragments de trag. et de comédies grecques, trad. en vers latins; en même temps il pratiquait le barreau à La Haye. En 1601 il était nommé historien des États de Hollande, et commençait les Annales de son pays, qui ne parurent qu'après sa mort. En 1607 il fut nommé avocat fiscal des provinces de Zélande et de Hollande; en 1613 conseiller pensionnaire de Rotterdam et membre des États-de Hollande; bientôt après, membre des États généraux. Mais ayant pris parti pour Barnevelt contre Maurice, il fut condamné comme républicain et arminien à une prison perpétuelle, et ses biens furent confisqués, 1619. Sa femme réussit au bout de 2 ans à le faire évader dans une caisse de livres. Il vint en France, où Louis XIII lui fit une pension. Après la mort de Maurice, il crut pouvoir rentrer dans son pays, mais il fut de nouveau proscrit, et passa en Suède où Christine, sur la recommandation d'Oxenstiern, lui fit un brillant accueil et le nomma son ambassadeur en France, fonctions qu'il remplit de 1635 à 1645. Ayant demandé et obtenu son rappel, il voulut revenir en Suède, mais une tempête l'assaillit dans la Baltique; il débarqua près de Dantsick, se fit transporter malade à Rostock, et f 28 août 1645. Il est le créateur du droit naturel et le père du droit des gens. Comme juriste et publiciste on lui doit un traité sur la Liberté des mers, et son immortel Droit de la guerre et de la paix. Comme historien, ses Annales de Hollande, et une Hist. des Goths, des Vandales et des Lombards. Comme théol., son livre De la vérité de la relig. chrét. fait époque dans l'apologétique, ses Annotations sont importantes pour l'exégèse gram-mat. et historique. Enfin sa correspondance est aussi riche qu'elle est étendue. Son tombeau est à Delft. La Hollande a célébré le 3me centenaire de sa naissance. QEuvr. compl. Amsterd. 1679. Vie, par Brandt en hollandais, Luden en allemand, Burigny en français.

GRUBENHEINER, Jamnici; sobriquet donné aux fr. moraves lorsque, persécutés sous Rocky-zane, ils devaient se cacher dans les fondrières et les cavernes des montagnes (habitants des fosses).

GRYNiEUS lo Simon, né 1493 à Vehringen, Souabe, abandonna sa place de recteur à Ofen, pour obéir à ses convictions évangéliques, et se rendit à Wittenberg auprès de Mélanchthon. Prof, de grec et de latin à Heidelberg 1524-1529; puis à Bâle, où il devint aussi Dr et prof, de théol. f 1541, de la peste. Ses connaissances variées et son activité lui assignent une place honorable parmi les hommes de la réforme. Outre des trad. de Plutarque. d'Aristote et de Chrysostome, on lui doit la découverte des 5 derniers livres qui nous restent deTite-Live; il les trouva au couvent de Laurisheim, près Worms, 1531. Il a publ. un recueil des voyagas modernes, sous le titre de Novus orbis. Il propagea la réf. en Souabe, surtout à Tubingue dont il réforma l'univ. en 1534; concourut au préavis des théol. allemands touchant le divorce de Henri VIII et de Catherine, travailla à la rédaction de la Conf. helvétique, et prit part au colloque de Worms 1540.

2o Jean-Jacques, né 1540 à Berne, étudia à Bâle et à Tubingue, fut prof, de théol. à Bâle, antistès depuis 1586. Jean-Casimir l'employa pour reconstituer l'univ. de Heidelberg et pour introduire dans l'Égl. le dogme protestant. Quoique aveugle depuis 1582, il continua jusqu'à la fin de prêcher et d'enseigner, + 1587.

GUALBERT, Jean, abbé et fondateur de l'ordre de Vallombreuse, vivait au 11™® siècle. Né vers 999 il passa sa jeunesse dans le désordre et le libertinage; mais devenu sérieux il renonça au monde, quitta son château de Pistoie, devint moine à l'abbaye de San Miniato, et alla en 1038-1060 fonder dans l'Apennin, à Vallombreuse, diocès de Fiesoli, un nouveau couvent, suivant la règle stricte de saint Benoît. Il est le premier qui ait eu l'idée de recevoir dans l'ordre des frères lais, faisant les mêmes vœux que les moines, mais soumis à une discipline moins rigoureuse et s'occupant surtout des choses temporelles. Gualbert f 1093 et fut canonisé 100 ans après à cause de ses vertus et de sa foi. Son ordre fut approuvé par le pape 1070; il s'est maintenu jusqu'à ce jour. Le costume, d'abord gris, puis brun minime, est noir depuis sa fusion avec les sylvestrins 1662. Un ordre du même genre fut fondé pour les femmes au 13mc siècle, par la sainte Humilité f 1310.

GUASTALLINES, v. Angéliques.

GUÉBARD, v. Gebhard.

GUÈBRES, nom persan qui signifie infidèles, et que les mahométans donnent à tous ceux qui n'étant pas musulmans, ne sont ni juifs, ni chrétiens, particulièrement aux adorateurs du feu.

GUELFES, v. Gibelins.

GUEM AR A, mot chaldéen qui signifie: ce qui est dit, par opposition à la Mishna, qui était la tradition écrite. La Guemara est le comment, de la Mishna, et il y en a deux: celle de Ba-bylone, qui est due au rabbin Asche + 427, et qui fut achevée vers l'an 500; et celle de Jérusalem, qui devrait être appelée plutôt de Tibé-riade, et que l'on croit avoir été écrite par un des chefs principaux de cette célèbre école, le rabbin Jochanan, sans toutefois pouvoir fixer l'époque où il a vécu; Buxtorf le place vers l'an 230, Ganz vers 270; Maïmonides, Abarbanel, Élie le Lévite, vers 370, date qui paraît la plus probable.

GUERIGKE, H.-Ern.-Ferd., né 1803, prof, à Halle depuis 1829, pasteur d'une Égl. luthér. indépendante, assez étroit en dogmatique, mais vraiment libéral en politique, s'opposa en Allemagne à la politique de conquêtes et d'annexions, f 1878. Auteur d'une Hist. ecclés. très estimée, d'une Symbolique chrét., d'une Archéol. ecclés., d'Introd. auN. T. et rédacteur, avec Rudelbach et Delitzsch, d'une Revue de théol. luthér.

GUÉRIX, Eugénie (de), née 1805, f 31 mai 1848, est surtout connue par son Journal et les Lettres qu'elle écrivit en vue de son frère Maurice (4 août 1810, f juillet 1839). Orphelins de bonne heure, ces deux âmes d'élite cherchent l'idéal; Eugénie le trouve dans la foi chrétienne, dans la religion, dans ce que le catholicisme a de vraiment catholique, dans le mysticisme de Fénelon. Maurice oscille du doute à l'incrédulité, puis au panthéisme, et ne revient à une foi de sentiment que sous l'influence de sa sœur, de sa jeune épouse et de sa maladie. Ce sont deux nobles natures servies par un noble talent, et cependant il y a dans leurs Lettres et dans leur vie quelque chose qui énerve; il y manque la vigueur de la foi.

GUERRE. Une question controversée depuis l'établissement du christianisme, est celle du devoir des chrétiens quant au service militaire. La réponse dépend surtout de l'idée qu'on se fait de l'État, de sa responsabilité et de ses droits sur le citoyen. Il est évident que la guerre est une mauvaise chose, que le triomphe de la force ne constitue pas un droit, que le meurtre coi -lectif ne prouve rien. Mais la question n'est pas là, car l'État par le seul fait de son existence, doit pouvoir défendre ses frontières et ses sujets, c.-à-d. avoir une force armée. Il s'agit plutôt, blâmant la guerre, de savoir si malgré cela le chrétien peut s'en faire une carrière, ou s'il peut se laisser contraindre par l'État à devenir soldat. Les fidèles de l'Égl. primitive s'y refusaient en général, moins à cause de certains textes de l'Évangile, ou parce que le service se trouvait parfois lié à des cérémonies païennes, que parce qu'ils méconnaissaient les véritables conditions de l'État, et parce qu'ils croyaient devoir se désintéresser entièrement des choses de ce monde. Tertullien leur donne raison, mais ce divorce entre le chrétien et le citoyen est si peu naturel que l'on voit de bonne heure des chrétiens dans les armées des empereurs. On connaît la Légion sacrée. Augustin soutient le devoir des chrétiens d'obéir à l'autorité sur ce point, quand ils en sont requis, et l'Égl. a dès lors peu varié. Quelques sectes seules au moyen âge, et plus tard les Mennonites et les Quakers, se sont prononcés énergiquement contre tout service militaire. En Allemagne et en France les autorités se trouvent parfois en présence d'un refus absolu, mais évidemment consciencieux. Dans ce cas des gens d'esprit trouvent toujours moyen de tourner la difficulté pour éviter un scandale. Quant au service militaire des ecclés. et des séminaristes, l'Égl. cathol. l'a toujours regardé comme incompatible avec leur caractère et avec leurs fonctions, quoique plus. év. et même des papes, comme Jules II, ne se soient fait aucun scrupule de ceindre l'épée et de partir en guerre. Les croisades n'étaient pas autre chose que des expéditions militaires, et des prêtres y jouaient leur rôle. Il n'y a donc pas de raisons de fond pour que les ecclés. soient absolument dispensés du service militaire qui, en tout cas, est une bonne école d'ordre et de discipline; mais il y aura toujours des raisons de convenance à ce qu'on en laisse un nombre suffisant pour l'exercice de leur ministère, et à ce que ceux-là qui seront enrôlés soient, autant que possible, employés à des services compatibles avec leurs fonctions habituelles. Toutes ces questions sont susceptibles d'être tranchées de diverses manières, suivant le tempérament, le caractère et la conscience de chacun. Le fait que des chrétiens éminents, tels que Havelock, Outram, et tant d'autres ont été soldats, prouve au moins qu'on ne peut condamner d'une manière absolue ceux qui par patriotisme, par goût, ou par besoin, s'engagent dans cette carrière.

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GUIBERT, antipape; v. Clément 4°.

GUIDO 1° ou Gui, en latin Vitus, q. v.

2° Gui d'Arezze, ou YAritin, né vers 995 à Arezzo, Toscane; musicien consommé, fut longtemps moine au couvent de Pomposa, duché de Ferrare, qu'il dut quitter pour se soustraire aux tracasseries de son supérieur et homonyme, l'abbé Guido. L'év. d'Arezzo le protégea. Le pape Jean XIX le fit venir, admira sa méthode, et le combla de biens. Dès lors, les uns disent que les moines de Pomposa le rappelèrent; d'autres qu'il entra au couvent de Sainte-Croix d'Avellana, près d'Arezzo, et qu'il en devint l'abbé, après un voyage de quelques mois fait à Brème sur la demande de l'archev. Hermann. Guido f 4050. Son principal ouvrage est le Micrologus, petit traité des règles de l'art musical. Il est surtout célèbre par sa méthode de solfège, par le système de notation qu'il inventa ou perfectionna, et par les clefs qu'il mit en tête des lignes, v. l'abbé Gerbert, Fétis, etMarcillac.

3° Guido de Brès, v. Guy.

4° Guido de Joinville, fondateur d'un hôpital à Châlons, le remit à une association relig. qui, après s'être acquis une maison à Paris 4294, fut autorisée par Boniface VIII, 1300, prit le nom d'Hospitaliers et adopta la règle de saint Benoît .

GUILBERT. v. Gilbert.

GUILLAUME 4<> de Saint-Amour, Franche-Comté; né vers 4200, devint Dr de Sorbonne et chanoine de Beauvais. Il livra une guerre acharnée aux ordres mendiants, dominicains et franciscains, qui voulaient s'imposer à Paris, non seulement comme professeurs, mais comme directeurs des consciences et ayant cure d'âmes. Protégés par Alexandre IV, ils se remuaient beaucoup pour en venir à leurs fins. Guill. les combattait dans ses sermons et dans ses leçons, leur déniant toute existence légale en vertu du conc. de Latran 4245, qui avait interdit la création de nouveaux ordres; critiquant amèrement la mendicité; refusant à ces mendiants le droit d'invoquer en leur faveur des passages oomme Luc 40, 7. qui ne regardent que les ecclés. réguliers, seuls autorisés à prêcher; leur reprochant comme une impertinence de se glisser dans son domaine et d'empiéter sur ses droits et ses devoirs. Dénoncé à l'év. de Paris, il ne fut pas poursuivi, parce qu'il n'avait attaqué personne en particulier. Mais son livre Les Périls des derniers temps 4256, ayant été soumis au pape, il fut condamné, ce qui concourut beaucoup à son succès. Les ordres avaient des défenseurs à foison, et des amis comme Thomas d'Aquin; il leur fut facile de venir à bout d'un simple chanoine. Guill. fut déposé et se retira à Saint-Amour; mais la mort d'Alexandre lui permit de rentrer à Paris 4263, et il y enseigna, sans être inquiété, jusqu'à sa f 4272.

2° Guillaume de Champeaux, v. Champeaux.

3° Guillaume, né en Aquitaine, nommé comte de Toulouse et duc d'Aquitaine par Charlemagne, en récompense de ses heureuses expéditions contre les Sarasins en Languedoc, se retira du monde 808, et fonda dans la vallée de Gellone, près Lodève, le monastère qui reçut de lui le nom de Saint-Guilhem du Désert, f 842, et canonisé.

4° Guill. de Dijon, né 964 d'une famille souabe considérable, et filleul d'Othon I«r et d'Adélaïde, entra comme oblat à l'âge de 7 ans dans un couvent des environs de Vercelli, étudia à Vercelli et à Pavie et rentra dans son cloître. Il refusa le serment de fidélité à son évêque. lorsqu'il s'agit de l'ordonner diacre, et se rendit avec l'abbé Majolus à Clugny, où il se fit consacrer et où il entreprit l'œuvre difficile de la réforme des couvents. Ayant accompli la réf. du couvent de saint Benignus à Dijon, il y resta comme abbé et fit sentir de là sa salutaire influence sur plus de 40 couvents, en France et à l'étranger, notamment dans le dioc. d'Ivrée où il passa 2 ans. Il fit entendre de sérieuses vérités aux rois Henri et Robert, ainsi qu'aux papes. Il fit 2 fois le voyage de Rome, 995 et 998. f 4034. Outre la discipline, il s'est occupé d'améliorer l'instruction dans les écoles des couvents.

5<> Guill. de Malavalle, ou Maie val, gentilhomme français, militaire, dont la vie offre beaucoup d'incertitudes, quoiqu'elle ait été écrite par son disciple Albert et par l'év. Théo-bald de Grossato; mais ces deux biogr. ne nous sont parvenues que tronquées et en mauvais état. On sait, mais sans date précise, qu'il eut une jeunesse licencieuse; qu'après sa conversion il fit un pèlerinage à Saint-Jacques de Com-postelle, et un autre à Jérusalem; qu'après son retour, 1153, il se fixa dans une caverne de la vallée de Malavalle, près de Sienne; que plus, personnes se réunirent à lui pour vivre dans la sainteté (v. Guillelmites) et qu'il f 10 fév. 1157.

6° G. de Bourges, de la famille des comtes de Nevers; chanoine à Soissons et à Paris, entra dans l'ordre de Citeaux, et vivait dans la retraite quand il fut appelé malgré lui à l'archev. de Bourges 1201. Pieux et tolérant, f 10 janv. 1209.

Guill. ou William Somerset de Malmes-bury; hist. anglais du 12me siècle; né 1096 dans le Somerset,, étudia à Oxford. Son père était normand, sa mère saxonne. De l'ordre des bénédictins, il entra au couvent de Malmesbury, où il remplit les fonctions de bibliothécaire et de chantre, ayant refusé d'être abbé, f peu après 1143. Il a beaucoup écrit: une Hist. des rois d'Angl. jusqu'à Henri 1er, 449-1127; avec une suite 1127-1143; une Hist. des pontifes anglais, etc. Consciencieux et sûr; excellent latin.

8° Guill. de Tyr, né en Syrie vers 1140, passa sa jeunesse à Antioche ou à Jérusalem. Destiné à l'état ecclés. il vint achever ses études en Italie et à Paris, vers 1160. A son retour il fut très bien reçu par Amaury, qui le nomma archidiacre de Tyr 1167, et qui l'envoya la même année auprès de l'emp. Manuel, pour négocier une alliance contre l'Égypte. Ayant eu des difficultés avec son archev. il se rendit à Rome 1168; fut en 1169 nommé précepteur du jeune prince Baudouin, qui, à son avènement au trône, le nomma chancelier et en 1174 archev. de Tyr. Il assista au 3me conc. de Latran, passa ensuite quelques mois à la cour de Manuel, et revint par Antioche où il porta des instructions de l'empereur. Dès lors son histoire est incertaine. Une version le fait mourir à Rome vers 1184, empoisonné par son archev. le patriarche Héraclius, de Jérusalem, dont il poursuivait la destitution; une autre version porte qu'en 1188 il était légat de Grégoire VIII lors de la rencontre de Philippe-Auguste et de Richard d'Angleterre. Il a écrit en latin une Hist. des croisades, extrêmement appréciée, que l'on possède encore, et qui prouve autant de science que de talent et de sagacité critique. Un autre livre: les Princes de l'Orient, est perdu.

9o G. d'Occam, v. Occam.

10° G. de Newbury, dit le Petit; écrivain anglais, né 1136 à Bridlington, près York; chanoine de Fabbaye des Augustins de Newbury, où il avait été élevé. Auteur d'une Hist. de Guillaume-le-Conquérant et de son temps, 1066 à 1197, qui passe pour une des œuvres les plus remarquables du moyen âge. Il a aussi écrit des Homélies, et une Expl. du Gant, des cantiques.

H° G. de Nangis, moine bénédictin de Saint-Denis, vers 1300; auteur d'une Chronique qui va de la création jusqu'à l'an 1300; il est cependant douteux que la Ire partie soit de lui. Ses travaux sur Louis IX, Philippe le Hardi, Robert, sont très appréciés.

12° Guillaume III, v. Nassau et Orange.

GUILLELMITES, ou Guillemins, congrégation relig. fondée par Guillaume de Malavalle vers 1153. Ils allaient nu-pieds et mendiaient; cependant Grégoire IX leur permit de porter des souliers. Innocent IX régla par une bulle le mode d'élection du prieur général. Alexandre IV ayant fondu tous les ordres d'ermites dans celui des augustins, les guillemins obtinrent de conserver leur indépendance, mais au prix de nombreux sacrifices en hommes et en couvents. En 1256 ils avaient un monastère à Montrouge; en 1298 ils vinrent à Paris et comptaient des maisons en Allemagne, Pays-Bas et Italie. Leur costume leur avait fait donner le nom de blancs-manteaux. La réforme des petits-augustins naquit 1594 dans leur maison de Bourges. Ils disparaissent au 18roe siècle.

GUIZOT, François-Pierre-Guillaume, né à Nîmes le 4 oct. 1787, fils d'un avocat exécuté 8 avril 1794, et petit-fils d'un pasteur du désert, fit ses études classiques à Genève, son droit à Paris, vécut de sa plume quelques années, fut précepteur chez Stapfer, q. v., et inaugura sa carrière politique comme secrétaire de l'abbé de Montesquiou, ministre de l'intérieur. Aussi grand par le talent que par le caractère, il a forcé l'estime et l'admiration, sinon la sympathie de tous ceux qui l'ont connu, et si l'austérité de ses manières imposait le respect, il avait dans l'intimité un charme de séduction qui lui gagnait les plus prévenus. Penseur, philos., professeur, publiciste, historien, homme d'État, ambassadeur, député, ministre, il a brillé partout au premier rang, et s'il a fait des fautes, c'est parce qu'il n'a pas réussi qu'on a pu les lui reprocher. Sa vie publique, que nous n'avons pas à rappeler ici, se caractérise par la recherche constante de l'ordre dans la liberté; il haïssait les excès d'une révolution qui l'avait fait orphelin de bonne heure, mais il resta libéral sous la Restauration, et c'est encore au nom de ses principes qu'il fit en 1815 le célèbre voyage de Gand. Marié en 1812 à Pauline de Meulan, il en épousait la nièce, Élisa Dillon. en 1828. Veuf de nouveau en 1833, il vit sa vieille mère s'asseoir à son foyer et lui reconstituer une maison. C'est comme ministre de l'Instr. publ. qu'il a rendu à son pays les plus précieux services. Tombé du pouvoir en 1848,

11 n'a cessé d'aimer la France et de la servir selon ses moyens, en attirant sa pensée vers les choses élevées. Membre de l'Acad. franç. depuis 1836, c'est lui qui dut recevoir le P. La-cordaire, 24 janv. 1861, et le présenter à Napoléon. Protestant de cœur et croyant, Guizot s'intéressa touj. aux œuvres et aux sociétés relig. qu'il présida souvent, et si parfois il parut donner des gages aux catholiques et aux philosophes, il n'alla pas plus loin, et resta fidèle aux convictions de sa jeunesse. C'est lui qui obtint de M. Thiers la convocation du synode de 1872, et il se plut à rappeler à cette assemblée, que 70 ans auparavant, il avait lu la Bible dans le Désert comme proposant, f Val Richer.

12 sept. 1874.

GUNDULF, chef obscur d'une secte du moyen âge, qui rejetait l'Égl. extérieure, le clergé et les sacrements, prétendait ne vouloir reconnaître que la loi de Christ, et condamnait le mariage. Il doit avoir vécu dans le nord de la France. Ses disciples discutèrent avec l'év. Gerhard à un synode, 1035, et finirent par être arrêtés.

GUSTAVE-ADOLPHE, roi de Suède 1611-1632, le 6«« de la dynastie des Wasa. Né 1594, il s'illustra par ses victoires sur les Danois et les Moscovites, et contraignit les Polonais, à la suite de deux grandes victoires, à lui céder toutes les places fortes de la Livonie et de la Prusse polonaise. Le chancelier Oxenstierna était à la téte de son conseil, tout formé d'hommes éminents. Son dévouement à la cause évangélique et ses succès militaires le désignaient aux protestants de l'Europe, comme le souverain le plus capable de les défendre contre les princes cathol. qui. depuis 1619, sous la direction fatale de Ferdinand III, travaillaient avec acharnement à détruire l'hérésie. La ligue avait vaincu l'électeur palatin Frédéric Y; Tilly et Wallenstein avaient écrasé le roi danois Christian IV et l'avaient contraint à signer l'humiliante paix de Lubeck, 1629. En dix ans la cause protestante avait subi tous les revers et toutes les humiliations. Elle semblait perdue. Gustave-Adolphe paraît alors, et fait alliance avec les princes évang. de l'Allemagne, auxquels il avait déjà rendu service en 1628 en défendant Stralsund contre Wallenstein. Brandebourg et la Saxe ne se décident que difficilement à se joindre à l'union protestante. Pendant les négociations Magdebourg succombe. Enfin l'union est conclue, et Richelieu, qui persécute les huguenots en France, promet au jeune roi de Suède 1,200,000 fr. par an de subside, pour aider les protestants d'Allemagne et pour détruire la maison impér. des Habsbourg. Gustave-Ad. s'embarque en 1630, par l'hiver le plus rigoureux, traverse la Poméranie, le Brandebourg, la Silésie; et ce roi de neige, comme Ferdinand l'appelle, fond sur l'armée impériale, remporte une brillante victoire à Leipzig en 1631, une seconde au passage de la Leck, où Tilly est mortellement blessé, 1632, et se prépare à marcher sur la capitale. Ferdinand épouvanté rappelle Wallenstein, et les deux rivaux se rencontrent à Lutzen, 6 nov. 1632. Gustave-Adolphe est vainqueur, mais il périt presque au commencement de l'action, laissant le commandement au duc Bernard de Saxe-Weimar. Le matin même il venait de composer le cantique, si populaire en Allemagne: Verzage nicht, du Hauflein kkin. Oxenstiern son chancelier et ses ministres continuèrent son œuvre, mais au point de vue politique surtout. Si en 1634 ses conquêtes furent en partie compromises, ce qu'il avait fait pour le protestantisme demeura. Il n'avait pas eu la prétention de l'établir par la force; il avait voulu seulement empêcher la force de l'anéantir, et le protestantisme allemand conserve religieusement sa mémoire comme celle de son libérateur aux mauvais jours. Au second jubilé centenaire de sa mort, le 6 nov. 1832, une Société s'est fondée sous son nom

à Leipzig et à Dresde, pour venir en aide aux communautés souffrantes et aux protestants dis- « persés; le Dr Grossmann de Leipzig en fut le fondateur et resta son président aussi longtemps qu'il vécut. Dix ans plus tard, elle vit se rattacher à elle une autre société du même genre, qui s'était formée à Darmstadt sous les auspices du surintendant Zimmermann. Cette fusion eut lieu en sept. 1842 à Leipzig, et fut confirmée à l'assemblée générale de Francfort 1843. Leipzig fut désigné comme le siège central de la Société de Gustave-Adolphe, qui a pris dès lors une importance considérable et qui a rendu aux Égl. des services signalés. Chaque État a son comité central, qui correspond à son tour avec les comités sectionnaires des principales villes de son ressort. Chaque année la Société se réunit en assemblée générale, tantôt dans une ville, tantôt dans une autre, désignée d'avance. Les dons qu'elle reçoit se répartissent en subsides aux égl. pauvres, en proportion de leurs besoins, et chaque année aussi une somme exceptionnellement forte est affectée à une égl. spéciale qui se recommande par sa position ou par des besoins extraordinaires, construction d'un temple, d'une école, d'un presbytère, etc. En 1867 la Soc. Gustave-Adolphe comptait 1,117 sections régulières, 270 associations de femmes, et 10 d'étudiants. Une somme de 500 mille fr. avait été répartie entre 800 églises.

GUTZLAFF, Charles-F.-A., missionnaire en Chine. Né à Pyritz, Poméranie, 1803, il étudia à Berlin sous Jâneke et partit en 1826 pour l'île de Sumatra; il travailla ensuite quelque temps dans le royaume de Siam. Un riche marine lui permit de se vouer à la prédication de l'Evangile en Chine sans dépendre d'aucune société. Son extrême aptitude à apprendre la langue et à adopter le genre de vie du pays, et plus tard sa position comme interprète du gouvernement anglais, lui permirent de pénétrer sans difficulté dans l'intérieur du pays, et d'y faire plusieurs voyages et d'abondantes distributions de Bibles et de traités. L'emp. de Chine le nomma mandarin de 3me classe. Dans le but de travaillera l'évangélisation de la Chine par les Chinois eux-mêmes, Gutzlaff y fonda une vaste association composée de prédicateurs indigènes. Cette institution ne produisit pas tous les fruits qu'on en attendait. Un voyage qu'il fit en Europe en 1849 contribua beaucoup à réveiller le zèle en faveur de cette portion de l'œuvre des missions. Il mourut peu après son retour en Chine en 1851. C'était un homme d'une grande foi et d'une grande puissance; il a beaucoup semé; l'avenir seul dira si son ministère a laissé des fruits durables.

GUY de Brès, ou Guido, le fondateur de l'Égl. évangélique belge; né à Mons 1540. D'abord peintre sur verre, puis ecclésiastique. Poursuivi à cause de son attachement à l'Evangile, il se rendit à Londres, où sa foi se fortifia au sein de l'Égl. des étrangers. Plus tard il vint à Lausanne et à Genève, où il fit un petit séjour. C'est de là qu'il partit comme évangéliste et prédicateur itinérant, parcourant la Belgique et fondant partout de petites églises, jusqu'à ce que, après la prise de Valenciennes 1567, il fut arrêté dans sa fuite et condamné au supplice de la corde. En 1562 il avait fait parvenir à Philippe II sa Conf. de foi. C'est celle qui fut reprise par les synodes d'Emden et de Dordrecht, et qui est devenue la conf. de l'Église belge.

GUYON (M®®), née Jeanne-Marie Bouvier de la Mothe; née à Montargis 13 avril 1648. Son père était maître des requêtes. Élevée chez les ursulines, et se nourrissant des écrits de François de Sales et de Mme de Chantai, son caractère déjà porté au mysticisme acheva de se développer dans cette direction. Elle voulait se faire religieuse, mais sa famille s'y opposa et la maria malgré elle. Ce mariage ne fut pas heureux. Restée veuve à 28 ans, 1676, avec plus, enfants, elle se mit sous la direction de l'ab-besse Granger, puis sous celle du mystique Ber-tot. Après la mort de celui-ci, elle se lia intimement avec le p. Lacombe, supérieur des bar-nabi tes de Thonon, que l'év. de Genève lui donna comme directeur spirituel. Son séjour au couvent de Gex lui étant devenu impossible, et des visions enthousiastes lui ayant confié une mission divine, elle commença en 1681 et continua pendant 5 ans à mener une vie errante, visitant le Piémont, le Dauphiné, d'autres provinces encore, prêchant partout sa doctrine, réduisant toute la religion à l'amour pur de Dieu et à la mortification de la chair, et concluant à la passivité complète de l'âme, au quié-tisme. Elle finit par revenir à Paris où elle se fit de nombreux partisans, entre autres Fénelon et Mme de Maintenon. Mais la doctrine de Mo-linos, qui avait beaucoup d'analogie avec la sienne, ayant été condamnée par le pape 1687, elle fut naturellement compromise et comprise dans la même disgrâce, enfermée dans un couvent, puis à Vincennes. Les rapports qu'elle entretenait avec Fénelon, au moment même où ce dernier était en butte aux attaques de Bos-suet, furent cause qu'elle fut indirectement impliquée dans les mêmes recherches, et à la suite de conférences présidées par Bossuet, elle fut condamnée à se rétracter et à passer dix ans à la Bastille, 1695-1705. Après sa libération elle fut internée à Diziers près Blois, où elle passa le reste de ses jours, ne s'occupant que de bonnes œuvres, f ® juin 1717. Elle n'a pas écrit moins de 39 volumes. Ses principaux ouvrages sont: le Moyen court et très facile pour l'oraison; le Cant. des cantiq. selon le sens mystique; les Torrents spirituels, les Vers mystiques, etc. Ses opuscules ont été publ. Cologne 1704. On a aussi sa Vie, écrite par elle-même, mais dont l'authenticité n'est pas établie. L'influence de MGuyon a été peut-être plus grande à l'étranger qu'en France. Arnold, Ter-steegen, la Bible de Berlebourg lui ont donné dans l'Égl. réf. d'Allemagne une popularité passagère, qui malheureusement n'a pas toujours été sans quelques excès.

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GYROVAGI, espèce de circoncellions, qui ne voulant rien de la vie de cénobites, s'arrangeaient, en mendiant, pour vivre aux dépens des établissements monastiques. Les conciles essayèrent en vain de porter remède aux désordres de cette vie vagabonde; l'introduction stricte de la règle de saint Benoît put seule y mettre un terme.

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HAAG lo v. La Haye. 2o Les deux frères Haag, auteurs de la France protestante; nés à Montbéliard, Eugène 1808, f 1868; Emile 1811, f 1865. L'aîné avait étudié la théol.; le second, le droit; mais ils ne pratiquèrent ni l'un, ni l'autre; ils se vouèrent à l'enseignement, voyagèrent, et en 1836 vinrent se fixer à Paris pour y vivre de leur plume, faisant des trad. de l'allemand, de l'anglais, du polonais pour les journaux; un moment rédacteurs ou collabor. du Lien, du Disciple de J.-C., de la Revue germanique; auteurs de plusieurs biogr., Luther, Calvin, Crammer. Leur France prot. 10 vol., dont M. Bordier publie la 2me éd., revue, leur a mérité la reconnaissance de l'Égl., et une récompense de 10,000 fr. fruit d'une souscription.

HABERKORN, Pierre, né à Butzbach 1604, prof, à Marbourg 1632, et à Giessen 1650; un des derniers représentants de la lutte du luthéranisme contre le calvinisme; connu surtout comme controversiste; plus, de ses écrits sont dirigés contre le catholicisme et contre son ardeur à faire des prosélytes, f 1676.

HABERT, Isaac, chanoine de Paris 1645, év. de Vabres, f 1668. Il écrivit le premier contre Jansénius, et c'est à cette occasion qu'Arnaud publia son Apologie des Jansénistes.

HiEVERNICK, Henri-André-Christophe, étudia à Halle et à Berlin, fut appelé comme prof, d'hébreu à l'école de théol. de Genève, où il passa 2 ans 1832-1834; se rendit à Rostock comme prof, extraordinaire, fut appelé en 1841 à Kônigsberg comme prof, ordin. et f 1845. Ses principaux ouvrages sont un Comment, sur

Daniel 1832, Nouv. Études sur Daniel 1838, Introd. à l'A. T. 36-39 (2*e éd. revisée par Keii 49 -54), Comment, sur Ézéchiel 1843, la Théol. de FA. T. (2** éd. retravaillée par Schulz 1863). Tendance évang. réf. très accentuée.

HAFENREFFER, Matthieu, né 24 juin 1561 au cloître de Lorch; étudia à Tubingue, et fut nommé 1590 conseiller ecclés. et prédicateur de la cour, f 1617. Il avait écrit à la demande du duc Frédéric, et à l'usage du prince Jean-Fréd., un recueil de Lieux communs, qui obtint en Wurtemberg à peu près l'autorité d'un livre symbolique, et qui fut admis en Suéde presque avec un caractère officiel dans les maisons d'éducation.

HAGENBACH, Christophe-Rodolphe, né 4 mars 1801 à Bâle, où il fut nommé prof, de théol. Il a composé de nombreux ouvrages, une Ency-clop. et Méthodologie des sciences théol.; des Fragments sur la Réformation et son histoire; plusieurs volumes de Sermons; un Manuel de l'Hist. des dogmes; l'Égl. chrétienne des 3 premiers siècles; l'IIist. ecclés. au moyen âge; une Notice sur les principaux fondateurs de la Réf., QEcoIampade, Myconius, etc. Il a aussi rédigé pendant de longues années la Feuille ecclésiastique de la Suisse réformée, dont la tendance est orthodoxe modérée, f 7 juin 1874.

HAGIOGRAPHES, nom que les juifs donnaient à la 3m« division des livres de l'A. T., comprenant les Psaumes, les Proverbes, Job, le Cantique, Ruth, les Lamentations, l'Ecclésiaste, Ester, Daniel, Esdras, Néhémie et les Chroniques. Ces livres sont appelés Sacrés, parce qu'ils ont été inspirés par l'Esprit de Dieu, mais la loi e* les prophètes leur sont supérieurs, parce qu'ils ont été, non pas inspirés seulement, mais dictés par cet Esprit. L'Égl. chrét. n'a pas admis cette distinction.

HAGUENAU f Colloque de). A la suite des résolutions adoptées à Francfort 1539, l'emp. avait décidé qu'il serait fait une nouvelle tentative pour concilier les protestants et les catholiques. Cette conférence, qui dura du 12 juin au 16 juillet 1540, devait avoir lieu d'abord à Worms, mais une épidémie qui régnait dans la ville nécessita son transfert à Haguenau. On n'osa pas y déléguer Luther sans sauf-conduit; Mélanchthon était tombé malade en route; de sorte que les protestants ne furent représentés que par Brenz, Osiander, Capiton, Cruciger et Myconius. Les cathol. étaient Eck, Faber et Cochlâus. Le seul résultat du colloque fut qu'une nouvelle conférence serait convoquée à Worms, où les deux partis seraient représentés en nombre égal par des délégués des États intéressés.

HAHN, Philippe-Matthieu, né le 25 nov. 1739 à Scharnhausen, Wurtemberg; pasteur en plusieurs paroisses de campagne. Génie mécanique et mathématique, il s'occupa toute sa vie, enfant, étudiant et pasteur, à fabriquer des montres astronomiques. En théol. il marchait avec Bengel et Oettinger.

2o Jean-Michel, le théosophe. Né 2 févr. 1758 à Altdorf, était fils d'un paysan. Très accessible aux impressions relig., il se complaisait dès sou enfance à étudier en secret l'Écr. sainte, avec Boehme, Oettinger. Par les révélations dont il se glorifiait, et par son talent de parole, il réunissait facilement de nombreux auditoires, mais il eut plusieurs fois à justifier sa doctrine devant le Consistoire. La protection de la duchesse Francisca de Wurtemberg le sauva, et il finit en paix ses jours sur une terre de cette princesse, 1819. Son système spéculatif conclut à la vie de Christ en nous et à la sainteté de la vie, ce qui n'a rien de particulièrement original ou grave. Ses partisans, qui d'ailleurs ne se séparent pas de l'Église, forment la secte des miche-liens, qui a été un moment très répandue.

3° Auguste-Hahn, né 1792 à Grossosterhau-sen, près d'Erfurt, étudia à Leipzig et se fit connaître avantageusement 1815 par une étude sur Éphrem Syrus. Il habita successivement Kônigsberg, Leipzig et Breslau, tour à tour prof, et pasteur. En 1844 il était surintendant général de Silésie. f 1863. Il combattit le rationalisme dans sa thèse: De rationalismi indole, et sans être un supranaturaliste bien strict, il maintint cependant touj. les doctrines orthodoxes. La lutte l'amena même à accentuer l'importance objective des symboles ecclésiastiques, et en 1845 ce fut lui qui réintroduisit dans la formule de consécration l'adhésion formelle à l'Augustana, préparant ainsi le néo-luthéra-nisme. Son obéissance absolue à l'autorité royale lui fit commettre plusieurs inconséquences, notamment l'abandon aux persécuteurs et aux militaires du rôle de médiateur qui lui avait été confié auprès des vieux luthériens.U a publ. un Manuel de la foi chrét., et 2 éd. du N. T.

4° Hahn, Henri-Aug., fils du précédent, né 1821 à Ktfnigsberg; prof, de théol. à Breslau, Kônigsberg, et enfin Greifswald où il f 1861. Comment, sur Job, l'Écclésiaste, et la fin d'Ésaïe, suivant l'exégèse traditionnelle.

HAIMO, v. Haymo.

HALDANE, Robert, né à Londres 28 févr. 1764, servit dans la marine royale, s'occupa ensuite d'agriculture, et après sa conversion, se consacra aux missions et à l'évangélisation. Eu 1816 il visita le continent, en particulier, Genève et Montauban, et exerça une salutaire influence sur quelques étudiants et sur le réveil religieux en général. Auteur d'un Comment, sur l'Ép. aux Romains, trad. en fr. f 12 déc. 1842 à Édimbourg. Son fr. James l'a accompagné et aidé dans plusieurs de ses missions.

HALES lo v. Alexandre de Haies. 2o Jean, né 1584 à Bath; homme profondément instruit, collabora à l'édition de Chrysostome par War-den 1612, et fut prof, de grec à Éton. Accompagnant à Dordrecht le délégué anglais, il parut pencher vers l'arianisme, et en 1636 dans son écrit sur les schismes il se prononça contre le système épiscopal. Mais il se laissa convaincre par Laud, se rétracta, resta fidèle à Laud jusqu'au bout, et partagea sa disgrâce 1642; il perdit ainsi ses prébendes, parce qu'il refusa le serment. Il repoussa obstinément tout secours de ses ennemis, et f dans la misère 1656. Œuvres publ. par Pearson 1659 et 1673.

HALITGAR, év. de Cambrai 817-830, auteur d'un livre pénitencier; accompagna l'archev. Ébon de Reims dans son voyage missionnaire en Danemark.

HALLE, univ. allemande fondée par Frédéric I«r roi de Prusse et inaugurée 1694. Elle fut un asile précieux pour les victimes de l'intolérance luthérienne de Leipzig, pour le juriste Thomas, pour des piétistes comme Francke, Paul Antoine et Jean Gaspard Schade, qui concoururent à sa fondation et lui donnèrent dès l'abord une importance spéciale. Au 18«ne siècle elle devint un des premiers sièges du rationalisme. Wolf lui imprima son cachet. Semler y travailla depuis 1751; puis Niemeyer; Wegs-cheider en 1810. L'univ. de Wittenberg lui fut réunie en 1817. La nomination de Tholuck 1826 lui a donné une vie et une importance nouvelles, scientifiquement et au point de vue religieux.

HALLER lo Berthold, le réformateur de la ville de Berne. Né 1492 à Aldingen, Forêt noire, il étudia sous Rubellus à Rottweil, oti il connut Glaréan et Volmar; puis à Pforz-heim, où il se lia avec Mélanchthon, et enfin à Cologne, où il devint bachelier. De Rottweil où il avait une école, il fut appelé à Berne 1513. D'abord maître d'école, puis diacre, chanoine de la cathédrale 1520, et prédicateur en titre 1526, il fut de bonne heure gagné à la Réforme; mais par timidité, par prudence, par modestie, par un sentiment exagéré de son insuffisance (il ne savait ni le grec, ni l'hébreu) il refusait de se mettre en avant. Myconius le mit en relation avec Zwingli 1520, et Haller, doué d'une grande éloquence naturelle, réunit autour de lui un cercle d'adhérents et de protecteurs assez respectables pour le défendre contre ses adversaires catholiques. Souvent menacé d'expulsion, ainsi qu'Anshelm et Séb. Meyer, il fut soutenu par le peuple et un peu par le Conseil des Deux-Cents. Son rôle à la dispute de Baden ne fut pas brillant. Lui-même était décidé; il avait dit sa dernière messe à Noël 1525, mais il était lié par ses instructions qui lui faisaient une position difficile; son ami Kolb et QEcolampade parlèrent plus librement. Il se releva pendant les 3 semaines de la dispute de Berne, janvier 1528; il prit la parole sur presque tous les points, vit sa considération personnelle considérablement augmentée, fut chargé du discours de clôture, et dès le lendemain le Conseil des CC promulgua l'édit de réformation. Ce fut le succès de sa vie. 11 réussit moins avec les anabaptistes, qu'il aurait voulu convaincre au lieu de les persécuter. II ne réussit pas non plus à empêcher la guerre civile; la défaite de Cappel et la mort de Zwingli l'atterrèrent. En 1532, un synode étant convoqué à Berne en janvier, pour l'organisation définitive de l'Égl. réformée, Haller voit arriver son ami Capiton, qui relève son courage, calme les esprits et résoud diverses difficultés. Malgré son amour de la paix, il refusa d'entrer dans les voies de conciliation proposées par Bucer, ne pouvant se décider, dit-il, à échanger une notion claire contre des idées confuses. Il souffrait d'une hernie, et surtout d'une obésité telle qu'on avait dû élargir la porte de sa chaire, f 25 févr. 1536. Il s'était marié en août 1529 avec une personne de 30 ans, sans fortune, dont il n'eut pas d'enfant.

2o Jean Haller, de Wyl, Saint-Gall, pasteur à Amsoldingen, Oberland; ami du précédent, et le premier prêtre suisse qui ait eu le courage de se marier. Il dut pour cela quitter le territoire bernois, f à la bataille de Cappel. Un des ancêtres de la nombreuse famille des Haller.

3o Albert de Haller, dit le Grand, né à Berne 1708, fils d'un avocat. Très bien doué comme intelligence, mémoire, imagination; timide, mélancolique et digne de caractère, il fut un enfant précoce et un homme universel. Il étudia la médecine à Tubingue, puis à Leyde auprès de Boërhave, visita Londres et Paris, Bâle et Zurich, voulant tout apprendre; fit un voyage à pied dans les montagnes, à la suite duquel il publia sa description des plantes suisses, et son poème des Alpes, qui fit époque dans la littérature allemande. Après quelques années passées dans son pays, il accepta à Gôttingue une place de prof, de chirurgie et d'anatomie 1736, et il y resta 17 ans, s'occupant de tout, s'assimilant les idées d'autrui, et méritant d'être appelé par Herder: le grand compilateur. Profondément religieux et fidèle à ses convictions, il rassembla et organisa à Gôttingue l'Égl. réformée. Il composa pendant ce séjour plusieurs de ses meilleurs ouvrages, collabora à plus, journaux et revues, à la Biblioth. raisonnée d'Amsterdam, à une publication scientifique de Gôttingue; prit part à la fondation de la Soc. royale de G5ttingue, dont il fut nommé président, et rentra dans sa patrie 1753, pour y prendre quelque repos. Il fut nommé membre du Grand Conseil, et scrutateur; puis directeur des salines de

Bex, enfin bailli d'Aigle. Pins apprécié au dehors que dans son pays, en Europe qu'à Berne, il reçut de partout des titres, des marques d'estime et des honneurs. L'emp. Joseph II le visita quelques mois avant sa fin. f 17 déc. 1777. Ses ouvrages sont très nombreux et portent sur une foule de sujets divers, botanique, médecine, physiologie, etc. Celui qui nous intéresse le plus, ce sont ses Lettres sur les vérités les plus importantes de la révélation, adressées à sa fille, Mm« Marianne Jenner. Sa piété était douce et vivante, sa foi ferme. Il ne se laissa pas éblouir par Voltaire, et repoussa les avances de Frédéric, qui aurait voulu l'attirer à Berlin. Il eut plusieurs enfants, dont aucun n'a suivi la carrière des sciences. Emmanuel adopta à Paris les idées révolutionnaires, et s'est fait une mauvaise réputation dans les fournitures.

4° Albert, le plus jeune fils du précédent, assista à ses derniers moments, qui furent paisibles, et les raconta dans une Lettre à Ch. Bonnet.

5° Charles-Louis, petit-fils du grand Haller, né à Berne 7 août 1768; publiciste, connu par son livre: Restauration de la politique. Efîrayé des excès de la révolution, il se jeta dans l'excès contraire et se fit catholique 1820, mais en secret, pour ne pas nuire au succès de son livre. Il donnait pour base à la société le régime patriarcal. En 1836 il écrivit l'Hist. de la révol. ecclés. du c. de Berne, f 1854.

HAMANN, Jean-Georges, né à Kônigsberg 27 août 1730, précepteur dans plusieurs familles, fit un voyage à Londres, pendant lequel la détresse lui fit faire t La descente aux enfers de la connaissance de soi-même; » il se mit à écrire dès son retour 1759, et pénétra plus que personne dans les profondeurs et l'originalité de la Bible. Il vécut d'une place de chancelier auprès du département militaire, épousa par conscience la servante de son père 1763, et f 20 juin 1788. La profondeur de ses pensées et la négligence de son style rendent difficile la lecture de ses 8 volumes. Berlin 1821-1843. Il chercha l'essence de la religion, la présence de Dieu, dans l'histoire de l'humanité. Pour lui poésie, religion, philos., histoire, sont une seule et même chose, et il condamne aussi bien l'orthodoxie sèche que le rationalisme vulgaire.

HAMBOURG. Charlemagne avait déjà projeté d'établir un évêché dans cette ville, mais c'est seulement Louis-le-Déb. qui put réaliser ce projet, en nommant Anschar à ce poste 833. C'était avant tout un poste missionnaire. A la suite des invasions et des déprédations normandes, l'évêché fut réuni à celui de Brème 847. L'archev. Adalbert résolut d'en faire un patriarcat, mais après sa défaite, ses successeurs fixèrent définitivement le siège de l'archevêché à Brème, et Hambourg n'eut plus qu'un chapitre. Grâce à son indépendance civile et politique, Hambourg passa sans difficulté à la Réformation. Son premier pasteur fut Otton Stimmel, de l'égl. de Sainte-Catherine. L'opposition cathol. n'aboutit qu'à accentuer touj. davantage le mouvement. Après 2 conférences publiques Bugenhagen fut appelé, et en 1527 des ordonnances ecclés. furent proclamées. En 1536 la ville se joignit à la ligue de Smalcalde et se garantit ainsi contre tout retour du catholicisme, qui avait célébré en 1531 sa dernière messe. Les droits civils se sont longtemps confondus avec les droits religieux, la bourgeoisie avec le caractère luthérien. Ce n'est que récemment que les réformés, les catholiques et les juifs ont été admis au bénéfice de la tolérance et de l'égalité.

HAMEL, Jean, jésuite, prof, à Louvain; nia en 1571, dans une dispute contre Bajus, d'accord avec Less, l'inspiration des Écritures; 34 passages de ses écrits furent condamnés comme hérétiques.

HAMELMANN, Hermann, le réform. de la Westphalie. Né à OsnabrUck 1525, élevé dans le catholicisme, il fit de violents sermons contre Luther, mais fut ébranlé parMusâus de Wesel, écrivit 1550 contre le célibat forcé, et se rangea décidément 1552 dans les rangs évangéliques à Camen. Banni de là il vint à Bielefeld; renvoyé de nouveau, il fut successivement pasteur à Lemgo, et surintendant à Gandersheim 1568-1572 et à Oldenbourg, où il f 26 juin 1595. Il a laissé quelques écrits de controverse, et des travaux intéressants pour l'hist. ecclés. de la Westphalie.

HAMILTON, Patrick; premier martyr de la cause de la Réformation en Écosse, jeune homme du plus grand mérite, parent de la famille royale; né 1504. Il était destiné à l'Église et étudia à Saint-André, mais il ne tarda pas à en reconnaître la corruption et la quitta. Dans un voyage qu'il fit sur le continent, notamment à Wittenberg et à Marbourg, il rencontra quelques-uns des réformateurs. Puis il revint dans son pays natal, où son influence, qui était considérable, lui fit de nombreux ennemis. L'archev. Beaton l'attira dans un piège sous prétexte de discussion et le fit condamner au supplice du feu pour cause d'hérésie. Il f avec courage, 29 févr. 1528 âgé de 24 ans. Le même bûcher allait bientôt consumer la prélature et la papauté.

HAMON, médecin, solitaire de Port-Royal depuis 1648, le seul qui pût fréquenter les religieuses depuis le décret d'interdiction lancé contre elles.

HANNO, ou flannon, archevêq. de Cologne 1056-1075, une des personnalités les plus remarquables de l'épiscopat à cette époque. Chancelier du royaume sous Henri IH, régent sous

Henri IV pendant sa minorité, jusqu'au moment où l'influence d'Adalbert réussit à le mettre momentanément de côté. Il se prononça vivement dans i'esprit de Hildebrand, sur le célibat et la simonie, fit opposition à l'antipape Honoré II, donna un immense développement à son diocèse, et fut canonisé 1183.

HANOVRE. Ce royaume, auj. province allemande, appartenait à l'ancienne Saxe et devint chrétien par la soumission des Saxons à Char-iemagne. Il s'y fonda au 8me et au 9me siècle plusieurs évêchés, qui, par suite des guerres civiles, finirent par devenir des villes libres et indépendantes, Hambourg, Brème, OsnabrUck, Munster, etc. La Réforme y pénétra; à Lune-bourg, 1527, par le duc Ernest et le surintendant Urbain Rhegius; à Calenberg, 1540, par la duchesse Élisabeth et Corvinus; à Brème, ce fut en dépit de l'év. Christophe; de même en 1552 à OsnabrUck. Il y a quelques districts réformés, d'autres catholiques, mais la majorité du pays est luthérienne. Une tentative pour accentuer encore plus ce luthéranisme échoua devant le mécontentement public, 1862, sans cependant que la Prusse ait entièrement réussi à introduire le système de l'Église Unie.

HANS, v. Sachs.

HANSE (la), v. les diff. art. Brème, Hambourg, Lubeck, etc.

HANSITZ, Marc, né 1643 en Carinthie, jésuite, prof, de philos, à Gratz, commença la publication d'une Germania sacra, Hist. relig. de l'Allemagne. Il en a fait 3 vol. comprenant Fégl. de Lorch et les év. de Passau, Salzbourg et Ratisbonne. Mais comme tout n'était pas élo-gieux, il s'attira des difficultés et renonça 1754 à ce travail, dont il confia la continuation aux moines de Saint-Biaise, f 1766.

HANTWILL, Jean (de), de Normandie, prof, à l'univ. de Paris, mort vers le commencement du 13me siècle. Auteur d'un poème en vers élégants, sur les misères de l'humanité dans toutes les classes et conditions: Joh. Archithrenii Opus, Paris 1517.

HAPHTARS. On désignait ainsi chez les juifs les fragments des prophètes qui devaient être lus dans les synagogues. Ce nom de Parasch s'appliquait aux fragments de la Loi. La lecture des livres proph. remonte à l'époque des Macchabées, mais la division en haphtars est plus récente, et les divers spécimens qu'on en possède ne concordent pas.

HARDENBERG, ou plutôt Rizœus, né à Har-denberg, Hollande, 1510; Dr et prof, de théol. à Louvain, accusé d'hérésie, n'échappa que parce que les bourgeois et les étudiants prirent parti pour lui. Il rompit avec Rome en 1543, vint à Wittenberg et fut nommé pasteur à Kem-pen, puis en 1547 à Brème. Comme il n'admettait pas l'ubiquité et qu'il avait une théol. intermédiaire entre Luther et Zwingle, le parti des exaltés luthériens le força d'abandonner la place 1561. Il passa 4 ans avec sa famille chez son ami le duc d'Oldenbourg, puis reprit du service à Sengwarden 1565 et à Emden 1567. f surintendant 18 mars 1574. Ses ennemis à Brème perdirent le pouvoir au bout de quelques années, et la ville refusant de signer la Form. de Concorde, passa définitivement à la réforme.

HARDING, abbé de Citeaux, 1109-1134, Anglais d'une famille distinguée, après avoir été soldat, fit un pèlerinage à Rome, à la suite duquel il devint moine. L'ordre de Citeaux ayant pris une grande extension par l'adhésion de Bernard, il l'organisa d'après la Charta caHta-tis et lui imposa la règle stricte de saint Brnoît, sans adoucissement.

HARDOUIN, Jean, né 1646 à Quimper, prof, de rhétorique, biblioth. du collège Louis-le-Grand 1683, f 1729. Savant jésuite, il publia en 12 vol. une Collection des conciles de l'an 34 à 1714, mais tellement indépendante et paradoxale, qu'un arrêt du parlement en interdit la vente avant que des cartons en nombre suffisant eussent comblé les lacunes et rétabli le vrai texte des résolutions. Le p. Hardouin du reste *ne croyait pas que ces conc. eussent eu lieu; il n'admettait que le concile de Trente. Il niait presque toute l'hist. ancienne, et prétendait sérieusement que les chefs-d'œuvre du latin classique, l'Énéide, les Odes d'Horace avaient été écrits au 13me siècle par des moines. Il n'admettait pas la preuve par les médailles. Il soutenait que Jésus et ses disciples avaient dû parler latin. Ce qu'il a laissé de mieux, c'est une éd. de Pline-le-Naturaliste, 5 vol. 4°, très vanté* par Huet.

HARDT, Hermann (von der). Critique et orientaliste, né 1660 à Melle près OsnabrUck, étudia à Iéna, puis auprès d'Esra Edzard à Hambourg, professa à Iéna et à Leipzig, se lia intimement avec Spener et Sandhagen dont il partageait les sentiments religieux, et fut nommé par le duc Rodolphe-Aug. de Brunswick conservateur de sa riche bibliothèque, prof, à Helmstâdt 1690, enfin recteur du gymnase de Marien-bourg 1709. f 1746. Il a écrit plus de 300 vol. sur la grammaire, l'exégèse et l'histoire. Son Hist. littér. de la Réforme 1717 et son Grand conc. de Constance, 6 vol. f° ont encore de la valeur auj. par l'abondance et la sûreté des renseignements qu'ils renferment. En revanche il y a bien de la fantaisie dans ses études exégé-tiques, et la liberté avec laquelle il interprétait ou expliquait allégoriquement certains miracles, lui attira des ennemis et des désagréments. En 1713 l'exégèse lui fut interdite; en 1727 il fut dispensé de toutes fonctions académiques, tout en conservant son emploi. Ses Énigmes du peuple juif 1705, avaient fait crier; ses Énigmes du monde primitif lui valurent une amende de lOOthalers; il envoya cette somme, et y joignit les cendres de 8 vol. folio de ses Explic. bibliques manuscrites. Il cessa de travailler.

HARE, Ch.-Jules, né 1795 à Herstmonceux, étudia et professa à Cambridge et devint en 1834 recteur de sa paroisse natale. La reine le nomma son chapelain, f 1855. Très lié avec Arnold et Bunsen, il était au courant de la science germanique et chercha à l'implanter en Angleterre. Il fut à la tète du parti, résolument anticatholique, et se posa comme conciliateur entre les puséistes et les évangéliques.

HARLAY, François (de), seigneur de Champ-valon, né à Paris 1625, reçut 1651 l'archevêché de Rouen vacant par la retraite de son oncle, et en 1670 celui de Paris. Il était à la tête du parti qui défendait contre le pape les droits du roi; aussi Louis XIV lui donna-t-il la direction des affaires ecclés. et la direction des synodes. Il usa de sa position pour brider les jansénistes et les jésuites, et il révoqua ce qui restait de l'édit de Nantes. Il célébra le mariage secret de Mme de Maintenon avec le roi, et améliora le bréviaire parisien, 1680-1684. Bossuet, dont il avait contrecarré les vues modérées, incrimine' les mœurs de ce prélat courtisan, f 1695.

HARLESS, Gottlieb-Christophe-Adolphe; né à Nuremberg 21 nov. 1806; prof, de théol. ù Erlangen et à Leipzig; premier prédicateur de la cour et conseiller ecclésiastiq. à Munich, membre de la Chambre des seigneurs de Bavière. Auteur d'un Comment, sur les Éphés. 1834; Encyclopédie théol.; Éthique chrétienne; Sermons, et plus, écrits de circonstance: contre Dollinger, Strauss; le gouvernement de l'Église, etc. Il a écrit aussi une sorte d'autobiographie anonyme (Ausdem Leben). f 6 sept. 1879.

HARMONISTES, secte wurtembergeoise qui, sous les auspices du paysan Georges Rapp (né 1770). émigra en Amérique pour y réaliser l'idéal du christianisme par la communauté des biens, 1804. Ils fondèrent près de Pittsburg la colonie de Harmony 1804, dont Rapp fut nommé le directeur, le patriarche et le sacrificateur. En 1812 la colonie fut vendue, et il s'en fonda une nouvelle: Économie. Une division éclata en 1832 et le prophète Muller détacha de la colonie un certain nombre d'adhérents; le reste continua de subsister. Rapp f 1847.

HARMONIUS, fils du gnostique Bardesane; il popularisa les doctrines de son père par ses poésies et ses chants.

HARMS lo Klaus (abrégé de Nicolas), né 25 mai à Fahrstedt, Holstein; meunier jusqu'à 19 ans, comme son père, il entra en 1797 à l'école de Meldorf, puis à l'univ. de Kiel, et devint diacre de Lunden 1806. Son sermon La guerre après la guerre, 1814, fit sa réputation. Il refusa en 1819 une place d'év. luthérien en Russie, et en 1834 la place de prédicateur à Berlin comme successeur de Schleiermacher, et il resta fidèle à la ville de Kiel, qui, de son côté, ne se montra pas ingrate et le nomma successivement docteur et prof. 1834, pasteur principal et doyen, enfin conseiller consistorial. Il démissionna 1848, presque aveugle, et f 1 févr. 1855. Le fait saillant de son activité, ce sont les 95 thèses qu'il publia contre le rationalisme, 1817, pour le 3™ jubilé séculaire des thèses de Luther. Il a aussi publié une Théol. pastorale et sa propre Biographie.

2° Louis-Detlef-Théodore, né 8 mai 1808 à Walesrode, Lunebourg; adjoint à son père à Hermannsbourg 1844, il le remplaça en 1848, fonda une maison dp& missions, puis un asile pour les hommes égarés et vicieux. En 1853 il lit l'acquisition d'un vaisseau chargé de visiter les stations missionnaires. Son plan était en général de fonder des colonies évangéliques, plutôt que d'envoyer des hommes seuls. Personnalité distinguée, il a su donner à son œuvre une bonne et vigoureuse impulsion, f 14 nov. 1865.

HARTMUTHde Kronberg, chevalier de Fran-conie, parent de Sickingen, se déclara pour Luther en 1521 dans son Exhort. chrétienne aux ordres mendiants, et dans plusieurs adresses à l'empereur qu'il espérait gagner à la cause de la Réforme. Ayant pris parti contre Mayence 1522, il perdit son château et s'enfuit en Suisse. Il s'attacha ensuite à Ulrich de Wurtemberg, recouvra ses biens 1541 et f 1549.

HASE, Ch.-Aug. né 25 août 1800 à Stein-bach, Saxe. Emprisonné quelque temps comme étudiant, pour délit d'association, il fut nommé 1829 prof, à Leipsig, et immédiatement après à Iéna, où il est resté jusqu'à sa fin. Parmi ses nombreux écrits on remarque: Hutterus redi-vivus, une Dogmatique, une Hist. de l'Église, François d'Assise, un Manuel de controverse, plusieurs écrits de circonstance, etc.

HASENKAMP lo Jean Gerhard, né 12 juill. 1736 à Wechte, près Lengerich, Westphalie, étudia 1753-1756 à Lingen, mais fut suspendu comme candidat à cause de quelques erreurs. Réhabilité en 1763 il fut en 1766 nommé au gymnase de Duisbourg, f 1777. Très lié avec les séparatistes du Bas-Rhin, notamment avec Collenbusch, il donnait plus d'importance à la doctrine de la sanctification et du royaume de Dieu qu'à celle de l'expiation; il fut même pour cela suspendu par le synode provincial de Clè-ves 1771, mais l'État leva la sentence. — 2° Son frère Fréd.-Arnold, 1747-1795, lui sue* céda dans le rectorat et épousa sa veuve dans l'intérêt de ses enfants. Il combat le rationalisme dans de nombreux écrits. Ami de Men-kens. — 3° Un autre frère, Jean-Henri, 1750-1814, recteur & Emmerich, puis pasteur à Dahle. 2 vol. posthumes d'ouvrages chrétiens.

HASSE, Dr Fréd.- Rodolphe, né à Dresde 29 juin 1808, étudia à Leipsig et à Berlin; prof, d'hist. ecclés. à Greifswald 1836, à Bonn 1841. f 1862. Connu surtout par sa monographie d'Anselme, qui ouvre un jour nouveau sur la scolastique.

HATTO lo ou Haito, év. de Bâle et abbé de Reichenaudepuis 806. Né 763. Auteur déplus, fragments utiles à consulter pour l'hist. de l'Égl. et des mœurs de son époque. Le récit de son ambassade à Constantinople est perdu. — 2° Hatto I<>r, archev. de Mayence et, depuis 888 abbé de Reichenau, se distingua comme homme d'État et rendit de grands services à l'unité de l'emp. allemand, quoique sa conduite ne fût pas toujours scrupuleuse. Il sut étendre aussi les droits des évêques. En 895, à la diète de Tri-bur, il prononça en faveur de Cologne contre Adalgar de Brème, f 913. — 3o Hatto H, abbé de Fulda, où il avait été élevé, 942; il accompagna Othon 1er à Rome 961. Archev. de Mayence, il dut céder ses évêchés de Havelberg et de Brandebourg au nouvel év. de Magde-bourg. La légende le peint comme un homme dur et cruel, et raconte qu'il fut mangé des souris, dans la fameuse tour de ce nom, près de Bingen.

H AUGE, Hans Nielsen, né 3 avril 1771 près de Thuno, Norwège, apparut en 1795 comme prédicateur et prophète, en 1796 comme écrivain. Sans se séparer de l'Église officielle, il tenait des réunions religieuses et niait qu'on eût le droit de les interdire. Il avait aussi sur l'ordination, le clergé et le royaume de Dieu, des idées qui n'étaient pas celles de tout le monde. En conséquence son imprimerie de Christian-sund fut fermée 1804, et lui-même, après dix ans de prison, condamné à une forte amende. Dès lors il vécut tranquille dans sa ferme de Breddwill, près Christiania, f 23 avril 1824. Ses sectateurs, les Haugiens, surnommés les liseurs (de la Bible) ont continué de se réunir; ce sont des chrétiens modestes, qui insistent sur la doctrine de la foi et de la régénération. On s'étonne qu'ils aient pu être tracassés.

HAUSMANN, Nicolas, prédicateur à Schnee-berg, puis à Zwickau 1531-1532, combattit les enthousiastes et ceux qui se posaient en prophètes. 11 introduisit la Réforme à Dessau 1532, et fut appelé comme surintendant à Freiberg, sa ville natale. Il y alla et f en chaire à son premier sermon 1538. Sa mort fut vivement regrettée de Luther, dont il était un des plus anciens amis.

HAYDN, Franç.-Joseph, l'aîné de 20 enfants, né 31 mars 1732 à Rohrau, Basse - Autriche: fils d'un pauvre charron, il eut une jeunesse difficile, fut élevé par le régent de Haimbourg, qui lui donnait « plus de coups que de bons morceaux; > puis par le maître de chapelle de la cathédrale de Vienne. Il se fit connaître par de nombreux morceaux pour clavecin. En 1759 il passa au service du comte Mozzin, pour qui il composa sa première symphonie; en 1760 chez le prince Esterhazy, avec 400 tlorins par an, ou il passa 30 années, un peu perdu dans la domesticité du manoir. Devenu libre il accepta des offres qui lui furent faites en Angleterre, et un séjour de 3 années fut une vraie révolution dans sa vie. Il devint riche par ses leçons et ses concerts, et, recherché dans toutes les sociétés, il marchait de pair avec les plus grands du royaume. Il y entendit les compositions de Hândel, écrivit pour la Billington L'Ariane abandonnée, et emporta en 1794 le mss. de La Création qu'il n'acheva entièrement qu'en 1798. Il avait déjà fait Les sept paroles; il fit encore les Saisons, son dernier ouvrage, et finit en paix sa vie dans un des faubourgs de Vienne, f 31 mai 1809. On a dit de lui qu'il était le musicien de tout le monde, parce qu'il s'est distingué dans tous les genres. Humble, modeste, jovial, toujours de bonne humeur, il est comme génie au premier rang des musiciens célèbres et doit être considéré comme le vrai père de la symphonie, du quatuor et de la musique instrumentale. L'Autriche lui doit aussi son air national.

HAYMO, ou Haiino, ou Aymo; né vers 778; ami et condisciple de Raban Maur; recteur à Fulda et à Hirschfeld, év. de Halberstadt. f 853. A côté de son activité épiscopale, il trouva du temps pour écrire, et quelques-uns de ses sermons ont été publ. Cologne 1531 par Hit-torp. Ses Comment, ont peu de valeur, mais ses extraits de la traduction d'Eusèbe par Rufin ont donné une nouvelle impulsion à l'étude de l'hist. ecclésiastique.

HÉBER 1° Réginald, né 21 avril 1783. Recteur de Hodnet, Shropshire, et prédicateur d'uni v. à Oxford, il fut en 1822 nommé à l'évêché de Calcutta fondé en 1816. Très instruit, plein de zèle pour l'évangélisation, il se montra bon administrateur, et réussit pendant son court épiscopat, non seulement à bien organiser son diocèse, mais encore à lui créer de bons rapports avec les nombreuses stations missionnaires existantes, f subitement 4 avril 1825. Il attachait aux principes anglicans une très grande importance, notamment à cause des chrétiens syriens avec lesquels il pouvait se trouver en contact, et n'acceptait le concours des missionnaires allemands luthériens qu'après leur avoir donné son ordination épiscopale.

HÉDIO, Gaspard. Né 1494 à Ettlingen, Bade, il étudia à Fribourg, puis à Bâle où Capiton l'amena à la foi évangél. Prédicateur et vicaire à Mayence 1520, mais sentant son action neutralisée, il vint 1523 à Strasbourg où il retrouva Capiton, fut nommé prof, de théol. et prédicateur à la cathédrale, et prit une part active à la Réforme et à la Conf. tétrapolitaine. En 1541 il se rendit avec Bucer à Bonn, sur la demande de Gebhart de Cologne, mais il comprit bien vite que cette tentative ne pouvait pas aboutir et il revint à Strasbourg 1543. f 1552. Ses ouvrages n'ont plus grande importance.

HEDWIGE lo ou Avoie, fille du margrave Berthold, duc de Carinthie; née 1174, elle fut mariée à 12 ans à Henri-le-Barbu, duc de Silé-sie et de Pologne, dont elle eut six enfants. Sa profonde piété, qui se traduisait en bonnes œuvres, lui valut la canonisation, sous Clément IV, 1267. Elle avait fondé à Trebnitz, Si-lésie, un couvent de femmes de l'ordre de Ci-teaux, 1205-1219, qui devint un centre missionnaire, et auquel elle donna sa fille pourabbesse. Elle s'y retira à la mort de son mari 1238 et y resta jusqu'à sa fin. Son fils Henri étant tombé à Wahlstatt contre les Mongols 1241, elle en reçut la nouvelle avec résignation et bénit Dieu de lui avoir donné un tel fils, f 15 oct. 1243.

2o Fille du roi Louis de Hongrie et de Pologne, née 1371, princesse éclairée et pieuse. Elle épousa Jagellon, duc de Lithuanie, qui s'engagea à se faire chrétien, qui fut en effet baptisé avec ses fr. et les grands de sa cour, 14 févr. 1386, et qui monta sur le trône de Pologne sous le nom de Vladislas V. Elle s'occupa de répandre le christianisme autour d'elle et fit le premier essai d'une trad. de la Bible en polonais. f 1399.

HEERBRAND, Jacques, né 12 août 1521 à Giengen; fils d'un tisserand. Après avoir achevé ses études à Wittenberg, il fut diacre à Tubingue, puis surintendant à Herrenberg, dont le duc, Christophe, l'envoya aussi à Trente comme son délégué 1551. Appelé comme prof, de théol. à Tubingue, il fut nommé chancelier, doyen et et enfin conseiller ducal. Démissionnaire 1598. f 22 mai 1600. Auteur d'un Compendium theol., Tubingue 1573, exposé scientifique de la doctrine luthérienne suivant la Form. de concorde; trad. en grec par Martin Crusius, lors des tentatives d'Andreâ auprès de l'Égl. grecque.

HEERMANN, Jean, né H oct. 1585 à Rau-ten, Silésie; pasteur à Kôben 1611, démissionnaire pour cause de santé 1624. f 1647 à Lissa. Connu par de beaux cantiques populaires, plus de 400, qui respirent la foi la plus entière en Dieu, malgré des souffrances presque continuelles.

HEGEL, Georges-Guill.-Fréd., né à Stutt-gard 27 août 1770, fils du secrétaire du gouvernement, étudia à Tubingue en même temps que son ami Schelling, puis à Iéna sousFichte. Il débuta dans l'enseignement par des cours libres 1801, qui lui valurent en 1805 à Iéna la place de professeur suppléant comme successeur de Schelling; en 1808 il fut nommé directeur du gymnase de Nuremberg, en 1816 prof, de philos, à Heidelberg, et en 1818 successeur de Fichte à Berlin, où il f du choléra 14 nov. 1831. Parmi ses nombreux ouvrages, il faut nommer surtout sa Phénoménologie de l'esprit, sa Philos, de la nature, et sa Philos, de la religion. Sa profondeur est devenue proverbiale; sa pensée est si obscure que ses disciples ne sont pas toujours d'accord sur ce qu'il a voulu dire, et que deux écoles contraires se réclament également de son nom, celle de Daub, de Marhei-necke, de Goschel, de Rosenkranz, et celle de Strauss, de Bauer. de Feuerbach. La base de toute sa philos., c'est l'unité réelle de toutes choses. Le moi et le non-moi, le subjectif et l'objectif, le fini et l'infini, Dieu et le monde, ne sont pas des choses contraires; ils ne s'excluent pas, ils se complètent; ils ne sont même que des faces différentes de la même chose. L'absolu, l'idée pure ne devient une réalité que lorsqu'il se traduit dans la nature; alors seulement il peut prendre corps dans l'esprit. L'humanité elle-même dans son histoire n'est qu'une des formes, une des incarnations de l'absolu, et elle est réglée par des lois générales qu'il s'agit de rechercher et de déterminer. Enfin Jésus-Christ lui-même, considéré dans sa personne et dans sa nature, est la plus haute manifestation de l'absolu. De là sur la Trinité, la Rédemption, le christianisme des conceptions nouvelles, hardies, élevées, mais vagues et abstraites, qui peuvent être interprétées comme une négation de l'immortalité personnelle et et comme un acheminement au panthéisme. On peut reprocher à l'ensemble de son système de reposer sur des abstractions qui ne sont pas prouvées et qu'il ne se donna même pas la peine de chercher à établir.

HÉGÉSIPPE, juif de l'Asie mineure, converti au christianisme. Né probablement en Palestine au commencement du 2m« siècle, a vécu entre 100 et 180. C'est le plus ancien historien ecclésiastique, bon, sérieux, peut-être un peu charnel. Dans un voyage à Rome il visita plus, églises, entre autres Corinthe. Sou histoire est intitulée Comment, sur les Actes des apôtres; il n'en reste que quelques fragments, conservés par Eusèbe, et qui ont plutôt le caractère apologétique. Une tradition le fait év. de Rome vers 177.

HÉGIRE. Ce nom dérivé de l'arabe Hedjra, qui signifie fuite, sert à désigner le commencement de l'ère musulmane, qui date du 16 juillet 622, moment où Mahomet s'enfuit de la Mecque pour se retirer à Yatreb, ou Médine. Gomme les années musulmanes sont lunaires et qu'elles ne coïncident pas avec les nôtres, il est difficile d'obtenir une réduction exacte. On peut dire comme règle approximative que si l'on veut ramener une date mahométane à notre numération, il faut y ajouter 621, et en retrancher 3 ans par siècle.

HEGIUS, Alexandre, né à Heck, près de Munster, f 27 sept. 1498. Il était instituteur et prêtre à Deventer, et a donné une forte impulsion aux études classiques; parmi ses élèves on cite Érasme, Hermann de Busche, Mu tien, etc.

HEIDAN, Abraham, prof, de théol. à Leyde, perdit sa place en 1675 pour avoir défendu la liberté d'enseignement, lorsque sur l'initiative des théol. réformés le bureau de l'université défendit l'exposé de la philos, cartésienne et son application à la théologie. Il conserva cependant sa place de pasteur, depuis 1627, et l'occupa jusqu'à sa f 1678.

HEIDEGGER, Jean-Henri, théol. réformé, rédacteur du Consensus. Né 1er juillet 1633 à Bârentschweil, Zurich, il étudia à Marbourg sous Crocius, et enseigna à Heidelberg et à Stein-furt. En 1665 il fut nommé jprof. de morale à Zurich, et en 1667 de théologie, f 18 janv. 1698. La formule du Consensus, dont il fut chargé 1673, lui valut de longues années de vexations de son ardent collègue Muller, parce que, s'il condamnait Amyraut, il ne voulait pas aller jusqu'à condamner Cocceius et Descartes. En général il était tolérant, au moins vis-à-vis des luthériens. Sa polémique était plus vive contre les catholiques dont l'attitude était aggressive sur tous les points. Il s'intéressait activement aux réfugiés et aux persécutés de Naples et de la Hongrie. Il a écrit une Hist. de la papauté, une Anatomie du Conc. de Trente, etc. Son Enchiridion biblicum est une introduction concise aux livres de la Bible, populaire et bonne pour l'époque.

HEIDELBERG, célèbre univ. fondée 1386 par l'électeur palatin Rupert 1er, et reconstituée 1803 par le grand-duc de Bade, Charles-Fréd., ce qui lui a fait donner le nom de Ruperto-Ca-rolina. La plus grande partie desa riche biblioth. fut envoyée à Rome 1622 par Maximilien de Bavière, et logée au Vatican où elle est encore. Cette ville a joué au 16®e siècle un rôle important dans l'hist. de la Réformation: Bucer et Brenz y étudièrent, Billican y devint bachelier; tous les trois assistèrent à la dispute de Luther au couvent des augustins 1518 et furent gagnés à la Réforme. Mélanchthon y étudia 1510, Bo-quin y enseigna la théol. 1557-1574, Grynâus le grec 1524-1529. Hesshusen, le polémique bien connu 1557-1559; Olevien et Ursinus, les rédacteurs du catéchisme; au 17®* siècle les deux Hottinger, Adam Alting, Scultet, l'orientaliste Eisenmenger, appartiennent aux illustrations de l'université. Plus récemment on peut nommer encore le vieux rationaliste Paulus; Daub, Marheinecke, puis Ullmann, Umbreit, Rothe, Plitt, Schenkel.

Le Catéchisme de Heidelberg qui, dans l'Égl. réf. allemande, a presque reçu l'autorité d'un livre symbolique, fut composé à la demande de l'électeur palatin Frédéric III, d'après le projet latin d'Ursinus. Ursinus et Olevien surtout le retravaillèrent, et l'électeur y ajouta lui-même dans la 3me éd. la fin dé la 80®e question. Après que le livre eut été approuvé par un synode, il fut publié 1563 et officiellement adopté. Malgré les violentes attaques des théol. luthériens, auxquels l'électeur fit répondre par les deux auteurs intéressés, et répondit lui-même directement à la diète d'Augsbourg 1566, le catéchisme fut adopté par les Egl. réf. d'Allemagne (Wesel 1568, Emden 1571), de Hollande, de Suisse, de Hongrie. Sur l'avis favorable du synode de Dor-drecht, il reçut aussi en France et en Angleterre le meilleur accueil. En Allemagne, dans les services d'après midi, non seulement on le lisait, mais on le commentait el on le prenait pour texte du discours. Il se divise en 3 parties: la Misère de l'homme, la Rédemption et la Reconnaissance, et il traite en 130 questions les principaux articles de la foi chrétienne, sans appuyer sur le rôle théol. de la prédestination, ni sur le mode de la présence réelle dans l'eucharistie. La virulence de sa polémique contre Rome, notamment les articles 30 et 80, servirent souvent de prétexte pour demander sa suppression au nom de la paix confessionnelle. On s'est demandé ces derniers temps si l'esprit général de ce catéchisme est calviniste ou mélanchtho-nien. Le fait même qu'il a été admis essentiellement par les égl. calvinistes semble trancher la question.

HEIMBURG, v. Grégoire 8°.

HEINECCIUS, Jean-Michel, 1674-1722, pasteur luthér. à Goslar et à Halle. Auteur d'un Tableau de l'Égl. grecque anc. et moderne; a écrit un autre Mémoire contre < les Prétendus prophètes des Cévennes, » 1715.

HEITZ, J.-G. intendant du comte Zinzendorf et organiste, accueillit en 1722 à Bertholsdorf les premiers réfugiés de Moravie, et leur choisit sur le Hutberg la place où s'éleva Hernhut. Longtemps les assemblées se tinrent chez lui, mais comme il était réformé, et non luthérien, on l'engagea à aller ailleurs pour éviter des contrastes. La séparation fut pénible pour tous. 1 1730 à Erlangen.

HELDING, Michael, surnommé le Sidonien; théol. catholique du temps de la Réformation. Né 1506 de parents pauvres, probablement à Esslingen, il étudia à Tubingue et vint à Mayence comme recteur du collège et prêtre; il fut nommé en 1538 év. in partibus de Sidon et suf-fragant de l'archevêque. La faveur impér. le fit conseiller; il fut nommé év. de Mersebourg contre le vœu du chapitre 1550, et finalement juge à Spire, f 1561. Il soutint énergiquement la doctrine romaine dans plusieurs écrits, mais comme il avait des manières conciliantes, Charles l'employait volontiers dans les négociations difficiles avec les protestants; ainsi à Ulm 1547, pour l'Intérim d'Augsbourg 1548, à Ratisbonne 1556, à Worms 1557; mais les négociations échouaient toujours devant sa prétention de faire interpréter par l'Égl. romaine les textes controversés. Les auteurs protestants, surtout Flacius, l'ont attaqué avec vivacité.

HÉLÈNE 1° la sainte. Origine inconnue; les uns la font venir d'Angleterre, les autres de Bi-thynie. Première femme de Constance Chlore et mère de Constantin. Répudiée par son mari qui, devenu César, voulut épouser la fille de Maximien, elle se retira à Trêves, où elle vécut jusqu'à la victoire de Constantin sur Maxence. Constantin devenu empereur lui donna le titre d'impératrice et lui accorda une grande confiance. Elle se convertit, demanda le baptême, fit construire des égl. et des couvents, se rendit en pèlerinage aux Lieux Saints, à Jérusalem et à Bethléhem, organisa des recherches, crut avoir retrouvé la vraie croix, et fit élever l'égl. du Saint-Sépulcre et celle de la Nativité, f 327 à Nicomédie. Rome prétend posséder ses restes: l'abbaye de Hautvilliers, près Reims, prétend que c'est elle qui les a, qu'on les lui a apportés de Rome en 849. De leur côté les Vénitiens assurent qu'on les leur a remis directement de Constantinople où elle est morte.

2* Sainte russe; v. Olga.

3° Hélène de SkOfde, de Suède, fut assassinée 1160, comme elle revenait d'un pèlerinage à Rome; canonisée par Alexandre III, 1164, n'est guère connue que dans son pays et sur les bords de la Baltique.

HÉLIAND, nom d'une Harmonie de l'hist. évangélique en vers vieux-saxons, qui paraît dater du temps de Louis-le-Déb. Jésus y est chanté comme roi populaire en un style noble sans enflure, et libre sans vulgarité. Ce poème a été trad. et réimpr. Elberfeld 1866.

HÉLIODORE lo trésorier de Seleucus Philo-pator, envoyé à Jérusalem pour piller les trésors du temple. Il en fut miraculeusement empêché 2 Macc. 3, 6. sq. Tableau d'Eug. Delacroix à Saint-Sulpice.

2° Év. de Thricca, Thessalie, né à Émèse,

Phénicie, vivait à la fin du 4me siècle. Dans sa jeunesse, étant encore païen, il a écrit le plus ancien roman grec qui nous ait été conservé: les Éthiopiques, ou les Amours de Théagène et de Chariclée, riche en renseignements sur l'Égypte, et dont le caractère moral prouve que l'auteur connaissait déjà le christianisme. Ce roman fut découvert par hasard à Bude 1526, pendant le pillage de la biblioth. de Matthias Corvinus. Trad. par Amyot 1549. Nicéphore dit qu'un synode provincial reprocha plus tard à Hél. cet ouvrage de jeunesse et l'obligea à donner sa démission, mais c'est peu probable. On assure, également sans preuves, qu'il imposa le premier à ses prêtres mariés la continence.

3° Un compagnon de Jérôme pendant son voyage en Orient; plus tard prêtre d'Aquilée et év. à Altino. Jérôme lui a adressé sa lettre sur l'Amour de la Solitude.

4° Prêtre d'Antioche vers 400; a écrit contre les manichéens le traité: De naturis rerum ex ordialium.

HÉLIOGABALE, emp. romain 217-222, fils illégitime de Caracalla et de sa nièce Julie, femme du sénateur Varius Marcellus. Il s'appelait Varius Avitus Bassianus, et fut dès l'âge de 13 ans nommé grand prêtre d'Elagabale, dieu du soleil, à Émèse; de là son nom. La légion d'Émèse le proclarpa empereur après la mort de Caracalla et le conduisit à Rome. Il voulut y introduire la religion du soleil, faire entrer au Sénat sa mère et sa grand'mère, vendre les emplois publics. Il tua Gannys son bienfaiteur et voulut tuer aussi son cousin Alexandre Sévère, dont il était jaloux, mais les prétoriens le prévinrent, le tuèrent lui-même et mirent à sa place celui dont il voulait se débarrasser. Héliog. voulant fondre en une seule toutes les religions, se fit juif et protégea aussi le christianisme. Selon Lampridius, il aurait fait bâtir sur le mont Palatin un temple unique pour le paganisme, le judaïsme et le christianisme.

HELMBOLD, Ludovic, auteur de plus, cantiques appréciés; né à Mtlhlhausen, Thuringe, 21 janv. 1532; étudia à Leipzig et à Erfurt, où

11 devint prof. 1554; en 1571 recteur à Mdhlhausen, puis pasteur et surintendant à Erfurt. f

12 avril 1598. Il avait reçu de Maximilien II à la diète d'Augsbourg 1566, la couronne de laurier pour ses poésies.

HELMOLD, prêtre de Butzow, près Lubeck, et élève de Vicelin; il accompagna l'év. Gerold d'Oldenburg dans sa mission chez les Slaves, 1158-1162, et écrivit une Chronique des Slaves très estimée, qui va de Charlemagne à 1170, et qui est une source sûre et précieuse de renseignements sur la vie religieuse de cette époque. Cette chronique fut continuée par Arnold, abbé des bénédictins à Lubeck 1209.

HELMSTiEDT. Univ. fondée 1575 par le duc Jules de Brunswick, à la place du collège de Gandersheim qui fut ainsi supprimé. Sa direction fut en général plus littéraire et plus indépendante que celle de Wittenberg. L'influence de Calixte en écarta les luttes confessionnelles et les disputes religieuses, ce qui lui valut tantôt une position privilégiée, tantôt un entier discrédit. Parmi ses prof, on nomme Chytrée, Carpzov, Calixte, Hesshuse, Martinius, Mos-heim, etc. Jérôme, roi de Westphalie la supprima.

HELVÉTIQUES (Confessions). On désigne sous ce nom deux documents différents. l°L'un qui est quelquefois appelé Conf. de Bâle, du nom de la ville où il fut rédigé. Il avait eu pour bases une première Confession de foi, envoyée par Zwingle à la diète d'Augsbourg, et approuvée par GEcolampade; une nouvelle confession envoyée 1531 par Zwingle à François et approuvée par Bullinger et Judœ; enfin la Conf. de Bâle 1534, rédigée sous la double influence, conciliante, de Bucer et d'QEcolampade. Les théol. suisses jugèrent bon de constater leur unité et de faire connaître leurs vues par une déclaration commune, soit pour fixer leur position vis à vis des luthériens, soit surtout dans l'éventualité du prochain concile. Ils se réunirent pour cela à Bâle 30 janv. 1536, et, sous l'influence spéciale de Bullinger, Léon Judœ, Megander, Myconius et Grynâus, rédigèrent en 27 (texte latin 28) articles la Première helvétique; des circonstances spéciales en empêchèrent la publication, mais elle ne resta pas sans influence. — 2o Le second document de ce nom, celui dont il s'agit quand on parle de la Conf. helvétique, est l'œuvre personnelle de Bullinger. Il l'avait composée en 1562. En 1564, sur le point de mourir, il la léguait au gouvernement comme son testament religieux; mais il ne mourut point. En déc. 1565 l'électeur Frédéric IH, l'ayant consulté sur plusieurs questions avant de se rendre à la diète d'Augsbourg, Bullinger lui envoya ce travail, et l'électeur qui en fut très satisfait, lui demanda la permission de le publier en allemand. Zurich et Berne demandèrent que cette Confession fut publiée en commun; d'autres villes adhérèrent bientôt, Genève. Schaffhouse, Bâle, Bienne, Saint-Gall; puis les égl. d'Écosse 1566, celles de Hongrie 1567, de nombreuses égl. polonaises, 1571 et 1578; les Égl. de France l'approuvèrent au synode de La Rochelle 1577, tout en déclarant garder leur propre confession. On peut donc dire que, sans avoir été l'objet d'un vote spécial, la Conf. hel-vét. est le grand Symbole des Égl. réf. du 16®« siècle, v. Thomas, Genève 1853, et Chaponnière.

HELVÉTIUS, Claude-Adrien, né 1715, f 1771, était fils du médecin Jean-Claude-Adrien, qui sauva Louis XV en 1719, et petit-fils du médecin Adrien, qui découvrit les vertus de l'ipécacuanha. Il fut nommé fermier général à 25 ans, place de cent mille écus de rente. Il sut en jouir, et fit du bien autour de lui. Avide de gloire, il quitta la finance pour les lettres, 1750: il fit des tragédies et des poésies, et se décida enfin pour la philosophie. Son livre de l'Esprit fonda sa réputation; il réduisait toutes nos facultés à la sensibilité physique et toute la morale à l'intérêt personnel. Condamné par la Sorbonne, le pape et le parlement, ce livre fut brûlé par le bourreau, 1759, ce qui ajouta à sa notoriété. Frédéric II appela Helvétius à Berlin 1765 et le combla d'honneurs. Il valait mieux que son système. Son livre De l'homme, et son poème du Bonheur, assez froid, ne furent publiés qu'après sa mort.

HELVICUS, ou Hellwig, Christophe, chronol. et orientaliste distingué, né 1581 à Sprendlin-gen, Hese-Darmstadt, prof, d'hébreu et de grec à Giessen 1605, puis prof, de théol. 1610, était également savant en médecine. Il parlait couramment l'hébreu, et fut chargé d'examiner les livres des juifs chassés de Francfort. On a de lui des gramm. et des dictionnaires, des tables chronologiques, le Théâtre chronol. etc.

HELVIDIUS, antidicomarianite, disciple de l'arien Auxence, vivait à Rome; il est connu par une lettre que lui adressa Jérôme, parce qu'il avait soutenu que Marie avait eu d'autres enfants après la naissance du Sauveur.

HÉLYOT, Pierre, dit le P. Hippolyte, moine franciscain du couvent de Picpus; né 1660, f 5 janv. 1716. Auteur de plus, ouvrages de piété, et d'une Hist. des ordres monastiques, religieux et militaires.

HEMMERLIN (Malleolus, petit marteau), Félix, né à Zurich 1389, chanoine de la cathédrale 1412, doyen à Soleure 1421; prit part au conc. de Constance, et fut nommé à Bologne docteur en droit-canon. Ses écrits font connaître l'état religieux de l'époque. Sans toucher au dogme, il combattit le relâchement de la discipline chez les chanoines mondains et à tous les degrés des ordres mendiants. Pendant la guerre de l'Autriche avec les Suisses, il se prononça sur le compte de ces derniers d'une manière si offensante qu'ils l'enfermèrent, d'abord à Constance, puis dans un couvent de Lucerne jusqu'à sa mort. Quelques-uns de ces écrits furent publ. par Séb. Brandt, Bâle 1497; d'autres par Re-ber; ils sont à l'Index.

HEMMING, Nicolas, né 1513 à Laaland, étudia à Wittenberg, fut précepteur, puis pasteur à Copenhague, prof, de grec, d'hébreu et de théol.; enfin vice-chancelier de l'université. Ses nombreux écrits, trop oubliés, ont donné lieu à diverses critiques. Il s'opposa à l'introduction de la Form. de Concorde, et combattit la doctrine de l'ubiquité, ce qui le rendit suspect. Il fut aussi accusé de cryptocalvinisme pour une confession de foi publiée en 1576, et le roi le suspendit de ses fonctions à la requête de son beau-fr. Auguste de Saxe. Il fut nommé chanoine à Roeskild 1579, et f 23 mai 1600.

HEMSTERHUYS, François, fils du savant critique et philologue Tibère, né 1720 à Gronin-gue, fut premier commis à la secrétairerie d'État des Provinces-Unies. Il consacra ses loisirs à la philos., rejetant toute religion positive et professant le sensualisme de Locke. Disciple de Platon et ami de Jacobi, nature élevée, son sensualisme ne tombe pas jusqu'au matérialisme. Il a écrit sur l'art et le beau. Ses vues religieuses sont consignées dans son Aristée ou La divinité 1779, et dans ses Lettres de Dioclès à Diotime 1785. Plus, de ses ouvrages lui ont été inspirés par ses conversations avec la princesse de Ga-litzin, dont il avait dirigé les études.

HENGSTENBERG, Ernest-Guillaume, né 20 oct. 1802 à Frôndenberg. étudia à Bonn et à Bâle; dès 1824 il est déjà prof, à Berlin, docteur en théol. 1829, f 28 mai 1869. Sa vie, sans grands épisodes extérieurs, n'en a pas moins été accidentée par les luttes qu'il a soutenues envers et contre tous: d'abord à l'occasion des rationalistes de Halle, puis pour l'orthodoxie, pour le luthéranisme pur, pour les droits de l'État en matière religieuse, etc., ce qui ne l'a pas empêché, vers la fin, de devenir i\ son tour suspect auprès des luthériens rigides. D'une science incontestée, il est trop passionné pour que son exégèse puisse être admise sans contrôle, mais ses écrits sont utiles à consulter. Les principaux sont: La Christologie de l'A. T., ouvrage capital; Études sur l'Égypte; Fragm d'introd. à TA. T,; Comment, sur les Psaumes, sur l'Apocalypse, sur saint Jean. Il a en outre rédigé depuis 1827 la célèbre Gazette Évangélique de Berlin. Son attitude vis-à-vis des chrétiens avancés a beaucoup varié suivant les années et les circonstances.

HENHOEFER, Aloys, Dr en théol., prêtre évangélique, né 11 juill. 1789 à Volkersbach, près Carlsruhe, d'une famille de paysans, étudia à Rastadt et à Fribourg, et fut consacré 1817. C'est à MUhlhausen, où il était curé, qu'il fut converti et amené à la Bible. On s'en aperçut bientôt; l'autorité ecclés. le fit arrêter à Bruch-sal et il fut excommunié. Il passa avec son troupeau à l'Égl. évangélique, et fut successivement pasteur à Graben, Spôck et Stafford. f 1862 après un long et heureux ministère. Auteur de Sermons et de plus, écrits de circonstance.

HENKE lo Henri-Philippe-Conrad, né à Heh-len3 juill. 1752, élevé à Brunswick, étudia à Helmstâdt, devint prof, de philologie 1778, de théol. 1780, abbé du couvent de Michaelstein, surintendant de Schôningen 1801, vice-président du Consist. 1804. f 2 mai 1809. Rationaliste, auteur d'une Hist. ecclés. très estimée et des Lineamenta institutionum fidei Chr. hist.-criticarum.

2<> Son fils Ernest-Louis-Théod.. prof, à Iéna jusqu'en 1836, puis directeur du séminaire des prédicateurs, et en 1839 prof, de théol. à Marbourg, Auteur de divers écrits sur Calixte, Conrad de Marbourg, Fries, le Consensus des théol. saxons, etc.

HÉNOTIKON (unité, ou unionisme), édit de l'emp. Zénon, par lequel en 482, contrairement à l'édit de Basilisque en faveur du monophysi-tisme 476, il entendait ramener la paix et mettre un terme aux discussions théologiques. A l'instigation d'Acacius il déclarait seul valable le symbole de Nicée, avec les additions de Constantinople 381, et condamnait également le nestorianisme et l'eutychianisme; il accordait peu d'importance au conc. de Chalcédoine, et passait entièrement sous silence la lettre de Léon à Flavien. Le pape Félix ayant excommunié Acacius, auteur réel de l'Henoticon, il y eut schisme entre les Égl. d'Orient et d'Occident, jusqu'à l'avènement de Justin 1er, 518, qui reconnut de nouveau l'autorité du conc. de Chalcédoine.

HENRI 1° Henri dit de Lausanne, moine de Cluny, probablement italien de naissance, quitta son couvent vers 1116 et commença ses tournées missionnaires en costume de pénitent. C'est peut-être de Lausanne qu'il partit; de là son surnom. Il prêcha successivement au Mans, à Poitiers, à Bordeaux, à Toulouse, et partout il produisait une vive impression sur le peuple. Le clergé même l'accueillait avec plaisir et lui pardonnait l'énergie de sa prédication, mais lorsqu'on le vit s'engager toujours plus avant, ne rien ménager, attaquer le clergé et la hiérarchie, nier le mérite des œuvres extérieures, se prononcer contre le sacrifice de la messe, les choses changèrent. Au Mans, pendant qu'il prêchait, la foule fondait en larmes et pleurait sur ses péchés. D était devenu si populaire, et sa doctrine avait jeté de si profondes racines que lorsque l'év. Hildebert, revenant de Rome, voulut donner aux habitants la bénédiction épisco-pale, ils la refusèrent. Henri dut quitter le Mans et ses partisans reçurent le nom de hen-rieiens; ils se confondirent souvent aussi avec les pétrobrusiens, soit à cause de l'analogie des doctrines, soit à cause des rapports d'Henri avec Pierre de Bruys. Il se rendit en Provence pour y prêcher; arrêté à Arelate, il fut emprisonné 1134 par ordre du conc. de Pise, mais réussit à s'échapper et recommença ses prédications. Hugo de Rouen et saint Bernard le combat-lirent; le pape envoya contre lui son légat Al-béric pour extirper l'hérésie. Saisi de nouveau H48, Henri fut jeté en prison sous la garde de l'év. de Toulouse, et mourut on ne sait quand. Ses partisans lui survécurent.

2<> H., archidiacre de Hutingdon, vivait au milieu du 12m* siècle. Auteur d'une Hist. d'Angleterre qui va de Jules César à 1154; chronologie douteuse, mais bon à consulter à cause des sources auxquelles il a puisé.

3° H. de Gand, s'appelait Gtfthals; né 1220 à Muda, près Gand: théol. scolastique, disciple d'Albert-le-Grand, adversaire de Duns Scot, et prof, à la Sorbonne. f 1293, archidiacre à Tournai. Auteur d'une Sumrna théologien, et de: Quodlibeta theologica.

4° H .de Langenstein, dans la Haute-Hesse; inaitre de philos, à Paris 1363; prof, de théol. et vice-chancelier de l'univ. 1375, fut appelé par Albert II, 1390. comme prof, de théol., d'astronomie et de mathématiques, à Vienne où il f 1397. Très savant, il a rendu des services en astronomie en écrivant contre l'astrologie. Son principal ouvrage est une critique des mœurs des couvents et du clergé; il demande un conc. universel dans l'intérêt de la paix et de la réforme de l'Église: Concilium pacis, etc., 1381. Comme il porte aussi le nom de H. de Hesse, on l'appelle quelquefois l'ancien, pour le distinguer du suivant.

5° H. de Hessen, le jeune; chartreux, prieur du couvent de Marie en Gueldre, et depuis 1400 recteur de l'univ. de Heidelberg. Connu par de bons travaux exégétiques. f 1427.

6° H .de Gorkum, oïl Gorcome, vers 1450, vice-chancelier de l'univ. de Cologne: commentateur d'Aristote et du p. Lombard; auteur d'un livre contre diverses superstitions ecclésiastiques.

7° H. de Ziitphen, v. Moller.

Plusieurs empereurs, rois et princes du nom d'Henri ont été mêlés à l'hist. de l'Église; il en est parlé aux articles spéciaux. Nous ne mentionnons ici que ceux qui ont joué un rôle exceptionnellement important.

1° Henri IV, emp. d'Allemagne, célèbre par ses luttes avec Grégoire VU, q. v. était fils de Henri IH et lui succéda en 1056, âgé de 6 ans. Homme déréglé, faible, mal élevé, il investit des fonctions épiscopales des hommes indignes et fournit ainsi de nouveaux motifs à ceux qui lui contestaient le droit d'investiture. Fier d'avoir vengé sa mère contre ses oncles qui l'avaient dépossédée, et d'avoir battu les Saxons 1075, il voulut prendre parti pour quelques-uns de ses conseillers que le pape avait excommuniés comme simoniaques, mais cette maladroite prétention aboutit au voyage de Canossa, 1077. Il avait alors 27 ans. Mais Henri, soutenu par les

Lombards, et bien résolu d'effacer cette humiliation, profita d'un retour de l'opinion en sa faveur 1080, marcha sur Rome et la prit 1082. Il nomma son fils Conrad roi des Romains, puis le fit déposer et nomma à sa place son autre fils Henri 1097, qui se révolta à son tour sous le masque de la religion et finit par le faire prisonnier. Déposé par la diète de Mayence 1106, Henri IV réussit à s'échapper. Il vint à Liège, mais dans l'indigence et il y f de misère la même année 1106, âgé de 56 ans seulement.

2° Henri VI1L fils de Henri VII, roi d'Angleterre, né 1491, monta sur le trône en 1509. Il épousa successivement Catherine d'Aragon, veuve de son frère Arthur, dont il eut Marie-la-Sanguinaire; puis, après son divorce, Anne de Boleyn, 1532, dont il eut Élisabeth, et qu'il fit décapiter en 1536; Jeanne Seymour, qui mourut en couches en 1537, mère d'Édouard VI; Anne de Clèves, qu'il répudia pour cause de laideur; Catherine Howard, 1540, qu'il fit mettre à mort en 1542, sous prétexte d'adultère; enfin Catherine Parr, qui lui survécut. Catholique fervent il combattit la Réforme et écrivit lui-même contre Luther un traité auquel le réformateur répondit vivement; mais le pape ayant refusé de sanctionner son divorce avec Catherine d'Aragon, il rompit avec lui et se fit proclamer Protecteur et chef suprême de l'Égl. d'Angleterre, ce qui lui permit de se remarier quand et comme il voudrait. Toutefois, pour qu'on ne se méprit pas sur la portée de sa rupture avec Rome, il maintint intacts le dogme et le culte cathol., et persécuta les protestants de son royaume aussi bien que les catholiques qui refusaient de le suivre dans sa nouvelle Eglise. La terre fut arrosée du sang des martyrs. Ce prince passionné, voluptueux et cruel, f 28 janv. 1547. Ses trois enfants régnèrent l'un après l'autre; d'abord le fils, le pieux Édouard VI, qui aima la Réforme, 1547-1553, puis sa fille aînée, el enfin Élisabeth.

3° Henri IV, roi de France, né 13 déc. 1553, fils d'Antoine de Bourbon et de Jeanne d'Albret, reine de Navarre; élevé par sa mère dans les principes de la Réforme, et par Coligny dans l'art de la guerre. Il prit le titre de roi de Navarre après la mort de sa mère 1572, et épousa la même année, 18 août, la sœur du roi Charles IX, la jeune et licencieuse Marguerite de Valois. Le 24 août il échappa aux massacres de la Saint-Barthélémy, mais « à condition qu'il abjurât sa doctrine profane. > Il se fit vite instruire et le 16 oct. il était déjà si bon catholique qu'il interdisait le culte réformé dans le Béarn. La peur lui dicta des lâchetés dans ce sens; l'ambition lui en fit faire d'autres. Il se sentait prisonnier à la cour de France, et d'autant plus que Catherine lui disait qu'il était

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libre; il sentait le piège. Il accompagna Henri III à Avignon et se joignit à une procession de flagellants, maniant si mal la discipline que cela faisait rire toute la cour. Enfin en févr. 1576 il se décida d'aller rejoindre les protestants, et le 14 juin à Niort il rentrait dans l'Égl. réformée, en protestant qu'il ne l'avait jamais abandonnée de cœur, non plus que sa sœur Catherine. Il fut bientôt agréé comme le chef du parti des huguenots, titre que Condé lui céda volontiers, tout en y ayant des droits plus sérieux. ABlois il reprit aussi son titre de protecteur des Égl., qui lui donnait une certaine latitude pour diriger, et au besoin pour étouffer les discussions. Sa carrière militaire n'appartient pas à ce travail, non plus que sa vie privée, et l'on trouvera ailleurs les détails relatifs aux guerres de religion; v. France, etc. Il flotta longtemps, trompant tout le monde, et ne sachant probablement pas lui-même comment il finirait; cela devait dépendre sans doute des événements. Il avait besoin, à l'intérieur, des huguenots; en cas de vacance du trône; au dehors, des Etats protestants contre l'Espagne et l'Autriche. Aussi ne laissait-il échapper aucune occasion d'affirmer son attachement à la foi réformée. Quant aux catholiques, il les priait de croire à sa bonne foi; il se ferait instruire quand il en aurait le loisir, et il se soumettrait à ce que déciderait un concile, ou « une assemblée notable et suffisante. » Trompant ainsi tout le monde, se trompant lui-même et ne satisfaisant pleinement personne, il gagnait du temps et voyait venir. La guerre et quelques intermèdes de débauches lui donnaient le temps d'attendre et lui fournissaient un prétexte quand on le pressait trop. Le 16 nov. 1588, un mois après la bataille de Coutras. il présida l'assemblée politique de La Rochelle. L'assassinat de Henri III, 2 août 1589, le fit enfin roi de France; mais il eut encore à lutter plusieurs années contre Paris, contre les ligueurs, contre les Espagnols, avant d'être accepté de tous. Les victoires d'Arqués et d'Ivry, 1589 et 1590, relevèrent ses affaires. Le vieux cardinal de Bourbon était mort, Guise s'était évadé, la ligue se désorganisait; tout le monde était à la paix. Cependant il crut bien faire, et couper court pour l'avenir à toute récrimination nouvelle, en se reconvertissant encore une fois au catholicisme. Le 18 juill. 1593 il assista pour la dernière fois au prêche; le 23 il se fit instruire à Saint-Denis, opposa aux docteurs catholiques des passages de la Bible qui les embarrassèrent, mais comme il était décidé à faire ce qu'il appelait lui-même en plaisantant « le saut périlleux, • il se déclara convaincu, et le 25 il abjurait. Il se fit sacrer à Chartres le 27 févr. 1594, et jura l'expulsion des hérétiques, ce qui ne l'empêcha pas de donner l'Édit de

Mantes 6 févr. 1595, et l'Édit de Nantes, bien plus important encore, 13 avril 1598. Son mariage avec Marguerite ayant été déclaré nul. 1599, il épousa 1600 Marie de Médicis et dès lors se remit tellement entre les mains des jésuites, dont il avait peur, qu'il fit abattre pour leur plaire la pyramide commémorative où Jean Châtel était accusé d'avoir voulu l'assassiner a leur instigation. Cela ne lui servit pas à grand'-chose, car bientôt il fut assassiné par Ravaillae, 14 mai 1610, après avoir fait sacrer le 12 Marie qu'il avait nommée régente le 20 mars. Il laissait 6 fils légitimes et 11 adultérins qu'il avait reconnus, sans parler de beaucoup d'autres. Il avait 56 ans; sa forte constitution, rendue plus forte encore par l'éducation sévère de ses premières années, et longtemps entretenue par le travail et la fatigue, avait été ébranlée par l'irrégularité de ses mœurs et par des habitudes de débauche qu'il conserva jusqu'à son âge avancé. La goutte, qui le faisait beaucoup souffrir, et une éphidrose, qui le rendait insupportable à son entourage, étaient la suite de ses désordres et ôtaient beaucoup de son charme à un prince que ses qualités ont d'ailleurs élevé si haut.

HENRICIEXS, v. Henri lo.

HENSCIIEN. Gottfried, bollandiste, chargé des saints grecs, français et italiens, qui l'occupèrent jusqu'à sa mort. Il était né à Venrad près Gueldre 21 janv. 1600, et étudia à Bois-le-Duc. f 1681.

HÉRACLAS, élevé dans le paganisme ainsi que son frère Plutarque, fut amené au christianisme par la philos, néo-platonicienne, et employé par Origène comme catéchiste à Alexandrie, où il fut nommé évêque 232. + 274.

HÉRACLÉON, disciple de Valentin; gnosti-aue du 2®e siècle, vivait probablement en Egypte. A la fois plus logique et plus modéré que son maître, il conservait quelques idées de l'ancienne Egypte, tenait à l'embaumement des corps, et au moment de la mort employait certaines formules, adressées les unes aux puissances supérieures, les autres au démiurge. Auteur d'un Comment, sur Jean, dont Origène a conservé des fragments.

HÉRACLIUS, emp. d'Orient 610-641, fils d'un exarque d'Afrique, monta sur le trône en tuant Phocas. Les 12 premières années de son règne furent malheureuses. Assiégé dans Constantinople par les Avares, il vit l'Égypte et l'Asie Mineure aux mains des Perses. Il se débarrassa des premiers à prix d'argent, et réussit dans la seconde partie de son règne, en 628, à imposer aux Perses la paix en reprenant ses anciennes frontières. Il se fit restituer aussi le bois de la vraie croix. Lors de la conquête de Jérusalem. Héraclius, contrairement à son serment, fit mettre à mort tous les juifs, et le clergé ayant accepté auprès du patriarche la responsabilité de cet acte, on appela Jeûne d'Héraclius le jeûne établi à cette occasion. Les dix dernières années de ce faible et inepte monarque furent de nouveau misérables. Il voulut faire de la théol. sans l'avoir étudiée, et unir les orthod. et les monophysites, sans les avoir convaincus. Déjà en 622, dans une guerre contre les Perses, quelques monophysites lui insinuèrent que toute la question revenait à savoir s'il y a en Christ une volonté ou deux. Serge, de Constantinople, consulté par lui, répondit que l'admission d'une seule manifestation de la volonté divine ne contredisait pas l'Écriture. Une tentative de rapprochement fut faite en 633 sur cette base un peu vague, qui fut combattue par Sopho-nius, mais défendue par Serge et par Honorius de Rome. La dispute s'envenimant, Héraclius crut y mettre fin en publiant son Ekthesis (Exposé de la foi), composé par Serge, et donnant raison aux monothélètes, 638. En même temps il perdait Damas, Jérusalem, et presque toute l'Asie mineure.

HÉRARD, archev. de Tours 855-871, savant distingué, auteur des Capitula episcopalia, 858, qui contiennent des instructions à son clergé, sur les devoirs de la prédication et sur la direction des écoles.

HERBART, Jean-Fréd., né à Oldenbourg 4 mai 1776, étudia à Iéna, prof, de philos, à Konigsberg et à Gottingue, f 1841. Chef d'une école qui, sur le terrain de la morale, de la psychologie et de la pédagogie, a produit des hommes et des ouvrages remarquables, en opposition aux tendances spéculatives de Schelling et de Hegel.

HERBERT de Cherbury (lord Édouard), né 1581 à Montgommery, Galles, distingué par les qualités du corps et de l'esprit, fit de bonne heure de longs et nombreux voyages et obtint de grands succès auprès des dames de France et d'Angleterre. Il servit sous le prince d'Orange, fut nommé 1616 ambassadeur de Jacques auprès de Louis XIU, s'interposa en faveur des protestants, fut créé pair d'Irlande, puis d'Angleterre; fut pendant la guerre civile du côté du parlement, qui l'indemnisa quand son château eut été détruit, et f 1648. Il a le premier systématisé le déisme dans deux ouvrages: De veritate, Paris 1624, et De religione Gentilium, dans lesquels il cherche à prouver que toutes les religions reviennent à cinq vérités fondamentales: lo II y a un Dieu; 2o il faut le servir; 3o la vertu et la piété sont le vrai culte à lui rendre; 4o on doit éviter le péché et s'en repentir; 5° il y a des récompenses pour le bien et des châtiments pour le mal. Il regarde le christianisme comme la meilleure des religions, mais non comme absolument pure et vraie. —

Soufr. George f 1635 a publié quelques poésies sacrées, sous le titre: Le temple et le ministère de campagne.

HERBORN, univ. fondée 1584 par Jean l'ancien, de Nassau, avec le concours des villes et des États du bas Rhin. Elle brilla pendant un temps comme univ. réformée, et comme la seule qui professât les principes de Dordrecht. Les noms d'Olevianus et de Piscator firent sa réputation. Elle souffrit beaucoup pendant la guerre de 30 ans, ne recouvra jamais son ancienne importance, et fut supprimée par Napoléon. Ses biens furent affectés 1817 au séminaire des prédicateurs de Nassau.

HERDER, Jean-Gottfried, né 25 août 1744 à Mohrungen, Prusse orientale, fils d'un pauvre chantre, étudia à Konigsberg, entra dans renseignement à Riga où il fut appelé aussi aux fonctions de prédicateur de l'après-midi; donna sa démission à la suite de difficultés littéraires; se chargea de l'éducation d'un prince avec lequel il visita Paris et Strasbourg et fit d'illustres connaissances. A son retour il fut nommé pasteur à Btickebourg, à Schaumbourg-Lippe, et enfin 1776 à Weimar, comme surintendant-gé-néral et président du consistoire, f 18 déc. 1803. A côté de son caractère ecclésiastique dont il s'honora, et qu'il honora toute sa vie, on peut dire que la poésie et l'humanité furent deux traits distinctifs de sa nature, de ses tendances et de sa personnalité. La poésie et la religion ne faisaient pour ainsi dire qu'un dans son esprit, et ils étaient vivifiés et rendus féconds par l'idée, on peut dire par la passion dé l'humanité. Le cœur éclairait chez lui l'intelligence, et le sentiment a influé sur sa théol. en même temps qu'il éclairait d'un jour nouveau les beautés de la prophétie antique. Supérieur dans les genres les plus divers, à la fois savant et homme de goût, il a écrit sur tous les sujets, et ses œuvres compl. ne forment pas moins de 45 vol. 8°. On a de lui des sermons; 38 cantiques, des Dialogues sur Dieu et l'âme, contre Spi-nosa; un Traité sur la Poésie des Hébreux; ses Idées sur l'Hist. de l'humanité, trad. par Qui-net, 3 vol.; des Lettres sur l'étude de la théol.. qui ont relevé l'idéal du ministère évangélique; plusieurs dissert, sur la langue allemande, la décadence du goût, etc., couronnées à Berlin 1773. L'élévation de son caractère et de son esprit l'ont fait comparer à Fénélon.

HÉRÉSIE, erreur crue et professée, soit par une église, soit par un individu, sur un point de doctrine regardé comme essentiel et fondamental. Le mot s'emploie généralement en parlant des choses religieuses; il peut s'appliquer à d'autres par extension: une hérésie en politique, en peinture, en littérature. Dérivé d'un mot grec qui signifie choix, opinion, le mot hérésie a pu désigner primitivement la pensée indépendante s'écartant de la tradition; il a désigné ensuite la doctrine s'écartant des décrets des conciles approuvés par les empereurs; au moyen Age, les doctrines condamnées par l'Égl. et justifiables des tribunaux ecclésiastiques. Auj. sa signification a beaucoup perdu de sa rigueur. Hérétique9 c'est l'homme qui admet une hérésie. Hérésiarque, c'est celui qui en est l'auteur, le chef, l'inventeur.

HÉRIGAR, gouverneur de Birka, ou Sigtuna, Suède, conseiller et favori du roi Biôrn, vers 830, fut converti par Anschar, resta fidèle malgré toutes les difficultés, et devint à son tour un puissant et zélé missionnaire; f 852. Ses contemporains lui attribuent plusieurs délivrances merveilleuses.

HÉRIGER, d'origine incertaine, d'abord prof, et maître au couvent deLobbes, puis son abbé, f 1007. Auteur de plusieurs écrits: Gesta épis-coporum Tungrensium; Vie d'Ursmar, Vie de de Landoald, une Épître au moine Hugon sur les mathématiques et la chronologie; enfin un Traité du corps et du sang du Seigneur où il défend la doctrine de Paschase Radbert.

HÉRITAGE (droit d'), v. Dépouilles.

HERMANDAD (sainte), v. Confréries.

HERMANN, nom teutonique signifiant homme de guerre, et très fréquent en Allemagne où il rappelle le souvenir du célèbre vainqueur de Varus.

io Surnommé Billung à son baptême; fils d'un agriculteur saxon, nommé par Otton Ier administrateur de l'empire et duc de Saxe, pour assurer ses conquêtes sur les Wendes, 950. t 973.

2° Le Contrefait, né 1013, fils du comte Wol-ferat de Veringen, fut à cause de sa faiblesse mis dès l'âge de 7 ans au couvent de Reiche-nau, où il fut élevé et où il resta jusqu'à sa f 1054. « Prodige » de son siècle il se distingua dans toutes les branches des connaissances humaines, et fut à la fois théologien, philos., philologue, astronome, poète, musicien et mécanicien. Le plus important de ceux de ses ouvrages qui nous ont été conservés, est sa Chronique, qui va jusqu'à 1054 et a servi de source aux historiens postérieurs. Son Hist. de Conrad II et celle de Henri III sont perdues.

3° H. de Salza, grand maître de l'ordre teu-tonique 1210-1239. Jeunesse inconnue; prit part à l'assaut de Damiette 1219, négocia la paix avec le sultan, envoya sur la demande de Conrad de Masovie le grand-maître Balk avec une partie de ses chevaliers en Prusse, et finit par réunir à son ordre celui des Porte-épées, v. Frères 6°. Très estimé del'emp. aussi bien que du pape, il fut à plusieurs reprises accepté par eux comme arbitre. Il réconcilia de même Frédéric avec son fils Henri.

4° H. de Lehnin; probablement vers 1300 abbé du couvent de Lehnin, aux environs de Potsdam. Au commencement du 18rae siècle il parut sous son nom une prophétie, auteur incertain, concernant l'avenir du Brandebourg et de Lehnin; prophétie qui faisait l'espoir et la joie de l'ultramontanisme et qui a perdu beaucoup de sa valeur depuis 1866 et 1870.

5° H. de Fritzlar, mystique, vers 1340; probablement un laïque, qui se retira du monde et se voua à l'étude de la théologie. Il fit de grands voyages et visita l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne. On a de lui un recueil de Mélanges, empruntés à divers écrits religieux, mais réunis par une pensée commune; il y a des légendes, des explications et des notes utiles au point de vue du développement historique du mysticisme. Son travail intitulé La fleur de la contemplation est perdu.

6° H. de Busch, humaniste. Né 1468 d'une vieille et noble famille de la Westphalie, il étudia la littér. classique à Deventer et à Heidelberg, et revint dans cette ville comme maître après avoir visité l'Italie. Appelé à Cologne par Nuenar, il entra en conflit avec Hoogstraten et dut s'en aller, visita le nord de 1*Allemagne où sa réputation littéraire ne fit que grandir. Il ne put résider ni à Wittenberg 1510, ni à Leipzig, fut de nouveau chassé de Cologne par Hoogstraten 1517 et fut enfin nommé recteur de l'école de Wesel, 1518, où il écrivit son célèbre livre: Vallum humanitatis.

7o H. de Wied, fils de Frédéric 1er de Wied, prince-électeur de Cologne. Né 14 janv. 1477, il fut nommé chanoine en 1492 et archev. en 1515. Longtemps ennemi de la Réforme il interdit 1523 les écrits de Luther, fit brûler Klaren-bach, vota à Augsbourg contre les protestants, réprima durement comme administrateur de Pa-derborn et Munster toutes les innovations 1532, mais revint à des idées plus modérées après le conc. provincial de 1532. Introduit par Mett-mann auprès de Mélanchthon, il invita Bucer à une conférence à Haguenau, et le mit en rapport avec Pistorius, Hedio, Sarcerius et Mélanchthon et ils élaborèrent ensemble un projet de réformation. Les États l'approuvèrent, mais le chapitre le rejeta. L'arrivée de l'empereur, engagé dans la guerre de Gueldre, encouragea les chanoines. Ils en appelèrent au pape et à l'empereur, Hermann à un conc. national. Invité à se rendre à Rome, il refusa, fut suspendu le 8janv.

1546 et excommunié le 18 avril. La guerre de Smalcalde survint et lui ôta tous ses alliés. A la demande de l'emp., il donna sa démission en

1547 et rentra dans la vie privée, f 1552. Prince éclairé, excellent, il fut aimé de son peuple, respecté de l'empereur et n'eut contre lui que le clergé.

8° Nicolas H., chantre et régent à Joachims-thal, Bohême, compositeur distingué, auteur de plusieurs hymnes, musique et paroles, que Ton chante encore en Allemagne. Il mit en vers plusieurs sermons de son pasteur et ami Jean Mat-thesius. Il souffrit beaucoup de la goutte, et f 5 mai 1561.

HERMAS, probablement un laïque de l'Égl. d'Occident, quoique la tradition en fasse un ecclésiastique. Selon Muratori il aurait été fr. de l'év. Pie 1er, 142-157; selon d'autres ce serait un compagnon de saint Paul. Il y a beaucoup de vague sur cette figure, ainsi que sur l'œuvre qui porte son nom: Épître du Berger (ou Pasteur) d'Hermas. Ce travail un peu apocalyptique, se divise en 3 parties: Visions, Préceptes, Paraboles. Il jouit un moment d'une grande considération, au 2rac siècle, au point qu'on le rangeait parmi les livres sacrés et qu'on le lisait dans les assemblées du culte. Mais cette faveur dura peu; les doutes surgirent rapides et nombreux sur l'authenticité et la date supposée de cette Lettre. Déjà Tertullien en parle avec peu de ménagement. Le contenu nous transporte au moment des controverses montanistes, mais il y règne tant de confusion queDorneret Ritschl y voient un livre pour,, tandis que d'autres croient que c'est un livre contre le monta-nisme. On n'y trouve en tout cas ni la simplicité, ni la grandeur apostolique. Le texte latin en a été publié pour la i™ fois par Lefèvre d'Étaples 1513, et réimp. par Cotelerius dans ses Monuments 1672; trad. par Legras 1717. Le texte grec, longtemps perdu, a été retrouvé il y a quelques années à Leipzig, éd. Anger et Din-dorf 1856, Tischendorf, 1856 et d'après lui Hil-gcnfeld, 1866. Peu intéressant au point de vue dogmatique, ce livre a de la valeur comme monument ancien; il montre l'importance attachée au 2me siècle à l'Évang. de Jean, et aussi aux 3 synoptiques. Jésus n'y est pas une fois appelé par son nom.

HERMÉNEUTIQUE (interprétation), science qui a pour objet les règles à suivre pour déterminer le sens exact d'un texte ou d'un passage de l'Écriture. V. Exégèse. Schleiermacher l'appelle la technique de l'explication d'un discours ou d'un écrit. Parmi les auteurs qui ont traité de l'Herméneutique en théologie, il faut nommer en français Reuss et Cellérier. Le mot s'emploie aussi en philologie et en jurisprudence.

HERMÈS lo Jean-Auguste, théol. protestant, ué 24 août 1736 à Magdebourg, étudia à Halle, fut aussi un prédicateur distingué. D'abord évangélique, il finit par le rationalisme. Il occupa successivement différents postes, Hor-schenburg, Wahren, Jérichow, enfin Dittfurth et Quedlinburg, où il fut nommé conseiller ecclés. et surintendant, 1800. f 1822. Son Manuel de la religion, qui appartient à l'époque vivante de son ministère 1779, a été trad. en français par la reine Élisabeth de Prusse, veuve de Frédéric II, 1784.

2o Georges-Henri, théol. catholique, né 22 avril 1775 à Dreyerwald, près Munster où il étudia et fut nommé prof, au gymnase, puis prof, de dogmatique 1807; enfin prof, delà même branche à Bonn 1820. f 26 mai 1831. On a de lui des Recherches sur la vérité intérieure du Christianisme 1805; une Introd. philos, à la théol. chrét.-catholique 1819-1829, et un volume posthume: Dogmatique chrét.-catholique, publié par Achterfeld, Bonn. Dans ces deux derniers ouvrages, partant des principes de Kant, il cherche à prouver que les idées de Kant et celles de Fichte, qu'il avait beaucoup étudiées, sont inconciliables avec le christianisme; mais il essaie en même temps d'établir par les voies rationnelles la vérité de la foi catholique et son accord avec la raison. Cette tentative fut d'abord bien accueillie, et ohtint de nombreuses adhésions, notamment dans les universités qui ne demandaient pas mieux que d'allier la philos, à la théol. Mais le clergé comprit que sous le bénéfice d'une alliance momentanée se cachait l'absorption de la foi par la raison, et que VHermésianùme, comme on l'appela, conduisait nécessairement, soit à l'incrédulité, si la raison étouffait la foi; soit an protestantisme, s'il aboutissait à la conciliation. Il se hâta donc de protester, et l'archev. de Cologne se mit énergiquement à la tête de cette campagne, dans laquelle il fut aidé surtout par les théologiens du sud de l'Allemagne et par la Gazette ecclésiastique d'Aschaffenburg. La cause fut portée à Rome, et un bref du pape, 25 sept. 1835, condamna Thermésianisme comme contraire aux traditions de l'Égl. et comme frayant la voie à toutes les erreurs, puisque partant du doute il demandait à la raison la connaissance des vérités surnaturelles. C'est en vain que Braun et Elvenich se rendirent à Rome pour obtenir un adoucissement de la sentence, en alléguant qu'on avait mal compris Hermès. Droste de Vischering, qui n'avait jamais été favorable au prof, de Bonn, s'autorisa du bref pour agir sans retard contre leshermésiens.Les représentants les plus autorisés du système, Braun et Achterfeld, continuèrent la lutte dans leur Journal de philos, et de théol. catholique, mais sans autre résultat que de provoquer un nouveau bref de Pie IX, 1847, confirmant celui de 1835, et mettant à l'index les écrits de l'éminent professeur.

HERMÈS-TRISMÉG1STE (Mercure trois fois grand), nom grec de Thoth, le Mercure des Égyptiens, la personnification des arts et des sciences, et le symbole du sacerdoce. On lui attribuait l'invention des hiéroglyphes, et on le faisait le patron de l'alchimie et de toutes les sciences occultes, qui ont été conservées à l'humanité par une série de sages qu'on a appelés la Chaîne hermétique, et dans une foule d'ouvrages connus sous le nom de Livres hermétiques. Ces écrits, en tout cas plus récents que le christianisme, contiennent les doctrines des néoplatoniciens postérieurs. On nomme surtout le Poemander ou Pasteur, les Définitions d'Es-culape, les Horoscopes, etc. Ils sont réunis dans la Nova Philosophia, de Patricius; Venise 1593.

HEHMIAS 1° philos, grec chrétien, auteur d'un ouvrage d'apologétique intitulé: Dia&yr-mon, Destruction des philos, du dehors, dans lequel, traitant de l'origine des choses, de l'âme, de Dieu, il combat la méthode et les résultats de la philos, païenne. Il doit avoir vécu au 5™ siècle, et non au 2^ 0u 3,ne, comme on l'a cru longtemps. Impr. Zurich 1560 par Fugger; Leyde 1840, par Menzel. — 2° v. Sozomène.

HERMOGÈNE, faux docteur africain, contemporain de Tertullien qui écrivit contre lui. On croit qu'il était peintre. Il enseignait l'éternité de la matière, sur laquelle Dieu agirait plastiquement d'après les principes de l'harmonie et de la beauté. Les éléments matériels, en opposant de la résistance à l'action de Dieu constituent le mal, mais le mal sera peu à peu surmonté et vaincu. Le nom d'Hermogène est aussi mentionné par Philastrius et Augustin, mais avec des données un peu différentes de celles de Tertullien, de sorte que quelques-uns ont cru qu'il s'agit d'un autre personnage du même nom.

HERRNHUT, bourg de la Lusace, Saxe, construit en 1722 sur le Hutberg, propriété de Zinzendorf, par Christian David, deux Neisser, Michel Joschke et d'autres émigrés moraves fuyant la persécution. Il ne comptait d'abord que 3 maisons. L'année d'après 3 autres Neisser arrivèrent avec leurs familles, 18personnes; en 1724, puis en 1725, d'autres encore. C'est en 1724 qu'ils donnèrent à leur établissement son nom, qui signifie Garde, ou Protection de Dieu. Les réfugiés affluaient, mais la colonie veillait à ne recevoir autant que possible que des échappés de la persécution, et le 12 mai 1727 elle se constituait en commune religieuse, luthérienne de doctrine, mais avec une discipline et une organisation indépendante. Elle se composait alors d'environ 300 frères et sœurs, dont la moitié venaient de Moravie. En tout 34 maisons. Ce fut une fête à la fois joyeuse et solennelle. L'art. 1er de la constitution, ou des statuts, portait que Herrnhut ne devait pas être considéré comme un bourg ou une ville naissante, mais comme une institution établie pour des frères. Une vie religieuse intense caractérise cette époque: le 13 août la petite église se rendit en masse à Berthelsdorf, pour communier avec les chrétiens luthériens de l'endroit, et le pasteur Rothe lui-même sentit d'une manière exceptionnelle l'influence de l'Esprit de Dieu. En 1731 seulement, la petite église, sans se séparer de la grande, décida d'avoir ses communions spéciales, accompagnées d'agapes; elle y joignit même pendant quelque temps la cérémonie du lavage des pieds. Les besoins de l'œuvre missionnaire décidèrent le petit troupeau à demander à l'év. Jablonsky de Berlin, la consécration épiscopale pour D. Nitschmann, 1735; Zinzendorf la reçut également en 1737, sur le conseil du roi de Prusse, ce qui donna une consécration nouvelle à son titre de Président, ou Préposé des Frères. De nouvelles communautés s'étant formées dans la Wettaravie, en Silésie et en Lusace, et un arrêté général prussien les ayant soustraites à l'autorité des consistoires, ce fut un pas de plus dans leur constitution comme Egl. des frères, au lieu de l'idée primitive qui consacrait bien leur vie en commun, mais au sein même de l'Église. Peu à peu ils se constituèrent d'après les formes de l'ancienne Église morave. dont ils reprirent le nom; mais longtemps ceux qui ne les connaissaient que superficiellement, les désignèrent sous le nom de leur village et les appelèrent herneutes, ou hernouies. Zinzendorf ayant donné sa démission d'évêque et Dober celle d'ancien en chef, 1741, le gouvernement de régi, passa à la conférence générale, sans que cependant le comte renonçât à exercer une certaine influence, qui fut même reconnue en 1744. Plusieurs synodes tenus a Marienborn, Barby, Herrnhut, de 1741 à 1775, ont établi que l'autorité suprême appartient à la conférence des Anciens de l'Unité. Une conférence provinciale est à la tête de chacune des 3 provinces (Continent, Grande-Bretagne, Amérique). Enfin chaque communauté s'administre elle-même au moyen de pasteurs, de prédicateurs, d'anciens, de diacres et de chœurs. Les hernhoutes ne se distinguent par aucune doctrine particulière, et comptent dans leur sein des luthériens, des réformés et des moraves. Leur principal livre symbolique est la Idea fra-trum de Spangenberg, 1778. Ils appuient avec un réalisme quelquefois exagéré sur le salut par les plaies de Christ. Ils attachent de l'importance au texte du jour et consultent volontiers le sort. Leur zèle missionnaire est très remarquable. Dès 1733 ils évangélisaient le Groenland; bientôt après les Antilles. En 1739 ils comptaient déjà 39 postes ou stations. Auj. ils sont au Labrador, aux Indes orientales, aux Antilles, à Surinam, au sud de l'Afrique, chez les Mosquitos, avec 82 stations, 171 missionnaires, et 78,000 chrétiens indigènes. Ils ont également rendu de grands services à l'éducation; leurs établissements, fondés d'abord pour la noblesse, se sont ouverts peu à peu à toutes les classes. En 1750 ils ont fondé un pédago-gium à Hennersdorf, transféré 1805 à Niesky; puis un séminaire pour pasteurs à Gnadenfeld. Leur œuvre de la Diaspora, ou Dispersion, consiste moins à faire des prosélytes à leur Société qu'à grouper, partout où ils sont, les chrétiens vivants et réveillés, et sous ce rapport ils ont servi la cause de l'Évangile en bien des lieux. A Bâle, Kônigsberg, Breslau, Stockholm et ailleurs, ils ont formé de petites sociétés qui, sans se séparer de l'Égl. nationale, ont des pasteurs à elles et célèbrent leur culte dans des salles à elles, d'après le rite morave. Il faut nommer enlin, parmi les causes de la si grande influence que les moraves ont exercée, leurs beaux cantiques et leurs livres de piété. Herrnhut a auj. de 1500 à 2000 habitants, tisseurs, chapeliers, couteliers; mais les hernoutes comptent sur le continent 20 communautés avec 7000 âmes; en Angleterre 36 communautés avec 5000 âmes; en Amérique 33 avec 8500 âmes, sans parler des missions et des sociétés simplement alliées aux frères. Les hommes les plus distingués de l'œuvre morave renouvelée sont Ghr. David, les Nitschmann, Zinzendorf, Spangenberg, Alber-tini, etc. Leurs élèves ont été fort nombreux et chaque pays peut en citer plusieurs; Schleiermacher n'a jamais oublié ce qu'il leur devait, v. A. Bost, Hist. des Fr. deBoh. et de Moravie.

HÉRULES, peuplade germanique et barbare, rude et grossière, qui n'embrassa le christianisme que par force sous Justinien, et qui n'en resta pas moins attachée à ses idoles et à son culte dont les sacrifices humains faisaient partie. On les aperçoit pour la l'e fois au 3™ siècle, établis au nord de la mer Noire, et alliés des Goths. Soumis un moment par Hermanaric. ils se relèvent après la mort d'Attila 435, fondent un empire puissant, sur les bords du Danube, puis, sous Odoacre et avec l'aide des Turcilin-giens, ils envahissent l'Italie, prennent Rome; forcent Augustule à donner sa démission, et mettent fin à l'emp. d'Occident, 476. Mais à leur tour ils sont défaits par les Ostrogoths 495. et après avoir habité quelque temps l'Illyrie, puis la Germanie, chassés de partout à cause de leurs brigandages, ils disparaissent de l'histoire au 7me siècle.

HER ViEUS lo Natalis, surnommé le Breton; célèbre dominicain, né en Bretagne, étudia à Paris, professa de 1307 à 1309, fut élu provincial de l'ordre en 1309, 14«>e général en 1318. 1 1323 à Narbonne. Thomiste zélé, il commenta les 4 livres des Sentences de P. Lombard, et écrivit sur le Pouvoir ecclés. et papal.

2° H. du Bourg-Dieu, prieur dominicain du couvent de ce nom, f 1145; auteur d'un Gomment. sur Ésaïe. Augsb. 1721.

HESS lo Jean, né 23 sept. 1490 à Nuremberg, fils d'un riche marchand, d'une famille distinguée; étudia à Zwickau, Leipzig, Witten-berg, entra dans la carrière ecclésiastique en 1511, fut secrétaire de l'év. Turzo en 1513 à Breslau, puis précepteur des fils du duc Charles de Mtinsterberg à QEls. De là il alla à Bologne où il fut sous-diacre en 1519, à Ferrare où il devint docteur, puis à Rome, 1520. Turzo lui donna alors en Silésie le triple canonicat de Neisse, Brieg et Breslau. Ordonné prêtre, Hess fut appelé à Breslau, où il attira de nombreux auditeurs par son talent, et surtout en leur donnant la Bible comme règle de foi. Dans un voyage à Nuremberg, 1522, il accentua encore ses idées évangéliques, si bien qu'il fut nommé pasteur à Breslau, juin 1523, à régi, de Sainte-Marie-Madeleine. Il consacra dès lors tout son temps aux malheureux. Après avoir longtemps demandé en vain l'établissement d'un bureau de bienfaisance, il finit un jour par refuser de prêcher, disant: « Je ne peux pas passer sur le corps des malheureux qui encombrent la porte de mon église. » Les magistrats prirent la chose à cœur, et l'on fonda 7 mai 1525 le premier bureau de bienfaisance, et un hôpital 21 juillet 1526. Hess eut à subir de nombreuses attaques des adversaires de l'Évangile; une discussion publique qu'il soutint contre eux amena de nouveaux adhérents à la Réforme. Frappé en chaire d'une attaque d'apoplexie, il t le lendemain 6 janv. 1547. Ses dernières paroles furent: « Seigneur Jésus, délivre-moi. » Il avait connu Luther et Mélanchthon à Wittenberg 1519.

2° Jean-Jacques, né à Zurich 21 oct. 1741, fils d'un horloger; consacré en 1760, fut jusqu'en 1766 suffragant de son oncle à Neften-bach, près Winterthour; puis diacre à Zurich, pasteur de la cathédrale, et en 1795 antistès. C'est lui qui rédigea 1803 les ordonnances ecclés. synodales. Il fut le soutien de l'Égl. dans les temps difficiles de l'invasion étrangère. Il a servi la cause évangélique par ses nombreuses publications, 23 vol. 1826: Les 3 dernières années de la Vie de Jésus 1767; Jeunesse de Jésus 1773; Hist. des Apôtres 1775; La doctrine du royaume de Dieu 1819; Hist. des Israélites 1788, Sermons, etc. A la fête de la Réformation, il reçut le brevet de Dr en théol. des univ. de Tubingue, Iéna et Copenhague. Tombé malade en 1819, il ne remonta plus en chaire, f 1828.

HESSE. L'histoire des origines de la Réformation dans la Hesse se rattache à celle de Phi-lippe-le-Magnanime, q. v. Après avoir longtemps hésité, il se décida en 1524 à faire venir des prédicateurs évangéliques, en 1525 il se prononça pour la Réforme; en 1526 il appela

Lambert d'Avignon et organisa la ligne de Tor-gau. Il signa en 1530 la confession d'Augsbourg, mais pencha toujours vers les doctrines de Zwingle, et se prononça en 1539 et en 1566 dans le sens de la For m. de Concorde de Strasbourg, qui fit règle dans ses États. Sous son petit-fils Maurice, la Réforme s'accentua davantage dans le sens calviniste, et le catéchisme de Heidelberg fut introduit, à côté de celui de Hesse, comme livre symbolique officiel. Dans la Hesse-Darmstadt au contraire, qui fut donnée au 4me fils de Philippe et qui s'agrandit par la mort de deux frères, ce fut le luthéranisme qui l'emporta, et en 1607 Louis V fonda l'univ. de Giessen, luthérienne, en opposition à celle de Cassel, réformée. Mais avec le temps, et avec les agrandissements successifs du grand-duché, les réformés et les catholiques introduisirent des éléments nouveaux dans le pays, et son caractère confessionnel en fut modifié. Les cathol. se rattachant à l'évêché de Mayence ont, surtout depuis l'arrivée de l'év. Ketteler 1850, obtenu une certaine prépondérance4 que la constitution de l'emp. d'Allemagne a seule ramenée à ses limites légitimes.

HËSSEL, Léonard, prof, de théol. à Louvain, délégué 1551 au conc. de Trente, où il mourut. Il fut remplacé par Baïus.

HESSELS, Jean; né 1522 à Louvain, ou à Arras; prof, de théol. à l'abbaye des Prémontrés du Parc, près Louvain; puisa Louvàin. Partageant les idées augustiniennes de Baïus, il fut envoyé avec lui à Trente 1563, et f 1566, peu après son retour. Il a composé surtout des écrits de controverse. Le principal, publié à Louvain 1571 et 1572, est son Catéch. de la doctrine chrétienne; dans son chapitre des sacrements il n'en mentionne que 3, le baptême, la confirmation et la cène. On ignore si c'est la mort qui l'a empêché d'aller plus loin.

HESSHUSEN, Tilemann, né à Wesel, Clèves, 3 nov. 1527; théol. luthérien d'un grand talent, mais d'un caractère âpre et violent, qui le rendit partout impossible. A 25 ans il était Dr en théol., surintendant et premier pasteur à Goslar. Destitué en 1556 parce qu'il excitait le peuple en attaquant les mœurs du bourgmestre, il vint à Rostock comme prof, de théol. et se fit renvoyer à cause de ses exigences en matière de discipline; à Heidelberg 1557, à cause de ses disputes sur la Cène avec le diacre Klebitz; en 1560 à Brème, à cause de ses procédés contre Hardenberg; à Magdebourg, à cause de ses sermons de controverse; à Wesel, à cause d'un traité contre les papistes; à Iéna, où il vint après un ministère de 4 ans à Neuburg, il attaqua les théol. saxons, le prince le congédia; il passa à Kônigsberg, comme év. de Sameland, et Wigand le fit renvoyer comme faux docteur 1577; enfin à Helmst&dt il attaqua Ghemnitz et batailla bravement jusqu'à sa f 1588. Il a laissé un Compendium de dogmatique.

HÉSYCHASTES, moines mystiques du Mont-Athos, qui, au 14®e siècle, prétendaient que l'homme pieux, en se retirant du monde, en s'abstrayant en lui-même, en baissant la tête d'une certaine manière, pouvait arriver à voir la lumière divine, même physiquement. On les appelait par moquerie omphalapsychot, les âmes du nombril. Ils furent combattus par Barlaam et par Grég. Acindynus, mais comme ils étaient pieux, et surtout à cause des circonstances po-litiq. du temps, les 4 synodes de Constantinople 1341-1351 déclarèrent leur doctrine orthodoxe.

HÉSYCHIUS lo éditeur d'un texte des 70 et du N. T. adopté en Egypte; il est mentionné par Eusèbe et Jérôme. — 2o prêtre de Jérusalem vers 433, auteur de plus, ouvrages exégét. et homilétiques. Il faut peut-être attribuer quelques-uns de ces derniers au suivant. — 3° prêtre vers 600, puis év. et patriarche de Jérusalem, mentionné dans les œuvres de Grég.-le-Grand. — 4o savant grec d'Alexandrie, vers la fin du 4me siècle, auteur d'un Lexique grec, découvert par Musurus, et publ. à Venise 1514: souvent réimpr. — 5o Chroniqueur, surnommé VIllustre; d'après Suidas un fragment de sa Chronique, sur les Antiquités de Constantinople. existerait encore. On croit qu'il était de Milet, 6me siècle.

HÉTÉRODOXIE, proprement doctrine autre. Se dit en général d'une doctrine autre que celle qui est enseignée par l'Église, mais comme il y a plusieurs Églises, le mot ne peut avoir qu'un sens relatif, et chacun regardera naturellement comme hétérodoxes les doctrines qu'il n'admet pas.

HETZER, Louis, né à Bischofszell, chapelain à Wadenschwyl, s'attacha un moment à Zwingle, combattit le culte des images, se rendit en 1524 à Augsbourg, d'où il fut banni l'année suivante pour avoir attaqué la doctrine de l'eucharistie; visita successivement QEcolampade à Bâle, Denk à Strasbourg; répandit dans le Pa-Iatinat ses doctrines mystiques et radicales sur sur la loi et l'Écriture, niant la divinité du Sauveur; banni à la suite d'une conférence à Worms, dans laquelle il avait eu le dessous, il vint à Constance, 1528. Là on découvrit que ses mœurs ne valaient pas mieux que sa doctrine; il fut condamné à mort et décapité. Sa fin fut meilleure que sa vie.

HEUBNÉR, Henri-Léonard, directeur du séminaire à Wittenberg, né à Lauterbach 1780; il étudia à Wittenberg où il passa sa vie, successivement pasteur et professeur, f 1853. Il a publié la petite Concordance de Btlchner. On a aussi de lui un ouvrage posthume: Explic. pra-tiq. du K. T.

HEUMANN, Christophe-Auguste, né 3 août 1681 à Altstâdt, Thuringe. Il perdit de bonne heure ses parents; sa jeunesse fut difficile et laborieuse. Il fit d'excellentes études à Iéna, voyagea pour s'instruire, et occupa successivement différentes places k Eisenach et k Gôttin-gue. En 1745 il fut nommé prof, de théol., mais il donna sa démission en 1758, parce que ses vues sur la Cène étaient devenues celles de la conf. réformée, f 1763. On a de lui une trad. et une Explic. du N. T., et un traité posthume sur la Cène.

HEURES canoniques, ou régulières: terme de liturgie; ce sont les heures que les chanoines et les ecclésiastiques vivant en communauté doivent consacrer k la lecture des prières et au chant collectif des offices. On en compte 7 ou 8; les matines et les vêpres sont les plus importantes, l'une à 3 h. du matin, l'autre à 6 h. du soir. Puis viennent les petites heures: prime, à 6 h. du matin; tierce à 9 h.; sexte k midi; none à 3 h. Enfin vigile, ou mesonyktion, k minuit, que l'on réunit d'ordinaire avec matines. On donne aussi ce nom à l'office lui-même et aux différentes parties du bréviaire; elles se composent d'un Pater et d'un Ave,d'une hymne, d'une oraison, et se terminent par une prière pour les morts et l'antiphonie de la Vierge.

HEXAPLES (en latin sextuples), nom du grand travail d'Origène sur l'A. T. Il l'entreprit pour fixer le texte souvent corrompu, et pour corriger les inexactitudes les plus saillantes de la traduction des LXX. Pour cela il copia sur six colonnes parallèles le texte hébreu en lettres hébraïques, le même en lettres grecques, les Septante, et les traductions d'Aquila, de Sym-maque et de Théodotion, en y ajoutant pour quelques livres d'autres traductions. Il indiquait par des signes particuliers les variantes ou les additions les plus importantes. Cet immense travail, 50 rouleaux, périt probablement dans le sac de Césarée 653. Heureusement Eusèbe avait recopié la colonne des Septante, avec les corrections qu'Origène y avait ajoutées. Il n'en reste que des fragments, recueillis et publ. par Montfaucon, Paris 1714; réédités Oxford 1864.

HEY'iXLIN, Jean de Lapide, né k Bâle 1434, prof, à Bâle et à Paris, docteur en Sorbonne, occupa diverses places à Tubingue et Baden-Baden, devint en 1484 chanoine et prédicateur à la cathédrale de Bâle, et finit par se faire chartreux, 1487. f 1496. Il était réaliste. Il a écrit un Comment, sur la Logique d'Aristote, et a défendu l'immaculée conception de Marie.

HIÉRAKAS, ou Hiérax, moine égyptien fort savant, qui vivait à Léontopolis k la fin du 3me siècle. Il réunit autour de lui de nombreux disciples, et il leur enseignait que la différence principale entre l'A. T. et le christianisme, c'est que ce dernier interdit le mariage. Épi-phane et Arius l'accusèrent d'hérésie et de manichéisme; mais il se rapprochait plutôt d'Origène. Les moines qui se rattachèrent à lui, mais sans pousser l'ascétisme aussi loin, portent le nom de Hiéracites.

HEÉRAPOLIS, ville de la Grande Phrygie. mentionnée Col. 4, 13 (v. Dict. de la Bible). Elle compta parmi ses évêques Papias et Apollinaire.

HIÉRARCHIE. Ce mot, qui signifie la Domination des saints, désigne à la fois la puissance du clergé, et le clergé lui-même, cette corporation ecclés. formée d'échelons divers, qui, munie de droits et de privilèges, intervient officiellement entre Dieu qu'elle représente et les hommes qu'elle domine. En germe dans le sacerdoce mosaïque, la hiérarchie se développa comme institution chez les Juifs après leur retour de l'exil. Complètement étrangère au christianisme, elle y prit cependant naissance de bonne heure, par le fait de diverses circonstances naturelles ou politiques, et plus particulièrement par suite de sa fusion avec le paganisme k l'époque de Constantin. La hiérarchie étant une forme de gouvernement, peut se justifier de diverses manières, aussi longtemps qu'elle n'est autre chose que cela. Par la force des choses les év, ou pasteurs de campagne furent peu k peu subordonnés à ceux des villes, dont ils étaient d'abord les égaux; puis ils firent place à de simples presbytres ou anciens, et même en Orient à des évangélistes, ou visiteurs (le Conc. de Sardique dit à ce sujet que le titre d'évêque ne doit pas être abaissé). Ce fut le premier pas. Le second se trouva dans la nomination d'un archevêque, ou métropolitain, président ou inspecteur des autres év. de la province. Le 3n>e, dans l'établissement de pa -triarches. Le conc. de Nicée avait reconnu 3 é\. comme distingués au-dessus des autres par leur position, ceux d'Alexandrie, de Rome et d'Antioche (il dit cela au sujet du schisme de Mele-tius qui voulait secouer le joug de Pierre d'Alexandrie). Au siècle on y ajouta le siège de Constantinople. On les appela d'abord exarques, puis patriarches. Celui de Rome étant seul pour tout l'Occident avait ainsi une position privilégiée, et il fut naturellement choisi comme arbitre dans plusieurs circonstances, comme plus désintéressé dans les questions, souvent personnelles, qui s'agitaient en Orient. Sa considération alla en augmentant. Puis l'orgueil et l'ambition s'en mêlèrent; on chercha pour l'Égl. de la capitale du monde romain une haute origine; on y fit venir Pierre, qui n'y était probablement jamais allé. Au 7me siècle deux des sièges patriarcaux furent envahis par les sectateurs de Mahomet. Constantinople à son tour fit schisme et se sépara, C'était plus qu'il n'en fallait pour assurer à Rome la prééminence qu'elle recherchait, qui rendit des services à la chrétienté et à la civilisation pendant les siècles de troubles qui suivirent, et qu'on n'aurait peut-être jamais mise en question sans la manière dont elle en abusa et les excès de tous genres qui en résultèrent. L'idée de l'unité extérieure avait trouvé sa formule, mais dans l'uniformité des intelligences et dans l'oppression des consciences; l'opposition naquit aussitôt, et ne cessa pas un instant de revendiquer ses droits sous la forme multiple des nombreuses sectes qui parurent au moyen âge. On distingue en général 1° la Hiér. de droit divin, qui comprend les évêques, les prêtres et les diacres; 2° la Hiér. de droit ecclésiastique, qui compte les six degrés du diaconat; ostiaires, lecteurs, acolythes, exorcistes, sous-diacres et diacres; 3° la Hiér. de juridiction, qui comprend la catégorie si nombreuse des fonctions diverses instituées dans l'Église, administration, enseignement, justice, finances, culte, ordre de préséance des cardinaux, prélats, archev., abbis mitrés, etc. Deux systèmes très différents sont en présence: celui de la cour romaine, qui fait du pape le point de départ, l'unité, dont toutes les autres charges ne sont que des émanations, des délégations; et le système épiscopal, qui fait de l'évêque l'unité, le délégué direct de Dieu et des apôtres, le détenteur de la puissance apostolique, qui fait par conséquent de la réunion des évêques l'autorité souveraine en matière ecclésiastique, le pape ne pouvant modifier en rien ni la doctrine, ni la constitution de l'Égl. sans l'assentiment d'un concile. Mais dans les deux systèmes la hiérarchie constitue l'Église catholique toute entière; le peuple ne compte qu'en tant qu'il adhère; et l'Égl. supportera plus facilement des écarts dans la doctrine et dans le culte, qu'une résistance à son autorité. Le protestantisme est par son principe la négation de toute hiérarchie, et si quelques Églises en ont conservé la forme (Nassau, Prusse), c'est plus au point de vue honorifique et de juridiction, que comme différences de droits et de compétence. La Bible ne distingue pas entre évêque et prêtre; les deux mots sont habituellement employés l'un pour l'autre; cf. Actes 20, 28. et 17. Tite 1, 5. et 7., et c'est Ignace qui les a le premier distingués. Il n'est par conséquent aussi parlé nulle part de la succession apostolique, à laquelle Rome, l'Égl. anglicane et même un peu les Moraves (anciennement) attachent une si grande importance. L'ap. Paul insiste au contraire sur ce qu'il y a de spirituel dans l'œuvre du prédicateur de l'Évangile; lui-même se vante d'avoir été envoyé de Dieu et non par aucun homme, de n'avoir rien reçu des apôtres; c'est Dieu qui distribue ses dons aux hommes, et qui nomme les uns apôtres, les autres évangélistes et docteurs. Quand on sort de là on arrive bien vite à avoir des papes, des cardinaux, des év. et des prêtres, en un mot une hiérarchie, comme il y en a peut-être trop pour l'honneur de l'Évangile. — Au commencement c'était le troupeau qui nommait son évêque; dans l'empire franc et dans l'empire germanique, les troupeaux étant dispersés, les emp. s'en attribuèrent le droit, d'autant plus qu'ils en faisaient les traitements. Après la querelle des Investitures ce droit revint à l'Église, qui en remit l'exercice aux chapitres, avec la réserve que ceux-ci choisiraient une pertonagrata, c.-à-d. agréable au gouvernement. Quelquefois cependant, c'est l'État qui nomme, sous réserve de la confirmation par le pape.

HIÉROCLÈS, gouverneur de Bithynie, ennemi des chrétiens, souleva contre eux la persécution de Dioclétien 302. Il écrivit contre le christianisme un livre: Parole d'un Ami de la Vérité, qui ne nous est connu que par les réfutations d'Eusèbe et de Lactance. — Ne doit pas être confondu avec un autre Hiéroclès, d'Alexandrie, 5m* siècle, auteur d'un Traité de la Providence et du libre arbitre, dont il ne reste que des fragments.

HIÉRON YMITES, religieux qui se proposaient pour modèle la vie de saint Jérôme dans la grotte de Bethléhem. Il s'en est formé plusieurs branches. 1° Ceux d'Espagne, fondés 1370 par Vasco et Pierre Pécha et Thomas de Sienne, tertiaires de Saint-François: ils s'adonnèrent aux sciences et à l'enseignement, et se firent une grande réputation. Le couvent de Saint-Just leur appartenait. Leur costume se composait d'uue robe blanche, avec scapulaire brun et manteau noir. Les sœurs de cet ordre, réunies par Maria Garcias de Tolède dans le monastère de Saint-Paul 1375, ne prononcent pas de vœux. — 2° Ceux d'Italie, ou de l'Observance, fondés en Lombardie 1424 par Loup Olivet, ou Lope d'Olmedo, qui avec l'autorisation de Martin V, adoucit et réforma la règle de Thomas et la remplaça par celle de saint Augustin. — 3° Pierre de Pise, ou Gambacorti, fonda 1380 en Ombrie la Congrég. des ermites de Saint-Jérôme, avec une règle si austère qu'elle les fit passer pour sorciers; elle réussit surtout en Allemagne, mais dès 1444 elle crut aussi devoir adoucir sa règle et adopter celle d'Augustin; il en subsiste encore quelques couvents. — 4<> La Congrég. de Slint-Jérôme de Fiesole, fondée 1406 par Charles de Monte Granelli; règle d'Augustin. N'existe plus.

HIGDEN, Ralph, moine bénédictin de Saint-Werberg, Chester. f 1363. Auteur d'une Chro-niqne histor. en 7 livres, qui va jusqu'en 1357, souvent utilisée; impr. par Caxton, 1482.

HIL AI RE 1° év. de Poitiers, né au commencement du 4»e siècle de parents nobles, mais païens, se convertit dans l'âge mûr, avec sa femme et sa fille Apra, fut appelé à l'épiscopat vers 350. Éloquent et instruit, versé surtout dans l'A. T., il combattit l'arianisme et se rangea du côté d'Athanase. Il se fit remarquer aux conc. de Milan et de Béziers 355 et 356. et ayant refusé de se soumettre au décret de Milan, il fut exilé en Phrygie par les ariens qui étaient les maîtres. C'est là qu'il écrivit ses Douze livres sur la Trinité. Il reparut aux conc. de Séleucie et de Rimini, se rendit à Constantinople, obtint l'autorisation de rentrer dans son évêché, fut banni de nouveau pour avoir combattu Auxence, év. de Milan, arien, etf 368. Il avait eu une grande influence sur le développement spirituel de Martin de Tours. On a encore de lui un Traité des synodes, un Comment, sur Matthieu, un sur les Psaumes, et trois,écrits à l'emp. Constance; impr. Paris 1693. Style énergique, impétueux; Jérôme l'a appelé le Rhône de l'éloquence latine.

2<> Év. d'Arles, né vers 401 d'une famille noble dans le midi de la Gaule. Après une jeunesse orageuse, il fut vaincu par les prières d'Honorat, s'établit auprès de lui au couvent de Lérins pour étudier et se préparer à l'évangéli-sation; lui succéda comme directeur de l'œuvre, et plus tard comme év. d'Arles 429, où il se distingua par son activité, son zèle et son éloquence. Il maintint ses droits et son indépendance vis-à-vis de Léon 1er qUi? pour le punir d'avoir destitué l'év. Chelidonius, voulait transporter le patriarchat d'Arles à Vienne 445; en dépit des prétentions de Léon et d'un rescrit de Valentinien III, Hilaire réussit à sauvegarder les libertés de l'Égl. des Gaules. Il combattit les semi-pélagiens et + 449. Les principaux couvents de PAIlemanie se partagèrent ses reliques. On a de lui quelques opuscules et une Vie d'Honorat.

3° Pape461-468, originairede Sardaigne; pontificat sans éclat ni incident. Il avait été légat de Léon Ier au conc. des brigands à Éphèse, 449.

4° Diacre de l'Égl. de Rome, partisan de Lucifer de Cagliari. D'après Jérôme il aurait soutenu la nullité du baptême des hérétiques, et serait peut-être l'auteur du Comment, sur les ép. de Paul, connu sous le nom d'Ambrosiaster.

HILARION lo né 21 oct. 288 à Tabathe, près Gaza; étudia à Alexandrie où il se convertit au christianisme, se rendit auprès de saint Antoine, distribua ses biens à sa famille et aux pauvres, s'installa dans les solitudes de Majuma, près Gaza, où il fonda plusieurs couvents, inaugura en Palestine la vie monacale, et se fit un grand renom de sainteté. Après avoir visité le tombeau de saint Antoine, il parcourut l'Égypte, la Sicile et la Dalmatie, et vint + en Chypre dans un petit ermitage, 372. Vie, par Épiphanes.

2o Moine russe du lime siècle, prêtre de Bé-restov, nommé en 1051 métropolitain de Kiev, par les évêques et sur l'ordre de Iéroslav; homme savant et vertueux, d'après Nestor. Il est connu surtout comme le fondateur du célèbre couvent souterrain qui porte son nom (la caverne d'Hi-larion), et qui a exercé une si grande influence sur la culture de l'Égl. russe. Il s'était creusé sur une hauteur près de Kiev, au milieu des bois, une caverne où il allait se recueillir loin du monde. Abandonnée lors de son appel à l'épiscopat, cette caverne fut retrouvée longtemps après par un moine du mont Athos, Antoine, qui s'y établit comme ermite et vit bientôt venir à lui 12 autres moines, dont chacun se creusa une cellule souterraine, et ils se bâtirent une église en commun. Le nombre des moines augmenta, et en peu d'années la montagne fut remplie de cellules. Plus tard on y tailla tout un couvent, et il s'y forma des milliers de moines pour le service de l'Église, missionnaires, médecins, jurisconsultes, copistes, etc. C'est auj. encore une des curiosités de la Russie, On pénètre par en haut dans ces Catacombes d'Antoine; par d'étroits couloirs, et par d'étroits escaliers, noircis par la fumée des torches, limés par le frottement des visiteurs, on arrive aux niches et aux cellules où reposent depuis 8 siècles les momies ou les cadavres de ces austères travailleurs. Quelques-uns tendent la main aux baisers des passants. De petites lampes brûlent ici et là. On remarque entre autres les restes du pénitent Jean qui s'ensevelit jusqu'à la ceinture, le monument de l'historien Nestor, et en bas, sur les bords du Dnieper, 2 chapelles souterraines, dont l'une renferme le corps de saint Antoine.

HILDEBERT. Né 1057 à Lavardin, près Vendôme, il fut directeur de l'école, puis archidiacre et év. du Mans. Des difficultés de divers genres et des calomnies le décidèrent à se rendre à Rome, où il demanda à Pascal II de le relever de ses fonctions. A son retour il trouva son diocèse surexcité par les prédications de Henri de Lausanne, et il fit bannir l'hérétique. Nommé archev. de Tours 1125. f 1134. Ses œuvres ont été publ. par Beaugendre 1708; son latin est d'un excellent style, choisi et châtié: Lettres, Sermons, Poésies, Philosophie mo-raie etc *

HILDEBRAND, v. Grégoire VII.

HILDEGARDE, née 1098 à Bôckelheim, élevée au couvent de Disibodenberg, dont elle devint abbesse après la mort de sa tante Julia; se rendit ensuite avec 18 nonnes au couvent du mont Saint-Rupert, qu'elle venait de faire construire près de Bingen. f H79. Elle eut dès sa jeunesse des visions, qui furent1 reconnues par un concile tenu à Trêves sous Eugène III, 1148, et par saint Bernard. Elle les raconte dans des lettres, où elle traite aussi de plusieurs points de morale et de théologie, condamnant les excès de l'ascétisme et l'immoralité du cierge. Œuvres, Cologne 1566, 4<>.

HILDESHEIM, ville de Hanovre, célèbredans l'histoire d'Arminius (Hermann) à qui elle a élevé un monument; év. fort ancien, fondé 818 par Louis-le-Déb., sur la désignation d'un rosier qui. en retenant un reliquaire, marqua la place où l'égl. devait être bâtie. Les évêques en forent longtemps les seigneurs et se conduisirent comme tels, se battant et faisant le commerce. La Réformation y fut introduite vers 1521, mais non sans opposition; elle ne triompha décidément qu'en 1542. En 1562 le libre exercice des 2 religions fut proclamé.

HILDULF. év. de Trêves, f 754. Cette date ne cadre pas avec l'histoire, et il est possible que ce soit un personnage fictif. La légende le mentionne à propos de Geneviève; il aurait été nommé par Pépin. Il donna aux os de Maximin une meilleure sépulture, et avec son fr. Érard, de Ratisbonne, baptisa Odile qui par là recouvra la vue.

HILLEL 1<J le rabbin ou Yancien; quitta Ba-bylone à 40 ans, et vint à Jérusalem 36 av. J.-C. pour étudier la loi, pourvoyant à sa subsistance par les travaux les plus vulgaires. Ses talents et ses connaissances le firent bientôt remarquer; il fut placé comme rabbin à la tête de la synagogue, et fut nommé à 60 ans président du Sanhédrin. Dans ces fonctions il eut d'abord pour aide et collègue Ménahem, puis Schammaï, qui devint le chef de l'école rivale. Ensemble ils organisèrent l'étude scientifique et systématique de la Bible, qui ne reposait jusque-là que sur la tradition. Le caractère de Hillel, doux et bienveillant, se retrouvait dans ses explications de la loi; il prenait toujours le sens le plus facile et en même temps le plus spirituel, tandis que Schammaï faisait précisément le contraire, insistent sur la lettre des Écritures et ne voyant que le sens littéral. Le contraste s'accentua plus encore chez leurs disciples, et la lutte continua jusqu'à ce que, d'après la légende, une Bath-Kol (voix du ciel) donna raison à Hillel. Les juifs dès lors s'en tinrent à Hillel, à l'exception des caraïtes, plus scrupuleux, qui continuèrent de suivre Schammaï. Saint Jérôme lui attribue l'origine des scribes et des pharisiens, + 10, âgé de 120 ans? Quelques-uns croient que le chef d'école et le président du Sanhédrin sont deux personnages différents; c'est ce dernier, le saint, qui serait arrivé à 120 ans.

2o Le Prince, descendant du précédent et ar-rière-petit-fils de Juda-le-Saint, vivait au 3®* siècle. Avec lui finit le Sanhédrin. Il introduisit chez les juifs l'usage de compter les années depuis la création, et il composa vers 260 un cycle solaire de 19 ans, que les juifs gardèrent jusque sous Alphonse, roi de Castille. Origène le consultait souvent. Épiphane dit qu'il se convertit au christianisme au moment de mourir.

HILLER lo Philippe-Fréd., né 6 janv. 1699 à Mtlhlhausen sur l'Ems; pasteur à Steinheim depuis 1733, démissionnaire pour cause de santé, t 24 avril 1769. Poète très populaire par le nombre et la beauté de ses cantiques: le plus connu peut-être après Gerhardt, surtout en Wurtemberg. Il est l'auteur du Geistliches Lie-derkœstlein. — 2o Henri-Fréd.-Conrad, 1662-1726, avocat en chancellerie à Stuttgard, a aussi composé un recueil d'hymnes spirituels.

HIMERIUS, archev. de Tarragone, Espagne, écrivit au pape Damase pour demander divers renseignements relatifs à la discipline. Ce fut Siricius qui lui répondit 385, et cette réponse est intéressante comme un premier symptôme des prétentions papales.

HIKCMAR lo de Reims, né vers 806, d'une famille considérable de la Gaule franque, parent des Bernard de Toulouse et du Vermandois. Protégé par Louis-le-Déb. puis par Charles-le-Chauve, il fut élevé au couvent de Saint-Denis et travailla 829 à sa réforme. Nommé à l'archevêché de Reims 845, à 39 ans, il le dirigea37ans. Il a signé les actes de 39 conciles, qu'il a presque tous présidés. On a de lui 423 lettres, à des rois, reines, papes, archev. etc., et 70 ouvrages, grands ou petits, politiques ou religieux, édités par le père Sirmond, 2 vol. fo avec un 3me vol. du p. Cellot. Il a été mêlé à tous les événements de la cour, dont il était comme le grand directeur, et s'est touj. montré fidèle aux descendants légitimes de Charlemagne, tout en conservant vis-à-vis d'eux son franc parler. Il eut l'habileté de défendre à la fois, ou plutôt tour à tour, de manière à les équilibrer, les libertés gallicanes et la souveraineté de l'Église. Il condamna le divorce de Lothaire et de Teutberge et fut en grande faveur auprès de Léon IV, Adrien H, Jean VIII et même Nicolas I*r, mais se brouilla un moment avec ce dernier en soutenant qu'Ebbo. son prédécesseur à Reims, n'avait pas été un archev. légitime. Comme administrateur, il adressa à son clergé un grand nombre de ca-pitulaires, ou instructions pastorales, qui dénotent un grand sens pratique, habile et moral, avec une tendance tyrannique très caractérisée. Mais c'est surtout dans l'affaire de Gottschalk qu'il se fit une réputation, où le théologien ne fut malheureusement pas à la hauteur du métropolitain. Sur une lettre reçue de Raban, il fit condamner par le conc. de Kiersy, le moine qui prêchait la prédestination et qui agitait l'Église. Il n'avait pas examiné la question de bien près, et sa conduite souleva une vive opposition, soit à cause de la trop grande dureté de la sentence, soit à cause de la condamnation elle-même, qui semblait être un désaveu de saint Augustin. Prudence, év. de Troyes, écrivit à Hincmar pour défendre la doctrine attaquée; Ratramne, consulté par Charles-le-Chauve, prononça dans le même sens; Servatus Lupus ou Loup, abbé de Ferrières, soutint Gottschalk dans une lettre à Charles et, dans ses Trois Questions, il parle de ceux qui annulent la grâce en la faisant dépendre de quelque chose qui soit en l'homme. Voyant le nombre et la force de ses adversaires, Hincmar chercha du secours; il s'adressa d'abord à Raban, qui avait attiré sur lui cet orage, mais Raban, intimidé, refusa d'intervenir; ensuite à Amalaire, de Metz, dont l'ouvrage est perdu; puis à Jean Scott, dit Érigène, plus philos, que théologien, dont les hérésies sur la liberté humaine compromirent Hincmar et nuisirent beaucoup au parti qu'il voulait défendre. Après un nouveau recours à l'autorité, représenté par le conc. de Kiersy 853, Hincmar écrivit lui-même 857 et 859 deux ouvrages contre la prédestination, où il brille plus par le bon sens dans les idées générales que par l'esprit philos, ou théologique, et qui ne tirent pas avancer la question, f à Épernay 21 déc. 882, chassé de sa métropole par une invasion des Normands. On l'a comparé à Bossuet comme hardiesse dans ses abstractions et flexibilité dans la pratique. Il y a aussi du Machiavel dans les conseils qu'il donne à Charles: traité De régis persond, etc.

2° Hincmar de Laon, neveu du précédent, prit parti pour le pape Adrien II et pour Louis, frère de Lothaire, contre Charles-le-Chauve et contre son propre oncle. Hincmar de Reims résistait aux prétentions de Rome et disait qu'un pape ne peut être à la fois roi et évêque; c'est aussi à cette occasion qu'il appela les Décrétâtes une invention de l'enfer. Le neveu, cité successivement devant les conc. de Verberie, Attigny et Douzy, 869-871, y fut condamné et déposé. H en appela au pape, qui cita les deux parties à comparaître à Rome, mais le roi maintint l'honneur national et refusa. Charles fit aussi emprisonner Hincmar sous prétexte de rébellion, et bientôt même le priva de la vue. L'év. de Laon fut réhabilité 878, et f peu de temps après.

HIPPOLYTE, écrivain ecclés. du 3™e siècle, év. de Portus près Rome, peut-être de Rome même; selon quelques-uns, mais à tort, d'Arabie. f martyr 22 août 235 ou 251. Il appartenait au parti novatien; cependant l'Égl. l'a canonisé, ce qui s'explique soit par une confusion de 2 personnes, soit par le fait qu'il aurait abjuré ses erreurs avant de mourir. Eusèbe et Jérôme donnent les titres de ses écrits, tels qu'on les a trouvés sur une statue à l'endroit où s'élevait l'égl. bâtie pour honorer sa mémoire. Il a laissé des travaux sur l'hist., la dogmatique, l'exégèse et l'homilétique; Fabricius en a publié des fragments, Hambourg, 1716. Son principal ouvrage est intitulé Philosophou-mena; c'est une réfutation de toutes les hérésies; il a été découvert en 1842 dans un des couvents du mont Athos, par Mina. Millner qui l'a publié, Oxford 1851, l'attribuait d'abord à Origène. Il fait l'exposé des différentes philos, païennes, et il y voit la forme ou le point de départ des principales hérésies, notamment du gnosticisme. Sa dissertation sur le patripassia-nisme est importante en ce qu'elle fait connaître l'état de la question dans l'Égl. de Rome et le point de vue de l'évêque Calixte, jugé par un écrivain subordinatien et novatien, où l'on reconnaît un ancien disciple d'Irénée. — v. Bunsen, Dollinger et de Pressensé.

HIRSCHAU, abbaye de bénédictins, Wurtemberg, se rattachant à celle de Fulda; construite vers 830 par le comte Erlafried de Calw. Tous les moines périrent de la peste l'an 1000, et le couvent resta inhabité jusqu'au moment où Adalbert II obtint de son oncle Léon IX la permission de le remettre en état 1049-1059. L'abbé Guillaume-le-Bienheureux 1069-1091 assura sa richesse el sa prospérité en iui donnant les règles de Cluny et l'autorisant à recevoir des frè-res-lais et des oblats. Les vitraux coloriés du chemin de la croix et de l'église datent du 15'»* siècle. La Réformation y fut introduite par le duc Ulrich, qui y installa Reysmann comme maître évangélique. Les cathol. romains s'en emparèrent de nouveau pendant la guerre de 30 ans, et en 1692 les Français en détruisirent les bâtiments. Jusqu'en 1815 il y a eu des abbés titulaires de Hirschau. V. Annales hirsau-gienses, de l'abbé Trittenheim, 15ffle siècle.

HITA, Juan-Ruiz, né vers 1300, f 1350. Prêtre. Emprisonné par ordre de son archev., il profita de ce loisir pour mettre en vers le Miroir allégorique des pièges que l'amour du monde tend à l'âme chrétienne. Mais il se complaît un peu trop dans la description de ces artifices, et l'on reproche à son ironie et à ses plaisanteries une grossièreté de mauvais goût.

HITZIG, Ferdinand; critique, auteur d'un grand nombre de Comment, sur l'A. T., Ésaïe, Jérémie, Ecclésiaste, Ézéchiel, etc.. Né 23 juin 1807; prof, à Zurich, et depuis 1861 à Heidelberg. f 22 janv. 1875.

HOBBES, Thomas, né 5 avril 1588 à Mal-mesbury, étudia à Oxford la philologie, la logique et la physique; voyagea sur le continent comme précepteur des jeunes Ca\ endish, fils du comte de Devonshire; connut le chancelier Bacon; épousa la cause royaliste, dut fuir en France, oti on lui confia l'éducation de celui qui fut plus tard Charles II, et écrivit deux de ses principaux ouvrages: Du citoyen, sur les droits de l'homme, et Lèviathan, contre l'ambition du clergé. Sa haine de l'anarchie le lit tomber dans l'excès contraire, vers le despotisme. Après la restauration, 1660, il reçut de Charles II une pension de 100 livres, mais n'eut à la cour ni position, ni influence. Il passa ses dernières années dans la retraite chez les Devonshire et f 1679, à 92 ans. Homme à paradoxes, il se distingua de bonne heure par sa haine de la scolastique, et entra dans les idées de Ramus, de Bacon, de Descartes, avec qui il fut en relations. En morale il ne voit que des intérêts. Dans l'état de nature, c.-à-d. dans l'état sauvage, les hommes ont des droits égaux; le plus fort s'emparera de ce qui lui convient, fera ce qui lui plaît, et la société sera une simple réunion d'égoïstes. L'état de guerre en sera la conséquence inévitable. Mais comme à la longue il y en a un qui triomphera des autres, il s'imposera, et l'ordre ressortira des abus même de la guerre. Rousseau partant de la même base arrivait à des conclusions moins violentes, à un accord amiable, au Contrat social. Hobbes n'aimait pas le clergé, mais on lui a fait une réputation d'athéisme qui n'est pas justifiée; il disait seulement qu'il ne pouvait pas concevoir Dieu sans un corps, et quant à l'Égl. il la voulait soumise au pouvoir civil. S'il niait la certitude de la géométrie, c'était évidemment par besoin du paradoxe. Il a écrit encore: De la Nature humaine: du Corps politique; de la Liherté; une trad. de Thucydide, une trad. de Médéeen vers latins, etc.

HOCHMANN, Ernest-Christophe, né 1670 à Lauenbourg, d'un mariage mixte, mère catholique. Étudiant à Halle, il y fut arrêté 1693 comme piétiste, et mena longtemps une vie errante, prêchant, tenant de petites réunions, admiré des uns, haï des autres, emprisonné à Dettmold, à Hanovre, à Nuremberg, à Halle, traqué surtout par les synodes et les consistoires avec l'appui du bras séculier, jusqu'à ce qu'enfin il trouva à Schwarzenau une retraite paisible, où il + 1721. Tersteegen lui fit une inscription funéraire. Hochmann était un séparatiste décidé, condamnant le baptême des enfants, et n'admettant pas que la cène dut être donnée à d'autres qu'à des chrétiens.

HOCHSTRATEN, v. Hoogstraten.

HOCH WART, Laurent, surnommé Tursenren-tanus, de Tirschenrent, Palatinat, où il naquit 1493. f 1570. Il avait étudié à Leipzig et à Ingolstadt, et exerça les fonctions de prédicateur en divers lieux, notamment à Eichstâdt, Ratisbonne et Passau. Il assista au conc. de Trente comme orateur de l'ev. de Ratisbonne. Sermons et travaux histor., la plupart inédits.

HOE de Hoënegg, Mathias, né 1580 à Vienne, d'une noble famille autrichienne, étudia à Wittenberg, et après avoir occupé plusieurs postes importants, fut nommé prédicateur de la cour à Dresde, 1612. Sa haine du calvinisme l'empêcha de s'intéresser aux affaires de Frédéric III de Bohême, et il ne fallut rien moins que l'éditde restitution 1629 et surtout le débarquement de Gustave-Adolphe, pour le décider à prêter les mains à une tentative d'union, qui eut lieu dans sa maison, entre réformés et luthériens. Il haïssait également les jésuites et le papisme, comme on le voit par son petit Manuel évangélique et par son Apologie contre Bellarmin; mais comme conseiller politique il employa toujours son influence en faveur de la cathdl. Autriche, et il s'est exposé au soupçon de s'être laissé acheter.

HŒFLING, Jean-Guill .-Fréd., auteur de plus, écrits de symbolique luthérienne, sacrements, baptême, ordination, culte chrétien, en opposition à la tendance catholique. Né 1802 à Dros-senfeld près Bayreuth, il remplit les fonctions pastorales à Wurzbourg et à Nuremberg, fut nommé prof, de théol. à Erlangen, et enfin membre du consist. supérieur de Munich, où il f 1853.

HOFACKER. Deux frères lo Louis, le plus populaire; né Wildbad, 15 avril 1798, étudia à Maulbronn, à Schônthal, puis 1816 àTubingue: fit ensuite les suffragances de Stetten, Plienin-gen et Stuttgard, et fut en 1826 nommé pasteur à Rielingshausen. f 1828. Ses sermons se sont vendus à des milliers d'exemplaires, et peu de de livres ont exercé une influence plus profonde. Simples, originaux, souvent pittoresques dans la forme, ils renferment la moelle évangélique dans ce qu'elle a de plus substantiel, la doctrine de la réconciliation avec Dieu par le sang de Christ et le salut gratuit. 2o Guillaume, né 1805; en 1828 suffragant de son fr. malade, puis répétiteur à Tubingue, en 1836 diacre à Stuttgard. f 1848. Prédicateur distingué.

HOFFMANN lo Melchior, né à Hall, Souabe: fourreur de son état; se convertit à la Réforme étant en Livonie, et se mit à prêcher l'Évangile, avec un talent et un succès qui le firent bientôt chasser de Dorpat et de Wolmar. En 1525 il vint à Wittenberg, puis occupa divers postes à Réval et à Stockholm. Il attaqua la doctrine de Luther sur la Cène et s'attira des répliques passionnées d'Amsdorf. A Kiel, après une dispute publique avec Bugenhagen 1529, il fut banni do pays et se rendit à Strasbourg. Il finit par tomber dans des exagérations apocalyptiques et par se donner pour le prophète Élie. Il fut mis en prison et ne paraît pas en être sorti. Le 11 juin 1533 il comparut devant un synode, avec l'autorisation de se défendre, mais sans succès. On ne put cependant le convaincre d'aucun rapport avec les anabaptistes de Munster, + probablement vers 1542.

2° Daniel, né à Halle 1540, étudia à Iéna 1558, et fut appelé à Helmstâdt comme prof, de morale 1576; en 1578 nommé docteur et prof, de théol. Ami de Hesshusius il combattit la doctrine de l'ubiquité, s'opposa à l'acceptation de la Form. de concorde à Brunswick, et se montra hostile aux philippistes et aux humanistes. Lors de l'arrivée de Caselius à Helmstâdt, il s'éleva si violemment contre l'étude de la philos., que la faculté s en plaignit et obtint du duc l'éloignement du malcommode professeur 1601, Hoffmann revint cependant en 1603, mais ne se releva jamais de cet échec, + 1617 à Wolfenbuttel. C'est une des premières escarmouches dans la grande lutte entre la foi et la libre-pensée.

3° Guillaume, né 1670, f 1746 î surnommé le Candidat. Homme pieux avec une tendance mystique; réveillé par Hochmann, il organisa des assemblées rel., que le synode de Clèves essaya en vain de faire fermer, et qui durèrent sans interruption de 1714 à 1750, l'ami et disciple de Hoffmann, Tersteegen, en ayant pris la suite. Auteur de quelques petits ouvrages d'édification.

4o André, orientaliste, né 13 avril 1796 à Welhsleben, Mansfeld, fit la campagne de 1813 contre la France, étudia et se lixa à Halle, fut nommé prof, de théol. à Iéna 1826, puis doyen de la faculté, f 16 mars 1864. Auteur d'une Gramm. syriaque, d'un Comment, sur le livre d'Énoch, de divers fragments sur les antiq. hébraïques. Il a publié aussi une édition du Dict. hébreu-latin de Gesenius.

5<> Gottlieb-Guill., le fondateur de Kornthal; né à Ostelsheim, près Calw, 19 déc. 1771, entra dans la carrière administrative et fut successivement notaire et bourgmeistre à Leonberg. Converti de bonne heure à l'Évangile, il publiait déjà en 1801 son Petit livre des frères de Leonberg. Plein de sympathie pour les familles pieuses que des motifs de conscience avaient déci -dées à se rendre en Russie, il travailla à leur obtenir à l'intérieur même du pays un refuge, une oasis, où elles fussent à l'abri de toute ingérence ecclésiastique, et il put fonder Kornthal en 1819. Il s'y tixa lui-même et, représentant tout à la fois l'autorité royale et l'autorité municipale, il fut le président comme il était l'âme de la communauté, f 1846.

6° Louis-Fréd.-Guill., fils du précédent; né à Leonberg 6 oct. 1806, diacre à Winnenden, inspecteur depuis 1839 de la maison des missions de Bâle, prof, de théol. en 1843, nommé de 1850-1852 à Tubingue, enfin prédicateur de la cour à Berlin et revêtu de différentes charges et dignités. Chrétien fidèle et dévoué, il s'est inter-ressé à toute œuvre de mission et d'évangélisa-tion. Sa doctrine est orthodoxe décidée, mais modérée. Sa tendance ecclés., presque politique, a souffert de l'atmosphère dans laquelle il a vécu ces dernières années; c'est presque du césaréopapisme; le roi est le chef delà religion. Ses sermons mêmes en portent l'empreinte. 11 fut un des fondateurs et patrons de la Nouv. Gaz. évangélique. + 1873.

7° Christophe, sonfr., est l'évêque des Amis de Jérusalem; il demeure à Jaffa avec ses disciples qui attendent comme lui l'accomplissement littéral de Ézéch. 40. La petite colonie s'occupe avec succès d'agriculture.

HOFMANN, Jean-Christian-Conrad, né 21 déc. 1810 à Nuremberg, prof, de théol. à Rostock 1842, à Erlangen 1845. Rédacteur avec Thoma-sius et Hfifling de la Gazette pour le protestantisme et l'Église, fondée depuis 1846. Député à Munich 1863 à 1869, et décoré, il compromit sa réputation de prof., sans se faire une position politique. Auteur d'un travail sur les 70 semaines de Jérémie et de Daniel, d'un Avertissement sur la façon nouvelle d'enseigner l'ancienne vérité, etc. f 20 déc. 1877 à Erlangen.

HOFMEISTER, Sébastien, proprement Séb. Wagner, surnommé le D'Baschion; né à Schatf-house 1476, entra chez les capucins, mais étant venu à Zurich il s'attacha à la Réforme, prêcha l'Évangile à Schaffhouse dès 1523, fut banni comme perturbateur du repos public,et fut enfin placé comme prédicateur à Zofingue 1528. t 1533 d'une attaque d'apoplexie. On l'utilisa beaucoup dans les discussions contre les anabaptistes.

HOHENBOLÏRG, ou Mont Sainte-Odile, couvent de religieuses en Alsace, fondé par Ethik 1er, et par sa fille, patronne d'Alsace, + 690 (ou 720?). Il bâtit au pied de la même montagne le couvent de Niedermunster. Frédéric l*T y fit appeler Relindis comme abbesse 1140, pour y ramener la discipline; elle y introduisit la règle d'Augustin, el bientôt le couvent eut une brillante réputation scientifique; on parlait en 1167 du hortus deliciarum (jardin des délices) de l'abbesse Herrad. En 1249 les abbesses furent élevées au rang de princesses. Ces 2 couvents furent fermés au 16me siècle.

HOHENLOHE - Waldenbourg - Sehillimfurst, Alexandre - Léopold-Franz-Emmerich ( prince de), né 17 août 1794 à Kupferzel, Wurtemberg, destiné à l'Église dès sa naissance et élevé dans différents séminaires, consacré prêtre 1816, fit un voyage à Rome, entra dans l'association jésuite du cœur de Jésus, et à son retour se distingua par son zèle, ses prédications et ses gué-risons miraculeuses obtenues par la prière à l'instar du paysan Michel 1820 à 1821. Toutefois il n'eut pas de chance; ses cures, d'un caractère douteux, ne furent pas reconnues parle pape. En 1825 il fut nommé chanoine à Gross-Wardein, en 1844 év. de Sardique in partibus. ha révolution le força de quitter la Hongrie, f 13 nov. 1849 à Baden. A écrit sur la Prière intérieure, la Mission du Prêtre catholique, etc.

HOHENSTAUFEN, illustre famille de Souabe, célèbre surtout par les luttes qu'elle a soutenues contre la papauté. Le premier de ses membres qui porta la couronne impériale fut Conrad III, successeur de Lothaire 1137. Son neveu Frédéric 1er (Barberousse) commença la lutte contre Adrien IV, 1152. L'idée du vieil empire carlo-\ingien que Fréd. rêvait de restaurer, irrita les susceptibilités du pape, et quoique l'emp. lui eût livré Arnaud de Brescia pour être brûlé 1155, l'amitié ne fut jamais bien solide. Le pape chercha l'alliance des villes lombardes, mais une diète de la plaine de Roncaglia lui fit expier cette tentative et le remit à sa place 1158. La mort l'empêcha d'exécuter sa seconde excommunication. Les papes suivants, établis par l'empereur, moururent assez vite, et lui-même ayant éprouvé une défaite à Legnano 1176, dut reconnaître le pape de ses ennemis, Alexandre III. Il f à la croisade 1190. Vinrent ensuite Henri VI, héritier des traditions paternelles, qui joignit la Sicile à ses États, et lutta avec avantage contre le vieux et faible Célestin III; puis son fils de 3 ans, Frédéric U, élevé sous la tutelle puissante d'Innocent III, qui le couronna après les règnes et les guerres de rivalité de son oncle Philippe de Souabe f 1208 et de Othon de Brunswick. Ce jeune monarque à son tour, défenseur jaloux de l'autorité impériale, se tourna contre le pape, qui l'excommunia, et pour rentrer en grâce il dut promettre de faire une nouvelle croisade 1228, ce qui amena une réconciliation apparente et momentanée. Excommunié de nouveau en 1239, puis encore en 1245 à Lyon, comme blasphémateur et spoliateur de biens ecclésiastiques, il était en train de chercher des accommodements, quand il f 1250. Son fils Conrad régna de 50 à 54. Urbain IV remporta la dernière victoire sur cette malheureuse famille, en appelant en Sicile Charles d'Anjou de France. Le jeune Conradin, dernier des Hohenstaufen, fut mis à mort après un simulacre de jugement, et sa race descendit avec lui dans la tombe, vaincue par les papes. L'Allemagne tomba dans une anarchie de 20 ans, dite le Grand interrègne, 1254-1273, et n'en sortit qu'à l'avènement des Habsbourg. V. les diff. art., et G. Guibal, Arnaud de Brescia et les Hohenstaufen.

HOLBACH, Paul-Fréd. Théry (baron d'), né 1723 à Heidelsheim, Palatinat, + 21 janv. 1789, vint à Paris dès sa jeunesse, cultiva avec succès les sciences naturelles, écrivit sur la chimie et la minéralogie, et se fit surtout connaître par la crudité de son matérialisme et par l'acharnement avec lequel il combattit toute idée religieuse, en particulier celle de l'existence de Dieu. C'est chez lui que se rassemblaient les athées les plus exagérés, Grimm, Diderot, Xaigeon, Lagrange. La plupart de ses écrits ont paru sous de faux noms. On cite surtout son Christianisme dévoilé, la Théol. portative, l'Essai sur les préjuges, le Système de la nature, et plus, articles de l'Encyclopédie.

HOLLANDE. Christianisé violemment par Charlemagne, ce pays, d'un tempérament calme, à la fois bon, intelligent et résolu, fut pendant le moyen âge l'asile des proscrits pour cause de religion, et laissa s'établir sur son territoire les fr. de la vie commune, les beggards et diverses sectes sincèrement religieuses qui fuyaient la tyrannie du clergé romain. Aussi, quand la Réforme parut, elle y trouva un terrain tout préparé, et les écrits de Luther y furent immédiatement accueillis avec faveur par la population. Mais l'autorité ecclésiastique veillait, et dès 1523 deux moines augustins, Henri Voëset Jean Esch, étaient brûlés à Anvers. Ce n'était pas le moyen d'éteindre le feu. Les doctrines de Luther furent bientôt dépassées par celles de Calvin, qui pénétrèrent par les provinces du sud, voisines de la France. L'emp. Charles-Quint, souverain de ces provinces, leur appliqua dans toute sa rigueur l'édit de Worms de 1521; mais ce fut surtout sous Philippe II, dès 1555, que la persécution sévit contre les protestants. Les réformés rédigèrent en 1562, par l'organe de Guy de Brès, leur confession de foi, connue sous le nom de Conf. belge, et en 1566 le synode d'Anvers la reconnut officiellement comme le symbole de l'Égl. des Pays-Bas. La même année les nobles se liguèrent par un acte, appelé Compromis, pour résister à l'oppression espagnole. Marguerite de Parme, sœur de Philippe II, nommée par lui gouvernante des Pays-Bas, ne pouvant pas, ou plutôt ne voulant pas exaspérer par la violence la Ligue des Gueux, fut remplacée par le duc d'Albe, qui répandit dans les provinces l'épouvante et l'horreur par les nombreuses et féroces exécutions qu'il ordonna. Il établit, 1567, le Conseil des troubles, ou Tribunal de sang, qui fit périr en 3 aus plus de 18,000 personnes. Cela lui réussit quelque temps, mais à la fin le soulèvement devint général contre l'autorité espagnole; les sept provinces du nord se liguèrent et, après une lutte acharnée, conduite par Guill. d'Orange avec autant de courage que d'habileté, elles réussirent à se constituer en gouvernement indépendant par le Traité d'Utrecht 1579, sous le nom de République des Sept Provinces-Unies. Les provinces du sud restèrent à l'Espagne et au catholicisme. Née sous l'oppression, formée sous la croix et la persécution, l'Église de la jeune république se développa puissamment dans l'atmosphère de la liberté, et les luttes même auxquelles elle fut appelée, contribuèrent à son développement. Les réformés durent lutter contre l'État pour assurer leur indépendance ecclésiastique sur la base d'une constitution presbytérienne et synodale (1er synode de Dordrecht 1578). Puis vinrent les discussions dogmatiques, notamment celles des gomaristes et des arminiens, qui provoquèrent de nombreuses recherches scientifiques et historiques, et donnèrent à la pensée une vigoureuse impulsion. Le synode de Dordrecht, 1618, assura sous la protection de Maurice d'Orange le triomphe du calvinisme pur, contre les remontrants, qui ne purent obtenir la tolérance qu'après la mort de Maurice 1630. Parmi les savants qui illustrèrent les univ. de Leyde, Franeker et Groningue; les académies d'Utrecht et de Harderwyck, et les athénées de Deventer et d'Amsterdam, on cite pour leurs études bibliques: Gomar, Arminius. Grotius, Rivet, Drusius, Amama, Amesius; et en dogmatique: Épiscopus, Limborch, Alting, Cocceius, Vo'ëtius. Plus tard Witsius, Burmann, van Till, Vitringa. De nos jours encore la Hollande occupe sa place dans les discussions théol. et les deux courants contraires qui se trouvent partout, se rencontrent aussi chez elle. La doctrine évangélique, dignement représentée au 18me siècle par des hommes comme van der Palm, Heringa, van der Hôven. l'a été dès le commencement de ce siècle par des laïques de premier ordre, par le poète Bilderdijk, par les juifs convertis Da Costa et Capadose, par le prédicateur Dyck Molenaar. Les résistances du gouvernement amenèrent en 1834 une dissidence dont les effets se font encore sentir. L'école de Groningue, fondée par Hofstede de Groot et illustrée par Pareau et van Oordt, représente la tendance de Schleiermacher, en appuyant un peu plus à gauche. L'école de Leyde, longtemps orthodoxe, a un peu fléchi depuis une vingtaine d'années. Scholten et Kuenen en sont les principaux chefs, et ils se sont définitivement accentués dans le sens libéral, dit moderne. — On compte en Hollande 1,750,000 réformés, 60,000 luthériens, 200,000 protestants de diverses dénominations, 5000 remontrants, 40,000 anabaptistes ou mennonites, et 300,000 catholiques.

La traduction de la Bible, ordonnée par le synode de Dordrecht et publiée en 1637, a une réputation justement méritée.

Pour la Nouvelle-Hollande, v. Polynésie.

HOLLAZ lo David, né 1648 + 1713, étudia à Wittenberg et fut pasteur à PUtzerkin, Colberg et Jakobzhagen. Son Examen theologicum, qui a eu plusieurs éditions, est un Manuel de dogmatique luthérienne, qui se distingue par une grande clarté, et par une orthodoxie sans sécheresse. 2o Son fils, pasteur à Gunthersberg, Poméranie, a écrit plusieurs ouvrages d'édification, spécialement une Direction pour la vraie prière; réimpr. Stuttgard 1855.

HOLSTE, ou Holstenius, Luc, né à Hambourg 1596, étudia à Leyde où il fit de brillantes études philologiq. et philos., et n'ayant pu obtenir une place au gymnase de Hambourg, il quitta pour jamais sa patrie, passa en Angleterre 1622, vint en 1624 k Paris où il se fit catholique, et fut appelé k Rome, où la faveur d'Urbain VIII et de son neveu le cardinal Barberini, lui assura une position solide et honorable. Il fut nommé biblioth. et chanoine du Vatican, auditeur de la rote, membre de la congrég. de l'index. Chargé de plusieurs missions importantes, entre autres de recevoir l'abjuration de la reine Christine et de travailler k la conversion du landgrave de Hesse, il n'en conserva pas moins son esprit doux et bienveillant et une certaine largeur de vues, dont il fit preuve dans les négociations avec Allatius et dans les discussions jansénistes, f 1661. Il a composé de nombreux ouvrages: le Code des règles monastiques, Collection des vieux monuments, Recherches sur la géogr. sacrée, etc. Il en a laissé un plus grand nombre inachevés.

HOLSTEIN, v. Schleswig.

HOLZHAUSER, v. Barthélemites.

HOMBERG (synode de). Dans cette petite ville de l'électoral de Hesse, Philippe-le-Magna-nime convoqua pour le 21 oct. 1526 une assemblée publique des États, des nobles, des prêtres et des citoyens du pays, pour délibérer sur la réforme de l'Égl. en prenant pour base les 158 thèses de Lambert d'Avignon. Nicolas Ferber, custode des franciscains de Marbourg, lui répondit; puis le lendemain, le vieux curé Jean Sper-ber. L'assemblée s'étant prononcée pour la réforme, une commission rédigea une constitution ecclés., sous le nom d'Ordonnances de réforme, travail très remarquable, qui poussait jusqu'à l'extrême la démocratie ecclésiastique, plaçant l'autorité dans l'assemblée hebdomadaire des membres de l'Égl., organisant des presbytères et des synodes et réglant les formes du culte dans l'esprit de Zwingle. Luther fit un accueil plus que froid à ces Ordonnances; elles ne furent pas promulguées et n'eurent jamais force de loi, mais elles n'en exercèrent pas moins par leur esprit général une réelle influence sur les églises protestantes. Elles visaient trop haut pour être

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praticables, mais elles montraient l'idéal et traçaient le chemin.

HOMÉLIE. C'est le plus vieux nom par lequel on désigne dans l'hist. de l'Égl. l'enseignement oral ordonné par Jésus-Christ. Il se distingue par la simplicité de sa forme, comparée aux discours ou sermons des rhétoriciens. Il ne s'agit pas d'une idée unique que l'on creuse et que l'on retourne sous toutes les formes, mais d'un fragment plus considérable, ordinairement historique, dont on fixe le sens pour en tirer ensuite les conclusions et les applications dont il est susceptible. Bossuet regardait l'homélie comme une partie essentielle de la prédication et en cela il voyait plus clair que ses contemporains. Si ce genre est plus facile que le discours, en ce sens qu'il permet plus de développement et qu'il fournit plus de sujets à la faconde, il est plus difficile parce qu'il prête moins à l'unité et qu'il favorise trop la négligence et la paresse dans la préparation. C'est en partie cette négligence qui a nui à l'homélie et qui l'a reléguée au rang inférieur des « petits services. » On a été jusqu'à dire (Harms) que l'homélie remplit, mais ne nourrit pas; jugement injuste et qu'on pourrait retourner contre le sermon, s'il était permis de rendre un genre responsable des erreurs ou des imperfections de ceux qui le cultivent mal. Telles homélies de Rochat, de Gaus-sen et de Coquerel fils suffisent à prouver la richesse de ce genre comme forme. — Homélies île Clément, v. Clémentines.

HOMILÉTIQIÏE. C'est la rhétorique de la chaire, une des branches de la théol. pratique, l'art de prêcher et de présenter les vérités religieuses d'une manière impressive; v. Éloquence. Si la rhétorique fixe les règles générales, l'ho-milétique les développe ou les modifie selon l'analogie et les besoins particuliers, soit des auditeurs, soit des sujets traités. C'est une science. L'homme qui a la foi sera toujours plus fort que celui qui ne croit pas, mais celui qui a travaillé, étudié, creusé son sujet sera aussi toujours supérieur à celui qui, dans les mêmes conditions, croira pouvoir parler sans préparation, et celui qui aura de la suite dans ses idées se fera mieux écouter que celui qui présentera sans ordre des pensees confuses et mal digérées. Il ne faut donc pas donner à l'art de la prédication une importance exagérée, mais il ne faut pas non plus en nier la valeur, et l'un des maîtres de l'éloquence, saint Paul, est la démonstration la plus frappante des ressources que le chrétien lui-même peut chercher dans l'emploi de certains moyens humains, opportunité, fines allusions, citations classiques, appel au bon sens, concessions opportunes, arguments ad kominem, logique, rigueur des conclusions, etc. C'est vers le 4m« siècle que la prédication chrétienne, jusque là nourrie à l'école des rhéteurs païens, des Libanius, des Thémistius, commença à être l'objet d'études particulières. Saint Augustin, Alain de Insulis, Hurnbert de Romanis, donnèrent des préceptes, mais en s'en référant aux règles rhétoriques des Grecs et des Romains, de Cicéron en particulier. Les réformateurs y apportèrent plus de soin encore. Luther émit quelques idées générales pratiques, tout empreintes de son génie. Mais Mélanchthon le premier en fit l'objet d'une étude spéciale 1519, et il y revint dans son De officio concionatorum 1535. Érasme écrivit dans le même but son Ecclesiastes, réimpr. par Klein 1820. Après beaucoup d'autres, Spener, dans ses Piis desi-deriis, releva le caractère d'édification pratique réclamé par la prédication de l'Évangile; mais par réaction, et comme s'il avait nié l'importance des soins à donner à la forme, ses adversaires insistèrent à leur tour sur la prédication comme art, et l'école de Wolf entra dans des détails d'un formalisme minutieux, dans des recherches puériles sur les définitions, les transitions, la disposition des parties du discours, qui réduisirent presque la prédication à un simple mécanisme, et qui suppléèrent trop longtemps la vie relig. dans les sermons de l'orthodoxie morte comme dans ceux du rationalisme. Ce qui caractérisa surtout la prédication de la réforme, ce fut l'étude et l'explication de l'Écriture, la paraphrase, l'homélie. Les catholiques eux-mêmes furent amenés à l'étudier davantage, et la prédication se releva de son long engourdissement; il y eut progrès de part et d'autre dans l'enseignement, l'exposition, l'exhortation et la défense de la foi. De nombreux écrits ont été publiés sur Thomilétique; nommons Schott, au point de vue de la forme 1828-1847; Thére-min, beaucoup plus sérieux et plus profond, comprenant la différence qu'il y a entre la rhétorique vulgaire et l'éloquence chrétienne; Pal-mer, Schweizer, Baur, Hagenbach, Sprague, Kundig et surtout A. Vinet, Homilétique, ou Théorie de la prédication.

HOMILIAÏRE, recueil de sermons ou d'homélies, tirés surtout des pères, et destinés à être lus en totalité ou par fragments, pour tous les jours de l'année. Le plus célèbre de ces recueils est celui qui fut composé à la demande de Char-leinagne par Alcuin et le diacre Paul. Il eut en particulier l'avantage de fixer et de conserver l'ordre des péricopes.

HOMOLOGOUMÈNES, nom sous lequel on désigne, depuis Eusèbe, les livres de la Bible dont l'authenticité n'a jamais été contestée.

HOMOIOUSIENS (de nature semblable) et Homoousiens (de même nature). Sous ces deux noms que distingue une seule lettre, un i, s est cachée pendant la 2»e partie du 4®* siècle h différence qui séparait les semi-ariens et les orthodoxes, les premiers maintenant contre les ariens que le Fils est semblable au Père, admettant la ressemblance d'essence, mais non l'égalité ou l'identité; les seconds réclamant au contraire non pas une simple ressemblance, mais la parfaite égalité de nature.

HONGRIE. Contrée qui fait aujourd'hui partie de la monarchie austro-hongroise, mais dont les limites anciennes ont beaucoup varié et ne paraissent pas, encore auj., être fixées d'une manière définitive. Ses habitants, qui au 7n»e siècle s'appelaient Madgyares, et que les historiens grecs désignent sous le nom de Turcs, étaient une race finnoise-mongole, féroce, sans culture, orgueilleuse et trompeuse. Us arrivèrent des plaines de l'ancienne Scythie, entrèrent en Pan-nonie sous la conduite de sept ducs, ayant sept rhâteaux (SiebenbUrgen) sur les sept fleuves de 1a Transylvanie. Ils poussèrent de là jusqu'à Brème et Hambourg, jusqu'en Alsace, Lorraine et Bourgogne; jusqu'en Italie, où Pavie fut livrée aux flammes, et partout ils furent pour les chrétiens un objet d'épouvante. Henri-I'Oiseleur, après quelques revers, finit par les battre 933; son fils Othon-le-Grand acheva de les réduire, près d'Augsbourg, iO août 955, et stipula avec <îeysa en faveur de la libre prédication de l'Évangile. L'év. Piligrin, de Lorch, profita de cette liberté pour envoyer des missionnaires chrétiens et pour évangéliser lui-même. Dans une lettre il parle de plus de 5,000 conversions. Mais ce n'est que sous Étienne, fils du duc Geysa, que le christianisme fut décidément reconnu comme Égl. nationale, officielle et privilégiée. Cependant il fallut deux siècles encore avant qu'il eût soumis toutes les résistances populaires. Il y eut aussi de longues luttes avec Rome au sujet des biens ecclés. et du célibat des prêtres. André II conduisit en Terre-Sainte la 5m* croisade vers 1222. La dynastie d'Anjou, spécialement Louis donna aux études une vigoureuse impulsion par la création de l'acad. de Cinqéglises; puis la dynastie des Hunyades, surtout Matthias Corvinus, par la fondation de l'univ. de Presbourg et par la création de la riche bibliothèque d'Ofen. Louis s'occupa avec succès de la conversion des Serbes et des Bulgares; il persécuta les juifs, et céda la Bosnie au ban Twartko 1370, à la condition que les habitants passeraient à l'Égl. latine. C'est sous les Jagellons de Bohême que la Réforme commença. Déjà les doctrines de Huss avaient éveillé .l'attention des rois précédents, et Matthias avait pris des mesures contre les hérétiques. En 1518 plusieurs martyrs périrent par le feu. En 1523 la diète décréta l'extermination de tous les hérétiques du royaume, mais l'approche des Turcs, la mort du roi et de plusieurs év. et archevêques, la perte d'une bataille, enfin des compétitions pour le trône empêchèrent l'exécution d^ cet arrêt et donnèrent aux protestants le temps de s'organiser et le loisir nécessaire pour assurer leur position. Leur premier pasteur fut Thomas Preussner de Kâsmarkt; puis vinrent De-vay, q. v.; Léonard Stockel, qui rédigea dans un sens luthérien une Conf. de foi pour les églises de la Haute Hongrie, laquelle fut présentée à Ferdinand; Quendel, Fischer, etc. Gry-nâus et Speratus avaient déjà travaillé à Ofen, et souffert pour l'Évangile. Plusieurs évêques se prononcèrent en faveur de la réforme. Des sièges épiscopaux restèrent vacants plusieurs années. La veuve de Louis II, Marie, à qui Luther dédia ses psaumes, 1526, prit pour chapelain un évangélique, Jean Henkel. La plupart des magnats se convertirent. Plus de cent Hongrois suivaient les cours de Wittenberg. Ainsi les circonstances extérieures favorisaient le protestantisme, et pendant tout le 16me siècle la menace de l'invasion turque assura leur tranquillité; mais cette paix même leur fut un piège: luthériens et réformés se divisèrent. Les deux tiers se prononcèrent pour le calvinisme; le synode de Tarezal adopta le catéchisme de Genève: le synode de Debreczin adopta la 2n»e confession helvétique de 1566. De nouvelles traductions de la Bible vinrent s'ajouter aux trois que l'on possédait déjà; la littérature prit un grand développement comme poésie, philologie, histoire, jurisprudence, théologie. Les restes des hussistes se fondirent dans les égl. réformées; l'unitarisme disparut; les anabaptistes rentrèrent dans le catholicisme, sous Marie-Thérèse. Les protestants furent encore tranquilles sous Maximilien II; mais le long règne de Rodolphe II ramena les jésuites et les troubles; sous l'influence de Belgioso, gouverneur de la Haute-Hongrie, ce roi fit revivre les vieilles lois rédigées contre les protestants, et il les appliqua en dépit des protestations de la diète de 1597. Savant en chimie et en astronomie, protecteur de Tycho-Brahé, ce roi sans énergie comme sans politique, battu par les Turcs, mené par le clergé, mit une seconde fois son veto à un vote de la diète qui établissait la liberté de conscience 1608, veto qui lui coûta sa couronne. Son fr. Matthias le remplaça sur le trône et proclama de nouveau la liberté. Les jésuites surent en profiter. Pierre Pazmany, 1570-1637, converti au catholicisme à 13 ans, consacra sa vie à la mission jésuite dans son pays; très bien doué, instruit, insinuant, il eut bientôt gagné 50 familles de magnats; Ferdinand, après Matthias, lui donna toutes les facilités pour cela; archev. de Grau et primat de Hongrie, il travailla avec tant de succès qu'on put dire de lui, qu'à sa naissance la Hongrie était protestante, et qu'à sa mort elle était catholique. On se demande ce que les pasteurs faisaient pendant ce temps. Les magnats convertis au catholicisme supprimèrent toute liberté religieuse sur leurs terres, s'emparèrent des temples, fermèrent les écoles et bannirent les pasteurs. Un grand nombre de ces chrétiens persécutés se rangèrent sous les drapeaux de Bethlen Gabor, qui leur procura quelques avantages momentanés; mais la réaction recommença de plus belle sous Léopold après que la Transylvanie eut perdu son indépendance 1699, et comme le mécontentement était général, on en accusa les pasteurs et plusieurs furent condamnés à mort. La persécution alla s'étendant de plus en plus; sous Charles III les temples furent démolis. Un édit de tolérance de 1781, un arrêté de la diète de 1791, donnèrent aux protestants un peu de repos et d'espérance; mais cela dura peu. Léopold mourut, et la réaction releva la tête. C'est la diète de 1843-1844 qui la première régla conformément aux principes de la liberté la question des mariages, et c'est en 1848 que fut proclamée enfin l'égalité des confessions. Le gouvernement essaya d'imposer à l'Égl. de Hongrie la même organisation que possédait celle d'Autriche, mais la résistance unanime qu'il rencontra dans cette tentative l'obligea d'y renoncer 1867, et c'est auj. la vieille organisation qui régit encore les deux Églises hongroises. — Les juifs jouissent aussi depuis 1870 delà plus complète liberté et sont placés sur le même pied que les chrétiens. On compte en Hongrie environ 7 millions de catholiques, 1 l/* million de grecs unis, 2 '/* millions de grecs non unis, 1 million de luthériens, dont la moitié slaves, les autres allemands et magyares; 2 millions de réformés; 400,000 juifs; 40,000 bohémiens ou zigeuner, etc. L'instruction publ. est très soignée dans les grands centres, mais négligée dans les villages et les campagnes. La séparation de l'école et de l'Égl. date de 1869.

HONORAT, ou Honoré, 1° né dans les Gaules, d'une famille gallo-romaine; converti ainsi que son frère aîné, Venantius, ils s'enfuirent à Marseille pour se soustraire aux séductions de leur père, qui voulait les ramener au paganisme. Après un voyage en Grèce, où Venantius mourut, Honorât revint avec un ami, et ils fondirent sur les côtes de la Provence, dans les îles de Lérins, ou Léro, vers 400, un couvent qui devint bientôt célèbre. Il fut appelé, malgré sa résistance, à l'évêché d'Arles 427 et f 429. Vie par Hilaire. — 2<> archev. de Cantorbéry, 630-653. — 3<> Év. d'Amiens, 660, patron des boulangers. — 4<> Honoré d'Autun, surnommé le Solitaire; écrivain ecclésiastique du 12me siècle, f vers 1146, un des hommes les plus considérables de son temps. On connaît peu de chose de sa vie; il a été prêtre et prof, de scolastique à Au-tun; quelques-uns pensent qu'il a aussi enseigné la théol. à Augst, près Bâle. Il a laissé de nombreux ouvrages, entre autres un Abrégé de théol., un Abrégé de cosmographie, un Traité sur les Luminaires de l'Égl., un Comment, sur le cantique, etc.

HONORÉ, ou Honorine, lo pape, né en Cam-panie, fils du consul Pétrone; élu 625, f 638, Après lui le siège reste vacant 19 mois. Il permit au prêtre Birinus d'aller évangéliser la Gr. Bretagne. Il fut condamné comme monothélite par le 6^ conc. écuménique, celui de Constantinople 680, pour avoir dit avec Serge et Pyrrhus, qu'il n'y avait en Christ qu'une seule volonté. S'il n'a pas été hérétique, il n'a du moins pas professé la vérité, et dans sa lutte sur ce sujet, il protesta qu'il n'avait rien décidé. Les papes suivants n'ont pas réhabilité sa mémoire; il reste ainsi anathématisé. Il a laissé quelques Lettres.

2o Honoré II; cardinal Lambert, év. d'Ostie, élu 1154 après la résignation de Célestin V, confirma Lothaire dans sa dignité impériale et condamna pour diverses fautes les abbés de Cluny et du mont Cassin. f 1124. On a de lui quelques Lettres.

3o Honoré II, antip.; Cadalous, év. de Parme, élu 1061 par le parti impérial en opposition à Alexandre II, mais fut déposé l'année suivante par le conc. de Mantoue et mourut peu après.

4o Honoré III; Cencio Savelli, Romain, élu 1216, f 1227. Il reconnut l'ordre de Dominique et celui des carmes, introduisit l'élévation de l'hostie 1220, accorda le premier des indulgen -ces dans la canonisation des saints, défendit d'enseigner le droit civil à Paris, arma Louis VIII contre les albigeois, et obtint de Frédéric II la promesse qu'il ferait une croisade pour reconquérir la Terre-Sainte. Il mourut sans avoir vu cette promesse réalisée. On a de lui: Conjuratù> adversus principem tenebrarum etc. Rome 1629.

5° Honoré IV, Jacques Savelli, Romain, élu 1285, f 1287. Il purgea ses États des brigands qui les infestaient, soutint en Sicile le parti français contre la maison d'Aragon, et défendit avec énergie les immunités ecclésiastiques.

— V. aussi Honorât.

HONORIUS, Flavius, second fils de Théodose, né 384, monta sur le trône à la mort de son père 395, et obtint pour sa part l'Occident, pendant que son fr. Arcadius reçut l'Orient. Il eut pour tuteur et ministre l'habile général Stili-con, et pour co-régent son beau-fr. Constance 1421, qui par leurs talents réusssirent à retarder la chute de l'empire. Mais jaloux de Stilicon dont il redoutait les intrigues ambitieuses, il le fit mettre à mort, 408. Alaric s'empara de Rome et la mit au pillage, Honorius perdit aussi lei

Gaules contre Ataulf, et l'Espagne contre les Vandales. Ce prince faible maintint les lois de son père, mais s'il fut tolérant, ce fut plutôt par intérêt; en 401 il refusa de détruire une ville à cause des impôts considérables qu'il en retirait. Il fit fermer les temples païens 399, et exclut les païens des emplois publics 416. Il fit des lois sévères contre les donatistes 405 et 411, après que le conc. de Carthage se fut prononcé contre eux. Il intervint de même par des édits contre les pélagiens et concourut pour sa part à affaiblir les égl. du nord de l'Afrique, ce qui les rendit une proie facile pour les Vandales.

HONTER, Jean, l'évangéliste de la Transylvanie. Né 1498 à Cronstadt, il étudia à Craco-vie, Bâle et Wittenberg. La réforme avait déjà pénétré dans le pays depuis 1521; Hermann-stadt avait banni les catholiques en 1529. Hon-ter fonda une imprimerie à Cronstadt, 1533, et publia des écrits de Luther. Pasteur de Cronstadt, il abolit la messe. L'év. Martinuzzi essaya en vain, à la diète de Klausenbourg, d'arrêter le mouvement; la plupart des sièges ou districts saxons se déclarèrent évangéliques et adoptèrent la conf. d'Augsbourg. Fondateur du gymnase et de la biblioth. de Cronstadt, Honter était aussi estimé des catholiq. à cause de ses nombreuses connaissances. On lui doit quelques ouvrages de théol., d'hist. et de cosmographie.

HONTHEIM, Jean-Nicolas (de), né à Trêves 27 janv. 1701, plus connu sous son pseudonyme de Febroniu* Justinus. Élevé chez les jésuites, il étudia à Louvain le droit canon, visita Rome, fut en 1728 assesseur au tribunal civil de Trêves, de 1732 à 1738 prof, de droit civil, puis officiai à Coblence, év. in partibus de My-riophys et coadjuteur du siège de Trêves. Il lit paraître en 1763, sous son pseudonyme, son livre De l'état de l'Église (De statu prœsenti ecclesicf). qui fut bientôt trad. dans presque toutes les langues de l'Europe, qui fut mis à l'index et qui exerça une immense influence. Il y combat le système romain et les prétentions <lu pape. Il part du principe que le pouvoir de l'évêque est d'autorité divine. Le pape n'est que le premier entre ses pairs; il peut présider une réunion d'évêques. mais il est lié par les canons et peut être rappelé à leur observation. La suite immédiate de cette publication fut une assemblée d'évêques à Coblence 1769 et le plan de réformes dit Punctation d'Ems. Le pape avait condamné le livre de Hontheim 1764; Zaccaria et Bellerini l'avaient réfuté. A force de démarches on finit par décider le pauvre vieillard à se rétracter 1778, mais en 1781 il tint à expliquer lui-même le sens et les circonstances de tette rétractation, f 1790. lia écrit aussi l'Hist. diplomatiq. de Trêves, avec un Prodromus. Ses adhérents reçurent le nom de fébroniens.

HOOGSTRATEN, ou Hochstraten, Jacques (de), le grand adversaire de Reuchlin. Né 1454 à Hoogstraten en Flandre, il étudia à Cologne et vint à Louvain comme prieur des dominicains et inquisiteur. Dans son zèle inconsidéré il attaqua les humanistes et cita Reuchlin devant son tribunal, à cause de ses attaques contre le juif converti Pfefferkorn. Comme il n'y était pas formellement autorisé, LéonX fit instruire à nouveau le procès par l'év. Georges de Spire, qui condamna Hoogstraten. 1514. Sur l'appel de de ce dernier, Léon pressé par les dominicains, mais ami des humanistes, donna l'ordre de surseoir, et la question fut enterrée. Par ses prétentions et son manque de tact Hoogstraten se fit haïr également de tous ses contemporains, sans distinction de parti. Il est un des plus maltraités dans les Lettres des hommes obscurs. Ses œuvres, qui le caractérisent, ont été publ. à Cologne 1526. Son Handtpiegel (miroir) fut réfute par Reuchlin dans son AugenspiegeL

HOOPER, Dr John, év. de Gloucester, né 1495 dans le comté de Somerset. Il étudia les saintes Écritures à Oxford, s'attira la haine des théologiens à cause de ses idées évangéliques, et dut partir en 1539 pour Paris, Bâle et Zurich où il visita Bullinger. Après la mort d'Henri VIII et l'avènement d'Édouard VI, il retourna dans sa patrie, non sans de sinistres pressentiments. Il prêcha avec beaucoup de succès; le jeune roi venait l'entendre. En 1550 il fut nommé év. de Gloucester. Sa réputation comme prédicateur était immense; il attaquait surtout les abus du clergé et le dérèglement des mœurs. Mais le 6 juillet 1553 Marie-la-Catholique succéda à Edouard VI. De 1555 à 1558, 288 bûchers furent allumés pour les hérétiques. Le 1er sept. 1554 Hooper fut emmené prisonnier à Londres; on le jeta dans un misérable cachot malsain où on le laissa presque mourir de froid et de faim. Le 4 février suivant il fut condamné à mort parce qu'il admettait le mariage des prêtres et la possibilité du divorce, et qu'il appelait le sacrifice de la messe une idolâtrie. On le ramena à Gloucester pour être brûlé. Marie lui défendit de parler au peuple, mais ne put l'empêcher de prier sur le bûcher. Son supplice dura trois quarts d'heure, grâce au vent qui chassait les flammes dans une aulre direction. C'était le 9 févr. 1*555.

HOPKINS, Samuel, un des chefs de la théologie de la Nouv. Angleterre; v. Edwards. Né 1721 à Waterbury, Connecticut, il étudia au collège de Yale et fut quelque temps 1743 pasteur à Honsatonic, Massachusets. Son égl. n'ayant plus le moyen de l'entretenir 1769, il accepta une vocation à Newport, Rhode-Island. f 1803. Ses œuvres ont été réimpr. à Boston 1825.

HORNBEEK, Jean, né à Harlem 1617, pasteur et prof, de théol. à Utrecht 1644, puis à Leyde 1654; f 1666. Auteur de plusieurs livres contre le socinianisme, d'un volume sur les polémiques réformées, d'une Théol. pratique, et d'une Institution des études théologiques.

HORB, Jean-Henri, fils de pasteur, né à Col-mar le H juin 1645, étudia à Strasbourg, puis à Iéna, Leipzig et Wittenberg. Il voyagea quelque temps comme précepteur en Hollande, Angleterre et France, et fut nommé pasteur à Bischweiler 1671. La môme année il épousa Sophie-Cécile, sœur de Spener. Sa profonde piété et ses doctrines évangéliques lui suscitèrent dans sa paroisse de nombreux ennemis, qui réussirent à le faire partir. En 1678 il accepta un nouveau poste à Windsheim, Franconie, comme pasteur et surintendant. Enfin en 1685 il fut appelé à desservir la paroisse de Saint-Ni-colas à Hambourg, mais sa fidélité lui attira les mêmes haines, qui dégénérèrent en persécutions, au point qu'un jour il faillit perdre la vie. Son crime était de tenir des réunions religieuses, des conventicules à la mode de Spener, des col-legia pietatis. Un de ses collègues, le pasteur Mayer, se mit à la tête de ses ennemis, lui reprochant surtout d'avoir traduit l'ouvrage du mystique Poiret sur l'éducation des enfants. La lutte fut longue et acrimonieuse; Horb fit toutes les concessions possibles, donna toutes les explications désirables; ce fut en vain. En vain aussi le sénat le protégeait, ainsi que la bourgeoisie; il dut se retirer. Il partit 16 nov. 1693 pour le Holstein, où il avait une propriété. En 1694 on le déposa officiellement; il f le 26 janv. 1695, et malgré l'autorisation du sénat, les ministres ne permirent pas que son corps fût enterré dans son église. Il a laissé une trentaine d'ouvrages, grands ou petits, sur des sujets d'hist., de doctrine et d'édification.

HORCH, né 1652 à Eschwege, étudia la théol. et la médecine à Marbourg et à Brème; il occupa différents postes comme diacre, prof, et pasteur, k Heidelberg, Kreuznach et Francfort. Ses tendances séparatistes le firent destituer 1698. Après une année passée dans une maison de santé, il reprit ses prédications et ses travaux littéraires 1700, vivant à Marbourg d'une modeste pension, f 1724. Son principal ouvr. est la Bible mystique et prophétique, 1712.

HORMISDAS, pape 514-523, brilla surtout par son ardeur dans la lutte contre les euty-chiens. Les efforts des emp. Anastase et Justin, pour rétablir l'union troublée par l'Hénoticon, échouèrent devant les exigences impérieuses de ce pontife qui maintenait l'excommunication d'Acacius et des monophysites. Son légat fut renvoyé d'une manière blessante 517 et les négociations de 519 n'aboutirent pas. On dit qu'il découvrit à Rome des manichéens et qu'il les persécuta.

HORNEY. on Horneius, Conrad, né 1590 k Brunswick, étudia k Helmstàdt 1608; prof, de logique et de morale 1619, de théol. 1625. f 1649. Violemment attaqué, comme Calixte, par les théol. de Leipzig et de Iéna, parce qu'il insistait sur la nécessité de la sanctification. Il a laissé un Abrégé de dialectique et un Compen-dium de théologie.

HOSIUS 1° de Cordoue, Espagne, né vers 260, très considéré comme confesseur de la foi, déjà sous Maximien. C'est lui, dit-on, qui montra à Constantin qu'il trouverait en Christ le pardon de ses crimes, que les païens lui refusaient. Il jouit à la cour de cet empereur d'une très grande influence et s'en servit dans les luttes ariennes. Chargé de porter à Alexandrie la lettre impériale adressée à Arius et à Alexandre, il se prononça clairement contre Arius. Il fut un des trois prélats qui présidèrent le conc. de Nicée, où il joua un rôle prépondérant, et il conseilla à Constantin de bannir ceux qui ne signeraient pas le symbole adopté. Il présida le conc. de Sardique 347. Il se montra toujours l'intrépide défenseur d'Athanase, même vis-à-vis de Constance II, qui le fit venir à sa cour à Milan. Sur son refus de renouer des négociations avec les ariens 355, il fut relégué à Sirmium. Là, presque centenaire, il se laissa entraîner à signer, par peur de la mort, un symbole où il était dit que le Père est supérieur au Fils; mais> il se rétracta plus tard, quand il fut rentré dans son diocèse, où il + 359.

2° Stanislas Hosius, né à Cracovie 8 avril 1504, étudia à Wilna, Cracovie, Padoue et Bologne, entra à la chancellerie du roi. et reçut, malgré lui, en récompense de ses nombreux services un canonicat, ce qui le décida d'entrer dans les ordres 1538. Nommé év. de Kulm 1549, il consacra toutes ses forces à combattre les protestants qu'il haïssait, en même temps qu'il travaillait à la restauration du catholicisme. Légat à Vienne, puis cardinal, il poussa à la réouverture du conc. de Trente, fit adopter ses résolutions dans son diocèse, livra aux jésuites le nouveau collège de Braunsberg et donna au catholicisme en Pologne la direction dont il jouit aujourd'hui. Appelé à Rome 1569, comme grand-pénitencier, il y f ^79. La violence de sa polémique a rendu faciles les réfutations. Son principal ouvrage est la Conf. de la foi chrét. catholiq.ue qu'il fit adopter par le conc. de Petri-kau 1551.

HOSPINIEN, Rodolphe, né 7 nov. 1547 à Altorf près Zurich, étudia à Marbourg et à Heir delberg, et finit par être nommé directeur du Carolinum et pasteur de l'égl. de l'Abbaye à Zurich, 1594. Il perdit la vue et tomba dans Fen-fance. f 1626. Auteur de plus, ouvrages critiques, histor. et polémiques: De l'origine des rites, Hist. du jésuitisme, etc. Il combattit la Form. de Concorde (Concordia discors) dans un écrit qui provoqua des réfutations, mais il ne répondit pas.

HOSPITAL, Michel (de 1'), né 1506 à Aigue-perse, Auvergne, accompagna en Italie son père, médecin attaché au connétable de Bourbon. Il étudia le droit à Milan et à Padoue, et fut nommé à Rome auditeur de la rote. De retour en France, il pratiqua quelque temps le barreau, fut nommé conseiller au parlement; distingué par le chancelier Olivier, il fut envoyé comme ambassadeur au conc. de Trente 1547. II fut ensuite chancelier privé de Marguerite de Valois, et surintendant des finances, poste difficile et délicat, où son intégrité lui permit de réformer bien des abus. François II l'éleva 1660 à la dignité de chancelier de France et Charles IX le maintint dans ces fonctions. Doué d'une vaste intelligence et d'un cceur généreux, le chancelier était ami de la tolérance; il avait en outre une estime particulière pour un grand nombre de protestants et, l'on peut ajouter, de sympa-pathiepour leur cause. Il chercha à établir entre lescathol. et les réformés quelque chose de plus qu'un simple mode de vivre. Dans une assemblée convoquée par Catherine de Médicis et présidée par lui, il dit aux délégués des parlements: Recherchez s'il est impossible que des hommes qui n'ont pas la même croyance vivent en paix les uns avec les autres. Pour lui la question était tranchée. C'est dans cet esprit paisible qu'il présida au Colloque de Poissy, à l'assemblée de Moulins 1564, à la paix de Lonjumeau. C'est dans cet esprit aussi qu'il s'opposa à l'acceptation des actes du conc. de Trente relatifs à la discipline et contraires aux principes de l'Égl. gallicane. La cour ayant violé le traité de Lonjumeau, l'Hospital qui voyait les passions se déchaîner toujours plus furieuses et qui prévoyait, sans pouvoir les prévenir, les crimes de la monarchie, donna sa démission, tout en conservant jusqu'à la fin la dignité de chancelier, et se retira dans sa terre de Vignay, près d'Étampes 1568. Suspect aux catholiques, accusé par les uns d'être athée, par les autres d'être protestant, il faillit être massacré dans sa demeure à la Saint-Barthélemy. Il échappa aux poignards, mais il mourut de douleur et de honte l'année suivante 1573. Il avait entrevu bien des bassesses et des crimes, mais non un pareil attentat. Pendant les 4 ou 5 années qu'il vécut dans la retraite il s'occupa de lettres et de sciences. On lui doit la réforme du calendrier, et indirectement une ordonnance de 1593, portant que l'année civile commencerait le 1er janvier, et non plus à Pâques comme précédemment. On a de lui des Harangues, des vers latins, un Traité de la réformation de la justice, et son Testament où l'on trouve d'intéressants détails sur sa vie.

HOSPITALIERS. On range sous cette désignation générale toutes les associations qui ont pour but le soin des malades, des pauvres, des voyageurs, des orphelins et qui, même sans former de vœux perpétuels, vivent ordinairement d'après la règle de saint Augustin, ou d'après la 3m* règle de saint François, ou encore se rattachent à quelqu'un des ordres militaires. Les associations un peu considérables ont un général; les autres relèvent presque toujours de l'évêque. Outre les chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem et les chevaliers teutoniques, on nomme comme hospitaliers les chevaliers de l'ordre du Saint-Esprit, de Guido de Montpellier 1178; ceux de Guido de Joinville 1294; ceux de Jean de Dieu, ou fr. de la Charité, ceux de Bourges, etc. Parmi les ordres de femmes, l'un des plus considérables est celui des élisa-béthines, qui remonte à sainte Élisabeth de Thuringe f 1231; il a revêtu sous Angéline de Corbaro (1377-1435) un caractère monastique très prononce, suivant la 3®* règle de saint François; leur costume est gris. Il y a aussi en France les haudriettes, ainsi nommées de Ét. Haudry, secrétaire de saint Louis; les hospitalières de N.-D. de Paris, fondées 1624 par Françoise de la Croix; celles du Refuge, de Nancy, pour les repentantes; celles de Loches; celles de Saint-Joseph, fondées 1638 par Marie de l'Estang pour l'éducation des orphelins; plusieurs autres de Saint-Joseph à la Flèche, à Bourg, etc.; celles de Saint-Thomas à Villeneuve, fondées 1660 à Lamballe par Ange Le Proust et L. Chaboisseau, etc. La plus récente est celle de la Providence fondée en 1820, et qui est fort répandue en France. On peut croire que sous des noms divers c'est un même esprit qui les anime, que le prosélytisme se cache souvent derrière la charité, et que leurs écoles et autres institutions ne sont que des commencements de couvents.

HOSSBACH, Pierre-Guill., D'théol., né 20 février 1784 à Wusterhausen, étudia à Halle et à Francfort s. l'O. la théol., la philologie et les sciences naturelles. Après avoir occupé plusieurs places dans l'enseignement et dans le ministère; il vint à Berlin comme aumônier du corps des cadets, mais compromis dans les affaires de son ami De Wette il donna sa démission. Nommé 1821 à l'égl. de la Nouvelle-Jérusalem, il devint en 1830 Dr en théol., surintendant et membre du Consistoire, f 1846. Il prit une part active à la réorganisation de l'Égl., soit dans la question des liturgies 1825, soit lors de la protestation de 1845. Grand ami de Schleiermacher, il garda une position intermédiaire entre l'orthodoxie renaissante et le libéralisme. Outre ses sermons, il a publié une Vie d'Andreà et une Notice sur Spener et son temps.

HOSTIE. L'Égl. cathol. el l'Égl. luthérienne se servent pour la communion d'oubliés faites de farine et d'eau, représentant ainsi les pains sans levain. Le nom môme d'oubliés vient du mot oblation et rappelle les dons en pain et en vin que les fidèles des premiers siècles remettaient aux diacres et qui étaient censés devoir servir pour la communion. Le nom d'hostie, ou sacrifice, n'a été introduit qu'avec la transsubstantiation et se dit de l'oublie consacrée. L'Égl. romaine fait remonter au 2me siècle l'usage du pain sans levain, mais on n'en trouve aucune trace avant le 9me siècle. Au lime siècle l'Égl. grecque reproche cette innovation à l'Égl. latine. La formule d'union de Florence 1439 laisse la question ouverte et les églises libres de faire comme elles voudront. Les réformés ont peu à peu abandonné l'hostie, comme n'étant pas réel lement du pain. - On appelle soleil, ou ostensoir, le vase dans lequel elle est contenue, exposée ou transportée. L'hostie a porté de bonne heure une empreinte, le nom de Christ, un agneau, ou la croix; cette dernière a fini par prévaloir. L'hostie doit se renouveler tous les 8 ou 15 jours pour éviter la moisissure; on brûle l'ancienne.

HOTT1NGER lo Jean-Henri, né à Zurich

10 mars 1620, étudia à Zurich, à Groningue et à Leyde, visita la France et l'Angleterre, fut nommé à Zurich prof, d'hist. ecclés. 1642, de catéchétique et d'hébreu en 1643; fut appelé par l'électeur palatin à Heidelberg 1655-1661, revint à Zurich, et il était sur le point de partir pour Leyde comme prof., quand il se noya dans la Limmat 5 juin 1667, ainsi que 3 de ses enfants. Savant orientaliste, il a écrit une Gramm. hébr., chaldaïque, syriaque et arabe; un Lexi-con harmonicum hep tag lot ton, un Thésaurus philolog., une Hist. ecclés. du N. T.; une Hist. du mahométisme, etc.

2o Jean-Jacques, un de ses fils, né à Zurich 1er déc. 1652, étudia à Zurich, Bâle, Hambourg et Genève, fut consacré en 1676, occupa différents postes de pasteur en 1680 et 1686, et fut nommé prof, de théol. en 1698. Quoique orthodoxe et attaché à la Confession de foi de Zurich,

11 chercha à unir les différentes églises, mais il s'éleva dans plusieurs écrits contre le piétisme qui comptait déjà à Zurich de nombreux adhérents, et il attaqua vivement le catholicisme dans son Hist. ecclés. de la Suisse, 1698-1707. Frappé d'une attaque d'apoplexie en 1729, il se remit assez pour pouvoir reprendre ses leçons. f 1735. — La même famille zurichoise a fourni encore quelques autres théol. de mérite, et l'historien (1783-1860) continuateur de Jean de Muller.

HOUBIGANT, Ch.-François, né à Paris 1686, prêtre de l'Oratoire, successivement prof, à Juilly, Marseille et Soissons, puis supérieur du collège de Vendôme, appelé enfin à Paris, pour faire les conférences de Saint-Magloire. Il devint sourd à la suite d'une grave maladie et ne vécut plus que de ses travaux littéraires. Il traduisit de l'anglais divers ouvrages de Lesley, de Forbes et de Sherlock; il publia en 1732 ses Racines hébr. sans points-voyelles, et en 1746 des Prolégomènes à l'Écrit, sainte. Son principal ouvrage est sa splendide édition de la Bible hébraïque, en 4 vol. in-fo, 1746-1753, dont la valeur est cependant diminuée par le grand nombre de corrections hasardées qu'il a jointes à ses notes et à sa traduction. Il avait adopté le système de Masclef qui supprime les points-voyelles.

HOWARD, John, philanthrope, né 1727 à Clapton, près Londres. Ses heureuses dispositions se manifestèrent de bonne heure. Voué d'abord au commerce il ne put résister à sa vocation qui était de secourir les malheureux. En 1755 après la mort de sa première femme il fit un voyage à Lisbonne. Le vaisseau ayant été attaqué par un corsaire, il fut emmené à Brest où il passa quelque temps dans un mauvais cachot. Remis en liberté il se promit de consacrer sa vie à améliorer le sort des prisonniers. Il fit aussi construire près de Bedford, où il s'était établi, des habitations simples et propres pour des ouvriers. Sa position de shériff l'appelait à visiter les prisons; il les trouva toutes dans un pitoyable état, et les prisonniers endurant mille privations au bénéfice des geôliers. Il voyagea partout en Europe, du Portugal au nord et au sud de la Russie, visitant les prisons et les hôpitaux, apportant des réformes, interrogeant les chefs, les geôliers et jusqu'aux bourreaux. A Vienne il eut une entrevue avec l'emp. Joseph II, auquel il eut le courage d'adresser de graves reproches. Il fit ainsi en Europe 7 ou 8 voyages. En 1776 il écrivit sur: L'État des prisons en Angl. et au pays de Galles. En 1785 la peste ayant éclaté il visita les principaux lazarets d'Europe, et finalement voulut pousser jusqu'à Smyrne. En 1789 il trouva au sud de la Russie des hôpitaux en si mauvais état qu'il y prit lui-même le germe d'une maladie qui l'emporta, 20 janvier 1790. Il avait recommandé qu'aucun monument ne fût élevé sur sa tombe; on lui en éleva cependant un dans la cathédrale de Saint-Paul à Londres.

HOYER, Anna, fille de Jean Owen, née 1584 à Coldenbuttel, Danemark, mariée 1599 à Her-mann Hoyer. Après la mort de son mari, elle s'abandonna à son penchant pour le mysticisme, se lia avec l'alchimiste Teting et fit de sa maison le rendez-vous des sectaires. Elle abhorrait le clergé et tout ce qui constituait l'Égl. extérieure. Les voix intérieures qu'elle prétendait entendre étaient empruntées à d'autres mystiques, et sans aucune originalité de sa part. Devenue pauvre, elle se rendit 1632 en Suède, où la reine-mère lui fit don d'un petit bien; elle y f 1656.

HROSVITA, ou plus simplement Rosvita, ou Hrotsuit, la plus ancienne femme poète de l'Allemagne. Née vers 930 à Gandersheim d'une vieille famille de la noblesse saxonne, elle entra vers 950 comme religieuse au couvent de Gandersheim, fondé par un membre de la famille impériale, s'illustra par ses compositions en vers et en prose, qui prouvent non seulement en faveur de ses talents, mais aussi en faveur du développement littéraire de son époque, et f 973, peu après la mort d'Othon 1er, son héros. On a d'elle cinq légendes, six comédies, plusieurs drames en prose, un panégyrique des Othon de Saxe, et les Origines de Gan-desheim; le tout en latin. Ses ouvrages sont aussi remarquables par la pensée que par le style. Son Théâtre a été trad. en fr. par Magnin 1845. Vie, par Kôpke.

HUBALD, v. Hucbald.

HUBER lo Samuel, né 1547 à Berne, étudia en Allemagne et fut nommé pasteur à Berthoud. Comme il ne croyait pas à la prédestination et qu'il penchait vers la doctrine luthérienne de Feucharistie, il s'opposa avec succès à la suppression de l'hostie, et il écrivit après le colloque de Montbéliard, 20 mars 1586, contre la doctrine de Bèze sur la grâce. Il fut invité par l'autorité supérieure à garder le silence sur ces questions, et comme il refusa il fut renvoyé du pays, 1588. Il passa au lulhéranisme, fut nommé pasteur près de Tubingue, puis prof, à Wittenberg. Là il enseigna un universalisme si exagéré qu'il scandalisa les théol. Leyser et Hunnius, et après un court emprisonnement il fut banni. La même chose lui arriva à Tubingue 1595. Après d'inutiles tentatives pour faire reviser son procès, il se retira près de Goslar chez son gendre, + 1624.

2o Marie Huber, née à Genève 1694, fille de Jean-Jacques Huber et d'Anne-Catherine Calan-drini-Fatio, f â Lyon c^ez des parents 13 juin 1753, s'est fait de son vivant une certaine réputation par le sérieux de sa vie et le caractère moral de ses ouvrages. Son style est froid; sa religion c'est le déisme. Ses idées ont été développées surtout dans ses Lettres sur la religion essentielle à l'homme, distinguée de ce qui n'en est que l'accessoire. Elle ne voit dans la révélation qu'un moyen d'arriver au développement de la théologie naturelle, et elle rejette tous les dogmes et les cérémonies du culte. Elle eut à défendre ses vues contre plusieurs théol., entre autres contre Ruchat. Son déisme est plutôt une affaire de sentiment qu'un système raisonné. — Son fr. Jacob fut le grand-père de François Huber, l'aveugle, l'admirable observateur des mœurs des abeilles.

HUBERIN, ou Huber, Gaspard, moine dans un couvent de Bavière, pasteur 1527 à Augsbourg où il avait déjà prêché la Réforme en 1525, prit part à la dispute de Berne, après laquelle il se rendit 1535 à Wittenberg auprès de Luther. Pendant quelques années il travailla à établir la Réf. dans le Palatinat et dans la principauté de Hohenlohe, puis il revint à Augsbourg; mais ayant accepté seul l'Intérim, il dut quitter la ville et f 1^53 à QEhringen. Quelques-uns de ses écrits et de ses sermons ont été publ. à Nuremberg 1552.

HUBERT (saint), fils du duc Bertrand d'Aquitaine; né vers 656. Il occupa d'abord un emploi considérable à la cour de Théoderic, puis auprès de Pépin d'Héristal. Après avoir vécu dans toutes sortes de plaisirs et de voluptés il se maria. Sa femme étant morte il se recueillit, il entendit la prédication de Landebert, se convertit, entra dans les ordres, vers 683, se consacra à l'évangélisation de la Belgique, succéda à Landebert comme év. de Maastricht, 708, transporta son siège épiscopal à Liège, qu'il dota, dit-on, de sa belle cathédrale, et + vers 727 ou 730 à Varen, près Bruxelles. Il a évangélisé surtout la forêt des Ardennes, et les légendes se sont multipliées autour de son nom. Les uns racontent que, fanatique chasseur, il fut converti de cette passion par la rencontre d'un cerf portant entre ses bois un crucifix lumineux; d'autres disent que saint Pierre lui a prêté sa clef, qui guérit les possédés et les gens mordus par des chiens enragés. Ses reliques doivent avoir conservé la même vertu. Elles ont été longtemps conservées à l'abbaye d'An-dain, à Saint-Hubert, petit bourg du Luxembourg belge, qui est encore auj. un lieu de pèlerinage très fréquenté. Si les moines ont en effet un secret contre la rage, ils sont impardonnables de le garder pour eux. Saint Hubert fut canonisé 3 nov. 827, et il est regardé comme le patron des chasseurs, — Deux ordres portent le nom de Saint-Hubert: l'un créé par Girard V. duc de Berg-et-Juliers en souvenir d'une victoire remportée le 3 nov. 1444 sur Arnold de Gueldre; il ne compte que 12 chevaliers et un commandeur; les insignes sont une croix d'or à 8 pointes avec l'image de saint Hubert au centre. L'autre fondé 1416 par Louis 1er, duc de Bar, transporté en Allemagne après 1789 et conservé par le grand-duc de Francfort; insignes: croix d'or avec l'adoration de saint Hubert et les armes de Lorraine.

HUBERTIN (Le Chroniqueur), nom qu'on donne au rédacteur inconnu, mais aussi spirituel que savant, de la Chronique du couvent de Saint-Hubert. Il doit avoir vécu vers la moitié du llm* siècle. La Chronique a été publiée par Bethmann et Wattenbach.

HUBMAIER, Balthasar, né 1480 à Friedberg, près Augsbourg, étudia sous Eck à Fribourg, et fut successivement pasteur et prof, à Ingolstadt et à Ratisbonne. Il provoqua l'expulsion des juifs 1519, mais suspect lui-même d'un penchant vers la Réforme, il dut quitter la ville. En 1522 il est pasteur à Waldshut; en 1523 il assiste au colloque de Zurich. La bourgeoisie de Wadshut s'etant décidée, grâce à lui, pour la Réforme, il dut fuir la colère de l'Autriche, se rendit à Zurich, et ne revint qu'avec une escorte zuricoise. Ses vues sur le baptême étaient celles de Mun-tzer et de ROubli, il n'admettait que le baptême des croyants; il écrivit dans ce sens, et sur son refus de se rétracter il fut mis en prison à Zurich. Proscrit, il se rendit en Moravie où il fonda une congrég. baptiste; mais la Moravie étant tombee entre les mains de l'Autriche 1527, il fut traduit à Vienne devant les tribunaux, accusé d'hérésie et de haute trahison, condamné et brûlé; sa femme fut simplement noyée comme complice, 10 mars 1528. Il n'a jamais donné dans les excès politiques des anabaptistes, et s'en est toujours tenu à la pure doctrine des Écritures contre le culte extérieur.

HUCARIUS, diacre anglais 1040, auteur d'un abrégé, ou d'un extrait du livre des pénitences, de l'arche v. Egbert d'York, 8®© siècle.

HUCBALD, Hubald, ou Hugbald, élevé par son oncle, l'abbé Mi Ion, au couvent de Saint-Amand, Flandre, lui succéda 871 dans ses dignités et dans l'enseignement. 11 s'occupa toute sa vie des arts libéraux, et non sans succès. On lui doit un Manuel de musique, et un Système harmonique connu sous le nom de diaphonie. Il a écrit aussi des biographies de saints et des notices historiques, qui ont surtout de la valeur par les descriptions, les épisodes et les traits de mœurs qu'elles renferment, f 930.

HUET, Pierre-Daniel, né à Caen 8 févr. 1630, d'un père protestant retourné au catholicisme, fut élevé par les jésuites. En 1652 il fit un voyage en Suède et, ayant trouvé à Stockholm un Comment, mss. d'Origène, il revint à Caen et ne s'occupa plus que de le traduire et le publier. En 1662 il fonda l'acad. de Caen; en 1668 il Acheva la publication de son Origène; en 1670 il fut adjoint à Bossuet, comme sous-précepteur du dauphin et commença dès lors à cette occasion sa belle collection de classiques ad usum Delphini. En 1674 il fut nommé à l'Acad. française, reçut en 1676 les ordres de l'abbaye d'Aulnay. Appelé 1685 à l'évêché de Soissons, il l'échangea, avant de l'avoir occupé, contre celui d'Avranches, se démit en 1699 pour cause de santé et pour pouvoir se livrer en entier à son goût pour l'étude, et se retira, comme abbé de Fontenay, dans une maison de jésuites à Paris, où il f 1721. Outre son travail sur Origène, il a publié sous le titre de Démonstration évan-géliq. un traité d'apologétique fort complet, où il prouve non seulement le caractère historique de la Bible, mais encore ses affinités avec une foule de traditions païennes; c'est un livre plein de science, mais qui abonde en conjectures hasardées. Ancien cartésien, il a fini par combattre son maître, dans Censura philos, cartesianœ. Il a écrit sur l'Origine des romans, sur le Commerce et la navigation des anciens, sur la Faiblesse de l'esprit humain, des vers grecs et latins, plus de 300 Lettres latines, etc. En 1718 il a publié à Amsterdam des Mémoires autobiographiques sans prétentions, qui ne manquent pas d'intérêt: Huetii Comment. de rébus ad eum pertinentibus. La réputation de sceptique qu'il a laissée s'explique par quelques-uns de ses ouvrages, mais ne doit pas être exagérée.

HUFFEL, J.-J.-Louis, auteur de plusieurs Sermons, de Lettres sur l'immortalité, d'un volume de Prudence pastorale et de quelques ouvrages d'édification; né 6 mai 1784 à Gnaden-bach, Hesse; après avoir occupé différents postes à Friedberg et Herborn, il fut nommé en 1829 prélat badois, conseiller ministériel et membre du consist. supérieur de Carlsruhe, où il f 26 juill. 1856.

HUG, Jean-Léonard, théol. cathol., né 1765 à Constance, étudia au séminaire général de Fribourg en Brisgau, fut nommé préfet des études en 1787, n'ayant pas encore l'âge légal pour porter le titre de professeur; fut chargé en 1791 de l'enseignement des langues orientales; puis prof, d'exégèse. En 1827 il reçut le titre de chanoine, celui de doyen en 1843. Il était éphore du Lycée depuis 1838. f 1846. Il avait refusé plusieurs appels, à Breslau, Rome, Tubingue. Ses principaux écrits sont relatifs k la critique et k l'Introduction; ils ont en même temps un caractère apologétique et visent à réfuter les idées de Paulus et de Strauss. Son lntrod. au N. T., trad. en fr. par Cellérier, bien que dépassée par les travaux-modernes, conserve encore sur plus, points une vraie valeur.

HUGO, ou Hugues. 1° abbé de Cluny, né vers 1024, f 1109; fils de Dalmace, seigneur de Se-mur et descendant des ducs de Bourgogne; ami de Henri III, d'Alphonse d'Espagne, et de plusieurs papes, jusqu'à Grégoire VII qui le fit son légat.

2<> év. de Grenoble 1080, ami du précédent; né 1053, f H32.

3° H. de Flavigny, né 1065 à Verdun, élevé au couvent de Saint-Viton, accompagna l'abbé Rodolphe à Dijon et l'abbé Jarentou en Italie dans diverses missions ecclésiastiques. Élu abbé de Flavigny 1096, il fut contraint par ses moines de quitter le couvent 1099. On croit qu'il se rangea ensuite du côté de l'empire et qu'il devint abbé de Dijon.

4° H. de Saint-Victor, d'une origine incertaine; comte de Blankenburg, suivant les uns; suivant les autres, né 1097 à Ypres, d'une très modeste famille. Il fut élevé par un oncle Hugo, archidiacre de Halberstadt, qu'il accompagna à Paris. Il entra là dans un couvent d'augustins, fut nommé maître des études et f H41. Mystique de tempérament, scolastique d'éducation, il s'efforça de concilier les deux tendances. Les principaux de ses 50 ou 60 écrits sont: Auditio didascalica, sorte d'encyclopédie, avec Introd. à l'Écriture Sainte; un traité systématique des sacrements, où il se rattache à saint Augustin, mais en insistant davantage sur le signe comme renfermant et portant la grâce; il accorde aussi beaucoup d'importance au chiffre sept. Son Éloge de la charité est comme le résumé ds sa théologie. Nommons aussi sa Méthode pour étu-. dier, et sa Sagesse de Christ. Œuvr. Rouen 1648. Hauréau, Paris 1859.

5<> Hugo des payens, un des fondateurs de Tordre des Templiers 1118, était de la maison des comtes de Champagne, f 1136.

6° Hugo de Saint-Cher (de Sancto Caro), né à Saint-Cher, un des faubourgs de Vienne en Dauphiné, étudia à Paris la théol. et le droit canon, entra 1224 dans le couvent dominicain de Saint-Jacques, cardinal en 1245, f 1263. Très savant il mit son érudition au service de l'Égl. et combattit Guill. de Saint-Amour et Joachim de Flore. Son principal ouvrage est sa correction de la Vulgate, Correctorium Bibliœ Sorbo-nicum. Il a aussi publié une Concordance, la 1" qui ait été faite, et qui a vulgarisé la division de la Bible par chapitres.

HUGUENOTS, surnom ou sobriquet donné aux protestants de France, avec une intention injurieuse. L'origine et l'étymologie en sont incertaines. D'Aubignè et Pasquier rappellent qu'à Tours il y avait une tour Hugon où les reli-gionnaires s'assemblaient; ils pensent aussi à des lutins, qu'on appelait Hugon, de l'ancien et méchant comte ou roi Huguet, dont on faisait un épouvantait pour effrayer les enfants. De Brieux raconte qu'un prédicateur protestant commença un jour son sermon en disant: Hue nos venimus, hue nos... (Nous sommes venus ici, ici...) et qu'il ne put aller plus loin. Par moquerie on l'appela, lui et ses fidèles, des Hucnos; c'est bien forcé, surtout ce sermon protestant en latin ! Mahu suppose que huguenot pourrait être le diminutif de Hugues, quelque hérétique de ce nom, inconnu auj. et qui aurait servi à désigner tous les hérétiques; à cette hypothèse il ne manque que le point de départ, le premier anneau. L'etymologie la plus généralement admise est que le mot est une corruption de l'allemand Eidgenossen (Eygenots) qui signifie confédérés, et qui aurait pris dans les Mémoires de Condé la forme de Aignos. Mais on peut objecter, d'abord, que le surnom de confédérés ne constitue pas une injure; ensuite que le mot de Huguenot se trouve déjà, il est vrai comme simple nom propre, dans l'Hist. littéraire de France, qui mentionne à la date du 7 oct. 1387 un Pascal Huguenot, docteur en décrets. La plus ancienne mention de réformés sous le nom de huguenots, se trouve dans une lettre du comte de Villars, lieutenant général en Languedoc, 12 nov. 1560; ils y sont appelés Huguenaulœ. En définitive c'est encore l'origine tourangeause qui paraît le plus probable.

HULSEM ANN, Jean, prof, à Wittenberg depuis 1629, prit part 1631 au colloque de Leipzig, en 1645 à celui de Thorn et finit par se retirer à Leipzig 1646. + 1661. Foncièrement orthodoxe, comme son gendre Calov, il ne cessa de lutter en faveur du luthéranisme. Un peu vif comme polémiste, il était savant et relativement impartial. Il ne poussait pas à l'extrême les conséquences que l'on pouvait tirer des doctrines de ses adversaires, notamment de Calvin. Son principal ouvrage, paru 1640, plus développé 1655, est un Abrégé théol. exposaut les points controversés de la foi.

HUMANISME, Humanités. Si l'on appelle humain tout ce qui correspond aux besoins intellectuels et moraux de l'homme, l'humanisme sera la possession et la manifestation de ce développement intérieur, surtout sous le double rapport de la culture intellectuelle et morale. Et comme c'est par le retour à l'antiquité classique grecque et latine, à sa littérature et à sa philos, que s'est produit le mouvement du monde moderne, comme c'est chez les anciens qu'on est allé chercher et des idées et des modèles, par opposition à la scolastique qui prétendait en appeler à l'autorité de l'Égl. et de Dieu, on a été conduit à donner le nom d'humaine à cette direction de la pensée; le nom d'humanistes aux hommes qui pour s'approprier les trésors des anciens, se sont donné pour tâche l'étude de leurs langues; le nom d'humanisme à cette tendance littéraire qui a pour principaux représentants Érasme et Reuchlin. Dans notre langage moderne on emploie encore ce mot et ses dérivés pour désigner les actes et les tendances d'ordre moral purement humanitaires, qui ne s'appuient pas nécessairement sur l'idée religieuse et qui même peuvent être en antagonisme avec elle. Si la propagation de l'Évangile par les missions appartient au premier chef à ces œuvres de philanthropie qui tendent au bien de l'humanité, on peut y ranger aussi les efforts de tous genres qui ont pour but d'améliorer le sort des hommes, l'abolition de l'esclavage, la suppression de la traite, la croix-rouge, les hôpitaux, et même certaines aspirations politiques ou sociales qui, réserves faites quant aux moyens, peuvent être considérées comme réellement humanitaires et proviennent, sans qu'on s'en rende compte, de l'influence d'un christianisme inconscient.

HUMBERT 1° le cardinal, originaire de Bourgogne. élevé dans un couvent de bénédictins, près de Tours, par l'abbé Bruno, plus tard Léon IX. Il accompagna son maître en Italie 1049, et fut nommé év. de Silva Candida et cardinal. Chancelier sous plusieurs papes, il jouit d'une grande influence. Il fut envoyé comme légat à Constantinople, quand le schisme éclata, et déposa dans Sainte-Sophie la bulle d'excommunication. Il fut aussi à la tête des ennemis de Béranger et l'obligea de paraître au conc. de Rome pour y faire sa profession de foi. 1059. f 1061 ou 1073. OEuvr. publ. par Migne, ave: le récit de son voyage à Constantinople.

2° Humbert II, le dernier dauphin du Viennois, céda le Dauphiné à Philippe de Valois, à la condition qu'un des fds du roi porterait touj. le titre de dauphin. Il se croisa 1345, remporta sur les Sarasins un léger avantage, abdiqua à son retour et se fit religieux 1349. Patriarche d'Alexandrie 1352, il allait être nommé archev. de Paris, quand il + 1355.

HUMILIÉS (Ordre des). Quelques nobles italiens, ayant été faits prisonniers en Allemagne, se réunirent en association au 12™e siècle pour des exercices de pénitence. Ils adoptèrent la règle de saint Benoît, et après avoir été agréés par Innocent III, ils se répandirent dans le nord de l'Italie. Pie V les supprima 1571, parce qu'ils avaient comploté contre les essais de réforme du card. Borromée. Les couvents de femmes du même ordre, appelées aussi les nonnes de Blas-soni, du nom de leur fondatrice, subsistent encore aujourd'hui.

HUNNIUS lo iEgidius, de Winnenden, Wurtemberg; né 1550, étudia à Tubingue; prof, de théol. à Marbourg en 1576, puis à Wittenberg 1592. f 1603. Il travailla pour la Form. de Concordent prépara ainsi le schisme dans la Hessç; il combattit aussi le crypto-calvinisme à Wittenberg et fit destituer son collègue S. Huber, accusé de croire à la prédestination. Son second fils, prof, de droit, se fit catholique.

2° Nicolas, fils d'iEgidius, né à Marbourg 1585, étudia à Wittenberg; surintendant à Ei-lenburg 1612, prof, de théol. à Wittenberg 1617, appelé h Lubeck 1623 et surintendant. Pasteur pieux et zélé dans l'exercice de ses fonctions, il se montra très rai de contre les enthousiastes, les réformés et les catholiques. Il avait fait le plan d'un sénat théologique permanent, chargé de veiller au maintien de la saine doctrine.

HUNS, peuple barbare, d'origine mongole, qui força les Chinois à élever leur grande muraille. Après s'être fixés, partie sur les bords de la mer Caspienne, partie en Finlande, au commencement du 4me siècle, les Huns se précipitèrent sur l'Europe vers 376, et subjuguèrent les Alains, les Goths et les Bourguignons. Ceux-ci, d'après Orose et Socrate, se firent chrétiens pour s'assurer le secours du Dieu des gallo-romains, vers 413, et défirent à leur tour les Huns, Attila, le fléau de Dieu, porta à son comble la puissance de ces hideux et cruels barbares. Petit de taille, horrible de figure, simple dans ses goûts, mais d'une férocité inouïe, il s'allia avec Genséric, crut un moment qu'il allait épouser Honoria, la sœur de Valentinien, couvrit l'Occident de ruines, et passa le lac de Conslance avec 400,000 hommes. Il épargne Troyes à l'intercession de saint Loup, subit à Châlons-sur-Marne 451 une sanglante défaite "dan? une rencontre avec Aëtius qui commandait les Romains, les Francs et les Visigoths; se rabat sur l'Italie, mais est arrêté aux portes de Rome par Léon plus courageux que Valentinien: il signe la paix et se décide à retourner dans la Pannonie, son ancienne demeure. En route, 453, la veille de ses noces, il f d'apoplexie, des suites d'une débauche, ou empoisonné. Ses soldats le mirent dans un cercueil d'or et l'enterrèrent dans un lieu ignoré. Ses fils se disputèrent l'empire, mais aucun d'eux ne fut assez fort pour le rétablir; l'un d'eux ramena en Asie une partie de la nation; l'autre s'établit dans la Hongrie, dont le nom dérive vraisemblablement des Huns; quelques tribus enfin s'établirent dans le Caucase et sur les bouches du Don; ce sont les ancêtres des Cosaques actuels. Les rapports accidentels d'Attila avec saint Loup et Léon sont les seuls points par lesquels l'hist. des Hims touche à celle de l'Egl. chrétienne.

HUNYADE, Jean, surnommé Corvin, né vers 1400, descendait selon les uns des emp. Paléolo-gues; selon les autres il était fils de l'emp. Sigismond. Il fut pendant plusieurs années le défenseur de la Hongrie et le boulevard de la chrétienté contre les Turcs, qui l'avaient surnommé le diable. Voïvode de Transylvanie en 1440, il fut nommé en 1444 régent de Hongrie, pendant la minorité de Ladislas V, et se distingua par ses qualités civiles, administratives et militaires. En 1456 il défendit Belgrade contre Mahomet II, et mourut peu après, au comble de la gloire. Son fils Mathias Corvin lui succéda. Les Hunyades avaient pour armes un corbeau, tenant au bec un anneau d*or; de là leur surnom.

HUPFELD, Hermann, savant orientaliste, né â Marbourg 31 mars 1796, prof, à Marbourg 1823, puis en 1843 à Halle, où il f 25 avril 1866. Auteur de plus, ouvrages de grammaire et de théologie.

HURTER. Frédéric, né 1786 à Schaffhouse. où il fut plus tard pasteur, après avoir étudié à Gottingue 1804. Auteur d'une vie d'Innocent III, 1834-1842, il chercha à justifier la hiérarchie et â glorifier le moyen âge; il finit par se faire catholique 1844, après avoir longtemps repoussé comme une calomnie l'accusation d'être un catholique secret. Nommé historiographe de l'empereur, à Vienne, il écrivit l'histoire de Ferdinand II. f 1865.

HUSCHKE, Georges-Édouard, né à Munden 26 juin 1801, prof, de droit à Rostock, puis à Breslau 1827, et conseiller de justice, s'opposa à l'union forcée des églises et se mit en 1841 à la tête d'un synode qui décida la formation d'une Égl. luthérienne libre, indépendante de l'État, qui se gouvernerait par un synode réuni tous les 4 ans. Mais comme il mettait la constitution de cette Égl. bien au-dessus de sa doctrine, et qu'il semblait accorder une autorité presque divine au Conseil supérieur qui la dirigeait, une partie de ses adhérents refusa de le suivre aussi loin, un schisme éclata en 1858, et la petite église se morcela en 1864.

HUSS, Jean, né de parents pauvres, 6 juill. 1369, à Hussinecs, bourg d'où lui est venu son nom, dans le cercle de Prachin, au midi de la Bohême, étudia à Prague, fut maître ès arts en 1396, prof, à l'uni v. en 1398, doyen de la faculté de philos, en 1401. Il était tchèque, ou slave, comme la plupart des habitants de la Bohême, et conservait pour la nationalité de ses ancêtres autant d'affection que de respect, et ce caractère de race, avec les souvenirs qu'il éveillait, peut expliquer en partie l'indépendance de Huss et les persécutions dont il fut l'objet de la part des allemands. En 1402 il fut appelé à desservir la chapelle de Bethléhem, élevée et dotée 1392 par un riche bourgeois, agréée par le roi et l'archev. comme destinée uniquement à la prédication en langue bohème. Elle pouvait contenir 3000 auditeurs; Huss attirait les foules, et son éloquence électrisait et vivifiait l'église. En même temps la reine Sophie, femme de Wenceslas-le-Fainéant, le choisit comme son chapelain. Son maître Stanislas de Znaim l'avait déjà disposé à une grande largeur de vues; les écrits de Matthias de Janow, et plus tard ceux de Wiclef ne firent que l'affermir et l'éclairer davantage. Sa prédication devint plus incisive, mais il ne poursuivait encore qu'une réforme dans les mœurs. Il avait blâmé les désordres de la cour, et sur la plainte du roi, l'archev. répondit que Huss avait promis à sa consécration de dire la vérité à tous sans acception de personnes. Quand Huss passa aux désordres du clergé, l'archev. vint se plaindre à son tour, mais le roi lui rendit sa propre réponse. L'univ., inquiète de l'accueil favorable fait aux écrits de Wiclef, en signala 45 propositions comme dangereuses, et défendit sous peine du feu de les répandre et de les professer. Huss, qui prétendait encore ne pas vouloir se séparer de l'Égl. romaine, se borna, pour toute opposition, à nier que les doctrines incriminées se trouvassent dans Wiclef. En général sa doctrine paraît être restée celle de l'Égl. sur presque tous les points, et là où il y avait désaccord il s'abstenait d'insister. Il admettait plus ou moins l'intercession de la vierge et des saints, et n'était bien au clair que sur le salut gratuit en J.-C. En principe il approuvait comme d'institution divine la communion sous les deux espèces, mais il n'a rien fait pour l'introduire, et l'agitation de la Bohême sur la question du calice lui est étrangère. En 1408 la lutte éclata dans l'université en Ire les différentes nations qui la composaient, et Huss obtint de Venceslas 1409 le retour à l'ordre de choses établi par Charles IV en 1347, soit 3 voix pour la nation bohème et 1 seule pour les 3 autres réunies, c.-à-d. le contraire de ce qui s'était introduit peu à peu. En récompense de ce succès Huss fut nommé recteur, mais les Allemands quittèrent Prague et fondèrent à Leipzig une université rivale. L'archev. Zbyniek, ou Zbynko, avait été jusqu'alors plutôt favorable à Huss; il l'avait soutenu dans sa lutte contre l'imposture de Wilsnack, et avait délaré, encore en 1405, qu'il n'y avait dans son diocèse aucun hérétique. Mais à partir de ce moment, voyant s'éloigner les Allemands et par conséquent grandir le parti de la Réforme, il se tourna contre Huss et lui fit interdire la prédication en tchèque dans la chapelle de Bethléhem. La question fut de part et d'autre portée devant le pape Alexandre V, qui y répondit par une bulle 1409 enjoignant à Zbynko de sévir contre les hérétiques. Zbynko fit brûler les livres de Wiclef, près de 200 volumes d'une fort belle écriture, avec des couvertures très riches et des reliefs en or. Suspendu de ses fonctions, puis excommunié 1410, Huss fut cité à Rome ou à Bologne, mais Venceslas l'empêcha de s'y rendre. La cour soutenait le réformateur; le pape envoya le cardinal Angelo qui mit Prague à l'interdit, et toutes les égl. furent fermées. En 1412 Jean XXIII publia une croisade contre Ladislas roi de Naples et contre son antipape, promettant une indulgence pléniaire à ceux qui se croiseraient, soit personnellement, soit pécuniairement. Huss protesta contre cette impiété et donna en chaire libre cours à son indignation. Le peuple de la ville insulta publiquement les marchands d'indulgences, et l'on ne se gênait pas pour interrompre dans leurs discours ceux qui les prônaient. Trois de ces jeunes gens furent un jour arrêtés et presque aussitôt décapités, malgré l'intervention de Huss. Le peuple les ensevelit dans la chapelle de Bethléhem et les honora comme des martyrs. Huss, pour relever la ville de Prague sur laquelle sa présence amenait l'interdit, se retira momentanément, et se mit à prêcher dans les villes et dans les campagnes, oîi sa parole, à la fois tchèque et réformatrice, fut reçue avec grande faveur. En-(in cité devant le conc. de (instance, il partit pour s'y rendre le 11 oct. 1414, muni d'un sauf conduit de l'emp. Sigismond, d'une déclaration d'orthodoxie signée par Conrad, le nouvel archev. de Prague, et par Nicolas, év. de Nazareth, inquisiteur du diocèse, et d'une recommandation du roi, qui lui donnait pour compagnons trois seigneurs bohémiens, Jean de Chlum. Henri de Latzenbock et Wenceslas de Duba. Il prêcha partout sur sa route et fut bien accueilli des prêtres et des populations. Arrivé à Constance le 3 nov., il vit d'abord ses amis favorablement reçus par le pape et les cardinaux, mais cela dura peu, et le 28 il était déjà accusé d'hérésie et mis sous la garde d'un chanoine qui le retint 8 jours, malgré les réclamations de Chlum et les ordres très précis de l'empereur. Après Noël il fut transféré dans une prison humide et infecte qui faisait partie d'un couvent de dominicains, puis le 3 mars 1415 dans une prison de franciscains, et le 20 au château de Gottleben, où il fut enchaîné, les mains attachées la nuit avec un cadenas au mur contre lequel était appuyé son grabat. Le pape Jean XXIII, arrêté dans sa fuite, fut conduit comme prisonnier le même jour dans ce château. Enfin les 5, 7 et 8 juin Huss comparut, malade et exténué, devant le Congrég. du Concile, faveur qui lui fut accordée à la sollicitation de Chlum, car on avait voulu d'abord le condamner sans l'avoir interrogé; mais dès qu'il prit ta parole on lui répondit par des injures et des cris si furieux qu'il ne put réussir à se faire entendre. C'est ce qui décida Sigismond à assister aux séances du 7 et du 8 pour maintenir un peu d'ordre parmi les pères; mais cela même ne profita pas beaucoup à l'accusé. On voulait obtenir de lui une rétractation pure et simple de tout ce qu'il avait dit, ou pas dit, entre autres, qu'il était la 4m« personne de la Trinité. Plusieurs prélats essayèrent de la douceur pour l'engager à s* rétracter, mais il leur répondit comme à de Chlum: qu'il était prêt à rétracter tout ce qu'il aurait avancé de faux, dès qu'on le lui aurait démontré. Le 5 juillet nouvelle tentative par ordre de l'empereur, et le lendemain, 6 juillet 1415, première et dernière comparution devant le concile, présidé par le cardinal d'Ostia. Il est condamné comme hérétique et dégradé; ses livres sont brûlés devant lui, et enfin il est livré au bourreau. L* bûcher s'élevait dans une prairie, entre les jardins, derrière la ville. Le supplice dura longtemps, mais le martyr ne faiblit pas; il chanta et pria jusqu'à ce que les flammes étouffèrent sa voix. A 11 h. du matin tout était terminé; Kome avait triomphé el les bourreaux n'eurent plus qu'à ramasser les cendres de sa victime pour les aller jeter dans le Rhin. — Les principaux accusateurs de Huss avaient été Etienne Paletz. prof, en théol. à Prague, et Michel de Causis, curé d'une des paroisses de cette ville. — Parmi les Œuvres de Huss il faut nommer son Traité de l'Église, celui des Six erreurs, les Trois ennemis de l'homme, plusieurs petits écrits composés dans sa prison, des sermons et de nombreuses et touchantes lettres adressées à ses amis de Bohême, en prévision de son supplice, pour les engager à persévérer dans la foi. Ces œuvres qui furent fréquemment copiées au 15™ et au 16me siècles, furent détruites en grand nombre d'exemplaires par les jésuites, qui recherchèrent tout ce qui était tchèque pour le brûler. Publiées à Nuremberg 1558 avec une préface de Luther, et réimpi. en 1715, (les Lettres seules, par Bonnechose, Paris 1856), elles ont trouvé récemment à Prague un éditeur distingué en la personne de Ch. Erben, directeur des archives de la ville, 3 vol. 8°, en tchèque, v. aussi Palacky. C'est par erreur qu'on attribue à Huss une trad. de la Bible. Il a simplifié et réformé l'alphabet, l'orthographe et la langue tchèque, blâmant l'introduction de mots étran gers, et rappelant à ce sujet Néhémie 13, 23, 2i.

Ht SSITES, les disciples de Huss. Révoltés du manque de foi et de la cruauté dont avaient fait preuve les ennemis de Huss, la noblesse et le peuple de Bohême ne regardèrent pas la question de la Réforme comme tranchée par le supplice du martyr, et le 2 déc. 1415 la diète adressa au concile une protestation menaçante avec un mémoire signé par plus de cent chevaliers et de mille gentilshommes. Le conc. n'en tint compte, excommunia les partisans de Huss, enleva leurs églises, les mit eux-mêmes en prison, brûla les uns, noya les autres, et multiplia les actes de cruauté au point que ceux qui survivaient durent prendre les armes pour pourvoir a leur propre sûreté et à celle de leurs familles. La guerre, rendue plus barbare encore par l'intervention du pape qui organisa une croisade contre ces malheureux, dura 13 ans et fut marquée par plusieurs succès signalés remportés par les hussites sous les ordres de Ziska. Ces derniers se divisèrent bientôt en deux partis, les calixtins, ou modérés, qui demandaient seulement la communion sous les deux espèces et qui avaient pour eux l'université, et les tabori-tes, qui demandaient une réforme complète de tous les abus de mœurs ou de doctrine. Ces derniers à leur tour se séparèrent en deux classes: les spirituels, qui voulaient avant tout une vraie réforme de l'Église, et qui sont les pères des frères de l'Unité, et les zélotes, ou violents, qui, une fois partis en guerre, ne pensèrent plus qu'à vaincre ou mourir. A la suite d'une victoire des hussites, le 14 août 1431, le pape se décida à convoquer le conc. de Bâla, où Cesarini obtint que Rockyzane et Épiscopius fussent délégués, et en 1434 les Compactata, compromis équivoque, satisfirent les calixtins, mais sans désarmer les taborites, qui continuèrent de lutter seuls. Ni Sigismond, ni ses successeurs Albrecht etLadislas, ne respectèrent le compromis de Bâle, et lorsque Podiebrad, qui était hussite de cœur, eut consenti à se laisser sacrer par lesév. catholiques, Pie II crut pouvoir révoquer formellement ces Compactata, et même faire déposer le roi qui s'était permis d'incarcérer son légat. Podiebrad résista, et son successeur Wla-dislas conclut à Kuttenberg en 1471, la paix de religion, qui maintenait les actes de Bâle et assurait aux deux partis la liberté confessionnelle. Il y eut bien encore quelques tiraillements, quelques supplices, mais la guerre était terminée, et quand la Réforme arriva, elle trouva chez les descendants des hussites des adhérents nombreux, joyeux et convaincus.

HUTTEN, Ulrich (de), né 22 avril 1488 à Stackelberg, Hesse-élect, d'une famille noble; s'enfuit à 16 ans d'un couvent de Fulda où il avait été placé pour son éducation, et étudia à Erfurt, Cologne et Francfort s. l'O. Après une vie un peu aventureuse il vint à Greifswald, où il se fit une affaire avec le bourgmestre Lôtz, et il répondit à la honteuse conduite de ce magistrat par un pamphlet où il le clouait au pilori. En 1310 il vint à Wittenberg, puis, sur le désir de son père, il se rendit à Pavie et à Bologne pour y étudier le droit romain, mais il n'y prit pas goût. Ses poésies satiriques lui avaient déjà fait une réputation; ses vers latins lui valurent même de la part de l'emp. Maximi-lien la couronne poétique. Mais poursuivi par la mauvaise fortune, il dut s'engager comme simple soldat dans l'armée impériale. En 1517 il revint en Allemagne et commença une série de publications, poésies ou discours, satiriques; en 1519, pour venger la mort de son frère, ou cousin, contre Ulrich de Wurtemberg qui l'avait fait assassiner. En 1516 il avait déjà pris parti pour Reuchlin dans sa lutte contre les théol. de Cologne, et il collabora pour beaucoup aux fameuses Lettres de quelques hommes obscurs. Lié un moment avec Luther, dont il partageait les idées réformatrices; appuyé d'abord par Al-berg de Brandebourg, archev. de Mayence, et quelques princes allemands, il perdit peu à peu ses protecteurs qui trouvaient qu'il allait trop loin, soit pour le fond, soit pour la forme. Ses aspirations nationales et antipapales se traduisirent en discours devant la diète d'Augsbourg 1518, et en écrits qu'il répandait du château de Stackelberg, où il demeurait; mais comme il ne trouvait d'écho, ni chez l'empereur, ni chez les princes, il s'attacha à François de Sickingen, et publia son éloquent appel aux villes libres de l'Allemagne pour les exciter à la lutte contre les Turcs. Enfin privé de toutes ressources, errant de ville en ville, ce puissant mais incommode génie vint à Zurich pour y chercher des alliés, et il y f 29 août 1523, de maladie et le cœur brisé. On a encore de lui un Traité latin sur l'art de versifier, et des Dialogues contre l'Égl. romaine. On lui doit aussi la découverte de 2 livres de Tite-Live, et des mss. de Pline et de Quintilien. Comme puissance oratoire on l'a comparé à Démosthènes et à Cicéron. Œuvres publ. par Munch, Berlin 1821-1827. Vie, par Ruffet, Genève 1879.

HUTTER, Léonard, né janvier 1563 à Nelli-gen, près Ulm, étudia la philologie et la théol. à Ulm, Strasbourg, Leipzig, Heidelberg et Iéna; commença à enseigner dans cette dernière ville 1594, puis à Wittenberg, où il se distingua surtout par la pureté de son orthodoxie. Son principal ouvrage, publié après sa mort 1619, est intitulé Loci communes theologici, développement d'un Compendium qu'il avait composé en 1610 à la demande de Christian II de Saxe, sous les auspices des facultés de Wittenberg et de Leipzig, et qui était deveuu le Manuel officiel de l'enseignement en Saxe. C'est un exposé simple et calme de la doctrine contenue dans la Form. de concorde. Il combattit les tentatives d'union du réformé Pareus, blâma le changement de religion de l'électeur Sigismond et réfuta la Concordia discors en lui opposant 1614 sa Concordia concors. Un volume allemand, paru à Leipzig 1829 sous le titre de Hutterus redivivus, est un simple hommage rendu à sa mémoire; les éditeurs ont voulu honorer son souvenir en publiant une dogmatique du même genre, due à un jeune savant, Klein, mort avant d'avoir pu retoucher son manuel devenu promp-tement populaire; une plume amie s'est chargée de ce soin.

HYACINTHE (le père), de son vrai nom Charles Loyson, né 1827 à Orléans, élevé à Paris où son père était recteur, montra de bonne heure des dispositions poétiques, entra à 18 ans à Saint-Sulpice, fut prof, de philos, à Avignon, de théol, à Nantes; puis à Paris curé de Saint-Sulpice, aux Carmes de Lyon, el fit de là des tournées de prédications, à Bordeaux, Périgueux, et enfin Paris en'1865, où il obtint à la Madeleine et à Notre-Dame un immense succès. Mais devenu suspect de largeur confessionnelle il fut dénoncé par Veuillot et dut se rendre à Rome où il réussit à se justifier auprès du pape. En juin 1869, au Congrès de la paix, il se signala par un magnifique discours où il manifestait des sympathies pour le protestantisme et où il faisait la critique du catholicisme moderne. Bientôt il rompit avec son ordre, fut excommunié, nommé balayeur des rues de Rome, et partit pour l'Amérique. Sa position, comme ses talents, le désignait pour être le chef du catholicisme libéral en pays de langue française. Il fut nommé curé à Genève en 1873, brilla un moment d'un vif éclat, mais finit par abandonner une œùvre qui ne répondait pas à ses aspirations, et se rendit à Paris où il ouvrit une chapelle. Le P. Hyacinthe a épousé à Londres une dame américaine. Plusieurs de ses conférences sur la Réform. cathol. renferment des morceaux de la plus haute éloquence, mais sa position intermédiaire entre le cathol. et le protestantisme, difficile à expliquer, a affaibli son action sur les masses et compromis son œuvre.

HYDROPARASTATES, v. Encratites.

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HYGIN, ou Hyginus, 9™ év. de Rome 139-141; peut-être Athénien de naissance, condamna le gnostique Valentin et Cerdon le Syrien, précurseur de Marcion; d'ailleurs inconnu. Les lois et les décrets qu'on lui prête sont sup-

HYMNES, cantiques, etc. On sait par le N. T. que le chant des cantiques était ordinaire chez les premiers chrétiens, qui ne faisaient que suivre en cela les coutumes des Hébreux, Éph. 5, 18. Col. 3, 16. Matt. 26, 30. La lettre de Pline à Trajan constate que les hymnes en l'honneur de Christ continuèrent dans la primitive Église, mais on ne possède aucune donnée sur la nature de ces chants, que quelques-uns supposent avoir été une simple cantilène ou une sorte de récitatif, une déclamation accentuée, sans mesure, ni rythme. On peut croire que le chant variait suivant les communautés. Parfois l'un des assistants chantait un psaume et l'assemblée répétait les derniers mots. Ailleurs, après la prière, les enfants entonnaient le Kyrie éleï-on, que les fidèles répétaient avec eux. D'après Tertullien, à la fin d'une agape on invitait le plus capable à chanter un fragment de l'Écriture ou un cantique de sa composition. Puis, à mesure^qu'on prenait plus de plaisir à entendre le chantre attitré, le public se déshabitua de chanter lui-même, jusqu'à ce que Sylvestre 1er vers 320, et Ambroise de Milan, cherchèrent à régulariser et développer le chant d'église. De nombreux hymnes datent de cette époque, plus remarquables par les paroles que par la musique, à peine digne de ce nom. Du 6me au 9me siècle la langue latine offre une riche moisson de cantiques spirituels, composés par Bède, Warnefried, Théodulphe d'Orléans, Alcuin, RabanMaur,etc. Plus tard on doit enregistrer les noms de Robert, roi de France, de Damiani, Bernard, Bona-venture, Thomas d'Aquin, Celano, auteur du Dies irœ vers 1230; Jacopone de Todi, auteur du Stabat, f 1306, etc. Bien qu'étant surtout l'affaire du clergé, le chant tendait naturellement à se répandre dans la masse des fidèles, et les processions, en multipliant les refrains, favorisèrent cette disposition; les flagellants en particulier, y contribuèrent avec leur rythme mélancolique. Mais c'est de la réforme hussite qu'il faut faire dater son introduction légale et régulière dans l'Église, comme chant de tous les fidèles. Pierre de Dresde, recteur à Zwickau 1420, s'en occupa sérieusement, et l'év. Lucas 1504 fit imprimer une centaine de cantiques. Il y en avait beaucoup d'originaux, mais le plus grand nombre étaient trad. du latin (recueil de 1494). Parfois aussi un amateur plein de bonnes intentions, prenait une mélodie mondaine et y adaptait des paroles religieuses: ainsi H. de Laufenberg, Fribourg, 15m« siècle. Mais c'est seulement à partir de la Réformation que le chant d'église est devenu ce qu'il est auj., un acte de culte auquel toute l'assemblée participe, et qui fait en même temps la joie et la force des églises. Les cantiques sont devenus l'expression publique de la foi et ont ainsi revêtu un caractère liturgique. L'Allemagne a été particulièrement privilégiée sous ce rapport: Luther tient la tête avec ses 37 b^aux cantiques et choraux, mais le nombre de ses chantres est immense, et l'on compte dans le nombre des têtes couronnées, Gustave-Adolphe, Louise-Henriette de Brandebourg. Parmi les poètes les plus populaires et les plus féconds, il faut nommer Gerhard, Gerock, Herm. Francke, Zinzendorf, Tersteegen, Gellert, Klopstock, Lavater, Nova-lis, et parmi les modernes, Knapp, Spitta, Garve. En France la trad. des Psaumes, quelque imparfaite que fût l'œuvre de Bèze et de Marot, trouva un terrain si bien préparé qu'elle devint presque l'un des livres officiels des égl. réformées, et d'un usage si répandu que les protestants furent appelés les chanteurs de psaumes. Néanmoins ce recueil, toujours respecté, dut être complété par l'adjonction de cantiques plus clairement chrétiens quant à la doctrine; Bèn. Pictet est un de ceux qui ont surtout concouru à la formation de ce supplément. Parmi les modernes, le nom de César Malan, par ses chants de Sion, mérite d'être signalé en première ligne, comme poète et compositeur musical. Mais le réveil religieux a produit toute une littérature de cantiques, dont quelques-uns, déjà consacrés par le temps, sont définitivement admis par les églises. Les auteurs les plus connus sont Bastie, A. Bost, Clottu, comte De la Borde, Chavannes, Empeytaz, Gonthier, Guers, F. Neff, Recordon, Schérer, Vinet.

Les chants figurés de A. Bost (Apocalypse, Ps. 118, Jubilé, Pâques, etc.), marquent un progrès dans le chant d'église et ont eu plus, éditions. Quant aux recueils, simples compilations, ils sont trop nombreux pour être tous mentionnés; chaque église a voulu avoir le sien: Genève, Lyon, Paris, Nîmes; et de même chaque congrég. particulière, wesleyens, baptistes, chapelle de l'Etoile, darbistes, etc.

HYPATIE, fille du mathématicien Théon, née vers 370 à Alexandrie, très savante elle-même en mathématiques et philos.; étudia à Athènes et donna des cours publics à Alexandrie sur Platon et Aristote. Très liée avec le gouverneur de la ville, Oreste, elle était païenne, et fut massacrée 415 dans une émeute par les chrétiens, désireux de venger leur év. Cyrille, qu'elle avait attaqué avec passion. D'après Suidas, Cyrille, jaloux de la gloire d'Hypathie. n'aurait pas été étranger à cette mort. Les œuvres d'Hypatie ont péri dans l'incendie de la biblioth. d'Alexandrie.

HYPERIUS (d'Ypres). André Gerhard, né 16 mai 1511, étudia à Paris la philos. 1528-1532, puis la théol., s'attacha àSturm, et après avoir visité encore l'Italie et l'Allemagne, se prononça pour la Réformation. Il se rendit ensuite en Angleterre, et à son retour fut nommé 1541 prof, de théol. à Marbourg, où il + 1564. Quoique luthérien, il se montra conciliant avec les réformés. Il a posé les bases de la Méthodologie dans son livre: De recte formando theol. studio; et a donné de sérieuses indications ho-milétiquea dans son De formandis concionibus.

HYPOCRISIE, disposition à cacher sous des apparences bonnes et honnêtes des intentions déloyales ou coupables; à feindre pour des motifs intéressés, des sentiments que l'on n'éprouve pas, et à dissimuler sous des actes extérieurs ce qui manque en vie morale. Les Pharisiens en étaient souvent coupables; Ananias en est un exemple; saint Pierre aussi, dans un cas particulier, Gai. 2, 13. Tartufe en est devenu le type. Les jésuites en ont fait une vertu (Esco-bar, etc.).

HYPOSTASE; expression de théol. métaphysique, marquant la distinction des personnes dans la nature divine, non seulement des aspects, des rayons particuliers de cette nature, mais la totalité des attributs divins se révélant en sortant pour ainsi dire de l'absolu et n'en différant que par la forme et la manifestation. L'hypostase est en quelque sorte un moment révélant pour lui-même et à un degré égal, quoique sous une forme particulière la totalité de Dieu, la totalité de son amour, de sa sainteté, de sa puissance. La sagesse divine, la Parole, le Logos est une hypostase, une vraie personnalité.

HYPSISTARIENS, secte religieuse, à laquelle appartenait, avant sa conversion, le père de Grégoire de Naziance. Elle n'est connue que par ce qu'en disent les deux Grégoire, et paraît avoir été un mélange de judaïsme et de paganisme.

HYSTASPES, nom d'un vieux recueil de prophéties, semblable aux Oracles sybillins. Il contient des prophéties relatives à Jésus-Christ, et depuis le 2me siècle on s'en servit souvent contre les païens. D'après Lactance, Hystaspes aurait été un ancien roi perse, doué du don de prophétie. Cité aussi par Justin et Clément d'Alexandrie.

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IARCHI, v. Jarchi.

IBAS, ou Ibbas, syrien, év. d'Édesse, Mésopotamie, 435. Ayant traduit les écrits de Théodore de Mopsueste, il fut soupçonné de nesto-rianisme, et dénoncé au patr. Proclus, d'Antio-che, et à l'emp. Théodose II, 446. Les conc. de Tyr et de Béryte le renvoyèrent absous, mais celui d'Éphèse, dit des brigands, le condamna 449 et le déposa. Celui de Chalcédoine le rétablit dans sa charge, mais après avoir obtenu de lui une condamnation formelle du nestoria-nisme. Il est connu surtout par la place qui lui est faite dans les Trois chapitres, et par la lettre qu'il écrivit à l'év. persan Mari, dans laquelle, sans prendre parti pour Nestorius, il blâme vivement Cyrille. Cette lettre fut condamnée par Justinien et par le 5rae conc. de Constantinople. #

IBÉRIE, une partie de la Géorgie et du Caucase actuels. Le christianisme y fut apporté sous Constantin par une prisonnière chrétienne nommé Nunia, dont les prières avaient d'abord guéri un enfant, puis la reine. Le roi reconnaissant voulut la récompenser richement, mais elle refusa ses présents, ne désirant autre chose que la conversion de ses maîtres. Un jour, étant à la chasse par d'épais brouillards, séparé de sa suite et courant de grands dangers, le roi se rappela la toute-puissance du Dieu des chrétiens, il l'invoqua et fut sauvé. Fidèle à son vœu, il se convertit, se fit instruire par Nunia

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et s'appliqua à instruire ses sujets, lui les hommes, et la reine les femmes. Il fit venir ensuite de Rome (et d'Arménie) des pasteurs et des missionnaires. Ce récit, raconté par Rufin, est confirmé et complété par tous les historiens subséquents. — On pense qu'une colonie d'Ibé-riens chassés de leur pays, passèrent dans les Gaules et de là en Espagne, où leur nom prévalut.

ICONOCLASTES, littéralement Briseurs d'images; appelés aussi Iconomaques, ceux qui font la guerre aux images. V. Images.

IDACIUS, év. d'Émerida en Espagne, au 4®e siècle; adversaire fanatique de Priscillien; d'accord avec Ithace, de Sossuba, il le dénonça 380 à l'emp. Gratien.

IDOLATRIE, v. Images.

IGNACE 1° un des premiers pères apostoliques, disciple de Jean, ainsi que son ami Poly-carpe. On connaît peu de choses sur sa vie et diverses traditions ont altéré les faits pour les embellir. Ses contemporains disaient de lui, qu'il était en tout semblable aux apôtres, dont il avait connu plusieurs. Nommé év. d'Antioche vers l'an 70 en remplacement d'Évodius, il y remplit noblement ses fonctions. Lorsque Tra-jan, faisant la guerre aux Parthes, vint à Antioche, il somma Ignace d'abjurer le christianisme, et sur son refus, prononça la sentence suivante: Puisque Ignace prétend qu'il porte en lui-même Celui qui a été crucifié, nous ordon -nons qu'il soit conduit lié à Rome, pour y être livré aux bêtes en spectacle à la foule. Des soldats grossiers et cruels le conduisirent d'abord à Smyrne, où il séjourna quelque temps et put voir son ami Polycarpe. Non content d'y exhorter les chrétiens par ses paroles et son exemple, il écrivit de là des lettres qui nous sont parvenues, aux églises d'Éphèse, de Magnésie, de Tralles et de Rome. On le mena ensuite à Troas, d'où il écrivit aux égl. de Philadelphie et de Smyrne, et à son ami Polycarpe. Ces sept lettres sont généralement considérées comme authentiques. Puis ayant traversé la Macédoine et l'Épire, on l'embarqua pour l'Italie, et il abordatà Pouzzoles. Dans une de ses lettres il avait demandé aux Romains de ne pas intercéder en sa faveur et de ne pas lui enlever la palme du martyre. Peu après son arrivée il fut en effet livré aux bêtes, après avoir une dernière fois prié avec ses frères 107 (ou 115). Ses Lettres sont remarquables par l'éloquence, l'onction et la grandeur d'&me. On en possède plus, récensions: une première, en latin, retrouvée eu 1495, renferme 15 lettres; une seconde, en grec, trouvée en 1559, contient 12 lettres; on les appelle la Grande récension. En 1646 on découvrit un nouveau mss. de 7 lettres, en grec, chacune d'un texte plus abrégé, que l'on appelle la Courte récension. Plus récemment enfin, l'on a découvert une nouvelle récension de 3 lettres seulement, en syriaque (Ignace était syrien), d'un texte encore plus abrégé. La critique n'a pas encore dit son dernier mot sur ces recueils; Daillé les rejette tous; Néander hésite. Il semble cependant qu'on se mette peu à peu d'accord pour admettre l'authenticité de la petite récension; elle est digue d'Ignace, à l'exception de quelques passages un peu exagérés sur l'épiscopat; peut-être sont-ils interpolés. D'autres passages ont paru renfermer des allusions au gnosticisme, ce qui supposerait une date plus tardive pour leur composition. Quant aux dix autres lettres, dont 2 à Jean et 1 à la Vierge, elles sont décidément fausses.

2<> Ignace, patr. de Constantinople. Fils de l'emp. Michel Curopulate, il naquit vers 790 ou 796. Léon l'Arménien le fit faire eunuque el enfermer dans un cloître. La carrière ecclés. lui étant imposée, il l'accepta et y trouva une occupation pour ses talents et une mine à exploiter pour son ambition, f 878, v. Grecs.

3° Ignace de Loyola, v. Loyola.

1GNORANTINS, v. Doctrine.

ILDEFONSE, ou Alphonse, archev. de Tolède, né dans cette ville 607 d'une famille distinguée, moine au couvent d'Agli, puis abbé, év. en 658, t vers 669. Sa vie a été écrite par son successeur, Jean-le-Saint (680-690). On a de lui un Traité de la virginité perpétuelle de Marie, un autre sur le baptême, une Hist. des hommes illustres parmi les écrivains ecclés., et quelques Lettres, v. d'Achéry, Mabillon, Baluze. Les adoptions l'ont cité comme un des leurs.

ILGEN, Ch.-David, né 1763, f 1834; fils d'un instituteur de Sehna, étudia à Leipzig et fut successivement pasteur et prof, à Naumburg, Iéna et Schulpforta. Auteur d'une étude latine sur Job, et d'un travail sur les origines des archives du temple de Jérusalem, 1789.

ILLGEN, Chrétien-Fréd., né à Chemnitz, 16 sept. 1786, prof, à Leipzig depuis 1818, fondateur de la Société d'hist. et de théol. 1817, et rédacteur depuis 1822 de la Revue de théol. historique, f 1844.

ILLUMINATION, se dit en théol. de l'acte par lequel l'homme s'approprie le salut et en vient à percevoir par le Saint-Esprit la vérité divine, qu'il ne pourrait comprendre, réduit aux seules forces naturelles de son intelligence. Dieu étant la source de toute lumière et Christ étant la lumière du monde, Jacques 1, 17. Jean 9, 5., le Saint-Esprit est comme la puissance éclairante qui conduit l'homme eu toute vérité, Jean 14; cf. 2 Cor. 2, 13. Eph. 1, 17, L'Église distingue l'illumination médiate, c.-à-d. par l'Écriture sainte, et l'illum. immédiate, par Fin-spiration directe du Saint-Esprit. On admet en général que cette dernière a cessé avec l'âge apostolique, et l'on s'en autorise pour repousser à la fois les prétentions de la hiérarchie romaine et celle des mystiques, mais c'est une affirmation a priori, dont les faits ont plusieurs fois prouvé le caractère trop absolu. Aux époques de persécutions en particulier, Dieu a souvent encou ragé ses fidèles par des révélations extraordinaires de sa présence.

ILLUMINES. Parmi les diverses manifestations de la surexcitation religieuse, deux sectes surtout ont porté et mérité ce nom: 4° Le parti des Alumbrados, en Espagne, 1575, qui se vantait d'une si grande lumière intérieure et d'une si intime union avec Dieu, qu'il estimait pouvoir appeler œuvres de Dieu toutes les œuvres faites par ses partisans. Persécutés par l'inquisition ils se réfugièrent en France, où ils ne tardèrent pas à disparaître.

2° Secte, ordre religieux, ou plutôt Société secrète, fondée en 1776 à Ingolstadt, Bavière, par le prof. Adam Weishaupt, né 6 févr. 1748 â Ingolstadt. Son but primitif était d'éveiller dans les cœurs des sentiments de tolérance et d'amener les hommes à s'aimer les uns les autres. Il y avait dans la tendance et les procédés de la secte un mélange de souvenirs jésuites et d'aspirations maçonniques. C'était une religion de la raison, avec une constitution républicaine. Pour arriver à leur but les initiés cherchèrent à se faire des alliés dans les hautes classes et à placer de leurs créatures dans les grands emplois du royaume. Le comte de Knigge fut mis à la téte de la Société. Mais certaines manifestations ayant donné l'éveil à l'autorité, on fit des recherches, on trouva des papiers compromettants, et en 1784 Charles-Théodore supprima l'ordre en Bavière, et l'on procéda rigoureusement, par l'amende, l'exil ou la prison, contre les récalcitrants (Weishaupt dut s'enfuir à Gotha, où il f 18 nov. 1830). Un Édit plus sévère encore, 1785, acheva d'anéantir la Société.

IMAGES. Les représentations de la divinité étaient absolument interdites par la loi des Hébreux, ainsi que les images ou figures qui au-ràient pu favoriser ou développer le penchant naturel à l'anthropomorphisme. Du culte des images à l'adoration des idoles la transition était trop facile pour que le législateur ne prît pas des mesures préventives sévères, et les religions monothéistes ont toujours proscrit les images taillées et les tableaux destinés à figurer aux yeux celui qui est invisible. Mais si Moïse a défendu « toute représentation des choses qui sont là-haut aux cieux, ici-bas sur la terre et dans les eaux, sous la terre, » le christianisme, plus spirituel, s'est affranchi de ce qu'il y a de littéral dans le texte de la loi; il en a gardé l'esprit et n'a plus reculé devant la peinture ou la sculpture de scènes relatives à l'hist. évangélique, et déjà dans les catacombes on trouve des figures et des représentations ayant pour but de rappeler certains faits au souvenir des chrétiens. Il n'était pas, et ne pouvait pas être question d'introduire ces images dans les églises, par la double raison qu'il n'y avait pas encore de bâtiments spécialement consacrés au culte, et que la peinture, comme art chrétien, n'existait encore qu'à l'état rudimentaire. C'est seulement au 4*e siècle qu'on tenta de leur donner une place dans les temples, et au siècle qu'on y réussit, mais non sans beaucoup de réserves et sans quelque résistance. L'invasion des Barbares et la décadence des lettres y con -tribuèrent puissamment. Il est probable que si des abus ne s'étaient pas produits, l'opposition aurait été moindre, mais les abus étaient dans la nature des choses. Déjà Grégoire-le-Grand doit s'opposer à une adoration superstitieuse des images: « Il faut, dit-il, les considérer seulement comme un moyen de nous élever au Sauveur. » Dans le 6me siècle il se manifesta en Syrie une très forte opposition; le monophy-site Xenaïas en particulier se distingua dans cette lutte, mais sans succès. Il est fâcheux que la vraie campagne contre les images, au lieu de commencer par des hommes capables et pieux, ait été engagée et conduite par des laïques passionnés, par des rois et des impératrices dont le seul mode d'action consistait en décrets et en ordonnances. (> fut Léon III, l'Isaurien, prince intelligent, qui l'entama; il voulait amener au christianisme les juifs et les mahométans, or comme ce qu'ils appelaient l'idolâtrie des chrétiens, c.-à-d. l'adoration des images, était une des choses qui les repoussaient le plus, il résolut de leur enlever ce prétexte en faisant disparaître des temples les images. Il procéda d'abord avec douceur et chercha à gagner à sa cause les théol. de Constantinople, mais il n'y réussit pas. En 726 il publia son premier édit contre l'adoration superstitieuse des images, et fit dans ce sens de nouvelles ouvertures au patr. de Constantinople, Germanus, vieillard honnête, mais rempli des préjugés du temps. Celui-ci resta inflexible, et soutint les images dans 3 Lettres où il essaie de prouver: qu'il n'y a pas de superstition dans le fait des images, que la tradition est en leur faveur, et qu'elles font des miracles. On ne les adore pas, dit-il, mais Christ ou les saints qu'elles représentent. L'empereur fut plus heureux avec quelques évêques, qui firent disparaître les images de leurs temples, mais il en résulta de grands troubles; les Cyclades même se révoltèrent et envoyèrent une flotte contre Constantinople. Léon la détruisit par le feu grégeois, employé aussi contre une autre flotte des Sarrasins. En 728 parut un 2®e édit, plus sévère que le précédent, et interdisant toutes les images religieuses; les magistrats furent chargés de veiller à son exécution. Quand les soldats vinrent pour enlever l'Anti-phonétès, grand crucifix qui décorait une porte du palais impérial, le peuple se souleva et il y eut du sang versé. Germanus dut donner sa démission, et son secrétaire, Anastase, homme ambitieux et sans principes lui succéda. Léon réussit mieux dans l'armée et parmi ses soldats; mais le clergé, le monde religieux et le peuple lui furent hostiles. On alla jusqu'à dire qu'il avait été poussé à ces mesures par les ennemis de la religion, notamment par les juifs. Jean Damascène fut un ardent défenseur du culte des images. En 744 Const. Copronyme succéda à son père. Artabaste, son beau-frère, appuyé par le parti des images, le détrôna momentanément, mais en 744 Constantin reprit le dessus, et pour en finir avec la question controversée, il résolut de donner aux édits de son père la sanction d'un concile écuménique. Il profita de la mort du patriarche Anastase, et réunit 754 à Constantinople 338 évêques soumis à sa volonté, sous la présidence de Théodose, métropolitain d'Éphèse. Ce concile, auquel Rome n'avait pas même de députés, condamna les images et leurs adorateurs, sous prétexte de nestorianisine chez les uns, d'eutychianisme chez les autres; déclarant quant à Christ, que sa seule image vraie était dans la Cène, et quant aux saints, que l'imitation de leur vie était la meilleure image qu'on en pût faire. Il décréta de plus, que tout ecclésiastique qui adorerait, cacherait ou ferait une image, serait destitué, et tout laïque excommunié et puni par l'empereur. Les ennemis de l'emp. exagérèrent sa pensée et répandirent le bruit qu'il rejetait également l'invocation des saints, l'invocation de Marie et le culte des reliques. C'est peut-être pour protester contre cette imputation, que le concile, contrairement à l'esprit de ses autres décrets, prononça l'anathème contre les adversaires du culte de Marie. L'empereur. en présentant à la multitude le nouveau patriarche Constantin, fit lire les décrets du concile el en ordonna l'exécution immédiate. Le peuple, les femmes surtout, et les moines firent une violente opposition. Etienne, en Bithynie, se mit à la tête des mécontents, et ils multiplièrent les images. Copronyme sévit contre eux. en fit emprisonner plusieurs et en fit mourir un à coups de fouet, qui l'avait appelé un second Valens. line longue suite de cruautés inutiles marquèrent les années 766 à 775. L'empereur, pour se venger d'une résistance inattendue, chercha à détruire le monachisme par le mépris; les cloîtres furent chaugés en casernes, les religieuses furent dispersées; les gouverneurs renchérirent encore sur les ordres de l'empereur, et devinrent comme lui un objet d'horreur. Les décrets du concile, bien qu'ils ne fussent reconnus ni en Orient, ni à Rome, produisaient cependant à la longue une certaine impression sur le peuple, et les nouveaux évêques leur étaient dévoués. Copronyme f 775. Son fils Léon IV hérita de ses vues, mais non de son énergie; son épouse, la célèbre Irène, tenait pour les images et sut obtenir de lui au moins une attitude modérée. Il mourut 780, laissant son fils Constantin jusqu'en 802 sous la tutelle d'Irène, qui eut dès lors beau jeu et fit mouvoir tous les ressorts de la diplomatie féminine et ecclesiastique. Le patr. Paul avait pris parti contre les images; il donna sa démission, étant sur le point de mourir et déclara se rétracter. Tarasius (Taraise) qui fut appelé à le remplacer, demanda la convocation d'un nouveau conc. écuménique. Déjà en 759 le conc. de Latran avait condamné la guerre faite aux images, et en 767 un concile tenu à Gentilly avait refusé de se prononcer. Un nouveau concile allait ramener la paix. Les év. arrivèrent en foule à Constantinople en 786; le pape Adrien y était représenté par deux légats. Mais l'armée, encore dévouée aux souvenirs de Copronyme, poussa de grands cris, et Irène, craignant les violence des iconoclastes, renvoya le concile à l'année suivante 787, à Nicée, et profita de ce temps pour congédier son armée et s'en créer une nouvelle à sa dévotion. A Nicée tous se déclarèrent pour le culte des images; ceux qui avaient à rétracter leur ancien sentiment le firent, les uns sans réserves, les autres en réservant les déclarations de l'A. et du N. T. comme supérieures aux doctrines des pères et des conciles et aux traditions de l'Égl. catholique. Le concile décida que les images méritaient, sinon la latrie, du moins une adoration respectueuse. Quelque opposition se manifesta, surtout parmi les soldats; le concile néanmoins eut force de loi, et ses décrets s'exécutèrent sans opposition ni violence. Irène fut détrônée 802 par Nicéphore. En France on a vu les hésitations des év. à Gentilly. Charle-magne attaqua le 2m* conc. de Nicée comme exagéré et portant à la superstition; il dit entre autres: Dieu ne doit pas être adoré dans des objets matériels, mais dans un cœur touj. pur. A remploi des images, il oppose 2 Cor. 3, 18. A l'argument tiré des chérubins, il oppose la révélation plus grande et plus claire que nous avons des mystères de Dieu. Gharlemagne met la Bible au-dessus de tout; il reproche encore au concile d'avoir appelé dieux et divins les empereurs et leurs décrets, et d'avoir comparé la mission des emp. à celle des apôtres. Du reste il ne rejette pas entièrement les images et il donne tort à la violence des iconoclastes. Il envoya cel écrit à Adrien I«r, qui y répondit par son faible et mauvais: De imaginibus. Le conc. de Francfort 794, quoique favorable aux images, rejeta aussi les décrets de Nicée, comme allant trop loin. Mais ils restèrent en vigueur en Orient, grâce surtout à Théodore de Studium q. v. jusqu'à ce qu'en 814 l'armée mit Léon V sur le trône. Un nouveau conc. tenu à Constantinople 815, mit à néant les décrets du de .Nicée, et l'Occident lui-même condamna à Paris ce culte superstitieux, à la sollicitation de Michel II. Les amis des images furent cruellement persécutés, surtout les moines et Théodore, mais sans qu'on pût les extirper ou les faire fléchir; on avait attaqué les branches, au lieu de s'en prendre à la racine; la superstition, au lieu d'en attaquer, la source, l'endurcissement du cœur. A la mort de Michel II, sa veuve Théodora prit en mains les rênes de l'empire. convoqua un nouveau concile à Constantinople, fit revivre les décrets de 787, et le Ï9 févr. 842 fut un jour de fête pour l'Église catholique; les images furent solennellement replacées dans les églises. Le conc. de Trente, 25®« session, statue « qu'on doit avoir et conserver, principalement dans les églises, les images de J.-C., de la Vierge mère de Dieu, et des autres saints, et qu'il faut leur rendre l'honneur et la vénération qui leur est due..., parce que cet honneur est référé aux originaux qu'elles représentent. » Mais pas plus en théorie qu'en pratique, l'on n'a encore résolu le problème d'empêcher l'adoration des images elles-mêmes.

IMER, ou Imier, des environs de Porrentruy, cultiva avec son serviteur Albrecht un terrain de la vallée de Susin^en, au pied du Chasserai, appartenant à l'év. de Lausanne. Après un pèlerinage à Jérusalem ils revinrent, groupèrent autour d'eux de pieux cultivateurs, et f en paix. Le vallon prit le nom de Saint-Imier. 6roe siècle.

IMITATION de J.-C., livre célèbre qui appartient au t5*ne siècle, mais sur l'auteur duquel une controverse de 250 ans n'a peut-être pas encore dit son dernier mot. Il maintient dans toute sa rigueur le dogme cathol. du mérite des œuvres, mais en ajoutant que la libre grâce de Dieu en Christ peut seule les vivifier. Il expose d'une manière magistrale la magnificence de l'Évangile et sa puissance pour sanctifier et pour consoler. Par son côté chrétien, non moins que par son caractère populaire et par la clarté du style, il est promptement devenu dans toute la chrétienté le livre le plus estimé des âmes pieuses, après la Bible. Il en est aussi résulté que depuis la tentative de Pedro Manri-quez, 1604, de contester à Thomas a Kempis, la rédaction de ce livre, sous prétexte qu'il devait être plus ancien même que Bonaventure, les principales nations catholiques et les principaux ordres religieux se le sont disputé avec acharnement, lui donnant pour auteur un des leurs. Les bénédictins l'ont attribué à un abbé de leur ordre, Jean Gessen, ou Gersen, et le chevalier piémontais de Grégorv a encore soutenu cette thèse en 1827. D'autre part, les Français l'ont attribué à leur célèbre Gerson, et en présence d'exemplaires portant le nom d'A Kempis, ils ont cru pouvoir soutenir que Kem-pis*ïes avait signés comme copiste et non comme auteur. Aujourd'hui, quoique ce ne soit pas absolument prouvé, on est assez d'accord à regarder Thomas a Kempis comme l'auteur de cet étrange et remarquable volume. Son nom répond le mieux à tout ce que l'on en sait, et l'on ne peut lui opposer aucune objection sérieuse. La forme sententieuse et le latin barbare du livre se retrouvent dans les autres compositions du même auteur. D'ailleurs il y a des témoignages positifs et anciens dont l'autorité ne peut être méconnue; plusieurs membres de l'ordre, Jean Busch, Hermann Rycl, amis personnels d'A Kempis, le lui attribuent positivement; de même le chanoine strasbourgeois Pierre Schott 1488. Trad. dans presque toutes les langues, l'Imit. a eu des milliers d'éditions; il s'en est fait même à l'usage des protestants (Bethmann-Hollweg). Les principales trad. franc, sont celles de P. Corneille, Sacy, Gonne-lien, Lamennais, de Genoude; la plus récente est d'un pasteur de l'Égl. réf. de France, Paris 1879. V. aussi Malou, év. de Bruges; Hirsche, Ulhnann, etc.

IMMANENCE de Dieu, conception philos, identifiant en quelque sorte Dieu et l'univers, l'un ne pouvant se comprendre sans l'autre. Dieu étant lui-même la grande unité, le grand centre dont le reste émane. L'immanence est opposée à la transcendance, qui distingue la personnalité de Dieu comme créateur, régulateur et providence; comme pouvant exister seul, en dehors de l'univers et au-dessus de lui.

IMMUNITÉS, droit, réel ou prétendu, des ecclésiastiques, d'être dispensés des charges civiles imposées par l'État aux autres citoyens. Les païens en jouissaient dans l'ancienne Rome; ces immunités ont passé dans l'Égl. chrétienne et se sont beaucoup étendues dans le moyen âge. Les temps modernes ont déjà supprimé les immunités financières, c.-à-d. la franchise d'impôts; ils ont une tendance à restreindre aussi les immunités personnelles, telles que dispense du service militaire, dispense des fonctions de juré, etc. La question peut être discutée au point de vue des convenances, plutôt que du droit, mais si l'on enlève aux ecclésiastiques leurs privilèges, sous prétexte d'égalité, on doit supprimer aussi les charges qui pèsent sur eux, exclusion de certaines fonctions politiques, académiques ou nationales; l'assimilation doit être entière. L'Égl. romaine, en vertu de son principe, regarde les immunités du clergé comme de droit divin, et ne s'y soumet que là où elle est forcée de le faire.

1MPANATION, doctrine qui admet dans le mystère de la Cène que le Verbe est changé en pain par la consécration, de la même manière qu'il a été changé en chair et en sang dans l'Incarnation. Elle a été professée par Ruprecht*de Deutz 1115, Alger de Liège 1131, et Jean de Paris f 1306. Mais comme elle augmente, sans les diminuer, les difficultés de la transsubstantiation, elle n'a pas réussi à prévaloir. Bellar-min et d'autres l'attribuent à tort à Luther.

IMPOSITION des mains, acte par lequel l'Égl. symbolise la communication du Saint-Esprit dans les différentes cérémonies où cette communication est regardée comme essentielle, telles que le baptême, la confirmation, la consécration des pasteurs et des anciens. Déjà pratiquée dans l'A. T. à l'égard des victimes et pour la guérison des maladies, 2 R. 4, 34., elle a passé dans l'Égl. chrétienne, Act. 8, 17. 9, H. 13, 3. 1 Tim. 4, 14. La main étant l'organe de l'activité matérielle, on en a fait naturellement le symbole de l'action spirituelle exercée sur le consacré. L'Égl. catholique admet que l'imposition des mains fait partie intégrante du sacrement, au point que si l'acte matériel fait défaut, le sacrement est nul par cela même. Quelques luthériens modernes, comme Bohmer, partagent aussi ce point de vue et attachent à l'idée de l'imp. des mains celle d'une transmission magique de l'Esprit de Dieu.

IMPOSTEURS (Livre des Trois), titre d'un livre fameux qui doit avoir paru au moyen âge, dénonçant Moïse, Jésus-Christ et Mahomet comme s'étant proposé de tromper l'humanité. On l'a attribué à plusieurs personnes, entre autres à Frédéric II, ou à son chancelier Pierre Des Vignes (Petrus a Vineis), qui l'aurait écrit d'après son ordre, dans un sens hostile aux papes, et même plus ou moins au christianisme. Cependant aucun témoin ne dit avoir vu ou lu ce livre, et l'on ne connaît rien de plus sur son contenu. L'idée générale en avait été déjà émise antérieurement à Paris par Simon de Tournai, et il est peu probable que l'empereur se la soit appropriée, mais on peut admettre que ses ennemis la lui aient prêtée, vu ses opinions bien connues. Quant au livre lui-même, quelques-uns pensent qu'on a peut-être désigné sous ce titre un autre ouvrage d'un contenu analogue. En tous cas un chevalier d'industrie essaya de faire passer sous ce nom l'Esprit de Spinosa, mais la fraude ne réussit pas. On a découvert un écrit publié en 1598, qui doit être fort ancien, et dont le contenu justifierait ce titre; on en a deux recensions mss., dont la plus courte est la plus ancienne. Ce livre aurait pour but de prêcher la religion naturelle; il montre en Dieu un être indéfinissable et indéterminé, qu'il est impossible d'adorer; la révélation comme telle est par conséquent aussi impossible, et la foi à ses récits ne peut reposer que sur la crédibilité des témoins. Les fondateurs des religions ont avancé des faits imaginaires, et ne doivent être considérés que comme des imposteurs.

INCAMÉRATION, v. Amortisation.

INCAPACITÉS, se dit spécialement en théol. et dans le vocabulaire romain, des raisons qui s'opposent à ce qu'une personne puisse recevoir l'ordination ou la consécration; ainsi les enfants, les non-baptisés, les femmes et, dans certains cas, des invalides, des mutilés, des individus atteints d'infirniités graves, sourds-muets, aveugles, etc.

INCARNATION, doctrine de la Parole faite chair, de Jésus fait homme. On lit dans l'égl. du couvent latin à Nazareth: Hic verbum caro factura est.

INCESTE; se dit des rapports conjugaux, légitimes ou non, entre personnes d'une parenté trop rapprochée, Lév. 18, 6-18. 29. Le droit romain, d'accord avec le droit canon, a étendu la notion de ce crime aux parentés spirituelles résultant soit de l'adoption, soit des rapports établis par le baptême entre les parrains et les enfants. L'inceste était puni de mort dans l'ancienne alliance; le moyen âge a conservé cette peine, dont la rigueur n'a été adoucie que par la législation moderpe.

INCHOFER, Melchior; né 1584 en Hongrie, entra chez les jésuites à Rome 1607, enseigna la théol. et les mathémati<Jbes à Meâsine, revint à Rome 1636, fut envoyé ensuite à Macerata et à Milan 1644, et f 1648. Il a laissé plusieurs ouvrages latins, un traité contre Copernic, un* défense des jésuites contre Scioppius, et des Annales ecclés. de la Hongrie, qui ne font pas grand honneur à son sens critique. Il doit surtout sa réputation à un livre qu'il n'a pas fait: la Monarchie des Solipses (ceux qui ne vivent que pour eux-mêmes), satire violente contre les jésuites, Venise 1645. Oudin a prouvé, dans Nicéron, que cet écrit avait été composé par le comte Scotti, de Plaisance, entré dans l'ordre en 1616, et qui l'avait quitté 1645, fort mécontent.

INCORPORATION. Pour augmenter les revenus de certains couvents ou fondations, on leur remettait souvent un bénéfice, en stipulant qu'ils l'administreraient, qu'ils en percevraient les revenus, mais qu'ils se chargeraient aussi de remplir, soit directement, soit par un vicaire payé par eux, toutes les charges ecclés. et spirituelles qui y étaient attachées: c'est ce qu'on appelait l'incorporation quant au spirituel et au temporel. Ou bien on se contentait de leur en remettre les revenus, après avoir prélevé d'abord ce qui était nécessaire pour l'entretien du vicaire, lequel restait en ce cas sous la juridiction de l'évêque. Le conc. de Trente a interdit l'incorporation des bénéfices.

INDE, ou Indes orientales, deux grandes péninsules de l'Asie méridionale, séparées par le Gange, et formant un certain nombre d'États réunis sous le sceptre de l'Angleterre, moins quelques villes ou districts appartenant à d'autres pays: Chandernagor et Pondichéry à la France, Tranquebar aux Danois, Goa aux Portugais, etc. L'hist. des Indes remonte à des temps fabuleux, et ses origines sont légendaires. Sa religion est le boudhisme; son caractère principal est le régime des castes. Les premiers essais pour y introduire l'Évangile datent le saint Thomas et de Pantène, et ne sont même pas bien constatés, non plus que ceux qui furent faits aux 13roe et 14me siècles par des franciscains et des dominicains, et qui n'eurent dans tous les cas aucun succès durable. Les travaux pieux et dévoués de François Xavier au 16m« siècle, n'y ont laissé qu'un souvenir, et il n'est pas beau, l'inquisition. On peut dire que le vrai travail d'évangélisation n'y a commencé sérieusement qu'au siècle dernier, avec Ziegenbalg q. v. Outre les difficultés provenant de l'étendue du territoire et de la diversité de ses nombreuses langues et dialectes, les missionnaires ont rencontré un obstacle inattendu dans le fait des castes. Les catholiques ont cru devoir respecter ce préjugé, au point qu'un missionnaire ne tendait l'eucharistie aux parias qu'au bout d'une perche, pour ne pas trop s'en approcher; les protestants, au moins quelques-uns, ont paru hésiter un instant sur ce qu'ils avaient à faire; néanmoins tous sont d'accord auj. à ne pas en tenir compte et à marcher contre cet ennemi comme contre tous les autres. Les Indes sont maintenant le plus grand centre de l'œuvre missionnaire, et si les débuts ont été longs et pénibles, neutralisés qu'ils étaient par l'hostilité de la puissante Compagnie des Indes, le jour est arrivé où la moisson promet d'heureux résultats. Le travail est réparti entre 29 sociétés qui comptent plus de 600 missionnaires et de 430 stations. Dans les Indes anglaises, y compris Ceylan et le Birman, on ne comptait en 1852 que 22,440 communiants, représentant 128,000 chrétiens indigènes; en 1862, 49,681 communiants, soit 213,182chrétiens; en 1872, dix ans plus tard, 78,494 communiants, et 318,363 chrétiens; en 1878, 460,000. La famine de 1877 et 1878, à laquelle ont succombé près de 5 millions d'indigènes, a fait tomber beaucoup de préventions et de barrières, et les Indous ont apprécié la religion de ceux qui cherchaient à soulager leur détresse; l'Angleterre seule avait collecté pour les affamés plus de 20 millions de francs. Sans parler de Calcutta, c'est dans la province de Madras que se trouvent le plus grand nombre d'indigènes convertis, plus de 77,000; dans l'île de Ceylan 32,000; dans le Birman, 72,000; au Bengale, 60,000; dans le Pundjab, 1,490, un séminaire de théol., 13 stations, 23 missionnaires, 54 écoles; le Rajputana, Bombay, Mahratta, Orissa, en sont encore à leurs commencements, et ne comptent guère en tout plus de 12 à 15 mille communiants. Les différentes dénominations re-lig. vivent en bonne harmonie.

INDÉPENDANTS. Ce mot qui s'explique tout seul dans son sens absolu, ne peut jamais être que relatif dans la pratique. En matière de théologie ecclés. il se dit surtout des Égl. qui revendiquent pour chaque congrégation, grande ou petite, le droit de s'administrer elle-même comme elle l'entend et qui repousse l'interven • tion de toute autorité civile ou religieuse étrangère, qu'elle s'appelle l'État, l'évêque, le synode ou le presbytère. Les Indépendants datent de Brown, q. v. Plus tard Robinson, de Norfolk, précisa davantage encore leurs principes. Ils estimaient que le N. T. donne à chaque association de chrétiens une entière juridiction sur son mode de recrutement, sur sa discipline intérieure et sur le choix de ses fonctionnaires. Elle peut entrer en relation avec d'autres Églises, mais ces rapports sont purement fraternels, libres et volontaires, et ne créent aucun droit. Ces principes étant directement contraires, aussi bien au système épiscopal anglais qu'à la suprématie royale, une congrégation qui s'était formée à Londres en 1616, ayant été découverte en 1640, fut citée en jugement, mais ne fut pas autrement molestée. Elle acquit même une certaine popularité dans la lutte contre le Parlement et contre Charles et Cromwell (surtout depuis que lesNiveleurs s'en furent retirés) donna aux égl. indépendantes assez de crédit et d'influence pour qu'elles sentissent le besoin de s'entendre et de s'unir. Elles eurent donc dans l'égl. de Savoie en 1658 une assemblée générale, où elles convinrent de certains principes ecclés. et où elles formulèrent leur confession de foi, pour être promulguée en leur nom, mais sans être rendue obligatoire. Après la restauration des Stuarts, l'Acte d'Uniformité fut rédigé contre eux 1662 et l'Acte des Conventicules interdit leurs assemblées. Un grand nombre se rendirent en Amérique, où ils purent s'organiser librement d'après leurs convictions. Mais l'Édit de tolérance de Guillaume d'Orange 1689 leur rendit la liberté, et dès lors leur nombre n'a cessé d'aller en augmentant, en même temps qu'i's se sont montrés animés d'un zèle toujours croissant pour toutes les œuvres relatives à l'avancement du règne de Dieu. Il s'est aussi formé en divers lieux, sur le continent, des égl. indépendantes, surtout depuis le commencement de ce siècle (Genève, Paris, Lyon, Bruxelles, etc.). Elles sont en général calvinistes dans leur théologie, mais avec plus ou moins de rigueur dans la discipline. Le nom de congrégationalistes, que plusieurs préfèrent, tend davantage à prévaloir, parce qu'il exclut moins que celui d'indépendantes l'idée d'une union ou d'une association entre elles.

INDEX, v. Censure.

INDIFFÉREXTISME. On désigne spécialement sous ce nom l'absence complète d'intérêt pour les questions religieuses, ecclésiastiques ou confessionnelles, provenant d'un défaut d'at-lention, de réflexion ou de foi, lacune morale causée surtout par la prédominance des préoccupations terrestres. L'indifférence ne doit pas être confondue avec le scepticisme qui ressort surtout de l'intelligence et qui, voyant sur beaucoup de questions les raisons pour et conlre se contrebalancer, ou à peu près, conclut, sans poursuivre davantage ses recherches, qu'il y a un peu de vérité partout, et que la vérité n'est nulle part. Quant à l'indifférentisme, il peut être général et embrasser la religion tout entière, ou partiel et ne porter que sur certaines questions, p. ex. sur la question confessionnelle ou sur l'organisation de l'Église. Il peut porter sur le dogme lui-même, ou seulement sur les formes, et il n'est pas rare de rencontrer des personnes, ou des églises, qui font bon marché de la doctrine, mais qui tiennent beaucoup à certaines cérémonies.

INDULGENCES. Au fond de presque toutes les superstitions on est assuré de trouver une idée juste, et si le commerce des indulgences a été un des scandales de la tin du moyen âge, l'abus qu'on en a fait ne suffirait pas à lui seul à condamner l'institution. Si l'on réduit à sa plus simple expression l'idée première qui a donné naissance aux réparations connues sous le nom d'Indulgences, on trouve ceci: L'homme, par la repentance et par la foi, peut obtenir de Dieu le pardon de ses péchés pour la vie éternelle, mais et indépendamment des conséquences naturelles de ses fautes, il n'en obtient pas toujours Je pardon pour la vie présente. Les jours de Jacob furent courts-et mauvais; Moïse ne put entrer dans la Terre promise; David fut puni dans sa famille. Voilà le point de départ, et il est juste, parce qu'il reconnaît et respecte l'action de Dieu. Mais dès le second pas on se heurte à l'action de rhoinme; l'erreur commence, mais ce n'est que peu à peu qu'elle atteint les proportions grossières sous lesquelles seules on la connaît aujourd'hui. Voici la filiation; a. l'homme a mérité un châtiment terrestre et, après sa mort, le Purgatoire; b. pour s'y soustraire autant que possible, il cherchera à réparer, et même à expier sa faute; c. il choisira naturellement parmi les diverses expiations entrevues, celle qui conviendra le mieux à ses goûts ou à son tempérament, celle qui lui imposera le sacrifice le moins sensible; d. s'il a un directeur spirituel, celui-ci lui conseillera un sacrifice qui contribue à l'édification, a l'honneur et au bien temporel de l'Église; un désaveu de sa conduite, un acte public de pénitence et de dévotion, un sacrifice pécuniaire: e. il se fera peu à peu une tradition dans ce sens, et au lieu d'examiner chaque fois à nouveau les conditions qu'il faudra imposer au pénitent pour lui acquérir l'indulgence de l'Église, on finira par tarifer les délits et les crimes suivant leur gravité et suivant la richesse et la position sociale de ceux qui les auront commis. Ce ne sont pas des hypothèses, c'est de l'histoire. Quand pour la première fois Urbain II donnait un caractère général aux indulgences, en les promettant à ceux qui se croiseraient pour la Terre sainte, il ne prévoyait pas qu'un jour Léon X publierait des indulgences pléniè-res pour tous ceux qui contribueraient de leur bourse à la construction de la basilique de Saint-Pierre; qu'ensuite ce même Léon donnerait le bénéfice de celles qui se vendaient en Saxe à à sa sœur Madeleine, femme de Cibo, fils d'Innocent VIII, et qu'enfin ce bénéfice étant affermé par un archevêque, celui-ci remplirait l'Allemagne de quêteurs mercenaires, industriels et charlatans, dont le commerce sacrilège provoquerait l'indignation du moine Luther, du curé Zwingle, et de populations entières. Ni la Bible, ni les pères de l'Église ne mentionnent quoi que ce soit qui se rapporte aux indulgences; elles sont absolument inconnues jusqu'à Grégoire VIL Durand, év. de Meaux, au 14«i« siècle; puis l'archev. Antoniu de Florence, le sco-lastique Gabriel Biel, le cardinal Cajetan sont unanimes à dire que l'on ne possède, sur l'origine des indulgences, aucune autorité, ni de l'Écriture Sainte, ni des anciens pères, ni des docteurs grecs ou latins. Le Conc. de Trente affirme cependant que Jésus-Christ a donné à l'Église le pouvoir de conférer les indulgence*, et il cite à l'appui les passages Matth. 16,18.19. Jean 20, 23. qui n'en parlent pas. Parmi les questions qui se rattachent à celle des indulgences, il faut noter celle du Purgatoire q. v. et celle du mérite des saints, qui constitue ce qu'on appelle le Trésor de l'Église. Toutes les œuvres qu'un homme a faites de trop pour son salut, peuvent servir d'appoint à celles qui ont | manqué à un autre, et cet autre, ou ses parents, ou ses amis, sont en mesure de lui procurer cet appoint par des prières ou des aumônes. De là les prières pour les morts; de là aussi les indulgences collectives rattachées à certains actes religieux, v. les Heures de la bien-heureuse Vierge, avec quinze prières de sainte Brigitte (en latin) Paris 1533. Quelquefois des mille ans de pardon, même pour des péchés mortels, sont attachés à des conditions d'une extrême puérilité, à la récitation d'un ave devant un bras d'un crucifix. Là où la Réforme est établie, ces pratiques aussi contraires à la Bible qu'au sens moral se renferment même chez les catholiques dans des limites plus acceptables.

INDULT, autorisation du pape donnée à la violation de lois ecclésiastiques existantes, p. ex. le droit de recevoir des bénéfices expectatifs, ou le pouvoir de nommer aux bénéfices établis par les réserves et les règles de la chancellerie papale.

INFAILLIBILITÉ. Ce dogme qui repose historiquement sur les décrétaies du faux Isidore, et que l'on essaie d'expliquer en disant que le pape résume en sa personne l'épiscopat tout entier, comme étant le représentant de Jésus-Christ dans l'Église, est d'origine assez moderne. Les conciles ne l'ont pas connu, ou s'ils l'ont connu, ils l'ont combattu, n'accordant au pape que la présidence et plaçant leur autorité au-dessus de la sienne. Pour certaines questions, ils ont admis son infaillibilité, c.-à-d. le caractère absolu de ses résolutions, quand il parle ex cathedra, et ils se sont réservé d'en appeler du pape mal informé au pape mieux informé. Ils ont aussi distingué la question de fait et celle de droit. C'est le conc. du Vatican, 1870, qui sous la pression de la curie romaine, a le premier transformé en dogme ce qui n'était jusqu'alors qu'une opinion.

1NFRALAPSAIRES, ceux qui admettent que l'élection de Dieu n'a eu lieu que depuis la chute et seulement pour le bonheur des élus, sans désignation formelle des réprouvés; par opposition aux supralapsaires qui tiennent que Dieu avait fait son choix déjà avant la chute et de toute éternité, la chute ayant été voulue et ordonnée de lui, et qu'il a désigné les uns pour le malheur aussi bien que les autres pour la félicité éternelle. Le synode de Dordrecht et la plupart des théologiens réformés adoptent le premier de ces points de vue, qui leur paraît plus doux dans la forme, quoique au fond les deux reviennent au même.

INGULPH. né à Londres 1030, f 1109, auteur d'une hist. de l'ancien couvent de Croyland, comté de Lincoln, de 664 à 1091. Il étudia d'abord à Westminster, puis à Oxford; fit connaissance, à l'âge de 20 ans, de Guillaume duc de Normandie, qui se l'attacha comme secrétaire. Ayant désiré faire le pèlerinage de Jérusalem, le duc lui donna une escorte de 30 cavaliers; Sigfried, duc de Mayence, se joignit à eux, avec un grand nombre de gentilshommes et d'évêques, si bien que la caravane ne comptait pas moins de 7,000 pèlerins. L'expédition ne fut pas heureuse; ils furent attaqués en Lycie par des brigands qui les dépouillèrent et en tuèrent un grand nombre. Après leur retour, Ingulph devint prieur du couvent bénédictin de Fonte-nelle, et Guillaume devenu roi lui donna l'abbaye de Croyland. Ses mémoires présentent un vif intérêt.

INNOCENT lo pape 402-417, travailla un des premiers à étendre la domination de l'év. de Rome sur ses autres collègues. Il soumit l'év. d'Antioche et ceux de Macédoine, profita du bannissement de Chrysostôme pour établir sa prédominance, et insista après la mort de ce grand homme pour que son nom fût place parmi ceux des meilleurs évêques. Il condamna Pélage, poursuivit les novatienset obtint d'IIo norius des lois sévères contre les donatistes. Il avait pressé l'empereur de faire la paix avec Alaric, et il s'appliqua à réparer les désastres de Rome.

2<> Innocent II, 1130-1143. Grégoire, nomme en concurrence avec Anaclet II (Pierre de Léon). Il est contraint par son rival de quitter l'Italie, et il se réfugie auprès de Louis-le-Gros, qui essaie en vain de le rétablir. Après la mort d'Anaclet il recouvre son autorité, malgré l'élection de Victor IV et il est généralement reconnu. Démêlés avec Louis-le-Jeune pour lu nomination d'un archevêque. Il condamne les doctrines d'Abélard, et voit éclater les idées chaleureuses d'Arnaud ou Arnold de Brescia qui demande que le clergé ne s'occupe que de ses affaires, laissant aux princes tous les droits séculiers. Arnold excommunié se retira en France, mais ses idées germent, les Romains les embrassent, se révoltent, s'emparent de la capitale et nomment un sénat. Innocent mairt de douleur. Conc. à Rome 1139; mille évêques.

3° Innocent III; Lothaire Conti 1198-1216, dans la force de l'âge, d'un esprit entreprenant, l'un des plus grands papes qui aient illustré le siège romain. Il agrandit les États de l'Église et se rendit maître absolu dans Rome. Ennemi des Hohenstaufen, il est nommé tuteur du jeune Frédéric (fils d'Henri VI) par sa mère mourante, Constance; mais cet enfant a pour compétiteurs à l'empire son oncle Philippe de Souabe et Othon de Saxe. Le pape, dans son De tribus eligendi*, se déclare contre Philippe, qui est assassiné 1208; Othon est généralement reconnu; il est couronné à Rome 1209, mais aussitôt après il se tourne contre le pape, qui l'excommunie 1210 et couronne le seul Hohenstau-fen restant, Frédéric II, à, Aix-la-Chapelle 1215; grande victoire pour Innocent, prélude à ses autres victoires sur les rois. Il parvint successivement à établir sa puissance sur cinq ou six monarques de la chrétienté. Il mit la France en interdit à cause du divorce de Philippe-Aug. avec Ingelburge 1199. Jean-sans-Terre, roi d'Angleterre, s'étant opposé à la nomination de l'archev. Langdon à Cantorbéry, son royaume fut mis à l'interdit jusqu'à ce qu'il se fut humilié, et il dut accorder au peuple sa fameuse Magna Charta 1215. Après avoir poussé Philippe-Aug. â attaquer l'Angleterre, il essaya mais en vain d'arrêter cette entreprise. Il chercha, par le moyen des troubadours, à ranimer le feu des croisades; sous son règne Baudouin de Flandres se fit reconnaître emp. latin de Constantinople et soumit cette ville au pape, mais cela dura peu. Innocent montra du zèle pour la réforme des mœurs; il n'approuve pas qu'on exige de l'argent pour l'administration des sacrements; il regarde le célibat et la désappropriation comme essentiels à la vie monastique.il convoqua le 4™ conc. de Latran, prêcha la croisade contre les albigeois, reconnut l'ordre des franciscains 1209 après s'en être d'abord moqué; nomma le premier inquisiteur en la personne du célèbre Dominique 1215, et annula un décret d'un de ses prédécesseurs, Jean I«r. C'est lui qui le premier s'appela Vicarius Dei, et qui donna veniam canonis infringendi, et non seulement infracti, s'appuyant sur Luc 22, 32. On a de lui des Homélies, des Discours et des Let très pleines de faits historiques curieux. Quelques-uns lui attribuent le Veni, Sancte Spiri-tus, et même le Stabat Mater que les franciscains revendiquent pour un des leurs. Vie par Hurter, trad. par Saint-Chéron. Étude par A. de Gasparin.

(3° bis) — Innocent III, antipape contre Alexandre III, s'appelait Landus et appartenait à la famille desFrangipani; vaincu, il dut s'enfuir au couvent de Cava.

4° Innocent III bis, antipape, de la famille des Frangipani, un des deux qui succédèrent à la fois à l'antip. Victor IV, 1163; insignifiant.

5o Innocent IV, Sinibalde de Fiesque, 1243-1254. Successeur de Célestin IV après un interrègne de deux ans, causé par les rivalités d'intérêt des cardinaux. Il est personnellement bien disposé pour Frédéric q. v. et consent, moyennant certaines conditions à lever l'excommunication qui pèse sur lui; mais ici ils cessent de s'entendre, Frédéric réclamant l'absolution avant d'avoir rempli les conditions du traité, le pape voulant au contraire les conditions avant l'absolution. Innocent dut s'enfuir à Lyon, d'où il excommunia l'emp. pour la 3m* fois. Dans le conc. de Lyon 1245, Taddei de Suessa soutint seul le parti de l'empereur. Frédéric ayant refusé de comparaître, ses sujets furent déliés envers lui du serment de fidélité. Frédéric écrivit aux rois de France et d'Angleterre, leur proposant de s'unir à lui pour ramener les ecclés. romains à la simplicité apostolique en leur enlevant leurs immenses richesses. La lutte continue. Le pape fait nommer successivement Henri, landgrave de Thuringe, qui meurt, et Guillaume, comte de Hollande. Il organise une croisade contre Frédéric; celui-ci cherche des accommodements, mais il est vieux et ne tarde pas à mourir. Le pape poursuit son fils Conrad de la même haine, mais Conrad étant mort 4 ans après. Innocent se déclare le protecteur du jeune Conradin contre Mainfroi son oncle. Innocent f 1254. C'était un caractère hautain et inflexible. Robert Grosse-Tête, q. v. ayant été appelé à Rome, eut l'occasion de dire au pape les plus amères vérités en plein concile.

6° Innocent V, Pierre de Tarentaise, dominicain et célèbre théol., élu 22 janv. 1276, f 22 juin, même année, avait succédé à Thomas d'Aquin comme prof, de théologie à Paris; archev. de Lyon 1272, cardinal et év. d'Ostie. Auteur de plusieurs ouvrages de droit canon.

7° Innocent VI, Étienne d'Albert, pape d'Avignon 1352, Limousin, ancien prof, de droit civil à Toulouse, et fondateur du collège Saint-Martial. Plus doux que ses prédécesseurs, il sent la nécessité d'une réforme. Il protégea les lettres, et fit offrir à Pétrarque la charge de secrétaire apostolique, f 1362.

8° Innocent VII, Côme de Megliorati, né à Sulmone, Abruzzes, pape 1404-1406, successeur de Boniface IX, en concurrence avec l'antip. Benoît XIII (P. de Lune). Quelques tentatives de conciliation n'aboutirent pas. Il s'est rendu célèbre par son népotisme.

9° Innocent VIII, J.-B. Cibo, pape 1484-1492. Quand il monta sur le trône, il avait 7 (d'autres disent 16) enfants illégitimes, dont l'un épousa plus tard la sœur de Léon X. On a beaucoup plaisanté sur le nom d'Innocent qu'il prit à son avènement. A sa cour on faisait assaut de simonie, d'avarice et de débauche. C'est le vice-chancelier Borgia, le futur Alexandre VI, qui par ses intrigues avait fait nommer Cibo. Celui-ci travailla à exciter toujours plus les souverains de l'Europe contre les Turcs, ce qui ne l'empêcha pas d'accepter de Bajazet une pension de 40,000 écus d'or, pour garder prisonnier son jeune fr. Zizim 1490. Il excommunia le roi Ferdinand de Naples, pour cruautés commises contre quelques sujets du pape et donna (en paroles) son royaume au roi de

France; après quelques combats peu importants, ils firent la paix 1492.

10° Innocent IX, J.-Ant. Facchinetti, de Bologne, né 1519, employa les deux mois de son règne, 30 oct. à 30 déc. 1592, à diminuer le poids des impôts. Il fut regretté du peuple. Il avait été légat à Trente, nonce à Venise et président de TInquisition.

Ho Innocent X, J.-B. Pamfili, Romain de naissance, pape 1644-1655; dépouilla de ses Élats le duc de Parme, accusé d'avoir fait assassiner l'év. de Castro. Il exila les cardinaux François et Antoine Barberini, quoiqu'ils eussent contribué à son élection. C'était un homme remarquable par son ignorance profonde de tout ce qu'un ecclésiastique doit savoir, remarquable aussi par son indolence et ses dérèglements. 11 abandonna sa personne, sa dignité, la conduite de ses affaires et de celles de l'Église à dona Olympia (OUm pia, jadis pieuse, disait Pasquin), veuve de son frère, femme sans mœurs, d'une avarice et d'une ambition insatiables, avec laquelle il vécut, après comme avant son élévation, dans un commerce coupable. Il chercha à empêcher la paix de Westpha-lie. Comme son prédécesseur, il condamna les cinq propositions de Jansénius, 1653.

12o Innocent XI, Benoît Odescalchi, 1676-1689; soldat avant d'être pape, s'est acquis une réputation immortelle par l'austérité de ses mœurs, son grand courage, son aversion pour les grossières superstitions de l'Église, sa discipline inflexible, ses efforts pour réformer les ecclés. et abolir un nombre considérable de ces fraudes pieuses, de ces fables puériles qui déshonorent leur ministère. Il éloigna des emplois les hommes ignorants ou déréglés, et pourvut au besoin des pauvres. Mais il fut une preuve de plus que ceux qui occupent le siège papal ont beau vouloir le bien, ils ne peuvent l'exécuter, ni résister à l'opposition, secrète ou avouée, du clergé même et des institutions de la curie. Il condamna Molinos et le quiétisme. Comme politique, il eut des démêlés avec la France au su -jet de la régale, des 4 articles arrêtés par l'assemblée du clergé français et rédigés par Bos-suet en 1682, et du droit de franchise des ambassadeurs français à Rome. L'ambassadeur de Frtmce, Beaumanoir de Lavardin, étant entré dans Rome malgré sa défense, Innocent l'excommunia; Louis XIV allait tirer vengeance de cette insulte, quand le pape mourut.

13o Innocent XII, Ant. Pignatelli, 169M700, tâcha de faire revivre les sages lois d'Innocent XI, dont il eut les qualités sans en avoir les défauts; il fut pour les mœurs un censeur rigoureux, pour les pauvres un père; il n'appela à des fonctions que des hommes capables de les remplir. Il obtint quelques succès, mais il comprit qu'il est au-dessus du pouvoir des papes de réformer l'Église, ou même la cour de Rome seulement. Il termina, moyennant quelques concessions de la part de Louis XIV, le différend qui avait éclaté sous Innocent XI; il se prononça dans l'affaire du quiétisme en condamnant l'Explication des Maximes des Saints de Fénelon.

14o Innocent XIII, Michel Ange Conti, 1721-1724; rappelle du Portugal son nonce Vincent Bitschi, que son prédécesseur Clément avait refusé de rappeler. Lequel des deux a eu tort ? Il élève au cardinalat l'infâme Dubois.

INNOCENTS (La fête des), lo Fête instituée en l'honneur des petits enfants de Bethléhem massacrés par l'ordre d'Hérode. Une tradition en compte 300, et l'on montre encore sous la basilique de Bethléhem une grotte qui leur est dédiée et qui renferme leurs prétendus petits squelettes. En réalité il a dû y en avoir 12 à 15. Irénée, Cyprien, Origène mentionnent déjà cette fête; au S^e siècle elle se confondait avec l'Épiphanie. Plus tard les grecs la mirent au 29, et les latins au 28 décembre. Le prêtre la célèbre en vêtements bleus.

2o Fête des écoles, instituée en mémoire de Grégoire Ier, et qui se célébrait, surtout en Allemagne, aux environs de Pâques. Les enfants choisissaient l'un d'entre eux pour remplir les fonctions d'évêque, et il figurait dans l'égl. sous ce travestissement. Ils parcouraient ensuite la ville avec leurs maîtres et faisaient une quête pour couvrir leurs frais. Cette fête disparut avec la Réformation.

IN PARTIBUS, sous-entendu infidelium (sur les terres des infidèles). L'Égl. romaine a tenu à conserver, au moins nominalement des diocèses dans les pays autrefois chrétiens, qui ont cessé de l'être. Elle poursuit en cela deux buts: elle maintient son droit de premier occupant sur ces territoires; elle a en outre l'occasion, quand elle nomme un titulaire à ces diocèses, de rester fidèle à son principe qui consiste à ne nommer personne à une charge d'évêque, sans lui donner en même temps un diocèse à desservir; ainsi celui d'Hébron-.

INQUISITION. Si l'on admet que l'Égl. a reçu directement de Dieu par Jésus-Christ, la mission de sauver les hommes, malgré eux et de les > contraindre d'entrer » par tous les moyens dont elle peut disposer; si l'on admet que l'esprit étant supérieur au corps, le pouvoir spirituel est supérieur au pouvoir temporel; en un mot, si l'on admet avec la proposition 24 du Syllabus, que le souverain pontife a le droit d'user de la contrainte même matérielle envers les hétérodoxes, l'Inquisition est justifiée. Mais les premiers chrétiens ne connaissaient pas cette doctrine; ils ont élé persécutés, et ce fut leur temps de gloire, celui des progrès de l'Évangile; depuis qu'il se sont faits persécuteurs et bourreaux, l'influence de l'Église a baissé. Sans doute l'Église a toujours eu une juridiction sur ses membres au point de vue de la foi et de la discipline; elle a le droit de les censurer et même de les exclure; mais une fois retranchés de sa communion, hérétiques ou relaps, peut-elle encore les regarder comme relevant de son autorité? L'empire devenu chrétien l'a prétendu, Théodose a prononcé la peine de mort contre les manichéens, et Jérôme a tenté de justifier cette doctrine par la Bible. Mais si l'État a pu intervenir, c'est toujours l'Égl. qui, par l'organe des év., était chargée de faire le procès des hérétiques. Après les troubles soulevés par la croisade contre les albigeois, cela changea. De sérieux dangers menaçaient la hiérarchie, et Innocent III, à la suite d'un rêve, dit-on, comprit que sïl voulait sauver l'unité romaine, il devait organiser une milice nouvelle, indépendante du clergé, toute dévouée au saint-siège. Il avait obtenu déjà d'Othon IV, 1210, un édit de persécution qui faisait intervenir le pouvoir impérial; il obtint du conc. de Latran 1215, l'institution d'un pouvoir itinérant, chargé de connaître des cas d'hérésie, et ce principe posé, il fut facile à ses successeurs d'en tirer les conséquences. HonoriusIII, en 1220, profita du sacre du jeune Frédéric II pour lui faire accepter le nouveau tribunal, et en 1229 le conc. de Toulouse, renchérissant sur celui de Latran, acheva d'enlever aux év. tout droit d'intervention dans les procès d'hérésie. L'Inquisition était fondée; on lui donna le nom, devenu sinistre, de Saint-Office. Chaque année amena des décrets de plus en plus rigoureux. Le tribunal avait été confié aux franciscains et aux dominicains. Castelnau et les autres moines de Citeaux avaient été de vrais inquisiteurs, mais Dominique le premier en porta le nom, 1215, et son ordre finit par en accaparer tous les droits et les avantages. Pour mieux assurer leur omnipotence judiciaire, les inquisiteurs établirent la procédure secrète, la preuve du délit basée sur des dénonciations anonymes, sans confrontation avec les témoins, et sur les aveux de l'accusé, qu'on pouvait toujours se procurer au moyen de la torture. Le Tribunal révolutionnaire de Fouquier-Tinville est peut-être le seul exemple que l'on puisse citer d'une procédure analogue, aussi contraire aux notions de la justice qu'à celles du christianisme. Innocent IV rendit une nouvelle vigueur aux persécutions: pour soutenir fra Ruggiero qui succombait à la tâche, il lui adjoignit Pierre de Vérone 1243, et les bûchers se rallumèrent. Admis en France et même réclamé par saint Louis, l'odieux tribunal eut quelque peine à s'acclimater en Italie. C'est l'Espagne qui lui offrit le meilleur terrain pour son développement, grâce à l'intime union de la royauté et de la hiérarchie, qui voyaient dans les Juifs et les Maures leurs plus dangereux ennemis, et qui étaient en outre excités dans leur saint zèle par la perspective du partage des dépouilles. De l'Aragon où il fonctionna d'abord sous le grand inquisiteur Nicolas Eymeric f 1399, le saint-office s'étendit en Castille, où il fut introduit comme tribunal royal ayant juridiction même sur les évêques. Les horreurs qui se commirent au nom de la religion sous Tor-quemada, sous Diego Deza 1499-1506 et sous Ximenèsde Cisneros 1507-1519, sont légendaires et passent toute imagination. Une férocité bestiale semble avoir présidé aux basses œuvres des fonctionnaires de tous rangs qui composaient ce mécanisme ecclésiastique, véritable ligue de délations, de rapine et de vengeances particulières. On a peine à le croire, mais la conscience publ. s'était corrompue au contact et sous l'influence de la conscience de ces religieux, au point que les autodafés étaient presque devenus des fêtes nationales, l'occasion de foires et de réjouissances. Sous Charles-Quint et sous Philippe II les occupations du saint-office prirent un nouveau développement; le protestantisme était un ennemi de plus à écraser. Les Cortès et même des papes voulurent réduire la compétence du tribunal; les rois d'Espagne s'y opposèrent. Ce n'est qu'au 18™* siècle que quelques restrictions furent mises à leur droit de vie et de mort; à la fin du siècle il y eut de nouveaux adoucissements, et enfin en 1808 Joseph Napoléon supprima le tribunal lui-même; l'occupation franc, avait été nécessaire pour mettre fin à cette monstruosité qui avait duré près de 600 ans. Ferdinand VII essaya en 1814 de relever l'institution, mais les Cortèseni820 l'abolirent définitivement, et le peuple saccagea et démolit le palais des inquisiteurs, rejetant ainsi, mais trop tard, la responsabilité de ce grand crime national. Le Portugal n'avait guère été moins propice à l'établissement de ce tribunal exceptionnel; le marquis de Pombal réussit à limiter un peu son pouvoir discrétionnaire et sa compétence, mais c'est Jean VI qui eut l'honneur de le supprimer entièrement, 1818-1826. En France, le peuple, le parlement et le pouvoir royal lui furent contraires, quoique re soit dans ce pays qu'il eût reçu sa première application. Le conc. de Narbonne en particulier, 1249, s'éleva contre la prétention du tribunal de confisquer les biens des condamnés au profit de l'ordre des dominicains. Des décrets royaux et des mouvements populaires intervinrent à diverses reprises pour paralyser l'œuvre du tribunal et annuler ses décrets, et malgré les bonnes dispositions de quelques souverains, des

Valois surtout, il ne put organiser une campagne contre les huguenots; il est vrai que les rois s'en chargèrent. L'inquisition réussit mieux en Allemagne. Lors de l'apparition des begghards, Grégoire IX, d'accord avec Charles IV, y envoya 5 inquisiteurs, 1369. Une première fois, 1333, une mission de ce genre, conduite par Conrad de Marbourg et par Conrad Droso, avait échoué devant l'indignation publique et le peuple avait massacré Conrad. Cette fois elle réussit mieux, et le pape étendit ses attributions en lui conliant aussi la recherche des cas de sorcellerie. Henri Kramer et Jaq. Sprenger firent la chose scientifiquement: Ce dernier publia son Maliens Maleficarum (le marteau des sorcières) pour l'instruction des inquisiteurs, avec l'indication des questions à faire et des règles à suivre. Cologne fut le quartier-général de l'institution. Après qu'elle eut été supprimée, les jésuites s'efforcèrent pendant la guerre de Trente ans de la faire revivre, mais en vain. Dans les Pays-Bas elle avait revêtu le caractère espagnol; l'inquisition fonctionnait au nom du roi, et c'était au point de vue politique qu'elle agissait et sévissait contre les protestants. Ses cruautés sans nombre amenèrent le compromis de Bréda, la paix de Gand et la séparation des Sept-pro-vinces. Elle ne put jamais s'établir solidement dans les royaumes du nord de l'Europe. En Italie, sous Caraffa, elle avait réussi à écraser le protestantisme, en mettant à mort ou en contraignant à l'exil tous ceux qui tenaient k la Réforme. Sixte V, vers 1587, amoindrit ses pouvoirs en transformant le tribunal lui-même et en fondant la Congrég. de l'Inquisition, chargée de connaître de tous les cas d'hérésie ou de sorcellerie. Peu k peu ce tribunal, qui n'était pas lié par les formes même les plus élémentaires de la justice et qui était condamné moralement par l'opinion publique, finitpar disparaître de toutes les législations; les Etats de l'Église ont été les derniers à en subir la suppression, due surtout à l'occupation française. Le progrès des esprits et l'intelligence de la liberté permettent de croire qu'on ne reverra plus jamais rien de pareil, à moins d'un de ces moments de vertige ou de transport, comme peuvent en avoir les peuples les plus spirituels et les plus généreux. Hist. par Spittler 1788, Lim-horch, Amsterdam 1692; Llorente 1817; He-fele, Hist. de Ximénès.

I.N.B.I., inscription latine de la croix: Jésus Nazarenus Hex Iudœorum.

INSPIRÉS. Les époques de crise provoquent souvent une surexcitation relig., dont on peut discuter la nature ou l'importance, mais que l'on ne peut nier. Les camisards avaient eu leurs prophètes; plusieurs de leurs proscrits emportèrent avec eux et propagèrent en Hollande, en

Angl. et en Allemagne, leur idée que l'extase, les visions, les prophéties sont l'accompagnement obligé d'une foi vraie. Repoussées par les Égl. établies, ces idées furent accueillies par de petites égl. indépendantes. Ce fut le cas dans la Wetterau, ou les frères Pott les apportèrent de Halle, les ayant reçues d'inspirés français (les réveils religieux en Amérique présentent des exemples du même genre, et regardent ces manifestations comme nécessaires pour ranimer les Égl. endormies). Le sellier de Wittgenstein, Rock, réunit autour de lui de vraies congrégations d'inspirés, qui firent des missions pour propager leurs vues. Le mouvement prit une certaine consistance 1714-1716, mais la plupart des inspirés partirent pour la Pensylvanie, ce qui amena un arrêt momentané dans les petits troupeaux. Un nouveau réveil eut lieu de 1816-1821, sous la direction du tailleur Michel Krau-sen, de Strasbourg, et de Christian Metz, né k Neuwied 1792. Gênés par l'autorité, ils émi-grèrent au nombre de 890 pour Buffalo, pratiquant la communauté des biens. Ils ont fondé des colonies au Canada et k Java.

INSTRUCTIONS secrètes, v. Monita.

INTERCESSION, prière en faveur d'autrui. C'est la manifestation la plus pure de l'amour désintéressé du prochain accompagné de la confiance en Dieu. Abraham intercède pour les villes de la plaine, Moïse pour son peuple, Gen. 20 et 23. Exode 32, Nomb. 11, etc. La prière sacerdotale, Jean 17, en est le plus sublime modèle. L'Oraison dominicale en est pénétrée; elle suppose la communion des saints et la prière collective de l'Église. Les doctrines cathol. de l'intercession des saints et des prières pour les morts reposent sur l'idée du purgatoire et des indulgences, et n'ont aucun fondement scrip-turaire.

INTERDIT, sentence par laquelle l'Égl. proscrit l'administration des sacrements, le culte public et les funérailles ecclésiastiques. L'interdit peut être prononcé contre une personne, qui se trouve ainsi privée de tout culte et en présence de laquelle aucune cérémonie religieuse ne peut être célébrée; ou contre une localité, un territoire, une ville, un pays et ses habitants, qui sont ainsi comme excommuniés en masse et dépouillés de tous les privilèges et bénédictions de la religion. Ce fut du 11™ au 13me siècle une arme puissante entre les mains des papes dans leurs luttes contre les emp. et les princes, qui durent fléchir plus d'une fois. De sérieuses considérations obligèrent cependant les papes à adoucir la rigueur de la sentence ou â en restreindre la portée trop générale; à concéder, p. ex., dans des cas isolés, la célébration d'un culte hebdomadaire, k accorder l'administration des sacrements k l'article de la mort, etc., mais toujours sans apparat et sans cloches. L'un des derniers exemples d'un interdit collectif fut celui de Venise sous Paul V, 1606. De nos jours, lorsque l'archev. Dunin de Gnesen fut destitué et incarcéré, l'interdit ne porta que sur les cloches, les orgues et l'apparat extérieur, 1839-1840. Pie IX prononça aussi contre le roi d'Italie et contre ses ministres quelque chose de semblable, mais il n'osa pas préciser, ni pousser jusqu'à l'interdit des anciens temps. L'interdit frappe de droit et indistinctement les prêtres et les laïques dès qu'ils désobéissent aux commandements de l'Église; il peut être levé par l'évêque, et même, lorsqu'il est personnel, par le prêtre confesseur.

INTERIM. On a donné ce nom à 3 traités, conclus ou imposés par les puissances, pour établir un mode de vivre, une tolérance réciproque momentanée entre protestants et catholiques, jusqu'au jour où leurs différents seraient aplanis, ou leur position réglée par une convention franchement acceptée de part et d'autre. Le premier, rédigé par Bucer, Gropper et de Pfllick, porte le nom de Ratisbonne, parce qu'il servit de base aux négociations engagées dans cette ville, du 27 avril au 22 mai 1541, lesquelles n'aboutirent pas. Le second, dit d'Augsbourg, imposé par Charles-Quint, 1547, n'était guère, en attendant la décision du conc. de Trente, qu'une soumission provisoire déguisée à l'autorité de Rome, mais concédant aux luthériens le mariage des prêtres et la communion sous les 2 espèces. Il ne satisfit naturellement personne. Le 3mc? dit de Leipzig, ou de Celle, 1548, provoqué par Maurice de Saxe, maintint davantage la base évangélique, mais accepta les formes de culte catholique et souleva une violente opposition. Les trois d'ailleurs ne durèrent qu'aussi longtemps que les princes les imposèrent.

INTERSTICES. On nomme ainsi en style canonique les intervalles de temps qui, dans la collation des ordres, doivent être observés avant de passer d'un degré au degré supérieur, et qui sont regardés comme nécessaires pour qu'on puisse constater l'aptitude du candidat. Les 4 ordres moindres peuvent être conférés en un seul et même jour, mais pour passer de là au sous-diaconat, le conc. de Trente exige un interstice actif d'au moins un an.

INTROÏT, ou entrée, ouverture, introduction; prière qui se dit au commencement de la messe, et qui se compose d'antiphonies bibliques et de versets de psaumes, variant suivant les diverses époques de l'année ecclésiastique. Dans le rituel grégorien, l'introït est précédé du Confiteor, ou Conf. des péchés.

INTRONISATION, installation solennelle des papes et des évêques; quelquefois la somme qu'il faut payer pour être mis en possession.

INTRUSION, intervention illégale dans l'administration d'un bénéfice ou dans des fonctions auxquelles on n'a aucun titre. On donne p. ex. le nom d'intrus à des ecclés. appelés par le peuple à desservir des paroisses que l'évêque prétend être de son ressort, mais cette appellation, comme injure, peut être réciproque.

INVESTITURES (Querelle des). On appelle investiture l'acte par lequel l'autorité compétente transmet à un évêque, ou à un abbé, certaines fonctions et les droits qui y sont attachés. Cette transmission se fait par la remise d'insignes qui en sont le symbole. Deux siècles fnrenl consacrés au moyen âge à liquider la question de savoir qui avait le droit de conférer l'investiture, si c'était l'État ou l'Église. La querelle dura longtemps, parce que la question était mal posée. Il y avait d'un côté les bénéfices, de l'autre les fonctions, et l'on s'obstinait à ne pas les distinguer. Les biens territoriaux appartenaient aux princes; s'ils voulaient bien en faire la concession aux évêques, c'était dans les mêmes conditions que les autres fiefs, conformément à la coutume féodale et en investissant le titulaire par la remise de la crosse et de l'anneau. Mais ainsi les ecclésiastiques se trouvaient être entièrement dans la dépendance du souverain. Grégoire VII comprit le premier ce qu'il y avait d'anormal dans cette situation et il résolut d'y mettre ordre, mais il passa à l'autre extrême, el il ne comprit pas qu'en renonçant aux charge* il était juste qu'il renonçât aussi aux bénéfices. Pour commencer la lutte il avait un prétexte tout trouvé dans le fait qu'Henri IV d'Allemagne avait investi des fonctions épiscopales des hommes qui en étaient notoirement indignes et qui n'avaient ambitionné ces charges que pour le profit qu'ils en espéraient. La puissance royale était trop solidement établie en France et en Angleterre pour qu'on pût espérer d'y réussir sans luttes, mais il commença par l'Allemagne et les circonstances le servirent à souhait. Il fait adopter au conc. de Rome 1075 sa maxime qu'un prince temporel ne peut investir à aucune charge spirituelle. Victor III et Urbain II agissent dans le même sens; ce dernier à Clermont rouvre les hostilités contre Henri IV à l'instigation de ses fils. Pascal II, à Bénévent 1108 et à Latran 1110, affirme les mêmes principes, mais Henri V l'oblige à lui abandonner l'investiture par la crosse et l'anneau; ayant voulu rompre en 1112 cette convention et ayant excommunié l'empereur, il expie sa hardiesse et il est chassé de Rome. Enfin pour clore un conflit où chacun avait à moitié raison, le Concordat de Worms 1122, sous Calixte II, décide que l'élection des évêques sera faite par le clergé sous la surveillance de l'empereur, et que l'investiture aura lieu pour le temporel par l'emp, avec le sceptre et l'épée, pour le spirituel, par le pape avec la crosse et l'anneau. Lo-thaire III ayant admis 1125 que la consécration papale eût lieu avant l'investiture impériale, celle-ci perdit bientôt beaucoup de son importance.

IONA ou Icolmkill, île du groupe des Hébrides, qui fut pendant de longues années le champ d'activité de Colomba. Elle s'appelait primitivement Junio-tan-Druidneath (Ile des Druides). Les anciens auteurs l'appellent souvent Ji (l'Ile); après Colomba elle a été connue sous le nom de Ji-Cholums-Chili (Ile de la Cellule ou du Cimetière;de Columba), qui est devenu Icolmkill. Enfin le nom sous lequel on la désigne le plus ordinairement, Iona, vient de Ji-shona (Ys en gaélique ne se prononce pas) l'Ile sainte. Elle est située entre le 56e et le 57« de latitude N. au S.-O. de l'île de Mull, à env. 60 kil. du point le plus rapproché de l'Écosse. Elle a 5 kil. de long sur 2 !/« de large; '/» de sa super-licie est cultivé, le reste est couvert de rochers, de prairies naturelles ou de bruyères. Le premier nom de l'île, ainsi que des ruines qui subsistent encore, portent à croire que les druides y avaient fondé un collège comme dans d'autres îles, entre autres à Ànglesey. Chassés par les Romains de la Gaule et d'autres contrées, ils avaient trouvé un abri dans ces îles. Ils étaient encore à Iona lorsqu'en 563-564 Colomba y aborda avec 12 de ses amis dans un currach ou bateau d'osier recouvert de peaux. Les druides et les indigènes leur firent un accueil assez hostile, mais peu à peu l'opposition cessa; l'île fut donnée par le roi des Pietés au religieux qui y fonda un monastère: Colomba n'était pas moins savant que pieux et le monastère ne tarda pas à acquérir une grande réputation; de partout on s'y rendait et, de cette petite île, des hommes pleins de zèle et de foi allèrent répandre la lumière de l'Évangile et les bienfaits de la civilisation parmi les tribus ignorantes des Pietés, des Celtes et des Saxons. Les moines ne se bornaient pas à l'étude, à la méditation et à la prière; ils se livraient aussi à des travaux manuels, entre autres à la culture des champs et des jardins; ils mangeaient les fruits de leurs propres arbres, et leurs granges regorgeaient du grain qu'ils avaient eux-mêmes récolté. Par là ils donnaient un exemple à leurs voisins, et par les semences qu'ils donnaient aux indigènes, ils aidaient à la propagation de la culture dans leur propre ile et aux environs. Comme l'île appartenait à Colomba, celui-ci avait pris les dispositions nécessaires pour y assurer le maintien de la plus stricte moralité; aucune personne dont la réputation ne fût pas absolument pure ne pouvait y mettre le pied; les femmes, et même, chose bizarre, les vaches étaient exclues de cette terre sainte. Les Culdées q. v. conservèrent les institutions de Colomba, mais comme le mariage ne leur était pas interdit, ceux d'entre eux qui étaient mariés habitaient une ile voisine, et ne se rendaient au monastère que lorsque leurs devoirs les y appelaient. Après Colomba les culdées maintinrent intacte la jré-putation de l'île et du couvent; leur bibliothèque était célèbre et ils continuèrent de former des missionnaires. Ce ne fut qu'au bout de longues années que Rome put y faire sentir son influence, vers 718, et il fallut beaucoup de temps et des persécutions pour que cette influence l'emportât, car il y a des raisons de croire qu'au 13®e siècle des culdées se trouvaient encore dans Iona. Vers 794 eut lieu une invasion des Normands sur la côte 0. de ces îles; cette attaque ne fut que le prélude d'autres plus violentes. A plusieurs reprises Danois ou Normands débarquèrent dans Iona, pillèrent et brûlèrent des habitations et parfois tuèrent des moines. On possède les annales de Iona jusque vers 1100, époque à laquelle les culdées comme corps furent remplacés par des moines bons catholiques qui introduisirent peu à peu dans l'île les usages de Rome. De cette époque environ date la fondation d'un couvent de nonnes dont on voit encore quelques ruines. Lorsque les Hébrides et Man furent constituées en diocèse, Iona y fut comprise et devint le siège de la cathédrale. Vers 1560 un acte du Parlement écossais fut passé, en vertu duquel les cloîtres et les églises abbatiales devaient être démolis; en conséquence Iona eut à souffrir, ainsi que son égl. et son couvent. En 1635, Charles l** fit réparer la cathédrale et alloua à l'évêque pour cet objet 400 livres sterling (10,000 fr.). Auj. des pasteurs écossais sont fixés dans l'île et le niveau moral des habitants s'est élevé. De nombreux étrangers viennent chaque année pour en visiter les ruines. On en fait remonter plusieurs au temps de Colomba, mais alors on ne bâtissait qu'en bois et en chaume, et il y a sans doute des siècles que les cabanes du saint et de ses moines ont disparu. La plus ancienne de celles qui subsistent, celle de la chapelle d'O-rain, date sans doute du 12™ siècle; elle est dans le cimetière d'Orain, ainsi nommé d'un des compagnons de Colomba. La chapelle du couvent de nonnes ne doit pas remonter plus haut que le 12me siècle puisque jusqu'à cette époque les culdées interdisaient l'accès de leur île aux femmes. Le principal édifice est auj. la cathédrale bâtie à différentes époques, du 13®e au 14®e siècle; la tour, haute de 20 mètres, est encore debout, ainsi que beaucoup de colonnes sculptées et ornées de bas-reliefs. A une époque l'île était littéralement couverte de croix; il en reste encore un certain nombre, remarquables par leur ancienneté et leurs dimensions, mais le reste a été dispersé ou détruit après la Reformation, ou transporté dans différents endroits de l'Écosse. On trouve aussi beaucoup de tombeaux recouvrant, les uns, les cendres de rois d'Islande, d'Écosse ou de Nor-wège, d'autres des chefs de clans écossais, d'ecclésiastiques distingués, etc.

IRÈNE, impér. d'Orient, née à Athènes de parents pauvres, mais douée d'une rare beauté et de talents non moins remarquables. Copronyme la donna à son fils qui fut depuis Léon IV, 769. Elle aimait les images et sut engager son mari à se modérer dans la campagne entreprise contre elles par L. l'Isaurien. Cependant elle empoisonna son mari, 780, qui plein de confiance en elle, lui laissa la tutelle de leur jeune lils Constantin VI. Celui-ci devenu majeur 790 11 relégua dans un château fort, soit qu'il redoutât son ambition, soit à cause de ses insuccès contre les Sarasins, soit à cause de la position qu'elle avait prise au conc. de Nicée en faveur du culte des images. Elle obtint cependant de revenir à la cour, et en 797 elle ressaisit le pouvoir et fit crever les yeux à son fils. Elle lit, dit-on, offrir sa main à Charlemagne pour assurer l'union des deux empires. Mais détrônée

802 par Nicephore, elle fut bannie dans l'île de Lesbos, et réduite à filer pour gagner sa vie. f

803 dans la misère. Les grecs l'ont canonisée.

IRÉNÉE lo docteur de l'Église. Né à Smyrne

vers 120 ou 140, il fut amené à Lyon par des circonstances qui ne sont pas connues et se voua au ministère au milieu des plus effrayantes persécutions. Pendant les discussions mon-tanistes son égl. l'envoya à Rome auprès d'É-leuthère. Il fut aussi délégué vers les chrétiens d'Afrique, pour les encourager en leur portant une lettre de leurs fr. de Lyon, mais il n'y a aucune trace qu'il ait fait ce voyage. C'est peut-être la mort de Pothin qui l'en empêcha, en l'obligeant à prendre sa place comme évêque. Il se distinguait par des connaissances étendues, par un grand zèle pastoral et par un esprit doux et paisible. Une tradition douteuse lui fait subir le martyre sous Sévère, 28 juill. 202 Appartenant à l'Orient par sa naissance et à l'Occident par son ministère, il était bien placé pour concilier des églises divisées au sujet du jour de la célébration de la Pâque; il écrivit à Victor de Rome et réussit à ramener la paix et une tolérance réciproque. Son principal ouvrage, que Ton ne possède plus qu'en latin, est intitulé: Adversus hœreses libri V; il est dirigé contre les gnostiques, qui avaient répandu leurs idées dans les Gaules, surtout contre les marcosiens. Il combat l'idée de l'accommodation. Il était millénaire. Il fit prêcher l'Évangile de Valence à Besançon. — Œuvres, publ. par Massuet,

Paris 1710; Venise 1734. Vie par l'abbé Prot, 1843.

2<> Irénée, Christophe, disciple de Flacius et l'un de ses plus ardents représentants; pasteur à Eisleben 1566, puis à Weimar, à Neustadt sur TOrla, à Horn en Autriche; fut généralement mal vu à cause de l'exagération de sa polémique.

IRÉNIQUE, partie de la dogmatique, ou disposition d'esprit et de cœur, qui tend à rechercher dans tous les systèmes religieux l'explication des différences qui les séparent, et à s'attacher aux points qui les unissent, de manière à assurer autant que possible la paix confessionnelle.

IRLANDE. Le christianisme y fut introduit déjà vers la moitié du 2J siècle, et fut apporté d'Orient; au 4*ne siècle on y voit des écoles et des couvents qui envoient de nombreux missionnaires. Mais c'est à saint Patrick, q. v. qu'il faut rattacher l'évangélisation et la conversion de toute l'île 432. L'Égl. conserva longtemps sa constitution et ses coutumes particulières, même sous la domination danoise au 9*** siècle, el ne se soumit à la discipline de Rome qu'au synode de Drogheda 1152. Le zèle missionnaire des moines irlandais est célèbre. A côté de Patrick l'île reconnaît comme patronne sainte Brigitte. Adrien IV fit cadeau de l'Irlande à Henri H d'Angleterre, qui en commença l'occupation et la conquête 1175. La Réforme y trouva peu d'écho, en dépit des efforts de l'archev. G. Brown, ï>arce que Henri VIII, et surtout Édouard VI et Élisabeth prétendaient introduire non seulement la liturgie, mais aussi la langue anglaise dans le culte. De continuelles émeutes, fomentées et payées par les jésuites, furent réprimées avec une rigueur toujours croissante A la suite de la convention de 163i, qui vota les 39 articles, eut lieu le soulèvement de 1641, dans lequel 40,000 protestants furent égorgés et que Cromwell réprima 1649 avec la plus impitoyable énergie. L'Irlande ayant pris parti pour Jacques II, les catholiques furent privés de leurs droits civils 1727, et les orangistes travaillèrent ouvertement à la suppression de l'Égl. catholique. A partir de 1778 la législation s'adoucit; non seulement les cathol. peuvent célébrer en paix leur culte, mais des droits civils leur sont rendus, entre autres celui d'acquérir des terres. En 1782 ils obtiennent un parlement indépendant. L'union catholique de 1791 obtient davantage encore. En 1795 ils fondent le séminaire de Maynooth. Mais, encouragés par la France qui devait cependant peu les aider, ils s'insurgent de nouveau et perdent d'un coup tout ce qu'ils avaient gagné; les échafauds se relèvent. En 1800 le parlement anglais décrète l'union définitive des deux pays et met l'Égl. épiscopale d'Irlande sur le même pied que celle d'Angleterre. Une grande association cathol. se forme en 1802, qui n'a cessé dès lors de revendiquer tous les droits, l'émancipation catholique et même le rappel de l'union. Elle a obtenu l'émancipation en 1829, sous le ministère de Robert Peel. L'Égl. épiscopale a 2 archev., Armagh et Dublin, et 8 évêques, pour à peu près 2 millions de protestants. L'Égl. catholique a 4 archev., 24 év. et 3000 prêtres pour 5 millions de catholiques. L'Église anglicane, en sa qualité d'Église établie, a longtemps joui de toutes les faveurs de l'État: elle touchait même les revenus des biens ecclésiastiques du pays, détournés de leur destination depuis la Réforme. Cette injustice, qui était l'un des principaux griefs des Irlandais, a disparu en 1869 par le déséta-blissement, c.-à-d. par l'abolition de l'Égl. anglicane d'Irlande, sous le ministère Gladstone. Cette mesure, dont plusieurs craignaient qu'elle ne fût fatale, n'a porté que de bons fruits, et l'Égl. épiscopale, réduite à ses seules ressources, est plus prospère, plus active, plus vivante que lorsqu'elle jouissait de trésors mal acquis.

IRRÉGULARITÉS. En style canonique ce sont les circonstances qui peuvent rendre un homme inapte à remplir certaines fonctions. Elles sont de deux sortes. Les unes proviennent d'une lacune, d'un défaut, de quelque chose qui manque, ex defectu: ainsi défaut d'âge, infirmité corporelle, manque de science, de foi, de liberté morale pour prendre un engagement; manque de douceur (celui qui a tué un homme ne peut aspirer à la prêtrise); défaut quant au sacrement (l'homme marié deux fois); illégitimité de la naissance; mauvaise réputation. Les autres ex delicto, proviennent d'un crime ou délit quelconque notoirement constaté, ou d'une faute, même cachée, commise contre l'Égl. ou contre la foi. Le pape peut relever de toutes, les évêques de plusieurs irrégularités. Cette énu-mération des vices redhibitoires s'est faite au fur et à mesure des besoins. L'Égl. grecque s'en est tenue aux prescriptions apostoliques, 1 Tira. 3, 1. 5, 22. Tite 1, 6. sq. L'Égl. évangélique juge dans chaque cas particulier, sans avoir fait une classification spéciale des causes d'indignité. Là où le peuple nomme ses conducteurs spirituels, l'élection supprime de fait les irrégularités ex defectu.

IRRÉLIGIOSITÉ, disposition tantôt intellectuelle, tantôt morale, à repousser non seulement l'autorité de Dieu et de sa parole, mais toute idée religieuse, tout élément chrétien ou même déiste, toute intervention d'une puissance supérieure dans les pensées, dans les actes et dans les circonstances de la vie, soit comme règle et direction, soit comme providence. Souvent il arrive que celui-là même qui ne croit pas en Dieu, le hait comme s'il existait.

IRVING, Édouard, cél. prédicateur écossais, né 15 août 1792 à Annan, Dumfries; suffragantde Ghalmers à Glasgow 1819, et depuis 1822 prédicateur et pasteur d'une égl. écossaise à Londres. Ses talents exceptionnels et sa profonde piété le rendirent bientôt populaire. Il étudiait surtout l'Apocalypse, et en voyant le triste état de la chrétienté, il se convainquit de la nécessité et bientôt de l'imminence d'une nouvelle effusion du Saint-Esprit. Le bruit se répandit en 1830 que le don des langues et de la prophétie s'était reproduit en Écosse, el il ne tarda pas à se manifester aussi dans sa congrégation, surtout parmi les femmes, accompagné d'extases et de mouvements convulsifs. Dans les sons rauques et dans les paroles souvent incohérentes articulées par ces personnes, Irving crut reconnaître les langues étrangères, et il fut fortifié dans cette conviction par le fait de guérisons miraculeuses qui les accompagnèrent en diverses circonstances et qui ne pouvaient être niées ni expliquées. A la suite de manifestations irrégulières et désordonnées qui eurent lieu pendant la célébration du culte, il fut suspendu par l'Égl. d'Écosse. Il organisa immédiatement une nouvelle congrégation dans une chapelle particulière, et se crut autorisé à la constituer sur le modèle de l'Égl. apostolique, en y introduisant les charges d'anges, de prophètes, d'apôtres, d'évangélistes et de docteurs qui sont mentionnées dans le N. T. f 1834. Son église lui survécut, sans doute à cause des éléments de vie et de^vérité qu'elle renfermait, et elle se constitua sur la base d'une hiérarchie rigoureuse avec une foi entière à une nouvelle effusion de l'Esprit de Dieu. Il se forma ainsi à Londres même sept églises, et elles envoyèrent des missionnaires dans toute la chrétienté. Avec ce mélange de bien et de mal, d'aspirations justes et d'exagérations enthousiastes, de piété et de moyens humains, elles firent un moment de nombreux prosélytes en Allemagne, en Suisse, en France, même parmi les hommes les plus considérables et les plus estimés, tels que le prof. Thiersch. Mais ce mouvement dura moins qu'on ne s'y attendait; il fut arrêté, moins par les objections et le dédain de ses adversaires que par ses propres fautes et lacunes et par la difficulté de trouver partout des anges, des apôtres et des prophètes. Il en reste cependant encore ci et là quelques faibles débris, v. Bost, Mémoires II, p. 166. Guers, Irving et l'Irvin-gisme.

ISAAC Ier. dit le Grand, v. Sahak.

ISAGOGIQUE (Introduction), étude préparatoire à la lecture de la Bible en général et de chacun de ses livres en particulier. Elle comprend la date et les circonstances de leur composition, la détermination de l'auteur, l'authen-

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ticité, la langue et toutes les questions qui se posent, pour en fixer le sens, la signification, la valeur et l'autorité. — Manuel de la Bible, par Angus, trad. de l'anglais. Michaélis, Hâvernick, Gellérier, Chenevière, etc.

ISIDORE 1° moine de Péluse, disciple de Chrysostome, vécut au 4®e siècle et au commencement du 5me; sa vie est peu connue; il se distingua principalement sous Théodose-le-Jeune, 431. Retiré dans un cloître, il jouit cependant d'une grande célébrité à cause de sa piété, de son éloquence et de sa charité. Il se fit remarquer par une indépendance d'esprit rare dans son temps. Tout en combattant le paganisme, il montre le profit qu'on peut tirer des ouvrages païens. Il reste de lui 2,000 lettres distinguées par l'élégance, l'onction, le bon sens, l'esprit et la concision. Les plus remarquables sont celles sur l'Écriture sainte. Il paraît avoir vécu jusqu'à un âge fort avancé.

2° Isidore Mercator, ou peccator, pseudonyme de fauteur qui a écrit la préface des décrétales faussement dites d'Isidore. On l'a confondu à tort avec le suivant.

3° Isidore de Séville, né vers 560 à Carthagène, dont son père était gouverneur, succéda 501 à son fr. comme év. de Séville et présida en cette qualité les synodes de Séville 619 et de Tolède, f 636. Par ses talents et sa piété il fut le théol. espagnol le plus érninent de son temps, et ses écrits ont encore de la valeur, malgré les critiques fondées auxquelles ils ont donné lieu. Les principaux sont: un Traité des écrivains ecclés., des Extraits de Grégoire et d'Augustin, une Chronique de l'hist. du monde depuis Adam, une Hist. des rois des Gétes, 20 livres des Origines et des étymologies, et des Comment, sur l'A. T.

4° Prêtre et hospitalier d'Alexandrie, persécuté pour son attachement à Athanase, + 414.

5<> Laboureur, f 1170; canonisé patron de Madrid.

ISLAMISME, v. Mahomet.

ISLANDE, Eisland, île de glace, que ses premiers explorateurs avaient déjà nommée Snia -land, ou Schneeland, île de neige, et dont Adam de Brème fait une description remarquablement exacte pour son temps. Elle fut découverte vers 870, mais doit avoir été connue à des époques anté-rieures,caron y trouva des traces d'établissements chrétiens. C'est le pirate irlandais, Nadod, qui le premier la fit connaître aux Norwégiens; le pirate Floke s'y rendit à son tour pour l'exploiter, et il fut suivi d'une multitude de gens qui, mécontents de leur roi Haarfager, vinrent peupler cette île et s'y constituèrent en république 870-930. Ils adoraient Thor, mais sans fanatisme; quelques-uns adoraient le créateur et le maître du soleil. Voyageant beaucoup, ils furent mis en relation avec des chrétiens. Audur, princesse irlandaise, veuve, vint se fixer en Islande avec sa famille et une trentaine d'autres chrétiens: ils dressèrent des croix partout, mais faute de pasteurs et de missionnaires la seconde génération retomba dans le paganisme. Le premier essai d'évangélisation fut fait par un ancien pirate, Thorwald fils de Kodran, qui avait été converti chez les Saxons par le moine ou prêtre Fredrich. Ils partirent à deux pour l'Islande 981 et construisirent en 984 un premier temple. Malgré divers échecs ils se présentèrent à la diète et proposèrent au peuple d'embrasser le christianisme; mais on les menaça, on les tourna en ridicule, et Thorwald se vengea en tuant quelques scaldes. Ce fut la fin de la première mission. Thorwald fut proscrit et alla mourir à Constantinople, dans un couvent qu'il avait fondé et dont il était l'abbé. Fredrich retourna tristement dans son pays. En 996 Olaf Trygwe-son fit une nouvelle tentative; il envoya Steffner en Islande, mais celui-ci n'ayant pas réussi par la persuasion voulut essayer de la violence pour renverser les idoles, et se fit expulser du pays. En 997 Thangbrand le remplace; il obtient quelques succès, mais deux scaldes ayant fait des satires contre lui, il en assomme un et doit retourner en Norwège 999. Nouvelle mission de Hialte et de Gissur, qui partent avec le prêtre Thormod et quelques missionnaires, l'an 1000. et qui obtiennent enfin de la diète la même année la reconnaissance du christianisme comme religion de l'île, moyennant quelques réserves en faveur des idolâtres, réserves qui furent retirées en 1019. Le premier évêque, Isleif. consacré par Adalbert de Brème, fut nommé 1056 et se fixa à Skalholt; en 1105 un second évêché fut érigé à Holum, ou Holar. La Bible fut bientôt traduite, ou paraphrasée dans la langue du pays. Brochenhuus dit avoir vu en 1567 une traduction qui devait avoir été faite 300 ans auparavant, et Henderson qui visita l'Islande en 1715 assure que c'est au 13®e siècle que se fit le premier essai d'une trad. de la Bible. Ce travail était nécessairement imparfait, souvent abrégé, parfois enrichi de légendes ou d'homélies. La Réformation eut à la refaire en entier. Ottur Gottschalk publia le N. T. en 1540; l'év. Thorlaksson, la Bible entière en 1554. L'Islande avait traversé des crises nationales et politiques diverses, une révolution la soumit à la Norwège en 1261; l'union de Calmar la soumit au Danemark 1397, et lorsque celui-ci eut décide en 1536 d'adhérer à la réforme, ce décret de la diète fut également applicable à l'Islande; à cette époque la religion personnelle ne comptait pour ainsi dire pas. L'év. de Skalholt, vieux, aveugle, soupçonné d'un meurtfe, Oegmuml Palsson, se démit en faveur de Gizur Einards-son, qui avait étudié à Wittenberg et qui appartenait à la Réforme. Martin, successeur de Gizur, trouva un ennemi acharné dans Jon, év. catholique de Holar, qui le fit mettre même en prison; mais Jon fut à son tour incarcéré et jugé pour crime de haute trahison 1550; dès lors la Réforme ne rencontra plus d'obstacles.

1TALA ( Vêtus), la vieille version italique. Au 2®* siècle la Bible était déjà trad. en latin, comme on le voit par des citations de Tertullien et de Cyprien. Mais n'y avait-il qu'une version latine, comme le dit Jérôme, ou y en avait-il plusieurs, comme l'assure Augustin et comme cela semble ressortir des différences qu'on remarque dans les citations? Les dernières recherches sont en faveur de la version unique; elle -aurait été faite par divers auteurs qui se seraient partagé le travail, et leurs différentes traductions revues ensuite par d'autres, corrigées, amendées, interpolées, auraient présenté sous le même nom d'Itala la seule version authentique, mais si altérée dans la plupart des exemplaires, que Jérôme se serait décidé à entreprendre la nouv. version, qui s'appelle auj. la Vulgate.

ITALIE. Lorsque saint Paul arriva à Rome il y trouva déjà une petite assemblée de chrétiens, mais on ignore quand et comment l'Évangile leur avait été annoncé; on suppose que ce fui par des fidèles, négociants, soldats, ou évan-gélistes, venus de Grèce ou d'Orient. La même obscurité règne sur la propagation du christianisme dans le reste de l'Italie, mais il est probable que, du moins pour une grande partie du pays, le mouvement partit de Rome, et que vu l'importance particulière qui s'attachait naturellement à la personne des pasteurs de la métropole, leur influence fut décisive pour l'organisation des nouvelles Églises. L'invasion des barbares se fit sentir en Italie plus qu'ailleurs, et la fondation d'un royaume lombard put seule rendre à l'Église un peu d'ordre et quelque sécurité. Mais les Carlowingiens, menacés par ce nouveau royaume, crurent politique de lui opposer une digue en créant au cœur même de l'Italie une puissance rivale, sous le nom d'États de l'Église, avec Rome pour capitale et l'évêque pour souverain. En dénaturant ainsi le caractère même de l'Église et en en faisant un pouvoir temporel, ils lui portèrent, sans l'avoir prévu, un coup fatal. De ce moment le clergé se trouva engagé dans la politique, et toutes les places et fonctions, depuis les plus humbles jusqu'à la plus élevée, servirent de moyen ou d'échelon pour atteindre un but, pour obtenir des résultats complètement étrangers à la vraie mission de l'Église. La moralité et la piété en reçurent une rude atteinte, et les pompes les plus brillantes d'un culte fastueux ne réussirent qu'à peine à gazer un peu ce qui se cachait de grossières superstitions, de passions mondaines et de visées ambitieuses sous les riches oripeaux d'une dévotion puérile et tout extérieure. La Réformation n'exerça en Italie qu'une influence passagère. Et cependant les plaies de l'Égl. avaient été reconnues et déplorées par les hommes les plus éminents et les plus capables d'y porter remède. Une ligue s'était formée sous Léon X pour renouveler et pour sauver l'Église; elle se composait de 80 hommes, qui plus tard abandonnèrent une entreprise impossible, Cajetan, Caraffa, Contarini, mais dont la tentative reste la preuve du profond besoin de réformes qu'on éprouvait alors. A Venise des hommes animés des mêmes intentions se groupaient autour de Reginald Poole et de Flaminio. L'apparilion de Luther en un pareil moment ne pouvait manquer de faire sensation; ses écrits et ceux des autres réformateurs furent accueillis avec avidité, lus, répandus en grand nombre, et lorsque l'autorité relig. prit l'éveil et voulut les poursuivre, on continua de les traduire et de les publier, mais sous des noms d'emprunt; ainsi les Loci de Mélanchthon, le catéch. de Luther, l'institution de Calvin, divers écrits de Bucer, de Zwingle, etc. Les Italiens eurent aussi leur littérature évangélique, dont le plus brillant specimen est l'ouvrage de Paleario: le Bienfait de la mort de Christ. Partout où il se rencontrait un homme d'intelligence et de cœur attaché à la Réforme, il devenait le centre d'une petite congrégation évangélique: Lupertini, Fla-cius, Altieri à Venise; Renée à Ferrare, Ricci à Modène, Mollio et de Planitz, ambassadeur de Saxe, à Bologne; Valdez, Vermigli, Occhino à Naples; Vergerio en Istrie, etc. Mais ce protestantisme italien n'était pas de force à résister aux ennemis de tous genres qui allaient fondre sur lui. Non seulement la protection de l'autorité lui faisait complètement défaut; non seulement il ne se recrutait guère que dans les classes lettrées, ce qui lui ôtait toute action sur le peuple; mais encore les divisions entre les Suisses et les Allemands sur la cène jetaient de l'hésitation dans ses rangs, et surtout la réserve des Allemands vis-à-vis du mouvement italien, dont les chefs principaux avaient une tendance unitaire prononcée, arrêtait et paralysait ceux qui auraient pu ou voulu agir. Un moment on crut que Paul III, pour éviter un mal plus grand, allait faire quelques concessions à l'esprit nouveau, et Contarini fut délégué par lui àx la conférence de Ratisbonne, mais l'influence de Caraffa prévalut. On comprit bien vite que la première concession serait une limitation des pouvoirs de la curie, et laissant là les pourpar-ler, on décida d'agir énergiquement et d'employer tous les moyens pour l'extirpation du protestantisme. En 1542 l'Inquisition s'établit k Rome avec des pleins pouvoirs. En 4543 paraît le premier index des livres défendus. Sous Caraffa le saint office étend partout ses mains cruelles; Renée de Ferrare est impuissante à protéger ses amis; le sénat de Venise lui-même doit plier. Beaucoup s'enfuirent, beaucoup périrent dans les prisons, sur Péchafaud, sur les bûchers; un plus grand nombre furent forcés d'abjurer. Les persécutions redoublèrent encore lorsque Caraffa fut monté sur le trône pontifical 1555, et sous ses successeurs Pie IV et Pie V. La curie put alors savourer en paix son triomphe, l'hérésie était vaincue. Les États s'inspirèrent de ce même esprit d'intolérance et de haine contre l'Évangile, et leurs diverses législations se rencontrèrent pour proscrire la Bible et toute manifestation religieuse. Le 19siècle encore a vu les persécutions des vaudois du Piémont. Rome, Naples, Florence ont rivalisé avec Turin. Les noms de Madiaï, de Guicciar-dini, d'Achilli, de Mortara rappellent ces persécutions, mais ils sont le dernier écho du vieux régime. Le jour où l'Italie a repris conscience d'elle-même sous le sceptre d'un roi galant homme et loyal observateur de la foi jurée, elle est devenue intelligente et tolérante. Les vaudois ont solennellement inauguré leur culte à Turin; le père Passaglia, et d'autres avec lui, se sont prononcés contre le jpouvoir temporel et pour une réforme de l'Eglise; les hommes d'État ont proclamé la liberté des cultes; les vaudois ont multiplié leurs égl., leurs écoles et leurs stations missionnaires. D'autres Italiens, De Sanctis, Mazzarella, Guicciardini, rêvant pour leur pays une organisation évangélique plus en rapport avec son tempérament, travaillent de leur côté à fonder sur la base biblique une Égl. véritablement italienne. Les Anglais, les Français, les Américains de toutes les dénominations, fondent des Églises, ouvrent des écoles, et constatent partout que la liberté en Italie n'est pas un vain mot. Leurs seuls adversaires sont, d'une part le clergé, de l'autre l'apathique indifférence d'un peuple qui a été habitué depuis trop longtemps à ce que d'autres pensent pour lui et lui fournissent une religion facile et toute faite. — v. Mac Crie, Erdmann, Witte 1861, Nitzsch 1863, J. Bonnet, etc.

Bibles italiennes. La version la plus estimée est celle de Jean Diodati, de Lucques, prof, de théol. k Genève. Il en avait paru une avant lui, de Bruccioli, Venise 1530, et une plus ancienne encore, du camaldule Nicolo di Malermi, Venise 1471, faite d'après la Vulgate et à l'aide d'autres versions plus anciennes; mais elles sont inférieures pour le style et même pour l'exactitude à celle de Diodati.

ITHACIUS, év. de Sossuba. Chargé de mettre à exécution le décret du conc. de Sarragosse contre Priscillien, il en appela k l'empereur, et obtint de Maxime que Priscillien fût exécuté comme hérétique, après qu'il eût été déposé et condamné par le conc. de Bordeaux 384. C'est le premier antécédent pour l'inquisition.

IVO de Chartres; v. Décret.

j

JABLONSKI lo Pierre Figulus, né à Jablunka d'où il prit son surnom, était sorti de Bohême encore enfant avec Coménius dont plus tard il épousa la fille. Pasteur à Dantzick, il fut consacré év. pour les moraves, k Mieleczyn en 1662. f 1670.

2o Daniel-Ernest, fils du précédent, né 26 nov. 1660 k Nassenhuben, près Dantzick. Après avoir achevé ses études, il visita la Hollande et l'Angleterre, fut pasteur à Magdebourg, recteur à Lissa, prédicateur de la cour à Kônigsberg et k Berlin 1693; enfin conseiller ecclés. et président de l'Académie, f 1741. Il travailla avec Leibnitz et d'autres philos, et théologiens, à concilier les différentes communions: il essaya même d'introduire en Prusse la liturgie anglicane et l'épiscopat. Il fut consacré év. des frères de Pologne et de la Diaspora, 1698, pour assurer la possibilité de la succession apostolique. Au milieu de ses dignités terrestres, iKne faiblit jamais dans son amour pour les frères, et c'est lui qui en 1735 conféra l'ordination épiscopale au charpentier David Nitschmann.

3o Paul-Ernest, fils du précédent, né à Berlin 1693, parcourut l'Europe aux frais de son gouvernement 1714-1717, pour faire des recherches sur la langue et les mss. coptes, et fut nommé prof, de théol. et pasteur de l'égl. réf. de Francfort sur l'Oder, 1721. f 1757. Auteur de nombreux ouvrages latins sur les antiquités grecques et égyptiennes.

JACOB 1° (et les Jacobites). Jacob Baradaï, nommé aussi Zanzale, moine et prêtre au couvent de Phasilta, près Nisibis, appelé à l'évêché d'Édesse 541 par les eutychiens. Les persécutions menaçant la secte d'une entière destruction, les év. monophysites captifs à Con«* stantinople lui décernèrent le titre de patriarche écuménique sans lui assigner de résidence spéciale. Pauvre et misérablement vêtu, bravant la décision du conc. de Chalcédoine et lesédits des empereurs, il parcourut l'Asie mineure et 1* Mésopotamie, prêchant ses doctrines, èncoura-geant les égl., ordonnant des prêtres et des évêques, avec un zèle et un succès qui lui mérita la reconnaissance de tous ses sectateurs, f 578. C'est de lui qu'ils prirent le nom de jaco-bites. Il en existe encore environ 60 mille en Syrie et en Mésopotamie (3 ou 4000 se sont laits catholiques). Sauf une certaine confusion des deux natures, ils sont presque orthodoxes; ils reconnaissent les 3 premiers conciles et, comme l'Egl. grecque, invoquent les saints, vénèrent la Vierge et croient à la transsubstantiation. Ils ont une vingtaine d'èvêques et un patriarche qui porte toujours le nom d'Ignace pour constater qu'il est le vrai successeur des vieux év. d'Antioche, dont Ignace fut le 3*e. Mais tout en s'appelant patr. d'Antioche, il réside au couvent de Saphran, N.-O. de Mossoul, et son coadjuteur, dit primat, au couvent de Saint-Matthieu, dans la môme contrée.

2° V. Jacques.

JACOBEL, ou Jacob de Mies ou de Misa, curé de Saint-Michel, Prague, disciple zélé de Huss et de Jérôme, éloquent, populaire, ne se laissa pas effrayer par le supplice de ses amis. Ses écrits 2 fois condamnés à Constance, demandaient une réforme de l'Église; il appelait le pape un antéchrist et introduisit la Cène sous les deux espèces. Ses partisans, appelés jacobel-lites, se joignirent aux taborites sous Ziska. f en paix à Prague, 9 août 1429.

JACOBI 1° Henri-Fréd., né à Dusseldorf 25 janv. 1743. Destiné au commerce il étudia d'abord à Genève, puis se mit aux affaires dans son pays, et fut successivement revêtu de charges importantes dans l'administration et les finances, nommé conseiller privé à Dusseldorf, et en 1804 conseiller de Bavière et membre de l'Acad. des sciences de Munich qui, en 1807, le nomma son président, f 10 mars 1819. C'est comme philosophe qu'il est surtout connu. Il combattit la prétention de démontrer par la logique ou la raison des faits d'un ordre supérieur, genre de démonstration qui, portant sur le relatif et le conditionnel, doit nécessairement aboutir à l'athéisme et au nihilisme. Il voyait l'organe de la connaissance immédiate, évidente, non dans l'esprit, non dans l'intelligence, mais dans l'instinct, dans la foi, dans ce que Kant appelait plus tard la raison opposée à l'esprit. 11 n'entendait pas par là une foi d'autorité, mais ce besoin intérieur, impérieux, qui n'admet pas la possibilité de l'opinion contraire. Dieu, la Providence, l'immortalité de l'âme, appartenaient selon lui à ces vérités qui s'imposent et ne se prouvent pas. Ses pensées philos, sont éparses dans plusieurs écrits de circonstance, Lettres, etc., sans qu'il les ait coordonnées en un système. V. surtout: Lettres sur Spinosa, sur Hume, sa lettre à Fichte, son roman de Woldemar. etc. OEuvr. compl. Leipzig 1812-4824, 6 vol. — 2° Son fr. Jean-George, 1740-4814, était poète, chanoine d'Halberstadt; il enseigna l'éloquence à Halle et les lettres à Fribourg en Brisgau.

JACOBINS, nom des dominicains q. v; il passa en 1789 à un parti politique violent qui s'était établi dans l'ancien couvent des dominicains, rue Saint-Honoré, à Paris.

JACOBITES, v. Jacob |o.

JACOPO, Passavanti, dominicain de Florence, orateur et écrivain, f 1357; auteur de Lo spec-chio di vera penitenza, en latin et en italien.

JACOPONI de Todi, ou Jacobus de Benedic-tis, jurisconsulte à Todi où il était né. Bouleversé par la mort subite de sa femme 1268, il renonça au monde et entra chez les fr. mineurs, après que par la composition de 2 hymnes sublimes il leur eut donné la preuve qu'il jouissait encore de toutes ses facultés. Il se joignit aux cardinaux qui protestèrent contre l'élection de Boniface VIII, et il fut mis en prison par celui-ci; il ne fut délivré que lorsque le pape à son tour fut fait prisonnier, 7 sept. 1303. Beaucoup de ses poésies sont dirigées contre le pape et les vices de l'Église. Ses Cantiques spirituels sont pleins de l'amour de Dieu et du Sauveur; le plus connu est le Stabat Matei% q. v.

JACQUES, ou Jaques, lo V. Jacob (ces deux noms s'échangent facilement). — 2° J. d'Édesse, savant syrien, né à Indâba près d'Antioche, se fit moine et se livra à l'étude du grec et du syriaque. Nommé év. d'Édesse 651, il donna sa démission quand il vit qu'on ne respectait pas les canons et vécut 20 ans dans les couvents d'Eusébone et de Télède. Il fut réélu pour la fois à cette charge, mais f 708 au moment où il apprit sa nomination. Il trad. plus, livres grecs en syriaque, écrivit des Comment. et une critique des versions syriaques de la Bible. Il en reste quelques fragments.

3<> Jacq. de Nisibis, dit le Grand; év. de Ni-sibis, jouit d'une telle considération qu'on ra -conte de lui des choses miraculeuses. Il était renommé pour sa science, sa piété et son austérité. Il assista au conc. de Nicée, Éphrem le Syrien était son élève. On a de lui 18 Discours et une Lettre en araméen. Venise 1756.

4o Jacques de Sarûg, surnommé Malpanna Ti-belita, c.-à-d. docteur ècuménique, flûte du Saint-Esprit, cithare de l'Église fidèle, né 452 à Kur-tam, sur l'Euphrate; prêtre en 503, év. de Bat-nân, territoire de Sarûg 519. Écrivain et docteur distingué de l'Égl. de Syrie, les jacobites le comptent comme un des leurs, malgré son orthodoxie. On lui attribue, et on lit encore dans les égl. de Syrie. 763 Homélies, écrites en vers de 12 pieds, d'après le rythme qui a pris de lui le nom de jacobite.

5° Jacq. de Voragine, né 1230 à Viraggio, près Gênes, entra 1244 dans l'ordre des fr. prêcheurs, fut nommé provincial pour la Lorabar-die, et 1292 archev. de Gênes, f 1298. Auteur de la Légende dorée, recueil d'histoires merveilleuses empruntées sans choix ni critique aux livres et aux traditions populaires: les aventures les plus incroyables y sont racontées, et ce livre, comme tous les livres d'imagination, a eu longtemps un grand succès.

6° J. de Vitry, prêtre d'Argenteuil, chanoine augustin à Ognies, auteur d'une Vie de sainte Marie d'Ognies. Le pape le chargea de prêcher la croisade contre les albigeois et les sarasins, et lui donna le titre d'év. de Ptolémaïs. Après la perte de Damiette 1225, il revint; fut créé cardinal, nommé év. de Frascate et légat papal en France. Son Hist. orientale est bonne comme description de la Terre sainte, et contient, ainsi que ses Lettres, des détails intéressants sur l'hist. des Ordres en Orient et en Occident.

7o Jacques, moine cistercien, originaire de Hongrie et surnommé de là maître de Hongrie. Il se mit à la tête du mouvement qui éclata en France vers 1250 et qui, fomenté et soutenu surtout par des troupes de paysans et de bergers, est connu sous le nom de Guerre des Pastoureaux. Le prétexte fut d'abord l'appel à une nouvelle croisade; il s'agissait de délivrer saint Louis prisonnier. Mais à côté de cela il y avait la haine des prêtres, des moines et des juifs. Ces hordes ravagèrent la France, pillant partout, et finirent par se faire tailler en pièces dans le Berry, où maître Jacques troiiva la mort 1251. Une nouvelle tentative eut lieu en 1329, avec processions, pillage, assassinats de juifs; mais comme elle en vint à menacer les prêtres et Avignon, elle fut de nouveau combattue et dissipée.

80 Jacques Bonhomme, chef de la Jacquerie 1358, s'appelait Guillaume Caillet. La révolte à laquelle il présida, n'avait, malgré sa ressemblance avec la précédente, aucun caractère religieux.

9o Jacques, ou Jacob de Misa, v. Jacobel.

10° Jacques de JUterbock, un des précurseurs de la Réforme. Né vers 1383, il entra dans le couvent cistercien du Paradis en Pologne, étudia à Cracovie, prit son grade de docteur et devint abbé de son couvent. Mais ne le trouvant pas à la hauteur de son ascétisme, il le quitta pour entrer chez les chartreux d'Erfurt, où il f 1465 étant à la fois prof, et prieur. Dans ses écrits il prouve que la décadence de l'Égl. vient du pouvoir absolu du pape et de la mondanité du clergé, et il insiste sur l'urgente nécessité d'une entière réforme.

11° Jacques de Marchia, franciscain, prêcha à Brescia à Pâques 1462, et soutint que le sang de Christ répandu sur la croix ne retournerait pas à la divinité avant la résurrection, et que par conséquent il ne devait pas être adoré. Le grand inquisiteur Jacques de Brescia s'émut, ainsi que les dominicains, de cette hérésie, et une discussion solennelle eut lieu à Noël 146£ en présence de Pie II, qui ajourna son verdict. Cette oiseuse question ne fut donc pas tranchée.

12° Jacques de Compostelle, v. Compostelle.

Plusieurs rois d'Angleterre ont aussi porté le nom de Jacques, en anglais James; les plus importants pour l'histoire de l'Église sont:

lo Jacques I^r, qui était Jacques VI comme roi d'Ecosse. Né 19 juin 1566, fils de Darnley et de Marie Stuart, il monta sur le trône l'année suivante, par suite de l'abdication forcée de sa mère, et se distingua par ses tendances cathol., son attachement aux formes épiscopales, et ses prétentions à la science théologique. Il tenait énergiquement à l'idée de l'Église nationale, de son unité et de sa soumission absolue à l'autorité royale, ce qui entretint pendant de longues années des troubles dans la protestante et presbytérienne Écosse. La méfiance qu'on avait de lui décida en 1581 l'assemblée des presbytères à publier le premier Covenant national, que le roi fut contraint de signer, bien malgré lui, et qui établissait le régime presbytérien. La cour n'en persista pas inoins à manipuler les èvê-chés, et elle nomma comme archev. de Glasgow le ministre Montgomery, qui n'était que le prête-nom du duc de Lennox, cousin du roi, catholique secret et perdu de débauches. Ce fut le signal d'un soulèvement, à la suite duquel Jacques fut fait prisonnier et enfermé au château de Ruthwen. Relâché après avoir fait de belles promesses, il se vengea en faisant arrêter Melville et en dictant au parlement une série de mesures connues sous le nom d'Actes Noirs, 25 mai 1584, établissant le gouvernement de l'Égl. par les évêques et la suprématie absolue du roi. Cependant son mariage avec Anne, la fille du roi de Danemark, le calma un peu et il donna en 1592 à l'Égl. d'Écosse la Grande charte, qui reconnaissait le presbytérianisme, mais maintenait le droit de patronage et permettait au roi de dissoudre les synodes. Les persécutions n'en continuèrent pas moins, ainsi que les tergiversations, et quand la mort d'Éli-sabeth eut fait monter sur le trône d'Angleterre le roi d'Écosse, 31 mars 1603, un prédicateur, faisant allusion au double nom du roi, qui était Jacques I«r en Angleterre, et Jacques VI en Écosse, put prendre pour texte de son discours Jacques un, six (Jacq. 1, 6). € L'homme double de cœur, etc. » Il fut en effet avec les puritains ce qu'il avait été avec les presbytériens, un mystificateur. Il convoqua, janv. 1604, une conférence à Hampton Court, mais pour notifier aux délégués que l'Égl. de Rome était sa mère, et que les puritains étaient une secte que l'on ne pouvait pas tolérer. Le synode de Linlith-gow 1606 s'opposa aux arrêtés du parlement, et la cour des hauts commissaires, févr. 1610, fut instituée par le roi pour faire réussir devant une nouvelle assemblée la question de l'épisco-pat. Les 5 articles de Perth 1617, confirmant une liturgie et des institutions odieuses, mirent le comble au mécontentement des presbytériens d'Ecosse. Les catholiques aussi, depuis la conspiration des Poudres, 1603, éprouvèrent son mauvais vouloir, et il leur imposa le serment d'allégeance, qui déniait au pape le droit de déposer les rois. Malgré les rapports de famille, et malgré les sollicitations de ses sujets, il refusa d'intervenir en faveur des protestants d'Allemagne et il vit. sans en être ému, son gendre Frédéric V dépouillé de ses États de Bohême par l'emp. d'Autriche 1621. Il maria son fils ainé Charles 1er à Henriette de France, fille de Henri IV, 1625, et f la même année le 8 avril. Touj. amateur de théol., il suivait avec intérêt les discussions, se lit même représenter au synode de Dordrecht, mais n'en agréa pas les conclusions. Il a laissé un Comment, sur l'Apocalypse, des Instructions à son fils Henri (le Dôron Ba-silicon) et un livre intitulé Lois libres et monarchies libres, qui lui ont valu de la part de ses flatteurs le surnom de Salomon de l'Angleterre, et qui ont été publiés k Londres 1619 par l'év. Montacuti.

2° Jacques II d'Angleterre et VII d'Écosse, né 1633, fils de Charles 1er et d'Henriette de France. Élevé à la cour de France, oli il s'était réfugié après les événements de 1648, il en avait adopté les idées catholiques. Il fit les campagnes d'Espagne avec Turenne et revint en Angl. en 1678 avec son frère Charles II. La même année il se fit catholique, mais ne l'avoua publiquement qu'en 1671, et dut renoncer k tous ses titres et fonctions, entre autres à son titre de grand amiral. Les dispositions hostiles du peuple, qui voyait en lui le futur restaurateur du catholicisme et qui essaya de le faire exclure de la succession au trône, l'obligèrent à se réfugier en Hollande 1679. Il revint en 1680, sous son nom de duc d'York, comme commissaire royal et se signala par ses persécutions contre les presbytériens. Rappelé à la cour et nommé membre du Conseil d'Etat, il monta sur le trône en 1685, après la mort de Charles II, et se hâta de rétablir publiquement le culte catholique. Pour affaiblir le parti épiscopal il favorisa les dissidents en Angleterre, tout en continuant de persécuter les covenantaires en Écosse. Il fit mourir Monmouth et Argyle, publia 1687 un Acte d'indulgence qui proclamait la liberté des cultes et qui froissa vivement les épiscopaux sans rallier les presbytériens. Une nouvelle proclamation du même genre, suivie du procès des evêques 1688, n'eut pas un meilleur succès.

L'agitation ne fit que grandir, et lorsque la naissance d'un prince vint menacer l'Angleterre d'une dynastie catholique, les partis évangéliques s'unirent pour appeler k leur aide le gendre du roi, Guillaume d'Orange, qui débarqua le 6 nov. 1688, précipita Jacques du trône et l'envoya en exil. Battu à la Boyne et à la Hogue, malgré les secours de Louis XIV, Jacques passa le reste de ses jours à Saint-Germain, partagé entre les intrigues politiques et les exercices de dévotion, f 16 sept. 1701. On a dit de de lui qu'il avait perdu trois royaumes pour une messe.

JAENICKE, pasteur et prédicateur morave à Berlin, à l'égl. de Bethléhem; fonda en 1800 une école libre pour former des missionnaires, dont la plupart entrèrent au service de sociétés anglaises. Après sa f 1827 cette œuvre fut continuée par la Soc. des Missions de Berlin.

JALAGUIER, Prosper-Fréd., né 21 août 1795 à Quissac, Gard, pasteur à Sancerre 1821, prof, de morale et de dogmatique à Montauban 1833-1864. f 22 mars 1864. Théol. biblique, il a exercé pendant plus d'un quart de siècle une heureuse influence sur les étudiants, non seulement par un enseignement évangélique, mais par le sérieux de la vie et la bonté du cœur. Auteur de plusieurs brochures sur: le Témoignage de Dieu, l'Authenticité du N. T., l'Inspiration du N. T., la Question chrétienne jugée par le bon sens, Du principe chrétien et du ca-thol., Du rationalisme et du protestantisme; enfin: Une vue de la question scripturaire.

JAMES, v. Jacques.

J ANOW, Mathias (de), un des précurseurs de la réforme de Huss, mais timide. Il étudia k Paris d'abord, ce qui lui valut le \itre de ma-gister parisiensis, puis à Prague où, sur la recommandation du pape, il fut plus tard nommé chanoine et confesseur k la cathédrale. L'exercice du ministère lui fit comprendre peu à peu que les questions ecclés. sont moins importantes que la communion avec le Sauveur. Il aurait voulu que les laïques communiassent tous les jours, et cela sous les deux espèces, mais il fut obligé de se rétracter, un synode ayant décidé k Prague 1388 qu'une fois par mois suffisait. Il obéit k ses chefs, mais il finit par se persuader qu'une réforme ne serait possible que lorsque l'Égl. aurait d'abord été détruite par l'Antéchrist. Il ne reste que des fragments de son livre Des règles de l'A. et du N. T., et de ses Recherches sur l'essence du christianisme.

JANSÉNIUS, Jansénisme. Né 28 oct. 1585 k Acquoi, près Leerdam, Hollande, Cornélius Jan-sénius étudia k Louvain et à Paris où il se lia avec Saint-Cyran. Placé d'abord à la tête d'un collège à Bayonne, il retourna 1617 à Louvain comme prof, de théol., fut nommé principal du collège Sainte -Pulchérie, en 1630 prof. d'Ecri-tnre sainte à Tnniv., combattit les jésuites, leur interdit l'enseignement de la théol. dans cette ville, et devint év. d'Ypres 1635. f 1638. Sa célébrité ne commença qu'après sa mort par les attaques que les jésuites dirigèrent contre sa mémoire. C'est en 1640 que parut son principal ouvrage: « Augustinus, ou Doctrine de saint Augustin sur la nature humaine, sa santé, ses maladies; remède contre les pélagiens et les massiliens. • L'importance de ce livre est moins dans la réfutation de la doctrine des jésuites, de Molina en particulier, que dans la manière féconde et vivante avec laquelle il présente les doctrines du péché, de la grâce et de la rédemption. A l'instigation des jésuites, il fut interdit par Urbain VIII, dans sa bulle In eminentis, comme la reproduction des erreurs déjà condamnées de Bajus. Mais le jansénisme avait trouvé des adhérents en France, entre autres l'abbé de Saint-Cyran, puis Arnaud, Nicole, Pascal et d'autres savants. L'univ. de Paris présenta au pape sept propositions, comme extraites des écrits de Jansénius; elles furent réduites à cinq, et Innocent X les condamna 1653 dans sa bulle Cum occasions. Alexandre VII fit de même 1656. Les amis de Jansénius refusèrent de se soumettre, niant que les propositions condamnées se trouvassent dans les livres incriminés, ou qu'elles eussent le sens qu'on leur donnait. Le pape ayant exigé leur adhésion à sa bulle, Arnaud publia sa Lettre à une personne de qualité, et Pascal ses Lettres à un provincial. La lutte était engagée, et l'opposition se concentra, hommes et femmes, autour de Port-Royal. Louis XIV aurait voulu réduire les jansénistes par fa violence, mais 4 évêques tenaient pour eux; ils distinguèrent entre le fait et le droit, refusèrent de signer, mais s'engagèrent à un respectueux silence, compromis équivoque imaginé par le roi et accepté par le pape sous le nom de Paix de Clément IX, 1668. La paix fut d'autant plus facile que les év. jansénistes et Arnaud lui-même ayant pris parti pour le pape dans ses luttes avec la royauté, Louis XIV les avait forcés de quitter la France. Et quant à Port-Royal, dont les religieuses refusèrent de signer la bulle Vineam domini, 1705, il fut supprimé et démoli. Il semblait que la lutte fût terminée. Elle se ranima plus vive et plus ardente, quand le père Quesnel, prêtre de l'Oratoire, publia, sous le patronage de l'archev. de Paris, cardinal de Noailles, ses Réflexions morales sur le N. T., livre de pure édification, qui obtint un succès immense, mais qui reproduisait les idées de Jansénius. Clément XI, par sa bulle Unigenitus 1713, en condamna 101 maximes comme jansénistes et hérétiques, et dans le nombre plusieurs qui sont textuellement dans la

Bible, dans Augustin et même dans les décrets du conc. de Trente. Une grande partie du clergé de France refusa de s'y soumettre, quoique le roi l'eût fait enregistrer comme loi du royaume. Les év. demandèrent qu'elle fût soumise à un concile national, mais les constitutionnels on acceptants s'y opposèrent avec énergie, et le clergé se scinda en deux grands partis, celui des Acceptants et celui des Appelants, qui en appelaient au concile. Il fut procédé contre ces derniers avec une extrême rigueur. Plusieurs, entre autres Noailles, se rétractèrent; les autres furent destitués, emprisonnés, bannis; les sacrements de l'Égl. leur furent refusés. Un grand nombre se réfugièrent en Hollande, où ils se sont maintenus jusqu'à ce jour. L'archevêché d'Utrecht. avec les év. de Harlem et de Deventer, se déclara indépendant du pape, tout en maintenant l'union avec l'Égl. catholique. A chaque avènement d'un nouveau pape, ils lui présentent leurs hommages, tout en repoussant sa suprématie, et il y répond en renouvelant leur excommunication. Ils ont en Hollande 27 églises, comprenant environ 6,000 membres. Ils continuèrent aussi de subsister à Paris, et le diacre Pâris fut une de leurs illustrations 1727, mais le nombre en a toujours été très restreint. L'œuvre entreprise par le p. Hyacinthe, quoique moins accentuée quant à la doctrine, a de l'analogie avec le jansénisme.

JANVIER. Parmi les 14 saints de ce nom, le plus célèbre est l'ancien év. de Bénévent qui. avec ses compagnons, fut emprisonné à Pouizo-les sous Dioclétien 305, et martyrisé le 19 sept. Comme il refusait de sacrifier aux idoles, il fat d'abord jeté dans une fournaise ardente, puis livré aux bêtes, mais il n'en reçut aucun dommage. A la fin il eut la tête tranchée. Une femme qui était là recueillit la tête et le sang, qui sont auj. conservés dans une des chapelles de la cathédrale de Naples; le sang dans deux fioles. Quand la tête est rapprochée du sang, celui-ci devient liquide. Ce miracle se fait régulièrement le jour anniversaire de la mort do martyr. Il se fait aussi dans des occasions solennelles. S'il tarde à s'opérer, c'est mauvais signe et l'on peut s'attendre à des malheurs. C'est ce qui faillit arriver lors de l'établissement de la République parthénopéenne 1798; le général Championnet coupa court à tout danger en prévenant Tarchev. que si le miracle n'était pas fait dans un bref délai, il lui brûlerait la cervelle. Lorsque Garibaldi entra dans Naples 1860, le miracle se fit sans hésitation ni retard. On sait que la cire rouge est à la base du mystère et qu'un peu de chaleur la fait fondre; les cierges qui brûlent sur l'autel suffisent pour cette opération.

Les autres saints du même nom. et sainte

Janvière, figurent sur les catalogues comme martyrs, mais sans histoire. Janvier, chanoine de Saint-Symphorien d'Autun, a publié en 1742 un poème latin Ars confabulandi, l'Art de causer, que Delille a utilisé dans son poème de la Conversation.

JAPON. Découvert au 13me siècle par Kubru-quis et Marco Paolo, le Japon fut évangélisé dès 1549 par François Xavier et ses compagnons, qui s'établirent d'abord dans l'île de Kiousiou, et qui obtinrent de tels succès qu'en 1580 ils avaient gagné à leur foi près de 200,000 prosélytes, dont plusieurs princes, et qu'ils purent envoyer à Grégoire XII une députation japonaise pour le saluer. Mais en 1587 l'emp. Taiko-Sama, excité par ses bonzes, irrité par les imprudences des missionnaires et provoqué par l'attitude de ses sujets chrétiens, fit raser les églises et chassa les missionnaires. Ceux-ci feignirent d'obéir, mais en réalité le culte continua de se célébrer en secret, et l'empereur l'ayant découvert, procéda contre les rebelles, d'autant plus rigoureusement que l'action politique du Portugal était à peine dissimulée sous les apparences relig. de l'œuvre 1595 et 1597. C'est alors que périrent les 26 martyrs japonais dont la canonisation a eu lieu en 1862. Le fils de Taiko-Sama aimait les missionnaires et il les toléra jusqu'en 1613, mais informé par les Hollandais que les Portugais menaçaient son royaume, il rouvrit l'ère des persécutions 1614, fit raser les églises, brûler ses sujets chrétiens, déporter à Macao les missionnaires, et bannit à toujours tous les Portugais. L'édit fut exécuté avec la plus grande rigueur, et sous Taiko-Sama II, 1631-1658, les restes du petit troupeau qui continuaient de se défendre avec l'énergie du désespoir, furent anéantis à Nangasaki, grâce au concours des Hollandais. En 1644 tout était fini, et pour prévenir tout retour du christianisme, l'édit de 1638 fut de nouveau confirmé, portant sous le titre de Jésu-mi l'ordre à chacun de fouler aux pieds le crucifix. Les Hollandais à leur tour ayant excité des méfiances, furent relégués à Nangasaki, où ils purent continuer leur commerce et où ils se sont maintenus. L'ouverture des ports du Japon en 1854 a permis aux missionnaires de reprendre leurs travaux; les Américains en ont profité les premiers. Le N. T. vient d'être entièrement trad. en japonais. — v. Kâmpfer 1691, Thunberg 1776, Siebold 1830, et surtout Aimé Humbert, Paris 1865, et Tavlor 1871.

JAQIJELOT, Jean, né 16 sept. 1649 à Vassy où son père était pasteur. Il fit de bonnes études et montra du talent pour la prédication. A la révoc. de l'Édit de Nantes, il passa à Heidelberg, puis à La Haye comme pasteur du corps des nobles; enfin en 1702 à Berlin, où il f 1708.

Auteur de plus, écrits philos., apologétiques et d'édification. Il était arminien.

JAQUERIE, v. Jacques 8<>.

JARCHL ou plus ordinairement Raschi, nom composé, suivant la méthode rabbinique, des initiales de son vrai nom: RAbbin SCHelomon, fils d'Izchak. Né 1040 (ou 1030) à Troyes, Champagne, f 1105. Il appartenait à une famille considérée de savants juifs. Sa vie, ornementée de traits légendaires, est peu connue; on sait seulement qu'il parcourut presque toute l'Europe, l'Égypte et une partie de l'Asie, et qu'il rentra, enrichi d'un immense recueil de notes et d'observations, à Troyes où il se consacra à l'enseignement. Beaucoup de jugement, un sens critique et historique très développé, et une vast* érudition le caractérisent comme écrivain. Ses Comment, sur tout l'A. T. renferment, outre l'explication du sens littéral, les explications allégoriques si chères aux anciens. Il a écrit aussi des Comment, sur les différents livres du Talmud, qui font de lui le véritable père de cette étude. Ses ouvrages ont été souvent réimprimés: Naples 1487, Venise 1520; et en latin, trad. d* Breithaupt, 1713-1740.

JAROUSSEAU, Jean, né 1720 à Mainxe, An-goumois, comptait parmi ses ancêtres des pasteurs martyrs. Il étudia à Lausanne, fut consacré par Rabaut et fut nommé 21 sept, 1761 à Saint-Georges de Didonne, avec une paroisse grande comme un diocèse. Il eut pour collègues dans le co'loque de Saintonge, des hommes dévoues comme lui, entre autres Louis Gibert qui fut tué l'année suivante. Le gouverneur de la province, maréchal de Senneterre, avait des dispositions tolérantes et ferma les yeux; mais l* nouveau gouverneur voulut faire du zèle et appliqua les édits. Jarousseau fut blessé dans une assemblée, et pendant sa maladie il conçut l'audacieux projet de se rendre directement auprès de Louis XVI et de plaider la cause des églises. Grâce à Malesherbes il obtint une audience, et pour lui-même la promesse royale qu'il ne serait plus inquiété, pourvu qu'il évitât toute manifestation trop ostensible de son culte; il ne put obtenir davantage, f 18 juin 1819 à Che-naumoine. Sa fidélité a été une bénédiction pour sa famille où sa mémoire est en vénération. Son petit-fils, M. Eug. Pelletan. a raconté l'histoire du Pasteur du désert, dans un livre couronné par l'Acad. franç. qui joint tout l'intérêt d'un roman au sérieux moral d'un livre de pure édification. La maison de Saint-Georges, que la famille possède encore et soigne avec amour, a été appelée par Michelet un temple de l'humanité; le jardin, qui s'est agrandi, est orné d'arbres, de roses et de fleurs rares et précieuses.

JEAN lo pape 523-526. Chargé par Théodo-ric de se rendre à Constantinople pour deman -der le retrait de l'édit de 524 contre les ariens, il fut emprisonné à son retour en récompense de son succès; il parait qu'il avait mal compris ou mal rempli sa mission.

2° Jean II, nommé Mercure, pape 533-535, le premier qui a changé de nom. Contrairement à son prédécesseur Hormisdas, il admit la formule: Une des personnes de la Trinité a été crucifiée. Décret contre la simonie.

3° Jean III, pape 560-574, n'entra en fonctions que 4 mois après son élection, Justinien;»yant tardé à le confirmer.

4° Jean IV, pape 640-642; Dalmate, travailla à soumettre à son autorité Pyrrhus, patr. de Constantinople.

5o Jean V, pape 685-686, passa dans son lit tout le temps de son pontificat.

6° Jean VI, pape 701-705. Les Romains le défendirent contre l'exarque qui voulait le destituer.

7o Jean VII, pape 705-707, n'osa rien décider quand Justinien II lui lit soumettre les canons du conc. de Trulle.

8° Jean VIII, d'abord archidiacre de Rome, élu en 872 en remplacement d'Adrien II, régna 10 ans. Il recouvra quelques-uns des avantages perdus par son prédécesseur. 11 soutint Charles-le-Chauve contre Louis d'Allemagne et donna l'empire au premier « par un bienfait non humain, mais divin: > il reprocha aux év. français de n'avoir pas repoussé Louis les armes à la main, « puisque, dit-il, nous n'avons pas à combattre contre la chair et le sang, mais contre les principautés ! » Attaqué par les Sarrasins, il implora le secours de Charles, mais celui-ci mourut avant d'avoir pu le secourir. Emprisonné par Lambert, duc de Spolète, qui voulait s'emparer de Rome, il s'enfuit en France où Louis - le-Bègue lui fournit les moyens de remonter sur son siège. Pressé de nouveau par les Sarrasins, il eut recours à l'emp. Basile, de Constantinople. Par reconnaissance il offre à Photius de le relever de son excommunication et de le reconnaître comme patr. de Constantinople, s'il veut lui céder la Bulgarie. C'est de la simonie en grand. Photius refuse, il est excommunié. il excommunie. On reproche à Jean VIII d'avoir faibli dans cette circonstance, et de s'être conduit comme une femme; on a même voulu profiter de l'occasion pour chercher dans ce fait une des explications de l'histoire de la papesse Jeanne q. v. Jean accorda aux slaves le droit de célébrer l'office divin dans leur propre langue, permission que Grégoire VII leur retira plus tard. Jean se nomme un vicaire en France et rattache ainsi plus intimèment cette Église à la sienne. Il émancipe les év. de la puissance séculière et se les assujettit; il avait défendu que les nobles s'assissent devant un évêque sans la permission de celui-ci. Il couronna trois souverains, Charles-le-Chauve, Louis-le-Bègue et Charles-le-Gros, et convoqua onze conciles. Il fut assassiné vers la fin de 882.

9° Jean IX, 898-900, rétablit la mémoire du pape Formose, condamnée par ses prédécesseurs, et reconnut comme empereur Lambert de Spolète contre Arnolphe.

10o Jean X, 914-923. II avait vécu dans un commerce impur et criminel avec la Théodora, puis il avait été fait archev. de Ravenne. Mais cet éloignement ne convenait pas aux deux amants. Théodora, désirant le rapprocher d'elle, le fit nommer pape, avec tous les titres de sainteté et d'infaillibilité qui sont les fiefs du pontificat. Dans l'ivresse de sa vie scandaleuse il fut jeté en prison par la Marouzia, et il y mourut.

llo Jean XI, 931-936, fils du pape Serge III et de la Marouzia, élu à 25 ans. Avec lui la papauté a quelque chose d'héréditaire. Son fr. Albéric, aussi fils de la Marouzia, le fait jeter en prison avec sa mère au château Saint-Ange, où il meurt.

12° Jean XII, Octovien-Albéric, fils du précédent Albéric, patrice de Rome et petit-fils de la Marouzia. se fit élire pape à 18 ans, 956. Comme souverain temporel il garda le nom d'Octavien; comme pape il prit celui de Jean, pour distinguer ses deux charges. Inquiété par Bérenger roi d'Italie, puis par Adalbert son fils, il recourut à Othon, emp. d'Allemagne, qu'il couronna, en lui donnant le titre de roi d'Italie, 962. Sous ce malheureux jeune homme le palais pontifical devint un véritable lieu de débauche, prostibulum mereti^icium^ dit un historien catholique. La dissolution, la corruption et les horreurs de tous genres atteignirent sous son règne, à un si haut degré, que des plaintes s'élevèrent de toutes parts. Les femmes n'osaient plus se rendre dans les temples, où leur honneur n'était pas en sûreté. Othon, ayant appris tous ces désordres, crut devoir intervenir. Jean s'excusa de ce qu'il appelait quelques folies de jeunesse, puerile quid. Othon lui pardonna pour la première fois en disant: ce n'est qu'un enfant; avec le temps il se corrigera. Mais les désordres ne faisant qu'augmenter, et le pape s'étant tourné vers Adalbert contre l'empereur, Othon se rendit à Rome. Jean s'enfuit. L'emp. convoqua un concile. Là, des évêques et des cardinaux déclarèrent que Jean avait consacré un prêtre dans une écurie, qu'il avait consacré évêque pour de l'argent un jeune garçon de dix ans, qu'il avait volé l'Église, qu'il avait commis beaucoup d'impuretés, même d'incestes: qu'il avait fait arracher les yeux à son père spirituel Benoit; qu'il avait causé la mort d'un sous-diacre, qu'il avait bu à la santé du diable, et qu'en jouant, ce qui était sa coutume, il avait souvent invoqué Jupiter et d'autres dieux. Le clergé et tous les Romains déclarèrent d'une manière solennelle, que toutes ces accusations étaient véritables. Appelé à se justifier, Jean répondit en menaçant des foudres de l'excommunication. Il fut déposé par le concile et Léon VIII fut nommé à sa place. Mais après le départ d'Othon il réussit à rentrer dans Rome 964, et y exerça d'affreuses vengeances. A l'un il fît couper le nez, à l'autre la main droite, à un troisième la langue, etc. L'emp. dut revenir. Jean était aux environs de Rome, occupé à ses débauches; il fut tué la même année par le mari d'une femme avec laquelle il se trouvait.

13o Jean XIII, 965-972; fils de Jean XII,de nouveau papauté héréditaire. Il imagine le baptême des cloches.

14<> Jean XIV, 983, un des trois papes qui furent élus entre la fuite du pape Boniface VII et son retour. Il était chancelier d'Othon II. Baronins le range parmi les plus fameux brigands. Il fut tué par son collègue revenu de Constantinople, 985.

15° Jean XV, 985, nous sort un peu de ces tristes horreurs, mais il est plein d'orgueil et d'ambition. Arnulf de Reims, de la famille des topet, est accusé d'avoir voulu livrer sa ville aux ennemis de Capet. Celui-ci se plaignit au pape, qui traîna en longueur. Pendant ce temps Capet s'est affermi sur son trône; il convoque un conc, à Reims 991. Des moines prétendent que le jugement d'un évêque n'appartient qu'au pape; ils citent les fausses décrétales. Arnulf d'Orléans les combat avec éloquence et vigueur. H veut le respect au siège de Rome, mais avant tout, le respect pour les conciles. Il tonne contre la suprématie de ces jeunes gens débauchés dont on fait des papes, t A quoi servent les décisions et les lois, si tout est dirigé par la volonté d'un seul? Et des prêtres illustres par leur science et leur piété, doivent-ils être soumis à de tels monstres (taies monstri) 1 L'Antéchrist est assis dans le temple de Dieu, se donnant pour Dieu ! > Le concile fut entraîné par la parole de cet évêque; Arnulf de Reims avoua sa faute et donna sa démission. C'est Gerbert, son successeur, plus tard Sylvestre II, qui a donné les détails de ces discussions. Jean XV condamna ce concile et, avec l'aide de ses moines, en convoqua un autre à Montluçon 995, mais il mourut peu après, 996. La chronologie de ces papes Jean est un peu confuse.

16° Jean XVI, 996, ne fit que passer sur le trône. On croit que c'est sous son règne qu'eut lieu la première canonisation.

- Il y eut aussi un antip. Jean XVI, vers 986?

17° Jean XVII, pape 1003.

18° Jean XVIII, successeur immédiat du précédent, 1004-1009.

19° Jean XIX, 1024-1033, frère de Benoît VIII, élu quoique laïque; son neveu. Théophylacte, presque un enfant, lui succède sous le nom de Benoit IX.

20° Jean XX, 1045-1046, élu concuremment avec Sylvestre III, pendant que Benoît IX prétend encore rester pape. Il dura peu et ne fit rien. Quelques-uns le comptent comme antipape; c'est difficile à démêler.

21° Jean XXI, 1276-1277; Pierre Julien, ou Petrus Hispanus* né à Lisbonne, philos, et médecin distingué, élu pape 1276. Il essaya d'empêcher la guerre d'éclater entre Philippe-le-Hardi et Alphonse de Castille, et tenta mais en vain de leur faire entreprendre une croisade. 11 périt malheureusement à Viterbe, écrasé sous les décombres de son palais. On a de lui des Sum-mulœ logicales.

22° Jean XXII, 1316-1334. Jacques Duèse, de Cahors, élu par le parti français après deux ans d'interrègne. C'est te second pape d'Avignon; homme éclairé, savant en droit et en médecine, comme en théologie. Il favorisa la France, combattit l'élection de Louis de Bavière et l'excommunia à cause de sa lutte avec Frédéric d'Autriche. Les deux monarquess'étant réconciliés, les franciscains rigides, tels que Guill. Occam, embrassent le parti impérial et attaquent violemment l'Égl. romaine et ses prétentions. Le pape s'appuie en Allemagne sur les païens de Brandebourg qu'il emploie contre Louis, mais Louis marche sur l'Italie, se fait couronner, fait destituer le pape pour simonie et nomme à sa place Nicolas V. Jean n'en continue pas moins d'excommunier; il triomphe de son rival qu'il contraint à abdiquer et à lui demander pardon, la corde au cou. Il fait brûler vif l'év. de Cahors, qu'il accuse d'avoir voulu l'empoisonner. Louis en appelle à un conc. général, mais Jean f 1334. Du Pin l'accuse d'hérésie à cause de ses opinions sur l'état de l'âme entre la mort et la résurrection (Antiq. p. 352); mais ce n'est qu'un détail. On a de lui quelques traités de médecine, entre autres le Thésaurus pauperum, qu'on a attribué à tort à Jean XXI. C'est aussi lui qui a publié les Clémentines et les Extravagantes.

23° Jean XXIII, Balthazar Cossa, élu à Bologne 1410, par 16 cardinaux, après la mort d'Alexandre V qu'il avait fait empoisonner; il se trouve en concurrence avec Grégoire XII et Benoît XIII, trois papes qui ont tous les trois leurs partisans, mais qui finiront par être remplacés par Martin V. Cruel, avare, exacteur, corrompu, simoniaque, il réforme un décret de Nicolas 1er. Puis, pressé par l'empreur Sigismond, il convoque à Rome, pour la réforme de l'Église, un conc. où il n'admet que des Italiens et qui ne fut qu'une farce honteuse. Si-gismond veut un conc. écuménique en règle. Le pape, dans un moment de vertige, laisse à l'emp. le choix de lieu, et celui-ci choisit Constance, en dehors de l'influence papale. Jean se maudit de regret et s'écrie en arrivant à Constance: C'est ainsi que le renard se laisse prendre. Ce concile, 1414, fut un des plus nombreux qu'il y eût eu. Outre les grands dignitaires civils et ecclésiastiques, on y compta 1800 prêtres, 348 comédiens et 700 femmes de mauvaise vie. On produisit contre Jean une série d'accusations de péchés mortels, empoisonnements, débauches, incestes, etc., tellement abominables qu'on n'osa pas les lire en public; si connus d'ailleurs que la lecture en était superflue. Sur la demande du concile Jean donne sa démission et s'enfuit le 21 mars 1415 déguisé en garçon d'écurie. Il est repris, jugé, déposé, et jeté en prison à Rudolfszell, près de Constance. Trois ans après Martin V le fait remettre en liberté et le nofnme doven du sacré collège. f 1419.

D'autres personnages de ce nom sont connus dans l'hist. de l'Église. Après les papes, nous mentionnerons:

lo Jean de Giscala, Ben-Lévi, célèbre patriote qui, lors de l'invasion romaine, se mit à la tête de volontaires dévoués et résolus, défendit sa ville de Giscala contre Josèphe, dont il se déliait, et ne cessa de harceler les Romains. Quand il apprit que Jérusalem était assiégée, il courut s'v enfermer avec ses hommes, s'unit aux zé-lates, organisa la résistance la plus désespérée, s'empara du gouvernement malgré les tièdes et les politiques, trop disposés à négocier, lutta contre le parti d'Eléazar et de Simon de Gue-rasa, usa de représailles terribles contre ceux qui refusaient de reconnaître son autorité, et se défendit vaillamment jusqu'à la fin. Emmené à Rome comme prisonnier, il servit d'ornement au triomphe de Titus et mourut dans un cachot. Josèphe, qu'il avait démasqué, le représente comme un homme faux, mais il ne lui ôtera pas l'honneur d'avoir aimé son pays avec passion et d'avoir tout sacrifié pour essayer de le sauver.

2° Jean-le-Presbytre, ou Y Ancien, à qui plusieurs auteurs croient pouvoir attribuer l'Apocalypse; il n'est connu que par un mot de Pa-pias, qui le fait vivre vers 150, et qui le cite comme une autorité, comme ayant connu Jésus personnellement. Il était ancien d'Éphèse. Mais l'ap. Jean vivait aussi à Éphèse, et l'on peut croire que Papias, qui n'avait pas beaucoup de sens critique, a fait une confusion. D'autres pensent au contraire que l'apôtre n'a jamais vécu à Éphèse, et que la tradition sur ce séjour vient d'un malentendu d'Irênée et de Polycrates qui auraient confondu les deux Jean.

3o Jean-le-ScoIastique, né à Sirimis, près d'Antioche, d'abord avocat, puis prêtre, il fat 564 nommé patriarche d'Antioche en remplacement d'Eutyche, destitué par Justinien pour n'avoir pas voulu reconnaître les aphthartodo-cètes. Il écrivit sur la Trinité un traité, auquel J. Philipon répondit. Il provoqua à Antioche la première grande collection de canons, + 577.

4o Jean d'Éphèse, né à Amid; év. monophy-site, très considéré à la cour dè Constantinople. sous Justinien. Chargé par l'empereur de faire un voyage missionnaire, il convertit en Asie 90,000 païens, fit construire 96 églises et fut surnommé le Destructeur des idoles. Il écrivit une histoire en 3 livres, dont le tiers a été trad. du syriaque en 1843 par Cureton, et contient les années 571-585. On y trouve des détails intéressants, fournis par un témoin oculaire.

5° Jean-l'aumônier (Eleèmosynariu*), patr. fa Constantinople, connu par son inépuisable charité. f 616 dans l'île de Chypre, fuyant les persécutions des Perses.

6° Jean Philopon, grammairien d'Alexandrie. Son nom signifie ami du travail et paraît avoir été mérité. Il a beaucoup écrit sur la grammaire, la physique, la philos, et la théologie, et la plupart de ses ouvrages ont un but apologétique. Disciple d'Ammonius et auteur du Trithéisme, il soutient que la nature et l'hypostase sont une seule et même chose; que le corps périssant tout entier par la mort, doit être créé de nouveau pour la résurrection; que le Christ a célébré le 13 Nisan une Pâque mystique. Ses livres sur l'Éternité du monde, la Création, la Résurrection, son Traité de l'Ame, et quelques traductions d'Aristote, ont été publ. à Venise 1534 et 1536.

7° Jean-le-Jeûneur, de Cappadoce, d'une naissance obscure, fut, à cause de sa piété nomn* patr. de Constantinople, 582-595. Comme plusieurs de ses prédécesseurs, il prit le titre de patriarche écuménique, que le pape Grégoire essaya en vain de lui disputer, comme un empiétement sur sa propre souveraineté. Grégoire contesta même la sincérité de son ascétisme. Des règles sur la confession, des instructions pour les confesseurs se trouvent dans les plus anciennes liturgies grecques et portent son nom, mais il n'est pas prouvé qu'il en soit l'auteur.

8o Jean Maron, v. Maronites.

9° Jean, patr. de Thessalonique, prit au 8*e siècle, la défense du culte des images, dans uu écrit qui fut approuvé par le conc. de Nicée 787.

10° Jean de Dara, près Nisibis, év. jacobite de la lr® moitié du 9<ue siècle. On a de lui m traité sur la Résurrection des âmes, un sur la Hiérarchie céleste et ecclésiastique, et un sur le Sacerdoce. Il en a écrit aussi un sur l'Ame.

llo Jean-le-Diacre, moine du Mont Cassin. 9™ siècle, auteur d'une Vie de Grégoire I*r.

Ho Jean, Saxon d'origine. Alfred d'Angleterre le fit venir du continent vers 834 et lui confia la direction de l'école d'Oxford. Devenu abbé du monastère d'Ethelingay, il fut tué à coups de stylet dans une émeute de moines, 895; comme il était très fort il se défendit longtemps. Quelques-uns, à cause de certaines analogies de nom, le confondent à, tort avec Jean Scot Erigène, v. Scot.

13° lean de Gortz, né à Vendière, près Pont-à-Mousson, fut amené à l'étude de l'Écriture sainte par Berner, diacre de Toul. Frappé du manque de discipline dans tous les couvents, même chez les recluses, il se lia avec quelques amis pour vivre saintement. L'év. Adalbert de Mayence mit à leur disposition le monastère délabré de Gortz, dont Jean accepta la direction, avec son ami l'abbé Einald. Vers la fin de sa vie Othon-le-Grand l'envoya en mission auprès d'Ab-derrahman III à Cordoue. Sa vie a été écrite par

14° Jean de Saint-Arnulph, son ami et contemporain, f 984, et compte parmi les documents historiques les plus importants du 10me

siècle.

15o J. Scot, ou Y Écossais, envoyé par Adalbert de Brème à Goltschalk, roi des Vendes, pour l'aider à évangéliser son peuple. Nommé ev. de Magnopolis (Mecklembourg), il fut tué dans un soulèvement des païens contre le christianisme, 1066.

16o et 17o, deux moines dominicains, l'un et l'autre connus sous le nom de Jean-le-Teutoni-que; le premier, célèbre par son éloquence, fut nommé év. de Pressbourg, mais préférant la vie contemplative, il rentra dans son ordre, dont il devint général, et f 1254. Le second, surnommé le Lecteur, écrivit la Somme des confesseurs, pleine de problèmes et de cas de conscience avec leurs solutions, et f 1314.

18o Jean X, de Constantinople. Opposé à l'union des deux Églises proposée au conc. de Lyon 1274, il fut emprisonné par ordre de Michel Paléologue, mais ayant changé d'opinion il fut élu patriarche de Constantinople l'année suivante. L'irritation des orthodoxes le décida à donner sa démission et il se retira dans un couvent. Il f exilé en Bithynie 1298.

19o Jean de Paris, savant dominicain du 13m* siècle, dialecticien si habile qu'on l'avait surnommé pungens-asinum (pique-âne); prof, de théol. à Paris. Dans le conflit entre Philippe-le-Bel et Boniface, il prit parti pour le roi. Il tenait à la doctrine de l'impanation et la défendit avec tant de vigueur qu'une commission d'évêques lui interdit de prêcher et d'enseigner. Le pape attira la cause à lui, mais Jean + 1306 avant que la sentence eût été prononcée On a de lui un traité sur le Pouvoir royal et le pouvoir papal, et un autre sur le Mode d'existence du corps de Christ.

20o Jean Petit, ou Le petit, né à Hesdin, moine franciscain, D' en théol. à Paris, était aux gages de Jean-sans-Peur, duc de Bourgogne, et s'est fait une triste célébrité en cherchant à justifier l'assassinat du duc d'Orléans 1408, sous prétexte que c'est une chose bonne et honorable de tuer un traître et un tyran. Cette doctrine, réfutée par Gerson, fut condamnée comme hérétique par le conc. de Constance, + 1411.

21o Jean de Dieu, v. Frères llo.

22o Jean d'Avila, né entre 1494 et 1500 à Almodovar del Campo, archevêché de Tolède, f 1569. Il étudia d'abord le droit à Salamanque, mais n'y trouvant point de plaisir, il se tourna vers la théol. et l'étudia à Alcala sous Dominique a Soto. Il aurait désiré se rendre aux Indes comme missionnaire, mais son archev. aima mieux en faire un prédicateur itinérant dans son pays. Il se fit une grande réputation et s'attira même les tracasseries du saint-office. Il refusa toutes les offres qui lui furent faites. Malade à Montella pendant 20 ans, il réunit autour de lui de nombreux disciples et leur dicta 2 gros volumes de Lettres.

23o Jean de la Croix, fondateur de l'ordre des carmes déchaussés. Son vrai nom est Jean de Yepes. Né 1542 à Ontiveros, près d'Avila, Cas-tille, il entra à 21 ans, sous le nom de Jean de Saint-Mathias, dans le couvent carmélite de Medina del Campo. Passionné d'ascétisme, il accueillit avec ferveur les appels de sainte Thérèse pour une réforme de l'ordre. La nouvelle congrég. se forma en 1564 et le couvent fut transféré 1570 à Manzera. Il en fut nommé abbé sous le nom de Jean de la Croix. Les succès qu'il obtint lui valurent, avec les colères de son ordre, un long temps de prison, et même, après la f de Thérèse 1582, des persécutions de la part de ceux qui l'avaient suivi dans sa réforme, mais qui la trouvaient trop sévère. Il déposa ses dignités et se retira au couvent d'Ubeda, où il f 1591 par suite de mauvais traitements. Ses écrits unissent l'ardeur du mystique à la dureté du fanatique.

24o Jean, surnommé le Constant, le premier des princes qui signèrent la protestation de Spire 1529, et par conséquent le premier des protestants. Électeur de Saxe 1525-1532; fils d'Ernest, il naquit à Meissen 1468, fit de bonnes études à l'univ. de Grimma, et vint, après la mort de son père, 1486, à la cour de son fr. Frédéric III, dit le Sage, qui l'associa au gouvernement et finit par le nommer co-régent. Il épousa 1500 la fille de Magnus, duc de Mecklembourg. Très bon catholique et fréquentant assidûment l'égl. de Tous les Saints à Wittenberg, il se trouva assister le 31 oct. 1517 à la scène de l'affichage des 95 thèses de Luther, et il se prononça ouvertement pour le moine réformateur. En 4520 il demande que le traité de Luther sur la Foi et les œuvres lui soit dédié. En 1521 il se charge des frais du voyage de Luther à Worms, et le couvre de sa protection, même mis au ban de l'empire, en dépit des menaces de Henri VIII, de Charles-Quint et d'Adrien V. Il prit part à la guerre des paysans, dont Munzer aurait voulu faire une guerre religieuse, et joignant ses forces à celles des ducs Georges et Henri et du landgrave Philippe, il défit les rebelles à Mulhausen le 15 mai 1525. Son fr. le sage Frédéric étant mort dix jours auparavant dans la paix de Dieu, il lui succéda sur le trône électoral, ayant devant lui une ligue d'ennemis aussi puissants que peu scrupuleux. Les impériaux veulent obtenir la mise en vigueur de l'édit de Worms contre Luther et convoquent une diète à Spire pour le 25 juin 1526. Jean et sa suite s'y présentent sans crainte, ayant sur la manche droite de leur habit les lettres brodées: V. D. M. I. M. ( Verbtim Do-mini Manet In jEtemum, 1 Pier. 1, 25). Il revendique avec autant de courage que de modestie ses droits de prince et ses devoirs de chrétien, et ne laisse pas même soupçonner qu'il puisse y être porté atteinte. Au bout d'un mois la diète se sépare sans avoir rien fait, renvoyant à un concile les questions religieuses. En attendant, il réorganise les églises, prie Mélanchthon de composer un manuel des principaux articles de la foi (Libellus visitatorius), et recommande au clergé rassemblé de ne prêcher que la Parole de Dieu. A la diète de Spire de 1529 il est menacé dans sa vie. Ses amis veulent l'empêcher d'y aller. Il y va accompagné seulement de deux pasteurs, sa suite ne devant le rejoindre que plus tard. Le vote de la diète supprime la liberté de conscience. Jean répond au président qui l'interpelle: Dans les affaires de conscience il n'y a pas de majorité. Et le 19 avril 1529 la protestation est signée; le nom de Jean figure en tête. L'année suivante il est à Augsbourg, et c'est lui qui obtient, malgré l'empereur, que la Confession soit lue en allemand et non en latin. Six semaines après paraît la Réfutation, et l'empereur exige que les princes la signent. « Il y va de votre électorat et de votre vie, » dit-il à Jean. Le 19 nov. tous ceux qui rejettent l'autorité du pape sont mis au ban de l'empire. Mais Jean n'a pas fléchi. La ligue de Smalcalde se forme; l'approche du Turc, les intrigues de François I«r, empêchent Charles de pousser les choses trop loin. La paix, ou trêve de Nuremberg 1532, est une solution qui plafl mieux à Jean que la guerre civile ou qu'une alliance avec l'Angleterre, f 16 août 1532 àSchweinitz, assisté de Luther et de Mélanchthon. Charles même le pleura. Jean, marié 2 fois, eut 2 fils et 2 filles.

25° Jean, Joachim II, margrave de Ktistrin, ne 3 août 1513, f 13 janv. 1571; second fils de Joachim 1er, électeur de Brandebourg, de la famille des Hohenzollern, il reçut de bonne heure de sa mère Elisabeth des impressions religieuses évangéliques, en dépit de son père qui destinait ses deux fils à la prêtrise, et qui obligea sa femm? à prendre la fuite lorsqu'il eut connaissance d** ses sentiments. — Le père mort, Jean rejoignit sa mère et se rendit auprès de Luther, à Wittenberg, pour examiner ce qu'il y avait à faire pour propager la réforme. Il parcourut son pays sans rien imposer, se bornant à appeler des prédicateurs évangéliques là où l'on en désirait, et à réprimer les abus les plus criants. Admirablement secondé par sa femme, Catherine d) Brunswick -Wolfenbuttel, il donna touj. dans son château l'exemple d'une vie simple et religieuse, s'occupa consciencieusement de la bonne administration de son pays, et voyageant incognito pour connaître les vrais besoins de se> sujets. Sa charité lui valut le surnom de Pèr«4 des pauvres, tandis que l'excellence de son jugement en matière religieuse et politique le fit appeler l'Œil et le Conseil de l'Allemagne. En 1548 il se prononça nettement contre l'Intérim d'Augsbourg, il n'eut pas à s'en repentir, car tous les petits États de l'Allemagne furent divisés, sauf le sien. Il publia contre l'Intérim un « Petit catéchisme, » parodie satirique du catéchisme de Luther. A l'avènement de Maximi-lien IL 1564, il lui conseilla hardiment de ne pas déguiser ses opinions, mais de se prononcer pour le protestantisme; l'empereur ne prit que des demi-mesures, qui restèrent sans effet. Apprenant tout à coup la mort de son frère Joachim, 3 janv. 1591, Jean en fut si boule versé qu'il mourut dix jours après. Le l«r févr., au milieu d'un grand concours de peuple, il fut enseveli dans l'égl. de Ktistrin, dans un tombeau qu'il s'était fait construire 16 ans auparavant, avec cette inscription: Solus spes mea Christus.

— Quant aux Jean qui ne figurent pas sur cette liste, on les trouvera sous d'autres lettres: v. Bockhold, Buridan, Capistran, Chrysostome. Damascène, Duns Scot, Goch, Maronites, Monte-Corvino, Népomucène, Prêtre-Jean, Salisbury. Sinaïte, Torquemada, Wesel, Wessel, etc.

— Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, appelés aussi de Rhodes, ou de Malte, et plu* généralement frères hospitaliers. Des marchands d'Amalfi avaient fondé à Jérus. en 1048 on couvent avec un hôpital pour la protection des pèlerins. Lorsque cette ville eut été prise par les croisés 1099, Gérard Tom, ou Tonque, d* Martigues, Provence, organisa cette fondation en ordre religieux, avec l'autorisation de Pascal II, et Raymond-Dupuy, en 1118, comprenant qu'il ne suffisait pas d'héberger, de nourrir et de soigner les pèlerins, mais qu'il fallait encore les défendre contre les infidèles, modifia la constitution première de l'association et en fit un ordre à la fois religieux et militaire 1121, qu'il divisa en 3 classes, les chevaliers, les religieux et les frères servants. Les richesses abondèrent bientôt, et avec elles les rivalités avec l'ordre analogue des Templiers, dont les débris en 1311 se fondirent dans celui de Saint-Jean. Après la prise de Jérus. par Saladin, le siège de l'ordre fut transféré, à Ptolémaïs 1188, puis en Chypre 1291, et enfin dans l'île de Rhodes quand elle fut tombée en leur pouvoir 1309. Ils s'y établirent, en dépit des assauts répétés des Turcs, jusqu'à ce que, après une défense mémorable, Soliman II s'en empara, grâce à la trahison du chancelier de l'ordre, André d'Ama-ral, 1522. Charles-Quint leur céda l'île de Malte, 1530, à condition,qu'ils feraient aux Turcs une guerre sans trêve, ni relâche. Ils se partageaient en 7 (ou 8) langues, ou provinces, dont chacune avait ses chefs, et à leur téte un grand-maître élu par un chapitre formé des délégués des provinces. Leur costume se composait d'une tunique rouge; en temps de paix d'un manteau noir, avec une croix blanche triple à 8 extrémités. Cet ordre a beaucoup perdu de son importance depuis son expulsion de Rhodes. Henri VIII d'Angleterre fut le premier à le supprimer. Lorsque Bonaparte s'empara de Malte 1798, à l'aide d'intelligences entretenues avec le dernier grand-maître, Hompesch, ce dernier donna sa démission, et fut remplacé par Paul Ier, emp. de Russie. L'ordre n'exista dès lors plus guère que de nom. Le siège en fut transporté à Catane, puis à Ferrare, enfin à Rome 1831. L'Autriche en fit un titre honorifique. La Prusse en 1810 en fit une décoration pour la noblesse, mais peu à peu, et surtout depuis 1853, ces nouveaux chevaliers de Saint-Jean se sont donné pour tâche de rappeler la première origine de l'ordre en fondant et en entretenant des établissements de bienfaisance. Ils possèdent plusieurs maisons importantes, entre autres à Beyrout et à Jérusalem.

— Les Jobannites ou disciples de Saint-Jean, nom donné aux partisans de Jean Chrysostome, qui, regardant sa destitution comme injuste, refusèrent de reconnaître son successeur comme patriarche, et se séparèrent de l'Église. Soutenus par Rome, ils trouvèrent de nombreux appuis, et il en résulta des conflits et des luttes souvent sanglantes, jusqu'au moment où Attius fit inscrire le nom de Chrysostome dans le livre des prières publiques et où son corps fut.

par ordre de Théodose II, solennellement ramené et inhumé à Constantinople.

— Feux de la Saint-Jean, ou Ardons. Plusieurs contrées ont conservé l'usage d'allumer des feux en plein air le 24 juin au soir, et de danser autour. Quoiqu'on essaie de justifier cet usage par des passages bibliques, tels que Jean 1, 8. il est évident qu'il vient du paganisme et qu'il se rattache au solstice d'été, ainsi que les rameaux que l'on suspend ailleurs le même jour aux portes des maisons. — On donne aussi le nom de bénédiction de Saint-Jean au vin que l'on boit en souvenir de cet évangé-liste, le jour de sa fête, à cause de la légende d'après laquelle il aurait avalé une coupe de vin empoisonné, sans qu'elle lui fît aucun mal. pour prouver à un païen la divinité de son Évangile.

JEANNE lo papesse 855-857. Son pontificat se place entre ceux de Léon IV et de Benoît III. D'après la tradition une fille de Mayence, enlevée par son amant, se serait rendue d'abord à Athènes, habillée en homme et sous le nom de Jean l'Anglais; elle se serait mise en rapport avec tous les savants grecs et aurait fait de grands progrès. De là elle serait venue à Rome où elle aurait enseigné les belles-lettres. Elle dut à ses talents la couronne pontificale, mais au bout de deux ans elle accoucha dans une procession, près du Colisée, et mourut. Si ce pontificat d'une femme est une fable, comme a tâché de le prouver le protestant Blondel (De Johannâ papessâ), du moins c'est un fait qui a été affirmé sans contradiction pendant 5 siècles par des historiens cathol. romains (Anasthase. Biogr, des év. de Rome), par des secrétaires de papes, des bibliothécaires du Vatican, des pénitentiaires, des évêques, des papes et des saints. Cette histoire est confirmée par des monuments, une statue à Rome; par de nombreux écrivains, et par la curieuse cérémonie de la constatation du sexe des papes à leur avènement. On objecte d'un autre côté que la première mention explicite et authentique de ce fait, date de la fin du 13™® siècle; Martinus Po-lonius, confesseur de la cour papale, est la plus ancienne autorité que l'on puisse invoquer, et il est de plus de 200 ans postérieur à l'histoire elle-même. Le fait que Jean, 1277, prend le titre de Jean XXI, tandis que sans la papesse il aurait dû s'appeler Jean XX, est allégué en faveur de la tradition, mais il y a eu dans l'intervalle tant de papes insignifiants, qu'on est mai placé pour insister sur l'exactitude de leur succession, notamment en ce qui concerne Jean VI, VII, XVII, XVIII et XIX. On a cherché à expliquer l'origine de cette histoire, les uns par la faiblesse que montra Jean VIII vis-à-vis de Photius, faiblesse qui l'aurait fait traiter de femme; les autres par la succession de femmes impures qui gouvernèrent l'Égl. au 10me siècle, et dont l'une, concubine de Jean XII, aurait porté le nom de Jeanne. Quoiqu'il en soit, cette histoire a donné lieu à des discussions fort animées; Spannheim et Des Marets ont essayé de réfuter Blondel.

2° Jeanne d'Arc, née 1410 à Domrémy, Meuse, sur la frontière de l'Alsace et de la Lorraine; iille d'un paysan nommé Jacques d'Arc, elle garda les troupeaux jusqu'à 18 ans. Mais déjà dès sa 13^ année elle était travaillée par des visions et des révélations, et elle finit par se persuader qu'elle était appelée à délivrer la France, conquise et opprimée par les Anglais. Les difficultés ne lui manquèrent pas, non plus que les moqueries. Mais elle n'y lit aucune attention. Les voix lui donnaient pour tâche de délivrer Orléans et de faire sacrer le roi à Reims. A travers mille dangers elle arrive à Chinon, Touraine, auprès de Charles VII, le reconnaît au milieu de ses courtisans, rappelle Dauphin parce qu'il n'est pas encore sacré, et finit par obtenir de lui, non sans peine, le commandement d'une petite troupe. Au bout de 8 jours le siège d'Orléans est levé, 5 mai 1429. Jeanne poursuit les Anglais et bat Talbot à Patay. Elle annonce la reddition de Troyes et arrive enfin sous les murs de Reims. Charles y entre le 16 juillet et il est sacré le 17. Jeanne, que l'armée appelle la Vierge, ou la Pucelle d'Orléans, se tient près du roi, debout pendant la cérémonie, son étendard à la main, estimant que « ayant été à la peine, il avait bien le droit d'être à l'honneur. » Son œuvre était achevée; elle témoigna le désir de retourner à sa famille et à ses « brebis et bétail, » mais l'armée la supplia de rester. Elle céda, pour son malheur, fut blessée au siège ùe Paris, faite prisonnière en défendant Compiègne, vendue aux Anglais par Jean de Luxembourg pour 10,000 livres, et livrée à l'Inquisition comme suspecte de magie et de sortilège. Enfermée dans les cachots de Rouen, elle vit son procès instruit par l'év. Cauchon, de Beauvais, et fut brûlée vive le 31 mai 1431. Charles VII ne fit rien pour la sauver; ce n'est que 25 ans plus tard qu'il s'occupa de réhabiliter sa mémoire: il anoblit sa famille, en stipulant que la noblesse s'y transmettrait par les femmes, et il exempta de toutes tailles à perpétuité Creux et Domrémy où elle était née. — v. Lebrun des Charmettes, Jules Quicherat, Hase, Strass, etc. Schiller, Soumet, Delavigne, Southey, Porchat. Les faits de son histoire étant attestés, non seulement par des historiens, ses contemporains, mais encore et surtout par son procès, Jeanne apparaît comme une héroïne et comme une prophétesse; elle rappelle la Débora de TA. T. Elle n'a pas été canonisée et ne le sera que lorsque l'Égl. rom. saura renier les erreurs de son histoire.

3° Jeanne-la-Folle, fille de Ferdinand-le-Catholique et d'Isabelle; née 1480, mariée 1496 à Philippe, archiduc d'Autriche, mère de Char-les-Quint. Atteinte au cœur par l'abandon de son mari, elle tomba dans un sombre désespoir qui la fit passer pour folle. On l'enferma comme telle et elle resta 50 ans enfermée, jusqu'à sa f 1555. En 1504 elle avait succédé à sa mère comme reine de Castille, et quoique sous tutelle, son nom figura toujours sur les actes publics à côté de celui du régent, soit son père, soit son fils depuis 1516. Sa folie est restée un mystère historique, et l'on penche à croire auj. que la question religieuse n'a pas été étrangère à l'interdit que l'on a fait peser sur elle.

3° Jeanne d'Albret, la mère d'Henri IV, naquit à Paule 7 janv. 1528. Elle était fille d'Henri II, roi de Navarre, et de Marguerite d'Orléans, sœur de François Elle reçut une excellente éducation, digne de ses hautes qualités intellectuelles et morales, et entretint avec Joachim du Bellay une correspondance poétique où l'avantage lui resta souvent. Après un mariage politique avec le duc de Clèves, 15 juillet 1540, qui même fut rompu avant d'avoir été consommé, elle épousa le 20 oct. 1548 Antoine de Bourbon, duc de Vendôme, dont elle eut 5 enfants, Henri, Louis-Charles, qui moururent jeunes; Henri, comte de Viane, qui devint Henri IV; une fille qui mourut au bout de 15 jours, et une autre fille, Catherine, dont Catherine de Médicis voulut être la marraine. Jeanne, élevée par sa mère dans les principes de la Réforme, leur demeura fidèle jusqu'à la fin. C'est le seul reproche que lui adressent ses biographes catholiques, Davila, le P. Anselme, et même Maimbourg, qui l'appelle l'Héroïne de son temps. D'Aubigné la définit t Royne n'ayant de femme que le sexe; l'âme entière aux choses viriles, l'esprit puissant aux grandes affaires, le cœur invincible aux adversités. » Elle devança son temps, eut l'idée claire de ce qui était bien et le voulut avec une persévérance que jamais rien ne put ébranler. Elle avait le génie d'une saine politique, et lorsque tous autour d'elle se laissaient prendre aux avances hypocrites de Charles IX et de sa mère, seule elle ne fut pas leur dupe un instant. Devenue reine de Navarre en 1555 par la mort de son père, elle partagea le pouvoir jusqu'en 1562 avec son faible mari, et devenue libre par sa mort, elle gouverna avec autant de sagesse que de fermeté, laissa la Réforme s'établir autour d'elle, sans qu'elle fût compromise par un aucun acte d'intolérance, et fut également aimée et respectée de tous ses sujets, catholiques et protestants. Mais la cour, le clergé, le pape, l'Espagne, lui suscitèrent par leurs intrigues et leurs perfidies des dangers et des difficultés de tous genres et finirent par fomenter une révolte dans ses États. Elle dut s'enfuir à La Rochelle et s'unit plus étroitement aux huguenots. Elle présenta à l'armée son fils et le jeune prince de Condé, obtint de nombreux succès militaires, grâce à La Noue, Mont-gommery et René de Rohan; rentra en possession de son royaume, réorganisa l'administration, les écoles, le collège d'Orthez; fit traduire en basque et imprimer 1571 le N. T., le catéchisme et la liturgie de Genève, créa un conseil ecclés., et pourvut à ce qu'il y eût touj. à Or-thez des prof, distingués et « 50 escoliers en théologie. » Après la paix de Saint-Germain, elle consentit, mais bien à contre-cœur, au mariage de son fils avec Marguerite de Valois, sœur du roi. Le pape s'y opposant, Catherine leva les difficultés en fabriquant une fausse dispense, et Jeanne partit de Blois le 8 mai pour se rendre à Paris où les noces devaient être célébrées le l«r juin. Mais à peine arrivée à l'hôtel de l'ancien év. de Chartres, Guillart, devenu protestant, elle se sentit, le mercredi soir 4 juin, saisie d'une fièvre ardente, et + le lundi 9 juin 1572 après de cruelles souffrances admirablement supportées. Tout porte à croire qu'elle fut empoisonnée, et l'on ajoute que ce .fut au moyen de gants et de collets parfumés qu'elle avait achetés chez le florentin René, que le peuple appelait l'empoisonneur de la reine. Jeanne n'avait que 44 ans. Son corps, après l'autopsie fut d'abord déposé à Vendôme, puis, selon son désir, transporté à Lescure et inhumé auprès de ses parents.

JERÉMIE H né 1536, élu patr. de Constantinople après la démission de Métrophane 1572, puis renversé 1579 par son prédécesseur qui revint sur sa démission. Réélu après la mort de celui-ci, 1580, il fut calomnié auprès du sultan et relégué dans l'Ile de Rhodes 1584. Le sultan nomma successivement à sa place Pacôme et Théolipte. A son retour Jérémie s'arrangea à prix d'argent avec ses deux concurrents, et comme le patrimoine de l'Égl. était totalement épuisé, il entreprit en 1589 un voyage en Moldavie et en Russie pour se procurer des ressources. A la demande du grand-duc Boris Go-dunow il remit au métropolitain de Kiew le patriarcat de l'Égl. grecque en Russie et consomma ainsi de fait la séparation des deux Églises. On sait que les théol. de Tubingue, Crusius, André*, etc., essayèrent d'entrer en correspondance avec l'Égl. grecque, et lui envoyèrent des traductions de la Conf. d'Augsbourg et du Com-pendium dogmatique de Heerbrand. Jérémie fit bon accueil à leur délégué Gerlach, 1574, mais ces démarches n'eurent pas de suites, f 1594.

JÉRÔME 1® Sophronius-Eusèbe, père de l'Égl., canonisé. Sa biographie se résume en 3 mots: longue vie, grands travaux, petites passions. Né 331 à Stridon, près d'Aquilée, Pannonie, il étudia à Rome les lettres et la philos., voyagea pour s'instruire; visita les Gaules: Trêves où il fut converti; Aquilée, où il se mit à l'hébreu; Antioche, où il entendit Apollinaire et où il fut ordonné prêtre. A cette époque, dit-il, les prêtres laissant là les évangiles et les prophètes, lisaient des comédies. Lui-même fl aimait beaucoup les auteurs païens. A la suite d'un rêve mémorable il jura de renoncer à toute lecture profane. Rufin lui reprocha plus tard de s'être parjuré, mais il faut prendre l'esprit du serinent. D'Antioche il vint à Constantinople, sous Grég. de Naziance, puis à Rome où Damase le fit son secrétaire, 382, et où il acquit une grande influence dans la noblesse, en même temps qu'il se fit nombre d'ennemis par son ascétisme. Il fut l'apologiste convaincu du monachisme. Après la mort de Damase son protecteur, il retourna en Orient avec deux saintes femmes, Paula et sa fille Eustochie. Il se fixa à Bethléhem, d'abord dans une grotte que l'on montre encore, et y composa plusieurs de ses ouvrages. C'est là en particulier qu'il fit cette importante revision de la Bible, de l'ancienne Itala qui par ses soins est devenue la Vulgate, pour laquelle il s'aida des hexaples d'Origènes, de sa connaissance des langues originales et de mss. qu'il avait lus ou copiés. On l'accusa de falsifications parce qu'il avait rétabli le texte original. Il traduisit ensuite la Bible d'après l'hébreu; on cria au blasphème de ce qu'il prétendait mieux comprendre la Bible que les Septante et même que les apôtres. Il s'était formé à Jérusalem une société de savants; Jean de Jérusalem, Rufin, Jérôme en faisaient partie, tous trois origénistes. Quelques occidentaux voyant les écrits d'Origène aussi répandus en parlèrent comme d'une chose fâcheuse. Jérôme, très jaloux de sa réputation d'orthodoxie, se joignit à eux, ainsi qu'à Épiphanes qui condamna ces écrits, en 394. L'amitié d'enfance de Jérôme et de Rufin fut donc brisée. Il y eut réconciliation en 396, mais Rufin ayant traduit à Rome le livre des Principes d'Origène, le plus attaqué, et lui ayant donné pour préface les anciennes louanges de Jérôme, celui-ci, blessé du procédé, rompit entièrement. Il se brouillèrent et écrivirent l'un contre l'autre, dans un style et avec une passion qui ne font pas honneur au caractère de Jérôme. Anastase, plus tard év. de Rome, blâma Rufin. Ses dernières années furent troublées par ces luttes personnelles, et aussi par des incursions de barbares, qui brûlèrent les couvents des environs de Bethléhem et contraignirent Jér. à chercher son salut dans la fuite. Il y revint cependant, et f

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420, âgé de près de 90 ans. Il a émis peu d'idées neuves, mais il a exercé une bonne et durable influence sur l'Égl. par sa science, son travail et sa piété. Sans parler même de sa Vulgate qui, du 5"»« au 16me siècle, a été la lumière brillant au milieu des ténèbres, il a servi l'Église par ses Comment, sur l'A. et le N. T., et il a posé les bases de l'archéologie et de la patristique. Dans ses autres écrits il défend la virginité de Marie, le jeûne, le culte des martyrs et celui des reliques, ce qui l'a fait juger un peu sévèrement par Luther. Ses œuvres ont été publ. par Érasme, Bâle 1516-1520; par Martia-nay, Paris 1693-1706; Vallarsi et Maffei, 1734-1740. — Quant aux ordres qui se rattachent à saint Jérôme, v. Hiéronymites.

2° Jérôme de Prague, né à Prague vers 1360 ou 1370, d'une famille distinguée dont le nom était Faulfisch. Il étudia à Prague, Heidelberg, Cologne, Paris et Oxford; il rapporta de cette dernière ville les idées et quelques livres de Wiclef. Bachelier et maître en théol. il fut appelé 1410 pour l'organisation de l'univ. deCra-covie; il passa ensuite en Hongrie pour un but semblable, et n'échappa qu'à grand'peine aux persécutions du clergé. De retour à Prague il s'attacha à Huss, qu'il aida dans ses travaux, en accentuant encore davantage son opposition aux erreurs de Rome. Quand Huss eut été fait prisonnier, et malgré ses lettres qui l'exhortaient à n'en rien faire, Jérôme partit pour Constance, obtint du concile un sauf-conduit conditionnel (avril 1415), et fut conduit enchaîné chez les franciscains. Gerson, qui l'avait connu à Paris, le traita durement. Un docteur de Heidelberg lui reprocha d'avoir cherché à expliquer la Trinité par l'image de l'eau, de la neige et de la glace. Crnellement lié dans une tour, sans pouvoir lever la tête; nourri de pain et d'eau, dangereusement malade, ébranlé par le supplice de son maître et ami, il se laissa entraîner le 19 juill. à signer une rétractation, mais il regretta aussitôt cet acte de faiblesse et le désavoua publiquement. Son procès fut donc repris, et après un semblant de jugement, après 340 jours de prison, il fut condamné au feu et subit le martyre avec le courage d'un héros chrétien, 30 mai 1416. Il a laissé quelques lettres qui ont été publ. avec celles de Huss.

JÉRUSALEM lo II est admis que Jacques et Siméon, frères du Seigneur, furent les premiers év. de Jérusalem. Leurs successeurs sont peu connus, la ville sainte ayant d'ailleurs bientôt perdu elle-même toute influence ecclésiastique, depuis que la primitive Égl. eut émigré à Pella. Marc fut le premier év. de l'Aelia restaurée, mais l'importance politique de Césarée en lit longtemps la métropole religieuse. C'est à Nicée seulement que l'on donna le titre honorifique de patriarche à l'év. de Jérus. en raison du rôle historique de son église, et c'est le couc. de Chalcédoine 451 qui érigea réellement ce siège épiscopal en patriarchat, ainsi que celui d'Antioche, mais il n'exerça jamais une influence bien marquée. Il prit part aux essais d'union tentés à Florence 1438, mais, comme Alexandrie et Antioche, il s'en retira en 1443r et se montra dès lors toujours, notamment an conc. de 1672, hostile à tout rapprochement avec FOccident. Ses patriarches ont longtemps* résidé à Constantinople; c'est depuis 1845 seulement qu'ils sont revenus à Jérusalem. Pendant les croisades il y eut là un patriarchat latin, 1099-1187, qui, après avoir vainement tente d'être indépendant, dut se soumettre au jou^r de Rome. Une fois la ville prise par Saladin el l'Église dispersée et détruite, les fonctions cessèrent, mais le titre resta quelque temps encore; en 1316 on trouve à Paris comme légat du pape un Pierre, patr. de Jérusalem.

2° Conciles de Jérusalem. Outre celui de Act. 15., et celui de 1672 qui repoussa les ouvertures libérales de Cyrille Lucar, il faut mentionner, quoique n'ayant pas exercé une grande influence, les conc. de 335 et 349 dans les luttes ariennes; celui de 415 contre les pélagiens; celui de 536 contre les sévériens; 634 contre les dyothélètes, et 730 contre les iconoclastes.

3° Les Amis de Jérusalem sont une secte wurtembergeoise, qui a pour principal chef, ou évêque, Hoffmann, q. v. Ils attendent à Jafla et au pied du Carmel le retour du Seigneur, el s'occupent d'ici là à défricher des terres, à les cultiver et à réaliser au milieu des populations musulmanes l'idéal d'une vie, d'une famille et d'une société chrétiennes.

4<> L'évêché protestant de Jérusalem est dû a l'initiative du roi de Prusse Fréd.-Guillaunie IV. qui, en 1841 (2 juin) chargea son conseiller in -time, Bunsen, de s'entendre avec le gouverne -ment anglais pour voir comment il serait possible que les pays protestants de l'Europe et les diverses égl. protestantes fussent officiellement représentées et protégées en Orient. Les négo -dations eurent lieu entre Bunsen d'une part, t-t de l'autre William Howley, archev.de Cantorbéry et l'év. Bloomfield de Londres. Elles furent conduites avec une grande largeur de cœur et d'esprit, et aboutirent à la création d'un èvè-ché, dont le titulaire, sur la proposition des prélats anglais eux-mêmes, serait nommé alternativement par les couronnes de Prusse et d'Angleterre. Le bill présenté à la Chambre des Lords le 30 août, reçut la sanction royale le 5 oct. La dotation de l'évêché fut fixée a 30,000 livres sterling (revenu annuel 1200 L.>; le roi de Prusse en fournit la moitié sur les fonds dont il dispose; l'Angleterre fournit l'autre moitié par une collecte faite en octobre dans toutes les églises. Le premier év., désigné par la reine, fut un juif converti, le Dr Micha'él-Salomon Alexandre, originaire de Posen, sujet prussien, maître à rétablissement de Palestine-Place, et prof, d'hébreu à King's College. Il prêta serinent d'obéissance à la reine et à l'ar-chev. le dim. 7 nov., et s'embarqua le 6 déc. 1841 sur le vapeur la Dévastation, mis à sa disposition par le gouvernement. Il était accompagné de: sa femme, 6 enfants, le Rev. Williams, le Rev. Éwald, originaire de Bamberg, et sa famille; enfin le docteur M. Gowan et son aide. Ils arrivèrent le 21 janvier, et furent bien reçus des autorités turques, ainsi que des év. grecs et arméniens. Le diocèse était immense, comprenant la Syrie, la Chaldée, l'Égypte et l'Abyssinie: mais la paroisse était bien petite, 40 auditeurs, 25 communiants. L'organisation de l'évêché était telle que, sans sacrifier leur individualité religieuse, toutes les autres églises, et en particulier les chrétiens de toutes dénominations pouvaient se joindre à elle, vivre dans sa communion et travailler avec elle. La célébration du culte en allemand par des pasteurs allemands se faisait avec la liturgie allemande et les cantiques allemands. Les candidats allemands étaient consacrés par Tévêque: les catéchumènes, confirmés par lui, sans que cela entraînât leur adhésion au système épisco-pal.On a pu dire que c'était là une chose entièrement nouvelle dans les annales du protestantisme, et si quelques-uns s'en effarouchèrent, d'autres, en plus grand nombre, s'en réjouirent (VerHuell, Gasparin, A. de Mestral, etc.). L'év. Alexandre étant f 1845, le roi de Prusse à qui appartenait la nomination du 2m* èvêque, nomma Samuel Gobât q. v. Le fut le Dr Barclay; depuis sa f 1882, le siège est resté vacant, à la suite de tiraillements survenus. Le nombre des protestants a beaucoup augmenté; il s'élève à plus de mille, sans compter les annexes de Bethléem, Sichem. Nazareth, etc. Il y a aussi plusieurs établissements d'éducation ou de charité, orphelinats, hôpitaux, écoles, bazars, qui relèvent de la mission et font honorer le protestantisme.

5° Jean-Fréd.-Guill. Jérusalem, né à Osna-briick 22 nov. 1709, étudia à Leipzig et à Leyde la philos, et la théol., fut quelque temps pasteur à La Haye, pois précepteur à Gottingue, enfin en 1742 prédicateur de la cour de Brunswick et précepteur du jeune duc. De nombreux bénéfices le récompensèrent de ses peines, et il en fit un bon usage. 11 donna le plan du Collège carolinien et fonda dans son abbaye de Riddags-hausen un séminaire, f 1780. Il a écrit des Lettres sur; la religion de Moïse, des Consid. sur les vérités de la religion» et des sermons, très estimés. La mort de son fils, qui se tua à Wetzlar 1773 dans un accès de mélancolie, a fourni plusieurs circonstances au Werther de Goethe, dont il est le type.

JÉSUATES, ordre religieux laïque, institué à Sienne 1363 par les nobles Jean Colombino et François Mino, pour prendre soin des pauvres et des malades et leur distribuer des remèdes qu'ils fabriquaient eux-mêmes. Urbain VI les autorisa 1367, en leur imposant la règle, un peu modifiée, de saint Benoit, et en les obligeant à résider. L'ordre ne s'étendit guère au delà de l'Italie, et quoique depuis 1606 il se recrutât aussi parmi les prêtres, il déclina rapidement et 'fut supprimé 1668. Son nom lui venait de ce que ses fondateurs invoquaient l'exemple et le nom de Jésus.

JÉSUITES, ordre fondé en 1534 par Ignace de Loyola, et approuvé 1540 par Paul III. Il porte aussi le nom de Compagnie ou Société de Jésus. S'il eut dès l'abord plusieurs objets en vue, les circonstances l'amenèrent presque aussitôt après sa fondation à entrer en lice avec la Réforme, et il se jeta dans la mêlée avec une hardiesse qui ne reculait devant rien et avec un succès qui dépassa même ses espérances. Mais il alla plus loin encore, et il exerça sur sa propre Église une influence telle que les destinées de l'une et de l'autre ne tardèrent pas à s'unir presque indissolublement. Ils avaient débuté modestement à Venise, 1537, en soignant des malades et en prêchant; quelques-uns entrèrent dans les ordres et, sous la direction de Loyola, devinrent prédicateurs itinérants. En 1538, i\ l'instigation de Cnraffa, le fondateur des théa-tins, ils vinrent à Rome, où Paul III les reconnut 1540, mais en fixant leur nombre à 60, limitation qui fut supprimée en 1543. Ignace en fut le premier général, et il développa rapidement la constitution et l'activité de l'ordre, à l'intérieur et au dehors. Les statuts sont calculés pour faire de chacun l'instrument absolument passif de ses supérieurs. Non seulement Ignace a fait de l'obéissance aveugle l'objet d'un vœu spécial, mais encore il travaille à l'inculquer, i\ la faire devenir une habitude, une seconde nature, au moyen d'exercices destinés à assouplir, à dompter ou à briser la volonté. Ces exercices sont une combinaison de méditations relig. graduées, de macérations et de pénitences ascétiques, dont le résultat final exalte l'imagination et ne lui laisse plus entrevoir que le triomphe de l'Église et la gloire de l'ordre. Un noviciat de 2 ans est d'abord imposé à celui qui veut devenir jésuite; après cela il passe élève, ou écolier, et il entre dans un collège où, pendant 6 à 8 ans, on le dresse à une étude méthodique de la philos, et de la théologie, et ce n'est qu'après une nouvelle année d'épreuves qu'il reçoit la consécration et qu'il devient définitivement membre de l'ordre, profès et coadjuteur spirituel. On donne le nom de coadjuteurs temporels à des frères laïques, désignés et choisis pour les travaux manuels et pour des occupations moins relevées. Au-dessus de tous règne le général, nommé à vie, dont le pouvoir n'est limité que par les constitutions et qui ne peut être déposé que par l'assemblée ou congrégation générale. Il a auprès de lui 5 assistants, qui forment son conseil, et un admoniteur, chargé de le surveiller. Puis viennent, dans chaque pays, des provinciaux, chargés chacun d'une province; les supérieurs des maisons de profès. les recteurs des collèges, et les supérieurs et professeurs des résidences. Tous sont élus pour 3 ans. La théorie de l'obéissance passive, empêchant le développement de la conscience individuelle, a été, avec le pélagianisme qui est à la base de tout le système, la grande inspiratrice de la morale jésuitique, dont le nom seul est déjà synonyme d'hypocrisie, de mensonge et de corruption. Aucun membre de l'ordre n'ayant le droit de rien publier sans l'autorisation de ses supérieurs, l'ordre entier est responsable pour les écrits de tous ses membres, et l'on a vu le curieux spectacle d'une approbation donnée en même temps et par les mêmes hommes à des enseignements et à des maximes morales contradictoires: les uns sévères, à l'usage des personnes qui prennent la religion au sérieux; les autres, et c'est le plus grand nombre, d'une indulgence effrayante pour tous les vices, pour tous les crimes commis ou à commettre. Le pro-babilisme, entrevu déjà par Porée 1415, mais repoussé par le conc. de Constance, est le droit de faire taire sa conscience et d'en appeler à des autorités, puis de choisir entre deux autorités, toutes deux respectables, celle que l'on préfère, même celle que, en conscience, on regarde comme la moins sûre. Il y a des nuances à observer; ainsi l'on distinguera: l'aequi-probabi-lisme, c.-à-d. le cas où les deux opinions sont également probables; le probabiliorisme, qui recommande davantage l'opinion la plus probable; le tutiorisme, qui regarde comme plus sûre la décision qui a le plus de chances d'écarter le danger du péché. La morale des jésuites se caractérise encore par la direction de l'intention; on peut voler, calomnier, tuer, pourvu qu'en le faisant on éloigne l'intention coupable, et qu'on s'en tienne à l'intention permise, p. ex. au désir d'être riche pour pouvoir faire du bien, au désir de sauver son honneur et peut-être sa vie. Enfin les réservations mentales, autre système ingénieux inventé par les jésuites, consistent dans le droit d'affirmer une chose fausse, même par serment, pourvu que dans son for intérieur on en pense une autre qui infirme ou modifie celle que l'on paraît affirmer. Pascal, dans ses Provinciales, a flagellé ces turpitudes, mais comme elles sont très commodes, elles ont toujours flatté les masses et pris le dessus de manière à devenir une menace pour les sociétés, et dans tous tes temps les gouvernements ont compris que ce n'était pas avec de simples discours qu'on pouvait espérer de vaincre cette influence malfaisante et qu'en luttant contre elle au nom seulement de la liberté et de la vérité, on se résignerait à n'être que des dupes et des victimes. Quand Ignace mourut, l'ordre comptait déjà 13 provinces, quoique l'Allemagne et la France lui fussent encore à peu près fermés. François Xavier avait commencé sa mission dans les Indes. Mais déjà la méfiance était éveillée. Certaines maximes politiques des jésuites, leur intervention indiscrète dans les affaires des États, leur main entrevue dans plusieurs complots, leur esprit de corps, leur ambition dévorante, leur habileté dans l'art de se procurer de l'argent, leurs agissements, leurs succès même dont ils faisaient un trop grand étalage, tout concourut à soulever contre eux l'opinion, et la république de Venise fut la première à les bannir de son territoire 1606. Mais Henri IV venait de leur accorder une existence légale, pour s'assurer l'appui de l'Espagne et de Rome; on sait comment il en fut récompensé. La guerre de Trente ans leur livra la Bohême et la Silésie. Bientôt ils gagnèrent la Belgique et la Pologne, et y écrasèrent le protestantisme par la violence. La Suède seule leur ferma résolument ses portes 1593. Élisabeth les avait bannis d'Angleterre, ainsi que tous les ordres religieux 1585. Quelques années de triomphe sous Marie Stuart ne servirent qu'à les envelopper d'une manière plus éclatante dans la chute du trône. S'ils ne répugnaient pas aux moyens violents, ils savaient aussi mettre en usage des procédés plus intellectuels, et leurs écoles, leurs collèges, habilement dirigés par des hommes souvent supérieurs, leur assurèrent une clientèle et une influence considérables; des familles protestantes même, et des familles princières, leur confièrent leurs enfants, et s'aperçurent trop tard que si on leur apprenait bien le latin et la discipline, on faussait à la fois leur conscience et leur jugement. Bientôt ils se crurent les maîtres et la prospérité les perdit. Des hommes puissants et ambitieux, comme un Claude Aquaviva, ne se contentèrent plus d'être au service du pape; ils rêvèrent de faire des papes leurs instruments et de se les soumettre. Leurs immenses richesses, leurs factoreries, leurs comptoirs, leurs couvents faisaient d'eux une puissance véritable, en même temps qu'ils favorisaient dans leur sein le luxe et la mollesse. Longtemps ils n'eurent d'adversaires sérieux que les dominicains, et le public ne vit là qu'une querelle de sectes rivales. Mais quand ils s'en prirent à la doctrine, à la mémoire et aux disciples de Jansé-nius, ils rencontrèrent devant eux des hommes de science et de foi qui les démasquèrent et les perdirent dans l'opinion. Les Provinciales leur portèrent un coup fatal et décisif, dont ils ne se sont jamais relevés moralement. De leur côté (es capucins et les franciscains, jaloux de leurs succès dans les missions lointaines, dénoncèrent leur méthode d'accommodation et les supercheries dont ils usaient pour faciliter la conversion des païens au christianisme. Mais ce qui acheva de les perdre, ce fut leur conduite politique. En 1750 ils refusèrent de reconnaître l'autorité du Portugal dans le Paraguay, et le marquis de Pombal obtint de Benoît XIV un décret qui ordonnait la réforme de l'ordre, et lorsqu'en 1759 ils furent compromis dans une tentative d'assassinat contre Joseph I<", ils furent embarqués en masse, conduits à Rome, bannis du pays et leurs biens confisqués. La banqueroute frauduleuse du p. La Valette, préfet apostolique de la Martinique, et les débats qui eurent lieu à cette occasion au parlement, firent supprimer l'ordre en France en 1764. En Espagne ils furent compromis dans une conspiration contre le ministre Aranda, arrêtés et expédiés à Rome avec défense, sous peine de mort, de rentrer dans le royaume. De même à Naples, en Sicile et ailleurs. En vain les gouvernements demandèrent au général, le p. Ricci, quelques changements dans les constitutions de l'ordre; Ricci répondit fièrement: Sint ut sunt, aut non sint. Clément XIII essaya de les défendre dans sa bulle Apostolicum 1765, mais à sa mort Clément XIV fut élu, et il publia le 19 août 1773 sa bulle Dominus ac redemptor noster, qui supprimait les jésuites et fermait leurs collèges. Tous les États catholiques s'empressèrent de publier cette bulle. La schismatique Russie seule offrit un asile aux jésuites, qui purent élire un nouveau générai en 1801, et l'hérétique Frédéric II laissa subsister leurs collèges en Silésie. La réaction qui suivit la révolution de 1789 et qui fut encouragée par l'affaiblissement de l'empire, permit à Pie VII de rétablir les jésuites le 7 août 1814 par sa bulle Sollkitudo omnium, et la Restauration crut trouver en eux des aides pour ramener le calme au milieu des populations ébranlées par tant de guerres et tant de principes nouveaux. Ils rentrèrent donc en France sous le nom de Pères de la foi et commencèrent modestement, comme auxiliaires des évêques et éducateurs de la jeunesse; mais leurs progrès furent si rapides et ils se multiplièrent tellement, que le comte de Montlosier se fit l'organe du mécontentement général; plusieurs ordonnances royales diminuèrent leur sphère d'action, leurs collèges furent fermés 1828, et la révolution de juillet les bannit de nouveau. En 1848 ils revinrent, et l'empire les combla de faveurs en feignant de les ignorer. Ils finirent par dominer le clergé lui-même et prirent une position si aggressive que le gouvernement fut amené à prendre contre leur enseignement des mesures répressives, 1879. La Belgique de même. La Suisse les avait expulsés déjà en 1847 après la guerre du Sonderbund. L'Italie, qui leur fut longtemps favorable, comprit sous Victor-Em-manuel le danger qu'il y avait à les laisser s'emparer de toutes les positions. En Portugal et en Espagne ils arrivèrent avec Don Miguel et Ferdinand VII et repartirent avec eux. Le pape seul leur resta fidèle, si bien enlacé par eux qu'il ne peut rien faire sans leur consentement. Paul III leur avait donné une église qui prit d'eux le nom d'il Gesu; Pie VII et Léon XII appelèrent à Rome leur général, après la mort de Brzozowski, 1820, qui n'avait pas été autorisé à quitter la Russie, et leur confièrent le Collège romain en 1824 et la Propagande en 1826. Lors de sa suppression par Benoît XIV, l'ordre comptait 22,589 membres; il en compte auj. 7,956, soit 3,389 prêtres, 1837 novices et 2730 affiliés, ces chiffres, le dernier surtout, ne pouvant jamais être fixés bien exactement, beaucoup de prêtres et de hïques appartenant à l'ordre en secret, mais non ostensiblement. Nous n'avons rien dit de leur enseignement au point de vue des mœurs; la question est trop délicate; on sait seulement que plusieurs de leurs manuels ont dû être supprimés par les gouvernements, et que celui du p. Gury en particulier renferme des questions et des réponses qui ne peuvent pas être reproduites, même en latin. Les jésuites ont produit outre leurs célèbres casuistes, Mariana, Sanchez, Escobar; des missionnaires zélés, comme Xavier; des pédagogues habiles; des savants, comme Bolland, Sirmond, Porée; des prédicateurs éloquents, comme Bourdaloue.Mais, chose curieuse, ils n'ont jamais réussi dans leurs entreprises politiques, et c'est lorsque leur influence semblait le mieux assise que leurs projets échouaient contre le réveil des souverains ou contre le bon sens des peuples. — V. leur Histoire, par Crétineau-Joly, Paris 1846; par Wolf, Zurich 1789; Spittler, 1817; Huber, trad. par Marchand; Lutteroth, Guettée, Michelet et Quinet, Schulte, Spuller, etc.

JÉSUITESSES. Deux ordres de ce nom. lo l'ufl, fondé par Isabelle de Rosella, de Barcelone. Elle obtint de Paul V un décret qui lui permit de se placer, elle et quelques dames respectables, sous le patronage d'Ignace et d'agir sous sa direction. Mais Ignace réussit à s'en débarrasser et obtint à son tour la bulle Licet de-bitum 1549, qui garantissait^ son ordre qu'il ne serait jamais incommodé par l'accession de religieuses. — 2o Deux Anglaises, Warda et Tuittia, fondèrent en 4534 un ordre de religieuses, ii l'instar de celui de Loyola, faisant vœu de chasteté et d'obéissance, mais sans clôture et préchant dans les églises. Urbain VIII les supprima 1631.

JÉSUS-CHRIST lo (Ordres de), v. Christ, Eudistes, Porte-Glaives, Frères. 2° Enfant-Jésus (Congrégation des filles de 1'), fondée 1673 à Rome par Anna Moroni de Lucques, pour renseignement gratuit des jeunes filles pauvres. Robe brune avec capuchon blanc.

JETZER, Jean, garçon tailleur de Zurzach, frère laïque chez les dominicains de Berne. Intelligence bornée, que ses chefs eurent l'idée d'exploiter dans leurs luttes avec les franciscains sur la conception de la Vierge 1507. Ils lui apparurent déguisés tantôt en vierge Marie, tantôt en saints, et lui révélèrent que Marie avait été conçue avec le péché originel. Mais quand ils lui imprimèrent les saints stigmates, pour prouver au peuple la réalité de ses visions, il expliqua le mystère à l'autorité, et cette circonstance ajouta au discrédit que les ordres religieux avaient déjà mérité, et favorisa pour sa part le mouvement vers la Réforme.

JEUDI-SAINT, le jeudi de la semaine sainte, dans lequel on admet généralement que le Sauveur célébra la Cène avec ses disciples. Les Allemands l'appellent le Jeudi vert (Grtiner Donnerstag), soit à cause des herbes que l'on mangeait à Pâques, soit à cause du chapitre qu'on lisait en ce jour, Ps. 23, 2., qui parle de frais pâturages.

JEUNE, lo chez les Hébreux, v. Dict. de la Bible. — 2o Chez les musulmans, v. Ramadan. — 3o Chez les chrétiens. Comme expression naturelle de la douleur et de la repentance, le Jeûne a conservé dans l'Égl. son ancienne signification, mais sous l'influence du montanisme et du monachisme, l'idée première s'est altérée, et l'on en est venu à y voir un moyen d'obtenir de Dieu le pardon des péchés. L'Égl. romaine ra peu à peu compris dans ce sens et en a fait une règle dans des cas déterminés. Elle distingue le Jeûne naturel, la privation absolue de toute nourriture avant le sacrement, et pour le prêtre avant la célébration de la messe; et le Jeûne ecclésiastique, ou abstinence relative dans la quantité et la nature des aliments. Il est parfait, quand il exclut certains aliments et ne permet qu'un repas par jour; il est particulier, un demi-jeûne, quand il ne permet qu'un repas avec viande par jour et une collation du soir. Le jeûne parfait est commandé depuis le mercredi des cendres jusqu'au vendredi saint, et aux vigiles des grandes fêtes, comme préparation aux solennités qui s'approchent. Des dispenses peuvent être accordées par l'autorité compétente, évêque ou supérieur, pour des cas d'impossibilité matérielle, de maladie, d'indigence. Elles sont souvent promulguées d'une manière générale, sous certaines réserves, financières ou autres, et le relâchement en est venu au point que, mêm* en carême, le jeûne est réduit aux modestes proportions de la simple abstinence. L'Égl. grecque a également conservé l'obligation du jeûne, mais avec des prescriptions un peu différentes; elle l'observe, et rigoureusement, les mercredis et les vendredis toute l'année; puis 40 jours avant Pâques, 40 avant Nolsl, 15 avant l'Assomption, et 25 après Pentecôte en souvenir du jeûne des apôtres Act. 13, 3. L'Égl. luthérienne n'a aucune prescription sur ce sujet. L'Égl. réformée a quelquefois décrété des jeûnes à l'occasion de grandes calamités, telles que la Saint-Barthélémy, et ces jeûnes se sont reproduits d'année en année et sont devenus une tradition. Des prédications extraordinaires accompagnent souvent les jeûnes officiels et sont presque toujours confiées à des prédicateurs d'élite. Les év. catholiques ont l'habitude d'annoncer chaque année le jeûne dans un mandement spécial, et de faire connaître à cette occasion les adoucissements apportés à la règle du jeûne et les conditions auxquelles on peut se les procurer.

JEWELL, John, év. d > Salisbury. Né 28 mai 1522 à Buden, Devonshire, il fit de 1535-1544 d'excellentes études à Oxford et fut amené à la Réforme par la lecture des écrits de Luther, puis par les leçons de Pierre Martyr 1549. Il visita Francfort, Strasbourg et Zurich, et rentra en Angleterre au moment oti Élisabeth rétablissait les institutions ecclésiastiques d'Édouard. Il fut nommé év. de Salisbury en 1560. Ses scrupules à l'endroit des chanoines et du rituel se dissipa peu à peu. Son attachement à la Réforme tenait à la conviction qu'il avait qu'elle était un simple retour à l'Égl. primitive, "dont l'Égl. cathol. n'était qu'une déformation non justifiée. Il a exposé ce point de vue dans ses écrits contre Cole et Harding et dans sa célèbre Apologie de l'Égl. anglicane, f 21 sept. 1571.

JOACHIM lo D'après le protévangile de Jacques, le mari d'Anne, le père de la vierge Marie, aurait porté ce nom. Aux deux époux, longtemps sans enfant, un ange aurait annoncé la naissance de leur fille. Jules II a fixé sa fête au 10 mars; Pie V la supprima, Grégoire XV la rétablit.

2o Abbé de Flora, Calabre. Né 1130 à Célico, près Cosenza, il renonça à la vie mondaine de la cour de Roger de Sicile, fit un voyage en Terre sainte, se fit ensuite moine et devint prieur et abbé du couvent cistercien de Cambuc-cino. Désireux de suivre ses études, il demanda d'être déchargé de ses fonctions, et se retira dans les solitudes de Flora. Là de nombreux disciples se groupèrent autour de lui, et formèrent sous sa direction la congrég. des Floraciens qui, outre le couvent de Flora ou Floris dont il fut le premier abbé, fonda encore quelques autres monastères. Les statuts de l'ordre furent approuvés par Célestin III, H96. Après deux siècles de prospérité, l'ordre déclina entre les mains d'abbés mondains et tomba tout à fait en 1470; la plupart de ses couvents reprirent la régie deCiteaux. Joachim + 1202, et la légende dit que des miracles se firent sur son tombeau. C'était un homme de mœurs pures et d'un grand esprit. Il passait pour avoir eu des révélations et exerça une grande influence sur le développement moral et littér. de son siècle. Dans son exposition des prophète* et des psaumes, il annonce des temps nouveaux où le sacerdoce des prêtres indignes cessera et sera remplacé par une sacrificature spirituelle. Quelquefois il prophétise lui-même sans prétendre expliquer les prophéties de la Bible. Il distingue dans l'hist. de l'Égl. 3 époques: 1° Selon la chair depuis la création jusqu'à Christ. 2° Entre la chair et l'esprit; depuis Christ jusqu'au moment présent. 3° Selon l'esprit; depuis lui jusqu'à la fin du monde, qui, selon lui, ne devait pas être éloignée. Sa doctrine, que ses disciples désignèrent sous le nom d'Évangile éternel. fut acceptée avec enthousiasme par les franciscains rigides et par les fraticelles. Un franciscain nommé Gerhardt publia 1254 une Introd. à l'Évangile éternel, qui fut poursuivie comme hérétique, et condamnée à Rome et à Paris. Le conc. de Lalran 1215 avait aussi condamné la doctrine de Joachim sur la Trinité comme hérétique, mais une bulle d'Honorius III le réhabilita et ses ouvrages continuent d'être considérés comme orthodoxes. Parmi ses écrits imprimés, on remarque: Liber Concordiœ N. et V. Test. Venise 1519. Expositio Apoealypsis. Comment. in Jeremiam, 1525. in Jesaiam 1517.

3° Joachim I®»1, électeur de Brandebourg 1499-1535, reconnaissait les désordres de l'Église, mais il voulait une réforme par l'Église. Il se montra toujours l'ennemi résolu de Luther, et le rendit responsable même de la guerre des paysans. Il fonda l'univ. de Francfort pour combattre celle de Wittenberg. A Worms et à Augsbourg il fut des plus ardents adversaires de la Réformation, et la violence de ses discours mécontenta jusqu'à l'emp. et aux princes catholiques. Sa femme, ayant communié sous les deux espèces en 1528, ne put se soustraire que par la fuite à ses mauvais traitements. Sur son lit de inort il recommanda à ses fils de protéger la vieille Église.

4° Joachim II, fils du précédent, régna 1535-1571. 11 connaissait Luther depuis 1519, et sous l'influence de sa mère il avait adopté les idées évangéliques. Il introduisit la Réforme dans ses États, avec mesure et sans violence. La Cène y fut célébrée pour la première fois sous les deux espèces en 1539. La même année fut élaborée la Constit. ecclés., qui parut en 1542.

JOCH, Jean-Georges, docteur en théol.; né 1685 à Rotenbourg, il étudia à Iéna, où il professa quelque temps, et fut nommé 1709 surintendant et conseiller du gymnase à Dortmund. Accusé de piétisme, il eut beaucoup à souffrir de la part de ses collègues. Plus tard il fut appelé comme doyen à Erfurt, et en 1726 comme prof, à Wittenberg où sa thèse: Die Heilsame Verzweiflung, souleva contre lui de nouvelles attaques.

JON (DU), v. Junius.

JONAS lo év. d'Orléans 821. Il écrivit à la demande de Louis le-Déb. un traité sur le Culte des images, contre Claude de Turin qui s'en faisait le défenseur. On a encore de lui 3 livres sur l'Institution laïque, où il combat les œuvres extérieures, et un travail sur l'Institution royale, sous forme d'une Lettre à Pépin d'Aquitaine, contenant d'excellents préceptes de gouvernement, livre qui, sous l'influence de Jonas, fut inséré dans les actes du Conc. de Paris 829. f 844.

2° Jonas, le Juste (Jodocus), né à Nordhau-sen 5 juin 1493, étudia à Erfurt, et après avoir pris ses grades de Dr utriusque juru, il passa à l'étude de la théologie. Il s'unit intimement à Luther, l'accompagna à Worms, et fut son collaborateur le plus zélé à Wittenberg comme doyen et comme prof, de théol.; il prit part à la traduction de la Bible et à la rédaction du catéchisme, donna son avis sur les ordonnances ecclésiastiques et se rendit avec Luther à Marbourg. Surtout il traduisit les écrits de Luther et concourut par là à leur diffusion. Appelé en 1541 à Halle comme surintendant, il en fut chassé par la guerre de Smalcalde, fut nommé en 1551 prédicateur de la cour à Cobourg, et enfin 1553 surintendant à Eisfeld, où il f 1555. — Son fils, portant les mêmes noms, fut compromis dans les affaires de Grumbach et exécuté à Copenhague en 1557.

3° Louis Jonas, D' théol., un des disciples les plus distingués de Schleier mâcher. Né 11 févr. 1797 à Neustadt sur l'Oder, il entra en 1812 au collège de Joachimsthal, prit part comme cadet à la guerre contre Napoléon, devint pasteur de Schwerinsbourg, épousa la fille du comte de Schwerin, et fut en 1834 nommé pasteur à Berlin où il ne tarda pas à occuper une position considérable. Il publia les mss. laissés par Schleiermacher; ses Discours et dissertations, sa Dialectique, sa Morale et ses Lettres. Il fonda en 1840 avec quelques amis la Revue mensuelle de l'Égl. unie, organe des tendances ecclés. libérales en Prusse, qui fut remplacée plus tard par la Kirchenzeitung protestante. Ses talents oratoires, non moins que son caractère élevé lui ont fait une réputation méritée, f 19 sept. 1859.

JONATHAN -ben-Uziel, un des auteurs du Thargum. Ce savant rabbin vivait au 1er 0u au 2®* siècle de l'ère chrétienne. Les Talmudistes le font vivre 5 siècles avant Christ, et lui attribuent la trad. des Prophètes en chaldéen, ou araméen.

JORIS, Jean-David, surnommé VErzketzer, ou archi-hérétique. Né en Flandre 1501 ou 1502, il eut une jeunesse agitée; son éducation fat irrégulière. Il s'adonna d'abord à la peinture sur verre, se maria en 1524 et s'établit à Delft. Il poussa jusqu'au fanatisme son zèle pour la réforme, insulta en 1528 une procession, et fut pour ce fait fouetté et banni. Il se joignit aux anabaptistes et jouit d'une grande influence parmi eux. En 1536 il devint chef de secte, se vanta de visions et de révélations, se distingua par son fanatisme, son orgueil et sa lubricité; dans de nombreux écrits il se donna à ses disciples comme l'Emmanuel annoncé par les prophètes, et prêcha un anabaptisme mystique antitrinitaire, rejetant le mariage et justifiant les plus honteux désordres de la chair. Une persécution terrible éclata enfin contre les jo-ristes en Hollande, en Frise et dans le Hols-tein. Lui-même réussit touj. à se soustraire aux recherches, ne cessant de correspondre avec les autorités évangéliques, Lasko, Luther, le landgrave de Hesse, mais repoussé même de ceux qui se rapprochaient le plus de ses idées, tels que Menno. De 1528 à 1544 il mena une vie des plus misérables. Enfin, ayant reçu des secours de ses sectateurs, il se fixa à Bâle sous le nom de Jean de Brugge 1544, s'y maria avec une personne d'une famille considérable et, inconnu même de ses disciples, il entretint une correspondance active avec plusieurs d'entre eux, ainsi qu'avec d'autres exaltés, comme Schwenk-feld et Castellion. Le secret ne fut découvert qu'après sa f 1556, par la trahison d'un serviteur, et par l'aveu de son gendre Blesdyk, dont il s'était séparé depuis longtemps. Son corps, qui avait eu les honneurs d'une sépulture dans l'église de Saint-Léonard fut exhumé et brûlé 1559. Il a laissé 250 écrits et plus de 1000 Lettres. Son principal ouvrage est le Wunderbuch, paru de 1540-1544.

JORNANDÈS, historien goth du 6™ siècle, secrétaire, ou notaire du roi des Alains. se convertit au christianisme, se retira dans un couvent, et devint abbé ou év. de Ravenne. Il travailla avec zèle et succès à la conversion des Goths. f 555. On a de lui deux ouvrages qui sont plutôt des compilations, et dont la valeur historique peut être contestée: l'un c'est une Hist. des Goths, publ. Paris 1558 par Guill. Fournier; tr. en fr. par Maupertuisl703 et par Savagner 1842. L'autre est une Hist. du monde depuis son origine, publ. par Rhenanus, Bâle 1531. Sa tendance est anti-arienne; en politique il cherche à concilier les Goths et les Romains.

JOSEPH H, né 13 mars 1741, fils de François I, de Lorraine, et de Marie-Thérèse, élevé dans les principes de la philos, française. Il fut élu roi des Romains en 1764, et emp. d'Allemagne en 1765 à la mort de son père, mais ne gouverna réellement qu'après la mort de sa mère, 1780. Il prit alors résolument les rênes en mains, et suffisamment instruit par les expériences qu'il avait faites à la cour de Marie-Thérèse, il entreprit les réformes qui lui parurent nécessaires pour brider la hiérarchie et assurer le développement intellectuel et religieux de son peuple. Il fit du gouvernement de l'Égl. un ministère de l'État, introduisit Ieplacet, défendit les appels à Rome, supprima 700 couvents, dont les revenus furent affectés à l'instruction publique; plaça les ordres religieux sous la surveillance des évêques, et créa, en remplacement des séminaires épiscopaux, des séminaires généraux destinés à former des ecclésiastiques, mais entretenus et dirigés par l'État. Le 30 juin 1781 parut l'Édit de tolérance qui garantissait aux protestants comme aux juifs, sous quelques réserves, la pleine liberté de conscience et la jouissance de tous leurs droits civils; l'usage des cloches leur était interdit. Les brefs lancés par le pape contre ces me sures furent inflexiblement repoussés, et lorsque Pie VI se rendit en personne à Vienne 1782, il fut reçu poliment, mais ne put rien obtenir. Cependant quelques-unes de ces réformes ayant touché aux privilèges de la noblesse, d'autres à l'indépendance des provinces, des soulèvements eurent lieu parmi le peuple, notamment en Hongrie et en Belgique, avec l'appui du clergé, et Joseph se vit contraint de retirer, d'abord en Hongrie, puis dans les Pays-Bas, en Tyrol, en Bohême, ses mesures réformatrices, à l'exception de l'Acte de tolérance. Il fit la guerre aux Turcs, de concert avec Catherine de Russie, mais vil ses États envahis par le grand-visir Youssouf-pacha; heureusement le feld-maréchal Laudon reprit l'avantage et força même Belgrade à capituler. La ré vol. française, si menaçante pour sa sœur Marie-Antoinette lui causa une profonde tristesse, f 1790. C'est en 1867 seulement que l'emp. d'Autriche a repris les traditions de vrai libéralisme que Joseph lui avait léguées, et qui ont reçu de lui le nom de joséphisme, ou josé-phinisme; elles se résument dans l'instruction largement répandue parmi le peuple et dans la surveillance des agissements du clergé par l'État, sans intervention dans les affaires religieuses proprement dites.

JOSEPH, François Leclerc du Tremblay, né 1577 à Paris, servit d'abord dans l'armée, puis se fit capucin 1599. Il fit plusieurs missions en province et parvint aux premiers emplois de son ordre. Richelieu le remarqua, lui confia quelques missions délicates dans lesquelles il réussit, et finit par se l'attacher comme son unique confident. Il l'emmena à La Rochelle, le fit entrer au Conseil d'État, lui confia les missions les plus épineuses, et voulut, m$is en vain, le faire nommer cardinal, ce qui n'empêcha pas le peuple de donner au P. Joseph le surnom d'Émi-nence grise. Richelieu le soigna à ses derniers moments, et lorsqu'il f 1638, il s'écria: J'ai perdu mon bras droit.

JOSÈPHE Flavius, historien juif. Né l'an 37 de l'ère chrét., il appartenait à la race sacerdotale par son père Mathias, à la famille des Ma-chabées par sa mère. D'abord pharisien, puis sadducéen, esséen et l'hôte du solitaire Banus, il finit par revenir au parti des pharisiens. Un voyage à Rome lui procura la faveur de l'impér. Poppée. Lors de la dernière guerre des juifs, il fut nommé général pour la Galilée et chargé d'en défendre les forteresses et les montagnes. II prétendit, en dépit des zélotes et de Jean de Gis-cala, tout gagner en gagnant du temps, et dès qu'il eut été vaincu, à Jotapat qui avait résisté à 45 jours de siège, il se rendit aux Romains, alléguant une révélation divine, et Vespasien le combla de faveurs. Il lui fit épouser une fille de Césarée, prisonnière comme lui, mais qui ne tarda pas à l'abandonner. Josèphe épousa ensuite une fille d'Alexandrie, puis une juive de Crète, qui fut la meilleure de ses femmes. Il avait annoncé à Vespasien son élévation à l'empire et s'était ainsi acquis son amitié; il l'accompagna à Rome et s'éteignit en bonne vieillesse vers 103, longtemps après que les défenseurs de son pays furent morts sous la hache ou sur la paille des prisons. Josèphe est une ingrate figure, toute faite d'égoïsme et de dissimulation; il n'aima que lui-même et les Romains, et ii trahit son pays, quoiqu'il n'ait jamais renié ni sa foi, ni sa nationalité. Ses idées religieuses manquent de profondeur et laissent percer un rationalisme sans base ni conviction. Ses ouvrages n2en sont pas moins une source précieuse pour l'hist. et l'archéologie juives. Ses Antiquités judaïques et son Hist. de la Guerre des Juifs, écrites dans un but apologétique et pour donner aux Romains une idée favorable de sa nation, sont des documents importants, et lui ont mérité de la part de saint Jérôme le surnom de Tite-Live de la Grèce. Sa Vie écrite par lui-même, a moins de valeur et n'est en quelque sorte que son apologie personnelle. Ses deux livres Contre Apion, ennemi des juifs, sont une espèce de traité de controverse. Quelques auteurs lui attribuent enfin le 4m« Livre des Ma-chabées et l'Éloge des sept Machabées martyrs. Édition de Haverkamp. Trad. franç. par Arnaud d'Andilly, Amsterdam 1681, et par Glaire, Paris 1846. On regarde généralement comme interpolé le célèbre passage sur Christ. Antiq. XVIII, 3. 3.

JOSÉPHITES, congrégation de prêtres, fondée 1641 par le chirurgien Jaq. Cretenet de Lyon, président d'une société de bienfaisance. Ils s'interdisaient les missions et se consacraient surtout à l'enseignement. On donne aussi ce nom en France aux fr. de Saint-Joseph, qui se proposent le même objet. Plusieurs congrégations de femmes se sont également aussi fondées en France sous ce vocable: lo à Bordeaux 1638 par Marie Delpech de l'Étang, pour l'éducation d'orphelines; 2o au Puy 1650 par le jésuite Médaille, pour le soin des malades; 3° à Clugny 1819, par la mère Javouhey, pour le soin des malades et l'enseignement (travaillent surtout dans la Guinée supérieure); 4° à Lyon 1821, par Ch&tillon, pour la visite des prisonnières; 5o à Albi 1833, par la m. Vialar, pour les malades et l'enseignement.

JOVIEN, Flavius Claudius, né en Pannonie, fut choisi par l'armée comme empereur après la mort de Julien. Il dut conclure la paix avec Sa-por, roi des Perses, et subit des conditions désastreuses, pour sauver les débris d'une armée compromise par son prédécesseur. Ami des chrétiens, il sut les protéger sans persécuter les païens; il accorda à tous la liberté de penser, ce dont le païen Themistius le loua, et s'il y eut quelques vexations, elles furent le fait d'autorités subalternes. Il mourut au bout de 8 mois, comme il allait se faire couronner à Constantinople.

JOVINIEN, Milanais, moine à Rome. Faisant consister toute la vie chrétienne dans une communion réelle avec Dieu, il rejetait comme superflues ou nuisibles les prescriptions de détail de l'Égl., sur les jeûnes, les pénitences, le céli-libat, blâmait la soif du martyre. Condamné par Siricius au conc. de Rome 390, il s'enfuit à Milan, mais là aussi fut excommunié et banni, f 412. Augustin, Ambroise et Jérôme ont écrit contre lui, non sans quelque passion.

JUBILÉS. Les païens avaient leurs Jeux séculaires, et dans tous les temps les hommes ont aimé à solenniser le retour de dates rappelant des événements importants, utiles à méditer. La loi de Moïse avait institué un jubilé après 7 semaines d'années, c.-à-d. tous les 50 ans, Lév. 25, 8-20, et notre siècle célèbre le centenaire de ses grands hommes. La chose est en elle-même si naturelle qu'elle ne peut être critiquée qu'au point de vue de l'abus qu'on en ferait, ou du caractère religieux qu'on voudrait lui imposer. Le nom de Jubilé vient de l'hébreu Jo-bel, son d'une trompette, parce que c'est au son de cet instrument qu'était annoncée, le soir du jour des expiations, l'approche de l'année jubilaire. L'Égl. cathol. a eu l'idée d'instituer aussi des fêtes de ce genre. Boniface VIII, le premier, a décrété 12 févr. 1300 que cette année-là il y aurait remise plénière des péchés à tous ceux qui visiteraient 15 fois l'égl. de Saint-Pierre et 15 fois celle de Saint-Paul à Rome. La fête devait avoir lieu tous les 100 ans. Clément VI décida qu'elle aurait lieu tous les 50 ans, Urbain VI tous les 33, Paul II tous les 25 ans. L'affluence des pèlerins et le bénéfice qu'en retirait le trésor papal contribuèrent à multiplier le nombre des jubilés. L'impossibilité pour un grand nombre de fidèles d'assister à ces solennités fit que le privilège des indulgences fut accordé à toutes les églises de la chrétienté, et dans des conditions semblables, l'année qui suit l'année jubilaire. Le dernier grand jubilé a eu lieu en 1850, mais il a été peu fréquenté. Les égl. protestantes célèbrent aussi le Jubilé de la Réforme, mais sans y attacher aucune idée de contrainte ou de vertu particulière.

JUDJ5, ou Jud, Léon, fils d'un prêtre; né 1482 à Rappoldsweil. Son vrai nom était Kel-ler. Il étudia à Schlettstadt sous Craton, à Bâle sous Wyttenbach; fut successivement diacre à Bâle, curé à Saint-Pilt, Alsace; remplaça son ami Zwingle à Einsiedeln 1518, et fut nommé pasteur à Zurich 1523. Il travailla, de concert avec Zwingle, à introduire dans cette ville la Héforme, à laquelle il avait été gagné par les écrits de Luther et d'Érasme, et se maria en 1523 avec une ancienne religieuse, + 1542, II a publié en lat. et en allem. un Catéchisme, et trad. quelques-uns des ouvrages de Luther et de Zwingle. Il a publ. aussi une trad. latine de la Bible (édition de Froschau 1524-1529) que son ami Bibliander a achevée.

JUDÉO-CHRÉTIENS, les chrétiens convertis d'entre les juifs, avec une tendance à conserver leurs anciennes habitudes et traditions relig., par opposition aux chrétiens convertis d'entre les gentils, ou pagano-chrétiens, que les premiers auraient d'abord voulu soumettre k leurs observances. Le livre des Actes a conservé le récit des luttes engagées à ce snjet.

JUDEX MATOLEUS, né 1528 à Dippolds-walde, district de Meissen, prédicateur à l'égl. d'Ulric, Magdebourg, et un des collaborateurs de Flacius aux Centuries.

JUDICA, nom ecclésiastiq. du dimanche qui précède les Rameaux, cf. Ps. 43, 1.

JUGEMENTS, v. Juridiction, et Visites. -Jugement de Dieu. Lorsque pour la constatation de certains délits la preuve venait à manquer, ou était insuffisante, les anciens ont eu longtemps coutume, non de faire profiter l'accusé du défaut de preuves, mais d'en appeler à l'intervention directe de Dieu. Les Hébreux connaissaient déjà le Jugement de Dieu, mais pour un seul cas, Nomb. 5, 12-31, et il était pour ainsi dire inoffensif, car il fallait un miracle pour punir. L'Église du moyen âge l'a généralisé et l'a rendu cruel, car il faut un miracle pour sauver. C'est ainsi qu'il y a eu le sort, le duel juridique, l'épreuve par le feu. par l'eau, etc. Quelquefois on faisait communier le prévenu dans l'idée que, s'il était coupable, la sainte hostie lui serait fatale. En cas de meurtre on mettait ceux qui étaient soupçonnés en contact avec le cadavre, dans la pensée que celui-ci ferait un mouvement ou une démonstration quelconque à l'approche de l'assassin.

JUIF ERRANT. Dans la légende occidentale, c'est un cordonnier de Jérusalem, nommé Ahasvérus, qui -refusa à Jésus portant sa croix, la permission de s'asseoir un instant devant sa boutique, et le chassa en l'injuriant et le frappant. Jésus le condamna alors à marcher toujours jusqu'au jugement dernier, sans pouvoir jamais ni s'arrêter, ni mourir. Dans la légende orientale, moins dure, c'est Cartaphile, le portier du palais de Pilate; il donna à Jésus un coup de poing, mais se convertit plus tard, fut baptisé par Ananias, et passa le reste de sa vie dans la pénitence, espérant que tôt ou tard il serait pardonné.

JUIFS. L'histoire des juifs depuis la ruine de Jérusalem est dans son ensemble une histoire de souffrances et de persécutions. Antérieurement déjà ils avaient su ce que c'est que l'exil, et ils avaient formé de nombreuses colonies: en Égypte, sous l'administration bienveillante des Ptolémée, avec des synagogues et un temple, et dans un contact facile avec la culture grecque; en Babylonie, en Mésopotamie, et de là à Antioche, puis dans les îles et sur les rivages de la Méditerranée; à Rome depuis les victoires de Pompée. Leurs rapports avec la métropole subsistèrent longtemps, d'abord avec Jérusalem, puis avec Jamnia et Tibériade, mais touj. plus ou moins influencés par la politique des pays o(i ils se trouvaient; les persécutions furent fréquentes à Alexandrie, Cyrène, Rome, et ne revêtirent que trop souvent le caractère de massacres. Cependant la législation romaine leur fut plutôt favorable, au point qu'ils purent acquérir la bourgeoisie et jouir de tous les droits de citoyens. Depuis la ruine de leur patrie, leur situation s'aggrava, bien qu'ils eussent perds toute signification politique. L'accroissement constant de leur population les rendait dangereux, en même temps que la barrière souvent hautaine que leurs mœurs et leur loi mettaient entre eux et les païens, les faisaient haïr ou mépriser. Les emp. chrétiens furent les premiers à restreindre systématiquement leurs droits et à les distinguer des autres peuples, puisqu'ils s'en distinguaient eux-mêmes. Les bons rapports qui s'établirent naturellement entre les juifs opprimés et les ariens, les iconoclastes, les Perses, les musulmans, les compromirent toujours davantage. Cependant ils conservaient leurs synagogues; c'est à Constantinople seulement qu'il leur fut assigné un quartier spécial, en dehors de la ville. L'empire d'occident leur fut plus favorable, et les papes eux-mêmes n'entreprirent rien contre leur culte. C'est des Gaules que partit le premier signal d'intolérance; plusieurs conciles intervinrent contre eux dès 465, jusqu'à ce que Dagobert 629 ne leur laissa plus que l'alternative de se faire baptiser ou de quitter le royaume. Charlemagne et Louis-le-Déb. furent plus politiques et plus humains; ils comprirent que l'élément juif avait sa valeur au point de vue de la richesse, de la culture et dn développement national, mais peu à peu leurs successeurs en vinrent à exploiter à leur propre profit la protection qu'ils accordaient à ces hommes actifs et industrieux, et ils les pressurèrent d'impôts et de contributions forcées. Sans les persécuter ou les molester, on les humilia et on leur imposa un costume, on leur interdit la propriété foncière, on les exclut de certaines charges, fonctions, ou professions; on les parqua dans des quartiers déterminés. Ils n'en trouvaient pas moins le moyen d* devenir riches, et ils excitaient la convoitise. Philippe-Auguste 1182 et ses successeurs les dépouillèrent sous divers prétextes; ils furent bannis, puis rappelés. Charles V 1361 les soumit à un impôt personnel et leur donna un gardien et juge chargé de les protéger, mais aussi de les faire payer. Louis XIV, malgré son zèle convertisseur, les laissa tranquilles dans ces conditions, et Louis XVI supprima l'impôt personnel 'fui pesiit encore sur eux, 1784. La révolution française enfin les émancipa complètement, et dès lors ils sont restés dans le droit commun. Napoléon 1807 leur donna un consistoire par 2000 âmes, avec un consistoire central à Paris. L'Angleterre suivit à peu près la même ligne de conduite. Édouard-le-Confesseur les avait déclarés 1041 propriété de la couronne, les protégeant et les pressurant. Richard-C«mr-de Lion, Jean-sans-Terre, Henri III, Édouard 1er 1275 tirent de même, mais ce dernier eut recours aux | moyens les plus odieux pour se procurer de l'argent, et finit par les chasser du pays 1290. Il j leur fallut attendre le régime de Cromwell pour | obtenir l'autorisation tacite de rentrer en Angleterre. En 1723 le parlement leur accorda le droit de posséder des terres. Ce n'est qu'en 1858 que par une modification de la formule du serment, ils ont été rendus aptes à occuper des fonctions publiques et même à entrer au parlement. En Allemagne, où la tradition les fait arriver presque aussitôt après la ruine de Jérusalem, ils furent, moyennant finance, protégés par les princes, et leur position fut assez tolé-rable jusqu'à l'époque des croisades, mais alors le fanatisme s'en mêla, et il y eut contre eux de nombreux mouvements populaires. Les empereurs ne furent pas toujours assez forts pour les protéger, et un grand nombre émigrèrent en Pologne et en Silésie. Après la Réformation plusieurs juifs considérables jouirent de la faveur des princes, mais dans le peuple la haine et le mépris l'emportèrent longtemps, et comme ces parias n'avaient d'autre métier que la banque et continuaient de s'enrichir, une malveillance jalouse ne cessa de les poursuivre. Le grand électeur eut l'esprit d'accueillir les juifs chassés de l'Autriche, et reconnaissant chez eux une grande intelligence industrielle et commerciale, les rois de Prusse leur accordèrent des franchises et des privilèges. On fut également obligé de rendre hommage à leurs talents et à la supériorité artistique et littéraire de plusieurs d'entre eux, et les préjugés diminuèrent et se dissipèrent en partie. Le parlement de Francfort 1848 a établi leurs droits en théorie, mais le Wurtemberg seul les a sans réserve fait passer dans la pratique. En attendant, ils sont les maîtres par l'argent et par la presse. En Russie leur sort varia souvent; Pierre-le-Grand les toléra, Élisabeth les bannit 1745; Alexandre leur accorda la liberté d'industrie 1805 et 1809, Nicolas restreignit leurs droits. En Pologne, réfugiés depuis plus de mille ans, rarement persécutés, mais toujours tracassés, humiliés, méprisés, ils sont usuriers, cabaretiers, aubergistes, débitants; les seigneurs les écrasent d'exactions, mais leur permettent de se dédommager au double sur leurs tenanciers; le gouvernement s'occupe d'améliorer leur position. En Italie leur sort dépendit des conciles, pui* des papes dont l'attitude varia suivant leur caractère, leurs idées et leurs intérêts, jusqu'à ce que l'Inquisition se chargea d'établir la règle uniforme de la persécution; à Rome ils furent confinés dans le Ghetto. Les villes de commerce leur étaient plus favorables. L'occupation française améliora un moment leur situation. La révolution de 1848 enfin les affranchit entièrement. Très nombreux en Espagne, ils jouirent longtemps de leurs droits civils et de la liberté de conscience, mais depuis la conversion de Reccared, les décrets des conseils prirent force de loi, et à plusieurs reprises depuis 589 ils durent opter entre le baptême et l'exil. Les Maures furent meilleurs pour eux, et la conquête musulmane fut une époque de gloire et de prospérité à tous égards pour les juifs, non seulement parce qu'ils furent assimilés politiquement à tous les autres citoyens et purent revêtir les charges publiques les plus considérables, mais encore parce que la civilisation arabe développa chez eux l'amour des arts et des sciences, et leur permit de fonder ces écoles célèbres de Cordoue, de Grenade, de Lucena, qui brillèrent d'un si vif éclat et qui firent faire de grands progrès à l'étude, non seulement du talmud et de la loi, mais encore des mathématiques, de l'astronomie et de la médecine, et qui ont fourni les savants juifs les plus éminents du moyen âge. Le 14^e siècle mit fin à cet état de choses, et la monarchie chrétienne s'étant mise sous la dépendance de l'inquisition, les juifs et les maures de la Cas-tille furent exposés à d'horribles persécutions qui ne tendaient à rien moins qu'à leur entier anéantissement. A la suite de la conquête de Grenade, plus de 300,000 émigrèrent, sans parler de ceux qui furent brûlés, 2000 dans une seule année. Le Portugal suivit à peu près les exemples de l'Espagne. Dans l'emp. d'Orient les lois de Justinien, qui privaient les juifs de leur état civil, restèrent longtemps en vigueur, et elles furent appliquées d'autant plus sévèrement que, servant dans les armées perses, ou prenant parti, tantôt pour les ariens, tantôt pour les iconoclastes, ils semblaient se montrer les ennemis de l'empire; toutefois ils n'eurent jamais à subir les exactions, ni les persécutions qu'ils ont souffertes en occident. On sait qu'après l'exil de Babylone ils se répandirent dans les montagnes de l'Arménie; de là ils poussèrent à l'est jusqu'en Chine, au Japon, aux Indes. Par la destruction de Jérusalem ils étaient devenus indépendants de leur métropole naturelle; ils n'acceptèrent pas l'autorité de Tibé-riade et fondèrent à Babylone une école qui eut son talmud et son rabbinisme et qui finit par exercer une influence prépondérante sur tous les juifs, jusqu'au schisme des caraïtes, q. v. Dispersés auj. parmi des populations en majorité musulmanes, ils ne jouissent pas de tous leurs droits, ils sont tenus en suspicion, mais moins cependant que les chrétiens: souvent même les autorités leur montrent une certaine bienveillance personnelle. V. Depping, Les juifs dans le moyen âge.

Les missions parmi les juifs ont pris au 19me siècle un élan nouveau et ont obtenu certains succès. Le nombre des missionnaires est de plus de trois cents, en Europe, en Asie et en Afrique, et l'on compte par milliers le nombre des juifs convertis. Les écoles juives fondées en divers lieux sont des pépinières d'où sont sortis des agents bien qualifiés; lies préjugés se dissipent, et les jeunes juifs apprennent à connaître leurs livres saints et à comprendre les prophéties, dont plusieurs semblent annoncer leur rétablissement national, et leur retour, peut-être prochain, dans leur patrie.

JULES 1er lo pape 337-352, né à Rome, dé fendit Athanase contre les ariens; envoya des légats au conc. de Sardique 347. Il fit construira beaucoup d'églises.

2o Jules II, 1503-1513. Julien de la Rovère, neveu de Sixte IV, né à AUbizalla, près Savone, succéda à Pie III qu'il avait fait élire. Homme abominable, mais dans un autre genre qu'Alexandre VI; colère et féroce, disent deux adulateurs de la papauté, il n'avait d'un pontife que le nom et l'habit. Il ne rêve que l'extension du pouvoir de l'Église par ses intrigues et ses machinations. Il reprit la Romagne sur le duc Borgia, et fit la guerre aux Vénitieijs qui avaient enlevé au saint siège plusieurs villes du nord de l'Italie. Il forme avec Louis XII, Ferdinand roi d'Espagne et l'emp. Maximilien, la ligue de Cambrai contre les Vénitiens 1508, et réduit Venise à se soumettre aux conditions les plus désavantageuses. Plus tard, n'ayant plus besoin d? Louis XII il l'excommunie et lui suscite des ennemis. Le roi de France envoie contre lui une armée qui le bat à Bologne et à Ravenne 1511. et convoque à Pise un concile, qui le suspend de ses fonctions 1512. Jules II convoque de son côté un autre concile à Saint-Jean-de-Latran (95 évêques), qui annule les actes du conc. de Pise, met la France en interdit, délie les sujets de Louis XH de leur serment de fidélité et soulève Henri VIII contre la France. Au Latran le général des augustins dit qu'il importe peu de connaître l'étendue du territoire de l'Église, mais plutôt le nombre de saintà qui s'y trouvent. Jules H se fit haïr en Italie par ses guerres continuelles. Il employait beaucoup de Suisses dans ses armées, et s'écria un jour: O saint Suisse, priez pour nous ! D'après l'abbé Fleury, c'est sous son règne que le cardinal dominicain Ca-jetan aurait entrevu le dogme de l'infaillibilité. Le comte de Maistre, et c'est beaucoup dire, trouve que ce pape fut trop guerrier. Il avait commandé son mausolée à Michel-Ange, et favorisa les arts et la Renaissance.

3o Jules UI, 1550-1555. Jean-Marie Giocchi del Monte, élu après deux ou trois mois de division entre les partis français, impérial et italien. Le card. Pôle avait été d'abord désigné, mais l'opposition étant trop violente, on dut y renoncer. Le premier acte d'autorité de Jules III fut de donner le chapeau de cardinal k celui de ses domestiques qui soignait son singe favori, jeune garçon pour qui on l'accuse d'avoir eu un amour peu innocent. Il se brouille avec le roi de France, rouvre le conc. de Trente, interrompu par la mort de Paul III, mais le fait traîner en longueur pour pouvoir faire la guerre à Octave-Farnèse, duc de Plaisance, petit-fils du feu pape; il nomme un jour 14 cardinaux pour raffermir sa majorité douteuse. Il avait en général de l'aversion pour tout ce qui était concile, colloque ou conférence.

hp Jules-l'Africain, v. Julius.

5o Jules Echter de Mespelbrunn, prince-évê-que de Wtlrzbourg, fils d'un conseiller grand-ducal, étudia dans les principales univ. d'Allemagne, de Belgique, de France .et d'Italie, devint docteur en droit, puis chanoine en 1569, doyen du chapitre en 1570, et enfin en 1573 à la mort du prince-évêque, son successeur. Il s'occupa avec zèle de réorganiser son diocèse au point de vue temporel et spirituel, mais fut dur envers les protestants et chassa leurs pasteurs. Il fonda un hôpital et restaura l'université, dont une partie porte encore son nom, et qu'il livra aux jésuites. Il fut Pâme de la ligue de 1609, à la téte de laquelle se plaça son ami Maximilien de Bavière, f 1617.

60 Duc de Brunswick, né 1529; le plus jeune fils du duc Henri; primitivement destiné à l'état ecclésiastique, il succéda à son père, introduisit la Réforme dans son pays, adopta les ordonnances de Chemnitz et Andre'â, et fonda l'univ. de Helmstedt 1576.

7o Jules de Pflug, v. Pflng.

JOUA MAM&LEA, mère de l'emp. Alex. Sévère, 193-235, femme hautaine et ambitieuse; elle soigna l'éducation de son fils, le sauva des roups d'Héliogabale, son cousin, et contribua à lui assurer l'empire. Elle avait reçu à Antioche les enseignements d'Origène, se montra pieuse et bien disposée pour les chrétiens, mais ne fit jamais profession de christianisme. Elle périt dans le même soulèvement militaire que son fils.

JULIANA lo martyre, née en Nicomédie, fut décapitée parce qu'elle ne voulut pas épouser le préteur Éleusius, à moins qu'il ne se fit chrétien. Plusieurs villes disent posséder ses reliques. — 2o religieuse de Liège, qui eut en 1261 une révélation à la suite de laquelle fat instituée la fête du Saint-Sacrement.

JULIANISTES, v. Julien 5o.

JULIE, plusieurs saintes et martyres de ce nom. La plus connue, née à Carthage, fut emmenée esclave en Syrie, puis en Corse, où elle t pour la foi vers 439.

JULIEN lo Flavius Claudius Julianus, né à Constantinople 331, était fils de Jules Constance et neveu de Constantin. Nommé gouverneur des Gaules avec le titre de césar 355, il fixa son séjour à Lutèce. La jalousie de Constance son cousin l'avait longtemps éloigné de la cour; il avait été élevé dans une ferme de Cappadoce et avait été consacré lecteur, comme son fr. Gal-lus. Mais la lecture de la Bible l'ennuyait, tandis qu'il savourait avec délices Homère avec Nicoclès, et il se fit initier aux mystères d'Éleu-sis. Emmené par Constance en Nicomédie, il y trouva des rhéteurs païens, Themistius, Liba-nius, et autres, qu'il mit bien au-dessus des deux Apollinaire. Il avait promis de ne pas les aller entendre, mais il se procura leurs pauvres, mais brillants discours, se décida à entrer en rapports avec eux, visita les philosophes, vit à Éphèse le magicien Maximus faire des miracles et finit par renier Christ, ce qui le fit surnommer l'Apostat. Lorsqu'il partit pour les Gaules, il était fiancé à la sœur de l'empereur. Il fit plusieurs expéditions contre les Germains et les battit 357 à Argentoratum. En 361 il fut proclamé empereur par ses troupes révoltées; il assista la même année au culte chrétien à Vienne en Dauphiné, et peu après il rendit publiques son abjuration et ses doctrines. Le grand Un a émis les astres, qui sont des dieux; mais comme ces dieux sont encore trop loin, on les adore sur la terre dans leurs statues. Le peuple n'y comprenait rien. Il fit destituer les prêtres chrétiens, rappela les év. exilés pour cause de doctrine, afin de ranimer des controverses et de ruiner l'Égl. par des divisions; il fit construire des temples païens aux frais des chrétiens, dont Libanius dut plaider la cause. Favorable aux juifs, il voulut par bravade réédifier leur temple, mais des flammes, dit-on, sortirent de ses fondements. Plutôt bon de caractère, juste, modéré, chaste dans ses mœurs, il savait que les persécutions raniment le zèle, et il recourait plutôt aux moyens détournés, pour combattre le christianisme* mais sans grand succès. Les ariens s'unirent aux orthodoxes dans la lutte contre le paganisme. Athanase fut de nouveau banni. Julien recourait à toutes les ruses; il entourait ses statues de celles des dieux; il interdisait aux chrétiens l'usage des livres païens, « afin que n'ayant d'autre moyen de culture que la Bible, ils deviennent stupides. » Il permettait cependant aux jeunes gens de suivre les rhéteurs païens, et la foi de plusieurs, fut manifestée. II donnait de l'argent aux soldats, s'ils consentaient à jeter un grain d'encens dans l'encensoir, ce qu'il estimait être un acte de paganisme. Mais dans le peuple cela ne rèusssis-sait pas. Les chrétiens d'Alexandrie se révoltèrent; l'émeute fut naturellement réprimée; l'év. Georges fat mis à mort. A Antioche on se moqua des sacrifices de Julien; il avait fait ouvrir une source près de là, dans un bois de Daphné, et il voulut inaugurer un ancien temple, mais il ne parut qu'un seul prêtre et le temple dut être fermé. C'est à Antioche qu'il écrivit ses 3 livres contre le christianisme: une Satire des emp. romains, le Misopogon (ou Ënnemi de la barbe), et un Traité contre les chrétiens, qui fut réfuté par Cyrille d'Alexandrie. Il mourut dans une guerre contre les Perses, blessé mortelle-meut par un soldat chrétien, dit-on, et l'on ajoute qu'il s'écria en mourant: Tu l'emportes, Galiléen ! Sa mort l'empêcha de promulguer les édits qu'il projetait contre les chrétiens. — Œuvres publ. par Spanheim 1696. et par Tourlet, Paris 1821. Vie, par Ad. Naville, Genève 1877.

2<> apôtre et év. du Mans, issu d'une famille noble de Rome, + vers 286.

3° martyr, contemporain du précédent, f à Brivas (Brioude) chez les Arvennes, dans les persécutions de Dioclétien.

4° év. d'Eclanum, Apulie; homme intelligent et savant, très apprécié d'Augustin, ami de son père. D'abord adonné à l'enseignement, il devint ensuite évêque. Mais il était pélagien, et Pun des représentants les plus autorisés de cette doctrine. On possède quelques fragments de ses écrits dans la réfutation qu'en a faite Augustin. Après l'édit impérial de 409, qui bannissait les pélagiens, il se rendit en Orient, mais ne put gagner à ses vues, ni Théod. de Mopsueste, ni aucun évêque. On dit qu'il se rétracta plus tard, mais il ne put rentrer en possession de son évêché. f v. 439.

5° Julien, év. d'Halicarnasse, le chef de cette fraction des monophysites, qui a pris de lui le nom de julianistes, et qui est aussi connue sous le nom d'aphthartodocètes, q. v. Il enseignait que le corps de Christ, même avant sa résurrection, était déjà de nature divine et par conséquent incorruptible. Les plus stricts, appelés actistètes, soutenaient même que ce corps n'avait jamais été créé. Les sévériens étaient leurs adversaires. Lorsque les év. monophysites furent condamnés 519. Julien dut s'enfuir à Alexandrie.

6<> Julien Câsarini. né 1398 à Rome, prof, de droit à Padoue, protonotaire, auditeur de la rote et cardinal. Le pape l'envoya comme légat en Allemagne pour mener la croisade contre les hussites et le chargea de présider le conc. de Bâle. Il s'opposa avec succès, et malgré Eugène IV, Ji la translation du concile à Bologne, mais négocia inutilement avec les hussites. Plus tard il se joignit au parti du pape pour transférer le conc. à Ferrare. Envoyé en Hongrie auprès du roi Ladislas, il le poussa à rompre ses engagements envers Amurat II, et souleva ainsi une guerre dans laquelle l'armée chrétienne fut taillée en pièces à Varna 1444, et lui-même f peu après.

JULIERS. Clève$,Berg et Lamarck, provinces westphaliennes, auj. prussiennes, que Jean III de Clèves réussit à réunir en un seul duché 1521, jusqu'au moment où, son fils Guillaume étant mort sans enfants 1609, s'ouvrit la succession de Juliers. La Réformation s'y établit dans des conditions particulières, favorisée par les rivalités qui existaient entre le duc et l'archev. de Cologne. Jean III était ami d'Érasme, et il prit une position plutôt intermédiaire et modérée que franchement réformatrice; son fils Guillaume IV adhéra personnellement à la religion évangélique en 1541, mais il s'abstint de toute mesure officielle pour amener un changement dans le pays; il laissa faire sa noblesse, qui tenait pour le luthéranisme, et de nombreux réfugiés étant venus des Pays-Bas et d'Angleterre, les réformés finirent par l'emporter et firent triompher leurs vues aux synodes de Wesel 1568, d'Emden 1571, et définitivement au synode général de 1610. L'Égl. protestante s'était donc constituée au milieu d'une population en majorité catholique, avec la protection, mais sans l'intervention de l'État. Celui-ci n»» commença que vers 1770 à s'ingérer un peu dans les affaires de l'Église, et il se réserva la confirmation des pasteurs. Les luthériens et les réformés, généralement évangéliques, mais pa> stricts, vécurent longtemps en bonne harmonie: ils ne se tranchèrent en confessions rivales que lorsque le gouvernement prussien voulut les unir par contrainte, et l'opposition fut assez forte aux synodes de Duisbourg et d'Elberfeld. pour que cette tentative fût momentanément abandonnée.

JUMPERS, ou Sauteurs, secte quaker qui. s'appuyant de 2 Sam. 6, 16., accompagne dévotions de danses et de sauts destinés à provoquer une surexcitation extatique. Elle fut fondée vers 1760 par Harris Rowland et William Williams. Son siège principal est dans If pays de Galles.

JUNG Stilling, v. Stilling.

JUNILIUS; d'Afrique. Cassiodore le cite parmi les auteurs qu'il a consultés comme Introducteurs à l'Écriture sainte. Il a dédié en effet à un év. nommé Primasius un écrit intitulé: Dt partibus divinœ legis, qui est comme une introd aux livres de la Bible. Plusieurs traits semblent le rattacher aux églises d'Orient. II admet dan* le N. T. des antilégomènes. et regarde comm* non canoniques les Chroniques, Esdras, Néhe-mie, Job, Judith, Ester et les Machabées.

JUNIUS Francisons, plus connu sous le nom latin qu'il avait rendu célèbre par de nombreux ouvrages; il s'appelait en réalité François Du Jon, et appartenait à une famille noble du Berry. Né 1545 à Bourges, fils de Denis Du Jon. qui était lieutenant de la maréchaussée, il fut longtemps chétif et malingre, mais n'en fit pv moins de bonnes études. Devenu sceptique par la lecture de Cicérou {De nat. deorum), il fut converti par la lecture de l'Évang. de saint Jean et se consacra an ministère. Il étudia à Genève 1562-1565, et fut nommé pasteur à Anvers à 20 ans. Les circonstances étaient critiques; le peuple brisait les images, le roi d'Espagne menaçait d'établir l'Inquisition, la régente poursuivait les ministres. Du Jon tint bon, courageux et modéré, jusqu'à l'accord conclu avec tiuill. d'Orange. Il passa de là à Limbourg, que la persécution le força d'abandonner. L'électeur palatin Frédéric III l'appela comme pasteur à Schonau, et après qu'il eut été aumônier du prince d'Orange pendant toute la campagne 1568-1373, il l'emvoya à Heidelberg, pour collaborer avec Tremellius à la traduction de l'A. T. En 1578 Jean-Casimir le nomma prof, à Neustadt, puis à Heidelberg. En 1592 il accepta la place de prof, de théol. à Leyde, où il f de la peste, 13 oct. 1602. Plutôt savant que théologien, il était.très apprécié de Grotius et d'André Rivet. Il a laissé une cinquantaine d'écrits, Discours, Études, Commentaires, trad. de la Bible, etc., 2 vol. f°. Sa controverse était ferme, franche, mais chrétienne et charitable.

JURIDICTION, jugements, justice, etc. Toute société d'hommes a besoin d'une organisation et d'une autorité qui décide en cas de conflits, d'irrégularités, ou d'actes portant préjudice à l'association. L'Égl. chrétienne a dû avoir sa juridiction comme les autres, et déjà saint Paul marque la règle à suivre. Lorsqu'il survient des contestations entre frères, au lieu de faire trancher leurs différends par les tribunaux païens, ils doivent les porter devant les saints, c.-à-d. devant les membres de l'Église, même les affaires d'intérêt, 1 Cor. 6, 1-7. Plus tard les evêques attirèrent à eux les causes litigieuses, mais leur intervention ne fut d'abord qu'officieuse et facultative; peu à peu elle s'imposa, d'abord aux ecclésiastiques, puis aux laïques lorsqu'ils avaient à se plaindre d'un ecclésiastique; puis aux personnes dépendantes, misérables, mineurs, veuves, orphelins, etc. A mesure que s'accroissait la puissance de l'Église, l'autorité judiciaire de ses év. prenait plus d'extension, et ils revendiquèrent comme étant de leur domaine la connaissance de toutes les affaires, même civiles, qui pouvaient toucher par un bout aux intérêts religieux, tels que mariages, testaments, funérailles, héritages, serments, propriétés ecclés., etc. Contre cette usurpation de pouvoirs la réaction commença en France sous Philippe-le-Bel, et peu après en Allemagne; les droits de l'État furent rétablis, du moins en partie, et les év. n'eurent plus de compétence pour juger, quant aux personnes, que les ecclésiastiques de leur ressort, et qu^nt aux choses que les cas d'hérésie, d'apostasie, de schisme, de blasphème, de sorcellerie, d'adultère ou d'impureté, que l'État en général ne connaît ou ne punit pas. C'était encore beaucoup, d'autant plus que rien n'était réservé quant aux pénalités, et que l'autorité relig. pouvait édicter des peines qui n'avaient rien de religieux, non seulement l'excommunication, l'interdit, la suspension, mais encore des amendes, la prison et des châtiments corporels. L'évêque était l'autorité suprême dans son diocèse; il n'y avait d'appel qu'auprès du pape. Il pouvait cependant se faire remplacer dans ses fonctions de juge par un vicaire, dit l'official, ou par des délégués pour des affaires de peu d'importance. Comme les appels au pape présentaient souvent des difficultés, qui les rendaient presque illusoires, le conc. de Trente les a remplacés par un appel devant le métropolitain, ou son vicaire général. Les Kgl. protestantes n'ont jamais admis que leurs évêques, leurs synodes ou leurs consistoires eussent une autorité judiciaire dans les affaires de droit commun, ni une compétence pénale dans les questions religieuses: les seules peines qu'elles reconnaissent sont l'avertissement, la censure, la suspension, et la destitution avec ou sans pension de retraite. Quelques exemples isolés de pénalités proprement dites, n'ont été que des actes arbitraires et prouvent qu'il y a eu à l'origine des tâtonnements dans la fixation de la jurisprudence, mais aucune discipline ecclésiastique ne les a consacrés.

On appelle, en termes d'école, Jus circa sacra, les droits que l'autorité civile, quelle que soit sa forme, peut toujours revendiquer dans l'administration d'une société religieuse, quelle qu'en soit la nature. Ils sont difficiles à déterminer, et par leur caractère vague et général, ils prêtent d'une part à l'arbitraire, de l'autre à des réclamations plus ou moins fondées. En réalité ils se résument dans le droit de haute police qui permet à l'État de surveiller tout ce qui se passe sur son territoire, au point de vue de l'ordre intérieur et de la prospérité publique. On distingue ainsi le jus inspectionis, le droit d'inspecter, de constater les faits; le jus cavendi, le droit de s'opposer à tout ce qui pourrait être un empiétement sur les prérogatives de l'État; le recursus ab abusu, le recours comme d'abus, c.-à-d. l'annulation de mesures, discours, arrêtés ecclésiastiques préjudiciables soit pour le pays en général, soit même pour de simples particuliers qui pourraient se trouver lésés. C'est un blâme officiel, un désaveu par l'État, mais quifi'a qu'un effet moral et dont l'autorité ecclés. n'a pas l'habitude de beaucoup se préoccuper. Le placet, c.-à-d. le consentement, l'autorisation donnée par l'État, de publier certaines pièces, mandements, bulles, est également tombé en désuétude dans les pays cathol., et les gouvernements n'en usent qu'avec réserve et dans des circonstances exceptionnelles, pour ne pas voir trop souvent leur autorité méconnue. La plupart des pays protestants étant gouvernés directement par l'Etat, même au point de vue religieux, le jus tirca sacra s'applique à tout et comprend tout, la confirmation des pasteurs, les lois électorales, les élections des conseils et des consistoires, la convocation des synodes, la ratification de leurs décisions, etc. C'est une anomalie, qui tend k prendre fin, mais qui ne s'est maintenue que par les abus du principe contraire, l'Égl. ayant voulu empiéter sur les attributions de l'État; ce n'est cependant guère par là que l'Égl. protestante a péché. Parmi les jura circa sacra que les États d'Allemagne ont le plus revendiqués et pratiqués, le jus refortnandi, le droit d'introduire dans l'Église des réformes devenues nécessaires, est un de ceux qui ont été le moins contestés et dont les populations ont le plus approuvé l'usage.

Jugement de Dieu, v. Jugement.

JURIEU lo pasteur k Chirat en 1599. — 2<> Si-inéon Jurieu, pasteur à Ch&tillon-sur-Loing 1614, président du synode provincial de l'Orléanais, nommé 1618 principal du collège fondé par les enfants de Coligny, f 1632. — Son fils Daniel, né à Châtillon, pasteur à Mer, député 1644 au synode de Charenton; bon prédicateur, a publié quelques sermons et deux traités de controverse. Il avait épousé en premières noces uue fille de Pierre Du Moulin, dont il eut le célèbre

4o Pierre Jurieu, né à Mer 24 déc. 1637, f à Hotterdam 11 janv. 1713. Envoyé à Saumur, il suivit pendant 2 ans le cours de philos, de Drouet, et fut reçu maître ès arts 13 sept. 1656. De là il se rendit à Sedan, où il fit sa théologie et où il publia sa thèse De vitâ Dei. Il visita ensuite les univ. de Hollande et d'Angleterre, fut consacré dans ce dernier pays suivant le rite anglican, dut se soumettre à la reconsécration quand il revint en France, et fut appelé à Mer auprès de son père, qu'il remplaça comme pasteur. Malgré les sollicitations de l'égl. de Rotterdam, qui lui adressa vocation 1666, il resta fidèle à sa paroisse et sauf quelques mois pendant lesquels il (\it prêté à l'égl. de Vitry-le-Fran-çois, il ne put se décider à quitter Mer que lorsqu'il fat nommé prof, d'hébreu et de théol. à Sedan 1674, après 2 thèses soutenues sur la Kabbale et sur le Pouvoir des clefs, qui lui valurent aussi le titre de docteur. Peu de temps après, on le chargea des fonctions de pasteurfet malgré la faiblesse de sa santé, il accepta avec joie ce surcroît d'occupations, suppléant par son ardeur et son zèle à ce qui lui manquait sous le rapport de la force et de la vigueur. Il lit en 1677 un voyage à Paris pour conférer au sujet des opinions de Claude Pajon, et en 1679 une excursion aux eaux d'Aix-la-Chapelle, pour sa femme malade; mais il ne paraît pas s'être permis d'autres congés, et il consacrait tout son temps et ses forces à son enseignement et à sa paroisse, en même temps qu'il défendait la cause de la Réforme par de nombreux écrits d'édification ou de controverse, Il déclina en 1680 un double appel qui lui était adressé de Groningne, mais en 1681, l'académie ayant été supprimée le 9 juillet, et le clergé romain étant exaspéré contre lui, il dut prendre le chemin de l'exil, et il accepta l'appel qui lui vint de Rotterdam, comme professeur, et bientôt après aussi comme pasteur. Il y passa 32 ans, ne cessant d'honorer le nom français et de défendre ses coreligionnaires. Il se distingua surtout dans la controverse, quoiqu'on lui ait reproché et avec quelque raison, trop d'âpreté dans le style et des erreurs de fait dues à la trop grande rapidité de son travail. Il étudiait aussi avec passion les prophéties, et notamment l'Apocalypse qui, dans les tristes circonstances de l'Eglise, lui laissait entrevoir les lueurs d'une prochaine délivrance; il avait même annoncé, d'abord pour 1689, puis pour 1715, la ruine du papisme et la chute de l'Antéchrist. Ce phénomène d'esprits lucides cherchant des dates précises dans les mystères des oracles bibliques, se retrouvai toutes les époques de persécutions religieuses, et Jurieu était si peu isolé dans la manière dont il interprétait les textes, que ceux dont il flattait les espérances firent frapper une médaille en son honneur, avec ces mots: Jurius pro-pheta. Large et tolérant pour les luthériens, auxquels il fit des avances qui furent malheureusement repoussées, il se montra violent contre les catholiques, Bossuet et Maimbourg; contre les jansénistes, Arnauld et Nicole; contre les protestants, Basnage, Jaquelot, Bayle, Sau-rin, etc. Il faut dire que plusieurs de ses adversaires l'avaient provoqué par des violences également injustifiables, Maimbourg par ses grossières calomnies, Bayle par ses sarcasmes; mais Jurieu avait, pour ne pas les suivre dans cette voie, des motifs qu'eux n'avaient pas, son ministère à faire respecter et la vérité à honorer. Il n'en reste pas moins un des champions les plus vigoureux qu'ait eus le protestantisme, et il se montra jusqu'à la fin un défenseur vaillant de ses frères sous la croix, cherchant à intéresser à leur sort la Hollande, le Brandebourg, l'Allemagne et l'Angleterre. Il avait épousé sa cousine germaine, Hélène, fille de Cyrus Du Moulin, et mourut sans enfants. Il a laissé plus de 60 ouvrages; les plus importants sont: le Traité de la dévotion, 22 éditions successives, et en anglais 26; l'Apologie de la morale des Réformés; l'Hist. du calvinisme et celle du papisme mises en parallèle. 2 vol. 4°. Rotterdam 1683; Réflexions sur la cruelle persécution que souffre l'Égl. réf. en France; les Soupirs de la France esclave; Hist. critique des dogmes et des cultes bons et mauvais, qui ont été dans l'Égl. depuis Adam jusqu'à J.-C.; des Sermons, ses Lettres pastorales, etc. Homme de foi, malgré ses défauts, il a été jugé avec une rigueur exagérée par les sceptiques et les indifférents. Voltaire le voue à l'horreur publique, Buhle le traite de fanatique, et les fr. Haag eux-mêmes lui préfèrent de beaucoup Bayle son antagoniste; mais l'Égl. protestante aime à le regarder comme un de ses pasteurs les plus fidèles et les plus dévoués.

JUSTE-LIPSE, v. Lipse.

JUSTIFICATION. La doctrine des égl. évan-fîeliques, fondée sur l'enseignement de saint Paul, Rom. 3, 21. 5. 8. i Cor. 1,30. etc. admet que l'homme pécheur est rendu juste, déclaré juste, justifié, par le fait de sa foi au Sauveur, alors même qu'il n'est pas juste par ses œuvres. C'est une justice imputée; la justice de Jésus passe sur lui, comme ses propres péchés ont passé sur la tête du rédempteur, devenu péché pour nous. Cette doctrine, entrevue déjà dans l'A. T., Hab. 2, 4., enseignée par les pères, prêchée par les saints du moyen âge, puis étouffée par la scolastique et par la doctrine du salut par les œuvres, a été remise en lumière par Luther et est devenue le mot d'ordre de la Réformation. Loin d'exclure les œuvres, elle les provoque, mais n'en fait pas le moyen du salut.

JUSTIN 1° gnostique, de la secte des ophites, tfité par Hippolyte, mais d'ailleurs inconnu.

2° Justin Martyr, ou le Philosophe, né vers l'an 100, à Flavia Neapolis (auj. Naplonse), de parents grecs et païens. Il porte aussi quelquefois le nom de Flavius à cause de son lieu de naissance. Avide d'instruction il rechercha partout la vérité; il commença d'abord par les stoïciens. puis fut péripatéticien, pythagoricien, platonicien. La constance des martyrs, une conversation qu'il eut avec un vieillard, la lecture enfin, furent le moyen de sa conversion. Ce vieillard, dont d'ailleurs on ne sait rien, l'engagea à lire les prophètes, mais sans leur demander de preuves. Justin pouvait avoir 30 ans quand il se convertit. Il visita l'Europe, l'Asie et l'Afrique, prêchant sur son chemin, recommandant la lecture de la Bible, notamment celle des prophètes. C'est surtout à Rome qu'il s'illustra, recevant chez lui tous ceux qui désiraient s'instruire. Tatien fut un de ses disciples. En 138 ou 139 il présenta à Antonin sa grande Apologie, où il justifie les chrétiens du reproche d'athéisme, et proclame en plusieurs passages la doctrine de la Trinité et celle de l'Incarnation; il termine en exposant ce qu'est le culte des chrétiens. En 162 il adressa au sénat de Rome une seconde Apologie, plus résumée. Dans les deux il soutient que le christianisme est la pure et complète manifestation de la vérité, tandis que les systèmes humains n'en présentent que des fragments isolés et obscurs. Il admet cependant dans la jiature humaine un germe de la vérité, quelque chose de semblable au divin Logos, et qui a mis les philos, sur la voie, mais sans leur permettre d'arriver. Dans un 3m« ouvrage, le Dialogue avec Tryphon, il suppose, et peut-être le fait lui-même est-il vrai, que près de partir d'Éphèse, un juif nommé Tryphon l'aborde et entre avec lui en conversation. Les compagnons de Tryphon se moquent de Justin, qui raconte sa conversion, et Justin en profite pour exposer longuement la doctrine de la Trinité et ses vues sur le millénium. Il est probable que ce sont les disputes avec les juifs qui l'engagèrent à écrire cet ouvrage. On croit qu'il subit le martyre, mais les dates varient entre 161 et 168; le jour a été fixé au 13 avril, et par les grecs aji juin. D'autres livres lui sont encore attribués, mais à tort: l'Exhortation aux Grecs, où il combat l'insuffisance de la religion philos., et où l'on trouve des idées opposées au germe mentionné plus haut; le Discours aux Grecs, où sont exposés les défauts de la doctrine païenne; le livre de la Monarchie, ou de l'unité de Dieu: dans sa Lettre à Diognète le judaïsme et le paganisme sont mis sur le même rang; enfin un Traité de la résurrection, qui est bien de son temps. Justin est le plus ancien des pères de l'Église. OEuvr. publ. par dom Maran, Paris 1742; par Otto, Iéna 1842; trad. en fr. par les abbés Chanut et Courcy.

JUSTINE, Flavia-Justina-Augusta, impératrice romaine, fille de Justus, gouverneur du Picenum. D'abord femme du tyran Magnence, elle épousa ensuite Valentinien 368, et après la mort de celui-ci, fit couronner son second fils Valentinien II, s'établit avec lui à Milan, et tenta d'y établir l'arianisme en demandant à Ambroise de lui céder une de ses églises; Ambroise refusa et le peuple se mit de son côté. En 387 elle dut s'enfuir devant l'usurpateur Maxime, f 388.

JUSTINIEN lo empereur d'Orient, célèbre par son long règne 527-565, et par sa réforme des institutions judiciaires. Une commission de jurisconsultes, présidée par Tribonien, revisa et codifia les ordonnances de ses prédécesseurs et en fit le code qui porte son nom. Après le code vinrent le Digeste ou Pandectes, les Institutes et les Novelles, le tout réuni sous le titre de Corpus juris civilis. Il eut la main moins heureuse en religion. Il était contre le monophy-sitisme, mais dirigé par sa femme Théodora, aussi célèbre par ses débauches que par sa beauté, il ne sut pas voir clair et nomma pa-

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triarche le moine monophysite Anthimus, 535, qu'il dut destituer l'année suivante sur les réclamations d'Agapet. Pour assurer l'unité de l'empire, il interdit le paganisme, ferma l'école philos. d'Athènes 529, et ordonna aux hérétiques de rentrer dans l'Église. Pour se concilier les monophysites, il condamna dans ses Trois chapitres les principaux chefs de l'école d'Antioche, et il allait proclamer dogme catholique l'aphthartodocétisme, quand il f 565. Son règne avait brillamment débuté par des victoires sur les Perses et les Ostrogoths; il s'éteignit tristement dans des luttes théol. sans portée. Bélisaire mourut la môme année que son maître.

2° Justinien, ou Giustiniani, v. Laurent.

JUSTUS, Just ou Juste. On compte plusieurs saints de ce nom: un jeune garçon de Complu-tum, près Tolède, qui fut martyrisé sous Dioctétien; un év. de Strasbourg, au 4me siècle; un archev. de Lyon qui assista aux conc. de Valence 374 et d'Aquilée 381, où il combattit les ariens; il quitta son siège pour aller finir en solitaire dans les déserts de l'Égypte. Enfin un moine romain, qui succéda à Augustin dans l'évangélisation de l'Angleterre et f 627 comme archev. de Cantorbéry. — Le couvent de Saint-Just, Estramadure, desservi par des hiérony-mites, est surtout célèbre comme retraite de Charles-Quint.

JUTLAND, v. Schleswig.

JUVENCUS, Caïus Vettius Aquilinus, poète espagnol, d'une famille illustre, embrassa de bonne heure la carrière ecclésiastique. Il vivait vers 330, sous Constantin. Un des premiers poètes chrétiens, il mit en vers, en hexamètres latins, l'hist. évang., suivant le texte de Matthieu. Cette Historia evangelica en 4 livres, a été imprimée à Deventer 1490. Elle est remarquable par la simplicité du style et par la pureté de l'exégèse. On attribue aussi à Juvencus un travail du même genre sur les cinq livres de Moïse et sur Josué; un poème sur les sacrements, mentionné par Jérôme, n'a pas été retrouvé.

JUVENTIN et son ami Maximin, deux capitaines des gardes de Julien-l'Apostat. Ils avaient exprimé pendant un repas, à Antioche, leur opinion sur le triste état des chrétiens, qui, di-saient-ils, « n'auraient pas même d'air pur à respirer, si cela dépendait de nos ennemis. » Cette parole rapportée à l'emp., il les fit jeter en prison, complètement nus. Mais leur cachot fut comme transformé en un temple; les chrétiens accouraient pour s'entretenir avec eux, malgré les défenses expresses de l'empereur. Quand il l'apprit, il donna le choix à ces deux capitaines entre mourir et abjurer; les trouvant inébranlables, il les fit décapiter pendant la nuit, 25 janv. 363.

K

Voir aux lettres C ou Q les mots qui ne se trouveraient pas ici.

KAABA, vieux sanctuaire national des Arabes, espèce de chapelle à peu près carrée (il mètres sur 9), qui doit son nom à la forme de dé qu'elle présente. Les uns disent qu'elle fut construite par Adam, les autres par Abraham, d'autres enfin par les anges. On assure qu'Adam y a déjà été en pèlerinage. La célèbre pierre noire Hadschar-el-Aswad, qui s'y trouve emmurée, serait descendue du ciel à l'époque d'Abraham. Elle est au centre de la mosquée de La Mecque, et Mahomet l'a entourée d'un tel respect qu'il a imposé à tous ses sectateurs l'obligation d'y aller prier au moins une fois dans leur vie.

KABASILAS 1° l'ancien, nommé Nilus, archev. de Thessalonique, auteur d'un livre contre les prétentions romaines; De Primatu papœ: ed. Matth. Flaccius Illyr. 1555.

2° Nicolas, le jeune, son neveu, métropolitain de Thessalonique dès 1354; peu connu; avait probablement été moine et avait pris parti pour les moines dans le conflit des hésychastes. Auteur de: Sept livres sur la Vie en Christ, un des meilleurs écrits de la mystique byzantine postérieure. Notice par Gass 1849. '

KABBALE, = tradition. Les juifs ont à côté de leurs livres sacrés deux traditions parallèles, le Talmud, qui est écrit, et la Kabbale, métaphysique et théosophie mystérieuse, qu'ils prétendent avoir été confiée de Dieu au premier homme, et par celui-ci aux patriarches, à Moïse, aux anciens d'Israël, de génération en génération, de bouche en bouche, jusqu'au moment où elle fut consignée par écrit dans le Jetsirah, livre de la Formation, et le Tsohar. livre de la Lumière. Le premier de ces écrits est attribué au rabbin Akiba f 120, mais il ne fut connu que plus tard et la 1" édition date de Mantoue 1565. Le second aurait pour auteur Simeon ben Jochaï, mais il ne commença à être connu qu'au 13me siècle, et les critiques estiment que si la doctrine est peut-être ancienne, la rédaction ne saurait remonter au delà du 8®e siècle, à cause du style talmudique moderne. Le Jetsirah développe ses idées théo-sophiques en les rattachant*aux nombres (3, 7. 12) et aux 22 lettres de l'alphabet; il n'y pas eu de création proprement dite, mais une émanation; c'est le souffle de Dieu qui s'est condensé. D'après le Tsohar, Dieu, l'Aïnsoph, rinconnn des inconnus, lumière incréée, se pose comme celui qui est, et fait jaillir de cette source unique toutes les existences particulières. Il n'y a donc pas de création, mais une évolution de la substance première; en téte de la hiérarchie des intelligences se trouve l'homme céleste, le prototype; il réunit en lui les dix Sephiroth, ou nombres parfaits. L'ensemble de ce système, <jui n'est pas sans analogie avec le gnosticisme, tend à subordonner le moral au physique, la liberté à la nécessité. L'explication que la Kabbale donne de l'Écriture, a quelque chose de mysti-■que, et en même temps de puéril et d'artificiel; aussi les juifs du nord, de la Pologne, p. ex., avaient réduit la religion à n'être plus qu'une sorte d'astrologie. Les kabbalistes de l'âge apostolique étaient plus sérieux, plus prétentieux; ils cherchaient à pénétrer touj. plus avant dans le secret de Dieu, et ils croyaient que celui qui posséderait la clé des révélations aurait la puissance de faire des miracles; ils ont laissé passer le Christ sans le reconnaître; quelques hommes seulement, comme Paul, l'ont reconnu comme la vraie sagesse et ont cru en lui. C'est à partir de Raymond Lulle que les philos, chrétiens ont attaché de l'importance à la Kabbale. Jordan Bruno et Pic de la Mirandole y ont vu une base spéculative pour le christianisme. Reuchlin introduisit cette étude en Allemagne; Paracelse et Jacob Bœhme lui assurèrent, quant aux idées thésophiques, une certaine influence sur la philos. chrétienne, et les mystiques modernes lui ont fait des emprunts. V. Molitor, A. Franck, Lutterbeck, Pétavel, etc. Le mot de cabalistique se rattache surtout à la recherche mystérieuse que certains chiffres, ou certaines combinaisons de lettres peuvent avoir sur la destinée;

11 n'est pas besoin d'être un juif cabaliste pour être la victime de cette superstition.

KADMON, ou Adam Kadmon, était dans la kabbale juive, le nom de l'homme prototype, l'image idéale de la divinité.

KANT, Emmanuel, né 22 avril 1724 à Ko-nigsberg, était fils d'un sellier. Il étudia dans sa ville natale, dont on assure qu'il n'est jamais sorti, et parcourut en peu d'années le cercle presque entier des connaissances hurrteines, zoologie, physique, mathématiques, philos., théologie, etc. Incompris, il resta 15 ans simple répétiteur, et n'obtint qu'en 1770, à 46 ans, la chaire de logique et de métaphysique. Nommé recteur de l'univ. en 1786, il fut nommé en 1787 membre corresp. de l'univ. de Berlin, f

12 févr. 1804. Il a écrit un grand nombre d'ouvrages, entre autres des travaux très remarquables sur le système planétaire, le mouvement des corps, la géographie physique, les races humaines. Le premier en date: Pensées sur la véritable évaluation des forces vives, parut en 1747. Plusieurs suivirent, mais celui qui fonda sa réputation, la Critique de la raison pure, ne fut publié qu'en 1781. Frappé de l'introduction de doctrines étrangères en Allemagne, et con -sidérant que l'historien Hume en particulier, de l'école écossaise, pouvait avoir une influence très fâcheuse en faisant naître ou en développant le scepticisme, il essaya de résoudre lui-même le problème de la source des connaissances en déterminant le vrai rôle de l'esprit et du corps, de la forme et de la matière. Il distingua dans nos connaissances deux parts, l'une qui appartient aux objets de la pensée et qui nous est communiquée par l'expérience, par les sens: c'est Y objectif; l'autre qui vient du sujet pensant et que l'esprit tire de son propre fonds pour compléter ou modifier les données de l'expérience: c'est le subjectif. Malheureusement ce livre, si plein de profondeur et de vues nouvelles, était lourdement écrit, dans un style pénible, avec une terminologie barbare et des termes nouveaux; il était presque impossible à comprendre, et il en résulta qu'il resta fort longtemps ignoré et que le libraire ne savait comment s'en défaire. Un philos, allemand. Reinhold, gendre de Wieland, doué d'un talent de style que Kant ne possédait pas, étudia cet ouv rage et fut frappé de sa profondeur. Il le réduisit en un langage intelligible et populaire, et publia sur la philos, kantienne, en la complétant à son point de vue, 2 vol. de Lettres qui firent sensation. La révolution fut instantanée: en peu de temps, comme par une explosion subite, cette philos, devint l'objet de l'étude générale et l'enthousiasme fut si grand que dans quelques universités les étudiants placèrent la Critique de la raison pure à l'égal de la Bible. (La lire dans la trad. franç. de Tissotj. Kant a fait deux autres ouvrages également considéra-lés, la Critique de la raison pratique, espèce de philos, morale 1787, et la Critique du jugement, cours d'esthétique ou de littérature générale, examen des facultés par lesquelles l'homme juge des qualités, du beau, du sublime, 1798. Ce qui avait amené Kant à rechercher les bases et les limites de la raison, ce sont l'absolutisme d'une orthodoxie trop exclusivement dogmatique, les prétentions non moins exagérées du rationalisme, et le parti que le scepticisme essayait de tirer des erreurs de l'un et de l'autre. Nous ne pouvons rien connaître que par l'expérience, et? il y a des choses qui nous échappent complètement, ainsi Dieu et l'immortalité de l'âme. Toutefois il est possible d'y arriver par la raison pratique. L'homme est tourmenté du désir de connaître les causes; il voit et il raisonne, mais il rêve de s'élever au delà; il lui faut davantage; il croit à la liberté, à la loi du devoir, à l'harmonie entre le bonheur et la vertu, et comme postulats de la raison pratique, il doit admettre sa dorée infinie, son immortalité, un monde abstrait et spirituel pour la réaliser; enfin un être distinct du monde, qui soit le type de la sainteté et de la perfection absolue. Il donne ainsi à la conscience morale un rôle considérable dans la formation des jugements, et si par certains côtés il touche au stoïcisme, par d'autres il rappelle Pascal à qui on l'a souvent comparé. La philos, kantienne souleva cependant des objections de diverses natures, soit à cause de l'hypothèse qui lui sert de base (la subdivision de chaque impression en 2 éléments), soit à cause des contradictions qu'elle renferme. Aussi, après avoir été goûtée quelque temps, a-t-elle été plus ou moins abandonnée; elle avait triomphé dans des discussions avec les partisans de Leibnitz et de Condillac, mais c'est de son sein même que sortirent les hommes qui devaient l'attaquer avec le plus de force, Fichte, Schelling et Hegel. Kant d'ailleurs avait prévu ce résultat et annoncé qu'on méconnaîtrait les limites qu'il avait voulu donner à la raison. Étnde et Vie, par Amand Saintes, 1841.

KAPFF (Sixt Karl von), né 1805 à Gdglin-gen, fut 10 ans pasteur à Kornthal, 8 ans surintendant àMunsingen, membre de l'Assemblée constituante en 1848, et depuis 1852 prédicateur de la collégiale à Stuttgard, doyen du clergé de la ville, et considéré comme une des colonnes de l'Égl. luthérienne dans le pays. Auteur de plusieurs volumes, livres d'édification, sermons, etc., il était estimé de tous, juifs, cathol. et protestants. Il était membre de plusieurs sociétés relig., bibliques, missions. Une fondation de 13,000 marcs, en faveur des orphelins de pasteurs, fut fondée sous son nom en 1877. + 1er sept. 1879.

KARG, George, né 1512 à Heroldingen, Grisons, pasteur à Oettingen, Schwabach et Ans-bach. f 1576. Connu surtout par des thèses où il niait l'imputation de la justice de Christ, et qu'il retira 1570 devant les attaques de Kelz-mann. A cette occasion la doctrine fut plus nettement précisée dans la Form. de concorde.

KAUTZ, Jacques, de Bockenheim, pasteur à Worms en 1524 et prédicateur distingué. Gagné aux idées anabaptistes il publia en 1527 des thèses qu'il offrit de soutenir, mais le prince-électeur Louis le chassa de la ville et la dispute ne put avoir lieu. Il se rendit à Augsbourg, Rothenbourg, et enfin Strasbourg, où Bucer et Capiton le reçurent d'abord bien, mais finirent aussi par l'abandonner. Il tint des réunions en pleine rue, excita des désordres et se fit expulser 1529. En 1532 il demanda de pouvoir rentrer, mais cela lui fut refusé. Dès lors on perd ses traces.

KECKERMANN, Bàrthélemy, théol. réformé, né à Dantzig 1571, étudia à Wittenberg, Leipzig et Heidelberg, où il passa 10 ans dans l'enseignement. En 1602 il fut nommé recteur du gymnase de Dantzig, et f 1609. Il a publ. un Système de théol. et une Rhétorique ecclés., qui ont eu de la réputation. Il a combattu Pierre la Ramée dans un écrit philosophique. Son système de morale a ceci de particulier qu'il demande la séparation de la morale et de la théologie, cette dernière ne touchant qu'à la vie religieuse et intérieure de l'individu, tandis que la morale touche davantage à la vie civile.

KEIL lo Ch.-Aug.-Gottlieb, né 1754 près Dresde, élevé chez un oncle à Leipzig, devint maître d'école, mais s'éleva successivement par son travail jusqu'au professorat théologique, fut nommé chanoine, conseiller consistorial et président de plusieurs sociétés savantes, f 1818. Il s'est fait un nom en herméneutique en recommandant l'interprétation grammatico-historique dans ses Elementa hermeneutica, 1811.

2° Charles-Fréd., né 1807, prof, à Dorpat, puis à Leipzig, collaborateur de Delitzsch dans son Comment, bibl. sur l'A. T., auteur de nombreux écrits d'exégèse sur les Chroniques, les Rois, le temple de Salomon, Josué, Esdras, Introduction, Archéologie, etc.

KEIM, C.-Th. né 1825 à Stuttgard, répétiteur à Tubingue, diacre à Esslingen, D*1 et prof, à Zurich depuis 1860; auteur de plus, travaux historiques: la Réformation àUlm, les Réformateurs de la Souabe, Ambr. Blaarer, la conversion de Constantin, la Vie de Jésus, Celse, Paroles amicales à sa paroisse, etc. f 1878 àGiessen.

KEITH lo George, Écossais; d'abord ministre de l'Égl. presbytérienne, puis quaker. On lui reprocha, parmi les Amis, d'attacher trop d'importance à la Parole écrite et pas assez à la lumière intérieure. Après un voyage en Amérique, il put constater qu'il ne s'entendait pas avec ses nouveaux frères, notamment avec Stockdell, et il entra 1700 dans l'Église épiscopale, pour combattre ceux dont il avait appris à connaître l'étroitesse.

2o Alexandre, né 1790 ou 1791, Dr en théol., pasteitr de l'Égl. libre d'Écosse; quand il se retira du ministère actif il se fixa à Buxton, Derbyshire, où il f 7 fév. 1880. Il a publié en 1823 un livre qui a eu plus de 40 éditions et qui a été trad. dans presque toutes les langues de l'Europe: Les Prophéties et leur accomplissement littéral, d'après les récits des voyageurs modernes, Volney, etc. On a aussi de lui, sons le titre de: Les Juifs d'Europe et de Palestine (trad. par Mlle Chabaud-la-Tour), la relation d'un voyage qu'il a fait en 1839 avec MM. Black, Bonar et Mac Cheyne, sous les auspices de l'Égl. d'Écosse, pour constater l'état des juifs dans le pays de leurs pères. Esprit élevé, Keith était aussi un chrétien singulièrement aimable et bienveillant.

KELLER, Jacob, né 1568 à Sâckingen, Souabe, entra 1588 dans Tordre des jésuites, et devint prof, de philos, et de théologie. Après l'assassinat de Henri IV il chercha à justifier son ordre du reproche de complicité. Recteur d'Ingolstadt et de Munich, il usa de son influence comme confesseur du duc pour l'exciter de toutes manières contre les protestants. Ses Mysteria politica furent brûlés en France par ordre.

KELLNER, pasteur à Hflnigern, Silésie, ayant refusé de souscrire à l'Union, fut destitué et mis en prison. La paroisse ne voulut pas reconnaître son successeur et se massa devant l'église en priant et en chantant, pour lui en interdire l'entrée. Il fallut la force armée pour en ouvrir les portes, 1834.

KEMP (van der), Jean-Théodore, né 1748 à Rotterdam où son père était pasteur, étudia à Leyde avec succès, embrassa la carrière des armes, devint capitaine de cavalerie et lieutenant des dragons de la garde. Il était irréligieux et d'une morale très légère. Au bout de 6 ans il quitta l'armée et se voua à la médecine; il se perfectionna pendant 2 ans à Édinbourg, et vint s'établir à Middelbourg, puis à Dordreeht, toujours intelligent, aimable et irréligieux. Le 27 juin 1791 il naviguait sur la Meuse avec sa femme et sa fille; un coup de vent fit chavirer leur bateau et il vit périr sous ses yeux celles qu'il aimait; il faillit périr lui-même. Cela mit du sérieux dans sa vie. Le dimanche suivant il se rendit au culte pour la première fois depuis longtemps, et rentrant en lui-même il comprit qu'il avait fait jusque-là un mauvais usage de sa vie. En 1792 il se dévoua à l'hôpital militaire fondé près de Rotterdam pendant la guerre avec la France. Bientôt après il se mit en rapports avec la Soc. des missions de Londres, et le 23 déc. 1798 il s embarquait pour le Cap. Un voyage long et dangereux l'amena dans le pays des Cafres, où il rencontra des adversaires inattendus, ses propres compatriotes, les boers hollandais. Soutenu par le gouverneur de la colonie, M. Dundas, et en 1806 par le général sir David Baird, il persévéra et obtint de nombreux succès. Une attaque d'apoplexie le paralysa en partie, mais sans éteindre ses facultés, ni ralentir son zèle. Il se rendit au Cap pour plaider la cause des Hottentots devant le nouveau gouverneur, lord Caledon, et atteint d'une nouvelle attaque, il f déc. 1811.

KEMPE, Étienne, né a Hambourg, étudia à Rostock, où il entra au couvent des franciscains. Gagné à la Réforme par Joachim Sluter 1523, il la prêcha dans sa ville natale, fut nommé prédicateur 1527, épousa une religieuse, assista au colloque de Flensbourg, organisa le culte à Lu-nebourg en 1530, et + 1540.

KEMPIS, Thomas A., v. Thomas.

KENNICOTT, Benjamin, prof, à Oxford, né 1718 dans le Devonshire, f 1783. Il collationna directement ou avec l'aide de collaborateurs, plus de 600 mss. hébreux, dont il a reproduit les variantes, au moins pour les consonnes, dans sa célèbre édition de 1776-1780. Tout le monde chrétien concourut aux frais de cette édition.

KENT (la Vierge de), v. Barton.

KEPLER, Jean, ou Keppler, le célèbre astronome, né 27 déc. 1571 à Weil, Wurtemberg, de parents nobles, mais pauvres, étudia à Tubingue, fut nommé prof, de mathématiques à Grâtz, Styrie, 1593, dut s'enfuir en 1598 pour avoir écrit une lettre de consolation et d'encouragement à ses coreligionnaires persécutés, se fixa 1600 à Uranienbourg, auprès de Tvcho-Brahé, et fut nommé mathématicien de l'emp. Rodolphe, avec un traitement. Sa pension lui étant irrégulièrement payée, il se rendit, pour réclamer, à Ratisbonne, où il f 1630. Il contribua à fixer l'année de la naissance du Sauveur, en calculant que la conjonction de Jupiter et de Saturne eut lieu l'an 747 de Rome. En théoso-phie il marcha avec Andréa. Ses découverts en astronomie le placent au premier rang des savants, et il sut adorer dans le système du monde le sage et grand auteur de toutes choses. Son principal ouvrage est l'Astronomie nouvelle, ou Physique céleste, 1609, où se trouve la belle prière qui fut le couronnement de son œuvre.

KESLER, André, né 17 juill. 1595 à Cohourg, fils d'un tailleur. Après avoir été prof, de philos, et de logique, il fut nommé 1635 pasteur surintendant à Cobourg, et f 1642, frappé d'apoplexie en chaire au moment où il finissait une prière en faveur de l'Allemagne menacée.

KESSLER, Jean-Jacques, ou Chesseliw, auteur d'une Chronique de la Réformation à Saint-Gall, sa ville natale. Né 1502, il étudia à Bâle. vint en 1522 à Wittenberg pour entendre Luther, se rencontra avec lui, sans le connaître, à l'hôtel de l'Ours noir à Iéna, prit ses commissions pour Mélanchthon, rentra à Saint-Gall en 1523, refusa la prêtrise, se fit sellier, tout en tenant des réunions privées, fut nommé pasteur en 1535, antistès en 1571 et + 1574.

KETTELER lo Gotthard (de). Dernier grand-maître de l'ordre teutonique, embrassa le protestantisme en 1559, et reçut en compensation de sa renonciation le duché vassal de la Pologne. — 2° Guillaume II, nommé par le duc de Clè-ves évêque de Munster, quoiqu'il ne fût pas prêtre, et penchant vers le protestantisme, il chercha auprès du pape à prendre une position conciliatrice, mais ayant échoué il donna sa démission. — 3° Guill.-Emmanuel, baron de Ket-teler, né 25 déc. 1811 à Herkotten, Westphalie; il entra d'abord au service de Prusse, étudia la théol. en 1839, fut ordonné prêtre et nommé curé de Hflxter; membre du parlement national 1848; doyen à Berlin 1849 et év. de Mayence 4830; un des plus fougueux champions de l'ul-tramontanisme en Allemagne et le principal protecteur des jésuites. Il avait combattu le dogme de l'infaillibilité, mais finit par s'y soumettre. f 13 juill. 1877.

KETTENBACH, Henri (de), écrivain populaire et prédicateur très goûté. Moine franciscain il prêcha la Réforme à Ulm, avec d'autant plus de force que le dominicain Pierre Neatler essaya de le réfuter en chaire. Menacé de mort il dut quitter la ville et parcourut la Souahe en continuant de prêcher partout. Ses discours, souvent réimprimés, sont plein de trait, de profondeur et d'inspiration. Il arriva ainsi jusqu'à Wittenberg auprès de Luther, et se prononça pour lui malgré les clameurs de son ordre et de son parti 1523. Déjà précédemment, en comparant le pape et Jésus-Christ, il avait soulevé contre la hiérarchie la noblesse et les villes et il avait cherché à les gagner en faveur de Sickingen et de ses luttes pour la liberté. Après la défaite et la mort de ce réformateur trop guerrier 1523, il défendit encore sa mémoire. Ses traces se perdent en 1524; on suppose qu'il périt pendant la guerre des paysans.

KHLESL, Melchior, ué 1553, fils d'un boulanger luthérien de Vienne; séduit à 16 ans par un jésuite, il se fit cathol. et fut envoyé à Rome pour y être élevé dans un couvent de cet ordre. En 1579 il est doyen du chapitre à Vienne, en 1581 vicaire général de l'év. de Passau, en 1588 év. de Neustadt, en 1598 év. de Vienne. Il se montra toujours l'ennemi acharné de la Réformation, tout en blâmant par politique les mesures trop rigoureuses de Ferdinand contre les protestants de Styrie. Son dévouement à l'emp. Matthias, qui l'avait nommé directeur du Conseil privé et l'avait fait élever au cardinalat, le rendit d'autant plus odieux à Ferdinand de Styrie, qui, après une tentative d'assassinat man-quée, le fit arrêter et mettre en prison. En 1622 il fut transféré au château Saint-Ange, à Rome. Il ne tarda pas à recouvrer sa liberté et la restitution de ses biens et de ses titres, mais il ne fut plus employé dans les allaires publiques, t 1630.

KILIAX, ou Kyllena, ou Kullen, moine irlandais, qui prêcha l'Évangile en Thuringe et, après un voyage à Rome, convertit le duc Gozbert, ou Godsbert, de Wurzbourg. D'après une tradition, Geilane, la femme du duc, l'aurait fait enterrer vivant avec ses compagnons, en l'absence de son mari, pour se venger de ce que celui-ci aurait voulu faire rompre son mariage. Une autre tradition porte au contraire que c'est Gozbert lui-même qui le fit mettre à mort 680. La maison de Gozbert s'éteignit, quoique son fils Hedan II eût conservé l'héritage paternel et qu'il continuât d'entretenir de bons-rapports avec les missionnaires. Kilian fut choisi comme patron de Wurzbourg.

KIMHI 1° nommé aussi Radak d'après les initiales de son nom (Aabbi David Jfimhi), né 1190 â Narbonne, où il f 1240; un des savants juifs les plus célèbres du moyen â#e. Il était très considéré. Il appartenait à la tendance libérale et antitalmudique de Maïmonides. Son principal ouvrage, le Michlol, comprend une Gramm. et un Dictionnaire qui, depuis Reuch-lin, sont devenus la base des études hébraïques. Ces deux ouvrages sont ordinairement imprimés séparément; la Gramm. garde le titre général de Michlol, et le Dict. s'appelle Liber radicum, le livre des racines. Il a aussi publié des Comment. sur l'A. T., dans lesquels il s'attache au sens littéral, sans s'arrêter aux minuties ingénieuses des rabbins. Il a soigneusement étudié ses prédécesseurs. Sa controverse avec les chrétiens est modérée.

2° Joseph Kimhi, père du précédent, vivait vers 1160; écrivain juif distingué il importa en Provence l'érudition espagnole. De ses travaux exégétiques et polémiques, le Sepher Hab'ritk seul a été publié, Constantinople 1710; les autres existent en mss., ou ne sont connus que par des citations de son fils David.

KIRCHENTAG, diète des églises; nom donné depuis quelques années à des assemblées libres de pasteurs et de laïques allemands, qui se réunissent tantôt dans une ville, tantôt dans uue autre, pour s'occuper officieusement des intérêts généraux du protestantisme. Les manifestations touj. croissantes et plus grossières de l'incrédulité et de l'irréligion inspirèrent à des hommes de foi, tels que Bethmann-Holweg, Wackerna-gel, l'idée de se réunir au Sandhof, près de Francfort, en 1848, et de leurs délibérations sortit un appe! à une première grande conférence, qui se réunit à Wittenberg les 21 à 23 sept, de la même année. Le but était de grouper toutes les Égl. en un faisceau, un corps évangélique, pour faire face au catholicisme et au matérialisme. Sur la proposition de Wichern, on décida aussi qu'à chacune de ces grandes conférences se rattacherait un congrès pour la mission intérieure. La position officielle des églises s'étant raffermie contre toute espérance, le premier objet da Kirchentag était atteint, et le second passait au premier rang; la conférence devenait surtout une association missionnaire itinérante, pour le développement de la vie religieuse. Mais après les sessions si vivantes de Wittenberg, Stuttgard, Elberfeld, il commença à se manifestera

Brème 1852, une tendance à favoriser certaines vues politiques ecclésiastiques. A Berlin en 1833 on alla plus loin encore, et rassemblée se prononça tout entière pour le maintien sans réserve de l'Augustana. A Stuttgard le conflit éclata 1857; Stahl et Hengstenberg sortirent du comité. Dès lors les réunions se sont poursuivies d'année en année, toujours dans un esprit évangélique, mais avec une moins grande raideur confessionnelle, et souvent avec un caractère pratique d'édification et d'évangélisation.

KIRCHHOFER, Melchior, né 1775 à Schaff-house, étudia à Marbourg, et fut nommé pasteur à Stein sur le Rhin, 1808. f 1853. Auteur de monographies sur Myconius, Steiner, Haller, Farel, et continuateur estimé de THist. ecclés. de la Suisse, de Hottinger.

KLARENBACH, Adolphe, né au Buscherhof, dans la paroisse de LUttringhausen, où un monument lui a été élevé en 1829, avait étudié à Cologne et s'était rallié aux idées évangéliques. Il chercha à les répandre à Munster et à Wesel parmi ses élèves, 1520-1523, et se lia avec le jeune et pieux Jean Klopreiss de BUderich. Banni de la ville il se retira à OsnabrUck, où il continua d'expliquer les livres du N. T. Banni de nouveau par ordre de l'évêque, il voulut, avant de répondre à un appel qui lui était adressé de Meldorp, dans le Holstein actuel, visiter encore son pays et lui prêcher la foi. Sa vie fut souvent menacée. Son ami Klopreiss ayant été arrêté, il intervint en sa faveur et ne réussit qu'à se faire arrêter lui-même, et après un long procès contre lequel il ne cessa de protester, n'étant pas ecclésiastique, il fut condamné par le tribunal ecclésiastique à être brûlé vif, ainsi que son ami. La même sentence frappa aussi Pierre Flysteden de Bergheim, Juliers, qui dans son zèle intempérant, avait cru devoir témoigner contre la superstition de la messe, en gardant son chapeau pendant qu'on la célébrait dans la cathédrale.

KLEE, Henri, né 20 avril 1800 à Munster-uiaifeld, élevé dans les séminaires de Mayence, prêtre, puis prof, et Dr en théol, accepta en 1830 l'appel qui lui fut adressé par l'uni v. de Bonn, où il était destiné à faire contre-poids aux tendances hermésiennes. Il jouit d'une grande faveur sous l'épiscopat de Droste-Vische-ring. Après son éloignement, il vint à Munich comme successeur de Moehler, et il y f 1841 hissant la réputation du représentant le plus autorisé du système ecclés. catholique. Tous ses écrits reposent sur cette pensée que la doctrine de l'Église est la seule nécessaire et la seule raisonnable. Il a publié des Comment, sur Jean, Romains, Hébreux; un Traité de la confession, une Dogmatique, une Encyclopédie, une Hist. des dogmes, et un volume sur la Morale.

KLEUKER, Jean-Fréd., théol., né 24 oct. 1749 à Osterade, prof, à Kiel dès 1798, ami de Herder, homme pieux avec une tendance mystique, a écrit sur le Zend-Avesta, les religions de l'Asie, la kabbale, et plusieurs travaux d'exégèse, d'hist. ecclés.,de symbolique, etc. f 1827.

KLIEFOTH, Théod. - Fréd. - Dethlofî, Dr en théol., né 1810 en Mecklembourg, surintendant et membre du Conseil supérieur à Schwerin depuis 1850, avec une tendance ecclés. luthérienne très accentuée; auteur de Comment, sur Zacha-rie, Ézéchiel, Daniel, et de plusieurs écrits sur l'Égl. et sur le culte.

KLING, Chrétien-Fréd., né 4 nov. 1800 à Altdorf, Wurtemberg, prof, de théol. à Marbourg 1832, à Bonn 1840, donna sa démission en 1847, et fut nommé pasteur à Ebersbach, puis à Marbach où il f 1861. Il a publié les travaux de Flatt sur les Ép. pastorales, collabora à plusieurs revues de théol., et a donné le Comment. sur les Ép. aux Corinthiens dans l'œuvre de Lange. Il appartient à la théol. de conciliation.

KLOPSTOCK, Fréd.-Gottlieb, né à Quedlin-bourg 2 juillet 1724, étudia d'abord la théol. à Iéna, puis se rendit à Leipzig pour se consacrer entièrement à la poésie; il se joignit à la société des poètes qui s'y était constituée. En 1748 parurent les premiers chants de sa Messiade, qui ne fut achevée qu'en 1773. Il passa à Zurich, chez Bodmer, les années 1750 et 1751, vint ensuite à Copenhague comme conseiller de légation 1763, puis en la même qualité à Hambourg 1773. Le margrave de Bade l'appela à Carlsruhe en 1776 comme conseiller, mais l'autorisa déjà l'année suivante à retourner à Hambourg, en conservant ses titres et sa pension, f 14 mars 1803 et enterré au cimetière d'Ottensen. Comme poète religieux il brille au premier rang, malgré les défauts et les longueurs de son chef-d'œuvre. L'inspiration tient chez lui à la profondeur même de son sentiment religieux et à la vivacité avec laquelle il avait saisi les beautés et la vérité du christianisme. Ses odes chrétiennes sont le premier essai de ce genre qui ait été fait en allemand, et plusieurs de ses cantiques ont été adoptés par l'Égl. et se trouvent dans tous les recueils; on cite en particulier son cantique de la résurrection: Auferstehen, ja Auferstehen !

KLUPFEL, Engelbert, ou plutôt Jean Andréas, théol. catholique, né 18 janv. 1733 à Wipfelda, Franconie, étudia à Wurzbourg, entra dans l'ordre des ermites augustins, fut employé comme prof, de théol. à Mayence et à Constance, et finit par être nommé prof, de dogmatique à Fribourg 1767 à 1805. A cause de ses tendances joséphines, il fut tracassé par les jésuites, mais protégé par Marie-Thérèse et Joseph IL II combattit Semler et la méthode protestante dans sa Nouvelle biblioth. ecclésiastique. Son principal ouvrage est son Institutio theol. dogm. Vienne 1789.

KNAPP lo Jean-George, prof, à Halle et directeur des établissements de Franke, fut un des représentants les plus solides du piétisme. t 1771. — 2° Son fils George-Christian, né à Halle 1753, étudia à Halle et Gôttingue, et fut nommé prof, de théologie, puis directeur, avec Niemeyer, des établissements de Franke 1785, t 14 oct. 1825. Auteur d'une édition estimée du N. T. grec, et d'une trad. des Psaumes, avec notes. Sans couleur ecclésiastique bien tranchée, il appartenait à la théol. biblique et professait à cet égard une orthodoxie très arrêtée.

3° Albert, né à Tubingue 25 juill. 1798. Après de bonnes études et plusieurs suffragan-ces, il fut nommé en 1836 pasteur à Stuttgard, où il t 1864. Grand ami de Hofacker il partageait ses convictions religieuses. Il publia de 1833 à 1853 la Christoterpe, almanach avec des passages et des poésies bibliques, et un grand nombre de biographies chrétiennes. En 1850 il publia la 2ra« éd. de son Liedtrschatz, précieux recueil de cantiques en 2 vol., destinés au culte public et à l'édification privée. Biogr. par son fils.

KNIPPERDOLLING, Bernard, bourgeois de Munster, adopta les idées anabaptistes, accueillit chez lui Matthys et Bockhold, et devint avec Rottmann un des chefs du parti. Élu bourgmestre en 1534, il proscrivit tous ceux qui pensaient autrement et favorisa le règne d'une souveraineté théocratique du peuple. Après l'élévation de Bockhold à la royauté, il se contenta de la place de premier magistrat de la ville; mais en 1535 la roue tourna; les révoltés furent défaits, Munster fut prise et Kn., comme un des principaux chefs de la résistance, fut tenaillé avec des tenailles rougies au feu, et son corps suspendu dans une grille de fer à la tour Lambert, 23janv. 1536.

KNIPSTRO, Jean, réformateur de laPoméra-nie; né 1 mai 1497 à Sandow, vieille marche de de Brandebourg; il entra dans un couvent de franciscains et étudia à Francfort sur l'Oder. Ayant combattu les thèses de Tetzel, dans le même esprit que Luther, il fut envoyé 1518 au couvent de Pyritz, Poméramie, mais là il gagna les moines et toute la ville à la réforme. Chassé par l'évêque il se rendit on 1523 à Stettin, où il se maria, fut nommé successivement pasteur en plusieurs villes, organisa les églises et f 1556, étant surintendant général à Wolgast. Il passe pour avoir rédigé le chap. 6 du Catéch. de Luther. Doux et modéré il a préservé ses églises de commettre des excès.

KNOBEL, Ch.-Aug.. né 7 août 1807 près de Sorau, Silésie, fils de cultivateurs, il fut prof, à

Breslau, puis 1838 à Giessen qui le nomma Dr en théol. f 1863. Rationaliste instruit, il a publ. de nombreux Comment, sur l'A. T., le Pentateuque, Josué, Ésaïe, l'Ecclésiaste, le pro-phétisme chez les Hébreux, et des dissertations sur des fragments choisis; touj. utile à consulter.

KNOX, John, réformateur écossais, né 1303 àGifford, village de l'East Lothian, Écosse.d'une ancienne et respectable famille. Il commença ses études à Haddington et les acheva 1524 à Saint-André où il fut condisciple de Buchanan et où il eut pour professeur Mairou Major, q. v. Sous la direction de ce savant, Knox fit de brillantes études et égala bientôt son maître dans les subtilités de la dialectique. II fut ordonné prêtre avant l'âge. Cependant, la lecture des pères, l'étude de la Parole de Dieu, et des entretiens fréquents avec Wishart exercèrent peu à peu sur lui une profonde impression, et vers 1542 il abaudonna définitivement les erreurs de Rome pour embrasser la doctrine évangélique. Il eut alors à craindre les attaques du cardinal Beaton, adversaire acharné de la Réforme; il se rendit dans le Lothian; là il catéchisaij et exhortait le peuple, et accompagnait Wishart dans ses tournées. Après la mort du cardinal, il se retira avec ses disciples dans le château de Saint-André, et cédant aux sollicitations du peuple, il accepta la charge de ministre et devint collègue de Jean Rough. Il commençait sa grande œuvre réformatrice, et prêchait publiquement, lorsque le château de Saint-André fui assiégé par Strozzi et par les Français ligués avec les catholiques; la place capitula et Knox, fait prisonnier 1547, passa 19 mois sur une galère française. Après sa mise en liberté il fut nommé chapelain d'Edouard VI; Cranmer lui offrit même dans l'Église anglicane un poste qu'il refusa pour conserver son indépendance. En 1553 Édouard mourut; Marie-la-Sanglante lui succéda. Knox n'était plus en sûreté dans son pays; il se rendit à Dieppe, puis de là à Genève, fut un moment pasteur des réfugiés anglais à Francfort, et revint à Genève comme pasteur de la congrég. anglaise et écossaise. Dans cette ville il vit Calvin et noua avec le grand réformateur des relations d'amitié qui leur furent utiles à tous deux et durèrent jusqu'à leur mort. En 1555 Knox retourna en Écosse, prêcha à de nombreuses assemblées dans diverses parties du royaume, et célébra à Calder House la première cène depuis la Réformation; ensuite, sur l'invitation qui lui fut faite de retourner à Genève, il s'y rendit de nouveau avec sa femme et sa belle-mère 1556. Avant son départ il avait été appelé à comparaître devant une assemblée du clergé; il s'y était rendu sans que ses adversaires eussent osé lui tenir tête; mais à peine était-il parti que le clergé le somma de revenir et le fit brûler en effigie. Knox resta 3 ans à Genève; il y publia sa fameuse brochure: « Le premier son de la trompette contre la monstrueuse domination des femmes, » ouvrage qu'il dirigeait contre Marie d'Angleterre et Marie de Guise, mais qui, après la mort de Marie, irrita aussi Élisabeth, car ce pamphlet avait pour but de montrer que le gouvernement par la femme est antiscripturaire. En l'absence de Knox deux faits s'étaient passés. Les chefs du parti protestant avaient signé le 1er Cove-nant et, de son côté, la reine avait sommé les ministres de comparaître devant elle. A l'arrivée de Knox, elle promit un sursis, mais, au jour fixé, convoqua de nouveau les ministres qui furent tous condamnés par contumace. Le jour de ce jugement inattendu, Knox prêchait à Perth; après son sermon, par suite de l'imprudence d'un prêtre, il y eut de grands désordres; la foule saccagea l'église et plusieurs couvents fort riches; il s'en fallut de peu que catholiques et protestants n'en vinssent aux mains. Quelque temps après, Knox prêcha 4 jours de suite dan&l'égl. de Saint-André; la reine voulait punir cette manifestation, mais les protestants entrèrent avec Knox dans Édinbourg; ils durent cependant se retirer devant les troupes royales. Knox parcourut alors le pays, gagnant à sa cause de nombreux disciples. Ces travaux ne l'empêchaient pas de prendre part aux événements politiques. En 1560, dans l'Assemblée qui déposa la reine régente, il fit cette déclaration hardie que, lorsque les souverains franchissent certaines limites prescrites par TÉcriture, leur autorité peut leur être enlevée par leurs sujets. Il prit aussi une grande part au traité conclu en 1560 entre Élisabeth, la cour de France et les protestants, traité en vertu duquel un parlement écossais libre était convoqué, et les troupes étrangères devaient s'éloigner. C'était le triomphe de la Réforme. Knox avait contribué pour sa large part à amener ce résultat, mais sa tâche n'était pas finie. Il lui fallait donner une constitution à cette Église, la diriger, et la défendre contre les attaques de ses ennemis. II y consacra les 12 dernières années de sa vie. Les bases de l'organisation de l'Église furent jetées dans la première assemblée générale, et le Livre de Discipline donna à cette organisation la forme presbytérienne. Sur ces entrefaites Marie Stuart débarqua en Écosse, août 1561. Knox eut plusieurs entrevues avec elle; on a beaucoup blâmé sa rudesse envers la jeune princesse, mais il faut se rappeler les dangers dont elle menaçait l'Église. Knox avait perdu sa première femme, Jeannie Bowes, en 1560; 3 ans plus tard il épousa 1563 la fille de Lord Ochiltree, un des chefs les plus influents du protestantisme. Cependant. Knox voyait ses forces s'épuiser; il avait toujours eu une santé délicate, et la tâche énorme qu'il s'était imposée devenait trop lourde pour lui. En 1572 il envoya une lettre d'adieux à l'Assemblée générale. Sa fin approchait: ses amis le firent venir à Édimbourg; il prêcha une dernière fois dans son ancienne église, se choisit un successeur, et t 24 nov. 1572 à l'âge de 67 ans. Une foule immense assista à ses funérailles. On raconte que le régent Morton s'écria en regardant la fosse ouverte: Ici repose celui qui ne redouta jamais visage d'homme. Ce qui distingua surtout Knox, ce fut son attachement à la cause de la Réforme, un grand amour de la vérité, joint au courage de la professer hautement. Ce qu'il croyait devoir dire, il le disait, fût-ce au souverain. S'il s'exprimait parfois avec trop de violence, c'était, comme il l'a dit lui-même, par haine contre le vice, non contre les vicieux; du reste à l'occasion il savait aussi exposer les merveilleuses consolations de l'Évangile. Dans ses rapports avec ses amis, il était doux, atfer-tueux, et quoique son caractère fût plutôt triste il savait entremêler sa conversation de saillies originales. Comme réformateur, il était éminemment propre à la tâche qu'il avait entreprise; à la fois fougueux et prudent, il n'aurait sans doute pas accompli tout ce qu'il a fait, sans l'opiniâtreté dont quelques-uns veulent lui faire un crime. Knox a laissé, outre beaucoup de lettres, traités, mémoires, etc., une Hist. de la Réformation en Écosse, qu'il avait composée dans ses moments de loisir. Son seul traité théologique est une Défense de la Prédestination.

KNUTZEN, v. Conscience.

KQENIG 1° Georges, auteur des Cas de conscience (latin), né à Amberg, Palatinat, 1590, t 1654 à Altdorf oi\ il était professeur. — 2° Jean-Frédéric, théol. luthérien. Né 16 oct. 1619 à Dresde, il étudia à Leipzig et à Wittenberg, professeur, pasteur et surintendant en diverses villes, enfin prof, de théol. à Rostock 1659. f 1664. Son principal ouvrage: Theologia positiva acroamatica, très apprécié, a servi de base au livre de Quenstedt. — 3° Samuel, né 1670 à Gergensee, Berne, étudia à Berne et Zurich, et devint le disciple enthousiaste du chiliasme de Petersen. Nommé chapelain de l'hôpital à Berne, il s'attacha aux piétistes, et ayant refusé de prêter le serment, il fut destitué et banni du pays. Bien reçu à Halle et en diverses autres villes d'Allemagne, par les piétistes et par son ami Petersen, il fut nommé prédicateur de la cour à Budingen 1712. Il revint à Berne en 1730 comme prof, de langues orientales et de mathématiques, et continua d'entretenir de bons rapports avec ses anciens amis et de prêcher ses doctrines dans des voyages missionnaires, f 1750.

KQESTLIN io Jules, prof, et Dr en théol., membre du Consist. provincial de Breslau. Né 1826 à Stuttgard, il fut d'abord répétiteur au séminaire évang. de Tubingue, puis prof, et prédicateur à Gôttingue. En i867 il fut appelé à Breslau. Il a écrit sur l'Égl. d'Écosse et ses rapports avec l'État; plusieurs ouvrages sur Luther, sa théol. et ses vues ecclésiastiques, des Études sur la foi et sur l'Église, etc. — 2° Char-les-Reinhold, prof, et Dr en philos.; né à Urach, Wurtemberg, 20 sept. 1819; d'abord répétiteur au séminaire évangélique, privat-docent depuis 1849, enfin depuis (863 prof, ordinaire à la faculté de philos, de Tubingue, enseigna l'esthétique et l'hist. de l'art. Il appartient à l'école historique critique de Baur, et a écrit sur la doctrine de l'Évang. et des Épîtres de Jean, $ur les synoptiques, sur le gnosticisme du livre Pistis-Sophia, sur le Faust de Gœthe, l'Esthétique, etc.

KOHLBRUGGE, H.-F., né 15 août 1803 à Amsterdam, d'un père allemand, luthérien, et d'une mère frisonne, réformée; étudia k Amsterdam, où il fut quelque temps pasteur auxiliaire, mais ses vues très calvinistes sur la grâce et la prédestination lui firent abandonner la Hollande, et il s établit en 1846 à Elberfeld, comme pasteur d'une petite congrégation, en partie néerlandaise, séparée de l'Égl. officielle. Les chaires réformées de la Hollande ne lui furent rouvertes que depuis 1863, après les fête» de la maison d'Orange. Son catéchisme, trad. dans presque toutes les langues de l'Europe, appartient à la vieille doctrine réformée, avec un mélange de quelques idées particulières. On a aussi de lui de nombreux sermons, une Étude sur le Ps. 45, sur le 7® chap. aux Romains, une réimpression de H. Grotius papizam. etc.

KOHLER, deux frères: Christian, ouvrier, et Jérôme, charron, nés à Brtlgg, Berne, utilisés par leur père, dans leur enfance, comme ayant le don de divination, se donnèrent comme prophètes dans le mouvement religieux de 1745, posèrent pour les deux témoins de l'Apocalypse, annoncèrent la venue d'un sauveur, qui devait naître d'Élisabeth Kissling, personne mal famée, et prédirent l'approche du jugement dernier. Ils justifiaient l'impureté et l'égoïsme, et en séduisirent plusieurs. Bannis pour 6 ans en 1750, ils n'en tinrent aucun compte; leurs têtes furent mises à prix; Jérôme, arrêté en 1752, fut condamné, exécuté et son corps brûlé; Christian, emprisonné à Neuchâtel, disparait de Thistoire; on ne sait comment il a fini.

KOLARBASE, gnostique hypothétique, dont l'existence n'est due probablement qu'à un passage mal compris d'Irénée. Les mots kol arba signifient tous les quatre, c.-à-d. les 4 Eons supérieurs, et c'est de ces quatre, et non de

Kolarbase, que Marcus, le gnostique, dit avoir reçu la sagesse qu'il possède.

KOLLENBUSCH, Samuel, né 1er sept. 1724 à Wichlinghausen, près d'Elberfeld, s'établit comme médecin à Duisbourg, et s'occupa beaucoup d'alchimie. Sous l'influence du wurtem-bergeois Fricker, et par l'étude de Bengel, Ter-steegen, QEtinger et Bœhme, il se fit à lui-même son système religieux, qui se résumait dans: le Christ vivant en nous, la sanctification personnelle. et le règne de mille ans pris dans le sens littéral. Depuis 1784 il s'établit à Barmen comme médecin, se fit de nombreux adhérents, concourut à la fondation de la maison des mis-* sions, devint aveugle vers la fin de sa vie, et t 1803. Il avait été très lié avec les fr. Hasen-kamp, Tersteegen, Jung Stilling, etc. Menken a un peu retravaillé sa doctrine, qui compte encore auj. des partisans dans le Wupperthal.

KOL-NIDRE. Ce sont les premiers mots d'une prière juive, assez mal notée, écrite en caldéen, que l'on prononce dans les synagogues le soir du jour des Expiations, et par laquelle on annule d'avance tous les vœux ou serments que l'on pourra faire dans l'année. Les juifs expliquent que cette annulation ne porte pas sur les engagements que l'on prend vis-à-vis de tiers; ils ajoutent que les réservations mentales, autorisées par Isaac Abechab en cas de fraude ou de violence, ne sont pas admises pour nier un* dette. Ces explications étaient nécessaires.

KOMANDER (le villageois), Jean, curé à Igis, puis à Coire, Grisons, 1525, prêcha l'Évangile, en opposition aux cathol., et aux anabaptistes. Accusé d'hérésie il se défendit à la diète d'Hanz, et en 1526 distribua la cène sous les deux espèces; il obtint en même temps un article de réforme qui donnait aux paroisses le droit de nommer et de révoquer leurs curés. Très lié avec Zwinglq et Bullinger, il organisa le culte évang. dans les Grisons, présida le synode de 1537, obtint la création d'un gymnase à.Coire, fut le principal auteur de la Confession rhétique 1552, et composa un Catéchisme que Biveroni traduisit en roman. Il eut souvent des démêlés avec les nombreux antitrinitaires italiens que les circonstances avaient amenés dans les vallées voisines. Atteint de la peste en 1550, il déclina et f 1556.

KONARSKI, né 1500, év. de Posen 1562-1574, diplomate sous Sigismond-Auguste, fat à la tête de la députation qui offrit à Henri de France le trône de Pologne. D'accord avec l'év. Hosius, il refusa sa signature au traité de San-domir, fit v?mv les jésuites à Posen et dota richement leur collège.

KOOLHAAS, Gaspard, né 1536 à Cologne, embrassa la doctrine réformée, fut pasteur à Nassau et à Deux-Ponts, puis vint à Leyde comme professeur 1574. Il donna sa démission en 1577, à la suite d'une brochure sur la compétence du magistrat en matière ecclésiastique, dans laquelle il se mettait en désaccord avec le synode. Il fut excommunié en 1582. + 1615 à Leyde. Ses principes étaient à peu près ceux qui furent plus tard l'arminianisme.

KOPPE, Jean-Benjamin, né à Dantzig 17 août 1750, étudia à Leipzig et Gôttingue, fut prof, de théol. à Mitau, et prédicateur de l'univ., vint ensuite à Gotha, puis à Hanovre comme surintendant et prédicateur de la cour. + 1791. On lui doit le catéchisme de Hanovre, la réforme du séminaire des régents, et le commencement d'une édition du N. T. grec, avec notes, qui fut continuée par Tychsen et Ammon.

KORNTHAL (vallée du blé), petite communauté wurtembergeoise, qui jouit d'une constitution civile et religieuse complètement indépendante et forme au milieu du royaume une sorte de théocratie sociale. L'introduction d'un nouveau recueil de cantiques en 1791 et d'une nouvelle liturgie en 1801, ayant froissé les chrétiens piétistes, des milliers d'entre eux émi-{jrèrent en Russie. Le bourgmestre Hotfmann, de Léonberg, finit par obtenir du roi qu'un terrain neutre leur serait accordé, sur lequel ils auraient pleine liberté de conscience et s'administreraient comme ils l'entendraient. La communauté fut fondée en 1819; Hoffmann, q. v. en fut le premier directeur. Le sol est la propriété de la commune comme telle; chacun en a sa part, qu'il a payée, mais s'il quitte l'endroit, ou si les héritiers refusent de faire partie de la société, la terre fait retour à la commune contre le prix pour lequel elle avait été achetée. Un conseil d'hommes élus par les membres de la société remplit toutes les fonctions publiques; en cas de difficultés graves, ils s'adressent au (Collège des fr. pour les affaires extérieures, qui, dans l'origine, avait été composé des principaux fondateurs de ces communautés religieuses et qui, en cas de décès, se recrute lui-même. Une discipline sérieuse et fraternelle maintient les bonnes mœurs et les habitudes de la piété dans la société. La peine la plus sévère qui puisse être appliquée est l'exclusion, c.-à-d. le bannissement, l'obligation de quitter le territoire et la restitution de la propriété, qui est remboursée. Kornthal a possédé longtemps deux maisons d'éducation très estimées; elles subsistent encore aujourd'hui.

KORTHALT, Christian, né 15 janv. 1632 à Borg, île de Femern; il fut successivement prof, à Kiel et à Rostock. f 1 avril 1692. Auteur de plusieurs travaux d'histoire ecclés. très estimés, H de deux réponses à Baronius.

KRABBE, Othon-Karsten, né à Hambourg 1805, prof, à Hambourg, puis à Rostock, principal adversaire de Baumgarten; a écrit plusieurs ouvrages de circonstance, Hist. de l'univ. de Rostock, l'Église évangélique de Prusse, des Rapports de l'apologétique avec l'Écriture, Vie de Jésus, doctrine du péché et de la mort, notes sur Osée, des Canons apostoliques, Vies de Sa-vonarola, de Néander, etc.

KRAFFT, Jean-Chrétien - Got t lob-Louis, né à Duisbourg 12 déc. 1784, précepteur 5 ans à Francfort, pasteur à Weeze, près Clèves, 1808-1817, dès lors prof, de théol. à Erlangen. f 1845. Moins distingué par ses talents que par son caractère, sa foi, sa fermeté, il a relevé la vie religieuse en Bavière et il peut en être considéré comme le restaurateur. En 1824 il fondait une maison de refuge près d'Erlangen, et il a le premier donné des conférences sur l'Hist. des missions. Il n'a publié que des sermons; on a aussi de lui un ouvrage posthume: Chronol. et Harmonie des 4 Évangiles.

KRANTZ, Albert, né à Hambourg vers le milieu du 15,n® siècle, d'une famille distinguée. Après avoir fini ses études il voyagea, et se fixa enfin à Rostock ou il fut nommé professeur, prorecteur, Dr en théol. et en droit. Rappelé comme chanoine de la cathédrale à Hambourg, il fut chargé de plusieurs missions administratives et diplomatiques. Il travailla comme doyen à réformer les mœurs de son clergé, mais il rencontra tant de difficultés que, lorsqu'il eut connaissance des 95 thèses de Luther, il ne put s'empêcher de s'écrier: Tout ce que tu dis là, mon bon frère, est très vrai, mais tu n'aboutiras à rien. Va, rentre dans ta cellule, et chante le Miserere! Il a recueilli de nombreuses sources relatives à Thist. de l'Allemagne et il a composé plusieurs ouvrages, qui n'ont paru qu'après sa f 1517. Comme ils mentionnent les misères de l'Égl. ils ont été mis à l'index, donec, esepurgentur. Les plus importants sont: Metro-polis9 ou Hist. des évêchés de Brème, Magde-bourg, Munster, Paderborn, etc.; Historia Saxo-nia, Wandalia, Chron. regn. aquilonarium.

KRANZ, auteur d'une Hist. ancienne et moderne de l'Égl. des fr., qui fait autorité, mais d'une lecture un peu difficile; espèce de chronique, bien suivie, mais aride et sans détails édifiants.

KRUDENER, Juliane-Barbara (baronne de), née de Wietinghoff. D'une vieille famille noble; elle naquit à Riga 11 nov. 1766, mais fut élevée à Paris et connut dans la maison de son père les principaux chefs des encyclopédistes. A l'âge de 14 ans elle fut mariée contre son gré au vieux baron de Kr., ambassadeur de Russie à Venise. Ils eurent deux enfants et se séparèrent après quelques années. Elle vécut indépendante, tour à tour à Riga, Pétersbourg et Paris, où elle publia 1804 son roman de Valérie, qui est un peu sa propre histoire. Après la mort de son mari, vers 1807, elle quitta le monde, et sous l'influence d'une piété vraie, d'une foi vivante, peut-être un peu exaltée, elle se crut appelée de Dieu à réveiller les Églises et à les vivifier. Elle se croyait presque une prophé-tesse, visita Stilling et Oberlin, vint à Genève 1813 où elle connut l'étudiant Empeytaz qui devint un de ses plus fidèles adeptes, parcourut la Suisse et le duché de Bade, souvent traquée et bannie par la police, à cause des réunions d'édification qu'elle tenait chez elle. Elle visitait les prisons, prêchait quelquefois en plein air, faisait d'abondantes aumônes, attirait des milliers de personnes. A Heidelberg et à Paris elle vit souvent l'emp. Alexandre, qui fréquentait ses réunions, et elle passe pour avoir exercé sur lui une certaine influence. En 1818, bannie de Genève, de Berne, de Bâle, elle est à Hôrnlein, sur la frontière badoise, mais la politique la sépare de ses amis; elle est envoyée à Dresde, et de là escortée jusque dans son pays. Elle avait prédit le retour de l'île d'Elbe et la chute prochaine de Napoléon, elle avait pris une grande part à la formation de la Sainte-Alliance, mais son crédit avait alors beaucoup baissé. Elle se passionna pour la cause des Grecs, mais ne fut pas reçue par l'empereur. Depuis longtemps elle avait formé le projet de fonder dans le sud de la Russie une colonie de ses adhérents, et d'y joindre comme annexes quelques institutions philanthropiques, un refuge, un pénitencier. Quoique malade elle partit pour la Grimée pour hâter la réalisation de son projet, mais elle mourut de phtisie en route, à Karasou-Bazar, 13 déc. 1824. C'était une belle âme, mais trop emportée par son imagination: le mysticisme et le catholicisme côtoyaient chez elle la recherche de la vérité, et dans le même salon où l'on méditait la Bible, on entendait les révélations de la prophétesse et l'on voyait des images de la Vierge à profusion. — Vie par Empeytaz, Ch. Eynard, Ziethe, Brescius et Seiler.

KRUG, Guill.-Traugott, né 22 juin 1770 à Radis, prof, de philos, à Leipzig depuis 1809, chasseur à cheval pendant la guerre d'indépendance 1813, retraité en 1834. + <3 janv. 1842. A écrit: Hist. de la philos, ancienne. Manuel de philos., Dictionn. des sciences philos., et son autobiographie sous le titre de: Voyage de ma vie, en six stations, par Urceus, etc.

KRUMMACHER, nombreuse famille de pasteurs distingués. Les plus connus sont: 1<> Fréd.-Adolphe, né 13 juill. 1767 à Tecklembourg, Westphalie, étudia à Lingen, puis à Halle sous Knapp 1787, occupa diverses places et fut enfin nommé premier pasteur à Saint-Ansgar, Brème, où il f 1845. Il a écrit sur l'esprit et la forme de l'hist. évangélique. sur les rapports de l'égl.

et de l'école, et un catéchisme biblique. Sans rien de remarquable comme orateur, ni comm*» théol,, il est surtout apprécié comme poète chrétien et comme écrivain pour la jeunesse. Ses Paraboles, souvent réimpr. et trad. en plus, langues, se distinguent par la grâce et le sérieux, quoique parfois anssi par un peu de recherche.

2° Son frère Gottfried-Daniel, né 1er avril 1774, pasteur à Baerl, près Mors, nature plus puissante et plus originale, d'une piété plus vivante, d'une activité extérieure plus grande. Très calviniste et prêchant la prédestination absolue. il réclamait en même temps la foi dn cœur, un sentiment subjectif, la vie et la piété intérieure. Appelé à Elberfeld 1816, il se fit un parti, sans l'avoir cherché, et ses adhérents provoquèrent par leurs prétentions des troubles, dont on fit peser sur lui et sur sa doctrine la responsabilité. Il entra en conflit avec l'autorité ecclésiastique, et il finit par se soumettre après s'être justifié dans un sermon sur Rom. 6, 1. Mais il resta l'adversaire décidé de l'Union et imprima à son Égl. et à toutes les paroisses réformées du Wuppenthal ce cachet de force et de vie qui les caractérise encore après tant d'années. f 30 janv. 1837. Il a publié des Sermons, la Lutte de Jacob, le Voyage des Israélites dans le désert, la Bénédiction sacerdotale, la Lettre aux Philippiens, etc. Vie, par son neveu Emile-Guillaume.

3° Frédéric-Guillaume, fils de Fréd.-Adolphe, né 28 janv. 1797 à Môrs, où son père dirigeait l'école publique. D'abord pasteur auxiliaire à Francfort, il fut successivement pasteur à Ruhrort, Gemarka et Elberfeld, puis à Berlin 1847, enfin prédicateur de la cour et chapelain de la garnison à Potsdam, où il f 9 déc. 1868. Orateur de l«r ordre, avec plus d'imagination cependant que de logique et d'onction, il a exercé une grande influence. A Elberfeld il suivit les traces de son oncle et prêcha les doctrines réformées avec une netteté qui lui fut plus d'une fois reprochée comme une provocation intempestive. 11 représentait d'ailleurs les idées de l'alliance évang. dont il fréquenta assidûment les assemblées générales, à Londres, Paris, Genève, etc. Avec des opinions très arrêtées, il savait respecter et comprendre les opinions contraires. Auteur d'Élie le Thisbite, Salomon et la Sulamithe, Sermons sur le Cantique, la Cloche du Sabbat, etc.

4° Son frère Émile-Guill., pasteur à Langen berg et Duisbourg, moins éloquent, mais non moins fidèle; auteur d'une Vie de son oncle; connu surtout par la manière énergique dont il se prononça aux assemblées de l'Alliance à Berlin. contre les tendances et la théol. de Bunsen.

KUGELHERREX (les encapuchonnés), v. Groot.

KUHLMANX, Quirinus, pauvre visionnaire fanatique, né 25 févr. 1651 à Breslau, connu dès son enfance par ses rêveries excentriques, étudia le droit à Iéna, passa en Hollande où il étudia les écrits de Boehme, se lia avec un nommé Jean Rothe, et finit par se persuader qu'il était appelé de Dieu à fonder la S^e monarchie, en détruisant Rome et Babylone. Chassé de Leyde, il parcourut l'Angleterre, la France et l'Italie, sollicitant partout l'appui des rois. En 1678 il commença ses pérégrinations en Orient. En 1689 il visita la Russie, et arrêté à Moscou avec un camarade, Conrad Nordermann, également fanatique, ils furent brûlés 4 octobre; c'était sous Pierre-le-Grand. Les écrits de cet infortuné: le Christ mystique, David ressuscité. Le nouveau Boehme, touchent à la folie.

KUINOEL, Christian, né à Leipzig 1768, prof, de théol. à Giessen 1806, après y avoir d'abord enseigné l'éloquence; conseiller ecclés. 1818, doyen 1836, retraité 1840, f 1841. Outre plusieurs ouvrages de philologie, il a écrit des Comment., maintenant vieillis, sur les livres historiques du N. T. et sur l'Ép. aux Hébreux; style facile, mais verbeux.

KIÎRSCHNEH, ou Kursner, Conrad, en latin Pellicanus (pelletier, trad. de l'allemand), né 8 janv. 1478 à RufTach, Alsace, de parents pauvres. Après avoir passé près d'un an chez un oncle maternel, Josse Gall, recteur de Heidelberg, il rentra chez lui, se fit maître d'école pour donner un peu d'aide à ses parents, et enfin à 16 ans, 25 janv. 1493, entra dans l'ordre des franciscains. On l'envoya à Tubingue ache-v er ses études; il prit des leçons de Paul Scrip-tor, et se mit avec ardeur à étudier l'hébreu, Pfedersheimer lui fournit des livres, et Reuchlin des directions. Ordonné prêtre en 1501, prof, de théol. au couvent de Bâle, en 1511 custode du couvent de Pforzheim, il vint à Rome en 1517 et en remporta les mêmes impressions que Luther. Nommé custode à Bâle 1519, et ami d'QEcolauipade, il fut bientôt suspecté d'hérésie, à Leonberg en 1522, et à Bâle en 1523; mais le sénat de la ville prit son parti contre Satzger, le provincial de l'ordre, et nomma Pellican prof, de théol., en même temps qu'QEcolam-pade 1523. En 1526 Pellican fut appelé à Zurich comme prof, d'hébreu et de théol. Il y passa 30 ans, savant, modeste, toujours très occupé, chargé de la garde de la biblioth. publique, appelé souvent à prendre part aux grandes discussions du moment. Reçu bourgeois en 1541, il f 5 avril 1556. Marié deux fois, il ne laissa qu'un fils, d'Anna Fries sa l** femme, lequel vécut 64 ans, fut prof' au collège, et laissa 4 enfants, dont 2 ministres. Les écrits de Pellican sont nombreux; le premier est une Gramm. hébr. 1503, réimpr. avec un Dictionn. hébr.-la-tin 1523 et 1524; puis des Comment, sur presque tous les livres de la Bible; l'Histoire de sa vie, etc. H a publié aussi plusieurs ouvrages de Luther, et pris part à la public, des œuvres d'Augustin, de Cyprien, de Tertullien, etc. La biblioth. de Zurich possède encore de lui quelques volumes manuscrits.

KYRIE ELEISON: grec, Seigneur, aie compassion ! prière liturgique qui revient fréquemment, et qui est empruntée à des passages tels que Matth. 20, 30. Marc 10, 47. cf. Ps. 51, 3. 123, 3. Déjà dans l'ancienne Égl. grecque c'était la réponse de la communauté à chacune des prières formulées par le prêtre. C'est Sylvestre qui a introduit l'usage de ce texte grec dans la liturgie latine. L'invocation répétée trois fois, en vue de la Trinité: Kyrié Christe Kyrié, fut la formule employée après l'introït de la messe; cette triple répétition est due à Grégoire-le-Grand. Luther et plusieurs liturgies évang. ont conservé le Kyrié Eleison, mais comme c'est la seule expression de ses sentiments laissée à la communauté, et que les mêmes mots se reproduisent à chaque instant, pour exprimer les choses les plus diverses, on a fini par reconnaître que cette formule seule avait quelque chose d'abusif comme refrain, et on a été amené à l'encadrer dans un texte qui a donné naissance à plusieurs chants religieux.

L

LABAD1E, Jean (de), né 13 févr. 1610 à Bourg-en-Guyenne, entra chez les jésuites à Bordeaux, à 15 ans, après la mort de son père et malgré sa mère. 11 s'y distingua par son application, son zèle et sa piété; il étudia la philos, et la théol., surtout saint Augustin et saint Bernard. Mais à la longue, rebuté par la sécheresse de la scolastique et dégoûté par la vie peu religieuse des jésuites, il résolut de quitter l'ordre 1639 et réussit à recouvrer sa liberté, grâce à une plainte portée par lui au parlement de Bordeaux. Les jésuites ne lui pardonnèrent jamais et ne cessèrent de le poursuivre de leurs calomnies. A Paris il se lia avec les pères de l'Oratoire et les jansénistes. Chanoine à Amiens et protégé par l'évêque 1640, il chercha à réaliser la pensée de sa vie en groupant en un petit troupeau un certain nombre de vrais fidèles, mais ses ennemis y cherchèrent un prétexte à scandale, et il dut se rendre d'abord à Bazas, puis à Toulouse, où l'archev. lui confia la direction d'un couvent de religieuses. Calomnié de nouveau, il se retira chez les carmes de La Gra-ville, sous le nom de Jean de Jésus-Christ, mais la haine de ses persécuteurs l'y suivit, et il finit par aller à Montauban 1650, où il se déclara protestant le 16 octobre. Il y fut nommé pasteur, puis prof, et en 1655 recteur de l'académie. Exilé en 1656 par ordre de la cour, il accepta une place de pasteur à Orange; mais à cause de l'occupation française il dut fuir encore et arriva à Genève, juin 1659. Il y fut pasteur 6 ou 7 ans, se distingua par ses talents de prédicateur, par sa foi vivante, par son attachement à la discipline, et par les assemblées de piété qu'il tenait chez lui. C'était trop de zèle pour le tempérament de la plupart de ses collègues; on le lui fit sentir, on dit aussi que ses sermons étaient trop longs, on lui reprocha des doctrines millénaires, et comme on n'avait aucun grief sérieux à faire valoir, on s'arrangea pour le faire appeler à Middelbourg et pour lui faire accepter cette place, 1666. 11 s'y rendit avec ses jeunes amis Yvon, Du Lignon et Menuret, obtint d'abord de grands succès (entre autres la conversion de la célèbre Anne-Mariede Schtirmann). mais rencontra les mêmes difficultés qu'ailleurs par sa persistance à vouloir réunir les chrétiens en de petits troupeaux; malgré ses explications le synode de Leyde le suspendit 1667. Un accommodement eut lieu en 1668, mais Labadie ayant dénoncé comme soci-nien un livre de Wollzogen, la guerre se ranima et malgré l'appui de sa paroisse il fut déposé^et excommunié par le synode de Dordrecht 1669. Il fonda une égl. indépendante à Veere, l'année suivante à Amsterdam où l'affluence fut énorme, mais où les magistrats ne le laissèrent pas tranquille; ils lui en voulaient surtout de ce qu'il attirait à lui « les meilleurs chrétiens et les âmes les plus pieuses. » La princesse palatine Élisabeth, abbesse d'Hereford, lui fit offrir un asile; il s'y rendit avec un fort noyau de ses adhérents et ils y passèrent 2 ou 3 ans, vivant comme une seule famille, séparés du monde, mais non sans quelques-unes de ces erreurs qui naissent parfois de l'isolement religieux. Il lui était resté, entre autres, de son ancienne éducation catholique des préjugés contre le mariage; il y renonça naturellement, quand lui et Yvon se décidèrent à se marier, mais la tradition en resta chez leurs sectateurs. L'approche des armées françaises l'obligèrent de quitter cet asile, en 1672. Il s'enfuit à Altona où sa communauté fut reçue avec bienveillance; il y f 13 févr. 1674. Parmi les nombreux écrits qu'il a laissés, la plupart dans un but polémique, on remarque le Manuel de piété, trad. par Tersteegen; le Héraut du grand roi Jésus, où il expose ses vues millénaires, l'Exercice prophétique, le Véritable exorcisme, etc.

Les labadistes se maintinrent quelque temps encore après sa mort, au château de Waltha, près de Leeuwarden, où ils atteignirent le chiffre de 500, réalisant la communauté des biens, sous la direction de leurs anciens; mais en pratique ils durent y renoncer, et après la t d'Yvon 1707 ils se dispersèrent peu à peu. En 1732 leur dernier orateur, Conrad Bosmann, quitta aussi la communauté. Leur influence a cependant duré plus longtemps qu'eux-mêmes, en Hollande et dans les provinces rhénanes. Spener leur a rendu un beau témoignage, et si leur mission à Surinam échoua, leur établissement sur l'Hudson fut béni.

LABARUM, le drapeau des armées romaines sous les derniers empereurs, et plus spécialement celui que Constantin fit faire après sa vision, avec la croix et le monogramme de Christ. J.-C., forme qui s'est conservée jusqu'à ce jour dans les drapeaux ecclésiastiques. Le drapeau fixe des palais portait en outre, soit le portrait de Constantin ou de ses fils, soit, d'après Prudence, l'image de Christ. Julien fit enlever I* tout et le remplaça par Mars et Mercure. Par corruption, ou par extension, on donne auj. le nom de labarum aux bannières des églises.

LA BAUME, Pierre (de), 92™ et dernier év de Genève, successeur de Jean de Savoie. H avril 1523. Bienveillant et intelligent, mais amateur du luxe et de la bonne chère, il louvoya pendant les troubles de la république, laissa exécuter Lévrier, faillit compromettre Besançon Hugues, donna la main aux Mameluks et aux Gentishommes de la cuiller, se fit recevoir bourgeois de Genève en 1527 et prit ensuite parti contre les bourgeois, revendiqua ses droits de juridiction en matière ci\ ile, se montra hostile aux réformes projetées, et après un nouveau séjour de deux ans à Genève, prit peur et partit 14 juill. 1533, pour Saint-Claude.

11 ne revint plus, car la Réforme fut proclamé»*

12 août 1535. f 4 mai 1544 dans son prieurt d'Arbois.

LABRADOR. La mission au milieu des Esquimaux de cette contrée a été commencée en 1769 par les fr. moraves, sur un territoire qui leur fut concédé par l'Angleterre; ils possèdent auj. 4 stations principales: Hoffenthal 1782. Naïn 1771, Okkak 1776,Hébron 1830, avecnn total de 1160 membres placés sous la direction des missionnaires et de leurs aides. Un vaisseau spécial fait chaque année, depuis 1769 le service de la mission, pour le ravitaillement en nature et pour les transports de tous genres jugés nécessaires; des dons nombreux leur sont ainsi régulièrement adressés par des amis et des sociétés d'Europe.

LABRE, Benoît-Joseph, né 1748 à Amettf dans l'Artois, f 16 avril 1783 à Rome; il appartenait à une famille moyenne et resta simple laïque; il passa sa vie à visiter les principaux lieux de pèlerinage, mendiant partout, rebuté, misérable et souvent couvert de vermine. Béatifié par Pie IX, il a été canonisé par Léon XIII. Les musulmans ont eu aussi, près d'Alger, un saint de cette espèce, qui répugnait au travail, et que les perdrix nettoyaient de sa vermine pendant qu'il dormait; enterré à Coléah.

LACHAISE, François (de), jésuite, né 1629 au chftteau d'Aix en Forez, Loire, prof, de philos. à Lyon et provincial de son ordre; nommé confesseur de Louis XIV 1675, il sut à force de prudence conserver 32 ans ces fonctions, jusqu'à sa f 1709. Il fut modéré dans les affaires jansénistes et dans les questions des libertés gallicanes; mais on lui doit la révocation de l'Édit de Nantes, le procès contre Molinos et la condamnation de Fénelon. Le roi lui fit cadeau d'une belle maison de campagne, dont l'enclos en 1804 fut converti en un cimetière et porte encore auj. son nom.

LACHMANN, Ch.-Fréd., célèbre critique et philologue, né à Brunswick 4 mars 1793, étudia avec Bunsen 1811 à Gottingue, où il se fixa. Il fit la campagne de 1815 comme volontaire; puis, après un séjour de 9 ans à Kônigs-berg, il vint à Berlin comme professeur 1825. f 13 mars 1851. Il est connu par son édition grecque du N. T., et par ses recherches pour en déterminer, sinon le texte exact, au moins le texte le plus ancien. Pour cela il préférait généralement les mss. orientaux, mais en les contrôlant par leur accord avec les occidentaux. Il a ébranlé la foi au texte reçu, mais malgré l'accueil favorable qu'il a trouvé d'abord, son travail a dû être revisé à son tour par la découverte de nouveaux mss.. tels que celui de Tischen-dorf. Son système critique a été attaqué surtout par Fritsche.

LACORDAIRE, Jean-Baptiste-Henri; né 12 mars 1802 à Recey-sur-Ource, Côte d'Or, il vint à Paris comme avocat et se laissa persuader par LaMennais d'entrer dans l'Église D'abord voltairien, il embrassa avec passion les idées de son maître sur la liberté de l'Église et celle du peuple. Aumônier du collège de Jailly, il ouvrit avec Mon ta lembert, après la révolution de juillet et sans l'autorisation de l'État, un collège libre, et plaida dans l'Avenir la séparation de l'Égl. et de l'État. Son école fut fermée, et le journal condamné par le pape 1832. Il se soumit, et en 1834 il monta dans les chaires de Notre-Dame, pour y défendre avec une brillante éloquence les principes les plus ultramon-tains en religion, les plus radicaux en politique. Lors de son second voyage à Rome 1838, il entra dans l'ordre des dominicains, qu'il espérait pouvoir introduire en France. Elu 1848 à l'Assemblée nationale, il donna bientôt sa démission, ses chefs ayant blâmé sa profession de foi républicaine; il dut abandonner également l'Ère nouvelle qui venait de se fonder. Pendant un an il fut le provincial de son ordre, mais il se remit ensuite à la prédication, au milieu des méfiances inquiètes des autorités relig. et politiques. Depuis 1853 il se renferma dans la direction de son collège de Sorrèze. Membre de de l'Acad. franç. il est reçu le 15 janv. 1861 par M. Guizot; il f 21 nov., la même année. Si ses talents ont jeté du lustre sur l'Église, il ne l'a pas moins servie en cherchant à concilier la religion avec la science et la liberté. Il a publ. une Vie de saint Dominique, un peu légendaire; plus de 73 conférences, à Notre-Dame et ailleurs; Considér. philos, sur le système de La Mennais, et plus. Oraisons funèbres, Ozanarn, Drouot, O'Connel, etc.

LACTANCE, Lucius-Cœlius-Firmianus, surnommé par Jérôme le Cicéron chrétien à cause de la pureté de son style et de l'élégance de son exposition. Né vers 250 en Afrique, ou en Italie, il étudia sous Arnobe, à Sicca en Numidie, et n'embrassa que tard le christianisme. Dioclé-tien ayant lu de lui une poésie religieuse, le Sym-posion, l'envoya vers 290 à Nicomédie, comme prof, d'éloquence; c'est là qu'il fut converti. N'ayant pas beaucoup d'élèves, il se livra à des travaux littéraires, surtout apologétiques. Vers 318 Constantin l'envoya dans les Gaules et lui confia l'éducation de son fils Crispus. + probablement à Trêves vers 325. On a de lui des Institutions divines, en 7 livres, ainsi qu'un ex -trait, ou Épitome, adressé à Pentadius, où il établit que la religion et la philos, étant une seule et même science, le paganisme est condamné de fait, puisqu'il n'a pu résoudre aucun problème, ni arriver à la vérité. Ses autres ouvrages: La Colère de Dieu, L'œuvre de Dieu, ou la Formation de l'homme, ont le même but et sont dirigés, le dernier surtout, contre les épicuriens. On lui attribue aussi un livre: De la mort des persécuteurs, découvert au 17me siècle, racontant les persécutions des chrétiens sous Néron et jusqu'à Maximin, qui est important au point de vue historique. L'idée morale domine dans sa conception du christianisme et dans la manière dont il présente la personne du Sauveur. Ses développements dogmatiques ne sont pas toujours très orthodoxes; Jérôme l a combattu, et un décret du pape Gélase dénonce ses ouvrages comme apocryphes.

LACTICINIA (laitages). L'Égl. cathol. désigne sous ce nom général tous les produits ah -mentaires provenant de mammifères et défendus comme nourriture les jours de jeûne. L'Egl. grecque s'en tient encore en principe aux décisions des conc. de Laodicée 367 et de Trull 692. L'Égl. d'Occident, plus indépendante, tient compte des circonstances, et les mandements des évêques déterminent chaque année les conditions dans lesquelles certaines personnes peuvent s'affranchir des règles du jeûne strict.

LAFORCE, Jacques Nompar de Caumont, (duc de), un des chefs les plus illustres des protestants, né 30 déc. 1558, à l'époque des troubles religieux, était fils de François de Caumont, dont l'origine se perd dans la nuit des temps, « t dont un des ancêtres sous Charles V, avait mérité le titre de Nompar, ou non pareil, à cause de sa valeur. Sa mère s'appelait Philippe de Beaupoil, aussi d'une vieille et noble famille. Le jeune Jacques vit massacrer son père et son frère aîné à la Saint-Barthélémy, et n'échappa lui-même que par miracle; il tomba comme s'il avait été tué et ne se releva que la nuit, pour s'enfuir chez une tante, M «ne de Brisambourg, ou il passa quelques semaines. Il réussit ensuite à se rendre en Périgord, chez son oncle Caumont, au château de Castelnaut, et il y resta 15 mois, instruit dans la crainte de Dieu et la connaissance de la vérité. Placé d'abord par Henri III sous la tutelle du comte de la Vau-guyon, zélé catholique, il épousa fort jeune la fille du maréchal Biron, et se rangea sous la bannière de Henri de Navarre, aussitôt que ce prince se fut mis à la tête des protestants. Il vécut sous sept rois et resta fidèle toute sa vie à son pays et à sa religion. Sa première campagne le mit aux prises avec son beau-père, qu'il força de lever le siège de Marans. Il brilla à la bataille de Coutras et fut nommé gouverneur de la Basse-Guyenne, puis gouverneur de Béarn et vice-roi de Navarre. Il était avec Henri IV lorsque celui-ci fut assassiné; il le reçut dans ses bras et lui dit: Sire, souvenez-vous de Dieu ! Il se joignit aux mécontents à l'avènement de Louis XIII, et fut disgracié, lui et ses enfants; mais le roi ne tarda pas à reconnaître son injustice. Après une guerre oU Laforce tint en échec et fit reculer l'armée du roi, mai? où il perdit son tils, il rentra en grâce et fut nommé maréchal, avec une dotation de 200 mille écus, comme indemnité pour toutes les places et fonctions qui lui avaient été enlevées. En 1625 il intervint à Paris en faveur des protestants, bien que ceux-ci l'eussent abandonné, ou payé d'ingratitude. En 1626 il protegea la Picardie contre l'Espagne et le marquis de Spinola. En 1629 il fut envoyé en Piémont, avec Schomberg et Cré-qui; en 1630 il prit Pignerol et Saluces; en 1634 il bloque Lunéville et Nancy, délivre l'Alsace; occupe Coblence, La Mothe, Bitche; repousse successivement plusieurs armées espagnoles et autrichiennes, et fait prisonnier Collo redo. Sa femme meurt à Metz après 58 ans de mariage; son petit-fils, le baron de Boisse, est tué par trahison pendant qu'il parlemente avec des Lorrains. De retour à Paris à la fin de la campagne, il est reçu avec des applaudissements unanimes; seul de tous les généraux il n'a point éprouvé de revers. En 1636 la guerre ayant recommencé, le roi recommanda au duc d'Orléans et au comte de Soissons d'écouter les conseils de Laforce, mais ils n'en firent pas de cas et ils furent battus. L'opinion publique réclamant une récompense pour celui qui avait rendu à la France tant de services, Laforce fut nommé duc et pair, et sa terre fut érigée en duché, 1637. En 1638 Laforce âgé de 80 ans, fat envoyé avec des troupes peu nombreuses contre l'ennemi qui venait de rouvrir les hostilités; il le mit en déroute; Colloredo fut tué, le comte de Nassau se sauva à pied à travers les marais; 2000 hommes furent tués, 900 chevaux furent capturés. Dès lors Laforce se retira dans son château (détruit en 1793) pour y finir en paix ses jours au sein de sa famille. Il y écrivit ses Mémoires, et f 10 mai 1652, âgé de 93 ans. Le pasteur Sauvage, (ou Du Barthe) qui l'assista à sa dernière heure, rend un touchant témoignage de sa sérénité et de sa foi. Il avait eu plusieurs enfants, entre autres une fille, comtesse d'Orval, et quatre fils, le marquis de Montpouillan, tué à Sainte-Foy; Jacques, sieur de Masgésir, tué à Juliers 1610; Pierre, baron d'Eymet, et Armand de Castelnaut, qui fut maréchal de France après son père et + 1675 à près de 90 ans. Leurs Mémoires ont été publiés en 1843 par le marquis De la Grange. — Charlotte-Rose de Caumont Laforce, née 1650 f 1724 a publié des poésies et des romans historiques.

— Le bourg de Laforce, autrefois plus considérable, ne compte guère auj. qu'on millier d'habitants. La place du vieux château se voit encore, mais il n'en reste que quelques pans de murs. Les établissements de philanthropie chré-tienne au nombre de neuf, que M. le pasteur John Bost y a fondés, pour soulager les misères de toutes sortes, sont soutenus par la charité protestante et ont été appréciés même en dehors de l'Église, par l'Acad. française et par le gouvernement. Ils ont été reconnus en 1877 d'utilité publique.

LAINEZ, ou Laynez, Jacques, un des premiers associés d'Ignace de Loyola, et le second général de l'ordre. Né 1512 à Almançario, Cas-tille. il s'attacha à Loyola lors de son séjour à Paris 1534, l'accompagna 1537 en Italie, fut pendant quelques années prof, d'exégèse au collège de la Sapienza, et travailla dans la Haute-Italie dans l'intérêt de l'ordre naissant, prêchant et fondant des collèges. H refusa un évéché et le cardinalat, Son éloquence, ses talents et son habileté lui donnèrent une influence prépondérante au conc. de Trente, où il défendit l'absolutisme du pape. Il avait assisté au colloque de Poissy. Il assista également à la diète d'Augs-bourg 1555. Après la mort de Loyola il fut chargé de l'intérim, et en 1558 il fat élu général. C'est comme tel qu'il compléta et fixa l'organisation de l'ordre et qu'il en publia les Constitutions et Déclarations rédigées par lui. f 1565. Vie par Ribadenaira.

LAÏQUE, du grec Laos, peuple; mot dont on se sert dans le langage catholique pour désigner toutes les personnes qui n'appartiennent pas au clergé. Précédemment même on comptait les moines parmi les laïques; maintenant, et à cause de leurs vœux, ils sont rangés parmi les gens d'église. D après le sens étymologique du mot tous les hommes sont laïques, parce qu'ils sont le peuple, et tous les croyants sont ecclésiastiques, parce qu'ils forment l'Église. L'usage a introduit une distinction artificielle, qui serait aussi naturelle qu'innocente si elle se bornait à constater un fait, mais qui est devenue fâcheuse parce qu'elle semble consacrer une injuste inégalité de droits et de mérites, les laïques étant destinés à être régis par les ecclés., sans avoir aucune part au gouvernement de l'Église. Le retranchement de la coupe a été au moyen âge le symbole extérieur de cette infériorité des laïques. Dans les égl. protestantes la différence est loin d'être aussi tranchée; le terme d'ecclésiastiqne désigne plutôt un office et des fonctions, mais les laïques concourent sous les divers noms d'anciens, de diacres, de lecteurs, d'évangélistes, etc., à l'administration et à l'édification de l'église. Il y a toujours eu cependant chez quelques-uns une tendance à relever le caractère sacerdotal du pasteur au détriment de l'idée réformée de la sacrificature universelle. — La Confession laïque, ou à un laïque, n'est pas admise dans l'Égl. latine; du moins le laïque n'a pas le pouvoir de donner l'absolution; il l'a chez les luthériens dans les cas extrêmes. — La communion laïque est, dans l'Égl. latine, la conséquence de la dégradation; c'est une peine pour le prêtre qui a mérité de perdre son titre; il ne perd pas seulement sa charge et ses bénéfices, mais encore son droit à la communion sous les deux espèces. — On appelle frère lai, ou laïc, ou convers, et sœur converse, les membres d'une communauté relig. qui ne fout pas tous les vœux de l'ordre, mais seulement celui d'obéissance, et qui sont employés dans le couvent à diverses fonctions temporelles.

LAMARCK (comtes de), v. Mark.

LAMBERT lo le saint; appelé aussi Lande-bert, fils d'une famille pieuse et considérée de Maastricht. Élevé au couvent de Stavelo par l'év. Théodard, il lui succéda 668; fut un moment conseiller de Childéric II, puis chassé de son siège épiscopal parÉbroin, et réintégré sous Pépin d'Héristal. Mais ayant dénoncé courageusement la vie de ce maire du palais, qui entretenait une femme illégitime, Alpaïs, mère de Charles-Martel, il fut assassiné, 17 sept. 708, par le comte franc Dodon, que quelques-uns supposent avoir été le fr. d'Alpaïs. Lambert a évangélisé surtout les païens des bords de la Meuse, où il a opéré de nombreuses conversions. Il eut pour successeur comme évêque son disciple Hubert, qui transféra plus tard l'évêché de Maastricht à Liège, à l'endroit même où Lambert avait été frappé.

2o Chroniqueur et historien du 15®* siècle; bénédictin; sa patrie, sa famille et sa naissance sont inconnus. On sait seulement qu'il devint moine à Hersfeld 15 mars 1058, et qu'il fut ordonné prêtre la même année à Aschaffenburg, d'où lui est venu son nom de Lambertus Sehaf-naburgensi*. Après sa consécration il fit un voyage en Terre sainte. Il a raconté la Guerre de Henri IV contre les Saxons 1071, auj. perdu. De même une Hist. du couvent d'Hersfeld, dont il ne reste que des extraits. Son Hist. univ. commence à la création, mais n'a que des noms et des dates jusqu'en 703, et quelques notices jusqu'en 1040. La 2* partie, jusqu'en 1077, est plutôt une Hist. d'Allemagne; elle est assez exacte et relativement impartiale, mais l'auteur manque de critique dans les emprunts qu'il fait à d'autres écrivains, et l'on reconnaît trop l'œil du moine, qui ne voit que le pape Grégoire VII et ne comprend pas les droits de l'empereur.

3o Lambert-li-Cors (le court), ecclés. du siècle, né à Châteaudun, auteur du roman d'Alexandre, qui fut continué par Alexandre de Bornay, en vers de 12 pieds, auxquels, à cause de lui, on donna le nom d'alexandrins.

4o Lambert, François, dit d'Avignon; d'une bonne famille bourguignonne, d'Orgelet, Franche-Comté; né 1487 à Avignon, où son père était secrétaire du cardinal-légat. Bien doué et d'une belle figure, il fut adulé des franciscains dans le couvent desquels il avait été élevé, et à 15 ans il obtint d'entrer chez eux comme novice. A 16 Vt ans il prononça ses vœux et n'apprit qu'alors à connaître les mœurs véritables de ses vieux confrères. Il en fut dégoûté. Ses talents comme prédicateur, l'austérité de sa vie, la pureté de la morale qu'il prêchait, lui attirèrent de la part des moines de nombreuses vexations 1517-1521 et il fut sur le point de passer chez les chartreux. II étudiait soigneusement la Bible. Quelques écrits de Luther tombèrent entre ses mains et ses yeux s'ouvrirent 1522. Il quitta son couvent, se rendit à Genève et à Lausanne, où il fit entendre probablement les premiers sermons de réforme; à Berne où il vit Haller; à Zurich où, après une dispute publique avec Zwingle sur le culte de la vierge et des saints, il se reconnut vaincu. Il vit aussi Érasme à

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Bâle, et sous le pseudonyme de Jean de Serres, arriva à Eisenach, où il se fit connaître par 139 thèses sur le célibat, la confession, etc. Par Spalatin il obtint de venir à Wittenberg, gagna la confiance de Luther et se mit à donner un cours latin sur Osée. Son ignorance de l'allemand fut l'épine de sa vie, et l'empêcha de se faire aux mœurs et au caractère allemands. Il regrettait de ne pouvoir prêcher et souffrait de ne pouvoir gagner sa vie. Six mois de conférences en latin lui rapportèrent en tout 15 gros, 2 fr. Le 15 juillet 1523 il se maria, donnant le premier l'exemple d'un moine renonçant à des vœux contre nature pour rentrer dans la légalité évangélique. En mars 1524 il quitta Wittenberg pour Metz, où il était appelé à prêcher, mais les chanoines réussirent à lui faire interdire la chaire, et pour échapper k la mort il se rendit à Strasbourg, où il trouva Tilman, Zell, Hédion, Capiton, Bucer, où il obtint de grands succès comme prédicateur et controversiste; où il publia de nombreux écrits (Du saint mariage, la Vocation des croyants, Sept psaumes, et plusieurs Comentaires). La ville lui donna la bourgeoisie d'honneur et un secours hebdomadaire. François 1er, à qui il dédia deux de ses livres, ne lui répondit naturellement pas. Appelé par Philippe de Hesse, sur la recommandation de Sturm et de Mélanchthon, Lambert, qui ne gagnait qu'à grand'peine le strict nécessaire pour lui et sa famille, accepta avec joie cette nouvelle vocation 1526, et se rendit d'abord à Homberg, q. v. où il se fit connaître le dim. 26 oct. par la soutenance de 158 thèses, ou Paradoxes, qui décidèrent le triomphe de la Réforme dans la Hesse. En mai 1527 il fut nommé prof, d'exégèse à la nouvelle univ. de Marbourg, et fut dès lors à l'abri du besoin. Il assista au Colloque de Marbourg, qui dura 3 jours, et où Luther et Zwingle défendirent leurs vues sur la Cène. Lambert se prononça pour Zwingle, comme on pouvait le présumer d'après les vues très avancées qu'il avait déjà émises sur l'Égl. dans les Ordonnances de Homberg. On lui en voulut à Wittenberg, et cette hostilité sourde ne le réconcilia pas avec un pays dont le tempérament cadrait si peu avec sa vivacité méridionale. Il exprima à plus, reprises le désir de pouvoir se consacrer à la prédication dans des pays de langue française; il désignait en particulier Genève et Lausanne. Mais Dieu en avait décidé autrement. La peste, dite sueur anglaise, régnait à Marbourg; l'univ. fut transférée à Frankenberg, mais la maladie l'y saisit, et il f 18 avril 1530. Quelques mois après, sa femme et ses enfants le suivirent. Ses écrits se distinguent par la vigueur et l'élégance plus que par la profondeur. Sans être au premier rang il occupe une place honorable dans l'hist. de la

Réforme, et son noble caractère le fit estimer de ses ennemis eux-mêmes. Vie, par Ruffet.

LAMBETH (Articles de). On appelle ainsi 9 articles qui furent présentés en 1598 par le prof. Whitaker à l'archev. John Whitgift, en son palais de Lambeth, diocèse de Londres, et qui, approuvés par lui, furent communiqués a l'univ. de Cambridge. Ils contenaient le dogme de la prédestination sous la forme supralapsaire la plus accentuée, mais n'eurent jamais force de loi, la reine Élisabeth en ayant ordonné le re trait. Une nouvelle tentative fut faite en 4606 pour les adjoindre aux 39 articles, mais elle échoua par l'opposition des épiscopaux; les puritains seuls les acceptèrent.

LAMBRUSCHINI, Luigi, né à Gênes le 7 (ou 16) mai 1776, entra chez les barnabites et s'éleva chez eux aux plus hautes fonctions. Il accompagna le card. Consalvi au congrès de Vienne, et fut nommé archev. de Gênes 1819. En 1823 il vint à Paris comme nonce, flatta les instincts absolutistes de Charles Xet inspira les ordonnances de juillet. Grégoire Xyi le nomma cardinal, et en 1836 secrétaire d'État. Comme tel il gouverna avec autant de talent que d'énergie, repoussa toutes les réformes, opprima la théol. hermésienne et fut plus fort que la Prusse dans les affaires des mariages mixtes et de l'archev. de Cologne. La nomination de Pie IX fut un échec pour lui, et il se retira du gouvernement, ne voulant pas entendre parler des réformes projetées. Après la révolution de 18W la haine du peuple le poursuivit et il dut s'enfuir à Gaëte, f 12 mai 1854 à Rome, comme cardinal du palais. Ses œuvres ont paru à Rome de 1836 à 1839. — Son fr. Jean-Baptiste + 1826. avait été vicaire général à Gênes; év. d'Orvieto 1807. Il donna un asile aux jésuites, refusa le serment à Napoléon et fut déporté en France Auteur d'un livre de piété estimé.

LA MENNAIS, Hugues-Félicité-Robert, né a Saint-Malo 17 juin 1782, tonsuré en 1811, prof, de mathématiques au séminaire de Saint-Malo. prêtre en 1816, refusa en 1823 un évêché et le cardinalat. En 1848 il est élu à l'Assemblée nationale. Il se retira après le coup d'État, et f 1854 dans sa propriété de La Chesnaie, près Dinan, Bretagne. Les conflits politico-ecclésiastiques dont il fut d'abord le contemporain et l*1 témoin l'amenèrent à réfléchir sur les rapports de l'Égl. et de l'État, et après avoir été le champion du pape qu'il défendit avec tout l'éclat d'une conviction ardente et d'un style admirable, il se tourna contre le pouvoir temporel de Rome, dont il resta jusqu'à sa fin Tirréeoncilia-ble ennemi. Son idée fondamentale était celle ci: La religion seule peut donner une base solide à la société humaine* et elle doit reposer sur une autorité, laquelle se manifeste par leçon-lentement général et doit avoir un organe déterminé. Longtemps il crut que cet organe était le pape; c'est à cette époque et dans cet esprit qu'il publia ses Réflexions sur l'état de l'Égl. en France 1808, sa Tradition de l'Égl. sur l'institution des évêques 1814, et son célèbre Essai sur l'indifférence en matière de religion 1817-1823. Après la publication du Progrès de la révolution 1829 et après la révolution de juillet, les circonstances politiques ayant changé, il se prononça pour la séparation de l'Égl. et de l'État dans son journal l'Avenir. 1830-1832, qu'il rédigea d'abord avec Lacordaire et Monta -lembert, mais à la suite d'un voyage à Rome 1831, ses collaborateurs le quittèrent effrayés «de ses hardiesses. Malgré ses démarches et ses explications le pape condamna ses principes. Un moment il parut se soumettre, mais bientôt les Paroles d'un croyant 1834, et les Affaires de Rome 1836 rendirent la rupture définitive. Il a développé son système dans l'Esquisse d'une philos. 1841. et ses vues sociales et démocratiques dans ses Discussions critiques de la religion, ainsi que dans quelques journaux, le Monde, le Peuple constituant, la Réforme, etc. Œuvr. compl. Paris 1844-1847. OEuvr. posth., par Forgues 1858. Il est mort sans la présence d'un prêtre, M. Pelletan avanl été chargé par lui d'empêcher à cet égard toute surprise. Con-troversiste passionné, il a fait de nombreux disciples et n'en a conservé aucun; orateur populaire et plein de feu, il n'a pas su, plus que Lacordaire. se faire écouter à la Chambre.

LAMETTRIE, Julien-Offroy (de), né 23 déc. 1709 à Saint-Malo, élève de l'abbé janséniste (iordier, étudia la médecine à Leyde sous Boer-have. A son retour en France 1742 il fut nommé médecin des gardes françaises du duc de Gram-mont, et tomba malade au siège de Fribourg. Là il fut frappé de voir que les facultés intellectuelles diminuaient et disparaissaient en même temps que la vie du corps. Ce fut l'occasion de son premier écrit: Hist. naturelle de l'âme, La Haye 1745, ou il exposait le matérialisme le plus grossier. Renvoyé du service, il se réfugia à Leyde, où il écrivit en 1746 une satire contre son maître Boerhave et contre les médecins en général, et en 1748 son livre de l'Homme machine. Chassé de Hollande, il vint à Berlin, où Maupertuis lui trouva un asile. Frédéric II en fit son lecteur, le nomma membre de son académie, et l'admit parmi ses familiers. Il composa encore quelques écrits du même genre, entre autres l'Homme plante, et la Vénus métaphysique, et f le 11 nov. 1751 d'une indigestion, qu'il soigna lui-même, et mal. Ses amis reconnaissaient qu'il avait le cerveau dérangé.

LAMI, ou Lamy, 1° dom François, 1636-1711, d'abord soldat sous Richelieu, puis bénédictin, auteur de plus, ouvrages estimés: la Connaissance de soi-même, la Connaissance de Dieu, l'Athéisme renversé, Réfutation de Spinosa. Il entretint une polémique avec Bossuet, Nicole et Arnaud, et une corresp. intéressante avec Male-branche et Leibnitz.

2° Bernard, 1645-1715, oratorien, prof, à Vendôme, à Saumur et à Angers, se créa des difficultés par ses vues cartésiennes, fut nommé grand-vicaire de l'év. de Grenoble, et se retirn à Rouen. Il a beaucoup écrit, entre autres une Harm. des 4 Évang., une description du temple et quelques traités de théol., qui furent très critiqués.

3o Jean, 1697-1770, littérateur italien, enseigna l'hist. ecclés. à Florence et eut de vifs démêlés avec les jésuites.

LAMMISTES, un parti de Mennonites hollandais, ainsi nommé de l'égl. de l'Agneau (Lamm) où ils se réunissaient, par opposition aux Sonnistes (Sonne, le soleil) qui avaient aussi pris le nom de leur lieu de réunion. Les premiers, à tendance libérale, ne voulaient point de confession de foi. Leur chef était le prédicateur Galenus Abraham de Haan. Les deux partis se réconcilièrent en 1801.

LAMPE, Fréd.-Adolphe, le théol. réformé le plus distingué de l'Allemagne, qui introduisit dans l'Égl. la tendance de Cocceius, avec une nuance de labadisme. Sa dogmatique est intitulée: Le secret de l'Alliance de grâce; et son Catéchisme: Le lait de la vérité. Il a publié aussi un Comment, sur saint Jean, et quelques travaux historiques. Né à Detmold 19 févr. 1683. il fut pasteur à Duisbourg, prof, de théol. à Utrecht, et pasteur à Brème, où il f 1729.

LAMPÉT1ENS, v. Messaliens.

LANCELOT 1° L. du lac, un des 12 chevaliers de la Table ronde, héros d'un roman célèbre du moyen âge. — 2° L. ou Ladisla*, roi de Naples, né 1376 f 1414. — 3° Dom Claude, né à Paris 1615, entra à Port-Royal 1638, et fui chargé de la direction de sa célèbre école 1640-1660. Il composa de nombreuses Grammaires, grecque, latine, italienne, espagnole, le Jardin des racines grecques, et des Notes historiques sur la Bible de Vitré. Il partagea le sort des jansénistes et fut chassé de Port-Royal en 1660. Il fut nommé précepteur du prince de Conti, vécut ensuite dans le monastère de Saint-Cyran jusqu'à sa suppression en 1679, et f 15 avril 1695 à Quimperlé.

LANCELOTTL Giovanni-Paolo, 1511-1591, écrivit sur l'ordre de Paul IV et en imitation des Instit. de Justinien, les Institutions du droit canon, Pérouse 1563. Cet ouvrage qui sur plusieurs points contredit le conc. de Trente, fut pas approuvé, mais il n'en est pas moins important en ce qu'il fait connaître le droit et la pratique des temps antérieurs.

LANDELIN et Landoald, deux hommes qui prêchèrent l'Évangile en Belgique au siècle. Le premier, probablement un anglo-saxon, doit avoir travaillé avec Saint-Àmand; d'après les hollandistes il fut d'abord disciple d'Audebert de Cambrai; il s'enfuit, devint brigand, mais se convertit plus tard, fonda les couvents de Lob-bes et de Crépin, et f 686.

LANFRANC, fils d'un juriste de Pavie, étudia d'abord le droit à Bologne, et l'enseigna à Pavie, puis à Avranches, mais finit par y renoncer, et entra, sons la direction de l'abbé Herluin, au couvent bénédictin de Bec 1042, où il organisa l'enseignement supérieur; il en fit une école célèbre et devint un des précurseurs de la scolastique. Il déploya la même activité à l'abbaye de Saint-Étienne de Caen, dont il avait été nommé abbé 1063. Il refusa l'archev. de Rouen, mais en 1070, à la demande de Guillaume-le-Conqué-rant. il accepta celui de Cantorbéry, et continua sous son successeur d'élever des églises et des cloîtres, en même temps qu'il développait le goût des études et réunissait plusieurs conciles. Il maintint son indépendance vis-à-vis du pape, sans intervenir dans son conflit avec Henri IV. Il est surtout connu par sa controverse avec Bé-renger sur la doctrine de la transsubstantiation, et écrivit contre lui son; De corpore et sanguine J.-Ch. qui renferme en germe la doctrine catholique actuelle sur cette question. Il était très instruit, prudent, passionné, mais avec un esprit timide et de peu d'étendue; Lessing ne voit en lui qu'un zélote à courtes vues, f 1089. OEuvr. publ. par d'Achéry, Paris 1648. Ses Lettres sont intéressantes pour l'hist. de son temps.

LANG lo Matthieu, archev. de Salzbourg; né 1469 à Augsbourg. Secrétaire de Frédéric III, conseiller intime de Maximilien, chef du chapitre d'Augsbourg et de Constance, év. de Gurk. Jules II le nomma cardinal 1511 pour obtenir de lui qu'il détournât Max. du concile de Pise. Au conc. de Latran 1514 il fut nommé coadjuteur de Salzbourg et assista 1518 à la diète d'Augsbourg. D'abord assez favorable à l'idée d'une réforme, il fit revenir Staupitz auprès de lui, mais changea bientôt d'idée et se fit persécuteur; il réprima le mouvement de 1523, se joignit à la Ligue en 1524, combattit la révolte des paysans, et se montra à Augsbourg l'adversaire décidé de Luther, f 1540.

2<> Henri, pasteur à Meilen, Zurich, un des réprésentants les plus décidés du parti rationaliste en Suisse; rédacteur depuis 1859 des Zeitstimmen; auteur de Sermons et de plusieurs écrits religieux. Né 14 nov. 1826 à Frommern, Wurtemberg, il étudia à Tubingue, d'où il dut s'enfuir en 1848 comme agitateur politique, f 13 janv. 1876. Il s'était feit dans son parti une grande réputation comme orateur populaire.

LANGE lo Joachim, né 26 oct. 1670, t 7 mai 1744; théol. luthérien, étudia à Magde-bourg et à Leipzig, et suivit Francke à Erfurt et à Halle. Sous son influence et celle de Spener, il devint un des chefs du réveil religieux. Après quelques années passées à Berlin, successivement directeur du gymnase et pasteur, il fut nommé prof, de théol. à Halle. Il eut des controverses avec les tbéol. de Wittenberg, et surtout avec l'école philos, de Wolff. Il a laissé aussi quelques travaux d'exégèse et quelques livres d'édification. — 2° Jean-Pierre, auteur d'une Vie de Jésus, et principal rédacteur du Comment, théologique homilétique de la Bible de Biele-feld. Né 10 avril 1802 près d'Elberfeld, il étudia à Bonn sous Nitzsch et Lttcke, et après avoir été quelque temps pasteur, il fut appelé à Zurich 1841 comme prof, d'hist. ecclés. et de dogmatique. En 1854 il accepta une place semblable à Bonn, où il fut aussi nommé conseiller consis-torial. On a encore de lui une Dogmatique chrétienne, l'Époque apost., et 7 volumes de Mélanges.

LANGRES. Un concile fut tenu dans cette ville, 859, dont les Actes sont joints à ceux du conc. de Tulle de la même année. En matière ecclés. ils défendent les droits de l'èpiscopat contre les princes, et insistent sur la discipline. Au point de vue dogmatique ils maintiennent la doctrine de la prédestination du synode de Valence, sans accentuer son opposition au synode de Quiercy et à Hincmar de Reims.

LANGTON, ou Langthon, Étienne, était chancelier de l'univ. de Paris, quand son ami et condisciple Innocent III le fit venir à Rome, le créa cardinal et lui confia l'archevêché disputé de Cantorbéry 1297. L'opposition de Jean-Sans-Terre, que l'interdit put à peine briser, l'obligea, jusqu'à sa réconciliation avec le pape 1213, à se retirer dans le couvent de Pontimac, près d'Autun. En 1215 il se tint avec les barons contre le roi et lui présenta à signer la grande Charte. Ayant refusé de publier le ban contre les barons, il fut suspendu, ce qui ne l'empêcha pas d'assister la même année 1215 au concile de Latran. f 9 juill. 1228. Il a écrit quelques Comment, sur la Bible. On lui attribue aussi la division actuelle de la Bible en chapitres.

LANGUET, Hubert, diplomate et publiciste, né 1518 à Vitteaux, Bourgogne, fils du gouverneur de la place. Il étudia le droit à Poitiers, à Leipzig où il se lia avec Camérarius, à Padoue, où il fut reçu docteur. Le livre de Mélanchthon sur l'Ame le mit en relations 1549 avec cet homme illustre, pour lequel il conserva jusqu la fin une affection filiale. Il se fixa à Witten-berg et fit de là de nombreux voyages, visitant toute l'Europe et jusqu'à la Laponie. Il s'était converti à la Réforme. La protection de Mélanchthon le mit en rapports avec la cour de Saxe, qui le fit son agent diplomatique, vers 1559, et l'envoya tantôt en France, tantôt à Vienne; il avait surtout à tenir le prince au courant des événements politiques et militaires. Plusieurs de ses lettres sont signées du pseudonyme d'Ulrich Fribergius. Il était à Paris lors de la Saint-Barthélemy; il courut de grands dangers, mais échappa heureusement, et réussit à sauver aussi plusieurs de ses amis. De 1573 à 1577 il est à la cour de Vienne, maigrement salarié, et depuis la mort de Maximilien, il est attaché à Guillaume d'Orange et se fixe à Anvers. f de la fièvre 30 sept. 1781. On lui fit des obsèques magnifiques dans l'égl. des Cordeliers; le Sénat et le prince d'Orange y assistèrent. Outre ses Lettres, qui sont intéressantes, et sa Harangue à Charles IX, 23 déc. 1570, on a de lui un ouvrage capital qui a fait sa célébrité et qui montre combien il était en avant de son siècle; c'est son Vtndiciœ contra Tyrannos, 1579, trad. en franç. sous le titre de: Puissance légitime du prince sur le peuple et du peuple sur le prince. La trad. en est généralement attribuée à Du Plessis-Mornay. L'auteur établit que les rois étant les mandataires du peuple, ils en sont aussi justiciables, et qu'ils peuvent être déposés et punis. Il définit le roi et ses droits, et détermine les conditions dans lesquelles l'abus du pouvoir, en matière de justice ou de religion, fait descendre le roi au rôle de tyran, autorisant l'insurrection comme légitime. Ecrite sous l'impression des massacres de la Saint-Barthélemy, c'est une justification de l'attitude prise dès lors par les protestants de France, qui n'ont cependant jamais poussé les choses aussi loin dans la pratique.

LA NOUE (de) 1° François, l'un des chefs les plos illustres de l'armée huguenote, comparé souvent à fiayard pour le courage et pour la loyauté; surnommé Bras-de-fer, parce qu'ayant perdu le bras gauche à Fontenay, il se l'était fait remplacer par un bras artificiel, qui lui servait à tenir la bride. Né 1531 en Bretagne, fils d'un gentilhomme, il ne reçut qu'une éducation assez négligée, faite pour développer les forces physiques et l'adresse corporelle. Il y remédia plus tard, grâce à son goût pour l'étude. Il visita l'Italie, servit fort jeune en Piémont, se convertit à la Réforme après une visite que d'An-delot lui fit en Bretagne, mais resta longtemps l'ami des Guise. Il accompagna même Marie Stuart en Ecosse. Après le massacre de Vassy, il se rangea énergiquement du côté de ses coreligionnaires, suivit Condé à Meaux, puis Coli-gny en Normandie. Il prit Orléans, et d'autres villes en 1567 et fut nommé gouverneur commandant de la Rochelle. Plusieurs fois fait prisonnier, plusieurs fois blessé, il n'eut pas un moment de défaillance. Charles IX lui confia un commandement dans les Flandres, mais intrigua pour le perdre et le contraignit de rendre Mons que La Noue espérait conserver à la France. C'était en août 1572, l'époque des massacres. La Noue échappa, mais plus, de ses amis tombèrent sous les coups des assassins. Il vit Charles IX à Paris et se laissa persuader par lui d'engager les Rochellois à se soumettre, soit qu'il crût encore à la sincérité des promesses royales, soit qu'il fût persuadé que La Rochelle ne pourrait plus résister. Cette position d'agent du roi le rendit un moment suspect à son parti, mais quand on le vit prendre les mesures les plus énergiques et combattre avec une rare intrépidité à la tête de ceux qu'il n'avait pu décider à se rendre, tous les soupçons se dissipèrent. Il se rendit dans le camp du duc d'Anjou pour travailler à pacifier les deux partis, mais Anjou ayant été nommé roi de Pologne, et La Noue étant enfin désabusé de ses rêves de conciliation, il rentraà La Rochelle, dont il fit une place redoutable, servit Henri III contre la Ligue, et battit d'Aumale. En 1578 il fut envoyé en Flan- # dre, prit Louvain, surprit Bruges, Cassel et Ni-nove, fit prisonnier le comte d'Egmont, mais le

10 mai 1580, devant Ingehnunster, il tomba lui-même entre les mains de l'ennemi: Philippe II le retint 5 ans enfermé au château de Limbourg, dans une tour dont le toit était effondré, dans un cachot humide, grossièrement et mal nourri. Sa femme n'obtint que 3 fois l'autorisation de le visiter. Philippe II, un moment adouci par les sollicitations de la reine Élisabeth, des ducs de Savoie, de Guise et de Lorraine, du roi de Navarre et de beaucoup d'autres souverains, consentit à un échange, mais à condition que La Noue se laisserait crever les yeux. Il refusa. Enfin Philippe consentit à l'échanger contre d'Egmont, mais aux conditions les plus dures, et le pauvre invalide recouvra sa liberté. Il alla voir son filsOdet, prisonnier à Tournay, vint passer quelques mois à Genève avec sa femme, se rendit ensuite à Sedan où LaMark l'avait nommé son exécuteur testamentaire, passa enfin au service d'Henri IV avec le titre de lieutenant-général, et fut mortellement blessé au siège de Lamballe. f 4 août 1591 à Moncontour. où il avait élé transporté.

11 venait d'apprendre que son fils était en liberté, mais il n'eut pas la joie de le revoir; Odet n'arriva que pour les funérailles. La Noue avait épousé Marguerite de Téligny (sœur du célèbre Téligny), et il en avait eu Anne, qui devint marquise de La Moussaye; Odet (v. plus loin), et Théophile, qui resta probablement gentilhomme campagnard. — Pendant sa captivité La Noue a écrit ses admirables Discours politiques et militaires, au nombre de 26, qui rappellent Plutarque par la noblesse du style et la grandeur de la pensée, et qui donnent une idée exacte de l'état de la France à cette époque de guerres civiles. Il a écrit aussi des Observations sur l'hist. de Guicciardini, Genève 1593, et un Abrégé des vies de Plutarque, avec Notes, qui n'a pas vu le jour.

2° Odet de La Noue, seigneur de Téligny, lils du précédent, se montra digne de son père; échappé k la déroute d'Ingelmunster, il continua la campagne contre les Espagnols, et tomba gravement blessé entre leurs mains, 21 déc. 1584. Enfermé au château de Tournay, il fut traité presque aussi durement que son père. J'ai mon recours, écrivait-il, à prier Dieu, et puis à l'étude. Il sortit de prison en 1591 et se mit au service d'Henri IV, mais son père et lui s'étaient ruinés pour faire face aux dépenses de la guerre. Il dut s'adresser au roi, parce qu'on avait saisi ses bagages. Le roi lui répondit brusquement: Quand il me faut payer mes dettes, je ne vais pas me plaindre à vous. Ce furent les protestants qui les payèrent. Député à l'assemblée politique de Sainte-Foy 1595, il présida celle de Saumur 1596 et celle de Loudun, même année. Il prit une part active aux négociations qui aboutirent à l'Édit de Nantes, vit plusieurs fois Henri IV, et alla servir en Hollande sous les ordres du prince Maurice. En févr. 1612 il vint au secours de Genève, touj. menacée par les ducs de Savoie. En 1617 il fut nommé à La Haye comme envoyé extrordinaire et f 1618 à Paris. Pendant sa captivité il avait composé de jolies Poésies chrétiennes, qn Discours en vers intitulé: Paradoxe « que les adversités sont plus nécessaires que les prospérités et qu'entre toutes Pestat d'une estroite prison est le plus doux et le plus profitable, » La Rochelle 1588; enfin un Dictionn. des rimes françaises. Il avait épousé Marie de Launay, dont il eut deux filles et un fils, Claude, que la faiblesse de sa vue obligea de quitter le service militaire.

LAODICÉE. Des cinq villes de ce nom qui se trouvaient dans l'Asie Mineure, une seule intéresse l'hist. de l'Église; c'est celle qui est située sur le Lycus, et qui appartint tantôt à la Phry-gie, tantôt à la Lydie ou à la Carie. Elle s'appelait d'abord Diospolis, puis Rhoas; Antio-chus II lui donna le nom de Laodice son épouse. Mentionnée Col. 4, 16. Apoc. 1, 11. 3,16. elle fut le siège d'un concile, vers 360 ou 370, qui s'occupa des hérétiques, de la discipline ecclésiastique et de la hiérarchie. Son canon 59 interdit le chant des cantiques non bibliques et composés par des hommes. Le canon 60, quelquefois contesté, énumère les livres de l'A. T.: ils y sont tous, mais pas les apocryphes; et ceux du N. T., mais l'Apocalypse manque.

LAPIDE (Cornélius a), jésuite distingué comme exégète, et faisant encore autorité chez, les catholiques. Né 1598 près de Liège, il fut prof, k Louvain et k Rome, et f 12 mars 1637.

LA PLACE (de) lo Pierre, savant jurisconsulte et historien distingué; né à Angoulôme vers 1520, massacré à la Saint-Barthélemy, 25 août 1572. Avocat du roi à la cour des aides, il en fut nommé président par Henri II. Il avait vu Calvin à Poitiers en 1534, et embrassafran-chement la Réforme après la mort de François II. Quand la guerre civile éclata, il se retira en Picardie, où il composa quelques traités politiques et philos, pleins de sérénité. Plus tard il écrivit l'hist. de son temps jusqu'au colloque de Poissy, 1561, puis un Traité (très calviniste) De l'excellence de l'homme chrétien, dédié à Jeanne d'Albret. Rappelé à Paris, puis exilé de nouveau, sa maison pillée, sa biblioth. détruite, il revint après la paix de Saint-Ger-main, fut réintégré dans sa charge et assassiné.

2o Jean, pasteur à Montpellier 1565-1583, président du synode de Nîmes 1572, homme ferme, fidèle et modéré.

3o Josué, fils et petit-fils de pasteurs, descendant peut-être de Pierre, il était le plus jeune de 5 frères qui tous furent aussi pasteurs: Samuel à Guernesey, Pierre k l'égl. de Sion, Élie à Jersey, David à Laval et La Moussaye. Lui-même né en Bretagne vers 1604, un an avant la mort de son père, fut d'abord prof, de philos. k Saumur, puis pasteur k Nantes 1625 à 1633, et député au synode de Charenton, enfin rappelé comme prof, de théol. k Saumur, où il f 17 août 1665. Homme aussi pieux que savant, il souleva une vive opposition par la tentative qu'il fit, tout en soutenant la doctrine du péché originel, de mitiger celle de l'imputation. Il publia plusieurs thèses sur ce sujet, et fut condamné par le synode de Charenton 1644: Claude compta parmi ses défenseurs sur cette question difficile. 11 a écrit un certain nombre de dissertations, opuscules, thèses, discours, etc.

LAPONIE, la contrée la plus septentrionale de l'Europe, divisée en deux parties, dont les langues ne sont pas les mêmes: la L. russe, qui compte k peu près 10,000 âmes, et la L suédoise-norwégienne, environ 68,000. Séparés du monde par la rudesse de leur climat, ils sont restés longtemps païens, et n'ont pris de la civilisation que les vices, entre autres l'ivrognerie. Cependant les russes ont fini par être soumis à la religion grecque orthodoxe. Quant aux suédois, après plusieurs tentatives sans résultat, une mission fut commencée chez eux sous Gustave Wasa, 1524; des églises furent fondées, et des écoleg ouvertes, mais à cause de la rareté des visites pastorales, leur christianisme ne fut que nominal et ils continuèrent d'invoquer les faux dieux. C'est l'év. Bredahl, de Drontheim, qui le premier entreprit sérieusement de les évangéliser, 1658-1661. Après lui vint l'instituteur Olsen, à Warangar 1703-1717. Frédéric IV de Danemark, ayant fondé un collège pour la propagation de l'Évangile, dirigea l'attention de ses directeurs sur la Laponie. Thomas de Westen y lit plusieurs voyages et y établit des lecteurs et des évangélistes pieux, qui obtinrent de vrais succès. A sa mort 1728, un comptait en Finmark 376 familles chrétiennes, soit 1725 âmes; en Nordland 18 écoles et 5028 Aines; à Drontheim 3 écoles et 428 Lapons, avec 14 missionnaires et 26 instituteurs. Mais le zèle se ralentit. Il se réveilla de nouveau en 1825, et Stockfleth partit pour la Laponie, accompagnant ses pauvres ouailles dans leurs nombreuses pérégrinations. La Société suédoise des missions a pris cette œuvre à cœur, surtout depuis que l'évangéliste volontaire Tellstrôm et ses amis ont montré qu'il y avait là une œuvre a faire, 1836-1846. Outre les temples il y a aussi dans les montagnes de nombreuses maisons de prières. Les Lapons suédois ont eu le N. T. traduit dans leur langue en 1755; Stockfleth Ta traduit en 1840 pour ceux du nord. Les ca-thol. ont commencé en 1855 une mission chez les Lapons norvégiens, ayant aussi en vue les contrées polaires.

LA PORTE, famille cévenole, originaire d'Alais, mais fixée au Mas Soubeyran, entre An-duze et Mialet. Elle se composait, à la révocation de l'Édit de Nantes, de 4 frères: lo le père de Roland (v. ci-dessous), 2o le pasteur du Collet, plus tard aumônier militaire sous le roi Guillaume, 3° un pasteur du désert, supplicié à Montpellier 1696, 4o le successeur de Séguier comme chef des enfants de Dieu. Ce dernier et Roland sont les plus célèbres. Né vers 1657 au Mas Soubeyran, soldat, puis maître de forges au Collet-de-Dèze, La Porte releva en août 1702 le courage des camisards abattus par une défaite a Fontmorte et par le supplice de leur prophète. Le môme soir il avait 20 fusils, des munitions et une trentaine de soldats; bientôt il *>n eut 60, puis 150. Après plusieurs heureuses expéditions, traqué sans relâche et trahi par le consul de Montlezon, il tomba entre les mains de Poul et fut frappé d'une balle, comme il gravissait un rocher pour s'enfuir. Sa tête, portee à Broglie, fut exposée le 25 oct. 1702 à Anduze, puis à Saint-Hippolyte et à Montpellier. Chrétien sincère, homme de prière, âme nobfe et dévouée, il avait électrisé ses compagnons, et en s'offrant pour être leur chef, il faisait acte, non d'ambition, mais d'héroïsme.

5° Son neveu Roland, que l'on continua de désigner par son nom de baptême pour le distinguer, né en 1675, avait servi dans un régiment de dragons. Après la paix de Ryswick il rentra au pays, rejoignit son oncle, organisa le soulèvement de la Vaunage, réunit une cinquantaine d'hommes sûrs dans la vallée du Gardon et désarma les catholiques de Mialet. Élu à l'unanimité comme chef en remplacement de son oncle, il divisa en 5 légions les hommes qu'il avait sous ses ordres, el s'occupa de leur assurer des moyens d'existence et des secours en cas de maladie ou de blessures graves. Les cavernes des moutagnes devinrent des magasins, des ateliers et des ambulances ou hôpitaux. Après avoir désarmé plusieurs villages et brûle plusieurs églises, par représailles, mais sans maltraiter les habitants, il releva le culte protestant partout où il passait. Il prit Sauve et le château de Saint-Félix, entra à Ganges où il fit célébrer le culte, brûla l'égl. de Saint-Lau-rent, mais subit une sanglante défaite près de Pompignan. En 1704 il s'était relevé; il obtint coup sur coup de nombreux avantages, mais se laissa aller à des actes de cruauté qui s'expliquent, sans se justifier, par les cruautés que les catholiques avaient commises contre d'innocents Cévenols. C'est à ce moment que Cavalier traitait avec Villars. D'Aigalliers obtint de Roland qu'il négocierait aussi, et Villars offrit, par le traité d'Anduze, la liberté de conscience pour l'avenir, et l'amnistie pour le passé, mais ce n'était pas la liberté de culte, et Roland en faisait une condition absolue de son désarmement. Il refusa donc. Après la destruction de la flottille qui devait lui apporter du secours, une nouvelle conférence eut lieu à Durfort le 29 juillet 1704, mais n'aboutit pas davantage, Roland demandant au moins 4 temples et refusant de s'expatrier. Peu de semaines après, vendu pour 100 louis par un jeune Malarte d'Uzès, il fut surpris au château de Castelnau, s'enfuit avec quelques amis, mais serré de près par les dragons, il s'adossa contre un arbre pour se défendre et fut tué d'un coup de feu. Son corps fut porté à Nîmes, suivi de 5 de ses lieutenants enchaînés. Il fut brûlé, et les 5 camisards roués. Roland avait la taille avantageuse et bien prise, un beau teint, quoique marqué de la petite vérole, de grands yeux pleins de feu, quoique voilés; la parole brève et énergique, une nature à la fois calme et pleine de vigueur.

LAPSI: mot latin pluriel, qui signifie les tombes, les déchus; il se disait en général de ceux qui pour un péché mortel avaient été exclus de la communion de l'Église, mais dans son sens plus restreint, et aussi plus ordinaire, il s'appliquait à ceux qui avaient renié la foi pendant les persécutions. De longues et vives discussions eurent lieu dans les égl. africaines, sur la question de savoir dans quelles conditions ils pouvaient être réintégrés. Cyprien fut d'abord pour le parti de la sévérité, mais lors du schisme de Felicissimus, le conc. de Carthage 251 se prononça pour les mesures les plus douces, et Rome l'approuva. Le conc. d'Ancyre 314 régla en 7 canons la discipline de pénitence des lapsi, en distinguant plusieurs degrés de culpabilité. Les schismes des mélétiens et des donatistes furent aussi en partie provoqués par des divergences de vues sur cette question. En Orient les mesures de douceur ont toujours prévalu.

LARDNER, Nathanaël, Dr théol. Né 1684 â Hawkhurst, Kent, il étudia à Londres, lîtrecht et Leyde, visita avec un élève la France, la Belgique et la Hollande, et s'établit à Londres, où il se livra à des travaux scientifiques et littéraires. Nommé 1729 pasteur-adjoint d'une égl. dissidente, il donna sa démission en 1751 pour cause de surdité, f 1768. Son principal ouvrage est: La Crédibilité des Saintes Écritures, 17 vol. 1727-1757, espèce d'introduction historique, où il démontre par les témoignages des pères et par de nombreuses citations l'authenticité des livres du N. T. Dans d'autres écrits apologétiques il cherche à montrer que l'idée du christianisme n'a rien de contraire à la raison; il fait en même temps quelques réserves contre la dogmatique traditionnelle, notamment en ce qui regarde la personne de Christ.

LA ROCHELLE, auj. chef-lieu de la Charente-Infér., est une des villes que la paix de Saint-Germain 1570 donna aux protestants comme places de sûreté. Ils la fortifièrent si bien qu'en 1557 elle était leur principal boulevard. Elle fut vainement assiégée par le duc d'Anjou 1573. Richelieu la prit enfin en 1628 après un siège mémorable qui dura 13 mois, et après une défense héroïque de ses habitants. Sa chute marqua la fin de l'existence politique des huguenots, et permit aux rois très chrétiens de procéder peu à peu à la Révoc. de l'Édit de Nantes. Il se tinta La Rochelle deux synodes nationaux, 1571 et 1607. C'est dans le premier que fut confirmée et définitivement adoptée la célèbre confession de foi, qui en a pris le nom, et qui avait été d'abord élaborée au synode de Paris 1559, puis présentée au roi au colloque de Poissy, 1561. C'est auj. un évêché, et un chef-lieu de Consistoire.

LA SALLE, v. Salle.

LAS CASES, v. Casas.

LASIUS, Christophe, théol. de l'école de Mélanchthon, adversaire des fiaciens, et persécuté pour sa foi. Né à Strasbourg, il fut successivement recteur à Gorlitz 1537, pasteur à Greus-sen, à Spandau, à Lauingen et à Cottbus, mais partout destitué, f 1572 à Senftenberg. Ses écrits font un triste tableau de l'état de l'Égl. luthérienne d'alors.

LASKY, Jean (de), ou Lasco, né 1499 appartenait à une noble famille polonaise qui exerçait une grande influence aussi bien dans l'Égl. que dans l'État. Pour compléter sa brillante éducation il voyagea de 152&4525, rencontra à Zurich Zwingle qui attira son attention sur la Bible, à Bâle Érasme qui lui fit remarquer les abus du clergé. Cependant de retour dans sa patrie, il ne quitta pas immédiatement son église, et là, dit-il, il végéta onze ans < dans le pharisaïsme de la propre justice. » Voyant enfin que l'Église romaine ne pouvait pas être réformée, mais qu'il fallait absolument en sortir pour créer une véritable Église chrétienne, il quitta sa patrie pour commencer un pèlerinage qui dura 19 ans, fidèle à sa devise: « Pour le chrétien point de patrie ici-bas, il cherche le ciel. » Il alla d'abord à Louvain, où il se maria 1539, puis à Emden où la régente, comtesse Anna, lui donna un emploi de prédicateur et de surintendant. 11 travailla surtout à faire régner dans son église la paix et la pureté des mœurs, si bien que Emden devint le modèle des églises réformées de la langue allemande. En 1545 il fut appelé à Cologne pour travailler a la réforme avec Mélanchthon et Bucer. En 1550 obligé de quitter définitivement Emden, à cause de ses vues zwingliennes sur la Cène, il partit pour Londres, comme pasteur de réfugiés de diverses nations. Mais après la mortd'ÉdouardVI et à l'avènement de Marie, il dut partir avec 175 membres de sa congrégation. Il chercha en vain un asile durable en Danemark, à Hambourg, à LUbeck, et même à Emden; ce ne fut qu Francfort sur le Main qu'il put séjourner en paix. Enfin en 1556, il put rentrer en Pologne. Il y obtint quelques succès, malgré la résistance du clergé et l'indifférence des nobles. Quatre ans après, 1560, il mourut plein de joie à la pensée d'aller rejoindre son Sauveur.

LASAULX, Amélie (de), en religion sœur Augustine, née à Coblence 17 oct. 1815, fille de Jean-Claude, constructeur et restaurateur d'églises, et d'Anne-Marie Muller. Enfance maladive, caractère énergique et généreux, intelligence supérieure et développée par de bonnes études. Fiancée à un jeune médecin dont elle s'était fail un idéal, elle faillit mourir de douleur en découvrant qu'il n'était qu'un égoïste, et rompit aussitôt son engagement. En 1840, et maigre l'opposition de sa famille, elle entra comme re ligieuse dans la maison-mère des sœurs de l'ho-pitarSaint-Charles Borromée à Nancy et commença par la pharmacie. En 1842 elle fut envoyée à Aix-la-Chapelle, où elle passa 7 ani. Les luttes avaient éclaté en Allemagne contre les catholiques, et elle tenait pour ceux qui respectaient le plus l'indépendance de la conscience et de la foi, quoiqu'elle se cramponnât à l'église visible comme un asile protecteur au milieu des conflits des partis. Nommée supérieure de l'hôpital Saint-Jean-Baptiste, nouvellement construit à Bonn, elle s'y installa le 19 nov. 1849, et en fit l'affaire de sa vie; dévouée autant qu'intelligente, mais refusant de se prêter à aucune tentative de prosélytisme, très estimée, et bientôt célèbre, elle était liée avec les hommes les plus éminents de son temps et recevait les visites les plus considérables; elle vit plus d'une foi la reine Marie-Amélie. La proclamation de l'Immaculée conception la laissa plutôt indifférente. En 1864 le Syllabus € la damnait 16 fois. » Elle s'intéressa vivement à ces questions, et sympathisa avec les prof. Hilgers, DtH-linger, Alzog, les deux Reusch, etc. Elle accompagna comme ambulancière et infirmière l'armée allemande en Schleswig, hiver 1864, et en Bohême, été 1866, et acheva d'y ruiner sa santé. Désolée de l'issue du concile, elle ne se réjouit pas des succès de la guerre qui suivit, car elle savait ce que les champs de bataille coûtent de larmes et de sang. Elle installa dans son hôpital de Bonn de nombreux blessés. Comme elle continuait de recevoir des prêtres suspendus et qu'elle se prononçait franchement contre le conc. de Rome et en faveur des vieux-catholiques, elle fut dénoncée et les suites ne se firent pas attendre; elle fut cassée de sa charge, renvoyée de l'hôpital toute malade, dépouillée de ses vêtements religieux, et se retira à l'infirmerie de Yallendar, près Neuwied, où elle arriva 14déc. 1871; elle y f dim. 28 janv. 1872. Son cercueil fut chargé le lendemain sur un bateau pour Weissenthurm, puis déposé dans une salle d'auberge, et enfin enterré dans un caveau de la famille, avec un faible cortège, sans service religieux, comme une païenne. Seulement le prof. Reusch annonça la récitation du Pater. (iette femme d'élite était morte martyre. Vie, par Reinkens, Bonn, 1878, et par Lecoultre, Lausanne, chez Imer.

LATIMER lo Hugh, né vers 1480 à Thurcas-ton, Leicester, fut d'abord un adversaire décidé de la Réformation, mais converti par Bilney, il en devint un défenseur ardent et dévoué, et obtint de grands succès par ses talents et sa prédication populaire. La faveur d'Henri VIII le protégea contre les persécutions du parti catholique; il fut nommé en 1529 pasteur de Westkingston, et en 1535 év. de Worcester. Il appartenait au parti modéré de Cranmer et de TliomasCromwell, qui n'en voulait qu'aux abus, repoussait les mesures violentes et maintenait la suprématie royale. Aussi lorsque parurent les 6 Articles de saug, 28 juin 1539, il donna sa démission et fut enfermé à la Tour de Londres pendant 6 ans. L'avènement d'Édouard lui rendit la liberté et une place de chapelain à la cour. Mais quand Marie monta sur le trône, elle le fit arrêter comme un des chefs du parti de la Réformation 1553; il fut condamné à mort avec Ridley, et brûlé 16 oct. 1555.

2<> William, un des collaborateurs d'Érasme pour sa 2de édition du N. T. Né 1489, élève d'Oxford, il avait étudié le grec à Padoue.

LATIN. L'usage de la langue latine est encore auj. la règle dans le culte et dans l'administration de l'Égl. romaine. Il date d'une époque où cette langue était pour l'occident presque entier la langue vulgaire, et par la force de l'habitude il s'est conservé dans le culte après que les choses eurent changé. Ce fut d'autant plus facile et naturel que. lorsque le christianisme fut apporté aux peuples germaniques, le culte se réduisait à la simple célébration de la messe, et que les missionnaires s'édifiaient généralement eutre eux; ce n'est que par faveur que peu à peu les baptisés furent admis à y assister. En principe l'Égl. catholique n'a jamais exigé l'usage exclusif du latin; elle a même concédé aux slaves et aux grecs-unis l'emploi de leur langue dans le culte et dans les liturgies. Mais en pratique elle s'est montrée très tenace dans l'intérêt de sa hiérarchie. Les motifs qu'elle allègue sont: le danger que ferait courir à l'unité de la foi la traduction du texte en une quantité de langues différentes; l'impossibilité pour la plupart des prêtres de lire la messe dans une autre langue que la leur, s'ils venaient à changer de résidence; enfin l'incapacité du peuple à comprendre les saints mystères et le danger de le voir les profaner. Mais le vrai motif a été de conserver au siège romain la possibilité d'envoyer partout des prêtres italiens, de leur accorder dans tous les pays des places et des bénéfices, et de s'assurer ainsi ce moyen d'influence, soit sur ses propres créatures, soit sur les contrées étrangères. La langue vulgaire n'est admise que là où il n'est pas possible de faire autrement, pour les mariages, la confession, la prédication. Quant aux nombreux sermons latins que l'on possède, ils étaient prêchés dans des cloîtres ou dans des réunions d'ecclésiastiques; ou bien, écrits en latin, ils étaient débités en allemand. Le latin de l'Église appartient à la latinité corrompue des siècles postérieurs, avec un mélange de mots et de constructions provinciales, grecques et même hébraïques; le moyen âge l'a rendu presque barbare. Dans l'origine il s'était formé d'après la Vulgate; les moines ignorants l'ont défiguré, et le latin de l'office ne rappelle pas même de loin la langue de Virgile ou d'Augustin. La théol. protestante a conservé le latin comme langue scientifique jusqu'au siècle dernier pour les thèses, disser-talions, examens, etc,; l'usage n'en est môme pas encore entièrement perdu, et ce latin se ressent avantageusement de l'étude des anciens classiques. — Bible latine, v. Jérôme et Itala.

LATITUDINAIRES (Les larges, les tolérants). C'est le nom qu'on donna au 17 siècle en Angleterre à un parti d'ecclésiastiques appartenant la plupart à l'Église établie, mais désireux d'amener une entente commune entre les épis-copaux, les presbytériens et les indépendants. Ils tenaient aux 39 articles et à la constitution de leur église, mais ils estimaient que ce n'était pas une raison pour rompre la communion avec leurs frères des autres églises. A la tête de ce parti étaient Chillingworth et John Haies, puis More, Cudworth, Tillotson, Spencer, etc. Cette tentative, malgré l'appui du lord chancelier Clarendon, échoua devant l'opposition violente des évêques et devant la résistance un peu étroite des dissidents calvinistes. Dès lors le nom fut pris en mauvaise part et servit à désigner non seulement ceux qui se montrent conciliants sur les points secondaires, mais encore ceux qui sont indifférents aux questions religieuses, les sceptiques, les sociniens, les athées, etc. Plus récemment il a été appliqué à la tendance des Arnold et des Coleridge qui, tout en maintenant les principes évangéliques, mettent le christianisme vivant au-dessus des confessions de foi ecclés. ou dogmatiques.

LATOMUS lo Jacques Masson, théol. catholique, chanoine à Louvain, connu par la réponse que Luther lui adressa de la Wartbourg. à l'occasion de la censure de ses écrits. Né dans le Hennegau, il f 1544. — 2o Même nom, cousin du précédent dont il a publié les oeuvres; aussi chanoine à Louvain. f 1596. — 3° Même nom, contemporain de Luther, abjura le protestantisme par intérêt et mourut dans le désespoir à Louvain; il était juriste. — 4<> Barthélémy, né à Arlon 1485, successivement prof, à Trêves. Cologne et Paris, enfin conseiller électoral à Coblence; auteur de quelques écrits conlre Bu-cer et Andréa, f 1566.

LATRAN, ou Lateran, splendide palais, bâti à Rome par Lateranus Plautius et longtemps connu pour un des plus magnifiques monuments de la vieille cité, sous le nom de domus Latera-norum. Néron le confisqua et fit mourir son propriétaire, l'accusant d'avoir conspiré. Les emp. en firent souvent leur résidence. Constantin le donna au pape Sylvestre, qui s'y établit et ses successeurs après lui, jusqu'au moment de leur départ pour Avignon. A leur retour ils s'installèrent au Vatican, et le Latran fut aménagé pour des collections artistiques. L'église attenante est la vraie paroissiale de Rome, et chaque pape, à son entrée en fonctions, s'y rend pour en prendre solennellement possession;

c'est aussi de là qu'il bénit le peuple le jour de l'Ascension. Cette basilique, connue sous le nom de Saint-Jean de Latran, fut construite par Constantin. C'est la plus ancienne de l'Occident; elle a cinq nefs, sur quatre rangées de colonnes. Innocent X la fit restaurer. Elle est riche en antiquités et en reliques; on y montre encore les têtes de Pierre et de Paul, le plateau sur lequel notre Seigneur a célébré la Cène, et, sous le maître-autel, l'autel de bois sur lequel les papes ont dit la messe jusqu'à Sylvestre. Près de là est le baptistère de Saint-Jean, aussi de Constantin; bâtiment octogone; au milieu, entourée de colonnes de porphyre, une antique baignoire en basalte verte. Deux chapelles y furent annexées par Hilaire 452-468, l'une consacrée à Jean-Baptiste, l'autre à l'évangéiiste. L'égl. de Saint-Laurent appartient encore à cet ensemble d'édifices; on y arrive de la place par cinq escaliers; celui du milieu est la Scala santay qu'on dit venir de la maison de Pilate à Jérusalem; on ne le gravit qu'à genoux et en priant. Sur la place, devant l'église, Sixte V a fait dresser l'un des deux obélisques que Constantin avait fait venir d'Héliopolis.

Conciles du Latran. Il s'est tenu dans ce palais 11 conciles, dont 4 écuméniques. Le premier fut convoqué par Martin 1er 649; il condamna le monothélisme et déplut à l'emp. Constant II, qui fit arrêter le pape et l'envoya prisonnier à Constantinople. C'est en 1125, sous Calixte B, que se réunit le premier conc. ècuménique de ce nom, compté généralement comme 9ni<* écu-ménique, bien qu'à tort, puisque l'Orient n'y était pas représenté. Il traita des investitures et confirma le concordat de Worms. Mille prélats y assistèrent. Le 2d de Latran, avec le même nombre d'évéques, eut lieu en 1139 sous Innocent II; il mit fin au schisme de l'antipape Anaclet, excommunia Roger de Sicile son protecteur, et condamna au feu Arnaud de Brescia. Le 3m«, 1179, sous Alexandre III, vota 27 canons sur la discipline des ecclésiastiques et décida que les deux tiers des voix seraient nécessaires pour l'élection d'un pape; on n'y compta que 300 évêques. Le 4®* enfin, 1215, sous Innocent III, marque l'apogée de la puissance pontificale. On y voit 71 primats, 412 évêques, 800 abbés et prélats, et de nombreux envoyés des puissances. Les décrets sont rendus au nom du pape, avec l'approbation du concile; ils sont au nombre de 70 et portent sur la discipline et le dogme; ils établissent la confession auriculaire et la transsubstantiation; ils condamnent les manichéens, les vaudois, les albigeois, Amal-rie de Bènes, et Joachim de Flore. Enfin ils décident une nouvelle croisade. L'inquisition date aussi de cette session. Faut-il compter comme 5* conc. écuménique de Latran, celai qui fut ouvert en 1512 par Jules II eu opposition à celui de Pise, dont il annulla les décrets? Fort peu d'évêques y assistèrent, et tous italiens. Il avait si peu à faire que, dans la 3roe session, il fut consulté sur la translation d'une foire de Lyon à Grenoble. Cependant il publia la bulle Pater œternus et abolit la Pragmatique sanction. Benoît XIII convoqua 1725 un 6®e conc. à Latran, pour lui faire approuver la constitution Unigenitus.

LAUD, William, arch. de Cantorbéry. Né 7 oct. 1573 à Reading, il montra déjà au collège d'Oxford des tendances vers le catholicisme. L'év. de Rochester, qui le protégeait, le présenta à Jacques I<", qui le nomma son chapelain et lui confia la direction de Johns-College à Oxford. En 1616 Laud fut nommé doyen de Glocester. Il accompagna le roi en Écosse, dans le voyage qu'il fit pour soumettre les trois royaumes à la même religion. Nommé év. de Saint-David, il introduisit dans son diocèse un rituel presque catholique. Son idéal était sans doute l'Egl. des premiers siècles, et il reconnaissait que l'Égl. romaine s'en était ecartée; mais elle avait conservé l'épiscopat et la succession apostolique. Pour lui c'était l'essentiel. Sons Charles son influence alla croissant. Il fut successivement év. de Bath et Wells, puis de Londres, conseiller du roi, administrateur de l'archevêché de Cantorbéry, enfin premier ministre après la mort de Buckingham. Il fit un nouveau voyage en Écosse avec le roi 1633, et froissa le peuple par ses manières orgueilleuses, mais bien plus encore par son zèle arminien, épiscopal et semi-papiste. Nommé archev. de Cantorbéry à son retour, il imposa à l'Angleterre une liturgie et des règles canoniques auxquelles les dissidents * taient obligés de se soumettre, mais les puritains d'Ecosse résistèrent. Ils formèrent en 1639 la sainte Ligue et se préparèrent à se défendre. Le roi s'étant décidé enfin, après 11 ans, à convoquer à Londres son parlement, avril 1640, il y éprouva un échec; le parlement voulut restreindre l'absolutisme royal et refusa les subsides. Il fut dissous. (Jn second parlement (qui fut le Long), convoqué le 30 novembre, se montra plus hostile encore. Laud fut déclaré coupable de haute trahison et responsable de la guerre d'Écosse. Son procès ne fut ouvert qu'en 1644; il fut condamné à mort, et décapité 16 janv. 1645. Sa tendance a reparu de nos jours sous le nom de Puséisme. Son journal (Diary) écrit par lui-même, a été publié par Wharton, 1695.

LAUDA, Sion, Salvatorem: premières paroles d'un cantique de Thomas d'Aquin pour la Fête-Dieu. Elles signifient: Sion, loue le Sauveur!

LAUDEMIUM, en termes canoniques, espèce de droit de mutation, ou d'impôt, que le propriétaire perçoit à chaque changement de vassal ou de fermier, à moins que ce ne soient les descendants directs du titulaire. Ce droit varie entre !/*o et V^o de la valeur de la propriété.

LAUDES (louanges): une des prières du bréviaire; elle devrait se dire à 3 h. du matin, mais elle se confond d'ordinaire avec les Matines. Ce sont surtout des chants de louanges, dans le genre du cantique de Zacharie; ils renferment aussi des invocations à la Vierge et au patron de l'eudroit.

LAUNOY lo Jean (de), né 21 déc. 1603 à Val-de-Sis, près Coutances, f 10 mars 1678 à Paris, Théologien, il visita Rome dans sa jeunesse et passa le reste de sa vie à Paris, où il se lia entre autres particulièrement avec le cardinal d'Es-trées. Il ne voulut point accepter de fonctions ecclés., mais se consacra à l'enseignement de la théol., comme docteur en Sorbonne et écrivit de nombreux ouvrages sur la théol. et l'histoire. Esprit indépendant et judicieux, il défendit le gallicanisme et entra en conflit avec plusieurs ordres religieux, dont il combattit les privilèges, ou dont il contesta les miracles, entre autres les jésuites et les carmélites. On l'avait à cause de cela surnommé le Dénicheur de saints. Daus son premier écrit il défend la doctrine de Durand sur les rapports de la volonté de Dieu avec le péché des hommes (De la prédestination et de la grâce). Il a écrit aussi sur les premiers temps de l'Égl. chrét. en France, sur la doctrine du conc. de Trente relativement à l'attrition et la^ontrition, sur le droit des ordres mendiants de confesser sans l'autorisation du prêtre de la paroisse. Son traité de la Puissance royale sur le mariage est intéressant en ce qu'il établit le droit de l'autorité civile à déterminer les causes d'empêchement, et qu'il réduit les empêchements ecclésiastiques à n'être plus qu'un accessoire. Ayant refusé de souscrire à la condamnation d'Arnauld, il fut exclu delà Sorbonne.—2° Chanoine de Paris, connu seulement par ses violentes prédications contre les huguenots sous Henri IU.

LAURE, v. Couvents.

LAURENT lo martyr. D'après la tradition c'était un archidiacre de Rome; il souffrit le martyr pendant les persécutions de Valérien 257-258, immédiatement après Sixte II. Déchiré d'abord à coups de fouet, il fut placé sur un gril ardent au-dessus de charbons embrasés; il brava ses bourreaux en demandant qu'on le retournât sur le gril. Sommé de livrer les trésors des chrétiens, il avait amené les pauvres et les malades comme le vrai trésor de l'Église. Le poète Prudence l'a glorifié.

2o Antipape, nommé 498 en concurrence avec Symmaque après la mort d'Anastase. Il était archiprétre à Rome et représentait le parti de l'Hénoticon. Théodoric, appelé comme arbitre, mit fin au schisme en se prononçant pour Sym-maque qui avait été nommé le premier et avait obtenu le plus de suffrages.

3<> Lorenzo Giustiniani, né 1380 d'une ancienne famille de Venise, général des chanoines réguliers de Saint-Georges in Alga, év. de Venise 1433, patriarche en 1451, f 1455; auteur de quelques écrits théologiques.

4° V. Valla. — 5® Archev. de Cantorbéry au 6®« siècle. — 60 Archev. de Dublin au 12®«.

LAVAGE des pieds. En souvenir et en accomplissement littéral de Jean 13, 14. les Égl. grecque et latine, qui en avaient fait d'abord un sacrement, ont conservé en quelques endroits la coutume que, le jeudi saint, le pape, certains princes, desévéques, des abbés de couvent, lavent avec un cérémonial convenu les pieds de 12 pauvres vieillards. Saint Augustin et le conc. de Tolède 694 prouvent aussi que dans l'anc. Église cet usage se pratiquait quelquefois.

LAVATER, Jean-Gaspard, né à Zurich 15 nov. 1741, fds d'un médecin, fit ses études dans sa ville natale et entra 1762 dans la carrière pastorale. Nature timide, il savait être énergique lorsque sa conscience parlait. En 1762 il attaqua publiquement un bailli prévaricateur et le força de rendre ses comptes. Il gagna son procès, mais jugea prudent de s'absenter pour quelque temps, jusqu'à ce que l'affaire fût un peu oubliée. Il partit avec ses amis Fttssli et Hess, vit Gellert à Leipzig, Spalding à Bart, Jjp-ler à Berlin, Klopslock à Quedlimbourg. De retour à Zurich, il épousa en 1762 Anna Schinz et continua de vivre 8 ans encore chez ses parents. Sans place il s'occupa de littérature; il publia en 1766 ses Chants suisses; en 1767 ses Vues sur l'éternité, qui le mirent en rapport avec Herder, Oberlin, et d'autres éminents personnages. En 1768 il entra en correspondance avec Ch. Bonnet et Moïse Mendelssohn. Presque en même temps la vie pratique s'ouvrait devant lui; nommé diacre en 1769, il finit par de venir premier pasteur de l'égl. de Saint-Pierre, et sa réputation comme prédicateur égala celle qu'il s'était acquise comme écrivain. Profondément pieux, avec une forte tendance mystique, il s'éleva contre toute tentative faite pour ramener le christianisme à n'être qu'un déisme, mais il n'aimait pas disputer sur les formules théologiques. Sa foi en Dieu, en l'efficacité de la prière, à la vie intérieure, aux pressentiments, l'empêcha de traiter de charlatans les Cagliostro, les Mesmer, les Gessner; cependant il ne se livra pas à eux sans réserve. Mais ce qui l'a rendu surtout célèbre, ce sont ses études physiogno-moniques. Il en faisait non point un objet de curiosité, mais un moyen de populariser la connaissance de soi-même et d'autrui, pour apprendre aux hommes à se mieux juger et à se mieux aimer. Ses Fragments physiognomoniques, publiés de 1775 à 1778, lui procurèrent de nobles relations, Jung Stilling, Wieland, Fichte, Jacobi, et si elles lui attirèrent des critiques, elles excitèrent ailleurs un véritable enthousiasme. Gœthe fut même un de ses collaborateurs. En politique il ne voulait pas plus du cosmopolitisme de Herder et de Gœthe que des procédés révolutionnaires du chancelier Waser. Il déplora en chaire les massacres du 10 août et la mort de Louis XVI. A cette époque de troubles il eut 1»> courage civique de l'impartialité et devint un moment suspect à tous; il fut même conduit brutalement à Bâle, quoique malade, et empri -sonné pendant 3 semaines par les Français, accusé d'avoir correspondu avec la Russie. S011 innocence fut bientôt reconnue et il put revenir se soigner chez lui. Après la bataille de Zurich, 25 sept. 1799, il était dans la rue, distribuant des vivres, du vin et de l'argent; un grenadier français lui tire dessus et la balle le frappe au-dessous des poumons. Il survécut 15 mois à cette blessure, mais touj. souffrant, et souvent alité. Il essaya encore de prêcher en sept. 1800. mais ce fut la dernière fois; après de cruelles souffrances, il f paisiblement 2 janv. 1802. Parmi ses ouvrages en vers et en prose, nommons encore le Cœur humain, Jésus le Messie, les Paroles de Jésus, Joseph d'Arimathée, Poncv Pilate (ou l'Indifférence religieuse), la Parole d'un Suisse libre à une grande nation 1798, et ses deux dernières brochures: Lettre contre la déportation pour délits politiques, et Chant du Cygne. Ce qu'il y avait de plus remarquable chez Lavater, c'était sa personnalité sympathique et pénétrante. On l'a comparé quelquefois à Fénelon; inférieur comme écrivain, il lui était supérieur comme caractère, plus ferme dans ses convictions. Son éloquence, parfois un peu Ion* gue, était onctueuse et persuasive, et comme elle était l'expression vraie de l'homme lui-même, elle produisait de grands effets.

LAYARD, Austen-Henry, célèbre par sa découverte des ruines de Ninive et de Babylone. 1845 et 1848, est né 5 mars 1817. Il a été nommé en 1852 sous-secrétaire d'État au ministère des aff. étrang. à Londres et a dès lors reni l'ambassade de Constantinople; mais malgré ses mérites et sa connaissance de l'Orient, il n'a pas trouvé grâce devant certaines influences ministérielles, et a été mis en disponibilité.

LAYMANN, Paul, jésuite, né 1576 à Inns-bruck, ou à Deux-Ponts: prof, de philos, et df théol. morale à Ingolstadt, Munich, Dillingen. Bamberg et Cologne; très considéré comme ca-suiste dans son ordre à cause des développements qu'il a donnés au probabilisme. Il a été si loin sous ce rapport que même la bulle d'Innocent XI, 1679, le nomme parmi les jésuites dont les maximes morales sont frappées d'excommunication. f de la peste à Constance 1635.

LAYNEZ, v. Lainez.

LAZARE (Hospitaliers de Saint-), ordre religieux qui date des croisades; fondé à Jérusalem au 12®* siècle, reconnu par le pape 1255, avec mission spéciale de soigner les lépreux. Il tirait son nom du pauvre Lazare, Luc 16, 20. Introduit en France sous Louis VII, il perdit sa raison d'être à mesure que la lèpre diminua; le titre de chevalier de Saint-Lazare ne fut bientôt plus qu'honorifique et il finit par disparaître à son tour. De Lazare sont dérivés les mots de lazaret, et de ladre qui signifiait lépreux.

LAZARISTES, ordre fondé 1624 par Vincent de Paule, à la demande et avec l'aide du comte de Gondy, pour visiter et instruire dans la religion les classes pauvres et le peuple des campagnes. On les appelait Prêtres de la mission, et le nom de lazaristes leur vint de ce qu'ils s'établirent d'abord dans un collège qui avait appartenu à l'ordre militaire de Saint-Lazare. Urbain VIII les autorisa. Ils se répandirent assez promptement en France, encore du vivant de leur fondateur, et ils ouvrirent des séminaires en Italie, Pologne, Irlande, Alger et Tunis. Supprimés à la révolution, ils furent rétablis en 1804 et définitivement en 1816. Ils comptent auj. plus de 700 membres, travaillant surtout dans le Levant, en Chine, aux États-Unis et au Brésil. Ils sont chargés de l'enseignement dans plusieurs diocèses étrangers.

LAZIENS, peuplade qui habitait laColchide, auj. le pays des Lesghiz, entre le Phase et le Bathys. Un de ses princes, Tyathus, fit en 520 le voyage de Constantinople pour s'assurer l'appui de Justinien contre les Perses. Il se laissa baptiser et épousa une Grecque de distinction. Le peuple accepta ce changement de religion et montra même du zèle pour la propagation de l'Évangile. Les Perses essayèrent de les fixer davantage dans l'intérieur du pays.

LEADE, Jane, née 1623 près de Norfolk, élevée dans l'Égl. anglicane, mariée en 1644 à un marchand, veuve en 1671, aveugle en 1690, 113 août 1704. Elle eut des visions, des révélations, surtout après son veuvage, et devint le centre d'une petite secte qui compta jusqu'à cent membres. Elle regardait la sagesse (Sophia) comme l'épouse de Dieu et la mère des croyants; elle attendait la prochaine venue de la nouvelle Jérusalem, et le rétablissement de toutes choses. A l'instigation deschiliastes allemands Petersen et Kelner, elle fonda avec Bromley et Pordage une société qui prit le nom de Philadelphie (amour fraternel), mais qui s'éteignit avec elle.

Ses ouvrages, devenus très rares, sont écrits dans un style mystique et obscur.

LÉANDER, archev. de Séville en 578, était le frère aîné d'Isidore et fils du préfet Sévérien de Carthagène et de Turtura. Il gagna au christianisme le prince Hermenegild, fils de Léovi-gilde, et se rendit même à Constantinople pour lui chercher un appui contre son père. Le jeune prince ayant été vaincu et mis à mort, Léander fut jeté en prison, mais le successeur de Léovi-gilde, Reccared, le fit relâcher et embrassa la foi chrétienne. Léander présida le conc. de Tolède 589, où l'arianisme fut condamné et la doctrine évangélique nettement formulée. En 590 nouveau concile à Séville, où il défendit les droits de la cour de Rome; Grégoire l** l'en récompensa en lui envoyant le pallium (ils s'étaient connus à Constantinople). On a encore de lui son discours à Tolède et la règle qu'il donna aux religieuses; on possède aussi la réponse que lui fit Grégoire portant que pour le baptême une seule immersion suffit, tandis que les ariens en voulaient trois.

LÉBRIJA, ou Lebrixa, ou Nebri$$a, Aelius Antoine, le restaurateur des études classiques en Espagne. Né 1444, il étudia à Salamanque et visita ensuite les univ. italiennes. A son retour il occupa divers emplois administratifs et fut nommé professeur à Séville et à Salamanque. Ses efforts pour relever les études furent couronnés de succès. Il composa un Dictionn. latin sous les auspices du cardinal Zuniga, grand-maître de l'ordre d'Alcantara. Ximénès le nomma 1508 à Alcala, et en 1513 il retourna définitivement à Salamanque où il f 1522. Il avait travaillé à une révision de la Vulgate, et collaboré à la Polyglotte de Ximénès. Ces travaux critiques lui valurent les censures et les tracasseries de l'Inquisition, mais la protection de Ximénès le sauva.

LEBUIN, ou Liafwin, anglo-saxon; appelé par une vision, il obtint de Grégoire d'Utrecht la permission d'évangéliser les Frisons et les Saxons. Il construisit plusieurs églises, mais qui furent bientôt démolies. Lui-même, au cœur de la Saxe, n'échappa à la mort que par la protection d'un noble. II revint dans la Frise et releva les ruines du temple de Deventer. f vers 775.

LECTEUR (anagnoste), celui des clercs qui était primitivement chargé des simples lectures dans le culte; c'était le degré inférieur de la prêtrise. Depuis que dans la messe les diacres et les sous-diacres remplissent cet office, la fonction a disparu, mais elle est encore rappelée pour la forme dans le rite de l'ordination. Il faut mentionner trois autres catégories de lecteurs, qui n'ont rien de commun axec l'ancienne charge de ce nom: le lector dignitatis, qui règle dans les égl. cathédrales Pensemble et la suite des lectures à faire; le leetor mensœ, lecteur de table, qui dans les couvents et les sociétés religieuses fait# la lecture pendant les repas; et le lecteur, ou"professeur, qui enseigne dans les écoles et les séminaires épiscopaux.

LECTIONNAIRE. recueil des fragments qui doivent être lus le dimanche on aux différentes fêtes. Le plus ancien document de ce genre, et qui sert encore de base au Lectiomrium plenarium, est le Cornes, ou Compagnon, de saint Jérôme; on l'appelait major ou minor, le grand ou le petit, suivant qu'il donnait le texte entier ou seulement le commencement et la fin des péri-copes. Le I^ect. gallicanum, découvert par Ma-billon au couvent de Luxeuil, et qui servait clans l'ancienne Égl. des Gaules, est écrit en lettres mérovingiennes; il ne mentionne qu'un petit nombre de fêtes, mais entre autres celle de sainte Geneviève; enfin, contrairement au rite grégorien, et conformément à la vieille coutume gauloise, il a trois fragments pour chaque messe. Le Lect. romain renferme, outre les Èpîtreset les Évangiles, d'autres fragments des Écritures appropriés au culte.

LECTURiE, lectures. On désigne ainsi divers écrits, discours, ou leçons sur le droit romain et le droit canon. Ce sont des travaux d'exégèse, ou des explications, qui n'ont pas de valeur officielle et qui ne donnent que l'opinion dp l'auteur. Les principaux ouvrages de ce genre sont dus à Baldus, Pierre d'Ancharono, Jean d'imola, Alexandre Tartagnus, Barbatia Siculus, Pierre Sandeus et Franciscus de Accoltis.

LEE 1° Anna, née 1735 à Manchester, femme d'un maréchal, se donna dès 1768 parmi les quakers comme une prophétesse, comme la Parole et l'épouse de l'Agneau, dont devait naître le nouveau Messie. Persécutée en Angleterre, elle émigra 1774 avec ses disciples en Amérique, où elle f 1784 sans avoir accompli sa prophétie. Ses sectateurs, peu nombreux, se sont maintenus jusqu'à ce jour, et portent le nom de shakers pour rappeler la danse qui fait partie de leurs cérémonies religieuses; ils vivent dans le célibat, la pauvreté et l'attente du Seigneur.

2° Édouard Lee, né 1482 à Lee-Magna, Kent, chapelain d'Henri VIII 1529, archev. d'York 1531, connu surtout par ses démêlés avec Érasme et les humanistes, qu'il avait provoqués par ses critiques de la trad. de la Bible d'Érasme, f 13 sept. 1544.

LEFEVRE d'Étaples (Faber Stapulensis), né 1450 à Étaples, un des pères de la renaissance et même de la Réforme en France. Après avoir étudié à Paris où il prit le grade de maître ès arts, il vint en Italie et visila plusieurs contrées de l'Europe, et même, dit-on, de l'Orient. A son retour il fut nommé maître de mathématiques et de philos, au collège du cardinal Le Moine à Paris. L'év. Briçonnet, de Meaux, qui l'appréciait à cause de ses talents, de son savoir et de sa piété, lui offrit dans son monastère de SaintGermain-des-Prés un paisible asile contiv les ennemis, théologiens et moines, que lui attirait son indépendance en philosophie. Louis XII l'avait protégé; François I«r le protégea aussi contre la Sorbonne. Il avait beau t faire les plus grandes révérences aux images, » on lui reprochait surtout de distinguer les trois Marie, la pécheresse, la sœur de Lazare et la Made-laine, que le bréviaire confond en une seule: ses livres allaient être brûlés, et lui-même peut-être aussi, comme Berquin, lorsque Briçonnet le nomma son grand-vicaire, 1 mai 1523, Marguerite de Valois obtint de François que les poursuites fussent arrêtées. Leffevre continua ses travaux sur la Bible, qui achevèrent de k gagner entièrement à la Réforme, sans toutefois qu'il ait jamais rompu officiellement avec l'Égl romaine. De 1523 à 1525 il traduisit le N. 1. avec notes; les persécutions se renouvelèrent, et Louise de Savoie, faisant l'intérim du vaincu de Pavie, Marguerite fut impuissante à le protéger, d'autant plus que Briçonnet lui-mêm» faiblissait. Lefèvre s'enfuit à Strasbourg, nov 1525. Mais François le rappela, lui confia l'éducation de son fils Charles, duc d'Orléans, f 1545, et Marguerite le nomma son bibliothécaire à Blois. C'est là qu'il acheva la trad. de l'A. T. 1528. Il partit ensuite 1531 avec Marguerite pour Nérac, où il f 1536 sur les terres du roi de Navarre. Il a énormément écrit; outre les livres indiqués, on a encore de lui une trad des Homélies de Chrysostome sur les Actes, un Catalogue de la biblioth. du château de Blois, le Quintuplex Psalterium avec notes, des Comment. sur les 14 ép. de Paul, sur les 4 Évang.. sur les ép. catholiques; plusieurs études sur ^ristote, une trad. de la Théologie de Jean Da-mascène, etc. D'un caractère doux et facile, de mœurs irréprochables, ne rêvant que de scieno et de vérité, il eut cependant de nombreux adversaires, et à leur tête le même Noël Beda qui venait de faire condamner Berquin. Il se reprochait à la fin de sa vie de n'avoir pas su se fair brûler comme tant d'autres !

LÉGATS. Comme conséquence naturelle du droit que les papes se sont attribué de gouver ner le monde, ressort le droit pour eux de se faire représenter d'une manière permanente ou occasionnelle sur divers points de leur territoire ecclésiastique, par des hommes auxquels ils délèguent tout ou partie de leurs pouvoir> absolus. Ce droit a été contesté par ceux qui n'admettaient pas la suprématie des év. de Rome, p. ex. les églises d'Afrique. Dans lagie, au 4me et au siècle, c'étaient les ét eux-mêmes qui étaient chargés en certaines circonstances de cette délégation; quelquefois aussi les papes envoyaient des hommes spéciaux, tels que Boniface en Allemagne, Augustin en Angleterre. A mesure que s affaiblit la discipline et que les rapports avec les autorités temporelles se multiplièrent et se compliquèrent, le nombre des légats augmenta et il fallut au lime siècle fixer plus exactement leurs attributions. Mais, comme souvent ils empiétèrent sur la juridiction épiscopale, il en résulta des froissements et des récriminations de la part des évêques, et Rome dut consentir à limiter la compétence de ses délégués, dont l'exercice fut d'ailleurs subordonné à l'autorisation préalable du prince temporel. On en revint à rattacher les fonctions et surtout le titre de légats à certains archevêchés, tout en réservant au besoin le cas de légations extraordinaires: de là la distinction entre les légats nés (nati) et les légats envoyés (missi ou dati). Cette institution prit une importance exceptionnelle aux temps de la Réforme, où il s'agit k la fois d'organiser les missions et de combattre les princes et les peuples qui avaient accepté le retour à l'Évangile. Le conc. de Trente fut présidé par des légats. Des nonces, ou légats permanents, furent installés k Lu-cerne 1579, à Vienne 1581, à Cologne 1582, k Bruxelles 1588; mais ils ne tardèrent pas, à cause de leurs empiétements, à devenir une source continuelle de conflits et de discorde, si bien que des plaintes incessantes s'élevant, l'existence de ces nonciatures fut rangée au nombre des griefs (grammina) de la nation allemande. L'emp. Charles VI déclara en 1736 qu'il ne voulait plus de nonces à Cologne, parce qu'ils troublaient la paix du pays: de même en 1761 le prince électeur du Palatinat. La lutte prit un caractère plus aigu encore lors de rétablissement d'une nonciature k Munich et de la nomination du comte Zoglio à ce poste; les archev. répondirent k ses empiétements par les résolutions connues sous le nom de Ponctation d'Ems q. v., qui n'eurent malheureusement aucune suite, à cause de la mort prématurée de Joseph II. Auj. les légats sont considérés comme des ambassadeurs, jouissant des mêmes privilèges sous les mêmes conditions. On distingue encore les légats de naissance, c.-à-d. dont le titre est attaché à certaines fonctions, sans leur donner d'autres droits que des honneurs, et quelquefois un traitement, et les légats en fonctions régulières qui ont généralement le titre de nonces apostoliques, ou d'internonces s'ils n'ont qu'une mission diplomatique momentanée. Le titre de vicaire apostolique suppose une mission chez les païens et relève directement du collège de la Propagande. Le légat a latere, ou de la-tere, remplace immédiatement et absolument le pape dans la mission spéciale qui lui est confiée. Ce n'est plus la coutume d'envoyer des cardinaux comme légats, depuis que les légats ne sont plus que de simples ambassadeurs, mais quel que soit leur rang dans la hiérarchie, les légats ont le pas sur tous les dignitaires ecclésiastiques. La Suisse a renvoyé son nonce et supprimé la nonciature 12 déc. 1873 à cause d'une tentative d'empiétement de son dernier titulaire, M. Agnozzi.

LÉGENDES (fragments à lire). On désignait ainsi dans l'origine, en général les morceaux qui devaient être lus dans les églises, puis plus spécialement certains fragments des Actes des saints ou des martyrs. Peu à peu le même mot servit à désigner tout récit de la vie d'un saint avec l'accompagnement obligé d'un peu de merveilleux et de surnaturel. De bonne heure, avec ou sans intention, l'on prit l'habitude de rattacher à l'hist. de chaque saint des embellissements poétiques et fictifs, qui ont fini par ôter aux légendes tout caractère de crédibilité; elles sont devenues le synonyme de fables (Luther, au lieu de légende, les appelait lugende, les menteuses). Le moyen âge a été l'époque privi légiée de ce genre de littérature, et à mesure que le goût baissa la légende dégénéra, tombant du mythe dans la fable, et du merveilleux dans l'extraordinaire, le puérile et le burlesque. Les légendes des saints sont encore auj. la lecture favorite recommandée aux populations catholiques. Depuis Herder les auteurs qui se respectent ont essayé de leur rendre leur poésie première, mais cette entreprise est neutralisée par les légendes de plus en plus ridicules que l'on cherche k accréditer parmi le peuple, légendes neuves, dont les vrais détails sont souvent dénoncés par les évêques eux-mêmes, et quelquefois flétris par les tribunaux, soit en Allemagne, soit en France et ailleurs (la Sa-lette, Lourdes, etc.). Le recueil le plus complet est celui des bollandistes, q. v. Les latins comptent à leur avoir un Martyrologe attribué à Jérôme; les grecs, le recueil de Métaphrastes. — Quant k la Légende dorée, v. Voragine.

LÉGER lo v. Léodegar. — 2° Antoine, originaire de la vallée de Saint-Martin, né 1594; pasteur dans les Vallées et à Constantinople; puis pasteur et prof, de théol. et de langues orientales à Genève, f 1661; auteur de 3 vol. de Sermons, publ. Genève 1720. Ami de Cyrille Lucar, il avait publié avec lui un N. T. en grec ancien et grec moderne. Aimé et respecté pour ses talents, sa modestie et sa sainteté.

3o Jean, neveu du précédent, fils du consul de la Vallée; né 1615; pasteur de Saint-Jean, dans les Vallées vaudoises, et modérateur, fuj plusieurs fois condamné à mort, et finit par se retirer à Genève d'abord, puis à Levde où il fut nommé pasteur, se remaria 1665, écrivit son Hist. générale des Égl. vaudoises, 1669, et f avant 1684. Son Histoire, 2 forts volumes, ne raconte proprement que la persécution de 1655; elle est plas remarquable comme couleur locale que comme rédaction; il semble qu'on assiste aux terribles événements, et si le style en est parfois passionné, cela s'explique de la part d'un homme qui en a été le témoin oculaire et la victime. Il faudrait n'avoir pas de cœur pour raconter de sangfroid les atrocités dont il s'est fait l'historien, et dont il répète si souvent: « J'ay esté témoin; j'ay vu de mes yeux. » Il a écrit aussi une Remonstrance pour les Vallées, et une Apologie des Égl. du Piémont.

LÉGION, corps d'armée des milices romaines. Elle se composait en général de 6000 hommes divisés en 10 cohortes, 30 manipules et 60 centuries, pas touj. au complet. Deux légions appartiennent à l'hist. de l'Église: 1° la légion Fulminante, ou foudroyante, primitivement appelée Mélitine, parce que Trajan l'avait installée à Mélitène, près de l'Euphrate. Elle était toute composée de chrétiens, et devait son surnom, d'après Eusèbe et Tertullien, au fait qu'en 174, sous Marc-Aurèle, l'armée poursuivant les Qua-des dans les forêts de la Germanie, se trouva engagée dans une solitude sans eau, ni sources, et allait périr; mais les chrétiens de la légion obtinrent de Dieu par leurs prières un orage accompagné d'une pluie torrentielle, qui eut le double effet de fournir de l'eau aux Romains et de jeter le désordre dans les rangs enuemis. En suite de cette délivrance Marc-Aurèle serait devenu plus favorable aux chrétiens. Mais cette belle légende est démentie par le fait que Marc-Aurèle persécuta les chrétiens en 177, et par cet autre fait que l'armée romaine comptait déjà depuis longtemps sa légion Fulminante.

2<> La légion Thébaine, ou thébéenne, toute composée de chrétiens (levés en Thébaïde?). Une légende raconte que, sous Dioclétien ou Maximien, cette légion, commandée par Mauri-tius, ayant refusé soit de sacrifier aux idoles, soit de prendre part à une persécution dirigée contre les chrétiens, fut d'abord décimée par l'emp. irrité; puis, cette exécution partielle n'ayant pas suffi, entièrement passée au fil de l'épée par le reste de l'armée. La chose aurait eu lieu à Martigny (Octodurum). Le nombre des martyrs indiqués varie entre 6000 et 6666. Leurs ossements auraient été retrouvés et recueillis en partie à Agaunum, qui aurait pris dès lors le nom du chef de la légion, saint Maurice, et qui est auj. un lieu de pèlerinage assez fréquenté. On conserve à Cologne les crânes de 57 de ces saints, dont une femme. La légende a été racontée pour la première fois par Euchère, év. de Lyon vers 430, à moins, comme le pense

Rettberg, qu'il s'agisse d'un autre Euchère plus récent, qui doit avoir vécu vers 560. Depuis les Centuries de Magdebourg, il est presque généralement admis que cette histoire n'a aucun fondement historique; c'est l'opinion de Du-bourdieu, Baulacre, Hottinger, Gieseler, etc. L'authenticité du fait a été soutenue par Pierre de Rivaz, Valais 1789, par les bollandistes à la date du 22 sept., et par quelques auteurs catholiques modernes. On ignore si c'est de la Thèbes d'Egypte, ou de celle de Grèce, que cette légion tirait son nom.

LÉGISTES, nom qu'on donnait aux glossa-teurs, ou interprètes du droit romain, par opposition aux décrétistes, qui s'occupaient du droit canon d'après le décret de Gratien. Les premiers défendaient les droits des empereurs, tandis que les autres étaient au moyen âge les champions de l'autorité papale.

LEGRAND, Jacques, v. Maguus 2°.

LEHNIN, vieille abbaye des environs de Pots-dam, connue surtout par l'oracle de ce nom, Vaticinium lehnense, fabriqué vers la fin do 17n>e siècle, et qu'on essaya d'attribuer à un moine du 14^. v. Hermann.

LEIBNITZ, Godefroi-Guillaume, né 6 juillet 1646 à Leipzig, fils d'un prof, de droit, perdit son père en 1652, mais n'en fut pas moins élevé avec beaucoup de soin par sa mère, Catherine Schmuck, et se distingua de bonne heure par ses aptitudes et sou amour du travail. A 15 ans il entrait à l'université, à 17 ans il était bachelier, à 18 maître en philos, à Iéna, à 20 docteur en droit et prof, à Altdorf. En 1667 il vint à Francfort-sur-Main, se fit connaître par une Méthode pour l'étude du droit et par quelques brochures politiques, et fut appelé en 1669 par l'électeur de Mayence comme conseiller de chancellerie. Il passa ensuite 4 ans à Paris, 1672-1676, comme gouverneur du fils du baron de Boinebourg, fréquenta les cours publics et les savants, s'occupa surtout de mathématiques, communiqua plusieurs découvertes à l'Acad. des sciences, qui l'admit dans son sein; visita l'Angleterre, où il fut reçu membre de l'Académie royale de Londres. En 1676 il fut appelé par le duc de Brunswick-Hanovre, qui le nomma bibliothécaire, baron, conseiller aulique, et en 1687 historiographe de la maison de Brunswick. Il faisait marcher de front les travaux les plus divers, histoire, théol., philos., politique, mathématiques. En 1700 il était nommé président perpétuel de l'Académie de Berlin, qu'il venait de fonder. Il avait visité l'Allemagne et l'Italie pour recueillir les matériaux nécessaires à son histoire de Brunswick, dont il ne put cependant publier lui-même que des fragments. Les sou* verains le recherchaient. A la demande de Pierre-le-Grand, il fonda une académie à Pé-tersbourg; Charles VI de Suède le créa baron et le pensionna; Louis XIV tâcha de le fixer en France, f à Hanovre 14 nov. 1716. Génie universel, il découvrit en même temps que Newton le Calcul différentiel et intégral. En philosophie il fut éclectique, admettant dans le moi une puissance absolue agissant par elle-même et créant la pensée et les principes abstraits. Il a posé et développé deux grands principes, celui de la continuité des êtres (leur échelle), et celui de la raison suffisante, qui, exagéré par Wolff, conduit au fatalisme et au stoïcisme. Son système des monades, qui est à la base de sa doctrine, et qu'il opposait au panthéisme de Spinosa comme au dualisme de Descartes, aboutissait par sa théorie nouvelle de l'Harmonie préétablie, à l'idée de la Providence, et par là même à l'optimisme: notre monde n'est pas parfait, mais il est ce qu'il pouvait y avoir de meilleur dafts les conditions oti il se trouve. C'est cette théorie qui a donné à Voltaire l'idée de sa plaisanterie de Candide. Leibnitz appartient à la théologie par son principal écrit, dirigé contre Bayle: Essais de Théodicée sur la bonté de Dieu, la liberté de l'homme et l'origine du mal, où il montre comment le mal appartient nécessairement à tout ce qui est fini, et comment Dieu a créé le meilleur monde possible avec les éléments imparfaits et finis du monde actuel. Il reconnaissait la révélation et n'admettait pas qu'elle pût être en contradiction avec aucune idée philosophique. Il travailla à réunir en une seule les diverses égl. protestantes et s'en occupa sérieusement avec Spener, mais sans succès. Il fit aussi d'inutiles efforts pour concilier le protestantisme et le catholicisme, et correspondit dans ce but avec Pélisson et Bossuet, mais il demandait comme préliminaire de l'union, que le pays suspendit les effets et décrets du conc. de Trente. Le projet d'union qu'il avait élaboré se trouve dans son Systema theologicum, 1680, trad. par A. de Broglie 1846; mais comme il maintenait avec énergie les principes essentiels du protestantisme, cette tentative n'eut pas de suites. La Ire édit. compl. de ses œuvres a été publ. par Dutens, Genève 1768. LEICZON (La Nobla), v. Leyczon. LEIDRADE, né dans la Norique vers le milieu du siècle, distingué par ses talents et son érudition, attaché d'abord à Arnon, év. de Salzbourg, fut un des missi dominici de Charlemagne, doyen de la cathédrale à Zurich, puis fut nommé par lui, 798, archev. de Lyon où il y avait de grands désordres à réparer. Il se distingua comme réformateur des Maures, comme organisateur et comme restaurateur des bâtiments du culte. Il fut envoyé 2 fois en Espagne, à Urgel, pour y combattre les adoptiens, et après la mort de Charles, se retira 814 au couvent de Saint-Médard à Soissons, où il mourut. Mabillon et Baluze ont publ. quelques-uns de ses écrits.

LEIPZIG, en Saxe, ville de plus de 80,000 habitants, déjà regardée en 1015 comme le centre du commerce de l'Allemagne, et auj. encore célèbre par ses foires annuelles et par sa librairie, doit à sa position d'avoir été mêlée à une foule d'événements politiques et religieux. Son université fondée 4 déc. 1409 à l'occasion des mesures oppressives prises contre les Allemands à l'univ. de Prague, passa à la Réforme en 1539 sous Maurice de Saxe et attira à elle Cruciger et Medler qui commencèrent la réputation de sa faculté de théologie. Elle représenta d'abord le philippisme, comme Wittenberg, mais peu à peu, sous l'influence de Carpzov et d'Hulse-mann, elle prit le caractère d'une orthodoxie très accentuée, par opposition aux tendances religieuses de l'école de Franke, dont elle se sépara. Elle eut aussi des prof, rationalistes distingués. Auj. sa tendance générale est plutôt luthérienne. Parmi les hommes qui l'ont illustrée, outre ceux qui sont nommés plus haut, on distingue Camerarius, Olearius, Crusius, Gel-lert, Keil, Rosenmuller, Tittmann, Winer, Har-less, Herzog, Tischendorf, etc. La Soc. des missions de l'Allemagne du nord a été transférée à Leipzig en 1848 à cause du voisinage de l'université. Il s'y est fondé aussi en 1844 une église catholique allemande; là s'est réuni le 25 mars 1845 le premier concile catholique-allemand, qui a donné à la nouvelle Église son nom et sa confession de foi. Parmi les souvenirs historiques de cette ville, trois méritent d'être relevés:

La dispute de Leipzig, 1519. Provoquée par les attaques du Dr Eck d'Ingolstadt contre Luther, elle devait avoir lieu d'abord entre Eck et Carlstadt; mais Eck ayant publié 13 thèses nouvelles sur les pénitences et les indulgences, Luther crut devoir intervenir en personne. La dispute s'ouvrit le 27 juin 1519 en présence du duc Georges et de Mosellanus, et dura jusqu'au 3 juillet entre Eck et Carlstadt, roulant sur les 18 thèses de ce dernier relatives au Libre arbitre. Du 4 au 13 juillet elle eut lieu entre Luther et Eck, et roula principalement sur la primauté de l'Égl. de Rome que Eck, dans ses 13 thèses, faisait remonter au delà du pape Sylvestre, ce que Luther nia au nom de la Bible, de l'histoire et du concile de Nicée. Le 8 il y eut aussi une discussion sur le purgatoire. Enfin le 14 la discussion reprit entre Eck et Carlstadt sur le libre arbitre, et fut close le 16. Le résultat le plus clair de cette Dispute fut d'affranchir entièrement Luther de ses préjugés, et de le décider pour la Réforme. D'après Ranke, ce fut le moment capital de sa vie, car il fut amené à nier, à propos de Huss, même l'autorité des conciles.

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L'Intérim de Leipzig, 1548. Le prince Maurice de Saxe ne pouvant, à cause des engagements qu'il avait pris vis-à-vis de son peuple, adhérer à l'Intérim d'Augsbourg, qui faisait la part trop belle aux catholiques, chercha un moyen terme et réunit, d'abord à Pegau 23 août 1548, puis à Torgau 18 octobre, enfin à Celle du 16 au 20 nov., un certain nombre de conseillers, évéques, prélats, théologiens, pour rédiger un projet d'Intérim pins acceptable. A Celle ils finirent par tomber à peu près d'accord, et les États de Leipzig adoptèrent le 25 déc. ce projet avec quelques légères modifications, v. Adiaphora.

Colloque de Leipzig. Les princes électeurs de Brandebourg et de Saxe et le landgrave de Hesse s'étant réunis du 3 au 23 mars 1631 à Leipzig pour se concerter contre l'édit de restitution, les ecclésiastiques réformés et luthériens qui les accompagnaient profitèrent de la circonstance pour examiner ensemble officieusement s'il ne serait pas possible de réunir les denx confessions. Les réformés consentirent à prendre pour base de la discussion la Conf. d'Augsbourg; ils s'engagèrent même à la signer, pourvu qu'il fût entendu qu'il y aurait pleine tolérance réciproque sur la doctrine de l'ubiquité et sur celle de la présence réelle matérielle du corps et du sang de Christ dans l'eucharistie. On s'entendit également sur la prédestination. Le procès-verbal de cette conférence ne fut tiré qu'à un petit nombre d'exemplaires et peu répandu. Le projet n'aboutit pas, le président du Colloque, Hoë de Hoënegg, ayant lui-même repris les hostilités contre les réformés, pour n'être pas taxé de tiède par les luthériens.

LELONG, Jacques, né à Paris 19 avril 1665, destiné à entrer dans l'ordre des chevaliers de Saint-Jean, fut envoyé tout jeune à Malte pour son éducation, Mais il ne s'y plut pas, demanda un congé et revint à Paris où il acheva ses études. Il entra 1688 dans la Congrég. de l'Oratoire, dont il fut nommé bibliothécaire, après avoir d'abord enseigné les mathématiques et les lettres dans plusieurs collèges, à Juilly, à Notre-Dame des Vertus, etc. f 1721. Ses principaux ouvrages sont la Biblxotheca sacra, catalogue des principales éditions et traductions de la Bible, 1709; réimpr. en 1723 avec quelques changements et une Notice biographique; Biblioth. histor. de la France, 1719. Catalogue de tous les livres et mss. qui se rapportent à cette histoire.

LE MAISTRE, v. Sacy.

LEMBERG, capitale de Galicie; 75,000 hab., siège de trois archevêchés, arménien, grec-uni, et latin. L'arménien date de 1365 et relevait primitivement du patriarcat d'Etschmiatzin; depuis 1624 il s'est soumis au siège romain.

LEMOINE, ou Lemoyne, cité dans les Provinciales de Pascal, né 1602 à Chaumont en Bassigny, f 1671; jésuite, médiocre comme théologien et comme poète; auteur d'un poème épique sur saint Louis.

LENFANT 1° Paul, de Saumur; après avoir desservi comme pasteur les égl. de Bazoche*, d'Albone et de Ch&tillon sur Loing, il fut banni par la Révocation de l'Édit de Nantes, et s'en vint à Cassel, où il n'y ayait pas moins de 3000 réfugiés en 1686. f à Marbourg, juin 1686. — 2° Jacques, son fils, né à Bazoehes 13 avril 1661, étudia à Saumur et Genève; la consécration lui ayant été refusée à cause de ses idées sociniennes, il alla la demander à Heidelberg, août 1684, et fut nommé pasteur de l'égl. française. En 1688 il dut fuir devant l'invasion et vint à Berlin, où il fat très bien reçu par l'électeur, qui le mit au nombre des pasteurs des réfugiés. Il occupa ce poste 39 ans, et t le 7 août 1728 à la suite d'une attaque de paralysie. Prédicateur agréable plutôt que puissant, il a laissé des discours faits pour être entendus plutôt que lus. Il a fait avec Beausobre une trad. du N. T. qui ne manquait pas démérité et dont la préface, de 236 pages, était une véritable Introduction. Mais ses écrits les plus appréciés sont: son Hist. du Conc. de Constantinople, plusieurs fois réimprimée; son Hist. du Conc. de Pise, et son Hist. de la guerre des hussites On a en outre de lui une douzaine d'ouvrages moins importants, et des articles publiés dans la Revue germanique, dont il était le collaborateur.

LENGERKE (de), né 30 mars 1803 à Hambourg, prof, de théol. et de langues orientales à Kônigsberg en 1829, f 3 févr. 1855; a écrit sur l'Herméneutique d'Éphrem Syrus, un Comment. sur Daniel, et une Hist. d'Israël en Canaan jusqu'à la mort de Josué.

LENTULUS. On possède sous ce nom une lettre apocryphe adressée au sénat de Rome par un Romain qui s'intitule Prœse* Hieroeolymita-norum, et qui donne la description et le portrait de Jésus: t Beau entre les hommes; cheveux bon-clés et frisés, rouges et brillants; raie au milieu de la tête; le nez et les oreilles sans défauts; on ne l'a jamais vu rire, mais souvent pleurer, etc. • La lettre, dont les exemplaires mss. varient entre eux, a été publ. d'abord dans la Ira édition d'Anselme, ensuite dans les Centuries de Mag-debourg. Son inauthenticité ressort du titre même qne se donne l'auteur, la charge en question n'ayant jamais existé. Ensuite il emploie des expressions bibliques dont un Romain et un païen ne se seraient jamais servis. On suppose qu'il y a là une imitation d'un écrit du même genre composé au 14me siècle par l'historien grec N'icéphore.

LÉODEGAR, Leodegàrxus, en français Sat»<-Léger, né vers 616 d'une famille considérée, fut nommé très jeune archidiacre et abbé dans le diocèse de Poitiers. En 659 il est év. d'Autun. Il contribua à l'élection de Childéric II, contre Thierry III soutenu par Ebroin; mais ayant censuré la vie voluptueuse du roi, il fut enfermé dans le monastère de Luxeuil. Thierry le rendit à son diocèse, mais sous Clovis, Ebroin qui avait à se venger assiégea Autun. Pour éviter à la ville les horreurs d'un siège, Léodegar se livra lui-même à son ennemi, qui lui fit d'abord crever les yeux, couper les lèvres et la langue, et après l'avoir fait déposer par un simulacre de concile comme complice de la mort de Childéric, il lui lit trancher la tête dans un bois près d'Arras, 678.

LÉON lo dit le Grand, né à Rome ou en Toscane, élu pape en 440, f 10 nov. 461. Il approuve les actes du conc. de Constantinople contre l'eutychianisme 448. Ses députés ne sont pas écoutés au conc. écuménique d'Éphèse, dit des voleurs. Nouveau conc. du même genre à Nyase 451; on doit le transporter plus près de Constantinople, à Chalcédoine. L'opinion de Léon est adoptée qu'il y a deux natures en Christ, mais sans mélange. On condamne à la fois l'eutychianisme et le nestorianisme. Léon, par sa noble et courageuse intervention et par son éloquence, parvient à détourner Attila d'entrer dans Rome 452, mais il est moins heureux avec Genséric, et la ville est pillée par les barbares, 455. L'idée d'une succession apostolique se développe de plus en plus, et Léon proteste contre le 28®* canon du conc. de Chalcédoine qui a déclaré égaux les patriarches de Constantinople et de Rome. Il se fait donner par Valen-tinien III, 455, un rescrit confirmant sa primauté, et où la résistance à l'év. de Rome est appelée un crime contre l'empereur. Hilaire d'Arles ayant destitué Calédonius de Besançon, Léon, pour se venger, prétendit, mais sans y réussir, transporter son patriarcat d'Arles à Vienne. On a de lui quelques écrits, 96 sermons, 173 lettres, etc.

2o Léon II, Sicilien, pape 682, f 683. On lui doit l'aspersion par l'eau bénite, et une trad. des Actes du 6®e concile.

3o Léon III, Romain, élu 795, f 11 juin 816. Deux de ses compétiteurs le firent assaillir en 799 par une bande d'assassins qui, après l'avoir horriblement maltraité, l'enfermèrent dans un couvent. Il réussit à s'échapper, se sauva en France auprès de Gharlemagne, et grâce à une escorte fournie par ce puissant monarque, il put remonter sur son siège. Il témoigna sa reconnaissance à son protecteur en mettant sur sa tête la couronne impériale, Noël 800, et celui-ci de son côté le mit en possession de l'exarcat de Ravenne. Dès lors le pape est prince.

4° Léon IV, Romain, pape 847, f 855. Il fut élu sans l'autorisation impériale. Cependant les papes reconnaissaient toujours, dans la forme, la domination des empereurs, bien que, par un cercle vicieux, Ton commençât à considérer la dignité impériale comme dépendant de l'onction du pape. Il est le premier qui dans ses discours mit son nom avant celui des princes. Léon embellit Rome et la fortifia contre les invasions des Sarrasins; il y ajouta un nouveau quartier sous le nom de Léopolis, qui est compris aujourd'hui dans l'enceinte actuelle. C'est vers cette époque, sous Léon IV, ou sous son prédécesseur Serge II, qu'on vit pour la première fois apparaître le recueil des Fausses Décrétâtes, fabriquées, à ce qu'on suppose, par un diacre de Mayence, Benoît le lévite. La légende lui donne pour successeur la papesse Jeanne, q. v.

5o Léon V, bénédictin, élu 903, mis en prison par le cardinal Christophore un mois après, mourut de chagrin, et peut-être aussi d'un mauvais régime, après 40 jours de pontificat. Dates incertaines.

6° Léon VI, Sanguigna, élu juillet 928, f févr. 929. Insignifiant.

7o Léon VII, Romain, élu 936, f 939, interdit le mariage des prêtres.

8o Léon VIII, élu par les Romains et sous l'influence d'Othon en 964, du vivant et en remplacement de l'ignoble Jean XII; il vit son autorité contestée, d'abord par ce Jean, puis par Benoît V que quelques cardinaux nommèrent après la mort de Jean. Il f 965, non sans avoir constaté son opposition à plusieurs mesures prises par Adrien III. Sans en faire un antipape, quelques-uns le considèrent comme un intrus.

9° Léon, antipape sous le nom de Grégoire VI, 1012; un moment compétiteur de Benoit VIII fut bientôt contraint par Henri II, de céder la place à son rival. On ne sait ce qu'il devint.

10o Léon IX, Brunon, év. de Toul, parent de l'emp. Henri III, élu à Worms en 1048 par Henri III et plusieurs princes réunis. Comme il passait à Clugny, revêtu des insignes de la papauté, Hildebrand l'arrêta pour lui dire que des laïques n'avaient pas le droit de le nommer pape et qu'il devait se rendre à Rome comme un simple particulier pour s'y faire élire. Il fut élu en effet. Il entra dans un système d'améliorations et de réformes que les circonstances ne lui permirent pas d'achever. C'était contre l'horrible prostitution du clergé qu'il devait lutter surtout. Il tint plusieurs conciles. Il vit éclater définitivement le schisme des grecs, déjà commencé sous Photius. Il demanda le secours d'Henri III contre les Normands; influencé par Guebhard son confident, Henri refusa. Léon fut battu par les Normands en 1053 et fait prisonnier. Il fut remis en liberté au bout d'un an et reconduit à Rome où il mourut l'année qui suivit son retour. Rome venait d'innover encore; au pain ordinaire elle substitua pour la Cène, du pain sans levain. Cerularius de Constantinople appelle cette innovation une hérésie; Rome l'excommunie, il excommunie Rome et le grand schisme, déjà commencé par Photius, se consomme entre l'Égl. d'Orient et celle d'Occident, 1013.

Ho Léon X, Jean de Médicis, second fils de Laurent le Magnifique, né à Florence en 1475, cardinal à 13 ans, pape à 38, f 1521 k l'âge de 45 ans. Il quitta Florence fort jeune, k cause des malheurs de sa famille et vint s'établir à Rome où il se concilia l'affection de Jules II, qu'il devait bientôt remplacer sur le trône pontifical. Il fut élu 11 mars 1513, quoiqu'il fût k peu près le plus jeune des cardinaux; mais il avait su feindre tant d'infirmités et il avait si bien su se donner les apparences d'un homme' qui n'a plus longtemps à vivre, que ceux qui le nommèrent ne crurent pas engager beaucoup l'avenir. Ils se trompaient: le nouveau pape jeta ses béquilles et une ère nouvelle commença, que personne ne pouvait prévoir. Politiquement, Léon X fit la paix avec Louis XII qu'avait excommunié son prédécesseur; mais, comme si la France et l'Italie devaient vivre toujours en délicatesse et en bouderies, il excommunia François I*r et se ligua contre lui avec Sforza, duc de Milan, et les Suisses; vaincu à Marignan en

1515, il dut faire la paix, mais il recommença en 1541, avec le secours de Charles-Quint, et concourut à chasser les Français du Milanais. Il avait obtenu de François Ier l'abolition de la Pragmatique sanction et son remplacement par un nouveau concordat plus à l'avantage des papes et des rois que de l'Égl. et des peuples,

1516. Il termina le conc. de Latran. LéonXest connu par son amour pour les lettres et pour les sciences, qu'il aimait autant qu'il se souciait peu de la religion. Le luxe, les plaisirs, la chasse, les repas, les spectacles le préoccupaient k un tel point, qu'il laissa la Réforme éclater et se développer sans s'en mettre en peine. Querelles de moines, disait-il d'abord, et même il appelait Luther un beau génie. Il payait cber ses musiciens et se fâchait quand sa partie de chasse était dérangée; il jouait gros jeu. Il projetait en outre une croisade contre les Turcs et l'achèvement de la basilique de Saint-Pierre. Mais avec de pareilles inclinations et de pareils projets, il devait avoir besoin d'argent. Pour s'en procurer il donna une impulsion toute nouvelle au commerce des indulgences, et ses employés, des dominicains surtout, s'y livrèrent avec un tel cynisme, que la coupe déborda.

L'Europe demandait en vain, depuis deux siècles, une réforme de l'Église par elle-même. Le scandale causé par la vente des indulgences fut général, et quand Luther se leva, vrai prophète parlant par le Saint-Esprit, le peuple écouta sa voix, protesta avec lui et proclama la Réforme. Léon X s'y prit trop tard pour excommunier Luther, 1520. Ce que les princes et les conciles n'avaient pu obtenir, un simple moine l'avait fait. Léon X rétablit à Rome l'université et la dota richement; il fit rechercher et publia les auteurs anciens, et fonda la Bibliothèque Lau-rentienne en souvenir de son père. Son règne a mérité de donner son nom à son siècle, et rarement une époque a vu autant d'illustrations réunies dans le domaine des arts, des sciences et de la littérature, l'Àrioste, Fracastor, Michel-Ange, Machiavel, Bramante, Raphaël, Guichar-din, le Caravage, Jules-Romain. Vie par Fa-broni; id. par William Roscoë, trad. par Henry 1813.

12° Léon XI, de la famille des Médicis, archev. de Florence, élu par l'influence française, malgré l'opposition de l'Espagne, f 1605, 26 jours après son élection.

13° Léon XII, Annibal-François-Clément-Melchior-Jérôme-Nicolas délia Genga, né 1760 k Genga, près Spolète, vicaire général de Pie VII, le remplaça en 1823. Ami des sciences, mais hiérarchique. Il embellit Rome, enrichit la bibliothèque du Vatican, encouragea les lettres, proscrivit les sociétés bibliques, les francs-maçons et les carbonari, releva l'inqui9ition, favorisa les jésuites et ramena les indulgences, f 20 févr. 1829. Vie par Artaud; Souvenirs de Massimo d'Azeglio.

14° Léon XIU, élu 20 févr. 1878. Son nom est Giovacchino Pecci. Né à Carpinato 2 mars 1810, il devint en 1837 le prélat domestique de Grégoire XVI, puis fut nommé délégat k Spolète et à Port ici. Nonce en Belgique en 1848 il n'y resta que peu de temps. Cardinal en 1853; l'influence d'Antonelli le tint constamment éloigné de Rome. A la mort de son rival, Pie IX en fit un camerlingue pour lui ôter toute chance d'obtenir sa succession, ce qui ne l'a pas empêché d'être élu par adoration, c.-à-d. par l'agenouillement spontané de ceux même qui n'avaient pas voté pour lui au premier scrutin. Nature forte, intelligente et modérée, il suit les errements de Pie IX et reste prisonnier comme lui au Vatican, mais avec moins de phrases et des discours moins violents.

Outre les papes, d'autres personnages du nom de Léon appartiennent à l'bist. de l'Église:

15° Léon III, l'Isaurien, emp. d'Orient 716-741, qui par ses Édits de 726 et 730 contre l'adoration des images provoqua la guerre entre les iconoclastes et les iconodules, les briseurs et les adorateurs des images. Il chassa le patr. Germain du siège de Constantinople. Les luttes durèrent un siècle et furent fatales à son empire surtout en Orient, où Jean de Damas put le le braver sous la protection des musulmans. Grégoire II et Grégoire III l'excommunièrent, mais ils y perdirent l'Italie méridionale et se tournèrent vers les Francs. Une flotte qu'il équipa pour se venger d'eux, fit naufrage dans l'Adriatique, f 741.

16* Léon V, l'Arménien, nommé emp. par les troupes, après que Michel eut été destitué, 813. Opposé au culte des images, il déposa le patr. Nicéphore qui lui résistait et persécuta l'abbé Théodore Studita qui travaillait à soulever les moines contre lui. Vainqueur des Bulgares, il se rendit odieux par ses cruautés et fut massacré la nuit de Noël 820-821. Michel-le-Bègue le remplaça.

17o et 18o, v. Allatius, et Judae.

19o Henri Léo, prof, d'hist. à Berlin, et depuis 1830 à Halle. D'origine juive, il est né le 19 mars 1799 à Rudolstadt, et doit sa réputation à divers travaux d'histoire sur les Villes lombardes, le Moyen âge, les Cités italiennes, les Pays-Bas, la Nation allemande, et par ses recherches sur les langues celtique et germanique. Il est cependant plus connu encore par les excès de sa réaction politico-religieuse, f 24 avril 1878.

LÉONARD lo ou Liénart, ermite du Limon sin, d'une famille distinguée, converti par saint Rémi, prêcha le christianisme dans le Berry et l'Aquitaine et fonda près de Limoges le monastère de Noblac. Comme il contribua par ses prières à la délivrance de la reine dont les couches étaient laborieuses, il a été fait le patron des femmes en couche, f vers 559.

2o Léonard, d'Udine, cél. prédicateur dominicain,dont les sermons, souvent réimpr., rappellent le genre de Barletta et de Menot. Il prêchait en 1435 devant Eugène IV, et brilla à Venise, Rome et Milan. Prieur à Bologne, il devint provincial de la Lombardie. + vers 1470.

3° Léonard de Port-Maurice, né 1676 en Li-gurie, élevé par les jésuites, entra dans l'ordre des franciscains-réformés, se consacra à la mission, prêcha l'Imm. Conception, fonda la confrérie de Coeur de Jésus et fut canonisé 1796 par Pie VI.

LÉONCE, de Bysance, d'abord avocat, se fit moine et entra au couvent de San Saba, près Jérusalem; il vivait au 6™ siècle. Ses ouvrages sont utiles pour l'étude de l'hist. des sectes, notamment du monophysitisme aux 4^e à 5®e siècles. Les principaux sont: Des sectes, Contre les nestoriens et les eutychiens, contre les fraudes des apollinaristes, Dialogue contre les aphthartodocètes. Quelques-uns le regardent comme identique avec Léonce de Jérusalem. Il y avait encore un Léonce, prêtre en Chypre; un évêque Léonce d'Antioche, pendant les luttes ariennes; un chronographe de ce nom, vers 920, qui écrivit la Vie de Léon l'Arménien, etc.

LÉOPOLD IV, margrave d'Autriche, né 29 sept. 1073, célèbre par sa bonté et sa piété, fonda de nombreux couvents. Il avait épousé Agnès, fille d'Henri IV et veuve de Frédéric de Souabe. Un de ses fils fut Othon de Freysing, l'historien de Barberousse. Il se montra favorable à la première croisade. Son influence était telle qu'après la mort d'Henri V il fut en concurrence avec Lothaire pour l'empire: il renonça à ses chances pour éviter la guerre, f 1136. Canonisé 6 janv. 1485 par Innocent VIII, et patron de l'Autriche.

— On appelle Diplôme de Léopold la convention du 4 déc. 1691 qui fit passer à la maison d'Autriche la Transylvanie, et qui stipulait qu'il ne serait rien changé dans ce pays quant à la religion et aux affaires ecclésiastiques.

L'ÉPÉE (l'abbé de), fondateur de l'institution des Sourds-Muets, et auteur de la première méthode pour les instruire. Né à Versailles, 25 nov. 1712, f Paris 23 déc. 1789, il a consacré à cette œuvre sa vie et sa fortune, et n'a pas été canonisé. Versailles lui a élevé une statue, L'abbé Sicart lui succéda. De l'Épée a eu toute sa vie l'Église contre lui, parce qu'on le soupçonnait d'être janséniste, et cependant il ne se faisait pas faute de prosélytisme contre les réformés.

LEPSIUS, Ch.-Richard, un des égyptologues les plus distingués de notre temps. Né à Naum-bourg 23 déc. 1810, il étudia à Leipzig, Gettin-gue et Paris, fut nommé docteur en 1833, et en 1846 prof, à Berlin. Il visita l'Égypte de 1842-1846, à la tête d'une mission scientifique prussienne, et a publié de nombreuses Lettres et différents volumes sur les antiquités de ce pays. En 1864 il a pris la direction de la Revue égyptienne, fondée par Brugsch. Dans un second voyage, en 1866, il a découvert une inscription en deux langues, en grec et en hiéroglyphes, qui a servi à confirmer les résultats déjà obtenus par les égyptologues.

LÉRIJA, Antoine (de), un des premiers humanistes de l'Espagne, prof, à Salamanque. Xi-ménès l'appela en 1508 à l'univ. d'Alcala (Com-plutum) qu'il venait de fonder, l'employa à la rédaction de sa célèbre Bible polyglotte, et le protégea contre l'Inquisition qui voulait le poursuivre, parce qu'il avait cru pouvoir signaler des erreurs dans la Vulgate. f 1552.

LÉRINS, deux îles de la Méditerranée, sur les côtes de la Provence. L'une, l'île Sainte-Marguerite, renferme la prison d'État où fut enfermé le Masque-de-Fer; l'autre Saint-Hono-rat, fut longtemps célèbre par son monastère, qui était la pépinière du clergé de France. Ce couvent, fondé 410 par Honorât, comprenait des moines vivant en commun, et des solitaires. Parmi les hommes qui en sont sortis on cite Hilaire d'Arles, Vincent de Lérins, Enchère de Lyon, Valérien de Comelle, Césaire d'Arles. Sous les successeurs d'Honorat, Lérins devint l'appui du semi-pélagianisme. Le conc. d'Arles affranchit Lérins de l'évêché de Fréjus. La discipline s'étanl peu à peu relâchée, il fallut au siècle de longues luttes pour la rétablir. Le monastère, qui comptait au 8®« siècle 37Ô0 moines, fut détruit par les Sarasins. Reconstruit vers 997 il atteignit sa plus grande prospérité sous l'abbé Adalbert 1066-1102. En 1505 il fut rattaché aux bénédictins, mais il avait déjà beaucoup perdu de son importance.

LESLEY, John, écossais, né 1527, f 1596, év. cathol. de Ross, intrigua en faveur de Marie Stuart et finit par être banni d'Angleterre; il chercha en vain sur le continent des secours pour la reine captive. Il fonda pour les Écossais 3 collèges, à Paris, Douai et Rome, et fut nommé ev. de Constance 1593. Il a laissé en latin une Hist. d'Écosse et un plaidoyer en faveur de Marie Stuarl.

LESLIE, Charles, né vers 1660 en Irlande, t 1732, était fils d'un év. anglican; chancelier de Connor 1687; il accompagna Jacques n en France et en Italie après la révolution de 1688. Auteur de plusieurs traités de polémique et de controverse contre les déistes, les catholiques, les quakers, etc.

LESS, Gottfried, né 31 janv. 1736 à Conitz, étudia à Halle et à léna, fut prof, de théol. à Dantzick, puis à Gflttingue, où il fut nommé pasteur et surintendant, f 28 août 1797. Orthodoxe modéré, il combattit le rationalisme dans des ouvrages qui eurent un grand succès, surtout au point de vue apologétique, Sermons, etc.

LESSING, Gotthold-Éphraïm, né 22 janv. 1725 à Kamentz, Basse Lusace. Fils d'un pasteur, il étudia d'abord au Collège des princes à Meissen, puis à Leipzig 1746, mais quitta bientôt la théol. pour la philos, et les beaux-arts; vint en 1748 à Berlin, en 1752 à Wittenberg, où il fut reçu maître ès arts. Nommé membre de l'Acad. des sciences en 1760, il fut appelé à Breslau comme secrétaire du gouverneur, entreprit en 1767 la direction du théâtre national à Hambourg; se lança dans la librairie, mais sans succès, fut nommé conseiller aulique et bibliothécaire à WolfenbUttel, et f à Brunswick 15 févr. 1781. Longtemps considéré comme l'auteur des Fragments de WolfenbUttel, dont il n'était que l'éditeur, il soutint contre le pasteur Gœtze de Hambourg une vive controverse, dans son livre intitulé AntiGœtze 1778. Son livre de l'éducation du genre humain le place également parmi les philosophes. Il découvrit et publia l'écrit de Béranger contre Lanfranc de Tours sur la transsubstantiation, que l'on croyait perdu. Mais à côté de ses Fables qui sont devenues classiques, son principal ouvrage est son drame philosophico-religieux de Nathan-le-Sage, qui ouvre la porte à tous les scepti-cismes. Il sépare dans le christianisme la morale de tout ce qui est histoire ou doctrine et cherche à fixer le sentiment religieux en dehors de la révélation. Pour lui le christianisme n'est pas un fait acquis une fois pour toutes, mais quelque chose qui doit aller sans cesse en se développant. L'homme n'arrivera jamais à la pleine possession de la vérité, mais il doit la rechercher, et les religions positives ne sont que le développement historique des efforts de l'homme pour y arriver. Sceptique, influencé à la fois par Leibnitz et Spinosa, ni orthodoxe, ni rationaliste, il admet l'essence du christianisme sans en accepter les formules et manque ainsi de base.

LESSIUS, Léonard, né 11 oct. 1554 à Brecht, Brabant, étudia à Louvain, entra 1572 dans l'ordre des jésuites, enseigna à Douai et à Rome, et fut nommé prof, de théol. à Louvain en 1583. Les disputes à propos de Bains venaient de prendre fin. L'enseignement de Lessius les raviva. Il enseignait le pélagianisme, contrairement à la tendance de la faculté qui était au-gustinienne; la faculté, appuyée par celle de Douai, fit un extrait de 54 thèses tirées de ses leçons et de celles de son collègue Hamel, et les condamna. La lutte ayant pris un caractère général, le pape évoqua l'affaire et chargea son légat à Cologne de procéder à une enquête. C'est ainsi que finit l'incident; il n'y eut ni rapport, ni sentence, et Lessius garda sa place, f 5 janv. 1623.

LESTINES, Hainaut, à 20 kiL de Charleroi, résidence royale, connue surtout par le concile de 743, tenu sous Carloman, qui travailla à la réforme du clergé et régla la sécularisation des biens ecclésiastiques commencée sous Charles Martel. Il fut décidé par cette convention, appelée division, que ces biens feraient retour à l'Église après la mort de leurs propriétaires, mais comme le roi se réservait, en cas de nécessité, de les donner à d'autres, cette apparente concession ne fut qu'une lettre morte. La mesure prise était dictée au roi par les besoins du royaume; elle fut consentie par l'Église poar obtenir une meilleure organisation des diocèses, réclamée par Boniface

LE TELLIER, v. Tellier.

LEUSDEN, Jean, célèbre hôbraïsant hollandais. Né 26 avril 1624 à Utrecht, où il étudia, il y devint professeur et y f 30 sept. 1699. En 1649 il s'était rendu à Amsterdam pour s'y perfectionner dans l'hébreu auprès des juifs instruits et cultivés qui s'y trouvaient. La plupart de ses ouvrages se rapportent à la grammaire et k la lexicologie hébraïque. Il a publ. aussi nne Bible hébr. sans points-voyelles 1694, une Version des Septante 1683, un N. T. 1675, et le commencement d'un N. T. en syriaque.

LEUTHARD, fanatique des environs de Châ-lons sur Marne, vers Tan 1000. A la suite d'une prétendue vision, il se sépara de sa femme, renversa dans l'église une croix et l'image du Christ, défendit de payer la dîme aux prêtres et chercha k justifier le tout par des passages bibliques. L'évêque Gebouin, qui avait du bon sens et un bon caractère, le traita simplement comme un fou. Abandonné de ses adhérents, le malheureux se jeta dans un puits et s'y noya.

LÉVEILLÉ, Julien, v. Filleul.

LEVELLERS, secte politico-religieuse qui parut en Angleterre à l'époque de Cromwell, vers 1647; elle comptait des adhérents parmi les indépendants et surtout dans l'armée. Son nom signifie niveleurs. En politique elle était la conséquence exagérée de la souveraineté du peuple et de l'égalité de tous devant la loi. En religion elle réclamait la liberté absolue de conscience, même pour l'individu. Cromwell leur ayant résisté, ils ourdirent contre lui une conspiration 1658, mais elle fut découverte et réprimée. La secte disparut avec l'avènement des Stuarts.

LEYGSON, ou Leic$on (La Nobla), poème religieux en langue romane attribué à un auteur vaudois des» vallées du Piémont. Le titre même de l'ouvrage, déduit de son premier vers, nous donne une idée de son contenu en nous révélant le but auquel il est destiné. Leiczon, dérivé de lectio, signifiait d'abord la portion de l'Écriture qui était lue; puis la prédication destinée à la développer. Les vaudois appelaient leiczon leurs discours religieux, ou tout autre discours composé dans le but d'instruire et de moraliser. La Nobla Leiczon est donc une pièce didactique qui, partant de l'idée que la fin du monde approchait, invite les pécheurs k la repentance, à l'exercice des vertus chrétiennes, à l'accomplissement des bonnes œuvres, en considérant la brièveté de la vie et la récompense ou la punition future. A cet effet elle expose brièvement l'histoire de l'A. et du N. T. qu'elle groupe autour de trois faits principaux, les trois lois de Dieu: la loi naturelle, la Joi mosaïque et la loi de l'Évangile. L'ensemble de ces trois lois, représenté par la Parole de Dieu, est pour l'auteur la seule règle de foi. L'ancienne loi ne doit plus être pour le chrétien qu'un stimulant à faire le bien, aussi la compare-t-il à la nouvelle pour faire ressortir toute la perfection de cette dernière.

La Parole de Dieu étant le principe formel du chrétien, le poète s'élève contre les décrets ecclésiastiques et la fausse autorité de l'Église; contre sa tendance & tranquilliser les consciences au moyen de vaines absolutions, inventées par les prêtres qui n'aiment les brebis que pour le lucre. Dieu a donné autant d'autorité à un simple fidèle qu'au prêtre, s'étant réservé k lui seul le droit de remettre les péchés, de condamner et punir les pécheurs. La juste et courageuse indignation de l'auteur éclate contre les excès d'un clergé ignorant et fanatique dont les persécutions sanglantes, que désavouèrent touj. la charité et la raison, méritent les justes reproches de la postérité.

Les doctrines de la Trinité et de l'unité de Dieu, du libre arbitre donné à l'homme et du péché originel commis et transmis par Adam sont déclarées positivement par la N. L. Elle affirme explicitement l'incarnation et le caractère rédempteur du Christ en racontant avec soin la naissance du Christ, sa passion, sa mort, sa résurrection d'entre les morts et son ascension au ciel. D'où il résulte que l'assertion trois fois reproduite par l'év. de Pignerol, Charvaz, que l'auteur de la N. L. était du nombre des cathares, est insoutenable. La lutte du bien et du mal ou plutôt des bons ou des méchants est décrite dans ses linéaments historiques; le nombre des bons et des hommes pieux a touj. été de beaucoup inférieur k celui des méchants, et ils ont eu plusieurs maux k supporter k cause de leur crainte de Dieu, de la sainteté de leur vie et de l'intégrité de leurs mœurs. Jésus fut persécuté parce qu'il ne faisait que du bien; le même sort est réservé k ceux qui veulent suivre ses traces.

Sur l'état de l'homme après la mort la N. L. ne donne aucune place au purgatoire. Ceux qui ne se sont pas convertis dans ce monde ne doivent avoir aucune epérance de jouir de la béatitude éternelle, puisque les prières faites en faveur des morts sont inutiles. — L'invocation des saints doit aussi être bannie du culte des fidèles. Toutes les prières doivent être adressées au Père, au Fils et au Saint-Esprit, et les vies des saints ne sont que d'imparfaits modèles proposés à l'imitation des fidèles. Si Marie est appelée sancta, virgo gloriosa, la N. L. ne lui attribue cependant pas un culte particulier.

11 existe trois manuscrits qui reproduisent le poème en entier; trouvés dans les vallées vau-doises du Piémont, ils sont déposés aux bibliothèques de l'univ. de Cambridge, du Trinity-College de Dublin et de l'univ. de Genève. Il existe entre ces manuscrits des centaines de variantes qui permettent d'affirmer que ce sont de simples copies, non pas d'un texte unique et primitif, mais de récensions différentes, qui étaient déjà elles-mêmes des copies modifiées d'un texte antérieur. La principale de ces variantes est relative à la date même du poème. Elle a vivement attiré l'attention de nos contemporains et a donné lieu à de nombreux débats auxquels ont pris part des hommes émi-nents de notre époque, tels que MM. Herzog, Meyer, GrUzmacher, Hudry-Menos, Muston, etc. On avait longtemps admis, et des historiens vaudois l'affirment, que la N. L.datait du commencement du XUme siècle. En effet les mss. de Genève et de Dublin portent au 6** vers cette date ainsi rédigée:

Ben ha mil e cent anes oompH entierament

Que fo icripta l'or* car son al derier t«mp.

Mais en 1862 M. Bradshaw, bibliothécaire de Cambridge, retrouva le fameux mss. dit de Mor-laud qu'on avait cru perdu, mais qui n'était que mal étiqueté. Il fut très étonné de trouver au vers en question entre mil et cent, un espace blanc raturé laissant encore distinguer un quatre en chiffre arabe. Dans un autre mss. de Cambridge qui ne contient que les treize premiers vers du poème il a pu lire à la même place un quatre en chiffres romains. Cette découverte a fait grand bruit en Angleterre et en Allemagne, et on en a conclu que le poeme avait été composé au XVm« siècle. Mais les caractères de la langue qu'on y parle, les faits auxquels il est fait allusion, les idées qui y sont exprimées et ses autres caractères intimes et généraux ne permettent pas de s'arrêter à cette conclusion. La simplicité dans les formes, l'incertitude dans les expressions et dans la syntaxe, les fréquentes traces du latin qu'on trouve dans la N. L. nous font remonter à une époque plus reculée où la langue n'avait pas encore pu se fixer d'une manière définitive, où elle n'était encore qu'un des premiers degrés de la décomposition du latin et le type d'après lequel se sont formés successivement les divers idiomes de l'Europe occidentale. Le dialecte de la i\\ L., d'après Raynouard lui-même, serait le frèré de celui des troubadours, sorti de la même souche, ayant tous les deux leur origine au XIm« siècle.

Remarquons ensuite que l'idée dominante et, on peut le dire, inspiratrice du poème, c'est l'attente de la prochaine fin du monde; événement qui occupait alors tous les esprits et réveillait dans les âmes une attentive anxiété. Ce caractère essentiel de la N. L. est aussi celui des Hrae et 42ra* siècles en particulier, tandis qu'il n'en est plus fait mention dans ce que l'on sait du 15m«. Pareillement la venue de l'Antéchrist que le poète regarde comme réalisée dans la personne du pape est la croyance de la fin du 12'»*. C'est donc à cette époque que doit être placée la rédaction de la X. L. Le poète prend pour terminus a quo l'époque de la rédaction de l'Apocalypse. Il a donc raison de dire qu'il y a bien mille et cent ans accomplis entièrement... que... etc., ce qui ne serait plus vrai pour la fin du 15*6. D'ailleurs la variante de Cambridge portant à quatorze cents ans la date du poème et donnant quatorze syllabes à son sixième vers est par elle-même la preuve que ce mss. est d'une date plus récente. Le copiste ayant à écrire: « Voici onze cents ans... i se sera dit: « Mais non, nous sommes maintenant en 1400; il faut mettre: voici bien mille et quatre cents ans. t Quoiqu'il en soit, le chiffre 4, représenté par un signe arithmétique (arabe dans le mss. B, romain dans le mm. C) au milieu d'un millésime tracé en signes graphiques, a quelque chose d'étrange. P. G.

LEYDE, Lugdunum Batavorum, ville de Hollande, 33,000 hab. Patrie de Lucas, Rembrandt, Gérard Dow, Voss; connue aussi par les travaux de Scaliger, et de Boërhave. Son nom est rattaché à la mémoire de Jean de Leyde, et à la découverte de la bouteille de Leyde. Son univ. fut fondée immédiatement après le siège mémorable qu'elle soutint 1574 contre les Espagnols, et qui lui coûta plus de 6000 de ses habitants. Elle fut aussitôt dotée d'une riche bibliothèque, avec de nombreux manuscrits, et d'un musée archéologique. Parmi les théologiens qui l'ont illustrée, on compte Junius, Arminius, Gomar. Drusius, les deux fr. Spanheim, Cocceius. Witsius, Heidan, Burmann; et dans d'autres branches, Scaliger, Saumaise, Lipsius, Voss. Erpenius, Boërhave, Schultens, etc. L'école de Leyde est auj. représentée par Scholten et ses disciples qui, tout en admettant la vérité de la religion chrétienne, distinguent entre les principes et les dogmes et regardent comme la tâche de la science de mettre ces derniers en harmonie avec les découvertes de l'hist. et de la critique. Cette école a été combattue en Hollande par Da Costa, Groen van Prinsterer. l'école de Groningue (Pareau), et Opzoomer.

LEYDE (Jean de), v. Bockhold.

LEYDECfŒR, Melchior, théol. réformé, qui a écrit dans un sens apologétique, contre la tendance de Cocceius et contre Descartes, des ouvrages qui par la fermeté des principes ont encore auj. de la valeur. Né à Middelbourg 1642, il exerça le ministère pendant 15 ans dans différentes paroisses de la Zélande, fut nomme prof, à Utrecht, et f 1721.

LIAFWIN, v. Lebuin.

LIBANIUS, célèbre sopliiste du 4®e siècle, maître et ami de Basile et de Chrysostome; né à Antioche sur TOronte entre 314 et 316. Élevé et formé à Athènes, il se rendit à Constantinople où des envieux l'accusèrent de magie. En 346 il vint en Nicomédie où il enseigna avec tant de succès, qu'il fut rappelé à Constantino-pie, mais, avec l'autorisation de l'emp. Gallus, il aima mieux se fixer à Antioche, où il f 391. Avec des idées empruntées au christianisme, il défendit la liberté de conscience et les droits des païens; il s'attira par là la faveur de Julien qui le nomma questeur. Valens le persécuta d'abord, mais lui redevint favorable. D'un caractère généralement respecté, il demeura païen, mais fut tolérant pour les chrétiens. Dans sa vieillesse il constatait avec chagrin les progrès du christianisme et la diminution croissante de ses auditeurs. On a de lui sa Vie, des Harangues, des Lettres, utiles à consultent des Fragments.

LIfiËLLATICI, ceux qui pendant les persécutions romaines se procuraient, par des fonctionnaires complaisants, de faux certificats (Li-bellos) constatant qu'ils avaient obéi aux ordres de l'empereur en sacrifiant aux idoles; ou qui, par une ruse quelconque, réussissaient à faire croire qu'ils avaient renié leur foi, quoique cela ne fût pas. Les chrétiens stricts, condamnant cette équivoque, ne les considéraient pas moins comme des lapsi.

LIBELLI PACIS (certificats de paix), attestation donnée par les confesseurs et les martyrs à des tombés {lapsi) pour obtenir leur réintégration dans l'Église. Il s'en lit un tel abus, sans parler des faux et des interpolations, que Tertul-lien et le conc. d'Elvire protestèrent contre leur usage.

LIBELLUS PASCHALIS, circulaire pascale de l'év. d'Alexandrie, adressée vers l'Épipha-nie aux églises, pour leur notifier la date des fêtes de Pâques.

LIBER ( I ivre).—1 ° Diurnus Romanorum Pon-tificum, vieux recueil de formulaires à l'usage des papes pour les affaires courantes. Il est divisé en 7 chapitres. Comme il mentionne la mort de Pogonat 685, et qu'il prévoit la formule relative aux exarques de 752, sa composition se place entre ces deux dates. L'édition qu'en fit en 1660 Lucas Holstenius, fut supprimée par le pape. Le jésuite Garnier l'a réimprimée 1680. ainsi que Hoffmann, Leipzig 1733.

L. PotUificalis de vitis rom. pontificum, ouvrage intéressant pour l'hist. ecclés. Il renferme la vie de tous les papes jusqu'àÉtienne VI, dont la mort 891 n'est pas mentionnee, ce qui fixe à peu près la date de sa composition. On l'a longtemps attribué à l'abbé Anastase, bibliothécaire à Rome 872, mais s'il a écrit la vie des derniers papes, l'ensemble du livre est plus ancien, et doit avoir été composé d'après le catalogue dit de Libère, parce qu'il va jusqu'à ce pape, et d'après un autre catalogue, d'un auteur également inconnu, qui va jusqu'à Félix IV t 530. U est très utile par les renseignements qu'il donne sur le culte, la discipline et les édifices religieux de Rome. L'ouvrage a été continué en trois fois: d'abord jusqu'à Grégoire VII, puis jusqu'à Honorius II, 1129 (attribué à Pan-dolphe de Pise); enfin au 12®« siècle dans les Actes du Vatican.

L. Sextus et L. Septimus (6®e et 7®e livres). Après la grande collection de décrétâtes faite par Grégoire IX, 1234, Innocent IV fit réunir les décrets du conc. de Lyon 1245 avec quelques-uns de ses brefs ou bulles; Grégoire X promulgua les décrets du 2m« conc. de Lyon 1274; Nicolas IV y ajouta 5 décrétales de Nicolas HI, et Boniface Vin chargea trois prélats et le légiste Dinus de les collationner et de les classer de la même manière que le grand recueil existant. On en fit donc un volume supplémentaire, qui est cité au même titre que les autres décrétales, mais avec la mention de livre, Liber VI. Le 7me livre est l'ouvrage particulier de Pierre Matthieu de Lyon, vers la fin du 16me siècle, et comprend les décrétales des papes depuis Grég. XI jusqu'à Sixte V. Quoique généralement en usage, il ne jouit pas, à cause de son caractère privé, de la même autorité que les précédents. Il ne doit pas être confondu avec un autre 7®e Livre, travail d'une commission de cardinaux nommés par Grég. XIII et Sixte V pour rassembler les nouvelles constitutions de l'Église. Comme les décrets du conc. de Trente en font partie et que ce concile n'a pas été reconnu par plusieurs pays, notamment par la France, l'édition fut supprimée pour ne pas soulever de contestations.

4<> Liber status animarum. C'est en latin ce que l'on appelle en français Registre paroissial, le tableau des naissances, baptêmes, mariages, décès, survenus dans une paroisse pendant l'année.

LIBÈRE, 36me pape, 352-356. Marcellinus Félix Liberius, romain, convoqua plusieurs conciles pour décider entre Arius et Athanase. Il tergiversa sur cette question, et fut exilé à Bérée par l'emp. Constance qui le remplaça par Félix II. Au fond il était arien, ou au moins semi-arien, ainsi que l'établissent non seulement Hilaire, Jérôme et Athanase, mais ses propres écrits qui se trouvent parmi les fragments d'Hilaire. Dupin l'appelle sans détour un hérétique (De antiq. p. 347). Il fut rappelé en 358. Si l'on en croit quelques auteurs, il serait revenu plus tard à la foi orthodoxe; en tout cas, pour obtenir de rentrer dans son diocèse, il avait signé les décrets du 3»« conc. de Sir-mium et la confession d'un ancien concile semi-arien d'Antioche. Canonisé.

LIBERTINS. Ce mot qui Act. 6, 9. signifie les Affranchis, et qui dans le langage ordinaire vise la légèreté des mœurs, a servi, après l'établissement de la réforme à Genève, à désigner d'une manière générale les hommes opposés à

Calvin. C'était nn parti politique, le parti des vieux Genevois d'alors, et, comme tous les partis plus ou moins, il renfermait à côté de personnalités sérieuses et respectables une quantité d'individus qui n'étaient réellement libéraux, ni en politique, ni en religion. Sous le nom d'Ei-gnots ils avaient combattu la maison de Savoie; sous celui de Libertins, ils déclarèrent ne vouloir endurer les ministres, qui les reprenaient de leurs vices. A leur requête le vieux Courauld fut emprisonné, puis banni, et quelques jours après, 23 avril 1538, Farel et Calvin reçurent aussi l'ordre de quitter la ville sous 3 jours. Mais ceux qui avaient le plus travaillé contre Calvin finirent mal; l'un fut exécuté, deux autres durent se sauver, le quatrième se tua en cherchant à fuir. Le parti était désorganisé et démoralisé. Calvin fut rappelé et revint k Genève le 13 sept. 1541. Mais naturellement la lutte recommença. Il y avait chez les libertins des hommes énergiques, de bons patriotes, de vrais libéraux, attachés à leurs vieilles franchisas et à leurs vieilles coutumes, qui ne voulaient ni de l'autorité du consistoire, ni de celle de ministres étrangers, ni d'une législation trop sévère; inais il y avait aussi des hommes turbulents et dissolus, débauchés, se riant des lois et de la justice, dilapidant la fortune publique, notoirement incrédules et irréligieux, qui compromettaient par leurs vices ce que les prétentions des meilleurs pouvaient avoir de légitime. L'opposition porta sur la discipline ecclésiastique. La lutte dura douze ans, mais elle eut un caractère politique plutôt que religieux. Beaucoup d'hommes périrent. En 1555 une tentative fut faite contre Calvin, mais déjouée et repoussée. Enfin en 1557 le Petit Conseil ayant été renouvelé dans un esprit contraire k celui des libertins, ceux-ci furent décidément vaincus comme parti. Au point de vue religieux ils avaient d'ailleurs subi la fâcheuse influence de chefs étrangers, allemands pour la plupart, panthéistes, qui cherchaient à détruire l'œuvre de la Réforme, qui ne voyaient dans le Christ qu'un symbole, et dont les principes, poussant à l'immoralité, furent rendus évidents lors des procès d'Ameaux et de Gruct. Le parti ayant cessé d'exister k Genève, perdit aussi bientôt tout appui en France où il avait essayé de se glisser, même à Nérac à la cour de Marguerite de Navarre, et ses débris se réfugièrent en Belgique. V. Am. Roget, Galiffe, H. Bordier, etc.

LIBRES-PENSEURS. On a souvent désigné sous ce nom tous ceux qui refusent d'admettre la religion révélée, et qui. pour la plupart aboutissent au déisme et au rationalisme. C'est leur faire la part trop belle, et en réalité la définition de l'Académie est plus exacte: ceux qui pensent, qui parlent librement en matière de religion. Parmi ces penseurs libres, les uns sont amenés à la foi chrétienne, les autres la repoussent, mais les uns comme les autres peuvent agir et conclure dans le plein et libre exe* cice de leur pensée. Il peut même arriver que ce nom soit réclamé par des gens qui n'ont jamais étudié les questions, qui n'ont ni réfléchi, ni pensé, ou qui ne pensent que sous l'empire de leurs préjugés ou de leur parti.

LIBRI CAROLINI, v. Carolins (livres).

LIESSE (N. D. de), v. Marie.

LIGHTFOOT, John, pasteur et vice-chance-lier de l univ. de Cambridge, orientaliste distingué. Né 1602 k Stocke, Stafford, pasteur 1630 k Asie, 1642 k Londres, f 1675 à Ely où il possédait un canonicat. Il commença ses études hébraïques étant chapelain chez le chevalier R. Cotton, à Norton, et les poursuivit toute sa vie. Son principal ouvrage: Horœ hebr. et toi-mudicœ a encore auj. de la valeur. Œuvr. compl. Utrecht 1699; supplément de Strype 1700.

LIGUE, association temporaire formée entre des souverains, des peuples ou des villes, pour la défense d'intérêts politiques, religieux, commerciaux, ou autres: ainsi la ligue achéenne, la ligue hanséatique, les ligues grises, etc. Les plus importantes dans l'hist. ecclés. sont:

lo La L. de Smalcalde, conclue 1531 entre les princes protestants, k laquelle les princes catholiques opposèrent en 1538 une autre ligue, sous le patronage de la Bavière, mais qui n'aboutit à rien, la paix de 1555 ayant enlevé k l'une et k l'autre leur raison d'être, tout en semant de nouveaux germes de discorde. La violation de ce traité de paix k Donauwdrth par Maximilien 1er, duc de Bavière, provoqua en 1608 une nouvelle ligue, ou union, des protestants, k l'instigation du prince Christian d'Anhalt, pour la protection de la foi, mais nullement dirigée contre l'empire ou l'empereur. En juillet 1609 Maximilien de Bavière y répondit par une sainte ligue, ou ligue catholique, k la tête de laquelle il se mit avec plusieurs princes et évêques, mais en dehors de l'empereur et de la maison d'Autriche. Elle fut d'abord paralysée par les méfiances qu'elle souleva, mais elle finit par en triompher et réussit k conquérir la Bohême et à gagner le Palatinat. Wallenstein lui donna un moment du relief, mais elle fut vaincue par Gustave-Adolphe et abandonnée par la France.

2° La Ligue d'Or, ou de Borromèe, fondée en Suisse 10 oct. 1586, entre les 7 cantons confédérés de Lucerne, Uri, Schwytz, Unterwald, Zoug, Fribourg et Soleure, pour résister à l'influence protestante des autres cantons. Elle s'allia à l'Espagne.

3° La Ligue, ou Sainte-Union, confédération du parti catholique de France, formée 1576 par Henri de Guise sous l'influence du cardinal de Lorraine, en apparence pour défendre la religion catholique, en réalité pour renverser Henri III, empêcher l'avènement d'Henri IV, faire nommer le cardinal de Bourbon, et préparer les voies à la royauté des Guise. Les jésuites en étaient les inspirateurs. Ils soulevèrent la population parisienne qui, après la Journée des Barricades, nomma un Conseil des Seize (16 quartiers de la ville), espèce de Comité de salut public, qui se distingna par son arbitraire et ses cruautés et répandit partout la terreur. Henri III fit assassiner le duc de Guise,- que la Ligue remplaça aussitôt par son frère Mayenne. La Ligue ne prit fin que lorsque Henri IV eut abjuré le protestantisme, juillet 1593.

LIGUORI, Alphonse-Marie (de), né à Naples 46 sept. 1696, élevé par des prêtres de l'Oratoire, embrassa d'abord la carrière du droit pour plaire à son père, mais la quitta à la suite d'un échec.et entra en 1722 dans la Propagande. Consacré prêtre en 1726 il se voua à l'enseignement du peuple. A la suite de plusieurs visions il fonda en 1732 à Scala, près Bénévent, l'ordre du Très-Saint-Rédempteur, destiné à fournir des prêtres pour l'éducation des paysans ignorants. Après de nombreuses difficultés il put ouvrir en 1735 une seconde maison près de Sa-lerne. Les vœux furent prononcés le 21 juillet 1742, et en 1749 Benoit XIV reconnaissait le nouvel ordre et lui donnait le nom de Rédemp-toristes. Liguori déploya comme général la plus grande activité et fit preuve d'un entier dévouement. Clément XIII le nomma en 1762 év. de Sainte-Agatbe-des-Goths, à tapies, fonctions dont il obtint en 1775 de Pie VI d'être déchargé, ne pouvant y suffire à cause de son âge et de sa faiblesse. Pendant ce temps il avait fait administrer l'ordre par un vicaire général. Le gouvernement napolitain n'ayant voulu reconnaître son institut que moyennant certaines modifications dans les règlements, et Liguori y ayant consenti, le pape lui retira le généralat et exclut les maisons de Naples des privilèges accordés à l'ordre. Naples ayant renoncé à ses prétentions, l'affaire finit cependant par s'arranger 1790, mais Liguori n'eut pas la joie d'en être le témoin. f 1787 à 90 ans. Béatifié par Pie VII, 1816; canonisé par Grégoire XVI, 1839. Il a laissé de nombreux écrits, entre autres une Théol. morale, dans laquelle il professe le pro-babilisme. — L'ordre des liguoriens, lignoris-tes, ou Rédemptoristes, a beaucoup d'affinités avec celui des jésuites et l'a parfois avantageusement remplacé pendant sa suppression, notamment en Allemagne. Son principal représentant a été un Bohémien, Clément-Marie Hoffbauer, né 24 déc. 1751 à Tasswitz, d'abord garçon boulanger au couvent des prémontrés de Bruck, près Vienne, qui se fit ensuite ermite et utilisa ses loisirs pour étudier le latin et finit par entrer chez les rédemptoristes avec son ami Hibel. Ils fondèrent à Varsovie une mission pour les Polonais, les Allemands et les Français; puis une autre mission à Mi tau, Courlande, et des collèges en divers lieux et jusqu'en Suisse, Coire, etc., mais qui n'eurent pas grand suceès. L'ordre fut supprimé en Pologne 1807 par le gouvernement français; plusieurs pères furent incarcérés ou bannis; Hoffbauer trouva un re -fuge à Vienne dans une famille Klinkowstrtfm, fonda une maison d'éducation, rassembla quelques débris de l'ordre, qu'il envoya les uns à Bukarest, les autres à Fribourg, Suisse, et f 15 mars 1820. Le 22 avril suivant, le gouvernement autrichien autorisait la congrégation; mais elle fut de nouveau supprimée par la révolution de 1848. Elle subsiste encore en Amérique. La maison mère est à Nocera dei Pagani, près de Naples; elle est la résidence officielle du général.

LILIENTHAL 1« Michel, né à Liebstadt, Prusse, 8 sept. 1686, diacre à KiJnigsberg, f 1750; auteur d'une Biblioth. théol. et exég. 1740 et d'un Archivaire de l'Écrit. Sainte, 1745. — 2° Théodore-Christophe, son fils, né à Ko-nigsberg 8 oct. 1711, f 1782. Il avait visité l'Angleterre et la Hollande et finit par se fixer dans sa ville natale, où il fut nommé prof, de théol. et pasteur de la cathédrale. Il a publ. divers écrits d'apologétique, où il défend avec une chaleureuse conviction l'excellence du christianisme contre les déistes.

LIMBES, nom que les théol. catholiques donnent à cette partie du purgatoire ou sont enfermées les âmes de ceux qui sont privés du salut sans que ce soit de leur faute. Ils en distinguent de deux sortes: Le Limbe des patriarches, ob se trouvaient les fidèles avant le sacrifice rédempteur; il est vide auj. parce que Jésus y est descendu pour en retirer ses rachetés; et le Limbe des enfants morts sans baptême, où il ni a ni feu, ni souffrance, mais aussi nulle joie et nulle espérance. Cette doctrine a été affirmée par les conc. de Lyon et de Florence, mais les théologiens ne s'entendent pas sur la nature de ce triste lieu. L'Égl. réformée, avec sa doctrine de l'alliance de grâce et de la prédestination, ne peut reconnaître de limbes: l'Égl. luthérienne, quoiqu'elle maintienne la nécessité du baptême des enfants en vue du péché originel, n'a pas osé aller jusqu'à la damnation de ceux qui mourraient sans avoir été baptisés.

LIMBORCH, Philippe (de), théol. hollandais, né 19 juin 1633 à Amsterdam, où il étudia, ainsi qu'à Utrecht; pasteur à Gouda 1657, puis à Amsterdam en 1667, et enfin prof, de théol.

au collège des Remontrants, f 1712. Apôtre zélé de la tolérance, il a écrit nné Théol. chrét., une Hist. de l'Inquisition, un Dialogue amical avec un juif sur la vérité de la relig. chrét., et publié d'autres ouvrages, entre autres ceux d'Épiscopius. Locke lui a adressé ses Lettres sur la tolérance.

LIN ou Linu$, que l'on dit avoir été év. de Rome; second pape suivant la tradition romaine. Il naquit à Vol terra, en Toscane, et passe pour avoir gouverné l'Égl. de Rome de 66 à 78, de concert avec Clet, Anaclet et Clément, qui lui succédèrent. On ne sait d'ailleurs rien de précis sur la vie ni sur son activité; quelques-uns disent qu'il prêcha l'Évangile à Besançon. Son martyre est possible, 23 sept., sans être prouvé.

LINDANUS, Guill.-Damase, né 1525 à Dor-drecht, prof, de théol. à Louvain et à Dillingen, doyen à La Haye, év. de Gand, + 1588. Connu par quelques écrits dogmatiques, et surtout comme grand inquisiteur dans les Pays-Bas; il fut l'âme de tout ce qui se fit contre le protestantisme.

LINDISFARNE, couvent fondé dans l'île de Holy-Island par le roi Oswald 635, et d'abord occupé par des moines écossais qui évangélisè-rent le nord de l'Angleterre. Aidan et Cuthbert s'y firent remarquer par leur zèle et leur activité, et la sépulture de ce dernier devint un lieu de pèlerinage. Lindisfarne résista longtemps aux empiétements du culte romain dans le pays.

LINDSEY, Théophile, né 20 juin 1723 à Middlewich, étudia à Cambridge, fut nommé aumônier d'un hôpital de Londres, visita le continent comme précepteur avec le petit-fils du duc de Somerset, et fut à son retour pourvu de plusieurs riches bénéfices. Il s'adressa en 1771, avec quelques amis, au parlement pour obtenir de n'être pas lié par les 39 articles qu'il n'admettait pas. Sa pétition ayant été repoussée, il donna sa démission 1773, et vint à Londres où il fonda une église unitaire dont il fut le pasteur jusqu'en 1793. Il publia son Apologie, un Catéchisme, et une Hist. des Unitaires, f 1808.

LINGARD, John, théol. catholique anglais, né à Winchester 5 févr. 1771, élevé au collège des jésuites de Douai, prof, et directeur du séminaire et depuis 1810 président du nouveau collège d'Ushaw près Durham. Pour se consacrer plus entièrement à ses études, il demanda et obtint en 1811 la place de curé de campagne de Hornby. On assure que lors d'un voyage à Rome le chapeau de cardinal lui fut offert, mais qu'il le refusa, f 13 juill. 1851. Il a écrit une Hist. d'Angleterre, et un livre sur les Antiquités de l'Égl. anglo-saxonne, très estimés malgré le point de vue très confessionnel et très partial de l'auteur; plusieurs ouvrages polémiques apologétiques, et une trad. anonyme du N. T.

LINK, Wenceslas, l'ami de Luther, et le successeur de Staupitz comme vicaire général de l'ordre des augustins. Il adhéra à la Réforma-tion, l'introduisit à Altenburg, et f 1547 pasteur à Nuremberg.

LINNER 1° Martin, natif de Moravie, arriva à Herrnhut en 1728; boulanger; nommé ancien en chef à 27 ans en remplacement de Melchior Nitschmann; se mit cardeur de laine pour ne plus faire concurrence à un confrère qui était mal dans ses affaires. Il s'imposa des privations qui abrégèrent ses jours, f 26 févr. 1733. — 2° Matthieu, son neveu; préposé des garçons de Herrnhut; zèle et tact dans son influence sur la jeunesse; fin édifiante.

LINUS, v. Lin.

LINZ ou Lintz, évêché qui fit partie du diocèse de Passau, jusqu'à ce que Joseph II, eu 1783, le constitua en diocèse indépendant; son premier titulaire fut le comte Ernest-Jean de Heberstein.

La paix de Linz, 13 déc. 1645 mit fin à la guerre qui avait éclaté entre le prince Rakoczv et Ferdinand III, comme roi de Hongrie, à l'occasion des persécutions dirigées contre les protestants du pays, ces derniers ayant obtenu l'appui de la Suède et de la France. Le traité remettait en vigueur les stipulations du traité de Vienne 1606 et de la diète de Pressbourg 1608, maintenait la liberté de conscience, restituait aux protestants leurs biens confisqués, et permettait le retour au protestantisme de ceux qui avaient été convertis par la violence. La diète de Pressbourg 1647 ratifia en partie ce traité, mais sous l'influence des jésuites, rédui-sitde 400 à 90 le nombre des églises rendues aux protestants.

LIPOMANI, Aloys, év. de Modène, puis de Vérone et de Bergame, un des trois présidents du conc. de Trente et légat du pape en Pologne. Né 1500, f 1559. Ses violences lui nuisirent plus que sa finesse ne le servit, et sa mission en Pologne échoua. Il a composé des Comment, sur la Genèse, l'Exode et quelques Psaumes.

LIPPE, principauté convertie à l'Évangile par Charlemagne qui y fonda plusieurs églises et l'évêché de Paderborn. La Réformation y fut introduite sous l'influence de Philippe de Hesse, et de Jobst de Hoya, tuteurs des enfants du comte catholique Simon, f 1536. C'est à Lemgo d'abord 1525, puis dans le couvent des augustins de Lippstadt, qu'elle commença; elle devint officielle en 1538, avec un caractère luthérien prononcé. Le comte Simon 1583 à 1613 établit le calvinisme à Horn et à Detmold, el bientôt la plus grande partie du pays devint réformée, mais Lemgo resta luthérienne.

LIPSE lo Juste, né 18 oct. 1547 à Overys-sche près Bruxelles, secrétaire de GranvelK visita Rome avec son maître 1589, se fit protestant, enseigna l'éloquence et l'histoire à Iéna et à Leyde, se refit catholique et vint comme prof, à Louvain, où il f 23 mars 4606, avec le titre d'historien du roi d'Espagne. Il a édité plusieurs classiques, et écrit divers ouvrages de théol. et de philosophie, dans lesquels il cherche à concilier le stoïcisme et le christianisme;

11 parle en catholique fervent et même intolérant. Les principaux sont: De und religions, De constantid in publiais malis, Monita politica, De magnitudine romand, etc. On a aussi de lui des Lettres choisies. Œuvr. compl. Anvers 4585.

2° Ch. - Henri - Adelbert, philologue, auteur d'une grammaire sur le grec de la Bible. Né 19 janv. 4805 dans la Haute-Lusace, il étudia à Leipzig la théol. et la philologie, et y f 2 juill. 1861 après avoir occupé diverses places dans l'enseignement.

3° Son fils Richard-Adelbert, né 14 févr. 1830 à Géra, principauté de Reuss, Dr en théol. de l'univ. de Iéna, prof, à Leipzig, puis à Vienne et membre du synode général autrichien, prof, de dogmatique à Kiel depuis 4865; auteur de plus, ouvrages de critique et d'histoire sur le gnosticisme, les Lettres d'Ignace, l'Ép. de Clément Romain aux Corinthiens, etc.

LIQUORISTES, petite secte suédoise des environs de 4560, qui examinait sérieusement la question de savoir si, en l'absence de vin, on pouvait communier avec d'autres liquides, eau, bière, cidre, ou s'il valait mieux renvoyer la communion jusqu'au moment où l'on aurait pu se procurer du vin. Le synode de 4563 donna tort à ceux qui admettaient d'autres liquides.

USCO 1° Fréd.-Gustave, né à Brandebourg

12 févr. 1791, pasteur à Berlin depuis 1814, Dr en théol. 1839, f 5 juill. 1866; auteur d'une quantité de sermons, cantiques, livres de piété, et d'un Comment, sur la Bible. — 2° Émile-Gustave, son fils, né à Berlin 13 janv. 1819, étudia à Berlin et à Bonn, fut nommé pasteur à Berlin 1845, Dr en théol. de l'univ. de Heidelberg 1868, membre du synode de 1867, et rapporteur sur la question soulevée par le pasteur Knak, du système de Copernic dans ses rapports avec les données de la Bible.

USMANINI, François, natif de Corfou, franciscain, confesseur de la reine Bona, femme de Sigismond 1er de Pologne. Déjà gagné par les écrits d'Ochin en faveur de la Réforme, il fut cependant envoyé à Rome auprès de Jules IU, 1549. De retour en 1551 il fit la connaissance de Socin, et en 1553 lors d'un voyage en Suisse, il passa au protestantisme et se maria. Il ne put retourner en Pologne qu'en 1556, mais il fut banni à cause de ses doctrines sociniennes. Nommé à Konigsberg conseiller du duc, il se suicida à la suite de chagrins domestiques, 1563.

LISOI, ou Lisieux, chanoine d'Orléans, respecté pour ses connaissances et sa piété, fut le chef d'une secte à la fois rationaliste et mystique, ayant de l'analogie avec celle des Pauli-ciens. Ils niaient la naissance miraculeuse du Sauveur, et rejetaient le Baptême et la Cène. Découverts par trahison, la secte fut condamnée par le conc. d'Orléans 1022, et ses sectateurs livrés au feu.

LITANIES. C'est le nom que, dans la primitive Église, on donnait à certaines prières et même à l'ensemble du culte. Aujourd'hui l'on entend spécialemeut par là des prières avec répons, l'un des chœurs formulant des requêtes, invocations, louanges, et l'autre les affirmant ou les appuyant en termes brefs, tels que: « Exauce-nous! aie pitié de nous ! ® Miserere, ou Parce nobisf Elles commencent d'ordinaire par Christe, ou Kyrie Eleison, et se terminent par VAgnus Dei. Il y a quelques psaumes, tels que le 118, le 138, où l'on ne peut méconnaître l'idée d'une assemblée répondant à la prière ou à la déclaration de foi d'un chef ou d'un prêtre parlant en son nom. C'est aux processions surtout, ou dans des cas spéciaux, qu'elles sont en usage. On distingue la petite, qui date de saint Mamert 452, et la grande, ou Septiformis, qui a été introduite et développée par Grégoire-le-Grand. Les luthériens en ont conservé certaines formes; les moraves aussi: les réformés beaucoup moins et seulement par exception. Chez les catholiques les principales litanies sont: celle de Tous-les-Saints, la plus connue; celle de N.-D. de Lorette, du 13** ou du I4*e siècle, et celle du nom de Jésus, du 15m« siècle.

LITHU ANIE, contrée sauvage, située entre la Prusse et la Russie, sur le Niémen, à peu près au nord de la Pologne actuelle; une des dernières parties de l'Europe qui reçut la civilisation. Elle passa au christianisme sous le prince Mendog, fils de Ringold, qui après une malheureuse campagne militaire, demanda la paix aux chevaliers de l'épée, et ne l'obtint 1252 qu'en se faisant baptiser, lui et son fils Woischleg, ou Wolstinik. Mais cette conversion purement extérieure n'exerça aucune influence sur le pays, et n'amena pas même la paix. C'est seulement en 1386 que le christianisme y fut définitivement introduit par Jagellon, fils d'Olgierd, qui, pour obtenir la main de la pieuse et sage Hedwig de Pologne, et avec la main la couronne, se fit baptiser et contraignit son peuple à suivre son exemple: l'instruction religieuse ne se fit qu'après le baptême. L'hist. de la Lithuanie se confond dès lors avec celle de la Pologne, même en ce qui regarde la Réformation, qui y pénétra d'assez bonne heure. La Russie a travaillé dès la Ire moitié de ce siècle, et avec succès, à y remplacer la religion latine par la religion grecque.

LITTEMî (ou Lettres), correspondance officielle de l'Église latine. On distingue 1° Lit t. commendatitiœ, lettres de recommandation données par un évêque à un prêtre de son diocèse pour l'introduire ou le légitimer auprès d'un autre prélat. — 2° L. encyclieœ, lettres circulaires d'un pape aux évêques. Elles diffèrent des brefs et des bulles par leur caractère qui est d'un intérêt plus général; elles exposent des principes et notifient l'opinion et la volonté du pape sur les rapports de l'Égl. avec la société. Ainsi la fameuse encyclique de 1864. — 3<> L. formatas, ou canonicœ, lettres officielles d'évê-ques ou d'églises à d'autres év. ou églises, pour recommander certaines personnes, ou simplement pour entretenir des rapports fraternels. En prévision d'abus possibles, t même de contrefaçons, plusieurs conciles, Élvire 305, Arles 314, Nicée 325, crurent devoir déterminer les formes destinées à garantir au destinataire l'authenticité de la lettre. Auj. l'on ne s'en sert plus guère que pour les certificats d'ordination délivrés par les évêques.

LITURGIE, terme grec composé de deux mots et signifiant service public, ou ministère public; il avait chez les Athéniens un sens général et s'employait en parlant de services, corvées, ou charges réservées à l'ensemble des citoyens. Il a pris plus tard une signification restreinte, et sert à désigner dans le langage ecclés. soit l'ensemble du culte, soit les prières, soit le recueil de ces prières; chez les catholiques plus spécialement la messe, chez les anglicans le Prayer-Book. On sait que dans l'Église primitive le culte était extrêmement simple; les principes chrétiens, la spiritualité évangélique, la pauvreté des fidèles, les persécutions en faisaient une loi. La communion formait une partie essentielle de ce culte. Avec les circonstances cela changea; les édifices religieux s'embellirent. Le culte se compliqua, la liturgie se développa et tendit à se fixer. Chaque groupe d'églises eut la sienne. Le caractère de la liturgie est double. Elle représente d'nn côté l'élément du culte proprement dit, la prière, l'intercession, l'adoration, le chant, la lecture de la parole de Dieu, par opposition à l'enseignement et à la partie didactique; de l'autre côté la foi de l'Église, l'élément stable, par opposition à la foi de l'individu, prêtre ou missionnaire, qui pourrait dans sa prédication introduire des doctrines étrangères et discutables. Si le culte purement liturgique a certains avantages, il présente aussi des inconvénients; il peut dégénérer en formalisme et devient facilement monotone. Pour remédier à cette monotonie on a cherché à y introduire de la variété, à l'embellir, à le vivifier par des chants figurés, des processions, des ornements d'église, des génuflexions réitérées, et l'on est tombé dans un autre inconvénient; le luxe, la mondanité a remplacé le culte qui doit être esprit et vie. Quelque forme que Ton adopte, elle offre des dangers, et l'on n'y échappe que par un sentiment religieux vrai. Les réformateurs, plus frappés des abus d'un culte liturgique et cérémoniel, et sentant le besoin de faire à l'enseignement une large place, ont peut-être donné à la partie parénétique une importance exagérée, en lui sacrifiant le côté mystique du culte. Des essais de réaction ont été tentés à diverses reprises contre ce qu'on a appelé la sécheresse du culte protestant, récemment encore par M. Bersier. Il est difficile de dire à quoi ils aboutiront, car l'exemple des ritualistes anglais prouve qu'on va toujours plus loin qu'on ne se l'était d'abord proposé. — Les liturgies les plus connues sont: en Orient a. celle dite de Jérusalem, attribuée à saint Jacques, mais que les mots de homo-ousios et de théotocos forcent de ra mener à une date plus récente; 6. celle d'Alexandrie, attribuée à saint Marc, mais plus probablement rédigée par Cyrille; elle est devenue en grande partie celle de l'Égl. copte; c. celle de Clément, qui a beaucoup de rapports avec celle de Jérusalem; d. les lit. byzantines de Basile et de Chrysostome, qui paraissent avoir été faites d'après celle de saint Jacques, et qui ont été l'une et l'autre en usage à diverses épo ques et en différents pays. Celle de Chrysostome ayant été traduite en slave, est devenue celle de l'Église gréco-russe. Leur caractère commun, outre l'invocation du Saint-Esprit dans la consécration des éléments de la Cène, est la distinction tranchée entre les catéchumènes et le» fidèles, le culte ne consistant pour les premiers que dans des prières, des chants et des lectures, et le sacrifice de la messe n'ayant lieu que devant les fidèles. Les liturgies arménienne et nes-torienne appartiennent à la même famille. — En Occident on distingue surtout: a. la liturgie romaine, qui date de Grégoire-le-Grand, mais qui fut révisée à la demande du conc. de Trente par Pie IV et Pie V, et publiée en 1570 sous sa nouvelle forme. Elle a pour bases les vieux formulaires de Léon et de Gélase; b. la lit. de Milan, ou d'Ambroise, qui s'est maintenue malgré les efforts des papes, Nicolas U 1060, et Eugène IV 1440; une bulle d'Alexandre VI l'a encore autorisée 1497. Elle se rapproche des liturgies orientales par plusieurs points, notamment par la triple lecture des Écritures, c. la lit. mozarabique, q. v., etd. la lit. gallicane, d'origine orientale, rédigée par Hilaire de Poitiers, mais déjà abandonnée par les carlovingiens, et dont il ne reste plis que des fragments. C'est Flacius l'Illyrien qui en 1557 l'a de nouveau rappelée à l'attention publique. — L'Égl. luthérienne possède plusieurs liturgies assez développées, qui toutes reposent comme doctrine sur l'Augustana et sur le catéchisme de Luther, mais aucune n'est absolument obligatoire pour toutes les églises. Il en est de même pour les égl. réformées, où non seulement la partie liturgique joue un rôle plus eflacé, mais où la liturgie elle-même est trop souvent abandonnée à la discrétion des pasteurs et des prédicateurs qui la modifient ou même la suppriment à leur gré. Quant à la liturgie dans l'Egl. anglicane, v. Prayer-Book.

LIUDGER, petit-fils de Wttreing, q. v. montra de bonne heure des dispositions pour l'étude et de l'amour pour la parole de Dieu. Élevé à Utrecht par les soins de l'abbé Grégoire, puis à York sous Alcuin, il exerça son ministère à De-venter, a Ostrach, puis parmi les Saxons et les Frisons, avec des alternatives de succès et de persécutions. Après avoir évangélisé Heligoland, il revint dans le Zuydersee à la demande de Gharlemagne, se fixa ensuite dans la Westpha-lie, et fat nommé év. de Munster, où il resta jusqu'à sa f 80». Il a laissé une Vie de Grégoire. Sa fin fat paisible et joyeuse. On lui attribue plusieurs miracles.

LIUTPRAND, v. Luitprand.

LIVIN, moine irlandais, disciple de l'archev. Augustin, annonça l'Évangile en Brabant et fut tué près de Gand vers 659. Sa biogr., attribuée à tort à Boniface, est pleine de légendes; elle est d'ailleurs en contradiction manifeste sur plusieurs points avec l'hist. ecclés. de l'Angleterre et de l'Irlande.

LIVLNGSTONE, David, né 10 mars 1813 à Blantyre, Écosse, f 4 mai 1873 à Hala, sur les bords du Bangoelo, inhumé à Westminster, à côté des hommes les plus illustres de la Grande-Bretagne. Fils d'un ouvrier, il fut placé à dix ans comme rattacheur dans une filature de coton; mais dévoré du désir de s'instruire il s'acheta une grammaire latine, et à 16 ans il lisait Horace et Virgile. Il continua d'acheter des livres, qu'il étudiait tout en travaillant de son métier. Bientôt son chemin s'aplanit; il put suivre à Glasgow des cours de science, de médecine et de théologie, et fut admis comme élève de la Soc. des missions de Londres. A ses titres ecclésiastiques il joignit celui de docteur en médecine, et fut envoyé au Gap où il arriva en 1840. Au Kourouman il épousa la fille du missionnaire Moffat, et s'acquit par son caractère et son courage une grande popularité parmi les indigènes. Mais les Boers ravagèrent sa station et il dut se chercher un nouveau champ de travail. Le missionnaire devint un explorateur. Il visita le Zambèse, découvrit le lac Ngami, et après avoir embarqué sa famille pour l'Ëurope, il résolut de traverser l'Afrique de l'ouest à l'est, 1854 à 1856. Après un voyage en Angleterre il revint en mai 1858 avec son fr. Charles «t quelques amis protégés par le gouvernement. C'est dans ce voyage qu'il vit de près les chasseurs de nègres, et qu'il se décida à faire à cet infâme commerce une guerre sans relâche. Sa femme était venue le rejoindre, mais elle succomba â la fatigue janvier 1862. Il revint en Angleterre en 1864 avec toute l'expédition, mais recommença en 1866 une nouvelle exploration de l'Afrique centrale; les sources du Nil et celles du Congo étaient découvertes. Speke, Burton, Grant, Baker, avaient marché sur ses traces, et les grands problèmes géographiques étaient en bonne voie de solution. En mai 1869 il arrivait à Udjiji, malade et épuisé. Depuis ce moment et pendant trois ans, on n'entendit plus parler de lui. L'heureuse expédition de Stanley, envoyé par un journaliste américain, M. Bonnet, le retrouva à Udjiji, déc. 1871. Li-vingstone et Stanley explorèrent ensemble le lac Tanganika, puis Stanley repartit pour l'Europe, mars 1872, laissant L. reconforté et ravitaillé. Au commencement de 1873 Livingstone arrivait au lac Banguelo, mais fatigué et dans un pays inondé. La fièvre le saisit; on était obligé de le porter, et le matin du 4 mai ses fidèles domestiques le trouvèrent agenouillé, la téte appuyée sur son lit; il était mort. Son corps fut embaumé et porté à Zanzibar par les hommes de l'escorte, un fait qu'on n'a pas suffisamment remarqué, et qui prouve de quel respect et de quelle considération il était entouré, car les naturels du pays ont l'horreur des cadavres et n'en touchent jamais. L'Angleterre, en donnant à L. une sépulture presque royale, a voulu honorer en lui l'homme, le chrétien, le missionnaire, le philanthrope et le hardi explorateur qui a ouvert à la civilisation les portes de l'Afrique.

LIVRE, v. Liber.

LOBWASSER, Ambroise, connu par une trad. allemande des Psaumes de Clément Marot, et par le succès qu'elle obtint, malgré ses imperfections, dans les égl. réformées de l'Allemagne et de la Suisse qui s'en servirent longtemps. Né 1515 à Schneeberg en Saxe, il étudia à Leipzig, visita la Hollande, la France et l'Italie, et devint prof, de droit à KOnigsberg. f 25 nov. 1585. Ses Psaumes ont à leur tour été trad. en romanche pour les Grisons.

LOCARNO, ville tessinoise située sur le lac Majeur, soumise en 1512 à la Confédération. Un mouvement évangélique s'y produisit de 1531 à 1548; beaucoup d'Italiens proscrits s'y rattachèrent, sous la direction du prêtre Giovanni Beccaria. Les cantons cathol. tracassèrent la petite communauté; Zurich, à l'instigation de Bullinger, essaya de protéger ses coreligionnaires, mais ne put faire autre chose que leur offrir nn refuge dans ses mors, 4555. Parmi les familles qui en profitèrent, on nomme Vermi-gli, Ochino, les Socin. Beccaria les accompagna, puis se rendit à Misox en 1559 et f à Rondo 1580.

LOCI COMMUNES, lieux communs, se dit en théologie des vérités philos, et morales qui se comprennent d'elles-mêmes et n'ont pas besoin d'être prouvées. Mélanchthon donna ce titre à son principal ouvrage dogmatique, lequel n'était pas dans l'origine une Dogmatique, mais une explication suivie de l'Ép. aux Romains, et comme une introduction à l'étude de l'Écrit, sainte. C'est plus tard seulement que le titre de theologici fut joint au titre primitif, parce que Spalatin, qui avait traduit l'ouvrage en allemand, l'avait intitulé: Principaux articles et points essentiels de la S. Écriture. Ce livre eut de 1521 à 1535, 18 éditions différentes et 8 traductions. Mélanchthon y jette carrément pardessus bord toute la terminologie scolastique, et se montre prédestinatien, comme Luther. L'édition de 1535 traite en outre de la Trinité et de l'Incarnation. A mesure qu'il avançait en âge et en expérience, Mélanchthon retouchait son œuvre et la revisait dans un esprit plus conciliant et moins absolu, notamment en ce qui concerne la doctrine du libre arbitre et celle de l'Église. L'édition de 1543 contient la revision définitive d'une œuvre capitale dans l'histoire du développement de la Réforme, et dont l'auteur, avant sa mort, a pu compter 26 éditions latines et

10 allemandes. Publ. par Bindseil 1854.

LOCKE, Jean, fondateur de l'empirisme philosophique, né 29 août 1632 à Wrington, près Bristol, fils d'un greffier de justice de paix qui avait servi comme capitaine dans l'armée parlementaire. Il étudia à Oxford la philos, et la médecine, mais sa santé ne lui permit pas de pratiquer cette dernière. Ayant obtenu au collège de Christ un bénéfice, ou sinécure, il put se livrer tout entier à ses travaux. Le comte de Shaftesbury se l'attacha en 1566, lui confia d'abord l'éducation de son fils, puis, devenu ministre, lui donna une position dans le département des colonies. Disgracié en même temps que son protecteur, il le suivit en Hollande 1682, revint avec le prince d'Orange 1688, et fut nommé commissaire du commerce et des colonies avec un traitement considérable; mais

11 donna sa démission pour cause de santé 1700, et se retira chez Lady Marsham, à Oates, où il f 28 oct. 1704. Sa philos, est tout entière dans cette maxime: Nihil est in intellectu, quod non fuerit in sernu; il n'y a rien dans l'intelligence, qui n'ait été d'abord dans les sens. C'est l'idée qu'il développe dans son Essai sur l'entendement humain. L'homme a deux moyens pour arriver k connaître la vérité: la sensation et la réflexion; ce dernier point n'est pas très clair dans son système, qui aboutit en morale à la doctrine de l'intérêt, quoique Locke s'en défende. Il a écrit aussi sur d'antres sujets, sur l'éducation, les rapports de la raison avec le christianisme qu'il veut concilier, la liberté, la tolérance, etc. On a été un peu loin en l'acca-sant de matérialisme et de socinianisme, mais il y prête par plusieurs de ses affirmations, et le fait que Condillac s'est fait son disciple suffit à caractériser son système.

LODEiNSTEIN, Jodocus (de), né à Delft vers 1620, élève de Voëtius et de Cocceius; pasteur à Utrecht 1652, prédicateur éloquent et plein de vie, il combattit le relâchement spirituel de l'Égl. réformée, chercha à rétablir la discipline, organisa comme Spener de. petites réunions d'édification, mais ne voulut jamais, quoique ami de Labadie, se séparer de l'Égl. à laquelle il appartenait. Cependant, à dater de 1665, il cessa de distribuer lui-même la cène, pour n'être pas obligé de la donner à des indignes. Lors de l'invasion des Français en 1672, il consentit dans l'intérêt de son église à se laisser emmener comme ôtage à Rees. Ses disciples, comme ceux de Labadie, furent surnommés les Régénérés, ou les Fins, désignation qui leur est restée jusqu'à ce jour. Il a composé beaucoup de cantiques, dont plusieurs se chantent encore, t 1677.

LŒFFLER 1® Fréd.-Simon, neveu de Leib-nitz, théol. protestant, auteur d'un essai exégé-tique sur la parabole des Vignerons. Né à Leipzig 9 août 1669, pasteur à Probstheida, + 1748. — 2« Josias-Fréd. -Christian, un des représentants les plus accrédités du rationalisme. îié 18 janv. 1752 à Saalfeld, il fut élevé à la maison des orphelins de Halle, étudia sous Semler, fut successivement aumônier militaire, pasteur et prof, de théol. à Francfort sur l'Oder, et surintendant à Gotha, où il f 1816.

LCEHE, Jean-Conrad-Guill., né 21 févr. 1808 à Furth, Bavière; étudia à Erlangen; luthérien ardent, prédicateur de premier ordre, jouissant d'une grande autorité dans l'Égl. de Bavière, avec des tendances ritualistes prononcées, comme le montrent son Calendrier des saints, l'extrême-onction qu'il a introduite dans sa maison des diaconesses de fteuendettelsao, et diverses publications. Il s'est beaucoup occupé des missions et a fondé des colonies luthériennes aux États-Unis, f 2 janv. 1872.

LOEN, Jean-Michel (de;, né 1695 à Francfort sur le Main, mort 1776 à Marbourg comme conseiller prussien et président du gouvernement de Lingen; connu surtout par son écrit sur La seule vraie religion, universelle dans ses principes, troublée par les disputes de ses docteurs, divisée en sectes, restaurée en Christ, 1750- Avec l'idée de la révélation intérieure, il faisait consister toute la religion dans la foi et la charité. Il estimait qu'il y avait beaucoup de choses bonnes dans la hiérarchie romaine, et pensait que pour la Cène, à cause des concep lions différentes, il valait mieux la célébrer en famille. Il aurait voulu réunir en une seule Église tous les protestants, et même les cathol i ques. Il a écrit sous le pseudonyme de Gottlob de Friedenheim (Louange à Dieu, paix chez les hommes).

LOESCHER io Jean-Gaspard, né 8 mai 1636 à Werden, Voigtland, pasteur à Erfurt, Zwic kau, Dantzig; enfin prof, de théol. et surintendant à Wittenberg, où il + H juill. 1718. — i* Son fils Valentin-Ernest, né 1673 à Sonders-hausen; après avoir occupé différents postes comme pasteur et prof., il fut nommé 1709 à Dresde en remplacement de Spener. Ses talents et sa piété lui assurèrent une grande influence. Il combattit le rationalisme représenté par l'école de Thomasius; mais surtout il fit la guerre au piétisme et combattit ce qu'il appelait les excès enthousiastes de Joachim Lange; il chercha plus tard dans un colloque, à Merse-burg, mais sans y réussir, à faire la paix avec Kranke et Herrenschmidt. Il a publié quelques .Notes théol., et des écrits de circonstance.

LOGOS, mot grec qui signifie la Parole, et qui, appliqué à Jésus-Christ par saint Jean, a joné un rôle considérable dans la théologie, à cause de la difficulté, pour ne pas dire l'impossibilité, de concilier les idées contraires qu'il représente. Le Logos est Dieu; mais distinct de Dieu, puisqu'il est auprès de Dieu, qu'il est venu de Dieu, et qu'il a servi, entre les mains de Dieu à créer le monde. Il est venu dans le monde comme la lumière. Il a été fait chair. Celui qui Ta vu a vu le Père. Tous les conciles et tous les docteurs ont cherché à définir et à préciser ce qui, dans l'Écriture et même dans saint Jean, reste vague et indéterminé; dès que l'on croit avoir trouvé une solution qui semble satisfaisante, il se présente d'autres passages qui la contredisent, et l'on risque touj. en parlant de l'être infini, qui ne se mesure pas à la mesure de l'homme, d'exagérer dans le sens de l'anthropomorphisme, du docétisme, ou de quelqu'une des nombreuses sectes des premiers siècles. L'idée du Logos, ou de la Parole, si nettement formulée dans saint Jean, se trouve déjà dans l'A. T. sous les trois formes, ou noms successifs de: VAnge de l'Éternel, qui apparaît à Abraham, à Jacob, à Moïse, à Josué, et dans Zacharie, et qui même quelquefois est appelé l'Éternel; la Parole, dans la Genèse, dans les Psaumes, et ailleurs; et enfin la Sagesse, dans Job et Prov. 8. il y a dans plusieurs de ces fragments une telle poésie qu'on pourrait n'y voir qu'une personnification de divers attributs de Dieu, mais d'autres ne peuvent s'expliquer ainsi et ne se comprennent qu'en admettant une individualité, une personnalité distincte, plus qu'une simple incarnation temporaire et momentanée. Cette doctrine qui par moments laisse entrevoir l'identité de la Parole et du Messie, qui dans Malachie semble confondre l'Ange de l'alliance et le Messie, se précise davantage encore dans les Apocryphes, à mesure qu'approche le jour où il doit être manifesté. L'Ecclésiastique et la Sapience affirment l'éternité de la sagesse, son habitation en Israël, son action et presque son incarnation. L'influence païenne a paru à quelques théologiens être évidente dans la doctrine de Jean et dans les derniers Apocryphes de l'A. T., dont les auteurs avaient pu connaître la philos, grecque; ils ont cru y distinguer soit le panthéisme stoïcien, soit la notion platonicienne de l'âme du monde, et il est possible qu'il y ait eu une influence de forme exercée par la sagesse grecque sur la systématisation définitive du Dieu immanent. Mais la doctrine elle-même d'un intermédiaire entre Dieu et le monde existait depuis si longtemps chez les Hébreux, comme le prouvent leurs livres sacrés, qu'il n'est pas possible de chercher ailleurs que chez eux-mêmes la justification et l'explication du prologue de Jean et de sa théologie.

LOGOTHÈTE, haut fonctionnaire de l'Égl. grecque, espèce de chancelier ecclésiastique, garde des sceaux, chargé des ecritures et de la comptabilité, et membre du conseil justiciaire.

LOH, Jaques (de), simple artisan protestant, arrêté à Lille le 30 janv. 1361 entre 5 et 6 h. du matin, lors de la persécution des Pays-Bas. On trouva chez lui des livres évangéliques. Il fut brûlé le 15 févr. après 15 jours de prison.

LOHE, Pierre (de), né à Elberfeld, vicaire en 1552, fut contraint de s'enfuir pour échapper aux persécutions du clergé romain, qui l'accusait d'avoir distribué la Cène sous les deux espèces et attaqué la doctrine de l'eucharistie. Nommé prédicateur à la cour de la comtesse Anna de Waldeck, il visita plusieurs fois en secret sa patrie et son ancienne paroisse et fut plusieurs fois arrêté et mis en prison. En 1565 un ordre du duc Guillaume le rappela à Elberfeld et lui rendit ses fonctions; il le chargea en outre d'organiser l'Égl. réformée dans le pays. Lohe mérita d'être appelé le Réformateur du duché de Berg. f après 1567.

LOI, expression générale qui se dit de tout ce qui doit être ou se faire; il y a les lois de la nature, les lois physiques, les lois morales, les lois civiles, les lois religieuses, etc. Dans la constitution théocratique des Hébreux, la loi comme telle avait un caractère absolu, et l'on ne distin-

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loi

guait pas parmi les commandements ceux qui étaient de Tordre politique et ceux qui étaient exclusivement religieux. Avec l'Évaugile la distinction s'est établie nettement et Jésus a marqué la limite entre ce que l'homme doit à César et ce qu'il doit à Dieu. Plus tard, quand le christianisme fut devenu la religion officielle du monde romain, la confusion recommença, et suivant que l'un ou l'autre pouvoir était le plus fort, l'État donna des lois à l'Église, ou l'Église prétendit en donner à l'État. Ce fut la guerre du moyen âge, et elle n'est pas encore entièrement terminée. Le pharisaïsme et le catholicisme se caractérisent par leur tendance à identifier les prescriptions cérémonielles et les lois morales; la même chose peut se dire, quoique en sens inverse, de l'anlinomianisme tel qu'il est représenté par Agricola, rabaissant la loi morale au niveau des lois cérémonielles et disant que la prédication de la loi n'est plus faite pour ceux qui sont régénérés. Les anciens docteurs ont an contraire relevé le caractère permanent de la loi divine, et spécialement du Décalogue qui en est la formule la plus précise et la plus succincte, en insistant sur sa valeur au point de vue civil, puisque ses commandements sont à la base de toute société organisée; pédagogique, puisqu'elle doit servir de direction dans l'éducation; et normative, puisqu'elle renferme la règle absolue de toute vie morale. L'Égl. romaine, s'appuyant du sens qu'elle donne à Matt. 16, 18. 19. s'est cru en droit de légiférer, mêmes sur les questions civiles et pénales. Mais avec le développement qu'a pris la notion de l'État dans la société moderne, elle n'a pu maintenir ses prétentions et elle a dû se renfermer dans les limites de son domaine propre, sans même que les peines qu'elle édicté, telles que l'excommunication, puissent avoir aucune conséquence civile. Dans le domaine religieux les églises peuvent avoir leur confession de foi et leur discipline, mais sans autre autorité légale que celle qui ressort des conditions dans lesquelles ces églises sont formées; si elles relèvent de l'État, c'est le gouvernement seul qui peut les transformer en lois; si elles sont indépendantes, c'est à elles et à chacun des membres qui les composent, qu'il appartient de décider s'ils les acceptent et s'ils veulent s'y soumettre.

LOLLARDS, ou Lollhards, nom dérivé d'un mot qui signifie murmurer, parler à voix basse; il s'appliqua d'abord aux alexiens, q. v., garde-malades qui avaient coutume de parler bas. On donna ensuite ce nom aux beghards, puis à toutes les sectes religieuses.il finit par désigner plus particulièrement en Angleterre les partisans de Wicleff. Ceux-ci, partant d'un principe strictement scripturaire, rejetaient avant tout l'autorité de l'Église, et avec elle toutes les doctrines qu'elle ne pouvait pas justifier, confession auriculaire, indulgences, invocation de* saints, etc. Leur piété était simple et pratique, leurs mœurs étaient pures et sans reproche. Un de leurs adversaires assure que plus de la moitié du peuple anglais était lollard, mais il attribue leurs succès au démon. Ils étudiaient la Bible, lisaient des livres de dévotion, s'édifiaient dans de petites assemblées et travaillaient activement à l'évangélisation. Bien que persécutés déjà du vivant de Wicleff, ils continuèrent son œuvre après sa mort et comptèrent de nombreux martyrs, parmi lesquels W. Sawtre, prêtre de Londres 1400, Thorp 1407, John Badby 1410, sir John Oldcastle, lord Cobham 1417, victimes de la fureur de l'archev. Arun-del. Sous Chicheley qui lui succéda, féroce el rusé, les supplices redoublèrent encore; il y aurait tout un martyrologe à écrire. Pour le roi la question religieuse se compliquait surtout d'une question politique. En 1394, au moment où les usurpations du pape avaient indisposé le parlement, les lollards présentèrent à celui-ci 12 propositions, demandant l'abolition du célibat forcé, la suppression de la peine de mort, la fin des guerres, etc. Le roi y répondit en menaçant de mort les seigneurs qui protégaient ce mouvement, et d'accord avec le parlement il promulgua 1400 l'acte De comburendo h&retico. ordonnant de brûler les hérétiques. On passa vite à l'exécution; Sawtre fut brûlé le 4 févr. de la même année. Des visites épiscopales purgèrent l'univ. d'Oxford de toute velléité d'opposition, et après qu'en 1417, sous Henri Y, lord Cobham, le favori d'Henri V, eut été brûlé, il fut facile à l'Inquisition d'en finir avec les restes des lollards, comme on en avait fini avec leurs tournées d'évangélisation. Tout était donc terminé en 1431, mais en apparence seulement; le feu couvait sous la cendre. Il y eut encore quelques martyrs: Gooze 1473, Brown 1511. La Réformation approchait; elle trouva le terrain préparé et mit un terme aux supplices el à l'omnipotence de la cotir de Rome. — V. Lecli-ler. Wiclif und die Lolarden, Leipzig 1858.

LOMBARD, Pierre, célèbre théol. scolastique. né à Novarre en Lombardie vers 1100, étudia la théol. à Bologne, à Reims et à Paris, où il fut reçu docteur, puis professeur de théol. et enfin évêque 1159. f 1164. Son cours, intitulé Sen-tentiarum libri IV, l'a fait surnommer le maître des sentences. Il chercha à concilier la théol. spéculative et la théol. ecclésiastique (non la théol. mystique, comme avait fait Anselme). Il fut scolastique par la forme, par le mode d* thèses et d'antithèses qu'il employa pour expo-ser ses doctrines. D'un autre côté il satisfit k* parti ecclésiastique, ou positif, en prenant comme base des passages des pères ot de l'Écriture. Inférieur en talent à Abeilard, en piété à Bernard, il fut le vrai représentant de l'école de la tradition. Pendant trois siècles et demi son livre fut plus honoré et plus estimé que la Bible. Le livre traite de Dieu et de la théologie proprement dite; le 2d de l'anthropologie; le 3e de la sotériologie; le 4® des sacrements (Nuremberg 1474, Venise 1480). Il a été l'objet de nombreux commentaires, mais comme dans certains passages il n'a pas suffisamment affirmé le système de la hiérarchie, et comme par ses syllogismes il a paru ébranler la doctrine de la vraie humanité de Jésus, il fut accusé sous Alexandre III et dénoncé à la faculté de Paris. Il a aussi écrit des Comment, sur les Psaumes, le Cantique, et les Épltres de Paul. Il eut pour disciple Pierre de Poitiers.

LOMBARDS, ou Longobards, peuple d'origine germanique, venu probablement du Jut-land, au nord de l'Elbe, et qui par la Moravie se rendit en Pannonie, où il embrassa superficiellement l'arianisme. Il battit ensuite les Gé-pides, 547, mais repoussé par les Avares il passa en Italie sous les rois Auboin et Clef 569, mit fin à la domination gréco-romaine et fonda le royaume lombard, avec Pavie poijr capitale. Les rivalités des cités lombardes, qui plus d'une fois s'organisèrent en républiques, ne sont pas encore très bien connues, mais leur histoire se rattache à celle de l'Église en ce sens que, voulant dominer l'Italie entière, elles se heurtèrent plus d'une fois contre les év. de Rome qui avaient la même ambition. Leur arianisme, encore imprégné de souvenirs païens, n'était pas de taille à se mesurer avec le catholicisme. Les efforts df> la reine eathol. Théodelinde el de Grégoire 1er furent couronnés de succès; les évêques ariens furent bientôt évincés et Aribert, neveu de Théodelinde, monta sur le trône comme premier roi catholique. Mais à partir de ce moment leurs intérêts se divisèrent. Les papes prirent parti pour les ducs de Bénèvent et de Spolète qui réclamaient leur indépendance; de leur côté les rois lombards soutinrent l'archev. de Milan et le patr. d'Aquilée, qui refusaient de reconnaître l'autorité du pape en matière d'administration intérieure et d'élection du bas et du haut clergé. La belle époque de ce royaume tombe sous le règne de Luitprand 713-742; c'est lui qui acheva l'organisation du pays déjà commencée par l'édit de Rothari 643. Ayant entrepris une campagne contre le pape, il faillit avoir pour adversaire son ancien allié Charles Martel, que Grégoire II avait appelé à son aide, mais la mort des deux belligérants coupa court à la guerre, et Zacharie fit la paix avec les Lombards. Les difficultés recommencèrent sous Rat-chis et Astolfe; Étienne III invoqua le secours de Pépin-le-Bref, qui obligea Astolfe à abandonner ses conquêtes et à reconnaître la domination franque. Didier (Desiderius) vécut d'abord en bons termes avec Étienne IV, mais il finit aussi par vouloir s'émanciper et il menaça Rome. Gharlemagne, qui avait épousé, puis répudié la fille de Didier, prit parti pour Adrien et mit lin à la monarchie lombarde en réunissant le pavs à ses États, 774.

— Plusieurs négociants et banquiers italiens ayant dû émigrer à la suite des guerres des guelfes et des gibelins, et n'ayant d'autre ressource que le trafic pour échapper à la misère, fondèrent de nombreuses banques et furent généralement désignés sous le nom de Lombards, qui devint peu à peu, mais à tort, synonyme du mot usurier à une époque où, sous l'influence de l'Église, tout prêt à intérêt était considéré comme une usure. Les premiers qui s'établirent en France étaient en effet des banquiers lombards, et ils ont laissé à Paris un souvenir de leur présence dans la rue des Lombards; de même à Londres, Lombardstreet. On leur attribue l'origine de la lettre de change.

LONGOBARDS, v. Lombards.

LOPE de Vega, don Félix, né à Madrid 25 nov. 1562, étudia la théol. à Alcala et à Salamanque et s'amusa à faire des vers. Un duel dans lequel il blessa un gentilhomme qu'il avait déjà offensé par une satire, l'obligea de quitter Madrid. Ayant perdu une femme qu'il aimait, il embrassa la carrière militaire, se trouvait à bord de l'invincible Armada, quitta le service en 1590, se remaria et se mit à travailler pour le théâtre. Devenu veuf une seconde fois, il se fit prêtre et rerut les ordres 1611. Il n'en cultiva pas moins la littérature qui depuis longtemps lui avait fait une réputation. Le roman l'Arcadie était un produit de sa jeunesse; la Belle Angélique devait faire suite à l'Arioste; Jérusalem conquise devait compléter le Tasse. Il écrivit dans tous les genres, sérieux, badin, langoureux, satirique. Mais celui dans lequel il se distingua le plus par sa prodigieuse fécondité, celui qui lui donna presque la gloire, ce fut le théâtre. Il a composé, dit-on, de 15 à 1800 comédies, toutes en vers, dont près de 400 sur des sujets religieux, autes sacramentale$. La glorification de la Vierge dans sa Corona tragica lui valut de la part d'Urbain VIII le bonnet de docteur, le titre de camérier apostolique et la croix de Malte. II fut aussi nommé juge de l'Inquisition et président du collège ecclés. de Madrid. Il a publié, sous le voile de l'anonyme, un livre de piété: Soliloquios a Dios. f 21 août 1635 à Madrid. Lope de Vega est le vrai type du catholicisme espagnol de son époque, singulier alliage de piété vraie et de mondanité, d'ascétisme et d'amour du monde. Vie par Montai van.

LORCH, Laureacum, sur le Danube, vieil évêché de Pannonie, qui fut transféré à Passau au 8me siècle. Une légende lui donne Marc pour fondateur; elle ne remonte qu'au 8™® siècle. Une autre, du IS^e siècle, l'attribue à Laurent, à cause de l'analogie du nom. Le plus vieux souvenir un peu authentique est le martyre de Florian. Lors des rivalités qui surgirent entre Passau et Salzbourg, la première de ces villes essaya, pour établir les droits métropolitains de Lorch, d'invoquer un écrit du pape Symmaque à l'archev. Théodore de Lorch, mais il fut facile d'établir que cette pièce était supposée. Le premier èvêque connu de Lorch, Constantin, est mentionné dans la vie de Séverin. Urolf q. v. en fut le premier archevêque. Après la translation du siège épiscopal, un couvent considérable fut fondé à Lorch comme dédommagement.

LORETTE, Lauretum, ville de 7000 hab., des environs d'Ancône; pèlerinage célèbre où l'on montre la Santa Casa, la maison de la Vierge et la chambre qu'elle occupait lors de la visite de Gabriel. En 1291 elle fut transportée de nuit par des anges de Nazareth en Dalmatie, et de 1 à en 1294 à Recanati, sur le domaine d'une pieuse veuve, Laureta, d'où elle a pris son nom. Après quelques nouveaux changements de domicile, elle s'est fixée là où elle est maintenant. Paul II lui a accordé des indulgences, et une magnifique église s'est élevée, toute en marbre, sur cet emplacement consacré; elle renferme la Casa Santa dans son enceinte. La Vierge est en bois de cèdre; on la dit l'ouvrage de saint Luc; elle possédait une garde-robe et un écrin dignes d'une princesse; les Français ont tout pillé en 1800, mais la piété des fidèles «Mit bientôt presque réparé ces pertes. On montre pourtant encore à Nazareth, au couvent latin, la vraie maison de la Vierge, qui est en pierre.

LORIQUET, Jean-Nicolas, né 5 août 1760 à Épernay; prêtre, puis affilié à l'ordre des jésuites qui s'étaient cachés sons le nom de pères de la foi, ou paccanaristes, il a brillé surtout dans l'enseignement et fut directeur des séminaires d'Aix en Provence et deSaint-Acheulen Picardie. Il ne comptait pas moins de 800 élèves des premières familles. Protégé par le cardinal Fesch, puis par M. de Freyssinous, il fut banni en 1830 et se réfugia en Suisse; mais la tolérance de Louis-Philippe lui permit de rentrer à Paris, où il f 9 avril 1845. Il a écrit de nombreux ouvrages pour la jeunesse A. M. D. G. (Ad Mu jorem Dei Gloriam), mais en mutilant l'histoire pour la faire concorder avec le reste de son enseignement. Il est devenu presque aussi célèbre que ridicule par sa fameuse phrase: « En 1809 M. le marquis de Buonaparte, lieutenant général des armées du roi, entra à Vienne en Autriche, à la tête de 80,000 hommes. > C'était trop fort, même pour la Compagnie, qui supprima la phrase dans les éditions suivantes. En 4852 M. Fortoul interdit son Hist. de France à l'usage de la jeunesse, même dans les établissements libres.

LORRAINE, ancien royaume de Lothaire II, ancien duché traversé par la chaîne des Vosges et borné en partie par le Rhin. la Meuse et la Moselle; ancienne province comprise entre l'Alsace, la Franche-Comté et la Champagne, avec Metz pour principal évêché, puis Toul et Verdun; cédée à la France 1766; auj. province allemande. Les ducs qui s'y sont succédés ont fini par aboutir à la puissante maison de Lorraine, divisée en de nombreuses branches considérables, sous les noms de Mercœur, Guise, Joyeuse, Chevreuse, Mayenne, Aumale, etc., et alliée à plusieurs maisons souveraines. C'est dans les Guise que cette famille a trouvé, sinon sa plus belle, du moins sa plus riche et sa plus brillante représentation. De l'esprit, du talent, de l'ambition, point de cœur, point de conscience, ils ont rêvé de ceindre la couronne royale et n'ont pas craint de jeter la France dans les malheurs de longues guerres civiles; mais l'orgueil marche devant l'écrasement, et le moment de leur plus vif éclat a précédé de peu celui de leur décadence. La maison ducale a feit à la Réforme une guerre sans pitié comme sans intelligence, et, bien que les doctrines évangé-liques y aient été prêchées à maintes reprises, les ordonnances et les supplices ont touj. empêché le protestantisme de s'y établir. Le doc Charles II fondait en 1572 l'univ. de Pont-à-Mousson, avec nn personnel de 70 jésuites. Un moment on espéra de réussir, quand la sœur de Henri IV, Catherine, épousa le duc de Bar; mais elle f 13 févr. 1604, et le clergé ne cess? de veiller et de sévir. On trouve cependant quelques traces d'églises et de pasteurs à Féné-trange, Phalsbourg, Lixheim, Saarunion, et ailleurs. Il y a auj. un consistoire à Nancy, pour les dép. de Meurthe et Moselle, Vosges et Meuse, avec 6 à 8000 protestants et environ 12 pasteurs.

LORRAINE (cardinal de), Charles de Guise, né 17 févr. 1525, fils de Claude de Lorraine, duc de Guise, et frère de François, duc de Guise; nommé archev. de Reims en 1538 et cardinal en 1547, il prit le nom de Lorraine après la mort de son oncle, le cardinal de Lorraine, pour se distinguer de son fr. Louis, cardinal de Guise. Principal ministre de FrançoisD, il lui avait fait épouser sa nièce, Marie Stuart. f! fut, avec son fr. François, l'un des persécuteurs les plus cruels des protestants. S'il ne réussit pas à introduire en France les jésuites et l'Inquisition, ce fut grâce à l'opposition du chancelier de l'Hôpital et du parlement. II présida au massacre de Vassy 1562 et précipita la France dans la guerre civile. La conjuration d'Ainboise fut pour lui le prétexte à de nombreuses et féroces exécutions. Au colloque de Poissy 1561 il n'obtint pas les résultats désirés, mais il sut manœuvrer avec tant d'habileté et si bien exploiter les circonstances troublées du royaume qu'il regagna par l'intrigue ce que son éloquence n'avait pu lui procurer. L'édit de Roinorantin contre les protestants, mai 1560, fut paralysé par la mort du roi, 5 déc. 1560. Il détourna Antoine de Bourbon du parti huguenot et forma avec lui et François de Guise le fameux triumvirat. Il témoigna publiquement sa joie au sujet de la glorieuse nuit de la Saint-Barthélémy. Il avait joué un rôle important au conc. de Trente, f 26 déc. 1574 à Avignon, comme il revenait de saluer Henri III.

LORSCH, cél. couvent des environs de Heidelberg, appelé aussi Lauresheim, fondé 764 par la comtesse de Williswinda, parente de Chrodegang, de Metz, et dont le frère Gundeland fut le premier abbé. Il remit à Charlemagne ce couvent dédié â Saint-Nazaire, et la protection des Carlovingiens lui valut honneurs et richesses. Les Annales Laureshamenses 703-768 lui ont fait une juste réputation, mais il commença à baisser au 10,ne siècle, et il ne se releva jamais complètement de l'incendie de 1090. Il passa aux cisterciens, puis aux prémontrés; l'incendie de 1621 l'acheva. Son territoire, longtemps disputé, fut donné en 1806 au duché de Hesse-Darmstadt.

LOUDUN, v. Grandier.

LOUIS, le Lois des Grecs, Ludovicus des Latins, Chlodowig des Francs (adouci dans Glovis), Ludwig des Allemands, Lewis des Anglais. Parmi les souverains qui ont porté ce nom, quelques-uns intéressent l'hist. ecclésiastique.

1° Louis-le-Débonnaire, ou le Pieux, surnommé aussi le Moine. Sa piété monacale, son courage personnel, sa culture scientifique, n'ont pas suffi pour contrebalancer les défauts de son caractère sans élévation, faible, irrésolu, passionné, cruel môme, et ses pénitences publiques n'ont pas plus expié ses torts qu'elles n'ont pu les réparer. Né en 778, fils de Charlemagne et d'Hildegarde, il fut nommé roi d'Aquitaine à 3 ans sous la tutelle de Guillaume, duc de Toulouse; après la mort de son frère il fut associé à l'empire 813 et couronné à Aix-la-Chapelle de la propre main de son père, qui réserva formellement le royaume d'Italie à son petit-fils Bernard, fils de Pépin. Une fois son père mort il s'abandonna à tous les dérèglements d'une nature molle, subissant des influences étrangères. Il fut dur envers les membres de sa propre famille, chassa les conseillers de son père, fit crever les yeux à Bernard qui en mourut, partagea 817 le royaume entre ses trois fils, qu'il avait eu d'Ermengarde, refit un nouveau partage 823 pour doter un 4»>e fi|9j Charles-le-Chauve, qu'il eut de Judith, et provoqua une révolte des trois aînés. Relégué dans un monastère 829, rétabli, puis déposé de nouveau 833 après avoir été battu près de Colmar au champ du mensonge, il fut condamné à Compiègne par une assemblée d'évêques convoquée par Lot ha ire et enfermé à Soissons dans le cloître de Saint-Médard. Rétabli en 834, il procède par deux fois à de nouveaux partages, touj. dans l'intérêt de Charles; les aînés reprennent les armes, et avant que la guerre ait été décidée, le pauvre Louis atteint d'une grave maladie f 840 à Ingel-heiin, en pardonnant à ses fils. Il avait fondé dans l'intérêt de la religion de nombreux couvents et évêchés, qu'il avait richement dotés; ces richesses servirent plus tard aux partis dans un intérêt politique. Son règne marqua la séparation de l'empire en deux tribus, la germanique et la romane, en deux pays distincts, qui devinrent plus tard l'Allemagneet la France. Il amenases adversaires h abandonner le principe, qui d'abord avait été le sien, de l'unité nationale fondee sur l'unité ecclésiastique; mais en même temps ses fils, qui en avaient appelé au pape contre leur père, durent renoncer à la doctrine de la supériorité du pouvoir impérial sur le gouvernement ecclésiastique. Une lettre de Grégoire IV, k laquelle Wala n'est pas resté étranger, s'exprime dans ce sens: elle se trouve dans les fausses décrétâtes d'Isidore.

2° Louis IX, ou saint Louis, fils de Louis VIII Cœur-de-Lion et de Blanche de Castille; né â Poissy 25 avril 1215, il reçut de sa mère une éducation digne d'un grand roi et conforme aux idées politiques et relig. de son époque. Il monta sur le trône en 1226; pendant sa minorité la régence fut exercée par sa mère, qui mit fin à la guerre des albigeois par la paix de Paris, 12 avril 1229, et par le concile de Toulouse. Majeur en 1236 il s'appliqua à réformer l'administration, à organiser la justice et à établir l'économie dans le royaume. Il eut à combattre la résistance de ses grands vassaux, et la révolte du comte de La Marche qui, avec l'appui des Anglais, lui refusait l'hommage. Vainqueur en 1242 il pardonna au comte et accorda aux Anglais un armistice de 5 ans, qui aboutit à la paix de 1259. Pendant une maladie dangereuse 1244, il fit vœu, s'il guérissait, d'aller combattre les infidèles. Il partit d'Aigues-Mortes en 1248, passa l'hiver en Chypre, entra en Égypte et prit Damiette l'année suivante, mais vaincu à Mansourah il fut fait prisonnier avec deux de ses frères, 1252, et ne recouvra la liberté qu'en restituant Damiette et en payant une rançon de 8000 besants d'or, environ 7 millions de francs.

II passa encore 4 ans en Palestine, prit Tyr et Césarée, mais ne put aller plus loin. Sa mère étant morte il revint en France et s'occupa surtout d'administration, donna des lois, abolit les combats judiciaires, fonda les Quinze-Vingts pour les aveugles et jeta les bases de la Sor-bonne.C'est de cette époque que date le recueil de lois et d'ordonnances connu sous le nom de Établissements de saint Louis. Il persécuta cruellement les juifs, les vaudois et les albigeois; c'était dans la piété du temps. Mais il maintint les droits et l'indépendance du royaume vis-à-vis des prétentions du clergé, et fonda les libertés de l'Église gallicane par sa célèbre Pragmatique Sanction 1269, fixant les cas où ii était permis d'en appeler de l'autorité ecclés. à la justice royale, appels qui reçurent le nom d'Appels comme d'abus. La première croisade n'ayant donné aucun résultat, il crut ne s'être pas suffisamment acquitté de son vœu, et lorsqu'il apprit la fin de l'empire latin à Constantinople et les massacres des chrétiens en Syrie, il s'embarqua de nouveau à Aigues-Mortes 1270, après avoir visité les principales églises du du royaume. Il fit voile pour Tunis, ou il trouva son fr. Charles d'Anjou, roi de Naples; mais après quelques succès peu importants, la peste éclata dans l'armée; son second fils, le duc de Nevers, fut frappé, et lui-même, atteint, comprit que la mort approchait. Sa fin fut édifiante et paisible; il donna ses dernières instructions à son fils Philippe, lui recommandant la Parole de Dieu, les bénéfices de l'Église et les coutumes du royaume; puis il se lit transporter sur un lit de cendres, où il mourut les bras en croix, 25 août 1270. Il fut canonisé par Boni-face VIII en 1297, à cause de sa sainteté et de miracles qu'on lui attribua. Il est le seul de sa race qui ait mérité et obtenu cet honneur. Quoique entachée des préjugés de son temps, sa foi était vivante et sincère. Les Mémoires du sire de Joinville en citent d'intéressants exemples, v. aussi Guizot.

3° Louis XIII, fils d'Henri IV et de Marie de Médicis, né 1601 à Fontainebleau, roi en 1610 sous la tutelle de sa mère, majeur à 14 ans, épousa à 15 ans Anne d'Autriche. Tiraillé entre le parti huguenot et l'aristocratie, il se laissa gouverner d'abord par le maréchal d'Ancre, Concini et par sa femme, tous deux les favoris de la reine mère. Après leur chute il abdiqua entre les mains de son premier ministre, Richelieu, dont toute la politique fut d'élever la France, non seulement contre les puissances protestantes, comme l'Angleterre et la Suède, avec lesquelles il contracta même des alliances, mais contre l'empire, contre l'Espagne, et même contre le pape. Son histoire est comprise presque entière dans celle de son ministiv.

4o Louis XIV, roi de France 1643-1715, fils de Louis XIII et d'Anne d'Autriche, né 1638; minorité agitée par les troubles de la Fronde. Il épouse en 1659 Marie-Thérèse d'Autriche, fille du roi d'Espagne. Son premier ministre Mazarin étant mort en 1661, il commença à régner par lui-même. Son règne fut célèbre par sa longueur, ses grands hommes, ses victoires et les revers qui en attristèrent la fin. Il gouverna d'après le principe: L'État c'est moi. Il eut la passion de la guerre, de la dépense et des plaisirs. Parmi ses nombreuses maîtresses on connaît surtout Mesd. de La Vallière, de Mon-tespan et de Maintenon; il finit par épouser cette dernière. Sans être religieux, il intervint beaucoup dans les questions religieuses, et se laissa conduire par son confesseur le père jésuite Le Tellier, successeur du P. La Chaise. Il profita de toutes les circonstances pour humilier les rois; il exigea du pape, à l'occasion d'un affront fait à son ambassadeur, le renvoi de sa garde corse, des excuses faites par le nonce, et l'érection à Rome d'une pyramide qui rappelât l'offense et l'expiation. Dans la dispute soulevée en 1673 et 1675 au sujet du droit de régale, il s'appuya de déclarations conformes de la Sor-bonne, établissant dès 1663, les principes do gallicanisme, et il en obtint la confirmation, sous le titre de Déclaration du clergé de France. Le pape condamna les 4 articles et refusa des bulles à tous ceux qui avaient fait partie de l'assemblée de 1682. Un schisme était imminent; Bossuet le prévint; les évêques continuèrent d'administrer leurs diocèses, mais seulement en vertu des pouvoirs qui leur furent conférés par leurs chapitres. Le droit d'asile que l'ambassadeur de France exerçait à Rome en faveur des malfaiteurs et des vagabonds, était un scandale et entravait toute action de la justice. Le pape ayant demandé au roi d'y renoncer, comme avaient fait les autres puissances, Louis s'y refusa avec hauteur, et le pape ayant excommunié l'ambassadeur, le roi se vengea en s'emparant d'Avignon 1688 et en condamnant le nonce aux arrêts. Ce qu'il était avec le chef de la chrétienté catholique, il est naturel qu'il le fût aussi avec les dissidents; son absolutisme, sa dureté, sa cruauté durent même aller plus loin encore, car il espérait dans sa politique de bascule se faire pardonner son insoumission par des persécutions, expier ses torts envers le pape par sa conduite envers les sectaires, et laver les désordres de sa vie privée avec des mesures de rigueur contre les hérétiques. Il n'acceptait pas qu'on pensât autrement que lui, et la dernière moitié de son règne fut consacrée à défendre par la violence la religion qu'il outrageait par sa vie et ses mœurs. Il ne cessa de persécuter les protestants par des lois.

des décrets, des proscriptions; la corruption, les missions bottées, les dragonnades furent ses moyens de propagande, et il les couronna par la Révocation de l'Édit de Nantes, qui chassa du royaume près d'un demi-million d'hommes honnêtes et laborieux, et qui fut l'origine de la terrible guerre des Cévennes, dans laquelle ses généraux n'eurent pas le beau rôle. Il ne se montra pas moins arbitraire et cruel envers les paisibles et pieux habitants de Port-Royal, dont il fit raser la maison en 1709, et qu'il persécuta jusqu'en 1714 au nom de la bulle Unigenitus, qu'il avait obtenue de Clément XI contre Ques-nel en 1713. Les lettres de cachet et d'autres actes despotiques furent les armes qu'il employa pour tenter de réduire les récalcitrants. Il rêvait d'assembler un concile national pour faire proscrire une partie de son clergé par l'autre. La mort 9eule mit un terme à ses tentatives théologiqnes. fà Versailles l®r sept. 1715. Son influence bigote et débauchée se fit sentir encore longtemps après lui.

o° Louis III, dit le Bavarois, ou Louis de Ba-oière, forme une date importante dans l'hist. de l'Église. C'est avec lui que commence l'opposition énergique et finalement triomphante du clergé et du peuple allemand contre les prétentions romaines. Né 1286, fils de Louis II, il réunit en 1312 la Haute et la Basse Bavière, et fut élu à Francfort 1314 empereur d'Allemagne, en concurrence avec Frédéric-le-Beau, nommé par la minorité. Frédéric vaincu à Mtihldorf 1322 fut fait prisonnier et renonça à sa compétition pour recouvrer sa liberté. Mais Jean XXII s'y opposa, voulut contraindre Louis à abdiquer. et sur son refus l'excommunia. Louis fit élire un autre pape, Nicolas V, qui le couronna 1328, mais ne put se maintenir et mourut en exil. Partagé entre le désir de conserver intacte son autorité et la crainte superstitieuse que lui inspiraient les foudres ecclésiastiques, le roi se sentait paralysé; mais les villes et les princes de ses Etats, irrités de voir la curie d'Avignon, dépendante de la France, se montrer de plus en plus arrogante vis-à-vis de l'empereur, et l'accabler d'anathèmes toujours plus rigoureux, résolurent de lui résister. Les premiers actes d'opposition partirent de Rense 15 juill. 1338 et furent confirmés le 8 août suivant par la diète de Francfort. La cause de Louis fut défendue par les cordeliers, sous la direction de Michel de (^ésène, Occam, Marsilius de Padone, Jean Jordan, qui, arguant de la pauvreté du Christ, prétendaient que les prêtres ne doivent non plus rien posséder. Louis f 11 oct. 1347 d'une chute de cheval, excommunié de nouveau par Clément VI, au moment où il allait recommencer la guerre contre Charles IV que le pape voulait lui opposer comme empereur.

6° Louis de Grenade, surnommé le Chrysos-tome espagnol. Né 1504 à Grenade, il fut élevé dans la maison du comte de Tendilla et entra à 19 ans dans l'ordre des dominicains, qu'il illustre par ses talents, son éloquence et sa piété. Prof, de philos, et de théol., il releva le couvent de Scala cœli près de Cordoue, qui tombait en décadence; il fut nommé provincial de Portugal, directeur de Catherine, veuve de Jean III, et composa un grand nombre d'ouvrages de dévotion. Il refusa l'archevêché de Braga et le chapeau du cardinal, et finit par se retirer au couvent de Saint-Domingue, près Lisbonne, où il fut comblé d'honneurs, f 1588. Son éloquence tient en partie à ce qu'il avait étudié surtout la Bible et Cicéron.

7° Louis de Gonzague, v. Aloys.

8° Louis de Léon (Luis Ponse de), le plus correct des poètes espagnols, connu aussi par de remarquables homélies. Né 1527 ou 1528 à Bel-monte, dans le sud de l'Espagne, il entra en 1543 en Salamanque dans l'ordre des augustins et fut nommé docteur et prof, de théologie. Une traduction du Cantique de Salomon et quelques expressions un peu libres sur la Vulgate le firent enfermer en 1572 dans les prisons de l'Inquisition à Valladolid; il n'en sortit qu'au bout de 6 ans, acquitté, et ses fonctions lui furent rendues, + 1591 vicaire général de son ordre. On a de lui La parfaite épouse, et un recueil de poésies divisé en 3 livres: poésies originales, traductions des classiques, et trad. de quelques psaumes et de quelques parties de Job.

LOUP, Lupus lo saint Loup, né vers 383 à Toul, Lorraine, d'abord avocat. Après 7 ans de mariage, il se sépara par consentement mutuel de sa femme, qui était sœur de saint Hilaire, et se retira au couvent de Lérins. Nommé en 426 à l'év. de Troyes, Champagne, il accompagna 429 saint Germain d'Auxerre en Angleterre pour y combattre le pélagianisme. Son ascétisme lui valut une telle réputation qu'on alla jusqu'à lui attribuer des miracles. On rapporte aussi qu'il obtint d'Attila par ses prières qu'il épargnât la ville de Troyes. Il reste de lui une lettre de félicitations à saint Sidoine, et un travail fait en collaboration avec Euphro-nius d'Autun sur quelques points de la liturgie et sur le mariage du bas clergé, f 479.

2o Év. de Lyon, f 540.

3<> Loup, ou Leu9 év. de Sens sous Clotaire II, membre de la famille royale, f 623.

4<> Servatus Lupus, abbé de Ferrières, né 805 dans le diocèse de Sens. Disciple de Raban Maur à Fulda, il fut nommé professeur en même temps qu'abbé de Ferrières 842. Engagé dans les troubles de son époque, au point qu'il dut même faire le service militaire, il conserva touj. le goût de l'étude et recueillit de nombreux mss.

profanes et sacrés. Protégé par Louis-le-Déb. et par Charles-le-Chauve, it assista au conc. de Verneuil 844 et au 2m* conc. de Soissons 853. On a de lui 134 lettres et quelcpies traités. Il prit parti pour Gottschalk dans les controverses sur la prédestination, et écrivit en sa faveur en s'autorisant de saint Augustin. Dans son traité Des trois questions, il établit que l'homme est libre pour le mal; que pour le bien il n'est libre que par l'assistance de Dieu; la prédestination est la base de la sanctification; par la mort de Christ Dieu a racheté tous ceux qu'il a voulu sauver.

5* Christian Lupus, ou Wolf, moine augus-tin. Né 1612 à Ypres, étudia à Louvain, enseigna à Cologne, puis revint à son couvent de Louvain pour lequel il fit plusieurs voyages à Rome, f 1681. Auteur d'un Comment, sur les Conciles, en 5 vol., et de Notes ou Scholies sur les conc. de Chalcédoine et d'Éphèse.

LOURDES, sur la rive droite du gave de Pau, petite ville de 4 à 5,000 hab. avec un vieux château-fort: célèbre par 18 apparitions miraculeuses de la Vierge, dont fut honorée à partir du 11 févr. 1858, une petite paysanne de 13 ans, Bernadette Soubirous. Une enquête, dirigée par le curé et le clergé de l'endroit, prouva que le miracle était authentique. Une autre enquête, aussi ecclésiastique, prouva que l'eau de la source faisait des miracles et guérissait les malades. L'évêque de Tarbes, après avoir tout t pondéré dans la balance du sanctuaire, • autorisa les fidèles à croire k l'apparition, et les pèlerinages commencèrent. Une église monumentale fut construite au-dessus de la grotte et du rosier miraculeux; les hôtels se multiplièrent, le chemin de fer fit un coude pour y conduire les fidèles, et les bouteilles d'eau de Lourdes entrèrent dans la circulation; il s'en vend par centaines de mille. On remarque cependant que le haut clergé continue d'aller aux eaux vulgaires de Bagnères ou de Vichy. Bernadette, envoyée chez les ursulines de Nevers, y est f 1879.

LOUVAIN, vieille cité belge d'environ 30,000 habitants. Elle est célèbre surtout par son université, qui fut fondée en 1425 par Jean IV de Brabant, autorisée par Martin V et ouverte le 7 sept. 1426. Parmi les hommes qui l'illustrèrent, on compte Adrien VI. Lipse. Baïus, Jan-senius, Bellarmin. Sous Baïus et Jansenius elle fut un foyer de résistance contre le jésuitisme. Joseph II y installa pour quelque temps un de ses séminaires généraux et transféra 1788 à Bruxelles toutes les facultés, sauf la théologie. Le gouvernement français supprima en 1797 l'université, mais la Hollande la rétablit, 1816. Le gouvernement belge l'ayant abandonnée comme établissement public, les évêques prirent possession des bâtiments et de leurs fondations; ils y transférèrent la faculté catholique libre qu'ils avaient fondée à Malines 1834, et y adjoignirent les 4 autres facultés. A l'université est annexée, comme gymnase, le collège de la Haute colline. Louvain est auj. une des principales forteresses de l'ultramontanisme.

LOU VOIS, François-Michel Le Tellier (marquis de), fils du chancelier Le Tellier; né à Paris 18 janv. 1641, ministre de la guerre sous Louis XIV, l'exécuteur des hautes œuvres contre les protestants, l'organisateur des dragonnades et des missions bottées; il décréta la peine de mort contre tous ceux, hommes ou femmes, qui assisteraient aux assemblées du désert, t 16 juill. 1691.

LOYOLA, Ignace (Lopez de Recalde de), né 1491 au château de ce nom, dans la province de Guipuzcoa, Biscaye, d'une famille noble, fnt élevé à la cour de Ferdinand II, mena quelque temps une vie dissipée, et fut blessé au pied an siège de Pampelune 1521. Pendant sa maladie et sa convalescence il lui tomba entre les mains, au lieu de livres de chevalerie, une Vie de Jésus et des saints, qui surexcita son imagination et donna à son besoin d'agir une direction toute nouvelle. Il résolut de se consacrer à la défense de la religion et de fonder une association qui en ferait l'objet unique de ses efforts. Il s'enferma d'abord dans le couvent de Montserrat, puis dans une caverne près de Manresa, vaquant k toutes sortes d'exercices de piété, tels que flagellations et autres, veillant, jeûnant, jusqu'à ce qu'à la fin il eut des visions et des extases touchant à l'extravagance. En 1524 il visita les Saints Lieux, et quoi qu'on ne lui permit pa> d'y rester longtemps, ce voyage eut pour lui ce bon résultat de lui faire comprendre que, s'il voulait faire une œuvre durable, il lui fallait d'abord commencer par s'instruire. Il se mil donc à étudier la théol. à Barcelone, à Alcala el à Salamanque; mais ayant été inquiété par l'In-quisition, il se rendit à Paris en 1528, et y vécut d'aumônes jusqu'à ce qu'il fut admis an collège de Sainte-Barbe. Là il se lia intimemeat avec 6 amis, qui s'unirent à lui pour la vie: Pierre Favre, de Savoie; François Xavier, Alph. Salméron, Jacq. Laynez et Nicolas Boba-dilla, espagnols; enfin Simon Rodriguez, portugais. C'est avec eux qu'en août 1534 il posa les premières bases de l'association nouvelle: ils firent vœu de pauvreté, d'obéissance et de chasteté, et s'engagèrent, une fois leurs études terminées, à se consacrer au service des pauvres et des malades, à la prédication, à renseignement de la jeunesse, à la mission de la Terre Sainte, à la défense de la foi contre les infidèles et les hérétiques, et en général (ce fut leur 4®f vœu) à tout ce à quoi le pape voudrait les employer. Approuvé par Paul III 1540, Loyola fut nommé général de l'ordre, écrivit en espagnol les Constitutions des jésuites, qui furent trad. en latin et publ. Rome 1588, et f 1556, épuisé par ses austérités. Outre ces Constitutions, qui sont un chef-d'œuvre en leur genre, il a encore écrit des Exercices spirituels en espagnol; trad. lat. Rome 1548. Vie, par Bouhours. Canonisé par Grég. XV. Outre une piété consciencieuse, quoique peu éclairée, et malgré tout le mal qu'il a fait à la religion et à la société, on ne peut contester au fondateur de l'ordre des jésuites un certain génie et un puissant talent d'organisation.

LUBECK, une des villes de la Ligue hanséa-tique, et leur capitale depuis 1226. Fondée par le prince vende Gottschalk, elle devint dès 1163 le siège d'un évêché important. La Réformation y pénétra en 1524, mais rencontra de la part du Conseil de la ville une résistance opiniâtre, qui ne céda que devant un mouvement populaire, 30 juin 1530. Les prédicateurs AVilms et Walhoff furent rappelés, et les prêtres s'étant refusés à une discussion publique, il leur fut interdit de prêcher. Bugenhagen fut chargé de la nouvelle organisation ecclésiastique et maintint à quelques égards le système épiscopal. Pendant l'époque des discussions religieuses, Lubeck conserva la paix intérieure, ayant sa propre confession de foi, rédigée par Curtius 1560, et que tous les ecclésiastiques devaient signer. L'évêché évangélique survécut à la paix de Westphalie, et compta successivement 12 évêques de la maison de Holstein. Les réformés y jouissent depuis 1825 de tous les droits civils, el ont une église à eux depuis 1826.

LUBIENIECKJ, Stanislas, né à Racovie 23 août 1623. Fils d'un pasteur unitaire, socicien lui-même, il mena uue vie assez agitée, tour à tour précepteur et pasteur, souvent tracassé à cause de ses opinions, renvoyé de Copenhague et de Friedrichstadt où il avait espéré trouver un refuge. Il f 1675 à Hambourg, empoisonné par accident ainsi que ses deux filles. Auteur d'une notice sur la signification des comètes, et d'une Hist. inachevée et partiale de la Réform. en Pologne.

LUC, v. Luce.

L13CAR, Cyrille, patr. de Constantinople, connu pour ses tendances évangéliques et par les efforts qu'il tenta, quoique pas avec assez d'énergie, pour vivifier l'Église grecque. Il naquit dans l'île de Crête à Candie, en 1572. U fit ses premières études à Venise, puis à Padoue où il resta jusqu'à l'âge de 23 ans. Son protecteur, Mélétius Péga, l'appela auprès de lui à Constantinople où il ét^it vice-patriarche en l'absence du titulaire, et au bout d'un an Cyrille fut ordonné prêtre, puis archidiacre. Mélétius lui confia diverses missions; ce fut ainsi qu'il alla en Pologne où il eut à Vilna une conférence avec des protestants, et revint par l'Allemagne à Genève où il resta quelque temps. Il avait plus de sympathies pour les protestants que pour les catholiques. Il alla aussi en Crête pour collecter; dans un de ces voyages il fit la rencontre du Hollandais Cornélius Van Haga, avec qui il resta dès lors en relation. Le patr. d'Alexandrie Mélétius venait de mourir et avait désigné comme son successeur Cyrille Lucar, 1602. A partir de ce moment, sa vie ne cessa d'être une vie de luttes et de persécutions. Il remplit l'intérim de la place vacante et aurait été nommé patriarche s'il avait consenti à payer le tribut injuste que réclamait le sultan. Il dut s'opposer aux agissements des latins et surtout des jésuites dans l'Égl. grecque. Des ennemis ayant mis sa vie en danger, il se réfugia dans un couvent du Mont Athos, puis en Égypte. (> fut pendant son séjour au Mont Athos qu'il trouva le fameux Codex Alexandrinus, dont il tit hommage à Jacques 1er. Craignant pour le clergé grec l'influence latinisante de Venise et de Padoue, il envoya son protégé, le jeune Me-trophanes Critopoulos étudier en Angleterre et le recommanda à Abbot, l'archev. de Cantorbéry. Cependant Cyrille continuait ses travaux, étudiait les écrits des théol. réformés et luthériens. et devenait de plus en plus hostile aux jésuites, comme le montre sa correspondance avec De Dominis, ancien archev. de Spalatro. Il comptait aussi parmi ses amis David Le Leu de Wilhelm, conseiller des princes d'Orange, et Antoine Léger, chapelain de l'ambassade hollandaise. Cette influence qu'il subissait le fit accuser d'avoir servi de « valet » aux étrangers protestants qui auraient désiré une réforme dans l'Église grecque. Cyrille, reconnaissant la dégradation de son Eglise, aurait désiré une réforme; s'il ne réussit pas, il faut l'attribuer en partie à un défaut d'énergie de sa part. Le patriarcat de Constantinople étant encore une fois vacant, Cyrille, élu de nouveau, accepta 1621, au grand déplaisir des latinisants et des jésuites qui dès lors lui déclarèrent une guerre à mort. Ils le renversèrent une première fois et mirent à sa place Anthime, qui ne garda pas longtemps le siège patriarcal. Cyrille revint; les jésuites renouvelèrent leurs intrigues contre lui. mais ils furent arrêtés, grâce à l'intervention des ambassadeurs anglais et hollandais, pour avoir saisi la « Confession de foi » que Cyrille faisait imprimer. Renversé de nouveau, exilé à Téné-dos, puis à Rhodes, il fut réintégré une 3* fois sur le siège patriarcal. Cependant ses ennemis voulant avoir le dernier mot, gagnèrent deux pachas qui persuadèrent au sultan que Cyrille conspirait contre la Turquie, et le faible sultan envoya à Constantinople l'arrêt de mort dn patriarche. Cyrille fut étranglé et son corps jeté dans le Bosphore. Ainsi mourut en 1638 à l'âge de 66 ans ce pieux et noble vieillard, qui ne manqua ni de talents ni de zèle, mais auquel le courage et l'énergie d'un Calvin firent défaut. On s'étonne que Cyrille, qui s'était prononcé contre l'invocation des saints et des images, se soit pourtant, sous ce rapport, conformé aux pratiques de son Église. Son principal ouvrage est sa Confession; il y passe en revue dans 18 chapitres les principales doctrines chrétiennes; il se sépare de sa propre Église, dont pourtant il prétend représenter la foi, presqu'autant que de l'Égl. romaine. D'un autre côté si, comme les réformés, il donnait la première place à l'Écri: ture, s'il recevait J.-C. comme seul Sauveur, s'il repoussait la transsubstantiation et le purgatoire, il ne paraît pas avoir eu un profond sentiment du péché et il admet la régénération baptismale. Cette Confession est suivie d'un Appendice contenant 4 réponses à des questions posées par des orthodoxes; 3 au sujet de l'Écriture sainte, 1 au sujet des images. Les opinions de Cyrille furent condamnées dans trois conciles subséquents: à Constantinople 1638. à Jassy 1642 et à Jérusalem 1672. La « Confession orthodoxe » et plus tard celle de Dosithée furent opposées à la Confession de Cyrille Lucar. C'est à lui qu'on doit la première version en grec moderne du NouveauTestament. Il a aussi écrit une Hist. des persécutions d'Égypte contre les fils de l'Égl. orientale, 4 volumes d'Homélies, une Hist. des juifs en Turquie, des traités théologiques, etc. Parmi les auteurs à consulter, v. Neales, le chevalier Ricaut, et parmi les modernes, Dr Pichler, et A. S. Khomichoff.

LUCAS de Tuy (Tudensis), diacre, puis chanoine régulier au couvent de saint Isidore, Léon, nommé en 1239 év. de Tuy dans la Gallice espagnole, f 1288; a écrit contre les albigeois; continuateur de la Chronique d'Isidore jusqu'en 1236; auteur d'une Vie d'Isidore.

LUCE, ou Lucius 1<> èvêque de Rome en 253, mais pour 5 mois seulement, fut exilé et, plus tard, canonisé. On ne sait rien de sa vie.

2° Lucius II, cardinal Gérard, et ami de Wi-bald; 1144; ne régna que 11 mois, et perdit la vie dans une émeute k propos des idées d'Arnaud de Brescia sur la séparation de l'Église et de l'État.

3° Lucius III, 1181-1185, né à Lucques, élu au milieu des troubles par les cardinaux seuls, à l'exclusion du clergé et du peuple. Il a contre lui le redoutable Frédéric et doit quitter Rome; il se retire à Velletri, puis à Vérone, et assemble 1184 un concile à Bamberg, où il fait condamner les patarins, les vaudois, les arnoldistes, et Rome qui lui a pris son patrimoine.

LUCERNE, dont le nom est dû peut-être à un fanal (latin lucerna) construit pour orienter la nuit les bateliers du lac, fut fondée au 7me siècle, dit-on, par un seigneur du pays, appelé Wighard, qui bâtit une chapelle et le couvent de Saint-Leger sur la colline qui domine auj. la ville. Il en fut le premier abbé et lui donna des possessions sur l'Albis. En 768 Pépin-le-Bnef donna ce couvent et la ville aux abbés de Mur-bach, de la Haute-Alsace; ceux-ci les revendirent à la fin du 13me siècle à la maison de Habsbourg, et celle-ci perdit tous ses droits quand Lucerne entra dans la Confédération helvétique, 1332. Depuis la Réformation, et notamment depuis la bataille de Cappel 1531, depuis l'établissement de la nonciature 1579, et depuis la Ligue de Borromée, Lucerne a été le centre reconnu du catholicisme en Suisse. Malgré quelques tentatives libérales, l'ultramonta-nisme y est resté dominant, et il s'est cru assez fort en 1843 pour lever contre la Suisse l'étendard de la révolte, sous la présidence de l'avoyer Siegwart-Muller. La bataille de Gislikon, 23 nov. 1847, mit fin à cette tentative. Lucerne, qui appartenait d'abord à l'évêché de Constance, fat réuni à celui de Bâle. La nonciature a été supprimée en 1873.

LUCIDE, le prêtre, vivait dans les Gaules au 5®® siècle et fat un des membres les plus influents du parti prédestinatien, ne reculant même pas devant l'idée de la prédestination à perdition; le synode d'Arles 475 l'obligea à se rétracter. C'est à lui que le semi-pélagien Fans* tus, de Reggio, adressa son Épître à Lucide.

LUCIE (sainte). Sa mère ayant été guérie d'une perte de sang par un pèlerinage au tombeau d'Agathe de Catane, la jeune fille fit vœu de virginité perpétuelle pour marquer sa reconnaissance. Mais ce vœu anéantissait un projet de mariage, et son fiancé irrité la dénonça comme chrétienne. C'était pendant les persécutions de Dioclétien. Le préteur Paschase ayant condamné la jeune fille à être conduite dans une maison de débauche, aucune force humaine ne put la faire bouger de sa place; l'emploi du feu même fut inutile. On finit par la tuer d'un coup de poignard; avant de mourir elle eut encore la force de prophétiser que la persécution touchait à sa fin. On la fête le 13 déc. et son culte est très ancien, mais l'Égl. cathol. ne l'a pas reçue et elle ne figure pas dans les Acta Sanctorum. Le peuple cependant l'invoque pour les maux d'yeux.

LUCIEN lo écrivain grec, né entre 120 et 130 à Samosate, Commagène, de condition inférieure; il s enfuit de chez son maître qui était sculpteur et malgré sa pauvreté se mit k étudier la philos, et la rhétorique en Grèce; il pratiqua ensuite le barreau k Antioche, voyagea en Syrie, en Egypte et en Italie, se fixa à Athènes, déclamant et récitant ses écrits contre les défauts et les préjugés de ses contemporains, et après avoir perdu sa fortune il accepta de Commode une place de procurateur en Egypte, vers 180. f 200. Il a laissé (^nombreux écrits, les Dialogues des dieux, 1™ Dial. des morts, l'Ane. Le plus intéressant pour l'hist, ecclés. est intitulé La mort de Peregrinus, où il cherche à ridiculiser le christianisme dans ses manifestations extérieures. Il s'agit d'un philosophe qui, après avoir été chrétien, a fini par passer aux cyniques et qui meurt misérablement. On voit comment un homme cultivé, passablement sceptique à l'endroit du paganisme, jugeait alors les chrétiens, sans avoir pris la peine de chercher à les connaître. « Ces malheureux croient être immortels et ils méprisent tout; ils sont aveuglément soumis à leur maître crucifié et à ceux qui sont venus après lui avec leurs écrits. » Cette satire prouve en tout cas la place considérable que les chrétiens occupaient alors déjà dans l'opinion publique. Ed. Dindorf, Didot. Jacobitz; trad. d'Ablancourt, Belin de Balu.

2° Lucien-le-Martyr, aussi de Samosate, né vers 220; fondateur de l'école d'Antioche, prêtre à Alexandrie, célèbre par son austérité non moins que par sa science. Sa revision du texte des Septante a été longtemps appréciée en Grèce et dans l'Asie Mineure; celle du N. T. est moins estimée. En dogmatique il marchait à peu près d'accord avec Paul de Samosate, et après que celui-ci eut été condamné au conc. de 272, il évita tous rapports avec les év. d'Antioche. Arius était son disciple et crut pouvoir en appeler à son autorité; les ariens les plus modérés composèrent même leur Confession de foi de fragments empruntés à Lucien. Il ne reste d'ailleurs rien de ses écrits dogmatiques, et seulement quelques lettres. Il mourut dans la persécution de Maximin; traîné à Nicomédie, il souffrit avec une constance héroïque toutes les tortures, sans répondre autre chose à ses juges que: « Je suis chrétien. » Chrysostome prononça son oraison funèbre le 7 janv. 387.

LUCIFER 1° nom donné à Satan, comme ayant été avant sa chute le plus élevé des anges, d'après une fausse interprétation de Ésaïe 14, 12. où les noms d'étoile du matin, fille de l'aube du jour, désignant le roi de Babylone, et traduits par Jérôme Lucifer (porte-lumière), ont été appliqués à celui qui, précipité des cieux, est devenu le prince des ténèbres.

2° év. de Calaris, ou Cagliari, Sardaigne. Origine inconnue. Il apparaît pour la Ire fois en 354 comme évêque envoyé par Libère à Constance pour provoquer la convocation du conc. de Milan 355. Là il défendit Athanase et combattit l'arianisme avec tant d'énergie que l'empereur l'exila, d'abord en Cappadoee, puis en Célésyrie et en Palestine. Remis en liberté par Julien, il vécut successivement en Egypte et k Antioche. Appelé comme arbitre à se prononcer dans le schisme des méléciens, il repoussa les conclusions conciliatrices proposées par le synode d'Alexandrie et déjà acceptées par son diacre et se déclara pour les eustachiens. Il interdisait toute communication avec ceux qu'il regardait comme hérétiques, et consacra évêque le prêtre Paulin, ce qui le constitua schisma-tique de fait. De retour à Cagliari, il y f 371, entouré de l'estime générale. Son corps a été retrouvé 1623 avec l'inscription tumulaire; sa canonisation, demandée en 1639, souffrit quelques difficultés, mais fut enfin accordée par Pie VII en 1803. Œuvres, dans la Patrologie de Migne.

LUCIFÉRIENS 1° les disciples de Lucifer de Calaris; ils soutenaient que ceux qui avaient été une fois ariens, et ceux qui avaient signé les conclusions du conc. de Riinini 359, ne pouvaient plus jamais être reconnus év. par l'Égl. catholique. Ils étaient nombreux et avaient même un év. à Rome. On a d'eux une pétition adressée à Valentinien II et à Théodose, où ils demandent d'être reconnus et protégés. Jérôme les a combattus dans un Dialogue.

2° Surnom donné à quelques sectes du moyen âge, que l'on accusait d'adorer le diable; ainsi les Stedinger et les Fratricelles. On brûla 14 de ces derniers en 1336 à Tangermunde.

LUC1LLUS, év. de Pannonie vers 490; un des disciples de Sévérin, qui l'avait envoyé auprès du roi Géwold pour négocier la liberté de nombreux prisonniers. C'est aussi lui qui en 488 transporta en Italie les restes de son maître, selon l'ordre qu'il en avait reçu.

LUCKE, Gottfried-Christian-Frédéric, né 23 août 1791 à Egeln, près Magdebourg, étudia à Halle et Gôttingue, prof, à Berlin 1816, à Bonn 1818, à Gôttingue 1827, où il enseigna l'exégèse du N. T., la dogmatique, la morale et l'hist. ecclésiastique; membre en 1839 du consistoire de Hanovre, abbé de Bursfeld en 1843 et membre du Conseil d'État en 1849. f 14 févr. 1855. Évangélique avec une tendance conciliatrice très prononcée, exégète ingénieux et spirituel, littérateur agréable, n'admettant pas de contradiction entre la science et la foi, il travailla sur le terrain pratique à mettre d'accord l'Église et la théologie. Ami de Bunsen, de Hitler et de Lachmann, il peut compter parmi les théol. les plus considérables de son temps. Son Comment, sur l'Évangile et sur les épîtres de Jean, son Introd. à l'Apocalypse, sa Synopse faite en collaboration avec De Wette, ses Études sur Plank, Mosheim, Schleiermacher et Otfr. Muller, enfin de nombreux articles dans diverses Revues de théol..et de critique, lui assurent une réputation méritée.

LUCQUES, ancienne et célèbre ville libre de l'Italie, siège d'un archevêché et d'une université, reçut de Pierre Martyr Vermigli, prieur du couvent de San Frediano, les premiers germes de la Réforme, 1541. La foi nouvelle comptait un assez grand nombre d'adhérents, même dans les hautes classes, pour que le Sénat crût devoir intervenir en 1545 et 1549 par des décrets contre l'hérésie. En 1555 Paul IV fit appel à l'Inquisition, qui se mit aussitôt à l'ouvrage, et beaucoup de familles émigrèrent; l'émigration redoubla après que Pie V eut fait brûler Paleario 1570. Vermigli, aidé de ses amis Zanchi et Curione, chercha à réunir les restes de la petite église, et il lui adressa une Lettre de consolation, qui se trouve dans ses Lieux communs, mais le terrible tribunal coupa court ii toute tentative, et la Réforme fut étouffée. Une partie des fugitifs se rendirent en France; plusieurs étaient à Paris au moment de la Saint-Barthélemy, et n'échappèrent qu'à grand'peine. D'autres, plus nombreux, s'élaient fixés à Genève, entre autres les pasteurs Nicolas Balbani et Scipion Calandrini, ce dernier pour peu de temps. Les Turrettini y vinrent en 1575, les Burlamacchi en 1585, les Calandrini en 1612. Les Balbani et les Diodati furent naturalisés au lfime siècle; les Turrettini, les Burlamacchi et les Calandrini au commencement du 17me; les Minutoli en 1651, les Micheli en 1664. L'év. de Lucques, cardinal Spinola, écrivit en 1679 une lettre pressante aux réfugiés, pour les engager à rentrer, sans même leur offrir aucune garantie; mais c'était trop tard. Les Calandrini comptaient parmi leurs ancêtres collatéraux le cardinal Philippe Calandrini 1448, et le pape Nicolas V; ils comptèrent parmi leurs descendants un grand nombre de pasteurs éminents, soit dans la ligne masculine (6 Calandrini), soit dans la ligne féminine. Les Turrettini ont de même donné 6 pasteurs, les Diodati 4, les Burlamacchi 2, les Micheli 2, etc. En général très bien doués, les réfugiés lucquois ont aussi fourni à leur nouvelle patrie, et jusqu'à ces derniers temps, des savants, des magistrats et des administrateurs, et s'ils avaient fait par fidélité le sacrifice de leurs biens, la fidélité de Dieu les a bénis et leur a rendu selon leur foi; toutes ces familles ont prospéré.

LUDGARDE, née à Tongres, Belgique, en 1182, d'une famille distinguée; elle entra à 12 ans dans un couvent des bénédictines de sainte Catherine près de Bruxelles, vécut dans la communion de Dieu, eut des extases, fit ses vœux en 1200, fut nommée prieure 1205, entra en 1206 dans un couvent de cisterciennes à Aquiric, près Bruxelles, y passa 40 ans et f 1246. On lui attribue beaucoup de miracles, entre autres une apparition d'Innocent III qui, enfermé dans le purgatoire jusqu'au jugement dernier, sollicita son intercession.

LUDMILA, femme de Boriwoj de Bohème que Méthodius avait gagné^u christianisme: elle se fit aussi baptiser et (revint une fervente chrétienne. Chassés par les païens ils réussirent à remonter sur leur trône. Après la mort de son mari et de leur fils aîné, elle fut nommée régente du royaume et tutrice du jeune Wences-las, héritier de la couronne. Mais la mère de celui-ci, la païenne Drahomira, la fit mourir, 15 sept. 927. Wenceslas devenu majeur et roi fit transporter les restes de Ludmila dans régi, de Saint-Georges nouvellement bâtie à Prague.

LUDOLF 1° religieux, né en Saxe, dominicain vers 1300, entra 1330 dans l'ordre des chartreux près de Strasbourg. Ami de Tauler* il visita avec lui les malades et les mourants pendant la peste de 1348, et leur administra les sacrements malgré l'interdit. Ils s'en justifièrent par une lettre adressée au clergé, t 1370. Rudolf était mystique. Il a écrit une Explic. des Psaumes, et une Vie de Christ, souvent réimpr., trad. par Le Menant 1490. Quelques-uns lui ont aussi attribué l'Imitation de J.-C.

2° Job Ludolf, orientaliste distingué, nè à Erfurt 1624, f 1704; précepteur, puis conseiller aulique du duc de Saxe-Gotha, enfin son résident à Francfort sur Main. Il avait parcouru presque toute l'Europe, et a entretenu avec Leihnitz une correspondance étendue. 11 est connu surtout par ses travaux sur l'Éthiopie. histoire du pays, grammaire, et Dict. éthiop,-latin.

LUITPRAND ou Liutprand lo roi des Lombards 712-744, profita des discussions survenues entre Léon l'Isaurien et Grégoire II pour enlever aux Grecs et s'approprier ce qu'ils possédaient au nord de Rome; il soumit les ducs de Spolète et de Bénévent, qui s'étaient révoltés et allait recommencer contre les Grecs une nouvelle çuerre, quand il mourut.

2° Ev. de Crémone au 10™ siècle. Nè à Pa-vie, il vint en 931 à la cour de Hugues roi d'Italie et entra bientôt dans les ordres. Nommé secrétaire de Bérenger, successeur de Hugues, il fut envoyé par lui en mission à Constantinople 948-950. Tombé en disgrâce il se réfugia auprès d'Othon I<* à qui il rendit de grands services par son dévouement et par sa connaissance du grec et de l'allemand. Il eut plus d'une fois à intervenir comme délégué de l'empereur, notamment pour l'élection ou la destitution de Léon VIII, Benoît V, Jean XU. Ottou 11 l'envoya une seconde fois à Constantinople, et plus tard il y retourna encore, f 972. Il a laissé une Hist. de l'Allemagne de 862 à 964, et une Relation de son ambassade à Constantinople, l'une et l'autre intéressantes et dignes de foi, quoique rédigées à son point de vue et peu favorables à Bérenger.

LUKAR1S, v. Lucar.

LULLE lo anglo-saxon, abbé du couvent de Fulde, un des principaux aides et amis de Bo-uiface, et son successeur à l'archev. de Mayence. f 786. — 2° Raymond, né 1234 à Palina, dans l'île Majorque, passa sa jeunesse à la cour de Jacques l** d*Aragon, qui le nomma sénéchal; niais à 30 ans, dégoûté du monde, et quoiqu'il fût marié et père de famille, il entra dans les ordres, se fit franciscain, et se mit k étudier. Il se proposa comme but la conversion des Sara-sins, non par les armes, mais par une croisade spirituelle. Comme la foi et la raison lui paraissaient ne pas pouvoir être séparées l'une de l'autre, la raison devant être éclairée par la foi, il rechercha et crut avoir découvert par une sorte d'inspiration, le grand art, l'art merveilleux, l'art combinatoire, qui devait fournir la clé de toutes les difficultés. Il réduisait à un certain nombre, 63, l'énumération complète de toutes les idées des hommes, substances, accidents, notions, qualificatifs, et pensait que leurs diverses combinaisons étaient la tâche de la philosophie; le tout mélangé de signes, d'idées mystiques, de tableaux figuratifs. C'était un travail immense, qui dépassait les limites des forces humaines. Il rêvait également la création d'une langue universelle, logique, sans réfléchir qu'une langue est formée par les circonstances et ne se fixe qu'avec le temps. Lorsqu'il fut en possession de son système, il le traduisit en arabe et se mit à l'enseigner à Montpellier, à Rome, à Paris, à Gênes. Il espérait intéresser les souverains à sa croisade pacifique, mais il ne réussit pas; Clément V lui-même le traita avec dédain, ainsi que le conc. de Vienne 1311, qui repoussa le plan de sa croisade et lui refusa la création d'un nouvel ordre de chevaliers. Tout ce qu'il put obtenir fut l'érection en France, en Italie et en Espagne, de collèges pour l'étude des langues orientales. Il se décida alors à travailler seul à la conversion des infidèles. Il fit pour cela 3 voyages; l'un à Tunis 1291, où à la suite d'une discussion publique, il se vit en danger de mort et ne fut relâché qu'à la condition de ne pas recommencer; le second 1305 à Bone et Alger, qui lui valut une captivité de 6 mois; et le 3®* de nouveau à Tunis, 1315; les musulmans exaspérés le lapidèrent et il fat laissé pour mort sur la place, un vaisseau génois le recueillit pour le ramener à Majorque; mais il mourut dans la traversée. Ses compatriotes en firent un martyr. Les uns auj. le considèrent comme un saint, les autres comme un halluciné; il y a eu chez lui de l'un et de l'autre. Ses idées scrupuleusement étudiées par Leibnitz sont complètement abandonnées. Il a laissé de nombreux écrits, les uns disent 460, d'autres 1000. L'édition de Salzinger, Mayence 1721, ne compte pas moins de 10 vol. in-fo. v. D. Gerando.

LUMIÈRES (Amis des). On désigne ainsi un mouvement qui éclata en Saxe vers 1840, provoqué d'abord par la crainte qu'avait le vieux rationalisme de se voir attaqué et réprimé par l'orthodoxie renaissante et par l'appui moral que lui donnait la Prusse. Ses négations excessives et le caractère d'opposition politique que ce parti ne tarda pas a prendre, le compromirent bientôt dans l'opinion, et quand il lui fut permis de se constituer librement en communautés, comme il n'avait aucune base religieuse, il déclina rapidement et finit par disparaître. C'est à Gnadau, en 1841, qu'une première conférence pastorale rationaliste donna le signal; il y en eut d'autres, à Halle en 1841, à Leipzig et à Kôthen en 1842; les laïques y furent admis, et un journal fut fondé sous la direction du pasteur Uhlich, q. v. Un écrit de Wislicenus, de Halle, intitulé: La lettre, ou l'esprit? qui rejetait l'autorité des Écritures, souleva d'énergiques protestations de la part du parti évangélique et amena l'intervention de l'autorité. Les disciples de Schleiermacher, et à leur tête les év. Drâseke et Eylert, essayèrent en vain d'intervenir et de prêcher la conciliation, 15 août 1846. Les jeunes hégeliens et la bourgeoisie libérale se rangèrent du côté des Amis des lumières. Après la destitution de Wislicenus, ses adhérents s'organisèrent à Halle en une petite communauté morale, rejetant toute espèce de dogme. II s'en forma une autre à Nordhausen, sous la direction de Baltzer (de Delitzsch), que le Consistoire avait refusé de confirmer parce qu'il ne voulait pas admettre la liturgie officielle. D'autres se fondèrent encore à Halber-stadt, Marbourg, Hambourg, Furth, Offenbach, puis à Magdebourg quand Uhlich eut été suspendu. En 1845, k Kônigsberg, l'aumônier militaire Rupp se mit à la tête d'un mouvement semblable. mais plus socialiste que politique. Il prêcha contre les idées du symbole d'Athanase, mais refusa de se séparer soit de l'Église, soit de la Bible; c'est encore une question de savoir si sa communauté reposait sur une base chrétienne quelconque; elle se disait avant tout humanitaire, et lorsque Rupp fut délégué à l'Assemblée générale de Gustave-Adolphe, son admission fut vivement contestée. L'édit de tolérance du 30 mars 1847 ayant déclaré les droits civils indépendants de la position ecclésiastique, les Amis des lumières jouirent en Prusse d'une certaine liberté, mais les événements de 1848 jetèrent les chefs de la secte, de même que les cathol. allemands, dans les agitations de la politique, et en compromirent plusieurs; aussi la réaction qui suivit traita ces communautés comme des associations politiques: le tribunal supérieur prononça leur dissolution en 1856, et dès lors elles ne firent plus que végéter; la plupart même disparurent bientôt.

LUNE (Pierre de), antipape; v. Benoît XIII.

LUPETINO, Baldo, savant religieux, originaire d'Albona, poursuivi pour son attachement à la Réforme, fut emprisonné à Venise 1541, et resta 15 ans en prison. Il en appela en vain au conc. de Trente. Le 17 sept. 1556 le tribunal vénitien le condamna à mort; il fut dégradé et noyé sans bruit. Il était parent de Flacitis.

LUPUS, v. Loup (saint).

LUTHER, Martin, né 10 nov. 1483 à Eis-leben, pendant un séjour momentané qu'y faisaient ses parents, Hans Luther et sa femme Marguerite Ziegler. Ils étaient de Môhra, au pied de la montagne, pauvres et cherchant du travail. Ils en trouvèrent, d'abord à Eisleben, puis à Mansfeld. L'enfant fut élevé à la dure; à 7 ans il va à l'école de son village, à 14 ans à Magde-bourg pour apprendre le latin; puis à Eisenach. Pour gagner sa vie, il chante de porte en porte. L'excellente dame Ursule Cotta, la veuve d'un riche bourgeois, lui ouvre sa maison, et pendant 4 ans, Luther, à l'abri du besoin, se consacre tout entier à l'étude et fait de rapides progrès. En 1501 il part pour l'univ. d'Erfurt; en 1503 il est bachelier, en 1505 maître en philos, et peut commencer son droit. Mais il a d'autres pensées. C'est une nature à la fois joviale et sérieuse, qui aime l'étude et la musique, mais qui fait tout dans un esprit de prière. Il a le sentiment de la justice de Dieu et se demande avec angoisse comment il pourra être sauvé. Trois événements déterminent la crise: un de ses amis meurt assassiné; lui-même se blesse grièvementà la jambe avec son épée d'étudiant, et pense en mourir; enfin la même année, comme il revient de Mansfeld où il a été voir ses parents, la foudre tombe à ses côtés, et dans sa frayeur il s'écrie: « A mon aide, sainte Vierge ! je me fais moine ! < Parole inconsidérée, qu'il regretta bientôt, mais qui était bien en harmonie avec le fond de ses préoccupations religieuses. Il demanda son admission au couvent des augustins d'Erfurt, dont Staupitz était le directeur, fit ses adieux à ses amis dans une dernière et joyeuse soirée, et entra au couvent le lendemain 18 juillet 1505. La vie ne lui fut pas facile: privations, travaux manuels répugnants, balayage de l'église, des corridors et des cellules, jeûnes, veilles, et le jour tournées de mendicité, la besace sur le dos, il accepte tout et fait tout consciencieusement. Il en fait même plus qu'on ne lui en demande, car il espère travailler ainsi à son salut. Mais toutes ces bonnes œuvres ne lui donnent pas la paix; ses angoisses continuent et augmentent. Il tombe malade. Staupitz l'engage à lire la Bible. Luther en avait déjà vu un exemplaire à l'université, deux ans auparavant; il y avait lu l'histoire d'Anne et du jeune Samuel, et désirait vivement retrouver le saint volume. Sa joie fiit grande quand Staupitz lui confia la grosse Bible latine du couvent, et il s'empressa de la lire et de l'étudier, sans réussir d'abord à tout comprendre: elle le transportait dans un monde religieux qui n'avait aucun rapport avec celui que lui montrait l'Église. Il continuait en même temps d'étudier ses classiques et la philos. d'Oc-cam. Au bout d'un an de noviciat, il fut ordonné moine; l'année suivante, prêtre, avec le titre de père, 1507. Ce fut une solennité; son père y assista, un peu réconcilié avec son fils, mais non avec sa carrière ecclésiastique. Touj. travaillé dans sa conscience, Luther se sent indigne de son ministère. Staupitz et un vieux moine l'entourent de leurs soins pieux et lui rappellent que si les œuvres sont nécessaires, c'est cependant le sang de Christ seul qui purifie de tout péché; et un jour après avoir lu Hab. 2, 4: * Le juste vivra par la foi ! » il lui sembla que des écailles tombaient de ses yeux. « Je me sentis comme né de nouveau, » dit-il. Ce travail intérieur est comme la clé de toute sa vie. En 1508 il fut appelé comme prof, à la nouvelle univ. de Wittenberg, qui lui conféra 1512 le grade de Dr en théologie. En 1511 il avait en le bonheur de visiter Rome, un de ses rêves; ce fut une déception; il en revint rempli de tristesse et d'horreur; il ne s'était pas attendu à rencontrer chez les gens d'église tant de péchés, d'indifférence et d'immoralité. Sa résolution fut prise de prêcher avec d'autant plu< d'ardeur les grandes doctrines de l'Évangile qui sauve et qui sanctifie. A ce moment Tetzel vint à Wittenberg avec son commerce d'indulgences, ses tarifs et les armoiries du pape: il disait: Sob&ld das Geld im Kaatcn klingt, Sobald die Seel* in Himmel springt.

(Aussitôt que l'argent tombe dans ma cassette, l'âme s'élance vers le ciel.) C'était poétique et productif. Indigné, Luther prêche contre ce trafic immoral, et affiche contre la porte de Tègl. du château, 31 oct. 1517, un programme de 95 thèses qu'il se déclare prêt à soutenir comme docteur. Eck, prof, à Ingolstadt, relève le gant* publie à son tour 13 thèses, et la dispute est engagée. Elle aboutit 27 juin 1519 au colloque de Leipzig q. v., et l'opinion générale se prononce pour le réformateur. Mais Eck ne se tient pas pour battu; il part pour Rome, et en revient avec une bulle d'excommunication datée du 16 juin 1520. Cajetan et Miltitz essaient encore de la douceur, mais en vain, Luther a fini par reconnaître clairement la vérité, il ne reculera plus, il brûlera ses vaisseaux. Le 10 déc. de la même année il convoque la jeunesse studieuse de Wittenberg, et suivi d'une foule immense il se rend à la porte d'Elsterthor, un peu hors des remparts, et livre aux flammes la bulle et les décrétales des papes. Peu de jours après il publie une brochure: Pourquoi les écrits du pape et de ses disciples ont été brûlés par le docteur M. Luther. Charles-Quint venait d'être couronné à Aix-la-Chapelle: la diète de Worms allait s'ouvrir; la question relig. était en tête de l'ordre du jour. Le 6 mars 1551, après un réquisitoire d'Aleander, Luther est sommé d'y comparaître; et malgré les sollicitations de ses amis effrayés, il se met en route le 2 avril, muni d'un sauf-conduit de l'empereur, dont on n'est pas bien sûr qu'il sera respecté; prêche partout où il passe, notamment à Erfurt; voit son escorte se grossir à chaque ^vîlle, répond à ceux qui veulent le retenir: « Quand il y aurait autant de diables à Worms qu'il y a de tuiles sur les toits, j'y irai pourtant; on a pu brûler Jean Huss, on n'a pu brûler la vérité. » Enfin le 16 avril les cloches de Worms annoncent son arrivée: il est en charrette; cent cavaliers l'accompagnent, ainsi qu'une députation de l'électeur de Saxe. Un héraut impérial précède le cortège. La ville regorge de curieux; il y en a jusque sur les toits. Luther est cité à se présenter le 18 devant la diète. Comme il passe devant la salle des gardes, le vieux comte de Freundsberg lui frappe sur l'épaule, et lui dit: « Petit moine, tu vas à une bataille telle que ni moi ni aucun officier, nous n'en avons Vu de pareille; mais si ta cause est juste, va de l'avant et ne crains rien; Dieu ne t'abandonnera pas. » Il entre, et le petit moine se voit seul au milieu de cette assemblée qui résume toutes les puissances réunies de l'Europe, temporelles et spirituelles. Et cependant il ne bronche pas. Après les avoir vérifiés il reconnaît que les livres déposés sur la table sont bien de lui. Eck, au nom de l'empereur, l'invite à les rétracter. Il demande d'ajourner sa réponse au lendemain, et il passe sa nuit en prières. Le 19 il répond par deux fois qu'il ne peut rien retirer de ce qu'il a écrit, si on ne le convainc par l'Écriture ou par des raisons décisives, autres que les papes et les conciles. Un tumulte indescriptible accueille cette déclaration, et l'on entend encore Luther, au milieu de l'assemblée menaçante, s'écrier: • Me voici ! je ne puis autrement ! Que Dieu me soit en aide ! » On essaie le lendemain de nouvelles démarches auprès de Luther, mais tout est inutile. Quelques-uns pressent l'emp. de le faire arrêter; mais il hésite à cause de son sauf-conduit, et l'archev. de Mayence lui-même intervient pour faire respecter la parole jurée. Luther quitte Worms le 26 avril k 10 h. du matin. Un mois après, le 25 mai, le sauf-conduit étant expiré, l'emp. lance l'interdit contre le moine hérétique et le met au ban de l'empire. Mais dans l'intervalle Luther a disparu. Avec ses amis Amsdorf et Petzensteiner il avait traverse Eisenach, et fait une visite k sa grand'mère à Môhra. Il se mettait en route pour se rendre à Gotha avec Jonas, Schurf et Swaven, quand sa voiture fut attaquée le soir dans une forêt, près du château d'Allenstein, par des cavaliers armés et masqués. Séparé de ses amis, il fut conduit au château de la Wartbourg où il arriva à 11 h. du soir. Là, sous le nom de chevalier Georges, il dut changer de costume, laisser croître sa barbe et ses cheveux, avoir l'épée au côté, aller à la chasse, et mener une vie toute nouvelle. C'était son ami, l'électeur de Saxe, qui l'avait fait enlever pour le dérober à ses ennemis, le soustraire à ses propres imprudences, et laisser l'émotion publique se calmer. Bientôt il put entrer en correspondance avec ses amis, qui l'avaient cru mort, et l'oisiveté de ce Pathmos, dont il souffrait même physiquement, cessa de lui peser, quand il lui fut permis de se remettre à l'ouvrage. Il chargea Méianchthon de le remplacer, écrivit son Comment, latin sur les 22 premiers psaumes, une paraphrase sur le Cantique, 24 sermons en allemand, qui parurent au commencement de 1522, une lettre à Henri VIII, des lettres pastorales, une lettre à l'archev. Al-brecht qui organisait une vente d'indulgences el qui s'humilia. Il commença aussi sa célèbre trad. de la Bibl. (d'abord le N. T. d'après l'édition d'Érasme de 1519), monument littéraire qui a^ sinon créé, du moins fixé la langue allemande, et qui, interrompu en avril 1530 (au livre de Daniel), ne fut entièrement achevé, avec le concours de Méianchthon, Pomeranus, Jonas et d'autres, qu'en 1532. Mais des désordres venaient d'éclater à Wittenberg et menaçaient de s'aggraver. Quand Luther l'apprit, il se décida à quitter sa retraite, en informa l'électeur et se mit en route 1er mars 1522. A l'auberge de l'Ours, à léna, il passe une soirée avec deux étudiants suisses et deux négociants de Wittenberg, et l'on parle beaucoup de Luther « ange ou satan; » il se mêle à la conversation, mais sans se faire connaître, et se borne à donner aux étudiants une commission pour l'université. Plus tard il retrouve ces jeunes gens, dont l'un, Kessler, sera le réformateur de Saint-Gall. Arrivé à Wittenberg, le 6, il constate du désordre dans les esprits, de l'agitation; quel -ques-uns de ses disciples vont trop vite, ou trop loin; les uns, prêtres ou moines, ont rompu leurs vœux et se sont mariés; Carlstadt même les approuve. D'autres ont introduit à grand bruit la Cène sous les deux espèces. Chacun fait oe qui lui semble bon, et l'on sent qu'il manque une direction, un chef à ce mouvement. Les illuminés de Zwickau menacent de compromettre la Réforme par leurs exagérations. Luther prend en mains le gouvernail. Il est au ban de l'empire: « Voici, dit-il, je ne suis plus protégé que par les puissances célestes, je me jette au milieu de mes ennemis, et tout homme a le droit de me tuer ! » Il n'en monte pas moins en chaire, et pendant 8 jours consécutifs, sans crainte, il reprend le cours de ses prédications, dénonce les abus, redresse les erreurs, stigmatise les mauvaises doctrines, prêche la Réforme, et en marque les limites contre les fanatiques dont les excès effraient les âmes timorées. Son temps se partage entre les travaux littéraires, l'enseignement universitaire et la prédication. En 1524. révolte des paysans, motivée par les charges et corvées qui pèsent sur eux, et par la tyrannie des seigneurs et du clergé. Luther, appelé à se prononcer sur les Douze griefs des plus modérés, leur donne raison sur certains points, tort sur d'autres; il veut que chacun fasse des concessions. Mais quand il apprend les excès du 15 avril, châteaux brûlés, couvents pillés, le comte de Helfenstein torturé et tué, désespérant de faire entendre la voix de la raison, il recommande aux princes une action énergique t Contre les attentats des paysans brigands et assassins, » et bientôt l'insurrection est écrasée et son chef MUntzer décapité.

C'est peut-être ici que se termine la partie héroïque, dramatique de la carrière du réformateur. A partir de ce moment la rupture avec Rome est achevée, c'est maintenant l'organisateur, l'homme, le théologien qui entre en scène, et pour être moins brillante, sa tâche n'en est ni moins importante, ni moins difficile. Ce sera le travail de tous les jours, celui qui demande le moins d'élan, mais le plus de persévérance. Études de théologie, enseignement, sermons, conférences, cantiques, prédication, catéchismes, controverse, commentaires, brochures de circonstance, traductions, correspondance étendue, Luther doit pourvoir à tout, et il a le rare talent de savoir se faire aider et de bien choisir ses aides. Il a sous la main un personnel nombreux et dévoué, il forme des disciples, il visite les églises et leur donne des pasteurs. Il jouit de la confiance des princes, qui le consultent volontiers. Sans entrer dans de longs détails qui prendraient des volumes, rappelons sommairement les dates principales de cette dernière phase de sa vie. Son ami l'électeur Frédéric de Saxe venait de mourir. Luther avait déposé son froc de moine pour revêtir la robe de docteur. Il vivait presque seul dans son couvent, sans que personne prit soin de lui; son lit n'avait pas été fait de toute une année. 11 se décidai se marier, choisit Catherine de Bora q. v., et le 27 juin 1525 la noce a lieu en présence de plusieurs grands personnages et de quelques amis intimes. Ses témoins sont Lucas Kranach et sa femme, le Dr Apal, Bugenhagen et Jonas. Le 7 juin 1526, naissance de son fils ainé, Hans. En 1527 la peste éclate à Wittenberg; tout le monde fuit, mais lui il reste à son poste, visite, soigne les malades, console les survivants; c'est le 12 décembre qu'en apprenant la naissance de sa fille Élisabeth, il compose son célèbre cantique: Ein' (este Burg. En 1529 a lieu la diète de Spire, où la minorité proteste le 19 avril contre la tyrannie des princes, et vaut aux évangéliques le nom de protestants. La méuie année a lieu le Colloque de Marbourg q. v., où Luther n'a pas le beau rôle. En 1530 les évangéliques sont convoqués à la diète d'Augsbourg, et ils s'y font représenter par Jonas, Spalatin, Mélanchthon et Agricola: Luther reste à Co-bourg, parce qu'il a « la voix mauvaise; » on craint qu'il ne gâte les affaires par ses violences, mais il communique de loin avec ses amis, et l'Augustana est présentée à la diète. En 1532 parait la Ire édition complète de la Bible. En 1534, soulèvement de la ville de Munster à la \oix de Mathiesen et de Jean de Leyde; assaut meurtrier du 25 juin, l'anabaptisme est noyé dans des flots de sang. Le 29 mai 1536, sous l'influence de Mélanchthon, la Concorde de Wittenberg apporte une trêve momentanée aux luttes douloureuses qui déchirent le protestantisme. Le 3 janv. 1537 assemblée de Smalcalde; Luther s'y rend, mais tombe si gravement malade qu'on désespère de le sauver; il revient cependant à la vie, sinon à la santé. En 1540 il donne à la Saxe une organisation consistoriale, et continue de s'occuper de l'éducation des enfants; ses rapports avec Mélanchthon se refroidissent toujours plus. C'est cette même année qu'ils donnent à Philippe de Hesse leur avis embarrassé sur son cas de bigamie, qu'ils ne tardèrent pas à déplorer comme c ayant été joués par le rusé Macédonien. » Mais il vieillissait, la gravelle le tourmentait, son caractère s'aigrissait, il devenait irritable. Sans rien perdre de son activité, de son zèle, de son étonnante capacité de travail, il avait perdu sa bonne humeur; il voyait le mal se développer, ses ennemis s'enhardir, quelques-uns de ses disciples déshonorer leur foi par leurs oauvres, les princes faire de la religir m im instrument de leur politique. « Vers quel avenir marchons-nous? disait-il. Le peuple est sauvage; le bourgeois dur et avare; les nobles débauchés pillent l'église ! » Il avait perdu son père et deux enfants, plusieurs de ses amis étaient descendus dans la tombe, d'autres l'abandonnaient et lai donnaient tort dans la question de la Cène, l'Église était divisée; lui-même peut-être, sans se l'avouer, se reprochait de n'avoir pas été plus conciliant. On comprend qu'il désirât de mourir, se trouvant désormais inutile sur la terre. Cependant il voulait mourir debout, et ses deux dernières années furent aussi fécondes que les précédentes. Il acheva son Comment, sur la (ienèse, et publia encore sa Brève confession sur le sacrement, son Traité contre la papauté romaine, et la fin de sa Ktrchenpostille. Le 17 janv. 1546 il partit avec ses trois fils pour Eis-leben où il avait à régler comme arbitre quel-qnes affaires des comtes de Mansfeld; il prêche à Halle en passant; à Eisleben, quoique malade, il prêche encore quatre fois. Le 17 février il signa la convention d'arbitrage pour laquelle il était venu, dîna et soupa avec les siens, s'en-tretenant de la vie éternelle, mais très souffrant. Il dit à Jonas: « Je suis né à Eisleben et j'y mourrai. « Il monta ensuite dans sa chambre, et après avoir fait sa prière, se sentant mourir, il répéta par trois fois: « Père, je remets mon esprit entre tes mains; tu m'as racheté, Dieu fidèle! » Il se coucha, se releva vers une heure; ses hôtes, ses fils, deux médecins, le comte et la comtesse Albrecht de Mansfeld étaient auprès de lui. Les pasteurs Jonas et Cœlius, voyant que la dernière heure est arrivée, lui demandent à haute voix: « Révérend père, mourez-vous fidèle à Christ et à la doctrine que vous avez prêchée? » « Oui, i fut sa réponse nettement accentuée. Il se recoucha sur le côté droit, sa respiration s'affaiblit, et un quart d'heure après il rendait le dernier soupir. C'était 3 h. du matin, le 18 février 1546. Son corps, enfermé dans un cercueil de zinc, fut transporté à Wittenberg où on lui fit de splendides funérailles, dans féglise même sur les portes de laquelle il avait affiché ses 95 thèses. Le 4me centenaire de sa naissance a été célébré en 1883 dans la chrétienté évangélique tout entière avec une grande pompe et un véritable enthousiasme, et de nombreuses publications historiques, poétiques, musicales, ont été consacrées à sa mémoire. En français il faut mentionner surtout les 3 volumes de M. Félix Kuhn. La bibliographie relative à Luther est très considérable. On a 6 éditions compl. de ses œuvres: Wittenberg, Iéna, Altenbourg, Leipzig, Halle et Erlangen; ses Lettres ont été publ. par de Wette, ses Tisch-reden, en plusieurs rédactions; ses Cantiques par Wackernagel. Vie et Notices par Mélanchthon, Jonas, Cœlius, Myconius, Seckendorf, KSstlin, Jurgens; en franç. par Merle, Hoff, Michelet, etc.

LUTZ 1° Lucius-Samuel, prédicateur réformé, né 1674, s'attacha déjà comme étudiant en théol. au mouvement évangélique de Berne, que le gouvernement essaya de réprimer sous prétexte d'association illicite 1699, et se lia d'amitié avec Kônig qui en était l'âme et le chef. Il fut successivement pasteur à Yverdun, Amsol-dingen et Diessbach, et travailla avec zèle au réveil de la vie religieuse. Ses nombreux écrits sont pleins d'idées excellentes; on lui reproche d'avoir abusé de l'allégorie, f 1750.

2° Jean-Samuel, né 1785 à Berne; orphelin de bonne heure, il pourvut par des leçons à sa subsistance, passa en 1808 ses examens de candidat, se rendit à GOttingue avec une bourse de l'Université, et entra 1812 dans l'enseignement au gymnase de Berne. Il fut ensuite nommé pasteur de l'égl. du Saint-Esprit, et enfin, en 1833, prof, ordinaire de théologie. Il enseigna l'hébreu, l'exégèse, l'herméneutique et la dogmatique, et exerça autour de lui une grande et bonne influence, tant sur les étudiants que sur ses concitoyens, dans les différentes fonctions qu'il eut à remplir, au synode et comme membre du Conseil d'éducation. Il n'a rien publié lui-même, mais après sa f 1844 quelques-unes de ses leçons de dogmatique et d'herméneutique ont paru par les soins de ses disciples.

LUXEUIL (Luxovium), jolie contrée de la H.-Saône actuelle, à quelques lieues de Plombières, recherchée fort anciennement pour ses sources thermales. Il s'y trouvait un vieux château romain, et des idoles de pierre dans le voisinage. Colomban, qui venait de fonder Je couvent d'Annegray, en fit sa seconde station et établit une colonie sur les ruines du château abandonné, 590. Ce monastère, qui compta bientôt 600 moines, devint célèbre. Ebroïn et saint Léger y furent enfermés 673. Les Sarrasins le ravagèrent, mais Charlemagne le releva. Le card. Jouf-froy. et plus tard Granvelle en furent abbés.

LYON (Lugdunum). Fondée 41 ans av. C., relevée de ses ruines par Néron, embellie par Trajan, cette ville fut de bonne heure évangé-lisée et devint comme église un centre important pour le christianisme. Persécutée par Marc-Aurèle 177, elle montra dans l'épreuve un courage héroïque; son vieil évêque Pothin, âgé de 90 ans, fut lapidé par le peuple, et plongé dans un cachot il y mourut de ses blessures; 47 confesseurs périrent dans les tourments, déchirés par les bêtes féroces ou par le fer des bourreaux, et leurs cendres furent jetées au vent; v. Blandine. La mission donnée à Irénée pour l'Asie Mineure, accomplie ou non, montre les rapports de ces eglises entre elles et semblerait indiquer que c'est d'Asie que l'Évangile fut apporté dans la Gaule lyonnaise. Irénée, après la persécution, rassembla les membres dispersés du petit troupeau et fut le centre de l'œuvre missionnaire qui rayonna sur le reste des Gaules. Devenue en 407 la capitale d'un des

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démembrements de» la Bourgogne, Lyon renonça à l'arianisme après la conférence de 499. Clo-taire la réunit à la France 534, et l'évéché s'illustra par des hommes tels que Leidrad, Agobard, Amolo f 852. Érigée en archevêché, elle finit par obtenir pour son premier pasteur le titre si disputé de primat des Gaules. Innocent IV y présida en 12451e 13®* conc.écumé-nique, qui déposa et excommunia Frédéric II. En 1274, sous Grégoire X, le 14®* conc. écu-ménique opéra, mais pour bien peu de temps, la réunion des égl. grecque et latine, les grecs ayant consenti à reconnaître la primauté du pape et à signer le filioque. C'est aussi là que furent fixées les règles à suivre par le conclave pour l'élection des papes. Patrie de Valdo, Lyon montra touj. une espèce d'indépendance, et en 1460 Fr. Guérin flagellait en vers les vices du clergé. En 1520 le clergé s'occupe déjà de brûler les livres et les mal pensants. En 1528 on excommunie les luthériens. L'Église s'organise en 1546, et déjà en 1551 les bûchers s'allument; 12 confesseurs sont brûlés en 1553, entre aulres les Cinq étudiants de Lyon. Un synode se réunit 10 août 1563, avec Viret pour modérateur. Enfin la loi de germinal an X consacra le culte, donna un pasteur à l'Église, qui maintenant en possède 5; plus, une égl. luthérienne et une égl. libre. Parmi les ecclésiastiques qui ont illustré Lyon, on cite le card. de Bonald et le pasteur Ad. Monod.

LYRA, Nicolas (de), surnommé Doctor planus et utilis. Né à Lyra, ou Lire, près d'Évreux, il connaissait si bien la langue hébraïque qu'on a cru longtemps qu'il était d'origine juive. Jeune encore il entra 1291 au couvent des franciscains de Verneuil, fut nommé docteur en théol. à Paris, et y enseigna. Dans le testament de la reine Jeanne il est mentionné comme provincial de son ordre, f 23 oct. 1340. Le premier il a écrit un comment, complet et suivi sur les livres de la Bible, Postilke perpetuœ in V. et N. test., dans lequel il s'applique à préciser le sens exact des mots, en consultant les écrivains juifs et sans se croire lié par la Vulgate. Luther l'appréciait beaucoup et disait de lui: Si Lyra non lyrasset, Luth. non saltasset. Comme complément de ses Postilles, il a donné aussi les Moralités, c.-à-d. le sens mystique et pratique de la Bible, que plus tard on a intercalées dans les Postilles. Rome 1471-72. Paris 1511 en français. L'édition de Bâle 1498 renferme en outre les Additions de Paul de Burgos (juif converti, qui s'appelait Salomon Levi, qui fut nommé év. de Burgos, puis patriarche d'Aquilée, 1 1435).

LYSCZYNSKI, Casimir, athée, d'une noble famille de Pologne, juge en Lithuanie 1680. Son amour du paradoxe en religion l'avait déjà fait chasser du collège des jésuites de Wilna. Il continua de s'occuper de théol. et écrivit une critique des preuves de l'existence de Dieu. Comme il se déclarait franchement athée, il fut dénoncé à la diète de 1688, et fut condamné par une cour ecclés. à être brûlé avec ses écrits, sentence qui fut exécutée après qu'on lui eut d'abord tranché la téte, 1689.

LYSER, Polycarpe, théol. luthérien, neveu de Jacques-Andreà, né 1552 à Winnenden, Wurtemberg, occupa divers postes, comme pasteur et prof., fut l'un et l'autre à Wittenberg 1577. vit son orthodoxie contestée, vint à Brunswick comme surintendant, reprit ses fonctions à Wittenberg 1592 et finit par être nommé prédicateur de la cour à Dresde, où il f 1610. Il a continué et achevé l'Harmonie des 4 Évang. commencée par Chemnitz; il a aussi publié un écrit pour prouver qu'il vaut mieux être en communion avec les catholiques qu'avec les calvinistes. Ses deux fils, Guillaume, prof, à Wittenberg, et Polycarpe, prof, à Wittenberg et à Leipzig, ont joui d'une certaine réputation: v. Tholuck, sur l'Esprit des théol. luthériens de Wittenberg.

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MABILLON, Jean, savant bénédictin, ne 23 nov. 1632 à Pierremont, près Sedan, fit premières études avec son oncle, qui était prêtre, vint ensuite à Reims et entra 1654 dans l'abbaye des bénédictins de SaintpRemi de Saint-Maur. Sa santé ayant souffert d'études trop prolongées, il fut chargé de diverses missions qui l'obligèrent à voyager. En 1660, comme il était rétabli, il fut nommé prêtre à Amiens; il reprit ses études dans la bibliothèque de Corbie, et les continua comme trésorier de l'abbaye de Saint-Denis. Ses supérieurs l'envoyèrent 1664 à Saint-Germain pour aider d'Achery dans la rédaction de son Spicilège, et le chargèrent ensuite d'achever l'édition des œuvres de saint Bernard, commencée par Chantelon; elle parut en même temps en deux formats, Paris 1667, 2 vol. f°, et 9 vol. 8°. A la demande du gouvernement français, il visita en 1683 l'Allemagne, en 1685 l'Italie pour en étudier les bibliothèques, et il en rapporta plus de 3000 mss. précieux pour la Bibloth. royale. Il passa ses dernières années dans l'abbaye de Saint-Germain-des-Pré> à Paris, où il f le 27 décembre 1707. Il fut un des ornements de son ordre. Malgré sa mauvaise santé, malgré ses travaux incessants, il refusa tous les adoucissements qui lui furent offerts a la rigueur de son régime. Outre les ouvrages déjà cités, il a écrit les Aeta Sanctorum de l'ordre de saint Benoît, 9 vol. f°, les Annales ordt-nisy 6 vol. f°, Vetera Analecta, pièces recueillies dans plnsieurs bibliothèques, le Muséum itali-cum, un Traité des études monastiques, un autre sur la Liturgie gallicane, etc. On regarde comme le meilleur de ses ouvrages, celui qui a fondé la science des Chartes et qui auj. encore n'a pas été dépassé, son livre De re diplomaticâ, où il explique tout ce qui regarde l'écriture, le style, l'origine des chartes et diplômes. Son amour pour la vérité Jui avait déjà fait des ennemis à l'occasion de son histoire de Tordre; cela ne Pempécha pas d'écrire, mais sous le couvert de l'anonyme, un livre sur le Culte des saints inconnus dans lequel il attaque les abus de Rome, et qui fut mis à l'index. Il a écrit aussi contre l'abbé Rancé, fondateur de l'ordre des trappistes, pour montrer que les moines ont non seulement le droit, mais même le devoir de se livrer à des études scientifiques. Vie, par son disciple Ruinart.

MACAIRE lo le saint, le grand, ou l'ancien, né vers 300 dans la Haute-Égypte, de parents pauvres. Disciple de saint Antoine, il se retira à 30 ans dans le désert de Scété, Thébaïde, et y vécut près de 60 ans dans l'ascétisme le plus rigoureux. Il en fut un moment retiré pour être, malgré lui revêtu du sacerdoce, mais son attachement à la doctrine de Nicée lui valut les persécutions de Valens, qui le fit reléguer dans une île du Nil. Cet exil ne fut pas de longue durée; le peuple mécontent contraignit le préfet à le rappeler, et le vieillard reprit le chemin de sa solitude où il f vers 390. On a sous son nom 50 Homélies et des Fragments pleins de vie et d'un mysticisme sérieux. —2° Macaire le Jeune, ou le politique, d'Alexandrie, païen de naissance, boulanger de son état, disciple de saint Antoine comme le précédent, se retira vers 335 dans les solitudes de la vallée de Natron et fut nommé abbé par ses confrères. Il fut également persécuté par Valens à cause de son zèle contre les ariens, f 2 janv. 404 (ou 394). — 3o Macaire d'Antioche, condamné comme inonothélète par le 6me conc. ecuménique 680, et banni de la ville.

MACÉDOINE, contrée évangélisée par saint Paul, et qui, lors du partage de l'emp. romain 395, était entièrement gagnée au christianisme. Elle appartient dès lors à l'emp. d'Orient, dont elle partagea les destinées. Placée auj. sous la domination turque, elle est en majorité catholique grecque et relève en religion des 4 arche v. de Salouique, Sérès, Koslendil et Uskub. Le mont Athos et ses nombreux couvents en font partie.

MACÉDONIUS. Après la mort d'Eusèbe de Nicomédie, ce jeune et brillant représentant de l'arianismefutélu par son parti év. de Constantinople 341, en concurrence avec le pieux et savant Paul, que les orthodoxes avaient déjà nommé en 336, mais que l'influence impériale avait réussi à écarter. Ces deux hommes occupèrent successivement le siège, suivant les caprices de la cour, jusqu'à ce qu'en 348 Paul fui définitivement établi patriarche par Constance, sur la demande de son fr. Constant. Mais à la mort de ce dernier, 350, Macédonius essaya de remonter sur le trône épiscopal; il y eut du tumulte, et le jour de son installation il y eut du sang versé; on parle de 3000 personnes qui périrent dans cette rixe. Le conc. de Constantinople le condamna 360. et Constance le déposa. Macédonius mourut peu de temps après, mais non sans avoir fait un schisme dans l'Église, et créé une secte qui porta son nom, les Macédoniens. Lui-même, arien d'abord, était devenu semi-arien, et les ariens l'excommunièrent. C'est surtout sur la question du Saint-Esprit que ses sectateurs différaient de la doctrine reçue; les uns niaient sa personnalité tout en accordant sa divinité, les autres faisaient le contraire. Le conc. de Constantinople de 381 mit fin à cette discussion pneumatomachique en proclamant la divinité hypostatique du Skint-Esprit, comme procédant du Père.

MACHSOR (cycle, cercle), titre d'un livre de prières juif, espèce de liturgie, qui renferme par ordre la succession des prières publiques destinées à être lues aux différentes fêtes, ainsi quo les chants (piutim) qui s'y rapportent. Ces chants ont été composés entre 1000 et 1300 par des juifs espagnols et allemands, dont le plus ancien est le rabbin Éléazar ben Jacob Kalir. Outre les idées talmudiques, ils renferment des pensées empruntées à la spéculation scolastique du moyen âge et ne sont pas à la portée de tout le monde. Les exemplaires qu'on en possède varient notablement d'un pays à l'autre. Hei-denheim en 1800 en a publié une édition â l'usage des juifs d'Allemagne et de Pologne.

MADAGASCAR, grande île de l'océan indien, dont les habitants appartiennent les uns à In race nègre, les autres à la race malaise. Leur religion est une idolâtrie informe; leur principal rite est la circoncision, leurs prêtres sont plutôt des sorciers. Les Portugais cherchèrent les premiers à y établir une colonie et des comptoirs 1505-1545, et Fr. Xavier, en route pour l'Inde, y missionna quelques jours, mais cette tentative ne réussit pas. En 1642 les Français essayèrent à leur tour d'y fonder un établissement, mais l'insolente imprudence du père Étienne qui avait arraché à un chef ses amulettes pour les jeter au feu et qui le menaçait de faire venir des troupes s'il ne renvoyait pas immédiatement les femmes qu'il avait de trop, provoqua le massacre de la colonie et mit fin à la mission française. Van der Kemp en 1811, puis Campbell et Lebrun en 1814, furent chargés de sonder le terrain, mais pour diverses raisons ces essais n'aboutirent pas. Enfin en 1817 l'Angleterre réussit à conclure avec le roi Ra-dama I^, à Tamatave, un traité pour la suppression de la traite. Radama fit aussi venir d'Angleterre des ouvriers; quelques missionnaires les accompagnèrent, et le roi favorisa leurs écoles, mais c'est seulement sur son lit de mort qu'il autorisa le baptême et la conversion de ses sujets. En 1818 la mission fut un moment renforcée par l'arrivee de Bevan et de Jones, mais le premier mourut bientôt et le second dut retourner à l'île Maurice. Les négriers avaient su réduire à rien la convention relative à la traite, l/agent du gouvernement anglais, à Tamatave, le dévoué Hastie (f 1826) reprit à nouveau les négociations à Tananarive et les mena à bonne fin. En 1826 les écoles étaient en pleine prospérité et une presse publiait de nombreux écrits; en 1832 on comptait 10,000 Madécasses sachant lire. Mais Radama f 1828; une de ses femmes, Ranavalona, s'empara du trône par l'intrigue et en faisant mettre à mort les membres de la famille royale. Elle laissa quelque temps le champ libre aux missionnaires; mais peu à peu elle leur devint hostile, ferma les écoles, refusa de recevoir l'agent de l'Angleterre, Lyall, successeur de Hastie; bannit le missionnaire Atkinson qui venait d'arriver, interdit la lecture de la Bible, et finalement, février 1835, ouvrit contre les chrétiens une ère de persécutions. De juillet 1836 à mars 1837, en huit mois, il n'y eut pas moins de 1,016 exécutions publiques, sans parler des malheureux qui furent égorgés dans les bois et dans les cavernes, ou jetés dans des précipices. Les missionnaires quittèrent l'ile, mais de l'île Maurice où ils se réfugièrent ils continuèrent d'encourager leurs disciples et d'évan-géliser ceux qui vinrent à eux. En 1845 le prince héritier Rakoto se mit du côté des chré tiens, mais sans que cela améliorât beaucoup leur position; c'est seulement après la mort du ministre Reniordo, le grand ennemi des chrétiens, qu'il fut associé au gouvernement, et les choses changèrent. Le missionnaire Ellis vint en 1852, puis de nouveau en 1856, visiter les troupeaux restés fidèles; mais les intrigues d'un Français, Lambert, marchand d'esclaves, qui projetait de soumettre l'île au protectorat de la France, provoquèrent en 1857 une révolution qui fut également fatale aux catholiques et aux protestants. La reine mourut en 1861. Son fils lui succéda, après avoir écarté un compétiteur au trône; il prit le nom de Radama II. Il proclama la liberté de conscience, et rappela Ellis qui vint, accompagné de plusieurs autres missionnaires. Des prêtres catholiques arrivèrent aussi, et Radama hésita longtemps entre les deux, faisant dire la messe on jour, écoutant Ellis le lendemain. Il s'était engagé à reconnaître le protectorat français. Le parti païen, de sou côté, exploitait les penchants sensuels et débauchés du roi et ses superstitions. A la fin le massacre des chrétiens fut décidé, mais Radama s'était aliéné le peuple et la cour par ses folies: l'ordre était profondément troublé, et il fut assassiné le 11 mai 1863. La reine Rosaherina prit en main la directiop des affaires, promit aide et protection aux étrangers et donna toute liberté aux chrétiens. Dès lors les protestants et les catholiques travaillent à la conversion des naturels, en même temps que l'Angleterre et la France rivalisent pour assurer leur prépondérance. En 1881 le nombre des chrétiens évangéliques était de 300,000, avec 1200 églises, 33 missionnaires anglais, 69 indigènes et 862 écoles. En 1883 la- France, après le bombardement de Tamatave a réussi à s'emparer d'une partie de l'île et à y imposer son protectorat au profit de son commerce et de la mission catholique.

MADELEINE, etc. v. Magdeleine.

MADELONNETTES, v. Magdalenum.

MADIAI, Francisco, et Rosa sa femme, furent condamnés en Toscane en 1852, pour des réunions évangéliques tenues dans leur maison, et parce qu'on avait trouvé chez eux des Bibles et des traités religieux. Ces actes, qualifiés de blasphèmes, leur valurent d'être jetés dans des cachots. L'Europe protestante s'en émut; des députations arrivèrent d'Angleterre, d'Allemagne, de France, de Suisse, de Hollande, pour solliciter leur élargissement; le roi de Prusse écrivit lui-même au grand-duc, mais en vain. Il fallut les menaces de l'Angleterre pour décider le gouvernement toscan à commuer en un exil perpétuel la peine de ces deux vénérables vieillards.

MADRUZZIUS, Christophe, né 1512. étudia à Bologne et à Padoue et reçut de bonne heure de riches bénéfices. S'étant distingué à Venise comme envoyé de Ferdinand, il fut, sur la recommandation de Charles-Quint, nommé prince-évêq. de Trente, 1539, n'ayant que 27 ans; piris évêque de Brixen. cardinal, et gouverneur de Milan 1555-1560. Au conc. de Trente il appuya les demandes de réformes, notamment la communion sous les deux espèces et la Bible en langue vulgaire. Le légat du pape lui répondit que s'il fallait rétablir l'ancienne discipline ecclésiastique, un évêque serait réduit à n'avoir qu'un seul diocèse, f 1578.

MAERLANT, Jacob, un des plus célèbres poètes hollandais du 13™® siècle, f vers 1300 à Damm près Bruges; plus savant encore que poète, auteur d'une Chronique du monde, da plusieurs poésies relig., et d'une Bible envers, dont la première partie fait suite à Y Hist. esco-lastre de P. Comestor, chancelier de Paris, et la seconde est une Harmonie des évangiles assez estimée.

MAFFE1 1° ouMaffeo Vegio, néàLodii407, prof, de belles-lettres à Pavie, chanoine de Saint-Jean de Latran, f 1458 à Rome; auteur d'une suite à l'Enéide, d'une Antoniade en l'honneur de saint Antoine, d'un traité sur l'éducation chrétienne des enfants, sur la persévérance dans la religion, de plusieurs biographies, etc.

Bernard, cardinal, secrétaire de Paul III, né à Bergame 1514, f 1553; auteur d'un Comment. sur les épîtres île Cicéron; honoré comme protecteur des lettres.

3° Jean-Pierre, ou Giampietro, né vers 1536 à Bergame, f 1603 à Tivoli, entra 1565 dans l'ordre des jésuites et fut prof, d'éloquence dans leur collège de Gônes et secrétaire de la république. 11 fut mandé à Lisbonne 1570 par le cardinal Henri pour écrire rHist. des Indes d'après les derniers documents. Il écrivit aussi l'hist. du pontificat de-Grégoire XIII et celle de Loyola. Il avait obtenu du pape la permission de réciter son bréviaire en grec, pour ne pas risquer de compromettre l'élégance classique de sar latinité.

François-Scipion, marquis de Maffei. né à Vérone 1er juin 1675, élève des jésuites de Parme, membre depuis 1698 de la Société arca-dienne de Home, fit en 1704 une campagne au service de la Bavière, puis revint en Italie et se consacra tout entier à la littérature. En 1713 il publiait Mèrope, qui fut depuis imitée par Voltaire; plus tard une Hist. de Vérone. En 1732 il visita la France, puis l'Angleterre, la Hollande, l'Autriche. De retour à Vérone il y fonda une société savante et réunit une collection d'inscriptions antiques, f 11 févr. 1753. Parmi ses Œuvres compl., Venise 1790, on compte quelques dissertations théol. sur le duel, le théâtre, des écrits contre le Jansénisme, etc. Il a publié aussi une édition d'Hilaire de Poitiers 1730, le Musée de Vérone, Vérone illustré, etc.

MAGARITA, Magarites, nom donné par quelques écrivains du moyen âge aux apostats de la religion chrétienne, spécialement à ceux qui passaient à l'Islam et qu'on appela plus tard renégats. On fait dériver ce nom du grec Mâga-ron, le saint des saints à Delphes et dans les temples païens?

MAGDALENUM, nom donné dans les églises évangéliques aux établissements destinés à recevoir et à relever les jeunes filles tombées, les Magdeleines repentantes. Deux furent fondés à Londres en 1758 et en 1787, et d'autres suivirent. En Allemagne le premier fut ouvert à

Hambourg 1822, le second à Kaiserswerth 1833, puis un autre à Berlin 1843. Dès lors ils se sont multipliés. Dans les pays de langue française ils portent plutôt le nom de Refuges; il y en a à Genève, à Paris, à Nîmes, etc. Les catholiques en possèdent aussi, les uns indépendants, les autres rattachés à des couvents (les sœurs de Marie et Joseph). Le plus ancien connu date de Louis IX, 1226-1270. En 1618, sous Louis XIII, une maison religieuse, dite les Madelonnettes, fut fondée à Paris pour les filles de cette catégorie et placée sous l'invocation de Magdeleine. Plus tard elle devint une prison politique: elle sert aussi de maison de détention pour les femmes de mauvaise vie. Elle est située entre la rue du Temple et la rue Saint-Martin.

MAGDEBOURG, ville et archevêché datant d'Othon 1er 967-970, qui y avait fondé d'abord un couvent de bénédictins 937. Il servait de centre archiépiscopal à plusieurs évêchés fondés au milieu des Slaves, notammentMeissen, Hai-berstadt qui remontait déjà à Gharlemagne. Zeitz-Naumbourg, Havelberg, Cammin, Lebus et Brandebourg. Le premier archev. fut Adel-bert 968-981; 44 archev. et 3 administrateurs ont depuis lui occupé ce siège; le plus important est Norbert 1126-34, fondateur de l'ordre des prémontrés. Cesarch. eurent, comme princes temporels, de nombreuses guerres à soutenir contre les Slaves leurs voisins, ainsi que contre Henri IV, Henri-le-Lion, les margraves de Brandebourg, etc. Ils eurent aussi beaucoup à souffrir pendant les guerres hussites. La Réformation s'y établit rapidement, et l'archev. Albrecht, qui était en même temps prince-électeur de Mayence, ayant fait de vains efforts pour l'empêcher, abandonna sa résidence. L'archev. Jean-Albert 1545-1550 dut, avant cl^ prendre possession de son siège, s'engager à accepter le compromis de Wittenberg qui accordait le libre exercice de la religion. La ville avait dès 1526 adhéré à l'alliance de Torgau. Elle entra aussi dans la ligne de Smalcalde et fut mise au ban de l'empire. Après la guerre elle devint le refuge des théol. luthériens et le principal centre littéraire de la lutte dirigée contre l'Intérim. Après la diète d'Augsbourg 1550. qui la déclarait hors la loi, elle se rendit. 5 nov. 1551, à Maurice de Saxe qui lui fit de faciles conditions. Le dernier archev. nommé par le pape, Sigismond, 1553-1566, passa au protestantisme; de même l'arch. Joachim-Frédéric, qui se maria, ainsi que son fils et successeur Chrétien-Guillaume, administrateur du diocèse 1598-1631. Il dut fuir pendant la guerre de Trente ans et fut remplacé par Auguste de Saxe, mais lorsqu'il revint et que la ville le reçut de nouveau, elle fut attaquée, assiégée, prise le 10 mai 1631, el saccagée par les troupes de

Tilly, qui y commirent d'horribles massacres. Les Suédois la reprirent l'année suivante et elle fut incendiée. Â la paix de Westphalie elle fut sécularisée et donnée au Brandebourg, mais Auguste en conserva l'administration sa vie durant; c'est lui qui fixa en 1652 son organisation ecclésiastique. Dans les temps modernes elle a fait parler d'elle par les excès du pasteur Sin-tenis 1840, qui regardait le culte rendu à Christ comme une superstition et qui fut menacé de suspension, ce qui agita beaucoup la ville et provoqua le mouvement des Amis des lumières, et par la formation de Pégl. libre rationaliste du pasteur Uhlich 1848, après qu'il eut été destitué 1845 par le Consistoire. Magdebourg est le siège du Consistoire pour la province de Saxe.

Centuries de Magdebourg. On désigne sous ce nom une Hist. de l'Église, rédigée par Flacius avec l'aide des pasteurs de Magdebourg Wigand, Matth. Judex et Basile Faber, et rédigée par siècles, ou centuries. Cette Historia ecclesias-tica, le premier travail complet qui ait été fait dans ce genre, parut de 1560-1574, réimpr. 1624, et va jusqu'au 14™ siècle. Malgré quelques lacunes et imperfections, cet ouvrage a une grande valeur historique par l'importance des matériaux rassemblés et par le sens critique avec lequel les faits sont jugés. Il a pour but de prouver, l'histoire à la main, que l'Égl. luthérienne est la véritable Égl. chrétienne primitive. L'Égl. cathol. a essayé plus tard de faire un travail analogue, dans les Annales de Baro-nius.

— On connaît en physique sous le nom d'Hémisphères de Magdebourg, un appareil destiné à prouver la puissance de compression de l'air; il fut imaginé par Otton de Guericke.

MAGDELEINE de Pazzi, de son vrai nom Catherine, née 1566 à Florence, de l'illustre famille des Pazzi, entra en 1584 dans le couvent carmélite de Saint-Frigidien, ouJSaint-Fri-<lien; ses austérités l'amenèrent au bord du tombeau, et pendant sa maladie elle eut des extases et s'entretint avec des saints et même avec la Trinité. Guérie en 1590, elle fut nommée sous-prieure et directrice des novices, et édifia tout le monde par son ascétisme, f 1607. On lui attribua des miracles. Béatifiée la mêmean-née par Urbain VIII, elle fut canonisée 1669 par Alexandre VII. Ses Œuvres spirituelles ont été publ. par le P. Salvi, Venise 1739.

MAGDELEINE (Ordre de Sainte). Plusieurs couvents de cet ordre, destiné à sauver les filles perdues, existaient déjà en Allemagne au 12®« siècle, sans qu'on sache qui en fut le fondateur. Les papes leur accordèrent de nombreux privilèges. Contrairement à l'esprit de la fondation, ils finirent par recevoir aussi des jeunes filles non tombées que l'on désigna, à cause de leur costume, sous le nom de Dames blanches. Ber-tranchntroduisit cet ordre en France et le soumit à la règle d'Augustin. Lors de la fondation d'un couvent à Paris 1497, les statuts remirent en vigueur la disposition primitive qui n'admettait que les filles perdues. Mais peu à peu des désordres se glissèrent dans la maison; une réforme fut nécessaire, et en 1629 l'ordre fut placé sous la direction des visitandines, puis des ursulines, puis des dames de la miséricorde. L'ordre se divisait en 3 classes: celle de Magdeleine, comprenant les religieuses proprement dites; celle de Marthe, formée de femmes qui ne prononçaient point de vœux, et qui pouvaient rentrer dans le monde et se marier; celle de Lazare, ou de femmes enfermées malgré elles par mesure disciplinaire, et qui pouvaient être rendues à la liberté quand elles avaient donné des preuves d'amendement.

MAGIE, magiciens. Le culte de la nature, et le fait que les astres, ou tout au moins le soleil, exercent sur la terre une grande influence, avaient accrédité chez les Çhaldéens, trop généra-lisateurs, l'idée qu'il y avait un rapport intime et constant entre les phénomènes célestes et les événements de ce monde. Grâce à la superstition, grâce à la disposition des uns à profiter de la crédulité des autres, les habiles érigèrent en science ce qui n'était d'abord qu'une impression vague, et ils décidèrent que les destinées des hommes sont ecrites dans les cieux et réglées par les constellations. L'astronomie devint l'astrologie. Bientôt il ne s'agit plus seulement de regarder les étoiles, il fallut les consulter et leur demander leur secret. Mais si l'on tombait juste quelquefois, souvent aussi l'on se trompait. Pour expliquer ces erreurs fréquentes, on dut faire un pas de plus, qui devait servir également à neutraliser les mauvais présages. On admit qu'il y avait, à côté de l'influence stel-laire, d'autres influences mystérieuses, bonnes ou mauvaises, qui pouvaient contrecarrer les données des constellations. Les mages, qui étaient les savants de l'époque, les hommes nécessaires, ceux que l'on consultait, devaient donc conjurer les mauvaises puissances, si les astres étaient favorables, et implorer les puissances bienfaisantes si l'horoscope était fâcheux. Dans tous les cas ils avaient à intervenir, et c'était pour eux une source de richesse et de crédit. Le contact des Perses avec les Mèdes, qui avaient reçu des Babyloniens l'adoration des astres, initia les premiers à la magie qui était étrangère à Zoroastre et au Zend-Avesta, et familiarisa les autres avec la notion des principes mauvais qui sont dans la nature et qui peuvent exercer une influence fatale sur la vie des hommes. La magie eut ainsi pour tâche de rechercher les moyens secrets, connus des ini-liés seuls, de combattre les mauvais esprits et de les contraindre à renoncer à leurs coupables projets; on inventa des formules, des anneaux constellés, des mélanges d'herbes, et l'on y joignit certaines connaissances physiques, bien incomplètes, mais inconnues du vulgaire. Le nom de mages, d'origine indogermanique et désignant dans l'origine les prêtres de la religion naturelle, passa successivement aux Chaldéens, aux Perses et aux Mèdes, mais en s'accenluant de plus en plus dans le sens de la magie, tout en conservant aussi la signification générale, souvent justifiée, de sages et de savants. À mesure que les religions anciennes perdirent de leur prestige et que leur fausseté éclata davantage aux yeux des populations plus éclairées, la magie gagna du terrain et sembla surnager seule sur les ruines des idées morales et supérieures. Il n'y eut plus de mages, mais les magiciens demeurèrent et fourmillèrent, sous les noms de devins, d'enchanteurs, de sorciers, etc. Ils envahirent la Grèce et Rome (Simon l'enchanteur, Élymas, la servante pythonisse), et acquirent parfois un tel ascendant que les lois durent intervenir pour prévenir des abus et une trop jrrande exploitation delà crédulité publique. Le séjour de Rome leur fut interdit sous Sylla, Auguste, Tibère, Caracalla, Dioclétien. Les emp. chrétiens défendirent également d'avoir recours k la magie, mais comme les chrétiens eux-mêmes croyaient à l'action des démons, il leur était difficile d'établir l'imposture des magiciens qui prétendaient s'en servir ou les combattre. C'est ainsi que la foi k la magie se perpétua dans tout le moyen âge, et elle trouva dans la Kabale et l'alchimie de nouveaux aliments; la transition fut facile pour arriver aux extravagances populaires sur les diableries, les sortilèges, les sorciers et la sorcellerie, que l'Église exploita tout en les persécutant, et qu'elle enracina plus qu'elle ne les détruisit. Le miracle suppose l'action absolument libre de la toute-puissance de Dieu; dans le sortilège au contraire on a l'action puissante du mauvais esprit, du démon, mais subordonnée k des causes humaines et terrestres, quoique mystérieuses. La dogmatique du moyen âge, en attribuant une efficace magique k l'ordination, aux exor-<ismes, aux sacrements, a pu entretenir sans le vouloir des idées fausses sur les relations réciproques des choses matérielles avec les choses spirituelles.

MAGISTER sacri palatii (le maître du sacré palais). Il n'avait d'abord pour fonctions que d'enseigner la religion, pendant leurs heures de loisir, aux domestiques du pape et des cardinaux. Cette charge, que Dominique avait revêtue volontairement, fut transformée en dignité par Honorius III1218. et confiée toujours à un dominicain. Eugène IV y ajouta 1435 le droit de censure sur tous les sermons destinés à être prêchés dans la chapelle papale, et en 1515 elle se compliqua encore du droit de censure sur tous les livres publiés k Rome. Elle finit par comprendre aussi l'approbation des ouvrages publiés à l'étranger. Auj. le droit de censure est le seul qui subsiste encore.

MAGNENCE, Flavius Magnus, ou Magnen -tius, né en Germanie, capitaine des gardes de Constant, profita de l'indolence de ce prince pour le détrôner et se faire nommer empereur k sa place, à Autun 350. Constant mourut dans sa fuite. Magnence marcha sur Rome, se défit de Népotien qui aspirait à le renverser, refusa orgueilleusement le partage de l'empire que lui offrait Constance II, et vaincu par lui à Mursia en Illyrie 352, il s'enfuit dans les Gaules et se suicida à Lyon 353. Pour se rendre favorables les populations, il fav orisa le paganisme en Germanie et l'orthodoxie athanasienne dans le reste de l'empire. Il se donnait lui-même pour le Christ sur ses drapeaux.

MAGNIFICAT, nom latin du cantique de Marie, Luc 1, 46. d'après le premier mot par lequel il commence dans la Vulgate. César d'Arles doit l'avoir introduit comme hymne dans l'Égl. latine, qui le chante aux vêpres de l'Office divin. L'Égl. grecque le récite à la messe le dimanche; plusieurs Égl. protestantes l'ont également mis en vers et en musique pour le culte de Noël (v. Bost, le Gloria et le Magnificat

MAGNUS. Outre plusieurs rois de Suède et de Norwège qui portèrent ce nom (Magnoald, Maginald, Mangold, Mang), l'hist. ecclés. mentionne 1° un compagnon de Saint-Gall, qui lui survécut et qui, avec son ami Théodore, présida k l'établissement du monastère et de la ville de ce nom. Après la dispersion des religieux par les Francs, les deux amis restèrent seuls fidèles à leur poste, exposés k beaucoup de mauvais traitements, mais soutenus et secourus par l'év. Bosko de Constance. Une tradition leur attribue aussi la fondation du couvent de Ftlssen en Souabe, mais ces hommes vivaient au 7 me siècle, et les plus anciens documents qui les concernent (un mss. de la biblioth. deSaint-Gall) sont du 10*e ou même du 12me siècle, et par conséquent peu sûrs. — 2<> Jacobus M., où Jacques Legrand, moine au-gustin, né 1350 k Toulouse, prof, k Padoue et k Paris, grand et courageux prédicateur, qui ne craignit pas de blâmer en chaire les désordres d'isabeau de Bavière, 1405. f 1422; auteur d'un Livre des bonnes mœurs, un des plus anciens livres écrits en langue vulgaire; impr. 1478. — 3° Jean M. archev. d'Upsal, né à Lin-kôping 1488, s'opposa aux projets de réforme de Gustave Wasa, et dut se retirer k Rome où il

1544; auteur d'une Hist. des Goths, et d'une bist. de l'univ. d'Upsal. — 4° Son fr. Olatts, ^ui lui fut donné pour successeur, ne put prendre possession de son siège et f 1568 au couvent de Sainte-Brigitte à Rome; auteur d'une Hist. (latine) des peuples septentrionaux, et <d'un tableau ou table des matières sur le même sujet.

MAGYARES, ou Madgyarcs, peuplade chassée par les Petchenègues du Turkestan; elle s unit un moment aux Chazares et occupa la côte N. 0. de la mer Noire. Avec l'aide des Bulgares et d'Arnolf de Garinthie, ils combattirent la Moravie, s'établirent sur le Danube, firent des expéditions en Italie (où ils furent battus à Brenta 899), en Suisse, en Allemagne, en Lorraine et dans le sud de la France, jusqu'à ce que la bataille de Lechfelde 955 les refoula dans leurs limites actuelles de la Hongrie. Leur férocité dépassait toute idée. Leur religion consistait uniquement en la foi à un être suprême et à l'immortalité de l'âme. Geisa et sa femme Sarolta, qui était chrétienne, introduisirent dans le pays les premiers principes de la civilisation et du christianisme. Le fils de Geisa, Étienne-le-Saint, se fit baptiser 994, et Sylvestre II lui envoya une couronne d'or. Cependant il se passa encore un siècle avant que le paganisme fût entièrement extirpé. Le nom de Magyares, qui ne désignait d'abord qu'une des tribus du pays, finit par désigner la contrée tout entière; auj. il se dit surtout de l'aristocratie du pays.

MAHOMET, en arabe, Mohammed (le louable), né à La Mecque 569, de la noble tribu des koreishites, perdit son père à l'âge de 5 ans, et fut élevé par son oncle Abu Taleb, qui le mit dans le commerce. Il fit plusieurs voyages avec des caravanes et eut l'occasion de faire la guerre sur les frontières de Syrie. D'un extérieur agréable, d'un jugement pénétrant, d'un esprit méditatif, il pensait beaucoup, mais il ne savait ni lire, ni écrire. A 25 ans il épousa Kadisha, la veuve d'un riche marchand, dont il avait quelque temps géré les affaires. Entouré d'Arabes païens, dont le grossier fétichisme le dégoûtait, de juifs cupides et sensuels, de chrétiens superstitieux qui déshonoraient leur foi, il rêvait une réforme religieuse dans le sens du monothéisme, et pendant 15 années, se retirant souvent dans une caverne du Mont Harah, il combina ce qu'il pouvait conserver, comme dogmes et comme préceptes, de l'A. T. qu'il avait étudié avec un savant juif, et du N. T. qu'un chrétien nestorien lui avait fait connaître. A 40 ans il apparut enfin comme prophète, se disant honoré de révélations spéciales de l'ange Gabriel, qui lui avait donné dans le Coran q. v. la parole éternelle de Dieu, gravée sur des tablettes avec des rayons de lumière. Il fut modeste dans ses premiers essais de prosélytisme; il gagna d'abord sa femme, puis son cousin Ali, puis un riche marchand de la Mecque, nommé Abu Beker, qui devint plus tard un de ses beaux-pères par la belle Aïcha, puis Othman, qui fut calife après les deux précédents. Mais pendant 3 ans la nouvelle doctrine resta renfermée dans ce cercle restreint. Il se décida alors à se produire publiquement comme envoyé de Dieu, et son parti finit par s'accroître; assez pour lui susciter de nombreux adversaires, pas assez pour qu'il pût leur résister. Une violente insurrection l'obligea 622 de s'enfuir, et il trouva un refuge sûr à Yatreb, où il comptait déjà des partisans. Cette ville reçut en récompense de son hospitalité le nom de Medinet-al Nabi, ville du prophète, et par abréviation: Médine. C'est de cette époque que date l'ère des mahométans, connue sous le nom d'hégire, ou fuite. Poursuivi par ses ennemis, il leur répondit les armes à la main, et n'hésita plus à employer la force pour propager sa doctrine. Ses progrès furent rapides; il soumit plusieurs tribus de l'Arabie, et dans l'espace de dix ans, tout le pays fut convaincu et converti, de gré ou de force; il prit la Mecque 630 et en renversa les idoles. Il allait même pousser plus loin ses conquêtes, lorsqu'il f à Médine 632, léguant à ses généraux le soin de continuer son œuvre. Il avait eu 15 femmes légitimes, sans parler des autres, mais il n'en eut point de fils. Une seule fille lui survécut; elle avait épousé Ali, qui était naturellement désigné pour devenir le successeur de Mahomet; mais Abu-Beker réussit à se faire nommer à sa place et fut le premier calife (lieutenant); il mourut 634. Omar fut le second, t 644; Othman, le troisième, f 656; Ali, le 4™ f 660. Mais alors déjà deux partis violents se partageaient l'empire et la religion: les orthodoxes, sunnites ou traditionnaires, et les chyites ou hétérodoxes, ces derniers estimant que le califat aurait dû passer directement de Mahomet à Ali, et regardant les califes intermédiaires comme des usurpateurs. — La religion musulmane, ou Islam, repose sur le Coran. Le nom de musulman dérive, comme celui d'islamisme. de l'arabe islam, qui signifie mettre sa confiance en Dieu, s'abandonner à Dieu. Pendant un siècle la nouvelle religion marcha de conquête en conquête; elle couvrit une partie de l'Asie, fut sur le point de prendre Constantinople, s'étendit au nord de l'Afrique sur tout le littoral de la Méditerranée, franchit le détroit de Gibraltar, inonda l'Espagne où elle fut pendant 700 an> maîtresse absolue, passa en France, menaça l'Allemagne, et ne fut arrêtée dans sa marché envahissante que par la bataille de Poitiers 732 où Charles Martel lui fixa les limites qu'elle ne devail plusx franchir. Auj. Ton compte dans le monde plus de cent millions de musulmans appartenant à différentes sectes, qui sont loin d'être unies. Ils ont reconnu longtemps pour leurs chefs les califes; c'est auj. le sultan qui est reconnu par la majorité d'entre eux; il possède l'étendard du prophète et peut déclarer la guerre sainte. Vie de Mahomet par Aboul-Féda, Paris, Didot, 1838. — Plusieurs princes orientaux ont porté le nom de Mahomet, Mohammed, Méhémet, etc.; le plus célèbre est Mahomet II, fds d'Amurat II; il prit Constantinople 1453, fat battu à Belgrade par Hunyade 1456, fit aux chrétiens une guerre acharnée, soumit la Moldavie, le Frioul, la Dalmatie, Otrante, mais échoua devant Rhodes défendu par les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, f 1481.

MAIMBOURG, Louis, né 1610 à Nancy; jésuite dès l'âge de 16 ans, étudia à Rome, prof, des lettres à Rouen, prédicateur très couru, volontiers burlesque et faisant rire son auditoire; attaqua 1667 l'édition de la Bible de Mons el fut réfuté vigoureusement par Arnauld et Nicole. Plus tard il se mit à l'histoire, et commença par celle des iconoclastes; puis celle du schisme des grecs; celle du calvinisme, qui lui valut de Bayle et de Jurieu une de ces réfutations dont un historien ne se relève pas; celle du luthéranisme 1680, réduite à sa valeur par Seckendorf; des sermons, des traités de controverse, etc. Tout cela aussi passionné que superficiel, f 13 août 1686 à Paris.

MAILLARD, Olivier, né à Paris ou en Bretagne, f 13 juin 1502 à Toulouse; cordelier, docteur en Sorbonne, prédicateur de Louis XI, confesseur de Charles VIII, un des représentants les plus curieux du style macaronique burlesque. Il envoie souvent ses auditeurs ad omnes diabolos, raconte en chaire des drôleries et ne se géne pas pour chanter des chansons, même indécentes, de sa composition. Sermons, Lyon 1474. Dans un sermon de 1500, on marque par des hem/ les passages où l'orateur s'est interrompu pour tousser. On ne peut le comparer qu'à Menot.

MAIN-MORTE, v. Amortisation.

MAISTRE (comte Joseph de), né à Chambéry i«r avril 1753, d'une famille d'origine française. En 1784 il écrivit un Éloge du roi Victor-Amédée, qui fut suivi de plusieurs brochures contre la révolution et de Considérations sur la France. Nommé sénateur en 1787, il quitta la Savoie lorsqu'elle fut envahie par les Français en 1793, passa en Piémont et accompagna Charles-Emmanuel dans l'île de Sardaigne. De 1803 à 1817 il fut ministre plénipotentiaire à Saint-Pétersbourg, mais dut quitter la Russie lors de l'expulsion des jésuites, parce qu'il avait embrassé leur cause avec plus d'ardeur qu'il ne convenait à un diplomate étranger. De retour à Turin il fut nommé ministre d'Etat et régent de la chancellerie, f 1821. Il s'est fait un nom dans les lettres par la précision de son style et l'exagération de ses idées. Absolutiste en politique et partisan des vieux régimes, il l'était également en religion et ne voyait de christianisme que sous la forme papale et théocratique. Il se borne d'ailleurs à affirmer, à lancer ses oracles, sans se mettre en frais pour les justifier. Ses principaux écrits sont: Du pape, 1809; De l'Église gallicane, 1821 (il la combat); les Soirées de Saint-Pétersbourg, et Lettre sur l'Inquisition, 1822 (posthumes).

MAIEUL, ou Mayeul (Majolus), d'une riche famille d'Avignon, né vers 906, coadjuteur ot abbé de Cluny 948-994, distingué par sos talents, sa science et sa piété; il réforma plusieurs couvents relevant de Cluny et mérita d'en être regardé comme le second fondateur. Il avait refusé l'archevêché de Besançon et repoussa d? même les avances d'Othon II qui voulait le faire nommer pape. v. Somasques.

MAITRE du sacré Palais, v. Magister.

MAJ AL, Matthieu, pasteur du désert et martyr sous Louis XV, plus connu sous le surnom de Désubas qu'il tenait du lieu où il était né en 1720. D'un extérieur agréable, d'un caractère aimable, plein de zèle et de talent, ce jeun*1 ministre était très aimé des églises et du peuple; il était d'autant plus détesté du roi et redouté des prêtres. Par ordre de Saint-Florentin, La Devèze se mit en campagne, et grâce à ses espions il réussit à l'arrêter à Mazel, près de Saint-Agrève, la nuit du 11 au 12 déc. 1745. Deux fois les protestants essayèrent de le délivrer, mais plus de 40 d'entre eux furent tués ot 200 blessés. Conduit d'abord à Vernoux, puis à Tournon, il fut enfin transporté dans la citadelle de Montpellier. L'évêque et d'autres prélats firent ce qu'ils purent pour le ramener dans le giron de l'Eglise romaine. Il comparut devant l'intendant Le Nain, chevalier d'Asfeld, qui, pour se conformer aux ordres précis du roi, le supplia d'abjurer. Sur son refusil fut condamné à mort, mais Le Nain en prononçant la sentence fondit en larmes; les juges savaient qu'il était innocent, mais ils avaient des ordres à exécuter, non un jugement à rendre. Une foule immense accompagna le martyr à l'échafaud; deux jésuites essayèrent jusqu'au dernier moment de lui faire baiser un crucifix; il les pria de le laisser mourir en paix, f *er févr- 1746. Une complainte populaire en 35 couplets a perpétué sa mémoire. Vie par D. Benoît.

MAJESTÉ (Lettre de Sa). C'est le nom sous lequel on connaît l'édit impérial par lequel Rodolphe II, 12 juillet 1609, accordait aux États de Bohême le libre exercice de la religion. La violation et le retrait de cet édit par l'emp. Matthias 1618 fat la première cause de ta guerre de Trente ans.

MAJOUTES, clercs réguliers de Saint-Maïeul, v. Somasques.

MAJOR lo Georges, théol. luthérien, né 1502 à Nuremberg, successivement pasteur à Magde-bourg, à Eisleben, à Mersebourg, prof, à Wittenberg, et enfin surintendant à Eisleben, d'où il fut banni 1551. f 1572. Il soutint la doctrine subtile que les bonnes œuvres sont nécessaires pour le salut, mais non pour la justification, et réussit à la faire passer dans la formule de l'In-térim de Leipzig dont il était un des rédacteurs. Mais il s'attira de vives répliques d'Amsdorf, de Flacius et des luthériens purs. Il finit par renoncer à sa définition pour ne pas donner prise à la doctrine cathol. de la nécessité des œuvres pour le salut. Mélanchthon aurait préféré dire: une nouvelle obéissance est nécessaire. Cette controverse d'équivoques se termina par la formule de Concorde qui posa la nécessité des bonnes œuvres comme résultant de la reconnaissance et non comme condition du salut La secte, qui portait son nom, ne lui a pas survécu.

2<> Jean (Hânsel Meyer) poète humaniste et satyrique de Wittenberg, né 1533 à Joachims-thal, prof, à Wittenberg, docteur en théol. de Mayence 1557, couronné en 1558 à Francfort par Ferdinand I«r comme poète lauréat. Il représenta le philippisme dans ses satires et se moqua de ses adversaires, notamment de Flacius; il fut emprisonné après la première défaite des cryptocalvinistes 1578, et de nouveau après la chute du chancelier Krell 1591. f à Zerbst 1608.

3<> Jean M., prof, de théol., collègue de Him-inel el de Gerhardt, né à Iéna 2 févr. 1615, f 1654.

4o John M., écossais, né près de North Ber-wick en 1469, fit ses études à Paris et pendant 15 ans fut prof, de théol. à la Sorbonne. En 1519 il enseigna à Saint-André, de nouveau à Paris, puis retourna à Saint-André oQ il passa les 20 dernières années de sa vie f 1550. Il avait des idées très larges et avancées pour son siècle. Il soutenait que l'autorité d'un concile était supérieur à celle du pape, et que les excommunications papales n'avaient pas de valeur. En politique il reconnaissait au peuple le droit de déposer son souverain quand celui-ci outrepasse ses droits. Il eut parmi ses élèves Bucha-nan et Knox sur lesquels il exerça une grande influence. On a de lui des commentaires en latin, une Hist. d'Écosse et d'autres ouvrages.

MAJORIN, élu 311, après la mort de Mensu-rius év. de Carthage, par le parti de ceux qui se montraient sévères envers les tombés; ceux qui tenaient pour l'indulgence avaient élu l'archidiacre Cécilien. Après sa f 313, ses sectateurs furent appelés le parti de Majorin, et reçurent plus tard de son successeur le nom de Donatistes.

MAJORITES (Controverse des), v. Major lo.

MAKOWSKY, Jean, de Lobzenic, Pologne, né 1583, prof, de théol. réformée à Franeker 1615-1644, accusé d'erreur, mais acquitté par le synode de Dordrecht: on lui reprocha seulement de vouloir ramener la méthode scolastique dans l'enseignement de la théol., et on le pria de s'en abstenir.

MAKRINA, ou Macrina, sœur de Grégoire de Nysse. Élevée sous l'influence d'une vie de famille pieuse, elle consacra sa vie, après la mort de son fiancé, au recueillement et à la pratique des œuvres de la charité dans un couvent de femmes que son père avait fondé dans le Pont. Son frère lui a élevé un monument de piété fraternelle dans sa Vita Macrinœ. Son aïeule, qui portait le môme nom, a également édifié l'Égl. par sa piété et sa constance dans les persécutions.

MALACHIE, archev. d'Armagh, né à Armagh 1095, il fut un des élèves du solitaire Imar, et se fit une réputation méritée par l'austérité de sa vie. Nommé d'abord assistant de l'archev. d'Armagh, puis év. de Connereth en 1130, il chercha à introduire dans l'Égl. déchue d'Irlande les formes de l'Égl. romaine. Désigné par l'archev. Celse comme son successeur, il dut attendre 5 ans que son rival et concurrent Maurice lui cédât la place. Ce n'est qu'en 1135 qu'il pût entrer en fonctions, mais il se démit de sa charge entre les mains de Gélase à Rome 1137 et rentra humblement dans la pauvreté d'un couvent de clercs réguliers. Pour obtenir le pallium il retourna en 1139 à Rome et fut nommé légat d'Irlande. Il visita Clairvaux en passant et fit la connaissance de saint Bernard, qui devint son ami et son biographe. Il n'obtint pas le pallium, le pape estimant qu'il aurait dû être demandé par un synode irlandais. Il fonda en Irlande, non sans difficulté, plusieurs couvents cisterciens, et f 2 nov. 1148 à Clairvaux dans un nouveau voyage à Rome pour les intérêts de son Église. Canonisé. On lui attribue faussement un livre, assez plat, de prophéties relatives aux papes, qui fut fabriqué en 1596.

MALAN, César, né à Genève le 7 juill. 1787, d'une famille originaire des vallées vaudoises, fut consacré en 1810 et bientôt nommé régent de cinquième au collège. Ses premiers sermons firent sensation, parce qu'il prêchait, et d'une manière quelquefois aggressive, la doctrine évangêlique. Le réveil religieux était dans l'air, et quoiqu'il dût en être un jour un des représentants les plus autorisés, il ne s'y joignit pis d'abord. La chaire lui ayant été interdite, il se fit construire une chapelle dans son jardin.

Privé en 1818 de sa place de régent, puis destitué et déclaré déchu du ministère ecclésiastique, il ne forma qu'en 1824 une égl. indépendante, qu'il rattacha à l'Église presbytérienne d'Écosse. Klle prospéra pendant six ans, mais en 1830 un schisme éclata, provoqué soit par ses allures trop autoritaires, soit par sa doctrine trop absolue, notamment sur la prédestination. Il n'en continua pas moins de réunir ceux des membres de son troupeau qui lui étaient restés fidèles. Son activité littéraire et musicale était immense; ses Traités religieux, ses Cantiques, Chants de Sion, Chants d'Israël, seront longtemps populaires. ainsi que son Véritable Ami des enfants et plusieurs volumes de récits de ses courses missionnaires, f le 8 mai 1864 dans sa campa-gne de Vandœuvres. Vie par C. Malan, fils. Notice par Bost, et passtm dans la plupart des écrits sur le réveil.

MÀLDONAT, Jean, né 1534 à Las-Casas de la Reina, Estramadure, étudia d'abord le droit, puis, sur le conseil d'un ami, la théologie. Après quelques années passées dans l'enseignement à Salamanque et à Rome, il entra dans l'ordre des jésuites 1562, et fut bientôt appelé comme prof, de philos, au collège de Clermont, à Paris, puis à Pont-à-Mousson. Il réussit moins bien dans une mission en Lorraine. De retour à Paris il <mt deux procès, l'un pour une captation d'héritage, dont il eut le bonheur de se justifier, l'autre pour accusation d'hérésie, parce qu'il n'admettait pas le dogme de l'Immaculée Conception. Acquitté, il n'en donna pas moins sa démission et se retira au collège de Bourges, où il f 1583. Son principal ouvrage est un tomment. sur les 4 Evangiles, publ. en 1596 à Pont-à-Mousson et encore estimé, quoique les jésuites l'aient falsifié et mutilé. Il corrige souvent le texte de la Vulgate. Sa polémique contre les protestants est précise mais passionnée.

MALÈSHERBES, Chrétien-Guill. (de Lamoi-gnon de), né 1721 à Paris, arrière-neveu de Bâville, fat passionné du bien sous toutes ses formes. Exilé par Louis XV à cause de ses remontrances contre les nouveaux impôts, il fut rappelé 1774 par Louis XVI, et travailla avec Turgot et Necker à créer un régime plus libéral, a vider les prisons d'État et à relâcher les derniers galériens protestants, Contrecarré par Xaurepas, il n'en continua pas moins, un peu avec l'aide des encyclopédistes et de quelques magistrats, de prendre le parti des persécutés, notamment en ce qui concerne l'état civil, mariages, baptêmes, des protestants. Il fut secondé par La Fayette à son retour des États-Unis, par Franklin, par la famille de Jaucourt, sans parler de Court de Gébelin, de Rabaud Saint-Étienne et de quelques abbés intelligents et de bonne volonté. Il obtint quelques réformes de détail; la révolution de 1789 les compléta, en même temps qu'elle balayait, bons ou mauvais, tous ceux qui représentaient le passé. Malesher-bes eut le courage de s'offrir pour défendre Louis XVI, et il f sur l'échafaud 22 avril' 1794. v. Ch. et Ath. Coquerel, Ant. Court, et le livre de M. Pelletan sur Jarousseau.

MALINGRE, Thomas, ou Mathieu, contemporain de Calvin. D'abord dominicain, il se convertit au protestantisme, prêcha à Blois, où il connut Marot 1534, et vint ensuite au canton de Vaud. Pasteur à Aubonne 1546, à Yverdon 1556. On a de lui (en vers) une « Épître à Cl. Marot, en laquelle est demandée la cause de son département de France, » avec la réponse du dit Marot, etc. Bâle 1548, Paris 1869. Ses poésies eurent du succès. Très intéressant pour l'hist. de la Réf. à Genève et en France, f 1572 chez son fils Daniel, pasteur à Vuarrens.

MALLET, Fréd.-Louis, célèbre prédicateur de l'égl. de Saint-Étienne, Brème. Né le 4 août 1792 à Braunfels, + 6 mai 1865; auteur de nombreux écrits d'édification.

MALMESBURY, v. Guillaume 7o.

MALTE (Ordre de), v. Jean (Chevaliers de Saint-).

MALVENDA, Thomas, né 1566 à Xativa, province de Valence, entra dans l'ordre des dominicains à Lombay et se distingua par son talent pour les langues. Lecard. Baronius le fit venir à Rome 1600 et lui confia la correction du bréviaire et du missel. Il fut employé à des travaux analogues par la Congrég. de l'index à Rome et par l'Inquisition en Espagne. Ses annales de l'ordredes prédicateurs sont inachevées. Son principal ouvrage est une traduction de l'A, T. avec commentaire, qui va jusqu'au chap. 16 d'Ezéchiel; mais la trad. est trop littérale et souvent incompréhensible à cause de cela.

MAMACHI, Thomas-Marie, dominicain, né 1713 dans l'île de Chios, vint de bonne heure en Italie et se distingua par son attachement au saint-siège et par sa connaissance des antiquités chrétiennes, f 1792. Son livre des origines et des antiq. chrétiennes est inachevé. Il a aussi écrit sur les coutumes des premiers chrétiens, 1753.

MAMAS, saint très estimé en Orient et en Occident, célébré par Grégoire de Naziance, Basile de Césarée, Walafried Strabon, mais dont on ne sait à peu près rien. Il doit être mort vers 274. La légende le fait naître dans une prison, d'une confesseuse, et sa vie est pleine de miracles et de souffrances courageusement supportées pour la foi.

MAMERT lo archev. de Vienne, Dauphiné, f le H mai 475. On admet généralement que c'est lui qui, à l'occasion d'un terrible incendie à Vienne, a institué les Rogations, processions pour demander à Dieu la tin d'un fléau ou pour le remercier de l'avoir détourné. Baronius et Bingham le contestent, mais en tout cas c'est lui qui en a généralisé l'usage en France, et le conc. d'Orléans 511 l'a sanctionné.

— 2o Claudien Mamert, son frère; v. Clau-dien.

MAMMJSA, v. Julia.

MAMMILLAIRES, secte d'anabaptistes hollandais, de Harlem, date inconnue. Un jeune homme avait mis la main sur le sein d'une jeune fille qu'il voulait épouser. Cet acte inconvenant fut blâmé par le Consistoire des anabaptistes, et le coupable fut excommunié. Ceux qui se prononcèrent pour l'indulgence furent appelés mammillaires. Une dispute semblable eut lieu à Venise 1743.

MANDATA de providendo, ordres de repourvue. Quand certains bénéfices devenaient vacants, les papes avaient le droit d'indiquer leur candidat préféré, et au besoin de le nommer d'office, par ordre, v. Menses episcopales.

MANDÉENS, v. Mendéens.

MANDEVILLE, Bernard (de), né 1670 à Dordrecht, d'une famille originaire de France, se fit médecin et se fixa à Londres, où il f 21 janv. 1733. Esprit paradoxal, il soutint les thèses les plus étranges. En 1709 il publia la Vierge démasquée, satire; en 1714 la Ruche bourdonnante, ou les Fripons devenus honnêtes gens, poème didactique de 550 vers, et en 1723 la suite ou le développement du précédent, sous le titre de: La Fable des abeilles, ou: Les vices privés font la fortune publique, dans lequel il attaque tous les gouvernements, préconise tous les vices, et cherche à prouver qu'un État qui ne se composerait que d'honnêtes gens et de bons chrétiens serait un État perdu. Il n'a aucune idée du bien et du devoir. Le dévouement et la vertu n'existent pas pour lui; le désintéressement n'est qu'un masque; l'intérêt et la vanité sont les seuls mobiles dont on puisse attendre quelque chose. Condamné par les tribunaux et par l'opinion, il essaya de se justifier en disant qu'il avait voulu plaisanter; il publia même en 1732 des Recherches sur l'honneur et sur l'utilité du Christianisme, mais personne ne s'y laissa prendre. La Fable a été trad. en fr. par Bertrand, Amsterdam 1740.

MANDRA (parc, étable), nom qu'on donnait quelquefois aux couvents du moyen âge et des temps primitifs, par allusion au mauvais état des huttes qu'habitaient les solitaires ainsi groupés.

MANÉS, Mani, ou Manichée, et MANICHÉENS. En même temps que les Perses recouvraient leur indépendance, vers le milieu du 3me siècle, leur religion se relevait aussi et Zo-roastre retrouvait ses partisans. Manès, qui avait été acheté comme esclave par une riche veuve de Ctésiphon, élevé par Térébinthe, puis affranchi, entreprenait de créer une religion de transition, ou de conciliation, en mêlant aux dogmes de Zoroastre un certain nombre de dogmes et de faits chrétiens. On possède sur cette tentative des sources occidentales, exploitées depuis longtemps, et des sources orientales plus récemment découvertes; elles s'accordent en général. Manès fut persecuté par les mages, à cause des éléments chrétiens de son système et s'enfuit en Chine, où il se lit de nombreux partisans. Il avait été banni par Sapor I dont il n'avait pu guérir le fils. A son retour sous Hormisdas. partisan de l'ancien culte, il fut vaincu dans une discussion publique avec un èvêque chrétien; il essaya de fuir encore, mais fut arrêté par ordre deBehram, écorché vif et sa chair donnée aux oiseaux, vers 277. Il admettait deux royaumes, ou principes éternels, la lumière et les ténèbres. La guerre ayant éclaté entre eux, chacun franchit ses limites, et ainsi la lumière fut mêlée aux ténèbres. De ce mélange Dieu créa l'Esprit vivant. Ainsi se forma le monde visible, afin que la lumière qui se trouvait emprisonnée dans les ténèbres en fût dégagée. Les démons enchaînés dans les étoiles s'opposaient à cette réalisation du monde actuel; mais l'âm* du monde, sans mélange avec la matière, résidant dans le soleil, le Christ, fils de la lumière éternelle, travaille pour l'accomplissement de ce but, aidé du Saint-Esprit qui réside dans Téther. Leur but est de dégager toujours plus l'âme souffrante, le Jésuspassibilis répandu dans le monde. Chaque homme a une âme lumineuse et une âme matérielle; il faut que la première remporte la victoire, par le même procédé de purification qui s'accomplit dans toute la nature, ob la lumière est la source de la vie, dans la végétation, etc. Le Jésus souffrant, apparente au Jésus céleste du soleil, a paru dans l'humanité avec l'apparence d'un corps, et il a été crucifié en apparence pour délivrer entièrement l'âme prisonnière. Les manichéens postérieurs ont enseigné que Manès, Bouddha, Zoroastre. Christ et le soleil ne sont qu'un même être. Selon eux les apôtres n'ont pas compris les enseignements du Christ, et leurs disciples k eut se sont encore plus trompés. Mais Christ qui avait prévu cette inintelligence de sa doctrine, y avait pourvu par avance en annonçant la venue du Paraclet, qui n'est autre que Manès. Ils rejetaient tout l'A. T. et presque tout le Nouveau: en revanche ils se servaient de différents ouvrages de Manès; la Bible, ou le Livre des mystères; le Livre des Chefs, ou têtes, etc. Ils distinguaient dans leur église les catéchumènes, auxquels on distribuait des indulgences, et qui étaient moins sévèrement tenus, et les Parfaits, qui s'abstenaient du mariage, des viandes et autant que possible de tout travail manuel, abstinences qui étaient figurées par trois sceaux, ceux de la bouche, des mains et de la poitrine. Manès avait établi dans l'Église un prince, 13 apôtres et 72 évêques ou disciples, sous la direction desquels fonctionnaient des anciens, des diacres et des évangélistes. Ils jeûnaient le dimanche. Ils avaient aussi un jour solennel en l'honneur de la mort de Manès. Cette secte se répandit rapidement dans l'empire et trouva des sectateurs parmi les hommes les plus cultivés; Augustin en fut membre pendant 7 ans. Elle avait certains points communs avec le pnosticisme, mais modifiés sous l'influence des idées parses et boudhistes. Un édit de Dioclé-tien les condamna, ainsi que plusieurs conciles, mais ils se maintinrent au nord de l'Afrique jusqu'à l'invasion des Vandales. Justinien les punissait de mort. Cependant on en trouve encore au 8me siècle. L'idée principale du manichéisme, celle de l'éternité du mal et de son identité avec la matière, a reparu sous diverses formes au moyen âge, et notamment chez quelques sectes religieuses qui poursuivaient avec ardeur leur santification, et qui voyaient dans la chair le principal obstacle: les cathares, les bogomiles, les pauliciens, mais on lésa trop légèrement accusées de manichéisme, quoiqu'elles y aient peut-être donné lieu par des paroles imprudentes,.v. Lombard. Les Pauliciens.

MANHARTIENS. ou Manhartistes, secte ou parti catholique qui se montra dans le Tvrol 1814*4826. Un chapelain nommé Haagleitner, de Hopfgarten, ayant refusé de se soumettre au coadjuteur de Salzburg nommé par Napoléon, et ayant amené de l'agitation dans le pays, fut mis en prison par les Français. Il réussit à s'échapper, et après la paix il se fit un parti qui le regarda comme son seul véritable prêtre. Il fut soutenu dans ses prétentions par le land-mann Sébastien Manzl, de Westendorf, qui s'appelait aussi Manhart, du nom d'un de ses domaines. C'est sur cette propriété que l'on se réunit; Manhart et sa femme y prêchèrent eux-mêmes, et naturellement la congrégation fut baptisée de leur nom. En 1823 ils finirent par s'adresser au pape, qui les renvoya au prince-archevêque Gruber, et ils se soumirent. MAN1, Manichéens, v. Manès. MANIPULE, petite étolequi se porte au bras gauche, de la même couleur que les vêtements de la messe, et ornée de petites croix au centre et à ses extrémités. On la bénit avant de s'en servir.

MANSFELD, Ernest (de), fils naturel du comte Pierre-Ernest, gouverneur du Luxembourg, et d'une dame hollandaise. Né 1585, il fut élevé dans le catholicisme par son parrain, Ernest d'Autriche. Il servit d'abord l'Autriche et ses services lui valurent d'être légitimé par Rodolphe II, mais comme malgré cela on ne voulut pas lui restituer les biens de son père, qui étaient en Hollande, il devint l'ennemi acharné de l'Autriche, passa à la Réforme 1610, offrit son aide aux révoltés de Bohême qui le nommèrent leur général 1618, se battit pour l'électeur Frédéric V dans le Palatinat et sur le Rhin, défit les Espagnols à Fleurus, et réussit avec une armée nouvelle, et malgré une défaite que lui fit éprouver Wallenstein, à pénétrer jusqu'au centre de la Hongrie, 1625. MaisBeth-len Gabor ne lui ayant pas amené les troupes fraîches qu'il lui avait promises, il licencia son armée et se disposait à se rendre en Angleterre quand il f à Zara, presque subitement, 20 nov. 1626. Sans lui l'Autriche aurait pu réaliser son plan de soumettre l'Allemagne et d'écraser le protestantisme.

MANSI, Jean-Dominique, né à Lucques 16 févr. 1692, entra dans l'ordre des clercs réguliers de la Mère de Dieu, fondé 1593 par Léonardi, et enseigna la théol. à Naples. Rappelé à Lucques par son archev., il y fonda une académie pour la littérature et l'hist. ecclésiastique, se fit une réputation européenne par ses écrits et fut nommé archev. de Lucques. f 27 sept. 1769. Il a traduit en latin les Comment, et le Dictionn. de Calmet, publié les Annales de Baroniuscon-tinuées par Raynaldi, et fait une collection des saints conciles avec un supplément au travail de Colet.

MANSIONATICUM, indemnité au moyen de laquelle les prêtres pouvaient se racheter de l'obligation de nourrir les évêques et leur suite lors des visites d'églises. Innocent IV, au conc. de Lyon 1274, avait interdit ce rachat, mais après lui Boniface VIII et le conc. de Trente, sans le recommander, l'ont laissé facultatif.

MANSUS ecclesiœ, portion de terrain donné à une église comme sa dot, attenant à la fondation, et à ce titre dispensée de toute charge et impôt. L'étymologie du mot est incertaine; comme dans le français du midi, mas, il signifiait peut-être habitation, demeure. Chez les Francs les prestations militaires étaient calculées d'après les manses, et l'église elle-même n'était dispensée de cet impôt que pour sa dot, mansus inte-ger, et pour les biens-fonds que les rois en avaient expressément dispensés.

MANTOUE, la patrie de Virgile, une des places les plus fortes de l'ancien royaume lombard-vénitien. Il s'y tint en 1459 un congrès convoqué par Pie II, où les princes chrétiens furent invités à se croiser pour délivrer Constantinople qui venait d'être conquise par les Turcs. Les princes promirent peu et tinrent encore moins;

la mode n'était plus aux croisades. Pie profita de la réunion pour condamner les appels qu'on faisait souvent de l'autorité du pape à celle d'un concile. Paul III eut aussi l'idée de convoquer en 1537 à Mantoue un concile auquel seraient invités les princes protestants, dans des conditions que Paul Vergère avait préalablement réglées avec eux. Mais les circonstances, l'époque de la réunion et le mode de l'invitation prouvaient que Paul III ne se souciait que médiocrement de réussir dans ses démarches, et le congrès n'eut pas lieu, les princes ayant refusé les lettres de convocation dans la forme où elles leur étaient adressées. A toute éventualité cependant Luther avait préparé les Articles de Smalcalde, et les Suisses la seconde confession de Bâle.

MANUEL 1° Comnène, lils de Jean, emp. d'Orient 1143-1180. Distingué par son courage, non moins que par sa perfidie, il monta sur le trône au détriment de son fr. Isaac, et fut constamment en guerre avec la Hongrie, les Turcs, les Serbes, les Normands, les Vénitiens, presque toujours vainqueur, sans cependant avoir assuré rien de stable à son royaume. La seconde croisade échoua misérablement, grâce à lui, parce qu'à l'aide de faux renseignements il livra l'armée aux Sarrasins et à la famine. Adrien IV et Alexandre UI ouvrirent avec lui des négociations pour la réunion des Égl. d'orient et d'occident, mais elles échouèrent, parce qu'il exigeait pour prix de la réconciliation la couronne d'occident. II favorisa les moines, mais chercha à régulariser leur vie. Comme beaucoup d'empereurs precs il se plaisait aux controverses théologiques; il rédigea même une confession de foi, qu'il voulut imposer aux évêques sous peine de destitution, d'excommunication et de mort. Vaincu en 1175 dans les déniés de Myriocéphales, Asie Mineure, il vit son royaume à deux doigts de sa perte, mais il réussit à se relever par une victoire sur Azeddin, près du Méandre, f 1180.

2° Nicolas Manuel, appelé Deutsch, né 1484 à Berne, peintre et poète populaire, satirique et controversiste, qui a beaucoup travaillé et avec succès pour la Réforme. On a de lui: Complainte des idoles (contre les iconoclastes), Épigramme sur le Dr Eck, Dialogues sur la maladie et la mort de la messe, le Testament de la messe, le Marchand d'indulgences, une espèce de drame; le Croquemort, un autre drame: Parallèle entre Jésus sur un âne et le pape à cheval. Il avait fait de la peinture à Colmar sous Martin Schœn, et à Venise sous le Titien qui l'appelle Emmanuello Tedeschi; son chef-d'œuvre, la Décollation de Jean-Baptiste est à Bâle; son portrait, par lui-même, à Berne. Marié en nov. 1509 avec Catherine Frisching il en eut six enfants. Probablement à cause d'une gêne momentanée, il se mit au service de François et assista à la prise de Novare et au désastre de la Bicoque 1522. Dès 1510 il avait été nommé membre du Conseil souverain, en 1323 il fut nommé bailli deCerlier, et il y passa 5 de ses plus belles années. Il s'était attaché de cœur à la cause de la Réformation et il la servit avec autant de zèle que de tact et de modération. Il fut l'ordonnateur de la célèbre Dispute de Berne, il négocia avec Strasbourg et avec Philippe de Hesse dans l'intérêt de la paix de son pays; il contribua à apaiser la révolte de l'Oberland. Élu membre de l'Exécutif et banneret des tanneurs, il fut chargé de plusieurs missions à l'intérieur et au dehors; il se rend encore à la diète de Bade, puis à Bâle, toujours calme et prudent, et après avoir vu la Réforme solidement établie dans son canton et pure d'alliage mondain, épuisé de fatigue, il f à 46 ans, 30 avril 1530.

MAPHRIANAT. Après le patriarcat d'Antio-che, c'est la plus haute dignité épiscopale de régi, jacobite monophysite syriaque; sa résidence est à Takrit sur le Tigre, et sa juridiction s'étend sur la Chaldée. la Syrie et la Mésopotamie.

MAPPE, drap d'autel. Sur chaque autel où la messe doit être dite, il y a 2 ou 3 draps de lin blanc; celui de dessus est plus lin et descend jusqu'à terre; il ne sert qu'après avoir été consacré. Après la messe on étend sur ces drap> une mappe ou couverture pour les protéger contre la poussière.

MARANES, ou Marano*, nom donné en Espagne aux juifs, et probablement aussi aux musulmans qui, ayant été convertis par force, conservaient encore dans leur cœur, ou étaient suspects de conserver un secret attachement pour leur ancien culte. La famille de Maïmoni-des était dans ce cas et ne manquait pas de bonnes raisons pour justifier une conduite équi voque imposée par la violence. Les maranes et leurs descendants n'inspiraient pas grande con fiance; ils pouvaient devenir prêtres, mai> montaient difficilement en grade. Tolet cependant fut nommé cardinal, mais on n'eut pas a s'en applaudir; la vieille indépendance de U race se laissa toujours apercevoir. Les jésuites ne les recevaient qu'avec peine et sous toutes réserves.

MARANUS, Prudence, savant bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, né 14 oct. 1683 à Sézanne ou à Troyes, f 2 avril 1762. On lui doit une bonne édition de Cyrille de Jérusalem, grec et lat. 1720, une de Cyprien 1726, une de Justin Martyr 1742, et un Traité (latin) sur U divinité de J.-C. d'après la Bible et la tradition 1746. Quoiqu'il n'ait pas pris une part active aux controverses sur la bnlle Unigenitus, il eut beaucoup à souffrir comme Appelant.

MARBACH, Jean, né à Lindau 24 août 1521, étudia à Strasbourg et à Wittenberg, occupa plusieurs postes, fut entre autres pasteur de l'égl. de Saint-Nicolas à Strasbourg, et reçut diverses missions. Appelé en 1553 à succéder à Hedion comme surintendant, président du consist. et prof, de théol., il se donna pour tâche d'implanter à Strasbourg le luthéranisme le plus pur et de bannir de la'ville toute contradiction. Éloquent, mais peu instruit, zélé mais imprudent, pointilleux surtout, il fit plus de mal que de bien par son intolérance. En 1554 il demanda au conseil de la ville l'expulsion des catholiques, contrairement au traité de paix d'Augsbourg, et s'attira une humiliante réponse. En 1555 il réussit à faire partir le pasteur de l'égl. réf. française, Garnier, et en 1557 l'égl. elle-même fut fermée. En 1556 l'électeur palatin Othon-Henri lui confia la réorganisation des égl. du Palatinat dans cet esprit de luthéranisme absolu; il voulut même lui en remettre la surintendance, mais il la refusa. Ses dernières années furent plus calmes et sans éclat, f 17 mars 1581. B avait décidé en 1577 le clergé stras-bourgeois à adhérer à la Formule de concorde. Ses dix ou douze écrits ont peu d'importance. — Son fils Érasme, né 1548, fut prof, de théol. à Strasbourg, f 1593. Le second, Philippe, né 1550, f 28 sept. 1611, fut co-recteur à Grâtz, prof, de théol. à Heidelberg, recteur du gymnase de Klagenfurt, et enfin prof, à Strasbourg en remplacement de son frère. Érasme avait publié un Comment, sur le Pentateuque; Phi-lippe, quelques discours, et des dissertations sur la Cène, etc.

MARBOURG, résidence des landgraves de Hesse sur la Lahn, célèbre par sa jolie église de Sainte-Élisabeth, chef-d'œuvre de l'art gothique allemand. Philippe-le-Magnanimey fonda30 mai 1527 la première univ. protestante, qui fut reconnue en 1541 par Charles-Quint: il la dota avec les biens des couvents sécularisés, et elle acquit bientôt une grande réputation. Un moment fusionnée avec l'univ. de Giessen, elle se reconstitua en 1653 après le traité de Westpha-lie. Elle représentait d'abord la tendance philippine, mais lorsque Hunnius, en enseignant l'ubiquité et la formule de concorde, eut amené le schisme entre les deux Hesse et que Giessen eut été fondée avec un caractère strictement lu thérieu, Marbourg devint comme un centre de la théol. réformée, d'autant plus que le landgrave Maurice penchait dans ce sens et se fit représenter au synode de Dordrecht. Cependant l'univ. eut toujours une tendance modérée*. Parmi ses prof, les plus distingués on remarque Hypérius, Hunnius, Cruciger, le philos. Wolf, puis plus récemment Daub, Stîlling, Richter, Ranke, etc. — On appelle Bible de Marbourg une édition de la trad. de Luther, faite par Horch et Scheffer 1712, avec des introductions et des notes dont plusieurs sont empruntées aux explications mystiques de Mad. Guyon. Cette version était très estimée des mystiques, jusqu'au moment où elle fut remplacée par la Bible de Berlebourg.

Le Colloque de Marbourg fut nécessité par l'impossibilité où les protestants se trouvaient de constituer une unité politique en face du mauvais vouloir de l'emp. et des États catholiques; et comme ils ne pouvaient pas même constituer une unité religieuse, aussi longtemps que les théologiens de Wittenberg déclaraient contraire à leur conscience toute communion avec les Suisses, Philippe de Hesse résolut de travailler à un rapprochement. Luther refusa longtemps de s'y rendre, et il ne s'y décida que parce que Mélanchthon, à Spire 1529, l'avait promis à Philippe de Hesse. Zwingle s'y rendit en dépit des craintes exprimées par le conseil de Zurich. Du côté des luthériens se trouvaient Luther, Jonas, Mélanchthon, Osiander, Agricola et Brenz; du côté des Suisses réformés, Zwingle, OEcolampade, Bucer et Hedion. La conférence commença le 1er oct. 1529, après le service du matin, par deux discussions séparées, l'une entre Luther et OEcolampade, l'autre entre Zwingle et Mélanchthon; l'accord fut complet sur tous les points, sauf celui de la Cène. Le 2 oct. la discussion roula exclusivement sur le point en litige, et Luther, pour se prémunir contre toute faiblesse, écrivit à la craie en grosses lettres sur la table: Hoc est corpus meumy confondant l'Écriture avec son interprétation et se refusant à tout examen, sous prétexte qu'il faut se soumettre à la Parole de Dieu, « même si elle nous ordonnait de manger des pommes sauvages. > On discuta longtemps sur Jean 6, sur la question de savoir si le corps de Christ a une forme et des dimensions, et sur la différence qu'il peut y avoir, comme bénédiction, entre manger le corps de Christ matériellement, avec la bouche (manducatio oralis), et le manger spirituellement. Cette discussion sans issue fut reprise le lendemain, dimanche 3 oct., et quand elle fut close sans avoir abouti, le chancelier Feige exhorta les théologiens à l'union. Zwingle tendit la main à Luther, mais celui-ci la repoussa en lui disant: « Vous avez un autre esprit que nous. » Néanmoins, à la demande du landgrave, on collationna le 4 oct. les articles sur lesquels l'entente s'était faite, et ceux sur lesquels on différait. Les 14 premiers comprenaient les doctrines fondamentales du christianisme. Trinité, christologie, péché, ainsi que celles qui caractérisaient la Réformation, la justification par la foi, la confession des péchés, le baptême des enfants- Le I5<ne% Sor la Cène, se bornait à repousser la doctrine catholique, insistait sur l'usage spirituel du sacrement et promettait l'amour fraternel et l'union, dans la mesure où la conscience de chacun le permettrait. De ces articles, qui sont la première Confession de foi protestante et qui ont servi de base à la Conf. d'Augsboarg, Luther a fait les articles de Schwabach, mais en les accentuant davantage dans le sens luthérien. Si le colloque de Marbourg n'atteignit pas complètement son but, il eut cependant pour effet de réveiller chez tous la conscience d'une unité évangélique supérieure; il facilita la Concorde de Wittenberg, et il assura aux réformés la même protection qui fut accordée aux adhérents de la Conf. d'Augs-bourg.

C'est aussi à Marbourg, en mai 1540, que fut consacrée la bigamie de l'électeur. Luther et Mélanchthon n'allèrent pas jusqu'à l'approuver; ils constatèrent seulement qu'il n'y avait pas dans le N. T. un passage qui l'interdit d'une manière formelle. Mélanchthon y tomba gravement malade, du regret, dit-on, d'avoir montré tant de faiblesse.

MARC 1° l'évangêliste. v. Dict. de la Bible.

2° pape presque inconnu, Romain, successeur de Sylvestre 336. De lui date peut-être l'usage, dans le service de la messe, de lire après l'Évangile le symbole de Nicée. On lui attribue à tort une lettre à Athanase, dans laquelle il est fait mention de 70 canons qui auraient été votés à Nicée.

3° Marc-Aurèle, ou Aurèle-Antonin, dit le philosophe, né 121 à Rome, d'une famille espagnole distinguée, préfet de Rome sous Adrien, adopté par Antonin-le-Pieux, marié avec sa tille Faustine. Dès l'âge de 12 ans il adopta le costume et les allures des stoïciens, et il posa toute sa vie pour un disciple de leurs doctrines. Il se distingua par une conduite honnête et régulière, et s'appliqua à introduire d'utiles réformes dans l'administration et dans le gouvernement. 11 a même composé un recueil en 12 livres, de Réflexions morales (en grec), sous le titre: A moi-même, où il dit d'excellentes choses sur la vertu. Mais il n'était pas capable de comprendre le christianisme qui, par son origine et par l'enthousiasme qu'il excitait chez ses disciples, faisait un si grand contraste avec sa philosophie. Il ne paraît même pas qu'il se soit donné beaucoup de peine pour chercher à le connaître, et il est une preuve frappante de l'insuffisance de la philos, pour inspirer les vrais principes de la tolérance et du respect des convictions. L'hist. de son règne présente une suite presque ininterrompue de persécutions; il rivalisa avec Néron et Domitien, et il eut pour fils Commode. Il débuta par un édit portant la peine de mort contre quiconque prêcherait une nouvelle religion, de manière à troubler la paix des individus ou celle de l'État. Son règne 161-180 compte entre autres martyrs célèbres Justin 166, Polycarpe 169, et les martyrs de Lyon 177, peut-être Félicité et ses 7 fils. S'il n'est pas directement responsable de tous les détails dé ces persécutions, c'est cependant sous son nom, par son ordre et sous son inspiration qu'elles ont eu lieu. Justin eut le courage de loi présenter sa Seconde Apologie en faveur des chrétiens: il l'expia par la mort. D'autres défenseurs prirent sa place, Athénagore, Méliton de Sardes, Tatien, etc. Marc-Aurèle, qui encourageait la délation, méprisait l'humilité et ne voyait dans l'héroïsme et la persévérance des chrétiens qu'une folle obstination et un fanatisme insensé. Il était en même temps superstitieux. Pendant la guerre aux Marcoraans, il offrit des sacrifices aux dieux et fit faire des prières par des prêtres appartenant à toutes sortes de religions. Surpris par le manque d'eau et par un soleil brûlant, la veille d'une bataille, la 12me légion qui comptait beaucoup de chrétiens se mit à genoux, et bientôt un orage qui justifiait son titre de légion fulminante vint désaltérer les soldats. Les païens attribuèrent cette délivrance aux enchanteurs d'Égypte, les chrétiens à Dieu, Marc-Aurèle au Jupiter des pluies; mais peut-être que dans sa conscience il fut plus juste envers les chrétiens. Cela ne l'empêcha pas, trois ans plus tard, d'ordonner de nouvelles persécutions, f 180 usé par l'âge, la fatigue et la maladie.

4o ermite, contemporain de Chrysostome, vivait dans le désert scétique, et se distingua par sa science, sa piété et ses miracles, si bien qu'il a passé dans la liste des saints de l'Égl. grecque et d'une partie de l'Égl. latine, f vers 410, plus que centenaire. On a sous son nom, et vraisemblablement authentiques, 9 traités de morale, sur la valeur et la signification de la vie ascétique, du baptême, du péché, de la grâce, etc. Ils jettent du jour sur la mystique des moines d'Égypte. En dogmatique ils inclinent vers le monophysitisme et reproduisent la doctrine des pères grecs sur le baptême, le péché originel et la liberté. Comme ils insistent sur la justification par la foi, Rome les a mis à l'index. Bel-larmin croyait y reconnaître des interpolation* d'un hérétique, v. Patrol. grecque, de Migne.

5o autre ermite, mentionné par Nicéphore comme disciple de Chrysostome et auteur d'écrits ascétiques.

6o ermite anglais, auquel on attribue, mais sans fondement suffisant, une Historia Brtto-rum, qui, selon d'autres, serait l'œuvre de Neo-nius.

7°, 80 et 9*. On connaît sous ce nom trois gnostiques devenus chefs de secte; un disciple de Valentin, q. v.; un disciple de Marcion, le chef des marcosiens; il enseignait que Dieu avait donné à l'homme du démiurge le pneuma, l'esprit, lequel s'était perdu par le péché et était reconquis par la rédemption. Comme il distinguait entre les pneumatiques et les psychiques, il admettait un double baptême, en Jésus le messie des psychiques, et en Christ. C'est dans cette secte qu'on constate pour la première fois l'usage de l'extrême onction. Le 3e Marc gnostique doit être né à Memphis; on le trouve en Espagne vers 350 comme le père du priscillia-nisme.

10o Marc-Eugène, archev. d'Éphèse, un des délégués de l'Égl. grecque au conc. de Ferrare-Florence 1438-1439, et le chef du parti hostile à la réunion des deux Églises. C'est lui qui à la fin des négociations déclara les latins non seulement schismatiques, mais hérétiques, et dit que les grecs aimeraient mieux mourir que latiniser, c.-à-d. s'allier aux latins. Seul il refuse de signer le décret d'union, sans se laisser effrayer par la crainte d'une condamnation papale. Après son retour il continua la lutte et réussit à empêcher le décret d'entrer en vigueur, t1447.

MARCA, Pierre (de), né 24 janv. 1594 à Gan, Béarn, élevé à Auch au collège des jésuites; il fit son droit à Toulouse. En 1615 il fut nommé membre du Conseil souverain du Béarn, lui seul catholique, et fut nommé par Louis XIII en 1621, président du parlement de Pau, en récompense de ses efforts pour réintroduire le catholicisme dans la province. Conseiller d'État à Paris en 1639, il écrivit en 1641 à la demande du roi un livre De Cancordia, etc., de l'Alliance du sacerdoce et de l'empire, ou Des libertés de l'Égl. gallicane, qui fut mis à l'index à Rome. Après la mort de si femme 1632 il était entré dans les ordres; en 1643 le roi lui donna l'évêché de Conserans, mais le pape refusa de le confirmer, à cause de son livre, et il ne put prendre possession de son diocèse qu'en 1650. après avoir signé une rétractation en 1647 pendant une grave maladie qu'il fit à Barcelone et qui lui ôtait la conscience de ses actes. Le roi qui l'employait souvent pour des négociations politiques, le promut en 1652 à l'archevêché de Toulouse. Mais sa confirmation traîna, parce qu'on le soupçonnait de jansénisme; il se lava de ce reproche en condamnant le jansénisme dans l'assemblée du clergé de France de 1656. + 1662, peu de mois après avoir été appelé à l'archevêché de Paris. Son compatriote Baluze a écrit sa vie et publié une édition complète de sa Concordia, qui continue d'être à l'index.

MARCEL lo pape 308, succéda à Marcellin après une vacance de deux ans et sept mois. On raconte que Maxence, pour le punir de ce qu'il refusait de sacrifier aux dieux, lui imposa plusieurs fois les fonctions de valet d'écurie. Il réussit à s'évader et se cacha dans la maison d'une veuve, qu'il fit plus tard, quand il eut recouvré sa liberté, transformer en église. Devenu pape il partagea Rome en 20 paroisses avec leurs prêtres et leur administration indépendante. Il fut banni par Maxence sous prétexte qu'il causait des troubles par sa sévérité envers les tombés. On dit qu'il souffrit le martyre, 16 janv. 309.

2<> Marcel II, 1555, Cervin, cardinal dé Sainte-Croix, ne changea pas de nom en devenant pape. Homme grave et sévère, d'une âme ferme et élevée, il avait un tel désir de réformer l'Église, en commençant par la cour de Rome elle-même, qu'il mourut d'apoplexie 22 jours après son élévation. Il avait déclaré, en frappant du poing sur une table (Adrien avait déjà dit quelque chose de semblable), que personne n'était plus misérable qu'un pape romain, et qu'il ne pouvait pas se persuader que ceux qui sont revêtus de cette haute dignité pussent être sauvés.

3o Marcel d'Ancyre, Galatie, adversaire d'A-rius au conc. de Nicée, écrivit contre lui, mais souleva les protestations des orientaux. Il ne pouvait admettre une distinction hypostatique du Logos, et il rapportait à Jésus seul l'expression de fils de Dieu, qu'Athanase regardait comme équivalant à celle de Logos. Il n'y a pas un fils éternel de Dieu, mais il y a un Logos éternel, un avec Dieu, qui n'est devenu son fils que par l'incarnation. Une fois la rédemption accomplie, la qualité de fils disparaît et le Logos rentre dans l'unité de Dieu. On l'accusa pour cela de sabellianisme et de samosaténisine. Les ariens, aux synodes de Jérusalem et de Constantinople, le destituèrent et l'excommunièrent ainsi qu'Athanase. Après la mort de Constantin il revint; puis, banni de nouveau, il s'adressa à Jules 1er de Rome, qu'il réussit à gagner à sa cause et qui le déclara orthodoxe. Plusieurs conciles consécutifs se prononcèrent les uns pour, les autres contre; enfin le conc. de Sardique 347 le libéra en même temps qu'Athanase. Mais à l'instigation de Basile, Atha-nase se sépara de Marcel, et celui-ci donna sa démission, mais en publiant une confession de foi pour laquelle il sollicitait l'approbation des Égyptiens, f vers 373.

4° Martyr, à Chalon-sur-Saône, vers 140. Le préfet Priscus le voulut contraindre à prendre part à un banquet païen, mais Marcel refusa et se moqua des faux dieux. Le préfet le fit enterrer jusqu'à mi-corps et le laissa mourir dans cette position.

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5° Capitaine de la légion trajane à Tingis en Mauritanie; sur son refus de participer à des sacrifices il fut décapité, 20 oct. 280. Sa constance frappa Cassien, greffier du tribunal militaire. qui se convertit à la foi chrétienne et fut à son tour mis à mort.

6° Fils d'un païen et d'une chrétienne de Rome; il s'enfuit à Argenton pendant la persécution d'Aurélien. Ses miracles attirèrent l'attention; il confessa sa foi; on le mit sur un gril pour le brûler, mais comme la mort ne venait pas, on finit par lui trancher la tête. 29 juin.

7° Év. de Die au 5«»e siècle: il était d'Avignon. Son élection fut décidée par une colombe qui vint se poser sur lui. Arrêté par les ariens, il f en prison le 9 avril.

8° Év. d'Assamée, Syrie, vers 380. Comme il avait fait démolir un temple d'idoles, les païens se jetèrent sur lui et le traînèrent à l'échafaud.

9<> Moine qui vivait vers 450. Après la mort de ses parents qui étaient riches, il distribua ses biens aux pauvres et se retira dans un couvent d'acémètes à Constantinople; l'archimandrite Alexandre étant mort, il s'enfuit pour ne pas être nommé à sa place; il réussit à faire élire Jean, mais celui-ci, jaloux de lui, l'envoya aux écuries pour soigner les ânes du couvent. Après la mort de Jean il ne put se soustraire à la dignité qu'on lui imposa, et il procura à son couvent honneur et prospérité, f vers 485.

10 Év. de Paris, célèbre par sa pitié; nommé vers 400 f vers 440; enterré dans un petit village des environs, qui est auj. le faubourg Saint-Marcel.

MARCELLIN, pape 296-304. Sous son pontificat ont lieu les persécutions de Dioclétien. La plupart des docteurs de l'Église racontent qu'il renonça solennellement à la religion chrétienne et qu'il sacrifia aux dieux de Rome, à Vesta et à Isis (Platina, De vitis ac gestis summ. Pont. p. 71). Il se serait repenti plus tard de cet acte de faiblesse, et n'en est pas moins ho* noré comme saint et martyr. On a démontré la fausseté de l'histoire qu'un prétendu concile de Sinuesse, Campanie, se serait refusé à prononcer sur lui après sa chute, sous prétexte qu'un év. de Rome n'a pas de juge au-dessus de lui dans ce monde. — Après lui, interrègne de 4 ans à cause des persécutions. Le conc. d'El-vire 305, essaie d'introduire le célibat forcé des prêtres.

MARCELLINE, femme qui arriva à Rome vers 160 et qui chercha à y introduire le système gnostique de Carpocrate. Ses adhérents, mentionnés par Celse sous le nom de marcellinistes. ne doivent pas être confondus avec les marcel-liens, disciples de Marcel d'Ancyre.

MARCION, Marcionites. Né païen, mais fils d'un homme qui se convertit plus tard et qui devint év. de Sinope, Paphlagonie, Marcion, converti lui aussi et ayant embrassé la foi chrétienne avec enthousiasme, vint à Rome vers 143 ou 144 et y vécut dans un grand renoncement qui lui valut l'estime de tous. Le monde exterieur et l'hist. même du peuple de Dieu lui paraissaient morts; il ne pouvait reconnaître h* vrai Dieu dans l'histoire des Hébreux; il n'y voyait que Satan, ou un dieu diminué, dénaturé; la nature aussi lui apparaissait comme frappée d'anathème. Il avait attaqué d'abord les doctrines judaïques qui régnaient dans l'Asie et à la suite d'une faute grave il s'était fait ex -communier à Sinope. A Rome il appliqua à la nature et à l'A. T. le passage Matt. 9, 17. sur les vieilles outres et le vin nouveau. Rejeté par l'Église, il fut amené à se faire un système à part, dont l'idée principale était que le christianisme avait paru dans le monde comme une révélation indépendante de tout ce qui avait précédé, comme quelque chose d'entièrement nouveau. Il rencontra Cerdon dont le système servit à compléter le sien. Différent des autres gnostiques qui prétendaientiunover, il croyait que ses doctrines étaient la doctrine primitive de l'Église, et qu'elles appartenaient à tous, bien loin d'être le privilège des sages ou des parfaits. Il ne cessa de voyager et de combattre pour propager ses idées: haine à la nature, haine à l'histoire, amour de Christ en Dieu. Il appelait ses disciples ses compagnons de haine et de souffrance. Il ne mettait pas la connaissance, la gnôsi*. au-dessus de la foi. Son système était essentiellement moral; il distinguait trois principes: Le Dieu bon, qui est celui du N. T.; le Dieu juste ou démiurge, qui est celui de l'Ancien; et la matière qui est mauvaise, le monde qui est le royaume du démiurge, du Dieu légal. L'homme n'aimait pas le démiurge à cause de sa justice, et Christ est venu pour l'en délivrer. Celui qui aime le Dieu bon et qui vit dans la sainteté, sera éternellement heureux. Voilà à quel mélange de faux et de vrai l'imagination peut en venir, quand elle abandonne le terrain biblique. Tertullien dit que Marcion reconnut ses erreurs et que, sur sa demande, il fut réin -tégré dans la communion de l'Eglise, f vers 170. Marcion est un des premiers qui aient eu l'idée de faire une collection complète des livres apo>-toliques; plusieurs de ces collections existaient sans doute déjà; elles s'étaient formées peu à peu, mais il voulut en faire un recueil authentique, une récension critique et savante. Mal -heureusement pour son travail, il avoue lui-même qu'il s'est laissé guider dans ses recherches par des considérations dogmatiques, et cela suffit pour lui enlever une partie de sa valeur. Il n'admettait que les écrits purs de tout alliage judéo-chrétien et ceux qui pouvaient donner quelque appui à son système; même dans ces derniers il supprimait les passages qui ne concordaient pas avec sa doctrine. Il n'a donc conservé que l'Évangile de Luc, tronqué, et dix Épîtres de Paul dans l'ordre suivant: Galates, 1 et 2 Corinthiens, Romains, 1 et 2 Thessaloni-ciens, Laodicéens (Ephésiens),Colossiens, Phi-lémon.et Philippiens. Au point de vue critique ce catalogue a cependant une certaine signification, car outre le témoignage indirect qu'il rend aux autres écrits, en ne les repoussant que par rapport à leur contenu, il renferme des données critiques étrangères à toute préoccupation de doctrine, des variantes confirmées par Epiphane et Tertullien, et une succession des epîtres, qui prouve que ce travail a été fait sérieusement. Plusieurs des disciples de Marcion, entre autres Marc 1° et Lucain, ont dénaturé son système en l'exagérant.

MARCK (comtes et comté De LA), ancien État de l'empire d'Allemagne, dans le cercle de Westphalie, appartenant depuis le 14me siècle aux duchés de Juliers, Clèves et Berg, et tombé en partie depuis 1609 dans la possession de la maison de Brandebourg. Il appartient auj. à la Prusse, et relève ecclésiastiquement du diocèse de Paderborn. Un des princes de La Marck, Evrard III, ayant épousé en 1410 Marie de Braquemont, sœur de Louis, seigneur de Sedan, acheta cette seigneurerie et la fit ériger en comté. Les de La Marck furent dès lors, et pendant près de 2 siècles, les souveraius de cette principauté. Evrard III f vers 1448. Son fils Jean fit achever le château et entoura la ville de murailles 1454; il eut 6 fils, dont Robert I«r, et Guillaume, baron de Lumain, le Sanglier des Ardennes. En 1484 les La Marck obtiennent le château et le duché de Bouillon. Jean f 1469; Robert I*r lui succède; il f 1489, laissant 2 fils, Robert II, né vers 1460, prince de Sedan, Rau-court, Jametz et Bouillon, et Évrard, cardiual-archev. de Liège, év. de Chartres, archev. de Valence, f 1538. Robert II, caractère inquiet, eut une vie agitée; il prit parti pour Charles-Quint contre François I«r, mais l'empereur n'ayant pas tenu ses promesses, il lui envoya un cartel à Worms; ses États furent ravagés; t 1536. Vie par Brantôme. Son fils Robert III, maréchal deFleuranges, dit T Aventureux, vaincu à Pavie et prisonnier à Madrid, très aimé de François Ier, lui succéda, mais f 1537 à Long-jumeau, avant d'avoir pris possession de son gouvernement. Sous Robert IV, Sedan fut érigé en souveraineté et ses frontières s'étendirent, grâce à sa femme Françoise de Brézé, fille de Diane de Poitiers. Fait prisonnier à Hesdin par Emmanuel-Philibert 1553, il languit 3 ans et f 1556 au moment où il venait d'être racheté. La

Réforme s'introduisit à Sedan sous son fils Henri-Robert et sa femme Françoise de Bourbon- Montpensier. Son fils aîné Guillaume-Robert, né 1562, lui succéda à l'âge de 11 ans. sous la tutelle éclairée de sa mère; devenu ma jeur et menacé par la Ligue, il prit parti pour le roi de Navarre; il était très estimé de La Noue. Vaincu par les Lorrains, il vint mourir à Genève, janv. 1588, peu de temps après sa mère et son fr. Jean. Charlotte sa sœur et son héritière, défend avec autant de succès que d'énergie sa principauté contre des ennemis de tous genres. Elle épouse le 11 oct. 1591 Henri de La Tour, vicomte de Turenne et f en couches, ainsi que son enfant, juin 1594; son mari épouse bientôt après Élisabeth de Nassau, qui sera la mère de Turenne. Les héritiers naturels de Charlotte, et désignés par elle, sont ses oncles de La Marck et Montpensier, mais La Tour, duc de Bouillon, est en possession, et protégé par Henri IV il n'entend pas se dessaisir du pouvoir. Il traite avec le duc de Montpensier, moyennant la cession de Jametz, et avec le comte Charles-Robert de La Marck pour uno somme d'argent, et ceux-ci, ne pouvant en appeler ni au droit, ni aux armes, sont obligés de se contenter de ce qu'on leur offre. Dès ce jour les La Marck ne sont plus princes de Sedan, et c'est en vain que Charles essaiera plus tard, en 1598. et sou fils Henri-Robert sous Louis XIV, de protester contre l'usurpation du duc de Bouillon et de revendiquer leur héritage; l'acte de cession existe et leur cause est perdue. V. Peyran, Hist. de la princip. de Sedan, 1826.

MARCOMANS, peuplade germanique déjà mentionnée par César; elle habitait sur les deux rives de l'Elbe, dans les monts Hercyniens, et finit par s'étendre sur la Bohême. Ils cherchèrent à envahir l'Italie, 167-174, mais furent repoussés. On raconte qu'entre 374 et 397 un chrétien italien disposa la reine Fritigil en faveur du christianisme et qu'un écrit d'Ambroise l'y gagna entièrement. Elle se décida même à faire le voyage de Milan pour voir le pieux évêque, mais lorsqu'elle arriva il était déjà mort.

MARCOSIENS, v. Marc 7*.

MARCULF, moine français, vers 660, auteur d'un recueil dans lequel il a réuni des modèles de formules pour les contrats et les actes publics, civils ou religieux, les plus usités de son temps. Publ. par Bignon 1613, Baluze 1677.

MARETS (DES), Samuel, en latin Maresius, né à Oisemont, Somme, 9 août 1599, fils de David, seigneur du Feret, lieutenant civil et juge ordinaire, eut une enfance débile et souffreteuse. Dès 12 ans sa santé se raffermit et il se mit aux études avec énergie, fit sa philos, à Paris, sa théol. à Saumur sous Gomar et Cappel, puis à Genève, revint en 1619, fut consacré en 1620 au synode de Charenton, nommé pasteur à Laon qu'il quitta à la suite d'une tentative d'assassinat le 13 déc. 1623, et après avoir servi quelque temps l'égl. de Falaise, Champagne, il fut appelé comme prof, à Sedan, où il arriva à la fin de 1625, après avoir visité la Hollande et l'Angleterre. Ministre du duc de Bouillon, il dut l'accompagner dans sa campagne de Hollande et fut nommé par lui pasteur de Maastricht; il quitta celte ville pour Bois-le Duc, 1636, après que le duc se fut fait catholique par amour pour Éléonore de Berghes, et il accepta la place de prof, de théol. à Groningue, enseignant la dogmatique et l'hist. ecclésiastique, recteur, prédicateur infatigable, écrivain, polémiste, il jouit bientôt d'une grande réputation et de nombreuses universités se le disputèrent, Montauban, Marbourg, Lausanne, Franeker. Il était sur le point d'accepter une vocation à Leyde, quand il f 18 mar* 1673. Sans avoir été le premier, ni comme orateur, ni comme savant, il a brillé dans presque tous les domaines, et s'il avait été plus paisible et plus modéré dans ses controverses avec les catliol. et avec les théol. protestants, il occuperait une place plus élevée dans l'histoire et dans le souvenir de ses coreligionnaires. D'une grande fécondité comme écrivain, il a publié plus de cent ouvrages, livres, brochures, dissertations, discours, d'une valeur inégale sans doute, mais ayant tous au moins le mérite de l'actualité. Le plus connu est son édition de la Bible, 2 vol. in-f°, texte de la version de Genève, avec des notes tirées de Diodati et d'autres, plus recherchée comme Elzevier que comme commentaire. Le plus important est son Collegium theologi-cum, ou Breve systema theol. souvent réimpr., à Groningue, de 1645 à 1673. — Il laissa 2 fils, Henri, qui eut pour marraine Élisabeth de Nassau, pasteur à Bois-le Duc et â Delft 1662-1696; et Daniel, né 1635, pasteur à Middelbourg et La Haye, 1662.

MARGUERITE 1° d'Antioche en Pisidie, repoussée comme chrétienne par son père païen. Le préfet Olibrius, sous Dioclétien, lui offrit sa main; elle le refusa el il la fit décapiter. Son culte en occident ne date que du 9m« siècle et son hist. porte le caractère de la légende. Raphaël la montre aux prises avec le dragon et victorieuse. On la fait la patronne des femmes enceintes.

2° Arrière-petite-fille du roi d'Angleterre Éthelred, née en Hongrie 1046, forcée avec son frère Edgar (Ethaling), après la bataille d'Has-tings, de chercher son salut dans la fuite, 1066, elle fut repoussée par la tempête sur les côtes d'Écosse, où le roi Malcolm III leur accorda l'hospitalité. Puis séduit par la noblesse de ses sentiments Malcolm l'épousa, et l'héritière des rois d'Angleterre devint reine d'Écosse 1070. Elle eut 2 filles et 6 fils, dont 3 succédèrent à leur père sur le trône. Elle passa sa vie à faire le bien, puissamment secondée par Anselme de Cantorbéry. Sa fille Mathilde épousa Henri roi d'Angleterre, et fut surnommée la bonne reine (f 30 avril 1118). Marguerite avait une piété simple, une foi humble et personnelle. Son mari, engagé dans une guerre contre Guillaume-le-Roux, perdit la vie, ainsi qu'un de ses fils; ce fut un coup fatal pour l'épouse dévouée qui était malade et déjà avancée en âge. • Je te rends grâce, ô Dieu, dit-elle en apprenant par son fils Edgar la triste nouvelle, de ce que tu veux encore à ma dernière heure purifier ma foi par un calice amer. • Et elle mourut 10 juin 1093. Canonisée en 1251. Sa vie a été écrite par Théodoric, moine de Durham, qui avait été son confesseur.

3° Marguerite-la-Veuve, ou la Déchaussée, sainte de l'ordre des dominicains, f 1395; n'est guère connue que dans son village natal de Saint-Séverin, marche d'Ancône. Ses deux surnoms résument son histoire et ses vertus.

4<> Marguerite de Crotone f 22 févr. i297? expia par une vie de dures pénitences neuf années d'une vie trop légère, dont elle fut tirée par la vue du cadavre à moitié rongé des vers, d'un homme qu'elle avait trop connu. — Les Actes des saints mentionnent encore plusieurs saintes de ce nom, mais peu importantes.

5<> Marguerite d'Orléans, improprement appelée de Valois, était fille de Charles d'Orléans, duc d'Angoulème, et de Louise de Savoie, par conséquent sœur de François Née à Angou-lême 11 avril 1492, elle fut élevée à la cour de Louis XII, qui lui fit donner une éducation digne de lui, digne d'elle aussi et de ses admirables dispositions pour tout apprendre et tout approfondir. Outre les ouvrages de son sexe elle étudia la philos, et la théologie, la poésie, les langues savantes, le grec, le latin, l'hébreu, et se distingua par ses connaissances à une époque où beaucoup de nobles se vantaient encore de ne rien savoir. Louis XII la maria 9 oct. 1509 à Charles d'Alençon, dernier duc de ce nom. Ils restèrent dans leur duché jusqu'en 1515. Dès lors ils vinrent habiter la cour, et elle entra en relations avec les poètes du temps et avec les hommes éminents qui travaillaient à une réforme de l'église. Par Le Fèvre d'Êtaples elle apprit à connaître Briçonnet 1521, puis Farel, Roussel, d'Arande nn\ devint son pasteur. Elle sauva du bûcher plusieurs victimes de la foi, poursuivies ou condamnées parla Sor-bonne et le Parlement; elle ne put les sauver toutes. Le désastre de Pavie, attribué en partie au duc d'Alençon qui lâcha pied avant m£me d'avoir été attaqué, la rendit veuve; son mari f à Lyon 44 avril 4525, d'une pleurésie. Le triomphe de Charles-Quint, c'était la réaction. Louise de Savoie et les chambres établirent l'Inquisition. Marguerite se rendit à Madrid pour travailler, non sans courir elle-même beaucoup de dangers, à la délivrance de son frère. Le 24 janvier 4527, à 35 ans, elle épousa Henri d'Albret, roi de Navarre, qui en avait 24. Elle en eut deux enfants: un fils, Jean, né 45 juillet 4530, qui ne vécut que 2 mois, et une fille, Jeanne, née 45 janv. 4528, qui devint la célèbre Jeanne d'Albret, mère de Henri IV. Avec son second mari, leur résidence de Nérac devint de plus en plus le centre, et au besoin l'asile des notabilités de la Réforme; on y vit les Marot, les Des Périers, les Du Moulin, Le Fèvre d'Éta-ples, Toussaint, Calvin lui-même. Elle prit G. Roussel pour son chapelain, lui donna l'abbaye de Clairac et le fit même nommer évêque d'Olorou. Elle avait fondé l'abbaye de Tusson, où elle aimait quelquefois à se retirer; à Paris, l'Hospice des Knfants-Rouges, ou des Enfants de Dieu-le-Père. Elle donna à l'académie de Bourges une illustration nouvelle, en y appelant des hommes comme Volmar, qui attiraient à eux des élèves comme Bèze et Calvin. A sa cour on faisait de la théologie, on récitait des vers, on jouait des moralités. Deux chagrins marquèrent ses dernières années; elle perdit son frère le 34 mars 4547, et dut consentir au mariage de sa fille avec Antoine de Bourbon, le 20 oct. 4548. Elle y survécut peu, et f 24 déc. 4549 en son château d'Odos en Bigorre. Ses funérailles furent célébrées en grande pompe dans l'égl. de Lescar. Tous les poètes tinrent à honneur de la chanter. Par ses talents, sa verve gracieuse et le nombre de ses écrits, elle mérite en effet une place parmi les illustrations de la littérature française. Outre son Décaméron projeté, qui, faute de temps, est réduit à n'être qu'un Heptaméron (sept nouvelles au lieu de dix), 4559, et dont on a singulièrement exagéré la note légère et licencieuse, qui était cependant bien dans les mœurs du temps, il faut noter ses poésies: Marguerites de la Marguerite des Princesses, un grand nombre de petites comédies, des allégories, des Dialogues, des Lettres, des fables, et surtout son Miroir de l'âme pécheresse, Alençon 4534, Genève 4539, que l'Université mit au nombre des livres suspects et qui lui valut de nombreuses et violentes attaques du haut des chaires, parce qu'elle voyait en Christ le seul intercesseur et sauveur. — On a discuté la question de savoir si elle était catholique ou protestante. Ce qui précède peut suffire, ce nous semble, à la résoudre. A une époque où la Réforme était dans l'air sans que les positions fussent encore tranchées, et lorsque pour plusieurs il ne s'agissait que de nuances ou de tendances, Marguerite a montré aussi clairement que possible ses idées, ses sympathies et ses sentiments. Elle n'a pas fait d'abjuration formelle, mais toute sa vie a été une abjuration. Avec son penchant au mysticisme elle a pu conserver quelques cérémonies catholiques, assez pour que Calvin lui conseillât de prendre garde; mais elle a protégé partout les réformés, elle a introduit la Réforme dans sa maison même, â sa cour et dans son royaume; si elle a conservé un service de messe, c'est en français, sans élévation ni adoration de l'hostie, sous les deux espèces, avec du pain ordinaire. Enfin son livre condamné par la Sorbonne et les attaques du clergé lui font dans l'Égl. protestante une place qui ne peut guère lui être contestée. Les accusations dont on a voulu la flétrir et qui ne se fondent sur aucun témoignage et sur aucune apparence, n'ont d'autre base que ses lettres à elle, et il est plus qu'évident que si elles avaient le sens que la haine a voulu leur donner, elle ne les aurait pas écrites. Les âmes pures se laissent seules aller à certains entraînements de parole, parce qu'elles ne soupçonnent pas le mal.

6° Marguerite de France, ou de Valois, fille d'Henri II et de Cath. de Médicis, sœur d* François II. Charles IX, Henri III et du duc d'Alençon, née 1553 à Saint-Germain, belle «le corps, dévote de religion et débauchée de mœurs, était déjà à 49 ans la maîtresse d'Henri de Guise, quand elle épousa Henri de Béarn 4572, et il fallut que son fr. Charles IX lui appuyât la main sur la tête pour la forcer de s'incliner en façon de réponse k la question sacramentelle. Elle continua sa vie dissolue et fut successivement encore la maîtresse de Bussy d'Ainboise, de La Môle et de beaucoup d'autres. Son mari finit par la faire enfermer au Château d'Usson, gardée plus ou moins bien par le marquis de Canillac; elle y passa 48 ans, 4587 à 4605. Enfin Henri, devenu roi de France, obtint le divorce. Elle vint passer ses dernières années à Paris, fonda des couvents, prit Vincent de Paul pour confesseur et f 4645. Ses Mémoires, qui vont de 4565 à 4587 sont curieux à lire.

MARHEINEKE, Philippe-Conrad, né ieMnai 4780 à Hildesheim, où son père était brasseur, directeur des postes et sénateur. Il étudia la théol. à Gottingue, fut nommé Dr en philos, à Erlangen 4803, et après avoir occupé différents postes de pasteur et de prof, à Gottingue, Erlangen et Heidelberg, il fut appelé à Berlin 4811 comme prof, d'hist. ecclés., de droit canon, de symbolique et de théol. morale. En 4820 il devint collègue de Schleiermacher à l'égl. de la Trinité, et en 4824 membre du Consistoire supérieur f 34 mai 4846. Il s'est fait une position dans l'hist. de la théologie, en ce que, disciple convaincu de Hegel et son successeur après sa mort, il en a appliqué les idées et les principes à la dogmatique. En 1810 il a publié le: Système du catholicisme dans son développement symbolique, qui a ouvert à la symbolique de nouvelles voies. De 1810-1813 il a fait la Symbolique chrétienne, ou la Critique historique des doctrines cathol., luthér., réf. et socinienne; on 1816 une Hist. de la Réforme en Allemagne, et dès lors un certain nombre de travaux sur la dogmatique.

MARIAGE. Cet acte si important de la vie sociale existait déjà en principe et en droit chez presque tous les peuples, quand Jésus vint sur la terre, et il n'eut pour ainsi dire rien à innover. Mais le fait même qu'il releva la personnalité de la femme comme l'aide et l'égale de l'homme, releva l'idée du mariage, consacra définitivement la monogamie et réduisit le divorce ii n'être qu'une mesuré extrême. L'importance du mariage pour la société, pour la vie de famille, pour l'État, lui donna aussitôt le caractère d'un acte religieux, et l'Église l'appela un sacrement 'pour exprimer d'un mot le respect dont il devait être entouré. D'un autre côté, ne l'envisageant qu'au point de vue matériel du rapport des sexes, il y a eu dans la même Kglise une tendance à le rabaisser, et il en est résulté l'interdiction du mariage pour les ecclésiastiques. Les deux extrêmes se sont rencontrés. Luther n'a pas entièrement échappé à l'influence des traditions monacales, et il considère trop le mariage comme s'il était avant tout une digue contre l'impureté. Le N. T. ne le déconseille que dans des circonstances exceptionnelles, Matt. 19, 12. 1 Cor. 7, 1. A mesure que la vie religieuse a été reconnue plus indépendante de l'État, l'idée du mariage civil s'est développée, et si pour les gens religieux il n'enlève rien à son caractère religieux, il reste avec toutes ses conséquences civiles un acte qui intéresse la société dans son ensemble, sans engager l<*s convictions de ceux qui n'en ont pas. Les Égl. peuvent réclamer de leurs membres qu'ils recherchent la bénédiction nuptiale, mais l'État ne peut connaître que le mariage civil. C'est le Code Napoléon qui l'a le premier formulé et institué, et il était naturel qu'il fit son apparition d'abord en France où, pendant près de deux siècles, les abus du mariage religieux refusé à la population protestante avaient créé des positions irrégulières sans nombre, aucun mariage n'étant reconnu sans la sanction du prêtre, et le prêtre la refusant aux religionnaires. L'Angleterre admit en 1836 le mariage civil comme facultatif, pour les dissidents; puis la Prusse de même, 30 mars 1847, après le préavis conforme du consist. de Coblence au synode provincial de 1844. L'Italie une fois constituée l'a admis sans hésitation. La législation des cantons suisses a varié sur plusieurs points à cause des concordats et de l'intervention des puissances; la Constitution fédérale a fini par trancher la que** tion dans le sens du droit moderne, qui est aussi le plus respectueux pour la religion, puisqu'il n'oblige personne à feindre des sentiments qu'il n'a pas à profaner par une adhésion hypocrite ou légère un acte qui n'est sérieux que s'il est fait avec foi. — On appelle mésalliance (nuptiœ indecorœ, disparagium), un mariage entre personnes oui n'appartiennent pas à la même classe; l'Eglise n'a pas à en connaître; l'État non plus, puisque les effets civils restent les mêmes et que les enfants sont légitimes; il peut arriver seulement que certains droits, certains titres nobiliaires appartenant à l'époux d'un rang supérieur ne passent pas aux enfants issus d'une mésalliance. C'est en particulier le cas pour les mariages dits morganatiques, ou de la main gauche, vieux reste du droit germanique et du droit romain, qui ont lieu quelquefois entre des souverains ou des personnes de haute noblesse et des femmes d'une condition inférieure. Ces femmes et leurs enfants, dont la position se règle par contrat avant le mariage, n'ont aucun droit aux titres et dignités de l'époux et du père. C'est pour marquer cette différence que l'Eglise les marie de la main gauche. L'Église a reconnu comme valides des mariages de conscience, accomplis par consentement mutuel et engagement réciproque, sans formalités ecclésiastiques ou civiles, quand des circonstances impérieuses ou des obstacles de droit rendaient impossible le mariage légal, quelquefois chez des prêtres catholiques ou chez des princes. Le mariage clandestin est peut-être un peu plus légal. Il est célébré à huis-clos par le prêtre, et inscrit dans un registre à part, ou sous des noms supposés. Il est canoniquement valable. Les mariages mixtes, c.-à-d. contractés entn^ personnes de religions différentes, sont condamnés par l'Égl. catholique, puisque l'une des parties est nécessairement étrangère au sacrement; c'est une question de logique et de conscience; mais dans la pratique elle fléchit quand il le faut, en faisant le possible pour sauver le principe et en imposant aux conjoints des sacrifices correspondant à ceux auxquels elle doit elle-même se résigner.

MARIANA, Juan, né 1537 à Talavera, près Tolède; savant jésuite, prof, de théol. à Rome, en Sicile, à Paris, revint en 1574 à Tolède où il se fixa dans la maison de son ordre et consacra le reste de sa vie à la composition de nombreux ouvrages, f 1623 à Madrid (ou 1624 à Tolède). Il a laissé une Hist. d'Espagne, trfc estimée, en 30 livres; des Comment, sur l'A. et le N. T., une étude sur le Roi et la royauté, où il examine si dans certains cas il est permis de tuer un tyran, et conclut par l'affirmative (c'est ce livre qui, dit-on, a inspiré Ravaillac; il fut brûlé à Paris 1610 par ordre du parlement); enfin un Traité sur les infirmités (enfermedades) de la compagnie et les moyens d'y remédier. Cet écrit, non mentionné dans Bouillet, fut publié sans le consentement de l'auteur, mais son authenticité n'est pas contestée; il critique plusieurs des statuts de l'ordre et en particulier le pouvoir trop absolu du général. Il parut à la fois en espagnol, en italien, en franç. et en allemand, Bordeaux 1625, et fit une grande sensation; il fut condamné par Urbain VIII à la demande du général.

MARIANIENS, ou Fr. joyeux, v. Frères 3*.

MARIE. Outre les femmes de ce nom citées dans la Bible, l'hist. ecclésiastique enregistre plusieurs Marie, dont quelques-unes ne sont que des nuances ou des variétés de la mère du Sauveur; ainsi: a. Notre-Dame de Lorette, q. v. 6. N.-D. de Liesse (Picardie), vierge de bois, apportée « du Nil en Turquie • par trois chevaliers français, avec une sultane qu'ils avaient convertie; pèlerinage très estimé pour les boiteux et les pieds malades; c. la Vierge éthiopienne, la Vierge noire, etc.

Parmi les personnages qui ont réellement existé, nommons:

lo Marie d'Égypte. Après avoir vécu 17 ans dans le vice, elle fut convertie par un pèlerinage qu'elle fit à Jérusalem, auquel elle s'était jointe avec de mauvaises intentions. Sur l'ordre de la sainte Vierge, elle se retira dans un désert au delà du Jourdain. Le moine Zozimas l'y retrouva 47 ans plus tard, toute brûlée par le soleil et n'ayant pour se couvrir que ses longs cheveux blancs. Elle se confessa à lui, et il lui donna, quand il revint au bout d'un an, la sainte Cène. Trois ans plus tard, quand il repassa, il ne trouva plus que son cadavre; un lion l'aida à lui rendre les derniers devoirs. On place sa mort sous Théodose-le-Jeune, entre 408 et 450. L'Égl. grecque l'honore le 2 avril.

2<> et 3<> v. Agreda (Marie d') et Alacoque.

4o Marie-la-Sanglante, reine d'Angleterre. Fille de Henri VIU et de Catherine d'Aragon, née 8 févr. 1515, elle fut- élevée loin du trône dans une sorte d'exil. Sa mère ayant été répudiée, le parlement refusa de reconnaître la légitimité de sa naissance. Mais après la mort de son fr. Édouard VI, et malgré l'opposition de Dudley, v. Grey, elle réussit à s'emparer du trône et régna de juillet 1553 au 17 nov. 1558. Ces cinq années furent pour l'Angleterre le règne de la terreur. Elle commença par faire mettre à mort sa rivale Jeanne Grey, qui n'avait que 17 ans; Guildford son mari, et le duc de Northumberland, père de celui-ci, qui avait été l'âme du parti opposant. Bigote et passionnée,

elle avait hérité de sa mère la haine de la Réforme et rôva l'extermination de tout ce qui était protestant. Latimer, Ridley, Hooper, Cran-mer, furent envoyés au supplice, et la tentative de Wyatt fut cruellement réprimée. Le 25 juillet

1554 elle épousa Philippe II, et ce mariage fut le signal de nouvelles persécutions. Les lois sur le culte furent abrogées, les édits de Henri VIII contre l'hérésie furent remises en vigueur; en

1555 l'Égl. cathol. était de nouveau dominante en Angleterre, grâce à des bûchers par centaines et à des proscriptions par milliers, sans parler de tous ceux qui s'enfuirent du royaume. Son farouche mari l'abandonna, quand il fut nommé roi d'Espagne. Elle mourut, dit-on, du chagrin que lui causa la perte de Calais, la dernière ville française qui fût encore au pouvoir des Anglais. Élisabeth sa sœur lui succéda.

5° Marie Stuart, fille de Jacques V et de Marie de Lorraine; née 1542, proclamée reine d'Ecosse à l'âge de 8 jours; épousa en 1558 le dauphin de France qui fut François II. Veuve après 18 mois, elle retourna en Ecosse, épousa en 1565 son cousin Darnley, dont elle eut Jacques VI; aima Rizzio, que son mari fit assassiner. Darnley étant mort de mort violente, en 1567, elle épousa 3 mois après Bothwell, que la voix publique désignait comme son amant et l'assassin de Darnley. Les Écossais indignés se révoltèrent; elle s'enfuit en Angleterre. Élisabeth la retint 18 ans en prison, et à la suite d'un complot finit par la faire mettre à mort, 15 févr. 1587. Malgré l'ardeur de son catholicisme, elle n'exerça aucune influence sur l'Écosse et n'appartient pas à l'hist. de l'Église. Aux yeux de ses admirateurs ses malheurs doivent faire oublier ses crimes, et Schiller l'a chantée de manière à intéresser à elle ceux qui ne s'inquiètent ni de la religion, ni même de la morale.

MARIN, v. Martin 2<> et 3<>.

MARINA d'Escobar, née 1554 à Valladolid, fille d'un juriste distingué, compte parmi les lumières du mysticisme espagnol. Après plusieurs années de retraite et de vie contemplative, elle se produisit au dehors en 1599, et réforma l'ordre de sainte Brigitte. La maladie la retint sur son lit pendant ses 30 dernières années; elle eut des extases et des visions, dans . lesquelles elle reconnut que le vrai but de la vie chrétienne devait être l'entière conformité de la volonté de l'homme avec la volonté de Dieu. Vie par L. de Ponte, son confesseur.

MARINUS, ou Marin. 1° Deux papes qui, depuis le 13™ siècle, furent appelés Martin H et III, q. v. 2° Martyr, centurion sous Gallien, il fut dénoncé comme chrétien. Sur son refus de sacrifier à l'empereur, il fut misa mort àCé-sarée. Le sénateur Astérius lui fit d'honorables funérailles. — 3° Dalmate du 4®« siècle; employé comme tailleur de pierres aux travaux du port de Rimini, il étonna par sa piété l'év. Gaudence, de Brescia, qui l'admit comme diacre dans l'état ecclésiastique. Il se retira sur le mont Titano, pour y vivre dans la prière, et s'y bâtit une cellule. Après sa mort il se fit des miracles sur son tombeau; de nombreux solitaires vinrent s'y établir pour se livrer à l'exercice de la piété. Ce fut l'origine de la ville de Saint-Marin.

MARION, Élie, né mai 1678 à Barre-des Cé-vennes, forcé de fréquenter la messe dans son enfance, fit des études de droit à Nîmes et à Toulouse, mais quand il dut se procurer un certificat de catholique pour être reçu avocat, il hésita et finit pir refuser, 1701. Il se retira dans les Cévennes, assista aux assemblées des prophètes, fut gagné par leur esprit, et finit à son tour par prophétiser. Dans une réunion extraordinaire, aux environs de Pâques 1703, il versa des larmes de sang qui tombèrent sur ses habits et sur son fusil. Il était sous les ordres du capitaine-prophète Salomon Couderc, et le remplaça plus tard avec Mazel; mais il dut traiter en octobre 1704 avec le marquis de Lalande, dans d'assez bonnes conditions, et vint à Genève avec, quelques amis, qui ne furent pas très bien reçus. Après une nouvelle tentative insurrectionnelle déjouée par la trahison, il se rendit à Lausanne, puis à Londres 16 sept. 1706, où il prophétisa pendant 2 ans sans grand succès. Ils visitèrent ensuite la Hollande, l'Allemagne, la Pologne, Stockholm, enfin Constantinople et Rome. Marion f 29 nov. 1713 à Livourne. V. Théâtre sacré des Cévennes.

MARIS, où Marès. 1° év. de Beth-Hardashir, en Perse; connu par la lettre qu'il adressa à Ibas d'Édesse, relativement à Nestorius et à sa doctrine, lettre qui fut déclarée orthodoxe par par le conc. de Chalcédoine 451, mais que Jus-tinien condamna comme un des Trois chapitres. Maris vécut encore quelque temps à Édesse et fut le propagateur du nestorianisme en Perse. — 2° Les nestoriens comptent parmi les 70 disciples de Jésus, un Maris qui aurait été le collaborateur de Thomas et aurait apporté l'évang. en Mésopotamie. — 3° Patr. nestorien, vers 987, le premier qui se fit reconnaître comme tel par les califes. — 4° Maris, fils de Salomon, vivait au 12me siècle; auteur d'une Hist. des patr. nestoriens. v. Assemani. — 5° Solitaire, nommé par Théodoret dans son Historia religiosa.

MARIUS. ou Maire, gentilhomme originaire d'Autun, destiné dès sa jeunesse à l'état ecclésiastique; il bâtit sur ses terres en Suisse une métairie et une église; ce fut le commencement de Payerne. Devenu év. d'Avenches 573-581, il dut quitter cette ville ruinée par la guerre et transporta son siège à Lausanne 585-593. f 31 déc. 593. A la fois agriculteur, industrieux de ses mains, architecte et savant, il a laissé une Chronique, découverte par le p. Chifflet, qui se rattache à celle de Prosper d'Aquitaine et qui comprend les années 455 à 581; il raconte Thist. des Bourguignons, v. Mémoires et docu -ments de la Soc. d'hist. de la Suisse romande t. XIII. et le Cartularium Lausannense.

MARK (de La), v. Marck.

MARLORAT, Augustin, né 1506 à Bar-le-Duc, orphelin à 8 ans, envoyé par un tuteur avide au couvent des augustins, où il fit de bonnes études, ordonné prêtre en 1524. Il se fit bientôt une réputation comme prédicateur. Prieur d'un couvent de son ordre à Bourges 1533, il prêcha le carême à Poitiers et à Angers. Mais on reconnut en lui un homme nourri des pères, de l'Évangile et des doctrines de la Réforme; il dut fuir, se retira à Genève en 1534 où il fut correcteur d'imprimerie, se rendit à Lausanne où il se lia avec Bèze, fut nommé pasteur de Crissier en 1549, puis à Vevey. En 1559 Genève l'envoya à Paris, et en 1560 l'égl. de Rouen l'appela comme pasteur. Le 12 mai 1561 il présidait le synode provincial à Dieppe. Il fut député au colloque de Poissy où, de concert avec François de Saint-Paul, il présenta au roi la conf. de foi des Égl. réformées; il fut un des 5 commissaires chargés de s'entendre sur une formule commune. Après le soulèvement du 15 avril 1562, provoqué par le massacre de Vassy, il fut nommé membre du Conseil de Rouen, mais après la prise de la ville il fut enfermé, le 26 oct., dans la prison du Vieux Palais, brutalement interrogé par le connétable de Montmorency, et 4 jours après, accable d'outrages et de mauvais traitements, il fut martyrisé avec deux de ses amis Grucber et Cotton. Sa veuve et ses 5 enfants se réfugièrent à Londres. Il a laissé une douzaine d'écrits, en latin et en français, dont quelques-uns ont été impr. chez les Étienne. Les principaux sont: Novi Test. Expositio catholica eccles., Genève 1561, souv. réimpr. et trad., et divers Comment. sur les Psaumes, Genèse, Ésaïe, le N. T. etc. — Son fr. Martin resta catholique et f 1571. Un autre Marlorat, Samuel, peut-être aussi son fr., fut pasteur à Lausanne en 1563, et prof, de théol. 1567.

MARNIX de Saint-Aldegonde, Philippe (de), une des plus nobles figures de la réforme hollandaise, à la fois orateur, écrivain, homme d'État, négociateur et militaire, l'ami intime du prince d'Orange, Guill.-le-Taciturne. Né 1538 à Bruxelles, il étudia à Genève avec son fr. aîné sous Calvin et Bèze, et rentra dans son pays en 1560. Sa vie publique ne commença guère qu'en 1565 par la rédaction du Compromis, et en 1566 par la rédaction de la requête de la noblesse à la régente pour demander la suppression de l'Inquisition. La même année, 26 oct., il préside à Anvers le premier synode wallon. Vaincu à Austrewel, comme il se proposait dè secourir Valenciennes assiégée, il passa en Allemagne et se mit au service de Frédéric III du Palatinat, ce qui ne l'empêcha pas de servir son pays en diverses manières. C'est ainsi qu'il assista aux synodes de Wesel et d'Emden, 1568 et 1571. Lors de la guerre de 1572, il rentra dans les Pays-Bas, fut fait prisonnier, puis échangé; essaya, mais en vain, d'amener une entente entre l'Espagne et les Provinces-Unies aux conférences de Breda 1575; mais réussit dans les négociations préliminaires qui aboutirent à la Pacification de Gand 1576, et à l'Union de Bruxelles 1577. Il fut chargé de plusieurs ambassades, eu Angleterre, aux diètes de Worms et de Cologne, et enfin auprès de François d'Anjou à qui les États-Généraux firent offrir la couronne en 1586. Comme bourgmestre d'Anvers en 1583, il eut à la défendre pendant le siège qui aboutit à la capitulation du 17 août 1585. Sa conduite, pendant ces temps difficiles, fut inspirée par l'illusion qu'il se faisait sur l'honneur et la loyauté de l'Espagne, et par l'espoir qu'il avait d'obtenir la liberté de conscience sans qu'il fût nécessaire de séparer violemment les provinces. Il s'était trompé. De ce moment sa carrière publique est finie. Il se retira dans une de ses terres, et plus tard à Leyde, à cause de l'univ. de cette ville, à la création de laquelle il avait puissamment contribué. Là il s'occupa de la trad. de la Bible, dont les États-Généraux l'avaient chargé, mais il ne put achever que la Genèse. Parmi ses différents ouvrages on cite sa controverse avec Baïus, ses écrits sur l'Église et sur la Cène, son Catéchisme, et surtout sa Ruche 1569, qui. très augmentée, fut réimpr. en 1601 sous le titre de Tableau de la différence des religions; il fait ressortir avec une verve satyrique les principales doctrines qui caractérisent le système romain. Il fut marié 3 fois, et laissa 1 fils et 3 filles, f 15 déc. 1598. Ses Œuvres ont été publ. par Quinet, avec une biographie.

MARO, ou Maron 1° Couvent de Syrie, fondé \ers 400 par un pieux solitaire de ce nom, d'après Théodoret; moine et prêtre, d'après Chrysostome. f 433. — 2° Jean Maron, né à Sirum près d'Antioche, étudia à Constantinople. et devint moine et prêtre au couvent de Maron. Nommé par le légat du pape évêque de Botrus, on raconte qu'il ramena à la foi orthodoxe tout le Liban, monothélètes et monophy-sites, qu'il fut nommé patr. d'Antioche et que le pape Honorius le confirma. Les Grecs ayant détruit l'ancien couvent de Maron. il en construisit un nouveau à Kafar-Hai, près de Botrus, et f 707. Tout cela est peu vraisemblable; Honorius vivait 60 ans auparavant, et il était mo-nothélète. Ce qui est positif c'est que Maron jouissait d'une grande influence et qu'il réunissait dans le Liban le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. C'est à lui que les maronites font remonter leur existence comme secte. Les écrits qu'on lui attribue sont inauthentiques, sauf peut-être un seul.

MARONITES, peuplade d'origine syrienne, qui occupe avec les Druses la partie nord du Liban et quelques districts de la Syrie. On en compte 500,000. Les Druses sont leurs ennemis acharnés et l'ont prouvé par les massacres de 1860. Ils forment un état militaire indépendant, sous la domination de la Turquie qui, depuis 1842, leur a concédé un chef de leur race. Comme mœurs et coutumes ils ressemblent aux Arabes. Ils portent le turban vert en signe de leur noblesse. Ils forment religieusement une église à part, dont le chef s'appelle le patriarche d'Antioche et réside au couvent de Kano-bin sur le Liban, non loin de Tripoli. Pendant les croisades ils se rattachèrent au siège romain, en ce sens qu'ils reconnurent l'autorité du papr. mais tout en gardant leurs doctrines et leurs usages. Lorsqu'en 1736 on voulut leur faire adopter le conc. de Trente, au synode réuni dans le couvent de Luweiza, Kesrouan, il fallut leur faire tant de concessions qu'on put se demander s'ils étaient encore catholiques. Ils adoptèrent la formule du filioque dans le symbole, ils acceptèrent les jeûnes prescrits, le catéchisme romain, le calendrier grégorien, mais conservèrent leur ancienne liturgie qu'ils font remonter à Éphrem le Syrien, l'usage du syriaque et de l'arabe dans le culte, la Cène sous les deux espèces pour les ecclésiastiques, le mariage du clergé inférieur, et le libre choix du patriarche; celui-ci toutefois doit être confirmé par le pape et lui faire tous les dix ans un rapport sur la situation de la communauté. Déjà en 1584 Grégoire XIII, pour relier davantage les maronites à la métropole, avait fondé à Rome le fameux Collège maronite, séminaire destiné à former des ecclésiastiques pour la Syrie. Parmi les savants qui en sont sortis on compte Gabriel Sionita et Abraham Ecchellensis, collaborateurs de la Polyglotte de Paris, 1629-1645; les Assemani et d'autres. Avant leur réunion avec Rome les témoignages sont unanimes à constater qu'ils étaient monothélètes. C'est comme tels qu'ils furent condamnés au conc. de Constantinople 680, et pour le nier Assemani et d'autres avec lui sont obligés de forcer les textes ou de les déclarer apocryphes. C'est, sans doute, du monophysitisme qu'ils ont passé au monothéisme, car ils ont conservé dans leur Trishagion (formule trinitaire) la mention: « qui a été crucifié pour nous, • et les moines du couvent de Maron passent pour avoir été martyrisés par leurs compatriotes à cause de leur adhésion au conc. de Chalcédoine.

MAROT, Clément, né à Cahors vers 1495. Son père, Jean, était le poète d'Anne de Bretagne et passa ensuite au service de François 1er, comme valet de chambre. Après des études as-srz négligées, Clément fut placé chez un homme de loi, mais il n'y resta pas longtemps; ses goûts étaient ailleurs. François le recommanda à sa sœur Marguerite. Il suivit la cour au Camp du Drap d'Or 1520. Il accompagna le duc d'Alen-çon en Italie, fut blessé à Pavie et fait prisonnier. Deux fois il tomba entre les mains de l'Inquisition, et il fallut sa position à la cour et l'influence de puissants amis pour le tirer de là. L'affaire des Placards, dans laquelle il n'avait pas trempé, et quelques vers satiriques au sujet des persécutions contre les protestants, l'obligèrent de s'enfuir; il se rendit dans le Béarn d'abord, puis à Ferrare et à Venise. Rappelé par François 1er il lui présenta la traduction de ses 30 premiers psaumes, et fut encouragé par lui à continuer ce travail. Ces essais lyriques, les premiers qu'on eût vus en-France, obtinrent un tel succès de vogue que tout le monde les chanta; le pape lui-même en fit faire une édition, pendant que la Sorbonne les faisait mettre à l'interdit comme pleins d'erreurs. Il dut fuir de nouveau et vint à Genève où il continua sa traduction. Calvin mit une préface à l'édition des 50 premiers psaumes, que Marot dédiait aux Dames de France, 1er août 1543. Mais l'air de Genève était un peu sévère pour cet esprit léger, nuancé de profane; on lui reprocha d'avoir joué au trictrac avec Bonivard, et quoique la chose n'ait pas eu de suites, elle le décida à s'éloigner; il se retira à Chambéry, visita le camp de Cérisoles après la bataille, chanta le comte d'Enghien héros de la journée, et à son retour tomba malade il Turin, où il f mai 1544, peut-être empoisonné. Une de ses poésies porte la date du 5 mai 1546, ce qui mettrait sa mort au moins 2 ans plus tard, Mais il est probable qu'il y a là une faute d'impression. Sans être créateur, il porta la poésie ancienne à sa perfection et surpassa ses devanciers autant par la grâce et la naïveté que par la ferme structure du vers. Ses productions sont très nombreuses; la seule qui nous intéresse sont ses Psaumes, trad. en vers, queBèze acheva. Il avait choisi pour devise: La mort n'y mord; son fils Michel, le seul de ses enfants dont le nom soit connu, fut placé comme page d'abord chez la reine de Navarre; ensuite chez Renée de France; il était poète aussi, mais sa devise était moins gaie que celle de son père; c'était • Triste et pensif. Œuvres compl.

de Marot, Lyon 1538, La Haye 1731, Paris 1824. L'Epistre de M. Malingre à Marot contient d'intéressants détails sur ce poète et son époque.

MAROZZIA, Marousie ou Mariuccia, fille de Théodora, belle, intrigante et vicieuse, épousa 906 Albéric, comte de Tusculum et marquis de C^amerino, f 927; puis Guido, duc de Tuacie, t 928; enfin Hugues de Provence, roi d'Italie, t 945. En même temps elle était la maîtresse de Serge III, dont elle eut un fils qu'elle fit nommer pape sous le nom de Jean XI. Son influence sur les seigneurs de la ville était telle qu'elle réussit à faire élire successivement Serge III, Anastase IU et Landon, dont on ne parle pas. Jean X ayant été élu sous l'influence de Théodora, Marozzia, à l'aide de son second mari, réussit à le faire jeter en prison, où il mourut. Les papes suivants, jusqu'à Jean XI, furent encore son ouvrage. Son mari Hugues ayant donné un soufflet à Albéric II, fils aîné de la Marozzia, celui-ci se vengea, réunit la jeunesse romaine, chassa de Rome son beau-père 933, et enferma sa mère au château Saint-Ange, où elle f vers 945. Mais si les femmes ne régnaient plus, il restait encore des traces de leurs désordres. Après la mort d'Albéric, son lils Octavien lui succéda comme prince de Rome, et sur le conseil de ses amis ce petit-fils de l'impure Marozzia se fit couronner pape sous le nom de Jean XII, gardant le nom d'Octavien comme souverain temporel, et se montra le digne héritier de la Pornocratie, q. v.

MARRON, Paul-Henri, né 1754 à Leyde, de* cendant de réfugiés, vint à Paris 1782 comme chapelain de l'ambassade de Hollande, et travailla avec Rabaut Saint-Étienne et grâce à la complicité cachée de Malesherbes, à reconstituer l'Égl. prot. de Paris. En 1789 il célébrait déjà le culte dans une salle de la rue Mondétour, et en 1790 dans la rue Dauphiné. Le 23 brumaire an II il déposa sur le bureau de la Commune les 4 vases d'argent de la communion, et le culte fut interrompu. Il fut 3 fois arrêté comme suspect. Le 20 mars 1795 il reprit ses fonctions, et eut d'abord pour collègues Rabaut-Pommier et Mestrezat, puis Jean Monod. La loi de germinal an X le confirma comme pasteur officiel, et le 15 août 1806 il célébra l'anniversaire de la naissance de l'empereur dans un style un peu ampoulé. Il salua tous les régimes qui suivirent, mais il sut défendre contre tous, même contre M. de Blacas, les droits et la dignité de son ministère, + 30 juill. 1832. Il faisait des vers latins et des vers français, et ne se tâchait pas trop quand on leur refusait son admiration.

MARSABA, v. saint Sabas.

MARSAY, Charles-Hector (de Saint-Georges, marquis de), né 1688 à Paris, quitta la France à cause des persécutions religieuses, entra dans i l'armée allemande comme enseigne, fit la guerre de la succession d'Espagne, et converti par les écrits de Bourignon, se retira 1711 avec deux amis, Cordier et Baratier, à Schwarzenau pour y vivre dans la solitude. En 4742 il épousa mystiquement Clara Élisabeth de Callenberg, gagnant sa vie comme horloger, voyageant et écrivant beaucoup pour répandre ses doctrines. Il travailla avec quelque succès à la diffusion de la Bible de Berlebourg et des idées de Mad. Gnyon. Sa femme f 4745, et lui-même 4746 à Ambleben, ayant abandonné ce qu'il y avait d'excessif dans ses vues séparatistes et quiétisles.

MARSEILLE.^L'Évangile y fut apporté, dit la légende, et la première église y fut fondée par Lazare, qui y arriva vers 63 avec Marie, Marthe et Maxime. C'est dans ses environs que Cassien groupa ses premiers couvents, et comme il leur imprima une direction intermédiaire entre la doctrine d'Augustin et celle de Pélage, on s'habitua à donner aux sémi-pélagiens le nom de Massiliens (Marseillais). C'est contre eux qu'à l'instigation de Prosper d'Aquitaine, Augustin écrivit son livre: De dono perseverantiœ. L'évêché actuel relève de l'archev. d'Aix.

MARSILIUS, ou Marsile lo v. Ficin.—2<>M.de Padoue, né d'une famille bourgeoise, professa à Orléans et à Paris dans toutes les facultés, quoiqu'il fût surtout juriste. En 4342 il était recteur de l'univ. de Paris. Son grand ouvrage, celui qui a fait sa réputation, Defensor pacis, 4324, le fit mettre à l'interdit et l'obligea de s'enfuir. Il se retira en 4327 chez Louis de Bavière, et f après 4342, puisqu'à cette date il publiait encore son livre sur le Droit en matière matrimoniale. Ces deux ouvrages étaient trop avancés pour leur temps. Le premier, le Défenseur de la paix, prend le parti du pouvoir impérial contre les prétentions de la curie romaine. Il y établit qu'aucun prêtre n'a d'autorité civile et temporelle à exercer; que tous les prêtres sont égaux; que la supériorité hiérarchique des uns sur les autres est d'institution humaine, non divine; enfin qu'il n'y a jamais eu une primauté de Pierre. Il ajoute que Christ étant en réalité le chef de l'Église, l'autorité ne saurait appartenir à l'év. de Rome, mais seulement à une assemblée générale de l'Église, laquelle nff peut être convoquée que par l'empereur, auquel seul il appartient aussi d'employer les moyens de contrainte ou de répression. L'État, comme institution divine, n'est pas au-dessous de l'Église, mais à côté. Ces principes, alors tout nouveaux, ne furent reconnus que par les grands conciles du siècle suivant et par les hommes de la Réforraation. Dans son Traité De jurisdic-tione Imperatoris in causis matrimonialibus, il défendit comme fondé en droit, et malgré l'opposition intéressée de Louis, le divorce prononcé par l'empereur entre le comte Jean de Bohême et Catherine Maultasch du Tvrol.

MARTÈNE, dom Edmond', né 22 déc. 4654 à Saint-Jean de Lône, près Dijon, savant écrivain de la congrég. de Saint-Maur, disciple et ami de d'Achéry et de Mabillon, étudia la diplomatie, visita les archives de la France et des pays voisins pour recueillir des documents relatifs à l'hist. de France, vécut surtout dans les couvents de Marmoutier et de Saint-Germain-des-Près, où il f 20 juin 4739. âgé de 85 ans. Il observa dans toute sa sévérité la règle de saint Benoît, et la crainte que l'éloge qu'il faisait de l'ascétisme mystique de Claude Martin, son maître, ne fit une impression fâcheuse, décida ses supérieurs à empêcher la publication de cette biographie, et lui valut même d'être enfermé pour quelque temps dans un couvent de Rouen, 4697. Très versé dans l'archéologie monacale, il a publié un Comment, sur la règle de saint Benoît, 5 livres sur les Anciens Rites des moines, 3 sur les Anciens Rites de l'Église, une Nouvelle collection des anciens livres et monuments, faisant suite à celle de d'Achéry. C'est après cette publication qu'il entreprit, avec Ursin Durand, un voyage à travers les biblioth. de France, d'Allemagne et des Pays-Bas, qui amena la publication de son Trésor de nouvelles anecdotes, 2 vol. Paris 4747. Un second voyage lui fournit les matériaux de son grand ouvrage: Collectio amplis*, Vet. script, et mo-nurn. 9 vol. Paris 4724-1733. Il continua aussi les Annales de Mabillon, Paris 1739.

MARTENSEN, Jean, év. de Seeland. Né à Flensbourg 19 août 1808, il étudia à Copenhague, où il fut nommé 1838 prof, de philos, et en 1839 de théol.; en 1840, Dr théol. honoraire de l'univ. de Kiel, en 1845 prédicateur de la cour, et en 1854 év. de Seeland en remplacement de l'év. Mynster. En 1879, pour la 25™ année de son épiscopat, une souscription publique lui a offert un don de 20,000 couronnes. Orateur distingué, profond penseur, écrivain remarquable, il a publié de nombreux volumes, en latin, dapois et allemand: en 1837 De auto-nomid conscientiœ; en 1841, un Système de Philos, morale, très estimé et souvent réimprimé; en 1840 et 1850 une Dogmatique chrétienne, traduite en plus, langues, et récemment en français par le pasteur Ducros; une autobiographie intéressante, ainsi que plusieurs brochures de circonstance. Disciple de Hegel et de Schleiermacher, il met cependant le surnaturel à la base de son système religieux. Sa tendance générale est conservatrice; il combat le libéralisme politique moderne (et jusqu'à la réforme de l'orthographe); mais il appuie les revendications modérées des classes ouvrières. Sa polémique est aussi courtoise que décidée. + 4 févr. 1884.

MARTIANAY, Jean, né 30 déc. 1647 à Saint-Sever-le-Cap, près d'Aire (Landes), entra en 1667 au couvent bénédictin la Daurade à Toulouse. Il s'adonna surtout aux langues orientales et à l'étude de la Bible, et fit sur ces sujets des lectures ou conférences dans plusieurs couvents. Sa Défense du texte hébreu et de la Chronologie de la Vulgate, Paris 1689, attira sur lui l'attention. Ses supérieurs l'appelèrent à Saint-Gerraain-des-Prés, et le chargèrent de faire une nouvelle édition de saint Jérôme; elle parut en 5 vol., f°. Paris 1693-1706, après que dans son Prodromus 1690, il en eut établi la nécessité. En 1706 il publia une Vie de Jérôme, et en 1709, une Trad. du N. T. Son édition de Jérôme lui valut quelques attaques, qu'il repoussa avec vivacité et avec trop d'amour-propre, + 16 juin 1717.

MARTIN lo pape 649-654. Sa biblioth. est si dépourvue de livres qu'il prie instamment un év. de Maestricht de lui en envoyer des parties les plus reculées de la Germanie. Il tient aussi à se procurer des livres qu'on ne trouve pas facilement à Rome. Il convoque à Rome 640 le 1er concile de Latran, condamne les monothélè-tes et encourt la colère de l'emp. Constant II, qui le fait enlever de Rome, traîner à Constantinople, et l'envoie enfin mourir en exil, 16 sept. 655, après l'avoir fait remplacer sur le siège de Rome par Eugène 1er.

2o Martin II, ou Marin, 882-884, voit commencer en Italie ces luttes terribles entre les grands, luttes dont ce malheureux pays fut si longtemps le théâtre, et dans lesquelles les papes sont tour à tour le jouet du peuple et l'instrument du parti dominant; plusieurs périssent de mort violente, ou terminent leurs jours en prison.

3° Martin III, ou Marin II, 942-946, romain, n'a rien fait de remarquable, f 4 août 946.

4o Martin IV; Simon de Rrione, 1281-1285, pape français, prit parti pour Charles d'Anjou, roi de Sicile, qui l'avait fait élire, contre Pierre d'Aragon, et condamna sévèrement les Vêpres Siciliennes 1282. Il ranima la guerre entre les guelfes et les gibelins et provoqua l'anarchie, f 28 mars 1285.

5° Martin V, Othon Colonne, élu 1417 à Constance en remplacement des trois papes déposés; homme doux en apparence et du juste milieu. Son élection met fin au grand schisme d'Occident. On s'en réjouit beaucoup le premier jour, mais on s'en repent déjà le second, et l'on regrette de n'avoir pas suivi le conseil de Sigismond, qui aurait voulu qu'on procédât à la Réforme de l'Égl. avant l'élection du pontife. Il présida le conc. de Constance jusqu'à sa fin, 22 avril 1418, anathématisa les partisans de Jean Huss, convoqua un concile à Pavie 14Î3. puis à Sienne 1424, et f 1431 au moment où allait s'ouvrir le concile de Bâle.

6° Martin de Tours, né vers 316 à Sabaria (Sarwar, Stein-am-Anger), Pannonie, de parents païens; il se convertit de bonne heure à l'Évangile; à dix ans il était catéchumène. A 15 ans. son père qui était tribun le contraignit d'entrer dans l'armée. Comme ses pratiques religieuses faisaient douter de son courage, il demanda, un jour de marche contre des hordes germaines, d'être placé à l'avant-garde. Un rude hiver, comme il passait par la porte d'Amiens à la téte d'un escadron, il partagea sonmanteau avec un pauvre mendiant qui mourait de froid; la nuit suivante il vit en songe le Sauveur vêtu de cette moitié de manteau. Après la campagne, ayant obtenu son congé, il se rendit chez Hilaire, év. de Poitiers, qui lui confia la charge d'exorciste, Martin ne se jugeant pas encore digne d'être diacre. Il alla visiter ses parenls en Pannonie. réussit à convertir sa mère, combattit les ariens, courut beaucoup de dangers et finit par être chassé du pays. Il rejoignit Hilaire qui, banni de Poitiers, était dans la haute Italie, et déploya à Milan un grand zèle contre les ariens. De retour à Poitiers, vers 360, il fonda à quelques lieues de la ville, un couvent pour former des jeunes gens au ministère, le Monast. de Loco-ciagense ou Lieugé. Sa réputation de sainteté et de pouvoirs miraculeux se répandit au loin, et en 371 le peuple de Tours l'appela comme évA-que. Il accepta, mais fuyant les grandeurs mondaines il se choisit dans un désert, sur un rocher, non loin de la Loire, une solitude où il se construisit une cellule, autour de laquelle d'autres ne tardèrent pas à s'élever; ce fut l'origine du fameux couvent de Marmoutiers (Jfartini Mo-nasterium). Bientôt 80jeunes gens s'y réunirent pour se préparer à l'œuvre du pastorat ou de 1 évangélisation. Il travailla à la conversion des païens qui étaient encore nombreux dans cette partie de la France, et fit abattre les temples des idoles. D s'opposa, au conc. de Trêves 384, à ce que les priscilliens fussent condamnés et punis par l'empereur, et rompit toute relation avec les évêques qui avaient voté dans ce sens. La pieuse reconnaissance de ses contemporains lui a prêté beaucoup de miracles; Grégoire de Tours en mentionne 206, même une résurrection, qui presque tous appartiendraient plutôt à la première partie de sa vie. f vers 397. Sa fête se célèbre le 11 nov. en France, en Belgique et dans le nord de l'Allemagne, où elle coïncide avec les anciens sacrifices de la mi-automne. Vie par Sulpice Sévère.

7o Martin, de Pannonie; après un pèlerinage en Palestine, il se rendit en Galice, Espagne, et contribua à rattachera l'Égl. de Rome les Suè-ves qui avaient de* tendances ariennes. Il fonda plusieurs couvents, et il était abbé à Dumia, quand il fut appelé à l'archevéché de Braga vers 560. Il assista 563 au 2®« conc. de Braga contre les ariens et les priscilliens, et présida celui de 572. f vers 582. Outre quelques écrits moraux, on lui doit une collection (probablement retravaillée) des Canons orientaux et des Actes des conciles grecs. Une traduction des Sentences des pères égyptiens, qu'on lui attribue, a plutôt été faite par le diacre Lachase, de Dumia, mais sous sa direction.

8° David Martin, traducteur de la Bible, né à Revel 7 sept. 1639, étudia à Montauban et à Nîmes. D«- en philos. 21 juillet 1659, il fit sa théol. à Puy-Laurens, fut consacré à Mazamet 1663, fut nommé pasteur d'Espérausse, épousa à Castres 1666 Florence de Malecare, dont il eut 5 enfants; fut appelé à Lacaune en 1671 et refusa tous les autres postes qui lui furent offerts. Savant, aimable, influent, chéri des siens, respecté des catholiques, il était haï du clergé qui lui suscita plus d'une méchante affaire, mais son innocence fut reconnue. Il fallut la révocation de l'Édit de Nantes pour le forcer à partir. Sur le point d'être arrêté, des amis catholiques l'avertirent et pourvurent à sa sûreté. Il arriva à La Haye en nov. 1685, et fut bientôt nommé pasteur de l'Égl. wallonne d'Utrecht, qu'il servit fidèlement jusqu'à sa f 9 sept. 1721. Il prit mal en chaire, et 2 jours après il n'était plus. Il avait refusé sa nomination comme prof, à De-venter, et une place de pasteur à La Haye. Son travail le plus connu est sa revision de la Bible d'après la version de Genève, avec notes et introduction, Amsterdam et Utrecht, 1707, 2 vol. f°; souvent réimpr. jusqu'à nos jours, et partiellement revue au siècle dernier par Osterwald. elle a été longtemps la meilleure. Il a publié aussi le N. T. expliqué par des Notes courtes et claires, Utrecht 1696; Hist. du V. et du N. T., Amst. 1700, 2 vol. f° avec 424 excellentes gravures, espèce de chef-d'œuvre; quelques Sermons, des ouvrages de polémique et d'exégèse, etc. Il soutient l'authenticité de 1 Jean 5, 7 et du passage de Josèphe touchant J.-C.

9o Jacques, né 1794 d'une famille originaire des Cévennes, entra à Saint-Cyr 1812, fit comme officier la campagne d'Allemagne 1813, assista aux batailles de Bautzen, Leipzig et Waterloo, où il fut blessé; revint à Genève reprendre ses études de théol. et fut consacré 1822. D abord régent, puis inspecteur des écoles, il fut nommé pasteur à Chêne 1831, et à Genève 1844-1856. f 1874. Orateur populaire, sympathique, puissant, il n'a cessé de progresser dans le sens évangélique. Membre de plusieurs sociétés savantes, littér. et religieuses. Auteur d*: Souvenirs du jubilé de 1835; Sermons, Méditations sur l'Oraison dominicale, Médit, et prières pour le culte domestique, Confér. sur la Rédemption (2séries), Conf. sur la Prière, Souvenirs d'un officier, etc.

10° Joseph, plus connu sous le nom de Mar-tin-Paschoud, né 14 oct. 1802 à Nîmes, étudia à Genève; pasteur à Luneray, puis à Lyon 1828-1837, enfin à Paris, où il f 24 mai 1873. Nature impétueuse, ardente, chaleureuse, il se jetait avec fougue dans toutes les causes qui faisaient appel au cœur, et ne reculait devant aucune hardiesse; il ne s'inquiétait plus des conclusions, quand il avait cru devoir accepter les prémices. En théologie il poussa cette logique à l'extrême et arriva ainsi jusqu'au théisme. Rédacteur depuis 1839 du Disciple de /.-C., feuille mensuelle d'édification plutôt que de controverse, il a fondé en 1853 l'Alliance chrét. universelle (par opposition à l'Alliance évangélique), et à concouru en 1867 à fonder la Ligue internationale et permanente de la paix. Ses derniers jours furent attristés par la guerre de 1870, et pir l'acuité de son conflit avec le Consistoire de Paris, conflit qui éclata en 1864 et fut envenimé de part et d'autre par des questions ou des répugnances personnelles. Très bien doué, il avait dans la vie privée un caractère aimable et bienveillant.

MARTINIUS, Matthias, théol. réformé et pédagogue, né 1572 à Freienhagen, étudia à Her-born sous Piscator, et fut tour à tour pasteur, prédicateur de la cour, prof, et recteur en diverses villes. En 1610 il fut appelé à Brème comme prof, de théol. et recteur du Gymnase illustre. Il fut un des trois délégués de cette Église au synode de Dordrecht, et regretta plus tard d'y avoir participé.

MARTYN, Henri, missionnaire aux Indes et en Perse, né 18 fév. 1781 à Truro, Cornouailles, fit de brillantes études à l'univ. de Cambridge. Amené à la foi en suite de la mort de son père, il se décida à se vouer an ministère évangélique, fut attaché à la Compagnie des Indes en qualité de chapelain et partit comme missionnaire en 1805. Fixé à Dinapore, il travailla avec un infatigable dévouement au milieu des indigènes et des Européens et traduisit le N. T. en hindoustani. Le mauvais état de sa santé et le désir d'améliorer sa traduction persane du N. T. le déterminèrent à se rendre en Perse où il eut de nombreux entretiens avec les savants et écrivit contre l'islamisme. Contraint par la maladie de retourner en Angleterre, il se mit en route pour Constantinople, mais f au milieu de son voyage à Tokat, en Arménie, 16 oct. 1812. Vie trad. de l'anglais par Guers, Genève, 1828.

MARTYR lo v. Justin. 2° Pierre, v. Ver-migli.

MARTYROLOGE, liste officielle et histoire, à l'usage de l'Église, des hommes qui sont morts, ou qui ont souffert pour la foi. C'est le développement des anciens calendriers des martyrs, qui se bornaient à mettre le nom en regard de la date. Les Grecs avaient pour le même but leurs ménologes, q. v. Le plus célèbre est celui qui fut fait par l'emp. Basile de Macédoine au 9™ siècle. En occident on connaît surtout les martyrologes de Jérôme et de Bède, quoique ceux qu'on leur attribue ne soient pas tous authentiques; et ceux de Florus. sous-diacre à Lyon vers 800, Rhaban Maur 845, et Notker (Balbu-lus) f 912. Grégoire XIII fit faire par Baronius un Martyrologe universel, comprenant les saints de tous les pays, Rome 1536; réimpr. et augmenté par le jésuite Rosweyd, Anvers 1613. Il va de soi que les martyrs de la Réforme n'y figurent pas; Crespin a comblé en partie cette lacune, au moins pour les Vallées vaudoises et les provinces du sud de la France.

MARTYRS. Ce mot grec qui signifie témoins suppose, dans l'usage ordinaire, le témoignage rendu jusqu'à braver la mort, Act. 22, 20. 1 Pier. 5, 1. Partout où se trouvent des convictions on peut trouver des hommes prêts à tout souffrir plutôt que de les renier. Toutes les religions spiritualistes, le paganisme lui-même, ont eu leurs martyrs, et l'on comprend le respect dont ils sont entourés. Il y a toujours persécution quand des idées nouvelles semblent menacer le crédit ou l'avenir des vieilles idoles, et Ton doit regarder comme complices ou responsables de ces persécutions, soit la hiérarchie religieuse, soit les pouvoirs politiques, s'ils reposent sur une base religieuse. Ce qu'il y a de caractéristique dans l'hist. des martyrs du christianisme, c'est le long espace de temps pendant lequel les persécutions n'ont cessé de se produire régulièrement, 64 à 314; preuve irrécusable de l'antagonisme profond, quoique souvent inconscient, qui existait entre les principes du christianisme et ceux de la société païenne. La vénération, peu à peu exagérée, dont l'Église honora les martyrs, s'explique non seulement par l'admiration qu'on éprouve touj. pour la force d'âme et l'énergie du caractère, pour cette imitation de Jésus-Christ poussée jusqu'au sacrifice de sa propre vie, mais encore par le relief que les persécutions donnaient, en l'accentuant, à l'antagonisme fondamental qui existe entre le monde et le christianisme, entre la chair et l'esprit. La vie terrestre était alors considérée comme si peu de chose, qu'on était tenté de regarder comme une délivrance la glorieuse mort qui affranchissait l'homme du mal et qui l'introduisait dans la félicité éternelle. De là cette soif du martyre dont les païens se moquaient. De là aussi la sévérité de l'Église contre ceux qui employaient pour s'y soustraire les moyens, même les plus légitimes, tels que la fuite; v. Lapsi. Dodwell (De paucitate mart.) a cherche à établir qu'on a beaucoup exagéré le nombre de ceux qui furent mis à mort; mais même en admettant, ce qui n'est point établi, que, sous l'influence de l'angoisse et de la terreur, les contemporains aient involontairemént grossi le chiffre des victimes, il n'en est pas moins vrai qu'il a été considérable, surtout si l'on y ajoute ceux qui furent punis par la torture, la prison, l'exil ou la privation de leurs biens. Il était impossible de ne pas honorer leur mémoire, et bientôt on leur rendit un culte; on fit de leurs tombeaux des lieux de pèlerinage, on y alla prier, on invoqua les martyrs eux-mêmes et l'on implora leur intercession. Déjà la lettre do l'égl. de Smyrne au sujet de la mort de Poly carpe recommande la célébration de la fête des martyrs, de leur jour de naissance (naissance à la vie du ciel). La piété des fidèles leur éleva des églises, on chercha à se procurer tout ou partie de leurs corps, comme si quelque chose de leur âme restait attachée à ces débris, et h> culte des reliques prit cet étrange développement qu'on lui connaît et qui aboutit à la théorie de la valeur surérogatoire des mérites des saints et à leur transfert à d'autres par le moyen des indulgences. Ainsi ce qui n'avait été d'abord qu'un pieux souvenir, un exemple rappelé, dégénéra rapidement en fausses doctrines et eu superstitions; on avait commencé par raconter leur vie, leur histoire et leur mort, on finit par Içs légendes et les faux miracles.

Plusieurs groupes de martyrs sont devenus célèbres, sans que pour cela leur authenticité soit mieux établie, ainsi:

1<> Les onze mille vierges de Cologne, massacrées ou noyées par les Huns, en 384, ou 453; fable généralement abandonnée, et dont l'origine s'explique soit par l'inscription UNDECIM M. VIRGINÉS. les onze martyres vierges, qu'on avait traduite par les onze mille vierges (Rett-berg, Gieseler, Friderich); soit, moins vraisemblablement par l'inscription: S. Ursula et Un-decimiUa F. if., Ursule et Undécimille, vierges martyres (Valesius, Leibnitz). Cette Undécimille, dont le nom signifie la fille, ne se rait d'ailleurs connue que par cette mention.

Les quarante martyrs; 40 soldats qui furent mis à mort en 320 à Sébaste, en Arménie, sous l'emp. Licinius. Comme ils refusaient de sacrifier aux dieux, on les exposa tout nus sur la glace au milieu de la nuit. L'un d'eux faiblit et renia sa foi. On le plongea dans un bain chaud pour le ranimer, mais il y mourut. Frappé de cet événement un de ses gardiens se convertit et alla prendre sa place sur la glace. Leurs cadavres furent brûlés et les cendres jetées à l'eau On célèbre leur fête le 9 mars.

Les dix mille martyrs. D'après la légende on compterait sous ce nom deux massacres distincts: l'un arrivé en 303 en Nicomédie sous Dioclétien, à la suite de l'incendie du palais impérial, que Ton attribua aux chrétiens; Eusèbe dit cependant que la cause en est inconnue. L'autre, sous Adrien et sous Antoninl serrés de près dans une émeute des Gadaréniens et des Euphratésiens(l), ils furent délivrés par un ange et se convertirent. A la demande du reste de l'armée, ils furent soumis à diverses tortures et finalement crucifiés comme le Christ. Les bollandistes eux-mêmes rejettent cette légende comme inconciliable avec l'histoire.

4° v. Massa.

MARUTHAS, év. de Tagritt, ou Maipherkat, en Mésopotamie, un des écrivains les plus distingués de l'Égl. syrienne. En 403 il vint à (Constantinople prier Arcadius d'intervenir en faveur des chrétiens auprès de Jezdegerd, roi de Perse. Envoyé une seconde fois par Théodose II auprès de ce monarque, il réussit en dépit des mages à exercer sur lui une bonne influence et à le mieux disposer pour le christianisme. Il était lié avec Chrysostome, et assista à plusieurs conciles, entre autres à celui d'Antioche contre les messaliens, 383, ou 390. On a de lui une Hist. des martyrs de la Perse, une Explic. des Évangiles, et un ouvrage liturgique, conservé dans le missel des maronites.

Assemani.

MASIUS, ou Dumas, André, né 1516 à Len-nich, près Bruxelles, un des plus grands savants et philologues de son siècle, philosophe et jurisconsulte. Secrétaire de l'év. de Constance, Jean de Weege, il demeura quelque* temps à Rome, et fut ensuite nommé conseiller de Guillaume, duc de Clèves. f 1573. Il a concouru à la publication de la Polyglotte d'Anvers (éd. Plantin 1559-1572); il a fait aussi un Comment, sur Josué, une grammaire et un dictionn. syriaque.

MASORAH, ou Massore, et Masorètes. Le mot caldéen mesar signifie transmettre; la ma-sorah est donc la transmission, la tradition. Après l'achèvement de la Guemara de Jérusalem, de savants compilateurs de l'école de Tibériade s'occupèrent, non plus de commenter, mais de fixer le texte sacré, de le mettre en sûreté, • d'élever une haie autour de la loi. » Ils comparèrent les meilleurs mss., laissèrent intact l'ancien texte (ketib, ce qui est écrit), ajoutèrent en marge leurs notes et observations (keri, ce qui doit être lu), et pour garantir le texte contre toute falsification volontaire ou involontaire, comptèrent tous les mots et toutes les lettres de chaque livre et du code entier, conservant même les lettres trop grandes, trop petites, renversées ou hors de ligne, que l'on rencontre dans le texte hébreu. A force de scrupule, ils firent des notations qui semblent avoir quelque chose de puérile, grossissant une lettre Lév. H, 42. pour marquer que c'est la lettre du milieu du Pentateuque, élevant une lettre de Ps. 80, 14. parce que c'est la lettre du milieu des Psaumes. Quant aux changements qu'ils firent au ketib en lui donnant dans le keri d'autres voyelles, les uns sont purement grammaticaux, d'autres sont des euphémismes, comme Es. 36, 12., d'autres enfin n'ont pour objet que d'affirmer la tradition. On distingue la grande Masore, plus volumineuse que le texte; la petite, dont le résumé se trouve au bas de la plupart des Bibles hébr. imprimées, et la finale, due au rabbin Jacob Ben Hhayim, Venise 1526, qui résume à la fin du volume les comment, et les principales variantes signalées. Quoique dans un domaine tout matériel et littéral, les masorètes ont rendu un vrai service aux sciences bibliques et ont complété avantageusement l'œuvre des talmudistes. Commencé au 6me ou au 7me siècle, ce travail était achevé probablement au 10me, car déjà au 11 me il sert de base aux textes de rabbi Ben Asher pour l'occident, et de rabbi Ben Naphthali pour les copies babyloniennes. V. Buxtorf, Tiberias, Bâle 1620, réimpr. 1665 par son petit-fils, et Èlie-le-Lé-vite, Masoreth Hammasoreth, trad. par Semler, Halle 1772.

MASSA candida, ou sancta, la masse sainte, ou encore les martyrs de Cyprien: on désigne ainsi un ensemble de martyrs qui furent mis à mort à Carthage du temps de Cyprien, lors des persécutions valériennes. D'après Prudence ils auraient été obligés, au nombre de 300, de se précipiter dans un four à chaux ardent. Augustin n'en mentionne que 153 qui auraient eu la tête tranchée, et il fait dériver leur nom de leur sainte et glorieuse mort. On les fête le 24 août (la Saint-Barthélemy).

MASSILIENS, v. Marseille.

MASSILLON, Jean-Baptiste, né à Hyères, Provence, 24 juin 1663. d'une famille pauvre (son père était notaire), entra à 18 ans dans la congrég. de l'Oratoire, où il avait été élevé, et professa les belles-lettres et la théol. à Pézenas, Montbrison et Vienne. Quelques discours qu'il prononça attirèrent sur lui l'attention de ses supérieurs. Il fut envoyé à Paris comme un des directeurs du séminaire de Saint-Magloire. Le succès obtenu par quelques conférences sur les devoirs des ecclésiastiques assurèrent sa réputation et le décidèrent à se présenter comme prédicateur du Jeûne et de l'A vent. Le roi le charga en 1698 d'une mission à Montpellier et en 1699 il prêcha le carême devant la cour, à l'Oratoire et à Versailles. Son premier texte fut: Heureux ceux qui pleurent I II fut tellement apprécié que de 1701-1704 il fut rappelé pour ces mêmes services du carême. Cependant Louis XIV ne lui donna point d'avancement. Le régent, plus juste, le nomma év. de Clermont 1717; en 1719 il devint membre de l'Acad. française. Après avoir prononcé l'oraison funèbre de la duchesse Élisabeth d'Orléans, sa meilleure, il se renferma dans son diocèse et n'en sortit plus, f 28 sept. 1742. On a de lui une centaine de sermons, dont dix réunis sous le titre de Petit Carême et prêchés devant Louis XV âgé de 8 ans, sont considérés comme des chefs-d'œuvre. Ce ne sont pas des discours sur la Passion, mais une série de méditations sur les devoirs des grands; parfaitement écrits, mais un peu monotones. Ses sermons sur l'Aumôme et sur le Petit nombre des élus, ont plus de vigueur et d'originalité. Ses Oraisons funèbres l'égalent presque à Bossuet; les plus remarquables sont celles de Louis XIV, et de la duchesse BL d'Orléans. Il a aussi écrit des Mystères el des Panégyriques des saints, des Mandements, des Discours synodaux, des Conférences ecclésiastiques, des Paraphrases de Psaumes, etc. Son style est doux, facile, harmonieux, plein d'onction, mais la pensée manque en général d'énergie, quoiqu'elle atteigne parfois une grande élévation. Il avait le talent qui convient à la cour, et il savait dire au roi des vérités que celui-ci pouvait entendre sans en être ni blessé, ni touché. Le régent et Louis XV l'appréciant et le protégeant sont à la fois l'éloge et la critique de son éloquence sacrée. Il a prêché la morale plus que le dogme, et sans le vouloir il a fait la régence et le 18™ siècle. Il a signé l'attestation de bonne vie et mœurs dont l'abbé Dubois avait besoin pour être nommé cardinal, et il assista au sacre de ce grand débauché, qui l'avait fait nommer év. de Clermont. La morale et la religion payèrent ainsi la dette de sa reconnaissance. Il était à la foix doux, modeste et charitable.

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MASSORAH, Massorètes, v. Masorah.

MASSUET, René, maurin, né 1665 à Saint-Ouen, Normandie; prof, de théol. et de philos, dans plusieurs maisons de l'ordre, licencié en droit, s'établit en 1703 à Saint-Germain-des-Prés, où après la mort de Ruinart, il publia le gnne vol. des Annales des bénédictins, et se consacra ensuite â la publication des Œuvres com-pl. d'ïrénée, qui parurent en 1710, avec 3 dissertations sur la vie d'Irénée, son enseignement, et les hérétiques qu'il eut à combattre.

MATÉRIALISME. On comprend sous ce nom général un certain nombre de systèmes, assez différents les uns des autres (le sensualisme, le naturalisme, le positivisme, etc.), mais qui sont d'accord sur le point de départ, c'est que tout ce qui existe provient de la matière, et sur les conclusions, c'est qu'il n'y a ni Dieu, ni âme, ni morale. Les diverses manifestations delà vie et

de l'esprit sont de simples modifications physiques ou chimiques de la matière, des combinaisons, des vibrations, des empreintes ou des sécrétions. L'homme n'est pas un être libre; il est esclave; il n'est donc pas responsable; soumis à la loi des sens, il ne peut connaître d'antre loi, et la notion du devoir lui est étrangère, comme celles de vertu, de vice, de dévouement, de reconnaissance, etc. L'égoïsme est la senle règle de sa nature. Dans la pratique le matérialiste vaut presque toujours mieux que ses doctrines. Le représentant officiel le plusanciende cette tendance est Épicure, qui succédait à Dé-mocrite et aux Cyrrhénaïques. La recherche du bonheur, de la tranquillité, de la volupté, du repos, doit être le but suprême de chacun. Ce qu'il y a de démoralisant dans cette maxime était adouci ou neutralisé par cette autre considération qu'on ne trouve de jouissances solides, vraies et durables, que dans la recherche de la sagesse et de la vertu, les plaisirs matériels ou coupables ne procurant qu'une satisfaction trompeuse ou momentanée. C'est cette doctrine qu'ont relevée au siècle dernier les matérialiste* français: non pas seulement Condillac, qui était plutôt sensualiste, mais La Mettrie dan* son Homme-machine, d'Holbach dans son système de la nature, et la plupart des encyclopédistes. C'est aussi, plus ou moins, le système qu'avait préconisé Locke, tout en maintenant la foi en Dieu, comme manifestée à l'homme par une révélation qui n'avait rien de contraire â la raison. C'est enfin le système dont parait s'enorgueillir aujourd'hui une partie de l'Allemagne philosophique: elle estime que le matérialisme est la conséquence logique et naturelle des découvertes scientifiques modernes. L'homme est le produit brut ou artificiel de ses père et mère, de sa nourrice, de l'air et du climat, de sa nourriture et de ses vêtements; il dépend des traditions de sa famille, de réduction qu'il a reçue, de ce qu'il mange et de ce qu'il boit. Ce désolant naturalisme, qui abaisse l'homme après l'avoir élevé si haut et qui lui fait payer si cher ses grandes découvertes, a Tair d'une ironie ou d'un cri de désespoir. Sous des j formes plus fines et plus élégantes, des écri- j vains français sont retombés depuis un demi- I siècle dans ce même matérialisme auquel la France paraissait avoir renoncé depuis quelle en avait éprouvé les fatales conséquences. V. Janet, le Mat. contemporain, Caro, le Matér.el la Science; Ch. Secrétan, Discours laïques,etc.

MATERNUS lo le premier év. connu deCo-logne; il vivait sous Constantin et assista 31 i au conc. d'Arles, dont il signa les décrets. Ine légende le place au 1*** siècle et le fait disciple de Pierre, qui l'aurait envoyé avec Enchère et Valerius sur les bords du Rhin; mort à Elegia,

en Alsace, il aurait été ressuscité au bout de 40 jours par le bâton de Pierre mis sur son tombeau, et serait allé fonder les égl. de Tongres et de Cologne. Canonisé.

2<> Juiius Firmicus M., auteur d'un traité apologétique: De errore profanarum religionum, adressé aux emp. Constance et Constant, vers 343-330. Il montre l'origine du paganisme dans une fausse intelligence de l'histoire biblique et dans l'apothéose d'hommes corrompus et mortels; il recommande comme un devoir chrétien l'emploi des moyens violents contre les païens. — Un ouvrage d'astronomie qui porte le même nom d'auteur, doit avoir été écrit par un autre Maternus, qui était païen et dont le style est différent.

MATHESIUS, Jean, né 24 juin 1504 à Roch-liLz en Saxe, étudia la théol. à Ingolstadt, puis vint 1528 à Wittenberg, attiré par les écrits de Luther, dont il fut pendant plusieurs années le commensal et l'ami. Recteur en 1542, pasteur de Joachimsthal, en 1545, il f en chaire, frappé d'apoplexie, 8 oct. 1565. Homme pieux, nature élevée, il est l'auteur du cantique: Aus meines Herzens Grunde, qui était l'un des favoris de Gustave-Adolphe, et de quelques autres. Devenu majoriste plus tard, il eut des doutes sur la doctrine de la justification par la foi et finit même par douter de l'efficace suffisante de la mort de Christ. Plusieurs de ses sermons ont été mis en vers par son chantre et ami Nie. Hermann.

MATHEW, ou Mathieu (le père Théobald), dominicain, né 10 oct. 1790 à Thomastown en Irlande, surnommé l'apôtre de la tempérance. Orphelin de bonne heure, il étudia à Kilkenny, puis 1810 au séminaire deMaynooth, et fut appelé. 1814 à desservir un poste dans le sud de l'Irlande. Ayant constaté que l'ivrognerie était la principale cause de la misère dans son pays, il se décida à la combattre énergiquement, commença à Cork en 1838 des prédications sur la tempérance, et parcourut successivement l'Irlande, l'Angleterre et l'Amérique, remuant les masses et recevant par milliers les adhésions de convertis qui prenaient entre ses mains l'engagement de ne plus boire de liqueurs fermentées. Il revint d'Amérique malade 1851, et f 1856 à Queenstown. Si son activité n'a pas obtenu tous les résultats espérés, et si l'enthousiasme du moment n'a pas tenu tout ce qu'il promettait, il n'en a pas moins exercé une grande et bonne influence.

MATHILDE lo la sainte; fille du comte Théo-doric, elle épousa fort jeune en 909 Henri l'Oiseleur, et devint ainsi reine de Germanie; elle en eut deux fils, Othon et Henri. Elle fonda plusieurs couvents, et s'attacha particulièrement à celui de Quedlinbourg. Ses abondantes et ruineuses aumônes la firent en partie interdire pàr son fils Othon-le-Grand et elle se retira dans ses terres jusqu'au moment où la femme d'Othon eut décidé son mari à une démarche de réconciliation. Elle eut aussi beaucoup à souffrir des longues divisions qui éclatèrent entre Henri, son fils préféré, et Othon, mais elle réussit à les rapprocher. Depuis la mort d'Henri 955 elle ne posa plus le deuil. Elle perdit encore un autre lils, Bruno-le-Grand, archev. de Cologne, et son petit-fils Guillaume, arch. de Mayence. Elle f à Quedlinbourg 14 mars 968, laissant une grande réputation de piété et de charité.

2o Autre sainte, fille de Malcolm, roi d'Écosse, mariée en 1100 à Henri 1er, roi d'Angleterre, fut sur le trône l'exemple de toutes les vertus, t 30 avril 1118.

3° La grande ami de eGrégoire VII. Fille de Boniface II marquis de Tuscie, et de Béatrix, elle naquit en 1046 et monta sur le trône en 1076. Mariée d'abord avec Godefroy-le-Bossu 1063, puis avec Guelfe V de Bavière 1089, elle se sépara de ses deux époux, parce qu'ils n'étaient pas assez dévoués au saint-siège: quelques-uns prétendent même que ces mariages furent purement fictifs, et qu'elle ne les contracta que pour pouvoir disposer librement de ses biens en faveur du pape. Cette donation faite en 1076, elle la renouvela en 1102. Avec toutes les qualités de la femme et de la princesse, elle avait hérité de sa mère le dévouement politique à la cause des papes, et elle fut le plus ferme appui de Grégoire VII; c'est dans son château de Canossa que Henri IV subit l'humiliation que lui imposa le pontife. Elle fit longtemps la guerre aux empereurs, mais la guerre éclata surtout après sa mort à propos de son héritage, qui faisait le pape maître de toute l'Italie. Finalement les deux puissances en vinrent à se partager les dépouilles en litige.

MATINES, latin matutinœ, la première des prières indiquées pour chaque jour dans le bréviaire. Elle commence par le Pater, Y Ave et le Credo. Puis viennent le Ps. 94, quelques hymnes, quelques lectures et le cantique d'Ambroise qui termine la nuit. Le mot allemand de Mette, qui désigne les matines en général, mais plus spécialement celles de nos grands jours de fêtes dans l'Égl. catholique, et qui peut dériver de matutina, a été dérivé aussi de Cantus metten-sis, le chant de Metz, en souvenir de la célèbre école de chant fondée dans cette ville par Charlemagne. Les matines se disent d'ordinaire par le prêtre seul, sauf aux grandes fêtes, et dans les couvents où elles se chantent solennellement avant le jour.

MATTER, Jacques, né 1791 à Alt-Eckendorf, prof, d'hist. à Strasbourg, directeur du gymnase, inspecteur d'acad. depuis 1828, puis inspecteur général des études en France, id. des

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bibliothèques; enfin 1846 prof, de la philosophie de la religion, f 1864. Auteur de nombreux ouvrages, dont deux couronnés: Hist. de l'école d'Alexandrie, Hist. génér. du christianisme, Hist. critique du gnosticisme, le Visiteur des écoles, Influence des mœurs sur les lois, Hist. des doctrines morales et politiques des 3 derniers siècles, Saint-Martin, Swedenborg, le Mysticisme au temps de Fénelon, etc. Il a dirigé de 1835 à 1849 une revision des versions françaises de la Bible.

MATTHiEI, Chrét.-Fréd., né 1744 à Grôst, Thuringe, prof, à Wittenberg et à Moscou, où il f 1811. Adversaire décidé de Griesbach en matière de critique, il n'admet pas des familles de mss., et met les mss. de Moscou, c.-à-d. la recension constantinopolitaine, beaucoup au-dessus des autres. Il en avait collationné 103, et il a eu le tort de compromettre un système déjà faible et factice, par une polémique hautaine et passionnée.

MATTHIESEN, ou Matthiszeen, boulanger de Harlem, gagné aux idées anabaptistes, devint le chef des melchiorites. Se donnant pour Énoch et revendiquant les fonctions de prophète, il suivit Bockhold à Munster, où il se mit à la téte des plus violents, chassa ceux qui ne pensaient pas comme lui, brûla les tableaux, les manuscrits et les livres, sauf la Bible, et périt 1534 dans une sortie que son fanatisme avait provoquée.

MATTHIEU lo v. Mathew. — 2o Matthieu Paris (on ignore d'où lui vient ce second nom;, né en Angleterre vers la fin du 12m<* siècle, bénédictin de la congrég. de Cluny à Saint-Alban, où il entra 1217. Un des hommes les plus savants de son temps, il était très estimé d'Henri IU et d'Innocent IV. Celui-ci l'envoya même en Nor wège 1248 pour réformer le couvent de Holm et d'autres. On lui doit une chronique intitulée Hist. Angliœ major, qui va de 1066 à 1259, qui avait été commencée et qui fut continuée par d'autres. Il raconte librement ce qu'il a à dire sur les désordres des papes, et jette de la lumière sur les circonstances de l'Allemagne. Il a fait lui-même un abrégé de sa chronique: Hist. Minor, et a écrit la vie des abbés de Saint-Alban.

MAULBRONN, ancien couvent de cisterciens dans le diocèse de Spire; fondé 1148. Lors de la Réforme il servit de retraite aux moines qui désiraient continuer la vie commune, mais en 1557 il passa lui-même à la Réforme et fut employé comme école. Il s'y trouve auj. un petit séminaire. Deux colloques y eurent lieu entre théologiens: l'un du 10 au 15 avril 1564 sur la doctrine de la Cène, qui n'aboutit pas, les palatins soutenant leur point de vue d'après les paroles de l'institution, et les wurtembergeois s'en tenant au fait de l'ubiquité; le second, janv.

1576, entre badois et wurtembergeois, qui servit de préparation à la Formule de concorde votée à Torgau.

MAUR lo v. Raban. — 2o Disciple de Benoit de Nursie, accompagna son maître à Subiac et au mont Cassin. La légende lui prête d'ayoir marché sur les eaux. On dit aussi qu'il fut envoyé en France pour y établir la règle de son ordre, f vers 584. — 3o autre moine de bénédictins, fondateur et premier abbé de Glanfeuil en Anjou, au 7** siècle.

Congrégation de Saint -Maur; célèbre association de bénédictins, qui s'organisèrent en France vers 1613 près de Vannes par les soins du moine Didier de Vannes, qui introduisit dans l'ordre quelques réformes. La congrég. fut autorisée et reconnue en 1621 et 1627, et jeta dès lors un vif éclat par le grand nombre de savants qu'elle produisit et par ses importantes publications. C'est Tariffe, son premier général, qui lui imprima sa direction scientifique. Les novices devaient faire 5 années d'études de théol. et de philos, avant d'être ordonnés prêtres. De là ils étaient envoyés dans une académie de l'ordre, soit pour y remplacer les professeurs sortants, soit pour y faire des travaux particuliers. La congrég. ne s'occupa d'abord que d'étudier ses origines et sa propre histoire, celle de ses couvents et de ses grands hommes; mais peu à peu elle étendit le cercle de ses recherches. Elle eut à lutter contre le fondateur de l'ordre des trappistes, Rancé, qui regardait l'étude comme incompatible avec l'ascétisme religieux, et contre les jésuites qui regardaient une culture sérieuse comme dangereuse et favorisant l'émancipation de la pensée. A l'époque de leur plus grande prospérité, les maurins comptèrent jusqu'à 180 couvents, dont les plus célèbres furent Saint-Germain-des-Prés, la maison-mère, près Paris; Saint-Denis, Saint-Be-noit-sur-Loire, Marmoutier, Vendôme, Saint-Rémi de Reims, Fécamp, etc. La révolution supprima tous ces monastères. C'est en 1833 seulement qu'une nouvelle maison fut rouverte, à Solesmes, diocèse du Mans, mais l'ambition de dom Guéranger ne lui a pas fait une brillante réputation (v. des Pilliers). Parmi les maurins distingués, on nomme Mabillon, Montfaucon, Martène, Tillemont, DuCange, Tassin, etc.

MAURES (de l'arabe maghreb, occidental), nom qui désignait dans l'origine les habitants de la Mauritanie, jusqu'en Numidie, et qui a fini par s'appliquer indistinctement à toutes les populations du nord de l'Afrique occidentale, toutes musulmanes, croisées surtout de sang arabe, mais mélangées aussi des différentes races qui s'étaient succédées comme maîtres du pays. Ce qui les distingue des Kabyles, c'est moins la question de race ou de religion que leur genre de vie et leurs habitudes, ces derniers, les Kabyles, étant plus nomades et plus parqués en tribus, tandis que les Maures vivent davantage dans les villes, adonnés au commerce et à diverses industries. Le point saillant de leur histoire est la conquête qu'ils firent de l'Espagne au siècle, conquête qui se divise en deux périodes distinctes: la première plus purement arabe, avec Cordoue pour centre; la seconde plutôt maure, ou mauresque, ayant Grenade pour capitale. Musa, de Mauritanie, et son général Tarik ayant mis fin 711 à la domination des Visigoths en Espagne, s'y installèrent eux-mêmes et cherchèrent à y établir leur puissance, mais les éléments étaient trop disparates pour qu'il fût possible d'y constituer une unité, et c'est en 756 seulement qu'Àbderrhaman ayant été chassé de Bagdad réussit à installer définitivement son califat à Cordoue; il y amena la culture arabe, et ses successeurs marchèrent sur ses traces. Sous Abderrhaman III en particulier les sciences et les arts fleurirent au point d'exercer une influence considérable sur toute l'Europe occidentale; ce fut l'âge d'or des musulmans, 912-961, et l'on citerait difficilement un pays chrétien qui se soit élevé à un pareil degré de développement et de prospérité. Ils se montrèrent d'abord bienveillants pour les chrétiens, leur laissant toute liberté de culte et jusqu'à leurs tribunaux; des conciles même se réunirent librement, et ni les églises, ni les monastères ne furent inquiétés; ils ne devaient que l'impôt. Les Maures ne sévissaient que lorsqu'un zèle indiscret les attaquait dans leurs croyances ou faisait des prosélytes. Mais quand les puissances chrétiennes leur déclarèrent la guerre, le fanatisme religieux se réveilla et de cruelles persécutions eurent lieu. Les mozarabes, chrétiens en petit nombre disséminés au milieu des Maures, et se rattachant à Rome plutôt qu'aux puissances envahissantes, furent épargnés, ainsi que les juifs qui avaient eu trop à se plaindre des chrétiens pour être suspects aux musulmans, et qui virent fleurir à cette époque leurs plus belles écoles. Peu à peu les princes chrétiens gagnèrent du terrain, les Asturies, laVieille-Castille, Léon, la Navarre, la Catalogne, chassant devant eux les Maures et les refoulant en Afrique, jusqu'à ce qu'enfin, sous Ferdinand et Isabelle, Grenade elle-même fut prise 1491. Ce fut la fin de la domination musulmane. Les Maures eurent la permission de rester dans le pays et on leur laissa quelque temps le libre exercice de leur culte. Mais le cardinal Ximenès souleva contre eux une véritable croisade d'extermination; un grand nombre furent baptisés par force ou par ruse. Le Coran et leurs livres religieux furent brûlés. Philippe II leur interdit tout port d'armes, ainsi que l'usage de leur langue, le costume national et même des noms arabes, 1556. Ils se soulevèrent, furent vaincus, internés au centre du pays, soumis à de nombreuses vexations. A la suite de nouveaux soulèvements Philippe III décida de les chasser tous d'Espagne 1609, et cette mesure fut exécutée avec la plus cruelle barbarie. L'Espagne perdit ainsi un million d'hommes intelligents et laborieux et, par contrecoup, tomba sans résistance entre les mains d'un catholicisme sombre et fanatique, dont l'influence devait achever l'œuvre de décomposition commencée par Philippe II et le saint-office.

MAURICE lo v. Légion thébéenne. — L'hist. des saints grecs mentionne un autre officier de ce nom, qui, sous Dioclétien, a été mis à mort, avec 70 de ses soldats, à Apamée en Syrie.

3° Maurice, ou Moritz, landgrave de Hesse, fils de Guillaume et petit-fils de Philippe-le-Magnanime. Né 25 mai 1572, il reçut une éducation soignée, et apprit le grec, l'hébreu, le latin, le français, l'italien, l'anglais, l'espagnol et le magyare. A l'âge de 20 ans, en 1592, il succéda à son père. La Hesse avait jusqu'alors tenu une position intermédiaire entre le luthéranisme et la doctrine réformée; il se décida franchement pour la Réforme et résolut de l'introduire dans son Église. Cette faute lui coûta cher. En 1604, sur le préavis de Bâle, de Genève, et de ses surintendants, et sans en avoir référé à un synode général, il ordonna: que les prédicateurs s'abstiendraient, en parlant du Christ, de le faire dans le sens de l'ubiquité; que le commandement du décalogue relatif aux images serait rétabli, que les images seraient enlevées des temples, et que le pain de la Cène serait rompu. Il résulta de cet acte d'autorité des troubles intérieurs; il rencontra une violente opposition chez son peuple, et surtout il fournit au landgrave Louis de Darmstadt, le prétexte de lui contester ses droits au duché, comme ayant violé la condition stipulée par le testament de son oncle Louis de Marbourg, f 1604, portant qu'il maintiendrait l'état religieux tel qu'il le trouverait au moment de sa mort. Après de longs débats, luttes et procès, il se décida à abdiquer en faveur de son fils 17 mars 1627, et f 1632 à Eschwege, triste exemple des conséquences de ce droit de reforme religieuse que le protestantisme allemand n'a que trop souvent accordé à ses princes.

4o Maurice de Saxe, né 21 mars 1521 à Frei-berg; fils d'Henri-le-Pieux et de Catherine de Mecklembourg, reçut une brillante éducation, passa quelque temps à Dresde auprès de son oncle Georges, et à Mayence chez Albert de Brandebourg, puis à Torgau chez son cousin Fréd.-le-Magnanime. Ainsi que son père, il embrassa le protestantisme en 1539, mais désapprouva les procédés employés par celui-ci pour introduire la Réforme dans ses États. Il se retira à la cour de Philippe de Hesse dont il épousa en 1541 la fille Agnès à l'insu de son père. Ce dernier étant mort la même année, il lui succéda, travailla à rétablissement de la Réforme, tout en abrogeant certaines mesures trop autoritaires ou trop précipitées prises par son père; fonda d'importantes écoles, mais refusa de se joindre à la ligue de Smalcalde, pour ne pas déplaire à Charles-Quint. Il ne tarda pas à se brouiller complètement avec l'électeur Jean-Frédéric, et à associer sa fortune à celle de l'empereur, dont il servit vaillamment les intérêts en Hongrie et en France, sous prétexte que la religion n'y était nullement intéressée. Cela lui valut le titre d'électeur, et lorsque la guerre éclata entre Charles et les princes alliés, il conclut à Ratisbonne avec Charles un traité secret, qui lui garantissait en échange de son appui ses Etats et ses droits. Après la bataille de Mtlhl-berg, Jean-Frédéric ayant abdiqué, la branche albertine, en la personne de Maurice, fut investie officiellement de l'électorat et de presque tous les biens de la branche ernestine, 1 juill. 1547, Augsbourg 24 févr. 1548. Cependant il finit par s'apercevoir que l'emp. ne cherchait qu'à se soumettre tons les princes de l'Allemagne en les usant les uns par les autres, et soit esprit d'indépendance, soit qu'il vît le protestantisme menacé par l'Intérim d'Augsbourg, soit enfin qu'il fût froissé de la déloyale captivité de son beau-père Philippe de Hesse, il quitta brusquement le parti de l'empereur, publia un manifeste devant Augsbourg pour justifier ce revirement, alléguant que Charles avait violé sur plusieurs points ses engagements et opposa l'Intérim de Leipzig, rédigé par Méianchthon, à celui d'Augsbourg. L'ernp. vaincu dans le Tyrol fut obligé de traiter, Passau 2 août 1552; il promit une amnistie générale, accorda la liberté de conscience, et mit Philippe en liberté. Maurice combattit encore les Turcs en Hongrie, puis chargé de réduire son ancien ami Alb. de Brandebourg qui refusait de se soumettre au traité de Passau, il fut grièvement blessé à Sievers-hausen, et f le surlendemain. H juill. 1553. Sa fille Anna épousa en 1561 Guillaume-le-Taci-turne. Profond politique et vaillant guerrier, Maurice était en même temps un homme tout d'impressions et passionné. Après avoir un moment compromis la cause protestante par ses tergiversations, il l'a finalement sauvée en renonçant à servir l'ambition de Charles-Quint.

MAURINS, v. Maur.

MAURY, Jean-Siffrein, né 26 juin 1746 à Vauréas, comtat Venaissin, fils d'un pauvre cordonnier, étudia la théol. à Avignon, vint 1765 à Paris, se fit connaître dès 1766 par un éloge de Stanislas roi de Pologne et par une oraison funèbre du dauphin; puis par des discours sur les bienfaits de la paix, des panégyriques de saint Louis, de saint Augustin, un éloge de Fénelon, une étude sur Charles-Quint, etc. Élu membre de l'Académie en 1785, il demeura à Paris, prédicateur renommé, et fut nommé en 1789 député du clergé aux États Généraux où il se distingua comme chef du parti clérical et monarchique, habile & traiter toutes les questions financières ou autres; luttant souvent avec avantage contre Mirabeau, défendant l'Église en toute occasion, et protestant contre le décret qui constituait le roi et sa famille prisonniers après leur fuite de Paris. En 1791 il se rendit en Allemagne; de là en Italie, à Rome. Le pape l'envoya comme légat an couronnement de François II, emp. d'Allemagne, puis à Francfort; en 1794 il le nomma archev. in partibus de Nicée; en 1796, cardinal et év. de Monte-fiascone. Louis XVIII le fit son ambassadeur à Rome en 1799, ce qui ne l'empêcha pas de se rallier par lettre à Napoléon, 1804, qui lui permit de rentrer en France, et le nomma en 1810 archev. de Paris, en remplacement du cardinal Fesch. Il administra son diocèse sans avoir été autorisé par le pape, et lors de la chute de l'empire il se rendit à Rome pour se justifier, mais il fut enfermé au château Saint-Ange, où il passa plusieurs mois; de là dans un couvent; fut dépouillé de son diocèse, et f 1817 dans la retraite. Il avait mis de grands talents au service d'une grande ambition. Comme littérateur, son principal ouvrage est son Essai sur l'éloquence de la chaire, Paris 1810. Vie, par Poujoulat, et d'Haussonville.

MAXENCE, fils de Maximien et gendre de Galère, devint auguste par la mort de Constance-Chlore. A la suite d'une émeute des prétoriens et de la ville de Rome contre Sévère, il s'empara de la pourpre impériale et, de concert avec Constantin, Licinius et Maximin, gouverna l'Italie et l'emp. romain en prince tyrannique et débauché. Il persécuta cruellement les chrétiens, fut vaincu par Constantin sous les murs de Rome, et se noya dans sa fuite 312, le pont Milvius s'étant écroulé sous lui.

MAXIME lo Claude-Pupien Maxime, emp. romain, successeur de Gordien, nommé à l'empire avec Balbin par le sénat, qui l'opposa à Maximin, 237. Après quelques mois paisibles, ils furent massacrés par les gardes prétoriennes, parce qu'ils voulurent rétablir la discipline.

2o Max. Magnus, tyran des Gaules, se fit proclamer emp. 381 ou 388 et s'établit à Trêves; vaincu par Théodose en Pannonie, il fiit massacré 388.

3° PetroniusMax., emp.d'occident, renversa Valentinien DI 455, et contraignit Eudoxie sa veuve à l'épouser. Pour se venger, elle appela Genséric et lui livra Rome. Max. ne songea qu'à fuir et fut lapidé par le peuple.

4o Valerius Max. V. Valère.-

5° Maxime de Tyr, philos, platonicien du 2™* siècle, connu par 41 discours ou dissertations sur des questions philosophiques (trad. par Combe-Dounous 1802). Il avait beaucoup voyagé. On a cru à tort qu'il avait été l'instituteur de Marc-Aurèle.

60 Év. de Turin au milieu du 5m« siècle, prêcha avec succès en Lombardie et assista 451 au synode de Milan, en 465 à celui de Rome. Ses écrits, surtout ses homélies renferment d'utiles renseignements sur ce qui restait encore de paganisme à son époque.

7° Philos, platonicien éclectique, un des maîtres et amis de Julien, qui le poussèrent àapos-tasier.

8° Païen de Madaura en Afrique, écrivit à Augustin pour justifier le monothéisme philos, païen; connu surtout par la réponse d'Augustin.

9° Auteur (chrétien) d'un Fragment sur la Hulè et sur l'origine du mal; v. Môller, Cos-mol., et Gieseler.

10° Un des ennemis de Grég. de Naziance, pendant son patriarcat de Constantinople.

Ile Abbé de Lérins, év. de Riez, f 460. Son corps est dans la cathédrale de cette ville.

12° Abbé de Constantinople, combattit les monothélètes el fut exilé pour sa foi. f 662.

MAXIMIEN-Hercule (Marcus Aurelius Vale-rianus), emp. romain, né à Sirmium, Panno-nie, vers 250; simple soldat, s'éleva de grade en grade jusqu'à être associé à l'empire par Dioctétien. A son tour il s'associa Constance Chlore. Lors du partage de l'empire 292, il eut pour lot l'Afrique et l'Italie et se fixa à Milan. Démissionnaire en 305, il regretta sa résolution et reprit la pourpre 306* quand son fils Maxence fut devenu auguste; mais ayant voulu dépouiller ce fils à qui il devait la couronne, il dut s'enfuir, et se rendit dans la Gaule auprès de Constantin qui avait épousé sa fille Fausta: dévoré d'ambition il voulut aussi faire assassiner son gendre, mais le complot fut découvert, et il finit par s'étrangler à Marseille dans sa prison, 310.

MAXIMILIEN 1° martyr, qui doit avoir été cnis à mort en 284 dans sa ville natale de Cilly, Styrie, pour avoir refusé de sacrifier à Mars. Une biographie du 13me siècle le fait aussi archev. de Lorch. Le culte dont on l'entoura de bonne heure en Bavière et en Styrie témoigne des succès de l'œuvre missionnaire.

2° Saint, martyr en Numidie, 295.

3° Maximilien II, né 1527 à Vienne, fils de Ferdinand I**; roi des Romains en 1558, de Hongrie en 1563, emp. d'Allemagne en 1564.

Élevé par Wolfgang Stiefel, qui était luthérien, il se montra favorable au protestantisme et le prouva en choisissant pour son secrétaire particulier Jean-Sébastien Phauser, qui avait été le chapelain de son père; il lisait volontiers les écrits de Luther, de Mélanchthon et de Brenz, et entretenait les relations les plus amicales avec les électeurs de Saxe et du Palatinat, ainsi qu'avec Philippe de Hesse. Il intervint même pour assurer aux protestants des avantages dans la Paix d'Augsbourg. Mais il n'alla plus loin. Il parut même un peu se refroidir par la suite, soit qu'il fût influencé par les traditions paternelles, soit qu'il cédât aux instances de sa femme, Marie, fille de Charles-Quint, ou de sa sœur Jeanne de Portugal, dirigée par le jésuite Rodrigue, par l'év. Hosius et par le cardinal Commendone; soit enfin par politique, par amitié pour l'Espagne et pour affermir la puissance de la maison de Habsbourg. Il ne pouvait trouver un appui suffisant dans les princes évangéliques, trop divisés entre eux. Ainsi en 1562, lors de sa nomination comme roi des Romains, il remplaça Phauser par un chapelain catholique, et en 1571, lorsque s'ouvrit la succession au trône d'Espagne, il se rapprocha des États cathol. et ne se prononça même pas franchement en faveur de la liberté religieuse. En 1568 il accorda aux.châteaux et aux nobles l'exercice du culte évangélique dans leurs domaines, et publia en 1571 une circulaire, inspirée par Chy-trâus, qui réglait pour l'Autriche la situation du protestantisme. Élu roi de Pologne après le départ du duc d'Anjou, il trouva un rival en Étienne Bathori, et il se disposait à défendre ses droits par la force, quand il f 1576, pendant la diète.

MAXIMIN 1° Julius-Verus, né en Thrace, de parents pauvres. D'abord pâtre, puis soldat, très bien doué, il se fit aimer d'Alex. Sévère et de ses soldats. Il fut appelé à l'empire après que Sévère eut été assassiné, et fit de nombreuses guerres; mais il se rendit odieux par ses cruautés et se montra un ardent persécuteur des chrétiens. Remplacé sur le trône par le sénat, il quitta la Germanie plein de fureur pour aller se venger en Italie, mais au siège d'Aquilée il fut assassiné par ses propres soldats, 238. Il était d'une force et d'une taille colossale; sa voracité n'était pas moins grande.

2° Caïus-Galerius-Valerius M., fils d'un berger de Thrace, berger lui-même, césar en 305, auguste en 307, empereur en 311 avec Constantin et Licinius, ennemi acharné des chrétiens, se brouilla avec ses collègues, fut vaincu par Licinius à Andripople, s'enfuit sous un déguisement, et f à Tarse 313; on croit qu'il se suicida. C'était un ivrogne; il avait même eu la précaution d'exiger qu'on n'exécutât que le leu-demain les ordres qu'il donnerait sous l'influence du vin.

3° V. Juventin.

MAYENCE. Le catalogue du moine Megen-fried, de Fulda, composé au 10®« siècle, donne pour fondateur à l'égl. de cette ville, et pour premier évêque, Clément disciple des apôtres; il lui prête aussi quelques évêques qui ont combattu l'arianisme, et un martyr, Alban, décapité, qui, à l'instar de plusieurs autres, a porté sa tête jusqu'au lieu de la sépulture. Mais le premier év. authentique est Sidoine, du 6me siècle, célèbre comme constructeur d'églises. Pépin fit de Mayence un archevêché, dont Bom-face fut le premier métropolitain, et l'importance de ce siège alla croissant sous ses successeurs, comprenant Liège, Cologne, Utrecht, Spire, Prague, Strasbourg, Constance, etc. L'archev. était l'archichancelier de la Germanie, vicaire de l'empire en cas de vacance, occupant le premier rang parmi les 7 électeurs. Nommés tantôt par les chapitres, tantôt par les rois avec l'agrément du peuple, quelquefois par les emp. ou par les papes, ces dignitaires constituaient une véritable puissance et l'on comprend que l'élection fût vivement disputée pendant les luttes et les rivalités du moyen âge. Tout le territoire environnant Mayence, et depuis 1462 la ville elle-même, qui avait été jusque là ville libre, était soumis au prince-archevêque, ajoutant ainsi à son pouvoir spirituel des forces matérielles que les titulaires s'appliquaient soigneusement à augmenter à chaque nouvel avènement. Parmi les archev.de Mayence les plus illustres, et il y en a eu beaucoup, on remarque, après Boniface; Raban Maur, Willigis qui donna à la ville ses armoiries et qui construisit la cathédrale; Bardo qui la rebâtit après qu'elle eut été brûlée; Siegfried 1060-1084, qui passa au parti de Grégoire VII, et 'qui faillit être tué par le clergé à Erfurt, lorsqu'il publia la bulle imposant le célibat; Rudhard qui, en expiation de la part qu'il avait prise à une cruelle persécution des juifs, bâtit le couvent de Johannisberg, où il fut enterré; Adolphe Iw, qui érigea l'univ. d'Erfurt 1389; Diether, celle de Mayence 1477; Albert II de Brandebourg, 1514-1545, qui accapara le commerce des indulgences, à cause des nombreuses dettes de l'archevêché; qui combattit violemment la Réformation, quoiqu'il fût obligé de la subir dans la Hesse et dans la Thuringe, et qui appela les jésuites en 1542; Joseph d'Erthal, le dernier archev.; il signa la Ponctation d'Ems contre Rome, s'appuya sur la Prusse contre l'Autriche, et prit pour coadju-teur Théod. de Dalberg. A l'arrivée des Français 1792, l'électorat fut sécularisé, l'archevêché transféré à Ratisbonne, Dalberg nommé chancelier du royaume et primat d'Allemagne, ne conservant plus qu'une petite partie de son diocèse. Le concordat rétablit Mayence comme évéché, avec Joseph-Louis Colmar comme titulaire; il f 1818, et le siège resta vacant 11 ans; Joseph Vitus fut nommé en 1829, son diocèse comprenant la Hesse des deux rives, et les conflits entre l'État et l'Égl. furent momentanément écartés; mais ils éclatèrent lorsqu'en 4849 le pape refusa de ratifier l'élection du prof. Léopold Schmidt, de Giessen, et nomma à sa place l'ardent Ketteler, qui a fait de Mayence l'une des places fortes de l'ultramontanisme.

MAYER, Jean-Fréd., luthérien, théol. de combat. Né 1650 à Leipzig, fils de pasteur, il occupa successivement divers postes, k Strasbourg, Leissnig, Grimma, Wittenberg; fut appelé k Hambourg comme pasteur et directeur du gymnase, et à Kiel comme prof, sous les auspices de Christian V, de Danemark. D'abord ami de Spener, il s'en sépara lorsque le schisme éclata entre la piété vivante et l'orthodoxie morte. Son animosité s'accrut en suite de Fatti -tude que prit Spener, comme président du consistoire, lors de son déplorable divorce. Il s'attaqua surtout au pasteur Horb, gendre de Spener, ainsi qu'à ses collègues qu'il traitait de horbistes, et demanda qu'on leur fît jurer, par écrit, qu'ils ne s'écarteraient en rien des livres symboliques. Son talent de parole mit le magistrat et le peuple de son côté. Charles XII l'appela en 1701 à Greifswald, comme chancelier de l'univ. et surintendant de la Poméranie. f 1712 à Stettin où il s'était réfugié à cause de la guerre. Il a laissé 378 écrits différents, mais très peu d'une valeur sérieuse.

MAYNOOTH (Collège de), séminaire cathol. d'Irlande, situé dans le comté de Kildare;crété en 1795 parle parlement britannique,avec une dotation annuelle de 8000 livres (200,000 fr.). Jusqu'alors les ecclésiastiques irlandais allaient fkire leurs études dSns les collèges du continent, Douai, Rome, etc.; car lorsqtTen 1560 l'Égl. anglicane devint officiellement l'Égl. nationale d'Irlande, les catholiques perdirent à la fois leurs biens et le droit d'avoir des collèges et des séminaires. Mais la révolution ayant supprimé les collèges irlandais en France, en Espagne et dans les Pays-Bas, il fallut bien pourvoir au recrutement du clergé, et Maynooth fut fondé. Quoique sous la surveillance nominale de l'État, ce collège est dirigé en réalité par les év. romains, et l'on comprend qu'ils prêchent à leurs élèves la haine de l'Égl. établie; on l'a vu lors de l'agitation de 1829 pour le Rappel. La dotation a été portée en 1845 k 20,000 Liv. (500,000 fr.) par le ministère de Robert Peel, après une discussion qui passionna toute l'Angleterre. Parmi les opposants à ce bill on comptait tous les dissidents et un grand nombre de catholiques décidés à ne rien accepter de l'État; en outre, des hommes qui voyaient dans cette mesure une atteinte aux droits de l'Église établie; enfin tous ceux que scandalisait l'esprit jésuitique dont était animé le séminaire. Ce vote fut à la fois un subside matériel et un encouragement donné aux catholiques à poursuivre leur agitation; on peut le considérer comme le premier coup porté à l'anglicanisme en Irlande; le ministère Gladstone lui porta le dernier par son bill de désétablisse-ment, juillet 1869. On ne leur en a pas su gré.

MÉCHITÀR, ou Mekhitar, surnom qui signifie Consolateur. Manuk, né 7 févr. 1676 à Sé-haste, Asie Mineure, de parents pauvres et pieux, entra à 14 ans au couvent de la Sainte-Croix, près Sébaste, où il se distingua par son amour pour l'étude, et où il fut ordonné diacre. Il y composa des hymnes, dont plusieurs se chantent encore dans l'égl. arménienne. La Bible et les pères étaient ses lectures favorites. 11 accompagna un vieux et pauvre archevêque à Etchmiazin, principal centre de la science arménienne, et, touj. désireux de s'instruire, il fit d'autres voyages et fut mis en relation avec des prêtres romains, qui naturellement tournèrent ses regards vers Rome. Il résolut de s'y rendre, mais une grave maladie épuisa ses ressources et l'obligea de rentrer à son couvent. En 1696 il fut consacré prêtre, et en 1699, au couvent d'Erzeroum, où il prit le nom de Mechithar, il reçut le titre de Wardapet, c.-à-d. docteur en théologie, et fut chargé de l'enseignement. Il se proposait surtout de développer la vie religieuse de sa nation, de former des missionnaires et d'établir des relations avec Rome. Il se rendit dans ce but à Constantinople, où il avait déjà passé quelques mois comme prédicateur, chercha à concilier les Arméniens qui étaient divisés en deux partis, et n'ayant pu y réussir, il se fit catholique, mais secrètement. Il déguisa sous le nom d'imprimerie pour la publication de livres religieux arméniens, l'institut missionnaire qu'il ouvrit le 8 sept. 1701; mais ayant fini par prêcher la soumission au pape, il s'attira la haine et les persécutions de ses anciens coreligionnaires, et s'enfuit 1703 à Smyrne, puis dans la Morée, qui appartenait alors aux Vénitiens. Quand ceux-ci perdirent cette province, il dut fuir de nouveau et se rendit à Venise, où il vécut quelque temps misérablement, jusqu'à ce que 1717 le sénat lui donna l'île de Saint-Lazare. Là avec l'aide de riches Arméniens il rétablit son couvent, qu'il peupla de moines de son pays; ils prirent de lui le nom de méchitarites, ou mékhitaristes, et s'adonnèrent à l'étude des Écritures, des classiques arméniens et des pères de l'Église. Dans le but de ranimer la vie nationale et religieuse de ses compatriotes, il composa une gramm. arménienne, un Dictionn. de la même langue, et publia de nombreux ouvrages religieux, entre autres une trad. de la Bible. Après sa f 27 avril 1749, ses successeurs continuèrent son œuvre; leur biblioth. fut bientôt une des plus riches en mss. arméniens, et leurs presses n'ont cessé de fonctionner et de rendre des services à la littérature arménienne. Ils ont donné ainsi une meilleure trad. de la Bible, 1804. et des trad. de la Chronique d'Eusèbe, d'Éphrem le Syrien, de Philon, etc.; de même une Chronique arménienne, les œuvres de Narsès. etc. Ils se divisèrent en 1773, et quelques-uns s'établirent à Trieste, puis 1810 à Vienne. Ils ont des succursales à Padoue, et depuis 1846 à Paris. Leurs rapports avec la Propagande de Rome sont passablement tendus.

MECHTHILDIS lo fille du comte Berthold d'Andechs, née 1125, mise déjà en 1130 au couvent de Diessen, Bavière, dont elle devint l'ab-besse en 1153. Par ordre de l'évêque elle fut chargée de réformer le couvent d'Edelstetten, dont elle assura la prospérité. Elle retourna dans son couvent avant sa f H60.

2o Comtesse de Hackeboni, née à Eisleben, fut mise à 7 ans au couvent bénédictin de Ro-desdorf, et passa 1258 avec les autres nonnes à Helpede. Ses visions et révélations, qui furent recueillies par un ami, montrent un grand sens religieux et une profonde connaissance de la Bible.

MECKLEMBOURG. Ce double grand-duché, borné au nord par la Baltique, tire son nom de l'ancien village de Mikilinborg. Habité d'abord par les Obotrites, il fut occupé ensuite par les Hérules. les Vandales et les Wendes; la maison de Mecklembourg est la plus vieille de l'Europe et ses ducs s'appellent encore princes des Vandales; ils prétendent remonter à Genséric. L'Évangile fut apporté dans ce pays du temps de Charlemagne par des moines de la Nouvelle-Corbie, dirigés de Brème ou de Hambourg; mais son établissement qui eut dès l'abord un caractère trop politique, fut souvent compromis par les guerres, et sous les derniers carlovin-gieus il avait entièrement disparu. L'év. Adal-ward de Verden 931, puis Adalbert de Brème avec l'appui du prince Gottschalk 1043, firent de nouveaux essais d'évangélisation, fondèrent des couvents, créèrent des évêchés, mais leur œuvre périt en partie sous le prince suivant. C'est seulement sous Henri-le-Lion 1161 que le christianisme obtint une existence assurée et définitive; Henri vainquit Niclot, fit mettre à mort Wertislaw, l'aîné de ses fils, et obligea le second, Pribislaw, à se faire baptiser; il eut pour collaborateur spirituel dans cette campagne J'archev. de Brème. Dès lors l'œuvre fut fixée;

il y eut des évêchés à Lubeck et à Ratzebourg, une abbaye de cisterciens à Doberan H 70, puis des prémontrés. Vicelin de Lubeck et son successeur Gerold favorisèrent la mission intérieure; seulement l'Église se ressentit toujours de son vice originel, la main des princes. L'univ. de Rostock, fondée 4419, fut un progrès. La réformation, commencée par les augustins et favorisée par Henri-le-Pacifique, préchée parKfltzker de Dijmitz, pasteur à Rostock, fut définitivement acceptée en 1550, et les couvents supprimés en 1552. Les États adoptèrent la forme consistoriale et le dogme luthérien pur, avec des droits étendus accordés au clergé. Plusieurs prédicateurs pieux essayèrent de secouer le joug d'une orthodoxie morte; le mouvement partit surtout de Rostock, mais les princes et le clergé réussirent momentanément à l'étouffer, et le déclin de la vie religieuse se traduisit rapidement et de diverses manières, entre autres par l'immense accroissement des naissances illégitimes et par l'abandon du culte public. Mais aussi de nombreuses associations et institutions se formèrent en dehors de l'officialité pour lutter contre le mal, et depuis 1848 surtout elles ont obtenu de grands succès. L'Égl. réformée n'a dans le pays que peu d'adhérents, une église de réfugiés à Butzow, quelques congrégations bap-tistes, etc. Les catholiques ont une chapelle à Schwerin depuis 1732 et une à Ludwigslust depuis 1810. Les derniers événements ont cependant donné plus de liberté aux différents cultes. Le Mecklembourg-Schwerin a 6 surintendants et 476 pasteurs; le Mecklembourg-Strelitz a 7 synodes sous un seul surintendant et 64 paroisses.

MÉDARD, né vers 457 ou 465 à Salency, Vermandois, fils d'un Franc noble et d'une femme distinguée dont la piété amena la conversion de son mari; il fut élevé selon l'Évangile, acheva son éducation à Tournay, et reçut la prêtrise à 31 ans. Il se consacra d'abord à l'évangélisation des païens encore nombreux dans ces contrées, fut sacré év. de Vermandois par saint Remi 530, vit son diocèse ravagé par les Huns et les Vandales, et dut en transporter le siège à Noyon, qui était fortifié. Cédant à de vives instances, il accepta encore en 532 la charge du diocèse de Tournay et consacra ses dernières années à l'accomplissement des devoirs multipliés que lui imposaient ce double diocèse et les féroces habitants de la Flandre, au milieu desquels il fut souvent en danger de mort. Sa piété sans tache et son zèle dévoué lui valurent l'amitié de Childéric I«r et de Clo-taire I. f 545, 8 juin. La légende lui attribue de nombreux miracles et les traditions populaires lui prêtent une curieuse influence sur la pluie. Un couvent a été élevé à Soissons sur son tom.

beau; les seigneurs francs y ont souvent tenu leurs assemblées.

MEDICIS, famille italienne célèbre, mais dont l'origine n'est pas sûre; les uns la font remonter aux paladins de Charlemagne, les autres à de modestes médecins. Le nom se rencontre à Or-vieto, Lucques,Milan et ailleurs; c'est la branche florentine qui est la plus connue, parce qu'elle a donné à Florence une dynastie de grands ducs, et à l'Église onze cardinaux, dont deux papes, Léon X et Clément VII, q. v. Le premier Médicis bien historique est Cosme, dît l'Ancien, qui fit la banque et l'usure aux conc. de Constance et de Bâle, 1415-1430; en 1453 il accueillit les savants grecs chassés de Cou* stantinople et fonda la première acad. platonicienne. Son fils Pierre 1416-1469, fut le père de Laurent-le-Magnifique, 1449-1492, intrigant, rusé, corrompu, l'ennemi de Sixte IV, mais le protecteur des lettres et des savants. Laurent a laissé plusieurs enfants, petits-enfants et neveux; mais l'adultère règne dans la famille: hommes et femmes ont des enfants naturels, et l'on ne sait pas à qui les donner. Il semble bien que Léon X est son fils, quoique d'autres en fassent son neveu. Clément VH est son neveu, fils naturel de Julien son frère f 1516. Laurent II, fils de Pierre n et petit-fils du Magnifique, est pendant 3 ans le tyran de Florence, et f 1519 en France d'une honteuse maladie; c'est le père de la fameuse Catherine qui a produit la triste dynastie des Valois. Quelques assassinats et empoisonnements viennent interrompre la succession régulière au trône de Toscane, assez compromise déjà par les débauches de la famille. Cosme, fils du capitaine Jean, est élu premier grand-duc, grâce à des actes de félonie et de simonie; il se distingue par plus de 70 édits draconiens contre toutes les libertés et par plusieurs assassinats domestiques (1519-1574). Son fils François II est pire encore, et il continue de cultiver la belle littérature; c'est le père de Marie de Médicis. Enfin Ferdinand I*r (3me fils de Cosme) 1549-1609, et Léopold, 1617-1675, relèvent un peu l'honneur desdicis par leur instruction, leur caractère et leurs mœurs. La famille s'éteignit en 1737, et le duché passa au duc de Lorraine.

MEDLER. Nicolas, né 1502 à Hof, Voigtland. étudia à Erfurt et à Wittenberg, et se fit con -naître dès sa 20®* année par des conférences sur l'A. T. et sur les mathématiques. Après avoir occupé diverses places dans l'enseigne* ment, il fut nommé diacre à Wittenberg et chapelain de la princesse Élisabeth de Brandebourg: en 1536 pasteur à Naumbourg, en 1546 surintendant à Brunswick; il y ouvrit une école qui jeta un moment un vif éclat; enfin à Bernbourg. mais il fut frappé d'apoplexie à son premier sermon, et f 1551. Lnther vante ses talents oratoires. La plupart de ses écrits appartiennent à la pédagogie.

MÉGANDER (Grassmann, grand homme), Gaspard, né à Znrich 1495, enseigna d'abord à Bâle, puis fut nommé chapelain de l'hôpital de Znrich, où il s'attacha à Zwingle. En 1524 pasteur de la ville, il se maria, travailla en 1525 à l'abolition de la messe, et après la dispute de Berne, fut nommé prédicateur et prof, de théol. dans cette ville, où il ne tarda pas à jouir d'une très grande influence. Il fut délégué à Zofingue en 1532, à Lausanne en 1536 et 1537, et fut chargé de la rédaction du catéchisme bernois. D'un caractère absolu, il combattit les tentatives conciliatrices de Bucer et voulut maintenir la Conf. helvétique, dont il était un des auteurs, contre la Concorde de Wittenberg que l'on proposait d'adopter. Il lutta quelque temps avec succès, mais en 1537 le synode de Berne donna raison k Bucer, et les conseils ordonnèrent de reviser le catéchisme dans le sens de la conciliation. Mégander donna sa démission, se retira à Zurich où il trouva une place à la cathédrale, continua de travailler contre Bucer, et f 1545. Il a laissé des Considér. sur la Genèsé, l'Exode, l'Ép. aux Hébreux, et 1 Jean, d'après les leçons de Zwingle.

MEIER lo Fréd.-Charles, né 11 août 1808, prof, à Iéna 1835, à Giessen 1836, f 13 févr. 1841; auteur d'une Vie de Savonarole, Comment. sur Éphés., Hist. de la doctrine de la Transsubstantiation, Manuel de l'Hist. des dogmes, etc.

2o Ernest-Henri, né 17 mai 1813 à Rusbendt, Schaumbourg-Lippe, prof, de langues orientales à Tubingue, f 2 mars 1866; auteur d'un grand nombre d'ouvrages sur: Les racines hébr., la forme du pluriel en hébreu, le Décalogue, la Poésie hébr., Ésaïe, les Petits prophètes, Hist. littér. des Hébreux, etc.

MEINHARD, moine augustin de Segeberg, partit de Brème sur un vaisseau marchand et se rendit en Livonie pour y prêcher l'Évangile; il fonda les égl. d'Yxkull et de Hohn et fut ordonné év. de Livonie par Henri II de Brème, t 1196.

MELNHOLD, J.-Wilhelm, né 27 févr. 1797, occupa diverses places de pasteur en Poméranie, mais donna sa démission en 1850 à cause de sa tendance au catholicisme et f 30 nov. 1851 à Charlottenbourg. Niant la valeur de la critique historique, et voulant démontrer la vérité des récits évangéliques, il écrivit son roman de la Sorcière de Bernstein, de pure invention, quoiqu'il prétendit en avoir emprunté le fond à d'anciennes sources; il réussit un moment, trompa beaucoup de lecteurs, et manqua finalement son but. On en peut dire autant de ses deux autres romans à tendances: Sidonia de Bork, et La sorcière du couvent.

MEINRAD, né vers la fin du 8*e siècle,'d'une famille illustre (des Hohenzollern, disent quelques-uns), il fut élevé au couvent de Reiche-nau, consacré prêtre, et envoyé comme prof, à Bollingen, près Zurich, une des succursales de Reichenau. Après quelques années il se retira pour vivre en ermite dans une solitude de l'Et-zel; il y passa 7 ans, mais pour se soustraire à la foule qui venait le visiter, il se retira plus loin encore, et se construisit une chapelle. Des brigands l'assassinèrent, 21 févr. 863. La légende raconte que des corbeaux poursuivirent les assassins avec tant d'insistance, qu'ils finirent par les dénoncer à la justice. Au bout de 40 ans, un chanoine de Strasbourg, Benno, ou Benoît, rebâtit la cellule; d'autres solitaires se joignirent à lui, et en 934 ils élevèrent un couvent, avec une chapelle consacrée à la légion thébaine; c'est auj. Einsiedeln.

MEINWERK, appelé aussi Meginwerk, Me-ginwark, fils d'un comte Imed et de la cruelle Athêla qui fit périr un fils du premier lit qu'elle avait eu du comte Balderich. Il eut pour condisciple à Hildesheim celui qui fut plus tard l'empereur Henri II. Chanoine à Halberstadt, il fut nommé chapelain d'OthonlII, 1001, et plus tard par Henri H, év. de Paderborn, 1009. Il intervint assez souvent dans les affaires de l'État comme négociateur, non seulement sous Henri qu'il accompagna à Rome 1013, mais encore sous son successeur Conrad IL 1026. Il profita de son influence pour enrichir son diocèse, et dépassa quelquefois les bornes. Il réforma le couvent de la Vielle-Corbie, établit des rapports avec Cluny, en fit venir 13 moines qu'il installa à Paderborn, fonda des couvents, bâtit des églises et fortifia la ville épiscopale. Il déploya beaucaup de zèle et fut canonisé; mais sa culture littéraire laissait à désirer. C'est de lui qu'on raconte qu'ayant obtenu d'Henri par trop d'instances un beau tapis dont il avait grande envie, l'empereur pour se venger fit raturer en secret quelques lettres sur le missel; le pauvre évêque qui ne s'en aperçut pas, lut le dimanche suivant dans le texte des Actes: pro mulis et mulabus, au lieu de famulis et famula-bus. Il obtint aussi d'Henri une investiture, qu'il accepta quoique l'emp. l'accompagnât de ces mots: « Que la haine de Dieu et de tous les saints soit sur toi qui ne cesses de me dépouiller au détriment de mon royaume l » Il répondit: « Tu es bienheureux, Henri, tu prospéreras, puisque par cette offrande le ciel te sera ouvert; une telle oblation produit l'abolition des péchés. » f 1036.

MEISNER, Balthazar, né 1587, f 29 déc. 1626; prof, de théol. à Wittenberg, auteur d'une

Philoiophia sobria, et de Pia desideria, où l'on voit qu'il sentait vivement les lacunes et les vices 3e l'Égl. de son temps.

MEISSEN, sur l'Elbe, Saxe; évêché fondé par Othon I, 938, et reconnu par le pape 968, en vue de l'évangélisation des Slaves. Chaque habitant fut imposé de la dîme de son revenu en sa faveur. Il eut beaucoup à souffrir par suite des guerres des Slaves et des Polonais avec les Allemands; il finit pourtant par s'enrichir et prospérer. Mais il fut perdu pour Rome lors de la Réformation, que Jean de Schleinitz introduisit 1518-1537; en vain Adrien VI canonisa l'év. Benno, pour donner un saint à cette Église ébranlée, cela ne produisit pas d'effet. Le dernier év., Jean IX de Haugwitz, déposa sa charge et passa au protestantisme. Il se trouve cependant encore à Meissen, depuis le siècle dernier, une petite église catholique.

MÉLANCHTHON (mot composé grec, traduction du nom de Schwarzerd, terre noire), Philippe, né à Bretten, Palatinat, 16 févr. 1497, fils de l'armurier Georges Schwarzerd (f 1507); sa mère, Barbara, était parente de Reuchlin. Après avoir étudié à Bretten et à Pforzheim, il vint à Heidelberg où il trouva des leçons à donner à de jeunes comtes, et en 1511 il devint bachelier. Ne pouvant à cause de sa jeunesse postuler un degré supérieur, il se rendit à Tubingue, et tout en donnant des conférences philos., il se mit à étudier la théologie, en même temps que le droit, l'astronomie et même la médecine. La publication d'une grammaire grecque le lit avantageusement connaître. Sous l'influence de Reuchlin et d'Érasme, et gagné à la cause dés lettres et de l'humanisme, il s'adonna à la lecture de la Bible et des pères et s'éloigna touj. plus de la théol. scolastique. Sur le conseil de Reuchlin il déclina des offres qui lui furent faites d'Ingolstadt et de Leipzig, et accepta la place de prof, de grec à l'univ. nouvellement fondée de Wittenberg. Il inaugura ses leçons 25 août 1518 par un discours d'ouverture sur les réformes à faire dans l'enseignement de la jeunesse. En 1520 il épousa Catherine Krabb, fille du bourgmestre de Wittenberg. Bientôt il s'établit entre Luther et lui une de ces profondes et solides affections qui naissent d'une estime mutuelle et de la sympathie qu'éprouvent l'un pour l'autre des hommes faits pour s'entendre dans la recherche des grandes choses. Dans les leçons d'exégèse que M. donnait, comme prof, de grec, sur les Ep. aux Romains, et d'autres, Luther trouva la justification de ses thèses réformatrices, et M. fut appelé à une chaire de théologie. Il fut amené à intervenir à l'occasion de la dispute de Luther avec Eck; il en avait écrit à OEcolampade, et cette lettre lui valut une attaque du Dr Eck, à laquelle il répondit par sa Defensio contra Eccianam incul-pationem. En 1521, sous le pseudonyme de Di-dymus Faventinus, il adressa aux États de l'empire une justification de Luther contre les calomnies romaines. Pendant le séjour de Luther à la Wartbourg, il fut à Wittenberg la vraie tête et le chef du mouvement de réforme, l'expliquant et le justifiant auprès de l'électeur, et le défendant contre les exagérations de Cari-stadt et des prophètes de Zwickau. Il est probable, pour lui comme pour Luther, que ce sont les excès de ces fanatiques qui ont déterminé son attitude dans les questions de politique ecclésiastique. En parfaite communion d'idées avec Luther, il publia successivement les divers écrits qui peuvent être considérés comme la base du protestantisme allemand: en 1521 les Loti communes rerum theol., souvent retravaillés et réimprimés; en 1524 YEpitome doctr. christianœ, dédié au très illustre prince de Hesse, et qui décida la conversion de Philippe; en 1530 la Confession d'Augsbourg, et son Apologie; puis le traité De potestate. papœ, dont l'avaient chargé les princes de l'union de Smal-calde, et qu'ils sanctionnèrent comme annexe ou appendice à la Confession. En 1544 il écrivit la Réformation de Wittenberg, pour l'offrir à l'empereur à Worms en 1545; et enfin, pour exposer au conc. de Trente les doctrines de la Réforme, la Repetitio Confessionis augustanœ saxonica. Tout en défendant l'Église, il s'occupait avec soin de l'organiser, et en 1528, lors de la grande visite des égl. saxonnes, à laquelle il prit une part considérable, il publia ses Instructions pour les visiteurs et les pasteurs de l'Égl. de Saxe. C'est le premier travail qui ait paru en ce genre, et il a servi de base et de modèle à tous ceux qui ont paru plus tard. L'importance du rôle de Mél. dans l'hist. de la Ré-formation allemande est marquée par le titre de Prœceptor Germaniœ qui lui fut donné; mais plus encore par le fait qu'il n'y a eu aucune assemblée un peu considérable de princes ou de théologiens à laquelle on ne l'ait convoqué; ainsi au colloque de Marbourg, à Spire, & Augsbourg, Smalcalde, Francfort, Cassel, Wittenberg, Haguenau, Worms, Ratisbonne, etc. Par sa largeur d'esprit, sa douceur de caractère et l'étendue de ses connaissances, il était l'homme le mieux fait, si la chose eût été possible, pour adoucir tous les angles et pour concilier les contraires. Il reçut de nombreux appels de Nu* remberg, Leipzig, Iéna, Tubingue, Francfort, même d'Angleterre et de France, mais il ne put jamais se décider à quitter Wittenberg, si ce n'est temporairement pour servir la Réforme dans quelques villes allemandes, à Meissen, à Cologne, ou pendant la guerre qui suivit la ligue de Smalcalde; l'université de Wittenberg ayant été fermée, il se fixa pendant quelque temps à Brunswick. Des divergences éclatèrent entre Luther et lui à l'occasion des théol. suisses. Jusqu'au colloque de Marbourg il s'était montré aussi opposé que Luther à tout compromis avec eux, mais à mesure que les discussions se prolongèrent, son opposition s'adoucit; non seulement l'exégèse trop littérale de Luther lui parut injustifiable, mais il comprit que dans la Cène ce qui importait, c'était moins l'acte matériel que la communion objective, réelle, mais spirituelle avec le corps de Christ. Luther lui en voulut d'avoir, dans les dernières éditions de sa Confession 1540, modifié le texte dans le sens de ses nouvelles convictions, et dès lors les divergences de ces deux grandes individualités allèrent s'accentuant toujours plus. D'un autre côté Àgricola lui reprochait 1527 sa doctrine sur la nécessité de la loi, et Cordatus 1536 son synergisme (bona opéra causa sine qud non). La patience de Mél. et l'inaltérable attachement qu'il ne cessa d'avoir pour Luther, empêchèrent seuls une rupture qui aurait sans doute éclaté lors de la Réformation de Cologne 1544, où Mél. d'accord avec Bucer se sépara décidément de Luther sur la doctrine de la Cène. La mort de Luther fut une époque dans sa vie; il devint par là le vrai chef du protestantisme allemand, son représentant le plus autorisé, et par conséquent responsable. Aussi son attitude lors de la publication de l'Intérim fut-elle amèrement critiquée comme un acte de faiblesse, quoiqu'elle s'explique d'un côté par la confiance qu'il n'avait cessé de mettre en l'empereur, de l'autre par la conviction qu'il avait que l'Église finirait par se réformer, et il ne voulait pas fermer la porte à un rapprochement possible; surtout il ne se rendait pas compte que des concessions pour lui peut-être indifférentes (adiaphora) à cause de son élévation scientifique et religieuse, ne devaient pas l'être aux yeux de la masse qui voit seulement le fait et ne s'arrête pas beaucoup aux explications. Il crut donc opportun de rédiger le provisoire de Leipzig, comme meilleur que l'Intérim d'Augsbourg imposé par l'empereur. D a cependant reconnu plus tard qu'il avait été trop loin dans ses concessions. Mais le mal était fait, et ses ennemis ne manquèrent pas de l'exploiter contre lui, ainsi que son refus de quitter Wittenberg pour Iéna. D'interminables discussions éclatèrent alors par la voie de la presse, par des colloques, dans les diètes même, entre les partisans de Mélanchthon et les luthériens purs (Flacius rillyrien), les intérimistes, les adiaphoristes, les majoris-tes, les synergistes, les osiandristes, etc., qui exagérèrent singulièrement les différences de doctrine entre Luther et Mél., sur le libre arbitre, la corruption originelle, la justification, les bonnes œuvres, l'Église et la Cène. Les fla-ciens cherchèrent même à humilier personnellement Mél. à la conférence luthérienne de Wei-mar, 12 janv. 1556, et plus encore à celle de Worms 1557, où, à la grande joie des catholiques, ils se séparèrent officiellement de lui, après avoir prononcé la condamnation de tous ceux qui n'adhéraient pas fidèlement à la conf. d'Augsbourg. Quelque patient qu'il fût, on comprend qu'il désirât être délivré de « la rage des théologiens. * Ses vœux furent exaucés le 19 avril 1560 par une heureuse et paisible fin. Ses dernières années avaient été éprouvées par les désordres de son gendre Sabinus, et par la mort de sa femme, dont il apprit la nouvelle dans un voyage à Heidelberg, 1557. La seule chose que ses plus ardents ennemis aient pu lui reprocher, est son indulgence pour le double mariage de Philippe de Hesse; ce fut un acte de faiblesse, un manque de foi; il se laissa effrayer par la pensée des suites que son refus pourrait avoir pour les destinées de l'Église. Mais on sait aussi la douleur et le repentir qu'il en eut; il tomba malade à la mort à Weimar 1540, comme il se rendait à Haguenau, et ne se releva que par les puissantes exhortations et les prières de Luther. L'amour de la paix, qui le caractérisait, ne l'amena jamais à transiger sur un point essentiel de la doctrine évangélique, et il résista à Ratisbonne 1542 à toutes les instances de l'empereur. Il sut même résister à Luther et quand il parut céder sur certains points, il montra clairement que c'était non par conviction, mais par condescendance. Son influence resta capitale, même après sa mort, même après que ses adversaires eurent réussi à faire condamner sa tendance, v. Philippisme. Ses Lieux communs sont restés le livre classique de la théol. luthérienne, et si l'orthodoxie postérieure des Lyser et des Hutterus n'a pas craint de lui attribuer de nombreuses erreurs de doctrine, son influence n'en est pas moins restée aussi heureuse que puissante sur le développement religieux, littéraire et philos, de son pays. Au nombre de ses écrits, notons encore une Gramm. latine, un Traité de l'âme, un Manuel de philos, morale, De la dialectique, etc. Plusieurs éd. et trad. par son gendre Peucer, par Bretschneider. Vie par Camerarius, Merle d'Aubigné, Ledderhose, etc.

MÉL

MELCHIADES, v. Miltiade.

MELCHISÉDÉKIENS: secte juive, gnostique, an ti tri ni taire, ayant pour chef Théodote-le-Chan-geur. et qui subsista quelque temps à Rome. Ils tenaient Jésus pour un homme comme tous les autres. Melchisédec était pour eux une puissance divine d'origine inconnue, souverain sacrificateur des anges et des êtres célestes. Jésus, intercesseur pour les hommes, n'était que son image sur la terre.

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MELCHITES (de Mélek, roi), chrétiens royalistes ou impérialistes de l'Égypte et de la Syrie, ainsi nommés parce que, à l'inverse des mono-physites et des coptes, ils se soumirent à l'ordre de l'empereur, qui leur manda de Constantinople de se soumettre à la doctrine de l'Égl., telle qu'elle avait été fixée par la conc. de Chalcé-doine 451. C'étaient les vrais catholiques.

MELDENIUS, Rupert, connu seulement par un écrit, sans indication de date, ni de lieu, mais contemporain de la guerre de Trente ans, intitulé: Paraenesis votivapro pace ecclesiœ• ad theologos Aug. confessionis. Sa tendance, indiquée déjà par le titre, est mieux résumée encore par ces paroles qui sont de lui, quoiqu'on les ait longtemps attribuées à Augustin: In necessa-riis unitas, in non necessariis liber tas, in utris-que caritas. Il résume ce qu'il appelle le nécessaire, dans les doctrines principales clairement exprimées dans la Bible et le Catéchisme, et sur lesquelles les théol. sont d'accord. Lttcke, Got-tingue 1850.

MELDORF, petite ville et vieil évêché du pays des Dithmarses (Holstein), tristement célèbre par le martyre du moine Augustin Moller, q. v. 1524. La conséquence de cet acte de fanatisme fut que 3 ans après, tout le district passait au protestantisme.

MÉLÈCE lo ou Melecius, métropolitain de Lycopolis, Thébaïde, et chef d'un parti qui finit par se joindre aux ariens, + 326. Les auteurs qui en parlent, Épiphanes, Athanase, Socrate et d'autres, ne sont pas d'accord sur les faits qui lui sont reprochés. On l'accuse a) d'avoir sacrifié aux faux dieux (?) et de s'être fait un parti après qu'il eut été excommunié et destitué par Pierre, év. d'Alexandrie: b) d'avoir été un homme orgueilleux, et de s'être permis dans le diocèse de Pierre et ailleurs, plusieurs usurpations de fonctions, entre autres d'avoir consacré des prêtres; c) de s'être montré sévère envers les lapsi, et d'avoir refusé de les admettre de nouveau, comme avait fait Pierre, quand son propre passé aurait dû lui inspirer plus d'indulgence, car il paraît avoir été lui-même un tombé. Le conc. de Nicée lui conserva son titre, mais en en restreignant les fonctions et les attributs. Mélèce se soumit, mais après la mort d'Alexandre, Athanase son successeur ayant voulu recourir à des mesures plus rigoureuses, les partisans de Mélèce résistèrent et se constituèrent en communauté séparée, pour bientôt se perdre dans l'arianisme.

2° ou Meletius, né dans la Mélitène, Arménie; év. de Sébaste 357, patriarche d'Antioche 361. Comme il tenait pour la doctrine de Nicée, les Eustathiens lui opposèrent Paulin, que Lucifer de Cagliari sacra évêque, au risque de perpétuer et d'envenimer le schisme, que le conc. d'Alexandrie 362 avait essayé de prévenir par des mesures de douceur. Les empereurs s'en mêlèrent; Julien exila Mélèce, Jovien le rappela, Valens l'exila de nouveau; enfin Gratien le rétablit 373, et malgré l'opposition persistante des occidentaux, le déclara seul et légitime évêque, à cause de 9on attachement aux résolutions de Nicée, et lui fit remettre les églises des ariens. Mélèce f 381 à Constantinople, pendant un concile qu'il présidait. Il semble que les partis étaient convenus qu'après la mort de l'un des 2 évêques, ils se réuniraient autour du survivant; mais les év. de Syrie se hâtèrent de donner Flavien pour successeur à Mélèce, et le concile le reconnut, de sorte que le schisme continua. Chrysostome réussit 398 à poser les bases d'une conciliation entre Flavien et Théophile d'Alexandrie, mais l'accord ne fut réellement conclu qu'en 415. Alexandre, le second successeur de Flavien, ayant consenti à assister le premier avec ses fidèles au culte des Eustathiens, et ces derniers ayant consenti en retour à ne pas donner de successeur à leur év. Évagrius, qui venait de mourir. Chrysostome a prononcé l'éloge de Mélèce, qui a été dès lors canonisé par les deux Églises.

MÉLITO, év. de Sardes, Lydie, vécut au milieu du 2">e siècle et fut un des plus grands savants de son temps. On a peu de détails sur sa vie: il ne se maria pas; sa piété lui avait valu un respect universel; quelques-uns le considéraient comme un prophète. Il présenta à Marc Aurèle une Apologie du christianisme. Il visita la Syrie et la Palestine, en vue de recherches sur les livres de l'A. T. f peu après 170. Ses écrits sont perdus presque en totalité; Eusèbe en a conservé une liste, mais incomplète. On l'a accusé d'anthropomorphisme, peut-être pour des expressions peu mesurées ou mal comprises, sur la gloire de Dieu dans l'homme. Il est également peu probable qu'il ait été montaniste. Anastase, au 6** siècle, cite de lui un passage où il expose la triple nature de Dieu; en loul cas il a défendu nettement la divinité de J.-C. et sa mort expiatoire.

MELK, ou Mœlk, cél. couvent de bénédictin* dans la basse Autriche, la Namare des Romains, déjà mentionné 861 comme fondé par des chanoines séculiers; relevé par Martin V qui j envoya 20 bénéd. de Subiaco. Il eut dans la Ire moitié du 18me siècle une certaine réputation par la science et les travaux de ses membres.

MELVILLE, lat. Melvinus lo André, né 1545 en Écosse, vint sur le continent après la fin de ses études, et les poursuivit à Paris, Poitiers et Genève, où il enseigna aussi quelques années à l'académie. En 1574, sur la recommandation de Bèze et avec la réputation d'un savant distingué, il revint dans son pays, où l'assemblée générale le nomma prof, de théol. et principal de l'univ. de Glascow. En 1580 il accepta la direction du séminaire théol. de Saint-André. Pendant qu'il était à Glasgow, pasteur en même temps que prof., il avait été appelé à intervenir dans les affaires de l'Église, et par la fermeté de son caractère, non moins que par l'étendue de ses connaissances, il était devenu le vrai chef de TÉgl. d'Écosse dans sa lutte pour ses libertés contre Jacques IAprès Knox il est certainement le personnage le plus considérable de la Réforme écossaise. Traduit devant le conseil le 15 févr. 1584 sous l'accusation de trahison, pour un sermon qu'il avait préché, il prouva son innocence, mais n'en fut pas moins condamné, et ses ennemis allaient le conduire au château de Blackness pour l'y faire périr, quand il réussit à s'échapper et se réfugia en Angleterre, à Berwick. Il revint en nov. 1585 après la chute d'Arran et reprit ses fonctions. En 1606, ayant composé une épigramme latine sur une cérémonie à peu près catholique à laquelle on l'avait contraint d'assister à Londres dans la chapelle du roi, il fut consigné comme prisonnier chez le doyen de Saint-Paul, où il passa 3 mois, puis chez l'év. de Winchester, enfin à la Tour, où il lui fut permis de recevoir des visites. Malade et tremblant de fièvre, il obtint la faveur d'aller respirer un air plus pur à 10 milles de Londres, et là il apprit que, sur les instances du duc de Bouillon qui l'appelait comme prof, de théologie à Sedan, il pouvait se rendre en France. Il partit 15 avril 1611, vit Dumoulin à Paris, et arriva à Sedan où il enseigna avec beaucoup d'éclat et fut généralement considéré, en dépit des attaques de Tilenus. + 1622.

2o Jacques, son neveu, fut aussi l'un de ses plus fidèles disciples et collaborateurs. D'abord prof, à Glasgow, puis à Saint-André, il prit en 1590 un poste de pasteur de campagne, et fut enfin nommé à Anstruther. Lors de l'affaire de son oncle il fut interné à Newcastle, et ne put pas même aller voir sa femme mourante, ni son oncle enfermé à la Tour, à qui il put seulement envoyer quelques meubles et quelques vêtements. Exilé, il quitta l'Angleterre en juin 1607. Le roi le craignait encore plus qu'André. Gracié, mais trop tard, il se remit en route pour PÉcosse, févr. 1614, mais ne put aller plus loin que Berwick, où il f 1614, paisiblement à 55 ans, après 8 ans d'exil. Il a laissé lui-même son Autobiographie, utile à consulter pour cette époque.

MÉXAION: les livres ecclésiastiques des grecs, renfermant pour chaque jour de fête des hymnes et des prières de circonstance, avec de courts extraits de la vie des saints. Ils étaient ordinairement arrangés par mois, d'où leur est venu leur nom.

MÉNANDRE. Samaritain, de Kaparattée, comme Dosithée, disciple de Simon-le-Magicien, fondateur d'une secte samaritaine à laquelle il se donna comme le rédempteur, et qu'il avait gagnée par ses arts magiques. La secte n'était pas chrétienne, quoi qu'en disent quelques pères, et dura peu.

MENDÉENS, ou plutôt Mandèens, disciples de la Manda de Hhajje, ou parole de vie; appelés aussi zabéens et chrétiens de Saint-Jean-Baptiste, secte gnostique ennemie du christianisme et du mahométisme, quoiqu'elle leur ait emprunté, ainsi qu'au judaïsme, des rites et des dogmes. On les trouve sur les bords du Tigre et de l'Euphrate, aux environs de Bagdad; il y en avait encore 20,000 au siècle dernier; maintenant ils ne sont plus que 1,500, la plupart orfèvres, tourneurs, serruriers ou ferblantiers. Ils célèbrent le 7®e jour et 4 grandes fêtes par an, dont la principale est le Pantscha, jour solennel où tous les mandèens doivent se faire baptiser (dans l'eau courante); les plus dévots se font baptiser chaque dimanche. La cène se célèbre avec le baptême; on mange un agneau qui a été tué par le prêtre. Ils sont polygames, mais n'ont guère que deux femmes; le divorce est interdit; leurs mœurs sont honnêtes et sévères.

MENDELSSOHN lo Moïse, célèbre écrivain et philos, juif du siècle dernier qui, par son influence sur ses propres coreligionnaires, a exercé aussi une certaine influence sur la vie religieuse en général. Nè 6 sept. 1729, fils d'un pauvre maître d'école de Dessau, il reçut ses premières impressions de la lecture de l'A. T., qu'il ne cessa jamais de considérer comme la vraie source d'une religion fondée sur la raison. En 1743 il vint à Berlin, où il eut à lutter pour l'existence, et où il finit par trouver des moyens de vivre, d'abord dans une place de précepteur, ensuite comme intéressé dans une maison de soieries. En 1755 il eut le bonheur de faire la connaissance de Lessing, avec qui il resta en relation toute sa vie, et qui l'illustra sous les traits de Nathan-le-Sage. Son livre sur: L'évidence des sciences métaphysiques, fut couronné par l'Acad. de Berlin, 1763. Ses deux traités: Phédon, ou l'Immortalité de l'âme 1767, et Heures du matin 1785, sont importants pour la théologie. Son écrit: Jérusalem, ou de la Puissance religieuse et du judaïsme, 1783, a inauguré au sein du judaïsme moderne une direction nouvelle et libérale. Mentionnons encore ses Lettres sur les sentiments 1755, Lettres juives, 1771, sa Lettre au diacre Lavater, déclinant l'invitation qui lui était faite de passer au christianisme, 1770. Il défendit son ami Lessing contre l'imputation de spinosime qui lui avait été adressée par Jacobi. + 4 janv. 1786.

2° Félix Mendelssohn -Bartholdy, petit-fils du précédent, compositeur éminent, auteur du Lobgesang, et des Oratorios de Paulus, 1836, et d'Élias 1846, est né à Hambourg 3 févr. 1809, f à Leipzig 4 nov. 1847. Élevé à l'école sévère de Séb. Bach, il a l'ampleur et la magnificence de Hândel, sans atteindre cependant à la hauteur de ces deux maîtres, dont il est quelquefois l'écho affaibli.

MENDIANTS. On désigne spécialement sous ce nom les dominicains et les franciscains parce que leurs vœux, leur interdisant de rien posséder, leur imposaient le devoir de mendier leur subsistance par humilité. On peut ranger dans cette même catégorie les carmélites, les augus-tins-ermites, et les servîtes. Ils ont en général exercé une grande influence sur les classes pauvres et ignorantes, mais aussi l'on a toujours été frappé du contraste qui existe entre la richesse de leurs couvents et leur prétention à l'indigence; on n'a pas le droit de mendier quand on est riche.

MENG-SE ou Meng-t*eu, appelé Mencius par plusieurs missionnaires, fut, avec Gonfucius, un des premiers éducateurs des Chinois, qui le révèrent comme un saint. Né vers 400 av. C. il est f 314. Après avoir reçu une excellente éducation, il parcourut les diverses parties de la Chine, prêchant la sagesse et la vertu. Ses discours, remarquables par leur brièveté, leur fraîcheur et leur originalité, ont été conservés par ses disciples et publiés sous le titre de: Le livre de Meng-tseu, on les range parmi les Quatre livres qui servent à l'éducation des jeunes Chinois; il y en a eu des milliers d'éditions. Trad en lat. par le p. Noël, Prague 1711; en français par Pauthier, Paris 1841.

MEN1US (ou Menig) Justus, né à Fulda 13 oct. 1494 (ou 13 sept. 1499). Il voulait d'abord être moine, mais se décida ensuite pour la prêtrise et vint 1514 étudier à Erfurt, puis à Wittenberg. Là il fit la connaissance de plusieurs hommes, notamment de Luther, et il s'attacha à la Réformation. Après avoir occupé divers postes, il fut nommé surintendant à Eisenach 1528, et prit une part active à presque tous les colloques et conférences qui eurent lieu, jusqu'à Mulhouse 1542. En 1546 il fut appelé à la surintendance de Gotha, sans être obligé d'abandonner Eisenach. Mais il rencontra des difficultés de plus d'un genre. Sans parler de l'Intérim, qu'il repoussa, il eut à lutter contre le parti d'Osiander et refusa entre autres de souscrire sans réserves à la proposition de Major, que c les bonnes œuvres sont nécessaires au salut. > Bien que l'affaire eut fini par s'arranger, il resta suspect et finit par donner sa démission, 1556. Sur la recommandation de Mélanchthon, qui l'aimait et mit unepréfaceà ses œuvres, il fut nommé past. de l'égl. de St-Thomas,à Leipzig, où il f 1558.

MENKEN, Gottfried, né à Brème 29 mai 1768, petit-fils de Lampe par sa mère. Ses sentiments religieux furent éveillés de bonne heure par l'influence des écrits de Lavater. Étudiant à Iéna 1788, et repoussé par le rationalisme ou le kantisme de ses maîtres, il résolut de devenir « un saint idiot, » et se mit à l'étude seule de la Bible, en y joignant cependant la lecture de Paracelse et de Boehme. En 1790 il vint à Duisbourg, où les travaux de Bengel et la connaissance personnelle du Dr Collensbusch, de Hoffmann et d'autres, le fortifièrent dans la direction qu'avaient déjà prise sa théol. et sa piété. La néologie superficielle et vulgaire de cette univ. le révolta, et il écrivit sous le voile de l'anonyme une Étude sur la démonologie, ou Réfutation des assertions exégétiques du prof. Grimm, 1793. Cette brochure, accueillie avec colère par les uns, avec joie par les autres, fit sensation. Suffragant en 1794 à Francfort sur le Mein, il publia une seconde brochure anonyme: Du bonheur et de la victoire des impies (Gott-losen), pour montrer que le triomphe des Français n'était pas une preuve de la faveur de Dieu à leur égard. Pasteur à Wetzlar en 1796, il fut appelé à Brème en 1802, et prit sa retraite en 1825. + juin 1831. après une carrière bien remplie. Prédicateur puissant, il tenait peu aux dogmes et aux livres liturgiques de l'Église, mais il s'attachait d'autant plus au texte de la Bible, et ne ménageait pas ceux qui pensaient autrement que lui sur l'inspiration. En revanche les orthodoxes lui reprochèrent de ne pas admettre l'expiation par le sang de Christ (dans le sens d'une satisfaction à la justice divine). Il a laissé un grand nombre de sermons très appréciés); on en a publié un choix à Brème pour le centenaire de sa naissance, 1868.

MENNAS, né à Alexandrie, nommé au patriarcat de Constantinople par Justinien à la demande d'Agapet I*', après que le monophy-site Anthime eut été déposé par le conc. de Constantinople 536. C'est le premier exemple d'un èvêque oriental nommé sous l'influence d'un év. de Rome. D'abord avec l'emp. il expulsa de la capitale et de leurs sièges épiscopaux les principaux chefs des monophysites. Dans la lutte des Trois chapitres il se laissa entraîner à signer les deux édits impériaux de 541 et 551 qui les condamnait, ce qui le fit excommunier par Vigile, 14 août 551. Mennas se soumit et se rétracta. Les latins et les grecs l'honorent comme un saint.

MENNO et les mennonites. Meno Simons, le chef de la secte, est né à Witmaarsum en Frise, 1496 ou 1498, et fut d'abord pasteur ou cuit, dans le petit village de Pirsgjum, 1524. H eut des doutes sur la transsubstantiation, telle qu'elle était alors définie, et il se décida à étudier la Bible, ainsi qne les écrits de Luther et de Bucer. Cependant il n'arriva à une pleine connaissance de la vérité qu'après avoir été mis en rapports avec les anabaptistes; le martyre du pieux héros chrétien à Leeuwarden, 1531, acheva de lui ouvrir les yeux. Appelé peu de temps après dans son village natal, il se déclara franchement contre Rome, rompit avec l'Église, et finit par donner sa démission 1535, quand son frère, un des chefs des anabaptistes qui avaient attaqué le couvent de Dokkum, eut été exécuté. Il devint prédicateur itinérant, se fit rebaptiser, et visita les petites communautés anabaptistes qui ne voulaient ni du fanatisme, ni des violences, et qui repoussaient également les procédés de Jean de Leyde et les doctrines de Munster ou de Batenbourg. 11 écrivit même contre Jean de Leyde en 1535. Attaqué par les protestants et par les catholiques, sa tête ayant été mise à prix par Charles-Quint 1540, il visita comme évêque, ou ancien, la Frise, le Hol-stein, le Mecklembourg et la Livonie. Faible et malade, il passa ses dernières années dans son petit bien de Wœstefeld, dirigeant de loin les petites églises, f 13 janv. 1561. Son principal ouvrage est intitulé: Livre fondamental de la vraie foi chrétienne, Amsterdam 1539. Il a écrit beaucoup d'autres traités, sur la Trinité, l'ex-communication, etc. Sa pensée dominante était le rétablissement du règne de Dieu par la fondation d'une Église pure et sainte. Il maintenait l'autorité absolue de la Bible jusque dans sa lettre; il rejetait le baptême des enfants, et condamnait le service militaire, le serment et les procès. Ses disciples et sectateurs se sont émiettés en une foule de petites sectes; déjà de son vivant, en 1554, ils s'étaient partagés à Wismar en stricts et indulgents, ou relâchés, et Grotius en 1616 disait que leurs subdivisions allaient à l'infini» Il est donc assez difficile aujourd'hui de préciser exactement en quoi consistent leurs doctrines et leurs usages, puisqu'il y a entre eux assez de variétés, mais on peut dire d'une manière générale, qu'ils se caractérisent par leur attachement à la Bible, leur indépendance vis-à-vis de toute autorité ecclésias-tique, le baptême des adultes, le refus du serment, le refus du service militaire, la douceur des mœurs, l'absence de luxe et une grande libéralité. Dès 1581 ils se multiplièrent dans toutes les provinces, malgré les ordonnances qui leur étaient contraires, et leur nombre s'accrut à plusieurs reprises par la communauté d'idées qui les rattachait aux remontrants, aux labadis-tes, aux hernoutes, aux baptistes chassés de la Suisse ou du Palatinat. Le nom d'anabaptistes pacifiques leur a été donné quelquefois pour marquer les rapports et les divergences qu'il y a entre eux et leurs coreligionnaires plus militants. On en compte auj. environ 42,000, répandus en Hollande, sur les bords du Rhin, en Alsace, en Prusse, en Moldavie, au sud de la Russie, en Transylvanie, en Hongrie, et au sud des États-Unis. Presque tous sont adonnés à l'agriculture, mais ils ont des pasteurs et depuis 1735 un séminaire; ils ont aussi une mission à Java.

MENOLOGION, calendrier des saints, en usage dans l'Égl. grecque, rappelant par ordre de dates, les noms et les traits principaux de la vie des saints. Il y en a plusieurs; le plus ancien est celui qui porte le nom de Basile; celui de Morelli est plus considérable, Rome 1788, 2 vol.

MEJNOT, Michel, f 1518, cordelier, prof, de théol. à Paris, vécut sous Louis XI et jusqu'à François I«r. Il s'est rendu célèbre par ses sermons en style macaronique, et surtout par la grossièreté de son style et l'indécence de ses bouffonneries. Il dit de Madeleine: « Venit se presentare face à face son beau museau ante nostrum Redemptorem, ad attinendum eum à son plaisir. > Impr. Paris 1518, 1519, 1525. Il est un spécimen pariant de ce qu'étaient la chaire chrétienne avant la Réforme, et la langue française avant Calvin.

MENSES papales. On nomme ainsi le droit des papes de disposer à leur gré des bénéfices devenus vacants en certains mois (menses). Depuis le 12me siècle il avait passé en coutume que les papes pouvaient recommander leurs candidats préférés. Si cette première démarche, la prière (preces), n'aboutissait pas, ils en faisaient une seconde, l'exhortation, puis l'ordre (mandata), enfin l'exécution. Mais peu à peu, et malgré la défense du conc. de Latran de disposer à l'avance des successions non encore ouvertes, des papes se permirent de disposer de bénéfices en attendant leur vacance. Cet abus finit par provoquer de vives réclamations. Aussi, pour donner satisfaction à l'opinion, Martin V fit décider au conc. de Constance que tout en réservant les droits acquis, les patronages laïques, les bénéfices relevant directement du saint-siège, la collation des bénéfices vacants devait alterner suivant les mois entre le pape et les évêques, de manière à ce qu'il fût impossible d'en disposer à l'avance, personne ne pouvant prévoir à qui reviendrait le droit de collation. Le conc. de Bâle contesta même au pape ce droit, de manière à supprimer toute tentation d'expectance. Le concordat de Vienne 1448, conclu entre Frédéric HI et Nicolas V, en accordant certains privilèges aux 3 électeurs ecclésiastiques, rendit aux papes pour les mois impairs, en laissant aux évêques pour les mois pairs, le droit de disposer des bénéfices. Mais le conc. de Trente ayant supprimé toutes t les grâces dites expectatives > (Sess. 24, chap. 19), le droit des papes fut non seulement restreint, mais presque supprimé en fait, l'alternance n'ayant été conservée qu'en Prusse jusqu'à ces dernières années,

MENSURIUS, év. de Carthage. Pendant les persécutions dioclétiennes 303, il crut devoir dans l'intérét de son église, faire quelques concessions apparentes; sommé de livrer la Bible il livra des ouvrages hérétiques, et s'opposa à l'adoration fanatique des confesseurs jetés dans les prisons. L'év. Secundus, de Tigisis, primat de l'Égl. de Numidie, l'accusa de ce double fait au concile de Ceuta 305, mais comme presque tous les év. africains étaient dans le même cas, on étouffa la chose. Accusé de nouveau, il dut se rendre à Rome, se justifia, mais + au retour 311. Après sa mort les modérés de Carthage, pour contrebalancer l'influence des rigides de la Numidie, se hâtèrent d'élire pour évêque l'archidiacre Cécilien, ce qui provoqua le schisme des donatistes, q. v.

MENTALES, v. Réservations.

MENTHON, petite ville située sur les bords du lac d'Annecy, patrie de saint Bernard 1° q. v.

MERCATOR, Marins, écrivain ecclésiastique du 5m<> siècle, très utile à consulter pour les luttes pélagiennes et nestoriennes, à cause de ses nombreuses citations. On n'en connaît que 2 mss. (Beauvais et Vatican) publiés par le bé-néd. Gerberon, Bruxelles 1673, et réimpr. par Baluze. On peut conclure d'une lettre de saint Augustin, qu'en 418 il était encore un jeune homme. Personnellement ami de Célestin I et de Sixte III, il fut leur agent officiel à Constantinople, entre 430 et 440, Rappliquant à établir l'autorité du siège romain. D'après le père Gar-nier il serait né en Italie, mais sa parfaite connaissance du nord de l'Afrique et ses rapports avec Augustin plaident en faveur de Bergeron et de Baluze, qui le font Africain. Comme il cite encore Eutyche, Théodoret et le conc. d'Éphèse, et qu'il ne va pas plus loin, on conclut qu'il doit être f entre 449 et 451. V. Tille-mont, Mémoires.

MERCURIAN, Éverard, belge et par conséquent sujet espagnol, 4me général des jésuites, élu 23 avril 1573 à l'âge de 68 ans; doux, prudent et vif. f 1 août 1580. Il avait été envoyé en Écosse sous Marie Stuart, pour voir ce qu'il y avait à faire, et il avait concouru à la fondation des collèges anglais de Reims et de Rome. 11 a écrit un Sommaire des Constitutions, et mis en ordre les Règles communes, et les Règles des différents offices.

MERICI, Angela, surnommée la Colombe de Salo. Née 21 mars 1470 à Desenzano, près du lac de Garde, et élevée chez un oncle après la mort de ses parents, elle quitta cet oncle pour aller vivre dans la solitude, avec une sœur qui mourut bientôt. Ramenée chez son oncle, elle entra dans les tertiaires de Saint-François, et s'occupa avec quelques autres jeunes filles d'instruire de petits enfants; elle le fit avec tant de succès qu'elle fut appelée à Brescia comme institutrice. Devenue aveugle dans un pèlerinage en Palestine, elle n'en visita pas moins tous les saints lieux, et fut miraculeusement guérie an retour, à Candie, par un crucifix. Touj. plus enflammée d'un saint zèle, et comme déjà sa réputation de sainteté se répandait, elle fonda 1535 sous le patronage de sainte Ursule une association de 12 femmes pour l'éducation des jeunes filles et le soin des malades, mais sans costume spécial, sauf le noir et un voile, sans vie commune, sans vœu de chasteté perpétuelle. Paul III les confirma 1544, et leur donna le nom d'ursulines, d'après celui de leur patronne. Angela + 27 janv. 1540. Il y eut pendant un mois grande dispute entre le chapitre et le chœur de Saint-Afre, pour savoir à qui appartiendraient ses restes, et le corps resta tout ce temps sans se décomposer. Béatifiée 30 avril 1768, elle fut canonisée en 1807. L'ordre avait été en 1572 soumis à la règle de saint Augustin et à la clôture; en 1789 il comptait H provinces et plus de 300 couvents. V. les Chroniques de l'ordre des ursulines, Paris 1676.

MERITUM de condigno et de congruo, deux expressions imaginées par Thomas d'Aquin, et adoptées par la théol. cathol., pour distinguer la valeur des œuvres et concilier les principes pélagiens avec ceux d'Augustin. Une œuvre n'est absolument méritante et digne que lorsque, la grâce de Dieu agissant, la volonté de l'homme l'accomplit spontanément et librement; en vertu de sa justice et de ses promesses, Dieu lui doit une récompense (M. de condigno). Quant aux œuvres purement humaines, Dieu ne peut, à cause de la distance qui sépare le créateur de la créature, lui accorder une récompense que par une concession de sa bonté (ex quddam congrui-tate), et c'est à ce litre seulement que l'homme peut l'attendre (M. de congruo). La première de ces deux classes de mérite est seule parfaite, et nul autre que Christ n'en est le représentant: mais la seconde a également sa valeur, et la foi d'un homme peut servir au salut de son prochain. De là s'est développée l'idée des vertus surérogatoires, qui a abouti à la théorie des indulgences. Les Réformateurs ont fait justice de cette distinction subtile, qui supprime en réalité le seul médiateur entre Dieu et les hommes, et qui inspire aux pécheurs une fausse sécurité.

MERLE d'Aubignè, Jean-Henri, né 16 août 1794 à Genève, fils d'un maître d'armes et descendant de réfugiés. Étudiant en théol. au moment où la lutte s'engageait entre le réveil religieux et le vieux socinianisme, il prit parti pour ce dernier et pour ses professeurs, ne prévoyant pas qu'un jour il serait lui-même professeur dans les rangs opposés. Il acheva ses études à Berlin, fut nommé en 1818 pasteur de l'égl. franc, réf. de Hambourg, en 1823 chapelain de Guillaume I«r roi de Hollande et pasteur de l'égl. réf. de Bruxelles. Il perdit cette position lors de la révolution belge, et fut appelé en 1831 comme prof, d'hist. ecclés. à l'école de théol. qui venait de se fonder à Genève. Il y resta jusqu'à sa f 21 oct. 1872. Pendant son séjour à Berlin il avait assisté à la féte de la Réformation; l'impression qu'il en reçut fut si vive qu'il forma le dessein d'écrire l'histoire de cette époque si glorieuse et si féconde en heureux résultats. Ce fut le but de sa vie et il ne s'en laissa plus détourner. De là ces volumes devenus si populaires, et trad. en plusieurs langues: Hist. de la Réf. du 16me siècle, 5 vol., Hist. de la Réf. en Europe au temps de Calvin, 6 vol. (achevé d'après ses notes par son gendre Duchemin); puis quelques épisodes détachés: La républ. d'Angl. aux jours de Cromwell, Trois siècles de luttes en Écosse; enfin un grand nombre de sermons. Rapports et Discours sur des sujets très variés, presque touj. de circonstance. Une instruction solide, beaucoup de recherches, une vive imagination, des convictions évangéliques arrêtées et un style souvent brillant, ont fait la fortune de ces ouvrages et ont assuré à l'auteur, ^n Angleterre et en Écosse surtout, de chaudes et justes sympathies.

MÉSA, ou Méscha. roi de Moab, mentionné 2 Rois 3, 4. sq. Un stèle découvert il y a quelques années par le missionn. Klein, mutilé par le fanatisme arabe, mais en partie reconstitué par M. Clermont-Ganneau 1870, reproduit le récit biblique, sinon littéralement, du moins de manière à en confirmer l'exactitude. Les principaux frag. de cette inscript, sont auj. au Louvre. MÉSALLIANCE, v. Mariage. MESROB, ou Mietrob, appelé aussi Maschtoz, né vers le milieu du 4"* siècle dans un petit village de la province de Taron. D'abord secrétaire du patr. arménien, Nersès-le-Grand, son maître, puis secrétaire d'État pendant 7 ans, il résolut de se consacrer à Dieu, entra dans un cloître, et n'y trouvant pas ce qu'il cherchait, il se retira dans une solitude, oti bientôt de nombreux disciples se groupèrent autour de lui. Sous le règne de Bram Shapuhr, il reçut du patr. Isaac la charge de prêcher l'Évangile comme missionnaire, ce à quoi sa connaissance de la langue arménienne le rendait tout à fait propre. Mais il rencontra un sérieux obstacle dans l'absence d'une traduction arménienne de la Bible, la version syriaque, seule en usage pour le culte, étant inintelligible pour le peuple. Il entreprit de faire ce travail, mais il lui fallut d'abord créer un alphabet arménien, et cela lui prit plusieurs années; l'aide de quelques savants syriens ne lui fut même pas d'un grand secours. Enfin en 406 à Samosate, après de ferventes prières, il lui sembla voir dans une vision une main qui gravait sur un rocher les caractères dont il avait besoin. Il se mit alors à l'œuvre, traduisit le N. T. et les Proverbes, et après une persécution qui paralysa momentanément ses etforts et le contraignit de se rendre à Constantinople, il put retourner dans sa patrie avec son ami Sahak, et ils emportèrent des mss. grecs qui lui permirent d'achever et d'améliorer son travail, dont le commencement avait été fait d'après la version syriaque. Après une vie longue et bien employée, il f 441, administrateur du patriarcat, peu de mois après Sahak.

MESSALIENS (les priants). Trois sectes de ce nom: 1° Parti religieux non chrétien de l'Asie Mineure, au milieu du 4me siècle. D'après Épiphanes ils reconnaissaient plusieurs dieux, mais n'en adoraient qu'un, le Tout-Puissant, lui élevant des temples et chantant ses cantiques. Selon Cyrille d'Alexandrie c'étaient des déistes, dégoûtés du paganisme et ne conservant plus que pour la forme la foi en plusieurs dieux; ils avaient quelque analogie avec les hypsistariens, q. v. Le judaïsme et l'hellénisme leur avaient fourni certaines idées, et ils avaient adopté comme culte les formes chrétiennes, mais sans les doctrines; ils fnrent même quelquefois persécutés par les chrétiens et purent se vanter d'avoir eu des martyrs.

2° Enthousiastes mystiques de la fin du 4®« siècle, appelés aussi euchites, pneumatiques, choreutes (danseurs), ou d'après quelques-uns de leurs chefs, lampétiens, marcianistes, adel-phiens, etc. Ils représentaient la réaction contre les exagérations de l'ascétisme monacal, contre les disputes ecclésiastiques et contre la trop grande préoccupation de l'influence des démons. Ainsi ils rejetaient les formes ecclésiastiques, le baptême, la cène, les jeûnes, et se montraient assez indifférents vis-à-vis de certains préceptes de morale. Ils tenaient surtout à la prière, persuadés que par elle seule on peut chasser les démons, recevoir le Saint-Esprit et connaître l'avenir. D'abord nombreux dans les couvents de Syrie, ils renoncèrent peu à peu à la vie commune et se mirent à courir le pays en mendiant. Ils ne formaient pas une société fermée et n'entendaient pas se séparer de l'Église; ce n'est que plus tard qu'on leur a reproché des erreurs gnostiques. Persécutés, leurs maisons brûlées, ils disparurent peu à peu. Amphiloque d'Icône avait écrit contre eux.

3° Secte gnostique, thrace, du 10*»e siècle, en rapports avec les pauliciens, et qui avait quelque analogie avec'les euchites.

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MESSE. Cette cérémonie, qui est l'acte principal da culte catholique et se célèbre tous les jours dans la plupart des églises, correspond à la liturgie des orientaux et i\ la sainte Cène des protestants. Son nom vient du latin missa, dans la formule anciennement employée pour congédier les catéchumènes après la première partie du service. On leur disait: lté, wwsa est (eccle-sia); allez, l'assemblée est congédiée, et l'adjectif missa a fini par devenir un substantif et par désigner, avec le renvoi des catéchumènes, le second service auquel pouvaient seuls assister les fidèles: la messe. Le mot paraît pour la première fois dans une lettre d'Ambroise, 397, mais il n'a pas encore la signification qui lui fut donnée beaucoup plus tard, et qui sous sa forme actuelle remonte au conc. de Trente. Le rituel dans ses traits principaux date de Gré-goire-le-Grand, vers 600; mais il fut modifié dans la suite des siècles, et il subit tant de changements, il y eut tant de livres de messe différents, que le conc. de Trente jugea nécessaire d'y introduire une certaine unité. Une commission d'évêques n'ayant pas réussi à s'entendre, Pie V fut chargé d'y veiller; il remit ce travail à la Congrég. des rites, dont la rédaction adoptée et promulguée en 1570, légèrement amendée sous Clément VIII 1604 et sous Urbain VIII 1634, est auj. définitive. Plusieurs des prières de la messe sont empruntées aux anciennes liturgies et prouvent que l'Égl. des premiers siècles ne donnait nullement au repas eucharistique le caractère et la signification que l'Égl. lui attribue aujourd'hui, sans même parler du dogme de la transsubstantiation qui ne commença à poindre qu'au 9me siècle, et qui ne prit un peu de consistance qu'en 1215 au conc. de Latran. Comme la plus grande partie de cette cérémonie se compose de lectures, on dit habituellement: lire la messe. On distingue dans ce service six actes liturgiques principaux: 1° La Confession des péchés, qui se fait sur les marches de l'autel, avec le diacre et les enfants de chœur; lecture de Ps. 43, 3. 4. — 2° L'Introït, à l'autel; prières et lectures préparatoires, passages de la Bible et cantiques appropriés aux circonstances: Kyrié eleison, Gloria, Graduel et Alléluia; lecture des Évangiles, explications familières. — 3° L'oblation du pain et du vin, ou Offertoire, le commencement de la vraie messe; l'ancienne missa fidelium; les fidèles, seuls admis, apportaient à l'autel le pain et le vin, comme offrandes pour le culte; auj. le prêtre offre à Dieu le pain et le vin de la communion; il élève le pain et découvre la coupe; encens, lavage des doigts, psaume 26, prière. — 4° Consécration des espèces, ou Canon de la messe, règle invariable. Ce u'était d'abord que la lecture des paroles de l'institution; peu à peu, depuis Grégoire-le-Grand, la liturgie s'est développée. Après la préface sursum corda, viennent les prières d'actions de grâces et d'intercession, puis la consécration par le signe de la croix. Dès lors les éléments étant transsubstantiés, 1h prêtre les adore, l'assemblée se met à genoux, et une prière est faite pour les vivants et les morts. — 5° La Communion; le prêtre partage l'hostie en trois et la trempe dans la coupe; ensuite il communie lui-même, ce dont la clochette avertit les assistants, et il donne la communion à ceux qui le désirent, en l'accompagnant de prières ou de citations appropriées, Agnus Dei, Pater, Libéra nos, etc. Puis vient la purification; il nettoie la coupe avec du vin non consacré, qu'il boit pour qu'il ne se perd*1 rien du sang de Christ. — 6° Enfin l'action de grâces, ou Postcommunion, lecture de Jean 1. 1-14, prières et collectes. Le diacre termine par: Rendons grâces à Dieu; après que l'officiant a dit: lté, missa est, et l'assemblée se disperse. — La messe orientale ressemble sur plusieurs points à la messe latine, mais elle ne repose pas sur le dogme d'une hostie devenant le même corps que celui qui a été offert sur la croix, que celui qui a été pris de la vierge Marie; en outre l'Égl. orientale n'a pas retiré la coupe aux fidèles. — La messe doit être célébrée à jeftn par le prêtre, ses assistants et les communiants, par conséquent le matin. Un prêtre ne peut en din* qu'une par jour, sauf des exceptions justifiées et autorisées. On distingue plusieurs sortes fa messes: publique, basse, solennelle, chantée,sèche, nautique (sur les vaisseaux); pour les morts, etc.; elles varient un peu et même beaucoup suivant les circonstances, en luxe, en longueur, en beauté, et dans le choix des prières et des lectures, mais le canon et la communion sont l'acte fondamental, qui ne varie pas. Les fidèles sont tenus d'assister au moins à une messe chaque dimanche. Les messes privées sont celles qui se lisent à un autel particulier, dans une chapelle, un jour ouvrable, ou sans communiant.

MESTREZAT lo Jean, né 1592 à Genève, fils d'un conseiller d'État, étudia à Saumur, fiit consacré par Du Moulin 27 août 1614, et fut aussitôt appelé par l'Égl. de Paris au poste de Charenton, qu'il occupa 42 ans. Il épousa eu juin 1624 Catherine de Malapert, veuve de J. Bellette et en eut 2 enfants. D'un caractère ferme, très instruit, orateur éminent, modeste et modéré, il exerça une grande influence. Provoqué par les jésuites, il leur tint tête en plusieurs rencontres, une fois contre Véron, une autre fois contre Regourd en présence d'Anne d'Autriche, plusieurs fois contre l'abbé de Retz. Il fut député à plusieurs synodes nationaux, présida celui de Charenton 1631, parla pour le rapprochement des luthériens et des réformés et pour le relèvement des études, et lit décider que les « séminaires et pépinières » do l'Église seraient conservés à tout prix, f à Paris 2 mai 1657. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages plutôt profonds et bien raisonnés, que bien écrits; la plupart sont dos sermons; il y a aussi quelques traités de controverse (le Hibou des jésuites), des dissertations sur la Communion, la Justification, l'Église et une Exposition de l'Ép. aux Hébreux, Genève 1855.

2o Philippe, que l'on fait à tort iïls du procèdent, fut prof, de théol. à Genève, et représenta avec Tronchin la tendance libérale de l'école de Saumur contre le calvinisme strict de F. Turrettini. f 2 févr. 1690.

MËTAPHRÀSTE (Siméon le), rédacteur et compilateur d'une collection de vies et légendes des saints, recueillies dans les églises et les couvents, sans discernement ni critique; il accepte les fables les plus ridicules et il les reproduit avec une liberté pleine d'imagination, les embellissant à sa manière, ce qui lui a valu son surnom. D après Allatius il aurait été au commencement du 10me siècle protosecrétaire de Léon VHe-Philosophe, et de son fils Constantin VII; en 902 il aurait accoinpagué une ambassade auprès des Arabes de Crète, et c'est à son passage à Paros qu'il aurait été amené à ridée d'écrire son livre. Oudin le place au 12'"* siècle et n'en fait qn'un personnage avec Siméon le logothète, ou l'historien à qui on doit l'ifyn-tome canonum. Il paraît cependant que ce sont deux écrivains distincts. La collection du Mé-taphraste contient 122 vies, dont les principales ont été insérées dans le recueil des bollandistes. Allatius et Cave ont cherché à déterminer ce qui appartient en propre à cet auteur; quant à plusieurs lettres, poésies, discours, etc., il est difficile de dire auquel des deux Siméon il faut les attribuer.

MÉTATKON, celui qui veille, est le nom que la théol. rabbinique donne à l'ange gardien d'Israël, celui qui marchait à la tête du peuple dans le désert, l'ange de la face, qui porte aussi le nom de Michel. Il correspond à la Sche-china, à la nuée dont s'enveloppe la majesté divine,

METH, Ézéchiel, fanatique du 17me siècle, fils d'un maître d'école de Langensalza, et neveu de Stiefel, q. v. Le mépris de la Bible, du ministère et des sacrements, le rêve d'une Église idéale et du paradis sur la terre, caractérisaient ces enthousiastes. Ils occasionnèrent des soulèvements tumultueux à Langensalza, Erfurt et ailleurs. Il entra comme chimiste chez le comte Haas Louis de Gleichen, dont la femme passa bientôt à ses idées. Après beaucoup de persécutions, et surtout après la mort de son oncle 1627, il se convertit à Erfurt 1628. f 26 oct. 1640.

MÉTHODISTES, secie anglaise, appelee aussi we$leyen$, du nom de Wesley, son fondateur, q. v. Jean et Ch. Wesley, Whitefield et quelques autres jeunes étudiants d'Oxford, pénétrés d'un vif sentiment religieux et déplorant le formalisme, l'indifférence et le dogmatisme mort qui régnaient dans l'Église officielle d'Angleterre, se réunirent pour s'affermir dans la foi et vivifier leur piété par des prières, des conversations édifiantes et la pratique des bonnes œuvres, visites de malades, etc. A cela rien d'officiel, surtout aucune idée de se séparer de l'Égl. établie. En 1735 les deux Wesley se rendirent comme missionnaires en Georgie, ou ils entrèrent en relations avec les moraves et se lièrent intimement avec eux, mais n'ayant pas trouvé le champ d'activité qu'ils désiraient, ils revinrent à Londres en 1738, et fondèrent à Fetter-Lane, avec les moraves, une société d'édification mutuelle. Wesley était tourmenté dans sa conscience; il lui semblait qu'il n'avait pas la foi, il la demandait à Dieu avec instances, et c'est le 2i mai 1738 qu'il dit avoir enfin été converti, subitement, par un acte de Tesprit de Dieu. Un voyage à Herrnhut, la même année, le fortifia dans ses sentiments, mais lui prouva aussi qu'il y avait entre lui et les moraves d assez graves divergences. A son retour à Londres il y trouva Whitefield, qui revenait de la Geor-git\ Ils commencèrent ensemble des tournées missionnaires, qui firent une immense impression, en même temps qu'elles leur attirèrent des haines, des railleries et des persécutions. Bien loin de préparer un schisme, ils cherchèrent à gagner à eux les évêques, mais c'est chez ces hauts dignitaires qu'ils rencontrèrent la plus opiniâtre résistance, jusqu'à être menacés d'excommunication. En 1739 Whitefield commença ses prédications aux mineurs de Kingswood, pendant que Wesley prêchait en plein air à Bristol et à Londres, souvent devant 20,000 auditeurs. Ces prédications libres leur ayant été interdites, Wesley ouvrit en niai 1739 à Bristol sa première chapelle. L'association de Fetter-Lane fut dissoute en 1740,1a marche tranquille des hernhoutes ne s'accordant pas avec l'impétuosité des nouveaux apôtres et avec leur fiévreuse activité, et ceux-ci se constituèrent en United Society; ce fut la première association méthodiste. Whitefield et Wesley se séparèrent aussi, mais sans cesser d'être amis, le premier représentant le calvinisme strict et la prédestination, le second penchant plutôt vers l'armi-nianisme. Un pas important dans le développement du méthodisme fut l'emploi des laïques comme prédicateurs. Wesley ne s'y décida que difficilement, et sous l'influence de sa mère.

Parmi les prédicateurs improvisés, en général pauvres et sans culture, mais animés d'une foi ardente, il y avait certainement un choix à faire, mais tels quels ils contribuèrent pour beaucoup à répandre le méthodisme, quoique leur manque d'études théol. constituât un danger au point de vue d'un trop grand subjecti-visme religieux. Une première conférence générale, tenue à Londres en 1744, posa les bases de l'organisation de la Société, toutefois sans se séparer encore de l'Égl. établie. 11 s'agissait surtout de réagir contre le formalisme et l'indifférence, contre le dogme de la régénération baptismale et contre l'exagération de la notion d'église. Les United Societies établirent une discipline intérieure, destinée à favoriser le développement de la vie chrétienne, en instituant des classes, dans chaque église, c.-à-d. des groupes de 10 à 12 personnes, se réunissant une fois par semaine sous la direction d'un surveillant, ponr se communiquer leurs expériences, leurs tentations, leur état spirituel. Plusieurs églises réunies formèrent un circuit. Outre les prédicateurs locaux (le plus souvent des laïques pieux et bien doués), des prédicateurs itinérants turent chargés de visiter régulièrement les diverses communautés, et l'un d'entre eux fut désigné comme assistant ou surintendant. On en comptait déjà plus de 40 en 1744. La Société tout entière, églises et pasteurs, relève de la Conférence, qui se réunit une fois par année, et qui jusqu'à ces derniers temps était exclusivement formée d'ecclésiastiques. Le chiffre de ses membres fut fixé à cent par la Deed of déclaration de 1784, qui est en quelque sorte la charte constitutive du méthodisme. La conférence, comme autorité centrale, décide de toutes les questions de dogme et de discipline. On a reproché aux wesleyens d'avoir eu recours à des moyens extérieurs et artificiels pour convertir ou vivifier les âmes; mais tout le monde en fait à peu près autant; on cherche à agir sur toutes les facultés et même sur les habitudes de ceux que l'on veut convaincre. Des prédications journalières, des réunions intimes, des agapes trimestrielles (empruntées aux moraves), des nuits de prières, des jours de jeûne, le renouvellement annuel de l'alliance, des chants nombreux, comptent parmi les moyens qu'ils employaient, et l'on voit que ces moyens ne sont pas bien extraordinaires. Ils sont cependant ce qu'il y a d'un peu spécial dans ce qu'on a appelé leur méthode> et c'est de là qu'est né le nom de méthodistes. Les progrès de la Société avaient été rapides; grâce au zèle de ses agents elle avait obtenu de brillants succès dans les contrées les plus déchues de l'Angleterre; en 1747 elle comptait déjà en Irlande, et en 1751 en Écosse de nombreuses congrégations. Les persécutions, qui allèrent jusqu'à démolir leurs chapelles, à maltraiter les prédicateurs, à menacer même leur vie, ne fit naturellement que les exciter davantage. L'opposition des évêques et du clergé poussa Wesley plus loin qu'il ne s'était proposé d'aller, et pour avoir des prédicateurs régulièrement consacrés, qui pussent distribuer la Cène, il s'adressa 1766 à un èvêque grec accidentellement en passage. Il croyait encore un peu à la succession apostolique dans toutes les Égl. chrétiennes, ou du moins à sa nécessité pour l'ordination et la communion. Plus tard, au moment de la guerre avec l'Amérique, ayant besoin d'un grand nombre de pasteurs missionnaires, et comprenant mieux qu'il n'avait fait que le pasteur et l'évêquen'étaient qu'une même charge dans l'Égl. primitive, il se décida à consacrer lui-même deux de ses évangélistes, et nomma surintendant, èvêque ou surveillant de la mission 1784. Thomas Coke, né 1754, qui avait été jusque-là son aide. Ce fut une rupture complète avec l'Égl. officielle. L'année suivante il consacra encore 3 pasteurs en Écosse. En même temps ses adhérents choisirent pour leurs réunions les mêmes heures que celles du culte anglican, ils adoptèrent d'autres chants, une autre liturgie, et pour bien accentuer la séparation, Wesley invoqua en sa faveur, pour lui et ses disciples, l'Acte de tolérance de 1689, fait spécialement pour les sectes séparées de l'Égl. établie. C'est à partir de ce moment 1785 que le méthodisme peut être compté comme une secte, ou une Église à part. On ne saurait nier les services qu'il a rendus, ni l'influence qu'il a exercée, soit en opposant l'idée de la vie nouvelle à celle de l'orthodoxie, soit en maintenant la doctrine évangélique contre les prétentions du rationalisme, soit en s'occupant avec amour et avec zèle des classes inférieures trop longtemps dédaignées, soit en luttant énergiquement contre la traite des nègres et pour l'abolition de l'esclavage, soit en travaillant au soulagement matériel et au relèvement moral des malheureux, par un ensemble d'oeuvres qui ont été le point de départ de la mission intérieure; soit enfin par leurs traités, leurs hymnes et leurs cantiques. Le mouvement méthodiste en Amérique, commencé par les deux Wesley en Geor-gie, fut surtout continué par Whitefield dans les 6 voyages missionnaires qu'il y fit entre 1738 et 1770; mais la première congrégation régulière s'ouvrit sous l'influence directe de Wesley, à New-York 1766, et fut fondée par un prédicateur laïque de ses disciples. De nombreuses communautés suivirent, en Pensylvanie, Mary-land, etc., mais sans rapports les unes avec les autres, jusqu'à ce que, après la guerre d'indépendance 1784, Wesley leur envoya, comme on l'a vu, le Dr Coke comme surintendant pour les organiser et les réunir en une seule Église, ce qui eut lieu la même année dans l'assemblée des prédicateurs laïques de Baltimore. La plupart des méthodistes américains ont conservé l'organisation épiscopale et le titre d'évêque, équivalent à celui de surintendant; Coke fut le premier qui le prit, d'accord avec Wesley et La Fléchère. Ils ont aussi adopté certaines formes ou procédés imaginés par Whitefield pour agir sur la sensibilité nerveuse et sur l'homme extérieur: les camp-meetings, ou réunions en plein champ, les protracted-meetings, ou réunions qui durent plusieurs jours, les bancs d'angoisse pour les auditeurs travaillés et ébranlés, et ils ont obtenu ainsi des réveils, revivais, et des conversions. Sans doute ces résultats n'ont pas toujours duré; c'est un inconvénient qui se rencontre avec toutes les méthodes et dans toutes les églises. Wesley leur donna aussi une liturgie, ou Gommon prayer book revisé, et réduisit à 25 les 39 articles de la Conf. de foi anglicane, mais la liberté du culte et la spontanéité de la prière l'emportèrent en général et ôtèrent une partie de leur importance à ces essais partiels de réforme. Au point de vue de la doctrine, les wesleyens rejettent le dogme de la prédestination comme conduisant à l'antinomianisme, et ils enseignent, ce qu'on leur reproche surtout, que le chrétien, par le travail de la sanctification, peut arriver à la perfection, en vertu de 1 Jean 3, 9. Matt. 5, 48. Il est probable qu'il règne sur cette question, comme sur tant d'autre9, un malentendu résultant de définitions défectueuses et entretenu par obstination de la part de quel-ques-uns, par amour de la discussion et par exagération de la part de ses adversaires. Le nombre des méthodistes est d'environ 24 millions, en comptant les élèves des écoles, soit; aux États-Unis, l'Égl. méthodiste épiscopale, 1,800,000; l'Égl. méth. épisc. du sud 843,000; l'Égl. méth. africaine 400,000; l'Égl. m. protestante, 114,000. En Angleterre, Irlande, etc., 507,598 membres, avec 27,000 pasteurs et prédicateurs locaux. Au Canada on distingue: l'Égl. méth. canadienne, l'Égl. méth. épiscopale, les méthodistes primitifs et les chrétiens bibliques, qui viennent de s'unir en un,seul corps ecclésiastique, avec un total de 170 mille membres effectifs. Les missions wesleyennes sont nombreuses et florissantes; les plus anciennes sont celles des Indes occidentales, de l'Océanie, du Cap et de la Côte d'Or, — v. Cook. Rostan, surtout Matt. Lelièvre, John Wesley, sa Vie et son œuvre, nouv. éd. Paris 1883, M. Edm. Schérer appelle le méthodisme « un mouvement religieux qui a changé la face de l'Angleterre, » et M. Ch. de Rémusat, qui l'appelle une renaissance de la Réformation* lui attribue une influence indirecte beaucoup plus considérable que ne le seraient les effets immédiats de la prédication de ses pasteurs et de ses missionnaires.

MÉTHODIUS lo surnommé Eubulius, successivement év. d'Olympe, de Patara en Lycie el de Tyr; on sait peu de chose de sa vie; Eusèbe et Socrate le désignent comme un adversaire décidé d'Origène, dont il combat la doctrine sur la résurrection et la préexistence de l'âme. Exilé par les intrigues des ariens, il subit le martyre sous Maximin 312. Épiphane nous a conservé quelques fragments de ses écrits sur la Résurrection et sur la Création. On a encore de lui un Éloge de la virginité en forme de dialogue, et un poème de 10,000 vers contre Porphyre. Il a écrit un Traité sur le libre arbitre, mais celui qu'on possède sous son nom n'est pas de lui, non plus que 2 homélies, une Révélation et une Chronique.

2° Méthodius, ou Mèthud, v. Cyrille, et Bulgares.

MÉTROPHAiNES Critopoulos, théol. grec, né à Bérée, élevé dans un des cotivents du mont Athos, fut nommé fort jeune hiéromonaque (secrétaire-chancelier) de Cyrille Lucar. Celui-ci l'envoya compléter ses études à Oxford, auprès de l'archev. Abbot, 1616, puis en 1621 jusqu'en 1626, dans les univ. évangélique»de l'Allemagne. Après avoir enseigné le grec à Venise quelques années, il fut à son retour nommé patr. d'Alexandrie, f après 1640. Pendant son séjour à Helmstâdt 1625, il avait écrit un Exposé de la doctr. de l'Égl. grecque et de ses principales coutumes, qui fut trad. en latin par Hornejus, Helmstâdt 1661; la tendance générale en est évançélique.

METROPOLITAIN, archevêque ayant comme suffragants plusieurs évêques sous ses ordres. Une église métropolitaine est la cathédrale d'un archevêché.

METZ, Divodurum, l'ancien chef-lieu des Médiomatrices, a eu très anciennement des évêques, dont la légende raconte qu'ils ont obtenu par leurs prières des résultats merveilleux lors des invasions des Germains et des Huns. Leur histoire a été écrite vers 783 ou 791, sur l'ordre de Charlemagne, par Paul le diacre, mais elle est défectueuse. Parmi ces évêques on remarque saint Arnulph, 614, que l'on croit être la souche de la maison carlovingienne; Chro-degang, qui imposa à son clergé une règle imitée de celle de saint Benoît et le soumit à la vie commune; Angilram 768-791, chapelain de Charlemagne, à qui l'on attribue les capitulaires qui portent son nom; Drogo 823-835, le S^e fils de Charlemagne qui s'occupa du chant sacré et fonda l'école de Metz. L'évêché relevait de Trêves, et continua d'en dépendre, même après les traités de Cambrai 1656 et de Westphalie 1648. Quant à la Réformation, v. Lorraine.

METZ, Christian, v. Inspirés.

MEXIQUE. Aussitôt après la conquête de ce pays par Cortez, les congrég. cathol. entreprirent la conversion des Indiens. Ce furent d'abord les franciscains 1522, puis les dominicains 1526, en 1572 les jésuites. Comme dans toute l'Amérique espagnole, il ne fut question naturellement que d'une conversion extérieure et les vieilles idoles furent plus d'une fois utilisées pour le nouveau culte, dont l'éclat rehaussé d'or, de pierreries et de riches tapis, était calculé pour frapper les imaginations. Un clergé sans instruction, souvent sans mœurs, mais dévoré d'avarice et d'ambition, n'eut bientôt plus d'autre souci que d'opprimer et d'exploiter les pauvres propriétaires du pays; le mal s'aggrava par les ambitions rivales des différents ordres, ainsi que par la jalousie qui ne cessa d'exister entre le clergé régulier et le clergé seculier. Les bons évêques, tels que Pa-lafox, furent une exception, et leurs récils donnent une triste idée de l'état de la religion dans les provinces qui leur étaient soumises; la perception d'énormes impôts était le plus clair de l'administration ecclésiastique. L'organisation actuelle date du bref papal de 1851; elle comprend un archevêché et onze évêchés, ainsi que d# nombreux couvents. Le pape s'étant prononcé en 1826 contre la révolution et contre l'indépendance du Mexique qui venait de secouer le joug espagnol, les relations avec la curie romaine furent entièrement interrompues et ne se renouèrent qu'en 1837. Dès lors, et dans toutes les révolutions qui suivirent, l'intérêt du clergé joua un rôle capital; il s'agissait pour les uns de lui arracher sa puissance, pour lui de la défendre et de la conserver. Jusqu'en 1861 il possédait près de la moitié de la propriété foncière, et ses revenus étaient de 50 °/o plus considérables que tous ceux du gouvernement réunis. À cette époque le triomphe du parti libéral changea la situation. Le président Juarez sécularisa les biens ecclésiastiques, supprima les couvents et proclama pour tous la liberté de conscience qui jusqu'alors n'existait que pour les étrangers seuls. Les évêques récalcitrants furent exilés. Une église cathol. nationale se fonda sous la direction d'un évêque libéral, et compta bientôt des martyrs. Plusieurs missions protestantes ouvrirent aussi des églises, et le fanatisme local, attisé par des prêtres, amena des démolitions de temples, des assassinats et des exécutions de pasteurs et d'êvangé-listes. La parti clérical conservait encore une grande puissance. Il avait à sa tête l'archev. Al-monte, qui réussit à organiser la fameuse campagne du Mexique de 1861-1862, avec l'empire éphémère de Maximilien. Le clergé abandonna le malheureux empereur dès qu'il vit que celui-ci ne voulait pas être un instrument docile entre ses mains pour lui rendre ses propriétés et ses privilèges. Dès lors, et surtout depuis le congrès de 1873 qui décréta l'expulsion des jésuites et confirma les mesures de Juarès, le protestantisme a recommencé son œuvre; il compte auj. 60 paroisses, avec 40 pasteurs et évangé-listes, et un évêque à Mexico.

MEYER lo Henri-Aug.-Guill. né à Gotha

10 janv. 1800, étudia à Iéna, et fut, après plusieurs autres postes, appelé comme conseiller ecclésiastique, premier pasteur et surintendant à Hanovre 1848. Démissionnaire en 1865 pour cause de santé, il se retira à Gôttingue et se livra à des travaux littéraires. Il fut membre de plusieurs commissions importantes, entre autres de la conférence de Halle chargée de reviser la version de Luther. Son principal ouvrage est un Comment, critique et exégétique du N. T., commencé en 1832. Il a publié aussi en 1829 une édition des Livres symboliques de l'Égl. luthérienne.

2<> Jean-Frédéric (de), né à Francfort 12 sept. 1772, étudia à Gottingue le droit, la philos, et l'histoire, à Leipzig les beaux-arts, et remplit plusieurs fonctions civiles et administratives, jusqu'au moment où l'invasion française mit lin à ses travaux 1802. Il se rendit alors de Mannheim à Francfort s/M., et il y fut successivement nommé conseiller administratif, juge, sénateur, syndic, premier bourgmestre et député à la diète. Erlangen en 1821 le nomma docteur en théol. f 1849. Il était arrivé par ses propres recherches du rationalisme au christianisme positif. Ses principaux travaux sont une version revisée de Luther, avec Notes explicatives, encore très appréciée et digne de l'être, 1819, 1823, 1855; des Explications bibliques 1812, une Étude sur le monde des esprits 1810, la Clé de l'Apocalypse 1833, et surtout ses Lettres sur les Vérités supérieures dans leurs rapports avec le magnétisme, 1818-1832, 11 livraisons.

11 a aussi fait une Étude sur la Jetzira, ou la Cabale juive.

MEY FART, on May fart, Jean-Matthieu, né à Iéna 1590, fils d'un pasteur de la Thuringe. Après avoir commencé à Gotha, il étudia à Iéna et à Wittenberg la philos., l'histoire et la théologie 1611. Nommé en 1616 prof, au Casimi-rianum de Cobourg, il passa en 1533 à Erfurt, d'abord comme prof, de théol., puis comme recteur, pasteur et doyen, f 1642. Il a écrit en latin quelques ouvrages de controverse et de polémique, contre les jésuites et contre les sophistes; et en allemand plusieurs études sur les Derniers temps: la Dernière trompette, la So-dome infernale, la Jérusalem céleste, etc. On lui sait gré d'avoir un des premiers élevé h voix contre les procès de sorcellerie, dont il a dénoncé l'infamie et les abus. Il s'est occupé enfin d'une réforme dans les études universitaires, et du relèvement de la vie religieuse dans l'Égl. et chez les pasteurs. S'il n'a pas exercé une influence bien durable, il a cependant frayé la voie aux travaux et à l'action de Spener.

MEZZOFANTE, Gaspard-Joseph, né à Bologne 17 sept. 1774, fils d'un pauvre ébéniste, put étudier, grâces aux bontés de Rospighi, supérieur des pères de l'oratoire, et fut ordonné prêtre 1797. Son remarquable talent pour les langues se révéla à l'hôpital de Bologne, lorsqu'il eut à s'occuper des soldats blessés ou malades de diverses nationalités. Il apprenait plus ou moins leur langue en les soignant, et finit par savoir, dit-on, 62 langues et même les dialectes de plusieurs d'entre elles. Nommé en 1804 prof, de grec et de latin à l'univ. de Bologne, il perdit sa place parce qu'il refusa de prêter serment k Napoléon, mais il fut rétabli par Pie VII, nommé bibliothécaire de l'université, et plusieurs fois recteur. Grégoire XVI l'appela à Home, et le fit successivement prélat domestique, chanoine de Saint-Pierre, et en 1838 car dinal; en cette qualité il fut membre des congrégations de la propagande, de l'index, des rites. de l'examen des évêques, et préfet de la rongrég. des études (ministre de l'instruction publique), f mars 1849. Remarquable par la pureté de ses mœurs et par sa facilité pour les langues, il n'était ni un savant ni même un linguiste dans le sens scientifique du mot. Il n'a laissé aucun écrit.

MICHAELIS 1° Jean-Henri, né 26 juill. 1668 a Klettenberg, comté de Hohenstein, voué d'abord au commerce, se tourna ensuite vers la théol. et la philos, et s'adonna spécialement k l'étude des langues orientales. Il professa d'abord l'hébreu à Leipzig, puis à Halle le grec, le chai-déen, l'hébreu, le syriaque et l'arabe. En 1698 il se rendit à Francfort pour y étudier l'éthiopien sous la direction de Ludolf et fut nommé prof, de grec dans cette université. Rappelé à Halle comme inspecteur de la biblioth., il fut également nommé prof, de théol., doyen et directeur du séminaire, + 1738. 11 avait fondé avec Francke le collège théol. oriental, plus important au point de vue des langues qu'au point de vue théol. proprement dit. Sa tendance était opposée à celle de Spener, plus sobrement religieuse, critique plutôt que mystique. Il a publié un travail sur les accents hébreux, un Comment. sur Ésaïe, une étude sur l'Ecclés., une Bible hébr. annotée, etc.

2o Chrétien-Bénédict, son neveu, né k Elrich, Hohenstein, 26 janv. 1680, théol. et orientaliste, bon exégète, prof, à Halle, f 20 fév. 1762. Auteur d'un traité sur les variantes du N. T.

3o Jean-David, fils du précédent, le plus célèbre de la famille. Né à Halle 27 févr. 1717, il étudia dans la maison des orphelins, visita l'Angleterre et la Hollande, et fut nommé prof, de philos, k Gottingue en 1745; en 1750 il fut chargé des langues orientales. En 1751 il fonda avec son ami, le grand Haller, l'Acad. des sciences dont il fut bientôt le directeur. De 1753 à 1770 il rédigea la Revue scientifique publiée par cette Société, et la Biblioth. orientale et exégétique. Depuis 1761 il fut le directeur, non salarié, du séminaire philosophique. Nommé conseiller impérial en 1785, conseiller intime du ministre de la justice, il f 22 août 1791. Savant distingué il a travaillé à expliquer l'hébreu par les analogies des autres langues orientales et il a rendu d'éminents services à l'interprétation des Écritures. Sa piété s'est ressentie jusqu'à la fin de la bonne influence de Halle. Comme théol. il sert de transition entre l'orthodoxie et le rationalisme, mais tourne quelquefois au vulgaire. Ses principaux ouvrages sont: sa Gramm. chaldéenne, le Droit mosaïque (trad. librement par Cellérier), l'Introduction au N. T. (trad. en français par Chenevière), l'Introd. à l'A. T., inachevée, et quelques travaux philosophiques.

4° Jean-Daniel, son fils, prof, à GOttingue, attaché à l'orthodoxie, mais plutôt intellectuellement que par le cœur. Il lui manquait une conviction vivante, et la manière dont il défendit le christianisme, en s'arrêtant à une foule de petites difficultés, le compromettait plus qu'il ne le servait.

MICHEL lo v. Cérularius. 2<> v. Scot. 3® emp. d'Orient, sous la régence de sa mèreThéodora, qui négligea son éducation. Livré à tous les vices et mal entouré, dès qu'il fut majeur il éloi -gna de la cour les meilleurs conseillers, et fit enfermer dans un couvent 857 ses 3 sœurs et sa mère, qui f 867.

MICHËLADE (la), soulèvement populaire qui eut lieu à Nîmes le 30 sept. 1567, jour de la Saint-Michel, et où les huguenots, furieux des persécutions qu'ils avaient souffertes, se vengèrent en massacrant les principaux chefs du parti catholique. D'après Ménard il y eut 80 victimes, parmi lesquelles figurent le consul Gui Rochette; Jean Quatrebar, prieur des augustins; le vicaire général Jean de Pabéran, etc. L'év. Bernard d'Elbène échappa. Les religion-naires ne frappèrent que leurs ennemis, et ne touchèrent ni aux femmes, ni aux cathol. inoffensifs. Le Consistoire intervint énergiquement, mais en vain; il était débordé. 11 n'en fut pas moins compromis. Le parlement de Toulouse condamna plus de cent personnes à mort par contumace; 4 périrent sur l'échafaud.

MICHEL-ANGE, Buonarotti, né 1474 au château de Caprèse, Toscane; f 1563. Ce puissant génie, fils d'un habile sculpteur, fut placé comme apprenti chez Dominique et Ghirlan-dajo, et les quitta à 15 ans les ayant déjà dépassés, Laurent de Médicis se fit son protecteur et lui assigna un logement dans son palais. Quand le protecteur mourut, l'artiste avait sa réputation faite; son Bacchus était un chef-d'œuvre que Raphaël attribuait, à cause de sa perfection, à Phidias ou à Praxitèle. Serviable et bon pour les petits, M.-A. ne sut jamais fléchir devant les grands, bien qu'il ait en quelque sorte passé sa vie à leur service. Il a eu l'occasion de voir bien des papes, et malgré son respect pour leur autorité, il a touj. traité avec eux d'égal à égal, jaloux de ses droits d'artiste et de sa dignité d'homme libre. Le belliqueux Jules II, le somptueux et gros Léon X, le belge Adrien VI qui n'entendait rien aux beaux-arts, Clément VII, Paul IV et Pie IV l'ont vu à l'œuvre; tous ils ont cru pouvoir lui donner des ordres, mais ils n'en ont rien obtenu que ce qu'il voulait bien leur accorder. C'est surtout avec Jules II que ces rapports de l'artiste furent caractéristiques. C'est lui qui l'avait appelé et fixé à Rome; il le faisait travailler, mais ne lui payait pas même le marbre qu'il faisait venir de Carrare. Un jour le sculpteur lui ayant demandé une audieuce, et le pape en colère la lui ayant refusée, Michel-Ange partit brusquement pour Florence et n'en revint qu'après que Jules eut envoyé courriers sur courriers, brefs, promesses, menaces; encore fallut-il que le pape fît la moitié du chemin et vînt jusqu'à Bologne à la rencontre de celui qu'il avait offensé. Jules II avait commandé à Michel-Ange un tombeau somptueux; cette idée fut abandonnée après que le sculpteur eut fait seulement l'une des 40 statues qui devaient lui servir d'ornement; mais cette statue c'est le Moïse.

C'est à la cour de Jules II, que Michel-Ange apprit à mépriser l'humanité, dont il voyait de près les faiblesses, les bassesses et les tromperies. Le cardinal Bramante, désirant pousser un jeune parent qu'il avait (Raphaël), et jaloux de la gloire du sculpteur florentin, conseilla à Jules II de faire peindre par Michel-Ange les voûtes de la chapelle de Sixte IV. C'était briser sa carrière; Bramante le pensait, du moins; il savait que Michel-Ange était sculpteur et architecte et qu'il ne s'était plus occupé de peinture depuis son apprentissage; il savait, en outre, que la peinture d'une voûte est toujours une œuvre difficile. Mais le génie de Buonarotti l'inspira, et ce qui était une épreuve devint pour lui l'occasion du plus éclatant triomphe. En vain, l'on multiplia sous ses pas toutes les difficultés; les échafaudages étaient mal faits; les couleurs n'étaient pas solides, le mortier moisissait. Michel-Ange résolut de tout recommencer et de tout faire par lui-même, menuiserie, chaux, couleurs, etc. Il y travailla nuit et jour, tombant parfois de sommeil et s'assoupissant sur ses échafauds, jusqu'à ce qu'au bout de vingt mois, la première partie de son œuvre étant terminée, Jules II voulut à toute force la présenter à la foule. Ce fut un immense succès. La second** partie de la voûte fut achevée en 1512; le tout avait pris quatre ans. Jules II trouvait qu'il manquait un peu d'or a ces figures. « Ce sont des saints que j'ai voulu peindre, > lui répondit ironiquement Michel-Ange.

La seule énumération des œuvres de ce grand maître prend 39 pages du livre de M. Charles Clément, et Michelet en consacre plus de cent a l'examen des fresques du Jugement dernier, dont la pensée mystérieuse, mais certainement douloureuse, n'a pas encore trouvé son interprète.

Michel-Ange vécut toujours solitaire; il eut sans doute beaucoup d'amis, mais ses affections les plus vives s'étaient, après la mort de son père, concentrées sur le fidèle Urbino qui 1* servait depuis le siège de Florence. Quand il le perdit, 1556, il put écrire en toute sincérité: « La majeure partie de moi-même Ta déjà suivi, » et, plus tard: « Je n'ai plus aucune idée qui ne soit empreinte de la mort. »

Il ne connut jamais l'amour dans le sens vulgaire de ce mot. Une fois, en 1538 il aima; il avait 63 ans; celle qu'il aimait, c'était la belle Vittoria Colonna, âgée de 48 ans et veuve depuis 13 ans; il lui donna toute son âme, sans cesser un instant d'être artiste; c'est pour elle qu'il fit la Descente de croix, Christ et la Samaritaine, et le Crucifiement. Cet attachement dura neuf années. Vittoria f 1547. Michel-Ange avait 73 ans quand il la perdit; il était fou de douleur; il lui baisa la main et regretta jusqu'à la fin de n'avoir pas osé l'embrasser sur le front.

Cependant, sa carrière était loin d'être finie; il lui restait à terminer Saint-Pierre avant de mourir; il avait 80 ans quand il fit les plans de la merveilleuse coupole qui le domine, et il dut. comme dans sa jeunesse, lutter contre des intrigues sans cesse renaissantes qui menaçaient de lui enlever sa gloire et son travail. « Vous n'avez qu'à donner de l'argent et à écarter les fripons, dit-il brusquement au cardinal Marcello qui l'accablait d'observations; quant à la bâtisse, c'est mon affaire. » Saintement jaloux de Brunelleschi, l'architecte de Sainte-Marie-des-Fleurs, de Florence, il devait le dépasser en hardiesse et n'en resta pas moins son ardent admirateur; il était trop grand pour être jaloux. A la fois architecte, sculpteur, ingénieur, diplomate, militaire, peintre et poète, il plane dans le ciel de la Renaissance comme un aigle solitaire. unissant dans sa personne toutes lesgran-deurs et tous les contrastes, frère de Dante et disciple de Savonarole. Il avait trop d'élévation dans l'âme ponr n'être pas profondément religieux; mais on se demande quelle était sa religion. Il n'a fait aucun acte qui permette de le classer; au moment où il vivait, en Italie surtout, les questions se posaient, mais n'étaient pas résolues; la transition était dans les esprits comme dans les faits; il y avait un travail des intelligences, et plus que personne Michel-Ange était homme à vivre de sa vie propre. De même que Vittoria ne voulait entendre que t la voix puissante de Jésus, et ne brûler que de l'amour céleste, » lui-même, dans ses poésies et dans ses lettres, ne tient pas un autre langage que celui des hommes de la Réforme. Il pleure son frère, « mort sans les secours religieux que l'Église ordonne; mais il a eu une bonne contrition et cela suffit pour son salut. » Il pleure son père, mais il n'est pas question du purgatoire: « La grâce divine, le sacrifice de J.-C. peuvent seuls obtenir le salut. » • Je t'appelle, Seigneur, je t'invoque toi seul. » « La foi est le don par excellence. » Des déclarations semblables abondent dans ses Rimes, et le placent incontestablement au nombre de ceux qui ont subi l'influence réformatrice du 16m« siècle. Ses mœurs, sa vie, son caractère témoignent de sa foi positive; il travaillait la Bible à la main. Les papes, qu'il met en enfer dans son Jugement dernier, prouvent d'un autre côté qu'il ne se faisait aucune illusion sur leur sainteté; peut-être les avait-il vus de trop près.

MIDDLETON, Conyers, théol. anglais, né 1683 à Richmond, étudia et devint docteur à Cambridge, et en 1723 bibliothécaire, f 1760. II appartenait à la tendance libérale, nia la présence des dons miraculeux dans l'Église, eut avec l'év. Warburton, de Glocester, une discussion qui n'aboutit pas, et détourna Bentley de publier son édition critique du N. T. Il a publié des Lettres sur Rome; Libres recherches sur le don des miracles; Examen d'un discours de Sherlock sur les prophéties, et une Vie de Cicéron, très estimée.

MIDRASCH, auplur. Midraschim, de l'hébreu darasch. chercher, pénétrer; commentaires libres et allégoriques des livres de la Bible. C'était un des 4 modes d'interprétation de l'Écriture employés simultanément dans la synagogue au temps d'Esdras; on distinguait les Halachoth, règles, ordonnances, et les Hagadoth, ou traditions, plus fantaisistes, plus goûtées, mais quelquefois exagérées et ne faisant pas autorité. Dans le sens le plus général on appelle Midraschim les livres de cette catégorie écrits jusqu'au tt®e siècle; dans un seus plus restreint, ceux des au 5»e siècle, v. Franck, la Kabbala.

MIES, Jacques (de), v. Jacobel.

MILÈVE. ville de Numidie, où se sont tenus deux conciles: l'un en 402 (le 7°* africain), qui fixa le rang des évêques d'après la date de leur ordination; les Actes en sont conservés; le second, plus important, en 416, auquel assista Augustin, et qui, sous l'influence du conc. de Carthage, condamna le pélagianisme qu'avait admis le synode de Diospolis 415, et demanda à Innocent 1er d'approuver ses décrets. Son opposition à la doctrine pélagienne s'appuie sur l'Écriture et spécialement sur la 6ne demande de l'Oraison dominicale et sur la doctrine du baptême. Sa lettre circulaire est conservée dans les recueils de Mansi et de Hardouin, mais les 27 canons que lui attribue la collection du faux Isidore appartiennent à d'autres conciles.

MILICZ, ou Militsch, Jean, un des précurseurs de Jean Huss, d'une famille noble de Moravie, homme savant, pieux et zélé. La date de sa naissance est inconnue. Il étudia à Prague la théol. et le droit. En 1350 il est chanoine et archidiacre. En 1360 il est vice-chancelier de l'emp. Charles IV et l'accompagne dans ses voyages. Mais bientôt il renonce à ses dignités mondaines pour se consacrer à son ministère. Prédicateur de l'égl. du château, ou se moque d'abord de son accent, mais il finit par attirer la foule et doit souvent prêcher jusqu'à 3 fois par jour, tant en tchèque qu'en allemand. Il attaque les vices du clergé et les désordres de l'Église; il annonce l'arrivée prochaine de l'Antéchrist et va jusqu'à désigner sous ce nom l'empereur présent à ce sermon. Il ne ménage personne et ne craint rien. A sa voix trois cents femmes de mauvaise vie qui vivaient en commun se convertissent, et leur maison de péché devient l'église de Marie-Madelaine; il déclare publiquement qu'il aime mieux ces pécheresses repentantes que tant d'autres qui vivent dans les couvents sous le nom de nonnes. Il fonda à Prague une école de théol. pour l'étude de la Bible. Ses nombreux ennemis réussissent à le faire jeter en prison, mais Tarchev. doit le relâcher à cause du peuple. Il se rend à Rome 1367 où il pense trouver Urbain V, mais l'inquisition le fait arrêter; le pape, arrivant d'Avignon 1368 lui rend la liberté, le traite avec bienveillance et le renvoie à Prague parfaitement disculpé. Dénoncé de nouveau en 1369 par les ordres mendiants, qui lui reprochent des exagérations, il est condamné par une bulle de Grégoire XI; il en appelle, et après avoir prêché en Silésie. en Moravie et en Pologne, il se rend à Avignon, où il est d'abord bien reçu par le pape. Mais avant que son procès soit achevé, il f 29 juin 1374.11 avait évangélisé le diocèse de Gnesen. Son élève le plus distingué fut Matthias de Janow, ou Janowski. Il a laissé 2 recueils de Sermons, un Libellus de Anti-ehristo, et un traité sur la Croix et les troubles de l'Église.

MILL. Jean, né 16io, Dr théol. à Oxford, f 23 juin 1707, connu surtout par son édition critique du N. T. grec, avec introductions, notes et variantes, dont il compte 30.000. niais très peu d'importantes. C'est presque le premier essai un p*m sûr d'une étude critique du N. T. Il était recteur d'Edmunds College, Oxford.

M1LNER lo Joseph, né à Leeds 2 janv. 1744, fut envoyé à Cambridge par quelques amis, après la mort de son père, étudia la philologie et la théol., et fut nomméàHulh d'abord comme directeur du collège latin et prédicateur du soir, puis comme premier pasteur, + 15 nov. 1797. Vers 1770 il tourna au méthodisme, dont il embrassa les principes, tout en restant membre de l'Égl. établie, et il ne cessa de compter parmi r s hommes les plus décidés du parti évangélique. C'est dans ce sens qu'il publia quelques petits écrits; mais son principal ouvrage est son Hist. de l'Église, qu'il ne put continuer que jusqu'à la Réformation et qui fut poursuivie par son frère. Il divise l'histoire par siècles, ce qui n'est pas toujours heureux, et donne à la partie biographique une grande importance, aux dépens du développement des dogmes, de la discipline et de la constitution ecclésiastique. Il a surtout en vue l'édification.

2» I-aac, son frère, né 11 janv. 1730. Interrompu dans ses études par la mort de son père, il fut mis en apprentissage dans une fabrique de tissus, mais son frère ayant été placé à Hull, il put recommencer ses travaux, et en donnant des leçons comme sous-maître, il se prépara pour l'université. En 1788 il fut nommé président de Queens College: en 1793 prof, de mathématiques, en 1798 de sciences naturelles. En même temps il avait poursuivi ses études de théol. jusqu'au doctorat. En 1791 il fut élu doyen du chapitre de Carliste et prêcha souvent dans la cathédrale. Il défendit énergiqueinent les Sociétés bibliques contre les attaques du Dr Marsh. Il partageait les vues et les principes de son frère. Après la mort de celui-ci il publia les vol. 4 et 5 de son Hist. de l'Égl. allant jusqu'à la diète d'Augsbourg. Il espérait achever cet ouvrage, mais il f 1820. Trad. en français. Il a aussi laissé des Sermons, et une Vie de son fr. Joseph.

MILTIADE 1° écrivain chrétien, qui doit avoir vécu sous Marc-Aurèle et sous Commode. Il combattit les montanistes, les païens et les juifs. Eusèbe et Jérôme le mentionnent avec éloge, mais ses écrits sont perdus.

2° Miltiade ou Melchiade, pape 311-314. Africain d'origine. Combattit les donatistes et rétablit Cécilien, év. d> Carthage. C'est sous son pontificat mais en dehors de son influence.

que Constantin se déclara chrétien: Constantin fit don à l'Égl. de Rome du palais de Latraii. Miltiade interdit les jeûnes du jeudi et du dimanche comme un reste de paganisme. Deux traditions, l'une qui le fait martyr, l'autre qui lui reproche d'avoir livré les saints livres pendant les persécutions, sont apocryphes. Vip par saint Bernard; on n'en connaît qu'un exemplaire, à la biblioth. de Cambridge.

MILTITZ, Charles (de), d'une famille noble de Saxe, chambellan du pape, notaire apostolique, fut envoyé en Allemagne comme nonce en

1518 pour essayer d'aplanir le différend avec Luther. Il s'y prit très habilement, et obtint du moine en révolte une lettre au pape, lettre d'humiliation, Altenburg 1519, et la rédaction d'un écrit (Leçons sur quelques articles, févr. 15191, dans lequel il exprimait tout son respect pour l'Égl. romaine et s'engageait à s'abstenir d* toute attaque ultérieure, à condilion que ses adversaires en fissent autant. Miltitz se prononça si rudement contre Tetzel et son commerce d'indulgences, que celui-ci en tomba malade et mourut. L'intervention agressive du Dr Eck ranima les hostilités; Luther se vit dégagé de l'engagement qu'il avait pris; les conférences de Liebenwerda et de Lichtenberg,

1519 et 1520, échouèrent, Luther ayant appris à se méfier de la « finesse italienne. » Il se décida cependant à tenter encore une fois les voies de la conciliation, et sous l'influence de Miltitz il adressa au pape son Sermon ou Discours sur la liberté d'un homme chrétien. Eck y répondit en publiant la bulle d'excommunication. Miltitz n'avait plus rien à faire; de Rome il revint en Allemagne où il possédait des canonicats à Mayence, Trêves et Meissen, et f 1529.

M1LTON, John, né à Londres 9 déc. 1608, était fils d'un notaire. Étudiant à Cambridge 1625-1632, il se distinguait par sa force de caractère et son indépendance d'esprit. Ne pouvant se résoudre à prêter le serment dit de religion, ni se soumettre au système épiscopal, il renonça à la carrière ecclés. à laquelle il avait été d'abord destiné et se retira dans une propriété que son père possédait dans le comte de Buckingham. Il se fit connaître par un certain nombre d'hymnes, en latin et en anglais, qui préparèrent sa réputation, et à l'âge de 30 ans il visita la France, la Suisse et l'Italie, reçu partout comme un hôte distingué. Dès son retour, en 1640, il se jeta dans le parti de la révolution, qu'il servit surtout comme écrivain, réclamant tout à la fois les libertés politiques et religieuses. Il écrivit contre le système épis-copal 1641, sur le Mariage et le Divorce, l'Education, la Liberté de la presse (Areopagetiea) que déjà Cromwell menaçait. Secrétaire du Protecteur. il conserva toute son indépendance. En 1649 il essaya de justifier l'exécution de Charles 1er, et publia divers autres écrits dans le sens de la révolution, ainsi l'Iconoclaste, le briseur d'images, en réponse à VIcon Basilikè, le portrail du roi, qu'on attribue au roi lui-même;

11 écrivit encore Deux défenses du peuple anglais. En 1652 il devint aveugle et sans espoir de guérison. Il se consacra dés lors presque complètement à la littérature, fut arrêté comme régicide au retour des Stuarts, mais délivré au bout de 2 mois par l'influence de Davenant, et se retira dans la solitude où il vécut pauvre et oublié. C'est là qu'il composa, le dictant à sa femme et à ses filles, son Paradis perdu, ce chef (Fœuvre de la langue anglaise, qu'un libraire lui paya 30 livres 1665 et qui ne devint célèbre que 20 ans plus tard. En 1671 il publia le Paradis reconquis, inférieur au précédent. On a encore de lui une Logique, une Hist. d'Angleterre, un Dictionn. latin, un Traité de la vraie religion, etc. f 8 nov. 1674. Ses œuvres, louées par Addison, ont été maintes fois réimpr. et sont trad. dans presque toutes les langues; en français par Saint-Maur, L. Racine, Château-hriand, Leroy, Dellile, etc. Trois fois marié, il ne fut pas heureux en ménage, et de ses 4 filles Débora fut la seule qui le comprit et charma sa solitude.

MINIMES, v. François 2°.

MINORITES, ou Mineurs, v. François lo.

MINUTIUS, Marcus-Félix, avocat' à Rome, né en Afrique vers le commencement du 3me siècle, après Marc-Aurèle et Tertullien; connu par son Apologie du Christianisme intitulée Octavius. Se promenant au bord de la mer av^c deux amis, le chrétien Octavius Januarius et le païen Cecilius Natalis, il assiste à la discussion qu'ils ont entamée sur la religion. Cecilius doute de la certitude en matière religieuse, fait valoir *es raisons en faveur du paganisme et reproduit los arguments de son temps contre la religion chrétienne. Octavius le réfute, et ils finissent par prendre Minutins pour arbitre. Cecilius convaincu cède et s'écrie: Nous sommes tous deux victorieux. On ne possède de ce traité qu'un seul mss., qui fut donné par Léon X à François 1er. Faustus Sabaeus l'a publié 1543 comme le 8me livre d'Arnobe Adr. Hœreses, parce qu'il se trouvait à la suite sur le même mss.; c'est F. Baudouin qui a constaté l'erreur, Heidelberg 1560.

MIR AMION, Marie Bonneau (de Rubelle Beau-harnais, dame de), née à Paris 1629, + 1696, fonda vers 1630 un refuge pour les femmes débauchées qu'on y enfermait, et la maison de Sainte-Pélagie pour celles qui s'y retiraient volontairement. En 1661 elle fonda une société de

12 jeunes filles, dite la Sainte-Famille, pour soigner les malades et instruire la jeunesse. En 1663 cette association se réunit à une autre semblable, formée en 1636 par Mad. Blosset, suivant la règle des génovéfains. Les deux réunies prirent le nom de miramionnes, et laissèrent leur nom à un port de Paris, celui du Mail. Cet ordre philanthropique possède encore quelques maisons.

MIRANDOLE, Jean Pic (comte de La), 3e fils de Jean-François, né 1463, comptait déjà à dix ans parmi les plus grands orateurs et poètes de son temps. Laissant là les intérêts mondains, il se voua tout entier à l'étude. A 14 ans il étudiait à Bologne le droit canon. Toujours plus attiré par la philos, et la théol., il visita pendant 7 ans les principales univ. de France et d'Italie, et s'adonna spécialement à l'étude de la Cabale, que Ficin enseignait à Florence; il étudia aussi pour cela l'hébreu et le chaldéen. A 23 ans il vint à Rome annonçant qu'il soutiendrait une thèse De omni re scibili et publia une série de 900 propositions relatives à la théol., à la philos, et aux mathématiques; mais les opposants, au lieu d'entrer en lice, dénoncèrent 13 de ces propositions comme hérétiques et les firent condamner par Innocent VIII. Cela coupait court à la discussion. Il partit pour la France, après avoir adressé au pape un mémoire justificatif. Rappelé à Rome pour donner de plus amples explications, il reçut en route l'avis de s'arrêter quelque temps à Florence, oti il trouva des protecteurs à la cour de Laurent de Médicis. et fut reçu membre de l'acad. platonicienne. Bientôt, reconnaissant l'impossibilité d'arriver à tout connaître, et désespéré de se sentir si faible, il se tourna complètement vers la religion, renonça à sa part d'héritage, distribua ses biens aux pauvres, et se décida d'entrer dans un couvent dès qu'il aurait achevé les travaux qu'il avait commencés. Il f 1494, à peine âgé de 31 ans. Ses 900 thèses forment un vol. fol* sous le titre de: Conclusions philos., cabalistiques et théol. Rome 1486. On a encore do lui son Apologie, des Disputationes contre l'astrologie divinatrice; des Lettres, son Heptaplus, qui est une explication du récit mosaïque do la création; un Essai sur Dieu, De Ente et Uno, où il cherche à concilier les philos. d'Aristote et de Platon, etc. Vie, par son neveu Jean-François de la Mirandole f 1533, dont les œuvres ont été publ. à Bâle 1573, sons le titre de: Pici utriusque Opéra.

MISCHNA(de l'hébr. shana, répéter), portion du Talmud qui reproduit les proscriptions orales que Moïse donna aux anciens sur la montagne, à côté de la loi écrite, et auxquelles le N. T. fait allusion sous le nom de Traditions des anciens. Elle est considérée presque à l'égal de la loi et comme venant directement de Dieu. On avait essayé à diverses reprises, et avec plus ou moins de bonheur, de rassembler par écrit ces nombreux renseignements et prescriptions, lorsque vers l'an 220 le grand rabbin Juda-le-Saint les recueillit et leur donna leur forme définitive, en laquelle ils nous sont parvenus. La Mischna renferme en 6 chapitres et 63 traités, des directions sur lo les semailles, l'agriculture et la part des prêtres; 2o le sabbat et les fêtes; 3o les femmes, le mariage et les vœux; 4o les droits de propriété, le code civil et le code pénal; 5° les prêtres, les sacrifices, etc.; 6° le pur et l'impur. De même que la Mischna était sortie de l'étude de la loi, la Mischna travaillée dans les écoles des rabbins donna naissance à la Guemara, q. v. Écrite en hébreu, elle a été trad. en latin et en allemand. Amsterdam 1698-1703, 6 vol. fol. Onolzbach (Anspach) 1760-1762. 3 vol. grand 4o.

MISERERE (aie pitié), chant d'église, d'après les Ps. 51 et 57, employé surtout dans la semaine sainte ou dans les temps d'épreuve et d'humiliation. Outre la mélodie grégorienne, il a été l'objet de plusieurs compositions musicales, dont la plus célèbre est celle de Gregorio Allegri (f 1640), qui se chante à Rome toutes les années la semaine sainte par les choristes de la chapelle papale.

MISÉRICORDE (Fr. de la), v. Frères llo.

MISERICORDIAS DOMINI, nom ecclésiastique du 2<* dimanche après Pâques, ainsi nommé des premières paroles de l'antiphonie de l'introït, Ps. 89, 1.

MISHNA, v. Mischna.

MISSEL, ou livre de messe; il renferme le rituel à l'usage des prêtres, les chants et les prières, soit générales, soit spéciales, pour les différentes circonstances, fêtes, dates de l'année, etc. A côté du missel romain, plusieurs Églises ont eu longtemps leurs missels particuliers, mais ils tendent de plus en plus à disparaître dans la grande uniformité du culte.

MISSI DOMLNICI (envoyés seigneuriaux). C'étaient, sous les carlovingiens, les délégués spéciaux que le roi envoyait chaque année, revêtus de pleins pouvoirs, pour inspecter dans les provinces les comtes, les ducs, les évêques; pour surveiller leur administration, et pour juger les cas d'appel réservés ou non. Les capi-tulaires déterminent leur compétence, mais elle était si étendue qu'elle touchait à l'arbitraire et qu'ils étaient extrêmement redoutés. Cette institution baissa peu à peu, à mesure que grandit la puissance des seigneurs.

MISSION (prêtres de la), nom qu'on donne dans l'Égl. cathol. aux prêtres qui se forment dans divers instituts, avec le but spécial de se consacrer à la mission, soit intérieure, soit étrangère. On distingue ceux qui appartiennent à des ordres religieux proprement dits, tels que les barnabites, les rédemptoristes, les jésuites, les théatins, et ceux qui relèvent de congrégations spéciales, commes celles de l'Oratoire, de Saint-Vincent de Paule, du Saint-Sacrement, de Jésus et Marie, ou des Eudistes; du Saint-Esprit, les séminaristes de Saint-Nicolas de Chardonnet, etc. Les prêtres de la mission de France, organisés par l'abbé Legris-Du val, supprimés en 1830. puis rétablis, travaillent surtout contre le protestantisme.

MISSIONS. On range sous ce titre général toutes les œuvres qui ont pour objet l'avancement du règne de Dieu, la propagation de l'Évangile, la conversion des incrédules et des infidèles, le réveil de la piété et l'affermissement des faibles. Le nombre en est aussi considérable que leur mode d'action est varié. On distiugue:

lo La mission intérieure. Chez les catholiques on appelle de ce nom tout particulièrement une série d'appels à la pénitence, une suite de prédications énergiques et vigoureuses faites dan* une paroisse, pour secouer les tièdes et les indifférents en leur montrant à grands traits les dangers du péché et les avantages de la foi, en opposant aux erreurs de la Réforme les beautés du catholicisme, en glorifiant l'Église, en engageant les hommes à se confesser et en les enrôlant, si possible, en confréries. Ces missious. rehaussées par les pompes exceptionnelles du culte, sont ordinairement organisées par l'év. du diocèse. Parmi les orateurs qui ont su faire vibrer avec le plus de talent la fibre populaire, on a remarqué surtout les jésuites, les rédemptoristes et les capucins; leur éloquence n'est pas touj. sérieuse, ni bien profonde, et la plupart de ces discours ne supporteraient pas l'impression ni pour le fond ni pour la forme; ils fourmillent d'anecdotes et de mots pittoresques; ils font de l'effet, au moins pour le moment, mais il est rare qu'ils touchent le cœur et qu'ils produisent une repentance véritable. Ils ont cependant l'avantage d'introduire un élément nouveau dans le culte catholique, et un prédicateur pieux et vraiment évangélique peut en profiter pour faire du bien. Souvent ces missions se terminent par l'octroi d'indulgences pour ceux qui y assistent et par l'érection d'une croix comme-inorative.

2° Dans l'Église protestante, où la prédication est plus régulière et le cuite public mieux organisé au point de vue de l'enseignement, le besoin d'une mission intérieure ne s'est pas fait sentir aussitôt. Ce n'est que peu à peu, lorsque la vie religieuse s est relâchée, quand la doctrine elle-même a été abandonnée ou faussée, quand les paroisses se sont refroidies ou endormies, que l'on a compris la nécessité de réagir du dehors et par des moyens nouveaux conti* le relâchement produit par une orthodoxie inorte ou par l'abandon de la foi. Presque au même moment les chrétiens d'Allemagne, d'Angleterre, de France, de Suède et de Suisse sentirent qu'il ne suffisait pas d'entretenir des stations missionnaires à l'étranger, et qu'il y avait également un travail à faire au sein de la chrétienté elle-même. Aussitôt, et en Allemagne depuis le Kirchentag de 1848, de nombreuses associations se formèrent, se rattachant directement ou indirectement à la Mission intérieure et se classant sous les chefs principaux que voici: lo Établissements pour le soulagement des pauvres et des malades: Kaiserswerth, Strasbourg, Saint-Loup, les Diaconesses de Paris, les œuvres du Dr Fliedner, etc. 2° Sociétés pour le relèvement de l'enfance malheureuse, vicieuse et abandonnée, orphelinats, asiles, écoles déguenillées, maisons d'éducation, de discipline; colonies agricoles, etc. Ainsi la Rauhehaus du Dr Wichern à Hambourg, Sérix, Dombresson, La Force, Sainte-Foy, etc. 3<> Associations pour la visite des pauvres et des malades à domicile: Amélie Sieveking, etc. 4° Associations et réunions en vue d'un but social, philanthropique, moral et religieux: Unions chrétiennes de jeunes gens, sociétés de tempérance, salles du dimanche, sociétés du dimanche, Soc. de Gustave-Adolphe, etc. 5<> Publications religieuses, traités, bibliothèques populaires, lectures, conférences, etc. Ces diverses œuvres, quelquefois réunies et centralisées, le plus souvent indépendantes les unes des autres, toujours tonnes, ne peuvent être rangées dans une catégorie de la mission intérieure que si elles ont un caractère réellement religieux et confessionnel, qui seul les distingue d'autres établissements de philanthropie ou d'utilité publique également respectables. La fondation de ces œuvres est un des devoirs de l'Égl. chrétienne dans son ensemble, mais souvent, surtout quand l'Eglise oublie ou méconnaît sa tâche, ce sont des individus isolés qui en prennent l'initiative. En France et dans les pays de langue française, le mot de mission intérieure s'emploie surtout dans un sens restreint pour désigner soit l'évangélisation des protestants disséminés, la desserte provisoire des paroisses sans pasteurs, soit dans les villes la recherche et l'évangélisation de ceux qui n'ont aucune espèce de culte ni de religion.

Les missions étrangères. L'évangélisation du monde, commandée par Jésus-Christ à ses disciples, Matt. 28, 19. se fit d'abord par les apôtres, par les églises; nous en avons les premiers récits dans le livre des Actes. Mais depuis leurs disciples immédiats, et jusqu'aux jours de Constantin, on ne voit pas qu'aucune organisation régulière ait présidé à cette grande œuvre de la propagation de la foi. Si l'Évangile, touj.

persécuté, gagna de proche en proche, ce fut surtout par suite des rapports commerciaux, par les marchands, les corps de métiers, les voyageurs, les prisonniers, les soldats. C'est notamment ainsi que furent évangélisées les Gaules, l'Espagne, l'Afrique, la Bretagne, les pays du Danube. Une fois que Constantin eut fait du christianisme la religion de l'État, il fut facile de l'imposer aux masses, et l'Égl. ne se fit aucun scrupule d'en appeler au bras séculier pour seconder ses efforts en vue de la conversion des païens; de même qu'il n'y avait qu'un empire, il ne fallait qu'une religion: un roi, une foi. Cette idée fatale produisit sans doute quelques bons fruits, qu'on ne doit pas méconnaître; mais elle eut le grand tort d'introduire dans l'Égl. les procédés, les mœurs, les usages, les formes du paganisme et de préparer une décadence qui ne pouvait tarder. Charlemagne, Othon et d'autres travaillèrent consciencieusement à convertir les Saxons, les Vendes et les peuples du nord au moyen de mesures militaires, dont les effets étaient immédiats, mais ne pouvaient durer. L'ordre des bénédictins obtint des résultats meilleurs. Par sa science et son activité, il fut le vrai missionnaire du 6me et du 7me siècle; ses couvents étaient non seulement des foyers de lumière, mais des écoles de missions, et il en sortit en grand nombre des hommes qui consacrèrent leur vie à prêcher l'Évang. dans les contrées barbares et païennes. Les prémontrés suivirent et travaillèrent parmi les Slaves et jusqu'en Silésie. Au 13ra<* siècle parurent les franciscains, qui dès 1214 envoyèrent leurs missionnaires chez les musulmans des côtes de l'Afrique et en Mongolie. En même temps les dominicains s'employaient à la conversion des juifs et des maures en Espagne. Aux uns et aux autres la découverte de l'Amérique offrit un nouveau champ de travail et ils s'y jetèrent avec une ardeur qu'on peut appeler féroce.

A. Ces missions, déjà catholiques depuis le 13m« siècle, le devinrent plus exclusivement encore lorsque les jésuites se présentèrent à leur tour dans l'arène; mais il ne s'agissait plus tant de porter l'Évangile aux païens et de leur prêcher le christianisme que de leur imposer le catholicisme et de les rattacher au siège de Rome. Ils eurent des missionnaires zélés et distingués, mais qui travaillèrent avec trop de précipitation et se préoccupèrent trop exclusivement de conquêtes matérielles et de succès extérieurs. L'Inde, la Chine, le Japon, l'Éthio-pie, le Paraguay parurent un moment gagnés par ces hommes pleins de dévouement et d'activité, mais leur œuvre manquait d'une base solide; ils avaient baptisé des milliers de païens sans s'inquiéter de savoir s'ils croyaient à l'Évangile, si même ils le connaissaient. Les rivalités des différents ordres, leur cupidité, leur ambition, leur rapacilé lirent le reste. Beaucoup d'autres ordres entrèrent dans le champ des missions à la suite des jésuites; lazaristes, ré-ilemptoristes, capucins, augustins, carmélites se distinguèrent tour à tour par le même zèle, les mêmes procédés et les mêmes succès passagers, immédiatement compromis par un mélange de politique et de mercantilisme. Rome comprit que dans l'intérêt des missions il convenait d'assurer l'unité de l'œuvre en lui donnant une direction centrale, et Grégoire XV, ou plutôt son neveu le cardinal Ludovisi, fonda en 1622 la congrég. de la Propagande qui dès lors se chargea seule du gouvernement du monde non catholique. C'est elle qui tixe le champ d'une mission et qui désigne les hommes appelés à le travailler sous la conduite d'un préfet apostolique; quand l'œuvre paraît s'affermir, on la place sous la direction d'un vicaire apostolique, revêtu de tous les pouvoirs et souvent du titre honorifique d'un évêque, avec la faculté de faire pour le culte et pour la discipline telles concessions locales qui pourraient être réclamées. Enfin, si l'Église est suffisamment nombreuse, elle linit par être constituée en évêché régulier et par être rattachée à l'organisme hiérarchique. Au point de vue de la propagande, les pays hérétiques et schismatiques sont traités sur le même pied que les pays païens. La Propagande compte comme séminaires missionnaires, outre ses propres collèges qu'elle a fondés à Rome, et les collèges de certains ordres, minorités, capucins, observants, quelques grands instituts créés à l'étranger; le plus considérable est celui de Picpus, fondé à Paris en 1805 dans la rue de ce nom, et reconnu par le pape en 1817. Il est entretenu, comme les autres, par des dons volontaires que recueillent des sociétés spécialement organisées pour cela, notamment la Société de Lyon pour la propagation de la foi, créée en 1822; l'association de Louis en Bavière, celle de Leopold en Autriche, etc.

B. Missions protestante*. Avant de songer à l'évangèlisation des païens, le protestantisme dut attendre d'en avoir fini avec les luttes qui éclatèrent à son berceau et présidèrent à son développement. L'établissement de quelques colonies au delà des mers fut pour la Hollande, le Danemark, l'Angleterre, l'Allemagne, et même un peu la France, l'occasiou d'y envoyer des chapelains coloniaux, et plusieurs de ceux-ci, mis en contact avec les indigènes, indiens ou nègres, en profitèrent pour leur annoncer l'Évangile et furent amenés même à se consacrer tout entiers à cette œuvre, mais comme simples individus isolés et par pur dévouement; ainsi John Eliiot 1603-1690, la famille Mayhew 1642-1803, les deux Brainerd 1743-1747, le comte Ernest de Wells, etc. La première mission organise»* date de la fin du 17'«e siècle et prit naissant on Angleterre. Cromwell avait eu déjà l'idée de fonder une propagande, à l'instar des jésuites, pour l'évangèlisation du monde entier, mais il avait dû y renoncer. Après la chute des Stuart il y eut un réveil de la vie religieuse, et par conséquent un sentiment plus \if des devoirs de la chrétienté envers les païens. En même temps le nombre des colonies anglaises augmentait, et leurs rapports avec les peuples idolâtres devenaient de plus en plus fréquents et plus réguliers. Une première société se forma en 1698 pour l'avancement de la connaissance chrétienne (for promoting Christian Knowledge): elle était destinée surtout à l'œuvre intérieure. En 1701 Guillaume III autorisa la fondation d'une société, issue de la précédente, pour la propagation de l'évang. dans les autres parties du monde, qui fut la première société des missions proprement dite et le point de départ de toutes celles qui se formèrent plus tard sur h même base de l'activité libre. En 1714 nouvelle fondation, organisée par Frédéric IV pour la mission des Indes orientales commencee en 1705 par Ziogenbalg; c'est un collège missionnaire à Copenhague; Égédé en Groenland, Wesl en Laponie travaillèrent sous sa direction. C'est aussi là que Zinzendorf conçut l'idée de la mission aux Indes occidentales, qui débuta 1732 par l'envoi de Nitschmann et Dober. Les mor* ves regardent la mission comme un des devoirs de l'Égl. et en font un département de son activité; c'est la conférence qui en règle les détails, d'accord avec les associations volontaires qui lui fournissent les subsides nécessaires. Il en est de même de l'Égl. d'Écosse, de l'Égl presbytérienne officielle aussi bien que de l'Égl. libre, ainsi que de l'Égl. méthodiste. Depuis le commencement de ce siècle il s'est formé en Angleterre, en Amérique, en Allemagne, dans presque tous les pays protestants, en Suisse, en France même, une quantité de sociétés missionnaires, qui ont pour ainsi dire couvert le monde de leurs stations, sans parler des hommes nombreux et dévoués qui se sont consacrés à cette œuvre par leur propre initiative* Marsdeo, Gutzlaff, Groves, Livingstone, etc. Divers principes ont présidé à l'organisation des missions, suivant qu'elles relevaient des puissances eur<> péennes ou qu'elles étaient indépendantes; suivant aussi les systèmes religieux des égl. et des missionnaires. C'est ainsi qu'à Ceylan le gouvernement hollandais, pour s'assurer un appm contre les entreprises portugaises, accordait des droits politiques aux indigènes baptisés. Pour un motif analogue, c.-à-d. pour maintenir intacte sa prépondérance, la Compagnie angl. des

Indes orientales a contrecarré de toutes ses forces les travaux des missionnaires et a tout fait pour empêcher la conversion des indigènes, jusqu'au moment où succombant sous le poids de ses fautes, elle a vu éclore la formidable insurrection qui l'a balayée et qui a fait passer son pouvoir à la reine d'Angleterre devenue impératrice des Indes. A Geylan le nombre des chrétiens diminua quand l'île passa sous la domination britannique, parce que les droits civils cessèrent d'être attachés à la qualité de baptisés, et dans la plupart des colonies hollandaises l'œuvre de l evangélisation dut être reprise à nouveau. Les protestants tirent la même expérience qu'avaient faite les catholiques, et ils comprirent que les conversions en masse, qui font de l'effet dans un rapport, ne représentent que rarement un succès réel et sérieux. On avait cru d'abord pouvoir aller de la civilisation à l'Évangile; on a iini par voir que c'est la marche inverse qui est la vraie, et que c'est l'Évangile qui civilise. Les sectes les plus étroites, les églises les plus fermées, les wesleyens, les mo-raves, les baptistes, les dissidents en général, ceux que l'on désigne plus spécialement sous le nom de piétistes, ont eu les missions les plus prospères, et il est à remarquer que s'ils ont envoyé des docteurs et des ministres, ils ont envoyé aussi des ouvriers chretiens, menuisiers, cordonniers, serruriers ou autres, qui honoraient l'Évangile par leur vie, en même temps qu'ils se rendaient utiles par leur industrie. Un grand nombre de ces derniers ne recevaient aucun salaire et subvenaient à leurs besoins par leur travail. C'était en particulier le cas des ouvriers envoyés par Gossner de Berlin, et par la maison de Chrishona près de Bâle. L'œuvre des missions a été attaquée très vivement par plusieurs, et même par des théologiens, soit comme inutile, soit comme mal conçue et mal dirigée. Mais leurs objections tombent surtout sur les missions patronnées par les États, ou poursuivies par des églises dans un esprit trop formaliste. Les rivalités des États, qui voyaient dans la religion des colonies ou des comptoirs un moyen d'intluence, ont plusieurs fois entravé le travail des missionnaires, p. ex. à Taïti et à Madagascar, et l'irréligion des blancs, boërs, colons, marchands ou marins, a compromis sou-\ent une œuvre en pleine prospérité. V. Hist. ' des Missions, de Barth, trad. par Descombaz; Journal des Missions de Paris; id. de Neuchà-tel; le Mutions-Magazin de Bâle, etc. La mission chez les juifs date à peu près de la même époque que celle chez les païens; les moraves et la maison de Halle ont commencé; en 1728 s'ouvrit à Halle llnstitut juif de Callenberg pour Finstruction de missionnaires, qui furent envoyés surtout dans l'est de l'Europe el en orient. Le terrain était difficile et les résultats furent peu satisfaisants. En 1809 une nouvelle société se forma à Londres pour le même objet; elle publia des traités et des N. T. en hébreu, ouvrit des écoles et envoya de nombreux agents missionnaires. D'autres sociétés, en Hollande, en Allemagne, en Suisse, travaillèrent à la même œuvre, non sans succès. — Prêtres de la Mission, v. Lazaristes.

Une statistique de l'œuvre des missions, des 75 ou 80 sociétés qui s'en occupent, des stations, du nombre des missionnaires, des succès obtenus, des indigènes convertis, est à peu près impossible, et formerait un volume; il en est de même de la bibliographie du sujet. Bornons-nous à quelques indications sur les sociétés de la France et de la Suisse. La Soc. de Paris, fondée en 1824, et dirigée successivement par MM. Galland, Grandpierre et Casalis. compte auj. environ 16 stations, 20 missionnaires. 2600 communiants et plus de 3000 élèves dans ses écoles du sud de l'Afrique, au pays des Bas-soutos; elle compte entreprendre prochainement une mission au nord du Zambèze. Elle a en outre 2 missionn. au Sénégal, et 4 à Taïti. Son budget annuel dépasse 220,000 fr. La Soc. de Bàle, qui date de 1815, a 62 missionn. aux Indes et en Chine, 2 en Perse, et plus de 600 catéchistes. Son budget atteint près d'un million. Une modeste société fondée à Lausanne vers 1870 par l'Égl. libre, et dirigée auj. par l'union des'égl. libres de la Suisse romande, a commencé une mission au sud de l'Afrique, au nord du Transvaal, dans les Spelunken, et après quelques années de pénibles épreuves, elle est entrée dans une voie de prospérité relative.

MITRE, ornement de tête et coiffure des évêques; simple bandeau ou turban chez les anciens, elle s'est compliquée au lime siècle de deux cornes, qui représentent les deux testaments, et elle constitue auj. l'un des signes caractéristiques de la dignité épiscopale. Le chapeau rouge des cardinaux date d'Innocent IV, 1245.

MODESTE lo patr. de Jérusalem 616-626, qui releva en 614 l'égl. du Saint-Sépulcre, détruite par les Perses sous Chosroës II. — 2° prêtre envoyé par l'év. Virgile de Salzbourg, pour évangéliser la Carinthie, à la demande du duc Chettomar. Il f au bout de peu de temps, vers 784, et ses compagnons retournèrent à Salzbourg. On l'honore comme l'apôtre de la Carinthie.

MOEHLER, Jean-Adam, un des théol. catholiques les plus savants et les plus sérieux de notre temps. Né 6 mai 1796 à Igersheim, près Mergentheim, Wurtemberg, il était lils de l'aubergiste et maire du village. Il étudia la philos. et la théol. à Ellwangen et à Tubingue.

Ordonné prêtre en 1819, il remplit pendant un an les fonctions de vicaire, puis fut nommé prof, suppléant, et en 1828 prof, titulaire de théol. k Tubingue, pour l'enseignement de l'hist. ecclésiastique, de la patristique et du droit canon. Après avoir refusé plusieurs appels, k Fribourg, Breslau et Bonn, il accepta en 1836 une vocation qui lui fut adressée de Munich, mais sa santé ne lui permit pas d'y faire un long séjour. Le roi, pour reconnaître ses services, le nomma doyen du chapitre de Wtirz-bourg; il f 12 avril 1838, peu de semaines après y être arrivé. Il a écrit: L'unité de l'Église, principe du catholicisme, 1825; Atha-nase-le-Grand, ou l'Égl. au temps des luttes ariennes, 1827; un traité sur le Célibat des prêtres, qu'il regarde comme la condition absolue de l'indépendance de l'Église, et plusieurs ouvrages publiés après sa mort par Dtfllinger. Son principal travail, celui qui a fait sa réputation, est sa Symbolique, ou Exposé des différences dogmatiques des cathol. et des protestants, d'après les documents officiels de leur foi, Mayence 1832, souvent réimprimé. Il oppose la Réformation (qu'il admet justifiable sur certains points) à un catholicisme idéalisé; il regarde le protestantisme comme un immense erreur, et s'attache à le réfuter. Son livre obtint un tel succès que les catholiques en vinrent k croire que le protestantisme succomberait à ce coup fatal. Un grand nombre de théol. lui répondirent: Baur, Marheineeke, Nitzsch, etc.

MŒRL, Marie (de), jeune et pieuse visionnaire du Tyrol, née en 1811, toujours maladive, qui vers la fin de 1833 présenta sur son front, ses mains et ses pieds, les stigmates du Sauveur, saignant le jeudi et le vendredi. Les pèlerins accoururent en foule pour la voir. Elle se retira au couvent des franciscaines de Kal-tern, où elle f 1868.

MOERLIN lo Joachim, né 1514 à Wittenberg où son père, qui fut plus tard pasteur en Fran-conie, enseignait la métaphysique. Il étudia la théol. k Marbourg, Constance et Wittenberg. Pieux et bien doué, mais d'un caractère inquiet et violent, il se fit renvoyer de plusieurs paroisses où l'avait appelé la faveur des princes, An-stadt, GOttingue, Kônigsberg, Brunswick, etc. Aussi rigoureux sur la discipline que raide sur la doctrine, luthérien fougueux, il combattit avec dureté sur divers points Osiander, Flacius et leurs adhérents. Il finit par être nommé év. de Samland, où il f 1571. Outre ses ouvrages de controverse, il a écrit un catéchisme, une étude sur la Vocation pastorale, et quelques traités d'édification.

2o Maximilien son frère, né 1516, élève de Luther et de Mélanchthon, desservit également plusieurs paroisses et se montra partout ardent luthérien. Il fit échouer le colloque de Worms 1557, et soutint en 1560 une dispute publique à Heidelberg, contre Boquin, lorsque le prince électeur Frédéric, du Palatinat, décida d'introduire dans ses États la confession réformée. Il combattit Flacius et fit proscrire ses partisan?. Renvoyé lui-même en 1569, il fut rappelé à Cobourg en 1572. f 1584. Auteur d'un travail sur la résurrection de Lazare, de Notes sur des extraits d'Eusèbe, et d'un Écrit de consolation relatif aux petits enfants qui n'ont pu recevoir le baptême.

MOFFAT, Robert, né 1795 en Écosse, d'abord mousse, puis jardinier, se rendit à Manchester pour y travailler de son état, non sans avoir promis à sa mère de lire la Bible matin et soir. Une séance missionnaire du rév. W. Roby décida de son avenir. La même année 1816, et presque sans autre préparation, il fut envoyé au sud de l'Afrique, plutôt comme aide. Par ses talents naturels et par son énergie, il s'appropria le hollandais, le namaquois et le sé-chuana, convertit le chef Africaner et exerça sur Moselekatsi une salutaire influence. Il s'établit ensuite à Kuruman, ou Latakou 1821, où il passa une cinquantaine d'années. Mettant la main k tout, il était l'homme qu'il fallait au milieu de cette peuplade. Les miss, français y trouvèrent l'hospitalité avant d'aller à Motito. C'était pour tous un ami fidèle et un bon conseiller. Il a traduit la Bible en séchuana. Beau-père des miss. Frédoux et Livingstone, qui l'ont précédé dans la tombe, il n'a quitté son poste qu'après plus de 50 années, et de retour en Angleterre il a continué de servir la cause des missions, f 1883 à 88 ans. Il a écrit l'hist. des 23 premières années de son séjour en Afrique; trad. par Horace Monod.

MÔGILAS, Pierre, métropolitain de Kiew, t 1647; auteur d'une conf. orthodoxe de la foi de l'Égl. catholique et apostolique d'Orient, c.-à-d. de l'Égl. grecque et russe. Cet ouvrage fut provoqué par les empiétements de l'Egl. latine dans la petite Russie et par la publication d'un catéchisme romain en polonais. Soumis d'abord à une conférence d'évêques réunis à Iassy, ce travail fut en partie remanié, puis approuvé. Pierre-le-Grand l'adopta comme conf. de l'Égl. russe, cependant il n'a jamais été reconnu officiellement comme livre symbolique. 11 se divise en trois parties, qui correspondent aux vertus théologales, et se termine par l'explication du symbole, de l'Oraison dominicale et des Dix commandements. Écrit sous forme de questionnaire, il maintient le chiffre sept des sacrements et la doctrine de la transsubstantiation. Il ne fait pas de controverse, et se borne à affirmer que la doctrine grecque est celle de l'Égl. primitive et des pères. Écrit d'abord en grec vulgaire, l'ouvrage parut à Amsterdam en 1662 et 1672, et fut trad. en russe en 1695, puis en allemand en 1727. On attribue aussi à Mogilas une liturgie grecque publ. en 1629.

MOLNES, v. Monachisme.

MOÏSE Chorenensis, surnommé le père des poètes ou des savants; théol. arménien du 5«*e siècle, neveu de Mesrob; né vers 370 à Khoren, il étudia 7 ans à Alexandrie, peut-être sous Cyrille, visita Rome, Athènes et Constantinople, et ne retourna qu'après la mort de son oncle en Arménie, où il fut nommé év. de Pakrévant. Pendant l'oppression des Perses et les persécutions des chrétiens, il se retira dans la solitude, f vers 487, plus que centenaire. Il a composé un grand nombre d'ouvrages, des hymnes, un Manuel de géographie, un Traité de rhétorique, des traductions, etc.; le principal est son Hist. des Arméniens, écrite vers 481 à la demande du prince Sahak, et qui va jusqu'à l'an 441.

MOL AI, ou Mole, v. Templiers.

MOLANUS (van der Meulen) lo théol. ca-thol. flamand, né à Lille 1533, prof, et doyen à Louvain, f 1585; auteur d'un traité sur le Culte des images et d'une dissertation sur la foi due aux hérétiques.

2° Gérard-Walter, théol. luthérien, né 23 oct. 1633 à Hameln, étudia sous Calixte à Helmstâdt, fut successivement prof, de mathématiques et de théol. à Rinteln, président du consistoire à Hanovre en 1674, et depuis 1677 abbé de Lokkum, avec la surintendance des égl. du duché de Lunebourg et du Hanovre; f 1722. II est connu par les efforts qu'il fit pour maintenir la paix entre les réformés et les luthériens, et surtout par la tentative qu'il fit, à la suggestion de l'év. Spinola, d'amener un rapprochement entre les protestants et les catholiques, 1683. Leibnitz le mit en rapports avec Bossuet. Ces négociations durèrent quelques années et donnèrent naissance à plusieurs pro jets et à divers écrits, mais elles furent complètement abandonnées en 1705. Les concessions qu'il avait faites, et l'aménité de sa controverse avaient fait courir le bruit qu'il penchait vers le catholicisme; il s'en défendit 1698 dans ses Nugœ venales. V. ses écrits dans les Œuvres de Bossuet, éd. Migue.

MOLINA, Louis, né 1535 à Cuenza, Nouvelle-Cas tille, entra à 18 ans dans l'ordre des jésuites et se distingua comme prof, de théol à Evora, Portugal, f 1600 à Madrid, On a de lui un Comment, sur la somme de saint Thomas, un Traité du droit et de la justice, et (son principal ouvrage) Liberi arbitrii Concordia, dans lequel il cherche à concilier la doctrine du libre arbitre avec celles de la grâce, de la providence, de la prescience, de la prédestination et de la réprobation, Lisbonne 1588, Anvers 1595, éd.

considérablement augmentée. Il a une tendance au semi-pélagianisme. Outre la science simple et la science libre, il admet en Dieu une science moyenne (média), par laquelle Dieu prévoit ce que chaque homme fera, usant de sa liberté et dans des circonstances déterminées. Il sait ainsi d'avance quels sont ceux qui feront usage de sa grâce et il la leur accorde pour leur salut parce qu'il sait qu'ils en profiteront. Les dominicains l'attaquèrent, ouvrirent à Valladolid une dispute publique qui n'aboutit pas, et dénoncèrent le livre à l'inquisition. Les jésuites prirent parti pour Molina. Clément VIII et Paul V évoquèrent la cause et ne se prononcèrent pas. Les jansénistes ravivèrent le débat que les papes avaient déclaré clos. Le système de Molina fut enseigné dans les écoles des jésuites, et plus tard modifié par Suarès et Vasquez sous le nom de con-gruisme.

MOLINOS, Michel (de), né le 21 déc. 1640? à Patalina, près Saragosse, prêtre et docteur en théol.; il se rendit à Rome vers 1669 ou 1670, et s'y fixa. Il acquit bientôt par sa piété une grande réputation comme directeur des consciences et fut admis dans l'intimité de plusieurs cardinaux; il jouit même de la faveur toute particulière d'Innocent XI. En 1675 il publia en italien un livre, le Guide spirituel, qui fut aussitôt trad. en plusieurs langues et qui obtint un tel succès qu'un jésuite, Paul Segnéri, ayant voulu le réfuter dans sa Concordia, faillit payer de sa vie son audace dans laquelle on ne vit que l'animosité d'un envieux. Molinos enseignait le quiétisme. Selon lui le but le plus élevé que puisse se proposer la piété, c'est le repos en Dieu, et l'on ne peut y arriver que par la vie contemplative et par la soumission complète de sa volonté à la volonté de Dieu. Pour cela les moyens à employer sont la prière, l'obéissance, la fréquente communion et la mortification intérieure. Tous les autres actes sont relégués à l'arrière-plan, même la prière en paroles qui peut distraire de la véritable prière en esprit. Le jésuitisme trouva dans ces propositions un principe diamétralement opposé au sien; il y trouva une attaque directe et riposta avec violence. L'écrit de Segnéri provoqua une enquête de la part de l'inquisition, mais Molinos fut libéré. Là-dessus les jésuites, par l'organe du p. La Chaise, intriguèrent auprès de Louis XIV et le décidèrent à faire au pape des représentations sur les dangers que le quiétisme faisait courir à l'Église. Le pape soumit de nouveau l'affaire à l'inquisition, et en 1685 Molinos fut arrêté et emprisonné, ainsi que son ami Pe-trucci. Sa correspondance fut saisie, plus de 2000 lettres furent examinées, et en moins de 2 ans, 200 personnes compromises furent enveloppées dans le même procès. Le 28 août 1667

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le tribunal condamnait la doctrine de Molinos en général, et en particulier 68 propositions extraites de son Guide. Une bulle d'Innocent confirma cette sentence le 19 novembre. Molinos se soumit, et alla même jusqu'à se rétracter, ce qui s'explique par la nature quiétiste de son mysticisme. Il échappa ainsi au bûcher et vit sa peine commuée en celle d'une détention perpétuelle. Le pieux vieillard f dans sa prison 28 déc. 1697; en dépit de sa rétractation le nom d'hérétique fut inscrit sur son monument. La peur qu'on avait du quiétisme moliniste était si grande que, même avant sa condamnation, l'inquisition avait envoyé aux princes et aux évêques une circulaire pour les mettre en garde contre son invasion, avec l'indication de 19 propositions par lesquelles il était facile de constater sa présence. Le pape lui-même, non comme pape, mais comme simple particulier, comme Odescalchi (curieuse distinction), avait dû soumettre son orthodoxie aux délégués de l'inquisition. Les actes du procès ne furent jamais publiés. Quant aux 68 assertions condamnées, elles ne sont pas toutes dans Molinos, mais on a cru pouvoir les déduire de quelques-unes de ses maximes. Il est évident que certaines phrases peuvent donner lieu à de graves abus, et que le quiétisme présente des dangers; ainsi lorsqu'il dit qu'il ne faut pas s'arrêter trop longtemps à discuter si l'on fait bien ou mal. Mais il y a un sens moral qui donne à cette phrase sa vraie signification, et les jésuites n'ont pas le droit de se montrer si susceptibles sur les phrases à double entente. La pureté et la sainteté de la vie de Molinos le mettent d'ailleurs au-dessus de tout soupçon. Le quiétisme ne survécut pas longtemps à la condamnation qui avait frappé Molinos; il disparut bientôt des couvents de l'Italie où il avait pénétré, et le nuage qui menaçait les jésuites se dissipa. Le Guide a été trad. en latin et publié à Leipzig 1687 par Franke. v. aussi Pascal et Arnauld.

MOLLER, Henri, plus connu sous le nom de Henri de Ztitphen, du lieu de sa naissance, né 1488 en Hollande, d'une famille originaire d'Allemagne. Il entra à 16 ans dans l'ordre des au-gustins, visita en 1515 Wittenberg où Luther le distingua; en 1516 il fut nommé prieur du couvent de son ordre à Dordrecht. Ses tentatives de réforme échouèrent, et il dut quitter son couvent. Sous-prieur à Anvers, il échoua de même, et revint à Wittenberg pour y continuer ses études. Les progrès de la Réforme le ramenèrent en Hollande, où il déploya une grande activité. Arrêté par l'inquisition, il fut délivré par le peuple; se rendit à Brème, où l'autorité le pria de prêcher l'Évangile et où il fonda une église. Spreng étant venu d'Anvers, et Timann d'Amsterdam, pour continuer son œuvre, il accepta, malgré ses amis, l'appel qui lui fut adressé par le pasteur Nicolas Boje de Meldorf, pays des Dithmarses (Holstein). Les dominicains, après avoir inutilement essayé de le faire interdire, soulevèrent les paysans contre lui, et dans la nuit du 10 décembre il fut arrêté. Le lendemain un semblant de tribunal improvisé le condamna au feu comme hérétique, et une troupe avinée le traîna au bûcher en lui faisant subir en route mille mauvais traitements. Son martyre causa une vive sensation. Luther écrivit aux Brêmois une lettre de consolation; Mélanchthon célébra en vers sa mémoire. En 1830 un monument loi a été élevé au cimetière de Meldorf.

MOLLIO, Jean (di Montalcino), entra forl jeune chez les fr. mineurs et, comme Vergerio, laissa là les docteurs scolastiques pour se mettre à étudier la Bible. Prof, à Brescia, Milan, Pavie, et en 1533 à Bologne, il enseigna la théol. biblique et la justification par la foi, et il le fit avec tant de succès qu'il fut dénoncé à l'inquisition. Acquitté, mais avec défense d'exposer en public ses vues particulières, il ne tint pas compte de cette recommandation et fut obligé de quitter Bologne. Il se retira à Naples où il entra en relations avec Valdès. Vermigli et Ochino, qui achevèrent de l'éclairer, et il se prononça ouvertement pour la Réforme. Quand la persécution de 1542 fit fuir ses amis, il réussit à se cacher quelque temps, mais il finit par être arrêté pendant qu'il prêchait, et après une dure captivité dans les cachots de Rome, il fut pendu et brûlé, avec son ami Tisserando, le 5 sept. 1553, sur le campo de' Fiori.

MOMIER, expression grossière et de mauvais goût, employée pour la première fois à Genève et dans la Suisse romande, vers 1817, pour désigner les chrétiens évangéliques au mépris ou aux voies de fait de leurs compatriotes. Leurs exercices religieux étaient taxés de mômeries. Le mot lui-même viendrait, suivant les uns, de Momus, le dieu des facéties; selon d'autres, il se rattacherait au mot mahomier qui se trouve dans quelques écrivains du 15me siècle comme appellation injurieuse des renégats.

MONACHISME, Vie monacale. Dans les premiers temps de l'établissement du christianisme, la lutte et le martyre pouvaient suffire aux âmes ardentes qui brûlaient de se distinguer au service de leur maître. Mais même alors il y avait déjà des natures plus tranquilles, pénétrée* d'idées païennes sur la sainteté contemplative, qui confondaient le monde et le mal, la vie dn siècle et le péché, et qui pour mieux affirmer leur piété renonçaient à toutes les jouissances terrestres comme illégitimes, à la richesse, à la vie de famille, à l'étude. Il y en avait même, et il y en a toujours eu, qui, sans vie religieuse, ayant peu de besoins et peu d'ambition, n'ai* mant pas le travail, choisissaient volontiers nne carrière qui offrait un certain caractère de respectabilité, qui leur garantissait à peu près le nécessaire, ce qui les dispensait de toute occupation. Logeant où ils pouvaient, faisant ce qu'ils voulaient, circulant comme il leur plaisait, ils vivaient tantôt seuls, tantôt groupés selon leurs sympathies, tour à tour dans les déserts ou dans les villes. Quand les persécutions eurent cessé et que le christianisme eut refoulé le paganisme, un grand nombre de ceux qui brûlaient de se dévouer, n'ayant plus à combattre, crurent ne pouvoir mieux travailler à leur sanctification et à l'édification de l'Église qu'en renonçant au monde et à ses joies et en s'iinposant des privations volontaires. Le nombre des moines augmenta. Paul de Thèbes, vers 250, est le premier solitaire connu; Pacôme, vers 330, passe pour avoir fondé dans l'île de Tabennœ la première association de moines, le premier monastère ou couvent. Ce genre d'associations, tout à fait conforme au génie grec oriental, se répandit rapidement, et les prosélytes ne lui manquèrent pas; il y en eut de toute espèce, de bons et de mauvais. Leur influence ne fut pas grande, et c'est seulement dans la controverse des images qu'ils commencèrent à jouer un rôle, parce que celte question d'un ordre extérieur et matériel était tout à fait dans leurs goûts et qu'elle était à la portée de leur théologie. Les égarements de ce genre de vie ne tardèrent pas à se faire sentir; on eut les messaliens, les eu-chytes, les hésychastes du mont Athos; on eut les excès ascétiques des acémètes, des stylites et d'autres; on eut des circoncellions. Athanase importa en Occident le cénôbitisme oriental, qui fut bientôt un des facteurs les plus importants du développement du christianisme dans ces contrées, et qui au milieu de peuples encore païens créa autant de postes missionnaires qu'il fonda de couvents. Ces maisons étaient de véritables communes chrétiennes semées parmi les païens, foyers de lumières et boulevards de la foi, accaparant même l'autorité ecclésiastique jusqu'au moment où l'Égl. de Rome jugea bon de la revendiquer pour ses prêtres et ses évêques. Par les services qu'ils avaient rendus, les moines étaient devenus une corporation plus puissante que celle des prêtres dont la force principale consistait surtout dans le fait de leur ordination. Presque tous laïques d'abord, les moines se rapprochèrent peu à peu de l'état ecclésiastique par les privilèges qu'ils surent acquérir, de prêcher et de confesser, en même temps que les prêtres se rapprochèrent de la vie monacale par l'introduction du célibat et par leur constitution en chapitres. Mais le triomphe du monachisme fut son affranchissement successif de l'autorité des évêques, les couvents et leurs abbés ne relevant plus directement que du pape. Depuis qu'ils eurent obtenu le droit de prêcher et de confesser, ils l'emportèrent dans les paroisses, et par leurs missions ils reléguèrent au second rang les prêtres titulaires. Ce qui disposait les papes à étendre leurs prérogatives, c'est qu'ils trouvaient en eux des auxiliaires plus dévoués et plus actifs dans leurs luttes contre les princes temporels, que dans le clergé séculier trop enclin à prendre parti pour le roi ou pour l'empereur dont il dépendait. — Si dans le principe chacun pouvait se faire er-înile ou moine pour son propre compte, s'impo-sant à lui-même son mode de vivre, il était facile de prévoir les désordres qui ne manqueraient pas d'en résulter. Aussi l'on comprit de bonne heure le besoin de régler ces existences d'un nouveau genre que le christianisme n'avait pas prévues. Pacôme déjà crut devoir fixer par quelques règles, plutôt morales, ce qui regardait la direction du couvent, la surveillance et les occupations de ses membres. Basile, surnommé le père des moines, alla plus loin, et dans ses Regulœ (que Combéfis lui conteste, mais que Garnier lui attribue), il détermina ce qui concernait la vie extérieure, le vêtement, la nourriture, l'obéissance, l'emploi du temps des moines. C'est aussi lui, croit-on, qui posa le principe des trois grands vœux qui sont à la base de toute vie monacale: pauvreté, chasteté, obéissance. Cette règle de Basile fut généralement adoptée dans tout l'Orient, et gouverne encore les moines grecs, les nestoriens, les melchites, sans parler des basiliens de la Sicile et de l'Amérique. Elle put suffire aussi longtemps que le monachisme resta confiné en Orient; elle pouvait même recevoir, et reçut en effet quelques développements dans le sens d'une plus grande spiritualité; du temps de saint Jérôme la liberté resta grande, et Ton vit en Palestine, en Syrie et en Égypte des moines vivres religieusement, par groupes de 2 ou 3, sans qu'ils fussent liés par aucune règle précise, ainsi les sarabaïtes. Mais quand la vie conventuelle eut passé en Occident, on sentit vite la nécessité d'une organisation déterminée et d'une législation spéciale pour des hommès qui étaient sortis du monde sans cependant appartenir au clergé. Au lieu de se répandre de tous côtés et sans mesure, en gaspillant ses forces, on comprit qu'il fallait rattacher la vie ascétique à un centre commun, autorisé, l'Église, et à un ensemble de formes et de moyens d'actions, c.-à-d. à la vie commune. Ce ne fut pas chose facile, car la vie de couvent, avec ses privations matérielles, son recueillement, son isolement, son travail régulier, ne pouvait convenir aux premiers ascètes, un peu fanatiques, ni même à leurs successeurs immédiats. Un grand nombre d'entre eux, tels que les circoncellions, aimaient mieux courir le pays. Malgré les décrets de plusieurs synodes, le but ne fut guère atteint que vers l'an 800. On attribue à Cassien, fondateur d'un couvent à Marseille et auteur de 12 livres sur les Institutions des cénobites, la première organisation régulière de la vie conventuelle en Occident; mais ses règles sont encore tout imprégnées des traditions orientales, parfois puériles, souvent cruelles et contre nature. Toutefois les règles variaient d'un couvent à un autre; elles n'avaient encore rien de fixe, et quelquefois il suffisait du changement de l'abbé pour que la règle changeât dans un même couvent. L'unité n'existait pas, et n'était pas nécessaire. Avec Benoît de Nursie cet état de choses, qui commençait à présenter des inconvénients, cessa d'exister. Benoît mit fin à l'arbitraire et imposa à ses moines un ensemble de règles qu'ils durent accepter. Conciliant sur certains détails, simple et complet, son travail est sévère pour les choses essentielles, chasteté, sobriété, silence, humilité, soumission aux supérieurs. Il fut regardé omme un modèle, et grâce au besoin d'unité qui se faisait sentir dans l'Église, grâce à l'appui des papes, notamment des deux Grégoire, grâce à l'influence de Boniface, il était généralement adopté vers 800, comme la règle de saint Benoit. Cela n'empêcha pas Eupippius, Equitius, Cé-saire d'Arles, Colomban et d'autres, de proposer aussi pour leur entourage des règlements locaux, justifiés peut-être par des circonstances spéciales, mais dès le 12me siècle toute divergence a disparu. Notons aussi la règle de Fructuose, exigeant l'obéissance aveugle et une ponctualité mécanique, cette dernière qualité entre autres pour les familles assez nombreuses qui s'étaient réfugiées dans les cloîtres, notamment en Espagne, afin de se soustraire aux impôts et aux prestations militaires. On désigne sous le nom de Règle de saint Augustin une organisation non moins appréciée que celle de saint Benoit, et qui fut extraite de deux discours d'Augustin aux prêtres de son diocèse et de ses lettres aux religieuses d'Hippone. Sans avoir de caractère officiel, elle régissait déjà de son temps beaucoup d'ecclésiastiques et les distinguait du clergé séculier. Chrodegang de Metz vers 760 organisa son clergé sur des principes analogues, et Innocent IV au 13®e siècle institua une série de congrégations en leur donnant la règle de saint Augustin. Aujourd'hui c'est, avec quelques modifications, la même règle qui gouverne les pré-montrés, les augustins, les servîtes, les dominicains, les jésuites, les ursulines, les sœurs de la Miséricorde, celles de l'Annonciade, les salé-siennes, etc. Les franciscains ont un caractère beaucoup plus ascétique et insistent davantage sur la pauvreté et l'humilité, ainsi que sur les devoirs de la cure d'âme, de la prédication et du soin des malades. Comme on peut le penser, le relâchement des mœurs (et peut-être aussi le besoin de se faire une individualité distincte) exerça son influence sur l'application des règles et en provoqua soit l'adoucissement, soit an contraire l'observation rigoureuse; il en résulta même que certains ordres se divisèrent et qu'il y eut les stricts et les relâchés. C'est à partir du 10m® siècle, le monachisme étant bien constitué, qu'on voit apparaître surtout la création de nouveaux ordres, tous tendant à la perfection et cherchant à la réaliser par l'accomplissement de certains devoirs, parmi lesquels le renoncement au monde occupait la première place. En 910 c'est l'ordre de Cluny, en 1073 celui de Grammont, en 1018 les camaldules, en 1086 les chartreux, en 1096 l'ordre de Fontévrault, en 1098 les cisterciens, en 1118 les carmélites, sans parler des ordres militaires, tels que les chevaliers de Malte, les templiers, l'ordre teutonique, et de plusieurs sous-ordres moins importants. Mais à partir du 13m*siècle l'institution monacale prit une toute nouvelle importance par l'avènement des ordres dits mendiants, les franciscains et les dominicains, se jetant dans le monde, non plus pour réfléchir et prier, mais pour agir, pauvres et infatigables, et pour faire rentrer dans les esprits l'idée de l'Église comme institut religieux, quand depuis longtemps on ne voyait plus en elle qu'un instrument politique entre les mains des princes. Les dominicains, défenseurs de la foi, fondèrent l'inquisition; les franciscains communiquèrent au peuple le mysticisme de la foi et de la vie chrétienne telle qu'ils la comprenaient, et par la création des tertiaires ils mirent la piété monastique à la portée de tous les membres de l'Église. Fidèles serviteurs du saint-siège ils n'en contribuèrent pas moins à ébranler les bases du système ro* main, soit en faisant consister la piété dans la vie plutôt que dans les formes, soit en opposant leurs vertus simples et modestes au faste luxueux, à l'ignorance et à l'ambition des dignitaires de l'Église. Mais à leur tour ils se compromirent par leurs rivalités et leurs querelles intestines, non moins que par l'acharnement avec lequel ils proscrivirent tout ce qui pouvait être un développement de l'intelligence ou un progrès scientifique. Le mépris dans lequel ils étaient tombés au moment de la Réformation, avait déteint sur l'Église elle-même. Le conc. de Trente maintint les couvents, mais les réorganisa et les soumit à l'autorité épisco-pale, ce qui acheva de leur ôter le peu d'auréole qui leur restait. C'est à ce moment qu'apparurent les jésuites, résumant en eux-mêmes tout l'ancien monachisme, accaparant la cure d'âme, la prédication, l'enseignement à tous les degrés.

la défense de la foi, les missions étrangères, et se chargeant par une morale à eux, tantôt sévère, tantôt relâchée, d'être les confesseurs des peuples et des princes. La plupart des congré-gâtions qui furent fondées dès lors se distinguent par leur caractère pratique ou philanthropique, les pères de l'Oratoire 1564, les ignorantins 1724, les frères et les sœurs de charité 1545 et 1633; les rédemptoristes missionnaires 1752, et c'est ce côté pratique qui a remis en honneur certains ordres et permis le rétablissement de leurs maisons, Mais il semble que l'institution ne puisse pas vivre de sa vie propre; il lui faut de la richesse, de l'influence; de là aux manœuvres et aux intrigues politiques il n'y a qu'un pas, et presque partout les couvents l'ont franchi. Notre siècle accepte de moins en moins le mélange du temporel et du spirituel; la sécularisation des couvents est devenue une des nécessités du temps présent; il y eut une époque où ils sauvèrent la société, aujourd'hui ils ne peuvent que compromettre la religion et la civilisation.

MONARCHIENS. L'hist. des dogmes comprend quelquefois sous cette désignation générale tous ceux qui, pour maintenir intacte la doctrine de l'unité de Dieu, s'éloignent de la doctrine de l'Église en ce qui concerne la personne de Jésus-Christ, aussi bien ceux qui nient sa divinité que ceux qui voient en lui le Père lui-même sous une forme et dans une manifestation différente. Les premiers regardent Jésus comme un homme que Dieu a revêtu de sa puissance; on les appelle à cause de cela Monar-chiens dynamiques; ainsi Théodote, Artémon, Béryll de Bostra, Paul de Samosate. Les autres ne voient aucune différence hypostatique entre le Père et le Fils; on les appelle hypostatiques, ou aussi patripassiens, puisque d'après eux le Père serait mort sur la croix; ainsi Praxeas, Noetus, Épigone, Cléomène, Sabellius.

MONGOLES. Ce peuple immense, qui forme à lui seul une des races principales du genre humain, et qui occupe une partie de la Chine, de l'Indoustan, de la Perse, de la Tartarie, du Turkestan et de l'Asie russe, se distingue par son teint jaunâtre, ses pommettes saillantes, son œil vif mais oblique, son nez large et aplati, son intelligence et sa férocité. Presque inconnu à l'Occident pendant des siècles, il se révéla tout à coup sous Gengiskan par les hordes qu'il déversa sur l'Europe et par la rapidité de ses conquêtes. C'est de ce moment aussi que datent ses rapports avec l'Égl. chrétienne, bien que des nestoriens en grand nombre habitassent depuis longtemps quelques points de son territoire. Gengiskan laissa l'empire à ses 4 fils, dont le plus puissant était Oktaï; un autre, Zagataï, faisait profession de christianisme et doit avoir élevé à Samarcande un temple dédié à saint Jean. Les Mongoles dans leur ensemble adoraient la nature sous la forme de fétiches et de grossières idoles; leurs prêtres, ou shamans passaient pour sorciers, enchanteurs et prophètes; mais ils n'étaient nullement fanatiques et toléraient toutes les religions des peuples vaincus. Les nestoriens qui habitaient au milieu d'eux ne paraissent pas avoir exercé sur eux aucune influence durable, et ce que l'on a pris quelquefois comme un rudiment de culte chrétien n'a guère été que le fait d'une concession ou d'une accommodation passagère. L'Occident a cherché à plusieurs reprises à les évangéliser. Déjà en 1237 le moine dominicain Philippe parle à Grégoire IX des nombreux chrétiens qu'il a vus en Mongolie: mais il a plutôt en vue les nestoriens et les ja-cobites. En 1245, sur la demande du fils d'Ok-taï, Kashouk f 1249, Innocent lui envoie une double mission, l'une de 4 dominicains sous la conduite d'Anselin, qui froisse l'orgueil du féroce général Batou, neveu d'Oktaï, et ne peut arriver jusqu'au khan; l'autre, de 3 franciscains, dirigée par Jean de Piano Carpine, disciple immédiat de François d'Assise, qui fut bien re<;u du khan; celui-ci f 1249, et eut pour successeur son cousin Mangu, ou Mandschou, favorablement disposé en faveur des chrétiens, mais surtout des nestoriens. C'était l'époque des croisades. Les Occidentaux et les Mongoles avaient un égal intérêt à s'unir contre l'ennemi commun, les musulmans. Louis IX envoya en 1248 le dominicain André de Lonjumeau, et 5 ans après le franciscain Guill. de Rubruquis auprès de Mandschou. L'accueil fut bienveillant, mais le voyage ne réussit pas plus que les précédents: le khan provoqua une discussion entre les chrétiens, les musulmans et les idolâtres, sans que personne se convertît, et Rubruquis revint à Rome raconter son insuccès. Les rapports avec l'Occident n'en continuèrent pas moins, surtout depuis que les Mongoles eurent fondé un nouvel empire sur les ruines du califat de Bagdad détruit en 1258; cet empire mongole-perse avait le même ennemi que la chrétienté, les sultans d'Égypte, et cette circonstance fut favorable à l'action des missionnaires. Les franciscains et les dominicains en profitèrent pour élever, sous la protection des khans d'Abaka f 1282, de Tangador f 1284, d'Argon + 1291, des couvents et des églises. Marco Paolo en parle avec une grande satisfaction. Cependant il ressort, même de son récit, que les églises qui se groupèrent autour des envoyés de Rome se composaient de chrétiens schismatiques, nestoriens ou jacobites, bien plus que de Mongoles, et que ces derniers étaient plutôt disposés, s'ils changeaient, à passer à l'Islam. En tout cas, même sans parler des persécutions qui eurent lieu sous certains princes, le christianisme n'eut jamais en Mongolie qu'nne situation precaire, et il ne dut ses succès apparents ou momentanés qu'à des considérations politiques, aussi bien en Perse et sur les bords de la mer Caspienne que sur le Don et le Volga. Il réussit un peu mieux en Chine, grâce à l'activité du pieux et savant franciscain Jean de Monte Corvino, qui, parti en 1288, travailla pendant 44 ans à la propagation de l'Évang. dans ces contrées, fonda deux églises à Khan-Baliéh (Kambalu, Pékin), éleva plusieurs couvents, fit traduire quelques livres chrétiens, groupa autour de lui de nombreux missionnaires, et f 1332 archev. de Kambalu. Il eut pour successeurs, après un intervalle de 8 années, les uns disent le franciscain Jean de Marignoles, les autres l'év. Nicolas; on sait d'eux peu de chose; ils continuèrent de jouir de la faveur des princes, mais n'en convertirent probablement aucun. Comme chrétiens, les nestoriens étaient à la fois plus anciens dans le pays, plus nombreux, et leurs églises plus florissantes. Et quand il se faisait un changement un peu considérable dans les sentiments de la cour ou du peuple, c'était généralement dans le sens du lamaïsme. La dynastie des Mings, représentée par Timour-Begh (Tamerlan) mit fin 1368 à l'empire mongole, et dans sa haine de l'étranger extermina tout ce qui portait le nom de chrétien. C'est dans notre siècle seulement que de nouvelles tentatives ont été faites pour porter l'Évangile dans les différents pays qui composaient autrefois la Mongolie, depuis le Caucase jusqu'en Chine.

MONGUS, Pierre, v. Monophysitisme.

MONHEIM, Jean, né 1509 près d'Elberfeld, fut converti pendant un voyage de commerce qu'il faisait pour aider ses parents. Il étudia à Munster et à Cologne, et se distingua surtout comme pédagogue. Recteur à Essen, puis à l'école du chapitre de Cologne, il fut appelé en la même qualité à l'école nouvellement fondée de Dusseldorf, où sa réputation attira jusqu'à 2000 étudiants. Il attachait une grande importance à l'enseignement religieux de la jeunesse, et il écrivit k cette intention plusieurs manuels, entre autres un Catéchisme • in quo Christianœ religionis elementa sincere simpliciterque expli-rantur, » 1560 (réimpr. par Sack, Bonn 1847). Ami d'Érasme, ennemi de la scolastique monacale, il était cependant resté catholique, mais son catéchisme trahissait avec une très grande liberté d'esprit des tendances calvinistes. Dénoncé par les jésuites, il allait être l'objet de mesures disciplinaires de la part du duc Guillaume, de Clèves, qui flottait entre l'Évangile et Rome, quand il f 9 sept. 1564. Son travail donna lieu à de nombreux écrits, attaques et réponses. Il avait publié

aussi d'autres ouvrages, sur le Symbole, le Dé-calogue, etc.

MONITA Sécréta, les Instructions secrètes, recueil de directions données pour leur gouverne particulière, et à des hommes de choix seulement, par les chefs de l'ordre des jésuites, sur la manière dont ils doivent se conduire suivant les pays où ils veulent s'établir, et suivant les personnes auxquelles ils ont affaire, pour rfiieux capter leur confiance et s'assurer leur clientèle. On y trouve des passages de toute force et un luxe étrange de précautions pour s'assurer le secret. Ce livre, appelé aussi Monita aurea (Conseils d'or) et qui n'était naturellement pas destiné à la publicité, ni même à une grande circulation, a été découvert au 17®« siècle pendant la guerre de Trente ans. On en a trouvé au moins 5 exemplaires, parfaitement conformes. Deux autres exemplaires ont été découverts encore il y a quelques années. On en attribue l'idéeet la première exécution au général Aqua-viva. Les jésuites en ont dès l'abord nié l'authenticité, car tout mauvais cas est niable. La crudité presque cynique de certains aveux ferait douter en effet de la possibilité que des religieux aient pu écrire ces choses, mais la lecture de l'ensemble amène à la conclusion que s'ils n'ont pas écrit le livre, ils l'ont inspiré; c'est peut-être une satire rédigée après coup par un membre de la Société, qui la connaissait bien et qui l'aura quittée parce qu'il était indigné de ses principes et de sa façon d'agir et de servir Dieu. Mais le fait que ce mystérieux document s'est trouvé dans les collèges et les maisons des jésuites plaide en faveur de son au- j thenticité.

MONIQUE, la mère de saint Augustin; née 332 en Afrique, de parents chrétiens. Contrainte d'épouser un païen, Patricius, de Tagaste en Numidie, elle eut le bonheur de le convertir à l'Évangile. Elle est célèbre par l'influence que sa piété exerça sur le développement intellectuel et religieux du plus grand des pères de l'Égl. latine, f 387 à Ostie, dans un voyage en Italie, qu'elle avait entrepris avec son autre fils Navigius. On la fête le 4 mai.

MONOD, Plusieurs prédicateurs français de ce nom. Les plus connus sont: 1° Jean, né à Genève 5 sept. 1765; d'abord pasteur à Copenhague, il fut appelé en cette même qualité à Paris en 1808. Il avait épousé 12 janv. 1793 Louise de Coninck, dont il eut douze enfants; quatre se consacrèrent au ministère, Frédéric, Guillaume, Adolphe et Horace, tous distingués à divers titres; les autres, médecins ou négociants, ont également bien mérité de l'Église. Ses petits et arrière-petits enfants ont fourni au pays et à l'Église des docteurs, des administra* teurs, des magistrats, des avocats et de nombreux pasteurs, qui honorent sa mémoire, + 23 avril 1856. Son fils aîné

2° Frédério-Joël-Jean-Gérard, né 17 mai 1794 à Monnaz, Vaud, étudia à Genève, et fat appelé à Paris d'abord comme suffragant, puis comme pasteur 1819-1849. Le synode de 1848 ayant refusé d'adopter une Confession de foi, même très modérée, pour éviter un schisme dans TÉglise, Monod se retira avec Gasparin et quelques autres et donna sa démission. Il fonda une égl. réformée évangélique et groupa autour de lui une trentaine d'autres églises indépendantes de l'État, mais toutes peu considérables, ne subsistant que de contributions volontaires et se réunissant en synode tous les deux ans. Plus remarquable par son caractère et par sa piété que par ses talents, il s'intéressa toute sa vie d'une manière active aux œuvres qui avaient pour objet l'avancement du règne de Dieu et se montra l'énergique défenseur de la foi chrétienne dans les Archives du christianisme qu'il avait fondées en 1818 et qu'il rédigea jusqu'à sa f 30 déc. 1863. II a donné à l'Égl. un prof, de théol., 3 fils et un gendre pasteurs.

3° Adolphe, nè à Copenhague 21 janv. 1802, lit ses premières études à Paris où son père venait d'arriver, et les poursuivit ensuite à Genève jusqu'en 1824. Ayant fait un voyage en Italie en 1825, il vint à Naples et groupa en communauté les protestants qu'il y trouva et dont il fut le pasteur jusqu'en 1827. Appelé à Lyon, il y fut apprécié pour son éloquence, mais ayant protesté contre la profanation de la Cène dans quelques sermons d'une grande énergie; il fut poursuivi par le Consistoire et destitué en 1832. Il ouvrit une chapelle indépendante à laquelle se rattachèrent de nombreux adhérents. En 1836 il fut nommé à Montauban professeur d'hébreu, puis prof, d'homilétique et d'éloquence sacrée, et continua, quand il en avait le loisir de visiter et d'édifier les églises. En 1847 il fut appelé à Paris comme pasteur, prit une part active au synode de 1848, mais refusa de se séparer, et après un ministère laborieux et béni, f 6 avril 1856 à la suite d'une longue et douloureuse maladie. Prédicateur accompli, l'un des plus illustres de la chaire française, il était en même temps un théologien distingué, un chrétien modeste et un homme d'une foi vivante. Outre plusieurs volumes de Sermons, on a de lui Lucile, traité d'apologétique, couronné et souvent réimprimé. Ses amis ont publié après sa mort ses Adieux, suite de courtes méditations prononcées de son lit pendant sa maladie, avec portrait; et une Explic. de TÉpître aux Éphésiens. Un fils et deux gendres pasteurs.

4o Horace, né 20 janv. 1814, past. àMarseille, a publié 7 volumes de sermons estimés, plus. |

trad. de l'anglais, entre autres Hannah, Dernier jour de la Passion; Comment, de Hodges sur les Romains; Madagascar; Moffat, 23 ans chez les Bassoutos, etc. 4 fils pasteurs, f 17 juill. 1881.

MONOGRAMME du Christ, c.-à-d. son nom écrit d'un seul caractère. On en connaît de plusieurs formes; la plus ancienne, antérieure à Constantin et grecque d'origine, est composée des lettres qui commencent en grec le nom du Christ, X et P (Ch et R); elle figurait sur le la-barum, et se rencontre sur divers monuments, tombeaux, monnaies, inscriptions, etc. D'autres, que l'on rencontre également sur des monuments et dans des manuscrits, reproduisent le nom de Jésus-Christ dans la combinaison des lettres 1C, XC; enfin chez les grecs on trouve IH, et chez les latins, surtout depuis la fin du moyen âge IHS, qui est le Jésus des grecs, mais dont les latins ont fait Jésus Hominum Salva-for; Bernardin de Sienne le présentait à l'adoration de ses auditeurs. Les jésuites en ont fait leur sceau depuis 1541 en terminant l'H en forme de croix.

MONOPHYSITISME, doctrine qui maintient l'idée d'une seule nature en Christ, contrairement à celle de Nestorius qui insistait sur la distinction des deux natures. Les ardents mo-nophysites de l'Égypte avaient trouvé, mais à tort, que le conc. de Chalcédoine favorisait la tendance nestorienne. Proclus f 454 avait été remplacé par Proterius, dont la violence dans le sens du conc. de Chalcédoine aigrit le parti opposé. Les monophys. avaient 2 chefs: le prêtre Timothée Aelurus (le chat) et le diacre Pierre Mongus (l'enroué ou le bègue). Léon I** étant monté sur le trône 454, les monoph. élurent Aelurus patr. d'Alexandrie, et Proterius perdit la vie dans une émeute. Les deux partis s'adressèrent à Léon, qui consulta les églises. Les év. de Pamphilie, entre autres, répondirent conformément à la doctrine de Chalcédoine, ajoutant que ces définitions étaient seulement pour les évêques, et que pour le peuple il devait lui suffire de savoir qu'il y a 2 natures # dans un seul Christ. Aelurus fut exilé, et remplacé par le pieux moine Timothée Salophacio-lus 460. En 475 Zénon, emp. d'Orient, fut attaqué par Basiliscus. Ce dernier, pour se concilier les inonoph. publia une encyclique en lenr faveur et l'imposa à tous par la force. Aelurus fut donc rétabli, mais 477 Zénon victorieux ramena la paix. Salophaciolus remonta sur son siège, mais mourut bientôt, il fut remplacé par Jean. Les monoph. élurent Mongus. Ce dernier par son habileté auprès d'Acacius et et auprès de l'empereur, suggéra une formule de concorde très astucieuse, YHènotikon, oix rien n'était formulé, qui déplut à la fois aux chalcédoniens et aux monophysites stricts qui

se séparèrent de Mongus et se trouvèrent ainsi sans chef, sans téte, d'où ils reçurent le nom d'Acéphales. Anastase 1er, homme modéré, succéda à Zénon, 491-518; il voulut imposer l'Hé-notikon comme loi, mais il pencha lui-même touj. plus vers le monophysitisme. Jean s'était enfai à Rome, où les monoph. étaient comme excommuniés. Pierre Fulio (le Foulon, ou le Tanneur), moine de Constantinople, nommé évêque. puis exilé, puis rétabli, ranima la querelle, + 488. Xenaïas (Philoxène) d'Hiérapolis, et Severus, moine, puis patr. d'Antioche, en faveur auprès d'Anastase, voulurent introduire dans toutes les églises, en s'autorisant de Es. 6, 3, le « Dieu crucifié pour nous, » que Fullo avait déjà introduit dans Sainte-Sophie; cela provoqua de grands troubles; il y eut du sang versé; un moine partisan de cette addition fut tué et sa téte promenée par la ville. Anastase se présenta à la foule, sans ornements royaux et lui dit: Je consens à déposer ma couronne, mais tous ne peuvent pas régner. La fureur du peuple se calma et Timothée fut proclamé patriarche. Après un certain intervalle les disputes recommencèrent, et les monoph. eux-mêmes se divisèrent; il y eut les phthartolâtres, ou sévériens, qui soutenaient que le corps de Christ avant sa résurrection était corruptible, et les aphthartodocètes, disciples de Julien, qui soutenaient qu'il avait touj. été incorruptible. Puis vinrent les antistètes et les ktistolàtres, qui eux-mêmes se divisèrent à l'infini, chacun suivant son idée et la subtilité de son imagination. L'emp. Justinien s'opposa au monophysitisme, probablement sans le comprendre et, sous l'influence de sa femme Théodora, il nomma patr. de Constantinople le moine monoph. Anthime, mais pour le destituer et le remplacer par Mennas 536 après qu'Agapet, envoyé par Théodoric, ei/t dévoilé son hérésie. Un concile convoqué la même année à Constantinople, condamna le monophysitisme. Ascidas, favori de l'emp., protégeait les opinions monoph., mais un nouveau concile les condamna; Ascidas signa, mais résolut de se venger. Il exploita l'idée fixe de l'empereur, de ramener l'unité dans l'Égl., et il lui suggéra son fameux décret des Trois chapitres, 544, qui ne remédia à rien. Devenu vieux, Justinien pour effacer ses péchés, se déclara pour l'aphthartodocé-tisme, et le patr. de Constantinople fut destitué et exilé. Le monoph. s'établit partout où l'emp. ne dominait pas. II se divisa en trois branches principales qui, suivant les pays formèrent les égl. jacobites, coptes et arméniennes.

MONOTESSARON, titre souvent employé pour désigner ce qu'on appelle plus ordinairement une Harmonie des 4 évangiles; il signifie en grec: les 4 en un, ou la réunion des 4.

MONOTHÉISME, doctrine d'un seul Dieu par opposition au polythéisme qui en admet plu-sieurs. Si l'homme avant la chute ne connaissait que le seul vrai Dieu, il a perdu par le péché le bénéfice de la vérité révélée, et lorsque, dans l'œuvre de son relèvement et de son développement religieux, il a voulu remonter à l'an* teur des choses, il a été frappé de la variété de l'univers bien plus que de son unité. Les puissances invisibles se sont personnifiées pour loi dans chaque groupe de phénomènes apparents et visibles; les pays, les peuples, les fleuves, les montagnes, les éléments, les fléaux lui sont apparus comme autant de manifestations distinctes de dieux différents, sans qu'il fût capable de les faire converger vers une cause unique. Cependant à mesure qu'il réfléchissait, il voyait croître les invraisemblances, les difficultés et les impossibilités; le besoin d'unité condamnait en lui la croyance à tant de dieux qui se heurtaient et se contrecarraient, aucun n'étant tout puissant puisqu'ils se neutralisaient les uns les autres. Déjà l'Inde cherchait à résumer en Brahma toutes ses divinités, mais elle tombait dans le panthéisme. La Grèce et l'ancienne Rome comprenaient l'incohérence de leur mythologie et plaçaient au-dessus de leurs dieux rivaux et ennemis un dieu aveugle qui les dominait tous, le Destin, le Fatum. Mais cet essai de monothéisme péchait par la base, puisqu'il maintenait sur le Parnasse ou dans les enfers tous les autres dieux; il ébranlait les vieilles croyances sans pouvoir accréditer la foi nouvelle. L'expérience des siècles semble dire que l'esprit humain est incapable de s'élever par lui-même à la notion du Dieu unique. Le peuple juif est dans l'antiquité le seul qui ait été monothéiste, et il l'a été déjà dans la personne de son fondateur, Abraham, qui reconnaissait l'Éternel comme le protecteur de sa famille et de sa maison; mais pour les siens c'est encore une foi obscure et Rachel tient à emporter ses dieux domestiques. Ce n'est qu'avec Moïse et depuis la promulgation de la loi en Sinaï, que le monothéisme devient véritablement un domine national et qu'il pénètre officiellement dans la conscience du peuple. Et malgré cela encore, les rechutes et les retours à l'idolâtrie sont fréquents, l'idée même d'un Dieu protecteur spécial d'Israël pouvant conduire à l'idée d'un Dieu pour chaque nation, et par conséquent au polythéisme, Ex. 19, 4. 22, 20. Jug. 11, 24. L'uni-versalisme chrétien pouvait seul fonder logiquement la foi au Dieu unique, en faisant de Dieu le père de tous les hommes et de tous les peuples, en en dégagant l'idée de tout anthropomorphisme comme de tout particularisme. Le gnosticisme s'est quelquefois exprimé de manière à favoriser la conception polythéiste.

et si les trinitaires n'y prennent pas garde, ils risquent d'accréditer la même erreur en exagérant la distinction des personnes. Plus le mo-noth. est conséquent, plus il aboutit en morale à des idées justes; la conscience morale repose sur l'idée de l'ordre dans le gouvernement du monde, et cet ordre lui-même suppose l'unité dans le commandement et la direction. Mais l'Écriture a soin aussi de rappeler que la foi au seul Dieu ne suffit pas pour sauver les hommes; les hébreux, les musulmans, les déistes, les démons eux-mêmes sont monothéistes, Jacq. 2, 19.; il faut encore que l'homme soit réconcilié avec Dieu, et c'est l'œuvre que Jésus-Christ est venu accomplir; nul ne vient au Père que par Lui.

MONOTHÉLISME (plus exactement Mono-thèlétùme), doctrine supposant qu'il n'y a en Jésus-Christ qu'une seule volonté, par opposition au dyothélisme qui en admet deux. La doctrine d'Eutyche avait été condamnée: l'Église avait repoussé le monophysitisme et déclaré qu'il y avait en Christ non pas une nature complexe, mais deux natures distinctes. Les sectateurs secrets de la doctrine condamnée essayèrent de se rabattre sur un détail et, tout en confessant accepter les deux natures, puisqu'il le fallait, ils soutinrent qu'il n'y avait dans le Sauveur qu'une seule volonté, la volonté divine. L'emp. grec Héraclius, qui sentait parfaitement que la question monophysite n'avait pas été tranchée par les décrets des conciles, désirait concilier les orthodoxes et leurs adversaires par une formule qui satisfit les uns et les autres. En 622, dans une guerre contre les Perses, quelques évêques monoph. lui insinuèrent que toute la question controversée revenait à savoir s'il y a en Christ une volonté, ou deux volontés. Sergius, patr. de Constantinople, consulté par l'emp., lui répondit que la foi à une seule manifestation de la volonté divine en Christ, n'était pas contraire à l'Écriture. En 633 les deux partis convinrent d'un compromis, qui ne fit qu'augmenter la confusion. Sophronius, patr. de Jérusalem, s'y opposa avec énergie et se montra le cruel adversaire du mo-nothélisme. Le pape Honorius se rangea du côté de Sergius, en demandant cependant que l'on ne ranimât pas des querelles stériles. Sophronius n'en tint aucun compte et publia contre le monoth. son discours d'inauguration. Peu après, Jérusalem fut prise et le patriarche resta sans patriarcat. Cependant la dispute était engagée; Héraclius voulut l'étouffer et publia son édit Ecthésis (Exposé de la foi) composé par Sergius, où il interdisait toute détermination dogmatique. Jean IV de Rome se rangea du côté des dyothélètes, ainsi que le fameux moine Maxime, qui dut fuir Constantinople, mais continua d'agiter l'Orient. Un conc. africain condamna le monothélisme. Théodore, successeur de Jean IV, excommunia 646 Paul, patr. de Constantinople. L'emp. Constant II intervint à son tour par son Typos (type de la foi), où il ordonnait le silence le plus absolu sur ce sujet. Les moines répondirent par une requête, déclarant que si l'on ne se décidait pas sur cette question, c'était faire de Christ un être sans énergie et sans volonté, pour ainsi dire sans âme. En 649, Martin I«r, de Rome, se joignit aux dyothélètes, et convoqua le premier conc. de Latran, dans lequel les édits impériaux furent anathématisés, et deux volontés reconnues en Christ, distinctes, mais les mêmes. Constant envoya d'abord en Italie l'exarque Olympius avec des pleins-pouvoirs, mais peu de bonne volonté, pour s'opposer à Martin. Olympius mourut sur le champ de bataille, en rebellion; l'emp. envoya à sa place Calliope avec une armée, 653. Martin était malade; il se réfugia dans le temple, où le peuple aurait pu le défendre, mais il aima mieux céder; il se rendit avec dignité. Calliope le fit enlever par ruse et le transporta par mer à Constantinople, où il fut honteusement maltraité et emprisonné, f 655 en Chersonèse. Maxime eut un sort plus douloureux encore; il fut mutilé et martyrisé. Constantin Pogonat, fatigué de ces misérables disputes, résolut d'y mettre un. terme et de rétablir la paix. Il comprit qu'un nouvel édit ne remédierait à rien, et pensa qu'un nouveau concile vaudrait mieux. Il demanda à Agathon, év. de Rome, d'envoyer des députés à Constantinople; Agathon le fit et remit à ses délégués des lettres dans le sens des deux volontés. Le concile, 6®e écuménique, s'ouvrit en 680 dans une salle du palais impérial, in trullo (de là son nom de trullianum)« sous la présidence de Georges, patr. de Constantinople, qui finit par se ranger au dyothélisme, ainsi que la plupart des évêques orientaux. Macaire, patr. d'Antioche, persista seul et fut destitué. Le conc. se passa avec beaucoup d'ordre et de tranquillité; les monoth. purent se défendre avec une pleine liberté. A la fin ils furent anathématisés, y compris le pape Honorius défunt, et les papes suivants durent reproduire cette excommunication d'un des leurs, ce qui met les théologiens ca-thol. dans un grand embarras. Le monoth. était officiellement condamné; l'emp. Bardanes 711 essaya un moment de le relever par la violence, mais il + 713. Le monoth. fut conservé chez les maronites dans les contrées du Liban jusqu'au temps des croisades au 12m® siècle; il y avait été introduit dans la moitié du 7me siècle par l'abbé syrien Jean Maron.

MONTALEMBERT (Charles - Forbes, comte de), pair de France. Né en 1810 à Londres, f 12 mars 1870 à Paris. Catholique fervent et convaincu, il fut en même temps libéral et le défenseur ardent de la liberté de conscience. Caractère noble et chevaleresque, il eut l'honneur de ne pas être logique et de suivre l'impulsion de son cœur et de sa conscience, même lorsque sa religion lui commandait d'autres allures, et il chercha jusqu'à la fin à concilier le catholicisme avec la liberté. Partant du point de vue religieux, il combattit en 1840 la loi d'instruction publique présentée par M. Villemain, et il prit parti pour les jésuites. Membre de l'Acad. depuis 1851. Il a regretté, comme son ami Lacordaire, la convocation du concile et blâmé son mode de votation et les résultats auxquels il a abouti. Auteur de plusieurs ouvrages: Hist. de sainte Elisabeth de Hongrie, 1836; Du vandalisme et du catholicisme dans les arts 1840; Les moines d'Occident, 5 vol. 1860-1862. On a aussi de lui de nombreux discours, des articles de revues, des Études sur l'Espagne, etc.

MONTANISME, secte orientale fondée par Montanus qui parut vers 170 à Artaban et à Pe-puza sur les frontières de la Phrygie et de la Mysie. Ses parents étaient païens. A peine converti il commença à se faire connaître, et se mit en avant, avec deux prophétesses, Priscilla et Maximilla, qui prétendaient, comme lui, avoir reçu des révélations immédiates. L'apparition du montanisme s'explique: par le peuple chez qui il prit naissance, les Phrygiens enthousiastes, dont les prêtres, ceux de Cybèle et ceux de Bacchus, étaient fréquemment dans l'extase; par le caractère mélancolique de Montanus; enfin par les circonstances de l'époque, 1 es guerres, les persécutions, la lutte du gnosti-cisme et de l'Église. Montanus ayant reçu quelques rayons de la vérité, son vieil homme et sa nature phrygienne mêlèrent leurs ténèbres à cette lumière naissante; il se laissa entraîner par son imagination orgueilleuse et eut des extases. Il se croyait alors l'organe d'un esprit supérieur, parlait des « langues étrangères, » et voulait être regardé comme celui à qui le Para-clet était communiqué. Quant aux doctrines principales des montanistes: en théorie ils admettaient que l'Égl. doit se développer sans cesse et graduellement sous le rapport de la morale, de la discipline et de la vie, par des manifestations extraordinaires du Paraclet; ils enseignaient en même temps la nécessité de la continuation des dons extraordinaires, surtout des prophéties. En pratique ils condamnaient les secondes noces, ils défendaient la fuite dans les persécutions, recommandaient le jeûne (carême) à l'époque des souffrances de Christ. Ils avaient quelques rapports avec les novatiens. Quant au millénium ils l'exagéraient et l'annonçaient comme très prochain. Priscilla et Maximilla sont, avec Montanus, les seuls membres de la secte qui aient revendiqué le don de prophétie, mais d'autres ont eu aussi des dons, que Gieseler assimile aux phénomènes du magnétisme animal ou du somnambulisme. On leur reproche un orgueil excessif; ils s'appelaient les spirituels, par opposition aux autres chrétiens, psychiques ou charnels. Ils eurent de nombreux adversaires, surtout en Orient. Claude Apollinaire les combattit; plusieurs égl. d'Asie les excommunièrent. Mais ces adversaires tombèrent eux-mêmes dans des excès, en rejetant le règne de mille ans, l'Apocalypse et l'Évang. de Jean. Ces écarts procurèrent des amis aux montanistes, Rome ne se déclara pas contre eux et accepta ce qu'il y avait de juste dans leurs vues. Les égl. de Lyon et de Vienne écrivirent en leur faveur. Un évêque de Rome, probablement Éleuthère, eut même la pensée d'entrer en communion ecclésiastique avec les montanistes, quand Praxéas vint à Rome 192 et changea ces dispositions bienveillantes. Alors commença la lutte. Tertullien écrivit contre Praxéas, Celui-ci et Caïus en répondant commirent d'énormes erreurs. Les égl. d'Afrique restèrent plutôt bien disposées, et ne virent dans les exagérations du montanisme qu'une exubérance de vie. On a voulu même expliquer l'étrange sommeil de Félicitas et de Perpetua pendant leur supplice, en disant qu'elles étaient montanistes. La secte se maintint jusqu'au 6me siècle, sous les différents noms de kataphrygiens, d'après le pays de son origine: quintilliens, priscil-liens, etc. Leur plus grand tort a été d'exagérer des vérités; quant au chiliasme, il ne leur appartenait pas plus qu'à d'autres sectes.

MONTANUS 1° chef des montanistes, q. v. 11 f probablement sous Caracalla, vers 212. — 2<> Benoit, aussi nommé Arias. Né 1527 en Es-tramadure, il entra dans l'ordre de SaintJacques et accompagna l'év. de Séville au conc. de Trente. A son retour il se retira dans le couvent d'Aracena, mais Philippe II l'en fit sortir, et, à cause de ses vastes connaissances dans les langues, lui confia la publication de la Bible polyglotte d'Anvers 1568-1572. Mais ayant, contrairement à l'év. de Léon de Castro, défendu le texte hébreu comme préférable à la Vulgate, et décidé de joindre les Targums à son édition, Montanus dut se rendre à Rome pour se justifier du reproche d'avoir falsifié le texte biblique et de pencher vers le judaïsme. Acquitté, il refusa un évêché, se retira dans son couvent, et fut nommé bibliothécaire de l'Escurial. f 1598 à Séville.

MONTAUBAN, chef-lieu du Tarn-et-Garonne, évêché, cathédrale du 8™ siècle, a joué un certain rôle pendant les guerres de religion. Fondée en 1114 par le comte Alph. de Toulouse, au pied du mont Alban, elle embrassa la Réforme en 1558 et fut longtemps une des places de sûreté des huguenots. Assiégée sans succès par Montluc 1580, elle fut prise enfin par Richelieu 1629. qui la traita durement et en fit raser les fortifications. Elle eut aussi beaucoup à souffrir des dragonades. Son école de théol., qui datait de la Réformation et qui avait été supprimée, fut rétablie 1809 par Napoléon; c'était la seule faculté pour les théologiens de l'Église réformée (Strasbourg était plus spécialement pour les luthériens, toutefois sans exclu-sisme). Parmi les professeurs qui l'ont illustrée, on nomme Daniel Encontre, Combes d'Ounous, Frossard, Bonnard, Gasc, G. de Félice, Ad. Mo-nod, Jalaguier.

MONTBÉLIARD, comté de la haute Alsace, placé d'abord sous la suzeraineté du Wurtemberg, et annexé à la France depuis 1796. La Réformation y «fut prêchée par un disciple de Luther, Jean Gailing, et de 1524-1525 par Fa-rel, sous la protection d'Ulrich de Wurtemberg; elle ne s'y établit définitivement qu'en 1535, sous le duc Georges, et conformément k la Conf. de foi helvétique. Son premier pasteur fut Toussaint, un ami de Farel. Les ordonnances de 1560 y introduisirent le rite luthérien. Le Colloque de Montbéliard, qui se tint du 20 au 29 mars 1586 fut provoqué par le refus des pasteurs luthériens de donner la Cène aux réfugiés français qui étaient calvinistes. Ceux-ci demandèrent au comte Frédéric de Montbéliard, cousin du duc Louis de Wurtemberg, de faire examiner la question dans une conférence. Andréa et Luc Osiander de Tubingue représentèrent le luthéranisme, Bèze et Musculus de Berne l'idée réformée. On discuta sur la Cène, la personne de Christ, le baptême et la prédestination. Le colloque fut relativement tranquille, mais n'aboutit pas, grâce surtout à la raideur d'Andréa, qui déclara même en terminant que, s'il consentait k donner la main k Bèze, c'était seulement comme homme et non comme frère. Andréa publia à son point de vue le procès-verbal de ces séances, 1587; Bèze y répondit la même année. Quoique le comte eût pris le parti d'Andréa, il autorisa les pasteurs luthériens à donner la Cène aux réfugiés. C'est à la suite de la Conférence que se produisit entre Musculus et Hu-ber, k Berne, le conflit qui se termina par le colloque du 15 avril 1588 et la démission de Huber.

MONT-CASSIN, montagne de la Terre de Labour, ancienne Campanie, à 80 kil. N.-O. de Naples; escarpée, isolée, enveloppée d'une ceinture d'autres montagnes; à l'ouest elle domine de fertiles plaines, k l'est de sombres et profondes vallées. Elle est célèbre par le séjour qu'y fit Benoit de Nursie, et par le monastère qu'il y éleva et qui fut pendant des siècles un foyer de lumières et un lieu de pèlerinage. Construit d'abord par les moines eux-mêmes et dans des conditions modestes, ce couvent fut détruit par les Lombards et ses habitants se réfugièrent k Rome où ils fondèrent un nouveau couvent près du Quirinal. En 720 Pétronax de Brescia obtint de Grégoire II l'autorisation de reconstruire le couvent du Mont-Cassin, et les papes qui suivirent lui accordèrent de nombreux privilèges. Mais les Sarrasins le détruisirent de nouveau 884, et il ne fut rétabli que par l'abbé Aligerne, qui remit en vigueur la règle et la discipline. Après de nombreuses vicissitudes, chutes et relèvements, détruit par un tremblement de terre 1340, il fut rétabli par Jules II qui lui affilia la congrég. de sainte Justine. Il a servi de retraite à de nombreux princes, souverains, papes et savants, k saint Grégoire, k Cassiodore. Auj. encore, et récemment restauré k l'occasion du 14»® centenaire de saint Benoît, il renferme d'immenses richesses, une importante bibliothèque, de beaux tableaux et, dit on, les corps de Benoît et de sa sœur Scho-lastique. On montre aussi près de là la retraite de l'Albanette, où Loyola doit avoir composé la règle des jésuites.

MONTE CORVINO, Jean (de), ainsi nommé de la ville d'Apulie où il était né. Franciscain, il se consacra dès sa jeunesse à l'œuvre des missions. Il avait été envoyé par Michel Paléo-logue à Grégoire X, après avoir fait un voyage en Mongolie, vers 1280. Le grand khan Kublaï, de Péking, avait fait demander par Marco Paolo qu'on lui envoyât des missionnaires. Deux premières missions avaient échoué. Nicolas IV décida d'y envoyer Jean avec quelques collaborateurs 1288; il n'arriva à destination qu'en 1295, ayant passé trois ans en Perse et un an aux Indes, toujours préchant et baptisant. Arrivé à Kambalou, il y bâtit un temple avec 3 cloches, baptisa plus de 6000 personnes, organisa des cultes pour les enfants, composa pour eux des cantiques et un bréviaire, ou catéchisme, et déploya le plus grand zèle pour la propagation de l'Évangile. Malheureusement il entra en lutte avec les nestoriens; ils ne comprirent ni les uns ni les autres que la Chine était un assez grand pays pour qu'il y eût place pour tous, et au lieu de s'unir, ils perdirent leurs forces à se combattre. Il traduisit en tartare le N. T. et les Psaumes, fonda une maison de missions, fut nommé légat du pape et archev. de Kambalou, obtint de Clément V l'envoi de 7 moines franciscains, qui furent ses évêques suffragants, et f 1332, après 44 ans d'un ministère fidèle et béni dans la Mongolie.

MONTFAUCON, Bernard (de), cél. bénédictin maurin, né 1655 d'une famille noble, au château de Soulages, Languedoc; il reçut une éducation soignée, servit sous Turenne 1672, mais ayant perdu son père et sa mère en peu de temps, il renonça au monde et se retira au couvent de la Daunade à Toulouse, où il prit l'habit de saint Benoit. Ses travaux d'érudition attirèrent sur lui l'attention de ses supérieurs; il fut en 1687 envoyé à Paris, où il se lia avec Ducange, et prit part à la publication des pères grecs. Il étudia ensuite les langues orientales, visita de 1698 à 1700 les principales bibliothèques de l'Italie, et fut fort bien accueilli par le pape Innocent XII. Il déclina les nombreuses offres qui lui furent faites, et revint à Paris pour s'y consacrer entièrement à ses études. En 1719 il fut reçu à l'Acad. des Inscriptions, et f 1741, respecté de tous à cause de sa science et de ses vertus. Son premier ouvrage fut un Analecta (morceaux choisis) de divers auteurs grecs encore inédits, 1688, puis vinrent les Œuvres d'Athanase, avec trad. latine et biographie 1698; la Collection des pères et écrivains grecs 1707, avec quelques fragments dTEusèbe de Césarée et la Topographie chrétienne du moine Cosmas Indicopleustes: les Hexaples d'Origènes, avec notes, variantes et l'histoire des traductions grecques de la Bible, 1713; Chrysostome, avec trad. latine et biographie, 1718, la meilleure qui existe et l'un des plus remarquables travaux des maurins, etc. En dehors de la théol. il a écrit aussi des ouvrages considérables sur l'antiquité; ainsi son Diarium italicum, notices sur les anciens monuments, 1702; la Paléographie grecque; la Nouvelle biblioth. des manuscrits; l'Antiquité expliquée et représentée en figures; les Monuments de la monarchie française, etc. Tous ces in-folios ont contribué à fonder la réputation de l'érudition bénédictine.

MONTMARTRE, ou Mont des Martyrs, faubourg au nord de Paris, ainsi nommé, dit-on, parce que saint Denis et ses trois amis y auraient été martyrisés. Selon d'autres, ce nom lui viendrait d'un temple de Mars.

MONTPELLIENS, nom d'une secte qui prit naissance à Montpellier en 1723, et qui s'appelait elle-même la nouvelle Sion. On lui attribue des orgies nocturnes commises sous le masque de la religion; ce sont ses ennemis qui l'en accusent. Persécutée, elle disparut bientôt.

MONTPELLIER, vieille cité romaine, qu'une légende fait évangéliser par Simon-le-Pharisien, mais qui en réalité n'a eu d'évêque et d'église qu'au 6®« siècle. Le protestantisme y pénétra en 1559, mais dès 1554 il avait eu déjà ses martyrs brûlés et des enfants enlevés à leurs parents. Une grande partie de la ville passa à la Réforme, et l'opposition du comte de Villars, de Joyeuse, même de Dampville n'empêcha pas les religionnaires de se réunir en plein jour et d'avoir leurs églises. Après les persécutions, qui risquèrent d'amener une révolte, le gouvernement eut recours aux tracasseries, aux manœuvres, aux interdictions professionnelles, jusqu'au moment où le grand coup fut porte par la Révocation. On comptait encore 10,000 protestants en 1682; 6000 abjurèrent par ordre ou pour se sauver, mais longtemps les curés se plaignirent de ce qu'ils étaient « mal convertis. • Le culte du désert fut célébré sans interruption de 1685 à 1789, et le Languedoc ne compta pas moins de 6 synodes généraux et 71 provinciaux. De nombreux martyrs y furent exécutés, depuis Brousson 1698, jusqu'à Bénè-zet 1752. Les premiers pasteurs de l'Église s? relevant de ses ruines furent Bastide 1770, Ra-baud-Pommier 1772, et Saussine 1791. La loi de germinal an X ne donna qu'un pasteur a Montpellier, Honoré Michel, f 1861, dès lors le nombre en a été successivement augmenté; il est auj. de cinq. Les noms de Grawitz et de Lissignol sont restés populaires au milieu de plusieurs autres.

MONTS de piété. Ces institutions, qui avaient pour but d'avancer de l'argent aux pauvres contre une garantie suffisante et sans intérêt, furent imaginées par le minorité Barnabas de Pérouse 1464, et sanctionnées par Paul III. L'intention était bonne, mais les abus survinrent. Auj. ce n'est plus qu'une industrie toute séculière, qui peut rendre des services, si elle est bien dirigée, mais qui a servi souvent à ruiner des familles par les nombreuses facilités qu'elle offre à l'emprunt.

MOPSUESTE, v. Théodore 4<>.

MORATA, Olympia-Fulvia, fille du poète italien F. Peregrinus, une des femmes les plus savantes du 16me siècle. Née 1526 à Ferrare. elle apprit de bonne heure le grec et le latin dans la société de son père et de ses amis, et fut admise dans le cercle littéraire de Renée de Ferrare comme compagne de la princesse Anna. Vivement affectée par la mort de son père, elle se tourna vers l'Évangile et se convertit à la Réforme 1548-1550. Elle suivit en Allemagne son mari, le Dr Andréas Gunthler, d'abord a Augsbourg, puis à Schweinfurt, où ils s'occupèrent paisiblement de littérature. Miraculeusement échappés au carnage de Schweinfurt. 1553, ils vinrent à Heidelberg où Gunthler avait été nommé professeur de médecine; elle y f 26 oct. 1555, d'une maladie de poitrine et regrettant son beau pays; son mari et son frère ne lui survécurent que peu de jours. Célius Sec. Curione a publié ses poésies grecques et latines. 1558. Vie par Jules Bonnet, 1850.

MORAVES, v. Moravie.

MORAVIE, contrée montagneuse du centre de l'Europe^primitivement habitée par lesQua-des et les Marcomans, puis par les Rugiens, les Hérules et les Slaves; elle appartient auj. à l'Autriche. Ses villes principales sont Brûnn, Olmtltz, Troppau et Teschen. Son histoire relig. est intimement unie à son hist. politique. C'est de Passau qu'elle fut évangélisée, par le moine Urolf, 820-826, et vers 850 elle comptait déjà 2 ducs chrétiens et 4 évêques. Le duc Rastislav, 863, pour se soustraire à l'influence trop grande des princes allemands, qui appartenaient à l'Église latine, demanda à Constantinople des missionnaires, et l'emp. Michel leur envoya Cyrille et Méthodius, qui ne tardèrent pas, en apportant au peuple la Bible dans sa langue, à obtenir de grands succès. Consacré archev. de Moravie, lors de son second voyage à Rome 871, Méthodius releva à Morsbourg l'ancien archevêché de Sirinium et le détacha de celui de Salz-bourg. Mais son successeur, Wiching, poussa le duc Swatopluk à adopter les formes latines du culte, ce qui fut d'autant plus facile que la Moravie elle-même subissait de plus en plus l'ascendant de l'Allemagne. L'archevêché morave disparut, ainsi que celui de Bohême, et ils furent réunis à celui de Ratisbonne d'abord, puis à celui de Prague, enfin à cçlui d'OlmUtz 1073. A partir de 1080 la Moravie et la Bohême furent complètement latinisées; le mariage des prêtres, la langue vulgaire dans le culte, l'usage de la coupe, furent successivement interdits. Mais la résistance augmenta à mesure que la réaction se faisait sentir plus durement. Husset Jérôme de Prague trouvèrent en Bohême leurs partisans les plus dévoués, que les Compactata de Bâle et les lettres des princes encouragèrent encore. Les frères de Bohême, comme les vaudois à Ful-neck, jouirent en Moravie d'une certaine protection, jusqu'au moment oti le roi Podiebrad rouvrit l'ère des persécutions, 1458-1471. Lors de la Réforme il se forma en Bohême, en Moravie en Pologne un certain nombre de communautés, luthériennes, réformées et même anabaptistes, dont les destinées furent longtemps communes. Ferdinand II sévit tout d'abord contre les anabaptistes, mais peu à peu il procéda à l'extirpation totale du protestantisme dans ses États, 1620-1627; les frères de Moravie durent s'enfuir, ainsi que leurs pasteurs, entre autres Pévêque Amos Comenius. Ce fut pour près d'un siècle la fin de l'église des Frères. Mais de ses débris se forma vers 1722 la petite communauté des hernoutes, aussi appelés Frères moraves, ou Fr. de Bohême et de Moravie; elle obtint de s'installer sur un domaine du comte de Zinzendorf, et commença dès 1727 son travail d'organisation, qui fut pénible et assez long. v. Bost, Hist. des Fr. de Boh. et de Moravie. C'est dans l'œuvre des missions et dans l'enseignement de la jeunesse qu'ils ont obtenu le plus de succès.

Ils ont réalisé, comme discipline intérieure, Yecclesiola in eccletiâ, la petite Église dans la grande, restant attachés à l'Église du pays partout où ils le peuvent, c.-à-d. où l'Évangile est fidèlement prêché, mais conservant leur indépendance et leur organisation propre. Moins militants, mais non moins actifs que les wes-leyens, ils ont éveillé moins de susceptibilités et soulevé moins d'hostilités. Quant aux réformés et aux luthériens qui étaient restés en Moravie, les cruelles persécutions de Ferdinand II et de l'év. Ladislaw d'OlmUtz les décimèrent; cependant il en restait encore quelques milliers, lorsque parut en 1781 l'Édit de tolérance de Joseph II. Aujourd'hui ils vivent en pauvre état, mais ils sont à peu près libres, et si ce n'était l'extrême misère à laquelle il sont réduits, et leurs pasteurs avec eux, on pourrait dire que l'Autriche leur a accordé la pleine liberté de conscience; seulement il faut que le monde chrétien leur fournisse les moyens de vivre.

MORE, v. Morus.

MORÉLY, Jean-Baptiste, ou Morelly, Morel, en latin Morelius, né à Paris, réfugié à Genève pour cause de religion, entra en conflit avec Calvin relativement à la constitution de l'Église, qu'il aurait voulu voir plus démocratique. Il écrivit son Traité de la discipline et police chrétienne, qu'il fit imprimer à Lyon 1561, sans l'avoir d'abord soumis à la censure. Le livre est bien raisonné de fond et modéré de forme, mais le moment de sa publication était inopportun; le livre fut condamné au synode d'Orléans, et l'auteur excommunié 1562. Mo-rély en appela à Genève 1563, à Paris 1565, à La Rochelle 1571, à Nîmes 1572, et fut condamné chaque fois. En 1566 il est auprès de Jeanne d'Albret, précepteur de son fils, mais il perd cette place sur des plaintes venues de Genève. Dès lors il disparaît: on suppose que c'est le même Joannes Morelius que l'on trouve en Angleterre en 1589, déjà vieux, et auteur de quelques traités de controverse: De ecclesiâ ab Antichtàto liberanda, De Cœnd, Ex-tirpatio Antichrùti, 1594, etc.

MORGAN lo Thomas, déiste anglais. Après avoir desservi comme pasteur non-conformiste l'égl. de Marlborougb, il perdit sa place à cause de ses doctrines ariennes 1726; il s'établit ensuite comme médecin auprès des quakers de Bristol; enfin à Londres comme homme de lettres. f 1743. Son principal ouvrage est intitulé Le Philosophe moraliste; le 1^ volume 1737 est l'exposé, sous forme de dialogues, de ses idées philos, et religieuses; les deux suivants 1739 et 1740 en sont la défense et appartiennent à la polémique. Il voit dans le christianisme une révélation divine, mais à condition qu'on en écarte tout surnaturel, qui n'est qu'un • levain des éléments juifs qui s'y trouvent encore. t Le mosaïsme n'est pour lui qu'un degré religieux très inférieur, et la loi n'est qu'un assemblage arbitraire et tyrannique d'observances et de commandements. Son système rappelle ceux des gnostiques, et notamment de Marcion. Malgré son peu de valeur il souleva une vive opposition, qui eut pour conséquence une étude plus sérieuse de l'A. T.

2° Morgan, l'ami des deux Wesley et le fondateur du club méthodiste d'Oxford. Il ruina sa santé par des austérités exagérées et f 1732.

MORGANATIQUE, v. Mariage.

MORIN Simon, espèce de fanatique, né à Richemont et qui finit par s'établir à Paris. Emprisonné trois fois, en 1640,1644 et 1648. pour fausse doctrine, il se rétracta deux fois, mais «'tant retombé, il fut accusé officiellement par Jean Desmarets de Saint-Sorlin et condamné 1663 à être brûlé; ses adhérents furent envoyés aux galères. Il se disait le Fils de l'homme, une incarnation de Christ. Selon lui le règne de la loi avait duré jusqu'à la venue du Sauveur; puis était venu le règne de la grâce; avec lui-même enfin commençait le règne du Saint-Es-prit. L'Égl. romaine n'était autre que l'Antéchrist. Sa morale était plus étrange encore; il affirmait que les actions les plus impures ne peuvent souiller l'âme, et que même elles sont utiles parce qu'elles humilient l'orgueil humain.

2° Jean, né 1591 à Blois, de parents protestants; il étudia à Leyde, et fatigué des luttes auxquelles il assista entre les arminiens et les gomaristes, il se laissa convertir par le cardinal Duperron; il entra 1618 dans la Congrég. des oratoriens. Ses connaissances et ses écrits lui firent une telle réputation qu'Urbain VIII l'appela à Rome pour l'aider dans sa tentative de réunir l'Égl. grecque à l'Égl. latine. Rappelé par Richelieu, il reprit son activité littéraire, f 1659. On a de lui: Hist. de la délivrance de l'Égl. chrét. par Constantin, et de la souveraineté temporelle donnée à l'Égl. rom. par les rois de France, 1630; une étude sur les LXX et sur le Pentateuque samaritain, où il essaie de montrer leur accord, et leur supériorité sur le texte reçu; réimpr. plus complètement après sa mort, un vol. f°, 1669; un travail sur la Discipline dans l'administration du sacrement de la pénitence, 1651, et un traité sur les Ordinations dans l'Égl. 1655. Richard Simon a écrit sa Vie en tête de ses Antiq. ecclesiœ, 1682.

MORLNS, peuplade de la Gaule septentrionale, avoisinant la Belgique; son territoire répondait au nord de l'Artois et à la Flandre. Villes principales: Thérouanne etCassel (nord). Contrée évangélisée par Amand, Orner, etc. au siècle.

MORISQUES, nom que l'on donnait eu Es-pagne aux Maures qui s'étaient laissé baptiser pour éviter l'exil.

MORITZ, v. Maurice.

MORLIN, v. Mœrlin.

MORMONS, dits aussi les Saints des derniers jours, secte religieuse de l'Amérique du nord, fondée 1827 par Joë Smith, q. v. Voici la légende de son origine. Smith eut en 1827 une vision qui lui dévoila les erreurs de toutes les sectes et le désigna lui-môme comme l'organe d'une nouvelle révélation. Sur l'ordre d'un ange il alla creuser la terre à un certain endroit, et il y trouva enfouies les Tables de la révélation (le livre des mormons); il y trouva aussi les lunettes de l'Urim et Thummim, qui lui permirent de déchiffrer et de traduire les Tables. Elles portaient en substance, qu'un juif de Jérusalem, nommé Léhi, sous le règne de Sédécias, émigra vers l'est avec sa famille; après avoir traversé le désert ils arrivèrent au bord de la mer et passèrent en Amérique. Les tribus issues de ses 4 fils s'appelèrent Néphites, du nom du plus jeune, et finirent par peupler tout le pays. Les néphites s'appelaient déjà chrétiens avanl l'apparition du christianisme. Jésus se montra à eux après sa résurrection et leur prêcha l'Évangile. Ils se convertirent et menèrent, sous la conduite d'un patriarche, une vie chrétienne; mais à la longue ils se divisèrent et tombèrent dans toutes sortes de désordres, si bien que la tribu des Lama ni tes, d'où descendent auj. les Indiens, les extermina. C'est alors que les derniers prophètes reçurent l'ordre d'écrire l'histoire du peuple infidèle. Ce fut Mormon qui l'écrivit; son fils Moroni l'acheva. L'histoire est écrite en caractères égyptiens, sur des plaques, ou tables, et enterrées pour être retrouvées seulement aux derniers jours et par Jo? Smith qui est spécialement désigné pour cela dans l'oracle. Après la légende voici l'histoire: Le livre mormon a été écrit en 1812 par Salomon Spaulding, pasteur presbytérien à New-Salem, dans l'Ohio, f 1816. C'est le développement romanesque et imaginaire d'une tradition sans preuve qui fait descendre les Indiens d'Amérique des juifs exilés à Babylone. Il remit son mss. à un éditeur de Pittsburg, Patter-son, qui le mit de côté, peut-être en attendant un moment favorable pour l'imprimer. Un jour ce manuscrit disparut. Mais un autre imprimeur, Sidney Rigdon, aussi un ancien prédicateur, avait réussi à s'en procurer une copie, et cette copie tomba entre les mains de Jo? Smith, qui résolut d'en tirer parti. Il le retravailla, le mit à son point de vue, et d'accord avec Rigdon et son ami Cowdry, aidé par la générosité d'un riche campagnard de leurs fidèles, Martin Harris, il le fit imprimer en le donnant comme la traduction des tablettes d'or de Moroni, qui lui auraient été révélées et expliquées par un ange. Les imposteurs s'établirent d'abord, 30juin 1830, à La Fayette, New-York, au nombre d'une trentaine. Mal vus du public, ils se rendirent en 1831 à Kirtland, dans l'Ohio, où Smith prétendit avoir reçu le don de prophétie et de révélation, et où il continua l'œuvre d'organisation de sa communauté, supprimant tout ce qui rappelait le presbytérianisme et rétablissant les emplois bibliques. La nouvelle secte fit de rapides progrès, grâce à l'aplomb avec lequel Smith débitait ses prophéties, et grâce à l'activité de ses missionnaires. Elle dut, à la suite d'une vision, se transporter dans le comté de Jackson, Missouri, mais le peuple les prit pour des brigands et les chassa. Ils passèrent dans l'IHinois, où ils fondèrent la ville de Nauvoo, où Smith joignit à ses fonctions religieuses celles de maire et de commandant des milices. Mais l'organisation de la communauté, sa prétention d'être la maîtresse du pays en qualité t d'héritière des gentils, » et surtout l'introduction de la polygamie que Smith pratiqua d'abord, qu'il recommanda à ses fidèles, et qu'il voulut rendre générale, soulevèrent le peuple qui jeta le prophète en prison et l'assassina, ainsi que son frère Hiram, 27 juin 1844. Il fut remplacé par Brigham Young comme chef des mormons. Chassés de Nauvoo, ils se rendirent en 1847 sur les bords du Lac Salé, près des monts Nevada, sur les frontières des États-Unis, où ils fondèrent l'Utah, ou Déseret, qui fut reconnu comme un territoire par le gouvernement des États-Unis, et dont Young fut nommé gouverneur, réunissant de nouveau en sa personne les pouvoirs civils et religieux. En dépit des difficultés que lui suscita à plusieurs reprises le gouvernement américain, la ville mormone prit un rapide développement, et grâce à l'arrivée de nombreux colons attirés d'Amérique et d'Europe, elle atteignit en peu de temps le chiffre de 80,000 habitants. Mais le gouvernement des Etats-Unis, par diverses lois, par l'envoi d'un nouveau gouverneur et de nouveaux fonctionnaires, appuyés par 2500 soldats, a coupé court aux progrès de la polygamie; de nouveaux colons, non mormons, se sont établis dans l'Utah; le chemin du Pacifique les a réunis au monde civilisé, et la mort de Br. Young 1877 leur a porté un coup fatal. Quant aux doctrines de cette secte, qui prétend conserver encore le titre de chrétienne, c'est un bizarre mélange de matérialisme, de sensualisme et d'extravagances religieuses empruntées à diverses dénominations chrétiennes des États-Unis. Le mormonisme prétend à la fois restaurer le vrai christianisme et en être l'accomplissement définitif, le dernier mot. Il en a gardé l'idée de la rédemption et du règne de Dieu, mais il en rejette la morale. Il continue d'appeler la Bible l'Écriture Sainte, mais Smith affirme que le texte en est complètement altéré, et il l'a rétabli dans son intégrité avec l'arbitraire le plus capricieux. Tout le système repose en réalité sur le don de prophétie que s'attribue le chef, et que d'autres peuvent revendiquer également sous prétexte de visions, de songes, d'inspiration, etc. Les miracles tiennent de la magie, et la foi se réduit à une soumission absolue à la nouv. Église et à un dévouement sans réserve à ses intérêts. C'est une démocratie sociale, où le temporel et le spirituel sont presque identifiés, et par la multiplicité des charges l'individu est relié à l'ensemble de la manière la plus étroite. Il y a le président ou voyant qui exerce l'autorité la plus absolue, malgré deux assistants qui lui sont adjoints. Puis viennent les 12 apôtres et les 70 disciples, qui représentent les deux chambres, et qui forment le Congrès en se réunissant. Douze grands sacrificateurs, conseil d'État ou tribunal suprême, décident dans les cas douteux ou difficiles. Le clergé est divisé en deux classes: les prêtres selon l'ordre de Melchisédec; ils sont présidés par le Voyant, qui a les clefs des bénédictions célestes et qui est en communication directe avec Dieu le Père et avec Christ; et les prêtres selon l'ordre d'Aaron, présidés par l'Ange, et qui remplissent les offices ordinaires du culte. Le clergé a sa hiérarchie: souverains sacrificateurs, patriarches, évêques, anciens, prêtres, diacres et catéchistes. Le culte est riche en cérémonies, empruntées soit au judaïsme, soit aux mystère* d'autres religions; il consiste surtout en prières, chants, discours, bénédiction, baptême et cène, et se termine quelquefois par des cris tumultueux ou par de joyeuses manifestations. Les langues et les allocutions sont permises à tous et ne portent pas nécessairement sur des sujets religieux. Il y a aussi des cérémonies spéciales pour les réceptions de membres et pour les consécrations. Parmi leurs particularités il faut noter le baptême pour les morts, qui peut assurer aux morts leur réception dans l'Église, et l'idée que les femmes ne peuvent avoir part à la rédemption qu'autant qu'elles sont unies a un saint, ce qui favorise et rend nécessaire la polygamie. Ils sont chiliastes, croient au rétablissement des juifs dans leur patrie et au prochain règne de mille ans. Leurs idées sur la vie future sont vagues, mais matérielles. On ne peut guère parler de leur système religieux, attendu que leurs révélations ont précisément pour objet de le modifier suivant les besoins du moment. Ce qui frappe les yeux, ce sont leurs travaux agricoles, le développement de leur cité, le nombre de leurs établissements d'utilité publique, université, écoles, ateliers, théâtre, et autres créations, qui réclament les forces de tous et qui doivent servir à tous. Cette prospérité extérieure a fait illusion à beaucoup de personnes et a séduit même des visiteurs étrangers à la secte, mais comme leur moralité n'a d'autre règle que le bien matériel de la communauté, quoiqu'ils fassent profession d'admettre le décalogue, ils s'abandonnent à des désordres révoltants, qui leur ont valu la haine et le mépris des Américains, et plus d'une fois l'intervention fédérale. — Sur leurs principes, v. Doctrines and Covenants9 Nauvoo 1846, parRig-don, qui fut excommunié plus tard, et différents articles de journaux. Les mormons les plus connus, outre Smith et Young, sont Rigdon, P. Wittmer, l'allemand Phelps qui a publié leur premier journal, l'apôtre Orson Pratl, etc. Ils ont recruté des adhérents en Suède, Danemark, Angleterre, peu en Suisse malgré leurs efforts. V. Gunnison, Mrs. White, Dixon, Guers, etc.

MORNAY, v. Du Plessis-Mornay.

MORON, ou Morone (Jean de), Un des prélats romains les plus distingués de l'âge de la Réformation. Né 1509 à Milan, fils du chancelier comte Girolarno de M., il étudia à Padoue; év. de Modène en 1536; Paul III l'envoie comme nonce auprès de Ferdinand, et le délègue aux colloques de Spire et de Worms. ainsi qu'à la diète de Spire. Nommé cardinal en 1542, et de retour dans son diocèse, ses vues se sont élargies par son séjour en Allemagne; il tolère l'égl. évang. fondée à Modène par Ricci, favorise la diffusion du livre Le bienfait de la mort de Christ, et prêche lui-même la justification par la foi: mais il n'en maintient pas moins sa soumission au pape. Légat de Bologne en 1544, il renonce 1548 à ces fonctions et à son évêché de Modéne, pour prendre celui de Novare. En 1555 il est nonce du pape à Augsbourg. En 1557 Paul IV le fait enfermer ati château Saint-Ange comme suspect d'hérésie, ainsi que le cardinal Polus et l'év. Foscarari de Modène; mais Pie IV lui rend la liberté et sa faveur, 1559; il l'envoie comme légat auprès de Ferdinand 1562, et en 1563 en cette même qualité au conc. de Trente, qu'il présida jusqu'à la fin. En récompense de ses services il fut nommé doyen du sacré collège. Il remplit encore plusieurs missions diplomatiques, et f 1 déc. 1580 comme cardinal-év. d'Ostie. On a de lui quelques lettres et des discours.

MORONI, v. Mormons.

MORRISON, Robert, fils d'un cordonnier. Né 1782 à Morpeth, Northumberland, il entra 1807 au service de la Soc. biblique britannique comme missionnaire et fut envoyé à Macao. Comme l'entrée du pays était sévèrement interdite aux étrangers, surtout aux chrétiens, il passa plusieurs années dans la retraite à Canton, ne s'occupant que de l'étude du chinois, et se préparant comme interprète de la factorerie anglaise de Macao à l'œuvre qu'il devait accomplir. En 1816 il accompagna en cette même qualité lord Amhorst à Pékin, et enfin en 1823, après lô années d'études, il revint en Angleterre, avec une collection d'environ 10,000 volumes chinois. En 1826 il repartit pour la Chine, où il ne cessa de travailler avec fruit à l'œuvre de la mission jusqu'à sa f l«r août 1834. Avec sa parfaite connaissance de la langue chinoise, il avait trad. la Bible 1819, aidé de son fidèle Leang-Afa. Il a publié aussi une Gramm. chinoise, Serampore 1815; un Vocabulaire en 6 vol., Macao 1815-1822, et un grand nombre de traités pour l'impression desquels il avait établi à Canton une imprimerie spéciale, qui devait servir plus tard de centre à l'activité missionnaire. Il a aussi fondé l'institut anglo-chinois de Malacca 1818, et un hôpital à Macao. Le fruit immédiat de son ministère fut un petit troupeau de Chinois convertis, qu'il évangélisait et édifiait sans réveiller l'attention des autorités.

MORTS. Le mystère de la mort, son inévitable certitude, l'incertitude du moment, l'état des âmes au delà du tombeau, tous ces sujets qui s'imposent à l'attention et qui fascinent quand on les considère de près, ont joué un rôle dans l'Église, soit en frappant l'imagination, soit en éveillant les consciences, soit en favorisant la superstition. Voici quelques-uns des points par lesquels ces questions appartiennent à l'hist. ecclésiastique.

La nécromancie, ou conjuration des morts, leur évocation, repose sur la foi à l'immortalité de l'âme. Connue des Perses, des Grecs, des Romains; pratiquée à Héraclée, à Trézène, au lac d'Averne, elle n'était pas inconnue des Hébreux, comme on le voit par la pythonisse d'En-dor, et par les défenses mêmes de la loi, 1 Sam. 28, 7. Deut. 18, 11. Lév. 20, 27. On en trouve des traces jusque dans Ésaïe 8, 19. 29, 4. L'Égl. chrétienne l'a touj. condamnée comme diabolique, ce qui n'a pas empêché quelques esprits rêveurs d'y ajouter foi en quelque degré, Para-celse, Bôhme, Agrippa, puis au siècle dernier Cagliostro; de nos jours enfin les spirites.

La danse des morts. essai fantastique d'allé-goriser la mort dans ses rapports avec toutes les classes d'hommes; riches, pauvres, bons, mauvais, vieux ou jeunes, elle les entraîne tous au sépulcre en dansant une ronde infernale. Elle est représentée tantôt comme un faucheur, tantôt comme un cultivateur qui se sert de sang pour engrais, tantôt comme un squelette, tantôt comme un cadavre enveloppé d'un linceul. Elle est quelquefois seule avec sa victime; d*au-tres fois elle danse avec de nombreux personnages, rappelant les pestes qui ravagèrent l'Europe vers le 14»* siècle. C'est surtout en Allemagne et en France que cette idée devint populaire et inspira les artistes, peintres, poètes et sculpteurs. Le moyen Age aimait à la reproduire sur les murs de ses cimetières, et celui des Innocents à Paris en renferme une des plus anciennes que l'on connaisse; les vers et les bas-reliefs datent d'à peu près 1424. Dans l'origine il y avait un quatrain pour chaque personnage, et les mss. se chargèrent d'illustrer le texte; chaque peintre avait naturellement sa manière, et les fresques offrent de grandes variétés. Ce genre passa ensuite en Espagne, aux Pays-Bas. en Italie, on Angleterre. L'un des tableaux les plus célèbres est celui de Holbein, qui a été reproduit nombre de fois par la gravure, et qui a donné lieu à beaucoup d'imitations; il compte jusqu'à 58 figures. Plus récemment Kaulbach a fait aussi une Danse des morts accommodée au goût et aux préoccupations modernes. Le nom français de Danse macabre, dériverait selon les uns (Ducange) de Danse des Maccibées et serait une allusion au martyre de la mère et de ses 7 enfants raconté 2 Maccab.; d'autres voient dans Macabre le nom de celui qui en a eu le premier l'idée; quelaues-uns le font venir du grec ma-rarios (bienheureux); tout cela est bien forcé. Peut-être faut-il le dériver de l'arabe magbarah (hébr. kèbèr), cimetière.

La communion des morts. Plusieurs décrets des conciles de Carthage 397, Constantinople fi92, Auxerre 578 ou 590, montrent qu'en quelques endroits on avait l'habitude de mettre le pain de la communion dans la bouche des morts, s'ils n'avaient pas communié au commencement de leur maladie ou immédiatement avant leur mort.

La confrérie de la mort, association qui date de Boniface; elle se composait d'hommes appartenant à diverses églises ou couvents, qui s'engageaient les uns vis-à-vis des autres à faire dire des messes dans toutes les chapelles de leur ressort pour hâter leur sortie du purgatoire. Des princes et seigneurs étaient admis par faveur particulière à en faire partie.

Les enterreurs de morts, ou fossoyeurs, étaient censés appartenir au clergé inférieur. Ils étaient fort nombreux dans les villes. Théodose IJ, en 418, réduisit leur nombre à Constantinople à 950! Avec les parabolans ils formaient un chiffre respectable, tout à la dévotion des évêques et prêts à servir leurs caprices ou leur ambition. On ne les connaissait pas avant l'apparition du christianisme, et ils ne tardèrent pas à redevenir une fonction puremept civile.

On appelle Extrait mortuaire une attestation copiée du registre paroissial, certifiant le décès d'une personne, et indiquant ses noms, son âge, sa condition, sa religion, la date de sa mort et celle de son inhumation, le tout scellé et signé par l'autorité ecclésiastique compétente. Ce document a cessé d'avoir de la valeur là où les registres sont tenus par les officiers de l'état civil. Il se délivre sur demande et moyennant finance.

Mortuaire ymortuarium) se dit quelquefois aussi en style ecclésiastique, de la redevance due à l'Église sur la succession des ecclésiastiques, depuis que ceux-ci ont recouvré le droit de disposer de leurs biens par testament.

La Fête des morts, ou des Trépassés, pieux souvenir consacré à la mémoire de ceux qui ne sont plus, 2 novembre, rappelle les Expiations funèbres que les païens célébraient pour les mânes de leurs ancêtres et qui sont encore en Chine une fête religieuse.

MORUS. ou More lo Thomas, chancelier d'Angleterre, né 1480 à Londres, fils d'un juge du Banc de la reine, il fit ses premières études auprès du cardinal Morton et à Oxford. Plus tard il se tourna vers le droit, tout en continuant la rhétorique et la littérature classique. Il entra en relations avec Érasme, qui l'engagea à cultiver la satire dans le genre de Lucien. Son début fut un coup de maître; il publia 1516 un livre remarquable par l'élégance de la forme non moins que par la profondeur des pensées, et qui fut aussitôt trad. dans presque toutes les langues de l'Europe, l'Eutopie (De optimo rei-publicœ statu, deque nova insuld Eutopia). C'est un ouvrage allégorique dans le genre de la République de Platon, et une critique de la Constitution anglaise. L'auteur a découvert dans l'Océan pacifique une île, l'Eutopie, et il y voit régner la liberté religieuse, l'égalité des droits et des devoirs, la communauté des biens, etc. C'était très avancé pour son temps et, dans tous les cas, un singulier mélange de faux et de vrai. Le juriste n'en continua pas moins ses études de droit. iNommé membre de la Chambre des communes 1503, il se distingua par une opposition courageuse qui le rendit très populaire; mais devant l'hostilité de la cour il se retira dans le couvent des chartreux à Londres, où il passa 4 ans; il visita ensuite les univ. de Louvain et de Paris. De retour il fut nommé sous-shérif, puis juge de paix à Londres, et enfin, après avoir servi Henri VIII dans plusieurs négociations avec la France et les Pays-Bas, il fut appelé en 1529 aux fonctions de grand-chance-lier, en remplacement de Wolsey disgracié. Il remplit cette charge pendant 2 ans avec zèle et désintéressement; mais catholique ardent, après avoir persécuté les hérétiques, il refusa d'entrer dans la voie nouvelle inaugurée par le souverain et résigna les sceaux, 1532. L'irritation d'Henri VIII s'accrut par le refus de Morns

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d'approuver son divorce. Accusé de complicité dans la conjuration de la religieuse de Kent, il réussit à prouver son innocence, mais comme il refusa de se prêter à l'acte de succession de 1534, qui supposait l'illégitimité du premier mariage du roi, il fut enfermé à la Tour. L'année suivante, appelé ainsi que l'évêque Fisherà prêter le serment de suprématie qui faisait du roi le chef de l'Église, il refusa de nouveau, refus qui fut interprété comme un acte de haute trahison, et il eut la tête tranchée, 6 juill. 1535. Cet assassinat judiciaire était pour Henri VIII une nécessité politique, inspirée par la crainte de trouver sur son chemin l'instrument d'une redoutable réaction contre l'affranchissment du pays vis-à-vis de la tutelle romaine; il n'en pèse pas moins sur la mémoire du roi.

2° Samuel-Fréd.-Nathanaël, théol. luthérien, né 1736 à Laubau, Lusace, étudia à Leipzig et finit par s'y établir. D'abord précepteur, puis magistrat, il fut nommé en 1771 prof, de grec et de latin, en 1780 éphore des boursiers, en 1782 successeur d'Ernestî comme prof, de théol., enfin chanoine de Meissen et membre du Consistoire, f 4 nov. 1792. Ses nombreux ouvrages d'exégèse n'ont eu qu'une valeur passagère; son Epitome theol. christianœ, fort apprécié en son temps, a eu plusieurs éditions; mais ce qu'il a fait de mieux c'est son Développement des principes herméneutiques d'Ernesti, Hermeneutica, 2 vol. 1797.

MOSCHUS, Jean, moine du 6m* siècle, vécut sous Tibère H et sous Maurice. Né probablement en Palestine, il fut prêtre à Jérusalem, et demeura quelque temps sur les bords du Jourdain et dans la laure de Saint-Saba. Fuyant les malheurs de la guerre des Perses, il parcourut l'Égypte et les îles de la Grèce et f vers 620 à Rome. C'est dans cette ville qu'il écrivit et adressa à son ami et disciple Sophronius, qui fut plus tard patr. de Jérusalem, son Verger spirituel, ou récit de ce qu'il avait rencontré d'édifiant dans ses voyages et dans ses visites aux différents couvents. Il manque de critique, et raconte sans broncher toutes les histoires d'anges, de visions, de miracles qu'il a recueillies; mais il n'en est pas moins intéressant à consulter pour l'hist. des hérésies et de la vie monacale de son temps. Il a écrit aussi la vie de quelques saints qu'il a connus.

MOSELLANUS, v. Schade.

MOSER lo Marie, née 23 oct. 1550, fille du bailli Valentin Moser, perdit sa mère à 9 ans, épousa à 26 ans le pasteur Jean André, et le perdit en 1601. Elle vécut dès lors avec une stricte économie, instruisant elle-même ses sept enfants. Sa vie entière était consacrée à la bienfaisance et à l'évangélisation. En 1607 la duchesse Sibylle du Wurtemberg en fit son amie, et lui laissa à sa mort 1614 une pension viagère. Elle f après sept jours de maladie, 25 janv. 1631 à 8 h. du soir après avoir pris la cène, ayant conservé ses facultés et son activité jusqu'au dernier moment.

2° Moser, Jean-Jacques, auteur de plus de 1200 cantiques allemands, qui honorent le chrétien encore plus que le poète; né à Stuttgart 18 janv. 1701, il publia à 19 ans son premier ouvrage et enseigna le droit à Tubingue. Appelé à Vienne 1721 il fut sollicité de se faire catholique, mais refusa et revint 1727 dans son pays, où il remplit successivement plusieurs charges et missions, soit à Stuttgart même et à Tubingue, soit à Francfort sur l'Oder et dans la Hesse. Par la position loyale qu'il prit lors des démêlés du duc et des petits princes, il s'attira la colère du duc qui le fit jeter en prison sans jugement 1759; il n'en sortit qu'en 1764, fut réintégré dans sa charge et f 30 sept. 1785. Il a publié plus de 500 vol., presque tous relatifs au droit public en Allemagne, et il est considéré comme le créateur de la science du droit germanique.

3° Son fils Frédéric-Charles, né 18 déc. 1723. f 10 sept. 1798, a écrit sur les mêmes matières des ouvrages très estimés, et s'est montré à tous égards le digne fils de son père.

MOSHEIM lo Jean-Laurent (de), savant luthérien, né à Lubeck 1694, fils, disait-on, d'un laquais de la cour, devenu plus tard lieutenant, mais en réalité fils naturel du duc Ernest-Léo-pold de Holstein-Plo'én, neveu de sa protectrice la duchesse de Brunswick. Il se distingua de bonne heure, dès 1716, par ses qualités d'écrivain, notamment par des pensées détachées sur la poésie; en 1718 il était maître; en 1719 il donnait un cours à Kiel sur la logique et la métaphysique; en 1723 il était appelé comme prof, de théol. à Helmstâdt, et pour l'y fixer plus sûrement on y ajoutait la charge et les revenus d'abbé de Marienthal et de Michaelstein, une place au consistoire et l'inspection de toutes les écoles du duché. Il refusa plusieurs appels qui lui furent adressés, de Leipzig, Dantzig, Hol-stein et Finlande. Enfin en 1747, à la demande de l'électeur de Hanovre, il accepta la place de prof, de théol. et de chancelier de l'univ. àGôt-tingue, où il f 1755. Versé dans la connaissance de la littérature classique, il savait parfaitement l'anglais, le français et l'italien, el avait cultivé presque toutes les branches de la théologie. A la science il joignait un style élégant et pur et s'élevait souvent jusqu'à l'éloquence. En religion il avait pris une position intermédiaire entre l'orthodoxie, le rationalisme et le piétisme, et cherchait à faire accepter par les esprits cultivés les vérités positives de la révélation. Comme prédicateur il a exercé de l'influence par la recherche et la beauté de la forme. Comme historien il s'est appliqué à être impartial, quoiqu'il ait été mal inspiré dans le mode de division qu'il avait adopté pour chaque siècle (événements heureux et év. malheureux); il avait un don particulier pour exposer l'hist. des dogmes. Il a laissé de nombreux ouvrages; les principaux sont des Sermons 1725, un Abrégé d'hist. ecclésiastique, latin 1726, allemand 1769; une Morale de l'Écriture 1735 1745, en 4 vol., qui obtint un immense succès et fut continuée par Miller; Études sur le christianisme avant Constantin; une trad. de VIntellec-tuai System de Cudworth, avec notes, et une foule de dissertations spéciales sur les sujets les plus divers, en particulier sur les rapports du platonisme avec le christianisme.

2° Mosheim, Ruprecht (de), d'une famille de Styrie, doyen du chapitre de Passau en 1522, auteur d'un écrit: De monarchid et renascentid christianœ fidei. Esprit bizarre et bien intentionné, voyant des erreurs dans toutes les sectes, trouvant le papisme, le luthéranisme, le zwinglianisme et l'anabaptisme également antichrétiens, il rêva de les purifier et de les réunir en une seule Église par le retour à Christ. Au colloque de Haguenau 1539 il discuta avec Osiander et Venatorius du côté évangélique, avec Nausea et Cochlâus du côté catholique. Ces derniers le convainquirent d'hérésie pour avoir attaqué la conduite du clergé, la mutilation du sacrement et le trafic des choses saintes; il fut jeté en prison et f 1544.

MOTET (motetto, un petit mot). On appelait primitivement ainsi un cantique spirituel à plusieurs voix, d'un caractère plus libre que le choral et n'appartenant pas à l'office liturgique. C'était d'ordinaire un texte de la Bible plus ou moins développé et arrangé pour un ou deux chœurs. Connu déjà avant Palestrina, qui ne le dédaigna point, il atteignit sa plus grande perfection avec Séb. Bach et Braun.

MOVERS, François-Ch., théol. catholique, né 1806 à Koesfeld, Westphalie, prof, de théol. à Breslau, f 28 sept. 1856. Connu surtout par trois ouvrages estimés sur les Phéniciens, leurs antiquités et leur religion, utiles à consulter pour les études bibliques.

MOZARABES (faux arabes, arabes mélangés, étrangers, inanthentiques); nom que les Arabes et les Maures d'Espagne donnaient aux chrétiens qui habitaient au milieu d'eux et auxquels ils avaient laissé le libre exercice de leur culte. Leur position les avait rendus assez indépendants vis-à-vis de Rome, pour qu'ils eussent une liturgie distincte. Cette liturgie mozarabi-que, que quelques-uns font remonter à Isidore de Séville, est probablement plus ancienne encore et offre plusieurs points de ressemblance avec la liturgie gallicane et avec celle de l'Égl.

d'Orient. C'est le concile de Tolède 633 tjui l'adopta pour l'Espagne, Jean X918 et Alexandre II 1064 la reconnurent; le cardinal Ximé-nès fonda môme à Tolède une chapelle pour le culte mozarabique, fit imprimer en 1500 pour la première fois cette liturgie, et deux ans après, le bréviaire qui en dépend. Elle se distingue des lit. romaines par 6 Dimanches de l'A vent, 2 jours de fête pour l'Annonciation, chaque jour une introduction différente au service de la messe, et surtout par un système de périco-pes plus complet, comprenant chaque fois une lecture des prophètes, une des apôtres et une des évangiles, faisant autant que possible un ensemble. Quant aux fêtes qui n'existaient pas à l'origine, il y a été pourvu plus tard. Le chant aussi, qui porte le nom (Veugénien d'après son créateur, l'archev. Eugène de Tolède, se distingue du chant grégorien par plus de mélodie et une plus grande place donnée au chant figuré.

MOHAMMED, v. Mahomet.

MUHLER, Henri (de), né 4 nov. 1812, fils de l'ancien ministre de la justice en Prusse, s'intéressa de bonne heure à toutes les questions de droit ecclésiastique, et publia en 1846 une Hist. de la Constitution ecclés. du Brandebourg, qui lui marqua dans l'Église une place distinguée. En 1848 il fut nommé membre et secrétaire du Comité du Kirchentag. et presque en même temps assesseur à la direction des cultes, de Berlin. En 1858, membre du Consistoire supérieur et du Conseil ecclésiastique, il montra combien il prenait à cœur les intérêts de l'Église, en s'adjoignant des hommes comme Wichern. Enfin 12 mars 1862 il fut nommé ministre des cultes. Défenseur ardent de l'Égl. officielle nationale, et en même temps de la foi évangélique, il mettait la vie religieuse au-dessus de tout et favorisa par son exemple toutes les tentatives entreprises dans ce but. On a pu lui reprocher des inconséquences, et peut-être trop d'indulgence pour le système catholique, mais ce qui lui a fait surtout des ennemis, c'est qu'il voulait que les choses de la religion fussent dirigées par des hommes religieux. Il f à Potsdam 10 mai 1874. Sa femme, Adelaïde de Gossler, était remarquablement douée et l'a peut-être trop laissé voir. On a de Mtlhler quelques cantiques.

MULLENS, Joseph, né 1820, missionnaire aux Indes depuis 1843, gendre de Lacroix 1845, revint en Angleterre en 1866, fut nommé secrétaire de la Soc. des missions, visita en 1870 l'Amérique, en 1873 Madagascar, accompagna en avril 1879 dans le district d'Ujiji deux jeunes missionnaires envoyés de Londres, et f d'une péritonite aiguë 10 juillet 1879 à Mpoua-poua entre Zanzibar et Ujiji.

MULLER lo Henri, né à Lubeck 18 oct. 1631, étbdia à Rostock et à Greifswald, fat pastenr à Rostock, prof, de grec, puis de théol., et surintendant. f 13 sept. 1675. Très orthodoxe, il était de l'école d'Arndt et cherchait dans le christianisme une source de vie religieuse et non de sèches formules. Il a publié des sermons, beaucoup de livres d'édification, une théorie de la prédication, une Harmonie chro-nol. de TA. et du N. T. etc.

2° Jean-Georges, frère du cél. historien, né 1759 à Schaffhouse; il étudia à Zurich et à Gôl-tingue, et devint docteur en théol.; mais sa santé ne lui permit pas de prendre la charge d'une paroisse. Il enseigna dès 1794 dans le collège de sa ville natale le grec, l'hébreu, puis l'encyclopédie et la méthodologie. Pendant la révolution il fut représentant du peuple, et membre du Petit Conseil, mais en 1809 il renonça à ses fonctions civiles et politiques, pour continuer son enseignement jusqu'à sa f 1819. Ses nombreux écrits ont presque tous un caractère apologétique. L'influence de son frère aîné, et celle de Herder dont il fut l'hôte et l'ami, ont donné à sa théol. une tendance pratique et humaine qui s'allie à une foi vivante à la révélation.

3o Pierre-Érasme, né 29 mai 1776 à Copenhague, étudia la théol. et la philos, dans plusieurs universités; prof, de théol. à Copenhague 1801; évêque de Seeland 1830; t 1834. Il a publié une Apologétique, une Morale et une Théol. chrétienne; une étude sur les Symboles, et plusieurs ouvrages sur les antiquités Scandinaves.

4° Adam-Henri, né' à Berlin 30 juin 1779, vint à Gottingue pour y étudier la théol., mais il y renonça pour se livrer à la philos, et au droit. Il retourna à Berlin en 1800, passa de là à Vienne 1805 où il se fit catholique; il rêvait la restauration du moyen âge; son idéal était l'État fondé sur la religion, ce qui le fit appeler un romantique parmi les politiques. En 1813 il entra au service de l'Autriche, prit part aux conférences de Carlsbad, fut anobli en 1826 et nommé conseiller aulique. f 1829.

5° Julius, un des théol. les plus considérables de notre temps. Né à Brieg 18 avril 1801, il étudia à Breslau, Gottingue et Berlin, d'abord le droit, puis la théologie. Pasteur en 1825 à Schœnbrunn et Rosen, il fut successivement prof, de théol. à Gottingue, Marbourg et Halle. Il enseigna la morale et la dogmatique dans une direction conciliatrice. Son principal ouvrage a pour sujet la Doctrine du péché. En 1846 à la Confér. de Berlin il lut un rapport dans le sens de l'Union, dont il fut toujours le représentant convaincu. En 1850 il fonda avec Néander et Nitzsch une Revue de la science et de la Vie chrétienne. Ses sermons ont pour titre: La Vie chrétienne. Il a publié aussi de nombreux articles dans les Studien und Kritiken. f 1878.

MUNIER, David, né 1798 à Genève, consacré en 1819, suffragant au Havre, lit un séjour à Paris, où il vit Cousin, entendit Talma et se lia avec la famille Monod. De retour à Genève il épousa Mlle Romilly, femme d'esprit et de cœur, portraitiste distinguée. Nommé pasteur à Chêne en 1825, prof, de théol. en 1826, recteur de 1832 à 1837, il fut chargé spécialement de la direction des étudiants français et se consacra à eux avec une bonté toute paternelle qui, malgré une certaine rudesse de formes, lui gagnait les cœurs et lui valut en 1865, à la demande de 168 pasteurs français, la croix d'honneur. Quoiqu'il lût ses sermons, Munier était un orateur de premier ordre; il n'improvisait pas facilement, à moins qu'il ne fût entraîné par son sujet. Sa taille élevée et bien prise, sa physionomie mobile et caractéristique, sa voix sonore et vibrante, ses yeux sympathiques, son geste expressif et correct, tout concourait à rehausser l'éclat de son éloquence. Il a longtemps exercé sur l'Église, l'Académie et même sur les Conseils du pays une influence incontestée. En religion il fut jusqu'en 1847 un des chefs du parti dit libéral, mais touj. en coquetterie personnelle avec les hommes du réveil, dont il n'a jamais méconnu la valeur. Quand le libéralisme versa dans la négation pure, il s'en sépara avec éclat, et se joignit à l'Union nationale évangélique. Fondateur de plusieurs œuvres religieuses (Protestants disséminés, etc.), il fut aussi, avec Bartholony, l'un des fondateurs du Conservatoire de musique. Travailleur infatigable, habile organisateur, on peut dire que pendant bien des années il fut mêlé à tout ce qui se faisait à Genève et, peut-être, qu'il embrassa trop de choses. Il n'a laissé que quelques sermons, des articles de journaux et des brochures de circonstance. Sa fin fut le digne couronnement d'une vie consacrée au service du Maître. Atteint d'une fluxion de poitrine à l'issue des conférences pastorales de Lausanne, il put revenir dans sa famille, mais bientôt le délire s'empara de lui, délire tout religieux, qui le transportait dans le monde des esprits. Il ne savait plus qu'une chose, c'est qu'il était chrétien et pasteur. Et quand, au matin, il entendit rouler la voiture du docteur, il murmura: C'est le chariot d'Élie, qui vient me prendre. Ce fut sa tin. 19 oct. 1872.

MUNOZ, antipape, v. Clément VIII.

MUNSCHER, Guill., né 11 mars 1766 à Her$-feld, dont son père était métropolitain. Il lf» remplaça, vint ensuite à Marbourg comme prof, de théol. et fut nommé membre du Consistoire et inspecteur réformé dans la Hesse. f 28 juill. 1814. Auteur d'un Abrégé d'Hist. ecclés.. il a étudié l'Hist. des dogmes au point de vue rationaliste, et a rendu surtout des services en relevant dans les campagnes l'instruction primaire; il a même fondé à Marbourg un séminaire pour les régents de campagne. Ses fils l'ont suivi dans cette voie. Son petit-fils. Dr théol., a publié dans la Revue de Schenkel un bon travail sur les Principes de la Réformation.

MUNSTER. Dérivé du latin monasterium, monastère, ce mot désignait d'abord une abbaye, puis l'église de l'abbaye, et il finit sous différentes formes (Moutier, Monetier, Montreux?) par devenir un nom propre. Il servit entre autres à désigner vers 1090 une ville des États prussiens, qui s'appelait alors Mimigardevorde, et qui avait déjà été constituée en évéché sous Charlemagne, avec Luidger pour premier évêque. Sa circonscription diocésaine fut modifiée à diverses reprises par les événements politiques, notamment à l'époque de la Réformation. Le belliqueux évêque Bernard de Galen 1651-1678 enleva à la ville tous ses droits et privilèges pour la soumettre à l'autorité épiscopale, mais cela dura peu. Parmi les prélats qui ont illustré, de différentes manières, cette ville auj. tout à fait prussienne, il faut compter Franç.-Fréd. de Furstenberg, 1729-1810, qui fonda des gymnases et agrandit l'univ., avec l'appui du cercle Gallitzin, des Katerkamp, des Droste-Vis-chering, des Overberg, etc. Le triomphe des anabaptistes 1532-1535 forme l'épisode le plus tragique de l'histoire de cette ville. La Réformation avait pénétré à Munster dès 1524, et grâce à l'heureuse influence du prédicateur hes-sois Bernard Rottmann, les évangéliques en étaient venus en 1529 à pouvoir prêcher dans 6 églises. En 1532 arrivèrent de Hollande les anabaptistes proscrits; ils avaient pour chef Bernard Knipperdolling, bourgeois de Munster, Jean Matthiesende Harlem, et Bockhold q. v.; Rottmann, après les avoir d'abord combattus, finit par se joindre à eux. Les élections communales de 1534 leur donnèrent la majorité; Knipperdolling fut élu bourgmestre; tous les non-croyants furent bannis de la ville, février 1534; la communauté des biens fut proclamée, ainsi que la polygamie, et l'anarchie régna en souveraine. Le prophète Matthiesen tomba dans une sortie. Bockhold lui succéda, et il fallut l'arrivée de Philippe de Hesse pour venir à bout de cette forteresse, qui soutint le siège près d'un an et qui ne succomba que devant la trahison. Rottmann périt sur le champ de bataille; Boc-kold et ses amis Knipperdolling et Krechting furent pris, mis à mort de la manière la plus cruelle, et leurs cadavres exposés dans des cages sur la tour de l'église Saint-Lambert. Le culte cathol. fut rétabli, mais il fallut tout le zèle des évêques, aidés des jésuites, pour extirper entièrement le protestantisme de Munster, 1588.

MUNSTER, Sébastien, né 1489 à Ingeiheim. élève de Pellican à Heidelberg, le suivit à Tubingue, où il entra dans l'ordre des franciscains. Avantageusement connu par la publication d'un Dictionn. et d'une Grammaire hébr., et d'une Gramm. chaldéenne, la première qui eût paru, il embrassa la foi réformée 1529, enseigna la théol. à Heidelberg et fut bientôt appelé à Bâle. Par modestie il refusa le grade de docteur, se fil dispenser de l'enseignement théol. et se borna à enseigner les mathématiques et la philologie. Il f de la peste 23 mai 1552. Son épitaphe l'appelle l'Esdras et le Strabon de l'Allemagne. Il a écrit en effet une Cosmographie estimée, et en théol. une trad. de l'A. T. en latin, une Bible hébr. avec les commentaires rabbiniques, un Comment, sur saint Matthieu, un sur l'ép. aux Hébreux, et des traductions de Jossiphon, d'Élie le Lévite, de Ptolémée, etc.

MUNTER lo Balthasar, né 1735, prof, à léna 1757, chapelain à Gotha et surintendant à Tonna 1763, fut nommé prédicateur à Copenhague 1765, et f 1793. Auteur de nombreux cantiques, il est connu surtout par la conversion du comte de Struensee et parce que c'est lui qui le prépara à la mort.

2° Son fils Fréd.-Christian-Ch.-Henri, né 1761 à Gotha, étudia à Copenhague et à Gôttingue, et fit un fructueux voyage en Italie, d'où il rapporta le livre des Statuts des Templiers, publ. 1794, et un exemplaire de la trad. copte de Daniel, avec de nombreuses impressions de voyage, notamment sur la Sicile. Nommé 1788 prof, de Ihéol. à Copenhague, il se fit bientôt par ses travaux une réputation européenne et ftit reçu membre d'un grand nombre de sociétés savantes. Il s'occupa aussi avec zèle du Collège missionnaire et de l'Asile des orphelins. Évêque de Seeland depuis 1808, il f 9 avril 1830. Ses principaux ouvrages sont un Manuel de dogmatique, une Hist. ecclés. du Danemark et de la Norwège, une Étude sur la religion des Carthaginois, un travail sur les signes et représentations symboliques des premiers chrétiens, etc. Il collabora aussi à la revision de la version danoise du N. T.. ordonnée sur sa demande par le roi Frédéric VI.

MUNZER, ou Muntzer, Thomas, né 1490 à Stollberg dans le Hartz (ou à Zwickau?) Il étudia probablement à Leipzig la théol., devint maître ès arts, instituteur à Brunswick, confesseur des bernardines au couvent de Beutiz près Weissenfels, prédicateur de l'égl. Sainte-Marie à Zwickau, ne s'arrêtant jamais longtemps au même endroit. Là il entra en rapports avec un tisserand exalté, Nicolas Storch, et il se mit â lui débiter comme siennes des idées empruntées à des passages mal compris de Joachim de Flore, de Suson, de Tauler, sur la communion immédiate de l'homme avec Dieu, se manifestant par des visions, des songes, des révélations, indépendamment de l'Ecriture sainte. Partant de ces soi-disant expériences de la < lumière intérieure, • il en vint à demander un changement radical de toutes les relations et institutions, et à prêcher la réforme non seulement dans le domaine religieux, mais encore dans le domaine politique et civil. Forcé de quitter Zwickau à la suite d'une émeute provoquée par une altercation qu'il eut avec son prophète Egranus, il se rendit à Prague, puis à Wittenberg où il se lia avec Carlstadt; fut en 1523 nommé pasteur à Alstedt, où il essaya d'introduire ses idées, une messe catholique allemande, et où il chercha par de nombreux petits écrits à se faire des partisans pour la suppression du papisme et en général de toute espèce d'autorité. Il organisa ses amis en société secrète. Une image miraculeuse de la Vierge à MUhlderbach ayant été détruite, il en fut rendu responsable et dut s'enfuir. Il se retira à Mulhausen, Franconie, dont il fit dès lors son quartier général; s'unit a l'ex-moine cistercien Henri Pfeiffer, publia contre Luther une foule de violentes brochures, attaquant la Parole écrite, le baptême d'eau, tout ce qui n'était que forme. Pour se créer des alliances au dehors, il visita Nuremberg et la Suisse, vit QEcolampade à Bâle, s'aboucha avec les anabaptistes suisses tels que Balthasar Hub-meier, et avec les paysans mécontents de la Souabe. De retour à MUhlhausen en 1525, ilen lit chasser les ecclésiastiques, se fit nommer pasteur à leur place, groupa autour de lui 30,000 fanatiques, fit élire un nouveau conseil, détruisit et pilla les couvents, sema la révolte dans toute la Thuringe, et commit tant de désordres, menaçant juqu'au comte de Mansfeld, (jue les princes voisins, Philippe de Hesse, Georges de Saxe et Henri de Brunswick se décidèrent à s'en débarrasser. La rencontre eut lieu près de Frankenhausen; les paysans fanatisés furent battus; MUnzer fut découvert dans une cachette et exécuté 1525. Il ne mourut pas en brave; par crainte de la mort il demanda la communion d'après le rite catholique, et il était si ému qu'il ne put pas seulement réciter le Credo.

MUPHT1, ou Mufti, fonction qui, chez les mahométans, correspond à celle de scribe dans le N. T. C'est l'homme qui expose, et explique la loi, c.-à-d. le Coran. Le grand-muphti, ou Sheikh-ul-Islam, chef des élus, a la direction supérieure du culte et de la loi. Comme rang il vient immédiatement après le grand-vizir. Il est nommé par le souverain, qui peut aussi le destituer.

MUP

MUBALT, Béat-Louis (de), né à Berne 1665, de la famille locarnaise des Muralto, quitta de bonne heure la carrière militaire, épousa 1699 Marguerite de Watteville, se sépara de l'Égl. officielle à cause de la sécheresse du dogmatisme régnant, et fut banni 15 févr. 1701. Il se retira à Colombier, Neuchàtel, où il resta jusqu'à sa f 20 nov. 1749. Littérateur, moraliste, mystique, il a laissé quelques ouvrages estimés: Lettres sur les Anglais et les Français, les Voyages, l'Esprit fort, l'Instinct divin recommandé aux hommes, et surtout ses Lettres fanatiques où l'illuminisme le dispute au rationalisme. Voltaire et Sainte-Beuve en parlent avec éloge.

MURATORI, Louis-Antoine, né 21 oct. 1672 à Vignola, duché de Modène, fut élevé d'abord au collège des jésuites, puis à l'université. Célèbre de bonne heure par son érudition, il fat à

22 ans nommé conservateur de la biblioth. am-brosienne, de Milan. Avant de quitter Modène

11 prit ses titres de docteur en droit, et reçut k Milan les ordres sacrés. 11 commença bientôt la publication de vieux manuscrits, latins et grecs, Ànecdota latina, Anecd. grœca, etc. Rappelé à Modène par les instances du duc 1700, il fut nommé bibliothécaire-conservateur des archives de la ville, et doyen de l'égl. Sainte-Maria de Pomposa, bénéfice qu'il conserva jusqu'à sa f

23 janv. 1750. 11 a énormément écrit, sans parler même des collections qu'il a réunies. Ses principaux travaux sont les Annales d'Italie, en

12 vol.; son Recueil des sources pour l'hist. de l'Italie, sous le titre de: Rerum italic. $cript€*re$ prœcipui ab anno 500 ad 1500; les Antiquités italiennes du moyen âge, avec 75 dissertations critiques et historiques, parmi lesquelles le canon qui porte son nom; v. plus bas. Il chercha, dans une série de lettres et sous le pseudonyme de Lamindo Britanio, à stimuler le zèle scientifique et l'amour des études en fondant une espèce de République des Lettres, mais il ne réussit pas complètement. Sa théologie avait de la largeur, comme on le voit par ses traités: De la modération dans les affaires de la religion 1714, et des dangers de la superstition 1740, où il combat la doctrine de limmac. conception. Attaqué par les jésuites, il leur répondit avec vivacité sous le nom de Ferdinand Valdesius. mais il se les concilia en écrivant l'histoire de leur mission au Paraguay. Ses efforts constants pour démontrer que le catholicisme n'était pas hostile à l'esprit moderne (tendance qui parut surtout 1747 dans son traité Délia regolata dt-vozioni, par L. Britanio), le firent suspecter d'hérésie, et il ne fallut rien moins pour y échapper que la protection de Benoît XIV et celle de Ganganelli. — On désigne sous le nom de Canon de Muratori un fragment trouvé par lui dans un mss. de la Biblioth. de Milan, et publié dans ses Antiquités itaJ. 3*® vol. Ce fragment est important, parce qu'il se donne comme ayant été écrit peu de temps après le Pasteur d'Hermas, c.-à-d. vers le milieu du 2m« siècle, et parce qu'il énumère quels étaient à cette date les livres du N. T. reconnus comme authentiques; on y trouve entre autres l'Apocalypse, 13 Épîtres de Paul, 2 de Jean; l'Évang. de Luc est appelé le 3®«, ce qui suppose les deux premiers. Mais ce qui ôte de la valeur à ce document, c'est qu'il est anonyme; on ne connaît pas l'autorité que pouvait avoir son auteur, et la date elle-même n'est pas sûre. En outre il est écrit en mauvais latin; le texte en est corrompu, et plusieurs phrases sont inintelligibles. Quelques auteurs pensent que ce texte latin n'est que la traduction d'un original grec.

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MUR

MURILLO, Bartholomé, peintre de Vierges et d'anges-enfants, est né à Séville en 1613 ou 1617, d'un père chirurgien, c.-à-d. barbier. Il fit longtemps des images pour les foires, fut présenté par Vélasquez à Olivarès, puis recommandé au roi. De retour à Séville en 1645, il se mit à travailler pour les couvents, et raconta en 11 toiles l'hist. de l'ordre séraphique pour les moines de Saint-François; en 1652 unelmm. conception; en 1656 un saint Antoine, saint Isidore et saint Léandre, et fonda à Séville une académie de peinture, dans le but « d'élever l'homme et de glorifier Dieu. » f 3 avril 1682. Profondément religieux il a mérité le surnom de peintre du ciel. Un monument lui a été élevé en 1858. Il a fait des tableaux par centaines, entre autres plus de 20 Imm. conceptions, dont la plus célèbre, de 1678, a été achetée pour le Louvre 613,000 fr. Son talent est mystique, vaporeux et profond. Il a aussi travaillé le genre et le paysage.

MURNER, Thomas, né 1475 près de Strasbourg, f vers 1537, probablement à Heidelberg. En 1499 il entrait dans l'ordre des franciscains. Il se fait recevoir à Paris maître ès arts, à Cra-covie bachelier, en 1519 docteur en théologie. En 1524 il quitte le cloître pour se joindre aux chanoines réguliers. Il voyage beaucoup et va jusqu'en Italie, à Bologne et à Venise. Esprit satirique, mais déréglé, il attaque les vices de son temps, surtout ceux des moines et du clergé, dans une série de brochures piquantes et humoristiques. Il traduisit de Luther la Captivité de Babylone et la lettre à Henri VIII, mais ne s'en montra pas moins l'adversaire de la Réforme. Il a raconté aussi, mais à sa manière, l'hist. du Colloque de Baden, 1526, auquel il avait assisté.

MURRAY, jeune chanoine écossais qui dans une assemblée du clergé des deux royaumes tenue en 1176 s'opposa avec force aux prétentions de l'archev. d'York. Celui-ci réclamait la suprématie ecclésiastique sur tout le royaume. L'assemblée entraînée par l'éloquence de Murray en appelle à Rome. Une bulle pontificale déclara l'Ecosse indépendante de toute autorité ecclésiastique, autre que celle du pape et de son légat.

MUSAEUS, ou Musée, lo Jean, théol. luthérien, né 7 févr. 1613 à Langenwiesen, Schwartz-bourg, où son père était pasteur; il étudia à Erfurt et Iéna, et fut nommé prof, d'hist. 1642, et de théol. 1646, à Iéna, f 1681. Il compte avec Gerhadt et Calixte parmi les théol. les plus éminents et les plus instruits de son époque. Il a publié de nombreux écrits sur la dogmatique, Distinguant la religion et la théologie, il a toujours défendu les droits de la liberté dans les recherches scientifiques, et s'est opposé, avec les théol. de Iéna, aux prétentions de Calov qui voulait leur faire signer le Consensus repe-titus. Ayant consenti, ainsi que l'université, à déclarer, pour plaire au duc, qu'il n'approuvait pas toute espèce de syncrétisme, il précisa sa position 1680 dans une adresse à Calov, à laquelle celui-ci répondit avec violence.

2o Pierre, fr. du précédent, né 1620, f 1671. Professeur de philos, et de théol. à Rinteln depuis 1648, plus tard à Helmstâdt et à Kiel; partageant les vues conciliantes de son frère, il prit part avec son collègue Henschen au colloque de Cassel 1661, où il fut reconnu que les divergences entre luthériens et calvinistes n'étaient pas de nature à les empêcher de fraterniser. Les orthodoxes stricts lui en voulurent. Par la suite il se montra un peu moins favorable au syncrétisme.

MUSÂPH, prières qui dans le culte juif du sabbat et des jours de fêtes, remplacent auj. les sacrifices ordonnés par la loi ancienne, comme les prières du matin et du soir remplacent les anciens sacrifices mosaïques.

MUSCULUS lo André, de son vrai nom Meu-sel, né 1514 à Schneeberg, Saxe, étudia à Leipzig. Frappé par la lecture des écrits des réformateurs, il se convertit à la foi évangélique, vint en 1538 à Wittenberg où il s'attacha à Luther, dont il resta l'ami toute sa vie. A la recommandation d'Agricola, il se rendit à Francfort sur l'Oder, où il fut successivement chapelain de l'égl. des franciscains, prédicateur de la cour et professeur. Plein d'énergie et de conviction, il avait la parole rude et parfois vulgaire; il se montra trop passionné dans les luttes qu'il eut à soutenir, soit avec les magistrats à propos des biens ecclésiastiques, soit avec ses collègues, et notamment avec Prœto-rius, dont les vues modérées se rapprochaient davantage de la tendance de Mélanchthon. Il soutenait entre autres que la loi est utile pour amener à la repentance quand on n'a pas la foi, mais qu'elle n'a plus de valeur pour le croyant.

2° Wolfgang, en allemand Mtisslin, ou Meuss-lin, un des théol. réformés les plus considérables du 16*** siècle, avec Calvin et Vermigli. Né à Dieuse, Lorraine, 8 sept. 1497, de parents pauvres, il fréquenta les écoles de l'Alsace et finit, à cause de sa belle voix, par être reçu dans un couvent de bénédictins près de Lixheim; il y étudia d'abord la musique et la littérature et se mit ensuite à la théologie. Amené à la Réforme par les écrits de Luther, il quitta son couvent en 1527, épousa la nièce de son abbé, avec laquelle il vécut si pauvrement à Strasbourg, qu'il fut obligé de travailler de ses mains pour se procurer le nécessaire. Enfin après avoir été quelque temps diacre de la cathédrale, il fut appelé à Augsbourg comme prédicateur. Dans cette nouvelle position il déploya tant de zèle et d'activité que la ville presque entière fut bientôt gagnée à la Réforme et qu'en 1537 il put prêcher à la cathédrale. La proclamation de l'Intérim, contre lequel il protesta, le décida en 1548 à résigner ses fonctions. Il se retira à Zurich, où il corrigea les épreuves chez son éditeur, et en 1549 il fut nommé prof, de théol. à Berne, où il f 30 août 1563, après avoir refusé de nombreux appels à l'étranger. Il avait assisté aux colloques de Wittenberg 1536, Worms 1540 et Ratisbonne 1541, mais sans réussir à y faire prévaloir une tendance pacificatrice. Ses vues sur les points essentiels étaient celles des théologiens de Strasbourg; plus tard elles s'accentuèrent dans le sens réformé. Il a publié des Lieux communs, souvent réimprimés, et de nombreux comment, sur des livres de la Bible. — Six de ses fils furent prédicateurs réformés; son dernier descenilant connu est David Mtisslin f 1821, dont les sermons ont de la réputation.

MUSIQUE d'église, v. Hymnes.

MUTIEN, Rufus Conrad (proprement Muth ou Mudt), né 1471 à Hombourg, Hesse, d'une famille distinguée, étudia à De venter et à Er-furt. Devenu maître ès arts en 1492, il visita l'Italie, se fit recevoir docteur en droit canon à Bologne et revint en Allemagne 1502. Placé d'abord à la cour de Hesse, il quitta bientôt 'cette position pour un petit canonicat à Gotha, où il ne tarda pas à devenir le centre d'un grand mouvement humaniste. Il se lia spécialement avec le cistercien Henri Urbain et avec Georges Spalatin, et il continua d'entretenir des relations littéraires avec son ancien condisciple Érasme. Hostile aux institutions ecclésiastiques, assez indifférent au christianisme historique, dont il croyait pouvoir garder l'esprit sans en accepter la lettre, il salua avec joie l'apparition de Luther, mais ne se joignit pas à la Réforme, dont il ne comprenait pas le principe moral, et où il crut entrevoir le danger d'un retour à la barbarie). Il en revint finalement aux pratiques scrupuleuses de l'Église, se retira de tout pour vivre dans la retraite et dans la pauvreté, et f 1526. Plusieurs de ses lettres sont à la biblioth. de Francfort; quelques-unes ont été publiées.

MUTONIS, Jean, moine jacobin, de Grasse, Provence, vint à Genève après sa conversion, fut envoyé à Nîmes comme pasteur 1561, mais se fit renvoyer à cause de ses rapports désagréables avec son collègue Mauget. Chargé par les protestants du Languedoc de porter leurs plaintes auprès du roi, il le fit avec courage. Mais Dam ville le fit arrêter et pendre sans procès près de Bagnols, 14 févr. 1564, pour plaiiv à la dame de Montfrin (de Lers). Mutonis mourant ajourna cette dame dans l'an devant Dieu; elle mourut en effet peu après, frappée de la foudre à Nîmes.

MYCONIUS lo (Geisshtisler) Oswald, né 1488 à Lucerne, étudia sous Rubellus à Rottweil el à Berne, sous Érasme à Bâle 1510. Il aimait l'enseignement et fut successivement maîtiv d'école à Zurich 1516 et à Lucerne 1519. Renvoyé de là à cause de ses relations avec Zwingle et avec les évangéliques, il fut appelé au couvent d'Einsiedeln où il ne fit que passer, et de nouveau à Zurich, où il devint le collaborateur de Zwingle, et où le Conseil, en lui confiant la direction de l'école, le chargea aussi de donner pendant la semaine des leçons bibliques. Après la bataille de Cappel 1531, il fut appelé à B&le comme diacre de l'égl. Saint-Alban, puis prof, à l'université, et à la mort d'OEcolampade, son successeur et antistès, chargé de diriger le mouvement de la Réforme. Il présida à la publication de la Ire Confession de Bâle, et se rallia dans l'intérêt de l'union, à la 2^6, dite Conf helvétique 1536. Sa largeur et son esprit de tolérance, notamment vis-à-vis de la doctrine luthérienne de la Cène, le rendirent suspecl auxzwingliens rigoureux. II donna sa démission de professeur en 1541, n'ayant pas voulu accepter le titre de docteur, f de la peste 14 oct. 1552. On a de lui plusieurs Comment, et un* notice sur la Vie et la mort de Zwingle.

2° (Mekum) Frédéric, né 26 déc. 1491 à Lieh-tenfels, Franconie. Élevé à l'école d'Annaberg. il demanda en 1510 à Tetzel une indulgence gratuite, étant trop pauvre pour la payer; elle lui fut refusée. Dans l'intérêt de son salut, il entra alors chez les franciscains, passa d'Anua-berg à Leipzig, puis 1512 à Weimar, étudiant avec soin les scolastiques, et fut ordonné prêtre en 1516. Les thèses de Luther l'amenèrent à la Réforme, mais il fut retenu 7 ans au couvent, dans une dure captivité. Il réussit enfin à s'échapper et s'enfuit à Nuremberg 1524. Il fût aussitôt nommé prédicateur à Zwickau, puis a Gotha. Son activité était prodigieuse. C'était au plos fort de la guerre des paysans. Non seulement il introduisit et organisa la Réforme, mais encore il fonda le célèbre Gymnase de Gotha, et remplit d'importantes missions au dehors, visites d'églises et d'écoles, négociations, colloques, etc. En 1527 il accompagne à Dusseldorf le prince héritier; en 1538 il fit partie de la députation envoyée par le duc en Angleterre dans l'intérêt de la Réforme. Après la mort du duc Georges-le-Barbu, il concourut avec Cruci-ger, Pfeffinger et Balthasar, à établir la Réforme dans les duchés saxons, notamment à Leipzig, 1539. Il était très lié avec Luther et Mélanchthon, qui le tenaient en grande estime, f 7 avril 1546. On a de lui une Hist. de la Réformation, publ. 1715 à Gotha par Sal. Cyprien, et fort appréciée.

MYLIUS lo Georges, théol. luthérien rigide, né à Augsbourg 1548, nommé pasteur à Augsbourg 1571, surintendant et directeur du collège; il dut abandonner sa position parce qu'il se refusait à l'introduction du calendrier grégorien . Il fut très bien reçu à Ulm, mais appelé 1585 à Wittenberg comme prof, de théol. il s'y rendit et y resta jusqu'à sa f 28 mai 1603, sauf un court intervalle pendant lequel, la tendance philippine de Christian ayant prévalu, il se retira à Iéna. Il a laissé quelques Comment, et ouvrages dogmatiques.

2° Georges, pasteur à Brandebourg, près Kô-nigsberg, + 1640; auteur de poésies et de cantiques estimés.

MYSTÈRES, mot dérivé du grec mu-étn, fermer (la bouche, les yeux); il désigne les choses cachées, soit à l'intelligence en général, soit à certaines personnes ou classes d'hommes, par opposition à d'autres. Il se prend dans 3 sens différents:

lo Les mystères de la religion sont les vérités qui par leur nature même dépassent les bornes et la portée de notre intelligence: l'éternité dans le temps, l'infini dans l'espace, Dieu, sa nature, sa toute-présence, nos rapports avec lui, son amour qui est appelé le mystère de la piété; le mal, l'origine du mal, les problèmes relatifs à la liberté humaine, etc.

2° Chez les anciens peuples et dans les anciennes religions, il y a toujours eu, à côté des cérémonies publiques du culte, des cérémonies secrètes destinées seulement aux initiés (aux raystes), et qui avaient pour but de leur faire comprendre, sous une forme dramatique et souvent effrayante, soit la grandeur de la divinité dont on célébrait la fête, soit le contraste de la vie et de la mort, soit encore l'importance de telle ou de telle tradition relative au culte. La plupart de ces mystères se terminaient en orgies. Les plus célèbres sont ceux d'Éleusis et de Samothrace chez les Grecs, de Bacchus chez les

Romains, d'Isis en Égypte, de Brahma aux Indes. Les gnostiques ont essayé de les faire passer dans le christianisme.

3° Au moyen âge on a donné le nom de mystères à des représentations dramatiques religieuses, qui devaient être à la fois un divertissement et un enseignement populaire, à une époque où l'imprimerie n'existait pas et où la prédication était rare et médiocre. Le culte catholique est en général l'image symbolisée de la rédemption, mais pour le comprendre il faut savoir la langue et avoir la clé des symboles. Peu de personnes en étaient capables pendant l'épaisse nuit qui sépare les temps de Charlemagne de ceux de la Renaissance. Le clergé, pour populariser les faits bibliques, les mit en vers, les découpa en actions et en scènes, et les représenta dans des solennités qui attiraient les foules de bien des lieues à la ronde; on a compté quelquefois jusqu'à 50.000 spectateurs. Une estrade de planches, dressée devant l'église, servait de théâtre; l'église elle-même était le foyer; les décors étaient primitifs; les rôles étaient joués par des prêtres; Dieu, s'il avait à intervenir, n'était représenté que par une voix, et ne paraissait pas. Le sujet du drame variait suivant la circonstance; à Noël on jouait la Nativité; pendant la semaine sainte, la Passion, ou quelques-uns de ses épisodes. En d'autres temps on jouait d'autres scènes bibliques, le paradis, la chute, etc. La pièce était presque toujours en vers, et quelquefois assez longue; on en cite dont la représentation durait plusieurs jours; les récitatifs alternaient avec les chœurs et les antiphonies. Il est évident que c'était un moyen d'instruction religieuse pour des populations incultes, mais il est clair aussi que ce moyen était imparfait et laissait beaucoup à désirer. Les tableaux vivants et les dialogues ne respectaient pas toujours l'histoire, ni la couleur locale, et malgré le sérieux qu'on y mettait, certaines scènes prêtaient à rire. Peu à peu le clergé demanda le concours des laïques, et finalement ce fut sur ces derniers seuls que retomba toute la charge. Ils en usèrent plus librement et se permirent des additions, des changements, parfois des facéties, qui altérèrent le caractère primitif du mystère. En 1250 Innocent III interdit aux prêtres de prendre part à ces représentations, du moins en public, car on voit encore au 15®« siècle des ecclésiastiques jouer des scènes avec leurs élèves. Le carnaval eut des sujets de drame spéciaux, et généralement gais et humoristiques; ils servirent de transition entre le mystère et la comédie proprement dite qui, lors de la Réforme, après avoir commencé par des imitations du grec et du latin, ne tarda pas à s'émanciper pour vivre de sa vie propre. Les mystères, tout en devenant pins rares, ont continué en certains lieux jusqu'à la fin du siècle. On en a encore joué un à Valenciennes en 1807. Le seul que Ton connaisse aujourd'hui est celui de la Passion, qui se joue tous les dix ans à Oberammer-gau, q. v.

MYSTIQUE, mysticisme. On désigne habituel-ment ainsi, non la recherche de la dévotion, mais cette disposition naturelle à certaines âmes et à certaines intelligences, à se rapprocher de Dieu directement, en dehors de toute révélation et de toute forme de culte. L'âme a un tel sentiment de ses rapports intimes avec Dieu, qu'elle n'éprouve alors aucun besoin de directions; sa lumière intérieure lui suffit; elle voit Dieu, elle s'entretient avec Lui, elle s'absorbe en Lui et II résume tout, dogme et morale. Dans cet état l'âme perd de vue la distinction entre sa personnalité et celle de Dieu; l'idée même de la personnalité s'efface, et un panthéisme inconscient risque de remplacer la notion de Dieu. D'un autre côté, comme le mystique attache la plus grande importance à ses émotions, à ses impressions, à ses expériences personnelles, la raison perd tous ses droits sur lui, et il devient facilement le jouet de son imagination; de là à la vision, à l'enthousiasme, il n'y a qu'un pas; il verra des mystères partout et il s'attachera aux rêveries extraordinaires. Il sera tout prêt à devenir un fanatique, ne connaissant plus ni la chair, ni le sang, ni le temps, ni l'histoire. Ce détachement complet des choses terrestres se traduira par une complète indifférence pour tout, pour l'Église comme pour la patrie ou pour la famille, et aboutira au quiétisme, avec une morale généralement assez sévère et une tendance à l'ascétisme. Cependant le contraire peut se produire aussi, car, sous prétexte que la chair n'est rien et que les chose? extérieures n'ont pas d'importance, on a vu des mystiques se laisser aller à beaucoup de désordres pour éviter les troubles de la lutte, en affirmant que ces débauches momentanées de la matière n'altéraient en aucune façon la sérénité de leur vie spirituelle intérieure. On a parfois confondu le mysticisme avec le piétisme; tous les deux en effet mettent la doctrine au-dessus de la question morale, et tous les deux professent pour les formes ecclésiastiques une indifférence, au moins relative; mais tandis que le mysticisme part de l'idée de la communion naturelle entre Dieu et l'homme, le piétisme dans presque toutes ses manifestations suppose au contraire que l'homme est rejeté de Dieu par nature et qu'il doit chercher à s'en rapprocher par la foi et la pratique des bonnes œuvres. Le mysticisme n'appartient pas au christianisme exclusivement; il est partout la réaction naturelle contre le dogmatisme ou contre un formalisme exagéré. Les esséens et les thérapeutes étaient des mystiques protestant contre le ritua-lisme des pharisiens; la cabale est une sorte de mysticisme. La religion de Boudha et l'islam ont également leurs mystiques. Chez les chrétiens, les anciens moines, les solitaires de TÉgypte, ceux du mont Athos; les montanistes, les euchites, les cathares; plus tard les franciscains, ont représenté cette disposition de l'esprit. Amaury de Chartres, David de Dinant, l'abbé Joachim de Flores lui ont donné au moyen âge une puissante impulsion. Depuis la Réformation le catholicisme a eu encore ses Mo linos, Fénelon, M»e Guyon, Silesius, tandis que le protestantisme, sans parler des anabaptistes et des disciples de Schwenkfeld dont il a tenu à séparer sa cause, a eu ses moraves, ses quakers, les labadistes, Pierre Poiret, Jane Leade, Bôhme, Jung Stilling, etc. — On appelle aussi mystique en théologie, par opposition soit à la scolastique orthodoxe, soit à la philos, spéculative, l'école inaugurée par Guill. de Cham-peaux sur les principes du faux Denys FAréo-pagite, et qui a eu pour principaux représentants Hugues et Gautier de Saint-Victor, Richard, Bonaventure. Gerson chercha à la concilier avec la scolastique. Elle prétendait, avec saint Bernard, être dans la pleine tradition de l'Église, Sa tendance se résumait dans ces deux pensées: s'élever à Dieu, c'est descendre en soi-même; et: On ne connaît réellement Dieu que dans la mesure où on l'aime. L'Allemagne du moyen âge a eu son école, préparée par Ruprecht de Deutz, fondée par le dominicain Eckhard, illustrée par Tauler et Suson; elle a produit vers la fin du 44me siècle la Théologie germanique, publiée pour la première fois par Luther, et qu'on a attribuée à tort àTauler. Très spéculative, elle est en même temps pratique et s'est rendue populaire par la prédication. Patronnée par les Amis de Dieu et les Fr. de la vie commune, elle est enthousiaste chez Ruysbrook et ascétique chez Thomas a Kempis. Par son opposition à la scolastique et par la part qu'elle fait à l'individualisme religieux, elle a préparé la Réformation. Le père de la mystique allemande moderne est Bôhme. Le mysticisme catholique moderne (Fénelon, Bourignon) est plus ascétique et édifiant que spéculatif. La nouvelle théologie, en appuyant sur la nécessité de Christ vivant en nous, s'est identifié l'idée principale du mysticisme.

mys

MYTHES, narrations merveilleuses, traditions héroïques et fantaisistes, qui se distinguent de la légende et de la fable par leur caractère religieux et par leur signification symbolique apparente ou cachée. Toutes les religions humaines ont eu leurs mythes, empruntés tantôt à la nature, tantôt à l'histoire, et destinés à servir d'enveloppes à leurs doctrines. L'idée de Dieu, comme puissance suprême, y apparaît toujours, quoique sous une forme indistincte et voilée. Depuis que la foi à la Révélation a été ébranlée, la théol. chrétienne s'est demandé s'il n'y aurait pas dans la Bible beaucoup de mythes. Herder a commencé en voyant un mythe dans les premiers chapitres de la Genèse, la création, le paradis et la chute. Strauss a poussé le système jusqu'à ses extrêmes limites en l'appliquant à la vie de Jésus qui ne serait qu'un ensemble de récits poétiques, inspirés par les prophéties et composés dans l'esprit de l'A. T., sans intention de tromper. D'autres,* sans aller aussi loin, tout en admettant comme historiques la plupart des faits de la vie de Jésus, pensent que quelques-uns ont été embellis par l'enthousiasme oriental, et que les écrivains ont donné la forme du mythe aux récits relatifs à son enfance, peut-être même à sa résurrection. C'est dans ce sens que Nitzsch a pu dire que ces histoires sont vraies, sans être réelles et que des vérités divines nous sont présentées sous une forme humaine. Ce procédé d'interprétation touche de bien près à la négation des faits et ne peut être employé qu'avec une grande réserve.

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MYTHOLOGIE, étude des mythes. C'est, dans un sens restreint, l'énumération des dieux et des déesses d'une religion, l'histoire de leurs faits et gestes, et l'étude de leur littérature. Dans un sens plus étendu et plus élevé, c'est l'interprétation et la systématisation des symboles fournis par les mythes d'une religion. Aucun peuple n'étant sans Dieu, chacun a vu se développer ses idées religieuses et morales d'après les circonstances de son histoire. On trouve chez tous quelques rayons épars de la lumière primitive, et l'étude des religions comparées montre comment toutes ont pu concourir à frayer le chemin au christianisme et à en faire un jour la religion du monde entier, v. Creuzer 1810. 0. Muller 1825.

N

NANGIS (de Nangiaco), v. Guillaume 11°.

NANTES (édit de), v. Édits 5<>.

NAPLES. Après que les Normands 1027 eurent obtenu du duc Serge de Naples la principauté d'Aversa, ils s'emparèrent de la Grande-Grèce sous Guillaume Bras-de-fer et ses frères, et en firent leur royaume 1040-1043. Comme ils menaçaient aussi Bénévent et d'autres possessions papales, Léon IX sortit contre eux avec une armée allemande, mais il fut défait à Civi-tella et fait prisonnier 1053. Nicolas II laissa à

myt

Robert Guiscard le reste de ses conquêtes dans l'Italie du sud, moyennant un tribut annuel et la garantie de sa protection pour Rome et les États de l'Église. Anaclet II, l'antipape, soutenu par Roger U, petit-fils de Robert, céda encore à celui-ci Capoue et la Sicile, et lui reconnut le titre de roi 1130. Lamême année Innocent II confirma ce titre, et en revanche Roger se déclara le vassal du saint-siège. Les papes suivants maintinrent comme un droit cette reconnaissance de leur souveraineté, si bien qu'Urbain IV en usa pour donner Naples et la Sicile à Charles d'Anjou 1263. Le symbole de la dépendance était la remise, chaque année, d'une haquenée blanche par le roi de Naples au pape. Mais en 1777 Ferdinand prétendit que cette haquenée n'était qu'un témoignage de déférence. Ce tribut cessa d'être payé en 1788, et le pape ne manqua plus de protester le jeudi saint. Lo Concordat de 1818, et plus encore, la convention de 1855, mit lin à cette ridicule contestation.

NASSAU (duché de), État de la Conféd. germanique, presque enclavé entre le Rhin, la Prusse rhénane et la Hesse; annexé à la Prusse depuis 1866, fait auj. partie de l'emp. d'Allemagne. Ses villes principales sont Wiesbaden et Nassau. L'Évangile y fut apporté dès l'époque romaine, par Lubentius, disciple de l'évê-Maxime de Trêves, 350, et par saint Goar t 575; mais, sauf quelques églises construites, il ne fit guère de prosélytes. Ce fut seulement sous Boniface qu'un grand mouvement se produisit, à la suite duquel les évêchés de Mayence et de Trêves furent fondés. La maison de Nassau se divisait en deux branches principales, celle de Walrame et celle d'Othon, avec d'autres subdivisions secondaires. Elles se rattachèrent toutes à la Réformation. Le comte Philippe III, ami de Luther et de Mélanchthon, fit venir à Weilburg en 1526 Schnepf de Heidelberg, et en 1546 le Dr Goltwurm, chargé d'organiser l'Église. Guillaume-le-Riche, à Dil-lenburg, après de longues hésitations, plutôt politiques, se décida aussi pour la Réforme et appela les pasteurs Heilmann et Léonard Mo-gner 1531; en 1534 il se joignit à la ligue de Smaicalde. Il fonda plusieurs séminaires ou écoles de théologie. Il ne promulgua l'Intérim que malgré lui et n'inquiéta pas les prédicateurs qui refusèrent de s'y soumettre. En 1578 la forme presbytérienne fut décidément adoptée pour l'administration et l'exercice de la discipline, et en 1581 le catéchisme de Heidelberg fut introduit comme la règle de l'enseignement. Les différentes branches des Nassau ayant été réduites à une seule depuis 1816, les églises s'étant réunies en synode, se sont prononcées dans le sens de l'Union, « leurs divergences dogmatiques n'étant pas de nature à altérer ou compromettre leur unité. • Depuis l'annexion du duché à la Prusse, l'Égl. a suivi ses destinées. Parmi les princes de Nassau qui ont joué un râle dans l'Eglise, figurent Guillaume Ier, dit le Taciturne, prince d'Orange9 Stathouder de Hollande, gendre de Coligny, organisateur des Gueux de mer, assassiné par Gérard 1584; Maurice, son fils, né 1567, qui assura l'indépendance hollandaise, mais se déshonora par le supplice de Barnevelt; Henri-Frédéric, fr. du précédent; Guillaume II, son fils 1626-1650; enfin Guillaume III, fils de celui-ci, né 1650, prince d'Orange, Stathouder de Hollande, gendre de Jacques II, et bientôt son successeur sur le trône d'Angleterre 1688, f 1702.

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NATALIS (Noël), Alexandre, né 19 janv. 1639 à Rouen, entra en 1655 dans l'ordre des dominicains, étudia k Paris; en 1672 licencié, en 1675 docteur en théologie. Auteur d'une hist. ecclés. demandée par Colbert, Selecta capita, 24 vol. 1677-1686, il vit son travail mis k l'index à Rome pour cause de gallicanisme, par Innocent XI, 1684; malgré ses explications l'index fut maintenu 1699 et ne fut levé qu'en 1734, après qu'une nouvelle édition eut été revisée après sa mort par Roncaglia. En 1706 il fut élu provincial de son ordre. Il est aussi l'auteur d'une Hist. de l'A. T. 6 vol., et de plusieurs autres ouvrages. Souffrant des yeux depuis 1712 il finit par devenir complètement aveugle, fà Paris, 21 août 1724.

NATALITIA, jours de naissance: fêtes qui datent déjà en partie du 2m« siècle, mais qui étaient entendues bien souvent dans un sens spirituel, au point de désigner pour les martyrs la date de leur mort, c.-à-d. de leur naissance à une vie meilleure. Par extension ce mot s'est dit aussi en parlant d'autres anniversaires, consécration d'une cathédrale, etc.

NATURE, tout l'ensemble de la matière organisée, par opposition à la matière pure, qui n'est d'ailleurs d'elle-même qu'une abstraction en ce sens qu'on ne la trouve nulle part en dehors de la nature. C'est l'assemblage de toutes les choses visibles sorties des mains du Créateur, unité vivante issue de la matière morte, vivifiée par le souffle de Celui qui s'appelle la Vie et qui a semé partout dans son œuvre les germes du progrès et d'un développement continu, depuis le minéral qui est au bas de l'échelle, passant par la plante et l'animal, jusqu'à l'homme qui en est l'échelon le plus élevé. Avec l'homme qui a la conscience de lui-même, une nouvelle série commence; il forme la transition entre le domaine de la nature et celui de l'esprit. La nature a pour lui une signification morale, car il sait qu'il est au-dessus d'elle, qu'il peut la dominer, la vaincre, et s'assujettir toutes choses. Il doit la prendre en quelque sorte là où le Créateur l'a laissée; il doit la pénétrer en l'étudiant, et par la culture de la terre et de l'esprit il la transforme et en fait pour ainsi dire une chose nouvelle, un produit de son intelligence. La nature prend alors un langage et publie à son tour les œuvres du Dieu Fort. L'homme pressent qu'il y a entre la nature et lui des sympathies, des liens mystérieux; elle lui appartient, elle a été faite pour lui et il en a été tiré. Il semble qu'elle aussi attende sa rédemption comme si, maudite avec l'homme, elle devait se relever avec loi, Rom. 8, 19. etc. — Ce qu'on appelle les lois de la nature dans le langage ordinaire, ce sont d'une part les règles que la physique et les autres sciences ont constatées, de l'autre les forces, les puissances qui sont habituellement en l'homme. Cependant les circonstances peuvent révéler, manifester ou développer chez l'homme certaines énergies inaccoutumées qui, par la rareté de leur apparition, sont quelquefois appelées surnaturelles, quoiqu'elles soient peut-être simplement l'état normal, primitif de l'homme, avant que ses facultés eussent été altérées par Pin-tempérance, la chair, le péché; ainsi la domination sur les animaux, ainsi encore plusieurs phénomènes du magnétisme. — La religion naturelle est, par opposition à la religion révélée, ce que l'homme peut connaître et comprendre de Dieu par la contemplation de ses œuvres; il ne faut ni en exagérer la portée, ni la nier, v. Ps. 19, Rom. 1. —Le droit naturel est celui qui est dicté par la conscience ou par les mœurs, en opposition au droit positif déterminé par les lois.

NAUCLER, Jean, de son vrai nom Verge. Vërgenhans, ou Ferge; chanoine, né à Justin -gen en Souabe, précepteur du comte Eberhanl de Wurtemberg, doyen à Stuttgart depuis 1477, puis chancelier de l'univ. de Tubingue. f vers 1510. Il était très versé dans la science du droit canon; auteur d'un livre sur la simonie. d?un autre sur le droit de succession des clercs. On estime surtout sa Chronique, qui fut revue par Mélanchthon, et à laquelle Reuchlin mit une préface.

NAUDÉ, Philippe, né à Metz 1654, réfugié 1687 à Berlin où il fut nommé membre de l'Acad. comme mathématicien. Il défendit avec autant d'énergie que de logique la doctrine réformée « directement révélée de Dieu » de For-thodoxie calviniste.

NAUMBOURG-Dtete, petite ville des États prussiens qui déjà en 968 était le siège d'un évêché travaillant à l'évangélisation des Slaves. Elle embrassa la Réforme sous l'év. Philippe + 1541. Nicolas d'Amsdorf fut nommé év. protestant en 1542, tandis que le chapitre élisait comme év. romain inles de Pflug, qui ne put entrer en fonctions qu'en 1547, après la bataille de Mtthlberg, sans d'ailleurs pouvoir arrêter le mouvement de réforme. Il s'y tint le 20 janv. 1561 et jours suivants, une assemblée des princes protestants désireux de s'entendre sur une foi commune, en vue du prochain concile que Ferdinand voulait convoquer à Augsbourg. Mais on ne réussit pas plus qu'on n'avait fait à Worms 1557 et à Francfort 1558. On convint d'adopter la Conf. de foi de 1530, mais Ulrich deMeck-lembourg et Jean-Fréd. de Saxe refusèrent de signer, parce qu'on ne condamnait pas assez nettement les erreurs et les sectes antiluthériennes, et les négociations furent closes. Les princes avaient refusé l'invitation d'assister au concile, et fait une démarche en faveur des huguenots de France.

NAVIGATEURS (Iles des), v. Samoa.

NAVILLE, Fr.-Marc-Louis, né 11 juill. 1784 â Genève, d'une vieille famille de la république, perdit ses parents de bonne heure; élevé chez un parent paternel (Naville-Gallatin) qui fut fusillé pendant les troubles de 1794, et ensuite chez un autre parent, Duby, prof, de théologie. Après quelques années de pastorat à C-hancy, il résolut, sans abandonner le ministère, de se vouer plus entièrement à l'éducation de ses deux fils, en leur adjoignant quelques condisciples, et il fonda 1819 l'institut de Ver-nier, à 5 kilom. de Genève, qui réunit bientôt des jeunes gens distingués de diverses contrées. A partir de ce moment, et donnant touj. à la religion une place importante dans l'éducation, il se consacra surtout à l'étude des questions sociales, pédagogiques, et d'utilité publique. Il se lia avec des hommes comme Zellweger et le P. Girard, et fit de sa maison un centre vers lequel convergeaient tous ceux qu'animait l'amour de la justice et de la liberté. Le relèvement de Tltalie, l'a {franchissement de la Grèce l'enthousiasmaient, sans refroidir ses sympathies pour les classes pauvres et laborieuses qu'on trouve partout. 11 a écrit plusieurs ouvrages et mémoires sur l'Éducation publique, et en 1836 un important travail sur la Charité légale, ainsi que divers articles de Revues. Très lié avec Maine de Biran, il obtint de sa famille, la communication des mss. de cet éminent penseur (publies plus tard par son fils, le prof. Ernest Na-ville). f 22 mars 1845. Notice par E. Diodati.

NÉANDER lo Michel, théol. protestant, né 1525 â Soraw, Silésie, f 1595 à Ilfeld; s'est plutôt occupé de grammaire et de philologie: Erotemata grœc. ling.; Gnomologia grœco-la-tina.

2<> Joachim né 1650 à Brème où son père était maître de latin. Il fut converti par le pieux Théod. Untereyket se tourna vers le labadisme.

A la fin de ses études il fut nommé recteur et prof, de latin àDusseldorf; il remplit sa charge avec distinction et prêchait souvent; mais comme il tenait en outre des réunions particulières et qu'il prêchait le labadisme, il entra en conflit avec le presbytère et fut suspendu de ses fonctions 1676-1677. Il ne put les reprendre qu'après avoir signé une rétractation de ses erreurs, et l'engagement de ne plus avoir de con-venticules. En 1679 il fut appelé comme pasteur à Brème où il f 1680. Il est considéré comme le père du cantique réformé allemand; il a composé un grand nombre d'hymnes, la plupart pendant sa suspension, et à ce qu'on dit, dans une caverne des environs de Dusseldorf qui porte encore son nom. Spener et ses amis les accueillirent avec empressement, et peu à peu ces cantiques remplacèrent l'ancien psautier. Il avait composé aussi la mélodie de ces chants, qui dénotent un grand talent musical.

3° Christophe-Frédéric, né 26 déc. 1725 à Eckau, Courlande, auteur de plus de 40 cantiques, était prieur ou prévôt du district de Doh-blen, Courlande.

4<> Daniel-Amédée, docteur et èvêque; né

17 nov. 1775 à Lengefeld dans les montagnes de la Saxe, d'un tisseur de laine, il étudia en 1795 à Leipzig et vint ensuite passer 5 ans à Dresde, où il subit la forte influence de Rein-hard. Pasteur à Flemmingen depuis 1805, il fut appelé en 1817 à Mersebourg par Fréd.-Guil-laume III, qui avait apprécié ses sermons. Enfin en 1823 il passa à Berlin où ses remarquables talents d'administrateur lui firent bientôt une place à part. Surintendant en 1829, en 1830 membre du Consist. supérieur et du collège de censure, il fut en 1833 nommé conseiller d'État avec le titre d'évêque. Il joua un rôle prépondérant dans la formation du recueil d'hymnes et cantiques et dans la rédaction de la liturgie; la circulaire du 28 févr. 1834 est en grande partie sou ouvrage. En 1846 il présida le synode général. Retraité depuis 1865; f

18 nov. 1869.

5° Jean-Aug.-Guillaume, le célèbre historien, s'appelait d'abord David Mendel. Né 17 janv. 1789 à Gôttingue, il était fils d'un marchand juif, mais fut élevé par sa mère à Hambourg, où il se prépara 1803-1805 à faire ses études de droit. Le 25 févr. 1806 il se convertit au christianisme et se fit baptiser; c'est à cette occasion qu'il prit le nom de Néander, c.-à-d. nouvel homme. En route pour Gôttingue où il comptait faire son droit, il changea d'idée et se décida pour la théol. et la philosophie. Il se rendit d'abord à Halle, où il trouva Schleierma-cher, et 1809 à Gôttingue où il connut et apprécia Planck, sans toutefois accepter son influence. Après un séjour d'un an et demi à Hambourg, ou il vit beaucoup le poète M. Claudius, il s'établit en 1812 à Heidelberg comme professeur, et fut appelé 1813 à la nouvelle univ. de Berlin, où il déploya une immense activité et exerça une grande et heureuse influence, f 14 juill. 1850, après avoir souffert des yeux pendant plusieurs années. Il avait débuté dans la carrière littéraire par des monographies ecclésiastiques très appréciées: L'emp. Julien et son temps, saint Bernard, le gnosticisme, Chrysostome, l'Antignostique, Tertullien, etc. Il mit enfin la main à son grand ouvrage: Hist. gén. de la relig. chrét. et de l'Église, 1825-1852, parfois interrompu par des publications d'un autre ordre: La Vie de Jésus, 1839, en réponse à Strauss, et par une foule d'écrits de circonstance, scientifiques, exégétiques, historiques, ou d'édification. Pour lui l'hist. de l'Église n'est ni une histoire quelconque à fixer d'après les sources, ni seulement l'histoire des dogmes, ou celle des ambitions sacerdotales; ce n'est pas non plus la simple étude psychologique du développement de l'esprit humain daus un champ spécial; c'est avant tout l'hist. d'un nouveau principe, principe de vie, survenu dans le monde pour le pénétrer; c'est en quelque sorte la vie de Jésus se révélant dans la vie religieuse de ses disciples. Ce caractère spécial de l'œuvre de Neander en fait une lecture aussi édifiante qu'instructive; il en fait le charme; le lecteur n'est pas en face d'abstractions, il a devant lui des individus vivants, et il en ressort une leçon de largeur évangélique par le fait que l'on est mis en rapport avec des chrétiens de tous les âges qui, au milieu de divergences notables, ont tous bâti sur le môme fondement. Mais ce pian présentait aussi des dangers, et l'attention donnée aux individus fait perdre quelquefois de vue l'ensemble, l'Église. L'objectif est sacrifié au subjectif. Ces admirables biographies ne laissent pas toujours apercevoir le lien qui unit l'Église aux autres associations et manifestations de la vie humaine, à la société, à l'État, etc. Ainsi l'influence de l'Égl. sur le dogme, le droit, les mœurs, les arts, la langue, la civilisation en général, n'est pas suffisamment mise en relief. En un mot Neander a saisi surtout la religion par son côté vraiment religieux; il a appliqué à son travail sa devise: Pectus est quod facit theologum (c'est le cœur qui fait le théologien), et il l'a appliquée de même dans tout l'ensemble de ses études, aussi bien dans sa lutte contre l'hégélianisme que dans ses rapports avec l'orthodoxie outrée de quelques théologiens. S'il est vrai de dire que son Histoire a fait sa réputation, on peut ajouter que son influence générale a été plus grande encore dans les autres branches-de son professorat, dogmatique, morale, exégèse, et qu'il a exercé une action puissante sur les élèves par la simplicité de sa foi, sa candeur et sa naïveté presque enfantine. Il représentait à quelques égards la théol. de sentiment de l'école de Schleier-macher, et en même temps il a relevé et restauré la vraie théol. biblique. Julius Muller a publié, comme œuvres posthumes, ses leçons de théologie. Plusieurs ouvrages de Neander ont été trad. en fr. par Fontanès, Goy, Diacon, Valette, Diodati, etc. Il était connu par sa générosité autant que par ses distractions.

NECTAIRE lo patr. de Constantinople 384-398, successeur de Grégoire de Naziance et prédécesseur de Chrysostome. Né à Tarse, il était sénateur à Constantinople lorsque, sur la proposition de Diodore de Tarse et de l'év. d'Antioche, Théodose, pendant le conc. de 381. l'éleva à la dignité épiscopale, quoiqu'il ne fût ni prêtre, ni même baptisé. Il appartenait au parti de Nicée. Il eut le bonheur de faire reconnaître son patriarcat comme étant le premier après Rome. Il fit abolir dans l'Égl. grecque la fonction spéciale de prêtres-confesseurs, qui avait surgi à l'époque des troubles novatiens, vers 250. C'est lui enfin qui, au concile de 393, fit décider qu'un év. ne pouvait être privé de ses fonctions et de son titre, que par la majorité des év. du diocèse, f 398, après qu'en 397 déjà Chrysostome eut été désigné pour lui succéder.

2o Patr. de Jérusalem, entre 1660-1672, auteur d'une préface qui recommande la Confession de Mogilas. 11 a écrit aussi un traité sur la primauté du pape, en réponse au P. franciscain Pierre, de Jerusalem, dans lequel il prouve qu'il comprend et connaît bien la question.

NEFF, Félix, né 8 oct. 1797 à Genève, d'une famille peu aisée, témoigna de bonne heure un grand désir d'apprendre et des dispositions remarquables pour l'étude; mais les circonstances empêchèrent tout développement régulier. Après un apprentissage de jardinier-fleuriste, il s'engagea comme soldat, fut nommé sergent, mais ayant appris à connaître l'Évangile, il s'unit 1818 à l'église naissante du Bourg-de-Four. Genève, et se décida à devenir missionnaire évangéliste. Après 3 ans de mission en Suisse 1819-1821, il vint à Grenoble, puis à Mens 1822, et depuis 1823 il se voua entièrement à l'évangélisation des Hautes-Alpes, voyageant sans cesse d'une vallée à l'autre, prêchant, faisant des routes, cherchant à civiliser ces populations abandonnées, et les relevant par la connaissance de la vie chrétienne. Consacré à Londres 19 mai 1823, il revint dans ses hautes vallées, et s'y dépensa comme apôtre jusqu'au moment où sa santé le força d'abandonner le rude climat, le mauvais régime et le travail surhumain qui le minait. Après une cure inutile à Plombières, il f à Genève 12 avril 1829. Vie et Lettres par A. Bost, 2 vol. 11 a laissé quelques sermons, lettres, traités et cantiques.

NEMESIUS, év. d'Émèse, Phénicie, auteur d'un livre sur la Nature de l'homme, que l'on avait d'abord attribué à Grégoire de Nysse; vivait au commencement du 5m* siècle.

NEMOURS (Édit de). Henri III, pour calmer les Guise qui menaçaient de se révolter, lança le 7 juill. 1585 un édit, enregistré le 18, qui défendait tout exercice de la religion réformée et ordonnait aux ministres de sortir du royaume dans le délai d'un mois.

NENNIUS, disciple de l'archev. Elbod, et abbé de Bangor. f 809. On lui a longtemps attribué une Hist. des Bretons, ou Eulogium Bri-tanniœ, qui à côté de plusieurs choses intéressantes, est dans son ensemble une compilation peu sûre de traditions, de légendes et de contradictions chronologiques. Cet ouvrage, en tout cas, doit avoir subi plusieurs remaniements entre 822 et 831.

NÉOLOGIE, proprement doctrine nouvelle, se dit de toute innovation non justifiée ou non prouvée dans l'enseignement public. On a souvent employé ce mot pour désigner le rationalisme en théologie, et Ton en a même abusé en l'appliquant non seulement aux théories négatives de quelques savants modernes, mais encore au simple développement de la doctrine traditionnelle présentée sous une forme plus large et plus rationnelle.

NÉOPHYTES (nouvellement plantés) ou novices, mot désignant les nouveaux convertis, 1 Tim. 3, 6. 1 Cor. 3, 7., sortis du judaïsme ou du paganisme et reçus dans l'Égl. par le baptême. D'après les premiers conciles ils ne pouvaient pas être appelés immédiatement à remplir des charges dans l'Église; au 6me siècle on exigeait encore qu'il y eût au moins un an entre le baptême et l'ordination. Les exceptions qu'on peut citer, Ambroise, Nectaire, s'expliquent par le fait que le catéchuménat les avait déjà arrachés au paganisme. Plus tard on réserva le nom de néophytes pour les jeunes chrétiens qui se destinaient à la prêtrise, mais il leur était interdit d'aspirer à l'épiscopat avant d'avoir rempli les charges inférieures. Rome eut souvent à protester contre les patriarches grecs pour n'avoir pas respecté cette règle.

NÉOPLATONISME, secte philos, venue d'Alexandrie et que l'on peut considérer comme le dernier effort du génie grec pour élever sur les bases de la sagesse humaine un système du monde et de Dieu, qui satisfasse à la fois l'intelligence et le cœur. C'est dans la philos, une apparition très remarquable, parce qu'elle est née du même besoin qui avait déjà préparé la voie au christianisme, et parce qu'elle s'est trouvée fréquemment en contact avec ce dernier, soit comme amie, soit comme adversaire. Depuis qu'Aristote et Platon furent tombés dans le fond commun de la philos, ancienne, laissant de nouvelles sectes éclore autour d'eux pour les transformer tout en acceptant leurs principes comme point de départ, l'abîme s'était creusé touj. plus entre le sujet pensant et le monde extérieur, et l'on sentit le besoin de travailler à les réunir dans une unité supérieure. Le stoïcisme et l'èpicuréisme y tendaient, mais sans atteindre le but, et le scepticisme se bornait à tout démolir, sans pouvoir rien édifier, aboutissant ainsi au nihilisme. C'est alors que le néoplatonisme conçut l'entreprise hardie de résoudre l'énigme du monde en s'élevant d'un bond à l'idée de l'absolu, el en créant une philosophie qui est en même temps une religion. C'est par l'extase, par une espèce d'inspiration, en dehors des sensations, en dehors même du travail de la pensée, que l'homme doit s'élever à la contemplation de l'absolu. Ce mysticisme est le point de départ. Le point d'arrivée, c'est l'unité absolue, embrassant toutes choses, qu'on appellera Dieu, ou le destin, mais qui n'a sur le monde aucune influence directe ou immédiate. Son action s'exercera par l'intermédiaire de deux êtres, ou émanations supérieures, qui sont ses manifestations visibles; l'un, c'est le Noûs, l'intelligence donnant des ordres, le Logos, la Parole; l'autre, c'est l'âme du monde, le Cosmos noètos, exécutant, réalisant ces ordres. C'est là la Trinité que le néoplatonisme opposait à celle des chrétiens. Il distinguait aussi le monde sensible, c.-à-d. toutes les apparences qui nous entourent, et le monde de l'intelligence ou des idées, qui domine et pénètre le premier, et le soumet par l'excellence et l'énergie de sa puissance. La morale a trait aux rapports de Dieu avec l'homme; elle a un côté négatif, l'homme doit se soustraire à l'influence de la matière, et un côté positif, l'homme doit se tourner incessamment vers sa première patrie, être éclairé de Dieu et de sa sagesse. L'étude peut concourir à ce résultat, mais elle ne suffit pas; il faut y joindre l'extase, c.-à-d. l'union intime et constante avec l'absolu. Il y a là quelques idées chrétiennes. — C'est à Alexandrie que le néoplatonisme a pris naissance, sous la double influence du judaïsme et du gnosticisme. Ammonius Saccas fut le premier, vers l'an 200, qui entra dans cette voie; il n'était pas juif et ne professa le christianisme que quelques années; il n'a rien laissé d'écrit, mais il eut d'illustres disciples, Erennius, Origène, Plotin né 205 à Lycopolis, prof, à Rome 245, f 270. Puis viennent Porphyre, né 233 àTyr, prof, à Rome, f 304, auteur de 15 livres contre le christianisme; Jamblique, précepteur de l'emp. Julien, né en Célésyrie, f 333; Proclus, né 412 à Constantinople, f 485, homme savant et d'une vie exemplaire; auteur de plusieurs ouvrages remarquables contre le christianisme. La secte n'était cependant pas de force à lutter; son point de vue religieux, tout formaliste, ne pouvait satisfaire les besoins de l'âme et de la conscience; ses écoles se fermèrent peu à peu; celle d'Athènes fut fermée par Justin, né en 529; plusieurs de ses disciples se réfugièrent en Perse, mais en 533 ils en fnrent aussi chassés; ce fut la fin. — Parmi les philos, chrétiens qui penchèrent vers le néoplatonisme, on cite Justin Martyr, Origène, Clément d'Alexandrie et Augustin.

NÉOSTADIENSIUM Admonitio, ou Avertissement chrétien des théologiens de l'académie réformée de Neustadt sur le Hardt (Palatinat bavarois), relativement au Livre de Concorde, publié au nom de plusieurs États touchant la Confession d'Augsbourg; Neustadt 1581. C'est à la fois le Commentaire et la critique du Livre de Concorde, que les luthériens extrêmes voulaient élever à la hauteur d'un livre symbolique. Ursins, l'auteur de ce travail, examine en 12 chapitres la doctrine et le genre d'autorité que peut avoir le livre luthérien, et il établit qu'en adhérant à la Conf. d'Augsbourg, les réformés l'ont acceptée dans un sens général, mais en se réservant leur liberté sur les détails.

NÉPOMUCÈNE, Jean, né à Pomuk, ou Népo-muk, vers 1330, f 1383, canonisé par Benoît XIII, 1725. L'histoire raconte qu'il était notaire papal en 1372, et qu'il devint curé de Prague en 1380, puis secrétaire et enfin vicaire général de l'archev. Jean de Jenstein. Par la promptitude avec laquelle il repourvut l'abbaye de Kla-drau, il empêcha le roi d'y placer un de ses favoris, mais le brutal Wenceslas, qui avait déjà à se venger de l'archev. parce que celui-ci s'opposait à l'érection d'un nouveau diocèse, se vengea sur quelques prêtres, entre autres sur Jean Pomuk, qu'il fit mettre à la torture, puis noyer dans la Moldau. Ce fait passa presque inaperçu. Mais un autre Jean, le martyr de Constance, ayant passé comme saint dans le calendrier populaire de la Bohêfoe, les jésuites, lorsque l'hérésie eut succombé 2 siècles plus tard à la Montagne blanche, cherchèrent à remplacer Jean Huss par un saint plus à leur convenance. Ils trouvèrent Pomuk, que personne ne connaissait, et lui firent une légende. Il aurait refusé de révéler au roi le secret de la confession de la reine, dont celui-ci suspectait la fidélité, et il serait mort héroïquement. La légende fit son chemin; auj. personne n'en doute et la statue du saint se dresse sur les ponts des villes et des villages. On assure même que la nuit de No'él, elle fait un tour complet sur elle-même, mais les esprits forts disent qu'elle se borne à faire un léger mouvement, un simple demi-tour.

NEPOS, moine égyptien du 3®e siècle, év. d'Arsinoé, homme pieux et de bonne renommée, exagéra la doctrine du chiliasme dans un écrit contre Origène, et ses disciples allèrent si loin qu'il en résulta un schisme. L'év. Denys d'Alexandrie, dans une conférence qui dura 3 jours, à Arsinoé, réussit à calmer les plus exaltés; il écrivit ensuite un traité sur le sujet, dont il ne reste que des fragments, dans lequel, pour enlever aux chiliastes leur principal argument, il nie que l'ap. Jean soit l'auteur de l'Apocalypse, sans toutefois rejeter ce livre des révélations. Plus tard Nepos fut formellement condamné comme hérétique. Fulgence mentionne au 6®e siècle des népotistes qui étaient chiliastes, mais ils n'ont probablement aucun rapport avec ce Népos.

NÉPOTISME, tendance souvent reprochée aux papes, qui favorisaient d'une manière scandaleuse leurs parents et neveux (nepotes), en les dotant de riches prébendes et bénéfices, auxquels ils n'avaient ni droits ni titres.

NÉRI, Philippe, fondateur de la congrégation de l'Oratoire, né à Florence 22 juill. 1515. Éveillé de bonne heure à l'amour de Dieu, il refusa les offres d'un riche parent qui voulait lui léguer son commerce, et se rendit 1533 à Rome pour y étudier la philos, et la théol. chez les augustins. Il priait avec une ferveur si intense qu'un jour, après une de ses oraisons, il remarqua sur sa poitrine à l'endroit du cœur une espèce de renflement inexplicable; après sa mort on constata qu'il venait de la rupture de deux côtes. En même temps il se consacrait au soin des pauvres et des malades. Il fonda en 1548 la confrérie de la Très sainte Trinité, qui avait d'abord pour but le soulagement des convalescents pauvres, et qui plus tard eut surtout en vue les pèlerins se rendant à Rome. Ayant reçu les ordres en 1551, il se mit k instruire les enfants, et s'étant assuré le concours de quelques jeunes gens pieux, prêtres et laïques, il organisa le soir des réunions d'édification dans une salle de prières, ou oratoire (d'où est venu le nom d'oratoriens), d'abord dans la chapelle de l'hospice Saint-Jérôme, puis dans l'égl. de Marie de Vatticella, Chtesa Nuova, qui fut mise à sa disposition. Depuis 1556 le culte fat régularisé; il y eut des prédications en règle, des conférences sur les vies des saints, sur la morale, l'hist. de l'Église; enfin des exercices de chant d'où naquirent les oratorios. Cette association tout à fait volontaire, et dans laquelle chacun devait pourvoir k son entretien, ne formait pas un ordre, mais une simple congrégation, avec un président, ou supérieur, élu pour 3 ans; elle ne recevait qne des prêtres séculiers, point de moines, et relevait de l'év. diocésain. Ses membres s'appliquaient aux travaux de l'intelligence et à l'exercice du ministère et n'acceptaient la direction d'aucun collège ou séminaire. D'un caractère serein et enjoué, il haïssait le sérieux morose et artificiel des moines, et les scandalisa souvent en autorisant des jeux et des danses; dénoncé à Rome, il fut momentanément suspendu en 1570, mais bientôt acquitté. Il donna à sa congrégation des statuts, qui furent approuvés par Grégoire XIII en 1575. Son influence était si grande que, par son ordre Baronius refusa à Clément VIII l'absolution, jusqu'à ce que celui-ci eût levé l'excommunication lancée contre Henri IV. Il refusa plusieurs fois le cardinalat, f 25 mai 1595; canonisé 1622. Baronius lui succéda comme supérieur. Bérulle introduisit la congrégation en France, où elle comptait 75 maisons en 1760. Malebranche, Massillon, le p. Gratry, étaient oratoriens. — v. Oratorio.

NÉRON, 5«n« emp. romain, né en 37, fils de Doraitius iEnobarbus et d'Agrippine, fille de Germanicus, monta sur le trône en 54, et f 68. Comme son hist. appartient au N. T., v. mon Dictionn. de la Bible.

NERSÈS, ou Niersès, nom de plusieurs patr. arméniens: 1° N.-le-Grand, petit-fils de l'apôtre d'Arménie Grégoire Photistès; nommé év. en 364, et patr. en 366, il se distingua par son zèle pour la discipline et par son amour des pauvres. Compromis dans les luttes de son pays avec les empereurs, il fut banni par Valens, mais Théodose le rappela. Il assista au conc. de Constantinople 381; de retour en Arménie, il fut empoisonné par son roi. — 2° Nersès Kla-jensis, né vers 1100, fils d'un prince arménien, élu patr. à la mort de son frère 1166, f 1173; est surtout connu par les efforts qu'il fit pour prouver que la doctrine arménienne d'une seule nature en Christ, ne différait pas essentiellement de celle de l'Égl. grecque, parce que par nature on voulait dire simplement personne. Des pourparlers eurent lieu pendant quelques années, qui furent sur le point d'aboutir à une entente, mais il mourut avant que tous les év. eussent adhéré aux 9 articles d'union que l'empereur avait proposés en déc. 1172. Ses lettres sont importantes pour l'hist. de l'Église et des dogmes. Il se distingua aussi comme poète religieux, et introduisit la rime en Arménie. Œuvres, Venise 1824 et 1830. — 3<> Nersès Lam-bronensis, parent du précédent, fils du prince de Lambron, né 1133 et destiné de bonne heure à l'Église; en 1179 il fut nommé archev. de Tarse et Lambron, et abbé du couvent de Skyrra, près de Constantinople. Il fit le discours d'ouverture du synode arménien de 1176, où devait se décider la réunion des deux Églises sur la base du conc. de Chalcédoine et des deux volontés en Christ, mais chaque Église conservant ses liturgies et ses rites traditionnels. L'union, si près de s'accomplir, échoua par la mort de l'empereur 1180, et les troubles qui suivirent, en échauffant les passions et les haines, empêchèrent la conciliation projetée. L'alliance des arméniens avec les croisés latins irrita plus encore les grecs. Pour se laver de l'imputation d'eutychianisme dont les grecs l'accusaient, le patr. Grégoire envoya 1184 au pape Lucien ni une députation qui obtint un plein succès. Mais Nersès fit trop de concessions à Rome, notamment sur les usages traditionnels et la célébration des grandes fêtes, et il s'attira la haine de son clergé, f 4192.

NER VA, Marcus Cocceius, emp. romain 96-98. Né l'an 25 à Narni, fils d'un jurisconsulte célèbre, il succéda à Domitien et chercha à réparer les maux causés par son prédécesseur. Juste et bienveillant, il rappela ceux qui avaient été exilés sous prétexte d'athéisme, et diminua les impôts extraordinaires qui pesaient sur les juifs et sur les chrétiens. Ceux-ci jouirent de quelque repos sous son règne; Jean de Patmos fut remis en liberté. Les prétoriens s'insurgèrent contre ce prince trop bon, mais leur conjuration échoua. Nerva adopta Trajan comme son associé et son successeur.

NESTOR, le père de l'histoire russe, le plus vieux annaliste des Slaves. Né 1056 il entra à 17 ans au couvent de Kiew, où il f 1116. Outre plusieurs biographies de saints et d'abbés de son couvent, écrites en slavon sous le titre de Paterikon, il a composé une Chronique, qui va de 862 à 1116, et qui a été continuée par d'autres jusqu'en 1203; en général sobre, intéressante et digne de foi; retrouvée en 1716 à Kô-nigsberg par Pierre - le-Grand; le mss. le plus ancien connu porte le nom de Laurentin. Très apprécié par Ch. Villers et Guizot.

NESTORIANISME, et

NESTORIUS. La doctrine de l'union de la divinité et de l'humanité dans la personne de J.-C., défendue contre les docètes, les gnosti-ques, les patripassiens, les ariens, n'avait pas encore été déterminée dogmatiquement, et par sa nature même elle ne pouvait pas l'être, parce qu'elle dépasse pour l'homme ce qu'il est en mesure de comprendre. Les ariens, limitant la divinité de Christ, cherchaient à rehausser son humanité, en unissant un divin Logos à un corps humain. Apollinaire reconnaissait en Christ une âme et un corps humain, mais un esprit divin. L'Église d'Antioche, voulant se rendre bien compte de l'union des deux natures, les séparait très soigneusement, et de peur de voir en Christ deux personnes différentes, ses

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chefs admettaient l'unité selon la grâce, mais sans transporter les attributs d'une des personnes sur l'autre. Deux évêques, Diodore de Tarse et Théod. de Mopsueste furent les représentants de cette tendance. A Alexandrie, ville contemplative, on insistait surtout sur le caractère mystérieux de l'union des deux natures, et l'on affectait volontiers de transporter à l'une les attributs de l'autre, pour en mieux marquer l'unité. C'est Athanase qui le premier avait appelé Marie mère de Dieu; Hésychius, de Jérusalem, avait appelé David père de Dieu, et dans quelques Apocryphes Jacques s'appelle frère de Dieu; ils confondaient ainsi les deux natures en une seule, mélangée. Nestorius protesta contre cette confusion. Né à Germanica, Syrie, il fut élevé à Antioche, et fut successivement moine dans un couvent, puis prêtre dans cette ville, aussi distingué par ses talents que par sa piété. En 428 Théodose le nomma patriarche de Constantinople. Il n'unissait pas touj. la charité à la vérité, et il persécuta les ariens, les quarto-décimains, les novatiens, ne prévoyant pas qu'à son tour il serait persécuté comme hérétique. Anastase, qu'il avait amené d'Antioche, fit beaucoup de bruit à cause de ce mot de théotocos, mère de Dieu, employé en parlant de Marie. Proclus lui répliqua avec véhémence. Dans un sermon Nestorius répondit: Marie n'a pas enfanté une créature incréable telle que le Logos, mais un homme, instrument de la divinité, celui que Pilate a fait mourir. La passion s'en mêla et atteignit même les laïques; un avocat, nommé Eusèbe, se leva au milieu de l'assemblée pour protester contre l'enseignement du patr. Proclus, comme ayant fait une sorte d'apothéose de Marie. Nestorius prit la parole avec modération et déclara qu'il appellerait volontiers Marie mère de Christ, et même en un sens mère de Dieu, en mettant l'accent sur le mot mère, pourvu qu'on ne la divinisât pas elle-même. Là-dessus le diacre Basilius, d'autres ecclésiastiques de Constantinople, et quelques moines, déclarèrent Nest. hérétique et le dénoncèrent comme tel dans des affiches, où ils le comparaient à Paul de Samosate, ce qui était d'une insigne mauvaise foi. Un moine alla jusqu'à barrer le chemin à son évêque, qui se rendait au temple pour prêcher. Cyrille d'Alexandrie intervint alors. Dans ses Paschalia, puis dans une Lettre aux moines d'Egypte, il montra la différence qu'il y a entre une simple communication morale de Dieu et de l'humanité et une vraie union, l'union naturelle et essentielle, qui seule entraine l'union des attributs. Nest. fut irrité de ces ouvrages; Cyrille lui écrivit qu'il ne devait s'en prendre qu'à lui-même et à sa doctrine. Un ancien d'Alex, opéra une réconciliation, mais qui ne fut que momentanée. Cyrille écrivit à l'év.

de Rome, Célestin, et lui présenta sous un faux jour les prétendues erreurs de Nestorius. Célestin, déjà prévenu contre Nest. qui avait excommunié un év. arien italien, lui donna dix jours pour rétracter par écrit son excommunication, et chargea Cyrille d'y veiller. Jean d'Antioche et 7 autres évéques prièrent Nest. d'accepter le mot de théotocos pour l'amour de la paix; il le fit, mais cela ne suffit pas à Cyrille, qui rédigea 12 anathèmes contre Nest. et ses partisans d'Antioche, et qui les fit sanctionner dans un concile d'Alexandrie 430. André de Samasote et Théodoret de Cyrrhus refusèrent d'y adhérer; ils y voyaient du gnosticisme et du monophy-sitisme. Ils estimaient que dans sa vie terrestre Jésus ne savait que ce que le père voulait lui révéler; Cyrille au contraire soutenait que Jésus avait conservé toutes ses perfections divines. Nest. reçut mal les députés de Cyrille et de Célestin, et répondit par 12 autres anathèmes aussi violents. Condamné par le conc. d'Éphèse, avant que ses amis fussent arrivés, v. Cyrille, il fut absous par un autre concile immédiatement convoqué par Jean d'Antioche et une trentaine d'évêques. Lequel de ces deux conciles devait être le maître ? Le moine Dal-matius, qui n'était pas sorti de son couvent depuis 48 ans, excité par Cyrille, se rendit avec une foule de moines fanatiques au palais impérial, et bientôt le peuple ému éclata en cris d'anathèmes contre Nestorius. Le comte Jean, secrétaire d'État, fut envoyé à Éphèse, mais ne réussit pas à rétablir la paix. Nestorius demanda de rentrer dans son couvent, ce que l'emp. loi ordonnait aussi de son côté, dans une lettre d'ailleurs bienveillante. Nouveau conc. à Chal-cédoine; haines, brigues et jalousies. Théodose obligea tous les évéques à retourner chez eux. Une espèce d'accord se fit, où Cyrille sacrifia l'intérêt de la doctrine, et Jean d'Antioche celui des personnes en condamnant Nestorius. Théodoret, Alexandre d'Hièrapolis et d'autres évêques, mécontents de Jean, se séparèrent de lui et se trouvèrent ainsi en opposition déclarée avec les 3 patriarches de l'Orient, Cyrille, Jean d'Antioche et Maximin qui avait remplacé Nestorius. Maximin étant f 433, le peuple redemanda Nestorius, mais on nomma Proclus; Cyrille, Jean et même Théodoret entrèrent dans cet arrangement; Alexandre et ses amis restèrent inébranlables et furent arrachés à leurs troupeaux. Alors Nestorius, livré sans appui à ses ennemis, fut exilé de son couvent et relégué d'abord à Pétra, en Arabie, 435, puis dans une oasis de l'Égypte, et enfin dans la Tbébaïde, où il f misérablement, vers 440. De nouvelles lois furent publiées contre les nestoriens, mais les causes persécutées éveillent touj. des sympathies. Rabulas, év. d'Édesse, avait fait coodàm-ner le nestorianisme, et ses successeurs, Ibas, puis Barsumas, zélés partisans de la doctrine proscrite, furent persécutés. Ibas écrivit à Maxès, év. de Hardoschir en Perse, une lettre célèbre, dans laquelle il exposait sa foi et qui lui fit de nombreux adhérents. Barsumas, chassé d'Édesse, vint en Perse et fonda 433 à Nisibis une école rivale de celle d'Édesse que l'intolérance de Rabulas avait ruinée. Il fut év. de Nisibis jusqu'en 485 et exerça une grande influence. Les débris de l'école d'Édesse, détruite 479, s'enfuirent en Perse, et les rois protégèrent naturellement une doctrine que les grecs rejetaient. En 499 Babaeus, patr. de Séleucie, fit reconnaître par un concile le nestorianisme comme la religion des chrétiens persans. Propagée par de zélés missionnaires, la doctrine fit de rapides progrès dans la Tartarie et aux Indes, mais les persécutions musulmanes ont réduit leur nombre. Aujourd'hui l'on n'en compte guère que 400,000; ils habitent surtout les montagnes du Kourdistan, l'Asie Mineure et la Perse; quelques auteurs voient en eux des descendants des dix tribus. Ils s'appellent eux-mêmes Chrétiens chaldéens, ou syriens; aux Indes ils portent le nom de Chrétiens de Saint-Thomas. Ils ont deux patriarches, l'un à Mossoul en Mésopotamie, l'autre à Urmiah en Perse.

NETHENUS, Samuel, né 1628 à Suchtelen, étudia la théol. à Harderwyck, et occupa successivement différents postes de pasteur. Plein de zèle, de vie et de foi, il se multipliait pour instruire les ignorants; il souffrait de voir l'indifférence religieuse maîtresse de l'Église, et avec une tendance labadiste il voulut exclure de la Cène les inconvertis, ce qui lui créa partout des difficultés avec les églises et leurs conseils. A Birstein, le comte Guill. Maurice lui. ayant fait des observations sur ses procédés trop autoritaires, il lui constesta le droit de remontrance et la qualité d'évêque. Enfin la faculté de Marbourg, consultée, préavisa contre lui et il fut déclaré déchu du ministère. Il passa ses dernières années à Amsterdam, où il f vers 4700. Instruit, bien doué et fidèle, il manquait peut-être de tact. Auteur de Lux in tenebris.

NETTER, Thomas, né à Walden, Essex, étudia à Oxford, entra à Londres chez les carmes, et devint leur provincial. Comme tel il assista au concile de Pise 1409; à celui de Constance comme délégué d'Henri V. Confesseur et secrétaire particulier du roi, il fut employé à plusieurs missions politiques; en 1520 il fut envoyé en Pologne et opéra la conversion du grand duc Withold de Lithuanie. Il accompagna Henri VI en France lors de son couronnement, et f 1431 à Rouen. La plupart de ses ouvrages sont restés en manuscrits; le seul qui ait été publié, Paris 1521, plusieurs fois réimprimé, est son: Doctrinale antiquitatum fidei eccles. cathol.9 dirigé contre Wicleff et les loi-lards.

NEUBRIGENSIS, William, surnommé le Petit, né 1136 à Bridlington, diocèse d'York, chanoine de l'abbaye des augustins à Newburgh où il avait été élevé; son Hist. rerum anglica-rum est très appréciée; elle raconte l'époque de Guillaume-le-Conquérant 1066-1197.

NEUMARK, Georges, néàLangensalza, 7 mars 1621, f à Weimar 8 juill. 1681, auteur d'un grand nombre de poésies et de plusieurs cantiques très estimés, entre autres de: Wer nur den l. Gott lœsst walten. Il avait étudié le droit à Kônigsberg, Dantzig et Thorn; il finit par être nominé bibliothécaire, archiviste et conseiller k la cour de Weimar.

NEUMEISTER, Erdmann, né 12 mai 1671 à Uechteritz, près Weissenfels, fils d'un maître d'école, étudia k Pforta et à Leipzig, et fut successivement pasteur à Bibra, Eckartsberga, Weissenfels, Soran, et enfin Hambourg, où il f 18 août 1756. Le 30 juin 1747, entouré de ses enfants et petits-enfants, il avait célébré le jubilé de 50 ans de son entrée dans le ministère. Zélé orthodoxe, ennemi du piétisme et du chiliasme, il a composé plus de 700cantiques, dont quelques-uns très estimés (Jésus, nimmt dieSiin-der an).

NEUNHERZ, Jean, né 16août 1653àSchmie-deberg, fils d'un marchand, fut pasteur k Hirsch-berg où il + 1737; auteur de plusieurs cantiques et livres d'édification.

NEWMANN, John-Henry, né à Londres 21 févr. 1801, étudia k Oxford depuis 1817, devint fellow de Christ-College, puis pasteur de l'égl. de Sainte-Marie. Avec Fronde, Perceval et Pusey, il publia les Traités pour le temps, et prétendit dans le 90m* (Remarks on certain passages of the 39 articles 1841) qu'on pouvait signer ces articles, tout en leur donnant un autre sens que le sens généralement reçu. Condamné en 1845 par l'université, qui n'admettait pas cette manière jésuitique de promettre, il se rendit k Rome, se fit cathol. et ne revint en Angleterre que comme supérieur des pères de l'Oratoire, qu'il introduisit dans le pays. Nommé en 1853 recteur de l'univ. catholique nouvellement fondée, il donna sa démission en 1859, et ouvrit près de Birmingham une maison d'éducation pour la jeunesse catholique. Parmi ses nombreux ouvrages on remarque surtout: L'histoire de mes opinions religieuses, 1865, et ses Discours adressés à des congrégations mixtes, 1850. Il poussait l'intolérance jusqu'à traiter les hérétiques de diables incarnés, qui ne méritent aucune pitié.

NEWTON lo John, né à Londres 24 juill. 1725, fils d'un capitaine de vaisseau, mena jusqu'à 23 ans, au milieu de marins et de négriers, une vie sauvage et désordonnée. Mais rendu sérieux à la suite d'un grand danger sur mer et d'une merveilleuse délivrance, il se convertit, renonça à la marine et fut nommé inspecteur du port de Liverpool. Il employa ses loisirs à étudier la théologie. L'archevêque lui refusa l'ordination, mais l'év. de Lincoln la lui accorda en 4764, et après une suffragance k Olney, il fut nommé pasteur à Sainte-Marie Woolnoth à Londres, où il f 1807. Sans être un prédicateur remarquable, il avait une grande connaissance du cœur humain et beaucoup de tact dans la cure d'àme. Ses principaux écrits sont: Cardi-phonia 1781, Lettres à une femme 1793, son Autobiographie ou Narrative 1764; v. aussi les Mémoires de J. Newton 1743, et une Notice de J.-L. Micheli. Un des promoteurs du réveil en Angleterre, il eut aussi sa part d'influence dans le grand mouvement antiesclavagiste dont Wil-berforce fut l'âme.

2° Thomas, né 1 janv. 1701 à Litchfield, étudia au Trinity-College de Cambridge, se distingua comme prédicateur, et fut successivement nommé recteur de Mary-le-Bone, chapelain du prince de Galles, év. de Bristol, et doyen du chapitre de Saint-Paul, t 1782. Il est connu surtout par ses Dissertations sur les prophéties, dans lesquelles il cherche à prouver par l'histoire que toutes les prophéties de la Bible, depuis la Genèse, se sont accomplies. Il a écrit aussi sur l'authenticité du Pentateuque, et sur d'autres questions relatives à l'A. T. Enfin on lui doit une édition du Paradis perdu, de Mil-ton, la meilleure qui existe, et qui a servi de base à toutes celles qui ont paru depuis.

NICÉE, ville de Bithynie, sur le lac Asca-nius, d'abord nommée Antigonie de son fondateur Antigone, puis Nicée, du nom de la femme de Lysimaque qui l'agrandit. Elle est célèbre surtout par les deux conciles généraux qui s'y assemblèrent. 1° Premier conc. écuménique. Il fut convoqué en 325 par Constantin pour trancher les controverses ariennes. Le nombre des éYéques, presque tous orientaux, qui y assistèrent, varia de 250 à 320; on en compte généralement 318. L'empereur en fut le chef; il prononça lui-même le discours d'ouverture et intervint dans la discussion. On ne sait s'il y eut un président; c'est probable, et l'on suppose que ce fut un évêque, peut-être Hosius de Cordoue, év. de la cour, que les catholiques prétendent avoir été légat du saint-siège, quoiqu'il ne prenne jamais cette qualité dans ses signatures. Des assemblées préparatoires eurent lieu, qui furent bénies, même pour des philosophes païens. Trois partis se trouvèrent en présence: Alexandre d'un cêté, avec son diacre Athanase; de l'autre. Arius: enfin, comme intermédiaire et conciliation, Eusèbe de Césarée. L'effort de la discussion porta sur le mot homo-outiot (de même essence) appliqué à Jésus-Christ dans ses rapports avec le Père; Arius maintenait honoï-outiot (d'une nature semblable). Les eusébiens, pour éviter le mot, proposèrent un symbole où Christ était appelé Dieu de Dieu, Lumière de Lumière; les orthodoxes l'auraient admis si les ariens n'avaient pas pu l'expliquer aussi dansleor sens; ils exigèrent donc et ils obtinrent que le mot homo-outiot fût admis dans le symbole, ainsi que les mots né et non créé. Presque tous signèrent, même Eusèbe et les siens, par amour de la paix et pour ne pas déplaire à l'empereur, peut-être aussi en réservant en secret leur interprétation particulière. Dix-sept refusèrent, et Constantin, sous l'influence d'Hosius, les menaça de bannissement. L'arienne Constance, sœur de Constantin, en décida 15 à signer; Théonas et Secundus, égyptiens, restèrent seuls avec Arius. Mais Eusèbe de Nicomédie, Théo-gnis de Nicée, et Maris de Chalcédoine, après avoir signé, refusèrent d'aller plus loin et de s'associer aux anathèmes lancés contre les ariens. Arius, Théonas et Secundus furent exilés en Illyrie; trois mois après Eusèbe et Théo-gnis furent envoyés dans les Gaules. Constantin fit brûler les livres d'Arius et condamna à mort ceux qui les conserveraient. Le conc. de Nicée eut à régler encore d'autres questions; celle de la Pâques, qui fut définitivement tranchée dans le sens de Rome, contre les quartodécimainsde l'Asie; celle du schisme de Mélèce relatif anx lapti, et la vieille controverse sur la validité du baptême des hérétiques. L'influence d'Athanase l'emporta, et la doctrine de Cyprien, qui jusqu'alors avait été tolérée, fut définitivement .condamnée; le baptême n'avait plus à être renouvelé. Le 6œ« canon relatif à la discipline confirmait les privilèges des év. d'Alexandrie, de Rome et d'Antioche, portant que dans leur ressort aucun évêque ne pouvait être établi sans leur consentement. Ce canon a servi anx év. de Rome pour revendiquer leur primauté.

2° Second conc. de Nicée; 7®»e universel. V. Images. Outre la condamnation des iconoclastes, ce concile régla plusieurs points relatifs à l'élection des évêques, aux synodes, à la discipline des égl. et des couvents. Le synode de Pavie 825 rejeta les doctrines de ce concile.

NICÉPHORE lo patr. de Constantinople. Fils de Théodore, le secrétaire d'État de Const. Co-pronyme, qui s'était fait exiler comme partisan des images, il réussit par ses talents à se faire nommer à la place de son père; mais fatigué de la vie de la cour il se retira bientôt dans on couvent du Bosphore. C'est là qu'en 806 l'Égl. grecque vint le chercher pour lui conférer la plus haute dignité ecclésiastique de l'empire, 806. Léon l'Arménien étant monté sur le trône 813, la politique du pays redevint hostile aux images, mais N. resta inébranlablement attaché aox décrets du 2»e conc. de Nicée. Destitué en 815, il se retira dans un couvent, où il f 828. Il a laissé un Breviarium, ou Abrégé d'histoire, qui va de 602 à 770, en général exact, mais trop attaché à la tradition. On a aussi de lui quelques traités en faveur du culte des images.

2° Nie. Blemmidas, moine du Mont Athos, où il fonda une belle école, pour laquelle il composa plusieurs ouvrages; il refusa en 1256 le patriarcat de Constantinople.

3° Nie. Calliste, moine du couvent de Sainte-Sophie 1330, f vers 1350; auteur d'une Hist. de l'Égl. en 18 livres, qui va jusqu'à la mort de Phocas 611; la préface annonce une suite qui n'existe pas; peut-être est-elle perdue. Intéressant pour l'époque de Justin et de Justinien, ce travail n'a cependant pas une grande valeur critique. On n'en possède qu'un seul mss. qui, découvert à Ofen, a passé à Constantinople, et finalement à Vienne; trad. en latin par Lange, Bâle 1553.

NICÉRON, Jean-Pierre, né 1685 à Paris, bénédictin en 1703, prêtre en 1708, + 1738. Il enseigna la littérature et l'histoire en province et à Paris. Auteur de Mémoires pour servir à l'hist. des hommes illustres dans la répub. des lettres, 43 vol. Paris 1727-1745.

NICETAS 1° David, surnommé le Paphlago-nien, soit qu'il soit né en Paphlagonie, soit qu'il y ait été évêque. Il vivait versSSO, et écrivit une vie du patr. Ignace f 878, laquelle, malgré sa partialité, est importante pour la lutte qui eut lieu entre Ignace et Photius. On lui attribue aussi des hymnes, des poésies et des oraisons funèbres.

2° Pectoratus, moine et prêtre du couvent de Studium, près Constantinople, prit parti pour le patr. Michel Câralarius, quand celui-ci rompit avec Rome 1053; il écrivit contre les latins un traité virulent, où il leur reproche surtout le pain non levé et le célibat forcé des prêtres* Les latins disent que, réfuté par le cardinal Humbert et sur l'ordre de l'empereur, il se rétracta et brûla son livre; les grecs n'en disent rien. Ce livre a été publié avec la réponse d'Humbert, par Canisius, éd. Basnage III.

3o Acominatus, surnommé aussi le Choniate, parce qu'il était de Chone, l'ancienne Colosse. Élevé par Michel, son fr. aîné, il étudia la théol., l'histoire et le droit, et remplit divers emplois à la cour de Constantinople. En 1189 il fut nommé gouverneur de Philippopolis. Après la prise de Constantinople par les latins 1204, il s'enfuit à Nicée où il f 1206. On a de lui une Hist. de Byzance en 21 livres, qui va de la mort d'Alexis Comnène à celle de Baudouin; et un

Trésor de l'orthodoxie en 27 liv., qui renferme de nombreuses et précieuses indications sur les diverses sectes et hérésies de son temps et sur les déviations de la doctrine.

NICOLAI lo ou Nikldes, Henri, né à Munster 1501 ou 1502, élevé dans le catholicisme le plus strict, occupait dans le commerce une position considérable. Plusieurs fois arrêté à cause de ses relations avec les luthériens, puis relâché faute de preuves suffisantes, il se rendit à Amsterdam, puis à Emden, où il donna libre carrière à ses tendances séparatistes. Un peu visionnaire dès sa jeunesse, ne trouvant le règne de Dieu nulle part, ne voulant rien de la Réforme qui lui paraissait désorganiser l'Église et le sacerdoce, il se crut une vocation de prophète et se mit à annoncer le vrai sacerdoce et la communion de l'amour. Tout en restant sur le terrain dè l'Égl. catholique, il donna à sa secte une organisation hiérarchique, basée sur des idées chiliastes. Persécuté et privé de ses biens, il erra quelques années entre Cologne, Kampen et Utrecht, et finit par se rendre en Angleterre sous Édouard VI et Élisabeth. On ne sait quand il mourut; ses idées avaient quelques rapports avec celles des anabaptistes, quoiqu'il maintînt le baptême des enfants. La secte, dite des familistes, ou Famille de l'amour, dura peu; condamnée par Élisabeth 1580, elle donna son dernier signe de vie en 1604. Son principal adversaire fut Coornhert, qui lui reprochait des désordres et un abus de la liberté.

2° Philippe, né 1556 à Mengeringhausen. principauté de Waldeck, où son père était pasteur, lui succéda, occupa ensuite différents postes, et fut nommé 1601 à Hambourg, où il f 1608. Auteur de plusieurs livres d'édification, et notamment de Méditations sur les joies de la vie éternelle, publ. à Unna pendant qu'une terrible peste ravageait la ville. On lui doit quelques beaux cantiques, entre autres: Wachet auf, ruft uns die Stimme, et: Wie schœn leuch• tet uns der Morgenstern.

3° Christophe-Fréd., né à Berlin 1733, élève de l'orphelinat de Halle 1748, f 1811. Apprenti libraire à Francfort s. M., il étudia les écrivains grecs et anglais, Descartes, Wolf et d'autres philosophes, et publia dès 1756 des Lettres sur la littér. allem., qui furent remarquées. En 1759 il reprit la librairie de son père à Berlin, et publia de nouvelles Lettres avec la collaboration de Lessing et de Mendelssohn. Enfin en 1765 il édita, avec l'appui des mêmes hommes, auxquels se joignirent Herder, Ramier, Teller, Spalding, et d'autres, sa Biblioth. allem. universelle, résumé de la science contemporaine, qui eut quelques années d'un grand éclat, mais qui finit par prendre un caractère trop utilitaire et mercantile. Il dut suspendre cette publication en 1792 (106 volumes), la reprit en 1800, mais l'abandonna de nouveau et définitivement en 1805. Il a publié aussi en 1773 un roman théologique, Sebald Nothanker, dirigé contre l'orthodoxie et le piétisme,et 1781-1796 un Voyage en Allemagne et en Suisse, plein de personnalités blessantes. Il a fini par sa propre Biographie.

NICOLAITES. lo V. Dictionn. de la Bible. 2o petite secte, issue du mouvement hussite en Bohême. On les appelait aussi Wlaseniker, de leur lieu d'origine, ou encore les pleureurs. Ils rejetaient l'état ecclésiastique régulier, et admettaient à côté de la Bible d'autres révélations que Dieu accordait à quelques-uns des leurs. Leur fondateur était un paysan nommé Nicolas, de Wlasenic près Pilgram 1471. Ils se sont maintenus en divers lieux jusqu'au 17™© siècle. Vers 1676 ils publièrent une sorte de conf ssion de foi, mais il n'en reste plus un exemplaire, v. Palacky, Hist. de Bohême.

NICOLAS Ier, dit le Grand, pape 858-867, couronné en présence de Louis II. Il maintient le premier les principes du faux Isidore, et déclare que le pape est Dieu sur la terre. Il entra en lutte avec les princes dans deux circonstances où le droit et la vérité étaient pour lui et firent sa force; il soutint Theutberge contre son infidèle et brutal époux Lothaire 11, épris de Waldrade, et il annula les actes du conc. de Metz 863, qui avait pris le parti de Lothaire; il déposa en même temps les archev. de Trêves et de Cologne, parents de Waldrade, accusés d'avoir suborné les légats. II avait contre lui les droits des évêques et des conciles, mais pour lui les fausses décrétâtes, et ce qui vaut mieux, la morale et l'opinion publique. II annula ensuite 865, les actes du conc. de Soissons qui, sous la pression d'Hincmar, avait suspendu Rothade, parce que celui-ci avait destitué un prêtre pour mauvaise conduite. Il s'appuie en général sur le clergé inférieur pour s'assurer l'obéissance entière des év. et des métropolitains. De son temps le roi des Bulgares, Bogoris, embrasse le christianisme et reconnaît l'év. de Home pour se soustraire aux intrigues de son chef naturel, Photius de Constantinople. Nicolas excommunie Photius, qui l'excommunie à son tour, f 13 nov. 867.

2° Nicolas II, Gérard dit de Bourgogne, parce qu'il était né dans la Savoie qui dépendait alors des rois de Bourgogne, ou de Florence, parce qu'il avait été év. de cette ville. Il fut élu pape sous l'influence d'Agnès, mère de l'emp. Henri IV, et avec l'appui d'Hildebrand, 1058-1061. Il fait déposer par les év. de Toscane et de Lom-bardie son compétiteur l'antipape Benoît X, qui s'humilie. Il convoque un concile pour prévenir à l'avenir la compétition de plusieurs papes, et il est décidé que l'élection des papes sera remise au collège des cardinaux, « en maintenant toutefois le respect et l'honneur qui sont dus à notre très cher fils Henri. » Cette décision n'empêche pas les deux partis d'élire à sa mort leurs deux papes respectifs, Alexandre II et Honoré H. Nicolas a donné au normand Richard la principauté de Capoue, et à Robert Guiscard la Pouille et la Calabre, 1060, faisant ainsi de ces 2 princes des vassaux de l'Église, f 27 juill. 1061.

3° Nicolas III, Jean Gaëtan-Orsini, 1277-1280, se fait rendre par Rod. de Habsbourg Imola, Bologne, Faênza; force Charles d'Anjou de renoncer au vicariat de l'empire en Toscane et au titre de patrice de Rome, mais échoue dans son essai de réunir l'Église grecque à l'Égl. d'Occident et dans l'œuvre de médiation qu'il entreprend entre le roi de Castille et Philippe-le-Hardi. Personnellement honnête, on lui reproche son népotisme.

4o Nicolas IV, Jérôme d'Ascoli, 1288-1292. Après sa mort le siège resta 2 l/« ans vacant. Il favorisa les fr. mineurs dont il avait été général et envoya des missionnaires jusqu'en Chine. Il tenait pour les Gibelins. Il prit parti ponr Alphonse d'Aragon contre Charles II d'Anjou, comme roi de Sicile.

5<> Nicolas V, Thomas Parentucelli, élu 6 mars 1447, après Eugène IV; il voit l'abdication de Félix V, qui met fin au grand schisme. Homme doux, avec lequel les négociations sont faciles. De magnifiques édifices s'élèvent sous son règne: il augmente la biblioth. du Vatican de tant de richesses qu'on peut l'en considérer comme le fondateur. Le conc. de Bâle est transféré à Lausanne 1448, où il meurt de consomption et sans éclat. Prise de Constantinople 1453; Nicolas voudrait organiser une croisade de toute la chrétienté contre les Turcs; il s'en occupe activement, mais il f 14 mars 1455, et lègue cette tâche à son successeur Calixte III.

6° Nicolas V bis, antipape, Pierre de Corbière, élu 1328 sous l'influence de Louis de Bavière, roi des Romains, en opposition à Jean XXII. Chassé de Rome 1329, il se rend à Pise. où il abdique, on le conduit à Avignon où il demande pardon, la corde au cou, à son rival: il f 2 ou 3 ans après.

7<> Nie. de Myra, saint très peu connu, mais très respecté, soit dans l'Égl. grecque, soit dans l'Égl. latine. Les uns le font év. de Myra en Lycie, au commencement du 4®« siècle; il aurait été un confesseur de la foi pendant les persécutions dioclêtiennes; il aurait même assisté au conc. de Nicée. D'autres, et en particulier les Actes des saints, retrouvés en 1751 au Vatican, le placent à la fin du 5®« siècle et le font év. de Pinara. Les uns et les autres lui font use légende de miracles et racontent des traits nombreux de sa bienfaisance. Son corps fut transporté à Bari, Naples, en 1087, et Urbain II fonda une fête à cette occasion. C'est le grand saint de la Russie, et spécialement celui des jeunes garçons, qui célèbrent le 6 décembre la Saint-Nicolas.

8° Nicolas-le-Mystique, patr. de Constantinople vers 900. Son refus de bénir le 4«ne mariage de Léon VI le Philos, et sa menace de l'excommunier, le firent destituer par l'empereur qui nomma Euthyme à sa placé. Il en résulta dans l'Égl. grecque un schisme, qui ne finit qu'en 920, par une déclaration du synode condamnant les 4m#s noces. Serge IIÊ et Jean X se prononcèrent contre cette décision du synode.

9° Nicolas de Méthone, év. de Modon, ou Méthone, en Messénie, vécut vers la fin du lime ou du 12m« siècle; on ne sait à peu près rien de lui. Les écrits que l'on a conservés sous son nom comptent parmi les meilleurs de la théol. byzantine. Ils traitent de la présence de Christ dans la Cène, de l'usage des pains sans levain, de la procession du Saint-Esprit, de la primauté du pape, du platonisme païen de Proclus (très-intéressant); ils accentuent la doctrine de la Trinité et celle de l'Incarnation, et présentent celle de la Rédemption sous un point de vue qui rappelle celui d'Anselme.

10° Nie. de Bâle, fils d'un marchand, mena quelque temps une vie mondaine, jusqu'à ce que des visions le rendirent sérieux et l'amenèrent à rechercher une communion intime avec Dieu. Il travailla avec zèle et renoncement à propager la piété autour de lui, exerça une grande influence sur Tauler et sur d*^utres, et forma avec quelques amis une petite société qui prit le nom d'Amis de Dieu. Ils vécurent d'abord a Bâle, puis sur une montagne de la Suisse, d'où Nicolas en 1377 écrivit à Grégoire XI pour lui signaler les maux et les désordres de l'Église. Nicolas fut brûlé à Vienne par l'Inquisition, comme beggard; son ami Martin de Mayence le fut à Cologne en 1393. Depuis 1383 on perd les traces de la secte.

Ho Nie. de Strasbourg, maître de lecture au couvent des dominicains de Cologne, fut en 1326 chargé par Jean XXII de la surveillance de l'ordre en Allemagne. On ne connaît presque rien de sa vie. Il compte parmi les vieux mystiques, et ses sermons se distinguent par une saine et bonne originalité; plusieurs ont été publiés par Pfeiffer. Dans un ouvrage sur la Venue de Christ, il combat les calculs faits sur la date de l'apparition de l'Antéchrist et du jugement dernier; il cherche aussi à prouver aux juifs et aux païens que le Christ était bien le Messie annoncé et désiré. Cet ouvrage a été brûlé lors du bombardement de 1870.

12o Un autre Nie. de Strasbourg, ou de Ar-gentinâ, dont le vrai nom était N. Kemph, mourut en 1497 à Chemnitz à l'âge de cent ans; il était chartreux et a laissé quelques ouvrages.

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13° Nicolas de Flue, ainsi surnommé soit du village de Flueli, Unterwald, où il naquit 21 mars 1417, soit du rocher (Flue, ou Floue) près de Saxelen, Haut Unterwald, où il vécut plusieurs années solitaire, s'appelait LOwenbrugger de son nom de famille. Après avoir servi son pays comme soldat et dans les emplois civils, et avoir eu 5 fils et 5 filles, il se retira du monde à 50 ans et se rendit sur la montagne, pour se consacrer à la prière et à la méditation des vérités éternelles, laissant sa femme cultiver son bien dans la plaine. Sa piété vraie le fit vénérer de tous; on lui prêta même bientôt des miracles et le bruit s'accrédita qu'il ne mangeait ni ne buvait et que sa seule nourriture était la sainte Cène dont il s'approchait une fois par mois. La discorde ayant éclaté à la diète de Stanz entre les 3 cantons primitifs et les 3 cantons de Lucerne, Berne et Zurich, au sujet du partage du butin de Bourgogne, et de l'admission de Soleure et de Fribourg dans la Confédération, le pasteur Imgrund, de Stantz, alla réclamer l'intervention du vieux solitaire. Celui-ci ne se fit pas prier, et lorsqu'il entra dans la salle de la diète, tous se levèrent de leurs sièges; il leur prêcha la paix et la concorde, et les persuada avec tant d'onction que dans l'espace d'une heure les difficultés furent aplanies. 22 déc. 1481. f 1483. Canonisé 1669. Notices par Sigrist, Bitzius, Bonstetten.

14° Quant aux autres Nicolas qui ne sont pas marqués ici, v. Clémengis, Cusanus, Lyra, etc.

NICOLE, Pierre, né à Chartres 19 oct. 1625, étudia la philos, à Paris 1642-1644, puis la théologie, fut bachelier en 1649 et enseigna les belles-lettres à Port-Royal, ou il se lia surtout avec Arnaud. En 1654 il intervint dans les luttes jansénistes et dut se cacher quelque temps, avec Arnaud, dans l'hôtel de la duchesse de Longueville à Paris. En 1658 il fit un voyage en Allemagne, pendant lequel il traduisit en latin, sous le nom de Wendrock (habit retourné) les Provinciales de Pascal. Vers la même époque il écrivit, contre les protestants, la Perpétuité de la foi de l'Égl. catholique touchant l'eucharistie, 1669-1676. De retour à Port-Royal en 1671, il écrivit ses Essais de morale et instructions théologiques, son ouvrage le plus connu et le plus estimé. Persécuté par les jésuites dont il avait dénoncé la morale au pape en 1676, et ne se croyant plus en sûreté à Paris, il quitta la France en 1679 et se retira dans les Pays-Bas, d'abord à Bruxelles, puis à Liège. Il rompit plus ou moins avec Arnaud et les jansénistes pour conserver sa liberté, fit quelques concessions de doctrine et put, grâce à l'inter-yention de M. de Harlay, archev. de Paris, revenir à Chartres, enfin à Paris, où il f 1695. Il avait essayé d'adoucir le dogme augustinien de la grâce, en admettant qu'il y a une grâce générale pour tous, mais qui reste sans effet s'il ne s'y joint pas la grâce efficace. Il pensait expliquer ainsi l'imputation de leurs péchés aux païens, qui ont, quoique confusément, une révélation de la loi de Dieu. Il a donné lieu par là à l'accusation de pélagianisme. Notons encore parmi ses ouvrages: Les Imaginaires ou l'Hérésie imaginaire (celle des jansénistes), et les Visionnaires, l'Essai sur les moyens de conserver la paix avec les hommes, et ses Réflexions morales sur les Évang. et les Épîtres. Il a aussi collaboré à la Logique de Port-Royal, v. Cerveau, l'Esprit de Nicole; Mersan, Pensées de Nicole; Vie par Goujet.

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NIEM, v. Dietrich.

NIEMEYER io Aug.-Hermann, né i sept. 1754 à Halle, où il fit ses études, où il devint Dr théol., et où il fut pasteur, professeur et conseiller ecclésiastique. Petit-fils de Francke, il fut nommé directeur de ses établissements 1799. En 1807 il fut déporté à Paris à cause de son patriotisme, et continua de travailler à la réorganisation de l'univ. de Halle, supprimée par Napoléon. Il en fut nommé chancelier à vie et fut reconnu comme recteur par Jérôme Napoléon 1808. Il abandonna cette charge quand la paix eut rendu à l'univ. ses anciens droits, f 7 juin 1828. Dans son activité professorale, il a rendu des services à la pédagogie et à la théol. pastorale. Il a publié de nombreux ouvrages, entre autres une Caractéristique de la Bible, un Manuel de pédagogie, un Manuel à l'usage des maîtres de religion. — 2° Son fils, Hermann-Agathon, né à Halle 1802, y revint en 1829 comme directeur et professeur, après avoir été prof, de théol. à Iéna. f 1851. Il a publié une Collection des Conf. de foi des Égl. réformées.

N1EREMBERG, Jean-Eusèbe, né 1595 à Madrid de parents allemands, il étudia à Salaman-que les lettres et le droit. Il entra dans l'ordre des jésuites, mais fut rendu à ses parents qui suspectaient la sincérité de sa vocation. Il persista à rester jésuite, étudia à Alcala, servit quelque temps comme missionnaire et finit par le professorat à Madrid, f 1658. Ses ouvrages de piété eurent un grand succès, entre autres La diferencia entre le temps présent et l'éternité, dont Jér. Taylor fit des extraits à l'usage des évangéliques. Il a écrit aussi en faveur de l'Immac. conception de la Vierge.

NIKON, ou Nikita, né 1605 de parents pauvres à Valemunof, près de Nijnei-Novogorod, fit ses études ecclésiastiques au couvent de Saint-Macaire. Après dix ans de mariage il se sépara de sa femme et se retira, sous le nom de

Nicon dans le couvent d'Anser situé sur une île de la mer Blanche. Élu plus tard abbé d'un couvent près de Moscou, il fut successivement nommé par le czar Alexis, archimandrite du couv. de Nowazaskoï à Moscou, métropolitain à Novogorod 1647, et patr. de Russie 1652. En faveur auprès du czar, vénéré du peuple à cause de sa piété et de ses bonnes œuvres, il tomba en disgrâce vers 1658, peut-être à cause de son caractère absolu, peut-être à cause de certaines réformes qu'il voulut introduire, et il se retira dans un couvent qu'il avait fondé. Un autre patr. fut nommé en 1660, et lui-même, en 1666, hit traduit devant un tribunal ecclésiastique, sous prétexte qu'il avait abandonné son poste sans autorisation, accusé aussi d'avoir manqué au respect dû à l'empereur. Il se défendit avec énergie et dignité, mais n'en lut pas moins condamné, destitué et exilé au couvent de Théro-pont. Rappelé 1681 par le czar Fédor, il moumt en chemin près de Jaroslaw, pleuré du peuple. Après sa mort la condamnation qui pesait sur sa mémoire fut levée. On lui doit une revision des livres liturgiques de son Église d'après les mss. grecs et slovaques, ainsi que l'introduction d'une musique d'église. Les améliorations qu'il introduisit dans le chant furent même le prétexte d'un schisme; les rascolniques, ou vieux croyants, se séparèrent de l'Église.

NILUS 1° l'Ancien, ou le sage, anachorète. Né d'une bonne famille et élevé à la dignité d'exarque de Constantinople, il renonça à ses charges 420, et se rendit avec son fils Théodule dans le désert de Sinaï, pendant que sa femme et sa fille se retiraient dans un couvent. Surpris par les Sarrasins, son fils fut vendu à l'év. d'Éleusa, Palestine, qui le sacra diacre. Outre de nombreuses Lettres, on a de Nilus ses opuscules ascétiques, qui tout en faisant l'éloge de la vie solitaire, en montrent aussi les dangers, et nous initient à ce qu'étaient alors l'existence el le cércle d'idées des moines et des anachorètes. Christ est le seul vrai docteur, le seul sage; ses héritiers et successeurs, ce sont les moines. Le but suprême de la philos., c'est l'affranchissement des passions et des soucis terrestres el matériels; c'est en Christ seul qu'on peut trouver le repos. Il offre quelques analogies avec Épictète, qu'il a parfois copié en le complétant.

2° Nilus-leJeune, appelé aussi le Aoittmts, de son lieu natal, Rossano en Calabre. Il entra d'abord au couvent de Saint-Mercure, puis vécut en ermite près de Gaëte. Moins philos, que le précédent, il fut davantage un prédicateur de la repentance. et très recherché comme directeur. C'est à sa recommandation qu'Othon 10 fit grâce de la vie à l'antipape Jean XIV. f 1005, presque centenaire.

3° l'archimandrite. Notaire, puis protosyn-eelle, ou coadjuteur du patr. de Constautinople, avec promesse de succession, et représentant de l'empire romain d'Orient, il écrivit 1143 à la demande de Roger de Sicile un travail sur les cinq sièges patriarcaux, dirigé contre les prétentions romaines.

4o Cabasilas, archev. de Thessalonique vers 1340, grand adversaire de Rome, écrivit contre sa primauté et raconta les causes du schisme. Ce livre a été plusieurs fois réimpr. depuis Fla-cius 1555, et Saumaise 1606.

NIMBE, cercle lumineux dont les peintres ont coutume d'entourer la téte des saints. S'il a des rayons, et s'il entoure la figure, il s'appelle auréole. On lui donne la forme d'un triangle pour Dieu le Père; il est traversé d'une croix sur la téte de Jésus-Christ. Ceux qui ne sont que béatifiés n'y ont aucun droit. On n'en connaît pas l'origine.

NIMES, Nemausus, vieille cité romaine, riche encore de souvenirs et d'antiquités admirablement conservées, Tour-Magne, fontaine et temple de Diane, arènes. Maison carrée, porte de César, mosaïques. La Réforme y pénétra de bonne heure, et c'est d'un couvent d'augustins qu'elle se fit entendre, 1532-1537. Mais ses débuts ne sont qu'un long martyrologe. Elle trouve des adhérents dans l'université, dans le clergé et même chez les dominicains chargés de la poursuivre. Le bûcher de Pierre Delavau convertit le prieur dominicain Deyron, qui vient à Genève et propagera la vérité. Le cordelier Rozier a la langue coupée et est brûlé à petit feu, 1557. En 1559 l'église se constitue; on prêche d'abord à la Tour-Magne, puis dans les faubourgs, enfin le 29 sept. 1560dans l'égl. de Saint-Étienne du Capitole. Guill. Mauget arrive de Genève avec deux autres pasteurs 1561 et organise la communauté. De là la vérité rayonne dans les contrées environnantes, Sommières, Montpellier, Uzès, les Cévennes. En 1562, le 4 janvier, Mauget, assisté de Viret, donne la Cène à 8000 communiants dans la cathédrale. C'est le peuple qui l'emporte sur le clergé; triomphe trop rapide pour durer. Le même mois un édit enjoint aux réformés de rendre aux catholiques les temples enlevés, et des résistances locales amènent des persécutions. La guerre civile éclata, et Nimes se déclara pour le prince de Condé. Charles IX arriva 12 déc. 1564, venant de Saint-Privat et laissa espérer aux protestants qu'il leur permettrait de construire un temple, ce qu'il fit quelques mois après. Mais la paix n'existait plus que de nom. La Michelade éclata 30 sept. 1567, et ce ne fut pendant plusieurs années qu'une suite d'hostilités oû les deux partis furent tour à tour vainqueurs et vaincus. En 1570 nouvelle visite de Charles IX accompagné de Goligny. Ces luttes se terminèrent enfin, non par la paix, mais par l'écrasement du plus faible, et le 7 juillet 1629, Louis XIII et Richelieu recevaient à Saint-Privat les douze étages de la ville de Nîmes. Dès lors, et pendant un siècle et demi, presque sans interruption, les protestants ne cessent d'être les victimes des mesures et des demi-mesures les plus barbares, et ils honorent l'Évangile par leur fidélité. Le duc de Noailles peut écrire à Louvois qu'il travaille à les convertir: « Ils sont 240,000 dans la province; je crois qu'avant un mois tout sera expédié. • Il se trompait. Il y eut peu de conversions; il fallut revenir aux massacres, en grand et en détail. Finalement les Cévennes se soulevèrent, v. Camisards. La monarchie n'v gagna rien, le catholicisme non plus. Antoine Court réorganisait les égl. pendant que le vieux Louis se mourait à Versailles. Le siècle marchait, et vers 1769 les pasteurs purent rouvrir leurs églises de paroisses, auxquels l'édit de nov. 1787 donna la sanction légale. Rabaut et ses amis ont maintenu l'Église; la loi du 18 germinal an X la reconnaît. Elle n'a dès lors cesse de prospérer et compte parmi ses anciens pasteurs les noms vénérés de S. Vincent, F. Fon-tannès, Gardes et Borrel; parmi les laïques MM. Guizot, de La Farelle et de Clausonne.

NINIAN, ou Nynias, l'apôtre des Pietés du sud, d'après Bède, Hist. eccles. III, 4. Breton d'origine, mais élevé à Rome, il travailla, à ce qu'on dit, à l'évangélisation des Pietés et érigea en l'honneur de saint Martin de Tours une église de pierres blanches, à Whithaven en Gal-loway. Suivant une autre version, il serait venu à Rome en 370, aurait été consacré en 394 par le pape Siricius en vue d'une mission chez les Pietés, et serait f 432. Ce qui rend cette histoire peu vraisemblable, c'est qu'à cette date les Pietés étaient encore connus et redoutés par leurs déprédations en Angleterre. Si Ninian a vécu, c'est plus tard seulement. Quant à l'égl. blanche, elle n'est mentionnée qu'en 725 comme siège d'un évêché. Mais dès le 6*e siècle Gallo-way appartenait déjà à un des petits états chrétiens du nord de la Bretagne, dont peut-être dépendait une tribu picte.

NIOBITES, secte monophysite, ainsi nommée de son fondateur le philos, alexandrin Étienne, surnommé Niobé; il soutenait qu'il faut, ou bien avec le conc. de Chalcédoine, admettre deux natures en Christ, ou bien reconnaître sa pleine et entière unité, et par conséquent renoncer à distinguer en lui l'humain et le divin. Condamnée également par ceux d'Antioche et ceux d'Alexandrie, et par le synode de Guba en Mésopotamie, la secte finit par se dissoudre et passa en grande partie aux Chal-cédoniens.

NISIBIS, ville du nord de la Mésopotamie, fondée, d'après une légende, par Nemrod, mais qui existait déjà avant les Séleucides, et qui doit son nom à Medzpin, que l'arménien vulgaire appelait Nesebin, et les rabbins Menzi-ven. Àntiochus 1er l'agrandit, l'embellit et lui donna le nom d'Antioche de Mygdonie; elle était située sur le Mygdonius. Elle reprit son nom comme capitale de l'Arménie, 149 av. C.-14 ap. C., puis enlevée à Tigrane par Lucullus, elle resta presque sans interruption au pouvoir des Romains; sous Septime Sévère elle reçut le nom de Septimia Colonia. Centre du commerce i»t de la culture romaines, centre du christianisme dans ces contrées, boulevard de Home à l'extrême Orient, elle fut trois fois assiégée en vain par les Perses et ne fut perdue pour Rome qu'après la malheureuse expédition de Julien et la honteuse paix de Jovien 363. Conquise par les Arabes au 7me siècle, elle recouvra un moment son ancienne prospérité, mais elle est retombée sous la domination turque et n'est plus auj. qu'un bourg insignifiant. Nisibis a été plusieurs fois le foyer d'entreprises religieuses, La communauté juive, enflammée par le rabbin Akiba, se souleva en 131, ainsi que tous les juifs de Mésopotamie, en même temps que Bar-Cocab s'insurgeait en Palestine. Le parti nesto-rien, chassé de Syrie, s'installa à Nisibis sous la direction de Barsumas, et fonda vers 440 la célèbre école, qui fleurit jusqu'au 8me siècle. Enfin c'est du couvent de Phasilta, près Nisibis, que sortit l'apôtre des jacobites monophysites. Aujourd'hui encore les nestoriens et les jacobites s'en partagent l'église.

NITHARD, petit-fils de Charlemagne, par sa fille Berthe et Angilbert, né vers 790, fut élevé à la cour et à l'abbaye de Saint-Riquier, et reçut une excellente éducation pour son époque. Il remplit plusieurs charges importantes à la cour de Charles-le-Chauve, se battit à ses côtés à la bataille de Fontenay 841. et f 858 selon les uns, à la suite d'une blessure reçue contre les Normands; selon d'autres il fut quelque temps abbé de Saint-Riquier et il y mourut. A la demande du roi il écrivit eu 4 livres l'Hist. de Louis-le-Déb. et des divisions entre ses fils « pour faire connaître la vérité aux générations futures, > ouvrage estimé et digne d'un homme d'État.

NITSCHMANN, nombreuse famille de Zauch-tenthal, en Moravie, 1715. Elle a donné plusieurs hommes à l'Église: lo David, charpentier, mis en prison pour sa foi, réussit à s'évader et se rendit un des premiers à Herrnhut, 12 mai 1724, où sa femme le rejoignit avec 2 enfants. En 1731 il vint à Copenhague avec Zinzendorf. Il partit 1732 avec Léonard Dober pour la Ire mission parmi les nègres de Saint-Thomas, et fut sacré à son retour, par Jablonsky, premier év. de l'église renouvelée des Frères 1735. Après plusieurs voyages missionnaires, en Georgie et aux Antilles, il f 1758 en Pensylvanie, à 8Î ans.

2<> Un autre David N., jeune tisserand, qui prêchait l'Évangile avec force et fut persécuté. Son père même, justicier de Zauchtenthal, était contre lui. Il se rendit avec 4 de ses amis à Herrnhut où ils arrivèrent le 12 mai 1727. Plus tard ilen fut nommé syndic, et resta uni au comte, quand les Frères se séparèrent de Berthelsdorf.

3° Melchior, tisserand, surnommé le martyr; fils d'un David et neveu du charpentier, avait 20 ans à peine quand il tenait déjà des assemblées. Poursuivi comme prédicateur, jeté en prison, lié de cordes, privé de nourriture. Après sa délivrance il s'enfuit à Herrnhut, où il fol nommé ancien à 25 ans, en 1727. En 1728 il voulut aller visiter les protestants de Salzbonrç. mais fut pris dès son entrée en Moravie, a Schildberg. Il f en prison à OlmOtz 27 févr. 1729. Son compagnon Schmidt ne fut délivre qu'au bout de 6 ans.

4° David N., tisserand, un des premiers qui arrivèrent à Herrnhut 1724; travailla en Russie 1735, partit pour l'Ile de Ceylan 1740; pins tard il fut nommé membre de la direction de l'église.

5° Jean N. nommé évêque 1741, lorsque Zinzendorf partant pour l'Amérique, résigna ses fonctions. Le comte, à son retour 1743, lui retira cette charge, ne le trouvant pas suffisamment qualifié.

6<> David N. le charron, père de Melchior qui mourut en prison à Schildberg 1729, et d'Anna qui épousa Zinzendorf 1757 et qui + 1760 peu de jours après son mari, f 1760. — 7° JeanN. l'ainé, directeur du séminaire de théologie. — 8o Jean, le cadet, missionnaire en Laponie 1734. — 9o Martin, l'un des martyrs du massacre de Gnadenhutten, Amérique, 1755, etc.

NITZSCH lo Louis-Guill. de Nitxsch, pasteur à Wittenberg. — 2o Son fils, connu surtout par ses beaux cantiques, Charles-Louis, né 6 août 1751 à Wittenberg, fut élevé d'abord dans un orphelinat après la mort de sou père; il étudia la théol. à Wittenberg, maiô il hésita avant d entrer dans le ministère, ses Mies n'étant pas d'accord avec celles de l'orthodoxie régnante. Cependant après un court préceptorat, il tftf-monta ses scrupules; il accepta successivement les postes de Beucha, de Borna et de Zeiti, et finit par être nommé pasteur, surintendant, et prof, à Wittenberg 1790. Enlevé 1813 à son activité académique, il fut en 1817 nommé directeur du séminaire nouvellement fondé dam cette même ville, f 5 déc. 1831. Sa théologie tient un faux milieu entre le rationalisme et le supranaturalisme et ne satisfaisait aocan parti. Sous l'influence des doctrines de Kant, il disait que la révélation est nécessaire pour amener, sons la forme de l'autorité, l'esprit à reconnaître l'importance de l'idée morale, jusqu'à ce que l'esprit mûri en sente par lui-même la vérité et l'autorité. Ses disciples, ceux même qui n'acceptaient pas ses principes, rendaient hommage à l'élévation de son caractère chrétien.

3° Charles-Emmanuel, son fils, né à Borna 21 sept. 1787, fit ses études à Wittenberg, où il remplit aussi de 1811 à 1820 des fonctions pastorales; reçut de Berlin en 1817 le titre de Df en théologie. En 1820 il fut nommé doyen de Kemberg, et en 1822 prof, de théol. et prédicateur à Bonn; en 1847 il fut appelé à Berlin dans les mêmes conditions, et en outre en 1855 il fut nommé doyen de régi. Saint-Nicolas. Il prit une part active au développement de la vie religieuse, comme membre du Consistoire et du Synode. Il fut aussi nommé membre de la première chambre et s'intéressa à diverses questions politiques. Il assista plusieurs fois aux assemblées du Kirchentag. Il se retira en 1866 et + 21 août 1868. Il fut un des principaux représentants de l'école de Schleiermacher, de cette théol. intermédiaire qui cherche à rallier les partis, et il travailla à l'union des Églises. Ses principaux ouvrages sont: Système de la doctrine chrétienne, et Théol. pratique. Il a beaucoup écrit dans diverses revues, dont il fut le fondateur ou le collaborateur assidu, entre autres dans les Studien und Kritiken. Enfin plusieurs dissertations détachées, des discoure académiques, et surtout 6 volumes de Sermons, lui assignent en Allemagne une place distinguée.

NIVELEURS, v. Levellers.

NOAILLES, Louis-Antoine (de) né 27 mai 1651, second fils du duc Anne de Noailles, reçut une éducation soignée et fut nommé successivement abbé d'Aubrac, docteur en théol., év. de Cahors, de Châlons, archev. de Paris 1695, et enfin cardinal 1700. D'une âme élevée, d'une piété large, il fut plusieurs fois compromis dans les démêlés jansénistes, et désireux de plaire à la cour sans rien faire contre sa conscience, il eut une position hésitante qui lui fut amèrement reprochée. Il avait accepté la dédicace du N. T. de Quesnel et approuvé ses Réflexions morales, 1693, mais en 1696 il condamna l'ouvrage janséniste Exposition de la foi, par l'abbé de Barcos, et un anonyme releva cette contradiction dans: Un problème ecclésiastique. En 1705 il présida l'assemblée du clergé de France contre la bulle In vineam Do-mini, prit parti contre les jésuites, s'opposa à la bulle Unigenitus, protégea Port-Royal, et fut contre Le Tellier à la tête des Appelants. Mais la bulle ayant été enregistrée par le parlement 1720, il s'y soumit, d'abord avec des réserves, puis sans réserves 1728, f 4 mai 1729. Il a donné son approbation à la version de la Bible de Lemaistre de Sacy.

NOCES de sang, nom donné au massacre de la Saint-Barthélémy, qui eut lieu par ordre de Charles IX à l'occasion du mariage de sa sœur avec Henri de Navarre.

NOËL, jour de la nativité du Sauveur, une des plus grandes fêtes de l'Église. Le nom est selon les uns un abrégé d'Emmanuel (Dieu avec nous), selon les autres un dérivé corrompu de natalis, jour natal. Il parait évident, puisque les bergers et les troupeaux couchaient aux champs, que la naissance du Christ n'a pas eu lieu en hiver; et l'on se demande pourquoi et par qui cette solennité a été fixée au 25 décembre. En tout cas cette date est fort ancienne, et l'on a lieu de croire que c'est dans les Gaules qu'elle a été d'abord imaginée. Elle était déjà adoptée à Antioche en 380 et à Alexandrie en 430. Chrysostome, duns son Homélie sur la nativité du Seigneur, prononcée en 386, dit: « Il y a à peine dix ans que cette date nous est véritablement connue, mais les Occidentaux la connaissaient déjà, et ce n'est que récemment qu'ils nous l'ont communiquée. Ce sont les habitants de Rome surtout qui nous ont renseignés sur ce point, car ils célèbrent cette date depuis longtemps et conformément à une vieille tradition. » Or cette tradition ne peut être autre que l'antique coutume de célébrer le 25 déc., ou à peu près le solstice d'hiver et le retour du soleil. C'étaient les Saturnales. Et par une étrange coïncidence, elles avaient lieu presque au même moment que pour les juifs la fête de la Dédicace et celle de la Purification. Il est probable que c'est la rencontre fortuite de ces différentes fêtes, qui a porté les chrétiens à choisir le même moment pour la célébration de la leur, et il n'y aurait rien d'étonnant à ce que quelques-uns aient rapproché dans leur esprit le soleil de justice apparaissant au milieu des ténèbres du monde, de ce beau soleil dont les païens célébraient le retour sur leurs champs et leurs jardins. Si la naissance du Sauveur a été fixée au 25 déc., on comprend que l'Annonciation l'ait été au 25 mars, à l'équinoxe du printemps. L'une et l'autre étaient généralement acceptées au 5™ siècle, et c'est de Noël que part l'année ecclésiastique, en y comprenant les semaines de l'A vent.

NŒSSELT, Jean-Auguste, né à Halle 2 mai 1734, étudia dans sa ville natale et y revint, pour ne plus la quitter, après avoir visité l'Allemagne, la Suisse et la France. Professeur depuis 1760, il fut en outre nommé directeur du séminaire en 1779, et conseiller privé en 1797, f U mai 1807. Il a enseigné surtout l'exégèse du N. T., l'histoire, la dogmatique et la morale. D'abord très orthodoxe, il se relâcha un peu sous l'influence de Spalding, ce qui lui attira en 1794 une admonition royale, mais qui n'eut pas de suites. Il insistait surtout sur l'importance de la morale, mais sans la séparer de la religion. Il a laissé quelques discours et travaux académiques, et une étude sur les meilleurs ouvrages dans les diverses branches de la théologie.

NOET, Moïse, de Smyrne, fut excommunié en 230 parce que, pour maintenir l'unité du Père et du Fils, il enseignait que le seul vrai Dieu unique, s'appelait Fils dans sa manifestation humaine. C'était donc le Père lui-même qui avait souffert sur la croix; de là le nom de Patripassiens donné à ses adhérents. Parmi ses précurseurs figurent Théodoret, Épigoneet Cléo-mène; Sabellius fut son disciple. D'après quelques auteurs, c'est à Éphèse qu'il aurait été condamné. Personne ne voulut s'occuper de sa sépulture, ni de celle de son fr. Aaron.

NOGARET, Guillaume (de), né en Laura-guais, prof, de droit à Montpellier, prit parti pour Philippe-le-Bel dans ses démêlés avec Boniface VIII et combattit les prétentions du saint-siège au nom de la toute puissance royale re* connue par le droit byzantin. Il attaqua le pape devant les États généraux 4303, et reçut en récompense deux domaines et une baronie. C'est ncore lui qui, avec Sciarra Colonna, fit prisonnier le pape à Anagni. Il dirigea l'enquête contre les Templiers. En 1307 il fut nommé chancelier, f 1314.

• NOIRMOUTIERS (nigrum monasterium) île des côtes de la Vendée, connue surtout par un couvent de bénédictins qui y fut fondé par Philibert au 7™ siècle, et qui fut détruit au 9rae par les Normands.

NOLASQUE, Pierre, né 1189, d'une famille distinguée, près de Saint-Papoul en Languedoc, manifesta jeune des dispositions ascétiques, mais suivit Simon de Montfort dans sa guerre contre les albigeois et contre leur allié Pierre II d'Aragon. Pierre ayant été tué à la bataille de Muret 1213, et son fils fait prisonnier, Nolasque fut chargé de l'éducation du jeune prince et l'accompagna à Barcelone. Tous deux, ainsi que leur commun confesseur Raymond de Penna-forte, eurent en même temps 1218 une vision, qui eut pour résultat la fondation d'un ordre de chevaliers pour le rachat des prisonniers chrétiens. L'ordre fut fondé le 10 août 1218, et Nolasque en fut le premier général. Outre les 3 vœux ordinaires, les membres s'engageaient à tout sacrifier, leurs biens et même leur liberté pour la délivrance d'un captif. Grégoire IX, en leur imposant la règle de saint Augustin, les autorisa 1230 et 1236, sous le nom d'Ordre de la Merci pour le rachat des esclaves. Ils eurent d'abord un palais royal, ce qui fit donner à leur supérieur le titre de Vicaire de la cour d'Espagne. Leur costume était la robe blanche avec le scapulaire, et les armes d'Aragon sur la poitrine. Composé d'abord de chevaliers et de prêtres, l'ordre finit par ne plus se recruter que d'ecclésiastiques. Nolasque fit plusieurs voyages dans les pays des infidèles et racheta plus de 400 chrétiens dans le royaume de Valence. En 1249 il donna sa démission de général, mais continua de servir dans les plus humbles emplois jusqu'à sa f 1256. Saint Louis avait vouln l'emmener en Palestine 1247, mais les infirmités avaient empêché son départ. Canonisé 1628 par Urbain VIII.

NOLLIUS, Henri, né à Ziegenhain, prof, à Steinfurt en 1616, enseigna ce qu'il appelait h philos, hermétique, un bizarre mélange de théo-sophie mystique, de théologie, de médecine, d'alchimie, qu'il faisait remonter aux tables d'émeraude de Hermès Trismégiste, q. v. Renvoyé à cause de son affiliation aux Rose-Croix, il se rendit à Giessen, où sa présence amena des troubles. La publication de son volume Parergi philos. spéculum décida le landgiave Louis V à procéder contre lui 1622; il quitta la ville et on n'entendit plus parler de lui.

NOMBRE d'or. C'est dans le comput ecclésiastique le nombre dont on se sert pour marquer en quelle année l'on est du cycle lunaire. Ce cycle est une révolution de 19 années, ao bout desquelles on a cru longtemps que les nouvelles et les pleines lunes se retrouvaient ao même jour et à la même heure. Le premier cycle datant de l'ère chrétienne, on trouve le nombre d'or en divisant le chiffre de l'année où l'on est par 19, et en ajoutant 1 au reste. Ainsi pour l'année 1881, 19 y entre 99 fois, et il reste 0; le nombre^d'or sera donc 1.

NOMINAL (Blâme, ou Elenchus). censure po-blique et personnelle faite en pleine assemblée d'église par l'ecclésiastique officiant et désignant nominativement, ou d'une manière suffisamment claire la ou les personnes visées. Ce procédé, contraire à l'idée même du culte public, est en général condamné par l'Église comme par ies lois civiles, et ces dernières peuvent même le poursuivre comme constituant une injure. Une seule exception est faite pour les cas d'excommunication; là où elle existe il faut naturellement que la personne excommuniée soit nommée. Lors du colloque de Berlin 1662. qui avait pour but d'opérer un rapprochement entre les luthériens et les réformés, les premiers maintinrent leur droit de désigner en chaire les théologiens réf. qui étaient à leurs yeux de faux docteurs; cela fit naturellement échouer U conférence. Le prince électeur renouvela a cette occasion 1664 un ancien édit contre les désignations injurieuses qui pourraient être portées en chaire, • toutefois sans interdire la con-traverse, ni les discussions nécessaires, relativement aux points contestés. » C'est sur cet édit que P. Gerhardt donna sa démission, n'admettant pas la restriction que le souverain lui imposait.

NOMINALISME et Réalisme, deùx grandes tendances philos, qui se sont partagé presque tout le moyen âge, et dont l'utilité pratique ne se comprend pas facilement. Quelle est la nature des idées générales? Correspondent-elles à une réalité, ou ne sont-elles que le produit, la création de notre esprit? Les anciens étaient en général réalistes; Platon l'était, par sa doctrine des idées qui se détachent de l'Etre suprême et qui donnent aux substances leurs formes. Les nominaux, au contraire, nient absolument qu'il y ait rien dans la nature, qui corresponde directement aux idées générales; ainsi la notion d'arbre n'est représentée par rien de distinct et de réel. Stilpon de Mégare, le maître de Zénon, est le plus ancien représentant de cette école qui nie les idées abstraites, prétendant qu'elles existent seulement par le nom qu'on leur donne. Rosce-lin, chanoine de Compiègne, qui vivait à la fin du H me siècle, reprit la même thèse et peut être considéré comme le père du nominalisme pur. Il le professa avec grand succès à Paris; il réduisait les idées générales à de simples mots, à des sons, à une portion de langage, et se met-lait en opposition directe avec les opinions d'Aristote. En outre, ayant voulu appliquer ses idées au dogme de la Trinité, il fut bientôt attaqué par les plus célèbres dialecticiens et théologiens de son temps, Anselme, Abélard, etc. La discussion devint assez ardente pour que l'Église crut devoir s'en mêler, et le conc. de Soissons 1093 condamna l'opinion de Roscelin. Abandonné de tous, il fut successivement chassé de France, puis d'Angleterre où il s'était réfugié; il fut amené à une espèce de rétractation, et f 1108. Le réalisme triompha donc, et il fit durement sentir sa puissance à quiconque tentait de lui résister, théologien, ou philosophe. Mais déjà, et même avec Abélard, une doctrine intermédiaire semblait se produire, comme une conciliation entre deux extrêmes trop absolus; c'est que les universaux ne sont rien par eux-mêmes, ils sont quelque chose d'idéal, mais par la pensée ils deviennent quelque chose de réel; ils sont une déduction, une création de l'esprit, mais néanmoins une réalité, parce que l'abstraction ne peut se concevoir sans un point d'attache dans les choses. C'est ce qu'on appelle le conceptualisme, opinion qui a fini par prévaloir, après que le réalisme, longtemps vainqueur, eut été vaincu à son tour par le nominalisme, depuis Occam et la fin de la scolastique. Persécutés par l'Église, parce qu'ils représentaient la libre pensée, les nominaux devinrent persécuteurs à leur tour, et la mort de Huss à Constance ne fut pas seulement une vengeance de l'Église, ce fut aussi la revanche du nominalisme contre le réalisme.

NOMINATION des évêques. Elle dépendait des rois, déjà sous les Mérovingiens, à cause de l'importance civile qui se rattachait à cette charge ecclésiastique. Sous les Carlovingiens et sous les premiers emp. allemands, il y avait là un droit incontesté. Le concordat de Worms 1122, pendant la querelle des Investitures, donna ce droit aux chapitres. Mais à la suite de diverses négociations et concordats, les princes cathol. réussirent à recouvrer une partie de leurs droits, la France à plusieurs reprises depuis 1516, notamment en 1817, l'Espagne depuis 1753, la Bavière depuis 1817, l'Autriche depuis 1855. Les princes protestants n'ont que la faculté assez restreinte de diriger les choix sur une Persona grata. L'élection est d'ailleurs toujours subordonnée aux conditions canoniques exigées du titulaire; si elles sont remplies le pape donne l'institution, ou la confirmation, à l'évêque élu par le chapitre.

NOMOCANONS, mot grec qui signifie: Lois et règlements. On connaît sous ce titre, dans l'Égl. orientale, 4 Recueils ou collections, où se trouvent réunis, à côté des canons ecclésiastiques, d'autres décrets, arrêtés ou ordonnances d'ordre purement temporel. 1° Celui qui est attribué, à tort, à Jean Scolastique d'Antioche; patr. de Constantinople, f 565. Il renferme les 85 canons apostoliques, les décrets de 8 ou 10 conciles, 68 canons tirés des lettres de Basile, et un certain nombre d'ordonnances impériales sur des matières ecclésiastiques, — 2° Celui de Photius, publié 883, se divise en deux parties: a. le Nomocanon proprement dit, en 14 chapitres; b. le Syntagma canonum, décrets de con -ciles, sentences des pères, etc. Ce n'est autre chose que la reproduction continuée d'un nom. déjà approuvé par le conc. de Trull 692, et dont l'auteur est inconnu. Jean Zonaras vers 1120, et Balsa mon vers 1170, ont complété et commenté ce travail. — 3° Le Syntagma de Matthieu Blastarès, très répandu vers 1335; il contient sous 303 titres les lois et canons rangés alphabétiquement d'après le mot principal du sujet qu'ils traitent. — 4° Un nom. de 1561, du notaire Manuel Malaxus, de Thèbes.

NOMPAR de Caumont, v. La Force.

NONCES, v. Légats.

NON-CONFORMISTES, désignation qui s'applique d'une manière générale en Angleterre à toutes les églises, sectes ou congrégations séparées de l'Église établie, aux baptistes, aux wes-leyens, etc. Elle est à peu près synonyme de dissidents. Cependant à certaines époques ce mot a eu un sens plus restreint et a servi à désigner une opposition à l'Égl. officielle sur un point spécial de sa doctrine ou de sa discipline. Ainsi en 4566, sous Élisabeth, quand l'archev. M. Parker voulut imposer aux ministres un costume particulier. Ainsi surtout en 1662, lorsqu'il s'agit d'imposer à tous les pasteurs l'Acte d'uniformité et de leur faire signer à bref délai, sans presque leur donner le temps d'en prendre connaissance, t une adhésion pleine et sans réserve à tout ce que contient le Common Frayer Book, * sous peine d'être immédiatement chassés de leurs paroisses et privés de leurs traitements. Déjà l'année précédente un acte du même genre avait déclaré déchus de leurs fonctions civiles tous les citoyens qui ne communieraient pas dans l'Égl. anglicane. Près de deux mille pasteurs refusèrent leur adhésion, et de nombreux fidèles les suivirent. En 1665 l'Acte d'Oxford, pour remédier à la dissidence, interdit les réunions particulières et relégua les pasteurs non-conformistes à une distance d'au moins cinq milles de leurs paroisses et de toute ville envoyant un député au parlement; il leur interdisait en même temps d'ouvrir des écoles et même d'enseigner. On parle de 8,000 personnes qui seraient mortes en prison sous Charles II, et de 60,000 qui auraient été les victimes à divers degrés de cette intolérance. Sous Guillaume III, 1689, la tolérance leur fut accordée, mais ce n'est qu'en 1829 que tous les droits civils leur furent rendus.

NONNE, mot d'origine inconnue, dérivé probablement du copte, avec le sens de consacré. On le trouve déjà chez Jérôme au masculin et au féminin, et il est très commun au moyen âge; parfois même c'est un titre d'honneur donné aux chefs d'un couvent, ou par les jeunes moines aux moines plus âgés. Il ne se dit plus guère aujourd'hui que des religieuses, et non sans une légère nuance d'ironie.

NORBERT, né vers 1080-90 à Santen, duché de Clèves, d'une famille noble, possédait un canonicat dans sa ville natale. Reçu familièrement à la cour d'Henri V, il l'accompagna en Italie. Sa jeunesse fut très dissipée, mais ayant eu un cheval foudroyé sous lui à la chasse, il rentra dans la réalité de la vie, se convertit, renonça à ses riches bénéfices, se retira dans le couvent de Saint-Siegbert, près Cologne, et ne revint à Santen qu'après avoir reçu la prêtrise 1116. Il espérait réformer un clergé trop mondain et agir sur la population; mais il dut comparaître devant le synode de Fritzlar 1118, accusé d'avoir prêché sans autorisation et d'avoir excité le peuple. Il fut acquitté, mais ne se souciant pas de s'exposer à de nouvelles poursuites, il partit pour le Languedoc où le pape Gélase II, alors en exil, lui donna le droit de prêcher et de confesser. Calixte U à Reims 1119, lui renouvela cette autorisation. N'ayant pas réussi à réformer le clergé de Saint-Martin à Laon, il fonda dans le voisinage un couvent et un ordre dans un pré que Dieu lui avait montré en vision, 1120. et qui reçut de là le nom de Prémontré. Cet ordre avait pour but la réforme des chanoines réguliers de Saint-Augustin; il fut confirmé par Honorius II, 1126, et devint très florissant. Laissant sou abbaye aux soins de son ami Hugo des Fossés, il partit pour l'Allemagne. A Spire il prêcha devant Lo-thaire II, qui le nomma archev. de Magdebourç 1126. Ses efforts pour ramener les chanoines à une vie plus régulière, amenèrent divers soulè* vements, mirent parfois sa vie en danger et l'obligèrent à chercher son salut dans la fuite. Pour s'assurer des alliés il introduisit son ordre dans le diocèse et chez les Vendes. Envoyé par l'empereur au conc. de Reims 1131, il contribua puissamment à faire reconnaître Innocent II contre son rival Anaclet II. Nommé archichan-celier pour l'Italie, il accompagna l'emp. à Rome 1132; le pape à cette occasion lui donna plein? autorité sur tous les év. de Poméranie et de Pologne 1133 et confirma de nouveau l'ordre des prémontrés. Aussitôt après son retour en Allemagne, il f 1134. Canonisé par Grégoire XV, 1582. Ses restes, déposés à Magdebourg, furenl transportés à Prague 1626. Abélard avait soumis ses miracles et toute son activité à une sévère critique.

NORFOLK, une des plus anciennes familles d'Angleterre, descendant des Plantagenet par le 2me fils d'Édouard 1er. Elle a donné à son pays quelques hommes distingués sous divers rapports !<> Roger Bigod, comte de N.. qui assista 1245 au conc. de Lyon, où il défendit les droits de l'Angl. contre les prétentions des papes; il fut un de ceux qui obligèrent Édouard III à signer la Grande Charte, f 1270. — Son neveu, de même nom, aussi maréchal d'Anal-fut en lutte avec Édouard HL obtint de lui la Confirmation des Chartes. — 3° Thomas Howard, 3«« duc, de la nouvelle maison de Norfolk (les 2 familles s'étant alliées au commencement du 15®e siècle). Né 1474, grand amiral après l'expédition de Guyenne, vainqueur de l'Écosse 1513, il réprima la rébellion de l'Irlande, et fut nommé grand chancelier 1324. Favori de Henri VIII, il devint tout puissant après la chute du cardinal Wolsey 1529. Ardent catholique, il fit tout pour empêcher la rupture de l'Angl. avec Rome, ce qui ne l'empêcha pas de favoriser le mariage de sa nièce Anne de Bo-leyn avec Henri VIII. Quand il vit qu'elle peo-chait vers la Réforme, il travailla à sa perte et vota sa mort. Il donna au roi une seconde de ses nièces, Catherine Howard, et grâce à ce nouveau mariage, grâce surtout aux 6 articles de foi, appelés les articles de sang, il put organiser contre les protestants une furieuse persécution. Catherine à son tour fut exécutée 1542, mais cela n'ôta rien au crédit du favori. C'est seulement plus tard, en 1546, que le monarque soupçonneux, jaloux, et craignant une trahison de la part du chef trop puissant du parti catholique, le fit jeter en prison avec son fils et les fit condamner à mort sous prétexte de haute trahison. Le fils, comte de Surrey, eut la tête tranchée; la mort du roi 1547 sauva seule le vieux chancelier, mais il resta en prison à la Tour pendant tout le règne d'Édouard VI, 1547-1553, et n'en sortit qu'à l'avènement de Marie-la-Sanglante; il recouvra toute son influence, travailla activement à la marier avec Philippe d'Espagne, renouvela le régime des persécutions, et f 1554. Un des derniers ducs de Norfolk a embrassé le protestantisme, pour protester contre ce que les Anglais ont appelé l'aggression papale, c.-à-d. la prétention du pape de diviser l'Angleterre en diocèses catholiques.

NORMANDS, ou Northmans, (c.-à-d. les hommes du nord). Ce fut longtemps, sans distinction de race, le nom, ou plutôt la qualification de tous les peuples riverains de lap mer du Nord, danois, norwégiens, suédois, jutes, frisons, saxons même, qui ne vivaient que de pillage et n'étaient connus que par leurs pirateries. Dès le 5®® siècle les Saxons ravageaient la Britannie et la Gaule romaine. L'Heptarchie en Angleterre 451-584 ne fut qu'une invasion de Normands. Vers 625 ils forment de petits royaumes en Irlande. Charlemagne les paralyse en fortifiant l'entrée des rivières. Mais aussitôt après sa mort ils relèvent la tête et de 820 à 911 ils dévastent et rançonnent les côtes de France, et poussent même jusqu'en Espagne, formant ci et là tantôt de simples stations, tantôt de véritables établissements. Le plus considérable fut celui que Rollo (Robert) obtint de Charles-le-Simple, 912. Charles lui donna, avec la main de sa fille Giselle, une partie de la Neus-trie, la côte nord de la France avec Rouen pour ^pitale, à condition que lui et ses hommes se convertiraient au christianisme et reconnaîtraient sa suzeraineté. Ce fut le commencement du duché de Normandie. Ils se convertirent en e®st, et si bien que malgré de nouvelles émigrations de païens, il ne fut jamais question d un retour au paganisme. En 921 même cession de la Bretagne et aux mêmes conditions. En Angleterre ce furent surtout les Saxons et les «mois qui se signalèrent par leurs invasions et

ÏÏT i8*^- Alfred> Par l* Paix de 873> h™ ai Northum*>erland, I* Mercie et l'Ost-5*gUe> condition qu'ils se fissent baptiser; hliL qu on d'OTdiaaî™ remonter l'éta-uasement du christianisme dans le pays, mais

il n'y devint réellement la religion nationale que sous les rois danois Svent et Canut, vers 1016. La conquête de l'Angl. par Guillaume de Normandie 1066, eut pour résultat de remplacer dans l'Église la forme anglo-saxonne par le système romain. Une troisième conquête des Normands en Europe fut la conquête de la basse Italie et de la Sicile, où ils fondèrent au 13*® siècle, sous Robert Guiscard, le royaume des Deux-Siciles. Les papes favorisèrent les conquérants et leur donnèrent de nouveaux domaines, moyennant un tribut annuel et l'engagement de leur venir en aide en cas de besoin; ce fut pour eux une force considérable dans leurs luttes avec les empereurs.

NORWÈGE. D'après Adam de Brème, qui donne à ce pays le nom de Nordmannie, le christianisme y aurait été apporté déjà vers la fin du 6»® siècle par des missionnaires venus d'Écosse, mais il n'y laissa pas de traces. Ni Anschar, ni Rimbert ne poursuivirent l'œuvre commencée, quoiqu'ils se soient occupés du Danemark et de la Suède. Ce n'est guère qu'à la fin du 9m® siècle que des efforts suivis semblent indiquer une ère nouvelle pour ces populations encore très attachées à leurs dieux, et ce sont les rois, plus que le peuple lui-même, qui montrent un penchant décidé pour le Dieu invisible. Harald Haarfager le premier se prononce pour la foi chrétienne 903, mais en conservant quelques apparences du vieux culte pour ne pas heurter ses sujets. Son second fils Hakon, élevé en Angleterre et chrétien, lui succède à l'âge de 16 ans, 938; il fait venir des ecclésiastiques, bâtit des temples, et annonce son intention d'introduire dans son royaume la religion chrétienne; mais il rencontre une opposition formidable qui l'oblige à sacrifier aux dieux, à célébrer la Juul (la mère-nuit, la noël des païens) et à manger du cheval. Ces concessions, dont il se repentit amèrement toute sa vie, ne lui servirent de rien. Il fut tué 963 dans un combat contre ses neveux, fils de son fr. Érich, dont l'aîné Harald Grafeld, monta sur le trône et régna 963-977. Celui-ci voulut aussi protéger le christianisme, et il fut tué dans un soulèvement provoqué par ses nobles. Hakon-Jarl lui succéda; c'était un ancien baptisé qui avait renié sa foi et qui persécuta cruellement les chrétiens, sans cependant réussir à les détruire tous. Il fut tué 995. Enfin parut Olaf Trygveson q. v., puis après quelques années Olaff II, dit le Saint, 1019-1033, et Magnus son fils, dit le Bon, 1038-1047, qui introduisirent définitivement le christianisme dans le pays, autant par leurs vertus et leurs convictions que par leur autorité souveraine. Quoique l'Égl. relevât de l'archevôché de Hambourg, Olaff faisait venir presque tous ses prêtres d'Angleterre, ce qui fit que de longtemps la discipline romaine y ftit inconnue; les dîmes ne furent introduites qu'au 12®« siècle, le célibat des prêtres au milieu du 13®*, et il ne fut pas question d'une juridiction et de tribunaux ecclésiastiques. Jusqu'à la fin du il** siècle les évêques ne furent que des missionnaires sans diocèses déterminés, relevant depuis 1104 de l'archev. de Lund. C'est peu à peu seulement, vers 1152 et sous la direction du pape que de véritables diocèses se constituèrent, calqués sur les arrondissements politiques, à Bergen, Hammer et Havanger, sous l'archevêché de Nidaros. Dès lors la puissance du clergé s'accrut rapidement, au point que non seulement les rois n'avaient rien à dire dans le choix des évêques, mais que c'étaient au contraire les évêques qui avaient voix prépondérante pour l'élection d'un roi, quand il n'y avait pas d'héritier direct. Il fallut l'énergie de Magnus Lagabâtter, 1277, pour refouler ces empiétements du clergé que des rois trop faibles avaient autorisés. Si les chapitres élisaient les évêques sans contrôle, ceux-ci à leur tour nommaient qui ils voulaient aux places et bénéfices ecclésiastiques. On a peu de détails sur l'établissement de la Réforme en Norwège. On parle seulement d'un moine Antoine, qui prêcha l'Évangile à Bergen. C'est du Danemark que vint le mouvement, et le clergé s'y rangea sans trop de résistance; plusieurs ecclésiastiques cependant résignèrent leurs charges et il y eut un moment disette de prêtres. La diète de Oldesloë 1548 eut à intervenir pour empêcher le pillage des monastères et autres biens d'église. Le dernier archev. de Drontheim fut Torban Olafson qui, nommé eu 1542, fut chargé en 1546 de veiller à la nouvelle organisation ecclésiastique; il s'en acquitta avec autant de tact que de zèle, mais non sans rencontrer chez le peuple quelque résistance. La constitution de l'Église est toute civile; c'est le roi qui en est le chef, ou plutôt la diète; les pasteurs remplissent souvent des fonctions administratives. Le surintendant général a le titre d'évéque. Jusqu'en 1844 la religion luthérienne était seule tolérée; dès lors une plus grande liberté fut proclamée; des lecteurs de la Bible, des évangélistes, des pasteurs de diverses dénominations, wesleyens, baptistes, catholiques, en ont profité, et l'Égl. officielle elle-même, stimulée par la concurrence, s'est réveillée et à recommencé une vie nouvelle, non sans opposition d'un parti de la haute Église.

NOTBURGA, ou Notpurgis, née 1265 à Rot-tenburg sur l'Inn, Tyrol, entra comme cuisinière au service du comte Henri de R., mais sa bonté et sa piété lui attirèrent la haine de sa niaîtresse, qui la renvoya. Elle prit alors une place chez un paysan; comme elle refusait de travailler le dimanche, pour ne pas perdre la faveur de ses nouveaux maîtres par ce refus, elle eut l'idée de suspendre sa faucille en l'air comme si elle était retenue par un clou. Ce miracle suffit naturellement à calmer les paysans. Plus tard elle assista son ancienne maîtresse sur son lit de mort, et elle continua de demeurer dans la maison du comte comme servante et amie, f 4313. Canonisée comme patronne des laboureurs et des bergers, avec une faucille pour emblème. Son corps magnifiquement habillé est dans l'église d'Ében, sur le maître-autel.

NOTKER lo Balbulus, ou le Bègue, né entre 830 et 840 à Heiligau au nord de la Suisse, fut donné tout jeune au couvent de Saint-Gall, et sous les soins d'Iso il finit par devenir le directeur de l'école, f 912. Célèbre par sa piété, il fut canonisé par Jules II, 1513. On lui doit quelques Explic. des saintes Écritures, un Martyrologe , beaucoup d'améliorations dans le chant grégorien, l'idée des séquences, et un certain nombre d'hymnes et cantiques, entre autres le: Media vitd in morte sumus, trad. par Luther. — 2o N. aux grosses lèvres (Labeo) ou N. le Teutonique, f *022, maître à l'école de Saint-Gall, a traduit en vieux allemand Job (auj. perdu), les Psaumes, et plusieurs antres fragments de l'A. et du N. T. — 3o N. le physicien. abbé de Saint-Gall, disciple de Norbert, connu par la rigueur de sa discipline, qui Pavait fait surnommer Grain de poivre. — 4o de Liège, 972-1008. après avoir rempli des fonctions diplomatiques en Italie, et une charge importante à Saint-Gall, fut appelé à l'enseignement dans l'école de Liège et y attira de nombreux élèves. Auteur d'une Vie de Landoald, et peut-être de Rémacle.

NOTRE-DAME, surnom donné par les catholiques à la vierge Marie: puis par extension, nom de beaucoup d'églises et de cathédrales placées sous son vocable. Presque touj. un autre nom s'ajoute au premier pour le déterminer, ainsi N. D. des Ermites, de Liesse, de Lo-rette etc.

NOURRY (Nicolas Le), né à Dieppe 1647, entra 1665 dans l'ordre des maarins, f 1724. Connu surtout par son Apparatu* ad Biblioth. patrum max., étude sur les pères et les écrivains des 4 premiers siècles. Il a travaillé aussi à une édition des œuvres d'Ambroise, et a réimprimé De mortibus persecutorum, qu'il estime n'être pas de Lactance.

NOUVEL AN. La coutume romaine de faire commencer l'année au 1er janvier, ne s'est introduite que peu à peu dans l'Église, et n'a été généralement adoptée qu'au 16®»* siècle. Sa so-lennisation dans les premiers temps consistait moins en une féte proprement dite qu'en un jour " de prière, de repentance et d'humiliation, pu-opposition aux divertissements païens, comme on le voit par les sermons d'Augustin: De ca-lendis januanis contra paganos. Une fois la fête de Noël fixée au 23 déc. le l«r janv. se trouva naturellement en être l'octave et par conséquent le jour de la Circoncision; ce qui explique pourquoi la liturgie cathol. de ce jour ne renferme pas d'allusion au changement de l'année, tandis que dans les égl. protestantes c'est plutôt la fuite du temps, la brièveté de la vie, qui fait le principal objet des lectures, des prières et des méditations. C'est dans le même esprit que beaucoup d'égl. chrétiennes ont également établi, le soir de la Saint-Sylvestre, un service de Un d'année qui se prolonge chez plusieurs jusqu'après minuit, faisant un heureux contraste avec les dissipations nocturnes de ceux qui cherchent à s'élourdir à la même heure pour oublier les appels que leur adressent la fin d'une année et le mystère qui règne sur l'année nouvelle.

NOVALIS, pseudonyme du comte Fréd. de Hardenberg, né dans le comté de Mansfeld, Saxe, 2 mai 1772, d'une bonne famille de hern-houtes, f 25 mars 1801. Il étudia d'abord chez un oncle à Brunswick, puis à Eisleben, Iéna, Leipzig, Wittenberg, le droit, les mathématiques, les sciences physiques, la philos, et surtout la poésie. Riche, et très lié avec les deux Schlegel, avec Tieck et avec les meilleurs littérateurs de l'Allemagne, il appartenait à l'école romantique, mais avec un sentiment religieux el moral plus pur, qu'avaient encore développé une grave maladie qu'il fit dans sa 9me année, et la mort prématurée de sa fiancée Sophie de Kuhn. Il occupait un emploi aux salines de Weissenfels et venait d'obtenir un bel avancement, quand la mort le frappa prématurément dans la maison paternelle. Ses écrits portent l'empreinte de son caractère, à la fois poétique, philos, et religieux; le rationalisme lui était antipathique sous toutes ses formes. Ses œuvres* impr. Berlin 1816, renferment outre ses (Cantiques spirituels et ses Hymnes à la Nuit, un roman intitulé les Disciples de Zaïs, et un autre inachevé: Henri d'Opferdingen. Ses admirables cantiques, d'une grande élévation, ont parfois une tendance panthéiste en contradiction avec le caractère évangélique et mystique du plus grand nombre.

NOVAT, ou Novatus, diacre de l'égl. deCar-Ihage, représentait contre Cyprien, à l'époque des persécutions de Décius, le parti de la modération et même d'un certain relâchement envers ceux qui avaient renié la foi; il prétendait qu'en leur refusant l'absolution on les rejetait dans l'idolâtrie. Il avait en outre consacré un diacre, Félicissimus, ce que Cyprien regarda comme une atteinte à ses droits. Cité devant le synode 2i9 et condamné, il s'enfuit à Rome 251 où, fidèle à ses habitudes d'opposition, à la fois remuant et violent, il prit le parti de la discipline et de la rigueur contre Corneille qui prêchait l'indulgence. Il s'unit à Novatien, et avec l'appui de quelques mécontents, réussit à le faire nommer pape en concurrence avec Corneille. Il partageait les idées montanistes.

NOVATIEN, païen d'origine, homme de science et d'érudition, philos, distingué, moraliste sévère, stoïcien rigide. Après un très grand travail d'âme il fut baptisé pendant une grave maladie dans laquelle il trouva la paix par la foi en Jésus-Christ. Cette circonstance devait l'éloigner à touj. de l'état ecclésiastique, mais comme c'était un homme très distingué, Fabien crut pouvoir faire une exception en sa faveur. La discussion sur la conduite à tenir envers les lapsi (tombés), était alors dans tôute sa force. Novatien s'était prononcé dans le sens de la rigueur. Pendant les 16 mois de la vacance épiscopale survenue après la mort de Fabien, No-vat était venu de Carthage à Rome, et quand on put de nouveau procéder à l'élection d'un évêque, il y eut division dansl'Église. Corneille fut nommé, mais le parti opposé, poussé par Novat, lui opposa Novatien, qui se laissa élire et qui fut consacré par 3 év. d'Italie, vers 231. Il soutenait que ceux qui avaient sacrifié aux idoles, ou péché gravement, ne pouvaient plus jamais être réintégrés dans l'Église, ni reçus à la sainte Cène. Tout ce qu'on pouvait faire était de les exhorter au repentir et, dans ce cas, de leur laisser l'espérance que Dieu leur pardonnerait. Les partisans de Novatien firent un pas de plus el déclarèrent impurs et souillés tous ceux qui entretiendraient la communion avec les tombés. Ils s'appelèrent eux-mêmes les purs (catharoï), déclarèrent déchues toutes les autres églises et rebaptisèrent ceux qui venaient à eux, n'admettant pas comme valable le baptême de l'Égl. catholique. Grâce à son apparence de sainte fidélité ce parti recruta un grand nombre d'adhérents, le schisme s'étendit, il se forma des égl. novatiennes dans presque toutes les parties de l'empire. Le conc. de Nicée et Constantin les ménagèrent. Toutefois Novatien n'eut pas de successeur dans ses prétentions pontificales.

NOVICIAT, temps d'épreuve imposé à ceux et à celles qui désirent entrer dans un ordre religieux, pour qu'ils apprennent à connaître leurs futures obligations, qu'ils s'habituent à cette nouvelle vie, qu'ils s'instruisent des divers services liturgiques qu'ils auront à remplir, et qu'ils puissent réfléchir avant de s'engager définitivement. Pendant leur noviciat ils restent toujours libres et l'ordre n'a aucun droit sur leurs biens. Le noviciat dure en général un an, deux chez les jésuites, quelquefois Irois, et

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ne peut être abrégé que dans des cas exceptionnels. Il aboutit soit à une profession expresse, soit à une profession tacite. Tertullien et Cy-prien parlent de vierges (et de veuves) qui, faisant vœu de virginité, restaient cependant dans les conditions ordinaires de la vie sans entrer dans un couvent; elles avaient aussi un noviciat à subir, ce qui était d'autant plus nécessaire que leurs parents les vouaient quelquefois au célibat avant qu'elles eussent conscience de leurs actes. Mais le vrai noviciat n'était guère possible qu'avec la vie cloîtrée. Le fait que des parents vouaient quelquefois à un ordre religieux des enfants mineurs, a souvent préoccupé les conciles; le second de Trull exigeait que le ou la novice eût au moins 10 ans; Basile en demandait 16; Grégoire-le-Grand 18, celui d'Arles 25, celui d'Agde 40 pour les religieuses. Justinien avait fixé la durée du noviciat à 3 ans; les garçons pouvaient le commencer à 14 ans, les filles à 12, malgré l'opposition de leurs parents.

NOYON, vieil évêché connu par les souvenirs de Médard et jl'Éloi, et comme patrie de Calvin. On y montre encore, transformée en auberge, la maison du réformateur; mais outre que la maison ancienne n'existe plus, il n'est pas même prouvé que l'emplacement actuel soit authentique.

NUENAR (de), noble famille des bords du Rhin, auj. éteinte, qui a donné à la Réforme plusieurs personnages distingués, entre autres Hermann, f 1531, humaniste, l'adversaire de Hoogstraten et le partisan de Reuchlin; il seconda l'archev. Hermann V de Cologne dans sa tentative de réformation. Le fils de son fr. Guillaume, 1515 f 1579, introduisit la Réforme à Meurs et fit nommer Guebhardt. Son beau-fr. Adolphe de N. + 1589, gouverneur de Guel-dre, fit prêcher l'Évangile dans son palais de Mechtern, et décida ainsi la formation d'une égl. évangêlique à Cologne.

NUNEZ, Hernando, savant distingué, prédicateur et prof, à l'univ. de Salamanque; auteur d'une collection de Proverbes, dont quelques-uns très sévères pour le clergé.

NUREMBERG, l'ancien Castrum Noricum de Conrad I®r 912, apparaît pour la première fois en 1050 sous le nom de Norimberga, et devint ville impériale du cercle de Franconie. Longtemps célèbre par son commerce, elle le fut aussi comme centre d'une grande culture artistique et littéraire. Albert Durer, Hans Sachs, Veit FIoss, Pirkheimer l'ont illustrée. Elle était prête pour la Réformation, qui y pénétra déjà en 1520 sous Venator. En 1523 la Cène y était distribuée sous les deux espèces; en 1524 on comptait 3000 communiants, et le conseil de la ville se rangeait autour de la Parole de Dieu en dépit de Ferdinand. En 1530 la ville signait la Conf. d'Augsbourg. Osiander et Veit Dietrich (1546-1549) contribuèrent surtout à fortifier et à diriger ce mouvement. C'est à Nuremberg que les évangéliques se réunirent après la diète de Spire 1529, pour envoyer des délégués à lem-pereur. Le Catéchisme dit de Nuremberg, composé par André Althamer (Brenz f 1564), diacre à Saint-Sébald, parut en 1528 et se répandit rapidement; il fut trad. en anglais presque textuellement par ordre de l'archev. Cranmer 1548, et resta en usage jusqu'en 1552; il fut alors remplacé par celui de l'év. Poinet. Le 30 mars 1573 le conseil de la ville accepta comme livres liturgiques, sans exclure d'aulres bons livres, mais en les subordonnant aux enseignements de l'Écriture, douze ouvrages choisis par l'assemblée des pasteurs de Nuremberg et du Brandebourg, entre autres les trois premiers symboles, les catéchismes de Luther, la Conf. d'Augsbourg, les articles de Smalcalde, les Lieux communs de Mélanchthon, etc. Trois diètes intéressant la Réforme furent tenues dans cette ville: lo En 1522, après s'être occupée de la guerre contre les Turcs, la diète aborda le 13 déc. la question religieuse. Le légat Fr. Chiere-gati demandait simplement, en vertu de l edit de Worms 1521, la suppression de l'hérésie luthérienne à Nuremberg, mais il fut amené peu à peu à reconnaître aussi les fautes de son Église, et à promettre une réforme par le pape. Les États lui opposèrent 81 griefs, et dans la séance de clôture, 6 mars 1523, ils retirèrent en réalité l'édit de Worms, tout en interdisant à Luther et à ses amis de rien publier sur la question jusqu'à ce qu'elle fût réglée; les évangéliques protestèrent contre cette clause, qui resta lettre morte. Les États ajoutèrent que si Rome ne tenait pas compte de leurs griefs ils aviseraient à ce qu'ils auraient à faire. Chiere-gati découragé avait déjà quitté Nuremberg 28 février; on lui envoya copie de ces résolutions. L'échec était complet; Adrien VI en mourut de chagrin. — 2<> Diète convoquée pour le 11 nov. 1523, réunie seulement le 14 janv. 1524, en présence du légat Campeggio. Elle maintient le décret de Maximilien 1er de 1500 qui crée on tribunal indépendant de l'empereur, chargé spécialement de veiller à la paix publique et a l'administration* de la justice, décret déjà renforcé en 1521 par Charles-Quint en vue de ceux « qui attaquent la foi chrétienne. » Cette décision est prise contre les évangéliques. Une partie de la diète se transporte à Esslingen, se réorganise et demande la convocation d'un concile, en même temps que le maintien de l'édit de Worow. Luther d'un côté, Clement VII de l'autre, sont également mécontents. — 3* La diète du 31 janv. 1543 creuse encore plus l'abîme qui separe les cathol. des protestants, ces derniers refusant de combattre les Turcs et de s'associer à la demande d'un concile, jusqu'à ce que la paix religieuse de 1532 soit consacrée et que le tribunal ecclésiastique soit réformé en ce qui les concerne. Ils quittent la diète, dont les arrêts sont dès lors invalidés et de nul effet. Ulrich de Wurtemberg essaie, mais sans y réussir, de former une alliance avec la Saxe, la Bavière et la Hesse. — La Paix de Nuremberg, conclue le 2:i juillet 1532, et sanctionnée le 2 août à Ratisbonne par l'empereur qui présidait (ce qui la fait appeler aussi quelquefois Paix de Ratisbonne) conserve aux protestants le libre exercice de leur religion, avec la jouissance de leur juridiction et de leurs biens ecclésiastiques, contrairement aux stipulations de la diète d'Augsbourg qui les sommait sous des peines sévères, de se soumettre avant le 15 avril 1531, à la suite de la ligue de Smalcalde. Par cette paix les deux parties déclarent renoncer à l'emploi des moyens violents, jusqu'à la réunion d'un concile qui devra avoir lieu dans l'année ou jusqu'à une nouvelle diète. Les décisions de Worms, Spire, Nuremberg et Augsbourg sont ainsi provisoirement suspendues, à l'avantage des protestants. Cependant pour Philippe de Hesse, et même pour Luther, ce n'est encore qu'une paix trompeuse, et les alliés de Smalcalde protestent en 1537 contre tout concile qui serait convoqué par le pape, ou placé directement sous son autorité.

NYNIAS, v. Ninian.

NYSSE, ville de Cappadoce, sur l'Halys, célèbre surtout par l'èpiscopat de Grégoire, q. v.

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OATES, Titus, fils d'un tisseur de rubans, né vers 1619, passa sa vie dans de misérables intrigues, qui lui valurent tantôt de l'argent, tantôt des peines corporelles et la prison. D'abord baptiste, puis pasteur baptiste sous Cromwell, il passa à l'Égl. anglicane quand il vit que le non-conformisme n'était plus en faveur. Accusé de choses graves, il fut renvoyé des postes ecclésiastiques qu'il occupait. Il se fit alors catholique et jésuite, sans qu'on sache si ce fut sérieusement ou pour espionner ses nouveaux coreligionnaires. Chassé successivement des collèges anglais de Valladolid et de Saint-Omer, il revint en Angleterre 1678 et fit savoir au roi qu'un complot était organisé contre sa vie par les jésuites. Il en informa en même temps le juge de paix, sir Edmondsbury Godfrey. D'après sa déclaration, appuyée de documents apocryphes ou falsifiés, le pape avait donné l'Angleterre aux jésuites; le roi devait être assassiné comme hérétique; la ville de Londres serait brûlée et tous les protestants massacrés; la couronne serait ofl'erte à Jacques, à condition qu'il s'engageât à exterminer le protestantisme; s'il refusait, il serait aussi mis à mort; le père La Chaise était à la tête du complot, mais le p. Coleman. secrétaire du duc d'York, y était également compromis. On y mêla même le nom de la reine. Il y avait là trop d'invraisemblances, et cité devant le conseil Oates se contredit sur des points trop importants, pour qu'on pût ajouter foi à sa révélation. Cependant elle trouva créance dans le peuple, et même chez plusieurs ministres. En tout cas ce fut une arme aux mains de l'opposition. La mort de Godfrey assassiné, 15 oct., acheva de soulever les passions, et le 21 Danby portait la question devant le Parlement. Le serment du Test de 1673 et le serment de suprématie furent renforcés, de manière à exclure les cathol. de toutes les fonctions publiques; le duc d'York se retira du conseil; plus de 2000 catholiques furent mis en prison, plus de 30,000 relégués à une distance d'au moins dix mille des palais du roi; plusieurs prêtres, entre autres Coleman, périrent sur l'écha-faud. Oates, comme sauveur de la patrie, eut son logement au palais et une riche pension. L'exécution de lord Stafford 29 déc. 1680 marque le point culminant de ces persécutions, et la réaction commence. En 1683 Charles se sent assez fort pour informer contre les chefs du parti protestant; il a dissous la Chambre des communes, et il fait juger par ses tribunaux les lords Shafterbury, qui peut fuir en Hollande; Russel et Sidney, qui sont décapités; Essex, qui se suicide dans la Tour; Hampden, qui est condamné à une amende de 40,000 l. st., enfin Howard, qui est acquitté. Tous étaient accusés de haute trahison. Oates ne pouvait pas échapper à ce triomphe du parti catholique. Il avait injurié le duc d'York, il fut condamné à une amende de 100,000 1. st., et jeté en prison faute de paiement. L'avènement de Jacques II (le duc d'York) lui fut plus fatal encore, 1685. Convaincu de parjûre, il fut dégradé, frappé d'une forte amende, promené ignominieusement à travers les rues de Londres, attaché au pilori et condamné à l'emprisonnement à vie; il devait en outre être fouetté publiquement 5 fois par an. La sentence fut exécutée avec une excessive cruauté. Après la chute de Jacques et l'avènement de Guillaume 1er, 1689, il recouvra sa liberté et une pension de 300 livres. Il se rattacha de nouveau aux baptistes, mais se fit chasser pour tromperie et finit misérablement 1705, âgé de 86 ans.

OBÉDIENCE, en style catholique, est synonyme d'obéissance, et s'emploie spécialement pour indiquer les rapports immédiats des inférieurs avec leurs supérieurs, du prêtre avec l'évêque, du moine avec son abbé. Quoique essentiellement professionnel ce terme embrasse tout, puisque l'obéissance doit être absolue et sans limite. Le plus ancien serment d'obédience date de Fulbert de Chartres f 1029; il a été accepté par Grégoire VII, et n'a subi dès lors que de légères modifications. En vertu des lettres d'obédience, le supérieur donne des ordres qu'il n'a pas besoin de justifier et qui ne se discutent pas. La suprématie du pape sur les princes et les rois est aussi d'obédience; baiser la pantoufle et tenir l'étrier en sont les symboles.

OBER-AMMERGAU, village du sud de la Bavière, non loin du lac de Constance, connu surtout par les représentations du mystère de la Passion que la commune y fait célébrer tous les dix ans, en accomplissement d'un vœu qu'elle forma pour écarter le fléau de la peste dont elle était menacée. Longtemps le spectacle fut rudi-mentaire et même trivial, malgré le sérieux qu'on y mettait. Le roi Louis eut l'idée d'en faire quelque chose d'artistique et de religieux, et il chargea de ce travail le père Daisenberger, de l'ordre du Saint-Esprit, fils d'un paysan, mais compositeur et musicien distingué (f 1883 à Ober-Amm. âgé de 85 ans). Ce drame de la passion obtient un succès toujours croissant.

OBERLIN, Jean-Fréd., né 31 août 1740, fils d'un instituteur de Strasbourg, et fr. du philol. Jérémie-Jacques. Passionné de l'état militaire, il fut converti de bonne heure et, à 20 ans, se consacra pour la vie au service de Dieu et de s?s semblables. Il fit de bonnes études; en 1758 il était bachelier ès lettres; en 1763 docteur en philosophie. Il fit un peu de médecine en 1762 et 1763 avec le Dr Ziegenhagen, chez qui il était précepteur, et après avoir fini sa théologie il chercha, comme La Fléchère, une place où il y eût peu à gagner et beaucoup à travailler. Le Ban de la Roche se présenta. Ce plateau, qui compte 5 villages, Rothau, Fouday, Belmont, Bellefosse et Zollbach, était presque sauvage et sans communications avec le dehors; les habitants en étaient misérables et ignorants. L'apostolique pasteur Stuber, qui avait fini par leur apprendre un peu à lire et qui avait fait venir de Bâle 50 Bibles, venait d'être appelé à Strasbourg, et il cherchait un homme pieux et dévoué qui consentît à le remplacer. Oberlin s'offrit, fut nommé et arriva le 30 mars 1767. Il lui consacra son ministère de 53 années, son temps, ses facultés, son cœur. Il épousa Made-laine-Salomé Witter, de Strasbourg, qui fut pour lui une amie et une aide précieuse. Des biographies nombreuses ont raconté comment l'activité d'Oberlin dut se porter sur toutes les branches; il dut tout faire presque à la fois. Il était avant tout pasteur et missionnaire; il dnt être en même temps jardinier, cultivateur, pépiniériste, médecin, ingénieur, agent-voyer, pionnier, juge de paix, industriel, maître d'école, etc. La contrée n'avait point d'industrie et presque pas de culture; dans J'intérêt de la civilisation, et dans l'intérêt matériel de ses paroissiens, il fallait faire toutes choses nouvelles; mais on sait combien les personnes peu éclairées redoutent les innovations. Il réussit cependant, non sans peine, à introduire dans ces villages la culture du lin et du trèfle, et k renouveler par des pommes de terre étrangères les espèces dégénérées qui ne rendaient plus rien. Il décida la construction d'un chemin et d'un pont pour rejoindre la grande route, et comme ils hésitaient il prit la pioche et se mit à l'œuvre; tous suivirent. L'année suivante il établit des communications entre les différents villages de la paroisse. Il apprit à ses hommes à soigner leurs fumiers, à diguer leurs ruisseaux, à soutenir par des murs les terrains menacés par les eaux. Il forma une soc. d'agriculture, ouvrit des concours, donna des prix. Il introduisit la filature du coton, et le vénérable Legrand de Bâle, avec ses deux fils Daniel et Frédéric, s'associant à ses efforts, vint se fixer à Fouday et fonda un établissement de passementerie en rubans de soie, faisant vivre les ouvriers en leur procurant du travail chez eux pour leur conserver la vie de famille. Il choisit aussi un certain nombre de jeunes garçons, qu'il envoya en apprentissage à Strasbourg comme vitriers, maçons, menuisiers, charrons, etc. Le préfet du Bas-Rhin, Lézay-Marnésia, son ami et admirateur, venait le voir souvent et le secondait au besoin. Mais Oberlin, si actif pour le temporel, était plus actif encore dans l'accomplissement de son ministère et n'oubliait jamais, ni dans ses prédications, ni dans ses conversations particulières, ni dans ses lettres, qu'il avait charge d'âmes et qu'il devait à tous la vérité de l'Évangile. Ses sermons étaient pittoresques, simples, populaires, mais soignés. Il avait quelques idées particulières sur la vie éternelle, mais le Consistoire, après s'en être un moment préoccupé, jugea qu'il valait mieux s'en remettre à la prudence du fidèle pasteur. Oberlin perdit sa femme en 1784 et lui voua un touchant et constant souvenir. 11 perdit aussi en 1815 son fils Henri, qui allait entrer dans la carrière ecclésiastique. Il avait réussi à associer à ses travaux de pasteur trois respectables femmes de sa paroisse, Sophie Bernard, Catherine Scheidecker et Louise Schepler: cette dernière le servit sans gages jusqu'à la fin, refusa le modeste héritage qu'il lui laissait par testament, et demanda comme seule récompense le droit d'ajouter à son nom celui d'Oberlin. Parmi les distinctions terrestres qui avaient été accordées au vieux pasteur, il faut noter la médaille d'or de la Soc. royale d'agriculture de Paris, décernée sur le rapport de M. François de Neufchâteau, et la croix d'honneur donnée par Louis XVIII. Sa mort paisible, l®' juin 1821, fut un deuil pour toute la contrée. A son arrivée, 50 ans auparavant, le Ban de la Roche ne comptait que 500 habitants; le nombre en avait décuplé dans l'interxalle. Sa tolérance était grande; les cathol. l'aimaient et venaient communier auprès de lui. Un pauvre juif étant maltraité dans le village, il le recueillit dans sa maison. Il s'intéressait à tout ce qui regardait l'avancement du règne de Dieu, Sociétés bibliques, de missions, etc. — Sa vie a été racontée entre autres par Schubert 1826-1832, Burckhardt 1843, Mad. Guizot, etc,

OBLATS (Oblati, offerts), se dit avant tout d'enfants voués par leurs parents à la vie religieuse monacale; un costume, ou du moins une couleur particulière, le bleu ou le blanc, les distingue d'habitude. On désigne cependant encore sous ce nom ceux qui, en entrant dans un ordre, lui font l'abandon de tous leurs biens; ils portent aussi le nom de donati, les donnés; ceux qui, sans faire de vœux, s'offrent à une «ibbaye comme vassaux; enfin jusqu'en 1671, certains couvents logeaient et nourrissaient des soldats hors de service, mutilés ou infirmes, qui s'appelaient Oblats, et qui dès lors furent placés aux Invalides. Une dame romaine, sainte Françoise, fonda en 1425 l'ordre des Oblates. Charles Borromée en 1578 organisa à Milan une congrégation de prêtres réguliers, qui s'étant offerts spontanément, et ayant pris pour patron saint Ambroise, reçurent le nom d'Oblats de saint Ambroise, et furent approuvés par Grégoire XIII; ils s'occupent surtout de cure d'âme et d'enseignement.

OBOTRITES, tribu slave de la Germanie, faisant partie des Vendes ou Wendes et habitant les rives du Haut-Oder, à peu près le Mec-klembourg d'aujourd'hui. Elle fut évangélisée par Vicelin, se convertit en apparence, retomba plusieurs fois dans le paganisme, entre autres sous Henri-le-Lion 1180, et ne fut définitivement acquise au christianisme qu'au 13m« siècle.

OBSERVANTS, ou Observance (Pères de 1'), nom donné dans plusieurs ordres, et notamment chez les franciscains q. v., aux religieux rigides et aux congrégations qui s'engageaient à observer strictement les règles monastiques. Il y a aussi l'étroite Observance de Citeaux, la grande Obs. de la Merci, la primitive Obs. des frères prêcheurs. Le nom apparaît pour la Ire fois officiellement au conc. de Constance, mais il était depuis longtemps en usage auparavant, et l'on peut dire d'une manière générale que les observants étaient regardés par les peuples et par les papes comme les vrais représentants des ordres religieux, les autres faisant trop bon marché de leur règle et n'étant en quelque sorte que des amateurs. En 1380 les franciscains stricts comptaient 12 couvents florissants. Mais les conflits étaient fréquents, et ni Martin V, ni Léon X ne purent concilier les partis contraires; ils durent s'habituer à la scission en permanence, les Observants ayant un minister ge-neralis, qui est en même temps le général de l'ordre tout entier, et les conventuels ayant à leur tête un magister generalis. Ce sont les observants qui ont la garde du Saint-Sépulcre.

OCCAM, Guillaume (d'), né 1280 à Occam, Surrey, cordelier; continuateur de Roscelin et d'Abeilard, disciple de Duns Scot, fonda ou ressuscita le nominalisme en opposition au réalisme qui régnait presque sans conteste depuis deux siècles, et il défendit son opinion par tous les moyens possibles, philos., dialectiques, théologiques. D'un caractère ardent, même violent, il fut banni d'Oxford à cause de la nouveauté de ses idées et quitta l'Angleterre ou il avait rempli diverses charges ecclésiastiques. La France devint sa patrie d'adoption; il enseigna la théol. à Paris sous la bannière mystique et remuante des franciscains, revendiqua l'autorité souveraine des Écritures en matière de foi, prit parti pour Philippe-le-Bel contre Boniface VIII, attaqua les vices et les prétentions des papes, fut excommunié, se rendit, après un court séjour en Angleterre, à la cour de Bavière, ou il défendit l'électeur Louis contre Jean XXII. Il recommença son enseignement à Munich, mais avec moins de succès qu'à Paris, et f 1343 ou 1347. Il a été appelé le Docteur invincible; c'est lui qui a réveillé pour Aristote l'enthousiasme des écoles; on a failli même béatifier le philos, païen. Les principaux écrits d'Occam sont: Super 4 Ubros sententiarum; Summa logicœ, Quod-libeta, De sacramento altaris. De potestate sumxni pontificis.

OCCURENCE des jours de fête. Comme dans l'année ecclésiastique certaines fêtes se célèbrent à jour fixe, et que d'autres sont mobiles et dépendent du cycle de Pâques, ou de certaines circonstances particulières, lorsqu'il y a coïncidence, c'est la fête principale qui l'emporte; l'autre est ajournée, transférée, ou bien l'on se borne à la mentionner simplement pour mémoire dans la liturgie.

OCÉAN PACIFIQUE. Cette immense étendue d'eau, comprise entre l'Asie, l'Amérique et l'Australie, est semée d'une foule d'îles et d'archipels, dont un grand nomhre ne sont guère connus que depuis un siècle et qui ont été dès lors évangélisés, et en partie civilisés par des missionnaires de tous les pays et de toutes les Églises. Outre les différents articles, v. Polynésie.

OCHINO, Bernardino, né 1487 à Sienne, franciscain d'abord, puis capucin de la stricte observance 1534, deux fois général de son ordre, en 1538 et 1541, confesseur de Paul 111. Sans avoir une bien grande culture théologique, il possédait une éloquence entraînante et compte parmi les orateurs populaires les plus puissants. La nature de son ministère l'avait conduit k l'étude de la Bible, et il prêcha à Naples, à Venise, à Vérone, la justification par la foi. Mandé à Rome pour donner des explications sur ce point il rencontra à Florence Vermigli, qui Jui conseilla de fuir, et il vint k Genève ou il fut nommé pasteur des réfugiés italiens 1543. Il se rendit au bout de deux ans k Bâle, puis à Augsbourg; mais en 1547 la ville ayant capitulé entre les mains de Fempereur, il se retira à Londres où il fut pasteur des Italiens. L'avènement de Marie-la-Sanglante l'en chassa en 1553; il revint k Strasbourg, puis à Genève, où il se prononça trop franchement contre l'exécution de Servet. De là il passa à Bâlar et en 1555 à Zurich, comme pasteur des réfugiés de Lo-carno. Un peu sous l'influence de son ami Lelio Socin, il exagéra l'expression de ses idées sub-jectivistes, tomba dans un faux spiritualisme, opposa à la Bible la révélation intérieure par Tesprit, réduisit la valeur des sacrements, ne vit dans la rédemption qu'un fait subjectif, nia le grand bienfait de la mort de Christ, et perdit peu k peu la considération dont il avait été entouré à son arrivée. Dans ses Trente dialogues, Bâle 1563, il passe en revue les principales doctrines du christianisme, l'Expiation, la Trinité, la Divinité de J.-C.. et sans les rejeter précisément, il présente les objections avec beaucoup plus de force et d'esprit que les réponses. Il se compromit encore davantage en essayant de défendre la polygamie dans certaines circonstances, notamment quand un homme aurait la conviction qu'il y est appelé par l'Esprit de Dieu. Sur la plainte des bourgeois de Zurich, une enquête fut faite, et quoiqu'elle ne fut pas concluante, il fut dépouillé de sa charge et banni. De Nuremberg où il se retira, il écrivit une Apologie passionnée de sa conduite, et se rendit de là à Cracovie où il comptait de nombreux amis. Mais un décret renvoya du pays tous les étrangers qui n'étaient pas catholiques; il dut fuir de nouveau, tomba gravement malade en route, et f 1566 k Schlackau en Moravie. Plus tard on a fait de lui un des pères de l'Antitrinitarisme.

O'CONNELL, Daniel, né6 août 1775, àCahir, comté de Kerry, Irlande. Destiné à la prêtrise et élevé au collège des jésuites de Saint-Omer, il se décida cependant pour le droit et devint avocat 1798. Il fut le chef du mouvement national cathol. irlandais, qui datant de 1809, aboutit en 1829 à l'émancipation des catholiques et lui ouvrit à lui-même les portes du parlement. Il obtint aussi la suppression de la dime destinée à l'Égl. protestante. Il alla enfin jusqu provoquer le plus terrible soulèvement en faveur du Rappel des lois qui unissent l'Irlande à l'Angleterre. Son influence sur ses compatriotes était immense, et bien que pauvres, ceux-ci lai assurèrent une dotation colossale formée de dons volontaires. Il les réunissait fréquemment en meetings publics. Il fut condamné à la prison en 1844, mais la sentence fut levée peu après. Il f à Gênes 15 mai 1847, comme il se rendait à Rome en pèlerinage. Vie, par son fils; Élope par Lacordaire.

OCTAVE, se dit dans le langage catholique, des huit jours, et spécialement du 8me jour qui suit une grande fête, l'Épiphanie, Pâques, Pentecôte, Noël, etc. On célèbre les octaves par des services et des liturgies de circonstance, en supprimant les autres fêtes qui pourraient se rencontrer les mêmes jours. Les octaves qui tombent pendant le carême ne sont pas célébrés.

OCTAVIEN, v. Jean XII.

OCULI (les yeux) 3»>e dimanche de Carême, ainsi nommé d'après le commencement de l'Introït, Ps. 25, 15. On l'appelait aussi le dimanche du scrutin, parce que c'est en ce jour que se faisait le premier examen des catéchumènes. Chez les grecs, c'est l'Adoration de la sainte Croix.

ODILLE, ou Odilie, née vers 650, fille du comte aleman Ethico. Son père la repoussa à sa naissance, parce qu'elle était aveugle. Élevée dans un couvent, elle recouvra la vue à son baptême, ce qui lui valut un retour de bienveillance de son père; il lui donna le château de Hoheubm?, Alsace, pour qu'elle en fît un monastère. Sur son lit de mort elle prit la coupe de ses propres mains, + 13 déc. 720 (690 selon d'autres)- Canonisée, et patronne de l'Alsace.

ODILON. 5«ie abbé de Cluny, 994-1049, en Auvergne D62, d'une famille de chevaliers. Boiteux de naissance, dit sa légende, il fut miraculeusement guéri, gouverna son couvent dans l'esprit d'Odon, y introduisit une bonne discipline qui le fit respecter, et fut en Allemagne le chef du parti de la réforme ecclésiastique. Très considéré de l'empereur, des rois de France et de Bourgogne, et de Casimir roi de Pologne, il avait toute la confiance du pape Grégoire VI. Il réfusa l'archev. de Lyon. On lui attribue U fête de Toutes-Ames et l'introduction de laTrève-de-Dieu. On a de lui 15 Disc, dogmatiques, dont l'un a passé longtemps pour être de saint Augustin.

ODIN, en allemand Wodan. le plus grand des dieux scandinaves. surnommé aussi AlLfadher (père de tous), à la fois tout puissant, tout sage et tout bon. La légende, qui lui attribue de nombreuses aventures de guerre et d'amour dignes de Jupiter, le fait mourir volontairement sur un bûcher pour le salut des siens. Plusieurs traits de sa vie sont empruntés à l'histoire d'un chef venu d'Asie en Scandinavie avec son peuple, 70 ans avant J.-C. #

ODOACRE, Rugien de naissance, fils d'un ministre d'Attila, chef dos Hérules et des Ru-giens, se révolta contre Augustule 476, supprima le titre d'emp. d'Occident et gouverna l'Italie jusqu'en 493 comme patrice romain, sous la souveraineté nominale de l'emp. d'Orient. Sé-verin lui avait prédit sa grandeur future, mais aussi la courte durée de son règne. Quoique arien, il ne fit rien contre l'Église orthodoxe. Après la mort de l'év. Simplicius de Rome 483, il doit avoir revendiqué comme patrice le droit d'intervenir dans le choix de son successeur: cependant ce n'est pas prouvé. On lui attribue un édit portant que les biens immobiliers de l'Égl. sont inaliénables, et que sa fortune mobilière doit être consacrée dans sa partie essentielle à des œuvres pieuses. Il fut tué dans un banquet, 493, par Théodoric qui l'avait vaincu, et qui lui avait promis de l'associer an pouvoir. Sa modération, son respect pour les lois, les réformes qu'il introduisit dans le pays, l'avaient rendu populaire en Italie.

ODON 1° né en Angleterre de parents danois, souvent employé par ies rois Alfred et Édouard, puis chapelain d'Athelstan, év. de Wilson, archev. de Cantorbéry, f 961. - 2° Le.2*e abbé de Cluny. Élevé dès sa jeunesse par Martin de Tours, il entra à 30 ans au couvent de Cluny, 927, dont il devint abbé comme successeur de Bernon. Il l'agrandit, en reconstruisit l'église, ramena la discipline, réorganisa les études, et lit de son couvent une pépinière intellectuelle et morale, dont la renommée s'étendit au loin; il en fit même le centre de plusieurs congrégations dont on peut le regarder comme le fondateur. Il n'établit pas une règle nouvelle, mais il renforça celles de saint Benoît; en 937 on comptait déjà 17 monastères régis par les Coutumes de Cluny, et le nombre alla en augmentant. Odon fut souvent appelé à Rome pour concilier les papes et les princes et pour réformer les couvents, + 942. — 3° Frère utérin de Guill.-le-Conquérant, né 1035, nommé év. de Bayeux 1049, aida son fr. à s'emparer de l'Angleterre. gouverna le pays tyranniquement, l'exploita pour s'enrichir, s'empara pour son compte de 153 fiefs outre le comté de Kent, et finit par soulever les populations. Il aspirait à devenir pape, et il voulait avoir de quoi acheter les suffrages. Guillaume mécontent le fit mettre en prison à Rouen. Devenu libre par la mort de son fr., il intrigua avec Robert, duc de Normandie, contre Guill.-le-Roux, fut dépouillé de ses biens, s'enrôla pour la Ire croisade, mais f à Palerme 1096. — 4<> Odon de Deuil, vallée de Montmorency, chapelain de Louis-le-Jeune, l'accompagna en Terre Sainte et a écrit la relation de ce voyage: Ludovici de profectione in Orien-tein. A son retour il fut nommé abbé de Saint-Denis en remplacement de Suger. f 1162.

ŒCOLAMPADE (lampe, ou lumière de la maison), s'appelait en allemand Hussgen (Hâus-chen, ou Hausschein). Né 1482 à Weinsberg, Franconie, il étudia d'abord le droit à Bologne, pour obéir à son père, mais se tourna ensuite vers les lettres et la théologie. Reçu bachelier à Heidelberg 1501, il dirigea quelque temps les études des fils du prince Philippe-le-Sincère. Nommé prédicateur dans un vicariat fondé par ses parents à Weinsberg, il se fit remarquer par son onction et le sérieux de ses pensées (Sermons sur les sept paroles), mais désireux de poursuivre ses études, surtout en grec et en hébreu, il repartit 1512 pour Tubingue, où il se lia avec Méianchthon, Reuchlin, Brenz et Capiton. En 1515 il est appelé par l'év. de Bâle, et il fait la connaissance d'Érasme et de son cercle. En 1518 il est à Augsbourg et prend contre Eck le parti de Luther; sans consulter ses amis, il entre au couvent de Sainte-Brigitte, pour se livrer à l'étude et à la prière, mais il penche de plus en plus vers la Réforme, et publie sur plusieurs des points controversés des traités incisifs, qui mettent sa liberté en péril et le décident à quitter le couvent 1522. On lui offre des places à Heidelberg et à Ingolstadt, à condition qu'il renie ses doctrines, mais ses convictions s'affermissent touj. plus; il passe quelque temps chez Fr. de Sickingen, et comme chapelain il introduit dans le culte la langue vulgaire. Enfin il se rend à Bâle 1522, où il est nommé pasteur, prof, et docteur en théologie. Ses tendances réformatrices l'éloignent toujours plus d'Érasme et le rapprochent de Zwingle, notamment quant à la Cène. Il prend part à plusieurs discussions et colloques, à Baden, à Berne, et introduit dans sa cathédrale une discipline et une liturgie nouvelles. On le consulte aussi du dehors, d'Ulm, de Mulhouse, de So-leure, des Vallées du Piémont. Il est à la fois ferme et modéré. Sa douceur envers les anabap tistes et ses relations bienveillantes avec des hommes qui ne partageaient pas ses opinions, l'ont quelquefois rendu suspect. Il a beaucoup écrit, des Sermons, des trad. des pères, des Commentaires, des brochures de controverse, combattant surtout la doctrine luthérienne de la consubstantiation, mais cherchant à maintenir l'union malgré la diversité des vues. Son principal ouvrage est: De vero intelleetu verborum: Hoc est corpus meum. Il + 24 nov. 1531, de douleur de la mort de Zwingle survenue, quelques semaines auparavant et de l'issue fatale de la bataille de Cappel, qu'il aurait voulu empêcher. Marié en 1528, il laissa sa veuve avec 3 petits enfants, dont un le suivit bientôt. Sa veuve se remaria avec Capiton, et ensuite avec Bucer. v. Herzog, 2 vol., et Hagenhach.

OECUMÉNIQUE, v. Ecuménique.

(JECUMÉNIUS, v. Ecuménius.

OETTING, célèbre pèlerinage de la Haute Bavière, sur la rive droite de l'Inn; on y adore une vieille vierge de bois, dans une petite chapelle de 6 à 7 mètres de long, que l'on dit avoir été un temple païen, construit en 696 (?), et consacré au service de Dieu par Rupert, qui fut effectivement l'apôtre de la contrée. On y conserve depuis Maximilien I les cœurs des princes de, Bavière. On rattache à l'histoire d'GEtting la fondation d'un couvent de bénédictins 876, l'érection de plusieurs églises 1238, celle d'un collège de jésuites 1592, et d'un couvent de franciscains capucins, 1655.

OETTINGER, Christophe-Fréd., né 6 mai 1702 à Gcippingen, acheva ses études de 1722-1728 à Tubingue, fit deux voyages dans le nord de l'Allemagne, passa quelque temps à Halle, puis à Herrnhut, où il étudia le grec et l'hébreu, et connut Zinzendorf sans trop se laisser gagner par lui. Il avait aussi étudié la médecine et la pratiqua près de Hombourg, avec la perspective de s'y livrer entièrement si ses vues particulières lui fermaient la carrière pastorale. Ce fut cependant le ministère qui l'emporta: il occupa successivement cinq ou six postes, et finit, 1765. par être nommé prélat à Murrhard, où il t 10 févr. 1782, dans un grand état de faiblesse physique et intellectuelle. Extrêmement instruit, d'un esprit vif et original, c'était un homme pieux et rêveur, qui ne voulant ni de l'intellectualisme de Wolf, ni de l'orthodoxie trop litté raie qui l'entourait, s'était attaché à Bengel, à Bôhme et à Swedenborg dont il traduisit les Œuvres mystiques. Il cherchait la vie en Dieu, telle qu'elle se révèle dans la nature et dans l'histoire. Son principal ouvrage est sa Théologie, déduite de l'idée de la vie. Plusieurs de ses idées ont été reprises et fécondées par Baader, Schelling et Rothe.

OEUVRES surèrogatoires, celles qu'on fait de trop, en sus de ce que l'on doit, et dont le surplus peut être attribué à d'autres pour leur salut. Cette doctrine, contraire à l'esprit du N. T., v. Luc 17,10., est la base delà théorie des indulgences, q. v. et de leur commerce. On la trouve déjà en germe dans le développement de la vie ascétique, chez Berger d'Hermas, Césaire d'Arles, etc. Augustin la combat énergiquement.

Les scolastiques la fixèrent. Les discussions sur ce qu'on doit appeler les bonnes œuvres, et ce que l'Évangile appelle simplement les œuvre?. datent déjà de l'époque apostolique et ont rempli tout le moyen âge. S'il y a eu parfois simple malentendu, ou exagération dans les formules, il y a cependant plus encore que cela. C'est du mosaïsme, c'est surtout du judaïsme rabbiniqoe et des t traditions des anciens, • qu'est née l'idée fausse de lionnes œuvres, ayant une valeur propre, indépendamment des dispositions du cœur. Jésus-Christ combat cette erreur et mel à la place la vérité; le péché n'est plus un acte seulement, il est un état, et les œuvres ne sont telles que lorsqu'elles sont le produit d'un état nouveau. De là aussi leurrôle dans le salut; elleN ne justifient pas le pécheur, mais elles sont h preuve qu'il est justifié. Là se trouve l'explication de la contradiction apparente qui exista entre la doctrine de Paul et celle de Jacques: toutes les fois que l'homme insistera outre mesure ou exclusivement sur l'importance de h foi, Jacques lui rappellera les œuvres; et s'il s'appuie trop sur les œuvres de la loi, Paul lui rappellera que c'est la foi seule qui sauve, celle qui fut la justice d'Abraham. Luther a remis cette vérité en lumière; Amsdorf l'a faussée en la poussant jusqu'au paradoxe, quand il dit qu»* les bonnes œuvres sont plutôt nuisibles an salut. La Formule de Concorde ne va pas aussi loin. En 1541 à Ratisbonne, il fut proposé dan* l'intérêt de la conciliation, de dire: la foi vivante et agissante. Le conc. de Trente, sans heurter de front la doctrine de Paul, a repoussa la foi seule du protestantisme. Moehler et d'antres ont reproché à la réforme de favoriser par ce dogme le relâchement moral; mais si l'arbre doit être jugé par ses fruits, les faits sont là pour répondre. On appelle opus operatum. œu vre se faisant elle-même, tout acte ou cérémonie qui, d'essence matérielle, a la vertu de pn>-duire un résultat spirituel; ainsi la prétendue régénération opérée par le baptême d'eau, la communion avec Christ opérée par le fait seul de l'eucharistie, une grâce ou des dons spirituels communiqués par le seul fait de Timposi tion des mains. Cette erreur, déjà combattue par Augustin, est à la base de toute la doctrine des sacrements comme ayant une vertu magique intrinsèque.

OFFERTOIRE, v. Messe.

OFFICE divin, synonyme de service religieux, se dit aussi dans un sens plus restreint du livre, ou bréviaire qui renferme les prières imposées à l'ecclésiastique. L'office du jour, ce sont les prières, psaumes et fragments qui doivent être lus ce jour-là.

OFFICIAL, le remplaçant de l'évêque dans sa juridiction épiscopale; Yoflicialat> ouConsis-toire, est le collège qui lui est adjoint, et qui se compose ordinairement de chanoines pris dans le chapitre. Dans la plupart des diocèses, l'év. a pour assistant un vicaire général, mais qui s'occupe plutôt d'administration; les charges se confondent encore en Italie, en Hongrie et en Orient; elles sont distinctes en France, en Espagne, en Allemagne et en Pologne, Au 5me siècle c'était l'archidiacre qui faisait fonction d'of-ficial, mais l'autorité de cet ecclésiastique s'étant beaucoup accrue avec le temps, les évêques préférèrent avoir des hommes de leur choix et même dédoubler leurs fonctions; au 13me siècle il y a, outre le vicaire général, seconde instance pour les cas réservés, des officiaux forains pour la partie du diocèse éloignée du chef-lieu, qui jugeaient en première instance. Le conc. de Trente a enlevé la juridiction aux archidiacres.

OLAF 1* Trygweson, c.-à-d. fils du baron Trygwe qui était gendre du roi Harald de Norwège. Élevé en Suède par des amis qui l'avaient arraché aux meurtriers de sa famille, il se fit pirate et désola les mers et les rivages du nord. Dans une descente en Angleterre il reçut quelques notions du christianisme, se fit instruire en Grèce par l'évêque Paul, et retourna en Norwège se mettre en possession de l'héritage paternel, 953. Doué des plus brillantes qualités du cœur et de l'esprit, beau cavalier, fort comme un Samson, il avait résolu de consacrer sa vie et sa puissance à la conversion de son peuple, et il tint parole dans la mesure de ses connaissances et de ses capacités. Parfaitement loyal et convaincu, il en était encore, comme arguments et moyens de persuasion, aux procédés de son époque, méthode plus expéditive que démonstrative; il proposait le duel aux chefs ou aux princes des districts qu'il avait l'intention de convertir, ou bien il envoyait une petite armée et payait toujours de sa personne; il repoussait l'idolâtrie i'épée à la main, et courut souvent les plus grands dangers, les adorateurs de Thor ou de Freya ne se laissant pas convertir sans résistance. Déjà la moitié de la Norwège avait embrassé le christianisme; le nord seul était encore païen, quand Olaf fut surpris à Svolter par une flotte ennemie; couvert de blessures et voyant son vaisseau près de sombrer, il se jeta à la mer avec ses compagnons et ne fut plus retrouvé. C'était l'an 1000. Il avait régné 4 ans. Thira, sa veuve inconsolable, se laissa mourir de faim.

2° Olaf-Skôtkonung, roi de Suède vers 998, favorisa en Suède, puis en Norwège, l'établissement du christianisme; il employa pour cela le missionnaire anglais Gotbald qui f 1004.

3° Olaf U, dit le Gros. né 995, orphelin de son père Olaf Grânske, fut dressé dès l'âge de 12 ans à la piraterie, sema la terreur sur les côtes de France et d'Espagne et revint en Norwège, d'où il s'occupa de chasser les dominateurs étrangers. Il fut lui-même proclamé roi 1019 à l'âge de 24 ans, et prit pour modèle son parrain Olaf Trygweson. Il fit venir d'Angleterre Grimkill, qu'il établit évêque, bâtit partout des églises, multiplia le nombre des ecclésiastiques et parcourut son royaume pour y détruire les derniers vestiges de l'idolâtrie. Parmi ses aides il faut nommer Bernard, Asgott, Tholf et Sigwart. Il avait commencé par la persuasion; il finit par s'impatienter et recourut aux moyens violents. Il obtint quelques succès, mais nombre de ceux qu'il avait bannis du pays se rangèrent sous les drapeaux du prétendant anglais, Knud-le-Grand, qu'Olaf avait dépossédé, et Olaf succomba dans la bataille 1033. Sa mémoire resta chère à son peuple, qui attribua même des miracles à son tombeau. Knud étant aussi chrétien, l'œuvre d'Olaf ne fut compromise ni par sa défaite, ni par sa mort. Canonisé.

OLDCASTLE, v. Lollards.

OLDENBOURG, ville d'Allemagne à 28 ki-lom. 0. de Brème; évangélisée aux 8m« et 9me siècles, elle eut un évêchédepuis 968; supprimé en 1066, il fut rétabli en 1149 par Hartwich, archev. de Brème, qui le confia à Vicelin pour l'évangélisation des Vendes. La Réformation s'y introduisit sans beaucoup de luttes, à la suite du commerce des indulgences exercé par Henri de Wyldeshausen. Antoine, fils et successeur de la comtesse Anna, fut un des premiers qui rompirent avec Rome, 1531; les couvents furent sécularisés, et la prédication de l'Évangile se fit publiquement. Il y eut quelques luttes entre le luthéranisme et le calvinisme; ce dernier eut le dessous par ordonnance de Jean XVI. En 1848 l'Église est devenue complètement indépendante de l'État, sans conditions religieuses, mais cela dura peu, et en 1858 le grand-duc a repris le droit de nommer les membres du Conseil ecclés. supérieur.

OLE ARIUS 1° Jean, né à Wesel, H sept. 1546. Son père, qui s'appelait Koppermann, était fabricant d'huile; de là son nom latin. Il étudia à Dusseldorf, Marburg et Iéna. Gendre de Hesshusen, il accompagna son beau-père à Kônigsberg, 1574, et fut nommé recteur de l'université. Il fut ensuite prof, de théol. à Helmstâdt, 1577; enfin, 1581, pasteur et surintendant à Halle, où il f 26 janv. 1623. Ardent luthérien comme son beau-père, il eut cependant plus de mesure, et s'occupa sérieusement de former de jeunes théologiens. Il fut le père d'une dynastie de pasteurs distingués, dont on compte au moins une douzaine. Nous mentionnerons seulement 2<> son fils Gottfried 1604-1685, surintendant à Halle, auteur d'Aphoris-mes homilétiques, qui ont encore de la valeur, et d'études sur. l'astronomie et la botanique; 3o Jean Gottfried, fils de celui-ci, 1635-1711, pasteur à Halle et à Arnstadt, auteur de Notices (alphabétiques) sur les pères de l'Égl. et les écrivains ecclés. jusqu'à la Réformation, a composé 73 cantiques, dont plusieurs estimés; 4° son fils Jean-Christophe 1668-1747, historien, numismate, surintendant à Arnstadt; auteur de plus, cantiques; 5° son oncle Jean, frère du 2°, 1639-1713, prof, de théol. à Leipzig et recteur de l'uni v. de Leipzig, protégea les Col-legia pietatts de Francke et les défendit contre Carpzow; auteur de quelques travaux d'exégèse et de controverse; 6» Jean, frère du précédent, 17 sept. 1611-14 avril 1684; docteur en théol., pasteur à Querfurt, surintendant général à Weissenfels, estimé pour sa science, sa piété et ses cantiques. Il laissa 5 fils et un pe-tit-lils, qui furent pasteurs.

OLEVIEN (Olevhnus), Gaspard, né à Trêves

10 août 1536, précoce dans ses études, partit à 14 ans pour faire son droit à Paris, passa de là à Orléans ot à Bourges, où il entra en rapports avec des disciples cachés de la Réforme. En 1556 il vit de près la mort, et sa délivrance fut pour lui le commencement d'une vie nouvelle. De retour à Trêves, il fut sollicité par quelques chrétiens de devenir leur pasteur; il vint pour cela à Genève faire de la théologie 1558, se lia intimement avec Calvin, et par lui avec Bullin-ger et Pierre Martyr. A Lausanne il vit Théod. de Bèze. Farel lui avait mis sur la conscience de prêcher l'Évang. à Trêves; il y retourna en juin 1559, et le Conseil de la ville lui donna une place de maître à l'école supérieure. 11 fit en latin, puis en allemand, des lectures sur la Dialectique de Mélanchthon, ce qui lui fournit l'occasion de populariser les idées de la Réforme. Un sermon sur la justification par la foi amena sa rupture définitive avec Rome; le clergé lui fit interdire tout enseignement public dans les bâtiments scolaires. Mais il restait libre d'enseigner ailleurs, et le Conseil mit à sa disposition l'égl. de Saint-Jacques. Le prince-électeur voulut intervenir, et finit même par ordonner l'arrestation du jeune prédicateur. La ville, s'autorisant de la paix d'Augsbourg, refusa de le livrer, mais le prince ayant recouru aux armes, Olevien se constitua lui-même prisonnier pour éviter toute effusion de sang. L'électeur palatin Fréd. III, et Philippe de Hesse, le firent remettre en liberté en payant une forte rançon, mais

11 dut quitter la ville. Il se rendit à Heidelberg, où il se maria, fut nommé docteur et prof, de théol., pasteur et conseiller ecclésiastique. Il prit une part prépondérante dans la rédaction du catéchisme de Heidelberg, et publia Neuf sermons sur la Cène du Seigneur. Il s'occupa en même temps de l'organisation de l'Égl. réformée du Palatinat 1563 et 1564. Mais en 1576, après l'avènement de Louis VI qui était très luthérien, il fut dépossédé de ses charges et dot quitter le pays. Il se rendit à Berlebourg, où il réunit bientôt un grand cercle d'élèves, puis à Herborn où il fonda une école réformée et présida un synode général pour l'élaboration d'un règlement des églises strictement presbytériennes. Un peu avant sa f 15 mars 1587, son ami Alstedtlui demandant s'il était parfaitement sûr de son salut en Christ, tel qu'il l'avait prêché aux autres, il lui répondit: Certissimus, très sûr.

OLGA, paysanne de naissance, fut distinguée par Oleg, qui la maria à son pupille Igor, de Kiew, grand-duc de Russie. Devenue veuve 945, elle devint régente sous la minorité de son fils Sviatoslav 1er, vengea la mort de son mari, et et quand son fils prit les rênes du gouvernement, 955, elle partit pour Constantinople, et se fit baptiser par le patr.- Théophylacte qui lui donna le nom d'Hélène. Elle essaya, mais sans beaucoup de succès, de répandre le christianisme en Russie. Comme étant la première princesse russe chrétienne, elle fut canonisée après sa mort 968 sous le nom d'Olga; on la fête le 11 juillet vieux style. Les latins ne la reconnaissent pas.

OLIER, Jean-Jacques, fils d'un maître des requêtes, né à Paris 1608, étudia à la Sorbonne et, sous l'impression de discours qu'il entendit de Vincent de Paule à Saint-Lazare, son cœur se tourna vers les choses de Dieu. Il fit en Auvergne et en Bretagne des missions qui furent couronnées de succès, et dont l'offre de l'évêché de Châlons sur Marne fut la récompense. Mais il refusa, et se contenta du poste de curé de Saint-Sulpice à Paris 1642. Il avait déjà organisé à Vaugirard une compagnie de prêtres se consacrant à l'instruction de jeunes ecclésiastiques; elle fut transférée dans sa nouvelle paroisse, dont elle prit le nom. Une partie des prêtres dirige le séminaire, une autre s'occupe de la cure d'âmes. En 1652 Olier qui venait de commencer la construction de l'égl. de Saint-Sulpice, prit la direction du séminaire, et la garda jusqu'à sa f 15 avril 1657. Il avait crêé ailleurs, et jusqu'au Canada, à Montréal, des succursales de son œuvre. Fénelon était sulpi-cien. Olivier a laissé plus, ouvrages, entre autres une Explic. des cérémonies de la grand'-messe, 1655.

OLIVA, Jean-Paul, génois, né 1600, jésuite, nommé 1661 vicaire du général Goswin Nickel, et son successeur en 1664. f 1681, favorisa le népotisme sous Alexandre VII. Il avait de la réputation comme orateur; il a publié des Discours, et des Comment, sur quelques parties des Écritures.

OLIVETAN, Pierre-Robert, néàNoyon (date inconnue), parent de Calvin, apparaît pour la Ire fois en 1533, à Genève, précepteur dans la famille de Jean Chantemps. Il interrompit publiquement, dans l'égl. des Jacobins, un prêtre qui avait attaqué et raillé les luthériens. Banni pour ce fait il se rendit à Neuchâtel, où il traduisit à la demande et pour le compte des vau-dois des Vallées, en s'aidant de la version récente de Le Fèvre d'Êtaples, la Bible, qui parut d'abord à Neuchâtel en 1535 sous le titre: La Bible qui est toute la Saincte Escripture, en laquelle sont contenus le vieil Testament et le nouveau, translatez en françois, le vieil de l'hébrien, et le nouveau du grec. Améliorée plus tard par Calvin, cette version fut reçue par les Égl. protestantes de langue française, et a servi de base à toutes les revisions qui en ont été faites, jusqu'à ces dernières années. Après avoir passé quelque temps au milieu des vau-dois du Piémont, Olivétan f 1538 à Ferrare, probablement empoisonné (Spannheim, Bnyle). V. Pélavel, la Bible en France.

OLIVI, Pierre-Jean, né 1247 à Sérignan, Languedoc, vers le milieu du 13rae siècle, entra à Béziers dans l'ordre des franciscains, et prit à Paris son grade de bachelier en théologie. Il marqua parmi les principaux chefs des rigides, sévère, et avec une forte teinte de mysticisme; il soutint, contre le pape, que le vœu de pauvreté ne concerne pas les individus seulement, mais aussi l'ordre dans son ensemble. Souvent recherché pour ce fait, il échappa cependant aux anathèmes du pape, et f 1297 à Narbonne. Jean XXII tira de ses écrits 60 déclarations qui firent condamner sa mémoire et ses livres 1326; son cadavre fut déterré et brûlé. Il avait des idées chiliastes, et partageait l'hist. du monde en 3 périodes qui rappellent celles de Joachim de Flores. Il insistait aussi sur les désordres de l'Égl. romaine. Sixte IV leva l'interdit qui pesait sur ses écrits; ils sont auj. perdus; les deux principaux sont sa Profession (sur la pauvreté apostolique), et ses Postilles sur l'Apocalypse. Son disciple le pins connu est libertin de Casali.

OLMUTZ, ville des États autrichiens, ancienne capitale de la Moravie, rattachée tantôt à Passau, tantôt à Ratisbonne; évêché depuis 979, rattaché par Clément VI, 1343, à l'archev. de Prague; quartier-général des jésuites pendant les luttes de la Réformation; archev. depuis 1777 sous Marie-Thérèse.

OLSHAUSEN lo Hermann, né 21 août 1796 à Oldesloe, étudia à Kiel sous Twesten, à Berlin sous Néander et Schleiermacher, dont il subit l'influence; publia 1817 une Caractéristique de Mélanchthon d'après ses lettres, qui obtint le prix de concours et lui valut une place de répétiteur à la faculté de théol. de Berlin, 1818; fut appelé à KOnigsberg en 1821, et en 1834 à Erlangen, où il f 4 sept. 1839. Outre son excellent Comment, sur le N. T., achevé par Ébrard et Wiesinger, il a écrit 2 vol. sur le sens profond des Écritures, une Dissert, sur l'authenticité des 4 Évangiles, et quelques brochures. Orthodoxe et spiritualiste, il s'attache plus au fond qu'à la forme. Il fut compromis malgré lui dans les troubles du théosophe Sch5n-herr et dans les affaires d'Éhel. Il combattit aussi les exagérations des vieux luthériens. — 2° Juste, son frère, né 9 mai 1800à Hohenfeld, Holstein, prof, à Kiel de 1823 à 1852, et depuis 1853 prof, de langues orientales à Konigsberg, fut appelé par Bethmann-Holweg comme conseiller au ministère des cultes à Berlin. Il a publié une Gramm. hébraïque, des Études sur les Psaumes, des Observations critiques sur l'A. T., une Topographie de l'ancienne Jérusalem, etc.

OMER (Audomarus), d'une famille noble al-lemane venue des bords du lac de Constance et établie sur la mer du Nord entre Boulogne et Ostende. Élevé au couvent de Luxeuil, le jeune moine accepta un appel de Dagobert b* pour l'évangélisation des païens du nord de I'Aus-trasie, et il y travailla avec succès 622, 638. Il devint 637 év. de Thérouanne, près de la ville qui a gardé son nom. f 670. '

OMNIBONUS, canoniste de Bologne, f 1185. Il était disciple de Gratien et a donné des extraits de son Décret.

OMOPHORIUM (qui se porte sur l'épaule), vêtement sacerdotal des év. orientaux et des métropolitains, que les patriarches leur remettent à leur ordination. C'est probablement le rochet des Hébreux, Exod. 28, 31., et le pal-lium des Romains. Il a aussi quelques rapports avec l'éphod. C'est une espèce de manteau, qui va des épaules aux genoux et qui est semé de croix. On lui prête diverses significations symboliques: il doit entre autres rappeler à l'officiant le Bon berger qui charge sur son épaule la brebis perdue et retrouvée. L'êvêque l'ôte pendant la messe. L'omophore peut être en laine ou en soie.

ONCTION (Extrême-), le 5me des sacrements dans l'Égl. latine. D'après le conc. de Trente, les malades qui sont en danger de mort doivent appeler le prêtre, et celui-ci, après les avoir confessés et leur avoir donné l'eucharistie, les oint d'huile avec le pouce en faisant le signe de la croix, sur les yeux, les oreilles, les narines, la bouche, les mains, les pieds, tous les organes qui ont pu être un instrument de péché, même les reins chez les hommes, puis étend l'huile avec du coton qu'il brûle ensuite. Cette cérémonie a pour but d'achever de purifier le malade de ses péchés, de le fortifier contre les angoisses de la mort, et subsidiairement de favoriser sa guérison, si c'est nécessaire au salut de l'âme. Les prêtres seuls sont qualifiés pour cette cérémonie. Elle ne peut pas se répéter dans une même maladie, mais elle peut être administrée en cas d'autre maladie, ou mêmede rechute constatée. Les seuls passages du N. T. dans lesquels on essaie de trouver une lointaine allusion à cette cérémonie, sont Marc 6, 13. où il est question de guérisons miraculeuses, et Jacq. 5, 14. qui parle de guérisons possibles par la prière. Or l'extrême-onctiona si peu en vue la guérison du malade qu'on ne l'administre qu'à la dernière extrémité, et qu'on l'a même appelée le sacrement des mourants, exeuntium. Complètement inconnue aux temps apostoliques et aux premiers siècles de l'Église, elle apparaît pour la 1™ fois au conc. de Pavie 850 (à moins qu'on ne compte les gnostiques va-lentiniens, qui répandaient de l'huile mêlée d'eau sur la tête de leurs mourants). C'est Hugo de Saint-Victor, au lime siècle, qui le premier l'enseigne comme sacrement, et elle n'a été définitivement reconnue comme telle qu'aux conciles de Florence et de Trente. Les docteurs romains ne sont même pas bien d'accord entre eux sur les effets de ce sacrement; les uns, avec Thomas d'Aquin, le font agir sur ce qui reste de péché; les autres, comme Bellarmin, sur les angoisses de la mort; d'autres encore sur les péchés véniels. Pour se rapprocher un peu de la soi-disant institution de ce sacrement, l'Église n'administre l'extrême-onction qu'à ceux qui sont en danger de mort par maladie; elle ne l'administre ni aux condamnés, ni aux soldats avant la bataille. L'huile, considérée comme le symbole et pour ainsi dire comme le moyen de transmission de la repentance, doit être de l'huile d'olive line et parfaitement pure, tout au plus avec un mélange de baume. C'est Têvêque qui la consacre, ordinairement le jeudi saint, avec l'assistance de 12 prêtres, qui l'adorent ensuite et baisent les tonneaux sacrés, en disant: Ave, sanetum chrismaf On la répartit entre les différentes cures du diocèse; s'il y en a trop au bout de l'année, on brûle au feu ce qui reste le samedi saint; si au contraire on prévoit qu'il en manquera, on peut l'étendre avec de l'huile non consacrée. Chez les grecs l'ex-trême-onction date aussi du 9m* siècle; dans la règle elle doit être administrée par plusieurs prêtres et non par un seul; dans le temple plutôt qu'à domicile; à des malades plutôt qu'à des mourants. Elle s'administre en grand le jeudi saint.

ONIAS, plusieurs souverains-sacrificateurs de ce nom: 1° le père de Simon Ier, exerçait la sacrificature lors de la bataille d'Ipsus qui donna la Palestine à l'Egypte, 301 av. C. Sirach 50, 1. — 2o Onias II, fds de Simon-le-Juste, sous Antiochus-le-Grand, entre 219 et 250 av. C.; connu par sa cupidité qui finit par amener une guerre civile. — 3° Onias III, fils de Simon II, 2 Macc. 3 et 4; assassiné dans un bosquet de Daphné près d'Antioche, 170 av. C.— 4° Son fils Onias IV s'enfuit en Egypte, auprès de Philométor, et obtint de lui, 152, la cession du temple de Bybaste, dans le Delta, pour en faire un temple hébreu.

ONKÉLOS, rabbin considéré comme le rédacteur du Targum juif du Pentateuque. Son travail, d'un style pur, est presque partout la traduction littérale du texte hébreu en chaldéen vulgaire; mais dans les passages difficiles ou douteux, il interprète plus qn'il ne traduit, et l'on a pu appeler son livre une paraphrase. On n'est pas fixé sur l'époque où il vécut. Certaines traditions tahnudiques l'identifient avec le prosélyte Akilas, ou Aquila, qui vivait au commencement du 2m« siècle; d'autres, comme le Talmud de Babvlone, le font disciple de Gama-liel et condisciple de Paul; d'autres enfin placent en Babylonie et au commencement du 4®« siècle la rédaction finale de ce targum, qui fut surtout reçu dans les écolesjuivesde la Palestine.

OPH1TES, en grec, ou Nackastèens, en he-breu Nachash (d'un mot qui signifie serpent), secte gnostique et l'une des plus anciennes, se subdivisant en plusieurs branches, Pérates, Sé-thiens, Caïnites, etc., qui toutes à différents degrés donnent une place au serpent dans le développement de l'humanité. Du Buthoi, profondeur, abîme, émanent le premier homme, le fils de l'homme et le saint Esprit. Ce dernier forme avec les deux premiers le Christ et la Sophia, ou fausse sagesse, qui mène au chaos. Elle produit le Jaldabaoth, le maître des puissances cosmiques, le créateur. Usant de la puissance qu'il a reçue de sa mère, il se révolte contre le monde supérieur; il regarde dans h hulè, dans la matière, où son image semblable à celle du serpent, Ophiomorphos, devient le mauvais esprit. Voulant créer l'homme, il loi communique l'esprit divin, l'intelligence, une volonté propre, et le décide à manger du fruit de l'arbre pour achever de l'émanciper. La chute est donc une délivrance; l'homme s'est élevé au-dessus de Jaldabaoth par l'influence du serpent. Mais Jaldabaoth, pour le réduire, l'enveloppe d'une écorce terrestre. Christ voulant délivrer l'homme se sert pour cela de l'homme Jésus, lequel après sa résurrection reste encore 18 mois sur la terre, instruisant ses disciples. C'est par Épiphane et par Hippolyte que fon connaît un peu cette singulière secte, grossier mélange de quelques idées chrétiennes avec les mythes cosmogoniques des religions de l'Asie Mineure.

OPTATUS, le saint, év. de Milève, Numidie, auteur de 7 livres De schismate Donatistorum, qu'il écrivit sous le pontificat de Siricius. par conséquent entre 384 et 398 (et non sous Va-lentinien ou Yalens, comme le dit saint Jérôme). Il défendit l'unité de l'Égl. contre Parmenianus, l'év. donatiste de Carthage, et comme il entre dans beaucoup de détails sur les luttes de ce temps et sur les circoncellions, c'est avec Augustin, l'auteur le plus important à consulter pour cette portion de l'histoire. Impr. 1549 à Mayence, et dès lors plusieurs fois.

OPTION, acte, ou droit de choisir en cas de vacance d'un bénéfice. Le plus ordinairement pour les fondations rattachées à des chapitres, le droit d'option appartient au chanoine le plus ancien, toutefois dans des conditions et avec des charges déterminées, souvent avec une indemnité à payer aux héritiers du titulaire défunt. Il pouvait arriver aussi que le propriétaire d'un bénéfice fût mis en possession d'un second, dit incompatible, c.-à-d. qui ne pût être cumulé avec un autre; dans ce cas il a le choix entre les deux, droit d'option que le 4me de Latran avait supprimé, mais qui n'en est pas moins resté dans les usages et traditions.

OPUS Operatum, v. Œuvres.

ORAISONS funèbres. A côté du service religieux qui se fait auprès de la tombe, et du service d'exhortations et de consolations qui a lieu dans la maison mortuaire au milieu des parents et des amis, l'usage s'est établi en plusieurs endroits d'avoir, soit le jour même des funérailles, soit le dimanche qui suit, un culte spécial dans l'église, ou tout au moins de consacrer le sermon à une méditation sur la mort. Ce discours, tout objectif par sa nature, peut cependant suivant le caractère et la position du défunt et suivant le rôle qu'il a joué, devenir une biographie, une apologie et un éloge. Ce genre est difficile au double point de vue littéraire et religieux. On évite difficilement la monotonie, si l'on s'en tient à une étude générale des enseignements de la Bible sur la mort; et l'on risque, si l'on veut parler du défunt, d'en parler inal en ne le louant pas assez, ou de tomber dans un excès d'adulation pour plaire à la famille. Les noms de Bossuet, de Fléchier, de Massillon, sont classiques dans ce genre, mais ils disent aussi combien il est malaisé de garder la juste mesure. Ce doit être pour chaque prédicateur une affaire de tact el d'expérience.

ORANGE, ville de Provence, célèbre par une \ictoire de Marius sur les Teutons, 102 av. C., et riche encore en monuments antiques, arc de triomphe, théâtre, etc. Deux conciles y furent tenus, l'un en 441 qui prit des résolutions disciplinaires sur la pénitence et sur le droit d'asile; l'autre en 529, sous la présidence de

Césaire d'Arles, qui promulgua 25 canons dans le sens augustinien sur le péché et la grâce, mais rejeta la prédestination pour le mal, tout en maintenant le dogme de la prédestination absolue et de la grâce irrésistible, inconséquences qui sont dans la nature même des choses. Il maintint aussi la doctrine de l'Église, telle qu'elle avait été formulée par Grégoire-le-Grand et telle qu'elle apparaît au moyen âge. Ses décrets, auxquels adhéra le conc. de Valence, furent approuvés par Boniface II dans une lettre à Césaire, 530. La ville d'Orange embrassa de bonne heure la Réforme, et elle le paya cher. En 1552 Pie IV y envoya Serbelloni à la tête d une bande d'Italiens. Les habitants furent massacrés, torturés, précipités du haut des rochers, pendus, brûlés; les femmes furent brutalisées. Ainsi la Réforme fut étouffée pour longtemps. Le nom d'Orange (principauté qui appartient à la maison de Nassau de 1530 à 1702, mais qui appartient à la France depuis 1714) est touj. donné à l'héritier présomptif de la couronne dans la maison de Nassau, qui règne auj. en Hollande. U est en outre conservé en Irlande comme terme de mépris, en souvenir de Guillaume III; on appelle Orangistes depuis 1689 les protestants qui reconnurent Guill. d'Orange comme successeur de Jacques II, et quoique en l'absence d'héritiers, le trône ait passé à la maison de Brunswick, le nom d'oran-giste est resté. On le donne aussi en Belgique à ceux qui, regrettant l'annexion de leur pays, sont restés fidèles dans leur cœur à la maison d'Orange, v. Nassau.

ORATOIRE, Oratoriens, v. Néri. Ce mot désigne d'après son étymologie un lieu spécialement affecté à la prière dans un établissement public, ou dans une maison particulière; même une petite chapelle où la messe ne se dit pas.

ORATORIO, composition musicale assez difficile à classer, mais qui se distingue en général par son caractère élevé et religieux. Intermédiaire entre la musique d'église et l'opéra, il remonte à Phil. de Néri, fondateur de la Congrégation de l'Oratoire qui, pour attirer la foule, avait imaginé de donner, dans l'égl. de son couvent, des espèces de représentations dramatiques mêlées de musique, dont le sujet était tiré de la Bible. C'était comme une suite des mystères. La foule « allait à l'Oratoire, * et bientôt ce genre de musique prit le nom du local où on le donnait. Le premier essai qui en fut fait, fut une représentation De//' anima e del corpo, d'Emilio de Cavalieri, 1600, auj. perdue. C'était une suite de récitatifs, mais avec de nombreux chœurs; la musique servait surtout d'accompagnement; il n'y avait pas d'action proprement dite. Avec Giac, Carissimi de Rome, l'oratorio se développa, mais il ne tarda pas à dégénérer.

Ce fut Hândel qui le releva, et qui le porta d'un coup à sa plus grande hauteur dans dix pièces successives, dont le Messie est le chef-d'œuvre. Séb. Bach, puis Haydn, Mendelssohn et d'autres suivirent. Parti de l'Italie, c'est surtout en Allemagne et en Angleterre qu'il s'est acclimaté et a le mieux réussi.

ORDERIC, Vitalis, né 1075 à Attengesham, Angleterre, déjà moine en 1086 dans le couvent normand de Saint-Évroul, où il+ 1150; auteur d'une Hist. ecclésiastique en 13 livres, importante surtout pour l'hist. des croisades, et pour celle des Normands jusqu'en 1142. Publ. dans les Scriptores de Le Prévost 1844, et dans Gui-zot, Mémoires rel. à l'hist. de France.

ORDINAIRE, désigne en style ecclésiastique, lorsqu'il n'y est joint aucune réserve restrictive ou extensive, l'évêque du diocèse, comme le dépositaire officiel et régulier de toute autorité administrative et judiciaire dans les affaires religieuses. Ce sont des droits qu'il possède jure proprio, par opposition, soit à ses vicaires généraux et autres subalternes, qui n'ont de droits que ceux qu'il leur délègue; soit aux coadjuteurs que le pape peut lui donner dans des cas exceptionnels, lesquels n'ont de droit que par l'autorité du pape. Les évêques in par-tibus n'ayant pas de diocèse réel, ne sont pas des ordinaires, non plus que les vicaires apostoliques qui sont toujours révocables. Dans les affaires de chaque paroisse, c'est le curé qui est en fait le véritable ordinaire. Les frères mora-ves sont la seule Église protestante qui ait reconnu ce titre; il fut donné à Zinzendorf et figure comme titre d'honneur sur l'inscription de son tombeau.

ORDINATION. D'après la doctrine catholique, l'onction d'huile et l'imposition des mains par l'évêque constituent le Sacrement de l'Ordre, qui communique la puissance de consacrer le vrai corps du Seigneur et de remettre les péchés. Cette cérémonie a, comme le baptême et la confirmation, une vertu magique; elle confère un caractère indélébile. L'evêque seul a le pouvoir de consacrer un prêtre, mais il est lui-même lié par des règles déterminées; celui qui demande l'ordination doit appartenir à son diocèse, ne pas appartenir à sa maison, avoir été baptisé, être un homme dans toute l'étendue du mot, être sans défaut corporel, n'avoir commis aucun crime ou délit, avoir un certain âge, être bien portant, de naissance légitime, libre de disposer de lui-même, etc. Dans l'origine l'impétrant ne recevait les ordres qu'en vue d'une paroisse ou d'une mission déterminée, mais l'Égl. s'est relâchée sur ce point et ne demande plus qu'une fortune suffisante, ou la garantie que le prêtre consacré sera à l'abri du besoin et ne tombera pas à sa charge. L'ordination a lieu par l'imposition des mains et la communion avec la coupe. Les Églises orientales et l'Égl. anglicane ont encore l'ordination par l'évêque: les moraves et les irvingiens en ont aussi garde quelque chose, mais en pratique les moraves sont beaucoup plus larges. Dans les Églises protestantes l'ordination est remplacée par la con-séTation qui est un acte religieux, avec ce double caractère d'un candidat qui se consacre lui-même au service de Dieu, et de ses collègues qui le mettent à part au nom et en présence de l'église, tous étant réunis pour demander à Dieu sa bénédiction pour le futur pasteur et pour son ministère. C'est un engagement solennel, mais il n'est pas irrévocable, et ceux qui regrettent de l'avoir pris ne sont pas tenus de persévérer s'ils n'ont ni la foi, ni la vocation, ni le dévouement. Chez les luthériens la tradition du sacrement est cependant plus vivace que chez les réformés, et ils continuent de voir dans l'ordination la communication surnaturelle du droit de bénir et de transformer les éléments de l'eucharistie et de remplir les fonctions du ministère.

ORDRE romain. On désigne ainsi tout l'ensemble des règlements relatifs au culte dan* l'Égl. catholique, et notamment des recueils liturgiques, lectures, chants et prières. A l'ancienne variété résultant de la liberté, succéda ppu à peu l'unité résultant de la centralisation. Le premier essai connu d'unification, remonte à Gélase ou à Félix III, vers l'an 500. Au 13»« siècle il s'appelait le Cérémonial romain; en 1595 le Pontifical romain, en 1600 le Cérémonial des évêques. Souvent les diocèses publient leurs calendriers particuliers, mais touj. sous le titre: Ordo officii divini juxta ritum romanum.

ORDRES 10 Le caractère ecclésiastique, d'après le conc. de Trente, est c véritablement et proprement un des sept sacrements; » il est communiqué par l'ordination, q. v. On emploie généralement le pluriel pour le désigner (entrer dans les ordres), parce qu'il y a divers degrés dans le service de l'autel, et qu'on n'arrive aux ordres majeurs qu'en passant par les moindres. Les 7 degrés sont ceux de: portiers, lecteurs, exorcistes, acolytes, sous-diacres, diacres et prêtres. Ces trois derniers seuls sont majeurs; les 4 premiers ne sont guère qu'une forme, et les fonctions qu'ils représentent sont le plus souvent remplies par des laïques ou des enfants.

2° On entend par ordres religieux des compagnies ou associations, d'hommes ou de femmes, qui, dans un but moral, charitable ou religieux, font vœu de vivre sous certaines règles convenues et acceptées. Tandis que dans les associations ordinaires l'individu n'aliène qu'uae partie déterminée de son temps, de ses biens <m de son activité, le caractère de l'ordre cousiste en ce que celui qui en fait partie s'y consacre j tout entier. L'homme qui se vouait à la vie religieuse était primitivement libre; c'était un ermite, un anachorète, un moine, c'est-à-dire Fhoinme seul. Quand ils se furent réunis en communauté, la vie de l'individu fit place à celle du couvent, mais chaque couvent eut son existence indépendante. Enfin saint Benoît groupa en un seul tous les couvents qui se soumettaient à une même règle, et les ordres religieux furent fondés. Ils sont très nombreux, avec des subdivisions plus nombreuses encore, et il n'est pas facile de les bien distinguer. On peut les classer en 4 grandes catégories: a. les moines proprement dits, qui comprennent les ordres de saint Basile et de saint Benoit, avec toutes leurs branches, Cluny, Camaldules, Citeaux, etc., tous antérieurs au 13me siècle; b. les chanoines réguliers, qui suivent la règle de saint Augustin, et auxquels se rattachèrent deux ordres illustres, les prémontrés et les confrères de la Merci; c. les religieux mendiants, comprenant les franciscains, les dominicains, les carmes, les augustins, les servi tes, et tous ceux qui prirent naissance entre le 13ine et le 16®® siècle; d. les clercs réguliers, forme affectée exclusivement aux ordres créés au 16me siècle et depuis, les jésuites, les théatins, les barnabites, etc. Chaque ordre fixe lui-même les règles qu'il doit suivre, son but, son mode de vivre, son costume, ses travaux, ses obligations, sa discipline. II peut se former au sein même d'un ordre un sous-ordre, ou congrégation, qui modifie, adoucit ou rend plus sévères certains détails de la règle, tout en la maintenant dans son ensemble. On entre dans un ordre, d'abord p?r le noviciat, qui est temporaire, puis par la profession. Les vœux que l'on forme sont irrévocables, et l'on ne peut en être relevé exceptionnellement que par le pape. Aucun ordre ne peut exister légalement que par l'autorisation du pape, qui en agrée ou en modifie les statuts. Chaque ordre se gouverne lui-même; il a à sa tête un chef, ou général. On a beaucoup discuté la légitimité et surtout la convenance de cette institution, au double point de vue religieux et social. Le pour et le contre peuvent se soutenir, et la question ne se serait pas même posée, s'il n'y avait pas eu des excès. Toute association est de droit commun; chaque individu est libre de prendre les engagements qu'il veut et de disposer de ses biens comme il l'entend; voilà deux principes indéniables. Mais ils se heurtent à d'autres principes non moins évidents: la société a le droit de se défendre; un État dans l'État est impossible; la mainmorte est un danger; l'individu qui a fait des vœux doit rester libre de se dégager. Les ordres dans le domaine religieux correspondent aux corporations dans le domaine social; ni les uns ni les autres ne sont compatibles dans toute leur rigueur avec l'esprit moderne, et si l'on veut encore essayer de fonder quelque chose d'ans ce sens, il faut tenir compte des besoins nouveaux, des droits acquis et des progrès accomplis. C'est ce que le protestantisme a fait, soit avec ses maisons de diaconesses, soit avec ses chevaliers de saint Jean, soit avec ses sociétés religieuses et de bienfaisance, soit enfin et surtout avec le développement de l'initiative et de l'activité individuelles, qui a produit tant de femmes et tant d'hoinmes distingués. — Chaque ordre a un supérieur, ou général, qu'il nomme lui-même, à temps ou à vie, qui a sa résidence obligée à Rome, et qui siège de droit dans les conciles généraux, avec voix délibérative. Le général est assisté d'un adinoniteur, ou directeur de conscience, qui peut le surveiller et l'avertir, mais n'a aucune juridiction. L'administration de chaque province est entre les mains d'un chef appelé provincial, lequel agit par des définiteurs dans les districts de son ressort. — V. les articles spéciaux.

ORGUES. L'origine de cet instrument, si apprécié de nos jours pour le culte public, remonte à des temps fort anciens. Les Grecs ont connu l'orgue hydraulique, ou orgue à eau, mais il n'est pas même établi que ce fût un instrument de musique; d'après Tertullien, c'est Archi-mède qui l'aurait inventé; d'après Vitruve, ce serait Ctésibe d'Alexandrie. Quant à la date de l'introduction de l'orgue à air, elle est inconnue. Julien l'Apostat parle bien d'un instrument « composé de tuyaux, dont les sons bruyants sont produits par le vent s'élançant d'un antre formé de peaux de bœuf, et dont les touches, frappées par un artiste vigoureux, produisent des sons mélodieux. « Saint Augustin parle aussi d'un « instrument de grande dimension, alimenté par l'air des soufflets. • Cassiodore fait la description d'une t tour construite de divers tuyaux qui, recevant l'air des soufflets, rendent des sons très puissants, modifiés par des langues de bois pressées avec art. » Mais c'est seulement au 8me siècle, en 757, qu'apparaît en Europe un orgue proprement dit: d'après Éginhardt, l'emp. Constantin Copronyme en envoie un comme présent à Pépin-le-Bref; puis Charle-magne en reçoit un autre de Const. Michel et le fait monter dans sa cathédrale d'Aix-la-Chapelle. Il en fait construire lui-même un second par ses ouvriers. Sous Louis-le-Débonnaire, un prêtre vénitien, nommé Georges, se présente comme facteur et forme sans doute des élèves à Aix-la-Chapelle, car bientôt l'Allemagne fournit des organistes à qui en demande, et Jean VIII s'adresse à un év. de Bavière, pour qu'il lui procure un orgue et un organiste. Au 14™* siè-c!e on en établit dans une quantité d'églises, mais non sans quelques résistances locales. Comme l'Égl. d'Orient ne se sert pas d'orgues dans son culte, et qu'il n'y en a jamais eu non plus dans la chapelle du pape, la proposition fut faite au conc. de Trente de les supprimer, mais on n'alla pas aussi loin, et il fut décidé simplement qu'il fallait bannir des églises « toutes sortes de musiques, dans lesquelles, soit par l'orgue, ou dans le simple chant, il se mesle quelque chose de lascif ou d'impur. » L'Église luthérienne apprécie beaucoup l'orgue, qui s'harmonise si bien avec le choral et l'ensemble de son chant religieux. Les réformés mettaient à l'origine l'orgue au même rang que les images et en proscrivaient l'emploi comme contraire à l'esprit et à la simplicité du vrai culte; cependant ils en sont un peu revenus, et sauf les puritains stricts, ils le tolèrent, et même le recherchent pour leurs grandes églises. La puissance de cet instrument, son genre même de sonorité, en fait comme la voix et l'organe de l'assemblée; il accompagne et porte le chant de la foule; cependant on peut dire aussi qu'il l'écrase, et dans la pratique on a constaté que là où il n'y a pas d'orgue, on chante plus et mieux que là où il y en a. Les harmoniums, plus petits, sont préférables comme accompagnement dans un vase peu considérable,

ORIGÈNE !» l'un des plus grands et des plus nobles génies de l'Égl. chrétienne, surnommé Adaniantinos, le Diamant, à cause de ses qualités aussi solides que brillantes, et Y Acier, à cause de sa capacité de travail. Eusèbe dit de lui: « Tout a été merveilleux dans Origène, même dans son enfance. • Né 185 à Alexandrie, il montra de bonne heure des dispositions remarquables comme sérieux, intelligence et piété. Son père, Léonides, ou Léonidas, leleva avec un soin scrupuleux dans toutes les sciences et particulièrement dans la connaissance des Écritures, qu'il lui faisait copier et apprendre par cœur. En 202, il avait 17 ans, quand éclata la persécution de Septime Sévère. Léonidas fut jeté en prison; Origène, ambitieux de partager son sort, affichait sa foi avec un courage qui tenait de la témérité. Sa mère, inquiète des imprudences qu'elle le voyait commettre journellement, finit par lui enlever ses vêtements, qu'elle cacha. Ainsi retenu malgré lui dans sa maison, il écrivit à son père pour l'encourager et l'exhorter au martyre. Léonidas fut mis à mort, laissant sa femme et ses sept enfants sans ressources. Origène sentit son énergie s'accroître avec sa responsabilité. Une dame de la haute société se chargea de lui et le reçut dans sa maison. C'est chez elle qu'il fit aussi la connaissance d'un gnostique célèbre, Paul, dont l'éloquence attirait beaucoup d'auditeurs; obligé de

vivre avec lui, Origène évitait avec soin de prier en sa compagnie. Bientôt, grâce à son travail, il fut en njesure de subvenir à ses besoins par ses leçons. L'école catéchétique d'Alexandrie était sans directeur depuis le départ de Clément. Des chrétiens et même des païens qui avaient suivi les leçons de Clément vinrent prier Origène de le remplacer, et à 18 ans il se trouvait à la tête de cette célèbre école. Ses deux premiers élèves furent deux frères, Plu-tarque, qui plus tard subit le martyre, et Héra-clas, qui devint év. d'Alexandrie après la mort de Démétrius. Cependant la persécution sévissait; Origène, loin de se cacher» soutenait les chrétiens dans leur foi, les visitait dans les prisons, les accompagnait devant les tribunaux et les suivait jusqu'au lieu du supplice où il leur donnait publiquement le baiser d'adieu. Presque tous ses disciples subirent le martyre, et l'on ne comprend pas que lui-même y ait échappé si longtemps. Plus d'une fois il faillit être lapidé par la foule; plusieurs fois il fut assiégé dans sa maison; une troupe de fanatiques se saisit un jour de lui, le revêtit des habits d'un prêtre I de Sérapis, et le força de distribuer des palmes à la foule, ce qu'il fit en disant: t Recevez, non les palmes des idoles, mais celles de Jésus-Christ . » Ses disciples cependant devenaient de plus en plus nombreux, et il fut obligé de les partager en deux classes, confiant à Héraclasles commençants. Après un voyage à Rome en 211, il reprit ses fonctions avec une nouvelle ardeur, et laissa la rhétorique pour se consacrer surtout à l'enseignement des Écritures. Il vivait avec la plus grande simplicité, se privant de tout, jeûnant, ne portant pas de souliers et n'ayant qu'une seule tunique. Il avait vendu un grand nombre de ses manuscrits pour la modique rente de 4 oboles par jour. Il montrait en même temps la plus tendre charité pour les affligés et les pauvres. Son genre de vie lui attirait chaque jour de nouveaux élèves, dont un grand nombre se convertissaient au christianisme. Le jour il s'appliquait à l'étude delà philosophie,lisant Ammonius Saccas, Aristote, Platon, Longin, Nicomaque; la nuit il méditait les Écritures. Mais il s'aperçut bientôt que pour cela l'étude de l'hébreu lui était nécessaire; il se mit aussitôt à l'apprendre et revisa la version des Septante. Ce fut vers cette époque qu'il commença à écrire. Un de ses amis, le riche Ambroise, l'y encourageait et se chargeait des frais de publication; il le poussait d'un écrit à un autre, et pour cela mit à sa disposition 7 tachygraphes auxquels il était sans cesse occupé de dicter, et 7 copistes travaillant tout le jour. Il jouissait alors d'une renommée universelle; les premiers personnages de l'empire étaient désireux de le voir et d'entrer en correspondance avec lui.

Porphyre fit exprès le voyage pour l'aller visiter, et le gouverneur de l'Arabie le manda auprès de lui pour le consulter sur des sujets religieux. Mais en 215 commencèrent ses tribulations ecclésiastiques, La persécution de Caracalla ayant éclaté, il fut obligé de s'expatrier. Il se rendit en Palestine, où les év. de Césarée et de Jérusalem le firent prêcher, quoiqu'il n'eût pas reçu les ordres. Démétrius, év. d'Alexandrie, l'ayant appris, le leur reprocha vivement, mais ils lui répondirent: « Nous nous étonnons que vous soyez ainsi éloignés de la vérité, car tous ceux qui sont capables de concourir à l'avancement spirituel des fidèles, sont priés par les saints évêques de prêcher au peuple. » Il revint bientôt à Alexandrie et reprit ses travaux. En 218Mamméa, tante d'Héliogabale, l'appela à An-tioche, et la tradition ajoute qu'il la convertit. C'est dans l'intervalle de 218 à 228 qu'il composa le plus grand nombre de ses ouvrages. C'est à ce moment aussi qu'à l'instigation de son ami Ambroise, il entreprit son Comment, sur l'Écriture sainte, qui l'occupa jour et nuit, sauf le temps qu'il donnait à son enseignement et k sa vaste correspondance. En 228 il fut appelé en Achaïe pour y combattre certaines hérésies; il s'y rendit et par son éloquence obtint des succès inespérés. A son retour il passa par Césarée; les évêques de Palestine l'engagèrent comme la première fois à prêcher; mais pour éviter toute complication, ils commencèrent par lui conférer la prêtrise. Cette fois la colère de Démétrius ne put plus se contenir. Jadis ils étaient amis, mais les succès d'Origène avaient rempli d'amertume et de jalousie le cœur de l'évêque. Il fit ce qu'il put pour soulever l'Église contre lui, et Origène, dans l'intérêt de la paix, s'éloigna volontairement, laissant à sa place son ami et disciple Héraclas. Mais profitant de son absence, Démétrius assembla un concile, le fit condamner, lui retira le droit d'enseigner et l'exila hors d'Égypte. Un nouveau concile le dépouilla du sacerdoce et l'excommunia comme hérétique. On fit entre autres valoir contre lui le fait qu'il s'était mutilé, par une interprétation trop littérale de Matth. 19, 12. Démétrius chercha à soulever toutes les Églises contre l'illustre docteur, et saint Jérôme relève amèrement ces injustices: « Telle fut, dit-il, la récompense de tant de travaux et de sueurs; Rome même le juge indigne de la communion, non qu'il ait enseigné de nouveaux dogmes, ou qu'il ait eu des sentiments hérétiques, ainsi que voulaient le persuader ceux qui aboyaient contre lui comme des chiens furieux, mais parce qu'on ne pouvait supporter l'éclat de son éloquence et de sa science, et que. lorsqu'il parlait, il semblait que tous les autres fussent muets. » La querelle ainsi envenimée devait se poursuivre encore

deux siècles après la mort de celui qui en était l'occasion. En attendant, Origène vivait auprès de ses amis les év. de Palestine. De Césarée il écrivit pour se justifier une lettre à Alexandrie, touchante par sa douceur et le pardon chrétien qu'elle respire. Il continuait d'ailleurs de mener exactement le même genre de vie que précédemment, et il ouvrit une école qui fut fréquentée par tous les hommes remarquables des environs; Grégoire Thaumaturge, son frère Athénodore, ainsi que des foules d'auditeurs y accouraient. En 235 éclata la persécution de Maximin; Origène menacé se retira en Cappa-doce pendant 2 ans, et trouva chez une femme chrétienne un asile et une riche bibliothèque. En 238 il alla à Nicomédie, d'où il écrivit à Jules l'Africain sa fameuse épître sur la version alexandrine de la Bible. Il se rendit ensuite à Athènes, puis à Bostra, où il eut avec l'év. de cette ville une discussion publique; l'évêque professait des idées entachées d'hérésie; après la discussion il reconnut franchement ses erreurs. Origène revint à Césarée; il y professa encore pendant dix ans; il prêchait presque tous les jours et publia plus de mille homélies. C'est à ce moment qu'il écrivit sa fameuse Apologie contre Celse, et qu'il entra en correspondance avec l'emp. Philippe l'Arabe et l'impératrice Severa. Sous le règne de Décius, 250, Origène fut enfin arrêté. Sa mort importait plus que celle d'un millier de chrétiens. Celui qui avait tant fait par sa parole et par ses écrits, ne devait pas être épargné. On employa tous les moyens, toutes les tortures pour obtenir son abjuration, mais il demeura ferme malgré son âge, et quand, après la mort de Décius, les portes de sa prison lui furent ouvertes, on put le voir, faible et brisé de corps, mais toujours fort dans son âme, reprendre ses travaux et consoler les autres dans leurs afflictions, jusqu'au moment où 4 ans après, il mourut à Tyr des suites de ses tortures, 254, âgé de 69 ans. Origène était un de ces génies vastes et universels dont l'éloge ne saurait qu'atfaiblir l'éclat. Il était au premier rang pour l'explication de la Bible, l'exposé des dogmes et l'apologie du christianisme. Il a laissé, dit-on, jusqu'à 6000 ouvrages, sans doute en comptant ses homélies et probablement ses lettres. Il n'en reste que peu. Le plus important est le Traité des Principes, où il expose ses idées sur Dieu, Jésus-Christ, l'âme, la Cosmogonie chrétienne, etc. C'est celui que l'Église lui reproche le plus. On y trouve une grande profondeur de pensées, unie à une riche imagination. Il a beaucoup emprunté à son prédécesseur Clément d'Alexandrie; il a plus d'ampleur que lui, mais moins de sens érudit et de logique. Puis viennent ses Comment. sur toute l'Écriture sainte, ses Homélies,

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ses Hexctplet, édition de la Bible en 5 colonnes portant le texte hébreu et les principales versions grecques; un livre sur la Prière, l'Oraison dominicale. l'Exhortation au martyre, l'Apologie, etc. Le traité des Principes nous a été conservé par une trad. latine peu fidèle de Ru-lin; il n'en reste que des fragments dans l'original. Plusieurs de ses ouvrages ont été publ. par Huet 1668, Spencer 165&, Montfaucon 1713, De la Rue 1733, Redepenning 1835, etc., v. Le Nain, de Tillemont, Fleury, Mosheim, Guillon, Mtfhler, L. Bridel, et la thèse de L. Rœhrich, Genève 1835. H. B.

2° On nomme encore un philos, néoplatonicien, disciplë d'Ammonius Saccas, condisciple de Plotin et de Longin, qui portait le nom d'Origène, mais il est inconnu, et il est possible que ce soit le même que l'illustre père de l'Église.

Les controverses relatives à Origène durèrent une partie du 4me siècle, et prouvent que l'esprit critique et scientifique était débordé par la théol. traditionnelle; la plupart des savants le défendaient; Rufm, Jean de Jérusalem tenaient pour lui, mais d'autres lui reprochaient sa théorie de la création, et d'autres en faisaient le père de l'arianisme. Sur les instances de quelques moines, Théophile d'Alex, condamna et chassa les moines origénistes, qui se réfugièrent à Constantinople auprès de Chrysostome; celui-ci à son tour dénoncé par Théophile, fut déposé 403 par le concile ad quercum; il ne s'agissait plus ni de science, ni de foi; la passion seule avait la parole. Elle décida contre Origène au conc. de Constantinople 553.

ORKNEY, v. Shetland.

OROSE, Paul, né à Tarragone, Catalogne, et prêtre. A l'occasion des questions priscilliennes il se rendit 415 à Carthage, pour consulter saint Augustin. Celui-ci le renvoya à saint Jérôme à Bethléhem. Là il assista à un concile tenu à Jérusalem contre les pélagiens. Accusé par eux d'hérésie, il se défendit en publiant son apologie De libertate arbitrii, où il rend aussi compte du concile. De retour en Afrique, il écrivit à la demande d'Augustin ses Historiarum Libri VII, livre d'histoire, également connu sous le nom <ÏHormesdas, où il montre que les maux de l'humanité viennent du paganisme et non du christianisme. Très apprécié au moyen âge, quoiqu'il doive être lu avec réserve, ce livre a été trad. en anglo-saxon, par les soins d'Alfred-le-Grand (édit. Londres 1773). Il va de la création à l'an 316, et renferme beaucoup de traditions populaires. La plus ancienne édition est celle d'Augsbourg 1471, puis Venise 1475; la meilleure, celle de Haverkamp, Leyde 1738 et 1767. La légende dit qu'il apporta en Europe les reliques de saint Étienne. f en Afrique, date inconnue.

ORTHODOXIE, la foi généralement et officiellement reçue dans une Église. Le mot vient du grec orthos, droit, exact, et doxie, opinion, doctrine, manière de voir, opposée aux mauvaises, c.-à-dire aux autres, à l'hétérodoxie. Si elle pouvait être déterminée d'une façon absolue, la question serait tranchée; mais elle ne peut l'être que d'une manière relative, et ainsi pour chaque église, et même pour chaque individu, l'orthodoxie, c'est ce qu'il croit, c'est sa foi par opposition aux autres croyances. Historiquement c'est pour les principales Églises l'ensemble de leurs dogmes et de leurs institutions. La chose et le mot n'apparaissent qu'à la fin du 2'ne siècle, alors que l'on commence a identifier le christianisme avec ses formules; elles se fixent pendant les luttes du au 8™ siècle, à mesure que les conciles sont amenés à préciser les dogmes chrétiens contre leurs adversaires. Avant même qu'il y eût des symboles ou confessions de foi, on se servait du mot pour désigner la foi chrétienne, telle qu'elle était généralement admise, et lors du schisme d'Orient, qui ne portait pas sur une question de dogme. FÉgl. grecque conserva son titre d'orthodoxe, pendant que l'Égl. latine prenait celui d'universelle, ou catholique, mal justifié par les circonstances. Dès lors, dans l'Égl. catholique le caractère de l'orthodoxie a varié. La soumission aux conciles en fut la condition, avec l'appel au pape comme dernière instance. Puis le conc. de Trente est devenu la règle unique de la foi. Enfin depuis le conc. du Vatican, c'est Tinfail-libité du pape qui résume tous les dogmes; celui qui ne l'admet pas n'est pas orthodoxe. Les Eglises de la réforme se sont dans le principe rattachées aux huit premiers conciles écuméni-ques, et leurs confessions de foi en portent la trace, même dans leur variété. Mais à mesure qu'on a mieux compris que la vie n'est pas dans le dogme, les déclarations de foi ont été abrégées, et la notion d'orthodoxie est devenue moins rigoureuse. Ce qui a contribué surtout à ce résultat, c'est le fait de nombreuses églises qui étaient restées strictement orthodoxes, et qui n'en étaient pas moins mortes spirituellement, l'Église russe, l'Égl. luthérienne avant Spener et Francke, longtemps l'Égl. anglicane, parfois aussi les égl. réformées. L'orthodoxie a eu souvent le pouvoir temporel pour allié, et ce n'a pas été son beau temps. Ailleurs c'est l'absolue liberté de croyance qui a été protégée par l'État, et la réaction a été en faveur de l'orthodoxie. Auj. le mot d'orthodoxie n'est pas populaire; il semble ne représenter quedesfor mules sèches et abstraites, sans vie et sans onction. C'est une injustice et l'on aurait tort de la condamner, à cause de quelques exemples regrettables; l'on ne peut oublier que ce sont presque exclusivement des églises et des hommes orthodoxes, qui ont témoigné de leur vie par leurs œuvres, dans tous les domaines de l'activité chrétienne. La doctrine peut ne pas suffire, mais elle n'en est pas moins nécessaire; des organes ne prouvent pas qu'on soit vivant, mais on ne peut vivre sans organes.

OSIANDER lo Andréas, un des théol. les plus distingués de son temps. Né à Gunzenhau-sen, Ansbach, 19 déc. 1498, fils d'un forgeron, il étudia à Leipzig, Altenbourg et Ingolstadt, s'adonna surtout aux mathématiques, à la théol. et à l'hébreu. Ordonné prêtre 1520, il fut nommé prof, au couvent des augustins à Nuremberg, se prononça pour la Réforme en 1522, et fut appelé comme prédicateur à régi, de Saint-Laurent, où il resta jusqu'en 1548. Il avait en vain combattu l'Intérim d'Augsbourg, et dès qu'il fut promulgué, il partit sans en avoir demandé l'autorisation au Conseil et se rendit à Breslau. La faveur du duc Albert de Prusse le fit aussitôt nommer pasteur à Kdnigsberg, et peu après prof, de théologie, f 17 oct. 1552. Malgré la présence de l'empereur et des légats aux diètes de 1522 et 1524, il avait courageusement prêché contre les principes catholiques, sur la messe, les cérémonies, le culte des saints. Il avait pris une part active à l'introduction de la Réforme à Nuremberg, dans le Brandebourg et dans le Palatinat. Il exerça même une grande influence sur la Réforme en Angleterre par le mariage de sa fille avec Th. Cranmer, qui devint archev. de Cantorbery. Il assista à plusieurs diètes et à presque tous les colloques; soutint avec énergie le droit de l'Égl. de résister aux empiétements de l'État sur les affaires religieuses; demanda la convocation d'un concile national allemand, où les questions seraient tranchées par la Bible et non par une majorité. Il combattit tour à tour Rome, Zwingle et les anabaptistes. Mais ce qui lui a surtout donné une notoriété, ce furent ses luttes avec Luther et Mélanchthon. Nature mystique, il n'admettait pas que la mort de Christ pût être envisagée comme une satisfaction juridique donnée à la justice de Dieu. Il y voyait plutôt la communication de la nature de Christ à l'homme, comme si l'une se fondait dans l'autre. La mort de Christ était plutôt un gage, une déclaration qu'une rédemption, et l'on peut dire en général que la personne humaine et historique du Sauveur restait chez lui à l'arrière-plan. Aussitôt après sou discours d'ouverture à Kônigsberg 4549, il fut attaqué vivement par le prof. Lau-terwald, puis par son collègue Staphylus (redevenu catholique), et par MiJrlin. Le duc, dans riutérét d'Osiander, arrêta la discussion et décida qu'oo demanderait l'avis de Mélanchthon et celui des théol. du Wurtemberg, 1552. Le premier préavisa contre Osiander, les autres pour, ainsi que Flacius; Stancarus se mêla au débat et exagéra l'opposition contre Osiander. C'est au milieu de la lutte qu'il mourut, bien supérieur à ses adversaires par la hauteur de ses vues et l'élévation de son caractère, certainement une des personnalités les plus remarquables de h Réforme. Parmi ses nombreux ouvrages on distingue surtout (en latin) ses Harmonies évangéliques, et son livre: Du seul médiateur Jésus-Christ et de la justification par la foi. Il a réimp. aussi de Copernic: De revo-lut. orbium eœlest. et de Cardan us: Ars magna, avec ses propres vues sur les derniers temps. Vie, par Wilken. Le conflit théol. se termina par des questions politiques; le peuple se souleva, et le prédicateur de la cour, Funk, gendre d'Osiander, périt sur l'échafaud.

2° Luc, son fils, né à Nuremberg 16 déc. 1534, étudia à Kônigsberg, et occupa plusieurs postes de pasteur. Étant prélat d'Adelberg 1567, et comme tel. membre du Conseil, il s'attira la colère du duc, parce qu'il s'opposa 1598 à l'établissement des Juifs dans le pays. Il fut dépouillé de sa charge, et après un court pastorat à Esslingen, f à Stuttgard 7 sept. 1604. Il s'était opposé avec succès, en 1584, à ce qu'on punît de la torture et de la mort les anabaptistes bannis qui revenaient dans le pays. Il pril part aux colloques de Maulbroun 1564 et 1576, de Montbéliard 1586, et de Ratisbonne 1594. Comme prédicateur il avait une certaine rudesse, mais qui ne manquait pas de distinction. Il a publ. 50 sermons sur le catéchisme, et un bon traité sur l'art de prêcher (concionandi). Son principal ouvrage est un Abrégé des Centuries de Magdebourg. Notons encore une édition de la Vulgate, avec notes, une Institution chrétienne, qui a de la valeur; une petite grammaire hébr. avec Dictionnaire.

3° Luc, son fils, né 6 mai 1571, docteur en théol., finit après avoir desservi quelques paroisses, par être prof, et surintendant au séminaire de Tubingue, puis chancelier de l'université, f 1638. Orthodoxe rigide, il attaqua violemment le Vrai christianisme d'Arndt, et mit aux prises les théol. deGiessen et de Tubingue. les cryptiques et les cénotiques.

4° Son petit-neveu, Jean, fils du chancelier Jean-Adam Osiander f 1697, naquit 22 avril 1657. Instruit et bien doué, il refusa des appels qui lui furent adressés de Tubingue et de Hambourg, et passa quelques années en France comme compagnon d'un jeune noble. En 1686 il revint à Tubingue, et fut nommé prof, d'hébreu, de grec et de philos., et prédicateuràl'égl. paroissiale. Ayant réussi à obtenir de Turenne qu'il épargnât la ville, il fut employé dès lors à diverses négociations diplomatiques, dont il se tira habilement. Charles XII de Suède voulut le nommer colonel d'un régiment, mais dut se contenter de le nommer conseiller ecclésiastique royal. Son pays ne lui ménagea pas les récompenses, et il finit par avoir en mains la direction supérieure des affaires ecclés. et de l'université. f!8 oct. 1727.

OSIUS=Hosius q. v.

OSMA (Pierre d'), prof, de théol. à Salaman-que: auteur d'un Traité sur la Confession, où il prouve qu'elle n'est pas d'institution divine et que le sacrement de la pénitence n'est justifié ni par l'A., ni par le N. T. Sur la dénonciation d'Alph. Carillo, archev. de Tolède, Sixte IV condamna ce livre comme hérétique à cause de ses énormités.

OSORIO, Jérôme, né 1506 à Lisbonne, étudia à Salamanque, Paris et Bologne; embrassa l'état ecclésiastique, jouit de la confiance des rois Jean et Sébastien, fut nommé prof, à Coïm-bre et év. de Silves, et essaya en vain de détourner Sébastien de sa fatale expédition en Afrique 1578. Il travailla à maintenir la tranquillité dans le pays après la mort de ce prince, f 1580. Il a écrit plusieurs traités de philos., de théol. et d'histoire, entre autres des Comment. et des paraphrases de l'Écriture, d'une latinité si pure qu'ils l'ont fait surnommer le Ci-céron portugais.

OSSAT (Arnaud d'), né 1536àCassagnabere, diocèse d'Auch. d'une pauvre famille. Orphelin de bonne heure, il fut élevé avec un jeune noble, qu'il accompagna en 1559 en France. Il étudia à Paris et à Bourges les lettres et le droit; gagna comme avocat la faveur de l'archev. de Toulouse, Paul de Foix, le suivit à Rome comme secrétaire d'ambassade et fut chargé après lui de représenter les intérêts français à la cour romaine. Il négocia l'absolution d'Henri IV en échange du rétablissement des jésuites, et reçut pour sa récompense l'év. de Bayeux, plusieurs bénéfices et le cardinalat 1599. f 1604. Ses Lettres sont renommées comme source d'information pour l'hist. de son temps et de la cour de Rome.

OSSÉNIENS, forme corrompue du nom d'Es-séniens, désignant une variété d'ébionites qui, d'après Épiphanes, serait identique avec les el-késaïtes, ébionites gnostiques du temps deTra-jan, tels que les représentent les Clémentines.

OSTENSOIR, vase d'église, ordinairement d'or ou d'argent, souvent enrichi de pierres précieuses, et destiné à recevoir soit l'hostie, soit des reliques sacrées offertes à l'adoration du peuple. La pièce principale en est une lunule, en croissant, placée dans une boîte en verre, où Thostie est conservée. L'ostensoir peut se transporter, ou se mettre sur l'autel. Avant de s'en servir on le bénit.

OSTERVALD, Jean-Frédéric, né 15 nov. 1663 à Neuchâtel, où son père était pasteur. Après avoir fait ses premières études à Neuchâtel, puis chez Ott à Zurich, il se rendit en 1678 à Saumur, de là à Orléans auprès de Claude Pajon, à Paris où il vit beaucoup Allix, plus que Claude; et rappelé par une maladie de son père, il vint le suppléer jusqu'à sa mort, 1681. Il passa ensuite quelque temps à Genève, sous Tronchin, fut consacré en 1683, épousa 1684 une demoiselle de Chambrier, fut élu diacre en 1686, prédicateur du mardi, et pasteur en 1699. Ses auditeurs étaient si nombreux qu'on avait été amené à construire un nouveau et vaste temple dans le bas de la ville. Il fut souvent nommé doyen, aussi souvent que les règlements le permettaient, mais en réalité il fut toute sa vie le modérateur vénéré de son église. Son activité était extrême. Dès 1702 et pendant 44 ans il réunit autour de lui les étudiants et leur donna gratuitement des leçons de théol., sans vouloir jamais rien accepter. Ceux-ci publièrent, mais sans son consentement, sa Morale, et sa Théologie, qui ne reproduisent qu'imparfaitement sa pensée. Sa tendance théol. était orthodoxe, mais, comme Spener, il en voulait à l'orthodoxie morte, et il prêchait la vie, le devoir, plutôt que les formules métaphysiques de la spéculation. La réaction l'entraîna même peut-être un peu trop loin, et quelquefois il dut s'élever à son tour contre les ministres « qui font de l'éloquence mondaine, et qui oublient l'essentiel, savoir J.-C., sa croix, sa grâce, son Esprit. i II aimait à faire des séries de sermons, sur des livres entiers de l'A. et du N. T. Il a pris part à la réforme du psautier, et à celle de la liturgie qu'il enrichit de plusieurs portions importantes, quelques-unes empruntées à la liturgie anglicane. Malgré sa piété bien connue, son Grand Catéchisme fut accueilli avec méfiance par les évangéliques; l'Abrégé, qu'il en lit en 1702, fut plus mal venu encore, parce qu'il avait dû sacrifier la plénitude de sa pensée (sans parler d'autres Abrégés qu'on en fit et dont il n'est pas responsable). On lui reprocha une tendance arminienne, et Berne l'accusa de vouloir remplacer le catéch. de Heidelberg par un Manuel de morale. C'était aller trop loin, mais Ostervald prêtait bien le flanc à la critique. Son ouvrage le plus connu, et qui a rende son nom longtemps populaire, ce sont les Arguments et Réflexions qu'il composa pour rendre plus facile la lecture de la Bible. D'abord publiés à part, on les inséra dans le corps d'nne édition de la Bible, impr. à Genève; c'était le texte d'Olivetan, revu par les pasteurs de Genève. Quand il s'agit d'en faire une nouvelle édition, on pria Ostervald de la revoir, et il fit en marge un certain nombre de corrections plus on moins importantes, destinées seulement à rendre le style plus clair et plus moderne. Ce fat ce qu'on appelle la Version d'Ostervald 1744; l'original en est précieusement conservé à Neuchâtel. Le vieillard avait alors 80 ans passés. En 1746, comme il commençait un sermon sur Jean 20, 1-8, il fut frappé d'apoplexie en chaire; il mourut en paix 14 avril 1747, laissant 35 enfants, gendres et petits-enfants. Sa femme était morte en 1715. Un de ses fils fut pasteur à Bâle. Outre les livres cités, Ostervald a publié encore Douze Sermons, un Traité des sources de la corruption qui règne auj. parmi les chrétiens, 1700; un Traité contre l'impureté 1701, et un Traité sur l'exercice du saint ministère. Plusieurs de ses ouvrages ont été trad. en allemand, en anglais et en hollandais. Un peu surfait de son temps, grâce à de grandes qualités personnelles, il est injustement déprécié aujourd'hui. Ami d'Alph. Turrettini, q. v.

OSTROGOTHS iou Greuthingers), nom de la fraction des Goths qui se trouvait à l'orient des autres au moment ou les différentes branches se séparèrent. Ils eurent pour premier chef le cruel Hermanaric 336-376, et s'étendirent d'abord sur les rives de la Baltique et jusqu'au Don. On les retrouve ensuite en Pannonie et en Mésie après la mort d'Attila; enfin ils fondent tout à coup en Italie le grand empire qui porta leur nom pendant 60 ans, 493-553, et qui compta 8 rois. Le premier fut Théodoric, ou Dietrich, surnommé le Grand, né 455, fils deThéodemir. Envoyé à 8 ans comme ôtageà Constantinople, il y reçut une espèce d'éducation et jouit de la faveur des emp. Léon et Zénon. Rentré en Pannonie à 18 ans il succéda bientôt k son père. Son peuple, trop à l'étroit dans l'inculte Illyrie, aspirait à s'étendre vers des contrées plus fertiles et plus civilisées; il le conduisit en Italie, battit 3 fois Odoacre, entra en vainqueur à Ra-venne 493, et resta seul maître du pays. Chrétien, comme les Goths l'étaient depuis Valens et Fritiger, il épousa Albofleda, sœur de Clovis, qui se fit bientôt baptiser, et pendant les 33 ans de son règne il travailla à faire pénétrer partout le christianisme, l'instruction, l'ordre civil et l'industrie. Par de nombreuses alliances il créa dans l'Europe centrale une sorte d'unité politique dont il fut le centre respecté, et qui fut très favorable à la propagation de l'Évangile. Ses dernières années furent moins heureuses; cruel et soupçonneux, il devint intolérant; il fit périr Boèce et Symmaque, faussement accusés d'un complot contre sa vie, et laissa mourir en prison le pape Jean I" qui ne voulut pas intervenir à Constantinople en faveur de la liberté des ariens; au dernier moment il voulut même interdire le culte catholique en Italie, mais il f 526. Ses successeurs ne surent pas continuer son œuvre; la décadence fut rapide; Bélisaire, puis Narsès, reprirent l'Afrique sur les Vandales et l'Italie sur ses nouveaux possesseurs; Totila fut vaincu à Lentagio 552, Téias fut tué près de Cumes 553, un grand nombre d'Ostrogoths quittèrent le pays et leur puissance fut définitivement brisée. Ce fut même la fin de leur existence comme peuple, mais ils avaient préparé l'arrivée et le triomphe des Lombards.

OSUNA (Fray Francisco de), auteur d'un traité: Loi du Saint amour, et d'un Alphabet spirituel, Burgos 15 avril 1542, où il distingue les bons évêques, qui édifient, et les autres, beaucoup plus nombreux, qui n'ont que l'anneau, la crosse, et l'autorité de faire bonne chère.

OSWALD lo né 604, était le fils du roi de Nor-thumbrie Ethelred, païen ardent qui f 616 dans une guerre contre son parent Eadwin, ami du christianisme. Lui-même, élevé en Écosse, devint chrétien, et après avoir vaincu et tué le païen Keadwalla, successeur d'Eadwin, il monta sur le trône 636 et travailla de toutes ses forces à la propagation de l'Évangile parmi les Anglo-Saxons. f 5 août 642 dans le combat de Masser-field, contre Penda, le dernier prince païen de Mercie. Canonisé à Rome à cause de sa mort héroïque et de son zèle chrétien, il devint bientôt légendaire en Angleterre et surtout en Allemagne; on lui prêta des miracles, entre autres d'avoir ressuscité des soldats tués dans une bataille, d'avoir eu un corbeau familier qui l'aida à passer la mer, qui favorisa son mariage, etc. Pour les Allemands il semble être devenu l'ancien dieu Woldan, converti au christianisme. Les deux seuls documents que l'on possède sur sa vie, datent des 12®* et 13m® siècles, et probablement des bords du Rhin.

2o Danois, év. de Worcester 960, et archev. d'York 972, f 992, travailla activement k la réforme du clergé, mais dans le sens romain. Il fit venir de France Abbon de Fleury pour instruire les moines de Ramsey. Parent de l'archev. Odon.

OTAHITI, ou Tahiti, ou Taïti, la plus grande des 104 îles de la Société, visitée 1606 par l'espagnol Quiros, puis par Wallis, Bougainville et le capitaine Cook 1768 et 1776, célèbre par la douceur de son climat et la richesse de son sol; 11,000 habitants. Dès 1774 les jésuites songèrent à y établir une mission sous Obéréa, mais la suppression de leur ordre mit fin à cette tentative. En 1796 la Soc. des missions de Londres, qui venait d'être fondée, y envoya ses premiers missionnaires, sous Pomaré Ier, mais le pays était divisé et ils ne purent d'abord rien obtenir. Ce fut seulement après la mort du roi 1803, qu'ils réussirent sous Pomaré II à dissiper les méfiances qui les avaient accueillis, et en 1817 tonte Pile avait passé à l'Évangile; les païens, après avoir été vaincus dans une rencontre qu'ils avaient perfidement ourdie, avaient mis bas les armes et s'étaient soumis. En 1819 Po-maré II se fit lui-même baptiser avec toute sa famille. Sous l'influence croissante des missionnaires, et en particulier de Pritchard, l'île se civilisa rapidement et adopta la plupart des coutumes et des institutions de l'Europe. Les mœurs voluptueuses du paganisme cédèrent devant la discipline chrétienne, l'on peut dire que les missionnaires furent à la fois les réformateurs et les gouverneurs du pays; ils ne voulurent pas même accepter en 1822 le pavillon anglais et la garnison que l'Angleterre leur offrait; ils craignaient de compromettre par un protectorat politique l'œuvre toute spirituelle qu'ils poursuivaient. La religion protestante était seule autorisée par la loi; deux jésuites, Carel et Laval, essayèrent néanmoins de s'imposer par la force, mais ils furent expulsés, ce qui, à l'instigation du consul Mœrenhout, donna lieu sous la reine Pomaré IV 1844-1847 à l'occupation française. Le couteau sur la gorge, la pauvre reine, malade, dut subir le protectorat et les jésuites que le gouvernement de la France lui imposait. La plupart des missionnaires évangéliques durent quitter l'île; ils furent bientôt remplacés par des pasteurs français, Arbousset, Viénot, Vernier, etc. Les catholiques n'ont fait oncore que bien peu de progrès, malgré les ressources de tous genres mises à leur disposition, v. Lutteroth, 0' Tahiti.

OTFRIED. moine du couvent de Weissem-bourg, Alsace; élevé à Erfurt sous Raban Maur, puis à Saint-Gall; auteur d'une Harmonie en vers rimés des 4 Évangiles en langue franque, en 5 livres et 25 chapitres, avec texte latin en regard, dédiée à Luidbert, év. de Mayence 863-889; il a fait de sages observations sur la langue. Publié par Flacius 1571.

OTHMAR, Automar, Audemar. A Saint-Gall, où les traditions des Culdee régnaient encore au 8rae siècle, le comte Waldram, patron du monastère, remit ses droits à Charles Martel, qui, sur sa recommandation, nomma pour abbé le jeune et brillant Othmar. Celui-ci en finit avec les anciens usages, et remplaça la règle de Co-lomban par celle de saint Benoît, sur la demande de Pépin. Il eut à se défendre contre les prétentions de l'év. de Constance et des comtes voisins qui, après la défaite des Allemans et sou s la domination franque menaçaient les propriétés et l'indépendance du couvent, et il repoussa ces revendications avec énergie et avec succès. L'évêque s'en vengea en le faisant arrêter dans un de ses voyages; il le fit mettre en prison, l'accusant faussement de divers crimes et délits, notamment d'immoralité, et Othmar jugé et condamné par lui fut enfermé dans l'Ile de Stein, sur le Rhin, où il + 16 nov. 759. Son corps fut transporté à Saint-Gall 769. Canonisé au siècle.

OTTHER. Jacques, né à Lautenberg, Alsace, étudia à Fribourg et à Strasbourg, prit sa licence en théol., et dès 1520 s'attacha à Luther. En 1522 pasteur à Kenzingen en Brisgau, il célébra la Cène sous les deux espèces et dit la messe en allemand. Plusieurs fois traqué par le grand duc Ferdinand, il vint en Suisse, prêcha à So-leure et à Aarau 1529, et finit par être appelé cemme pasteur à Esslingen, où Ambroise Blau-rer avait introduit la Réforme. Il usa de douceur envers les anabaptistes, et prit part aux tentatives d'union de Bucer; + 1547.

OTTON, ou Othott. Outre les divers empereurs de ce nom qui furent plus ou moins mêlés aux querelles des papes, notamment sur la question de l'investiture, l'hist. ecclésiastique connaît plusieurs Ottons. lo Le Saint, év. de Bamberf, né 1062 ou 1069, d'une famille de comtes soua-bes. Il passa plusieurs années en Pologne, comme docteur et conseiller de la jeune duchesse, femme de Boleslas II. Quand elle fut morte, il se retira dans un couvent de Bavière, à Ratisbonne, mais Henri IV le nomma son confesseur, l'appela à sa cour comme chancelier, et finalement lui donna l'évêché de Bamberg avec la crosse et l'anneau 1103; Pa<*al II ne le confirma qu'en 1106. Austère, actif et charitable, il remplit ses fonctions avec dévouement, se refusant souvent le nécessaire et employant ses immenses revenus à des aumônes ou à des constructions d'églises, d'écoles et de séminaires. Il releva en particulier la cathédrale, qui avait été brûlée en 1081. La querelle des investitures l'ayant dégoûté du monde, il voulut retourner au couvent, mais un ordre de l'empereur le ramena à son poste. Puis, à la demande de Boleslas ni, duc de Pologne, qui voulait faire évtn-géliser la Poméranie, il partit 1124 avec une suite nombreuse et avec un cortège et une magnificence toute royale qu'on crut devoir !*i imposer. Son activité, sa b*lle prestance, les cadeaux qu'il sut faire à l'occasion, mais surtout sa piété vivante, lui concilièrent les cœurs des princes et des populations. Dans un premier voyage missionnaire, à Pyrisa sur la Plœne, il baptisa 7,000 païens. Il gagna ensuite Kammin, puis Stargard et Gutzow, où les temples des idoles devinrent des égl. chrétiennes. Enfin il aborda Julin, dans l'île de Wollin, la forteresse du paganisme, où il avait une première fois risqué de perdre la vie. De nombreuses conversions eurent lieu, et il y laissa un évêque, Adtlbert, qui ne fut cependant confirmé par le pape qu'eu 1140. Après avoir visité encore Stettin, Gridiz, Lubin et les petites villes de la Poméranie, il repartit 1125 pour Bamberg, comblé par Bo-lesias III d'honneurs et de présents. Une seconde mission, 1128, amena la reconnaissance officielle da christianisme par la diète d'Usedom, la démolition des temples païens de Wolgast et de Gutzow, et le retour de Stettin à la foi chrétienne dont elle s'était détournée. Il échappa deux fois à des tentatives d'assassinat, à Stettin et Julin, et se disposait à se rendre auprès des Kugiens, quand les circonstances et des ordres positifs de l'empereur l'obligèrent à revenir à Bamberg, où il travailla encore 10 ans avec l>énédiction, dirigeant touj. de loin l'œuvre de la Pomèranie. f 1139. On lui attribue d'avoir le premier fixé à 7 le nombre des sacrements; mais cette mention ne se trouve que dans une notice postérieure à Pierre Lombard qui en fut e véritable inventeur.

2<> Otton de Freysingen, fils du margrave Léopold d'Autriche, et d'une fille de Henri IV; demi-frère de l'emp. Conrad III, et beau-père de Barberousse. Né 1109 il étudia la théol., fut à Paris un des élèves les plus distingués d'Abei-lard. Nommé 1130 abbe du beau couvent de Morimont, Bourgogne, de l'ordre de Citeaux, il fut appelé en 1136 à l'évêché de Freysingen. Ses talents, non moins que sa naissance, lui assurèrent une haute position politique; il fut employé dans les négociations avec les papes Eugène III et Adrien IV et montra beaucoup de tact. En 1147 il accompagna Conrad à la croisade et faillit périr près de Laodicée dans une embuscade. Il accompagna aussi Barberousse lors de sa première campagne de Rome, et f 22 sept. 1158 à Morimont, peu après son retour. Il a laissé une Chronique importante, qui va de la création du monde à l'an 1146. Elle est intitulée: Des deux cités (ou royaumes), et aussi: Du changement des choses. C'est la première chronique avec tendance philosophique. Il admet jusqu'à J.-C. deux royaumes, le terrestre et le céleste, qui sont distincts; depuis J.-C. jusqu'à Théodose il y a lutte, le céleste ayant à combattre le paganisme au dehors, les hérésies au dedans; mais la victoire est assurée, et l'Église finira par absorber l'État. Otton de Saint-Biaise a continué cette Chronique jusqu'en 1209. Le même écrivain a laissé aussi une Vie de Frédéric jusqu'en 1156, importante parce qu'elle a un caractère presque officiel, impartiale quoique rédigée au point de vue des Ho-henstaufen. Elle a été continuée jusqu'en 1160 par son disciple le chapelain Ragavin, et jusqu'en 1171 par un inconnu.

3# Otton de Passau, maître de lecture au couvent des franciscains à Bâle, et membre de la Société des Amis de Dieu; du reste inconnu. Son principal ouvrage d'édification est intitulé: Les 24 anciens, ou le trône d'or, introduction à la vie intérieure. C'est un recueil qui renferme des maximes ou des passages tirés de 104 auteurs de l'antiquité, classiques, pères de l'Égl. et théologiens, jusqu'au 13me siècle. Il n'a rien emprunté aux mystiques allemands, ni aux ascètes. On en possède plusieurs mss. La plus ancienne édition imprimée date de 1480.

OUBLIE, v. Hostie.

OUDIN, Casimir, ou Remi, né 1638 à Méziè-res, Ardennes, entra 1656 chez les prémontrés de Verdun pour pouvoir se livrer à l'étude. Il visita les archives de son ordre en Hollande, Alsace et Lorraine, et publia en 1683 un supplément sur les auteurs et les ouvrages ecclés. omis par Bellarmin; mais son travail était plein d'inexactitudes qui furent relevées sévèrement par W. Cave, auteur d'un ouvrage du même genre. Il dut être refait en partie et parut après sa mort sous le titre de Commentarius de script. eccl. antiq. 1722. Oudin embrassa la Réforme en 1640 et se rendit à Leyde, où il fut nommé biblioth. de l'université, f 1717.

OVERBERG, Bernard, pédagogue distingué, né 1 mai 1754 de parents pauvres, près d'Osna-brUck, montra d'abord peu de dispositions pour l'étude, mais se développa plus tard, devint prêtre en 1780, et par son talent d'enseignement fixa l'attention du ministre de Furstenberg qui en 1783 lui confia la direction de l'école normale de Munster. Overberg se chargea en même temps de l'enseignement religieux au couvent français, et entra en relations avec la princesse de Gallitzin, dont il devint le directeur depuis 1789 et chez laquelle il demeura jusqu'à ce qu'elle mourut 1806. Il ne cessa de s'occuper de son école, de l'instruction primaire et de la réorganisation des études. Membre du Consistoire et chanoine honoraire, il f 9 nov. 1826. Il a laissé une Méthode, un ABC, des études bibliques, deux catéchismes, etc., dont quelques-uns très estimés ont été trad. en anglais et en hollandais.

OWEN lo John, poète latin, connu par des épigrammes contre l'Égl. romaine, déshérité pour cela par un riche parent. Né à Caernarvon, pays de Galles, il étudia à Oxford, tint une école à Monmouth, puis à Warwick 1594, et + dans l'indigence. On lui a élevé à Saint-Paul de Londres un splendide monument. — 2° John Owen, 1616-1683, théol. non conformiste, champion du presbytérianisme et des doctrines arminiennes. — 3° John Owen, 1765-1822, pasteur de Felham, puis chapelain à Chelsea, membre actif de la Soc. biblique de Londres; a écrit: Voyages en différ. parties de l'Europe 1796, et Hist. de l'origine et des 10 premières années de la Soc. bibl. britann. et étrangère, 1816-1820. — 4° Robert, né 1771 de parents pauvres à Newton, Montgomery, épousa la fille d'un riche fabricant, qui lui légua en 1800 une filature de coton à New-Lanark, Écosse. Touché des misères de la classe ouvrière, il chercha à y remédier dans la mesure de ses moyens, distribua des secours, fonda une école et obtint quelques bons résultats. Il se crut dès lors appelé à l'apostolat de la réforme sociale, et entreprit de répandre ses idées par des conférences et par la presse. Sans prétendre que l'homme soit bon, il disait qu'il n'est pas responsable de ses actes; il est plutôt passif et la victime des circonstances dans lesquelles il est né et a été élevé; il fallait donc refaire son éducation et lui inculquer de nouvelles idées, sociales et religieuses. Les droits et les devoirs sont les mêmes pour tous. Il n'y a lieu ni à blâme, ni à louanges, ni à punitions, ni à récompenses. Le privilège du capital doit disparaître. Le mariage doit être remplacé par l'union libre; la famille par la communauté. Une religion qui regarde au delà de la vie présente, n'a pas de raison d'être. L'homme ainsi élevé sera tellement bon, qu'il n'y aura plus à s'occuper du partage des biens. Vivement attaqué à cause de ces idées, il se rendit aux États-Unis, où il fonda en 1823 dans l'Indiana la Société coopérative communiste de New-Harmony, mais cette entreprise dura peu, et en 1826 la Société fut dissoute. Owen revint en Europe découragé 1827, et + 47 nov. 1858 à peu près oublié de ses contemporains.

OXFORD, l'une des deux plus célèbres univ. de l'Angleterre. On la fait remonter au grand Alfred, et parmi ses premiers maîtres on compte Scot Érigène et Gildas. Elle sombra un moment dans les derniers temps de la domination saxonne et le règne de Guill.-le-Conquérant ne lui fut pas favorable; mais elle reprit sous Henri 1er dit Beaucierc, et vers le milieu du 12ra« siècle l'école fondée par Alfred se forme définitivement en corporation universitaire. L'adjonction du University Collège en devint le principal noyau. Des franciscains y arrivèrent vers la Toussaint 1225. Vers 1240 les leçons de Marsh et de Grosse-tête lui firent une réputation européenne; elle compta jusqu'à 30,000 étudiants, et rivalisa avec Lyon, Paris et Cologne. Ses maîtres s'appelaient Haies, Roger Bacon, Pulleyn, Duns Scot, Occam. Ses halls, édifices pour loger les étudiants, étaient au nombre de 12, et finirent par atteindre le chiffre de 300; plusieurs furent peu à peu transformés en collèges. La tendance des études était à la fois biblique et scientifique dans le sens le plus libéral du mot. Avec le déclin de la scolastique et l'accroissement de la puissance romaine, il y eut baisse dans le niveau des études proprement dites, et l'attention se porta surtout vers les questions politiques etecclés. controversées. Bradwardine et Wicleff furent persécutés; lors du concile de

Bâle Oxford ne comptait plus que mille élèves. L'époque de la Réformation lui rendit un-peu de son ancienne splendeur; Henri VIII le protégea, le cardinal Wolsey fit construire le magnifique collège de Christ-Church, 1525. Déjà en 1521 l'enseignement commence à se ressentir de l'influence des doctrines luthériennes. Sous Edouard VI l'univ. est devenue un centre de la Réforme; Pierre Martyr et Ochino y sont appelés en même temps que Bucer et' Fagius à Cambridge, et ils ne se laissent pas effrayer par le bûcher de Cranmer que Marie-la-Sanguinaire a fait dresser devant le collège Balliol. SousÉli-zabeth, par les soins de Leicester qui en fut plusieurs années le chancelier, l'univ. se réorganise; elle prend sa forme définitive sous Charles I*r, grâce à l'activité de l'archev. Laud qui en fut le chancelier 1630-1641 et le zélé protecteur, et à qui l'on doit un accroissement notable de la bibliothèque bodleyenne, et aussi la tendance absolutiste en politique et le caractère de haute église qu'elle a conservés depuis les temps des Stuart jusqu'à Guill. III, et qui en font encore la citadelle du torysme et le boulevard du pur anglicanisme contre tout ce qui porte le cachet du non-conformisme. L'université compte auj. 36 professeurs, 19 collèges et 5 halls; les principaux collèges sont Christ-Church, Saint-John, Queens, Trinity, AU Soûls, New College. Au commencement du siècle, avec Whately, Hampden, Arnold, un souffle libéral avait passé sur l'université, mais cela dura peu: les Keble, Bouverie, Pusey, Newmaun, Perce-val, Froude, inaugurèrent une ère nouvelle de réaction, lePuséisme, qui devait aboutir au catholicisme et qui y aboutit en effet pour plusieurs de ses représentants. Les Essais d'Oxfonl qui firent sensation il y a une cinquantaine d'années furent d'abord une protestation de la conscience contre le formalisme et le dogmatisme, un appel en faveur d'une restauration de la théol. sur la base de la vie religieuse. Sans avoir par eux-mêmes une grande valeur scientifique, ils imprimèrent aux études une direction nouvelle et donnèrent naissance à des travaux sérieux, parmi lesquels il faut nommer les Essays and Reviews, Londres 1860, dont dix éditions furent enlevées en peu de temps. Ils contenaient 7 travaux, dûs sauf un seul à des pasteurs ou à des prof, de l'université, savoir: L'éducation du monde, par Tçmple, recteur de l'école de Rugby; les Recherches bibliques de Bunsen, par Rowland Williams, prof, d'hébreu; Études sur les preuves du christianisme, par Baden Powell, prof, de géométrie; l'Église nationale, par Wilson; l'Hist. de la création d'après Moïse, par Godwin; les Mouvements de la pensée relig. en Angleterre de 1688-1750, par Pattison; de l'Interprétation de la Bible, par Jowett. Dans leur ensemble ces essais niaient l'inspiration des Écritures, le péché originel, le dogme de la rédemption, et l'importance des miracles comme preuve du christianisme. Ils devinrent le programme et le drapeau d un parti beaucoup plus négatif, rêvant le renversement de la foi et enlevant toute autorité à la Bible. Il y fut répondu par Tait, Taylor et d'autres, qui cherchèrent à établir que lorsqu'on ne professe pas la foi d'une Église, on n'a pas le droit d'y remplir des fonctions et d'en toucher les revenus. Des démarches furent faites pour obtenir des autorités ecclésiastiques la condamnation des rédacteurs et de leurs idées, mais grâce aux tortueuses complications de la jurisprudence anglaise; les démarches n'aboutirent à aucun résultat pratique; blâmés et reniés par tout l'épiscopat, William, Wilson, puis Colenso purent continuer en paix de prêcher et d'enseigner leurs doctrines, contraires à celle des 39 articles qu'ils avaient jurés, 1862.

OZANAM, Antoine-Frédéric, né à Marseille 23 avril 1813, vint de bonne heure à Lyon avec son père qui était médecin, et fut envoyé à Paris en 1831 pour faire son droit. Il s'y lia surtout avec le physicien André-Marie Ampère, et plus tard avec son fils Jean-Jacques. La littérature, les langues, l'hist. des religions l'intéressaient encore plus que le droit, et il n'oubliait pas les devoirs de la piété et de la charité. Il réussit, avec quelques amis, à organiser une société de Saint-Vincent de Paul. Reçu docteur en droit et ès lettres en 1836, il revint s'établir à Lyon comme avocat, et bientôt il fut nommé prof, de droit commercial, 1837. En 1839, il fut appelé à la Sorbonne, Paris, comme suppléant de Fauriel, qu'il remplaça définitivement après sa mort. Il fit plusieurs voyages en Italie, le pays de ses rêves; il visita l'Allemagne, la Suisse, la Belgique, l'Espagne, et sut partout évoquer le passé. L'Angleterre seule ne trouva pas grâce à ses yeux; elle était froide et positive; surtout elle était protestante, et son âme profondément catholique, ne capitulait pas sur ce point. Sa santé laissait à désirer; entre son frère aîné, l'abbé Alphonse, et son fr. cadet, le docteur Charles, les conseils ne lui manquèrent pas. Il se rendit encore une fois en Italie avec sa femme et sa petite fille, mais il dut rentrer en France et put revoir Marseille, où il t 8 sept. 1853. Nature élevée, tendre et sympathique, il avait les qualités et les défauts de son éducation religieuse. Il a étudié avec amour l'histoire des mœurs et de la littérature du moyen âge, les légendes eschatologiques des nations, et les traditions des peuples qui semblent, sous des formes différentes, l'émanation d'une «éme pensée. S'il a senti le christianisme, il la peu ou mal compris; mais, malgré la rigueur de son orthodoxie catholique, il voulait la tolérance, comme ses amis Montalembert, Lacor-daire, Maret, Gratry. Ses Œuvres compl. ont paru à Paris, 1855, en 8 vol. 8°. Les principaux de ses ouvrages sont: La Civilisation chrét. chez les Francs, la Civilis. au siècle, les Poètes franciscains, les Études germaniques, Dante et la philos, cathol. au 13™* siècle,ainsi que plusieurs articles dans l'Ère nouvelle et le Correspondant.

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PACCA, Barthélémy, né 15 déc. 1756 à Bé-névent, d'une famille distinguée, étudia la théol. à Naples et à Rome, et fut en 1786 nommé archev. in partibus et nonce de Pie VI à Cologne. Il défendit les droits de son maître dans les discussions de la Ponctation d'Ems, et réussit à se défaire par de belles promesses de ceux qui ne reconnaissaient pas sa juridiction. L'arrivée des Français en 1794 lui fit quitter la place. Il reçut la nonciature de Lisbonne jusqu'en 1802, fut nommé cardinal par Pie VII, ministre en 1808 en remplacement de Consalvi, rédigea et publia, 10 juin 1809, le bref d'excommunication contre Napoléon, et fut enfermé au château Saint-Charles, près Fenestrelles, Piémont. Relâché après le concordat de Fontainebleau, il rentra dans Rome avec Pie, 14 mai 1814, continua d'intriguer, à Vienne et ailleurs, en faveur du pouvoir temporel, fit rappeler les jésuites, et f 19 avril 1844. Il a laissé d'intéressants Mémoires sur sa vie mêlée à tant d'événements.

PACCANARISTES, v. Baccanari.

PACHOME, ou Pacôme, né vers 292 dans la Thébaïde d'Égypte, se convertit de bonne heure au christianisme, et après avoir été quelque temps soldat, se fit disciple de l'anachorète Pa-lémon et entreprit de donner un corps au mo-nachisme en l'organisant militairement. Il réunit dans l'île de Tabenna, Haute-Égypte, un certain nombre de moines, dispersés jusqu'alors dans des laures séparées; il les divisa en 24 classes désignées par les 24 lettres de l'alphabet, leur donna un chef, et à chaque couvent un économe; imposa à tous une discipline rigide dont quelques articles laissent supposer qu'un grand relâchement de mœurs régnait parmi ces ascètes, et les dirigea ou les domina comme leur archimandrite. Il y en eut bientôt jusqu'à 3,000, et ce chiffre alla toujours en augmentant jusqu'à sa f 348, quoiqu'il faille se méfier des exagérations qui abondent chez les auteurs contemporains, et des légendes qui remplacèrent l'histoire.

Pacôme réunissait une fois l'an les directeurs et les économes. Il fonda aussi des couvents de femmes. On de lui des Monita ad monachos, trad. par saint Jérôme; des Verba mystica, et des Lettres à des directeurs de couvents. Les Règles que lui prêtent, soit Palladius et Sozo-inène, soit Jérôme, sont inauthentiques. Ennemi décidé d'Origène, qu'il regardait comme un hérétique, il défendit encore sur son lit de mort, à tous ses moines, d'avoir aucun rapport avec les disciples du célèbre théologien.

PACIEN, d'une grande famille d'Espagne, entra tard dans les ordres, fut év. de Barcelone et f 370âgé et très considéré. Il a laissé 3 Lettres contre les Novatiens, un traité sur la Pénitence, et un discours sur le baptême, remarquable par l'élégance de la forme plus que par l'originalité des idées. Il avait été marié, et c'est à son fils, commandant en chef des gardes d'Honorius, que Jérôme a dédié son Catal. viror. illustrium.

PACK, Otton (de), conseiller et vice-chancelier du duc Georges de Saxe, et prêté pour un temps par celui-ci à son gendre Philippe de Hesse; il découvrit, ou crut avoir découvert un complot organisé à Breslau 1527, entre G. de Saxe, Ferdinand de Hongrie et plusieurs princes catholiques, pour la destruction du luthéranisme dans les États protestants. Philippe organisa aussitôt des moyens de défense, et pressé d'expliquer ces préparatifs belliqueux, il les justifia en produisant les révélations faites par Pack, et la copie du traité d'alliance. Mais les princes catholiques nièrent absolument la chose, et quoiqu'elle eût quelque vraisemblance, il paraît que Pack l'avait exagérée; il fut en outre convaincu d'avoir rédigé lui-même la piè^e dont il avait montré une copie et dont il n'avait jamais vu l'original. Il fut condamné à la prison. Relâché au bout d'un an, il s'en fut à l'étranger, visita l'Angleterre, la France et les Pays-Bas, et finalement, à la requête de G. de Saxe, probablement à la suite de nouvelles intrigues, il fut décapité 1537 (à Anvers, Vilvorde, Bruxelles ou Malines ? les historiens ne sont pas d'accord). Le complot peut être considéré comme certain, et Pack l'a connu, mais il s'est compromis en en racontant plus qu'il n'en savait; il l'a fait échouer, mais il a porté la peine d'un zèle sans scrupule.

PADERBORN, Patrabruna, ou Patrisbrun-nen, vieille ville de l'emp. d'Allemagne, déjà visitée par Charlemagne qui y tint en 777 une assemblée générale, et où furent baptisés un grand nombre de Saxons. Il y reçut aussi la visite de Léon HI, 799, qui en consacra l'église. L'évêché fut fondé vers 800, et son premier titulaire fut Hathuwer, un des ôtages saxons que Charlemagne s'était fait liver en grand nombre; il eut pour successeur Badurad, un autre Saxon, qui acheva la cathédrale (brûlée en 1000). Louis-le-Déb., et plus tard Henri II comblèrent de faveurs cet évêché; Henri lui donna pour évêque son cousin Meinwerk 1009-1036. Indépendant des ducs saxons depuis 1189, Paderborn relevait des archev. de Cologne, qui essayèrent même plus d'une fois de l'absorber entièrement. Myconius , accompagné de Jean-Frédéric de Saxe, y prêcha la Réformation en 1527, mais il eut à lutter contre Hermann de Wied, l'administrateur du diocèse, et contre ses successeurs qui empêchèrent l'établissement du protestantisme dans le pays. Les jésuites et l'év. Théod, de Furstenberg réussirent, par des mesures de rigueur et par des proscriptions, non seulement à préserver le diocèse, mais encore à reconquérir à leur foi la ville elle-même qui s'était en majorité prononcée pour l'Évangile. Son dernier prince-évêque fut François-Egon de Furstenberg 1789-1803. Le diocèse fut sécularisé en 1803 et passa à la Prusse, qui lui adjoignit en 1826 l'évêché de Corvey et augmenta ainsi son importance. Un certain nombre d'églises protestantes s'y sont établies depuis quelques années. L'év. de Paderborn a joué un rôle actif dans le dernier conflit de la Prusse avec la cour de Rome.

PADILLA (Juan de), ou le Chartreux, ou le Moine de Santa-Maria de las Cuevas (couvent de Séville, où Christ. Colomb passa quelque temps); auteur de: le Labyrinthe du duc de Cadix 1493; le Tableau de la vie de Christ; les Douze apôtres; il censure les désordres des ecclésiastiques et la simonie. On y retrouve quelques traits de la Divine Comédie, de Dante.

PAGANISME, Païens. Ce mot qui a un sens bien déterminé, et qui désigne d'une manière générale toutes les religions polythéistes et fétichistes, vient du latin pagus et signifie proprement la religion des campagnes, la religion des paysans, parce que c'est dans les villes que le christianisme s'est d'abord développé et que les campagnes sont restées plus longtemps la citadelle des faux dieux et des superstitions. Chex les Hébreux les païens étaient compris sous le nom de nations, goyim, que les juifs emploient encore auj. en parlant de ceux qui n'appartiennent pas à leur race; ils étaient- considérés comme ennemis e't rebelles, comme impies el méchants, comme livrés au jugement de Dieu, mais comme devant un jour reconnaître le Dieu d'Israël et se soumettre à ses lois. Sous l'économie chrétienne les juifs incrédules sont assimilés aux païens, les uns et les autres appartenant ao royaume des ténèbres et aveuglés par le prioce de ce monde. Il n'y a plus de différence entre le Juif et le Grec, mais les uns et les autres doivent être évangélisés au même titre et sauvés par la même foi. Au milieu de ses plus profondesnèbres, le paganisme ancien cherchait Dieu, il

Tentrevoyait confusément, il le pressentait dans la nature et dans sa sainteté, et la conscienee lui servait de loi, Act. 17, Rom. 3, 29. 9, 30. Il y avait chez les païens de nobles cœurs et de grands caractères, des hommes qui avaient trouvé Dieu en dehors de la loi, au bénéfice des traditions anciennes ou sous l'influence de l'esprit. L'A. T. nous montre Melchisédec et Jéthro parmi ces adorateurs non hébreux du Dieu vivant; le N. T. rappelle que Dieu a aimé Naa-man le lépreux et la veuve de Sarepta. et qu'il a fait prêcher la repentance à Ninive. Il y a donc pour les païens une économie spéciale. Si les juifs les méprisaient, Dieu ne les abandonnait pas, et les prophètes célébraient à l'avance leur conversion. Mais à mesure que le christianisme prouvait mieux sa supériorité, les erreurs du paganisme assortaient davantage, et l'abîme naturel se creusait. Les passions théologiques s'en mêlèrent. Déjà Augustin ne voyait plus dans les vertus des païens que des vices brillants, et tout le moyen âge vécut sur cette idée qu'il ne peut y avoir absolument rien de bon chez l'homme naturel en dehors de la foi à l'Évangile. Les Réformateurs, et surtout Zwingle, réagirent contre cette opinion excessive, admettant que les païens pouvaient être sauvés en écoutant la voix intérieure de Celui qui ne s'est jamais laissé sans quelque manifestation et en profitant de cette espèce de lumière diffuse que les anciennes révélations ont léguée au monde.

PAGI lo Antoine, né 1624 à Rognes, Provence, franciscain cordelier dès 1641, plusieurs fois provincial de son ordre, f 1699 à Aix. Auteur d'une Critica histor. chonologica, 4 vol. Anvers 1705, dirigée contre les nombreuses erreurs de Baronius, et d'une Dissertation, sur les consuls césariens. — 2o Son neveu François, né 1654 à Lambesc, Provence, f 1721 à Gand, l'aida dans son grand travail critique, et en publia une nouvelle édition améliorée, 1724. Il a écrit aussi une hist. abrégée, Breviarium, des papes les plus illustres, 1717-1747.

PAÏENS, v. Paganisme.

PAIX des Dissidents, v. Dissidents, et Thorn.

PAJON, Claude, né 1626 à Romorantin, bas Blésois, étudia à Saumur sous Amyraut, La Place et Cappelle, fut en 1650 pasteur à Mar-chenoir, en 1666 prof, de théol. à Saumur, donna sa démission ensuite des luttes soulevées par son enseignement, et vint à Orléans comme pasteur, f 1685. Il était accusé à tort de péla-gianisme, mais il est sûr qu'il arrivait difficilement à concilier la liberté de l'homme, sur laquelle il insistait, avec la souveraineté de Dieu. Il n'admettait ni la prédestination, ni la grâce irrésistible, et il fut l'écho d'un parti nombreux qui travaillait à adoucir ce qu'il y avait de trop anguleux dans certaines doctrines du synode de Dordrecht. Après quelques hésitations il fut condamné par les synodes provinciaux; Jurieu fut un de ses principaux adversaires. Pajon n'a rien publié sur ses doctrines spéciales; il s'en est tenu à la controverse; contre Nicole il a écrit: Examen des préjugés légitimes, Orléans 1673; et contre le clergé catholique: Remarques sur l'avertissement pastoral, Amsterdam 1635. Parmi ses adhérents, appelés pajonistes, on compte Isaac Papin, Lenfant, Alix, du Vidal, etc.

PALAFOX de Mendoza, Jean (de), né 1600 en Aragon, f 1659; un des prélats les plus dis-tinguésdu clergé espagnol. Nommé 1639 évêque d'Angélopolis, Mexique, avec des pouvoirs civils et administratifs très étendus, il s'appliqua de toutes ses forces à protéger les Indiens contre la rapacité et les cruautés des Espagnols, et s'il travailla à les convertir, ce fut uniquement par la persuasion. Aussi souleva-t-il contre lui la haine furieuse des jésuites, qui ne lui laissèrent aucun relâche et finirent par obtenir son rappel. Il fut nommé év. d'Osma 1653. Auteur d'une Hist. de la Conquête de la Chine par les Tar-tares, Hist. du siège de Fontarabie, Mémorial sur la dignité épiscopale, Homélies sur la Passion, Le pasteur de la nuit de Noël, etc. Vie, par Gonz. de Résende.

PALAMAS, Grégoire, né 1296 à Constantinople. aimé et protégé de l'emp. Jean Cantacu-zène, se lassa de la cour, se fit moine au couvent de Berrée, Mont Athos, où il passa dix ans, s'absorbant dans la contemplation, v. Hésy-chastes,et dut se rendre àThessaloniquepour y répondre aux accusations formulées contre lui par Barlaam et d'autres. Il réussit à faire condamner ses adversaires 1341 et fut nommé archev: de Thessalonique 1349. Plus tard il se retira dans l'île de Lemnos où l'histoire le perd de vue. Auteur de nombreux écrits mystiques, ou polémiques.

PALATINAT. Sous ce nom général, qui comprenait deux pays de l'ancien emp. d'Allemagne, l'un allant de la Bavière à la Bohême, l'autre du Rhin à l'Alsace et à la Lorraine, on désigne plus particulièrement ce qu'on appelle auj. la Bavière rhénane ou le Palatinat bavarois. Éveillé l'un des premiers aux idées de réforme, soit par la dispute de Heidelberg 1518, soit par la comparution de Luther à Worms 1521, il ne se décida cependant pas l'un des premiers. La semence germa lentement, d'abord chez des lettrés et des théologiens, comme Bucer, Schnepf, Brenz, puis chez des chevaliers comme Sickingen, dont le château d'Ebernburg servit d'asile aux réfugiés et où GEcolampade introduisit dans le culte la lecture de la Bible en allemand. La révolte des paysans marqua un temps d'arrêt sous Louis V, mais déjà Frédéric II en 1544, sur le préavis de Mélanchthon, inaugura la messe en allemand, la Cène sous les deux espèces, et permit le mariage des prêtres. En 1546 eut lieu à Heidelberg le premier service luthérien. Le prince tenait aussi par politique au parti protestant, mais il accepta l'Intérim de 1548. Otton-Henri organisa l'Église dans tout le pays et fit venir des théol. de diverses nuances. Son successeur Fréd. III, 1559, se montra plus décidé encore, se prononça pour le calvinisme avec tout son peuple, simplifia le culte, nomma un conseil d'Église composé d'ecclésiastiques et de laïques, et présida à la rédaction du catéchisme de Heidelberg. Il combattit les jésuites et les luthériens exagérés. Mais son fils, Louis VI, gouverneur du Haut Palatinat, était luthérien et agissait dans ce sens, tandis que son autre fils, Jean-Casimir, continuait les traditions paternelles. Les deux doctrines s'habituèrent ainsi à vivre côte à côte non sans quelques froissements momentanés. Puis après la guerre de Trente ans et après les conflits soulevés par la succession de Juliers, la maison de Neubourg, qui était catholique, hérita du Palatinat, et Wolfgang-Guillaume 1614, s'appliqua à ramener les populations à la foi romaine, et réussit en certains endroits. De la cette cohabitation des 3 confessions par parties presque égales dans le Palatinat.

PALE M, environ 150 arrêtés ou décrets de conciles, qui n'ont aucune autorité de droit, mais qui sont ordinairement ajoutés à la suite du décret de Gratien et admis dans le Corpus juris. Le mot dérive du grec selon les uns, et signifie anciens, vieillis, démodés; du latin, selon d'autres, avec le sens de paille, chaume, sans valeur. D'autres le font venir de Pauca-palea, disciple de Gratien, qui les aurait ajoutés au recueil du maître.

PALEARK), Aonio, né 1504 à Veroli, Cam-panie, près de Rome, d'une famille distinguée qui s'appelait primitivement degli Pagliarri. Lui-même changea son nom d'Antonio en celui d'Aonio en l'honneur des 9 muses, Aontœ so-rores. Il habita Rome jusqu'en 1527; l'entrée des troupes de Charles-Quint l'en chassa, mais il y revint un moment en 1529, après avoir étudié à Padoue et à Florence. Il ouvrit ensuite lui-même une école de rhétorique à Pérouse, puis à Sienne, et se lia avec les lettrés les plus illustres de son temps. Un brillant plaidoyer qu'il fit en faveur de Ballante, augmenta sa réputation, mais lui attira aussi bien des envieux, surtout à Rome. Il continua d'enseigner les lettres, les antiquités grecques et romaines, et la philos. d'Aristote en opposition aux puériles insanités de la scolastique agonisante. C'est là qu'il acheva son premier grand poème latin, en 3 livres: De l'immortalité des âmes, où l'on trouve encore la foi au purgatoire. Mais alors déjà il commençait à sentir l'influence des idées réformatrices qui germaient dans tous les cercles cultivés de l'Italie. Ses propres travaux, l'étude de saint Augustin, ses relations affectueuses avec l'arche v. de Sienne, Bandini, avec des hommes comme Bembo, Vergerio, Pôle, Sa-dolet, Campanus; la lecture de quelques écrits venus de Suisse ou d'Allemagne, concoururent à le faire réfléchir. Bientôt on le soupçonna d'hérésie, à Sienne, où il possédait une campagne. Une Apologie, qu'il publia, le rendit plus suspect encore, car il en appelait aux pères de l'Église pour justifier Luther, Mélanchthon et GEcolampade. On lui reprochait d'avoir dit que Jésus-Christ était le plus grand bienfait que Dieu eût accordé aux hommes. Et le second, lui demanda-t-on? Encore Jésus-Christ. Et le troisième? Toujours Jésus-Christ. Une persécution éclata contre lui à Sienne en 1544; il trouva un refuge à Rome chez les cardinaux Bembo et Maffei. Sadolet facilita son retour à Sienne. Mais il avait touj. à craindre l'Inquisition. Ses amis l'engageaient à se méfier de toute nouveauté. En 1545 il fut nommé prof, de latin à Lucques, et il y resta jusqu'en 1550, malgré plusieurs tracasseries. C'est vers cette époque, plus tard selon Schmidt, qu'il se déclara franchement pour la Réformation, dans une pièce, ou Action, adressée « aux directeurs de l'Église croyante en Suisse et en Allemagne. » Elle n'était pas destinée à la publicité, mais seulement aux théologiens et aux princes qui voyaient de plus en plus que le concile de Trente n'était pas libre et qu'il ne pouvait pas aboutir. Il s'agissait pour lui d'arracher au papisme le pouvoir temporel; c'était l'œuvre des princes: quant à la réforme de l'Église, la Bible seule pouvait l'accomplir. Appelé en 1556 à Milan comme prof, de littérature classique, il manifesta publiquement, quoique avec prudence et modération, des vues qui devaient déplaire au tribunal de l'inquisition et aux papes Paul IV et Pie V. Une édition de ses œuvres publiée à Bâle précipita la crise. Il professait la justification par la foi et rejetait le purgatoire. Arrêté, il fut conduit à Rome, passa 3 ans dans un cachot et fut brûlé le 3 juillet 1570. Son principal ouvrage: Bienfait de la mort de Christ (Del be-neficio di Giesu Christo crocifi$so)9 qu'on lui a longtemps contesté à tort, est le simple expose de la doctrine de Paul sur la justification, sans aucune controverse. L'inquisition l'appelle un livre très pernicieux. Il parut pour la 1™ fois à Venise 1542 ou 1543, sans nom d'auteur, fat brûlé à Naples 1543, et fut si consciencieusement détruit par l'inquisition qu'on l'a longtemps cru perdu. On en a retrouvé un exemplaire italien original à Cambridge eu 1843; ou en possédait une trad. anglaise de 1548, et une franc, de 1552. v. Jules Bonnet.

PALESTRINA, Jean-Pierre-Aloys, ou Pier-luigi, né 1524 à Palestrina, l'anc. Préneste, dont il a pris le nom, celui de sa famille nous étant inconnu. Ses parents étaient pauvres et cherchèrent de bonne heure à tirer parti de sa belle voix et de ses dispositions musicales. En 1510 il entra à Rome dans l'école de Goudimel. Attaché dès 1549 à la chapelle julienne du Vatican, il composa une messe qui lui valut en 1555 une place de chantre dans la chapelle papale. Il avait épousé une jeune fille nommée Lucrezia. Ce mariage, qui ne lui avait pas nui sous Jules III et sous Marcel II, fut vu de mauvais œil par Paul IV, qui renvoya tous les chantres mariés, avec une pension de 6 écus par mois. Il passa de là à Saint-Jean de Latran 1555 comme maître de chapelle, puis 1561 à Sainte-Marie-Majeure. (le fut la grande époque de sa vie. C'est alors qu'il composa l'Improperia Popule meus, qui se chante encore à Rome le vendredi saint; la Messe du pape Marcel, comme souvenir de reconnaissance, et un certain nombre d'hymnes, motets, litanies, etc. En 1571 il fut réinstallé dans les fonctions de maître de chapelle de Saint-Pierre au Vatican, et nommé compositeur du pape, fonctions qu'il conserva jusqu'à sa + 2 févr. 1594. Il était en même temps directeur du chant dans la chapelle de l'Oratoire de son ami Philippe de Néri, et maître dans l'école de Giovanni-Maria Nanini, avec qui il avait étudié sous Goudimel. La mort de sa femme 1580 le plongea dans une profonde mélancolie; il von-lait renoncer à la musique, mais consacrer son deuil par une dernière composition: Super flu-mina Babylonis. Il trouva de si douces consolations dans ce travail, qu'il y puisa des forces nouvelles, et en 1584 il présenta à Grégoire XIII un chef-d'œuvre, le Cantique des cantiques; en 1588 il écrivit les Lamentations, en 1589 des Hymnes pour toutes les fêtes de l'année, en 1590 le Stabat mater; en 1593 les Litanies de la Vierge. On peut dire qu'il mourut en travaillant. Sa fin fut paisible et sereine, malgré de violentes douleurs. Philippe de Néri l'assista. Il ne laissait qu'un fils Igin; 3 autres étaient morts; il lui légua plusieurs ouvrages qui n'avaient pas encore vu le jour. Palestrina fut le réformateur de la musique catholique; il réhabilita le chant figuré que le conc. de Trente avait proscrit à cause de ses abus, et il exploita l'harmonie consonnante et les dissonances naturelles de manière à en tirer d'ineffables beautés et d'immortels chefs d'œuvre.

PALEY, William, né 1743 à Petersborough, Northhampton, étudia d'abord à Giggleswick, où son père était maître de latin, puis à Cambridge. Vicaire à Greenwich il obtint erf 1765 le prix pour la meilleure dissertation latine sur la valeur relative des philosophies d'Épicure et de Zénon au point de vue politique et social. Il concluait en faveur d'Épicure. Nommé fellow au Christ College de Cambridge et maître ès arts, il s'y rendit en 1766, se distingua comme prof, de philos, et de théol. par l'originalité de sa méthode, et reprit en 1776 des fonctions pastorales sous le patronage de son ami, le D** Law, archev. de Carliste, qui lui procura plusieurs bénéfices. En 1795 il fut nommé docteur en théol., puis recteur de Bishop- Wearraouth, où il f 1805. La plupart de ses écrits ont un caractère apologétique, mais ils ne s'élèvent guère au-dessus du déisme chrétien qui était à la mode en Angleterre; c'est même probablement à la tiédeur de sa doctrine qu'il doit de n'avoir pu parvenir à l'épiscopat. Il a publié des Éléments de morale et de politique, Londres 1785, où il fonde la morale sur la volonté de Dieu manifestée par l'intérêt général; les Horœ paulinœ, son meilleur ouvrage 1787, trad. par Levade, étude sur les lettres de Paul, établissant la vérité du christianisme; Évidences (ou preuves) du christianisme, 1794; Théol. naturelle, 1802, trad. par Ch. Pictet 1815. Des Sermons de lui ont été publiés après sa mort. Ses ouvrages sont en général solides au point de vue historique et patriotique, mais la pensée a peu d'élan, et son apologétique un peu terre à terre laisse à désirer; il s'est trop préoccupé du côté intellectuel et matériel, pas assez du caractère intime du christianisme, et ses preuves ne sont pas de nature à pénétrer la conscience et à convaincre.

PALISSY, Bernard, né vers 1510 à la Chapelle -Biron, Périgord, ouvrier, pauvre et sans culture, fit son tour de France comme peintre-verrier et géomètre-arpenteur, et après avoir visité Tarbes et les Ardennes, il s'établit à Saintes comme potier-faïencier et s'y maria 1529. Il aurait pu s'enrichir par son travail, mais il avait le génie de la perfection, et il passa seize ans à chercher le secret de la belle faïence et de l'émail, se ruinant, séchant sur pied près de ses fourneaux, criblé de dettes, moqué de tout le monde, accusé de vouloir faire de la fausse monnaie, et pour comble de misère, tourmenté par sa femme qui se préoccupait de l'argent plus que du génie et qui aurait mieux aimé le voir faire de la poterie ordinaire pour payer les mois de nourrice de ses enfants. En outre il était huguenot; il s'était joint au petit troupeau de protestants, braves ouvriers « de peu de savoir, » qui se réunissaient le dimanche pour lire tour à tour quelques passages de l'A. et du Nt Testament, les expliquant « selon les dons qu'ils avaient reçus de Dieu. » Il a lui-même raconté cette partie de son histoire dans son Traité de l'Art de terre, où l'on est tout étonné de reconnaître comme style ce fameux « patois de Canaan » dont il est de bon goût de se moquer auj. mais qui reparaît toutes les fois qu'il y a un vrai réveil de la vie religieuse, et qui n'est condamnable que lorsqu'il ne répond plus ii une réalité. Palissy avait fini par vaincre les difficultés; il avait « cuidé entrer jusques à la porte du sépulcre, t mais il avait trouvé l'émail, et des émaux fusibles à un môme degré de feu. Ses plats ornés de poissons, de fruits, d'insectes; ses corbeilles, ses statuettes, ses groupes mythologiques, devenaient célèbres; il avait la gloire, bientôt il allait avoir la fortune. D écrivait des livres, il donnait des conférences à Paris; il avait des commandes pour le connétable de Montmorency, pour Diane de Poitiers, pour la reine-mère; ses deux fils, Nicolas et Mathurin, travaillaient avec lui au Louvre 1570. À la Saint-Barthélémy il fut épargné, comme Paré, parce que Catherine avait encore besoin de lui; il n'avait pas divulgué le secret de ses émaux. Mais en 1588 la Ligue fit jeter le vieillard en prison. Henri III l'alla visiter et lui offrit la liberté, à condition qu'il se fît catholique: « Si non, je suis contraint de vous laisser entre les mains de mes ennemis. » D'Aubigné, qui raconte le fait, donne aussi la réponse: « Sire, j'étais bien tout prêt de donner ma vie pour la gloire de Dieu. Si c'eût été avec quelque regret, certes il serait éteint en ayant ouï prononcer à mon grand roi: Je suis contraint. C'est ce que vous et ceux qui vous contraignent ne pourrez jamais sur moi, pour ce que je sais mourir. » Il mourut en effet dans les cachots de la Bastille en 1590, de misère et de mauvais traitements. Sa tante ayant réclamé son corps, Bussi lui dit qu'elle le trouverait sur les remparts t où il l'avait fait traîner comme un chien qu'il était. » — Outre ses travaux comme potier, il s'est distingué comme naturaliste et il a ouvert à la géologie ses véritables voies. En étudiant les terres il était frappé de leur succession régulière, et aussi de certaines anomalies, coquillages, empreintes, pétrifications, fossiles, dents d'éléphants, que les savants avant lui expliquaient par des jeux de la nature, ou par des conjonctions d'étoiles. Il y vit l'indice et la preuve de nombreuses révolutions du globe, et la science rompit dès ce jour avec la tradition. Il a de même rendu à l'agriculture d'immenses services, en préconisant l'idée du marnage. M. de Chevreuil le met tout à fait au-dessus de son siècle pour ses admirables découvertes, et Lamartine l'appelle un des plus grands écrivains de la langue française, le comparant à Montaigne, Bossuet, La Fontaine et J.-J. Rousseau. Outre l'Art de la terre, ses principaux ouvrages sont: la Recette véritable pour laquelle tous les hommes de la France pourront apprendre à multiplier et augmenter leurs trésors (par l'agriculture), et: Discours admirables de la nature des eaux et fontaines, métaux, sels, terres, etc. Il avait recueilli et classé un grand nombre d'objets, que le public était admis à visiter; c'est probablement le premier cabinet d'histoire naturelle qui ait existé.

PALLADIUS lo né vers 368 en Galatie, vécut longtemps parmi les moines d'Égypte, que sa santé l'obligea d'abandonner; il passa ensuite 3 ans parmi ceux du Mont des Oliviers, et apre> un voyage en Europe, fut nommé év. d'Héléno-polis, Bithynie. Ami et partisan de Chrysostome, il fut persécuté avec lui 403, vint k Rom*1 auprès d'Innocent l*r pour implorer la protection d'Honorius, mais à son retour fut banni par Arcadius et envoyé à Syène, Haute Égypte: plus tard il fut nommé év. d'Aspone en Galatie. selon d'autres réintégré à Hélénopolis, et + 430 Auteur d'une Histoire lausiaque, ainsi nommer du préfet Lausius, de Cappadoce. à qui elle fut dédiée; elle porte aussi quelquefois le nom de Paradis des vies des pères, et donne des détails intéressants sur la vie des moines d'Égypte et de Palestine, qui concordent avec ceux de Rutin d'une manière si étonnante qu'on a pu se demander s'il n'y avait pas eu emprunt de l'un à l'autre, ou une source commune. On a aussi attribué, mais sans fondement, à Palladius, un Dialogue avec Théodore, diacre romain, et une Vie de Chrysostome. — 2° Palladius, premier évêque envoyé de Rome en Irlande, vers 431. sous Célestin; f vers 450; c'est tout ce qu'en disent Prosper d'Aquitaine et Bède. Quelques-uns le confondent avec Patrick.

PALLAVIC1NI, Sforza, né à Rome 28 nov. 1607, d'une vieille et noble famille romaine, se distingua de bonne heure comme lettré. Protège par Urbain VIII, il entra 1630 dans les ordres, reçut le gouvernement de Fesi, puis celui d'Or-vieto, et tomba en disgrâce. En 1638 il se fit jésuite pour conserver à son frère les débris de l'héritage paternel. Après un noviciat de 2 ans, il fut chargé d'enseigner la philos., ensuite la théologie, et fut nommé préfet du Collège romain. Son protecteur Alexandre VII le choisit pour son confesseur. Il était membre de la congrégation nommée pour faire une enquête sur U doctrine de Jansénius 1651-1653, et fut nomme cardinal en 1659. f 5 juin 1667. Son principal ouvrage est son Hist. du conc. de Trente, écrite en réfutation de celle de Sarpi, et deux fois retravaillée. Le jésuite J.-B. Gattino en lit une trad. latine. Riche en documents inédits puisés à la source, mais rédigé dans un esprit de parti trop évident, ce travail n'a ni la vigueur, ni même la valeur historique de celui de Sarpi. Pallavicini peut être regardé comme le restaurateur de la belle prose italienne.

PALLIUM, ornement ecclés., bande d'étoffe, large de 5 centim., qui se met par-dessus les vêtements pontificaux, et entoure les épaules, pendant des deux côtés1 sur une longueur de 22 à 25 centimètres; il est semé de croix de diverses couleurs, suivant la dignité hiérarchique de celui qui le porte. Il est fait de la laine d'agneaux mis à part le jour de Sainte-Agnès (Agnus), et rappelle que le bon berger porte sur ses épaules la brebis perdue ou souffrante. C'est un symbole de juridiction que le pape envoie aux archevêques.

PALMER, Chrétien - David - Fréd., né 1811 à Winnenden, Wurtemberg, prof, de théol. à Tubingue 1843, f 1875. Savant aimable, orateur populaire, il s'est occupé surtout de la partie pratique de la théol.: prudence pastorale, homilétique, morale, hymnologie. Il a publié de bons ouvrages sur ces différentes branches, ainsi que des Sermons et des Mélanges. Très évangélique, il n'aimait ni la controverse ni les exagérations.

PAMELIUS, Jacques, né à Bruges 1536, fils d'un des administrateurs civils de Charles-Quint, étudia à Bruges, Paris et Padoue. Chanoine à Bruges et à Bruxelles, il quitta son pays pendant la guerre et se rendit à Saint-Orner, où il fut nommé archidiacre. Il venait d'être promu à l'évêché de Metz, quand il f 1587 à Mons. Auteur d'un traité sur la liturgie latine, d'un Catalogue des Comment, bibliques, de Comment. sur Judith et sur Philémon, et d'éditions estimées de Cyprien, Tertullien et Raban Maur.

PAMMACHIUS, le Saint, sénateur romain, ami d'enfance de saint Jérôme, avait épousé Pauline, fille de Paula et sœur d'Eustochie. Devenu veuf, il résigna ses fonctions et se retira dans un couvent, f 410. Il était connu pour sa douceur et sa générosité; il avait fondé dans le port de Rome une hôtellerie pour les étrangers. Jérôme lui a dédié plusieurs de ses écrits, entre autres son ouvrage contre Jean de Jérusalem. Il est nommé avec éloges dans les lettres d'Augustin et de Paulin de Nola. iPAMPHILE, d'une famille considérable de Béryte, Phénicie, étudia à Alexandrie sous Pie-rius, directeur de l'école des catéchistes, et fut nommé prêtre ou ancien à Césarée; il est connu pour sa piété et sa science. Il travailla à rassembler les écrits ecclésiastiques, et à répandre de bonnes copies de la Bible, avec l'aide de son disciple Eusèbe l'historien. Il copia de sa propre main une partie des écrits d'Origène, il fonda une bibliothèque et une école de théologie. Sous Dioclétien il fut persécuté et mis en prison 307. Là il écrivit un ouvrage pour la défense de son ami Origène. Le 16 février 309 il fut décapité, et en même temps que lui son fidèle esclave Porphyre qui avait simplement voulu réclamer le corps de son maître.

PANAGIA, grec la toute-sainte, d'abord surnom de la vierge Marie, s'employa plus tard chez les grecs pour désigner l'hostie; le vase qui la contenait reçut le nom de panagiarion. Dans plusieurs couvents grecs on célébrait l'élévation de la panagia en déposant devant l'image de Marie un morceau de pain triangulaire (symbole de la Trinité) avec le vin dans la coupe, et après l'avoir élevé, les assistants se le partageaient. Même au commencement on se bornait à déposer l'hostie devant le siège d'honneur vide, pour annoncer que l'on attendait la présence du Seigneur.

PANCRACE, plusieurs saints de ce nom, tous plus ou moins légendaires: un soi-disant disciple des apôtres, envoyé par Pierre comme év. à Taormina, Sicile, où il aurait été martyrisé, le 3 avril; un des 3 saints de glace, 12 mai, doit avoir souffert le martyre à 14anssous Dioclétien; ses reliques abondent, une dame chrétienne, Octavilla, passe pour avoir sauvé ses restes après sa mort. Il a une église à Rome, dans laquelle, au moyen âge, on conduisait ceux qui étaient soupçonnés d'un faux serment, parce qu'on croyait que le coupable serait frappé de mort subite, ou que le démon s'emparerait de lui.

PANÉGYRIQUES, livres liturgiques chez les grecs, contenant les éloges de divers saints; ils n'ont plus auj. de caractère officiel. Comme on en rattache souvent la lecture avec les mandements de Pâques, on donne quelquefois à ces programmes le nom de Grammata panegyrica.

PANGE LINGUA, premiers mots et titre d'un chant de Thomas d'Aquin, imité de Venantius, en l'honneur du sacrement de l'autel. On le chante le jeudi saint, à la fête-Dieu, et dans d'autres circonstances solennelles.

PANIS LITI ERE, lettres du pain; obligation que les princes pouvaient imposer à un couvent ou à une abbaye, de fournir pour un temps déterminé. ou même à vie, l'entretien à un laïque; le bénéficiaire portait le nom de paniste. Cette coutume se rattachait au droit qu'avaient les princes de se faire héberger dans les maisons religieuses pendant leurs voyages. Elle est à peu près tombée avec la Réformation; les princes protestants en contestèrent le droit à l'empereur. Frédéric-le-Grand le supprima définitivement, et Léopold II déclara en 1790 qu'il n'en userait que là où les titres seraient incontestables. Cette vieille coutume prit fin avec l'empire germanique.

PANNONIE. Ce pays, qui fait auj. partie des États autrichiens, allait de l'Illyrie jusque près des Alpes noriques. Il se divisait en P. supérieure, comprenant en partie la Styrie, la Car-niole, la Croatie, la Carinthie et la marche vandale, et P. inférieure, comprenant la Bosnie, l'Esclavonie et la Hongrie jusqu'à la Drave. Elle fut pendant plusieurs siècles le théâtre de guerres entre les Goths et les Romains. Ses premiers habitants, celtes d'origine, furent soumis d'abord par Philippe et Alexandre de Macédoine, puis par Jules-César, et enfin conquis et annexés par Auguste, Tibère et Drusus. L'invasion des barbares changea souvent les frontières et les conditions de vie de cette province, dont les principales villes étaient Sigesta ou Sissek, Petavio ou Petau, Aemona, Nauportus, Vindabona, Taurunum, Sirmium, etc. Une tradition sans fondement veut que Pierre, Paul, Luc, Tite et Clément y aient apporté l'Évangile; mais sans remonter aussi haut, il est sûr que la contrée fut évangélisée de bonne heure, vraisemblablement par des prisonniers chrétiens, et déjà au commencement du 3«ie siècle on y trouve plusieurs évêchés, Petavium en Styrie, Siscia en Croatie, Mursa en Slavonie, et surtout Sirmium qui devint célèbre par ses 4 conciles dans les luttes ariennes et par son év. Photin. Au conc. de Nicée on trouve un évêque de P., Théophile, désigné comme év. des Goths. Le sémiarianisme fut assez longtemps en faveur dans ces contrées, et ne fut supprimé que sous Gratien, par l'influence d'Ambroise, au conc. d'Aquilée381. Mais les barbares arrivèrent, les Vandales, puis les Sarmates et les Gépides, les Visigoths, les Huns. Le christianisme étant refoulé, l'empire romain ne pouvait plus maîtriser le flot de l'invasion, et ce fut sous Charlemagne seulement qu'un gouvernement plus régulier se reconstitua; l'évangélisation du pays fut reprise à nouveau au 9me siècle, par Urolf, mais les rivalités de Salzbourg et de Lorch, comme sièges métropolitains, menacèrent et compromirent un moment la mission. Les Hongrois profitèrent de ces divisions pour faire la guerre à l'Église, 889, mais à leur tour, au lime siècle, ils furent gagnés à l'Évangile.

PANNORMIA, collection de canons en 8 livres, due à Ivo de Chartres, une des plus importantes qui aient été faites avant Gratien, et qui a été largement utilisée par Gratien pour son Décret.

PANORMITANUS, le Palermitain, surnom du célèbre canoniste Nicolas Tudiscus, ou de Tudesco, surnommé aussi lucema juris. Né 1386 à Catane, bénédictin en 1400, chanoine de la collégiale de Catane 1414, il étudia le droit canon à Bologne, et l'enseigna ensuite dans di-ves universités. En 1425 le pape Martin Y lui donna l'abbaye de Maniacum, près Messine, et le nomma auditeur de la rote et référendaire apostolique. Alphonse de Sicile, le Magnanime, le nomma 1434 archev. dePalerme, et l'envoya au conc. de Bâle comme légat. Là il prit parti, contre Eugène IV, pour les droits du conc. de Bâle que le pape avait transféré à Ferrare. 11 partit avant la destitution du pape par le concile, mais il y revint sur l'ordre de son maître, reconnut l'antipape Félix V, qui le nomma cardinal 1440, et l'envoya comme légat aux diètes de Mayence et de Francfort. Mais Alphonse se réconcilia avec Eugène, 14 juin 1443, et Nicolas fut rappelé. Il + peu de temps après de la peste à Palerme 1443 ou 1445. On a de lui un Comment, fort estimé sur les Décrétais de Grégoire IX et sur les Clémentines. Il a écrit aussi une Justification du concile de Bâle, trad. en fr. par Gerbais 1677 dans l'intérêt du gallicanisme.

PANOPLIE (collection d'armes), titre d'un volume de théologie polémique, composé par Euthyme Zigabenus, à la demande d'Alexis Comnène vers 1118.11 est divisé en 24 parties. Il commence par l'épicuréisme et l'athéisme, et les combat au moyen de citations des pères sur la doctrine de Dieu et de la Trinité. Il passe ensuite aux hérésies gnostiques jusqu'aux bogo-miles, sans oublier les juifs et les mahométans, leur appliquant à tous le même procédé de réfutation, au point de vue de l'orthodoxie traditionnelle grecque. Les fragments relatifs auxbo-gomileset aux massaliens ont le plus de valeur; les autres ne brillent pas par l'importance des auteurs cités. Cet ouvrage n'a été imprimé qu'une fois, 1711, à Tergovitz, Valachie, et encore a-t-on supprimé l'art. 25 sur les mahométans, par peur des Turcs; mais ce fragment a été publié à part par Sylbourg.

PANTALEON lo en grec Panteleemon, le Miséricordieux, un des 14 saints secourables. Il était médecin et fut martyrisé 305 à Nicomédie sous Maximien; mais c'est une histoire sans preuves. — 2° v. Urbain IV.

PANTÈNE, le premier catéchète connu de l'école d'Alexandrie. Athénien selon les uns, Sicilien selon d'autres, il était stoïcien quand il fut amené à la foi chrétienne; vers 180 on le trouve déjà travaillant à Alexandrie. D'après Eusèbe il lit un voyage de missions aux Indes, peut-être au sud de l'Arabie, et il en rapporte un évangile hébreu de Matthieu. Si ce voyage a eu lieu réellement, il doit s'intercaler dans te ministère de P. à Alexandrie. D'après Jérôme, Pantène vivait encore sous Caracalla, mais en 190 il était déjà remplacé par son disciple Cle-ment, et son nom disparait pendant la persécution de Septime Sévère. La date de sa mort est inconnue. Ses écrits sont perdus; Halloix en a retrouvé et publié quelques fragments. Si l'on en croit saint Jérôme, Pantène a plus servi l'Église par sa parole que par sa plume.

PANTHÉISME, du grec pan (tout) et thioi (dieu), système philosophique fort ancien, nuis dont le nom est assez moderne, puisque le mot de panthéiste apparaît pour la Ire fois en 1705 dans le titre d9un livre du déiste anglais Toland. Une définition exacte est difficile par le fait des systèmes divers et fort nombreux, plus ou moins logiques et complets, qui se groupent autour du même mot. Pour les uns Dieu est tout, pour d'autres tout est Dieu, ou tout est en Dieu, ou Dieu est en tout. Suivant le sens dans lequel on l'entend, le système est plus ou moins absurde, ou plus ou moins explicable. D'une manière générale, c'est la divinisation de la nature, mais d'autres y voient au contraire l'exaltation de Dieu comme dominant et renfermant toutes choses. Quelques-uns des sages de l'antiquité se sont rangés au panthéisme, pour protester contre les folies du polythéisme, et ne connaissant pas le vrai Dieu ils ont acclamé le Grand Tout. C'est encore auj. avec d'importantes nuances la religion des bramines de l'Inde. La logique du système consisterait à confondre absolument Dieu et la nature, mais on recule d'instinct devant cette confusion, et l'on s'attache surtout à l'idée que toutes les manifestations visibles peuvent et doivent se rattacher à une unité, à un centre qui n'est pas distinct de l'univers, qui forme en quelque sorte corps avec lui, et au delà duquel on ne peut rien concevoir. Saint Augustin a défini Dieu l'Être suprême, le Summum esse; le panthéisme en tire la conséquence qu'il n'y a pas d'être en dehors de Dieu. Le théisme cherche une cause première à tout ce qui existe, et aux lois morales un législateur, le panthéisme n'en demande pas autant, l'effet lui suffit comme cause et les lois morales sont les lois de la nature. Deux chemins peuvent conduire au panthéisme: un profond sentiment religieux, le besoin de s'unir mystiquement avec Dieu d'une manière intensive, d'absorber Dieu en soi et d'être absorbé en Lui; c'est la voie qu'ont suivie les Indous sous l'influence de leurs chefs religieux; c'est celle aussi qui parmi les chrétiens a conduit certains mystiques, le faux Denys, Scot Érigène, Eckhart, Silesius, jusque sur les confins du panthéisme. L'autre chemin, c'est la poursuite de l'unité philosophique; au commencement de ses recherches, on trouve que le panthéisme répond à tout, parce qu'il suppose un principe unique; plus tard aussi l'on y revient volontiers, quand on est mis en présence du théisme, c'est-à-dire d'un dualisme inconciliable entre Dieu et l'univers. Chez les Grecs, Héraclite et les Éléatiques peuvent être considérés comme les vrais pères du panthéisme; ils en ont donné la formule. Tout n'est qu'un, et cet un est Dieu. Les stoïciens, avec leur âme du monde, les néoplatoniciens avec leur théorie des émanations et de l'extase, sont des panthéistes religieux. Au moyen âge, réagissant contre la sécheresse de la scoiastique, les italiens Vanini, Jordano, dans un enthousiasme plein de poésie plus que de philosophie, ont proclamé le panthéisme de la nature. Mais c'est Spinosa qui, tirant du système de Descartes les conséquences les plus rigoureuses, essaya de donner au panthéisme une base scientifique et philosophique. De nos jours Hegel, Schelling, Conradi, Strauss, Bruno, Bauer et une partie de la jeune éeole allemande, représentent à divers titres cette conception de Dieu, les uns dans un esprit religieux, les autres, comme Feuerbach, en haine de toute idée religieuse.

PAPAUTÉ, v. Papes.

PAPEBROCH, ou Papebroek, Daniel, né à Anvers 17 mars 1628, entra 1645 dans l'ordre des jésuites et collabora activement aux Actes des saints de Bollandus. Professeur d'abord aux gymnases de Malines et de Bruges, il étudia ensuite la théol. à Louvain, fut ordonné prêtre en 1658, enseigna la philos, à Anvers, et choisi pour assister les bollandistes dans leur œuvre, il se rendit avec Henschen en Italie, où il passa 2 ans, 1660-1662, occupé à visiter les archives. De retour il écrivit la vie de Patrick; puis avec Henschen les saints du mois de mars; seul le mois d'avril et les 3 premiers volumes de mai; enfin, avec B»rt et Jenning, les 4 derniers vol. de mai, et une partie de juin. Ayant combattu la prétention des carmes, qui faisaient remonter leur ordre au prophète Elie, il fut vivement attaqué par les carmes des Pays-Bas, auxquels se joignirent bientôt ceux de France. Ils le dénoncèrent à Innocent XII comme hérétique, en relevant des centaines d'erreurs dans les Actes des saints. Le pape prit la chose assez froidement et la renvoya à la congrég. de l'Index. Ils se tournèrent alors vers l'inquisition espagnole 1691, qui condamna en effet le livre bollan-diste; mais sur l'intervention de l'emp. Léo-pold I", Papebroch fut autorisé à se défendre; il publia 3 nouveaux in-quarto, et le pape, ennuyé de cette affaire et ne voulant donner tort ni aux uns, ni aux autres, ne vit d'autre moyen d'en finir que de couper court à la discussion par sa bulle du 20 nov. 1698, qui interdisait sous peine d'excommunieation d'agiter à l'avenir la question de l'origine des carmes. La querelle avait duré 30 ans. Papebroch f 28 juin 1714.

PAPES, Papauté. Le mot grec pappas, qui signifie père, s'employa souvent dans un sens de respect affectueux, pour désigner un ecclésiastique de confiance, parfois un simple prêtre, puis tout particulièrement un évêque. Innocent III appelle encore papatus les paroisses de l'archevêché de Thèbes, et Isaac Comnène donne le nom de papa à un de ses lecteurs. L'Égl.

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d'Occident ne connut que plus tard ce nom étranger, et le réserva exclusivement pour l'év. de Rome, en conservant les noms de père et députer pour les clercs et les religieux. C'est l'év. SU ricius 384 qui l'emploie le premier comme titre; au 5®« siècle il est généralement admis, et au 7™ il cesse complètement d'être employé pour désigner autre chose que l'évêque de Rome. Le mot de pape a dès lors le sens déterminé qu'il a conservé jusqu'ici; le mot papauté désigne surtout la dynastie et le pouvoir temporel; papisme s'applique surtout au système religieux, quoique les deux se confondent fréquemment L'histoire de l'évêché romain se divise assez clairement en 4 périodes d'inégales longueurs: lo l'évêché proprement dit, du milieu du 2«»e siècle au milieu du 8°*, de Pie 1er à Félix II; dans cette époque les év. de Rome luttent pour obtenir la prééminence sur les autres évêques et patriarches; ils travaillent à fonder leur suprématie dans l'Église; — la papauté du moyen âge, depuis la formation des États de l'Église jusqu'au complet développement de l'absolutisme romain: Grégoire VII, Innocent III, Boniface III, le conc. de Florence; de 754 à la Réformation. Rome, maitresse des âmes, travaille à fonder une monarchie universelle, dont elle sera le chef; elle s'en prend surtout aux États de l'Occident, et après une lutte de 2 siècles elle l'emporte sur les empereurs. Mais le schisme d'Avignon, suivi d'un schisme dans la papauté elle-même, réveille chez les peuples le sentiment national et la conscience religieuse; — 3o la cour romaine depuis la Réformation jusqu'au concile de 1870; elle lutte pour reconquérir le terrain perdu par la Rôformation; Charles-Quint, Philippe U, Ferdinand II, la Guerre de Trente ans; pour vaincre elle accepte le secours d'un serviteur qui deviendra son maître, le jésuitisme, et qui, jetant le gant à la société moderne, rêve de faire reculer le 19®« siècle au 14»*, et transforme le catholicisme en ultramontanisme; — 4° c'est le papisme depuis le concile de 1870, c.-à-d. la guerre avouée à tous les droits, à toutes les libertés, à toutes les conquêtes de l'esprit nouveau; d'autant plus dangereuse qu'elle tend à rendre le christianisme responsable des erreurs et des excès qui se couvrent de son nom. L'épiscopat n'ayant commencé à devenir une fonction distincte de la charge pastorale ordinaire qu'au 2me siècle, vers 130 ou 140 (la Ire mention s'en trouve dans les lettres d'Ignace), il n'est pas question d'évêques à Rome avant l'an 140, et tout ce qui va au delà est légendaire; le plus ancien évêque historiquement constaté est Pie I*r, 142, ou peut-être Sixte, 115. Les autres qui figurent sur les catalogues romains sont si peu connus que les catalogues varient même sur l'ordre de leur succession; on ne nie pas qu'ils aient existé, mais s'ils furent à Rome des chrétiens considérables par leurs vertus ou leur position, rien n'établit qu'ils aient exereé un ministère, encore moins qu'ils aient succédé à Pierre, dont le voyage à Rome est plus que problématique; v. Dict. de la Bible. Quant à la mention du siège de Saint-Pierre à Rome, elle n'apparaît qu'au temps de Cyprien, quoique alors déjà les év. de la métropole affichassent vis-à-vis des autres évêques, surtout d'Occident et d'Afrique, la prétention d'être les episcopi episcoporum. Le mode d'élection pour les papes, comme pour les évêques, a varié avec les temps et les circonstances. A l'origine c'était le peuple qui choisissait son pasteur, mode simple, logique et naturel; puis ce fut le clergé, d'accord avec le peuple; puis le clergé seul. Huit papes sont élus au moyen âge sous l'influence de trois femmes débauchées; la papauté est héréditaire pour les trois Jean, XI, XII et XI1L Plusieurs papes sont élus directement par tes emp. d'Allemagne; Léon IX par Henri III; Victor II est élu par le simple Hil-debrand, qui pourvoit à la nomination de 5 papes, avant de croire le moment venu pour lui-même. Les choix furent longtemps soumis à la ratification des empereurs, qui plus d'une fois la refusèrent et firent eux-mêmes directement l'élection. Henri H rendit au clergé son droit de choisir librement. Enfin 1181 les cardinaux revendiquèrent pour eux seuls ce droit, et au siècle suivant les papes décidèrent que l'élection se ferait en conclave. — Pendant longtemps les papes ne possédèrent qu'un pouvoir spirituel; et de siècle en siècle ce pouvoir s'affermissait, d'abord par l'usage et l'habitude, ensuite et surtout par une série de fausses pièces et de documents falsifiés; v. Décrétâtes. Le pouvoir temporel vint plus tard; Constantin en posa la première base en dotant richement l'Église et en lui accordant d'immenses privilèges (mais nullement cette fameuse Donation dite de Constantin, qui n'est qu'un mythe, greffé sur U légende de Constantin baptisé à Rome par Sylvestre). C'est seulement au 8*ne siècle que Pepin-le-Bref et Charlemagne fondèrent le pouvoir temporel eu donnant au pape une partie des États conquis sur les Lombards, l'exarchat de Ravenne, la Pentapole, le Pérugin, le ducbé de Spolète. Puis en 1077 la comtesse Mathilde y ajouta la campagne de Rome, l'Ombrie et Vi-terbe, qui dans leur ensemble portent le nom de Patrimoine de Saint-Pierre. Avec ces domaines qui en faisaient des princes temporels, les papes intervinrent plus souvent et plus facilement dans les affaires des autres royaumes et de l'empire; ils avaient l'influence, ils y joignirent la force, celle de l'argent et celle de leurs armées. Mais ils se trouvèrent par là-même exposés a un amoindrissement de leur influence, et à des chocs qui ne pouvaient que les affaiblir; ils participèrent de l'instabilité des choses terrestres. Personne ne songe à nier l'action prépondérante exercée par le catholicisme sur la civilisation de l'Europe au moyen âge. C'est le pivot sur lequel ont tourné pendant longtemps les empires et les consciences, l'artère principale qui a maintenu l'unité dans une partie de la chrétienté, le centre d'où sont sortis les moines savants et les moines cultivateurs, les missionnaires et les bénédictins. Mais quand on en parle, il y a deux réserves à faire: l'une, c'est que le catholicisme ne doit pas toujours se confondre avec la papauté; l'autre, c'est que cette I action, heureuse souvent, a souvent aussi été désastreuse. S'ils ont sauvé des mss., combien n'en ont-ils pas détruits? La valeur personnelle des hommes qui exerçaient le pontificat pesait d'un plus grand poids que l'institution elle-même, et les conciles servaient quelquefois de régulateurs aux variations dogmatiques des papes. Il suffit de nommer Libère, Honorius Iw, Formose, Étienne VII et Clément XIV, pour faire toucher au doigt le manque d'unité qui caractérise la succession des papes en matière de doctrine et discipline, de culte ou de morale. Sur ce dernier point, il y aurait même tout un «chapitre à écrire qui ne serait rien moins qu'édifiant et qui, s'il ne prouvait pas contre l'institution, serait certainement fort loin delà recommander. — Les luttes incessantes des papes contre les empereurs et les rois s'expliquent par le fait que de part et d'autre on voulait cumuler le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, les limites des attributions n'étant pas déterminées, et l'État empiétant sur les droits de l'Église, comme celle-ci revendiquait le gouvernement de la société civile. — Le système et tout l'ensemble de la hiérarchie peut invoquer en sa faveur de nombreux arguments; il peut se défendre et se justifier comme tous les systèmes humains; il a ses qualités et ses défauts, ses bons et ses mauvais côtés. C'est la question de la monarchie ou de la république, dont ni l'une ni l'autre ne peut revendiquer le droit divin, mais qui ont toutes deux des avantages et des inconvénients. Ce qu'on peut dire, c'est qu'à mesure que l'humanité se développe, elle a moins besoin de la forme monarchique; les services que la papauté a rendus contre l'invasion des barbares et de la barbarie, elle n'est plus dans le cas de les rendre aujourd'hui, e4 comme les progrès de la société sont incessants, l'Église qui a été à la tête pendant un temps, a fini par être dépassée, parce qu'elle a refusé de marcher.

PAPESSE, v. Jeanne.

PAPHNUCE io év. d'une ville de la haute Thébaïde; il perdit un œil dans les persécutions de Maximien, fut envoyé dans les montagnes, et mérita par sa vie ascétique et par son martyre le respect et la réputation de sainteté qu'il laissa après lui. Déjà fort âgé il assista au conc. de Nicée et combattit avec énergie la tentative qui fut faite d'imposer aux prêtres le célibat; il estimait que ceux qui étaient mariés en recevant les ordres, quel que fût leur rang dans la hiérarchie, ne pouvaient être contraints à renvoyer leurs femmes. On croit qu'il fut aussi membre du conc. de Sardique 343. — 2<> abbé des moines de Scété, haute Égypte, vers 399, partisan de Théophile, et adversaire des exagérations de l'anthropomorphisme.

PAPIAS, év. d'Hiérapolis, Phrygie, ami et contemporain de Polycarpe, né vers la fin du l*r siècle, martyr sous Marc-Aurèle d'après Épiphane, vers 156, selon d'autres 163 ou 165. Irénée en parle comme d'un homme fort âgé et qui aurait été disciple de Jean, mais sans dire de quel Jean il s'agit. Il a écrit, en grec, une Exposition des discours du Seigneur, qu'on ne connaît que par quelques extraits conservés dans Irénée, Eusèbe, André de Césarée, etc. On croit qu'il en restait encore au 13m« siècle un mss, à Nîmes. Petit esprit, d'après Eusèbe, qui cependant lui accorde de l'éloquence, il manquait absolument de critique et donne comme faits des anecdotes t qui sentent un peu trop la fable. » J1 a induit en erreur plusieurs écrivains ecclésiastiques anciens, et son témoignage a besoin d'être contrôlé. On lui doit certaines nouvelles paraboles et prédications du Sauveur, la première mention d'un évang. de Matthieu, ou des Logia. écrit en hébreu; l'histoire de Pierre dictant à Marc l'Évangile connu sous le nom de ce dernier; une allusion possible à la tradition d'un voyage de Pierre à Rome, etc. Il est connu surtout par ses idées millénaires charnelles, et par son mode d'interprétation typique allégorique. Ne doit donc être consulté qu'avec précaution.

PAPIN 1° Denis, célèbre physicien, né à Blois vers 1650, ami et collaborateur de Boyle en Angleterre, prof, de mathématiques à Marbourg, correspondant de l'Acad. des sciences de Paris, f 1710; le premier qui ait pressenti le rôle de la vapeur comme force. Son Digesteur est surtout connu sous le nom de Marmite de Papin. Il a laissé de nombreux mémoires et fragments. La France lui a fait une réparation tardive 1881 en lui élevant une statue à Blois. — 2° Isaac, son cousin, né 27 mars 1657, étudia à Orléans sous Cl. Pajon, son oncle, dont il épousa les idées et dont il entreprit l'apologie 1683. Pour cette raison, peut-être aussi pour ses idées excessives ou mal formulées sur la tolérance, il eut de vifs démêlés avec les calvinistes et notamment avec Jurieu. La révoc. de l'Édit de Nantes le décida à partir pour l'An-gîeterre 4686 où il fut consacré. Il passa ensuite en Allemagne, et fut appelé à Berlin et à Dantzig, mais il refusa pour rester fidèle au pajo-nisme. Il dut cependant y renoncer bientôt, puisque dégoûté des attaques des protestants qui allaient jusqu'à l'accuser de socinianisme, il se décida en 1690 à se faire catholique, entraînant avec lui les deux fils de Pajon. f 1709. Œuvres, Paris 1723. Il disait entre autres que si Ton accorde de l'autorité à un synode, comme celui de Dordrecht, il n'y a pas de raison pour ne pas en reconnaître autant au conc. de Trente, ce qui prouve que pour lui l'Écriture sainte n'était pas une véritable autorité.

PAPPATES, ami et disciple d'Adalbert; d'autres l'appellent Radia; on croit qu'il était frère de Boleslav. duc de Bohême. Il travailla en Hongrie comme missionnaire et fit à la cour l'éducation du jeune prince Étienne. En 997 il alla rejoindre Adalbert en Prusse où il trouva probablement le martyre.

PARABOLAINS, hommes de peine, plus spécialement des infirmiers; sorte de confrérie qui, dans l'ancienne Église, surtout dans l'Égl. grecque, constituait l'un des échelons inférieurs du clergé. Ils étaient placés sous les ordres immédiats de l'évêque et pouvaient à l'occasion lui servir de gardes du corps; ainsi, p. ex., au concile des brigands, d'Ephèse 449. On croit que c'est à Alexandrie que la corporation prit naissance. Ils rendaient de grands services en temps d'épidémie. Théodose 1er avait limité leur nombre à 500 à Alexandrie, mais en 418 il fut porté à 600. probablement en suite de besoins extraordinaires.

PARACLET, du grec Parakaleïn, prier, exhorter, consoler, appeler à soi, intercéder, plaider pour. Le substantif se ressent de ces diverses significations, et on l'a traduit tour -à tour par consolateur, défenseur, directeur et avocat; dans quelques versions on a choisi tantôt l'un, tantôt l'autre de ces sens, suivant le contexte. C'est le nom par lequel Jean désigne le Saint-Esprit dans son Évangile 14, 16. 26. 15, 26. 16, 7., et Jésus-Christ dans sa lreépître2,1. D'après les paroles de Jésus, le Paraclet est celui qui doit le remplacer auprès de ses disciples quand il sera remonté vers son Père, et comme Jésus dit: un autre paraclet, il vise clairement la même fonction que celle qu'il remplissait; or Jésus est appelé paraclet dans un passage 1 Jean 2f 1. où il ne peut y avoir aucun doute sur le sens spécial de défenseur, ou avocat, plus conforme à l'étymologie, à l'analogie de la langue et aussi à l'ensemble de l'œuvre rédemptrice de Jésus, que le sens de consolateur adopté par Luther à la suite d'Origène et de Jérôme. Quoi qu'il en soit du côté exégétique de la question, le mot paraclet a fini par devenir une espèce de nom propre et par désigner exclusivement le Saint-Esprit. Il vient du Père, il est envoyé par le Fils, il doit conduire les croyants à la connaissance de toute vérité; il doit compléter et accomplir l'œuvre de Jésus-Christ. C'est à l'idée de ce Paraclet que se sont rattachées dans tout le moyen âge, depuis Montanus jusqu'à Joachim de Flores et jusqu'aux exaltés des temps de la Réforme, toutes les sectes se prétendant spirituelles, qui rêvaient d'une nouvelle révélation. S appuyant des paroles mêmes du Sauveur, elles en concluaient qu'il avait laissé son œuvre inachevée, et que c'était au Saint-Esprit, représenté par elles, qu'il appartenait de faire entendre le dernier mot de la vérité divine. Plusieurs églises ou chapelles ont été élevées sous le vocable du Paraclet; la pins célèbre est l'oratoire d'Abélard, à Nogent-sur-Seine.

PARAGUAY, contrée de l'Amérique du sud, au nord de la Plata, à l'ouest du Brésil; découverte en 1526 presque simultanément par le vénitien Sébastien Caboto et le portugais Diego Garcia. Les franciscains y établirent vers 1537 une mission, mais qui ne réussit pas. L'évêque de Tucnman y appela les jésuites, qui étaient déjà au Brésil depuis une trentaine d'années; ils y arrivèrent, en 1586, se firent aimer des Indiens et obtinrent en 1610 du gouvernement espagnol, que, moyennant une redevance annuelle, on les laissât indépendants et maîtres absolus du pays. Ils catéchisèrent les Indiens, leur donnèrent quelques notions d'agriculture, leur apprirent quelques métiers simples, les organisèrent en république théocratique, avec une police, des juges, des soldats, établirent solidement leur autorité, et pour mieux s'assurer qu'elle ne serait pas discutée, fermèrent hermétiquement le pays à tous les étrangers. Us se livrèrent dès lors en paix à l'industrie et au commerce le plus fructueux et devinrent exces sivement riches. Ce qu'ils racontent de leur domination et du bonheur des Indiens soumis à leurs lois est plein de charme, et presque tons les écrivains du 18me siècle qui en ont parlé, depuis Montesquieu, l'ont fait avec une vive sympathie. Malheureusement ils oubliaient que pendant un siècle et demi, on n'a rien eonro du Paraguay que ce qu'il plaisait aux jésuites d'en laisser transpirer ou d'en raconter eux-mêmes. Plus tard d'autres renseignements sont venus et ont ajouté beaucoup d'ombres au tableau. En 1750 l'Espagne ayant cru devoir céder aux Portugais, par échange, quelques cercles, ou Réductions, du Paraguay, les jésuites refusèrent de se soumettre au nouveau gouvernement, qui avait à sa tête le marquis de Potn-bal, et ils armèrent 20,000 Indiens pour résister. La lutte dura près de deux ans; les forces réunies de l'Espagne et du Portugal finirent cependant par l'emporter, les Indiens furent réduits en esclavage et les jésuites traités en rebelles. C'est alors qu'une enquête plus sérieuse démontra la fausseté des rapports que depuis si longtemps on avait admis comme vrais, sur le régime patriarcal et le bonheur dont jouissaient les indigènes colonisés par les pères. Mais la brutalité des nouveaux possesseurs fit presque regretter les jésuites et reculer le peu de civilisation qu'ils avaient réussi à introduire dans le pays. En 1777 le Paraguay dut faire retour à l'Espagne. Puis vint l'insurrection de toutes les colonies espagnoles de l'Amérique du sud. Le Paraguay conquit son indépendance en 1809; Francia s'en constitua le dictateur 1813-1840, sécularisa les biens ecclésiastiques, développa l'industrie et maintint le système d'isolement des jésuites. Son successeur, Lopez f 1870, ouvrit les communications, fit faire des routes, mais ruina le pays. v. Beck-Bernard, le Rio Parana.

PARÉ, Ambroise, né à Laval 1318, surnommé le père de la chirurgie française, était fds d'un coffretier: il étudia à Paris, accompagna en Italie comme chirurgien le général René de Montéjean, revint à Paris prendre ses degrés et, quoique protestant, fut nommé 1552 chirurgien de Henri II, poste qu'il garda sous les trois rois suivants. Charles IX en particulier, qu'il avait guéri de violentes douleurs, suites d'une piqûre au bras, lui avait voué une amitié à toute épreuve, et le sauva du massacre de la Saint-Barthélemy, trouvant « qu'il n'était raisonnable qu'un qui pouvait servir à tout un petit monde, fût ainsi massacré. * C'est Paré qui accourut le premier auprès de Coligny après l'attentat du 22 août. f22 déc. 1590. Il a laissé plusieurs ouvrages et traités de médecine et de chirurgie, notamment sur les plaies produites par les armes à feu. Ce chrétien modeste, complimenté sur une guérison, répondit: « Je le soignai, Dieu le garit. • Enterré dans l'égl. Saint-André des Arts.

PAREAU, Jean-Henri, orientaliste distingué, d'abord prof, à Deventer, puis prof, et pasteur français à Utrecht, a publié quelques ouvrages: en 1790 sur les Lamentations, en 1803 sur ridée de l'Immortalité dans le livre de Job, en 1822 un Manuel de l'interprète de l'A. T., en 4817 un Abrégé des Antiq. hébraïques. Ne pas le confondre avec un autre Pareau, prof, de théol. à Groningue.

PARENTÉS spirituelles. A côté de la parenté du sang, qui crée un empêchement naturel ou moral au mariage, comme la loi de Moïse le reconnaissait déjà, tout en établissant des différences de peines suivant le degré de parenté des conjoints, Lév. 18, 8-18. 20, 11-21,, il y a la parenté par alliance qui, chez plusieurs peuples, entre autres chez les Romains, était en quelque mesure assimilée à la consanguinité. Il en était de même de la parenté par adoption. L'Église chrétienne trouva ces lois établies, et elle se les appropria; elle alla même un moment plus loin encore, en étendant pour les parentés fictives et non consanguines la prohibition du mariage au delà de la personne même des intéressés; mais elle dut renoncer bientôt à une rigueur non justifiée. En revanche elle introduisit un nouveau cas de prohibition dans le fait de la parenté spirituelle. Plusieurs pères du 6™ siècle et le conc. de Trull 692 estiment en effet que le baptême et la confirmation constituent une parenté plus intime que celle du sang. D'autres y ajoutèrent même la confession et l'instruction des catéchumènes, mais Boni-face VIII leva ces dernières interdictions. Il en restait cependant encore trop; le père devenait parent du parrain et de la marraine, et les enfants eux-mêmes étaient déclarés parents; en outre il y avait souvent plusieurs parrains et marraines, et comme la même personne pouvait avoir à plusieurs reprises rempli ces fonctions dans des familles très diverses, étrangères les unes aux autres, les parentés spirituelles formant obstacle au mariage se multipliaient outre mesure et il arrivait même que les intéressés les ignoraient. Le conc. de Trente frappé de ces inconvénients, et considérant que le grand nombre de défenses est cause que très souvent on contracte mariage, sans le savoir, dans des cas qui sont défendus, a décidé d'abord qu'il n'y aurait jamais qu'un parrain, ou une marraine, ou tout au plus un parrain et une marraine ensemble; et ensuite que l'alliance spirituelle n'existerait qu'entre l'enfant, les parents et les parrains; de même entre l'enfant, ses parents et celui qui aura conféré le baptême seulement, les autres ascendants ou collatéraux n'étant pas compris dans cette parenté spirituelle. Dans les égl. évangéliques les Ordonnances de Lunebourg 1543 et de Wurtemberg 1553 ont seules maintenu ces empêchements au mariage, mais dans la pratique d'autres ont conservé longtemps l'esprit qui les avait dictés. Aujourd'hui presque partout ils ont disparu, et la loi civile ne reconnaît plus que les empêchements provenant d'une parenté réelle; même là des adoucissements, peut-être trop nombreux, ont diminué les cas d'interdiction: ainsi les mariages entre oncle et nièce, entre cousins germains, entre beaux-frères et belles-sœurs, tendent à devenir fréquents, bien qu'ils soient reconnus peu favorables au développement de la race.

PAREUS lo David, de son vrai nom Wœn-gler, théol. réformé, né 30 déc. 1548 à Franken-stein, Silésie supérieure. Destiné d'abord à un état manuel, son amour de l'étude triompha des circonstances, et après avoir reçu quelques leçons de Schilling, élève de Mélanchthon, il vint à Amberg, Palatinat, puis à Heidelberg, où il jouit de la protection d'Ursinus, l'ami de Frédéric III. Ses études achevées 1571, il occupa successivement plusieurs postes de pasteur, fut renvoyé quand Louis eut fait prévaloir le luthéranisme 1577, et revint en 1583 quand la crise fut passée. Maître au gymnase, principal, prof, à l'université, conseiller aulique. premier pasteur, il déploya dans toutes ses fonctions une saine et grande activité. Lors de l'entrée des Espagnols 1621, il se réfugia à Amweiler, près de Deux-Ponts, puis à Neustadt chez son lils; enfin voyant sa fin prochaine il se fit transporter mourant à Heidelberg, où il f 15 juin 1622. Son principal ouvrage est son édition de la Bible, dite de Neustadt, texte de Luther, avec de nouvelles notes et réflexions en remplacement de celles de Luther; les violentes attaques du parti luthérien, d'Andréa en particulier, ne servirent qu'à augmenter la popularité de cette version. Pareus était d'ailleurs d'une nature conciliante, et il se joignit aux efforts du noble Fréd. IV pour rapprocher les calvinistes et les luthériens, en établissant que les points qui les distinguent ne méritent pas de les diviser: Cly-peu* veiitatis 1598, Irenicum 1615. — 2° Son fils Philippe, aussi prof, de théol. à Heidelberg, 1576-1648, avait étudié sous Théod.de Bèze; il enseigna les humanités à Neuhausen, et fut recteur à Neustadt et à Hanau. On lui doit une Vie de son père et plusieurs bons travaux sur Plaute. — 3o Daniel, fils du précédent, né 1605 à Neuhausen, assassiné 1635 par des voleurs, était prof, des lettres à Kaiserslautern, a édité plus, auteurs latins, composé un Dictionn. de Lucrèce et publié plusieurs ouvrages d'histoire.

PARIS. L'introduction du christianisme dans la vieille Lutèce, capitale des Parisii, se perd dans les ombres du 3ro« siècle. C'est Grégoire de Tours qui en parle le premier, au 6®« siècle; il raconte que vers l'an 240 ou 250, sept évan-gélistes furent envoyés d'Italie dans les Gaules, et que l'un d'eux, Denys, accompagné d'Eleu-thère et de Rustique, s'établirent à Paris. C'est tout. Aucun détail sur ce Denys, q. v. La légende le confondit plus tard avec l'Aréopa-gite et de faux documents du 4me siècle furent invoqués & l'appui de cette substitution de personnes. Abélard lui-même s'y laissa tromper. On peut admettre cependant que l'évêché de Paris date de saint Denys, et dès360 un synode est réuni dans cette ville. Geneviève en 451 détourne la fureur d'Attila et devient la patronne de la capitale; Clovis lui élève une église. En 1622 Grégoire XV érige l'évêché en archevêché, et lui donne pour suffragants Chartres, Orléans et Meaux; plus tard Blois et Versailles. Un grand nombre de conciles provinciaux ont en lieu à Paris, mais en général peu importants. Celui de 360 rejeta I'arianisme et le semi-aria-nisme; celui de 614 ou 615, en stipulant que l'évêque serait élu par le concours du peuple et du clergé, et en étendant la compétence épiscopale, favorisa le développement de la hiérarchie. En 825 les év. et les théologiens convoqués par Louis-le-Déb., rejettent les actes du conc. de Nicée 787 et se prononcent malgré Adrien 1er contre le culte des images, ainsi qae l'avaient fait les Livres carolins; plusieurs, entre autres Bellarmin, ont contesté, mais sans preuves, l'authenticité de ces décrets. En 829 el 846, questions disciplinaires contre le relâchement des mœurs. En 1050 condamnation de la doctrine de Bérenger sur la Cène. En 1074 protestation énergique contre le décret de Grégoire VII imposant le célibat forcé. En 1147, sous la présidence d'Eugène UI, discussion sans résultat sur la prétendue doctrine trithéiste de Gilbert de la Porrée. Mentionnons encore le synode de 1210 qui condamna le panthéisme mystique d'Amatiry de Bène; ceux de 1223, 1224, 1226, 1228 contre les albigeois, et celui de 1310 contre les templiers. Plusieurs synodes au 15m« siècle s'occupèrent de réformes, mais avec hésitation, et ils aboutirent à celui de 1523 qui condamna Luther et la Réformation. Ceux des év. constitutionnels 1797 et 1801 n'aboutirent pas, non plus que celui de 1811 convoqué par Napoléon pour la formation d'une Église nationale indépendante de Rome. —L'uni-niversité de Paris, qui fut dans la moitié du moyen âge la principale école de théol. et de philosophie, et qui possédait une autorité presque incontestée, au point qu'en 1387 elle résista même au pape sur la question de l'Immaculée conception, date de 1209 et 1213, époque où Innocent III promulgua en faveur des écoles conventuelles existantes des droits et des privilèges collectifs. Elle compta bientôt20,000 étudiants. C'est au temps de la scolastique qu'elle brilla de son plus vif éclat. On reconnaît encore au 13«>e siècle l'influence de l'école de Saint-Victor, et la lutte des théologiens parisiens contre l'invasion des ordres mendiants fut en même temps, et malgré ses écarts, une lutte en faveur de la science et de la liberté, contre la barbarie théologique. L'univ. se montra froide pour la renaissance des lettres, et le mouvement se fit en dehors d'elle; elle fat généralement hostile à la Réforme. Mais même a ces temps elle continua de résister aux prétentions des papes: en 1458 contre les moines mendiants, en 1554 sur la question des jésuites, en 1717 au sujet des libertés gallicanes et de la bulle Unigenitus. Parmi les hommes qui ont illustré l'université de Paris, on cite Abélard, Gilbert de La Porrée, Jean de Salisbury, Albert-le-Grand, Bonaventure, Thomas d'Aquin, Dans Scott, Jean de Paris, Occam, d'Ailly, Clé-mangis, Gerson, etc. La Sorbonne, q. v., distincte de l'université, qnoiqne en rapports intimes avec elle, en était comme la faculté de théologie. — Le protestantisme y fit de bonne heure son apparition et y compta des pasteurs zélés et bien doués. Dés 151S Lefévre publie son Comment. sur les Ép. de Paul, et enseigne k la Sorbonne que c'est Dieu qui justifie par grâce, par la foi. L'influence des « hérétiques de Meaux » se fait sentir et en 1523 Berquin est mis en pri son. Le 20 mars 1524 le parlement rend un arrêt contre les blasphémateurs et les luthériens, et bientôt Pavanne est brûlé vif, ainsi que l'ermite de Livry. A partir de ce moment la persécution se poursuit activement, et François 1er donne des ordres précis contre « les hérétiques qui pullulent dans sa bonne ville de Paris, > 10 déc. 1533. Malgré de nombreuses exécutions, les réformés continuent de tenir leurs réunions, présidées quelquefois par des pasteurs en passage, le plus souvent par des laïques. En 1555 ils pensent sérieusement à s'organiser, et le sieur de la Ferrière met à leur disposition sa maison du Pré-aux-Clercs; ils choisissent pour ministre, l'un d'entre eux, Jean Le Maçon, dit la Rivière, ou Launey, et à la fin de l'année l'Église a son consistoire, des diacres et plusieurs pasteurs. D'horribles massacres eurent lieu en 1557, et suivisde condamnations à mort. En 1559 une accalmie permet aux protestants de se réunir en synode, du 26 an 28 avril, sous la présidence du pasteur Fr. deMorel, dit deCoulonge. Malgré son mauvais vouloir le gouvernement est bien obligé de tolérer le prêche, puisque la noblesse et des princes même le fréquentent. Henri IV pense tout concilier en donnant Charenton aux protestants 1606, mais ce temple plusieurs fois brûlé ou démoli par la populace, avec la complicité des autorités subalternes et du clergé, finit par être abandonné. La Révocation a supprimé le protestantisme, en droit, ce qui ne l'empêche pas de se maintenir en fait pendant tout le 18** siècle, el les autorités qui l'ignorait continuent de traiter avec lui officieusement et par des intermédiaires moralement accrédités. D'une part les puissances protestantes et leurs ambassadeurs, de l'autre la philosophie et ses plus illustres représentants, plaident la cause de la tolérance, et malgré les lois les magistrats se décident à fermer les yeux. LouisXVI accepte en Necker un ministre des finances protestant. Court de Gébelin est l'agent général des églises sous la croix. Malesherbes se prononça à plusieurs reprises pour la liberté. Un pasteur est nommé président de l'Assemblée nationale.

Enfin la loi du 18 germinal an X consacre comme droit ce qui existe depuis longtempscomme fait, et l'Égl. de Paris est constituée.

PARIS, Matthew, bénédictin anglais du couvent de Saint-Alban, né à la fin du 12«»« siècle, f 1259, fut chargé de réformer plusieurs couvents norvégiens, et jouit de la faveur d'Henri III. Il a écrit une Hùtoria major d'Angleterre, de 1066 à 1259, publ. par l'archev. Parker, et il en a fait lui-même l'abrégé sous le titre de Hist. minor.

PARIS, François (de), né 30 juin 1690, fils d'un conseiller au parlement, avait embrassé avec ardeur les doctrines jansénistes; il rejeta la bulle Unigenitus, et refusa une cure parce qu'il ne voulait pas signer le formulaire. Après s'être miné en aumônes et en bonnes œuvres, il se mit à faire des bas pour vivre, mais il abrégea ses jours par ses austérités. Il f i« mai 1727 en odeur de sainteté, et le bruit courut qu'il se faisait des miracles sur son tombeau; v. Convulsionnaires. Carré de Montgeron a publié le récit de ces miracles.

PARKER lo Matthieu, né 6 août 1504 àNor-wich, étudia à Cambridge, fut ordonné prêtre, devint membre du collège Corpus Christi 1527, et se rattacha à la Réforme. Ses talents de prédicateur lui valurent la faveur royale; Anna de Boleyn en fit son chapelain, Henri VIII lé nomma doyen du collège Sainte-Claire, Cambridge, qui acquit sous sa direction une prospérité intellectuelle, morale et financière exceptionnelle. Vice-chancelier de l'université depuis 1545, il se retira sous Édouard VI dans son décanat de Lincoln. Persécuté et proscrit sous Marie-la-Sanglante, il fut rappelé par Éli-sabeth, et malgré sa répugnance, il dut accepter en 1559 l'archev. de Cantorbéry et la tâche de réorganiser l'Égl. anglicane. Il y procéda avec énergie, conformément aux vœux de la reine, mais dépassa peut-être les limites dans la recherche de l'uniformité; la question du costume, propter lanam et linum, amena des luttes, qui ne se terminèrent que par la retraite des puritains. f 1575. Il a publié quelques notices et rendu des services comme historien; il a fondé une société des Antiquités et recueilli des mss. précieux.

2o Samuel, 1640-1687, archid. de Cantorbéry et év. d'Oxford; auteur de plusieurs ouvrages de théologie.

3» Samuel, son fils, auteur d'une Biblioth. Biblica, Oxford 1720.

4o Théodore, né 24 août 1810 À Lexington, Massachussets, fils d'un fermier, se procura par des leçons les moyens de poursuivre ses études et entra en 1834 au collège de Harward près Boston. La théol. rationaliste allemande, la lecture de Eiehhorn, Wegscheider, de Wette, Spi-nosa, Leibnitz, Lessing, détermina sa propre théologie. Nommé en 1837 pasteur de l'égl. unitaire de West-Roxbury, il dut se retirer à cause de ses idées trop libérales. En mai i84i il fit à Boston un discours sur ce qu'il y a de permanent et de transitoire dans le christianisme. Dans l'hiver de 1841-1842 il lut des conférences sur différents sujets religieux, qui amenèrent sa rupture avec les anciens unitaires. En 1843 il vint en Europe et s'occupa spécialement de la théol. allemande. En 1845 il quitta Rox-bury pour prendre la direction d'une égl. con-grégationaliste à Boston, et il y resta jusqu'en 1839; une attaque d'apoplexie l'obligea de renoncer au ministère actif, et il f 1860 à Florence. Parker est avec Channing le représentant le plus autorisé du nouvel unitarisme, qui a fait justice des inconséquences du vieux rationalisme et qui rejette le surnaturel et l'inspiration; il admet de la Bible ce qu'elle renferme de religieux, mais il revendique les droits absolus de la raison, et insiste sur la nécessité de la révélation immédiate de la religion à la conscience. Presque nul au point de vue de la doctrine chrétienne, Parker a dû son influence à ses qualités personnelles, à la générosité de son caractère et à ce qu'il y a eu de vrai dans ses attaques contre la foi morte. Il a pris parti pour l'abolition de l'esclavage en un temps où il y avait du danger à le faire.

PARMÉNIEN, donatiste, élu après la mort de Donatus pour lui succéder comme anti-évêque vers 360, expulsé, puis rappelé par Julien l'apostat, demeura à la tête des donatistes d'Afrique jusqu'à la fin du siècle. Il a écrit 2 ouvrages, qui sont perdus, l'un qui a été réfuté par Optatus de Milève, l'autre par saint Augustin.

PARRAINS, v. Parenté.

PARSES(Parsisme), nom actuel des Perses qui, après la victoire de l'islamisme, ont continué de rester les disciples de Zoroastre et les adorateurs du feu. Le principe fondamental de cette religion est la coexistence éternelle de deux êtres puissants, représentant: Ormuzd ou Ormazd, le bien, le vrai, le bon, le soleil; Ah-riman le mal sous toutes ses formes, le péché, la souffrance, les ténèbres, la nature malfaisante, plantes et bétes. Ormuzd le premier avait créé le monde par sa parole, et il l'avait créé parfait; Ahriman, sous la forme d'un serpent, survint pour le souiller et le corrompre. De là une guerre qui finira par la destruction du mauvais esprit. L'apparition de Zoroastre a été dans cette lutte le moment décisif où la victoire du mal sur le bien a commencé à se dessiner. Le 3»e des grands prophètes, Sosiosch, le Sauveur, apparaîtra au dernier jour pour vaincre, et il jugera le monde. Zoroastre avait demandé à ses disciples de mener une vie pure; ses prêtres, les mages, ont compliqué cette donnée morale par une foule de cérémonies et de pratiques minutieuses, dignes du talmud et de la scolastique. Les Parses sont encore nombreux dans la province de Bombay.

PARSON, ou Pertm, Robert, né 1545 à Somerset, d'abord protestant, puis jésuite, un des premiers qui surgirent en Angleterre, avec son collègue Edmond Campion. Chargé de plusieurs missions secrètes en Espagne et ailleurs, il revint dans son pays comme supérieur des missions catholiques, intrigua contre Elisabeth, fat compromis dans la conspiration des poudres, mais s'arrangea de manière à ce qu'il n'y eût pas de preuves contre lui. Son collègue Campion ayant été exécuté, il jugea prudent de quitter l'Angleterre et s'occupa activement de fonder des collèges anglais en Espagne et en France. Il composa un grand nombre d'écrits de controverse, et soutint la thèse que la royauté étant une émanation du peuple, le peuple avait le droit et même le devoir de refuser l'obéissance à un prince non catholique. Très estime de Philippe II, il refusa le cardinalat et f 1610 à Rome, après avoir été 23 ans le directeur dn collège anglais de cette ville.

PASAGIENS, ou Passagieru, une des nombreuses sectes du moyen âge, condamnée an conc. de Vérone 1184, et proscrite par Fréd. D. 1224, sous le nom de: les Circoncis. Èlle croyait au Christ, entendu à la façon ébionite, mais elle y joignait la pratique littérale de certaines prescriptions du judaïsme, les sacrifices non compris. C'étaient peut-être des juifs qui. pour se soustraire aux persécutions, avaient adopté quelques formes chrétiennes, tout eu retenant dans leur cœur l'attachement à leur vieille foi, et conservaient des relations avec leurs coreligionnaires d'Orient. On ne les connaît d'ailleurs que par les rapports de leurs ennemis. C. Smidt fait dériver leur nom du mot passage, qui a bien des sens: passer d'une religion à l'autre, d'un pays à l'autre, passer poor chrétiens, etc.

PASCAL lo pape 817-824, né à Rome, directeur du monastère de Saint-Étienne, se fut pardonner par Louis-le-Déb., comme son prédécesseur Étienne V, l'irrégularité de son élection qui n'a pas été soumise à son approbation préalable. Il reçoit de Louis les îles de Corse et de Sardaigne, et couronne Lothaire à Rome 833 Ainsi les deux puissances en sont à se reconnaître mutuellement; les empereurs ont peidn du terrain, les papes en ont gagné. Pascal doit rendre compte à Lothaire pour avoir fait incarcérer et décapiter deux dignitaires romains qui avaient juré fidélité au monarque. Sous son pontificat parait Claude de Turin, qui s'élève contre la plupart des superstitions de son temps:

Pascal le combat, mais ne le déclare pas héré* tique. Il ouvre à Rome un refuge pour les Grecs que les persécutions des iconoclastes réduisent à quitter l'Orient.

2° Pascal II, Rainieri, né à Bléda, Toscane; moine de Cluny, nommé par Grégoire VII abbé de Saint-Paul extra-muros, élu pape 1099, continue vis-à-vis de la France la politique hostile de son prédécesseur Urbain II. Il remporte la victoire sur l'emp. Henri IV, en excitant contre lai. sous le masque de la religion, son fils Henri V. Mais celui-ci, une fois roi, défend les mêmes principes que son père, en particulier le droit d'investiture. Le clergé allemand soutient Henri. Pascal persistant à refuser à Henri le droit d'investiture, celui-ci marche sur Rome. Le pape propose, 1110, que les év. allemands rendent à l'empereur tous les llefs qu'ils tiennent depuis Gharlemagne, et que l'empereur de son côté renonce à l'investiture comme lui-même renoncera à s'immiscer dans les affaires terrestres, mais le clergé allemand ne veut faire aucune concession. Le pape refuse au roi le couronnement, mais (ait prisonnier avec ses cardinaux, il se décide à sacrer Henri et lui accorde le droit d'investir ceux qui auraient été élus sans violence, ni simonie. Le parti papiste, à son tour (conc. de Latran 1112), délie le pape de son serment et excommunie Henri. Nouvelles luttes. Pascal nie d'avoir excommunié l'empereur, et f en exil 1118. Il avait eu à combattre deux antipapes, Albert et Théodoric, et fonda plusieurs églises.

3o Pascal III, Gui de Crème; étant cardinal il fut chargé par Adrien IV d'une négociation auprès de Frédéric Barberousse; il se laissa séduire par ce prince et fut nommé pape par lui, en opposition à Alexandre III, après la mort de l'antipape Victor IV, 1154. Bientôt abandonné par son protecteur, il mourut misérablement 6 ans après.

PASCAL, Biaise, né à Clermont-Ferrand, 19 juin 1623, d'une famille d'Auvergne anoblie en 1478 par Louis XI. Son père était premier président à la cour des aides de Clermont et veilla avec grand soin à l'éducation de ses enfants. Biaise inoutra de bonne heure des dispositions étonnantes pour les sciences, notamment pour les mathématiques et la physique. Son père s'était fixé à Paris en 1631 et réunissait chez lui des savants, dont la conversation était bien faite pour élever l'âme et développer l'intelligence des trois jeunes Pascal, mais il ne voulait pas hâter ce développement par des études qui auraient fatigué son fils, et Biaise résolut de travailler seul. A 12 ans il était arrivé en géométrie à la 32®e proposition d'Euclide, et quand son père le découvrit, il comprit qu'il était inutile de résister à une vocation aussi manifeste et qu'il valait mieux faciliter à l'enfant son travail que de l'épuiser en le laissant travailler seul. Dès lors Pascal ne cessa plus d'inventer, d'imaginer et de découvrir: traité des sections coniques, machine à calculer, triangle arithmétique, théorie de la roulette, expériences sur le vide, équilibre des liquides, brouette, ha-quet, etc. Ses travaux sur le poids de l'air, qui devaient aboutir au baromètre, suffiraient à la gloire d'un homme. Ce n'est cependant pas dans ce domaine qu'il a le plus mérité l'éclat qui entoure son nom, et la théologie a plus de titres encore que les sciences naturelles à le revendiquer comme sien. Son père avait accepté de Richelieu en 1638 la place d'intendant à Rouen. Plusieurs nobles familles jansénistes qui s'y trouvaient, et un ecclésiastique du nom deGuil-lebert de Rou ville, exercèrent sur la vie religieuse des Pascal une influence décisive. Jacqueline en particulier, la plus jeune sœur de Biaise, née 1625, y fut mise en relations avec plusieurs membres de Port-Royal, et prit le voile dans ce couvent après la f de son père 1651. Elle décida aussi un moment son frère, qui avait en elle une confiance pleine de sympathie, à se choisir un directeur janséniste et à s'ouvrir à lui quand l'excès de ses travaux lui ferait sentir le besoin d'une détente. Cependant ces premiers rapports ne furent que passagers. Le jeune homme avait 18 ans; il était maladif, et tous ses efforts se concentraient dans la pensée. Son Discours sur les passions de l'amour est antérieur à la prise de voile de Jacqueline, et rappelle Montaigne à plusieurs égards. Sa conversion est racontée de diverses manières. Une tradition janséniste, dont on ne trouve d'ailleurs aucune trace ni dans sa correspondance, ni dans sa vie écrite par sa sœur aînée, Gilberte, Mra« Périer, porte qu'en octobre 1654 il faillit périr sur le pont de Neuilly, ses chevaux s'étant emportés, et qu'il ne fut sauvé que parce que les traits se rompirent; de ce moment, ajoute-t-on, il croyait toujours voir à sa gauche un précipice ouvert. Il est possible que cet événement ait eu lieu, et qu'il ait fait faire des réflexions sérieuses à celui qui eu avait presque été la victime et qui, depuis 1647, à moitié paralysé des jambes, devait comprendre que sa vie ne tenait qu'à un fil, et que le génie ni la science ne suffisent à l'homme. Mais ce qui fut la véritable crise dans sa vie religieuse, ce fut l'extase, ou la vision qu'il eut dans la nuit du 23 nov. de la même année 1654 et dont il transcrivit le souvenir en double sur un parchemin qu'un serviteur trouva après sa mort, dans la doublure de son vêtement. Cette même année encore il eut avec Sacy la mémorable discussion sur Epictète et Montaigne, qui nous fait connaître la lutte qui se livrait en lui. Sans abandonner ses travaux il se consacra plus entièrement à l'étude des choses religieuses et renoua ses relations avec les jansénistes. En 1656 il fit une première retraite à Pôrt-Royal, et il y retourna souvent. Arnauld ayant été censuré par la Sorbonne, Pascal publia, datées de la province et signées Louis de Montalte, ses célèbres Provinciales, ouvrage de logique, de science théologique et de bonne foi, aussi bien qu'un des chefs-d'œuvre de la langue française, qui obtinrent dès leur publication un immense succès, auquel leur condamnation par le pape, par le parlement d'Aix et par le roi ne firent naturellement qu'ajouter; il n'y en eut pas moins de 60 éditions aussitôt enlevées. Elles furent en même temps traduites en allemand à Cologne, sous le pseudonyme de Wendrock (déguisement) et avec des annotations de Nicole. Voltaire les a traitées de satires, J. de Maistre de menteuses, et Châteaubriand a appelé Pascal un calomniateur de génie; la conscience publique n'en a pas moins ratifié le jugement porté contre les casuistes de la dévotion aisée et des réservations mentales. Mais Pascal méditait un livre d'une portée plus générale, un traité d'apologétique dans lequel il aurait prouvé l'évidence du christianisme par ses rapports intimes et éternels avec les besoins de Pâme humaine. Il demandait à Dieu pour cela dix années de vie et de sanlé, mais ses jours étaient comptés et sa santé était irrémédiablement perdue. L'occasion de ce livre fut la guérison inespérée d'une jeune nièce de 10 ans, qui souffrait d'une fistule lacrymale et qui, à la suite de prières faites dans la chapelle de Port-Royal ftit l'objet d'une guérison presque instantanée, mars 1656. Pascal en fut frappé, comme d'un miracle. Il comprit toujours mieux la force du christianisme, et il entreprit de le justifier vis-à-vis des incrédules et de lui rendre sa forme primitive vis-à-vis de ceux qui en avaient altéré l'esprit. Il écrivit, mais après sa mort on n'en trouva que des fragments détachés, des notes éparses, quelques-unes inachevées. Des mains amies les recueillirent, les classèrent de leur mieux, et les publièrent, mais non sans les avoir retouchées, èmondées, corrigées, embellies (c'est le mot dont quelques-uns se sont servi), de manière à ce qu'elles pussent recevoir 17 approbations de la Sorbonne, et ne déplaire ni aux jésuites, ni à l'orthodoxie du grand roi. Arnaud et Nicole furent les complices de cette impie mutilation, contre laquelle protestèrent en vain dès l'origine les dépositaires de la vraie pensée de Pascal. C'est ce volume qui, sous le titre de Pensées, parut pour la 1" fois en 1670, et a été reproduit dès lors en tant d'éditions et traduit dans presque toutes les langues civilisées. C'était un faux Pascal, et il a fallu que M. Prosper

Faugères, en 1844, avec l'autorisation de M. Vil-lemain, collectionnât à nouveau les mss. existants, pour en donner enfin une édition fidèle, authentique, débarrassée de toutes les Mutilations et altérations qu'avaient fait subir an texte vrai les courtisans de Louis XIV et les advérsaires du jansénisme. C'est dans les dernières années de Pascal qu'eut lieu la grande lutte entre Port-Royal et la hiérarchie, et que les religieux eurent à signer, sans distinguer entre le fait et le droit, la Constitution d'Alexandre VI de 1686 condamnant les soi-disant hérésies de Jansénius. Arnaud et ses amis se décidèrent à signer, moyennant une légère capitulation de conscience; Pascal refusa, attendu que le pape se trompait sur le fait même. Jacqueline se laissa induire à signer aussi, mais elle en eut des remords et mourut de chagrin, 4 oct. 1661. Pascal ne tarda pas à la suivre; + 19 août 1662, ayant supporté avec une résignation toute chrétienne des douleurs qui n'avaient fait que s'aggraver depuis 1658. v. Vinet, Études sur W. Pascal; Éloge, par Condorcet; Cousin, Havet, Sainte-Beuve, Schérer, de Pressensé. Le prof. Astié a publié en 1857 une édition des Pensée? d'après un plan nouvfeau, qui dessine mieux le caractère apologétique de l'ouvrage.

PASCHASE RADBERT. Tous les anciens pères et docteurs avaient maintenu sur la doctrine de la Cène la foi à une communion réelle avec le Rédempteur, sans chercher à déterminer le comment. La pente à voir partout une influence magique conduisit peu à peu à la doctrine de la transsubstantiation. Paschase Rad-bert, moine à Corbie, + 868, fut le premier i attribuer aux pères cette doctrine. Le pain et le vin, dit-il, après leur consécration ne sont plus autre chose que le corps de Christ et son sang; c'est la même chair, et pas une autre, que celle qui est née de Marie et qui a souffert sur la croix. Des légendes merveilleuses ne contribuèrent pas peu à accréditer le nouveau dogme. Paschase avait fait un recueil de citations des pères; Raban Maur, Ratramne, Scot Érigène, Walfried Strabon le combattirent; Ratramne entre autres, en lui opposant sous le même titre des citations contraires. Mais le courant était dans le sens de l'opinion miraculeuse et en apparence la plus religieuse; l'esprit dn temps matérialisait tout; Haymon d'Halberstadt lui-même se laissa entraîner, et au 11">* siècle c'était une hérésie d'attaquer cette doctrine; v. Rérager. C'est au*si à Paschase qu'on doit la première idée de la conception surnaturelle de Marie.

PASOR, Georges, né 1er août 1570 à Ellar, Nassau; prof, à Herborn et à Franeker, t 10 déc. 1637. Auteur d'un petit Dictionn. du N. T. et d'une Grammaire du N. T. très estimée.

PASSAGÏENS, v. Pasagiens.

PASSAGLIA, Charles, né 1814 près de Luc-ques, prof, à Reggio et à Picoli, entra en 1844 chez les jésuites et fut nommé prof, au Collège romain. Il dut s'enfuir lors de la révolution de 1848, mais revint avec le pape. Très versé dans la scolastique, il possédait toute la confiance du pontife. Il écrivit en 1853 trois volumes pour la défense de l'Immaculée Conception, et présida la Commission qui devait préparer l'adoption du nouveau dogme par le concile. Mais il était plus avancé en politique qu'en religion, et l'étonnement fut grand en 1859, lorsque parut sa brochure patriotique Pro causa italicâ, dans laquelle il défend l'unité nationale et prouvé, tout en restant strictement fidèle à la doctrine orthodoxe, mie le pouvoir temporel est dangereux pour l'Eglise. Cet essai de conciliation entre la papauté et les aspirations populaires fut accueilli avec enthousiasme par le bas clergé, mais l'auteur dut quitter Rome pour n'être pas arrêté, 1860. Il se rendit à Turin, où il fut nommé prof, de philos, morale. Il a dès lors publié quelques autres brochures dans le même esprit, un journal politique Mediatore 1862-1866, et en 1864 une réfutation de la Vie de Jésus, de Renan.

PASSAU, ville de Bavière, au confluent de l'Inn et de l'Ilz, siège épiscopal qui date de l'invasion des Avares 738, et qui fut pendant plusieurs siècles en rivalité, soit avec l'ancien évêché de Lorch, première métropole de la Pannonie, soit avec celui de Salzbourg qui finit par l'emporter. Piligrim en 997 portait encore le titre d'archev. de Lorch et Passau, mais au milieu de prétentions rivales, et quand les frontières des pays étaient constamment remises en question, Rome avait de la peine à se décider. Quand elle eut enfin prononcé 1691 en faveur de la suprématie de Salzbourg, Joseph 1er obtint à son tour 1722 que Passau en fût reconnu indépendant. Mais déjà cet évêché qui comprenait dès l'abord la plus grande partie de l'ancienne Pannonie évangélisée par son zèle, avait été diminué par l'érection d'évêchés hongrois, et en 1480 il l'avait été encore par la création du diocèse de Vienne. Ses limites actuelles datent de 1822 et il a perdu toute son importance. La Réformation fut introduite à Passau par le chapelain Léonard Kaiser, qui fut martyrisé à Schàrding 1527; elle y fit de rapides progrès, mais les jésuites, avec l'aide du pouvoir temporel et avec leur collège fondé en 1612, réussirent à l'étouffer. Passau est surtout connu dans l'histoire par le célèbre Traité qui porte son nom. Il fut conclu sous les auspices du roi Ferdinand, à la suite des victoires remportées par Maurice de Saxe sur Charles-Quint. Ouvertes le le 18 avril 1552 à Ehrenberg, les conférences n'aboutirent pas. Elles furent rouvertes à Passau le 26 mai, et posèrent les bases de la paix de religion d'Augsbourg. Elles eurent ceci de caractéristique que c'est là que pour la Ire fois les États protestants comparurent devant l'empereur, non comme des sujets rebelles pour être jugés par le maître, mais comme des puissances indépendantes et pour traiter d'égal à égal. C'est aussi là que fut reconnue l'impossibilité de fonder l'unité politique et relig. de l'Allemagne sur les principes rêvés par Charles-Quint. L'empereur hésita longtemps à signer un compromis, qui était la ruine de tout son système; il écrivait encore le 18 juillet « qu'il ne ferait rien contre son devoir et sa conscience, quand même tout devrait se perdre, » mais l'approche des Turcs, contre lesquels il ne pouvait rien sans l'appui des protestants, finit par le décider; il signa le 2 août 1552.

PASSION, nom par lequel l'Église désigne d'une manière spéciale les souffrances du Sauveur depuis sa condamnation jusqu'à sa crucifixion, telles qu'elles sont reproduites entre autres dans la procession dite le Chemin de la Croix. Dans un sens plus étendu le mot s'applique à toule la Semaine sainte, depuis les Rameaux jusqu'à Pâques. L'Égl. catholique donne même ce nom au dimanche qui précède celui des Rameaux. Toutes les églises célèbrent par des lectures et par des méditations spéciales cet événement qui résume la Rédemption. Les ser-monnaires sur ce sujet abondent, Francillon, Galland, Bridel, etc.

Ordres de la Passion. Deux ordres de chevalerie furent créés sous ce nom, l'un par Richard II d'Angleterre 1380, l'autre par Charles IV 1400, en vue de combattre les infidèles, mais ils n'ont duré que peu de temps. Un ordre de femmes du même nom compte encore en Italie quelques représentants; il fut fondé à Naples en 1538 par Marie-Laurence Longa suivant la règle des tertiaires de Saint-François, et autorisé par Clément VIII et Grégoire XV.

Mystères de la Passion, v. Mystères.

PASSIONAL, ouvrage d'un auteur inconnu, du 14®* siècle; il chante en 3 livres la vie de Jésus, de Marie, des apôtres, des évangélistes et de 75 saints, « pour vivifier la piété des hommes et les fortifier dans la sainteté. » Luther l'a réimprimé avec quelques modifications, en même temps que le petit livre de prières.

PASSIONISTES, confrérie, ou Congrégation, association de religieux ecclésiastiques ayant pour but de rappeler incessamment à tous la vie, les souffrances et la mort du Sauveur; leurs moyens sont la prédication et la mission. Le fondateur est Paul-François de la Croix de Danni, né 1694 à Ovada, Sardaigne. Benoit XUI lui permit en 1725 de recevoir des novices. Paul fut consacré en 1727, ainsi que son frère Jean, et en 1737 ils ouvrirent à Orbitello leur première maison. Dans l'intervalle, la congrégation avait déjà pris un certain développement. 'Pie VI la reconnut par un bref solennel, le jour môme où mourait son fondateur, 18 oct. 1775. Celui-ci a été canonisé par Pie IX, l*r mai 1853. La congrég. possède un couvent à Rome, el a depuis 1782 des missions en Bulgarie et en Va-lachie. Le costume se compose d'une tunique de drap noir avec manteau, portant en blanc le nom de Jésus, un cœur et une croix.

PASTOUREAUX, bandes de vagabonds, de bergers et de paysans inoccupés qui en 1251, sous prétexte d'aller délivrer saint Louis, s'organisèrent dans le midi de la France, ayant à leur téte un ex-moine cistercien hongrois, Jacob, qui s'intitulait maître de Hongrie. Les uns agissaient peut-être par enthousiasme religieux, les autres et le plus grand nombre par haine des prêtres, des moines et des juifs, et parce qu'ils trouvaient plus de plaisir et de profit dans cette vie aventureuse que dans un travail régulier qui ne leur procurait pas même le nécessaire. Ils vécurent quelque temps de pillage, ravageant villes et campagnes, et furent enfin vaincus et détruits dans le Berri. Une nouvelle tentative eut lieu en 1320, dévote, fanatique, pillarde, massacrant les juifs sous l'étendard de la croix; elle menaça le clergé et vint jusque sous les murs d'Avignon; le sénéchal de Carcassonne les tailla en pièces.

PATARIA, quartier des chiffons (pâtes) à Milan, où se groupaient les fripiers et leurs dépôts de vieilleries. On avait aussi donné par dérision ce sobriquet de Patariens à une secte de dévots rêvant une réforme de l'Église, et qui se recrutait surtout parmi les pauvres; elle ne fut jamais condamnée, parce qu'elle ne fit point d'excès et n'était pas dangereuse; son chef même, Anselme de Badagio, devint év. de Lucques 1056. Elle eut ensuite pour directeurs deux prêtres, Ariald et Landulf. La réforme qu'ils demandaient n'était autre que l'abandon des libertés qui dataient d'Ambroise, et une subordination plus entière du clergé milanais à l'évêché de Rome; ils travaillaient dans l'esprit de Grégoire VII et sous l'influence ascétique et mystique de Cluny. L'archev. Guido de Milan leur était naturellement contraire. Une émeute en 1057 leur donna la victoire, la cathédrale fut envahie et les prêtres durent se séparer de leurs femmes légitimes; mais en 1066, dans une nouvelle émeute, Ariald fut tué. Le parti ne se tint pas pour battu; Herlembald, frère de Landulf, qui revenait de la Terre sainte, en prit la direction, et dès 1072 il triomphait dans tout le nord de l'Italie; Milan avait perdu ses vieilles franchises.

PATARINS, ou Patarène*, secte religieuse du 12"" et du 13°* siècle, dont on ne connaît bien ni l'origine, ni la doctrine. Les uns font venir leur nom de pati, souffrir, à cause des persécu tions dont ils ont été les objets; d'autres de pater, parce qu'ils répétaient souvent l'oraison dominicale. Mais il est plus vraisemblable d'admettre que cette secte a reçu son nom par suite d'un malentendu. Celle des patariens, v. Pata-ria, se distinguait par un attachement outré a la hiérarchie et n'a pas été persécutée par les papes; elle cessa d'exister quand elle eut vaiucu. Mais le nom resta comme synonyme d'opposition religieuse, et quand plus tard, à Milan môme et ailleurs, de nouvelles sectes se formèrent, ayant leurs cultes, leurs assemblées et leurs ministres, on leur appliqua le nom ancien et méprisé, dont on avait oublié la véritable signification. En religion les noms se donnent facilement et n'ont jamais rien de bien précis; ils sont ordinairement donnés par des adversaires, par conséquent par des gens qui ne connaissent pas la foi ou les doctrines de ceux qu'ils prétendent flétrir. Les patarins étaient vraisemblablement, sous un autre nom et avec quelques nuances, une des nombreuses manifestations d? la réaction biblique et anticléricale que l'on trouve à toutes les époques du moyen âge, depuis les pauliciens et les cathares jusqu'aux albigeois et aux vaudois, et que l'Égl. de Rome essayait d'assimiler aux manichéens. Artisans petits manufacturiers, industriels, ils vivaient modestement de leur travail. Fort nombreux dans le nord de l'Italie, ils enseignaient que c'est la foi qui sauve, qu'une Église ne doit se composer que de personnes pieuses, que la croix ne doit pas être adorée; ils rejetaient le baptême des enfants et refusaient le serment et le service militaire; ils avaient leurs pasteurs, leurs anciens et leurs évangélistes, qui vivaient de leur travail. Le gouverneur de Milan, 01-drad de Tresseno, lança contre eux en 1233 un décret de persécution, mais d'après le témoignage de l'inquisiteur Saccho, ils possédaient encore en 1259 de florissantes églises.

PATRIARCHES, titre d'honneur donné, sans doute en souvenir des pères du peuple d'Israël, aux chefs du sanhédrin en Syrie et en Perse, après la destruction de Jérusalem. Il en est nommé un à Tibériade en 415, un autre à Babylone en 1038. On ignore si c'est des Juifs que ce titre passa dans l'Égl. chrétienne. C'est d'abord dans l'Égl. grecque qu'il fut donné aux principaux évêques, et à partir du conc. de Chalcédoine 451, il fut réservé pour ceux qui avaient plusieurs provinces sous leur juridiction. Déjà au conc. de Nicée on avait accordé un titre analogue à l'év. d'Alexandrie, dont l'inspection comprenait la haute Égypte, la Lybie et la Cyrénaïque. Le conc. de Conslanti-nople 383 reconnut aussi comme patriarche, l'év. d'Antioche qui avait tout l'Orient pour diocèse. A ces deux on adjoignit Rome pour l'Occident. Les mêmes attributions, sans le litre, furent également reconnues aux chefs-lieux des 3 éparchies proconsulaires de l'Asie, Éphèse, Césarée, Héraclée (bientôt transféré à Constantinople). Enfin l'év. de Jérusalem reçut le même titre, mais seulement honorifique et par respect pour le berceau du christianisme. Le conc. de Constantinople 381 donna nn rang d'honneur à l'év. de cette résidence impériale, immédiatement après Pév. de Rome et avec les mêmes droits, ce qui mécontenta à la fois Damase qui trouvait que c'était trop, et les év. d'Orient qui furent jaloux de cette distinction; les disputes origéniennes et christologiques des siècles suivants s'en ressentirent plus qu'on ne pense, et Chrysostome en porta la peine. Les rivalités ne cessèrent que lorsque le conc. de Chalcédoine 451> malgré Léon-le-Grand, eut définitivement soumis au patr. de Constantinople les évêchés de Thrace, du Pont et de l'Asie proconsulaire. Les conquêtes de l'Islam firent disparaître successivement les évêchés de Jérusalem, d'Antioche et d'Alexandrie, et il n'y eut plus en présence que Constantinople et Rome, cette dernière ville affichant depuis Léon, et surtout depuis Grégoire, la prétention d'être le patriarchat universel, et revendiquant le droit de nommer en Orient même des évêques in partibus. En Occident Milan, Aquilée et Arles prétendirent aussi au patriarchat, mais se rallièrent à Rome lors de l'invasion lombarde. L'év. de Bourges et l'archev. de Lisbonne ont porté ce nom comme titre d'honneur. Presque toutes les égl. schismatiques de l'Orient, les nestoriens, les monophysites ont eu leurs patriarches, ainsi que les arméniens et les maronites soumis à Rome. Il y avait en Russie, à Moscou, un patriarche, qui balançait l'autorité du czar; Pierre-le-Grand le supprima 1721 et le remplaça par le saint synode. Auj. il y en a deux, à Moscou et à Kiev, mais sans grande autorité.

— Le Testament des H patriarches, écrit du second siècle, renferme les prétendues instructions qne les fils de Jacob léguèrent en mourant à leurs enfants. L'esprit en est tont messianique et judéo-chrétien; l'auteur a eu pour but de persuader aux juifs d'embrasser le christianisme. Publ. par Grœbe dans son SpiHlegium patrum.

PATRICK, ou Patrice, appelé aussi Sukkat, ué à Bannavon, auj. Kil-Patrick, Écosse, ou près de Boulogne, Armorique, vers 372 on 387, fils d'un diacre Calpurnius de son village. Ses différentes biographies sont si légendaires et semées de tant de contradictions et d'incertitudes que quelques auteurs en sont venus à conclure qu'il n'avait jamais existé. Voici cependant ce qui paraît acquis. Vers l'âge de 16 ans il fut enlevé par des pirates et vendu en Irlande comme esclave. Ce malheur dirigea vers Dieu ses pensées, et lui fit rechercher la source des vraies consolations. Au bout de 6 ans d'un pénible travail et de cruelles souffrances, une vision lui fournit le moyen de s'échapper et il rentra dans sa famille. Mais une vocation intérieure irrésistible le poussait à évangéliser l'Irlande. Enlevé une seconde fois il fut vendu en Gaule, mais bientôt racheté par des chrétiens. Il passa 4 ans 410-414 au couvent de Saint-Martin près Tours, sous la direction de saint Germain, et 9 ans dans un autre monastère. Enfin en 431 il arriva en Irlande et, en dépit des druides, opéra de nombreuses conversions; plusieurs rois se firent baptiser. Entouré de jeunes gens pieux, il parcourait le pays en tous sens, et fonda plusieurs églises et de nombreux couvents, entre autres celui d'Armagh. II fonda aussi des écoles et introduisit en Irlande la langue latine. Son zèle, sa foi, l'austérité de ses mœurs, en ont fait l'apôtre et le patron de son pays adoptif. Il a écrit lui-même ses Confessions, f 465 ou 483. Vie, par Josselin, Usher, etc. — On appelle Purgatoire de Saint-Patrick une caverne d'Irlande, près d'un couvent de PUltonie, où sont représentés les tourments de l'enfer.

PATRIPASSIENS, v. Noët.

PATRIST1QUE, ou Patrohgie, ensemble des études relatives aux pères de l'Église, à leur vie, leurs ouvrages, leurs doctrines, leur rôle, etc. C'est avec l'archéologie, l'hist. des dogmes, la littérature, une des branches de l'étude générale de l'hist. ecclésiastique. Mais dans son ensemble ce n'est pas une science proprement dite et bien déterminée. Ses limites peuvent être fixées arbitrairement, quant à son objet et quant à l'espace de temps qu'elle embrasse. On varie beaucoup sur ce qu'il faut entendre par pères de l'Égl.; les uns s'arrêtent au6ra« siècle, les autres vont jusqu'au 12me et à Bernard de Clairvaux; et même parmi ceux qui s'en tiennent aux 6 premiers siècles, il y en a qui distinguent entre les pères (canonisés), les docteurs et les écrivains. Les catholiques eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux, quoiqu'ils tiennent généralement pour pères les écrivains canonisés des 12 premiers siècles. Si l'on regarde à l'influence exercée, au lieu de ne regarder qu'à la date reculée où ils ont vécu, des hommes comme d'Ailly et Gerson, Luther et Calvin. Bossuet et Fénelon, Pascal et Spener, pourraient tout aussi bien être considérés comme des pères de l'Église et compris dans l'étude de l'enseignement des grands docteurs. II en est un peu des pères comme des classiques; on comprend ce que cela signifie, mais on n'en donnera que difficilement une définition acceptée de tous. Le plus ancien ouvrage connu pour l'étude de la patristique, est celui de Jérôme: De viris Mut-tribu*, s. de scriptoribu* eccle*ia*ticis; puis la Patrologie de Photius. La Réforme imprima une impulsion nouvelle à l'étude des pères, chez les catholiques; les jésuites et les maurins se distinguèrent surtout par leurs recherches; il en fui de même des réformés en France et en Angleterre. Parmi les ouvrages à consulter, il faut citer Bellarmin: De *cript. eccle*ia*tici*; Ellies Dupin, Biblioth. des auteurs ecclés. 1686; Daillé, Remy Ceillier; William Cave, Casimir Oudin, Walch, Schônemann, et de nombreuses monographies, Niemeyer, Neander, etc.; v. aussi Môhler, Alzog, etc.

PATRONAGE, Patron. Il arrivait souvent que, sous l'influence de circonstances diverses, heureuses ou malheureuses, par suite d'un vœu ou autrement, un seigneur eût l'idée de fonder une église, une chapelle ou une abbaye. Dans ce cas presque toujours il se réservait certains droits, des honneurs, un revenu en nature ou en argent, des prières spéciales, et surtout le droit de nommer, ou tout au moins de présenter un ecclésiastique pour la désserte de cette église. Ce droit était naturel, et quand le fondateur était lui-même un ecclésiastique on ne pouvait lui contester ni les revenus, ni le droit de prêcher et d'exercer la cure d'âme. Mais les abus ne tardèrent pas à se multiplier, et l'institution, chrétienne dans son principe, dégénéra. Les héritiers du premier patron, devenus patrons à leur tour, s'occupèrent d'exploiter leur droit en affermant le bénéfice au plus offrant; ils en firent la dotation d'un de leurs enfants, ou la récompense d'un service rendu, et le titulaire n'était pas touj. à la hauteur de sa tâche. D'un autre côté une paroisse s'était peu à peu groupée et constituée autour de l'église et avait pris l'habitude d'eu considérer le desservant comme son pasteur. Si le patron avait des droits, les fidèles n'étaient pas moins intéressés que lui au choix du titulaire, mais les intérêts n'étaient pas toujours les mêmes, et dans les cas graves des conflits étaient inévitables. A mesure que l'esprit religieux se développa la crise s'accentua; les synodes s'en mêlèrent et prononcèrent presque toujours contre le patron en faveur des vœux du troupeau. La Réforme, telle qu'elle se produisit en Angleterre et dans l'Allemagne luthérienne, maintint le patronage avec quelques réserves; dans les égl. presbytériennes il eut plus de peine à se maintenir parce qu'il était contraire à leur principe même. Le parlement écossais l'abolit en 1649, Charles II le restaura en 1661, mais en 1690 il futde nouveau supprimé, moyennant une indemnité raisonnable. La reine Anne ayant rendu aux patrons leur droit illimité 1712, une sécession eut lieu en 1733, composée de plus de 500 communautés, et la question toujours ouverte., toujours résolue par les magistrats dans le sens du droit strict et matériel des patrons, a produit la nouvelle sécession de 1840, v. Chalmers. Le patronage tend de plus en plus à disparaître et ne subsiste plus guère que sous la forme générale du patronage des gouvernements, qui président encore à l'élection des ecclésiastiques officiels.

PAUL lo pape, 29 mai 757, + juin 767, fr. d'Étienne II, a laissé 22 lettres; il commença à vider les catacombes.

2<> Paul II, Paul Barbo, cardinal de Saint-Marc, élu 30 août 1464, + 26 juillet 1471. Ingrat, avare et cruel. Poussé par l'avarice et par le besoin d'argent il établit les jubilés tous les 25 ans, tandis qu'à l'origine, sous Boniface VIII, ils ne devaient avoir lieu que tous les 100 ans. Clément VI les avait déjà réduits à tous les 50 ans et Urbain VI à tous les 33 ans. Il excommunia le roi de Bohême, Georges Podiebrad, et donna ses États à Matthias Corvin; il prêcha en vain une croisade contre les Turcs et s'occupa de faire restaurer les anciens monuments de Rome.

3° Paul III, Alexandre Farnèse, qui avait pris d'abord le nom d'Honoré V, 1534-1549. Profond et dissimulé, il avait été cardinal sons six papes. Il parle beaucoup de réformes et de conciles, mais nomme cardinaux deux de ses petits-fils, âgés de 16 et de 14 ans (il avait été marié). Il a des conférences avec Luther et tâche de lui faire comprendre qu'J£nèas Sylvios est resté simple chanoine aussi longtemps qu'il a voulu suivre ses propres idées, mais qu'après s'être rétracté il est devenu évêque, cardinal et pape. Sourd à ces suggestions, Luther repousse toute ouverture avec Rome. Paul montre beaucoup de raideur dansses relations avec Henri VIII et finit par l'excommunier après son schisme. Il convoque un concile à Mantoue pour le 7 mai 1537; les princes allemands et même le duc de Mantoue refusent de s'y rendre. Le pape choisit Vicence; même refus. Il ne sait que faire. Inutile conférence à Worms. Il forme avec Charles-Quint et Venise une ligue contre les Turcs 1538. et se porte comme médiateur entre Charles et François I^r, qui concluent la trêve de Nice 1538. Il fonde l'ordre des jésuites par sa bulle Régi-mini. Enfin il se décide à convoquer le concile à Trente, mais il y préside absent, et comme on l'a dit, il y envoie le Saint-Esprit dans la valise de ses légats, après avoir vainement essayé de le rompre ou de le transférer à Bologne. Il fait enfermer dans les prisons de Rome beaucoup de protestants, que son successeur se chargera de faire mourir. Il érige pour son fils,

P.-L. Farnèse, Parme et Plaisance en duché j 1545. On a de lui des Lettres, à Érasme, qu'il aurait voulu faire cardinal, à Sadolet, etc. Mi-chel-Ange continue ses travaux à Saint-Pierre.

4° Paul IV, Jean-Pierre Caraffa, ex-évêque de Thèate, fondateur de l'ordre des théatins, j auxquels il donne une règle; pape 1555-1559. Le plus fier et le plus emporté de tous les hommes, il marche sur les traces sanglantes de ses prédécesseurs. L'inquisition répand partout l'épouvante. Avant son élection il avait rempli plusieurs missions délicates. Il jure que, s'il est nommé, il convoquera le concile avant 2 ans, et que dans l'intervalle il ne nommera pas plus de 4 cardinaux. Mais une fois élu, il veut se faire un grand nombre de créatures. Le sacré collège s'y oppose en lui rappelant son serment. Il convoque alors le consistoire, mais déclare qu'il n'écoutera personne, qu'il veut parler tout seul. Il donne de violents coups de poings dans la poitrine au cardinal Saint-Jacques qui s'était levé pour lui répondre, et répète, après cette préface, qu'il ne peut être lié ni par engagement, ni même par serment; que croire le contraire est une hérésie, et qu'il enverra à l'inquisition les opiniâtres. Il traite de bâtarde la r. Élisabeth. Il ne rêve que pouvoir temporel et spirituel, établit le premier un Index des livres prohibés, s'emporte contre la diète d'Augsbourg <qui a rendu un édit de liberté, rompt avec l'empereur, se venge sur ses neveux du mauvais succès de ses armes, et meurt en recommandant l'inquisition à ses cardinaux. Ses fureurs et ses sévérités avaient irrité le peuple romain qui, après sa mort, le décapite en effigie, traîne sa statue dans les rues, la jette dans le Tibre, et déchire les armes des Caraffa. Après lui le siège resta vacant 3 mois.

5° Paul V, Camille Borghèse, 1605-1621, violent, jaloux, emporté, déclare la guerre aux Vénitiens qui veulent empêcher la trop grande opulence du clergé et qui refusent de relâcher deux religieux saisis et emprisonnés pour crimes capitaux. Henri IV amena un accommodement 1605-1607; les Vénitiens ne cédèrent qu'après avoir vu leurs droits reconnus. Sarpi a écrit cette histoire, et Rome a payé des assassins pour se venger du stigmate de l'historien; Paul V admettait d'ailleurs la morale de Juarez qui justifie le meurtre des rois. Paul termina, sans la décider, la querelle des dominicains et des jésuites, et donna la dernière main à la bulle In Cœnâ Domini (dite Bulle de Paul V) excommuniant hussites, wicleffites, luthériens, zwingliens, calvinistes, etc., ainsi que les schis-matiques, les pirates, etc. Il se distingua par un népotisme elfréné.

Outre l'apôtre Paul, on connaît encore sous le même nom:

6° Paul, de Samosate, Syrie, unitaire du 3®« siècle; il était vers 260 év. d'Antioche, où il occupait aussi une charge de percepteur des impôts. Il fréquentait la cour de Zénobie, reine de Palmyre, auprès de laquelle il était fort en faveur. Ses ennemis lui reprochent son orgueil et des mœurs plus que légères. Il regardait Jésus comme un homme engendré du Saint-Esprit, et en qui le Logos était uni d'une manière particulière. Par des équivoques il sut échapper dans divers synodes tenus contre lui, mais à Antioche même, en 269, un évêque le força de se démasquer, et il se prononça si clairement contre la Trinité, qu'il fut excommunié et destitué. Le pape Félix et l'emp. Aurélien étaient contre lui, mais Zénobie le maintint à son poste, et c'est seulement quand elle eut été vaincue par les Romains que son successeur put entrer en fonctions. Ses sectateurs, ou samosatiens, durèrent jusqu'au 4m« siècle sous divers noms, surtout sous celui de paulianistes.

7° Paul de Thèbes, ou le saint, né d'après Jérôme dans la 1™ moitié du 3m« siècle, perdit de bonne heure ses parents, qui étaient chrétiens et dans l'aisance, et pendant la persécution de Décius, prévenu que son beau-frère voulait le trahir pour s'emparer de l'héritage, il s'enfuit dans le désert de la Thébaïde. Il y trouva une grotte, dans laquelle il vécut encore 97 ans en pcésence de Dieu et sans jamais voir personne. Seulement quelques heures avant sa mort 340, il reçut la visite de l'anachorète Antoine à qui Dieu révéla sa retraite. Des lions creusèrent sa tombe. Toute cette histoire est due vraisemblablement à l'imagination de Jérôme.

8° Paul Warnefried, surnommé aussi le Diacre, ou le Lévite, né vers 730 à Cividale, Frioul, d'une bonne famille lombarde, fut élevé à la cour de Pavie et fut chargé de diriger les études d'Adelperge, fille du roi Didier et femme du duc de Bénévent, pour laquelle il écrivit une Hist, romaine fort estimée de son temps. Il fut ensuite ordonné diacre et entra au mont Cassin. En 782 Charlemagne le fit venir comme prof, de grec et Warnefried se rendit utile non seulement dans le domaine de l'enseignement, mais encore dans la direction des affaires ecclésiastiques. Il publia entre autres 783 un Omiliarus, un recueil d'homélies choisies parmi les meilleures des différents auteurs, qui se répandit bientôt dans toute l'Église franque. Il a écrit encore d'autres ouvrages, surtout des compilations, mais faites avec un grand soin et beaucoup de goût; une Hist. des Lombards, les Chroniques du mont Cassin, une Vie de Gré-goire-le-Grand, etc. On lui attribue entre autres l'hymne qui a donné son nom aux notes musicales, et qui commence par

Ut qae&nt Iaxis resonare fibris.

9. v.Lyra, Macédonius, Paulus, Vincent, etc.

PÀULÀ lo Romaine, née vers 347, de la famille des Scipion et des Gracques. Femme de Toxotius, elle lui donna un fils, qui mourut jeune, Pauline, qui épousa Pammaque, et 4 filles, entre autres Blésille et Julie Eustochie. Devenue veuve, elle se joignit avec ses filles à la société de dames qui se groupaient à Rome autour de Jérôme. Quand il partit pour la Palestine, elle l'accompagna avec Julie et fonda près de Bethléhem un couvent d'hommes et 3 couvents de femmes dont elle surveilla elle-même les travaux, f 404. — Sa pelite-fille, fille de son fils Toxotius, et portant aussi le nom de Paula, fut élevée dans le même esprit et suivit les mêmes traditions. L'histoire de ces femmes, connue surtout par les lettres que Jérôme leur écrivait, est une riche et curieuse révélation des mœurs romaines au moment où le monde antique disparaissait peu à peu sous l'influence du christianisme.

PAULE (François de), v. François *>.

PAULI, Jean, moine franciscain, dont le vrai nom était Pfedersheimer, né vers 1455, vécut de 1506-1510 à Strasbourg où il était custode du couvent des franciscains et suivit assidûment les prédications de Geiler. En 1515 il est à Schlestadt comme lecteur, et rédige les Brœ-samlein de Geiler. En 1517 à Strasbourg il travaille à une nouvelle édition du livre de Geiler sur les Évangiles. Enfin en 1519 à Thann il achève son propre ouvrage Schimpf und Errât, qui ne paraîtra qu'en 1535, probablement après sa mort, et dont on connaît jusqu'à 55 éditions. Sous une forme bizarre, pittoresque, tantôt triviale et burlesque, tantôt sérieuse et indignée, il fait la critique des mœurs de son temps, du clergé surtout. On le compte comme un protestant avant la Réforme; mais s'il est moraliste, l'idée religieuse est peu accentuée; les grandes doctrines sont passées sous silence, et il y a presque de l'ironie dans les miracles qu'il raconte pour recommander l'eau bénite et la confession. v. Dithmar, Choix de récits, Marbourg 1856. Schiffer, Colmar 1863.

PAULICIENS. Les persécutions contre les adorateurs des images n'avaient pu réussir à déraciner ce vieil arbre. On s'était adressé à la branche, au lieu de s'en prendre au tronc et aux racines. On avait attaqué la superstition dans ses fruits, au lieu de l'attaquer dans sa source, l'aveuglement du cœur. Il y eut cependant un petit troupeau, plein de ferveur religieuse, quoique avec de graves erreurs, qui attaqua avec succès la hiérarchie grecque et laissa dans l'histoire des traces profondes. Les pauliciens étaient comme un débris transformé des anciens gnostiques et des manichéens. L'origine de leur nom est encore un problème; on croit cependant qu'il vient de leur attachement à la doctrine de l'apôtre Paul. Vers 660 parut un nommé Constantin, probablement marcionite, à Mana-nalis, près Samosate; il reçut un jour un diacre échappé à la captivité des Sarrasins, qui, en reconnaissance de son hospitalité, lui donna un N. T., ou au moins les Epltres de Paul. lise mit à étudier avidement ces écrits, qu'il ne connaissait pas, et ses idées religieuses, sans être entièrement changées, furent purifiées; sa conscience fut réveillée. Il voulut réformer l'Église selon l'esprit de saint Paul, et y travailla avec zèle pendant 27 ans. Il prit le nom de Silas, ou Sylvain; ses compagnons empruntèrent de même des noms nouveaux à l'histoire de l'apôtre et s'appelèrent Tite, Timothée, Ti-chyque. Ses adhérents se multipliant, la hiérarchie et les empereurs résolurent de les combattre. Constantin Pogonat envoya Siméon, officier grec, pour détruire la secte. Arrivé à Colonia, Siméon fit arrêter Sylvain et ses amis et prescrivit à ceux-ci de lapider leur maître s'ils voulaient avoir la vie sauve; un seul obéit, Justus, fils adoptif de Sylvain; les autres périrent. Mais Siméon avait eu avec quelques-nns d'entre eux des conversations sérieuses, qui germèrent après son retour à Constantinople, et au bout de 3 ans il quitta la cour et s'enfnit en Arménie, où il devint chef de la secte sons le nom de Tite; il mourut sur l'échafaud 690 dans une persécution de Justinien II. Vers le même temps deux frères, Paul et Jean, fils d'an manichéen, répandaient les mêmes doctrines; Paul, né 844, qui selon quelques-uns aurait donné son nom à la secte, échappa au bûcher, ainsi que ses deux fils, Gegnase et Théodore. Gegnase, mandé à Constantinople devant le patriarche, se tira d'affaire par des réponses am-bignës et f paisiblement en Arabie. Sergios, vers 777, fut un nouveau soutien de la secte. Tout jeune encore il avait reçu d'une panli-cienne une Bible, il l'étudia soigneusement, se convertit, prit le nom de Tychique, et se mit i enseigner. Il commençait par l'Évangile, et quand il avait gagné les cœurs, il passait à l'étude de la doctrine paulicienne. Il était charpentier et voyagea beaucoup en gagnant sa vie. Sa douceur était extrême, sa piété intime et profonde. « J'annonçais, dit-il, l'Évangile sur mes genoux, c'est-à-dire avec beaucoup de prières. • Il se fit de nombreux partisans par le caractère pratique de sa prédication et par la pureté de sa vie; il combattit Baanes, homme immoral qui s'était glissé parmi les paulkîen* et qui faillit les compromettre. Sergius peut être considéré comme le second fondateur de la secte. Mais ces succès même provoquèrent de nouvelles persécutions sous Léon; ils durent s'enfuir chez les Sarrasins, qui leur firent bon accueil et leur assignèrent pour demeure la petite ville d'Argaum, où Sergius f 811 (ou 835?). L'imp. Théodora, zélée iconolâtre, résolut de ne leur laisser « ni racines, ni rameaux; » elle en fit périr, dit-on, plus de cent mille; en 842 il en émigra 5000 qui, sous la conduite de Car-beas, se rendirent chez les Sarrasins, auprès de leurs frères qui s'y trouvaient déjà, et s'y bâtirent une citadelle, Tephrica, d'où ils livrèrent de nombreuses batailles aux Byzantins. Plus tard on en trouve encore des restes dans la Thrace, en Italie, et à la fin du 17™* siècle dans les vallées des Balkans. — Il n'est pas facile de dire ce qu'était la doctrine des pauliciens; elle a varié suivant les individus, les uns étant plus évangéliques que les autres. En général ils admettaient qu'Adam ayant péché contre les ordres du démiurge, cette désobéissance avait rompu les liens qui les unissaient à lui et élevé l'homme à la connaissance de sa nature supérieure et divine; c'était un pas vers le bien; le dieu mauvais, qui retenait l'homme dans le mal avait été vaincu. Le Christ venait du Dieu bon; il avait uu corps céleste, qui n'avait pu souffrir. Ils n'admettaient ni l'idée d'un Dieu juste qui punit, ni celle d'une expiation. La croix n'était pour eux qu'un gibet de malfaiteur et ils la méprisaient. Ils s'appelaient les concitoyens de Christ. Croyant au sacerdoce universel, ils rejetaient les noms de prêtres et de sacrificateurs, comme trop judaïques. Ils donnaient ii leurs chefs. Constantin, Sergius, les titres de prophètes ou d'apôtres, et à leurs autres docteurs les simples noms de bergers, de maîtres ou d'évangélistes. Sauf un très petit parti, leur morale était pure; ils voulaient délivrer de l'empire des sens le principe moral et divin qui se trouve en l'homme. Quelques-uns cependant, comme Gegnase, pensaient qu'on peut mentir à ceux du dehors, parce que les psychiques ne peuvent comprendre les pneumatiques. Ils étaient fermement attachés à la parole et rejetaient toutes les formes, même la Cène, excepté la génuflexion devant le livre de l'Évangile, v. les Pauliciens, par Alex. Lombard.

PAULIN 1° Pontius-Meropius-Anicius Pau-linus, né à Bordeaux 353, d'une famille sénatoriale; riche, condisciple de l'empereur, consul, gouverneur delà Campanie, élève et ami du poète Ausone, époux de la riche et sainte Thérésia, il pouvait aspirer à tout. Son mariage décida sa conversion, mais il ne reçut le baptême que plus tard, à son retour en France, des mains de l'év. Delphinus de Bordeaux. Ayant perdu un jeune enfant, Paulin et sa femme se jetèrent dans l'ascétisme, qui était une des formes de la dévotion à cette époque; ils vendirent leurs biens, en distribuèrent le produit aux pauvres, et décidèrent de vivre ensemble comme frère et sœur dans la retraite et la prière. Ils se rendirent en Espagne 389, où en 394 il fut consacré prêtre à Barcelone, sous la pression d'un mouvement populaire. Il se rendit de là à Rome, où le pape Siricius le reçut assez froidement, puis à Nola en Campanie, où il rendit un culte particulier et un peu superstitieux à saint Félix de Nola, un des 60 saints de ce nom, dont 3 de Nola. En 409 il fut nommé èvêque par le peuple, ce qui le fait parfois appeler Paulin de Nola. Son amitié pour Augustin et Pélage l'empêcha de se mêler à leurs controverses, f 22 juin 431. Il reste de lui un sermon, 50 lettres, et environ 30 poésies très remarquables. Pleuré de tout son diocèse, qu'il avait administré pendant 23 ans, et dont il avait été le bienfaiteur, il brilla comme poète plus que comme théologien; il poussa très loin le culte des reliques. On lui attribue, mais à tort, l'invention des cloches.

2° Paulin de Milan, diacre d'Ambroise, dont il a écrit la vie. C'est lui qui, par ses plaintes contre Célestin au conc. de Carthage, donna le signal des controverses pélagiennes.

3° P. d'Antioche qui, après la destitution d'Eustathe réclamée par les semi-ariens 330, prit la direction de l'Église restée fidèle au symbole de Nicée. Meletius, condamné précédemment comme nicéen, fut élu év. d'Antioche 361, mais P. qui se croyait des droits à ce titre protesta et fut sacré èvêque par le violent Lucifer de Cagliari. Des questions personnelles et des disputes de mots étaient à la base de ce conflit. Nicée avait défini la Trinité: une seule hypostase, trois personnes; Mélèce disait: une seule essence, trois hypostases. Ils donnaient donc au mot hypostase deux sens différents, et faute de s'entendre sur la définition, ils créaient un schisme et troublaient l'Église. Les occidentaux en intervenant, embrouillèrent encore les affaires au lieu de les simplifier. Paulin fut reconnu par Damase comme év. légitime, et Mélèce repoussé comme intrus, malgré les concessions les plus conciliantes. Paulin + 388, et fut remplacé par Evagrius. V. Mélèce 2°.

4o P. de Trêves, 349, successeur de Maxime comme év. de Trêves, fut un des représentants les plus convaincus des doctrines athanasiennes en occident. Il s'opposa à l'einp. Constance et contrecarra ses efforts en faveur du semi-aria-nisme, et fut pour cela exilé en Phrygie, où il f vers 358. L'égl. de Trêves a pieusement conservé son souvenir, et prétend même posséder son corps, qui aurait été exhumé à la fin du 4me siècle et ramené en Europe.

5° Un des compagnons du missionnaire Augustin en Angleterre. Après avoir évangélisé le Kent, il passa comme èvêque dans le Northumberland, avec Ethelburga, déjà chrétienne, et avec son mari Edwin, qui ne devait pas tarder

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à-ae convertir et qui se fit baptiser à Pâques 627, ainsi que ses 2 fils et sa nièce Hilda, dans une chapelle provisoire bâtie là où s'élève auj. la cathédrale d'York. Paulin dont les succès étaient immenses auprès des païens, reçut d'Ho-norius I** le pallium, comme archev. d'York, et f 644, év. de Rochester.

6<> P. d'Aquilée, patriarche 776, résidant au Forum Julii, grand ami d'Alcuin et employé par Charlemagne dans plusieurs circonstances difficiles. Né au Frioul, il fut quelque temps prof, de philos., et Charlemagne l'appelle magister artis grammaticœ. Il prit part aux conc. de Ratisbonne et de Francfort contre les adoptiens 792 et 794, présida plusieurs conciles provinciaux, et s'occupa avec zèle de l'évangélisation de la Carinthie, peut-être aussi des Avares, f vers 804. Ses œuvres, en partie contestées, ont été publ. par Madrisius, Venise 1737.

PAULUS, Henri-Eberhard-Gottlob, né 1 sept. 1761 à Léonberg, Wurtemberg. Son père était pasteur, mais ayant perdu sa femme il tomba dans un mysticisme visionnaire et dans des rêveries mélancoliques qui l'obligèrent de renoncer à ses fonctions, 1771. Il fit ses études à Tubingue 1779-1784, fut vicaire à Schorndorf, d'où il fut ramené malade 1787, refusa un appel à Gottingue, visita, grâce à la libéralité du baron de Palm, l'Allemagne, la Hollande, l'Angleterre et la France, et à son retour fut nommé répétiteur à Tubingue 1789, puis prof, à Iéna 1793. Il s'était déjà fait une réputation comme rationaliste, mais il l'était à sa façon. Il ne rejetait pas les miracles et ne les traitait pas de mythes, mais il y voyait des faits réels, naturels, dont il s'agissait seulement de trouver l'explication; sous ce rapport il a fait preuve d'un esprit d'invention merveilleux, et ses commentaires sont curieux à étudier à cet égard, quoique sa méthode ait sombré depuis longtemps sous le poids de ses bizarreries. C'était d'ailleurs un cœur droit et qui cherchait sincèrement la vérité, mais il avait l'esprit étroit et ne voyait qu'un côté des choses; il ne voyait en particulier dans la religion et dans le christianisme que le côté moral. Dénoncé pour sa doctrine par le consistoire d'Eisenach, il fut absous sur le préavisfa-vorable de Herder, concluant qu'il n'y avait pas lieu à suivre. C'est pendant son professorat que Fichte fut accusé d'athéisme, et Paulus ne put empêcher sa destitution. Nommé en 1803 prof, de théol. et conseiller consistorial à Wurz-bourg, il n'eut d'abord presque pour auditeurs que des étudiants catholiques, et bientôt même il leur fut interdit de suivre ses cours, ce qui le décida à quitter. Après avoir occupé divers postes, à Bamberg, Nuremberg, Anspach, il fut enfin appelé 1811 comme prof, d'exégèse et d'hist. ecclésiastique à Heidelberg, où il célébra en 1839 son jubilé professoral, prit sa retraite en 1844 et f 1851. Dans ses dernières années il était devenu un rationaliste absolu, appliquant son système à tout, philos., politique et religion, au mysticisme, au piétisme, à la hiérarchie, à l'ultramontanisme. Il prit le parti de Strauss, quoique celui-ci l'eût traité assez dédaigneusement; des catholiques allemands; de l'État contre l'archev. de Cologne; il combattit Schelling et ne voulut voir dans son système qu'une variété de mômerie mystique. Il a écrit lui-même pour sa justification une sorte d'autobiographie, où il raconte l'histoire de ses idées et de son développement. Parmi ses nombreux ouvrages il faut noter surtout son Comment, sur les synoptiques, et sa Vie de Jésus.

PAUVRES de Lyon, v. Vaudois. — Les vaudois d'Italie furent aussi par analogie, qualifiés de Poveri italici.

PAVIE, ancienne capitale de la haute Italie depuis Théodoric, fut vaincue dans les guerres des Guelfes et des Gibelins, et tomba sous la domination de Milan. Université fondée par Charlemagne et reconstituée en 1361. Célèbre par la défaite de François 1er, 1525. Il s'y est tenu 14 synodes ou conciles; le dernier 1423 fut aussi le plus important. Martin V aurait voulu qu'il fût écuménique, mais il y vint très peu d'évêques, et la peste obligea sa translation à Sienne; il fut dissous en 1424. Son programme portait, comme celui de Constance, la réforme de l'Église. La légende fait remonter l'évêché de Pavie à Cyrus, disciple de Pierre; en tout cas c'est un des plus anciens du nord de l'Italie.

PAVILLON, Nicolas, év. d'Alet, Aude, né 1597 à Paris, ami d'enfance de Vincent de Paul, prit part à ses travaux et se fit une réputation comme prédicateur. Nommé évêque par Richelieu en 1637, il n'accepta qu'aprte avoir longtemps hésité, en 1639; fonda des écoles, des séminaires et une école normale d'institutrices. Lié avec Port-Royal, il fut un des rares évêques qui refusèrent de signer les yeux fermés la condamnation des 5 prétendue* propositions de Jansénius. Dans l'affaire de h régale il prit parti pour le pape contre le roi. et s'attira la défaveur de Louis XJV, qui cependant n'osa pas le destituer, f 8 déc. 1677.

PAZMANN, Pierre, v. Hongrie.

PAYNE, Pierre, surnommé Y Anglais; disciple de Wicleff, soutint contre Pierre Waldensis une thèse sur les principales erreurs de Rome. Obligé de quitter l'Angleterre, il vint en Bohême où ses doctrines furent acceptées avec enthousiasme par Huss, Procope, Ziska, etc. fl avait apporté de magnifiques mss. ornés de garnitures d'or, qui furent brûlés. Il fut choisi comme arbitre dans plusieurs conférences et se prononça en faveur des docteurs de Prague. Au conc. de Bâle 4432 il parla contre les temporalités de l'Église, f date incertaine.

PAYS-BAS. v. Hollande.

PEARSON. John, né 28 févr. 1612, à Sno-ring, fils d'un pasteur de Norfolk, fit ses études à Eton et à Cambridge. Consacré en 1639, puis pasteur de ïhorington, il fut appelé comme chapelain par lord Goring et s'attacha à sa fortune pendant la guerre civile. Comme royaliste il perdit ses bénéfices universitaires et vécut assez longtemps dans le besoin. Le retour de la monarchie lui rendit ses avantages, et il fut successivement nommé pasteur à Londres, chapelain, prof, â Cambridge, recteur de Trinity-College, et év. de Chester. f 16 juill. 1686. Son érudition en fit pendant un temps un des théol. Jes plus considérables de l'Angleterre, mais sa réputation a baissé. Son principal ouvrage est une Exposition du Credo, 1659, cours de dogmatique développé suivant les articles du symbole, et traité d'apologétique dirigé contre les athées, les juifs et les hérétiques. Aidé de son frère et de quelques amis, il a publié aussi en 9 vol. fo un recueil colossal de matériaux exé-gétiques, sous le titre de Critici sacri, et un travail dans lequel il défend contre Daillé, et dans l'intérêt de l'épiscopat, l'authenticité des lettres d'Ignace. On a aussi de lui les Annales cyprianici. Enfin après sa mort on publia ses 24 Leçons (en latin) sur Dieu et ses attributs, dont la forme scolastique fit un moment le succès.

PÉCHÉ, nom sous lequel l'Égl. chrétienne, d'après la Bible, désigne le mal moral. Toutefois entre le l'A. et le N. T. il y a des différences notables, non pas un changement dans la notion môme du péché, mais progrès de l'une à l'autre économie, la première loi s'en tenant plutôt au fait, la seconde à l'intention, aux dispositions du cœur. Les deux alliances reconnaissent l'universalité du péché; le mal est partout, il s'hérite, et il fait retomber sur les enfants l'iniquité des pères. Mais dans l'Ancien il consiste dans tel ou tel acte déterminé; il est plutôt collectif et national qu'individuel, et il ne se rattache pas directement au péché du premier homme. Il semble même pouvoir s'expier en partie par la repentance ou par des réparations fixées par la loi. Dans le Nouveau c'est l'interruption des rapports de l'homme avec la source du bien; la rupture avec Dieu, la rébellion, la révolte, une disposition au mal; c'est un état; l'homme est né, plongé dans le mal, et le père lègue k ses enfants ce qu'il a lui-même reçu de ses aïeux, ses penchants mauvais. Les mystères abondent quand on étudie de près ce dogme qui est un fait, cette doctrine qui est un malheur, et si l'enfant déjà se pose tous les problèmes, le philosophe, pas plus que le théologien, ne peut en résoudre aucun. D'oU vient le mal? Pourquoi Dieu l'a-t-il permis? S'il l'a permis, c'est donc qu'il a sa raison d'être? Y a-t-il un esprit, une incarnation du mal? Si l'homme, par sa nature même, est décidément et irrévocablement pécheur, est-il juste de faire peser sur lui la responsabilité d'un fait dont il est la victime et non l'auteur? Dans quelle mesure le péché d'Adam peut-il être attribué à toute sa race? Dans quelle mesure l'homme peut-il réagir par ses propres efforts contre ses mauvais instincts? N'y a-t-il aucune vertu vraie, aucun noble caractère en dehors du christianisme ?

Toutes ces questions, et d'autres encore, se posent à l'occasion du péché. Cette doctrine, on peut le dire, est le point central de la dogmatique. On peut ajouter que c'est autour d'elle que gravite l'histoire ecclésiastique tout entière, à partir des luttes augustiniennes et pélagien-nes, et si la théologie d'Augustin a touj. eu pour elle les textes bibliques dans leur navrante grandeur, la conscience humaine n'a cessé de protester au nom même du Dieu d'amour contre les conséquences exagérées qu'en tire une logique impitoyable. La formule a beau nous dire que nous sommes les esclaves du péché, nous revendiquons les droits et la responsabilité de notre liberté. D'autre part nous avons beau nous sentir libres, nous n'en répétons pas moins avec l'apôtre: Misérable que je suis ! je fais le mal que je ne voudrais pas, et je ne fais pas le bien que je voudrais. Cette mystérieuse antinomie n'est pas un embarras pour le christianisme seulement; elle existe pour tous ceux qui réfléchissent, et pour tous elle est insoluble. Le christianisme a même l'avantage sur tous les autres systèmes, de rendre la difficulté moins grande en ce sens qu'il met en relief la liberté du pécheur et qu'il fait appel à sa conscience. L'homme n'acceptera jamais la doctrine matérialiste qui fait de lui une machine.

Les mots de péché originel impliquent la transmission delà transgression d'Adam, et par conséquent de sa condamnation et de sa mort, à toute sa postérité. Nous étions tous en Adam, et Adam était nous tous, non seulement notre premier père, mais notre totalité; il était nous-mêmes, et comme il a péché nous avons pèche en lui. C'est la doctrine du conc. de Trente, et les Réformateurs l'ont accentuée davantage encore, mais l'ont rectifiée en quelque manière, ou l'ont complétée en relevant le fait de la justification individuelle par la foi.

L'Église cathol., pour adoucir ce qu'il y a d'énorme dans sa conception du péché et de son châtiment, distingue le péché mortel qui, sur un point important, transgresse volontairement un commandement connu, et mérite l'enfer; et le péché véniel (pardonnable), qui affaiblit la vie spirituelle, mais sans faire perdre la grâce sanctifiante; il peut s'expier par des actes de contrition et le reste s'achève dans le purgatoire. Cette distinction est naturelle, et chacun fera une distinction entre un crime et une simple faute, entre un péché commis par méchanceté et un acte de négligence ou de vivacité; entre celui qui aura connu la volonté du maître et celui qui l'aura ignorée. Mais si naturelle qu'elle soit, elle a son côté artificiel, sans même parler des abus auxquels elle a donné lieu. Le salaire du péché (quel qu'il soit), c'est la mort; et: Le sang de Christ purifie de tout péché (aussi quel qu'il soit) Rom. 6, 23. 1 Jean 1,7.

Quant au péché irrémissible, il résulte des lextes mêmes dans lesquels il en est parlé, Matth. 12, 31. 1 Jean 5, 16. cf. Hébr. 6, 4-6. 10, 26. qu'il consiste dans la résistance opiniâtre, avouée, volontaire aux appels de Dieu et dans l'impénitence finale que ni la grandeur de Dieu, ni l'amour du Fils, ni les lumières du Saint-Esprit n'ont pu vaincre et toucher.

PECTORAL, la croix d'or que portent sur la poitrine les archevêques, les évêques et les abbés mitrés. Ils laissent alors pendre l'étoffe des deux côtés au lieu do la croiser.

PÉDAGOGIQUE, étude des principes qui doivent présider à l'éducation; le mot vient du •rrec et signifie Conduite, ou direction de l'enfant. Cette science confine d'une part à la philosophie, de l'autre à la religion par sa morale; elle est à la fois psychologique et théologique; lorsqu'un de ces éléments vient à manquer, elle reste incomplète. L'éducation n'est pas seulement la communication de certaines connaissances, elle doit être aussi le développement de toutes les facultés; elle doit former la volonté et donner à la vie une impulsion. Chez les peuples sans culture il n'est question ni d'instruction ni d'éducation; l'enfant apprendra seulement à se procurer la nourriture et à se défendre. A mesure que le niveau intellectuel s'élève, le cercle de l'éducation s'étend, mais dans le sens et dans l'esprit du peuple; on dressera l'enfant chinois à respecter son père et les autorités. Aux Indes le régime des castes et la prépondérance des brahmines donnera à l'éducation un caractère plus religieux et poussera à l'étude des dieux, des légendes et des fables. Dans l'ancienne Perse ou l'État était tout, la jeunesse devait être élevée pour son service; on était prêtre ou soldat; la Cyropédie renferme à cet égard des traits intéressants. Il en était à peu près de même en Égypte, mais avec une prédominance de l'élément sacerdotal; quant au peuple, le père devait apprendre son métier à son fils et en faire un habile ouvrier; la pensée de la vie et du jugement à venir déteignait en sérieux sur l'ensemble de l'éducation. Le centre de toute vie nationale, politique et religieuse chez les Hébreux, c'était la loi, et de bonne heure les parents « instruisaient le jeune enfant > dans la connaissance de l'histoire et des traditions de leurs pères. L'individu n'étant considéré que comme un membre du corps social chez les Doriens, il était élevé pour l'État; la gymnastique et la musique furent d'abord les deux principales branches de l'enseignement; la lecture et l'écriture ne vinrent que plus tard, et les femmes y participèrent comme les hommes. Les tribus ioniennes au contraire donnèrent un grand développement aux études littéraires. artistiques et philosophiques; les parents devaient y pourvoir; ils avaient souvent pour cela des esclaves des deux sexes, pédagogue*, chargés d'instruire leurs enfants: il y avait eu outre des écoles publiques et des gymnases ou l'on enseignait tout, même l'escrime et le métier des armes. A Rome, sous l'influence des Grecs, mais surtout sous celle des Étrusques et desSa-bins, l'on se préoccupa moins de former de* soldats ou des savants, que d elever des citoyens; il y eut de nombreuses écoles élémentaires, pois des écoles supérieures pour les études libérales, à l'instar de celles d'Alexandrie, et enfin de véritables facultés pour la médecine, le droit, U rhétorique, etc. Quand le christianisme parât, il imprima naturellement à l'éducation une direction nouvelle; si les anciens s'étaient préoccupés de faire des élèves, des savants, des soldats, des sujets, des citoyens, il s'occupa, loi. de faire des hommes, de développer l'homme dans tous les éléments de sa nature, aussi bien dans sa conscience et dans ses aspirations que dans son intelligence, mais ce n'est que peu a peu que l'Église comprit sa tâche et la grandeur de sa mission. Elle eut longtemps d'autres sou* cis; elle eut d'abord à combattre pour son existence; elle eut à se défendre contre les perseca tions et contre les calomnies; elle eut ensuite à fixer ses dogmes et sa discipline, et quand après trois siècles elle eut acquis le droit de vivre, elle se trouva tellement mêlée avec le monde que sa vigueur première en était paralysée. U puissance d'initiative lui manquait à plusieurs égards, et si elle s'occupa de fonder des écoles, elle imita plus qu elle ne créa; elle continua les anciennes routines en se bornant à les approprier à la nouvelle religion; le catéchuménat et le sacerdoce étaient d'ailleurs son objectif immédiat, si ce n'est même l'unique. L'invasion des barbares fut un temps d'arrêt. Le triomphe da mahométisme en fut un autre, mais du moins les Arabes et les Maures cultivèrent les arts, les lettres et les sciences; ils eurent de brillantes écoles, qui empêchèrent l'esprit humain de s'endormir, en même temps que Charleraagne, condé par Alcuin, présidait à une sorte de renaissance à la fin du 8m® siècle. Cordoue et Séville d'un côté, York de l'autre, puis Pavie, Fulda, étaient des foyers lumineux, dont chacun avait son éclat particulier. Mais il n'était aucunement question d'un enseignement populaire, et si les couvents et le clergé continuèrent pendant des siècles d'avoir leurs écoles, elles restèrent circonscrites et restreintes, soit quant au choix et à la vocation des élèves, soit quant à la nature des objets d'étude, s'écartant peu des traditions de Raban Maur. Les Frères de la vie commune, en Hollande, furent des premiers à abandonner les voies de la scolastique et à inaugurer l'étude plus libre des auteurs anciens, mais en s'en tenant surtout à la Bible, aux pères et aux écrivains mystiques du moyen âge. On peut dire qu'ils préludèrent au réveil de l'humanisme, et quand parurent Érasme et Reuchlin, la terre était préparée pour les recevoir. Mais ce n'était encore qu'un réveil universitaire, pour les grandes villes et pour les hautes classes de la société. Il appartenait à la Réforme, et à Luther en particulier, de demander que les écoles pour le peuple prissent rang comme une institution de l'État, et c'est à partir aussi de ce moment que la pédagogie fut fondée comme une science distincte. Sous l'impulsion d'une honorable rivalité, les divers peuples et les diverses églises, les philosophes, les théologiens, les littérateurs, les éducateurs étudient it l'envi les nombreuses méthodes qui surgissent, et cherchent à répandre l'instruction dans la mesure qui leur paraît le plus convenable à leurs besoins et à leur tempérament. Plus de 400 ouvrages ont paru dès lors sur l'éducation, depuis l'époque d'Érasme (Mathurin Cordier, Montaigne) jusqu'à nos jours. Port-Hoyal, Rollin, l'abbé de Saint-Pierre, Rousseau, sont des dates, et dans notre siècle seul les noms dePestalozzi, Fellenberg, Zeller, Naville, le père Girard, M®« Guizot, Mme Necker de Saussure, le baron de Guimps, Dupanloup, représentent à bien des égards des travaux de valeur et des progrès considérables, v. Burnier, Hist. litt. de l'éducation morale et religieuse, 1864. Pendant longtemps le clergé avait accaparé l'enseignement; par une brusque réaction, et à la suite d'abus constatés, l'esprit du siècle tend à le lui enlever sans réserve; une espèce de fièvre s'est produite au sujet de l'instruction laïque, gratuite et obligatoire: on reconnaîtra bientôt qu'on est allé trop loin, et que l'éducation sans religion n#est pas une éducation.

PEINTURE. On connaissait de nom les grands peintres de l'antiquité classique, mais vu la fragilité des matières sur lesquelles ils travaillaient, leurs chefs-d'œuvre avaient disparu avec le temps, et l'on ne savait de Zeuxis et d'Apelles que ce que la légende en avait conservé. Les Noces d'Aldobrandini étaient peut-être tout ce qui restait de plus ancien, quand les fouilles d'Herculanum et surtout de Pompéi vinrent mettre au jour des fresques d'une admirable beauté et justifier les données de la tradition. Mais tout cet art était au service de la mythologie, et l'on comprend que par une liaison d'idées, exagérée mais naturelle, les premiers chrétiens se soient méfiés d'un art qui dans leur esprit s'associait à tous les souvenirs du paganisme. Ils avaient en outre, pour se tenir sur la réserve, la lettre du second commandement qui semble interdire la peinture aussi bien que la sculpture. Cependant peu à peu quelques timides essais se produisirent, et ce fut d'abord chez les morts, sur les tombeaux, dans les catacombes, avec cette excuse atténuante qu'il ne s'agissait pas d'images, de portraits, def représentations proprement dites, mais uniquement de symboles. Le Christ y apparaissait sous la forme d'un poisson (v. Catacombes), ou d'un berger: l'Église, sous celle de l'arche, ou d'une femme en prière; les vertus chrétiennes, l'espérance, sous celle d'une colombe, du phénix, etc. Déjà vers la fin du siècle on va plus loin; on représente des actes religieux, le baptême, la cène, et l'on se hasarde dans la voie qui bientôt séparera complètement l'art chrétien de l'art païen; on aura la peinture religieuse, où l'A. T. jouera le rôle principal, Daniel dans la fosse aux lions, etc. Puis l'art bysantin; la mosaïque, dont le plus splendide spécimen est à Saint-Marc de Venise, reléguera la peinture au second plan; elle ne servira plus que pour des enjolivures de missels, ornements de mss., vitraux de cathédrales. L'architecture est grave, grandiose, sombre; la peinture se met à l'unisson et les églises n'ont que des tableaux d* marbre; c'est raide, froid, cadavérique, mais cela produit un effet saisissant, de loin. Quand enfin la forme ogivale remplace le plein cintre, quand l'architecture se transforme, à son tour la peinture essaie de réagir et de secouer son linceul de pierres. Une ère nouvelle commence avec Cimabue, élève des Grecs et maître de Giotto; il peint des anges en marge de ses fresques à Florence, mais il ne s'aventure pas encore à faire des sainte Vierge. C'est Giotto le premier qui franchira ce pas, à Padoue, Assise et Florence: son école est vivante et dramatique, ainsi que la manière de Fra An-gelico de Fiesola; ils travaillent pour l'Église, et leur peinture suit une voie parallèle à celle de l'architecture. Mais avec leurs successeurs la peinture s'affranchit et il y a divorce; chacun suivra ses destinées. La renaissance a ouvert trop d'horizons nouveaux pour que les peintres s'astreignent à rester les serviteurs ou les associés de la théologie; l'idéalisme, avec toutes les lumières et les ombres de la réalité, sera leur maître et leur guide. Léonard de Vinci, Raphaël, Michel-Ange surtout, ne connaissent, même pour les églises et les couvents, d'autre règle que leur génie, et s'ils traitent encore les sujets religieux, c'est à leur manière et sans craindre de faire des emprunts à l'antiquité païenne. Sarto, le Gorrège, l'école vénitienne marchent à leur suite et leur font honneur. L'école hollandaise est un peu moins brillante, mais également grande et naturelle; elle a pour chefs les frères van Eyck et Hemmelink de Bruges; ils travaillent pour les églises et trouvent leurs sujets dans la Bible ou dans l'histoire de leurs saints. Au 17m« siècle Rubens reprend les couleurs chaudes de l'Italie pour continuer l'œuvre de ses devanciers, tandis que Rembrandt reproduit consciencieusement les sombres couleurs dû ciel de son pays. Mais les uns et les autres, comme ils se sentent libres dans leur domaine ! Et comme ils sont affranchis de l'Église ! Il suffit de citer le Jugement dernier de Michel-Ange, la Cène de Léonard de Vinci, les Noces de Cana de Véronèse; même la Transfiguration de Raphaël, où il y a deux tableaux en un. L'idée de la couleur locale ne les aborde même pas, et ils transportent les scènes de l'orient en occident, comme les mœurs et les costumes du 1er siècle au dix-septième. En Allemagne Albert Durer avec l'histoire de la Passion, Holbein avec sa Danse des morts et sa Famille en prière devant la madone, ont fait époque au 16®e siècle, comme au 17roc en Espagne Murillo avec sa Conception. Après ces gigantesques représentants de la peinture, l'art ne pouvait plus que décliner; surtout il ne pouvait plus être question de ressusciter une peinture ecclésiastique; de part et d'autre on ne s'entendait plus, et si de nos jours on voit apparaître encore de grands artistes et de grands tableaux représentant des sujets religieux, ils ont un caractère individuel et ne font plus école.

PÉLAGE io Le Saint, év. de Laodicée, sa ville natale; quoique marié il vécut avec sa femme comme si elle était sa sœur. Un des chefs du parti orthodoxe contre les ariens, il assista aux conc. d'Antioche, 363 et de Tyana 367. Banni en Arabie par Valens 370, il revint plus tard et assista 381 au conc. de Constantinople, il jouit d'une grande considération.

2° Pape 555-559, Romain de naissance, fils d'un fonctionnaire impérial, accompagna le pape Vigile a Constantinople, et se montra, comme lui, hésitant sur la question des Trois-Chapitres. Devenu pape à son tour, il fit commencer à Rome régi, des Saint-Philippe et Saint-Jacques. 11 eut à se défendre d'une accusation de simonie.

3o Pélage II, pape 578-90, eut à combattre en Italie le schisme dit des Trois-Chapitres, et n'y réussit qu'imparfaitement. Il mourut d'une épidémie causée parles débordements du Tibre.

4<> Moine breton, père du pélagianisme; v. l'art, suivant.

5° Pélage 1er, roi des Asturies, chef des Goths chrétiens, vainquit les Arabes à Caradonga 718, et remporta dès lors d'autres avantages, f 737.

6° Alvarus, franciscain espagnol, grand péni-tentier de Jean XXII, év. de Silves en Algarve, un des plus fougueux défenseurs du pouvoir absolu des papes, auteur d'un livre De planct* ecclesiœ, écrit pendant le schisme d'Avignon, dans lequel il met le pape au-dessus de tousle> pouvoirs humains, même des conciles, identifiant son autorité avec celle de Jésus-Christ; impr. à Ulm 1474. Il vivait vers 1320.

PÉLAGE, moine breton, nommé d'abord Morgan, qui signifie en celte maritime, a donné son nom à une doctrine qui était l'exagération de ses principes et qui a été condamnée comme une hérésie, le Pélagianisme. C'était un homme moral, tranquille et religieux, d'une grande austérité de vie, et non moins distingué par ses talents que par son éloquence. Il vint à Rome où il se lia avec Augustin et d'autres illustres personnages. Il avait beaucoup étudié Origène et les philos, païens. Ses études, quelques circonstances particulières, et sans doute aussi la tendance de son esprit, le portèrent à donner aux œuvres une importance qui lui lit sacrifier ou diminuer la doctrine de la grâce. Il crut que l'homme, par un développement successif des germes de bien qui sont dans sa nature, et par la force de sa volonté, pouvait atteindre l'idéal de la sainteté. Il était péniblement frappé de voir partout cette foi morte dont parle Jacques, et voulant réveiller les chrétiens de leur torpeur religieuse, il crut devoir leur montrer combien il y a en l'homme de forces pour faire le bien; seulement, au lieu de leur montrer cette force en Dieu, il la chercha en l'homme. L'homme peut tout, disait-il, il aurait dû ajouter: en Christ qui le fortifie. Cette lacune de sa foi est particulièrement sensible dans la lettre qu'il écrivit à la jeune Démétriade, pour la féliciter de ce qu'elle avait fait vœu de virginité: il lui cite l'exemple d'Abel, d'Enoch, de Jacob et d'autres, comme preuve de ce que l'homme peut par ses seules forces, tandis que la Bible nous montre dans ces mêmes exemples l'action de la puissance de Dieu. Dans une autre lettre, à une veuve chrétienne, il lui enseigne presque la prière du pharisien. « Tu sais, ô Dieu, combien sont saintes et innocentes les mains que j'élève vers toi. » Augustin fut son principal adversaire. Pélage publia des commentaires qui firent peu de sensation. L'avocat Célestius, cependant, gagné par le rèle de Pé-lage, se fit moine. Ce fut lui qui engagea la lutte. Augustin l'appelle apertior, par opposition à Pélage qu'il appelle opertior. En 411 ils vinrent à Carthage, où Célestius se présenta pour une place d'ancien. Mais en 412 le diacre Paulin l'accusa publiquement, devant un concile tenu à Carthage, d'avoir soutenu lo que la chute d'Adam n'avait eu de suites que pour lui-même; 2° que les enfants naissaient dans le même état qu'Adam avant la chute. On lui reprochait encore 3° d'avoir nié la condamnation des enfants morts sans baptême. Il fut excommunié. Pélage se rendit de là à Bethléhem, mais il fut mal reçu par Jérôme qui crut voir en lui un origéniste. Cependant quelques évêques orientaux lui firent bon accueil. Il dut paraître en 415 devant un concile présidé par Jean de Jérusalem. Orosius et d'autres lui citèrent saint Augustin: Que m'importe Augustin? répondit-il. Là-dessus grand émoi. Il s'explique, il présente sa doctrine par ses côtés les moins agressifs, et il est reconnu sain dans la doctrine. Accusé devant un nouveau concile, à Dioscoris, Syrie, par Héros et Lazare, il est de nouveau absous, mais il dut condamner formellement ceux qui enseignaient autrement qu'il ne venait de dire; il le fit en ces mots: Je les anathématise comme fous, non comme hérétiques. Là-dessus cinq évêques, partisans d'Augustin, et deux conciles africains (Carthage et Milève) écrivirent à Innocent qui condamna Pélage. Celui-ci répondit par une confession de foi pour se disculper 416, mais elle arriva trop lard à Rome; Innocent venait de mourir. Célestius ne perdit cependant pas courage; il se présenta devant le successeur d'Innocent, le pape Sozime, et avec l'aide de quelques amis il obtint de ce superficiel personnage la déclaration que Pélage était sain dans la foi. Sur le refus des africains de se soumettre à cette décision, Sozime fut ébranlé et annonça qu'il suspendait son jugement jusqu'à plus ample informé. L'emp. Honorius ayant rendu un édit contre le pélagianisme, le faible Sozime cita de nouveau Célestius à comparaître et sur son refus, confirma l'édit de l'empereur et publia une circulaire qui dut être signée par tous les év. d'Afrique et d'Italie. Plusieurs refusèrent, entre autres Julien, qui devint le champion déclaré du pélagianisme. Il appela la science et la raison à l'aide dans une recherche que l'expérience, l'Écriture et le sentiment peuvent seuls éclairer. Pélage revint à la charge auprès de Sozime par un exposé spécieux de sa doctrine et le pape, peu habile à distinguer le vrai du faux, s'y laissa prendre et adressa aux évêques de l'Afrique une seconde lettre pleine de reproches; mais ils lui firent sentir sa méprise et Pélage, définitivement condamné par divers conciles, Carthage 417, Antioche 424, et Éphèse 431, dut se retirer de la théologie militante. On croit qu'il mourut en Palestine vers 432, mais sa doctrine lui a survécu, en s'accentuant davantage dans le sens du mérite des œuvres pour sauver.— Hist. par Voss, Noris, Patouil-let, etc.

Une doctrine moyenne ne tarda cependant pas à s'élever, qui reçut le nom de Senti-Pélagianisme. C'est dans le sud de la France, dans la Provence en particulier qu'elle apparut, comme une sorte de conciliation entre la doctrine de Pélage et celle d'Augustin sur la grâce. Le moine Jean Cassien en fut le principal représentant. Il reconnaît bien la corruption humaine comme suite de la chute d'Adam; il y a lutte de la chair contre l'esprit, la lutte est en la puissance de l'homme, mais eHe est dirigée de Dieu de manière à concourir au développement moral de l'homme. Le libre arbitre, est insuffisant pour le bien sans la grâce intérieure, voilà ce qu'il soutient contre Pélage; mais il ajoute, contre Augustin, que l'influence de la grâce est déterminée par le libre assentiment de la volonté humaine. C'est extrêmement subtil. Il oppose aux pélagiens l'exemple de Mathieu, de Paul, et aux autres celui de Zachée et du bon larron. Il eut de nombreux partisans. Prosper d'Aquitaine et Hilaire écrivirent à Augustin pour l'informer de ce qui se passait dans les Gaules; il y répondit par son De prœdestin. sanctorum9 et son De dono perseverantiœ. Il reconnaît que Cassien diffère essentiellement du pélagianisme, mais il s'étonne qu'il ne sente pas que c'est nier la grâce de Dieu, que la rendre dépendante du mérite humain. Les semi-pélagiens n'ayant pas cédé à l'appel d'Augustin, Prosper écrivit à son tour son Carmen ingrati9 poème plein de chaleur et qui mérite d'être connu, mais où il a le tort de faire de Cassien un pélagien.

PELET DE LA LOZÈRE (comte), né 12 juill. 1785 à Saint-Jean du Gard, f 6 févr. 1871 à Villers-Cotterets, étudia à Paris, Lyon et Genève; auditeur au Conseil d'État, administrateur des forêts de la couronne, préfet de Loir-et-Cher sous la Restauration, 4 fois député de Blois; pair de France, ministre de l'Instruction publique, et ministre des finances sous Louis-Philippe, il se retira des affaires après la révolution de 1848. On lui doit la nomination d'Ad. Monod comme prof, à Montauban. Il s'intéressa touj. au mouvement religieux, présida plus d'une fois la Soc. biblique, et fit partie du consistoire de Paris de 1815 à 1868. Auteur d'un Précis de l'Hist. des États-Unis, et de Pensées morales et politiques.

PELLICAN, v. Kurschner.

PELLICIA, Alexis-Aurèle, né à Naples 1744, f 1823, prof, de morale dans cette ville, auteur de plusieurs ouvrages d'archéologie ecclésiastique.

PELLISSON - FONT ANIER, Paul, né 1626 à Béziers d'une famille protestante, fut avocat à Castres, devint membre de l'acad. des sciences, acheta le titre de secrétaire royal, fut nommé conseiller d'État par Fouquet, partagea la disgrâce de celui-ci, le défendit dans 3 mémoires et passa 5 ans à la Bastille. Libéré en 1670 il se fit catholique, fut ordonné sous-diacre, et obtint de nombreuses pensions et places lucratives, entre autres l'administration des abbayes de Saint-Germain des Prés et de Saint-Denis. Il fonda une caisse pour la conversion des huguenots. Tombé en disgrâce auprès de Mad. de Montespan, il continua de jouir de la faveur de Louis XIV. Il correspondit avec Leibnitz et publia sur la tolérance An mémoire, assez pauvre, intitulé Réflexions sur les différends en matière de religion. Sa tolérance n'était au fond que de l'indifférence. D avait aussi commencé un travail sur l'eucharistie, f 1693 subitement.

PÉNISCOLÀ, petite ville et château-fort du diocèse de Valence, Espagne; c'est là que se réfugia Benoit XIII, le dernier pape du schisme d'Avignon, après que le conc. de Constance l'eut déclaré déchu. C'est de là qu'il excommunia le monde entier; puis il f 1424.

PÉNITENCE, mot non biblique par lequel la théol. catholique a remplacé le mot biblique de repentance. On peut dire que c'est, non le mot, mais la chose même représentée par ce mot, qui a provoqué la grande crise du 16®« siècle. Sans nier l'importance de la transformation intérieure, la doctrine cathol. la relègue tropàl'ar-rière-pian et la remplace par des actes matériels imposés par l'Égl. et subis par le pénitent. L'expression même: faire pénitence, implique l'idée d'un châtiment plutôt que celle d'un regret d'avoir mal agi. L'Égl. catholique distingue, dans la pénitence dont elle a fait un sacrement: l'attrition, c.-à-d. le regret par peur du châtiment; la contrition, c.-à-d. le regret par amour pour Dieu; la confession, qui aboutit 4 l'absolution, et la pénitence proprement dite, qui consiste en certains actes de piété, de sacrifices ou de réparation, déterminés par le prêtre. D'après l'Évangile la repentance consiste dans le regret humiliant d'avoir contrevenu à la loi divine, et dans la foi au sang de Christ qui lave de tout péché et qui renferme le principe d'une vie nouvelle. — On désigne sous le nom de Psaumes pénitentiaux les sept Ps. 6,32, 38, 51, 102, 130 et 143.

PENN, William (Guillaume), né à Londres 14 oct. 1644, était fils de l'amiral anglais sir W. Penn, qui avait fait la conquête de la Jamaïque. Étant au collège de Christ-Church, à Oxford, à l'âge de 15 ou 16 ans, il fut frappe d'une prédication du quaker Thomas Loe et s'attacha dès lors à la secte. Son père en fut affligé; il fit son possible pour s'opposer à cette direction des sentiments religieux de son fils et finit par l'envoyer à Paris, ville de dissipation. La mesure réussit en partie et le jeune homme revint de Paris moins sérieux et plus léger. Toutefois la semence étouffée repoussa. Il regretta ses erreurs et eut un combat spirituel pénible. Dans un voyage en Irlande il entendit de nouveau ce même prédicateur à Cork, prêchant sur la différence entre la foi qui surmonte le monde et celle que le monde surmonte* Il n'hésita plus; il se joignit publiquement aux quakers, 1768, et ne se laissa ébranler ni par la la colère de son père qui le bannit de la maison, ni par un double emprisonnement à la Tour de Londres, pendant lequel il composa son plus fameux ouvrage: No cross, no crown (pas de croix, pas de couronne). Sou père cependant se réconcilia avec lui et f 1670. Penn, dès lor> libre et indépendant, déploya une plus grande activité. U fit plusieurs tournées missionnaires en Allemagne et en Hollande, notamment eu 1677, où il se mit en relation avec la princesse Élisabeth, abbesse de Herford, et avec différent* centres mystiques et séparatistes, les labadistes, etc. Les persécutions continuant contre ses coreligionnaires, il conçut la pensée de leur offrir un asile en Amérique et d'y fonder un État sur le double principe de la foi chrétienne et de la liberté de conscience. Il avait hérité de son père, outre 40,000 fr. de rente, une créance considérable sur la couronne; Chartes II la lui remboursa en 1681 sous la forme d'un grand lot de terre en Amérique, et en 1687 Penn y installait ses amis et fondait la colonie qui a gardé son nom, la Pensylvanie. Il fit avec les sauvages des environs des traités qu'il exécuta scrupuleusement; il supprima l'esclavage, bâtit Philadelphie, ouvrit le pays aux réfugiés pour cause de religion, et donna à la colonie une Constitution en 24 articles, qui fut la base de celle des États-Unis. Il revint en Europe lorsque Jacques II eut mis fin au régime des persécutions et il s'attacha par reconnaissance à ce souverain, ce qui lui valut des tracasseries de divers genres à la suite de la révolution qui mit Charles II sur le trône; il fut plusieurs fois arrêté comme conspirateur, mais acquitté chaque fois. En 1699 il retourna visiter sa colonie et revint en Europe au bout de 2 ans, 1701. En 1712 il fut obligé, par l'état de ses affaires, de remettre à la couronne sa colonie, pour laquelle il avait obtenu déjà des avantages commerciaux, et il f 1718 dans le Berkshire» après quelque» années de maladie. Montesquieu l'appelle le Ly-curgue moderne; en tout cas Penn fut un homa* aussi remarquable par ses talents d'administrateur que par ses vertus chrétiennes et sa philanthropie. — Vies, par Marsillac 1791, et Clarkson 1813.

PENNÀFORTE, Raymond (de), né à Barcelone vers la fin du 12^6 siècle, fit ses études et professa à Bologne 1204-1219. Peu après son retour dans sa ville natale, où il remplissait la charge de vicaire, il entra dans Tordre des dominicains 1222, dont il devint général en 1238, après avoir été dans l'intervalle archev. de Tar-ragone. Par ordre de ses supérieurs il avait écrit d'abord une Somme des cas de pénitence. En 1230 chapelain et confesseur de Grégoire IX, il compléta pour lui la collection dite Décret de Gratien, en y ajoutant les décisions papales qui ne s'y trouvaient pas encore. Ce travail fut transmis à l'univ. de Bologne comme faisant seul autorité. Il renonça bientôt à son généralat et consacra le reste de ses jours à la mission parmi les maures et les juifs, f 6 janv. 1275; canonisé 1601 par Clément VIII.

PEPIN-te-Bre/', premier roi desCarlovingiens, fils de Charles Martel et père de Charlemagne, obtint l'abdication de son fr. Carloman, mit ses neveux au couvent, détrôna Childéric III, et se fit couronner à Soissons roi des Francs par Bo-niface. Sacré de nouveau par Étienne II (111), il reconnut les bienfaits de l'Église en lui faisant donation de la Campagne de Rome et des provinces avoisinantes, qu'il avait prises à As-tolf, roi des Lombards. Il favorisa l'Église sous sa forme romaine et hiérarchique, la jugeant avantageuse pour la solidité de son trône, et il la traita comme une des branches de son gouvernement. f 24 sept. 768. Les écrivains ecclésiastiques de son temps lui donnèrent le surnom de pieux; mais plus tard on se rappela qu'il avait sécularisé et confisqué des biens appartenant à l'Église, et la tradition l'envoya en enfer. En mourant il partagea ses États entre ses fils Carloman et Charlemagne.

PÉRATES, secte gnostique de la famille des Ophites q. v. Elle nous est connue surtout par Hippolyte. Son nom est évidemment symbolique et signifie que ses sectateurs estimaient que seuls ils pouvaient passer à travers la corruption de la mort, comme les Hébreux avaient passé à travers la mer Rouge. Ses chefs sont désignés sous les noms de Euphrate-le-Pérati-que, et Ademes-le-Karystiens, deux noms probablement allégoriques, et deux surnoms grecs qui font penser que la secte était en effet une branche grecque du gnosticisme oriental; les allusions de leurs livres à la mythologie justifient cette supposition. A côté de beaucoup de rêveries astrologiques sur les planètes, ils estiment que le but de l'homme doit être de sortir de l'Égypte de la vie terrestre en passant par la mer Rouge de la mort, et d'entrer dans te désert oti il n'y aura plus de dieux terrestres; ils y trouveront sans doute encore des faux dieux comme les serpents brûlants, mais ils en seront délivrés en regardant au vrai serpent libérateur, le même qui déjà dans le paradis avait appris à Éve à s'affranchir des lois de démiurge. Alors seulement l'homme pourra entrer en Canaan.

PÈRES lo de l'Église, v. Patristique. 2° de la mort, v. Frères IO®.

PÉRICOPES. fragments, coupures; c'est la division du texte sacré. Ce nom avait été employé d'abord pour les parash et les haphtar de l'A. T.; bientôt il fut transporté au Nouveau. Mais la division n'était pas touj. logique, pas plus que celle de nos chapitres, et elle fut plusieurs fois changée, n'ayant aucun caractère officiel. Les plus connues sont celle d'Ammonius d'Alexandrie, et celle d'Eusèbe de Césarée. D'après Suidas et Épiphane il y aurait eu dans Matthieu 355 péricopes ou chapitres; dans Marc 234, dans Luc 342, dans Jean 231; ce seraient presque nos versets.

PERPETUA, martyre chrétienne, peut-être montaniste, de la famille noble des Viviens. Mise en prison à Carthage avec l'esclave Félicité, Revocatus, fr. de celle-ci, et deux autres jeunes gens, Satyrus et Saturninus son frère, elle refusa solennellement au proconsul de sacrifier aux idoles, et fut condamnée ainsi que ses 4 compagnons, 202 ou 203, le jour de l'anniversaire de César Géta. L'Église en fait une vierge; d'après un mss. récemment découvert par M. Aubé, elle aurait eu un mari et un petit enfant, qui cherchèrent, ainsi que toute sa famille, à intervenir dans son procès et à la porter à abjurer. Sa mère était chrétienne, son père païen; elle-même ne fut baptisée que dans la prison et fut consolée et soutenue par des visions.

PERPIGNAN, ville des Pyrénées orientales, ancienne Navarre, où s'ouvrit le 1** nov. 1408 une espèce de concile officieux, qui avait été convoqué par Benoît Xffl. Désireux d'en finir avec le schisme d'Avignon et lassés des intrigues, de l'ambition et de la mauvaise foi des deux papes Grégoire et Benoît, plusieurs cardinaux s'étaient réunis à Livourne pour demander la convocation d'un concile (celui qui eut lieu en effet à Pise 1409). Ce fut pour prévenir cette convocation que le pape français, Benoît, se hâta de convoquer, sur terre neutre, le conc. de Perpignan; mais il n'y vint que peu d'évê-ques, en majorité espagnols ou français, et le pape ayant refusé de se rendre aux instantes sollicitations de ses partisans qui lui conseil -laient de donner sa démission, les prélats se retirèrent et le concile n'eut pas lieu.

PERSE. Cette contrée, dont les limites générales sont le golfe Persique, la Médie, la Car-manie et la Snsiane, et dont la population appartient à la famille iranienne et aux nations indo-germaniques, était déjà célèbre par son courage et sa cavalerie dans les temps les plus anciens. Ezéch. 27, 10. 38, 5. Elle entre dans l'histoire biblique par Cyrus 536 av. C.. et plusieurs de ses rois sont mentionnés: Darius Hystaspe Esd. 5, 15., Xerxès dans Ester, Ar-taxerce 1er >êh. 2,1. Il paraît qu'elle fut évan-gélisée dès les premiers temps du christianisme, quoiqu'il ne faille pas ajouter une foi absolue à la tradition qui nomme Simon et Jude, et Marès, un des 70 disciples, parmi les missionnaires des commencements. Pour avoir des renseignements précis, il faut descendre jusqu'au 4™* siècle. Au concile de Nicée 325, on voit déjà un évêque de Perse, Jean, ce qui suppose des égl. nombreuses et constituées. L'emp. Constantin recommande aussi au roi de Perse Shapur II, ou Sapor, les chrétiens de son royaume, et Ion peut croire que les guerres des Romains contre les Parthes et les Perses avaient indirectement concouru par des prêtres, des soldats ou des prisonniers chrétiens à faire connaître le nom de Christ aux adorateurs du feu et aux disciples de Zoroastre ou de Manès. Les persécutions de Dioctétien et de ses successeurs y avaient probablement aussi contribué en chassant vers les montagnes de la Perse un bon nombre de chrétiens. Mais en 343, peu après la mort de Constantin, une persécution de 40 années éclata, provoquée par les mages qui exploitèrent la mésintelligence survenue entre Constance et le roi de Perse. Des centaines de chrétiens furent mis à mort, entre autres Syméon, év. de Séleucie, Ctésiphon, et le vénérable Guhsciatazades, ancien précepteur du roi. Le même Sapor fit aussi déporter à Ispahan et dans l'intérieur du pays les juifs, dans lesquels il croyait ne voir qu'une variété de chrétiens. Des jours meilleurs parurent sous Iezdéjerdès II qui, grâce à l'év. Maruthas, avait conclu la paix avec les Romains. Un acte de folie ou de fanatisme de l'év. Abdas de Suse remit tout en question; il renversa un temple persan où brûlait le feu éternel d'Ormuzd 418, et il se refusa à toute réparation. Il fut exécuté et les persécutions recommencèrent. Le roi suivant, le sanguinaire Va-ranes, 421, rendit la persécution plus violente encore, et les supplices les plus atroces se multiplièrent. Les historiens Sozomène et Théodo-ret, évaluent à 16,000, dont la plupart ecclésiastiques et moines, le nombre des victimes de ces persécutions, et ils ne citent aucun cas d'apostasie; 22 évêques furent immolés. Il ressort de là que l'Égl. chrétienne avait de profondes racines dans le pays, mais on ne connaît aucun nom d'homme auquel on puisse attribuer la gloire de ce grand mouvement; il est probable que c'est de Syrie, et notamment d'Antioche, que v inrent la plupart des missionnaires et des évêques. Vers le milieu du 5®? siècle les év. de Séleucie se déclarèrent indépendants de ceux d'Antioche, prirent le titre de patriarches, et prétendirent être les égaux des patr. d'occident. Vers cette époque, sous l'influence de Barsumas de Nisibis et de Narsès-le-Lépreui, le nestorianisme s'introduisit en Perse, et bientôt, au 7me siècle, le roahométisme les fit presque disparaître. Au temps de leur prospérité les égl. perses avaient eu de nombreuses écoles à Édesse, Nisibis, Séleucie, Adiabène, Dorca, Ma-huza (Bagdad), où l'on enseignait la philos., les mathématiques et les saintes Écritures, sans parler des écoles primaires attachées à chaque église. Des fragments de la Bible étaient appris par cœur en syriaque, mais il n'en fut fait aucune traduction en langue persane; on ne connaît sous ce rapport que le Pentateuque, trad. par le juif Jacob ben Tawus, qui date tout au plus du 10m« siècle; les Proverbes, l'Ecclé-siaste et le Cantique, date inconnue; les 4 Évangiles, du 14me siècle, et quelques fragments. Do nos jours la Bible a été trad. par les soins des missionnaires: Colebroke, Calcutta 1805; Mar-tyn, 1815, etc.

PESHITO, la plus ancienne traduction syriaque de la Bible; elle date de la fin du 1er ou du commencement du2^ siècle et fut faite peut-être par les hommes envoyés en Palestine par l'apôtre Jude et par Abgare, roi d'Édesse. Il ressort des caractères internes que les traducteurs étaient des judéo-chrétiens, et qu'ils ont trad. l'A. T. directement d'après l'original. Sou nom syriaque signifie la simple, ou la fidèle, et elle est en effet très exacte. Elle renferme tous les livres canoniques de l'A. T., et ceux du Nouveau, sauf 2 Pierre, 2 et 3 Jean, Jude et l'Apocalypse. Le N. T. a été impr. pour la lrt fois à Venise 1552, l'A. T. par Lee, Londres 1823. Elle a servi de base aux versions arabes les plus anciennes et à la version perse des Évangiles. Réimpr. dans les Polyglottes de Paris et de Londres.

PESTALOZZI, Jean-Henri, né à Zurich lî janv. 1746, d'un père médecin, qui mourut bientôt, et d'une mère excellente, mais peu douée, qui ne put diriger elle-même son éducation. Laid, gauche et maladroit, il avait le sentiment de ce qui lui manquait, et cela ajoutait à sa timidité naturelle. Généreux et plein de cœur, il savait se dévouer, et sa vie entière fut consacrée au bien de ses semblables et au relèvement des petits. Pédagogue d'instinct, il ât-teignit aux limites du génie, et s'il fut pendant 32 ans le contemporain de Rousseau, celui de Basedow pendant 44 ans, par conséquent son-mis aux mêmes influences des idées de lenr époque, il conserva plus d'équilibre dans sa méthode, parce qu'il avait conservé plus de respect pour la Bible et pour la foi chrétienne. Après avoir successivement commencé, puis abandonné la théol. et le droit, il se tourna vers l'agriculture, acheta près de Birr, Argovie, un domaine oti il s'établit 1771 avec sa jeune femme, Anna Schulthess, et en suivant le développement de leur fils, il comprit que l'enfant, peu fait pour les abstractions, pouvait s'épanouir par l'étude des choses réelles et tangibles, par le contact avec la nature. Il se mit aussitôt à recueillir les petits pauvres, mendiants et vagabonds de la contrée, les occupant à la terre, les faisant travailler et réfléchir, leur apprenant à prier. Il obtint des résultats remarquables, mais mauvais administrateur, il était ruiné 1780, et d'insuffisantes souscriptions ne purent pas le remettre à flot. Sur le conseil de son ami Iselin de Bâle, il écrivit ses idées et publia la Soirée d'un ermite, puis Léonard et Gertrude, Berlin 1781, qui obtint un succès européen et lui valut du gouvernement bernois une médaille d'or avec l'inscription: Civi op-timo. En 1782 il publia à Zurich Christophe et Élise, instruction pour les mères; en 1787 la Feuille populaire suisse; en 1797 des Recher-ehes sur la marche de la nature dans le développement de l'humanité. Sa réputation était faite, mais il en revenait touj. à son idée d'une réforme dans l'enseignement populaire, et en 1798 le gouvernement helvétique lui confia la direction d'un orphelinat à Stanz; il y fit merveille; aidé d'une vieille servante il soigna 30 enfants, se faisant aimer d'eux et leur inspirant le goût du travail. Les malheurs de la guerre interrompirent une œuvre si bien commencée. Il vint à Berthoud, et dans le château que le gouvernement mit à sa disposition 1800 il fonda un grand institut qui jouit de quelques années d'une immense prospérité et qui fut sur le point de devenir l'école normale de la république. Mais la réaction survint, elle redemanda son château, et Pestalozzi fut obligé de s'en aller 1804. Il fut un moment l'associé de Fellenberg à Hofwyl, et accepta ensuite l'offre de la ville d'Yverdon, qui mettait son château à sa disposition. Les élèves y accoururent de toutes parts, de Prusse, de Hollande, du Danemark; on en compta plus de 200 à la fois, venus pour étudier la méthode du maître. Ce fut le beau temps de Pestalozzi; son nom et ses idées remplissaient le monde pédagogique. Mais il vieillissait, la jeunesse de son système finissait à son tour par devenir une routine; la discorde s'était mise entre ses maîtres, le vieux directeur n'était plus de taille à intervenir d'une manière efficace, et l'institut fut fermé 1825. Pestalozzi se retira à Neuhof chez son petit-fils Gottlieb, et+ àBrugg 17 février 1827. Il faut nommer encore parmi ses ouvrages, qui forment 16 vol. 8°: Discours à ma maison; Comment Gertrude élève ses enfants, et enfin, 1826, le Chant du cygne. —Vie et notices par Chavannes 1805, le P. Girard 1810, Jullien 1812, Herminie Chavannes 1853, Paroz 1857, Burnier 1864, Bordier 1873, Roger de Guimps 1874, etc.

PÉTAU, latin Petavius, Denis, né 21 août 1583 à Orléans, prof, de philos, à Bourges dès l'âge de 20 ans, résigna bientôt ses fonctions pour entrer dans l'ordre des jésuites. Après avoir achevé son noviciat à Nancy et au collège de Pont-à-Mousson, il enseigna la rhétorique à Reims 1610-1613, à La Flèche 1615 et à Paris jusqu'en 1621. Il avait prononcé ses vœux en 1618. Nommé en 1621 prof, de théol. à Paris, il y resta jusqu'à sa f 11 déc. 1652, ayant refusé les offres les plus brillantes du pape et du roi d'Espagne, même le chapeau de cardinal. Très savant, il a laissé 49 ouvrages, dont 10 in-folio. Le plus important, De theologicis dog-matibus, est une espèce d'histoire des dogmes, la première qu'on ait essayée, Paris 1644-1650, 5 vol. f°. Son livre De doctrinà temporum et son Uranologia souvent réimprimés, ont de la valeur pour les études chronologiques. Il a écrit aussi Rationarium temporum, et divers ouvrages de controverse, contre Grotius, Saumaise, les jansénistes, etc. — Son oncle Paul, aussi natif d'Orléans, 1568-1614, a laissé des ouvrages sur les antiquités.

PÉTAVEL, Abraham-François, 1791-1870, né à Neuchâtel où il fit ses premières études, sortit déjà du collège à 13 ans, et se rendit à Zurich pour y suivre les leçons de J.-J. Hottin-ger; de là à Berlin où, dans l'université nouvellement fondée, il fut le premier nommé docteur en philosophie. De retour dans sa patrie 1813, et consacré au saint ministère, il restaura les études classiques et enseigna seul pendant plusieurs années le latin, le grec et la rhétorique française. Peu à peu quelques-uns de ses élèves devinrent ses collègues et en 1841 il présida à l'inauguration de l'académie, dont il fut 2 fois recteur. Les discours d'ouverture dont il fut chargé à plusieurs reprises ont été publiés et réunis sous le titre: Disc, sur l'éducation: l'idée fondamentale en est la nécessité de la foi chrétienne comme base de toute étude. Depuis sa conversion 1820, il compta parmi les membres actifs du réveil religieux, prit part à la formation d'une société des missions, à l'organisation de l'Alliance évangélique, à la fondation de la faculté de théol.; mais il s'occupa surtout et avec une sympathie passionnée de l'évangèlisation des juifs et de leur relèvement spirituel et national. C'est vers ce but que tendent presque tous ses écrits: Appel aux égl.

chrét. en faveur d'Israël. Conversion de Capa-doce, la Kabbale, etc. La Fille de Sion 1844-1868 est un poème en 7 chants, moitié épique, moitié lyrique, qui célèbre le rétablissement futur d'Israël. De 1851 à 1854 il fit différents voyages pour visiter les principaux rabbins de France. Plus tard il fut appelé k prendre la parole dans diverses assemblées annuelles de l'Al-liance israélite universelle. D'une figure originale et comme inspirée, il faisait penser aux hommes de l'A. T., aux patriarches et aux Voyants. Il a laissé 3 fils dans le ministère.

PETERSEN, Jean-Gui»., né à Osnabruck 2 juill. 1649, d'une bonne famille, élevé à Lubeck, fit sa théol. à Giessen, Rostock, Leipzig, Wittenberg et Iéna; se montra l'ennemi acharné des jésuites, qui le lui rendirent et l'obligèrent plusieurs fois à changer de poste. Surintendant k Lunebourg 1688, il se montra le trop ardent partisan des visions millénaires de M"* d'As-sebourg, et fut destitué et banni 1692. Homme d'une imagination ardente, il était très apprécié de Spener k cause de son zèle pour un christianisme vivant, mais son penchant au mysticisme l'égara. Il épousa Jeanne-Éléonore Merlan, qui se vantait aussi d'avoir des révélations divines, et sous l'influence de ces deux femmes, ses vues s'exagérèrent encore. De la terre de Thymern, près Zerbst, qu'il avait achetée, il publia des écrits et des sermons, préchant entre autres un chiliasme un peu fantastique, et le rétablissement final de toutes choses. Lui et sa femme écrivirent leur vie. Il décida le duc Maurice -Guill. de Saxe à rentrer dans l'Égl. évangélique, qu'il avait quittée, et f 31 janv. 1727.

PETERSON (fils de Pierre), Olaf né 1497 et Laurent né 1499 à Oerebro, fils d'un maréchal ou serrurier suédois; élevés chez les carmélites de leur ville natale et destinés à l'état ecclésiastique, ils se mirent en route pour aller achever leurs études au collège Sainte-Brigitte k Rome; mais en passant à Wittenberg, 1516, ils furent tellement captivés par Luther qu'ils restèrent 3 ans auprès de lui, gagnés à la cause de la Réforme. De retour chez eux en 1519, et après qu'Olaf eut soutenu k Wisby avec succès une discussion contre le marchand d'indulgences Antonelli, ils furent placés à Strengnâss par le pieux èvêque Matthias. Échappés comme par miracle aux massacres de Stockholm 1519, ils continuèrent d'annoncer l'Évangile et de prêcher la Réforme sous la protection d'Anderson, l'administrateur du diocèse. Gustave Wasa nomma Laurent, que les Allemands appelaient maître Lars, prof, de théol. à Upsal, puis en 1531 premier archev. évangélique. Olaf, chancelier de Gust. Wasa depuis 1524, et son conseiller intime, résigna ses fonctions en 1539 pour devenir pasteur à Stockholm. Les deux frères, aidés de l'archidiacre Laurence AndreS, traduisirent la Bible en suédois, 1540 et 1541. Olaf, k la demande du roi, rédigea en outre l'organisation du service divin après l'assemblée réformatrice d'Oerebro 1529. Accusé d'avoir pris part k un complot contre Wasa, Olaf fat condamné à mort, mais son innocence ayant été reconnue, il rentra en possession de ses charges. f 1552. Laurent f 1573 et fut enterré dans la cathédrale d'Upsal: Ses sermons et ses homélies ont fait longtemps l'édification de son Église. On l'a surnommé l'apôtre et l'évangéliste du nord. Son frère et lui sont les auteurs de la lre Constitution ecclés. de Suède, qui est devenue loi en 1572.

PETIT lo Jean, né à Hesdin vers 1360, t 1411; juriste et Dr en théol., cordelier; au service du duc de Bourgogne Jean-sans-Peur, assassin de son cousin Louis, duc d'Orléans, il essaya 1408 de justifier cet assassinat et de prouver qu'il est permis de tuer un tyran; doctrine qui fut condamnée par Gerson, par le parlement et le conc. de Constance.

2o Samuel, né 25 déc. 1594 à Nîmes, f 12 déc. 1643. Fils du pasteur de Saint-Ambroix, et orientaliste distingué, il étudia la théol. à Genève, et fut en 1615 nommé prof, d'hébreu k Nîmes. o(i il exerça aussi des fonctions pastorales. Le Consist. lui témoigna touj. beaucoup d'égard* et lui confia plusieurs missions, politiques et religieuses. En 1637 il fat délégué au synode d'Alençon. Il finit par être nommé anssi principal du collège, qu'il s'agissait de relever. Auteur de quelques traités dogmatiques, sur la Réunion des chrétiens, etc. Le card. Bagni, et l'archev. de Toulouse, Montchal, le tenaient en haute estime. Sa biblioth. fut vendue 5,000 L tournois.

PETITOT, Jean, né à Genève 1607, f 1691? créateur de la peinture sur émail; attaché d'abord k Charles d'Angleterre, il vint ensuite en France sous Louis XIV, mais fut emprisonné après la Révocation, et ne sortit du For-l'Évêque que lorsqu'on craignit pour ses jours. Bossuet essaya vainement de le convertir.

PETRIKOW, ville de Pologne où se sont tenus plusieurs synodes. En 1551 la Conf. de foi catholique fut confirmée et des dispositions furent prises contre les évangéliques. La diète de 1555 demanda un concile national, la réforme des abus, le culte en langue vulgaire, la cène sous les deux espèces, le mariage des prêtres, etc. Le synode réformé de 1565 excommunia les antitrinitaires, et acheva le schisme entre les évangéliques et les sociniens.

PEUCER, Gaspard, né 6 janv. 1525 à Baut-zen, fit ses études à Wittenberg, fort l'ami, le commensal et en 1550 le gendre de Mélaacb-thon. Prof, de mathématiques en 1554, de médecine en 1560, il gagna la confiance d'Auguste de Saxe qui, en lui conservant sa place à Wittenberg, le nomma directeur des études et se l'attacha comme médecin. Mais ils se brouillèrent à cause de ses tendances philippistes; on lui attribua un écrit du Dr Curaus sur la Cène, jugé trop calviniste, et il fut condamné à un emprisonnement, qui dura 12 ans et ne finit que sur les instances de la duchesse Agnès, et de son père Joachim-Ernest. Remarié 1587, il f 25 sept. 1602. Il a laissé de nombreux ouvrages de médecine, théol., mathématiques, philos, et histoire.

PEUTIXGER, Conrad, né 1465 à Augsbourg, étudia en Allemagne et en Italie, fut secrétaire d'État dans sa ville natale et conseiller impérial, f 1547. Très cultivé, auteur de plusieurs travaux sur les antiquités historiques, il fut en relations suivies avec les humanistes et favorisa les débuts de Luther; mais déjà à Worms il trouva qu'il allait trop loin et lui conseilla d'enrayer.

PFAFF, Christophe-Matthieu, né 26 déc. 1686 à Stuttgard, fils d'un pasteur, se distingua de bonne heure par une rare intelligence, et et était déjà répétiteur à Tubingue à 19 ans. Le prince lui facilita un voyage de plusieurs années en Allemagne, Angleterre et Hollande, et le chargea ensuite de l'éducation de son fils, avec lequel il visita Turin et la Hollande. Nommé prof, et chancelier de l'univ. de Tubingue, et doté de plusieurs bénéfices, il abandonna soudainement son poste en 1756, sans motifs connus et se rendit à Giessen, où il fut nommé prof., recteur et surintendant général, t 19 nov. 1760. Il aurait aimé la réunion des Égl. luthérienne et réformée. Sa controverse avec les catholiques était modérée.

PFENNINGER. Jean-Conrad, nè 1747 à Zurich, étudia la théol. et fut en 1775 nommé diacre de l'égl. des Orphelins, puis diacre à Saint-Pierre quand son ami Lavater en devint le premier pasteur, + 1792. Écrivain fécond, il fut enveloppé dans les controverses de Nicolaï avec Lavater, dont il avait épousé les idées. Ses Lettres juives du temps de Jésus de Nazareth. 1783-1792, furent très appréciées, et sont encore auj. citées avec éloge par Stier.

PFLUG, ou Pflugk, Jules (de), fils d'un conseiller de la cour de Saxe, homme savant, patriote, doux et bienveillant, chanoine de Mayence et Naumbourg, doyen du chapitre deMeissen, conseiller de l'empire. Charles-Quint le délégua en 1541 au colloque de Ratisbonne. Nommé évêque par le chapitre de Naumbourg-Zeitz, il ne put entrer en fonctions qu'après la bataille de Mtihlberg et l'expulsion de l'év. évangélique Amsdorf, nommé par le prince-électeur. Il fut appelé à présider le nouveau colloque religieux de Ratisbonne, en 1546, et travailla avec Agri-cola et d'autres à préparer l'intérim d'Augsbourg. Il présida en 1557 la conférence de Worms et f 1564.

PHILADELPHIE. Plusieurs tentatives furent faites au 17*6 et au 18me siècle par des sectes mystiques, pour réaliser l'idéal du règne de Dieu par l'amour fraternel, tel qu'il semble symbolisé par l'Égl. de ce nom, Apoc. 3, 7. Il s'agissait seulement de rassembler tous les vrais chrétiens, d'en former une association, et de les organiser théocratiquement en une église gouvernée uniquement par l'Esprit de Dieu, dans l'attente du retour de Christ et du règne de mille ans. Ce furent les idées de Mm* Petersen, née Éléonore de Merlau, et de Jeanne Leade à Londres; là-dessus, et plus tard, se formèrent les sociétés philadelphiques de Portage à Londres, de Poiret et de Bourignon en Hollande, celle de Berleberg, etc. En général elles durèrent peu; quelques-unes même tournèrent mal. Celle de Guill. Penn et des quakers a seule survécu, parce qu'elle avait une base sérieuse et vivante.

PH1LASTER, ou Philastrius, év. de Brescia depuis 381 jusqu'à sa f 387. Zélé athanasien, il avait fait pour combattre l'arianisme de nombreux voyages en Occident. Il assista au conc. d'Aquilée 381, où sous l'influence d'Ambroise l'arianisme fut condamné et ses timides défenseurs, Palladius et Secundianus d'Illyrie, ana-thématisés. Il a laissé un traité qui a eu d'ailleurs peu de succès, sur les Hérésies; il en compte 28 avant Christ et 128 après; trop passionné, il manque de critique: il compte comme héresies les vues différentes des siennes sur l'auteur de l'ép. aux Hébreux. Son idéal comme écrivain était Épiphanes. On lui attribue d'avoir le premier donné le nom d'apocryphes à des livres que Rufin désigne plus exactement sous celui d'ecclésiastiques.

PH1LÉAS, év. de Thmuis, Egypte, martyr décapité 310 ou 311 après une longue détention à Alexandrie. Son nom figure parmi les signataires d'un Avertissement à Mélétius de Lyco-polis, et Eusèbe cite un fragment d'une lettre de lui à ses fidèles, pour les encourager à la persévérance.

PHILIPPE, nom d'un grand nombre de personnages, souverains, ecclésiastiques, anciens ou modernes. Voici les noms de ceux qui, en dehors de la Bible, intéressent l'hist. de l'Église.

lo Philippe VArabe, Marcus Julius, emp. romain 244-249, né à Bostra dans l'Arabie Pé-trée, fils d'un chef de brigands, entra au service militaire, se distingua dans la guerre contre les Perses, s'éleva rapidement aux plus hauts grades, et profita de son influence pour soulever les troupes et faire assassiner le jeune Gordien III. Il se fit nommer empereur à sa place et gouverna avec sagesse et modération. Les chrétiens jouirent d'une entière tranquillité sous son règne. D'anciens auteurs ecclésiastiques disent môme qu'il devint chrétien, ainsi que sa femme Severa et son fils Julius Saturai -nus; Origène lui reproche le meurtre de Gordien, et Babylas, év. d'Antioche, lui interdit pour le même motif l'entrée de l'église à Pâques, jusqu'à ce qu'il eût fait une pénitence publique. D'un autre côté il semble avoir fait acte de paganisme en assistant en 247 au 10m« jubilé séculaire de la fondation de Rome. II tomba dans la bataille de Vérone contre Dè-cius, 247.

2<> Év. d'Héraclée, refusa de quitter son poste malgré les persécutions. Son église ayant été fermée, il prêcha de devant la porte, Conduit devant le gouverneur Bassus, il reçut l'ordre de livrer les vases sacrés et les livres saints qu'il possédait: Nous sommes prêts, répondit-il, à endurer les plus cruels tourments, si tu prends plaisir à nous voir souffrir. Nous te livrerons même les vases sacrés, car ce n'est pas avec de l'or ou de l'argent qu'on adore Dieu, mais je ne me séparerai pas de mes saints livres. La foule des païens se rua dans l'église et brûla tout ce qu'elle put trouver. Philippe fut mis à la torture sur la place publique; le gouverneur lui donna l'ordre de sacrifier à une statue d'Hercule; mais il lui répondit par un discours sur la vraie nature de la Divinité, et il fut jeté dans un misérable cachot. Sous Justin, le nouveau gouverneur, il subit d'atroces tortures. Après avoir langui sept mois dans sa prison, il fut brûlé publiquement, f 304.

3° Ph. Sidétès, prêtre à Side, Pamphylie, jusque vers 430. Ses écrits contre Julien l'apostat, mentionnés par Socrate, sont perdus. On l'a fait à tort directeur de l'école philos. d'Alexandrie.

4° Philippe, pape ou antipape d'un jour, nommé par les Lombards après la chute de Constantin II, et installé 31 juillet 768. Il céda la place à Etienne IV (III) nommé régulièrement, ce qui ne l'empêcha pas d'être déposé par une assemblée d'évêques, et honteusement maltraité par une foule ameuté? sous la conduite de Chartophylax Gratiosus; on lui creva les yeux. Il était auparavant moine au couvent de Saint-Vit sur l'Esquilin.

5° Philippe IV, dit le Bel, roi de France, né 1267, le véritable fondateur de la monarchie française, qu'il établit sur les ruines de la vieille féodalité. Il eut aussi l'honneur de briser la puissance papale en bravant les foudres de l'excommunication qui le frappèrent deux fois sans le blesser ni l'ébranler. Ses luttes contre Boni-face VIII forment le caractère principal de son règne; il refusait au pape le droit de cumuler les deux pouvoirs, temporel et spirituel, nuis il ne se gênait pas pour les revendiquer en sa faveur. Dans ses difficultés avec 'Édouard 1" d'Angleterre, il repoussa l'arbitrage deBoniface. ce qui lui valut 1296 la bulle Clerieit laitot qui, sans le nommer, défendait aux ecclésiastiques de payer aucune redevance à des laïques; il y répondit en prohibant la sortie des métaux précieux. La paix ayant été cependant conclue par l'intervention officieuse du pape, qui négocia une alliance matrimoniale entre les deux familles belligérantes, les prétentions du légat Bernard de Saisset irritèrent et froissèrent Philippe, qui fit arrêter le prélat. La bulle Salvator mundi suspendit tous les privilèges du monarque, et bientôt, 5 déc. 1301, parut la célèbre bulle Ausculta fili, qui le sommait de se présenter à Rome. Il la fit brûler. L'université, le clergé et les États généraux, 10 avril 1302, se mirent du côté du roi (par patriotisme, car en réalité ses exactions l'avaient rendu odieux), el une nouvelle bulle de Boniface, Unam Sanctam. vint réclamer 18 nov. 1302 en faveur du pape la domination universelle. Le parlement français proclama en revanche la complète indépendance de la couronne, déclara le pape convaincu d'hérésie et d'autres crimes, 1303, et Philippe envoie à Anagni, où résidait le pape, son procureur Nogaret, qui s'empare de sa personne. 7 sept. 1303. Après la mort de Benoît 1301 on 1305, Philippe fait élire Bertrand de Got, qui se fixe à Avignon, mettant la papauté au service de la France. Le pape et le roi condamnent l'ordre des templiers; la torture fournit les preuves dont on a besoin pour paraître suivre les fonnes de la justice: des milliers d'hommes périssent sur l'échafaud ou sur le bûcher 1307-1314, et leurs immenses richesses sont confisquées. Le grand-maître Jacques Molay périt un des derniers et assigna dans l'année le roi, qui t en effet 1314. Cruel et dévoré d'avarice, Philippe avait également voué les juifs à la des truction pour s'emparer de leurs biens; il avait aussi fait saisir tous les banquiers italiens et u\\ certain nombre de commerçants français, sous prétexte d'usure, et ils ne s'étaient rachetés de la torture qu'à force d'argent. Enfin ce roi inique et odieux, qui levait des taxes énormes, faisait de la fausse monnaie et refusait de recevoir en paiement l'argent qu'il avait falsifié. En mourant il recommanda à ses fils la piété, la clémence et la justice.

6° Philippe-fe-ifagrnantW, landgrave de Hesse, né 23 nov. 1504 au château de Mar bourg, perdit son père en 1509, et fut déclaré majeur par l'empereur à 14 ans. Sa conduite dans les luttes contre Sickingen, et surtout dans la guerre des paysans, lui valut la réputation d'un capitaine prudent autant que brave. A U diète de Worms, il reçut de l'attitude de Luther une impression profonde, qui se fortifia encore par ses rapports avec Mélanchthon. En 1525 il se déclara ouvertement, et introduisit la Réforme dans ses États; les biens incamérés servirent à fonder 1527 l'univ. de Marbourg, qui compta Lambert d'Avignon parmi ses premiers professeurs. Lui-même penchait plutôt du côté des théologiens suisses, notamment pour la question de la Cène, et il se lia avec ceux de Bâle et de Zurich, mais il évita d'accentuer trop cette divergence, pour ne pas compromettre l'œuvre même de la Réforme. Il prit l'initiative de l'alliance de Torgau, se joignit à la célèbre protestation de Spire, prêta peut-être trop facilement l'oreille aux révélations de Pack, organisa la ligue de Smalcalde, et combattit avec succès à Augsbourgle projet de concessions que la molle diplomatie de Mélanchthon avait élaboré avec le légat. Il signa l'Augustana, mais en faisant des réserves sur l'article relatif à la Cène. Le rétablissement du duc Ulrich de Wurtemberg en 1534, la défaite des anabaptistes en 1535, l'extension et l'affermissement de la ligue de Smalcalde en 1536, mirent le comble à sa gloire. Mais son influence dans les affaires protestantes fut paralysée par le fait de son double mariage. Sa première femme était fille de Georges de Saxe; de son vivant, et avec son consentement en 1540, il épousa encore Marguerite de la Saal. Les Réformateurs le subirent sans l'approuver formellement, mais la conscience de l'Église protesta. Charles-Quint, après avoir fait la paix avec François 1er, et arrivé au faîte de sa puissance 1544, en revint à sa vieille idée de briser l'indépendance des princes allemands dans l'intérêt du catholicisme et de la maison de Habsbourg. La bataille de MUhlberg 24 avril 1547 trancha la question en faveur de l'empire. Philippe dut se rendre après que Charles eut solennellement promis à Maurice de Saxe qu'il ne serait porté atteinte ni à sa liberté, ni à l'intégrité de son territoire. La perfidie fut complète; le malheureux Philippe fut déclaré déchu de sa dignité électorale, il perdit le duché de Saxe et le MUhlberg, et fut traîné de prison en prison, en Allemagne et dans les Pays-Bas, jusqu'à la paix de Passau qui le délivra, 1552. Il employa ses dernières années à gouverner paisiblement son peuple, sans négliger les conférences religieuses, à Naumbourg, Worms, Erfurt, Fulda, où il se prononça toujours dans un esprit conciliateur. Avant sa f 31 mars 1567, il partagea ses États entre ses 4 fils.

7o Philippe II, roi d'Espagne, né 21 mai 1527, fils de Charles-Quint, épousa en 1554 Marie-la-Sanguinaire. En 1556 il succéda à son père comme souverain de tous ses États, sauf l'emp. d'Allemagne. Sombre, fourbe, cruel et despotique, il a laissé dans l'histoire une trace sinistre. Autant par fanatisme que par politique, il se donna pour tâche de défendre le catholicisme par tous les moyens et d'en faire la base de son trône. Le résultat fut ce qu'il devait être, il avait reçu le pays en pleine prospérité, les gallions lui apportaient l'or des colonies, et quand il mourut l'Espagne démembrée était ruinée, et elle ne s'en est jamais relevée. Sans le vouloir il a contribué aux succès du protestantisme. L'inquisition a pu brûleries évangéliques pêle-mêle avec les maures et les juifs en Espagne même, mais l'établissement de cet inique tribunal dans les Pays-Bas provoqua la révolte de ces provinces, leur déclaration d'inde-pendance et la guerre avec l'Angleterre, dans laquelle fut détruite par une tempête la flotte de l'Invincible Armada, ainsi que la flotte de réserve qui attendait dans le port de Cadix, 1588. Son alliance avec la Ligue et les Guise, son espoir de ceindre la couronne de France, fut une nouvelle déception: il dut en 1598 signer avec Henri IV la paix de Verviers, et il f 13 sept, la même année, laissant son royaume en ruines. Le seul succès de sa politique fut la conquête du Portugal, dont il s'empara après la mort du roi-cardinal Henri. Il gagna aussi la bataille de Lépante contre les Turcs 1571, mais malgré les instances du pape il ne put pas en profiter à cause de la jalousie haineuse dont il était animé contre le glorieux vainqueur, don Juan d'Autriche, son frère, qu'il fit empoisonner plus tard. Il fit également périr dans un cachot son propre fils don Carlos, que Schiller a poétisé. Son règne illustré par des littérateurs et des généraux que lui avait légués le règne précédent, ne légua que des décombres à ses successeurs. Il a beaucoup écrit, entre autres des Lettres récemment publiées, qui prouvent qu'à ses heures il savait encore badiner avec ses enfants et cultiver la vie de famille.

8° Ph. de Nêri, v. Néri.

PHILIPPISTES, v. Cryptocalvinisme.

PHILIPPONS, v. Rascolnicks.

PHILLIPS, Georges, né 1804 à Kônigsberg, passa au catholicisme et fut successivement prof, de droit à Munich et à Vienne. Écrivain et journaliste, il défendit l'ultramontanisme avec la fougue d'un nouveau converti et soutint la dépendance absolue de l'État, qui n'est qu'un rouage de police, vis-à-vis de l'Église comme seule autorité.

PHILON lo le Juif, le plus célèbre représentant de la philos, juive-alexandrine. Né à Alexandrie 20 ou 30 ans av. C. d'une famille distinguée et de la race sacerdotale, il développa par de fortes études de brillantes facultés, et chercha à concilier en quelque mesure la philos. de Platon et les révélations des saints livres.

Vers l'an 42, à la snite d'une émeute, il fut envoyé à la téte d'une députation auprès de l'emp. Caligula, pour plaider la cause de ses compatriotes. Caligula les reçut grossièrement, au pas de course, et la mission échoua presque complètement. Philon f vers le milieu du siècle. Il a laissé de nombreux ouvrages exégétiques, philos, et politiques: une explication du Pen-tateuque, des notices biographiques sur Abraham, Joseph, Moïse; une étude sur la Création; des traités sur la Charité, la Pénitence; 5 livres sur la condition des Juifs sous Caligula; De la vie contemplative, de la Providence, De l'incorruptibilité du monde, Tout homme honnête a le droit d'être libre, etc. L'hist. de son ambassade a Rome s'est perdue. Éditions de Morel. Genève 1613;Mangey, Londres 1742; Tauchnitz, Leipzig 1831-1834, etc. Dans son système Dieu est l'Etre absolu, sans qualificatif possible, l'opposé du fini. La matière est éternelle, car, source de tout mal, elle ne peut procéder de Dieu. On ne saurait comprendre un rapport de Dieu avec le monde; mais comme ce monde est cependant plein de l'action de Dieu, il faut admettre son intervention puissante, laquelle se manifeste, selon Philon, comme selon Platon, par les types généraux, ou idées, qui se détachent de l'Être suprême pour se placer sur une portion de la matière et la modifier. En combinant ces idées de Platon avec la doctrine stoïcienne des lois du inonde ou de la nature, Philon arrivait à un Logos, l'idée des idées, résumant en lui toutes les idées, espèce d'image de Dieu, premier-né, fils aîné de Dieu, en qui toutes les âmes trouvent leur patrie, leur nourriture, leur manne du désert. Il est étrange que ces mots n'aient jamais éveillé chez lui la pensée que ce Logos ne serait autre que le Messie de l'A.-T. Quant à sa morale, elle ressort de l'idée qu'il se fait de la matière, et sous ce rapport elle est aussi platonicienne: puisque l'âme est comme emprisonnée dans la matière, elle doit chercher à s'en affranchir; c'est l'ascétisme qui la conduira à la contemplation de l'absolu. Quoique la doctrine de Philon s'éloigne beaucoup des enseignements de l'Écriture, il était persuadé que les sages de la Grèce ne tenaient leur sagesse que de Moïse et des prophètes. Sa méthode d'interprétation consistait à allégoriser les faits historiques, et c'est ainsi qu'il entendait concilier le judîaïsrae et l'esprit grec.

2° Philon de Carpathe, nommé comme évêque de Carpasia, en Chypre, dans une prétendue biographie d'Épi phanes, écrite soi-disant par un contemporain, l'év. Polybe, de Rhino-eorura, Égypte, mais probablement quelques siècles plus tard. Cette impossible légende le met en rapports avec l'emp. Arcadius de Rome. Comme il n'y a point en Chypre d'évêché Carpasia connu, on peut regarder ce Philon comme un personnage fictif. Suidas lui prête an Comment. latin sur le Cantique, mais ce travail est bien postérieur.

3° Philon Herennius, né l'an 24 à Bybloe, historien, a publ. une trad. grecque de l'Hiat. phénicienne, de Sanchoniaton, dont quelques fragments ont été conservés par Eusèbe.

PHILOPATRIS, dialogue satirique dans lequel le paganisme et le christianisme sont également tournés en ridicule. On Pavait attribué à Lucien, mais la mention de la Trinité et les allusions au monachisme ne permettent pas de le faire remonter si haut, et d'ailleurs il manque d'esprit. Il est probable qu'il fut composé sous Julien l'apostat.

PHILIPON, Jean, v. Jean 6<>.

PHILOMÈNE, v. Philumène.

PHILOSTORGE, auteur d'une Hist. ecclésia* que, allant du commencement des luttes ariennes jusqu'à Valentinien III, 423. Elle se divisait eu 2 parties et 12 livres. Cet ouvrage, malheureusement perdu, ne nous est connu que par quelques extraits donnés par Photius. Arien zélé, ses indications peuvent servir à contrôler les rapports des orthodoxes. L'auteur, né 368 en Cappadoce, était fils de l'arien Carterius; il se rendit à 20 ans à Constantinople pour y suivre ses études, + vers 425.

PHILOSTRATE, Flavius, de Lemnos, enseigna d'abord à Athènes, puis à Rome comme sophiste, dans le premier quart du 3°" siècle. Il a écrit une vie d'Apollonius de Tyane, espèce d'apologie enthousiaste et merveilleuse de ce néo-pythagoricien du 1er siècle, l'opposant au christianisme comme l'idéal de la sagesse. On a aussi de lui des Lettres, quelques autres ries de sophistes, uu Dialogue, des descriptions de Tableaux, etc. Publ. par Olearius 1709. H fut protégé par Julie, femme de Septime Sévère.

PHILOXÉNE, ou plutôt Xenaïas, de Tahal en Perse, nommé 485év. d'Hiérapolis par Pierre-le-Tanneur, patr. d'Antioche, qui changea son nom. Ses adversaires prétendent que c'était nn esclave non baptisé et qu'il avait été d'abord manichéen, mais ce n'est pas établi et d'ailleurs ne prouverait rien. Contraire au nestorianisme, il fut un des chefs du parti monophysite qui, protégé par l'emp. Anastase, combattit les décisions du conc. de Chalcédoine. Il entra en lutte avec le patr. Flavien d'Antioche, successeur de Pierre, qui paraissait pencher vers les décisions de ce concile, et il fut exilé par Justin Ier à Gangres en Cappadoce, où on le lit périr 522. Les jacobites le regardent comme nn martyr. La version syriaque de l'A. T., connue sous le nom de philoxènienne* porte son nom, parce qu'il la fit faire par le chorévéque Poly-carpe d'Hiérapolis 508 et qu'elle lui est dédiée;

publ. par White, Oxford 1778. Il a écrit encore d'autres ouvrages.

PHILUMÈNE ou Philomène. Des ossements forent trouvés en 1802 dans une des catacombes de Rome, et sur une pierre voisine cette inscription: Philumena pax tibt, avec une ancre, une palme, un fouet, un vase à recevoir te sang, etc. Transportés à Magnano, ces restes firent des miracles, et il n'en fallut pas davantage pour donner le jour à une légende; les visions de rigueur eurent lieu et le nouveau culte, celui de la « bienfaitrice du 19m« siècle » fut sanctionné par Grégoire XVI. — On connaît aussi les os d'une autre sainte du même nom, de l'époque de Totila, trouvés en 1527 dans la marche d'Ancône.

PHOCAS 1° jardinier â Sinope, f 303 martyr, dans la persécution dioclétienne, a remplacé Castor et Pollux comme patron des navigateurs. — 2<> Emp. grec 602-610. Cappadocien de naissance, exarque des centurions, il monta sur le trône à l'aide d'une révolte, fit trancher la tête;t Constantinople à son prédécesseur Maurice et à ses 6 fils, se montra cruel, rapaceet lâche sur le trône; perdit contre Chosroès plusieurs de ses provinces, et fut à son tour renversé par Héraclius et décapité. Il est connu par le chant de triomphe que Grégoire 1er entonna en son honneur; le premier il reconnut Rome comme chef-lieu de la chrétienté et le pape comme patriarche universel. — 3° Jean, moine de Crète, auteur vers 1150, d'un voyage en Palestine et à Jérusalem, assez important pour la géographie biblique.

PHOTLN lo v. Pothin. — 2<> Diacre d'An-cyre, sa ville natale, puis év. de Sirmium. Disciple de Marcellus, il développa encore son système et de manière à en faire une espèce de sa-bellianisme. Dans le Logos il ne voyait que la raison divine, celle de Dieu même, ayant dans le Christ sa plus haute manifestation. Il parlait aussi de Jésus dans un sens ébionitique. D'ailleurs il employait différentes formules, et ses contemporains lui reprochaient d'être peu clair. En somme il fut le grossier antécesseur de So-cin, niant la Trinité et la préexistence de Christ. Il fut condamné par les orthodoxes et par les ariens, à Milan, au 2m« conc. de Sirmium et à Antioche. Ses adhérents furent de nouveau condamnés à Aquilée 381. On ignore si les photiniens du 5mc siècle étaient aussi ses disciples.

PHOTIUS, né vers 815 à Constantinople, savant, poète, orateur, philologue, juriste, grammairien, théologien, mathématicien, génie universel, un des hommes les plus instruits et les plus éminents de son époque, avait servi l'emp. Michel comme son ambassadeur en Assyrie et comme secrétaire d'État, quand il fut appelé par l'empereur, quoique laïque et capitaine des gardes, à la dignité de patriarche, en remplacement d'Ignace déposé pour un sermon qui avait mécontenté la cour, 857. Photiusétait d'ailleurs avare, ambitieux, cassant, et trop humble serviteur de la couronne; il se montra passionné dans des circonstances qui auraient demandé plus de calme, et peut être considéré comme le principal auteur du grand schisme d'orient, v. Grecs. Ignace s'étant adressé au pape Nicolas I*r pour demander réparation, celui-ci qui se croyait le droit de décider en dernier ressort, cassa en 863 les décisions du conc. de Constantinople, où cependant avaient siégé 2 de ses légats, rétablit Ignace, punit ses légats et excommunia Photius. Photius répondit par une encyclique violente, insistant sur les différences dogmatiques et liturgiques des deux Églises, et dans uu concile tenu à Constantinople 867 il condamna le pape à son tour. Mais peu après il fut déposé par Basile-le-Macédonien, Ignace fut rétabli et le conc. de 869 annula les résolutions de celui de 867. A la mort d'Ignace, Photius était rentré en faveur, les deux patriarches ayant fait la paix; il fut rétabli sur son siège et Jean VIII fut obligé par politique de garder le silence. Deux nouveaux conciles 879 et 880, auxquels assistaient les légats du pape, annulèrent les décrets de celui de 869; les légats se laissèrent berner, et c'est en 882 seulement que le pape mieux informé intervint de nouveau et réexcommunia Photius. Léon-le-Philosophe étant monté sur le trône mit définitivement un terme à la carrière du patriarche; il le fit arrêter sous prétexte de haute trahison et enfermer 886 dans un couvent d'Arménie, où il + 890. Photius a laissé un grand nombre d'écrits; le plus complet est son Myriobiblos, ou Bibliothèque, qui renferme sous 280 titres des notices et des extraits d'une foule d'écrivains ecclésiastiques et d'auteurs que nous ne connaissons que par lui, Genève 1611, Berlin 1824; le Nomocanon, recueil des lois impériales et des canons des conciles, important pour l'étude du droit canon; un Lexique, des Lettres, et divers traités de théol. et de controverse, contre les latins, sur la Procession du Saint-Esprit, etc.

PIARISTES, pères, ou frères des écoles pieuses, ou Pauvres de la mère de Dieu, congrégation qui a pour 4m« vœu d'instruire gratuitement les enfants pauvres. Elle fut fondée par Joseph Calasanzio, né 1556 d'une famille noble d'Aragon, f 1648. Après avoir étudié la théol. à Lérida, Valence et Alcala, il entra dans les ordres malgré sa famille 1582, et occupa différents postes ecclésiastiques. En 1592 il vint à Rome, et en 1597, avec le concours de quelques prêtres, il eut l'idée de rassembler dans les rues les enfants pauvres et abandonnés, et de leur

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donner des leçons chez lui. Paul V en 1607 les organisa en une congrégation, qu'il appela de son nom, paulinienne, et Grégoire V la confirma «n 1625. Les intrigues des jésuites la réduisirent à n'être plus qu'un institut sous Innocent X et Alexandre VIL mais Clément IX les releva et Innocent XII leur accorda tous les privilèges des ordres mendiants. Ils ont un général nommé pour 6 ans, et des provinciaux; leur costume est noir, avec robe et manteau. On les trouve surtout en Italie, Espagne, Autriche et Pologne, où ils possèdent de nombreux collèges.

PIC de la Mirandole, v. Mirandole.

PICARDS, surnom donné quelquefois aux hussites par leurs ennemis; probablement par corruption du mot beghard* prononcé à l'allemande. On entendait aussi par là les frères et les sœurs du libre esprit qui trouvèrent en Bohême un refuge, mais qui, ayant dégénéré, furent cruellement persécutés par Ziska. *

PICOT, Pierre, né 29 janv. 1746 à Genève; après avoir fini ses études de théol., il visita la France, la Hollande et l'Angleterre, et revint dans son pays où il fut dix ans pasteur à Sati-gny, puis pasteur à la ville, et successivement prof, d'hist. ecclésiastique et de dogmatique, f 1822. Il était connu comme orateur et s'occupait volontiers de sciences naturelles et d'astronomie. Auteur de plusieurs sermons, dont un d'actions de grâces pour la Restauration de la rép. de Genève. Son fils Jean, né 6 avril 1777, auteur d'une Hist. de Genève, juriste et prof, d'histoire, avait aussi beaucoup de goût pour l'hist. naturelle, + 1864.

PICPUS, petit village des environs de Paris, qui a fini par faire partie du faubourg Saint-Antoine. En 1601 il était le siège d'une con-grég. du tiers-ordre de Saint-François, qui prit le nom d'ordre de Picpus, ou pénitents, ou tier-celins. En 1805 une nouvelle association s'y forma sous la direction du p. Coudrin, pour l'adoration perpétuelle du saint sacrement, l'enseignement de la jeunesse, l'éducation de jeunes prêtres et la propagation de la foi. Elle se procura une maison dans la rue Picpus à Paris et fut reconnue en 1817 par Pie VII. Après avoir fondé en France plusieurs séminaires, elle entreprit en 1825 l'œuvre des missions païennes, spécialement en Australie. Dans la même rue Picpus se trouve également une maison pour les femmes. Elles ont de nombreuses succursales. L'influence des jésuites y règne en maître.

PICTES et Scotsranciens habitants de laCa-lédonie; ils apparaissent dans l'histoire au 2"* siècle et jouent un certain rôle sous Sep-time Sévère. Ces deux tribus, presque toujours en guerre entre elles, ne s'unissaient que pour combattre les Bretons ou les Romains. Les Scots habitaient plutôt l'Irlande, les Pietés l'Écosse, mais ces derniers, souvent vaincus, finirent par décliner et cédèrent leurs monta-gnes aux vainqueurs. Le nom de Pietés, pirti, s'explique, suivant les uns, par l'habitude qu'ils auraient eue de se peindre le visage et le corps pour se donner une apparence plus effrayante; selon les autres, il dériverait du gaëlique pic-tioch, voleurs, nom que leur auraient donné les Bretons à cause de leurs habitudes de brigandage. Ils luttèrent pendant 4 siècles contre les Romains; ils eurent aussi à lutter contre Vor-tiger, roi des Bretons, qui avait appelé à son aide les Germains. L'Évangile leur fut apporté par des prisonniers qu'ils firent dans leurs guerres; quelques églises furent fondées, à Ossony par Kiaran, à Ardmore par Declan, mais en somme ils restèrent résolument hostiles à la nouvelle doctrine. Au 9me siècle Kenneth II, roi des Scots, extermina les Pietés à la bataille de Stirling; leur nom disparut, et celui de Scot-land resta seul.

PICTET, Bénédict, théologien réformé, un des représentants les plus distingués de l'orthodoxie genevoise; neveu de François Turret-tini, il naquit à Genève 30 mai 1655, et après y avoir achevé ses études, il fit suivant l'usage d? ses jeunes compatriotes, un voyage dans quelques universités étrangères et revint dans sa ville natale où il fut bientôt nommé pasteur, et en 1702 prof, de théol. dogmatique. Il avait dé cliné un appel qui lui avait été adressé de Leyde pour remplacer Spanheim. f 10 juin 1724. Ora teur, poète et savant, il était membre de l'Académie de Berlin. On a de lui. outre des cantiques devenus populaires, une cinquantaine d'ouvra ges sur des sujets religieux; on estime surtout son Traité contre l'indifférence des religions, sa Morale chrétienne 1697, Défense de la religion des protestants 1716, Lettres à un catholique 1717, Hist. de l'Église et du monde 1712, Annales des 12*0 et 13™ siècles, et en latin 7W logia christiana 1696, Medulla Theol. didact. W elench. 1711. Vie par E. de Budé.

PIE 1° év. de Rome, qui dut son nom à sa piété, 142-157. Il combattit les hérésies de Va-lentin et de Marcion. On a quelques lettres de lui

2o Pie II, Aeneas Sylvius Piccolomini, ne 1405 à Corsiguano (Pienza), cardinal 1436. pape 27 août 1457, + 1464. Il remplit diverse* missions politiques et, devenu pape, fit tout pour organiser contre les Turcs une croisade, qui ne réussit pas. D y invita le roi de France le duc de Bourgogne, la république de Venise, et il allait se mettre lui-même à la tête de l'expédition, quand il mourut à Ancône au moment de s'embarquer. Savant et doué des talents le* plus variés, il fut tout ensemble théologien, canoniste, diplomate, orateur, écrivain, historien, géographe et poète. Malheureusement cV tait un homme immoral et sans principes; il combattit de toutes ses forces les désirs d'une reformation qui surgissaient de partout, et il se montra infidèle en cela aux principes qu'il avait si vigoureusement soutenus au conc. de Bâle. li déclara excommunié de fait et d'avance tous ceux qui en appelleraient à un concile général, et il obtint de Louis XI la révocation de la Pragmatique sanction de Bourges. Il avait coutume de dire que l'on avait eu de bonnes raisons pour introduire le célibat des prêtres, mais qu'il y en aurait de plus fortes encore pour l'abolir. On a de lui une Description de l'Étal de l'Allemagne, une Histoire de l'empire sous Frédéric III, des Lettres, des Harangues, un roman d'Euryale et Lucrèce; il a collaboré à ses Mémoires, publiés par son secrétaire Gobel-lini.

3<> Pie III, Fr. Todeschini, ou Piccolomini, neveu du précédent par sa sœur, ne régna que 26 jours, 1503, entre Alex. VI et Jules II.

4° Pie IV, J.-Angelo Medici, ou Medichino, frère du marquis de Marignan, fut pape de 1559 à 1566. Ennemi juré des Caraffa, il abolit quel-ques-uus des édits de son prédécesseur Paul IV, dont il surpassa encore le règne en cruautés. Massacres en Calabre, à Rome et ailleurs; il fait construire un nouveau palais de l'inquisition. Guerre contre les Turcs. Le conc. de Trente se dissout assez expéditivement sous son règne 1563, et il en confirme les décisions, 26 janv. 1564, sans qu'elles soient généralement acceptées. Il autorise plusieurs petits ordres religieux, entre autres l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Il embellit Rome et crée l'imprimerie du Vatican. Palestrina compose sa Messe du pape Marcel.

50 Pie V; Michel Ghisleri, né à Basco 1504, dominicain, prieur de l'ordre dont il relève la discipline, élu pape 7 janv. 1565. Sévère et mélancolique, cruel et inexorable, son pontificat présenta en grand autant d'horreurs que la Révolution française. Il fut impitoyable pour les hérétiques et en livra un grand nombre au tribunal de l'inquisition; cet acharnement lui valut d'être canonisé en 1712 par Clément XI. Sa bulle In cœnâ Domini se lit chaque année à Rome à la Fête-Dieu. Il participa à l'armement de la flotte qui remporta la victoire de Lépante. f l«r mai 1572. Ses Lettres ont été publiées à Anvers 1640.

6® Pie VI, J.-Ange Braschi, né à Césène 1717, trésorier de la chambre apostoliqne sous Benoit XIV, cardinal sous Clément XIV, pape de 1775-1799. Il suivit une politique contraire à celle de son prédécesseur et protégea les jésuites. Il eut la satisfaction de voir sombrer le système d'opposition du marquis de Pombal, mais ce fut presque sou seul triomphe. Des orages fondirent sur lui de toutes parts; il en vint même de l'Autriche. Joseph II interdit les appels à Rome et la publication des bulles avant qu'il les eût approuvées; il exigea des évêques un serment qui les rendait indépendants du pape; il soumit les moines à sa puissance et les mit sous la loi commune; il supprima 7 à 800 couvents; il exigea du clergé des études plus sérieuses. Pie fit en 1782 un voyage inutile à Vienne et ne put rien obtenir. Les év. allemands forment un congrès antipapal, dont les conclusions sont connues sous le nom de Fondations d'Ems. En Italie même une réforme profonde est conçue sous les auspices de Léopold, duc de Toscane, et de l'év. de Pistoie, Scipion de Ricci. La mort de Joseph et l'élévation de Léopold son frère et successeur 1790, délivrèrent Pie VI de ce cauchemar de réformations. Mais à ce moment survint la Révolution française qui lui causa d'autres soucis. II désapprouva la constitution civile du clergé, favorisa les Austro-Russes, se vit enlever par Bonaparte Urbin, Ferrare, Bologne, Ancône;fut contraint de signer la paix avec la France à Tolentino 1797, paya 31 millions, fut dépouillé d'un grand nombre de tableaux de maîtres. Dépossédé de son siège par Berthier à la suite de l'émeute où périt Duphot, il fut enlevé de Rome, conduit à Florence, puis en France, où on le promena de ville en ville. Il montra dans son malheur une force d'âme remarquable et finit par mourir 29 août 1799 à Valence, où l'on voit encore sa chambre et son mausolée. Bourgoing l'a attaqué dans ses Mémoires, l'abbé Blanchard l'a défendu dans son Précis historique, 1800.

7o Pie VII; Bamabé Chiaramonti, né à Césène 1740, bénédictin, év. de Tivoli 1780, cardinal-évêque d'Imola 1785, élu pape à Venise après un long conclave 1800; homme tranquille, ferme et versé dans le droit canon. Il réorganisa de son mieux les États romains, chercha à réconcilier la France avec sa cour, signa le 15 juill. 1801 un concordat religieux avec Bonaparte, et obtint la reconnaissance de la religion catholique comme celle de la majorité des Français; le premier consul se réservait le droit de nommer les évêques, mais le pape avait à les confirmer. En 1804 Pie VII sacra Napoléon à Paris, mais il eut bientôt avec lui des démêlés, il maintint les principes hiérarchiques et refusa de céder à diverses exigences de l'empereur; son territoire fut occupé; il excommunia Napoléon 1809 qui répondit en le faisant arrêter par le général Miollis et conduire à Savone, puis à Fontainebleau, où il subit une dure captivité. II recouvra la liberté en 1814 et rétablit aussitôt l'ordre des jésuites. Il eut l'heureuse et singulière bonne fortune de pouvoir bientôt offrir dans Rome un asile à la famille de son persécuteur. f 21 août 1823. Vie par Beauchamp, (lohen, et Artaud.

8° Pie VIII; Saverion (Xavier) Castiglione, né à Cingoli (Ét. de l'Église) 1761, év. de Fras-cati, élu 31 mars 1829, régna un an et 8 mois. Sous son régne eut lieu la révolution de juillet; il reconnut Louis-Philippe comme roi, non des Français, mais de France et de Navarre, f 1er déc. 1830. Vie par Artaud.

9<> Pie IX, comte Jean-Marie-Mastaï Feretti, né 13 mai 1792 à Sinigaglia, étudia 1803-1809 au collège Scolopi à Volterra. Ne pouvant entrer à l'armée à cause de crises nerveuses, on le destina à l'Église. Guéri de son mal par l'imposition des mains d'un prêtre, il prit la résolution de se vouer aux œuvres de miséricorde, et il s'affermit encore dans cette voie à la suite d'un grand danger qu'il courut au Chili et dont il fut préservé, 1823. A son retour il se distingua dans l'administration de plusieurs établissements de bienfaisance, fut directeur de l'hôpital Saint-Michel, archev. de Spolète en 1827, év. d'imola 1833, cardinal 1840. Après la mort de Grégoire XVI, il fut élu pape à sa place dans un conclave de 2 jours, et monta 16 juillet 1846 sur le trône pontifical. Ses débuts, d'un libéralisme éclairé, excitèrent un enthousiasme général; réforme des abus, amnistie, constitution municipale, amélioration de la justice et de l'instruction publique, facilités données à la presse, protestation contre l'occupation de Fer-rare par les Autrichiens, tout se réunit pour faire voir en lui un pape libéral et national. Mais l'année 1848 fit évanouir le rêve. Il avait donné un peu par force une constitution à son peuple, 14 mars 1848; il avait chassé les jésuites, mais il résista quand on voulut l'entraîner dans une guerre contre l'Autriche, et après l'assassinat de Rossi, 15 nov. 1848, il s'enfuit à Ga'éte. Ce fut la fin de son pouvoir temporel. II revint sans doute en 1850, grâce à l'occupation française, et il put conserver l'ombre du pouvoir jusqu'au moment où les troupes italiennes, sous la pression de l'opinion publique, entrèrent dans Rome et firent de Victor-Emmanuel le roi d'Italie avec Rome pour capitale, 20 sept. 1870. Mais ce ne fut plus qu'une apparence de règne, protégé mais réglé par les baïonnettes étrangères. Ce fut, sous le ministère d'Antonelli, une violente réaction, mais ce fut aussi un émiette-ment; la Romagne s'affranchit en 1859, et après Castelfidardo l'Ombrie et les Marches. Le roi étant entré à Rome 2 juill. 1871, avait assuré à Pie IX par la Loi des Garanties ses droits de souveraineté, sa pleine liberté de souverain pontife, le Vatican avec des possessions à Rome même et hors de la ville, enfin une dotation de plus de 3 millions de francs. Mais ce que le prince temporel perdait, le souverain spirituel

le regagnait largement, et il ne cessa d'afficher les vieilles prétentions autoritaires qui se trouvaient déjà contenues dans sa Ire encyclique. En 1848 il obtenait de la Russie nn concordat; en 1850 il essayait en Angleterre et en Hollande de réorganiser l'épiscopat; en 1851 il traitait avec la Toscane et l'Espagne; plus tard encore avec Costa-Rica, Guatimala, l'Autriche, le Wurtemberg, Baden, etc. Plusieurs de ses succès furent de courte durée, ainsi en Russie à cause de l'insurrection polonaise, en Espagne à cause de la chute d'Isabelle. La France fut de tous ses alliés le plus fidèle, mais Napoléon III ! et Eugénie ne sauvèrent pas le pape, et le pape ne sauva ni l'empire, ni son impérial filleul. La partie la plus importante du pontificat de Pie IX est dans le rôle qu'il a joué comme chef spirituel de son Église, et dans les changements qu'il a décrétés quant au dogme et quant à l'administration ecclésiastique. Il suffit de rappeler la proclamation de l'Immaculée Conception 1854, l'assemblée des évêques en 1867, le conc. dn Vatican 1869-1870, de nombreuses canonisations des 26 martyrs japonais, Marie Alacoqne, Fr.-Marie des cinq plaies, etc.); enfin l'Encyclique et le Syllabus, véritable défi jeté soit aux idées modernes, soit aux pouvoirs civils, et qui prouve l'influence fatale exercée par les jésuites sur cet esprit faible et vaniteux, mais qui, laisse à ses propres inspirations, serait resté jusqu'à la fin patriote et libéral. S'étant constitué lui-même prisonnier dans le Vatican, avec les jésuites pour geôliers, il réalisa celte parole de Massimo d'Azeglio: « Il y a des gens qui ont la manie du suicide. » f 7 févr. 1878 d'hydropisie.

PIÉMONT, v. Sardaigne, et Vaudois.

PIERIUS, prêtre d'Alexandrie, de la fin da 3m« siècle, mentionné par Photius comme chef de l'école des catéchistes, mais par Eusèbe seulement comme un des hommes les plus distingués et les plus pieux de cette église. Il survécut aux persécutions dioclétiennes. Photius le fait mourir martyr en même temps que son frère Isidore, mais c'est une légende postérieure. D'après saint Jérôme il aurait passé à Rome les dernières années de sa vie, et la date de sa mort serait inconnue. Une église avait été élevée à Alexandrie sous son vocable. D'après Jérôme et Photius il a écrit de nombreux ouvrages, entre autres des Comment, sur Luc, 1 Cor.. Osée, etc. On l'appelait Origène-le-jeune, et quelques-uns lui reprochent des erreurs origé-nistes. Photius dit qu'il fat le maître de Pam-phile, qui écrivit l'apologie d'Origène dans sa prison de Césarée.

PIERRE lo Saint Pierre, apôtre, envisage par quelques auteurs comme le premier pape, v. Dict. de la Bible.

2o Denier de Saint-Pierre, contribution que plusieurs États du nord s'étaient habitués à payer au siège romain. La plus ancienne mention que Ton en connaisse, date d'Ina de Wessex 728; on trouve ensuite Offa de Mercie 796. Ethel-wulf 895, enfin Édouard d'Angleterre 901-924, qui en fit une institution régulière. Le chiffre en était calculé à raison d'un denier par famille; il fut plus tard fixé au total de 299 marcs. Les efforts des papes pour transformer cette contribution en impôt échouèrent. Le Danemark, la Suède, la Pologne, la Norwège, l'Islande, payèrent également leur denier à partir du 12m« siècle, mais la France, l'Espagne, la Prusse refusèrent de s'y soumettre, et la Réformation y mit fin partout. Depuis 1859, grâce à des circonstances et à des besoins nouveaux, l'institution a repris vie, mais sous la forme de dons volontaires et purement individuels, sans que les États interviennent comme tels. Ce sont ordinairement des caravanes de pèlerins qui le portent à Rome; les sommes transmises sont quelquefois considérables.

3° P. de Lampsacus, Mysie, jeune martyr mis à mort dans la persécution de Décius, parce qu'il ne voulut pas sacrifier à Vénus.

4° P. d'Alexandrie, fit excommunier Meletius de Lycopolis, q. v., soit pour usurpation de fonctions, soit à cause de son attitude trop sévère contre les lapri. Lui-même périt 311 dans la persécution de Maximin, d'après Eusèbe; de Dioctétien, d'après Épiphanes. On a conservé un traité de lui sur la Pénitence; d'autres écrits sont douteux, entre autres une lettre à son troupeau sur les usurpations de Melétius.

5° P. Termite, d'Amiens, connu par le zèle fanatique avec lequel il organisa et prêcha la l*e croisade. Le jésuite Oeltreman a fait de sa vie un roman; Sybel a réduit à de plus modestes proportions une histoire qui a presque tous les caractères de la légende. Il parait que le premier pèlerinage à Jérusalem 1093, la vision dans l'église de la résurrection, la lettre du patr. Siméon, le discours à Urbain II, la tournée dans les pays de l'occident pour soulever les populations, n'ont existé que dans l'imagination fertile de quelques écrivains postérieurs, surtout de moines désireux d'enlever aux papes et de revendiquer pour leur ordre l'honneur d'avoir provoqué ces belles entreprises. Guillaume de Tyr, qui est la principale source pour l'hist. des croisades, ne sait rien de cet ermite, sinon qu'il était une persona contemtibilis, dont le sort fut celui de tous ces autres aventuriers. C'est le pape seul qui parla au Conc. de Cler-mont et qui enleva la croisade, 1095. Mais la légende même ne fait pas grand honneur à l'ermite, car elle le fait partir sans argent ni vivres, conduisant de nombreuses bandes, avec Gauthier-sans-Avoir, pillant pour vivre, massacrant les juifs sur leur chemin, ravageant la Hongrie, la Bulgarie et l'Asie Mineure, et perdant en route les neuf dixièmes de ses hommes, f 1115 à Neu-Moûtiers, diocèse de Liège, s'il n'est pas mort pendant l'expédition, ce qu'on ignore.

6° P. du mont Cassin, diacre, savant bénédictin, d'une famille noble de Rome; né vers 1100, il entra à 15 ans au couvent du mont Cassin, dont il prit à cœur les intérêts contre le pape, et dont il plaida la cause avec talent devant Lothaire, pendant le séjour de celui-ci au sud de l'Italie 1138. Nommé la même année cartulaire et chapelain de l'empire, il fut en 1159 nommé administrateur du mont Cassin par Alexandre III, et mourut peu de temps après. Ses nombreux ouvrages ont presque tous pour objet l'hist. de son couvent, ses chroniques, ses hommes illustres, des morts édifiantes, les Lieux saints, etc.

7° P.-le-Vénérable, ou de Cluny. Il s'appelait Maurice de Montboissier et était fils d'un gentilhomme auvergnat. Né 1094, il fut voué au couvent par sa mère qui, après la mort de son mari, s'était elle-même faite religieuse. 11 fit de bonnes études théologiques à l'abbaye de Soucilanges, fut successivement prieur des abbayes de Vézelay et de Domaine. Élu en 1122 abbé de Cluny, il fut un des derniers grands représentants de son ordre, à une époque où Bernard de Clairvaux donnait à celui des cisterciens un relief qui faisait pâlir tous les autres monastères de Saint-Bernon. Il rétablit la discipline, qui s'était un peu relâchée sous son prédécesseur Pontius, et restaura les études théol. des moines. Il revisa ses statuts en 1146, et à Noël 1157. Protecteur d'Abélard dans des circonstances difficiles, il mériterait pour ce seul fait, dit Lamartine, qu'on lui élevât une statue. II se fit traduire le Coran de l'arabe lors d'un voyage en Espagne 1141, pour pouvoir mieux réfuter les Sarrasins. Dans son rapport contre Bruys il cherche au moins à être exact et impartial. Ses Lettres, comme son livre Des miracles de son temps, sont précieux à consulter et font honneur à sa mémoire, car tout en partageant les superstitions et les préjugés de la vie monacale, il sut s'élever au-dessus d'un horizon restreint, et respecter ses adversaires.

8° P. de Celle, abbé de Moutier-la-Celle, faubourg de Troyes 1150, de Saint-Rémi à Reims 1162, év. de Chartres 1181, f 1183. Auteur de comment, mystiques sur la Bible, et de Lettres au pape et k différents princes et évêques, où il émet sur les questions religieuses des idées indépendantes et pleines de justesse; publ. par Sirmond, Paris 1613.

9<> P. chanoine de Saint-Victor, mystique, professait le culte spirituel, et a combattu le caractère extérieur des cérémonies ecclésiastiques, l'abus des indulgences et les stériles disputes de mots des scolastiques. f 1197 au couvent cistercien de Long-Port, près Soissons. Auteur d'un traité de morale intitulé Verbum abbreviatum. Son plus célèbre disciple fut Ful-eon de Neuilly.

10° P.Collivacinusde Bénévent, appelé aussi Morra, prof, de droit canon à Bologne, puis secrétaire d'Innocent III, publia 1210 les décrétales appartenant aux onze premières années de ce pape, en utilisant la compilation romaine de Bernard de Compostelle. Ce recueil fut agréé par l'univ. de Bologne et reçut le titre de compilation: la étant le Décret de Gratien, et la 2m* celle de Jean Galensis.

Ho P. de Blois, ou Blesensis; né vers 1140, disciple de Jean de Salisbury, étudia à Paris et à Bologne, fut nommé en 1167 précépteur et secrétaire du jeune roi Guillaume II de Sicile, mais il abandonna bientôt cette place par crainte du poison ou du poignard italien. Il s'enfuit en France, et accepta en 1168 une place auprès de Henri II d'Angleterre. Là il ne tint pas longtemps non plus, et malgré la protection du roi il craignit d'être compromis comme complice de l'assassinat de Becket. Devenu chancelier de Richard, archev. de Cantorbéry, il passa à Bath comme archidiacre, toucha de riches émoluments, fit remplir ses fonctions par un vicaire, encourut la disgrâce de son évéque et dut prendre à Londres un poste moins bien rétribué, f 1200. Ses Lettres, pleines de verve et de fines observations sur les nombreux abus de l'Égl. et de l'État, ont une vraie valeur. Il a écrit aussi quelques ouvrages historiques.

12° P. de Vérone, martyr, patron de l'Inquisition espagnole, dominicain, prédicateur et inquisiteur; il persécuta avec la plus féroce cruauté les cathares de Lombardie (ses parents en étaient), et haï de tous, il finit par être assassiné 1252 près de Côme.

13° P. de Pisis, de son vrai non Gambacorti, fondateur de l'ordre des ermites de Saint-Jérô-me. Né 1355 à Pise, d'une bonne famille, il se retira en 1377 dans les solitudes du Montebello, Ombrie; il s'y bâtit une église et un ermitage, où sa congrégation se réunit, f 1435. Canonisé.

14° P. d'Andlo, docteur et prof, de droit canon à Bâle, écrivit vers 1460, un traité dans lequel il étudie le droit germanique en se plaçant sur le terrain de la tradition. D'après lui l'empire allemand n'est que le continuateur de l'ancien emp. romain; tous les princes doivent être soumis à l'empereur, et l'empereur au pape qui lui délègue ses pouvoirs de la part de Dieu. Ce curieux ouvrage a pour titre De Imperio ro-mano, ou Libellas de Cmsarum monarchi4, ad

Fridericnm. Impr. Strasbourg 1603; mss. à Paris.

15° P. Bernardin, florentin, d'extraction vulgaire, qui s'attacha à Savonarole et continua après sa mort de réunir ses adhérents. Il défendait la participation aux sacrements dvune église qui marche à sa ruine, ordonnait la vie commune. la prière assidue et la pauvreté dans les vêtements. Traqué par les autorités civiles et ecclésiastiques, il se réfugia avec les siens chez le Pic de la Mirandoie, mais il finit par être pris et brûlé.

16° P. Moglianus, cél. prédicateur de l'ordre des minorités en Italie; f 1489 à Camerino.

17® P. martyr, d'Arona, sur le lac Majeur, né 1455, prof, à Salamanque 1487, très estimé, prit part aux guerres contre les Maures et em -brassa 1505 l'état ecclésiastique. Prieur de Grenade, il fut employé par Isabelle dans plusieurs négociations importantes, f 1525. Il a raconté sa mission au Caire dans son livre: De legatiome babylonicâ. Il a écrit aussi des Lettres sur les affaires d'Espagne, Alcala 1530.

18° P. d'Alcantara, né 1499, étudia à Salamanque et entra à 16 ans chez les franciscains; en 1519 il était prieur au couvent de Badajoz, prêtre en 1524. Après avoir vécu en solitaire pendant quelques années, il devint supérieur général de son ordre, pour l'Estramadure, qu'il réforma 1538-1540, et après avoir fait un séjour dans un couvent réformé de Lisbonne, il fonda avec l'autorisation de Jules III une congrég. particulière de la stricte observance, 1555. C'est dans le même esprit qu'il assista sainte Thérèse pour la réforme des carmélites, f 1562. Canonisé 1569. Il a publié un travail sur La prière et la méditation, qui eut un grand succès. On lai en prête, mais à tort, un autre sur La paix de l'âme.

— Pour les nombreux Pierre qui ne sont pas compris dans cet article, v. Aichspalt, d'Ailly, Benoît XIII, Chrysologue, Comestor, Damien, Lombard, Mogilas, Mongus, Nolasque, Otiri, Valdo, Vermigli, etc.

PIÉTISTES, Piétisme. Historiquement et vulgairement on désigne sous ce nom, comme lin* dique son étymologie, une tendance religieuse et des personnes dont la vie présente d'une manière spéciale les caractères ou les apparentes de la piété. Quoiqu'il n'ait rien d'injurieux en lui-même, il se prend presque toujours en mauvaise part et avec une nuance d'ironie, comme la plupart des noms qui servent à désigner une église ou une doctrine de minorité; ainsi huguenot, parpaillot, vache à Colas, méthodiste, etc. Le nom même de chrétien semble à l'origine avoir été donné aux fidèles par les ennemis du christianisme. C'est à l'époque de Spener, à ses CoUegia pietatis, réunions de piété, qu'il faut remonter pour avoir le sens vrai du mot. Une orthodoxie sèche et morte avait remplacé dans l'Église la foi vivante; les réunions de Spener furent une réaction, une protestation contre ce manque de vie, contre ce formalisme sans piété, et les ennemis eurent bien vite fait de trouver le mot qui devait ridiculiser les membres des petites assemblées. Mais, comme il arrive d'ordinaire en pareil cas, on confondit avec ou sans intention les bons et les mauvais, et surtout on remarqua davantage les mauvais, ceux qui compromettaient par leur conduite leur profession de foi chrétienne, et l'on s'habitua à mettre sur le compte de l'hypocrisie ce qui n'était peut-être que de l'inconséquence. Il faut ajouter aussi que souvent des personnes réellement pieuses ont compromis, par des exagérations, par petitesse d'esprit, ou par une aigreur peu chrétienne dans leurs jugements, le mot même de piété qui se résume pour la grande masse dans les simples notions de largeur et de charité. L'ancien piétisme accentuait la séparation de l'Église et du monde au point de condamner tout ce qui ne tendait pas directement à développer la communion intime avec Dieu, ainsi les arts et les sciences; il aimait les petites assemblées et tombait volontiers dans le sentimentalisme. Le piétisme moderne a été au contraire une réaction contre le rationalisme, et il a eu quelque chose de moins efféminé, de plus militant. Il n'a ni lieu de naissance, ni date précise, mais il est né, après les négations du 18me siècle et sur les ruines fumantes de la révolution, du besoin de croire et de s'élever des choses visibles vers les choses invisibles. Il a paru à la fois dans presque toutes les Églises des différents pays protestants, et il s'est fait connaître aussitôt par ses œuvres missionnaires et par ses œuvres de miséricorde. Le nom de piétiste a été peu à peu abandonné, comme venant de la méditative Allemagne, et remplacé par celui de méthodiste qui rappelle davantage l'influence anglaise sons laquelle, à tort cependant, on lui reproche de s'être développé.

PIGHIUS, Albert, de Kampen sur l'Yssel, né vers 1490, mathématicien et astronome, puis théologien, prof, à Louvain et à Cologne, accompagna Adrien VI en Italie, et fut employé par lui dans diverses missions, p. ex. à Worms et à Ratisbonne. f 24 déc. 1543 prévôt d'Utrecht. Sou principal ouvrage est son: Affirmation de la hiérarchie ecclés. 1538. Il a écrit aussi, contre les protestants, sur La grâce et le libre arbitre; les cathol. eux-mêmes ne le regardent pas comme très orthodoxe.

PILET, Jean-Alexandre-Samuel, né 15 sept. 1797 à Yrerdon, f 5 avril 1865 à Genève. Il étudia à Lausanne; consacré en 1821, il fut successivement principal du collège de Morges, pasteur & Francfort s. Mein 1828-1835, pasteur à Arzier sur Nyon, enfin depuis 1836 pasteur et prof, de théol. à l'Oratoire à Genève. Orthodoxe et national décidé, il resta touj. lui-même et n'abdiqua aucune de ses libertés, ni quant à la critique biblique et historique, ni quant à ses rapports avec les autres églises. Comme son enseignement, sa prédication était nourrie, élevée, pleine de fraîcheur. Sous une apparence bonhomme, et même un peu lourde, il était pétillant d'esprit, et sa conversation était assaisonnée de sel avec grâce. Auteur de quelques sermons et discours, et d'un petit écrit sur la Communion; il a laissé plus de 300 discours à la Biblioth. de l'Éc. de théologie.

PINYTUS, év. de Cnosse, Crète, contemporain de Denys de Corinthe. Eusèbe donne des extraits de leur correspondance, d'après lesquels Pinytus recommande les principes de l'ascétisme comme moyen de sanctification.

PIONIUS, prêtre de Smyme, martyrisé sous Décius, ou sous Marc-Aurèle, avec Sabine, Ma-cedonia et d'autres prêtres.

PIPER, Ch.-Phil.-Ferdinand, né 1811 à Stral-sund, répétiteur de théol. à Gôttingue 1833-1836, fixé en 1840 à Berlin, prof, en 1842, Dr théol. en 1847, et depuis 1849 fondateur et directeur du musée d'antiquités chrétiennes. Il a beaucoup écrit sur les questions d'archéologie* et publié de nombreux et curieux calendriers et almanachs d'un intérêt général. Son principal ouvrage est l'Introd. à la théologie monumentale, Gotha 1867.

PIRKE ABOTH (hébr. chapitres des pères), une des subdivisions du 4®e Séder, ou livre, de la Mishna. Ce traité, divisé lui-même en 6 chapitres, contient les maximes des pères qui depuis Moïse ont conservé les traditions de la loi orale; il va de Siméon-le-Juste à Jéhuda-le-Saint. De beaucoup le meilleur des traités du Talmud.

PIRKHEIMER, Vilibald, né 1470 àEichstâdt, d'une famille patricienne de Nuremberg, reçut une éducation excellente, fit le service militaire sous les auspices de l'év. d'Eichstâdt, étudia ensuite à Padoue et à Pise le droit, la théol., les mathématiques et l'histoire; occupa une place distinguée dans les conseils de sa ville natale, fut nommé général de l'empire et fit contre les Suisses une expédition, qu'il a racontée lui-même. Savant et littérateur, il a traduit Grégoire de Naziance et Nilus, édité Fulgence de Ruspe, et publié divers écrits historiques et politiques. Sa riche bibliothèque et ses nombreuses relations faisaient de lui le centre d'un mouvement intellectuel et littéraire et l'un des chefs de l'école de Reuchlin. Il salua avec joie l'apparition de Luther, reçut le réformateur dans sa maison de Nuremberg, et réussit à détourner l'excommunication dont il fut menacé pour ce fait. En 1524 il tenait encore pour Luther et la Réforme, mais il s'en détourna peu à peu, soit qu'il trouvât que Luther allait trop loin, soit que sa sœur et sa fille qui étaient au couvent aient exercé sur lui une certaine influence. En 1529 il écrivit assez vivement contre la doctrine d'OEcolampade sur la Cène, f 1530. Ses œuvres et ses lettres ont été publ. Francfort 1610. On dit beaucoup de bien de sa sœur Cha-ritas, sur laquelle ont paru diverses notices.

PIRMINIUS, ou Pirmin, abbé du couvent de Melci (Metz, ou Meaux, ou Mels près de Saint-Gall ? ou plus probablement Meltesheim, duché de Deux-Ponts); se rendit à la demande de quelques chrétiens, et avec l'appui de Charles Martel, sur les bords du lac de Constance, pour en évangéliser les populations encore païennes, 724. L'év. lui fit obtenir l'Ile de Owa-Augia, auj. Reichenau, pour y bâtir une église et un couvent; il la défricha et changea ce désert marécageux en un charmant jardin. Mais dès 727 il en fut chassé par le duc Théobald, qui l'accusait d'être un partisan du roi des Francs» son ennemi, et Firmin, laissant le vaillant Heddo pour le remplacer, se rendit en Alsace, dans le Brisgau et en Suisse, où il fonda de nombreux couvents, Pfeffers, etc. L'un des derniers fut celui de Hornbach près Deux-Ponts, où il eut la joie, avant de mourir, de recevoir son vieil ami et collaborateur Boniface. f 3 nov. 753. Il a laissé un petit Ltbellus abbatis Pirminii de $ing. libriê canonicis, étude pratique sur les livres du N. T.

PISCATOR (allem. Fischer) né 27 mars 1546 à Strasbourg, aidé dans ses études par le pasteur Thomas, obtint ses grades en 1567, et entra dans l'enseignement à Strasbourg et à Heidelberg. Mais Andreâ et Marbach le rendirent suspect, et il dut abandonner différents postes, jusqu'au moment où il fut appelé vers 1581 dans la nouvelle univ. réformée de Herborn, dont il fit la fortune et la réputation, avec son collègue Olevien, et où il resta jusqu'à sa f 26 juill. 1626. Parmi ses nombreux ouvrages on remarque surtout sa trad. de la Bible 1602 et 1603, plusieurs fois réimpr. avec notes; ses Comment, et des dissertations sur la Cène, la prédestination et différents sujets dogmatiques. Les synodes de Gap et de La Rochelle lui ont reproché sa théorie de l'obéissance active de Christ comme diminuant la doctrine de la mort expiatoire. Cependant la plupart des théol. réformés sont restés en correspondance avec lui, entre autres Bèze, et d'autres l'ont franchement défendu: ainsi Caméron, Alting, Blondel, Cappel, Parâus.

PISE, ville célèbre par ses conquêtes, son commerce et les luttes qu'elle soutint comme gibeline contre les républ. guelfes de l'Italie; évêché au 2me siècle, archev. en 1117; patrie d'Eugène IU, d'Ugolin, de Galilée (?) et des architectes Jean et Nicolas de Pise. Il s'y tint du 25 mars au 7 août 1409 un conc. écuméniqae destiné à mettre fin au grand schisme qui depuis 1378 désolait la papauté. Il fut convoqué sur la demande des (Ordinaux des deux papes rivaux, Grégoire XII et Benoit XIII, réuni* à Livourne et à Pise; le chancelier Gerson et Pierre d'Ailly poussèrent activement à sa convocation. Malgré le préavis de l'emp. Rupert du Palatinat en faveur de Grégoire, l'assemblée déposa les deux papes dans sa session du 5 juin, et dans celle du 26 les remplaça par Alexandre V, croyant à la parole qu'il avait donné*1 de ne pas clore le concile avant qu'il eût fait quelque chose pour la réforme de l'Église. Il trompa l'attente de ses électeurs, brusqua la clôture, mécontenta tout le monde, et il eu résulta qu'au lieu d'un pape, l'Église en eut trois. Quelques auteurs nient que ce concile ait été écuménique, parce qu'il ne fut pas convoqué par un pape. — Un autre concile eut lieu en 1511, convoqué par Louis XH et Maximilien. mais sans l'assentiment de Jules II; de Pise il fut successivement transféré à Milan, Asti el Lyon; sans importance.

PISTOIE. Un concile provincial ou diocésain se réunit du 18 au 28 sept. 1786 dans cette ville de Toscane, sous les auspices de son évé-que Scipion de Ricci, pour examiner un plan de réorganisation de l'Église en 57 articles, que le grand-duc Léopold, d'accord avec son fr. Joseph II de Vienne, avait élaboré pour améliorer l'état de l'Égl. catholique. Par une circulaire du 26 janvier, il l'avait soumis à l'approbation des évêques, mais la plupart l'avaient repoussé. Celui de Pistoie et son synode l'approuvèrent et allèrent même plus loin dans la voie des réformes; ils travaillèrent dans l'esprit du gallicanisme et du jansénisme, opposant, même en matière de foi, l'autorité des évêques et de> prêtres au pouvoir absolu du pape, réclamant le culte en langue vulgaire, débarrassant l'absolution et la pénitence des abus et% des superstitions qui les déshonoraient, réduisant à un seul tous les ordres religieux, supprimant te vœux éternels, et réclamant un concile national. Ce concile fut en effet convoqué à Florence par le grand-duc, 23 avril 1787, mais il rejeta toutes les réformes proposées, et le duc, san> s'obstiner et sans rien céder, décida que chaque évêque, même Ricci, resterait le maitredan* son diocèse. Malheureusement le successeur d? Léopold suivit une politique contraire, et w? bulle du pape du 28 août 1794 condamna 85 propositions du synode de Pistoie.

PISTORIUS (Beckei-, boulanger) lo Jean, curé (le Saint-Jean, puis pasteur et surintendant luthérien k Nidda, Hesse; homme paisible, prit part avec Bucer et Mélanchthon aux conférences de Ratisbonne 1541 et 1546, et k celles de Worms 1547. Il travailla aussi k établir la Réforme dans le diocèse de Cologne 1544. — 2<> Son (ils Jean, né 4 févr. 1546 k Nidda, étudia la médecine, le droit et la théol., mais finit en 1588 par se faire catholique. Il avait amené au protestantisme le margrave Ernest-Frédéric; il travailla ensuite avec non moins de succès k amener au catholicisme le margrave Jacob, et publia pour justifier cette conversion et la sienne propre un Theorema de fidei christ, mensurâ. Chanoine k Constance, puis doyen du chapitre de Breslau, il devint conseiller de Rodolphe II, et f 1608. Il a écrit sur la Pologne, l'Allemagne, l'Espagne et la Hongrie. — 3* Conrad, né à Brunswick, pasteur surintendant k Gtistrow 1562, renvoyé par le duc Ulrich de Mecklem-bourg, vécut quelque temps k Rostock, Anvers et Vienne, fut nommé surintendant k Hildesheim, et de nouveau congédié, f 1588 à Brunswick.

PITHOU, deux frères, l'un et l'autre savants canonistes. 1° Pierre, né 1 nov. 1539 k Troyes, étudia le droit sous Cujas, dont il resta l'ami, fut reçu avocat k 21 ans, mais ne fut pas admis à pratiquer, parce qu'il était protestant; il vint k Sedan, où il rédigea des lois k la demande du duc de Bouillon, fit un séjour k Bâle, revint en France en 1570, faillit périr massacré k laSaint-Barthélemy et se décida peu après k abjurer. Il fut successivement bailli de Tonnerre, procureur à la chambre temporaire de Guyenne, et enfin procureur général au parlement de Paris. 11 nov. 1596 de la peste. 11 a concouru k la rédaction de la Satire Ménippée. On lui doit aussi un Mémoire aux évêques, destiné k leur prouver qu'ils n'ont pas besoin du pape pour relever Henri IV de son excommunication; la publication du Corpus juris, les Libertés de l'Égl. gallic., des ouvrages de droit et des éditions de classiques latins. — 2° François, né 1543, aussi ami et disciple de Cujas, abjura également 1575, et devint avocat au parlement de Paris, + 1607; collaborateur de son fr. pour plusieurs de ses ouvrages.

PLACET, autorisation donnée par l'État de promulguer certaines lois ou communications de l'autorité ecclésiastique. Ce droit de permettre ou d'interdire rrtnonte en fait aux luttes de Philippe-le-Bel et de Louis de Bavière contre les prétentions des papes. En droit il ne peut exister que lorsque les 2 pouvoirs sont distincts et indépendants; c'est une sorte de convention, acceptée ou imposée, par mesure de précaution. Dès le 14®e siècle les lois en Espagne, Portugal,

France, Belgique et Naples, défendaient la pu* blication d'aucune bulle du pape sans autorisation préalable. En 1594 la chose était reconnue partout comme de droit coutumier. L'Égl. catholique s'y est soumise parce qu'elle ne pouvait faire autrement, mais elle a touj. protesté, et elle a cherché k s'affranchir, parfois en l'éludant, de cette limitation imposée k sa puissance. Au fond cette garantie de l'État, aussi bien que l'appel comme d'abus, a été souvent illusoire, et depuis que la liberté de la presse existe et permet toutes les publications, il importe peu au clergé de pouvoir lire ses circulaires en chaire; il a d'autres moyens de les faire connaître. Aussi le placet n'est-il plus guère auj. qu'une formalité, un souvenir.

PLACIDE, né k Rome, élevé par saint Benoit, devenu abbé d'un couvent près de Messine, fut surpris et massacré par des pirates, ainsi que ses compagnons, 546; probablement une légende.

PLANCK 1* Gottlieb-Jacob, né 15 nov. 1751, l'aîné des 16 enfants du greffier de Murtingen sur le Necker; élève de Tubingue, il occupa différents postes, notamment une place de pasteur k Stuttgard 1780, et finit par être nommé prof, de théol. k Gftttingue, où il fut comblé d'honneurs académiques, ecclésiastiques et autres. f 31 août 1833. II a écrit de nombreux volumes sur l'hist. de l'Église, en particulier sur le développement du dogme dans le protestantisme, ainsi que des nouvelles et romans très appréciés sur des sujets instructifs et moraux. — 2° Henri-Louis, son fils, né 1785 k Gottingue, déjk répétiteur en 1806, en même temps que Gesenius, après avoir eu 2 mémoires couronnés, sur Philon et sur la crédibilité des premiers adversaires du christianisme; prof, de théol. depuis 1810. f 1831 k la suite de longues souffrances épileptiques. Il a cultivé surtout l'exégèse et la critique du N. T. Principaux ouvrages: De la signification du canon dans l'ancienne Église; Quelques observations sur Luc (contre Schleiermachçr), lai" kTimothée(id.), une Synopse, la Révélation et l'Inspiration; enfin et surtout: De verâ naturâ atque indole orationisgr. N. T. 1810.

PLATINA, Barthélémy, né 1421, de son vrai nom Barthélémy de Sacchi de Piadena, près Crémone; d'abord soldat, s'adonna ensuite k l'étude des sciences. Nommé abréviateur apostolique par Pie II, il vit son emploi supprimé par Paul II, et comme il s'en plaignit amèrement, en ménaçant le pape d'un concile général, il fut jeté en prison pour 4 mois. Trois ans plus tard, compromis injustement dans un complot contre la vie du pape, et accusé d'hérésie, il fut mis k la torture. Sixte IV le nomma bibliothécaire du Vatican 1475 et le combla de bienfaits, f 1481. Auteur de Vies des souv. pontifes jusqu'à Sixte IV, Venise 1479, ouvrage assez impartial, sauf pour Paul II.

PLATONISME, v. Néoplatonisme.

PLATTER lo célèbre imprimeur, à qui l'on doit la Ire édition de l'Institution de Calvin. Né 1499 à Glenchen, paroisse de Wisp, Valais, il fut tour à tour chevrier, tisserand, cordier; à 20 ans il ne savait pas lire. Après un voyage malheureux en Allemagne, il vint à Zurich où il vit Myconius et Zwingle. Il s'attacha à la Réforme, apprit le latin, le grec et l'hébreu; n'ayant pas de quoi manger il se mettait dans la bouche de l'eau salée, des raves crues, du gravier, pour tromper sa faim. Après la Ire guerre de Cappel, il revint à Zurich où il épousa la servante de Myconius, avec l'arrière-pen-sée de se fixer en Valais comme instituteur. L'év. Schinner le reçut bien, et Platter compta à Viège jusqu'à 30 élèves en été. Mais comme il était protestant, il préféra rentrer à Bâle. Il monta une imprimerie, en même temps qu'il prit la direction d'une école, et il finit par réussir, grâce à ses persévérants efforts. L'aisance et les honneurs couronnèrent sa vieillesse, f 1582, d'une chute.

2o Félix, son fils, né 1536 à Bâle; tout jeune, il aimait la botanique, copiait les recettes, s'enthousiasmait au dépècement d'un animal et faisait des autopsies clandestines. Docteur en médecine en 1557, il fut en 1571 nommé professeur, et médecin de la ville, charge qu'il occupa 43 ans. Il fut l'honneur, ou comme dit Haller, l'étoile de l'univ. de Bâle. Auteur de plusieurs ouvrages, il a inauguré l'anatomie pathologique, pressenti l'importance de la statistique, et recommandé des traitements humains et raisonnables pour les aliénés, + 28 juill. 1614, un an après sa femme, après 56 ans de mariage.

PLINE, v. Trajan.

PLOTIN, le plus illustre représentant de la philos, néo-platonicienne, né 205 en Égypte, étudia à Alexandrie sous Ammonius Saccas, vint à Rome 245 où il obtint comme prof, de philos, d'immenses succès, et f 270 en Campa-nie, aussi respecté pour ses vertus que pour ses talents. Il admettait un Être souverain, Celui qui est: au-dessous de lui des dieux inférieurs, dont les uns sont au-dessus du monde, les autres dans le monde, tels que Marc, Mercure, Minerve. Ces derniers ont l'inspection des diverses parties du monde, et le peuple les adore. Mais les sages doivent tendre à la divinité suprême. Le paganisme reçut ainsi une base rationnelle, grâce à laquelle on espérait en arrêter la chute. Plotin alla plus loin, il atta-jqua le christianisme. Christ, selon lui, était un sage des plus distingués; il avait été néo-platonicien, mais ses disciples ne l'avaient pas compris et s'étaient trompés, surtout quant à sa divinité.

PLYMOUTH (Frères de), v. Darby.

PNEUMATOMAQUES (qui dispute à propo* de l'E9prit), surnom donné aux partisans de Macédonius, q. v.

POCOCKE lo Édouard, né 8 nov. 1604 i Chively, Berkshire, prof, d'arabe et d'A. T. à Oxford et pasteur à Childry, f 10 sept. 1691. Il est un des premiers qui aient compris l'utilité des langues orientales pour l'intelligence de l'hébreu; il s'en est servi pour ses Comment, sur Osée, Joël, Michée et Malachie. Œuvres publ. par Twels, Londres 1740. Son hist delà dynastie des Abulfaradseh est assez importante. — 2o Richard, né 1704 à Southampton, év. de Meath, archidiacre de Dublin, év. d'Ossory; connu par plusieurs voyages en Orient 1737-1742, qu'il a publiés, avec planches et cartes, f 1765.

PODIEBR AD, George, roi de Bohême, successeur deLadislas-le-Postume qu'il avait remplacé comme régent pendant sa minorité; né 1420 d'une illustre famille, il monta sur le trône en 1458. Favorable aux hussites modérés, il lenr assigna sur les confins de la Moravie et de la Silésie le district de Litiz, 1543, pour assurer lenr liberté de conscience, peut-être aussi pour en débarrasser le reste du pays, car il était très partagé entre ses devoirs de souverain catholique et ses sympathies religieuses personnelles. Mais le clergé le tenait toujours, et pour sauver les calixtins il se crut obligé en 1558 et en 156$ de recommencer les persécutions contre les ta-borites et les Frères. Il y eut des massacres horribles. Podiebrad se crut en droit de maintenir au moins les articles de Bâle, dits Compactata, mais il ne put obtenir de Rome même cette mince faveur, et comme il insistait au nom de ses droits, les catholiques mirent à leur téteson gendre Matthias Corvin, roi de Hongrie 1468, quoique le reste du pays continuât de lui rester soumis, f 1471.

P0ESCHL, Thomas, né 2 mars 1769àHoritx> Bohême, prêtre en 1796 dans le diocèse de Linx* en 1806 recteur de l'école de Braunau. D assista aux derniers moments de l'imprimeur Palm, qu'il prépara à la mort, mais à partir de ce moment il tomba dans une noire mélancolie, qui dégénéra bientôt en un sombre et parfois ridicule mysticisme. On eut beau le déplacer et l'envoyer à Ampfelwang, dans lfInn, le mal ne fit qu'empirer. De l'huile ét une certaine pondre de son invention lui paraissaient propres à purifier l'âme, à lui procurer des visions extatiques, et à le mettre en communion avec tteo, le Christ et la vierge Marie. Il recommandait aussi le jeûne, les pèlerinages, des exercices de prières; il attendait le règne de mille ans, et d'abord la conversion des juifs. Il s'adressait surtout aux femmes, et il fit de nombreux partisans. Emprisonné à Salzbourg depuis 1815, il apprit avec stupeur en 1817 les crimes que le fanatisme avait fait commettre à quelques-uns de ses sectateurs. Transféré à Vienne dans la prison des prêtres, il donna des preuves suffisantes d'égarement et de faiblesse d'esprit pour qu'on lui imposât sa démission. Il f 15 nov. 1837, à Linz, complètement oublié. Sa secte ne lui survécut pas.

POÉSIE CHRÉTIENNE. Tout grand mouvement a en lui-même une poésie, qui se traduit et se reflète naturellement dans une littérature spéciale. Entre l'art et la religion il y a comme des rapports d'origine, et l'on a pu remarquer chez tous les peuples, que leurs premières poésies et quelques-uns de leurs plus grands poèmes ont été consacrés à l'histoire de leurs dieux ou à l'exposé de leur foi, de leurs souvenirs et de leurs espérances d'avenir. Le christianisme n'a pas échappé à cette loi générale, dont le cantique a été la plus constante manifestation; v. Hymnes. Mais, même en dehors du cantique chaque siècle a eu plus ou moins ses poètes et ses poèmes chrétiens, depuis l'évêque égyptien Nèpos, depuis Bardesanes qui a célébré le gnos-ticisme, jusqu'à la Nobla Leycson des vallées vandoises, jusqu'à Châteaubriand et Lamartine qui ont exalté le catholicisme ou glorifié le crucifix. L'histoire, et même la simple énuméra-tion de ces travaux formerait un volume. Clément d'Alexandrie cite déjà de nombreux auteurs qui ont chanté la religion, et dès lors ils se sont multipliés sous toutes les formes et dans tous les pays chrétiens. Bornons-nous à quelques indications. Dans les débuts les poètes tâtonnent, sauf en ce qui concerne les hymnes; ils n'osent pas innover, ils se traînent dans les ornières classiques. Falconia-Proba, femme du proconsul Adelphius, écrit une histoire de Jésus en hexamètres imités de Virgile, pendant qu'en Orient un rhéteur anonyme de Béryte et de Laodicée s'exerce à faire un Homère, un Pin-dare, un Ménandre chrétiens. Le feu sacré n'y est pas. Jean Damascène chante la théogonie, la Pentecôte, l'Ascension, mais très didactique-ment. Commodien prêche dans ses 80 Instructions contre les dieux des nations, et il enseigne juifs et païens dans son Carmeti apologétique. Juvencus f 413 raconte en beaux vers l'histoire évangélique et la vie du Sauveur. Paulin de Nola célèbre dans ses Natalitia l'évêque-martyr qu'il a remplacé. Prudence écrit des poèmes didactiques, polémiques, descriptifs, des quatrains, des hymnes, un Cathèmérinon (directions pour chaque heure du jour). Au 5®® et au 6®* siècles on trouve les noms bien connus de Sedulus, de Prosper d'Aquitaine qui fait un poème contre les semi-pélagiens, de Damase l'inventeur de la rime; de Fortunat l'ami de Radegonde, qui raconte en vers l'histoire de saint Martin; de saint Avit, qui laisse 6 poèmes sur la création, le péché, le déluge, etc. (v, Ruflfet, Les poètes chrétiens d'Occident). L'invasion des barbares amène un temps d'arrêt, mais dès l'entrée du moyen âge nous retrouvons presque ininterrompue la chaîne des hymnes religieux, et en outre une nouvelle littérature poétique dont les légendes surtout forment la base, et qui ne tarde pas à aboutir aux drames bibliques, ou mystères. Après Bède, le diacre Paul, Théodulphe, Walafried et Raban-Maur, vient au 10me siècle la célèbre Roswitha de Gandersheim. Du au 13®« siècle on remarque un notable épanouissement de la poésie latine: Odon de Cluny, le roi Robert, auteur du Veni Creator; Pierre Damien, Abélard, saint Bernard, Thomas d'Aquin, Bonaventure, Thomas de Célano, l'auteur présumé de Dies irœ; Jaco-poni. l'auteur du Stabat, illustrent cette période, qui se termine par les suaves et profondes méditations des mystiques, tels que Thomas a Kempis. Les langues modernes commencent à se former. Kâdmon, dans le Northumberland, emprunte le style épique pour raconter les histoires de la Bible; un poète alsacien chante Héliand et Louis-le-Débonnaire; les minnesân-ger exploitent le sentiment religieux qui a donné naissance aux croisades; d'autres poètes célèbrent le Krist, ou font le procès aux hérétiques; il y a là tout un monde d'histoires, d'anecdotes, de satires, de raisonnements et de mythologie ecclésiastique, et déjà l'on entrevoit dans des poèmes comme celui de Renard, le commencement de ce malaise qui doit finalement aboutir à la Réforme; les poètes donnent la main aux sermonnaires. L'Espagne au 13®* siècle, a son Gonzalo de Berceo, qui chante la Vierge, et Dominique le Jugement dernier; l'Italie, après s'être longtemps servie du latin, essaie son nouvel et poétique idiôme par l'organe de quelques franciscains et du fondateur de leur ordre, pour atteindre avec Dante, à la fin du 13"* siècle, la dernière limite de l'art et du génie. La Réforme inaugure avec ses psaumes et ses cantiques populaires, une ère toute nouvelle. Hans Sachs cultive tous les genres; Murren et Hutten manient avec vigueur le fouet de la satire contre les erreurs et les abus ecclésiastiques. Le Tasse en Italie chante les croisades et la Jérusalem délivrée; Corneille écrit Polyeucte; Racine, Athalie et Esther. Au 17®e siècle l'Angleterre a Mil ton, le Paradis perdu et le Paradis reconquis. Enfin dans les temps plus modernes l'Allemagne enregistre avec orgueil les noms de Klopstock et de sa Messiade; de Gellert, Cl audit», Lavater, Herder, Novalis, etc. Des essais religieux en une prose poétique ont été faits, ainsi que des tentatives pour porter sur la scène des sujets bibliques, Joseph, Moïse, Hazaël, Jean-Baptiste; mais les uns ont échoué, les autres appartiennent plutôt à l'art musical. Parmi les poètes religieux tout à fait modernes, dont le nombre est considérable, on doit citer en Angleterre Wordsworth, en Allemagne Arndt, Schenkendorf, Rttckert, Gerok, Knapp, et les catholiques Brentano, Diepenbrock, Pocci; en France des fragments de Victor Hugo, Lamartine, De Lavigne, Vidal, Pétavel, Malan, Vinet, Louisa Siefert, Alice de Chambrier. Il ne saurait échapper à personne que les vers, même les plus beaux, s'ils n'étaient pas dictés par une inspiration chrétienne, ont été éclipsés par ceux qui accentuent davantage la doctrine évangélique.

POIRET, Pierre, né 1646 à Metz, fds d'un armurier, était destiné à l'état de sculpteur, mais les circonstances lui permirent de faire à Bâle, dès 1664, des études de théol., et il en profita. En 1666 il était nommé pasteur à Heidelberg, en 1672 à Anweiler, près Deux-Ponts. La guerre le força de partir; il vint à Hambourg où il fit connaissance avec M'ieBourignon, puis en Hollande. Il finit par s'établir à Beinsbourg, près Leyde, où il f 1719. Conduit au mysticisme par Tauler et a Kempis, il sympathisa vite avec M1** Bourignon, dont il publia plus tard les œuvres, avec une notice. Il a trad. en français Thomas a Kempis, la Théol. germanique, et quelques autres ouvrages mystiques; il a publié aussi quelques opusculnsdeM™* Guyon. Parmi ses propres écrits, on distingue: La paix des bonnes âmes, L'économie divine, La théol. du cœur, La théol. réelle, Principes solides de la relig. chrét. Il avait été enthousiaste de Descartes; il finit par le combattre dans son traité: De eruditione triplici, Amsterd. 1707.

POISSON. L'Eglise des premiers temps, des catacombes et des martyrs, avait sa symbolique, on pour mieux dire, ses hiéroglyphes, une écriture mystérieuse et de convention. Le poisson, qui figure sur plusieurs monuments, formait en grec, par ses cinq lettres ixer2, les initiales de: Jésus-Christ, fils de Dieu, Sauveur, Iwou; xpicT&ç *jio; ScotYip. C'était la consolation des chrétiens, et les païens qui n'en avaient pas la clé, ne s'expliquaient pas ce signe de ralliement.

POISSY, petite ville de 2 à 3000 âmes, située sur la Seine, Seine-et-Oise, à 15 kilom. de Versailles; connue surtout par le colloque de 1561. Le conseil privé du roi, dans sa séance du 9 juillet, avait décidé d'interdire toute assemblée religieuse, mais avait adouci, sous la pression des circonstances, les peines prononcées contre les réformés. Il avait arrêté en même temps, par un édit publié le 25 et qui combla de joie les Guise et leurs amis, qu'une réunion aurait lieu en août, dans laquelle, en présence des prélats et des évêques, les ministres et les délégués des églises, munis de sauf-conduits, viendraient exposer leurs motifs devant le roi. Ce ne pouvait être ni un concile, ni un synode; on donna à cette réunion le nom de Colloque; conversation, conférence. Les égl. de France s'empressèrent de nommer leurs délégués, choisis presque tous parmi les hommes les plus distingués. Plusieurs églises étrangères s'y firent également représenter, entre autres Genève par Bèze, sur la demande du roi de Navarre, et Zurich par Pierre-Martyr (Vermigli), avec des garanties spéciales données par Charles IX aux sénateur* de Zurich. Dès le 17 août les membres présent adressèrent au roi une requête préliminaire, demandant lo que les évêques ne fussent pas à la fois juges et parties; 2° que le roi voulût bien présider lui-même le colloque; 3o que les questions fussent décidées par la seule Parole de Dieu, et 4o que deux secrétaires, choisis par les deux partis, comparassent journellement leurs procès-verbaux des séances, qui ne seraient valables qu'autant qu'ils auraient été ai-gués par chacun d'eux. II ne fut pas répondu à cette requête, cependant aussi modérée que légitime. Les pasteurs la renouvelèrent le 8 sept., en s'adressant à la reine-mère, qui s'engagea verbalement, mais sans promesse écrite, à faire observer ces conditions. Le 23 août Bèze arrivait à Saint-Germain, où les députés, crainte d<> surprise, étaient tous logés près du palais, dans une maison appartenant au cardinal de Châtil-lon, frère de Coligny. Le soir même, selou d'autres le lendemain, Bèze se présenta chez le roi de Navarre, et discuta avec le cardinal de Lorraine, en présence de Catherine et de plusieurs personnages du plus haut rang, sur la valeur et l'importance du dogme de la transsubstantiation. Le lendemain 24 il prêchait dan* le salon du prince de Condé; les autres pasteurs employèrent également à prêcher en divers endroits, les jours qui précédèrent la réunion. Jeanne d'Albret, reine de Navarre, finit aussi par arriver, accompagnée de son vieux pasteur, Jean de la Tour, septuagénaire. Le 9 sept., un mardi, la conférence s'ouvrit enfin dans le grand réfectoire du couvent des religieuses de Poissy. Le roi l'ouvrit en personne, assis sur son trône, ayant à sa droite le duc d'Orléans et le roi de Navarre, à sa gauche Catherine de Médicis et la reine de Navarre, devant lui des princes, des chevaliers, des seigneurs, des dames de qualité, 6 cardinaux, 36 évêques et archevêques, une foule d'ecclésiastiques, de docteurs et de délégués du clergé. Les 12 ministres et les 22 dépotés des églises ne furent introduits qu'après le discours du roi et une réponse du cardinal de Tournon. Ils étaient conduits par des gardes qui paraissaient aussi bien les surveiller que les protéger. Bèze, chargé d une voix unanime de porter la parole, commença par la belle prière, ou Confession des péchés, qui 4ès lors a pris place dans les liturgies réformées; puis, dans un discours précis, clair, mesuré, plein de convenance et de fermeté, que M. Henri Martin regarde comme un des plus beaux spécimens de l'éloquence protestante, il établit d'abord les articles de foi sur lesquels les deux Églises étaient d'accord; après quoi, passant k ceux sur lesquels il y avait divergence, il insista surtout sur le fondement de la foi, la Cène et le gouvernement de l'Église. On l'écouta tranquillement sur le premier point, quand il déclara que les protestants n'admettaient d'autre autorité que la Bible, les écrits des pères et les conciles n'ayant eux-mêmes de valeur qu'autant qu'ils y étaient conformes. Mais quand, en parlant de la Cène, il dit que • le corps de J.-C. est éloigné du pain et du vin autant que le plus haut ciel est éloigné de la terre, t les prélats soulevèrent une véritable tempête, demandant que la parole lui fût retirée, ou qu'il leur fût permis k eux de se retirer de l'assemblée. Le roi leur refusa l'un et l'autre, et Bèze put achever son discours en paix, relevant les vices du gouvernement de l'Église, sans trop insister sur ses abus, et prolestant de la fidélité des réformés à la puissance royale et de leur soumission en tout ce qui ne touchait pas le service de Dieu. Après une courte prière il présenta derechef au roi la Confession de foi des Églises réformées.

Le lendemain Bèze écrivit à la reine-mère pour justifier ce qu'il avait dit de la Cène et pour donner les explications que le tumulte des prélats l'avait empêché de compléter.

En même temps les évêques s'occupaient de la réponse à faire. Ils comprenaient la difficulté de la chose et cherchèrent à la tourner de deux manières: d'abord en ne répondant pas et en se bornant k opposer simplement aux ministres une profession de foi contraire, à laquelle ils seraient sommés de souscrire, sous peine d'être condamnés et de voir la conférence close; mais le chancelier de l'Hôpital refusa de se prêter à cette étrange manœuvre qui eût été la négation même du colloque. Déboutés de ce côté, les catholiques, à l'instigation du card. de Lorraine, imaginèrent un autre expédient, savoir de mettre aux prises les calvinistes et les luthériens, mais ce projet n'aboutit pas non plus, l'un des docteurs venus de Tubingue étant mort de la peste en arrivant à Paris, deux autres (dont Baudouin) ayant retardé leur voyage à cause de cet accident, et les deux autres, de Heidelberg, étant d'accord avec les réformés. Il fallut donc que le cardinal s'exécutât, qu'il fit son discours, et il le fit le 16 sept., ne manquant ni de talent, ni d'adresse, un peu prolixe et diffus, ne parlant que de la Cène et de l'autorité de l'Église, et demandant la clôture des conférences. Bèze demanda de répondre immédiatement, mais le roi ajourna à une autre séance et ne reparut plus au colloque. Malgré les efforts des prélats qui se réservaient de dire que les ministres n'avaient pas répondu, les réformés obtinrent une nouvelle conférence, mais non publique, dans la chambre priorale du couvent. Les deux reines y assistèrent avec 2 dames d'honneur, les princes du sang et les membres du conseil privé. Le nombre des ministres fut réduit k 12, le nombre des docteurs catholiques, réduit aussi, fut fortifié en qualité par l'arrivée du cardinal de Ferrare et de Jacq. Lainez, général des jésuites. Cette conférence, qui eut lieu le 24, fut suivie d'une 4™ et dernière le 26 et roula surtout sur l'unité de l'Église et sur la Cène. Bèze et P. Martyr défendirent les doctrines de la Réforme avec un tact et une éloquence qui furent admirés même de leurs adversaires; le docteur d'Espense, le moine Xaintes, le cardinal de Lorraine et Lainez défendirent la doctrine catholique; ce dernier se couvrit de ridicule en traitant les protestants de singes et de renards. Le Colloque fut rompu, mais Catherine, pour traîner les choses en longueur, essaya d'organiser encore deux ou trois conférences privées où les théologiens qui ne s'entendaient pas sur la Cène devaient tâcher de trouver une formule commune, qu'ils pussent signer les uns et les autres. Les ministres rejetèrent la première formule, comme trop vague; les docteurs de Sorbonne rejetèrent la seconde comme trop précise et hérétique, et après 6 jours de débats, le 4 oct.. les prélats déclarèrent que si les ministres n'adîhéraient pas à la doctrine catholique sur la Cène, ils ne voulaient plus avoir affaire avec eux. Ce fut la fin du Colloque de Poissy: les ministres rentrèrent dans leurs églises; Bèze seul, retenu par les deux reines, resta k la cour.

POITIERS, vieille cité romaine, siège d'un évêché qui date du 4^ siècle, et qui relève auj. de l'archev. de Bordeaux. Il ne s'y est pas tenu moins de 23 conciles, mais en général peu importants. Le premier 589 ou 590 fut convoqué k propos d'une révolution de religieuses, dans laquelle le sang coula; une nonne Chrodieldis s'était révoltée contre son abbesse Leubovera. En 935, nouveau synode, sans signification. Celui de l'an 1000 préluda à l'établissement de la Trêve de Dieu, par la résolution qui fut votée que toutes les questions litigieuses se résoudraient par le droit et non par la force. En 1075 Bérenger fut presque assassiné pour avoir soupçonné Hilaire de Poitiers d'hérésie. En janvier 1078, concile provoqué par l'év. Hugo de Die, Fun des partisans les plus ardents de Grégoire VII; ses dix canons ne sont guère que le développement et l'application des décrets rendus par le pape contre la simonie et le mariage des prêtres. Celui de 1100 s'occupa surtout du mariage de Philippe Ier qui, divorcé, avait épousé Bertrade, également divorcée, et était excommunié depuis 1092. — Poitiers a été illustré par ses évêques Hilaire et Fortunat et par Radegonde. Il a eu beaucoup à souffrir pendant les guerres de religion.

POLANUS, Amand de Polansdorf, né 16 déc. 1561 à Oppeln, Silésie; après ses premières études, visita Breslau, Tubingue, Bâle, Genève, Heidelberg, passa 2 ans chez les moraves, et fut nommé 1596 prof, de théol. pour l'A. T. à Bâle. Considéré pour sa piété et pour son érudition, il reçut les plus grandes distinctions académiques, et f 18 juill. 1610. Outre ses ouvrages sur l'A. T.. il a écrit sur l'élection de grâce, d'après Rom. 9, 11., et quelques traités sur les différences qui séparent l'Égl. cathol. des Églises protestantes.

POLE, ou PooL Reginald, né en mars 1500 à Stowerton-Castle, Stafford, était par sa mère, une Salisbury, parent de Henri VII, Édouard IV et Henri VIII. Doté de riches bénéfices, il put après ses études d'Oxford, visiter Padoue, Londres et Paris. Il consacra quelques années à ces voyages. Ayant désapprouvé le divorce du roi, il dut quitter l'Angleterre et se rendit à Avignon, puis à Padoue, où il publia en 1535 un écrit très vif Pro unitatis ecclesiœ defensione, dirigé contre Henri VUI. Le pape l'en récompensa en 1536 par le chapeau de cardinal; le roi l'en punit en lui retirant ses bénéfices, le déclara coupable de haute trahison, fit mettre sa tête à prix, et fit exécuter son frère et sa mère. Envoyé en France comme légat du pape, et son extradition ayant été réclamée, Pôle s'enfuit de nouveau en Italie, et le pape l'employa à plusieurs missions en Allemagne; il en fit un des 3 légats qui présidèrent à l'ouverture du conc. de Trente. Malgré ses relations avec les luthériens, et quoique son adhésion à la doctrine de la justification par la foi, l'eût rendu suspect, il fut sur le point d'être nommé pape après la mort de Paul III. Sous Marie-la-Sanguinaire il fut nommé par Jules III, cardinal-légat en Angleterre; mais Charles-Quint le retint longtemps, parce qu'il craignait de le voir s'opposer au mariage de Marie avec Philippe 11. C'est seulement quand tout fut conclu qu'il put rentrer à Londres, nov. 1554. Il obtint d'un parlement servile le retrait de toutes les lois contraires au catholicisme et le retour de Y Angleterre k l'unité romaine. Il combattit cependant l'usage des moyens violents contre les protestants, mais comme son orthodoxie était déjà suspecte, il ne put empêcher ni les cruautés commandées par l'archev. Gardiner, ni la rentrée des jésuites. Devenu en 1555 archev. de Cantorbéry, il dut subir ce qui avait été décidé par son prédécesseur. Ses efforts pour réformer son clergé réveillèrent de nouveau les soupçons élevés contre lui, et il ne fallut rien moins que la protection d'Élisabeth pour faire révoquer la bulle de Paul IV qui l'appelait à venir se justifier à Rome, f 4558. Il est hors de doute qu'il penchait vers la Réforme, mais sa faiblesse de caractère l'empêcha de réaliser le bien qu'il rêvait.

POLÉMIQUE, signifie d'une manière générale Discussion; dans un sens plus restreint c'est, en théologie, l'étude, l'examen et la réfutation des idées que l'on regarde comme erronées, te encore on distingue: l'Apologétique, ou défense du christianisme contre les incrédules et les indifférents; la Controverse, ou discussions entre les protestants et les catholiques; et la Polémique, discussion entre les protestants des diverses dénominations. Cependant la démarcation entre ces trois branches n'est pas si marquée qu'elles n'empiètent souvent l'une sur l'autre. Les plus anciens polémistes connus sont auai des apologètes: Irénée, Hippolyte, Épiphanet. Mais c'est depuis la Réformation surtout, que la polémique a pris un caractère positif comme branche d'enseignement. Les jésuites s'y sont distingués: Alphonse de Castro dans ses 14 livres Advenus amnes hœresei; Bellarmin dans ses Disputationes. Bossuet occupe un rang éleve par son Exposition de la doctrine de l'Égl. catholique. Du côté des protestants l'Allemagne nomme Chemnitz, dans son étude sur le conc. de Trente; Calov, dans sa synopse des controverses; Hunnius. Hombeck, Walch, etc.; la France a Claude, Charnier, Du Moulin, Drelin-court, F. Turretin et grand nombre d'autres. Avec Schleiermacher et Lttcke la polémique est devenue une science plus objective, qui participe de la philos, et de l'histoire des dogmes. Sack a écrit un livre sur la Polémique chrétienne; enfin Hase, un de ses principaux ouvrages: Des rapports du protestantisme avec l'Égl. cathol. 1871.

POLENZ, v. Georges 6<>.

POLIANDER (Graumann, l'homme gris), Jean, né 1487 à Neustadt, Palatinat. Recteur de l'école de Saint-Thomas à Leipzig, il assista, comme secrétaire d'Eck, à la dispute de Leipzig et fut gagné à la cause de la Réforme. Il laprfr-cha dès 1520, mais dut donner sa démission. En 1522 il se rendit à Wittenberg et, par l'influe** de Luther, fut placé par le duc Albert de Prusse, comme pasteur à Kônigsberg 1525. 11 y rendit de grands services, non seulement an aidant ses collègues Brismann et Speratu*, mais encore en travaillant à l'organisation de l'Égl. de Prusse. + 1541. Auteur de cantiques estimés.

POLOGNE. Ce grand pays, sans frontières naturelles, placé entre les Slaves orientaux auxquels il appartenait comme race, et l'Allemagne à laquelle il appartenait par sa position géographique, a été longtemps tiraillé entre ces deux influences contraires, par conséquent entre l'Église grecque, dont il reçut l'Évangile par la Moravie, et l'Égl. romaine que représentaient pour lui les empereurs d'Allemagne. Longtemps idolâtre, ivrogne et voluptueux jusque dans le culte de ses dieux, il ne parait avoir été évangélisé sérieusement qu'au 10me siècle par des chrétiens venus de Moravie à la suite de l'invasion hongroise. Le duc Zymyslav, qui régna depuis 913, se montra mieux disposé que ses prédécesseurs Sémowit et Lesco, mais c'est son fils Miécislav, ou Miesco, 963, qui le premier se déclara franchement chrétien, peut-être sous l'influence de sa pieuse femme Dombrowka, fille de Boleslav, et le 7 mars 967 le peuple fut engagé à jeter ses idoles dans le fleuve. Le culte se faisait encore en langue grecque, d'après le rite grec, et les prêtres se mariaient. Mais l'emp. Othon l*r, qui venait de fonder l'archevêché de Magdebourg, et qui désirait étendre sa puissance en Pologne, décida l'érection d'un évê-ché à Posen, et le subordonna au métropolitain de Magdebourg, c.-à-d. à l'Église de Rome. Pour ces populations il n'y avait là qu'une nuance; elles se soumirent, et ne résistèrent quelque temps que pour l'emploi du latin qui leur était antipathique. La seconde femme de Miécislav entraîna le roi et la noblesse dans le sens du catholicisme, et la question fut tranchée. Adalbert et Gaudentius arrivèrent dans le pays, gagnèrent Dantzigà l'Évangile, vers 997, et bientôt le christianisme fut la religion nationale; Gaudentius était archev. de Gnesen, Popo év. de Cracovie, Reimbert de Colberg, Clément de Breslau. Pendant les siècles qui suivirent, le pays resta catholique, mais avec des alternances de révolte contre Rome, suivant que la politique de ses princes le rapprochait de l'Allemagne ou de la Russie, et surtout parce que son caractère le rendait impatient de tout joug et très susceptible à l'endroit de son indépendance. 11 ne prit aucune part aux croisades parce qu'il n'était pas sur leur route, et parce qu'il avait assez à faire chez lui comme avant-poste du christianisme dans le nord. La Réforme s'y introduisit d'abord sans trop de difficultés. Les nombreux proscrits pour cause de religion, auxquels dans le moyen âge la Pologne avait donné asile, vaudois, beghards, et autres, avaient préparé le terrain; Mi liez avait prêché à Gnesen, Jérôme avait professé dans l'univ. de Cracovie, et l'inquisition dont Jean XXII voulut la doter ne fit que donner plus de force aux tentatives réformatrices des hussiles. D'ailleurs la noblesse était aussi instruite qu'intelligente; la Bible était traduite en polonais, le culte se célébrait presque partout en langue vulgaire, les relations commerciales avec l'Allemagne s'étaient multipliées, et l'autonomie municipale permettait à chaque ville de s'organiser librement au point de vue religieux, pourvu que la manifestation n'allât pas jusqu'à l'émeute, comme il était arrivé à Dantzig sous la direction de Jean Hegge, 1525-1526. Le dominicain Samuel, à Posen en 1520, et Jean Seclucyan en 1526 par sa publication du N. T., donnèrent le signal et prêchèrent les premiers la Réforme; Culva ouvrit en 1529 une école évangélique à Wilna; le mouvement se généralisa, et de 1548 à 1572, sous Sigismond- Auguste, la Pologne et la Lithuanie étaient presque entièrement acquises à l'Évangile. Le roi lui-même était sympathique et s'était mis en relation directe avec Calvin. La diète de Petrikau, 1555, demandait un concile national, malgré l'opposition de l'év. Hosius d'Ermland. Les réformés s'organisaient en 1559 sous la conduite de Cruciger, Verge-rius, Lasky; les luthériens en faisaient autant de leur côté. En 1563 un Édit de tolérance accordait à tous le droit de vivre et leur imposait la paix et des égards mutuels. Malheureusement les jésuites s'étaient introduits dans le pays, et ils avaient ouvert un premier collège à Brauns-berg 1563. D'un autre côté les antitrinitaires, avec leurs doctrines énervantes, Socin, Biandrata, Occhino. jetaient le trouble dans les églises et forçaient en 1570 les évangéliques de conclure le Consensus de Sandomir, pendant que les sociniens se constituaient en Ecclesia minor. A l'avènement de Henri d'Anjou 1573, un traité, Pax dimdentium, assura aux protestants l'exercice de leur culte, mais Sigismond III, tout en respectant la lettre du traité, s'arrangea pour ne donner d'emplois et d'honneurs qu ses amis les catholiques, ce qui décida la défection d'une grande partie de la noblesse. Le traité de Varsovie 1717 interdit d'élever de nouvelles églises; un édit de 1733 exclut les protestants de toutes les charges publiques, et le mal en vint à ce point qu'en 1764 la Russie et la Prusse durent se charger du protectorat des dissidente. Par une occupation de plus de 40 années, les jésuites avaient ruiné le pays. La diète de 1768 réduisit à néant les promesses et les garanties qui avaient été données aux évangéliques, et il ne fallut rien moins que l'arrivée du prince russe Repuin, qui vint avec des troupes et transporta en Russie les magnats réGalcitiants, pour forcer la diète à retirer ses intolérantes mesures. Mais c'était trop tard pour les protestants; c'était trop tard aussi pour la Pologne elle-même, les puissances voisines allaient procéder à son premier démembrement. En 1839, à la suite du synode de Polotsk, un ukase rompit les relations des grecs-unis, qui existaient avec Rome depuis 1595. et en 1847 de nouvelles restrictions furent apportées au concordat de 1818. Enfin le clergé ayant pactisé avec l'insurrection en 1863, l'empereur supprima les couvents, sécularisa leurs biens, imposa la langue russe dans le culte, paya le clergé et travailla ostensiblement à ramener la Pologne à la foi grecque orthodoxe.

POLOTSK, petite ville de Lithuanie, à 500 kil. S.-O. de Petersbourg. Les luthériens de Pologne y tinrent en 1563 une conférence, où ils élaborèrent leur constitution ecclésiastique, telle qu'elle fut adoptée en 1565 par le synode de Gostyn. En 1839 un synode grec-uni déclara pour la Lithuanie et la Russie blanche, rompre ses relations avec Rome.

POLYCARPE, une des plus nobles figures du siècle apostolique. Disciple de saint Jean, et par conséquent instruit par un témoin oculaire des actes de la vie de Jésus, il fut converti fort jeune au christianisme. Son disciple Irénée nous a conservé le souvenir de sa charité, de son zèle et de sa foi. A la fin du 1er siècle il fut nommé év. deSmyrne.il étaitamidePapias. On ne sait presque rien de son long ministère, si ce n'est qu'il se rendit à Rome vers le milieu du second siècle, qu'il y vit l'év. Anicet, et que c'est là que fut constatée pour la l*e fois la divergence qui existait entre les Égl. d'Orient et celles d'occident sur le jour où se célébrait la Pâque. Il vit poindre et se répandre beaucoup d'hérésies et les combattit vivement. Rencontrant un jour Marcion, et il lui dit: Je te connais, fils de Satan. En 167, sous Marc-Au-rèle, les persécutions ayant éclaté à Smyrne, ses amis et son église l'engagèrent à fuir, mais il fut découvert par ses persécuteurs. On hésitait à condamner un vieillard presque nonagénaire, et on lui demanda de renier le Christ. Les juges et le proconsul lui offraient de crier seulement: A bas les athées ! Mais comme ils entendaient par là les chrétiens, dont le Dieu n'est pas visible, il s'y refusa: « Que la volonté de Dieu soit faite, dit-il; voilà 86 ans que je le sers; et il ne m'a jamais fait que du bien. Comment renierais-je mon Seigneur et mon Maître ! » Le peuple apporta alors du bois, et le vieux martyr fut livré aux flammes; il mourut en paix après avoir rendu grâce à Dieu, 168 ou 169 (d'après Waddington 154; d'après Lipsius 156). Il reste de lui uneépître aux Philippiens, qui est un précieux document; style simple, beaucoup d'onction; elle est citée par Irénée et Eusèbe. Il avait écrit aussi une relation de la mort de Jean, malheureusement perdue.

— On connaît aussi sous le nom de Polycarpe (cueilli partout) un recueil de canons fait avant 1118 par le card. Grégoire de Pavie, un des principaux travaux du parti de Grégoire VU, qui fut utilisé pour la revision du Corpus juris 1580.

POLYCRATE, év. d'Ephèse vers 190, écrivit au sujet de la date de Pâques une lettre synodale, en réponse à Victor de Rome qui prétendait imposer aux orientaux l'époque usitée en occident. Il cite l'autorité des apôtres et des évêques ses prédécesseurs; sa lettre est intéressante parce qu'elle fait connaître l'état des églises et l'usage qu'on faisait du N. T.

POLYGLOTTES, éditions de la Bible qui, dans un intérêt critique et scientifique, présentent à côté du texte original, les traductions qui en ont été faites en diverses langues. Les plus connues sont 1° celle de Complutum, v. Complutensis; 2° celle dePlantin, Anvers 1569-1572, 8 vol. fo, impr. par ordre de Philippe II, et appelée pour cela editio regia; elle fut faite avec le concours de plus, savants par Benoit Arias, v. Montanus 2o, et renfermait l'hébreu, la Vulgate, les Septante; pour le N. T. la Pe-shito, et plus, fragments des targums avec trad. latine; 3° l'édition de Paris, faite aux frais d'un avocat au parlement, Guy Michel le Jay, qui y consacra toute sa fortune; impr. chez Vitré 1629-1645, 18 vol. f*. C'est la reproduction de la précédente, plus pour le N. T. une version arabe avec sa trad. latine, et pour l'A, T. le Pentateuque samaritain, avec trad. arabe et syriaque, et la version latine; c'est la plus riche polyglotte comme édition, mais sans grande valeur scientifique; 4° l'éd. de Londres, publ. par l'év. Bryan Walton de Chester, avec l'aide des savants et des orientalistes les plus distingués, achevée 1657, 6 vol. f° Elle contient pour l'A. T. le texte hébreu avec la version intercalaire d'Anvers, le Pentateuque samaritain, les Septante (mss. du Vatican avec les variantes du mss. Alexandrin), des fragments de l'Itala, la Vulgate, la Peshito avec les Apocryphes, la version arabe, les targums, la trad. samaritaine du Pentateuque. l'éthiopienne des Psaumes et du Cantique; nne trad. latine accompagne partout le texte non latin. Le N. T. donne le texte d'Étienne, avec la version d'Arias Montanus et les variantes du mss. alexandrin; la Peshito, la Vulgate, l'arabe et l'éthiopienne; même les évangiles en persan; le tout avec une trad. latine littérale. Un Lexicon en 7 langues, deCas-tellus, y est joint. Les éditions postérieures sont dédiées à Charles II, mais il en reste encore quelques exemplaires avec la dédicace républicaine. Cette polyglotte est très estimée; 5<> celle de Heidelberg 1599, n'a que l'hébreu, les Septante, la Vulgate, et pour le N. T. la version interlinéaire d'Arias; 6° Celle de Hambourg 1596: hébreu, grec, allemand de Luther, latin; peu importante; 7° Celle de Nuremberg 1599, inachevée, ne va que jusqu'à Ruth; hébreu, grec, latin et allemand; 8° celle de Leipzig, de Reineccius, 1750, en 3 langues, avec notes et variantes; 9° celle de Bielefeld, par Stier et Theile, 1845; hébr., grec, latin, allemand, parfois anglais, avec les principales variantes pour le N. T.; 10° enfin la magnifique Polyglottè de Londres, en 8 langues 1831, et celle de 1876.

POLYNÉSIE, c.-à-d. beaucoup d'îles, ou Australie9 terres australes. On comprend généralement sous cette désignation, et comme 5me partie du monde, toutes les îles, grandes ou petites, de l'Océan Pacifique, que Y on divise, assez arbitrairement d'ailleurs, en 3 ou 4 groupes distincts, dont le premier et le plus considérable est formé par la Nouvelle-Hollande, la terre van Diemen et la Nouvelle-Zélande. C'est en 1788 que les Anglais s'y établirent pour la lr« fois, et peu à peu ils en firent des lieux de déportation. On y eut des chapelains pour les condamnés. Vers 1824 plusieurs sociétés missionnaires tentèrent de porter l'Évangile aux indigènes papous, mais sans succès. Les moraves ne se découragèrent pas, et depuis 1859 quelques conversions ont eu lieu, quelques églises ont été fondées, d'autres sociétés de missions sont venues travailler dans ce champ difficile, et à côté des nombreuses congrégations formées d'immigrants européens, on y compte auj. des écoles, des églises et des séminaires formés de naturels convertis, et entretenus par différentes sociétés qui se sont partagé la tâche. Les épis-copaux sont les plus nombreux; ils n'ont pas moins de 12 évéques, dont celui de Sidney est le primat. Les catholiques ont un archevêque, et dans chaque province un évêque; ce sont presque tous des Irlandais. Il y a des presbytériens presque partout, régis par une Assemblée générale qui se réunit chaque année. Les wes-leyens, puissamment organisés, ont des missions prospères sur plusieurs points, soit dans la Nouvelle-Hollande, soit ailleurs; v. Nouvelle-Zélande. La Nouvelle-Guinée, évangélisée par les Hollandais, et depuis 1771 par la London mission. Soc. est un sol réfractaire, grâce au peu de développement de ses habitants qui sont Papous. Célèbes en.revanche, sur 114,000 insulaires, compte 80,000 chrétiens, avec 125 écoles et 199 paroisses. A Sumatra il y a 25 missionnaires allemands et environ 5,000 indigènes convertis. Dans la Polynésie proprement dite, presque en entier christianisée, et malaise de race, on remarque les centres d'O' Tahiti, que v., les îles de la Société, de Tonga, Sandwich, Carolines et Marquises. Dans la Micronésie, l'archipel Gilbert. Dans la Mélanésie enfin, les Iles Fidji où, sur une population de 120,000 âmes, naguère cannibale, on compte plus de 102,000 assistants réguliers au cuite, avec plus de 300 chapelles, et 42,000 enfants fréquentant 1534 écoles; les Nouvelles-Hébrides, 3,000 natifs suivant le culte, 800 communiants, une centaine d'instituteurs indigènes; les lies de Banks, Santa-Crux, Salomon, où le pieux évêque Patteson trouva le martyre en 1871. En tout, non compris la Nouvelle-Hollande et les Européens établis, la mission compte en Polynésie environ 340,000 chrétiens indigènes. Darwin lui-même rend hommage au bien fait par les missionnaires.

POLYTHÉISME. La foi en un certain nombre de dieux spéciaux se rattache d'une part au sentiment presque instinctif qui révèle à l'homme une puissance supérieure, fatale, irresponsable, invisible; de l'autre, à la vue des phénomènes extérieurs qui en sont comme la manifestation. Le premier sentiment mène d'abord au monothéisme, à l'idée de l'unité de Dieu; mais l'action de ce Dieu étant multiple, diverse, souvent contradictoire, se manifestant partout à la fois dans la nature, avec autant d'unité réelle que de variété dans la forme, l'homme en vient in* volontairement à confondre l'effet avec la cause, la création avec le créateur, et il aboutit à un certain panthéisme, à la divinisation de la nature, qui est pour lui, sinon l'explication, du moins la conciliation des deux termes contraires. Mais comme d'un autre côté les phénomènes naturels se présentent indépendants les uns des autres, chacun ayant son existence propre, par* fois en lutte et par conséquent sans unité, le panthéisme se décompose en forces, c.-à-d. en divinités distinctes, chacune préposée à une manifestation particulière de la vie générale. Ici l'imagination, ou le génie, a beau jeu, et suivant le développement d'un peuple, sa religion sera plus ou moins esthétique. Au bas de l'échelle on rencontre le fétichisme, c.-à-d. l'adoration d'objets matériels. Puis, un peu plus haut, le culte de la nature et de ses forces, tantôt sans représentations extérieures, sans temples, dans les bois, au bord des fleuves; tantôt avec des images symboliques, chez les Assyriens, les Babyloniens, les Phéniciens; c'est l'idolâtrie proprement dite. Les anthropomor-phismes, la personnification des forces de la nature, forme un degré plus élevé; de même l'idéalisation des vertus, des arts, des sciences. C'est la mythologie grecque; plus tard il s'y est joint, mais à un tout autre point de vue, comme dans le bouddhisme, l'exaltation, ou l'apothéose d'hommes ayant rendu de grands services à la patrie, culte des morts qui s'est reproduit au sein (le l'Égl. chrétienne. Enfin le dualisme,

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qui n'est qne la réduction du polythéisme, et qui ramène à deux principes, l'un bon et l'autre mauvais, toutes les manifestations de ces puissances étranges, dont les unes créent et fécondent, les autres nuisent et détruisent. On comprend que l'idée morale n'ait aucune place dans ces différents systèmes, ou si la morale y pénètre, c'est par sa force propre, par la force de la conscience et de la volonté, par conséquent malgré le système et en lui faisant violence, v. Paganisme, et Panthéisme.

POMBAL (dom Sébastien-Joseph de Carvalho-Melho, comte d'Oeyras, marquis de), né 1699 à Soura près Coïmbre. Après avoir étudié le droit il fit quelques années de service militaire, se remit aux études, fut envoyé en 1739 à Londres comme secrétaire d'ambassade, en 1745 à Vienne comme ambassadeur. En 1750 le roi Joseph le nomma ministre des affaires étrangères et en 1756 premier ministre. Il garda le pouvoir pendant 27 ans, et se distingua par des mesures utiles, par l'impulsion qu'il imprima au commerce, par la sage réorganisation des finances et par un grand nombre d'importantes réformes. Il avait trouvé le Portugal endetté; en quittant les affaires il laissait 240 millions dans les caisses de l'État, malgré toutes les dépenses qu'il avait faites, entre autres pour relever Lisbonne détruite par le tremblement de terre de 1755. Mais ce qui a le plus contribué à le rendre célèbre, c'est la lutte victorieuse qu'il eut à soutenir contre les jésuites. Ses réformes lui avaient attiré la haine des nobles et du clergé; il avait diminué le pouvoir de l'inquisition et défendu les droits de l'État. Les jésuites lui déclarèrent une guerre sourde; il leur répondit à ciel ouvert, leur retira l'administration du Paraguay, obtint contre eux du pape un décret de réforme 1757, confisqua leurs biens, et ayant reconnu leur main dans un complot contre la vie du roi, en fit exécuter ou bannir quel-ques-uns et finalement les expulsa du Portugal et du Brésil 1759. Il les fit tous embarquer pour l'Italie et faillit se brouiller à ce sujet avec le pape; il était môme sur le point de rompre avec Rome, quand Clément XIII mourut. Le pape suivant ayant donné satisfaction au Portugal et à l'Europe, en supprimant l'ordre, la paix fut rétablie. En 1777 Marie ayant succédé à Joseph, la politique changea; Pombal fut disgracié, ses ennemis reprirent le dessus; on lui fit son procès; on exploita contre lui ses idées philosophiques et son caractère hautain. Il fut condamné à mort, mais la reine commua la peine, et il f en exil 8 mai 1782. C'est un des ministres qui ont le plus fait pour la grandeur du Portugal. Malgré des rivalités commerciales très vives, il avait pris parti pour l'Angleterre contre les Bourbons en 1762.

POMÈRANIE, province située entre la Vis-tule, l'Oder et la Baltique; envahie au 6» siècle par les Vendes, les Polanes et les Luticiens, sous le nom général de Lèches. Charlemagne et Louis-le-Déb. étendirent jusqu'à eux leurs conquêtes, et fondèrent l'évêché de Hambourg pour les évangéliser; les moines de Corvey fondèrent aussi une mission à Rugen et y installèrent un èvêque; Otton y envoya des moines de Magdebourg, mais tous ces essais n'eurent pas de suite. C'est seulement au 10®« siècle, après que la Pologne se fut soumis le pays, qu'une mission sérieuse put commencer, et les débuts ne furent pas faciles. Un évêché fut fondé à Colberg l'an 1000 par Boleslav 1er, mais il dura peu, les Poméraniens s'apercevant qu'on ne voulait les convertir que pour les mieux dominer. Sous Boleslav ni l'œuvre reprit dans de meilleures conditions. Le moine espagnol Bernard, simple et pauvre, avait échoué en personne 1122, mais il envoya à sa place le saint év. Otton, de Bamberg, q. v. et celui-ci amena les populations et la diète à la foi. L'év. Adal-bert lui succéda, fonda l'évêché de Wollin, qui fut plus tard transféré à Cammin, et placé sous la direction immédiate du pape. L'île de Rugen ne se soumit qu'en 1168 à Waldemar et à l'Évangile. Avec Henri-le-Lion la Pomèranie fut définitivement acquise à la profession du christianisme. La Réforme y pénétra 1520 par les écrits de Luther, avidement lus dans les couvents, entre autres dans celui de Belbuk (d'où Bugenhagen sortit pour se rendre à Wittenberg), malgré l'opposition de l'év. Érasme de Manteufel. La diète de Treptow 1534 consacra la liberté des cultes. L'évêché de Cammin resta aux évangéliques, et fut longtemps occupé par des princes de la maison ducale. La Formule de concorde, d'abord repoussée, finit cependant vers le milieu du 17me siècle par être admise. Après la guerre de Trente ans une partie de la Pomèranie resta aux Suédois. Elle fut donnée à la Prusse en 1815, et l'Union confessionnelle y fut introduite, quoiqu'il s'y trouvât peu de réformés; les luthériens stricts de la Pom. postérieure s'organisèrent en dissidence et se rattachèrent au consistoire de Breslau.

POMERANUS, v. Bugenhagen.

POMORÉNIENS, v. Raskolniks.

POMPONACCI, Pierre, 1462-1526, prof, de philos, à Padoue et à Bologne, un des humanistes les plus distingués de l'Italie, connu surtout comme disciple fervent d'Aristote. On l'a soupçonné d'athéisme. Il partait du principe qu'une chose peut être vraie en philos, et basse en théol., et il distinguait entre la connaissance philosophique et la connaissance pratique, dont les résultats peuvent varier; cela pourrait mener loin. Dans son traité de l'Immortalité des

âmes, qui fat condamné en 4513, il soutenait qu'on ne peut prouver l'immortalité de l'âme par la seule raison, et subsidiairement que les âmes meurent jusqu'au jour du jugement. Il explique aussi les miracles par un développement croissant des forces de la nature, dans son De naturalium effectuum admirandorum causis. Son traité Des Incantations fut mis à l'index. Esprit original, il parait avoir eu plus d'idées que de foi.

PONTICUS, garçon de 15 ans, qui souffrit avec beaucoup de fermeté le martyre sous Marc-Àurèle, pendant les persécutions de Vienne et de Lyon, 177: d'après Eusèbe.

PONTIEN, 18">e év. ou pape de Rome, 230. Inconnu; n'est pas même dans Douillet. On dit que sous la persécution maximienne il fut banni en Sardaigne avec son ami Hippolyte, qu'il y donna sa démission et f 236. Son corps aurait été transporté à Rome par Fabien et enterré au cimetière de Galliste. C'est sous lui qu'un synode aurait adhéré à la condamnation d'Origène prononcée 231 par Démétrius, év. d'Alexandrie.

PONTIFE,du latin pontifex, faiseur de ponts, nom donné d'abord dans l'ancienne Rome aux chefs du culte, soit qu'ils présidassent à la construction des ponts de la ville, soit qu'ils eussent la charge spéciale de l'entretien et des réparations du pont sublicien (sur pilotis). Leur autorité était très grande. Ils étaient élus tantôt par le peuple, tantôt par les empereurs; parfois ils * se recrutaient eux-mêmes. Ils choisissaient dans leur sein le souverain pontife, nommé à vie, qui consacrait les prêtres, rédigeait les annales, tranchait les questions religieuses et matrimoniales. convoquait et présidait les comices, et avait une inspection spéciale sur les jeunes vierges vouées au culte de Vesta. Les pontifes portaient la robe prétexte; ils avaient pour coiffure un bonnet de laine de forme conique, et k la main une baguette entourée de laine et se terminant par une houppe. Cette magistrature, à la fois puissante et populaire, datait de Numa. Quand les chrétiens, sortis de l'ère des persécutions, commencèrent à se sentir les maîtres à Rome, ils s'emparèrent des positions existantes et, pour ménager la transition vis-à-vis des païens en leur empruntant leurs usages, leurs cérémonies et leur vocabulaire, ils donnèrent à leur pasteur, ou évêque, le nom de pontife, qui finit par devenir souverain pontife. Le mot pontifical s'applique à tout ce qui concerne le pontife, emploi, costume, honneurs; il se dit spécialement d'un volume renfermant divers formulaires et prescriptions concernant les évêques, approuvé en 1596 par Clément VIII avec défense d'y jamais rien changer, il fut réédité et revu par Urbain VIII en 1644. — On connaît aussi sous le nom de Pontifices un ordre

de frères hospitaliers, qui s'établissaient le long des rivières pour transporter gratis les voyageurs d'une rive à l'autre, ou qui s'associaient pour construire des ponts. L'un des plus connus est le petit Benoît, ou Bénézet 1177. On leur doit le premier pont d'Avignon et celui de Saint-Esprit. L'ordre fut sécularisé 1519.

POPES, nom des prêtres dans l'Égl. grecque.

POPER, parti de raskolnicks qui, vers la fin du 17®« siècle, décida de conserver des prêtres et fit ainsi un schisme dans la secte. Ils se trouvaient surtout dans les environs de Novogorod, et se divisèrent de nouveau en plusieurs branches dont les plus connues sont les Slobodâer qui attachaient une grande importance au pain consacré, et les Reconsacrants de l'Ukraine, qui tenaient à oindre de nouveau avec une huile particulière les prêtres qui se joignaient à eux.

PORDAGE, Jean, né 1608 à Londres, f 1685 (Bouillet 1625-1698), étudia à Oxford la théol. et la médecine, et fut nommé pasteur à Reading, puis à Bradfield. Amené au mysticisme par la lecture de Bœhme, il réunit autour de lui quelques amis, auxquels il communiqua ses visions et qui finirent par en avoir à leur tour. Destitué il se rendit à Londres avec ses partisans, mais la peste de 1655 les décida à retourner à Bradfield. Là Jane Leade se joignit à eux, mais la mort de Pordage mit fin à ce petit cercle d'amis, v. Philadelphie. Pordage voit Dieu dans un monde pur et sphérique, d'où jaillissent incessamment des âmes ou esprits purs qui, s'unis-sant à la matière éternelle, forment la sphère des anges et celle des hommes suivant leur plus ou moins grande finesse. Le premier homme, Adam, était androgyne; sa chute a amené la séparation des sexes. La rédemption consiste dans la réunion de l'homme avec la Sophia ou Sagesse, et par elle avec Christ, enfin par Christ avec Dieu. Le célibat est essentiel pour y arriver. Tout le christianisme historique est le con-trepied du vrai christianisme. — Ses principaux ouvrages sont: la Théol. mystique, la Divine et vraie métaphysique, Court aperçu sur le monde des esprits et des anges.

PORNOCRATIE. Le latin n'est pas seul à braver l'honnêteté dans les mots. Le grec en fait autant. Le mot grec pornê signifie une femme au comble de la dégradation, femme à vendre ou à louer. La pornocratie est donc le règne et le gouvernement de femmes de cette espèce. On désigne sous ce nom la fatale période de l'histoire où l'Égl. chrétienne eut à sa tête trois femmes de mauvaise vie, prostituées de haut rang, les deux Théodora et la Marozzia, qui, pendant plus d'un demi-siècle, 904-963, firent des papes dans tous les sens du mot, et soulevèrent le dégoût et l'indignation de la chrétienté tout entière. Ce régime, qui a eu pour principal historien Liatprand, alla de Serge III à Jean XII, et ne flétrit pas moins de onze papes. — v. les diff. art.

PORPHYRE lo philos, néoplatonicien, né vers 233 à Tyr ou à Batanée en Syrie; de son vrai nom Mélek, ou Malchus, roi, grécisé en purpureus, revêtu de la pourpre, ou Porphyre; étudia à Athènes soos Longin, à Rome sous Plotin, cultiva les sciences, se distingua dans l'art d'écrire, et succéda à Rome à son maître. Il fut le premier qui écrivit contre le christianisme, qu'il haïssait comme prétendant être la seule vraie religion. Son traité Contre le Christianisme, en 15 livres, fit sensation. Il y combat surtout l'origine divine des saintes Écritures. Si Christ est le seul chemin du salut, que sont devenus ceux qui ont vécu avant lui? Il s'applique à chercher des contradictions, surtout entre Pierre et Paul; de même entre Jean 7, v. 8 et 14; dans Galat. 2; il estime que les prophéties de Daniel se sont accomplies sous Antiochus Épiphanes et ne concernent pas le Messie. Il hésita cependant à dire du mal de Christ « qui est mort comme un dieu. » Il a écrit encore beaucoup d'autres ouvrages. Ses attaques ont été réfutées par Méthodius de Tyr, Eusèbe de Césarée, Apollinaire de Laodicée, etc.

2® Fidèle esclave de Pamphile q. v.

PORRÉE (G. de la), v. Gilbert 4«.

PORTE-GLAIVES, v. Frères 6®.

PORTIUNCULA, nom de la petite église et du petit presbytère que les bénédictins d'Assise cèdèrent aux disciples de saint François. Le saint ayant obtenu de Dieu qu'une indulgence fût attachée à la célébration du jour de la dédicace, 2 août, Honoré III confirma cette indulgence, et d'autres papes l'étendirent même à ceux qui feraient la fête sans se rendre dans cette église. Paul III l'étendit à tous les jours de l'année, et les franciscains de la Carinthie en exploitèrent dès le 17me siècle le bénéfice en l'étendant à toutes leurs églises. Innocent XI décida même 1687 que les morts pourraient en profiter.

PORT-ROYAL, célèbre abbaye de religieuses bernardines, située à25 kil. S.-O. de Paris, non loin de Versailles, dans une petite vallée, près d'un étang, et surnommée des Champs par Philippe-Auguste, qui s'y était reposé quelques moments pendant une chasse. Sur le désirqu'il en manifesta, Odon de Sully y fit construire un monastère 1223 qui fut remis à des religieuses de l'ordre de Cîteaux; elles prirent le nom de filles de Saint-Bernard, mirent leurs biens en commun et se consacrèrent à la prière et à l'éducation de la jeunesse; en 1647 elles ajoutèrent k leurs devoirs celui de l'adoration perpétuelle du Saint-Sacrement, dont elles reçurent aussi le nouveau surnom. Cette abbaye, qui avait d'abord prospéré, était tombée dans le relâchement. Une nouvelle abbesse, Marie-Angélique Arnaud, sœur du grand Arnaud et fille d'Antoine, s'efforça de ramener le couvent dans les voies de la piété et de rétablir la règle de saint Benoit dans toute sa rigueur, mais elle rencontra des difficultés qui la firent hésiter à conserver ses fonctions. Zamet, év. de Langres, avait fondé à Paris une confrérie féminine, et comme les nonnes de P.-R. étaient à l'étroit chez elles, il persuada Angélique de transférer dans son monastère une partie de son personnel et d'en accepter la direction. Comme succursale cette nouvelle maison s'appela Port-Royal de Paris; elle était au faubourg Saint-Jacques, local actuel de la Maternité. Diverses difficultés survenues entre Saint-Cyran qui en était le directeur, et Richelieu appuyé par Zamet, décidèrent Angélique à se retirer à Paris avec ses religieuses, et P.-R. des Champs, ainsi abandonné, devint en 1738 la retraite préférée de quelques hommes pieux et savants qui, sans règle apparente, formèrent cependant une sorte de confrérie, se livrant à toutes sortes de travaux intellectuels ou manuels, aux études et à l'agriculture, donnant des leçons, et subvenant par eux-mêmes à leurs divers besoins. L'un des premiers fut Antoine Lemaitre; puis vinrent les frères Simon Séricourt et Isaac de Sacy; puis Robert d'Andilly, Antoine Arnaud, Singlin, Racine, le duc et la duchesse de Luynes, Til-lemont, Nicole, Pascal, etc. Ils ouvrirent des écoles et des pensionnats de garçons, et inaugurèrent dans l'enseignement une méthode toute nouvelle, en en bannissant la routine, le pédan-tisme, l'ennui et la frivolité. Les premiers ils firent des livres d'école en français et donnèrent leurs leçons en français. En 1648 la plupart des religieuses étaient revenues à leur première maison, et dans le voisinage des savants anachorètes, elles avaient aussi fondé des écoles de jeunes filles. Cet ensemble d'institutionsscolaires peut être considéré comme la vraie gloire du grand siècle; avec des maîtres comme Saint-Cyran, de Sacy, Nicole, Singlin, cet enseignement qui. restaurait les sciences, la littérature, la morale, obtint un brillant triomphe et une grande notoriété, mais cela ne dura que quelques années, de 1636 à 1656. La jalousie des jésuites et le bigotisme du roi Louis devaient avoir raison d'une école dont la prospérité rainait les uns, dont la gloire éclipsait celle du monarque. Port-Royal se sentait menacé. Une guérison miraculeuse qui se fit dans une de ses églises à Paris, et les premiers succès des Provinciales, le sauvèrent pendant quelque temps. Mais ses ennemis étaient tenaces. Ils eiploitè-rent l'accusation de jansénisme portée contre les solitaires de P. R., qui étaient en effet presque tous jansénistes, même les femmes, et ils trouvèrent moyen de faire intervenir la politi* que là où elle n'avait que faire, et Annat, que Pascal avait plus particulièrement attaqué, se chargea de prouver au roi que les jansénistes étaient les ennemis du royaume, et que P.-R. -complotait contre la sûreté de l'État. Le 13 avril 1661 une ordonnance royale condamna tous les prêtres, moines, nonnes et instituteurs à signer un formulaire rédigé par les évêques contre les cinq thèses de Jansénius. Plusieurs, même des hommes de P.-R. signèrent en faisant des réserves; les femmes montrèrent plus d'énergie. Angélique f le 6 août 1661 après avoir reçu la notification que sa maison allait être fermée; sa soeur Agnès refusa de livrer les novices qu'on lui réclamait; on les lui arracha par la force. Cependant poussées à bout, quelques unes cédèrent à leur tour sous l'influence d'Arnaud, qui fut sévèrement blâmé par Pascal. Les négociations sur la signature et sur le sens qu'il convenait de lui donner durèrent longtemps. Sacy fut mis à la Bastille. Mais avec Clément VIII on en revint à l'idée d'une conciliation fondée sur des équivoques. En 1702 l'archev. de Noail-les blâma tout ce qui était réservation mentale ou duplicité, et malgré une bulle du pape il fit déclarer par ses évêques que les décisions papales n'avaient force de loi que si elles étaient acceptées par les docteurs de l'Église. Le roi n'en voulut pas moins imposer aux nonnes de P.-R. la nouvelle signature, et sur leur refus, un édit du 11 juillet 1709, inspiré par Letellier, supprima P.-R. des Champs, et dispersa les religieuses. Le 22 janv. 1710 on démolit la chapelle et le couvent, on passa la charrue sur ses ruines, et les tombeaux même furent profanés. Ainsi finit un des centres qui avaient le plus contribué à la grandeur littéraire, morale et scientifique de la France, en un temps où le clergé, la routine et le roi pesaient sur les esprits et les consciences. V. Sainte-Beuve, Fau-gère,Ranke, et L. Burnier. Hist. de l'éducation.

PORTUGAL. Après avoir partagé longtemps les destinées de l'Espagne, ce pays en fut virtuellement détaché quand Alphonse VI de Cas-tille céda à son gendre Henri de Bourgogne les provinces reprises sur les Maures, 1094. Mais le fils de celui-ci, Henriquez, sous le nom d'Alphonse I*f, se fit couronner roi par l'archev. Pélage de Braga 1143, et en échange de ce service rendu, accepta que son royaume fût considéré comme un fief pontifical. C'était trop et 4e ce moment les conflits se multiplièrent; les rois trouvaient que les pontifes et les évêques dépassaient en exigences les bornes permises, et les légats répondaient par des excommunications et des interdits. Un concordat conclu 1289 entre Denys et la curie mit un terme à ces luttes et à la trop grande concentration de terres entre les mains de l'Église. Jean I", fondateur d'une nouvelle dynastie 1385, obtint du pape que l'évêché de Lisbonne fût reconnu indépendant de l'Égl. d'Espagne, et bientôt par la prise de Ceuta, et par des découvertes en Asie et en Amérique, le Portugal regorgea de richesses; mais l'Inquisition, les jésuites et les persécutions contre les juifs l'amoindrirent et l'épuisé-rent; il retomba entre les mains de l'Espagne 1580-1640. Avec la maison de Bragance, que le pape n'osa pas reconnaître, par égard pour l'Espagne, Jean IV rechercha l'appui de la France, mais Pierre H pencha vers l'Angleterre, et l'influence de cette dernière puissance n'a dès lors pas cessé de se faire sentir, souvent d'une manière heureuse, quelquefois trop ostensiblement. Le cléricalisme et l'amour du faste inspira à plusieurs rois l'idée de s'attacher le clergé et les jésuites en les protégeant et en les comblant, mais le marquis de Pombal mit fin à toutes ces intrigues, et rendit à la circulation des biens qui lui avaient été enlevés. L'Inquisition fut abolie par l'occupation française, et ni Jean VI, ni Marie n'ont osé rappeler les jésuites. Le clergé ayant favorisé l'usurpation de don Miguel, don Pèdre en profita pour limiter son pouvoir, supprimer la plupart des ordres et séculariser leurs biens. Mais toutes ces mesures n'ont réussi ni à réformer, ni à relever l'Église. Le Portugal compte, outre le patriarche cardinal de Lisbonne, 2 archev. à Braga et à Évora, 14 évêques sur le continent, et 6 dans ses colonies. Il y a un archev. à Goa. Les églises protestantes sont peu nombreuses, à Lisbonne, Oporto, et se composent surtout d'étrangers anglais et allemands. La liberté des cultes existe en droit, et même en fait, mais dans des conditions qui la rendent presque illusoire.

POSIDIUS, év. de Calama, Numidie, un des principaux adversaires des donatistes, a écrit 432 une Vie de saint Augustin, son maître et ami.

POSSEVIN, Antoine, né 1534 à Mantoue, étudia à Rome, entra dans l'ordre des jésuites en 1559, s'exerça comme missionnaire dans les vallées vaudoises et chez les protestants français, fut successivement recteur des collèges d'Avignon, Lyon et Bologne, et mérita de Grégoire XIII, par son habileté, d'être employé dans plusieurs négociations difficiles. Il fut envoyé en Suède el décida la conversion de Jean MI en le menaçant de la damnation éternelle; mais il avait promis au roi diverses réformes, et comme le pape refusa de les octroyer, le toi se trouva peu à peu délié de ses engagements et la position des jésuites devint intolérable. Possevin passa en Pologne, où il obtint quelques succès, puis en Russie, ,où il fit conclure en 1582 à

Kieverova-Hôrka la paix entre la Russie et la Pologne; il espérait que Ivan IV se soumettrait à Rome; il dut se contenter de quelques faveurs accordées aux catholiques. Après avoir travaillé encore quelque temps comme nonce en Polo-logne, il passa ses dernières années à Padoue, Bologne et Venise, f 1611 à Ferrare. Auteur d'un Apparatus sacer ad scriptores V. et N. T., revue des auteurs ecclésiastiques, d'une Hist. de la Moscovie, et de plusieurs autres ouvrages. Vie par Dorigny, 1712.

POSTEL, Guillaume, né 1510 à Barenton, Normandie, jésuite, un des plus savants hommes de son temps, mathématicien, orientaliste, parlant presque toutes les langues de l'Europe; envoyé par François 1er en Orient, il en rapporta de précieux manuscrits, et fut nommé prof, à Paris. Mais le cerveau était atteint, son enseignement s'en ressentit; il parla d'une prochaine émancipation des femmes, qui régneraient avec les hommes; il se crut une mission divine pour réunir tous les hommes dans une même foi sous un mêméroi. Il se lia à Venise avec une femme aussi folle que lui, la mère Jeanne, qui acheva de l'égarer. Destitué, repoussé de son ordre, poursuivi par l'Inquisition, emprisonné, il fut déclaré fou et relâché. Il quitta la France, 1553, erra de ville en ville, vécut à la cour de Ferdinand I«r, guérit, désavoua ses erreurs, reprit ses fonctions, mais après une rechute il fut enfermé au couvent de Saint-Martin des Champs à Paris,oùil f 1581. Il a laissé de nombreux écrits dont plusieurs, dit-il, par révélation, sur la théol. et les langues orientales.

POSTILLES, notes ajoutées après le texte (post illas) dans les anciens mss. On donnait aussi ce nom au petit commentaire que le prédicateur ajoutait à la péricope du jour; ce doit même avoir été le premier nom de l'Homiliaire de Charlemagne.

POTAMLENA, jeune martyre égyptienne, plongée dans une cuve de poix fondue, sous Septime Sévère 207. Eusèbe ajoute que le soldat qui la gardait, Basilides, frappé de son courage, se convertit à l'Évangile, confessa sa foi et fut décapité.

POTHIN ou Phatin, év. de Lyon. Agé de plus de 90 ans, il souffrit le martyre sous Marc-Au -rèle 177, et succomba dans une dure prison anx mauvais traitements qui l'accablèrent. Eusèbe a conservé la Lettre, ou rapport, que les égl. de Vienne et de Lyon adressèrent aux chrétiens d'Asie au sujet de cette persécution.

POUVOIR des Clefs, expression tirée deMatt. 16,19. où Jésus dit à Pierre: « Je te donnerai les clefs du royaume; » promesse expliquée et complétée par ces mots: « Ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux. » Dans un passage parallèle pour le sens, Jésus dit de même aux apôtres réunis: t A quiconque vous pardonnerez les péchés, ils seront pardonné*, » etc. Jean 20,19. C'est une promesse faite à tous les chrétiens, aux vrais chrétiens, et à eux seuls, dans la mesure même de leur foi, et l'interprétation abusive qu'on en a faite plus tard ne se justifie ni par le texte, ni par le contexte. Pendant les premiers siècles on n'y a vu qu'un droit général donné à l'Église, et plus spécialement à ses prêtres et à ses martyrs, le droit d'excommunier et celui de réhabiliter les pécheurs, sans prétendre toutefois prononcer une sentence définitive, qui n'appartient qu'à Dieu seul. Il semble, d'après Tertullien, que l'év. de Rome ait été un des premiers à réclamer pour l'épis-copat ce privilège, mais toujours sans en exagérer la portée. Jérôme. Grégoire-le-Grand, Pierre Lombard lui-même, distinguent encore soigneusement l'absolution donnée par le prêtre et le pardon qui vient de Dieu. Mais déjà l'on commençait à s'habituer à l'idée que le prêtre est un intermédiaire, un médiateur entre Dieu et les hommes, et que le pardon promulgué par lui sur la terre est nécessairement ratifié dans le ciel. C'est Thomas d'Aquin, le scolastique par excellence, qui a définitivement formulé le dîog-me, à peu près tel qu'il est reçu aujourd'hui, et tel que le conc. de Trente l'a voté, Sess. XIV, chap. VI, c.-à-d. « Le ministère des ciels n'appartient qu'aux évêques et aux prêtres..., et les prêtres même qui sont en péché mortel, ne laissent pas de remettre les péchés, en qualité de ministres de J.-C. » C'est logique dans le système, mais c'est aussi une présomption contre le système. La Réformation est revenue à l'idée évangélique; ce n'est pas l'homme qui pardonne, c'est Dieu; ce que le chrétien (et non pas seulement le prêtre) peut faire, c'est de déclarer, d'annoncer le pardon qui est en J.-C. Luther dit même dans ce sens, que le prédicateur de l'Évangile ne peut pas ouvrir la bouche sans annoncer l'absolution et la grâce. Au 17* siècle il y eut quelques tentatives de restaurer le sacerdoce catholique et de rétablir pour le pasteur luthérien le pouvoir des clefs tel que le possédait le prêtre, en le rattachant à la personne, même indigne. Le piétisme réagit contre cette fâcheuse tendance, et le rationalisme alla plus loin encore, puisqu'il conteste le pardon dans la mesure où il nie le péché. Schleierma-cher a défini le pouvoir des clefs le droit que l'Église a de déterminer ce qui constitue la fie chrétienne et d'agir en conséquence vis-vis de ses ressortissants dans les limites de sa compétence.

PRAGMATIQUE-SANCTION (du grec: ordonnance réglant les affaires), nom donné à certaines lois d'un caractère et d'un intérêt général, par les rois de France ou par les diètes impériales. Les » connues sont: lo celle de saint Louis 1269, qui devint la base des libertés de l'Église gallicane. On en a contesté à tort l'authenticité. Après avoir déclaré que la France ne relève que de Dieu seul, le roi repousse toute ingérence étrangère, revendique le droit de la libre élection des évéques et des prêtres, prohibe les réserves et les grâces expectatives, dénie au pape le droit de promotion, défend de faire pour Rome des levées d'argent en France sans son autorisation, et fixe les cas où il est permis d'en appeler (comme d'abus) de la justice ecclésiastique à la justice royale.

2° celle de Charles VU qui, en 1438, en présence du clergé rassemblé à Bourges, renouvela la précédente en la développant, proclama les libertés de l'Égl. gallicane telles que le conc. de B&le venait de les définir, reconnaissait la supériorité des conciles sur le pape, défendait la publication des balles avant leur enregistrement au parlement, confiait aux chapitres l'élection des évéques, retirait à la carie le revenu des Iténéfices vacants, restreignit les effets de l'excommunication, etc. Les ducs de Bourgogne et de Bretagne refusèrent de l'admettre. Pour se concilier Pie II, Louis XI la supprima en principe 1461, tout en la laissant subsister en fait. Charles VIII la rétablit, François Ier l'abandonna de nouveau par le concordat de 1516 avec Léon X.

3» celle de Charles VI, dite Pragm. autrichienne, 1713, par laquelle l'emp. désigne comme héritière de tous ses États sa fille aînée, Marie-Thérèse. — 4« Celle de Charles III d'Espagne, 2 avril 1767, qui supprime l'ordre des jésuites.

PRAGUE, évêché fondé 973 pour la Bohême, qui relevait précédemment de Ratisbonne. Son premier titulaire fut le saxon Dithmar t 982, auquel succéda l'apôtre de l'Allemagne, Adal-bert f 996. En 1346 il fut érigé en archevêché, après avoir été jusqu'alors sous la direction de celui de Mayence. Son université, la première en Allemagne, fat fondée par Charles IV, 1348, et illustrée par d'éminents docteurs. Prague fut au 15me siècle le théâtre d'un grand mouvement religieux (Huss, Jérôme). Les Compactata de 1433 rétablirent un moment la paix. C'est aussi à Prague qu'eut lieu la fameuse défenestration 1618, qui déchaîna la guerre de Trente ans.

PRAXEAS, docteur de l'Asie Mineure, qui parut à Rome vers le milieu ou la fin du 2d siècle, et qui, sous prétexte de combattre le mon-tanisme, mit en avant des idées erronées sur les rapports du Père et du Fils. Il était patripas-sien; v. Unitaires. Mis en prison pour sa foi, il en conçut beaucoup d'orgueil; mais de retour chez lui il rétracta momentanément ses erreurs. Tertullien l'a combattu avec vivacité, lui reprochant d'avoir fait deux fois l'œuvre du diable: en crucifiant le Père, et en repoussant le Saint-Esprit (le montanisme).

PRÉBENDE, revenu attaché à une place de chanoine dans un chapitre. C'était primitivement le droit de tous les clercs à la table commune. Il s'est, avec le temps, augmenté et modifié de diverses manières.

PRÉCISTE. Celui qui a été nommé à une place ou charge ecclésiastique en vertu du droit de premier postulant.

PRÉCONISATION, acte par lequel le pape, dans l'assemblée des cardinaux, désigne et proclame les évéques élus dans les formes régulières, après avoir vérifié leurs titres, et leur assigne leur diocèse.

PRÉMONTRÉS. Cet ordre fondé 1121 par Norbert de Santenq.v., avait pour objet la cure d'&me et la prédication; il avait pour règle l'ascétisme le plus rigoureux; dans le principe il ne mangeait même pas de viande. Son costume était blanc. L'abbé de Prémontré était général de l'ordre, mais peu à peu les provinces d'Allemagne et d'Espagne se rendirent indépendantes; celle d'Espagne se réforma 1575 dans le sens de la stricte observance. En 1630 la règle fut revisée et confirmée. Des religieuses du même ordre, portant le même costume, plus un voile et un tablier, vécurent d'abord dans le même couvent, n'étant séparées des moines que par un mur, mais il parait que ce mur ne suffit pas, car en 1138 cette espèce d'association fut supprimée par une résolution portant entre autres < qu'il n'y a rien de plus hideux et de plus antichrétien que les femmes, c L'ordre, qui compta jusqu'à mille abbayes, n'en possède plus auj. qu'un petit nombre, et très peu de femmes.

PRÉPON, Marcionite, cité par Eusèbe comme auteur d'une lettre à Bardesanes. Il voit dans le démiurge de Marcion (auteur du mal et vrai Dieu) deux dieux distincts, un bon et un mauvais; en tout, par conséquent, trois dieux.

PRESBYTÉRIENS; du grec presbyteros, prebstre, prêtre, ou ancien. On nomme ainsi les hommes ou systèmes qui regardent le prêtre ou ancien comme la plus haute dignité ou charge ecclésiastique établie par J.-C. pour le gouvernement de son Église, par opposition à ceux qui placent les évéques au-dessus des prêtres, et qui créent ainsi une hiérarchie comme étant d'ordre divin. L'identité de fonctions entre l'évêque et l'ancien est clairement établie par plusieurs passages du N. T.; les diacres en sont distingués; v. Hiérarchie, et Diacres. Cela ne signifie nullement que la forme épiscopale. ou toute autre soit interdite; elle peut se justifier à certains points de vue et dans certaines circonstances, mais elle n'est pas plus de droit divin que la forme monarchique pour le gouvernement des peuples. C'est une des questions que la Bible, dans sa largeur et sa spiritualité, laisse à l'appréciation de l'Église et des fidèles. D'après le N. T. le prêtre ou pasteur, ayant charge d'Âme, était nommé par la communauté, avec ou sans la participation des apôtres. Clément de Rome est le premier qui, dans sa lettre aux Corinthiens, réclame pour les prêtres une autorité positive; il part de l'idée que, nommés par les apôtres, ils ont hérité de ceux-ci le pouvoir des clefs, et il inaugure la distinction entre l'ecclésiastique et le laïque. Pour éviter un émiette-ment trop grand de leurs congrégations et pour maintenir entre elles une sorte d'unité, les presbytériens, notamment en Angleterre, ont en général un gouvernement commun composé de délégués des différentes églises, chargé dans certaines limites de contrôler la marche, les résolutions et même le personnel des paroisses. Il y a d'abord, comme base et point de départ, le conseil de paroisse, composé du pasteur et d'anciens choisis parmi les pères de famille; puis le presbytère, mixte aussi, qui a une compétence plus étendue et qui examine les titres des candidats au ministère: puis le synode provincial ou de district; enfin l'Assemblée générale, ou Cour ecclésiastique supérieure, qui se réunit ordinairement une fois par an. La doctrine est presque partout représentée par la Conf. de foi de Westminster, quoique en certains endroits, notamment aux États-Unis, un relâchement se soit produit sous le nom de Nouvelle école et ait abouti à l'unitarisme. Le culte est chez plusieurs réduit à sa plus simple expression; les liturgies sont supprimées, ainsi que les Dix commandements, le Symbole, les doxo-logies, les fêtes ecclésiastiques; les orgues même sont en suspicion, comme un reste de catholicisme. Le sermon en forme la partie principale. La vie religieuse se distingue par une grande connaissance de la Bible, par l'observation du dimanche, par l'habitude du culte domestique, par le zèle pour les missions et par la participation active des laïques à tout ce qui regarde le gouvernement de l'Église. On évalue à près de 7 millions le nombre des presbytériens dans le monde; c'est surtout en Ecosse et aux États-Unis qu'ils se trouvent; il y en a aussi en Angleterre, en Irlande et en France; en Écosse ils se divisent en trois branches: l'Église établie, nationale, dont la reine est le chef nominal, et qui a maintenu en beaucoup de paroisses le système du patronage; l'Égl. libre, qui date de 1843 et qui a pour but de défendre l'autonomie de l'Église; enfin l'Égl. presbytérienne unie, qui date du siècle dernier, qui s'est séparée à cause du patronage, et qui finira par se réunir à la précédente. Aux États-Unis on distingue l'ancienne école, qui a son principal séminaire à Princeton, et la nouvelle dont le séminaire est à New-York; ce sont en réalité deux égl. différentes.

PRÉSENCE. Les chanoines sont astreints à une participation personnelle au service da chœur. Pour la mieux assurer, une partie des revenus des chapitres est distribuée chaque jour entre ceux qui ont assisté aux offices; c'est ce qu'on appelle ailleurs des jetons de présence. Le conc. de Trente confirme cet usage. — v. aussi Résidence.

PRÉSENTATION (Droit de). C'est le droit que possède le patron d'un bénéfice de présenter à l'evêque un titulaire; deux conditions doivent être remplies; le titulaire doit être qualifié pour la fonction, et la présentation doit être faite dans un délai déterminé. En cas de simonie constatée, ou si les conditions ne sont pas remplies, le patron perd son droit pour l'élection pendante. Dans la plupart des Égl. protestantes, les paroisses ont le droit de présentation; la nomination appartient au consistoire, au synode ou à l'État.

PRÉTEXTÂT, archev. de Rouen vers 555, parrain de Mèrovée, second fils de Chilpéric, bénit le mariage de Mérovée avec sa tante Brune-haut, ce qui lui valut la colère de Chilpéric, la destitution par le concile de Paris 577, et l'exil à Jersey. Après la mort de Chilpéric il revint à Rouen, mais Frédegonde le fit «iss&ssiDër 588r pour se venger des reproches qu'il lui avait adressés et de ses sympathies pour firunehaut v. Rouen.

PRETORIUS lo Abdias. né 1524 en Bran debourg, recteur de l'école de Magdebourg prof, de théol. à Francfort s. l'O. Dans le coo flit avec A. Musculus, sur la nécessité des bonnes œuvres, il dut fléchir devant son adver saire protégé par le prince, et se retira à Wit tenberg. f 1573.— 2» Stephan, pasteur de Salz-wedel à la fin du 16®* siècle, engagé dans de nombreuses controverses et difficultés, pour avoir émis des idées qu'on ne trouvait pas suffisamment orthodoxes; il soutenait entre astres l'inamissibilité de la grâce, le bonheur à venir commençant déjà sur la terre, etc., doctrines qui comptent encore auj. bien des adhérents. Son disciple Martin Statius, diacre à Stettin, t 1655, a publié de nombreux extraits de ses ouvrages, même en en retranchant les passages les plus accentués, ce qui ne l'a pas mis à l'abri de nombreuses tracasseries.

PRÊTRES-JEAN. Curieuse apparition d» lime et du 12«« siècles. Le bruit se répandit k l'époque des croisades, qu'il y avait en Orient un puissant prêtre chrétien, qui gouvernait ses États avec une magnificence inouïe. La légende, la curiosité, l'ambition s'emparèrent de ce mystérieux personnage et l'on multiplia les tentatives pour le découvrir. On le chercha d'abord en Afrique et Ton crut l'avoir trouvé en Abys-sinie, mais on reconnut qu'on s'était trompé. On n'arriva à une solution un peu claire de cette énigme qu'au moment où la dynastie elle-même allait cesser d'exister, et c'est Assemani qui, au siècle dernier, a donné enfin des renseignements exacts sur l'histoire de ces rois et de ce royaume. Sur les frontières de la Chine, au sud du lac Baïkal, se trouvait un peuple connu sous le nom de Kèrithes, en chinois Unch-Khans. Ils se convertirent au christianisme vers l'an 1000, sous l'influence du patriarche Jean; leur roi, qui résidait à Karakarum, se fit baptiser et reçut le nom du patriarche. Soit qu'il se fût fait aussi consacrer (avec les évêques nestoriens c'était assez facile), soit comme titre d'honneur, soit au contraire par humilité et pour établir qu'il n'était qu'un serviteur de Dieu, il prit le titre de prêtre, au lieu de s'appeler roi, et il légua à ses successeurs cette appellation dynastique. Le premier n'est connu que par sa conversion et son baptême. Le second du nom, vers 1060, fut un conquérant; l'histoire relève son humanité et sa justice, vertus chrétiennes au milieu de populations barbares. Le prêtre Jean III, vers 1145, riche et puissant, voulut venir au secours des chrétiens de Syrie et de Palestine, mais il en fut empêché; il est connu par une lettre à l'emp. Manuel Commène, découverte par Assemani, contestée à tort par Mosbeim qui l'attribue à un nestorien, dans laquelle il parle des Israélites des dix tribus comme faisant partie de son empire. Jean IV, surnommé David, régna pendant le dernier quart du 12me siècle; sous son gouvernement le christianisme fit de grands progrès dans l'Asie centrale, grâce aux missionnaires nestoriens. Alexandre III lui écrivit en 1177 pour essayer de le rattacher à l'Égl. de Rome, mais cette lettre n'eut pas de suites; l'orage qui éclata 25 ans plus tard et qui ébranla l'empire, porta les préoccupations partout ailleurs. Le jeune Te-mugin, né 1164, ayant eu une intrigue avec Visulogine, fille du prêtre Jean, dut quitter la cour; il jura de se venger, fomenta une révolte, reparut sous le nom de Gengis-Kan, épousa celle qu'il aimait, renversa du trône le dernier des prêtres-Jean, qui fut assassiné 1202, et mit fin à cette étrange dynastie sacerdotale, sans toutefois se montrer dès l'abord hostile au christianisme. Sa femme même resta chrétienne et conserva son confesseur. Gengis-Kan prit pour devise: Un Seigneur dans le ciel, un seigneur sur la terre, le grand dominateur des Tartares.

PRÊTRES, v. Hiérarchie, Presbytériens, etc.

PRIDEÀUX lo John, né 1578 à Stawford, Devonshire; recteur et vice-chancelier à Oxford, témoigna pour le monarque et l'anglicanisme un zèle qui fut récompensé par l'évêché de Woroester 1641, mais la révolution lui fit perdre sa place, et il f pauvre 1650 à Bredon. — 2° Humphrey, l'auteur de l'Hist. des Juife; né 1648 à Padston, Cornouailles, fut successivement pasteur à Saint-Clément près d'Oxford; à Bladen, à Suffolk, et enfin doyen de Norwich, où il f 1724.

PRIERIAS, Sylvestre, moine dominicain, maître du palais à Rome, écrivit le premier contre les thèses de Wittenberg un Dialogue au sujet des conclusions présomptueuses de Luther contre la majesté papale. Luther y répondit par un autre Dialogue, qui lui ferma la bouche. Un second écrit de controverse: Des erreurs et des arguments de Luther, eut encore moins de succès, et Léon X dut imposer le silence à ce malheureux avocat. Il le nomma cependant l'un des juges qui devaient examiner l'affaire de Luther. Dans les démêlés de son ordre avec Reuch-lin, il porta la question devant le pape. Sa Summa Sylvestrina, ou Des cas de conscience, est connue dans l'histoire de la Casuistique.

PRIESTLEY, Joseph, né 1733 à Field-Head près de Leeds, Yorkshire, d'une vieille famille puritaine. Unitaire, il fut en 1768 pasteur d'un troupeau dissident à Leeds, en 1770 bibliothécaire de lord Shelburn, puis de nouveau pasteur dissident à Birmingham. Il s'occupait en même temps beaucoup de physique et de chimie; il a écrit sur la vision, l'électricité, les différentes espèces d'air; le premier il a isolé l'oxygène, qu'il a appelé d'abord phlogistique. En philos, il était partisan de Hartley et tendait au matérialisme. Il a écrit plus de 70 volumes. Son enthousiasme pour la révolution française lui attira des persécutions. Pendant qu'en France on le nommait citoyen et membre de la Convention, sa maison était saccagée par le peuple et il dut s'enfuir en Amérique. Il se fixa à Northumber-land, Pensylvanie, comme professeur, et il f 1804. C'est dans les sciences naturelles qu'il s'est fait sa meilleure réputation. Comme théologien il n'a pas grande importance; son ouvrage le plus considérable dans ce domaine est son Hist. de la corruption du christianisme. Il a écrit ses Mémoires, complétés par son fils, 1806.

PRIMAT, titre de l'archevêque qui, dans un un pays, jouit d'un droit de préséance et de juridiction sur les autres archev. ses collègues. C'est à lui que revient l'honneur de les installer, de convoquer les conciles nationaux, de couronner les princes, de recevoir les appels. Ce droit, concédé par le pape, se rattachait à certains sièges, et souvent il avait été la récompense d'un vicariat apostolique. C'est en Occident un titre qui équivaut à celui de patriarche en Orient. Certains sièges l'ont revendiqué, mais sans y avoir des droits suffisants, Arles,

Reims, Bourges, Narbonne, Vienne, Bordeaux, etc. Les seuls bien authentiques sont celui de Lyon, qui date de Grégoire VII, (renouvelé par Pie IX en 1851) et celui de Bourges, dont le titulaire s'appelait primat d'Aquitaine. Cantorbéry, Upsal, Prague, Guesne en Pologne, Séville, Taragone et Tolède en Espagne, ont été des primaties; de même en Allemagne Mayence, dont l'archev. baron de Dalberg 1806-1810 s'appelait prince-primat. Cette institution est à peu près auj. abandonnée.

PRIMICIER (primus in cera, le premier inscrit sur les tablettes de cire), titre donné au premier employé d'une certaine catégorie; puis spécialement, dans un chapitre, le chanoine qui vient après l'archidiacre et l'archiprêtre, et qui est chargé de conduire le chœur et de diriger le clergé inférieur.

PRISCILLIEN. Un rêveur égyptien, Marc, de Memphis, se disant enchanteur, et demi-manichéen, ayant passé en Espagne vers la fin du 4®e siècle, séduisit par ses discours deux Espagnols, Agape et Elpidius, et par eux un homme considéré et instruit, Priscillien, qui commença vers 379 d'annoncer sa doctrine, curieux mélange de gnosticisme, de christianisme et de manichéisme. Pour lui, Dieu, le diable, les anges sont éternels; le diable gouverne le temps et le monde; le corps c'est le mal et ne saurait ressusciter; Christ n'a qu'une nature. Ses disciples, ascètes, méprisaient le mariage, sans vivre dans l'impureté; ils regardaient toute procréation comme un mal. Ils autorisaient le mensonge et même le parjure, pour les choses de la foi. Parmi ses adhérents se trouvaient deux évêques, Instance et Salvien. Hyginde Cordoue et Idace d'Émerida s'élevèrent contre les pris-cilliens, qui furent condamnés dans un concile à Saragosse, 380. L'empereur les bannit; ils se rendirent à Bordeaux, où l'évéque les repoussa, mais la veuve Euchrotia les reçut. Après avoir été inutilement à Milan chez Ambroise, à Rome chez Damase, ils finirent par être rétablis en Espagne, et Pr. fut sur le point d'être nommé év. d'Avila. Ithace d'Ossonuba, qui les avait le plus persécutés, fut exilé à son tour. Mais après la mort de Gratien, Maximin reprit la question et les obligea de comparaître devant un nouveau concile à Bordeaux 384; d'abord acquittés, ils forent ensuite condamnés; ils en appelèrent à l'empereur, et furent conduits à Trêves, où Priscillien, Euchrotia et deux anciens, malgré l'énergique intervention de Martin de Tours, eurent la tête tranchée 385, et un grand nombre furent bannis. Voilà le glaive qui entre pour la 1" fois dans l'Église; jusqu'alors les chrétiens avaient été mis à mort pour leur foi par les emp. païens; à présent c'est un emp. chrétien qui frappe des hérétiques. Ithace avait provoqué cette intervention du pouvoir civil, Martin de Tours rompit la communion avec lui. Le peuple d'ailleurs n'était pas plus éclairé; il lapida la priscillienoe Orbica. Mais en dépit de ces persécutions, el malgré le conc. de Tolède 400, malgré les réfutations d'Orose, d'Augustin, de Léon-le-Grand, la secte persista en Espagne; elle ne disparut qu'après le synode de Braga 563.

PRIVAT (Saint-), vieux château aux tours sarrasines, situé sur le Gardon, à 24 kilom. de Nimes, non loin du fameux Pont du Gard, et dans l'ancien diocèse d'Uzès. D'abord propriété des évêques, il passa aux mains de la famille Faret, venue du Piémont, 1451, dont un des descendants, Honorât, embrassa la Réforme vers 1535, et aidé de son ami le notaire Louis Colet, travailla et réussit à la répandre dans le pays, notamment à Remoulins. A défaut de temples le manoir servit longtemps d'abri au culte évangélique et se mit en rapport avec Genève. Mao-get, Mutonis, Viret y prêchèrent devant de nombreux auditoires. L'évéque Jean Saint-Gelais d'Uzès se joignit un moment aux réformés, et se maria, mais prétendit rester évôque. La protection de Charles IX ne l'empêcha pas d'être déposé; il finit par se réconcilier avec l'Église et f 1574. Anatole Frontin fut le premier pasteur régulier de Saint-Privat. Charles IX logea au manoir le 12 déc. 1564, avec les futurs Henri IU et Henri IV, et d'autres seigneurs; le comte de Crussol était alors suzerain do royaume. Renée de France y avait passé quel* ques semaines auparavant. Mais la réaction était partout; la Michelade précipita la crise. A Lé-denou l'église fut en partie démolie et une de ses cloches transportée à Saint-Privat. Pendant la guerre de 1570, Coligny est à Nimes avec le jeune roi; il s'avance vers Remoulins et visite le château qui donne un appui solide à la petite armée protestante; mais c'est le dernier grand jour de ce manoir; la Saint-Barthélemy marque le terme de son histoire. Le 30 juin 1629 le roi, accompagné de Richelieu, reçoit dans la salle qui porte encore le nom de Louis XUI, la soumission des habitants de finies. Les Faret s'inclinèrent, mais gardèrent dans leur cœur la foi à l'Évangile. Aujourd'hui le château, plein de curiosités historiques et artistiques, n'est plus qu'un noble et beau domaine, appartenant à M. Th. Caldéron. — v. J. Bonnet.

PROBABILISME, v. Jésuites.

PROCLUS lo patr. de Constantinople 434-446, avait été le grand ami de Chrysostome, dont il fit revenir les restes en 439. Alors qu'il était encore simple prêtre, il combattit les erreurs de Nestorius et s'allia dans cette controverse avec Cyrille d'Alex, et Jean d'Antiod*. Il jouissait d'un grand crédit auprès de Théodose II. On lui a attribué à tort quelques ouvrages de son homonyme qui suit.

2° Proclus ou Proculus, le dernier des néoplatoniciens un peu considérables. Né 412 à Constantinople, ou à Xanthe en Lycie, il étudia à Alexandrie, puis à 20 ans à Athènes sous Plutarqueet Syrianus; après quelques années de voyages destinés à compléter son éducation, il revint à Athènes 450 où il succéda à Syrianus, comme directeur de l'école, d'où il reçut le surnom de Diadochus, successeur. Il compta de nombreux élèves, f 485. Il combattit avec violence le christianisme et chercha à rendre le paganisme plus acceptable en l'expliquant. Aux doctrines de Platon, dont il a commenté quelques écrits, il mêla celles de Pythagore, d'Orphée, de Platon, de Porphyre, de Jamblique, de sorte que son système est un mélange de théurgie, de magie, de mysticisme et de démo-nologie difficile à comprendre. Il s'était fait initier à une foule de mystères et se disait le hiérophante, le prêtre de la nature entière; il a célébré par des hymnes les dieux les plus divers. Beaucoup de ses ouvrages sont perdus; Cousin a publ. en 6 vol. les principaux de ceux qui restent: la Providence, Traité de la Liberté et du mal, etc. Paris 1820-1825. V. aussi La théol. platonicienne, Hambourg 1618.

PROCOPE lo de Gaza, théol. et prof, d'éloquence, 500 à 520, auteur de Comment, sur les Rois, les Chroniques, les Proverbes, Ésaïe, formés d'extraits d'exégètes grecs.

2° Pr. de Césarée, étudia le droit à Béryte et tint une école de rhétorique à Constantinople. Il accompagna Bélisaire dans ses campagnes depuis 526, et devint sénateur et préfet de Constantinople 562. f 565. La manière dont il parle des églises et des monuments de culte construits par Justinien, dans son De œdificiis, laisse présumer qu'il était chrétien. Son Hist. de son temps, en 8 livres, renferme des documents précieux, même au point de vue de l'hist. eccl.; il fait l'éloge de Justinien et de sa cour. Que s'est-il passé?Dans son Hist. anecdota (secrète, ou intime) ses jugements sont tout différents, et il désenchante le lecteur sur le compte de Justinien, de Bélisaire et surtout de Théodora. Quoi qu'il en soit, il fournit des faits et des matériaux abondants pour l'hist. de l'Église. Un ouvrage purement ecclésiastique, auquel il semble faire allusion, doit s'être perdu.

3° et 4<> deux fameux chefs hussites: Pro-cope-le-Grand, ou le Tondu, aide-de-camp de Ziska et souvent son lieutenant, commandait aux taborites; en 1430 il fit une incursion eu Allemagne et s'empara d'un riche butin; en 1431 à Tauss il défit l'armée impériale. Son seul aspect, dit-on, faisait fuir l'ennemi. En 1433 il parut au conc. de Bâle. Son fr., dit le Petit, était également redoutable. Us périrent tous deux en 1434 à Bomischbrod, leurs troupes ayant été affaiblies et diminuées par la retraite des utraquistes.

PRODICUS et Prodiciens, gnostiques antino-miens, qui rejetaient toute espèce de culte en leur qualité de fils du soleil, fils du Dieu Très-Haut, maître de toutes lois. Ils avaient des livres apocryphes sous le nom de Zoroastre.

PROFESSION, engagement solennel de celui qui prononce ses vœux pour entrer dans un ordre religieux. La cérémonie est accompagnée de la célébration de la messe. L'abbé du couvent y préside pour les hommes, l'évêque pour les femmes. Pour que l'engagement soit valable, il faut que le profès ait un certain âge, qui varie suivant les pays; qu'il ait fait un noviciat, et qu'il soit complètement libre de sa personne, c.-à-d. non marié. Les vœux étant irrévocables, l'ordre se charge à son tour de l'entretien de son nouveau membre et lui accorde tous les droits dont il dispose lui-même.

PROLES, André, prédécesseur de Staupitz comme vicaire général des augustins. Né 1429 à Dresde, il étudia la théol. à Leipzig où il prit son grade de magister en 1451. II entra au couvent des augustins à Wermigerode 1452, fut nommé en 1458 prieur et maître à l'école cathédrale de Magdebourg, et enfin vicaire général. Prédicateur estimé, il déplorait l'abaissement de l'Église et le caractère tout formaliste de la religion. On lui reprocha même d'avoir, dans un concile italien, attaqué la hiérarchie et repoussé la création d'un nouveau jour de fête. En tout cas il fut excommunié, mais cela n'empêcha pas ses moines de le bien accueillir. Réhabilité eu 1502, il mourut l'année suivante dans un voyage qu'il fit à Rome par ordre. On a encore quel-ques-uns de ses sermons.

PROLI. Maximilien-Bernard-Louis, fils illégitime d'une jolie couturière qui avait travaillé quelque temps au château du coadjuteur Dal-berg à Aschaffenbourg, et que l'on maria précipitamment en 1787 au jardinier Muller, de Kostheim, en lui donnant une place d'inspecteur pour le dédommager. L'enfant né à peu près à cette époque, mais on ne sait où, était magnifique et devint un fort bel homme. Après avoir été tailleuret danseur de corde, il fut reçu enfant de chœur; on l'envoya à Rome d'où il revint par Bamberg et Ratisbonne. Un missionnaire anglais, Shykson, un peu visionnaire, développa chez le jeune homme des instincts de mysticisme exalté. Muller, qui avait pris le nom de son père légal, se crut prophète; il écrivit 1810 à Napoléon une lettre qui fit mettre sa tête à prix. Il s'enfuit à Londres, puis en Irlande où un jésuite, du nom de Martin, chassé de France pour crime, acheva de lui faire perdre la raison. Ils parlèrent du règne de mille ans, d'un royaume théocratique, et le jésuite exploitant le mystère de sa naissance, lui persuada qu'il était le prince désigné pour régner dans la nouvelle Jérusalem: il l'appela Prott, semence, comme étant de la semence de David. Une riche miss anglaise leur fournit les fonds nécessaires, un nouveau culte fut inauguré, des adeptes se groupèrent autour du prophète-sacrificateur; Martin partit avec la caisse, la police intervint; les chefe émigrèrent en Allemagne, à Offenbach, Stuttgard, Wurzbourg, 1822. Enfin après bien des odyssées et des péripéties, après des appels inutiles adressés aux souverains d'Europe, 1828, la secte alla s'échouer en Amérique, où Proli f vers 1833, du choléra, ou noyé dans le Missouri.

PROPAGANDE. Une bulle de Grégoire XV, du 22 juin 1622, fonda à Rome la congrég. pour la propagation de la foi, et la composa de 12 cardinaux, 3 prélats et un secrétaire. Elle avait à s'occuper de tout ce qui concerne l'œuvre missionnaire et l'extension de la foi catholique. Urbain VIII qui lui succéda en 1623 dota cet établissement de riches revenus, et lui adjoignit un séminaire spécial, dit collège de la Propagande, à l'instar des 2 collèges que les jésuites possédaient à Rome. Plus tard l'institution se compléta par une bibliothèque, une imprimerie, un musée. Ils ont la veille de l'Épiphanie, la féte des langues, dans laquelle chacun des élèves fait un discours dans sa langue maternelle. Tous les pays du monde sont partagés en un certain nombre de provinces, à la téte desquelles est placé un directeur, généralement missionnaire lui-même, sous le nom de préfet apostolique; et à mesure que la mission progresse, il monte en grade et devient vicaire apostolique. et enfin évéque-missionnaire. La propagande doit prendre soin des prosélytes et des missionnaires renvoyés ou hors de service.

PROPHÉTIE (Réunions de). En prenant ce mot dans son sens le plus général, 1 Cor. 14, 3. 4., Zwingle en 1525 remplaça les Heures ou services ordinaires des chanoines par des assemblées régulières de pasteurs, chapelains, chanoines et étudiants en théol., dans lesquelles on étudiait exégétiquement et pratiquement, au point de vue de la prédication, certaines parties des Écritures; ces assemblées furent appelées Réunions de prophétie. De même à Londres Lasky donna ce nom à des réunions hebdomadaires de pasteurs, docteurs et anciens, où l'on étudiait en général le texte et le sermon du dimanche précédent. Le synode de Wesel 1568 définit ces réunions une Explication publique de l'Écriture avec le concours du presbytère, des maîtres et des pasteurs. C'est ce que Spener avait fait avec ses collèges de piété, ce que nous appelons Leçons ou lectures bibliques, ce que les quakers ont adopté pour leur seul culte.

PROSPER d'Aquitaine, né vers 403, f 435 ou 463; laïque, ami d'Augustin, poète estimé, appelé 440 à Rome, dit-on, par Léon 1er qui k nomma son secrétaire. Il combattit avec persévérance le pélagianisme et surtout le sérai-pé-lagianisme, dans des lettres à Rufin, à Augustin (où il y a peut-être quelque exagération, puisqu'il traite Cassien de pélagien), et dans son beau poème Des Ingrats, où il reproche aux pélagiens de méconnaître la grâce divine. Il défendit Augustin après sa mort contre les attaques de moines gaulois, et publia de nombreui extraits de ses écrits. Son principal ouvrage est intitulé: De la grâce de Dieu et du libre Arbitre. Il a écrit aussi une Chronique, qui fait sait? â celle de Jérôme et va jusqu'à 455. Ed. Tille-mont.

PROTAIS, fr. de Gervais, q. v,

PROTERIUS, 26rae patr. d'Alexandrie, élu en opposition aux eutychiens, qui le massacré rent 457 et traînèrent son cadavre par les rues.

PROTESTANTISME. Tandis qu'à la diète de Spire, 1526, Charles-Quint menacé de tous côtés avait dû faire aux évangéliques d'énorme* concessions, en leur accordant de n'observer l'édit de Worms 1521 que dans les limites de leur conscience, à la diète de Spire 1529 il » trouvait dans une position beaucoup plus avai-tageuse pour traiter ou plutôt pour imposer » volonté. II fit remettre en vigueur l'édit de 1511 et annuler celui de 1526; c'était en quelque sorte le maintien du statu que, mais dans des conditions qui, laissant toute liberté aux catholiques, paralysaient tous les mouvements des évangéliques. Les princes et les États qui avaient déjà embrassé la Réforme, rédigèrent immédiatement une protestation énergique, et ils la lurent à la diète, quoique Ferdinand, malgré leurs réclamations, eût déjà levé la séance et quitté la salle. Par cette pièce ils déclarent protester contre la suppression de l'édit de 1526 qui avait été voté avec des engagements solennels réciproques; ils regardent comme nulle et non avenue la nouvelle résolution qui vient d'être prise; soumis à l'empereur en toutes choses, ils ne peuvent l'être dans les questions de conscience; il s'agit de leur salut, de leur honneur et de la gloire de Dieu. Cette protestation fut signée par Jean de Saxe, George de Brandebourg, Ernest et Francis de Lune-bourg, Philippe de Hesse, Wolfgangd'Anhalt, et par les députés de 13 villes impériales, Strasbourg, Nuremberg, Ulm, Constance, Landau, Memmingen, Kempten, Nôrdlingen, Heiibrone, Reutlingen, Isny, Saint-Gall, Weissenbourg et Windsheim. Déposée le 19 avril 1529, cette protestation fut discutée le lendemain à la requête de Henri de Brunswick et de Philippe de Bade qui tentèrent, mais inutilement de la conciliation; il n'y avait pas de transaction possible. L'original en fut remis le dim. 1525 au chapelain de l'égl. de Saint-Jean, à Spire, Pierre Mutterstadt. La protestation était un fait; les princes protestants étaient des hommes; le protestantisme devint un principe à partir de ce jour, et servit à désigner toutes les oppositions positives qui, depuis des siècles, n'avaient cessé de réagir contre les erreurs, les abus, les prétentions ou les usurpations de l'égl. de Rome. Pauliciens, cathares, albigeois, vaudois, lollards, ces nombreuses sectes, isolées et sous des noms différents, toujours persécutées, écrasées, mais sans cesse renaissantes, avaient pour fonds commun la haine du matérialisme et de la forme en matière religieuse et le désir ardent d'en revenir au christianisme primitif. Le protestantisme a sans doute un sens négatif; il rejette certaines doctrines, certaines formes et cérémonies, le culte des saints, et surtout l'autorité du pape. Mais il a aussi un côté positif, sans lequel il serait une simple irréligion; il ne se borne pas à démolir, il reconstruit; il admet l'autorité de la Bible, et le droit pour chacun de l'interpréter, droit qui ne va pas jusqu'à la tordre, nier ou rejeter. Il croit au salut par la foi et non par les œuvres, encore moins par les cérémonies, mais ce droit ne va pas à nier l'importance et la nécessité des œuvres. Il demande une piété personnelle et ne se contente pas d'une piété collective ou de manifestations extérieures. Le mot même comprend toutes les églises qui reposent sur le môme principe, mais il n'en définit aucune en particulier. Si des princes luthériens l'ont inauguré, l'esprit public lui a donné aussitôt une portée plus étendue, et les calvinistes, comme les anglicans, ont été compris sous cette désignation générale.

PROTONOTAIRES apostoliques, institution que la tradition fait dater de Clément Romain. Il y en avait primitivement 7; Sixte-Quint les a porté à 12, Grégoire XVI les a ramenés à 7. Ce sont les secrétaires de la chancellerie romaine; ils ont à tenir les procès-verbaux et les registres des consistoires, à surveiller le contentieux, à préparer les béatifications et les canonisations; ils pouvaient nommer des docteurs et des notaires, légitimer des enfants naturels, etc. Leurs occupations sont auj. simplifiées sur bien des points. Ils ne relèvent d'aucune juridiction épiscopale.

PROTOPAPE, ou protoprétre, dans l'Égl. grecque, correspond au titre d'archiprêtre, ou doyen, chez les latins; c'est hiérarchiquement le degré intermédiaire entre l'évêque et le simple prêtre. Il a plusieurs paroisses sous son inspection, et peut être marié. En

Sicile et à Corfou, ce titre désigne encore un prélat.

PROVINCIAL. Les couvents de presque tous les ordres religieux sont groupés en un certain nombre de districts, déterminés autant que possible par leur situation géographique. Ils forment ainsi une province, et ils sont placés sous la direction d'un supérieur, qui porte le titre de provincial, et est de droit le supérieur du principal couvent de l'ordre dans cette province, et membre du chapitre général.

PROVINCIALES, v. Pascal.

PROVISION canonique, droit de conférer certains bénéfices, comprenant la désignation, l'installation et la mise en possession des revenus.

PRUDENCE lo Aurelius-Prudentius-Clemens, né vers 348 à Saragosse, ou à Calahorra, sous le consulat de l'ancien Salia, fut élevé avec sévérité et n'en eut pas moins une jeunesse dissipée. Il étudia avec succès les lettres et le droit, devint un avocat distingué, fut deux fois nommé par Théodore gouverneur d'une province d'Espagne, et reçut un grade militaire élevé qui le rapprochait du souverain. Mais à 57 ans il se retira du monde et des affaires pour se consacrer tout entier aux exercices de piété et à la littérature religieuse, f 408 ou 413. Il a laissé de nombreux poèmes et des poésies qui comptent parmi les meilleures de l'Église chrétienne à cette époque, soit pour la beauté de la forme, soit pour le sérieux de leur contenu. On remarque surtout le Cathémérinon (compagnon du jour), douze hymnes décrivant les devoirs du chrétien pour les divers moments de la journée; le Pèristéphanon, livre des Couronnes, 14 hymnes, célébrant autant de martyrs; l'Apothéose, 2 hymnes sur la Trinité et la divinité du Christ; la Hamartigénie, sur l'origine du mal, contre le dualisme marcionite et manichéen; la Psychomachie, combat de l'âme, la lutte des vertus contre les vices, poème descriptif sous forme épique, longtemps populaire; deux livres contre Symmaque et contre le rétablissement de l'autel de la Victoire, etc. V. Ruffet.

2° Év. de Troyes 847, f 861; Espagnol de naissance, nommé Galindo, mais élevé en France. Il est surtout connu comme ayant combattu les sémi-pélagiens, et par la part qu'il prit dans les controverses relatives à la prédestination, s'étant rangé du cété de Gottschalk. Il écrivit en sa faveur à Hincmar et à Pardulus 849, et envoya à Scot Erigène un traité sur le sujet 852. Il composa enfin une Epistola tractoria, après avoir signé les 4 articles du conc. de Quiercy 853. On a encore de lui des Annales 836-861, avec une Élégie. A Troyes il est vénéré comme un saint.

PRUM ou Pruym, non loin de Trêves, sur nn affinent de la Sure, célèbre abbaye de bénédictins, fondée 720 par Bertrade. Pepin-le-Bref, mari de sa petite-fille Bertha, la restaura et la dota richement. Par la protection des rois qui se succédèrent, elle atteignit un degré de prospérité inoui. A la fin du 12m« siècle elle possédait 119 domaines ou seigneuries et comptait des ducs et des comtes pour vassaux; des princes s'y retiraient; Lothaire l*r y prit l'habit. La discipline s'y étant relâchée, Boniface la rattacha au diocèse de Trêves 1397. Napoléon Ta sécularisée 1803, et ses bâtiments ont été utilisés pour des établissements scolaires.

PBUSSE, contrée du nord-est de l'Allemagne, longtemps sans frontières bien déterminées, avoisinant la Baltique et la Vistule et connue av. C. sous le nom de Samland, ou Saumland (pays riverain); population de race Lette, parente des Lithuaniens, nommée pour la lr« fois Pruzzi, ou Prutheni, par Gaudenlius au H»® siècle; d'une réputation incertaine; doux et paisibles suivant les uns, passablement cruels selon les autres, venant en aide aux naufragés, brûlant vifs leurs malades et leurs vieillards, ne laissant vivre qu'une fille par famille. Ils adoraient différentes forces de la nature. Leurs 3 principales divinités leur venaient des Goths: Perkunos, ou le tonnerre, dieu de la pluie et du beau temps; Potrimpos, conservateur des choses, dieu de la fécondité; Potollos, ou Pikullos, dieu du mal et de la mort. A la tête de leurs prêtres était un chef, dit Griwe (Graf ?), qui jouissait d'un pouvoir absolu. Parfois aussi des prêtresses, ou devineresses, attiraient à elles le pouvoir. Ils croyaient à l'immortalité de l'âme et à des récompenses au delà de la tombe. Le christianisme leur fut apporté par Adalbert de Prague et par Bruno de Quer-furt, qui furent martyrisés, 997 et 1009. D'autres essais furent tentés de Pologne, de Suède, de Norwège et du Danemark, mais ils échouèrent. Enfin 1209 vint Christian, q. v. qui avec l'aide de Conrad, duc de Massovie, aidé du pape, et appuyé par Frédéric II, réussit au bout d'une trentaine d'années, grâce à une croisade et au concours de l'ordre teutonique, à obtenir la soumission extérieure des Prussiens au christianisme imposé par Borne, 1244. Le pays fut partagé en 4 évêch 1249: Cul m, avec Hei-denreich pour èvêque; la Pomésanie, avec Ernest deTorgau; l'Ermland, et le Samland qu'on ne tenait pas encore. Albert d'Armagh en fut l'archevêque. Les évêchés furent partagés en 3 portions, dont 2 pour l'ordre Teutonique, et une pour l'évêque. Mais ce n'est qu'en 1283, après une suite de nouveaux massacres, que les païens furent complètement écrasés, et que le vaillant Skurdo, désespérant de vaincre, se retira en Lithuanie après avoir tout détruit derrière lui. L'alliance de l'Église avec Tordre Teutonique ne lui porta pas bonheur; elles se cor* rompit, et les mœurs avec elle. Une espèce de réaction se fit au 15™ siècle, sous l'influence du mouvement hussite, et prépara les voies à la Béformation. L'ordre ayant succombé après sa malheureuse guerre de Pologne 1519-1521, son dernier grand-maltre, Albert de Brandebourg, passa au protestantisme 1522. Plusieurs évêques favorisèrent ouvertement la Réforme; Wittenberg y envoya des prédicateurs, et entre 1525 et 1530 la Réformation fut de.initivement acceptée et organisée; une sorte de régime synodal (Restitutions* synodales) y fut introduite, et confirmée en 1544. Le souverain fut longtemps l'évêque de fait de l'Église; mais ce droit, dont il avait hérité des évêques, lui apportai! plus d'ennuis que de profits, à cause des confessions différentes qui se partageaient le pays. Le luthéranisme dominait, et avec un caractère de raideur qui devait le conduire à la foi morte. Le réveil de Spener amena un peu de vie dans cette orthodoxie sèche et froide. L'électeur de Brandebourg Jean Sigismond, ayant passé 1653 de l'Égl. luthérienne à la réformée, les princes qui lui succédèrent sur le trône de Prusse travaillèrent à réunir les 2 communions. Ils commencèrent par abolir la Formule de Concorde, beaucoup trop confessionnelle, 1656. Puis, de nombreux réfugiés réformés étant venus de France, amenèrent un esprit nouveau qui permit de faire quelques pas dans le sens de la tolérance et d'un rapprochement fraternel. Enfin le 27 sept. 1817, à l'occasion du 3** jubilé de la Réformation, le roi Fréd.-Guillaume IV invita les 2 Églises à se réunir en une seule, et 4 ans après, une Agende, ou Liturgie, était publiée et imposée de fait à toutes les églises du royaume. L'idée était bonne, mais on ne légifère pas en matière de conscience; beaucoup d'églises résistèrent, il fallut employer la coutrainte, parfois la force armée. En 1835 un grand nombre de luthériens se constituèrent en églises indépendantes, plus de 60,000 en Silésie; d'autres émigrèrent en Amérique. Avec le temps, et en laissant aux dissidents la liberté, l'union a fini par être assez généralement acceptée. Dans cette union, c'est la doctrine luthérienne qui a dû faire le plus de sacrifices, parce que c'est elle qui avait le plus d'angles et les prétentions les plus absolues. On compte auj. en Prusse environ 17 millions de protestants, 8 à 9 millions de catholiques, et 350 mille juifs.

PSELLUS, Michel-Constantin, dit le Jeune, par opposition à un philos, grec du même nom, contemporain de Photius, surnommé l'Ancien. Né vers 1020 à Constantinople, prof, de philos., sénateur sous trois règnes, il exerça une grande influence politique sous Michel Ducas, mais tomba avec loi 1078, se fit moine et se retira dans nn couvent où il f 1106. Mathématicien, médecin, historien, théologien, il a énormément écrit, en prose et en vers: des traductions et des ouvrages originaux, sur Aristote, les minéraux, l'acoustique, la chronographie, Grégoire de Naziance, l'âme, la Trinité, la personne de Christ, etc. v. Allatius, De Psellis 1644; Bois-sonade, Paris, 1838.

PSEUDÉPIGRAPHES, livres faussement attribués aux auteurs dont ils portent le nom, et par conséquent apocryphes, mais tellement sans valeur qu'on ne les a pas même admis parmi les apocryphes bibliques, dont quelques-uns sont cependant bien médiocres. On connaît sous ce titre 1° pour l'A.-T., des Psaumes de Salomon, composés sous Pompée, ou sous Antio-chus Epiphanes; le livre d'Enoch, sous Jean Hyrcan; le 4®* livrs d'Esdras, vers la fin du siècle; l'Ascension et la vision d'Esaïe, d'origine chrétienne avec une teinte gnostique; le Testament des 12 patriarches, de la fin du 2™ siècle; Le Livre du Jubilé, à peu près contemporain de l'ère chrétienne; la Vie d'Adam, comprenant son Testament et celui de Noé; la lettre de Baruch aux 9 ■/» tribus; l'Assomption de Moïse, citée Jude 9; un Testament de Salomon, et beaucoup d'autres ouvragés, découverts ou publiés récemment; 2° pour le N.-T.: les Actes de Pilate et la Descente de Christ aux enfers, l'Évangile de Thomas, le Protévangile de Jacques, le faux Matthieu ou l'Êvang. de l'enfance, la Nativité de Marie, l'enfance du Sauveur, l'Hist.' de Joseph charpentier, l'Assomption de la Vierge, et une quantité d'autres Évangiles, d'Actes, de Discours, d'Épîtres (comme celles d'Abgare) et d'Apocalypses, autant d'ouvrages des 2®e et 3m« siècles, plus ou moins complètement conservés, ou connus seulement par des citations.

PSEUDO-ISIDORE, v. Isidore, et Décrétales.

PTOLÉMÉE, disciple de Valentin, q. v. 2<>.

PULCHÉRIE, tille de l'emp. Arcadius, née 398, tutrice de son jeune frère Théodose II, proclamée augusta 415, co-régente avec lui; femme à tendances monastiques, ambitieuse, zélée pour la foi, ayant fait vœu de virginité. Elle maria son frère avec Eudoxie ou Athénaïs 421, mais dès qu'elle s'aperçut qu'elle avait de l'influence et qu'elle s'en servait en faveur du nestorianisme, elle la poursuivit de sa haine, et n'eut de repos qu'après l'avoir réduite à aller s'ensevelir dans la retraite à Jérusalem. Son fr. étant mort 450, le trône lui revint, car la fille de Théodose, Eudoxie, avait perdu ses droits en épousant Valentinien III, emp. d'Occident. Elle épousa de son côté pour la forme, pour avoir un co-régent, le sénateur Marcien, âgé de 60 ans, qui la laissa libre de continuer au palais son existence de religieuse. Elle était sous l'influence du pape Léon 1er. C'est elle qui convoqua les conc. d'Ephèse et de Chalcédoine, et assista môme avec son mari, 25 oct. 451, à la 6®« session de ce dernier, où elle eut l'occasion de se venger de Dioscure, év. d'Alexandrie, qu'elle haïssait, et de faire condamner le mo-nophysitisme. f 11 sept. 453. Honorée comme sainte par les grecs.

PUNSHON, William Morley, prédicateur wesleyen très éloquent, surnommé le Chrysostome du méthodisme. Né 1825 à Doncaster, fils d'un drapier, il fut placé à 14 ans chez son grand-père, marchand de bois à Sunderland, et nommé à 17 ans prédicateur local. A 21 ans, il était prédicateur itinérant. Il donna aussi de brillantes conférences sur les Huguenots, Bu-nyan, Wesley, Macaulay, etc. Il se fixa au Canada en 1868, revint en Angleterre en 1873, et fut en 1874 nommé président de la Conférence wesleyenne, puis secrétaire de la maison wes-leyenne des missions, f 14 avril 1881 à Brixton, Londres.

PURGATOIRE, lieu de purification, sorte d'intermédiaire entre le ciel et l'enfer, ou plutôt l'enfer sans l'éternité, un enfer d'une durée plus ou moins longue, où, d'après l'Égl. catholique, sont envoyés ceux qui, morts en état de grâce, n'ont cependant pas entièrement expié leurs péchés. On cherche à justifier ce dogme par 2 Macc. 12, 40. sq., et en recourant aux Apocryphes, on reconnaît implicitement que la Bible ne l'enseigne pas. Mais qu'est-ce que le Purgatoire, et où est-il? Bellarmin compte là-dessus 8 opinions différentes. Pour les uns c'est un vrai feu dévorant, pour les autres un état spirituel, un monde sans matière; les uns le placent dans la région moyenne de l'air, les autres sous la Méditerranée, avec l'Etna et le Vésuve pour soupiraux. La peine des malheureux peut être abrégée par les prières des vivants, par certains actes, et surtout par des aumônes. Les rapports du Purgatoire ayec le scandale des Indulgences, éveillèrent l'attention des Réformateurs, qui, après avoir d'abord rejeté simplement la pensée d'un salut par l'argent, finirent par rejeter l'idée même du purgatoire, comme n'ayant aucune base biblique. Les origines de ce dogme ne remontent pas plus haut que saint Augustin et Grégoire-le-Grand, qui semblent avoir admis la possibilité de peines expiatrices temporaires après la mort. Le concile de Florence 1439, et après lui celui de Trente (session 25) précisèrent le dogme c qu'il y a un Purgatoire, et que les âmes qui y sont détenues sont soulagées par les suffrages des fidèles particulièrement par le sacrifice de l'autel >. L'Ég ise grecque s'en tient à l'idée générale de l'hadès, ou lieu invisible.

PURITAINS, nom donné en Angleterre, après la Réforme, à ceux qui auraient désiré une réforme plus complète et plus radicale que celle qui se fit sous les auspices du roi et de son parti. Ils subissaient l'influence de Genève et de la Hollande, c.-à-d. celle de Calvin; ils demandaient un culte plus simple et repoussaient l'épiscopat. Le nom même qu'on leur donna caractérisait leur intention de purifier l'Église autant que possible, dans ses institutions, dans son clergé et dans ses membres. Us demeurèrent d'abord dans l'Égl. épiscopale, se contentant de protester contre ce qu'ils appelaient des restes de papisme, mais quand ils virent qu'ils n'avaient à espérer aucune concession, ils se retirèrent 1570 et se constituèrent d'après le système presbytérien. On chercha à les ramener par des persécutions, et l'archev. Whitgift, ancien puritain lui-même, se distingua dans cette campagne, mais naturellement sans rien obtenir. Élisabeth en 1583 institua une commission d'enquête, composée de 12 évêques et de 32 magistrats, qui troubla et irrita le pays par ses procédés inquisitoriaux. L'avènement des Stuarts, et surtout Charles 1er, aviva la persécution, et les presbytériens, surtout les brownistes, q. v. se cramponnèrent touj. plus à leur foi pour laquelle ils souffraient. En 1620 un grand nombre émigrèrent en Amérique. Le roi, l'archev. Laud et le comte Strafford allèrent si loin qu'ils tournèrent enfin contre eux la majorité de la nation; la révolution éclata 1640. En 1643 l'épiscopat fut aboli, les puritains étaient les maîtres, mais à leur tour ils allèrent trop loin, et en 1658 la réaction se fit; on rappela Charles II, le fils du roi mort sur l'échafaud. Celui-ci, qui n'avait rien appris en exil, recommença l'œuvre de la persuasion par la force, et entreprit de soumettre les dissidents par l'Acte d'uniformité, qui entra en vigueur le 24 août 1662; 2000 ecclésiastiques furent contraints de se retirer, après qu'on eut en vain offert aux plus distingués d'entre eux des postes d'évêques, et l'Acte des 5 milles leur interdit en 1665 de se rapprocher de plus de cinq milles de leurs anciennes paroisses. En 1673 ils furent, comme les catholiques, exclus des fonctions publiques. Enfin les tentatives papistes de Jacques II ayant soulevé contre lui les épiscopaux aussi bien que les puritains, l'avènement de Guillaume d'Orange mit fin à leurs souffrances, et leurs droits furent officiellement reconnus. Mais en même temps disparut, non leur foi, mais la raideur de principes qui les avait caractérisés et qui n'était due qu'au fait même de la persécution; ils s'allièrent dès lors avec moins de scrupule à d'autres églises synodales ou congrégationalistes, aux presbytériens, aux baptistes, et disparurent presque de la scène, laissant à l'Église et à leurs descendants le souvenir de leur persévérance et de leur fidélité.

PUSEY, Puséisme. Le docteur Édouard-Bou-verie Pusey, né août 1800, et depuis 1818 prof, d'hébreu et chanoine du collège de Christ-Church à Oxford, a donné son nom à une nouvelle forme de l'anglicanisme, plus rapprochée encore du catholicisme et y aboutissant, sinon logiquement, du moins presque fatalement comme l'a prouvé l'exemple de quelques-uns de ses chefs et de ses adhérents. Élève d'Oxford, mystique par tempérament, avec quelque chose de nuageux dans les pensées et dans le style, qu'un séjour en Allemagne n'avait pas contribué à rendre plus lucide, Pusey joignait à des connaissances variées une vraie et profonde piété, une grande générosité, des manières agréables et un aimable caractère. Mais, comme tout le monde, il avait son côté faible; il avait en horreur le libéralisme, soit en politique, où il était représenté par le ministère whig de lord Grey, ouvertement hostile à l'Église établie, et qui venait de supprimer une dizaine d'évéchés en Irlande; soit en religion, toute hérésie et même toute dissidence lui apparaissant comme une révolte contre Dieu. Il avait avec lui quel-ques amis de son bord, et ils s'excitaient les uns les autres: Newmann, q. v., Froude, qui mourut pendant la lutte; Keble, philosophe idéaliste, qui ne pouvait pas souffrir qu'on appelât la Bible la religion des protestants; Palmer,etc. Us s'unirent pour propager leurs vues, et ils publièrent un grand nombre d'écrits, qui firent sensation. Ces écrits, sous le nom de Traités pour les temps, valurent au mouvement le nom de Tractarianisme; on l'appella aussi Puséisme, du nom de son principal représentant; ou Ri-tualisme, du nom de sa tendance, qui consistait à développer le rituel dans l'Égl. anglicane. C'est même ce dernier nom qui a fini par prévaloir. Le premier Traité, de Newmann, parut en sept. 1833; le 90e et dernier, aussi du même auteur, à Pentecôte 1841. Les crucifix, les cierges, les processions, les prières pour les morts, le signe de la croix, ont pris place dans ce nouveau culte, et les imperfections de la législation anglaise n'ont pas encore permis de mettre ordre à ce retour de catholicisme, qui flatte certaines couches aristocratiques, mais qui est profondément antipathique à la nation. Les ri-tualistes sont aussi connus sous le nom deHigk Church, ceux qui sont très attachés à l'Église, par opposition à la Low Church, qui tiennent davantage à la doctrine. La Broad Church, on église large, a plutôt pour principe le maintien de l'union entre l'Église et l'État, et se mont* assez large et tolérante pour le reste; c'est dans ses rangs surtout que se recrute le rationalisme; Colenso, etc. A la suite d'un sermon prêché en 1843 à l'université, Pusey fut suspendu de la prédication pour 2 ans. Effrayé de voir quelques-uns de ses amis se faire catholiques, il écrivit à l'év. de Londres pour justifier sa doctrine; lui-môme n'innova pas en matière de costume et de cérémonies. Il continua jusqu'à la fin ses cours d'hébreu et se retira peu à peu du mouvement qu'il avait provoqué, f sept. 1882 au prieuré d'Ascot. Marié en 1828, il perdit en 1838 sa femme, qui lui laissa 2 filles et 1 fils; ce dernier, infirme, mais bien doué, est mort en 1880.

PYT, Henri, né 5 avril 1796 à Sainte-Croix, Vaud, étudiait la théol. à Genève, quand le règlement du 3 mai 1817 vint briser sa carrière officielle. 11 appartenait au réveil et n'hésita pas à refuser sa signature. Nommé pasteur de l'égl. du Boorg-de-Four, Genève, il accepta bientôt nne suflfragance à Saverdun. visita la Picardie, fut consacré 1819 à Londres, passa 8 ans à Bayonne et dans le Béarn, où il revisa le N. T. en langue basque; vint ensuite à Boulogne, puis à Versailles et à Paris, où il t 21 juin 1835. Auteur de quelques ouvrages de controverse et d'apologétique, et de quelques articles dans le Semeur, il était remarquable comme orateur par son onction pleine de force et de logique. Il avait épousé une sœur d'Ami Bost, qui le seconda puissamment dans son ministère. — Vie par Gners.

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QUADRAGÉSIME, v. Carême.

QUàDRATUS 1° év. d'Athènes, qui réunit sous Antonin-le-Pieux les débris de son troupeau dispersé. 2° apologète du christianisme, vivant à Magnésie. Eusèbe a conservé quelques fragments de l'apologie qu'il adressa 126 à Adrien; l'ouvrage existait encore au 7 me siècle. Dans cet ouvrage Quadrat déclare entre autres avoir vu des hommes ressuscités, ou guéris par Christ. Eusèbe lui attribue aussi à lui-même des dons miraculeux, et l'appelle évangéliste. D'après Jérôme ce serait le même que le précédent.

QUAKERS. A l'époque de la révolution d'Angleterre, dans un moment de fermentation et de désordre politique et religieux, il se trouva des esprits fervents et pieux, sentant les maux de l'Égl. et désireux d'y porter remède. Georges Fox, fils d'un tisserand presbytérien, né juillet 1624 à Brighton, fut envoyé en apprentissage chez un marchand de bestiaux de Nottingham. Cet homme l'employa à garder ses moutons, ce qui lui laissa du temps pour réfléchir. Fox médita sur la corruption de l'Église et l'attribua à ce que les hommes négligeaient l'intérieur pour l'extérieur, mais cette idée juste prit une fausse direction, et il mêla aux inspirations de l'esprit de Dieu celles de son propre esprit. Heureusement il était encore sous l'influence de la parole extérieure, et il ne voulut ni ne put s'y soustraire entièrement; cela le sauva de lourdes chutes. En 1647 il se mit à prêcher, et souvent avec un enthousiasme fanatique. Son zèle, et son intrépidité, même devant Cromwell, lui gagnèrent beaucoup d'adhérents. Il voyagea en Angleterre, en Allemagne et en Amérique, et répandit ainsi ses principes. La communauté, dont on fixe ordinairement l'origine à l'an 1649, se nomme Société des Amis, ou Peuple de Dieu; mais ils sont plus généralement connus sous le nom de quakers, ou trembleurs, dont l'étymo-logie est incertaine. Les uns le rattachent au tremblement nerveux et fébrile qui accompagnait leurs prières ou leur inspiration religieuse; les autres à ce que Fox, en présence du juge Bennet, lui ayant cité Es. 32, 11., le juge, dit-on, lui répondit: « Voilà un trembleur. » Les Amis ne rejettent ni la Bible, ni la religion positive, mais ils n'y voient qu'un moyen pour arriver à l'œuvre intérieure qui se fait dans le cœur. Dans une profession de foi présentée par Fox à un gouverneur américain, Fox reproduit à peu près le Symbole, auquel il ajoute en parlant de Jésus: « Il est venu spirituellement et nous a donné un esprit pour reconnaître le véritable, etc. » Il n'y a pas chez eux de ministère; tous les membres du troupeau qui sont illuminés doivent s'édifier mutuellement. Plus tard cependant, et avec la pratique, on choisit dans chaque communauté certains membres, ouvriers ou autres, chargés d'exhorter dans le cas où personne ne prendrait la parole. Point de fêtes, ni d'églises, ni de rites, ni de sacrements; pas même de chant. Ils se réunissent en silence dans une simple salle, et l'assemblée se dissout de même au bout de quelque temps, si personne n'a rien à dire. Ils refusent le serment et le service militaire; ils s'opposent à la mode et au luxe, et dans le sentiment de l'égalité de tous les hommes ils gardent leur chapeau sur la tête et tutoient tout le monde. Leur costume est singulier: vêtements de couleur sombre, sans boutons; chapeau à large bord pour les hommes; mantille noire, immense capuchon noir, et tablier vert pour les femmes. Celles qui ont du goût trouvent toujours moyen de s'en tirer. Dans les temps plus modernes ils se sont divisés en deux partis: les secs, plus rigides, et les mouillés, plus modérés, plus larges et disposés à se relâcher sur les points qui n'engagent directement ni la foi, ni la morale. Fox f 1691. Pendant sa vie la communauté avait reçu dans son sein des hommes marquants, dont l'adhé-

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sion lui fut utile: Samuel Fisher 1694; Georges Keith; Barclay, le théologien de la secte. Le sort des quakers resta incertain jusqu'après la mort de Fox. Les congrégations d'Angleterre et d'Amérique étaient persécutées; les autresétaient peu importantes. Jacques II fut le premier qui les protégea, peut-être sous l'influence de William Penn; les événements de 1688 amenèrent l'édit de tolérance de Guillaume III, 1689, qui leur donna enfin une entière liberté de conscience. A l'époque des persécutions ils s'étaient enfuis en grand nombre en Amérique, pour éviter la prison et les maisons de fous où l'on affectait de les enfermer. Ils débarquèrent dans le New-Jersey en 1660, et reçurent de Penn en 1684 le territoire qui prit le nom de Pensylva-nie. C'est là qu'ils sont encore auj. le plus nombreux. En 1658 ils avaient fondé en Hollande de nombreux et importants établissements, dont plusieurs subsistent encore; et d'autres en plusieurs parties de l'Allemagne, Dantzig, Altona, mais qui ont disparu, sauf Pyrmont. Leur nombre s'élève à 300,000 aux États-Unis seulement, où ils ne comptent pas moins de 7 province^. Ils se sont de tout temps distingués comme philanthropes et ils ont rendu de vrais services à la cause de l'humanité, William Allen et Béné-zet dans leurs efforts pour l'abolition de l'esclavage, Caroline Fry pour l'amélioration du système pénitentiaire; Gurney, Forster, Grellet, Sturge dans les temps plus modernes, par leurs actes de bienfaisance, de dévouement et d'intercession. — v. Crœse, Tschirner, W. Penn, Gurney, Astié, etc.

QUARTO-DÉCIMAINS (14-w), ceux qui célébraient la Pâque à la mode juive, c.-à-d. le 14 nisan, comme Polycarpe, par opposition à l'usage des chrétiens qui, partant du fait que la résurrection avait eu lieu le dimanche, plaçaient la mort du Sauveur au vendredi. Les év. de Rome, Césarée, Alexandrie, Syrie, Palestine, étaient d'accord, et la communion des Églises faillit être rompue pour cette divergence, si peu importante. Le bon esprit des quarto-décimains et l'intervention d'Irénée parvinrent à ramener la paix. Le conc. de Nicée régla la question dans le sens des occidentaux, mais la coutume orientale continua de prévaloir chez quelques églises et quelques sectes, les montanistes, les novatiens, les audiens, etc.

QUEDLINBOURG, célèbre abbaye de femmes, fondée 937 par Otton 1er Sur un terrain dont Mathilde, sa mère, avait fait donation pour des veuves. Destinée à des princesses et à des nobles, cette abbaye jouit de la faveur particulière des empereurs saxons. Après la mort de sa fondatrice, sa petite-fille, Mathilde, sœur d'Otton II, en fut la première abbesse 966, puis sa nièce Adélaïde. Le patronage en appartenait à la

Saxe, qui 1690 vendit sou droit à la Prusse. La Réformation y fut introduite 1539 sous Anna de Stolberg. L'abbaye fut sécularisée en 1803. Le ch&teau renferme les restes d'Henri I.

QUEISS, Eberhardt (de), év. de Poméranie, successeur de Polenz, abdiqua en 1523, se rattacha à la Réforme, et se maria peu après, f 1529.

QUÉLEN, Hyacinthe (comte de), né 8 oct. 1778 à Paris, étudia à Saint-Sulpice et fut ordonné prêtre 1807. Secrétaire et aumônier dn cardinal Fesch, il l'accompagna à Lyon quand il se brouilla avec Napoléon. Sous la restauration il fut successivement grand vicaire de l'év. de Saint-Brieuc, vicaire général de Talleyrand, évêque in partibus de Samosate, coadjuteur de Talleyrand en 1809, son successeur comme archev. de Paris en 1821. En 1822 il fut nommé pair de France, puis membre de l'Académie. D fit un grand nombre de voyages, s'occupa activement de reliques et d'œuvres de bienfaisance. Très ami des jésuites, dont il ne put cependant pas empêcher l'expulsion en 1828, il était hostile aux idées modernes et patronnait l'ultn-montanisme. Il bouda le gouvernement de 1830. et s'attira la haine du peuple qui, par 2 fois, saccagea le palais archiépiscopal, 1830 et 1831. ce qui ne l'empêcha pas de se montrer aussi généreux que courageux lors du choléra; il mit à la disposition des malades son château d* Gon-flans, et créa l'établissement des Orphelins dn choléra, f 1839. On a de lui de nombreux mandements, l'Oraison funèbre de Louis XVI, celle du duc de Berry. Il a pris part à la rédaction du Concordat. M. Molé, son successeur à l'Académie, a fait son éloge.

QUENSTEDT, Jean-André, né 1617àQued linbourg, prof, de théol. à Wittenberg depuis 1644, et représentant des tendances de cette école, f 1688. Auteur d'une Theol. didactico-polemica, ou Système de théologie, qui est le dernier mot de la scolastique luthérienne, el qui se distingue par ^développement et par le raffinement exagéré des définitions. C'était un homme doux et sans fiel dans sa polémique.

QUERCUS, sous le chêne, grec epi dru*: v. Chalcédoine.

QUESNEL, Pasquier, d'origine écossaise, ne 14 juill. 1634 à Paris, étudia à la Sorbonne, en tra 1657 à l'Oratoire où étaient déjà ses 2 frères, et fut en 1662 nommé directeur de Port-Royal de Paris. Son principal ouvrage: Le N. T. en français avec des réflexions morale*, parut d'abord à Paris 1687, et eut de nombreuses éditions, revues et augmentées. Il publu aussi les œuvres du pape Léon et celles d'Hilaire d'Arelate, avec notes, pour défendre les libertés de l'Égl. gallicane, 1675; cette publication fut mise à l'index, et l'auteur, suspect de jansénisme, dnt quitter Paris. Il se rendit d'abord à Orléans, mais ayant refusé de signer une formule contre Jansénius, il dut se retirer à Bruxelles, où il reçut les derniers soupirs de son ami Arnaud. Les jésuites obtinrent du roi d'Espagne qu'il fût arrêté et incarcéré à Ma-lines 1703. Avec l'aide de ses frères il réussit a s'échapper 1708 et arriva à Amsterdam, où il eut à se défendre contre les calomnies de ses ennemis, qui incriminaient même sa moralité. Il y fonda quelques églises jansénistes. Ses Réflexions morales, d'abord approuvées par Vailles, év. de Châlons, puis condamnées par le même, devenu archev. de Paris, furent condamnées par le pape; la bulle Unigenitus de 1713 censura en particulier 101 propositions extraites de ce livre, f 2 déc. 1719. — Un autre Quesnel f 1774 à La Haye, a écrit une Hist. des jésuites, Soleure, 1740, 4 vol. in-12°.

QUIEN (Michel Le), savant dominicain, né 1661 à Boulogne, f 12 mars 1733 bibliothécaire du couvent Saint-Honoré à Paris. Il a publié les œuvres de Jean Damascène, et de quelques ouvrages de lui même, polémiques et assez violents, en latin: l'Orient chrétien, une Panoplie contre le schisme des grecs, une Défense du texte hébreu, etc.

QUIERZY, ou Quiercy, sur l'Oise; du diocèse de Reims. Un concile y fut tenu 849, dans lequel Gottschalk fut condamné à cause de ses vues sur la prédestination; un autre en 853 approuva la doctrine contraire d'Hincmar. Dans un troisième, 857, à propos du conflit survenu entre Hincmar et Rothad de Soissons, les fausses décrétales d'Isidore furent citées pour la première fois.

QUIÉTISME, nom donné d'une manière générale à cette disposition de l'âme qui la fait se replier sur elle-même, se recueillir dans la contemplation de Dieu, et se désintéresser des choses visibles, même religieuses. Dans un sens plus restreint on désigne sous ce nom, et sous celui de Quiétistes les sectes ou les individualités qui ont professé avec plus ou moins d'éclat ce genre de système, ou de philosophie mystique. Les caractères ne se discutent pas, et il y a dans le monde comme dans l'Église des natures qui. sans être apathiques, sont cependant plus portées à la contemplation qu'à la vie pratique. Si elles sont religieuses, et qu'elles réduisent en système ce qui chez elle est une affaire de tempérament, elles seront quiétistes; elles vivront dans une communion intime et continuelle avec Dieu. Par conséquent aussi elles tomberont dans une indifférence relative quant aux formes, et même quant à l'Église. C'est ce qui a valu de tout temps à ces gens inoffensifs une espèce de malveillance de la part des chrétiens militants. Et à vrai dire, ils font du mal en ce sens qu'ils ne font pas de bien, et qu'ils entravent quelquefois ceux qui agissent. Ils consomment et ne produisent pas. Les plus anciens quiétistes systématiques sont les Hésvchas-tes, q. v. Puis sont venus Molinos, Mme Guyon, Malaval, Fénelon. Ils pouvaient s'autoriser d'anciens mystiques très orthodoxes, mais ils ont eu beau les invoquer, ils ont été condamnés par l'Église. Bossuet en particulier leur a fait une guerre passionnée, et Fénelon a courbé la tête devant la censure. Avec lui le quiétisme a pris fin. v. la Réfutation desQuiét. par Nicole; Relation du Q. par Bossuet.

QUINET, Edgar, né 17 févr. 1803 à Bourg, f 27 mars 1875 à Versailles, fit de bonnes études à Paris, les compléta à Heidelberg, visita la Grèce, et fut successivement prof, à Lyon, puis au collège de France. Son cours fut suspendu en 1846. comme celui de Michelet. Député en 1848 il fut exilé en 1851 et se rendit d'abord à Bruxelles, puis à Veytaux, Montreux, jusqu'à la chute du 2J empire. Auteur d'un fort grand nombre d'ouvrages sur l'histoire, le génie el l'avenir des religions, Tultramontanisme, la Vie de Jésus, etc. Vaporeux, souvent diffus, s'assi-milantavec peine les idées allemandes, tournant parfois au panthéisme, il fut touj. plein d'un humble respect pour le sentiment religieux, et par deux fois dans ses deuils il s'adressa au protestantisme, auquel il avait rendu un hommage public dans son Étude sur Marnix de Sainte-Aldegonde, dans sa Lettre à Eug. Sue, et dans ses 2 vol. sur la Révolution. Il ne fut pas assez logique pour aller jusqu'au bout. v. Vi-net. Statue à Bourg.

QUINI-SEXTE (5*e 6me), concile tenu 692 à Constantinople, qui rejeta les Constitutions apostoliques. Il reçut ce nom parce qu'il eut la mission spéciale de suppléer par ses 102 canons disciplinaires au 5me et au 6m« concile, qui n'en avait point laissé. Quoique écuménique, et bien que ses actes aient été signés par les délégués romains, il n'a pas été reconnu par Serge de Rome, à cause de ses votes sur les canons, le mariage des prêtres, le rang des patriarches, le jeûne du Samedi, l'usage du sang et des bêtes étouffées, les images de l'agneau, etc. On l'appelle aussi in trullo (sous le dôme) q. v. parce qu'il se tint dans la salle voûtée de la chancellerie du palais impérial, comme déjà celui de 680.

QUINQUAGÉSISME, ou Esto mihi: le dimanche qui tombe 50 jours avant Pâques, et qui a quelquefois marqué le commencement du Carême. LeDim. suivant est appelé Dimanche gras.

QUINQUENNALES (Facultés). On nomme ainsi les pouvoirs que le pape confère aux évêques pour l'accomplissement de certains actes qui, d'après le conc. de Trente, sont déjà de leur compétence. Il semblerait qu'il n'y eût pas lieu à les spécifier; mais à cause des nonces, et comme il est reçu qu'un délégué spécial et supérieur concentre en sa personne les droits et les attributions de ceux qui n'ont qu'un mandat général, les pouvoirs des évéques pourraient n'être qu'illusoires, s'ils ne leur étaient confirmés par une déclaration expresse, laquelle est faite pour 5 années. Les pouvoirs dont il s'agit sont relatifs surtout aux dispenses pour mariages, aux cas réservés, aux devoirs des prêtres, etc.

R

HABAN MAUR, Rhabanu* Maurus, ou Ma-ynentius, savant moine, né d'une bonne famille à Mayence 776, + 85(J> étudia d'abord à l'abbaye de Fulde, puis à Saint-Martin de Tours, sous Alcuin; reçut les ordres 814; ouvrit à Fulde une école qui devint célèbre et compta Gotts-chalk parmi ses élèves, devint abbé de Fulde 822, puis archev. de Mayence; fut le premier à dénoncer son ancien moine Gottschalk et le plus ardent à le poursuivre, l'accusant d'avoir dit que Dieu avait prédestiné les méchants au péché, ad peccatum, tandis que celui-ci, qui ne déguisa jamais ses sentiments, avait dit que Dieu les avait prédestinés à la perdition, ad in-teritum, mais non au péché. Après avoir compromis Hincmar dans la lutte, il refusa d'intervenir pour l'aider k sortir d'embarras, soit qu'il eût peur de cette levée de boucliers, soit qu'il ne sût pas lui-même quel parti prendre, et qu'il ne fût ni assez philosophe, ni assez théologien pour voir clair dans cette question. Homme plutôt pratique, il réprima beaucoup d'abus, intervint comme conciliateur entre Louis-le-Déb. et ses fils, fit des règlements et se distingua par sa charité lors de la famine de 850. Il a laissé 51 ouvrages de théologie, de morale, de philologie, chronologie, lettres, etc. Ses OEu-vresont été publiées k Cologne, 3 vol. f°. Parmi ses poésies on distingue le Vent Creator.

RABAUT lo Paul, né à Bédarienx le 29 janvier 1718, fils d'un marchand de draps, servit souvent et fort jeune de guide aux prédicanls du désert, devint proposant k 17 ans, et fut nommé pasteur de Nîmes à 20 ans. En 1739 il épousa Magdeleine Gaydan, mais ces jeunes époux comprirent bien vite qu'ils devaient s'imposer une douloureuse séparation. Rabaut n'était pas à la hauteur de sa tâche; il n'avait pour ainsi dire pas fait d'études, et il se décida d'aller passer 3 ans au séminaire de Lausanne, d'où il revint en 1743 avec un certificat signé

Court et Polier de Bottens. Dès son retour \t fut entouré d'une grande considération et fut nommé président, ou modérateur de plusieurs synodes. Il prêchait fréquemment dans les bois ou les carrières des environs de Nîmes, et se faisait facilement entendre de 10,000 personnes. Il recommandait aux siens l'ordre et la soumis* sion, et intervint énergiquement contre les foules exaspérées qui voulaient délivrer le pasteur Désubas. Sa tête fut mise k prix. Le 30 janv. 1752 il fut arrêté par des dragons, avec son jeune ami Bénézet; le lieutenant craignant, avec sa petite troupe, de ne pouvoir garder ses deux prisonniers, en relâcha un, Rabaut, sans se douter que ce fût lui. La même année, 19 sept. 1752, le courageux pasteur, sortant d'une de ses re- I traites, s'avança seul sur une route par laquelle devait passer le ministre de la guerre, marquis Paulmy d'Argenson; il l'aborda, se nomma et lui remit un placet pour le roi. D'Argenson qui d'un mot pouvait le faire arrêter, juger et même pendre sans forme de procès, se découvrit avec respect devant cet héroïsme, et promit de remettre le mémoire: en tout cas cette pièce a été retrouvée dans les archives de l'État. La femme j de Rabaut erra elle-même pendant deux ans avec sa mère infirme et ses deux fils, et résista aux suggestions de l'Intendant qui à plusieurs reprises essaya de se servir d'elle et de ses craintes pour obtenir l'éloignement de son mari. En février 1758 il impose les mains au désert k 7 candidats venus de Lausanne. Plus tard, la même année, à 3 autres; 8 à 10,000 fidèles sont réunis et chantent des Psaumes; une patrouille de 15 hommes arrivent, renvoient l'assemblée ! qui se disperse, et tirent dans le tas, tuant femmes et enfants, quoiqu'on ne lenr ait opposé aucune résistance. Quelques jeunes gens seulement, armés de pierres, protègent la retraite des fugitifs, et ce simple fait est exploité contre eux comme une résistance à l'autorité. Rabaut, tout en les blâmant, cherche à les excnser auprès du gouverneur de la province; mais son mémoire, très sobre, très modéré, amène contre lui un redoublement de poursuites; il doit plus que jamais errer dans les bois et se cacher dans des trous ou dans des cavernes. En même temps il envoie ses deux aînés au séminaire de Lausanne. Le jeune pasteur Rochette ayant été arrêté près de Caussade, et livré au parlement de Toulouse, ainsi que les 3 gentilshommes verriers, Rabaut remue ciel et terre en leur faveur. Il adresse une supplique à M®« Adélaïde; on ignore si elle lui parvint; il écrit au duc de Richelieu, au duc de Fitz-James; il écrit même à J.-J. Rousseau, qui lui répond assez sèchement que le devoir des chrétiens est d'obéir aux lois des princes. Les martyrs furent exécutés le 26 février 1762. Peu de semaines après, les ea-pitouls de Toulouse condamnaient l'innocent 'Galas et Rabaut intervenait à son tour en publiant la Calomnie confondue, qui fut lacérée et brûlée par la main du bourreau, sur la place du palais. Ce nouvel écrit irrita tellement la cour que l'on conçut les craintes les plus vives pour la sécurité de Rabaut, et que de toutes parts, Danemark, Hollande, Lausanne, Genève, on lui offrit un asile et des moyens d'existence, mais il refusa toutes ces offres. Il continua pendant plusieurs années encore cette vie de dévouement, d'agitations, de privations, de dangers, de fatigues et d'émotions. Depuis 1765 il était secondé par son fils aîné, Rabaut-Saint-Étienne, mais à la longue cela ne suffit plus, et en 1785 11 obtint du consistoire de Nîmes un congé illimité, avec conservation de son traitement. Vers la même époque, sa femme ayant hérité un fonds de sa mère, il se fit construire une maison et ses paroissiens lui vinrent en aide pour assurer cette retraite à sa vieillesse. La rut; où est située cette demeure, aujourd'hui donnée aux orphelines protestantes du Gard, continue de porter le nom populaire de rue de M. Paul, quoique la municipalité lui ait donné le nom officiel de rue Grétry. Rabaut ne vit pas avec plaisir ses fils se lancer dans la politique, mais il sut apprécier leur attitude dans les Conseils du pays, et il dut bénir Dieu le jour où il reçut la lettre de l'un d'eux, qui se terminait par ces mots: Le président de l'Assemblée nationale est à vos pieds. En 1792, la liberté religieuse ayant été proclamée, le Consistoire loua l'église des frères prêcheurs, ou dominicains; Rabaut prononça la prière de dédicace et lut le Cantique de Siméon; il avait 74 ans, 54 ans de ministère. Ces beaux jours durèrent peu: la Terreur vint, Rabaut fut traîné en prison, transporté sur un âne à la citadelle, outragé par la populace, jusqu'au moment où la mort de Robespierre le rendit à la liberté. Mais il était infirme, et seul: sa femme était morte, Saint-Étienne avait péri sur l'échafaud; Pommier était enfermé à la Conciergerie: son 3™® fils, Rabaut-Dnpuis ou Rabaut jeune, négociant, était dans l'exil, ayant émigré sous la Terreur. Le vieillard, dans sa maison déserte, mit ordre à ses affaires, se recueillit et f le jeudi 25 sept. 1794 à 4 h. du soir. Dévoué jusqu'à la mort, il avait rendu par son tact non moins que par son zèle, de précieux services à l'Église; il avait une éloquence sans éclat, mais douce et pénétrante. Ses vues particulières sur le chiliasme et sur l'épiscopat se perdaient dans l'ensemble de son activité et ne lui furent reprochées par personne. Ses restes reposent dans le sous-sol de la cave de la maison qu'il habitait. Il fut inhumé sans bruit. En 1863 le pasteur Borrel fit placer deux plaques commémoratives, l'une dans la cave,

l'autre dans la chambre mortuaire. En 1882 des fouilles ont remis au jour le squelette, et en 1883 le Consistoire de Nîmes a décidé de le recouvrir d'une pierre tombale, v. Borrel, C. Co-querel, L. Bridel, Ch. Dardier, etc.

2° Rabaut-Saint-Étienne, fils du précédent, né à Nîmes 1743, étudia à Lausanne et fut nommé pasteur de Nîmes à son retour 1765. Il avait aussi étudié le droit. Membre de l'Assemblée Constituante en 1789, et bientôt son président, il demanda et fit décréter, non la tolérance, mais la liberté et l'égalité de tous les cultes, et se fit remarquer par son talent oratoire. Il se prononça contre la mise en jugement de Louis XVI, et vota pour la détention provisoire et le sursis; il vota contre la mort du roi. Membre de la Commission girondine qui surveillait les actes du tribunal révolutionnaire, il tomba avec les Girondins et porta sa tête sur l'échafaud 5 déc. 1793. Sa veuve se tua dans son désespoir. On a de lui un roman: Le triomphe de la Tolérance, Londres 1779, réiinpr. 1820 à Paris sous le titre: Le vieux Cévenol; un Précis de l'hist. de la révolution française 1791, et des Lettres à Bailly sur l'hist. primit. de la Grèce, 1787.

3° Jacques-Antoine Rabaut-Pommier, fr. du précédent, né 24 oct. 1744 à Nîmes, fut comme lui pasteur et membre de la Convention. Il vota la mort du roi, mais il supportait impatiemment le joug de la Montagne, et il fut un des 73 députés qui furent incarcérés par Robespierre et délivrés par sa mort. Il renonça à sa place de pasteur à Paris et entra au service de l'Etat; sous-préfet au Vigan. Exilé en 1815 par les Bourbons comme régicide, il put rentrer en 1818. Il connaissait la vaccine depuis 1784; on ignore pour quels motifs il n'en donna connaissance qu'à peu de personnes, f 1820 à Paris. Auteur d'un Annuaire ecclés. à l'usage des égl. réf. Paris 1807.

4<> Rabaut-Dupuis, fr, des deux précédents, négociant, banni comme fédéraliste, nommé au Conseil des anciens, puis 1799 au Corps législatif, qu'il présida 1802, lors du vote sur le consulat à vie. f 1808.

RABBIN, Rabbinisme. Le mot rab signifie grand, chef, maître; avec la suffixe t, mon, il signifie mon tnaitre, et a fini par prendre une signification générale, comme le mot français monsieur. Dans ce sens il s'appliquait chez les Juifs à toute personne capable d'enseigner ou d'expliquer la loi. Les Juifs distinguaient entre Rab, Rabbi et Rabboni, sans qu'on puisse préciser la différence, ni fixer la date où elle a commencé à se faire sentir. Jésus est appelé 12 fois rabbin, et deux fois Rabboni. Jean-Baptiste est salué de ce nom, et le Sauveur reproche aux notables de son temps de rechercher cette qualification. Il est probable qu'elle datait du retour de l'exil. La vie nationale des Juifs, si souvent menacée, ne tenait pour ainsi dire plus qu'à la connaissance et à l'observation de la loi, puissante barrière qui les séparait des autres peuples. Ce fut leur forteresse, et en l'absence des prophètes, avec une sacrificature qui n'avait pas touj. la conscience de sa mission, il fallait que des hommes de bonne volonté s'appliquassent à faire pénétrer dans le peuple jusqu'aux moindres détails de la loi. Les prêtres s'en chargèrent d'abord, Esdras en tête, mais peu à peu les laïques s'y mirent aussi, touj. plus nombreux; ils lisaient le texte, ils le commentaient, ils le développaient, et comme les masses comprennent mieux les choses concrètes que les abstractions, il arriva ce qui arrive toujours, que la loi fut peu à peu modifiée par le commentaire, et finalement presque oubliée pour ne laisser plus subsister que la tradition et les gloses des rabbins. Ces gloses, d'abord verbales, se fixèrent à leur tour par l'écriture et formèrent à la longue le Talmud. q. v. Il en résulta une théologie spéciale, presque une morale à part, qu'on désigne sous le nom de rabbinisme et qui se caractérise par des subtilités dogmatiques et par la minutie de ses prescriptions, non moins que par l'abandon des grands principes de la loi. La première période des rabbins bibliques, inaugurée par Esdras, finit avec Simon-le-Juste. A partir de ce moment, et déjà sous les Macchabées le règne de la lettre commence à se faire sentir; il s'accentue dans la rivalité des pharisiens et des sadducéens, et le Seigneur se heurte à un monde qui lave le dehors de la coupe et des plats, qui avale le chameau et qui coule le moucheron. Une foule de médiocrités ignorantes aspirent aux fonctions et au titre de rabbin; il y a cependant quelques hommes supérieurs, Hillel et Schammaï sous Hérode: Hillel qui interprète la loi dans un esprit de largeur, Schammaï qui s'en tient rigoureusement à la lettre et prépare le zélotisme. Hillel est à la fois le grand-père et le maître de Gamaliel aux pieds de qui Paul reçut ses leçons. La ruine de Jérusalem ajouta à l'autorité des rabbins, et ils fondèrent à Jamnia une école et un sanhédrin à la tête duquel brilla le second Gamaliel, le digne petit-fils du premier. Le nom de rabbin, qui jusqu'à ce moment était porté indistinctement par à peu près toutes les personnes instruites dans la loi, commença à prendre une signification plus précise, et il fut décerné par les écoles à ceux qui le méritaient par un examen. Mais les temps malheureux qui suivirent amenèrent du relâchement dans la rigueur des conditions imposées, et l'on dut accepter pour rabbins dans de petites congrégations des hommes sachant lire la loi dans l'original et en expliquer le sens au besoin. Le rabbin était ordinairement consacré dans la synagogue où il était placé sur un siège élevé; on lui remettait une clef comme emblème de son pouvoir de lier et de délier, et souvent un livre comme symbole de son enseignement. Aujourd'hui que les États se sont chargés en plusieurs lieux de l'entretien du culte judaïque, ils se réservent aussi de fixer, comme pour les autres cultes, les conditions à remplir pour les fonctions de rabbin.

RABULAS, év. d'Édesse. + 436. D'abonl disciple de Théodore de Mopsueste, vota en 431 à Éphèse avec les év. d'Antioche, mais il se laissa 432 entraîner par Cyrille d'Alexandrie à prendre parti dans le conflit nestorien, et il se prononça énergiquement contre Nestorius, Diodore de Tarse et Théod. de Mopsueste; il renvoya tous ceux de ses maîtres ou lecteurs qui lui parurent pencher vers les idées orientales, et il favorisa par là, sans le vouloir, la fondation d'une école rivale à Nisibis. Il eut pour successeur Ibas, qui appartenait au parti opposé. On a sous son nom une collection de vieux canons de l'Égl. syrienne.

RACOVIE, ou Rakoiv, petite ville de Pologne, palatinat de Sendomir, fondée 1569 par un réformé, Jean Sieminsky, dont le fils Jacques passa aux unitaires 1600 et fit de la ville le quartier général de l'unitarisme polonais avec synodes et écoles. En 1638, pour plaire aux jésuites, Wladislas IV fit fermer l'école, et la petite ville ne fut bientôt plus qu'un pauvre village. — Le Catéchisme dit de Racovie parut en 1605 en polonais. C'est le résumé de la doctrine so-cinienne. Il fut composé par Val. Schmalz, Jérôme Mescorzowsky et Vœlkel, d'après les notes de F. Socin. Une édition allemande fut dédiée

1608 à l'univ. de Wittenberg, et une latine

1609 à Jacques 1er d'Angleterre.

RADBERT, v. Paschase.

RADEGONDE, née 519 fille de Bertaire, roi

de Turinge, païenne de naissance. Faite prisonnière fort jeune par les Francs, elle plut à Clo-thaire 1er qui la fit élever dans le christianisme et la contraignit de l'épouser 538. Mais 6 ans après, 545, le roi lui ayant enlevé son frère par une mort violente pour s'emparer de ses États. Radegonde demanda et obtint de se séparer de lui et de se retirer dans un couvent. Elle prit le voile des mains de Médard à Noyon, et se rendit à Poitiers où elle fonda un couvent de femmes, retraite pour les filles de sénateurs. Elle en rédigea elle-même la règle, qui porte l'empreinte d'une piété profonde et éclairée. Elle réussit à retenir le poète italien, Venance For-tunat, qui devint év. de Poitiers, ainsi que quelques autres savants sous la direction desquels elle étudia les pères grecs et latins, donnant ainsi un bon exemple au clergé. La vie était aussi agréable qu9honorable au monastère, et Aug. Thierry en a fait le plus charmant récit. f 587. Canonisée. Vie par Fortunat.

RADER, Matthieu, savant jésuite, né 1561 à Jeichingen, Tyrol, prof, de rhétorique à Augs-bourg, f 1634 à Munich; auteur d'une Vie de Canisius et de plus, écrits sur l'état religieux de la Bavière.

RADEWIN, Florence, né vers 1350 à Ley-derdam, Hollande, étudia à Prague, et renonça à son canonicat d'Utrecht pour se joindre aux Frères de la vie commune. Il succéda à Groote comme chef de cette confrérie, et en est considéré comme le second fondateur. Il établit de nouvelles maisons de chanoines réguliers à Windesheim près Zwoll, et à Deventer. f vers 1400. Vie par Thomas à Kempis.

RAIKES, Robert, né 1735 à Glocester, imprimeur, rédacteur d'un journal populaire qui lui assura une modeste fortune. Il s'occupa des malheureux, et spécialement des prisonniers, dont il chercha à adoucir la situation. Il fonda aussi en 4784, en faveur des enfants des fabriques et des vagabonds, qu'il appelait de petits sauvages, des écoles qui eurent un grand succès, et qui peu à peu devinrent Tontine de cette institution connue sous le nom d'Ecoles du Dimanche. De 1786 à 1800 un Comité dépensa plus de 100.000 fr. pour le traitement des maîtres et maîtresses chargés de ces écoles, chacun recevant un shelling par dimanche, 1 fr. 25. L'œuvre s'est dès lors modifiée et développée; des moniteurs et des monitrices volontaires ont remplacé les agents salariés, l'école ne dure plus guère qu'une heure, et généralement la leçon ne porte que sur l'enseignement de la Bible. Rai-kes f 1811. Une statue lui a été élevée à Londres en 1880.

RAINERIO Sarehoni, de Plaisance, après avoir été cathare, rentra dans l'Égl. de Rome, se fit dominicain, puis inquisiteur et se montra le plus acharné persécuteur de ses anciens frères. En 1252 il échappa à un complot préparé contre lui, mais Uberto Pallavicini, protecteur des cathares, l'obligea à quitter Milan, + 1259. Il a écrit pour l'Inquisition une Notice (Summa) sur les cathares et les léonistes, qui est une source de renseignements utile à consulter. Les éditions postérieures à celle de Dartène et Durand, renferment beaucoup d'additions et ont moins de valeur.

RAMBACH, J.-J., né 24 févr. 1693 à Halle, fils d'un pauvre menuisier, renonça d'abord aux études pour pouvoir aider son père, mais un accident l'ayant rendu impropre aux travaux manuels, il reprit avec joie la carrière qu'il avait cru devoir abandonner, aida Michaëlis dans la publication de la Bible hébr. de Halle, visita ensuite Iéna, et après quelques années de professorat à Halle, passa à Giessen comme prof, et surintendant, 1731. f avril 1735. Il appartenait à la partie modérée du piétisme. Sa prédication était onctueuse et pratique. Il a composé plusieurs cantiques estimés, et publié un recueil pour l'égl. de Darmstadt. On a de lui un livre d'Herméneutique biblique, un Manuel du catéchiste et des Commentaires qui ont paru après sa mort.

RAMEAUX, v. Semaine sainte.

RAMUS, ou Pierre de la Ramée, né vers 1515 à Cuth près de Soissons, d'une famille noble, mais ruinée, réussit après deux essais infructueux à entrer à l'école de îfavarre comme domestique d'un jeune noble, profita de l'occasion pour s'instruire et fit de grands progrès. II montra dès le commencement de ses travaux la même hostilité contre Aristote, qui avait déjà caractérisé Campanella et Giord. Bruno. 11 voyait l'inutilité et le danger de la dialectique, la nécessité de leur substituer un ensemble de raisonnements plus d'accord avec le bon sens. Ce fut déjà l'objet de sa i™ thèse en 1536, puis de deux ouvrages qu'il publia en 1543. Mais les péripatétitiens étaient nombreux et influents; ils jetèrent les hauts cris, l'agitation fut excessive, l'intrigue s'en mêla et pénétra dans les académies et jusque dans les conseils du roi. Finalement le droit d'enseigner lui fut retiré et il quitta Paris. Mais par la protection du cardinal de Lorraine, la sentence fut annulée, et Ra-mus, qui s'était fait à l'étranger une brillante réputation, fut nommé par François I** en 1545, principal du collège de Presles où il enseigna la rhétorique et les mathématiques. En 1551 il passa au collège de France comme prof, d'éloquence et de philosophie. Le col loque de Polssy l'intéressa vivement; il se préoccupa des questions religieuses et finit par se convertir au protestantisme; mais il perdit du même coup ses protecteurs et il dut de nouveau quitter la France. Il visita Strasbourg, Bâle, Zurich, Genève et Heidelberg. Il ne fut pas autorisé à en -seigner dans l'acad. naissante de Genève, et l'on a plusieurs lettres de Bèze à ce sujet; on en était encore à la philos, péripatéticienne. Il fut mieux reçu en Allemagne, et enseigna à Heidelberg avec succès. Il refusa divers appels, à Bologne, Cracovie, Weissenbourg, et crut en 1571 pouvoir rentrer en France, croyant les troubles religieux apaisés. Il reprit ses leçons, par une faveur spéciale de la cour, qui lui conserva son titre et son traitement. Trahi par son collègue Charpentier, il fut assassiné le 26 août 1572, pendant les massacres de la Saint-Barthé-lemy; il fut précipité de sa fenêtre et son corps jeté à la Seine. Sa logique brille par la clarté, la simplicité et le bon sens; comme plus tard Bacon, il demande que les sciences soient étudiées par l'observation. Il réclame de même pour la religion nne intelligence saine et naturelle de la Bible et l'abandon des arguties sco-(astiques, v. Waddington, Ramus, sa vie, ses écrits et ses opinions, Paris 1855. Son principal ouvrage, posthume, est: Comment. de relig. christianâ, 1576. Il a aussi propose quelques réformes orthographiques, dont plusieurs ont été adoptées (entre autres le j et le v).

RANCÉ, Dominique-Armand-Jean LeBouthil-lier, abbé (de), né à Paris 9 janv. 1626, fils du conseiller et secrétaire de Marie de Médicis, et filleul de Richelieu, hérita à 10 ans d'un frère aîné et devint du même coup chanoine de Notre-Dame, abbé commanda taire de la Trappe, prieur de Boulogne et propriétaire de plusieurs autres bénéfices. Il fit de bonnes études, publia à 12 ans une édition d'Anacréon avec traduction et notes, et se mit à la théologie. Avec ses 20 mille livres de revenus ecclésiastiques, il mena une vie facile et joyeuse. En 1651 il fut ordonné prêtre, en 1654 nommé docteur en théologie. Premier aumônier de Gaston d'Orléans, il refusa l'évêché de Léon, parce qu'il comptait sur l'archevêché de Tours que son oncle lui réservait. Mais au retour d'un voyage, grimpant par une échelle dans la chambre de Mme de Montbazon, qu'il aimait et dont il ignorait la mort, il vit sa tête dans un plateau. Ce fut pour lui un coup de foudre. Déjà sa position était gâtée à la cour par suite de l'attitude qu'il avait prise en 1655 à l'assemblée du clergé de France. Il résolut de renoncer au monde, se démit de tous ses bénéfices, ne se réserva que la Trappe, et s'y retira en 1664 après deux voyages à Rome et après avoir prononcé ses vœux, décidé d'y faire observer la règle la plus stricte. Il y f 1700 après 36 ans de réclusion sur la paille et la cendre. On a de lui: La Règle de saint Benoit, trad. et expliquée, 1689; Sainteté et devoirs de la Vie monastique 1683. Règlements pour l'abbaye de la Trappe, 1701. — Vie, par Châteaubriand, 1844.

RANTERS, les turbulents, les zélateurs exagérés; nom anglais donné par les presbytériens modérés à deux sectes, l'une du temps de Crom-well, qui professait un radicalisme mystique un peu outré; l'autre, vers 1820, dans le York-shire, qui se sépara des méthodistes et célébrait son culte avec des cris bruyants.

RAPHAËL, Santi du nom de son père (forme adoucie Sanzio), né le vendredi saint de 1483 à Urbino, d'une famille de campagnards devenus artistes, reçut ses premières leçons de son père, orfèvre et peintre médiocre, mais qui avait de l'école et du goût. Son père étant + 1494, son oncle l'envoya 1495 à Pérouse chez Va-nucci le Pérugin, où il eut d'abord à broyer les couleurs, puis à copier les dessins du maître.

Le Baptême du Christ, de la chapelle Siitine, est le plus ancien que l'on connaisse; puis le Sauveur remettant les clefs à Pierre. L'élève copie un peu les défauts du maître, mais il ne tarde pas à s'affranchir, et c'est le maître qui se modèlera sur l'élève. Après avoir travaillé aux fresques du Cambio (la Bourse) de Pérouse, où s'entassèrent.pêle-mêle Léonidas et la Transfiguration, Horatius Coclès et les Vendeurs chassés du temple, il fit un court séjour à Urbino, et visita Sienne et Milan. Il avait 20 ans quand il peignit le Mariage de la Vierge, le chef-dœuvre de sa jeunesse. Enfin il arrive à Florence 1505, et il y trouve l'idéal qu'il a rêvé, qui l'inspire, et qui met le sceau à son talent. La Madone du grand-duc et la Vierge à la chaise sont deux tableaux typiques, dont l'un relève du Pérugin et l'autre rivalise avec Michel-Ange En 1508 son oncle, le card. Bramante, le fait venir à Rome, où Jules II le comble d'honneur* et de travaux. Là l'ensemble de ses compositions tient du prodige. Ce sont les Stances, les Loges, des cartons pour tapisseries; grand noiu-bre de sujets bibliques; l'Accord de la théol avec la philosophie, l'École d'Athènes, la Dispute du saint sacrement, la mort d*Ananias, etc Son dernier tableau, la Transfiguration, est aussi son œuvre la plus parfaite: il était destiné au card. Jules de Médicis. Il f à Rome 1520, le vendredi saint, âgé de 37 ans, épuisé par les plaisirs et la volupté. Il légua sa fortune à sw élèves. Ses Madones, et en particulier sa Vierge sixtine, suffisaient à le placer au premier rang des peintres. Ses portraits lui ont fait une seconde réputation par l'art avec lequel il savait trouver sous le masque la physionomie et la vraie ressemblance de ses modèles, Jules IL Léon X, etc. Fondateur de l'école romaine qui résumait les autres écoles, il fut un peintre aimable, sympathique, séraphique, mystique et grandiose, peut-être aussi parfait que Michel-Ange dans les détails; mieux en cour et mieux servi que son rival, il fut moins grand comme homme, moins universel comme génie, et moins complet comme artiste.

RAPIN-THOYR AS, néà Castres 1661, neveu* Pélisson, avocat, puis militaire, protestant, dut quitter la France lors de la révocation de ledit de Nantes, passa en Angleterre et en Hollande, accompagna Guill. d'Orange en Angleterre, fut aide-de-camp du gén. Douglas, prit part au siège de Limerick, fit l'éducation dit duc de Portland, et + 1725 à Wesel. Auteur d'une Hisl d'Angleterre estimée.

RASCHI, v. Jarchi.

RASCOLNIKS, ou les dissidents, nom collectif donné par leurs adversaires à tous ceux qui refusèrent, en Russie, de se ranger à la reforme liturgique de Nicon. Ils s'appelaient eux-môme» les Starotcierzki (vieux croyants), ou Pratooêlawnûje (orthodoxes), reprochant à Ni-con d'avoir altéré le texte des symboles et des anciens conciles, d'avoir changé la manière de faire le signe de la croix, d'avoir modifié l'ordre de la procession de Pâques, d'invoquer le mauvais esprit, etc. Ils se divisaient d'ailleurs en plusieurs sectes: celle des Philippons, fondée par le paysan Philippe Pustowiât vers 1700, ne voulant ni prêtres, ni communion, ni serment, ni service militaire, sobres, inofTensifs, nombreux en Lithuanie et en Gallicie; les Pomoré-niens, qui ne veulent pas dè prêtres et ne reconnaissent pas les cérémonies accomplies par des prêtres; pour entrer chez eux il faut se faire rebaptiser; ils ne se servent pas d'argent et refusent toute relation avec les autres sectes, qui leur paraissent uu peu entachées de l'esprit de l'antéchrist; les Théodosiens, qui n'ont point de prêtres, mais beaucoup de cérémonies; ils se sont bâtis 1771 près de Moscou un couvent et un hôpital. S'étant trouvés dès le début mêlés à des troubles politiques, ils furent persécutés, mais Pierre-le-Grand les laissa tranquilles, les obligeant seulement à porter un morceau d'étoffe rouge sur leurs vêtements. Depuis 1760 ils sont complètement libres; on les trouve dans la Petite Russie, chez les Cosaques, le long de l'Oural, et jusqu'en Sibérie; par leur nombre ils exercent une assez grande influence. Ils sont plusieurs millions.

RÀSTENBOURG, petite ville de Prusse; il s y tint en 1530 un synode ob l'anabaptiste Pierre Zenker, de Dantzig, exposa ses vues; un colloque s'y réunit en 1531 pour les discuter, Poliander et d'autres défendant contre Zenker la doctrine luthérienne. Le duc Albert y assista et se prononça contre les anabaptistes, qui furent en conséquence bannis du pays.

RÀTHERIUS, né vers 890, près de Liège, d'une famille noble, oblat et moine du couvent de Lobach, intrigant, ambitieux, maladroit, et qui ne réussit à rien. Il se lia avec Hilduin, cousin du roi Hugues d'Italie, et Hugues lui donna, non sans quelques difficultés, l'évêché de Vérone, 931. Ratherius ne pardonna pas à Hugues ses hésitations et se tourna contre lui quand Arnold de Bavière envahit ses États. Mais Arnold fut vaincu et R. perdit son évêché. Il profita de son emprisonnement à Pavie pour écrire ses Prœloquia en 6 livres. Relâché en 939 il revint en France et en Belgique, recouvra et perdit de nouveau son évêché, fut nommé év. de Liège, ne fut considéré nulle part, et f 25 avril 974 chez le comte de Namur.

RATHMANN, Hermann, né 1585 à Lubeck, pasteur à Dantzig, f 30 juin 1628. Sa tendance mystique le mit en opposition avec son collègue Jean Corvin et les autres orthodoxes luthériens.

Il ne voyait dans la Bible qu'un instrument historique et une lettre morte, aussi longtemps qu'elle n'était pas vivifiée par l'esprit; il est probable qu'il exagérait sa pensée parce que ses adversaires allaient trop loin de leur côté en faisant de la Bible une puissance agissant par elle-même et comme le véhicule du salut.

RATIONALISME, un de ces grands mots vagues, qui, suivant l'application qu'on en fait, et dans l'ardeur des luttes, perdent leur sens étymologique et leur signification primitive, et finissent par n'avoir plus qu'une portée conventionnelle. Personne n'admet que dans les choses de la religion, l'homme doive renoncer à faire usage de son intelligence, et les croyants les plus fervents, les orthodoxes les plus convaincus, les mystiques même les plus exaltés, prétendent se servir de leur raison pour justifier soit leurs doctrines, soit la position qu'ils ont prise. C'est par la raison qu'ils reconnaissent l'autorité de la révélation, qu'ils en déduisent les faits et les vérités révélées, qu'ils réfutent les attaques dirigées contre le christianisme, qu'ils comparent et contrôlent le sens de passages en apparence contradictoires. C'est la raison elle-même qui sert à marquer les limites qu'elle doit s'imposer, et même en se limitant elle ne cesse pas d'être la raison. Dans ce sens tout homme raisonnable pourrait se dire rationaliste. Mais dans le langage thèologique, tel qu'il est né de la polémique, ce mot désigne presque exclusivement la tendance qui subordonne les choses révélées à leur acceptation par la raison ou la conscience humaine, et dans ce sens c'est la négation de la révélation. Il y a des nuances dans le rationalisme, parce que l'esprit n'est jamais entièrement logique, mais son dernier mot c'est le rejet du surnaturel. L'arianisme, le sabellianisme, le nestorianisme, le socinianisme, le déisme, l'uni tarisme, sont des formes différentes de la même disposition qui voudrait tout expliquer et qui rejette tout ce qui ne se comprend pas. Historiquement le rationalisme a touj. existé. On le reprochait déjà aux disciples d'Aristote. Kant le distinguait aussi soigneusement du naturalisme que du su-pranaturalisme. Les déistes anglais les premiers, Herbert, Hobbes, Bolingbroke, Morgan, lui donnèrent une certaine consistance. La France en fit un instrument de guerre contre le despotisme et les superstitions romaines, et tandis que le catholicisme versait dans l'incrédulité et l'impiété, l'Église réformée, tout en revendiquant les droits de la raison, continuait de rester attachée à la Bible et à la vérité chrétienne. Le contraste entre Voltaire et Rousseau est caractéristique. En Allemagne le rationalisme a été surtout systématique, mais il n'a pénétré dans l'école que lorsque déjà il avait tari les sources de la vie religieuse; tour à tour élégant, philosophique, profond, haineux, ou grossièrement naïf, il a provoqué par ses excès une réaction dont les Néander et les Tholuck ont été les premiers interprètes, et si Strauss en a été le dernier mot sérieux, c'est qu'après lui il n'y avait plus qu'à choisir entre le christianisme et l'irréligion, et l'Allemagne a choisi la bonne part, qui seule peut lui donner la force de résister aux fâcheux éléments qu'elle renferme. Au commencement de ce siècle le rationalisme n'existait en réalité qu'à l'état latent, comme un fait, comme un instinct; peu à peu il s'est épanoui, mais en conservant encore des formes religieuses et le respect des Écritures. Ses principaux représentants, en France surtout, gardent encore la Bible pour base et point de départ, l'exégèse seule étant en question. Dès lors ce rationalisme modéré a été battu en brèche et la foi en la Bible s'est effondrée sous les attaques de la critique moderne, représentée surtout par M. Edm. Schérer, dont l'impitoyable logique, après avoir commencé par le Père céleste, a roulé jusqu'à notre père l'Abime. De nombreux théologiens s'y sont ralliés, et le mal est devenu si évident, si grand, les Églises en ont tellement souffert, que les synodes ont été obligés de prendre quelques mesures pour y remédier. L'État n'a que rarement ratifié ces mesures, mais l'Église apprendra à s'en passer.

RATISBONNE, Castra regina, vieille cité romaine de Bavière. Importante station desCuldee, elle devint sous Boniface un évêché chrétien; son premier év. fut Gaubald 739. Le monastère de Saint-Emmeran servit longtemps de résidence à l'évêque, qui cumulait la dignité épiscopale avec celle d'abbé, et qui devint prince d'empire quand R. fut un moment capitale de la Bavière. Prise par les Français en 1800, elle fut érigée en archevêché 1805, avec Dalberg pour titulaire, archev. prince-primat de l'Égl. cathol. d'Allemagne. Cédée à la Bavière en 1810, R. redevint simple évêché et Dalberg reçut en compensation le titre de grand-duc de Francfort. Parmi les derniers titulaires de ce siège épisco-pal, on remarque surtout Sailer. — On appelle Ligue de R. l'alliance formée le 6 juill. 1524 entre les princes cathol. pour s'opposer aux progrès de la Réforme; les États protestants y répondirent, février 1526, par la Ligue de Tor-gau. — L'Intérim de R., resté à l'état de projet, et qui, remis à l'emp. avec le préavis favorable de Luther, devait servir de base à des négociations, fut élaboré par Bucer, retravaillé par quelques théologiens cathol. et protestants, et accepté par Joachim II et le landgrave Philippe, févr. 1540. Un premier colloque eut lieu à R. en nov. 1540; il avait été convoqué d'abord à Spire, à Haguenau, puis à Worms, et déplacé pour cause de maladies contagieuses. Les débats ne s'ouvrirent sérieusement qu'en avril 1541, sous la présidence de Granvelle et de l'électeur palatin Frédéric. Mélanchthon, Bucer el Pisto-rius représentaient la Réforme; Eck et Gropper de Cologne, et Pflugk de Meissen, le catholicisme. La conférence faillit échouer sur la question de l'Église, les protestants n'acceptant pas l'autorité des conciles, les catholiques trouvant que les conciles, sans le pape, ce n'était pas assez. Elle échoua complètement sur la question de la Cène, une main étrangère ayant ajouté au projet le mot de transsubstantiation, qui n'était pas dans le texte primitif. Les négociations cessèrent le 22 mai, et l'empereur décida le 29 juillet qu'un concile serait convoqué dans les 18 mois, et que jusqu'à ce moment l'on s'en tiendrait de part et d'autre au traité de Nuremberg. En janvier 1546, nouveau colloque; les catholiques se refusent à toute concession, et rendent par là impossible la réalisation du désir de l'empereur, qui aurait voulu voir les protestants se faire représenter au concile. En 1601 3m© conférence, provoquée par Maximilien de Bavière, pour décider la conversion de Neubourç au catholicisme, 1614; v. Reihing.

RATRAM, appelé aussi Bertram, moine de Corbie, du 9®e siècle, n'est guère connu que par sa science et sa prodigieuse activité littéraire, qui se déploya surtout entre 830 et 868. Versé dans la patristique, il intervint dans la plupart des controverses de son temps. Ami de Gottschalk, il défendit la doctrine augustinienne dans un écrit composé 850 sur la demande de Charles-le-Chauve, De prœdestinatione Dei; il écrivit aussi contre Hincmar de Reims en faveur de Gottschalk, dans la discussion sur la Trtiwi deitas. Mais c'est principalement sur la question de la transsubstantiation qu'il intervint, et contre Paschase Radbert; en réponse à Charles-le-Ch. il établit que ce que le fidèle reçoit dans la Cène, c'est le corps et le sang de Christ, en mystère et en vérité, mais non en réalité matérielle; le changement ne se fait que par la foi, et l'union avec Christ est réelle, complète, mais spirituelle. Son écrit fit d'abord sensation, mais il fut bientôt oublié, et du temps de Bérenger on l'attribuait à Scot Erigène: le conc. de Ver-celli 1050 le fit brûler. Fisher, év. de Roches-ter, l'invoqua 1526 comme exposant la foi catholique, et il fut souvent réimprimé. Les protestants l'invoquèrent aussi en leur faveur, et avec plus de raison. Les censeurs du conc. de Trente le mirent à l'index,' 1559.

RATZENBERGER, Matthieu, médecin, né 1501 à Wangen, Wurtemberg, étudia 1517 à Wittenberg où il se lia avec Luther. En 1525 il était médecin de la ville de Brandebourg, passa au service de la princesse Élisabeth, à laquelle il fit lire les écrits de Luther, et occupa successivement quelques autres places. Ses connaissances théologiques lui assurèrent une grande influence en plusieurs occasions- Luther mourant le nomma tuteur de ses enfants. Après la guerre de Smalcalde, il se retira à Nordhausen, puis à Erfurt où il f 3 janv. 1559. Auteur d'une Hist. de Luther, utile aussi pour la connaissance de l'époque, et appréciée par Seckendorf.

RAUTENSTRAUCH, Fr.-Étienne, né 1734 en Bohême, moine bénédictin, prof, de philos, et de théol. à Braunau, dès 1773 directeur de la faculté de théol. et membre de la commission des études à Prague, fut nommé conseiller à Vienne en 1774, et f 1785 à Erlau, Hongrie. Partisan des réformes joséphines il eut beaucoup à souffrir de la part des jésuites. Il publia une Synopse du droit ecclés. Vienne 1778, et des Instructions pour toutes les facultés de théol. de l'empire.

RAVENNE, fondée sur l'Adriatique par une colonie de Thessaliens, devenue romaine 234 av. C., et résidence impériale 404 ap. C. Elle n'acquiert d'importance qu'à ce moment, quand Honorius s'y établit et fait de l'évêque un métropolitain. En 510 elle devient la capitale d'un exarchat, et ses métropolitains entrent en lutte avec Rome. Maur est excommunié, mais à son tour il excommunie le pape; le conflit vient devant l'emp. Constant 666, qui déclare Ra-venne indépendant de toute juridiction supérieure. La lutte dura deux siècles et ne finit que sous l'archev. Jean, excommunié par Nicolas I«r, un moment soutenu, puis abandonné par l'emp. Louis, et finalement condamné par un synode de Rome, à se rendre tous les ans une fois auprès du pape pour lui rendre hommage, et à ne consacrer que des évêques agréés par lui. — Outre le conc. de 419 qui eut à décider entre les papes Boniface et Eulalius, il s'est tenu à Ra-venne 25 conciles, dont le plus important fut celui de 877 qui stipula entre autres que le métropolitain, trois mois après son élection, et les évêques 5 mois après, devaient aller à Rome solliciter leur confirmation; à défaut de quoi l'élection était nulle de droit, l'élu était excommunié de fait, et son nom publiquement affiché.

RAYMOND lo Non natu* (qui n'est pas né), ainsi surnommé du fait qu'il dut le jour à une opération césarienne. De la famille des Sarrois il vint au monde 1200 à Postello, Catalogne, et entra dans l'ordre de la Merci, dont il fut nommé 1230 procurateur général. Il fit plusieurs voyages de Rome en Afrique, pour racheter des prisonniers, et manquant d'argent il finit par se vendre lui-même et profita de sa captivité pour prêcher la foi chrétienne. Son maître, ne pouvant lui imposer silence, lui fit mettre à la bouche une serrure en fer. Grégoire IX éleva le fidèle prisonnier à la charge du cardinal-diacre, f 1240, peu après son élargissement. Canonisé.

2* Pennaforte, v. cet art.

3° Martin, dominicain espagnol, directeur depuis 1250 des 8 collèges que les rois de Cas-tille et d'Arragon avaient fondés dans autant de couvents dominicains, pour l'étude des langues orientales en vue des missions. Il travailla aussi directement lui-même comme missionnaire, notamment à Tunis, f après 1286. Auteur d'un écrit Pugio fidei, contre les maures et les juifs.

4° Lulle, v. Lulle.

5o Sébonde, Sabunde, ou Sabiende, espagnol de naissance, professait à Toulouse vers 1430 la médecine, peut-être aussi la philos, et la théologie. f vers 1432. Son principal ouvrage est le Liber naturœ, ou Theologia naturalis, impr. Strasbourg 1496 et très estimé de Montaigne qui lui consacre un chapitre dans ses Essais, et cherche à établir son orthodoxie. L'idée-mère de ce livre, c'est qu'il y a deux sources de connaissances, la nature et la révélation, cette dernière destinée à compléter et à redresser la première, mais n'étant pas en contradiction avec elle. Il part de là et commence par le monde inorganique. Le minéral est; le végétal est et vit; l'animal est, vit et sent; enfin l'homme est, vit, sent et pense. A chacun de ces faits de l'être quelque chose correspond dans la nature; à chacun des sens il y a des manifestations spéciales qui les mettent en mouvement, la vue pour l'œil, le son pour l'oreille; de même pour la pensée, il y a l'être moral, ordonnateur, créateur, gouverneur et juge, Dieu. Mais la conscience dit à l'homme que ce Dieu est bon, et la doctrine du Sauveur en découle. Le Père est le Verbe actif, le Fils le Verbe passif, le Saint-Esprit le Verbe impersonnel. On a encore de Sébonde des Dialogues sur la nature de l'homme. Le chartreux Dorland en a publié une édition, fort augmentée, sous le titre de Viola animœ, Cologne 1499; et Amos Comenius une édition plus abrégée, sous le titre de Oculus fidei, Amsterdam 1661.

RAYNALD, Odoric, oratorien, né à Trévise 1595, f 12 janv. 1671, continuateur des Annales de Baronius.

RÉALISME, v. Nominaux.

RECOGNITIONS, v. Clémentines.

RÉCOLLETS, membre des congrégations de stricte observance dans plusieurs ordres religieux, franciscains, augustins, capucins. Ils s'établirent d'abord à Nevers 1592 par les soins du duc Louis de Gonzague. Leur nom vient de recollecti, les recueillis, parce qu'ils n'admettaient que des personnes vivant dans le recueillement. Il y avait aussi des congrégations de femmes sous ce nom.

RECTEUR, titre donné chez les catholiques: 1° au principal d'un collège de jésuites; 2° au père abbé d'un couvent ou d'une fondation; 3° au curé principal d'une église; l'Égl. épisco-pale d'Angleterre l'emploie aussi dans ce sens.

RÉDEMPTORISTES, v. Liguori.

RÉFORMATION, nom historique du grand mouvement religieux qui, préparé par les sectes du moyen âge et réclamé par les peuples, les docteurs, les conciles et les princes, finit par éclater au 16®* siècle, presque simultanément sur plusieurs points de l'Europe, ayant pour objectif le retour à l'Église primitive, pour autorité la Bible, et pour doctrine principale la justification par la foi, par conséquent la suppression des abus sans nombre engendrés par la théorie des œuvres surérogatoires, indulgences, purgatoire, culte des saints, etc. C'est en Allemagne que le mouvement se produisit avec le plus de vigueur et d'intensité, parce que c'est là que les abus s'étaient étalés avec le plus d'impudence, et Luther en fut le champion le plus illustre. Depuis que le christianisme avait été dénaturé sous l'influence du paganisme renaissant, c.-à-d. depuis qu'il était devenu religion d'État et que l'ancienne capitale de l'empire s'était donné pour tâche de conserver ses positions dans le monde renouvelé, l'ambition et l'ignorance aidant, chaque siècle avait vu se produire de nouveaux dogmes, de nouvelles prétentions et de nouveaux abus, appuyés sur de fausses décrétâtes et des textes falsifiés. L'opposition ne cessa pas un instant; elle se produisit sous les noms les plus divers de pauli-ciens, cathares, albigeois, etc., de sorte que jamais non plus il n'y eut de prescription. Au 45m* siècle l'opposition devint plus vive et plus savante. L'Italie eut Savonarole, l'Angleterre Wicleff, la Bohême Jean Huss et Jérôme de Prague. Plusieurs conciles furent convoqués pour réformer l'Église, mais ils n'osèrent pas toucher à la source du mal, à la papauté, et ils ne firent rien, ni à Constance, ni à Bâle. Les empereurs échouèrent également, et Léon croyait pouvoir achever tranquillement sa belle cathédrale de Saint-Pierre de Rome, quand tout à coup retentit la voix éclatante et sonore du moine de Wittenberg. Il n'attaquait qu'un seul abus, mais, comme dans un édifice où tout se tient, tout croula à la fois. Ce qui se passait en Allemagne se passait presque au même moment en d'autres lieux; le fruit était mûr et il tombait. Zwingle en Suisse, Calvin à Genève, Lefèvre et Briçonnet en France, Tyndal en Angleterre, les frères Peterson en Suède, Johannes en Danemark, les Spinola en Italie, d'humbles marchands en Espagne, levaient presque à la même heure l'étendard de la Réforme et des réformes, et si l'œuvre fut quelquefois compromise, soit par des adhésions comme celle de Henri VIII, soit par des persécutions comme celle de Philippe II, elle n'en resta pas moins vivante et triomphante, pour le bonheur des peuples qui la reçurent. La renaissance et la découverte de l'imprimerie favorisèrent la Réformation en lui fournissant la littérature dont elle avait besoin, et en lui permettant de se faire connaître par la multiplicité de ses écrits. De son côté la Réforme sauva la renaissance de ses propres excès, et en lui donnant une base religieuse l'empêcha de retourner au paganisme et à la vieille mythologie qui la ravissait et menaçait de l'étouffer. Comme protestation, le protestantisme a eu quelque chose de négatif, il a repoussé ce qu'il ne croyait pas; mais comme reconstitution & l'Église primitive, il s'est dès l'abord, et partout, produit comme ayant une foi positive, et l'une des premières préoccupations des théologiens dans les divers pays a été de rédiger la foi de l'Église sous la forme de Confessions de foi, Constitution, Ordonnances, etct Ce qui frappe dans ces Confessions de foi c'est leur indépendance les unes des autres quant aux points secondaires et leur accord sur les points essentiels de la foi chrétienne, divinité de Jésus-Christ, nécessité de la rédemption,, salut par la foi, autorité de l'Écriture sainte, etc. L'Égl. anglicane est celle qui a conservé dans ses forme* le plus de rapports avec le catholicisme; puis vient l'Égl. luthérienne, dont la manière d'envisager les sacrements prête à de faciles exagérations. Les Égl. réformées ont plus entièrement rompu avec les traditions, et elles semblent par là-même plus exposées à l'invasion du rationalisme, mais en réalité elles n'en ont pas plus souffert que les autres, et l'exemple de l'Écos!* prouve que l'école de Calvin n'est pas nécessairement vouée aux révolutions de doctrine. Pour les détails, v. les articles spéciaux, et les innombrables ouvrages consacrés à cette portion de l'hist. ecclésiastique: Hist. de la Réf. par Merle d'Aubigné; en France par MM. Haa#, Puaux, Borrel, Dardier, Douen, Arnaud, D* Félice, Paumier, Herminjard.

REFUGE, Réfugiés. Ce titre comprend d'une manière générale tous les protestants français qui durent émigrer à cause de la Révocation de l'édit de Nantes et des mesures qui précédèrent et suivirent cet acte d'une politique insensee. On a calculé que de 1662 à 1752 il n'y eut pas moins de 300,000 personnes condamnées à quitter leur pays, et ce chiffre est certainement au-dessous de la réalité. Ces émigrés furent reçus a bras ouverts partout où ils allèrent chercher un refuge, mais particulièrement dans le Brandebourg; dès 1672 ils se bâtissaient uue église à Berlin; ils fondèrent le Collège français, l'Académie des Nobles, celle des Chevaliers; ils introduisirent de nombreuses industries, et les noms d'Ancillon, Basnage, Abbadie, Beausobre, Lenfant, Lamotte-Fouqué, jetèrent du lustre sur le développement littéraire et scientifique du pays qui ne devait pas tarder à devenir la Prusse. Il y eut aussi des réfugiés dans d'autres parties de l'Allemagne. Beaucoup se fixèrent en Hollande, et l'on cite avec honneur les noms de Rivet, Du Moulin, Claude, Dubosc, Saurin, Jurieu, Basnage, Martin, Superville, Benoît, Chauffepié, Bay le, etc. En Suisse tous les cantons se disputèrent l'honneur de les recevoir, sans se laisser arrêter par les menaces du gouvernement français. Abauzit vint à Genève, où ses coreligionnaires de France avaient donné à l'horlogerie une impulsion nouvelle. Court fondait à Lausanne un séminaire qui devait fournir des pasteurs et des martyrs aux églises du désert. Le Danemark, la Suède, l'Angleterre ouvraient leurs portes aux proscrits. Les États-Unis ne pouvaient rester en arrière, et le Refuge leur a fourni trois présidents. La Guyane hollandaise, Surinam, le Cap de Bonne Espérance favorisèrent de même l'immigration, soit en payant les frais de voyage des réfugiés, soit en leur donnant des terres, soit en les exemptant d'impôts pour un temps déterminé. En partant ils emportaient leur langue avec eux; presque partout ils ont conservé le culte en français, et leurs colonies parlent encore français aujourd'hui; placés en dehors du courant académique ils n'ont peut-être pas suivi tous les progrès de leur langue, et l'on a pu plaisanter sur le style réfugié de leurs écrivains, mais ce qu'on fera moins facilement ce sera de calculer le tort immense que cette émigration a fait à la France, non seulement en l'appauvrissant, mais encore en enrichissant et en fortifiant les nations plus hospitalières. Des sommes considérables, des ouvriers honnêtes et laborieux, des patrons intelligents, des employés fidèles, d'habiles médecins sortirent du pays. Vauban même, dans un Mémoire à Lonvois, se plaignit d'une mesure nuisible pour la marine et pour l'armée. V. Weiss, Hist. des réfugiés, Paris 1853.

RÉGALE: faculté d'un seigneur de repourvoir un bénéfice vacant, d'en percevoir les revenus pendant la vacance et d'exercer tous les droits de propriétaire. Ce droit, tout féodal, était dans la nature des choses et ressortait presque toujours de l'origine même des fondations ou bénéfices. Il fut cependant toujours contesté, surtout quant à la repourvue, par l'Église qui se regardait comme seul propriétaire légitime de tout ce qui touchait à son administration. De là en Allemagne les luttes qui finirent par le traité de Worms. De là en France les luttes de Philipp^e-le-Bel contre Boniface VIII, et celles de Louis XIV contre Innocent IX et Alexandre VIII. L'Égl. gallicane en 1682 le maintint comme une de ses immunités. De là encore en Angleterre les luttes relatives au patronage, q. v.

RÉGINON, né vers la fin du 9** siècle, d'une bonne famille des environs de Spire; il était abbé de Prum en 892. Illégalement évincé 899, il se retira dans le couvent de Saint-Maximin près de Trêves et fut nommé administrateur du couvent de Saint-Martin, f 9*5. On lui doit une Chronique, espèce d'hist. universelle, qui va de J.-C. à l'époque de Charles Martel; le livre II va jusqu'en 907; un auteur inconnu l'a continuée jusqu'en 967; publ. Mayence 1521. A la demande de Ratbod il a composé aussi un recueil de Canons, Libri II de eccles. disciplinis et relig. christtand, publ. par Baluze. D'autres ouvrages de lui sont perdus.

RÉGIONNAIRES, employés, diacres, notaires, avocats, préposés à chacune des 7 régions dans lesquelles l'ancienne Rome ecclésiastique était divisée.

RÉGIS, Jean-François, né 31 janv. 1597 d'une famille noble à Foncouverte, évêché de Nar-bonne. jésuite, distingué par sa piété et son dévouement; il se montra plein de zèle pendant la peste de Toulouse, comme dans sa mission en Languedoc, f 1640. Canonisé par Clément XII.

RÉGIUS (royal, ou Leroy), Urbain, né 1490 sur les bords du lac de Constance, étudia à Lindau, puis à Fribourg où il se lia d'amitié avec Eck. Après un court séjour à Bâle, il vint à Ingolstadt où il fut nommé prof, d'éloquence et de poésie, et chercha à gagner à l'université des hommes de mérite, entre autres Eck, auprès de qui il ne réussit pas. L'emp. Maximilien le nomma son poète. Un travail sur la Dignité sacerdotale lui valut 1519 une place de vicaire épiscopal, et 1520 de prédicateur à Augsbourg, en remplacement d'OEcolampade. Mais il avait commencé à lire les livres de Wittenberg; il sentait le besoin d'une réforme et les persécutions auxquelles il fut en butte hâtèrent sa résolution. En 1522 il est prédicateur évangélique à l'égl. Sainte-Anne d'Augsbourg. Il se maria, travailla avec autant de succès que de zèle, assista 1530 à la diète d'Augsbourg, où Ernest-Ie-Confesseur le choisit pour pasteur-surintendant de Brunswick, et lui voua une affection telle qu'il disait qu'il aimerait mieux perdre un œil que son Urbain. En 1537 il est à Smalcalde, en 1540 à Haguenau. + 23 mai 1541. Il a laissé 97 ouvrages, presque tous de théologie, entre autres deux Corpus doctrinœ, un grand et un petit catéchisme. Vie, par son fils Ernest.

RÉGUIS, un des prédicateurs les plus puissants et les plus évangéliques de la chaire catholique française, et qui peut être mis à côté de Bridaine. On n'a presque aucun détail sur sa vie. On sait seulement qu'il fut curé dans le diocèse d'Auxerre, puis dans celui de Gap;

quelques-uns ajoutent dans celui de Lisieux. Il travailla dans la 2®e moitié du 18®« siècle. Doué de mes talents, il aurait pu briguer une situation plus élevée, mais il se contenta de distribuer modestement le pain de vie à son troupeau, et il passa comme inaperçu au milieu des scandales et des troubles de son époque. Ses sermons, presque toujours improvisés, n'étaient écrits qu'après avoir été prêchés. Il s'en est fait de nombreuses éditions, sous le titre de La Voix du Pasteur; la ire date de 4766; l'une des dernières est de M. Ramu de Genève, légèrement modifiée. On lui doit aussi une Étude sur les Psaumes, malheureusement perdue.

REGULA, martyr, femme de Félix 8° q. v.

REICHENAU, riche et savante abbaye de bénédictins, fondée vers 725 par Pirmin, dans une île fertile et riante de la partie occidentale du lac de Constance. Grâce à des donations considérables, elle atteignit bientôt une splendeur telle que nulle autre ne pouvait, du moins en Allemagne, rivaliser avec elle. Elle fut successivement rattachée à Constance, Saint-Gall et Bâle. En 1032 l'abbé Bernon essaya de revendiquer pour elle une entière indépendance; invoquant des titres qu'il faisait remonter à Othon III, il réclama le droit d'officier en dal-matique et en sandales et de conférer les ordres, mais malgré le consentement de Jean XIX, il ne fut jamais autorisé à le faire. Ses écoles, son séminaire, ses bijoux, ses reliques, sa bibliothèque enfin, que des moines copistes enrichissaient chaque année, ajoutaient à sa célébrité. Ses abbés étaient princes de l'empire. En 1538 elle fut réunie au dioc. de Constance. En 1799 elle fut sécularisée, et en 1802 cédée au duché de Bade, moins ses propriétés situées en Argovie et Thur-govie. L'Église de Sainte-Marie, bâtie 804. renferme entre autres le tombeau de Charles-le-Gros f 888.

REIHING, Jacques, né 1579 à Augsbourg, étudia à Ingolstadt au collège des jésuites, et entra dans l'ordre h la suite d'un vœu fait pendant une maladie. Successivement prof, de philos. et de théol. à Ingolstadt, docteur en théol., prêtre à Dillingen, il fut appelé à la cour du comte palatin Wolfgang - Guill. de Neubourg, qui penchait vers le catholicisme et qui finit par abjurer, 23 mai 1614. Reihing justifia cet acte dans plusieurs écrits et travailla avec ardeur contre la Réformation. Cependant plus tard, à la suite d'une étude sérieuse des Écritures, il s'enfuit à Stuttgard 1621 où il se fit examiner par Osiander et fut admis au séminaire de Tubingue; le 23 nov. il fil sa profession publique comme protestant. Le discours qu'il prononça à cette occasion fut violemment attaqué, et il se défendit avec force dans sa thèse professorale sur la vraie Église de Christ. Marié en 1622. En 1625, surintendant du séminaire. En 1526 il écrivit une spirituelle réfutation de son livre de 1617 sur le catholicisme, f 5 mai 1628. Les attaques des jésuites le poursuivirent jusqu'après sa mort.

REIMAR, Hermann-Samuel, surnommé le Fragmentiste. Né 22 déc. 1694 à Hambourg, il y fit ses premières études, passa à Iéna 1714, puis 1716 à Wittenberg, où il fut nommé prof, adjoint de philos. De 1719-1722 il visita h Hollande et l'Angleterre, fut nommé en 1723 recteur à Wismar, et en 1728 prof, d'hébreu et de langues orientales à Hambourg, où il t 1<* mars 1768. Auteur de plusieurs écrits sur la religion naturelle, l'instinct chez les animaux, les langues, etc., il s'est fait surtout une réputation, bien inattendue, par ses célèbres Fragments de WolfenbUttel, q. v. Son fils Albert-Henri, médecin, introduisit la vaccine à Hambourg.

REIMS, Remi, ou Durocortorum, vieil évêché de France, dont les origines se perdent dans la légende. On nomme Sixte comme son premier évêque, vers 300, mais on ne sait rien de lui, pas plus que de son prétendu successeur Sinice, qu'une tradition du 9®« siècle fait venir de Rome. Au 4®e siècle Reims est déjà un archevêché, la métropole de la Gaule belgique, avec dix suffragants. Mais on n'entre définitivement dans l'histoire qu'avec saint Remi qui le jour de No'él 496 baptisa Clovis dans sa cathédrale, auj. l'église Saint-Remi. Sous les Mérovingiens Reims appartenait à l'Austrasie. elle passa à la Neustrie lors du partage de l'empire après Charlemagne. A Wulfar 806-816 succéda Ebbon 816-845, au lieu de Gislemar qui avait été nommé, mais qui ne put être confirmé, à cause de sa grossière ignorance. Puis vint Hincmar 845-882, qui acheva la cathédrale, et qui défendit l'indépendance de l'Égl. gallicane contre Xi-colas et Adrien II. Avec lui commencent les revendications de Reims à la primatie des Gaules, et les inventions se multiplient pour les justifier. On découvre que si Rome a été fondée par Romulus, Reims l'a été par son frère Re-mus, et qu'elle a droit ainsi au second rang dans l'Église. Mais c'est depuis 1179 seulement que le droit des archev. de Reims est incontesté, de couronner les rois de France, comme premier siège du royaume. Au 40®« siècle deux compétiteurs se disputent la place, Artold et Hugues de Vermandois, ce dernier sous prétexte que sa famille s'est emparée de Reims au 9m« siècle. De nouvelles rivalités éclatent peu après entre Arnolphe et Gerbert qui, tous les deux, occupent le siège l'un après l'autre. Louis IV donne aux titulaires le titre de comtes, Louis VII en fait des ducs. Parmi les archev. qui ont brillé d'une manière quelconque à la téte de ce diocèse, il fant ajouter aux précédents 1* noms de Foulques, Turpin, Adalbéron, le cardinal de Lorraine, Maurice Le Tellier, et récemment Thomas Gousset. Quelques synodes ont été tenus à Reims au moyen âge, mais peu importants; le seul un peu considérable, celui de 1148 présidé par Eugène IV, en présence de Bernard de Clairvaux, eut à s'occuper de Guy de Brès, Éon, Gilbert de la Porée et de leur doctrine. Flodoard + 966 a écrit une Hist. de Tégl. de Reims. La cathédrale, commencée en 1212, est magnifique, ainsi que l'égl. de Saint-Remi. Patrie de Lasalle, fondateur des écoles de la doctr. chrétienne.

REINECCIUS lo Jacques, né 1572 à Salzwe-del, étudia à Wittenberg, et fut successivement pasteur à Tangermunde, Berlin el Hambourg, où on lui remit en outre la direction du nouveau gymnase, f 28 juin 1613. Auteur d'écrits de polémique et d'édification. — 2° Christian, est plus connu. Prof, libre à Leipzig, et en 1721 recteur du gymnase de Weissenfels. + 1752. Il fitréimpr. 1718 l'excellente Concordance allem., hébr. et grecque de la Bible, de Fréd. Lankisch, et travailla à une nouvelle édition portative des Septante, à une dite du texte hébreu, et à une polyglote en plusieurs in-folio, dont l'A. T. seul parut avant sa mort.

REINHARD, François-Wolkmar, né 12 mars 1753 à Vohenstrauss, Sulzbach, était fils du pasteur. Il suivit le gymnase de Ratisbonne et se rendit en 1777 à Wittenberg pour y faire sa théologie. Il se fit connaître en 1777 par une dissertation sur l'Autorité de la version d'Alexandrie, et se mit à donner des cours libres de philos. et de philologie, tout en travaillant pour obtenir ses grades. En 1782 il fut nommé prof, de théol., en 1784 aumônier du château et prédicateur de l'université. Enfin en 1792 il fut appelé à Dresde comme prédicateur de la cour et conseiller ecclésiastique, f 6 sept 1812. Marié deux fois il n'a cependant pas laissé d'enfants. Trop encensé de son vivant, il a été trop vite oublié. Excellent administrateur, il était aussi prédicateur éloquent, et n'a pas laissé moins de 51 vol. de sermons, très soignés dans la forme; plus de 5 vol. de morale et une Dogmatique assez faible, où il flotte entre la révélation et la raison. Il était cependant supranaturaliste et prêchait la justification par la foi.

REINHOLD, Léonard, né 1758 à Vienne, élevé d'abord chez les jésuites, les abandonna pour aller étudier à Leipzig chez Platner, puis à Weimar, où il épousa la fille de Wieland. Il publia en 1786 des Lettres sur la philos, de Kant, qui commencèrent sa réputation, et en 1787 il fut nommé prof, de philos, à Iéna; puis en 1794 à Kiel, où il f 1823. Il trouvait le système de Kant incomplet, et aurait voulu le faire précéder d'une analyse de la conscience; il finit par l'abandonner, adopta tour à tour les idées de Fichte, de Bardili et de Jacobi, et renonça à tout système en voyant dans l'abus des mots la source de tous les malentendus. Parmi ses nombreux écrits on remarque: Nouvelle théorie de la faculté représentative, 1789. Moyens de remédier aux malentendus en philos. 1790. Lettre à Lavater et à Fichte sur la croyance en Dieu, 1799.

RELAND, Adrien, né 17 juill. 1676, fils du pasteur de Ryp, près d'Alkmar, Hollande, étudia à Amsterdam et se distingua surtout dans la philol., les antiquités classiques et les langues orientales. En 1699 il fut nommé prof, à Harderwyck et en 1701 à Utrecht. f 5 févr. 1718 de la petite vérole. Ses nombreux ouvrages sont surtout remarquables par l'érudition dont ils font preuve. Les plus importants sont: La Palestine illustrée par les anciens monuments, les Antiquités sacrées des Hébreux, Situation du Paradis terrestre, la Mer Rouge, le Mont Garizim, Ophir, l'Arc de Titus, le Manuel de l'étudiant (traduit de l'arabe), des Mélanges rabbiniques, de la Religion musulmane, etc.

RELIGION. L'étymologie de ce mot, qui touche à tout dans l'histoire ecclésiastique, est incertaine: Cicéron la trouve dans le mot relegere, relire, étudier avec soin tout ce qui regarde le culte; Lactance dans le mot religare, rattacher, réunir, réconcilier l'homme avec Dieu. On n'est également pas d'accord sur la définition de l'idée qu'il exprime; les uns en font un fait purement historique, d'autres une affaire de volonté, de conscience ou de sentiment. Cette incertitude est d'autant plus étrange que la religion elle-même est de tous les temps, de tous les pays, et de toutes les formes de civilisation; mais elle s'explique par le caractère vaste et complexe de la chose à définir, qui s'adresse à l'homme tout entier, à toutes ses facultés, à tous ses besoins, à toutes ses aspirations. Pour être exacte et vraie, la définition devra donc être simple et sommaire, ne pas s'embarrasser des détails et s'en tenir à ce qui est l'essentiel et comme le fond commun de ces nombreuses manifestations qui par les chemins les plus divers poussent l'homme à se détacher des choses visibles en cherchant Celui qui est invisible, le Dieu connu ou le Dieu inconnu. L'Écriture a peut-être résumé la question dans son ensemble, quand elle dit que celui qui vient à Dieu doit croire que Dieu est, et qu'il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent, Hébr. 11,6. Conscient ou inconscient, tout homme religieux possède ce minimum de foi, qui lui suffit s'il n'a pas d'autres lumières, qui lui sert de point de départ s'il aspire à des choses plus hautes. Dans la pratique l'homme a le sentiment instinctif d'un devoir à remplir vis-à-vis de l'Être supérieur qui domine sa vie; il a la conscience de sa responsabilité; il désire devenir meilleur. C'est à la fois peu et beaucoup, et le N. T. nous ouvre sous ce rapport des horizons que la théologie n'a peut-être pas suffisamment explorés, quand il nous montre Dieu ne s'étant jamais laissé sans témoignage, se laissant toucher et trouver, même en tâtonnant; ayant pour agréables ceux qui le craignent et qui s'adonnent à la justice; s'inté-ressant à Naaman et à la veuve de Sarepta, Act. 14, 17.17, 27. 10. 35. Luc 4, 26. 27. Sans aller aussi loin que M. Quatrefages qui fait de la religion le trait distinctif qui sépare l'homme de l'animal, on est fondé à dire que l'homme seul est religieux, et que tous les hommes le sont, plus ou moins, même ceux qui affectent de haïr la religion, car on ne hait que ce à quoi Ton croit; même les indifférents, car il arrive touj. des moments où leur indifférence disparaît, où quelque notion de foi s'éveille, dans leur cœur ou dans leur conscience. Les manifestations seules, ou les formes de la foi peuvent varier, et ont en fait varié chez tous les peuples. L'impossibilité où nous sommes de saisir ou de comprendre Dieu dans sa grandeur, dans son immensité, dans sa spiritualité, a amené des conceptions différentes, qui se sont traduites dans le polythéisme, le panthéisme, le fétichisme, le naturisme et les anthropomorphis-mes. Une science nouvelle, jeune encore, s'est appliquée â rechercher dans l'histoire, les littératures, les climats et les civilisations, le développement successif, sinon progressif de la conscience religieuse chez les hommes. Elle s'appelle l'Histoire des religions, et sous ce rapport elle a sa raison d'être, pour autant qu'elle s'occupe du classement et de la filiation des religions; elle a même servi la vérité en ce sens qu'elle a fait bonne justice des niaiseries qui, au siècle dernier surtout, croyaient pouvoir expliquer toutes les religions en les représentant comme l'exploitation de la crédulité humaine par des hommes habiles et rusés, comme une invention des prêtres pour dominer les populations et s'enrichir à leurs dépens. Mais elle n'en a pas moins fait fausse route en ce que, faisant abstraction de toute révélation directe de Dieu à l'homme, elle part de l'idée que c'est l'homme seul qui s'est mis à chercher Dieu et qui, de tâtonnements en tâtonnements, a passé d'une religion à une autre, s'élevant peu à peu, de degré en degré, et procédant de la conception la plus grossière à un système plus sage, plus logique et mieux ordonné. On pourrait admettre dans certaines limites ce passage d'un état inférieur à un état supérieur; philosophiquement la chose est possible. Mais en réalité et dans la pratique on n'a jamais vu un peuple s'élever par ses propres forces vers une religion plus spirituelle et plus vraie; c'est plutôt le contraire que l'on a vu, des peuples (même le peuple juif et des peuples chrétiens) retomber dans un culte matériel aussitôt qu'ils abandonnaient la vérité révélée. L'exemple du judaïsme est frappant comme spécimen de la disposition naturelle de l'homme à reculer plutôt qu'à progresser dans les questions religieuses, et depuis que le Christ est venu établir le culte en esprit et en vérité, l'histoire de l'Église est là tout entière pour prouver que l'homme sans Dieu, abandonné à ses lumières et à ses instincts, marche en arrière et non pas en avant. On peut voir aussi que le vrai progrès se trouve partout dans la proportion où l'Evangile est franchement accepté et pratiqué. En dehors de la révélation on a pu faire l'histoire des religions; on a passé ensuite à l'avenir des religions, et l'on a fait un dernier pas en essayant d'esquisser les religions de l'avenir; on escompte déjà la mort du christianisme, et l'on offre à choix les cultes qui le remplaceront. Peut-on croire que ce sera au profit de l'humanité?

Il est étrange que le mot de guerre puisse s'unir à celui de religion; mais le fait n'est que trop constant. Il y a eu les guerres des païens, puis des musulmans contre les chrétiens, celles des chrétiens contre les hérétiques, celles des catholiques contre les protestants, d'autres encore. Les principales sont les croisades en Orient, les croisades au sud de l'Europe, et la guerre de Trente ans. v. les diff. articles.

RELIQUES, du latin reliquiœ, les restes, ce qui reste; peut se dire d'une manière générale de tout objet laissé après elle par une personne quelconque, aimée ou célèbre; mais on l'entend habituellement, dans un sens religieux, des choses qui ont appartenu à un martyr ou témoin de la vérité, fragments de son corps, vêtements, ou tout autre objet à son usage. L'Égl. primitive n'a rien connu de semblable; elle regardait trop aux choses d'en haut pour s'attarder aux choses terrestres; la résurrection du Sauveur, son prochain retour, le triomphe de la foi, l'empêchaient de s'attacher à la poussière qui passe. La translation du corps d'Ignace à Antioche, 107, est la plus ancienne allusion qu'on puisse trouver au culte des reliques, et encore même en supposant le fait authentique, n'y a-t-il là qu'un simple acte de respect pour une dépouille humaine. Les cendres de Poly-carpe religieusement conservées, 169, et autour desquelles on se réunissait à chaque anniversaire pour célébrer le culte, sont un fait mieux constaté, mais qui ne prouve rien de plus qu'un pieux souvenir donné à un fidèle confesseur. H faut descendre jusqu'au 3me siècle pour trouver les premiers vestiges d'un culte plus oo moins superstitieux rendn à des restes de martyrs, et les Constitutions apostoliques essaient de le justifier contre les opposants, en rappelant que Joseph baisa le corps de son père Jacob, et que les os d'Élisée ressuscitèrent un mort, Gen. 60, 1. 2 Rois 13, 21. L'hist. de Lucilla et les protestations de saint Antoine montrent combien, sur cette pente, la superstition fit de rapides progrès, et si Athanase ne cessa de la combattre, d autres comme Eusèbe de Césarée, Grégoire de Naziance, Épiphanes, Chrysostome, Jérôme, Ambroise, Augustin la favorisèrent, non dans ses excès ou ses abus, mais cependant avec l'arrière-pensée qu'il pouvait bien y avoir dans ces précieux débris quelque vertu magique et surnaturelle. Les pèlerinages en Terre sainte et les spéculations des moines qui trouvaient dans la vente des reliques une ressource facile et assurée, imprimèrent à ce commerce une impulsion extravagante, au point qu'une réaction se fit, mais elle n'arrêta rien. Toutes les églises voulaient avoir leurs reliques, et Théodoret va jusqu'à dire que Dieu, dans sa bonté, compensait de cette manière pour les païens convertis, ce qu'ils perdaient en abandonnant leurs dieux et le culte des héros. On eut des visions et des songes qui révélaient les bons endroits où l'on trouverait des restes; on eut des miracles pour en démontrer l'authenticité. Au siècle on admet généralement que l'impér. Hélènea trouvé la vraie croix à la suite d'une vision 326, légende dont les premières traces datent de la fin du 4m« siècle. Au 6™^ Grégoire de Tours s'enthousiasme pour ce nouveau culte, qui doit plaire aux peuplades germaniques de l'ouest, et le 2J conc. de Nicée 787 décide qu'il y aura des reliques dans chaque église, sous chaque autel. Charlemagne 803 ressuscite un capitulaire de 742 qui adjoint des reliques à chaque corps d'armée. Pour établir l'authenticité de ces objets, on leur demande de faire des miracles; le conc. de Sarragosse 502 en appelle aussi au Jugement de Dieu, à l'épreuve du feu; d'autres demandent en outre que le corps ne sente pas la corruption et n'exhale aucune odeur désagréable. Dans la période carlovingienne, quelques docteurs, Claude de Turin, Agobert de Lyon, protestent, mais c'est la voix qui crie dans le désert. Les croisades développent le mal outre mesure; chaque pèlerin prétend avoir rapporté une foule de souvenirs sacrés, et dans des conditions ridicules; on oublie que le Seigneur est monté au ciel, et l'on montre de ses dents, de ses cheveux, son nombril: on a du lait de la Vierge, des langes, des peignes. Le 4e de Latran essaie en vain d'arrêter ce débordement en décidant qu'aucune relique ne comptera avant d'avoir été approuvée par le pape; elles se vendent, et les plus bizarres, à des prix fous. Le même objet, robe, doigt, bras, tête ou corps, se reproduit à plusieurs exemplaires; cela n'importe pas, chaque possesseur, couvent ou autre, prouvera que son exemplaire est le seul vrai et que seul il fait des miracles. On lui fera une châsse précieuse, ou un beau reliquaire, à moins encore qu'on ne l'encastre dans la maçonnerie de l'autel. Calvin, dans son traité des Reliques, a déjà fait justice de cette fièvre où la fraude le dispute à la crédulité; mais il ne savait pas encore tout, car une nouvelle invasion de reliques, la plus nombreuse, eut lieu depuis 4578, lorsque, le 31 mai, l'etfondrement d'une rue ramena l'attention sur les catacombes que l'on avait complètement oubliées pendant le moyen âge. Ce fut une nouvelle carrière à exploiter, et dans cette immense nécropole on ne pouvait manquer de trouver les corps de beaucoup de martyrs. En vain les esprits sérieux faisaient observer que la chose était impossible; que déjà sous Pascal l«r 817 les corps de plus de 2300 martyrs avaient été exhumés et déposés dans l'égl. de San Prassede, à Rome même; et que l'archev. Otgar, de Mayence, ayant demandé qu'on lui envoyât le corps d'un martyr, Grégoire IV f 844 lui avait fait répondre qu'il n'y en avait plus, et que tous ceux qui étaient dans les catacombes en avaient été retirés et distribués aux égl. de la ville et ailleurs. Mais l'occasion était trop bonne pour qu'on se payât de pareilles raisons, et le catholicisme, dans sa lutte contre la Réforme, ne pouvait pas négliger le moyen nouveau qui s'offrait à lui de réchauffer le zèle de ses églises. On fouilla, et tous les ossements que l'on déterra furent déclarés corps de martyrs. Sur une tombe on trouvait l'inscription D. M. (Aux dieux mânes), on la traduisait par Divins martyrs; ailleurs B. M. (Bene merem, qui a bien mérité), on en faisait Beatus Martyr, heureux martyr, et ainsi de suite. Tous les ustensiles que l'on découvrait près du corps étaient transformés en symboles de foi ou en instruments de supplice. La fraude se pratiqua sur une grande échelle, et on se mit à vendre des cadavres de toute provenance. La congrégation des rites décida le 10 avril 1668, de ne reconnaître et de ne recommander comme saints que les corps tirés des catacombes, dont le caractère de martyr serait constaté par une palme ou par un vase à recevoir le sang. Mais les bénédictins, et à leur tête Mabillon, prouvèrent que la palme était, même chez les païens, en usage sur les tombeaux, de sorte que Benoît XIV se rabattit sur le seul vase à sang comme constatation du martyre. Cela même était une preuve plus qu'incertaine, car l'antiquité ne dit rien de ces vases ou fioles destinés à recevoir le sang, et beaucoup de ces vases figuraient au chevet de tout petits

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enfants qui évidemment n'avaient pas été martyrisés; en outre la plupart de ces symboles appartenaient à des tombes de l'époque de Constantin, et l'on sait qu'il n'y eut pas de martyrs à Rome sous cet empereur. Enfin l'analyse chimique a démontré qu'il n'y a dans ces vases aucun résidu animal, mais seulement des dépôts minéraux, des oxyhydrates de fer, et point de sang. Cela n'a pas empêché Pie IX, le 10 déc. 1863, de remettre en vigueur la déclaration du

10 avril 1668. L'Église catholique enseigne que le prêtre qui célèbre le saint mystère sur de fausses reliques commet un grand péché; les prêtres consciencieux doivent être bien embarrassés et souvent bien inquiets.

REMBRANDT, Paul-Hermansz, né 15 juin 1606 ou 1608, fils d'un meunier, fut l'un des plus grands peintres de la Hollande, en même temps qu'un habile graveur. Avare et sans ordre il se laissa mettre en faillite, et s'éteignit dans la misère et l'obscurité, f 8 oct. 1669. Il a traité beaucoup de sujets bibliques, la Présentation dans le temple, Susanne au bain, To-bie, la Sainte famille, le Samaritain miséricordieux, le Repas d'Emmalls, Samson, Jésus et la femme adultère, la Bénédiction de Jacob, etc.

REMEDIUS, v. Remi.

REMI, Remigius, ou Remedius, 1° né à Laon 437 d'une noble famille romaine, était déjà à 22 ans archev. de Reims, f 13 janv. 533, à 96 ans. Il est surtout connu par l'influence qu'il exerça sur Clovis; il le baptisa 496 après la victoire remportée à Tolbiac sur les Allemans;

11 l'intéressa à la conversion des païens et des ariens, et provoqua la réunion du premier concile franc à Orléans 511, qui s'occupa de questions disciplinaires. Il obtint pour l'Église de riches dotations, et fonda l'évéché de Laon. Sa vie, comme déjà sa naissance, a été l'objet de nombreuses légendes; celle de la sainte Ampoule, q. v. est la plus connue. Hincmar, qui le premier la raconta, est probablement aussi l'auteur d'une lettre que le pape Hormisdas aurait écrite à Remi en le nommant primat des Gaules. On ne possède de l'archev. de Reims que 4 lettres. Un comment, sur les épitres de Paul, publ. sous son nom par Villapand, appartient plutôt à un autre Remi, év. d'Auxerre. Vie par Grégoire de Tours, Vorigny, etc.

2° archev. de Rouen, + 771; frère utérin de Pepin-le-Bref, à ce que l'on croit.

3° év. de Coire, 800-820, connu par les lettres qu'Alcuin lui adressa. On lui a faussement attribué un fragment d'un recueil de Décrétales, qu'on a reconnu être un extrait des Décrétales d'Isidore.

4° courtisan de Lothaire, il succéda 852 à Amoio. comme archev. de Lyon, f 875. Il inclinait du côté de Gottschalk dans la question de la prédestination, et après la sentence défavorable du synode de Quercy 849, il écrivit son livre des Trois Lettres, répondant ainsi à Hinc mar de Reims, à une lettre de Pardulus de Laon adressée à Amolo de Lyon, et à une lettre de Ra-ban Maur à Noting de Vérone. Il publia en même temps un Traité sur l'élection. Sur une question de ce genre, où les difficultés sont dans les nuances, il prenait position entre Hincmar et Gottschalk.

REMINISCERE, le 2<* dimanche du Carême, q. v. Il est ainsi nommé des premiers mots de l'Introït de la messe: Reminiscere, Domine, Souviens-toi, ô Éternel, Ps. 25, 6. On l'appelle aussi quelquefois le dim. de la Transfiguration.

REMONTRANTS, v. Arminius.

RENAISSANCE, restauration des lettres et du goût, relèvement de la culture générale, réveil de l'intelligence et des études après un long sommeil. L'histoire compte plusieurs moments où il semble que l'humanité soit sortie d'un tombeau, le siècle de Périclès, celui d'Auguste, le règne de Charlemagne; mais on réserve spécialement ce nom pour la fin du 15me et le commencement du 16me siècle, pour l'époque comprise entre la prise de Constantinople par les Turcs et l'avènement de la Réforme. Après avoir servi la cause de la civilisation contre les barbares et celle de l'Évangile contre les païens, le clergé s'était endormi dans la quiétude d'une position acquise, sans autre souci que d'accroi-tre ses revenus et sa puissance. Riche, il vou* lait jouir et se corrompit. Omnipotent, il devint tyrannique. Mais pour pouvoir dominer en paix, il lui fallait endormir les âmes et il y travailla de toute son énergie et par tous les moyens. Il se réserva pour lui-même, pour ses écoles, pour ses couvents, le monopole de l'instruction; nobles et manants étaient dispensés de savoir lire et de comprendre. Et encore, dans le clergé lui-même, que de nuances! Et quelle science que celle de ces moines qui détruisaient les vieux parchemins, les grattant, les lavant pour en effacer les classiques et remplacer la belle latinité par le latin de l'office, des pères ou des psaumes. Les croisades, qui auraient dû réveiller l'Europe, avaient été confisquées au profit de la papauté. Tout dormait, ou si par hasard un astre venait à briller au milieu de cette profonde nuit, il ne faisait que passer comme un météore, et ne servait qu'à constater l'épaisseur des ténèbres. C'était le bon vieux temps pour les barons et les châtelaines, pour les nobles et pour le haut clergé. Pour le peuple c'était la misère et l'ignorance; et quant aux couvents, placés hors du monde, ils avaient leur état civil à eux; personne ne s'occupait de savoir qui l'on arrêtait, qui ft>n enfermait, qui l'on jetait dans les oubliettes, qui l'on torturait.

On pouvait y souffrir et y mourir; on pouvait même y naître sans que le monde s'en aperçût: Na*ci, pati, mori, c'était bien la devise du moyen âge et celle des couvents. Tout cela sentait le renfermé, le moisi. Mais pourtant ce n'était pas la mort. A de rares intervalles une agitation se produisait qui trahissait la vie. Sans parler des sectes qui ne cessèrent jamais de protester par leur existence même contre le régime de plomb qui pesait sur l'Église, quelques hommes surgissaient dont la voix puissante annonçait des temps meilleurs: Wiclef, Savonarola, Jean Huss. On les persécutait, on les brûlait; cela même entretenait une certaine vie. Et les conciles où d'importantes queslions se débattaient, où les grands docteurs faisaient entendre de grandes vérités, contribuaient également à maintenir ouverte la porte du progrès et empêchaient la prescription d'accomplir son œuvre de mort.

Mais tout à coup, et lorsque les circonstances semblaient le moins favorables à cette résurrection de la conscience et de l'esprit humain, la grande voix descendit du ciel: Lazare, sors dehors! Les ossements desséchés de la vision se rassemblèrent; il y eut comme un frémissement universel. L'Italie, la France, l'Espigne, l'Allemagne renaissaient à la vie. Le secours, le remède était venu de là où on l'aurait le moins attendu, de la pauvre Byzance, succombant sous le poids de ses puériles disputes. Constantinople était tombée entre les mains des Turcs 1453. Ce malheur, depuis longtemps attendu, eut pour conséquence immédiate l'expulsion des savants grecs, qui se rendirent en Italie emportant avec eux leurs trésors littéraires, leurs richesses classiques, leurs manuscrits, l'antiquité dévoilée. Pour vivre ils travaillèrent, ils donnèrent des leçons, des cours, des conférences; les Paléologues révélèrent aux savants italiens un monde qu'ils ne connaissaient pas, le monde ancien, que l'on croyait vieux quaud il était au contraire la vraie jeunesse de l'art et de la littérature. Ce fut comme un coup de théâtre, un éblonissement. Vers la même époque les rois de France, cédant à leur habitude maladive de faire la guerre à l'Italie, avaient envoyé là leurs armées, sous Charles VIII, Louis XII, en attendant François I«r; les Français se trouvèrent présents à cette renaissance; avec leur merveilleuse facilité d'adaptation, ils s'en approprièrent le génie, en même temps que leur présence en Italie concourait à initier deux langues et deux civilisations l'une à l'autre et à élargir leurs horizons comme histoire, littérature, géographie, beaux-arts, même comme politique et religion. Pour les Français il y avait une étude à faire, et ils la faisaient; ils apprenaient à connaître, non seulement Fornoue, mais les républiques italiennes, Florence et les Médicis, Home et les papes, une riche nature pleine de parfums et une architecture qui les sortait du gothique. Les grands peintres et les grands sculpteurs se préparaient; Brunelleschi, les avait devancés en élevant à Florence Sainte-Marie des Fleurs, et il leur avait ouvert la marche dans la carrière du grand art. Par un bonheur vraiment providentiel (car les bonnes choses arrivent ensemble, dit-on, comme les mauvaises; il y a des veines), Gutenberg venait d'inventer i'imprimerie, l'art de fixer pour toujours et de répandre eu tous lieux ces précieux manuscrits apportés de Constantinople, et ce qu'on trouverait d'autres manuscrits de valeur dans les couvents de l'Occident et de la Grèce; tout le monde put se mettre à étudier, et les vieillards retournèrent aux écoles, leurs gros livres sous le bras, pour entendre les leçons des illustres maîtres chassés par les Turcs; les femmes et les enfants s'en mêlèrent; les imprimeurs et les libraires tinrent à honneur d'être aussi des savants, et non de simples industriels ou des marchands. En même temps on perfectionnait le télescope qui faisait connaître le ciel, et Christophe Colomb découvrait l'Amérique et donnait à l'Europe un nouveau monde sur lequel allaient se précipiter les savants, les chevaliers d'industrie, les coureurs d'aventures, les missionnaires et les chercheurs d'or. Riche végétation, faune inconnue, populations étranges, placers de métaux précieux, il y avait là tout ce qu'il fallait pour aiguiser les convoitises bonnes ou mauvaises, et pour ajouter à la soif de connaître qui s'était emparée de l'Europe à cette époque. Tout contribuait ainsi. le passé et le présent, le monde antique et le nouveau monde, à surmener les esprits et à les élever au-dessus des vulgarités dont ils s'étaient nourris jusqu'alors; c'était une révolution, l'on s'acheminait vers les temps nouveaux, et le clergé lui-même se laissait entraîner par l'enthousiasme que lui inspiraient les chefs-d'œuvre des poètes grecs. Un évêque donnait une fête en l'honneur du dieu Pan. Un pape bénissait l'Église au nom des dieux éternels. La réaction contre le moyen âge était complète, sans frein, sans direction, et la société risquait, sous prétexte d'humanisme, de retomber dans le paganisme, si elle n'avait été retenue sur cette pente dangereuse par une autre révolution, plus salutaire encore, issue de la Renaissance même et qui devait la sauver de ses propres excès, la Réformation.

En effet, parmi les premiers ouvrages sortis des presses de Gutenberg, se trouvait la Bible; de nombreux exemplaires s'en répandirent rapidement; le clergé, les couvents, les peintres qui s'en inspiraient, se la procurèrent; on la lut, on l'étudia, et les âmes sérieuses firent cette découverte qu'il n'était pas nécessaire de renoncer au christianisme, si l'on voulait cesser d'être catholique. Le malaise qu'ils éprouvaient dans leur Église tenait, non au christianisme lui-même, mais aux éléments étrangers que l'Église s'était assimilés; et dès lors, tout en résistant à l'entraînement irréfléchi d'une Renaissance qui les aurait ramenés aux dieux de l'Olympe, saluant avec joie les lumières nouvelles qu'elle leur apportait, il les firent servir à une connaissance et à une intelligence meilleure du christianisme, que l'Église avait compromis dans sa doctrine, dans sa morale et dans son influence.

RENAN, Ernest, né 27 févr. 1823àTréguier, Côtes du Nord, étudia la théol. cathol. et les langues orientales. En 1856 il fut reçu membre de l'Acad. des Inscriptions, fut chargé en 1860 d'un voyage en Syrie, qui eut surtout pour résultat une connaissance plus sérieuse de la Phénicie, fut en 1862 nommé prof, d'hébreu au Collège de France, mais perdit cette place parce que dès sa 1™ leçon il crut pouvoir en changer le programme et en profiter pour exposer, non l'hébreu, mais ses idées sur la Bible et le christianisme; la République la lui rendit en 1871. Nommé sénateur en 1878 et membre de l'Académie, avec un discours de réception très vif et très spirituel de M. Mézières. Auteur de: Hist. génér. des langues sémitiques, Études d'hist. religieuse, Origine du langage, Essais de morale, Averrhoès, il doit sa réputation principalement à sa Vie de Jésus, dont le style, les descriptions et l'originalité firent le succès, et aux volumes qui suivirent: Saint-Paul, les Apôtres, Origines du Christianisme, Marc-Aurèle, l'Antéchrist, etc. Il a fait de la théologie et de la critique en amateur, de la littérature en artiste, et de la religion en sceptique.

RENATO. ou René, Camille, sicilien, converti au protestantisme, né de nouveau (de là son nom sous lequel il est seul connu), dut fuir 1542 et vint dans la Valteline, où il gagna sa vie en donnant des leçons. Grand remueur d'idées, il se fit à Chiavenna des partisans et entra en conflit avec son pasteur, le savant Mainardi. Il voyait l'essence du christianisme dans la nouvelle naissance et n'admettait aucune action objective de la mort de Christ; les sacrements n'étaient que des symboles; l'âme n'était immortelle que par la foi. Le conflit éclata en 1547. Un synode réuni à Coire, et des préavis de Bâle et de Zurich donnèrent raison à Mainardi; Renato se sépara avec quelques anabaptistes, et fut excommunié en 1550. Il entra en relations avec L. Socin, et l'arrivée de quelques réfugiés italiens lui permit de végéter encore quelque temps, mais en 1571 ils furent bannis el excommuniés par le synode des Grisons. Renato a fait un poème sur Servet. La date de sa mort est inconnue.

RENAUDOT, Eusèbe, petit-fils du médecin de ce nom, né à Paris 20 juill. 1646, étudia chez les jésuites et chez les oratoriens, fut consacré abbé sans jamais revêtir de fonctions, entra à l'Acad. française 1689, devint membre de l'Académie des Inscriptions et de l'Acad. de Florence, accompagna le cardinal de Noailles an conclave de 1700 à Rome, où il fut reçu avec distinction, et f 1 septembre 1720. Il possédait une riche biblioth. et de nombreux mss. orientaux. Un peu vaniteux et caustique, il s'était fait des ennemis. Ses principaux ouvrages sont: une Collection de liturgies orientales, avec 4 dissertations, 1716; Perpétuité de la foi catholique touchant l'Eucharistie, etc. 1711-1713; Hist. des patriarches jacobites d'Alexandrie, 1713. Ane. relations des Indes et de la Chine, de deux voyageurs mahom. qui y allèrent au 9®* siècle, 1718. Il avait aussi écrit, 1697, une critique du Dictionn. de Bayle, qui l'engagea dans une vive discussion.

RENÉ, v. Renato.

RENÉE, Renata, seconde fille de Louis Xll et d'Anne de Bretagne, née 25 oct. 1310, reçut une éducation distinguée. Sans être belle elle était agréable, ses manières étaient élégantes et affables, elle parlait parfaitement l'italien et était versée dans les classiques grecs et latins. On la maria 30 juill. 1527 avec Hercule 11 d'Esté, qui en 1529 devint aussi duc de Fer-rare et de Modène. Par ses talents et par sa grâce elle groupa autour d'elle les hommes les plus distingués et sa cour devint une des plu> brillantes de l'Italie. Mais ce qui mettait le comble aux précieuses qualités de la duchesse, c'est rattachement qu'elle professait pour les doctrines de la Réforme, que la sœur de François et sa gouvernante, M®* de Soubise, lui avaient fait connaître avant son départ pour l'Italie. Elle donna un asile à Clément Marot, qu'elle fit son secrétaire, reçut avec honneur Calvin et du Tillet, et compta parmi les familiers de sa maison des membres considérables du clergé italien qui appelaient de leurs vœux une réforme de l'Église, Contarini, Sadolet, Bembo. Calvin passa à sa cour quelques mois de 1535, sous le nom de Charles d'Espeville, et amena à la foi plusieurs personnes notables de son entourage. Mais le duc, lié vis-à-vis du pape, s'opposa à ce mouvement, fit partir Calvin et ses disciples, et finit, d'accord avec son neveu Henri II de France, par faire enfermer 1554 la duchesse elle-même dans la château d'Esté, où elle pas» quelques mois jusqu'à ce qu'elle se décida d'as sister à la messe; deux de ses filles furent mises au couvent. Elle promit à son mari, qoi t 3 oct. 1559, de rompre tout rapport arec Calvin, mais celui-ci la releva d'un engagement pris dans des circonstances qui lui étaient sa liberté- Veuve, elle continua de favoriser la Réforme; elle gouverna le duché jusqu'au retour de son fils Alphonse, mais celui-ci trompa les espérances qu'elle avait fondées sur lui, et après une rencontre avec Pie IV il donna à sa mère le choix entre l'exil et l'abjuration. Elle se rendit en France. Tante de François II, et belle-mère de François de Lorraine, duc de Guise, elle se montra la protectrice avouée des protestants, dont la condition s'améliora depuis la mort de François II, 1560. Elle choisit F. More) de Genève pour son chapelain et conducteur spirituel, et se fixa à Montargis. Bienveillante pour tons, secourable aux affligés, sévère dans ses mœurs et exigeant de son entourage une conduite honorable, s'appliquant à maintenir la paix entre les partis, elle échappa aux massacres de la Saint-Barthélemy, et f 12 juin 1575 honorée de tous, et après avoir formellement demandé que ses funérailles fussent faites conformément à la simplicité calviniste, v. Jules Bonnet. Herminjard, Catteau. Mac Crie.

RENI, Guido, ou le Guide, né 15J5 à Bologne, f 1642, élève des Carrache, fut protégé par Paul V qui le fit venir à Rome, et par Pie V qui le combla de faveurs. Il eut dans le Caravage un rival haineux et jaloux, et dans le jeu une passion funeste qui le ruina. Il finit dans les dettes et la misère. Auteur de plusieurs tableaux d'église, d'un beau coloris: le Crucifiement de Pierre, le martyre d'André (au Vatican) ont des effets hardis, violents; plusieurs Madeleine, l'Annonciation, et un Jésus couronné d'épines ont plus de douceur, mais une idéalisation un peu efféminée.

RÉORDINATION, renouvellement de l'ordination, quand on a lieu de croire que la première n'est pas valable, soit qu'elle ait été faite par un officiant non autorisé, soit qu'elle n*ait pas été faite dans la forme prescrite. Suivant les cas, on recommence toute la cérémonie, ou l'on se borne à compléter ou à rectifier ce qui a manqué à la première.

REPENTANCE, v. Pénitence.

RÉPONS, partie de l'office liturgique dans plusieurs églises, antienne redoublée; tantôt c'est le clerc, tantôt c'est l'église, ou le chœur, qui répond au prêtre, qui répète, ou qui confirme ses paroles.

REQUIEM, la Messe des Morts, ou des Ames; elle tire son nom des mots souvent répétés de la messe proprement dite: Requiem œternam doua ei$, Domine; ô Dieu, donne leur un repos éternel. On y chante le Dies irœ au lieu du Gloria. Au lieu de l'Évangile du jour, on lit des passages appropriés à la circonstance, et le lté, missa est est remplacé par le Requieseant in pâte. Les officiants s'approchent ensuite du cercueil, et pendant que l'un offre l'encens, l'autre récite le Libéra nos, le Pater et une prière d'absolution. Le costume du clergé est noir. Le rituel peut souvent être modifié, surtout pour la musique; l'orgue, l'orchestre et les chœurs sont mis à contribution pour de riches ou d'illustres morts, et de vrais oratorios, sous le nom de Requiem ont été composés dans des cas spéciaux, par des maîtres comme Mozart, Cheru-bini, Jomelli. Quelquefois le service du Requiem se répète le le 7®«, le 30^ jour, et au bout de l'an. Dans l'Égl. grecque il porte le nom de Pannychis, sorte de vigile ou de veillée, et se compose de lectures, de chants et de prières: il se célébré à volonté dans la maison, sur la tombe, ou dans l'église.

RÉSERVATION mentale, réserve ou restriction que fait dans sa pensée un homme qui affirme une chose, vraie moyennant cette réserve, mais que son interlocuteur doit nécessairement comprendre dans un sens tout différent, parce qu'il ne se doute pas de la réserve qu'on y met. On peut aussi affirmer une chose en riant, comme si c'était une plaisanterie, et soutenir ensuite, suivant la circonstance, ou qu'on l'a dite, parce que c'est vrai, ou qu'on l'a dite seulement en plaisantant, ce qui est vrai aussi. Ananias et Saphira offrent l'exemple d'une réservation mentale. Les jésuites dans leur morale, l'autorisent comme licite, vu que selon eux il n'y a pas là un mensonge proprement dit en paroles, mais seulement en intention et en réalité; c'est une des choses qui ont fourni à Pascal une de ses plus vigoureuses objurgations. Ce raffinement du mensonge est le chef-d'œuvre du système.

RESERVES (Cas), v. Cas.

RÉSIDENCE. Il va de soi que ceux qui ont charge d'âmes résident dans l'endroit même où ils doivent exercer leur ministère. Cependant, si naturel que cela paraisse, c'est un des points sur lesquels se sont de tout temps produites les infractions les plus nombreuses et les plus invétérées. La réunion de plusieurs bénéfices en une seule main rendait déjà la résidence impossible en mainte paroisse ou abbaye. Mais l'isolement, les désagréments inhérents à certains postes, une grande fortune et le désir d'en jouir, l'amour du monde, le besoin d'une activité autre que la cure d'âme, des relations de famille, d'autres motifs encore, ont souvent poussé les titulaires d'un bénéfice à se faire remplacer par des vicaires et à ne pas remplir eux-mêmes leurs fonctions. Déjà les conciles d'Are-late 314, Nicée 325, Antioche 341, s'en plaignaient et prenaient des mesures pour remédier à ce désordre. Mais les contraventions n'en ont pas moins persisté, et du 14me au 15®* siècle elles ont atteint les proportions d'un véritable scandale ecclésiastique et donné lieu à un mécontentement général, soit de la part des peuples, soit de la part des princes. Le conc. de Trente a jugé la chose assez grave pour s'en occuper dans sa 6m« et dans sa 23^ session, et pour établir « de nouveau » des peines contre les pasteurs qui ne résident pas. Il leur accorde « deux mois, trois tout au plus » chaque année, pour s'absenter, et « que cela n'arrive que pour quelque sujet juste et raisonnable, » avec permission écrite de leur supérieur, et à charge de se faire remplacer par un vicaire capable, auquel ils assigneront un salaire convenable et suffisant. En cas de contravention, ils seront privés des revenus de leur place. Les absences ne pourront avoir lieu à l'époque des grandes fêtes. Des exceptions sont faites pour les cas de pressante nécessité, d'utilité manifeste de l'Église ou de l'État, ou à l'occasion de quelque emploi ou • fonction dans l'État, attachée aux évêchés mêmes. » Dès lors les abus ont sensiblement diminué, quoiqu'ils n'aient pas entièrement disparu, et auj. grâce à la facilité des communications, le titulaire peut résider, tout en faisant momentanément les courtes absences qu'il juge nécessaires. Dans la règle, c'est à l'État qu'il doit demander la permission de s'absenter, s'il a besoin d'un congé de plus d'un mois dans l'année. La question ne s'est guère posée dans les égl. protestantes. L'Égl. anglicane seule, avec ses évêques, au 16™ et dans une partie du I7m<> siècle, a vu se perpétuer les abus de non-résidence qui avaient marqué le moyen âge.

RÉSIGNATION d'un bénéfice. Un titulaire peut résigner sa charge, soit d'une manière tacite, par le fait qu'il aura commis un acte qui le délie complètement, tel que mariage, changement de religion, acceptation d'un bénéfice incompatible; soit directement, formellement, par l'envoi de sa démission, auquel cas il faut que l'autorité compétente, l'évêque ou le pape, examine si les motifs allégués sont valables et suffisants.

RESTITUTION, v. Édit. 9<>.

RETTBERG, Fréd.-GuilL, né à Celle 21 août 1805, étudia à Gôttingue et à Berlin, fut en 1838 nommé docteur et prof, de théol. à Marbourg. t 7 avril 1849. Auteur d'une Hist. ecclés. de l'Allemagne, très appréciée, surtout pour les temps antérieurs à Charlemagne; d'une étude sur Cyprien, d'un travail sur la doctrine du salut d'après l'Évangile, et de plusieurs petits écrits et dissertations.

RETTIG, Henri - Chrétien-Michel, né 1795 à Giessen, appelé en 1833 comme prof, de théol. à Zurich, où il f 24 mars 1836. Il se fit connaître en 1832, à Giessen où il enseignait, par son livre: La libre Église protestante, ou les

Principes de constitution ecclés. d'après l'Évangile. S'appuyant sur Lambert d'Avignon, il demande que l'Église soit libre et indépendante de l'État, et que les ecclésiastiques ne soient liés par aucun symbole. Il rejette le baptême des enfants et réduit à fort peu de chose le caractère sacerdotal, qui selon lui n'existe réellement que dans la fonction.

RETZ (de). Trois cardinaux, archev. de Paris, de ce nom: 1° Pierre deGondi, né à Lyon 1553, d'origine italienne, protégé de Catherine de Médicis, grand aumônier d'Élisabeth d'Autriche, femme de Charles IX, f 1616. — 2° son neveu, Henri. — 3° son petit-neveu Jean-François-Paul de Gondi, né 1614 à Montmirail, fils de Philippe-Emmanuel, commandant des galères du roi. Par une jeunesse licencieuse il espérait se soustraire à la carrière ecclésiastique à laquelle sa famille le destinait, mais il fut obligé de s'y mettre, étudia la théol. sous Vincent de Paul, se distingua comme prédicateur, fut nommé docteur en théol. en 1643 à la Sorbonne, et devint coadjuteur de son oncle, puis archev. de Paris. Ambitieux, mais sans une véritable portée politique, libéral, intrigant, brouillon, spirituel, généreux, if se rendit populaire, prit parti contre Mazarin et contre les jésuites, déchaîna la Fronde, sans toutefois s'engager avec l'Espagne, se rapprocha d'Anne d'Autriche, ce qui lui valut le chapeau de cardinal. Mais après le rétablissement de l'ordre 1652, il fut arrêté, sans que le peuple fit rien pour le délivrer; enfermé à Vincennes, puis à Nantes, il réussit à s'évader et se rendit successivement en Espagne, à Rome et à Bruxelles. Après la mort de Mazarin il put rentrer en France, mais en renonçant à l'archevêché de Paris; il reçut en échange l'abbaye de Saint-Denis, renonça à la politique, paya ses dettes, et se retira à Saint-Mihiel en Lorraine, où il écrivit ses Mémoires. La fin de sa vie fut régulière et tranquille, f 24 août 1679.

REUCIILIN, Jean (de), né à Pforzheim le 22 févr. ou le 28 déc. 1455; fils d'un messager au service des dominicains. Il étudia à Pforzheim, et fut bientôt, à cause de sa belle voix, attaché à la chapelle du margrave Charles de Baden-Durlach. En 1470 il se rendit à l'univ. de Fribourg, et accompagna en 1473 le prince Frédéric de Baden & Paris, où il se mit à l'étude du grec. Il vint ensuite à Bâle, et reçut, d'nn Grec réfugié, Kontoblakos, des leçons qui furent décisives pour son avenir. C'est là qu'il publia son premier ouvrage, BrevUoquus, petit dictionnaire latin. Nommé maître ès philosophie, il commença en 1477 des lectures sur la langue et la littérature grecques, mais la faculté ne les voyant pas d'un bon œil, il repartit pour Paris* où il gagna sa vie en copiant des classiques grecs, Homère, Socrate, Aristote. Il étudia en-snite le droit à Orléans, où il prit le grade de bachelier, et publia en 1678 une grammaire grecque, Micropaedia. A Poitiers enfin il devint licencié en droit, et muni de tous ces titres il revint à Tubingue comme avocat et prof, de grec. L'université le nomma docteur en droit.

comte de Wurtemberg, Eberhard im Bart, se l'attache comme secrétaire et l'emmène avec lui à Rome. Au retour il se lie à Florence avec le platonicien Ficin et avec le cabaliste Pic de la Mirandole, qui le gagnent à leur philosophie, à leur mysticisme et à leur goût pour les sciences occultes. C'est à Rome que l'humaniste Her-molas Barbarus, donna à Reuchlin, dont le nom signifie petite fumée, le nom de guerre de Kapnion qui en est la traduction grecque. Grâce à la protection d'Éberhard, R. fut nommé comte palatin et fut un moment mêlé à diverses négociations, mais les études restèrent toujours pour lui au premier plan. A Linz, à la cour de l'empereur, il apprit l'hébreu d'un savant juif, Jacob ben Jehiel Loens, et non content du sens littéral il chercha dans les écrits sacrés un sens mystique, qui aboutit à la publication de son De verbo mirifico, Bâle 1494. Il écrivit aussi un traité sur l'état présent des juifs, 1505; une petite Gramm. hébraïque, dont il était très fier, 1506; un livre sur l'Art cabalistique 1517, etc. Pendant un exil à Heidelberg, il écrivit quelques comédies, entre autres une, Sergius, contre les moines, et des leçons sur l'Art de prêcher. Mais il avait signalé des erreurs dans la Vulgate, et il n'en fallait pas davantage pour le rendre suspect d'hérésie et pour préparer les orages qui le menaçaient. La situation des juifs en Allemagne était précaire. Deux juifs convertis, Karben et PfefTerkorn, obtinrent de Maximilien que les livres juifs fussent livrés et détruits, 1509; ils avaient pour eux l'arche v. et les dominicains de Cologne, mais le prince-archev. de Mayence, Uriel de Gemmin-gen, plus éclairé, s'opposa à cette exécution sommaire, et il fut secondé par Reuchlin. Hochstraten. prieur des dominicains et inquisiteur, profita de ce prétexte pour attaquer violemment Reuchlin dans son Handspiegel; celui-ci riposta avec non moins de violence par le Augenspiegel; Léon X appelé à trancher la question, et ne voulant se brouiller ni avec las dominicains, ni avec les humanistes, fit des réponses dilatoires, mais qui en réalité donnaient raison à Reuchlin. Hutten publia même à cette occasion son poème latin le Triomphe de Kapnion. Toutefois, ennuyé de ces luttes qui l'empêchaient de travailler, Reuchlin quitta Stuttgard 1513, se remit à l'enseignement de l'hébreu et du grec à Ingolstadt 1519, revint à Stuttgard en 1521, et il était sur le point d'accepter une nouvelle vocation àTubingue, lorsqu'il f 30 juin 1522. Un peu anxieux il avait appris à craindre l'Église et l'Inquisition, et il évita de se compromettre dans le grand mouvement de la Réforme. C'est lui cependant qui engagea son neveu Mélanchthon à se rendre à Wittenberg.

REUSCH, François-Henri, né 4 déc. 1825 à Brilon, Westphalie, étudia à Bonn, Tubingue et Munich; prit ses grades théologiques à Munster et reçut les ordres à Cologne en 1849. Répétiteur en 1854, puis prof, d'exégèse à la faculté de théol. catholique de Bonn depuis 1861, il fut suspendu en 1871 par l'archev. de Cologne et excommunié en 1872, à cause de son opposition au dogme de l'infaillibilité. Un des principaux chefs du parti vieux-catholique. Auteur de Comment, sur Baruc et Tobie, d'une Introd. à l'A. T., d'une étude appréciée sur la Bible et la Nature, ou les récits de Moïse et les résultats de la science contemporaine, etc. Il publie depuis 1866 une Revue de théologie.

REUSS, deux petites principautés allemandes, arrosées par l'Elsteret la Saale. L'Évangile y fut introduit sous Henri I<*r, et la plus vieille église date de 974. La Réforme eut de la peine à s'y établir; cependant vers 1552, sous Henri Y de Plauen, une Constitution et des Ordonnances ecclésiastiques réglaient déjà le nouvel ordre de choses. La famille des princes de Reuss se rallia au mouvement religieux dès le commencement du 18me siècle; des réunions se tenaient dans leurs palais, qui accordaient aux fidèles une large et cordiale hospitalité. La première femme de Zinzendorf, Erdmuthe-Dorothée, était une Reuss, et fut la vraie mère de Herrnhut et du peuple de Dieu. Plusieurs membres de la famille se rattachèrent à la colonie d'Ebersdorf, fondée 1733. La comtesse Bénigne-Marie, sœur de la comtesse de Zinzendorf, 1695-1751, et d'autres encore, s'y joignirent et se distinguèrent par leurs écrits, leurs cantiques et leurs fondations pieuses.

REUSS, Édouard-Guill.-Eugène, né à Strasbourg, 18 juillet 1804, fit ses études classiques à Strasbourg, visita GOttingue, Halle et Paris, et revint en 1829 dans sa ville natale où il se fixa définitivement, s'occupant surtout d'études bibliques et orientales. Prof, extraordinaire en 1833, ordinaire en 1836, il passa en 1838 à la faculté de théologie. Il a écrit en allemand, et surtout en français. Ses principaux ouvrages sont une Hist. du Canon du N. T., une Hist. du Canon des saintes Écritures dans l'Égl. chrétienne, une Hist. de la théol. chrét. au siècle apostolique 1852, plusieurs fois réimprim.; la réimpression des Œuvres de Calvin (avec Baum et Kunitz) faisant suite au Corpus Refor-matorum; une BibliothecaNov. Test.;une étude sur les Variantes du N. T.; de nombreux articles dans diverses Revues de théol. à Strasbourg, Iéna, etc.; enfin une Nouvelle version de la Bible, avec Commentaire. Plusieurs de ces ouvrages ont une grande importance et lui assignent une place considérable parmi les théologiens français.

RÉVEIL, expression qui dans le sens religieux est empruntée à Ésaïe 60, i. Éph. 5, 14. L'âme endormie dans l'indifférence ou le péché, se réveille sous une influence extérieure ou intérieure; une lecture, une prédication, un appel, une épreuve la ramène à la conscience de sa valeur et de ses intérêts; elle rentre en elle-même, elle reconnaît des torts, des illusions, des vanités, des péchés, une corruption qu'elle ne soupçonnait pas auparavant; elle a des besoins nouveaux, elle se détourne des citernes crevassées, et elle se convertit à Celui qui est la vérité et la vie. Il y a des réveils individuels, parfois aussi des réveils collectifs. Des communautés entières, des nations même peuvent à certains moments sortir de leur léthargie spirituelle et comprendre que leur manière d'être les conduit directement à leur ruine et à leur perdition. De grandes catastrophes, des épidémies, des guerres malheureuses servent quelquefois à réveiller les nations; d'autres fois aussi l'excès du mal, du matérialisme, de l'irréligion, suffit à amener une réaction salutaire. Presque toujours l'initiative d'un ou de quelques hommes préside à ce mouvement, et c'est leur ardeur et leur piété, plus que leur talent, qui décide du succès de leurs appels et de leur prédication. Il y a eu réveil à Florence au temps de Savonarola. La Réforme a été un grand réveil. L'Allemagne sous Spener, l'Angleterre sous les deux Wesley, se sont réveillées du sommeil d'une orthodoxie morte et traditionnelle. Au commencement de ce siècle, après le règne de l'incrédulité couronné par la révolution et par les guerres de l'empire, le sentiment religieux s'est réveillé dans presque tous les pays du continent, en Angleterre et en Amérique, et il s'est manifesté par un redoublement de zèle missionnaire, par une littérature biblique plus saine, par la fondation de nombreuses écoles du Dimanche, d'Unions chrétiennes, de Sociétés religieuses, et par le rapprochement des diverses Églises et dénominations sur le terrain de la foi qui leur est commune. On a désigné sous le nom anglais de Revivais, qui n'est que la traduction du mot Réveil, les grands mouvements qui ont eu lieu, en Angleterre et en Amérique surtout, sous l'influence de puissants prédicateurs, tels que Wesley, Whitefield, Jonathan Edwards, et qui ont fini par avoir une espèce de règle et d'organisation, qui rappelle de loin, et en bien, les Exercices spirituels d'Ignace de Loyola. Ceux qui ne comprennent pas la vie religieuse et les transports de l'amour chrétien, n'y ont vu qu'une excitation maladive et un phénomène de la nature des névroses. Il est possible que quelquefois le réveil se soit compliqué d'éléments étrangers, mais il est en lui-même la manifestation de l'homme nouveau, qui passe des ténèbres à la lumière, v. Discours de Finney, trad. par A. Bost. Il est possible que parfois il se joigne quelque chose de factice à une oeuvre d'ailleurs spirituelle; c'est ce qu'on a reproché aux wesleyens, et plus récemment à l'Armée du Salut; l'ivraie se mêle quelquefois au bon grain; mais aussi longtemps qu'on n'aura pas une œuvre pure de tout mélange, il vaudra mieux accepter les inconvénients avec les avantages que de rester dans le sommeil et dans la mort.

REVOCATUS, v. Perpetua.

RHAGIUS, v. Ragius.

RHABAN MAUR, v. Raban.

RHEIMS, v. Reims.

RHEINWALD, Georges-Fréd.-Henri, né!80î à Scharnhausen près Stuttgard, prof, de théol. à Berlin, puis à Bonn; entra plus tard à Berlin dans l'administration des cultes, f 1849. Auteur d'un Comment, sur les Philippiens; d'une Ar-chéol. chrétienne; éditeur de quelques réimpressions théol., et l'un des fondateurs de la Gazette ecclés. de Berlin.

RHEMOBOTH, Jérôme, Lettre à Eustoche, mentionne sous ce nom une espèce de moines, assez nombreux en Syrie et en Palestine, indépendants de toute règle, associés ordinairement par deux ou trois, vivant du travail de leurs mains, et fréquemment en contestation les uns avec les autres. Cassien mentionne en Egypte, l'existence de moines analogues sous le nom de Sarabaïtes.

RHÉTIE (Confession de foi de la). A l'occasion des difficultés soulevées dans la Valteline par les réfugiés italiens, v. Renato, le synode des Grisons décida que des ordonnances ecclésias-ques et une Confession de foi seraient rédigées pour le pays. La Confession fut lue et adoptée en automne 1552, puis en avril 1553 transmise par Comander à Bullinger pour approbation, et enfin acceptée et signée en synode avec les autres ordonnances. Quelques Italiens seulement, et à leur tête Vergerio, hésitèrent d'abord, mais finirent par se décider. La partie polémiqué de cette Confession vise surtout les Italiens.

RHODES, v. Dict. de la Bible. Le christianisme y fut apporté au 4®* siècle, par la volonté des empereurs, et n'y remplaça que lentement et difficilement le culte païen. Son célèbre colosse, représentant Apollon ou le Soleil, construit 300-288 av. C. fut renversé par un tremblement de terre 232 ou 222 av. C. Les chevaliers de Saint-Jean arrachèrent File aux empereurs grecs 1309 et s'y établirent sous le nom de Chevaliers de Rhodes. Soliman II les en chassa après un siège célèbre 1522, et Char-les-Quint leur donna l'Ile de Malte, dont ils prirent le nom sous lequel ils sont connus aujourd'hui.

RIBÀDENEIRA (Pierre de), né 1 nov. 1527 à Tolède, envoyé pour son éducation à Rome, où Loyola l'admit 1540 dans son ordre qui venait à peine d'être fondé. Il étudia ensuite à Paris 1542, à Padoue 1545, et fut nommé prof, de rhétorique à Palerme 1549. Il concourut à la fondation du collège germanique, dont il fut nommé directeur en 1559, travailla à l'organisation de l'ordre en Belgique, fut provincial pour la Toscane, assistant du général, et finit à cause de sa santé ébranlée, par retourner en Espagne, où il f 1 oct. 1611. C'est lui qui a commencé la Biblioth. des écrivains de la Soc. de Jésus, continuée par Alegambe et Nathan Sotwel.

RICCI lo Matthias, né 6 oct. 1552 à Macerata, Marche d'Ancône, et voué à la prêtrise; il entra 1571 dans l'ordre des jésuites, fut envoyé en Chine 1578, et obtint 1583 du gouvernement de Canton la permission de s'établir à Tschao-King-Fu; il finit même par y bâtir une église. II écrivit un catéchisme, et pour flatter les Chinois il fit une carte du monde dans laquelle la Chine brillait par son immensité, dépassant en grandeur tout le reste de la terre. Il réussit en 1600, après avoir échoué en 1595, à pénétrer jusqu'à Pékin, déguisé en mandarin, et se fit des amis avec de petits cadeaux, montres, images, etc. Par ses connaissances mathématiques il gagna la confiance du roi; ses talents en musique et en peinture lui furent également utiles. Mais quant à l'œuvre missionnaire, il la compromit en donnant le christianisme comme la restauration de la doctrine de Confucius altérée et oubliée. Il tolérait les sacrifices offerts à Confucius et aux ancêtres, et ce christianisme dénaturé n'aboutit à rien. Il a laissé 15 livres en chinois, f 11 mai 1610.

2° Ricci, Laurent, 18me général des jésuites, né à Florence le 9 sept. 1703, élu en 1758 après avoir déjà rempli diverses fonctions à Sienne et à Rome, envenima sous Pombal les rapports déjà si tendus entre l'ordre et le Portugal, s'opposa au débarquement des jésuites chassés de Portugal et d'Espagne, et assista à la suppression de l'ordre par Clément XIV. Il fut conduit au château Saint-Ange le 21 sept. 1773 et y passa deux ans, accablé des plus mauvais traitements. f 29 nov. 1775, en protestant de son innocence et de l'innocence de l'ordre. Le pape lui ayant demandé quelques réformes, qui auraient pu sauver les jésuites, il s'y refusa obstinément et répondit: Stn< ut sunt, aut non tint. Il ne sentait pas la nécessité d'une réforme, et d'ailleurs il aurait été sans force pour l'exécuter.

3° Scipion Ricci, petit-neveu de Laurent, év. de Pistoie, né 9 janv. 1741 à Florence, étudia chez les bénédictins, et fut nommé chanoine et auditeur de la nonciature. Il favorisa les réformes de Léopold et de Joseph, et les fit agréer par le synode de Pistoie, mais elles furent rejetées par le conc. de Florence 1787 et annulées par Pie VI. Partisan des décrets de l'Assemblée Constituante et de l'occupation française, il fut emprisonné par le pape 1799. Pie VII l'amena 1805 à se rétracter, mais il n'en reste pas moins un martyr de la liberté de conscience, f 27 janv. 1810. Vie par Potter.

RICCIARELLI, Daniel, plus connu sous le nom de Le Volterran, du nom de sa ville natale, Vol terra. Né 1509, + 4567. Peintre et sculpteur, le plus célèbre des disciples et amis de Michel-Ange, parfait comme dessin, admirable dans les raccourcis, moins brillant coloriste. Il a travaillé pour Paul III, Marguerite d'Autriche, Catherine de Médicis. Sa descente de croix est un chef-d'œuvre. On remarque aussi la Mise au Tombeau, Marie auprès du cadavre de son fils, la Sainte Famille, le Massacre des Innocents, David et Goliath, etc.

RICETTO, Antonio, de Vicence, allait avec-quelques amis, partir pour la D.ilmatie, quand leur barque fut arrêtée à Capo d'Istria, et eux retenus comme suspects, et conduits à Venise. Ils étaient protestants. Bucella se rétracta. Ri-cetto résista à toutes les séductions, même aux prières de son jeune fils, et le 17 févr. 1565 il fut condamné à mort. Le capitaine Chiaramonte lui offrit par une phrase équivoque l'occasion de se sauver encore, mais il refusa de s'y prêter, et quand le gondolier qui allait le noyer lui demanda s'il ne craignait pas la mort, il répondit: Je fuis la mort éternelle. Six jours après, son ami Francesco Sega, qui avait profité de l'équivoque, allait le rejoindre, encouragé par Spi-nola, 23 févr. 1565.

RICHARD lo de Saint Victor, écossais de naissance; successeur de Hugues dans la direction de l'école de Saint-Victor, Paris, il pencha plus encore vers le mysticisme et chercha même, le premier, à réduire le* mysticisme en un système scientifique. Ses nombreux ouvrages l'avaient fait surnommer le Grand Contemplateur. Il donnait à la mystique le nom allégorique de Benjamin, et a écrit sous ce titre un: Benj. major , ou l'Arche mystique, et un Benj. minor, ou Préparation de l'âme à la contemplation; en outre quelques traités sur la Trinité, l'Incarnation du Verbe, la différence entre le péché mortel et le péché véniel, l'Instruction de l'homme intérieur, etc. Il était grand ami de Bernard de Clairvaux. f 1173.

2° R. l'Ange, on l'Anglais (Anglicus), docteur de l'univ. de Bologne au 12me siècle, a rédigé des Notes pour le Décret de Gratien, et des Gloses sur les décrétâtes des papes.

3o év. de Ghichester, f 1253; canonisé.

4o Richard Simon, v. Simon.

RICHELIEU, cardinal Armand-J. dn Plessis, né 1585 à Paris, s'était déjà fait connaître comme controversiste, quand Louis XIII le choisit pour premier ministre. Évêque de Luron depuis 1607, et aumônier de Marie de Médicis 1615, il écrivit: Principaux points de la foi cathol. contre la Lettre des 4 ministres de Charenton, et l'Instruction du chrétien. Cependant une fois aux affaires il ne fit plus guère de la religion qu'une question politique, et s'il s'occupa quelquefois de convertir des notabilités huguenotes, ce fut plutôt en amateur et pour s'entretenir la main. « Autres, disait-il, sont les intérêts de l'État, et autres les intérêts du salut de nos âmes. » Il disait encore: « Les diverses créances ne nous rendent pas de divers États; divisés en foi, nous vivons sous un prince au service duquel nul catholique n'est si aveugle d'estimer, en matière d'État, un Espagnol meilleur qu'un Français huguenot. » Mais ces beaux principes ne l'empêchaient pas d'offrir de l'argent aux ministres, de convertir La Trémouille en trois jours et de faire le siège de La Rochelle. Ce qu'il rêvait avant tout, c'était l'unité du royaume. Il aurait voulu même réunir les deux Églises, et il s'en préoccupa sérieusement. Après la prise de La Rochelle 28 oct. 1628, et la paix d'Alais avec Rohan 27 juin 1629, il publia (14 juillet) l'édit de grâce de Nîmes, qui, respectant la liberté de conscience et l'égalité des citoyens des différents cultes, mettait fin à l'existence des huguenots comme parti politique, et les livrait au bon vouloir du gouvernement. Il fit d'ailleurs respecter cet édit aussi longtemps qu'il vécut, et s'il y eut encore des persécutions, elles furent toutes locales ou cléricales. Il prit parti pour Gustave-Adolphe contre l'Espagne et l'Autriche, et pria le nonce de ne pas s'inquiéter pour la sûreté de sa conscience. Il sépara touj. le temporel du spirituel, et protégea la religion sans abandonner aucun des droits et des privilèges du monarque. L'Égl. catholique est loin de l'avoir canonisé, et le protestantisme doit à sa politique plus de reconnaissance qu'on ne l'a cru longtemps, ce qui ne l'absout pas des cruautés que lui a dictées la raison d'Etat, ni d'avoir cru « que sa robe rouge de cardinal pouvait tout couvrir. » f 4 déc. 1642.

RICHER lo bénédictin du couvent de Saint-Remi, Reims, vers l'an 1000; auteur de 4 livres sur l'Hist. de France 884-995, et d'Annales 995-998. — 2° Edmond, né 1560 à Chaource près Langres, Aube, d'une famille très modeste, étudia à Paris où il devint en 1590 docteur et prof, de théol., en 1594 directeur du collège do cardinal Lemoine, en 1606 syndic de la faculté de théologie, f 28 nov. 1631. Zélé gallican, et mettant les conciles au-dessus du pape, il ent beaucoup à souffrir pour ses convictions, fat destitué, emprisonné, et ne dut qu'à l'intervention de la faculté de n'être pas conduit à Rome. On a de lui une édition de Gerson 1607, une Apologie de ce travail, dirigée contre Bellar-min; un traité De ecrlesiaet. et polit. pote$tate 1611, publié à l'instigation du président du parlement. Il s'était aussi opposé à la soutenance de thèses en faveur de l'infaillibilité papale.

RICHTER lo Jean-Panl, 1763-1825, célèbre philos, et écrivain. On cite en particulier de lui un traité sur l'Immortalité de l'âme. —2o Émile-Louis, né 15 fév. 1808, avocat et docteur en droit, à Leipzig depuis 1829, en 1838 à Marbourg, appelé à Berlin en 1846 comme prof., entra comme conseil an ministère des cultes en 1859, et f 8 mai 1864. S'est occupé surtout du droit canon dans ses livres et ses journaux, et a pris une part active aux discussions d'organisation ecclés. dans le sens d'une Union positive, telle que Nitzsch la voulait. — 3o Jean-Henri, directeur de la maison des missions de Barmen, né H déc. 1799 à Belleben, comté de Mansfeld, fit la campagne de 1813 comme volontaire et commença ensuite sa théol. à Halle. Outre ses rapports missionnaires, il a pnblié avec son frère un Comment, de la Bible, très estimé, f 5 avril 1847.

RICULF, archev. de Mayence, successeur de Lulle, 787-813, ajouta à son diocèse celui de Buraberg.

RIDLEY lo Nicolas, né 1500 dans le Nor-thumberland, étudia à Paris, Cambridge et Louvain. Savant, éloquent, il était évêque catholique de Londres au moment de la Réforme, et suivit Cranmer dans ce grand mouvement religieux. Après avoir été sous Henri VUI év. de Rochester. puis de Worcester sous Édouard VI, il fut arrêté avec Latimer de Londres sous Ma-rie-la-Sanglante, et tous les deux traînés à Oxford et brûlés 16 oct. 1555. Il mourut avec calme et courage. — 2o Glocester, ainsi nommé parce qu'il naquit 1702 en mer sur le vaisseau de ce nom. Il entra d'abord au théâtre, et joua la tragédie. Puis il se voua à l'Église et devint un prédicateur distingué, f 1774. Auteur d'une Vie de l'év. Ridley, Essai sur le card. Pôle, le poème de Psyché, etc.

RIEGER lo George-Conrad, né 7 mars 1687 à Cannstadt, fils d'un conseiller, fat d'abord répétiteur à Tubingue, puis pasteur à Urach et à Stuttgard. f 16 avril 1743. Prédicateur distingué, il appartenait à l'école du réveil piétiste, et a laissé des sermons et de nombreux ouvrages d'édification. — 2° Charles-Henri, son fils, né à Stuttgard 16 juin 1726, chapelain du roi, conseiller consistorial, auteur de sermons et de méditations très évangéliques, un peu dans l'esprit de Bengel. f 15 janv. 1791. — 9o Made-laine-Sybille, née 1707 à Maulbronn, femme d'un frère du précédent, poète distinguée et couronnée; auteur de plusieurs cantiques estimés. f 1786.

RIEGGER lo Paul-Joseph (de), prof, de droit canon à Vienne en 1753, combattit l'ultramon-tanisme au nom des droits de l'État. Né 29 juin 1705 à Fribourg, + 8 déc. 1775 à Vienne. — 2° Son fils Joseph-Antoine-Étienne, né 13 févr. 1742 à Innsbruck, publiait à 16 ans une étude littéraire sur Térence et Plaute; prof, de droit à Fribourg, il soutint que les gouvernements peuvent faire payer l'impôt au clergé et aux biens ecclésiastiques, ce qui lui valut un appel à Prague 1778, puis à Vienne 1782. Il retourna il Prague comme conseiller du gouvernement, mais les circonstances le servirent mal et il tomba dans la pauvreté, f 5 août 1795. Il était zélé partisan des réformes de l'emp. Joseph.

RIEHM, Édouard-Ch.-Aug., né 29 déc. 1830 à Diersbourg, Bade, chapelain militaire à Matin-heim, prof, à Heidelberg, puis à Halle qui lui donna le titre de docteur en théol. Auteur de plusieurs dissertations, traités et comment sur l'A. et le N. T., et depuis 1865 l'un des rédacteurs des Studien und Kritiken.

RIENZI, ou Rienzo (Cola ou Nicolas-Laurent di), né 1313 à Rome, fils d'un pauvre cabaretier et d'une blanchisseuse, reçut une éducation secondée par de grands talents naturels et se complut de bonne heure dans l'étude des classiques romains, surtout de Tite-Live et de Salluste, qui enflammèrent, son patriotisme et son imagination. II rêva de rendre à Rome son ancienne grandeur, et d'en faire la maîtresse du monde, en groupant autour d'elle toutes les républiques de l'Italie. Notaire de la ville, il fit partie d'une députation chargée en 1343 de se rendre auprès de Clément VI à Avignon pour le prier de revenir à Rome. A cette occasion il se lia avec Pétrarque d'une étroite amitié. Son éloquence le fit remarquer; le pape le nomma notaire apostolique, et de retour à Rome, Rienzi fit connaître ses projets et son plan qui furent accueillis avec enthousiasme par le peuple. Le 20 mai 1347 il proclama la nouvelle constitution, se rendit en procession solennelle au château Saint-Ange, puis au Capitole, et annonça l'avènement d'une nouvelle ère. Il prit, ou reçut les titres de tribun et de libérateur, avec un pouvoir dictatorial, dont il usa d'une manière excessive. Il chassa les barons et les sénateurs, fit la guerre aux bandits, mit à mort leurs principaux chefs, nomma des ambassadeurs, et vit plusieurs villes se soumettre à lui. Quelques puissances étrangères parurent même le reconnaître pour un souverain. Mais son orgueil lui fut funeste. Le 15 août il se fit couronner de la septuple couronne. Il affecta de se baigner dans la baignoire de Constantin. Il invita Charles IV et Louis de Bavière à se présenter devant son tribunal, et après avoir été odieux, il devint ridicule. Les nobles marchèrent contre lui, et le peuple, las de sa tyrannie et de ses gaspillages, refusa de le défendre. Le 15 déc. il se réfugia au château Saint-Ange, mais il n'y put tenir et il quitta Rome en janvier 1348. Il se rendit d'abord dans les environs de Naples, mêlant la politique aux rêveries mystiques, s'affilia aux spirituels du mont Majella, pratiqua l'ascétisme, prêta l'oreille aux prétendues révélations du frère Angelo, et tout à coup, en 1350, se rendit à Prague auprès de l'emp. Charles IV, à qui il se donna pour un fils naturel de son grand-père Henri VII. Bien reçu d'abord, mais surveillé, il finit par être livré à Clément VI d'Avignon. Le successeur de celui-ci, Innocent VI, comprend la valeur de Rienzi et le parti qu'on en peut tirer; il le garde quelque temps comme prisonnier, mais en lui laissant une liberté relative et sans le gêner, ni dans ses études, ni dans sa correspondance. A la fin pour essayer de calmer les Romains mécontents, et pour profiter de la popularité de Rienzi, il le leur envoya comme sénateur et comme son délégué, mais sous la direction de son légat Al -bornoz. Rienzi resta quelque temps à Pérouse, el ce ne fut que le 1®r août 1354 qu'il se décida à entrer dans Rome. Il fut reçu avec enthousiasme, mais cela dura peu. Il combattit avec une sage énergie les abus et les brigands, fit trancher la tête à Montréal, chef de ces derniers, mais s'aliéna la population par des exécutions sommaires et par des procédés tyran-niques. Il périt clans une émeute le 8 oct. 1354 au moment où il allait s'enfuir. Singulier mélange de despotisme et d'aspirations libérales, de courage et de lâcheté. Son corps fut mutilé et brûlé. V. le roman de Lytton. Vie par Du-jardin, Ducerceau, etc.

RIMINI, ville fortifiée des anciens États de l'Église, donnée aux papes par Pépin. Elle est célèbre par le conc. de 359, où l'arianisme fut d'abord condamné, mais où sous la pression de l'emp. Valens, les orthodoxes se laissèrent entraîner à signer une formule qui rappelait celle du 3»* de Sirmium, et donnait ainsi gain de cause aux ariens. — Patrie de la belle et malheureuse Françoise de Rimini, chantée par Dante.

RINCK, Melchior, anabaptiste, d'abord pasteur à Hersfeld 1523, puis dans les environs d'Eisenach, où il se lia avec Munzer et devint son disciple. En 1524 il prit part à la guerre des paysans, échappa à la bataille de Franken-hausen, et regarda sa délivrance comme un appel de Dieu à continuer l'œuvre de Munzer. Après avoir erré quelcpie temps en Suisse, il revint en Hesse et en Thuringe, où son éloquence lui procura de grands succès. Les théologiens de Marbourg essayèrent en vain de le ramener à la foi de l'Église. Menacé par Philippe de Hesse, il s'enfiiit, se rendit dans la Frise orientale, où il rebaptisa plus de 300 personnes. Chassé de là, plusieurs fois emprisonné, il réussit à s'évader, passa en Saxe, revint en Hesse, et périt, à ce que l'on croit, dans l'affaire de Munster 1536.

RINGWALDT, Barthélémy, né 1530 à Francfort s. l'Oder, f 1598 à Langenberg, bon prédicateur, mais plus connu par ses cantiques et par quelques ouvrages d'édification, entre autres par un drame Spéculum Mundi, où il montre comment de tout temps les pasteurs fidèles ont été persécutés. Il attendait la fin du monde pour 1684.

RINKART, ou Rinckart, Martin, né à Eilen-bourg 23 avril 1586. fils d'un tonnelier, étudia à Leipzig la théol. et la musique, et après avoir occupé différents postes comme pasteur, finit par être nommé archidiacre dans sa ville natale, où il f 8 déc. 1649. Homme pieux, il eut tour à tour à souffrir de la guerre, de la peste et de la famine. On lui doit plusieurs beaux cantiques, entre autres Nun danket aile Gott, inspiré par Écclésiastiq. 50, 24-26; une tragédie sur Munster, Monetarium Seditiosum, et quelques ouvrages d'édification.

RIST, Jean, né 8 mars 1607 à Ottensee, Hols-tein, où son père, d'une famille patricienne, était pasteur. Il étudia la théol., les mathématiques et la médecine, à Rostock, Utrecht, Leyde et Leipzig, accepta une place de précepteur, et fut en 1635 nommé pasteur à Wedel, puis conseiller ecclésiastique. Couronné pour ses poésies 1644, il fut anobli par l'empereur et nommé palatin. Membre de plusieurs sociétés utiles, dans lesquelles il était appelé le Vaillant, il fonda en 1656 l'ordre du Cygne de l'Elbe, f 31 août 1667. Marié deux fois il laissait 5 enfants de sa première femme. On lui a reproché de l'orgueil, mais c'était celui de son temps, celui d'un homme qui connaît sa valeur; il était fidèle et zélé dans son ministère et les épreuves ne lui manquèrent pas. On a de lui un grand nombre de poésies, entre autres 658 cantiques, les uns très bons, plusieurs un peu délayés. Mis en musique par des compositeurs connus, ils étaient chantés dans beaucoup d'églises, mais il ne les fit pas chanter dans la sienne.

RITSCHL lo Georges-Ch.-Benjamin, né à

Erfurt 1 nov. 1783, f à Berlin 18 juin 1858, avait étudié à Iéna. Il occupa différents postes à Berlin et fut en 1827 nommé évéque et surintendant de la Pomèranie; il donna sa démission en 1854. Il resta jusqu'à la fin conseiller honoraire du Consist. supérieur. — 2* Albert, son fils, né 25 mars 1822. après de bonnes études, s'établit à Bonn en 1846 et ne tarda pas à y être nommé professeur; en 1864 il fut appelé à Gôttingue. Un moment disciple de l'école de Tubingue, il s'en sépara de bonne heure. Auteur de plusieurs ouvrages exégétiques, historiques et dogmatiques: l'Evang. de Luc, celui de Mar-cion, les Vieux catholiques, la doctrine de la Justification, etc.

RITTER, Érasme, bavarois, appelé 1522 â Schaffhouse comme prédicateur pour combattre Hofmeister, finit par se joindre lui-même à la Réforme et travailla à l'établir. U épousa la sœur de l'abbé de Tous-les-Saints, qui de son côté épousa une religieuse. Très décidé zwin-glien, il entra en conflit avec son collègue Bnr-gauer, et dans l'intérêt de la paix on les renvoya tous les deux. Il se tourna vers Berne: dès lors ses traces disparaissent.

RITUALISME, v. Pusey.

RITUEL, livre indiquant les formes à suivra pour les cérémonies. Assez longtemps une certaine latitude a régné sur ce point dans les divers pays, mais le conc. de Trente ayant exprimé le vœu que la plus grande uniformité possible présidât au culte et aux prières liturgiques. Paul V fit composer le Rituel Romain, fornk* des anciens rituels, et le publia en juin 1614. n traite des sacrements, des processions, etc. h* bref qui l'introduit le recommande à toutes les églises, mais ce n'est que peu à peu qu'il remplaça en France le rituel gallican. Benoît XIV en publia une nouvelle édition, augmentée et améliorée.

RIVET, André, né 1573 à Saint-Maixent, Poitou; élevé à Niort, La Rochelle et Orthez: consacré en 1595, pasteur à Thouars jusqu'en 1620 et chapelain de Claude de la Trémoille: délégué à cinq synodes; prof, de théol. à Leyde 1620 à 1632, enfin directeur du collège d'Orange et de l'École illustre à Breda, où il f janv. 4651. Marié 1590 avec Suzanne Oiseau, dont il eut 4 fils et 3 filles; remarié 1621 avec Marie Du Moulin, sœur de Pierre et veuve du capitaine des Guyots. Calviniste strict et rigide, il a laisse de nombreux ouvrages de controverse, de polémique, de dogmatique et de critique sacrée; il n'a pas toujours sû éviter les personnalités blessantes, qui étaient dans les mœurs du temps. Il a combattu surtout l'école de Saumur, Amy-raut et l'universalisme hypothétique. Délégué au synode de Dordrecht, il n'a pu s'y rendre, Louis XIV l'ayant défendu sous peine de mort.

ROBE (La sainte). La robe sans couture sur laquelle les soldats jetèrent le sort, Jean 19, 23. était nne espèce de tunique, tissée d'une seule pièce. Plusieurs égl. catholiques prétendent la posséder, Trêves, Argenteuil, le Latran; il y en a en outre de nombreux morceaux en divers lieux, San Salvador, etc., car les chrétiens ont fait ce que les soldats païens n'ont pas osé faire; ils l'ont déchirée. Enfin une tradition dit qu'elle est encore à Jérusalem, par conséquent sous la protection des Turcs. La plus célèbre de toutes est celle de Trêves, qui fut exposée en 1844, qui donna lieu k un redoublement d'audace et de zèle ultramontain, et qui provoqua par réaction les protestations de Ronge et la formation de l'Égl. catholique allemande. Cette robe n'est pas une tunique, mais une chasuble; elleauneou deux légendes, plusieurs fables et une histoire. L'histoire date de 1132; la robe a été donnée en 1121 k l'église de Saint-Nicolas k Trêves par l'archev. Brunon; elle avait été trouvée par Jean 1er. Sa première exposition eut lieu *>n 1512. Mais déjà vers le H me siècle les légendes se formaient peu k peu, et sans beaucoup d'égards pour la vraisemblance historique. L étoffé aurait été filée par la vierge Marie, tissée >ur le mont des Oliviers par l'imper. Hélène, et la robe portée par l'enfant Jésus et grandissant avec lui. Après sa crucifixion Hérode la donna, tachée de sang à un Juif qui, ayant inutilement essayé de la laver, finit par la jeter k la mer. Longtemps après elle fut retrouvée par un pèlerin, mais saisi d'une terreur respectueuse, il la rejeta de nouveau à la mer. Une baleine l'avala. Un pécheur prit la baleine et vendit la robe au roi de Trêves Orendel qui, en la portant, devint invulnérable et reçut le surnom de frère-gris; il lavait payée 30 pièces d'argent, etc. Une autre legeude dit que Pila te mit cette robe quand il parut devant Constantin pour se justifier, et qu'il aurait été absous si Véronique n'avait pas dévoilé la ruse. Vers la fin du 18^6 siècle la robe n'étant plus en sûreté à Trêves fut transférée à Ehrenbreitenstein, puis plus avant encore en Allemagne; elle a été réintégrée en 1810. Bile mesure l^ôS; elle est de couleur brune; on n'est pas d'accord sur l'étoffe dont elle est faite. — On montre aussi à Trêves le manteau de pourpre; il est renfermé dans une caisse, mais celui qui l'ouvre devient aussitôt aveugle. Ces objets ont été donnés par l'impér. Hélène au patriarche Agritius, d'Antioche, qui n'a jamais existé.

ROBERT lo de Champagne, ou de Citeaux, v. Cisterciens. — 2° R. d'Arbrissel, v. Fonte-vrault. — 3° R. Malchetius, d'Auxerre ( Altissio-dorensis), chanoine et prieur du couvent des Prémontrés de cette ville, f 1212; auteur d'une Chronique embrassant l'histoire universelle jusqu'en 1211. — 4° R. Capiton, v. Grosse-Tête. — 5* v. Sorbonne. — 6<> Robert de la Marck, v. Marck.

ROBINSON lo John, le véritable fondateur du congrégationalisme, v. Browne, et Indépendants. Banni de Norwich en 1608 à cause du caractère puritain de sa prédication, il se retira k Amsterdam avec ses adhérents, puis 1610 k Leyde où il f 1 mars 1625. Outre ses Essais on remarque parmi ses nombreux ouvrages son: Apologie juste et nécessaire de quelques chrétiens dédaigneusement appelés Brownistes; latin 1619, anglais 1625.

2o Edward, fils d'un prédicateur congréga-tionaliste, né 10 avril 1794 à Southington. Con-necticut, fut d'abord destiné au commerce, mais se mit plus tard aux études 1812-1816, et cultiva spécialement le droit, les mathém. et les langues anciennes, qu'il finit par enseigner lui-même dès 1816. Chargé k Andover de surveiller une édition de l'Iliade, il se décida à y étudier la théol. et i) le fit avec un tel succès qu'en 1823 le prof. Moses Stuart le choisit pour son adjoint aux chaires d'hébreu et de littérature. En 1826 il fit un voyage en Europe, visita Paris, Halle et Berlin, et épousa la fille du prof, et conseiller Jacob de Halle, écrivain distinguée connue sous le pseudonyme de Talvi, formé des initiales de son nom Thérèse-Albertine-Louise-Von Jacob. En 1830, de retour à Andover, il fut nomme bibliothécaire et prof, de littérature biblique. De 1833 à 1836 il se retira à Boston, la faiblesse de sa santé lui commandant le repos. Nommé en 1837 prof, à New-York, il accepta pourvu qu'on lui permit d'aller passer 3 ou 4 ans en Palestine. Il visita en même temps la presqu'île de Sinaï, de juin 1837 k oct. 1838, avec le missionnaire Éli Smith. Son voyage dura jusqu'en 1841, et rentré k Berlin où il avait laissé sa famille, il en publia les résultats sous le titre de Biblical Researches of Palestina, k la fois en anglais et en allemand (trad. par sa femme). Ce travail lui valut la médaille d'or de la Soc. royale de géographie de Londres, le titre de Dr en théol. de Halle, celui de Dr en droit des collèges de Yale et de New-Haven, et fit époque dans le domaine de la géogr. biblique. Il y ajouta en 1847 une importante étude sur la Topographie de Jérusalem. Un second voyage en 1852 eut pour résultat ses INouvelles Recherches. II avait entrepris un ouvrage plus considérable, La Géogr. physique de la Terre Sainte; il ne put en achever que la 1 re partie, Londres 1865. Malade et souffrant des yeux il se rendit en 1862 à Berlin pour consulter un oculiste célèbre, mais il n'éprouva aucun soulagement et revint à New-York, où il f 27 janv. 1863. Il avait publié plusieurs autres ouvrages, soit originaux, soit trad. de l'allemand: Dictionn. grec-anglais du N. T.; Gramm. grecque du N. T., de Winer; Wahl, Clavis N. T.; Buttmann, Gramm. grecque; Gesenius, Dict. hébr.-latin. II avait aussi fondé en 1831 la revue The biblical Reper-tory, qui se fondit en 1851 avec la Biblioth. sacra d'Edwards et Park. C'était une nature distinguée, énergique, en même temps que bienveillante et pieuse. Ses travaux ont donné le signal à d'autres recherches; et s'ils ont été dépassés ou rectifiés sur quelques points, ils ont marqué un grand et décisif progrès.

ROCH, né vers 1295 ou 1300 à Montpellier, donna son bien aux pauvres et partit à 20 ans pour l'Italie comme pèlerin. Il y trouva la peste qui y faisait des ravages et soigna les pestiférés. Atteint lui-même par le fléau, il se cacha dans une solitude pour ne pas communiquer la contagion, et il allait succomber quand il fut découvert par le chien d'un seigneur voisin, nommé Gothard, qui le soigna et le guérit. De retour dans son pays qui était en guerre, il fut pris pour un espion et jeté en prison, + 1327. Canonisé à Constance et devenu patron des pestiférés, il a eu sa légende; on l'a fait naître d'une famille royale; il aurait été tertiaire des franciscains et cardinal. Montpellier, Turin, Venise possèdent de ses reliques.

ROCHELLE, v. La Rochelle.

ROCHET, sorte de surplis camail des évêques, des abbés et quelquefois des chanoines; ordinairement en toile fine, garnie de dentelle à jour et plissée.

ROCK, Jean-Fréd.. né 5 nov. 1678, fils d'un pasteur des environs de Goppingue, il apprit l'état de sellier, et en faisant son tour d'Allemagne à Halle et à Berlin il fut converti, et se mit à tenir des réunions. Un édit de 1707 interdit ces assemblées de culte, et il émigra dans la Wetterau où il trouva de l'occupation comme sellier, et devint avec Gruber le chef des séparatistes. A partir de 1714 il s'unit à la secte des Inspirés des fr. Pott, qu'il avait d'abord combattus, et il en devint un des membres les plus actifs et les plus dévoués jusqu'à sa f 1749, prêchant, écrivant et voyageant pour la cause. Il eut longtemps de bonnes relations avec Zinzendorf et les fr. de Herrnhut.

ROCKYZAN, ou Rokyzan, un des chefs du parti des calixtins, docteur en théologie, prédicateur de la cathédrale de Prague, doué de grands talents, pieux mais ambitieux; en 1427 il avait la surintendance générale des égl. de son parti, et il aspirait à l'archevêché. Son influence obtint du conc. de Bâle 1434 certaines concessions qu'il estimait suffisantes., les Compactata q. v., mais dont les taborites refusèrent de se contenter. Élu archev. de Prague par les États de l'empire, mais non confirmé par le pape, il essaya de réunir de nouveau l'Égl. de Bohême avec l'Égl. grecque, et des négociations furent ouvertes dès 1450, mais la prise de Constantinople par les Turcs 1453 empêcha de donner suite à ce projet. Il n'en resta pas moins toujours hostile à la papauté, mais sans pouvoir se décider à une rupture officielle et complète; vers la fin même il se déclara entièrement contre les taborites et incita Podiebrad à sévir contre eux. La persécution fut atroce; le neveu de Rockyzan, Grégoire, fut mis à la torture, an point qu'on le croyait mort; il fut relâché à la prière de son oncle et vécut jusqu'en 1474. Roc kyzan dès lors alla s'éloignant toujours plus des Frères et mourut dans le désespoir, 1473.

RODIGAST, Samuel, auteur du cantique Was Gott thut, das ist wohlgethan, et grand ami de Spener; né 19 oct. 1649 à Grôben près Iéna. recteur de gymnase à Berlin, f 18 mars 1708.

ROEHR, Jean-Fréd., né 30 juill. 1777, fils d'un tailleur de Rossbach près Naumbourg, montra de bonne heure de l'aptitude et reçut quelques leçons d'un pasteur. Un héritage lui permit de se vouer à l'étude, et en 1796 il se rendit à Leipzig. Après avoir été pasteur à Pforta et à Ostrau. près Zeitz, il fut nommé en 1820 premier pasteur, conseiller ecclésiastique, surintendant et prédicateur de la cour à Wei-mar. f 15 juin 1848. Il fut un des représentants principaux du vieux rationalisme, et le défendit contre le piétisme, contre l'orthodoxie, et contre la nouvelle théologie de Daub, Mar-heineke, Schleiermacher, Hase, etc. Il se fit connaître surtout par ses attaques contre Rein-hard 1801, et plus tard par sa polémique avec Hase. Ses principaux ouvrages sont ses Lettre* sur le Rationalisme; Principes du protestantisme, Manuel d'anthropologie, Palestine, Vie de Luther, et de nombreux et bons sermons. Sa dogmatique était étroite, incomplète; elle est auj. délaissée, mais son caractère, ses talents et sa droiture l'ont fait aimer et respecter.

ROGATE, le 5*e dim. après Pâques, d'après l'Évangile du jour: Demandez (rogate), et il vou& sera donné, Jean 16, 23.

ROGATIONS (de rogare, demander), fête correspondant aux Ambarvales des Romains, fondée pour demander à Dieu de bonnes moissons; elle se célèbre par des processions dans les champs 3 jours avant l'Ascension. V. Mamert 1°.

ROHAN, Henri (duc de), né 21 août 1579 en Bretagne; prince de Léon, élevé dans le protestantisme, bon militaire, auteur de Mémoires très remarquables et de quelques écrits sur la politique et sur l'art de la guerre, s'attacha à Henri IV, qui le fit duc et pair 1603; gendre de Sully 1605. Après la mort d'Henri IV il fat placé à la tête du parti protestant et soutint 3 guerres contre Louis XHI, justifiées par le manque de parole des princes et de Richelieu qui refusaient d'observer les édits et les traités. Retiré à Venise après l'édit d'Alais, il reprit cependant du service pour le compte de la France, comme chef des Ligues grises dans la Valteline, 1636, servit sous Bernard de Saxe-Weimar, fut blessé à Rheinfelden, et + 28 févr. 1638. Enterré dans la cathédrale de Genève.

ROI. Plusieurs souverains ont reçu de l'Église catholique des titres d'honneur en échange de services rendus. Ainsi le roi de Portugal a été déclaré très fidèle, fidelissimu$y par Benoit XIV; les rois de France, depuis Louis XI, portent le titre de très chrétiens; ceux d'Espagne ont largement gagné celui de très catholiques; ceux de Hongrie, celui de majesté apostolique, etc.

ROLLAND-LAPORTE, v. Laporte 2°.

ROLLE, Jean-Henri, célèbre compositeur de chants d'église, né 23 déc. 1718, + 29 déc. 1785; organiste à Magdebourg; auteur de plusieurs Oratorios: La Mort d'Abel, Satil, Abraham en Morija, etc.

ROLLENHAGEN, Georges, né à Bernau 22 avril 1542, étudia à Wittenberg, et occupa différents postes comme précepteur, pasteur et directeur de collège. Il fut nommé en 1573 prédicateur de l'égl. de Saint-Nicolas à Magdebourg, et recteur en 1575. f 18 mai 1609. Presque toujours maladif, il conserva jusqu'à la fin sa bonne humeur. On a de lui des poésies gracieuses et pleines de sens, mais il est connu surtout par un livre didactico-satyrique, qui parut en 1595 sous un pseudonyme, espèce d'imitation de la Batrachomyomachie d'Homère et de Rei-necke der Fuchs, le Froschmeuseler, où les animaux parlent, expriment leur opinion sur la Réforme en faisant la part belle à Luther (Elbmarx), et donnent de sages conseils aux protestants en les mettant en garde contre la manie des disputes théologiques.

ROMAIN (saint) 1° diacre et exorciste de l'égl. de Césarée en Palestine, présent à Antioche pendant les persécutions de Dioclétien, encouragea les chrétiens à la résistance, et fut jeté en prison après avoir eu la langue coupée, févr. 303. L'année d'après beaucoup de prisonniers furent relâchés en l'honneur des 20 ans de règne de Dioclétien, mais lui-même fut retenu et mis à mort, 18 nov. 304. Eusèbe raconte sur lui de nombreuses légendes. — 2° soldat dans les légions romaines, assista au martyre de saint Laurent, fut converti par la vue de son courage héroïque, et fut à son tour martyrisé 258. — 3° apôtre du Jura; il avait été élevé dans un couvent de Lyon avec son fr. Lupicinus, qui l'assista dans son ministère. D'abord sur les bords du lac de Bienne, puis à Saint-Claude (Condate) et à Leucone ils fondèrent des églises et des couvents, vivant eux-mêmes de la vie la plus austère, f 460, Lupicinus vers 480. — — 4° év. de Rouen 626, issu, dit-on. des rois de France; quelques auteurs le placent beaucoup plus tard, vers 1080, et lui attribuent l'honneur d'avoir, par un signe de croix, délivré le pays d'un dragon monstre. — 5° pape 897; son nom était Gallesin, de Galezza, son lieu natal; il ne régna que 10 mois; il est omis par quelques auteurs. — 6° François de Saint -Romain, né à Burgos, Espagne, s'était établi à Anvers. En 1540 il se rendit pour affaires à Brème, où il entendit la prédication de Jacob Spreng, ancien moine augustin. Converti, il écrivit à ses amis d'Anvers, et leur fit part de son désir de retourner en Espagne, pour évangéliser sa patrie. Ils l'engagèrent par de belles promesses à revenir à Anvers; mais à peine arrivé il fut arraché de son cheval, et jeté en prison pieds et poings liés. On trouva sur lui des écrits de Luther, de Mélanchthon, d'Œcolampade. Il passa 8 mois dans un cachot souterrain, puis fut relâché et s'en alla à Ratisbonne auprès de Charles-Quint. Il fut remis en prison et emmené en Italie, de là en Afrique, enfin à Valladolid où on le remit aux mains des inquisiteurs. C'est tout dire; il fut brûlé vif, 1544.

— Chant romain, v. Grégorien.

ROMANE (Langue). Les traductions de la Bible dans les différentes langues issues du roman, sont nombreuses. Pour les versions françaises, v. Traductions. En italien nous citerons les trad. partielles ou complètes de Voragine f 1298, Malherbi, Venise 1417; Bruccioli, 1530-1532; Teofilo, Genève 1560; Diodati, Genève 1607; Martini, Florence 1776. En espagnol: Enzinas, Anvers 1543; Perez, Venise 1556; Reyna, Bâle 1569. En portugais: Ferreirad'Al-meida, Amsterdam 1712; Pereira de Figuei-redo, Lisbonne 1784. Dans les Grisons, la Bible a été trad. en romanche, au 16me siècle par Bif-frun, au 17®« par Gritti, au 18®* par Vulpio et Dorta de Vulpera. V. Reus, Hist. du N. T.

ROME, v. Dict. de laBible. — C'est l'importance politique de cette métropole du monde, qui en a fait peu à peu la capitale de la chrétienté, et si l'ambition de quelques-uns de ses évêques les a poussés à rechercher un pouvoir temporel et une primauté terrestre, d'autres, au moyen âge surtout, ont fait servir leur puissance à favoriser la propagation du christianisme et à défendre la foi contre le paganisme et l'incrédulité. Comme les couvents, Rome a eu ses bons et ses mauvais côtés, et si dans le principe elle a représenté les temps nouveaux contre l'esprit ancien, elle a fini malheureusement par devenir elle-même la réaction par opposition au progrès; elle n'a plus compris son rôle et en a abandonné la gloire à d'autres. Elle a lutté contre les conciles réformateurs, elle a condamné la Réforme; son concile de Trente n'a été qu'un palliatif, et par celui du Vatican elle a brûlé ses vaisseaux et rompu officiellement avec la société moderne. Son histoire n'en est pas moins celle de l'Égl. chrétienne pendant plusieurs siècles; elle se confond en partie avec celle des papes, des théologiens, des conciles, des ordres religieux et des empereurs, et nous devons renvoyer aux articles spéciaux pour éviter des répétitions inutiles. V, Catacombes, Catholicisme, etc.

ROMUALD, né à Ravenne vers 950, appartenait à une riche famille. Sa jeunesse fut dissipée et son éducation presque nulle. A l'âge de 20 ans il se décida, pour expier un meurtre commis par son père, à passer 40 jours dans un couvent. Un frère lui fit avoir une apparition d'Apollinaire, qui détermina sa vocation monacale. Il se fit d'abord bénédictin, puis ermite; un ami, saint Marin, lui apprit à réciter chaque jour tout le psautier avec force flagellations. Il habita tour à tour les environs de Venise, Perpignan, le mont Cassin, voyageant nu-pieds. Son père ayant aussi embrassé la vie monacale, mais ayant voulu y renoncer, 982, Romuald le battit jusqu'à ce qu'il reprît le froc. Il fonde de nombreux couvents dans les environs de Ravenne; la foule s'attache à lui comme à un saint; Otton III le visite l'an 1000; à la tête de quelques Allemands il ramène les habitants de Tivoli à l'obéissance à l'empereur. Il fonde en Istrie de nouveaux couvents, puis tout à coup se met en route avec 24 disciples pour aller évangéliser la Hongrie; mais les forces lui manquent pour la vocation missionnaire et il est obligé de revenir. En 1018 il réunit de nouveau 5 solitaires sur les pentes abruptes des Apennins, au Campus Maldoli (Camaldules), près d'Arezzo. et les soumet à une règle sévère, puis d'autres en 1022 â Saxoferato, où il reçoit la visite d'Henri II. Enfin il f à Val de Castro 18 juin 1027. Son œuvre de Maldoli, la plus humble, fut la seule qui lui survécut. V. Camaldules. vie a été écrite par son disciple P. Da-mien.

RONGE, Jean, né 16 oct. 1813 à Bischofs-wald, Silésie, d'une famille de paysans propriétaires. Il fit sa théol. à Breslau de 1837 à 1839, et pour n'être point à charge à ses parents, il accepta une place de chapelain à Grottkau. Mais déjà alors ses tendances libérales et quelques manifestations d'indépendance indisposèrent ses supérieurs qui le renvoyèrent, 1843. Il fit un court séjour chez le comte de Reichen-bach, puis vint à LaurahUtte, Silésie supérieure, où il vécut en donnant des leçons. C'est de là qu'il écrivit le l«r oct. 1844, sa fameuse Lettre à Pév. Arnoldi de Trêves, contre l'exposition de la prétendue robe de N. S., et contre la recrudescence d'ultramontanisme qui en fut le résultat. Déclamatoire, sans aucun sentiment religieux, et même sans véritable érudition, cette lettre obtint un immense succès, parce qu'elle répondait à la conscience publique et aux sentiments du pays. 11 reprochait à l'évêque de tromper sciemment le peuple, et conviait la nation entière, ecclés. et laïques, à protester contre cette honteuse exploitation, indigne de notre siècle. Déjà le 19 oct. Czerski lui répondait en jetant les bases de l'Égl. allemande-catholique-apostolique, et de toutes parts des églises se fondèrent sur ce principe. Excommunié, Ronge se mit à parcourir l'Allemagne et son voyage fut une suite de triomphes. Il écrivit quelques antres lettres encore, mais la première avait tout dit, il ne pouvait que se répéter, et il n'avait ni assez de vie, ni assez de talent pour rajeunir des choses anciennes. Après un colloque tenn à Leipzig, mars 1845, la division se mit dans le parti, et la personnalité de Ronge n'était pas de nature à amener une conciliation. Le mouvement s'arrêta, les congrégations existantes continuèrent de subsister, mais il n'y eut plus de progrès, et les événements de 1848 rejetèrent la question religieuse à l'arrière-plan. Ronge se jeta dans la politique, il siégea au parlement préparatoire et prit place à l'extrême gauche; en juin il signa la protestation contre le choix d'un lieutenant de l'empire, et dut en 1849 prendre le chemin de Londres. De retour en 1861 il s'établit à Francfort, d'où il rayonna pour fonder quelques églises, à Gratz, Pesth, etc. En 1867 il commença la publication d'un journal pour ses adhérents, mais à travers une phraséologie obscure il est difficile d'y reconnaître une doctrine positive. II parut à Munich en sept. 1871 au synode des Vieux-catholiques, mais y resta presque inaperçu, comme un homme passé de mode et trop plein de lui-même.

ROOS lo Magnus-Fréd., né 6 sept. 1727 i Sulz sur le Neckar, étudia à Tubingue, et après avoir desservi plusieurs petites églises, il fut en 1784 nommé prélat d'Anhausen, ce qui lui donna le droit de siéger dans l'assemblée représentative du pays; il fut même en 1787 nommé membre de la Commission exécutire, f 19 mars 1803. Auteur fécond et estimable, de la tendance religieuse de Bengel et d'OEtinger, sans grande profondeur, ni originalité, il a écrit quelques commentaires populaires, des traités apologétiques, des études sur Daniel et l'Apocalypse, une Vie de Jésus, des sermons un essai sur l'état des âmes après la mort, etc. — 2o Jean-Fréd. son fils, né 1759, f doyen de Marbach 1828, auteur d'une Hist. de la Réform. 1788, et d'une Hist. de l'Égl., utiles pour leur temps, mais sans importance particulière.

ROSA, Salvator, né 1615 à l'Arenella près

Naples, partisan de Masaniello 4647, écrivain satirique et peintre célèbre, protégé par les Médicis* f 1673 à Rome. Auteur de plusieurs tableaux religieux: Thomas mettant son doigt dans les plaies du Sauveur, Jonas à Ninive, la Pythonisse d'Endor, etc.

ROSAIRE, cordon garni de grains ou de perles, de deux grosseurs différentes, et terminé par une croix. Ces grains se comptent par 15 dizaines, chaque dizième étant plus gros que les autres. On Pa appelé aussi le Psautier de Marie, parce qu'il pouvait servir à la récitation d'autant d'Ave qu'il y a de psaumes. C'est un moyen de compter sans se tromper le nombre de Pater et d'Ave que l'on a récités, les petits grains étant destinés à Y Ave, les plus gros au Pater. Il se distingue du chapelet ordinaire en ce que ce dernier est plus petit, ne comptant que 50 grains, aussi divisés par dizaines. L'usage en remonte au 13«»e siècle, et on en a attribué rinventiou à Dominique lui-même, mais à tort. Il est établi que les bouddhistes connaissaient de vieille date ce procédé pour compter les prières, et ce sont vraisemblablement les croisés qui l'ont apporté de l'Orient en Europe; les dominicains se sont contentés de le naturaliser en l'adaptant aux dévotions chrétiennes. On mentionne cependant déjà* sous le nom de bel-tides, un cordon de ce genre dont il aurait été question au conc. de Celchyt 816, sous la présidence de l'archev. de Cantorbéry, mais la chose n'est pas claire.

ROSALIE, la sainte des Siciliens. Fille du comte de Quisquina et Rosis, qui se disait descendant de Charlemagne, elle vécut isolée et vouée à la piété sur le mont Quisquina, puis dans une grotte du montPelegrino, sur Palerme, et f vers 1170. Son corps découvert en 1624 fit cesser la peste; de là la vénération des Siciliens pour sa mémoire, et le culte que les Palermi-tains lui rendent en juillet, dans leur cathédrale qui lui est consacrée.

ROSCELIN, ou Ruzelin, le principal représentant du nominalisme, q. v. Sa vie est peu connue. Né en Bretagne, il fut nommé chanoine et prof, de théol. à Compiègne. Condamné par le conc. de Soissons 1092, à la requête de Jean de Telese, qui devint cardinal-év. de Tuscoli, et par l'influence d'Anselme, il se retira en Angleterre; mais Anselme ayant été nommé archev. de Cantorbéry, Roscelin qui avait écrit contre lui son livre De fide trinitatis, revint en France où on le retrouve prof, à Loches, en Bretagne, où il compta Abélard parmi ses auditeurs; puis chanoine à Tours, et à Besançon. Abélard et lui s'accusèrent tour à tour d'hérésie. La date de sa mort est inconnue; il atteignit un âge avancé.

ROSE 1° jeune fille de \ iterbe, tertiaire des franciscains, demeurait en ermite dans la maison de ses parents et prêchait dans les rues la repentance aux habitants de Yiterbe. f 1252 à l'âge de 18 ans. — 2° de Lima, née 1586, patronne du Pérou; elle fut empêchée par un miracle d'entrer dans un couvent de dominicains; elle se contenta d'en être tertiaire. Élevée dans l'aisance, elle tomba dans la pauvreté, se fit servante, et finit par se construire elle-même une cellule dans le jardin de ses parents; elle y vécut dans des pénitences ininterrompues, f 1618 à 31 ans. respectée pour sa piété. Canonisée 1671. — 3° Guillaume, év. de Senlis, ligueur acharné, prédicateur de Henri IU, fit l'éloge de Jacques Clément. Banni par Henri IV, il obtint son rappel et continua ses prédications d'ènergumène. f 1602. Auteur d'un livre sur la juste autorité d'une républ. chrét. contre les rois impies, Paris, 1590.

— La Rose d'or est un témoignage d'honneur que les papes accordent à des princes qu'ils veulent récompenser pour des services rendus, ou qu'ils espèrent décider à leur en rendre. Elle est consacrée le dimanche de Laetare, qui à cause de cela est aussi appelé le dimanche de la Rose: elle est aspergée d'eau bénite, parfumée d'encens et placée dans un coffret plein de baume et de plantes odoriférantes. D'après la prière de consécration, celte rose représente Christ; l'or, l'encens et le baume figurent sa divinité, son corps et son âme. L'usage en remonte au llnie siècle. Pie II a donné la rose d or à la ville de Sienne; Grégoire XVI à la cathédrale de Saint-Marc. Léon X l'avait donnée à l'électeur Fréd.-le-Sage pour en obtenir des mesures répressives contre Luther. La dernière rose d'or connue, celle qui a fait le plus de bruit, a été donnée par Pie IX à la reine Isabelle d'Espagne.

ROSE-CROIX, secte mystérieuse d'illuminés, rêvant un ordre de choses meilleur pour l'Église et pour l'humanité et mêlant à ses théories des emprunts faits à la magie et à l'alchimie. Ils se donnaient pour chef un gentilhomme de Rosen-kreuz (Rose-Croix) né 1378, f 1484, qui, après avoir parcouru la Terre sainte, l'Arabie, l'Égypte et le Maroc pour y étudier les sciences occultes, se serait établi en Espagne, puis définitivement en Allemagne pour y propager ses doctrines et pour y répandre les bienfaits de ses découvertes. Là il aurait fondé l'ordre qui porte son nom et il aurait révélé à ses adeptes de merveilleux secrets, entre autres celui de faire de l'or, de se toujours bien porter et de vivre longtemps. Les membres de l'ordre s'engageaient en revanche à mener une vie honnête, à soigner gratuitement les malades, à garder le secret de l'association pendant cent ans, à ne pas divulguer le lieu de leur sépulture, et à se réunir une fois par an

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dans la maison du maître, dite du Saint-Esprit. Ils avaient pour devise les lettres R-C, et professaient la religion du Christ, avec 2 sacrements. Le tombeau du fondateur, dont la description semble empruntée aux contes des Mille et une nuits, aurait été découvert 120 ans après sa mort, donc vers 1604. Toute cette histoire pourrait bien n'être qu'une œuvre d'imagination, et la première trace qu'on en trouve est un ouvrage anonyme paru 1614 à Cassel: Fama fraternitatis, réimprimé 1615 avec un supplément: Confessio soc. R. C. Enfin en 1616 parurent les «Noceschymiques» de Christian Ro-senkreutz, sorte de biographie pleine de détails fantastiques. Arnold et Herder ont établi que l'auteur de ces trois documents était Jean - Va-lentin-Andreâ, qui serait ainsi le véritable fondateur de la secte, et qui aurait eu l'idée de lui donner une origine plus ancienne et quelque peu merveilleuse. Il s'en suivit toute une littérature, et parmi les opposants on remarqua surtout des théologiens et des médecins. L'anglais Robert Fludd, le médecin Maier, Sperber et quelques autres prirent parti pour la nouvelle secte, qu'on rattachait aux cabalistes et aux théosophes, mais sous leurs différents noms d'Immortels, d'Invisibles, d'Illuminés, les Rose-Croix ne dépassèrent jamais en nombre le chiffre que ce genre de rêveries atteindra toujours et à toutes les époques. Auj. il n'en existe plus, et le nom seul s'est conservé dans un des grades de la franc-maçonnerie.

ROSENMULLER lo Jean-Georges, né 18 déc. 1736 près de Hildburghausen, fils d'un tisserand, maître d'école, fut d'abord pasteur en plusieurs paroisses, puis prof, de théol. k Erlangen en 1773, prof., pasteur et surintendant k Giessen en 1783, à Leipzig en 1785, et enfin prélat et doyen de la faculté à Meissen, où il f 14 mars 1815. Aimable et pieux représentant du vieux rationalisme, il a composé plus de 100 ouvrages, dont les plus connus sont: Scho-lia sur le N. T., des sermons, et quelques livres d'édification; il a aussi écrit pour la jeunesse. — 2o Ernest-Fréd.-Charles, son fils, né 10 déc. 1768 à Hessberg, étudia et professa k Leipzig, où il fut nommé en 1793 biblioth. de l'université, prof, d'arabe en 1796, prof, de langues orientales en 1813, f 17 sept. 1835. Non moins fécond que son père, modeste et bienveillant, doué d'un grand sens critique et d'une solide érudition, il a publié des ouvrages qui ont encore de la valeur aujourd'hui. On remarque surtout ses Scholia sur l'A. T., un Manuel sur les Antiquités bibliques, un Manuel sur la littérature de la critique et de l'exégèse biblique, plusieurs travaux sur la langue arabe, et quelques réimpressions des ouvrages de son père.

ROSENROTH, Chrétien, baron Knorr (de) 1637-1689, connu comme poète chrétien, par son Nouvel Hélicon, était conseiller et chancelier à Sulzbach. Il a publié aussi la Cabale dévoilée (denudata) qui jeta un jour nouveau snr la cabalistique juive.

ROSKOFF, Georges-Gustave, théol. libéral, né 30 août 1814 à Pressbourg, d'abord précepteur, puis en 1839 étudiant à Halle. De 1841-1814 à Vienne où il s'établit. En 1850 il est nommé prof, de théol. pour l'A. T., en 1864 membre du Conseil impérial d'instruction publique, en 1869 conseiller d'État. Heidelberg en 1852 l'avait nommé Dr en théologie. Auteur de Lettres sur les Antiq. hébraïques, la Légende de Samson, l'Histoire du diable, etc.

ROSSI lo (J.-B. de), né 22 déc. 1698 à Vol-teggio en Ligurie, élevé par la marquise Sforza Cambiaso à Gênes; il acheva ses études à Rome et fut ordonné prêtre 8 mars 1721. Chanoine à Sainte-Marie, il eut du succès comme prédicateur, mais s'occupa surtout des hôpitaux, de* malades et spécialement des phtisiques, f à Rome sur un grabat 23 mai 1762; béatifié 1860. canonisé 1881. — 2o Jean-Bernard (de), né 1742, Dr en théol., prof, de langues orientales à Parme, publia en 1772 un livre sur la langue parlée en Palestine à l'époque de Jésus: il est aussi connu par la comparaison intelligente qu'il a faite des mss. hébreux de la Bible. — 3o Giovanni-Battista, né à Rome 23 févr. 1822, élevé au Collège Romain, où il commença les études archéologiques qui ont fait de lui l'une des grandes autorités contemporaines pour l'archéologie chrétienne. Ses premiers travaux ont paru dans le Bollettino de Rome, dans celui de Naples, et dans le Sjricilegium solesmense de Pitras. Mais ce qui a fait surtout sa réputation, ce sont ses recherches et ses découvertes sur les vieilles inscriptions chrétiennes, et notamment ses travaux sur les catacombes. Elles sont consignées dans ses Inscriptiones christ, urbis Ro-mœ, VII sœc. antiquiores, et dans la Roma Sot-teranea christ. 1864. Il a été nommé prof, à l'Académie pontificale d'archéologie, et a longtemps publié le Bulletin de ses recherches.

ROSWEYDT, Herbert, jésuite, né 22 janv. 1569 à Utrecht, f 5 oct. 1629 à Anvers. Entrv dans l'ordre en 1589, il étudia, puis professa b philos, et la théol. à Douai, ensuite k Anvers: prononça ses vœux définitifs en 1600, mais abandonna bientôt la vie active pour se consacrer à des travaux littéraires. Il s'occupa surtout de la vie des saints et se montra un collectionneur aussi ardent que dépourvu de tonte critique. On a de lui les Fastes des saints, 1607, que les bollandistes ont refait; les Vies des Saints, ou la Forêt (sylva) des ermites d'Égypte et de Palestine, 1619; la Vie des saintes vierges, 1626, la Vie des pères 1615; une étude sar

Thomas a Kempis, etc. Enfin il a publié les œuvres de Paulin de Nola, avec Notes, 1622.

ROSWITA, v. Hroswita.

ROTE romaine, sorte de cour de justice et de tribunal d'appel dépendant de la cour de Rome, et chargée du contentieux pour les États cathol. de l'Europe. Elle fut créée par Jean XXII, 1326, et reconstituée par Sixte IV 1483, qui la composa de 12 prélats, dont 2 k la nomination de l'Espagne, 1 de la France, 1 de l'Allemagne, et 8 de l'Italie (savoir Rome 3, Bologne, Ferrare, Venise, Milan, et Florence ou Pérouse, chacune!). Elle pouvait aussi juger en première instance, dans les États de l'Église, les causes qui dépassaient 500 scudi. Le nom de rote, rota, roue, vient soit de la forme de la salle de marbre où elle tient ses séances, soit d'un bâtiment en rotonde qui s'élevait jadis sur l'emplacement actuel. Lesjuges, ou auditeurs, siègent en costume violet; chacun a sa table particulière et 4 secrétaires, ou notaires. Le président porte le nom de doyen de la rote.

ROTHAD, év. deSoissons, ayant destitué un prêtre pour cause d'immoralité, fut à son tour suspendu comme incapable par son métropolitain, Hincmar de Reims, sentence qui fut confirmée par le conc. de Soissons, 861. Il en appela au pape Nicolas, qui déclara le concile non valable. Un second concile de Soissons 862 ayant maintenu la décision du premier, le pape cita Rothad et Hincmar à comparaître. Le roi et le clergé protestèrent; Hincmar refusa d'obéir, on essaya même jusqu'en 864 d'empêcher Rothad de se rendre à Rome, mais il finit par y arriver. Nicolas le revêtit lui-même des vêtements épiscopaux et lui fit dire la messe. Les év. français en appelaient à la collection de Denys, Nicolas pour la l™ fois aux décrétales du faux Isidore, prétendant que l'on devait, les métropolitains surtout, une obéissance entière au pape; Hincmar d'ailleurs l'avait jurée en recevant le pallium, 848. En 865 le légat Arse-nius rétablit officiellement Rothad dans ses fonctions. Comme les prétentions de Nicolas étaient à l'avantage des ecclésiastiques inférieurs, elles ne trouvèrent pas d'abord beaucoup de résistance, mais le conflit éclata sous son successeur Adrien, 867.

ROTHAN, ou Roothaan, Rottenhaan (Jean-Philippe de), né à Amsterdam 23 nov. 1785, entra en Russie dans l'ordre des jésuites 1807, et lorsqu'il fut supprimé 1817, se retira à Brigue, Valais. En 1823 il est appelé comme prof, au collège de François de Paula, à Turin, où il exerce une grande influence sur toutes les couches de la population et se pose ouvertement en champion des jésuites. L'influence de Pie VIII et du secrétaire d'État Albani le firent élire général en 1829. Son énergie et son acti-tivité donnèrent à l'ordre une vigoureuse impulsion. Il créa 8 nouvelles provinces: Turin, Venise, Lyon, Toulouse, en Autriche (moins la Gallicie), en Belgique, en Hollande et au Mary-land. f 8 mai 1853. Cet homme habile avait offert, pour le cas où la liberté d'enseignement serait restreinte dans les univ. d'Allemagne, de reconnaître l'Église protestante comme Église sœur de la catholique.

ROTHE lo ou Roth, Jean, riche marchand d'Amsterdam, au 17«e siècle, appartenait à la secte des spiritualistes. Disciple de Kuhlmann, il fut repoussé par les labadistes 1672, à cause de ses prophéties de malheur contre sa patrie. Étant revenu à La Haye 1676, il fut jeté en prison et il y passa 15 années, f vers 1695.

2° Jean-André, né à Lissa 12 mai 1688, étudia à Leipzig; candidat au saint ministère; fit en 1717 à GSrlitz la connaissance de Zinzendorf, qui l'appela en 1722 comme pasteur de son église de Berthelsdorf, Haute-Lusace. Savant et éloquent, simple et profond, il s'associa de cœur aux idées du comte, et fut de 1723 à 1737 un instrument de bénédiction pour l'égl. de Herrnhut, dont il accueillit les premiers fondateurs, et à laquelle il donna en août 1729 Y Acte notarié, qui exposait par devant notaire la doctrine et la discipline de la communauté, à la fois morave et luthérienne. Mais il n'était pas de taille à rester longtemps à la hauteur de ce réveil tout spirituel; les Frères lui parurent aller trop loin dans leur esprit d'indépendance, et il profita de la présence de Steinhofer, 1731, pour donner sa démission de pasteur de Herrnhut et demander qu'il fût nommé à sa place. La chose n'aboutit pas à cause du refus du gouvernement saxon. Rothe quitta son poste de Berthelsdorf 1737, toujours en froid avec les Frères, et f à Bunzlau 6 juillet 1758. Auteur de plusieurs cantiques estimés et de quelques ouvrages de théologie.

3o Richard, né 28 janv. 1799 à Posen, étudia àStettin et àBreslau, en 1817 àHeidelberg, où il entendit Schwarz, Daub et Creuzer, dont la direction d'esprit correspondait à sa propre tendance mystique. En 1819 il vint à Berlin, où il goûta surtout Néander, moins Schleier-macher et Hegel, auxquels il préféra toujours Schelling. Il subit aussi la pieuse influence du baron de Kottwitz et de son cercle, et ces sentiments furent fortifiés par le séjour qu'il fit en 1820 au séminaire de Wittenberg, où se trouvait une élite de jeunes étudiants craignant Dieu, entre autres Stier. Consacré en 1823, il épousa Louise de Brttck, et partit comme chapelain d'ambassade pour Rome, où il se lia d'amitié avec Bunsen. De 1828 à 1837 il est prof, au séminaire de Wittenberg, et publie son premier grand ouvrage: Les origines de l'Égl.

chrétienne et de sa Constitution, avec un supplément sur l'authenticité des Lettres d'Ignace. Il y montre la nécessité historique du développement de l'Égl. catholique et de l'épiscopat, après la destruction de Jérusalem, comme centre de résistance contre le judaïsme, et comme point de départ de l'organisation de l'Égl. chrétienne. Il émet aussi l'idée que l'Église, comme institution propre avec son caractère religieux indépendant, doit finir tôt ou tard par se résoudre et se fondre dans la grande communion de l'État, à mesure que celui-ci se pénétrera davantage de l'idée morale du christianisme. Laissant ainsi le côté mystique et dogmatique, Rothe met donc au premier plan le côté moral de la religion, mais sans rien abandonner de sa foi au supranaturalisme, a laquelle il est resté fidèle jusqu'à la fin. En 1837 il vint à Heidelberg, comme prof, et directeur du nouveau séminaire ecclésiastique. De 1845 à 1848 parut son grand ouvrage: Theolog. Ethik., la morale théologique, l'un des plus importants qui eussent paru depuis Schleiermacher, par la profondeur de la pensée, la rigueur de la méthode et la hardiesse des déductions. C'est toute une philosophie chrétienne, qui embrasse avec la morale l'ensemble de la théol. et de la cosmologie, les questions de Dieu, de l'homme, du péché, de la rédemption, des anges, de l'Église. Il vint à Bonn en 1849, après avoir refusé divers appels de Halle, Breslau etc., mais retourna à Heidelberg en 1854 comme successeur d'Ullmann nommé prélat, et intervint activement dans les luttes politico-ecclésiastiques qui éclatèrent vers cette époque. Membre du synode général en 1855, puis en 1861 membre extraordinaire du Consistoire supérieur du duché, il concourut pour une grande part à faire adopter la nouvelle Constitution ecclés., basée sur le principe de la représentation de l'Église. Il ne croit pas que l'indifférence, ou même l'hostilité apparente des masses pour le christianisme, soit réelle; il y voit la suite d'un malentendu; il croit à un christianisme latent, qui se manifestera quand l'Église tiendra un langage plus approprié aux besoins du siècle. Il a fondé avec Schenkel et d'autres l'Association protestante, dont il fournit lui-même le programme, f 20 août 1867. Il a laissé qnelques autres travaux, surtout dogmatiques: sur la Bible et l'inspiration, sur Rom. 5, 12-21; des Sermons, une Dogmatique, des Aphorismes, etc. Plusieurs ont été publiés après sa mort, par Schenkel, Bleek, Rippold, Trumpelmann. v. Godet, Colani, Astié.

ROTHMANN, Bernt, né près de Munster, de parents pauvres, réussit cependant à faire quelques études, devint maître d'école, et finit, après un séjour à Mayence, par entrer dans les ordres 1524. En 1529 il fut nommé chapelain de l'égl. de Saint-Maurice, faubourg de Munster, et il ne tarda pas à prêcher la Réforme. Déjà le vendredi saint de 1531, sous l'influence de sa parole, ses adhérents préludèrent, à propos des images, aux scènes tumultueuses qui devaient éclater plus tard. Il visita en cachette Wittenberg, Spire et Strasbourg, pour s'inspirer auprès des Réformateurs. De retour en juillet, il reprit ses prédications, mais sur les plaintes du chapitre les chaires lui furent interdites dans le diocèse. Il trouva cependant un terrain favorable à Munster même, et obtint un tel succès que l'év. Franz de Waldeck dut accepter une conférence publique, à la suite de laquelle 6 églises furent réservées pour le culte évangélique. Les anabaptistes ayant fait de Munster leur quartier général, il les combattit d'abord, mais finit par se joindre à eux, et perdit la vie dans l'affaire du 24 juin 1536.

ROUEN. Les plus vieilles légendes rattachent cet évêché à Victricius, q. v. Mais ce n'est qu'en 577 qu'on arrive à l'histoire. Dans un concile tenu à Paris, le roi Chilpéric demanda la destitution de l'év. Prétextât, comme coupable de révolte et d'autres méfaits. Sur le refus du concile, la roi bannit Prétextât et le relégna dans une île des côtes de Normandie, mais à la longue le clergé l'emporta. Plusieurs autres conciles furent tenus dans cette ville, mais ils n'ont aucune importance, s'étant bornés pour la plupart à confirmer ou à enregistrer les actes des conc. de Rome ou de Paris. Celui de 1214 rappela l'interdiction de la Fête des Fous, promulguée à Paris, mais la Fête des Anes continua d'être célébrée. La Réforme trouva à Rouen un terrain favorable, et malgré de violentes persécutions, une quantité de prêtres et de laïques se convertirent, 1531. En 1557 une église est fondée; elle a pour pasteur De la Jonchée, et en 1560 Marlorat, qui réussit, par la considération qui s'attachait à son caractère, à mettre fin, momentanément, aux divisions qui déchiraient la ville. En 1561 l'église compte 10,000 âmes, avec 4 pasteurs et 2 anciens; à défaut d'un temple, ils se réunissent dans une vieille tour. Le 25 janv. 1562, synode provincial. Quand éclata la guerre civile, les protestants s'emparèrent de la ville, 15 et 16 avril 1562, ils la fortifièrent, la gouvernèrent en république, et le 3 mai les images furent déchirées. En vain le duc d'Aumale en fit le siège du 27 mai au 12 juin; Antoine de Bourbon, père d'Henri IV, y fut blessé à mort. Enfin le 29 sept. Henri IV arriva lui-même, et le 26 oct. la ville était prise et pillée. Le protestantisme, qui perdit ses principaux chefs, entre autres Marlorat, ne s'y releva que lentement. Un synode y fat tenu en 1663, présidé par Du Bosc. C'est aujourd'hui un important chef-lieu de Consistoire.

ROUSSEAU, Jean-Jacques, né 28 juin 1742 à Genève, f 3 juin 1778 dans le parc d'Ermenonville, appartient à l'hist. ecclés. par la Confession de foi du Vicaire savoyard 1762, par sa Lettre à Christophe de Beaumont, archev. de Paris, et par ses Lettres de la Montagne, adressées au Conseil de Genève. Son Contrat social, l'Émile et la Nouvelle Héloïse renferment également des pages où il professe avec ardeur des opinions religieuses qui tranchent avec la foi de l'Église, comme elles tranchaient avec le matérialisme et l'incrédulité de son temps. Né protestant, il se fit catholique à 16 ans sous l'influence de Mad. de Warens, et revint en 1754 à la religion de sa patrie et de ses pères, mais il ne fut guère un peu pratiquant que pendant son séjour à Motiers-Travers, Neuchâtel, 1762-1765. Malgré la crudité de ses Confessions, il reste beaucoup de points obscurs dans sa vie; on ne sait pas s'il fut marié avec Thérèse Le-vasseur, il n'est pas sûr qu'il ait eu des enfants et qu'il les ait mis aux Enfants trouvés; sa mort môme reste une énigme, et les travaux de Rau-nier ne suffisent pas à établir qu'il y ait eu suicide. Tout a été dit sur son talent, la magie de son style, les travers de son caractère, son orgueil, sa misanthropie. Nous avons à relever ici seulement le côté de ses écrits par lequel il touche à la religion. Il était déiste, et déiste courageux et convaincu, dans un temps où ce n'était plus la mode de croire. Il faisait de la foi en Dieu l'une des bases de la société; on sait avec quelle énergie Robespierre, qui s'inspirait du Contrat social, insista pour que les deux dogmes spiritualistes de l'Etre suprême et de l'Immortalité de l'âme fussent proclamés par la république. Rousseau croyait l'homme bon, ce qui faussa presque tous ses raisonnements sur la politique et sur l'éducation, lui causa à lui-même d'amères déceptions, et l'aveugla sur ses propres défauts en l'empêchant de voir la source du mal. La civilisation, l'étude, les sciences et les arts, en un mot une vie artificielle opposée au développement naturel de l'individu, étaient selon lui la cause de la corruption des mœurs. N'ayant pas la notion du péché, il n'a pas davantage celle de la rédemption, et Jésus-Christ n'est pas pour lui un Sauveur, mais il en parle avec un respect sympathique et presque enthousiaste, qui prouve combien chez lui la logique est subordonnée au sentiment. Le Vicaire savoyard n'est sans doute qu'une page brillante ajoutée à tant d'autres écrits sur la religion naturelle; c'est un livre de raison, d'émotions et d'imagination, mais c'était une manifestation hardie et même généreuse en un moment où le catholicisme de la cour et des petits abbés n'avait d'autre contrepoids qu'une philosophie matérialiste. Rousseau ne se rangeait ni dans un camp, ni dans l'autre; il restait seul, exposé aux coups des deux armées, et il est impossible de ne pas reconnaître un accent de sincérité dans l'enthousiasme avec lequel il parle du grand livre de la nature, et aussi de la majesté des Écritures. Il était sur la voie, et l'on a tout lieu de croire, s'il était sincère, qu'il se rapprocha plus tard de la vérité révélée et du Fils de l'homme, venu pour expier et guérir nos erreurs (v. Gaberel).

ROUSSEL lo Gérard (Rufus). Né vers 1480 à Vaquerie, près d'Amiens, il remplit des fonctions ecclésiastiques dans le diocèse de Reims, puis vint à Paris où, sous Lefèvre d'Étaples, il étudia avec zèle les humanités; parmi ses condisciples se trouvait Farel. Bientôt accusé d'hérésie, ainsi que plusieurs de ses amis, il s'enfuit auprès de Briçonnet de Meaux, puis avec Lefèvre, à Strasbourg, où Capiton leur donna l'hospitalité. Rappelé par François en 1526, il fut nommé en 1527 chapelain de Marguerite, mariée au roi de Navarre, et en 1530 abbé de Clairac. Il vint en 1533 à Paris pour y prêcher la foi évangélique; il prêcha le carême au Louvre en présence de Marguerite. On finit par lui iuterdire la prédication, mais comme il conti -nuait d'enseigner en particulier, il fut mis en prison avec Courault. Cependant il fut relâché et retourna dans le Béarn, la faculté ayant déclaré que les propositions qu'on lui reprochait n'avaient que l'apparence de l'hérésie. En 1536 Marguerite lui donna l'évêché d'Oloron en Béarn; il y introduisit de nombreuses réformes, la diffusion de bons livres, la messe en langue vulgaire, la communion sous les 2 espèces, prêchant lui-même 2 ou 3 fois par jour; il publia un catéchisme, ou explication du Symbole, des

10 Commandements et de Notre Père, avec une exhortation pour les visites d'églises, qui furent condamnés par la Sorbonne comme hérétiques.

11 n'abjura pas le catholicisme, mais il était pleinement d'accord avec Calvin sur la doctrine; il voulait t nettoyer la maison, l'appuyer, mais non pas la détruire. > Au printemps de 1550, comme il prêchait à Mauléon contre l'exagération du culte des saints, une foule fanatisée envahit la chaire, la démolit et frappa le prédicateur avec tant de violence, qu'il ne tarda pas à succomber à ses blessures.

2o Napoléon R., né à Sauve, Gard, étudia à Genève, et fut successivement suffragant à Rouen, pasteur à Saint-Étienne, à Marseille 1835-1838, à Alger; évangéliste à Paris, Lyon, le Limousin où il fonda plusieurs églises. Rédacteur pendant quelque temps de l'Espérance, il s'est fiait connaître par une foule de publications de tous genres, embrassant les sujets les plus divers, apologétique, dogmatique, édification, controverse, livres pour les enfants. Sa fécondité était immense et l'a peut-être empêché d'approfondir les questions. Ses petits traités étaient comme autant de flèches acérées, et si on lui a reproché la vivacité de sa controverse, on ne peut nier qu'elle ait produit de l'effet. Sa prédication était également incisive, sérieuse et pittoresque. Il quitta Lyon en 1863, abandonna le ministère en 1867, et maladif, souffrant, fatigué, se retira à Genève où il f 8 juin 1878, ayant continué presque jusqu'à la fin de suivre le culte à la chapelle de l'Oratoire, avec laquelle il sympathisait par le cœur plus que par la doctrine qu'il trouvait trop calviniste.

ROW, un des prof, les plus distingués du collège de Perth, Ecosse, avait été d'abord légat du pape dans ce pays, avec mission de combattre les protestants. Converti à la suite de sérieuses conversations avec Knox, il abjura le papisme. Il fut chargé d'enseigner le grec et l'hébreu à Perth. Vers 1530.

ROYAARDS, Hermann-Jean. né 3 oct. 1794 à Utrecht, fils d'un prof, de théol., fut nommé docteur en théol. en 1818, pasteur à Meerbeck en 1819, revint en 1823 comme prof, à Utrecht, enseigna la théol. historique et la morale chrétienne, et finit par succéder à son père. Auteur de plusieurs ouvrages en latin et en hollandais: la 2i*e aux Corinthiens, Daniel, Hist. de la Réforme à Utrecht, Chrestomathie patristi-que, etc. f 2 janv. 1854.

RUARUS, Martin, né 1589 à Krempe, étudia à Altdorf, où il devint socinien, fut nommé recteur du collège de Racovie, vécut à Dantzig 1631-1643 et f 1657 à Straszin. Il avait pris part en 1645 au colloque de Thorn. Il a laissé des Lettres et des Notes sur le catéchisme de Racovie.

RUBENS, Pierre-Paul, célèbre peintre flamand, né 29 juin 1577 à Siegen, Nassau, d'une famille noble; vécut surtout à Anvers, et f 30 mai 1640, de la goutte, après avoir été le favori de bien des têtes couronnées: l'archiduc Albert, Marie de Médicis, l'infante Isabelle, Jacques l™, Philippe IV, etc. Supérieur dans tous les genres, il a excellé surtout dans les sujets religieux, quoiqu'il en ait un peu compromis la sainte et noble grandeur par un réalisme trop flamand. Parmi ses meilleurs tableaux, on remarque: Sainte-Hélène au pied de la croix, Marie portée et adorée par les anges, le Christ à la paille, Jésus sur la croix, plusieurs Descentes de croix, l'Assomption, le Jugement dernier, etc. Les principaux sont à Rome et à Anvers; d'autres à Munich, Pétersbourg, Paris, Vienne, Madrid, Dresde, etc. Il était aussi architecte et a fait les plans de plusieurs autels. Ses œuvres atteignent presque le chiffre de 3,000, dont environ 1500 ont été reproduites par la gravure; il est vrai qu'il se faisait aider par ses élèves et qu'il se contentait souvent de mettre la dernière main et sa signature à leur travail.

RUCHAT, Abraham, né 15 sept. 4678 à Grandcour, Vaud, consacré à Lausanne 1701, voyagea en Allemagne et Hollande, fut pasteur à Aubonne, puis à Rolle; enfin prof, de belles-lettres et principal à Lausanne 1721, et en 1733 pasteur et prof, de théologie. Son goût le portait surtout vers l'histoire, et il réussit à se procurer de nombreux documents. Dès 1707 il avait projeté une Hist. générale de la Suisse; il débuta par un Abrégé de l'hist. ecclés. du Pavs de Vaud, et publia à Genève 1727 et 1728 la première partie de son Hist. de la réformation en Suisse, très exacte et très modérée, un peu passionnée sur les points controversés. On lui a reproché sa servilité envers Berne; il parait cependant qu'il ne fut pas encore assez servile, car les seigneurs ne permirent pas que la seconde partie fût publiée. Légué à la biblioth. publique de la ville de Berne, le mss. ne fut enfin publié que dans l'édition complète de Vul-liemin, Lausanne 1835-1838, 7 vol. 8o. On a aussi de lui une Gramm. hébraïque, et un Examen de l'Origénisme. f 29 sept. 1750 par suite d'un accident.

RUCKERT lo Frédéric, poète et orientaliste célèbre, né 16 mai 1788 à Schweinfurt, établi à Iéna comme prof, de belles-lettres en 1811, visita Rome en 1817, puis se maria et se fixa à Cobourg. En 1826 il fut appelé à Erlangen, et en 1841 à Berlin, comme prof, de languesorien-taies, avec le titre de conseiller intime. En 1849 il se retira dans sa terre de Neuses, près Cobourg, où il f 13 janv. 1866. Il a mis en vers Es. 40-46, et les petits prophètes, sauf Jonas. Il a aussi publié une vie de Jésus, harmonie des Évangiles.

2o Léopold-Emmanuel, né 1797 à Grosshen-nersdorf, près Hermhut, fut en 1825 prof, et sous-directeur au collège de sa ville natale, en 1840 à Zittau. C'est à cette époque qu'il publia ses Comment, sur les Romains, Galates, Corinthiens, Éphésiens, qui fondèrent sa réputation. En 1836 Copenhague lui décerna le titre de docteur. En 1844 l'univ. de Iéna l'appela * remplacer Baumgarten-Crusius, et peu de professeurs ont su comme lui exercer sur leurs élèves une bonne et saine influence. Il enseignait l'exégèse et la dogmatique. Il fut nommé conseiller ecclésiastique, et reçut en 1869 pour son jubilé la croix d'or épiscopale. C'est à Iéna qu'il publia sa Théologie, un livre sur les sacrements,» un sur la Cène, un sur l'Église, un sor le Rationalisme, etc. Il se donnait pour rationaliste, mais il conserva toujours l'empreinte des souvenirs de Herrnhut, resta avec les moraves dans des rapports affectueux, et tint lui-même à

Iéna pendant de longues années des réunions de missions le dimanche après-midi, sans se laisser décourager par le petit nombre de ses auditeurs. Il appartenait en réalité à l'école de Kant et de Fichte, et rationaliste de nom9 il resta chrétien de cœur.

RUDELBACH, André-Gottlob, né 29 sept. 1792 à Copenhague; un des représentants les plus absolus du luthéranisme, il combattit l'union dans ses écrits, ses prédications et ses journaux; et réclama pour l'Église plus d'indépendance et une constitution presbytérienne et synodale. Il a publié de nombreux ouvrages, entre autres une étude sur Savonarole et son temps, et une réfutation de la Néologie sous toutes ses formes. Même dans ses livres d'édification sa tendance confessionnelle est mise en relief, ainsi que l'importance qu'il attache aux sacrements. En 1829 il vint à Glanchau, Saxe, comme pasteur surintendant. En 1844 il retourna à Copenhague à l'occasion du mouvement catholique allemand, et professa à l'université. Enfin en 1848 il fut nommé pasteur à Slagel-see, où il f 3 mars 1862. 11 avait fondé un journal avec Guerike; à sa mort Delitzsch le remplaça.

RUDINGER, Esrom, né 19 mai 1523 à Bam-l>erg, étudia k Leipzig, logea chez Camerarius dont il élevait les enfants, et dont il épousa la fille ainée 1548; de 1549 à 1557 il fut recteur k Zwickau, vint ensuite à Wittenberg comme professeur, fut nommé recteur en 1562, doyen de la faculté eu 1570. Sa femme étant morte en 1558, il se remaria. S'étant prononcé sur la Cène dans le sens de l'égl. réformée, il dut quitter Wittenberg. Arrêté à Torgau, et sommé de changer d'opinion, il s'enfuit à Berlin, Bâle, Heidelberg, et finit par ouvrir une école près de Brtinn sous les auspices des Moraves, où il composa un Comment, en 5 vol. sur les Psaumes. Après la mort de sa seconde femme, il vint à Nuremberg, où il f 1591 (ou à Altdorf). Il a écrit quelques ouvrages, mais d'une importance secondaire; le plus intéressant traite des Fr. moraves, de leur orthodoxie, et de leurs petites églises.

RUDOLF (Rodolphe) lo moine du couvent de Fulda, f 865. Disciple de Raban Maur, il continua les Annales de Fulda 838 à 863, écrivit nne vie de Lioba, abbesse de Bischofsheim et aide de Boniface; une petite Hist. de Saxe, et une vie de Raban.—2<> R. d'Ems, f vers 1250, auteur d'une chronique du monde, mise en vers pour Conrad IV, presque le seul écrit du moyen âge, qui fasse connaître aux laïques l'hist. de l'A. T.

RUFIN lo ministre de Théodose 1er et d'Ar-cadius, né vers 350 en Aquitaine, ordonna le massacre de Thessalonique 390, fit périr Tatien, préfet du prétoire, dont il prit la charge, et allait être associé au trône par Arcadius, quand les troupes de Stilicon le massacrèrent pour se venger de ses cruautés et de sa tyrannie, 395.

2° R. Tyrannius, ou Toranius, ou d'Aquilèe, né 345 à Julia Concordia près d'Aquilèe, entra au couvent avant d'avoir été baptisé et ne reçut le baptême qu'en 372. En 374 il partit pour l'Orient, où Jérôme l'avait précédé d'une année, et pendant que celui-ci se fixait en Syrie, il se rendit dans les déserts de l'Égypte. Il habita aussi Alexandrie, où il se lia avec Didyme, Macaire. Sérapion, ainsi qu'avec le futur jeune évêque Théophile. Ces amis le gagnèrent à la théol. d'Origène. En 380 il vint à Jérusalem, où il rencontra sainte Mélanie, l'ancienne, qui avait alors 48 ans, et ils se vouèrent ensemble à la vie monacale et aux exercices ascétiques* En 394 il fut ordonné prêtre par Jean de Jérusalem, qui était aussi origéniste. Son ami Jérôme s'étant prononcé contre Origène à l'instigation d'Epiphanes, les deux amis se brouillèrent, et quoique Isidore, envoyé par Théophile, eût en apparence calmé les esprits, Rufin repartit pour Rome avec Mélanie, et s'établit 399 k Aquilée. Là il traduisit, mais très librement, en l'abrégeant et en y faisant une suite, l'Hist. ecclés. d'Eusèbe, ainsi qu'une Vie des pères, ou Hist. eremitica, de Patronius (ou de saint Jérôme); une Exposition du Symbole des Apôtres, où figure pour la première fois la Descente aux enfers. A Rome il avait déjà traduit l'apologie d'Origène, par Pamphile et Eusèbe de Césarée, et le livre des Principes d'Origène. Il alla jusqu'à mettre dans l'introduction à ce dernier ouvrage une ancienne approbation donnée par Jérôme, procédé qui froissa naturellement celui qui en était la victime, et Rufin, au lieu de réparer sa faute répondit aux reproches de Jérôme par ses Invectivœ en 2 livres. Devant l'invasion des Goths sous Alaric 408, il s'enfuit à Rome, et de là, avec Mélanie, en Sicile où il f 410. Sans grande portée théologique, il a rendu des services en faisant connaître à l'occident la science alexandrine. On lui doit de nombreuses Homélies d'Origène, et surtout les Récognitions clémentines.

RUGEN, île de la mer Baltique, appartenant auj. à la Prusse, ancienne Poméranie, première patrie des Rugiens qui fondèrent plus tard le Rugiland. Cette île fut longtemps la métropole et la citadelle du culte de Hertha (Erde, la terrant matrem de Tacite, Germanie 40). Là se trouvait, à Arcona, l'idole de Swantewit, dans un sanctuaire séparé du temple par un rideau en tapisserie; elle avait 4 têtes. Il y avait encore l'idole de Rugiwit, dont la tête avait 7 faces et une immense barbe qui logeait des hirondelles; Perewit, qui avait 5 têtes, et Perenutz qui en avait 4, et une sur la poitrine. Pour mettre fin aux déprédations de ces pirates, Louis-le-Gerrnanique sortit contre eux, tua leur roi et s'empara de l'île, 844. Les moines de Corbie entreprirent de l'évangéliser, mais pendant longtemps ils ne purent obtenir que des succès partiels, apparents et momentanés. Ce que la force des armes avait obtenu se reperdait aussitôt que la résistance était redevenue possible, et quand toute la Pomèranie était gagnée, Rugen seule maintenait encore les vieilles traditions. Enfin vers 1157 Waldemar 1er, roi de Danemark, entreprit une campagne énergique contre les restes du paganisme dans ces contrées, et en 1169 l'île entière tomba entre ses mains. Les idoles furent taillées en pièces, et les morceaux brûlés ou transportés à Copenhague. Les temples furent, les uns livrés aux flammes, les autres consacrés au culte chrétien, et Axel, ou Absalon, l'évêque de Rôskilde, l'ami du roi, tut chargé de l'administration religieuse de l'île que, pour sa bonne part, il avait aidé à conquérir. Le belliqueux èvêque fit d'abord mettre en liberté les prisonniers chrétiens; il baptisa d'un jour 900 habitants, fit venir des prêtres de Pomèranie, et en peu de temps on compta dans l'île 12 églises. En 1171 le roi dut céder au duc de Saxe la moitié de l'île pour la part qu'il avait prise â la conquête, et en 1177 le pape l'incorpora au diocèse de Schwerin. Elle revint plus tard au Danemark, puis en 1325 à la Pomèranie dont elle partagea les destinées religieuses.

RUGIENS, peuplade germanique, de la race des Suèves, originaire de Rugen. Ils apparaissent au S^e siècle, commandés par Attila, et fondent au nord du Danube un royaume comprenant sous le nom de Rugiland, l'Autriche et la Moravie, qui détruit par Odoacre 487, devint vers 500 l'asile des Hérules, et en 518 celui des Lombards. Le nom de Rugiland disparut.

RU1NART, Thierry, né 10 juin 1657 â Reims, d'une bonne famille, entra en 1674 chez les bénédictins de Saint-Maur à l'abbaye de Saint-Fa-ron, Meaux, prononça ses vœux en 1675, et fut envoyé en 1677 à Saint-Pierre de Corbie pour y poursuivre ses travaux sous la direction de Mabillon. Sa vie n'eut d'autres épisodes que 2 voyages, en Alsace et en Champagne, f 27 sept. 1709 à Paris, abbaye d'Hautvilliers. II fut le collaborateur de Mabillon. On lui doit en outre, en latin, les Actes des premiers martyrs, très utilisé pour les sources, 1689; une Hist. de la persécution vandale 1694; une édition des Œuvres de Grégoire de Tours, 1699: un abrégé de la vie de Mabillon, 1709; une Apologie de la mission de saint Maur, où il cherche à établir que le fondateur de la congrégation est identique avec le Maur, ami de Benoît de Nursie; son Itinéraire en Alsace, les Œuvres posthumes de Mabillon, etc.

RULMANN, Merswin (Meerschwein, marsouin?) membre important de la Société des Amis de Dieu. Riche marchand de Strasbourg, il renonça au monde en 1347, d'accord avec sa femme, et s'attacha à Nicolas de BAle, le c grand ami de Dieu ». Il acheta un vieux couvent de sa ville, le fit restaurer et le donna aux johan-nites: c'est la • maison d'un grand prix >, dont il est souvent parlé dans l'hist. des Amis de Dieu. Il y f 1382. Auteur du: Livre des 9 rochers, et de: Les 4 années de sa vie recommencée.

RUMOLD, au 8®e siècle, f vers 775; év. de Dublin et de Malines: la légende le fait apôtre et martyr dans cette dernière ville. Connu par une Biogr. de l'abbé Theodorich Leodensis, du lime siècle.

RUPERT lo l'apôtre de la Bavière; venu d'Irlande, selon les uns, membre de la famille royale franque, selon d'autres, et frère de Trudpert, il visita d'abord les tombeaux des apôtres à Rome, et fut nommé par Childebert IL év. de Worms, où il travailla quelque temp* avec succès; bon pour les pauvres, il étail sévère contre les vices de son époque et se fit des ennemis surtout parmi les riches. Il fut chassé à coups de fouet, et se rendit 696 auprès de Théodo n, duc de Bavière, dont la femme Régi-natradis, était chrétienne. Le duc se convertit, et son exemple fut suivi par les grands de sa cour et par une quantité de ses sujets. Il descendit ensuite le Danube, et les chroniques de Salzbourg le font arriver jusqu'à cette ville, peut-être dans l'intérêt d'une rivalité de juridiction avec Passau. A son retour il vint au Wal-lersee, où il éleva une église. Il se chercha dans les couvents de France de bous collaborateurs, et ramena entre autres Chunobald et Gisilar. Sur les ruines de Juvartum, ancienne colonie chrétienne détruite par les Hérules, il construisit un couvent et bâtit une égl. dédiée à Fa p. Pierre; ce fut l'origine de l'évêché de Salzbourg. II fit venir de Worms des moines pour son couvent d'hommes, et mit à la tête du couvent de femmes sa nièce Ehrentrudis. Puis il reprit ses voyages, prêchant l'Évangile là où il n'avait pas encore pénétré, surtout dans la Norique, à OeU tring, à Ratisbonne, fondant des églises et laissant partout des collaborateurs.En voyant approcher sa fin, il réunit ses disciples, désigna Vita-lis pour son successeur, et mourut en paix le jour de Pâques, à Worms ou à Salzbourg, on ne sait en quelle année.

2o R. de Deutz, moine du oouvent de Saint -Laurent à Liège, où il trouva en l'abbé Béranger un modèle des vertus ascétiques, et dans son successeur Heribrand un maître ès sciences distingué. Il fut ordonné prêtre en 1100. Il combattit la doctrine de Guill. de Champeaux et d'Anselme de Laon, qui soutenaient que Dieu avait voulu la chute et le péché, tandis qu'il était lui-même infralapsaire à la manière d'Augustin quant à la prédestination; il se fit par là des ennemis acharnés, et se rendit 1113, sous la protection de l'archev. Frédéric de Cologne, an couvent de Siegbourg dont l'abbé Cuno était son ami. Il eut plusieurs discussions publiques, à Liège et Châlons, mais naturellement sans résultat; demeura à Liège jusqu'en 1119, et fut en 1120 nommé abbé de Deutz, où il 14 mars 1130. Enthousiaste et mystique, penseur profond, fécond écrivain, il a laissé de nombreux Comment, sur l'A. et le N. T., entre autres sur le Cantique de Salomon, où il voit une hymne à la Vierge; sur Job, les Petits prophètes, saint Jean, l'Apocalypse, la vision d'Ezéchiel 1,10; les livres des Rois, au point de vue typique, etc. Il a aussi écrit des traités de dogmatique et d'édification. Bellarmin lui reproche d'avoir nié la transsubstantiation.

RURIK, v. Russie.

RUSSIE. Cet immense empire, formé de races diverses, et dans lequel il ne se parle pas moins de 30 langues, a eu, suivant les siècles, des frontières qui onl beaucoup varié, puisqu'il fut un temps où il comprenait encore les contrées du Danube, et que c'est à une date relativement récente qu'il s'est agrandi sur les bords de la Baltique. Pour les anciens, ils n'en connaissaient guère que la Sarmatie et la Scythie. Puis, dans les premiers siècles de l'emp. romain, les Slaves vinrent s'établir entre l'Adriatique et la Baltique, et envahirent peu à peu tout le pays. L'invasion des barbares amena successivement les Goths, puis en 376 les Huns; plus tard les Alains, les Bulgares, les Chazares. Au 6m« siècle apparaissent les villes de Novogorod et de Kiew, et les Lèches, établis dans les plaines arrosées par le Dniéper, reçoivent le nom de Po-lanes. Leur religion est celle des autres tribus de la même souche; ils ont un dieu bon, Swan-towit, et un dieu noir, ou méchant, Tscherni-bog; puis quelques autres dieux inférieurs. Leurs temples sont des bosquets et des autels sur les hauteurs; les seigneurs et les anciens du peuple sont leurs seuls prêtres; ils ont des sorciers; leur culte consiste en sacrifices, quelquefois humains. Une vieille légende attribue à l'ap. André la première évangélisation de ce pays, et même l'épiscopat; il est possible qu'il ait parcouru les contrées situées sur les rives de la mer Noire. Tertullien compte déjà des chrétiens parmi les Sarmates, vers l'an 200. Les Goths sous Ulphilas, vers 376, connaissent le christianisme. De nombreux martyrs succombèrent dans la Chersonèse, sous la persécution de Valérien, vers 260; on parle même de plus de 250 évêques ou pasteurs; mais des siècles se passent sans apporter aucun fait nouveau à l'histoire de la religion en Russie. En 720 Skira débaptisé), fils du roi de Suède Ynguar, chef des redoutables Varègues, ou Warâgers, pirates nordmans, envahit la Russie centrale et se fixe à Novogorod; son nom fait supposer que le christianisme comptait alors quelques adhérents, mais on ne sait rien de plus. Enfin vers 860 trois frères de la famille Ross, ou Rttss, appelés par le peuple, qui aimait encore mieux les Warâgers que ses propres boyards, viennent s'établir à Novogorod. Snio et Truwor meurent bientôt, et Rurik reste seul chef de la nouvelle Russie, et fonde un État durable. Ses successeurs étendent leurs conquêtes, s'avancent vers le midi et se présentent avec une flotille de 200 canots jusqu'aux portes de Constantinople. Un miracle sauva la ville; d'après la légende, Photius fit apporter sur le rivage « le vêtement très réel » de la Vierge, et il en résulta une tempête qui engloutit ou dispersa les canots des barbares. De retour chez eux en petit nombre, les chefs russes demandèrent à Constantinople la paix, le baptême et des missionnaires pour les instruire. Rurik f 879 remit les rênes du gouvernement à Oleg, ou Olaf, son parent, pendant la minorité de son fils Igor. Oleg, politique habile. étendit les limites de son empire, prit Smolensk, et s'empara de Kiew, dont les deux chefs, Askold et Dir, chrétiens, furent mis à mort; le peuple les honora bientôt comme les deux premiers martyrs russes. Oleg fit de Kiew sa capitale; Igor, devenu majeur, épousa 903 la jeune Olga, q. v. Oleg f 912 et Igor f 945 restèrent païens, et ne firent rien pour l'Église, qui cependant se développa sans eux; en 925 il y a une cathédrale à Kiew, et un traité conclu en 945 porte cette clause qu'il ne pourra être violé par aucun russe, baptisé ou non baptisé; et ailleurs: que chacun prêtera serment selon sa foi; ce qui prouve qu'il y avait des chrétiens russes, et que le gouvernement, quoique païen, était tolérant. Le fils d'Olga, Swà-toslav, resta païen, malgré les sollicitations de sa mère, et le christianisme trouva longtemps à la cour une hostilité qui devint de plus en plus entreprenante. Swàtoslav f 972, laissant 3 fils, qui se disputèrent le trône pendant 8 ans. A la fin Wladimir fit assassiner ses deux frères et resta seul maître. Ambitieux et cruel, il restaura le culte, les temples et les dieux païens, et multiplia les sacrifices humains. En 983 il avait désigné comme victime un jeune warâ-ger; le père, qui était chrétien, protesta et résista; le peuple fanatisé massacra le père et l'enfant, Théodore et Ivan, qui furent bientôt après honorés comme de saints martyrs. Mais le christianisme gagnait les peuples voisins, et Wladimir ne pouvait fermer les yeux à ses progrès. Les mahométans, le pape, des missionnaires juifs avaient essayé de le convertir; un philosophe grec, chrétien, réussit mieux. Le monarque ébranlé demanda seulement un peu de temps pour réfléchir, ou pour préparer son entourage à un changement de religion. En 988 il se fit baptiser à Cherson, sous le nom de Basile Wassilii, et épousa la princesse Anne, sœur de l'emp. Basile II. De retour à Kiew, il fit baptiser tout son peuple, à commencer par les grands, et les idoles furent brisées ou jetées au Dnieper. On procéda sans retard à l'organisation d'une Église russe, sur le modèle de l'Égl. grecque, et en s'attachant à la forme extérieure du culte plus qu'à la doctrine; on fonda des établissements d'éducation, et la Bible fut reconnue comme règle de foi; on se servit de la version de Cyrille, en slavon oriental, qui était encore intelligible pour le peuple russe, comme le prouvent les annales de Nestor, rédigées 1108 dans le même dialecte. D'après le Livre des degrés (Stufenbuch), le patr. de Constantinople envoya 988 à Kiew, comme métropolitain, un prêtre syrien nommé Michel qui parcourut tout le pays, évangélisant, baptisant, construisant des églises et des écoles, et qui fut remplacé à sa f 992 par un grec, Léontias, qui montra aussi beaucoup de zèle. On nomme encore à Novogorod l'év. Joachim, qui travailla avec succès 992-1030, avec l'aide de son disciple Ephraïm, chargé de l'enseignement. Wladimir partagea ses États entre ses 12 fils, encore de son vivant, et si ce partage donna lieu à de sanglantes divisions, il servit cependant la cause du christianisme en fixant les populations et en enlevant à l'idolâtrie ses dernières chances. Wladimir f 1015. Son ingrat neveu, Swâtopolk, dit le Scélérat, monta sur le trône en faisant périr plusieurs fils de son oncle, mais en 1019 il fut battu par Jaroslav, fils de Wladimir, qui régna jusqu'en 1054, et servit la cause chrétienne par des lois, des règlements ecclésiastiques, des écoles, et par une direction utile imprimée à l'activité des couvents, qui traduisirent beaucoup d'ouvrages grecs, notamment des pères. Il restait sans doute encore quelques tribus païennes, mais l'Égl. russe était formée; elle était libre vis-à-vis de Rome, Iaroslav montra qu'elle était indépendante de Constantinople, en nommant de sa propre autorité Luc Schidâta év. de Novogorod 1036, et Hilarion métropolitain de Kiew 1051. La domination mongole 1225-1480 n'exerça presque pas d'influence sur la situation de l'Église; mais la prise de Kiew par les Lithuaniens 1320 eut pour effet de transporter à Moscou le siège métropolitain, centre de l'Égl. russe, qui relevait de Constantinople. Et comme, depuis la conversion de Jagelloo, la Lithuanie devint catholique, ils établirent à Kiew en 1415 un métropolitain de leur confession. En 1596, sous la domination polonaise de Sigismond, III, et sous l'influence du jésuite Pos-sevin, on négocia au synode de Brzesk la réunion de cette partie de l'Égl. russe avec Rome. Déjà en 1439, au concile de Florence-Ferrare, Isidore de Moscou s'était laissé gagner à l'idée de l'union, ce qui lui avait valu à Rome le chapeau de cardinal et le litre de légat, mais à Moscou sa déposition par le synode, la prison et l'exil; + à Rome 1463. Le synode déclara relever non de Rome, mais de Constantinople, lien qui devait à son tour se relâcher peu à peu et finalement se briseh En 1589 Jérémie II de Constantinople consacra Job comme métropolitain de Moscou et comme patriarche indépendant de l'Égl. russe, mais en réservant toujours au patr. de Constantinople le droit de confirmation; ce droit même se perdit le siècle suivant, et il ne resta plus au siège de Constantinople qu'une primauté d'honneur. Mogilas, Nikon, et indirectement Cyrille Lucar, concoururent à donner à l'Égl. russe une organisation ecclésiastique et une espèce d'unité, qui se maintint malgré le schisme des rascolnicks et d'une foule d'autres sectes plus petites, qui n'ont cessé d'éclore comme autant de manifestations spiritualistes et de protestations de la conscience individuelle, mais qui en général ont peu duré. Le siège patriarcal est inoccupé depuis 1702; Pierre-le-Grand en confia les attributions à l'éparcbat de Rinizan, et finit par les donner au saint synode dont il se réservait la nomination. Le patr. de Constantinople reconnut ce nouveau changement et donna au synode le titre de patriarcal. Le tzar était le président réel du synode. Catherine II mit le comble à ce régime de césaropapisme en mettant à la charge de l'État l'administration des biens ecclésiastiques et l'entretien du clergé. Dès lors tout fut mis en œuvre pour que l'Égl. gréco-russe fat entièrement et réellement une Église nationale, celle de tous les citoyens. Nicolas en particulier, en molestant les dissidents, en exigeant que les enfants issus de mariages mixtes fussent élevés dans la religion russe, en interdisant la conversion de ses sujets à un autre culte, en récompensant au contraire les dissidents qui passaient à la religion de l'État, a été conséquent avec son principe; et le prince Gortscha-koff, le 14 juill. 1871 à Friedrichshafen, en opposant à l'Alliance évangélique un*e fin de non-recevoir n'a fait que tirer les conclusions d'une situation donnée. Mais il faut reconnaître aussi que, dans la pratique, le gouvernement de l'Église par l'État a eu quelques bons côtés; il a empêché la formation d'une hiérarchie trop puissante, et favorisé l'établissement d'écoles et de séminaires. Sous ce rapport Alexandre a rendu de vrais services; il a même provoqué en 1813 à Pétersbourg la création d'une Soc. biblique, malheureusement dissoute en 1826. Le 18m« siècle a compté dans Pépiscopat quelques hommes distingués: Propokowicz, l'ami de Pierre-le-Grand, auteur d'une Dogmatique, f 1736; Platon, métropolitain de Moscou, auteur d'un excellent Catéchisme, f 1812; Théo-phylacte, archimandrite de Moscou, auteur d'un Manuel dogmatique paru en 1773; Philarète enfin, dont le Catéchisme de l'Égl. orientale orthodoxe a encore été approuvé par le synode de 1866. — L'empire est divisé en 52 éparchies ou provinces, et celles-ci en diocèses, dont 24 ont à leur tête des archevêques, les autres des évêques. Kiew, Pétersbourg, Novogorod, Kasan et Tobolsk sont des sièges métropolitains. Le bas clergé est marié; en général il est peu instruit, peu religieux et peu considéré. Les couvents sont riches et mondains; il y en a environ 600; le plus considérable est celui de Troitskoje, à 50 kilom. de Moscou. La population a des instincts religieux et professe un grand respect pour ses prêtres, popes, diacres et autres, mais elle est assez indifférente, ou ignorante, quant à la doctrine; elle tient surtout au culte, aux saints et aux sacrements. La vie chrétienne est mieux comprise des sectes, sans être cependant tout à fait absente de l'Égl. officielle. Les grecs-unis de quelques provinces, de Pologne surtout, qui, au nombre d'environ 2 millions, avaient consenti vers 1596 à se placer sous la juridiction nominale du pape, tout en conservant leur discipline, leur culte et leurs usages, sont rentrés peu à peu dans l'Égl. russe; Catherine II les traita durement, en ne leur laissant que l'évêché de Polocz; Paul et Alexandre furent plus tolérants et leur donnèrent 6 évêchés, mais Nicolas, qui aimait les situations nettes, mit fin par l'ukase du 5 juillet 1839 à l'anomalie de cette Église qui était catholique et grecque en même temps. La protestation de Grégoire XVI, du 22 sept. 1839 resta sans écho, v. Grecs.

Le nombre des catholiques russes est de 3 à 4 millions; on les trouve surtout en Pologne; leur autorité centrale est le collège ecclésiastique de Pétersbourg, présidé par l'archev. de Mohi-lew. Les jésuites, bannis de partout et supprimés par Clément XIV, trouvèrent un asile auprès de Catherine, qui ne voyait en eux qu'une puissance ennemie de la papauté; mais leur prosélytisme acharné, et surtout leur ambition d'accaparer tout l'enseignement, éveillèrent de légitimes susceptibilités; leurs collèges furent fermés en 1816, et eux-mêmes bannis en 1820.

L'insurrection polonaise en 1863 porta un coup fatal à l'Égl. catholique, et le 28 nov. 1864 une quantité de couvents furent sécularisés, le clergé consigné dans ses paroisses, et les contrevenants envoyés en Sibérie. Les protestations de Pie IX n'aboutirent qu'à la rupture des relations diplomatiques entre les deux Églises. — Les protestants, en grande majorité luthériens, se trouvent surtout dans les anciennes provinces suédoises: en Finlande, plus d'un million et demi, avec un archev. à Abo, un évêque à Borgo, une université à Helsingfors; en Courlande, Livonie et Esthonie, aussi un million et demi, gouvernés par des consistoires et des surintendants, avec une université à Dorpat. Malgré les traités et les garanties, ces provinces ont eu beaucoup à souffrir vers 1830 des tendances du gouvernement à soumettre toutes les consciences au culte officiel; des lois oppressives facilitaient le passage du protestantisme à l'orthodoxie russe, en empêchant tout mouvement en sens contraire, et l'appât d'avantages matériels a provoqué en peu d'années la désertion d'environ 40 mille paysans, qui ont passé à l'Égl. grecque. Il y aussi des communautés protestantes dans les environs de Saratow, en Bessarabie, en Georgie, en Crimée, en Sibérie, et daus la plupart des grandes villes. Les moraves, ou hern-houtes, ont des stations en Livonie, en Cour-lande, et à Sarepta depuis 1765; les mennonites, ou anabaptistes, ont cultivé les steppes de la Moloschna, où ils comptent 70 établissements, avec 1700 âmes; la menace du service militaire en a cependant décidé un certain nombre à émi-grer et à se rendre en Amérique. Enfin les juifs, dont la position varie beaucoup suivant les provinces qu'ils habitent et suivant la nature de leurs rapports avec la population. Leur commerce, leurs bénéfices et la propagande russe contribuent trop souvent à provoquer contre eux des insurrections populaires d'un caractère sauvage, ou des persécutions légales plus injustifiables encore.

RUYSBROOK, Jean, surnommé le docteur extatique, le plus illustre des mystiques hollandais. Né 1293 dans le petit village de Ruys-brook, entre Bruxelles et Hall, il fut élevé par un parent, Jean Hincart, chanoine augustin, et devint en 1317 vicaire de Sainte-Gudule. Il se distingua par ses talents, son zèle et sa charité, et entretint des relations intimes avec les cercles mystiques de la vallée du Rhin, les Amis de Dieu et Nicolas de Bâle. A 60 ans il donna sa démission et se retira dans le couvent de Grônendal, dont il fut nommé prieur, et où il f 2 févr. 1381. On lui attribua des miracles, même de son vivant. Ses principaux disciples furent Gérard Groot et Guill. Jordaens. Il a écrit de nombreux ouvrages en flamand; presque tous furent traduits en latin par ses disciples, et quelques-uns en allemand: Les ornements des noces spirituelles, Le miroir du salut éternel, Comment, sur le tabernacle de l'Alliance, Des 4 tentations subtiles, Des 7 degrés de l'amour, De la vraie contemplation, etc.

RYSWICK, Hermann (de), hollandais, condamné par l'inquisiteur Hoogstraten et brûlé 1512 à La Haye, sous prétexte d'idées manichéennes, comme ayant nié l'immortalité de l'âme et affirmé l'éternité du monde; il soutenait aussi que la Bible est un recueil de fables et que Jésus fut un séducteur.

SA, Emmanuel, né à Conde, Portugal, entra chez les jésuites, enseigna à Gandie, Coïmbre et Rome, se distingua comme savant et comme orateur et f 1596 à Arona. Auteur de notes assez peu estimées sur la Bible; il est surtout connu comme casuiste. lia collaboré & l'édition de la Vulgate publiée par Pie V.

SAAD1AS ben Joseph, savant juif, né 892 à Fajum, l'ancienne Pithom, en Égypte; nommé 927 gaon, c.-à-d. docteur magnifique, de l'école de Sura, près Babylone. Ses efforts pour concilier la religion et la philos, lui valurent l'inimitié des vieux orthodoxes; il se brouilla avec les caraïtes en défendant contre eux les droits de la tradition, et il eut encore contre lui le Rosch ou Resch-Gelutha, chef civil des juifs exilés. Il dut s'enfuir au bout de 2 ans, et passa le reste de sa vie dans la solitude, occupé à des travaux littéraires, f 942. Son principal ouvrage est un poème arabe sur les Doctrines et les coutumes des juifs, trad. en hébreu. Il faut noter sa traduction de la Bible hébr. en arabe, avec réflexions; quelques fragments en ont été publiés en allemand.

SABAITES, v. Sabas.

SABAS lo Cappadocien, né 439 à Mutala, d'une famille distinguée. Ses parents, Jean et Sophie, s'étant établis à Alexandrie, il fut confié aux soins de ses oncles Hermès et Grégoire; mais déjà à l'âge de 8 ans il se décida à entrer dans un monastère, et 10 ans plus tard il se rendit dans les environs de Jérusalem pour y vivre en solitaire. Un des élèves préférés d'Eu-thyme, ri créa plusieurs laures et fonda plusieurs monastères, en particulier celui qui porte son nom, Marsaba, ou Saint-Saba, à quelques lieues de Jérusalem. Il leur donna la règle de saint Basile, fut ordonné prêtre 484 par Sal* luste de Jérusalem, et reconnu comme abbé de l'ordre. Ses moines, appeles Sabaïtes, portaient un vêtement fauve avec un scapulaire noir. Plus tard il fut, avec Jean de Jérusalem, ancien sévérien converti par lui, un des principaux défenseurs du conc. de Chalcédoine. f 531. Son couvent, qui existe encore, est un des plus pittoresques et des mieux fortifiés de la Palestine, situé dans une contrée sauvage, sur la pente vertigineuse d'un précipice, au milieu d'une population de bédouins contre la visite desquels il a dû se précautionner par de hautes et solides murailles. On y montre de nombreux souvenirs, curiosités, reliques, la caverne d'où Saba délogea le lion, la source qu'il fit jaillir du rocher, l'ossuaire des moines martyrisés en 614. un palmier qui semble sortir de la muraille, des cellules comme des nids, etc.

2o Martyr à Rome 272. — 3o Martyr en Vala-chie 372. — 4o Surnom de Julien d'Edesse. ascète, et athanasien décidé.

SABATATI, un des surnoms donnés aux vaudois, parce qu'ils portaient des sabots?

SABATIER lo Pierre, de Poitiers, né 1682. entra 1700 dans l'ordre des maurins à Saint -Faron de Meaux, et, après avoir achevé ses études à Saint-Germain des Prés, il devint le collaborateur de Ruinart; il travailla, celui-ci étant mort, à collationner et rétablir le texted^ l'Itala antérieure à Jérôme, et acheva son ouvrage dans l'abbaye de Saint-Nicaise, Reims, où il avait été relégué pour s'être compromis dan* les affaires jansénistes, et où il f 24 mars 1742, pendant l'impression du travail, qui fut poursuivie par ses frères d'ordre. C'est une comparaison de l'Itala et de la Vulgate, avec de nom-breuses variantes et notes; 3 vol. R Reint* 1743. — 2o Antoine, de Castres, 1742, prêtre, écrivit tour à tour pour et contre les philosophes, auteur d'un Dictionn. sur les siècles païens. 1784, flatta Napoléon sans en rien obtenir, fut pensionné par les Bourbons, qu'il dénigra, el f 1817. — 3° Sabatier, ou Sabbathier, François, né 1732 à Condom, professeur de 3«* a Châlons 1762-1778, auteur d'un mémoire sur U Puissance temporelle des papes, qui fut couronné à Berlin 1763. f 1807.

S ABB ATH AI - SÉVI, ou Zwi, juif, né 1625, à Smyrne, d'un père courtier de commerce. Les cabalistes annoncèrent à sa mère, dès son berceau, que cet enfant serait le Messie. Élevé dans cette idée, beau et bien doué, nourri du Talmud et de rêveries, il finit peut-être lui-niè-me par le croire. Il se maria à 16 ans, mai.* pour vivre en ascète, et se divorça bientôt: nouveau mariage en 1659, et nouveau divoro? S'étant ouvertement donné pour le Messie, il trouva de nombreux adhérents, mais fut excommunié par les rabbins. Il visita avec succès le> provinces turques, prêchant, recevant de* ovations et rassemblant des disciples; puis craignant de ne plus être en sûreté à Saloniki, il se rendit à Jérusalem, où il trouva un ferme appui en la personne du riche Nathan, de Gaza, puis à Alexandrie chez Raphaël Joseph. Il établit 30 apôtres, et se remaria avec une belle juive, un peu aventurière, Sara née 1641 en Ukraine. Puis il se prépara pour la grande bataille qui devait précéder l'avènement du Messie, et la résurrection des morts, probablement en 1666 ou 1671. Mais ses ennemis lui minèrent le terrain sous les pieds, et il partit avec 5,000 hommes pour Jérusalem; il comptait 80 mille partisans. Il vint ensuite à Smyrne, où il fit une entrée solennelle, et à Constantinople, où Mahomet IV lui fit bon accueil, et lui donna une garde d'honneur, destinée en même temps à s'assurer de sa personne. Un rabbin polonais, Xéhémie, le dénonça comme fauteur de troubles, et Kiuperli, ministre du sultan, fit jeter en prison le faux Messie. Condamné à une épreuve qui pouvait amener la mort, Zwi aima mieux renoncer à sa mission et à son titre; il échappa au supplice en embrassant l'islamisme; il reçut une place avec le titre modeste d'effendi et une pension. Mais ayant continué de pratiquer en secret le judaïsme, il fut conduit au château de Dulcigno, Morée, où il f 1676. — Sa secte, dite des Sabbathéens, lui a survécu jusqu'au commencement du 19me siècle, et elle a compté quelques représentants distingués, entre autres Moïse Hajim Luzzato, de Padoue 1707-1747, qui espérait faire de sa doctrine la base de la religion universelle. Il admettait la Bible, à l'exclusion du Talmud, comme seule source des connaissances; une trinité en Dieu, et Dieu sauvant le monde et le réconciliant avec lui sous une forme humaine.

SABBATAIRIENS. Plusieurs sectes de ce nom: 1° secte de visionnaires anglais* attendant la prochaine arrivée du Messie, et s'y préparant par l'observation de la loi juive, et notamment du sabbat; fondée par Jeanne Southcote, née 1780, f d'une tympanite 27 déc. 1814, qui, d'abord anglicane, était devenue wesleyenne et avait fini par se faire renvoyer de la Société, un peu comme folle. Elle se prenait pour la femme du soleil, Apoc. 12,1, feignit une grossesse à 65 ans, même un accouchement, en se procurant un enfant nouveau-né, et finit par être démasquée. La secte n'en dura pas moins jusqu'à 1831.

2° Secte baptiste, fondée à la fin du 18®e siècle en Angleterre, par Fr. Bampfïeld; elle observait le sabbat et le dimanche.

3° Autre secte baptiste, en Amérique, fondée par Beissel, qui se détacha de ses frères men-nonites pour vivre, d'abord en solitaire, puis en commune organisée comme un couvent ou un phalanstère, cultivant la terre, exerçant l'hospitalité et observant le sabbat. Beissel + 1768, puis Eckherlin, et Pierre Muller, présidèrent la communauté avec le titre de prieurs.

SABBATIUS, juif converti du 5«>e siècle, ordonné prêtre à Constantinople par l'év. nova-tien Marcien. Lorsque, sous Valens, les nova-tiens de Phrygie résolurent, au conc. de Paz, de célébrer la Pâque avec les juifs et de se servir de pain sans levain, il se rangea de leur côté dans l'espoir de se faire nommer évêque par les dissidents. Mais les autres évêques prévinrent le schisme en déclarant la question indifférente, et il dut renoncer à ses prétentions. Il recommença cependant ses intrigues sous le successeur de Marcien, Sisinnus, et réussit même, après la mort de celui-ci, à se faire sacrer par quelques évêques de la contrée; mais il fut relégué dans l'île de Rhodes, où il mourut, honoré comme martyr par ses adhérents. Son corps fut transporté à Constantinople, mais l'év. Atticus le fit éloigner, à cause des désordres du culte qui se célébrait sur son tombeau.

SABÉENS ou Sabiens, v. Mendéens.

SABELLIUS et Sabelliens. Né à Pentapolis en Afrique, pasteur, peut-être même évêque à Ptolémaïs entre 250 et 260, Sabellius est d'ailleurs peu connu. Il avait été à Rome vers 220, et s'était trouvé mêlé aux luttes de Calliste et d'Hippolyte; c'est même là que son système se serait formé ou développé f 265. Les anciens docteurs opposent son système à celui d'Arius. Sabellium fugimus, dit Athanase, qui diciteum-dem esse patrem et ftlium. Loin de nier la divinité de Jésus-Christ, il * le confondait avec le Père. Il regardait le Logos et le Saint-Esprit comme des manifestations, ou comme des forces différentes du même Dieu unique; ce sont trois noms de Dieu, représentant une action, non simultanée, mais successive, ou, si l'on préfère, ce sont trois rôles. De même que chez l'homme il y a le corps, l'âme et l'esprit; ou, comme dans le soleil on peut distinguer sa lumière, sa chaleur et sa rondeur, on peut voir en Dieu trois puissances dans une seule personne, le créateur, le Sauveur et celui qui régénère et sanctifie. Plusieurs évêques africains admirent sa doctrine; on appela ses adhérents sabelliens ou patripassiens; mais ils ne formèrent jamais une secte distincte. Denis d'Alexandrie combattit vivement cette erreur, et il tomba peut-être dans l'erreur contraire en opposant trop le Père et le Fils. Il envoya un ecclésiastique visiter son propre diocèse, où le sabellia-nisme avait quelques disciples; il écrivit plusieurs lettres, et enfin il porta ses plaintes à Rome, où le sabellianisme fut condamné par un concile, comme il l'avait été à Alexandrie 261. Il se maintint cependant encore en Mésopotamie.

SABINE, veuve romaine du 2®« siècle, convertie par son esclave Serapia, d'Antioche, qui était chrétienne. Peu de temps après, les deux furent martyrisées. Leurs restes furent découverts en 430, et une église leur fut élevée. La légende a singulièrement brodé sur leur vie et leur mort. Fête, 29 août.

SABINIEN, fils d'un Bono de Bieda ou de Volaterra; il représenta le saint siège auprès de l'emp. Maurice à Constantinople. Élu pape 604 il succéda à Grégoire-le-Grand, et prit en tout le contrepied de ce qu'avait fait son prédécesseur. Il ne régna qu'un an et demi. C'est lui qui le premier fit sonner les cloches pour annoncer les heures des offices, f 605.

SACCHONI, v. Rainerio.

SACHS, Hans (ou Jean), le premier poète allemand du 16me siècle, et que l'on a comparé à Lope de Vega pour la fécondité. Né 5 nov. 1494 à Nuremberg, fils d'un tailleur, il suivit les écoles jusqu'en 1509, apprit un peu de latin, fit ensuite son apprentissage de cordonnier, voyagea comme compagnon 1511 à 1513, visita Ratisbonne, Passau, Salzbourg, s'enthousiasma toujours plus pour la poésie, vint à Munich pour se perfectionner en continuant de travailler de son état; parcourut le sud de l'Allemagne, et la contrée du Rhin jusqu'à Aix-la-Cha-pelle; s'affilia à Francfort aux maîtres-poètes (Meistersœnger) dont il dirigea quelque temps l'école, publia en 1514 sa première poésie, et rentra en 1516 à Nuremberg où son père le rappelait. Il fit avec succès son chef-d'œuvre comme cordonnier, obtint l'autorisation de s'établir et ouvrit même un magasin. En 1519 il épousa Cunigonde Kreutzer, dont il eut plusieurs enfants, mais qui moururent jeunes. Devenu veuf en 1560, il se remaria en 1561 avec Barbara Harscher, mais sa santé était ébranlée, et il alla s'affaiblissant jusqu'à sa f 20 janv. 1576. Sauf ses voyages réguliers à la foire de Leipzig, il sortit peu de Nuremberg, et l'on a conclu à tort de quelques passages de ses poésies qu'il avait fait la guerre de France en 1528, celle des Pays-Bas en 1544, et même celle des Turcs; on lui prête aussi des voyages à Erfurt, Gênes et Rome. Honnête et vertueux, il s'attacha de toute son âme à la Réforme, dès qu'elle parut. Il avait vu Luther à Augsbourg en 1518, et dès lors il ne laissa passer aucune de ses publications sans se la procurer; en 1522 il en possédait déjà 40, et en 1523 il écrivit lui-même son chant: du Rossignol de Wittenberg, die man jetzt hœrt ûberall; en 1527 sa Merveilleuse prophétie sur la Papauté (Bapstumb). Il a publié d'ailleurs un grand nombre d'écrits, en prose et en vers, humoristiques ou sérieux, comédies, tragédies, fables, contes, psaumes, cantiques, etc. où il flagelle les abus des couvents et de la hiérarchie, et où il célèbre le triomphe de l'Évangile et de la Réforme. Ses premiers volumes formant collection, parurent en 1558, 1560 et 1561 sous le titre de: Très magnifiques, belles et véritables poésies spirituelles et mondaines, de toutes sortes, tragédies sérieuses,. etc. Elles ont été souvent réimprimées. Elles ont un peo la rudesse de leur époque et pèchent quelquefois par la forme, mais elles sont pleines de fraîcheur et de naïveté, et Gœthe les a vengées de l'espèce d oubli dans lequel le temps les avait plongées. Musset aussi a célébré le patois du savetier de Nuremberg. Sachs, dans son Valete 1567, a donné une esquisse de sa propre vie.

SACK lo Aug.-Fréd.-Guill., né 4 févr. 1703, précepteur de jeunes nobles et du prince héritier de Hombourg, pasteur réformé à Magdebourg en 1731, puis en 1740 à Berlin, renonça à sa place ensuite de quelques contrariétés, voyagea, se lia avec les principales notabilités de son temps, se voua à la littérature, et fut nommé en 1750 membre du Consist. supérieur; d'autres fonctions honorifiques ou lucratives lui furent encore confiées: il les résigna toutes en 1780 et t 3 avril 1786. On lui a reproché à tort d'être arminien et même socinien; il était zwinglien pour les sacrements. Son principal ouvrage: La Foi des chrétiens justifiée, combat le rationalisme et le déisme; il expose en même temps, la doctrine chrétienne, du point de vue Leib-nitz-Wolffien; il accepte la religion naturelle, qui est pour lui la preuve du besoin religieux chez l'homme, mais il en démontre l'insuffisance et il en appelle à l'Écriture comme source de révélation; il en relève l'influence directe et immédiate, il en prouve l'antiquité par les témoignages extérieurs, mais il ne dit rien de son inspiration. Il distingue, mais sans les séparer la justification et la sanctification. Il était aussi distingué comme prédicateur, et, dans un langage élevé il savait mettre la religion à la portée de ses auditeurs; il tenait une espèce de milieu entre la froide orthodoxie et le mysticisme piétiste.

2o Son fils Fréd.-Samuel-Gottfried, né 4 sept. 1738 à Magdebourg, après de bonnes études à Berlin, fit l'éducation d'un jeune prince, visita l'Angleterre, et fut successivement pasteur à Magdebourg et à Berlin. Nommé èvêque 1814. f 2 oct. 1817. Il partageait les vues théol. de son père, avec une nuance un peu plus pélas-gienne; il était également ennemi du naturalisme et du rationalisme. Il a beaucoup travaillé à amener l'union des Églises. On a de lui des sermons et quelques traductions du latin et de l'anglais.

3o Son fils Fréd. - Ferdi n and - Adol phe, né 16 juill. 1788, f 16 oct. 1842, a été 25 ans prë-dicateur de la cour à Berlin. Un autre fils —

4o Ch.-Henri, né 17 oct. 1790 à Berlin, est le plus connu de tous. Prof, à Bonn de 1818 à 1847, il passa ensuite quelques années à Magdebourg comme membre du Consist. supérieur, puis il retourna à Bonn pour y achever sa carrière dans la retraite. Il a publié des sermons, des études sur PUnion des confessions dans la monarchie prussienne, une Hist. de l'Égl. d'Écosse, une Hist. de la prédication en Allemagne depuis Mosheim jusqu'à Schleiermacher, un travail sur les chants et cantiques dans les livres historiques de l'A. T. etc.

SACRAMENTAIRE, nom donné par les luthériens aux calvinistes dans les luttes sur l'eucharistie. Il a fini par devenir synonyme d'hérétique, et on l'emploie quelquefois encore en Allemagne comme une injure vulgaire.

SACREMENTS. L'Église chrétienne a résumé sous ce nom les deux actes solennels, institués par Jésus-Christ, dans lesquels des grâces spirituelles sont représentées, symbolisées ou communiquées par des objets matériels et visibles: le baptême par l'eau, la cène par le pain et le vin. Le mot n'est pas dans la Bible, et les premiers chrétiens ne l'ont pas connu. Pour désigner ces actes, qui leur rappelaient sous une forme plus élevée, les anciens mystères du paganisme et les réalités d'une vie spirituelle supérieure, ils employaient le nom de mystères. Tertullien le premier se servit du mot sacra-mentum, qui, par sa terminologie, a un sens actif et devait signifier, non une chose sainte, mais une chose sanctifiante. Par le sacrement l'homme s'unit à Dieu, comme le soldat se lie à l'armée par son serment au drapeau. Pour Tertullien et pour d'autres pères, l'idée de sacrement s'appliquait non seulement au baptême et à la cène, mais à beaucoup d'autres choses encore, notamment à la doctrine de l'Église. Le mot n'avait donc rien de précis. Augustin le précisa, et en donna une définition qui est à peu près celle de l'Égl. réformée; c'est le signe visible des grâces promises, et il n'a de signification que par la foi. Le nombre des Sacrements n'était pas déterminé. Bientôt on y ajouta l'Ordination. L'Aréopagite en compte 6: Baptême, Cène, Confirmation, Ordination du prêtre, Ordination du moine, Onction des morts. Isidore et Raban Maur en occident n'en comptent que 2, Damiani 12. Au commencement du moyen âge on était à peu près d'accord à regarder comme tels le baptême, la cène, la confirmation, la repentance et l'ordination; quelques-uns y ajoutaient le mariage. Plus tard seulement on y joignit Textrême-onction. Otto de Bamberg fut le premier qui précisa le chiffre de sept, 1124; Pierre Lombard et Gratien l'acceptèrent, et Eugène IV le confirma au conc. de Florence 1439.

En Orient le patriarche Job se prononça aussi 1270 pour le chiffre 7, mais en remplaçant d'abord la pénitence par les vœux monastiques; plus tard on en revint cependant à la nomenclature romaine. Quant à l'efficacité du sacrement, les thomistes enseignaient qu'il agissait d'une manière immédiate et absolue, en vertu de son origine divine, tandis que pour les sco-tistes il n'avait pas d'influence objective, mais Dieu communiquait directement et personnellement sa grâce à celui qui recevait le sacrement: discussion oiseuse. Le Baptême, la Confirmation et l'Ordination passent pour communiquer un caractère indélébile; les autres sacrements sont un bienfait pour l'âme, et quelques-uns doivent se renouveler, même fréquemment. Le conc. de Trente, 7m© session, prononce l'ana-thème contre quiconque prétend qu'il y a plus ou moins de 7 sacrements, et il les énumère dans l'ordre suivant: baptême, confirmation, eucharistie, pénitence, extrême-onction, ordre et mariage. Il regarde « la confection, ou la collation du Sacrement » comme valable, même si celui qui l'administre se trouve en péché mortel, pourvu qu'il ait l'intention de faire ce que l'Église fait. E11 revanche le sacrement agit par sa seule vertu, sur celui qui le reçoit, quelles que soient ses dispositions, sauf le cas de péché mortel; il agit ex opere operato, v. Œuvres, et non ex opere operantis, indépendamment de toute foi et de tout sentiment religieux. Les Égl. de la réforme sont toutes d'accord à ne reconnaître que les deux sacrements institués par Jésus-Christ, mais elles diffèrent sur leur importance et leur signification. Les ritualistes anglais et les luthériens sont ceux qui se rapprochent le plus de l'idée catholique. Les calvinistes attribuent aux éléments consacrés une valeur réelle, mais qui dépend des dispositions de celui qui les reçoit. Pour les zwingliens, c'est l'idée du mémorial et du symbole qui domine. Enfin les sociniens et les rationalistes de toutes les nuances n'y voient que des cérémonies élevées et touchantes qui rappellent la fraternité des membres de la communauté. Plus logiques, les quakers qui, par un excès de spiritualité, rejettent toute forme, ont tout supprimé, jusqu'aux sacrements.

Fête du Saint-Sacrement, v. Fêtes.

SACRIFICATI, les Sacrifiés nom qu'on donna pendant et depuis la persécution de Décius, aux tombés, aux lapsi, qui pour échapper au supplice avaient consenti à sacrifier aux idoles.

S ACRILÈGE, profanation, mutilation ou vol d'objets sacrés, appartenant au culte. U était puni de l'excommunication majeure, et quelquefois même de la mort; aujourd'hui encore il est soumis parla loi à des peines sévères, comme abus de confiance ou détournement d'objets confiés à la foi publique. L'Égl. cathol. voudrait une sanction spéciale et beaucoup plus rigoureuse; au besoin la peine de mort.

SACRISTALN, employé ecclésiastique, chargé essentiellement du soin et de la surveillance de la sacristie, puis, par extension, de tous les soins matériels concernant l'entretien de l'église et la célébration du culte.

SACRISTIE, petite dépendance d'une église dans laquelle sont déposés les accessoires du culte, vêtements sacerdotaux, vases de la communion, aiguière du baptême, livres liturgiques, etc. On y garde au besoin le trésor quand il y en a un, la bibliothèque, etc. C'est là que le prêtre ou le pasteur s'habille. Si la sacristie est assez grande, le Consistoire ou la diaconie s'y réunissent.

SACY lo Isaac-Louis Le Maistre, dit de Sacy, ou plutôt Saci, ce dernier nom n'étant que l'anagramme de son prénom Isac. Né 29 mars 1613 à Paris, frère plus jeune d'Antoine Le Maistre, et parent par sa mère du grand Arnauld. Sérieux et grave dès son enfance, il se joignit en 1648 aux solitaires de Port-Royal et fut consacré prêtre le 25 janvier 1650. Devenu directeur de Port-Royal, il dut s'enfuir lors de la persécution suscitée contre les jansénistes à l'occasion du Formulaire 1661, et il fut arrêté et enfermé à la Bastille le 13 mai 1666, avec son ami Fontaine. Ce fut sa Wartbourg. Il entreprit aussitôt, d'après la Vulgate qu'on lui avait laissée, la traduction de l'A. T. (celle du N. T. était achevée et sous presse à Amsterdam; il y avait collaboré avec Arnaud, Nicole, Ant. Le Maistre et le duc de Luynes), et lorsqu'il sortit de prison, 1 nov. 1668, son travail était presque achevé. Mais pour pouvoir l'imprimer, il dut y ajouter des notes explicatives et édifiantes, ce qui entraîna un retard de plus de 20 ans. L'impression commencée en 1672 ne se termina qu'en 1696. Après quelques voyages Saci était rentré à Port-Royal en 1675, mais en 1679 il en fut de nouveau banni, et il se retira auprès de son cousin le marquis de Pomponne, où il f 4 janv. 1684. Sa version du N. T., condamnée par Clément IX, avait été un immense succès littéraire. Celle de l'A. T. avec ses précieuses annotations, ne fut pas un moindre événement, auquel Sainte-Beuve paie un juste tribut d'éloges, en ajoutant que la vie de l'homme fut constamment en harmonie avec la tâche qu'il s'était donnée. On lui a reproché l'élégance de son style, auquel Bossuet trouve un tour trop recherché, et Saci confessait lui-même qu'il avait peut-être été trop loin en essayant d'ôter à l'Écriture son obscurité et sa rudesse. Mais on peut regretter surtout qu'au lieu de recourir au texte original, il se soit astreint à suivre servilement la Vulgate, ce qui lui a fait faire plusieurs fautes graves, sans même parler des expressions toutes catholiques dont il se sert en dépit des dictionnaires pour traduire certains mots: faire pénitence, au lieu de se repentir; prêtre, au lieu d'ancien, etc. C'est la meilleure version de l'Égl. catholique, et elle a été recommandée par plusieurs prélats. Réimprimée par diverses sociétés bibliques protestantes, elle l'est cependant moins maintenant, depuis que des versions décidément meilleures se sont comme imposées à l'Église, et depuis que M. Pozzi, faisant suite à Prideaux-Tregelles, en a fait ressortir les erreurs. On a encore de Saci une trad. de l'Imitation, du poème de Prosper contre les Ingrats, des Fables de Phèdre et de quelques comédies de Térence.

2<> Antoine-Isaac-Sylvestre de Sacy, célèbre orientaliste, fils d'un notaire, né 21 sept. 1758 à Paris, étudia presque sans maître, apprit l'hébreu avec un juif, l'arabe avec Bertherean, tout en faisant son droit; entra à la Cour des Comptes en 1781, fut nommé associé libre de l'Acad. des Inscriptions, membre ordinaire en 1792, secrétaire perpétuel en 1833. En 1795 il avait été chargé de la chaire d'arabe à l'école des langues orientales. Il siégea de 1808-1814 au Corps législatif, fut nommé baron de l'empire en 1813, grand'croix de la légion d'honneur en 1822, en 1823 administrateur du Collège de France, en 1831 conservateur des mss. de la Biblioth. royale, en 1832 pair de France, f 21 févr. 1838. A côté de ses travaux sur les langues, celui de ses nombreux ouvrages qui nous intéresse le plus est son Exposé de la religion des Druses, auquel il consacra plus de 20 ans et qui parut l'année même de sa mort.

SADOLET, Jacques, cardinal, une des figures les plus pures et les plus aimables du catholicisme; né 1477 à Modène, fils d'un prof, de droit, il fit de bonnes études, vint encore jeune à Rome, se lia avec des hommes distingués, tels que Bembo et Olivier Caraffa, fut nommé d'abord chanoine de Saint-Laurent, puis, avec Bembo, secrétaire de Léon X qui le nomma év. de Carpentras 1517. Calomnié auprès d'Adrien VI, il rentra en faveur sous Clément VII et fut créé cardinal par Paul III, 1536. Clément avait en lui une si grande confiance qu'il le retint, presque de force, trois ans à Rome; ils ne se séparèrent que lorsque Sadolet eut essayé inutilement d'empêcher le pape d'entrer dans la ligue contre Charles-Quint. En 1538 il concourut efficacement à la trêve conclue entre l'emp. et le roi de France, et en 1542 il fut député auprès de François I*r pour l'engager à la paix, mission qui aurait réussi si le cardinal Visa n'avait pas échoué auprès de Charles. Voilà pour l'homme politique. Le chrétien se montra dans tous les rapports qu'il eut avec les protes-

tant*. H voyait en eux des frères égarés, mais il avait vu de trop près les désordres de Rome pour ne pas comprendre ceux qui s'en séparaient. Il chercha sérieusement à les ramener au bercail, mais pressé d'agir contre les vaudois, il répondit au cardinal Farnèse que très reconnaissant du diplôme pontifical qui lui conférait les pouvoirs nécessaires, € il avait des armes dont il se servait plus volontiers, parce que, inoffensives en apparence, elles peuvent seules porter la conviction dans les esprits les plus rebelles. » Il rechercha la connaissance de Mélanchthon, Bucer, Sturm et autres réformateurs, et entretint avec eux un commerce épis-tolaire affectueux. Malgré cela, et quoique ses tendances fussent bien connues, il ne perdit jamais la confiance de la cour de Rome et son crédit demeura intact. Paul III le nomma même en 1536 membre de la commission chargée de préparer le second concile. Quand les vaudois des Vallées furent menacés des persécutions qui marquèrent la fin du règne de François c'est à Sadolet qu'ils s'adressèrent, et il ne leur ménagea pas ses témoignages de sympathie. « Ces gens-là sont meilleurs que nous, » dit-il. Mais son intervention ne put empêcher les boucheries de Cabrières et de Mérindol; il en reçut la triste nouvelle à Rome, où il était, et il f peu après, 18 oct. 1547. Son tombeau est dans l'égl. de Saint-Pierre-aux-Liens. Outre un grand nombre d'écrits littéraires en latin, Poésies, Lettres familières, etc., il a laissé un Comment, sur l'Ép. aux Romains, avec une tendance polémique contre le protestantisme (la édition aurait été supprimée comme faisant trop de concessions au point de vue de la doctrine); une Interprétation des Ps. 51 et 93; un livre inachevé De extructione Ecclenœ, et surtout une Épître au sénat et au peuple de Genève, 1539, écrit dans un esprit conciliant. Éd. complètes: Mayence 1607, Vérone 1737.

SADOTH, ou Sehiadastes, évêque persan du 4me siècle. Il y avait alors beaucoup de chrétiens en Perse, et le roi Sapor, Schapur II, les persécutait cruellement. Sadoth fut nommé évêque après le martyre de l'év. Siméon. Pour échapper aux persécutions il se retira dans des lieux déserts; mais là il vit en songe une échelle brillante de gloire, au sommet de laquelle était Siméon qui l'appelait à lui. Il comprit que son devoir était de retourner auprès des siens, même au péril de ses jours. Peu de temps après il fut mis en prison avec 128 chrétiens, tant hommes que femmes. Ils y languirent 5 mois pendant lesquels on les fit sortir à trois reprises pour les sommer d'abjurer après mille tortures. Finalement ils forent condamnés à mort. On les mena au supplice attachés deux à deux, et le chant de leurs cantiques monta au ciel jusqu'à la mort du dernier. Sadoth fut encore gardé quelque temps comme suprême espoir du roi, qui comptait toujours le voir abjurer. On l'envoya dans la province de Bethusa, mais il ne fléchit point, et finit par être décapité, 342. — Peut-être est-ce le même que Gushiatazades, mais ce dernier ne porta pas le titre d'évêque.

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SAGITTAIRE (de), en allemand Schutze, Gaspard, né 23 sept. 1643 à Lunebourg, fils d'un pasteur, se distingua par ses talents, sa facilité de travail, son érudition, son caractère et sa piété. Après avoir visité les universités allemandes et Copenhague, il fut nommé recteur à Saalfeld 1668, puis prof, de théol. et d'hist. ecclés. à Iéna, 1671. En 1678 docteur en théol.; en 1679 historiographe de la maison ducale de Saxe, f 9 mars 1694 à Iéna. Outre ses nombreux travaux sur la Thuringe, il a laissé quelques écrits d'édification, dont 2 en faveur du piétisme, une Harmonie des Évangiles, une Hist. de la Passion, une Vie de Boniface, etc. Vie par J.-A. Schmidt, 1713.

SAHAK, ou Isaac Jer, fils de Nersès-le-Grand, q. v., surnommé aussi le Parthe comme dernier descendant de Grégoire Photistès qui était d'origine parthe. Il se maria pour plaire à son entourage qui désirait voir la charge de patriarche arménien se perpétuer dans sa famille, mais il n'eut qu'une fille, et un songe lui ayant annoncé que sa race finirait avec lui, il se sépara de sa femme, par consentement mutuel, et se voua entièrement à son ministère. Il voyagea, organisa des missions à la tête desquelles il plaça 60 de ses disciples, et se rendit à Constantinople pour achever de s'instruire. Il y était quand son père fut empoisonné. En 388 Chos-roès n le nomma patriarche arménien; il était le 4®« successeur de son père et avait 60 ans. Il rendit de grands services aux chrétiens d'Arménie, fit bâtir des églises, fonda des institutions destinées à former des missionnaires et de jeunes prêtres, en envoya quelques-uns à Athènes pour y apprendre le grec, entre autres Moïse de Chorène; composa une liturgie el traduisit avec Miesrob la Bible en arménien, la reine des traductions, d'après Lacroze. Plusieurs fois emprisonné, banni, destitué sous des prétextes politiques, puis rétabli sur son siège, il vit ses petits-fils mourir martyrs pendant les persécutions et sa famille s'éteindre avec eux, comme le songe le lui avait prédit. Il présida 432 le conc. d'Ashtishat qui adhéra aux décrets de celui d'Éphèse, et 435 un second synode, qui condamna les écrits de Théod. de Mdpsueste et de Diodore de Tarse. Les persécutions ayant recommencé sous le roi Isdégerdès n, il se retira au village de Blur, où il + 9 sept- 440, jour anniversaire de sa naissance, âgé de plus de 100 ans. Il fut enterré à Ashtishat, et une église bâtie sur son tombeau. Ses écrits sont classique* pour la langue arménienne.

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SAILER, Michel, né 17 nov. 4751 à Aresing, diocèse d'Augsbourg, de parents pauvres, étudia à Munich, entra en 4770 dans Tordre des jésuites (qui devait être supprimé en 4773) et fit sa philos, et sa théol. à Ingolstadt, mais il ne put se faire ni à la sécheresse de la scolastique, ni au mécanisme d'une dévotion tout extérieure. Il fut successivement répétiteur, puis professeur, soit de dogmatique, soit de morale, à Dil-lingen, Ingolstadt, Landshut, où ses talents d'enseignement et sa parole facile, noble et d'une grande élévation lui attirèrent de nombreux disciples. Ces qualités même le compromirent auprès de ses supérieurs, qui pressentaient vaguement en lui un adversaire caché. Sous divers prétextes il fut remplacé, ou appelé à d'autres fonctions mal rémunérées. Ses relations avec les Illuminés, 4794, avaient surtout contribué à lui nuire. En 4843 le pape refusa de le confirmer comme év. d'Augsbourg. Enfin il fut appelé à Ratisbonne, chanoine, vicaire général, coadjuteur avec survivance, doyen du chapitre, et par son zèle et son activité, il releva l'instruction publique et ranima la vie religieuse dans un diocèse qui comptait parmi les plus attardés. Nommé évêque en 1829, il f 20 mai 4832 et fut enterré dans sa cathédrale de Ratisbonne. Il avait refusé de nombreux appels, entre autres en 4848 l'archevêché de Cologne. On l'a comparé à Fénelon; sa dogmatique venait du cœur et n'avait point d'angles; il fraternisait avec des curés comme Booz et avec des protestants comme Lavater. Il a laissé de nombreux écrits de piété, ses Œuvres compl. ne forment pas moins de 40 volumes. Il passe avec raison pour un des initiateurs du catholicisme libéral contemporain.

SAINT, sainte, v. à leurs différentes lettres les noms des personnages dont le nom est habituellement précédé de cette épithète et qui ne se trouvent pas ci-après.

SAINTES, patrie de Bernard Palissy, q. v. Chef-lieu de la Saintonge, ancien évéché, que Grégoire de Tours dit avoir été fondé par Eutrope; supprimé en 4804. L'Égl. réformée, fondée par d'humbles artisans, qui lisaient la Bible entre eux, eut ses martyrs, brûlés et pendus, ea 4546 et 1547, et souffrit de toutes les persécutions qui fondirent sur la Réforme pendant 2 siècles. Le culte y est de nouveau célébré depuis que la liberté de conscience a été garantie par les lois.

SAINT-MARTIN, Louis-Claude (de), sur-nommé U Philosophe inconnu, titre qu'il s'était donné lui-même dans son premier ouvrage. Né 18 janv. 1743 à Amboise, élevé par une belle-mère pieuse, puis placé au collège de Pontleroy, il réagit intérieurement contre les tendances matérialistes de la philosophie régnante. D était destiné au droit, mais il préféra les armes et entra à Bordeaux au régiment de Foix. LA il se lia avec un juif portugais, Martinez PasqualU, chef des martinistes, et il s'affilia à la secte dont il fut un des initiés, ou Cohen; il tâcha de comprendre leur thêurgie et l'évocation des esprits. A Lyon, en 4775, il connut Cagliostro et d'Hauterive; il étudia le somnambulisme et Schwedenborg. En 4784, il s'enthousiasma pour le mesmérisme. D quitta le service en 4787 et visita l'Angleterre, l'Italie et l'Allemagne; il s'arrêta quelque temps à Strasbourg, où il vit le neveu de Swedenborg, le chevalier de Silver-hielm, et quelques autres rêveurs de la même école. C'est à cette première période que se rattachent ses principales publications: Des erreurs et de la vérité 4775; Des rapports qui existent entre Dieu, l'homme et l'univers 4782; l'Homme de désir 4790. Dès lors il passa sous l'influence de Bohme, et il apprit l'allemand pour essayer de le mieux comprendre; son Nouvel homme 4792 marque la transition. Arrêté à Paris comme aristocrate, il fut sauvé par le 9 thermidor. Un décret de 4794 l'éloigna de la capitale, et il fut chargé de cataloguer les bibliothèques des couvents d'Amboise. Appelé comme maître à l'École normale, il fut attaqué par le sensualiste Garat et lui répondit avec autant d'énergie que de succès: Disc, en rèp. au citoyen Garat, 4795. Sa position était précaire et chétive; il ne pouvait faire tout le bien qu'il aurait voulu; le travail incessant de son esprit minait sa constitution, et il f 43 oct. 4803 i Aunay, dans un état assez misérable. Parmi ses derniers ouvrages, signalons son Ecee Homo contre la superstition; l'Esprit des choses 4800, le Ministère de l'homme-esprit 4802, et quelques traductions de Bœhme. Il avait pris parti plusieurs concours, mais sans succès. La confusion de ses pensées se révèle dans l'obscurité de son style, mais ses adeptes admirent l'un H l'autre. Sa théosophie est un monothéisme extatique, et l'homme n'est que la pensée de Dieu, un microcosme. Vie par Gence, et par Matter.

SAINT-SIMON (comte de), Claude-Henri, parent du célèbre duc de ce nom, et de la famille des comtes de Vermandois. Né à Paris 47 avril 1760, pair de France et grand d'Espagne, il entra à l'armée en 4777, fit en 4779 la guerre d'indépendance en Amérique, adjudant de La Fayette et ami de Franklin. Fait prisonnier par les Anglais en 1782, il suggéra au vice-roi du Mexique l'établissement d'un canal interoe&a-nien, mais l'idée était prématurée. Libéré et de retour en 1789, il visita la Hollande etl'& pagne. Il salua avec joie la révolution française comme l'espoir d'une régénération sociale. Il acquit des biens nationaux et se fit une fortune, mais se mina presque en spéculations industrielles malheureuses et fut en outre trompé par son associé, le comte de Redern. Dès lors il se mit à l'étude des sciences exactes et rêva de reconstituer un ordre social plus en harmonie avec la justice et l'équité. Il se lia dans ce but avec les hommes les plus distingués de l'Angleterre et de l'Allemagne, visita la Suisse et Genève en particulier, où il publia sa Lettre d'un habitant à Genève 1802. Il repoussait résolument tout mysticisme et ne voyait de salut pour la société que dans l'industrie, dans l'exploitation du capital mort par le travail intelligent, association qui supposait un dévouement réciproque et devait aboutir au bonheur universel. Sa religion était le panthéisme, et son Dieu le grand Tout, réunissant l'amour, la sagesse, la force et la beauté. Le catholicisme était une transition vers la religion de l'avenir; le protestantisme était un recul. Il publia de nombreux écrits: Introd. aux travaux scientifiques du 19«* siècle, 1807; Prospectus d'une nouvelle Encyclopédie, 1810; Catéchisme des industriels, 1823; d'autres encore, et surtout son Nouveau christianisme, 1825. Il fit de nombreuses et bizarres expériences, qui n'aboutirent pas; malgré le vernis religieux qu'il essaya de donner k l'école industrialiste, il excita les méfiances de tous, et les ouvriers de Paris eux-mêmes prièrent le gouvernement de mettre un terme à ses provocations. Ruiné et ne comptant plus sur l'avenir, il essaya de se suicider 4823, mais la balle dévia et il en fut quitte pour la perte d'un œil et pour une santé compromise. II se remit à l'ouvrage et s'attacha quelques disciples, Aug. Thierry, Aug. Comte, Olinde Rodrigue, Bazard, Enfantin, etc. Il f entre leurs bras 19 mai 1825. — Mais sa doctrine ne mourut pas avec lui, ses disciples la retravaillèrent, la développèrent et cherchèrent à la faire passer dans la pratique, en constituant sous le nom de saint-simoniens une secte communiste hiérarchiquement organisée. Les hommes n'ont de valeur et de droits que ceux que leur assignent leurs capacités et leur faculté de travail. Ils se divisent en 3 classes: les hommes de la pensée et de l'intelligence, qui statuent sur les lois, les principes, sur Dieu même; les hommes du cœur et du sentiment, artistes, poètes, inventeurs, éducateurs; enfin les hommes de la force et de l'action, industriels, producteurs et marchands. A la tête de tous sont les prêtres, et notamment le Père supérieur, ou pape, qui est le grand administrateur, qui décide des vocations, reçoit les confessions, explique les livres de Saint-Simon et distribue les récompenses. Les biens d'un homme reviennent à sa mort à la communauté, ou banque centrale. Le mariage est un devoir; l'homme et la femme sont égaux, avec des aptitudes différentes, etc. Ces idées allaient beaucoup plus loin que celles du fondateur de la secte; elles furent prêchées surtout par l'éloquent Bazard, qui était le prêtre des sciences, pendant que Etienne Moncey était prêtre de la culture, et Enfantin, q. v. pape. La secte eut successivement pour organes le Producteur en 1826, l'Organisateur en 1829 et le Globe en 1831. Les exagérations de quelques chefs, et notamment du p. Enfantin, amenèrent un schisme dans la Société, qui finit par se dissoudre; l'émancipation de la femme, l'amour libre, et la femme révélatrice, jetèrent du ridicule sur les sainl-simoniens que leurs tendances communistes avaient déjà suffisamment compromis et divisés. En 1832 le gouvernement interdit leurs réunions; Rodrigue avait déjà mis en sûreté sa fortune particulière. Ils avaient adopté un costume bizarre, qui ne contribua pas à les faire prendre au sérieux, v. Reybaud, Villenave, Hubbard.

SALES (François de), v. François 4<>.

SALÉSIENNES, v. Visitandines.

SALIG, Chrétien-Aug., théologien allemand, d'une piété douce et vraie, auteur d'une étude sur l'Eulychianisme et de plusieurs ouvrages importants relatifs à l'hist. de la Réformation. Né 6 avril 1692 à Domersleben près Magdebourg, il étudia à Halle et Iéna, fut prof, dans ces deux villes, et passa comme vice-recteur à Wolfenbuttel, où il f 1738.

SALIGER (Selig, heureux) Jean, prédicateur luthérien à Anvers, vers 1566, puis à Lubeck, à Rostock, et à Wôrden, Hollande, 1579. Il dut successivement renoncer à tous ces postes à cause de ses vues catholiques sur l'eucharistie.

SALISBURY lo Jean (de), un des hommes les plus savants et les plus remarquables du moyen âge; moine anglais, né 1110 à Salisbury; d'où son surnom de Sarisberiensis; vint en France où il étudia sous Abélard à Paris, 1136, et passa quelques années au couvent de Moutier-la-Celle. Nommé chapelain de l'archev. Théo-bald de Cantorbéry, il fut envoyé à Rome par le roi Henri 1156, mais prit parti pour les libertés de l'Église et contre le roi. Il se lia avec Adrien IV. De retour en Angleterre, il devint secrétaire de Th. Becket, s'attacha à lui, l'accompagna dans son exil, et fut blessé à ses côtés en le défendant contre ses assassins. Il se retira en France, fut nommé évêque de Chartres par Louis-le-Jeune 1176, et + 1180. Il a écrit une Vie de Becket, une Vie d'Anselme, des Lettres très curieuses, des Mélanges de politique, de philosophie et de morale, sous le titre de Poli-eratiêns; une étude sur la vraie et la fausse science intitulée Metalogicus, où avec un bon sens et une indépendance d'esprit admirables, il déplore la subtile dialectique de son temps, la fausse direction des études, et l'ardeur de disputes où le fonds est presque touj. sacrifié aux détails. Dans son Entheticus il expose brièvement et d'une manière vivante les systèmes des anciennes philosophies et son propre système. Partisan du réalisme, il a raconté avec une rare impartialité l'hist. du nominalisme.

2® v. Cecil.

SALLE, Jean-Baptiste (de La), fondateur des écoles de la Doctrine chrétienne, q. v. Né 1651 à Reims, fils d'un conseiller au présidial, il se distingua de bonne heure par sa piété, obtint un canonicat à la cathédrale 1668, étudia à Saint-Sulpice et reçut les ordres en 1678. Appelé par son confesseur, l'abbé Roland, à le seconder dans la direction de l'union des sœurs enseignantes de l'Enfant Jésus, qu'il avait fondée 1674, il s'y intéressa et se montra digne de lui succéder. Il obtint ensuite les autorisations nécessaires pour fonder un séminaire d'institutrices, puis un certain nombre d'écoles, dont il réunit les maîtres en congrégation 1681, avec des succursales à Réthel et à Guise, 1682, à Laon 1683. Il renonça à son canonicat, distribua son bien aux pauvres lors de la famine de 1684 et s'en remit à Dieu du soin de ses écoles. Les frères devaient prendre un engagement de 3 ans et portaient un costume particulier, sévère et laid. En 1688 il fut appelé à Paris, où il réussit au milieu de beaucoup de difficultés à faire adopter ses écoles; en 1691 il fonda un séminaire à Vaugirard, un autre 1705 à Rouen, où il f 1719. Il a écrit Les devoirs du chrétien, et la Civilité chrétienne. Son œuvre a été un grand progrès pour l'époque, mais elle est aujourd'hui dépassée, et diverses circonstances ont contribué à rendre impopulaire une institution qui n'a pas su marcher avec le temps et qui n'est plus guère connue que sous le nom des Ignorantins.

SALMANTICIENS, ou théologiens de Salamanque, frères déchaussés du mont Garmel, de l'université de Salamanque, opposés aux jésuites et à leur sémipélagianisme. Ils sont les auteurs d'un ouvrage de théol. morale en 9 volumes, Salamanque 1631, Leyde 1679, et se montraient thomistes zélés. Un autre ouvrage, aussi de théol. morale, mais écrit par des jésuites, a paru à Venise 1728, 6 vol.

SALMÉRON, Alphonse, né à Tolède, oct. 1515, étudia à Alcala, puis à Paris où il trouva Loyola et fut un des premiers à s'attacher à sa fortune. Zélé propagateur de l'ordre des jésuites, il parcourut l'Italie, la Belgique, l'Allemagne et la Pologne pour soutenir et défendre le catholicisme, et reçut le titre de nonce apostolique en Irlande. Il fut, avec Lainez, nommé théologien et orateur du pape au oooc. de Trente, où ils combattirent énergiquemeut le protestantisme et toutes les réformes. Après le concile, souffrant de corps, il se rendit à Na-ples où il se livra à des travaux littéraires, et où il f 13 fèv. 1585, provincial de l'ordre, dans le collège qu'il avait fondé. Il a écrit des études sur les Évangiles et sur quelques parties du N. T.

SALTZMANN, Fréd.-Rod., né * Straabouig 9 mars 1749, élevé à Sainte-Marie aux Mines où son père était pasteur, licencié en théol. 1773, entra au service du baron de Stein, qui le fit nommer secrétaire de légation el loi procura des lettres de noblesse. Mais ses richesses et sa qualité de noble firent son malheur en le rendant suspect pendant la révolution. Il erra plusieurs années dans l'est de la France, faisant constater sa présence par les maires des communes, pour établir qu'il n'avait pas émigré et pour éviter ainsi la confiscation de ses biens. C'est alors que ses sentiments religieux se développèrent et s'affermirent. Dès son retour il publia coup sur coup, sous le voile de l'anonyme, un certain nombre d'ouvrages, d'une tendance mystique, mais sans exagérations trop criardes: Toutes choses seront faites nouvelles; Des derniers temps; Pensées sur la création et la durée du monde; Les desseins de Dieu sur l'humanité; La Religion de la Bible, etc. U visita beaucoup l'Allemagne, où il jouit d'une grande considération parmi les chrétiens réveillés. Il remit à son gendre Silbermann une imprimerie qu'il avait fondée, et qui eut de 1a réputation. Enfin, souffrant des nerfs il se retira de la vie active, et f 1820, laissant des mss. et de nombreuses lettres, entre autres sa correspondance avec Oberlin, Jung-Stilling, etc.

SALUT (Armée du), institution, secte ou société religieuse, formée en Angleterre vers 1865, sous la direction du pasteur William Booth, dans le but spécial de l'évangélisatioo des masses. M. Booth, après avoir fait de bonnes études générales, entra à l'âge de 23 ans chez le Dr W. Cooke, wesleyen, pour achever avec quelques autres jeunes gens de s'y préparer an saint ministère. II s'y distingua par ses aptitudes, sa tenue, son caractère et ses talents oratoires. Il passa ses grands examens avec honneur et la Conférence (Methodist Nev^Connesiom ) le reçut pasteur et lui confia des fonctions de prédicateur qu'il remplit avec zèle et conscience. Il parcourut une bonne partie de l'Angleterre en évangélisant, et obtint partout de brillants succès. En 1861 il crut devoir donner sa démission de pasteur régulier, estimant qu'il se rendrait plus utile en se consacrant tout entier, lui et sa femme, à l'évangélisation pure et simple des populations abandonnées. Il avait constaté que partout il y avait une partie considérable des classes pauvres, honteuses ou vicieuses, qu'on ne parvenait ni à atteindre, ni à remuer, quels que fussent les moyens mis en oeuvre. Salles populaires, prédicateurs distingués, pressants appels, rien ne les touchait, parce que rien ne les atteignait; ces classes étaient en dehors de la sphère [d'attraction. II résolut de les aller chercher jusqu'au fond de leur misère et de les attirer par tous les moyens possibles. Les moyens ordinaires étant inefficaces, il recourut à d'autres non encore employés, la curiosité, le bruit. Les noms de pas-teurs, ministres, temples, églises, sermons, fidèles, chers frères, ayant un caractère religieux qui pouvait effaroucher au lieu d'attirer ces auditeurs réfractaires, M. Booth les remplaça par ceux de général, capitaines, quartier général, casernes, soldats, camarades, etc. Les robes noires, avec les rabats, furent remplacés par des uniformes. Puis, à mesure que les conversions se multiplièrent et que l'œuvre s'étendit, il fallut songer à l'organiser, et, les prémisses étant données, l'organisation militaire s'imposa d9elle-méme, 1865. Elle se justifiait, d'une part par certaines locutions bibliques, Ps. 103, 21. 148, 2. 2 Tim. 2; 3. Eph. 6, 11 sq. 1 Thess. 5, 8.; de l'autre par le caractère très militant de l'œuvre, qui se propose surtout la guerre au mal et la conquête des âmes, luttant pour les convertir et cherchant à se les agréger, quand elles sont gagnées, ou les laissant s'affilier à telle église de leur choix. Pour recruter des auditeurs l'Armée recourt volontiers à des processions et à des démonstrations en plein air, avec musique, chants, drapeaux; et quand un auditoire s'est formé, elle cherche à le retenir en l'intéressant par des chants sur des airs connus, populaires, souvent profanes; par des allocutions ardentes, véhémentes, parfois pittoresques. On lui reproche même de créer une excitation factice par des affiches d'un goût plus que douteux. En fait elle a exercé sur les basses classes une influence immense, et elle a obtenu en quelques années de fort nombreuses conversions. Aussi a-t-elle rencontré d'abord d9ardentes sympathies parmi les chrétiens anglais de toutes les dénominations; des lords, des èvéques, un archevêque, la reine elle-même l'ont encouragée de leurs souscriptions. Mais il est arrivé, comme toujours, que le succès même lui a été en piège, et qu'elle est tombée dans diverses exagérations. Son personnel gradé, nouvellement converti, parfois sans une éducation préparatoire suffisante, n'était pas partout à la hauteur de sa mission. Sous prétexte d'originalité, quelques-uns se sont livrés à de vraies vulgarités excentriques; et, comme si ce n'était pas assez de la « folie de la croix, » ils y ont joint les folies de la chair et de l'esprit humain, dans une mesure qui leur a aliéné beaucoup de personnes bien disposées à les appuyer du dehors.

Mais ce qu'on leur a reproché surtout, ce sont leurs Ordres et Règlements, calqués sur le Code militaire, et que l'on a voulu assimiler aux Règlements et aux Exercices spirituels des jésuites. Traduits en français par un Anglais, qui connaissait bien sa langue, mais moins bien le français, ils ont été livrés au public avec des notes et des commentaires qui en exagéraient la véritable signification, et ils ont soulevé l'opinion, en même temps que < des juifs incrédules et jaloux prenaient avec eux des méchants hommes de la populace » (Act. 17, 5.), et la persécution s'organisa sous toutes les formes, littéraire, brutale, officielle, administrative, ou grossière. Les brochures et les journaux sont intervenus, assez généralement hostiles. La passion s'en est mêlée, au point que la discussion était presque rendue impossible. Grâce à cette opinion publique surexcitée, et avec cette complicité inconsciente des personnes religieuses, les ennemis de la religion se sont crus autorisés à commettre toutes les brutalités, insultes, voies de fait, domiciles envahis et saccagés, jeunes filles et vieillards battus et grièvement blessés, et il s'est trouvé des gouvernements pour pactiser avec l'émeute, et pour punir, emprisonner ou bannir, non les agresseurs, mais les victimes de ces attentats. V. une lettre de M. Sautter, et, de Mm* Joséphine Butler, The Salvation Army in Switzerland.

Ce qu'on peut reprocher à plus juste titre, à l'Armée du Salut, outre ses procédés, c'est une dogmatique singulièrement incomplète et une exégèse souvent fantaisiste. Ils l'avouent d'ailleurs, ils ne sont pas théologiens, ils font peu de cas de la théologie. Ils ne connaissent pour ainsi dire pas les sacrements. La justice de Dieu, l'homme pécheur et perdu, le Salut par Jésus-Christ, tout est là. Ce sont en effet les éléments de la vérité, et quand les missionnaires s'adressent aux païens, ils ne leur prêchent pas autre chose pour commencer. Dans la bataille engagée par l'Armée, c'est aussi l'essentiel, mais là comme ailleurs il faut se rappeler qu'il ne suffit pas de poser toujours le fondement; il faut ensuite construire, bâtir, édifier, et c'est un de leurs côtés faibles. Quant au rôle accordé aux femmes, du moment que l'A. et le N. T. mentionnent des prophétesses, on ne peut pas le condamner d'une manière absolue; c'est une affaire de tact et de convenance. Depuis quelques années d'ailleurs assez de femmes sont intervenues dans le gouvernement de l'Église, pour qu'on ne puisse pas y voir une spécialité de l'Armée du Salut. Quoi qu'il en soit, et quel que soit son avenir, ce sera bien Y une des plus étranges manifestations de la vie religieuse en Angleterre, mélange curieux de zèle apostolique et de bizarreries; ils auront remué la vase et fait monter la boue à la surface; ils auront fait poser bien des masques et mis en évidence la haine cachée du cœur humain pour l'Évangile.

SALUTATION i<> angélique, nom qu'on donne souvent à Y Ave Maria, q. v. — 2° apostolique, v. Rom. 1,7. 15, 33. 1 Cor. 1, 3. 16, 20. 2 Cor. 1, 2. 2 Jean 2. 1 Thess. 1, 1, etc.

SALVE REGINA, antiphone, ou antienne en l'honneur de la Vierge, formé de 7 lignes d'inégale longueur, attribué à Pierre de Compostelle du 9™® siècle, ou à Hermann Contrac-tus du Hme. La dernière ligne: 0 clemens, 0 pia, 0 dulcis Virgo Mania, paraît être une addition postérieure, à cause de la rime; on croit qu'elle a été ajoutée par saint Bernard à Spire. Musique par Pergolèse, Haydn, etc. Sermons par Winkelhofer, avec préface de Sailer. Cette formule, qui ne se trouve pas dans la Bible, passe pour avoir fait des miracles.

SALVI, Giambattista, ou Jean-Baptiste, surnommé de son temps le peintre des Madones, travailla à Rome sous le Dominicain, Guido et Albani, mais s'inspira surtout de Raphaël. On l'appelle quelquefois Sassoferrato, du nom du bourg où il naquit 11 juil. 1605. f 8 août 1685.

SALVIEN l°v. Priscilliens.2° écrivain ecclésiastique, né vers 390 aux environs de Cologne, épousa une païenne, Palladia, qu'il convertit; il en eut une fille, Auspiciola, puis du consentement de sa femme, il renonça au monde, distribua son bien aux pauvres et se retira dans un couvent, probablement à Lérins 420, puis à Marseille où il fut ordonné prêtre et où il enseigna; il eut parmi ses élèves 2 fils d'Euchère, Salonius et Veranus. f 48*- On a de lui des traités contre l'Avarice, sur le Gouvernement de Dieu, ou Providence, et des Lettres. Œuvres, par Baluze 1684. Son style a du trait, à la fois fougueux et mélancolique.

SALZBOURG, le Juvavum des anciens dans la Tauride celtique (Bohême), appelé aussi Co• lonia Adriana, du nom de son fondateur; l'évangile s'y établit au temps de Valentin, de Séverin et du martyre Maxime. Cette florissante cité fut détruite par Attila 448 et les sapins s'élevèrent au milieu de ses ruines, mais elle se releva vers 700 à l'appel de Rupert, qui en fit une nouvelle station chrétienne et y construisit l'église de Saint-Pierre et un couvent. L'évêché ne tarda pas à devenir un archevêché, et même sous Léon III, la métropole de l'Allemagne, 798, comprenant la Bavière, la Moravie, la Bohême et l'Autriche actuelle. Boniface avait dans l'intervalle rattaché ce diocèse à l'autorité romaine, malgré la résistance de l'évêque Jean, accentuée encore par son successeur Virgile. A mon, le premier archev. envoya des missionnaires chez les Slaves et les Avares, et entra en lutte avec les év. d'Aquilée et de Passait qui lui reprochèrent d'empiéter sur leur juridiction. Sous Léon VU la lutte s'envenima* et les droits de Salzbourg furent transférés à Gérard de Passau 937, mais pour lui être rendus en 971. Les occasions de conflits ne manquèrent pas les siècles suivants, depuis la querelle des investitures jusqu'aux guerres hussites. A l'époque de la réformation c'est le cardinal Matthias Lang qui occupe le siège archiépiscopal; c'est lui qui fait venir Staupitz à Salzbourg et qui le nomme son chapelain, mais il se montra bientôt hostile au mouvement, bannit Speratus, complota la mort d'Agricola et fit décapiter Schàrer. Les luthériens furent bannis sous ses successeurs. L'archev. Paris, fondateur de l'université, réussit par sa sagesse à préserver de mal son diocèse pendant la guerre de 30 ans: mais les persécutions recommencèrent après lui à l'instigation des jésuites, et les protestants furent chassés par milliers au gros de l'hiver, leurs biens étant confisqués, et leurs livres brûlés. Les persécutions durèrent, avec de courtes accalmies, pendant près d'un siècle, souvent cruelles, toujours rapaces. Les évangéliques se cachaient; on feignit de revenir à des sentiments plus humains, et par de perfides promesses on leur demanda de se faire reconnaître: 20,678 donnèrent leurs noms; 70 de leurs chefe furent arrêtés et maltraités, et plus de 20,000 durent émigrer; ils se rendirent en Prusse, en Lithuanie, en Hollande, en Amérique, partent accueillis à bras ouverts, pendant que leurs biens confisqués servaient à grossir le trésor de Rome et des jésuites, sans profit pour le pays qui fut ruiné, et à élever dans la foi catholique les enfants qu'on avait arrachés à leurs parents. Le traité de Luneville 1802 sécularisa l'évêché et le transforma en électorat; en 1808 il passa à la Bavière, al fit retour à l'Autriche en 1814, et continua dès lors d'être le siège d'un archevêché.

SALZMANN, Christian-Gotthilf, pédagogue distingué, né 1 juin 1744 à Sfimmerda, pasteur 1768 à Rohrborn, puis à Erfurt, s'éprit des idées de Rousseau et de Basedow, et se les appropria en les redressant. Il fonda à Schnep-fenthal, non loin de Gotha, une maison d'éda-cation qui obtint un immense succès, et dans laquelle il vieillit comme un vrai patriarche, entouré de nombreux élèves et de maîtres distingués. En 1788 il ajouta à son établissement une imprimerie et une librairie, f 1811. I! a laissé de nombreux ouvrages traitant de l'éducation, surtout au point de vue religieux, pour les maîtres, les parents, et les enfants; an Bon messager de la Thuringe, commencé en 1788, ete. Plusieurs ont été réimprimés après sa mort.

SAM, Som, ou Saum, Conrad, le réformateur d'Ulm. Né 1483 à Rothenacker, Wurtemberg, il étudia à Tubingue. Il était en 1530 curé de Brakenheim, quand il entra en relations avec Luther et passa au protestantisme. En 1524 le peuple d'Ulm le choisit pour pasteur. En 1526 il se maria, en même temps qu'il se prononçait sur l'eucharistie dans le sens des Suisses. Très lié avec Zwingle et OEcolampade, il s'efforça de maintenir l'union entre les diverses communions protestantes. Malgré son zèle il ne gagna que lentement du terrain sur les catholiques, et c'est seulement en 1531 que la Réforme s'établit dans Ulm. Sa grande activité l'usa peu à peu, et il f 20 juin 1533 d'une attaque d'apoplexie.

SAMBUGA, Jos.-Ant.-François-Marie, grand ami de Sailer. Né 2 juin 1752 à Welldorf, près Heidelberg, animé de dispositions ascétiques, orphelin à 16 ans, il se rendit en Italie, où il fut ordonné prêtre en 1774 et nommé aumônier de l'hôpital allemand de Côme. Mais il revint bientôt dans son pays et y occupa successivement différentes places; en 1787 il était prédicateur de la cour à Manheim. La duchesse palatine lui confia en 1797 l'éducation de son fils, qui fut plus tard le roi Louis. Frappé en 1813 par la mort de deux neveux bien doués, qu'il avait élevés, et peu après par la mort de son beau-frère, il ne put résister à ces coups douloureux, et il f 5 janv. 1815, conseiller ecclésiastique à Munich. Il a laissé plusieurs livres de dévotion très estimés.

SAMOA, ou Archipel des Navigateurs, en Polynésie; îles découvertes par Bougainville 1768, visitées en 1830 par John Williams, évan-gélisées en 1835 par la Soc. des missions de Londres, en 1845 par des prêtres romains, en 1857 par les méthodistes. Sur 30,000 habitants il n'y a plus un seul païen; tous sont devenus chrétiens évangéliques, sauf 4000 catholiques. Point central de la mission polynésienne, temples, écoles, un séminaire, imprimerie, journal, etc.

SAMOSATE, Samosatiens, v. Paul 6<>.

SAMPSÉENS, nom donné parÉpiphanes aux Elkésaïtes, q. v. Il le traduit par hélisques (du soleil), et le fait dériver de l'hébreu thèmes, soleil, peut-être parce qu'ils se tournaient vers le soleil quand ils priaient.

SANCHEZ, Thomas, jésuite espagnol, né 1550 à Cordoue, d'une bonne famille. Un fort bégaiement l'empêcha quelque temps d'être admis dans l'ordre, mais il fut guéri de cette infirmité, grâce, dit-il, à l'intercession de la vierge qu'il pria avec ardeur. Directeur du noviciat de Grenade, il se distingua par son érudition, dit-on, et par l'austérité de sa vie. f 19 mai 1610 à Grenade. Son livre sur le Sacrement du mariage est d'une obscénité révoltante et lui valut une mercuriale sévère de la part d'Arnauld de Saint-Cyran (signée Petrus Aure-lius) dans ses Vindicte censurai facult. Paris. Il a publié aussi des Conseils et une Étude sur le Décalogue. Il défend le probabilisme sous toutes ses formes, jusqu'à justifier l'assassinat en guet-apens, pourvu qu'on allègue l'absence d'intention mauvaise.

SANCHONIATHON, vieil historien phénicien, de Tyr ou de Sidon, que les uns font contemporain de Sémiramis, les autres de Moïse, ou de Gédéon, mais dont l'existence, malgré les lénèbres qui l'entourent, ne saurait être sérieusement contestée. On a donné à son nom diverses étymologies: serviteur de Dieu, épée de Dieu, donné de Dieu (comme Elnathan, ou Nathanaël), mais aucune n'est sûre. Il doit avoir vécu en Phénicie, à Béryte, ou à Beirout, et son Histoire de la Phénicie, qui commence avec la création du monde, aurait été dédiée au roi de Béryte Abibaal. Un grammairien grec Heren-nius Philon, de Guébal ou Byblos, qui vivait à la fin du 1er siècle de l'ère chrétienne, en a le premier traduit en grec l'Histoire, ou Théologie phénicienne, 8 ou 9 livres; mais ce travail est perdu, et il n'en reste que des fragments conservés dans la Préparation évangélique d'Eusèbe. Ces fragments ont été réunis par Orelli, Leipzig 1826, et mieux par C. Muller, Paris 1849. Ils suffisent à peu près pour reconstituer son système du monde, où l'on retrouve des réminiscences ariennes, phéniciennes, égyptiennes, peut-être même hébraïques. Au commencement régnait le Chaos, avec les ténèbres, et le vent soufflait; l'Esprit le pénétra dans une pensée d'amour, et il en sortit la Mot, l'étendue liquide, qui à son tour donna la naissance au monde, sous la forme d'un œuf. En même temps parurent dans le ciel les astres, et leur chaleur produisit le vent, les nuages et la pluie, puis les êtres organisés éveillés par l'éclair et le tonnerre. De l'union du vent et du désert naquirent deux hommes mortels, Eon et Protogonos, qui les premiers cueillirent des fruits; ils eurent pour enfants Genos et Genea, qui peuplèrent la Phénicie, etc. En somme ce vieux document est plutôt un objet de curiosité qu'il n'a de valeur réelle; il représente certaines idées et des traditions plus anciennes qui avaient cours au moment où il fut écrit. Mover, Ewald, Bunsen et Renan l'ont spécialement étudié. On prête au même auteur un traité sur la Physique d'Hermès, également perdu. Une spéculation littéraire assez curieuse fut faite en 1836 à Hanovre par Fréd. Wagenfeld, ou Wild, puis à Brème en 1837 avec préface de Grotefend; ce fut la publication en grec, puis avec trad. latine, de

l'ouvrage complet de Sanchoniathon en 9 livres. Cet ouvrage aurait été retrouvé dans le couvent de Sainte-Marie de Merinhao, Portugal, par le colonel Pereîra, et apporté en Allemagne par un sous-officier nommé Christophe Meyer; mais ni le couvent ni les personnes n'ont existé, et la fraude fut dévoilée par le fils de Grotefend lui-même. La contrefaçon dn reste était habilement faite, avec l'intercalation des fragments d'Eusèbe, reliés entre eux dans l'esprit et avec les documents de l'époque.

SANCTION, v. Pragmatique.

SANDEMANIENS, ou Glassites, secte de presbytériens écossais, poussant le congrégatio-nalisme à outrance, repoussant toute ingérence d'un synode ou de toute autre autorité, même ecclésiastique, dans les affaires intérieures d'une église. Ils avaient des mœurs sévères et proscrivaient le sort et les jeux de hasard. Chaque église avait ses évéques, ses anciens et ses diacres. Le fondateur, John Glass f 1773 était très absolu. Son gendre, Robert Sandeman, né 1723 à Perth, f 1772 dans la Nouvelle-Angleterre, où il était allé pour y propager ses idées.

SANDWICH (Iles), archipel de la Polynésie, le plus septentrional, situé à. 20» au nord de la ligne. Il se compose de 13 îles d'origine volcanique, dont 8 seulement habitables. La principale est Hawaï (ou Owhyhee, même nom avec l'orthographe et la prononciation anglaise). Sol fertile, riche végétation, climat enchanteur; les habitants sont de race polynésienne, idolâtres malgré une certaine culture, ils ont longtemps pratiqué le tabou, q. v. Aperçues en 1542, elles furent découvertes en 1778 par le capit. Cook, qui leur donna le nom de Sandwich, premier - lord de l'Amirauté, et qui y périt l'année suivante dans une rixe provoquée par les indigènes. Le roi Tamehameha Ier, qui régna de 1784-4819, et qui s'était soumis toutes les lies voisines, appréciait la civilisation. Mais pendant longtemps les blancs n'y apportèrent que leurs boissons et leurs vices. En 1820 le Board américain y envoya ses 5 premiers missionnaires avec 4 indigènes convertis qui avaient été élevés aux États-Unis. Le jeune roi Hihoriho, ou Tamehameha II devint chrétien 1820; il habitait Honolulu dans l'ile d'Oahu, ville de 40,000 habitants; f 1824 à Londres. En 1823 l'Amérique envoya 20 nouveaux missionnaires, et en 1832 les îles ne comptaient pas moins de 19 stations prospères. Dès 1827 on comptait 21 chefs parmi les partisans du christianisme, et la pieuse reine Kaahumana avait été baptisée sous le nom d'Élisabeth. Mais quand, à sa mort, son fils Tamehameha III prit les rênes du gouvernement, 1832, ce jeune prince frivole, qui s'entoura de jeunes gens, résolut de secouer le joug de moralité qui pesait sur l'île, et il

s'ensuivit une époque de relâchement qui finit par inquiéter les principaux chefs de l'île. Secondés par la reine Kinan, ils réussirent* faire revivre les lois restrictives du commerce dos boissons alcooliques. Un autre danger menaçait la mission. Des prêtres de Rome étaient venus en 1827 s'établir dans le pays. Au bout de 4 ans le roi les fit reconduire en Californie; ils revinrent en 1837, mais on ne leur permit pas de débarquer. Le gouvernement français prit parti pour eux, les renvoya en 1839 sur le vaisseau l'Artémise, et exigea pour eux une indemnité de 25,000 dollars, une église et le droit de célébrer leur culte. Devant la force représentée par la France, le pauvre roi dut céder. Les catholiques se construisirent une chapelle à côté du temple protestant à Honolulu, et le prêtre Walsh, un Irlandais, interdit la lecture de la Bible et se montra coulant sur l'usage du tabac, du rhnm et de l'eau-de-vie. Il eut peu de succès. Vers le même temps un grand réveil eut lien, et des milliers de païens se joignirent à l'Église. Le roi, pour se mettre à l'abri de toute nouvelle invasion étrangère, a demandé à l'Angleterre, et obtenu en 1842, qu'elle reconnût son indépendance. Auj. ces îles peuvent être considérées comme une terre chrétienne. Elles ont nne constitution, des lois, de nombreuses églises, des écoles, des journaux, des imprimeries, etc. v. Porret, Un miracle au 19m« siècle, Lausanne; Mm« W. Monod, Cinquante années de la vie d'an peuple, Toulouse.

SANG, lo On donne souvent au martyre le nom de Baptême de sang. 2<> Noces de sang, le massacre de la Saint-Barthélemy, ordonné par Charles IX à l'occasion du mariage de sa sœur avec Henri de Navarre. 3» Journée du sang a Prague; massacre de la noblesse de Bohême, ordonné par Ferdinand II, 16 juin 1621, après la bataille de la Montagne blanche. 4<> Théologie du sang, terme de mépris par lequel on affecte de désigner la doctrine de la rédemption quand elle insiste trop matériellement sur le sang de Christ comme source unique du salut. On a quelquefois reproché aux moraves des ex: cès de langage sous ce rapport. 5° Conseil de sang, tribunal établi en 1567 par le duc d'Albe dans les Pays-Bas, célèbre par ses exécutions. 6o Fête du précieux sang de Christ, se confondit d'abord avec le vendredi qui suit le 4m* dimanche de carême; plus tard on la mit au 4™® on 5m« dimanche après Pentecôte. Un décret du 10 août 1849 l'a mise au 1er dimanche de juillet.

SANNAZAR, Jacopo, poète italien, auteur de 3 distiques sur Venise, pour chacun desquels la ville lui paya 200 ducats. Né 28 juill. 1458 a Naples, il entra à l'académie sous le nom d'Ao-tius Sincerus, resta fidèle à ses anciens maîtres après l'annexion de son pays à l'Espagne, se construisit au pied du Pausilippe une chapelle en l'honneur de la Vierge, et fonda l'ordre des Serviteurs de Dieu. Il suivit Philippe en France 1901. On l'a surnommé le Virgile chrétien, à cause de quelques poésies religieuses très estimées: Lamentations sur la mort de Christ, et De partu Virginis, 3 chants, f 27 avril 1530 à Naples.

SANSOVINO lo André Cartucci, né 470, fils d'un paysan, sculpteur et architecte, travailla pour Jules II, pour le roi de Portugal et pour Léon X. f 1529. On lui doit les ornements de plus. égl. et de la Casa Santa. 2<> Son élève Ja-cobo Tatti, né 1479, f 1570.

SANTAREL, Ant., jésuite, né à Adria 1569, f à Rome 5 déc. 1649. Auteur d'une Vie de Jésus, d'un Traité du jubilé, et surtout d'un Traité moral sur les hérésies où, comme Mariana, il revendique pour le pape la puissance la plus absolue sur les rois et les princes, et qui fut condamné par la Sorbonne et brûlé publiquement à Paris, 13 mars 1626.

SANTES PAGNINUS, ou Xantes, dominicain, savant orientaliste, qui fut à Fiesole l'élève de Savonarole. Né vers 1470 à Lucques, il fut l'ami de Léon X qui l'appela à Rome comme prof, de langues orientales. En 1521 secrétaire du légat à Avignon; en 1524 à Lyon, où il f 24 août 1541. Auteur de plusieurs ouvrages importants d'herméneutique, de critique sacrée, Gramm. hébraïque, Dictionn., notes sur le Pentateuque et les Psaumes. On lui doit surtout une trad. latine de la Bible, premier essai de ce genre depuis saint Jérôme, fruit d'un travail de 30 années, dans lequel il put tenir compte des traditions rabbiniques, s'attacha à traduire mot à mot, et reproduisit pour les noms propres les sons hébreux autant qu'il put le faire. Cette Bible parut à Lyon 1527-1528, dédiée à Clément VII, puis à Cologne 1542. Elle a été souvent réimprimée, entre autres par R. Étienne, Genève 1557.

SANTEUIL, Jean (de), en latin Santolius, connu par ses aventures, son amour de la table, ses bons mots et ses bizarreries; né 12 mai 1630, il entra dans les chanoines réguliers de Saint-Victor, où il fut fait sous-diacre. Auteur de poésies latines, très estimées, mais un peu profanes, ses supérieurs l'obligèrent à se consacrer exclusivement à des sujets religieux; il fit une épitaphe sur le docteur Arnaud, mais elle déplut aux jésuites, et il dut se rétracter. Il se mit dès lors à la poésie sacrée et composa de belles hymnes, qui le placent au premier rang des poètes latins modernes, f 5 avril 1697 à la suite d'un bon repas, peut-être empoisonné par plaisanterie. Portrait peu flatteur, par La Bruyère. — Son fr. Claude a aussi composé des poésies latines.

SANZIO, v. Raphaël.

SARABAITES, v. Rhemoboth.

SARAGOSSE, v. César-Augusta.

SARDAIGNE. Cette lie fut évangélisée déjà dans le 2°" siècle, mais le christianisme n'arriva que lentement à dominer, et jusqu'au 6me siècle les païens furent tolérés moyennant une redevance payée aux empereurs et même aux évéques. C'est seulement après la victoire de Zabordas 594, et grâce à des moyens de rigueur, que Grégoire Ier réussit à soumettre toute l'Ile à son joug. Depuis qu'en 1720 la Sardaigne eut passé à la maison de Savoie, les deux histoires se confondent, sans présenter rien de spécial. Ce n'est plus l'île, c'est le royaume de ce nom qui entre en scène, et il ne cesse de réclamer et de maintenir ses droits de souveraineté contre la cour de Rome. Il y a rupture après 1730, mais réconciliation et concordat en 1741. Le placet est introduit, les immunités du clergé et le droit d'asile sont limités. En 1841 ils le sont plus encore, et les ecclésiastiques, en cas de crime, relèvent des tribunaux civils. L'occupation française avait introduit momentanément un droit nouveau; la bulle de circonscription remet les choses en l'État, et le roi se réserve la nomination des évéques. Il y eut 4 archevêchés sur terre ferme, Chambéry, Turin, Vercelli et Gènes, et 3 dans l'Ile, Cagliari, Sassari, Orista-gni: et 37 évéchés, dont 8 dans l'Ile. La Constitution de 1848 est plus accentuée; les jésuites sont bannis et leurs biens sont confisqués. En 1849 sous le ministère Siccardi, tous les privilèges ecclésiastiques sont abolis, et la liberté des cultes est proclamée; les juifs rentrent dans le droit commun. En 1855 la plupart des couvents furent sécularisés, et leurs biens, qui étaient considérables, furent employés à l'amélioration du sort du bas clergé et à des objets d'utilité publique, ce qui amena l'excommunication de ceux qui avaient perpétré cette mesure. La guerre de 1859 fit du roi de Sardaigne, Victor-Emmanuel, le roi de toute l'Italie, la suppression des États de l'Église, et bientôt Rome capitale.

SARDES, v. Dict. de la Bible. Ville de Lydie, située dans une plaine fertile, arrosée par le Pactole. Mœurs dissolues. Détruite sous Tibère par un tremblement de terre et bientôt rebâtie. Son premier évéque fut Clément.

SARDIQUE, ville d'IUyrie, auj. Sophia ou Triaditza, patrie de l'emp. Galère, qui par un édit de 311 fil cesser les persécutions contre les chrétiens. Il s'y tint en 347 un concile, présidé par Hosius de Cordoue, qui comptait 100 év. occidentaux et 70 orientaux. Les ariens, ou eusébiens, au nombre d'environ 76) ayant appris qu'Athanase et Marcellus d'Ancyre, excommuniés à Antioche 340, se proposaient d'y assister, et que les occidentaux fraternisaient avec eux, ils refusèrent de prendre part aux débats et se retirèrent à Philippopolis où ils se constituèrent en contre-concile et condamnèrent les homo-ousiens. Le conc. de Sardique réintégra Athanase dans son église.

SAREPTA, colonie morave au sud de la Russie, aux environs de Saratov, fondée en 1765.

SARPI, Paul (fra Paolo), appelé aussi Paul de Venise, de son lieu de naissance, ou le servi te, parce qu'il s'était affilié à cet ordre. Né 14 août 1552, fils d'un marchand et d'une vénitienne de la famille Morellis. il fut élevé dans un collège de jeunes nobles dirigé par son oncle, et se montra toujours sérieux, sobre, dévoré du désir de s'instruire. Il ne mangeait jamais de viande. A 14 ans il entra, malgré sa mère, chez les servîtes, prononça ses vœux à 20 ans et fut ordonné prêtre à 22. Il visita ensuite Padoue, Mantoue, Milan, où il se lia avec Ch. Borromée. A 26 ans il est docteur en théol. et provincial de son ordre, puis procureur général 1585. En 1597 il défendit les droits de Venise contre Paul V, fut nommé théologien consultant de la ville, et finalement membre du Tribunal des Dix. Il soutint contre le pape, que tout pouvoir vient de Dieu directement, et que Venise avait le droit de repousser toute ingérence dans ses affaires. Cela lui valut une citation à comparaître devant l'Inquisition à Rome le 30 oct. 1606. Il avait déjà été dénoncé une première fois comme hérétique, mais sans succès. Il refusa de comparaître, mais annonça une justification écrite. Une trêve fut consentie qui lui offrait toute garantie, mais 5 bandits soldés tentèrent de l'assassiner. Pendant qu'il se remettait lentement de ses 3 graves blessures, les moines de son ordre complotèrent à leur tour de lui ôter la vie, mais leur projet fut découvert, et c'est Beilarmin qui l'avertit de se tenir sur ses gardes. Il f 15 janv. 1623 dans son couvent. Sarpi avait fait des études aussi solides que brillantes; il était versé dans les sciences naturelles comme dans la théol., et il a émis sur la théorie de la connaissance des idees qui font penser à Locke. En religion il était peut-être plus patriote et plus polémiste que véritablement pieux et convaincu. On a été trop loin en affirmant que, s'il avait vécu, Venise serait devenue protestante; en somme il a toujours été catholique. Mais on a eu tort également d'attribuer à des ambitions déçues son opposition à la cour de Rome: rien ne prouve qu'il ait désiré un évêché, et sa position dans son ordre et dans sa ville le met au-dessus de ce soupçon; il n'était pas vénitien pour oublier la vieille indépendance de sa patrie. Il a beaucoup écrit; ses principaux ouvrages sont: L'hist. particulière des choses qui se sont passées entre Paul V et la sérénissime Républ. de

Venise, 1606; l'Hist. du concile de Trente (mm un pseudonyme), Londres 1619; une Hist. de l'origine des lois et usages de l'Inquisition, 1637. CEuvr. compl. Venise 1677.

SARTO (André del), Vanucchi, peintre célèbre, auteur de tableaux religieux appréciés: la Charité, plusieurs madones, le sacrifice d'Abraham, la Cène, un Christ mort, etc. Né à Florence 1488, il fut d'abord orfèvre, puis se mita la peinture et étudia surtout Masaccio et Michel Ange. Il fit un voyage en France à la cour de François 1er 1515-1518, et f 1530 de la peste à Florence, dans une position peu brillante. On cite ses fresques de saint Philippe, Jean Baptiste, la naissance de la Vierge, etc. Remarquable par le coloris, la distinction et la vie de ses figures.

SARTORIUS, Ern.-Guill.-Christian, né 10 mai 1797 à Darmstadt, prof, à Marbourg, en 1824 à Dorpat où il est nommé docteur en théol. et conseiller, en 1835 à KiJnigsberg, surintendant général et prédicateur de la cour, f 13 juin 1859. Un des plus fermes représentants de l'orthodoxie, il combattit le rationalisme en faisant ressortir ses affinités avec le catholicisme, ce qui lui attira plusieurs réponses. Il se montra aussi un fervent partisan de l'Union, donnant entre autres pour raison, que le luthéranisme étant déjà lui-même une transaction, une union, c'était à lui que l'union devait finalement aboutir. Outre de nombreux articles dans la Gazette évang. et dans d'autres journaux et revues, il a publié plusieurs ouvrages de dogmatique, de polémique et d'édification pure: l'Insuffisance du libre arbitre, Doctrine protestante sur les droits sacrés de l'autorité temporelle, la Religion dépassant les limites de la simple raison, la Personne et l'œuvre de Christ (contre Schleiermacher), trad. en plusieurs langues; la Doctrine du saint amour, des Méditations, Sermons, etc.

SATANIENS, parti de la secte des messa-liens, qui, exagérant sa doctrine des démons, allait jusqu'à rendre un culte à Satan, comme à un puissant ennemi qu'il fallait se concilier.

SATURNIN lo ou Satomilos, gnostique chrétien, qui vivait sous Adrien à Antioche de Syrie. Selon lui, le Dieu inconnu aurait créé diverses classes d'esprits, et au dernier rang les esprits des 7 planètes, à la tête desquels se trouve le Dieu des Juifs. Ils créent les mondes, et sur la terre, la plus belle de leurs œuvres, ils créent l'homme, encore sans Ame et que Dieu vivifie. Le mauvais principe, Satan, crée aussi des hommes où le mal domine; ils se marient, ils mangent de la viande, et finissent par séduire ceux en qui est l'étincelle divine. La différence est tranchée entre ces deux espèces. Dieu envoie des prophètes, mais Satan des faux prophètes.

Enfin Dieu envoie son éon, le noûs, l'esprit, ponr ramener à lni ceux qu'il avait créés. Ce noûs n'a qu'un corps apparent. Pour se préserver du mauvais principe, il faut éviter le mariage et les viandes.

2* Prêtre de Numidie qui, après l'apostasie de l'év. Fundan, se mit à la tête de la congrégation d'Abitine. L'église étant fermée, on se réunissait dans une maison particulière. Un dimanche, chez Octavius Félix, 49 personnes, parmi lesquelles Saturnin et ses 4 enfants, le sénateur Datif, et une jeune femme nommée Victoria, furent surprises, arrêtées, et conduites d'abord au tribunal, puis à Carthage où siégeait Annlin, le gouverneur de la province. On les soumit tous, sans distinction d'âge ou de sexe, aux plus horribles tortures pour les contraindre d'apostasier; mais ils ne dirent pas autre chose que: 0 Dieu, donne-nous la force de souffrir pour toi. Ceux qui survécurent à la torture furent mis à mort; c'était l'an 303, ou 304.

3° Italien du 3®* siècle, sacré èvêque par Fabien, qui l'envoya avec 6 autres missionnaires, également évêques, pour évangéliser les Gaules. Il se fixa & Toulouse, mais les prêtres païens le tirent saisir un jour de fête et le livrèrent à la fureur du taureau destiné à leurs sacrifices. Deux femmes chrétiennes relevèrent son cadavre et l'enterrèrent secrètement. Son successeur, l'évêque Hilaire le fit transporter dans une chapelle.

4<> Autre martyr de Carthage, qui fut, 302, livré à un léopard.

SAUMAISE, Claude (de), né 15 avril 1588 à Semur, fils d'un conseiller au parlement, Bénigne, fit ses premières études avec son père, et vint à Paris, 1604, puis à Heidelberg, 1606; il étudia la philosophie, la littérature, les langues anciennes, le droit, les sciences, la médecine, l'arabe, le caldéen, le persan, la copte, etc. 11 se fit recevoir avocat en 1610, mais n'accepta jamais une charge, qui l'aurait détourné de ses travaux scientifiques. Très lié avec Casaubon et Gruter. II avait embrassé le protestantisme, sous l'influence de sa mère, ce qui lui était en France toutes chances d'avenir, et le força de se rendre à l'étranger. Appelé à Padoue et à Bologne à la suite de remarquables études sur Pline et sur Solin, il refusa ces offres par égard pour son père qui avait besoin de son aide. Mais quand il se fut convaincu de la parfaite inutilité de ses efforts pour réussir dans son pays, il accepta une place de prof, à Leyde 1632. Sa réputation était universelle. Lors d'un séjour à Paris, Richelieu essaya de se l'attacher; il lui donna le titre de conseiller d'État et la croix de Saint-Michel, et voulut en faire son historiographe; mais Saumaise aima mieux retourner à Leyde, où par reconnaissance on éleva son traitement de moitié, le dispensant en outre de tout impôt. Il se laissa persuader par Charles II décrire l'apologie de son père et son livre Defensio regia pro Carolo ce qui lui attira, outre une vive réplique de Milton, des récriminations de la part des républicains hollandais. Mécontent, il accepta une invitation de Christine et partit pour la Suède 1650, mais il n'y trouva pas ce qu'il avait espéré, et il revint en Hollande l'année suivante. On lui écrivait que Leyde ne pouvait pas plus se passer de lui, que le monde du soleil. Souffrant de la goutte, il alla chercher du soulagement à Spa, mais il y f 3 sept. 1653. Il fut enterré à Maestricht. Il a laissé 80 ouvrages imprimés et 60 manuscrits. Les plus importants pour la théol. sont une étude sur la Primauté du pape, un traité sur les évêques et les prêtres, un sur la Transsubstantiation, etc. Il a écrit aussi sur la médecine, l'économie politique, l'histoire, les questions militaires, etc.

SAUMUR, ville de Maine-et-Loire, de 12 à 15 mille habitants; ancienne place forte; connue dans l'hist. ecclés. par son Académie protestante. Décrétée par le synode de Montpellier 1598, l'Académie fut placée à Saumur, parce que DuPlessis-Mornay s'y trouvait comme gouverneur; il en fut aussi le protecteur et veilla à la doter de professeurs capables et distingués. Elle ne fut ouverte qu'en 1604, mais déjà en 1607 elle comptait un bon nombre d'étudiants. Elle ne tarda cependant pas à devenir suspecte, à cause de la liberté d'allures de quelques-uns de ses maîtres, et si elle n'arriva pas jusqu'au rationalisme, elle le cotoya souvent, et les synodes eurent fréquemment à intervenir entre ses profeseurs et les églises. Cameron l'un des premiers donna au libre examen un développement et revendiqua pour la critique des droits que l'on ne reconnaissait pas encore. Amyraut 1633 àl664 attaqua le dogme de la prédestination et essaya de le remplacer par l'uni versaiisme hypothétique, ce qui lui valut, ainsi qu'à Tes-tard, une dénonciation en règle de P. Du Moulin, et de la part du synode d'Alençon 1637 une exhortation à être prudents dans le choix de leurs expressions. Josué de la Place, 1633 à 1665 attaquait la doctrine du péché original, admettant bien son hérédité, mais non son imputation; le synode de Charenton 1645 le condamna, mais plusieurs synodes provinciaux en appelèrent à un prochain synode et refusèrent de se soumettre à cette sentence. Louis Cappel 1614 à 1658, alla plus loin, et sous prétexte de points-voyelles et de variantes, il attaqua la doctrine de l'inspiration de la Bible et s'attira de vives répliques de Du Moulin, Spanheim père et fils, Samuel des Marets, André Rivet, et un désaveu des cantons évangéliques de la

Suisse. Étienne Gaussen 1665 à 1675 ne jeta pas an grand lustre sur l'Académie. Pajon, successeur d'Amyraut 1665 à 1668 se fit accuser de pélagianisme et renonça à l'enseignement pour accepter les fonctions de pasteur à Orléans. Étienne de Brais f 24 juin 1679 à Saumur, est connu par un bon Comment, sur les Romains. Du Plessis-Mornay légua sa biblioth. à l'Académie, et cette bibliothèque s'enrichit successivement de beaucoup d'autres dons du même genre; elle fut remise à l'hospice de Saumur, quand l'Acad. fut supprimée, 8 janv. 1685. L'hospice la fit vendre et en tira 1550 livres.

SAUNDERS, Laurent, théologien anglais. Après avoir été élevé au collège d'Éton et fait de bonnes études à Cambridge, il fut nommé par Édouard VI pasteur k Lichfield, puis professeur de théologie. Mais Édouard VI mourut et Marie qui lui succéda était hostile à l'Évangile. Après un sermon sur 2 Cor. XI, 2-4, il fut mandé par son évêque qui le fit mettre en prison comme suspect de rébellion et d'hérésie. Il y languit quinze mois, pendant lesquels il écrivit de nombreuses lettres qui nous sont parvenues, à Cranmer, Ridley, Latimer, etc., et à sa femme. Le 4 février 1555 il fut dégradé par son évêque et livré au bras séculier. Il fut emmené sous bonne escorte à Coventry et brûlé 8 février.

SAURIN 1° Jacques, né à Nîmes 6 janv. 1677, fils d'un avocat de mérite. Chassée par la révocation de l'Édit de Nantes, la famille se réfugia k Genève. Jacques servit de 1694 à 1697 dans l'armée de Savoie, sous les ordres de lord Gal-loway, reçut un drapeau et fut nommé enseigne après une action d'éclat. Après le traité de Rys-wyk, 20 sept. 1697, il revint à Genève achever ses études de philos, et de théol., qu'il termina d'une manière brillante, sous Tronchin, Pictet, Léger et Alph. Turrettini. Son éloquence était déjà remarquée, et ses exercices homilétiques attiraient un public si nombreux à l'Auditoire, qu'il fallut bientôt les transporter à la cathédrale. Sa foi était ardente et communicative; il était plein de zèle pour l'Évangile et pour l'Église. En 1700 il se rendit en Hollande, puis à Londres, ob l'égl. wallonne l'appela comme pasteur; en 1703 il épousa Catherine Bouton; mais le climat de Londres leur étant contraire, il accepta 1705 une place qui fut créée exprès pour lui sous le nom de chaire des nobles, et qu'il occupa pendant 25 ans. f 30 déc. 1730. Ses dernières furent attristées par des attaques jalouses et qui ne furent pas toutes loyales. Il avait écrit un ouvrage sur l'État du christianisme en France, dans lequel il prenait successivement à partie les catholiques, les temporisateurs et les déistes. On lui reprocha sa modération comme une preuve d'indifférence;

ses manières distinguées, comme prétentieuses; on opposa à l'austérité de ses moeurs des anecdotes, vraies ou supposées, de sa jeunesse militaire; on lui reprocha des paroles, peut-être mal comprises, ou même peu réfléchies sur le mensonge officieux; enfin l'on fit condamner sa doctrine dans deux synodes. Des médiocrités envieuses envenimèrent ce qu'il pouvait y avoir de juste dans quelques-unes des critiques dont il était l'objet, et le chagrin qu'il en eut hâta sa fin. Sa réputation repose tout entière sur ses sermons; il en a publié 5 volumes; 7 ont été publiés après sa mort par son fils Philippe. Ce qui les distingue, c'est la netteté de la pensée, la clarté du plan, la logique des déductions, la rapidité de la phrase, parfois un peu de négligence et quelque chose de heurté dans le style. Ils sont plus polémiques et didactiques qu'édifiants; moraux plutôt que dogmatiques: l'onction fait souvent défaut. Il n'a rien de dé-clamateur. La grâce et la majesté de son débit ajoutaient encore à l'effet produit par sa vigoureuse argumentation. Son sermon sur l'Aumône, l'un des plus nobles et des plus touchants, remua tout son auditoire et valut aux pauvres d'abondantes moissons. Souvent réimpr. et trad. en diverses langues; v. Chenevière, Weiss. Ga-berel, Oosterzee, Berthault, Vinet. Outre ses Sermons, Saurin a aussi écrit des Discours historiques, critiques, etc., sur l'A. et le N. T., 2 vol. f°, 1720, continués par Roques et Beausobre; un catéchisme 1722, et un traité sur l'éducation des princes.

2° Philippe, son fils, éditeur des derniers volumes de son père, qu'il dédia à la reine d'Angleterre.

3° Élie, d'une autre famille, né 28 août 1639 à Usseau, Dauphiné; pasteur à Venterol, à Die, et finalement à Delft et à Utrecht ob il f 1703 le jour de Pâques. Connu surtout par ses attaques contre Jurieu, dont il combattit le calvinisme, et par une polémique oiseuse de plusieurs années. Son principal ouvrage est intitulé: Défense de la véritable doctrine de l'Égl. réf., Utrecht 1697, à la réfutation duquel Jurieu consacra 2 de ses écrits. Élie Saurin était un peu un théologien de transition, et il s'est quelquefois contredit lui-même sur les droits des souverains en matière de foi.

4° Joseph, frère du précédent; né 1659 à Courthéson, Orange, f 1737; pasteur en Suisse, quitta le pays sous prétexte de discussions religieuses, mais en réalité afin d'éviter une condamnation pour vol; se fit catholique entre les mains de Bossuet, reçut de Louis XIV une pension de 1500 livres, et cultiva avec succès les mathématiques. Il passa 6 mois en prison sur une fausse imputation de J.-B. Rousseau, et se vengea en intriguant à son tour contre son ennemi. — 5» Son fils Bernard-Joseph, né 1706 à Paris, f 1781, fat poète dramatique, auteur de Spartacus, et membre de l'Académie française 1761.

SAURINE, Jean-Pierre, né 1733 dans les B.-Pyrénées, curé, député aux États-généraux de 1789, prêta serment à la Constitution civile du clergé, et fut élu év. des Landes. Il assista aqp conciles de 1797 et 1801, mais s'opposa à l'introduction du décadi et à l'emploi du français dans l'administration des sacrements. Nommé év. de Strasbourg après le Concordat, grâce à Fonché. f 1813.

SAVOIE, v. Sardaigne. — Duc de Savoie, v. Amédée VIII.

SAVONABOLA, Jérôme(fra Girolamo), un des précurseurs de la Réformation. Né 21 sept. 1452 à Ferrare, d'une famille distinguée (son grand-père Michel avait une réputation comme médecin), il entra 1475 à Bologne dans la maison des dominicains, contre le gré de ses parents, et se mit à l'étude de la théologie; la Bible l'intéressa vivement, surtout les livres prophétiques. En 1488 il fut envoyé comme lecteur au couvent de Saint-Marc à Florence, dont il fut bientôt nommé prieur. Il avait été d'abord peu remarqué comme prédicateur, mais l'attention se porta sur lui en 1490, à Brescia, à l'occasion d'une suite de discours qu'il fit sur l'Apocalypse, dans lesquels, animé lui-même d'un enthousiasme prophétique il se montra le puissant orateur capable d'enflammer les foules. C'est en 1491 qu'il se révéla à Florence comme agitateur théocratique, toujours à propos de l'Apocalypse. II rattachait à l'idée de la repentance celle de la régénération politique de l'Italie et une protestation vigoureuse contre les excès de la papauté avilie par Alexandre VI. Il combattait en même temps les Médicis comme ennemis des libertés populaires, et leur humanisme trop raffiné, trop empreint du paganisme platonicien. Avec les allures d'un prophète il annonçait les jugements de Dieu et des temps meilleurs. Les événements semblèrent lui donner raison. Les Français faisaient une de leurs guerres d'Italie. Profitant de l'arrivée de Charles VIII, les Florentins se soulevèrent et chassèrent les Médicis, 1494. Savonarole devint l'idole du peuple, dictateur théocratique, gouvernant la république et l'organisant sur des bases toutes religieuses; les Florentins fanatisés lui permirent tout: il supprima les spectacles, des hommes par centaines entrèrent dans les couvents, l'ascétisme fut à la mode; il fit mettre à mort des conspirateurs qui travaillaient au retour des Médicis. Il demandait la communion sous les deux espèces, condamnait le trafic des indulgences, flagellait les dérèglements du clergé, dénonçait les débordements de la cour de Rome, niait la suprématie du pape, et fit si bien qu'Alexandre VI, après l'avoir en vain flatté par l'appât du chapeau rouge, finit par l'anathématiser 1497 et le somma de se rendre à Rome. Mais déjà l'étoile du réformateur baissait. Les ordres rivaux se liguaient contre lui par jalousie; les franciscains se montraient particulièrement hostiles. Charles Vffl avait dtt rentrer précipitamment en France. La peste et la famine avaient jeté le trouble dans les esprits; on reprochait à Savonarole de n'avoir pu conjurer ces fléaux. Les princes italiens, dont la république florentine menaçait les états, se groupaient autour du pape. Savonarola s'adressa aux souverains de l'Europe pour demander la convocation d'un concile universel. Mais il avait trop tendu la corde. Il commit la faute d'en appeler au Jugement de Dieu, c.-à-dire à l'épreuve du feu, et surtout de reculer au dernier moment et de se faire remplacer par un de ses disciples, Dominique de Pescia. Comme on ne put s'entendre sur certaines formalités et que l'on disputait encore pendant que les bûchers brûlaient déjà, l'épreuve n'eut pas lieu, mais l'incident ne tourna pas en faveur du fr. Jérôme. Aussi la Seigneurie reprit courage, et le jour suivant elle le fit arrêter, ainsi que deux autres dominicains de ses amis, Sylvestre Marussi et Dominique, et après leur avoir fait souffrir d'horribles tortures, elle les fit périr par le bûcher 23 mai 1498. Une version de source douteuse, prétend que Jérôme laissa échapper dans la torture une espèce de rétractation, qui lui valut d'être étranglé avant d'être brûlé; la chose n'est pas prouvée et ne prouverait rien. Leurs cendrés furent jetées dans l'Ar-no. Alexandre VI avait dit de lui: Et quand ce serait Jean-Baptiste, il faut qu'il périsse. Savonarola écrivit dans sa prison une méditation sur le Ps. 51, que Luther réimprima 1523. Il a laissé divers autres écrits, entre autres le Triomphe de la Croix 1497, et un abrégé de la Révélation 1495; mais c'est dans ses sermons surtout qu'il faut étudier son éloquence, son patriotisme et sa piété. Il alla si loin dans ses essais de réforme, qu'il fit brûler les écrits de Dante, Boccace et Pétrarque; mais, quoiqu'il prêchât la justification par la foi, il n'attaqua jamais de front la doctrine romaine, ce qui explique son insuccès. Vie, par Pic de la Miran-dole, v. Meier, Hase, Guicciardini, Cantu, Per-rens, Paul, etc.

SAWTRE, William, prêtre de Londres, condamné, 140Ô, à périr dans les plus affreux tourments, pour avoir recommandé la lecture de la Bible en langue vulgaire. C'est l'archev. Arundel qui organisa la persécution.

SAXE, et Saxons, ensemble de populations nombreuses et féroces qui, sans frontières bien déterminées, occupaient les contrées situées entre l'Elbe, le Weser et le Rhin, c.-à*I. le N. 0. de l'Allemagne actuelle. Pendant que les femmes s'occupaient du ménage, de la culture des champs et de l'élève du bétail, les hommes s'adonnaient à la piraterie et s'emparaient des contrées àieur convenance. Ils avaient conquis sur les Jutes la presqu'île qui a conservé le nom de Jutland. En Angleterre vers 473 ils avaient formé le royaume de Kent, vers 477 le Sussex (Sud-Sax), en 519 le Wessex, en 530 l'Essex, puis le Northumberland, l'Estanglie, enfin la Mercie 586, en un mot l'heptarchie anglo-saxonne, qui finit par donner au pays le nom de ses envahisseurs, England, la terre des Angles. Ils s'y trouvaient bien, mais ils espéraient se trouver encore mieux dans la Gaule, dont ils avaient plus d'une fois visité et ravagé les côtes. Le succès ne répondit pas à leur attente, Clotaire II leur imposa un tribut, et comme ils se révoltèrent plusieurs fois, Charlemagne résolut de les mettre à la raison, et il lui fallut pour cela 9 campagnes successives, 772-795; il leur prit des ôtages et finit par les dompter et les convertir de force au christianisme, en leur offrant le choix entre le baptême et la mort; près de 4,500 furent décapités, dit-on. parce qu'ils refusèrent d'abjurer le culte des faux dieux, tristes exécutions que ne justifient ni les préjugés de l'époque, ni les nécessités de la guerre, mais qui s'expliquent par l'irritation que causaient au vainqueur des résistances inattendues, et surtout la violation de la foi jurée. D'ailleurs si le conquérant imposait l'Évangile par les armes et la terreur, les missionnaires l'avaient depuis longtemps préché en risquant leur propre vie; ainsi Willibrod, Grégoire, Liafwin, Lulle, Sturm, Marcellin, Wille-had, Liudger, etc. Définitivement vaincus, Wit-tikind et Albion se firent baptiser à Attigny 785, et renoncèrent aux dieux qui les avaient les premiers abandonnés. Le conquérant, pour consolider son ouvrage, fonda plusieurs évêchés, Mimigerneford (Munster) et OsnabrUck en West-phalie; puis Paderborn, Verden, Minden, Brème qui devint le plus important du nord; les dates ne peuvent être précisées exactement. Ces évêchés ne furent d'abord que des prises de possession, bien plus que des paroisses ou des diocèses, mais é'étaient des points de repère et des appuis. En même temps Charlemagne veillait à ce que le clergé fût instruit, moral, actif, pourvu de liturgies et de livres, et il établit pour cette nouvelle Église de Saxe des Capitulaires particuliers d'une rigueur qui ne se comprend pas de nos jours et que les circonstances de l'époque peuvent seules expliquer. Ainsi il y avait peine de mort pour ceux qui après leur baptême continuaient de pratiquer en secret le paganisme, contre ceux qui mangeraient de la viande en carême, qui croiraient aux sorciers, etc. Sous Louis-le-Déb. on peut dire que la Saxe est sinon gagnée, du moins soumise, et l'on voit apparaître successivement les ôvé-chés de Hildesheim, Halberstadt et Hambourg, avec de nombreux couvents, parmi lesquels brille surtout celui de Corbie. Alcuin avait combattu les mesures trop rigoureuses prises par son maître contre les nouveaux couverts, et il s'exprime en termes très élogieux au sujet du renfort que les troupes fraîches des Saxons apportent à l'œuvre des missions; il vante ces optimi christianty et la suite a prouvé qu'il n'avait pas tort. — La Saxe de l'époque carlo-vingienne, celle de Wittikind, finit cependant par avoir des frontières déterminées, et elle comprit entre autres la Westphalie et la Thu-ringe, puis la Bavière; mais les fluctuations de la politique amenèrent de fréquents changements sous les empereurs, notamment sous les deux Henri, le Superbe et le Lion, et sous Othon Ier, et le christianisme fit des progrès dans toutes ces contrées, grâce au zèle surtout des cisterciens. Le royaume de Saxe actuel date de 1423; Sigismond conféra à la maison de Misnie la dignité électorale qui en 1564 passa à la branche ernestine, l'aînée, mais fut transférée par Ch.-Quint à la branche albertine, la cadette, 1547, qui était hostile à la Réformation. La branche aînée eut pour principal représentant Fréd.-le-Sage, puis Fréd.-le-Magnanime. Quoique chef de la branche cadette, Maurice de Saxe resta protestant et maintint les droits do parti évangélique. Le pays eut beaucoup à souffrir pendant la guerre de Trente ans, par les indécisions de ses princes qui furent tour à toor les amis et les ennemis de la Suède, et le morcellement du duché entre les diverses branches ne fit que s'accroître, en même temps que les petites luttes religieuses ajoutèrent à son malaise intérieur. Au 18"" siècle le rationalisme acheva ce travail de décomposition, que Rein-hardt constata d'une façon éclatante en 1800 dans le sermon courageux par lequel il demandait une nouvelle réforme sur la base de la justification par la foi. Les luthériens rigides étaient les seuls maîtres de la place; en 1806 la tolérance fut accordée aux catholiques, en 1811 aux réformés. La grande majorité du pays est protestante» avec 77 surintendants et 2833 églises. La cour est catholique. C'est en Saxe qu'a pris naissance 1832 la Société de Gustave-Adolphe. On y trouve une société des missions, luthérienne, fondée à Dresde 1836, transférée! Leipzig 1848; deux communautés réformées, Dresde et Leipzig, et 2 importantes stations moraves, Herrnhut et Berthelsdorf. L'Égl. catholique est régie par un vicaire apostolique, et par un consistoire dont les membres sont eboi-sis par lui, mais confirmés par le roi; ses décisions sont subordonnées au placet; pour les curés il faut qu'ils soient allemands et non affilés aux jésuites, les ordres religieux ne sont pas autorisés, sauf deux couvents de cisterciennes à Marienthal et Marienstern; le nombre des paroisses est de 20, avec environ 40,000 âmes. Égl. decathol. vieux-allemands à Dresde, Leipzig et Zwickau; égl. cathol. grecque à Leipzig.

SAXON 1° poète du temps de l'emp. Arnulph, lin du 9ra« siècle, ecclésiastique, peut-être moine du couvent de Lamspringa; auteur d'un poème histor. en 5 livres. De Gestie Caroli Magni, sans grande valeur comme histoire parce qu'il relève partout d'Eginhard.

2° Annaliste, clerc ou moine, des diocèses de Magdebourg ou d'Halberstadt, du milieu du 12me siècle, auteur d'Annales sur la Saxe de 741 à 1139, compilées de sources inconnues.

3° S. le Grammairien, ou le Long, né en Seelandd'une famille distinguée, doyen de Roes-kilde, secrétaire de l'archev. de Lund, Axel ou Absalon, qui l'envoya 1161 en mission à Paris. Auteur d'une hist. du Danemark, intitulée Da-norum regum heroumque historia, a Saxone Grammatico, en 16 livres, dont les 9 premiers sont formés de traditions populaires, chants de Scaldes, sagas islandaises, inscriptions runi-ques réclamant les soins de la critique, et les 7 autres d'une valeur historique non contestée; impr. Paris 1514 par Chr. Peterson, in-fol.; Copenhague 1839-1858, 3 vol. par Muller et Velchow; trad. en danois, f 1204 à Roeskild.

SAYOUS, Pierre-André, né 1808 à Genève, éditeur et auteur d'un grand nombre d'ouvrages: voyages dans les Alpes de De Saussure, Etude sur Calvin, id. sur les écrivains français de la Réformation 1841, Hist. de la littér. franç. à l'étranger du 17me siècle 1853, et au 18™ 1861; Conseils à une mère, Principes de littérature, etc. Prof, de belles-lettres à Genève et successeur de TôpiTer n 1846, il fut destitué 1848 par le gouv. radical. Il se fixa à Paris, et depuis 1857 fut nommé sous-directeur pour les cultes non catholiques, jusqu'à sa + 1870. Esprit bienveillant, conciliant et modéré. Son fils Edouard-Auguste est prof. àMontauban.

SCALIGER lo Jul.-César, né 1484 à Padoue, Vérone ou Venise, fils d'un peintre, Benoit Bordoni, et prétendant descendre de la noble famille délia Scala, dont il prit le nom qu'il a illustré. Il vint en France comme médecin de La Rovère, év. d'Agen, et se fit par sa science une réputation justement méritée; il brilla surtout comme grammairien, et eut de vives disputes avec Erasme sur la latinité de Cicéron. t1558.

2® Son fils Joseph-Juste, né 4 août 1540 à Agen, fit ses études à Bordeaux, puis sous la direction de son père. Après la mort de celui-ci il vint à Paris, accepta une place de précepteur dans une famille noble des environs de Tours, parcourut la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Écosse. U se convertit au protestantisme, fut nommé prof, de belles-lettres à Leyde en remplacement de Juste-Lipse 1593, et f 21 janv. 1609 d'hydro-pisie. Considéré par ses contemporains comme un prodige de science, il comprenait 13 langues et possédait en outre les mathématiques, la philos., le droit, la théol. el l'histoire. Malheureusement il était vaniteux et orgueilleux comme son père, et il publia vers la fin de sa vie une lettre sur l'antiquité de sa famille, qu'il faisait remonter aux rois alains. De ses nombreux écrits les meilleurs sont ceux qui touchent à la théologie, notamment en ce qui regarde les questions chronologiques; il a publié De emen-datione temporum, et Thésaurus temporum, 2 livres qui font époque, ainsi que son De re numismaria, où il fait ressortir l'importance des monnaies pour les déterminations chronologiques. Sa correspondance avec les Samaritains est également intéressante, en ce qu'il est le premier qui ait attiré de nouveau l'attention sur ce petit peuple; 2 réponses qu'il reçut, du Caire et de Sichem,sont conservées à la biblioth. de Paris, après avoir été trad. en latin par le p. Morin.

SCANDINAVIE, nom général sous lequel on désignait au moyen âge la Suède et la Norwège, parfois même le Danemark, sans qu'il y eût cependant un État de ce nom. Il y avait une province de Scandie. Les Scandinaves paraissent être venus d'Asie un siècle av. C., sous la conduite d'Odin. Parmi les versions de la Bible dites scandinaves, on remarque surtout celle d'Ulphilas, q. v., une traduction partielle en danois 1470, et la version suédoise des fr. Peterson 1526 et 1541, revue dès lors plusieurs fois. La version danoise a longtemps servi pour la Norwège, qui cependant a maintenant sa version propre. L'Islande a eu dès 1540 le N. T. et en 1584 toute la Bible, revisée 1644 par Thorlacius Sculonius.

SCAPULAIRE, bande d'étoffe à l'usage des moines; elle pend par devant et par derrière, du cou aux genoux pour les frères lais, jusqu'aux pieds pour les moines. Les bénédictins le connaissaient déjà, mais ce sont les carmes qui lui ont donné sa véritable importance, en particulier Simon Stock, leur général f 1265, qui dit l'avoir reçu de Marie, avec la promesse que ceux qui le porteraient n'iraient pas en purgatoire, la Vierge venant tous les samedi soir pour les en délivrer. En réalité le scapulaire des carmes date de 1287, et la légende est du 15®« siècle; mais Jean XXII l'a recommandée, et Benoît XIV l'a déclarée digne de foi.

SCEPTICISME, tournure d'esprit qui, suivant l'usage qu'on en fait, peut avoir quelque chose de maladif ou de ridicule. Ce n'est pas seulement l'esprit de recherche, ou la résolution de n'admettre comme vrai que ce qui est absolument prouvé et démontré; c'est une disposition à douter même de la valeur des preuves et de l'exactitude des conclusions. C'est le doute érigé en dogme et en système, une manie qui réduit à néant toutes les démonstrations. Pyrrhon, Timon, Aenésidème, chez les anciens, sont les représentants de cette tendance, qui est plutôt une pose qu'un système proprement dit; chez les modernes on doit citer Montaigne avec son: Que sais-je? et Bayle. Le scepticisme se développe surtout à la suite de crises philosophiques ou religieuses, dans lesquelles le pour et le contre ont été exposés avec une égale autorité et défendus par des arguments également forts. Dans ces cas on comprend le doute. Mais l'homme qui aime la vérité finit toujours par y arriver. Il se décidera peut-être dans un sens ou dans l'autre, successivement ou alternativement; mais il ne s'arrêtera pas dans les marécages du scepticisme. En admettant que les raisons pèsent d'un poids égal dans la balance de son intelligence, le besoin d'une solution l'emportera sur les hésitations de l'esprit, et sa volonté tranchera la question, quitte à se décider autrement sous des impressions nouvelles. Le scepticisme est ainsi favorable aux recherches et par conséquent au progrès, mais il trahit de la faiblesse et n'est pas capable de faire des hommes.

SCHABBATHÉENS, v. Sabbathaï.

SCHADE 1» Pierre, né 1493 à Proteg sur la Moselle, d'où il a pris le nom de Mosellanut sous lequel il est le plus connu, était un des plus savants hommes de son temps et fut, comme humaniste, très lié avec Érasme et avec les chefs de la Réforme. Il professa le grec et le latin à Freiberg 1515 et à Leipzig 1517. A la demande du duc Georges, il ouvrit la dispute de Leipzig 1518 par un discours: De ratione dùputandi, prœsertim in re théologien, f 1524.

2° Georges, né 8 mai 1711 à Apenrade, déiste, croyait à la métempsycose et à l'âme des bêtes. Il fonda 1751 à Altona une société de culture scientifique et morale, qui dura peu; fut banni dans l'île de Christiansoe pour un livre 1760 sur la religion naturelle, gracié 1770, 110 avril 1795 à Kiel.

3° Jean-Gaspard, né 1666 à Ktthndorf, étudia 1685 à Leipzig, où il subit la bonne influence de Francke. Il fut nommé diacre à Berlin 1690 et s'y trouva en même temps que Spener, mais il se brouilla avec lui à l'occasion de la confession. Tous deux voulaient le réveil de l'Église, et ils y travaillaient par un enseignement soigné de la jeunesse, mais Schade allait plus loin que son ami, et il appela en chaire la confession le siège de Satan, f 25juin. 1698. La populace troubla ses funérailles an point que la police dut intervenir.

SCHAFF,Phil., nél janv. 1819 à Coire, étudia k Tubingue sous Baur et Borner,** Halle sont Mu lier et Tholuck, qui furent ses amis; enseigna à Berlin, fin de 1842; fut, sur la recommandation de Neander, nommé prof, dlrisL ecclés. à Mercersbourg, Pensylvanie, 1844 à 1865, et s'établit dès lors à New-York. Docteur en théol. de l'université de Berlin, il est uo des principaux agents de l'Alliance évang. et a fait de fréquents voyages en Europe. Auteur de nombreux ouvrages de théol. histor., dogm. et pratique. Il est en outre le président du Comité de revision de la Bible et a réussi à amener une entente entre le Comité américain et celui de Londres.

SCHALL, Jean-Adam, jésuite, né 1591 à Cologne où il fut élevé, étudia au Collège germanique à Rome et s'y distingua tellement que Maximilien de Bavière, après l'avoir comblé de présents, l'envoya comme missionnaire eo Chine. Il y arriva 1628, et ne tarda pas à se faire bienvenir de la cour impériale. Il fut chargé de la rédaction du calendrier, prof, de mathémathiques, mandarin et premier ministre. Il se fit même relever de ses vœux par l'empereur Chunt-chi, et épousa une belle femme qui lui donna deux fils. Il avait obtenu de prêcher l'Évangile, mais c'était une doctrine tellement défigurée et accommodée à la religion chinoise, que les 300,000 prosélytes qu'il s'attribue et dont après sa mort il ne restait plus un seul, ne peuvent évidemment pas être pris au sérieux. Après la mort de Chunt-chi, il tomba en disgrâce, et fut même emprisonné 1664 avec d'autres missionnnires et plusieurs Chinois convertis. Kang-hi étant monté sur le trône à sa majorité 1667, il fit rel&cher les prisonniers, mais Schall était f le 15 août 1666, à la suite des mauvais traitements qu'on lai avait fait subir, v. le Tagebuch du professenr Friedrich.

SCHAMMAI, v. Hillel.

SCHEFFER, Ary, né 10 févr. 1795 à Dor-drecht, de parents juifs, étudia la peinture à Paris sous Guérin, mais se fit son genre i loi, poétique, romantique, idéal, brillant de coloris plus que de dessin, avec un ascétisme maladif dans les figures, mais plein d'élévation. Il eut pour élève Marie d'Orléans. Beau-père de M. Renan. Ses tableaux ont presque tous un caractère religieux: Le Christ consolateur, Augustin et Monique, Christ en Geth&émané, les Femmes revenant du Sépulcre, la Tentation, Ruth et Noémi, etc. Il a écrit une Hist. de la peinture. Il avait embrassé le protestantisme, f 5 juin 1858.

SCHEFFLER, Jean, surnommé le SUmen, né 1624 à Breslau, d'une noble famille polonaise luthérienne, étudia la médecine à Strasbourg et fut reçu docteur à Padoue 9 juill. 1648. En 1649 il fut nommé médecin du duc Sylvius de Wurtemberg-Oels, et donna libre carrière à son penchant pour la mystique, dont le germe s'était déjà développé chez lui en Hollande. La protection d'un gentilhomme silésien, Frankenberg, le servit quelque temps contre les intrigues du clergé de la cour, qu'il s'était aliéné, mais après la mort de son protecteur il perdit sa place, et passa le 12 juin 1653 à l'Église catholique, en prenant le nom d'Angélus, en l'honneur du mystique espagnol Jean ab An-gelis dont il avait subi l'influence. L'emp. Ferdinand III en fit son médecin, ce qui accrédita le bruit que sa conversion aurait eu l'intérét pour mobile, mais il est plus probable, et ses écrits postérieurs semblent l'établir, qu'il faut l'attribuer aux mauvais rapports qu'il avait eus avec le cercle luthérien de sou entourage. Le riche symbolisme du culte romain devait aussi plaire davantage à son tempérament que le culte sec et trop intellectuel d'une Église orthodoxe sans vie. Il se fit ordonner prêtre, s'attacha au diocèse de Breslau, résida dans le couvent des jésuites, et f de consomption 9 juill. 1677. Ses dernières années furent remplies d'une polémique grossière, digne d'un autre âge, et qui ne saurait lui être imputée entièrement; les cathol. eux mêmes le blâmèrent, ce qui le décida à ne publier la suite que sous le voile de l'anonyme ou d'un pseudonyme. Bien supérieurs sont ses premiers écrits, et en particulier ses poésies où, malgré quelques écarts panthéistes, on admire à côté d'une foi profonde au Sauveur, un sentiment et un style dignes des meilleurs maîtres. Plusieurs de ses cantiques figurent dans la plupart des recueils protestants, entr'autres: Liebe, die du mich zum Bilde, etc.

SGHEIBEL, Jean-Gottfried, un des représentants les plus décidés du vieux luthéranisme, respectable et pieux, pasteur et prof, d'hist. ecclés. à Breslau, refusa 1830 de souscrire à la formule d'union et fut suspendu; 2 à 300 familles se groupèrent autour de lui, Que les tracasseries de la police décidèrent presque toutes à émigrer, la plupart en Australie. Le gouvernement finit par les laisser tranquilles. Né à Breslau 16 sept. 1783, Scheibel f 21 mars 1843 à Nuremberg.

SCHELHORN lo Jean-Georges, bibliographe distingué, docteur en théol., pasteur, surintendant, corecteur de l'Académie, né 8 déc. 1694 à Memmingen, f 31 mars 1773; auteur de plusieurs mélanges (,Amœnitates) littéraires et d'hist. ecclés.; Francfort et Leipzig, 1724-1737, notices biograph. etc. — 2o Jean-Georges, son fils, né 4 déc. 1733 à Memmingen, f 18 nov» 1802, élève de Gœttingue, occupa différents postes comme pasteur, et finit par revenir dans sa ville natale comme aide de son père, bibliothécaire et surintendant; auteur de plusieurs dissertations et notices historiques.

SCHELLING, Fréd.-Guill.-Joseph (de), né 27 janv. 1775 à Léonberg, Wurtemberg, étudia la théol. à Tubingue, où il se lia avec Hegel. Un travail sur Genèse 3, puis en 1793 une étude sur les mythes et les systèmes philos, de l'ancien monde, et en 1795 un écrit sur le moi comme principe absolu des connaissances humaines, révélèrent en lui un penseur de premier ordre. Il accompagna les jettnes barons de Riedesel à Leipzig, où il s'occupa surtout des sciences naturelles. En 1798 il vint à Iéna, et en 1803 il remplaça Fichte comme professeur. En 1804 il passa à Wurzbourg, en 1807 à Munich, fut nommé secrétaire général de la Soc. royale des Beaux-Arts, et reçut les titres de noblesse. C'est l'époque de sa plus grande activité littéraire. Il en est encore à l'idéalisme subjectif, et jette les bases de ce qu'il appelle la philos, de la nature. A partir de 1808 il se rapproche du théisme en philosophie, reconnaît à la religion une place qu'il avait donnée à l'idéal esthétique et à l'art, et n'est pas éloigné de s'attacher au christianisme. Il subit l'influence mystique du néo-platonisme, de Baader et de Bœhme. De 1813 à 1854 il ne publie presque rien; il professe à Erlangen, puis à Landshut, et revient à Munich. Sa réputation va grandissant, on reconnaît en lui l'ami, l'émule des Schlegel, de Goethe, de Schiller, et ceux qui regrettent l'influence dissolvante exercée par la dialectique de Hegel sur la conscience chrétienne, comptent sur Schelling pour la neutraliser et le font appeler à Berlin 1841, où il est accueilli avec enthousiasme. Mais s'il prit d'abord position contre Hegel, on s'aperçut bientôt qu'on avait trop attendu de lui, et l'on se refroidit à son égard. Son influence n'en fut pas moins grande et salutaire, et lui-même se vit amené à retravailler son système et à lui donner la dernière main. Il s'en occupait en 1854, quand la mort le surprit à Ragatz, comme il allait prendre les bains de Pfeffers. Son fils Ch.-Fréd.-Augustin, pasteur en Wurtemberg, a publié en 14 vol. 1856-61 ses œuvres compl., y compris le résumé de son système, donné sous la forme de conférences. Après avoir commencé par l'idéalisme subjectif, Sch. reconnaît que IVtre réel n'est pas dans le Moi seulement, mais aussi dans le Non-moi, dans l'univers, dans les choses; et il pose en principe que pour renfermer

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une unité générale, l'univers doit dans son ensemble et dans chacune de ses parties, présenter une répétition des mêmes lois et des mêmes phénomènes; chaque partie doit être un univers en miniature, base qui, appliquée aux sciences naturelles, risque de favoriser bien des rêveries et mène à l'âme du monde et à la vie de la planète analogue à celle de la plante. De plus, pour que l'unité subsiste et soit réelle, il faut qu'il y ait parallélisme, c.-à-d. dualité, polarité, pôle positif et pâle négatif. Cette dualité il la retrouve partout dans l'application, le moi et le non-moi, la vie et la mort, la lumière et les ténèbres. Mais il avait le sentiment de quelque chose d'incomplet dans son système, et c'est à cela qu'il faut attribuer les longues années de recueillement et de réflexion qu'il s'imposa. Son fraité de la Liberté humaine 1809 pouvait le satisfaire au point de vue de la logique, mais il prouvait aussi que, pour atteindre à la véritable connaissance des choses, la logique seule ne suffit pas; il faut les avoir éprouvées, expérimentées; il étudie alors et montre, soit dans la révélation, soit dans les pressentiments de tous les peuples, le développement et l'action de cet esprit qui traverse l'histoire de l'humanité, et il conclut en montrant que le christianisme est la vérité absolue de l'esprit. Avec Schleiermacher il comprend que le christianisme n'est pas une théorie qui relève de la pensée, mais un fait, une histoire. Schellingest peut-être le premier philosophe des temps modernes qui ait pris à cœur de donner à la religion une place sérieuse dans la philosophie, et sous ce rapport il a fait école. — Éloge par Mi-gnet; Ch. Secretan, Philos, de la liberté.

SCHENKEL, Daniel, né 21 déc. 1813 à Dô-gerlin, Zurich, étudia à Bâle sous De Wette, à Gœttingue sous Ltlcke et Gieseler. Après un court ministère à Schaffhouse, il fut nommé prof- de théologie à Bâle 1849, et à Heidelberg 1851. Il prit part à toutes les luttes et discussions qui éclatèrent depuis cette époque; il écrivit contre Strauss, contre Hurler, contre le catholicisme, puis à l'occasion du mouvement cathol.-allemand. On a de lui plusieurs ouvrages de controverse, des sermons sur le principe du protestantisme, des plaidoyers en faveur de l'Union, une dogmatique, une apologie « Pour Bunsen contre Stahl. » Il occupait théologique-ment une position de juste-milieu; mais en penchant d'année en année vers le libéralisme de gauche. Depuis 1863, par sa Caractéristique de Jésus, il a passé complètement dans les rangs de la théol. moderne, et sa défection lui a aliéné bien des sympathies. Une grande partie du clergé badois a demandé que la direction du séminaire lui fût retirée, mais le gouvernement l'a maintenu et soutenu par arrêté du 17 août 1864. Il a rédigé de 1852 à 1859 VAUgem. Kir-chenzeitung, et publ. des Commentaires, des notices biographiques, un Dict. de la Bible, etr

SCHENKENDORF, Gottlob-Ferd.-Max <de». né H déc. 1783 à Tilsit, fils d'un officier, étudia les chartes à KOnigsberg, où il s'établit quelque temps comme référendaire. Ses sentiments religieux se développèrent dans un milieu qui, jusqu'à Pétersbourg, lui offrait une chaîne non interrompue de notabilités pleine* d'une foi vivante, depuis Elise de Recke et M™ de Krudener jusqu'à l'emp. Alexandre, n forma à la littérature sous la direction de No-valis, fut l'ami de Jung Stilling, fit les guerres d'indépendance et f 11 déc. 1817 à Coblence, conseiller d'État. Auteur de poésies chrétiennes, et de chants patriotiques très populaires.

SCHINNER, ou Skinner, Matthieu, né 1470 à Mtlhlibach, haut Valais, de parents pauvres, s'éleva par ses talents et son travail, devint chanoine, prêtre, coadjuteur, administrateur et enfin évêque de Sion. Nul comme théologien, son rôle a été grand comme patriote et comme politique. A plusieurs reprises il demande à U diète des troupes pour aider à chasser les Français d'Italie; deux fois il fait repasser les montagnes à Louis Xn, et il assiste en personne i la bataille de Marignan. Jules II le nomme cardinal, et légat du saint-siège partout où il ira. Deux fois le pape l'envoie à Londres pour négocier. Au 5®« conc. de Latran, il est chargé de préparer les bases d'une réforme de la curie romaine. La paix de 1516 met fin à son activité. Léon X lui-même l'abandonne. Il a cependant deux consolations avant de mourir: l'élection anti-française d'Adrien III, et l'écher de François I** à la Bicoque, f 30 sept. 15Î2 à Rome.

SCHISME (du grec tchizô, déchirer), division, séparation ecclésiastique motivée par des divergences de discipline, de forme ou d'organisation, ou même par des divergences sur des articles de foi d'une importance secondaire. Il y a hérésie quand la séparation a pour objet un dogme fondamental et une altération notable de la doctrine chrétienne. Quand les deux partis sont également forts, ils se traitent réciproquement de schismatiques, mais en cas d'inégalité bien constatée, c'est au plus faible que ce nom est réservé. Les principaux schisme* dont parle l'histoire, sont ceux de Félicissimu* à Carthage, de Nova tien à Rome, de Meletius a Alexandrie, d'Ursin à Rome, de Donatus à Carthage; des johannites, à l'occasion de Chryso*-tôme persécuté; le nestorianisme, le monophy-sitisme, celui des Trois chapitres, le monothé-létisme, celui de Ravenne. Mais ils durèrent peu, ou n'eurent pas d'importance. Le plus considérable est celui qui sépara l'Église d'Occident <le celle d'Orient, provoqué par Photius 862, et consommé par Cérularius 1053. L'Égl. d'Orient eut à son tour son schisme en Arsenius, et l'Égl. latine les siens dans les anglicans, les jansénistes, les vieux-catholiques, sans parler de la grande rupture du 16®« siècle. On compte également parmi les schismes les divisions momentanées qui survinrent à diverses reprises dans le gouvernement même de l'Église et qui amenèrent sur le trône pontifical, soit à Rome, soit à Avignon, deux ou trois pontifes rivaux, chacun ayant ses adhérents, depuis Corneille luttant contre Novatien 251, jusqu'à Eugène IV et Félix V, 1439, ce régime de rivalités ayant sévi surtout du 10m« au lime siècle.

SCHLEIERMACHER, Fréd. - Daniel - Ernest, né 21 nov. 1763 à Breslau, était fils d'un pasteur réformé, dont le père avait été compromis dans l'affaire des Inspirés de Ronsdorf. Sa mère, une StuJbenrauch, appartenait à une famille de réfugiés de Salzbourg. Le père de Schl., après avoir un moment penché vers la secte de Ronsdorf, passa au rationalisme, et finalement aux Moraves. L'enfant, maladif, étudia d'abord à Breslau et à Pless, et fut placé ensuite dans les écoles des Frères, à Niesky et à Barby, dont il subit toute sa vie l'influence religieuse Mais il avait soif de science, il ne voulait rien recevoir en aveugle, et il finit par obtenir de son père d'être envoyé à Halle, chez son oncle Stuben-rauch, prof, de théol.; il y entendit aussi Sem-ler, et s'appliqua à l'étude de la philosophie. Il passa 2 ou 3 ans chez le comte de Dohna comme précepteur, mais le quitta en 1793 pour des raisons politiques et religieuses, et après quelques suffragances passagères il fut nommé, sur la recommandation de Sack, prédicateur à la Charité de Berlin. Il préparait soigneusement ses sermons, mais il en réservait les développements pour la chaire et pour l'inspiration du moment. Un écrit, d'abord anonyme, qu'il publia en 1799 sur La Religion, Appel aux hommes cultivés, eut un grand retentissement et rencontra aussi une vive opposition. Gœthe le trouvait trop religieux; les rationalistes y virent un attentat à la raison, les orthodoxes une attaque dirigée contre le christianisme positif. Dans ses Monologues 1800, Schl. insiste sur le devoir de chacun de faire usage de sa liberté en matière religieuse, et de s'affranchir de toute influence extérieure et traditionnelle. Ses Lettres sur la Lucinde de Schlegel, trop louangeuses et dictées par son affection pour l'auteur, donnèrent lieu à d'amères critiques. Elles coïncidaient avec le temps de sa malheureuse passion pour Mme Éléonore Grunow, la femme d'un des pasteurs de Berlin; cet épisode de sa vie allait aboutir à un mariage par suite du divorce demandé, mais au dernier moment. Mme

Grunow saisie de remords, se décida à rester avec son peu recommandable époux; ce fut pour Schl. un coup terrible. Il accepta 1804 une vocation à Halle, comme prof, de philos, et prédicateur de l'université, et chercha dans un écrit sur les Fêtes de Noël, à concilier les diverses tendances théologiques, tout en restant dans sa Christologie sur le terrain du christianisme positif. L'université ayant été fermé* par Napoléon, il revint à Berlin 1807, et travailla avec Humboldt à y fonder une académie, qui s'ouvrit en effet en 1810, et qui le compta parmi ses premiers professeurs. Nommé aussi pasteur de l'Égl. de la Trinité, il répondit aux aspirations patriotiques de la nation, en cherchant avec Stein, Humboldt et d'autres à relever la Prusse. Il avait épousé en 1809 la veuve de son vieil ami De Willich, née Henriette de Mtthlenfels, qui avait déjà 2 enfants, et qui lui donna 3 filles et un fils (Nathanael 1820f 1829). Employé au ministère des cultes, et rédacteur du Correspondant prussien, son patriotisme même le rendit suspect et gênant quand la paix fut rétablie, et le gouvernement qui avait hésité à le confirmer comme secrétaire de l'Académie, lui retira ses fonctions au département des cultes. Membre de la Commission liturgique 1814 1816, il chercha à faire prévaloir les vues qu'il avait émises dans son Encyclopédie théologique 1811, acceptant l'union avec l'État, mais sans dépendance servile, reconnaissant à tout membre fidèle de l'Église le droit de la servir suivant ses aptitudes, réclamant pour l'Église une Constitution plutôt que des formulaires élaborés par certains ecclésiastiques à la dévotion de l'État. Il protesta en particulier en 1816 contre la nouvelle liturgie qui faisait la part trop grande à la partie liturgique aux dépens du chant et du sermon; et en 1817 contre la réorganisation ecclés. si compliquée, où la voix de l'Église ne comptait plus, où l'administration tournait à la bureaucratie, et où la liberté d'enseignement risquait de sombrer. Mais il accueillit avec joie la proclamation de l'Union, pour laquelle il avait toujours combattu, et il présida le Synode de Berlin 1817; là, contre Harm^ et contre Ammon,. il fit franchement le procès du vieux luthéranisme et réduisit les symboles à leur juste valeur. Mais l'agitation démagogique commençait à donner du souci au gouvernement. De Wette avait été une des premières victimes de la méfiance officielle, et Schl. lui-même fut inquiété par la police, à cause de son libéralisme bien connu et de sa hardiesse de parole. On ne trouva rien d'assez positif pour sévir, mais sa position n'en devint pas moins difficile, des amis même lui tournèrent le dos. Il eut pour se consoler le concours touj. croissant de ses auditeurs et les joies du cercle de famille. En 1821 il acheva sa Dogmatique, retravaillée en 1831, sons le titre de: La foi chrétienne présentée dans son ensemble, d'après les principes de l'Égl. évangéliqne. Il entra de nouveau en conflit avec l'autorité 1824 à 1826 an sujet de l'Agende et publia sous le pseudonyme de Pacifiais sincerus une vigoureuse protestation contre Le Droit liturgique des princes, droit qu'ils ne possèdent, dit-il, que par une délégation volontaire de l'Église, et dont ils ne peuvent faire usage pour se mettre en opposition avec cette volonté bien constatée. Après une lutte longue et parfois vive le gouvernement céda; il fit des concessions à l'opinion publique, en modifiant quelques parties de la liturgie pour l'adapter aux besoins des provinces et en se montrant moins sévère en général quant à sa stricte application. Peu à peu les rapports de Schl. avec l'État s'améliorèrent. En 1831 il reçut l'ordre de l'Aigle rouge de classe, et fut chargé de négocier un compromis avec les vieux-luthériens; il échoua et devait échouer. Il f 12 fév. 1834 d'une fluxion de poitrine. Ses ouvrages sont fort nombreux. Il avait trad. de l'anglais les sermons de Blair et de Fawcett 1798; il commença aussi une trad. de Platon, dont il publia 6 vol. très estimés. Mais c'est surtout comme théol. qu'il a été un écrivain fécond. Outre une foule d'écrits de circonstance, on a de lui un Essai sur Luc, une Comparaison entre la doctrine d'Athanase et celle de Sabellius sur la Trinité, une Étude sur la prédestination, el beaucoup d'ouvrages posthumes: Hist. ecclés., Morale chrétienne, Vie de Jésus, Théol. pratique, etc. Pour lui la religion est surtout une affaire intérieure et de sentimeut. Elle/ a pour point de départ chez l'homme le sentiment de sa dépendance, qui l'amène à reconnaître en dehors de lui une causalité absolue, Dieu, ou la nature qui se confond avec lui. La couleur un peu panthéiste de certaines phrases le firent accuser de spinosisme, mais il s'en défendit avec énergie; seulement il demande, à quelque religion qu'on s'attache, que ce soit par une conviction personnelle et parce qu'elle répond réellement aux besoins qu'on éprouve. La tolérance est la conséquence naturelle de son système. Ce qui caractérise la piété chrétienne, c'est la foi en la Rédemption. Le Christ était un homme possédant en lui-même la conscience de Dieu, pure, puissante, créatrice, inattaquable au péché, ne pouvant errer en matière religieuse. C'est cette habitation de Dieu en lui qu'on peut appeler sa divinité, mais l'expression est impropre. La doctrine de la Trinité, c. à d. la révélation de Dieu, n'est pas soutenable sous sa forme traditionnelle. Le Saint-Esprit est l'union de l'esprit de Dieu avec l'esprit de l'homme, sous la forme d'un esprit qui anime d'une vie commune une môme association. En fut de culte il redoutait la monotonie, les formes tirées au cordeau-: il voulait de la liberté, de la spontanéité, quelque chose de vivant, qui ne soit pas réglé par l'autorité civile, mais par les représentants de l'Église.

SCHLESWIG. Parmi les différents peuples ou peuplades qui formaient naguère encore le royaume de Danemark, il en est 3, le Jutland an nord, le Schleswig et le Holstein, dont l'histoire, au point de vue des missions, se confond souvent avec celle des missions scandinaves en général, soit à cause de leurs rapports entre eux, soit à cause de leurs relations avec Brème. Hambourg, la Suède et la Norwège. Le Schl. peuplé de Danois, d'Angles et de Frisons; le Holstein, de Saxons nord-albingiens et de Wa-griens; et le Jutland, de Juttes et de Danois, reçurent pour la première fois l'Évangile de de l'anglo-saxon Egbert 620, de Willibrod 690, et de Willehad 750; la première église, Mel-dorf, date à peu près de 776. La fondation de l'archevêché de Brème 788, facilita l'évangéli-sation du Holstein, et Charlemagne l'affermit en l'appuyant de 2 châteaux de guerre, Hoch-buchi qui devint Hambourg, et Esselfeld ou Itzehoe, 808. Ebbo de Reims visita Hadeby on Hethaby (Schleswig), fonda à Welna, Munster dorf, un séminaire: à Schœnefeld, Holstein, une église, et fut en 826 remplacé par Anschar. Vers 948, après une longue interruption, l'œuvre fut reprise, le vieux roi Gorm étant devenu plus traitable, et son fils Harald se montrant favorable au christianisme. Unnis, év. de Brème, et Adalgag, archev. de Hambourg, s'occupèrent successivement de cette mission avec zèle et succès. Mais les persécutions recommencèrent sous Swend, Suen ou Suénon, fils d'Harald, qui reconnut chez l'emp. Otton une ambition politique voilée sous l'apparence de la mission. Le culte d'Odin fut rétabli; la persécution dura î ans; puis à la suite de plusieurs guerres, k christianisme reprit le dessus dans le Schleswi? et le Jutland, et s'y établit définitivement sons Canut. Les Vendes, ou Wagriens du Holstein résistèrent plus longtemps; ce fut l'œuvre de Vicelin, év. d'Oldenbourg; Gerold de Lubeck l'acheva 1163. De riches couvents ne tardèrent pas à se fonder dans la contrée, spécialement en vue de l'éducation des jeunes nobles; d'antres aussi pour le soulagement des pauvres et des malades; il se forma même des corporations, ou confréries, en faveur des étrangers et des pèlerins. Mais les abus se glissèrent peu â peu dans l'Église, et là comme ailleurs ce fut le trafic des indulgences qui mit le comble au contentement général et qui favorisa l'adoption de la Réforme. Quelques mouvements hussites l'avaient peut-être préparée, mais lorsqu'elle fut prêchée, elle s'établit rapidement, à Schles-wig de 1522-1525 sous Fréd. I de Holstein-Got-torp, puis à Holsteîn et à Kiel. L'organisation fut lente; la question des évéchés, compliquée de celle des duchés, entravait les mouvements. La sécularisation des biens ecclésiastiques fut ce qui marcha le plus vite. Enfin en 1542, la Constitution danoise pour l'Église fut acceptée par la diète de Rendsbourg. La guerre de 1864 a mis fin à l'ancien ordre de choses, et les duchés devenus en 1866 une province prussienne, ont été rattachés ecclésiastiquement au ministère des cultes de Berlin.

SCHLEUSNER, Jean-Fréd. né 16 janv. 1759 à Leipzig, prof, de théol. à Gôttingue, puis à Wittenberg, où il fut chargé, avec Nitzsch de la direction du séminaire, f 21 févr. 1831. Auteur de plusieurs ouvrages: Dict. grec-latin du N. T.; Dict. pour les Septante, les Commentateurs grecs de l'A. T. et les Apocryphes, encore estimé. Plutôt savant que théologien.

SCHLICHTING, socinien, fils d'un unitaire; né 1592 à Bukowiec, pasteur à Racovie, fit plusieurs voyages dans l'intérêt de ses idées; chercha, mais eu vain, à ramener les « Non-adorants « des Sept-Montagnes, » écrivit sur la Trinité, l'eucharistie, le baptême, fut proscrit par la diète pour la publication de la confession de foi des sociniens polonais, quitta la Pologne 1658 et f 1661 à Selchow.

SCHLOSSER, Jean-Fréd.-Henri, né 30 déc. 1780 à Francfort s. M., avocat, conseiller municipal, juge sous Dalberg, inspecteur des études, travailla en 1814 à Caire proclamer dans la constitution de sa ville natale l'égalité des cultes luthérien, catholique et réformé. Il échoua et se retira à Vienne, où le 21 déc. 1814 il se fit recevoir catholique avec sa femme. Il n'en continua pas moins ses efforts, et de retour chez lui, protesta au nom de la communauté cathol. contre la constitution du 19 juill. 1814, jusqu'à ce qu'en 1822 il obtint gain de cause. Dès lors il se retira des affaires publiques, et vécut paisiblement, s'occupant de littérature, de religion, de cantiques, tantôt près de Heidelberg, tantôt à Francfort, où il f 22 janv. 1851. Son principal ouvrage est un recueil d'hymnes, publié sous le titre de: L'Église dans ses cantiques, à travers les siècles.

SCHLOTTMANN, Constantin, né à Minden 1819, chapelain d'ambassade à Constantinople 1850, prof, de théol. à Zurich 1855, à Bonn 1856, à Halle 1866; auteur de plusieurs écrits: sur Job, la Notion de la Conscience, Mélanchthon réformateur de la républ. des lettres, et d'un grand nombre d'articles de revues.

SCHMALZ, Valentin, né 1572 à Gotha, étudia à Strasbourg, se joignit aux unitaires, passa en Pologne où il se fit rebaptiser, occupa différents postes comme recteur et prédicateur, et fut enfin nommé à Racovie où il f 1622. Un des plus ardents champions du socinianisme, il servit sa cause par de nombreux voyages et par plus de 50 écrits, qui portent malheureusement l'empreinte d'une passion amère.

SCHMID lo Conrad, né 1476 à Ktlssnacht, prêtre affilié aux johannites, ami de Zwingli, se joignit à la Réforme en 1522 par un sermon prêché à Lucerne, et prit part à plusieurs conférences et discussions publiques; il accompagna les troupes à la guerre et périt k Cappel avec Zwingli 11 oct. 1531. Son corps fut recueilli dans la chapelle de sa paroisse. Caractère Aimable, controversiste modéré, bon orateur.

2o Chrétien-Frêd., né 1794 k Bickelsberg, Wurtemberg, Docteur et prof, de théol. k Tubingue depuis 1821, f 1852. Auteur d'une Théol. biblique du N. T. et d'une Morale chrétienne, publ. après sa mort, de Sermons, et de Témoignages en faveur de la vérité chrétienne. Il combattit l'école de Baur, et penchait vers la théol. philos, de Schleiermacher.

3° Léopold, né 9 juin 1808 à Zurich, fils d'un père catholique, étudia à Tubingue, Munich et Marbourg, et après avoir été ordonné prêtre il occupa divers postes comme vicaire et comme prof, d'hist. ecclés., de patristique et d'exégèse. En 1839 il vint à Giessen comme prof, de dogmatique et de symbolique. En 1850 il fut nommé év. de Mayence par le chapitre, mais le pape lui refusa sa confirmation k cause de ses tendances libérales. Il continua dès lors avec plus de liberté sa lutte contre l'ultramontanis-me jusqu'à sa f 20 déc. 1869 à Giessen. Il a laissé de nombreux écrits de circonstance, et quelques ouvrages de théologie, la Genèse, le Catholicisme allemand, etc.

SCHMIDT lo Jean-Laurent, né vers 1700 à Zelle près Schweinfurt, fils de pasteur, étudia à Iéna la théol., la philos, et les mathématiques. Il commença en 1735 la publication de sa Bible, dite de Wertheim, dont la i* partie seule parut, comprenant le Pentateuque. D'un rationalisme vulgaire, elle appartient comme tendance à l'école de Wolf, mais avec une certaine timidité dans les déductions. Ce livre souleva de vives protestations, et un décret impérial du 15 janv. 1737 en ordonna la confiscation en même temps que l'arrestation de l'auteur inconnu. Schmidt se livra lui-même, fut mis en prison, puis relâché, vécut pauvrement de traductions à Hambourg sous le nom de Schrtfder, et finit par trouver une place à Wolfenbttttel, où il f 1750 ou 1751.

2o Georges, l'apôtre des Hottentots. Né 13 sept. 1709, à Kunewalde, Moravie, converti en 1725, entreprit en 1727 avec Melchior Nitsch-mann un voyage en Bohême pour fortifier et

consoler les protestants opprimés de Salzbourg. Mis aux fers presque à son arrivée, il passa 6 ans en prison; Nitschmann y mourut en 1729. Transféré de Schildberg au Spielberg, de la prison aux travaux forcés, accablé de travail, pas chaussé, mal vêtu, mal nourri, il fut enfin relâché et arriva à Herrnhut 22 juillet 1734. Après un nouveau voyage missionnaire en Allemagne, il se sentit appelé à partir pour le Gap, où deux riches négociants hollandais projetaient une mission parmi les Hottentots. Il y arriva le 9 juillet 1736, se rendit immédiatement auprès de ses noirs dont une quarantaine, entre autres le chef Africo, devinrent ses disciples. Consacré au Cap en mars 1742, il baptisa quelques-uns de ses prosélytes, mais les pasteurs du Cap y virent un empiétement sur leurs droits et lui tirent des difficultés. Il n'en continua pas moins avec bénédiction son ministère et donna le nom de Gnadenthal k sa station; mais invité par les Frères à venir se retremper au milieu d'eux, il revint en Europe, en juillet 1743, avec l'espoir de retourner bientôt auprès de ses Hottentots; des obstacles de toute nature l'en empêchèrent. Il se maria en juillet 1746, et occupa successivement plusieurs postes comme économe, pasteur, ancien, etc. Il finit par s'établir k Niesky, toujours pauvre et plus ou moins souffrant, gagnant sa vie comme il pouvait, tour à tour jardinier, manœuvre et fossoyeur, mais respecté de tous. Il perdit sa femme en 1780, et le 2 août 1785 on le trouvait étendu mort dans sa chambre, entre 11 h. et midi; il était mort à l'heure habituelle de sa prière, portant touj. dans son cœur ses noirs paroissiens.

3° Jean-Ern.-Christian, né 6 janv. 1772 à Busenborn, Hesse, commença en 1793 sa carrière k Giessen comme privat-docent, et finit par y devenir prof, de théol., historiographe de la cour, conseiller intime et prélat, f 4 juin 1831. Ses ouvrages, fort nombreux, portent presque tous sur des sujets de théologie: Manuel d'hist. ecclésiastique (inachevé); la plus belle et la plus vieille idylle de l'Orient, Genèse 49; Clé du N. T., Encyclopédie et Méthodologie, l'Ecclé-siaste etc.

SCHMOLKE, Benjamin, nè 21 déc. 1672 k Brauchitschdorf, près Liegnitz, où son père était pasteur; étudia à Leipzig, devint ensuite • l'adjoint de son père (qui l'avait consacré k Dieu dès sa naissance), puis diacre, archidiacre et enfin premier pasteur, et inspecteur ecclés. et scolaire. Frappé d'une attaque d'apoplexie le dimanche de Laetare 1735, il donna sa démission. Bientôt il perdit la vue et f 12 févr. 1737. Un des poètes religieux les plus féconds de son temps, il a laissé sortir de sa plume des choses médiocres à côté de poésies d'un lyrisme admirable, pleines de chaleur et de vie. Il a publié aussi un petit Livre de communion, avec prières pour le matin et le soir.

SCHMUCK, Dr Vincent, fils d'un libraire et conseiller municipal de Smalcalde. Né 17 oct. 1565, il étudia à Leipzig, où il fut en 1617 nommé surintendant et prof, de théol. f 1 févr, 1628. Auteur et traducteur de plusieurs hymnes et cantiques latins.

SCHNECKENBURGER, Matthias, né 17 janv. 1804 à Thalheim, Wurtemberg; fils de cultivateurs, obtint de ses parents de pouvoir faire des études, et il y réussit brillamment, k Urach, Tubingue et Berlin. Après quelques fonctions-provisoires dans l'enseignement et le pastorat, nommé prof, de théol. à Berne 1834, f 13juin 1848. Esprit fin, délié, un peu collectionneur, il avait des idées larges et s'intéressait à toutes les questions, mais il manquait de profondeur et d'originalité. Auteur de plusieurs dissertations critiques sur le N. T., sur le Baptême de* prosélytes chez les Juifs, l'Évang. des Égyptiens, le but des Actes des ap., le faux Néron, l'ép. aux Hébreux, l'Antéchrist, etc. Il avait été malheureux en ménage, et quand il fut mort la Xantippe refusa de remettre k ses amis les mss. qu'il avait laissés; mais accusée d'avoir, par de mauvais traitements, causé la mort d'one jeune servante, elle s'enfuit en Amérique, et Hagenbach put entrer en possession de son héritage littéraire.

SCHQENHERR, J.-H. né 1770 à Memel, visita plusieurs universités, notamment Leipzig, fit de bonnes études, et se fixa en 1794 à Kdnigs-berg, où il vécut paisiblement dans la retraite,, se livrant k ses spéculations théosophiques, les propageant dans le cercle restreint de ses amis et connaissances, f 1826. Esprit original, élevé dans la piété, mécontent du Dieu abstrait de l'orthodoxie, il trouva chez les vieux mystiques, puis chez Bôhme, Oetinger, Schelling. Baader, une idée plus vaste et plus satisfaisante de Celui qui est la source de tout bien et de toute vérité. Ebel, qu'il avait connu à l'université, partageait ses sentiments, sans aller jusqu'aux exagérations de merveilleux que l'on remarque à regret dans Schœnherr, et quand Ebel fut accusé, on le rendit responsable de quelques excès de paroles qu'on avait constatés dans la Théosophie de Sch., et dont il était innocent.

SCHOETTGEN, Christian, né 14 mare 1687 à Wurgen, fils d'un cordonnier, étudia à Leipzig la philos., l'histoire, la théol. et les langues orientales, recteur à Francfort sur l'Oder 1716, k Stargard 1719, et à Dresde 1728 où il t 15 déc. 1751. Savant et très versé dans la littérature rabbinique, il a publié Horœ Mr. et talmudicœ in N. T. 1733; Horœ hebr. et talm. in theol. Judœorum dogmaticam de Mes-sid, 1742, et Novum lexicon grœco-lat. in N. T. 1746.

SCHOLTEN, Jean-Henri, né 17 août 1811 à Bleu ter, près d'Utrecht, fils d'un pasteur, étudia 1828-1836 à Utrecht, fit en 1831 comme volontaire la campagne de 10 jours contre la Belgique soulevée, prit en 1836 son grade de docteur en théol., et après 2 ans de pastorat à Meerkerk, fut nommé prof- à Franeker, puis 1843 à Leyde. Auteur de nombreux ouvrages, grands ou petits, dont plusieurs trad. en anglais, français et allemand; appartient à la théol. libérale, déterministe, il rejette le libre arbitre et le surnaturel. Démissionnaire depuis 1881.

SCHOLZ, Jean-Martin-Augustin, né 8 février 1794 à Kapsdorf, près Breslau, théol. catholique, s'occupa surtout de la critique du N. T., visita en 1818 et 1819 les mss. des bibliothèques de Paris, Londres, la Suisse et l'Italie; en 1820 et 1821 l'Egypte, la Palestine et la Syrie, et après avoir été ordonné prêtre à Breslau, il vint à Bonn comme prof, d'exégèse 1821, fut nommé doyen de la faculté catholique après la mort d'Hermès 1831, et chanoine de Cologne 1837. f 20 oct. 1832. Il a découvert et comparé beaucoup de mss.; sous ce rapport il a rendu des services, mais il manquait de méthode et procédait par voie de suppositions gratuites. Ainsi il distingue les mss. en 2 classes seulement: les alexandrins, parmi lesquels il compte tous les occidentaux, et les constantino-politains, qu'il préfère, rangeant dans cette famille non seulement tous les mss. de l'Asie Mineure, jusqu'à la Grèce et Constantinople, mais encore les versions gothiques, slavonnes, syriaques, et les pères de ces contrées. Il a écrit Fhist. de ses voyages en Orient, des notes critiques sur les mss. qu'il a trouvés, un Manuel d'archéologie, une Introd. à l'A. et au N. T.; mais son principal ouvrage est son édition du duN. T. grec, avec notes, qui malheureusement renferme des erreurs ou des inexactitudes, et qui dans tous les cas est auj. dépassée par celle de Tischendorf.

SCHOPENHAUER, Arthur, né 22 fév. 1788 à Dantzig, fils d'un négociant bilieux et de la femme-auteur Jeanne-Henriette Sch., avec laquelle il ne s'entendit jamais. Élevé pour le commerce, il apprit le français au Havre, l'anglais à Wimbledon, entra comme apprenti à Hambourg chez le sénateur Jénisch. Son père étant mort vers 1804, peut-être suicidé, il se tourna vers les lettres et les sciences, étudia à Gottingue la médecine, l'hist. naturelle et la philos.; Schulze lui recommanda de lire Platon et Kant avant de passer à Aristote et à Spinosa. A Berlin 1811 iln'apprécia ni Fichte, ni Schleiermacher. Un premier essai, paru en 1813 (la guerre avait interrompu ses travaux) lui valut le titre de docteur de l'univ. de Iéna. A Wei-mar il vit beaucoup Gœthe, et Mayer lui fit connaître la philos, indoue, qui le charma. Riche et indépendant, il visita deux fois Rome et Naples, et à son retour essaya deux fois du professorat à Berlin, mais sans succès. Mécontent des hommes qui ne l'estimaient pas suffisamment, et furieux des succès de Hegel, il se retira à Francfort, où il vécut solitaire et misanthrope. Enfin en 1836 il publia son livre: De la volonté dans la nature, qui fonda sa réputation. Il composa encore d'autres ouvrages, qui ne sont que le développement de celui-là. f 21 sept. 1860. Son système est le pessimisme. Tout, dans la nature et dans l'homme, vient de la volonté, mais par un effort, qui produit la fatigue et par conséquent la souffrance. La vie est une longue lutte, à laquelle la mort seule met un terme. C'est en allemand la doctrine de Bouddha, et en prose l'amère poésie de Léopardi.

SCHOTT 1° André, né 12 sept. 1532 à Anvers, élevé à Louvain, passa quelque temps à Paris, auprès de l'ambassadeur d'Autriche Rusbek, qui avait déjà représenté son maître auprès de Soliman. Depuis 1579 on le trouve en Espagne, à Madrid, Alcala, Tolède; en 1584 prof, de grec et d'histoire romaine à Saragosse. L'archev. de Tarragone, Antoine-Augustin, le fait venir à sa cour. Lors du siège d'Anvers 1585, Schott s'engage à se faire jésuite si la ville est prise et catholicisée; il tient parole, prononce ses vœux à Saragosse en 1586, étudie la théol. à Valence, et l'enseigne au collège des jésuites à Gandie. Il passe 3 ans à Rome comme prof, d'éloquence, et finit par se retirer au collège d'Anvers, où il continue ses travaux littéraires, et f 23 janv. 1629. Catholique fervent, mais savant paisible, il a rendu plus de services par des réimpressions de vieux livres que par ses propres écrits, dont les principaux ont pour sujet l'histoire d'Espagne.

2° Henri-Auguste, né 5 déc. 1780 à Leipzig, docteur, prédicateur, prof, de philos, puis de théol. dans sa ville natale, passa en 1809 à Wittenberg comme prédicateur, puis 1812 à Iéna, où il fut en 1817 nommé conseiller ecclésiastique. f 29 déc. 1835 d'une apoplexie séreuse. Faible de constitution, d'un caractère facile, d'une grande culture littéraire, latiniste consommé, il s'occupa surtout de former des prédicateurs. Outre une Dogmatique, une Introd. au N. T., des commentaires sur les Thessaion. et les Galates, une édition du N. T. grec, avec trad. latine, il a composé quelques écrits sur l'éloquence, et notamment l'éloquence chrétienne, qui ont encore de la valeur. Il appartenait à la théol. positive.

SCHR0ËCK, Jean-Matthias, né 26 juill. 1735 à Vienne, fit de bonnes études préliminaires, se rendil en 1751 à GOttingue où il entendit Mosheim et Michaélis, puis à Leipzig où il collabora aux Acta eruditorum. Après y avoir passé quelques années comme prof, de philos, et bibliothécaire, il se rendit à Wittenberg comme prof, de poétique 1767, et depuis 1775 comme prof, d'hist. ecclésiastique, f 2 août 1809 à la suite d'une chute faite d'une échelle dans sa bibilothèque. Il est surtout connu par son Hist. de l'Égl. chrétienne, ouvrage gigantesque de 45 vol. 1768-1812, qui a fait sa réputation et sa fortune, et qui a encore auj. de la valeur. Son Hist. universelle, 6 vol., a été trad. en français. Il était simple, pieux, d'un abord facile; son style est naturel et vivant; ses appréciations sont impartiales.

SCHROEDER 1° Jean-Joachim, orientaliste, de Neukirchen, 1680-1756, prof de langues orientales et d'hist. ecclés. à Marbourg; auteur d'une Grammaire arménienne.

2° Jean-Henri, né 1666 à Hallerspringe, disciple de Franke, pasteur à Môseberg 1700, auteur de quelques cantiques estimés, f 1714, selon d'autres 1728.

SCHUBERT, Gotthilf-Henri (de), né à Hohen-stein, Saxe, 26 avril 1780, fils du pasteur de l'endroit. Après avoir étudié au gymnase de Weimar, sous Herder, il vint à Leipzig 1799 pour y faire sa théologie, mais en 1801 il se décida pour la médecine et les sciences naturelles, se rendit à Iéna où il se lia avec Schel-ling, et s'établit à Altenbourg comme médecin. En 1805 il alla étudier la minéralogie à Freyberg, et publia 1806 ses premiers ouvrages. Recteur à Nuremberg 1809, il trouva dans <^tte ville des hommes distingués et pieux qui exercèrent sur lui une salutaire influence. Précepteur du grand-duc héritier de Mecklem-bourg-Schwerin 1816-1819. Il est nommé prof, à Erlangen, et en 1827 à Munich, où il est successivement nommé conseiller intime, décoré et anobli, f l*r juill. 1860. Marié deux fois, il n'a laissé qu'une fille. Sans être théologien, il a compté dans le monde religieux par le sérieux de sa vie et de sa pensée. L'état de l'Ame dans le monde des esprits était l'une de ses grandes préoccupations et, dans un sens, l'objet de ses études; les pressentiments, les songes, la seconde vue, toutes ces énigmes de l'être spirituel, le captivaient, et il y trouvait un aliment dans les profondeurs mystiques de la philos, de la nature de Schelling. Il est arrivé quelquefois à des conclusions un peu merveilleuses, un peu singulières, mais même alors on doit rendre témoignage à la candeur de sa vie intérieure et à la finesse de ses observations psychologiques. Sa piété personnelle intime et ses aspirations élevées l'ont toujours préservé d'un dogmatisme étroit et lui ont assuré l'intimité cordiale et l'affection respectueuse d'hommes appartenant aux Églises et aux tendances les plus diverses. Sans être un savant dans le sens ordinaire du mot, il était extrêmement instruit dans presque toutes les branches des connaissances humaines; il avait énormément lu, bien lu, et beaucoup retenu. Ses nombreux ouvrages, même les plu* profonds, sont écrits dans un beau style, qui les a rendus populaires et a contribué à sa fortune et à sa réputation. Il a écrit entre autres: Esquisse d'une hist. générale de la vie; Coup d'œil sur les côtés obscurs des sciences naturelles (mesmérisme, somnambulisme); les Grandeurs relatives et les Excentricités des corps terrestres 1808; le Monde primitif et les étoiles fixes; la Symbolique du rêve. Mais ses principaux ouvrages sont AUes und Neues, du Vieux et du Neuf, en 3 vol., apologie du christianisme, tirée de sa propre expérience et des profondeurs de la vie de l'âme; son Histoire de l'âme, souvent réimpr. et riche en citations d'auteurs anciens; son Voyage en Orient 1836-1837; son Autobiographie; enfin un grand nombre d'articles de revues.

SCHUCH, Wolfgang. originaire d'Allemagne, prêchait la Réforme à Metz en 1525; il obtint de grands succès à Sainl-Hippolyte et dans les Vosges, mais les prêtres le dénoncèrent au duc de Lorraine, Antoine-le-Bon, qui jura de mettre la ville à feu et à sang. Schuch, pour sauver la ville en rétablissant la vérité des faits, se rendit auprès du duc à Nancy; mais il fut arrêté, jeté dans un cachot infect, et condamné, sous la pression de Bonaventure Renel, provincial des cordeliers, à être brûlé vif. Il marcha au bûcher avec assurance, récitant les Ps. 51 et 122, et t 19 août 1525.

SCHULTE, Jean-Fréd., né 23 avril 1827 à Winterberg, Westphalie, docteur en droit, l'un des principaux représentants officiels des vieux-catholiques en Allemagne, connu par de nombreux ouvrages d'histoire et de droit canon, contre l'infaillibilité du pape et le concile du Vatican, étudia à Berlin, donna des cours libre* à Bonn, fut nommé prof, à Prague 1854, préposé aux affaires matrimoniales, membre du Conseil d'instruction publique, et anobli, janv. 1869. Appelé à Bonn en 1872; il a présidé plusieurs synodes vieux-catholiques.

SCHULTENS, Albert, né 1686 à Groningue. fonda à 18 ans sa réputation d'orientaliste, en soutenant, contre Gussetius, que l'hébreu n'était pas la langue primitive de l'humanité, donnée de Dieu, mais une branche des langue* sémitiques, dérivée de l'arabe, par conséquent plus jeune; il en conclut aussi qu'il fallait savoir l'arabe pour étudier scientifiquement la gramm. hébraïque. II étudia à Leyde et à Utrecht, où Reland l'assista pour la publication de ses observations philologiques sur Job. Nommé docteur en théol. 4 juillet 4709, il poursuivit ses travaux à Leyde, fut pasteur à Wasse nœer, prof, à Franeker, et enfin à Leyde où il eut d'abord la direction du séminaire, la chaire d'arabe el en 1740 les antiquités hébr. f 26 janv. 1750. Il a frayé la voie à l'étude scientifique de l'hébreu, quoique sa méthode ne soit pas exempte d'arbitraire. Ses principaux ouvrages sont (en latin), ses Origines hébraïques 1724; ses Institutions servant de base à l'étude de cette langue 1737; ses: Défauts, ou lacunes dans renseignement de l'hébreu 1731; Institutions ara-méennes 1745; Gramm. syro-araméenne, inachevée; Comment, sur Job, les Proverbes, etc. Il eut pour successeur son fils, né 1716, f 27 nov. 1778; et celui-ci à son tour, son fils Henri-Albert 15 févr. 1749, f 12 août 1793; l'un et l'autre très savants, mais qui ont peu produit.

SCHULTHESS, Jean, né 28 sept. 1763 à Mœnchaltorf, fils du pasteur et philologue Jean-Georges, étudia à Zurich et s'occupa beaucoup de pédagogie. Prof, au gymnase en 1816, docteur en théol. de Iéna en 1817, il fut en 1833 nommé prof, à l'univ. de Zurich, et f 10 nov. 1836. Il représente dans ses écrits le vieux rationalisme, et combat le piétisme et l'orthodoxie avec une persévérance et même un parti pris qui ne recule pas toujours devant d'ineptes platitudes, p. ex. dans son exégèse. Mais honnête, aimable et pieux, en dehors de la polémique. Auteur de: Rationalisme et supranatu-ralisme, Doctrine évang. de la Cène, Comment, sur Jacques, etc. On lui doit surtout une édition compl. des œuvres de Zwingle, faite en collaboration avec Schuler, 1829 et suiv. Son fils Jean a publié 1859 un mémoire à l'occasion du centenaire.

SCHULZ, David, né 20 nov. 1779 d'un pauvre régent et tabellion de Ptlrben, Silésie, travailla avec courage pour pouvoir faire ses études à Breslau et Halle, prit son grade de docteur en philologie 1806, fut nommé prof, de théol. à Francfort, s. l'O., docteur en 1810, et vint en 1811 k Breslau, enseignant l'exégèse du N. T., l'introduction, la dogmatique et l'hist. ecclésiastique. Franchement rationaliste, il put d'autant plus exercer d'influence en ce sens qu'il était membre du Consistoire, et même un moment président de la Commission d'examen pour les régents. 11 alla trop loin, signa une circulaire du 21 juin 1845 contre « les évangéliques, » et fut destitué; on lui conserva son titre et son traitement. Il se retira de la vie publique, fut quelque temps maladif et f 17 févr. 1854. Ses écrits, presque tous de polémique, et mal écrits, sont auj. oubliés.

SCHURMANN, Anna-Marie (de), née 5 nov. 1607 à Cologne. Fuyant les persécutions d'Ernest de Bavière 1610, elle dut avec ses parents se retirer en Hollande. Admirablement bien douée, elle savait outre sa langue maternelle le français, l'anglais, l'italien, le latin, le grec, l'hébreu, l'arabe, le copte, et cultivait avec distinction les beaux*rts; on l'avait surnommée la 10me muse. Portée de bonne heure à la piété, elle fit à 58 ans la connaissance de Labadie, s'attacha à lui à Amsterdam et l'accompagna à Herford, Altona, Wiewert, près Leeuwarden, où elle f 5 mai 1678, pauvre, après une longue maladie, et après avoir condamné ses poésies de jeunesse. On a d'elle: Opuscula hebrœa, grœea. latina, etc. 1648, et son dernier ouvrage: Eu-kleria, ou le choix d'un meilleur sort, qui renferme d'intéressants détails sur sa vie, 1673. Son Mysterium magnum n'a paru qu'en 1699. Son prétendu mariage avec Labadie est invraisemblable.

SCHUTZ lo Henri, (Sapittartta), né 5 oct. 1585 à Kfislritz, hésita longtemps entre le droit, qu'il commença 2 fois, à Marbourg 1607, puis 1613, et la musique, à laquelle il finit par se consacrer après l'avoir étudiée à Venise sous Gabrieli. Ses compatriotes l'appellent le père de la musique allemande, parce qu'il assura son développement futur en lui communiquant quelque chose du goût italien. C'est au baptême du duc Auguste, de Dresde, qu'il se révéla comme compositeur; dans le catalogue de ses Œuvres, qui ne furent pas toutes imprimées, on trouve des Symphonies sacrées, des Chansons sacrées, des Concerts d'église, à une ou plusieurs voix, des Motets, des Oratorios de grand mérite et d'une incontestable originalité. Il donna une heureuse impulsion au chant évangélique, mais en le perfectionnant par l'abandon des anciennes formes, il rendit plus difficile la participation des fidèles et porta un coup fâcheux à l'ancien choral. Il composa aussi un opéra, Daphné, trad. de Rinuccini par Opitz, et le fit représenter 1627 à Torgau, lors du mariage de la sœur de l'électeur, dont il était maître de chapelle. Ce premier essai d'opéra n'eut pas de suite, les circonstances n'y prêtaient pas; c'était l'époque de la guerre de Trente ans. Après avoir beaucoup voyagé, en Italie, Danemark, etc. Schtitz f 6 nov. 1672.

2° Jean-Jacques, né 7 sept. 1640 à Francfort-s.-Mein, avocat et magistrat, ami de Spener et de ses réunions de piété, f 22 mai 1690. Auteur anonyme d'un petit Recueil de la vie nouvelle à l'usage des commençants, et de plusieurs cantiques. attribués tour à tour à Schade et à Gro-tius. Son mysticisme finit par le conduire à quelques écarts de doctrine.

SCHWABACH, petite ville de Bavière, à 15 kilom. de Nuremberg, acquit une certaine importance par l'établissement de réfugiés fran-rais. Le margrave Georges d'Anspach, d'accord avec Nuremberg, y convoqua le 14 juin 1528, sous la présidence du chancelier Vogler, un colloque où furent rédigés, probablement par Osiander, les 24 articles, dits de la Visitation de Schwabach, qui servirent de base aux ordonnances ecclés. de Nuremberg-Brandebourg, dans le sens luthérien. Un autre colloque eut lieu aussi à Marbach immédiatement après la clôture de la diète de Spire et sous les auspices de Philippe de Hesse, 22 avril 1529, pour conclure une alliance entre les différents princes et États protestants, indépendamment de la question de la Gène, mais il n'aboutit pas, quelques délégués n'ayant pas les pouvoirs nécessaires pour conclure. Les députés stricts luthériens restèrent seuls en arrière et adoptèrent définitivement les 15 (devenus 17) Articles de Schwabach, où la doctrine luthérienne est très accentuée, rédigés probablement par Luther lui-même, et qui servirent de base à la Conf. d'Augsbourg. Le mss. original en a été retrouvé par Frick dans les Archives d'Ulm.

SCH WARTZ lo Berthold. moine de Fribourg eu Brisgau, ou de Cologne, bénédictin ou cor-delier, vers 1300 ou 1320, passe pour avoir inventé la poudre, involontairement et par accident, en laissant tomber une étincelle sur un mélange de salpêtre, de soufre et de charbon qu'il préparait dans un mortier pour une expérience. Le fait n'est pas établi.

2° Chrétien-Frédéric, né 26 oct. 1726 à Son-nenbourg, près Custrin. Il perdit fort jeune sa mère, qui l'avait consacré à Dieu, visita Halle en 1746 pour voir Francke et son œuvre; y fit sa théologie sous Baumgarten, Michaëlis, Knapp et Freylinghausen; fit la connaissance du missionnaire danois Schultze, eut l'occasion d'apprendre le tamule, et iinit par entrer au service de la mission danoise. Il s'embarqua à Londres et arriva à Tranquebar 30 juillet 1750; il apprit en peu de temps 4 dialectes des Indes, et au milieu des intérêts contraires et des rivalités qui s'agitaient autour de lui, il eut le bonheur de pouvoir rendre aux particuliers, comme au gouvernement, d'importants services, sans négliger jamais ses devoirs de missionnaire. A 66 ans il prêchait encore 3 fois par jour et en 3 langues différentes. En 1762 il avait passé au service d'une société anglaise. En 1776 il s'établit à Tanjore, dont le rajah lui faisait depuis 1769 de cordiales avances; et en 1779 il se rendit de la part du gouvernement anglais auprès d'Hyder-Ali, qui conçut pour lui la plus vive affection et lui permit de circuler librement dans le pays sans être inquiété, pendant les 4 années de la campagne contre les Anglais qui aboutit à la paix de Tippo-Saïb 1784. Le gouvernement le nomma en 1786 membre honoraire de la Commission de régence imposée au nouveau rajah de Tanjore. Celui-ci étant mort 1787 l'avait désigné comme régent du pays et tuteur de son fils mineur Serfodshi, mais Schwartz déclina cette charge et fit nommer régent le demi-frère do défunt. Celui-ci ayant abusé de sa position et de la protection anglaise pour se faire nommer rajah, Schwartz intervint énergiquement en faveur de l'enfant déshérité; il lui sauva la vie 1793, et après 3 ans de luttes réussit à faire reconnaître ses droits. II avait obtenu à la mort de son ami Tuldja, qu'on renonçât à brûler les veuves du défunt à chaque changement de règne. Sans devenir chrétien, Serfodshr ne cessa de témoigner pour le missionnaire le plus profond respect. Schwartz f le 13 févr. 1798, après quelques mois d'une douloureuse maladie et après plus de 48 ans d'un ministère fidèle. Il fut enterré dans la chapelle de son jardin; Serfodshi lui fil élever un monument dans une des églises de Tanjore et plaça le portrait du missionnaire parmi ceux de ses ancêtres. Le colonel Fullerton écrivit de Schwartz au gouvernement anglais: Les talents et 1'honnêtete de cet homme sans reproche ont relevé la réputation des Européens.

3<> Ch.-Joseph, né 4 nov. 1752 à Bamberg, entra, après d'excellentes études, au couvent bénédictin de Banz où il reçut le nom d'Isidore; après avoir été consacré prêtre, il fut chargé 1779 des cours de mathém. et de philos.* puis de la théologie, f 19 juin 1794, d'une attaque d'apoplexie, comme il officiait à l'autel le jour de la Fête-Dieu. Instruit dans les langues modernes, il connaissait aussi un peu les langues orientales. Il appréciait la philos, de de Kant. Catholique, mais modéré, il s'attacha surtout à combattre les tendances négatives de son temps. Auteur d'un manuel de la relig. chrét. en 3 vol., que son ami Schad, qui passa plus tard au protestantisme, fit réimprimer, avec quelques autres écrits.

4o Fréd.-H.-Chrétien, né 30 mai 1766 à Giessen, où il fit une partie de ses études, fut quelque temps suffragant de son père, puis occupa différents postes, prit ses grades de docteur eu philos, et en theol., et fit plusieurs voyages qui furent utiles à son développement. A Marbourg il fit la connaissance de Jung-Stilling, dont il épousa 1792 la fille aînée, Jeanne-Madeleine f 1826. Il vit aussi Pestalozzi, qui exerça sur lui une grande influence, et dont il s'empressa d'adopter la méthode, mais en lui imprimant une direction franchement chrétienne. Il s'occupa spécialement de l'éducation des filles, et ouvrit à Echzell, avec Creuzer, un pensionnat En 180fc il fut appelé à Heidelberg comme prof, de théol. et de pédagogique, et il y retrouva ses amis Daub et Creuzer; avec ce dernier il ouvrit nn séminaire catéchétique; avec Daub il travailla à l'union des Égl. sur la base de l'Évangile positif, qu'il défendit avec succès aux synodes de 1821 et 1834. A la suite de ce dernier il fut nommé commandeur de l'ordre du lion de Z&h-ringen. f 3 avril 1837 des suites d'un refroidissement. On a de lui une Dogmatique, une Morale chrétienne, et plusieurs traités de pédagogique.

5° Jean-Ch.-Édouard, né 20 juin 1802 à Halle, où il étudia la théol. et la philologie. Appelé en 1829 à Iéna, il y resta jusqu'à sa f 18 mai 1870, et y exerça une salutaire influence comme pasteur. Sa tendance était libérale modérée. Il a laissé des sermons, des travaux homilétiques, et de petites dissertations d'un intérêt local, l'Université de Iéna, etc.

6° Gh.-H.-Guill. né 18 nov. 1812 à Wiek auf Rugen, fils d'un prédicateur distingué, il étudia à Halle, Bonn et Berlin, où il entra en relation avec Schleiermacher. Il fit 6 mois de prison à Wittenberg pour participation à une émeute, 1837. En 1842 il fut agrégé à l'univ. de Halle, malgré Tholuck et Muller. En 1848 il fut envoyé au parlement de Francfort, où il prit place au centre droit. Enfin en 1836 il fut appelé à Gotha comme prédicateur de la cour, et il s'y fit une belle position par son talent et par son opposition libérale à la théologie traditionnelle. Il a écrit: L'essence de la religion (qu'il sépare entièrement du dogme); la Théologie de Lessing; Hist. de la nouvelle théologie; 5 vol. de serinons, etc.

SCHWARZENBERG, Jean (comte de), né 23 déc. 1463; après une jeunesse dissipée, il fut tout à coup ramené à des sentiments sérieux, et se décida, pour inaugurer une vie nouvelle, à accompagner Fréd.-le-Sage dans un voyage en Palestine, 1493. A son retour il se distingua par sa valeur daïis les guerres de l'emp. Maxi-milien. Sa taille, sa force répondaient à son courage. Son ambition était de pouvoir, par sa position comme homme d'État, réagir contre les mœurs corrompues de son temps. Gouverneur à la cour épiscopale souveraine de Bamberg, il prépara la revision de la Constitution criminelle du pays, en même temps qu'il se remit avec énergie à l'étude du latin et de la philosophie ancienne. Il aimait beaucoup Cicéron, el il en traduisit de nombreux fragments. Il publia aussi en vers et en prose des écrits satiriques ou didactiques. Enfin il étudia la Bible à fond, et quand Luther parut, il se trouva, lui, malgré son Âge, toujours fort et vigoureux, tout prêt pour l'aider dans son œuvre de réformation, d'abord à Bamberg sous le doux et pieux év. G. de Limbourg, puis à Anspach et Baireut. Il retira sa fille du couvent, et soutint avec énergie les droits de la vérité évangélique, lors

d'une mission à la cour d'Albert de Prusse, devant le roi de Pologne et ses prélats, f 21 oct. 1528. On a encore de lui: La conjuration du diabolique serpent ancien contre la parole divine 1525, et en 1526 le Serpent-capucin (Kut-tenschlange), contre le provincial des franciscains qui lui avait répondu.

SCH WEBEL lo Schweblin, ou Sttblin, Jean, le réformateur de Deux-Ponts, né 1490 à Pforz-heim, fils d'un pelletier. Ami d'enfance de Méianchthon, il entra dans Tordre du Saint-Esprit, et fut ordonné prêtre 1514. Préparé par son entourage et ses études à désirer une réforme de l'Église, il se joignit de bonne heure au mouvement, déposa dès 1519 l'habit de son ordre et se mit à prêcher l'Évangile. Persécuté, il trouva un refuge à Sickingen, accepta l'offre du duc Louis II qui l'appelait à Deux-Ponts, se maria en 1524, introduisit dans le culte la langue vulgaire, et poursuivit pendant 10 ans l'œuvre paisible de la Réforme, sans troubler • ceux qui voulaient rester catholiques. Souffrant depuis 1533, il f 19 mai 1540 de la peste. Il tenait pour l'Église à une organisation presbytérienne, et n'acceptait pas la doctrine de Luther sur la Cène; il aurait mieux aimé la formule de Bucer. Sa santé ne lui permit pas d'assister à de nombreux colloques et conférences, mais il resta touj. en relations avec les réformateurs, et même avec Luther. Son fils, chancelier de la ville, a publié ses œuvres et sa biographie.

2° Jean, moine cistercien, né 1499 àBischof-fingen, près Brissac; disciple de Valentin Mic-kram, passa à la Réforme, sortit du couvent 1524, et fut directeur de l'école de Saint-Pierre le-Vieux, à Strasbourg, jusqu'à sa f 1566.

SCHWEGLER, Albert, un des disciples les plus distingués de l'école de Baur, né 10 fév. 1819 à Michelbach, élève de Tubingue, admirateur de la Vie de Jésus de Strauss. Auteur de plusieurs ouvrages: le Montanisme 1841, le Christianisme après les apôtres, Hist. de la philosophie, Hist. romaine, la Philos, grecque, etc. f 5 janv. 1857, subitement. U a édité les Homélies clémentines, l'Hist. ecclés. d'Eusèbe, la Métaphysique d'Aristote, etc.

SCHWENKFELDT. Gaspard Schw. d'Ossig, ou d'Ossing, né 1490 en Silésie, fit de bonnes études à Cologne, et passa plusieurs années comme page en différentes cours, enfin auprès de Frédéric II, qui le nomma chanoine de Lieg-nitz, quoique laïque. Réveillé par les écrits de Tauler et de Luther, il se rendit 1522 à Wittenberg et, dès son retour, se mit à prêcher et à évangéliser. Par sa nature mystique il tenait plus de Carlstadt que de Luther; il attachait plus d'importance à la vie religieuse intérieure qu'à la foi purement subjective, mais il exagéra

cette tendance» il se servit d'expressions qui l'exagéraient encore; il s'obstina à défendre son point de vue, et finalement tomba dans diverses erreurs qui le brouillèrent avec tous les réformateurs. Il combattit en particulier la doctrine de Luther sur la justification par la foi, comme dangereuse en pratique. Il estimait que la foi ne procure pas seulement le pardon, mais transforme l'homme en nature divine. Dans l'Eucharistie le corps et le sang de Christ sont tout, indépendamment des éléments. Il estimait que le corps de Marie s'était uni peu à peu, par la foi, à la nature divine, et qu ainsi la chair du Christ était née sainte, capable de recevoir le Saint-Esprit. Il eut en 1525, à Wittenberg, une conférence avec Luther, qui aboutit à une rupture complète. Des visions en Silésie, et les controverses qui en résultèrent, rendirent impossible son plus long séjour à Liegnitz. Il se rendit 1529 à Strasbourg, vers Capiton et Zell, et il # y passa 5 ans, mais il fut indirectement compromis dans un procès fait par le synode aux sectaires, et il dut s'en aller; il visita Augsbourg ét Spire; à Ulm en 1535. Après plusieurs tentatives de conciliation, qui échouèrent, repoussé de partout, mais rassemblant partout quelques adhérents, il f paisiblement à Ulm 10 déc. 1561. Son activité littéraire a été immense, mais essentiellement polémiqué et par conséquent d'une valeur passagère. Il faut pourtant mentionner ses: Questions sur l'Église; Sommaire des preuves qui établissent que Christ, ayant perdu son humanité, n'est plus auj. une créature; sa Grande Confession, et sa Nouvelle Confession. Le réveil l'a un peu réhabilité, en montrant que sur certains points il avait été jugé avec trop de passion. C'est en Silésie et en Souabe que ses sectateurs ont été le plus nombreux et se sont le plus longtemps maintenus. Ils s'appelaient les Confesseurs de la gloire de Christ, mais on leur donna le nom de Schwenck-feldiens. La persécution en fit beaucoup émi-grer, jusqu'en Amérique; un édit de 1742 leur accorda la tolérance.

SCILLITAINS; 12 martyrs mis à mort sous Septime Sévère, vers 200, à Scillite, ville du Nord de l'Afrique, par le proconsul Saturnin. On nomme Speratus, Cittinus, Donata, Vestina, Secunda. Ils devaient jurer par le génie de l'empereur, et sur leur refus furent décapités. Enterrés à Carthage, leurs os furent 806 transportés à Lyon dans l'égl. de Jean-Batiste.

SCIOPPIUS (Schappe), Gaspard, né 27 mai 1576 k Neumark, fit de brillantes études, passa au catholicisme k Rome 1598, et fut nommé conseiller du comte de Clara-Valle. Vaniteux et hargneux, il attaqua tout le monde, jésuites et protestants, Jacques ^d'Angleterre,Henri IV, qui surent le faire châtier; Scaliger, qui le remit k sa place, et il finit par f 19 nov. 1649. à Padoue, après une retraite de 14 ans, toujours craignant pour sa vie. Il a beaucoup écrit, surtout sous le voile de l'anonyme (Maoer, Grocip-pus, Melander). De ces 104 ouvrages les meilleurs traitent de philologie. L'Ecclesiatticus est dirigé contre les protestants; ses Éléments de philos, morale 1606 sont le plus estimé.

SCOLASTIQUE, sœur de Benoît de Nursie, élevée comme lui dans la piété, vécut près du montCassin où il s'était retiré, et reçut fréquemment ses visites, f 542. On lui attribue k tort la fondation d'un couvent de bénédictines à Piumbarole, quoiqu'elle y soit en odeur de sainteté.

SCOLASTIQUE. Aussi longtemps que la doctrine de la grâce et du salut par la foi prévalut dans l'Église, elle suffit à comprimer les tendances envahissantes de la hiérarchie romaine. Mais peu à peu le relâchement se produisit, le centre de gravité d* la religion se déplaça, l'importance de la foi diminua, et le clergé attira à lui les âmes et les consciences. On vit naître le vieux conflit entre les deux pouvoirs qui se disputent l'empire du monde, Dieu et César; ils se reconnaissent mais ils se jalousent, et leur rivalité joue un grand rôle dans l'histoire des peuples chrétiens. A côté de l'Église et de l'État, un 3m* pouvoir sembla surgir, la science, c. à d. l'École; et tous les efforts de Charlemagne pour le développement de l'instruction publique risquaient d'aboutir à la formation de cette nouvelle puissance, quand l'habileté ecclésiastique réussit à détourner le danger et même à le faire servir à ses fins. Les scolasti-ques, dont le nom apparaît pour la Ire fois dans Benoît d'Aniane, se prétendaient tout à fait indépendants des politiques et des ecclésiastiques, mais ils entrèrent en contact forcé par la nature même des questions dont ils eurent à s'occuper, et la querelle des réalistes el des nominaux devint une question religieuse quand Roscelin tenta d'expliquer la Trinité par le nominalisme. Cette forme, ou cette méthode philosophique, remplit à peu près tout le moyen âge, et si elle rendit des services, elle eut le grand inconvénient de donner à l'esprit une fausse direction, en l'amusant d'arguties et en l'empêchant d'aborder et de regarder de front les vrais problèmes de la vie et du progrès. La philosophie n'était plus qu'un jeu de l'esprit, où le principal rôle appartenait aux puérilités les plus extravagantes. On distingue dans la Scolastique 3 phases, ou périodes: son enfance, du 9« au 12« siècle, où elle est la servante de la théologie; elle débute avec Alcoin et Scot Érigène, et va se développant avec Anselme et Abélard jusqu'à P. Lombard et Jean de Salisbury; sa maturité, 13« et 14® siècles;

devenue alors l'égale de la théologie, elle se confond presque avec elle; c'est l'époque de l'influenced'Aristote et des Arabes; elle est représentée par Alex, de Haies, Duns Scot, Al-bert-le-Grand, Thomas d'Aquin; c'est la lutte des scotistes et des thomistes; c'est la discussion, ou l'argumentation poussée à l'absurde. Knfin l'époque de la décadence, le 14®« et le 15me siècles, où la scolastique se sépare de la théologie, où le nominalisme triomphe de nouveau, hardiment prêché par Occam, Bu ri dan, d'AiJly; où le vide de la dialectique tue l'école sous son ridicule. Le 16®* siècle inaugure la vraie science et la vraie philosophie; la réforme, Bacon, Descartes, achèvent de déconsidérer une école qui pendant 6 ou 7 siècles avait fait le bonheur des savants et des théologiens, et qui avait trouvé à Paris son principal théâtre et le siège de ses exploits. Les traits essentiels de la scolastique sont: La direction presque exclusivement théologique, soit des études, soit des discussions, par conséquent la négligence des autres arts et des autres sciences, et l'importance accordée au clergé; les dignités ecclésiastiques étaient le but, le prix des études et du savoir, mais il fallait marcher droit dans le chemin tracé par les conciles et les papes. En second lieu, la préférence accordée à la dialectique; les discussions n'étaient que des tournois. Troisièmement l'absence de liberté, l'influence de l'autorité, qui était devenue un dogme théologique; celle du pape d'abord, puis celle d'Aristote qui tranchait toutes les questions. Enlin l'emploi d'une langue morte dans l'enseignement emploi qui couvrait la nullité et la futilité des discussions, et qui empêchait l'étude des langues vivantes, paralysant ainsi les relations de peuple à peuple et par conséquent les progrès de la civilisation. Il y eut cependant aussi à cette époque des circonstances qui concoururent k dissiper les ténèbres; ainsi les communications avec les Arabes et les Grecs, le commerce, les travaux et les voyages des Juifs, les croisades qui remuèrent l'Europe et la mirent en rapport avec l'Orient; ainsi encore les tentatives d'hommes distingués comme Charlemagne, Alcuin, Pierre de Pise, et d'institutions importantes comme des écoles et des universités, auxquelles on doit les notes de musique, le chant sacre, le comput ecclésiastique, etc. En-lin les discussions philosophiques elles-mêmes, si puériles qu'elles fussent parfois dans leur objet, remuèrent les idées et attirèrent l'attention sur certains problèmes.

SCOT 1° Jean, dit Erigène. Son vrai nom parait avoir été Jean; il aurait été Scot, c.-à-d. écossais de race, et irlandais de naissance, natif de la verte Erin, Erigène. Ce dernier surnom cependant a été traduit, et peut se traduire dans le sens de fauteur de disputes, ami des discussions, ergoteur. Tout est obscur dans sa biographie, son origine, sa jeunesse et sa fin. Il était probablement irlandais et naquit entre 800 *et 815. Un passage d'un de ses livres a fait supposer qu'il visita la Grèce et l'Orient. Il vint en France entre 840 et 847, appelé par Charles-le-Chauve et passa presque toute sa vie à la cour de ce prince, qui le fit chef (recteur) de l'École du palais qui lui dut, ainsi qu'à d'autres savants, son éclat et son relèvement momentané. Interprète clairvoyant d'Aristote, dont il restaura plusieurs textes altérés, il était surtout l'admirateur de Platon, qu'il appelle le plus grand philosophe du monde. Il traduisit plusieurs traités faussement attribués à Denys l'Aréopagite, qui présentaient l'application du néo-platonisme à la doctrine chrétienne, et se montra alexandrin en philos, et panthéiste en théologie. Nous ne devons pas, disait-il. concevoir le Seigneur et la créature comme deux choses distinctes l'une de l'autre. Il savait le grec et l'hébreu, il fit des comment, sur la Morale d'Aristote et sur la République de Platon, et un livre sur la Division de la nature, qui contient l'exposé de ses idées sur l'homme et sur l'univers. C'est à cet homme, esprit subtil et très indépendant, que Hincmar eut la maladresse de demander un travail contre Gottschalk. Scot le fit, il écrivit son traité, De prœ-destinatione, mais en entremêlant sa démonstration de tant de propositions malsonnantes que les théologiens y relevèrent 100 hérésies. Scot fut condamné au conc. de Valence 855, sans être nommé expressément; il fut condamné de nouveau, et cette fois nominativement, au conc. de Langres 859, et Hincmar fut frappé du même coup, malgré la précaution qu'avait prise le Scot d'assumer sur lui seul toute la responsabilité de son œuvre. Nicoïas Ier dénonça le philosophe à Charles-le-Ch. entre 865 et 867, et la carrière publique de Scot finit là. On croit qu'il resta en France, dans un monastère quelconque, et qu'il f vers 876, en tout cas avant Charles son protecteur. On peut le considérer comme un des fondateurs de la scolastique. Plusieurs chroniqueurs, depuis Mathieu de Westminster, l'ont confondu avec Jean, Scot d'origine, v. Jean 15<>.

2° Duns Scot, v. Duns. — 3<> v. Jean 15°.

4° Michel S., savant du 13rae siècle, né vers 1210 à Durham, Angleterre, ou à Balweary, Écosse, connaissait l'hébreu, l'arabe et le grec, ainsi que les mathématiques, la philosophie, la chimie, et la plupart des sciences de son temps. On le faisait même passer pour magicien. Il habita longtemps la France, puis l'Allemagne où il jouit de la faveur de Frédéric II; enfin il retourna en Angleterre, où Édouard 1er lui confia diverses missions, entre autres l'ambassade de Norvège 1290; il mourut peu après. Il concourut à la traduction en latin des œuvres d'Aris-tote. On a de lui une Physiognomia, une étude sur les secrets de la nature, et une Mensa philo-sophica, que quelques-uns attribuent cependant à l'irlandais Th. Anguilbert.

SCOTT, Thomas, né 16 févr. 1747 à Bray-toft, Lincoln, le 10"" de 13 enfants; étudia 5 ans au collège de Scorton, commença en 1762 un apprentissage de pharmacien à Alford, le quitta pour devenir marchand de bestiaux comme son père, se remit aux études et se tourna vers le ministère, sans convictions religieuses, mais avec la pensée qu'il y réussirait plus facilement et qu'il aurait dans cette carrière plus de temps pour lire, une existence plus commode, et plus de chances pour se distinguer. Il débuta par la modeste paroisse de Stoke, avec 50 1. st. de traitement; il avait pour voisin à Olney le célèbre John Newton qui, à la longue, exerça sur lui une bonne influence. En 1774 il épousa Jeanne Keil, et ils établirent chez eux le culte domestique. Il fut appelé ensuite k Ra-venstone oit il se convertit du socinianisme à l'Évangile, et sa prédication s'en ressentit immédiatement; en 1777 il se fixa dans le village de Weston-Underwood, dépendant de sa paroisse et habita la maison de la Loge, célèbre par le séjour du poète Cowper. Ses connaissances médicales lui permirent de rendre de grands services pendant une épidémie de petite vérole. En 1781 il accepta la place d'Olney, et en 1785 il fut appelé k Londres comme prédicateur adjoint à l'aumônier de l'hôpital du Lock. Là son activité fut immense; non seulement il prêchait plusieurs fois chaque dimanche dans la chapelle, mais encore il avait le dimanche et pendant la semaine, souvent dès 6 h. du matin de nombreux cultes dans des quartiers éloignés de l'hôpital. En 1787 il fonda un Refuge pour les malheureuses victimes de la débauche, et la même année il posait les bases de la future Société biblique. Le 2 janv. 1788 il commençait son Comment, sur l'Ecriture sainte, qu'il terminait le 2 juin 1792. Ce travail, plusieurs fois refait et refondu pendant 30 ans, eut de son vivant 4 éditions en Angleterre et plusieurs contrefaçons en Amérique. Le produit de la vente totale dépassa 5 millions, mais n'enrichit naturellement que ses libraires. Il avait presque fini la 5rae éd. quand il mourut. Devenu veuf en 1790, avec des enfants en bas âge, il se remaria avec une personne pieuse et digne de son affec tion. Il publia vers cette époque ses Essais sur les sujets les plus importants de la religion, et ses Notes sur le Voyage du chrétien. Vers 1800 il concourut à la formation de la Soc. des Missions de l'Égl. anglicane. Sa santé l'ayant obligé de résigner ses fonctions et de se retirer dans la petite paroisse d'Aston, 1807-1814, il surveilla les études de jeunes élèves missionnaire* et apprit, pour les leur enseigner, les langues susoo et arabe. Sa santé déclinait. Le dim. 4 mars 1821 il prêcha pour la dernière fois, et sentit qu'il était mortellement atteint. Il f en pleine paix 16 avril 1821, après un ministère de 45 ans.

SCOTTI, Jules-Clément (comte de), né 1602 à Plaisance, étudia à Rome, se fit recevoir jésuite et enseigna la philos, à Parme et Ferrare. S'étant offert pour une chaire de scolastique, il fut refusé et en conçut une vive irritation. Nommé 1641 recteur du collège de Carpi, il s* relira en 1643 et se rendit à Venise, mais il fut rappelé et envoyé à Rome sans fonctions. Sr rendant en 1645 à Parme pour l'élection d'un général, il fut secrètement averti de n'y pas aller, et il poursuivit son chemin sur Venise, où il sortit de l'ordre, et publia son traité, contre les jésuites, sur la Monarchie des Solipm (tout pour moi seul) 1641, trad. en franç. Au* terd. 1721, qui eut un grand succès. On Ta faussement attribué au p. Inchofer qui n'en fut que le propagateur en allemand. Il fut nomme prof, à Padoue, où il f 1669.

SCRIVER, Christian, né 1629 à Rendsboorg, Holstein; f 1693 à Quedlinbourg; auteur dn Seelenschatz, si populaire en Allemagne. Pauvre, il réussit comme précepteur à achever ses études de théol., et finit par être pasteur à StendaL Magdebourg et Quedlinbourg. Ami de Spener. Marié 4 fois, il eut 14 enfants; deux seulement lui survécurent.

SCULPTURE.Moins privilégiée que ses sœurs, la poésie, la peinture et l'architecture, la sculpture n'a guère trouvé d'inspiration dans l'apparition du christianisme, dont le spiritualisme ne semble pas cadrer avec le réalisme des représentations matérielles. Les premiers spécimens que l'on en trouve, soit dans les catacombes, soit sur quelques sarcophages, tiennent plus du dessin que de la sculpture proprement dite, et n'ont pas de valeur artistique; ce sont des souvenirs et des symboles. Plus tard ce seront de* décorations, des ornements ajoutés à Tarchitet-ture, inspirés par la fantaisie, le paganisme, U légende ou même l'opposition religieuse. L» cathédrales du moyen âge, notamment celles dn 14me siècle, voient se multiplier d'une façon bizarre, mais sans beauté, des représentation* allégoriques, dues au ciseau des francs-maçons, qui sont la critique du clergé bien plus que l'éloge du christianisme; des prêtres, des moines, des évêques, des papes livrés aux tourments des enfers: une traduction de Dante. U Renaissance crée le Moïse de Michel-Ange: mais Jean Goujon lui-même ne se hasarde pas dans la sculpture religieuse, et l'on peut dire d'une manière générale que le christianisme ne prête à la statuaire ni par ses dogmes, ni par son histoire, en même temps que le commandement relatif aux images taillées n'a cessé de peser plus on moins sur le génie des artistes chrétiens.

SCULTETUS, Abraham, né 24 août 1566 à Grflneberg, Silésie, fit de bonnes études à Breslau. Son père ayant été ruiné par un incendie, il prit une place de précepteur et passa quelques années difficiles à Gflrlitz, Wittenberg, et Heidelberg où il obtint le grade de docteur en philosophie. Nommé chapelain de Frédéric IV en 1598, il finit par devenir chapelain de la cour et prof, à l'université. En 1618 il fut délégué au synode de Dordrecht, et en 1620 accompagna à Prague l'électeur qui venait d'accepter la couronne de Bohême. Les événements politiques l'ayant forcé de fuir, il se retira à Emden, où il fut nommé pasteur 1622, et où il f 24 oct. 1624. Il était réformé, mais aussi modéré en théol. qu'en politique. On lui a amèrement reproché cette modération, et Lucas Osian-der a été jusqu'à l'accuser d'athéisme. Sa justification, Narratio apologetica, ne parut qu'après sa mort. Il avait publié de nombreux ouvrages, la MeduUa des pères 1605-1613, une Hist. de la Réformation, inachevée, une Morale, des Plans de sermons, etc. Marié trois fois, il n'a laissé qu'une fille.

SCYTHIEN, d'origine arabe, mais né en Syrie, serait le vrai fondateur du manichéisme, d'après Épiphane, Cyrille de Jérus., Théodoret et des fragments de la discussion d'Archélatts avec Manès. Sa femme, une esclave égyptienne, l'aurait décidé à venir dans son pays, où il aurait appris à connaître la sagesse, et il serait mort au moment de se rendre en Palestine pour y propager ses idées. C'est par son disciple Térébinthe que sa doctrine serait parvenue à Manès. Ce n'est pas un personnage fictif, mais il y a de l'hésitation sur son identité. Baur le confond avec Simon-le-raagicien voyageant avec son Hélène; d'autres avec Elkesaï qui, né en Scythie, en aurait conservé le surnom. Néander admet l'histoire telle quelle.

SEBALD (saint), un des deux patrons de Nuremberg; l'autre est Lorenz. Voici sa légende: Fils d'un roi de Danemark, il vint à 15 ans étudier à Paris, épousa la fille de Dagobert, et la quitta le lendemain, avec son consentement, pour se faire ermite. Dix ans après il vint à Rome et Grégoire II lui confia l'évangélisation de l'Allemagne. Dans son voyage à travers la Bavière il rencontra Willibald qui allait mourir de faim, et il le sauva miraculeusement. Il travailla avec succès à l'évangélisation du pays, vivant en ermite dans un bois près de Nuremberg. Avant de mourir il ordonna que son cadavre fût placé sur un chariot attelé de 4 bœufs et qu'on l'enterrât là où les bœufs s'arrêteraient; ils s'arrêtèrent devant la chapelle de Sain t-Pierre, qu'on agrandit dès lors, qu'on embellit, à laquelle on donna son nom, et où l'on admire encore auj. son tombeau. Béatifié parGrégoire X, canonisé par Martin V, 1425. D'autres le font vivre entre le 10m® et le 11»® siècle, ce qui ruine toute son histoire. A-t-il seulement existé?

SÉBASTIEN, né vers 250 à Narbonne, élevé à Milan, entra dans l'armée, secrètement chrétien, pour pouvoir aider ses frères pendant la persécution dioclétienne, et pour travailler à la conversion des païens; il obtint sous ce rapport de grands succès, et convertit à Rome plusieurs prisonniers, leur geôlier Nicostrate, et la femme de ce dernier, Zoé, à laquelle il rendit en outre la parole, qu'elle avait perdue depuis 6 ans. Il garda si bien son secret que Dioclétien le nomma commandant des prétoriens, en même temps que l'év. Gaïus le déclarait le Défenseur de l'Église. A la fin reconnu et condamné au martyre, il fut criblé de flèches par les archers maures, et son corps pendu à un arbre. Mais il en revint, grâce aux soins d'une chrétienne, Irène. Saisi de nouveau, peu de temps après, comme il attendait l'empereur sur les marches du temple, pour lui parler, il fut assommé à coups de bâtons dans le cirque, et son corps jeté dans un cloaque. Un songe révéla à Lucine le lieu où il était; il en fut retiré et déposé aux catacombes, 288. Au 5me siècle une église fut bâtie sur son tombeau. En 680 la peste, qui ravageait la ville, s'arrêta dès qu'on eut élevé à Sébastien un autel dans l'église de Saint-Pierre aux liens. Il est considéré comme le patron des archers; on l'invoque pareillement contre la peste. Il y a de ses reliques en divers lieux. — D'autres martyrs du même nom sont reconnus chez les latins et chez les grecs.

SECKENDORF, Gui-Louis (de), hommed'État et théologien, né 20 déc. 1626 à Herzogenaurach, près Erlangen, fils d'un colonel au service de Suède, qui, ayant voulu passer à l'armée impériale, avait été décapité. Sa mère l'éleva soigneusement, à Cobourg, Mulhouse et Erfurt. Le duc Ernest l'admit au nombre de ses pages, mais le jeune homme désirant une vie moins agitée, fut envoyé par le duc au gymnase de Gotha. Plusieurs amis de son père s'intéressèrent à lui. De 1642-1645 il étudia à Strasbourg le droit, la philos, et la théologie. Puis après un voyage en Hollande, il fut nommé enseigne de la garde de Georges II, duc de Darmstadt. II remplit successivement diverses fonctions civiles, ecclésiastiques et diplomatiques, vécut dans la retraite 1681-1691, s'adonnant à des travaux littéraires; accepta la charge de chancelier de l'univ. de

Halle, nouvellement créée, avec le titre de consoler, et f 27 déc. 1692: < le plus noble des chrétiens, et le plus chrétien des nobles, » comme l'appelaient ses contemporains. Il fut enterré à Meuselwitz. Son fils unique ne lui survécut pas longtemps. Parmi les ouvrages qu'il a laissés, les principaux sont: un Compen-dium d'hist. ecclés., fait à la demande du duc Ernest, 1660; une Hist. apologétique du luthéranisme, contre Maimbourg; une Dissertation sur la doctrine de Luther quant à la messe, 1686; l'État chrétien, contre l'athéisme et le naturalisme, 1684: un traité sur le piétisme, quelques traductions de Spener, des cantiques, etc. Il a écrit aussi quelques ouvrages politiques.

SECOND (Secundus) et les Secundiens; le plus ancien des disciples de Valentin, mais avec des nuances. Il admettait un double quadrige d'éons, qu'il distinguait comme lumière et ténèbres, droite et gauche. Il opposait aussi à la So-phia, ou Sagesse, supérieure, une Sophia inférieure. Enfin il admettait un nombre infini d'éons. Augustin reproche à la secte son immoralité. D'après Épiphane les secundiens étaient fort nombreux en Orient.

SECONDIN lo Manichéen d'Afrique; il reproche à Augustin sa désertion, et n'est connu que par la réponse que lui fit Augustin.—2o Irlandais, neveu de saint Patrick, fils d'une sœur qui aurait épousé le lombard Restitutus. Né vers 380 dans l'Italie septentrionale, il vint en Irlande 439 et fut nommé év. de Domnach. f 448 ou 459. Auteur d'une Hymne alphabétique à saint Patrick, connue déjà au 7me siècle, et retrouvée par Muratori au couvent de Bobbio; Todd l'a retrouvée aussi 1854 dans un mss. de Trinity-College, Dublin.

SECOURISTES. Parmi les Appelante du jansénisme, un parti extrême s'était formé, qui, malgré la bulle et malgré la loi, voulut continuer l'œuvre des convulsionistes et s'ingénia par divers moyens à surexciter l'état nerveux de cet enthousiasme maladif. On eut recours entre autres à des procédés brutaux, coups de pieds sur la poitrine, entailles, flagellations, charbons brûlants. Cela aidait à l'excitation; c'est ce qu'on appelait les grands « secours, » et ceux qui se chargeaient de les administrer étaient appelés secouristes. Mais comme on allait trop loin, il se forma un parti contraire, sous le nom d'antisecouristes. Ce mouvement insensé tomba vers 1733.

SECTE, du latin Sectari=sequi, suivre, sert à désigner un ensemble de personnes qui s'attachent à un conducteur, spirituel ou autre, et qui en suivent les directions, les conseils ou les ordres. Le mot est employé Act. 24, 5. 14. comme traduction du mot grec Hèrèsis, pour désigner les chrétiens qui abandonnaient la religion de leur nation. Et depuis qu'au 3™ siècle l'idée de l'Église eut prévalu, le nom de secte fut donné à tout écart, de doctrine ou de morale, qui pouvait y porter atteinte. Le Corpus de droit-canon n'énumère pas moins de 68 sectes; et depuis la Réformation le nombre en a bien augmenté. Longtemps on s'est demandé quelle devait être l'attitude de l'autorité vis-à-vis de ces sectaires, hérétiques ou schématiques, et pendant les jours de sa puissance l'Eglise a cru faire une œuvre de charité chrétienne en sauvant les hommes malgré eux, et en les contraignant par tous les moyens, même par des supplices, de renoncer à l'erreur et de rentrer dans l'unité. Plus tard les princes ont vu dans la secte, non plus un outrage à la vérité, mais un acte de rebellion contre leur autorité, et c'est à ce titre qu'ils ont sévi; c'était en particulier l'idée de Louis XIV. Avec le 18°" siècle un principe nouveau de tolérance a commencé à prévaloir, et l'État ne demande plus auj. à une secte que de ne rien renfermer qui soit contraire à la loi et à la morale.

SÉCULARISATION, v. Amortisation.

SÉCULIER: du siècle. se dit du pouvoir civil, par opposition au pouvoir ecclesiastique: le bras séculier était chargé au moyen Age d'exécuter la besogne ordonnée par l'Église. On appelle clergé séculier celui qui vit dans le monde, prêtres, curés, évêques, etc., par opposition au clergé régulier qui est sorti du monde et qui vit dans la retraite, moines, religieux, etc.

SEDAN, ville de l'ancienne Champagne, fut de bonne heure une principauté indépendante. Acquise par la maison de Bouillon sous Robert 1er 1489, et possédée entre autres par le célèbre Robert de la Marck, elle passa avec Charlotte à H. de la Tour d'Auvergne, comte de Turenne 1591, et fut réunie à la France par Richelieu 1641 après la bataille de la Marfée. La réforme avait été introduite à Sedan 1558 par la conversion de Henri Robert et de sa vaillante femme Françoise de Bourbon-Montpen-sier, en réponse à l'Édit de Henri II, qui établissait en France l'Inquisition. Une partie de ses sujets suivirent son exemple. De nombreux protestants venaient de divers endroits chercher un refuge dans les murs hospitaliers de cette petite ville, et ils apportaient avec eux leur fortune, leur industrie et leur esprit d'ordre. Après la Saint-Barthélémy, l'immigration fut plus grande encore, et l'obligation de loger tant de malheureux fugitifs donna naissance à de nouveaux quartiers; il fallut agrandir la ville. Beaucoup de ces réfugiés avaient une culture littéraire et théologique; d'accord avec ces illustres proscrits, Henri traça un plan d'instruction publique et décida la fondation de cette académie qui devint bientôt une des plus célèbres de l'Europe, et où la théologie était largement représentée. Des hommes comme Tilène, Bordellius, Dumoulin, Jacques Cappel, préparèrent les voies anx Des Marets, Blondel, Le Blanc de Beaulieu, Basnage, Abbadie, Bondel, Jurieu, Rambour, qni Tirent à divers titres la réputation de eette académie, et qni la plupart maintinrent avec éclat la tradition et le dogme calvinistes. L'annexion à la France marqua la fin de cette prospérité. Les lois, les décrets, les capucins, les jésuites, firent bientôt fermer les temples et les écoles, et l'académie fut supprimée, 9 juill. 1681. Le cnlte réformé y fnt rétabli avec la loi de germitifcl, mais dans l'intervalle la population protestante avait diminué et le temple avait été donné aux catholiques par l'autorité, v. Peyran. Auj. chef-lieu de Consistoire, avec 2 pasteurs, de bonnes écoles et un orphelinat de filles.

SEDER OLAM, deux ouvrages d'annales de l'histoire juive; l'une, le grand, raWw, est du 2<»e siècle; la tradition l'attribue à José ben Chalafta; il a de la valeur comme chronologie. L'autre, Suta, est du 8®e ou du 9"« siècle.

SEDULIUS, 1® Caïus, Cœlius, ou Cœcilius. poète du 5»>e siècle, mentionné par Isidore de Séville. Auteur d'un Chant pascal, dédié à son père spirituel Macédonius; d'après la préface dèdicatoire, il fut prof, de philos, et de rhétorique en Italie; il fut ensuite prêtre en Achaïe, et peut-être évêque. Son Chant pascal, imprimé dès 1473 par Aide Manuce, et qui a pour sous-titre Des miracles de Christ, est en hexamètres; il se compose de 5 livres, et traite de l'œuvre de Dien dans l'ancienne alliance; de la Trinité, contre les ariens et les sabelliens, et de la vie de Jésus. On lui attribue aussi plusieurs hymnes, entre autres: A soit» ortus cardtne, et He-rodes, hostvt impia. Publ. par Aurival 1794; Migne, T. 19.

3o théologien et juriste-écossais, Disciple de de Hildebert, parcourut la France, l'Italie et l'Asie, et assista 721 au conc. de Rome sous Grégoire II.

3» Irlandais, surnommé Scott», et Junicor; il vint en France 840-860, et écrivit des Mélanges, Mtscellanea, sur les épltres de Paul, ainsi qu'nn intéressant traité sur les devoirs des gouvernants chrétiens; des cantiques, et quelques autres ouvrages.

SEEKERS, les chercheurs, questionnistes, ou scrutateurs, secte anglaise du 17m« siècle, qui, regardant l'autorité de l'Écriture comme insuffisante, travaillait à chercher la vraie religion. Elle voyait dans la repentance et la pénitence le moyen d'obtenir le pardon des péchés; ils insistaient sur le sacerdoce universel (des laïques), rejetaient le baptême, ne voyaient dans la Cène qu'un mémorial, et en excluaient les femmes.

SEETZEN, Ulrich-Jasper, né 30 janv. 1767 à Sophiengroden près Oldenbourg, étudia la médecine et les sciences naturelles à Gôttingue 1785-1788, et après avoir parcouru la Hollande et l'Allemagne, s'établit à Gotha, 1801. Le duc et son fils s'intéressèrent à lui, et lui fournirent les moyens d'entreprendre le grand voyage d'Orient qui a fait sa réputation. Il partit 13 juin 1803, visita d'abord Constantinople, en 1803 Smyrne et Alep, en 1805 le Liban et l'Antili-ban, parfaitement au fait des langues et des coutumes des pays qu'il traversait. En 1806 il étudia l'Hermon et parcourut les rives orientales du Jourdain et de la mer Morte; en 1807 il vint au Caire où il passa 2 ans, visita la haute Égypte, fit d'importantes collections d'antiquités, produits du pays, curiosités, entre autres 1574 mss., qui ont servi de base au musée oriental de Gotha. Il se fit musulman pour pouvoir accomplir sans danger le pèlerinage de La Mecque et Médine, et prit en secret des plans et des croquis intéressants. En 1810 il visita l'Yémen, Aden, Moka, pù ses effets furent saisis. Pour les ravoir il s'adressa à l'iman de Saana, mais il f subitement, oct 1811, probablement empoisonné, près de Taes. Son journal a été publié par Kruse de Dorpat, Berlin 1854-1859» sous le titre de Voyages en Syrie, etc.

SEGA, v. Ricetto.

SEGARELLI, v. Frères apostoliques.

SEGNERI, Paul, né 1624 à Nettuno, États de l'Église, l'ainé de 18 frères, élevé à Rome par les jésuites, entra lui-même dans l'ordre à 15 ans. Prédicateur distingué, nourri de Cicé-ron, il se fit connaître d'abord à Pérouse et à Mantoue, et depuis 1665 se mit à parcourir l'Italie, prêchant partout avec un grand succès. En 1692 Innocent XII le nomma prédicateur du Vatican, puis théol. du palais, f 9 déc. 1694 à Rome. Il a laissé un Carême, des Panégyriques, de nombreux sermons riches de forme et de fond, quelquefois un peu ampoulés; des ouvrages d'apologétique et de controverse, et un traité contre Molinos. Réimpr. Ratisbonne 1858, 20 vol.

SÉGUIER, Pierre, né vers 1650, à Magesta-vols, cardeur de laine, un des prophètes cami-sards, surnommé Esprit. Accompagné de quelques amis, armés de faux et de haches, il partit en juillet 1702 pour aller délivrer les prisonniers du Pont de Montvert. L'abbé du Chayla paya de sa vie ses cruautés. La guerre était déclarée. Noguier, chef de l'expédition, fut surpris par le capitaine Paul, fait prisonnier avec deux de ses amis, et brûlé 12 août au Pont de Montvert.

SEILER, Georges-Frédéric, nè 24 oct. 1733 à

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Kreussen près Baireuth, occupa quelques postes comme pasteur, et fut 1770 nommé prof, de théél. à Erlangen, ob il se distingua par ses talents, son activité et plusieurs fondations artistiques et littéraires, f 13 mai 1807. Auteur d'un grand nombre d'ouvrages d'édification et d'apologétique, Catéchisme, Dogmatique, Revue chrétienne, Sermons, etc.

SEITZ, Jean-Christian, né vers la fin du 17'«•siècle près de Baireuth; séparatiste, enthousiaste, millénaire, commença ses prédications vers 1720 et recruta des adhérents. Il avait fixé à 1750 le commencement du règne de mille ans, mais il ne le vit pas, car il f vers 1740 après avoir été quelque temps précepteur d'un jeune prince et s'être fait renvoyer. Il parcourut l'Angleterre et la Hollande.

SELDEN, John, homme d'État anglais, avocat, théologien. Né 16 déc. 1584 à Salvington, Sussex, il fit de bonnes études, très variées. La carrière du droit ne lui ayant pas réussi, il l'abandonna pour se vouer à la littérature. Un premier travail sur les Dîmes 1618, dans lequel il combattait cette institution, fit scandale, et il dut se rétracter solennellement. Il montra à la Chambre des Communes une grande indépendance de caractère, fit opposition à la Cour, fut nommé membre de la commission chargée de rédiger l'acte d'accusation contre Buckingham, protesta contre la réglementation de la Chambre et de la presse et fut enfermé à la Tour, 1628; relâché en 1634. Persécuté pendant tout le temps que Charles gouverna sans la Chambre, il fit partie du Long Parlement et resta modéré; les royalistes lui reprochaient son indépendance, et les républicains sa faiblesse. Il signa le Covenant en 1644, mais refusa de s'associer aux mesures de rigueur contre le roi, et après la catastrophe de 1649 il rentra dans la vie privée. Comme membre de l'Assemblée de Westminster, il travailla dans le sens de l'indépendance. f 30 nov. 1654. Sous une écorce un peu rude, c'était un cœur généreux et une conscience profondément chrétienne. Il a laissé de nombreux écrits, réimpr. Londres 1726, 3 vol. in-fol., d'érudition et de politique. On remarque surtout sa Mer ouverte, en réponse à la Mer fermée de Grotius; ses Comment, sur les marbres d'Arundel; ses Recherches sur la Législation des Hébreux; la Femme hébreue, où il justifie la polygamie au point de vue naturel.

SELIGER, v. Saliger.

SELNECKER, Nicolas, né 6 décembre 1530 à Hersbrtick près Nuremberg, était si bon organiste à 12 ans, que l'emp. Ferdinand aurait voulu l'emmener avec lui en Espagne. En 1549 il vint étudier à Wittenberg, et se lia intimement avec Méianchthon, dont il fut le disciple le plus convaincu. Pasteur à Dresde, où il se maria, 1558, il se brouilla avec les partisans de Méianchthon; il vint comme prof, à Iéna, la place forte du luthéranisme, 1561, mais ne tarda pas à être dénoncé comme cryptocalviaiste. En 1568 il est prof, à Leipzig, en 1570 pasteur surintendant à Wolfenbuttel, et docteur en théol. de Wittenberg; en 1574 de nouveau & Leipzig comme prof, et pasteur surintendant. Il paraît que dans l'intervalle ses vues s'étaient modifiées. Son Institutio, qui parut en 1572, est encore mélanchthonienne, et au synode de Lichtenberg 1576 il compte parmi les plus fougueux adversaires de Mél. et parmi les plus fervents adeptes d'Andreae. Il travaille à la rédaction de la Formule de Concorde, puis, quand elle est publiée 1580, il se brouille avec André». Il fut destitué 1589, ainsi que son fils et son gendre, quand le philippisme fut rentré en faveur sous Chrétien I. Il allait être réintégré lorsqu'il f 24 mai 1592, fidèle à son luthéranisme rigide: d'ailleurs aimable et facile dans les relations privées. On a de lui 175 ouvrages, presque tous d'édification, et beaucoup d'hymnes et cantiques.

SELVAGGIO, Jules-Laurent, né 10 août 1728 à Naples, contrefait et bossu à la suite d'une chute en 1739, montrait tant de dispositions pour l'étude, qu'il se voua dès 1744 à la carrière ecclésiastique, fut ordonné en 1752 et fut chargé dès lors des fonctions de censeur et d'examinateur synodal. Ses poésies grecques et latines lui ouvrirent les portes de l'Arcadia. D donna aussi des cours de droit canon et de droit civil. Il retravailla l'hist. ecclés. de Mos-heim au point de vue cathol., et il achevait au moment de sa mort, nov. 1772, son principal ouvrage: Des antiquités chrétiennes, dont le chanoine Kalepbati publia l'édition posthume.

SEMAINE tamte. D'un consentement presque unanime les Églises chrétiennes consacrent la semaine qui précède Pâques, à la commémoration des souvenirs que chaque jour rappelle. Le dimanche des Rameaux est généralement choisi pour la réception des catéchumènes, quoique rien ne justifie cet usage; il est probable que l'approche des communions et le commencement de la belle saison, la fin de l'hiver et des travaux réguliers, ont décidé, en dehors de toute raison théologique, la fixation de cette époque; le nom de Pàque fleurie que le peuple donne en France à la fête des Rameaux, marque bien le mélange de nature et de religion qui se retrouve inconsciemment dans la plupart des fêtes de l'Égl. L'entrée de Jésus-Christ à Jérusalem, et les palmes, les rameaux, les fleurs dont on joncha la voie, sont l'heureuse inauguration d'une semaine à jamais mémorable. Le jeudi saint était déjà reçu au temps d'Augustin comme jour de l'institution de la Cène, et il est solennité comme tel dans plusieurs Églises; à Rome, et ailleurs, on y ajoute le lavage des pieds. Le vendredi saint est le grand jour de deuil; beaucoup d'églises sont tendues de noir et les fidèles jeûnent. Chez les catholiques, ni cloches, ni consécration des éléments. Le samedi, vigile de Pâques, est également solennisé, en mémoire du Christ au tombeau. Quelques sectes, par un rigorisme respectable, mais exagéré, ont supprimé toutes les solennités pascales, sous le prétexte spécieux que le chrétien doit célébrer toute Tannée les souvenirs sacrés de la rédemption.

SEMI-ARIENS, parti intermédiaire entre les orthodoxes et les ariens; ils admettaient entre le Père et le Fils ressemblance, mais non pas identité de nature; ils étaient homoyousiens, q. v. Leurs principaux représentants furent Basile d' Ancyre, Eustathe de Sébaste, Macédon de Constantinople, Eusèbe de Nicodémie (d'où on les appelait eusébiens); ils avaient eu déjà un prédécesseur en Eusèbe de Césarée. Leur tentative de conciliation échoua d'autant plus, dans divers synodes, que probablement la plupart des évêques ne comprenaient pas bien ces nuances, v. Arius, Macédonius.

SÉMINAIRES, maisons destinées à l'éducation et à la formation d'ecclésiastiques. Presque toutes les Églises ont les leurs, quoique les avantages de ce système soient de plus en plus contestés. S'il est bon que pendant le cours de leurs études les jeunes gens soient tenus à l'abri des dissipations, soustraits aux tentations et surveillés, il est également bon qu'avant d'entrer dans le monde ils aient appris à le connaître, à se surveiller eux-mêmes et à faire l'expérience de leurs forces et de leur faiblesse. Quoi qu'il en soit, la plupart des évéchés en France et plusieurs universités en Allemagne, ont leurs séminaires. Le conc. de Trente, 23™ session, entre dans beaucoup de détails sur l'âge des séminaristes, qu'il admet à partir de 12 ans, auxquels il impose la tonsure et le costume ecclésiastique, et dont il règle l'entretien. La question de l'âge est importante et a été diversement résolue: les uns laissant l'enfant chez ses parents jusqu'au moment où il commence sa théologie; les autres au contraire l'envoyant au séminaire de bonne heure, mais l'en affranchissant lorsqu'une sorte de maturité et la nature même de ses études permettent de l'abandonner à lui-même. Les séminaires ont toujours joui de quelques privilèges, et il en est résulté des abus, dont le plus grave se trouve dans la distinction qu'on a essayé de faire entre les grands et les petits séminaires, les premiers étant seuls sérieux comme écoles de recrutement pour le clergé; les petits n'étant que des pensionnats et faisant aux lycées officiels une concurrence ruineuse, sans que les prétendus séminaristes aient aucunement l'intention de se mettre au service de l'Église. La loi de 1882 y a remédié en partie.

SÉMI-PÉLAGIENS, v. Pélage.

SEMLER, Jean Salomon, né 18 déc. 1725 à Saalfeld, où son père était archidiacre. Il étudia à Halle, et fut admis à la maison des orphelins où il reçut de sérieuses impressions, qui ne s'effacèrent jamais; il subit l'influence de Baum-garten qui développa en lui le sens et l'esprit critique. En 1750 il passa à Cobourg comme prof, au gymnase et rédacteur de la Gazette de Cobourg; en 1751 il est nommé prof, d'histoire à Altorf, en 1752 prof, de théol. à Halle, et en 1757 après la mort de Baumgarten, il le remplace comme directeur du séminaire théologique. Dès lors sa critique devient plus indépendante et plus hardie. Il se jette dans les innovations les plus aventureuses, et s'appuyant des travaux de Bichard Simon, de Weststein et d'autres, il trie arbitrairement dans la Bible les livres qui lui paraissent inspirés et rejette les autres, Ruth, le Cantique, Ester, Esdras, Nêhé-mie, etc. L'Apocalypse lui apparaît comme l'œuvre d'un chiliaste fanatique; les Évangiles sont des compilations faites à divers points de vue; Jésus-Christ s'accommodait aux préjugés de son temps, etc. Il distingue avec soin la théol. et la religion. Les hommes ne peuvent pas arriver à une conception dogmatique; chacun se fait naturellement son système, indépendant de la doctrine officielle à laquelle les serviteurs de l'Église sont tenus de se conformer strictement. Plus tard, cependant, en voyant les progrès et les audaces du rationalisme qui se réclame de lui, il attaque les Fragments de Wolfenbuttel et fait si bien qu'un ministre rationaliste lui retire la direction du séminaire. Il combat aussi le déisme anglais, f 14 mars 1791. Il a laissé de nombreux ouvrages, mais dont aucun ne forme un système complet. Les principaux sont: Son Introd. à l'exégèse théol. et Son Inslitutio ad doctrinam christianam. Son érudition était immense, Vie, par Tholuck, et par Eichhorn.

SENDOMIR, ou Sandomir, petite ville de Pologne, connue par la conférence qui eut lieu en 1570 entre les délégués des Égl. réformée, luthérienne et morave, et l'alliance ou union qu'ils contractèrent, sous le nom de Consensus Sandomiriensis. Cet accord leur était imposé par la nécessité de pouvoir opposer une résistance efficace, d'une part aux antitrinitaires et aux anabaptistes, de l'autre à la campagne menée contre eux par les catholiques sous les ordres de fév. Ilosius et du légat Commendone, qui entouraient le faible roi Sigismond. Déjà un premier essai d'alliance avait eu lieu en 1555 entre réformés et moraves snr la base de la li-targie morave; et un autre entre luthériens et moraves 1560, mais ils avaient échoué sur des détails. De nouvelles négociations eurent lieu en 1570, à Posen 13 févr., à Wilna 2 mars, et le traité définitif fut discuté et adopté à Sendo-mir du 9 au 15 avril, sous la présidence des réformés qui étaient les plus nombreux. Confirmé à Thorn en 1595, le Consensus fut résilié à la suite d'une autre conférence de Thorn 1645, mais il avait porté de bons fruits.

SÉNÈQUE, philos, stoïcien, précepteur de Néron et condamné par son maître à s'ouvrir les veines dans un bain. Jérôme, Augustin, les Actes des Martyrs de Linus, parlent d'une correspondance qui aurait été échangée entre Paul et le philosophe, lors du séjour de l'apôtre à Rome. Ces lettres, qui ont été conservées, mais avec des récensions différentes, n'ont pas une grande portée. Sénèque loue Paul et sa doctrine, mais il lui recommande d'améliorer son style et il lui envoie un traité sur la valeur des mots; Paul lui recommande d'être attentif à son enseignement. C'est au 15®s siècle seulement que l'on a nié l'authenticité de ces lettres, et contesté que Sénèque fût devenu chrétien; le séjour de Paul à Rome, ses rapports avec Gai lion, fr. de Sénèque, et les vagues analogies que l'on a cru trouver entre les maximes du philosophe et la doctrine de l'apôtre, ne constituent en effet pas une preuve suffisante.

SENTENCES (Livre des), titre donné par P. Lombard à la célèbre Dogmatique, par laquelle il a consacré et systématisé pour la première fois l'esprit et les prétentions de la hiérarchie au moyen âge. Ce livre, ou plutôt cet ouvrage en 4 livres, a fait époque; il est devenu presque aussitôt le manuel de la Dogmatique catholique; son auteur a été surnommé le Maître des sentences, et ceux qui sont venus après lui n'ont guère fait que le commenter, en entrant dans des détails minutieux et souvent ridicules; ainsi Pierre de Poitiers, Alex, de Haies, Thomas, Duns, Occam, etc. On donne aussi par extension le nom de Sententiaires aux anciens auteurs qui ont fait des recueils de sentences tirées des pères; ainsi à Isidore de Séville, Hu-gue de Saint-Victor, etc.

SEPP, Jean -Népomncène, né 7 août 1816 à Tfilz, Haute-Bavière, fit sa théol. et sa philos, à Munich, où il se lia avec Môhler, GOrres et Schelling, combattit Strauss 1843, fit un voyage en Orient 1845 à 1846, qu'il publia richement illustré; fut privé de sa place de prof, d'hist. à l'école supérieure de Munich à cause de son opposition dans l'affaire de Lola Montes; fut élu au parlement de Francfort 1848 et à la Chambre des députés de Bavière 1849, et rentra dans l'enseignement en 1850. En 1863 il publia en 3 vol. son: Le paganisme et sa signification pour le christianisme. Conservateur catholique il prit souvent la parole dans des assemblées populaires. H écrivit 2 fois contre Renan, la seconde fois sur la demande de l'arehev. de Paris. En 1868 et 1869 il fut réélu aux Chambres de Bavière, et se prononça énergiquement en 1870 contre la France. Vis-à-vis du concile il prit une position indépendante, mais non militante; il aurait voulu une revision du Canon biblique, et l'examen des questions relatives à l'Évangile des hébreux et aux rapports de Marc et de Matthieu; il publia aussi une brochure très allemande: l'Allemagne et le Vatican. On a encore de lui divers ouvrages de théol., d'architecture et de politique, et un travail sur les Actes des Apôtres. Nouveau voyage en Palestine 1872.

SEPT (Les sept dormants;, v. Dormants.

SÉQUENCES, en terme d'église, fragments de lecture ou de chant qui se suivent. Le rituel de la messe se termine par un Alléluia, dont la dernière syllabe se prolonge volontiers en de capricieuses modulations qu'on appelle jubilations, et aussi séquences. Mais pour les empêcher de sortir du ton et de dégénérer, on eut l'idée d'y mettre des paroles; Notker essaya l'un des premiers, et il réussit si bien que Nicolas I* donna son approbation aux 30 séquences qu'il lui présenta. Au 11»® siècle on en comptait jusqu'à 100. Le missel du concile de Trente n'en a consacré que 5: le Victimœ paschalis, Veni Sancte Spiritus, Lande Sion Salvatorem, Stabat mater, Die$ irœ. Les franciscains en ont une 6m«: Lande Sion Jesu nomen.

SÉRAPION lo év. d'Antioche 190-199, renommé pour son zèle et sa piété, a écrit contre les montanistes et en faveur de l'Évangile de Pierre: fragments chez Eusèbe et Jérôme. — 2o év. de Thonuis, Égypte, surnommé le Scota*-tique, ami d'Antoine et d'Athanase; consacré par ce dernier 340, il le défendit à Sardique 348, intercéda pour lui vainement auprès de l'empereur, et fut lui-même exilé, f 358. Auteur d'un livre contre les manichéens, et d'une Lettre aux moines égyptiens. C'est probablement le même que l'ancien abbé d'Arsinoé, dont parle Palladius, qui avait 10,000 moines sous ses ordres et qui, du produit de leur travail, soulageait les pauvres d'Alexandrie et des environs. — 3° un saint du 4®« siècle, vers 350, surnommé le Sin&mite à cause du drap blanc dont il était couvert; il pratiquait la plus grande abstinence, voyageant çà et là, et Von raconte qu'il se vendit une fois à des artistes ambulants, pour pouvoir aider une pauvre femme; une autre fois à un manichéen pour le convertir, f 388. — 4° diacre de Chrysostome» le seconda dans ses efforts pour rétablir la discipline des mœurs dans le clergé; se fit beaucoup d'ennemis. Év. d'Héraclée. — 5® Plusieurs antres personnages de ce nom: nn des Sept dormants; nn martyr sous Maximin, exécuté à Alexandrie; un trinitaire mis à mort par les ma-hométans 1240, canonisé 1728 par Benoît XIII.

SERENUS, év. de Marseille à la fin du 6"» siècle, connu par la guerre qu'il fit aux images dans tous les temples de son diocèse. Sur les réclamations du peuple et du clergé, Grégoire intervint, à regret, semble-t-il, approuvant Se-renus de proscrire les abus et de faire la guerre 4 l'idolâtrie et à la superstition, mais lui reprochant d'aller trop loin en condamnant l'usage et en enlevant au peuple le moyen de s'instruire par les peintures qui décorent les murailles.

SERGIUS, ou Serge; quatre papes de ce nom: 1° Serge 1er, oct. 687 — 8 sept. 701, né et élevé à Païenne, appelle auprès de lui Bède-le-Vénérable, qui refuse par amour pour la vie monastique. Il resta sept ans absent de Rome, à cause des persécutions dirigées eontre lui, parce qu'il avait refusé de signer les décrets du concile Quinisexte; il ramena le patriarche d'Arménie à la foi orthodoxe, orna et répara plusieurs églises, éleva un tombeau à Léon-le-Grand, et institua diverses cérémonies. Il baptisa le roi anglo-saxon Ceadwalla, qui était venu à Rome, qui y mourut et fut enterré à Saint-Pierre. Il sacra 696 Willbrord, év. d'Utrecht, et en 698 fit condamner à Aquilée les Trois chapitres.

2° Serge II, 834-847, profite des embarras de l'empire pour éluder son serment et se faire consacrer sans l'approbation de Lothaire 1er. H fait cependant la paix avec lui en sacrant son fils Louis II roi, non d'Italie, mais de Lombardie. Sous son règne 846 les Arabes pillèrent la campagne romaine et dépouillèrent de ses trésors l'égl. de Saint-Pierre.

3° Serge III, 904-911. C'est avec lui que commence la dynastie des femmes impures qui pendant 50 ans firent des papes. Amant de la Marrouzia, et depuis longtemps connu par ses vices, il fut la première créature de ces prostituées. Il eut de cette femme déréglée un fils qui plus tard aussi devint pape. Élu déjà une première fois en 898, en concurrence avec Jean IX, il avait dft s'enfuir en Toscane. Sa faction réussit en 904 à le ramener en triomphe.

4<> Serge IV, Pietro Bocca di Porco, ou Bucca Porci (groin de porc) 1009-1012. On comprend pourquoi il changea son nom, mais il ne fut pas le premier, en montant sur le trône. Avec lui la famille de Toscane commence a reprendre de l'influence sur les élections et à rendre pour •quelque temps la dignité papale héréditaire -dans son sein. La féte de Toutes-Ames se célèbre pour la première fois 1010 à Clugny.

= Plusieurs saints du même nom 1® Serge et

Bacchus, toujours nommés ensemble, nés à Rome, bannis sous Maximin. Sur leur refus de sacrifier, Bacchus fut mis à mort à Rome et son corps jeté aux bétes, qui ne le touchèrent pas. Serge fut martyrisé à Rosaph en Syrie, et Bacchus lui apparut pour le fortifier. Guéri de ses plaies par un ange, il eut la téte tranchée 290.

— 2<> plusieurs martyrs de Saint-Saba, assassinés par des brigands 797. — 3® un martyr sous Dioclétien. — 4» Serge-le-Saint, surnommé le Confesseur par Photius parce que, en défendant le culte des images sous Léon l'Isaurien, il fut banni et eut ses biens confisqués. Il vivait dans lre moitié du 9™« siècle et écrivit l'hist. de la Lutte pour les images depuis Const. Copronyrae jusqu'à Michel II; elle n'a pas été conservée.

— 5® autre saint de l'Égl. grecque, né 1315, fils d'un boyard russe; il laissa toute sa fortune à son frère et se retira dans un bois près de Ra-donesh, où il bâtit une église; 12 amis vinrent l'y rejoindre et ils fondèrent ensemble le couvent de Troïza, ou Troitzkoje. Dimitri Donskoï ayant remporté une victoire que Serge lui avait prédite, fit cadeau à la communauté de 11 villages. Serge fonda encore d'autres couvents et f 7 sept. 1391. Canonisé 17 juill. 1423. L'imp. Anna a donné au couvent un cercueil en argent pour y recevoir les restes de ce célèbre religieux.

— 6» v. Pauliciens.

SERRES 1° Jean (de), aussi connu sous son nom latin de Serranus, né 1540 à Rhodez (ou Villeneuve-de Berg) étudia à Lausanne et à Genève, où il remplit aussi des fonctions pastorales 1558-1569; vint ensuite en France, échappa miraculeusement à la Saint-Barthélémy, fut nommé pasteur à Nîmes en 1582, fut employé par Henri IV à diverses négociations et reçut de lui le titre d'historiographe de France, f 19 mai 1598, probablement empoisonné. Outre ses travaux sur les règnes des derniers Valois, on a de lui un traité latin sur la Foi catholique comparée aux principes de la religion chrétienne 1697, un autre sur l'État de la religion en France, plusieurs Antijésuites, et un assez grand nombre d'autres écrits, traduits ou originaux.

2® Olivier, son fr. aîné, 1530-1619, est considéré comme le père de l'agriculture en France, où il introduisit, avec le mûrier, l'industrie de la soie.

SERVATl-S, v. Loup 4".

SERVET, ou Servede, Michel, né 29 sept. 1509 ou 1511 à Tudella, Navarre ou à Villan-nueva, Aragon, d'une famille estimée, fils d'un notaire, commença ses études à Saragosse, vint ensuite à Toulouse où, à côté du droit, il étudia les vieux classiques, l'hébreu, et la théologie qui l'intéressa touj. vivement à cause des problèmes qu'elle soulève; assista peut-être au couronnement de CharleS'Quint à Bologne 22 fèv. 1530, et déjà redoutant l'Inquisition à cause de l'impétuosité de sa pensée, il vint à Bâle 1530 et prit le nom de Revès en intervertissant l'ordre des lettres de son nom. Il avait des idées particulières sur la Trinité; ni OEcolampade à Bâle, ni Bucer et Capiton à Strasbourg, ne purent le convaincre, et il fit imprimer à Haguenau, sans nom de lieu, ses 7 livres Deerroribui 1531, qui malgré leur rédaction défectueuse firent sensation. De retour à Bâle il fut arrêté et ne recouvra sa liberté qu'au prix d'une rétractation. Son ouvrage fut condamné par ordre de l'empereur, confisqué et détruit partout où on put l'atteindre. En 1532 Servet publia à Haguenau un nouvel ouvrage: De Trinitate libri IL Dejustitiâ regni Christi cap. IV, où il regrette les fautes de style et d'impression de son premier livre, mais sans en désavouer le contenu. En 1533 il se rend dans les États vénitiens, puis à Orléans, et en 1534 à Lyon, où il vit de sa plume et comme correcteur d'épreuves; il publie une traduction estimée de la Géographie de Ptolémée, à laquelle l'édition de Pirkheimer sert de base. En 1537 il vint à Paris pour y étudier l'astrologie, la médecine et la philosophie, se fit recevoir maître ès arts et docteur en médecine et donna quelques cours de géogr. et d'astrologie. Ses attaques haineuses contre les médecins de Paris, les indisposèrent contre lui, et il fut dénoncé comme hérétique à cause de ses conférences sur l'astrologie. Il se défendit par une apologie passionnée. qui aigrit encore plus ses ennemis. Il avait du talent comme médecin, et paraît avoir entrevu l'un des premiers la circulation du sang. De Paris il se rendit à Avignon, à Chaulieu où il eut de nouvelles difficultés avec les médecins; à Lyon, enfin à Vienne, Dauphiné, sur la demande de l'archev. Paumier. Vers cette époque il réimprima sa Géogr. et publia une Bible latine de Santés Pagninus, avec des notes qui la firent mettre à l'index; il soutenait entre autres que tous les oracles des prophètes avaient été accomplis dans l'histoire même du peuple d'Israël, 1542. L'année suivante parut son principal ouvrage: Christianismi restitutio, par M. S. V. qui n'est qu'une attaque déguisée, une réponse indirecte au livre de l'Institution, parfois même une tentative panthéiste, sous les différentes rubriques de: La Trinité, la Foi, le Règne de Christ, l'Antéchrist, Lettres à Calvin, à Mélanchthon, etc. Il en avait envoyé quelques fragments à Calvin, qui entra en correspondance avec lui, mais Servet lui répondit avec tant de suffisance que le Réformateur s'en tint là. Ce livre fut pour Servet le commencement de la fin. Dénoncé aux autorités ecclésiastiques et au gouverneur du Dauphiné par un catholique de Lyon, Arneys, il fut arrêté à Vienne, ainsi que son éditeur Arnoullet. Il réussit à s'évader le 7 avril 1553, et s'enfuit pendant que le tribunal de l'Inquisition le condamnait à Vienne, et qu'on le brûlait en effigie. Il voulait aller en Italie, mais il eut la malheureuse idée de passer par Genève, il fut reconnu par Nicolas Delafontaine, arrêté le 13 août et interrogé. Son attitude manqua de dignité. Comptant un peu trop sur le parti des Libertins, il crut pouvoir, comme il avait injurié Calvin et les autres réformateurs, continuer ce système de bravades, et il paya d'audace; il alla jusqu'à demander le 22 sept, le bannissement de Calvin et la confiscation de ses biens pour l'indemniser de son arrestation. Il contesta la compétence du tribunal en matière de doctrine, et demanda l'assistance d'un homme de loi, qu'on commit l'injustice de lui refuser. En même temps on consultait les Églises suisses de Bâle, Berne, Zurich et Schaffhouse, qui se prononcèrent pour les mesures de rigueur. Le 26 octobre il fut condamné à mort, malgré Perrin qui présidait le Conseil, et an supplice du feu malgré Calvin qui aurait voulu en épargner les tourments an malheureux. Servet, qui avait perdu de si hauteur depuis qu'il en avait compris le danger, fut au désespoir quand il apprit la sentence qui le frappait. Conduit au plateau de Chatnpel le vendredi 27 octobre, il supplia Farel qui l'accompagnait de lui obtenir un autre genre de mort. On dit que sur le bûcher ses dernières paroles furent: 0 Dieu, conserve mon âme! 0 Jésus, fils du Dieu éternel, aie pitié de moi! Cette sinistre exécution, qui fait tache dans la réforme genevoise, fut diversement jugée en son temps. Mélanchthon, Bucer, Bullinger et d'autres félicitèrent Calvin, mais le blâme fat si général dans le monde laïque protestant, que Calvin jugea nécessaire de répondre à ces critiques par un Exposé des erreurs de Servet, comme si son hérésie justifiait son supplice. Toat ce que Ton peut invoquer pour expliquer b conduite de Calvin et de ses approbateurs, c'est qu'ils n'avaient pas encore dépouillé le vieil homme et les préjugés de leur Église; c'est aussi la crainte qu'ils avaient que les ennemis de la Réforme n'exploitassent leur indulgence envers les hérétiques; c'est le désir de maintenir la pureté de la doctrine. GuilL de Trie, réfugié à Genève, mais sollicité par son parent Arneys, de Lyon de rentrer dans le catholicisme, lui avait répondu que l'Égl. de Genève était plus pure que celle de Lyon, et qu'on n'y tolérerait pas, comme à Lyon, la présence d'un Villanovain (Servet). Cette lettre,qui avait été le point de départ des recherches contre Servet à Vienne et Lyon, devait peser aussi par son esprit sur la conduite des magistrats genevois. Si l'on veut en outre mettre en cause le caractère même de Calvin, il est juste d'ajouter que Servet a fait tout ce qu'il a pu pour l'irriter et l'aigrir. Notre siècle ne saurait absoudre Calvin, mais il était de son temps, et le bûcher qu'on lui reproche ne peut faire oublier les milliers d'autres bûchers qui ont été allumés avant lui, et qui ont continué de brûler longtemps eneore après sa mort. v. Rilliet, Relation du procès criminel, etc. Genève 1844.

SERVICE funèbre, v. Oraisons.

SERVITES, ordre de religieux qui se mettent au service de la Vierge; on les appelle aussi serviteurs de la Vierge, Frères de l'Ave Maria, Frères des souffrances de N. S. Jésus, ou du mont Senario. Il fut fondé à Florence le 15 août 1233, jour de l'Assomption, par 7 Florentins de bonne famille, et reçut en 1239 la règle de saint Augustin. Lear principal chef fut d'abord Bonphile Monaldi f 1262, et leur costume une chemise de crin, avec une robe gris-cendré. L'év. de Florence, Ardingo, les ordonna prêtres. Plusieurs papes leur accordèrent des privilèges, notamment celui des Ordres mendiants, et le noir devint la couleur de leur costume. Leur nombre s'accrut rapidement, et ils se partagèrent en Observants et Conventuels, avec un général à Rome. Philippe Benizzi, général en 1267, puis canonisé, contribua surtout à les propager en France et en Espagne. En France le noir de leur costume fut remplacé par le blanc; d'où l'église des Blancs-Manteaux à Paris, qui fut donnée aux guillelmites. Ils ont produit quelques hommes distingués, Doni l'antiquaire, le philologue Ferrari, Fra Paolo Sarpi, etc. — Il y eut enfin des servîtes femmes, depuis 1270, appelées sœurs noires, et des tertiaires depuis 1285, avec une étoile bleue sur un fronteau blanc. Anne-Catherine d'Autriche, après la mort de son mari 1595, devint leur protectrice et leur donna un couvent à Innspruck 1612. Supprimé en France déjà en 1274, il subsista longtemps en Italie.

SÉTHIENS, ou Séthites, secte gnostique de la famille des OphiteB; q. v. D'après elle deux couples ont été créés, les matériels par les anges des ténèbres, et les psychiques (ayant Pâme) par le démiurge. Ils en vinrent aux mains dans les personnes de Caïn et d'Abel. La nature psychique ayant succombé, la Sagesse l'a remplacée par Seth, le père des pneumatiques ou spirituels, auquel les deux puissances opposées n'ont cessé de faire la guerre. Seth, pour les vaincre, a reparu en la personne du Messie.

SÉVÈRE. Deux empereurs. 1° Lucius-Septi-mius-Pertinax, né 11 avril 146 à Leptis, Afrique; avocat, sénateur, consul sous Commode, il avait reçu une excellente éducation physique et intellectuelle, qui l'aida à avancer rapidement. Il commandait les légions d'IUyrie quand, à la mort de Pertinax 193, il fut appelé au trône par l'armée; en 197 il s'était débarrassé de tous ses rivaux et régnait seul. Il f 211 à Choracum York) pendant une expédition en Angleterre, après un règne sévère, qui lui valut son nom, mais qui ne fut ni sans talent, ni sans mérite comme administration. Il avait un esprit religieux, et s'appliquait à la magie, à l'astrologie, à l'interprétation des songes, surtout depuis qu'il avait épousé en secondes noces Julia Dom-na, fille du prêtre du soleil à Émèse. Il était tolérant pour le christianisme, comme sa mère Mammée, et entretenait dans sa maison un chrétien, Proculus Torpatianus, qui l'avait gnéri d'une maladie en l'oignant d'huile; son fils aîné, Caracalla, eut une nourrice chrétienne et fut élevé avec des jeunes garçons chrétiens. Mais lui-même ne se convertit pas; il en fut empêché peut-être par l'attitude hostile des juifs et des chrétiens en Orient. Il n'est pas responsable des persécutions qui éclatèrent sous son règne et qui furent amenées par la populace combinée avec la mollesse des autorités locales. C'est à cette occasion que périrent: au nord de l'Afrique Félicité et Perpétua; en É-gypte Léonidas, père d'Origène, et Potami&na.

2° Marc-Aurèle-Alexandre S., né vers 209 à Acco, fils de Julie Mammée, élevé par elle avec soin, proclamé empereur 222, rétablit une discipline sévère, réforma des abus, et se montra favorable aux chrétiens. Sa mère avait une grande estime pour Origène. Assassiné par ses soldats 235.

3» Sulpice S., né 363 en Aquitaine, fut d'abord avocat, partageant son temps entre Toulouse et Élusa près Carcassone. Après la mort de sa femme 392, il se retira comme moine dans un couvent près de Béziers, puis 409 à Marseille. On croit qu'il se fit prêtre. Il était très lié avec Martin de Tours, dont il a écrit la vie un peu légendaire. Un moment il se prononça en faveur du pélagianisme; quand il en fut revenu, il se condamna, pour se punir, à un éternel silence, t à Marseille 410, ou 429 (?) peu après l'arrivée des Vandales. Il a écrit une Hist. ou Ckron. sacra, en 2 livres, qui va de la création à l'an 410, et que l'on a comparée à Salluste pour l'élégance du style. On a aussi quelques Lettres sous son nom. OEuv. souvent impr. et traduites.

4» plusieurs évéques a. de Milève, Afrique, grand admirateur d'Augustin; b. de Minorque, vers 418; raconte la conversion de 540 juifs, attribuée aux reliques de saint Étienne déposées dans l'ile par Orose; c. de Malaca, 578-601, auteur d'un traité sur la Virginité, adressé à sa sœur, auj. perdu, et d'une correspondance contre l'év. arien Vincent, de Saragosse; d. év. jacobite en Égypte, d'Alexandrie, vers 978;

autour d une Hist. estimée des patriarches d'Alexandrie, malheureusement perdue.

5° deux chefs de sectes: a. un eucratite du siècle, fondateur de la secte des sévériens eucratites; il repoussait le mariage, la femme ayant été créée par le diable; ne buvait pas de vin, condamnait les jouissances terrestres, et rejetait tout l'A. T., les Actes, les Épitres de Paul, et niait la résurrection. 6. monophysite, né à Sozopolis, Pisidie, 5™ siècle. D'abord juriste et s'occupant beaucoup d'Aristote à Bé-ryte, il se fit baptiser, devint moine et se joignit aux acéphales; v. Monophysitisme et Théopaschites; il ne tarda pas à jouer dans ces luttes puériles un rôle prépondérant, et finit par arriver au patriarcat, f vers 540.

SÉVÉRIEN lo év. de Gabala, Syrie; d'abord ami de Chrysostôme qui le nomma son suppléant au patriarcat, lorsqu'il partit pour Éphè-se ob il allait apaiser le différend entre les év. Eusèbe de Valentinopolis et An ton in d'Éphèse. Protégé par Eudoxie, il essaya de se faire un parti à Constantinople, mais le peuple le chassa de la ville, 402. L'impératrice le rappela et amena une espèce de réconciliation; mais Sév. continua en secret ses intrigues avec l'ennemi mortel de Chrysostôme, Théophile d'Alexandrie. On ignore comment il finit. — 2° v. Sévère 5« a.

SÉVERIN lo pape élu fin 638, confirmé par Héraclius seulement, 28 mai 640, f 2 août même année. Il s'était prononcé contre le mono-thélisme, malgré une espèce d'engagement qu'il avait pris.

2° Premier abbé du couvent d'Agaunum (Saint-Maurice, Valais) 477-508. Ce couvent dépendait avant lui des év. de Sion. Vie par son disciple Faustus.

3° Saint Sévérin, apôtre de la Norique (Autriche). originaire d'Italie ou d'Afrique (il ne voulut jamais rien dire sur son origine); voué à la vie contemplative, d'abord en Orient, puis en Pannonie, s'établit vers 450 sur les bords du Danube, moins comme missionnaire que comme l'ange gardien des nombreuses petites églises de la contrée, exposées à tous les dangers pendant l'invasion des barbares. Son austérité et sa bienveillance lui assurèrent une influence étrange sur les habitants du pays. On s'adressait à lui dans la famine, dans la maladie et dans les angoisses de la guerre. Il résidait alternativement à Asturis près de Vienne, à Passau et à Lorch, voyageant incessamment, nu-pieds, visitant les malades, sollicitant les riches pour les pauvres, rachetant les prisonniers, donnant des ordres ou des conseils aux capitaines, réclamant avec énergie la dîme des produits de la terre en faveur des nécessiteux. Il était très respecté des Allemans et empêcha leur roi Géwold d'entrer à Passau. Odoacre, se rendant en Italie 476, lui demanda sa bénédiction et ses conseils. Sur son lit de mort il fit venir auprès de lui le roi des Rugiens, Fié-théus (ou Féva) et sa femme Gisa, arienne zélée et cruelle, et leur recommanda la crainte de Dieu. Sa foi fut souvent récompensée par de merveilleux exaucements, et le peuple alla jusqu'à lui attribuer des miracles. Sans épiscopat et sans aucune autorité matérielle, il fonda de nombreux couvents et des asiles, et fut un véritable évéque missionnaire. Sa fin fut paisible et sereine, il prit la cène et chanta des cantiques, f 8 ou 9 janv. 482. Son corps fut transporté en Italie par son disciple l'év. Lucillus, d'abord à Mont Feltre, puis dans une petite lie près de Naples, où une dame pieuse lui fit faire un tombeau.

SFONDRATO (-ti, ou 4e), famille patricienne qui a fourni à l'Église plusieurs notabilités: 1° François, né 1493 à Crémone, professeur, diplomate sous Charles-Quint, gouverneur de Sienne qui le nomma père de la patrie; enfin év. de Crémone et cardinal, f 31 juill. 1550. — 2° son fils Nicolas, qui devint pape; v. Grégoire XIV. — 3o Célestin, né 1644 à Milan, élevé a Saint-Gall, entra dans l'ordre des bénédictins, se distingua par son aptitude au travail, fut envoyé à Kempten comme maître de théol., fit imprimer Secretum D. Thomœ revelatum; passa à Saint-Gall comme prof, et officiai, fut envoyé 1679 à Salzbourg comme prof, de droit canon, et entreprit la défense du saint-siège contre la Déclaration du clergé de France, publiée 1684 sous le pseudonyme d'Eugène Lombard. De Saint-Gall, dont il était devenu l'abbé, il écrivit encore plusieurs ouvrages sur le même sujet, d'autres sur les Immunités ecclésiastiques, sur l'Immaculée Conception, sur la Prédestination (posthume), et son Cours de philos, monastique. Innocent XU le fit venir à Rouie et le créa cardinal 1695. f 4 sept. 1696. Son livre posthume sur la Prédestination, Nodw, etc., Nœud dénoué par les textes des Écriture ainsi que par la doctrine des saints Augustin et Thomas, renfermait sur le péché et la grâce, les païens et les enfants morts sans baptême, des hérésies ou du moins des hardiesses que le> évêques de France s'empressèrent de dénoncer à la cour de Rome, mais auxquelles celle-ci ne fit pas attention: petite vengeance d'un côte, reconnaissance de l'autre. Il ne fut cependant pas canonisé.

SHAFTESBURY, noble tamille d'Angleterre, dont le chef, le comte Ant. d'A&hley-Cooper, remplit de hautes fonctions sous Charles Ier et reçut le titre de Shaftesbury 1672.

lo Anthony Ashley-Cooper, petit-fils de l'homme d'État. Né 26 févr. 1671 à Londres, il

apprit 4e bonne heure d'une institutrice distinguée le grec et le latin, entra en 1683 au collège de Winchester, fit en 1686 un long voyage sur le continent, fut élu membre du parlement en 1694, mais se mit peu en évidence à cause de la faiblesse de sa santé. Ën 1698 il se rendit en Hollande, où il se lia avec Bayle et Leclerc. La mort de son père lui ouvrit les portes de la Chambre des lords 1699.11 jouit de la confiance de Guillaume III, mais à l'avènement de la reine Anne il se retira des affaires, vécut dans la retraite ou voyagea et se consacra aux lettres et à l'étude. De 1702 à 1704 il est en Hollande; il se marie en 1709, se fixe à Naples et y f 1713. Voltaire l'appelle un des plus hardis philosophes de l'Angleterre. Il alla fort loin en effet, et sous le couvert du déisme, il raya de son credo, comme Bolingbroke, la loi à la vie future; il rejetait la Bible et niait ou discutait les perfections morales de Dieu. Ses Lettres sur l'Enthousiasme, à l'occasion des prophètes cévenols, 1708, furent son premier ouvrage et attirèrent l'attention; il condamnait les voies de rigueur contre ces « fanatiques > et recommandait des procédés plus humains et plus rationnels. En 1709 il publiait ses Moralistes; puis son Soliloque, ou Avis à un auteur, et d'autres écrits, qu'il a réunis à son principal ouvrage: Charac-terùtia of men, manners, etc. 1711, trad. Genève 1769.

2° Ant. Ashley-Cooper, descendant des précédents, philanthrope bien connu. Né 28 avril 1801, il fit ses études à Oxford, entra à la Chambre en 1826, fut sous Wellington membre du Conseil des Indes, lord de l'Amirauté sous Robert Peel, défendit au parlement le bill de Dix heures et toutes les lois ayant un caractère libéral, et entra en 1851, par la mort de son père, à la Chambre des lords, où il se montra l'énergique et principal représentant de l'Égl. protestante évangélique, et le constant adversaire des tendances et des menées puséistes. D'un caractère aimable, et d'une grande largeur de vues, s'élevant au-dessus des mesquineries des partis confessionnels, il a travaillé comme chrétien à vivifier l'Église, et il s'est donné pour tâche, comme citoyen, de résoudre pratiquement, autant qu'il est possible de le faire, toutes les questions sociales. Il est président de l'Alliance évangélique, de la Soc. biblique, de la Soc. pour la conversion des Juifs; il a fondé les Écoles déguenillées, la Soc. pour l'amélioration des logements ouvriers, etc.

SHAKERS, v. Lee, Anna.

SHECHINA, de l'hébr. Shachan, demeurer , habitation de Dieu, symbole ou signe visible de cette habitation; l'éclat merveilleux, la lumière qui accompagnait toute manifestation de la majesté divine. D'après les rabbins, qui la

rattachent à la colonne de feu du désert et au buisson ardent, la Sch. devait se produire dans l'hist. d'Israël toutes les fois qu'il est parlé d'une intervention de Dieu, par le fait môme que Dieu étant esprit, et par conséquent invisible, il devait pour se manifester prendre une forme quelconque, et préférablement celle du feu qui correspond le mieux à sa nature, comme lumière, gloire, chaleur, fécondité, purification. Cette lumière accompagnait éventuellement d'autres formes de manifestation. En outre elle planait habituellement au-dessus de l'arche sainte dans le lieu Très Saint, et au-dessus des chérubins; elle a disparu avec l'arche. On a renoncé, depuis Vitringa, à cette idée rabbinique d'une présence visible; cependant Hengstenberg croit encore qu'il y avait comme une apparition de Dieu dans le Saint des Saints, au moins le jour des Expiations. Les passages 2 Cor. 4, 6. Col. 2, 9. Éph. 1, 6, Jean 14, 23. semblent renfermer une allusion à la Sheehina, et les nimbes ou auréoles ont peutpétre été inspirés par cette môme tradition.

SIBÉRIE, vaste contrée comprenant tout le nord de l'Asie et formant à elle seule la Russie d'Asie; elle va des monts Oural au Kamtshatka, et malgré son immense étendue, ne compte guère plus de deux millions d'habitants, presque tous de race tartare ou mongole. Plusieurs des peuplades qui l'habitaient dans l'origine étaient lamaïstes ou grossièrement polythéistes; elles passèrent en partie à l'islamisme, quand le khan desTartares, Kutzchum, en eut fait la conquête, mais vers 1580 le cosaque Jermak s'empara de leur territorre pour le compte d'Ivan IV. La Russie gagna dès lors de proche en proche jusqu'au Kamtshatka, fonda quelques villes, groupa les populations, les civilisa, les soumit à sa religion, et favorisa leur commerce avec l'Europe. Le première ville fut fondée par Jermak, sous le nom de Sibir, non loin du lieu où est auj. Tobolsk; c'est elle qui a donné son nom à la contrée. L'archev. Innocent, de Moscou, autrefois missionnaire en Sibérie, continue de diriger l'œuvre de la mission grecque orthodoxe qui ne compte pas moins de trois archevêchés, Tobolsk, Irkoutsk et Kamptshatka. Les luthériens y comptent 7 pasteurs pour 3 à 4,000 disséminés. Les catholiques relèvent de l'archev. deMohilew. Les déportés, qui dépassent le chiffre de 60,000 appartiennent aux diverses sectes et confessions; de bonnes écoles et 2 gymnases leur sont fournis par le gouvernement. Une mission protestante entreprise vers 1830 par Swan et Stally-Brass a été interrompue par un ukase.

SIBOUR, Marie-Dominique-Auguste, né 4 avril 1792 à Saint-Paul-Trois-Châteaux, Drôme; év. de Digne 1840, archev. de Paris 1848, nommé par Cavaignac; f assassiné 3 janv. 1857,

par Jean Verger, prêtre interdit <qui ftit exécuté le 30 janv.) Ù avait des instincts de libéralisme, et en accordant au pape une primauté de juri-diction, il maintenait pour l'évêque une autorité propre non déléguée. Il présida en 4849 et 1850 un concile provincial, et, attaqué par VUnivers, il le dénonça dans son diocèse par un mandement qui équivalait à un interdit. Mais ces velléités libérales, à la fois gallicanes et presque républicaines, disparurent avec le 2 déc. 1851. Il fit chanter un Te Deum pour le coup d'État, bénit le mariage de l'empereur, fut nommé sénateur, et célébra en 1854 le nouveau dogme de l'Immaculée Conception.

SIBYLLES, nom que les Grecs et les Romains donnaient à des femmes qui passaient chez eux pour prophétesses. L'une des plus célèbres fut celle de Cumes, dont Tarquin acheta des livres annonçant tout l'avenir de Rome. Ces livres ayant été brûlés dans l'incendie du Capitole, le sénat envoya partout des délégués pour tâcher de les reconstruire en recueillant les traditions éparses, et comme les livres sybillins se payaient bien, ce fut une industrie lucrative d'en composer; les juifs eux-mêmes s'en mêlèrent pour propager leurs doctrines. Mais il s'en fabriqua un trop grand nombre, et ils tombèrent en discrédit. Le dernier recueil fut brûlé par Stilicon, 399. Les juifs et les chrétiens s'étaient préoccupés de ces prétendus prophètes, et Lac-tance en a fait une étude. On possède encore auj. sous le nom d'Oracles sybillins une collection de vers grecs, formant une huitaine de livres; le cardinal Angelo Mai en a découvert en 1817 et 1828 a Milan 4 nouveaux fragments; le Jugement, la Venue du Messie, la Ruine de Jérusalem, l'Éruption du Vésuve y sont annoncés, et il n'est pas difficile de reconnaître que les différents auteurs de ces alexandrins sont les uns des juifs d'Égypte, les autres des judéo-chrétiens. Dates delà composition, inconnues; plusieurs sont antérieurs à l'ère chrétienne. Texte grec, trad. latine et Comment, par Alexandre, Paris 1841-1842.

SICKINGEN. François (de), né l«r mai 1481 au château d'Ebernbourg près Kreuznach, reçut une éducation supérieure à celle que recevaient alors les membres de la noblesse, et se distingua sous Maximilien I«r et Charles-Quint, oe qui lui valut des titres et des honneurs civils et militaires, notamment le grade de général de l'empire. Nature impétueuse, il épousa sans arrière-pensée toutes les causes qui lui paraissaient nobles et justes. Il y avait chez lui du chevalier; il était au service du pauvre et de l'opprimé, et si parfois on a pu lui trouver des allures de condottiere, ce n'était jamais qu'en faveur du malheur et du droit. Il s'était enthousiasmé pour la Renaissance, et par conséquent peur la Réforme qui en était l'application religieuse; mais Luther ne lui permit pas d'identifier sa cause avec celle de la noblesse mécontente. Pendant les troubles de cette époque, son château, que ses amis appelaient l'Auberge de la justice, servit souvent de refuge à Bucer, Aquila, Hutten, Œcolampade, Schwebel, etc. Il se faisait lire les œuvres de Luther. Hutten le met fréquemment en scène dans ses plus mordants opuscules; lui-même chercha à propager la cause de la Réforme par divers écrits, entre autres par une circulaire adressée à son beau fr. le chevalier Dietrich de Handschuhs-heim. Il avait longtemps espéré que Ch.-Quint mettrait son honneur à réformer l'Église; après la diète de Worms il comprit qu'il n'y avait rien à attendre des pouvoirs politiques, et comme il entrevit en même temps que l'empereur préparait la ruine de la petite noblesse, il réunit à Landau 1522 une ligue dont il devint le chef, et il partit en guerre sans s'être préalablement assuré qu'il serait suivi. Le premier objet de ses attaques fut l'archevêché de Trêves; il obtint d'abord quelques succès, mais il rencontra sous les remparts même de Trêves une résistance inattendue, et il se retira dans son château de Landstuhl où, mis au ban de l'empire et assiégé par l'armée impériale, il fut blessé à mort et capitula en voyant approcher sa fin. Les princes le trouvèrent mourant; à leurs observations il répondit: J'aurai bientôt à rendre compte à un plus puissant Seigneur. D demanda la communion et f 7 mai 1523 à midi.

SIDOINE, v. Apollinaire 3°.

SIENNE, v. Pavie.

SIEVEKING, Amélie, née 1794 à Hambourg, d'une famille sénatoriale, perdit ses parents de bonne heure. Dès sa 17»* année elle se sentit pressée du désir de se rendre utile; elle donna d'abord quelques leçons à une jeune fille qui demeurait avec elle, et bientôt d'autres jeunes filles se joignirent à la première. Pleine de foi et richement douée, elle obtint des sucoès étonnants, et les familles les plus considérables la supplièrent d'admettre leurs filles dans ses classes. Elle continuait de recevoir une fois par semaine ses anciennes élèves et leur donnait une leçon biblique, soigneusement préparée; elle a publié en 1822,1827 et 1855, des Considérations, ou Entretiens sur diverses parties de la Bible, destinés à fixer pour ses élèves le souvenir de ses leçons, et ces ouvrages se sont répandus bien au delà du cercle auquel ils étaient destinés. En 1831, pendant le choléra, elle passa plusieurs semaines enfermée avec ses malades dans l'hôpital des cholériques, et en 1832 elle put réaliser un de ses rêves en organisant une Société de femmes pour le soin des pauvres et des malades; des associations du même'genre se fondèrent ailleurs encore et rendirent de grands services à la mission intérieure. Elle en rédigea chaque année le rapport général, jusqu'à sa f l» avril 4859. Vie, trad. en français. Y. aussi Les Amis des pauvres, par J.-L. Mioheli.

SIGEBERT de Gembloux, Gemblacensis, Brabant, né vers 1030, élevé au couvent bénédictin de Gembloux, où il fut reçu membre de Tordre, où il passa presque toute sa vie, et où il f 5 oct. 1412. Il ne s'en absenta que de 1048 à 1070, pour aller enseigner l'hébreu à Saint-Vincent de Metz. C'était un homme aussi savant qu'énergique. On a de lui une Chronique latine, de 381-1112: une vie de Thierry, une de Sige-bert roi d'Austrasie, une de Guibert, une de Maclou, etc. Mais outre ces ouvrages mentionnés dans Bouillet, il en a composé d'autres d'une portée plus considérable: une lettre Contre le pape Grégoire qui, dans une lettre à Hermann de Metz, prétendait que le pape peut mettre l'empereur en interdit et délier ses sujets du serment de fidélité; une antre au pape Pascal II, qui invitait Robert de Flandres à organiser une croisade contre l'église de Liège; une Apologie en faveur des prêtres mariés, adressée à l'emp. Henri contre ceux qui calomnient les messes dites par des prêtres mariés; ouvrage mis à l'index. Par son caractère et son érudition, il fut un des adversaires les plus redoutés du parti de Grégoire VII, au moment où celui-ci affichait ses prétentions au pouvoir temporel et s'assujé-tissait le clergé par le célibat forcé.

SIGISMOND lo fils de l'emp. Charles IV et d'Anne de Silésie; né 1366, duc de Brandebourg 1378, roi de Hongrie 1382, élu empereur 1410, roi de Bohême 1419. Il convoqua le conc. de Constance 1414, dans l'espoir de mettre fin au schisme d'Occident; donna à Spire 18 oct. un sauf-conduit solennel à Jean Huss pour qu'il eût à se présenter devant le concile, et viola sa signature impériale pour plaire ou pour obéir aux prêtres. L'histoire dit qu'il en rougit devant Huss, mais ce n'est pas sûr et d'ailleurs ne suffirait pas pour le réhabiliter. Son manque de parole amena la révolte des hussites, et quand il monta sur le trône de Bohême, il eut à combattre ses nouveaux sujets: il leur fit bien en 1435 des concessions, mais pour les retirer aussitôt, f 1437.

2° Sigismond III, fils du roi de Suède Jean III, avait été élevé par les jésuites; élu roi de Pologne 1587 il resta leur jouet et leur instrument. Devenu roi de Suède par la mort de son père 1592, il accourut pour prendre possession de sa nouvelle couronne, mais les États du royaume lui posèrent pour condition son retour au protestantisme. Il accepta après quelque hésitation, mais on ne se fiait plus à lui; le duc Charles, son oncle, après l'avoir battu à Stan-gebro, le fit sommer de nouveau par la Diète d'abjurer le catholicisme, de venir gouverner en personne, ou de faire venir son fils en Suède pour qu'il soit élevé dans la religion nationale. Sur son refus il ftit déclaré déchu du trône. Il lui restait la Pologne; il en fit une jé-suitière, sacrifia partout les intérêts du pays à ceux de l'ordre; voulut convertir les Cosaques et se les aliéna; voulut imposer à la Russie deux faux Démétrius comme princes légitimes et ramener par eux les Moscovites à la foi romaine; il prit parti pour l'Autriche contre la Bohême, et entraîna la Pologne dans une guerre désastreuse contre le sultan. Enfin par ses mesures contre la noblesse protestante, il déchaîna la guerre civile 1606. Il se fit battre sans relâche par Gustave-Adolphe, 1621-1635, et conclut avec lui la paix d'Altmark par laquelle il pérdit la Livonie. Quand il f 1637, le pays était diminué, ruiné; ses frontières étaient ouvertes, et tout était prêt pour la dissolution du royaume. Ses successeurs ne purent que retarder un peu la catastrophe; les jésuites comptaient 2,000 membres et possédaient 50 collèges.

3» Jean-Sigismond, prince-électeur de Brandebourg, né 18 nov. 1572, élevé luthérien et dans le respect de la Formule de Concorde, fut amené par ses relations avec la Hollande, à étudier les doctrines réformées, et le 23 déc. 1613 il en fit publiquement profession, étant depuis 1608 monté sur le trône. En 1614 il publia la Confession de foi qui porte son nom et qui est franchement calviniste. Ce n'était d'abord qu'une œuvre personnelle, mais elle fut bientôt rangée parmi les livres symboliques de l'Égl. réformée, qui obtint les mêmes droits que l'Égl. luthérienne. Sans l'imposer à personne il travailla à la faire accepter de tous; il estimait que l'Église luthérienne n'avait pas dit son dernier mot, que sa réforme était encore incomplète; il jugeait en outre que les Églises luthériennes de son temps avaient déjà dévié de leur principe primitif, et il espérait pouvoir amener une sorte d'union entre les diverses confessions; il est ainsi le père spirituel de l'union que la maison royale de Prusse devait réaliser plus tard, f 23 déc. 1619.

SIGONIUS, Charles, savantr humaniste, né 1523 à Modène, prof, de littérature classique et d'éloquence à Modène, Padoue, Venise et Bologne. f 1585 dans sa campagne de Modène. Ses œuvres compl. forment 6 vol. in-fol. Outre ce qui regarde les antiquités romaines, le moyen âge et la diplomatique, il a écrit un traité sur la Consolation, une Hist. de l'empire d'Occident, un livre sur la République des Hébreux, une Hist. ecclés. de Milan, une Hist. de l'archevêché de Bologne, etc.

SILVÈRE, fils d'Hormisdas, pape du 8 juin 536 à mars 537; nommé sons l'influence de Théodat, roi des Goths, en concurrence avec Vigile, il fut destitué par leB intrigues de Théodora, femme de Justinien, et d'Antonina, femme de Bélisaire, parce qu'il ne voulut pas condamner le conc. de ChaJcédoine et qu'il refusa de rendre k Anthyme le siège de Constantinople. Accusé d'intelligences avec les Goths, il fut relégué à Patara, remplacé par Vigile (qui fut un moment anti-pape), et finalement conduit par ordre de Vigile dans l'île de Palmaria, où on le laissa mourir de faim.

SILVESTRE, v. Sylvestre.

SIMÉON ou Syméon 1° év. de Jérusalem et successeur de Jacques; d'après un fragment d'Hégésippe cité par Eusèbe, il aurait été fils de Cléophas et d'une tante de Jésus, Jean 19, 25., mais celte généalogie est incertaine et se complique en outre de la question des 3 Jacques. Haï des Juifs comme parent du Seigneur, et des Romains comme descendant de David et prétendant, il fut souvent persécuté. Enfin à l'âge de 120 ans il fut mis à la question et torturé plusieurs jours de suite. Sur son refus d'abjurer, le gouverneur romain étonné, mais furieux, Je lit crucifier, 107 ou 109.

2° S. le Stylite, né vers 390. de parents chrétiens, à Sisan au nord de la Syrie, sur la frontière de la Cilicie. Il fut d'abord berger; la vue d'une église éveilla en lui des sentiments religieux empreints d'un ascétisme exagéré; il entra au couvent voisin, et passa ensuite dans celui de Saint-Eusébonas, près Teleda, dont la règle était rigide, mais ses austérités, ses pénitences étaient si dures que les moines eux-mé-mes furent soulagés quand il les quitta. Il se retira dans une cabane, au pied du mont Télé-nisse non loin d'Antioche, où on le trouva un jour couché, presque mort de faim, après un jeûne de 40 jours, ayant près de lui de la nourriture qu'il n'avait pas môme touchée. On eut beaucoup de peine à le faire revenir à la vie. A force d'exercice il réussit à ne prendre qu'un repas par semaine, et rien du tout pendant le carême, même ne se couchant pas, et se faisant attacher à un poteau pour être plus sûr de ne pas tomber. Pour échapper à des admirateurs enthousiastes et importuns, il se fit faire en 423 une colonne de 6 à 7 coudées de haut, qu'il éleva à 36 en 429, et où il fixa son habitation; le chapiteau en était entouré d'une barrière, sur laquelle il s'appuyait le peu de temps qu'il se permettait de dormir. Il vécut ainsi 26 ans, u'ayant changé que 3 fois de colonne; il passa 22 ans sur la dernière, et f le mercredi 2 sept. 459, un abcès purulent à la jambe gauche l'obligeant depuis longtemps à ne plus se tenir debout que sur le pied droit. Son renoncement au monde était si grand qu'il ne recevait point de visites, surtout point de femmes; il ne voulut pas même voir sa mère, et ne lui accorda qu'une faveur, c'est qu'elle fût enterrée au pied de sa colonne. Telle était la piété de certaines natures à cette époque. Il agissait d'ailleurs comme prédicateur, haranguant les foules, donnant des conseils, convertissant les païens, pacifiant les esprits, veillant à l'intégrité de la foi; il intervint en faveur du conc. de Chalcédoine, et correspondit avec Théodose II, Léon 1er et Eudoxie. On lui prête beaucoup de miracles, entre autres des guérisons, ce qui ferait supposer qu'on lui montait les malades. Vies par son disciple Antoine, par Cosmas; notice» par Théodoret, Évagrius, etc. De nombreux adeptes s'étaient fait construire des huttes autour de sa colonne.

3<> Autre stylite qui dès sa jeunesse, en 527. monta sur une colonne en face de son maître Jean, puis sur une autre plus haute. Il se rendit ensuite sur une montagne près d'Antioche. où il vécut sur un rocher de sa 20®« à sa 30®* année, et finit par passer encore 45 ans sur une colonne, f 596.

4° S. de Durham, Dunelmetuis, historien anglais, étudia à Oxford, entra chez les bénédictins et vécut vers 1130 comme chantre principal de l'égl. de Saint Cuthbert à Durham. On lui doit une Hist. des rois d'Angleterre de 616 à 1130, très estimée comme source (continuée par Jean, prieur d'Exham, jusqu'en 1156), et d'autres écrits de moindre importance sur l'Hist. de Durham, etc.

5° S. v. Métaphraste.

6» Archev. de Thessalonique au commencement du 15m* siècle; il mourut 5 mois avant la prise de Thessalonique par les Turcs 1430. Il avait vaillamment concouru à sa défense. C'était un savant, grand partisan du mona-chisme, adversaire énergique des latins, et opposé à tout essai d'union; c'est contre eux qu'il a composé ses principaux ouvrages.

7° Troisième stylite du même nom, sous Manuel Comnène, dans la 2me moitié du 12«m siècle; surnommé le prêtre, l'archimandrite, ou encore Fulminatus parce qu'il fut frappé de la foudre. Il a écrit, comme le précédent; ses œuvres ont été publ. par lé jésuite Gretser 1603.

SIMON, autre forme du nom de Siméon. L'hist. juive mentionne 1° S.4e-Juste, souverain sacrificateur, fils d'Onias Ier, 300 av. C.. v. livre de Siracb 50, 1. — 2« Simon II, fil» d'Onias H, 219-199 av. C., qui empêcha Ptole-mée Philopator d'entrer dans le temple. — 3° S. ben Iochaï, savant rabbin du siècle après C., né à Jarania, élevé par Gamaliel II et Akiba, dont le Talmud cite de nombreux fragments, et que l'on regarde, mais à tort, comme l'auteur du livre de Sohar. Il est peut-être le vrai père de la Kabale. Nature sombre, pessimiste, ascétique, orgueilleuse, juif et rabbin fanatique, il exerçait une grande influence sur le peuple. Une tradition porte qu'il fut envoyé auprès d'Antonin-le-Pieux pour lui demander la liberté du culte et la reconnaissance de l'école de Jamnia. En IS8 il fut condamné à mort, ainsi que son fils, pour un discours violent contre les Romains, et ils n'échappèrent que par la fuite. Après la mort d'Antonin il sortit de sa caverne et ouvrit une école à Tékoah. f 170.

Dans l'hist. ecclésiastique 1° Simon de Tour-nay, d'origine franque, bien que quelques-uns l'aient cru Anglais. Il était chanoine à Tournay 1201, et a écrit plusieurs ouvrages pour la défense du christianisme, entre autres une Dogmatique, ou Somme théologique. Après avoir enseigné un certain temps avec succès, il paraît que l'orgueil lui monta au cerveau, et on lui prête de s'être écrié: « Ha ! petit Jésus, que je me suis donné de peine pour affermir ton autorité. Vrai, si la fantaisie m'en prenait, je pourrais te démolir plus facilement encore que je ne t'ai élevé. > D'après Thomas de Cantimpré il aurait dit aussi: t Trois Imposteurs ont trompé le monde: Moïse les juifs, Jésus les chrétiens, Mahbmet les musulmans; » ce qui a fait croire à quelques-uns qu'il pourrait bien être l'auteur du livre des Trois Imposteurs q. v. Cette surexcitation d'orgueil aboutit à des crises d'épilepsie, compliquées pendant 2 ans de surdi-mutité. On l'accuse encore d'avoir vécu avec une fille nommée Alcidis, dont il aurait eu un fils. On lui reproche enfin diverses hérésies, provenant de l'autorité trop grande qu'il donnait à Aristote et à Boétius: on ne peut cependant rien affirmer.

2o Richard S. né 14 mai 4638 à Dieppe, fut élevé par les oratoriens; il voulut même entrer dans l'ordre, mais comme on ne lui permettait pas de consacrer tout son temps à l'étude, il retourna chez lui. L'official de Rouen, La Roque, frappé de ses heureuses dispositions, l'envoya à Paris, où il s'occupa surtout de linguistique. En 1662, sur les instances qui lui furent faites, il rentra chez les oratoriens apr$s avoir stipulé qu'il pourrait suivre ses études et qu'il serait dispensé des exercices, ce qui lui valut bien des jalousies, mais le général tint bon, ne voulant pas risquer de voir passer aux jésuites un sujet si distingué. Il professa la philos. tour à tour à Juilly et à Paris, fut ordonné prêtre en 1670, desservit quelque temps Belle-ville et Dieppe, perdit une partie de sa bibliothèque dans le bombardement de cette ville 1694, rencontra de nombreux adversaires à rause de ses opinions, ligua contre lui Bossuet et les jansénistes, se fit rayer de son corps pour avoir attribué le Pentateuque à Esdras, légua ses livres et ses mss. à la cathédrale de Rouen, et pris d'une fièvre chaude f 17 avril 1712. C'était avant tout un savant et un esprit critique. Quelles que fassent ses convictions religieuses, il ne se laissa pas influencer par elles dans ses recherches scientifiques; il entreprit de faire l'histoire des livres de la Bible en leur appliquant les mêmes principes qu'à d'autres livres, en fixant leur âge, leur authenticité, leur intégrité d'après les témoignages, en consultant les sources et les autorités. Il a fondé l'Isagogique et donné le premier un travail suivi et complet d'Introduction aux divers livres de l'A. et dn N. T. Avec une grande hardiesse, il ne s'est pas rendu compte de tout ce qui lui manqnait pour donner à son œuvre une base scientifique solide; il fait trop souvent des hypothèses, et ses conclusions s'en ressentent. Sa logique froide le rapprochait d'un cdté des jésuites, de l'autre des sociniens; il détestait la chaleur d'exposition de Bossuet et de Port-Royal; il aimait l'exégèse de Calvin, mais il repoussait la méthode allégorique édifiante des théologiens orthodoxes de son époque. Ses principaux ouvrages sont: Hist. critique du V. T. Paris 1678; Histoire crit. du texte du N. T. 1689; des Versions du N. T. 1690; des principaux Commentateurs du N. T. 1693; Nouvelles observations sur le texte et les versions du N. T. 4695, en réponse au p. Quesnel: Cérémonies et coutumes qui s'observent auj. parmi les juifs, 1674, etc. On a encore de lui beaucoup d'écrits, réponses, brochures de circonstance, presque toutes sous les pseudonymes de Moni, sieur de Simonville, Recared Sciméon, da Costa, etc.

3° Richard Simon, prêtre, du Dauphiné, auteur d'un Dictionn. de la Bible, très estimé avant celui de Calmet; 2">e éd. Lyon 1703.

SIMONIE, achat ou vente de grâces spirituelles en échange d'avantages matériels; se dit particulièrement de places, charges et bénéfices ecclésiastiques acquis ou cédés moyennant une redevance. Grégoire 1er, Léon IX, Grégoire VII ont combattu l'hérésie simoniaque, mais surtout dans le but d'enlever aux princes temporels la collation de fonctions ecclés. richement dotées. Le clergé se réservait ce privilège, et le moyen âge est rempli d'abus de ce genre, contre lesquels la conscience publique n'a cessé de protester. L'un des plus graves a été la vente des Indulgences, et le pardon des péchés à pris d'argent. Le nom de ce commerce criminel vient de Simon-le-Magicien, Act. 8,19.

SIMPERT, ou Sindbert, abbé de Murbach, év. de Ratisbonne, f 791; auteur d'une encyclique, d'une Lettre pastorale, et de Statuts du couvent de Murbach, réimpr. par Migne.

SIMPIJCE, ou Simplicius, lo pape 468-483; confirme en Orient l'autorité du coneile de Chal-cédoine, rétablit sur leurs sièges les év. d'Antioche et d'Alexandrie 478, mais réussit moins bien en Occident; il nomme cependant l'év. Zenon de Séville comme vicaire apostolique en Espagne 482, et retire à l'év. d'Arles le droit de convoquer des synodes provinciaux, deux mesures qui sont un nouvel empiétement du pouvoir papal.

2° èvêque d'Autun, 41" siècle.

SIMULTANEUM, exercice de deux cultes différents dans un même édifice. Ce droit, consenti ou imposé, date en Allemagne des traités de paix de 1555 et de 1648; il a été renouvelé en 1803, puis par le traité de Vienne de 1815, là où les confessions étant presque en nombre égal, la population était trop pauvre ou pas assez nombreuse pour justifier la construction de 2 églises. C'est surtout dans le Palatinat bavarois et en Alsace qu'il s'est longtemps maintenu. Il pouvait être décrété aussi quand le prince appartenait à un autre culte que la majorité de ses sujets. On l'entend d'ordinaire des cultes catholique et protestant, mais quelquefois des luthériens et des réformés. Enfin on dit aussi le Simultaneum en parlant de la jouissance ex œquo de certains droits, d'un cimetière commun, d'écoles pour lesquelles le maître est choisi alternativement dans l'un et dans l'autre culte, sans que l'école soit pour cela non confessionnelle. Cet usage tend à se perdre, l'Égl. catholique lui étant systématiquement hostile, quoiqu'elle l'accepte en cas de force majeure, comme elle fit à Stockholm quand son église fut brûlée el que les protestants lui offrirent le Simultaneum dans un de leurs temples.

SINA1TE lo v. Anastase 5°. — 2o Jean-le-Sinaïte, surnommé aussi Climacus, Scalarius (de l'échelle), et le Scolastique; probablement d'origine palestinienne et disciple de Grégoire de Naziance, entra à 16 ans, 540, au couvent du Sinai, où il passa plusieurs années dans la retraite et l'étude; en 560 il se retira dans une solitude au pied de la montagne, mais sans interrompre ses relations avec les moines; il enseignait quelques élèves, mais il se condamna à une année de silence absolu, pour répondre à ceux qui lui reprochaient de trop parler. Au bout de 40 ans il fut nommé abbé du couvent, mais ne garda ces fonctions que 5 ans. f au commencement du 7»® siècle. Auteur d'un écrit: L'échelle du Paradis, dans lequel il indique 30 échelons qui peuvent amener l'homme à une sorte de transfiguration et de résurrection dès ici-bas; publ. par le jésuite Matth. Raderus 1633, en espagnol 1504, 1581, en franç. 1654. Il a aussi écrit une Lettre à un berger, à l'abbé Daniel, du couvent de Raytha sur la mer Rouge, qui a laissé quelques détails sur la \ie de Jean

SINAITICUS (Codex), manuscrit duSinaï; le plus ancien mss. connu du N. T., et le plos récemment découvert. Il a été trouvé en 1859 dans la biblioth. du couvent du Sinaï par Tis-chendorf (déjà quelques fragments en 1844), et contient outre presque tout l'A. T., tout le N. T. sans lacunes, plus l'ép. de Barnabas et le Pasteur d'Herinas; 346 feuilles grand format, environ 120,000 lignes, en lettres onciales, antérieures à la stichométrie, par conséquent du 4*e siècle. Impr. 1862. C'est le 28 sept. 1859 qu'après de longues démarches ce mss. fut remis à Tischendorf par le prieur et les moines do couvent, avec autorisation du nouvel archevêque, et le 19 nov. il le présenta à Tsarskoe-Sélo à l'emp. de Russie, à qui le couvent en avait fait hommage. Le mss. appartient maintenant! la biblioth. impériale.

SINÉCURES (sine cura), bénéfices auxquels ne correspond aucune obligation, ou qui peuvent être desservis par un autre que le titulaire; ainsi en Angleterre et même en Allemagne on certain nombre de canonicats. Ils ne sont pas dans l'esprit de l'Église, mais se sont formés peu à peu par des extinctions; la fonction n'a plos sa raison d'être, mais la dotation primitive est restée et l'autorité compétente en dispose pour récompenser des services.

SINTENIS, famille allemande, du duché d'Anhalt, qui depuis un siècle a produit quelques hommes distingués: 1° Chrétien-Fréd., né 1750 à Zerbst, pasteur, auteur de romans moraux, de sermons et d'écrits apologétiques d'un genre sentimental eL un peu maniéré, Elpixén, Pisteuén, Oswald, etc. — 2° son firère Charles-Henri, né 1744 à Zerbst, recteur à Torg&n et à Zittau, auteur de Théophrén et d'un Manuel sur la morale. — 3° Jean-Chrét.-Siegmund, son fr. né 1752 à Zerbst, pasteur à Dornbourg et à Rosslau, f 1821, auteur de plusieurs romans. — 4o son fils Gui 11.-François, né 26 avril 1791 à Dornbourg, étudia à Wittenberg, inspecteur de l'école des pauvres et du séminaire pédagogique à Kôthen, nommé pasteur à Magdebourg. l\ niait publiquement l'efficacité de la prière et fut poursuivi de ce chef par l'év. Dr&seke, mais le ministre étouffa l'affaire 1840. Les pasteurs rationalistes se réunirent et formèrent à cette occasion le premier noyau des Amis des lumières. f 23 janv. 1859.

SINTRAM, moine du couvent de Saint-Gall au commencement du 10me siècle, admiré pour sa calligraphie et pour la beauté de ses mss On cite entre autres comme un chef d'œuvre son Evangelium longum. Il est le fondateur de la riche école de mss. illustrés qui a fait la réputation de l'abbaye de Saint-Gall, qu'il dota d'une calligraphie spéciale comme minuscules. On ne sait rien de sa vie.

SIRICE, ou Siriciut, pape de déc. 384 au 26 nov. 398. Il travailla au maintien de la discipline; il combattit les novatiens et les dona-tistes, et aida Théodose à réprimer les manichéens et les priscilliens. On a de lui quelques Lettres, entre autres une en faveur du célibat des prêtres. 11 avait pris parti pour Rufin contre Jérôme, ce qui avait engagé Baronius à le rayer du Martyrologe romain. Mais Benoit XIV corrigea cette erreur.

SIRMIUM, une des principales villes de la Pannonie, plus tard sa capitale, séjour aimé des empereurs; Aurélien, Probus et Gratien y naquirent; Constance y demeura; Claude II et Marc-Aurèle y moururent. Elle est connue surtout par les 4 conciles qui s'y tinrent, 351,357, 338, 359, à l'occasion des controverses ariennes et sémi-ariennes. Photin fut un de ses évéques. Auj. Mitrowitz.

SIRMOND1» Jacques, né 12 oct. 1559 à Riom, Auvergne, étudia au collège de Billom, et entra dans l'ordre des jésuites. Il enseigna à Paris les lettres et la rhétorique, se consacra 1586-1590 à l'étude des pères, dont il publia quelques ouvrages inédits, et fut appelé à Rome comme secrétaire du général Aquaviva 1590. Il profita de l'occasion pour travailler dans les bibliothèques et pour cultiver la connaissance de Bellar-min, Baronius et autres hommes distingués. De retour à Paris 1608 il se remit à ses études de prédilection, fut nommé recteur du collège de Paris 1617, confesseur de Louis XIII, 1637-1642, retourna 1645 à Rome pour l'élection d'un nouveau général, et f 7 oct. 1651 à Paris. Aimable, aussi simple que savant, il vécut en bon termes avec les protestants. Ses œuvres, qui forment 5 vol. in-fo Venise 1728, se composent en grande partie de réimpressions, opuscules, ou dissertations de circonstance: Godefroi de Vendôme, Ennodius, Flodoard, Apollinaire Sido-nius, Paschase Radbert, Avitus de Vienne, etc. — 2<> son neveu Antoine, jésuite, a aussi écrit sur la théologie; un autre neveu, Jean, a été membre de l'Académie.

SISINNIUS lo pape élu 18 janv. 708, enterré déjà le 7 févr. Il projetait de fortifier les murailles de Rome. Syrien de naissance. — 2© év. novatien de Constantinople après la mort de Marcien 395. Il avait étudié sous Maxime avec Julien, le futur apostat Homme du monde, plein d'esprit, et de mœurs irréprochables, il était très considéré. Il a écrit un livre sur la Repen-tance, contre Chrysostome, et une encyclique contre les Messaliens. — 3o patr. de Constantinople du 26 févr 426 au 24 déc. 427, nommé contre son concurrent par la volonté du peuple, homme doux, pieux et bon pour les pauvres!

— 4® aussi patr. de Constantinople, surnommé Magister, 994-997, mit fin au différend sur les 4nM noces, et publia un mandement synodal, signé de 30 métropolitains, pour défendre que deux frères épousassent deux nièces. — 5° v. Vigile.

SIXTE I«r lo Xystus, évêque de Rome, peu connu, succéda à Alexandre I«f et précéda Té-lesphore. On l'honore le 6 avril, mais on ne sait au juste en quelle année il monta* sur le trône, entre 116 et 119, ni quand il mourut, de 125 à 129; il passe pour martyr.

2o Sixte U, d'Athènes, subit le martyre sous Valérien, pape de'257 au 6 août 258. Après lui Rome fut un an sans évêque.

3o Sixte HI, 432-440, travailla avec Cyrille à la réunion des églises d'Orient; il légua 5000 marcs d'argent pour orner les églises. C'est sous lui que commença l'évangélisation de l'Irlande par Patrick. On lui attribue l'érection de Sainte-Marie-Majeure et de quelques autres églises.

4° Sixte IV, François d'Alescola de la Ro-vère, né 1414, pape de 1471 à 1484, fils d'un pêcheur, général des fr. mineurs, cardinal sous Paul III et son successeur, travailla à la réforme ecclésiastique et à la guerre contre les Turcs. Il poussa le népotisme au plus haut degré, vendit l'Église et remplit l'Italie de sang pour donner des principautés à ses neveux et à ses fils; il donna Imola et Forli à Pierre Riario son neveu, Sora et Sinigaglia à Jean de la Rovère, en nomma deux autres cardinaux, ete. Ligué avec quelques hommes de sa trempe, ecclésiastiques et laïques, il fit exécuter un meurtre dans un sanctuaire au moment de l'élévation de l'hostie. Il complota avec les Pazzi contre les Médicis 1478, prit part à la guerre qui en résulta, persécuta les Colonne et causa dans Rome la guerre civile. Il mit à l'interdit les Florentins qui refusaient de se laisser égorger. Mais un concile leva l'excommunication. Louis XI l'obligea à faire la paix. Les Vénitiens et les Milanais lui résistèrent aussi, + 12 août 1484.

5o Sixte V ou Sixte-Quint; Félix Peretti, né 1521 à Montalte, près d'Ascoli, d'abord porcher (le pâtre de Montalte), puis cordelier 1537, professeur de droit canon à Rimini 1544, et a Sienne; grand inquisiteur à Venise, où il se mit mal avec le Sénat; consulteur de la congrégation, procureur général de son ordre; théologien du légat Buoncompagno (Grégoire XUI) en Espagne et consulteur du saint office, vicaire général des cordeliers 1558, év. de San-Agata de Goti, cardinal 1568, archev. de Fer-mo, il réussit 24 avril 1585 à se faire nommer pape en feignant de grandes infirmités et une faiblesse extrême; on pensait qu'il n'en avait plus pour longtemps. A peine nommé il jeta ses béquilles. Homme de ressources et d'apti -tildes variées, il a rendu de grands services à son Église par ses constants efforts pour en augmenter le lustre et le pouvoir. Il surpassa de beaucoup tous ses prédécesseurs par sa magnificence, son courage, ses vertus et ses vices. Il sut manœuvrer avec prudence au milieu des luttes religieuses qui avaient éclaté entre les catholiques eux-mêmes; il imposa silence à tous les partis et ne se prononça pour aucun. Il déploya de vrais talents comme administrateur, purgea l'État ecclésiastique des vagabonds et des brigands qui l'infestaient, embellit Rome de monuments magnifiques et utiles, réorganisa l'administration publique en la répartissant entre 15 Congrégations, ou Comités, encouragea la Ligne, prit parti pour Henri III, et excom-mnnia Henri IV, quoique dans son cœur il lui rendit justice. Il laissa 5 millions d'écus d'or. On a de lui des Sermons, une Théologie mystique, une édition d'Ambroise et quelques autres ouvrages. Au moment de sa mort, 24 août 1390, un orage épouvantable sévit sur Rome; le peuple, qui ne l'aimait pas, crut que le diable était venu prendre son âme; il se précipita vers le Capitole pour en arracher la statue que le Sénat lui avait fait ériger.

6° Sixte, François, de Sienne (Senetuis), né 1520 de parents juifs, se fit chrétien et franciscain, et se distingua en Italie comme prédicateur. Deux fois accusé d'hérésie, il fut la seconde fois condamné à être brûlé; mais à la requête du cardinal Ghisleri (Pie Y), il put se rétracter, fut gracié et se fit dominicain. Il se mit déBlors à étudier le grec, l'hébreu, l'histoire et la philosophie, et fut employé par le cardinal pour la conversion d'une société de juifs à Crémone, f 1569. Son principal ouvrage est la Bibliotheca Sancta, d'après les principaux auteurs catholiques, Venise 1566, qui a également été appréciée par les théol. protestants. C'est, en 8 livres, une espèce d'introduction générale aux livres de la Bible, apologétique, critique, herméneutique, etc.

SLAVES (Versions) de la Bible. Elles sont fort nombreuses. La plus ancienne est celle de Cyrille, q. v., dont le plus vieux mss. connu date de 1056; trad. en russe 988, Ire édition 1581, revisée 1751 par ordre de Pierre-leGrand. Une version polonaise fut faite 1390 pour Hed-wig, femme de Wladeslas IV. Le mouvement hussite amena 1410 la trad. de la Bible en Bohême, version qui fut remplacée par celle des Fr. moraves imprimée 1597 à Kralitz. Version catholique à Prague 1769. En Pologne chaque dénomination religieuse voulut avoir sa Bible; les unitaires en 1563, souvent réimpr.; les luthériens 1551, les réformés 1632. Il y en a plusieurs encore en russe: l'officielle, faite par l'archimandrite Philarète sous les auspices de l'Académie 1819; ainsi que des Bibles vendes 1670, lettes 1689, lithuaniennes 1590, croates 1553, etc.

SLEIDAN, Jean, de son vrai nom Philipp-sohn, fils de Philippe, né 4506 à Scfaleiden, électoral de Cologne, étudia à Liège chez les Fr. de la vie commune, à Cologne où il cultiva les lettres, puis avec Sturm à Louvain; il vint comnw précepteur à Paris et à Orléans, où il fit son droit et où il prit sa licence 1535. En 1537 il s'attacha au cardinal Du Bellay, qui le mit au service de François I". En 1540 il accompagne comme interprète une ambassade à Haguenau. C'est vers cette époque qu'il doit avoir embrassé le protestantisme, car en 1541 il est au service de Philippe de Hesse, qui l'emploie à diverses négociations. En 1542 il quitte la France à cause de la rigueur des édits contre les protestants, et se fixe à Strasbourg, où il se marie. Il fut chargé de très nombreuses missions, à Smalcalde, en Angleterre, en France, en Italie, même auprès du conc. de Trente, où il ne fut pas reçu. Il eut avee la plupart des hommes de la Réforme une correspondance très active, f 31 oct. 1556 de la peste. C'est à Strasbourg qu'il a composé la plupart de ses ouvrages historiques, qui lui ont valu comme style, élégance, impartialité, la réputation d'un Tite-Live et d'un Polybe. Le principal est son Hist. de la Réform. ou État de la religion et de la chose publique, sous Charles-Quint, en 26 livres, de 1517 jusqu'à la fin de sa vie, écrit à la demande de Philippe de Hesse; trad. en fr. par Teissier 1710 et par Hornot, 1757; réimpr. 30 fois et trad. en plusieurs autres langues. Violemment attaqué par Maimbourg, cet important ouvrage a été vivement défendu par Secken-dorf. On a aussi de lui une Hist. des 4 grandes monarchies 1557; deux Lettres (anonymes), un Discours à l'emp. et aux princes de l'empire, qui firent sensation 1542, et diverses trad. de Platon (la République), Froissard, domines, etc.

SMALCALDE, Schmalkalden, petite ville murée de la Hesse-Électorale, connue par 1° la Ligue qui s'y forma 1531 entre les princes protestants contre les empiétements de Charles-Quint; elle fut presque dissoute à Muhlbeif 1547, mais prit bientôt sa revanche et aboutit au traité de Passau 1552 et à la paix d'Augs» bourg 1555; v. Ligue. — 2o les Articles de S., un des livres symboliques de l'Église luthérienne. Ils furent composés par Luther, à la demande de l'électeur de Saxe, pour être présentés au conc. projeté de Mantoue 1537, qui n'eut pas lieu et qui n'offrait aux évangéliques aucune garantie. Ces articles ne sont que la reproduction des doctrines affirmées dans la Conf. d'Augsbourg, mais avec un caractère pins polé» mique. Ils ne ftirent pas même discutés à Smalcalde, l'occasion qui leur avait donné naissance n'existant plus. Luther les fit imprimer en 1538 avec une préface, et ce n'est qu'en 1558 qu'ils figurèrent pour la i™ fois avec un caractère officiel, que rien n'autorisait, dans le recueil liturgique de Saxe-Weimar.

SMARAGDE 1° d'origine inconnue, est en 805 abbé de Saint-Mihiel, diocèse de Verdun, où il s'occupe avec soin des écoles et de l'enseignement de la grammaire. En 809 il est employé à diverses négociations avec Rome. En 810 il discute au nom de Charlemagne la question de la procession du Saint-Esprit. On a de lui une Gramm. latine, une Via regia, traité de inorale à l'usage des prêtres, en 32 chap.; le Diadème des moines, purement religieux, et quelques autres ouvrages. Il prit part en 817 au conc. d'Aix-la-Chapelle et s'associa à toutes les mesures proposées pour la réforme des ordres monastiques, f 819. — 2° Disciple et ami de Benoît d'Aniane, dont il a écrit la vie; son vrai nom était Ardon. 783-843. — 3° Abbé de Lu-nebourg, vers 1000; c'est à lui que quelques-uns attribuent la Gramm. latine de 1°.

SMITH lo John Pye, né 25 mai 1774 à Shef-field, fils d'un libraire, étudia la philologie et la théol. à l'école indépendante de Rotherham, York; nommé en 1800 prof, de langues anciennes, et en 1805 de théol. à l'académie libre de Homerton-London, puis principal et pasteur de l'Égl. indépendante. Après un ministère béni de 51 ans, il f 5 fevr. 1851. Riche et belle nature, il s'était donné à Dieu tout entier; son érudition était immense; sa prédication était travaillée, nourrie, un peu froide, ce qui n'empêchait pas ses paroissiens de l'appeler le béni docteur. Il est le premier qui ait entrepris de faire connaître à l'Angleterre la science théol. allemande. Son principal ouvrage est dirigé contre les unitaires; il a pour titre: Le témoignage rendu par l'Écriture au Messie; c'est un vrai traité d'apologétique et de dogmatique. Dans le second ouvrage il étudie les rapports des récits de Moïse avec les résultats connus de la géologie, et pense résoudre quelques difficultés en admettant, soit pour la création, soit pour le déluge, que Moïse n'a voulu donner qu'une histoire partielle, en quelque sorte locale, l'hist. du monde connu et non celle de la terre entière.

2o Joë, né 23 déc. 1805, fils d'un petit marchand de Palmyre, dans l'État de New-York, lut très négligé dans son éducation, n'avait de goût pour aucune carrière, était mal noté dans l'opinion et avait reçu le surnom de déterreur de trésors. Sous l'influence d'un réveil américain 1827, son imagination prit un caractère religieux sans abandonner ses anciens errements. En 1829 il prétendit que Jean-Baptiste leur était apparu, à lui et à son ami Olivier Cowdrv, qu'il les avait consacrés prêtres, et qu'il leur avait ordonné de se baptiser l'un l'autre. Le 30 juin 1830 il organisa à LaFayette, près de New-York, sa nouvelle église, composée de 30 membres, mais il dut fùir, et après plusieurs années d'une vie pleine d'aventures, ayant voulu introduire la polygamie dans sa cité, il rencontra une violente opposition; le peuple se souleva; Jo'é fut jeté en prison, et il y fut mis à mort, ainsi que son frère Hiram, 27 juin 1844. v. Mormons.

SOCIN, Sociniens. lo Lelio Socini, ou Sozzini, né 1525 à Sienne, d'une célèbre famille de jurisconsultes. étudia d'abord le droit. Il entra en relation à Venise en 1546 avec des chrétiens évangéliques, puis en 1547 dans les Grisons avec Camille Renato. anabaptiste et unitaire; visita Genève, la France, l'Angleterre, la Belgique, Zurich où il fut bien reçu par Bullinger, se rendit en 1550 à Wittenberg pour y voir Mélanchthon, fit un voyage en Pologne, revint à Genève, et après de nouveaux voyages en Pologne et en Italie, se fixa à Zurich, où il f 1562, à 37 ans. Toujours préoccupé de questions religieuses, il eut des rapports avec presque tous les réformateurs. Il eut à se défendre contre Calvin qui lui reprochait ses vues sur le baptême et la Trinité, et à se justifier vis-à-vis de Bullinger, qui lui demanda un exposé de sa foi. Rendu prudent par l'opposition qu'il rencontrait, il se tint sur une grande réserve, et légua ses pensées et ses mss. à son neveu Fauste, qui avait 12 ans de moins que lui. On connaît de lui surtout un Dialogue entre Calvin et le Vatican, un traité contre la peine de mort appliquée aux hérétiques, et une Lettre sur les sacrements, adressée aux Zuricois et aux Genevois.

2o Son neveu Fauste, né 5 déc. 1539 à Sienne, fit aussi d'abord son droit, et, comme son oncle, se jeta dans l'étude des questions religieuses; il rompit avec le catholicisme. Persécuté par sa famille il partit, 1559, vint à Lyon, puis à Zurich, où il recueillit l'héritage littéraire de son oncle. Il l'étudia sérieusement, se l'assimila en partie, publia pour son compte, mais anonyme, une Explication du commencement de Jean I, se rendit à la cour de Florence où il remplit divers emplois jusqu'en 1574, mais finit par s'arracher à ses séductions, pour aller à Bâle reprendre ses études 1575-1578. Il y publia quelques écrits anonymes. C'est alors que Blan-drata l'appela à son aide en Transylvanie, pour réfuter les exagérations de Francis Davidis qui soutenait que Jésus était né comme un autre homme, et que malgré sa supériorité il n'avait aucun titre à être ni invoqué, ni adoré. Socin prit la chose très à cœur, mais ne réussit pas à

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persuader Davidis qui bientôt, par ordre du prince, fut jeté en prison et y mourut. On a insinué que Socin avait provoqué cette cruelle mesure, mais la chose n'est pas prouvée: s'il l'a fait, ce sera par la crainte qu'il aura eue de voir les principes et l'autorité de Davidis l'emporter sur les siens comme plus logiques et plus conséquents, ce qui ne pouvait pas manquer d'arriver, ce qui est arrivé en effet. Quoi qu'il en soit, la peste ayant éclaté 1579, il s'enfuit à Cracovie, où il essaya de se faire recevoir dans l'église unitaire, mais il fut refusé à cause de quelques divergences de vues, notamment parce qu'il ne voulut pas se faire rebaptiser, estimant que le baptême des enfants, dont il n'était pas partisan, était cependant suffisant. Cela ne l'empêcha pas d'être par ses paroles et par ses écrits le plus solide appui de cette église et son meilleur représentant. En 1583 il quitta Cracovie par crainte de Bathory, et se retira dans un village voisin, Pawlicowice, où il épousa la fille de Morsztyn; il perdit en même temps toute sa fortune, ses biens ayant été confisqués en Italie. De 1587 à 1598 il habita de nouveau Cracovie. Maltraité par des soldats en 1594, en 1598 par des étudiants qui le traînèrent malade et presque nu par les rues après lavoir battu et lui avoir volé ses mss., il alla s'établir dans un autre village, Luklawice, où il f 3 mars 1604. D'un extérieur agréable et d'un noble caractère, il avait plus de finesse que de profondeur, et lui-même n'entrevit pas toutes les conséquences de ses principes; aussi fut-il bientôt dépassé par ceux qui se disaient ses disciples. Le soci-nianisme datait déjà de loin en Pologne; il y avait été apporté par des Italiens, qui n'avaient pas trouvé en Suisse un terrain favorable, et qui s'étaient joints à l'Égl. réformée en dissimulant leurs opinions. Peu à peu les divergences s'étaient accentuées, et au synode de Cracovie 1562 Sarnicki avait obtenu la destitution du pasteur Pauli de Wola. Dès lors il y eut schisme el deux synodes concurrents. La diète de 1664 interdit les doctrines nouvelles. Les unitaires eux-mêmes se divisèrent en plusieurs sectes, les uns rejetant le baptême des enfants, les autres niant la préexistence de Christ, etc. Quand Socin arriva, il se trouva être l'homme le plus distingué du parti, et il exerça une grande influence, surtout sur la noblesse. L'église soci-nienne eut des (ivres, des écoles, des collèges, un gymnase à Racovie 1602. Mais cela ne dura pas longtemps. D'abord les jésuites réussirent à s'établir dans le pays et ils y fomentèrent les haines confessionnelles. L'égl. de Lublin fut détruite dans un mouvement populaire, et par des représailles aussi puériles qu'odieuses, quelques étudiants abattirent un crucifix, 1627, ce qui fournit au sénat un prétexte pour déclarer que les sociniens n'appartenaient pas aux cuit» dissidents reconnus; leur école fut fermée, leur église et leur imprimerie détruites, 1638. Les persécutions continuèrent sous Jean Casimir 1648, et redoublèrent en 1661. Les malheureux durent s'exiler et laissèrent les jésuites maitres du royaume; ils émigrèrent, en Prusse, en Transylvanie, en Hollande où ils se confondirent bientôt avec les arminiens, ailleurs encore, mais ne subsistèrent longtemps nulle part s'unissant presque partout avec des congrégations analogues, sous le nom général d'Unitaires. Socin repoussait toute idée de mystère dans la révélation et posait en principe que les doctrines devaient être jugées à la lumière de la raison. Il admettait dans le sens le plus strict du mot l'unité de Dieu; le monde et le Saint-Esprit n'en étaient que des attributs. Jésus-Christ, homme comme les autres, mais né par l'opération du Saint-Esprit, avait été particulièrement honoré de Dieu, qui l'avait pris à lui dans les régions célestes, au commencement de son ministère, pour lui révéler les vérités qu'il était chargé d'annoncer au monde. Sur le pèche et la grâce Socin professait les idées de Pélage. Il rejetait la doctrine de la rédemption, comme contraire à l'idée de Dieu; la mort de Christ n'était que le sceau de sa doctrine et un modèle donné aux hommes. Les sacrements n'ont qu'une valeur symbolique; le baptême ne doit être donné qu'aux juifs et aux païens, les enfante des chrétiens appartenant déjà à l'Église par le fait de leur naissance; comme vieille coutume on peut cependant conserver cette cérémonie, etc. Le catéchisme de Racovie q. v. offre le résumé le plus authentique des doctrines de cette secte, mais il n'a jamais été considéré comme faisant autorité, et sur plusieurs point* importants les sociniens ont varié.

SOCRATE, père de l'Église, né vers 380 à Constantinople, fut d'abord légiste et notaire ou avoué. Il continua l'hist. ecclés. d'Eusèbe. de 306 à 439, en 7 livres, et dut recommencer en partie son travail, quand il eut constaté que Rufin laissait à désirer au point de vue de l'exactitude. Le caractère très objectif de son travail, notamment quand il parle du novatia-nisme, l'a fait soupçonner par Nicéphore Cal-liste d'être lui-même novatien.

SOEURS 1° v. Charité.— 2<> Congrég. de fem mes, placée sous le patronage de Borromèe, fondée 1652 à l'hôpital Saint-Charles à Nancy par Épiphanes-Louis, abbé d'Estival et général des prémontrés; règle particulière et vœux i vie. — 3° Sœurs de la miséricorde à Aix, fondées 1633 par le p. Y van et Madeleine Martin, confirmées 1639 par Urbain VIII; costume pis-foncé, règle de Saint-Augustin; pour l'éducation de jeunes filles paiftres.

SOHAR, célèbre livre de la littérature cabalistique juive, attribué à Simon ben Jochaï, à cause de 3 fragments qui semblent mis dans sa bouche. Mais il renferme des allusions à la Ge-mara, au mahométisme, au docteur Gordon qui professait à Montpellier vers 1280, et à la ponctuation hébraïque, autant de choses qui le placent au 13®* siècle. C'est une espèce de Comment. sur le Pentateuque, mais avec une foule de hors d'oeuvre et de finesses casuistiques. On peut croire qu'il a été composé de pièces et de morceaux, à diverses époques successives à partir du 8me siècle.

SOISSONS, Augusta Suessionum, vieille ville de Picardie, connue par la victoire de Clovis sur Syagrius 486, et par celle de Ch. Martel sur Chilpéric 749. Depuis la mort de Clovis elle devint la capitale d'un des 4 royaumes francs, et porta le nom de comté. Au 10®* siècle elle passa à la maison de Savoie-Carignan, et en 1734 à la France. L'évéché date du 3®e siècle; ses titulaires étaient pairs de France, ducs de Laon, et avaient le droit de porter la fiole d'huile sainte au couronnement des rois. Il s'y est tenu plusieurs conciles, dont quelques-uns importants: un en 744 sous la direction de Boniface, qui décréta 10 canons de réformation, interdisant aux ecclésiastiques la chasse et le mariage, aux laïques certaines fonctions religieuses; un en 852, auquel assiste Ch.-le-Chauve, et qui se prononce pour Hincmar contre Ebbon, annulant toutes les consécrations faites par ce dernier; deux autres en 861 et 862, puis un en 866, qui révoque les annulations prononcées en 852, recommandant au pape ceux qui avaient été indûment consacrés. En 941 les év. déposent Artaud de Reims et nomment Hugo à sa place. En 1092 Roscelin accusé de trithéisme doit se rétracter; en 1121 Abélard est condamné sans être entendu. Enfin en 1201 Innocent III convoque un synode en faveur d'Ingelburge, femme divorcée de Philippe-Auguste, pour désavouer les évêques de France qui avaient sanctionné le divorce; les débats n'aboutirent pas, mais le roi finit par se ranger à la volonté du pape.

SOLANGE, sainte peu connue, qui vivait dans le Berry vers la fin du 9®« siècle, et dont Bourges possède encore un fragment de mâchoire. Bergère elle paissait ses brebis quand Rainulfe, le fils du seigneur de l'endroit, lui apparut et menaça de lui faire violence. Elle résista, Rainulfe lui trancha la tête; elle la ramassa et la porta à quelque distance, où on lui éleva une chapelle, mai 878. La chose fit du bruit, les fidèles se partagèrent les fragments de la jeune fille, dont plusieurs firent des miracles. L'archev. de Bourges a fait célébrer en 1878 le millénaire de cet événement.

SOLEURE, ville et canton suisse, reçu le 22

déc. 1481 dans la Confédération, en même temps que Fribourg, malgré les efforts de Berne et de Zurich, mais grâce à l'intervention de Nicolas de Flue. Il était en majorité catholique, mais comptait vers 1517 un assez grand nombre de protestants pour que des églises dussent être affectées au culte évangélique. Avec les guerres religieuses le catholicisme finit cependant par l'emporter, et auj. les protestants ne forment plus que le sixième de la population. Soleure pense posséder les reliques de deux martyrs de la légion thébaine, Ours et Victor, et celles de Véréna. Longtemps siège de l'évêché de Bâle-Soleure, dont M. Lâchât est depuis quelques années le titulaire militant, Soleure possédait aussi un séminaire catholique entretenu par les cantons ressortissant à l'évêché. L'attitude par trop ultramontaine du clergé et la découverte faite des manuels et du genre de morale qu'on enseignait dans cet établissement, achevèrent de troubler les rapports de l'Église avec l'État; le séminaire fut fermé et l'évêque exilé. Une Égl. catholique libérale s'est formée et se compose de 5 paroisses officielles, qui relèvent de l'év. Herzog.

SOLITAIRES, un des noms que se donnaient les manichéens.

SOLITARIUS, Philippe, moine de Constantinople au lime siècle, auteur d'un Miroir (Dioptra) de la vie chrétienne, livre ascétique achevé en 1095, où l'âme et le corps discutent en vers l'espace de 5 livres. Il y en a 3 mss. à Vienne.

SOMASQUES, ou Clercs réguliers de saint Maïeul, congrégation fondée 1531 ou 1532, par un riche vénitien, Jérôme Mani, ou Émilien. Né 1481 Mani, après avoir fait de bonnes études, servit son pays avec distinction dans la guerre contre la Ligue de Cambrai, et défendit courageusement la place de Castelnuovo, près Tré-vise. Fait prisonnier des Allemands, il eut le temps de réfléchir et résolut de donner à sa vie une direction plus sérieuse. Délivré miraculeusement de son cachot, comme saint Pierre, mais par la sainte Vierge, il revint dans son pays, fut élu podestat, et se distingua par sa piété et sa charité pour les pauvres, surtout pendant la famine de 1523. Guéri d'une grave maladie contractée dans l'exercice de ses fonctions, il donna sa démission et se consacra à l'éducation des orphelins et au relèvement des femmes tombées. Il fonda pour cela quelques maisons à Milan, Vérone, Bergame et Brescia, et s'adjoignit quelques collaborateurs qu'il organisa en congrégation. C'èst à Somasque, entre Bergame et Brescia qu'il eut sa maison principale; il f 8 fèvr. 1537. C'est de cette ville que l'ordre prit son nom; l'autre nom, celui de Ma-joliles, lui vint de l'égl. de saint Maïeul, de Pa-vie, que Borromée mit à sa disposition. L'ordre fut reconnu par Paul III, Pie IV et Clément VIII, mais avec quelques modifications dans les statuts primitifs. Ils eurent la direction de plusieurs collèges en Italie. Le plus important fut le collège Clémentin à Rome.

SOiNNITES 1° ou Sunnites; v. Mahomet. — 2o ou Sonnistes; parti mennonite, v. Lammistes.

SOPHIE. Il y a plusieurs saintes de ce nom, mais aucune bien authentique. D'après une tradition latine, une Sophie (sagesse) aurait eu 3 filles, Pistis, Elpis, Agapè, la foi, l'espérance et la charité, qui furent martyrisées vers 120 à Rome (en Nicomédie, d'après les grecs); trempées dans un bain bouillant de poix et de soufre, elles n'en moururent pas, et il fallut les mettre à mort par l'épée. La mère les ensevelit, et fut à son tour martyrisée 3 jours après. — 2o Martyre milanaise, mise à mort avec son amie Irène. — 3° Jeune fille de Fermo, États de l'Église, mise k mort à Minden en Westpha-lie.— 4« Religieuse de Thrace, veuve d'un sénateur de Constantinople, qui après la mort de son mari mena avec ses enfants une vie exemplaire, etc. Le plus étrange c'est qu'on ne connaît de toutes ces femmes que le mois et le jour de leur martyre; niais ni l'année, ni le lieu, ni les circonstances, ni rien de leur vie; tout semble aboutir aux éphémérides d'un calendrier. — L'église de Sainte-Sophie à Constantinople, momentanément transformée en mosquée, a été construite sur le modèle de celle de Saint-Vitale, de Ravenne, par Juslinien I«r, sur l'emplacement de celle que Constantin en 325 avait érigée en l'honneur de la sagesse divine (sophia), et qui 2 fois, en 404 et 532, avait été détruite par le feu. On assure que 10,000 hommes y travaillèrent sous les ordres d'Anthêmes de Tralles qui en avait formé le plan, et d'Isidore de Milet. Elle subit naturellement avec le temps de nombreuses réparations qui en ont altéré le caractère primitif: l'extérieur en est un peu lourd, mais l'intérieur est de toute magnificence. On y montre entre autres une colonne qui sue, et qui a le don de guérir les maladies; et une pierre lumineuse.

SOPHRONIUS, lo Grec, ami de saint Jérôme, auteur de quelques ouvrages sur Bethléhem, et la ruine de Serapis, a traduit en un grec élégant les Psaumes, les Prophètes, la Vie d'Hila-rion, le traité sur la Virginité, et quelques autres écrits de Jérôme. On lui a attribué aussi (Érasme) la traduction grecque des Hommes célèbres de Jérôme, mais à tort. — 2o S. de Jérusalem, né k Damas, étudia la philos., ce qui lui valut le surnom de Sophiste, quitta la Syrie lors des persécutions, et se rendit k Alexandrie où il fut très bien accueilli par le patr. Éléémosynaire. Il se retira avec son ami Mos-chus dans la Haute-Égypte, dont ils visitèrent les couvents. A leur retour, devant les menaces des Perses, ils durent fuir de nouveau, emmenant avec eux le patr. qui f en Chypre 15 nov. 616, et ils arrivèrent à Rome. Moschus étant mort, en exprimant le désir d'être enterré, soit au couvent de Sinaï, soit k Jérusalem, Sophr. dut opter pour ce dernier endroit, les Arabes ayant fait opposition au premier. C'était l'époque des discussions monophysites; Sophr. devenu patr. de Jérusalem 634 se prononça franchement pour les 2 natures, contre les tergiversations de Cyrus d'Alexandrie, de Serge de Constantinople, et d'Honorius de Rome. v. Monothélisme. Jérusalem fut prise par les Sarrasins 636; Sophronius f de douleur peu de temps après.

SORBON, lo petit village de l'ancienne Champagne, auj. Ardennes, k 3 kilom. de Ré-thel, patrie de 2o Robert de Sorbon, ou Sorbonne, né 1201, docteur en théol., chanoine de Cambrai, puis de Paris, chapelain (mais non confesseur) de saint Louis, distingué comme prédicateur. 11 fonda en 1252 rétablissement qui prit son nom, v. Sorbonne, et il en fut le proviseur. f 1274. Outre les Statuts de sa maison, il a laissé quelques ouvrages sur la Conscience, la Confession, le Chemin du Paradis, etc.

SORBONNE, célèbre collège de Paris, faculté de théol., distincte de l'Université, mais ayant de nombreux rapports avec elle. Fondé par Robert de Sorbon q. v., c^t établissement ne fut dans l'origine qu'une maison d'éducation k l'usage des ecclésiastiques, une société de prêtres séculiers, vivant en commun, et suffisamment dotés pour n'avoir à s'inquiéter de rien et pour pouvoir se consacrer entièrement k l'étude et à l'enseignement gratuit de la théologie. La munificence royale donna à cet Hospice des étudiants pauvres les bâtiments de la couronne situés rue Coupe-Gorge, près du Palais des Thermes. Les étudiants étaient partages en 4 nations. La maison était régie par un proviseur, qui devait être élu par l'archidiacre de Paris, le chancelier, le recteur de l'Université, les doyens des 4 facultés, les prof, de théol. et les représentants des 4 nations. Les élèves se divisaient en réguliers, ceux de la Société, et assistants, ceux de l'hospitalité. Clément IV reconnut cette école en 1268, mais le nom de Collegium Sorbonicum ne lui fut donné qu'au siècle suivant. Robert avait en outre fondé aussi le collège de Calvi, plus connu sous le nom de petite Sorbonne; espèce d'école préparatoire aux études théologiques, et qui compta jusqu'à 500 élèves. La Sorbonne, par la célébrité de ses professeurs et par l'affluence de ses élèves, acquit bientôt un renom européen. Elle finit par être reconnue comme faculté et ses locaux furent successivement agrandis. Richelieu, qui avait été son élève, fit restaurer ou plutôt reconstruire ses bâtiments, à peu près sur le même emplacement que les anciens, et il y ajouta une église magnifique, dans laquelle se voit encore son mausolée, chef-d'œuvre de Girardon. Frappée, comme tout ce qui était ordre religieux, par la révolution de 1789, la Sorbonne fut relevée en 1808 par Napoléon, qui l'annexa à l'Université comme faculté de théol. et qui lai adjoignit la faculté des lettres et des sciences, avec de grands privilèges. Nul ne pouvait aspirer aux dignités ecclésiastiques, s'il n'y avait pas reçu son diplôme de docteur. Mais cet éclat dura peu. L'obligation de souscrire aux 4 articles des libertés gallicanes éloigna beaucoup d'élèves, et le courant s'établit du côté de Saint-Sulpice. Ce ne sont pas les règlements, ce sont les hommes qui avaient fait le succès de la Sorbonne au moyen âge, et quand les Guill. de Saint-Amour, les Eudes de Douai, Laurent l'Anglais groupaient autour d'eux tant d'élèves et tant de maîtres distingués, on comprend qu'ils soient devenus une puissance, qu'ils aient formé en fait une sorte de corporation, et que le grade de docteur en théol. délivré par eux ait été plus considéré que tout autre à cette époque. Dans le sentiment de son indépendance la S. a dès l'origine défendu la doctrine des premiers conciles et des pères et les traditions de l'Église gallicane, et elle est intervenue dans les débats contemporains avec un esprit droit et clairvoyant. Elle a lutté contre les ordres mendiants, supprimé la féte des Fous, favorisé l'imprimerie, fait venir des presses et des ouvriers, imprimé elle-même, 1470; elle a combattu l'Inquisition et les procédés de Rome pour se procurer de l'argent; elle s'est prononcée en faveur des conciles réformateurs et du gallicanisme; elle s'est opposée aux jésuites et à la bulle Unigenitus. Mais d'un autre côté elle s'est montrée aveuglément hostile à la Réforme, et a condamné non seulement Luther et ses hérésies, mais encore Érasme et ses Colloques, et même un de ses membres, Benoît, à cause d'une Bible annotéç qui cependant n'avait rien d'anti-catholique. C est dans son sein que s'est organisée la Ligue; elle a permis l'assassinat d'Henri III, condamné Henri IV, persécuté le cartésianisme et voté la peine de mort contre les hérétiques. Au fur et à mesure qu'elle se jetait dans rultramontanisme l'opinion publique l'abandonnait; Voltaire l'a bafouée, la Révolution Ta balayée. Ce n'est plus auj. qu'un établissement comme un autre, siège de l'Acad. universitaire, où se donnent les cours de la faculté de théologie.

SORCIERS, Sorcellerie. Quoi qu'il en soit des rapports possibles de l'humanité avec le inonde des esprits, et de l'empire que certains êtres peuvent exercer sur d'autres au moyen de forces occultes et mystérieuses, il est de fait que dans tous les temps il y a eu des hommes, et surtout des femmes, qui se sont donné, ou qui ont passé pour posséder des pouvoirs surnaturels, dont ils se servaient généralement pour faire le mal et pour tourmenter leurs semblables. Leur seul regard suffisait pour jeter un sort, pour fixer une destinée, pour rendre un enfant malade, pour ensorceler toute une éta-ble, un champ, une vigne; ils portaient malheur à qui ils voulaient. On a toujours compté plus de sorcières que de sorciers; elles étaient habituellement laides, vieilles et pauvres. Le préjugé venait soit de la crainte qu'elles inspiraient à l'enfant, soit de l'espèce de répugnance qu'elles inspiraient à tous par une humeur souvent aigrie à la suite du manque d'égards dont elles étaient les victimes. Les vues théologiques du moyen âge sur le diable et les mauvais esprits, incubes, succubes et autres, donnèrent un corps à la superstition et semblèrent la justifier. Au lieu de soigner son bétail, ou son enfant, ce qui aurait exigé un peu de peine, on trouvait plus facile et plus commode d'imputer les accidents à la malveillance d'un mauvais œil, et l'on se vengeait sur des innocents de malheurs qui ne devaient être attribués qu'à l'incurie, à la paresse ou à la malpropreté. Et comme l'A. T. Deut. 18, 10. semble admettre l'existence de vrais sorciers, enchanteurs et magiciens, en rattachant leurs pouvoirs à des esprits de python, en en faisant par conséquent des actes d'idolâtrie, vestiges du culte des faux dieux, l'Église crut devoir attirer à elle toutes les causes de sorcellerie, d'autant plus que ceux que l'on soupçonnait d'être sorciers avaient un genre de vie et des mœurs qui ne brillaient pas par une orthodoxie trop sévère. L'Inquisition se chargea donc de cette spécialité dès ses débuts (Directorium inquisitorum, par Nie. Eymeric). Une bulle d'Innocent VIII, Summis desiderantes affeclibus, 4 déc. 1484, ratifia cette prétention, et en 1487 Sprenger et Institor rédigèrent leur Maliens, Marteau des sorcières. Plusieurs législations civiles et criminelles, entre autres celle de Saxe 1572, consacrèrent cette façon d'agir, en y ajoutant le droit d'employer la torture pour obtenir l'aveu des prévenus. Des milliers d'individus, même de petits enfants, furent brûlés dans la seule Allemagne, comme convaincus de sorcellerie. La première protestation officielle vint d'un protestant Jean de Weier, médecin du duc Guill. de Clèves, qui publia un livre sur le Prestige des démons, 1563. Puis vinrent Gabriel Naudé, et les jésuites Tanner et Frédéric de Spee: Cautio criminalis, ou Des procès contre les sorciers, 1634; Balthasar Becker, pasteur à Amsterdam: Le Monde ensorcelé, 1691; Thomasins, Thèses sur le crime de magie, 1701, et d'antres encore, qui donnèrent le dernier coup à l'impie et cruelle législation qui impo* sait aux magistrats le devoir de torturer et de condamner des gens qu'ils ne regardaient pas comme coupables. Les dernières sorcières brûlés furent, en 1749 la supérieure du couvent d Unterzell, en 1750 une femme de Quedlin-bourg, en 1783 une jeune fille de Glaris. Jeanne d'Arc avait aussi été brûlée comme sorcière, ainsi qu'Urbain Grandier. Notre siècle ne permettrait plus de pareilles énormités; malheureusement il y a encore des gens qui vivent en dehors du siècle et dont l'éducation se fait dans l'esprit des temps passés. L'hystérie n'a pas dit son dernier mot, le fanatisme et la superstition non plus. v. Michelet.

SORETH, François, né en Normandie vers 1420, carme élevé au généralat en 1451; visita Cologne, Bruxelles, Rome, essayant partout de réformer l'ordre et de le ramener à son esprit primitif. Mais il rencontra de nombreuses résistances et finit par être emprisonné avec un de ses amis, 1471. Mort à Angers, déclaré bienheureux par l'ordre; des miracles se sont faits sur son tombeau.

SORTS, sortilèges, v. Sorciers.

SOTER, 12®e évêque de Rome, 166 à 174. On croit qu'il est né en Campanie, et qu'il a écrit aux Corinthiens une lettre que ceux-ci lisaient dans le culte public; peut-être aussi un traité contre le montanisme. Il se distinguait par sa bienfaisance.

SOTERIS, jeune tille noble, torturée pour sa foi, puis décapitée sous Dioctétien, peu après l'an 300. La tradition a fixé le 10 février pour cet événement.

SOTO lo Francisque-Dominique (de), né 1494 à Ségovie, fils d'un jardinier, brûlait du désir de s'instruire, mais n'en ayant pas le moyen il prit d'abord une place de sacristain au village d'Ochando, et employa si bien son temps, quoique sans maitre, qu'il finit par pouvoir se rendre à Alcala ob il étudia sous Villa-nova, puis à Paris avec son ami Saavedra. En 1520, après avoir achevé sa philos, et sa théol., il fut nommé prof, de philos, à Alcala, et se posa en adversaire décidé du nominalisme. Il écrivit plusieurs ouvrages: sur Aristote, la dialectique, la physique; puis tout à coup, en 1524, il abandonna sa carrière, se fit moine, et entra chez les bénédictins de Burgos, où il prit le nom de Dominique; en 1532 il fut nommé prof, de scolastique à Salamanque. En 1545 il fut délégué par Charles-Quint au conc. de Trente, où il exerça une certaine influence, et défendit les doctrines du péché et de la gr&ce dans un esprit de largeur et de foi, qui se retrouve dans 2 écrits qu'il publia sur ce sujet. Il quitta le conc. en 1547, lors de sa translation à Bologne, fut nommé confesseur de Ch.-Quint, mais le quitta en 1549, refusa l'archev. de Ségovie, accepta pour 2 ans le priorat du couvent de Salamanque, reprit ses fonctions de professeur, et f 15 nov. 1560. Consulté dans le différend soulevé entre Las Casas et Sepulveda, il se prononça pour le premier et contre le commerce des noirs. On a encore de lui quelques ouvrages de théologie, Comment, sur les Romains, etc.

2* Pierre (de), de famille noble, né 1502 à Cordoue, entra 1519 chez les dominicains de Salamanque, et se fit une grande réputation par son zèle et ses talents. Conseiller et confesseur de Charles-Quint, il le quitta pour accepter une charge de professeur au séminaire de Diilingen, et combattit le protestantisme avec passion dans ses leçons et dans ses livres. Il travailla à obtenir de l'empereur, qui voulait le retenir à Bruxelles, l'autorisation pour le cardinal Pôle, de se rendre en Angleterre, et Pôle l'en récompensa en le nommant prof, à Oxford, â la place de Vermigli qui venait de partir. Il n'y resta pas longtemps et, à la mort de Marie, il retourna à Diilingen. En 1561 il assista à la réouverture du conc. de Trente, où il représenta les principes du romanisme le plus rigoureux, en opposition aux Espagnols, f 20 avril 1563. Ses leçons de théol. pastorale ont été publ. à la demande de son évêque, d'après ses notes et celles de ses élèves.

SOUS-DIACRES, v. Diacres.

SOUTHCOTE, Jeanne, v. Sabbatairiens.

SOUVERAIN PONTIFE, v. Pontife.

SOZIME, 42®® pape, 417, embrassa les erreurs de Pélage, qu'il fit plus tard condamner à Rome (Du Pin, p. 348). Il montra beaucoup d'orgueil. Sa rétractation prouve qu'un pape, loin d'être infaillible, peut être un hérétique.

SOZOMÈNE (ou Salamanes), Hermias, nè vers 400 à Béthel, près Gaza, élevé au couvent de Gaza, étudia le droit à Béryte, s'établit comme avocat à Constantinople, et finit par devenir moine en Palestine, où il + 443. Auteur d'une Hist. ecclés. qui va de 323 à 439, il vint peu de temps après Socrate, dont il a probablement connu et utilisé l'ouvrage. Son style est meilleur, mais le livre lui-même n'a rien de saillant, sinon l'intérêt spécial avec lequel il s'étend sur la vie monastique. Il avait écrit aussi un Abrégé d'hist. depuis l'ascension de J.-C. jusqu'à la mort de Licinius 323, mais qui est perdu.

SOZZINI, v. Socin.

SPALATIN, Georges, de son vrai nom Burk-hardt, né 1484 à Spalt, diocèse d'Eicbstidt, dont il prit le nom; fils d'un tanneur, il fit de bonnes études à Erfurt et à Wittenberg, se lia dès 1801 avec Luther, fut précepteur d'abord du jeune prince Jean-Frédéric, puis de 2 jeunes princes de Brunswick avec lesquels il se rendit à Wittenberg. Ordonné prêtre en 1507 et nommé curé près de Gotha, il entra 1511 au service de Fréd.-le-Sage, qui le pourvut d'un canonicat et lui témoigna une grande confiance en le consultant sur toutes les questions difficiles. Spalatin, que sa nature mystique, son amour pour Augustin et son étude de la Bible avaient déjà disposé en faveur de la Réforme, n'hésita pas quand il se trouva introduit dans le cercle théologique et littéraire des hommes de Wittenberg. C'est à lui que l'univ. doit la fondation de sa bibliothèque, et il ne cessa de l'enrichir par de nouvelles acquisitions. Bibliothécaire, secrétaire et chapelain de Frédéric, il l'accompagna à Augsbourg, Francfort, Cologne, Worms, Nuremberg, et se montra vis-à-vis de ce prince, quelquefois hésitant, lechampion constant et résolu de Luther et de son œuvre. Il écrivit aussi pour lui divers ouvrages sur l'iiis-toire et sur les « Choses de la religion: » En 1525 il épousa Catherine Heidenreich, fille d'un bourgeois, qui f 1551 sans lui laisser d'enfants. Il fut de même le conseiller de Jean-le-Con-stant, fils et successeur de Fréd. 1525 à 1532, et l'accompagna à Spire et à Augsbourg. Vers 1532 il renonça à ses fonctions pastorales officielles, mais continua d'exercer une influence considérable, notamment par ses visites d'églises. Il eut l'occasion de visiter les contrées du Rhin, le nord de l'Allemagne, la Bohême, Vienne, Venise; à Smalcade en 1537 il signa le traité de Mélanchthon sur le Pouvoir et la primauté du pape, f 16 janv. 1545 à Altenbourg. Sans avoir brillé au premier rang, il joua un rôle considérable dans l'hist. de la Réforme par son tact, son zèle, sa décision et par le crédit dont il jouissait. Sa correspondance avec les principaux réformateurs est très volumineuse, et a été publiée en partie, ainsi que d'autres de ses écrits relatifs à la maison de Saxe, à Jean-le-Constant, etc.

SPALDING, Jean-Joachim, né 1" nov. 1714 à Tribsee, Poméranie suédoise, fils et petit-fils de pasteurs, étudia à Stralsund, Rostock et Halle, fit l'éducation de quelques jeunes nobles, devint en 1746 secrétaire de légation auprès de Rudenschtfld envoyé de Suède à Berlin, revint en 1747 auprès de son père malade et puisa dans la vue de ce lit de mort l'inspiration de son livre sur la Destination de l'homme, souvent réimpr., trad. en français, plein de pensées élevées, dites avec une noble simplicité. Il avait déjà traduit quelques ouvrages de l'anglais, entre autres un de Schaflesbury. Il était wolfien et penchait vers le rationalisme, mais il combattit toujours le déisme pur et l'incrédi* lité. En 1749 il fut nommé pasteur à Lassahn, où sa réputation lui attira de nombreuses visites; Lavater, Ftlssli, Hess passèrent plusieurs mois à Lassahn. En 1764 il fut appelé à Berlin, où il publia sur l'Utilité de la prédication un traité qui fut vivement critiqué, notamment par Herder, alors à BUckebourg, qui voyait dans la prédication autre chose qu'une simple utilité au point de vue de la morale et de la police. L'édit de Wôllner, qui restreignait la liberté de la chaire, le décida à donner sa démission, 1788. f 22 mai 1804. Cœur honnête et loyal, il rachetait les imperfections de sa théologie par une grande piété personnelle. Outre ses Lettres et quelques traités d'apologétique, il a laissé plusieurs volumes de sermons, très appréciés. Il avait été marié 3 fois. Son 2®« fils George-Louis, philologue, conseiller au ministère de l'instruction publique, f 1811, a publié sa Vie et quelques extraits de son journal et de ses œuvres.

SPANGENBERG lo Jean, pasteur à Nordhau-sen, à Eisleben, et surintendant de Mansfeld; auteur de plusieurs cantiques, f 1550.

2° Son fils Cyriaque, né 17 juin 1528 à Nord-hausen, précoce dans ses études, élève de Wittenberg, pasteur à Eisleben et à Mansfeld, poussa le luthéranisme à l'excès, et fut à cause de ses exagérations, renvoyé de plusieurs paroisses où il avait porté le trouble. Il sema la division dans le comté de Mansfeld et jusque dans la famille seigneuriale, au point que le duc de Saxe fut obligé 1575 de faire occuper le comté par ses troupes pour y ramener la paix. Sp. réussit à s'enfuir déguisé en sage-femme, mais une démarche imprudente le compromit de nouveau en 1577. Nommé pasteur à Schlitz-see, près Fulda, en 1578, il se fit renvoyer en 1590 et vécut dès lors péniblement, avec une nombreuse famille, à Wacha, Hesse, sous la protection de Guill.-le-Sage. Il finit par trouver un abri chez un chanoine, le comte Ernest de Mansfeld, à Strasbourg, où il f *0 févr. 1604. Il a énormément écrit, et généralement ses ouvrages ont de la valeur: des Chroniques, des monographies historiques, une Vie de Sa-vonarole, des brochures de circonstance, des traités dogmatiques, des Comment, sur les Corinthiens, les Thessal., les Ép. pastorales, etc. Il aurait fait plus de bien s'il avait été moins passionné.

3o Aug.-Gottlieb, né 15 juill. 1704 à Klet-tenberg, Hohenstein; fils d'un pasteur, étudia d'abord à Ilefeld où il fut converti, puis à Iéna, sous Buddens qui le décida à étudier la théologie. Il fit la connaissance de Zinzendorf en 1727, vint en 1732 à Halle où il fut nommé suppléant à la faculté de thèol. et inspecteur de l'orphelinat de Francke; visita Herrnhut en 1733. Sea tendances séparatistes le firent bannir de Halle par Fréd.-Guill. Il s'attacha dès lors au comte, dont il devint le collaborateur dévoué; fut envoyé en Angleterre 0(1 il travailla et sympathisa avec les méthodistes; de là à Copenhague, d'où il partit pour la Georgie avec une colonie missionnaire; enfin en Pensylvanie où il dirigea la mission indienne. Il fut rappelé en 1762 par Tégl. de Herrnhut, qui le nomma évêque en remplacement du comte décédé, f à Bertholdsdorf, 18 sept. 1792. Aimable et doux, moins hardi que son prédécesseur, il travailla à la décentralisation ecclésiastique, régla la discipline, mit de l'ordre dans les finances, et fixa la doctrine dans son Idea fidei fratrum, 1779, souvent trad. et en plusieurs langues. On a aussi de lui une Vie de Zinzendorf 1772, et un Rapport sur les circonstances et la constitution de l'Unité des Frères.

SPANHEIM lo Fréd., né 1er janv. 1600 à Am-berg, Palatinat supér., étudiai Heidelberg, puis en 1619 à Genève, passa 3 ans comme précepteur chez le comte de Vitrolles, gouverneur d'Embrun, visita P Angle terre en 1625, et fut à son retour à Genève nommé professeur de philos., bourgeois d'honneur, prof, de théol. à la place de Turretin, recteur de 1633 à 1637. Sa démission lui fut accordée avec honneur en 1642, et et il se rendit à Leyde où il se rangea parmi les adversaires d'Amyraut, et f 30 avril 1648. Il avait épousé Charlotte Duport. Auteur d'un certain nombre de dissertations latines sur la Grâce universelle, les Anabaptistes, des Lettres, des Sermons et des Disc, de circonstance.

2° Ézéchiel, son fils ainé, né 1629 à Genève, étudia à Leyde la philos, et la théol., mais se consacra plus spécialement à l'enseignement et à la numismatique. Prof, d'éloquence à Genève

1651, membre du Grand Conseil en 1652, il abandonna la théologie et entra comme précepteur chez le duc palatin Charles-Louis; visita l'Italie chargé de plusieurs missions, passa au service de l'électeur de Brandebourg, qui le nomma son ambassadeur à Londres 1702-1705 et f 1710. Il a laissé plusieurs écrits, dont quelques notes sur Callimaqueet Thucydide, un livre sur les médailles, leur importance et leur rôle; plusieurs études sur les points-voyelles des Hébreux, des Observations sur Josèphe, une étude sur l'Hist. critique de l'A. T., de Richard Simon, 2 Disc, latins sur la Crèche et la Croix du Sauveur, trad. en franç. 1655.

3o Frédéric, fr. du précédent, né 1632 à Genève, étudia la philos, à Leyde, devint docteur

1652, et se mit ensuite à la théol., comme il l'avait promis à son père mourant. En 1655 il fut promu docteur en théol. et fut successivement prof, à Heidelberg et à Leyde. Dans cette dernière ville il fut aussi nommé bibliothécaire, et 4 fois recteur. Par sa Défense de la foi réformée, contre Descartes et contre le catholicisme, il se fit une telle réputation qu'on le dispensa de donner ses cours, pour qu'il pût se consacrer plus entièrement à la polémique. 11701. Ses œuvres, qui forment 3 vol. in-f° roulent sur les sujets les plus divers, géographie, hist. sainte, théologie; ainsi: La Philos, du chrétien 1676; l'Autorité des Écritures, le Vœu de Jephté, abrégé d'Hist. ecclés., Géogr. sacrée, travauxexégétiques sur le Lévitique, Job, Matthieu, Marc, Romains; la Prédestination, etc.

SPEE de Langenfeld, Fréd. (de), poète catholique, auteur de cantiques latins estimés. Né 1591 à Kaiserswerth, d'une famille appartenant à la noblesse, il entra 1610 chez les jésuites, enseigna d'abord la philos., la morale et la grammaire à Cologne, fut envoyé en 1627 à WUrzbourg et à Bamberg avec charge d'âme. Là il reçut la mission de préparer à la mort le* sorcières condamnées; il vit de près les horreurs de la procédure employée, et protesta 1631 dans un livre d'abord anonyme: Cautxo criminaii*. Le prince-électeur de Mayence, Phil. de Schônborn, lui ayant demandé comment il se faisait que si jeune il eût déjà les cheveux blancs, il répondit: C'est que j'ai conduit au bûcher plus de 200 sorcières condamnées, et dans le nombre pas une qui fût coupable ! On l'envoya ensuite en mission chez les protestants de la basse Saxe; puis, fatigué, il se retira à Trêves et vit la ville prise et pillée par les bandes impériales et espagnoles. En soignant les blessés et les malades, il fut lui-même atteint de la contagion, et f 7 août 1635. Ses poésies, pleines de naturel, ont été publ. après sa mort, et quelque peu retouchées; elles célèbrent surtout l'amour de Jésus.

SPENCER, John, né 1630 à Bocton, Kent. Orphelin de bonne heure, élevé par un oncle, il étudia à Cantorbéry et à Cambridge, archidiacre de Sudbury 1672, prébendaire et doyen d'Ely, docteur en théol, et président du collège de Corpus-Christi, de Cambridge, f 27 mai 1695. Auteur de divers travaux sur les Miracles, la Prophétie, l'Urim et le Thummim, il est surtout connu par ses Recherches sur les lois des Hébreux et leur origine 1685. Abandonnant la vieille ornière, il est le premier qui ait essayé de donner à la législation mosaïque une base historique et naturelle, en recherchant l'influence que le milieu, le genre de vie et les législations voisines ont pu exercer sur le code hébreu. Il rencontra une violente opposition; Witsius, Marsh a m, Calmet, le réfutèrent; il leur répondit, mais il fut surpris par la mort et sa réponse ne parut qu'en 1727 dans l'édition posthume de ses œuvres.

SPENER, Philippe-Jacques, le fondateur du piétisme allemand. Né 13 (25) janv. 1635 à Ribeauvillé, Alsace, il était fils d'un conseiller du comte de Ribeaupierre (Rappoltstein), et reçut de bonne heure une éducation chrétienne. La comtesse Agathe sa marraine exerça sur lui une excellente influence. Après avoir été préparé par le chapelain de la cour, Joachim Stoll, qui devint plus tard son beau-frère, Spener entra au gymnase de Colmar, et en 1651 à l'université de Strasbourg, où il fut reçu comme un fils par son oncle Jean Stephan, prof, de droit. Il s'y distingua bientôt par son sérieux et sa piété, et groupa autour de lui quelques étudiants avec lesquels il employait chrétiennement ses dimanches. Maître ès arts à 18 ans, il entra en théologie. En 1655 il fit son premier sermon, sur Luc 1, 74. 75. et déclara plus tard que c'était là le sommaire de toute la prédication chrétienne, comme aussi le principe qui dirigea toute sa vie. Sans autres ressources que celles qu'il s'était procurées par ses leçons, il visita les universités de Fribourg, Bâle où il entendit Buxtorf, 1659, Genève où il donna des cours fort suivis, où il était venu pour se perfectionner dans le français, et où il vit surtout le prof. Léger, et Labadie, dont il traduisit le Manuel de prière. Un voyage en Suisse, pour cause de santé, le mit en rapports avec beaucoup de notabilités théologiques. En 1661 il accompagna à Stuttgard le jeune comte de Rappoltstein; il en profita pour aller voir aussi Tubingue, et il était sur le point d'y accepter un engagement, quand il fut appelé comme prédicateur libre à l'égl. de Saint-Thomas, Strasbourg, 1663. Il y passa 3 ans, donna des cours à l'université, épousa en 1664 Suzanne Ehr-hardt, fille d'un conseiller de la ville, et reçut le jour même de ses noces son diplôme de docteur en théologie. En 1666 il fut nommé 1er pasteur à Francfort sur Main, ville intelligente et mondaine, où il comprit qu'il aurait beaucoup à faire, et où il trouva dans la catéchisation le moyen de s'adresser plus directement à la conscience individuelle. C'est aussi là que commencèrent ses célèbres réunions de piété, Colle-gia pietatiêy modestes d'abord, puis encouragées par l'adhésion de quelques hommes distingués, l'avocat Schtitz, le prof. Diefeubach, et qui acquirent en peu de temps un si grand renom que bientôt il s'en forma à Augsbourg, Hambourg, Amsterdam, etc.. On se réunissait chez Spener les lundis et les mercredis pour prier et méditer la parole de Dieu. Une si belle œuvre trouva naturellement des détracteurs et des calomniateurs, et pour éclairer le peuple Spener écrivit ses Pia desideria. Ce fut le point de départ de longues controverses qui dégénérèrent le plus fréquemment en disputes; on parla même de dissidence et d'hérésie. En 1685

Spener reçut un appel de Georges III, électeur de Saxe, comme premier prédicateur à la cour de Dresde. Il s'y rendit en 1686. Son influence se lit sentir dans toute la Saxe; ses catéchismes surtout devinrent célèbres et attirèrent beaucoup de monde. En 1687 lors de sa visite à l'université de Leipzig, il fit une prédication sur la nécessité des études bibliques, qui détermina un réveil important. Francke organisa des réunions dans ce sens, appelées Collegia philobiblica. Leur succès excita la jalousie des pasteurs et professeurs, qui appelèrent piétistes les adhérents de Spener, et le surnommèrent lui-même le patriarche des piétistes. L'électeur de Saxe et sa cour ne tardèrent pas à se tourner aussi contre lui, irrités de ce que sa prédication mettait à nu leurs vices et leur corruption. En 1691 Spener fut appelé par l'électeur de Brandebourg, plus tard Frédéric I®', roi de Prusse, pour remplir à Berlin les fonctions de pasteur-doyen à l'église de Saint-Nicolas. Son ministère y fut béni comme partout. En 1704 il tomba malade, et sentant sa fin s'approcher, il réunit tous ses collègues autour de lui. Le 4 février de l'année suivante, sa faiblesse augmentant toujours, il se fit lire trois fois de suite la prière sacerdotale de Jésus, Jean 17, et il s'endormit le lendemain, 5 février 1705, âgé de 70 ans. La grande influence de Spener ne doit être attribuée ni à son éloquence, ni à sa grande science, mais à sa piété réelle et vivante. Il fut un homme de foi, d'une foi agissante, unie à une grande charité. Dans ses Pia desideria, après avoir décrit l'état d'abaissement dans lequel était tombée l'Église évangélique d'Allemagne, il propose les six remèdes suivants: 1° Diffusion de la Parole de Dieu dans les églises et dans les familles. 2<> L'exercice du vrai sacerdoce spirituel (que chaque chrétien soit prêtre). 3° Faire comprendre à tous que le christianisme ne consiste pas dans la connaissance, mais dans la vie. 4° Une conduite sage dans les controverses (la prière, la charité envers les incrédules). 5° Nécessité d'une éducation plus chrétienne des futurs pasteurs. 6° La prédication doit surtout tendre à vivifier la foi. Il aurait voulu aussi ramener la discipline dans l'Église. Il prêcha toute sa vie d'exemple, en élevant chrétiennement sa nombreuse famille de onze enfants, et son ménage fut heureux et béni.

SPENGLER, Lazare, fils d'un greffier impérial et le 9me de 21 enfants, né le 13 mars 1479 à Nuremberg, étudia les lettres et le droit à Leipzig, revint en 1496 dans sa ville, épousa Ursule Sulmeister qui lui donna 9 enfants, et fut successivement chancelier, syndic et membre du Grand Conseil. Il refusa le poste de secrétaire impérial que lui offrait Maximilien, et f 7 nov. 1534 de la pierre néphrétique. Il se montra dès le début favorable à la Réforme; fut compris en 1518, avec Pirkheimer, dans la bulle d'excommunication inspirée par Eck, et réussit non sans peine à s'en faire relever. En 1520 il siégea à Worms comme délégué de Nuremberg, fit fonder dans sa ville une école évangélique, prit part en 1528 à la rédaction des articles de Schwabach, et lorsqu'en 1530, à Augsbourg, Méianchthon lui parut aller trop loin dans la voie des concessions, il s'empressa d'en informer Luther à Cobourg. Il entretint de constants rapports avec les réformateurs, et n'eut de contestation qu'avec Osiander et Billi-can. Auteur de quelques cantiques, et d'une brochure hardie en faveur de Luther.

SPERATUS, Paul, né 13 déc. 1484, on ne sait dans quelle ville, ni de quelle famille, p. é. à ROtteln, de la famille noble des Spretter, dont Sp. serait une forme latinisée. Il étudia à Paris et dans quelques villes d'Italie. Il entra dans les ordres. Curé de DinkelsbUhl en 1518, il passa en 1519 à Wtlrzbourget se prononça nettement en faveur de la Réforme, ce qui le fit renvoyer. Après avoir visité Salzbourg, où se trouvaient Staupitz et Agricola, puis Augsbourg, il s'établit à Vienne, où il prit le grade de docteur et vécut de leçons. Le 12 janvier 1522, à l'occasion d'un sermon sur le célibat, il fit, sur la demande du gouverneur de la ville et avec l'autorisation de l'évêque, un sermon sur Rom. 12, 1. sq., dans lequel il critiquait tout le régime monastique et en particulier le célibat forcé, dont il fit ressortir les dangers au point de vue moral. Ce discours fut imprimé et fit sensation. Le clergé le dénonça à l'év. comme hérétique. Sp. y répondit de Wittenberg en 1524 par une brochure très mordante, avec une préface de Luther. Après un appel à Ofen, Hongrie, que les intrigues viennoises empêchèrent d'aboutir, il se rendit en Bohême, où l'abbé d'Iglau le nomma chapelain, sans connaître ses tendances réformatrices, et sans savoir qu'il était marié. On ne tarda pas à savoir à quoi s'en tenir, et la population se divisa en 2 camps: il fut jeté en prison à la requête des moines, et il fallut l'intervention des princes protestants pour le faire relâcher. Il se rendit alors à Wittenberg, vnais continua ses relations avec son ancienne paroisse et avec les frères de Bohême, en même temps qu'il traduisit plusieurs ouvrages de Luther, cantiques, etc., pour l'usage de ses fidèles. En 1524 il fut envoyé comme prédicateur à KOnigsberg, où il rendit de grands services par son zèle et par son tact plein de modération. Enfin en 1529 il fut nommé év. de Pomé-ranie; le travail et les luttes ne lui manquèrent pas; il eut à organiser le diocèse, à rédiger les ordonnances ecclésiastiques, à faire accepter la forme synodale et la confession d'Augsbourg, à combattre les anabaptistes et les sacramentaira, à présider des colloques religieux; en 1548, à la suite de la guerre de Smalcalde, il eut le bonheur d'accueillir les Fr. de Bohême persécutés et de leur procurer en Prusse un sûr asile. Il vit éclater en 1544 à Kônigsberg les discussions relatives à Osiander, mais il s'abstint d'intervenir, f 12 août 1551. Sa femme Anna, un fils et 2 filles lui survécurent; il ne leur laissait que des dettes.

SPIERA, Francesco, né vers 1500 à Cita-della, près Padoue, jurisconsulte distingué, connut dès sa jeunesse la vérité évangélique et se déclara franchement pour la Réforme en 1541 Dès lors il consacra son temps et son éloquence à prêcher l'Évangile; les succès qu'il obtint lui suscitèrent de nombreux et redoutables ennemis. Dénoncé à Délia Casa, il fut sommé de se rendre à Venise. Il faiblit devant les procédés de l'Inquisition et se rétracta par écrit, 1547. Cela ne suffit pas au tribunal. Le malheureux dut encore une fois se rétracter publiquement devant ses compatriotes de Citadella, 1«" juillet 1548, et dès lors sa vie ne fut plus qu'un supplice. Il crut avoir commis le péché contre le Saint-Esprit, et malgré les consolations que lui prodiguèrent l'évêque-suffragant de Padoue, le prof. Gribaldi, et Vergerio, il mourut dans le désespoir, 27 déc. 1548, à Citadella, après avoir plusieurs fois essayé de se détruire. Cette mort et les tristes scènes qui l'accompagnèrent concoururent à hâter l'abjuration officielle de Vergerio.

SPIFAME, Jacques-Paul, seigneur de Passy, né 1502 à Paris, le plus jeune de 5 frères, fils d'un secrétaire du roi, étudia le droit et fut suc-cessivement maître des requêtes, conseiller d'État, chanoine à Paris, chancelier de l'université, vicaire général du cardinal de Lorraine (qu'il accompagna à Trente), et év. de Nevers. U eut des relations avec Catherine de Gas-perne, femme d'un procureur de Paris, qui lui donna un fils, et avec laquelle il continua de vivre. Le mari étant mort 1539, 4 mois après la naissance de l'enfant, Spifame déposa ses fonctions, vint h Genève pour embrasser la Réforme, et à l'aide de fausses pièces portant l'autorisation des parents et légitimant le fils, il épousa sa maîtresse 1559, dont il eut encore une fille. Très considéré il fut reçu bourgeois de Genève et consacré au saint ministère. Eto 1560 il est pasteur d'Issoudun; il prêche à Bourges et à Paris. Condé l'envoie k Francfort pour obtenir la neutralité des Allemands. Il est nommé gouverneur civil de Lyon jusqu'à U paix d'Amboise, 19 mars 1563. En fév. 1563 il est élu à Genève membre du Conseil des 60, en même temps qu'à Paris il est condamné à être pendu. En janvier 1564 Jeanne d'Albrecht ftp-pelle en Navarre pour mettre de Tordre dans ses affaires; mais il commet l'incroyable bévue de se brouiller avec elle, en disant que son fils Henri IV est un fruit de l'adultère. Pour se venger elle le dénonce à Genève; diverses accusations sont produites contre lui; l'enquête établit que les pièces relatives à son mariage étaient fausses, et en outre, que l'acte même du mariage était antidaté. Il est condamné à mort à Genève, et exécuté 23 mars 4566.

SPINA, Alphonse (de), espagnol, d'origine juive, franciscain, recteur de l'univ. de Sala-manque, év. d'Orense. Auteur d'un traité apologétique, d'abord anonyme, Valladolid 1458, contre les Juifs, les Sarrasins et les autres ennemis de la foi chrétienne. Souvent réimprimé. Le marane tenait à se faire pardonner son ori-gine.

SPINOLA, Francesco, de Milan, prêtre enfermé à Venise pour cause de religion, releva le courage de Sega, son compagnon de captivité, qui avait un moment faibli, et qui f 23 févr. 1565. Lui-même eut aussi quelques défaillances, mais Dieu le fortifia. Ghislieri, qui fut plus tard Pie V, le traita brutalement et aurait voulu le faire brûler, mais les traditions vénitiennes l'emportèrent. Condamné le 19 août, il fut dégradé, puis simplement noyé, le 31 janv. 1566.

SPINOSA, Bénédict, ou Benoît, primitivement Baruch; né 24 nov. 1632 à Amsterdam, d'une famille de juifs portugais, qui lui fit donner une bonne éducation. Il étudia entre autres la Bible et le Talmud, mais son esprit naturellement sceptique ne put se plier aux enseignements de la tradition rabbinique; le doute s'empara de lui, ses maîtres le menacèrent d'excommunication, et de lui-même il déserta la synagogue. Il se rapprocha des chrétiens, se lia avec la fille d'un malheureux médecin qui lui enseigna le grec et le latin et qui, depuis longtemps accusé d'athéisme, fut exécuté comme conspirateur 1674. Il se mit à l'étude de la théol., qui ne le satisfit pas davantage, parce qu'elle laissait bien des problèmes inexpliqués. Il étudia Descartes, dont il goûta la méthode. Ses coreligionnaires, irrités contre lui, essayèrent tour k tour, mais sans succès, de le gagner par des offres séduisantes, ou de le faire assassiner. Il se retira à la campagne, changea de nom, gagna sa vie en polissant des verres d'optique, qu'il faisait vendre par des amis, habita successivement les environs d'Amsterdam, de Leyde et de La Haye, creusant toujours sa pensée, publiant de temps k autre le résumé de ses réflexions, et poussant logiquement ses prémisses jusqu'à leur conclusion. Il refusa une place de prof, de philos, à Heidelberg, qui lui était offerte par Charles-Louis du Palatinat. Atteint depuis longtemps de phtisie, il f févr. 1677 à La Haye, paisible et dans la plénitude de ses facultés. Il a laissé une Exposition du syst. de Descartes, démontré géométriquement (latin), Amst. 1663; un Traité théologico-politique, Amst. 1677, mais sous le faux nom de Hambourg, et d'abord anonyme, qui, attaquant les livres saints, fut l'objet de nombreuses réfutations. Son principal ouvrage parut après sa mort, par les soins de son ami le médecin L. Meyer; il a pour titre Ethxca; c'est un traité de morale, mais qui expose son système panthéiste. Mentionnons encore 2 traités posthumes: Traité politique, et Du redressement de l'intelligence. OEuvr. compl. publ. par Paulus, Iéna 1802; trad. par Saisset, 1843; Vie et étude par Amand Saintes, 1843. Partant, comme Malebranche et Leibnitz, du cartésianisme, Spinosa a attaqué du même coup la scolastique ancienne et la théologie révélée, et a posé les bases d'un panthéisme matérialiste. On l'a accusé longtemps et à tort d'athéisme. 11 partait du célèbre enthymème de Descartes: Je pense, donc je suis. La seule base de tout, c'est l'existence, notion qui seule présente un degré complet de clarté. Mais avec cette notion se confond celle de substance, qui lui correspond. Or comme partout on trouve existence et substance, et qu'il ne peut exister deux substances infinies, c'est Dieu qui est cette seule substance infinie, qui renferme tout et dont tout est constitué; les êtres finis n'en sont que des manifestations partielles, les corps sont des modes de l'étendue infinie, les esprits sont des modes de la pensée divine. Par conséquent en morale tout est l'effet d'une nécessité absolue, et il n'y a de liberté ni en l'homme, ni en Dieu. Le style de Spinosa n'a point de charme; tout y est sec, présenté en définitions, axiomes, théorèmes, lemnes, etc. Les cartésiens le désavouaient.

SPIRE, vieille ville des bords du Rhin, l'Au-gusta Nemetum des anciens, peuplée auj. d'environ 10,000 hab. La légende lui donne pour premier èvêque un disciple immédiat des apôtres; une autre légende parle d'un év. Jessius, qui aurait assisté au synode de Sardique 347, ou au prétendu conc. de Cologne qui aurait eu lieu vers la même époque. En réalité c'est seulement après l'invasion des barbares, vers 630, sous les Mérovingiens, que le christianisme pénétra dans ces contrées. Nemidona, ou Nemeta, commençait à se développer au confluent de la Spir* et du Rhin, et sur l'emplacement d'un temple de Vénus, Dagobert 1er fit construire un temple chrétien et lui donna pour év. Athanase, son secrétaire et chapelain. Puis vint Primice, sous Sigebert III, 650. De nombreuses donations et l'octroi des dîmes enrichirent bientôt l'évêché. Otger obtint d'Othon I©' le droit de justice, et l'emp. Conrad fit construire la cathédrale, et l'affecta à la sépulture de ceux des sieus qui mourraient de ce côté des Alpes. Huit empereurs y furent enterrés. La ville et sa cathédrale furent mis à sac lors de la déplorable campagne de Turenne 1688 el 1689; les tombeaux des rois furent ouverts et profanés; les soldats jouèrent aux boules avec les têtes de ces vieux souverains. La cathédrale fut brûlée en 1137, 1159, 1289, 1450. Chaque fois elle ressortit de ses ruines plus magnifique; auj. c'est une basilique avec coupole octogone; on y remarque les fresques de Schraudolf. L'évêché supprimé par le traité de Lunéville, a été rétabli par le concordat de 1817. La ville de Spire a joué un grand rôle dans l'hist. de la Réforme en Allemagne, notamment par la diète de 1526, qui se montra assez coulante, parce que l'empire était menacé, et par celle de 1529 qui retira les concessions précédentes, parce que les circonstances politiques s'étaient améliorées, ce qui amena la protestation collective des villes et des princes évangéliques; v. Protestantisme.

SP1RIDION, év. de Trémithonte, en Chypre, assista au conc. de Nicée 325 et à celui de Sar-dique 347, où il défendit vaillamment Athanase.

SPIRITISME, une vieille chose sous un nom nouveau. C'est à peu près ce que les anciens appelaient nécromancie, la possibilité pour les vivants de se mettre en rapport avec les morts, la survivance des esprits, et leur influence, bonne ou mauvaise, sur leurs amis ou leurs ennemis. Les Hébreux y croyaient, Deut. 18, 9 à 16. Es. 8, 19. 2 Chron. 33, 6., et le roi Saùl s'adressa à la pythonisse d'Endor pour consulter l'ombre de Samuel. Les plus incrédules sont crédules par certains côtés. Chez les païens les prêtres et les oracles faisaient du spiritisme. Justin martyr et Tertullien constatent le fait et le condamnent. Au moyen âge on l'a un peu négligé en le pratiquant ou en le poursuivant sous la forme de la sorcellerie. Mais il s'est relevé vers le milieu du siècle dernier sous l'impulsion du visionnaire-mystique Swedenborg, et dès lors le médecin Mesmer, le marquis de Puységur, le divin Cagliostro, et autres, lui ont donné ses lettres de grande naturalisation, comme art de guérir ou de deviner, sans que l'on puisse dire où finit chez eux la conviction et où commence le charlatanisme et l'exploitation. Des effets étranges étaient produits; voilà le fait. Pouvaient-ils s'expliquer par la science ou la psychologie ? Voilà la question, et quoique bien des progrès aient été accomplis, la question est loin d'être absolument résolue. Mais depuis 18i6 l'Amérique intervint, et quand elle se mêle de quelque chose, elle fait tout grand. A Hydesville, non loin de New-York, les misses Catherine et Marguerite Fox se révélèrent comme des intermédiaires (médiums) de première force entre les vivants et les mort»; elles ouvrirent un bureau, donnèrent des consultations, et découvrirent peu à peu que certaines substances, le bois en particulier, avaient un pouvoir conducteur plus grand que d'autres corps (Le p. Venlura cita même dans un sermon les lits, les tables, les bureaux des rédacteurs comme exerçant une influence pernicieuse parce qu'ils sont en bois; un journaliste loi répondit en ajoutant à cette nomenclature les confessionnaux et les chaires) • Dès 1850 la France emboîta le pas derrière les Américains; on ne faisait plus que tourner des tables, des guéridons et des chapeaux. Allan Kardec (Rivait de son vrai nom, f 31 mars 1869) devint le prophète et le législateur du spiritisme; il établit que l'homme se compose de 3 éléments: le corps, qui meurt; l'âme, et entre deux le pé-risprit qui les relie, espèce de corps éthéré, vaporeux, au moyen duquel l'esprit peut encore agir sur la matière, écrire, frapper, etc. Quelques procès en escroquerie ont un peu refroidi depuis 1875 l'exploitation des dupes par les charlatans, et d'autres préoccupations ont fait passer la manie ou la mode des tables tournantes; mais la question n'est pas Jranchée pour cela: Quels sont les rapports qui peuvent exister entre le monde visible et le monde invisible? v. Tissandier, Mirville, Flammarion, et surtout les Tables tournantes d'Àgénor de Gas-parin.

SPITTA, Ch.-Jean-Philippe, né 1er août 1801 à Hanovre, étudia à GOttingue, et après avoir occupé plusieurs postes, fut nommé pasteur â Burgdorf, près de Hanovre, où il f 26 sept. 1859. Auteur de nombreuses poésies lyrique très estimées, et de cantiques d'une grande douceur, faits pour le culte privé plutôt que pour le culte public, et dans lesquels on sent l'influence de la Bible etle fruit de l'expérience personnelle.

SPITTLER, Louis-Timothée (baron de), né

10 nov. 1752 à Stuttgard, où son père était pasteur; il étudia à Tubingue et à Gôttingue, prit ses grades et voyagea. De retour en 1777 il s'établit à Tubingue comme répétiteur, publia quelques dissertations sur les conc. de Laodi-cée et de Sardique, sur le droit canon jusque faux Isidore, et fût en 1779 nommé prof. & philos, à Gôttingue. En 1797 il revint dans son pays, où il fut nommé conseiller aulique, ministre, directeur de l'instruction publique, ca-rateur de l'univ. de Tubingue, et enfin baron.

11 réussit moins dans la politique pendant l'occupation française, ayant affaire à un printf qui penchait pour Napoléon, f 14 mars 1810. Il a beaucoup écrit; son principal ouvrage une Hist. de l'Égl. chrétienne, plusieurs foi* réimprimée, même après sa mort, remarquable surtout par l'exactitude consciencieuse des recherches et la sûreté des appréciations; on a aussi de lui l'Hist. de la papauté, celle des croisades, etc. Œuvres compl. publ. par son gendre Wâchtler, 15 vol. Stuttgard 1827-1837.

SPONDE (de), ou Spondanus% lo Inigo, protestant, conseiller, secrétaire de Jeanne de Navarre; 2o Jean, son fils aîné, né 1557 k Mauléon de Soûle, Gascogne, se fit catholique 1593 et devint lieutenant-général de la sénéchaussée de La Rochelle et maître des requêtes, f 1595. Auteur d'une trad. latine d'Homère, et d'un comment, sur Hésiode. — 3° Henri, son frère, né 6 janv. 1568 à Mauléon, filleul de Henri IV, fut attaché k une ambassade du roi de France en Angleterre, étudia ensuite le droit, abjura sa religion en 1595, sur l'exemple de son frère et de son parrain et sous l'influence de Baronius et de Bellarmin; fut nommé maître des requêtes et se montra dès lors le grand ennemi des réformés. En 1600 il accompagna le cardinal de Surdis à Rome, reçut les ordres, et sur le désir de Louis XIII, appuyé par Urbain VIII, fut nommé év. de Pamiers, 1626. Il s'^pliqua vigoureusement à purger d'hérésie tout son diocèse, fonda des séminaires, bâtit des églises et organisa la Congrégation ecclésiastique, f 18 mai 1643. Auteur d'un écrit sur les Cimetières sacrés 1596, la continuation des Annales de Baronius 1639, et un abrégé de ces mêmes Annales 1612.

SPRENG, Jacques, prieur d'un couvent d'ati-gustins k Anvers jusqu'en 1522. Né à Spern, il s'était formé k Wittenberg sous Luther, et prêchait l'Évangile depuis 1519 dans son couvent, attirant la foule. La régente fit démolir ce couvent en 1522, et condamna le prédicateur à reconnaître comme siennes des hérésies qu'on lui prêtait, et k les rétracter du haut de la chaire. [| fut interné à Spern, mais ayant recommencé k prêcher l'Évangile, il fut arrêté de nouveau t>t jeté en prison. Il réussit k s'évader, s'enfuit auprès de Luther (qui le choisit comme parrain de sa petite Marguerite), et fut en 1524 nommé pasteur, puis surintendant k Brème, où il f 30 juin 1562. Il collabora k la trad. de la Bible en flamand, et avec Timann k la Constitution ecclésiastique de l'Égl. de Brème. Il écrivit aussi l'histoire de Ses deux captivités pour la parole de Dieu, et celle de sa prétendue Rétractation.

SPRENGER, lo Jacques, dominicain du 15™ siècle, auteur qui écrivit en collaboration avec Institor (Krâmer) le Marteau des sorcières. Innocent VIII envoya ces deux hommes, auxquels il adjoignit Gremper, dans les diocèses de Mayence, Cologne, Trêves, Salzbourg et Brème, en qualité d'inquisiteurs, pour y poursuivre avec énergie l'extirpation de tous ceux qui touchaient à la sorcellerie. Ils s'acquittèrent de leur mandat avec la plus farouche cruauté, et pour donner un peu de suite à leur œuvre, ils rédigèrent leur petit manuel qui parut pour la Ire fois à Cologne en 1489 et fut souvent réimprimé et augmenté. Il débute par la bulle du pape, un diplôme de l'empereur et les préavis favorables des facultés; puis vient une espèce de catéchisme en 3 parties sur les caractères de la sorcellerie (les femmes y sont plus disposées que les hommes), les moyens de se préserver des sorts (l'Église avant tout), et la marche à suivre pour le procès, les questions k faire; 2 ou 3 témoins suffisent, on peut même s'en passer; pour obtenir des aveux le plus sûr moyen est la torture. Des horreurs furent commises sous le patronage de ce livre au 16®® et au 17me siècles. Sprenger a aussi fondé dans l'égl. des dominicains de Cologne 1475, une confrérie du rosaire.

2o Placide, un de ces théologiens catholiques d'Allemagne, qui s'efforçaient au siècle dernier de concilier la religion et la science, sans tomber dans les écarts de l'illuminisme. Né 27 oct. 1735 k Wûrzbourg, bénédictin k Banz, dont il devint prieur, après l'avoir été aussi k WUrz-bourg, il vit son couvent sécularisé et se retira 1803 près de Bamberg. f 23 sept. 1806 k Staf-felstein. Il publia 1772-1773 l'Observateur de Franconie, qui cherchant à réunir les protestants et les cathol., dénonçait les jésuites comme les plus dangereux ennemis de la religion. Ce journal fut continué par d'autres et sous d'autres titres.

SPURGEON. Charles-Haddon, fils et petit-fils de pasteurs, né 19 juin 1834 à Kelvedon, Essex, étudia k Colchester, fut converti par un sermon méthodiste, entra comme sous-maître dans une école de Cambridge, et commença à prêcher à 16 ans. L'enfant-prédicateur fut appelé comme pasteur par l'église baptiste de Waterbeach, et il obtint rapidement de tels succès que l'égl. de New Park street, Londres, aussi baptiste, lui adressa vocation en 1853; il avait 19 ans. Les foules accoururent pour entendre cette parole puissante, acérée, originale, pénétrante. Quelques-uns crurent d'abord à un feu de paille qui s'éteindrait bientôt, après avoir brillé d'un trop vif éclat; c'était, disait-on, l'enthousiasme de la jeunesse; il n'avait pas fait des études assez solides pour que cette fécondité oratoire pût durer longtemps. On se trompait. En 1855 il était l'écrivain le plus lu et peut-être l'homme le plus populaire de la Grande-Bretagne. Ses sermons improvisés étaient publiés chaque semaine à 25 mille exemplaires, et il en a paru ainsi plus de deux mille. Sa chapelle, même agrandie, dut être abandonnée, ainsi que la salle de Surrey's Gar-den, et ses amis lui construisirent 1860 une vaste église qui compte 6500 places, et qui reçut le nom de Tabernacle, en souvenir de la chapelle de Whitefield. Sa paroisse se compose de 6000 membres. Il a formé aussi 1856 un séminaire théologique, d'où sont sortis plus de 600 pasteurs et missionnaires, un orphelinat pour 250 garçons, un autre pour autant de filles, une société de colportage, etc. Il a écrit, outre une Revue mensuelle, un grand nombre d'ouvrages de théol. pratique. Sa piété, son orthodoxie stricte sans raideur, sa conviction ardente, une belle imagination, touj. sobre; de vrais dons oratoires, un goût d'artiste inconscient, expliquent et justifient ses succès, qui sont en outre secondés par le charme de sa personne et par la douceur el la sonorité de sa voix.

STABAT MATER, célèbre séquence écrite d'abord pour être chantée par les franciscains à la fête des Sept douleurs; aussi profonde par la pensée qu'harmonieusement rythmée pour l'oreille. On ne peut lui reprocher que sa tendance mariolâtre. Les flagellants la chantaient déjà au 14®e siècle. Elle a été trad. dans presque toutes les langues par une foule de poètes. On lui donne pour auteur Jacques de Bénédict, v. Jacoponi. Elle a été mise en musique par Palestrina, Astorga, Pergolèse, Haydn, Nanini, Boccherini, Neukomm, Rossini, et cent autres, avec des succès divers.

STACH, Matthieu, né 4 mars 1711 en Moravie, vint à Herrnhut en 1728; il partit pour le Groendland le 19 janv. 1733, avec son cousin Christian Stach, et sous la direction du fr. Christian David. Très bien reçus par Hans Egede, q. v., ils fondèrent la station de Neu-Hermhut. Les débuts de l'œuvre furent lents; les missionnaires s'occupèrent activement à apprendre la langue du pays, et à traduire la Bible. Stach quitta le Groenland en 1771, pour se fixer à Bethabara, dans le nord de l'Amérique, où il f 21 déc. 1787.

STADLER, Maximilien, né 1748 à Melk sur le Danube, fils d'un boulanger, étudia chez les jésuites à Vienne, se fit bénédictin, entra dans les ordres 1772, et fut tour à tour curé et prof, de morale, d'hist. ecclés. et de droit-canon. Son couvent ayant été sécularisé, il continua dans sa vie privée d'être fidèle à sa vocation, comme chanoine et conseiller consistorial. f 8 nov. 1833 à Vienne. Il est surtout connu comme organiste et compositeur; on a de lui un Oratorio sur la Délivrance de Jérusalem, un grand Requiem, plusieurs messes, 3 Magnificat, un Miserere, 24 Psaumes, etc.

STAËL, Auguste (baron de), né 1790 à Coppet, fils de la célèbre M«" de Staël, et frère de la duchesse de Broglie. Élevé à Genève,

il visita l'Allemagne, la Suède, l'Angleterre; plaida vainement auprès de l'empereur 1808 U cause de sa mère, et après la mort de celle-ci. se fixa à Coppet, partageant son temps entre la Suisse el Paris. Philanthrope et chrétien, il s'intéressait à toutes les œuvres morales et religieuses, fut membre fondateur de plusieurs sociétés, et écrivit pour l'abolition de la traite et de l'esclavage. Il avait épousé Mlle Vernet de Genève, f 1827. Auteur de Lettres sur l'Angleterre 1825, Œuvres diverses, 2 vol 1829.

STiEHELIN, Jean-Jacques, né 6 mai 1797 a Bâle, étudia à Tubingue 1817 à 1821, s'attacha surtout à Steudel, et de retour à Bâle passa ses examens de théol. et se consacra au professorat; en 1842 il fut nommé docteur en théologie. 1! a enseigné surtout l'A. T. Ses principaux ouvra- | ges ont pour objet la Genèse, le Pentateuqœ, Josué, les Juges, Samuel et les Rois, les propte ties messianiques, Introd. spéciale aux livres de | l'A. T.

STiEUDLIN, Ch.-Fréd., né 25 juill. 1761a Stuttgard, fils d'un conseiller d'État, étudia la théol. à Tubingue sous Storr et Schnurrer, 1779 à 1784; écrivit son Histoire et esprit du scepticisme, surtout au point de vue de la morale et de la religion, 1784 à 1786; visita l'Allemagne, la Suisse,, la France et l'Angleterre, et fut appela en 1790 comme prof, de théol. à Gottingue, où il f 5 juill. 1826.

D'abord rationaliste décidé, il reconnut peu a peu que la raison est impuissante à résoudre les grands problèmes, et vers 1800 il revint aux idées religieuses et à la foi en la révélation. Ses | nombreux écrits témoignén t de sérieuses et consciencieuses recherches, en même temps quïb j dénotent un caractère aimable, simple et mo- j deste. Il affectionnait surtout les études histo- j riques et morales. Nommons ses: Principes fondamentaux de la morale et du dogme 1798; manuel de Dogmatique et d'Hist. des dogmes. 1800; Principes de morale; Géographie et statistique ecclésiastiques; Hist. univ. de l'Égl. i chrét. 1806; Hist. génér.de l'Égl. d'Angleterre j 1816; Encyclopédie et hist. des sciences théol. j 1821; Hist. de la philos, morale 1823; diverses études sur la conscience, le théâtre, le suicide, le serment, etc.

STAFFORT (le Livre de): Exposé des motife qui ont décidé le margrave Ernest-Fréd. & Baden-Durlach + 1604, à passer du luthéranisme au calvinisme. Cet ouvrage, impriu* 1599 au château même de Staffort, CarlsrulM adressé par l'auteur à son fr. Georges - Frèd. t 1638, a pour but d'expliquer et de justifier m* démarche qui, à cette époque, était beauwip plus grave qu'elle ne le serait aujourd'hui. une espèce de traité, parfois incisif sur les point controversés; l'auteur relève en particulier dans

les livres symboliques luthériens certains changements de rédaction dans lesquels il croit voir une tromperie intentionnelle, les textes imprimés n'étant pas exactement conformes à ceux qui avaient été signés.

STAHL, Fréd.-Jules, né 16 janv. 1802 à Munich, d'un marchand juif, étudia sous Thiersch la philologie, prit son brevet de capacité comme professeur de gymnase et embrassa le christianisme 1819; sa famille le suivit en 1823. Il se voua ensuite à la jurisprudence, fut reçu docteur en droit en 1826, et se fixa 1827 à Munich comme prof, libre. Schelling l'amena du droit romain à étudier la philos, du droit. Après qu'il eut été prof, à Erlangen et Wurzbourg, il vint à Munich comme député, se posa comme conservateur, mais très raide sur la question des droits de la Cbambre quant au budget. En 1840 il fut appelé à Berlin comme prof, et entra bientôt, 1847 et 1849, au parlement, où il siégea à l'extrême droite avec son ami Beth-mann-Hollweg. Sans insister sur le rôle qu'il joua en politique, soit au parlement d'Erfurt, soit comme conseiller d'État et comme chef du parti féodal, on peut dire qu'il fut en religion ce qu'il était dans les affaires publiques, un représentant de l'absolutisme ecclésiastique. Au synode général de 1846 il fut le délégué de la faculté de droit de Berlin; il présida la conférence pastorale en 1848, fut plusieurs fois le vice-président du Kirchentag, et de 1852 à 1857 membre du Consistoire supérieur. Il refusa de prendre part aux assemblées de l'alliance évangélique, favorisées par le roi, donna sa démission en 1859, et perdit en peu de temps l'influence considérable que ses talents et sa fermeté lui avaient méritée, f 10 août 1861 aux bains de BrUckenau. Nature fine, délicate et puissante, figure juive accentuée avec des yeux perçants, éloquence entraînante, il s'est montré logicien impitoyable dans sa conception de l'État, dans celle de l'Église et dans sa haine de tout ce qui sentait le libéralisme. Luthérien extrême, il se serait rapproché des catholiques plutôt que des réformés. Ce qui a fait sa grandeur a fait aussi sa chute; vers la fin il restait isolé. Il a laissé de nombreux écrits, et dans tous on reconnaît le juriste, le philosophe et le théologien.

STANCARUS (•cari, ou-caro), François, né 1501 à Mantoue; après de bonnes études théologiques (on dit aussi qu'il fut moine), il se décida pour la Réforme et fut naturellement persécuté. En 1543 il est à Chiavenna, en 1846 à Bâle, où il publie une Gramm. hébraïque et en 4547 une étude sur la Réformation; il se fait aussi recevoir docteur en médecine. En 1550 il est nommé prof, d'hébreu à Cracovie, mais la même année il est mis en prison à cause de ses idées évangéliques, dont l'archev. Maciejovius, qui l'avait appelé, ne s'était pas douté. Il s'enfuit, et le 8 mai 1551 l'univ. de Kônigsberg le nomme prof, d'hébreu. Il se mêle aux luttes soulevées par Osiander, prend parti contre lui très vivement, maintient que le Christ n'a été médiateur que par sa nature humaine, et il perd sa place. Il en retrouve une autre à Francfort s. l'Oder, et continue d'écrire contre Osiander, et s'attire des réponses de Musculus, de Méianchthon et de Bugenhagen. A partir de ce moment sa vie est toujours plus agitée; il erre de place en place, de Pologne en Hongrie et en Transylvanie, provoquant ses adversaires, les traitant d'ariens, d'eutychiens, d'hérétiques, se faisant condamner par les égl. suisses consultées (Zurich, Genève) et par plusieurs synodes, et il finit par f 1574 à Stobnitz. Vaniteux, inquiet, plein de prétentions, il ne sut pas même se faire pardonner ses erreurs par son caractère. Il disait qu'un P. Lombard valait à lui seul 100 Luther, 200 Méianchthon, 300 Bullinger, etc. Ses ouvrages, assez nombreux, se rapportent presque tous aux discussions antitrinitaires; en fait il était nestorien.

STANISLAS lo év. de Cracovie, patron de la Pologne, né 1030 d'une bonne famille à Sczepa-now. Il étudia à Gnesen, passa 7 ans à Paris, entra dans les ordres à son retour 1059, donna ses biens aux pauvres; chanoine et prêtre à Cracovie, il fut nommé coadjuteur de l'év. Lambert, et lui succéda en 1071. Indigné des excès, des cruautés et des débauches de Boleslas II, il eut le courage de les lui reprocher et finit même par l'excommunier. Le roi furieux entra dans l'église pendant que le prélat célébrait la messe, l'arracha de l'autel et le tua de son épée, 1079. Boleslas, excommunié par Grégoire VII, perdit sa couronne et la vie en 1081. Le corps de l'év. fut placé dans un magnifique sarcophage, qui existe encore. Canonisé par Innocent IV, 1254. La légende prête à Stanislas des miracles posthumes.

2° St. Kotska, fils du sénateur Kotska et de Marguerite Krika sœur du woïwode de Maso-vie. Né 20 oct. 1550 à Kotskow, d'un tempérament enthousiaste, encore excité par sa mère, il fut envoyé avec son fr. Jean et un précepteur au collège des jésuites à Vienne, 1564. Les circonstances les obligèrent bientôt à se loger dans une maison particulière. Jean et le précepteur menaient une conduite au moins légère, qui scandalisa Stanislas et le jeta toujours plus avant dans l'ascétisme. A la suite d'une maladie grave et pleine de visions, 1566, il demanda d'être reçu dans l'ordre, mais son père n'ayant pas donné son assentiment, sa demande fut repoussée. Il quitta Vienne secrètement, se rendit à Dillingen auprès de Canisius qui, pour l'éprouver le soumit aux devoirs les plus humiliants.

Enfin il vint k Rome, où le général Borgia finit par le recevoir, 1567. Son père lui marqua par lettre son mécontentement de sa conduite, ce qui lui inspira un zèle toujours plus ardent pour les exercices religieux et pour la pratique de ses devoirs (autres que l'obéissance filiale). Au commencement d'août 1568 il annonça qu'il mourrait dans le courant du mois et qu'il pensait célébrer la fête de Marie dans le ciel. Il tomba malade le 10, et f le 15, n'ayant pas même 18 ans. Canonisé par Clément VIII, 1604.

STANLEY', Arthur-Penrhyn, né 1815, de la famille des comtes de Derby, second fils du Bev. Edw. Stanley, év. de Norwich, étudia k Bugby, puis k Oxford où il obtint de brillants succès et fut nommé fellow 1840. En 1851 il est chanoine de la cathédrale de Cantorbéry, en 1858 prof, d'hist. ecclés. à Oxford et chanoine de Christ-Church; en 1862 précepteur et guide du prince de Galles en Palestine, en 1863 doyen de l'abbaye de Westminster. La même année il épousa lady Augusta Bruce, sœur de lord Elgin et intime amie de la reine. En 1868 il fut question de lui pour l'archevêché de Cantorbéry, mais ses vues théologiques peu orthodoxes empêchèrent sa nomination. Élu en 1864 correspondant de l'Institut de France, en 1872 un des prédicateurs électifs de l'univ. d'Oxford, en 1875 lord-recteur de l'univ. de Saint-André en Écosse, il est + 18juill. 1881, et des funérailles magnifiques lui ont été faites. Il était en réalité le chef de la Broad-Church, très large, puisqu'il sympathisait avec les libéraux, les catholiques et les dissidents. C'était un esprit ingénieux, artiste, un peu fantaisiste, un peu sceptique, généreux et facilement enthousiaste; un cœur ouvert à toutes les nobles aspirations, et qui aspirait k faire les honneurs de sa célèbre abbaye à toutes les illustrations, laissant prêcher Mof-fat dans sa chaire, et fréquentant lui-même des cultes dissidents. Il a laissé de nombreux ouvrages et beaucoup d'articles de revues: Sinaï et la Palestine, Biographies, Mémoires sur Westminster, Mémoires sur Cantorbéry, Hist. de l'Égl. orientale, Commentaire sur les Corinthiens, etc.

STAPF, Joseph-Ambroise, un des meilleurs moralistes catholiques des temps modernes. Né 15 août 1785 à Fliess, dans la vallée de l'Inn, il fut prof, de théol. morale à Innsbruck, puis prof, et chanoine k Brixen, où il f 10 janv. 1844. Auteur d'un traité d'éducation, d'un abrégé d'hist. sainte, et de plusieurs traités de morale très estimés.

STAPFER, Phi lippe-Albert de Brugg, Argo-vie, né 23 sept. 1766 à Berne, où son père était pasteur et 2 oncles prof, de théol. Il étudia k GOttingue sous Eichhorn, Michaëlis et Planck, fut travaillé de doutes que la Religion de Kant dans les limites de la raison pure dissipa en partie. Consacré en 1789, prof, d'humanités, puis de philos, en 1792, il fut en 1797 nommé ministre des arts et sciences, avec l'instruction publique et les cultes dans son département, n comprit et protégea Pestalozzi, et conçut la première idée d'une université fédérale; il eut k défendre les cultes contre les tracasseries du directoire, devint suspect au gouvernement français parce qu'il s'opposa aux spoliations que proposaient ses généraux, fut dénoncé en 1799 comme un aristocrate vendu k l'Autriche, et après la bataille de Marengo fut envoyé k Paris comme représentant de l'Helvétie; se montra toujours ferme et bon patriote dans ses négociations avec le premier consul et sut lui résister en face. Après l'Acte de médiation 19 févr. 1803, il disparaît de la scène politique, bien que nommé 2 fois membre du Grand Conseil d'Ar-govie. Il continue de demeurer en France, où son mariage lui a créé une famille et de précieuses relations. Il collabore à la Biographie universelle, devient membre de la Soc. de la Morale chrétienne, prend une part active à la fondation ou au développement de plusieurs sociétés religieuses, biblique, missions, traités, instruction primaire, etc. D'une santé délicate, il passa ses dernières années à la campagne, voyant peu le monde, mais travaillant toujours et se rappelant que s'il était penseur et philosophe, il était surtout chrétien et ministre de l'Évangile. Depuis 1839 il languit, et f 27 mars 1840. Ses salons étaient le rendez-vous d'hommes éminents, tels que Maine de Biran, Cousin, Guizot, et le protestantisme y était honorablement représenté. Ses Œuvres ont été publ. en 1844 par Vinet, 2 vol. 8<>. On remarque en particulier un mémoire sur la philos, de So-crate, un travail latin sur la République morale, un discours sur l'espérance de l'Immortalité confirmée par la résurrection de J.-C., un sermon sur la Dignité de Jésus, un Projet de message sur l'éducation nationale, une Hist. de Berne, un Voyage pittoresque dans l'Oberland, un discoure sur la Lecture de la Bible, etc. — Son fr. Frédéric a été prof, de théol. à Berne 1819-1833.

STAPHYLUS, Fréd., né 17 août 1512 à Os-nabrttck, étudia à Cracovie, Padoue et Wittenberg, où il se lia surtout avec Mélanchthon. Nommé prof, de théol. k Kônigsberg, juin 1546. puis recteur 1547, il n'était au clair sur aucune question, entra en lutte avec Gnapheus et Osiander, réussit à se mettre mal avec tous ses collègues, passa à Dantzig, puis k Breslau, et finit par se faire catholique, ce qui lui valut d'être nommé conseiller impérial 1554, recteur de l'univ. d'ingolstadt, le titre de docteur en théol. (quoique laïque et marié), cent écas d'or du pape, des lettres de noblesse de Ferdinand, et un domaine du duc de Bavière, f 5 mars 1364 à Ingolstadt où il est enterré. Il a rendu des services â l'enseignement Ses nombreux écrits n'ont qu'une valeur de circonstance et témoignent de l'agitation de son esprit; ils ont été réimpr. par son fils 1613.

STAPLETON, Thomas, né 1535 à Henfield. Sussex, d'une bonne famille, étudia k Cantorbéry, Winchester et Oxford, fut nommé chanoine k Chichester, quitta l'Angleterre sous Élisabeth, visita Louvain et Paris, puis Rome; appelé à Douai comme docteur et prof, de théol.; il fit son noviciat chez las jésuites, mais ne prononça pas ses vœux. Il finit par être prof, et chanoine à Louvain, oti il f 12 oct. 1598. Auteur de quelques ouvrages en faveur du catholicisme et du pape.

STARCK lo (ou Stark), Jean-Auguste, né 29 oct. 1741 à Strélitz où son père était pasteur. Il étudia k Gôttingue la théol. et les langues orientales, accepta k Pétersbourg une place de prof. 1763 à 1765, visita l'Angleterre et la France, fut nommé à Paris interprète des mss. orientaux k la biblioth. royale, avec mille livres d'appointements, et accepta successivement les places les plus différentes, de précepteur chez un prince russe, de prof, et de pasteur k Konigsberg, de prof, à Mitau. (1 était depuis longtemps franc-maçon; on le soupçonnait en outre de s'être fait catholique, et même jésuite; quelques-uns de ses écrits le feraient supposer: d'autres le montrent rationaliste et néologue. On n'a jamais bien su ce qu'il était. Il reçut en 1807 la croix de Saint-Louis, et en 1811 le titre de baron, de la cour de Darmstadt. Quand il f 3 mars 1816, on trouva sa chambre disposée pour la lecture de la messe; il fut enterré dans un froc de moine et avec la tonsure.

2° Jean-Fréd., né 10 oct. 1680 k Hildesheim, étudia à Giessen; pasteur k Francfort sur Main depuis 1715. f 17 juillet 1756, membre du Consistoire. Auteur d'une quantité de sermons estimés, et livres d'édification qui se réimpriment encore auj. et dont quelques-uns ont eu plus de 50 éditions. On cite entre autres son Manuel quotidien pour les bons et les mauvais jours.

STAROWIERZEN, v. Rascolniks.

STATIONS. On nomme souvent ainsi la représentation des 14 ou 15 principaux moments de l'histoire de la passion, soit: La condamnation de Jésus devant Pilate, il charge sa croix, première chute, il rencontre Marie, Simon l'aide k porter sa croix, Véronique l'essuie de son mouchoir, seconde chute, discours aux femmes de Jérusalem, troisième chute, il est dépouillé de ses vêtements, la crucifixion, la mort, la descente de croix, la mise au tombeau, l'invention de la croix. Ces moments, un peu arbitrairement déterminés, sont fréquemment reproduits en peintures, soit comme ornements des églises, soit le long de chemins conduisant k un lieu de pèlerinage élevé. Innocent XI et les papes dès 1686 ont accordé aux franciscains, pour les stations dans leurs églises, les mêmes privilèges et indulgences qui étaient précédemment attachés à un voyage en Terre-Sainte: aussi le nombre de ces stations se multiplia-t-il rapidement, parce que ce genre de pèlerinage était de beaucoup plus facile. C'est vers 1672 que les franciscains fixèrent pour la Ire fois à Jérusalem l'itinéraire, invraisemblable mais commode, de ce qu'ils appellent auj. la Voie douloureuse; on y montre même l'échoppe du juif-errant.

STATTLER, Bénédict, né 30 janv. 1728 il Kotzding, Basse-Bavière, élève des bénédictins, entra en 1754 dans l'ordre des jésuites et fut successivement envoyé comme professeur à Ingolstadt, Straubing, Landshut, Neubourg, So-leure, etc. Ordonné prêtre en 1759, il fut laissé comme prof, de théol. à Ingolstadt, et conserva ces fonctions, même après la suppression de l'ordre en 1773; il les cumula même en 1776 avec celles de curé de la ville. Il passa plus tard k Munich, où il fut nommé censeur et conseiller ecclésiastique, f 21 août 1797. Savant éclairé et généreux, il appartenait k la noble école de Sailer, qui a compté au siècle dernier tant de représentants en Bavière; il voulait la conciliation de la science et de la foi, du catholicisme et du protestantisme (sur des bases sans doute inacceptables de part et d'autres), la tolérance des opinions. Plusieurs de ses nombreux écrits ont été mis à l'index à Rome, entre autres son livre sur les Rapports du cathol. avec le protestantisme, sa Théologie chrétienne théorique, et ses Loci theologici. En philosophie il a combattu Kant et le déterminisme de Wolf. Dans sa morale chrétienne il étudie successivement les devoirs de l'homme envers lui-même, Dieu et le prochain, mais on y reconnaît la casuistique et souvent le probabilisme des jésuites. Il a écrit enfin divers ouvrages sur le Célibat, le Duel, les Psaumes, la Minéralogie, quelques catéchismes, etc.

STAUDENMAIER, François-Antoine, né H sept. 1800 à Donzdorf, Wurtemberg, d'une famille ouvrière, finit par obtenir la permission d'étudier, et il se mit avec passion k la lecture de Lessing et de Winkelmann, puis de Baader et de Heeren; en 1822 il entra k l'univ. de Tubingue et s'attacha surtout à Mohler pour la théol. et la philosophie; en 1826 il passa au séminaire ecclésiastique de Rottenbourg, et fut ordonne prêtre en 1827. Après avoir desservi quelque temps les paroisses d'EHwangen et de Heil-

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bronn, il vint comme répétiteur à Tubingue, fut en 1830 appelé comme prof, d'apologétique et de dogmatique à Gieksen, et en 1837 à Fribourg où il eut Hug pour collègue. D'abord chanoine de la cathédrale, il fut nommé conseiller, et en 1851 membre de la première chambre du duché. L'univ. de Prague le nomma membre honoraire. Sa santé était chétive, il souffrait de maux de tête continuels, sa vue était menacée; il donna sa démission en 1852, prit sa retraite définitive en 1855, et f 19 janv. 1856 k la suite d'une chute faite dans le canal. Dans ses nombreux écrits, qui se ressentent de l'influence de MOhler, Schelling, Hegel etSchlei-ermacher, et qui dénotent une grande élévation et la recherche de l'idéal, il s'applique k démontrer la divinité du christianisme et à ramener le catholicisme k des conditions historiques et scientifiques meilleures, mais il n'a jamais pu comprendre le protestantisme et il se montre iujuste à son égard.

STAUPITZ, Jean (de), l'ami et le père spirituel de Luther, d'une famille noble de Meissen. On ne sait rien de son enfance. Il est en 1497 k Tubingue, en 1500 docteur et prieur du couvent des augustins. Le prince électeur de Saxe le fait venir pour le consulter sur la création d'une université à Wittenberg. Il part pour Rome, obtient les privilèges nécessaires, et en 1502 il est nommé prof, et premier doyen de la faculté de théologie. L'année suivante son ordre le nomma vicaire général des augustins pour l'Allemagne. Dans une de ses nombreuses tournées d'inspection, il eut l'occasion de voir à Erfurt le moine Luther, 1505, auquel il s'intéressa vivement, et qu'il engagea, pour la solution de ses doutes, à étudier la Bible et Augustin, à méditer sur la libre grâce de Dieu et sur les bienfaits de la mort de Christ. Il lui procura en même temps, dans le couvent une meilleure position, le fit venir en 1508 à Wittenberg, lui promit un brillant avenir et resta son ami et son conseiller, même lorsque leurs destinées se furent séparées. C'est lui qui obligea Luther à se mettre à la prédication, et qui lui fit prendre son grade de docteur en 1512; il lui confia l'inspection de 40 couvents en Saxe et en Thuringe, quand il partit en 1516 pour aller en Hollande chercher des reliques pour son église de Tous-les-Saints, et l'on peut croire qu'il donna à Luther la première idée de ses 95 thèses. Mais en voyant la tempête soulevée par ces actes de hardiesse, il prit peur et commença k reculer. Il défendit cependant encore Luther contre Cajetan à la diète d'Augsbourg 1518, et favorisa sa fuite; mais en 1519 il dut se rendre k Salzbourg, où l'énergique et rusé cardinal Lang comprit qu'il fallait le faire changer de milieu, d'autant plus que Staupitz lui-même ne se sentait plus à l'aise à Wittenberg. Il n'en resta pas moins l'ami de Luther et des théol. de Wittenberg. Lang le nomma son chapelain. En 1520 Staupitz entra dans l'ordre des bénédictins, et eu 1522 il devint leur abbé à Salzbourg sous le nom de Jean IV. f 28 déc. 1524. U a laissé divers écrits sur des sujets exclusivement religieux, pleins d'une piété pénétrante et onctueuse: sur la foi chrétienne, l'audition de la messe dans l'église paroissiale, les Constitutions des fr. ermites de Saint-Augustin, la Prédestination, etc. Nature timide, il a servi la Réforme par sa piété plus que par ses actes, mais il lui est resté fidèle. Des livres et des mss. de Luther, qu'il possédait et qu'il avait légués au couvent de Saint-Pierre k Salzbourg, ont été brûlés vers 1615 par ordre de l'abbé Martin.

STEDINGIENS, petite peuplade, honnête, paisible et laborieuse, de l'ancienne Frise, des environs du Weser, ressortissant de l'évêché de Brème, et qui fut presque entièrement anéantie vers l'an 1234, après une horrible croisade organisée contre elle par l'autorité ecclésiastique. C'est, avec les croisades albigeoises, une des taches les plus honteuses de la hiérarchie romaine, d'autant plus que l'origine même du conflit n'offre rien d'édifiant. Une femme s'étant confessée, et n'ayant donné comme offrande qu'une pièce de monnaie que le prêtre jugea in suffisante, celui-ci au moment de la communion, lui mit dans la bouche, au lieu de l'hostie, la pièce de monnaie qu'elle lui avait donnée. Le mari, furieux de cet affront, assomma le prêtre. L'archevêque demanda justice, mais la population tout entière prit parti pour le mari outragé, et l'affaire ne tarda pas à s'envenimer, au point que la peuplade se sépara de la juridiction épiscopale. En 1197 l'archev. Hartwig II étant à Rome, reçut d'Innocent III une êpée, soi-disant celle avec laquelle Pierre avait coupé l'oreille à Malchus. Hartwig comprit, mais il oublia que le Seigneur avait condamné cet acte de violence. La peuplade fut excommnniée 1204, et les massacres commencèrent. La lutte dura plus de 30 ans; on accusa les pauvres excommuniés d'adorer le diable, de comploter contre l'empereur, de commettre toutes sortes d'horreurs; on les calomnia comme on fait en pareil cas, et l'on envoya contre eux une armée de 40,000 hommes, qui finit par trancher 1a question en faveur de l'Église; ceux qui survécurent à la croisade se dispersèrent ou se résignèrent.

STEGMANN lo Josué, né 1588 à Sulzfeld. Franconie, fils du pasteur, étudia 10 ans a Leipzig, fut nommé 1617 pasteur surintendant de Schaumbourg-Lippe, mais refusa, se trouvant trop jeune; reçut de Wittenberg le titre de docteur, fut en 1621 nommé prof, de théol. à Rinteln, en fut chassé par la guerre, mais revint en 1625, se consacrant à son ministère et à son professorat, jusqu'en 1630 où les bénédictins, se fondant sur l'édit de restitution, réclamèrent leurs anciennes propriétés et lui suscitèrent des tracasseries de tous genres, ne reculant même pas devant la violence, t 3 août 1632. Auteur de plusieurs beaux cantiques.

2° Deux pasteurs sociniens père et fils, l'un et l'autre appelés Joachim. Le père renvoyé de Fahrland et de Dantzig à cause de ses opinions, fut nommé à Racovie en 1631, puis à KJausen-bourg, f 1633. Le fils fut pasteur de plusieurs petites communautés en Pologne, puis à Dantzig, Manheim et enfin Klausenbourg. f 1678. Il a écrit quelques ouvrages pour défendre le socinianisme.

STEIGER, Gui IL, né 9 févr. 1809 à Flaweil, Saint-Gall; fils d'un pasteur, fit ses humanités à Schaffhouse, sa théol. à Tubingue sous Steu-del et Bengel, puis à Halle sous Tholuck, qui exerça sur lui une grande et salutaire influence. Consacré à Aarau en 1828, il entra dans le mouvement religieux de la Suisse française, envoya quelques articles sur ce sujet à la Gaz. évang. de Hengstenberg, qui le fit venir à Berlin et se rattacha comme corédacteur, 1829. Là il composa divers ouvrages, entre autres une Critique de la dogmatique de Wegscheider et un Comment, sur la première ép. de Pierre, très estimé. En 1832 il fut appelé à Genève comme prof, d'exégèse à l'école de théol., publia avec Hâvemick 2 cahiers de Mélanges de théol. réformée, commença une suite d'études sur les petites épîtres, dont le Comment, sur les Colossiens seul a paru, 1835. Il préparait aussi une réfutation du livre de Strauss, quand la mort vint le surprendre, bien jeune encore, 9 janvier 1836. Quelques fragments de son In-trod. an N. T. ont paru après sa mort par les soins d'un de ses élèves.

STEINBACH, Martin, né vers 1550 à Strasbourg, fils d'un tonnelier; garçon faible et nerveux, d'une imagination maladive; il croyait être le précurseur Élie, de Mal. 4, 5. et mettait sa lumière intérieure au-dessus de la Bible. Il eut des disciples, qui eurent aussi leurs visions. Banni de la ville, il mourut à Mackenheim, Alsace supérieure. Ses sectateurs prétendirent qu'il revenait dans un bois près de Schlestadt; une enquête et plusieurs emprisonnements leur prouvèrent qu'ils avaient tort. La secte disparut bientôt.

STEINKOPF, Ch.-Fréd.-Adolphe, né 7 sept. 1773 à Ludwigsbourg; frère du célèbre libraire de ce nom; étudia à Tubingue, fut en 1794 secrétaire de la société chrétienne à Bâle, et vint à Londres en 1801 comme pasteur de l'égl. de

Savoye; il s'intéressa à toutes les œuvres religieuses et fut en 1804 un des fondateurs de la Société biblique de Londres et son secrétaire. Il s'en retira en 1826, parce qu'il n'approuvait pas la suppression des Apocryphes, + 29 mai 1859.

STEINLE, Jean-Édouard, célèbre peintre, nourri des maîtres italiens; né 1810 à Vienne, il étudia à Munich sous Cornélius, à Rome sous Overbeck. Gn cite de lui les fresques de la chapelle de Rheineck, faites pour la famille de Bethmann-Holweg, et représentant le sermon sur la montagne; en 1843 le Chœur des Anges, à la cathédrale de Cologne; en 1841 le Jugement de Salomon, salle des empereurs à Francfort; l'Échelle de Jacob, etc.

STEPHAN et Stèphanistes. Petite secte allemande qui a dû aux talents et à la piété de son chef une certaine notoriété, mais qui, après avoir commencé selon l'esprit, a fini selon la chair. Martin Stephan, ou Étienne, né en Bohême 1777, était fils de parents catholiques convertis. Destiné au métier de tisserand, il décida de se vouer à la théologie, étudia à Halle et à Leipzig, et fut nommé pasteur de l'égl. tchèque à Dresde. Il empiéta peu à peu sur les fonctions de ses collègues luthériens allemands, se fit une réputation, une clientèle, des adhérents passionnés et des ennemis. Despote de caractère, il rendit sa famille malheureuse. Des histoires d'argent et des histoires de femmes compliquèrent sa position; en 1838 il fut suspendu et se décida à partir pour l'Amérique avec 700 adhérents, 6 ecclésiastiques et 10 candidats; il n'emmenait qu'un fils avec lui. En route il se fit nommer évêque et se fit donner la caisse de la communauté; mais le 30 mai 1839 on le destitua, on l'excommunia pour de nombreux scandales, et on l'expédia dans l'Il-linois, où une de ses concubines le suivit. Il doit y être mort vers la fin de févr. 1846. Sa communauté s'est dissoute peu à peu.

STERCORANISTES (de stercus, fumier), surnom injurieux, donné d'abord par le cardinal Humbert, en 1054, au moine studite Nicetas pectoratus, lors de la discussion entre les orientaux et les occidentaux sur la question de savoir s'il fallait communier avec du pain levé ou sans levain. L'injure portait sur ce que, en communiant avec du pain ordinaire, on exposait le corps de Christ à se confondre avec les autres aliments et à être rejeté par les mêmes voies dans le lieu secret. Les partisans de la transsubstantiation pensaient flétrir ainsi leurs adversaires, sinon les réfuter, tandis que ceux-ci distinguaient entre la substance matérielle et le corps qu'elle représentait et qui échappait aux effets de la digestion. Ces derniers finirent à leur tour, et on leur faisait beau jeu, par ren-xoyer l'injure à leurs adversaires qui assimilaient trop complètement le corps et le pain, et ceux-ci, dans cette controverse aussi réaliste que stupide et peu édifiante, essayèrent de s'en tirer en disant que la réunion du corps de Christ à l'élément matériel cesse d'exister aussitôt que l'élément a passé de la bouche dans l'estomac (Hugode S.-Victor), ou dès que le travail de la digestion commence (Thomas d'Aquin). Cette puérile et peu élégante discussion s'est reproduite, aux jours de la Réforme, contre les luthériens.

STEUDEL, Jean-Chrétien-Fréd., né 25 oct. 1779 à Esslingen, descendant de Brenz et de Bengei par sa mère. Après de bonnes études faites sous des influences chrétiennes, et toujours dans le milieu wurtembergeois de Stuttgard et de Tubingue, il vint à Paris pour se perfectionner dans les langues orientales sous de Sacy et de Chézy; fut en 1810 nommé diacre àCannstadt, et 1812 à Tubingue, enfin 1815 prof, de théologie, f 24 octobre 1857 à la suite d'une douloureuse opération. Il fut le dernier représentant de la vieille école de Tubingue fondée par Storr; il avait eu pour maîtres Flatt et SUsskind, et s'est montré toute sa vie le défenseur fidèle de la vérité évangélique. On lui a reproché de faire trop de polémique, et surtout de manquer parfois de modération. Personnellement aimable et doux, accessible même à des influences comme celles de Schleiermacher et de Jarobi quant au sentiment religieux, il s'est montré très sévère contre Strauss, qui lui a répondu avec non moins de vivacité. Il a beaucoup écrit sur la dogmatique, la morale, la pédagogie, etc. Il combattit 1811 le projet prêté à Napoléon, de vouloir unir le catholicisme et le protestantisme; en revanche il ne voyait pas dans les Égl. protestantes assez de différences pour justifier leurs rivalités, mais s'il désirait leur union, il y voyait des difficultés pratiques et ne voulait pas d'un rapprochement artificiel ou imposé. Il a rendu de grands services à la théol. biblique, surtout pour l'étude de l'A. T. Auteur de quelques cantiques.

STEWART, Dugald, né 22 nov. 1753 à Édin-bourg, fils de Matthieu Stewart le mathématicien. Après de bonnes études dans sa ville natale et à Glascow, il remplaça d'abord son père comme prof, de mathématiques, puis Adam Ferguson comme prof, de philos, morale depuis 1785. Il se retira en 1810 et + H juin 1828. II suivit le système de Reid, en s'appliquant à le compléter. Il représente la philos, écossaise, par opposition â Locke qui voyait dans l'âme une sorte de table rase à la merci des impressions produites par les sensations. Il admet des facultés indépendantes des sens, la mémoire, l'attention, des principes généraux; mais il manque de classification et ne rend pas suffisamment compte des faits. Il a publié: Esquisses de philos. morale, trad. parJouffroy; Éléments de la philos, de l'esprit humain, trad. par Prévost de Genève; Hist. des sciences métaphysiques et morales, trad. par Buchon; et des notices sur A. Smith, Robertson, Reid, etc.

STICHOMANTIE, de stichos, ligne, verset; art, talent, ou prétention de deviner l'avenir en tirant au hasard cerlains passages de certains livres; les païens se servaient pour cela volontiers de Virgile ou des Oracles sybillins. Les chrétiens ont quelquefois fait de même avec la Bible, soit pour lui demander des directions ce qui se comprend, soit pour l'interroger sur l'avenir, ce qui est moins légitime.

STICHOMETR1E. Les anciens mss. étaient écrits sans ponctuation, ni séparation des mots ou des phrases, ce qui offrait divers inconvénients; les lettres étant toutes égales et se présentant à la suite des unes des autres, les lecteurs dans le culte public étaient quelquefois embarrassés. Pour y remédier, Euthalius imagina, comme Origène et Jérôme l'avaient fait pour l'A. T., de couper le texte en stiques (ou rèmata, paroles, ce qu'on peut dire d'une seule haleine); cette division, qui ne tenait pas compte du sens, n'était pas logique, mais les stique* étant numérotés par 50 ou 60, on pouvait s'orienter dans les citations, et il y avait progrès. Les mss. D. et E. sont écrits d'après ce système. D'un autre côté, comme il y avait beaucoup de place perdue, on y renonça, et l'on remplaça les alinéas par des points on de* croix, qui furent l'origine d'une ponctuation plus régulière; ainsi dans le Codex Cyprins, oo K. de la Biblioth. nation, de Paris.

STIEFEL lo ou Styfel, Michel, né 19 avril 1486 à Esslingen, moine augustin, prit de bonne heure parti pour la Réforme 1520, passa ses examens à Wittenberg, et devint chapelain du comte de Mansfeld. Il occupa plusieurs places, épousa à Lochau la veuve de son prédécesseur, passa à Francfort sur l'O., à Kônigsberg, à Brtick, fut nommé prof, d'arithmétique à Iéna, avec un traitement de 60 florins, qui s'éleva un peu par son élection comme diacre, et f 19 avril 1567. Mêlé aux luttes d'Osiander et de Flacius, il ne se prononça pas; il était avant tout arithméticien, en même temps que rêveur un peu fantaisiste. Ses principaux ouvrages théol. ont pour objets les chiffres de U Bible. D'après Daniel il avait fixé la fin do inonde au 19 oct. 1533. ce qui lui valut un procès, les gens n'ayant pas rentré leurs récoltes, puisqu'ils pensaient que c'était inutile. Pour lui Luther était l'ange de l'Apocalypse (14) portant l'Évangile éternel. Il a publié plusieurs manuels d'arithmétique, un cantique sur Luther, le Psaume 10 mis en vers. etc.

2° Ésaïe St., théosophe du 17™ siècle, qui se révéla surtout de 1604 à 1625. Marchand de vin, il s'établit avec son neveu Meth, fils de sa sœur, à Langensalza, se brouilla avec le surintendant Tilesius, se lit condamner à l'amende et à la prison par le consistoire de Leipzig, passa à Erfurt, puis à Gispersleben, où, avec l'aide de ses adhérents qui avaient pris le nom de puriens (les purs), il s'acheta un petit bien. En 1614 il fut arrête avec Meth et conduit en prison à Dresde. En 1615 il est de nouveau à Erfurt, et protégé par le comte de Gleichen, dont la femme Juliane se joignit à la secte avec une telle passion qu'elle fut excommuniée et finit par se divorcer. Stiefel fut son intendant, Meth son chimiste (médecin?). A la suite d'un procès en 1625, il se rétracta, puis retira sa rétractation. Il finit par rentrer dans l'Église, et f 17 août 1627. Auteur de Dix petits traités, qui se caractérisent surtout par le mépris des formes et des sacrements et par un extrême mysticisme; il soutenait que Christ était en lui, non seulement en puissance, mais en nature. Bôhme lui-même a blâmé ces exagérations.

STIEKJVA (Jean de)? ou Stykna, moine cistercien, un des précurseurs du mouvement hus-site, prêchait à Prague 1393 dans l'égl. de Bethléhem fondée en 1391 par MUhlheim. Il fut ensuite procurateur de la nation polonaise à l'université, et en 1401 recteur de l'égl. paroissiale de Ezubda. Il s'opposa 1405 aux doctrines sur la cène, de Wicleff. Il s'eleva contre la corruption des ecclésiastiques, des moines mendiants, des usuriers, des femmes nobles, et contre certains abus de l'Église. Mais comme il s'en tint à la morale, on le laissa tranquille, f 1369.

STIER, Éwald-Rod., né 17 mars 1800 à Frau-stadt, Posen, fils d'un inspecteur des douanes. Ses premières études laissèrent à désirer. Ame de feu, romantique, enfiévré d'idéal, ami de Jean-Paul, il se jeta dans la littérature légère, commença son droit à Berlin en 1815, l'abandonna pour la théol. en 1816, vint à Halle en 1818, fut le président plein d'entrain d'une société d'étudiants, qui s'occupait de tout autre chose que d'étudier. La mort d'une jeune personne de sa parenté, qu'il aimait, fut un coup de foudre pour lui; son passé disparut tout entier dans sa douleur. C'est dans sa famille que s'accomplit le grand changement de son cœur, et lorsqu'en 1819 il reprit à Berlin ses études de théol., il était devenu un homme nouveau et sérieux, mais ayant conservé sa vieille énergie, sa fougue et une remarquable facilité de parole. En 1821 il se rendit au séminaire des prédicateurs de Wittenberg pour s'y perfectionner dans la pratique; il en fut le 55in« élève depuis sa fondation, et s'occupa surtout d'études bibliques, sous Heubner. Après avoir consacré 2années à l'enseignement, dans la maison des missions de Bâle, il passa quelque temps à Wittenberg auprès de Nitzsch devenu son beau-père, fut en 1829 nommé pasteur à Frankleben, où il travailla avec un zèle apostolique; en 1838 a Wichlinghausen, près Barmen. où à côté des soins absorbants d'une grande paroisse, il fut sollicité par toutes les œuvres missionnaires du Wupperthal, sans parler de sa prodigieuse activité littéraire. Mais les détails d'administration ecclésiastique répugnaient à son tempérament toujours jeune et génial, et en 1846 il donna sa démission pour retourner à Wittenberg. L'univ. de Bonn lui avait décerné le titre de docteur en théologie. En 1850 il fut nommé pasteur surintendant de Schkenditz, on 1859 d'EisIeben; il f 16 déc. 1862 d'une attaque d'apoplexie. Ses fils et Nitzsche ont écrit sa vie. Ses ouvrages, même exégétiques, ont presque tous un caractère pratique; tous sont bons, sans être particulièrement remarquables. Sa Gramm. hébraïque renferme des choses hasardées. Son Comment. sur 70 Psaumes, ses Discours de Jésus, et sa Keryktik, ou Manuel sur la prédication, comptent parmi ce qu'il a fait de mieux. Il faut mentionner aussi ses travaux en faveur d<*s Apocryphes, son livre sur l'Unité du proph. Ésaïe, ses efforts pour améliorer la version de Luther, ses Comment, sur les Corinthiens, les Hébreux, quelques fragments des Proverbes, de nombreux sermons, des cantiques, etc. Il était indépendant de cœur et d'esprit, sansétroitesse confessionnelle et s'est montré un zélé partisan de PUnion des églises.

STIGEL, Jean, né 13 mai 1513 à Gotha ou aux environs, humaniste distingué, ami de Luther et de Méianchthon, auteur de plusieurs cantiques latins et allemands, ouvrit en 1548 à Iéna une école supérieure, qui devint en 1558 l'université. Bien qu'il ne se mêlât pas aux discussions théologiques, son amitié pour Méianchthon le rendit suspect aux Flaciens qui tâchèrent de le perdre, mais leur règne était fini, et ce fut lui qui assista à leur chute. + 11 févr. 1562.

STIGMATES, du grec stigma, point, marque; c'est en général la cicatrice laissée par une plaie ou blessure; se dit aussi de toute empreinte mise sur une personne vivante, pour la reconnaître, brùluro k l'épaule ou autre; de là, dans un sens défavorable, stigmatiser. Saint Paul dit qu'il portait en son corps les marques, ou stigmates, de Christ, Gai. 6, 17. La tradition catholique mentionne aussi, et jusque dans les temps modernes, un certain nombre de personnes, de femmes surtout, qui, dans le sens le plus matériel du mot, portaient aux mains, aux pieds, au côté, quelquefois même en couronne, autour des tempes, les marques des plaies du Sauveur, parfois à l'état de simples cicatrices, parfois saignantes, ou saignant le vendredi, ou la semaine sainte, ou dans certaines circonstances déterminées. On n'en cite pas moins de cent exemples; le plus ancien serait le cas de François d'Assise qui, 2 ans avant sa mort, à la suite d'une vision sur l'Alverne, aurait vu se produire sur la paume des mains et sur les pieds des excroissances semblables à des têtes de clous, se terminant en pointes de l'autre côté, et à son flanc une cicatrice, comme faite par un fer de lance; quelquefois il en sortait du sang, phénomène qui dura encore après sa mort. Thomas de Celano et Bonaventure le racontent. On cite encore Anna-Catherine Em-merich, q. v., Marie de Morl, trois vierges tyroliennes, Marie-Dominique Lazzari, née 1815 à Caprioni, f 1850; et tout récemment en Belgique, Louise Lateau. Ce phénomène appartient à la nombreuse catégorie de ceux que la science n'explique pas. Y a-t-il eu supercherie dans tous les cas? C'est difficile à admettre. Il est plus probable que ces étranges manifestations relèvent de la physiologie; l'imagination, l'exaltation, dans le domaine religieux surtout, possède une puissance dont les savants ont tort de faire abstraction.

STILLING, de son vrai nom Jean-Henri Jung, né 12 sept. 1740 à Grand, Nassau. Son père, tailleur et maître d'école du village, était un homme pieux, mais mélancolique, et après avoir perdu sa femme Dorette, fille du pasteur Moritz, il devint sombre, misanthrope et dur pour son fils, qui dut le meilleur de son éducation à son grand-père Éberhardt, charbonnier, et à Marguerite sa femme. Jung eut une enfance et une jeunesse difficiles. Avec certaines singularités d'esprit, il était remarquablement doué, mais son père voulut en faire un tailleur, et l'enfant dut apprendre à coudre, ce qui ne l'empêcha pas de lire avidement les livres qui lui tombaient entre les mjuns, entre autres Pa-racelse et Bœhme. Il accepta aussi plusieurs fois des places de régent, s'y consacra de tout cœur, mais n'y recueillit que des déboires et se dégoûta de l'enseignement. Il avait lu Milton, Klopstock, les nuits d'Young, un peu de Wolff et de Leibnitz; il s'était mis au latin, au grec et à l'hébreu; enfin un bon curé lui ayant confié une recette contre la cataracte à condition qu'il soignerait les pauvres gratis, il se consacra à la médecine et s'établit à Elberfeid où il fit des cures merveilleuses et se fiança avec une jeune fille mourante, qu'il guérit, Christine Heyder. Pour obtenir le litre de docteur il vint à Strasbourg, où il se lia avec Herder et Gœthe qui furent toute leur vie pour lui des amis fidèles; c'est même Gœthe qui le décida à écrire son Autobiographie et qui la lança pour lui

procurer quelques ressources. Cependant Stil-ling restait toujours pauvre. A Elberfeid il avait contre lui les médecins qui le traitaient de charlatan, quoiqu'il ait guéri plus de 2000 c taractes; les piétistes, qui lui reprochaient d'écrire des romans, et les incrédules ou indifférents, qui le traitaient de mystique et d'enthousiaste. En 1778 le grand-duc de Hesse le nomma professeur d'agronomie, de comptabilité et de médecine vétérinaire à Kaiserslautern. C'est là qu'il perdit sa femme; elle lui laissait une fille et un fils. Il se remaria avec Selma de Saint-Florentin, femme forte, brillante, et bonne ménagère, digne autant qu'aimable. Stilling passa ensuite à Heidelberg, puis à Marbourg avec des appointements doubles, où il reçut la visite de son ami Lavater, et où il perdit sa seconde femme et son père. Enfin Charles-Fré- I déric, le pieux électeur de Bade, l'invita à venir se fixer auprès de lui, à Heidelberg d'abord, puis à Carlsruhe 1806, et il lui assura une position indépendante, avec le titre de conseiller aulique. f 2 avril 1817, onze jours après sa troisième femme Élise Coïng, et entouré de presque tous ses enfants et petits-enfants. La reine de Suède et sa fille Sophie le visitèrent sur son lit de mort. Il avait aussi connu l'emp. Alexandre et M®e de Krudener. — Ses ouvrages sont nombreux; l'Hist. de sa Jeunesse, sa Tournée par le monde, le Heimweh, comptent parmi les meilleurs. Les Scènes du monde des esprits, l'Hist. du triomphe de la relig. cbréi. sont remarquables et font bien connaître se» vues particulières sur les rapports des esprits avec les hommes; v. encore Théobald le rêveur. Il a écrit aussi une Méthode d'opérer la cataracte, etc. v. Jung Stilling, de M»e Sporlein, trad. franç. par M1,e S. Vincent.

STILLINGFLEET, Édouard, né 1635 à Cran bourne, Dorset, de la vieille famille des Stil-lingfleet, près York, étudia à Cambridge de 1648-1652, fut appelé comme pasteur à Sutton, et se fit connaître dès 1662 par ses Origines sacrées, ouvrage d'apologétique dans lequel il pose les bases de la religion révélée et de la religion naturelle. L'év. de Londres en fut si content qu'il lui confia le soin de défendre par écrit la discussion de Laud avec le jésuite Fis-her. ce qu'il fit 1664 dans son Account rationnel des principes de la religion protestante. 11 fut bientôt appelé à desservir une des paroiss» de Londres, puis Saint-Paul, dont il devint le doyen, 1678. Appelé 1689 à faire partie delà commission ecclésiastique de Jacques II, il en démontra par écrit l'illégalité, ce qui lui valut la même année, après la révolution du 13 octobre, l'évêché de Worcester. f 27 mars 1699 à Westminster. Il avait été plusieurs années sous Charles II et Jacques II, l'orateur de la convocation, et s'occupait d'une revision de la liturgie. Son travail sur les Origines britanniques est important, non seulement au point de vue archéologique et historique, mais encore par tous les détails qu'il donne sur les antiquités religieuses et ecclés. du royaume. Du reste la plupart de ses travaux ont plutôt un caractère soit apologétique, soit polémique; il a combattu les catholiques, les déistes, les athées, les ariens, les sociniens; il a même écrit contre les indépendants, d'abord avec douceur et modération, cherchant à les ramener, dans son Irénique, leur faisant des concessions, leur accordant même que l'épiscopat n'était pas d'institution biblique; puis avec une espèce d'aigreur, en maintenant l'épiscopat au nom des droits de l'État, et ne reculant pas devant le vote de mesures répressives en parlement. Beaucoup de ses arguments en faveur du christianisme reposaient sur des prémisses alors acceptées comme axiomes, mais qui sont devenues plus tard l'objet de nombreuses et vives controverses, de sorte que toute son apologétique a perdu sa valeur pour les discussions actuelles.

STITNY, Thomas (de). 1325 à 1400, laïque, précurseur inconscient de la Réforme, auditeur assidu de Milicz, a écrit en tchèque de nombreux et remarquables ouvrages, entre autres: la République chrétienne, la Doctrine chrét.; Discours religieux, Dialogues d'un père avec ses enfants, et plusieurs traductions de saint Augustin. Sans rompre avec l'Église, il attache peu" d'importance aux cérémonies et combat l'ascétisme. II est f à peu près au moment où Huss commençait ses prédications à la chapelle de Bethléhem.

STOCK, Simon, v. Scapulaire.

STOER, Étienne, prêtre de Liestall, né à Dies-senhofen, Thurgovie. Il vivait en concubinage, comme la plupart des ecclésiastiques de son temps, mais dès les premiers jours de la Réforme il sentit le besoin de faire régulariser sa position et d'épouser sa ménagère. Il offrit à sa paroisse de se justifier dans une discussion publique, qui eut lieu à Bâle le 16 févr. 1524, et dans laquelle il soutint 5 thèses sur la sainteté du mariage et contre le célibat forcé; personne ne se leva pour le contredire; UEcolampade, Pellican et d'autres l'appuyèrent, et même Wolf hart, le collègue d'QËcolampade à Saint-Martin, qu'on avait prié d'attaquer les thèses, prit la parole pour les défendre. Les hommes de Liestall se déclarèrent satisfaits et Stôr resta en fonctions. On croit qu'en 1527 il prit part à une émeute de paysans et ses traces se perdent.

STCBSSEL, Jean, né 23 janv. 1524 à Kitzin-gen, étudia à Wittenberg et fut nommé pasteur à Weimar en 1549. Luthérien rigide et partisan de Flacius dans plusieurs colloques, il défendit avec vivacité le livre de la Confutation attaqué par Strigel; mais à partir de 1560, le vent ayant tourné à la cour, il tourna aussi et s'attira par là la haine la plus violente du parti qu'il abandonnait. Il fut peu après nommé surintendant et prof, à Iéna, et finit par faire interdire la chaire aux flaciens. Nommé docteur en théol. en 1564. Mais les flaciens reprirent le dessus en 1567 et ce fut à son tour de partir. 11 fut appelé à Pirna comme surintendant et confesseur d'Auguste de Saxe, se compromit dans la conspiration crypto-calviniste, fut envoyé comme prisonnier à Senftenberg 1574, et f le jour de Reminiscere 1576, ainsi que sa femme, fille du surintendant Musa de Mersebourg.

STOLBERG, Fréd.-Léopold (comte de), ne 7 nov. 1750 à Bramstedt, Holstein, était fils du gouverneur danois. Il fut très lié avec Klop-stock, étudia à Halle et à Gôttingue, cultiva avec son plus jeune frère Christian les langues et la littérature, se lança dans la poésie et dans le romantisme, s'enthousiasma avec Voss pour la patrie et la liberté, visita la Suisse et l'Italie, vit à Zurich Lavater, qui le déclara une nature noble et fine, mais molle, impressionnable et facile à influencer. A son retour il fut nommé ministre du prince-évéque de Lubeck à Copenhague, épousa Agnès de Witzleben, mais la perdit 1788. Ce fut une grande épreuve pour lui; ni ses occupations, ni ses relations ordinaires ne purent le consoler. La famille de Re-ventlow l'amena à la connaissance de l'Évangile et à la foi. Il se remaria en 1790, «accepta de nouvelles missions diplomatiques en Russie, à Berlin, en Italie, et se lia un moment avec les frères moraves. Mais ses instincts aristocratiques,. le luxe dans lequel il aimait à vivre, une audience du pape, l'amitié d'Overberg et des deux frères Droste-Vischering, le poussaient toujours plus vers le catholicisme, bien qu'il fut à la tête du consistoire de Lubeck, et il finit par abjurer à Munster dans la chapelle de la princesse de Gallitzin, 1er juin 1800. 11 donna sa démission de ses charges et vécut dès lors dans la paisible culture des lettres, pendant que ses fils, restés patriotes, s'illustrèrent en combattant pour l'indépendance de leur pays, f 5 déc. 1819 dans son domaine d'Osnabruck. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages, des traductions d'Homère, d'Eschyle, d'Ossian; une relation de ses voyages, une Hist. de la religion chrét. en 15 vol., des Vies d'Augustin, de Vincent de Paul, des discours, etc. Son abjuration a été jugée sévèrement par Voss, et comme un acte maladif par Herder.

STOLZ, Alban, théol. catholique, né 8 févr. 1808 à BUhl, duché de Bade, étudia à Heidel-berg ia philos.* la philologie et la théologie. Ordonné prêtre en 1833, il fut en 1843 nommé répétiteur, puis directeur du séminaire de Fribourg en Brisgau, et en 1846 prof, de théol. pastorale. Auteur de plusieurs ouvrages estimés, de politique et d'édification, et d'un calendrier pour le temps et l'éternité, qui parut depuis 1843, il s'est foit le défenseur de l'ultrauionta-nisme le plus exagéré, et il apporte dans la discussion une acrimonie qui lui ôte beaucoup de sa valeur. On a entre autres de lui un Voyage en Orient, une vie de sainte Élisabefh, une explication du Pater et des Dix commandements, des traités contre les francs-maçons, contre les libéraux, etc.

STORCK, ou Storeh, v. Zwickau.

STORR, Gottlob-Christian, né 10 sept. 1746 à Stuttgard, fils du chapelain royal et conseiller Jean-Christian Storr, qui était disciple de Ben-gel et qui a publié quelques bons cantiques et des ouvrages d'édification. Après avoir étudié à Tubingue, où il s'appliqua surtout à l'exégèse du N. T., il visita les diverses universités de PAIlemagne, la Hollande, l'Angleterre et la France, Paris avec Griesbach, et se fixa en 1775 à Tubingue comme prof, de philos., puis de théologie; en 1786 il fut aussi appelé à remplir des fonctions au séminaire; en 1797 à Stuttgard premier prédicateur de la cour et membre du Consistoire. C'est là qu'il f 17 janv. 1805. Bien doué, érudit plutôt qu'orateur, un peu sec dans son éloquence, peu original, mais jouissant d'une mémoire excellente, et possédant un don particulier d'exposition, il a exercé une grande influence comme prédicateur et comme professeur. On peut le regarder, avec Bengel et Steudel, comme un des fondateurs de la vieille école supranaturaliste de Tubingue. Il a laissé un grand nombre de sermons, des Commentaires sur les Hébreux, les Galates, les petites Épîtres de Paul; des études dogmatiques sur le Saint-Esprit, la grâce, l'état des âmes après la mort; des opuscules académiques; des notes sur les versions du N. T. arabes, syriaques et philoxéniennes; des observations sur la syntaxe hébraïque, etc. Kant le tenait en haute estime, et a reconnu la valeur des objections que Storr avait faites aux résultats de sa philosophie critique.

STOSS, Veit, sculpteur et graveur, né 1440 à Cracovie, f 1553, appartient aux principaux maîtres de l'art. Il partagea sa vie entre Cracovie et Nuremberg. On lui doit plusieurs maître-autels, un monument de Casimir Jagellon, une salutation de l'ange, un crucifix, etc.

STRABON, v. Walafried.

STRASBOURG, l'ancienne Argentoratum, fondée, dit-on, par Drusus, fr. de Tibère, 15 ans av. C. Elle reçut l'Évangile déjà au 2®e siècle. On croit que Maternus, dans son voyage de Rome à Cologne, visita l'Alsace et y fonda plusieurs églises. Son premier évêque aurait été Saint-Amand, dont le nom figure dans les actes du conc. de Sardique. Plusieurs fois dé-truite, entre autres par Attila, elle fut toujours relevée. C'est le fils de Clovis qui lui donna le nom de Stratisburgum, qu'on trouve pour la Ire fois chez Grégoire de Tours. Ses évêques furent richement dotés et privilégiés sous les Carlovingiens, et sous Othon II; ils obtinrent même le droit de battre monnaie. L'évêché relevait de Trêves, et, depuis Boniface, de Mayence. Parmi ses nombreux titulaires il faut nommer Warner, comte d'Altenbourg, qui rebâtit 1025 la ville brûlée 1002 par le duc de Souabe; Othon de Hohenstauflen f 1100, qui entra m lutte avec Rome sur la question des investitures; Jean I«r, l'ami de l'emp. Albert qui fut assassiné comme il traversait l'Aar 1308; Guillaume III de Honstein, sous qui se fit la Rè-formation; Jean IV, sous qui les jésuites furent appelés; Franz Egon de Furstemberg, qui livra la ville aux Français et la cathédrale aux catholiques 1681; enfin 4 princes de Rohan 4704-1801, dont le dernier, Louis-Renè-Édouard, fut compromis dans l'affaire du collier, qui lui valut 2 ans de Bastille. Le titre de prince-évêque avait disparu au 14m« siècle. — Le besoin d'une réforme se fit sentir de bonne heure a Str., où clergé, noblesse et peuple étaient presque également corrompus. Ce qu'il y avait de mieux dans la ville, c'étaient les vaudois qui s'y étaient réfugiés; en 1210 on "en comptait 500; en 1212, 80 d'entr'eux furent brûlé* par les soins des dominicains. Il y eut aussi les amis de Dieu, les mystiques, comme Tauler; les winkeliens, les hussites, qui tous exercèrent une certaine influence; mais surtout il faut noter l'action de Geiler et celle de Wimp félin g, qui préparèrent les voies au rétablissement de la discipline et de la foi. La découverte de l'imprimerie, faite 1434 à Strasbourg par Gutenberg, contribua pour sa grande part a propager la bonne semence; déjà vers la fin do 15me siècle l'imprimeur Mentel avait publié des Bibles allemandes. La renaissance des lettres e* le voisinage d'Érasme, qui était à Bâle, achevèrent de préparer le terrain. L'impulsion décisive fut donnée par Zell en 1518, puis en 1523 par Capiton, Bucer, Hédio, appuyés par Stura dans les conseils de la ville. Fini de Saint-Thomas, en 1524, fut le premier qui lut la messe en allemand, et qui distribua la Cène sous les deux espèces. Les ennemis abandonnèrent le champ de bataille, les couvents se vidèrent; I» images et les reliques furent presque partout enlevées, et ceux qui refusèrent de jurer obéissance à la ville furent déclarés démissionnaires de leurs fonctions. Le doyen du chapitre de la cathédrale, Sigismond de Hohenlohe, se montra favorable au mouvement, mais en 1527 il dut quitter la ville, atteint par un decret de l'empereur. L'évêque Guillaume était un homme doux et prudent, qui se résigna à ce qu'il ne pouvait empêcher. La guerre des paysans, avec l'Alsacien Érasme Gerber à sa tête, puis Storch, Carlstadt, Denk, troubla la contrée, et en 1527 Strasbourg finit par bannir les anabaptistes. Mais des questions avaient été soulevées, entre autres celle de la Cène, à propos de laquelle on put voir que les théologiens de Str. penchaient plutôt vers la doctrine helvétique, ce qui leur valut de la part de Luther des épi-thètes très violentes, en dépit des essais de conciliation de Bucer. Gerbel seul tenait pour Luther. Le colloque de Baden en 1526, celui de Berne en 1528, et surtout l'arrivée de nombreux réfugiés français, réformés, Farel, Lefèvre d'Éta-ples, Gérard Roussel, Lambert d'Avignon, plus tard Calvin, amenèrent un nouveau rapprochement avec les Suisses, et en janvier 1530 Strasbourg conclut un traité d'alliance avec Bâle, Berne et Zurich. Cette espèce d'isolement dans l'empire inecontenta l'empereur à la diète d'Augsbourg; pour échapper à l'accusation d'être des sacramentaires, les théol. de Str. s'entendirent avec ceux de Constance, Mem-mingen et Lindau pour présenter une confession de foi commune, rédigée par Bucer et Capiton, qui prit le nom de Tetrapolitana, ou des Quatre Villes, mais dont l'autorité ne dura pas longtemps. De nouvelles sectes surgirent, des schwenkfeldiens, des anabaptistes, des visionnaires. L'insuccès de la guerre de Smalcade rendit un moment le pouvoir aux catholiques 1549, mais en 1559 les protestants reprirent le dessus, et le luthéranisme pur triompha. Quand l'Alsace passa à la France, le protestantisme fut naturellement sacrifié et la cathédrale lui fut enlevée. L'Allemagne en 1871 reprit l'Alsace et maintint le statu quo religieux; les catholiques se compromirent par 3 ou 4 prétendues apparitions de la Vierge, dont ils n'avaient pas besoin pour que leur culte fût respecté. Strasbourg se distingua dès le 10m* siècle par ses écoles, notamment par celles des bénédictins. Geiler lui donna un nouveau développement, et en 1528, grâce à l'influence et à l'activité de Sturm, elle se constitua d'une manière si complète et si brillante qu'elle mérita d'être appelée par Bossuet une des villes les plus savantes de la Réforme et un modèle de discipline. Les écoles, d'abord au nombre de 14, furent placées sous la direction d'hommes compétents, de Sturm entre autres. Il y eut ensuite des leçons publiques données par Bucer, Capiton et Hedio; elles débutèrent chez Bucer, mais elles durent être transférées dant le couvent des prédicateurs et finalement dans les auditoires de Saiut-Thomas. Une bibliothèque fut fondée en 1531. Un gymnase 1536 prépara les voies â l'académie, qui s'ouvrit en 1567, et qui devint une université en 1621 par décret de Ferdinand II. Les jésuites lui opposèrent en vain une sorte d'université rivale, où l'on n'enseignait que les lettres et la théologie. La faculté protestante a toujours eu des hommes distingués. Sa réorganisation par les Allemands, 1er mai 1872, lui a conservé la plupart de ses professeurs.

STRAUSS lo Gérard-Fréd.-Abraham, ne 24 sept. 1786 à Iserlohn, étudia à Halle et Heidelberg, et fut successivement pasteur à Rons-dorf, Elberfeld, et Berlin depuis 1822. Prédicateur de la cour., professeur, membre du Consistoire, attaché au ministère des cultes, il f 19 juill. 1863. Connu par de nombreux sermons, différents livres d'édification, des Souvenirs sur la jeunesse d'un prédicateur, les Avertissements d'un vieux: pasteur, Pèlerinage à Jérusalem, etc.

2o Son fils Fréd.-Adolphe, né 1 juin 1817 à Elberfeld, étudia à Berlin, fut nommé auxiliaire à la cathédrale, fit en 1843 un voyage en Orient et à Rome, lit en 1848 la campagne du Schles-wig comme aumônier, professa à Berlin, et fut nommé en 1870 à Potsdam, d'abord chapelain de la garnison, puis surintendant et inspecteur des écoles. Auteur d'un Comment, latin sur Sophonie, de Sinaï et Golgotha, souvenirs de son voyage, et de nombreux discours et fragments de liturgie.

3o David-Frédéric, né 27 janv. 1808 à Lud-wigsbourg, étudia à Tubingue. Son tempérament critique et positif le préserva de l'enthousiasme un peu juvénile des hommes de sa génération. Il ne se laissa pas plus séduire par Schelling que par Bôhme ou Kerner. Les travaux de Hegel et de Schleiermacher le captivèrent, et après avoir occupé deux postes secondaires, il se décida en nov. 1831 à partir pour Berlin, où il espérait trouver ces grands maîtres. Mais Hegel mourut presque à son arrivée. Il eut du moins le bonheur d'entendre Schleiermacher. De retour en 1832, il fut nommé répétiteur au séminaire de Tubingue, et donna en outre des cours de philos, à l'université. En 1835-1836 il publia sa vie de Jésus, qui lui lit aussitôt, a cause de ses paradoxes critiques, une réputation. Mais il perdit sa place de répétiteur et revint à Ludwigsbourg, où il trouva une place au lycée et des leçons particulières, continuant d'ailleurs de défendre ses idées, mais cherchant aussi à (-aimer l'orage qu'il avait déchaîné. Le gouvernement de Zurich, Hirzel eh tête, l'appela comme prof, de dogmatique et d'hist. ecclés., mais les populations soulevées par cette bravade culbutèrent le gouvernement et sa nomination fut annulée; une pension de retraite de 1000 fr. dut lui être assurée et lui a été payée pendant plus de 40 ans; il en a fait bénéficier la caisse des pauvres de Ludwigsbonrg. En 1840 il épousa une cantatrice, Agnès Schebest, mais ce malheureux mariage finit bientôt par une séparation; Agnès garda les enfants quelques années. Les menées cléricales empêchèrent Strauss en 1848 d'être nommé au parlement de Francfort; en revanche les électeurs de Lud-wigsbourg l'envoyèrent à la chambre wurtem-bergeoise, mais ses allures conservatrices mécontentèrent ceux qui l'avaient nommé, et à la suite d'un vote de méfiance il dut donner sa démission. En 1870, sous le titre de Paix et guerre, il entretint avec Renan une correspondance qui fit beaucoup de bruit, non seulement à cause de son débordement de patriotisme, mais à cause de son style haineux et passionné, qui contrastait avec l'indifférence placide et sereine qu'il affectait dans ses discussions théologiques.

Le résumé de sa Vie de Jésus, car il a singulièrement varié dans ses 4 premières éditions, c'est que le contenu des Évangiles est la tentative inconsciente de personnifier dans un personnage mythique et légendaire l'idée morale et religieuse que le mosaïsme et les prophètes avaient fait naître chez le peuple, sans réussir à la satisfaire. Il nie la possibilité du miracle et refuse aux Évangiles toute valeur historique. Plus tard il se rapprocha des idées de Baur, admettant que Jésus était un juif très pieux; que Jean, en le baptisant, le prit pour le Messie annoncé; que Jésus lui-même finit par se prendre au sérieux comme Messie; qu'il s'attira la haine mortelle des pharisiens en démasquant leur ambition et leur hypocrisie, et qu'il fut mis à mort par leurs intrigues. Il semble admettre plus tard, et sous réserves, l'authenticité de l'Évang. de Jean. Il reconnaît enfin que les miracles, c.-à-d. que des choses extraordinaires sont possibles dans certaines circonstances d'exaltation ou de surexcitation des esprits. Ce livre fit sensation dans le monde des théologiens, et fut l'objet de nombreuses réfutations, d'Ull-mann. Tholuck, Hug, Néander, Hengstenberg, H. Lasserre, Chenevière, etc. Strauss en fît aussi un extrait populaire. Sous prétexte de science et de critique on a pu dire de son œuvre que c'est une charge à fond contre l'Église et contre le christianisme, et l'Allemagne n'a pas à s'applaudir du résultat qui a été obtenu. On a encore de Strauss un éloge de Julien l'apostat; et des études sur Schubert, Ulrich de Hutten, Reimar, Lessing, Voltaire; et une Dogmatique chrét. dans son développement historique et dans sa lutte avec la science moderne, le Christ de la foi et le Jésus de l'histoire, etc. f 8 févr. 1874 à Ludwigsbourg entre les bras de son fils médecin.

4° Victor-Frédéric (de), né 16 sept. 1809 à Btlckebourg, conseiller du prince de Schaum-bourg-Lippe depuis 1832. anobli en 1850; auteur d'hymnes religieux où manque l'inspiration chrétienne, et d'écrits politiques où manque le sens de l'homme d'État. Pour expier le libéralisme de sa jeunesse, il préconise le parjure quand il s'agit de renverser des constitutions libérales, et dans la diète de l'empire, dont il fit partie 1866, il attaqua violemment la Prusse. On a aussi de lui quelques Nouvelles, et des Méditations sur le 1er commandement.

STRIGEL, Victorin, né 26 déc. 1514 4 Kaef-beuren, Souabe bavaroise, étudia la philologie et la théol. à Wittenberg, où il s'attacha surtout à Mélanchthon dans la question du Synergisme. Nommé prof, à Iéna, il se laissa entraîner par Flacius et ses autres collègues, à prendre parti contre Mélanchthon; mais les excès de la lutte le ramenèrent à des sentiments plus calmes; il protesta même contre le livre de la Confutation et fut enfermé, ainsi que son ami Htlgel, au château de Grimmenstein, d'où il ne sortit que grâce à l'intervention de l'emp. et des princes protestants. Bientôt la roue tourna; les flaciens perdirent du terrain et leur attitude violente dans les colloques ne le leur fit pas regagner. La position deStrigel n'en resta pas moins difficile, et pour couper court à des attaques touj. plus amères, il quitta Iéna pour Leipzig 1562, el enfin pour Heidelberg, où il f 26 juin 1569. Auteur de plusieurs Comment, sur l'A. et le N. T., et de quelques travaux dogmatiques sur les questions du jour. Savant et compilateur, plutôt que penseur original, il avait une puissante mémoire, assez d'esprit, mais peu de profondeur.

STRIGOLNIQUES, secte russe qui se rattache à la protestation de Carpe Strigolnik 1375 contre la forme de la Confession devant le prêtre, et contre le casuel à payer pour l'ordination.

STUBNER, v. Zwickrfu.

STUDITÉS lo Siméon, moine du couvent acémètede Studion k Constantinople; anteurde plusieurs hymnes. — 2o Théodore, archimandrite du couvent de Studion à Constantinople, depuis 794; ami passionné des images. Né 759 à Constantinople, entré au couYent 781, il entra en lutte avec C. Copronyme, lorsque celui-ci renvoya sa femme pour épouser Théodora; il l'excommunia et se sépara même de son patr. Tarasius qui se comportait mollement dans cette affaire. Plusieurs fois exilé, puis rappelé, suivant que les amis ou les ennemis des images étaient au pouvoir, il finit par + 11 nov. 826 à Chalcis.

STUNDISTES, secte chrétienne qu'on trouva d'abord chez les paysans grecs de la Crimée el de l'Ukraine, et qui, sous l'influence de colons luthériens, se mirent à tenir de petites réunions d'édification, des heures (Stenden), s'occupant à prier et à lire la Bible. Ils ne veulent pas d'images, et se nomment Amis de Dieu. Le gouvernement les a tracassés. Comme secte organisée ils sont peu nombreux, mais il y en a maintenant un peu partout, parce qu'on désigne sous ce nom tous ceux qui étudient la Bible. Ils datent du premier quart de ce siècle.

STURM 1° le premier abbé de Fulda; né vers 710 d'une famille noble de Bavière. Il fut confié de bonne heure à Boniface, et accompagna son maitre dans quelques courses missionnaires. Il entra ensuite à l'école de Wigbert au couvent de Fritzlar, et fut consacré prêtre 733. Il avait un goût particulier pour la lecture de la Bible et pour l'évangélisation. Désireux de fonder un monastère, pour en faire le centre d'une mission chez les Saxons, il s'établit d'abord à Hirschfeld (Herolfesfeld), mais sur le conseil de Boniface, qui trouvait la station trop exposée, il chercha un autre emplacement, plus rapproché, et s'établit à Fulda 744. Il visita avec soin les couvents de l'Italie, notamment celui du mont Cassin, 747, qui lui suggérèrent d'utiles améliorations. Il eut à se défendre ensuite contre les tentatives d'empiétement de Lulle, archev. de Mayence, qu'il repoussa victorieusement, mais qui n'en troublèrent pas moins sa vie en le rendant suspect à Pépin. Exilé à Ju-mièges 760, il fut cependant rappelé en 762 et finit par recouvrer toute la confiance du roi, qui lui rendit son abbaye et l'enrichit de nouveaux territoires. Il fut employé par Charlemagne à l'évangélisation des Saxons, et accompagna plus d'une fois les armées franques comme évêque, ce qui excita naturellement aussi les Saxons à se jeter souvent sur le monastère, 774 et 778. Charles, à son retour d'Espagne, le délivra définitivement de ce danger, mais Sturm devenait vieux et infirme, et les soins du médecin royal furent impuissants contre la maladie. Il + le 17 déc. 779, en paix, entouré de ses disciples, et fut enterré dans son église. T,anonisé 1139 par Innocent II, au concile de Latran.

2<> Sturm de Sturmeck, Jacques, né 10 août 1489 à Strasbourg, d'une famille patricienne qui comptait parmi ses hôtes et amis Geiler et Wimpfeling. Admirablement doué, il subit l'influence de ces hommes éminents et reçut leurs leçons. Après avoir fait avec eux les lettres et la théol., il se rendit à Heidelberg et à Fribourg, où il étudia le droit, qu'il continua ensuite à Paris et à Liège. En 1510 il était de retour et avait la douleur d'assister aux funérailles de Geiler. En 1514 il est membre d'une Société littéraire. En 1522 l'électeur palatin Louis Y le consulte sur la réorganisation de l'univ. de Heidelberg. Vers cette époque, ayant perdu sa fiancée, il résolut de ne jamais se marier et de consacrer toute sa vie au service de la ville de Strasbourg. En 1524 il fut, ainsi que son frère Pierre, délégué au Conseil comme représentant de la noblesse; en 1526 il en est nommé président, bourguemestre, et il le resta jusqu'à sa f 30 oct. 1553. Sous son administration la ville atteignit son plus haut degré de prospérité. En 27 ans il eut 91 fois l'honneur de représenter Strasbourg à l'étranger, aimé et considéré par François 1er comme par Charles-Quint. A l'intérieur il favorisa l'instruction publique, fonda une bibliothèque qu'il dota richement, et présida à l'introduction de la Réforme en évitant les mesures extrêmes et en s'appliquant à concilier les esprits et à calmer les passions. Il fit venir du dehors des hommes aussi distingués par leurs talents que par leur modération. Il avait été camarade d'études de Zell. La ville reconnaissante lui a élevé un monument, v. Ernest Lehr, Baum, etc.

3° Jean, né 1 oct. 1507 à Sleida, fut élevé à Liège par les Fr. de la vie commune et termina ses études à Louvain. Là, avec un ami, il fonda une imprimerie et publia des classiques grecs et latins. La vente de ses livres l'amena 1529 à Paris, où il se maria et où il fonda une maison d'éducation. Il correspondit avec Méianchthon 1533, et recommanda vivement au roi, qui le protégeait, d'appeler à Paris ce savant théologien. En 1536 il accepta l'appel que lui adressait le Conseil de Strasbourg, et il arriva dans cette ville le 14 janv. 1537. A côté des écoles il fonda un gymnase, avec une classe supérieure appelée selecta, qui devint le germe de l'université. Les écoliers affluèrent de toutes parts, nobles, comtes, princes; et les contrées voisines, Hornbach, Bâle, le Wurtemberg, la Saxe, le prièrent de venir réformer ou réorga niser leurs gymnases. Méianchthon l'appelait la lumière des écoles allemandes: l'archev. Erasme le consultait, et les jésuites eux-mêmes ne dédaignèrent pas de profiter de ses directions. 11 s'intéressa beaucoup aux réformés français proscrits pour cause de religion, et leur rendit des services qui finirent par le ruiner lui-même. Ses dernières années furent difficiles. Les luthériens stricts étaient les maîtres de la ville; le pasteur Marbach voulut se mêler de l'enseignement, puis Pappus vint à son tour, soutenu par Osiander et Andreae. Il finit par donner sa démission, qui lui fut accordée 7 déc. 1581; on lui conserva son traitement de recteur el les revenus de Saint-Thomas. Il se retira à Nordheim, avec sa 3me femme, ayant perdu tous ses enfants; il était aveugle et f 3 mars 1589. On a de lui plusieurs ouvrages latins sur la rhétorique et l'èlo-cution, et 4 livres contre Pappus.

4o Christophe-Christian, né 25 janv. 1740 à Augsbourg, fils d'un juriste, étudia à Iéna et Halle, fut pasteur à Halle, Magdebourg, et Hambourg où il f 26 août 1786. Pieux, aimable et savant, il a publié de nombreux cantiques, aimés entre autres de Beethoven.

STYLITES, du grec stylos, colonne; nom donné à certains religieux qui, pour se séparer entièrement du monde, avaient imaginé de fixer leur résidence au haut d'une colonne, où ils pouvaient se livrer k la contemplation, quelques-uns même plus ou moins k la prédication. Ils s'y tenaient debout, ce qui leur valut le surnom de stationnaires. Le chapiteau de la colonne était bordé d'une barrière, parfois même d'un mur en maçonnerie, qui leur permettait de s'appuyer. Rarement ils se permettaient, pour se préserver des intempéries de l'air, le luxe d'une couverture de peaux en guise de toit. Une échelle ou un petit escalier attenant à la colonne, les mettait en communication avec le monde. De modestes cabanes s'élevaient dans le voisinage, au service des admirateurs et des élèves du stylite. L'Inde a eu aussi des anachorètes ou fakirs de cette sorte. Les plus célèbres, dans l'Égl. chrétienne, sont: les 3Siméon,q. v., Daniel de Maratha, q. v.; Alypius, sous Héra-rlius, qui passa 70 ans sur sa colonne près d'Andrinople; Josué de Syrie au 5rae siècle; Julien au 6ra«, Nicandre, etc. C'est au 7®« et au 8me siècles que l'on en trouve le plus; il y en a cependant encore au IS1»® en Mésopotamie, peut-être même aujourd'hui parmi les jacobites. Le stylisme était devenu une mode sous le premier Siméon, et des gens riches se plaisaient k faire bâtir de belles colonnes à l'usage de saints qui n'avaient pas toujours la vocation, ni la persévérance de celui qu'ils avaient pris pour modèle.

STYRIE, un des gouvernements de la monarchie autrichienne, avec Gratz pour capitale; partie de l'ancienne Pannonie et de la Norique, au nord de l'illyrie. Ses limites historiques ont varié; son hist. se confond souvent avec celle de la Pannonie. Ses premiers habitants, d'origine celtique, reçurent d'Aquilèe les germes de l'Évangile dans le courant du 2me siècle; une tradition incertaine leur donne pour évêques et martyrs Maximilien 284 et Victorin 303, qui auraient été enterrés à Cilly et à Pettau, deux sièges épiscopaux relevant d'Aquilèe au 4rae siècle. L'invasion des barbares qui passa là-dessus ne permet pas de rien préciser; même après Virgile et Rupert la position des chrétiens resta difficile, quoique les princes se fussent convertis sous l'influence bavaroise et franque. Ce n'est qu'après Charlemagne que le christianisme s'y établit définitivement; des églises et de nombreux couvents s'y élevèrent; la Draveservit de limite entre les évêchés d'Aquilèe et de Salzbourg. La Réformation y commença 15Î5 par les prédications de Léonard Kayser à Steyer; il fut banni, puis brûlé en 1527 à Passau; puis G. Schérer et d'autres. Une émeute de paysans soulevés amena le siège et la ruine de Schlad-ming. Mais tous les efforts de l'empereur n'empêchèrent pas qu'en 15501a grande majorité de la Styrie fût devenue évangélique, et en 1552à Gratz la diète abolit la procession de la Fête-Dieu; les moines et les religieuses abandonnèrent leurs couvents. Ferdinand refusa de recon naître ce changement, et les protestants durent vendre leurs biens et partir. Leur position s'améliora sous Charles II, bon catholique, mais qui était tenu en échec par les Turcs, et le collège de Gratz, simple école fondée en 1540, fut en 1573 érigé en université, sous la direction de Chy-trâus; depuis 1593 elle compta Keppler parmi ses professeurs. Le collège des jésuites ne pul soutenir cette concurrence, mais il se maintint, grâce à la protection de l'archiduc. En 1581 la Bible fut imprimée à Wittenberg, traduction slave de G. Dalmatinus, avec l'appui des États. Mais Ferdinand II, l'élève des jésuites, étant monté sur le trône 1590, tout changea, et en 1598 les protestants furent mis hors la loi par 4 décrets successifs, leurs temples détruits, leurs livres brûlés, leurs enfants enlevés, les pasteurs condamnés à mort. La persécution fut horrible, la résistance glorieuse, courageuse, mais inutile; le protestantisme fut radicalement extirpé. Lorsque l'acte de tolérance de Joseph II, 1781. reconnut les droits de la conscience, 3 églises se retrouvèrent debout, à Ramsau, Schladrain^ et Wald; en 1822 une nouvelle église se forma à Gratz; mais c'est en 1849 seulement que de* temples leur furent accordés. Dès lors de nouvelles congrégations ont surgi, et il s'est forme en Styrie une Union protestante.

SUAIRE (le saint), v. Véronique.

SUARÈS, François, né 15 janv. 1548 à Grenade, fils d'un avocat de bonne famille. Étudiant en droit à Salamanque, il fut gagné an jésuitisme par les discours du p. Jean Ramirer entra dans l'ordre à 17 ans, ne montra pas d'abord beaucoup de dispositions pour l'étude, mais finit par réussir à force de persévérance. Prof, de philos, à Ségovie, il enseigna ensuite la théol. à Valladolid, 8 ans à Rome, 8 ans à Alcala, 1 an à Salamanque, et après avoir reçu le doctorat à Évora, il fut nommé premier prof. k Coïmbre 1597. f 25 sept. 1617 à Lisbonne, ou il s'était rendu pour intervenir entre le gouvernement et les légats au sujet de la détermination de leurs droits réciproques. Il avait une grande réputation de piété, d'ascétisme et de moralité. Il prit part aux discussions sur la grâce dans le sens moliniste, et fut l'un des chefs du congruisme, ou science moyenne, système bizarre qui semble admettre la prédestination gratuite et cependant n'admet pas la grâce efficace. Les ordres de Rome empêchèrent longtemps la publication de cet ouvrage, connu sous le nom de: De auxiliis gratiœ. Son livre: De la confession d'un absent à un absent, fut également interdit et ne put paraître qu'en fragments; il n'en fut pas moins condamné. Son principal ouvrage a pour titre (en latin): défense de la foi cathol. contre les auteurs de la secte anglicane, Coïmbre 1613, et fut dirigé contre le serment que Jacques I«r voulait imposer en Angleterre aux catholiques; il fut brûlé â Londres et à Paris. OEuvr. compl. Venise 1740, 23 vol. fo.

SUBLNTRODUCTiE (sous-introduites), ou synéisactes, nom que donnent les premiers conciles, depuis Antioche, aux femmes que les clercs non mariés installaient dans leurs maisons, pour tenir leur ménage, ou pour charmer la vie de famille, sans avoir les charges et les préoccupations du mariage. En théorie c'était très bien; c'était d'abord la mère, la tante, la sœur, une vieille amie: puis une étrangère, puis on comprit qu'il n'était pas nécessaire qu'elle fût vieille; on eut des nièces et des cuisinières, et l'abus était déjà constaté au concile d'Antioche 269. Dès lors tous les conciles eurent à s'en occuper, mais sans succès, jusqu'à celui de Trente, qui donne franchement le nom de concubines à ces femmes dont on cherchait toujours à gazer les véritables fonctions, sess. 25, chap. 14. II est évident d'ailleurs que ce désordre découle essentiellement du célibat forcé.

SUBORDINATIANISME, une des nombreuses questions soulevées dans les discussions auxquelles a donné lieu le dogme de la Trinité. Le Fils est semblable, est-il aussi égal au Père? En est-il indépendant, ou lui est-il subordonné? La formule du conc. de Nicée 325, confirmée par celui de Constantinople 381, en admettant l'égalité, sinon l'identité des 2 hy-postases, repousse le subord.; cependant différents passages du N. T. le supposent, et les arminiens, parmi les modernes, ne sont pas les seuls à l'accepter. La question ne se serait même pas posée, si l'on n'avait pas craint les ronséquences qu'on pourrait en tirer contre la divinité de J.-C.

SUDAILI, Bar, moine monophysite qui vivait vers 500 à Édesse, puis à Jérusalem: es-pece de panthéiste, qui admettait l'identité de substance de la Nature et de la Trinité, ainsi que le rétablissement final, d'après 1 Cor. 15, 28., comme Origène. Il distinguait 3 époques, d'après Luc 13, 32: l'économie actuelle, le règne de mille ans, et la fin ou l'accomplissement. D'après Xénaïas, dont le témoignage est suspect, il aurait rejeté le baptême et la cène, et se serait considéré comme le seul interprète inspiré du Saint-Esprit pour expliquer la révélation. Il est l'auteur de quelques comment, bibliques et d'un traité contre les peines éternelles.

SUÈDE, l'ancienne Scanie, primitivement peuplee de Finnois et de Goths, et divisée en 4 royaumes, reçut l'Évangile d'abord d'une manière indirecte, soit par son commerce qui la mettait en relations avec la Frise, notamment avec Dorstadt près d'Utrecht, soit par des prisonniers de guerre, et surtout par les soldats qu'elle fournissait aux empereurs d'Orient, et qui, vivant à Constantinople, apprenaient à connaître le christianisme et retournaient dans leur pays comme de vrais missionnaires. La version "d'Ulphilas prouve qu'à la fin du 4ni* siècle il y avait déjà en Suède des chrétiens. Mais c'est au commencement du 9m« siècle seulement que la mission s'établit d'une manière régulière, par les soins d'Anschar et de Willemar, 830-832; puis vint Gautbert, neveu d'Ebbon de Reims, qui obtint d'abord quelques succès, mais dut bientôt s'enfuir devant une émeute fomentée par les prêtres païens. L'ermite Ardgar essaya à son tour, mais dès 852, découragé par la mort de son ami Hérigar, le gouverneur de Birka (ou Sigtuna, près Stockholm), il retourna dans sa cellule. Après un nouveau voyage d'Anschar et l'installation d'Érimbert comme èvêque, le roi Olof, ou Olaf, autorisa de nouveau la prédication de l'Évangile et la reconstruction du temple de Birka, 860; mais il fallut encore 150 ans avant que l'idolâtrie païenne fût vaincue. Quelques archev. s'occupèrent plus de leur puissance temporelle que des progrès du règne de Dieu. Rimbert seul, 865-888 se montra animé d'un vrai zèle; puis vint Unnis 935, mais qui mourut au bout de peu de temps. Mentionnons encore Lifdag, Odinkar, Rem-brand, et quelques autres, qui travaillèrent avec-foi el bénédiction, mais dont l'œuvre fut souvent interrompue ou paralysée par des guerres. C'est seulement sous Olaf Skautkonung que le christianisme triompha définitivement, presque en même temps que sous Olaf Trygwesen en Norwège; lui-même se fit baptiser l'an 1001, et le missionnaire Jean Sigurd, venu d'Angleterre, obtint toutes les facilités pour répandre l'Évangile. D'autres missionnaires vinrent encore: Siegfried, le second apôtre du nord, f 1067; David f 1080, Eskil, etc. Les mœurs s'adoucissaient, la piraterie diminuait, et si les rois renonçaient à la violence pour imposer au peuple la foi chrétienne, ils recommandaient d'autant plus la foi par leur exemple. Upsala resta le quartier-général du parti païen. Mais le clergé brêmois, de qui relevait encore l'Égl. de Suède, venait de se rattacher à Rome, et il voulut introduire en Suède les procédés romains; deux évêques se proposèrent de mettre le feu au temple d'Upsala, et cette tentative, qui échoua, ranima la ferveur des païens; des persécutions eurent lieu, la guerre civile éclata et beaucoup de chrétiens retournèrent au paganisme. Enfin Inge, fils de Stenkil, malgré une vive opposition et après quelques insuccès, détruisit le temple d'Upsala, releva le christianisme de son oppression, le proclama la religion de l'État et supprima le paganisme, 1079. Inge II, le pieux, 1112 à 1133, bâtit des églises et enrichit le clergé. Éric Jedvarson, le saint, 1156, continua son œuvre et amena la Dalécarlie à la foi. Mais le clergé, trop riche, était devenu mondain, puis sensuel, vicieux, avare, débauché. Ce qui était resté de paganisme dans des endroits retirés, et dans les cœurs, joint au débordement des prétentions, de l'orgueil et des mœurs des ecclésiastiques, rendit à la longue une crise inévitable. La vente des Indulgences en fut, comme ailleurs, l'occasion, et comme depuis l'union de Calmar le haut clergé s'était toujours montré favorable au parti danois, Gustave-Wasa à son avènement trouva en lui un ennemi et ne se gêna pas de le traiter comme tel. Il essaya d'abord d'obtenir d'Adrien VI quelques réformes, mais n'ayant pas réussi, il chargea Anderson et les frères Péterson d'introduire en Suède la réforme de Luther. Les immenses richesses du clergé, agissant sur le peuple et paralysant le mouvement, le roi déclara 1527 à la diète de Westerœs qu'il lui était impossible de gouverner et qu'il déposerait le pouvoir s'il n'obtenait pas satisfaction; en même temps Olaf Peterson avait avec le prof, catholique Pierre Galle une discussion publique sur les questions qui agitaient la nation. Le tiers et ta noblesse décidèrent que le roi était autorisé à séculariser les biens ecclésiastiques, et le clergé se résigna, en déclarant qu'il ne cédait qu'à la force. Il fut pourvu à l'instruction populaire, et en 1529, à la diète d'Oerebro, la Réformation fut proclamée; on garda cependant encore le latin pour la liturgie, l'élévation du sacrement, les prières pour les morts et l'organisation épiscopale, qui ne furent abolis ou modifiés qu'en 1537. Le roi voyant dans l'insuffisance des évêques la cause d'une certaine opposition persistante chez le peuple, leur donna comme surin -dant un noble poméranien, George Normann, élève de Wittenberg, ce qui augmenta encore le mécontentement et donna lieu à plusieurs conjurations; Olaf Peterson et Anderson y furent compromis et perdirent leur position. Erich IV, depuis 1560, fit de la Suède un refuge pour les réformés persécutés et débarrassa l'Église de ses derniers restes de catholicisme, mais son attitude dans la ridicule question des liqueurs (peut-on célébrer la cène avec une autre boisson que le vin ?) le rendit suspect de pencher vers la doctrine réformée. Son fr. Jean III, sous l'influence de sa femme Catherine Jagellon, essaya de renouer avec Rome, favorisa les intri-tres du jésuite Possevin. passe même pour avoir abjuré secrètement, 1578, mais n'ayant pas obtenu du pape l'ombre d'une concession, il revint en arrière. La diète, beaucoup plus décidée, déclara à deux reprises, 1593 et 1595 le luthéranisme la religion de l'État, et finit par appeler au trône Charles IX, l'oncle du roi, connu par son zèle pour la foi évangélique 1604 et qui fut le père de Gustave-Adolphe. En 1663 la Form. de concorde reçut force de loi, et le luthéranisme devint la religion nationale de la façon la plus absolue et la plus intolérante. Toute dissidence était frappée de proscription et de confiscation; les ambassades de Hollande et d'Angleterre pouvaient seules célébrer leur culte à Stockholm. Ces rigueurs se relâchèrent un peu sous le roi Frédéric 1720-1751, un peu plus encore en 1779 par l'édit de tolérance, et s'étendit même aux catholiques en 1781; mais ce ne fut que de la tolérance, et malgré les progrès faits en 1862 par la loi sur les dissidents, l'on ne peut pas dire encore que la liberté des cultes existe en Suède. La vie religieuse a longtemps été paralysée par le caractère trop politique des débuts de la Réformation; au 18®* siècle elle s'éveilla sous l'influence des piétistes allemands et des frères moraves, et malgré des circonstances défavorables, le réveil a pris dans ce siècle une extension croissante. Un pasteur wesleyen, G. Scott, prêcha pendant quelques années à Stockholm en toute liberté, jusqu'à ce que en 1842 sa chapelle fut saccagée par la populace, et lui-même forcé de partir. Il y eut aussi des baptistes persécutés et jetés en prison, et jusqu'à de simples liseurs de la Bible (fitW-leters^ LœzareRmtare$). Aujourd'hui il y a progrès manifeste, surtout depuis l'avènement du roi Oscar qui, avec l'initiative de Wiesel-gren, fondateur de la mission intérieure, a commencé par réduire à quelques centaines le* 170,000 distilleries qui abrutissaient le pays. Les os secs semblent se remuer; à côté de l'archev. d'Upsal et de dix évêques avec leurs chapitres, à côté des facultés de théol. d'Upsal et de Lund, à côté des fondations ecclésiastiques el d'un clergé puissant qui forme le second ordre de la Suède, il y a des institutions libres de bienfaisance et de relèvement moral, des sociétés bibliques, un séminaire missionnaire qui date de Fjellstedt, plusieurs missions intérieures, beaucoup de chapelles indépendantes une Société d'Alliance évangélique, etc. C'est à un paysan, Nielsen Hauge, 4796, que la Norwège, et à un autre paysan, Éric Jansen, 1842, que la Suède doivent leur réveil religieux, qui fut plus tard puissamment secondé 1877 par le prof. Waidenstrœm, de Gefle.

SUGER, abbé de Saint-Denis. Né 1081 à Saint-Omer d'une famille de petite condition, il fut envoyé pour son éducation au couvent de Saint-Denis, ou il eut pour compagnon d'études celui qui fut plus tard Louis VI. Il étudia ensuite, de 1089 à 1103, à Saint-Florent de Saumur, et revint à son abbaye dont il eut à défendre les droits de la plume et de l'épée, contre les Anglais, contre Hugues du Puiset et contre l'év. de Paris. Louis, monté sur le trône 1108, le prit pour guide et pour conseiller, et n'eut pas à s'en repentir. Suger favorisa l'affranchissement des communes, organisa la justice, et défendit l'autorité royale contre les barons et contre les prétentions des papes. Dans la querelle des investitures il prit parti contre l'empereur, dans l'intérêt de la France. Nommé abbé de Saint-Denis en 1122, il ne renonça pas pour cela à la politique; mais depuis 1127 il travailla, peut-être sous l'influence de Bernard de Glairvaux, à réformer son couvent, reprit lui-même ses habits de moine et rompit avec le monde. La mort du roi et la minorité de Louis VU le ramenèrent aux affaires, pour lesquelles il avait une aptitude si remarquable, que le roi l'honora du titre de Père de la patrie. Il avait une volonté ferme et une grande droiture. 11 ne craignit pas de blâmer le départ de Louis VII pour la croisade, et encore plus son divorce. Par une inconséquence inexpliquée, il en vint à organiser lui-même une nouvelle croisade, pour laquelle il avait levé 10,000 hommes, et il se préparait à partir, quand il f 12 janv. 1151. Auteur de Mémoires sur son administration comme abbé, de Lettres, et d'une Vie de Louis VI.

SUICER, proprement Schweizer, Jean-Gas-pard, né 26 juin 1620 à Zurich, fils d'un pasteur, étudia d'abord dans sa ville natale, puis à Montauban et à Saumur, sous Amyraut, Cap-pel et La Place, et après un court pastorat en Thurgovie 1643, revint à Zurich où il se livra à l'enseignement, surtout du grec et de l'hébreu, f 29 déc. 1684. D'une érudition étonnante, il a rendu à la théol. un vrai service par le travail monumental, fruit d'un travail de 27 années, qu'il publia 1682 à Amsterdam sous le titre de: Thésaurus eccles. e patribus Grœcis ordine al-phabetico exhibens quacumque phrases, rit., dogmata, etc. On a aussi de lui: Sylloge vocum N. T. 1648, réimpr. 1744 sous le titre de: Glos-sarium Grœco-lat. N. T.; une Anthologie des pères grecs, des paraphrases sur Jonas et quelques psaumes, une étude sur le symbole de Nicée-Constantinople, une autre sur le Symbole d'Athanase, etc. La biblioth. de Zurich possède encore de lui des mss. inédits. Il chercha avec-Heidegger à faire adoucir la Formule du Consensus, dirigée contre ses anciens professeurs de Saumur.

SUIDBERT, ou Stvibert, un des onzes missionnaires qui, sous la conduite de Willibrord et à la demande du moine Egbert, furent envoyés 692 dans la portion de la Frise conquise sur Radbod par Pépin d'Héristall aux environs d'Utrecht. La mission fut heureuse et bénie. Willibrord étant parti pour Rome, où il allait chercher des pouvoirs et des reliques, ceux qui étaient restés envoyèrent Suidbert en Angleterre pour y recevoir de Wilfried la consécration épiscopale 695, de sorte que lorsque Willibrord revint, il se trouva y avoir 2 évêques dans la contrée. Le modeste Suidbert laissa la résidence à son collèque, et continua de travailler comme év. itinérant, dans le territoire compris entre la Meuse et le Rhin. Il passa de là chez les Bruc-tères (duché de Berg) et poussa jusqu'à Brunswick et Detmold. Pépin lui fit présent d'une petite île, au-dessous de Dusseldorf, Werd, qui devint Câsaris-Werda, auj. Kaiserswerth, où il fonda un couvent et une station missionnaire, et où il f vers 743.

SUIDGER de Bamberg, v. Clément II.

SUISSE. On comprend historiquement sous ce nom un ensemble de territoires si variés, de races et de langues si différentes, et qui ont eu dans l'origine des destinées si diverses, qu'on ne peut fixer pour l'introduction du christianisme dans ce pays une date unique. Si l'on tire une diagonale de Genève à Bregenz, on partage la Suisse actuelle en deux parties presque égales, dont l'une, au sud, toute montagneuse, moins riche et moins peuplée, a longtemps été dans l'orbite de Rome, tandis que la partie nord-est, a été davantage en relation avec les Allemans et les Burgondes. D'autres circonstances encore, à une époque où les communications étaient difficiles, ont contribué à ce que l'Évangile ne se propageât que d'une manière irrégulière dans ces pays qui n'avaient point de lien commun. L'ensemble de la mission s'étend sur une période d'environ 5 siècles; Genève et Saint-Gall, q. v. en sont à peu près les termes extrêmes. La nouvelle doctrine suivit, comme presque partout, les grandes routes militaires et commerciales, et sans nous arrêter à des traditions, sinon légendaires, du moins peu sûres, on peut dire qu'au commencement du 5me siècle Genève avait eu déjà 8 évêques; qu'un évêque du Valais assista 381 au conc. d'Aquilée, et en 452 un év. de Coireau conc. de Milan. Avenches a des évêques, dont en 590 Maire, ou Marius, transfère le siège à Lausanne; Ours et Victor sont vénérés à Soleure; les évêques de Vindonissa,

Windisch près Berne, sont signalés aux conc. d'Épaone 517, d'Auvergne 535 et d'Orléans 541 et 549. Bâle, Glaris, Bienne, Zurich, Lu-cerne, Constance, ont leurs traditions et leurs saints, qui remontent à cette même époque. Puis viennent, au nord-est les missions de Colom-ban et de ses disciples, Gall, Sigisbert, Ma-gnoald; puis Ursicin de Luxeuil, Germain dans le Jura bernois, Beatus dans la Suisse centrale. Sous les Carlovingiens l'œuvre de l'évangèlisation proprement dite peut être considérée comme terminée. Il y a six évêchés, Genève, Sion, Lausanne, Coire, Constance et Bâle, et de nombreux couvents, dont les principaux sont Saint-Loup, Bomainmotiers,Baulmes, Yverdun, Reirhenau, Einsiedeln, Payerne, le Saint-Ber-nard: à la lin du 13*e siècle on en compte à peu près 250. Tous se rattachent à Rome. Sauf Remedius de Coire et les moines de Saint-Gall, le niveau intellectuel et moral est peu élevé, la fondation de Pitniv. de Bâle 1460 remédie à cet état de choses. Les prétentions naturelles du clergé à la domination sont neutralisées par le caractère indépendant de la nation et par les franchises municipales; les ecclésiastiques paient les impôts comme tout le monde; la Suisse tient pour l'empereur contre Grégoire, et si l'interdit et l'excommunication sont lancés, ils sont aussi inefficaces qu'ils sont rares. Au moment de la Réformation, c'est la diète qui décrète les mesures disciplinaires contre le clergé. Depuis 1479 la Suisse possède un nonce à poste fixe. Les sommations, interdictions, excommunications de l'év. de Coire et d'autres, contre les hannetons, les sauterelles et autres insectes, montrent à quel degré de superstition l'Église était descendue; mais l'œuvre des vaudois à Berne et à Fribourg, et des figures comme celle de Nicolas de Flue disent aussi qu'une ère nouvelle allait venir. La Réformation commença dans la Suisse allemande avec Zwingli, provoquée par le trafic des Indulgences, et, comme à peu près partout, elle fut un moment compromise par les éléments impurs qui s'y mêlèrent et qui essayèrent de transformer une question toute religieuse en questions sociales et politiques. La réaction qui suivit la triste défaite de Cappel, ramena au catholicisme Soleure, Brem-garten, en partie Glaris, Thurgovie, Argovie, Saint-Gall; les colonies des cantons italiens furent persécutées et presque anéanties; Zurich même était, sinon hésitant, du moins intimidé. Mais Bullinger remplaça Zwingli; Myconius avait succédé à QEcolampade, Berne tenait ferme, Mulhouse s'était joint àlaConféd. helvétique, Farel avait remué la Suisse française, et le protestantisme regagna bientôt le terrain perdu. Le duc de Savoie qui voyait une partie de ses domaines lui échapper, essaya d'intervenir, mais Berne vint au secours de Genève et, pour mieux garantir ses confédérés contre une nouvelle surprise, s'empara en passant du canton de Vaud, qui d'ailleurs venait aussi de passer à la Réforme à la suite de la dispute de Lausanne 1536. A partir de ce moment l'œuvre est achevée; il ne reste plus qu'à la consolider; l'ère des théologiens commence avec Cal vie, Bèze, Viret, et Genève devient pour un temps la métropole du protestantisme français, avec ses doctrines arrêtées et sa rigoureuse discipline; Vaud et Neuchâtel subirent plus ou moins son influence, tandis que la Suisse allemande se rattacha plutôt à la l1^ Conf. de foi helvétique q. v. et au Consensus de Zurich. Après la mort des réformateurs il se fit une nouvelle réaction catholique sous la direction de Ch. Borromée; une partie du diocèse de Bâle et le Valais rentrèrent dans le catholicisme: François de Sales, protégé par le duc de Savoie, ramena par la violence les protestants du Chablais et du Fao-cigny; il y eut des massacres dans la Valteline 1620-1630. Les jésuites à leur tour fomentèrent les guerres religieuses, mais la seconde bataille de Vilmergen 1712 brisa pour longtemps leur pouvoir, et jusqu'en 1798 la parité confessionnelle, consacrée par la paix d'Aarau, fut respefr tée, grâce-peut être d'une part à la prudence des autorités cantonales catholiques, de l'autre à l'indifferentisme religieux qui dédaignait les différences confessionnelles, comme il dédaignait la foi chrétienne. La Suisse unitaire de 1798 à 1803 ne connut officiellement pas de religion. Napoléon releva les autels et les couvents, mais sema les germes de nouveaux conflits Avec la restauration le parti catholique releva la tête; le nonce enleva à l'évêché de Constance les paroisses suisses de son diocèse, pour les soustraire à l'influence de Wessenberg, et différents concordats statuèrent sur l'organisation des nouveaux évêchés. La France essaya à plusieurs reprises d'intervenir dans les affaires de la Suisse, mais les cantons et la Confédération résistèrent. Les articles de Bade 1834 opposèrent une digue puissante aux empiétements nl-tramontains; le canton d'Argovie finit en 184! par supprimer ses couvents qui avaient organisé une révolte armée. En 1846 la diète décréta l'expulsion des jésuites, et les 7 cantons catholiques ayant voulu former une ligue à part fie Sonderbund), cette tentative fut vigoureusement réprimée par le général Dufour. La Constitution fédérale de 1848 proscrivit les jésuites et leurs affiliés. Sa révision en 1874 renouvela cette proscription et proclama la liberté de conscience, qui existait déjà virtuellement; elle interdit aussi la fondation de nouveaux couvents. Les décrets du Vatican 1870 eurent pour effet de ranimer le zèle des catholiques et la vigilance des autorités fédérales, qui n'hésitèrent pas à bannir le vicaire apostolique G. Mermillod, envoyé à Genève par le pape 1873, et à envoyer ses passeports au nonce pour la vivacité peu diplomatique de ses réclamations. Quant au protestantisme, son clergé dévie de plus en plus vers le rationalisme, sauf au canton de Vaud, et ses principales facultés de théol., entre autres Berne et Zurich, lui sont à peu près acquises. A côté des établissements officiels, une quantité d'églises indépendantes se sont fondées dans les villes et dans les cantons où la prédication ne satisfait plus aux besoins des troupeaux; il y a 3 facultés libres de théol., à Genève, Lausanne et Neuchâtel, qui subsistent par les libéralités de leurs adhérents. On compte aussi en Suisse des Égl. wesleyennes, moraves et baptistes. La liberté religieuse est proclamée par la Constitution fédérale; malheureusement dans les mœurs elle n'existe trop souvent qu'à bien plaire, et plusieurs gouvernements cantonaux ont quelquefois refusé de la faire respecter.

SULLY, lo Maurice (de* év. de Paris 1160-1196, de parents pauvres dont il ne rougit jamais. né à Sully sur Loire, avait mendié dans son enfance. Il se distingua par son caractère et par ses talents comme prédicateur. Il concourut pour une grande part à la construction de la cathédr. de Paris, qui fut achevée sous son successeur Odon de Sully.

2° Maximilien de Béthune, marquis de Ros-ny, créé duc de Sully 1606; né 13 déc. 1560 à Rosny. Il s'attacha de bonne heure à Henri IV, qui le fit plus tard son premier ministre. Financier habile et économe, il fit sa propre fortune en même temps qu'il refaisait celle de l'État; il combattit le désordre, le gaspillage, les exactions, et supprima les sinécures et les fonctionnaires < dont on pouvait se passer. > Le roi le combla de faveurs et lui offrit même Tépée de connétable, à condition qu'il abjurât, ce qu'il refusa de faire. Comme huguenot il se montra cependant souvent tiède, plutôt préoccupé des intérêts du royaume. A la mort d'Henri il quitta les affaires, renonça à la plupart de ses charges, ne conservant que le gouvernement du Poitou et la grand'maîtrise de l'artillerie et des forêts. Louis XIH le fit maréchal 1634. f 31 déc. 1641 dans son château.

SULPICE (Saint) lo v. Sévère. 2o v. Olier.

SULZER, Simon, né 22 sept. 1508, fils naturel du doyen d'Interlaken, réussit à force de protections à faire ses études de théol., quoiqu'il ait dû un moment se mettre garçon de bains. Après avoir étudié à Lucerne, Bâle et Strasbourg, il fut placé dans le canton de Berne comme inspecteur scolaire et pasteur. Il appartenait à la tendance modérée de Strasbourg, mais après une visite à Luther 1538 il revint de Wittenberg luthérien décidé, quoique moins âpre que beaucoup de zélotes de cette époque, et il chercha à faire prévaloir ses idées d'abord à Berne où il enseignait la rhétorique et la théol., puis à Bâle où il fut appelé depuis 1548 comme pasteur, professeur, antistès et docteur en théologie. Pour obtenir ce dernier titre il eut à répondre du fait de sa naissance irrégulière, et il ne s'en tira qu'en affirmant que son père avait fait un mariage de conscience, qu'il se proposait de faire légitimer par l'Église dès qu'il le pourrait (il était né d'un prêtre et avant la Réforme). Il travailla avec persévérance, non sans succès, à pousser Bâle dans la voie du luthéranisme, fit abandonner la Conf. de foi bâ-loise, empêcha l'adoption de la conf. de foi helvétique et préparait l'adhésion à la Form. de concorde, mais là il rencontra une vive opposition. Après sa f 22 juin 1585, l'Égl. de Bâle, sous la conduite de Grynâus, rentra dans le courant réformé.

SUMMIS desiderantibus affectibus, titre de la bulle d'Innocent VIII, du 4 déc. 1484, qui fixait la procédure à suivre contre les sorciers, les assimilant aux hérétiques et donnant pleins pouvoirs aux inquisiteurs, Elle donna naissance au Malleus de Sprenger, q. v.

SUNNA, Sunnites. A côté du Coran, qui est la parole écrite, les musulmans ont une tradition, Sunna, qui fixe certaines lois ou règles, et à laquelle quelques-uns accordent une aussi grande autorité qu'au texte même. Les sunnites reconnaissent comme véritables successeurs de Mahomet les califes Abu Beker, Omar et Oth-man qui, selon eux, ont reçu verbalement ou par écrit, les enseignements supplémentaires du prophète, tandis que les chiites, le parti contraire, ne reconnaissent comme autorités que le 4m<> calife, Ali, et les descendants directs de Mahomet. Les sunnites sont en majorité en Turquie, en Égypte et sur les rives de la Méditerranée; ils se divisent en 4 sectes, nommées des noms de leurs fondateurs, hanbalites, sha-féites, malékites et hanéfites, mais qui sont toutes regardées comme orthodoxes. Il existe 6 recueils ou collections de la Sunna.

SUPERSTITIONS, croyances religieuses nées en général de l'ignorance des lois qui gouvernent l'univers. Quand l'esprit constate un fait qui dépasse les bornes de ses connaissances ou de ses expériences habituelles, ne distinguant pas ce qui est naturel de ce qui est surnaturel, il est disposé à l'expliquer par l'intervention de pouvoirs mystérieux, occultes, bons ou mauvais; de là les fées, les génies, les esprits, les revenants, les sorciers, la magie, toutes les my-thologies, les oracles, souvent les songes, les pressentiments, les sympathies, la seconde vue, etc.: puis dans la pratique des guérisons extra-

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ordinaires, qu'on peut expliquer, mais qu'on ne peut nier, des surexcitations nerveuses, un développement considérable de la sensibilité, et des phénomènes étranges, dont le charlatanisme n'a pas manqué d'user et d'abuser aux dépens de la crédulité.

SUPER VILLE, Daniel (de), descendant d'une famille du Béarn venue en France à la suite de Henri IV. Né à Saumur août 1657. il y fit de brillantes études classiques et se rendit 1677 à Genève, où il étudia la théol. sous Mestrezat, Turrettini et Tronchin. Il fut 1683 nommé pasteur à Loudun, où il resta 2 ans, puis après la Révocation, il passa à Rotterdam 1686 où il exerça un long, modeste et béni ministère jusqu'en 1725, ayant refusé de brillants appels à Berlin et Hambourg. Accablé d'infirmités il donna sa démission et fut remplacé par son fils aîné, Daniel. Il f 9 juin 1728, universellement regretté. Outre 5 vol. de sermons très appréciés, il a laissé un Catéchisme, un Manuel pour les communiants, et des Lettres sur les devoirs de l'Égl. affligée.

SUPRALAPSAIRES, v. Infralapsaires.

SUPRANATURAUSME, est dans le sens général cette conception du christianisme qui voit en lui une révélation directe de Dieu reposant sur des faits historiques; sous ce rapport, il est l'opposé à la fois du naturalisme et du rationalisme. Dans un sens plus restreint on désigne sous ce nom la tendance opposée au rationalisme philos., ou éthique, de Kant, qui, depuis la fin du siècle dernier, était devenu à la mode chez les théologiens, surtout luthériens. Avec la prétention de donner de nouvelles bases à la dogmatique, ce supranaturalisme tout intellectuel méconnaît les vraies relations du monde avec Dieu et l'action de Dieu sur la vie et l'histoire de l'humanité. Ce n'est plus l'Évangile pur et simple, c'est une conception particulière du mode d'après lequel l'enseignement révélé a été communiqué aux hommes. On l'oppose cependant au rationalisme en ce sens qu'il admet une révélation supérieure à la raison. Reinhardt, Planck et Bretschneider en sont les représentants.

SURÉROGATOIRES, v. Œuvres.

SURIUS, Laurent, né 1522 à Lubeck (Suyr de Lubeca), fils d'un orfèvre, étudia à Francfort s. l'Oder et à Cologne, où il se lia avec Ca-nisius, entra 1542 dans l'ordre des chartreux et combattit avec violence le protestantisme, qu'il assimilait à l'islamisme. Pieux d'ailleurs, savant, écrivant bien le latin, il obtint les éloges de Pie V pour ses Vies des Saints, 6 vol. f°, Cologne, 1570, et l'autorisation de se consacrer entièrement à ses travaux littéraires. On a encore de lui un Comment, abrégé des événements qui se sont passés de 1500-1564, écrit en réfutation de Sleidan, mais faible et rempli de récits absurdes contre les réformateurs, que Seckendorf a relevés dans son Hist. du luthéranisme; quelques Homélies et Discours de docteurs célèbres sur des textes pour tonte l'année, une Hist. des conciles généraux et provinciaux, diverses traductions, etc. f 23 mai 1578.

SURNATUREL, ce qui est en dehors et an-dessus des lois ordinaires de la nature. Il existe un ordre de choses stables, bien constaté par la science, des lois fixes, un ensemble de causes et d'effets dont chacun admet l'existence, et en dehors duquel le monde ne saurait ni se développer, ni se maintenir. C'est l'ordre naturel. Peut-on croire, comme la Bible le dit, qu'il y ait eu dans l'histoire des événements produits autrement que par ces causes naturelles? C'est une question qui ne peut être examinée qu'autant qu'on reconnaît un Dieu personnel, libre et créateur. Hors de ce postulat il n'y a pas de discussion possible. Pour le panthéisme comme pour l'athéisme la question n'existe pas; elle ne se pose que pour les théistes, mais là même elle rencontre des solutions et se heurte à des objections diverses, d'autant plus nombreuses que l'idée même de Dieu est plus vaste et pins complexe. Plusieurs acceptent Dieu, mais nient le miracle, le surnaturel, qu'ils regardent comme une violation des lois de la nature, comme une rupture violente, comme un désordre fondamental. Ils contestent, sans le prouver, qu'une force nouvelle puisse trouver place et fonctionner à son tour au milieu des lois qu'ils invoquent. Ils oublient que parmi les lois connues, il eu est qui peuvent à un moment donné se neutraliser les unes les autres, sans qu'il en résulte aucun désordre.

On a combattu le surnaturel au nom de l'immutabilité et de la prévoyance de Dieu. Changer les lois qu'il a faites lui-même, dit-on, c'est se contredire; c'est reconnaître aussi que le monde a été mal fait, et que son oeuvr a besoin d'être retouchée. Mais si la volonté centrale de Dieu est le bien, la beauté, la perfection, elle ne change ni ne se contredit en se manifestant sous des formes diverses appropriées à des besoins différents et à des circonstances particulières. Quant à l'objection que l'ouvrier qui doit remanier son ouvrage est un mauvais ouvrier, elle fait complètement abstraction du mal qui s'est introduit dans le monde. Dieu avait créé l'homme bon, nuis libre, et c'est en vue d'un état normal qu'il avait donné ses lois. L'homme a usé de sa liberte pour mal faire, et c'est quand il a troublé ainsi l'œuvre de la création et infiltré du poison dans toutes les sources vivifiantes, quand il a élevé des idoles sur les ruines du monothéisme, quand i! va se précipitant, lni et les générations futures, dans le désordre et les ténèbres d'un avenir inconnu; quand il sème à pleines mains une graine qui de génération en génération augmente la confusion et corrompt les âmes immortelles; quand au milieu de ce péle-méle de toutes les passions, quand dans ce dérèglement général, Dieu intervient directement pour arrêter la gangrène et sauver l'humanité qui se perd, c'est alors qu'on viendrait lui dire: Tu es un mauvais ouvrier; ton travail est à refaire ! Sans doute Dieu aurait pu créer l'homme impeccable, lui imposer l'innocence, le priver de sa liberté; mais il n'y aurait plus eu alors ni bien, ni sainteté, ni vertu chez l'homme; et Dieu lui-même n'aurait sauvegardé sa prévoyance qu'au prix de sa miséricorde et de son amour; sa puissance même aurait été bornée, puisqu'il n'aurait pas eu le droit de créer des êtres libres. Le surnaturel n'est donc pas un bouleversement de l'œuvre du Créateur; il en est au contraire la restauration possible à certains moments critiques; il est le remède à côté du mal.

Quant à la ligne qui sépare le naturel du surnaturel, on ne peut pas la déterminer d'une manière certaine. Toutes les sciences ont fait des progrès, et chaque année elles en font de nouveau; mais elles arrivent toujours à un point où la cause première leur échappe, Dieu qui a donné à tous t la vie, le mouvement et l'être. » Et s'il est insensé de croire au surnaturel, est-il beaucoup plus sensé d'aller de l'avant et de nier ou d'affirmer avec aplomb, quand on ne peut ni définir la vie, ni expliquer l'origine du mouvement. Les vrais savants sont toujours modestes, parce qu'ils ont vu qu'il y a des bornes à la science; ces bornes peuvent reculer devant l'étude, comme l'étendue recule devant le perfectionnement des instruments d'optique, mais le sage pressent qu'il y a toujours quelque chose plus loin, là derrière, au delà. Même dans le domaine de la biologie et de la psychologie il y a des choses qu'on ne comprend pas, des forces dont on ne se rend pas compte; il y a les nerfs, les pressentiments, la seconde vue, le magnétisme, les sympathies et les antipathies, les influences; en un mot il y a dans l'homme des mystères, des forces et des faiblesses qui ne s'expliquent ni par la physique, ni par les mathématiques, ni par la logique, et que l'on est bien forcé d'admettre sans les comprendre. L'histoire est pleine de faits étranges, et quelque envie qu'on ait de les nier, on ne le peut en présence de l'évidence et des preuves. Et l'on voudrait que celui qui gouverne le monde et qui avait fait l'homme droit, restât seul inerte, désarmé, sans force, en présence de son œuvre désorganisée par le péché ! Pour combattre en théorie le surnaturel, on devrait d'abord établir sur des bases solides ce que c'est que le naturel, prouver qu'on le possède et qu'on le connaît tout entier, et établir qu'il n'existe pas d'autres lois ou d'autres forces qui permettent à Dieu d'intervenir quand il le juge convenable. Depuis les Bacon, les Newton, les Pascal, les Leibnitz, les Keppler, jusqu'aux De la Rive, aux Dumas, aux Pasteur, ceux qui ont sondé les cieux ou la terre ont reconnu qu'il y a partout des lois admirables de régularité, mais soumises à un législateur qui a fait les lois pour l'homme, et non pas l'homme pour les lois. V. Riggenbach, Vie de Jésus; Godet, les Miracles de J.-C.; E. Naville, la Vie éternelle; Poulain, Rép. à M. Réville; Hermann Bost, Essai sur le Miracle, etc. J.-J. Rousseau dit, dans sa 3m« Lettre de la Montagne: « Si un homme affirmait que Dieu ne peut pas faire de miracle, ce serait lui faire trop d'honneur que de le punir; il suffirait de l'enfermer. •

SUSON, Henri, mystique, né 21 mars 1300 à Uberlingen (Constance?), d'un père militaire appartenant à la famille de Berg, et d'une mère pieuse, Siuse ou Stlss, dont il prit le nom, parce qu'elle avait exercé sur son âme une grande influence; elle f 1318. Il entra en 1313 comme novice au séminaire des prédicateurs de Constance, et se rendit ensuite à.Cologne pour étudier la théologie. Après sa conversion, due en partie au mystique Eckhart, il crut devoir à 18 ans renoncer à la science et il rentra dans son couvent pour s'y livrer, au milieu de beaucoup de macérations, à la recherche de la sagesse éternelle. C'était plutôt un poète qu'un penseur, et sa philosophie était plutôt du quiétisme. A 40 ans il quitta le couvent, dont un moine à moitié fou l'avait accusé d'avoir empoisonné la fontaine, et il se mit en relation avec les mystiques du HauURhin, notamment Tauler et Henri de Nôrdlingen. Il se lia aussi avec les amis de Dieu, et fonda une confrérie de la sagesse éternelle, f 25 janv. 1365 à Ulm, dans le couvent des dominicains où il fut enterré. Son tombeau ayant dû être ouvert en 1613, il en sortit, dit la chronique, un parfum délicieux. On a de lui un livre de la Sagesse, un autre de la Sagesse éternelle, 11 Lettres, et son Autobiographie, écrite par lui pour Élisabeth Stâglin, dominicaine au couvent de Ttfss, près Winterthour.

SUTRI, petite ville des États de l'Église, non loin de Viterbe, évêché depuis 487. Il s'y tint le 20 déc. 1046 un concile convoqué par Henri III pour mettre lin au schisme des 3 papes, accusés de simonie. Sylvestre III et Benoît IX furent destitués; Grégoire VI, qui présidait, fatigué des intrigues de cardinaux ambitieux, donna sa démission et fut remplacé par Clément II. Ce fut, sous l'influence allemande, le commencement d'nne ère plus calme et plus honnête pour la papauté.

SWÀNTEWIT, v. Rugen, Slaves.

SWEDENBORG (de), Emmanuel Swedberg, né 29 janv. 1688 à Stockholm, fils de l'év. de Skara, Vestrogothie, richement doué, très bien élevé, saisit de bonne heare le christianisme par son côté pratique. Il étudia Ja-4héofc, les langues et les sciences exactes et naturelles, voyagea beaucoup, et à son retour se fixa à Upsal. A 27 ans il publia son: Dédale hyper-boréen, dissertations scientifiques, qui fut fort remarqué, et en 1716 Charles XII le nomma assesseur des mines. Il fit de nombreuses découvertes en métallurgie et en mécanique, et en 1719 Ulrique-Éléonore lui conféra des lettres de noblesse sons le nom qu'il a illustré, ce qui lui donna une place dans les États du royaume. En 1734 il publia 3 in-fol. sur des questions métallurgiques et philos., dans lesquels on trouve déjà le germe des idées sur l'univers, qu'il développa plus tard. En 1738 nouvelles études sur l'Economie du règne animal. Il est nommé membre de la Soc. des sciences de Stockholm, et associé de l'Acad. de Pétersbourg. Il visite l'Allemagne, l'Italie, la France et l'Angleterre, et pendant un séjour à Londres, 1743, sous l'influence de ses constantes préoccupations, il a une vision, des révélations d'en-haut; Dieu lui dit: Je suis te Seigneur, Créateur et Rédempteur; je t'ai choisi pour faire connaître aux hommes le sens intérieur et spirituel des saintes Écritures; je te dicterai ce que tu dois écrire. Dès lors, sans renoncer complètement à la science, sa vie prit une direction nouvelle et il se consacra aux études bibliques, philos, et mystiques, s'appliquant à connaître et à définir des choses qui échappent à l'entendement humain. Il ne devint pas un hérétique, puisqu'il conserva les grandes bases de l'Évangile, la foi à l'inspiration de la Bible, la doctrine du péché, la divinité de J.-C., l'action de Dieu sur l'&me par le Saint-Esprit, l'immortalité heureuse ou malheureuse. Il ne se posa pas non plus en chef de secte, puisqu'il resta dans l'Égl. officielle, tout en ayant des réunions à lui; il conservait les deux sacrements institués par J.-C. et n'innova pas en matière de cérémonies ou de culte. Ce qui le caractérise plutôt, c'est l'interprétation qu'il donnait des doctrines reçues, et surtout quelques vues particulières qu'il avait sur le monde. sur ses rapports avec Dieu, et sur les anges bons ou mauvais. Il admettait l'unité entière de l'univers, mais avec un constant parallélisme, Dieu et le monde, le bien et le mal, le spirituel et le matériel, le macrocosme et le microcosme. Jésus était Jéhovah lui-même, ayant pris la nature humaine, mais pour la diviniser; en lui résidait corporellement toute la plénitude de la divinité, Col. 2, 9. Il renfermait en lui-même la Trinité, étant à la fois Père, Fils et Saint-Esprit, Jean 12, 44. 45. La mort de Jésus n'était pas une expiation, mais le triomphe définitif de la lumière sur les ténèbres et l'écrasement de la puissance du mal. La Bible est inspirée dans toutes ses paroles, mais l'homme naturel n'en comprend que le sens matériel; le sens spirituel n'est saisi que par l'homme régénéré, et il faut la communication directe de Dieu pour arriver au sens céleste. Quant à la sanctification, l'homme ne peut rien sans la grâce de Dieu, mais il doit cependant faire tous ses efforts, comme si tout dépendait de lui. Ce qui fait l'originalité et la spécialité de son système, ce sont ses idées sur les rapports de l'homme avec le monde invisible; tout se tient, et chaque homme est en relations avec des esprits, anges ou démons; s'il n'en a pas toujours conscience, c'est faute d'attention ou de réflexion; suivant qu'il écoute les uns ou les autres, il s'améliore ou se corrompt davantage. Il admet que l'âme humaine a la forme du corps, mais toujours plus fine et plus spirituelle a mesure que l'homme se purifie.7 Il y a là tous les éléments de ce qui est devenu plus tard le spiritisme, q. v. Le monde n'a pas été créé de rien, mais d'une émanation de la substance divine, de Dieu qui a fait de l'univers visible le dépositaire et le représentant de sa sagesse, particulièrement dans l'homme, et de son amour, particulièrement dans la femme. Swedenborg continua de remplir ses fonctions jusqu'en 1747, donna sa démission, se retira avec une demi-pension, refusa les honneurs nouveaux qui lui furent offerts, et séjourna dès lois tour à tour à Londres où il avait de nombreux sectateurs, à Amsterdam où il publia de nombreux écrits, et à Stockholm où il compta toujours de précieux amis. Ses qualités de cœur et d'esprit, le charme et la noblesse de sa personne et la haute position de ses protecteurs le défendirent contre les procès de tendance que plus d'une fois une partie du clergé aurait voulu lui faire, + 29 mars 1772. Outre ses livres scientifiques il a laissé un grand nombre nombre d'ouvrages, qui ont été trad. en français, en anglais et en allemand; les principaux sont (en latin): Les mystères célestes; Le ciel et l'enfer; Le jugement dernier; la Nouvelle Jérusalem; Doctrines de la nouvelle Église, et surtout: la Vraie religion chrétienne, où il résume ses idées sur la foi. D'autres sont restés en mss. dans les biblioth. de Stockholm et d'Upsal. Sa doctrine, par ce qu'elle a de fantastique et de mystérieux, se répandit rapidement, et ses adhérents se constituèrent en secte, ou pelite Église, sous le nom de swedenbor-giens, tout en continuant de demeurer dans l'établissement officiel; ils comptaient parmi leurs membres le duc de Sôdermanland et le prince qui devint Charles XIII. Mais c'est en Angleterre surtout que la Nouvelle Jérusalem trouva un terrain bien préparé, et qu'elle prit un développement remarquable. De hauts dignitaires ecclésiastiques se prononcèrent en sa faveur, Hartley recteur de Winwick, John Clo-wes recteur à Manchester, etc. Les sectateurs se comptaient par milliers, les livres se vendaient par cent mille. Une première église fut bâtie à Great Eastcheap, Londres, 1788, et maintenant il y en a en Angleterre dans les principales villes, en tout plus de 50, avec écoles, sociétés missionnaires, soc. des Traités, etc. Il y en a aussi en Suède, aux États-Unis <70 congrégations), an sud de l'Afrique, etc. Ils ont plus de 10 journaux, et plusieurs séminaires. En Allemagne leur principal représentant a été Tafel, de Tubingue, f 1863, auteur de divers ouvrages sur ce sujet; puis L. Hofacker, procurateur à Tubingue, et Tafel jeune, rédacteur d'un journal. OEuvr. trad. en fr. parMoët. Vie et Notice, par Matter, Paris 1863.

SWETCHINE (Madame). Sophie Soymonof, née 1782 à Moscou, d'une vieille famille russe; mariée à 17 ans au général Swetchine qui en a 42. Le milieu dans lequel elle vivait, la cour de Paul Ier, la guerre, les émigrés, tout éveillait en elle des idées et des besoins religieux. Sous l'influence de Joseph de Maistre elle se fit catholique, et se fixa à Paris depuis 1816 jusqu'à sa f 1859, réunissant dans son salon tous les représentants du catholicisme libéral, Monta-lembert, Lacordaire, Tocqueville, etc. Auteur de quelques écrits mystiques et fortement pensés: la Vieillesse, la Résignation. M. de Falloux a publié sa vie et ses œuvres, V. aussi Sainle-Beuve, et Schérer. Bonne et charitable, remarquable par l'élévation de son caractère, elle ne l'était pas moins par son esprit et la beauté de son intelligence, qui lui faisait pardonner un faible qui lui était resté pour les petites superstitions de son culte.

SYDNEY, ville d'Australie, fondée 1787, archevêché catholique depuis 1842, avec Hobart-Town et Adélaïde pour suffragants; il a fait venir d'Italie de nombreux prêtres et religieux, mais a rencontré beaucoup de difficultés. Ses missionnaires n'ont obtenu aucun succès chez les indigènes, et les paroisses se composent surtout d'Italiens et d'Irlandais émigrés. , SYLLABUS, le dernier manifeste du catholicisme romain avant le conc. du Vatican. Il porte la date du 8 déc. 1864 et la signature de Pie IX. C'est une rupture définitive avec l'esprit, le monde moderne et la civilisation; c'est le désaveu officiel et complet de tous les efforts tentés par Bordas-Demoulin, Huet, Ozanam, Montalembert et autres grands cœurs, pour réconcilier le 19®* siècle avec le catholicisme. Un concile venait d'avoir lieu à Malines, dans lequel des voix généreuses, dévouées au saint-siège, avaient plaidé la cause de la tolérance et de la liberté. L'entourage de Pie IX lui dicta cette réponse, acte de folie autant que de courage, bravade inutile, qui fut comme un coup de foudre pour tous les catholiques religieux non militants, et qui venait confirmer ce que le protestantisme n'a cessé de répéter, que le catholicisme ne peut se concilier avec aucune liberté, sans abdiquer par le fait même. Grégoire XVI, en 1832, dans sa Bulle Mirari vos, avait déjà fait ou renouvelé sa déclaration de guerre, mais Pie IX s'était promis de le dépasser et il y a réussi. Le document se compose de 3 parties: 1<> la circulaire, ou encyclique, adressée à tous les patriarches, primats, archev., évêques, etc.. dans laquelle il condamne d'une manière générale toutes les conquêtes de l'esprit moderne; 2° le syllabus, dans lequel il énumère, pour les condamner et les anathéma-tiser, 80 thèses ou propositions admises comme autant de principes vrais par la société et les législations contemporaines; 3° la proclamation d'un mois d'indulgences pour 1865, sous la forme d'un jubilé. Le syllabus condamne en 10 chapitres la révolution et l'incrédulité, mais il range tout sous ces titres: le naturalisme et tous les genres de rationalisme, l'indifféren-tisme, le socialisme, le protestantisme, les sociétés secrètes, les sociétés civiles, la liberté de conscience, le libéralisme politique, l'indépendance réciproque de l'Église et de l'État, le mariage civil, etc. Il rappelle même les vieilles notions sur la sorcellerie, et revendique le droit pour l'Église de sévir contre les sorciers. L'effet fut terrible, et le monde catholique fut consterné. A Naples on brûla publiquement cette pièce. L'Autriche, la France, l'Italie, le Portugal, la Prusse, la Russie en interdirent la publication officielle; l'Espagne ne l'autorisa qu'en prétextant la liberté de la presse; et s'il y eut dans le clergé de grandes défaillances, ce n'en fut pas moins dans plusieurs pays le commencement ou l'aggravation de cette révolte qui a reçu le nom de catholicisme libéral, ou deKul-turkampf.

SYLVAIN, ou Silos, 1° surnom apostolique choisi par Constantin, fondateur de la secte des Pauliciens; v. Al. Lombard, p. 12 et suiv. Lapidé 684 par ordre de l'empereur; son fils adoptif, Juste, lui jeta la première pierre. Sy-méon, qui présidait à l'exécution, se convertit et, sous le nom de Tite, remplaça bientôt Sylvain comme chef de la secte. — 2<> Antitrini-taire du Palatinat, aussi relâché dans ses mœurs que dans sa doctrine, et censuré pour son immoralité par Jean Casimir, qui ne lui était d'ailleurs pas opposé. Inspecteur ecclésiastique à Ladenbourg, il s'opposa avec Éraste à l'introduction de la discipline, et combattit en juin 1568 les conclusions de l'anglais Wither à Heidelberg. Il travailla avec ardeur en faveur de son parti, mais à la diète de Spire 1570, on découvrit qu'il intriguait avec les antitrinitai-res de la Transylvanie, notamment avec Blan-drata, et que même son ami Neuser avait correspondu avec le sultan. Lorsque l'empereur fut informé du fait et qu'il en eut les preuves écrites, il fit emprisonner les deux amis. Neuser réussit à s'enfuir; il se retira à Constantinople où, d'abord turc, puis athée déclaré, il finit par mourir d'une maladie honteuse. Sylvain fut condamné sous le double chef de blasphème et de trahison, et eut la tête tranchée à Heidelberg, 23 déc. 1573.

SYLVESTRE 1° né à Rome, pape du 31 janv. au 31 déc. 314. f 335, protégé par Constantin. C'est la fin des persécutions impériales. Sous son pontificat, mais en dehors de son initiative et de son concours, se réunit le premier grand conc. écuménique, celui de Nicée 325. Commencement de l'hérésie des donatistes. La légende fait remonter à cette date la prétendue donation de Constantin qui sert de base à la puissance temporelle des papes. C'est lui qu'on fête le 31 décembre.

2° Sylvestre II; le premier pap3 français, Gerbert, né vers 930 d'une famille obscure à Ànrillac, Auvergne, élevé dans un couvent de sa ville natale, compléta ses études en Espagne auprès de maîtres arabes, entra dans l'ordre des bénédictins, et fut successivement le précepteur d'Othon III, fils d'Othon H, et de Robert, fils de Hugues Capet. Abbé de Bobbio, il fut nommé archev. de Reims, en remplacement d'Arnouid, ou Arnulphe, déposé, 992; puis archev. deRa-venne997, enfin pape sous l'influence d'Othon III, 999. Il avait combattu énergiquement au concile de Reims les prétentions des papes; une fois sur le trône il changea de principes. C'était l'homme le plus savant de son siècle, dit-on, en mécanique, géométrie, astronomie; il introduisit en Europe l'horloge à balancier et l'usage des chiffres arabes (aussi l'a-t-on accusé de sorcellerie). On a de lui quelques opuscules et 149 épitres. C'est lui qui le premier mit en avant la folle et grandiose idée des croisades, f 12 mai 1003. Il avait beaucoup voyagé, en France, en Espagne, en Allemagne et en Angleterre. Il rêva avec Othon la domination universelle, l'un possédant le pouvoir temporel, l'autre le pouvoir spirituel; il prit lui-même le titre de iummus et universalis papa; mais ce rêve ne pouvait se réaliser qu'à la condition d'une entente complète et constante. Vie, par Richer; v. aussi DœlUnger,Hefele,GregoroTios.

3° Sylvestre III, antipape 1043. Évêque de Sabine, élu en remplacement de Benoît IX que les Romains dégoûtés de ses crimes venaient de chasser. Il ne dura que 3 mois et fut à son tour expulsé de Latran par Benoit qui avait repris le dessus. Deux autres antipapes, Jean XXII et Grégoire VI lui sucédèrent, jusqu'au moment où un concile, convoqué par Henri III, mit fin par des destitutions à ce pontificat à trois têtes, 1046.

SYLVESTRIENS, ordre fondé 1231 par Sylvestre Gozzolini, né 1771 à Osimo, Etats de l'Église. Chanoine de sa ville natale, mais tristement frappé de la vanité des choses terrestres, il se retira dans une solitude où quelques amis vinrent le rejoindre; ils b&tirent un couvent, adoptèrent la règle de Benoît, et furent reconnus 1247 par Innocent. Robe, scapulaire, capuchon, manteau brun-foncé. Il f dans un âge avancé. Il y eut aussi des sylvestriennes. L'ordre n'ayant pas un but précis, a touj. eu peu d'adhérents, et s'est deux fois fondu dans d'autres ordres. Il en existe encore quelques restes en Italie, à Ancône, Pérouse, etc. Jeûnes sévères, et de temps en temps des flagellations.

SYMBOLES, tout ce qui dans l'A. T. figurait d'une manière matérielle et sensible des choses spirituelles, promesses ou doctrines; ainsi les sacrifices, le tabernacle, les vêtements sacerdotaux, le voyage dans le désert; v. Dict. de la Bible, art. Types. Le N. T. a déterminé pour la foi des fidèles deux symboles, le baptême et la cène. La primitive Église affectionnait les symboles dans la vie journalière, dans l'ornementation des maisons; elle les empruntait à l'histoire sainte, mais sans y rattacher d'idées superstitieuses. Plus tard, quand survinrent les persécutions, les symboles furent un signe de ralliement, compris des seuls initiés; on les avait gravés d'abord sur les coupes, les vases, les bagues, on les mit sur les tombeaux dans les catacombes; c'étaient un pêcheur, une barque, une colombe, une vigne, un poisson, la croix, etc. L'Apocalypse même renferme de nombreux symboles relatifs à l'état de l'Église d'alors; il eût été trop dangereux de tout dire en un langage précis, et d'annoncer eu termes propres la chute de Rome et de l'empire; toat est voilé, symbolisé sous la forme de bétes ou de chiffres. Mais peu à peu, comme tout se gâte, le symbole tourna à l'énigme ou à la légende, on inventa saint Georges terrassant le dragon, le lys et la rose représentèrent Marie, un nimbe entoura la tête des saints, etc. — On donne aussi le nom de symboles, ou livres symboliques, aux écrits petits ou grands, qui représentent avec une autorité convenue la foi d'une Église; ainsi les décrets des premiers conciles relatifs à la foi s'appellent symboles, le nom de canons s'appliqnant surtout aux arrêtés qui concernent le culte et la discipline. Les protestants se servirent plutôt d'abord du mot de Confession de foi, mais depuis la Formule de concorde on employa aussi le mot de symbole. La Conf. de foi d'Augsbourg, l'Apologie, les articles de Smalcalde et le catéchisme de Luther, sont les livres symboliques du luthéranisme; la Conf. de foi de La Rochelle, les actes du synode de Dordrecht, le catéchisme de Heidelberg, ont été admis par diverses égl. réformées comme leurs livres symboliques; l'Église anglicane a ses 39 articles et ses liturgies; l'Égl. grecque catholique a le livre de P. Mogilas 1642; l'Égl. catholique a les décrets des papes et des conciles qui se modifient ou se complètent de temps à autre par des bulles ou des décrets nouveaux. — La Symbolique est l'étude des symboles, et désigne naturellement 2 sciences distinctes, suivant le double sens du mot symbole; mais on l'entend le plus souvent dans le second sens, comme l'étude comparée des dogmes des différentes églises. Objectivement elle appartient à l'hist. ecclésiastique; subjectivement, à la dogmatique.

SYMMACHIENS 1° Secte mentionnée par Philastrius, comme attribuant au diable la création du corps et recommandant d'en abuser le plus possible; ils niaient aussi tout jugement de Dieu. Elle remonterait à un certain Patricius de Rome. Étymoiogie inconnue. 2® Autre secte d'un caractère ébionite, d'après Ambroise, et qu'Augustin rattache aux Nazaréens; ils avaient la loi et la circoncision, mais aussi le baptême.

SYMMAQUE 1° Samaritain distingué du temps de Septime Sévère; froissé peut-être de n'être pas suffisamment apprécié de ses coreligionnaires, il passa au judaïsme; il traduisit les livres canoniques de l'A. T., s'attachant au sens plutôt qu'aux mots; sa version, très appréciée, a été reçue par Origène dans ses Hexaples. Eusèbe et Jérôme en font un ébionite, et quel-ques-uns le font le chef des symmachiens, q. v.

2° Quintus Aurelius S., né vers 330, questeur, préteur, pontife, préfet de Rome; païen zélé, orateur très éloquent, réclama de Gratien et de Valentinien II le rétablissement de la statue de la Victoire, que Constantin avait fait enlever du Capitole. Combattu par Ambroise, il fut banni par Théodose, mais rentra en grâce et fut nommé consul 391. On a de lui 965 lettres, et sa Requête pour le maintien de la religion païenne.

3° Pape 498-514, Sarde de naissance, accusé de crimes horribles par son rival Laurent, triompha de lui grâce au roi goth Théodoric. 11 fut absous par le concile de Palma. Il se montra ardent contre l'eutychianisme, le nestoria-nisme, et l'Hénoticon de Zénon.

SYMPHORIEN, d'Autun, fils de Fauste, jeune chrétien d'une éducation distinguée, refusa dans une fête d'adorer la statue de Cybèle et fut emprisonné, puis frappé de verges. Comme sa mère l'exhortait à persévérer, il fut conduit devant les portes de la ville, décapité, et son corps enterré dans un champ; une cellule d'abord, puis une chapelle fut élevée sur son tombeau, et l'on dit qu'il s'y fit des miracles. Canonisé. Son martyre eut lieu le 22 août 270, ou 280, selon d'autres 179.

SYMPHOROSA, veuve du tribun martyr Gé-tulius, de Tivoli. La légende raconte qu'Adrien s'étant fait bâtir une villa, comme on l'inaugurait les démons se plaignirent du supplice que leur imposaient les constantes prières de cette femme. L'empereur la somma de renier sa foi, et sur son refus la fit fouetter, pendre au temple d'Hercule par les cheveux, et finalement noyer avec une pierre au cou. Son fr. Eugène pourvut à ses funérailles. L'emp. fit ensuite prendre ses 7 fils, les fit attacher à un poteau et percer en différents endroits du corps; le plus jeune fut scié en long. Les cadavres furent jetés le lendemain dans une fosse, que l'on montre encore sous le nom de: Aux sept morts vivants. Ce petit roman rappelle trop la mère des Maccabées.

SYNCELLE, v. Georges 3<>.

SYNCELLES (compagnons de cellule), dignitaires ecclésiastiques, qui forment souvent chez les grecs l'entourage de l'évêque; peut-être d'anciens amis de couvent, peut-être des gardes du corps chargés de le protéger en cas de danger ou d'émeute, dans des temps difficiles; peut-être des conseillers ou de simples compagnons pour animer leur solitude; peut-être parfois des surveillants. Leur chef portait le titre de protosyncelle; il était le confident et le confesseur attitré de l'évêque, et sa position était considérable dans certaines villes, notamment dans des patriarcats comme Constantinople. Les empereurs, par politique, ne dédaignaient pas de donner ces fonctions à des princes de leurs familles, quoique en général elles ne dussent appartenir qu'à des ecclésiastiques. Le protosyncelle était d'ordinaire le successeur désigné de l'évêque.

SYNCRÉTISME. Chez les Alexandrins c'était, en philosophie, le mélange d'opinions contradictoires, inconciliables, dont on essayait de faire un ensemble unique, aussi confus que peu homogène. Dans Plutarque c'est l'association momentanée des républiques crétoises contre l'ennemi commun. Érasme a relevé le mot dans ses Adages, et il lui donne à peu près le sens d'éclectisme. A l'époque de la Réformation il signifia pour plusieurs le devoir et la nécessité d'unir toutes les forces du protestantisme poar combattre avec efficace le catholicisme, mais quelques-uns, des luthériens surtout, ne virent dans cette tentative que le lâche abandon de leurs principes et un malheureux essai d'allier le vrai au faux pour en faire sortir une doctrine composite aussi dangereuse qu'inintelligible. Dès lors le mot fut pris en mauvaise part. C'est au nom paisible de Calixte que se rattache l'origine des longues luttes, pleines d'étroitesse, qui ont fait le fond de la théol. allemande au 17®e siècle. Le prof. d'Helmstâdt aurait voulu que sur la base du Symbole des apôtres, les protestants s'unissent pour travailler ensemble au développement de la vie religieuse, au lieu de se retrancher derrière des formules abstraites, qu'il qualifiait de barbares. Hoë de Hoënegg, à la conférence de Iéna 1621, obtint qu'on chargeât un théologien de réfuter l'hétérodoxie d'Helmstâdt. En 1639 un prédicateur de Hanovre prêcha contre < l'Abomination de la désolation > qui remplaçait à Helmstâdt la pure doctrine luthérienne. Le colloque de Thorn, provoqué 1645 par Wla-dislas IY de Pologne dans l'intérét de la paix, ne fit qu'attiser les passions; Galov injuria les théol. de Helmstâdt, les traitant de novateurs, de corrupteurs de la saine doctrine, etc. Calixte répondit à ses adversaires qu'ils étaient des menteurs et d'impudents calomniateurs, s'ils ne rétractaient pas leurs accusations. Cette guerre théologique se poursuivit même après la mort de Calixte 1656, et se compliqua de nouveaux détails; les princes durent intervenir pour modérer les attaques des prédicateurs dans les chaires. Calov ne se laissa pas museler. Le fils de Calixte, Fréd.- Ulrich, intervint à son tour, avec plus de piété filiale que de tact et de prudence. Les universités, les théologiens, les cours de Saxe, de Brandebourg, de Darmstadt, se jetèrent dans la mélée. On linit par imposer silence aux théol. de Wittenberg 1669, et le gros livre de Calov, Hist. du Syncrétisme fut supprimé et mis au pilon 1680. Calov n'en continua pas moins d'écrire jusqu'à sa f 1686. Calixte eut une meilleure fin; son dernier ouvrage, 1700, fut un appel à la paix entre les protestants.

SYNERGISME (du grec Synergein, collaborer, coopérer). Tous les réformateurs, depuis Luther jusqu'à Zwingli, ont professé que l'homme est par lui-même incapable d'aucun bien, et qu'il ne peut se sauver lui-même. Il n'est qu'un instrument, soit entre les mains de Dieu, soit entre celles de Satan; il n'a point de libre arbitre. C'est aussi l'opinion de Mélanchthon dans ses premiers Lieux Communs de 1521. Mais déjà en 1527 ses vues se sont un peu modifiées; il n'admet plus que la conversion soit un changement magique, il la rattache à quelque chose de moral en l'homme; elle est produite par 3 causes, la Parole de Dieu, l'action du Saint-Esprit et l'adhésion volontaire du croyant. Luther était d'accord avec lui. Dieu se tient à la porte et il frappe; c'est l'appel d'en haut. L'homme peut ouvrir ou fermer, c'est son oeuvre. Mais ces questions de liberté sont si complexes qu'il est difficile à l'homme de s'y maintenir en équilibre, et dès que l'on penche d'un côté ou de l'autre les objections se multiplient. Quoi qu'on affirme on se heurte à une impossibilité morale; l'homme a le double instinct de son entière li* berté et de son incapacité pour le bien. Quand on veut systématiser, les difficultés augmentent. Flacius attaqua le synergisme comme une erreur fondamentale. Pfeffinger de Leipzig lui répondit 1555, et bientôt les théologiens furent partagés en 2 camps ennemis. Les universités aussi prirent parti, Iéna pour Flacius, Wittenberg et Leipzig pour les synergistes. Les princes s'en mêlèrent aussi, au point de vue de la paix publique, et il y eut par moments des destitutions de pasteurs et de professeurs, même des emprisonnements, suivant que les ducs qui se succédaient penchaient vers l'une ou l'autre doctrine. Aqj. le synergisme est généralement admis dans le sens de Mélanchthon.

SYNÉSIUS, de Cyrène, né vers 375, païen, descendant du roi Spartiate Eurysthènes. Son père était sénateur. Après avoir étudié à Alexandrie sous la célèbre Hypatie, il fut envoyé 397 comme orateur des 5 villes de la Cyrénaïque auprès de l'emp. Arcadius, à Constantinople, pour réclamer une diminution d'impôts. 11 présenta au roi une couronne, et lui fit un discours sur les Devoirs de la royauté, avec des allusions à l'eunuque Eutropias, qui ne devait pas tarder à tomber en disgrâce. En 400 il s'enfuit, fatigué d'un séjour inutile, et retourne à Cyrène, il raconte ses mésaventures et ses ennuis dans un écrit intitulé: Les Égyptiens, ou De la Providence. Il était probablement alors déjà chrétien, car en 404 il fait bénir son mariage par le patr. Théophile d'Alexandrie. Mais il reste philosophe platonicien et se plaint d'être isolé dans un monde qui ne s'élève pas à sa hauteur. Il cherche à concilier la philos, et la foi, le Christ et Platon, mais même dans ses Hymnes on aperçoit peu l'influence du christianisme. Il aime U chasse et les jouissances matérielles de la vie; il se bat pour repousser une invasion de brigands à Cyrène. L'év. de Ptolémaïs, Cyrénaï-que, étant mort 409, il est élu pour lui succéder, et Théophile ratifie ce choix, mais il n'accepte qu'après de longues hésitations, en réservant qu'il gardera sa femme et ses opinions. Consacré 410, il n'est pas heureux dans son ministère; il souffre d'une position Causse devant les mystères évangéliques et d'une responsabilité pour laquelle il n'est pas fait. Aimé et respecté de son Église, il doit sévir eontre le gouverneur Andronique et l'excommunie pour cause d'immoralité. Ses enfants meurent, ses amis les philosophes d'Alexandrie l'ont abandonné, les brigands du désert renouvellent lears incursions, et dans son découragement il pense à émigrer. Ici ses traces se perdent. On croit qu'il f vers 431. Il eut pour successeur son fr. Ëuoptius, qu'on trouve au conc. d'Éphèse. Outre les ouvrages susmentionnés il a laissé de nombreuses Homélies, 155 Lettres, un traité Des Songes, Dion ou l'Institution de soi-môme, etc.

SYNNADA, ville de Phrygie, connue par ses beaux marbres, et par un concile tenu 235, qui décida la non-validité des baptêmes conférés par les hérétiques.

SYNODE, identiquement le même mot que Concile, le premier en grec, le second en latin; réunion de personnages ecclésiastiques assemblés pour s'occuper des intérêts de l'Église, foi, discipline ou culte. Dans le langage ordinaire l'usage a prévalu de réserver le mot concile pour les assemblées catholiques et spécialement pour celles qui ont un caractère écuménique, tandis que le mot synode s'emploie en parlant des assemblées catholiques plus restreintes, ou des assemblées non-catholiques. Les plus remarquables de ces dernières sont:

I. Les Synode* des égl. réf. de France. Après quelques réunions locales, timides essais d'organisation, les réformés sentirent la nécessité de se grouper et de s'entendre sur les questions de doctrine, d'ordre et de discipline, au moyen des délégués, laïques et ecclésiastiques, des différentes paroisses, et à des intervalles aussi réguliers que le permettraient les circonstances. Ils eurent dans l'espace d'un siècle 29 synodes généraux, qu'ils appelaient nationaux, dont voici l'énumération: r

i<> Paru, 25-29 mai 1559, dans un modeste hôtel garni de la Petite Genève, faubourg Saint-Germain; président ou modérateur, François Morel, sieur de Collonges (toujours un pasteur); ils rédigent et adoptent k l'unanimité la Conf. de foi et la Discipline. — 2° Poitiers, 10 mars 1561; modérateur Ambroise Lebailleur, d'Orléans. — 3» Orléans, 25 avril 1562; modér. Antoine de Chandieu. — 4<> Lyon, 10 août 1563; modér. Pierre Viret. — 5° Paris, 25 déc. 1565; modér. Nicolas des Gallars, sieur de Saules. — 6® Verteuil (Angoumois), 1-7 sept. 1567; modér. De Lestre, de Paris. — 1° La Rochelle, 2-11 avril 1571; modér. Théod. de Bèze. Jeanne d'Albret y assiste avec voix consultative, ainsi que son fils Henri le Béarnais, H. de Bourbon, prince de Condé, Louis de Nassau, Coligny. Adoption définitive de la Conf. de foi votée à

Paris, et qui prend le nom de La Rochelle. — 8» Nîmes, 6-8 mai 1572; modér. Jean de la Place, de Montpellier. — 9° Sainte-Foy (Guyenne), 2-14 févr. 1578; modér. Pierre Merlin, ministre de Coligny. Le roi de Navarre y est représenté par H. de la Tour d'Auvergne, vie. de Turenne, qui devint duc de Bouillon. — 10° Figeac (Quercy), 2-8 août 1579; modér. Antoine de La Faye, ministre du roi de Navarre. — Ho La Rochelle, 28-29juin 1581; modér. Odet deNort, surnommé le pape rochelois. — 12° Vitré (Bretagne), 15-16 mai 1583; modér. P. Merlin. Phil. de Mornay assiste comme délégué du roi de Navarre, ainsi que 3 députés de Malines, Gand et Bruges. Le synode adopte pour sceau un buisson ardent, avec cette devise: Uror, non consumor. — 13» Montauban, 15-28 juin 1594; modér. Michel Bérault; confirme l'Union de Mantes. —14° Saumur, 8-16 juin 1596; modér. Dominique de Losses, dit Latouche, pasteur à Saint-Fulgent; Duplessis-Mornay, gouverneur de la ville; lettre de Henri IV remise par Jean de Serres. — 15° Montpellier, 26-30 mai 1598; modér. Michel Bérault; condamne ceux qui essaient < de méLer les deux religions. > — 16° Gergeau (Orléanais), 19-25 mai 1601; modér. Georges Pacard, ministre à la Rochefoucauld.

— 17o Gap (Dauphiné), 1-23 oct. 1603; modér. Daniel Charnier; adjoint Jérémie Ferrier de Nîmes; déclare que le pape est l'Antéchrist, le fils de perdition; témoigne de la sympathie pour les Vaudois persécutés. — 18® La Rochelle, 1er mars-12 avril 1607; modér. Michel Bérault; confirme l'article de l'Antéchrist, mais ne le réimprime pas; ordonne la création de collèges dans chaque province. — 19o Saint-Maixent (Poitou), 25 mai-19 juin 1609; modér. Jacques Merlin, fils de Pierre; remercie Charnier et Vi-guier pour leurs ouvrages; organise un plan de défense contre les conférences des jésuites. — 20° Privas (Vivarais), 23 mai-4 juill. 1612; modér. D. Charnier. Henri IV vient d'être assassiné. Le synode renouvelle l'Union de Mantes, rétablit la paix entre quelques seigneurs de la religion, et désavoue les lettres de rémission ou d'amnistie lancées par la régente en faveur de ceux qui avaient assisté aux assemblées provinciales; ces assemblées ayant été autorisées, les protestants n'ont pas besoin de pardon (le 11 juill. la régente se rétracta sous prétexte d'explications). — 21o Tonneins (Basse-Guyenne), 2 mai-3 juin 1614; modér. Jean Gigord, prof, à Montpellier; travaille à l'union de toutes les Égl. protestantes, réformées, luthér. et anglicanes, etc.; lettre de Jacques I«r d'Angleterre.

— 22° Vitré, 18 mai-18 juin 1617; modér. André Rivet, pasteur k Thouars, Poitou. —23» Alais, l«r oct.-2 déc. 1620; modér. Pierre Dumoulin; sympathise avec les malheurs des Béarnais; adhère aux décrets de Dordrecht, non sans des réserves, et s'oppose anx empiétements de certaines familles influentes. — 24° Char en-ton, 1er gept.-ier oct. 1623; modér. Samuel Durand. Auguste Gall and, procureur du roi de Navarre, se présente inopinément comme commissaire royal pour ouvrir le synode et empêcher qu'on fasse t rien de préjudiciable k la paix publique. » Le synode se soumet, mais en réclamant; il doit céder aussi sur la question des pasteurs étrangers; Primerose et P. Dumoulin sont bannis de France. On voit que les temps sont mauvais. — 26° Castrez, 16 sept.-5 nov. 1626; modér. Jean Chauve, de Genève, pasteur à Sommières. Galland, commissaire royal, fait un discours irritant; Chauve répond humblement, mais nettement. Le synode prend des mesures sévères contre les gens dissolus, qui déshonorent la religion par leur vie. — 26° Charenton, sept.-10 oct. 1631; modér. Jean Mestrezat. Commiss. royal, Aug. Galland, toujours plus hautain, vrai représentant de Richelieu; il parle et commande comme s'il était le synode, fait rayer des pasteurs, interdit à des députés de siéger. La Rochelle vient d'être prise; les prot. ne sont plus que tolérés; il faut bien obéir k la force. Encouragements votés à Sau-maise et à Blondel. — 27<> Alençon, 27 mai-9 juill. 1637; modér. Benj. Basnage. que Galland avait voulu faire exclure du précédent synode. Commiss. royal, Saint-Marc, conseiller d'État, encore plus altier que Galland. Il fait un long discours de reproches, interdit aux pasteurs d'aller prêcher dans les annexes, demande qu'ils reconnaissent comme valables les baptêmes faits pir des sages-femmes, et s'oppose à la lecture du cahier des griefc, sous prétexte que c'est de la politique. Basnage lui répond. Discussion sur Amyraut et Testard. — 28° Charenton, 26 déc. 1644-27 janv. 1645; modér. Antoine Garissoles, pasteur à Puy-Laurens. Commiss. royal, Cumont de Boigrollier, meilleur que les précédents; exorde bienveillant, mais harangue impérieuse < prescrite par Leurs Majestés; » réponses énergiques de Garissoles. Doléances. La question Amyraut de nouveau discutée. La Milletière excommunié. — 29° Loudun (Anjou), 10 nov. 1659-10 janv. 1660; modér. Jean Daillé. Commiss. royal, Jacques de la Magdeleine, ami des églises, lit avec tristesse un discours blessant pour le présent, funeste pour l'avenir; il mentionne comme le dernier degré d'insolence, que les pasteurs continuent de visiter leurs annexes; il interdit toute discussion sur le choix fait par le roi de M. de Ru-vigny comme député des églises, et termine en annonçant que, par économie, il n'y aura plus de synodes généraux, les synodes provinciaux pouvant suffire. C'était décapiter les églises, avant de leur infliger la Révocation. Une dépu-tation envoyée à la cour fut reçue poliment, mais ne put rien obtenir. C'en était fait de l'existence officielle des églises. Bientôt elles devaient être hors la loi. Mais elles ne s'abandonnèrent pas; à côté des synodes provinciaux, elles continuèrent, quoique à de longs intervalles, d'avoir des synodes nationaux officieux; ainsi 16 et 17 mai 1726, dans une vallée du Vivarais; modér. Jacques Roger; —11 nov. 1727 dans le Dauphiné; 26-27 sept. 1730, Vivarais: modér. Pierre Durand; — 11-21 août 1744 à Lédi-gnan; modér. Michel Viala; — 1M8 sept. 1748, dans les Cévennes; modér. Pierre Peyrot; — 4-10 mai 1756, Hautes-Cévennes, même modér.; —1-9 sept. 1758, Cévennes; modér. Paul Rahaut; —1-10 juin 1763, Bas-Languedoc, même modér. Puis pendant 85 ans, plus rien. En mai 1848 assemblée préparatoire à Paris, président Borrel de Nimes; sept, et oct. 1848, à Paris, assemblée générale; président Buisson, de Lyon. Enfin en 1872, à Paris, par convocation du gouvernement, synode générai; modér. Ch. Bastie, de Bergerac (Histoire, par Bersier). Dès lors de simples synodes officieux, mais d'une grande action morale.

La plupart des égl. réformées ont des synodes réguliers en Suisse, Hollande, Belgique, etc. — Pour des synodes particuliers, v. les art. spéciaux: Dordrecht, Quercum, etc.

II. Saint-synode, autorité supérieure de TÉgl. russe, établie à Pétersbourg, fondée par Pierre-le-Grand, après la mort du patr. Adrien, 1700. L'emp. ne voulant pas d'un pouvoir supérieur, ou même égal au sien, fit gouverner quelque temps l'Église par l'administrateur, et le 23 févr. 1720 supprima le patriarcat et le remplaça par un conseil d'ecclésiastiques notables, nommés par lui parmi les évêques et les supérieurs de couvents, en général au nombre de douze. Ce conseil est chargé de maintenir l'orthodoxie dans l'Église; il choisit les catéchismes et les liturgies, feit des présentations en nombre double pour les évêchés, et adresse chaque année un rapport k l'empereur. Il a aussi la surveillance des couvents d'hommes et de femmes.

III. Synode d'Athènes, créé à l'instar du saint-synode de Russie, le 15/27 juillet 1833 à Nau-plie, sur la proposition du gouvernement grec et avec l'adhésion des 36 évêques du nouveau royaume. Complètement indépendant vis-à-vis de la Russie, quoique de même religion, le synode, nommé par le roi, administre librement pour tout ce qui concerne le culte, mais a besoin de la ratification de l'État pour les questions d'ordre civil, mariages, séminaires, fixation de jours de fêtes, enseignement, etc. Le roi nomme les évêques et les 2 administrateurs civils.

SYNOUSIASTES, nom d'un parti d'apolli-naristes qui soutenaient que la chair du Christ était de nature céleste et ne formait qu'une substance avec sa divinité.

SYRIE 1» Versions syriaques de la Bible. Outre la Peshito, q. v. on connaît dans cette langue, ou dans les dialectes apparentés, quelques fragments de versions, dont les principaux sont: un N. T. trad. du grec par Philoxène, de Maberg, vers 508; leçons et variantes, mss. du Vatican n® 153; un N. T., de Thomas d'Harkel, ou d'Héraclée, vers 616; trad. littérale, mss. biblioth. d'Oxford; les 4 Évang. Vatican no 19; trad. du6"" ou 7"" siècle; mélange de caldéen et de syriaque.—2® Écoles de Syrie, v. Antioche, Edesse, Nestorius, Nisibis, etc. — 3o Chrétiens de Syrie, v. Nestoriens.

SYROPOULOS, Sylvestre, grand juge et fonctionnaire ecclésiastique de l'Égl. patriarcale de Constantinople, un des 5 qui avaient le droit de porter la croix sur ses vêtements sacerdotaux, fut chargé, malgré lui, par ordre de l'emp. Jean Paléologue, d'assister au concile unioniste de Ferrare-Florence, 1438-1439. Il était ouvertement hostile à l'Union, et partisan d'Eugène d'Éphèse; il ne signa les actes et procès-verbaux que sur l'ordre formel de l'empereur. Il écrivit en grec l'histoire de ce concile; le mss. conservé à la biblioth. royale de Paris, et retrouvé 1642, a été impr. avec trad. latine à La Haye 1660, par Rob Creyghton, et dédié à Charles II, sous le titre latin de: Hist. vraie de l'union non vraie projetée entre les grecs et les latins. Il y a été répondu, et assez maladroitement dans l'intérêt de Rome, par Allatius 1665.

SYSTÈME de la Nature, le principal ouvrage du matérialisme français, publié à Londres 1770 sous le nom de Mirabaud, secrét. de l'Académie. On l'a attribué faussement à Holbach et à Lagrange, mais il appartient & leur école. Il établit l'éternité de la matière et du mouvement, ne voit dans la pensée qu'un mouvement des mollécules cérébrales, nie la liberté et l'immortalité de l'homme, et fait reposer la morale sur l'égoïsme. Quant à Dieu, c'est un revenant, créé par l'ignorance, la souffrance et la peur. Il est difficile de rêver un cynisme plus révoltant que celai de ce système.

SIZYGIE, v. Gnostiqaes.

TABE1WA, île de la Haute-Égypte, non loin de Tbèbes; célèbre par le séjour qu'y fit Pacôme, q. v.

TABORITES, l'un des deux partis religieux entre lesquels se partagea l'opposition bohème du 15»>e siècle. Us prirent leur nom d'une montagne située près d'Aust, qui leur servit d'abord de rendez-vous pour leurs assemblées religieuses, puis de camp, enfin de forteresse principale (tabor, en langue tschèque, signifie camp.) Plus avancés et plus décidés que les calixtins, ils demandaient des réformes beaucoup plus étendues. Us en appelaient aux Écritures et réclamaient aussi bien contre les erreurs de doctrine que contre les usages et cérémonies de tradition humaine; ils voyaient dans les ordres monastiques une invention du diable; ils rejetaient la messe, le purgatoire, la confession, l'invocation des saints, le culte des reliques, le mérite des œuvres, etc. Leurs principaux docteurs furent Wenceslas Coranda et Nicolas Episcopius. Après s'être longtemps bornés à se défendre, les taborites passèrent à l'offensive, refusèrent de se soumettre au nouvel empereur, Sigismond, et quand celui-ci eut organisé contre eux une croisade, ils y répondirent en démolissant les couvents, dépouillant les églises de leurs tableaux et de leurs ornements, mettant à mort les moines et les prêtres. La guerre fut furieuse. Quelques fanatiques annoncèrent la prochaine venue du Christ et son règne de mille ans au profit des taborites. Mais comme un excès amène toujours une réaction, il se forma au sein du parti zélote, politique et violent, un petit troupeau de chrétiens spirituels qui travaillèrent en silence à une véritable réforme et qui devinrent le noyau de l'Église des Frères #moraves. Parmi eux se distinguait surtout le pieux moine Grégoire de Raserherz, neveu deRokyzane, qui, faisant peu de cas des pratiques extérieures, «'occupa de former par tout le pays des assemblées chrétiennes et de les organiser dans l'esprit de l'Évangile. C'est vers 1457 qu'ils mirent la main à l'œuvre et que, selon leur expression, ils sortirent décidément de Babylone. Quant aux taborites proprement dits, après de longues luttes, ils furent entièrement défaits par le roi Podiebrad, 1453, qui prit leur forteresse; la plupart d'entr'eux périrent misérablement; les survivants se joignirent aux frères moraves, et la secte disparaît de l'histoire.

TABOU, coutume superstitieuse des îles de la Polynésie; interdiction prononcée par les prêtres ou les chefs sur des personnes, des objets, ou des localités, ensuite de laquelle il n'est permis ni de les regarder, ni de les assister, sous peine de mort. Le roi est tabou, par conséquent inviolable; les dieux, les temples, les prêtres le sont également et toujours. Parfois il n'est que momentané. Certaines viandes, certains fruits peuvent l'être suivant les saisons. S'il est général, tout travail et tout bruit dans l'ile doit cesser; on eminuselle fortement les chiens pour les empêcher d'aboyer; les lumières doivent ôtre éteintes. Les violateurs, même involontaires, dn taboa étaient offerts anx dieux en sacrifices. Cette coutume a été abolie là où le christianisme a pénétré.

TAIPINGS (paix générale), secte politico-religieuse qui, de 1850 à 1864, a tenu en échec le gouvernement chinois; elle avait conquis la moitié de l'empire, avait fait de Nankin sa car pitale et rêvait de renverser la dynastie des Mandchoux. Sin, qui était le chef de ce mouvement, ou plutôt Hung-Sin-Tseuen, né 1813, avait connu à Canton quelques missionnaires protestants 1833; il leur emprunta le sabbat, les 10 commandements, le baptême, et répandit la Bible par milliers d'exemplaires; mais il toléra la polygamie et n'admit pas la sainte Cène. Sin se donnait pour frère cadet et continuateur de Jésus. Il avait appelé auprès de lui le missionnaire Roberts comme ministre des affaires étrangères. Les excès et les cruautés du parti amenèrent une réaction générale, ot la prise de Nankin, 1864, entraîna la ruine de l'entreprise.

TAIT, Archibald-Campbell, né 21 déc. 1811, fils d'un archidiacre de Coventrv, fut prof, et examinateur à l'univ. d'Oxford, puis principal du collège de Rughby, doyen de Carlisle; en 1836 év. de Londres avec siège à la Chambre haute. Il appartenait an parti libéral évangélique, et combattit le ritualisme par ses actes, comme il l'avait combattu dès 1833 en supposant k la.propagation des Tracts de Pusey. En 1868 il fut nommé par le ministère Gladstone archev. de Cantorbéry, où il f le dimanche 3 déc. 1882. Auteur de plusieurs volumes de sermons et ouvrages sur la religion, membre de nombreuses sociétés religieuses et de bienfaisance. Sa vie de famille fut cruellement éprouvée par la mort en fort peu de temps de ses cinq filles (cinq plantes transportées an ciel), puis de son fils, pasteur, et de sa femme.

TAITI, v. Otahili.

TAJUS, ou Togo, Samuel, évêque de Sara-gosse vers 646, fut envoyé à Rome par Ghin-daswinth, roi des Visigoths et par le 7®« synode de Tolède, pour retrouver l'Expotitio in Hiobums. Moralium lib. XXXV de Grégoire I«r. Il prit part aux 8°>e et 9™e syn. de Tolède, 635 et 655. Il ne reste de lui que son Epistola ad Eugenium Toletanum episcopum et l'ouvrage des Sententiarum lib. V, écrit dogmatique dans le sens évangélique, tiré en partie des écrits d'Augustin et du susdit livre de Grég. Ier, sorte d'imitation des sentences d'Isidore de Séville.

TALIBAN, secte d'Abyssinie, affiliée aux juifs et rappelant les anciens thérapeutes. Ses membres vivent au désert dans des couvents, jeûnent o fois la semaine, couchent sur du bois, se flagellent avec des épines, et attendent k Messie. Ils se plient aux habitudes ecclésiastiques de l'Orient, mais passent pour juifs et sorciers. Ils sont habiles à travailler les métaux.

TALMUD, v. Thalmud.

TAMBURINI lo Thomas, jésuite, né 1591 à Caltanisetta; prof, de théol., censeur, conseiller du saint-office, f 1675 à Palerme; auteur de plusieurs ouvrages de théol. morale. — S4 Michel-Ange, de Modène, général des jésuites, élu 31 janv. 1706, f 28 févr. 1730. — 3<> Pierre, né 1737 à Brescia; grand ami des lumières et ardent joséphiste; élève, puis prof, au séminaire de sa ville natale, il fut ensuite 6 ans directeur du collège germanique à Rome. Marie-Thérèse le nomma 1797 prof, de théol.. de droit naturel et de philos, morale à Pavie, où il f 14 mars 1827. Il avait assisté comme promoteur au synode de Pistoie 1786. Il a écrit sur Tertullien, Origène, Justin; son principal ouvrage est intitulé Prœlectiones, lectures sur l'Égl. et la jurisprudence ecclésiastique.

TANCHELM, Tanchelin, Tanquelin, fanatique du 12me siècle, qui vivait en Hollande; il lit beaucoup de bruit à Utrecht, Bruges et Anvers, s'adressant aux femmes et aux classes inférieures, s'entourant d'une garde et faisant porter devant lui un drapeau et une épée. B traitait de bordel l'Égl. cathol. et se donnait comme le fiancé de la vierge Marie. Il offrait à boire à ses fidèles l'eau dans laquelle il s'était baigné. Un prêtre finit par le tuer dans uo voyage en bateau 1125, et Norbert ramena peu à penses sectateurs à la communion de l'Église.

TANCHUM, ou Tanchuma, rabbin de Jérusalem, du 13m« siècle; auteur de Comment, arabes sur l'A. T., dont quelques fragments mss. sont conservés à Oxford; ils ne sont pas sans valeur.

TANCRÉDE, célèbre canoniste du 13"» siècle; il était de Bologne où il étudia le droit; peut-être aussi la théol. à Paris; chanoine, archidiacre nommé 1216 par Honorius IH; trè considéré et chargé de diverses missions; auteur d'un Traité sur le mariage, et d'un Ordre judiciaire, l'un et l'autre venus jusqu'à nous, mais avec un texte corrompu et interpolé, f avant 1236. Édition par Wunderlich.

TANDEBARATZ, Jacques (de), fils de Jehan de T., bourgeois de La Rochelle, et de Suzanne Gautron sa femme, mariés 1623. Consacré à Aytré 1655, il fut nommé pasteur de La Rochelle en 1660. Injustement condamné en 1680 par l'intendant de Demuy à une amende de mille livres. Chargé en 1682 de recevoir au temple l'év. de La Rochelle, Henri de Laval, et de lui répondre au sujet de l'avertissement dn 1" juillet, il s'en acquitta avec tact, modération et fermeté. Jeté à la Bastille avec ses deux collègues 1684, il n'en sortit à la Révocation que pour prendre le chemin de l'exil.

TANNER Adam, né 1572 à Innsbrnck, f 26 mai 1632 à Unken; jésuite, prof, de théol. à Ingolstadt et Vienne, chancelier de l'univ. de Prague. Auteur d'un rapport sur la dispute de Ratisbonne 1601; Théol. scolastique; Anatomie de la Conf. d'Augsbourg, pour prouver que le protestantisme est une innovation; Apologie de la Soc. de Jésus; Apologie sacrée; Discussion théol. sur la somme de Thomas. Avec Spee il a protesté contre les barbaries exercées dans les procès pour sortilèges. — 2° Matthias, né 1630 à Pilsen, jésuite en 1646, prof, de belles-lettres, de philos, et de théol., envoyé 1675 à Rome comme procurateur de Tordre. Auteur de plusieurs écrits dogmatiques et apologétiques: Le sacrifice sanglant de Christ, expliqué par le sacrif. non sanglant de la messe; contre tous ceux qui profanent les lieux saints; la Soc. de Jésus militant jusqu'au sang (éloge des missions jésuites) etc. — 3® Con^d, né 20 déc. 1752 à Arth, Schwytz, prince-abbé d'Einsiedeln depuis 1808, f 7 avril 1825; auteur de plusieurs ou-vragesd'édification.—4»Thomas, né 1674 à Lu-wington, étudia à Oxford; évéque 1732 à Saint-Asaph, pays de Galles. + 1735 & Oxford. Auteur d'une Biblioth. alphabétique des principaux écrivains de l'Angleterre jusqu'au 18ine siècle.

TANUCCI, ou Tanuzzt, Bernard (marquis de). Né 1695 à Stia, Toscane, étudia le droit à Pise, suivit don Carlos à la conquête de Naples et devint son premier ministre. Il réorganisa la justice, et dans l'intérêt du commerce leva l'interdit qui pesait sur les juifs. C'était l'époque où partout en Europe l'absolutisme royal, se heurtant aux prétentions temporelles de la cour de Rome, travaillait à brider la puissance ecclésiastique et à réprimer ses invasions dans le domaine politique; l'époque de Choiseuil, de Pombal, de Joseph II. U n'y avait pas moins de 112,000 ecclésiastiques dans le seul royaume de Naples, soit 1 prêtre pour 143 habitants, toute une armée. Tanuzzi entreprit la lutte contre un mal qui menaçait l'avenir et la prospérité du pays, et Charles IV qui en voulait au pape d'avoir combattu son avènement au trône, laissa faire son ministre. Tanucci envoya un prélat libre penseur, Galliani, à Rome, pour demander la suppression du tribunal de la nonciature à Naples, la limitation du nombre des couvents et du droit de posséder, une part plus grande dans le choix des évêques, etc. En attendant la réponse, qui devait aboutir à un concordat, Tanucci poursuivit son œuvre, tendant à réduire le nombre des ecclésiastiques à un pour mille habitants; il introduisit le placet, défendit aux jésuites la fondation de nouveaux collèges, et limita la juridiction ecclésiastique. Régent pendant la minorité de Ferdinand IV, il alla plus loin encore, restreignit pour l'Église le droit de posséder et d'hériter, statua qu'une famille ne pourrait consacrer qu'un fils à la prêtrise, et jamais un fils unique. Le mariage fut déclaré un acte civil. Clément VIII ayant rétabli l'ordre des jésuites 1765 par sa bulle Ajku-tolicum paseendi, Tanucci y répondit en faisant embarquer tous les jésuites du royaume dans la nuit du 3 au 4 nov. 1767, avec peine de mort pour ceux qui rentreraient. Mais il était trop avancé pour son temps. L'intrigante et jeune reine Marie-Caroline étant entrée au conseil en 1777, il ne put lutter contre elle; la réaction commença, et il se retira dans ses terres. f 1783 à Naples. Personnellement honnête et aimé, il avait servi son roi fidèlement, et son administration laissa le pays prospère et ses finances en bon état.

TARAISE, secrétaire d'État à Constantinople, et laïque, fut, après la démission de Paul 783, appelé au patriarchat par l'impér. Irène. Il n'accepta qu'à regret et sur les instances du peuple, et se fit pardonner l'irrégularité de son élection en acceptant la convocation d'un concile pour rétablir l'union de Constantinople avec les autres églises. Adrien Ier le reconnut, mais par une lettre où le titre de patriarche universel était soigneusement évité, où la question des images était nettement affirmée, et où l'empereur et sa mère étaient salués du titre de Constantin et d'Hélène. Convoqué d'abord le 17 août 786 dans l'égl. des apôtres à Constantinople, mais empêché par une émeute et transporté à Nicée, à Sainte-Sophie, le 24 sept. 787, le concile se prononça contre les iconoclastes et rétablit le culte des images. Le jeune Constantin ayant répudié Marie pour épouser Theodata, Taraise protesta contre ce divorce, mais n'alla pas plus loin; il eut beaucoup de peine à calmer les moines qui lui reprochaient son attitude peu décidée et qui auraient voulu voir l'empereur excommunié. Il se montra plus énergique lorsque les soldats impériaux essayèrent de violer le droit d'asile. Après avoir couronné Nicé-phore 802, il f 25 févr. 806. C'était un homme de prière, ami des pauvres et des veuves. II a laissé des Homélies et des Lettres. Canonisé chez les grecs et chez les latins.

TA SCODRUGITES, petite secte de Galatie au 4™« siècle, mentionnée par Théodoret comme gnostique, par Épiphanes comme montaniste; ils affectaient un caractère tout spiritualiste, repoussaient toute forme et toute organisation et parlaient de Christ en docètes. Malgré les poursuites dont ils furent les objets, ils existaient encore comme secte au 9®* siècle. Leur nom, assez bizarre (clou sur le nez) vient selon les uns de ce que pendant la prière ils mettaient lenr doigt sur leur nés pour recommander le silence; selon d'autres de Ps. 141, 3: Éternel, mets une garde à ma bouche.

TATIEN lo Syrien, né vers 130, très versé dans la culture gréco-romaine, profond observateur, philosophe platonicien, voyagea beaucoup en curieux, se fit même initier aux mystères d'Éleusis, vint vers 162 à Rome, où il s'établit comme rhéteur; mais, dégoûté des erreurs et de l'immoralité du paganisme qui se complaisait dans les jeux sanglants des gladiateurs, et ayant entendu parler du grand âge des livres de l'A. T. il les lut avec fruit. Il se lia avec Justin, dont il devint l'élève et l'ami, et fut eu butte, comme lui, aux attaques du cynique Crescens. Peu après la mort de son maître, il publia sa Ire Apologie, son Discours aux Grecs, la seule chose qui reste de lui, et où l'on retrouve tout l'enthousiasme syrien (publ. par Worth, Oxford, 1700). Il tomba plus tard dans les erreurs gnostiques, probablement après son retour en Orient 172, et f vers la même époque.

2° Auteur d'une Harmonie des Évang., trad. en latin par Victor de Capoue. Il était de Mésopotamie; d'ailleurs inconnu.

TAULER (Tauweler), Jean, né vers 1290 à Strasbourg, fils d'un conseiller, entra 1308 chez les dominicains, étudia à Paris la mystique, saint Rernard, l'Aréopagite, les Victorins, et aussi la Somme de saint Thomas. De retour à Strasbourg il se joignit à Nicolas, Dietrich, Ec-kart et autres mystiques, et se livra à la prédication et à la cure d'âmes sans se préoccuper de l'interdit que Jean XXII avait jeté sur la ville à cause de son attachement à Louis de Bavière. Nicolas de Bâle, qui l'avait visité, exerça sur lui une grande influence et le décida à se joindre aux Amis de Dieu; il lui interdit en outre toute prédication pendant 2 ans, mais après ce temps d'épreuve la voix de Tauler n'en fut que plus puissante, et il obtint de vrais succès dans la chapelle de son couvent et dans les diverses églises où il fut appelé, par la sévérité morale de sa parole, L'évéque lui-même Pécou-tait avec plaisir; il le bannit néanmoins de la ville, ainsi que le prieur des augustins et celui des chartreux, lorsque malgré l'interdit renouvelé sur Strasbourg, ils continuèrent de donner leurs soins aux victimes de la peste noire 1348. Tauler était le confesseur de Rulmann Mer-swin. Il se retira près de là dans une maison de chartreux. Les 3 amis, cités devant Charles IV. défendirent courageusement leur ministère, soutenant qu'il était injuste de laisser souffrir et mourir sans secours le pauvre peuple pour des raisons politiques auxquelles il n'entendait rien. Après avoir prêché quelques années à Cologne, il revint à Strasbourg où il f 16 juin 1361 dans le couvant de sa sœur et auprès de son ami Nicolas accouru quelques jours auparavant. Il a laissé un grand nombre d'écrits (en allemand), dont les principaux sont: Imitation de la pauvre vie de Christ, Exercices sur la rie et la passion de Jésus-Christ, Lettres spirituelles, Institutions divines, des hymnes, etc. Pour lui Dieu est le seul être réel et rien n'existe hors de lui; il s'incarne et se révèle dans sa Parole, qui est le Christ; l'amour qui les unit, c'est le Saint-Esprit. Un sens religieux pratique l'a seul empêché de pousser son idée de Dieu jusqu'au panthéisme. V. Jundt, Preger, Ch. Schmidt, etc.

TAYLORlo Jérémie, théol.anglais, né 15août 1613 à Cambridge, fils d'un barbier, et descendant direct de Rowland T. martyrisé sous Marie-la-Sanglante. Après avoir étudié à Cambridge, il fut choisi comme chapelain par Laud et Charles et nommé fellow d'Oxford. Les circonstances politiques lui furent fâcheuses; deux fois il fut fait prisonnier des puritains, et une fois enfermé à la Tour. Marié en 1639 à Phébé Langsdale, qui Jui donna 3 fils, et qui mourut (peut-être de chagrins et de privations), il épousa en secondes noces Jeanne Bridges, probablement fille naturelle de Charles I*r, qui lui fit une vie facile et indépendante et lui permit d'abandonner une école qu'il avait fondée et de se consacrer à ses amis et à ses travaux littéraires. Enfin Charles II le nomma év. de Down et Connor 1660, plus tard de Dromore* Irlande, où il f 13 août 1667. Depuis 1658 il s'était établi en Irlande, où il fut successivement nommé membre du conseil privé et chancelier de l'université de Dublin. Il ne laissa que 3 filles. Sa théologie était un peu hésitante et latitudinaire, au point qu'on lui a reproché des tendances catholiques, bien qu'il ait combattu le papisme et la transsubstantiation, et des tendances libérales, bien qu'il ait combattu les puritains. Ses principaux ouvrages sont: L'épis-copat affirmé contre les acéphales et les aërieas anciens et nouveaux 1642; contre la Transub-stantiation 1654; Distuasive of Popery 1663; et de nombreux sermons et traités édifiants (ré-impr. avec notice par Reginald Heber, év. de Calcutta, 1847-1854). C'est une image du Christ, placée en tête d'un de ses écrits, en 1658, qui lui valut d'être envoyé à la Tour de Londres.

2° Jean T., non conformiste, f 1761 à War-rington, auteur d'une concordance hébr. d'après le système de Buxtorf, très utile, et d'un Comment. sur Pép. aux Romains, avec une Introduction donnant la clé des écrits apostoliques. On l'a accusé de socinianisme à l'occasion de son Traité du péché originel.

TE DEUM laudamus, v. Ambroise.

TEISSIER lo François, viguier (juge), de Durfort, Cévennes, se disposait à quitter la

France au moment ob commençaient les mis-sions bottées, qnand il fat arrêté la nuit dn 19 an 20 janv. 1686, ponr avoir assisté (et peut-être pris la parole) à une réunion tenue, en plein hiver, dans une grange, avec 4000 autres personnes. Condoit devant Bâ ville, à Lasalle, il fut condamné le 26 à être pendu, et fut exécuté le même jour. Le prêtre-missionnaire chargé de le convertir n'y réussit pas; et fut au contraire gagné à l'Évangile par la foi du martyr. C'est lui-même, Philippe Aiguisier, qui a écrit la Relation véritable de cette exécution: Berlin, chez Dnsarrat 1702. Aiguisier, docteur en théol., se réfugia à Berne, fut nommé 1689 principal du collège de Vevey, épousa Judith Favier de Montélirnar, et f 1694.

2° Isaac, son fils aîné, consacré 1681, pasteur à Saint-Romande Cordière. Ayant prêché, malgré les édits, sur les ruines du temple de Saint-Hippolyte, il faillit être arrêté et dut s'enfuir en Suisse. Il fut pendu en effigie à Nîmes, 3 juill. 1684. Nommé pasteur à Saint-Cergues et Begnins, Vaud, il y f 1749 à 91 ans.

TÉLESPHORE, 8»« pape, 127 à 139, ou 125 à 135, probablement Grec d'origine, paraît avoir été martyr; d'ailleurs inconnu.

TELLER, Guill.-Abraham, né 9 janv. 1734 à Leipzig, 61s d'un pasteur, fut en 1761 nommé surintendant et prof, à Helmstsedt, mais gâta sa position par un volume qu'il publia en 1764 sous le titre de Doctrine de la foi chrétienne, et dans lequel il niait ou attaquait le péché originel, la doctrine de la grâce, celle de l'eucharistie, et présentait sur Dieu des idées nouvelles. Le livre fut confisqué et réfuté; Er-nesti le blâma, et on prouva qu'il était en partie emprunté à un ouvrage socinien de Crell. Destitué en 1767, Teller se rendit à Berlin, où il fut nommé membre du Consistoire, pasteur de Saint-Pierre, et en 1786 membre de l'Académie. Il usa d'abord d'une grande prudence, ne sachant jusqu'à quel point il pouvait innover, mais quand l'édit de Wôllner eut paru, il le combattit en déconseillant aux candidats de le signer et en engageant les pasteurs libéraux à ne prêcher que la morale pour ne fournir aucun prétexte. Il fut cependant suspendu pour 3 mois en 1792 pour avoir défendu Schulz, qui avait abandonné le luthéranisme et le christianisme par sa profession de foi. Mais à partir de ce moment il ne crut plus devoir rien ménager, et il affirma hardiment que le christianisme est perfectible, que les mystères doivent s'expliquer par des allégories; que déjà bien des progrès ont été laits dans l'intelligence de la Bible, mais qu'il en reste encore beaucoup à faire; enfin qu'une religion d'État est en contradiction avec le droit de libre examen. Il fut mis dans un grand embarras quand, en 1798, un certain nombre de juifs lui demandèrent de les recevoir dans l'Égl. chrétienne .«ans avoir à rendre aucun compte de leur foi. Il leur répondit en 1799 que < malheureusement > il ne pouvait se dispenser de leur demander un minimum de croyance, et il leur proposa de les haptiser « au nom du Christ, le fondateur d'une religion plus spirituelle et meilleure que celle de la société à laquelle ils appartiennent. » Ils refusèrent, et la chose en resta là; le pasteur déiste était convaincu d'impuissance et d'inconséquence. f 9 déc. 1804. Il a laissé un Dict. du N. T., une Morale pour tous les états, la plus ancienne Théodicée, des Notes critiq. sur divers passages de l'A. T., des dissertations, des recueils de sermons, quelques essais de liturgie, etc.

TELLIER (Le) 1<> Michel, né 1603, fils d'un conseiller à la cour des aides, protégé par Mazarin, nommé secrétaire d'État k la guerre, contribua à apaiser les troubles de la régence et à fortifier l'autorité royale. En 1666 il remit à son fils Louvois le ministère de la guerre, et fut nommé chancelier en 1677. On lui doit en grande partie la révocation de l'édit de Nantes. 1 1685. Bossuet et Fléchier ont fait son éloge.

2® Son fils puîné, Ch.-Maurice, fut nommé archev. de Reims 1671 et présida l'assemblée générale du clergé 1700; détesté pour sa morgue de famille. Il légua sa biblioth. de 50,000 vol. à l'abbaye de Sainte-Geneviève.

3° Michel, non parent des précédents, né 1643 à Vire, Normandie, fils d'un pauvre fermier; ambitieux et intrigant, il se fit jésuite en 1661, enseigna la philos, et les lettres au collège Saint-Louis, publia une édition de Quinte Curce à l'usage du Dauphin, devint provincial de l'ordre, et à la mort du P. Lachaise le remplaça comme confesseur du roi 1709. Il se signala par un zèle odieux, persécuta les jansénistes, provoqua la destruction de Port-Royal, et obtint la condamnation du N. T. de Quesnel par la bulle Unigenitus. Après la mort de Louis XIV, il fut exilé de la cour; le cardinal de Noailles lui assigna pour résidence d'abord Amiens, puis La Flèche où il f 1719. Il a écrit une Défense des missions en Chine et au Japon, une Hist. des 5 propositions de Jansénius 1699, le P. Quesnel séditieux et hérétique, 1705, etc.

TEMPÉRANCE (Sociétésde), association dont les membres s'engagent à s'abstenir entièrement de vin, de bière et de toute liqueur fer-mentée. Les ravages économiques et moraux causés par l'ivrognerie en ont donné la première idée, l'expérience ayant prouvé que les lois et les règlements de police étaient impuissants à conjurer le mal, et les faits démontrant chaque jour que l'abstinence totale, par opposition à l'usage modéré, est seule capable de relever les victimes de cette funeste passion. Les promoteurs de ces sociétés s'abstiennent eux-mêmes pour prêcher d'exemple et pour prouver que l'usage do vin n'est pas nécessaire à la santé. A cette question morale on a souvent essayé de donner une base religieuse, et lipn cite des missionnaires catholiques qui ont imposé à leurs néophytes païens le vœu d'abstinence comme une des conditions de leur baptême; cela n'a pas toujours réussi. Cependant ces essais ont servi à réveiller la conscience publique et à agiter l'opinion. Déjà en 1600 le landgrave Maurice de Hesse fonda une société de ce genre, et en 1617 àGrâtz l'ordre de Saint-Christophe fut fondé dans le même but. En 1803 se fonda à Boston la Société de tempérance du Massachussets, qui fut bientôt suivie de beaucoup d'autres et qui obtint de brillants résultats, entre autres, dans le Maine et ailleurs, l'interdiction de la vente de boissons alcooliques. Le pasteur John Edgar de Belfast, introduisit en 1829 ces sociétés en Irlande et en Europe sur la base de l'abstinence partielle; et il fut bientôt suivi du célèbre P. Mathieu, q. v. En 1835 Robert Baird les introduisit en Allemagne, mais après quelques années d'enthousiasme et l'adhésion d'hommes comme Liebe-trut, Bôttcher, de Seld, l'œuvre s'arrêta de nouveau, paralysée par les préoccupations de 1848. Auj. l'on compte dans les Iles britanniques environ 4 millions d'abstinents, dont plus de 8000 pasteurs protestants; à Londres 35,000 catholiques sous la présidence du card. Man ning; 20,000 hommes dans l'armée anglaise, 7000 dans la marine, etc. En Suisse les Sociétés ont également obtenu de brillants résultats, et les cafés de tempérance (Café, chocolat, thé) sont devenus rapidement populaires.

TEMPLE lo allemand, société religieuse fondée 1841 par Christophe Hoffmann, qui, après avoir dirigé le Salon de Ludwigsbourg, puis la maison de Krishona, près Bâle, organisa près de Marbach en 1854 une colonie du Peuple de Dieu avec l'arrière-pensée d'aller s'établir en Palestine; se brouilla avec les autorités ecclésiastiques du royaume, et linit, après un premier voyage et d'abondantes collectes, par aller se fixer en Palestine en 1869. La colonie, composée d'environ 250 personnes, et en possession de 250,000 fr., obtint du sultan des concessions de terre, et fonda plusieurs stations agricoles, à Jérusalem, Beyrout, Kaïfa, Jaffa, Saron, toutes placées sous la protection du drapean allemand. Ils cultivent surtout la vigne, et ont ouvert à Kaïfa une école agricole et professionnelle qui est en voie de prospérité. Hoffmann a de vrais talents d'administrateur. Ils ont en Amérique une succursale dirigée par

Schwilk, qui leur fournit des hommes et de l'argent. Us attendent le retour de Christ. — 2<> v. Templiers.

TEMPLIERS, ordre chevaleresque et religieux, fondé 1119 à Jérusalem, à l'époque des croisades, par Hugues des Payens, Geoffroy de Saint-Adhémar et 7 autres croisés, pour protéger les pèlerins et veiller aux intérêts des chrétiens. Baudoin II leur céda une partie de son magnifique palais, adossée à l'ancien temple de Salomon, et c'est de là qu'ils prirent leur nom, qui était d'abord celui de Frères de la milice de Christ. Le couvent du Saint-Sépulcre leur donna aussi quelques maisons, et saint Bernard de Clairvaux leur prêta en France l'appui de sa parole et de son crédit. Déjà en 1128 au conc. de Troyes Eugène III reconnaissait le nouvel ordre. Leur costume consistait en un habit blanc, avec une croix rouge sur le manteau; leur sceau portait deux cavaliers sur un cheval, et leur bannière noire et blanche avait pour devise: Non point à nous, 6 Éternel, mais à ton nom donne gloire. Ils faisaient vœu de pauvreté, de chasteté et d'obéissance; saint Bernard rédigea leur règle, qui compta bientôt 72 articles. Hugues des Payens, nommé grand-mattre par le pape, visita la plupart des pays de l'Europe pour y stimuler le zèle et la générosité de la noblesse, et il en obtint des donations considérables. Il retourna en Palestine à la tête de 300 chevaliers, et ils se distinguèrent par des actes de bravoure incroyables. Leur réputation se répandit au loin, des adhésions leur arrivèrent de toutes parts, les papes leur accordèrent des privilèges inaccoutumés, et 150 ans s'étaient à peine écoulés que leur nombre s'élevait à plus de 20,000 divisés en langues, et les langues en provinces, et qu'ils possédaient plus de 9000 commanderies, chacune avec de nombreuses fermes et dépendances. Les revenus annuels de l'ordre étaient de 54 millions de francs. Puis il arriva ce qui arrive toujours; les richesses amenèrent à leur suite la corruption, et d'autre part elles excitèrent la jalousie et la convoitise de leurs adversaires. Les chevaliers de Saint-Jean, les nobles, les évêques, se liguèrent, et s'il y avait des reproches à faire aux templiers, ils surent les exploiter habilement et les exagérer. On les accusa même de s'être entendus avec les Sarrasins et d'avoir ainsi ruiné l'œuvre des croisades eu Orient. Philippe-le-Bel, dont les richesses des templiers tentaient la cupidité, comme leur puissance offusquait son orgueil, résolut de les perdre. Après s'être entendu avec Clément V, dans ce marché appelé diabolique dont la clause secrète était précisément la suppression de l'ordre, il manda auprès de lui le grand-maître Jacques Molay et 60 de ses chevaliers, sous prétexte de les consulter sur .une nouvelle croisade. A peine arrivés de Chypre en France, il lit arrêter le môme jour, 13 oct. 13069 tous ceux qui étaient dans le royaume, les fit jeter dans ses cachots et séquestra leurs biens. Une espèce de tribunal, nommé par Philippe et présidé par l'inquisiteur Guillaume, ouvrit contre eux un semblant de procédure où les preuves furent remplacées par la torture. Accusés de orimes et des vices les plus infâmes, plusieurs avouèrent vaincus par la souffrance, mais ils se rétractèrent aussitôt. Un grand nombre périrent sur l'échafaud ou sur les bûchers; Molay, le grand-maitre, après avoir langui plusieurs années dans les cachots, et souvent torturé, fut condamné par un concile de prélats français sous la présidence de légats du pape, à une prison perpétuelle, 11 ou 13 mars 1314; mais le même jour Philippe ordonna qu'il fût brûlé vif avec 3 supérieurs de son ordre, dans une île de la Seine en face du Pont-Neuf. Il montra le plus grand courage, protesta de son innocence au milieu des flammes, et assigna, dit Tliistoire, le roi et le pape à mourir dans l'année, ce qui arriva. En Portugal l'ordre proscrit se dissimula sous le nom d'ordre du Christ. On assure môme que l'ordre ne s'est jamais entièrement dissous, qu'il se continua dans l'ombre, mais privé de ressources, qu'il prit des allures mystiques; qu'il s'allia un moment avec les jésuites vers 1754, quand ceux-ci étaient malheureux, mais qu'il fut persécuté par eux quand la Restauration leur rendit le pouvoir. — Ils avaient possédé à Paris un grand monastère qui était la maison-mère de France, et dont la tour principale construite en 1212 fut abattue en 1811. Ce bâtiment, dit le Temple, avait servi d'arehives à Tordre, de trésor aux rois de France; il servit de prison à Louis XVI; aujourd'hui c'est une grande halle ou marché.

TËMPUS clausum, temps réservé, jours ou semaines de fêtes solennelles dans lesquelles les dissipations bruyantes, telles que mariages, ne sont pas permis. Plusieurs conciles ont édicté des mesures dans ce sens; le Carême, l'Aven t, le Dimanche ont été indiqués comme réservés, mais depuis que la législation civile a prévalu, il ne reste plus de ces anciens empêchements que ceux qu'indique le bon sens ou le sentiment religieux.

TÊRÉB1NTHE, esclave et disciple de Scy-thien, doit, d'après des sources syro-grecques, avoir écrit pour son maître 4 livres: les Mystères, le Chapitre, l'Évangile, le Trésor; et après sa mort il se serait rendu d'Égypte en Babylonie, aurait préché comme sienne la doctrine de son maître, se serait fait appeler Bud-das, et se serait donné pour mère une vierge et pour père un ange. Attaqué par deux ennemis, il ae serait réfugié chez une veuve de ses adhérents, et il aurait été précipité du grenier sur le sol, au moment où il se préparait à les conjurer par une cérémonie. L'héritier de ses livres et de sa sagesse fut un jeune esclave de la veuve, Eubricus, qui prit le nom de Manès. Il est difficile de dire jusqu'à quel point ces sources méritent créance.

TERRA SANTA, nom collectif de 16 ou 17 couvents de femmes à Jérusalem, en Egypte, en Syrie, que des légendes ont sanctifiés, et qui déjà depuis le 14me siècle formaient une espèce de confrérie. Leurs revenus servent à l'entretien d'écoles, d'hospices, d'hôpitaux, etc. Ils ont pour chef le père custode du Saint-Sépul-cre, qui est élu tous les 6 ans, qui demeure au couvent de Saint-Sauveur, et qui doit touj. être italien; son vicaire, français, et le père trésorier espagnol. Ils sont les principaux, représentants des revendications latines sur les Lieux saints.

TERSTEEGEN (allemand zur Stiege), Gérard, né 25 nov. 1697 à Meurs, petite ville des provinces rhénanes, dépendant alors de la maison d'Orange. Fils d'un marchand, qu'il perdit à l'âge de 6 ans, et le plus jeune de 8 enfants, il étudia le latin, le grec et l'hébreu, mais sa mère le destinait au commerce et à 16 ans il entra en apprentissage chez un beau-frère à MUlheim-sur-la-Ruhr. II y trouva des chrétiens vivants, labadistes. mystiques, réveillés, qui exercèrent sur lui une bonne influence. Sa santé était délicate; il souffrit toute sa vie de maux de tête et de la dysenterie. Il eut un jour une crise terrible dont il crut qu'il allait mourir; il cria à Dieu et guérit; ce fut un moment décisif dans sa vie. Il renonça au commerce et se mit dans la rubannerie, qui lui procura le nécessaire, et même de quoi donner aux pauvres; mais comme il restait souvent des semai* nés sans pouvoir travailler, il devenait pauvre à son tour. Sa piété était calme, profonde, douloureuse plutôt que joyeuse; il cherchait la paix avec larmes et prières. Le jeudi-saint 1724, l'ayant trouvée, il se consacra de nouveau solennellement à Dieu, et se servant de son sang pour encre il se donna à son Sauveur sans réserve. Dès lors il se mit à enseigner et à prêcher le soir, après sa journée finie. Peu à peu de nombreux auditeurs se pressèrent autour de lui. Il se garda touj. d'un mysticisme d'imagination qui aurait pu l'éloigner de la Bible sous prétexte de voix intérieures; il évita aussi la dissidence et poussa si loin sa méfiance à cet égard qu'il repoussa même les avances de Zinzendorf et des moraves. ce qui n'empêcha pas ses conventicules et ses adhérents de former peu à peu une secte sans le savoir. Us se ras-

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semblaient volontiers dans une maison surnommée la hutte du pèlerin, entre Mttlheim et El-berfeld, et de là T. rayonnait sur la contrée environnante et même au loin, faisant presque toutes les années le voyage d'Amsterdam pour y voir son riche ami Pauw, et correspondant avec les mystiques de l'Allemagne, du Danemark, de la Suède, de la Transylvanie, etc. Bien qu'attaché à l'Égl. nationale, il n'y communiait pas, sa conscience lui interdisant de prendre la Cène avec des mondains et des incrédules. Vers la fin cependant il était devenu moins rigoriste sous ce rapport. De 1740 à 1750 leurs réunions furent interdites; il y suppléa en multipliant les visites particulières, et il se mit en même temps à faire un peu de médecine pour les pauvres en préparant lui-même des remèdes de son invention. Le réveil de Duisbourg, 1750, amené par l'étudiant Jacq. Chevalier, le décida à repousser toute contrainte; il se remit à prêcher, et il le fit avec un tel succès qu'il avait quelquefois jusqu'à 8 secrétaires ou copistes, prenant et rédigeant des notes. Mais depuis 1736 sa santé le força de renoncer à la prédication; il se contenta de publier de 1769 à 1773 sous le titre de Miettes spirituelles une trentaine de ses discours. Hecker de Berlin, membre du consistoire supérieur, ayant été délégué auprès de lui pour faire une enquête, devint un de ses plus chauds amis. Tersteegen ayant lu les Œuvres du philos, de Sans-Souci, y répondit en déplorant les préjugés du roi contre le christianisme, et en les jugeant ayec autant de tact que de clarté. Frédéric l'ayant appris s'écria: Les débonnaires du pays en ont-ils donc connaissance ? Et l'on ajoute qu'il aurait désiré voir Tersteegen; mais le pauvre septuagénaire était atteint d'hydropisie, et le 3 avril 1769 il f paisiblement à Mttlheim pendant son sommeil. Il ne s'était jamais marié. Parmi ses publications on remarque surtout: Le chemin de la vérité, La Vraie théol. du Fils de Dieu, Petit collier de perles, Le Jardin spirituel, des Prières, de nombreuses Lettres, 111 cantiques d'une perfection de forme et de fonds qui rappelle Silesius, et des traductions faites sous l'influence de Poire t et de Labadie.

TERTIAIRES, ou Tiercelins, ou Tier+Ordre, nom donné aux séculiers qui, ne pouvant ou ne voulant pas s'astreindre à toutes les règles de la vie religieuse, désirent cependant s'y rattacher en quelque manière; v. François d'Assise. Ils en suivent la règle tout en restant dans le monde, et professent une orthodoxie absolue et la soumission à l'Église. L'emp. Charles IV, saint Louis, Philippe d'Espagne, et beaucoup d'autres princes se sont fait recevoir tertiaires. Les franciscains, les templiers, les prémontrés, les dominicains, les augustins ont eu ce tiers-ordre, qui leur a valu d'importantes adhésions.

TERTULLIEN, Quintus Septimius, Florens, un des pères de l'Égl. les plus utiles à étudier. Né vers 160 à Carthage, fds d'un centurion romain, longtemps païen, il se voua au droit et fit de solides études, même en dehors de sa spécialité. Il ne tarda pas à se faire une riche et nombreuse clientèle. « J'étais alors aveugle dit il, et sans la lumière du Seigneur, t On ignore les détails de sa conversion. La vue des martyrs l'avait frappé; la puissance de l'Évangile le saisit, et il se consacra dès lors tout entier à sa défense et à son service. Un voyage à Rome 204 fut loin de l'édifier; le clergé le trouvait trop sévère. A son retour il embrassa le montanisme, qui se rapprochait davantage du christianisme primitif et qui convenait mieux à sa nature ardente et à son besoin de sanctification. Si plus tard il s'en éloigna, à cause des erreurs ou des excès qu'il y découvrit, ce fut pour fonder une secte nouvelle, peu différente et répondant mieux à ses besoins de piété mystique et de spiritualité. L'Égl. l'a toujours respecté, mais sans le canoniser, f entre 230 et 245. Il était marié. C'est en 198 qu'il publia sa célèbre Apologétique, adressée aux gouverneurs des provinces. On a aussi de lui de nombreux traités: Contre les spectacles, Contre les juifs, De l'âme, Cinq livres contre Marcion, De la chasteté, De la fuite dans les persécutions, Des jeunes filles qui prennent le voile, etc. Ses écrits forment un tableau vivant de l'Égl. au siècle, et l'év. Kaye de Lincoln les a spécialement étudiés à ce point de vue. Ses ouvrages grecs sont perdus. Son latin punique est dur, rocailleux, obscur, quelquefois bizarre, mais plein d'énergie et d'originalité; son langage est concis; il est presque devenu proverbial; Vincent de Lérins a pu dire de lui: Autant de mots, autant de maximes. On l'a surnommé le Bossuet africain. Quant à son mode de raisonnement, il est impétueux, spontané, souvent paradoxal. Pour lui la vérité révélée ne se prouve pas. Li phrase: Credo quia inepturn est, le caractérise; il ne recule pas devant la difficulté, il l'affronte. C'est un esprit intuitif et primesautier, qui préfère les voies mystérieuses de la contemplation aux chemins plats et droits de la philosophie. — Édition de QEhler, Leipzig 1853.

TESSIN, canton suisse depuis 1803, peuple d'environ 120,000 habitants, tous catholiques, sauf une petite église protestante à Lugano. Tour à tour clérical et radical, passant rapidement d'un extrême à l'autre, grâce à un système électoral vicieux; il a été rattaché longtemps, en partie au diocèse de Cdme, en partie à celui de Milan, situation anormale contre laquelle l'autorité fédérale n'a cessé de protester depuis 1815, et qui depuis le 22 juill. 1859 n'existe plus en droit, mais continue d'exister en fait. De nouveaux pourparlers avec le saint-siège font espérer une prochaine solution du conflit, par la création d'un évêché suisse auquel le Tessin serait rattaché.

TÉTRÀPLES, v. Origènes.

TÉTR APOLIT AINE (conf. ), v. Bucer et Strasb.

TETZEL, Jean, ou Tietze, né à Leipzig au commencement de la 2m« moitié du 15®* siècle, étudia non sans succès la scolastique et la dialectique, entra 1489 dans Tordre des dominicains et se fit bientôt une réputation comme orateur populaire, de sorte que l'attention se fixa sur lui à Rome et qu'il fut chargé 1502 de prêcher les Indulgences du jubilé. Il s'y mit de tout cœur, visita le nord de l'Allemagne et la Lithuanie, colportant sa marchandise, la recommandant dans les églises et dans les auberges, la criant dans les foires et sur les places publiques et ramassant des sommes énormes. Il n'avait cependant pas encore atteint le degré d'impudence auquel il arriva plus tard. Mais déjà en 1512 on commençait à se plaindre. Il dut quitter Nuremberg et vint à Ulm, où il eut affaire à un mari dont il avait séduit la femme et il fut condamné à mort. L'emp. Maximilien lui fit grâce. A quelques années de là Léon X organisa une nouvelle vente d'indulgences pour subvenir à son luxe effréné. Tetzel fut un de ses commissaires pour le Brandebourg et les contrées voisines; il fit l'article avec une crudité de langage inouïe, disant que si même quelqu'un avait violé la sainte Vierge, son pardon était assuré. Luther connut par le confessionnal la démoralisation qui résultait de ce commerce, et il afficha ses 95 thèses. Telzel, qui venait de se faire recevoir docteur en théol. à Francfort $.-l'Oder, crut pouvoir répondre par 106 thèses opposées, mais les étudiants les brûlèrent, et comme le scandale allait grandissant, le pape jugea bon d'envoyer Miltiz pour y remédier. Miltiz arriva à Leipzig, se convainquit des désordres de Tetzel, qui avait 2 enfants et qui s'était permis de trop grandes libertés avec le produit de ses collectes. Furieux, il le menaça de le faire chasser de l'ordre, mais Tetzel, bouleversé, tomba malade de saisissement et f juillet 1519 dans son couvent, avant qu'on eût pu procéder et sévir contre lui.

TEUTONIQUE (ordre), ou Chevaliers teuto-niques. Fondé 1190 au siège de Saint-Jean d'Acre, et confirmé 6 févr. 1191, cet ordre avait pour but de pourvoir aux besoins des pèlerins et de soigner et soulager les Croisés blessés ou malades. Quelques bourgeois de Brème et de LUbeck en avaient pris l'initiative, ou en avaient donné l'idée, en créant en 1120 pour leurs compatriotes un hospice desservi par des Allemands, ou Teutons. Il se divisait en 2 sections, celle des

Chevaliers et celle des Infirmiers. Le costume consistait en un manteau blanc, avec une croix noire. Son premier grand-maître fut Henri de Waldpott de Bassenheim, qui fixa sa résidence à Saint-Jean d'Acre. L'ordre s'accrut rapidement, et avec ses ressources il étendit son champ d'action; il se donna pour tâche de défendre partout l'Église contre ses ennemis; de nombreuses maisons s'élevèrent, et les princes allemands prirent à cœur de les bien doter; les papes leur accordèrent de grands privilèges, et le peuple contribua libéralement à l'enrichir. L'ordre ayant dû quitter l'Asie à la fin des Croisades, s'établit solidement en Europe; il eut des possessions en Italie, en Allemagne, en Hongrie, en Pensylvanie, et son grand-maître, Hermann de Salza, q. v. fut nommé prince de l'empire par Frédéric II. C'est à la même époque 1226, et sous cet Hermann, que Conrad, duc de Massovie, et Christian, év. de Prusse, appelèrent l'ordre à leur aide contre les païens prussiens, au moins pour préserver leurs stations et leurs temples chrétiens. La ville de Culm fut assignée aux chevaliers comme résidence, et avec le concours des chevaliers de Dobrin, ou Porte-épées, commandés par Hermann Balk, seigneur du pays, ils réussirent à se soumettre toute la Prusse, mais non sans de longs et sanglants combats 1283. Déjà en 1237 l'ordre s'était accru par l'accession des Porte-épées, qui ne se sentaient plus assez forts pour constituer un ordre à part, et il fixa son siège principal à Marienbourg, possédant la Poméranie, l'Esthonie et tout le littoral de la Baltique. Mais leurs richesses, comme d'ordinaire, amenèrent leur décadence par la démoralisation, et en 1466 des guerres malheureuses contre la Pologne et des divisions intérieures firent perdre à Henri de Plauen et à Louis d'Erlichshausen la partie occidentale de leurs États. En 1525 Albert de Brandebourg, qui était grand-maître et qui avait connu Osiander à Nuremberg, et par lui Luther, embrassa la Réforme, se maria et sécularisa une partie de ses États, qui depuis resta dans sa famille. Les autres chevaliers nommèrent à sa place Walter de Cromberg, et le siège de l'ordre fut transféré à Marienberg, ou à Mergentheim. En même temps les Porte-épées se reconstituaient sous Walter de Plettenberg, qui avait battu 2 fois les Russes, mais perdu la Livonie. L'ordre teutonique ne conserva plus que quelques propriétés de peu d'importance, et il finit avec l'empire d'Allemagne (ancien). Napôléon le supprima par un décret du 12 avril 1809, qui fut ratifié par le congrès de Vienne. Ses biens furent partagés entre Bade, la Bavière et le Wurtemberg.

THABORION, fête du mont Thabor, ou de la Transfiguration, peu célébrée en Occident, où

Calixte IH l'introduisit seulement en souvenir de la victoire remportée sur les Turcs à Belgrade, le 6 août 1456. Elle compte en Orient comme une des 12 grandes fêtes de Tannée.

THALLELÀUS1° médecin du Liban, martyr, fait prisonnier 284 en Cilicie, et exécuté à Edesse. — 2° Ascète, qui se fit enfermer dans une cage suspendue en plein air, et qui y vécut dix ans, jusqu'à sa f 460. Canonisé.

THALMUD, ou Talmud (enseignement, doctrine; de l'hébr. larnad, enseigner), titre d'une double collection formée de la Guemara et de la Mishna, q. v. et résumant tout ce qui est compris dans le N. T. sous le nom de Tradition des anciens, tel qu'il a pu être recueilli et rédigé au 4m« siècle de notre ère. C'est par excellence le livre des juifs, car il touche à toutes les questions, il répond à tous les doutes, il embrasse toutes les branches de la vie civile et morale, religion, philosophie, médecine, histoire, jurisprudence, etc. On en parle beaucoup, on le cite souvent, mais on le connaît très peu, soit à cause de la rareté de l'ouvrage, soit à cause de la lourdeur de sa composition, soit à cause des difficultés de la langue, soit enfin parce qu'il coûte fort cher. Et cependant il renferme des choses fort intéressantes, de belles et gracieuses pensées écrites dans le style imagé de l'Orient, de véritables réminiscences bibliques, des pensées fines et ingénieuses, des renseignements d'une grande valeur sur l'histoire et les coutumes du peuple juif. Mais ce sont comme des fleurs égarées au milieu de ruines sombres et rocheuses, éparses au milieu d'un fouillis de décombres sans nom; ce sont de belles pensées noyées, perdues au milieu de maximes minutieuses et puériles, et l'on s'explique la défaveur respectueuse qui accompagne ce recueil si précieux et si remarquable à plusieurs égards. D'après les juifs, Dieu a donné sa Loi à Moïse sur la montagne; c'est la loi écrite, telle que nous la possédons dans le Pentateuque. Il y ajouta ensuite des commandements oraux, qui furent transmis par Moïse à Aaron, aux 70 anciens, et au peuple, enfin spécialement à Josué; c'est la Mishna (répétition), recueil d'apboris-mes, de maximes, de préceptes, reproduits en un style vif et concis, et rangés sous un certain nombre de chefs. Puis, comme plusieurs de ces maximes pouvaient donner lieu à des interprétations diverses, le président de l'école de Jérusalem, ou de Tibériade, rabbin Juda-le-Saint, ou Jochanan, en donna la Guemara, ou le commentaire, l'explication, qu'on désigne auj. *ous le nom de Yeroushalmi. Mais les juifs de la Ba-bylonie n'étant pas contents de ce travail firent faire une autre Guemara, le Bâbli, par le rabbin Aschi de Mésopotamie (date incertaine), de sorte qu'il existe en fait 2 Talmud, qui ont une partie commune, la Mishna, mais des Guemara différentes. Ce travail colossal ne forme pas moins de 12 vol. in-folio, Venise 1520, Amsterdam 1744, et il est heureux que l'imprimerie soit venue le sauver du vandalisme du moyen âge qui brûlait tout ce qui pouvait rappeler le judaïsme, comme si le christianisme lui-même n'était pas intéressé à conserver des livres utiles pour l'intelligence de l'A. T. Les principaux mss. connus se trouvent anj. dans les biblioth. de Munich, Carlsruhe, Breslau, Hambourg et Constantinople; mais il doit y en avoir d'autres encore dans des synagogues ou chez des particuliers. Il n'en existe de traduction complète dans aucune langue. Les juifs préfèrent la Guemara de Babylone, qu'ils appellent le Thalmud tout court, par opposition à l'autre qu'ils ne nomment jamais sans y ajouter la désignation de Jérusalem; les chrétiens au contraire préfèrent ce dernier, non seulement parce qu'il est plus concis et d'un hébreu moins corrompu, mais encore parce qu'il renferme moins d'erreurs, de fables et d'absurdités. La Mishna est divisée en 6 livres, formant un total de 126 chapitres; les Guemara qui la commentent suivent à peu près le même ordre.

THAMER, Théobald, né à Rossheim, Ba&*>-Alsace, étudia la théol. à Wittenberg 1535-1539, et fut appelé comme prof, de théol. à Francfort sur l'O., puis par le landgrave Philippe, à Marbourg, où il se montra très luthérien. Mais la triste campagne de Smalcalde abattit ses esprits, et l'on ne tarda pas à constater chez lui à des signes évidents un penchant vers le catholicisme. Il ne pouvait comprendre la justification par la foi seule, et après avoir été consulter les théologiens à Wittenberg, Dresde, Iéna, Zurich, il finit par Milan et Rome, où il se décida à se faire catholique 1557. Nommé prof, à Fribourg, il f 23 mai 1569.

THARGUM, au pluriel Thargumim, mot cal-déen dérivé d'une racine à 4 lettres, qui signifie traduire, et qui ne se trouve dans la Bible que Esdr. 4, 7. où la version Segond l'a rendu en effet par traduire. On désigne sous ce nom les traductions de l'A. T. en caldéen, ou ara-méen, traductions un peu développées, paraphrasées, avec de courtes explications intercalaires pour des lecteurs ou des auditeurs peu au courant de la géographie et des anciennes coutumes juives. On y trouve même quelquefois des mots grecs, parfois aussi des variantes; cela dépend de l'auteur et de l'âge du thargum, car ils sont de dates différentes. C'est en voyant la langue hébraïque se perdre peu à peu dans leurs divers exils, que des rabbins ont eu l'idée^ comme ils l'avaient fait en grec pour l'Egypte, de mettre la Bible en caldéen pour leurs coreligionnaires de la Babylonie. Il est difficile de préciser l'époque à laquelle remontent ces premiers essais. On en trouve déjà une trace Néhém. 8, 8. mais ce ne sont encore que des traductions orales. Le besoin de les fixer et de leur donner une certaine autorité se fît vite sentir, soit à cause des libertés qne prenaient certains paraphrastes, soit à cause de leur ignorance même. La Guemara parle d'un thargum de Job, écrit au milieu du l** siècle, dont Gamaliel aurait été mécontent; or il est peu probable qu'on ait commencé par Job la traduction de l'A. T., et les thargums des livres de Moïse doivent être plus anciens. Daniel, Esdras et Néhémie sont les seuls livres qui n'aient pas de thargums, ce qu'on explique pour Daniel par le caractère trop précis de ses prophéties messianiques; pour Esdras, parce qu'il contient des fragments cal-déens et que par un respect superstitieux de la lettre, on craignait d'établir une comparaison, ou une confusion entre le texte inspiré et la traduction; pour Néhémie, parce qu'il ne faisait qu'un avec Esdras. Jusqu'à présent on connaît onze thargums: 1° Celui d'Onkelos, q. v.

Celui de Jonathan Ben Uziel, renferme les prophètes et les livres historiques; il est très estimé, probablement antérieur à celui d'Onkelos, et attribué au meilleur des 80 disciples de Hillel. 3° Celui de Jérusalem sur le Pentateu-que, écrit dans le dialecte très mélangé de Jérusalem, avec des mots barbares et quelques chapitres omis. 4° Celui du faux Jonathan sur le Pentateuqtie, attribué par erreur au Jonathan n<> 2; il appartient au 6®« ou au 7™« siècle et a peut-être servi de base au précédent; les deux se ressemblent et reproduisent en général les interprétations rabbiniques. 5° Celui de Joseph l'aveugle, ou le borgne, sur les Hagiographes (Job, Psaumes, Proverbes), probablement originaire de Syrie; trad. assez exacte pour les Proverbes; il n'est pas sûr que les trois parties de ce thargum soient l'œuvre d'un même auteur. 6° Celui des 5 Megilloth, ou rouleaux (Ruth, Ester, Écclésiaste, Cantique et Lamentations); il est d'un âge assez récent et n'a pas grande valeur; on en possède plusieurs copies différentes. 7° Celui sur les Chroniques, longtemps ignoré, découvert par Beck dans la biblioth. d'Erfurt, et impr. 1680-1683; nouvelle édition meilleure, par Wilkins, Cambridge 1715. 8<>? 9°, 10°. Trois thargums sur Ester, llo Un thargum de Jérus. sur les prophètes, counu seulement, ou soupçonné d'après une marginale du mss. 154 de Kennicott. Les thargums ont une grande utilité au point de vue critique, et ils servent à prouver l'exactitude du texte maso-ré tique. v. Hœvernick, Einl. T. 2, §81 et suiv.

THÉÀTINS, ou Chiètins ou Clercs réguliers de la Cùngrég. de Latran, ou de la Divine Providence; ordre religieux fondé 1524 à Chieti, latin Théate, pour la prédication, la cure d'âmes, le soin des malades, et pour relever moralement le clergé par l'exemple d'une vie pure, en enlevant ainsi à la Réforme un de ses prétextes les plus apparents. Outre les 3 vœux ordinaires, ils devaient encore renoncer à toute pqppriété, à tout revenu fixe, même aux quêtes, et ne vivre que d'aumônes et de ce que Dieu leur enverrait. L'ordre eut pour fondateur Gaétan, ou Cajetan, de Thienne, né 1480, voué à la Vierge dès son enfance, qui étudia à Padoue et devint docteur en droit 1505. Il fut protonotaire de Jules II et devint prêtre. Après la mort de sa mère il vécut à Vienne et à Venise, exerçant les œuvres de la charité; il eut pour amis des cardinaux dont plusieurs devinrent papes. C'est le 24 juin 1524 que Clément VII confirma l'ordre, dont le premier supérieur fat Caraffa, qui devint plus tard Paul IV; le 27 sept, les membres, qui avaient reçu les privilèges de chanoines de la Congrég. de Latran, prononcèrent leurs vœux. Après la prise de Rome par les soldats de Charles-Quint, ils se réfugièrent à Venise, et en 1533 Cajetan ouvrit une seconde maison à Naples, et plus tard plusieurs dans le nord de l'Italie. Cajetan t 7 août 1547 à Naples; canonisé 1669. Jusque là chaque maison avait son supérieur, et les affaires de l'ordre se traitaient dans un chapitre annuel. Sixte V changea cette organisation el donna à l'ordre un général 1588. Outre leurs maisons, qui se multiplièrent en Europe et qui furent pour eux une source de richesses et d'avantages matériels, ils eurent des missions en Tartarie et en Georgie. Costume ecclésiastique noir et bas blancs. — Il y eut aussi des théati-nes, fondées par Ursule Benincasa (née 1547, f 1618), qui bâtit une chapelle à la Vierge immaculée, et ouvrit deux couvents, dont chacun ne devait pas recevoir plus de 66 nonnes (parce la Vierge est morte à 66 ans!). L'un des couvents s'appelait Marthe et l'autre Marie.

THÉBAIDE, partie de la haute Égypte, située aux environs de Thèbes, qui lui donna son nom; elle fut de bonne heure civilisée; berceau des plus vieilles dynasties du pays. Elle était entourée de vastes déserts où se réfugièrent et vécurent de nombreux ermites et les premiers chrétiens persécutés.

THÉBAINE, ou Thébéenne, v. Légion.

THÉBUTIS, personnage obscur, cité seulement dans un fragment d'Hégésippe par Eusèbe, comme ayant aspiré à l'évêché de Jérusalem après la mort de Jacques. Il était porté par le parti judaïsant, mais les partisans de Siméon ayant eu le dessus, il se sépara de l'Église et concourut à former le parti des ébionites.

THÉGANUS, ou Thégain, archev. de Trêves, de noblesse allemande, vivant dans la 1** moitié du siècle; auteur d'une vie de Louis -le-Débonnaire (Hludovici) écrite vers 835 en manvais latin, un peu d'après Eginhard: importante seulement pour la fin, depuis 830.

THEINER, deux frères 1° Jean-Antoine, né 15 déc. 1799 à Breslau, prêtre, appartenant à la tendance joséphine; chapelain, depuis 1824 prof. (Texégèse et de droit ecclés. à Breslau, prit une part active au mouvement de réforme, et ayant été suspendu de sa charge de prof. 1826, il rentra dans la carrière pastorale. En 1845 il se mit de nouveau à la téte de l'agitation réformiste, fat excommunié, et vécut paisiblement en donnant des leçons; en 1855 il fut nommé bibliothécaire de l'université, f mai 1860. On a de lui une Description du mss. qui contient le Pentaleuque arabe, un Comment, sur les 12 Petits prophètes, une étude sur l'A. T., quelques ouvrages de controverse, et surtout 1828 un travail historique sur l'Introduction du célibat forcé et ses suites, fait en collaboration avec son frère. — 2° Augustin, né 11 avril 1804, étudia le droit et la théol., se joignit d'abord au mouvement libéral, et collabora au livre de son frère sur le célibat forcé; mais à la suite d'un voyage à Rome en 1833 il devint un des champions les plus ardents de l'ultramontanisme. Il fut nommé préfet des archives du Vatican et s'affilia aux oratoriens. Sa position le mit en état de continuer les annales ecclés. de Baronius, en 3 vol. in-f°, ainsi qu'une foule d'ouvrages sur l'histoire des diverses nations de l'Europe, collections inédites de Décrétâtes du moyen Âge, Hongrie. Russie, pontificat de Clément XIV, etc. Il tomba en disgrâce sous Pie IX, août 1870, soupçonné d'avoir fourni des notes et des documents aux adversaires du dogme nouveau de l'infaillibilité.

THÉISME, v. Déisme.

THÉKLA lo jeune fille légendaire, mentionnée par Tertullien et Jérôme, d'Iconie, ou d'Isaurie, elle fut convertie par l'ap. Paul dans la maison d'Onésiphore, renonça à tous ses biens et à un riche mariage avec Thamyris. Faite prisonnière avec Paul, et condamnée au bûcher, elle fut sauvée du feu par une pluie torrentielle. Elle s'enfuit à Antioche avec l'apd-tre et alla loger chez une dame très considérée, Tryphânan; arrêtée de nouveau, elle fut livrée aux bétes féroces, mais ces bétes se promenèrent devant elle, ou celles qui s'aventurèrent à vouloir la toucher furent foudroyées. Paul l'envoya en Iconie avec une mission, et protégée par un nuage elle put y enseigner et faire des miracles, ainsi qu'à Séleucie, où elle mourut à 90 ans. — 2<> Autre jsune fille, d'une bonne famille chrétienne, Sicilienne, du 3®« siècle; passe pour avoir pendant les persécutions protégé des chrétiens, enseveli des martyrs, bâti des églises, et doté un évéché. — 3° Nommée avec Marianne, Marthe, Marie et Ennéis, parmi les martyrs perses, qui furent sous Asa fouettées et décapitées pour n'avoir pas voulu abjurer leur foi.

THÉMISTIUS, diacre d'Alexandrie dans la Ire moitié du siècle, monophysite; il fonda parmi les sévériens un parti, qui prit son nom, les thémistiens, ou agnoètes, q. v.

THÉOCRATIE (gouvernement de Dieu), nom donné par Josèphe (contre Appion 2, 16) au mode de gouvernement établi par Moïse, en opposition à la monarchie, à l'aristocratie, à la démocratie et aux autres formes extérieures des peuples de ce monde. Israël devait n'avoir qu'un maître, Dieu, et quand il demanda un roi, ce fut comme un acte de rébellion contre son souverain légitime, 1 Sam. 8, 7. En théorie ce serait le meilleur des gouvernements, la loi divine se confondant avec la loi civile, mais il faudrait pour cela que le cœur des hommes fût bon. L'Évangile à son tour veut renouveler la théocratie, mais seulement pour un peuple de bonne volonté, en soumettant les cœurs et les pensées du fidèle à l'action du Saint-Esprit. Le moyen âge, en constatant que cette action intérieure, suffisante pour l'individu, était insuffisante pour la société, a voulu rétablir la théocratie sous la forme de la hiérarchie romaine. D'autres tentatives ont été faites dans le même esprit, contraindre les populations à vi^re comme si elles étaient chrétiennes; ainsi Savonarole à Florence, un peu Calvin à Genève, Cromwell en Angleterre. Le dernier concile du Vatican a émis la même prétention, mais il est venu se heurter en fait contre la résistance tacite ou avouée de toutes les nations, ce qui serait regrettable si le gouvernement du pape était réellement celui de Dieu.

THÉODARD, pieux év. de Maëstricht, souffrant de la décadence de l'Église et travaillant à y remédier. Il vit la fondation du couvent de Stavelo par saint Remacle 661 et y fit élever Landebert. Son église ayant été dépouillée par des voleurs, il se rendit à Metz pour se plain* dre à Childéric II, mais il fut assassiné en chemin, 668.

THÉODOMIR, prince visigolh d'Espagne, battit les Maures en plusieurs rencontres, 695 et 711, mais fut défait et dut se contenter d'un petit royaume comprenant Valence, Murcie et la Nouvelle-Castille.

THÉODORA lo impératrice d'Orient, femme de Justinien I**; née vers 508 en Chypre, de basse condition, mais belle, spirituelle, intrigante, elle vint fort jeune à Constantinople avec sa famille, et chercha des ressources dans le théâtre, la danse et la prostitution. Elle fut quelque temps la maîtresse d'Hékébole, préfet de la Pentapole, et quand il la quitta, elle revint à Constantinople où elle. ne tarda pas à captiver les bonnes gr&oes de l'empereur. A la mort de l'impér. Euphémie, Justinien l'épousa, et bientôt la nomma corégente. Elle dota généreusement les couvents et les églises, ouvrit un refuge pour les filles perdues, favorisa les désordres d'Antonine, femme de Rélisaire, et ruina le trésor par ses prodigalités. Elle protégea le monophysitisme et chercha, quoique avec réserve, à influencer son mari dans ce sens. Elle réussit à faire nommer Anthime, son favori, au patriarcat de Const., mais celui-ci s'étant ouvertement déclaré monophysite, fut aussitôt remplacé par Mennas. Le pape Vigile, qu'elle fit élire après Agapet, trompa ses espérances par ses hésitations. Elle f 12 juin 548 d'une maladie de cœur. Elle avait été excommuniée 2 fois. — Trois autres impér. d'Orient portèrent le même nom: la femme de Léon l'Arménien; celle de Théophile, régente sous Michel III, f 867 au couvent; et la fille cadette de Constantin IX, la dernière de la dynastie macédonienne. — 2° et 3<>, deux prostituées romaines de la plus haute distinction; elles appartenaient à la fois à la noblesse et au clergé. Apparentées aux plus grandes familles de Tus-cie (Toscane) elles ont été pendant 50 ans les chefs de la pornocratie, q. v. La mère, fille de Glycérius, un des douze juges qui condamnèrent Louis III, est considérée par Liutprand comme une des meilleures têtes de Rome, en même temps qu'elle est stigmatisée pour sa grossière impudeur. Ayant reçu un délégué de l'archev. de Ravenne, elle se prit de passion pour lui, donna successivement à ce mignon les sièges de Bologne et de Ravenne, et enfin le fit nommer pape sous le nom de Jean X. Elle eut 2 filles, Marozzia, q. v. et Théodora-la-jeu-ne, femme du consul Gratien; c'est à cette dernière que quelques auteurs prêtent les amours de la mère pour l'arch. de Ravenne. Liutprand définit les filles: Matri non tolum coequale*, te-rum etiam Veneris exercitio promptiores.

THÉODORE lo pape du 24 nov. 642 au 14 mai 649, Grec de naissance, combattit le mono-thélisme avec vigueur et fit condamner Pyrrhus et même Paul, le patr. de Constantinople; il excommunia le premier avec une encre mêlée de vin consacré, c. à d. avec du sang du Sauveur.

2» Pape de 20 jours, nov. et déc. 897, Romain, fit reconnaître solennellement le corps de Pormose retrouvé dans le Tibre par des pêcheurs.

3® Martyr du 4« siècle, surnommé de Tyr; Arménien ou Syrien, soldat d'une légion d'Ama-sée, confessa sa foi pendant les persécutions de Maximin et de Galère, et relâché d'abord, alla jusqu'à mettre le feu à un temple de Cybèle, ce qui l»i valut d'être fouetté de verges et brûle sur l'échafaud, 9 nov. 306. Grégoire de Nysse a fait son éloge. La légende porte que son corps ne fut pas consumé, qu'il fut transporté à Blindes et que sa tête est à Gaëte.

4<> Théodore de Mopsueste, célèbre docteur syrien, né 350 à Mopsueste ou à Antioche. Il étudia sous Libanius la rhétorique et l'art de persuader. Condisciple de Chrysostôme, il entra sous son influence dans la vie monastique, en renonçant à un mariage qu'il était sur le point de contracter, 370. Plus tard, ordonné prêtre à Antioche, il combattit, avec un rare talent, le sabellianisme en la personne d'Apollinaire, et l'arianisme qu'il fit disparaître presque totalement du diocèse de Mopsueste en Ci-licie. En récompense de ses mérites il fut nommé év. de Mopsueste, 392. En 394, convoqué à un concile de Constantinople, il prêcha devant Théodose-le-Grand qui le proclama le premier des théologiens, f 428 ou 429. Savant et logicien remarquable, d'un caractère paisible, il a écrit de nombreux ouvrages; on lui en a attribué jusqu'à 10,000! Il ne nous reste en entier que son Comment, sur les Psaumes, son Exposition du symbole de Nicée, et quelques fragments de ses commentaires, conservés surtout par les nestoriens. Ses écrits, dans lesquels deux docteurs illustres puisèrent leurs idées, Nestorius et Pélage, faisaient partie de ce qu'on appela les Trois-Chapitres, recueil d'ouvrages théologiques sur l'orthodoxie desquels le concile de Chalcédoine 521 jeta quelques doutes; après de longs débats, le 5me concile œcuménique, réuni à Constantinople, condamna les Trois-Chapitres, 553. C'est ainsi que plus d'un siècle après sa mort, cet illustre théologien fut déclaré hérétique, et sa mémoire flétrie. — Il avait un frère, Polycrone, év. d'Aparaée, auteur de comment, sur Ezéchiel, Job, Daniel, presque tous perdus. H. B.

5° Th.-le-lecteur, à Constantinople, vers 525; historien grec, donna des extraits des travaux de Socrate, Sozomène et Théodoret, et continua l'œuvre de Socrate jusqu'en 439; on n'en possède plus que quelques fragments conservés par Jean de Damas, Nil us et Nicéphore Callisti.

6° Th. de Césarée, dit Ascidas, moine à Jérusalem, vint 535 à Constantinople, où il gagna la faveur de Théodora, fut nommé archev. de Césarée, et prit une part active à la campagne contre les Trois-Chapitres. Il se distingua par ses intrigues et sa violence. Son crédit tomba après la mort de l'impératrice; il fut privé de son siège et excommunié.

7<> archev. de Cantorbéry, succéda 664 à Deusdedit. Il était de Tarse, savant en métrique et en astronomie. Le pape Vitalien, après lui avoir imposé la vraie tonsure, celle de Pierre an lieu de celle de Paul, lui donna pour aide, probablement aussi pour surveillant, Pabbé Adrien, d'Afrique. On craignait qu'il n'eût encore des traditions grecques, mais il se montra franchement romain et travailla avec autant de talent que de zèle à l'organisation de son immense diocèse, fonda des églises et des écoles, favorisa le patronage, écrivit des recueilsjitur-giques et rassembla en 60 chapitres des traités sur la pénitence, f 19 sept. 690 à Londres à 88 ans, enterré à York.

8<> Th. Graptus (le marque, le tatoué), ainsi surnommé à cause de 12 vers ïambiques gravés sur sa ligure. Né à Jérusalem, élevé k Marsaba, il fut le martyr de sa passion pour les images. A la demande du patr. Thomas de Jérusalem, il se rendit 818 à Constantinople pour reprocher k Léon l'Arménien sa guerre aux images; il fut fouetté et exilé dans le Pont. Au bout de 3 ans il recommença avec Miche) Balbulus, qui le bannit de la ville. Enfin Théophile, successeur de Michel, le fit fouetter pour le même motif 833, et le fit déporter dans l'Ile d'Aphu-sia, Bithynie. où il mourut. C'était beaucoup de rigueur contre un pauvre maniaque. Les 2 ou 3 écrits qu'on lui prête sont d'une authenticité douteuse.

9o et 10°, v. Studites, et Théodule.

THÉODORET (donné de Dieu), ainsi nommé par ses parents, parce que Dieu le leur donna en réponse k leurs prières. Né 386 ou 393 à Antioche de Syrie, d'une bonne et pieuse famille, il fut envoyé à 7 ans au couvent d'Eu-prepius, où il apprit à connaître les écrits de Diodore de Tarse et de Th. de Mopsueste. Après avoir été lecteur et diacre, il fut nommé év. de Cyrus, en Syrie; il n'accepta qu'à regret, mais s'acquitta de sa charge avec distinction. Il avait donné toute sa fortune aux pauvres, il continua de consacrer presque tous les revenus de son évêché à des œuvres d'un intérêt public, ponts, routes, bains, etc. Par sa puissante prédication il ramena à l'Église des milliers de marcionites, d'ariens, de macédoniens, quelquefois même an péril de sa vie. Engagé dans le conflit nestorien, il prit d'abord parti pour Nestorius, qu'il avait probablement connu au couvent; il distinguait entre le Logos, et son temple, c. à d. son humanité. Il ftat accusé par Dioscnre de partager le Seigneur en 2 fils de Dieu, à quoi il répondit avec beaucoup de modération, accordant même à Marie le titre de mère de Dieu. Il n'en fut pas moins dénoncé à Constantinople et dans toute l'Église d'Orient, et anathématisé. Il finit cependant par céder à la pression exercée sur lui de divers côtés et notamment par la cour, mais en continuant de défendre Neàtorius et la mémoire de Théod. de

Mopsueste, 434. Malgré ses déclarations il rota convaincu de nestorianisme; l'empereur l'interna 448 dans son diocèse, il fut excommunié, et le conc. d'Éphèse, dit des brigands, le déposa 449. Il prit sa revanche après la mort de Théodose, et au conc. de Chalcédoine il accusa Dioscure d'eutychianisme et le fit excommunier. Mais lui-même, pour être entièrement justifié, dut crier anathème à Nestorius. Il feutra en possession de son évêché, où il f 457. Il a énormément écrit; outre ses Comment, sur l'A. et le N. T., ses Discours sur la Providence, ses Lettres au nombre de 200 environ, on a de lui une Hist. de l'Église en 6 (ou 10) livres, qui va de 325 à 429, le plus important de ses ouvrages; une Hist. pieuse, qui raconte les légendes de la vie de 50 solitaires; une Hist. des hérétiques, de peu de valeur; Éranistès, ou Po-lymorphos, contre les eutychiens; une Réprè-hension, contre Cyrille; divers Dialogues, contre les anomèens, les macédoniens, les apoili-naristes, etc. On remarque surtout une excellente lettre à l'év. d'Arménie, pour le fortifier pendant la persécution perse.

THÉODORIC lo le Grand, v. Ostrogoths, 2®.

THÉODOSE lo Th. 1er, dit le Grand, né 346 à Cauca, Espagne, fils d'un comte que Gratien fit mettre à mort sur une dénonciation calomnieuse. Il fit ses premières armes en Bretagne, repoussa une invasion des Quades et des Mar-comans, combattit 374 les Sarmates en Mœsie. comme général de Valens, mais donna sa démission et se retira dans ses terres d'Espagne, quand il eut appris l'injuste exécution de son père, 376. En 378 Gratien se l'associa comme corégent, et le 19 janv. 379 il le proclama k Sir-mium empereur d'Orient. Par sa tactique prudente, non moins que par sa générosité, Thèo-dose tint en respect les Goths, les Alains et les Huns. Une grave maladie le décida à se faire baptiser, et en même temps, par un édit du 28 févr. 380, il donna force de loi aux décrète de Nicée. II acheva de soumettre les Visigoths par ses égards envers leur roi Athanaric. H déposa l'év. arien Démophile, qui fut momentanément remplacé par Grégoire de Naziance. Devenu par la mort de Valentinien II seul maître de l'empire, il proscrivit toutes les omis* l'arianisme, le paganisme, le manichéisne, fit renverser une colossale statue de Sérapis, bannit Eunomius, détruisit un grand nombre de temples païens, et employa le glaire temporel là où l'épée de l'Esprit aurait dû suffire. En 385 il perdit sa pieuse épouse Flaccilla et sa fille Pulchérie; il se remaria peu après avec la belle Galla, fille de l'impératrice arienne Justine, et soeur de Valentinien II, et tous cette influence il se relâcha un peu de ses rigueurs contre les ariens. Une émeute ayant éclaté 387 à Antioche dans laquelle sa statue et celles de ses deux fils i furent traînées dans les rues, il pardonna au I lieu de se venger. Il se montra moins gôuéreux en 390 via-à-vis de Thessalonique, lors d'une j autre émeute où plusieurs de ses officiers périrent, et malgré Ambroise il ordonna un massacre où plus de 7000 habitants perdirent la vie. Ambroise déclara alors au violent et cruel monarque, qu'il ne célébrerait pas la Cène en sa présence avant qu'il 9e fût repenti publiquement. Théodose se soumit à une pénitence de 8 mois, et s'engagea à ce qu'à l'avenir personne ne pût être condamné sans avoir été entendu, et à ce qu'aucune sentence capitale ne fût exécutée qu'un mois après avoir été prononcée. Il + 17 janv. 395 à Milan laissant le trône à ses deux fils, Arcadius âgé de 18 ans, pour l'Orient; Honorius, plus jeune, pour l'Occident. Ambroise, à qui il les confia, ne lui survécut pas longtemps. Il fut enterré à Constantinople, dans l'égl. des Apôtres, près du mausolée de Constantin. Aussi bon administrateur que grand guerrier, il put retarder la chute de l'empire; ses vertus personnelles lui font une place à part; la colère était son grand vice, et il le combattit, sinon toujours avec succès, du moins avec une con-eiencieuse persévérance. — Vie, par Fléchier.

THÉODOTE lo le tanneur, de Byzance, nia un des premiers la divinité de J.-C. Emprisonné pour sa foi, il avait renié Christ pour sauver sa vie. Couvert de honte il vint à Rome, espérant y rester ignoré, mais des chrétiens de Byzance l'y découvrirent et lui reprochèrent son péché. Pour l'atténuer en quelque manière, il dit, en s'appuyant de Luc 1, 35, qu'il n'avait renié qu'un homme, et le pape Victor l'excommunia, vers 190. Théod. reconnaissait cependant le Christ comme Messie, et admettait sa naissance surnaturelle. Il s'occupait beaucoup de dialectique et de mathématiques. Épiphane en fait un Aloge, mais en réalité sa secte fut plutôt ébio-nite et elle se fondit plus tard dans les artémo-nites. Ses principaux chefs furent Asclépiade, Hermophile, Apollon ides, etc. — 2<> Th. le changeur, pire que le précédent; il vint à Rome vers 200 à 210; chef des melchisédékiens, q. v.

THÉODOTION, de Sinope. Irénée et Eusèbe en font un prosélyte d'Éphèse; Épiphane un marcionite. Il passe généralement pour avoir été ébionite. D'après Épiphanes il aurait fait, sous Commode (en tout cas pas plus tard que Sym-maque), une traduction grecque de l'A. T., ou plutôt une édition revisée des LXX; mais il aurait suivi pour Daniel le texte original, ce qui explique la préférence que les écrivains chrétiens, sauf Justin, donnèrent à sa version. On n'en possède plus que quelques fragments conservés parmi les Hexaples d'Origène.

THÉODULE, ou Théodore, trois év. du Valais, souvent confondus les uns avec les autres:

10 le plus ancien év. de l'Égl. du Valais; 2o un év. de ce nom vers 515, organisateur du culte de la légion thébaine et fondateur de régi. de Saint-Maurice; 3° le dernier év. à l'époque de Charlemagne, qui lui aurait donné l'autorité temporelle sur toute la vallée, détail aussi peu sûr que le fait de l'existence de cet évêque dont le nom même est incertain; 4° V. Nil us.

THÉODULF. goth de nation, né en Italie, était en Gaule en 781, et fut nommé abbé de Fleur y vers 781, puis év. d'Orléans de 786 à 794, s'occupa beaucoup des écoles, écrivit un capitulaire en 46 articles sur les devoirs des prêtres, et se distingua par son élévation d'esprit autant que par sa charité. Chargé en 798, par Charlemagne, de visiter comme mi$sus9 avec Leidrade, les deux-Narbonnaises, il raconta son voyage en un poème de 956 vers, Parœneris (Exhortation aux juges), moitié descriptif, moitié didactique. On a encore de lui 71 pièces de vers, quelques fragments de sermons et 2 traités de théologie. Après la mort de Charlemagne, il fut employé par son fils Louis à diverses missions, mais compromis en 817, suspect d'avoir conspiré avec Bernard d'Italie contre le trône de Charlemagne, exilé de son diocèse, relégué à Angers, il fut réhabilité 821, maisf peu après, presque subitement, et probablement empoisonné.

THÉOGNOSTE, successeur de Pierius, comme directeur de l'école des catéchètes d'Alexandrie, vers 285; auteur d'un traité sur le Blasphème contre le Saint-Esprit, et d'Hypotyposes en sept livres sur: Dieu le Père, seul auteur de l'univers; le Fils, le Saint-Esprit, les anges,les démons, l'incarnation, et le plan du monde. Photius lui reproche plusieurs hérésies, entre autres d'avoir appelé Jésus une créature, mais Athanase qui le représente comme un homme savant et zélé, le justifie et montre que Photius l'a mal compris.

THÉOLOGAL, théologien chargé par un décret du concile de Latran 1215 d'expliquer aux jeunes clercs la sainte Écriture et de leur enseigner les points les plus importants de la cure d'âme; ordinairement choisi parmi les chanoines attachés à une cathédrale. Le conc. de Trente a étendu cette institution aux collégiales, et même à des villes moindres, et définit le théologal « un maître qui enseigne gratuitement la grammaire aux clercs et aux pauvres écoliers, pour les mettre en état de passer ensuite à l'étude de9 saintes Lettres, si Dieu les y appelle. » Leur traitement est formé ou par un bénéfice simple, ou par un canonicat; au besoin

11 y est pourvu par l'évêque ou le chapitre. — Comme adjectif on emploie ce mot pour désigner une exigence, ou un attribut spécial de la théologie; ainsi les vertus théologales, les trois que saint Paul met en relief. 1 Cor. 13, 13.

THÉOLOGIE, la science, ou l'étude de Dieu, comme l'anthropologie est l'étude de l'homme. Ahélard, le premier, parle de la théol. chrétienne. Elle embrasse tout l'ensemble des connaissances relatives à la vie religieuse, et se subdivise en plusieurs branches distinctes. Schleierniacher distingue: la théol. philosophique (polémique, apologétique), la théol. historique (exégèse, dogmatique, morale), et la théol. pratique. Mais la dogmatique appartient plutôt à la première catégorie, et la morale à la dernière. Ces divisions ont d'ailleurs quelque chose de factice, les branches empiétant souvent les unes sur les autres. Y. Encyclopédie. On désigne plus spécialement sous le nom de Théol. biblique, science assez récente, l'étude non systématique des différents livres de la Bible, qui met en relief, non le résumé des doctrines chrétiennes, mais le développement successif de la vérité révélée, qui devient de plus en plus claire et précise à mesure qu'elle passe des patriarches à Moïse, puis aux prophètes, à Jésus-Christ, et finalement aux apôtres. Haever-nick et Distel pour l'A. T., Néander et Reuss pour le N. T., ont fait faire de grands progrès à cette branche, qui part de l'exégèse pour aboutir à la dogmatique.

THÉOLOGIE germanique, petit ouvrage ascétique, découvert par Luther, et qu'il fit imprimer en partie 1516, en totalité 1518.11 est conçu dans l'esprit des Amis de Dieu, des Tauler, des Suson, et recommande, dans un langage qui frise le panthéisme, le complet renoncement à soi-même et l'entière abnégation de la volonté, pour arriver à cette illumination intérieure et à cette profondeur d'amour qui seule réalise l'intime communion avec Dieu. Mais il faut d'abord passer par l'enfer de la repentance. Christ nous est un modèle, par sa nature même. L'auteur est inconnu; il se donne comme un ami de Dieu. Dans la préface, antérieure à Luther, il semble désigné comme chevalier teutonique, prêtre et custode de l'ordre à Francfort. On avait pensé à Tauler, mais il est cité dans le livre comme un ancien docteur. L'enthousiasme de Luther, qui n'en fit pas moins de 6 éditions, gagna le protestantisme tout entier, qui en fit un moment un des livres de la Réforme, et le catholicisme le mit à l'index 1625. Il y en eut bientôt des traductions en latin, flamand, anglais, français. La meilleure édition a été publiée d'après un mss. de 1497 trouvé à l'ancienne biblioth. des cisterciens, de Bronnbach, près Wertheim, par Pfeiffer, Stuttgart 1851, réimpr. 1855avec trad.en allemand moderne: trad. en anglais par Sus. Winkworth, avec préfaces de Kingsley et de Bunsen. L'original date du commencement du 15®e siècle. — Un ouvrage semblable, avec le même titre, fut composé par l'év. Berthold Pirstinger de Chiemsee (né 1463 f 1543) dans un esprit tout catholique, mais il a passé inaperçu, 1528; réimpr. 1852 à Munich.

THÉOPASCHITES, nom donné à ceux qui adoptaient la formule: Dieu a été crucifié pour nous, comme firent d'abord les monophysites. On n'y attacha pas sur l'heure une grande importance, mais Sévère l'ayant introduite d'office dans la liturgie, et s'en étant fait un marchepied pour atteindre au patriarcat, la lutte recommença, et les dyophisites eux-mêmes finirent par s'y rattacher, comme étant la conséquence de leurs idées sur la double nature de Jésus. Le conc. de Constantinople 519 l'adopta; les acé-mètes la déclarèrent hérétique; elle fut sanctionnée 533 par Justinien avec le consentement du pape Jean IL Le conc. Quini-Sexte 692 la rejeta définitivement, et dès lors elle ne fut plus conservée que par les monophysites et les mo-notbélètes. Il n'en arrive pas moins que dans le peuple les gens pieux répètent souvent que Ken a été crucifié pour nous; si l'expression n'est pas correcte, l'idée n'est pas hérétique.

THÉOPHANES Iode Byzance,probablement vers la fin du 6rae siècle, auteur d'une Hist. de la guerre des Perses 567-573, et d'une continuation de l'hist. de Justinien; cité par Photius, avec 64 extraits. — 2o Théoph. Isaac, on k Confesseur, fils d'un gouverneur dans la mer Égée; né à Constantinople vers le milieu do 8me siècle, il perdit son père de bonne heure et fut élevé par sa mère sous la tutelle de C. Co-pronyme. Marié très jeune par l'emp. avec une riche et belle jeune fille, malgré sa vocation prononcée pour la vie monastique, il continua de vivre dans la continence, refusa une place dans l'administration, que son beau-père lui avait obtenue de Léon IV, et quand son beau-père fut mort, il se sépara de sa femme par consentement mutuel; celle-ci entra dans un couvent près de Constantinople, et lui-même se retira dans la petite Mysie comme abbé d'un couvent qu'il fit construire sur ses terres. Ab 2®e conc. de Nicée 787 il parut comme grand partisan des images. Léon l'Arménien ayant en vain essayé de le gagner à son parti, fit saisir le pauvre vieillard tout malade 813, et le filtrait* porter en Samothrace, où il t 818 ou 820, d'après les bollandistes le 12 mars. On lui doit une Chronographie qui continue l'ouvrage de Grég. Syncelle jusqu'au règne de Léon l'Arménien, et qui, malgré quelques erreurs et un mauvais style, est une source précieuse de renseignements sur l'hist. de la lutte pour les images. — 3® Th. Cerameus (le potier), appelé aussi Georges, ou Grégoire, év. de Taormina, Sicile, a prêché devant Roger II de Sicile, ce qui fixe sa date k 1140 environ. Il appartenait an rite grec. Il est probable que le canon latin de la messe ayant été introduit en Sicile sous Roger I«r, mais quelques villes, comme Messine, Palerme, ayant conservé quelque temps encore la liturgie orientale, il en aura été de même pour Taormina. Il a laissé 62 discours, d'un bon grec, très iconolâtres et mariolâtres, d'une exégèse allégorique à la mode du temps, publ. par le jésuite Scorsus 1644 avec trad. latine, et 2 sermons sur la Croix de Christ. — 4* Th. de Nicée, frère de Théodore Graptus, q. v. dont il partagea les idées et la mauvaise fortune.

THÉOPHILANTHROPES, c. à d. amis de Dieu et des hommes, secte religieuse fondée dans une intention louable, k une époque où il n'était pas facile de professer une religion, par La Réveillère-Lepaux, membre du Directoire (né 1753, f 1824). Jean-Baptiste-Chemin Du-pontès en avait donné l'idée par son livre anonyme: Manuel des théophilanthropes, sept. 1796, et l'année suivante le culte s'organisait. Il ne comptait d'abord que 5 familles, mais le manuel, en se répandant, lui amena bientôt de nouveaux prosélytes et dans le nombre Dupont de Nemours, Bernardin de Saint-Pierre, etc. Simple culte domestique il finit par se célébrer publiquement dans la salle de l'hôpital Sainte-Catherine, rue Saint-Denis, et par les soins de La Réveil 1ère qui en était devenu le directeur, il réussit k obtenir dix églises à Paris et à se propager même dans la province. Dieu, la vertu, l'immortalité de l'âme, l'amour du prochain et de la patrie, constituaient toute la doctrine et toute la morale de la secte. On se réunissait chaque semaine, mais sans jour fixe. Des inscriptions morales ornaient les murs des chapelles. Un père de famille présidait le culte en costume ordinaire, et ne mettait un surplis blanc, avec parements bleus et ceinture rouge, que pour les grandes fêtes, celles des 4 saisons, celles de la jeunesse, des époux, de l'agriculture, etc. On faisait une lecture, un discours, une prière: on chantait. Ce culte sans doctrine, cette religion sans dogme et toute de sentimentalité, dura 3 ou 4 ans et s'effondra sous le poids du ridicule qni s'attachera toujours k la prétention de fonder une religion sans croyances positives; un arrêté du Directoire du 12 vendémiaire an X (3 oct. 1801) lui donna le coup de grâce.

THÉOPHILE lo 5®e év. d'Antioche, apolo-gète. Né païen, très instruit, il fut amené au christianisme par l'étude de l'A. T. On n'a aucune date certaine, ni sur sa naissance, ni sur son épiscopat (168-181, d'après Nicéphore), ni sur sa mort. Il écrivit en un grec élégant de courts traités populaires: sur le Démon qui séduisit les premiers hommes, sur les Patriarches, sur le néant des faux dieux. Jérôme cite encore de lui une Harmonie des Évangiles. Tous ces ouvrages sont perdus. On ne possède plus de lui que son Apologie en 3 livres, adressée k Autolycus, philos, païen et contempteur du christianisme. Ce philosophe lui ayant demandé de lui montrer son Dieu, il lui répond: La lumière n'est que pour ceux qui ont les yeux nets. Le 2m® livre essaie de montrer dans les 3 premiers jours de la création l'image de la triade de Dieu. Dans le 3®« il condamne les païens et défend les juifs; il prouve en même temps que le christianisme n'est pas une nouveauté, puisque la Sybille l'a annoncé.

2° Théoph. l'Indou, né dans l'île de Diu, fut amené fort jeune comme ôtage à Constantinople, où il devint arien, puis diacre, et fut consacré èvêque pour la mission arabe, vers 350. L'emp. Constance lui remit de riches présents pour les princes arabes, et lui fournit l'argent nécessaire pour bâtir des églises. Il convertit le roi des Homérites, et éleva des temples k Taphar, Aden et Hormuz: mais les juifs, très nombreux dans le pays, l'empêchèrent de pousser plus loin ses succès. En 356 Constance le nomma év. d'Éthiopie sur le refus de Fromen-tius de se laisser consacrer par le patriarche arit'n d'Alexandrie. Il se rendit de Socotora à Axum, mais ne put s'y installer et fut obligé de revenir,

3o Théoph. év. d'Alexandrie 385412, violent, vindicatif, ami du luxe et passionné d'architecture. Théodose I«r lui ayant fait don d'un temple de Bacchus pour être transformé en égl. chrétienne, il y trouva des peintures licencieuses qu'il se hâta d'exploiter contre le paganisme. Les païens y répondirent par une émeute, qui prit bientôt les proportions d'une guerre civile. Acculés k leur beau temple de Sérapis, célèbre par sa riche bibliothèque, les païens choisirent pour chef le philos. Olympus, et de part et d'autre on martyrisa les prisonniers qu'on pouvait faire. Les efforts de l'autorité furent impuissants pour arrêter le désordre. L'empereur répondit k une dèputa-tion en ordonnant d'épargner les hommes, mais en permettant la démolition des édifices. Les païens découragés renoncèrent k la lutte, et comme il n'arriva ni tremblement de terre, ni changement extraordinaire dans les crues du Nil, ils se résignèrent et un grand nombre se firent chrétiens. Th. joua un rôle équivoque dans les controverses origénistes. Il eut pour successeur son neveu Cyrille.

4o Un Théophile légendaire, sans date, administrateur du diocèse d'Adana, Cilicie, refusa l'épiscopat par modestie et fut privé de sa place par le nouvel èvêque. N'ayant plus de ressources il s'adressa à un magicien juif qui lui procura une entrevue avec plusieurs diables. Ceux-ci lui firent rendre sa place, après qu'il eut renié Jésus et Marie et engagé son âme par sa signature. Mais bourrelé de remords il s'adressa à Marie, et par son intercession Jésus réussit à soustraire au diable l'engagement signé, et un jour que Th., fatigué d'avoir prié, s'était endormi dans l'église, Jésus déposa cette pièce sur sa poitrine. A son réveil il fut heureux de la retrouver; il confessa publiquement son péché et mourut 3 jours après. On attribue cette légende à un prêtre grec nommé Eutychien; c'est un prêtre napolitain, Paul, du 9»© siècle, qui l'a importée en Occident.

5o Empereur d'Orient 829-842, fils et successeur de Michel II, punit les meurtriers de Léon Y, et fit la guerre aux images.

6° Th. de Viau, plus connu sous son simple nom de Théophile, né 1590 à Agen, protestant de naissance, mais athée et d'une immoralité hideuse, vint à Paris 1610, se lia avec Balzac, se fit connaître par des saillies spirituelles et caustiques, reçut de Louis XIII une pension, mais fut condamné à mort pour les obscénités sacrilèges de son Parnasse des vers satiriques. La protection de Montmorency fit commuer sa peine en celle de l'exil, mais il garda sa pension. f 1626.

THÉOPHYLACTE 1° Simocatta, né en Égypte, écrivit vers 629 une Hist. de l'emp. Maurice 582-602; il avait rempli diverses charges sous son règne; en outre 85 Lettres, et des Recherches sur la nature, ou Problèmes physiques. — 2° Th. né probablement en Eubée, vint à Constantinople, fut nommé précepteur du jeune Const. Porphyrogénète, et vers 1078 archevêque d'Achrida, Bulgarie, f après 1118. Connu surtout comme exègète grec, l'un des meilleurs du moyen âge, rappelant un peu l'école d'Antioche, et versé dans la patristique; auteur de Comment, sur les petits Prophètes, les Évang., les Actes et les Épîtres; de 75 Lettres, d'un Traité d'éducation pour les rois, et d'une Réfutation des accusations des latins.

THÉOPNEUST1E, expression empruntée à 2 Tim. 3, 15 (l'Ecriture est tout entière théop-neuste, c. à d. inspirée de Dieu). On désigne sous ce nom cette théorie de l'inspiration qui attribue non à quelques livres seulement, mais à la Bible entière, l'inspiration, non seulement du sens général, mais aussi des mots, par opposition à l'idée que certains livres, comme les prophètes et les épîtres, ont été inspirés plus spécialement que d'autres, ainsi les livres historiques; par opposition aussi à cette autre doctrine d'après laquelle les écrivains sacrés, rédigeant soit leurs vues, soit leurs souvenirs personnels, ou les résultats de leurs recherches.

l'action de Dieu se serait bornée à une sorte de direction morale ou même de surveillance générale. La doctrine de la théopneustie a été développée et soutenue par le prof. Gaossen avec chaleur et conviction, Genève 1840.

THÉOSOPHIE, l'intelligence de Dien, sa connaissance, ou la sagesse concernant Dieu, espèce particulière de mysticisme qui se distingue de la théologie en ce qu'elle prétend arriver à connaître Dieu, non par l'étude et par des moyens extérieurs, mais par l'intuition et par la contemplation intérieure. On ne peut loi reprocher de manquer d'idées, ni de sentiments, et elle a rendu à la théol. et à la philosophie quelques services en les obligeant à tenir compte de l'élément mystique qui est dans l'homme religieux; mais dans son ensemble la théos. ne repose sur aucune base solide et ses résultats ne sont que le produit des imaginations individuelles. Le nouveau platonisme et le gnosticisme en furent les représentants à l'apparition du christianisme; plus tard les mystiques du moyen âge, et depuis la Réforme Schwenckfeld, VVeigel, Bôhme, Swedenborg. Œtinger, Baader, etc.

THÉRAPEUTES, secte égyptienne, des environs d'Alexandrie et du lac Maréotis, presque identique à celle des ébionites sur les bords de la mer Morte. Le mot grec dont ils tiraient leur nom signifie à la fois servir, honorer et guérir, et il est probable qu'il y avait quelque chose' de tout cela dans leur activité eénobiti-que. Ils formaient un véritable ordre religieux, avec noviciat d'un an, avec des classes super, et inférieures, et vivant dans la plus grande austérité. Ils regardaient le corps comme une prison, dont la mort devait les délivrer. Pfailon est le premier qui en parle, et il en parle comme d'une secte juive, mais il paraît qu'Aristo-bule, 170 av. C. appartenait déjà à une société de ce genre en Égypte. Eusèbe et Jérôme eu parlent au contraire comme d'une secte chrétienne. Il est possible qu'il y ait eu transition d'une religion à l'autre, à une époque où beaucoup de chrétiens ne voyaient dans l'Église qu'un épanouissement du judaïsme. Ils avaient plusieurs rapports avec les esséens, mais plus de spiritualité.

THÉREMIN, L.-Fréd.-François, né 19 mars 1780 à Gramzow, Marche de l'Ucker, fils du pasteur de la communauté française. Après avoir étudié à Berlin et à Halle, il vint à Genève pour se perfectionner dans le français et y fut consacré 1805. En 1810 il remplaça Ancillon à Berlin, et fut nommé en 1814 prédicateur de la cour et de la cathédrale; en membre du Consistoire, rapporteur au ministère des cultes, docteur en théol. de Greifewald; en 1839 prof. d'hom£létique à l'université. Il avait depuis l'âge de 30 ans perdu l'usage d'un œil. t sept. 1846. Il avait épousé Ernestine Matthis, née Conrad, dont il eut un fils et une lîlle, qui lui survécurent. Doué d'un talent oratoire très remarquable, qu'il relevait encore par un travail consciencieux, il regardait l'éloquence comme une vertu: ses auteurs préférés étaient Démosthénes et Massillon. Sa doctrine était purement biblique. Sa tenue en chaire, son débit, sa personne entière était pleine de noblesse et de distinction. Outre dix volumes de sermon s, qu'on peut appeler classiques, il a laissé quelques livres d'édification, des lettres, des poésies, des récits, qui ont joui d'une grande popularité.

THÉRÈSE de Cepeda y Ahumada, qui s'appelait elle-même plus volontiers Teresia a Jesu; née 25 mars 1515 à Avila, d'une famille noble i?t riche, la 6roe de 12 enfants, dont les 3 premiers d'une autre mère. Élevée dans les sentiments d'une grande dévotion, que son tempérament exagérait encore, elle montra toute jeune ce qu'elle devait être plus tard. Elle quitta un jour la maison paternelle pour aller avec un frère chercher le martyre chez les Maures; heureusement un parent les rencontra et les ramena chez eux. Une longue maladie de sa mère, qui f 1527, exerça sur elle une grande influence. Puis la jeunesse arriva, le besoin du plaisir, l'entraînement de compagnes mondaines, la lecture secrète de livres fantastiques et de romans pas tous moraux, la détournèrent pendant quelque temps de son ancienne voie et la jetèrent dans la dissipation. Mais son père s'étant hâté de la placer au couvent augustin de Marie-la-Gracieuse, elle reprit sa ferveur première, et une grave maladie, dont elle ne se remit jamais entièrement, la décida, malgré son père, à embrasser la carrière religieuse; elle s'était nourrie de biographies de saints, faisant suite à ses lectures romanesques et flattant ses goûts naturels; elle s'enfuit au couvent carmélite de l'incarnation d'Avila, en même temps que son frère Antonio se faisait aussi religieux, et elle prononça ses vœux 1534. Trois ans après, en 1537, elle reprenait ses allures de vie mondaine, essayant, disait-elle, d'allier le ciel avec la terre. Cela dura 20 ans, jusqu'en 1559. Enfin k 44 ans elle renonça définitivement au monde; la mort de son frère produisit sur elle une vive impression, et dès lors elle concentra toutes ses ardeurs sur la réforme de son ordre et sur sa propre sanctification. Elle eut des visions, des extases, de vraies hallucinations; un ange du ciel lui perçait le cœur avec une lance d'or; le Christ lui faisait sentir sa présence corporellement; il l'épousait et elle se sentait physiquement élevée en l'air; le clergé lui-même comprit que cela allait trop loin.

Mais dans ces moments de calme elle savait s'occuper de choses plus pratiques. A la suite d'une visite qu'elle reçut en 1560 de Pierre d'Alcantara, le réformateur de l'ordre des franciscains, elle entreprit de réformer aussi les carmélites. Favorisée par son provincial, elle établit en 1562 à Avila le couvent modèle de SainUJoseph, avec l'aide de la riche Giumara d'Ulloa, veuve de son frère Lorenzo de Cepeda, mort au Pérou; mais elle ne put obtenir qu'en 1563 d'en prendre la direction; il fallut l'intervention directe de P. d'Alcantara pour vaincre les hésitations de l'évêque. Elle ressuscita la vieille règle de l'ordre, et ses statuts, dont le mss. original est encore, dit-on, à Madrid, sont extrêmement sévères: jamais de viande, sauf en voyage ou en cas de maladie; jeûnes prolongés à Pâques; silence absolu en certains moments; abandon de tous ses biens; flagellations régulières les lundis, mercredis et vendredis; simple semelle de cuir ou de bois pour toute chaussure (les carmes hommes étaient entièrement déchaussés), etc. Cette constitution fut confirmée en 1565 par Paul IV. De 1566 à 1582 elle réforma 16 autres couvents, pendant que sous son influence Antoine de Jésus et Jean de la Croix réformaient les carmes. Ce dernier fut un moment son confesseur, et c'est sous sa direction qu'elle eut ses extases mystiques les plus accentuées. De 1576 à 1579 elle eut à subir de nouvelles persécutions de la part des carmes relâchés. Le général de l'ordre lui-même, longtemps son protecteur, se tourna contre elle et finit par lui imposer une retraite absolue dans le couvent de Saint-Joseph, et lui interdit la fondation de nouvelles maisons. Elle s'adressa inutilement à plusieurs personnes de la cour, et même à Philippe II qui la protégeait; elle avait contre elle le nonce Sega. L'inquisition ouvrit contre elle une enquête; J. de la Croix fut mis en prison. C'est en 1579 seulement que les choses parurent s'arranger un peu; les procès furent abandonnés; de nouvelles maisons purent s'ouvrir, Grégoire XIII donna un provincial aux déchaussés, Philippe nomma une commission favorable aux réformes de Thérèse. La visionnaire put espérer des jours meilleurs, mais à la suite d'un voyage à Burgos, elle prit la fièvre et f 4 oct. 1582 à Albe dans un couvent de son ordre. Son cadavre fit de nombreux miracles; elle apparut même à diverses personnes après sa mort, et fut canonisée 1622 par Grégoire XV, en même temps que Néris et Loyola. Les cortès de 1814 l'ont proclamée patronne de l'Espagne. Ses œuvres comprennent des Lettres, des Statuts, des Poésies, des Traités, des Conseils aux religieuses. On remarque surtout son Autobiographie, l'Hist. des maisons de son ordre, le Chemin de la Perfection, le Château de l'àme, Pensées sur l'amour de Dieu. A côté de choses édifiantes qui ont séduit non seulement Fénelon, Sailer, et les hommes de Port-Royal, mais encore des protestants comme Arndt, Arnold, Terstee-gen, on y trouve des exagérations mystiques d'une crudité qui expliquent les mesures prises contre Thérèse par ses chefs spirituels; évidemment ses facultés mentales étaient par moments, comme son corps, dans un état anormal de surexcitation.

THESAURUS (trésor) meritorum, v. Indulgences.

THÈSES 1° Les 95 de Luther; Tetzel y répondit, ainsi que Wimpina, une fois par 106, une seconde fois par 50 thèses; puis Prierias, puis Eck par ses Obélisques en 400 thèses, auxquelles Luther opposa ses Astérisques. Carlstadt intervint aussi dans cette lutte, dont le terrain ne tarda d'ailleurs pas à s'élargir, pour embrasser tout le champ de la Réforme. — 2° Les 95 thèses et les commentaires dont Harms accompagna en 1817 la reproduction des 95 thèses de Luther. Elles sont un manifeste acerbe contre le rationalisme: qui fait de la raison et de la conscience le pape du temps présent, qui remet à l'homme lui-même le droit de se pardonner ses péchés, qui a tué le diable et fermé l'enfer, qui se fait un Dieu à sa convenance, qui demande une revision du texte primitif de la Bible tous les cent ans, etc. L'auteur condamne aussi l'Union, sans méconnaître ce qu'il y a de bien dans les autres Églises, mais en établissant la supériorité du luthéranisme. Ces thèses eurent un grand succès et marquèrent le premier moment du réveil qui, sans être luthérien ni hostile à l'Union, opposa rigoureusement au rationalisme traditionnel la foi au surnaturel biblique. Il y fut répondu de divers côtés, notamment par Schleiermacher, et l'on ne compta pas moins de 200 ouvrages pour ou contre, grands ou petits, dans l'espace de 2 ou 3 années. Comme l'administration ecclésiastique du Hol-stein fut mise en jeu, des explications furent demandées à Harms, mais l'affaire n'eut pas de suites. — 3<> Un pasteur ultra-luthérien de Halle, Seiler, a eu aussi l'idée en 1858 de publier 95 thèses contre l'Union. Stier a répondu à cette « parodie » de l'œuvre de Luther.

THETMAR, ou Thitmar, v. Dittmar.

THIERS, Jean-Baptiste, né 11 nov. 1636 à Chartres, théologien, d'abord prof, au collège Du Plessis à Paris, puis curé de Charaprond, près Chartres, et enfin de Vibraye, dioc. du Mans, f 28 févr. 1703. Instruit et spirituel, mais caustique et d'un caractère désagréable, il a beaucoup écrit et d'une manière intéressante, mais quelques-uns de ses ouvrages affectent le rationalisme, d'autres le rapprochent du protestantisme, et quelques-uns ont été mis à l'index (jusqu'à correction). Ainsi sur la Diminution des jours de fêtes, un Traité de l'Exposition du Saint-Sacrement, Des Superstitions selon l'Écr. Sainte; Dissert, sur la sainte Larme de Vendôme, dont il demande la suppression; Des jeux et divertissements permis, l'Inscription du grand portail de l'Égl. des Cordeliers de Reims, l'Avocat des pauvres, Hist. des perruques, Contre les carosses, De l'absolution de l'hérésie, Critique du bréviaire revisé de Clugny, etc.

THIERSCH, H.-Guill.-Josias, né 3 nov. 1817 à Munich, humaniste et philologue distingué, fit sa théologie à Erlangen; en 1838 maitre a la maison des missions de Bâle, en 1839 répétiteur à Erlangen, prof, en 1843 à Marbourg où il exerça une grande influence sur la jeunesse studieuse. Quelques années après il devint irvin-gien, donna sa démission en 1850, et se fixa en 1864 à Munich comme vicaire apostolique, puis à Augsbourg, enfin à Bâle. Beau-frère par sa femme, de l'év. Gobât de Jérusalem. Personnalité attachante, profonde piété, sérieuse connaissance des Écritures, Thiersch est un écrivain fécond et original. Ses premiers travaux portent sur l'exégèse du N. T. et sur l'histoire des temps apostoliques. Sa Vie d'une famille chrétienne est un de ses meilleurs ouvrages et a eu de nombreuses éditions. Il a écrit aussi sur l'éducation des enfants, sur les Paraboles, le Sermon sur la montagne, Luther, Gustave-Adolphe, Dôllinger, etc. Ses Origines de l'Hist. sainte d'après la Genèse, ont été trad. en franç* par G. Godet, 1882. On a encore de lui un Essai, latin, sur le Pentateuque, et une Gramm. hébraïque.

THILO, Jean-Ch., né 28 nov. 1794 à Langensalza, étudia la philologie et la théol. d'abord à Leipzig, puis à Halle, où il passa la plus grande partie de sa vie dans l'enseignement, au gymnase, à l'école de Francke et à l'université. Il fit des lectures sur l'Hist. ecclésiastique, l'Hist. des dogmes, la symbolique et la patris-tique; après la mort de son beau-frère Knapp 1825, il donna aussi des leçons d'exégèse. En 1820 il visita l'Angleterre avec Gesenius comme franc-maçon. Il se tint en dehors des luttes dogmatiques qui éclatèrent entre les rationalistes Gesenius et Wegscheider d'une part, et les évangéliques ayant Tholuck à leur tête. Sa principale publication a pour objet les Apocryphes du N. T., travail resté incomplet et que Tischendorf a achevé. Il a publié aussi quelques dissertations sur la patristique, Ignace, Eusèbe d'Alex., les Hymnes de Synésius, etc. Décoré de l'Aigle rouge en 1840, il est + 17 mai 1853.

THOLUCK, Fréd.-Aug.-Gottgetreu {Deofidus), né 30 mars 1799 à Breslau, fils d'un orfèvre, étudia à Berlin, d'abord les langues orientales, puis la théologie. Patronné par le prélat Diez, protégé par les d'Altenstein, introduit dans le cercle religieux des Kottwitz, apprécié par Néander qui reconnaissait en lui, à côté de talents remarquables, une foi vivante et une piété sincère, il répondit aux espérances de ceux qui voyaient en lui un futur champion de la vérité évangélique, et même il les dépassa. Son premier ouvrage: le Péché et le Rédempteur 1822, bientôt suivi de Guido et Julius qui le complète (réponse au Théodore de De Wette), eut un immense succès, dû à son caractère franchement apologétique, non moins qu'au charme de la composition et à la beauté du style. En 1826 il fut appelé à Halle comme prof, de théol. à la place dtf Knapp, pour y combattre le rationalisme. Sa santé l'obligea bientôt à accepter la place de chapelain d'ambassade à Rome; mais il revint à Halle en 1829 et se trouva presque immédiatement, et pour une dizaine d'années, en conflit aigu avec les coryphées du rationalisme, Gesenius et Wegscheider. Les étudiants, et la ville elle-même, étaient divisés. Hengsten-berg à Berlin, dans sa Gazette évang., le soutint énergiquement et lui resta fidèle. La lutte finit à la mort de Gesenius, et Tholuck put se livrer en paix à ses travaux de prédilection, les langues, l'exégèse, la prédication. Il s'occupait soigneusement et affectueusement de ses étudiants et il a exercé sur eux une immense et bonne influence. Il avait également organisé dans la ville des réunions du soir qu'il présidait souvent, et dans lesquelles il a prononcé quelques-uns de ses meilleurs sermons. Il s'intéressait aux œuvres religieuses, et notamment à l'Alliance évangélique. Il avait épousé en secondes noces une baronne de Gemmingen, qui a fait beaucoup pour l'établissement des diaconesses à Halle. Le 2 déc. 1870, le 50™* anniversaire de son entrée dans le professorat a été célébré au milieu d'un vif enthousiasme dans toute l'Allemagne, et les marques de sympathie affluèrent de tous côtés, lettres, doctorat, ordre de l'Aigle rouge, etc. Il t 1877. Ses publications sont fort nombreuses: Comment, sur les Romains, les Psaumes, saint Jean, Hébreux, Serm. sur la montagne, Crédibilité de l'hist. évang. (contre Strauss), études sur le Rationalisme, la Théol. luthérienne, la Vie académique et ecclés. au 17me siècle, sur l'Inspiration, Sermons, Heures de recueillement, Biographies, Anthologie des écrivains mystiques de l'Orient, etc.

THOMAS lo l'apôtre, v. Dict. de la Bible.

2° Th. de Celano, l'auteur supposé de la 1" biographie connue de François d'Assise, écrite vers 1228 ou 1230, et de la célèbre séquence: Dies irœ, ainsi que de quelques autres hymnes. Né à Celano, et disciple de François, provincial des minorités d'Allemagne, et custode des couvents de Cologne, Worms, Mayence et Spire. Il vivait encore en 1255. On n'a cependant aucun renseignement historique positif sur son compte, et quelques-uns nient jusqu'à son existence.

3o Th. Cantipratanus, ou de Catimpré, savant néerlandais, né 1186 ou 1201 à Lewis, près Bruxelles, d'une famille noble, d'abord moine augustin à Catimpré, près Cambrai, et depuis 1232, dominicain et disciple d'Albert-le-Grand à Cologne; il étudia au couvent de Saint-Jacques à Paris, devint recteur de Louvain et peut-être év. suffragant de Cambrai, f le 15 mai entre 1263 et 1280. Auteur de plusieurs Vies de saints et de saintes, de quelques écrits sur la Nature, de poésies diverses, et d'un livre de morale sur les Abeilles mystiques, où il donne des préceptes aux supérieurs et aux inférieurs.

4° Th. d'Aquin, né vers 1226 au château de Rocca-Sacca, royaume de Naples, près du mont Cassin, de la noble famille des comtes d'Aquino, qui avait dans les veines du sang normand et du sang des Hohenstaufen; il fut envoyé à 5 ans à l'école du mont Cassin, et en 1237 à Naples. Il se sentit bientôt un penchant irrésistible à entrer dans un ordre religieux. Ses parents firent tout pour le retenir et ne lui épargnèrent même pas les mauvais traitements. Mais grâce à la protection d'Innocent IV, il finit par entrer chez les dominicains, qui l'envoyèrent compléter ses études à Cologne auprès d'Albert-le-Grand 1245. Ses condisciples, à cause de sa taciturnité, l'avaient surnommé le bœuf muet de Sicile. Il accompagna Albert à Paris, où il fut reçu bachelier en théol., et à son retour à Cologne fut nommé sous-maitre et prof, dans la nouvelle école de théologie. En 1251 il retourna de nouveau à Paris, d'où il revint avec le titre de licencié. Enfin en 1255 il fut nommé docteur. Ses écrits, son enseignement, ses prédications l'avaient déjà rendu célèbre. Saint Louis l'appréciait et l'invitait souvent. Il défendit contre la Sorbonne les ordres mendiants. Sur la demande d'Alexandre IV il rédigea le préavis qui eut pour conséquence la condamnation de Guill. de Saint-Amour. Enfin en 1271 il fut appelé à Rome comme maître du palais; il refusa toutes les autres charges et distinctions. Il partagea son temps entre Paris et l'Italie, enseigna à Bologne de 1266 à 1269, fut envoyé à Naples en 1272 à la demande du roi Charles, mais se sentit frappé dans sa santé dès 1273. Il avait des défaillances, des visions. Comme il se rendait au conc. général de Lyon, il tomba malade dans l'abbaye cistercienne de Fossa-Nuova, près Terracine. et f 6 mars 1274. Canonisé par Jean XXII le 18 juill. 1323. On se disputa ses reliques; les dominicains le réclamaient comme un des leurs, les cisterciens comme étant mort chez eux. Urbain V en 1368 décida en faveur des dominicaine; un bras fut donné à l'égl. de Saint-Jacques à Paris, le reste du corps à Toulouse, sauf une main qui avait été laissée à sa sœur. En 4567 Pie V le proclama docteur de FÉglise, mais depuis longtemps l'opinion l'avait surnommé docteur angélique, docteur universel, ange de l'école. On peut dire qu'il avait été aussi le disciple d'Anselme par la lecture de ses écrits. C'était un homme d'une intelligence remarquable, d'une grande profondeur, et en même temps d'une certaine subtilité dialectique qui le rendait le vrai représentant de la scolastique. Comme Anselme, c'était aussi un homme pieux, la prière était pour lui un grand moyen d'instruction; c'est dans la prière qu'il cherchait l'illumination intérieure dont il avait besoin. Comme prédicateur il était pratique et savait se mettre à la portée de ses auditeurs, mais il était plus logique et plus persuasif qu'entraînant. Les dominicains se glorifient de lui, comme de ce que leur ordre a produit de plus remarquable; et ils ont adopté sa doctrine comme la leur. Il a énormément écrit et sur presque tous les sujets. Ses œuvres compl. publiées à Rome 1570-1571, ne forment pas moins de 18 vol. in-fol.; Paris 1636-1641, 23 vol. in-fol.; Venise 1745, 20 vol. in-4°. Elles comprennent des Comment, sur Aristote, d'après le grec; sur l'Écriture, sur le Maître des sentences; des sermons, des traités de controverse et d'apologétique (contre les Gentils). Mais son principal ouvrage, le résumé de sa doctrine, comme l'avaient fait avant lui Alex, de Haies, Albert-le-Grand et d'autres, c'est son recueil intitulé Somme de théologie, longtemps classique et remis en honneur par Léon XIII, après avoir été relégué dans l'ombre pendant un temps par les jésuites. Il affecte la forme rigoureuse du syllogisme, mais ne réussit pas toujours à dissimuler le côté faible du raisonnement appliqué aux choses spirituelles. Ainsi il admet que c'est le corps humain, et non l'âme, qui crée l'individu; l'âme n'est pas quelque chose d'individuel; elle ne le devient que par la circonstance d'être déterminée par un corps. C'est assez obscur, et cette idée soulève plus de problèmes qu'elles n'en résout. U admet avec Augustin, la grâce efficace par elle-même, et avec Leibnitz, que Dieu se détermine toujours par la raison du meilleur. En métaphysique il est idéaliste, et voit dans les idées abstraites l'essence même des choses. En morale le bien et le mal sont absolument distincts, abstraction faite de la volonté de Dieu.

5<> Th. a Kempis, proprement Tkomas Hanter-ken (Hœmmerchen, petit marteau), né 1380 à Kempen, près Cologne, d'une famille d'artisans. Dès l'âge de 13 ans il fréquenta la célèbre école de Deventer, dirigée par les fr. de la Vie commune. Plus tard il devint membre de leur société, s'abandonna aux soins pieux de Florence Radewins, disciple de Gérard Groot, et sur son conseil entra 1399 au couvent du mont Sainte-Agnès, près de Zwoll, où, comme religieux, prêtre et bientôt sous prieur, il prêcha souvent et avec succès. Il copia 4 fois de sa main la Bible entière; il en fît une édition en 4 vol. qui lui prit 15 années de travail. C'était un cal-ligraphe remarquable, et son talent fut pour le monastère une jolie source de revenus. O copia aussi divers écrits de saint Bernard et d'autres ouvrages d'édification. C'est dans ce genre de travaux qu'il passa sa vie, se mêlant peu aux choses du dehors, + juillet 1471. On a de lui des sermons, des poésies et plusieurs liTres de dévotion: le Soliloque de l'âme, la Discipline des cloîtres, les Trois tabernacles, le Dialogue des Novices, la Vallée des lys, le Petit jardin des roses, etc. Son principal ouvrage est l'Imitation de J.C., q. v. Œuvres complètes 147S (sans l'Imitation); 1600, 1607, 1615, Anvers, édit. du jésuite H. Sommalius, avec l'Imitation.

6° Th. de Villanova, ainsi nommé du lieu d'origine de ses parents. Né vers 1487 à Fuen-tana, roy. de Léon, d'une famille peu aisée, il étudia à Alcala, devint docteur et prof, de philos. à Salamanque, mais se joignit en 1517 aux ermites de l'ordre d'Augustin, et fut ordonné prêtre 1520. Distingué dans la cure d'âme comme dans la prédication, un peu visionnaire, bientôt surnommé l'apôtre de l'Espagne, il fut le supérieur de son ordre pour Salamanque, Burgos et Valladolid, puis provincial pour l'Andalousie et la Castille, confesseur de Ghar-les-Qumt, et après avoir refusé l'archev. de Grenade, il accepta en 1544 celui de Valence, que, malgré sa santé chancelante, il administra avec zèle et bénédiction. On lui attribua de soo vivant plusieurs miracles: d'avoir conjuré oa orage qui menaçait sur mer les évéques embarqués pour Trente; d'avoir par la prière rempli de grain une grange vide, etc. f 8 nov. 15SB; enterré à Valence dans l'égl. des Augustias, canonisé 1668 par Alexandre VII. Auteur de plusieurs Sermons, et d'un Comment, sur le Cantique.

7o Th. Campanella, né 5 sept. 1568 à StiUa, Calabre, étudia à Naples et à Cosenza, se distingua dès l'âge de 12 ans comme poète et comme orateur. Il avait l'intention de se consacrer au droit, mais séduit par les noms d'Albert-l^Grand et de Th. d'Aquin, il se décida à entrer dans l'ordre des dominicains. Après avoir étudié d'abord Aristote avec passion, il tinit par s'en détourner et le combattit en se rangeant sous le drapeau de Platon. Par là même il attaqua aussi la scolastique, et s'il défendit le catholicisme et le papisme, ce fut d'une manière assez équivoque. C'était uue tête de génie, mais mal équilibrée; à beaucoup d'égards aussi un grand cœur, mais emporté par son imagination. En politique il rêva de reconstituer la république de Platon sous la forme idéale de l'état communiste, et comme le royaume de Naples, opprimé par les Espagnols, était loin de répondre à cet idéal, il fut accusé d'avoir conspiré. Retiré à Balbia, il écrivit 1591 son livre: La philosophie démontrée par les sens, dans lequel il cherche à prouver que tout repose sur la connaissance, sur la sensation, et que toutes les parties du monde sont douées de sentiment; à Naples il écrivit: Du sentiment des choses et de la magie. Par ses discussions sur Aristote il se mit mal avec les théologiens, et se retira successivement à Rome, Florence, Venise et Bologne. Il revint à Naples en 1598, prophétisa pour 1600 un changement de gouvernement, et fut arrêté en 1599 comme traître à son pays. Condamné à une prison perpétuelle, et plusieurs fois soumis à la torture, sans qu'on pût rien obtenir de lui, il écrivit dans sa prison la plupart de ses 82 ouvrages. Enfin Urbain VIII obtint des Espagnols qu'il fût remis à l'Inquisition pour y être jugé du crime d'hérésie, et spécialement d'alhéisme; mais une fois là, le pape s'intéressa à lui, le fit relâcher et lui accorda une pension, 1629. L'ambassadeur de France le prit également en affection, et lorsque Campanella quitta Naples pour Paris 1634, ne se fiant pas trop aux surprises que son pays pouvait lui réserver, il trouva en Richelieu un protecteur et une pension. Il s'occupait de publier une édition compl. de ses Œuvres, quand il + 21 mai 1639 au couvent des dominicains de Saint-Honoré. Le saxon Tob. Adami, qui l'avait visité dans sa prison, a édité plusieurs de ses ouvrages. Parmi les plus importants il faut citer son Prodromus pour la Réforme de la philos.; sa Philos, réelle (ou des choses), comprenant la physique, la morale, l'économie et la politique; la Philos, universelle, c.-à-d. la métaphysique; la Cité du Soleil, espèce d'allégorie dans le genre de la République de Platon, etc. Herder a traduit quelques-unes de ses poésies sous le titre de: Soupirs d'un Prométhée enchaîné dans une caverne du Caucase.

8« v. Becket, Cajetan, Netter.

— Saint-Thomas (Chrétiens de), v. Nesto-rius.

THOMASIN de Zicklaria (en italien Thom-masino délia Chiara), poète allemand, du Frioul, n'est connu que par un poème écrit vers 1215: Der wœlsche Gast, qui jette un certain jour sur la morale populaire au 13me siècle; la fermeté de caractère y est envisagée comme la princi -pale vertu, et l'inconstance comme la source de tous les vices; la repentance est la condition du pardon; aucune allusion n'est faite à la pénitence catholique.

THOMAS1US lo Christian, né janv. 1655 à Leipzig. Son père (1622-1684), philosophe distingué, prof, de philosophie et d'éloquence, compta Leibnitz parmi ses éléves, et Spener parmi ses amis de cœur. Christian, après de brillantes études, se voua au droit et commença sa carrière de professeur à Francfort s. l'O. Plein d'idées, mais plus original que sympathique, il réussit à se mettre mal avec tout le monde par le caractère agressif et caustique de ses paradoxes. Il faut peut-être des hommes comme cela pour frayer des voies nouvelles, mais il est regrettable qu'ils ne sachent pas touj. défendre avec convenance des causes qu'ils croient justes et utiles. Il attaqua surtout les vieilles méthodes, la routine et les préjugés régnants, en religion, philos, et littérature. Au lieu du latin il fit un discours public en allemand, et il vanta la littérature française. Il publia, sous des titres qui changèrent, une revue mensuelle de variétés, tantôt gaies, tantôt graves. Il attaqua l'hypocrisie et le faux savoir, et se fit une foule d'ennemis dans tous les domaines. Il n'était pas irréligieux; les souvenirs de Spener et de la maison paternelle exercèrent longtemps sur lui une influence inconsciente, mais dans son horreur de la fausse dévotion, et avec la crudité de son caractère, il se laissa entraîner trop loin, et il finit par admirer R. Simon, Leclerc, Spinosa et préférer, disait-il, la lecture des Apocryphes de TA. T. à celle de la Bible elle-même. Du reste il traitait Homère de vieux fou, et Aristote de barbouilleur. II croyait fermement au péché originel, beaucoup au diable, à la sorcellerie et à la magie; il demanda, mais avec des réserves, l'abolition de la torture. A force de singularités et de bizarreries, exprimées sous formes violentes, il se lit censurer par les univ. de Wittenberg et de Leipzig, et il allait même être arrêté, quand il s'enfuit à Berlin. Là il trouva des protecteurs qu'il n'avait pas encore froissés, et il obtint la permission d'ouvrir une école à Halle; on lui fit un traitement de 500 thalers avec le titre de conseiller. Le succès de son école encouragea le prince électeur à fonder à Halle une université 1694, et Thomasius, d'abord prof, de droit, en fut bientôt le doyen et le directeur. Il y resta, touj. actif, jusqu'à sa f 23 sept. 1728.

2° Gottfried, son petit-fils, fils d'un pasteur, né 26 juill. 1802 à Egenhausen, Framtonie, étudia la théol. à Erlangen. Halle et Berlin. Après avoir été pasteur, puis maître de religion au gymnase de Nuremberg, il passa en 1842 à Erlangen, comme prof, de dogmatique et prédicateur de l'université, et partagea avec Hof-mann et Harless l'honneur d'être un des prin-

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cipaux représentants dn luthéranisme. Auteur d'un travail sur Origène, de quelques études christologiques, d'un Comment, sur les Colos-siens, de sermons, et de plusieurs ouvrages dogmatiques. Nature bien équilibrée il dut à l'influence de sa mère de ne jamais s'écarter du droit chemin, et en écoutant Hegel, Schleierma-cher, Néander, Tholuck, en frayant même avec Feuerbach, il sut examiner toutes choses et retenir ce qui est bon. f 1847.

THOMASSIN, Louis (de), né 28 août 1619 à Aix en Provence, fils d'un avocat général, entra dans la Congrégation de l'Oratoire, enseigna à Lyon et à Saumur la philos, et les lettres, à Paris la théol. au séminaire de Saint-Magloire. Il se retira en 1668, pour se consacrer à des travaux littéraires et théol., apprécié du clergé français, et assisté par lui, car il n'avait aucune ressource personnelle. Le pape aurait voulu en 1691 l'attirer à Rome et le faire cardinal, mais, du consentement de Thomassin, Louis XIV empêcha son départ, f 24 déc. 1697. Dans sa jeunesse Thomassin avait donné quelques inquiétudes à l'Église, en essayant de concilier le jansénisme et le molinisme; il en résulta une vraie tempête contre l'Oratoire, et il dut renoncer à son entreprise. Dans sa retraite il composa de nombreux ouvrages qui lui firent une réputation méritée: Dissertations sur les conciles généraux et particuliers, Mémoires sur la grâce, Ancienne et nouv. discipline de l'Église, Dogmes théologiques, Traités hist. et dogmat. sur divers points dé discipline et de morale; Des Édits et autres moyens dont on s'est servi pour maintenir l'unité dans l'Égl.; De la vérité et du mensonge, Des jurements etdes paijures, etc.

THOMINES, v. Dubosc.

THOMISTES, disciples de Thomas d'Aquin, q. v., par opposition aux scotistes.

THORAH, nom hébreu de la Loi. Les juifs célèbrent la fête de la Thorah le 8®* jour de celle des Tabernacles, dont elle est comme le couronnement, sans qu'elles aient cependant aucun rapport direct. Leur point de contact se trouve dans le fait que la lecture de la loi finit avec la fête des Tabernacles, et que par conséquent elle recommence le sabbat suivant par la des péricopes (ou parash) dans lesquelles est divisé le Pentateuque chez les juifs depuis l'exil. C'est à partir seulement du siècle qu'une fête spéciale fut instituée, et tous furent d'accord, sadducéens comme pharisiens, pour marquer cette solennité en renvoyant au dernier jour de la Fête des Tabernacles la double lecture du dernier et du premier parash, soit Deut. 33 et Genèse 1. C'est dans plusieurs endroits encore l'occasion de réjouissances; on distribue aux enfants des fruits et des petites friandises, aux pauvres des vêtements et des secours en nature ou en argent, et l'on chante des cantiques en l'honneur de Moïse. La dernière et grande journée de la fête, Jean, 7. 37. était donc alors le 7®« jour, et non le 9»* comme aujourd'hui; le 8™ était la transition de la fête aux jours ouvrables.

THORN, ville des États prussiens, patrie de Copernic; 11,000 hab. Le roi de Pologne Wla-dislas IV, comprenant que l'intégrité de la monarchie était menacée par les rivalités politiques et religieuses, et désireux d'y mettre un terme en renouvelant la Paix des dissidents de 1573, qui faisait toujours partie du droit dn royaume, mais qui était peu à peu tombée en désuétude, convoqua à Thorn un colloque religieux, conférence ou discussion, où furent appelés les représentants des diverses Églises, avec la mission de chercher à s'entendre sur un mode de vivre. Le colloque s'ouvrit le 28 août 1645 et devait durer 3 mois. Les catholiques étaient au nombre de 28, dont 8 jésuites; les réformés 24, y compris les moraves et leur évêque Amos Comenius; les luthériens 15 d'abord, auxquels se joignirent plus tard 13 délégués de Courlande et de la Prusse orientale. La conférence était présidée par le grand chancelier Os-solinski, assisté de 6 laïques, 2 de chaque confession. Il y eut 36 séances, mais qui n'aboutirent à rien, les catholiques ayant refusé de recevoir la conf. de foi des réformés (Conf. tfco-runiensis), d'abord comme trop polémique, ensuite comme contraire aux résolutions du conc. de Trente. Dès la lr* séance on avait eu des difficultés relativement à la prière d'ouverture, et à l'usage du mot catholique que les protestant revendiquaient aussi pour eux. D'un autre côté les luthériens se montraient hostiles aux réformés, et en outre ils étaient divisés entre eux. Le 24 oct. tout était rompu, mais comme le roi avait ordonné une session de 3 mois, on resta à Thorn jusqu'au moment fixé, et l'on eut le 21 nov. une séance de clôture. Calixte, qui avait été nommé député par le grand-duc de Prusse, résuma ses impressions en disant que ce qui aurait dû être un colloque charitativwm était devenu un coll. irritativum. —Thorn «t encore connu par le Bain de sang de 1724 L'orgueil des élèves nobles du collège des jésui tes avait froissé la population. Une émeute eut lieu à l'occasion d'une procession, et des coup* de fusil ayant été tirés sur le peuple, le collège fut envahi et saccagé; le tumulte ne cessa qu? vers minuit, grâce à l'intervention des bourgeois et des soldats. Une sorte de tribunal des woïwodes de Wilna, Cracovie et autres villes, dirigé par le jésuite Wolansky, condamna à mort le président de la ville, Rôsner, vieillard de 70 ans, le vice-président, 40 députés, et 8 autres personnes; 4 durent en outre avoir la main coupée. Le roi confirma la sentence; une seule personne fut graciée; l'exécution eut lieu le 7 déc. 4724, malgré les sollicitations d'un grand nombre de personnages considérables. Les princes, l'empereur, le pape lui-môme protestèrent, mais trop tard. Ce bain de sang, que les protestants n'oublièrent pas, n'a pas contribué à sauver la Pologne, et auj. comme alors, les innocents paient pour les coupables.

THORPE. William, ecclésiastique anglais d'une grande piété, disciple de Wicleff, accusé d'être un loilard, fut traduit devant le tribunal ecclésiastique du sanguinaire Àrundel, archev. de Cantorbéry, et après un long interrogatoire qui prouva sa fidélité à l'Évangile, fut condamné à une prison perpétuelle, 1407. Les uns disent qu'on l'y laissa mourir de faim; d'autres qu'il y fut supplicié par le bourreau; d'autres enfin, qu'il fut brûlé vif, mais on ne dit pas où. On le fit disparaître, voilà tout.

THORWALD, v. Islande.

THOU (de) lo Jacques-Auguste, le célèbre historien, né 8 oct. 1553 à Paris, destiné d'abord à l'Église, fit ensuite son droit à Orléans et Valence, où il se lia avec Scaliger, et où il eut pour maîtres Cujas et Hotman. Il connut Montaigne à Bordeaux, fut chargé de plusieurs missions diplomatiques, et condamna énergiquement la Saint-Barthélémy. Attaché à à la fortune d'Henri IV, il fut un des rédacteurs de l'édit de Nantes, et s'opposa à l'introduction des décrets du conc. de Trente en France. Conseiller ecclésiastique au parlement depuis 1576, et même affilié au clergé, il fut en 1601 nommé Père temporel et protecteur de l'ordre des franciscains en France. Louis XIH le nomma un des trois directeurs des finances, au lieu de lui donner la place de premier président au parlement de Paris, vacante par la retraite de son beau-frère Achille de Harlay, qui lui avait été promise. C'était une espèce de disgrâce. Il se retira des affaires pour se consarer aux lettres et à l'histoire, et f 5 mai 1617. Il a écrit l'Hist. de son temps en 138 livres, travail aussi remarquable par l'exactitude du récit que parla sagesse des appréciations et des jugements. Ennemi décidé de Tultramontanisme, il a défendu les doctrines gallicanes, et s'est montré toujours bien disposé en faveur des droits des protestants el pour la liberté des consciences. — 2° Son fils François-Auguste, compromis dans le complot de Saint-Mars, fut exécuté par ordre de Richelieu, 1642

THURINGE, contrée du centre de l'Allemagne, expression historique plutôt que géographique; ses frontières ont souvent varié, s'éten-dant parfois jusqu'au Rhin, au Danube et à l'Elbe, comprenant une partie de la Hesse, de la Bavière et de la Saxe; tour à tour royaume, duché, landgraviat et comté. Son nom paraît pour la première fois au 5»e siècle. Elle fut habitée d'abord par les Hermandures, ou Thurs, ou Thuringiens, et subit diverses invasions, notamment de la part des Francs; Clovis était fils d'une princesse thuringienne enlevée à son mari par Childéric I«r, et Radegonde, prisonnière de Clotaire, était la nièce d'Hermanfried, roi des Thuringiens. Ce pays ne fut évangélisé qu'un siècle après les Alemans et les Boïares. Outre les dieux qu'il avait en commun avec ses voisins, il avait des idoles particulières, Holla et Busterich, toutes deux terribles et infernales. On cite comme première reine chrétienne Amel-berga, nièce de Théodoric, mais arienne, chrétienne fort tiède, ambitieuse et qui ne fit rien pour sa foi. Au 7me siècle le duc Hedan épouse une chrétienne, Bilihild, et celle-ci élève chrétiennement Godsbert, que son mari avait eu d'un premier lit, et qui, monté sur le trône ducal, à Wtirzbourg, fit venir Kilian 685 et quelques autres missionnaires. En 688 Wtirzbourg fut érigé en évêché. Puis vint Willibrord sous Hedan II, et en 719 Boniface, qui fonda de nombreuses églises et détruisit dans la forêt de Thuringe les lieux de culte des païens. Lulle qui lui succéda consolida son œuvre, soit à Er-ftirt, soit à Mayence; Charlemagne l'affermit, el malgré une invasion des Huns au 10®« siècle, on peut dire que l'Église fut la maîtresse du pays à partir de cette époque. Du moins elle était riche et puissante, comme presque partout en Allemagne, mais peu vivante, et son clergé inculte et peu instruit. Une des figures les plus attrayantes du moyen âge est celle de sainte Élisabeth de Hongrie, qui épousa Louis IV, landgrave de Thuringe, et qui +; beaucoup d'œuvres et de fondations pieuses se rattachent à son nom. Une peste noire qui éclata en 1348, et que la superstition attribua aux juifs, amena de cruelles persécutions contre ces malheureux et provoqua d'un autre côté l'avènement d'une secte de flagellants contre lesquels l'autorité dut sévir et que le pape lui-même condamna comme hérétiques. L'Inquisition d'ailleurs ne réussit pas à s'établir dans la contrée; 4 bûchers à Erfurt sont le seul triomphe qu'elle obtint. L'université d'Erfurt fondée en 1389 et 1398 fut un vrai centre de lumières, et elle concourut pour sa part à faire de la Thuringe le berceau de la Réforme en Allemagne; il suffit de nommer Coban Hesse, Wesel, Lange, Sebastien, Hilten, Staupitz et Luther. Les noms de Cobourg, Gotha, Weimar. Eisenach, Erfurt, Halle, même Leipzig, sont d'entre les principaux qui représentent la Thuringe historique; ils brillent également dans l'Église et dans la littérature.

La Thuringe actuelle comprend le grand-duché et les trois duchés de Saxe, les principautés de Schwarzbourg, avec une partie de la Saxe prussienne et des principautés de Reuss, outre quelques enclaves hessoises et bavaroises. Si les quatre grandes vallées de la Saale, de TUnstrut, de l'Ilm et de la Werra donnent l'idée de l'étendue et des limites du pays, les lignes ferrées qui le traversent font bien juger de la rapidité de ses communications avec le Nord et le Midi de l'Allemagne. Loin de diminuer, la population tend à s'accroître en Thu-ringe. Les statistiques en fournissent la preuve. A la facilité de la vie, à la puissance des souvenirs, au charme du paysage s'ajoutent beaucoup d'autres sources d'intérêt. Apolda, près Weimar, Sonneberg, près Cobourg, ainsi qu'Erfurt, Naumbourg, Géra, Weissenfels ont pris une grande importance manufacturière, industrielle, commerciale. Le mouvement intellectuel est foin de se ralentir dans les villes et résidences, qui ont chacune leur genre d'esprit et d'attrait, leur caractère propre et leur histoire. Gotha possède des établissements scientifiques et littéraires que chacun connaît. Go-bourg et Meiningen sont des foyers artistiques, où la musique en particulier brille d'un vif éclat. Weimar, l'Athènes de l'Ilm, la ville de Charles-Auguste et de Gœthe continue à porter dignement un grand nom dans le monde. L'illustre Liszt y séjourne, l'École des beaux-arts y prospère. Enfin la verdoyante cité d'Eise-nach, avec le château de la Wartbourg sur ses hauteurs boisées, où accourent en foule étrangers et touristes, demeure l'un des fermes remparts du luthéranisme, v. Édouard Humbert: Dans la Forêt de Thuringe 1862, et Les villes de Thuringe, 1869.

TILL, Salomon (de), théologien hollandais, né 26 déc. 1643 à Weesp, étudia à Utrecht sous Vo'élius et Burmann, puis à Leyde sous Coccéius, dont il devint le fervent disciple. Après avoir occupé plusieurs postes de pasteur, il fut appelé comme prof, à Leyde, où il f 31 oct. 1731. Auteur de plusieurs ouvrages estimés, dogmatiques, apologétiques, exégétiques, sermons, etc. D'un caractère doux et paisible, il a touj. représenté la modération.

TILLEMONT, Louis-Sébastien Le Nain (de), fils d'un maître des requêtes, de famille noble, né 30 nov. 1637 à Paris; il fit ses études à Port-Royal et compta Nicole parmi ses maîtres. Se destinant à la prêtrise, il étudia depuis 1660 au séminaire de Beauvais, puis chez le chanoine Hermant, s'occupant surtout d'histoire, étudiant Baronius dont les Annales le captivaient. Enfin vers 1676 il se décida d'entrer dans les ordres, se fixa à Port-Royal, subit en 1679 le sort des jansénistes, et s'établit définitivement au château de Tillemont, près Paris.

En 1681 il visita ses coreligionnaires des Flandres et de Hollande, mais il resta dès lors dans sa retraite, partageant son temps entre des exercices religieux et des travaux littéraires. f 10 janv. 1698. Son principal ouvrage est une Hist. des empereurs qui ont régné pendant les 6 premiers siècles de l'Égl., des persécutions, etc., 4 vol. en 1690, et 2 autres posthumes, en 1701 et 1738. Le l*r volume avait été d'abord attaqué par la censure, et retiré. Sou second ouvrage, également important, sont ses Mémoires pour servir à l'hist. ecclés. des six premiers siècles, 4 vol. 1693, 12 autres de 1698 à 1712. L'un et l'autre étaient signés D. T. (de Tillemont), mais l'anonyme ne dura pas longtemps. Il a collaboré en outre à divers écrits de Sacy, Arnauld, Hermant, etc. On lui reproche un style incorrect et diffus.

TILLOTSON, ou Tilston de Cheshire, Jean, né sept. 1630 à Sowerby, York, fils d'un fabricant de drap, pieux puritain, étudia à Cambridge depuis 1647. Cudworth le convertit à l'anglicanisme. Après avoir dirigé la paroisse de Lincoln, il fut appelé à Londres où il obtint de grands succès comme prédicateur par des sermons d'un style soigné et peu accentués comme doctrine; il eut toujours à se défendre contre l'accusation de socinianisme. Zélé partisan de Guillaume III, il en obtint de nombreuses faveurs, fut nommé chanoine, et finalement 1691 archev. de Cantorbéry en remplacement de Sankroft, qui avait refusé de prêter serment, f 22 nov. 1694 à Lambelh. Prédicateur élégant; il a laissé plusieurs volumes de sermons et un traité de dogmatique; il combat surtout le déisme et le catholicisme.

TIMOTHÉE lo diacre à Thébaïs, ayant reçu l'ordre du gouverneur Arrianus de livrer les écrits sacrés qu'il possédait, il répondit: Je te livrerais plutôt mes enfants si j'en avais, pour les immoler. Le gouverneur entra dans une telle fureur, qu'il lui fit crever les yeux avec un fer rouge, disant: t En tout cas tes livres te seront inutiles; tu ne pourras plus les lire. > Puis il le fit suspendre la tête en bas avec un poids au cou, et un bâillon dans la bouche. Ayant appris que Timothée avait récemment épousé une jeune femme nommée Maura, il l'engagea à persuader son mari. Mais la constance et la foi de celui-ci la gagnèrent si bien qu'elle déclara au gouverneur qu'elle était prête à mourir aussi. Après de cruelles tortures ils furent crucifiés l'un à côté de l'autre, l'an 303. — 2° v. Aelurus, et Monophysites.

TINDAL, lt> v. Tyndale.—2o Matthieu, déiste anglais, né 10 avril 1656 à Bear-Ferrers, De-vonshire, suivit d'abord la carrière des armes, étudia ensuite le droit à Oxford, se fit catholique sous Jacques n, ce qui lui valut une pension de 200 livres sterling; se refit protestant sous Guillaume III, pour conserver cette pension, et platement courtisan, libre penseur sans convictions, attaquant toutes les religions, se concilia touj. la faveur du pouvoir. Il + août 1733, comme doyen du collège de Toutes-Ames à Oxford. Se posant en champion de ce qu'il appelait la Foi rationnelle, et sur le terrain de Locke, il attaqua d'abord les prêtres romains dans son traité des Droits de l'Égl. chrétienne, 1706, et ensuite le christianisme lui-même dans son principal ouvrage: Le Christianisme aussi ancien que le monde, qui a fourni quelques traits à Voltaire. Il prêche la religion naturelle çt rejette les sacrements et toutes les cérémonies.

TINTORET (le), Jacques Robusti, né 1512 à Venise, d'un père teinturier (de là son nom), est le principal représentant de la jeune école vénitienne qui tenta de plier la renaissance au service de l'Église. Par le dessin il se rapproche de Michel-Ange, et par le coloris du Titien, f 1594. On lui doit un Crucifiement, un Jugement dernier, le Veau d'or, le Miracle de saint Marc, sainte Agnès, saint Roch, etc. Son fils Dominique Robusti a excellé dans le portrait, et sa fille Marie l'a brillamment secondé pour les draperies.

TISCHENDORF, Lobegott-Fréd.-Constantin (de), né 18 janv. 1815 à Lengelfeld, Voigtland, étudia la théol. et la philologie à Leipzig 1834-1838, fut reçu docteur en théol. à Breslau 1843, visita Paris où il déchiffra le codex Éphrem, puis diverses autres contrées de l'Europe, et en 1844 l'Orient, d'où il rapporta une riche collection de mss., entre autres le Frederico-Au-gustanus, fragment du sinaïtique pour l'A. T. En 1845 il fut nommé prof, à Leipzig, et en 1859 on ajouta à sa chaire de théol. celle de paléographie biblique; en 1867 conseiller auli-que. Les universités d'Oxford et de Cambridge le nommèrent en 1865 D* of Laws et Dr of civil Law. Les décorations et les diplômes lui furent multipliés. En 1853 il fit un second voyage en Orient, et il en rapporta une nouvelle collection de mss. grecs, arabes et syriaques. Enfin en 1859, aux frais du gouvernement russe, il entreprit ce 3e voyage, où il devait découvrir et acquérir le célèbre mss. du Sinaï, qu'il apporta à Pétersbourg. Dès lors il reprit ses fonctions de prof, à Leipzig et f 7 déc. 1874, après une maladie cérébrale suivie de paralysie. Ses publications sont nombreuses, presque toutes relatives à la critique des textes: on compte la reproduction de plusieurs mss.: Éphrem, Fréd.-Auguste, Clermont, le Vatican, etc.; plusieurs éditions du N. T., les Septante, la Vulgate d'après l'Amiatinus de Florence, les Apocryphes; quelques dissertations sur l'âge des

Évangiles (trad. en franç.), sur la Cène, sur la mer Rouge, sur la députation de l'Alliance évang. auprès de l'emp. Alexandre, des Sermons, ses Voyages en Orient. Mais son œuvre capitale est la publication du mss. du Sinaï, en plusieurs éditions de divers formats, avec les noms, indications, explications nécessaires, et les réponses aux objections et aux critiques soulevées par sa découverte.

TITE, v. Titus.

TITIEN, Tiziano Vecellio, né 1477 près de Pieve di Cadore, dans l'État de Venise, élève de Zuccato, de Bellini et de Giorgione, surpassa bientôt ses maîtres et prit place au premier rang des peintres vénitiens et même italiens. Il fut surtout remarquable comme coloriste. Recherché par François I«r et par Léon X, il repoussa leurs offres et se donna à Charles-Quint, dont il fit plusieurs portraits et pour qui il travailla. Il fit aussi des tableaux pour Philippe II. Comblé d'honneurs et de richesses, il f 27 août 1576 de la peste, à 99 ans, laissant 3 enfants. Il s'était marié en 1512. Ses principaux élèves sont Vecelli, son fils, Véronèse et le Tintoret. Un grand nombre de ses chefs-d'œuvre ont péri en Espagne. Parmi ceux qui restent, on remarque dans le domaine religieux: le Martyre de Pierre, celui de saint Laurent, l'Ascension de Marie, le Christ au roseau, les Disciples d'Emmafls, la Mise au tombeau, la Flagellation, la Cène, la Sainte-Trinité recevant au ciel la famille impériale, etc. Il se distingue par la plénitude de la vie jointe à la grâce de la forme.

TITTMANX lo Ch.-Chrétien, pasteur, prof, et surintendant à Wittenberg 1775-1784, conseiller ecclésiastique à Dresde, f 1820; auteur de quelques opuscules théol., notes sur saint Jean, sermons sur les mérites de Jésus. — 2° Son fils Jean-Aug.-Henri, né l*r août 1779 à Langensalza, étudia à Wittenberg et se fixa à Leipzig, où il fut successivement pasteur et professeur; chanoine de Zeitz après la mort de J.-A. Wolf; de Meissen après celle de Rosen-muller. f 30 déc. 1831 après une longue maladie. Esprit vif et subtil, humeur facile, caractère agréable, d'une très grande activité, il a réussi dans presque toutes les branches, mais sans atteindre jamais à une grande hauteur. Il comprenait tout, mais n'avait pas le génie créateur. Il fut chargé de quelques négociations à Pressbourg et au congrès de Vienne, où il travailla au rétablissement et à la réorganisation du corps des Égl. évangéliques. En théol. il avait essayé de se faire une position intermédiaire entre les extrêmes, par son livre: Su-pranaturatisme, Rationalisme et Athéisme, qui lit sensation et obligea les partis à se décider; il tenait pour le supranaturalisme rationnel. Il a d'ailleurs beaucoup écrit: une Morale élémen» taire, une Encyclop. théol., Théoklès ou la foi en Dieu, Tbéon ou notre espérance après la mort, et divers ouvrages très luthériens. Gross-mann a fait son oraison funèbre.

TITUS lo Flavius-Vespasien, fils de Vespasien, né 40 à Rome, à la cour de Néron, et élevé avec Britannicus. Il se distingua de bonne heure par ses brillantes qualités, fit comme tribun légionnaire les campagnes de Germanie et de Bretagne, où il eut l'occasion de sauver la vie à son père, et de retour se mit à Rome à l'étude du droit. Mais son père ayant été envoyé en Syrie contre les Juifs révoltés, il l'accompagna en 66, et depuis 69 acheva seul la campagne jusqu'à la prise de Jérusalem. Il revint à Rome en triomphateur, et l'arc de Titus consacra le souvenir de ses exploits. Vespasien l'associa, mais sans titre, à l'administration de l'empire. Sa sévérité comme chef des prétoriens, sa recherche des présents, sa vie licencieuse, son amour pour Bérénice, l'avaient rendu impopulaire. Dès qu'il fut monté sur le trône, 79, il changea totalement, renvoya celle à qui il avait promis le mariage, repoussa les délateurs, et organisa des secours énergiques pour les victimes des fléaux qui fondirent coup sur coup sur l'Italie, éruption du Vésuve, inondations, incendie de Rome, etc. Il aurait voulu être le bienfaiteur de l'univers; on l'a surnommé les Délices du genre humain, et on lui prête d'avoir dit: J'ai perdu ma journée, un jour qu'il n'avait rendu aucun service. Il f 13 sept. 81, empoisonné probablement par Domitien, son fr. et successeur, v. Beulé.

2<> T. év. de Bostra, Arabie Pétrée, mentionné par Jérôme et Sozomène comme un des docteurs les plus distingués pendant les luttes ariennes, f vers 371. Dans une lettre à l'emp. Julien il lui dit qu'il fera ses efforts pour empêcher dans son diocèse des excès contre les païens: Julien exploita perfidement cette lettre contre Titus, comme s'il eût voulu dénoncer ses paroissiens. Titus a laissé quelques écrits, dont on possède des fragments en grec et en syriaque, contre les manichéens.

3o v. Oates.

TOBAR, ou Tovar, v. Vergara.

TOBLER, Titus, né 25 juin 1806 à Stein, Appenzell, étudia la médecine à Zurich, Vienne et Paris, et s'établit en 1827 dans son pays comme médecin. Il fit d'abord un voyage en Palestine, moitié pour son plaisir, moitié pour des recherches botaniques et médicales, 1835 et 1836, mais il y trouva tant d'intérét qu'il y retourna 3 fois, en 1845, 1858 et 1867, et ne cessa de faire des recherches et des découvertes topographiques. Outre de nombreuses monographies, sur Bethléhem, Jérusalem, Siloé, le Saint-Sépulcre, Nazareth, il a publié une Bibliographie de la Terre-Sainte et des récits de ses voyages. Depuis 1840 il s'était fixé à Horn, Thurgovie, et en 1853 le canton d'AppenxeU, Rh. Exter., l'envoya comme conseiller national à Berne. Il est f 21 janvier 1877, léguant & son canton sa bibliothèque, une des pins riches en livres concernant la littérature palestinienne.

TOELLNER, Jean-Gottlieb, né 9 déc. 1724 à Chariot tenbourg, f 20 janvier 1774 à Francfort s. l'O. où il était prof, de théol. et de philos. Élève de la maison des orphelins de Halle, il fut d'abord supranaturaliste, puis rationaliste modéré, voyant dans la mort de Christ non le prix, mais le gage de notre réconciliation avec Dieu. Auteur de plusieurs écrits dogmatiques, sermons, etc. Il était le père et l'ami des étudiants et exerça sur eux une bonne influence.

TOLAND, Jean, né 30 nov. 1670 à Redcastk», près Londonderry, Irlande; fils d'un prêtre, dit-on. Élevé catholique, il étudia à Glasgow et à Édiinbourg, où il devint non-conformiste. Il passa ensuite quelque temps à Leyde, sous Span-heim, puis à Oxford. C'est là qu'il inaugura sa carrière littéraire, par une satyre contre le clergé, intitulée: La tribu de Lévi 1691. En 1696 il professa le déisme dans son livre: Le christianisme sans mystères, qui lui valut des persécutions; en 1697 il passa en Irlande, mais son livre y fut brûlé par ordre du parlement, et il dut revenir en Angleterre. II ne réussit pas mieux en 1698, avec sa Vie de Milton, ni avec son Amyntor 1699, où, poursuivant un but politique, il en profita pour attaquer l'authenti-cite des livres du N. T. Obligé de ae rétracter, il dit qu'il avait voulu parler seulement des écrits qui avaient suivi l'époque apostolique. Il voyagea quelque temps en Allemagne, visita Berlin, Vienne, Prague, fut distingué par quelques souverains, s'enfonça de plus en plus dans l'incrédulité, passa du déisme au panthéisme, puis à l'athéisme, profita d'un moment de laveur auprès du ministère 1710 pour s'enrichir, écrivit encore en 1718 son Nazarenus, ou le Christianisme juif, païen et musulman; en 1720 le Panthéisticon, en 1722 une Hist. des Druides, une trad. de Giordano Bruno, un livre sur Tin-crédulité, etc. f 22 mai 1722 de la fièvre jaune.

TOLÈDE, ville d'Espagne, qui compte auj. de 15 à 20 mille habitants, mais qui en eut jusqu'à 200,000 au temps des Maures, fille aurait été fondée par les Phéniciens. Les Romains en firent une colonie et le dépôt principal de For des mines d'Espagne. Le christianisme y pénétra de bonne heure, mais le premier évéque connu. Melanthius, ne date que de 305. Les Goths en firent leur capitale, et 17 conciles furent tenus à Tolède sous leur règne, conciles en général orthodoxes, quoique les Goths fussent ariens, mais conciles qui s'occupèrent aussi souvent de politique que de questions religieuses et dégénérèrent parfois en parlements. Conquis par les Maures 714, Tolède fut érigé en royaume 1024, mais fut repris 25 mai 1085 par Alphonse de Castille. Synode en 1066, qui nomme pour archev. Bernouard, ancien abbé cistercien; Urbain II l'élève au rang de primat 15 oct. 1088. Parmi ses successeurs on remarque Rodrigue Ximénès, l'infant Jean, Pierre de Lune, enfin et surtout le cardinal François Ximénès. L'inquisition y eut un moment son tribunal. Cathédrale magnifique; riche biblioth. avec plus de 7,000 mss. précieux.

TOLÉRANCE lo Acte (de). Guillaume d'Orange ayant été appelé au trône d'Angleterre 1689, publia dès son avènement une proclamation qui, sans faire du roi le chef de l'Église, n'imposait à ses sujets que le serment de fidélité et d'obéissance, condamnait la doctrine papiste qui met hors la loi le souverain excommunié, et repoussait pour l'Angleterre toute immixtion, môme spirituelle, d'un souverain étranger. Ce programme, fait à l'intention des dissidents, leur assurait ainsi la liberté des cultes*et l'accès aux charges publiques; les prédicateurs en signant les 39 articles pouvaient réserver les art. 34 à 36, et une partie du 22; les anabaptistes étaient dispensés du 22; les quakers pouvaient remplacer le serment par un simple engagement. Les catholiques et les sociniens n'étaient pas compris dans l'Acte.

— 2o Édit de T. v. Joseph II.

La tolérance en matière de religion a quelque chose d'équivoque, presque de mal sonnant. Il y a une sorte de flétrissure sur ce qu'on tolère (certaines maisons, p. ex.) On se rappelle avec quelle énergie Rabaut Saint-Étienne, à la Constituante, le 21 août 1789, repoussa la tolérance offerte aux protestants: < Ce que nous demandons, c'est la liberté, dit-il, et non cette chose injuste qui ne nous présente que comme des citoyens dignes de pitié, comme des coupables auxquels on pardonne. » Impartialité, tolérance, dit Edmond Schérer; mauvais mots, vertus imparfaites; substituons-y l'intelligencc et la charité. Paroles que le pasteur-poète, Alexis Mus-ton traduit par ce vers:

Tout comprendre en Jéaos, ce serait tout aimer

L'histoire des Précurseurs français de la Tolérance au 17"" siècle, a été écrite par M. F. Puaux.

TOLET, François, né 12 oct. ou 10 nov. 1532, à Cordoue, fit ses études à Salamanque, où il fut à 15 ans nommé prof, de philosophie. Après avoir pris son grade de docteur, il entra chez les jésuites, qui l'envoyèrent à Rome pour y enseigner la philos, d'après Aristote et la théol. d'après Thomas. Chapelain et théologien de 7 papes, depuis Pie Y jusqu'à Clément VIII, il fut comblé d'honneurs et chargé de plusieurs missions diplomatiques, entre autres en Allemagne avec Commendon pour négocier une alliance contre les Turcs, et en France pour ménager l'absolution d'Henri IV. Consulteur de l'Inquisition, il fut nommé cardinal 1595, le premier jésuite qui ait obtenu cette faveur, et f 14 sept. 1596; enterré à Sainte-Marie Majeure. Il s'est distingué comme prédicateur, exégète et casuiste. On a de lui des Comment, sur Aristote, un Comment, sur Luc, id. sur les Romains, des Sermons sur les Psaumes, une Summa conscien-tiœ9 trad. en franç. sous le titre de: Instruction des prêtres. Il a eu sa part dans la fameuse édition de la Vulgate de Sixte V.

TONSURE. Jusqu'au 6°* siècle il était interdit aux ecclésiastiques chrétiens de se faire ton-surer, car cela les aurait trop fait ressembler à certaines catégories de prêtres païens; et d'une manière générale on ne leur permettait d'avoir les cheveux ni trop longs, ni trop courts. Peu à peu cependant l'usage s'en introduisit; il commença par les moines, comme symbole de re-pentance et d'humilité, et passa doucement dans les habitudes de l'Église comme une espèce de premier grade dans la hiérarchie ecclésiastique, la marque distinctive qui séparait le clerc du laïque. On en fit une couronne pour rappeler au prêtre les épines qui ceignirent la tête du Sauveur. On peut être tonsuré sans être prêtre pour cela, et jouir ainsi de certains bénéfices ecclésiastiques; mais d'après le conc. de Trente il faut avoir au moins 7 ans, savoir lire et écrire, avoir été confirmé, et offrir t une conjecture probable > qu'on se vouera à la carrière ecclésiastique. C'est l'évêque ou un délégué spécial, qui accomplit cette cérémonie, pendant que le tonsuré vêtu de noir tient à la main un cierge allumé. On distingue la tonsure de Pierre, qui ne laisse autour de la téte qu'une couronne de cheveux; elle est d'usage pour le pape et la plupart des moines; celle de Jacques, dite aussi de Simon-le-Magicien, qui rase le devant du front en forme de croissant; elle est depuis longtemps abandonnée; et celle de Paul, ou grecque, qui rase toute la partie antérieure de la téte. Elle doit, dans la règle, être renouvelée tous les mois.

TORGAU, ville des États prussiens, Saxe, de 8000 hab. Catherine de Bora y fut enterrée 1552. Une Alliance y fut signée 4 mai 1526 entre Philippe de Hesse et l'électeur Jean de Saxe, à laquelle se joignirent, 12 juin, d'autres princes protestants. On appelle Articles de T. un premier travail en 7 parties, rédigé par ordre de Charles-Quint et à la demande de Jean-le-Con-stant, par 4 prof, de Wittenberg, Luther, Mélanchthon, Bugenhagen et Jonas. L'emp. avait demandé anx Etats protestants de lui remettre pour la diète un cahier précis de leurs réclamations et griefs. Les théologiens eurent du 14 au 20 mars 1530 pour le rédiger, et ils présentèrent ce travail à l'électeur à Torgau; ce fut la base que Mélanchthon retravailla pour en faire la 2»« partie de la Conf. d'Augsbourg. Le mss. original a été retrouvé 1830 par Fflrstmanndans les archives de Weimar. On donne aussi le nom d'Articles ou Confession de T. à une déclaration très embrouillée du 24 août 1574, des États de Saxe; l'électeur Auguste avait découvert, à sa grande consternation, qu'il y avait dans son Égl. nationale luthérienne de nombreux calvinistes secrets (par où il entendait des philippistes); il fit aussitôt saisir les suspects et convoqua les États et quelques théologiens; ceux-ci rédigèrent une confession très luthérienne, qui renfermait cependant un certain nombre d'articles plutôt mélanchthoniens, et qui rejetait çntre autres la doctrine de l'ubiquité. Ce travail, mal fait, passa dans la loi: les pasteurs renitents furent exilés, mais la question ne fut pas éclaircie. Deux ans après, en 1576, tout fut simplifié; ce qui restait de Mélanchthon fut supprimé, et dans une assemblée tenue à Lichtenberg on décida de s'en tenir comme Confession à TAugustana sans variantes. Sur le rapport d'Andreœ mandé exprès pour cela, et après avoir entendu Cbemnitz, Chytrâus, Musculus, etc., ce travail fut adopté sous le titre de Livre de Torgau. Ce fut l'avant-dernière rédaction de la Formule de Concorde.

TORQUEMADA, ou Turrecremata lo Jean (de), né 1388 à Valladolid (ou à Turrecremata), étudia la théol. à Paris et entra dans l'ordre des dominicains. Riche de plusieurs prieurés, il fut mandé à Rome par Eugène IV, qui le nomma maître du palais et l'envoya au conc. de Bâle. Là il se distingua par son zèle à défendre les intérêts du pape, fit condamner Wiclef et Huss, se rendit à Ferrare avec le parti romain, et assista aux dernières sessions du conc. de Florence, maintenant jusqu'au bout que le pape est supérieur aux conciles. Il fut chargé de plusieurs missions en Allemagne, France et Angleterre, fut nommé cardinal 1439, présida l'assemblée de Bourges et occupa les sièges d'Albano et de Pise. f 1468 à Rome. Ses mœurs étaient pures. Auteur de plus, ouvrages de théologie. Il fonda 1460 la confrérie de l'Annonciade pour marier chaque année quelques jeunes filles pauvres.

2° Thomas de T., né 1420 à Valladolid, dominicain, nommé 1483 inquisiteur général sous le règne de Ferdinand et Isabelle. Le pape, Sixte IV, fit d'abord quelques difficultés et le manda à Rome; mais il finit par céder, en lui accordant le droit de nommer et de destituer les membres du tribunal. Ferdinand lui adjoignit un conseil de théol. et de juristes, dont il devait seulement prendre l'avis dans les questions de foi, mais qui statuait à la majorité dans les questions civiles et juridiques, f 1498. Sa cruauté est devenue légendaire, v. Inquisition.

TORRÉS-NAHARRO, Barthélémy (de), né à Torrès, frontières du Portugal; prêtre, potte sa-tyrique, esclave en Afrique, vint à Rome sous Léon X, connut Jayme Enzinas, qui lui inspira un vif penchant pour la Réforme; écrivit contre les désordres de la cour de Rome, dut s'enfuir à Naples où il fut protégé par Fabricius Colonna, et f pauvre. Auteur de la Prapaliadia 1501, qui renferme des comédies, des ballades, des complaintes, des satires, etc. Rome 1517.

TOSSANUS, v. Toussain.

TOULOUSE, anc. capitale des Tectosages, alliée des Romains qui en firent une ville libre, chef-lieu de la Gaule Narbonaise, conquise par les Cimbres et les Teutons, puis par les Vandales et les Visigoths, enfin par Clovis qui l'érigea en comté. Elle compta de tout temps de nombreux troubadours. Ses voisins les ducs d'Aquitaine, jaloux de sa prospérité, firent tout pour lui nuire, favorisèrent les albigeois qui étaient nombreux dans la ville, et profitèrent ensuite de la circonstance, surtout sous Raymond V et VI, pour accuser les comtes d'hérésie, soulever contre eux une terrible croisade, et les remplacer par les deux Montfort. Le mariage de Jeanne avec Alphonse de France, frère de saint Louis, rendit Toulouse à ses princes légitimes, mais le comté ne tarda pas à être incorporé à la France 1271. Évêché depuis 250, avec Saturnin pour premier évêque (puis Honorât, Hilaire, Marner tin), Toulouse fut érigé en archevêché 1317 par Jean XXII, qui nomma à ce siège Jean de Coîn-minges. Il s'y est tenu 22 conciles, de 507-1590: celui de 1229 introduisit l'inquisition et donna des préceptes détaillés sur l'art de la dénonciation. Le protestantisme y pénétra sous Marguerite de Valois et Jeanne d'Albret; l'archev. lui-même, Odet de Châtillon, le favorisa longtemps avant de se déclarer publiquement. Des troubles violents éclatèrent sous ses successeurs d'Armagnac et Joyeuse, et les persécutions durèrent plus d'un siècle: le supplice de Calas en fut un des tristes épisodes. Mais le protestantisme se maintint dans la province, et l'on compte auj. à Toulouse une Consistoriale considérable et une Société de publications religieuses très importante.

TOURNÉLY, Honoré, jésuite, né 1658 à An-tibes, f 1729 à Paris, professeur à Douai et à la Sorbonne; il travailla activement en feveur de la bulle Unigenitus. Auteur de traités sur la Grâce, les Attributs de Dieu, la Trinité, l'Église, etc. qui, réunis, forment ce qu'on appelle la Théologie de Tournély.

TOURNEMLNE, René-Joseph, né 26 avril 1661 à Rennes, d'une vieille famille alliée aux Coëtlogon et qui prétendait remonter aux Plan-tagenet. Prof, de philos, et de théol, il rédigea depuis 1695 le Journal de Trévoux, et collabora aussi au Mercure. Il était entré à 19 ans dans l'ordre des jésuites, et se distingua par ses talents, sa mémoire, son génie et son urbanité. Il combattit le p. Hardouin aussi bien que Voltaire, et resta en bons termes avec ce dernier. En 1718 il se retira dans la maison de son ordre, qui le nomma bibliothécaire, f 16 mars 1735. Auteur de plus, ouvrages, Tables chronologiques, Réflexions sur l'athéisme, etc. Il avait été en correspondance avec Leibnitz.

TOURNEUX (le), Nicolas, né 30 avril 1640 à Rouen, doué d'une mémoire étonnante et d'une grande facilité de parole, étudia à Paris chez les jésuites, fut ordonné prêtre à Rouen, où il fut bientôt nommé vicaire. Nommé confesseur des religieuses de Port-Royal il attira tout Paris par ses prédications. Par jalousie les jésuites le firent interdire 2 fois, f 28 nov. 1686 d'apoplexie à Paris. Auteur de plusieurs livres d'édification, discours, instructions, etc. Le plus connu est son Année chrétienne, d'un style lourd et peu attrayant, sans onction, mais qui a été un moment très apprécié des âmes pieuses.

TOURNON lo François (de), né 1489 à Tour-non, Vivarais, archevêque d'Embrun, Bourges, Auch et Lyon; favori de François I«r, négocia la paix de Madrid qui rendit à celui-ci la liberté 1526, travailla en faveur de Henri VIII pour obtenir son divorce, dirigea avec Montmorency 1536 la guerre contre Charles-Quint, signa la paix de Nice 1538, fut envoyé à Rome comme ambassadeur, persécuta les vaudois et les calvinistes, introduisit les jésuites en France, et f 1562. Fondateur du collège de Tournon.

. 2o Ch.-Thomas Maillard (de), né 1668 à Turin, docteur in utroque jure, professeur à la Propagande, camérier d'honneur, nommé patr. d'Antioche 1701 et envoyé par Clément XI en Chine avec des pleins pouvoirs pour aviser aux nombreux abus de la mission des jésuites. Ceux-ci le reçurent mal, l'accusèrent auprès de l'empereur, le firent emprisonner, et au bout de 3 mois l'empoitonnèrent. Clément prononça son éloge au consistoire du 14 oct. 1711. Mémoires publ. par le card. Passionei, Rome 1762.

TOURS, Turones, Cœtarodunum, chef-lieu d'Indre-et-Loire, conquise autrefois par César sur Vercingétorix, puis par les Visigoths, enfin par les Francs; au 11 ™ siècle elle tomba entre les mains des Anglais, et redevint française sous Philippe-Auguste. Elle eut pour premier évêque Gatien, vers 250, puis Littorius, Martin, le plus célèbre de tous; plus tard Léon, Euphronius, Grégoire. Il s'y est tenu 17 conciles, en générai sévères sur les questions de discipline; celui de 1236 protesta contre les excès des croisés; celui de 1510, se fondant sur les résolutions de Bâle, se montra très raide contre Jules II dans son conflit avec Louis XII. La Réforme y pénétra comme partout, fut réfutée par la violence, et les huguenots prirent les armes pour se défendre. Le diocèse fut ravagé, la ville même prise et pillée, l'église démolie, les restes de saint Martin livrés aux flammes. Louis XIH reprit la ville, mais y laissa les protestants sans les inquiéter; ils y étaient fort nombreux, comme on le voit par le fait que la révocation de l'Édit de Nantes fit tomber à 33,000 le chiffre de la population qui était de 80,000. En même temps les jésuites s'y installèrent. Le diocèse comptait avant la Révolution 16 chapitres, 17 abbayes, 75 couvents, 4 commanderies de Malte; tout cela fut balayé. Avec l'empire le culte fut rétabli, et l'archev. de Tours a auj. pour suffragants les év. du Mans, Nantes, Angers et Laval. L'Égl. prolest, y a un consistoire et plusieurs pasteurs.

TOUSSAIN, Tossanus, lo Pierre, né 1499 à Saint-Laurent, Lorraine, neveu d'un chanoine de Metz, étudia la théol. à Cologne, Bâle, Paris et Rome, et fut amené par Lefèvre d'Étaples à la connaissance de l'Évangile. Il prêcha â Metz, et l'on reconnut vite qu'il était gagné à la cause de la Réforme; il dut s'enfuir, vint à Bâle, reprit ses études sous la direction du savant et pieux OEcolampade, qu'il appelle son précepteur et son père, et se déclara ouvertement pour la Réforme. Il retourna en France, et après avoir été emprisonné quelques mois à Metz et à Paris, protégé par Marguerite d'Alen-çon dont il était le chapelain, il put revenir en Suisse. De Bâle Farel l'envoya dans le Montbé-liard 1535; en 1539 il était nommé surinten-tendant, mais le luthéranisme wurtembergeois le força de repartir. Il publia 1559 son système d'organisation ecclésiastique sous le titre de: L'ordre que l'on tient en l'égl. de Montbéliard, et fut de nouveau renvoyé, t 5 oct. '573.

2° Daniel, son fils, né 1541 à Montbéliard, étudia à Bâle et Tubingue, fut nommé pasteur et prof, d'hébreu à Orléans 1562, s'enfuit 1569 devant une émeute populaire, revint à Montbéliard où on le trouva trop calviniste, et de retour en France, dut fuir de nouveau lors de la Saint-Barthélemy, se cacha avec sa famille à Montargis chez Renée, et se rendit à Heidelberg, puis à Neustadt comme prof, f 1602. Auteur d'une Hist. des pères, d'une Instruction sur la manière d'éprouver les esprits, d'une étude sur 1 la personne et le ministère de J.-C., de Com-1 ment, et de plusieurs ouvrages de controverse. Il eut pour fils

3° Panl, né 1572 à Orléans ou Montargis, qui étudia à Heidelberg, Âltorf et B&le; docteur en 1599, pasteur français à Frankenthal 1600, conseiller ecclés. 1608 à Heidelberg d'où il fut chassé par la guerre; il assista 1618 au synode de Dordrecht où il défendit vigoureusement la prédestination, f 1629 pasteur à Hanau. Auteur de plus, ouvrages, dont le plus important est la Bible de Luther avec notes.

TOUSSAINT (La), féte que l'Égl. d'Orient célébrait déjà au 4»« siècle en l'honneur des martyrs qui n'avaient pas un jour particulier. Lorsque en 607 Boniface IV fit la dédicace du Panthéon, ou Rotonde, à Rome, il dédia cet ancien temple d'idoles à la Vierge et à tous les martyrs, et plaça la féte au 12 mai. En 731 Grégoire III ouvrit une chapelle spéciale à tous les saints dans régi, de Saint-Pierre. Cette féte s'introduisit en France en 837 sous Louis-le-Déb., lors de la visite de Grégoire IV, qui la modifia un peu, la fixa au l*r nov. et lui donna son nom définitif. Les grecs la célèbrent le dimanche après Pentecôte; il y a une Homélie de Chrysostome pour ce jour. Le lendemain de la Toussaint a lieu la solennité de Toutes-Ames, fondée 998 par Odilon de Cluny, en commémoration des fidèles trépassés: on chante le Dies irœ; c'est un peu ce que quelques Églises appellent la Féte des morts.

TRACTAIRIANISME, v. Pusey.

TRADITION. Comme supplément et complément, souvent même en opposition à la loi écrite, c'est la doctrine, la discipline, la morale ou l'histoire communiquée verbalement de siècle en siècle, presque toujours avec la prétention de remonter d'une manière authentique -à une autorité incontestée. Les juifs avaient leurs traditions qu'ils disaient leur avoir été léguées par Moïse par l'intermédiaire des 70 anciens; elles furent plus tard rédigées par les rabbins et formèrent la base de la masore et de la cabale, Matt. 15, 2. Gai. 1, 14. Dans l'Égl. chrétienne la tradition joue un rôle qu'il ne faut ni méconnaître, ni exagérer. Le chef de l'Église n'ayant rien écrit lui-môme, sa doctrine et son histoire n'ont pu être connus que par les récits de ses apôtres, et ceux-ci à leur tour ayant peu écrit, mais beaucoup prêché et évangélisé, ont légué à leurs disciples immédiats ce qu'ils connaissaient des enseignements du maître. Malheureusement on sait combien des nouvelles transmises de bouche en bouche sont susceptibles de s'altérer au bout de peu de temps; aussi l'on en vint fort vite à accorder aux écrits des apôtres une plus grande autorité qu'aux récits conservés par quelques traditions, et comme il fallut déterminer quels étaient les écrits dignes de faire autorité, on dut consulter les églises-mères fondées par les apôtres; c'est la doctrine d'Irénée et de Tertullien. Au 3"* siècle Cyprien ayant mis en avant l'idée que l'Église était représentée par l'ensemble de l'épiscopat, ce fut aux évêques que l'on s'adressa, et l'on en vint à faire des évêques réunis en concile écuménique les véritables successeurs du collège apostolique. Il y avait là évidemment une usurpation de droits, mais comme en manière d'organisation une autorité est toujours désirable, et comme on ne pouvait pratiquement en imaginer une meilleure, les empereurs aussi bien que le peuple de l'Église acceptèrent ce nouveau régime, et Vincent de Lérins 435 y ajouta comme commentaire qu'il fallait regarder comme tradition apostolique ce qui avait été admis toujours, partout et de tous: quod semper, quod 1 quod ab omnibus creditum est; ainsi certaines formes du baptême, le remplacement du sabbat par le dimanche, etc. C'est encore aujourd'hui le point de vue de l'Égl. grecque, et ce fut pendant presque tout le moyen âge l'idée de l'Égl. latine, quoique la tendance hiérarchique commençât à se faire sentir au point d'altérer même l'idée de la tradition. Le conc. de Trente a définitivement rompu avec le passé; d'après lui la tradition n'est pas un canon clos et fermé, qu'il s'agisse seulement de conserver intact; l'Eglise est au contraire un champ toujours ouvert, susceptible de progrès et d'améliorations, et son autorité infaillible peut statuer quand elle le veut, non seulement sur ce qui a été, mais encore sur ce qui sera, en ma tière de foi, de mœurs et de rites. De là l'admission des Apocryphes dans le canon, quoique les conciles précédents les eussent rejetés; de là aussi en 1870 les nouveaux dogmes décrétés par le Vatican. — Le protestantisme, tout en n'acceptant comme autorité que la Bible, a reconnu sans discussion certaines traditions des anciens conciles, ainsi la valeur des symboles, le baptême des enfants, le dimanche, etc. Quelques-uns, comme Calixte, auraient voulu pour, faciliter l'union des Églises, prendre comme base de négociations l'autorité des anciens conciles, et l'on aurait été jusqu'au ou au 8"*; sur cette base on pourrait s'entendre avec l'Égl. grecque. Les ritualistes d'Angleterre et les ir-vingiens vont plus loin encore, et accordent à la tradition (laquelle?) une importance presque aussi grande qu'à la Bible. V. P. Du Moulin, J. Mestrezat, L. De Sanctis, Choisy (pour les î premiers siècles), etc.

TRADUCIANISME, doctrine spécialement représentée par Tertullien, qui pense que l'âme se transmet par la voie de la génération; c'est une des solutions du problème de rorigine de l'âme, et si elle soulève des difficultés, elle en résout d'autres; elle explique philosophiquement la doctrine du péché originel, et comme ce dogme est admis par l'Église chrétienne, les pélagiens qni le nient donnaient par dérision à ceux qui le reçoivent le nom de tradnciens (de traducitur, est transmis).

TRADUCTIONS françaises de la Bible. — De bonne heure la France et la Belgique ont connu la Bible. Les manuscrits qui ont survécu aux malheurs des temps attestent qu'il en a été fait de nombreuses traductions dans le moyen âge. Complètes ou partielles, en prose ou en vers, littérales ou glosées, elles étaient disséminées par centaines d'exemplaires sur toute la surface du pays. Il en est qui font partie des plus anciens monuments de la langue. Dès la fin du lime siècle, les Normands possédaient deux traductions des psaumes en langue vulgaire. On peut considérer la traduction des Quatre livres des Rois, publiée par M. de Lincy, comme appartenant à la première moitié du 12°>e siècle. En 1170, Pierre Valdo, de Lyon, se fait traduire en roman provençal diverses portions des Écritures. Deux lettres écrites vers 1199 par Innocent III, parlent d'une multitude de laïques et de femmes du diocèse de Metz qui « entraînés par un désir immodéré de connaître les Écritures ont fait traduire en langage français les Évangiles, les Épîtres de Paul, etc. » Trente ans plus tard, le concile de Toulouse interdisait expressément l'emploi des Livres saints en langue vulgaire, mais cette défense, qui fit couler des torrents de sang, ne prévalut jamais entièrement. La Bible en langue vulgaire trouva un asile chez les vaudois du Piémont et à la cour des rois de France. Un laïque, Raoul de Pres-les, avocat au parlement de Paris, écrivain gallican, reçut de Charles V la mission de « translater la Bible en françoys» (1380). Dans ce but, il reprit en sous-œuvre la Bible de Guiars des Moulins connue sous le nom de Bible hys-torians, qui date de la fin du 13®e siècle. C'était une traduction de la Bibtia scolastica de Pierre Comestor. Cette même Bible fut imprimée avec diverses modifications par la volonté de Charles VIII, et par les soins de Jean de Rély, confesseur du roi. Elle parut vers 1487 et atteignit en 1545 sa 14°>e ou 15®e édition. Un Nouveau Testament publié à Lyon par Barthélémy Buyer précéda de quelques années la Bible de Jean de Rély; on le fait dater de 1478. Aux premiers jours de la Réformation, nous retrouvons la Bible en langue vulgaire sous l'égide de la cour. C'est aux sollicitations de plusieurs • haultes dames et princesses du royaume » qu'en 1523, Lefèvre d'Étaples publia sa traduction du N. T.; elle est dédiée à t ung chascun qui a connaissance de la langue gallicane. > On doit au même traducteur une version française de l'Ancien Testament qui parut à Anvers, en 1528, avec un privilège de l'empereur Charles-Quint. Lefèvre avait purgé la Bible de gloses innombrables et éclairci le sens d'une infinité de passages. Sa version eut l'honneur de devenir la base des traductions tant catholiques que protestantes. Olivétan, ancien disciple de Lefèvre, fut chargé par les chrétiens des Vallées vaudoises de poursuivre l'œuvre de son maître. Il s'agissait de secouer entièrement le joug de la Vulgate, qui avait pesé sur Lefèvre. La trad. d'Olivétan parut à Neuchâtel en 1535. Calvin adopta le travail de son cousin Olivétan, mais non sans lui faire subir plusieurs retouches. Parmi les nombreuses éditions ou revisions de la Bible protestante du ift™ siècle nous signalerons celle de 1588, la première que publièrent collectivement les pasteurs et professeurs de l'Église de Genève. Bertram, de Bèze, Rotanus, Fay, Jaque-mot, Coulart, en furent les principaux auteurs. Revêtue d'une sanction officielle, elle jouit d'nn long crédit. La fin du 17 me siècle arriva sans que l'Église protestante possédât autre chose que la version vieillie du 16""> siècle, presque sans changements. La version de Castalion 1555, et celle de Diodati 1644, n'obtinrent que peu de succès, elles ne furent pas réimprimées. Plus tard la traduction de Le Cène, 1741, eut le même sort. Les traductions dites de Martin et d'Ostervald ne s'écartent pas considérablement de l'ancienne version genevoise. La Bible de Martin parut en 1707 et celle d'Ostervald en 1744; meilleures que la version de 1588, elles ont fini par prévaloir au sein de la plupart des Églises de langue française. La version nouvelle publiée à Genève en 1805 souffrit du mauvais renom que s'étaient fait ses auteurs au point de vue doctrinal, mais elle a plus d'élégance et de clarté que les précédentes. Quant aux Bibles catholiques, habituellement calquées sur la Vulgate, elles ne soutiennent pas la comparaison avec les versions protestantes; il en est en revanche qui se recommandent par les qualités du style. Celle de Lefèvre, dite d'Anvers ne tarda pas à être proscrite. Mais pour satisfaire la soif des populations, les docteurs de Louvain eurent l'idée de publier une Bible à leur façon, qui n'était en réalité que la traduction de Lefèvre soigneusement revisée et même altérée dans les passages qui pouvaient être invoqués dans le sens du protestantisme. Il s'en fit plus de 200 éditions, sans parler de quelques revisions dues à l'initiative de prélats ou même de laïques français. Le succès de la Bible de Louvain ouvrit les voies à celle des jansénistes. Le N. T. de Port-Royal, autrement dit de Mons, parut en 1667. De Saci, Arnauld, Le Maître, Nicole, le duc de Luynes et Pascal y avaient collaboré. Tout le monde voulut le posséder, Louis XIV en acheta pour son compte jusqu'à vingt mille exemplaires. Mis à la Bastille à l'instigation des jésuites, De Saci entreprit la traduction de l'A. T., mais elle ne put paraître qu'en 1696, douze ans après la mort de l'auteur. Le Gros et Roudet, Cologne 1753, ont corrigé De Saci d'après les originaux; il est à regretter que les sociétés bibliques n'aient pas adopté ce texte, beaucoup plus exact que celui qu'elles répandent. Parmi les versions catholiques plus modernes, nous citerons celle deGenoude (1820); et celle de l'abbé Glaire (1874), revêtue d'une approbation de llndex. — Pour en revenir aux versions protestantes, le moment semble enfin venu de substituer aux traductions surannées d'Ostervald et de Martin celles qui sont le fruit pe l'exégèse moderne: Perret-Gentil ou Segond pour TA. T., Arnauld, Rilliet, Oltramare ou Segond, pour le N. T. On peut aussi adopter provisoirement la version dite de Matter, qui combine et corrige les textes de Martin et d'Ostervald, ou encore la revision du texte d'Ostervald entreprise par la Soc. biblique de France. La version dite de Lausanne est respectable et précieuse à cause de sa scrupuleuse littéralité, mais l'excès même de cette qualité l'empêche de devenir populaire. Mentionnons encore la Sainte Bible, par une réunion de pasteurs et de ministres des deux Églises protestantes nationales de France; la Bible trad. nouvelle avec in-trod. et commentaires, par Éd. Reuss; enfin la Bible annotée par une société de pasteurs neu-châtelois sous la direction de M. F. Godet. Ces deux dernières entreprises comblent une lacune des plus considérables. Il n'existait jusqu'ici aucune Bible annotée à l'usage des protestants de langue française. Les catholiques en ont plusieurs, entre aulres une traduction d'Allioli; les israélites possèdent la Bible de S. Cohen (18 volumes in-8<>) et le Pentateuque de Wogué. Pour plus de détails, v. Pétavel, la Bible en France; Douen, Hist. de la Soc. bibl. prot. de Paris, etc.

TRAJAN, Marcus Ulpius Nerva, emp. romain 98-117, né vers 55 près de Séville, fils d'un soldat de fortune, et le premier étranger qui soit monté sur le trône des Césars. Il fit avec son père devenu gouverneur de Syrie une campagne contre les Parlhes, se montra brave et capable, fut apprécié de Vespasien, de Domi-tien, de Nerva qui l'adopta, fut nommé consul en 91, puis successivement gouverneur en Espagne et dans le Bas-Rhin. Successeur de Nerva en 98, il fit les campagnes contre les Daces et les Parthes, colonisa la Dacie en y favorisant l'établissement de citoyens romains, construisit un pont sur le Danube, et fit ériger à Rome la colonne trajane qui devait perpétuer le souvenir de ses exploits. Il fut à l'étranger et à l'intérieur un des meilleurs princes qui aient occupé le trône impérial; malheureusement enclin au vin et aux péchés contre nature, f 117. Il n'était pas intolérant par principe, mais il faisait la guerre aux sociétés secrètes et il publia contre elles 99 une loi rigoureuse; or il se trouva que la plus inoffensive de toutes, c'étaient les chrétiens qui, privés par les lois et par l'opinion publique, du droit de célébrer leur culte à ciel ouvert, étaient constitués par la force des choses et malgré eux en société secrète. C'est à ce titre qu'ils furent persécutés, sans que Trajan encourageât la délation et sans que l'administration fût chargée de les rechercher. Elle n'avait à sévir que lorsqu'un individu étyit dénoncé et qu'il se refusait obstinément à donner aucune espèce de satisfaction à ceux qui l'interrogeaient et qui essayaient de le sauver; l'ordre était donné de relâcher ceux qui faisaient des concessions. Le nombre des martyrs n'en fut pas moins .considérable; on cite entre aulres le vieux év. de Jérusalem, Si-raéon, et Ignace d'Antioche. Parmi les épisodes les plus instructifs et les plus intéressants de ce règne se place la correspondance de Trajan avec Pline-le-jeune qui, gouverneur de la Bi-thynie et du Pont, avait eu l'occasion de voir de près beaucoup de chrétiens, et rendait hommage à la pureté de leur vie. Il n'avait rien trouvé à relever contre eux, et la torture appliquée à deux diaconesses n'avait amené aucun résultat. Ce sont, dit-il, des gens qui se réunissent certains jours avant le lever du soleil, qui rendent un culte de chants et de prières 1 Christ comme à un Dieu, et qui s'engagent par serment à ne commettre aucun crime, ni vol. ni adultère; en outre ils prennent quelquefois des repas ensemble, mais composés d'aliments tout ordinaires. Il est très embarrassé, car leur nombre va croissant, et il demande à l'emp. des directions. La réponse de Trajan est un modèle d'inconséquence; il ne veut pas qu'on les recherche, parce qu'ils ne sont pas dangereux, mais si on les surprend il faut les punir, parce qu'ils sont coupables. Tertullien dans son apologie n'a pas de peine à faire ressortir la contradiction. — L'épouse et la sœur de Trajan, Plotine et Marciana, étaient aussi remarquables par leurs vertus que par leur intelligence.

TRANSSYLVANIE, ancienne Dacie trajane. comprise au delà des forêts (fravu Sylvas) des monts Krapacks, entre la Hongrie, la Moldavie et la Valachie, frontières d'ailleurs indéterminées, avec Klausenbourg pour ville principale. Le christianisme y fut apporté à l'époque de la conquête romaine, mais il fut balayé par l'invasion des Barbares. On dit qu'il y fut prêché de nouveau au 10®® siècle par le moine Hiérothée, et favorisé par la conversion du prince Gylas; en tout cas c'est de l'Égl. grecque que vint l'évangélisation, et le premier ar-chev. 1494 était grec, bien qu'un roi de Hongrie, Ladislas, ait essayé à la fin du 11 siècle d'y faire accepter l'autorité de Rome, et qu'il ait eu pour alliés dans les siècles suivants des colons et des chevaliers germaniques. C'est par l'Allemagne que la Réformation y pénétra dès 1521, notamment à Hermannstadt, et vers 1538 la partie allemande de la Transsylvanie était décidément protestante; des écoles remplaçaient les couvents et les églises s'organisaient par les soins de Jean Honter. Le même mouvement gagna la partie hongroise de la Transsylvanie, grâce à Devai et à Martin de Kalman-eehi, 1551-1561, et leurs synodes rédigèrent la confession de foi Hungarica, ou Czengerina 1357. Malheureusement l'invasion de l'uni ta-risme divisa les églises, et elles eurent à souffrir de leur affaiblissement. Les princes maintinrent la liberté de conscience et l'égalité des cultes devant la loi, et quand en 1699 l'emp. Léopold eut définitivement ramené la Tr. sous la domination autrichienne, elle resta au bénéfice des garanties léopoldines de 1691. Depuis 1848 la liberté religieuse est entière, et les églises s'administrent elles-mêmes, avec une dotation de l'État; le surintendant luthérien a le titre d'évêque et réside à Hermannstadt; le consistoire réformé a son siège à Klausenbourg. Les protestants sont au nombre de 500,000, dont à peu près 200,000 luthériens et 53,000 unitaires; 250,000 réformés. Il y a 240,000 catholiques, avec un évêque à Carlsbourg; 670,000 catholiques grecs, 500 arméniens, 14,000 juifs, et 80,000 ziganes.

TRANSSUBSTANTIATION. Littéralement: changement d'une substance en une autre substance, comme aurait été le changement de la pierre en or, si les alchimistes du moyen âge avaient réussi dans leurs fantastiques recherches. En théologie l'Égl. catholique donne ce nom au changement de toute la substance du pain et du vin dans l'eucharistie au corps et au sang de J.-C. Les substances premières disparaissent complètement et sont remplacées par les secondes. Les luthériens, qui ne vont pas aussi loin, emploient le mot de consubstantia-tion, pour marquer leur doctrine que le pain et le vin continuent de subsister même après que la consécration les a transformés en corps et sang du Sauveur. Cette double erreur prétend se baser sur les paroles de l'institution de la Cène; Ceci est mon corps, Hoc est corpus meum, mais l'histoire prouve que c'est l'inverse qui a lieu, et que l'exégèse de ces paroles a été forcée pour venir à l'appui d'un dogme lentement élaboré au moyen âge. Tous les anciens pères et docteurs avaient maintenu que la Cène est une communion réelle avec le Ré dempteur, mais sans rien déterminer sur le comment. Le penchant à voir partout une influence magique conduisit peu à peu à la doctrine de la présence réelle matérielle, et Pas-chase Radbert alla jusqu'à prétendre que c'était aussi la doctrine des pères: Le pain et le vin, dit-il, après avoir élé consacrés ne sont nihil aliud quant caro Christi et sanguis, — non alia caro quant quœ nata est de Maria et passa in cruce, pas autre chose que la chair de Christ et son sang, par une autre chair que celle qui est née de Marie et qui a souffert sur la croix. Des légendes merveilleuses ne contribuèrent pas peu à faire accepter cette doctrine nouvelle, mais l'opposition fut vive et dura longtemps. Raban Maur et Ratram combattirent Paschase au moyen de citations empruntées aux pères. Scot Érigène et Strabon firent de même. L'opinion miraculeuse, et en apparence la plus mystiquement religieuse, finit par l'emporter; Haimon lui-même s'y rangea. L'esprit du temps matérialisait tout. Bérenger résistait encore au llme siècle. Le conc. de Trente consacra cette doctrine; les luthériens l'amendèrent sans la rendre plus plausible; les réformés seuls s'en tinrent à la doctrine apostolique et à la tradition de la primitive Église, et la controverse continua, roulant toujours sur les 4 mots de l'institution, et spécialement sur le mot ceci qui aurait désigné, selon quelques cathares et selon Carlstadt, le corps même assis à table; selon les réformés, le pain qu'il avait rompu et béni; selon les romains et les luthériens, son corps invisible caché sous les accidents du pain et du vin; la Ire explication est littérale, la 2me figurée, la 3ra« absurdolittérale. V. l'important ouvrage de L. Durand: La question eucharistique élucidée et simplifiée, Liège, chez Faust, 1883.

TRAPPE, vallée du Perche (Orne), gorge profonde ainsi nommée parce que de loin elle présente vaguement l'image d'une trappe. Elle est connue surtout par la célèbre abbaye que Rotrou, comte de Perche, y fonda en 1140, et qui fut remise aux cisterciens. Sa sévérité fit sa réputation, mais là comme ailleurs le relâchement succéda à l'austérité et la richesse amena des abus. Au 16me siècle déjà les religieux s'abandonnaient sans scrupules à tous les désordres, s'affichant avec leurs femmes et leurs enfants, et ne se réunissant que pour chasser. Rancé, leur abbé, ayant pris l'habit de l'ordre en 1665, entreprit de les réformer; ils le menacèrent de mort. Il les remplaça par des cisterciens plus dociles et leur imposa l'étroite observance de Citeaux, qui est encore auj., sauf de rares exceptions, la règle des trappistes. Ils se couchent à 8 h. en été, à 7 h. en hiver; se lèvent toute l'année à 2 h. pour dire matines; se réunissent ensuite pour faire une lecture de dévotion; pais vont au travail, labourant la terre, balayant le cloitre, faisant les uns de la reliure, les autres de la menuiserie, à peu près tout ce qu'il faut pour la maison. Leur nourriture est maigre; ce sont des légumes sans huile, ni beurre; du pain de son, un peu de cidre, et quelques fruits. Entre leurs deux repas, vers 1 heure, ils creusent leur fosse. Ils couchent dans une espèce de cercueil, tout habillés, sur une paillasse piquée, avec un oreiller de paille et une couverture; jamais de linge, même quand ils sont malades. Le silence le plus absolu leur est imposé; tout ce qu'ils peuvent se dire, c'est: Memento mort (souviens-toi qu'il faut mourir). On se demande à quoi leur sert de vivre. Ils accordent l'hospitalité, plus qu'ils ne l'exercent; les visiteurs sont soumis au même régime que les trappistes, plus quelques œufs. Trente religieux moururent en peu de temps, victime d'une règle trop rigoureuse, et l'on appela la Trappe t la tombe. » L'ordre ne se répandit que lentement. En 1705 Côme III, duc de Toscane, fonda une maison à Buon So-lasso, près de Florence. À la révolution française les religieux se dispersèrent dans les différents pays de l'Europe; un grand nombre s'établirent à Val-Sainte, près de Fribourg; d'autres allèrent jusqu'en Amérique. Ils rentrèrent un moment sous l'empire, et retrouvèrent surtout sous la Restauration leur ancien crédit. Dom Augustin racheta la Trappe restaurée par de Lestrange, et fonda une nouvelle maison à Aiguebelle, près Valence. Sous Napoléon III ils comptaient en France 25 maisons, avec environ 1600 religieux. Plusieurs s'étaient mis à fabriquer une excellente liqueur, la trappistine. Leur costume se compose d'une robe et d'un pantalon blancs, avec des sabots rembourrés de paille; la robe est retenue par une ceinture de cuir noir, à laquelle sont attachés un rosaire et un couteau. II y a aussi des trappistines; elles comptaient naguère en France quelques maisons, avec 637 religieuses, quelques-unes autorisées et se livrant à l'enseignement, écoles, pensionnats; les autres vivant de la vie contemplative ou faisant du jardinage et quelques travaux manuels. Leur costume est blanc, comme celui des hommes. — La prétention de Rancé d'empêcher toute étude et tout développement intellectuel et scientifique, a été vivement combattue par Mabillon dans son traité des études monastiques, 1691.

TRAUTSOHN, Jean-Joseph, comte de Tr. et de Falkenstein, né 27 juill. 1704 à Vienne, étudia la théol. à Vienne et à Rome, fut à son retour honoré et doté de plusieurs canonicats importants; puis après avoir été le coadjuteur du 1er archev. de Kollonitz, aussi archev. de Garthage, il lui succéda en 1751. Assez instruit en grec et en hébreu, docteur en théol., d'uu caractère agréable, d'une foi simple, il fit en 1752 nommé par l'impératrice directeur des nouvelles études de l'univ. de Vienne, en 1754 directeur du Theresianum, en 1756 cardinal par Benoit XIV, qui lui accorda en même temps une diminution des jours fériés, f 10 mars 1757. Quand il eut des maîtres à nommerf il les choisit en dehors de la Soc. des jésuites. Sa lw lettre pastorale, 1751, recommande 1 son clergé de prêcher Christ et pas toujours les saints, les indulgences et les rosaires; il demande aussi que la prédication soit simple, soignée et sérieuse, sans farces, ni trivialités; elle fit du bruit et fut trad. en plusieurs langues TRÉMÉLIUS, Emmanuel, né vers 1510 à Ferrare, de parents juifs, se convertit au catholicisme et fut nommé prof, d'hébreu à Lucques: mais ayant passé à la Réforme il dut fuir et se rendit à Strasbourg et à Oxford. En 1553 il est prof, d'hébreu à Heidelberg; plus tard, à Sedan où il f 1580. Il a publié le targum des 12 petit* prophètes, un N. T. latin d'après le syriaque, une Biblia Sacra qui a eu de nombreuses éditions; le Comment, de Bucer sur les Éphé-siens, et une trad. en grec, une autre en hébreu, du Catécb. de Calvin,

TRENTE, ville située dans le Tyrol autrichien, sur l'Adige; évangélisée, dit-on, parus disciple de saint Marc; l'évêque Vigile y aurait été martyrisé vers 400. Célèbre surtout par le 16m« concile général qui y fut tenu au 16®* siècle et qui dura 18 ans, y compris les intervalles. Réclamé depuis longtemps par la chrétienté tout entière, peuples et souverains, qui n'avait été satisfaite ni par le conc. de Constance, ni par celui de Bâle et Ferrare, il s'imposa par la force des choses quand la Réforme se produisit d'une manière irrésistible. Alors l'Égl. de Rome comprit qu'il y avait quelque chose à faire; alors aussi Charles-Quint, préoccupé, sinon inquiet des divisions qui se produisaient dans son empire, insista auprès de Clément VU, qui ne s en souciait pas, pour la prompte convocation d'un conc. écuménique. Luther l'avait réclamé, la diète d'Augsbourg 1530 le laissait entrevoir. Clément parut céder vers 1532, mais il profita des objections faites par les protestants, à Smal-calde 30 juin 1533. pour ajourner de nouveau. Paul III recommença les négociations, mais quoique Luther eût préparé les articles de Smal-calde qui devaient être présentés au concile, les princes protestants refusèrent l'invitation qui les convoquait à Mantoue pour mai 1537; c'était trop près du pape. Le conc. fut ajourne au mois de mai 1538, et Vicence choisi pour lieu de réunion; inutilement; les papes traînaient en longueur. Mais après le colloque de Ratisbonne, comme l'emp. parlait de convoquer en Aliéna* gne même un conc. national, le pape finit par se décider, en s'arrangeant pour pouvoir diriger les débats. Il convoqua le conc. à Trente, ville allemande sans doute, mais italienne par sa nationalité, sa langue et ses relations avec le saint-siège. À la date fixée, 22 mai 1542, la guerre avec la France ayant éclaté et les prélats étant retenus dans leurs diocèses, un nouvel ajournement eut lieu, et c'est le 13 déc. 1545 seulement que le concile put s'ouvrir. Des évêques venus de Pologne, mais n'ayant pu se plier à tous ces attermoiements, étaient déjà repartis, et ne revinrent pas. Le pape était représenté par 3 légats, qui présidaient l'assemblée, les cardinaux del Monte (le futur Jules III), Marcel Corvin et Réginald Pôle. Ils obtinrent une première victoire en faisant décider, contrairement à ce qui s'était fait à Constance et Bâle, qu'on ne voterait pas par nations, mais par têtes, ce qui assurait d'emblée la prépondérance au parti italien, et que les abbés auraient droit de vote comme représentants de leurs congrégations. On décida ensuite, à l'aide de cette majorité artificielle et forcément docile, qu'au lieu de s'occuper de la réformation de l'Eglise on s'occuperait d'abord du dogme. On comprend pourquoi les protestants, qui avaient prévu ce système d'évasions, avaient finalement refusé de prendre part à une assemblée dirigée par leurs ennemis, où ils étaient sacrifiés d'avance, et qui, selon l'aveu de l'abbé Glaire, était convoquée, non pour les entendre et pour discuter, mais « pour condamner les erreurs de Luther, de Calvin et de Zwingle. » Le conc. commença par affirmer ses doctrines sur l'Écriture et la tradition, le péché, la justification et les sacrements, en opposition aux doctrines protestantes, en ayant soin de ne pas toucher aux points qui divisaient les dominicains et les franciscains. Forcé par l'emp. et par les év. espagnols, d'aborder enfin le chapitre des réformes, le conc. dans sa 6m« session traita de la résidence des évêques, et dans sa 7me de la surveillance des ordres religieux, des dispenses, des bénéfices, mais de manière à ménager le plus possible les droits du pape. Puis, pour soustraire le conc. à l'influence de l'empereur, Paul III s'autorisant de ce que la peste menaçait Trente, en profita pour transférer le conc. à Bologne, plus près de Rome, 11 mars 1547. L'empereur protesta et défendit a ses év. allemands et espagnols de quitter Trente. Le conc. ne se réunit de nouveau que sous Jules III, le 1** mai 1551, à Trente, sous la présidence du card. Crescence, et quelques députés allemands vinrent pour y assister, mais en posant des conditions telles que, malgré l'appui de la France, le parti italien refusa de les accepter. Le pape et l'emp. se brouillèrent de nouveau. L'importante victoire de Maurice de Saxe sur les armées impériales et la fuite de Charles-Quint interrompirent les travaux du concile, et ce n'est que dix ans plus tard que Paul IV, par un bref du 29 nov. 1560, invite les év. à revenir à Trente. Mais les circonstances n'étaient plus les mêmes: la paix d'Augsbourg avait rendu les évangéliques complètement indépendants du concile; la question protestante n'en était plus une; l'assemblée n'avait plus à s'occuper que des affaires romaines, mais elle n'en était pas moins embarrassée pour cela, car plusieurs princes catholiques parlaient d'aviser eux-mêmes à certaines réformes, et la France réclamait un conc. national. Au bout de 15 mois la session se rouvrit, 18 janv. 1562. Il y avait 102 év. présents, fort peu d'allemands; les légats étaient Gonzague et Seri-pande, avec les card. Hosius, Simonetta et Marc Sittich d'Altemps, neveu du pape; parmi les autres notabilités on remarquait Guerrero, le card. de Lorraine et le général des jésuites, Lai-nez, qui fut l'âme de cette 3ra« et dernière partie du concile; il réussit même à gagner, un peu par la peur, le card. de Lorraine. On régla, touj. au profit du pape, la question du droit des évêques, celle du mariage des prêtres, celle de la coupe, mais on voyait le raécontement grandir et les velléités d'opposition se multiplier; on avait hâte d'en finir; deux séances furent encore consacrées à voter quelques articles sur les indulgences, les viandes, les fêtes, la censure des livres pernicieux, le rang des ambassadeurs, et le concile fut déclaré clos le 4 déc. 1563. Non seulement il n'affirmait pas le droit divin des évêques et il maintenait presque tous les abus existants, mais il coupait court pour l'avenir à toute réforme en subordonnant l'Église entière au pouvoir absolu du pape. Son dernier mot avait été l'anathème contre les hérétiques en général. Pie IV, malgré les avantages évidents qui en résultaient pour le saint-siège, hésita quelque temps avant d'en confirmer les décrets; il ne s'y décida que le 26 janv. 1564. Les Actes furent signés par 4 légats, 2 cardinaux, 3 patriarches, 25 archev., 168 évêques, 39 procureurs pour absents, 7 abbés et 7 généraux d'ordre. Ils ne furent reçus en France que pour les articles de foi, non pour ceux de discipline qui étaient contraires aux libertés gallicanes et aux précédents concordats; ils ne furent pas reçus non plus en Suisse, ni en Hongrie; en Allemagne par les princes catholiques seuls, v. Hist. du conc. par Sarpi; Pallavicini, au point de vue romain; Jurieu, Wessenberg, Ranke, Bun-gener, etc.

TRÉSOR de l'Église. Pour fonder la théorie des bonnes œuvres, de leurs mérites et de leur transfert possible à d'autres, Alex, de Haies a imaginé un trésor de grâces mis à la disposition de l'Église qui l'administre dans certaines conditions, pour venir en aide à ceux qui gémissent en purgatoire. Les mérites infinis de Christ en forment le fond principal, mais qui est alimenté en outre par l'excédent de bonnes œuvres de Marie, des saints, des ordres religieux, qui en ont fait plus qu'il n'était nécessaire pour leur salut. Ce trésor, dit d'oeuvres surérogatoi-res, est confié aux successeurs de Pierre. Clément VI en a fait un dogme par sa bulle Unige-nitusl343. Il en est résulté les Indulgences, q. v.

TRÊVE de Dieu, ou du Seigneur, (Treuga Dei)9 suspension d'armes momentanée, d'abord du samedi au lundi, puis du mercredi soir au lundi matin, qui fut décrétée sous peine d'excommunication par les évêques de l'Aquitaine, pour modérer antant que possible l'ardeur des petites guerres privées qui ruinaient le pays sans motifs sérieux. Plusieurs conciles provinciaux appuyèrent cette convention due à l'initiative du synode d'Elne, Roussillon, 1027. Il fut également interdit d'attaquer, quelque jour que ce fût, un moine ou un clerc, un homme allant à l'église ou accompagné de femmes un marchand sans armes. Des hommes spéciaux, paciarii, étaient chargés de veiller à ce que la trêve fût respectée. C'était un adoucissement aux mœurs et aux malheurs de l'époque.

TRÊVES, l'ancienne Augu$ta Trevirorum, auj. Trier, évêché prussien sur la Moselle, 18,000 hab. C'est une des plus anciennes villes de la Germanie où le christisnisme se soit établi, et l'on cite comme ses premiers évêques Enchère, 25 ans, Valère et Maternus; une tradition du 10m« siècle les fait disciples des apôtres, on les compte parmi les 70 disciples. Sauf la date la tradition peut avoir un fond de vérité. Au conc. d'Arles 314 on voit déjà un év. de Trêves. Constantin en fait sa capitale en occident. Sous Constance Athanase, puis Paul, sont exilés à Trêves où l'év. Maximin les accueille avec joie et les associe à ses travaux. On ne sait quand l'évêché devint archevêché; ce fut en tout cas avant le 8me siècle, et de nombreuses donations ajoutèrent à son importance. Ludolphe, duc de Saxe, f 1007, joignit la dignité électorale à son titre ecclésiastique, et depuis l'extinction de la maison de Saxe, l'ar-chev. titulaire, qui était archichancelier de l'empire dans les Gaules, fut compté parmi les 7 électeurs appelés à choisir l'empereur; c'est même lui qui donnait le premier son suffrage. De 385 à 1549 onze conciles se sont réunis à Trêves. La Réforme y pénétra un peu après 1531, sous Jean III de Metzenhausen, ami de Hermann de Cologne. Olevian y fonda une église avec l'appui de la bourgeoisie, mais le prince-évêque le bannit, et l'appel des jésuites paralysa le mouvement, sans toutefois l'arrêter.

Plusieurs évêques se distinguèrent par leurs lumières et leur modération. Pendant l'occupation française, l'archevêché redevenu évêché fut rattaché à Malines; la Prusse le réunit à l'archev. de Cologne. L'év. Arnoldi f 1864 se distingua par sa fougue ultramontaine; on lui doit entre autres l'exposition de la fameuse robe, q. v., et une circulaire sur les mariages mixtes. La ville possède de belles églises, une cathédrale riche en ornements, reliques, autels et cryptes; une égl. gothique qui date de 1243, l'ancienne égl. des rédemptoristes, etc. Les protestants célèbrent leur culte dans une ancienne basilique restaurée et consacrée en 1856. Belle bibliothèque, avec 100,000 volumes et de précieux mss., entre autres le Codex aureus.

TRIBOLO, célèbre sculpteur, né vers 1500, élève de Jacques Sansorino, le rival de Michel-Ange; il travailla à Pise et Florence; Clément VII lui confia les travaux de N. D. de Levrette. Il s'appelait Nicolas de Pericolo. C'est la violence de son caractère qui lui valut son surnom de Tribolo, qui signifie épine, ou chardon.

TRIBUR, maison royale et ville des bords du Rhin, non loin de Mayence, dans la Hesse; connue surtout comme résidence des empereurs carlovingiens et par quelques conciles ou diètes importantes qui s'y tinrent entre 895 et 1076; dans l'une fut déposé Charles-le-Gros. L'autre, la dernière, décida le voyage de Canossa; les princes, mécontents de l'attitude de Henri IV dans son conflit avec Grégoire, déclarèrent que le pouvoir impérial était vis-à-vis de l'autorité papale ce que le plomb est à l'or, et que l'empereur n'avait pas autre chose à faire qu'à purger son excommunication. En général ces assemblées montrèrent une tendance ecclésiastique très accusée.

TRINITÉ, ou Tri-Unité, ou Unité de Dieu en trois personnes (hypostases) distinctes, dogme caractéristique et fondamental de l'Égl. chrétienne qui, dans tous les temps, a professé que Dieu est un dans un sens mystérieux et qu'il est trois dans un autre sens également mystérieux. L'Écriture ne se sert jamais des mots unité et trinité, qui appartiennent exclusivement au langage de la théologie, mais plusieurs passages, ayant plutôt un caractère pratique, justifient dans son ensemble la doctrine reçue; ainsi 2 Cor. 13, 13. 1 Cor. 12, 4-6. Mattb. 28, 19. La contradiction même qui existe dans les termes, et que nul ne songe à nier, amena bientôt les docteurs à vouloir expliquer et déterminer une chose qui par sa nature échappe à toute preuve comme à toute explication, et par des définitions plus que précises, ils exagé rèrent la contradiction et provoquèrent une opposition trop justifiée. Ils voulurent être sages au delà de ce qui est écrit. Ne pouvant définir ni Dieu, ni l'Esprit, ni la simple idée de personne, on hypostase, ils mirent Dieu, l'infini, sur le lit de Procuste de l'humanité, et lui appliquèrent des raisonnements, des mesures et des calculs qui, parfaitement exacts pour les choses visibles, ne sont plus de mise dans le grand domaine des choses spirituelles. La lutte, qui porta tour à tour sur la Divinité de J.-C. et sur la personnalité du Saint-Esprit, commença par les gnostiques, se poursuivit dans les luttes ariennes et dans le sabellianisme, et trouva une sorte de solution logique et négative dans le socinianisme qui rompit franchement avec ce que ses prédécesseurs avaient encore conservé du divin en Jésus-Christ. L'histoire, l'importance et la justification de cette doctrine, fécondé en malentendus, appartient à la dogmatique et à l'hist. des dogmes. On appelle trini-taires ceux qui croient à la Trinité.— On donne aussi ce nom à un ordre religieux fondé 1198 par Jean de Matha et Félix de Valois pour le rachat des esclaves chrétiens; — Confrérie de la Sainte-Trinité, une congrégation instituée à Rome 1546 par Philippe de Néri pour recevoir les pèlerins et les convalescents. — La Fête de la TYinité se célèbre le dimanche après Pentecôte, comme terme et couronnement de l'année ecclésiastique. C'est Étienne, év. de Liège, qui l'institua le premier en 922; le conc. d'Arles 1260 l'adopta pour sa province; Jean XXII la consacra au 14®® siècle. —On a inventé le nom bizarre de Trinité créée, pour la sainte famille, composée de Jésus, la Vierge et Joseph; c'est à La Rochelle en 1659 que quelques jeunes filles se réunirent sous ce titre pour s'occuper de l'éducation de jeunes orphelines. — L'abbaye de la Sainte-Trinité de Vendôme, fondée 1032 par Geoffroi Martel, et consacrée 1040 par Thierry, év. de Chartres, relevait du pape seul et valait à son abbé le titre de cardinal-né de Saint-Prisque.

TRISHAGION, en grec le Trois fois saint d'Es. 6, 2., formule de louange, ou doxologie qui se lisait dans l'ancienne Église au commencement du service et avant l'Évangile. C'est en Syrie, peut-être à Antioche, que cette coutume a pris naissance. Acace en raconte la légende: un tremblement de terre ravageait Constantinople 446; un jeune garçon violemment soulevé dans les airs entendit les anges qui chantaient cette hymne, et étant retombé sur terre, il recommanda au patr. Proclus de le faire chanter par l'Église; le tremblement cessa et l'enfant mourut. La formule se modifia peu à peu en: saint Dieu, saint puissant, saint immortel, ayez pitié de nous ! P. Fullo y ajouta même, après immortel: « qui as été crucifié pour nous, > mais cette addition des catholiques de Syrie fut rejetée par le conc. Quini-sexte, et ne fut conservée que par les monophysites et les monothélètes.

TRITHÉISME, hérésie de ceux qui dans leur conception de la Trinité accentuent tellement la distinction des personnes qu'au lieu d'un Dieu unique il semble qu'il y ait réellement 3 dieux. On prête à ^Esuasnage, prof, de philos, à Constantinople, d'avoir enseigné qu'il y avait dans la Trinité 3 natures, par conséquent 3 dieux; il eut pour sectateurs Conon, de Tarse, et Philipon, et fut combattu à Alexandrie et Constantinople; il était difficile d'arriver à un résultat, puisque de part et d'autre on ne s'entendait pas sur les mots. Roscellin fut aussi accusé de trithéisme pour s'être exprimé autrement qu'on n'a coutume de faire.

TRIUMPHUS, Augustin, né 1234 à Ancône, général des augustins 1300, f 1328; auteur d'un comm. sur Ézéchiel, de sermons et de quelques traités de théol.

TROIS-CHAPITRES, v. Théodore 4<>.

TROIS-ROIS (fête des). La tradition, s'auto-risant de Ps. 72, 10, a peu à peu transformé en rois les mages de Matt. 2, et leur a donné les noms de Gaspard, Melchior et Balthazar, ou, selon d'autres de Ator, Sator et Peratoras; on montra même leurs tombeaux à Milan, et aussi à Cologne. L'Orient le premier leur a consacré une fête, l'Épiphanie ou Théophanie, qui devait rappeler soit la naissance de J.-C., soit plus tard sa manifestation comme Dieu dans son baptême, ou dans l'adoration des mages. La fête est très populaire en Russie, où elle signifie pour les uns le don des langues, pour d'autres la consécration de l'eau bénite, ou des distributions de présents, gâteau des rois, etc.

TRONCHIN lo Théodore, né 17 avril 1582 à Genève, fils de Rémi Tronchin, négociant champenois émigré à la suiie de la Saint-Barthélemy, et qui avait épousé Sara Marin, genevoise. Il étudia à Genève, Râle et Heidelberg, visita ensuite la Hollande, l'Angleterre et la France, et à son retour fut nommé prof, d'hébreu 1606, puis pasteur, recteur, et en 1618 prof.de théologie. Il fut délégué avec Diodati au synode de Dordrecht, où il se prononça énergiquement contre l'arminianisme. Il écrivit aussi contre le jésuite Cotton, confesseur d'Henri IV, qui, à l'occasion de la version revisée de la Bible, avait publié un pamphlet intitulé: Genève plagiaire; il donna à sa réponse le titre de: Cotton plagiaire, 1620. En 1631 il accompagna comme chapelain dans la Valteline le duc de Rohan, que Richelieu avait envoyé avec des troupes contre l'Espagne-Autriche et qui avait demandé un aumônier à Genève. C'est aussi lui qui fut chargé de faire l'oraison funèbre de ce prince, lorsqu'il fut enterré à Genève en 1638. En 1655 il fut chargé de conférer avec

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l'écossais Jean Dury, pour essayer de concilier les luthériens et les calvinistes; il composa plusieurs ouvrages à ce sujet et correspondit avec des princes protestants, f 19 nov. 1657. Il avait épousé Théodora Rocca, fille adoptive de son parrain Th. de Bèze. On a de lui quelques sermons et des traités de dogmatique, sur le péché originel, le baptême, les bonnes œuvres, etc. Nature un peu rude, cœur excellent.

2° Son tlls Louis, né 4 déc. 1629, étudia à Saumur sous Amyraut, Cappel et La Place, dont il subit l'influence. On ignore pourquoi son père l'envoya dans cette école, puisqu'il en condamnait les principes. En 1651 il entra dans le ministère, et après avoir visité l'Allemagne, la Hollande, l'Angleterre et la France, il fut nommé pasteur à Lyon en 1654, et à Genève en 1661. Il se fit remarquer surtout par l'opposition qu'il fit, avec Mestrezat, à la signature obligatoire des thèses qui avaient été rédigées à l'occasion d'Alex. Morus, et il souleva un conflit dont F. Turretin sortit vainqueur, mais qui devait à la longue, comme toujours, aboutir au triomphe du latitudinarisme; c'était en 1669; un jeune Français, Maurice, demandait la consécration, mais depuis le 6 août 1647 un formulaire avait été dressé dans l'esprit du synode de Dordrecht, et Maurice ne voulait pas le signer. Tronchin fut un de ceux qui l'encouragèrent à refuser, et dans sa dispute avec Turretin il alla jusqu'à dire qu'il n'avait lui-même rien promis, et que d'ailleurs un serment qu'on n'a pas le droit de faire on n'est pas obligé de le tenir. La Compagnie des pasteurs et le conseil d'État lui donnèrent tort, mais le conflit se renouvela plusieurs fois. En 1678 le Consensus remplaça les articles cause du litige, mais la difficulté subsistait, f 8 sept. 1705. Il avait été recteur de 1663 à 1668. La Société anglaise pour la propagation de l'Évangile lavait nommé, avec Turretin, membre correspondant. Auteur de quelques sermons et thèses théol. C'était un esprit aimable et un cœur généreux.

TRUBER, Primus, réformateur de la Carin-thie. Né 1508 à Raschiza, près Laybach, d'une famille pauvre, il fit des études incomplètes, mais trouva dans l'év. Bonomus de Trieste un protecteur qui le mit en état de prendre ses grades. En 1531 il prêcha dans la cathédrale de Laybach, et il annonça l'Évangile avec tant de puissance que l'évêque lui interdit la chaire. La ville fit arranger pour lui l'église de l'hôpital, et il eut bientôt pour collaborateur Paul Wiener, qui fut plus lard évêque évangélique de la Transsylvanie. Après avoir été renvoyé dans son ancienne paroisse de Lack, il fut nommé chanoine à Laybach 1542 et remonta 1544 dans la chaire de la cathédrale. Vers 1546 il com -mença avec Wiener à distribuer la Cène sons les 2 espèces; le nombre de ses adhérents augmenta, mais ils furent excommuniés, il dot fuir; sa bibliothèque fut confisquée et devint la base de la lre biblioth. publique de la Ca-rinthie. Après avoir été quelque temps pasteur en Allemagne, où il se maria, il fut rappelé dans son pays avec des alternatives de succès et de persécutions, f 29 juin 1586. Il a publié, soit en latin, soit dans l'idiôme du pays, de nombreux ouvrages, abécédaires, catéchismes, Psaumes, N. Testament, des cantiques, le* Lieux communs de Mélanchthon, et fut pendant quelques années secondé dans cette œuvre par son ami le baron d'Ungnad, qui avait fondé à Urach une imprimerie destinée à servir la cause de la Réforme; v. Ungnad.

TRUDPERT, ermite qui vers 640 se construisit une cellule et éleva une chapelle à saint Pierre sur un terrain qui lui avait été donné par le seigneur alleman Othpert. Au bout de 3 ans il fut assassiné à coups de hache pendant son sommeil par son serviteur aidé de son frère. Les coupables furent arrêtés; l'assassin se suicida, son complice fut exécuté. En 816 Rambert, descendant d'Othbert, fit élever an même endroit une magnifique église consacrée aux saints Pierre et Paul, où furent déposés les restes de l'ermite. Une légende s'est faite sur sa mémoire, mais on ne sait pas même s'il a été canonisé, ni par qui, ni pour quoi.

TRULLO (in), du grec trouUos, voûte, coupole, rotonde, et par extension: salle ou palais surmonté d'nne coupole, ou d'un dôme. La grande salle, ou secrétariat, du palais des emp. de Constantinople, qui était construite dans ces conditions, fut deux fois affectée au service d'un concile général, 680 et 692, et le second a reçu le nom de Trullo à cause de cela; on l'appelle aussi Quinisexte q. v. parce que les uns en font un concile à part, le 6»«, tandis que pour d'autres, il ne fut que la continuation dn précédent. Celui de 680 est aussi quelquefois appelé in Trullo.

TSCHANDER-SEN un des fondateurs,et Brak ma Samadtch, église théiste des Indes. Jusqu'au commencement de ce siècle le brahmanisme polythéiste avait été la religion nationale exclusive des Indous. Un réformateur est venu, Ram Mohan Roy, né 1774, appartenant par sa mère à la caste des bramines. Dès sa 16®« année il manifesta publiquement des doutes sur les croyances dont on l'avait nourri; il se brouilla avec sa famille et dut s'enfuir, visita l'Inde et le Thibet, mais à 20 ans rentra en . grâce auprès de son père, et ne cessa dès lors d'écrire et de publier des traités contre les superstitions et les pratiques de son pays, entre autres contre les suttees. Il étudia le sanscrit, l'anglais, le persan, l'arabe, le grec et l'hébreu, s'attacha au monothéisme, et fonda le 23 janv. 1830 à Calcutta une petite société religieuse sur les bases de l'unité et de la Providence de Dieu, de l'amour fraternel entre les membres de la société, de la tolérance pour toutes les convictions religieuses, de la vertu et de la bienveillance universelle, Il partit 1831 pour l'Angleterre, et f 27 sept. 1833 à Bristol. Mais son oeuvre lui survécut; elle fut reprise par Deben-drah Nath Tagore, né 1818, fils d'un riche bra-mine qui en 1839 fondait une société pour la Recherche de la vérité; en déc. 1843 il comptait 20 adhérents, 767 en 1847. Un nouvel essai fut fait en 1858 par le jeune Keshab Tschan-der-Sen, né 19 nov. 1838 à Calcutta, de la caste des médecins. Élevé au collège de Calcutta, il renonça publiquement à la religion de ses pères et fonda la confrérie de la bienveillance (Good-wiU Fratemity) avec écoles du dimanche, traités, prédications, etc. Il s'associa un moment avec Nath Tagore, mais des difficultés étant survenues, Sen poursuivit seul son œuvre, qui était plus radicale et qui, dans son théisme, tenait davantage compte de Jésus-Christ, comme une des incarnations, et la principale, de la divinité. II fit aussi un voyage à Londres et fut très bien reçu, surtout des unitaires. Sa secte compte environ 6,000 adhérents, répartis entre 102 petites églises, ou samadsch, dont 52 dans le Bengale.

TUBINGUE, petite ville du Wurtemberg, célèbre surtout par son université qui fut fondée 1477 par le comte Eberhard im Bart de Wurtemberg, et qui reçut le nom d'Eberhardo-Ca-rolina. Elle fat réglée sur le modèle de celle de Paris et fut reconnue par l'empereur en 1484. Ses débuts furent modestes; cependant, elle compta un moment parmi ses maîtres Biel, le dernier des scolastiques; Reuchlin, qui eut pour auditeur son jeune parent Méianchthon, et l'humaniste Bebel. La Réformation y eut des représentants dès 1534; GrynaQs et Camérarius s'appliquèrent à réorganiser et à relever les études et ils y réussirent. En 1559 la tendance luthérienne l'emporta sur la théologie plus modérée de Bucer et de Méianchthon qui avait d'abord prévalu, et la Formule de concorde y trouva ses plus ardents défenseurs. Au commencement du 17 m© siècle la faculté de Tubingue entra en lutte ouverte avec celle de Gies-sen, et il y eut beaucoup de temps perdu entre les cryptiques et les cénotiques. Vers 1660 et après un court professorat de Spener, un esprit nouveau pénétra dans la faculté et dans la eontrée environnante; des réunions religieuses s'organisèrent sous la direction de Reuchlin, de Bengel et de Hochstetter. Ce fut la belle époque de l'école évangélique de Tubingue, illustrée après Bengel par Storr et Steudel. Mais une nouvelle école a remplacé l'ancienne dès les premières années de ce siècle; elle a commencé par Baur q. v. et a fini par Strauss. Depuis 1817 la faculté catholique d'Ellwangen a été transférée à Tubingue.

TUNIS, non loin de l'ancienne Carthage; célèbre par la bataille que Régulus perdit contre Xantippe. Auj. chef-lieu de la régence de Tunisie devenue possession française. La ville compte environ 130,000 hab.; la province entre 1,300,000 et 3 millions; on finira peut-être par en connaître le chiffre exact. La population est en majorité musulmane. Les juifs, de 50 à 150,000 ont leur culte garanti par la constitution de 1857. Les catholiques sont régis depuis 1881 par l'archev. d'Alger. Les protestants y ont un pasteur anglican, quelques évangélistes et quelques missionnaires.

TUNKERS (de l'allern. tunken, plonger), baptistes par immersion, secte allemande, fondée 1708 par Alexandre Mack de Schwarzenau, qui pour le baptême tenait à plonger par trois fois dans l'eau courante le néophyte agenouillé. Il appartenait à ces piétistes, comme Hoch-mann, q. v. qu'on accusait de troubler l'ordre, et à force de les tracasser, on les contraignit de partir. Ils recrutèrent des amis de Wittgen-stein, de la Wetterau, et du Bas-Rhin, baptistes et mennonites, et se fixèrent en Pensylva-nie 1720, au nombre d'environ trente mille, s'appliquant à vivre comme les premiers chrétiens, avec la communauté des biens, le lavage des pieds, les agapes, l'onction d'huile, etc. Ils croient au rétablissement final. Auj. encore ils sont plus de 20,000, à Éphrata et aux environs, avec un collège à Bourbon depuis 1871. Ils sont surtout cultivateurs, et un peu végétariens; ils dédaignent la science et portent de longues redingotes, de longs cheveux et de longues barbes, qui les ont fait surnommer les barbus. Inutile d'ajouter qu'ils se distinguent par une grande moralité.

TURIN, l'ancienne Augusta Taurinorum, reconstruite par César sur l'emplacement de la capitale des Tauriniens, détruite par Annibal. Colonie romaine; elle passa 570, aux Lombards, après avoir été occupée successivement par les Goths, les Huns, les Hérules et les Burgondes. Agilulf, le mari de Théodelinde, y fit bâtir la cathédrale 602. Charlemagne s'en empara et la donna aux ducs de Suze. La maison de Savoie la reçut par héritage 1032 et l'a gardée. Son premier év. fut Maxime; le 9*e, Claude de Turin q. v. Université fondée 1404, confirmée 1459, avec l'évêque pour chancelier; biblioth. magnifique, 115,000 vol. avec de nombreux mss. La cathédrale reconstruite à la fin du 15®e siècle, est gothique, à 3 nefs, et portique d'un beau style; dans une église voisine on montre le saint suaire de N. S. Le temple des vaudois, inauguré 4853, est très beau. On cite de même l'égl. Saint-Maxime et la nouvelle synagogue.

TURLUPINS, surnom que le peuple de Paris donnait aux bégbards, assez nombreux dans nie de France au siècle. Ces béghards ne sont connus que par la constance avec laquelle ils supportaient les persécutions et la mort. Une femme, Jeanne Dabenton, fut brûlée en 1372. Les inquisiteurs se chargèrent de leur conversion. Quant au reproche que leur faisaient leurs ennemis de célébrer leurs mystères de nuit et complètement nus, on est fondé de leur demander: Qu'en savez-vous ? Presque toutes les sectes et les meilleures, ont été l'objet des mômes calomnies. L'étymologie du mot est inconnue.

TURQUIE. Cette immense agglomération de races, de langues et de peuples divers, qui occupe géographiquement à peu près la place de l'ancien empire d'Orient, avec la même capitale, Constantinople, et sous un seul chef temporel et spirituel, le sultan, s'est formée peu à peu par voie de conquête. Elle a pris son nom de ses premiers envahisseurs, les Turcs de la Tartarie, comme elle s'est appelée aussi l'empire ottoman en souvenir d'Osman, ou Othman, l'un des plus brillants chefs ou émirs qui, en proclamant leur indépendance, aient agrandi leur territoire aux dépens des autres principautés séleucides, vers 1300. De la grande famille indogermanique, ils avaient quitté leurs montagnes du Turkestan pour occuper la Perse, et de là s'avançant touj. vers l'ouest, ils fondèrent divers royaumes et dynasties qui duraient ce qu'ils pouvaient jusqu'au moment où le plus fort se fut soumis, sinon assimilé tous les autres. Ils occupaient l'Asie occidentale et l'Afrique sur une partie des côtes de la Méditerranée; il leur fallait encore l'Europe; le 15®e siècle la leur donna sous Mourad II qui prit Thessalonique 1451 et Mahomet II qui prit Constantinople 1453. L'islamisme fut dès lors dans toutes ces contrées la religion régnante et vraiment dominante, avec une espèce de demi-tolérance pour les chrétiens et les juifs, qui leur permet d'exister, mais qui, d'après le prétendu testament d'Omar, leur défend de bâtir des lieux de culte, leur impose un costume particulier et les subordonne en tout aux musulmans. Beaucoup de ces prescriptions se sont modifiées avec le temps. D'un côté la mollesse orientale, qui a singulièrement affaibli la race et la puissance turque; de l'autre l'ambition et les prétentions des puissances chrétiennes qui revendiquent le droit de protéger leurs ressortissants et de faire respecter le Saint-Sépulcre et ses pèlerins, tout concourt depuis plus d'un siècle à précipiter la décomposition de cet empire factice, dont les morceaux tombent les uns après les autres. L'Égypte émancipée sous Méhémet-Ali, puis conquise ou à peu près par l'Angleterre; U Grèce reprenant son indépendance, l'Algérie et la Tunisie devenant possessions françaises, une partie de l'Arménie passant à la Russie, les provinces danubiennes devenant un royaume, d'autres entrant dans l'orbite de l'Autriche; enfin la diplomatie européenne ne soutenant plus que pour la forme celui qu'elle appelle son malade, on a pu dire que l'année 1882 avait été pour l'Islam et le faux prophète le commencement de la fin et l'accomplissement de la prophétie qui lui donne 1260 ans de vie à partir de l'hégire 622; v. Apoc. H, 3. 12, 6. On évalue, mais ces chiffres ne peuvent avoir qu'une valeur très relative dans un pays où la statistique et les recensements exacts sont chose à peu près inconnue et, où, pour Damas seulement, on hésite entre 120,000 et300,000; on évalue à 20 millions le nombre des sectateurs de Mahomet dans l'empire ottoman, dont 9 millions de Turcs proprement dits, un demi-million de Slaves, le reste Arabes, Berbères, Kabyles, etc., sans compter les Druses. Tout ce qui n'est pas musulman est compris sous le nom général et dédaigneux de rajas, troupeau, et se divise en millet, ou nations, peuples, dont les principaux sont les juifs et les chrétiens. Ce sont encore les juifs qui ont la meilleure part. Plus de cent mille en Europe, autant en Asie, et 600 mille en Afrique, ils ont à Constantinople un grand-rabbin qui a rang de patriarche et ils se gouvernent eux-mêmes. Le patriarche grec orthodoxe de Constantinople jouit d'une sorte de primauté sur ceux d'Antioche, d'Alexandrie et de Jérusalem; il est le défenseur naturel de son Église auprès du sultan; son synode se compose de 12 archev. et d'autres grands dignitaires. Le patr. arménien, qui date de 1461, a la haute main sur tous les monophysites de l'Orient au point de vue temporel (un demi-million en Europe, 2 millions en Asie, 150 mille jacobites syriens, 180 mille coptes), mais il n'a d'autorité spirituelle que sur ceux de son diocèse, tous les autres relevant du patriarche d'Etschmiadzin. Les arméniens-unis, étaient jusqu'au conc. du Vatican, rattachés pour le spirituel à l'archev. primat de Constantinople, pour le temporel au patr. de Cilicie, qui a son siège dans le Liban. Dès lors une rupture a eu lieu, le primat Hassoûn ayant voulu romaniser la liturgie; une députar tion ayant été envoyée à Rome pour réclamer, et n'ayant rien obtenu, un grand nombre d'arméniens-unis se sont séparés, et ils ont été excommuniés. La Porte les soutient et leur a donné des églises. Le conflit dure encore et se renouvelle d'année en année. Les latins, ou catholiques romains, y compris les maronites, les jacobites et les coptes, forment un millet à part, qui est administré par ce qu'on appelle la chancellerie latine, composée du Yékil et de quatre députés laïques, et pour les affaires religieuses par le patr., par les évéques ou par les vicaires apostoliques les plus rapprochés. Les jacobites-unis ont leur patr. à Antioche; mais ils se sont séparés de Rome depuis le concile du Vatican, de même que les melchites et les maronites. Enfin les protestants, au nombre de plus de -cent mille, dont plus d'un quart d'arméniens convertis, comptent 70 congrégations presque toutes presbytériennes, qui sont représentées par un Vékil. Ce petit millet, qui date de 1853, est plus important par l'activité que par le nombre; à côté de l'évêché protestant 1842, l'Angleterre, la Prusse, le board américain, ont fondé des écoles, des stations, des hospices, des pensionnats, des imprimeries, et travaillent avec fruit à grouper leurs fidèles et àévangéliser les juifs, les musulmans, les grecs et les arméniens.

TURRECREMATA, v. Torquemada.

TURRETIN, ou Turrettini, souvent mal écrit Turtin, famille lucquoise, réfugiée à Genève pour cause de religion vers 1580, et qui a fourni à sa nouvelle patrie de nombreux savants, des magistrats et des pasteurs.

lo Bénédict, né 1588 à Zurich (fils de Fran-cesco, né 5 mai 1547 à Lucques), étudia à Genève, consacré 1612, pasteur et prof, de théol.; délégué 1620 au synode d'Alais, prêté à l'égl. de Nîmes pour 6 mois, envoyé 1621 vers les États Généraux de Hollande et vers les villes hanséatiques pour demander des secours en faveur de Genève touj. menacée, f 1631. Auteur de nombreuses dissertations, sermons français et italiens, controverse; réponse au p. Cotton, et d'une Hist. (inédile) de la Réform. à Genève.

2° Jean, son fr., né 1600 à Genève, père du prof. Michel, qui a écrit 2 serm. sur l'Utilité des afflictions, et la Croix des jugements de Dieu.

3<> François, fils de Bénédict, né 17 oct. 1623 à Genève, étudia sous Jean Diodati, Théod. Tronchin, Fréd. Spanheim. Voyages en Hollande, à Paris, Saumur, Montauban, Nimes; il laisse partout d'excellents souvenirs. De retour à Genève il y fut consacré en 1648 et reçu dans l'Église italienne. En 1650 il refuse une place de prof, de philosophie. En 1652 cédant à de nombreux appels de Lyon il s'y rend comme pasteur pour quelque temps, et a de la peine à <en revenir. Prof, de théol. à Genève en 1653. Il aide les vaudois du Piémont persécutés 1655. En 1661 il épouse Élisabeth de Masse Chauvet •et se rend la même année en Hollande pour demander du secours contre la Savoie toujours menaçante. Après des entrevues avec de Thou etdeWitt,legrand pensionnaire, après des discours aux États généraux et aux Etats de Hollande, il finit par obtenir 75,000 fl. Recteur à Genève en 1668, prof, d'hébreu en 1676, il travaillait énormément par ses écrits à maintenir la plus stricte orthodoxie, et réussit en 1679 à faire adopter le fameux Consensus. Outre une quantité de thèses en latin, on a de lui: Insti-tutionum theologicœ elenchticœ partes très, 1679-1685; sa controverse contre le cardinal Spinola sous le titre de Réponse à l'écrit d'un chanoine d'Annecy pour rendre odieux le protestantisme; 2 volumes de sermons, 1683 et 1686, plus une correspondance très étendue. Son style est original et pressant. Turrettini joignait à ses talents une modestie poussée jusqu'à la méfiance de lui-même. Il se voua tout entier à Genève malgré les offres brillantes que lui firent la Haye, et l'égl. wallonne de Leyde. f 28 sept. 1687 après une courte mais douloureuse maladie. Vie, par E. de Budé.

4o Jean-Alphonse, fils du précédent, né 24 août 1671, d'une précocité remarquable, étudia à Genève, d'abord sous Dautun et le cartésien Chouet, puis la théol. sous L. Tronchin, Calen-drini, et Pictet. En 1691 il visita la Hollande, fréquenta les savants du refuge, réussit à se faire bien venir des deux partis, étudia 8 mois à Leyde sous Spanheim, et publia en 1692 ses thèses sur le Pyrrhonisme pontifical, en réponse aux Variations de Bossuet. En juin 1692 il se rendit en Angleterre, où il connut Newton, Burnet, Tillotson, l'archev. Wake, et où il fut présenté à la cour; il visita aussi Oxford et Cambridge. A Paris 1693 il vit Bossuet, Mabil-lon, Malebranche, Fontenelle, Saint-Évremont, Ninon de l'Enclos, et rentra à Genève souffrant et fatigué. Consacré en mars 1694; attaché 1695 à l'Égl. italienne; en 1697 prof, d'hist. ecclés., se lia dès 1699 avec Werenfels et Ostervald, formant avec eux un triumvirat théologique qui exerça une grande influence sur la Suisse; en 1705 prof, de théol. Weur 1701-1710. Il fut nommé membre d'une commission chargée de reviser la Bible au point de vue de la langue, et proposa divers changements à la liturgie et à l'ordre des services. Mais ce qui a fait l'importance et la réputation de ce théologien, c'est la part prépondérante qu'il a prise dans la suppression de tout symbole et de toute confession de foi, soit pour l'Église, soit pour l'exercice du ministère. Le candidat devait signer d'abord: Je sens, je crois, j'enseignerai, etc. A partir du 26 juin 1706, on se contenta de lui faire signer: Je n'enseignerai pas le contraire, et je ne troublerai pas la paix de l'Église. Le 17 juin 1725 tout formulaire disparut, autre que la mention de l'Écriture sainte et du catéchisme. En poursuivant cette campagne, T. n'entrevoyait pas qu'elle dût tourner au profit de la libre-pensée et de l'incrédulité; il la faisait surtout pour rapprocher les Égl. protestantes, que les symboles divisaient quand ils auraient dû seulement les distinguer; il eut pour lui Wake, archev. de Cantorbéry, et le roi de Prusse qui le lit nommer membre de l'Acad. de Berlin et lui envoya une médaille d'or. Souvent les Égl. étrangères, de Hongrie, Transylvanie, Palatinat, Vallées, s'adressèrent à lui, et il se montra touj. empressé à les servir, f l*r mai 1737. Il a laissé de nombreux ouvrages, dont le Nubes testium est peut-être le plus remarquable; c'est un recueil de citations de la Bible, des pères, des synodes, sur la tolérance en matière de foi et sur la différence à faire entre les dogmes essentiels et ceux qui ne sont pas fondamentaux. En outre, des Comment., dissertations, sermons, etc. Genève 1734, et 1737.

TUTILO, moine de Saint-Gall, de 900 et 912, fort et vigoureux, peu né pour la vie contemplative, pieux, mais sans aucune disposition k l'ascétisme; artiste, remarquable par son talent pour la sculpture sur bois et sur ivoire; on disait de lui que c'était la sainte Vierge elle-même qui lui avait donné des leçons. II était aussi peintre, dessinateur, architecte, poète et musicien. On possède encore de lui des reliefs et quelques hymnes.

TWESTEN, Aug.-Detlew-Christian, né H avril 1789 à GlUckstadt, vint comme prof, à Berlin 1812 et s'attacha à Schleiermacher. De 1814 à 1835 il fut prof, de théol. k Kiel, travailla avec Harms à vivifier la piété de son église, s'occupa sérieusement de la question des pauvres, et fut appelé k Berlin 1835. Nommé en 1850 membre du consistoire supérieur. Auteur de nombreux ouvrages sur les symboles, la dogmatique luthérienne, la Logique, l'Angélo-logie, etc. f 1877.

TWIN, Divin, Dovin, longtemps capitale de l'Arménie, fondée par G^osrofs II vers 350, plusieurs fois détruite et reconstruite; célèbre par divers synodes arméniens qui s'occupèrent surtout de discipline, et, par les riches et nombreuses reliques de sa cathédrale.

TYANE, ville de Cappadoce, non loin du Taurus; patrie d'Apollonius. Un synode y fut tenu 368 pour ramener l'union entre les nicéens et les sémi-ariens qui s'étaient adressés au pape Libère et qui avaient été réintégrés par lui dans la communion de l'Église. Cette réconciliation ainsi préparée devait s'affirmer et se conclure dans un concile convoqué à Tarse, mais l'arien Valens s'opposa k sa réunion.

TYCHONIUS, théol. africain, donatiste, mais modéré, qui ne regardait pas les opposants comme ennemis de l'Église, et qui n'imposait pas un nouveau baptême à ceux qui se joignaient à lui. Il vivait k la fin du 4®e siècle et fut contemporain d'Augustin, mais avant que la réputation de ce père eut atteint son apogée. Chi-liaste, il a écrit sur l'Apocalypse un commentaire auj. perdu. Auteur des Sept Règles, qu'il donne pour trouver et fixer le sens des Écritures.

TYCHSEN, ou plutôt Tuka lo Olaf Gerhard, né 14 déc. 1734 à Tondern, Schleswig, fils d'un tailleur originaire de Norvège, étudia à Altona où il fut admis par faveur, et où il apprit l'hébreu, le caldéen et l'arabe. En 1756 il vint à Halle, et se mit k la théol. et aux langues orientales; nommé surveillant à la maison des orphelins, il apprit avec le missionnaire Schulz l'anglais, le tamule et l'indostani. Depuis 1759 il se consacra k l'évangélisation des juifs et des mahométans, visita le Danemark et l'Angleterre, et finit par être nommé d'abord lecteur, puis prof, de langues orientales k Butzow. Marié en 1767. f 30 déc. 1815. Il était conseiller aulique, et membre de plusieurs académies, Berlin, Munich, Upsal, etc. Ses nombreux ouvrages prouvent plus de recherches et d'érudition que d'esprit critique, et malgré leur valeur ils n'ont pas eu grand succès. Le plus important est une Introduction aux monnaies musulmanes. Il a traité aussi des monnaies arabes. Son livre intitulé: Preuve de la fausseté des médailles juives à caractères hébr. et samaritains l'engagea dans une longue et stérile controverse; il niait l'authenticité de toutes les médailles maccabéennes. Il entra aussi en lutte avec Kennikott à l'occasion de sa collection de variantes, qu'il chercha à discréditer en prétendant que la plupart des mss. comparés étaient d'origine chrétienne et en prenant parti pour la masore. Citons encore: De Pentateueho ebrœosamaritano, Tentamen de variis codicum hebr. generibus, Estimation des nombres d'années dans les mss. hébr. de la Bible, etc.

2o Thomas-Christian, né 8 mai 1758 à Hors-byll, Schleswig, fils d'un pasteur, étudia la théol. et la philologie k Kiel et à Gôttingue, parcourut l'Allemagne, la France, l'Espagne et l'Italie, et fut nommé 1784 prof, et 1817 docteur en théol. à Gôttingue, où il + 24 oct. 1834. Ses 43 ouvrages roulent presque sur les mêmes sujets que ceux de son homonyme et leur sont en général supérieurs: Des monnaies hébr., des monnaies orientales. En outre: Comment, sur Joël, Littérature des Hébreux, de l'Autorité de Josèphe, Du retour de Christdans le N. T., etc. Il fut associé aux travaux de J.-D. MichaÇlis.

TYNDALE ou Tindal, William, théol. anglais né 1484 k Northnibley dans le pays de Galles, étudia d'abord à Oxford les langues et la philosophie. Il y lut avidement la Bible latine d'Érasme et la fit connaître à ses condisci-pies. Des persécutions naissantes le tirent partir pour Cambridge. En 1519 de retour chez lui, il est appelé comme précepteur dans la noble famille Walsh de Sodbury, où il exerce une bonne influence. Il sème autour de lui la parole de Dieu, mais le clergé ruine à mesure tout ce qu'il fait. Tyndale comprend qu'avant tout il faut faire connaître la Bible, et pour cela la traduire en langue vulgaire. Il se met à l'œuvre, et continue ses travaux à Londres, protégé et secondé par un riche marchand, Humphrey Monmouth. Un an après, obligé de partir il se rend à Hambourg où il publie les 2 premiers Évangiles. En 1525 il part pour Wittenberg, puis Cologne où il fait imprimer le reste du N. T. à 3000 exemplaires. La publication en ayant été interdite, il réussit à l'introduire en Angleterre malgré les efforts de ses ennemis. Il se met de nouveau en route, visite Worms, Marbourg, Anvers 1529, travaillant partout, mais toujours insaisissable. 11 est obligé de retourner à Hambourg, où il publie le Pentateuque, puis encore à Anvers où il imprime le N. T. 1534. Il y fut enfin arrêté et condamné à mort comme ayant contrevenu aux décrets de Charles-Quint qui défendait l'impression de livres évangéliques. Il mourut sept. 1536 avec le courage et la sérénité d'un martyr. Il fut étranglé et son corps brûlé. Ses amis Bilney, Bayfield, Fryth, avaient subi le martyre avant lui; tous avaient repoussé les avances de Henri VIII, ne voulant pas d'une demi-réforme dictée par de mauvaises passions.

TYPASE, auj. Tipaza, petite ville d'Afrique rendue célèbre par un étrange miracle qui arriva en 484. Hunneric, roi des Vandales, cruel protecteur des ariens, fit couper la langue à plusieurs chrétiens qui s'obstinaient à confesser la divinité de Jésus-Christ. La légende et quelques historiens rapportent qu'après cette opération ils continuèrent de parler, et que s'étant rendus à Constantinople ils parlèrent devant Zé-non et toute sa cour. Abbadie, Dodwell, le traducteur de Mosheim, et quelques autres protestants admettent la possibilité de ce fait.

TYPE, ou Modèle, formulaire de foi imposé par un édit de Constant II, publié 648 à l'occasion des discussions monothélites, et destiné à imposer le silence à tous; cet édit qui mettait sur la même ligne le oui et le non, ne fut respecté ni des uns ni des autres, et Martin le condamna 649 au conc. de Latran.

TYR, bien qu'à peu près ruinée, avait déjà un èvêque en 196; Paulin lui donna une cathédrale. En 335 un conc. y fut convoqué pour entendre Athanase, et après de longs débats le condamna et l'exila à Trêves. En 1164 l'historien des croisades, Guillaume, était archev. de Tyr et comptait 13 évêques suffragants.

TYROL. Peuplée de tribus celtes et galliqnes, l'ancienne Rhétie tomba sous Auguste entre les mains des Romains et s'en assimila prompte-ment la civilisation, mais l'invasion des barbares, Allemans, Huns, Goths, interrompit ce développement, et ce fût seulement sous Charlemagne qu'un état plus normal se rétablit. Des traditions incertaines font remonter l'évangéli-sation du Tyrol à un contemporain de Pierre, Prosdocime év. de Feltre. Le premier fait historique est la présence d'Abondance, év. de Trente, au conc. d'Aquilée 381; il eut pour successeur Vigile, qui trouva ta mort, 400, en faisant la guerre aux idoles. D'autres évêchés sont encore mentionnés du 6m« au 10m« siècle dans cette contrée, dont les limites ont beaucoup varié, puisqu'elles ont quelquefois compris Salzbourg, CoireetWurzbourg, parfois aussi Vérone etPadoue. L'immoralité et l'ignorance du clergé amenèrent en 1525 une émeute de paysans, et un moment on put croire à une réforme; mais la noblesse qui se croyait menacée se ligua contre tout mouvement évangélique et le protestantisme ne put jamais prendre pied dans le Tyrol. Les jésuites furent appelés 1561 et fondèrent l'univ. d'Innsbruck. Les couvents de tous ordres se multiplièrent, et ni le régime des lois joséphines, ni le gouvernement français, ni le traité de 1815 ne réussirent à faire comprendre la tolérance à ces vallées. A plusieurs reprises les protestants en furent chassés; en 1837 ils émigrèrent encore au nombre de 800 et fondèrent en Silésie la colonie de Zillerthal dans un district que la Prusse mit à leur disposition. Depuis 1864 cependant il y a à Bregenz, Vorarl-berg, un petit troupeau de protestants soutenus par la Société de Gustave-Adolphe.

TZSCHIRNER, Henri-Gottlieb, né 17 nov. 1778 à Mitweida, Saxe, fils d'un pasteur, fit ses études à Chemnitz et à Leipzig; protégé par Reinhard, il fut prof, de théol. d'abord à Wittenberg, puis à Leipzig où il occupa successivement diverses charges pastorales; surintendant depuis 1815 en remplacement de Rosenmuller, chanoine à Zeitz et à Meissen, chevalier de l'ordre de Danebrog. f 17 févr. 1828. Esprit vif et ingénieux, sans grande profondeur, pittoresque sans être précisément original, patriote enthousiaste, aumônier pendant la guerre d'indépendance, prédicateur sympathique, il était assez indifférent pour le dogme & admettait que l'Égl. chrétienne peut comporter toutes les opinions, comme le paganisme comportait tous les dieux. En fait de surnaturel il croyait au christianisme révélé, dont Jésus homme aurait été la plus exacte manifestation. Il a publié un grand nombre d'ouvrages, 5 vol. de sermons, des écrits de cironstance, des livres de philos., de controverse, de dogmatique, de psychologie; des traités sur la guerre, le suicide, etc.

U

UBBONITES, secte d'anabaptistes, fondée vers 4534 par le prêtre Ubbon Philipps, de Leeu-warden, et par son frère Dirk. Affligés des désordres de l'Église, il se réunirent en communauté avec quelques amis, se firent rebaptiser et choisirent pour anciens David Joris et Mennon Simons. Ils surent se préserver de toute extravagance; pour eux le royaume de Dieu c'était le renouvellement du cœur. Ils protestèrent contre les écarts politiques de Munster, et Ubbon finit par embrasser la Réforme; f 1568.

UBERTIN de Casait, minorité, disciple de Jean Olivi, et son successeur comme chef des Spirituels dans la lutte sur le vœu de pauvreté vers 1300. Il prit la défense des franciscains stricts dans une Vie de Jésus, qu'il écrivit. Ses ennemis lui firent une violente opposition et le dénoncèrent auprès du pape. Jean XXII lui per mit d'entrer dans l'ordre des bénédictins, mais ceux-ci l'ayant repoussé, il se fit chartreux. On ne sait quand il mourut.

UBIQUITÉ du Corps de Christ (de ubique, partout), doctrine éminemment luthérienne et qui se rattache à celle de l'eucharistie. S'il n'y a pas transsubstantiation, le Christ ne peut être à la fois au ciel et dans les éléments consacrés que parce qu'il est partout en corps et en sang, de même qu'il est partout comme nature divine. On invoque Matt. 28, 20. Éph. 1, 23. 4, 10. Hébr. 1, 3. Déjà dans un sermon de 1526 Luther émettait cette idée, et souvent dès lors. Brenz et les théol. du Wurtemberg la formulèrent en 1559; Andreâ et ceux de Tubingue aussi, mais en la modifiant; enfin Chemnitz et les Saxons firent de même et avec d'autres modifications, en réservant la multivoliprésence, c.-à-d. que le Christ peut être à la fois présent partout « où il veut. » La Formule de Concorde a essayé de combiner ces divers points de vue, mais sans succès. On peut se demander quel est l'intérêt de cette question. On appelle ubiquis-tes, ou ubiquitaires, les partisans de l'ubiquité. — On donnait aussi à Paris ce nom aux docteurs en théol. qui ne relevaient ni de la Sorbonne, ni de Navarre.

UCHOMO, ou Oukhôme, v. Abgare.

UHLHORN, Jean-Gerhard-Guill., né 17 févr. 1826, prof, à Gtfttingue, puis pasteur à Hanovre; docteur en théol. de l'univ. de Greifswald. Il est, par ses écrits, un des piliers du luthéranisme hanovrien. Auteur d'un grand nombre de sermons, monographies, traités: sur la guerre, le dimanche, les diaconesses, le conc. du Vatican, etc.

UHLICH, Leberecht, né 27 févr. 1799 à Kô-then, étudia à Halle sous Wegscheider, et après quelques années passées dans l'enseignement, fut nommé pasteur à Diebitz. Disgracié pour une biographie du prince Wolfgang d'Anhalt, il vint en Prusse, où il se fit apprécier par son zèle dans sa nouvelle paroisse de Pômmelte, près Schôneberg. Mais à l'occasion de l'affaire de Sintenis q. v., il se jeta dans le mouvement des Amis des lumières, qui remplaçait l'orthodoxie par la philanthropie, et il en devint le véritable chef, voyageant pour en propager les idées, rédigeant un journal et publiant de nombreux écrits, sermons, catéchismes, livres de piété, brochures de controverse, etc. En 18i5 ses conférences furent interdites et il lui fut défendu de sortir de sa paroisse sans autorisation. Appelé à Magdebourg il s'y consacra d'abord tout entier à son ministère, mais étant entré en lutte avec le Consistoire à l'occasion du baptême apostolique, ses réunions à domicile furent prohibées par la police et en sept. 1847 il fut suspendu. Il donna alors sa démission et fonda à Magdebourg une communauté indépendante, en même temps qu'il travailla à en fonder ailleurs un certain nombre. En 1848 il fut envoyé au parlement de Francfort. D'une moralité sévère et d'un caractère élevé, cherchant loyalement la vérité, mais sans profondeur comme pensée, il abandonna peu à peu tout ce qui lui restait de doctrines chrétiennes, au point qu'il ne croyait plus même à l'immortalité de l'âme. Son système se réduisit à un naturalisme panthéiste philanthropique. Il présida encore les conférences de sa secte les 31 mai et l«r juin 1871, et f 23 mars 1872.

ULLMANN, Charles, né 15 mars 1796 à Ep-fenbach, Palatinat, fils d'un pasteur, étudia la théol. à Heidelberg, où il fut nommé professeur après un court séjour à Tubingue où il connut Uhland, et un court ministère pastoral à Kireh-heim. Docteur depuis 1819, il enseigna l'exégèse et l'hist. ecclésiastique. Attaché à la doctrine orthodoxe traditionnelle, il vit ses vues se modifier pendant un séjour à Berlin, sous l'influence de Schleiermacher, De Wette et Nean-der. De 1829 à 1836 il fut prof, à Halle, mais il revint à Heidelberg, et tout en luttant contre les excès de la tendance de Hengstenberg, il ne cessa de combattre les prétentions du vieux rationalisme. Il voulait une réorganisation de l'Égl. nationale allemande, assista au Kirchen-tagde 1848, se prononça touj. plus dans le sens évangélique, fut nommé prélat en 1853 et membre du Conseil ecclésiastique supérieur. Au synode de 1855 il exerça une influence prépondérante dans le sens conservateur; le maintien d'une confession de foi exaspéra les libéraux tbéologiques et politiques, et en 1861 il dut donner sa démission, f 12 janv. 1865. Son principal titre littéraire est dans la fondation de la revue StwUen und Kritiken qu'il rédigea d'abord avec Umbreit, puis avec Rothe, Hundeshagen, Riehm, etc. II a aussi écrit quelques comment., des monographies et des brochures de circonstance.

ULPHILAS. ou Urphilas, Gui filas, Wulfila, Wœlfel, nom gothique grécisé. Né vers 313 dans un village de la Cappadoce, d'une famille emmenée prisonnière par les Goths, il apprit la langue des Goths en môme temps qu'il recevait de ses parents une culture grecque. Doué de talents remarquables, il fut distingué par Constantin; il enseigna parmi les Yisigoths comme docteur chrétien, et apparaît enfin vers 343 en qualité d'évêque de Dacie et de Thrace; Auxence et Philostorge ne sont pas d'accord sur les dates. En présence de l'attitude d'Athanaric, peu favorable au christianisme, il obtint de l'emp. Constance, 350, la permission de se rendre avec une partie de son peuple en Mêsie, où ils s'occupèrent surtout d'agriculture. Il paraît aussi que les Goths l'employèrent comme négociateur dans leurs rapports avec Rome. En 360 il consentit à signer les résolutions semi-ariennes du conc. de Constantinople, un peu sous la pression de Valens, un peu sous celle de la détresse de son peuple. En 370 ces Goths devinrent franchement ariens, à cause d'une nouvelle persécution d'Athanaric, qui força les chrétiens faibles à se jeter dans les bras de Fritigern et par conséquent de Valens. Les circonstances ayant changé par l'avènement d'Athanaric, devenu chrétien, et de Théodose, il y eut en 383 un nouveau concile à Constantinople, auquel Ul-philas assista et qui condamna l'arianisme, tout en montrant pour la personne d'Ulphilas un grand respect. Ulphilas, naturellement affecté d'un vote qui le condamnait, tomba malade peu après et + la môme année 383. Il fut enterré à Constantinople au milieu de la sympathie générale. Il laissait à l'usage de son peuple un Testament religieux incontestablement arien, mais où percent aussi les distinctions subtiles que comportent parfois ces délicates questions. Ce qui rendra sa mémoire chère à l'Église, c'est qu'il a traduit en goth la Bible, ayant dû pour cela inventer un alphabet spécial, pour remplacer les lettres runiques dont ces peuples se servaient alors presque exclusivement. L'écriture qu'il inventa, ou qu'il emprunta aux langues de son temps, n'est pas celle que l'on connaît auj. sous le nom de gothique; elle ressemble plutôt aux petits caractères latins. Il traduisit le N. T. d'après le grec. Il traduisit aussi l'A. T., sauf, dit Philostorge, les livres des Rois, parce qu'il craignait d'exciter encore l'esprit militaire de son peuple, déjà assez belliqueux. Sa traduction est littérale, presque servi le, en tout cas dégagée de toute préoccupation dogmatique; le fameux passage Rom. 9, 5. susceptible de deux versions est traduit dans le sens orthodoxe. Cet ouvrage, longtemps perdu, n'a pu être reconstitué qu'en fragments partiels: l'un contenant les Évangiles a été retrouvé à Prague au 17me siècle; les Suédois l'ont transporté à Upsal dans leur célèbre biblioth. où il porte le nom de Codex argenteus, cahier d'argent, à cause de ses caractères argentés, ornés d'or; plusieurs fois réimprimé, lîn autre, contenant des chapitres de l'ép. aux Romains, a été découvert à Wolfenbllttel par Knittel, et publié en 1763; on l'appelle Codex Carolinus, en l'honneur du duc Charles de Brunswick. D'autres fragments enfin ont été retrouvés à Milan sur des palimpsestes, par Mai et Castiglione 1819-1839. On ne possède ainsi de l'A. T. que Ps. 53, 2. 3. Est. 2, 8-42. Néh. 5 à 7. L;i perte est d'ailleurs peu grande en elle-même; cette version ne pourrait servir qu'à faire connaître l'état du texte au siècle, et quelques anciennes racines de l'allemand.

ULRIC lo ou Udalric, né 893 à Augsbourg, de la famille des comtes de Dillingen, descendant par sa mère du comte Burchardde Souabe, fut élevé à Saint-Gall, où une religieuse, Wibo-rada, lui prédit qu'il serait un jour évêque. Il fut élu en effet év. d'Augsbourg à son retour de Rome 923, et se distingua par son zèle à fonder des églises et des couvents et à les enrichir de reliques; il fit aussi beaucoup pour ranimer la vie religieuse de son troupeau, et l'on attribua à ses prières plusieurs délivrances merveilleuses de son diocèse pendant la guerre des Magyares, 925. f 4 juillet 973. La légende lui prête des miracles. Canonisé 993 par Jean XV.

2o Moine de Cluny, né 1018 à Ratisbonne, f 1093; neveu de l'év. de Frisingue, favori de l'emp. Henri-le-Noir; auteur de Lettres, et d'un Recueil des coutumes de Cluny.

3o Duc de Wurtemberg. Né 4 févr. 1487 au château de Reichenweiher, Alsace, il fut déclaré majeur en 1501 et se fit vite une position par sa guerre dans le Palatinat et par son mariage avec Sabine de Bavière, nièce de l'emp. Maxi-milien. Mais sa légèreté et sa mauvaise administration le firent détester de ses sujets. En outre, ayant assassiné Hans de Hutten qui avait divulgué les propositions criminelles qu'il avait faites à sa femme, il fut mis au ban de l'empire et resta 15 ans errant en Saxe, à Brunswick, en Suisse, intriguant pour se faire des alliés et rentrer en possession de ses États. Il s'aboucha tour à tour avec Sickingen, avec les révolutionnaires de Bohême, avec les paysans révoltés;

il trouva enfin dans Philippe de Hesse et dans François l** l'appui dont il avait besoin, et après la bataille de LaufTen 1534, il put reprendre son duché, mais comme relevant de l'Autriche. Il avait embrassé la Réforme à Montbéliard et il chercha à l'introduire en Wurtenberg, mais il y procéda avec prudence et modération, évitant de froisser les luthériens et ménageant même les anabaptistes. Compromis dans la guerre de Smalcalde, 1546, il vit ses États ravagés par le duc d'AIbe et n'obtint la paix qu'au prix d'une forte amende et en acceptant l'Intérim, f 6 nov. 1550 à Tubingue, après une courte maladie.

ULTRAMONTAN1SME. Mot venu du latin ultra montes au delà des monts; par son étv-mologie il a une signification géographique, et dans le moyen âge les catholiques de Rome donnaient le nom d'ultramontains aux vaudois du Piémont, qui étaient pour eux au delà des monts. Mais pour la France et l'Allemagne, p. ex., c'est l'Italie qui est au delà des Alpes, et l'usage a peu à peu prévalu d'appeler ultramon-taines les doctrines et les tendances qui ont leur siège et leur principal représentant de l'autre côté des montagnes, c.-à-d. à Rome. Auj. ce mot a un sens conventionnel très précis; il désigne le parti catholique dont les aspirations tendent à faire du saint-siège et du pape la seule autorité absolue dans l'Église, par opposition au catholicisme national, tel que le gallicanisme, et en général l'épiscopalisme qui met l'autorité dans l'évêque, ordonné de Dieu, et dans l'assemblée des évêques réunis en concile. L'ultra-montanisme, comme prétentions, date de Grégoire VII et d'Innocent III; les luttes qu'il a soutenues pour arriver à ses fins remplissent le moyen âge, et depuis le conc. de Trente, ce sont les jésuites qui ont supporté tout le poids de la bataille. Le conc. du Vatican a été leur œuvre, ainsi que les défections qui ont suivi dans l'Église et les mesures prises par divers États pour protester contre les doctrines du Syllabus.

UMBREIT, Fréd.-Guill.-Charles, né 11 avril 1795 à Sonneborn, près Gotha, fils d'un instituteur qui était en même temps organiste et compositeur distingué. Il étudia à Gotha, puis à Gôttingue ob Eichhorn lui donna le goût des langues orientales et enflamma son enthousiasme pour la poésie biblique. Examiné à Gotha par Bretschneider, il revint prendre ses grades à Gottingue, visita Vienne, puis s'établit 1820 à Heidelberg, où il fut successivement nommé prof, de philos, et de théol., et membre du Consistoire. Il y vécut honoré, heureux et paisible dans le cercle de la famille, entouré d'amis tels que Ullmann et Rothe, ne s'occu-pant jamais de politique, étranger aux luttes religieuses, faisant consister toute sa dogmatique dans la foi au Dieu vivant révélé en son fils

Jésus-Christ, et à l'immortalité, deux points sur lesquels il resta inébranlable et qui lui suffisaient. Il était partisan décidé de Schleierma-cher, et quant aux questions ecclésiastiques il avouait lui-même qu'il n'y entendait rien; il accepta l'union badoise comme un fait et sans la discuter. Nature aimable, artistique, profondément pieuse, il sut étudier la Bible en chrétien et en savant, sans s'attarder à la critique, t 26 avril 1860. Auteur de nombreux comment, sur Job, les Proverbes, l'Écclésiaste, le Cantique. les Prophètes, quelques Psaumes, les Romains et de quelques sermons et ouvrages d'édification; il est surtout connu comme rédacteur, avec Ullmann, des Studien und Kritiken.

UNDECIMILLE, v. Martyrs, et Ursule.

UNGNAD, Hans, baron (de), né 1493, fils d'un chambellan de l'emp. Maximilien 1er, se distingua dans la guerre contre les Turcs. Ayant perdu sa femme, comtesse de Thurn, il chercha des consolations dans la religion, embrassa le protestantisme, se rendit à Wittenberg où il se remaria avec la comtesse de Barby, une ancienne religieuse, fut nommé gouverneur de Styrie, et quand en 1557 la liberté religieuse eut été refusée aux évangéliques, il se rendit auprès du duc de Wurtenberg qui mit à sa disposition l'ancienne abbaye d'Urach. Il y fonda une imprimerie, et ayant fait la connaissance de Truber, il consacra ses presses à la publication d'ouvrages religieux en langue slave, qui, malgré la difficulté des transports, eurent un rapide écoulement, f 27 déc. 1564 au château de Wtn-tritz, Bohême, chez sa sœur. Son corps embaumé fut transporté à Tubingue. Son imprimerie arrêtée pendant la guerre de 30 ans, fut confisquée par les troupes impériales et donnée à la Propagande à Rome.

UNIFORMITÉ (Acte d'), nom qu'on donne à quelques-uns des bills du parlement anglais, ayant pour but, sur la base du Prayer-Book, d'établir pour toute l'Église du royaume un règlement extérieur uniforme. Le parlement du 4 nov. 1547 avait pris des résolutions à la suite desquelles Cran mer avait entrepris l'œuvre de la Réforme; il avait en particulier préparé un recueil de liturgies qui fut présenté à Édouard VI à NoiM 1548 et adopté comme Acte d'unif. au commencement de 1549, pour avoir force de loi dès le 1er juillet. Mais ce recueil qui conservait encore les prières pour les morts, la confession, Textrême-onction, ne pouvait être accepté tel quel et dut être revisé; il le fut en 1552 sous l'influence de Calvin, de Pierre Martyr et de Bucer, et un second Acte d'unif. fat voté par le parlement le 6 avril 1553. Il ne fut pas rigoureusement observé; une certaine liberté régnait dans l'Égl., jusqu'au moment où sous Charles II, 1662, un nouvel Acte daté dn jour de la Saint-Barthélemy contraignit les ministres à s'y conformer d'une manière absolue sous peine de destitution; 2000 d'entre eux perdirent leurs places et durent quitter leurs presbytères. Ils furent appelés Non-conformistes.

UNIGENITUS dei filius, premiers mots de la bulle de Clément XI, de sept. 1713, qui condamne comme hérétiques 101 propositions des Réflexions morales de Quesnel, dont plusieurs tirées de saint Augustin et même de la Bible, les dénonçant en même temps comme dangereuses pour l'État. Les jésuites étaient les vrais auteurs de la bulle, qui eut pour conséquence le schisme d'Utrecht. Cette bulle ne fut pas reçue sans opposition par le clergé français, et le card. de Noailles protesta énergiquement. Ailleurs elle resta sans application, parce qu'elle avait été calculée surtout en vue de la France. Joseph II d'Autriche la refusa ainsi que la bulle In cœnâ Domini, même après que Clément XIV l'eut déjà passablement adoucie. L'abbé Glaire emploie les mots d'absurde et d'ineptie pour réfuter Quesnel.

UNION 1° hypostatique, celle du Fils de Dieu dans la personne du Fils de l'homme; — 2° mystique, celle de Dieu avec l'âme du chrétien; quelques théologiens luthériens du 17®* siècle allèrent jusqu'à soutenir que par la foi l'homme s'assimilait une partie de la substance de la sainte Trinité. — 3<> Union des Églises, ou des bénéfices; la réunion de deux en un, momentanée ou définitive, motivée soit par le manque d'un personnel suffisant pour la desserte, soit parce que l'une des parties a perdu de son importance; il arrive quelquefois qu'une paroisse voit sa population diminuer considérablement sous l'influence de circonstances diverses, émigration, conversions, crise industrielle et commerciale, sinistres; elle ne réclame plus les soins d'un ministre spécial, qu'elle ne pourrait d'ailleurs entretenir, et l'autorité l'adjoint comme annexe à une paroisse voisine; — 4<> Union chrétienne, communauté de filles et de veuves, fondée à Charonne 1661 (transférée à Paris 1686) par Mad. de Polaillon et le prêtre Vachetfl681, pour travailler à la conversion des femmes et filles hérétiques, et donner une retraite à des personnes de qualité. — 5° La Petite-Union, fondée 1679 parle prêtre Vachet et Mlles Malet et de Lamoignon pour recueillir les filles venant à Paris chercher une place.

— Dans un sens beaucoup plus général le mot d'Union sert à désigner les rapports d'églises qui, sans se fusionner, forment entre elles une sorte d'alliance affectueuse, qui permet la communion à la même table, des échanges de services entre les ecclésiastiques, et la collaboration à des œuvres communes. Pour cela il faut l'accord sur les points fondamentaux, ce qvù fait que l'union ne pourra jamais s'établir entre l'Égl. catholique romaine et les Églises protestantes, le point de départ n'étant pas le même. L'union entre les Égl. luthérienne et réformée, est également difficile; les réformés l'ont toujours cherchée, p. ex. à Marbourg 1529, à Leipzig 1631, mais les docteurs luthériens l'ont touj. repoussée, et ce n'est qu'individuellement que des rapports fraternels ont pu se maintenir souvent d'égl. à église, grâce à des vues plus saines et plus larges des pasteurs et des troupeaux. L'histoire mentionne les nombreuses tentatives qui ont été faites pour amener un rapprochement entre l'Égl. de Constantinople et celle de Rome, depuis Basile et Jean IX jusqu'à Nicolas et Grégoire XVI. L'Égl. arménienne a aussi essayé, mais en vain, de se rapprocher de l'occident; elle s'est heurtée à des prétentions inadmissibles, et quelques congrégations isolées ont seules accepté les conditions qu'on leur imposait. Mais le besoin d'union est si grand et si naturel qu'on ne se lasse pas d'y travailler, et récemment encore des essais ont été faits pour unir les vieux-catholiques d'Allemagne aux jansénistes de Hollande; l'Egl. anglicane pourrait se joindre à cette union, et l'on a même pensé à l'Egl. arménienne. L'étroi-tesse d'esprit, des ambitions personnelles, des motifs politiques, empêcheront peut-être longtemps ces efforts d'aboutir.

C'est en Allemagne surtout que le mot d'union a pris une signification précise. Luthériens et réformés formaient des camps distincts, souvent hostiles, étant dans une même ville, dans une même province, presque partout, quelquefois en nombre à peu près égal. Parfois il arrivait aussi que le prince était d'une communion et le peuple d'une autre; il y avait à la fois conflit possible et rapprochement désirable. Avec un peu de bonne volonté la chose devait se faire à la longue, et comme les réfugiés français appartenaient en général à la Réforme et grossissaient ainsi la minorité, il devenait touj. plus urgent, au point de vue politique, de couper court à des discussions de doctrine qui passionnaient et divisaient les pasteurs et les troupeaux. Déjà un édit de 1664 interdit les injures et les attaques violentes du haut de la chaire, ainsi que tout ce qui pouvait irriter une communion contre l'autre. Mais cela ne suffit pas. et la conférence de 1703 n'aboutit pas. Au 18™ siècle le pié-tisme d'une part en mettant en relief les choses essentielles, de l'autre le rationalisme, en contestant l'importance absolue du dogme, préparèrent les esprits à des concessions mutuelles, et les habituèrent à l'idée d'une vie en commun. Plusieurs théologiens de valeur poussèrent dans ce sens, Planck, Schleiermacher, Sack, et le 27 sept. 1817 le roi de Prusse publia un appel aux Églises pour les exhorter, sans se renier elles-mêmes, à se constituer en une seule Égl. chrétienne évangélique vivante, dans l'esprit de leurs fondateurs. Sur le préavis conforme de la plupart des synodes et consistoires, l'Union fut décidée et les bases en furent élaborées d'une manière très large. Cependant elle rencontra çà et là quelques résistances; l'intervention de l'État ne fut pas toujours heureuse; le gouvernement dut fléchir quelquefois, et ses hésitations engagèrent le parti vieux-luthérien, sous la conduite de Hengstenberg, à relever la tête sous prétexte de défendre la foi contre le rationalisme. Aujourd'hui, après bien des décrets, l'Union existe en droit, sinon partout en fait; les églises choisissent leurs pasteurs, elles s'administrent elles-mêmes, et leur caractère confessionnel dépend d'elles et de leurs pasteurs plutôt que de l'État.

UNITAIRES, ou Antitrinitaires, nom général sous lequel on désigne les hommes ou les sectes qui, pour maintenir l'unité absolue de Dieu, rejettent le dogme de la Trinité. On les distingue d'ordinaire en 3 classes: Ceux qui maintiennent la divinité de Christ, mais nient la pluralité des personnes. Ils pensent que Dieu prend les différents noms de Père, de Fils et de Saint-Esprit, suivant ses différentes relations avec nous. Le principal représentant de cette tendance fut Praxeas. On leur a donné aussi le nom de patripassiens (la passion du Père), parce que, dans la logique du système, c'est le Père qui a souffert et qui est mort sur la croix. — 2o Ceux qui regardent la Parole comme une force divine qui s'est unie à l'homme Jésus, soit à son baptême, soit déjà dès sa naissance. La plupart des subordinatiens appartiennent à cette catégorie, ainsi que les ariens et plusieurs des réfugiés italiens. — 3° Ceux qui ne voient d'autre union entre Dieu et l'homme Jésus, que celle qui a déjà existé chez les prophètes. Ce sont les sociniens; Théodose le tanneur avait été leur précurseur. — L'unitarisme est relativement moderne; il s'est développé sous l'influence du rationalisme déiste; l'Angleterre et l'Amérique lui ont fourni le terrain oii il pouvait le mieux s'épanouir en liberté. Il était en germe dans l'égl. des Étrangers, Londres 1550, et se développa rapidement. Freeman avait déjà une église à Boston en 1787; Lindsay et Priest-ley, en Angleterre, en fondèrent plusieurs vers la fin du siècle. C'est dans le Massachusetts qu'elles prospérèrent le plus. Deux prédicateurs, philos, et philanthropes, aussi remarquables par leurs talents que par leur zèle, Channinget Parker, donnèrent à l'unitarisme une certaine popularité momentanée; ses églises se multiplièrent, mais depuis quelques années elles perdent de nouveau du terrain. Les ariens et les semi-ariens, les sabelliens, les sociniens avec leurs diverses nuances, toutes les sectes qui nient la divinité de J.-C. sont unitaires, mais malgré leur Association, fondée à Londres en 1825, elles sont loin d'être homogènes; les unes plus profanes rejetant de la personne du Sauveur tout élément surnaturel, forment la gan-che radicale; les autres éléventChrist beaucoup au-dessus de l'humanité. Elles comptent environ 300 églises en Angleterre et 600 en Amérique; ces dernières appartiennent aux plus hautes classes de la société et se distinguent par leur luxe. Elles ont établi quelques relations avec leurs sœurs d'Allemagne, au Protestante» Verein de Darmstadt.

UNIVERSALISME lo Caractère du christianisme qui est fait pour le monde entier, sans distinction de race, de peuple, de condition, ni de sexe, par opposition au judaïsme qui n'offre le salut qu'à un seul peuple. Les prophètes hébreux avaient entrevu l'ère nouvelle; Jésus-Christ l'a ouverte, et c'est l'apôtre Paul qui en a été le prédicateur et le représentant le plus populaire, le plus ardent et le plus convaincu. — 2<> L'univ. hypothétique, doctrine d'Amy-raut qui cherche à expliquer la prédestination: v. Amyraut. — 3° Doctrine qui admet, sous des formes diverses, que tous les hommes seront finalement sauvés, par opposition au dogme des peines éternelles, à celui de l'anéantissement des méchants, et au conditionalisme de MM. White, Pétavel et Byse.

UNIVERSITÉS, nom général sous lequel on désigne de grands centres d'enseignement, ayant le privilège de conférer des grades. Elles datent presque toutes de l'époque des croisades qui, en rapprochant l'orient et l'occident, deux cultures, deux civilisations, donnèrent aux études une vigoureuse impulsion et favorisèrent les rapports de peuple à peuple. Les plus anciennes connues sont celles de Salerne pour la médecine 1150, et de Bologne pour le droit 1158. Charlemagne avait déjà rêvé et entrepris quelque chose d'analogue, en faisant venir à Paris des savants étrangers et en recommandant par son exemple l'instruction publique, mais ce n'est guère que sous Louis-le-Jeune, et spécialement sous Philippe-Auguste, vers 1200, que l'université de France fut officiellement constituée; ses premiers statuts datent de 1215, et furent rédigés par un Anglais nomme Robert de Courson. D'autres centres scientifiques se fondèrent sur le même modèle, et le nom d'universités leur fut donné parce qu'on était censé y étudier toutes les matières. On y distingua d'abord quatre branches ou facultés principales, le droit, la médecine, la théologie et les arts, cette dernière faculté comprenant les lettres et les sciences. Chacune correspondait en pratique à une carrière déterminée. Une nouvelle branche, plus purement idéale, abstraite et en quelque sorte désintéressée, née dans les couvents de l'Angleterre et de l'Écosse, vint se joindre aux précédentes, l'étude de la philos, et spécialement de la dialectique, et elle finit par envahir, absorber, dominer les autres, passionner les esprits, et donner le ton aux études, même dans les écoles des cathédrales. Ce fut la Scolastique. A Paris le nombre des écoliers s'éleva jusqu'à 20,000. Comme ils ne relevaient d'aucune juridiction et que l'État n'avait pas à s'occuper d'eux, ils furent naturellement amenés à se constituer en nations, suivant leur pays d'origine. Il y eut ainsi quatre nations, France, Picardie, Normandie, Angleterre; la France comprenait l'Espagne, l'Italie, la Grèce et l'Orient; l'Angleterre comprenait l'Allemagne et tous les pays du nord. Chaque faculté avait à sa tête un doyen, et l'université un recteur nommé à l'élection, mais touj. dans la faculté des arts. L'université de France jouit dès l'origine de nombreux privilèges; elle s'administrait elle-même, professeurs et écoliers, et n'était pas soumise aux juges ordinaires. Elle soutint de longues luttes au 13™ siècle contre les dominicains et les franciscains, et au 16™e contre les jésuites, leur contestant le droit d'enseigner, mais elle fut vaincue. Elle joua un grand rôle dans les affaires publiques, défendit les libertés, eut ses représentants aux États généraux, résista même quelquefois à l'autorité royale; mais le plus souvent elle prit parti pour le pouvoir et mérita le titre de Fille aînée du roi, qui lui fut décerné par Charles Y et qui lui donna rang immédiatement après les princes du sang. En théologie elle défendit les libertés gallicanes. Elle a eu à sa tête des hommes illustres, Pierre d'Ailly, Gerson, Rollin, Crévier, etc. La Révolution la supprima, mais Bonaparte la rétablit et la réorganisa par une loi du 10 mai 1806 et par un décret du 17 mars 1808 en 144 articles; il en fit un corps enseignant unique pour toute la France, chargé de l'enseignement supérieur, de l'instruction secondaire, et de l'instruction primaire. Elle a pour chef un grand-maître assisté d'un conseil d'instruction publique, et sous sa direction un certain nombre d'académies régies par un recteur. Le 1er grand-maître a été M. deFontanes. — En Allemagne les univ. sont nombreuses et indépendantes les unes des autres; la plus ancienne est celle de Prague 1348, puis Vienne, Heidelberg, Cologne, etc. La Réformation en fit naître de nouvelles, qui eurent d'abord presque toutes un caractère confessionnel, Marbourg, Wittenberg, Tubingue, Halle, etc. Plusieurs sont devenues célèbres, et la plupart ont élargi le cercle de leurs études et ont cessé de faire de la théologie leur spécialité. — Un décret du 17 mars 1808 créait pour les protestants français 2 facultés de théol., Montauban et Strasbourg; cette dernière a été transférée à Paris par décret du 27 mars 1877.

URBAIN lo év. de Rome 223 à 230, subit le martyre. Inconnu. L'Église est en paix, grâce à Alexandre-Sévère.

2° Urbain II; Eudes ou Odon, né à Lagery, près de Châtillon-sur-Marne, nommé év. d'Os-tie par Grégoire VII, qui le désigna avant de mourir comme un des trois hommes dignes de lui succéder. Il fut en effet élu, après la mort de Victor III, 1087, et agit dans le même esprit que Grégoire; il soutint vigoureusement les droits des papes contre l'empire, mais fut à diverses reprises humilié, battu et chassé par son compétiteur l'antipape Clément III (Gui-bert), déjà nommé sous Grégoire par l'influence impériale. Bientôt un grand événement vint relever son autorité; c'est en mars 1095 à Plaisance (et non comme on l'a cru longtemps en novembre, au concile de Clermont), que la l'e croisade esfrésolue. L'enthousiasme est général. L'invention des chapelets se glisse inaperçue dans l'Église, à la faveur du tumulte causé par de plus importantes préoccupations 1090. Le pape, en décidant l'affranchissement du Saint-Sépulcre, n'a pas un but politique; cependant ce but est atteint. Clément III tombe en défaveur, de même qu'Henri IV. Bientô Jérusalem est conquise 1099; Urbain l'ajoute à ses possessions et f 29 juill. la même année. — Il avait excommunié Philippe de France qu avait fait emprisonner Yves de Chartres, parce qiïe ce pieux évêque s'opposait à son divorce.

3® Urbain III; Humbert Crivelli, archev. de Milan, nommé cardinal par Lucius III, lui succède 1185, mais ne règne que 2 ans, et f à Ferrare 1187. Il lutteen vain contre Frédéric 1er, Barberousse, et veut l'excommunier, mais les habitants de Vérone s'y opposent et il doit céder. Jérusalem est reprise par les musulmans.

4° Urbain IV; Jacques Pantaléon, de Troyes, Champagne, arrivé d'un rang obscur (son père était cordonnier) à la dignité de patriarche de Jérusalem; élu 1261. Il augmenta le nombre des cardinaux, établit la Fête-Dieu 1264, offrit à saint Louis la couronne de Naples, que ce prince refusa, mais qui fut acceptée par son frère Charles d'Anjou, f Monument à

Pérouse.

5° Urbain V; Guillaume Grimaud ou de Grû moardj un des papes d'Avignon; bénédictin, d'une famille noble du Gévaudan, élu 1362. Quoique Français, et malgré la France, il essaie de retourner en Italie, il quitte Avignon et s'installe à Rome 1367 à 1370, mais sa cour, qui se plaît en France où fleurissent les lettres, les reliques et la monarchie, refuse de lè suivre. L'emp. Charles IV, qui lui a promis du secours contre les usurpateurs des fiefs ecclésiastiques, n'arrive qu'avec des forces insuffisantes, et Urbain doit rentrer à Avignon où il f 19 déc. 1370. Il avait reçu la visite de l'emp. Jean Pa-léologue, qui implorait son secours contre les Turcs, mais il ne put rien faire pour lui. Charitable envers tous, sévère contre la simonie et les mauvaises mœurs, il a cherché à affranchir la papauté de la tutelle française et à lui rendre ses domaines en Italie. Vie, par Th. Roussel, Paris 1840.

6° Urbain VI; Barthélemi de Prignano, napolitain, archev. de Bari, élu 7 avril 1378 de la manière la plus violente et la plus irrégulière. Bien loin d'apaiser les esprits, il les aigrit par son orgueil et sa cruauté. Plusieurs cardinaux italiens mécontents se joignent aux français pour élire à sa place Clément VII, inaugurant ainsi un schisme d'un demi-siècle. Urbain a pour lui l'Italie, l'Allemagne, l'Angleterre, le Danemark et la Suède. Il crée 26 cardinaux pour remplacer ceux quH'ont quitté. Il décide le roi de Hongrie à envoyer contre Jeanne I" de Naples Charles de Duras qui la détrône; mais il se brouille avec ce prince, est assiégé dans Nocera et s'enfuit à Salerne, puis en Sicile et à Gènes. La plupart de ses cardinaux l'abandonnent et passent à Clément. Il en fait mettre six à la question, les traîne avec lui prisonniers et en fait exécuter cinq. Il gâte sa cause par ses passions et son opiniâtreté. Duras étant mort, il revient à Rome d'où il espère pouvoir s'emparer du royaume de Naples. Les grands, les princes, l'université de Paris, demandent un concile, et proposent que les deux co-papes soient invités à abdiquer, mais Clément, qui sait bien manœuvrer, parvient à se maintenir. Urbain f 15 oct. 1389. L'occasion serait bonne pour terminer le schisme; mais son parti se hâte de lui donner pour successeur Boniface IX.

7° Urbain VII; J. B. Castagna, successeur de Sixte-Quint, élu 15 sept. 1590, f 27 sept., ne fut pape que 13 jours.

8° Urbain VUI; Maffei Barberini, assez bon poète, orateur, écrivain, distingué par ses talents et ses connaissances, fut élu 6 août 1623, et débuta par l'annexion du duché d'Urbin aux États de l'Église. Ses querelles avec Venise 1632 et avec Jean IV de Portugal 1641 finirent moins glorieusement par la paix de Venise 1644, où tout fut remis sur l'ancien pied. Il publia une nouvelle rédaction du Bréviaire romain, restaura beaucoup d'églises, fit une édition retouchée de la bulle In ccenâ Domini 1627, et condamna les jansénistes, à l'instigation des jésuites, dans sa bulle In eminenti 1642. Ses poésies latines et italiennes parurent à Paris la même année. Sa f 29 juill. 1644 fut suivie d'une violente réaction contre sa famille.

URLSPERGER, Jean-Auguste, né 25 nov. 1728 à Augsbourg, fils d'un pasteur wurtem-bergeois, qui avait dû quitter son pays à la suite d'une prédication trop accentuée. Après avoir étudié à Tubingue et à Halle (chez Baum-garten), il revint à Augsbourg, fit encore un voyage à Ratisbonne et à Copenhague, et fut en 1755 nommé pasteur, et en 1772 doyen l'église de son père. Il donna sa démission en 1776 pour raisons de santé, mais n'en continua pas moins de servir l'Église de tout son cœor et de toutes ses forces. Il rêva de grouper contre les envahissements du rationalisme tous les éléments vivants du christianisme positif, même les catholiques croyants (dans le genre d-? la Société anglaise for promoting Christian Knowledge), mais un voyage fait en Allemagne. Hollande et Angleterre 1779 et 1780 lui donna peu d'encouragements, et il allait abandonner son projet quand il apprit qu'une Société do christianisme venait de se fonder à Bâle, 1780. Ce n'était pas tout à fait son idée; il aurait voulu quelque chose de plus polémique, d'agressif, tandis que la société nouvelle se proposait simplement de propager la saine doctrine et de développer la vie religieuse; mais il trouva moyen, en défendant cette œuvre contre ses adversaires, de donner satisfaction à son besoin de polémique ardente, et ses prophéties sur les agitations sociales et religieuses ont été justifiées par les événements, + l«r déc. 1806 a Hambourg, en revenant d'Angleterre. Il a laissé quelques ouvrages de doctrine et d'édification.

UROLF, moine missionnaire du 9®« siècle, évangélisa la Moravie 820-826, et s'étant rendu à Rome pour faire connaître ses travaux, Eugène II fut si satisfait qu'il rétablit en sa faveor l'archevêché de Lorch, avec le pallium, et le recommanda aux évéques et aux ducs de la Pannonie comme un homme expérimenté et instruit dans la parole de Dieu.

URSACIUS lo ou Arsace, solitaire de Bithy-nie, né en Perse. Sous Licinius, vers 320, il s'enferma dans une tour de Nicomédie, où il fit beaucoup de miracles.— 2° U. év. de Singe-don, sémi-arien, ainsi que Valens, év. de Murse» s'étaient déclarés contre Athanase et furent déposés au conc. de Sardique 347. Us se rétractèrent en 349, mais par leurs intrigues à Sir-mium et à Rimini, ils réussirent à reprendre leur position perdue. Ils furent de nouveaa condamnés à Rome 369.

URSICINUS, 1° solitaire du 5** siècle, qei vivait dans le Jura, près des sources du Doute, et qui recevait hospitalièrement les pèlerins fatigués. L'un d'eux, Wandergisil, riche gentilhomme, se plut dans la contrée, y chercha l'oubli du monde, et y bâtit une église, puis le couvent qui prit le nom de Sainte-Ursanne.— 2<> Ursicinus, ou Ursinus, diacre romain élu pape après la mort de Libère 366 par les partisans de ce dernier, contre Damase qui l'emporta. On se battit pour cette élection, et l'on ramassa 137 cadavres dans l'égl. d'Ursin. Exilé par Va-lentinien 1®', il s'enfuit à Cologne, revint, souleva de nouveaux troubles et fut définitivement banni d'Italie par le concile d'Aquilée.

URSINUS lo v. Ursicinus 2o.

2o Zacharie, né 18 juill. 1534 à Breslau, fils du pasteur Bœr (ours, latin ursus), fut élevé sous la douce et pieuse influence de Mélanchthon, étudia à Wittenberg, visita Worms avec Mélanchthon, connut Calvin à Genève, Mercier à Paris, et s'appliqua à l'étude des langues. En 1558 il passa par Zurich et revint à Breslau où il fut nommé professeur au collège; mais la ville était trop sous l'influence luthérienne stricte pour qu'il pût y rester longtemps; il donna sa démission, et après de courts séjours à Wittenberg et à Zurich, il vint à Heidelberg où il fut nommé docteur en théol. et professeur, 1562-1568. Il passa ses dernières années dans le Palatinat, engagé dans plusieurs controverses littéraires, et f 6 mars 1583. Doux, pieux, intelligent, travailleur, il avait écrit au-dessus de sa chambre de travail à Neustadt: Amice quisquis hue vents, — aut agito paucis, aut abi — Aut me laborantem juva. Il fut le principal rédacteur du catéchisme de Heidelberg. On a encore de lui une étude sur les sacrements, un comment, sur Ésaïe, un Avertissement chrétien, dans lequel il critique la Form. de concorde, des Explications sur le catéch. de Heidelberg, et divers traités de théol. Il était franchement réformé, et c'est à ce titre que Jean-Casimir l'avait appelé.

3° Jean-Henri, né 1608 à Spire, où il fut pasteur, f 1667 à Ratisbonne, comme surintendant; auteur d'un grand nombre d'ouvrages latins, dont plusieurs ont été mis à l'index: l'Ecclésiaste, les Églises de la Germanie depuis leur origine jusqu'à Charlemagne, Zoroastre et Sanchoniaton; la Passion au quadruple point de vue historique, prophétique, typique et symbolique, etc. ,

URSULE, une des prétendues onze mille vierges martyres mises à mort par les Huns en 384 ou 453. D'après la légende du 12™ siècle, elle était fille du roi anglais Déonat ou Diognète; son nom lui aurait été donné à la suite d'une victoire remportée par elle sur un ours (figurant le diable selon 1 Sam. 17, 34). Un prince païen, Hoioferne, ravi de ses charmes, voulut l'épouser; elle y mit pour condition qu'il se ferait chrétien, et qu'elle ferait d'abord un voyage de trois ans par mer. Elle s'embarqua avec une flotille et un millier de jeunes vierges de sa suite, venues de Sicile, de Constantinople et d'ailleurs. Elles remontèrent le Rhin jusqu'à Cologne et Bâle, firent de là le pèlerinage de Rome à pied, et c'est à leur retour qu'elles tombèrent entre les mains des Huns à Cologne. Elle fut épargnée, ainsi que son amie Cordule, parce que le prince païen (Attila ?) voulait aussi l'épouser, mais sur son refus obstiné elles furent mises à mort. Le jésuite Crombach a essayer d'accréditer cette histoire, 1647.

URSULINES, ordre religieux; v. Merici.

USHER, ou Ussérius lo James (Jacques), né 4 janv. 1581 à Dublin, de la vieille famille des Neville; fils d'un juriste attaché à la cour de justice. Le nom venait d'un ancien usher, ou huissier, qui en 1185 avait accompagné le roi Jean en Irlande. La famille était protestante; un oncle de James, Henri, fut archev. d'Armagh 1595-1613. James montra de bonne heure des dispositions pour l'étude de l'histoire; il se mit ensuite à la théol., quoique son père eût préféré le voir suivre la carrière du droit. D'abord ca-têchète à Dublin, puis pasteur, professeur et vice-chancelier de l'université, il consacra 18 ans à l'étude approfondie des pères. En 1615 il prit part au synode irlandais chargé d'organiser l'Église de son pays et il y joua un rôle prépondérant; le synode proposa, au lieu des 39 articles de l'Égl. anglicane, 104 articles de discipline et de foi d'une tendance plus réformée et plus puritaine, mais qui furent rejetés par le parlement. Il fut nommé en 1621 év. de Meath, et en 26 archev. d'Armagh et primat d'Irlande. Polémiste ardent, il s'opposa de toutes ses forces à l'Acte de tolérance en faveur des catholiques, mais réussit moins bien comme administrateur de l'Égl. protestante. Il fut même débordé par Wentworth qui essaya d'introduire en Irlande une espèce d'inquisition protestante, mais il en atténua les fâcheux effets comme président de la commission. En 1640 les troubles politiques l'amenèrent à Londres; il chercha dans un esprit conciliateur à ramener l'harmonie entre le roi et le parlement; épiscopal, il voulait le maintien de la hiérarchie, mais en réduisant les évêques au rôle de surveillants, ou de surintendants; il échoua; le temps n'était pas à la conciliation, et après avoir vu tomber la tête du roi, il chercha encore à gagner Crom-well à des idées plus modérées, f 21 mars 1656 d'une inflammation des poumons. On lui fit à Westminster de magnifiques obsèques. Il est surtout célèbre par sa chronologie fixant la création du monde à 4004 ans av. C., qui a été longtemps admise, mais qui est auj. complètement abandonnée. Parmi ses nombreux ouvrages, presque tous écrits en latin, on remarque surtout une Étude, ou Explication sur la très grave question de la succession apostolique dans les égl. de l'Occident, où il cherche à établir que le pape est l'Antéchrist; Emmanuel, où l'Incarnation du Fils de Dieu; Antiquité des égl. britanniques; Annales de l'A. etduN. T.; Chronol. sacrée, etc. Il a réuni on grand nombre de vieux mss., dont il a publié quelques-uns.

2° Jacques, de la même famille, mais d'une branche catholique, né 1720, + 1762, ecclésiastique, dirigea longtemps une école à Kensing-ton Gravel-Pits; auteur d'un: Nouveau système de philos., où il attaque Locke; Lettres, signées un Libre penseur, où il censure les persécutions contre les cathol.; Discours sur le goût: Introd. à la théorie de l'esprit humain, contre les déistes, etc.

USTERI, Léonard, né 1799 à Zurich, f 1833 à Berne, avait étudié 3 ans à Berlin sousBœckh, Hegel et Schleiermacher. Professeur au gymnase de Berne; auteur d'études sur Jean-Baptiste, la Tentation de J.-C., un Comment, sur les Gala-tes, un travail sur les 4 Évangiles concluant contre Bretschneider à l'authenticité de saint Jean, etc.: Développement de la doctrine pau-linienne dans ses rapports avec les autres écrits du N. T. C'est ce dernier ouvrage, dont les conclusions d'ailleurs peuvent être discutées, qui a fait sa réputation, par la netteté de la méthode.

USUARD, religieux bénédictin de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, f vers 877 (ou 897). Chargé par l'abbé Hilduin, son supérieur, d'aller chercher dans les ruines de Valence les reliques du martyr Vincent, il ne put y réussir à cause des Maures, mais il rapporta de Cordoue les restes de 3 autres martyrs, Georges, Aurèle et Nathalie, avec les papiers attestant leur authenticité. A la demande de Charles-le-Chauve il écrivit un martyrologe, pour lequel il utilisa les pères, qui était très estimé au moyen &ge, et qui plus tard servit de base au martyrologe romain.

UTENHEIM, Christophe (de), né 1450 d'une famille noble, chanoine et doyen de Saint-Thomas à Strasbourg, pénétré des idées de Gerson, avait un fort penchant pour la vie solitaire et correspondit avec Wimpheling 1487 pour aller s'établir avec lui dans la Forêt-Noire. Mais appelé à Bâle comme custode, puis comme évêque 1300, il y trouva tant de choses à réformer qu'il se mit résôlument au travail, et obtint quelques bons résultats. Il s'associa Pellican, Wimpheling, puis Capiton et OEcolampade, se lia avec Érasme, et suivit avec intérêt les débuts de Luther. Il fraya ainsi la voie à la Ré-formation, mais il n'alla pas jusqu'au bout et se retira peu à peu d'amis plus jeunes qui le compromettaient. f 16 mars 1527 à Delsperg, un mois après avoir donné sa démission.

UTRAQUISTES, du latin utraque, qui signifie « l'une et l'autre, > surnom donné anx hus-sites et notamment aux calixtins, q. v., qui voulaient communier sous l'une et l'autre espèce.

UTRECHT (ultrajectum, ou trajectvm ad Rhenum), ville de Hollande, évangélisée par Willibrod qui en fut le l«r évêque, relevant de l'archevêché de Cologne. Philippe II en 1539 la constitua en archevêché et lui donna pour suf-fragants les év. de Harlem, Middlebourg, Leeu-warden, Deventer et Groningne, mais cette organisation dura peu, la Réforme Payant rendue inutile. En 1580 il n'y avait plus à Utrecht qu'un vicaire-général, qui en 1583 fnt nommé vicaire apostolique pour les autres évêchés. Vers 1592 arrivèrent deux jésuites, qui furent bientôt suivis de plusieurs autres, et qui accaparèrent aux dépens du clergé toute l'autorité sur les catholiques. Deux partis se formèrent, l'un national, qui avait à sa tête Pierre Codde; l'autre, jésuite, avec Théod. de Cock pour provicaire nommé par le pape. Le chapitre ayant réclamé, et le pape refusant de lui donner satisfaction, les États prirent parti pour leurs nationaux et les jésuites furent bannis, 1704. La question janséniste se posa en même temps, et le schisme s'accomplit. Le 1er évêque, Cornélius Steenoven, fut consacré en 1723 par le missionnaire Dominique-Marie Varlet, ooadjnteur de l'év. de Babylone, et le 21 févr. 1725 Benoit XU excommuniait les schismatiques, cérémonie qui se renouvela à chaque élection d'évé-que. Un essai de conciliation tenté sous Clément XIV échoua par suite de la mort du pape. Le parti romain fat réorganisé en 1853, et dès lors le nombre des dissidents a toujours été en diminuant. Ils se sont ralliés à Munich aux Vieux-Catholiques d'Allemagne; l'év. Reinkens a été consacré à Rotterdam par l'év. de Deventer le 11 août 1873, et peu après ils ont complètement rompu avec Rome. L'Égl. réformée d'Utrecht a compté quelques hommes distingués, entre autres David Martin, le traducteur de la Bible.

UYTENBOGAERT, on Wytembogardt, Jean, né 1557 à Utrecht, étudia à Genève sous Bèze, et à son retour 1584 fut nommé pasteur de l'Égl. réformée, mais à cause de ses vues arminiennes il perdit sa place en 1589. En 1590 il fat nommé prédicateur à La Haye, puis chapelain de Maurice d'Orange et précepteur du prince Ferdinand-Henri. Après la mort d'Arminius, il fut avec Épiscopius un des chefs du parti opposé à Gomar et rédigea 1610 l'acte de Remontrance aux États. La même année il fut nommé chapelain d'ambassade à Paris, et vit Casaubon qui le fortifia dans ses idées. Un peu plus tard la persécution commença contre les arminiens;

il fut banni, ses biens furent confisqués 1619; il se retira à Anvers, puis à Rouen, et revint en cachette k Rotterdam 1626, après la mort de Maurice, pour consoler ses frères opprimés. On lui rendit ses biens et ses droits en 1629. + 24 sept. 1644. Auteur de plusieurs ouvrages: Hist. ecclés. de 400 k 1600; Autorité du magistrat dans les affaires de religion (il reconnaît cette autorité); Lettres théol. d'hommes distingués et savants, etc.

UZÈS, Ucecia, anc. ville épiscopale du bas Languedoc; elle était déjà représentée aux conc. d'Arles 451 et 455. La Réforme y pénétra de bonne heure; en 1560 il y avait une égl. avec un pasteur nommé Robert Maillart; en 1564 un pasteur y est pendu sur un simple ordre de Damville; en 1620 son pasteur Laurent Brunier est nommé vice-président du synode d'Alais. En 1683 un décret d'arrestation est lancé contre le ministre Laborie, qui réussit k s'échapper, mais est condamné par contumace à être pendu. Le 30 avril 1685 l'ordre est donné de démolir le temple d'Uzès. Auj. chef-lieu consistorial. Évêché supprimé en 1801.

VACANCE, absence momentanée, plus ou moins prolongée, ou définitive, du titulaire d'une place, produite par sa démission, sa destitution ou son décès. La vacance n'est officielle que lorsqu'elle a été constatée par l'autorité compétente, qui décide en même temps sur l'emploi des revenus du bénéfice vacant, ainsi que sur le mode de repourvue de la place.

VADIAN, v. Watt.

VAGA, Perino (del), de son vrai nom Buo-nacorsi, né 1500 à Florence, un des grands peintres de l'école italienne, élève de Ghir-landajo, puis collaborateur de Raphaël avec qui il travailla aux Loges; devint maniéré après la mort du maître. Fait prisonnier lors de la prise de Rome 1527, il se racheta et se rendit à Gênes où il travailla au palais Doria; il revint ensuite k Rome où il ouvrit une école, + 1547. On admire de lui plusieurs madones et une Naissance de Jésus.

VAGABONDS, ou Vagants. On appelait ainsi des prêtres sans poste déterminé, sans recommandations suffisantes, dont l'ordination était irrégulière ou tout au moins douteuse, comme il s'en trouvait beaucoup au moyen âge. Pour gagner leur vie ils cherchaient à s'insinuer dans les châteaux comme chapelains, acceptant de remplir toutes sortes de fonctions, et poussant la complaisance morale k un degré qui n'était pas toujours propre à faire honorer la religion. Ils donnèrent lieu k de nombreuses plaintes et contribuèrent à discréditer le clergé. Déjà les conc. de Laodicée et de Chalcédoine, puis d'autres encore, et les capitulaires de Charlemagne, interdisent les consécrations vagues, et le conc. de Trente les proscrit formellement, en même temps qu'il défend aux évêques t de laisser dire la messe à aucun prêtre vagabond et inconnu. » Cet abusa en grande partie disparu.

VALDÈS, ou Val d'Esso, Valdesius; deux frères espagnols, que l'on a cru quelquefois jumeaux, Alphonse et Juan, nés à Cuença(Nouv.-Castille), dont leur père f 1530 était corrégi-dor 1520. Très bien doués, instruits, d'un caractère et d'une vie irréprochables, pieux, ennemis des abus de l'Égl. romaine, ils se sont trouvé? mêlés à l'hist. de la Réforme, sans qu'on puisse dire qu'ils soient arrivés à une connaissance bien entière de la vérité évangélique.

10 Alphonse, né Vers 1490, accompagna 1520 l'empereur à Aix-la-Chapelle pour son couronnement, puis à Worms, où il put apprécier la grandeur de Luther et l'importance du mouvement religieux dont il était l'expression. Il était l'ami intime d'Érasme. Secrétaire d'État en 1524, il entretint une correspondance suivie avec le père delà renaissance, et publia en 1527 son dialogue de Lactance, relatif au siège et au sac de Rome, où il présente cet événement comme un jugement de Dieu contre le pape et contre ses cardinaux. Menacé de l'inquisition par le nonce Castiglione, il fut protégé par son patron, le chancelier Gattinara. Il accompagna de nouveau l'empereur en Italie, puis à Augsbourg où il vit de près Mélanchthon et les principaux réformateurs, les servit auprès de Charles-Quint, et traduisit pour ce prince la célèbre Confession. Il est encore au service de l'empe-reuren 1531; il quitte Bruxelles à la fin de l'année et se rend à Vienne auprès de Charles, mais

11 y t de la peste en oct. 1532.

2° Son fr. Jean, ou Juan, collabora peut-être au Dialogue de Lactance (que quelques-uns même lui attribuent entièrement), et composa vers 1528 ou 1529 le dialogue de Mercure et Caron, qui, dans les enfers, s'entretiennent de la guerre due à la rivalité de François 1er et de Charles-Quint. Des morts arrivent de toutes parts, un docteur, un évêque, un moine, une femme, et leurs révélations ne sont rien moins qu'édifiantes. Ce traité, qui lui valut une lettre flatteuse d'Érasme, attira l'attention du saint-office, mais l'empereur emmena Juan avec lui en Allemagne. Enfin il vint à Naples 1530, comme secrétaire du vice-roi, Pierre de Tolède, où il resta jusqu'à sa fin, sauf un court séjour à Rome vers 1533. Grâce à sa position, il put propager librement autour de lui les doctrines

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évangéliques, et fut bientôt le centre d'un cercle d'esprits distingués, qui étudiaient avec lui les saintes Écritures: Flaminio, Vermigli, Ochino, Bonfadio. Caracciolo marquis de Vico, Carnesecchi, Isabelle Manrique, sœur de l'inquisiteur; la noble Vittoria Colonna, Giulia Gonzaga, Constanza de Avalos, etc. Ils étudiaient ensemble; les Cent et dix considérations divines (ouvrage qui parut après sa mort) faisaient l'objet ordinaire de leurs entretiens. Il écrivit aussi un Comment, sur l'ép. aux Romains, un sur la 1™ aux Corinthiens, des explications sur quelques psaumes, cinq traités sur les Principes de la doctrine chrétienne, un Alphabet spirituel (dédié à Julie Gonzaga), plein de directions pratiques, etc., sans parler d'un Dialogue sur la langue espagnole, très estimé en littérature. Il imprimait volontiers à Venise où la presse était libre, et à Bâle chez Cœlîo Cu-rione, en môme temps qu'il continuait d'envoyer en Espagne de nombreux traités de controverse ou d'édification. Ses livres ont été souvent réimprimés. Il f paisiblement dans sa villa de la Chiaja, en automne 1541, assisté de son ami l'archev. d'Otrante. A peine mort, l'inquisition sévit contre ses adhérents; 3 archev., 8 évêques et plus de 3000 maîtres d'école et professeurs étaient compromis, et durent s'enfuir ou se rétracter; quelques-uns furent brûlés. — Kolde-wey a publ. Halle 1870, un ouvrage inédit de Valdès sur l'éducation des enfants, le Lac spirituelle . — V. Manuel Carrasco. Genève 1880.

3°. 4°. 5° L'hist. mentionne encore un Val-dez qui se suicida sous Jules II pour une affaire d'amour; un autre qui fut l'assassin de son fr. Juan Diaz, 1546; et un inquisiteur général sous Philippe II, Fernando Valdez, archev. de Séville, nommé le 20 janvier 1547 à la direction du saint-office, destitué par Pie V à cause de ses cruautés envers Carranza, et f2 déc. 1568. Il a fait brûler vives 2400 personnes, en effigie 1200; 12,000 autres furent condamnées à diverses peines.

VALDO, Waldus, Valdès. ou de Vaux, né à Vaux près de Lyon, apparaît pour la fois vers 1170. Marchand et riche, il était un jour à table avec quelques amis, quand l'un d'eux tomba mort subitement. Cela le rendit attentif à l'état de son âme et il consulta son directeur spirituel sur ce qu'il avait à faire pour être sauvé. Celui-ci lui indiqua plusieurs moyens, et sur son insistance, ajouta que le meilleur était dans la réponse de Jésus au jeune homme riche: Vends tout ce que tu as et le donnes aux pauvres. Il n'hésita pas, donna à sa femme et à sa fille ce qui leur était nécessaire, paya ses dettes et distribua le reste. Il s'occupa ensuite de traduire la Bible en langue vulgaire, et s'adjoi-nit pour cela deux prêtres un peu lettrés,

Etienne d'Ansa comme traducteur, et Bernard Ydros comme copiste. On ignore ce que cette version est devenue. Il en fit faire plusieurs copies et s'appliqua à la répandre et à l'expliquer par des colporteurs, ses disciples. Il gagna assez d'adhérents pour inquiéter l'autorité ecclésiastique. Condamné par le concile diocésain il en appelle au pape. AlexandreIII l'autorise d'abord à prêcher, mais en 1179 il retire son autorisation, et comme les disciples de Valdo continuent d'évangéliser de lieu en lieu, ils sont excommuniés au conc. de Vérone 1184 et la persécution éclate de toutes parts, en Italie, en France, en Angleterre. Les Pauvres italiens, comme on les appelait, durent s'enfuir, mais en fuyant ils emportèrent leur doctrine et la propagèrent. Valdo lui-même passa en Bohême où probablement il mourut. Innocent III finit par ramener à l'Égl. de Rome quelques vandois irrésolus, qu'on appela les Pauvres catholiques.

VALENS 1° semi-arien, v. Ursacius. — 2° Flavien, surnommé le Goth, emp. romain, né vers 328 en Pannonie, courageux, mais cruel, sans éducation, sans capacités militaires. Son frère aîné, Valentinien, se l'associa 364 et lui remit l'Égypte et l'Asie. Il comprima la révolte de Procope 27 mai 366, et remporta divers avantages sur les Perses, après s'être au préalable et comme talisman, fait baptiser par Eudoxe. Les ariens étant alors au pinacle, il se fit arien, et devint l'aveugle instrument de ee parti, en persécutant les orthodoxes, les moines, les semi-ariens et les païens. Il ne toucha pas à l'Égypte où l'influence d'Athanase était encore trop grande, ni à la Cappadoce où l'imposante personnalité de Basile commandait le respect même aux gouverneurs de l'empire. Mais partout ailleurs il commit des actes de cruauté qui ont rendu sa mémoire odieuse. Hémophile ayant été élu patr. de Constantinople par le parti arien, 80 prêtres se rendirent auprès de Valens pour protester; il les fit embarquer sur un vaisseau auquel on mit le feu quand il fut en mer; Valens prétendit que le feu avait éclaté par accident. Il chargea les moines d'impôts, les astreignit au service militaire et fit périr sous le bâton ceux qui refusèrent. Plus tard il pourchassa dans le désert les moines d'Égypte. Un oracle païen lui prédit qu'il serait remplacé par un homme dont le nom commençait par Théod. Ce fut Théodose. Lui-même, après avoir été vaincu à Andrinople par les Goths, périt misérablement 9 août 378, brûlé avec sa suite dans une chaumière.

VALENTIA, Grégoire (de), jésuite, né 1543 ou 1551 à Medina del Campo, Vieille-Castille, vint à Rome comme prof, de philos, après avoir achevé son noviciat, puis fut envoyé en Allemagne, à Dillingen et Ingolstadt, où il ensei-

#na la théol. et fit de la controverse. En 1598 il fut rappelé au Collège romain, et f 1603 à Naples pendant un séjour. Il a écrit un volume de controverse contre les protestants, et des ^Comment, sur la Somme de Saint-Thomas.

VALEiNTIN. Il y a dans l'histoire et dans la légende plusieurs saints de ce nom, mais aucun dont le souvenir puisse expliquer l'origine de la fête populaire qui, dans beaucoup de pays et .surtout en Angleterre, se rattache à la date du 14 févr. On sait que ce jour les jeunes gens des 2 sexes tirent au sort et qu'ils forment ainsi des couples fantaisistes de Valentin et Valentine jusqu'à l'année suivante. Il est probable que cette tradition remonte à l'Allemagne païenne.

lo Disciple d'Apollinaire de Laodicée, q. v.

2<> Valentin. le plus célèbre et peut-être le plus complet des gnostiques, doit être né, d'après Épiphanes, sur les côtes de l'Égypte. On croit qu'il était juif. Il étudia à Alexandrie. Devenu chrétien, mais avec quelques vues particulières empruntées à la sagesse grecque, il répandit d'abord ses idées avec une certaine réserve en Égypte, puis il vint à Rome 140-160, et soit ambition déçue, soit amour-propre froissé, n'ayant pu être nommé èvêque, soit conviction, il se mit à enseigner une doctrine nouvelle et se fit excommunier 3 fois. Il vint en Chypre, où il rompit décidément avec le christianisme, + 161. C'était un homme fort éloquent et un esprit subtil. Ses disciples prirent le nom de va-lentiniens, q. v.

3° Le Saint, vécut sous Léon 1er et vint de l'est comme èvêque missionnaire à Passau; n'ayant pas réussi, il linit par obtenir de Léon la permission de se retirer dans le Tyrol, et il y mourut. Ses os doivent s'y être conservés. Les actes qui en parlent datent du 11me et du 12®« siècles, et paraissent dignes de créance, quoiqu'ils varient sur certains points, notamment sur le lieu de sa sépulture, que les uns placent à Trente 730, les autres à Passau 768.

4° Pape 827, ne régna que 5 semaines.

d'emportement qu'un vaisseau se brisa dans sa poitrine et il + 17 nov. 375. Il était chrétien, orthodoxe, mais non encore baptisé; d'ailleurs tolérant, et séparant la religion de la politique. Bien que nicéen, il se prononça à Milan pour Auxence contre Hilaire de Poitiers, et à Rome pour Damase contre Ursin. Il ne défendait que la magie et les sacrifices nocturnes.

2° Valentinien II, lils du précédent et de sa seconde femme Justine, né nov. 371, fut en 375 appelé au trône par l'armée d'illyrie, et régna sous la régence de sa mère, aussi sage que belle, mais, arienne décidée. Son fr. Gratien, de beaucoup son aîné, ratifia cet arrangement et lui donna la préfecture d'Italie avec Milan pour résidence. Théodose qui avait épousé Galla. fille de Justine, reconnut l'usurpateur Maxime qui venait de tuer Gailien, mais â condition que Maxime laisserait à Valentinien II l'Italie, l'Afrique et llllyrie, 383. En 388 Maxime ayant cru pouvoir violer son engagement, Théodose accourut de Thessalonique, le vainquit et le mit à mort à Aquilée. Valentinien fut ainsi seul maître de l'empire; sa mère était morte; il renonça à l'arianisme, maintint malgré Symma-que, les lois contre le paganisme, fit contre les Francs une expédition heureuse, el fut trouvé f 15 mai 392 dans son lit à Vienne, probablement assassiné par le traître Arbogaste. Il n'était pas encore baptisé.

3o Valentinien III, Flavius-Placidius, né 419 à Ravenne, fils de Constance III et de Placidie fille de Théodose 1er, dut quitter l'Italie à la mort de son père, et fut conduit par sa mère à Constantinople auprès de Théodose II, 423. En 425 il fut placé par les troupes sur le trône. Il eut la chance de pouvoir se reposer sur A'étius. à la fois général et homme d'État, qui gouverna en son nom, lui conserva les Gaules et vainquit Attila 451; mais jaloux des succès de ce général et redoutant sa popularité, il le fit assassiner dans son palais. Val. avait épousé en 437 Eudoxie, fille de Théodose II. En 431 il avait convoqué le conc. d'Éphèse; il prononça le bannissement contre les manichéens, la peine de mort contre les païens. En 445 il publia un rescrit en faveur de Léon Ier, lui accordant le titre de recteur universel, confirmant sa primauté, et dénonçant comme un crime la résistance à l'év. de Rome. Léger, débauché, sans courage et sans talent, il fut tué mars 455 par le sénateur Pétrone Maxime, dont il avait outragé la femme. Maxime lui succéda et épousa sa veuve.

VALENTINIENS. 1° Les adhérents de Valentin, disciple d'Apollinaire, q. v.

Jfi On connaît surtout sous ce nom les partisans du gnostique Valentin 3o. C'est en lui que

VALENTINIEN lo Flavius, né 321 àCibehe, Pannonie, servit avec distinction sous Julien et Jovien, et fut proclamé empereur par l'armée le 24 févr. 364 à Nicée. Pour suffire à la grandeur de sa tâche il s'adjoignit son fr. Valens, à qui il donna l'Orient. 11 lit des guerres heureuses aux Allemanis, aux Pietés et aux Saxons, se montra bon administrateur et habile financier, donna aux \illes des défenseurs de la cité, s'occupa de législation et réprima les préten -lions des ariens. Mais il était cruel et violent; on raconte qu'il se faisait accompagner de deux ours qu'il chargeait parfois de ses exécutions sommaires. Des ambassadeurs Quades étant venus à Br^getio, où il passait l'hiver, p0ur lui

demander la paix, il se livra à une telle scène \\e système atteignit son plus complet dévelop-

peinent, emprunté par fragments à la cabale juive, au dualisme oriental et au N. T., dans un langage mystérieux, qui touche au jargon, et dont on n'est jamais sûr d'avoir bien saisi le sens. Quelques-unes des idées de Valentin remontent d'ailleurs à Basilides; d'autres dnt été ajoutées plus tard par ses propres disciples, et dans ces transformations et modifications incessantes, confuses par elles-mêmes, on ne distingue pas toujours ce qui appartient à l'un ou à l'autre. L'idée-mère chez tous les gnostiques, c'est que la matière, c'est le mal; donc Dieu ne peut l'avoir créée; donc elle est éternelle. La source de la vie c'est le Buthos, l'abîme, l'insondable, appelé aussi Propator, père d'ancienneté, avant qu'il y eût rien. De là émanent par des générations successives des paires d'èons, mâle et femelle, ainsi nommés parce qu'ils existaient avant le temps. D'abord l'Esprit et la Vérité; puis d'eux procèdent le Verbe et la Vie; de ces deux à leur tour l'Homme et l'Église, etc. Os trois paires forment le Pléroma, ou ciel. Enfermés dans des espèces de cercles concentriques, ces êtres ne peuvent franchir les limites de leur nature, et s'ils essaient de pénétrer dans l'essence de Dieu, ils risquent de tomber dans le néant. Le génie des limites, ou Oros, veille à cela. Le dernier des éons femelles, la Sagesse, Sophia, s'étant unie au Buthos, il naquit de cet amour désordonné un avorton, un ektrôma ou artosophia, qui fut pour la mère un sujet de tristesse, et créa pour le père l'obligation de remédier à un accident qui troublait l'harmonie de son œuvre. Cette Sophia inférieure communique à la matière le germe de la vie et forme le démiurge. Il y a ainsi 3 natures: la spirituelle, ou pneumatique, apparentée au pléroma; 2° l'animale, ou psychique, qui peut parvenir à la vie ou à la condamnation éternelle; 3° la matérielle, ou hylique. Le but de la Rédemption est de faire rentrer la nature spirituelle dans le pléroma, et d'anéantir la nature animale en la séparant du principe de vie. Trois éons concourent à cette œuvre; le Christ, c. à d. la Parole agissant dans le pléroma; le Saint-Esprit, et le Jésus, ou Sauveur, en dehors du pléroma. Le démiurge avait créé l'homme pour le représenter, mais la Sophia ayant mis en lui une semence surnaturelle, il fut épouvanté. Il avait promis aux siens un rédempteur qui les délivrerait de la puissance satanique, un messie psychique, et comme il ne pouvait s'unir à la matière, il lui fit un corps d'un air pur, élhéré, qui passa par Marie comme à travers un canal. Ce messie donna d'abord l'exemple d'une sainteté ascétique; mais au baptême le Sauveur, Sôter, s'étant uni à lui, lui inspira une sainteté bien supérieure. Cette union doit se reproduire en chaque homme et forme l'essence de la régénération. Il y a donc un christianisme pneumatique et un psychique, suivant qu'on reconnaît ou non le vrai messie ou sôter. C'est aux psychiques que Paul a dit qu'il ne voulait savoir autre chose que Christ crucifié. Valentin dit aux pneumatiques: Vous êtes dès le commencement immortels, enfants de la vie éternelle; partagez entre vous la mort afin de la détruire. Quand le monde matériel sera dissous, le Sôter sera uni avec la Sophia, les pneumatiques entreront dans le pléroma et seront unis avec les anges 2 à 2. Les psychiques occuperont avec le démiurge un ciel inférieur, cependant heureux aussi. — Telles sont les aberrations insondables par lesquelles la sagesse gnostique a prétendu remplacer l'Évangile des chrétiens. Les valentiniens furent nombreux en Égypte; ils s'entendaient à gagner la confiance de leurs interlocuteurs. Les principaux disciples de Valentin furent Héracléon, q. v.; Ptolémée qui donnait 3 auteurs à la loi mosaïque, Dieu, Moïse et un ancien docteur; son exposition de la loi cérémonielle est importante et ne manque pas de spiritualité; enfin Bardesanes d'Êdesse, vers 170, poète comme son fils Harmonius, auteur d'hymnes appréciés. Il savait au besoin s'abaisser au point de vue psychique quand il parlait de l'Église, ce qui explique pourquoi Eusèbe dit qu'il passa du gnosticisme au christianisme, tandis que Épiphanes dit précisément l'inverse.

VALÈRE 1° ou VaUrius, v. Maternus. — 2° ou Valera, Cyprien (de), né vers 1531 en Espagne; converti à l'Évangile il dut fuir l'inquisition, et se rendit en Angleterre où il se maria. Vers 1582 il entreprit la revision de la version espagnole de la Bible, publiée 1569 à Bâle par Cassiodore; il s'aida pour cela de la version de Genève. Il passa en Hollande pour la faire imprimer, et revint en Angleterre otk il mourut. On a aussi de lui quelques traités de controverse, et une trad. espagnole de l'Institution de Calvin.

VALÉRIE, vierge inconnue du Limousin, qui doit avoir subi le martyre au 3®« siècle.

VALÉRIEN lo Publius-Aurelius-Valerianus, emp. romain, né vers 190, d'une famille noble, fit sa carrière comme soldat, fut nommé censeur par Decius 2$1, marcha au secours de Gallus contre Émilien, et ces deux chefs ennemis étant morts, il fut proclamé empereur 253. Il s'associa son fils Gallien, et donna sa coo-fiance à son favori Macrien, qui l'inspira mal et finit par le trahir. Il ordonna la 3«« persécution contre les chrétiens, après leur avoir été d'abord favorable; les temples furent fermés, les évêques exilés, Cyprien et d'autres exécutés. Malgré son courage personnel il n'eut pas de bonheur à la guerre; après avoir repoussé les hordes barbares qui envahissaient ses frontières, il passa en Perse et fut vaincu par Sapor 260 qui le traita ignominieusement, en fit son marche-pied pour monter à cheval, finit par le faire écorcher vif et suspendit sa peau dans un temple, 269.

2° Év. de Cémèle (Cimiez) au 5m« siècle, de 439 à 455, avant le transfert de ce siège à Nice sous Léon. Il prit part au conc. de Riez 439, et son nom figure parmi ceux des év. de la province d'Arles qui correspondirent avec Léon 450 et 451. Ayant été nommé abbé d'un monastère, et ne pouvant s'y rendre aussitôt, il écrivit aux moines une Lettre sur les vertus et l'ordre de la discipline apostolique. On a aussi de lui 20 Discours.

3° etc. Plusieurs autres saints, martyrs et évêques: un à Tournus f 179; un év. d'Aqui-lée, qui combattit l'arianisme, présida le conc. d'Aquilée 381.. assista à celui de Rome 382, f vers 389; un év. de Habe ou Abbenza, Afrique, sous les Vandales, condamné pour avoir refusé de livrer les choses saintes, etc.

VALERIO, Augustin, né 1530 à Venise, év. de Vérone et cardinal, f 1606 à Rome, un des plus savants littérateurs de son pays, prof, de philos, à 27 ans; auteur de plusieurs ouvrages, Vie de Borromée, Traité de rhétorique, etc.

VALESIUS, v. Valois.

YALLA lo Laurent, célèbre humaniste, né à Rome 1406 ou 1415, f 1457. Prof, d'éloquence à Pavie, Milan, Gènes et Florence, il s'attacha à Alphonse V, roi d'Arragon, qu'il accompagna dans diverses expéditions. Il attaqua sans ménagements la scolastique et plusieurs traditions vénérées de l'Église, entre autres celle qui concerne la prétendue donation de Constantin. Il attaqua également le Symbole des apôtres et la Vulgate et dut s'enfuir à Barcelone, puis à Naples. Il fut condamné à mort par l'Inquisition. Alphonse obtint avec difficulté que cette peine fût commuée en une fustigation publique. Le pape Nicolas V se l'attacha en le nommant secrétaire apostolique et chanoine de Saint-Jean de Latran; mais Valla retourna mourir à Naples, auprès d'Alphonse, dont il était l'historiographe. Il a écrit quelques ouvrages d'une élégante latinité, et passe avec le Pogge pour un des hommes qui ont le plus contribué à ranimer l'amour et le goût des lettres latines. —

2o Joseph, oratorien français, prof, de philos, et de théol. à Soissons et à Lyon, auteur de 2 ouvrages devenus classiques (en latin); les Institutions théol. 6 vol. in-12o, et les Instit. philos. 5 vol. in-12o, connues sous le nom de Philosophie de Lyon, f 1790. Il s'opposa à l'Uni-genitus.

% VALLETTE, Jean-Louis, né 24 mai igOO Chêne-Thônex, près Genève, d'une famj|)e o** ginaire de l'Ardèche, perdit son père de bonne heure, se montra fils et frère dévoué et travailla avec énergie pour gagner sa vie en môme temps qu'il poursuivait ses études de théologie. Précepteur dans la famille Boissier-Butini. En 1827 est nommé pasteur de la communauté de Naples, sous le patronage du roi de Prusse, et chapelain volontaire des régiments suisses;

fonda à Messine une égl. évangélique, 1838, prêchant en français et en allemand. Pendant le choléra son dévouement se montra à la hauteur de son devoir. Appelé en 1841 à Paris, à égl. des Billettes, sur le désir exprimé par la duchésse Hélène d'Orléans. Président du consistoire luthérien 1867; enfin président du synode de la conf. d'Augsbourg. Il est peu d'oeuvres auxquelles il soit resté étranger; il n'en est point qu'il ait entreprise sans la mener à bonne fin. Ami des petits, des pauvres, des orphelins, des déshérités, des détenus libérés, il était recherché des grands qui appréciaient son zèle, son activité, aussi discrète que tenace. Décoré de plusieurs ordres. A force de démarches et de persévérance, il eut le bonheur de procurer des aumôniers protestants aux armées françai -ses en Crimée, en Italie, en Chine, et de créer un antécédent dont les gouvernements ne se sont plus écartés. Il resta à Paris pendant le siège; il y revint pendant la Commune à la nouvelle des premiers désordres, f 20 oct. 1872. Intelligent, très instruit, esprit vif et prime-sautier, figure fine et originale, il était attaché de cœur à la vérité évangélique, ne cachant jamais son drapeau; mais il n'était pas militant, aimant mieux consacrer ses forces et ses riches facultés aux œuvres si nombreuses et si variées auxquelles il estimait se devoir avant tout. Beau-frère de son collègue, le pasteur G. Ap-pia, et père du pasteur Oscar Vallette, de Bâle, 1883.

VALLOMBREUSE, v. Gualbert. VALOIS (de), en latin Valesius. A. Famille royale de France, qui date de Philippe VI1328, donna 13 souverains à son pays, dont quelques-uns très distingués, et s'éteignit 1589 dans une décomposition physique, politique et morale.

B. Famille de savants: lo Henri, né le 10 sept. 1603 à Paris, étudia successivement chez les jésuites de Verdun et au collège de Clermont, fit son droit à Bourges 1622 et se fit recevoir avocat à Paris pour plaire à son père, mais s'adonna ensuite à l'étude des lettres et spécialement des classiques grecs et latins. En 1658 il obtint une pension de Mazarin, en 1660 il fut nommé historiographe du roi. En 1664 il épousa Marguerite Chesneau, dont il eut 7 enfants. Sa grande réputation lui valut de nombreux appels, entre autres un de Christine de Suède, mais il les refusa. Vers la fin de sa vie

sa vue s'affaiblit et il dut prendre un secrétaire-lecteur. f 7 mai 1676. Outre ses nombreuses éditions de Polybe, Diodore de Sicile, etc., on lui doit l'Hist. ecclés. d'Eusèbe, une Vie de Constantin, et des extraits considérables de Socrate, Sozomène, Théodoret, Évagrius, etc.

2° Adrien, son fr., 14 janv. 1607-2 juill. 1692, aussi historiographe de France, auteur d'un traité historique sur les anciennes églises de Paris, et de quelques essais sur les Pères. Son fils Charles a publié sous le titre de Valesia un recueil posthume de notes historiques et critiques de son père.

VALTELINE, vallée et petite région située entre l'Italie et le Tyrol, touchant à la Suisse par les Ligues des Grisons, et qui a souvent changé de maîtres à cause des convoitises qu'elle excitait comme frontière naturelle facile à défendre. Pour la même raison elle est devenue à l'époque de la Réformation le refuge ordinaire des persécutés pour cause de religion, Renato, Vergerio, etc. La diète grise proclama 1544 la liberté de conscience, mais les autorités locales 1551 la repoussèrent, sous l'inspiration de l'évêque. La lutte dura longtemps; elle se termina le 19 juill. 1620 par l'extermination des protestants; quelques prêtres fanatiques, secondés par des bandes de vagabonds, de bannis et de voleurs descendus de la montagne, eurent raison des évangéliques. L'Espagne s'empara 1620 de ce territoire dont elle avait besoin pour les communications du Tyrol avec Milan, mais la France envoya le duc de Rohan au secours des Ligues et rendit la Valteline à la Suisse, 1624 à 1637.

VANDALES, peuplade germanique, d'origine slave, peut-être apparentée aux Vendes, ou aux lugi de Tacite, et dont quelques-uns font dériver le nom de wandeln, errer. C'est entre l'Oder et l'Elbe, sur les côles de la Raltique, qu'ils apparaissent d'abord; puis an siècle an sud de la Dacie trajane, alliés aux Goths et aux Gé-pides, faisant la guerre k l'emp. Probus. En 334 Constantin les établit avec lesSarmates en Pan-nonie, où ils vivent quelque temps en paix et empruntent aux Goths I'arianisme. En 406 ils envahissent les Gaules, en 409 l'Espagne et notamment la Bétique à laquelle ils donnent leur nom de Vandalousie, et qui devient l'Andalousie. Unis aux Alains ils passent en 429 le détroit de Gibraltar sous la conduite de Genséric, attirés par le gouverneur Boniface, jaloux d'A'é-tius. Ils se sont déjà fait connaître par leur férocité; ils ravagent tout sur leur chemin, la Mauritanie n'est plus qu'une ruine, leur présence est marquée par la dévastation, la belle province romaine n'est plus qu'un champ de décombres, et Boniface déplorant trop tard sa trahison, s'efforce en vain d'arrêter les hordes qu'il a appelées. Augustin meurt à Hippone, qui est bientôt livrée aux flammes, ainsi que Cvrtha, Carthage, toutes les villes, tous les villages par où passent les barbares. Genséric distribue le pays à ses guerriers, fait de Carthage sa capitale et règne sur un littoral qui mesure soixante journées de distance. Les Vandales passent ensuite en Sicile, en Sardaigne, en Corse; ils apparaissent à l'embouchure du Tibre 455, et s'avancent sur Rome qu'ils pillent pendant 14 jours et 14 nuits, pour se replier en Afrique chargés d'un riche butin. Leur réputation est telle que leur nom est devenu synonyme de brutale férocité. Enfin Bélisaire ayant débarqué en Afrique, délit leur roi Gilimerà Tricameron, et les extermina 534. Une partie de la peuplade était restée en Germanie, où leur nom est demeuré: les ducs de Mecklembourg s'appellent encore auj. prince des Vandales, et le roi de Prusse a hérité du titre.

VANINI, Lucilio, qui prit les prénoms de Jules-César, né 1585 à Taurizano, Otrante, savant de premier ordre et prêtre, se distingua par ses mauvaises mœurs autant que par son incrédulité. Dans sa vie aventureuse, il fut tour à tour aumônier, précepteur, écrivain, se fit mettre en prison à Londres, chasser pour ses désordres à Toulouse, continua de visiter l'Allemagne, la Hollande, l'Angleterre, la Suisse, l'Italie, faisant de la propagande athée, et finit par se faire condamner à Toulouse, à avoir la langue coupée, à être pendu et brûlé, 1619; il essaya en vain de prouver qu'il croyait en Dieu; ses écrits témoignaient contre lui, notamment son traité, dédié au maréchal de Bassompierre, 60 dialogues De admtrandis naturœ, reginœ deœque mortalium, arcanis, 1616, où il prétend expliquer tous les phénomènes par les seules forces de la nature. Trad. par Rousselot, 1842.

VARAGINE, v. Voragine.

VASQUEZ, Gabriel, né 1549, entra 1567 dans l'ordre des jésuites à Alcala (Complutum), près Madrid; prof, de théol. à Alcala, puis à Rome, il s'attacha à la Somme de Thomas d'Aqnin, et f 1604 à Alcala. Il appartient aux premiers ca-suistes qui ont enseigné le probabilisme. Dans la question de la prédestination, soulevée par Molina, il se joignit avec Suarès et Bellarmin à la solution moyenne du Congruisme. Il a laissé 10 vol. in-fo, impr. Lyon 1620.

VATABLE, ou Wattebled, Guastebled, François, né à Gamache en Picardie, curé à Bramet dans le Valois, nommé 1530 prof. d'hébreu au collège royal de Paris fondé par François t 1547. Savant distingué, il est surtout connu par la Bible qui porte son nom et qui fut publiée 1545 et 1547 par Robert Étienne; réimpr en 1557. Cette édition renferme la Vuïgate, la trad.* de Léon de Juda, et des Notes prises aux le-

çons de Valable par son disciple Bertin-le-Comte, qui les avait communiquées à Étienne; celui-ci y ajouta des commentaires évangéliques. Valable prolesta, et la Sorbonne condamna le livre comme hérétique. Cependant c'était un si excellent ouvrage que les docteurs de Salamanque, après l'avoir expurgé, le réimprimèrent 1584, à la demande du saint-office. Les Censures des docteurs de Sorbonne, publ. 1552 chez R. Étienne, furent réfutées par Étienne lui-même, dont le livre fut mis à l'index, 12 déc. 1624.

VATER, Jean-Séverin, né 27 mai 1771 à AÎ-tenbourg, fils d'un avocat, étudia à Iéna et Halle, surtout la théol., la philos., la philologie et les langues orientales, et fut successivement prof, à Iéna, KOnigsberg et Halle, où il f 15 mars 1826. Savant modeste et laborieux, il avait une théologie modérée, critique, et influencée par la philos, de Kant. Il a énormément écrit, tant en latin qu'en allemand; une Gramm. hébr., syriaque, caldéenne et arabe; une Gramm. hébr. pour les commençants; une dite plus avancée; Tableaux de l'hist. ecclés. jusqu'aux temps modernes; Hist. univ. et chronologique de l'Égl depuis la Réformation; une édition du N. T. grec; un Comment, sur le Pentateuque, et beaucoup d'ouvrages et brochures de circonstance, Le mysticisme, Le pape, Napoléon, Le rationalisme, Lettre à Planck sur la divinité du Christianisme, etc.

VATICAN (le), l'une des collines sur lesquelles Rome est bâtie, mais non l'une des 7 primitives; à l'O. du Tibre, au N. du Janicule, elle ne fut comprise que plus tard dans l'enceinte de la ville. Successivement embellie et peuplée, elle est auj. remarquable par l'immense et magnifique palais des papes, qui porte son nom, avec ses 20 cours, ses 11,000 chambres, ses admirables galeries de tableaux (Bramante, Michel-Ange, Raphaël, Pérugin, Bernin), sa riche bibliothèque, une des plus belles du monde; ses vastes et superbes jardins, et enfin la grandiose basilique de Saint-Pierre, la plus vaste église qui existe. Cet ensemble de luxueuses constructions forme auj. la résidence papale, tout ce qui reste de domaine temporel au pape depuis le concile qui a voulu consacrer sa domination universelle. Le palais date, selon les uns, de Constantin; selon d'autres, de Libère ou de Symmaque, mais il a été refait, embelli et agrandi bien des fois; c'est surtout depuis le retour d'Avignon qu'il est devenu la résidence habituelle des souverains pontifes. Il a trouvé une notoriété nouvelle par le fait du concile qui s'y est tenu en 1869 et 4870. On le prévoyait depuis quelques années. La proclamation du dogme de l'Immaculée Conception avait préludé aux fêtes du centenaire de Saint-Pierre

casion de reconnaître qu'ils n'étaient que les humbles vassaux du pape; ils adhéraient virtuellement aux doctrines de l'Encyclique et aux anathèmes du Syllabus. Le pape n'avait donc plus rien à craindre et la convocation d'un concile n'était plus qu'une formalité destinée à consacrer le déplacement du centre de gravité dans l'Église. Il y avait bien à prévoir une certaine opposition, mais on pouvait en atténuer les effets en choisissant un local d'une acoustique impossible, en fixant un programme invariable, et en confiant la rédaction des procès-verbaux à des secrétaires bien pensants. Le 29 juin 1868 Pie IX lança sa bulle Aeterni Pa-tris unigenitus Filius, convoquant le concile pour le 8 déc. 1869, mais sans dire qu'il s'agît de proclamer l'infaillibilité du pape; on eut même soin de démentir le bruit qui en courait avec une singulière persistance, et qui s'autori-risait de personnages haut placés. Les patriarches de l'Égl. grecque furent invités à ce concile pour faire acte de soumission, » et les Églises protestantes, notamment l'Égl. anglicane furent également citées à « venir abjurer leurs erreurs. » Elles déclinèrent naturellement ce mode d'invitation. Les États politiques, catholiques et protestants, ne se firent pas représenter non plus; quelques-uns firent d'avance toutes leurs réserves quant aux résolutions qui pourraient être prises, et le parti ultramontain, qui se savait en majorité compacte, ne se gêna pas pour célébrer d'avance son triomphe. La veille de l'ouverture, le 7 déc. à midi, quand toutes les cloches de Rome annoncèrent l'événement, plus de 700 évêques étaient déjà accourus de tous les points du globe. Ils savaient tous, même les mécontents, qu'ils n'étaient consultés que pour la forme, et pour que nul n'en ignorât, peu de jours après l'ouverture, le pape faisait afficher une bulle d'excommunication contre ceux qui contesteraient les doctrines du Syllabus, tranchant ainsi d'avance une des questions soumises au concile. L'assemblée était déjà muselée par les précautions prises quant à l'ordre du jour; mais quand on eut vu les Haynald de Cologne, Dupanloup d'Orléans, et surtout Strossmeyer d'Agram, réussir cependant à se faire entendre et protester, le pape fit un nouveau bref, le 20 février, pour restreindre encore la liberté de parole, et DOllinger prit position dès ce jour pour déclarer qu'un concile qui n'était pas libre ne pouvait pas lier l'Église. Après avoir réglé diverses questions de dogme et condamné le protestantisme, le conc. aborda enfin le point scabreux de l'Infaillibilité. Les opposants n'étaient que 140, mais ils avaient pour eux le talent, la raison et même le nombre, puisqu'ils représentaient les églises les plus considérables.

1867, les évêques n'avaient pas laissé cette oc-1 La majorité compacte comptait en revanche 580

voix, dont 50 cardinaux, 100 vicaires apostoliques (révocables), 50 généraux d'ordres et abbés mitrés,plus de 100 évéques de la propagande, et 270 év. italiens, dont 143 des États pontificaux. Le vote eut lieu le 13 juillet, et la proclamation le 18, mais avec une altération du texte qu'une assemblée mondaine ne se serait pas permise. Le texte primitif portait: Les définitions du pape sont irréformables; on y avait ajouté subrepticement: par elles-mêmes et non par le consentement de l'Église. Il n'y avait plus à Rome que 534 pères; 23 év. français, dont 3 archev., étaient partis, ainsi que 10 hongrois, 9 allemands et quelques autres. Deux voix seulement eurent le courage de voter non placet, l'év. de Cajazzo et celui de Little Rock. Les conséquences presque immédiates de la proclamation de l'infaillibilité ont été: la malheureuse guerre avec l'Allemagne, l'occupation de Rome par les Italiens, l'internement volontaire du pape dans ce Vatican, dont on avait rêvé de meilleures choses, et le schisme de l'Église catholique en Allemagne et en Suisse.

VATKE, Jean-Ch.-Guill. né 14 mars 1806à Behndorf, Magdebourg, étudia à Helmstœdt et à la maison des orphelins de Halle, puis la théol. à Halle, Gottingue et Berlin, où il étudia aussi l'histoire, la philos, et la philologie, et où il s'établit en 1830 comme privat-docent; en 1837 professeur, f 19 avril 1882. Auteur de: La religion de l'A. T. d'après les livres canoniques; la Liberté humaine dans ses rapports avec le péché et avec la grâce. Son libéralisme politique a quelque peu compromis son avancement.

VAUD, le 19me canton de la Suisse, peuplé d'ancienne date, puisqu'on y trouve des cités lacustres; conquis par les Romains 57 av. C., et possédé successivement par les Francs, les Burgondes, les emp. d'Allemagne, les ducs de Zâhringen, les ducs de Savoie, et enfin les Bernois 1536. Canton indépendant depuis 1798. Évangélisé dès le 2m« siècle, par Vienne et Lyon; évêché à Avenches au 4™ siècle, qui est transféré à Lausanne sous Marius. Cathédrale magnifique inaugurée 1275 par Grégoire X et Rodolphe de Habsbourg. La Réforme est prê-chée dès 1527 dans plusieurs mandements et bailliages, mais l'État se fait persécuteur et les Bernois s'emparent du pays 1536 et font prêcher partout la Réforme; bientôt ils lancent un édit de réformation. Une dispute a lieu à Lausanne sur les points controversés; Farel, Viret et Calvin n'ont pas de peine à triompher de prêtres peu préparés pour la lutte; le pays est réformé d'office, les couvents et les trésors d'église sont confisqués, le pouvoir civil de Berne devient le grand chef ecclésiastique. Dans quelques bailliages il y a de la résistance, et l'on va aux voix; à Échallens il y a partage. La Conf. de foi helvétique est donnée au pays de Vaud comme son livre symbolique; ceux qui refusent de l'accepter sont persécutés ou bannis 1675. La population protestante s'accroît peu à peu par l'arrivée de réfugiés français 1572 et 1685, ou piémontais vaudois 1659. En 1729 Court fonde à Lausanne un séminaire français. Enfin en 1798 le pays est affranchi de la domination bernoise, mais l'Église reste gouvernée par l'État, ce qui amène des persécutions successives contre ceux qui n'admettent pas ce régime. Réveil religieux de 1800-1815 (Dutoit-Membrini, Curtat, Levade, Sociétés religieuses), et loi incroyable du 20 mai 1824 contre les « mômiers; » protestations nombreuses, entre autres de Vinet: Mémoire en faveur de la liberté religieuse. Nouvelles persécutions en 1833. En 1839 abolition de la Conf. helvétique, et suprématie de l'État. En 1845 révolution politique; les pasteurs sont invités à la recommander, ils refusent, 150 quittent l'établissement officiel; le 12 mars 1847 formation de l'Église libre. Malgré les inconvénients résultant pour le canton de ses attaches gouvernementales, l'Église a toujours compté un grand nombre d'hommes, de pasteurs, de prédicateurs et de prof, distingués dans presque toutes les branches.

VAUDOIS, Valdenses, nom général donné aux populations protestantes qui habitent les vallées des hautes Alpes à l'ouest de Turin, savoir Saint-Jean de la Tour, Luzerne et Angrogne. Leur histoire est compliquée par les recherches mêmes qu'on a faites pour l'éclaircir, parce qu'on a essayé de la faire remonter à l'âge apostolique. En réalité on ne connaîtaucun fait positif antérieur à Valdo, et c'est à lui historiquement qu'il faut rattacher les origines de cette intéressante peuplade, qu'on a justement appelée l'Israël des Alpes (Muston). Tout ce qu'on peut trouver au delà appartient à la longue chaîne des témoins qui, dans tous les siècles, en Italie et ailleurs, n'ont cessé de protester sous des noms divers contre des prétentions ambitieuses et contre les altérations de la doctrine ou du culte, tour à tour bulgares, pauliciens, cathares, albigeois, patarins, etc. Les vallées fournirent leur contingent à ces protestations religieuses, mais elles ne se présentent nulle part comme formant un centre spécial, et c'est avec Valdo 1209 que pour la première fois elles forment un corps et prennent un nom. Dès lors elles ont des livres, des écoles, et même des missions ou colonies; celle des Calabres fut la plus célèbre et la plus malheureuse; v. Paschale, de A. Lombard. Ils ont la Bible, des barbes et des colporteurs. Leur doctrine est essentiellement biblique; ils rejettent le purgatoire et le serment; ils sont encore catholiques, mais sans le pape; leurs mœurs sont pures, de l'aveu de leurs en-

nemis. Ils furent compromis dans toutes les i Comment alors arriver à la connaissance de croisades dirigées contre les albigeois, comme Brahma ? On y arrive par les perceptions des étant solidaires de la même révolte contre l'au- sens, par la raison, et par la tradition ou révé-torité de Rome. Dès les premiers jours de la Ré- lation. Un Indou, parlant de la littérature de sa forme ils l'acceptent comme l'expression de caste a bien ea raison de dire: Nos livres sont leur foi; le synode de sept. 1532 et celui de comme l'océan, sans fond, sans fin; et un mis-Saint-Martin, août 1533, sont unanimes. Leur sionnaire qui a étudié les védas pendant des premier acte est une nouvelle traduction de la années, dit que les shastres sont un chaos im-Bible, version d'Olivetan. Puis les persécutions pénétrable. Les védas sont écrits en langue sans-recommencent, toujours plus terribles; on ne crite.

comprend pas que l'Égl. vaudoise n'ait pas été VEHME (la Sainte-), ou Cours vehmiques, ou exterminée. Cette histoire a été racontée par vêïmiques, tribunaux secrets que l'on trouve au Léger et par Gilles, plus tard par Muston et moyen âge, surtout en Westphalie et dans les par Monastier; Arnaud, le pasteur-colonel, fraya environs d'Engern, et qui en étaient venus à con-le chemin à de nombreux émigrants, et ramena naître c de toutes les contraventions aux dix 1689 dans leur patrie ceux qui voulurent y re- commandements et aux saints Évangiles. » Ils venir. Un réveil religieux a eu lieu au com- se recrutaient eux-mêmes, se liaient par des mencement de ce siècle, représenté par les serments terribles, jugeaient sommairement, noms de Neff. Gilly et Beckwith, surnommé le sans même toujours interroger le prévenu, et bienfaiteur des vaudois (Vie par Meille). Enfin chargeaient toujours un des leurs d'exécuter la 17 févr. 1848, émancipation des vaudois par la sentence. Cette justice, à la fois anonyme et promulgation du statut, œuvres d'évangélisa- sommaire, qui rappelle par certains points la loi tion, école de théol. à Torre-Pellice, transférée de Lynch, le nihilisme et la sainte-inquisition, à Florenceen 1862. L'Égl. vaudoise compte auj., put être considérée comme un progrès à un mo-en dehors des vallées, 41 églises, 34 stations, ment donné et dans un état social où il n'y 150 lieux visités, 3225 communiants, 22,000 avait point de justice organisée. Les membres auditeurs, 1878 élèves des écoles du dimanche; de ces tribunaux s'appelaient francs-juges; ils budget 250 mille francs. — V. Muston, Bert, avaient leur hiérarchie et comptaient partout Witte, Comba, Cocorda, etc. de nombreux initiés. Mais on comprend com-

VÉDAS. On comprend sous le nom général bien d'abus purent naître d'une organisation de de shastres, ou shastras, l'ensemble de la lit- ce genre, où l'accusé ne pouvait se défendre ni térature indoue, et celle-ci se subdivise en vé- contre la passion, ni contre l'erreur. L'origine das, pouranas, mahabarata, lois de Manou, etc. de ces tribunaux est rapportée à Léon Ier, et à Les védas sont le livre sacré par excellence et Charlemagne qui donna à ses comtes et à ses le fondement de la religion; l'upanishad en est barons droit de haute justice dans les domai-le commentaire comme le targum celui de la nés de leur ressort, mais sans rien stipuler pour bible juive. On y reconnaît 4 branches, ou re- les territoires indépendants. Peu à peu l'Église cueils distincts: le Rig, prières et hymnes en se constitua aussi en administrateur de la jus-vers, compilé par Pada; le Yadschûr, ou prié- tice, et comme elle a « horreur du sang, » elle res en prose, par Vaisampouyana; leSamâ, dont s'entendit dans bien des cas avec les cours veh-les prières sont faites pour être chantées, par miques qui n'avaient pas les mêmes scrupules. Saïmoni; et l'Atharva, qui renferme des for- La pleine floraison de ces tribunaux remonte k mules d'expiation, de consécration et d'impré- 1182, lorsque les duchés de Westphalie et d'En-cation, parSumanta. Ces 4 recueils passent pour gern furent donnés k l'archevêché de Cologne; avoir été inspirés par Brahma, de temps immé- les cours ecclésiastiques remirent alors une par-morial, et pour avoir été rédigés et classés 12 tie de leurs attributions à la Sainte-Vehme dont ou 15 siècles av. C. par Vyasa, aidé de son in- la compétence fut ainsi agrandie et légalisée, et telligent secrétaire Ganesha. Les védas, où do- jusqu'à Boniface VIII elle alla jusqu'au droit de minent la théol. et la philosophie, sont moins vie et de mort. Avec la paix publique de West-un traité spécial qu'une sorte d'encyclopédie I phalie 1371, le nombre des tribunaux de ce sur tout ce qui se rapporte à l'intelligence de I genre augmenta dans les pays qui reconnurent l'homme. L'objet de la religion, d'après ce li-1 ce traité, mais leurs attributions commencèrent vre, est de montrer l'unité qui existe entre!à se restreindre; des plaintes surgissaient, l'ap-Brahma et l'âme humaine; la connaissance del pel au pouvoir civil s'organisait, les gouverne-Brahma étant le but final de l'homme, il est Iments intervenaient. Au 15®* siècle les emp. donc appelé à chercher. Ceci parait clair; mais 1 Sigismond, Albert, Frédéric III réprimèrent les voici le sophisme; Cet objet est-il connu, ou 1 abus, et bientôt les tribunaux eux-mêmes disinconnu ? S'il est connu, il n'est pas nécessaire 1 parurent; la Réforme leur porta le dernier coup, de le chercher; s'il est inconnu, c'est inutile* lLa Sainte-Vehme avait son principal siège en

Westphalie. Son nom, qui parait pour la lre fois dans nn document de 1251, dérive selon les uns du vieux allemand vêrnen, séparer; selon d'autres de fehmen, condamner, bannir; selon Schulte de faem, vaem, lien, fil qui unit, qui lie en faisceau; selon d'autres enfin du latin vi-men, baguette flexible, d'osier ou autre, propre à faire dos liens.

VÉLASQUEZ, Jacques - Rodriguez (de Sylva y), né 1599 à Sév ille, f 1660, peintre espagnol, qui commence à s'affranchir de la tradition ecclésiastique. Il étudia soigneusement son art dans les musées et dans la nature, et se rapproche de l'école française. Comblé d'honneurs par Philippe IV, dont il a peint la famille. Auteur de la Tunique de Joseph, etc.

VELAY et VIVARAIS, deux provinces limitrophes des bords du Rhône, qui ont formé longtemps une môme province protestante et qui ont eu une histoire commune à l'époque des persécutions. Elles comprenaient une partie de la Haute-Loire et de l'Ardèche, et s'étendaient d'Annonay et du Puy en Velay jusqu'à Viviers. C'est d'Annonay que l'Évangile y fut apporté vers 1560, et parmi les premières villes qui passèrent à la Réforme, on nomme Privas, Ver-noux, Châteauneuf, Aubenas, Vais, Sala vas, Vallon. Le massacre de Vassy déchaîna les passions religieuses, et d'horribles boucheries eurent lieu, même là où une convention avait assuré aux protestants la vie sauve. L'Édit de Nantes donna quelque repos aux malheureux, mais dès 1620 les persécutions recommencèrent, les églises furent démolies, les pasteurs roués, les fidèles ruinés et envoyés aux galères, les enfants enlevés à leurs parents. Court, et surtout Durand, relevèrent le courage des martyrs; puis Dortial, Majal et Ranc. En 1731 on comptait encore 42 églises dans la province, mais il n'y avait plus que 2 ou 3 pasteurs pour les desservir. En 1803 le recensement donna environ 35,000 protestants, et l'empereur leur accorda 16 pasteurs. Auj. l'on y compte plus de 60,000 âmes, 50 églises et autant de pasteurs.

— Patrie d'Olivier et Jean de Serres, et de Boissy d'Anglas.

VENANTIUS, ou Venance lo v. Fortunatus.

— 2° Jeune martyr de Camerino, mort à 15 ans au 3m® ou au 4me siècle. — 3o Abbé de Tours au 5m« siècle; fiancé, il fit un pèlerinage au tombeau de saint Martin, renonça à son mariage, entra au couvent, se distingua par sa piété et sa sagesse, et fut nommé abbé. L'Égl. lui prête des miracles.

VENCE 1° François de Villeneuve, prêtre de l'Oratoire, f 1741 à Vendôme, a trad. et publié 6 livres de saint Augustin contre Julien, défenseur de Pelage, et 2 livres du même sur la Grâce et le Péché originel. — 2o Henri-François (de), né vers 1675 à Pareid en Voivre, dans le Barrois, élève de la Sorbonne, précepteur des enfants de Léopold duc de Lorraine, prévôt de Pégl. primatiale de Nancy, f 1749. Chargé de faire imprimer la Bible du p. de Carrières, il y ajouta des notes, analyses et dissertations, dont Rondet donna une nouvelle édition, 1767-1773. Cette version est connue sous le titre de Bible de Vence, ou d'Avignon; elle a été aussi réimpr. par le rabbin converti Drach, qui Ta enrichiede nouveaux éclaircissements. Il ne faut pas la confondre avec la trad. du N. T. faite par Antoine Godeau, év. de Vence 1668.

VENDES, ou Vénètes, v. Wendes.

VENI (viens!) lo V. Creator Spiritus, commencement d'une vieille hymne qui se chante à Pentecôte dans l'office romain, et quelquefois lors de l'élection d'un pape ou d'un évêque. Quelques-uns l'attribuent à Charlemagne (Not-ker), ce qui est peu probable; d'autres à Gré-goire-le-Grand.

V. Sancte Spiritus, séquence pour l'octave de la Pentecôte et pour quelques autres solennités; elle est de Robert, roi de France + 1031.

VENISE. Cette belle reine de l'Adriatique n'entre dans l'hist. de l'Église qu'au 5™* siècle, et encore indirectement. Indépendante, quoique tributaire de Théodoric, la population des lagunes, flottant entre l'empire d'Orient et celui d'Occident, fut tour à tour attirée dans la sphère d'attraction de l'un ou de l'autre. Lors de la querelle des Trois chapitres, le patr. Paulin, qui résidait à Aquilée, se prononça contre l'édit de Jus-tinien 544, et contre le conc. de Constantinople 553; fuyant devant les Lombards, il transporta son siège à Grado 580. Il eut pour successeur Élie que le pape Pélage II somma de reconnaître les décrets de Constantinople; mais l'emp. Maurice envoya aux Vénètes une députation qui leur reconnaissait le droit de penser comme ils l'entendaient. Par cette manœuvre il se les attacha et les détacha de Rome. La politique amena de nouveaux changements. Sévère, successeur d'Élie, vacilla entre les deux doctrines et les deux autorités, et c'est Candidianus qui le premier ouvre la liste des évêques de Grado soumis à Rome, en même temps qu'un patriarche lombard, Jean, s'établit à Aquilèe 606. Mais lequel des deux aura des droits sur l'Istrie ? Rome se prononça en faveur de Grado. Lorsque de 713 à 716 les Vénètes nommèrent leur premier doge, ou duc, il choisit successivement plusieurs des îles pour sa résidence, jusqu'à ce qu'en 810 l'île de Rialto devint le siège officiel et fixe de la nouvelle cité, qui prit le nom de Venise, acquit en peu de temps une importance considérable et finit par rompre les liens qui la rattachaient à Bysance. C'est en 827 que le corps hypothétique de saint Marc fut apporté à Venise.

La lutte continuait entre Aquilée et Grado. Au lime siècle Jean XIX, sur la demande de l'emp. Conrad, se prononça pour la première et régi, de Grado fut dépouillée de ses reliques et autres trésors. Le pape mieux informé se repentit, mais trop tard, d'avoir cédé sur ce point. Venise finit par avoir son évêque, vers 1091, et le patriarcat de Grado se fondit en 1451 avec celui de Venise qui était devenu de beaucoup le plus important. Il avait conservé une constitution indépendante, l'élection des cures par le peuple, des religieuses sans voiles ni vœux, libres de sortir, même pour se marier, le pouvoir temporel maître absolu de l'Église, au point que lors de la guerre avec Gênes, il contraignit les prêtres à faire le service militaire. Les conflits avec Rome furent fréquents; trois fois la ville fut mise à l'interdit; par Sixte IV, 1483, et par Jules II, 1509, comme arme de guerre; par Paul V, le 17 avril 1606, parce que Venise maintenait ses droits de ville libre, interdisait tout recours à Rome, réclamait le placet et refusait au clergé des acquisitions de biens-fonds. Mais les papes eurent toujours le dessous. Aussi redoutable par sa diplomatie que par ses forces militaires et maritimes, Venise était encore célèbre par son commerce, son industrie, ses imprimeries, ses palais et ses collections. Les deux frères Bellini, le Giorgione. le Titien, le Tinto-ret, Véronèse, avaient fait la réputation de son école de peinture. On comprend qu'avec de tels avantages elle fût fière et jalouse de son indépendance. On comprend aussi qu'au moment de la Réformation elle offrît un terrain favorable à la propagation des idées nouvelles. Ce fut aussi la première ville d'Italie où la prédication de l'Évangile trouva de l'écho. Le nom de Luther y était déjà en honneur en 1520; ses thèses et son portrait se rencontraient partout. Parmi les premiers représentants de la Réforme il faut compter le pieux allemand Ziegler, son fr. adop-tif Théod. Vitus, qui devint secrétaire de Luther; Brucioli q. v.; Ochino, Curione; Palea-rio, l'auteur du Bienfait de la mort du Christ crucifié, que Bindonis répand à plus de 40,000 ex. Un membre de la congrégation de Venise, Paolo Rosselli, entretient avec Mélanchthon la correspondance la plus affectueuse, et en 1547 Thomas Knight peut écrire à Bullinger que le nombre des fidèles va croissant de jour en jour. Le clergé même sympathise avec les réformés. Mais dès 1542 le farouche Caraffa a installé à Venise le tribunal du saint-office. Il est momentanément neutralisé par l'attitude énergique des magistrats, dont plusieurs correspondent avec Calvin. Le nonce du pape, Giov. délia Casa, se plaint amèrement des entraves que la seigneurie met à l'action du tribunal; il raconte lui-même ses mésaventures diplomatiques. 11 échoua en particulier dans ses démarches contre Ver-gerio, év. de Capo d'Istria, mais ce fut à peu près son dernier échec. Depuis le départ de Ver-gerio, déc. 1549, Venise fatiguée, semble-t-il, de sa lutte contre les légats cède peu à peu à l'influence de Caraffa; elle condamne Algieri à la prison, mais sur les réclamations du nonce elle l'extrade et Rome l'envoie au bûcher. Il n'y a que le premier pas qui coûte. Venise n'est encore que le complice; bientôt elle persécutera pour son propre compte, mais à sa manière; Jérusalem lapidait les prophètes, Rome les brûle; Venise les noiera; c'est plus conforme à ses traditions de mystère, cela ne fait pas de bruit: sitie sonitu et strepitu, c'est le texte de la sentence. On n'a pas tant d'eau pour rien. Les protestants avaient fait venir un ministre, ils avaient choisi des diacres; ils s'organisaient en Église sur le modèle de celle de Genève, mais dans leurs rangs se trouvaient des espions stipendiés du saint-office, et les délations commencèrent. C'est Lupetino qui ouvre le martyrologe, puis Fonzio, Gherlandi, Ricetto, Sega, Spinola; le nombre en est immense, mais personne ne le connaît. Venise ne reprit ses traditions libérales que lorsqu'elle perdit son indépendance politique. Ses vieux évêchés disparurent peu à peu; d'autres les remplacèrent; l'autorité civile présida d'ordinaire à ces changements. La liberté des cultes n'est enfin devenue une réalité que sous le roi d'Italie qui avait juré le statut. Auj. l'on compte à Venise et aux environs 4 égl. protestantes.

VÊPRES, du latin Vesper, soir, après-midi; partie de l'office catholique qui se célèbre habituellement à 2 ou 3 h. de relevée, ou vers le commencement de la soirée, suivant les lieux. Il date du 3®« siècle, et correspondait dans l'origine au sacrifice du soir chez les juifs, qui fut transformé en une simple prière après la destruction du temple, et qui servit en même temps chez les chrétiens à rappeler l'heure de la descente de la croix. Le bréviaire romain en fait la contre-partie des Laudes ou des Matines; on y lit 5 psaumes, un capitule, une hymne, le Magnificat, avec antiennes, et quelques oraisons suivant les circonstances. Un service liturgique semblable se fait dans quelques égl. protestantes.

VERENA, sainte qui, d'après la légende, serait venue de la haute Égypte avec la légion thébaine, comme parente, dit-on, de Maurice ou de Victor. Pendant l'expédition en Valais, elle resta à Milan chez un certain Maxime. Après le massacre de ses amis elle se relira dans une caverne aux environs de Soleure, dans une vallée qui porte encore son nom, et vivant de l'œuvre de ses mains elle travailla à l'évangèlisation des Alemans. Ayant été emprisonnée par un préteur païen, cet homme tomba subitement malade; elle eut le bonheur de lui rendre miraculeusement la santé et il la remit en liberté. Elle s'établit dans une île du Rhin, au confluent de l'Aar, dont elle chassa les serpents et les vipères, et f à Zurzach, près de Constance, où ses restes sont conservés. On se demande ce qu'il peut y avoir de vrai dans toute cette histoire. — Verena était aussi le nom d'une des 11 mille vierges.

VERGARA (de), trois frères, originaires de Cortone, et précurseurs de la Réformation en Espagne. 1° Jean, né 1491, savant en grec et en hébreu, chanoine de la cathédrale de Tolède, estimé de son archevêque et grand ami d'Érasme. Collaborateur de la Bible polyglotte, chargé par Adrien VI de traduire les livres de Salomon et du fils de Sirach, il signala quelques fautes dans la Vulgate et fut pour cela arrêté par l'inquisition et condamné à se rétracter, f 20 févr. 1555 à Tolède. — 2<> François, helléniste distingué, prof, de grec à Alcala-de-Héna-rès, ami d'Erasme. — 3° Bernardin, plus connu sous le nom de Tobar ou Tovar, un des savants les plus distingués du 16me siècle, d'après P. Martyr. Tous les trois attachés de cœur à l'Évangile, ils furent arrêtés pour hérésie et obligés par l'inquisition d'abjurer publiquement leurs prétendues erreurs.

VERGERIO; trois frères: lo Pier-Paolo, né 1498 à Capo d'Istria, d'une famille noble, étudia le droit à Padoue, pratiqua à Vérone et à Venise, et suivant l'exemple de ses frères, entra au service de la cour de Rome, qui l'envoya comme nonce en Allemagne. Il mena à bonne fin plusieurs négociations épineuses, réussit à empêcher la convocation d'un concile national en annonçant la prochaine réunion d'un grand concile oécuménique, et visita même 1535 à Wittenberg Luther, qu'il essaya de gagner par diverses promesses (celle du cardinalat, dit Sarpi). En reconnaissance de ses efforts, il fut nommé év. de Madrusium, Croatie, et en 1536 de Capo d'Istria. A la fin de 1540 il fut envoyé au colloque de Worms, où son discours du janv. 1541 amena la rupture des négociations avec les protestants, en même temps qu'il était dénoncé au pape comme trop conciliant. Les calomnies du nonce Aléandre achevèrent de le perdre. Il revint à Capo d'Istria, et, en partie pour se réhabiliter, en partie pour se raffermir dans ses vieilles croyances, il entreprit d'écrire un livre contre les hérétiques et de les réfuter. Cette étude produisit un effet contraire à ce qu'il en attendait, et ses yeux s'ouvrirent à la vérité évangélique. Effrayé, il s'en ouvrit à son fr. Battista, et les deux travaillèrent avec succès, surtout en Istrie, à amener une réforme sans schisme. Ils n'en furent pas moins dénoncés par le fougueux Muzio, et cités à comparaître devant délia Casa, mais ils en appelèrent au concile et se rendirent à Trente. Justice leur fut refusée sous divers prétextes et on les renvoya à Rome. Dans un voyage à Padone il vit la fin du malheureux Spiera, et bientôt son propre frère, Battista, probablement empoisonné, comprenant que sa dernière heure approchait, quitta Pola pour venir mourir en paix entre ses bras dans le palais épiscopal de Capo d'Istria. Vergerio rompit alors avec Rome par une lettre éloquente à l'év. de Padoue, et le cardinal Caraffa, au nom du saint-office, lança contre lui, le 3 juill. 1549, une double sentence de dégradation el d'excommunication. Vergerio, ne pouvant plus compter sur la protection de Venise, partit en déc. 1549 pour la Valte-line. En 1553 il visita les principales égl. de la Suisse, Bâle, Berne, Genève, Zurich; se rendit ensuite à Tubingue, où plusieurs princes lui firent une pension; visita comme missionnaire la Pologne et l'Autriche; fraternisa avec 1« pasteurs de Strasbourg, et, en 1561, se laissa presque persuader par le nonce de se rendre an conc. de Trente; mais le nonce lui ayant refusé un sauf-conduit, la chose en resta là. Il se proposait de retourner à Tubingue, mais la peste venait d'y éclater; il s'arrêta donc à Gttppin-gen, chez Andreae, et échappa ainsi, sans le savoir, aux coups de 3 bandits que le pape avait apostés pour l'assassiner, + à Tubingue, 4 oct. 1665. Il a laissé de nombreux écrits, un Comment. sur les Actes, un Catéchisme, des brochures de controverse satiriques, plus acerbes que profondes, quelques Discours, plusieurs Traductions des œuvres des réformateurs allemands, une Vie de Pétrarque, etc. Ce qu'il a écrit de plus remarquable c'est sa lettre de rupture avec Rome. Dogmatiquement il ne parait pas avoir été bien au clair, sauf sur la doctrine de la justification par la foi; il a fraternisé avec les calvinistes, les luthériens, les fr. moraves, et même les sociniens. L'opposition à Rome était pour lui l'essentiel: Qum papa futumm est mihi sempiternum bellum. C'était le serment d'Annibal.

2° Battista, év. de Pola, effrayé d'abord de la conversion de son fr., partagea bientôt ses sentiments et se mit à évangéliser l'Istrie et Venise. Glorifier Dieu fut son unique désir.

3° Aurelio, resta attaché au service du pape.

VERMEIL, Antoine, né 19 mars 1799 à Nîmes, f 1844 à Paris. Fondateur de la maison des diaconesses 1841, de la Soc. de prévoyance et de secours pour veuves et orphelins de pasteurs, et de la Soc. chrétienne protest, de France 1834. Orateur distingué, il fit ses études à Genève où il passa 7 ans et où il reçut la bourgeoisie d'honneur. Il alla de là à Hambourg, fat nommé pasteur à Bordeaux 1824 à 1840, puis à Paris. Homme de cœur et de bon conseil, il montra autant d'activité que de talent d'administrateur dans les diverses œuvres qu'il fonda ou qu'il fut appelé à diriger. On a de lui des sermons et un catéchisme liturgique.

VERMIGLI, plus connu sous le nom de Pe-trus Martyr, né 8 sept. 1500 à Florence, fils d'un patricien florentin, entra 1516 au couvent des augustins de Fiesole malgré son père et fut déshérité; étudia à Padoue la philos., la sco-lastique, le grec, lés Pères; à Bologne l'hébreu; en 1526 il commença à voyager, prêchant et donnant des conférences, devint abbé de Spo-leto, et trois ans après prieur de Saint-Pierre ad aram à Naples. Sous l'influence de Valdès et de l'éloquent Occhino il accepta enfin la doctrine de la justification de la foi. Quoique déjà entaché d'hérésie il fut nommé visiteur de l'ordre, mais l'austérité de ses mœurs fit qu'on chercha à s'en débarrasser; on l'envoya comme prieur à Lucques. Là il prêcha l'Évangile jusqu'à ce que l'inquisition l'obligea à fuir; il rompit ouvertement avec le catholicisme à Pise, se rendit à Florence, Bologne, Zurich, 1542, et Strasbourg où il se lia avec Bucer et fut nommé prof, de l'A. T. De là il écrivit son De fuga in persecutione. En 1547 Cranmer l'attira en Angleterre où il fut nommé prof, à Oxford, fit des conférences, soutint des discussions publiques avec les docteurs catholiques et conseilla la rupture complète avec Rome. Les actes de cette discussion furent publiés par lui, Londres 1549, et aussi par Tresharn un de ses adversaires. Ses doctrines de la justification et de la prédestination furent surtout combattues par Pighius. A l'avènement au trône de la sanguinaire Marie, 1553, il dut quitter l'Angleterre et fut nommé à Strasbourg à condition qp'il éviterait toute controverse sur la Cène. C'est à cette époque qu'il projeta d'introd. la Réforme en Pologne et qu'il écrivit ses deux traités sur la Trinité et les deux natures en Christ. Il continua ses relations avec l'Angleterre, exerça une grande influence surtout sur le parti des puritains, et écrivit encore en 1555 à Lucques. L'an d'après il refusa un poste qui lui était offert à Heidelberg et se rendit à Zurich où il donna des leçons sur Samuel et les Rois; il étudia l'hébreu avec Bibliander, aida Occhino avec sa communauté de réfugiés italiens. Genève chercha en vain à l'attirer. Son influence théol. fut grande, entre autres sur Bullinger et sur les Italiens généralement trop vagues, et mystiques dans leur dogmatique, et trop peu modérés dans leurs démonstrations. Il exposa avec clarté les bases d'un arrangement avec les luthériens, le cherchant non dans des moyens termes équivoques, mais dans l'activité en commun et dans l'association pour l'œuvre de la Réforme. Ses controverses avec Bibliander se terminèrent par l'acceptation pure et simple des doctrines de la prédestination par les Zurichois. Invité par le roi de Navarre à se rendre au colloque de Poissy, et muni d'un sauf-conduit réclamé par le gouvernement de Zurich, il y joua un rôle important. Il arriva le 21 sept., et dans la séance du 26, répondant en italien aux Italiens, il obtint un vrai succès d'admiration. Il parla sur le ministère en général et sur la transsubstantiation; il réfuta le reproche de rébellion adressé aux protestants, et pour faire preuve de largeur, il signa la Formule d'union sur la doctrine de la Cène. Il prit encore part à la controverse de Zanchius avec les luthériens de Strasbourg, et f 12 novembre 1562. Marié deux fois il n'eut qu'une fille de son second mariage. Vermigli est le pins remarquable des théologiens italiens; c'était un homme doux et affable, un professeur aimé, un orateur entraînant. Outre ses ouvrages déjà mentionnés, nous citerons encore son Catéchisme, une Exposition du symbole apostolique, un Comment, sur la morale d'Aris-tote, une étude sur le Célibat, une sur l'Eucharistie, etc.

VERNES lo Jacob, né 1728 à Genève, pasteur à Cologny, et en 1770 à Genève; longtemps ami de Rousseau, le combattit après la publication de l'Émile. Exilé 1782 à 1787 pour s'être opposé aux changements politiques demandés par le parti dominant, + 1791. Connu par quelques écrits religieux, mais surtout par un Catéchisme à l'usage de toutes les communions chrétiennes qui, d'édition en édition, devenait de plus en plus latitudinaire et relâché pour la doctrine, surtout quant à la divinité de J.-C.

2° Philippe-Louis, né 25 févr. 1815 à Paris, passa quelque temps à l'École polytechnique, puis se décida pour la théologie, étudia à la faculté de Lausanne (sous Vinet, Chappuis, Her-zog), fit ses examens de bachelier à Strasbourg, et fut consacré 1841. Pasteur de Nauroy, Aisne, 1841-1851, puis de Batignolles, et enfin de Paris 1860; président du Consistoire 1872. Vice-modérateur du synode officiel de 1872, et président de la commission de permanence. Essentiellement pratique et modéré, il s'est peu mêlé aux débats religieux, quoi qu'il appartienne franchement au parti évangélique. Il est le principal fondateur de la Soc. centrale protestante. Son père, M. Ch. Vernes, sous-gouverneur de la Banque de France, et son oncle, M. Félix Vernes, ont compté parmi les membres les plus influents et les plus dévoués du protestantisme français.

VERNET, Jacob, né 1698 à Genève, théol., consacre 25 sept. 1722, s'occupa plutôt de l'enseignement de la jeunesse. Prof, de théol. 1756. Ami de Montesquieu, dont il repassa l'Esprit des lois, et de Rousseau dont il combattit TÉmile dans un livre sur la Vérité de la relig. chrét. f 1780. Une de ses dernières paroles fut: Je sais en qui j'ai cru.

VERNY, Louis-Édouard, né 17 mars 1803 à Mayence, où son père était chef de division de préfecture. Il étudia le droit à Strasbourg et reçut de l'abbé Bautain de profondes impressions religieuses. A Paris en 1823 il connut Cousin et quelques rédacteurs du Globe. Après quelques années de barreau à Colmar, il se décida pour la théol., passa pour cela 2 ans à Strasbourg, fut en 1830 nommé principal du collège à Mulhouse; le voisinage de Bâle le mit en relations avec Vinet, qui lui ouvrit les yeux sur les beautés et l'esprit de l'Évangile; c'est là qu'il comprit le Réveil. «Vinet m'a fait l'opération de la cataracte, » disait-il. Nommé pasteur de régi, luthérienne à Paris 1835, il s'y lit bien vite une place importante par son activité, et surtout par sa prédication soignée, profonde et puissante, pleine de logique et de chaleur. Il visita en 1841 et 1842 l'Allemagne, et connut Rothe, Tholuck, Neander, J. Muller, Nitzsch, les principaux chefs de la théol. évangélique et scientifique. Le 19 oct. 1854 il ouvrit par un sermon à Saint-Thomas, la session du Consist. supérieur de la Conf. d'Augsbourg, et au moment où il allait finir son discours, il s'affaissa, frappé d'un coup d'apoplexie. Le deuil fut général, car malgré le caractère absolu de ses doctrines et de sa foi, Verny était un homme de conciliation, sans petitesse dans les controverses. Il a laissé un Catéchisme, un Recueil de cantiques, et un vol. de sermons publ. 1867 par son gendre Ed. Robert, avec un certain nombre d'articles qui avaient paru dans le Semeur, l'Espérance et la Revue de théologie.

VÉRONESE, Paolo Caliari, né 1528 à Vérone (dont il prit le nom), f 1588; fils d'un sculpteur, se fixa à Venise et prit pour modèles le Tintoret et le Titien. Connu surtout par ses Noces de Cana, prétexte à riches costumes, portraits contemporains et ornements de toutes sortes; la couleur locale y fait défaut, et l'on ne comprend guère qu'à un pareil banquet le vin soit venu à manquer. Mais ce n'en est pas moins un brillant spécimen du bel art italien de la Renaissance. On doit encore à Véronèse une Adoration des mages, les Disciples d'Em-malls, Moïse sauvé des eaux, la Vierge et l'enfant Jésus, l'Évanouissement d'Ester, et d'autres beaux tableaux d'église. Gracieux comme dessin, Véronèse est un coloriste de premier ordre.

VÉRONIQUE, femme pieuse de Jérusalem.

dont la légende raconte qu'elle détacha son foulard de tête et l'offrit à Jésus lorsqu'on le conduisait à Golgotha, pour essuyer sa sueur et le sang dont son visage était couvert. Jésus le lui rendit après s'en être servi, et l'on reconnut avec surprise que l'empreinte de son visage, son vrai portrait, y était marqué, on a naturellement conservé avec respect cette précieuse relique, qui porte le nom de Saint-Suaire, et qu'on montre auj. à Saint-Pierre de Rome, à Milan, à Jaen en Espagne, etc. On montre aussi à Jérusalem, sur le chemin de la Croix, la maison qu'habitait la sainte. Sur cette fable, qui date du moyen âge, d'autres détail* ont été brodés. Les clémentines, qui la nomment Béronice, ou Bérénice, la font fille de la syro-phénicienne Justa, ou l'identifient avec l'hémorrhoïsse qui toucha la frange du manteau de Jésus. Quelques-uns la font mourir martyre à Antioche; d'autres l'envoient à Rome avec son bien-aimé Amatus, le serv iteur de la sainte famille, puis dans les Gaules où elle aurait vécu en carmélite et serait f 75. On ajoute que Tibère, devenu lépreux, ayant entendu parler du saint-suaire, aurait mandé Véronique à Rome, et que guéri par elle, il lui aurait accordé comme récompense la disgrâce et l'exil de Pilate. On rattache aussi toute cette histoire au fameux portrait d'Abgare, et le nom de Ver a icon (vrai portrait) serait devenu à la longue celui d'une personne; c'est l'idée de Papebrock et de Mabillon, et dans ce cas toute la légende tomberait. — Une religieuse de Milan f 1497, canonisée, porte aussi ce nom.

VESPASIEN, Titus Flavius, né l'an 9 a Réate sur la frontière sabine, était fils d'un publicain. Il remplit diverses fonctions militaires et civiles sous Caligula, Claude et Néron, fut nommé consul en 51 et proconsul d'Afrique en 59. Il tomba en disgrâce pendant la tournée artistique de Néron en Grèce, puis il fut chargé de la guerre de Judée. Il s'agissait de réprimer la révolte qui avait éclaté sous Florus et doot Cestius Gallus n'avait pu venir à bout. Il passa l'hiver de 67 à Antioche et Ptolémaïs, faisant ses préparatifs, prit en 68 Séphoris et Jotapat défendue par Josèphe, et il allait marcher sur Jérusalem, quand il apprit la mort de Néron. 11 envoya son fils Titus, féliciter Galba, mais Galba était mort avant son arrivée, et pendant qu'Othon et Vitellius se disputaient sa succession, Vespasien se fit proclamer empereur par l'armée d'Orient, aidé des généraux Mucien et Antonius, ainsi que de prétendus oracles qui circulaient parmi le peuple. Il n'en fit pas moins féliciter Vitellius, mais la voix publique l'acclamait, et laissant à Titus la direction de la guerre, il se rendit 69 à Rome où il entra sans obstacle. Il rétablit l'ordre dans la Gaule troublée par Civilis, envoya Agricola soumettre la Bretagne, présida au triomphe de Titus sur les Juifs, fit fermer le temple de Janus, et f 23 juin 79 après un règne sage et glorieux, humain et tolérant. Il fit de son mieux pour ne pas ajouter à la douleur des Juifs et laissa les chrétiens tranquilles. Il disait qu'un emp. romain doit mourir debout.

VEUILLOT, Louis, né 1813 à Boynes, rédacteur en 1831 et 1832 à Rouen et à>érigueux, de journaux ministériels, collaborateur en 1836 de la Charte, puis de la Paix de 1830. L'ardeur de sa polémique lui valut de nombreux duels, qui lui firent une réputation. Un voyage à Rome le fortifia dans ses instincts ultramontains, qui devinrent du fanatisme;chez lui la violence s'ajouta aux excès de la sophistique des jésuites. En 1838 il fut nommé chef de bureau au ministère de l'intérieur, mais il n'en continua pas moins son œuvre de journaliste et devint collaborateur de l'Univers, puis son rédacteur en chef jusqu'au moment où ses attaques contre le gouvernement de l'Italie et contre les évêques de France firent suspendre cette feuille. Elle ne reparut qu'en 1867. Depuis 1844 il s'était associé son fr. Eugène, non moins exalté que lui. Il fit plusieurs voyages à Rome, souvent à la tête d'une députation du parti; il y était pendant le concile. Auteur de nombreux écrits: Souvenirs d'un pèlerinage en Suisse; Pierre SsRntive, le Saint-Rosaire, les Parfums de Rome, les Odeurs de Paris, Mélanges religieux, l'Esclave Yindex, etc. f 7 avril 1883.

VIATIQUE; dans un sens général ce mot signifie provisions de route, argent ou autres (du latin via, chemin). Dans le langage catholique, c'est spécialement la communion qu'on donne aux mourants pour les fortifier dans le grand et dernier voyage. On dit porter le viatique à un malade, et dans la langue populaire on dit: lui porter le bon Dieu. Anciennement on donnait ce nom à toute espèce de sacrement administré in extremis, même au baptême ou à l'extrême onction.

VICAIRE, ecclésiastique prenant la place d'un autre et remplissant ses fonctions en son absence ou comme son assistant. Le vicaire ou suffragant de paroisse devrait, dans la règle, ne relever que du curé qu'il doit aider, mais en réalité il dépend de l'évêque qui peut le nommer et le révoquer à son gré; un vicaire imposé à un curé est souvent une disgrâce pour celui-ci, quelquefois un espion. Le vicaire général, ou grand vicaire d'un èvêque, est le prêtre choisi par lui pour exercer une partie de ses fonctions et pour se soulager dans une tâche souvent considérable. On appelle vicaire capitulaire le prêtre choisi par le chapitre dans les jours qui suivent la mort d'un èvêque, pour le remplacer provisoirement jusqu'à l'élection de son successeur; il doit être docteur ou au moins licencié en droit canon. Le pape, qui s'appelle vicaire de Jésus-Christ, a aussi, comme èvêque de Rome son vicaire général, qui est presque toujours un cardinal, et dont les attributions sont très étendues. On nomme vicaires apostoliques des évêques que le pape continue de nommer à d'anciens évêchés qui n'existent plus, dans des pays infidèles d'où le christianisme a été banni, comme l'Afrique, la Turquie, ou dans des pays hérétiques, dans les colonies, dans les missions, etc. — L'université de Caen a possédé un prof, de théol. Philippe Vicaire, 1689-1775, qui s'est distingué dans la lutte contre les jansénistes et les protestants.

VICEL1N, apôtre des Obotrites, naquit vers la fin du lime siècle à Quern-Hammeln (Ham-mel) sur le Weser. Orphelin de bonne heure et dépouillé de ses biens, il entra au collège de Paderborn et fut bientôt appelé au rectorat de l'école de Brème. Mais avide de connaissances il se rendit avec son ami Dittmar, ou Thetmar, à Paris, il y passa 3 ans, se dégoûta de la scolastique, lui préférant la théol. biblique, et son cœur le porta à évangéliser les païens. Il choisit les Vendes pour champ de travail; l'archev. Norbert de Magdebourg le consacra avec joie et l'envoya d'abord à Lubeck; l'archev. Adalbero de Brème mit à sa disposition tout son diocèse, et le prince Henri le reçut avec distinction, lui et ses deux aides, Rudolph et Ludolph. Mais la même année, 1126, Henri fut assassiné, et Vi-celin reprit son projet d'aller chez les Vendes, qu'il trouva à moitié barbares, quoique chrétiens de nom. Il visita en même temps les égl. du Holstein et celles du Schleswig, élevant des temples et fondant des couvents. Les guerres civiles menacent de tout entraver; à la fin Lo-thaire II impose aux Vendes un duc de Schleswig, Knut Laward, de la famille royale de Danemark; c'est un chrétien, ami de Vicelin; l'œuvre des missions reprend, les églises se relèvent, le duc fait construire quelques châteaux-forts, entre autres celui de Segeberg, pour tenir en échec les malveillants. Mais il est assassiné 1131, et tout est à recommencer. L'intervention de Lothaire et du roi de Danemark arrête un moment la fureur des idolâtres, mais ceux-ci, conduits par Pribislav reprennent le dessus et rasent jusqu'à Segeberg. Vicelin et ses missionnaires se retirent à Faldera (plus tard Neu-Muns-ter) et poursuivent courageusement leur œuvre. Adolphe de Holstein relève Segeberg, qui devient Segebourg, mais Vicelin transfère son couvent à Hagerestorp, pour être plus tranquille, et là, avec son ami Dittmar qui en est l'abbé, ils s'occupent à former de nouveaux missionnaires.

Henri-le-Lion, duc de Saxe, ayant recommencé la guerre contre les Vendes, et contre leur chef Niclot, fr. de Pribislav, qui cependant avait laissé toute liberté aux missionnaires, et la fortune s'étant prononcée en faveur des gros bataillons, Hartwig, archev. de Hambourg, nomma Vicelin évêque d'Oldenbourg; mais le duc de Saxe et Adolphe de Holstein soulevèrent tous les deux des difficultés de juridiction, et ce ne fut que 7 ans plus tard que Vicelin se décida à recevoir l'épiscopat des mains d'Henri, ce qui lui valut sa disgrâce auprès d'Adolphe et de Knut. En 1152 il est à Mersebourg. A son retour, son ami Dittmar était mort. Lui-même s'établit dans le village de Bosau; il y pose les fondements d'une église qui reçut le nom de Saint-Pierre. Privé de la parole à la suite d'une attaque de paralysie, il se fait conduire à Neu-Munster pour s'y recueillir, et il f 12 déc. 1154. Son successeur Gerold transporte le siège épiscopal d'Oldenbourg à Lubeck.

VICTOR io africain de naissance, pape de 185 à 197, le premier qui ait manifesté l'esprit papal dans sa tendance à la domination. II condamna et excommunia Théodore de Byzance qui niait la divinité de J.-C. Il somma en 196 les év. de l'Asie-Mineure d'abandonner, quant à la célébration de la Pàque, l'usage apostolique pour adopter l'usage romain. Les év. de l'Asie-Mineure, Polycarpe en tête, répondirent par un refus. Victor, sûr des évêques de Césa-rée, de Jérusalem, d'Alexandrie et de Syrie, rompit la communion avec ceux de Polycarpe, comme chaque homme peut rompre avec un autre homme. Les évêques de l'Asie-Min. répondirent. Irénée, év. de Lyon, intervint en représentant à Victor le tort qu'il avait de troubler l'Église pour un sujet aussi peu important, et la paix fut rétablie; les deux partis continuèrent d'observer leurs jours particuliers. L'âpreté même de cette discussion sur un détail insignifiant prouve que les objets fondamentaux de la foi n'avaient pas encore été attaqués et que les pratiques anti-apostoliques qui furent introduites plus tard, ne s'étaient pas encore glissées dans l'Église.

2o Victor II, Guebhard, 1055-1057, év. d'Eich-shedt, conseiller et ami de l'emp. Henri IH. C'était, après l'emp., l'homme le plus puissant et le plus riche du royaume. Hildebrand le nomma pape malgré lui-même et malgré l'empereur. Il méritait cet honneur et fit tous ses efforts pour déraciner la simonie. Dans un concile tenu à Lyon, il fit destituer 6 évêques pour cause de mauvaises mœurs. Avant d'être pape, il avait cherché à limiter l'autorité pontificale; devenu pape il chercha à l'étendre, mais il put comprendre les contradicteurs. Il fraya le chemin à Hildebrand.

3o Victor ni, Didier, de la maison ducale de Capoue, abbé du mont Cassin pendant 29 ans, ami de Grégoire VII et son successeur. Élu pape en 1085 il refusa longtemps la tiare, et ne fut sacré qu'en 1087; il mourut 4 mois après. Il prêcha contre les Arabes d'Afrique une expédition qui leur fut funeste, Il eut à combattre Guibert de Ravenne, antipape sous le nom de Clément VII, qu'il excommunia dans un concile et que la gr. duchesse Mathilde chassa de Rome.

4° et 5°. Deux Victor IV antipapes; l'un Grégoire Conti, cardinal, nommé 1139 par les partisans d'Anaclet comme son successeur contre Innocent II; mais au bout de 2 mois saint Bernard l'amène à faire sa soumission; l'antre, le cardinal Octavien, de la famille de Tusculum, élu 1159 par le parti modéré, par l'emp. Fréd. Barberousse et par un concile convoqué à Païenne, en concurrence avec Alexandre HI et Calixte III. f 1164, et remplacé par Pascal IH.

6<> Un des saints de la légion thébaine.

7o V. de Marseille, officier romain, visitait et fortifiait les chrétiens pendant les persécutions; dénoncé â Maximien il fut condamné à divers supplices. Mis en prison il convertit ses gardes qui furent décapités. Lui-même eut la tête tranchée, 21 juill. 290 ou 303.

8o V. le Maure, né[en Mauritanie, soldat chrétien, martyrisé 8 mai 303 à Milan.

9o V. év. d'Antioche vers 400, auteur d'un Comment, sur Marc, espèce de compilation; publ. en grec et latin par Possin, Rome 1673.

10o Victor, ou Victorin, Claude-Marins, né en Provence, f de 425 à 450, fut prof, de rhétorique à Marseille, se retira ensuite dans la solitude, faisant de la Bible sa lecture habituelle; auteur d'un Comment, sur la Genèse, et de cantiques bibliques, souvent réimprimés.

llô V. év. de Cartenne (Tennez?) dans la Mauritanie césarienne, vers 460; auteur d'un grand ouvrage contre les ariens, présenté au roi Genséric; d'un traité sur la Pénitence, d'homélies, et d'une Épitre consolatrice à Basile, auj. perdus. Un traité De la Pénitence, publié par Migne, et un autre intitulé Consolation, publ. 1638 parmi les œuvres de Basile, lui sont faussement attribués.

12o Év. de Vite en Bysacène, forcé par les persécutions du vandale Hunéric de s'enfuir à Constantinople 483, où il demeura 4 ans. Au* teur d'une Hist. des persécutions sous Genséric et Hunéric, publiée par Ruinart 1694; trad. en fr. par Bellefore3t et Arnaud d'Andilly.

13o Év. de Capoue 541-574, traducteur d'une Harmonie des Évangiles d'Ammonius, avec Préface et Notes; auteur d'un Cycle pascal rectifiant celui de Victorius de Limoges.

14o V. év. de Tunones, ou Tunnunum (Tunis?), Afrique. Isidore de Sévillelui attribue une Chronique qui va de l'an 1 du monde à l'an 566, ap. C. et qui a surtout de l'intérêt pour l'hist. des Vandales 444-566, et pour celle de l'eutychianisme. D'après un mss, il serait l'auteur du livre sur la Pénitence mentionné n° H ci-dessus. Partisan décidé des Trois Chapitres, il fut 3 fois banni, enfermé 556 au château Dioctétien, puis interné à Tabenna, enfin enfermé à Constantinople, après que Justinien eut en vain essayé de le convertir autrement. Il survécut à ses persécutions et + ©n exil.

15° Év. de Carthage, vers 646, connu surtout par une lettre au pape Théodore, en faveur du

dyothélétfsme.

VICTOR (Couvents de Saint-) i<> ancienne abbaye de l'ordre de Saint-Benoît, fondée 409 près de Marseille par Jean Cassien. Elle prospéra quelque temps, mais fut détruite par les Visigoths, puis par les Normans. Réduite au llm« siècle à 5 religieux, elle fut relevée par Guillaume comte de Marseille et reçut de Léon IV et de Grégoire VII de grands privilèges, qui lui permirent d'avoir sous sa dépendance de nombreux couvents et abbayes,

2o Célèbre abbaye de l'ordre de Saint-Augustin, située dans un faubourg de Paris qui prit son nom. Elle s'illustra comme école, mais école du juste-milieu, et penchant vers la mystique de saint Bernard. Fondée 1109 par Guillaume de Champeaux, elle cherchait à vivifier la scolastique et à éclairer la mystique. Hugues, Richard et Gautier en furent successivement les représentants les plus attitrés.

3° Saint-Victor en Caux (apud Caletes), de l'ordre de Saint-Benoît, abbaye de Normandie, fondée par un prêtre nommé Tormor, qui y établit des moines de Saint-Ouen vers 1055. Ce n'était d'abord qu'un prieuré; un concile tenu à Rouen 1074 l'érigea en abbaye.

VICTORIN év. de Pétau, Styrie, probablement grec (d'autres le font africain), rhéteur, martyrisé sous Dioclétien 303. D'après Jérôme il aurait écrit des Comment, sur la Genèse, l'Exode, Lévitique, Ésaïe, Ézéchiel, etc., auj. perdus. Il ne reste de lui qu'un Comment, sur l'Apocalypse, que l'on a lieu de croire interpolé. Il était chiliaste.

VICTRICIUS, l'ami de Martin de Tours, missionnaire, puis év. de Rouen, + ou 417. La légende porte qu'il fut d'abord soldat romain, qu'il se convertit et demanda sa libération du service; que le tribun le fit charger de fers et fouetter de verges, et donna l'ordre de lui trancher la tête; que le soldat chargé de l'exécution devint subitement aveugle, et qu'à la suite de ce miracle de nombreuses conversions eurent lieu dans l'armée. Pour combattre l'arianisme il se rendit en Bretagne 393, puis en 403 pour se justifier du soupçon d'hérésie, auprès d'Innocent I«r qui lui avait fait adresser un recueil de la discipline romaine. On lui attribue un Éloge des saints.

vie

VIENNE lo Vienna Alfobrogum, vieille cité gauloise, faite colonie romaine par Tibère, dotée d'un sénat par Claude, quelque temps rivale de Lyon, et résidence principale du gouverneur de la Narbonnaise. Pilate y finit ses jours, dit-on. Il s'y forma de bonne heure, ainsi qu'à Lyon, une Égl. chrétienne, et les mêmes persécutions ravagèrent l'une et l'autre sous Marc-Aurèle 177; c'est là que succombèrent Plotin, Blandine, Symphorien et tant d'autres. En 258 on cite aussi le martyre de l'év. Florence. Quand la Narbonaise eut été scindée en 2 provinces, Vienne et Arles entrèrent en rivalité, chacune réclamant les droits métropolitains. Le conc. de Turin se prononça pour un partage amiable 401; Sozime trancha la question en faveur d'Arles, 417, mais Boniface rétablit le partage des droits par province. Léon I«r, en réponse aux réclamations d'Hilaire d'Arles, se prononça nettement pour Vienne 444, mais on en revint bientôt au mode de vivre imposé par les circonstances, et Vienne resta la métropole de sa province, la Viennoise. Parmi ses évêques on cite surtout Mamert, Avit, Agilmar et Adon. De 444-1312 douze conciles y furent tenus; l'un des plus importants fut celui de 892 convoqué par Formose pour régler les droits de l'Église; celui de 1112 présidé par l'arche v. Guido, qui excommunia Henri V d'Allemagne; le dernier, présidé par Clément V, fut le 15** conc. général, et fit le procès des Templiers pour obéir aux ordres du roi Philippe. Le concordat de 1801 a supprimé l'évêché de Vienne. Église protestante prospère.

2o V. capitale de l'Autriche. Bâtie par les Vendes, elle n'était encore qu'nn village quand Auguste s'en empara; les Romains en firent une de leurs stations militaires les plus importantes à cause de sa situation sur le Danube. Les historiens lui donnent les noms de Vindo-hona, Vindomana, Vindomina, d'où quelques-uns font dériver son nom actuel de Vienne (Wien); d'autres le dérivent de Faviana, nom que lui donne Eugippius dans sa Vie de Sé-verin et qui était généralement reçu au siècle; peu à peu Faviana aurait été abrégé en Viana,*Viena et Vienne. Son évangélisation se relie à celle de l'Autriche. On y trouve déjà des évêques dès 466, mais toute l'œuvre y fut momentanément détruite 840 par les invasions hongroises et antres. Paul II rétablit l'évêché 1468 à la demande de l'archiduc Frédéric III, et Clément XI l'érigea en archevêché 1721. L'univ. fondée 1365 comptait déjà 4 facultés en 1384. Deux conciles furent tenus à Vienne 1199 et 1217, mais eurent plus d'éclat que d'importance. Après d'illustres évêques vint 1513 Georges Slatkonia, un humaniste selon le cœur de Léon X, sous lequel la Réforme fit de rapides progrès, malgré l'opposition de la faculté, et jusqu'en 1576, surtout sous Maximilien II, le protestantisme compta de nombreux adhérents, au point que plusieurs évéques parurent s'y rattacher. Mais la réaction commença à se faire sentir sous Ernest et sous Matthias, et les jésuites favorisés reprirent le dessus. La guerre de Trente ans tourna en leur faveur, et à partir de 1624, le protestantisme fut proscrit et tous les habitants reçurent l'ordre de se faire instruire dans la religion catholique. La persécution devint générale, et on profita de l'occasion pour persécuter aussi les juifs; quand l'intolérance commence, elle ne se laisse ni restreindre, ni localiser. La politique antipapale de Joseph et de Charles coupa court à cette terreur; les protestants de V. furent autorisés à assister au culte des chapelles d'ambassades, et peu à peu ils recouvrèrent leur liberté; en 1783 on en comptait 4 mille possédant leurs temples ou leurs maisons de prières. Un recul sensible eut lieu sous Léopold II. Les guerres de la révolution et de l'empire détournèrent l'attention; l'Autriche maintint ses droits comme pouvoir civil, mais les jésuites qui se glissèrent de nouveau dans l'empire sous le nom de rédemptoristes 1820 restaurèrent l'absolutisme politique et religieux, et de progrès en progrès l'ultramontanisme finit par être le seul maître du pays; 1830 et 1848. loin de lui être fatal, le servirent et lui permirent d'élaborer le concordat de 1855 qui livrait l'empire à la cour de Rome. La guerre d'Italie 1866 renversa tout cet édifice, et la municipalité de Vienne se montra rebelle à toute tentative nouvelle faite pour ramener le passé. Les protestants en 1848 étaient au nombre de 20,000; ils possédaient une bibliothèque populaire depuis 1794; depuis 1796 un consistoire: depuis 1821 un collège d'exégèse et de dogmatique rattaché à l'université, et qui devint plus tard une faculté. Ils ont plusieurs églises, dont une franco-suisse. Les juifs ont 17 synagogues; ils sont plus de 40 mille.

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VIERGES (Onze Mille), v. Ursule, etMartyrs.

VIGILANCE, prêtre gaulois, né à Calagurri (Casères), petit bourg près de Comminges, Gascogne, fils d'un aubergiste, fut nommé curé à Barcelone, Espagne. Muni d'une recommandation de Sulpice Sévère, il se rendit auprès de Paulin de Nola, vers 395, et celui-ci l'envoya l'année suivante, comme prêtre, à Jérusalem vers saint Jérôme. Mais bientôt il en repartit, peu satisfait, visita l'Égypte, et revint en France où il trouva une place dans le diocèse de Toulouse. On ignore ce qui amena de la mésintelligence entre Jérôme et lui. L'amour-propre y entra pour quelque chose. Vig. était vaniteux et violent. Il écrivit contre Jérôme, l'accusaut d'hétérodoxie et d'origénisme. U se montra en même temps opposé au culte de> saints et des reliques, et condamna le célibat des prêtres; son voyage en Orient lui avait appris sous ce rapport bien des choses, et ses instincts occidentaux l'avaient mis en garde contre des superstitions, qu'il qualifiait de païennes. Jérôme lui répondit très vivement par un^ lettre écrite d'une seule nuit, et que nons possédons encore; au lieu de Vigilance, il le traite de Dormitantius, et réfute les reproches qui loi sont adressés. Vigilance était une bonne plume, sans être un fort théologien. Il est regrettable qu'il ait compromis des idées justes par des formes et des personnalités qui ne pouvaient qip leur nuire.

VIGILE lo diacre romain, élevé sur le siège pontifical du vivant de son prédécesseur Sil-vère 537, par les deux femmes qui avaient concouru à la chute de celui-ci, à la condition qu'il condamnerait le concile de Chalcédoine. La condition lui plut, mais une fois sur le trône il refusa une déclaration publique, bien qu'en particulier il s'exprimât comme monophysite. A la mort de Silvère 538, il fut généralement reconnu et sa position comme pape fut régularisée. Il prononça tour à tour l'absolution, puis la condamnation de trois évéques, pour eau* de monophysisme, mais voulut que sa condam nation restât secrète. Mandé à Constantinople par Justinien pour l'affaire des Trois-Chapitres. ce pape versatile hésita longtemps et ne donna d'abord que des réponses équivoques; il finit cependant par les condamner, 553. Balloté entre Juslinien et Théodora, qui différaient d'opinion sur ce point, persécuté par l'un ou par l'autre, il se fatigua de sa complaisance pour l'empereur, lui résista, se retourna vers l'impératrice par une évolution qui ne devait pas être la dernière, s'enfuit-, d'abord à Ormisda, puis en Chalcédoine, fut jeté en prison, se vit traiter d'hérétique et d'apostat et servit de prétexte ad schisme d'Aquilée, qui devait durer 150 an*. Justinien fit rayer son nom comme celui d un hérétique. Lassé et effrayé, Vigile céda de nouveau, obtint la permission de retourner à Rome, et mourut en chemin à Syracuse, 555, laissant une piètre réputation comme infaillibilité, ne sachant ce qu'il pensait et n'osant dire ce qu'il croyait.

2° Év. de Trente, nommé fort jeune à ce poste, après avoir étudié à Athènes et à Rome: il fut sacré par l'év. d'Aquilée et s'occupa avec zèle de l'œuvre des missions chez les païensdes contrées voisines. En 404 ou 405, ayant détruit une idole de Saturne dans la vallée de Randena, il fut lapidé par les habitants. On a de lui une

Lettre à Simplicius (év. de Milan?), où il raconte le martyre de 3 de ses collaborateurs, envoyés par Ambroise, et une autre à Chrysostome sur le môme sujet. Il ressort de son récit que Milan était alors pour l'évaugélisation une métropole complètement indépendante.

3® Diacre du S^e siècle, gaulois peut-être, vers 420, à qui Gennade attribue une Règle pour les moines, destinée à être lue dans leurs assemblées, et qui contient toute la discipline monastique, telle qu'elle s'était formée depuis Pacôme.

4° Év. de Thapsus en Bysacène, Afrique, vers 480; a laissé quelques écrits polémiques, publiés par le p. Chifflet, Dijon, 1664. Il règne quelque incertitude sur l'authenticité de plusieurs de ses écrits, dirigés surtout contre l'arianisme et l'eutychianisme, parce qu'il les publiait volontiers sous le pseudonyme d'Athanase. d'Augustin, ou de tout autre père, soit pour mieux affirmer sa communauté de foi avec eux, soit pour dissimuler son nom pendant les persécutions vandales. Il avait été banni par Hunneric 484,et s'était retiré à Constantinople; c'est là qu'il composa ses ouvrages. On lui attribue aussi (Quesnel), mais à tort, le symbole dit d'Athanase.

VIGILE, ou Veille, du latin Vigilia, terme de liturgie qui signifie la veille d'une grande fête. Autrefois les chrétiens passaient en effet une partie de la nuit en prière dans les temples la veille de certaines solennités, comme les grecs en ont conservé l'usage. Quelquefois on jeûnait aussi. L'origine de ces veilles, ou veillées, est obscure; quelques-uns la rattachent au fait que chez plusieurs peuples anciens la journée commençant au coucher du soleil, et non à minuit comme chez nous, la fête commençait le soir; d'autres, au devoir de la vigilance imposée au chrétien; d'autres enfin au culte que les chrétiens avaient pris l'habitude de célébrer la nuil à l'époque des persécutions. Il était résulté quelques abus de ces services nocturnes; Vigilance les dénonça, et peu à peu les vigiles furent remplacées par un service de prière le matin ou l'après-midi, qu'on appela service de préparation. Les vigiles de Noël et de Pâques durèrent plus que les autres, en souvenir de la naissance et de la résurrection de J.-C. qui eurent lieu la nuit. — On donne spécialement le nom de vigiles aux matines et aux laudes de l'office des morts, chantées aux obsèques d'un défunt, et qui, d'après un statut de 1215 dressé pour l'univ. de Paris, se chantaient la nuit.

VILLALON, Christoval (de), liceneié espagnol, auteur d'un Profitable Traité des Changes, 011 il stigmatise les profits illicites du confessionnal et les exactions des agents épiscopaux.

Impr. à Valladolid 1341 après avoir été vu et visé par les préposés de l'Inquisition.

VILLEGAGNON, Nicolas Durand (de), né à Provins 1510, neveu de Villiers de TIsle-Adam; marin distingué, officier des galères du roi, il lit en 1541 la campagne d'Alger, conduisit en 1548 la jeune Marie en Écosse, et contribua en 1550 à défendre Malte contre les Turcs (il était chevalier de Malte); il reçut sous Henri II la vice-amirauté de Bretagne. S'étant brouillé avec le gouverneur du château de Brest, et peu rassuré sur les suites que cette affaire pouvait avoir, il résolut d'aller fonder une colonie au Brésil. Il demanda l'appui de Colignv, et fit valoir l'asile que cette colonie pourrait offrir aux fidèles persécutés; auprès du roi on fit ressortir les avantages matériels de l'expédition. Le roi lui accorda 2 grands navires bien équipés et 10 mille livres. Il s'embarqua au Havre 15 juill. 1555 et arriva en novembre dans la baie de Guanabara, ou Janeiro. Les Topinamboys et surtout les Portugais, l'empêchèrent de s'établir à terre, et il se retira dans une île à laquelle il donna le nom de Coligny, qu'il fortifia. La plupart des colons qui l'avaient suivi étant protestants, il afficha pour leur foi un grand respect, renvoya ses vaisseaux en Europe et écrivit à l'égl. de Genève pour lui demander des pasteurs et des artisans bien qualifiés. Genève y répondit avec enthousiasme, en envoyant 2 pasteurs, Pierre Richier et Guill. Chartier; Jean de Léri, qui a écrit l'histoire de l'expédition, Phil. de Corguilleray, sieur du Pont, ami de Coligny, Cointat, ancien docteur de Sorbonne, et beaucoup d'ouvriers, mariés ou célibataires. La petite troupe recruta encore quelques renforts sur son chemin, et se composait de 300 personnes en arrivant à Honfieur; elle s'embarqua sous les ordres de Bois-le-Comte, neveu de Villega-gnon, le 19 nov. 1556, et arriva à Coligny le 7 mars 1557. Tout alla bien pendant quelque temps, mais bientôt Cointat ayant essayé d'introduire dans le culte des cérémonies catholiques et l'église s'étant divisée, Yillegagnon, qui craignait de passer en France pour protestant, se débarrassa de Chartier, qu'il envoya à Genève, soi-disant pour consulter Calvin; puis il jeta le masque et interdit la célébration de la Cène; il persécuta ceux qui ne voulurent pas se faire catholiques, fit étrangler ou noyer Bordel, Vermeil et Bourdon, chassa les autres de l'île. Seize de ces malheureux ayant pris passage sur un vaisseau qui retournait en France, il remit au capitaine un pli cacheté, recommandant au premier juge qu'il rencontrerait de les brûler comme hérétiques. Ils abordèrent 26 mai 1558 à Blavet, Bretagne; les dépêches furent remises, mais les juges, loin de poursuivre les accusés, les reçurent comme des frères et leur fournirent les moyens de continuer leur voyage; ils étaient protestants. Villegagnon vit promptement dépérir sa colonie, privée de ses meilleurs éléments; il revint en Europe, laissant l'île et ses canons aux Portugais. Il écrivit contre Calvin et contre Frédéric III du Palatinat, représenta Tordre de Malte à la cour de France, et f 1571 dans une propriété de son ordre. On a de lui, en latin l'hist. de son expédition à Alger, et celle de la campagne de Malte.

VILMAR, Aug.-Fréd.-Chrétien, né 21 nov. 1800, fils d'un pasteur de village, étudia àMar-hourg. en sortit rationaliste, se montra libéral enthousiaste en 1831 et 1848; prof, à Marbourg en 1833. Il finit par devenir, avec son ami le ministre Hassenpflug, réactionnaire en politique et orthodoxe luthérien jusqu'au matérialisme, mettant les sacrements (il en comptait cinq) au-dessus de la Parole de Dieu, f 1868.

VINCENT lo martyr de l'Agenois, dont la mémoire était populaire au 6"" siècle, mais dont on ignore s'il est mort sous Décius, Valé-rien, Maximien ou Aurélien 273. Comme il prêchait aux environs d'Agen, il se trouva à une féte que les païens célébraient en l'honneur du démon, et par un simple signe de croix il dissipa les illusions du peuple. Arrêté comme magicien, il fut livré au gouverneur, qui le fit mettre à mort par le glaive.

2° V. de Saragosse, d'une famille noble de Huesca, p. é. parent de Laurent de Rome, et célébré par Augustin, Prudence, Paulin de Nola et Venantius Fortunatus. Élevé par l'év. Valère qui le fit archidiacre et lui confia l'enseignement et le ministère de la parole. Au commencement de la persécution dioclétienne 303, ils furent l'un et l'autre conduits à Valence, chargés de chaînes, devant le gouverneur Datien. Sommés d'abjurer ils refusèrent; l'év. fut banni, et Vincent qui avait porté la parole fut soumis à des tortures qui dépassent tout ce qu'on avait vu jusqu'alors. Ses membres déjà aifaiblis par les privations furent broyés et tordus; puis on Je plaça sur un gril hérissé de pointes, au-dessus d'un petit feu, en même temps qu'on lui passait des fers rouges sur le corps et qu'on répandait du sel sur ses blessures saignantes. On le jeta ensuite, pour l'y laisser mourir de faim, dans un cachot obscur, semé de pierres pointues et de débris de verre. Ici l'histoire devient légende; les anges viennent et changent les pierres en fleurs, une grande lumière éclaire le cachot; Vincent prêche à la foule rassemblée devant sa prison. Quand les geôliers purent supposer qu'il était mort, ils entrèrent pour l'emporter, mais ils le trouvèrent guéri de ses blessures, très faible encore et en prières. Émus de ce spectacle, ils se convertirent et tombèrent à genoux devant lui. Datien dans sa fureur fit préparer de nouveaux instruments de supplice, plus horribles que les premiers, mais Dieu retira à lui son vaillant serviteur avant cette nouvelle épreuve. Son corps fut jeté aux bêtes, mais les corbeaux le protégèrent. On le jeta à la mer, mais il surnagea et fut déposé sur le rivage, oA les chrétiens le recueillirent et l'enterrèrent. Ses restes sont maintenant à Lisbonne.

3° V. de Lérins, gaulois de naissance, peut-être de Toul, suivit la carrière des armes; il eut une jeunesse agitée et troublée, et chercha un refuge dans la religion. Il se retira au couvent de Lérins, près d'Antibes, et se partagea entre la pénitence et l'étude. Ordonné prêtre, il présida à l'éducation des 2 fils d'Enchère, f 24 mai 450. Savant théologien il a laissé un livre précieux pour la connaissance du catholicisme de son temps, le Peregrini Commomto-rium (dont une partie est perdue;) avertissement pour prévenir le chrétien contre les nouveautés religieuses et les hérésies. Il fixe la tradition et occupe une place importante dans l'hist. du moyen âge.

4° V. de Beauvais, dominicain, né en France vers 1190, disciple d'Albert-le-Grand, sous-prieur du couvent de Beauvais, lecteur et ami de Louis IX, éducateur des jeunes princes, f vers 1264 au château de Royaumont. Savant, et auteur de plusieurs écrits. On a entre autres de lui le Spéculum majus, le Grand Miroir, divisé en 3 parlies: naturel, doctrinal et historique (la 4me partie, la morale, n'est pas de lui); c'est une revue de toutes les sciences connues de son temps, mais aussi avec toutes leurs lacunes. Il divise son hist. de la nature d'après les 6 jours de la création. Mentionnons encore un Traité sur la grâce, une Lettre de Consolation à saint Louis au sujet de la mort de son fils, et surtout son livre sur l'Éducation des jeunes filles royales et nobles, le seul livre pédagogique que nous ait légué le moyen âge.

5° V. Ferrier, dominicain, né 1357 à Valence, Espagne, + 5 avril 1419 à Vannes. Docteur en théol. et puissant prédicateur, confesseur de Benoit XIII, il visita toute l'Europe occidentale avec de grands succès. A Constance 1415 il opina pour la déposition des 3 papes et vota pour Martin V. On lui attribue des miracles et le don de prophétie. Auteur de Lettres et de divers ouvrages, sur la fin du monde, la vie spirituelle, la messe, etc.

6<> V. de Paul ou Depaul, né 24 avril 1576 à Ranguines, hameau de Pouy, près de Dax, Gascogne, fils de pauvres paysans. Il garda d'abord le petit troupeau de ses parents, étudia chexles franciscains de Dax, puis à Toulouse, reçut les ordres de 1598 à 1600, fut nommé curé de Thil, et se fit recevoir bachelier 1604. Revenant de Marseille par mer 1605, il fut pris par des corsaires, conduit à Tunis, vendu à un pêcheur, qui le revendit à un médecin; il passa enfin entre les mains d'un savoyard renégat, dont il convertit la femme à la religion chrétienne; le renégat lui-même regretta sa défection et ensemble ils réussirent à revenir en Europe, 1607. Après une visite à Rome, il fut nommé aumônier de la reine Marguerite de Valois (divorcée de Henri IV) et son secrétaire particulier. Logé près de l'hôpital de la Charité, il prodigua ses soins aux malades. Pierre de Bérulle, qui fut plus tard cardinal, le fit entrer dans sa nouvelle congrégation de l'Oratoire, et le fit nommer 1611 à la cure de Clichy, où il établit la confrérie du Saint-Rosaire. En 1613 il entra dans la maison de Gondy, général des galères, pour faire l'éducation de 3 jeunes gens, et ses relations avec cette famille ouvrirent un nouveau champ à son activité philanthropique; il visitait les galériens, les encourageait, les consolait, adoucissait leur sort, et comme dans le nombre il y avait des condamnés protestants, il en gagna quelques-uns par sa bonté, son humilité et ses services. De là il passa à Châtillon-les-Dom-bes, Bresse, où il releva l'état moral du clergé et fonda 1612 la confrérie de la Charité, qui donna naissance à plusieurs autres œuvres du même genre. De retour chez les Gondy en 1619, il fut nommé en 1624 aumônier général de toutes les galères de France, puis premier supérieur des religieuses de la Visitation. En 1624 il fonda la Congrégation des Prêtres de la Mission, autorisée par l'archev. de Paris, frère de Gondy, qui lui donna le Collège des Bons Enfants (où V. demeura depuis la f de M®* de Gondv 1623); par Louis XIII 1627, parle parlement 1631, par Urbain VIH 1632. Ces prêtres furent aussi nommés Lazaristes, q. v. En 1638 il leur donna une organisation positive et une Constitution. Il exerça aussi sur le clergé une grande et bonne influence, et ne cessa de s'intéresser aux galériens, pour lesquels il fonda même un hôpital à Marseille en 1648. On raconte qu'un jour, d'accord avec l'inspecteur, il prit la place d'un forçat, père de famille, dont la douleur l'avait ému,>et qu'il fallut l'intervention de Mme de Gondy pour le faire remettre en liberté. En 1634 il forma l'œuvre des Sœurs de Charité, ou Sœurs grises, pour le soin des pauvres et des malades; puis celle des Enfants trouvés, dont les commencements furent difficiles, mais qui fut fixée en 1648 à la suite d'un émouvant discours de Vincent; l'hospice du nom de Jésus en 1653 pour 80 vieillards, l'hôpital des pauvres de la Salpétrière, etc. Enfin on lui doit la fondation et l'établissement des grands séminaires 1635. f 27 sept. 1660, fouffrant depuis plusieurs années d'une fièvre intermittente; enterré dans l'égl. de Saint-Lazare; béatifié 1727, canonisé 1737 par Clément XII. Vie, par l'év. Abelly, Collet, Capefigue, Guizot.

— Un grand nombre d "Abbayes portent le nom de saint Vincent. Ainsi in nemore (aux Bois) près de Châteauneuf, de l'ordre d'Augustin: celle de Besançon, de l'ordre de Benoit; d'autres à Metz, à Senlis, au Mans, à Oléron, en Guyenne, etc.

VINCENT, Jacques-Louis-Samuel, né 1787 à Nimes, descendant de pasteurs du désert. Il montra de bonne heure des aptitudes extrême-ments variées et une grande facilité pour apprendre. Après avoir achevé ses études à Genève, il fut nommé catéchiste à Nîmes 1810, et ne tarda pas à se distinguer par ses talents et son activité littéraire. Il fut nommé pasteur, puis en 1825 président du Consistoire; il fut un moment suspendu sous le ministère Corbiè-res, pour lui avoir refusé son appui lors des élections. 11 est en outre membre du Conseil général du Gard, de la Commission des prisons, de l'Académie, de la Soc. d'Utilité publique, professeur à l'École normale des instituteurs, membre de la Soc. d'agriculture, etc. Il a travaillé à introduire le système lancastrien en France. Très bien équilibré comme caractère et comme intelligence, il a eu moins de succès comme prédicateur; un défaut de prononciation lui nuisait auprès du grand public, et ceux-là seulement qui s'attachaient à la pensée se réunissaient pour l'entendre. On peut le regarder comme un des chefs de l'ancien libéralisme, qui n'avait pas encore rejeté toute foi au surnaturel; il voulait unir le rationalisme au suprana-turalisme, mais sa méthode allait plus loin. Pour lui la religion n'était pas dans le dogme, mais dans la vie intérieure et dans les œuvres, et il allait jusqu'à ne pas donner d'importance même à la doctrine de la divinité de Jésus-Christ. Il demandait la séparation de l'Église et de l'État, et la convocation des synodes, mais comme un idéal et en réservant le moment favorable. Souffrant depuis longtemps, il +10 juillet 1837. On a de lui plusieurs sermons, un catéchisme, des Observations sur l'unité religieuse, des Observ. sur la voie d'autorité appliquée à la religion (en réponse à Lamennais): des Mélanges de relig., de morale et de critique; Le pasteur réformé du 19m« siècle, Du protestantisme en France, Méditations relig., une Revue (avec Fontanès), Religion et christianisme, quelques réimpressions, des articles dans les Archives du christ., le Courrier du Gard, etc.

VINCI, Léonard (de), né 1452 à Vinci, près Florence, fils naturel d'un notaire; grand, beau, bien doué, très savant, ingénieur, anatomiste, écrivain, poète, musicien, peintre, sculpteur, architecte, il travailla successivement à Milan,

Florence et Rome, puis vint mourir en France, à Amboise 1519; ses têtes de Vierges rivalisent avec celles de Raphaël. Son clW-d'œuvre est le tableau de la Cène dans le réfectoire des dominicains à Milan; sa Joconde est également célèbre, ainsi que son Charles VIII. Le Louvre a de lui 9 tableaux ou portraits. Il a réalisé l'idéal du beau en peinture, quoique son coloris laisse à désirer. Comme caractère il eut ses petitesses, il jalousa Michel-Ange, et l'on dit qu'il se vengea de quelques ennemis en leur donnant de vilains rôles dans quelques tableaux.

VINET, Alexandre-Rodolphe, né 17 juin 1797 à Ouchy, sous Lausanne, dans la tour carrée où son père, ancien régent, était employé des péages. Français par ses ancêtres, il fut touj. un bon Vaudois, mais il aimait la France. Il étudia à Lausanne, et à travers une grande timidité, montra de bonne heure un esprit original et un caractère indépendant. M^e de Montolieu l'appelait un jeune homme laid qui devient beau quand il parle. Après un court preceptorat il fut, à 20 ans, nommé prof, au gymnase de Bâle. En 1819 il acheva à Lausanne ses examens de théol., fut consacré et prit rang parmi les ministres vaudois. De retour à Bâle il épousa sa cousine Sophie De la Rottaz, qui fit son bonheur et qui lui survécut, f 1884. C'est à cette époque qu'il publia les importants ouvrages qui lui ont valu la position éminente qu'il occupe parmi les critiques et les écrivains français: Chrestomathie, Hist. de la littér. franc., Études, Poètes du siècle de Louis XIV. Mais bientôt il allait entrer dans la carrière militante et prendre position. A l'occasion des persécutions contre les dissidents, il réclama, non la tolérance qui tient du scepticisme et du mépris, mais la liberté religieuse qui est un droit de tous, et qui fut en quelque sorte l'inspiratrice de toute sa vie. Il écrivit coup sur coup plusieurs brochures et livres sur ce sujet, dont 2 furent couronnés à Paris, le Mémoire en faveur de la liberté des cultes 1826, et l'Essai sur la Manifestation des convictions relig. 1842, qui conclut nettement à la séparation de l'Égl. et de l'État. Il intervint plusieurs fois directement en faveur des dissidents persécutés contre le gouvernement persécuteur, et soutint que dans les cas de conscience il faut braver la loi si on ne peut la faire révoquer, ce qui lui valut une amende de 120 fr. (80 fr. anciens), et la suspension pour un an de ses droits ecclésiastiques. En 1831 commence sa collaboration active et régulière au Semeur, qui ne cessa qu'avec sa vie. Vers la même époque il se fait aussi connaître comme orateur chrétien et comme prédicateur; ses Discours, ses Méditations sur divers sujets religieux, datent de 1S31 et se poursuivent, se réimpriment et se traduisent d'année en année, avec un succès croissant. En 1837 il est appelé à Lausanne comme prof, de théologie pratique. L'univ. de Bâle lui donna comme souvenir le titre de docteur (Berlin aussi en 1846) 11 eut à intervenir dans les débats ecclésiastiques de son canton. Nommé membre de la Délégation des classes, il vota pour tout ce qui pouvait améliorer l'organisation de l'Égl. nationale, quoiqu'il en repoussât le système; il travailla loyalement à tirer le meilleur parti de ce qui existait en fait; il vota le maintien de la Conf. de foi, Fadjonc-tion des laïques, etc. Le Grand conseil élabora sa nouvelle loi ecclésiastique dans un sens qni aggravait les objections et les répugnances de Vinet, et en 1840 il se retira de l'Egl. nationale. En 1844 il donna aussi sa démission de prof, de théologie, mais en 1845 le gouvernement le nomma prof, de littérature française à cause de sa « réputation européenne. ® Le 3 déc. 1846 il était de nouveau congédié, pour avoir assisté à d'autres services religieux que ceux du culte officiel. Il fit partie de la coin-mission centrale du synode de l'Église libre, réuni à Lausanne 10 nov. 1846, mais il ne réussit pas à y faire prévaloir ses vues, qu'on trouvait trop individualistes. Il donna un cours de littérature pour dames au profit d'une école normale supérieure d'institutrices, et continua dans un local privé son cours de théol. pastorale libre pour les étudiants. Mais ses forces déclinaient. Le 19 avril 1847 il se fit transporter à Clarens, où il s'éteignit doucement le 4 mai. C'est là qu'il a été inhumé; les étrangers vont visiter son tombeau. Outre les ouvrages cités il a laissé encore (publ. de son vivant ou après sa mort): L'Éducation, la Famille et la Société; Théologie pastorale, Homilétique, Hist. de la prédication parmi les réf. de France au 17me siècle; Études sur Pascal, les Moralistes au 16®« et au 17®e siècles, etc., etc. Son influence n'a cessé de grandir. Par ses sympathies il appartenait à la théologie du réveil, mais il s'en éloignait par la doctrine, sans cependant la combattre. Sa foi se résumait en Christ, fils de Dieu, et Dieu, qui nous délivre du péché et nous conduit à Dieu. v. Scherer, Chappuis; Astié, Esprit de Vinet (très important). les 2 théologies nouvelles au sein du prot. français; le Vinet de l'hist. et celui de la légende; Rambert, Vie et Lettres, 2 vol. d'un grand intérêt; Fréd. Chavannes, etc.

VIRET, Pierre (signant quelquefois de son anagramme Terrius), né 1511 à Orbe, d'un couturier et retondeur de drap, étudia à Paris les lettres et la théol. sous Lefèvre d'Étaples, et fut gagné à la Réforme avant d'avoir reçu les ordres. De retour à Orbe il entendit Faref, et se laissa persuader par sa parole chaleureuse de se vouer au ministère. Consacré 6 mai 1531 il eut le bonheur de voir ses parents se convertir à l'Évangile, et se mit résolument à la prédication, visitant toute la contrée d'alentour et administrant les sacrements. Ce ne fut pas sans danger; à Payerne en 1533 il fut frappé au dos par un prêtre, un soir, veille d'un jour où il devait discuter avec lui. La blessure fut longue à guérir. En janvier 1534 il fut envoyé à Genève avec Farel et Froment, et ils réduisirent au silence l'insolent Furbiti. Après avoir logé d'abord à la Tête Noire, les réformateurs prirent pension chez Claude Bernard, où une servante, Antoina, soudoyée par les prêtres, essaya de les empoisonner. Viret seul soupa ce soir-là, et il fut longtemps entre la vie et la mort; même il ne se remit jamais complètement. Il se rend ensuite à Neuchâtel, puis à Lausanne où en avril 1536 on met à sa disposition l'égl. des dominicains, et après la célèbre dispute du mois d'octobre les Bernois le nomment, avec Caroli, second pasteur de la ville. Il y resta 22 ans, à la fois prédicateur et professeur; marié 1538, remarié 1547. Malgré la douceur de son caractère, il eut constamment à lutter, soit contre ses collègues, soit contre la population dont les mœurs étaient trop faciles, soit contre le gouvernement de Berne. Il aurait voulu faire prévaloir à Lausanne la discipline ecclésiastique de Calvin, et les libertins, exilés de Genève, lui rendirent plus d'une fois la vie difficile. A la lin, après de stériles disputes sur la prédestination, la Cène, la discipline, et l'excommunication, Bèze étant parti pour Ge nève, 1558, le gouvernement bernois congédia Viret et son collègue Vadier, janv. 1559; 38 pasteurs et prof, les suivirent dans leur retraite. Le 2 mars Viret était nommé pasteur à Genève, mais sa santé le força de chercher un climat plus doux. Il se rendit à Nîmes, à Montpellier, à Lyon, où il obtint de grands succès, à Orange, recommandant toujours la douceur et la persuasion. Enfin en 1566 il accepta un appel de l'académie d'Orthez et de Jeanne d'Albret; là, surpris par les troupes catholiques, il fut fait prisonnier, enfermé au château de Chaba-nay, puis délivré par un détachement huguenot. f 1571 à Orthez; enterré dans les caveaux de la famille royale. Ses nombreux écrits se distinguent par l'esprit, le style et l'érudition, plus que par l'originalité et la profondeur. On remarque surtout: Disputations chrétiennes, Comment, sur saint Jean, id. sur les Actes, Traités divers pour l'instruction des fidèles, de la vraie et fausse religion, Satires chrétiennes de la cuisine papale, etc. — Un monument lui a été élevé dans l'église d'Orbe; v. Gaberel.

VIRGILE, probablement Frargil, ou Fiergal, moine irlandais, d'une famille noble, compta d'abord parmi les collaborateurs de Boniface, vers 744, mais maintint son indépendance vis-à-vis des tentatives autoritaires de ce dernier. Il refusa de refaire des baptêmes que Boniface regardait comme nuls, parce qu'un prêtre ignorant avait estropié la formule du sacrement (in nomine patria, filia et spiritua sancta). Le pape donna raison à Virgile, ce qui froissa Boniface, et bientôt il dénonça de nouveau son ancien compagnon de travail, pour avoir dit qu'il y avait des antipodes, un autre monde et d'autres hommes, ce qui supposait, dit-il, un autre Christ. Cette fois Zacharie condamna Virgile comme hérétique. On voit par ce détail que le moine irlandais avait trouvé dans son couvent une éducation supérieure et distinguée. L'affaire s'arrangea cependant et Virgile fut appelé à l'évêché de Salzbourg; mais il se contenta d'en faire remplir les fonctions par un coadjuteur, Dabelo. C'est en 767 seulement qu'il fut consacré, reconnaissant ainsi l'autorité romaine. Il éleva une cathédrale à la mémoire de Rupert, et la remit à 12 prêtres séculiers; il travailla à l'évangèlisation de la Carinthie, dont il fut surnommé l'apôtre, et + 27 nov. 784. Canonisé 1233 par Grégoire IX.

VISCHER, Pierre, fondeur célèbre, dont on admire encore les reliefs dan* plusieurs égl. et châteaux d'Allemagne, sarcophages, vierges, etc. Né 1455 à Nuremberg, + 7 janv. 1529. Ses 3 fils Hermann, Jean et Pierre, ont continué ses traditions dont la grâce et la force contrastent avec l'inachevé des autres produits de la même époque.

VISIGOTHS, v. Goths.

VISITANDLNES, ou religieuses de la Visitation, appelées aussi quelquefois Salésiennes en souvenir de François de Sales, qui eut l'idée d'associer des femmes à son œuvre 1610 et qui lui donna pour supérieure Mm« de Chantai, q. v. Il en fit d'abord une simple congrégation à base quiétiste, sans vœux, ni costume particulier, sauf le vêtement et le voile noir. Les maisons étaient soumises à l'autorité diocésaine. En 1618 la congrégation devint un ordre, que Paul V reconnut et que Urbain VIII approuva. La règle en est très sévère, ainsi que le costume. Ne pouvant plus sortir pour soigner les pauvres et les malades, elles se sont consacrées à l'enseignement, et c'est en cette qualité qu'elles prirent la place des religieuses de Port-Royal. Elles possèdent plus de cent maisons en Italie, Allemagne, Autriche, Pologne, Syrie, Russie, États-Unis, etc.

VISITATION lo Ordre (de la), v. Visitandi-nes. — 2° Fête instituée en mémoire de la visite que Marie fit à Élisabeth sa cousine peu après l'Annonciation, Luc 1, 39. et dans laquelle elle chanta le Magnificat. On attribue à

Bonaventure 1263 la première idée de cette féte; il l'institua pour les églises de son ordre; Urbain VI l'étendit à toute l'Église; le conc. de Bâle 1431 l'a fixée au 2 juillet.

3° Vis. liminum SS. Apostolorum, visite au seuil des saints apôtres se dit de la visite que tous les évéques sont censés faire au pape tous les 4 ans, pour lui témoigner leur respect, lui rendre compte de leur administration et visiter les tombeaux de Pierre et de Paul. C'est la bulle Romanu* Pontifex de Sixte-Quint, 20 déc. 1585, qui a réglé les détails de cette visite. Il va sans dire que dans la pratique il y a été souvent dérogé. — Les limina sont Rome et le pape, mais surtout le pape, d'après la maxime: Limina Ap. sunt ibi, ubi papa.

VISITES d'église. La convenance et l'utilité d'une inspection régulière des églises a toujours été reconnue. L'Espagne au 6me siècle, puis les conc. de Meaux, de Paris, de Valence, au 9m« siècle, les recommandent. Le conc. de Trente en fait un devoir aux évéques, soit directement, soit par leur vicaire général. La visite doit porter sur l'état général des paroisses, sur la conduite des ecclésiastiques, sur leurs rapports avec les fidèles et sur l'administration des biens de l'église. Les archev. ont aussi à visiter les égl. de leur province, mais leur compétence a été limitée pour qu'ils ne prissent pas une autorité trop grande sur les évêques. — Dans les égl. protestantes, ces visites se font régulièrement par une délégation de pasteurs et d'anciens, qui rendent compte au Consistoire.

VITALIEN, ou Vitalin, pape du 30 juill. 657 au 27 janv. 672; de Signia en Campanie; a fait peu de bruit; on le soupçonne d'avoir penché en secret pour le monothélisme. Il tint plusieurs conciles, et envoya des missionnaires en Angleterre. On a de lui quelques lettres.

VITRINGA, lo Cainpegius, ou Kempe, né 16 mai 1659 à Leuwarden, Frise, où son père était juge, étudia d'abord à Franeker, puis la théol. à Leyde, où il se fit recevoir docteur, 1679. En 1680 il fut consacré. Nommé dès lors à Franeker, prof, de langues orientales, puis de théol., et en 1693 d'histoire ecclés. en remplacement de Perizonius. f 31 mars 1722 d'une attaque, après de longues souffrances. Son principal ouvrage est son Comment, sur Esaïe, souvent réimprimé et qui fait encore autorité. Ses autres écrits ont une valeur moindre: 6 livres d'Observations, 3 livres sur l'ancienne Synagogue, Études sur l'Apocalypse, en réponse à Bossuet, un Traité de théol. pratique (mis à l'index), un Comment, sur Zacharie, etc. — Il eut 2 fils, théologiens comme lui, dont l'un

2° Horace, mort à 18 ans, avait déjà la réputation d'un savant; auteur de Notes sur les hébraïsmes du N. T. de Jean Vorst; et l'autre

3° Campegius, comme son père, né 24 mars 1693 à Franeker, fit de brillantes études à Leyde et Utrecht; nommé docteur en théol. 1715, et 1716 prof, de théol. à Franeker. + ** janv. 1723 d'une fluxion de poitrine. Auteur d'un Abrégé de théol. naturelle, et de Dissertations sacrées (lutte de Jacob, Serpent d'airain, féte des Tabernacles, etc.).

vrrus, ou Guy, en allemand Veit, un des 14 saints protecteurs. On ne sait à quelle époque se place cette légende. Né en Sicile, d'une famille illustre, le jeune garçon fut élevé en chrétien par sa nourrice Crescence et par son gouverneur Modeste. Son père Hylas, païen, voulut le contraindre d'abjurer, et sur son refus le livra au gouverneur Valérien, qui se contenta de le faire fouetter. Les 3 chrétiens s'enfuirent en Lucanie, basse Italie, où ils firent des miracles. Dioclétien l'ayant appris les fit venir pour délivrer son fils qui était possédé. Cela fait, il les somma de renoncer au christianisme: Vitus fut successivement jeté dans le feu, livré à un lion, et comme cela ne suffisait pas, les trois fidèles furent mis à la torture et martyrisés* Les restes de Vitus, furent acquis par Pépin pour l'égl. de Saint-Denis, d'où l'abbé Warin les transporta à Corbie 836. En 1355 Charles IV amena de Pavie à Prague un autre corps de saint Vitus. La danse de Saint-Guy a été placée sous son patronage, parce qu'il a, dit-on, la spécialité de la guérir.

VIVARAIS, v. Velay.

VIVÈS, Jean-Louis (de), né 6 mars 1492 à Valence, Espagne, humaniste et savant distingué, étudia à Paris et à Louvain; mais ayant publié la Cité de Dieu, d'Augustin, avec des notes qui lui attirèrent la censure des théologiens de Louvain, il se retira à Londres auprès de Henri VIII à qui il avait dédié son ouvrage. Il fut nommé prof, et docteur en droit à Oxford, et chargé un moment de l'éducation de la princesse Marie. Plus d'une fois le roi et la reine assistèrent à ses leçons. Cette grande faveur dura peu; il fit 6 mois de prison et dut quitter l'Angleterre pour avoir en 1529 blâmé le divorce du roi, et il s'établit à Bruges d'où il écrivit un dernier avertissement à Henri VIII. Dès lors il se remit paisiblement à ses études, et f 6 mai 1540 après une très courte maladie. Auj. presque oublié, il fut un moment considéré, avec Erasme et Budé, comme une de» gloires de la république des lettres, et les jésuites lui empruntèrent sans le nommer, plusieurs de ses principes d'éducation. Sturm aussi s'inspira de sa méthode dans ses réformes scolaires.

VOELKEL, Jean, né à Grimma, étudia à Wittenberg, et se fit en 1585 rebaptiser socinien. Il fut recteur à Wengrow, puis pasteur à Phi-lippon, Lithuanie, et à Szmigel, f 1618. Vers la fin de sa vie le synode le suspendit pour diverses illégalités. Socin, dont il avait été le secrétaire, le protégea. Il a travaillé au catéchisme de Racovie, et publié un traité: De la vraie religion.

VOETIUS ou Voét (pied) i<> Gisbert, né 3 mars 1588 à Heusden, vint 1604 à Leyde pour y achever ses études et prendre ses grades; il s'attacha de tout son cœur à Gomar, et après avoir donné quelques leçons de logique, il fut en 1611 nommé pasteur à Blymen, puis en 1617 à Heusden, ayant refusé des postes plus brillants. En 1618 il fut envoyé au synode de Dordrecht, où il combattit l'arminianisme; en 1630 à Bois-le-Duc pour y réorganiser l'Église. En 1634 il fut appelé à l'Ecole illustre d'Utrecht, qui devint université en 1636, et en 1637 l'église le nomma aussi pasteur. Gronin-gue lui avait envoyé le diplôme de docteur. Les circonstances, les honneurs, sa position, son caractère, son immense érudition, ses talents, son activité, lui assurèrent une influence considérable jusqu'à sa f 1 nov. 1676. Malheureusement il fut toujours en guerre avec tout le monde, et son esprit entier ne connut jamais de compromis. Il poursuivit avec une rigueur impitoyable l'arminianisme, et regarda comme la tâche de sa vie de le détruire. Il combattit de même les catholiques, dont il convertit un grand nombre, et il aurait voulu, quant aux autres, que le magistrat de Bois-le-Duc employât la force pour les ramener. Il fut en lutte avec Labadie, son ancien ami, et avec tout ce qui pouvait ressembler à une dissidence; avec Cocceius et son école, dont il était en outre séparé par la politique; avec Descartes enfin, auquel il fit une guerre acharnée, l'accusant tour à tour d'athéisme et de jésuitisme, et le traitant de mendax GaUus (menteur de Français), quand lui-même niait contre l'évidence toute participation au livre de Schoock contre Descartes, que l'enquête prouva avoir été inspiré par lui. Tant il est vrai que l'esprit de parti aveugle les meilleurs esprits et fausse les consciences. La plupart de ses ouvrages ont été réunis sous le titre de Disputationes théol. Il faut y ajouter son Traité de politique ecclés., l'Exercice de la piété, des Directions pour les étudiants, etc.

3° Son fils Paul, 1619-1677, fut reçu docteur en droit, et fut à Heusden prof, de métaphysique et de grec; il a écrit une Harmonie des Evangiles, et un Traité de théol. naturelle.

VOEUX. On compte pour les religieux catholiques, lorsqu'ils entrent dans un ordre, trois engagements, ou vœux principaux, ceux de chasteté, de pauvreté et d'obéissance; ils s'y engagent d'une manière irrévocable et ne peuvent en être relevés que par le pape, même si leur ordre venait à être supprimé, ou leur couvent dissous et dispersé. Les jésuites s'engagent en outre, c'est leur quatrième vœu, à rester absolument à la disposition du pape pour tout ce qu'il lui plaira de commander. A côté de ces grands vœux il y a pour chaque ordre des engagements de détail qui varient suivant le but poursuivi, missions, soin des malades, conversion des hérétiques, enseignement, etc. Les catholiques distinguent les vœux en simples et solennels; ou, par rapport à leur objet, en absolus, conditionnels, réels, personnels et mixtes. Dans son sens ordinaire le mot vœu signifie un désir, une prière; les théol. estiment que le vœu du baptême, le désir d'être baptisé, équivaut au baptême lui-même, s'il y a eu quelque empêchement à le recevoir.

VOLNEY, Constantin-François Chassebœuf (comte de), né 1757 à Craon, f 1820. Envoyé aux États généraux, il se montra favorable aux idées nouvelles, mais pas assez; accusé de royalisme par Robespierre, il fut enfermé; le 9 thermidor le sauva. Après le 18 brumaire il fut nommé vice-président du Sénat, mais il combattit le concordat et l'empire, et se retira des affaires après le couronnement. Professeur d'histoire aux écoles normales 1794, et membre de l'Institut. Il est surtout connu par ses voyages en Orient (et aux États-Unis 1795), et plus encore par son inintelligence prétentieuse des choses de la religion, qu'il haïssait de toute son âme. Son insuffisance n'était égalée que par sa suffisance. En 1787 il publia son Voyage en Égypte et en Syrie, remarquablement exact et bien écrit; il racontait ce qu'il savait. En 1791 il voulut le commenter et le méditer, sous le titre de Ruines, et à côté de pages magnifiques sur les révolutions des empires, il empiéta sur le terrain religieux où il parla de ce qu'il ne savait pas. Dans son Hist. de Samuel, inventeur du Sacre des rois, il se montre au-dessous de toute critique par la vulgarité de ses attaques contre le christianisme. Citons encore ses Recherches nouvelles sur l'Hist. ancienne, 1814, sa Loi naturelle, ou Catéchisme du citoyen français 1793, et ses Recherches sur la simplification de l'écriture des langues orientales.

VOLTAIRE, né à Chatenay près Paris 20 févr. 1694, ou à Paris le 21 nov., s'appelait François-Marie Arouet; il prit le nom d'un petit domaine appartenant à sa mère, et f 30 mai 1778. Nous n'avons pas à retracer l'existence très accidentée de ce spirituel philosophe ni à nous occuper de sa prodigieuse activité littéraire dans tous les domaines; chacun sait que pendant près d'un demi-siècle il a brillé au premier rang des écrivains français, et que son amour-propre n'a été troublé que par les lauriers de son rival en gloire et en influence,

J.-J. Rousseau. Voltaire n'a de place dans ce livre que par les rapports qu'il a eus, directement ou indirectement, avec l'Église et la religion. Un homme est rarement tout bon ou tout mauvais; ses actions même peuvent présenter souvent un mélange de bien et de mal qui ne permet pas de les juger, de les admirer ou de les condamner sans quelque réserve. L'orgueil naturel de Voltaire, enflé par ses triomphes, par l'amitié des rois, par le succès de ses écrits, par sa popularité, par les flatteries de ses courtisans, était démesuré et lui laissait croire qu'il pouvait tout se permettre. Par moments et à ses heures il avait des velléités de déisme, et il est impossible d'admettre qu'il n'ait pas éprouvé des impressions religieuses. Quand il fait élever un temple à la divinité: Deo erexit Voltaire 1761, on peut croire qu'il cherche à se faire bienvenir de la population de Fernex, qu'il veut dissiper des préventions trop accréditées, mais ce n'est pas un acte d'hypocrisie. Il a aussi quelques poésies bien frappées en l'honneur de Dieu, et on lui doit cette phrase célèbre: Si Dieu n'existait pas, il faudrait l'inventer. Il voit en Dieu la plus grande puissance, mais non une puissance illimitée; le Créateur a fait le monde, mais seulement dans des conditions déterminées qu'il ne saurait changer. Ce sont là dans sa philosophie des lueurs passagères, mais dans l'ensemble de son être il est profondément irréligieux, impie, et sa morale s'en ressent; l'auteur de laPucelle, de Candide, du Dictionn. philos., de l'Évangile de la raison, et d'une foule de mauvaises petites brochures, ne saurait faire d'illusion à personne. On ne saurait oublier, en revanche, qu'il a pris en mains la cause de la tolérance et son intervention en faveur des huguenots persécutés. En 4755 il était venu se fixer dans la vallée du Léman, à Lausanne, puis aux Délices et à Fernex. On lui avait fait sentir de diverses manières qu'on n'appréciait pas beaucoup l'honneur de son voisinage. MM. les pasteurs en particulier, quelque flattés qu'ils fussent d'être admis parmi ses familiers, étaient d'autant plus tenus à être circonspects que leur orthodoxie était déjà suspecte et que Rousseau ne se gênait pas pour les accuser devant l'opinion. Aussi tout en lançant des brochures anonymes et qu'il désavouait en public, Voltaire cherchait-il à les désarmer par quelqu'une de ces déclarations officielles, véritable eau bénite de cour, qui ne trompaient personne, mais qui autorisaient chacun à se laisser tromper. Il trouva cependant un moyen de se les concilier, qui était plus honorable pour lui et qui l'a grandement servi; ce fut de prendre en main la cause de ces martyrs, dont le plus grand tort était « de prier Dieu en mauvais français. » U mit quatre ans à faire réhabiliter Calas, q. v. Il mit neuf ans à établir l'innocence de Sirven, que l'on accusait d'avoir fait périr sa fille, quand cette pauvre enfant, arrachée à sa famille, s'était enftiie du couvent où on l'avait enfermée et, de nuit, cherchant son chemin, était tombée dans un puits. Hal-ler et Bonnet, qui n'étaient pas de ses amis, lui ont su gré de ses efforts comme « couvrant une multitude d'écarts. » La fin de Voltaire n'a été ni d'un sage, ni d'un philosophe. Son activité, touj. plus fiévreuse, dangereuse pour un homme de 84 ans, lui fut fatale. De Genève il se rendit à Paris pour faire jouer Irène, dirigea de nombreuses répétitions, s'agita, remania son travail à plusieurs reprises, et finit par cracher le sang. II fit venir le médecin, puis le prêtre, n'épargna ni les drogues, ni les supplications, ni les promesses; il ne voulait pas mourir, et cependant il mourut; c'était le 30 mai 1778. Tronchin dit qu'il était dans l'état de désespoir et de démence le plus affreux; c la rage s'était emparée de son âme. • Ce n'est pas ce qu'il avait rêvé, quand il écrivait: « Je meurs tranquille, croyant en Dieu, aimant nies amis, ne haïssant pas mes ennemis et détestant le fanatisme. »

VOLTERRAN (Le), v. Ricciarelli.

VORAGINE, v. Jacques 5<>.

VORST, ou Vorstius lo Conrad, né 19 juill. 1569 à Cologne, fils d'un teinturier catholique, qui se convertit plus tard ainsi que sa femme. Il étudia d'abord à Dusseldorf et à Cologne, mais n'ayant aucun espoir de gagner ses grades sans se faire catholique, il se décida pour le commerce. IL reprit cependant plus tard ses études, à Herborn sous Piscator, à Heidelberg, et en 1595 à Bâle et Genève. Il professa la théol. à Steinfurt, où il finit par être nommé pasteur et conseiller consistorial 1605-1610. Mais déjà quelques ouvrages sur la Prédestination, la Trinité, la Personne et l'office de Christ l'avaient rendu suspect de socinianisme, et il dut s'en laver à Heidelberg 1599. Les sociniens lui firent aussi des avances et lui offrirent une chaire de prof, à Lublin. En 1610 il succéda à Arrni-nius à Leyde, et son traité de Dieu et de ses attributs fournit aux gomaristes l'occasion désirée de l'attaquer. Les théol. de Heidelberg le condamnèrent également et le roi Jacques Ier d'Angleterre ayant pris parti contre lui, il fut déposé par les États de Hollande 1612, malgré tout ce qu'il put dire pour sa justification, et se retira à Tergow, où ses propres disciples, à bonne intention, le compromirent encore davantage par la publication d'un livre antitrinitaire. Le synode de Dordrecht le jugea sans l'entendre et le déclara indigne d'être professeur. Banni en 1619 il trouva un refuge auprès du duc de Holstein, et + 29 sept. 1622 à Tonningen, franchement socinien. Presque tous ses ouvrages ont trait aux controverses soulevées par ses doctrines; il faut mentionner spécialement son Comment, sur les Épîtres apostoliq., sauf les Hébreux, 2 Tim., Tite etPhilémon, et son traité de Dieu, que Jacques fit brûler par le bourreau.

2° Son fils, Guill.-Henri, pasteur arminien â Warmond, Hollande, est connu parla traduction en latin de plusieurs ouvrages rabbiniques, et par une dissertation sur le sens que les hébreux donnaient au Verbe divin.

3o Jean, né 1623 à Vesselbourg, Holstein, bibliothécaire de l'électeur de Brandebourg, f 1676 à Berlin: très savant en hébreu, grec et latin, auteur de deux ouvrages sur la philol. sacrée, et sur le style du N.-T.

VOSS, ou Vossius lo Gérard, né àLoots, district de Liège, prévôt de Tongres, docteur en théol. protonotaire apostolique, passa plusieurs années à Rome où il s'occupa à déchiffrer et à traduire des mss. de pères grecs, f 23 mars 1609 k Liège. On a entre autres de lui une trad. de Grégoire Thaumaturge, un discours de Théo-doret sur la bienveillance, grec et latin; une trad. lat. des Discours de Chrysostome, la Vie et Lettres de Grégoire IX, etc.

2o Gérard-Jean, né 1577 près de Heidelberg; son père, pasteur, était hollandais et retourna bientôt dans son pays. Il étudia à Dordrecht et à Leyde, sous Gomar, et cultiva surtout la philos. et les antiquités. Après avoir acquis le grade de docteur, il fut successivement prof, à Leyde et à Dordrecht. et gomariste modéré. Il donna sa démission de recteur à l'occasion du synode de Dordrecht, et publia une Histoire des controverses pélagiennes, où il soutient entre autres que la prédestination stricte n'était pas une doctrine de l'Égl. primitive, et que l'arminia-nisme ne doit pas être confondu avec le pélagianisme. Suspendu de la cène par le synode de Tergow, il fut réhabilité moyennant rétractation, mais ne se prononça jamais bien nettement sur ce point difficile. Après avoir enseigné l'éloquence et la chronologie à Leyde, il fut appelé comme prof, d'histoire à l'Ecole illustre d'Amsterdam, où il + 17 mars 1649. C'était un esprit éclairé, qui n'avait pas de goût pour les controverses stériles. Son livre sur Pélage avait eu grand succès en Angleterre, et lui jivait valu un appel comme prof, d'histoire à Cambridge, qu'il refusa, et une place de chanoine à Cantorbéry, dont l'archev. Laud et Charles I«r lui permirent de toucher les revenus sans l'obliger à la résidence. Parmi ses nombreux écrits nous signalerons son Harmonie de la Passion, une lntrod. k la chronologie sacrée, une étude sur les Trois symboles, une sur le Baptême, une dissertation sur la généalogie de J.-C., une antre sur la date de sa naissance, de son baptême et de sa mort, etc.

3o Isaac, le 5™® de ses fils, né 1618 à Leyde, fit de bonnes études et voyagea beaucoup, jusqu'en Italie. Il fut historiographe des États de Hollande, en 1648 secrétaire de Christine de Suède, auprès de laquelle Saumaise le desser- . vit, et enfin chanoine de Windsor par la grâce de Charles II. + 21 févr. 1689. Savant, mais irréligieux et bizarre, il croyait à l'inspiration des sybilles, mais niait en détail celle des livres saints, ce quWit dire k Charles II: C'est un théologien qui croit k tout, excepté à la Bible. Il fut combattu par R. Simon. Il appréciait beaucoup les Septante et leur chronologie, sans admettre les fables qui couraient sur leur origine. Il a publié des notes sur les ép. d'Ignace et de Barnabas, et sur Justin; une dissertation sur l'âge du monde, sur la nature et les propriétés de la lumière, sur les sources du Nil, etc.

VOTIVES (Messes), nom qu'on donne k toutes les messes autres que celle de l'office du jour, et qui sont l'accomplissement d'un vœu particulier. — On appelle tables ou tableaux votifs des tableaux commémora tifs, ou parfois d'autres objets, placés dans les églises en souvenir d'un vœu exaucé, ou d'une délivrance accordée. C'étaient des témoignages de reconnaissance envers Dieu, quelquefois aussi envers de généreux bienfaiteurs. Il en est déjà parlé dans Théodoret. On les explique bibli-quement par Exod. 17,14. Ps. 111, 4. Ils vont de pair avec les reliques et les pèlerinages.

VOTO (Ex), 2 mots latins qui signifient en suite d'un vœu. On appelle ainsi toute offrande faite à une église ou chapelle en accomplissement d'un vœu fait dans un moment de danger, de peine ou de maladie. Ces ex voto varient de forme et de valeur suivant la nature et l'importance du vœu et de celui qui Ta fait; ce peut être un tableau, un bras en cire ou en argent, un pied, un vaisseau, une épée. Comme souvent le donateur vise à l'économie, on a pris l'habitude d'appeler aussi de ce nom, par dérision, un tableau mal fait représentant un sujet religieux.

VYASA, c.-à-d. le compilateur (des Védas, q. v.). Un brahmine, Parasara, petit-fils de Vashishta, passant un jour sur les bords du fleuve Yamouna, vit la belle Satyavati, fille d'un pêcheur et l'enleva. 11 eut d'elle un fils, Vyasa, qu'il appela KrishnaDwaypayou, c.-à-d. l'insulaire uni. Ce fils passa sa vie dans l'ascétisme; il fut à la fois poète, philos, et théologien. et mit en ordre les traditions religieuses de Brahma, sous le nom de Védas. Il fut aidé dans son travail par Ganesha. On lui doit un immense poème intitulé Mahabharata, et un Compendium de la théologie des Vedas, qui,

sons le nom d'Uttar Mimansa, ou de Vedanta-darsana, renferme les principes de l'orthodoxie indone et se distingue parun idéalisme exagéré.

W

WAGNER. Georges, d'Emmeringen, Bavière, s'était donné, suivant l'usage du temps, un nom latin: Carpentarius. On ne sait rien sur sa conversion, mais son zèle pour Christ, le fit jeter en prison à Munich au commencement de 1527. Après des essais infructueux pour le faire abjurer, ses juges lui envoyèrent le 18 février deux bourreaux, qui l'emmenèrent sur la place publique. Deux cordeliers l'assistaient. Arrivé à l'hôtel de ville Wagner maintint encore une fois, devant tous, les thèses qu'il avait soutenues (le prêtre ne peut pardonner les péchés, Dieu n'habite pas dans l'hostie, le baptême d'eau ne sauve pas, etc.). Plusieurs personnes, entre autres le prêtre Conrad Schritter essayèrent une dernière fois de le persuader d'abjurer; il leur répondit de la manière la plus édifiante. Quelques personnes émues lui demandèrent de donner avant sa mort une preuve de sa foi. « Vous reconnaîtrez ma foi à ceci, dit-il, c'est que tant que j'aurai un souffle de vie, je confesserai le nom du Seigneur Jésus. > Du milieu des flammes qui l'entouraient, on put en effet l'entendre distinctement proclamer le nom de Jésus. C'était le 18 févr. 1527.

WALA, v. Adalard.

WALAFRIED Strabon (il s'appelait lui-même Strabus. le louche), né au commencement du 9m* siècle, anglo-saxon ou originaire du Haut-Rhin, élevé d'abord à Reichenau ou à Saint-Gai], plus tard à Fulde sous Raban Maur, était en 842 abbé de Reichenau, et f 849 dans un voyage à la cour de Charles-le-Chauve entrepris pour Louis-le-Germanique. 11 appartient à cette pléïade d'hommes distingués de la renaissance chrétienne qui fleurit sous l'influence de Charlemagne. Son principal ouvrage est la Glosa or-dinaria, souvent réimpr. avec les notes de Nicolas de Lyre; c'est le texte latin de la Bible, avec des extraits des pères en marge, comme exégèse; puis une Archéologie ecclésiastique, une vie de Saint-Gall, une étude sur la ruine de Jérusalem, des poésies latines, etc. Édition compl. par Migne, 1852.

WAHL, Chrétien-Abraham, né 1 nov. 1773 à Dresde, pasteur à Schneeberg, Oschatz et depuis 1835 conseiller consistorial à Dresde, + 30 nov. 1855. Auteur d'une Introd. histor. aux livres de la Bible, de Conseils aux parents et instituteurs; de quelques dissertations philologiques H surtout d'un dictionnaire grec-latin, Clavis N. Test, philologica, souvent réimpr. et très estimé.

2° Samuel-Fr.-Gunther, né 2 févr. 1760 près d'Erfurt, recteur à BUckebourg, prof, de langues orientales à Halle, f 29 juin 1834. Auteur de plusieurs ouvrages sur l'Asie et les langues orientales, Dictionn. etc.

WALCH lo Jean-Georges, né 17 juin 1693 â Meiningen, fils du surintendant, étudia à Leipzig, et après avoir publié quelques ouvrages de philologie, fut nommé à Iéna, d'abord prof, de philos, et de littérature, puis prof, de théol. 1724; en 1726 il fut promu docteur, en 1754 membre du conseil ecclésiastique, f 13 janv. 1775. Gendre de Fr. Buddée, il prit son parti dans sa controverse antiwolfienne. Il a énormément écrit, et son professorat de plus de 50 ans a porté de bons fruits. On lui doit un Dictionnaire de philos., une Introduction à la philos., l'hist. du N. T. dans les 4 premiers siècles, une Introd. aux controverses religieuses des égl. protestantes, une Biblioth. théologique, une Biblioth. patristique, avec catalogue des livres publiés dans les différentes branches de la théol.; enfin et surtout une édition compl. des Œuvres de Luther, en 24 vol., qui, bien dépassée auj., n'en fut pas moins un travail très remarquable pour son temps, aussi exact et aussi complet que le permettaient les circonstances.

2o Chrétien-Guill.-François, 2™« fils du précédent, né 25 déc. 1726 à Iéna, enseigna l'hist.T l'algèbre et la philos, dans sa vie natale, et entreprit en 1747, avec son frère plus jeune, un voyage d'études en Hollande, France, Suisse et Italie. En 1750 il fut nommé prof, de philos, à Iéna, en 1753 à Gôttingue, où il fut en 1757, chargé de la théologie. Il était membre de la Soc. des sciences historiques, f 10 mars 1784. Luthérien orthodoxe, comme son père, il a cependant plutôt considéré la théol. comme une science que comme une puissance morale, et s'il lui a rendu des services c'est moins par la nouveauté ou la profondeur de ses vues, que par sa méthode rigoureuse et par l'exactitude de ses recherches. On lui doit entre autres une Hist. des papes romains, des Antiquités, une Hist. de la canonisation de Charlemagne, une Hist. desconcilps, une Hist. des hérésies, schismes et controverses; un Examen critique des sources de l'hist. eccl., des Recherches sur l'usage de l'Écrit, sainte parmi les chrétiens des 4 premiers siècles, etc.

3o Jean-Ernest-Emmanuel, frère aîné du précédent, né 30 août 1725, l'accompagna dans ses voyages, et fut plutôt littérateur, philologue et minéralogiste, quoiqu'il fût aussi théologien. Prof, d'éloquence et de poésie à Iéna, f 1 déc.

1778. On a de lui des travaux sur les persécutions des chrétiens en Espagne, sous Néron, puis sous Dioctétien; etjjuelques dissertations: sur le dieu de l'ile de Malte (ou Mélite), Acte 28, 6., sur la foi des enfants dans le sein de leur mère, sur les anciens symboles, etc.

WALDENSTROEM, P., le rénovateur du piétisme suédois, né en 1838, consacré en 1863, nommé 1864 à Uméa maître de religion, de grec et de latin, puis à Gefle entre Stockholm et Upsal. Disciple et ami d'Olaf Rosenius, un des promoteurs les plus influents et les plus vénérés du réveil, il fut son successeur dans l'œuvre de l'évangèlisation de la Suède, fonda des sociétés de missions par centaines, toute une légion d'associations ou confréries Missionnaires, fit élever de nombreux oratoires, créa une foule de conventicules, à la téte desquels il plaça des évangélistes, colporteurs et prédicateurs laïques; fit imprimer des traités et les répandit en grand nombre, envoya des missionnaires jusque dans les colonies du royaume, et publia 3 journaux, dont l'un, IePiétiste, compta bientôt jusqu'à 25,000 abonnés. Pour rendre PÉvangile plus abordable, il le débarrassa de ce qu'il appelait les t ronces théologiques, » et secoua le joug des symboles officiels. Par une réaction exagérée contre l'orthodoxie morte, il alla peut-être un peu loin, et se fit accuser de socinianisme et d'antinomianisme.Il demandait aussi la séparation de l'Église et de l'État, pour écarter les communiants indignes et les pasteurs mercenaires. Un congrèspiétiste réuni lel6août 1876 et comptant plus de 600 membres, demanda au roi la revision de la loi ecclésiastique, démarche appuyée par plus de 25,000 signatures, mais le synode général d'octobre 1878 préavisa négativement, et en 1879 le consist. ou chapitre d'Upsal a définitivement condamné W. et censuré sa doctrine. Son œuvre n'en continue pas moins et a pris une extension nouvelle.

WALDHAUSEN, Conrad (de), né autrichien, moine augustin, prédicateur à Vienne 1345-1360, curé à Leitmeritz, puis à Prague; un des précurseurs de Jean Huss, ennemi des ordres mendiants, représente à la fois l'opposition aux dogmes traditionnels, la réaction de la piété contre le formalisme, et la protestation de la conscience contre l'immoralité du clergé. Ses adhérents étaient si nombreux qu'il dut souvent prêcher sur la place publique à Prague, f 8 déc. 1369.

WALFROI, ou Valfroie, ou Ouftay: en latin Wilfiaïcus, saint peu connu, du 6®® siècle, originaire de Lombardie, diacre, qui après s'être développé sous saint Yriez, abbé du Limousin, et prenant Martin de Tours pour modèle, vint s'établir dans le diocèse de Trêves, a environ 8 lieues de Sedan, se bâtit un petit ermitage pour y vivre solitaire, et finit par élever ,une colonne au haut de laquelle il se tenait debout, pieds nus, l'hiver comme l'été; sa barbe ne formait quelquefois qu'un énorme glaçon. On dit que cette grande vertu toucha les païens des environs et les convertit. Il mourut dans la communauté de son couvent. L'ermitage de Saint-Walfroi existe encore, mais sous la forme d'nne petite auberge, sur la hauteur, non loin des ruines d'Orval, avec une vue magnifique. Fête 21 octobre.

WALPURGIS, Walpurga, ou WaUmrga, d'une famille noble anglaise, sœur de Willibald et de Wunebald, et nièce de Winfrid (Boni-face), suivit ses frères, avec quelques religieuses, pour répondre à l'appel de son oncle, et travailler à l'évangèlisation de la Thuringe. Elle y vécut dans le couvent de Bischofsheim, puis dans celui de Heidenheim fondé pour hommes et femmes par Wunebald, et à la mort de celui-ci, elle lui succéda comme supérieure. Elle f vers 777. Au milieu du siècle ses ossements furent transférés par l'év. Otkar dans l'égl. d'Eichstaedt; on en donna des morceaux à divers couvents. Son sternum en particulier, l'os de la poitrine, donné aux nonnes de Mon-heim, laissait et laisse encore perler une huile merveilleuse qui guérit bien des maladies. Elle fut canonisée un mai, grand jour de fête pour l'Allemagne païenne, ce qui contribua beaucoup à sa popularité. Les légendes se multiplièrent, et son culte se répandit en Allemagne, France, Pays-Bas, Angleterre, etc. On lui attribua de l'efficacité contre la morsure des chiens. On alla jusqu'à dire qu'elle avait fait un voyage missionnaire avec lesap. Philippe et Jacques; et comme on suspecta sa chasteté, elle prit un morceau de bois bien sec, le planta en terre, et il produisit aussitôt des feuilles. On n'a pas le droit de la rendre responsable de pareilles insanités. Il est également improbable qu'elle ait accompagné ses frères en Terre Sainte. On la désigne souvent sous le nom de Nonne de Heidenheim.

WALKER, un des auxiliaires de Brown, q. v. Il finit par l'emporter dans les rivalités qui éclatèrent entre eux, se montra conséquent jusqu'au bout dans son opposition à l'Église établie, et ne ce?sa de poursuivre le retour au christianisme primitif. Ses sectateurs reçurent le nom de Walkeristes.

WALTER, Ferdinand, juriste catholique, né 30 nov. 1794 à Wetzlar, élevé à Cologne, fit la guerre d'indépendance avec un régiment de cosaques du Don, étudia le droit à Heidelberg et fut nommé prof, à Bonn où il se distingua par l'élégance et la clarté de son enseignement. En 1848 il fit partie de l'assemblée nationale de

Prusse, où il défendit avec fermeté, mais sans déclamations violentes les droits de l'Égl. catholique. Auteur d'un Manuel du droit eccles. de toutes les confessions chrétiennes, qui a obtenu plus de 40 éditions, et d'un travail très remarquable sur les traditions et les sources (Fontes juris) du droit ecclésiastique.

WALTHER lo ou Gautier de Saint-Victor, v. Gautier. —2° W. von der Vogelweide, troubadour ou minnesânger allemand, né en Fran-conie vers 1170 d'une famille noble mais pauvre, vécut de ses chants et chanta ses protecteurs; il alla en Autriche de château en château, de cour en cour, et f 1230 paisiblement à Wurzbourg. Catholique pieux, il n'en flétrit pas moins les vices de son temps et les excès de l'Église; il a parfois des accents prophétiques. Parfois aussi on peut le trouver déiste et libre penseur.

W ALTON, Bryan, né 1600 à Cleveland, docteur en théol. 1639, év. de Chester 1660, f 1661 à Londres. Orientaliste distingué, très attaché aux pères et aux traditions de l'Église, homme de science, d'un jugement sain, il a publié en 1654 une Introd. à l'étude des langues orientales, mais son principal ouvrage est l'édition delà Bible polyglotte, dite d'Angleterre, ou de Londres. 1657, 6 vol. in-fol.; elle renferme l'hébreu, le samaritain, le caldéen, la Vulgate de Clément VIII, les Septante, et quelques parties en éthiopien, arabe et persan. Walton a eu pour collaborateurs plusieurs autres savants.

WANDELBERT, belge, ou plutôt allemand (d'après Tri thème), né 813, moine de l'abbaye de Prtiin, diocèse de Trêves, écrivit en vers et en prose, à la demande et sous la direction de Marquart, son abbé; à 35 ans il n'était que diacre; on ignore s'il reçut la prêtrise. + 870. Parmi les ouvrages qu'il a laissés, on remarque une Vie de Saint Goar, un peu légendaire, d'après d'anciens documents; le Martyrologe, en vers latins, presque tous hexamètres, donnant pour chaque jour de l'année l'histoire du saint ou des saints du jour, 360 pièces, avec quelques préfaces et épîtres dédicatoires, à Lothaire etc.; un Hexameron, ou les 6 jours de la Création, avec des explications mystiques, et quelques autres poésies.

WARBURTON, William, né 24 déc. 1698 à Newark, d'abord avocat, puis en 1723 théologien, diacre, successivement recteur de Gryesly, de Brand-Broughton, chapelain du prince de Galles et du roi Georges II, prédicateur à Lin-colns Inn, chanoine de Durham, docteur, doyen de Bristol, et enfin 1760 év. de Glocester où il f 7 juin 1779. Connu surtout par sa controverse contre les déistes et les dissidents. Il défendit l'union de l'Égl. et de l'État en marquant leurs limites respectives, mais en maintenant la liberté religieuse pour les dissidents. Il combattit surtout Bolingbroke, Lowth, Middleton, et défendit l'Essai de son ami Pope contre ses aggresseurâ. Sa réputation date de son premier ouvrage: Alliance entre l'Égl. et l'État 1736; mais le second, de 1737, est beaucoup plus important; il cherche à prouver la divinité de la législation mosaïque en s'appuyant des principes du déisme, et il trouve un argument dans le fait même que la doctrine de l'immortalité n'y est pas enseignée. Voltaire le combla d elo ges, mais Warburton repoussa ces louanges équivoques en prouvant que Voltaire l'avait mal compris et mal cité, et en corrigeant aussi quelques erreurs de fait qu'il avait lui-même commises. Il développa son système dans plusieurs éditions siftcessives. dans sa Vindication, dan> ses Remarks et dans quelques Sermons sur les principes de la relig. naturelle et de la relig. révélée. Son livre intitulé Julien tend à établir la vérité de la révélation d'après le fait, mentionné par Ammien Marcellin, du feu qui sortit de terre pour empêcher, sous Julien, la reconstruction du temple de Jérusalem. Warburton regarde le livre de Job comme un poème écrit après le retour de l'exil.

WARD 1° Marie, originaire de Graveline, commencement du 17roe siècle; fondatrice d'une Association de demoiselles anglaises pour l'éducation de la jeunesse, Urbain VIII supprima la Société 1630, Clément IX l'autorisa de nouveau 1703. La Société se compose de 3 classes: nobles, bourgeoises, servautes; elle s'occupe aussi des malades. Ni vœux perpétuels, ni claustration.

2° Seth W., prélat anglican, né 1617 à Bun-tingford, prof, d'astronomie à Oxford, recteur à Saint-Laurent de Londres, év. d'Exeter, puis de Salisbury 1667, chancelier de l'ordre de la Jarretière 1671, f 1689 àKnightsbridge. Auteur d'un Essai sur les attributs de Dieu et sur rira-mortalité de l'âme, de Sermons, et d'une Dissertation sur la philos, de Hobbes.

WARDLAW, Ralph, né 22 déc. 1779 à Dal-keith, Écosse, arrière-petit-fils d'Erskine, un des fondateurs de l'Égl. de la sécession, étudia à Glascow et à Selkirk, se joignit aux congre-gationalistes, et fut successivement pasteur à Perth et Dumfries, puis directeur du séminaire de Glascow. + 17 déc. 1853. En 1814 il avait publié quelques Discours sur le socinianisme; en 1816 un écrit contre l'unitarisme lui valut le doctorat du collège de Yale, Connecticut. Puis parurent des traités et des discours sur le baptême des enfants, l'assurance du salut, la doctrine de l'expiation, le sabbat, la morale chrétienne, le péché originel, les miracles, etc. Sa Théol. systématique, en 3 vol. ne parut qu'après sa mort; c'est un ouvrage de valeur. Il a aussi composé des cantiques. Président de l'Association volontaire des églises, il a touj. défendu le système volontaire, notamment contre Chal-mers, jusqu'au moment où celui-ci se sépara de l'Épi, établie.

WARHAM, William, le dernier, ou si Ton compte Cranmer. l'avant-dernier archev. catholique de Cantorbéry, nommé et canoniquement établi par le pape. Né à Okeley, Hampshire, d'une bonne famille, il fit ses études à Winchester et à Oxford, s'appliqua surtout au droit, fut avocat de la cour des Arches, puis modérateur de l'école de législation civile à Oxford; en 4493 il fut envoyé avec Poynings à la cour de Bourgogne pour demander l'extradition de Warfceck. Dès lors son avancement fut rapide; il fut nommé garde des sceaux, lord grand chancelier, év. de Londres, et en 1504 archev. de Cantorbéry, et en même temps chancelier d'Oxford. Très en honneur sous Henri VII, il baissa sous Henri VIII et fut relégué au second plan par Wolsey. C'était un vrai prince de l'Église, actif travailleur, ami d'Érasme et des humanistes, mais conservateur à outrance et opposé à toute réforme. Il lui fut dur, en 1532, de devoir, au nom du clergé, présenter l'acte qui plaçait les évêques sous la suprématie royale, + 23 août 1532, laissant à peine de quoi pourvoir à ses funérailles. Sa biblioth. fut partagée entre Oxford et Winchester. Parmi ses papiers on trouva une protestation notariée, datée de 1531. contre tous les projets de réforme, avec une adhésion sans réserve aux décisions du saint-siège. Il avait en 1515 donné sa démission de lord chancelier; lorsqu'après la chute de Wolsey cette place lui fut de nouveau offerte, il la refusa.

WARNEFRIED, v. Paul go.

WARTBOURG (lechâteau de la). A une demi-lieue d'Eisenach, dans le grand-duché de Saxe-Weimar, la Wartbourg, comme on dit familièrement dans le pays, s'élève depuis plus de 800 ans au sommet d'une montagne boisée. De la forte position qu'elle occupe, elle plane sur les forêts et les vallées d'alentour et semble commander au loin à de vastes territoires. Mais la grâce majestueuse du paysage ne saurait distraire personne de l'éloquence des souvenirs. Là tout parle, tout a une âme. Avec son sceptre poétique et son diadème chevaleresque, religieux, historique, légendaire même, la Wartbourg est plus encore que « le palladium » de la Thuringe, elle est un monument national par excellence. L'Allemagne entière l'admire et le vénère, cet édifice tant de fois séculaire. Ce n'est pas pour le seul charme pittoresque des lieux que des milliers de touristes de toutes opinions et de toutes croyances gravissent joyeux, en toute saison, les pentes parfois rudes qui conduisent au parapet et au pont-levis du château. Le rôle de la Wartbourg a commencé presque avec son origine. Un jour que le comte Louis de Thuringe, deuxième du nom, s'était laissé emporter loin de sa suite par l'ardeur de la chasse, il suivit si longtemps la piste d'une bête fauve qu'il parvint jusqu'aux environs d'Eisenach et n'hésita pas à s'engager dans la montagne. Fatigué enfin d'une poursuite vaine, il se laissa gagner par l'attrait du paysage. « Attends, montagne — s'écria-1-il — je ferai de toi un château-fort » (Warte, Berg, du sollst mir eine Burg werden). Et ces deux mots unis, Wartburg. auraient servi de baptême au donjon. Cela se passait en 1067.

Depuis cette époque, la Wartbourg a marqué toujours dans les annales de la contrée et plus d'une fois dans celles du monde. Pendant la féodalité, c'étaient les comtes et les landgraves de Thuringe, Louis-le-Barbu, Louis-le-Ferré, Louis-le-Doux, Louis-le-Saint qui faisaient retentir le manoir du bruit de leurs aventures et du renom de leurs exploits, tandis que la pieuse Élisabeth de Hongrie, sacrifiant tout aux œuvres de charité, devint l'ange béni de son époux, de sa famille, des pauvres. Avant même le mariage d'Elisabeth, la poésie, au commencement du treizième siècle, s'était assise au foyer du landgrave Hermann; une célèbre lutte poétique s'engageait en 1207 entre les principaux trouvères allemands, soit minnetoenger, Wolfram d'Eschenbach, Walther de Vogelweide, Henri d'Ofterdingen, d'autres encore, qui aux yeux de la postérité ont rendu la Wartbourg inséparable de leurs chants.

Avec la Renaissance et les temps modernes, le château de sainte Élisabeth a vu ses hautes murailles et ses tours briller d'un nouvel éclat. On sait que Luther, à son retour de Worms, fut arrêté, par ordre de Frédéric-le-Sage, conduit à la Wartbourg par mesure de précaution, et soustrait ainsi aux tentatives de ses ennemis; on n'ignore pas davantage que, pendant le séjour qu'il dut faire dans ce « Pathmos, » dans cette région t de l'air et des oiseaux, » les travaux formidables auxquels il se livra décidèrent de son avenir et du triomphe final de sa cause. Luther habita la maison dite des Chevaliers, dans la première cour du château. On y voit encore sa cellule, avec des objets qui lui ont appartenu ou qui le rappellent, et dans le voisinage de cette cellule, diverses inscriptions, curiosités et peintures consacrées à son souvenir et à celui des Réformateurs.

La religion, l'histoire et l'art n'ont donc pas cessé de se donner rendez-vous sur les hauteurs d'Eisenach. Mais plus ou moins abandonnée par suite de différentes circonstances et inhabitée pendant un certain temps, la belle demeure des landgraves aurait pu tomber dans un regrettable état de dégradation, si elle n'avait été restaurée an moment opportun. Cette restauration, qu'on peut regarder aujourd'hui comme achevée, est due à l'heureuse et vigilante initiative du grand duc régnant Charles-Alexandre. Bien qu'il soit d'une extrême difficulté de reconstituer un édifice selon son plan primitif, dans son vrai style et sa couleur locale, rien n'a manqué au succès du travail entrepris. Les conditions les plus délicates ont été remplies en vérité, et des artistes tels que M. l'architecte de Ritgen et feu M. le commandant B. d'Amswald ont excellemment secondé les vues et le goût exprcé du souverain. Nous ne connaissons pas de château de style roman qui représente plus fidèlement le caractère de l'époque jusque dans les moindres détails du symbolisme, des chapiteaux, des colonnes, des peintures murales, des plafonds, des fenêtres, de l'ameublement, de l'ornementation. La tour et les appartements des landgraves, la grande salle des fêtes, la salle des troubadours, la galerie de sainte Élisabeth qui ouvre sur la chapelle où prêcha Luther, toutes ces consciencieuses rénovations dans l'esprit du passé sont des «fuvres qu'on ne saurait assez apprécier et qui garderont une place d'honneur dans l'histoire de l'art au 49»" siècle. Chose curieuse, c'est a l'occasion du 8me jubilé séculaire de la Wart-bourg qu'en 1867, l'illustre Liszt, natif lui aussi de Hongrie, donnait pour la première fois devant la Cour et de nombreux invités l'oratorio que lui a inspiré l'histoire de sainte Élisabeth (le Hongrie et de Thuringe. — V. pour plus de détails, les deux beaux volumes de M. Édouard Humbert, Le Château de Wartbourg, et: Dans la Forêt de Thuringe, Genève. Paris. Leipzig. 1862; et en allemand, H. von Ritgen, Der Fûh-rer aufder Wartburg, Leipzig. 1868; Schwerdt und Ziegler, Thûringer Fùhrer. Hildburghau-sen, 1866.

WATERLAND, Daniel, apologète de l'Égl. anglicane, né 1683 dans le comté de Lincoln, chapelain de Georges 1er, chanoine de Windsor, vicaire de Twickenham, archidiacre de Middle-sex, f 4 janv. 1742. Ses écrits, presque tous de circonstance, sont consacrés à la défense des vérités evangéliques, et notamment de la Trinité; il voulait même interdire aux ariens de signer les 39 articles.

WATERL ANDERS, parti d'anabaptistes néerlandais, d'une tendance plus large, vers le milieu du 16"" siècle, qui par la suite s'unirent à Schedmaker, à Franeker, et à ceux qui furent repoussés 1557 par les Mennonites rigides.

WATSON lo Richard, né 1737 dans le West-moreland, élève de Cambridge, prof, de mathématiques, de chimie, et de théologie, occupa divers postes comme pasteur, et fut nommé en 1782 év. de Landaff; se retira en 1789 à la campagne où il fit de l'agriculture, f 1816. Défenseur de l'orthodoxie, il appartenait en politique à l'opposition. Auteur d'une Apologie de la Bible, en réponse à Th. Paine, de quelques sermons et mandements, et d'un recueil de traités empruntés à des théol. anglais, même à des dissidents. Il a écrit également sur la chimie, et en politique il a pris parti pour les Irlandais et pour l'émancipation des catholiques. Son Autobiographie montre un homme qui sait s'apprécier.

2° Richard, né 1781, destiné aux travaux manuels, est déjà â 15 ans prédicateur itinérant dans le comté de Lincoln; il est ensuite employé par les méthodistes à Wakefield et à Hull. et en 1816 à Londres, où il finit par être nommé secrétaire de la Soc. des missions. Il était distingué comme orateur, et a beaucoup fait, avec Wilberforce et d'autres, pour l'émancipation des esclaves, f 8 janv. 1833. Son défout d'éducation première se reconnaît dans son style, qui est lourd; mais il a des pensées originales et sa polémique est très convenable. Son principal ouvrage est un manuel de dogmatique: Theological Instituas, en 3 vol.; il a aussi écrit une Défense de la mission wesleyenne aux Indes, une Vie de Wesley, un Catéchisme (adopté par la conférence), des Remarques sur ÏEtemal Sonskip du Christ, et un Dictionn. biblique et théolog. Ouvrage posthume: Explic. pratique du N. T.

WATT, Joachim (de), plus connu sous le nom de Vadiantu, né à Saint-Gall 30 déc. 1484 d'une noble famille de marchands, fit de bonnes études sous un maître ultra-sévère, et se dédommagea à Vienne 1502 en se lançant dans la vie d'étudiants. Un ami de son père l'arrêta sur cette pente dangereuse, et il sut se remettre au travail. Virgile lui servit longtemps d'oreiller. Il cultiva les lettres et les mathématiques, fut en 1514 couronné poète par Maximilien, et après un court professorat en Carinthie, revint à Vienne, fit son droit, et en 1516 il est professeur de belles-lettres, chancelier et recteur de l'université. Il se mit ensuite à la médecine et à la géographie, et finit par revenir à Saint-Gall 1518. Nommé aussitôt médecin de la ville, il eut à combattre une peste terrible. Son heureux caractère, ses talents, son dévouement, lui ouvrirent les portes des Conseils, et depuis 1526 il fut 9 fois nommé bourgmestre. Il fut jusqu'à la fin l'âme du gouvernement. C'est lui qui introduisit la Réforme à Saint-Gall. Encore à Vienne, il avait écrit sur la primauté du pape. Ami de Zwingle, de Glaréan, de Tschudi, il entrevoyait les temps nouveaux, sans pressentir la crise, et il ne pensait pas rien précipiter en donnant des leçons publiques sur le livre des Actes, et en favorisant l'arrivée de prédicateurs attachés aux idées évangéliques.

La Réforme se faisait lentement, doucement, dans les mœurs, dans les idées, dans la doctrine; la loi ne venait qu'après, pour sanctionner ce qui existait déjà, Kessler expliquait la ép. de saint Jean dans une salle; ces méditations, en 1525, durent se continuer en plein air. Le Conseil, qui les interdit d'abord, se décida à les autoriser pour les dimanches et les jours de féte, en stipulant qu'elles auraient lieu à 5 h. du matin dans l'égl. Saint-Laurent. Bientôt on cessa de lire la messe; les images disparurent peu à peu; les couvents furent l'objet de mesures administratives qui, au bout de quelques années, amenèrent leur suppression. L'abbé du couvent de Saint-Gall, par quelques imprudences politiques, irrita les habitants, et le Conseil fit disparaître en 1530 les images du couvent. La Réforme était faite, sans qu'on puisse lui assigner un jour ou une date précise. En 1525 les anabaptistes avaient essayé de propager leurs idées; ils avaient à leur tête Gre-bel. de Zurich, dont Vadian avait épousé la sœur. Vadian partageait leurs vues sur le baptême des enfants, mais non les idées antisociales; il fit prendre contre eux des mesures énergiques. Aussi apprécié au dehors que dans sa ville natale, Vadian fut souvent chargé de missions délicates; il assista aux principaux colloques, à Zurich, Baden, Berne, Saint-Gall, et les présida ordinairement. En 1536 il se retira des affaires et rentra dans la vie privée, pratiquant la médecine et consacrant ses loisirs à composer des traités de théologie. Il avait épousé Martha Grebel, dont il n'eut qu'une fille, Dorothée, qui épousa un Zoflikofer et en eut plusieurs enfants, f 6 avril 1551. Il légua à la ville ses livres, beaucoup d'autographes, et des manuscrits; ce fut le commencement de la bibliothèque qui porte son nom, Vadiana. Il a publié un Comment, de Pomponius Mêla, un Épitome des 3 parties du monde, des Aphoris-mes sur l'Eucharistie, quelques écrits sur la vraie humanité du corps de Christ. Il a en outre laissé des Chroniques, et divers mss. de théol. dont plusieurs ont de la valeur. Vie par Kessler, en latin.

WATTE VILLE (baron Frédéric de); originaire de Berne; ami de Zinzendorf, dont il avait fait la connaissance à Halle vers 1713 ou 1714, et avec lequel il se lia surtout en 1715 pour l'évangélisation des païens. Après un séjour de quelques années à Paris, il vintàBertholdsdorf, 1722. prit une part active à la fondation et à l'organisation de la communauté de Herrnhut, où il finit par s'établir, où il passa ses dernières années, exerçant une bonne influence et une action pacificatrice dans les moments difficiles, f 1772. Auteur de plus, beaux cantiques.— Son fils adoptif Jean de W. devint gendre du comte 1746. f 1788.

WATTS, Isaac, né 17 juill. 1674, fils d'un humble maître d'école de Southhampton, qui avait été souvent emprisonné pour cause de non-conformisme. Enfant précoce il étudiait le latin à 4 ans, et faisait des vers à 7. Depuis 1690 il suivit les cours de l'académie dissidente de Newington, Londres, et depuis 1694 retourna à la maison paternelle. Comme il se plaignait du mauvais chant d'église en Angleterre, son père lui suggéra l'idée d'essayer de faire mieux; il essaya et réussit; il passe auj, pour le meilleur compositeur de cantiques spirituels de l'Angleterre. Il a composé des hymnes en anglais et en latin. Après un préceptorat de 2 ans et une suffragance temporaire, il fut nommé pasteur de l'égl. non-conformiste de Marc Lane, Londres, 1702-1712, mais il dut donner sa démission, touj. souffrant des suites d'une maladie mal guérie, et il passa les 36 dernières années de sa vie à Abney-Park, dans la pieuse famille de son ami sir Thomas Ab-ney, un des aldermen de Londres, f 25 nov. 1748. Il a laissé des Heures lyriques, en latin, un peu ampoulées; hymnes et cantiques spirituels; les Psaumes de David, imités dans le langage et au point de vue du X. T.; des cantiques chrétiens pour les enfants; 2 catéchismes, 3 vol. de sermons; une Logique, des Essais philos.; quelques travaux géograph. et astronomiques, etc. On l'a accusé à tort d'aria-nisme. Son influence chrétienne a été grande, et sa mémoire est encore en bénédiction. Vie par Johnson, Milner, Palmer, etc.

WAZO, Walther, ou Gautier, év. de Liège, 1042-1048, né vers 975 d'une famille obscure, commença chez Notker par une espèce de domesticité, mais s'éleva peu à peu par son zèle à profiter des occasions de s'instruire; il devint chapelain et maître à" l'école de Liège. Doyen du chapitre en 1017 il irrita par ses rigueurs l'év. Durand, et plus tard Reginhard, et il ne fallut rien moins que la protection de l'emp. Conrad pour lui sauver la vie. On le respectait, mais on ne l'aimait pas, et l'empereur lui-même, qui en avait fait son chapelain, n'osa pas, en 1031 le nommer au siège de Mayence, comme il en avait eu l'intention. De retour à Liège en 1031, comme doyen et archidiacre, il devint promptement populaire, fut élu évêque à l'unanimité par les Liégeois et agréé par Henri III qui aurait cependant préféré donner cette place à un de ses amis. Wazo entra plusieurs fois en conflit avec Henri, à qui il dénia entre autres le droit de déposer Grégoire VI. Par ses principes sur les rapports de l'Égl. avec le pouvoir temporel, il était un vrai prédécesseur d'Hildebrand. Il refusa d'intervenir dans la malheureuse campagne contre les Frisons, et Henri le lui ayant reproché comme une trahi -

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son, il s'humilia quoique innocent et se soumit à payer une amende, faiblesse qu'il déplora toute sa vie. Il resta touj. fidèle à l'empereur, s'occupa avec zèle des écoles, et de l'éducation du clergé, mena une vie exemplaire, combattit la simonie, et préavisa dans une lettre à l'év. de Châlons, contre la peine de mort appliquée aux hérétiques. Après avoir encore aidé son ami Poppon de Stavelo dans la réforme de son abbaye de Saint-Védaste, près d'Arras, il f 8 juill. i048.

WEGSCHEIDER, Jul.-Aug.-Louis, né 1771 à Kubblingen, Brunswick, étudia à Helmstaedt sous Henke, fut précepteur dans une bonne famille de négociants de Hambourg, continua en même temps ses études de théol. et de philos, (d'après Kant), et se mit à écrire. Pendant ces 10 années 1795-1805 il publia une Étude sur les moralistes stoïciens et leurs principes comparés à ceux de Kant, et une suite de sermons sur les principes de philos, religieuse. Une dissertation sur les mystères des Grecs lui valut

1805 un appel comme répétiteur de théol. à Gôttingue; une introd. à l'Évangile de Jean

1806 lui mérita le titre de docteur et un appel comme prof, à Rinteln. Cette université ayant été supprimée en 1810 il vint à Halle, et avec son ami et parent Gesenius, avec Knapp et d'autres savants théologiens, il contribua à donner à cette université récemment reconstituée, une réputation de rationalisme scientifique qui dura jusqu'en 1830; dénoncé alors par la Gazette évang. de Hengstenberg, cet enseignement fut l'objet d'une enquête, qui aboutit, non à la destitution des principaux inculpés, mais à un blâme sévère du gouvernement, 21 déc. 1830. Dès ce moment le crédit de l'école rationaliste, déjà menacé par les leçons de Tholuck et d'Ull-mann, alla en déclinant; et quand en 1839 Julius Mu lier fut chargé de la dogmatique, Wegscheider ne compta plus qu'un petit nombre d'auditeurs, f 27 janv. 1849. Son principal ouvrage, qui en était à sa 8">e édition en 1844, a pour titre Institutions* theol. christ. dogmaticœ; c'est avant tout une compilation, dédiée aux « pieuses mânes de Luther, » et où Henke et Ammon ont été mis à contribution. Le rationalisme en est aussi pauvre que naïf; l'auteur rejette d'entrée toute idée de suprana-turalisme, il nie toute révélation de Dieu et ne voit dans l'A. et le N. T. que des mythes destiné à cacher des vérités naturelles. Steiger et d'autres lui ont répondu dès son apparition. Nommons encore parmi les écrits de W. son Comment, sur la lre ép. à Timothée; il en défend contre Schleiermacher l'authenticité. On lui doit aussi la publication de 13 Lettres inédites de Mélanchthon.

WEIGEL, Valentin, né 1533 à Grossenhayn,

Saxe, où son père était pasteur, fit ses études â Leipzig et Wittenberg, ftit consacré le 16 nov. 1567, et nommé pasteur à Zschoppau, où il f

10 juin 1588. Mystique, théosophe, alchimiste,

11 exerça fidèlement son paisible et béni ministère, sans que personne ait soupçonné les erreurs ou les divagations de sa foi, d'autant moins qu'il avait signé la Formule de concorde. Après sa mort seulement, son chantre Wei-kert fit circuler en mss. quelques exemplaires des écrits laissés par le pasteur, ce qui amena sa révocation; puis des amis les publièrent sous différents pseudonymes. On retrouve chez Wei-gel l'influence de Paracelse, des néoplatoniciens, de Tauler, de la Théol. german.,de maître Eckhart, etc.; partout une forte nuance de panthéisme. Ses principaux ouvrages roulent sur la manière de comprendre l'Écriture; la Vie éternelle, la Théologie, les Évang. des dimanches et des fêtes, la Prière, la Théol. mystique, le Connais-toi toi-même. Il se livre tout entier dans le titre d'un de ses écrits: Comment, dans près de la moitié de l'Europe, il n'y a point de chaire, soit à l'église, soit dans les écoles, qui ne soit occupée soit par un faux prophète, soit par un faux chrétien.

WEITHAUPT, v. Illuminés 2*.

WEITBRECHT, Jean-Jacq., né 29 avril 1802 à Schorndorf, Wurtemberg, ressentit de bonne heure l'influence de la grâce divine et entra 1826 comme élève dans la maison des missioos de Bâle. Mis au service de la Soc. des missions anglicanes, il fut appelé en 1831 au poste de Burdwan, Indes orientales, où il resta toute sa vie. Caractère sociable, actif, adroit, le premier dans les études, il l'était aussi pour les ouvrages manuels. Il se consacra à la prédication parmi les indigènes, tout en s'occupant avec affection du petit groupe d'Anglais qui se trouvaient sur la station. Il fonda des écoles, établit un orphelinat pour les jeunes filles dont les parents étaient morts du choléra, construisit une église dont la flèche dirigée vers le ciel habituai les indigènes à regarder en haut. Il fit de Pongs voyages d'évangélisation, tendit une main fraternelle à tous les disciples de Christ, pratiqua l'alliance évangélique avant qu'elle fût organisée en Europe, plaida dans sa patrie et ailleurs la cause des missions et f 1852 victime de son zèle; son dernier sermon avait pour texte: Viens, Seigneur Jésus, viens! Il a écrit en anglais Missions in Bengal. Sa veuve a publié sa Vie et un volume de sermons. Il a laissé un fils, et une fille mariée au Dr Christ -lieb de Bonn.

WEISZiECKER, Ch.-Henri (de), né 11 dec. 1822 à OEhringen, Wurtemberg, pasteur 1848 et chapelain de la cour 1851 à Stuttgard, prof, de théol. à Tubingue 1861, comme successeur de Baur, a rendu des services à la critique du JN\ T. et à la théol. biblique. On a de lui des Études sur l'ép. des Barnabas (qu'il place peu après l'an 70), Recherches sur l'hist. évangélique (il admet un Évang. primitif, dont Marc serait la plus fidèle reproduction); 4"*® jubilé de l'univ. de Tubingue, etc.

WENCESLAS, v. Wenzeslas.

WENDELIN, ou IVandalin, 1° saint légendaire très douteux, fort en honneur sur les confins de la Suisse et de l'Allemagne, comme efficace contre les épizooties. Les bollandistes en font un prince écossais qui serait venu tout jeune sur le continent pour se vouer à la vie solitaire et se serait fixé comme ermite, près de Trêves; il se serait établi ensuite comme bercer à Saint-Wendel, et serait mort supérieur de l'abbaye bénédictine de Tholey.

2° Wandalin, Marc-Fréd., né 1584, fils du pasteur de Sandhagen, près Heidelberg, élève de Toussain, Pareus, etc., fit l'éducation des jeunes princes, et devint recteur de Zerbst 1611. t 1652. Auteur de plusieurs écrits de dogmatique réformée, encore auj. estimés, entre autres Compendium christ, theohgiœ, Systema ma-jus, Eœercitationes, et surtout Collatio doctri-nœ refoi*m. et lutheranorum9 très important pour la symbolique.

WENDES, ou Vendes, Vénètes, parents des Vandales; grande division de la famille slave, qui se subdivisait elle-même en une multitude de petites bandes, ou tribus indépendantes. On les trouvait sur les bords de la Baltique, entre l'Elbe et l'Oder, comprenant la Poméranie et le Brandebourg, mais s'avançant au sud par la Bohême et la Moravie, jusqu'en Styrie, en Serbie, en Illyrie et dans la Vénétie. Leurs principales villes étaient Wineta et Réthré. Leur grand dieu était Swantewit de l'île de Rugen. Idolâtres, et très attachés à leur idolâtrie, ils étaient en outre très difficiles à évangéliser à cause de leur fractionnement en nombreuses peuplades. Soumis par les Lombards et les Avares ils ne réussirent à secouer leur joug qu'en acceptant celui des Francs vers 744, mais ce fut aussi la fin de leur existence comme nation. Boniface avait eu l'idée de leur faire connaître l'Évangile, mais d'après un plan tout nouveau, non pas en leur envoyant des missionnaires, mais en leur faisant des prisonniers et en les transplantant comme colons dans des pays chrétiens. Pépin se prêta à un essai de ce genre, mais qui n'eut pas de suites. Charlema-gne et Louis le-Débonnaire multiplièrent les évêchés le long de la Weser et de l'Aller, et jusqu'à l'embouchure de l'Elbe, et les succès obtenus sur les Saxons permirent de travailler plus efficacement sur les Wendes. Mais les assauts des Normands, pillant et dévastant l'Allemagne, menacèrent l'œuvre d'une entière destruction, jusqu'au moment où Henri-l'Oiseleur, 919-936, opposa une digue au fléau. La lutte recommença sous Othon-le-Grand, et ne cessa que lorsque la ville de Réthré eut été détruite, avec son temple idolâtre et son idole Radegast d'or pur. Mais les Wendes n'étaient soumis que là où le soldat germain les tenait en respect; dès qu'ils le pouvaient ils se révoltaient de nouveau. Enfin, sous l'administration ferme et paternelle de Hermann Billung, avec des évêchés à Mecklembourg, Meissen, Mersebourg, Zeits, et un archevêché à Magde-bourg, sans qu'on exerçât sur personne une contrainte religieuse, la paix sembla devoir s'établir; ce ne fut cependant encore qu'une trêve; deux siècles de luttes allaient suivre. La mort d'Othon, celle d'Hermann, la même année 973, remit tout en question; les insurrections se succédèrent jusqu'en 11^5 avec des alternatives diverses. Sous Lothaire II la position des W. était si désespérée que, pour échapper à une ruine complète, il ne leur restait plus qu'à embrasser la foi chrétienne. C'est ce qu'ils firent; heureusement Vicelin et Dittmar compensèrent par la piété et la persuasion ce flue les procédés brutaux de la guerre et de la politique avaient mis de faux et de défectueux dans la conversion de ces peuples. Vers 1170 le christianisme pouvait pnsser pour généralement accepté.

WENZESLAS, duc de Bohême, surnommé le Saint; petit-fils des premiers ducs baptisés par Méthodius, Boriwoï et Ludmilla; fils de Wratislav et de la païenne Drahomire. Son père étant mort 925, la pieuse Ludmilla se chargea d'élever Wenzeslas, et Drahomire s'empara du cadet Boleslav, pour en faire un païen. Elle envoya des gens pour étrangler sa bel le-mère, 927, et tout ce que celle-ci put obtenir fut d'avoir la tête tranchée comme les martyrs. Dès lors les persécutions commencèrent, les chrétiens furent assassinés et les temples détruits. Pour amener la paix les grands du pays partagèrent le royaume en deux parties, une pour chaque frère. Prague échut à Wenzeslas. Lorsque Othon-le-Grand monta sur le trône 936, il convoqua les princes à Worms, reconstitua l'unité de la Bohême et donna la couronne à Wenzeslas. Boleslav se vengea en faisant assassiner son frère au moment où celui-ci venait lui rendre visite à Bunzlau 938. Le souvenir de W. resta précieux aux chrétiens de Bohême, et bientôt le meurtrier repentant, pour expier son crime en quelque mesure, fit baptiser son plus jeune fils, et l'envoya dans un couvent où il prit le nom de Christannus, ou Christianus; c'est peut-être lui qui a écrit la vie de Ludmilla.

WERENFELS lo Pierre, né 1627 à Liestall, pasteur, prof, etantistès à Bâle, f 1703. Antenr de plusieurs dissertations en latin, sur le premier et le second Adam, les Traditions de l'Égl. romaine, la mort et le sang de Christ, le Mystère d'iniquité, les Vaudois, etc.

2<> Samuel, son fils, né 1 mars 1657 à Bâle, visita les universités suisses, fut nommé prof, de grec à Bâle, puis après quelques voyages en Hollande et dans le nord de l'Allemagne, prof, de rhétorique; en 1696 docteur en théol., prof, de dogmatique et de polémique, en 1703 prof, de l'Ancien, en 1711 prof, du N.-T. et pasteur de l'égl. française. En 1704 il avait refusé un appel de l'université de Franeker. Il était membre de la Soc. des sciences de Berlin, et de la Soc. de Londres pour la propagation du christianisme. f 1 juin 1740. Avec Ostervald et Alph. Turretin il représentait une sorte de théologie intermédiaire qui, en protestant contre une orthodoxie desséchante, ouvrait la porte à un fâcheux latitudinarisme. Il n'était pas taillé pour la lutte, et donna sa démission de professeur pour n'avoir pas à se prononcer dans le conflit soulevé à l'occasion de Wettstein. Nature fine et d'un caractère élevé, il a cherché à procurer la paix entre les confessions, et il croyait y réussir en enlevant aux dogmes leurs angles et leur tranchant. Il expliquait l'Écriture avec simplicité, sans s'attarder aux énigmes subtiles et aux puérilités allégoriques. Il craignait que ceux qui consultent la Bible ne le fissent souvent avec un parti pris d'avance d'y trouver ce qu'ils cherchaient, et on lui doit ce distique:

Hie liber est in quo quœrit sua dogmata qufeque,

Invenit atque iterum dogm&ta quisque sua.

Sans avoir une bien grande portée, ses ouvrages, empreints d'une vraie piété ont de la valeur; on cite surtout ses sermons des Vérités importantes de la religion, une étude sur le système cartésien, et un certain nombre d'opuscules latins sur des sujets de théol., de philos, et de philologie.

WERKMEISTER, Benoît-Marie, de son vrai nom Léonard, né 22 oct. 1745 à FUssen, All-gau, de parents peu aisés, entra chez les bénédictins où il prononça ses vœux, étudia la théol., fut ordonné prêtre en 1769 et chargé de diverses fonctions à Neresheim et à Freysing, prof., bibliothécaire, etc. Il appartenait à la tendance libérale qui fut illustrée par Febronius et par Wessenberg. Le duc Charles de Wurtemberg le prit pour son chapelain 1784, mais les ducs suivants le renvoyèrent, et le pauvre homme déjà malade fut plusieurs années dans une position voisine de la misère. Ce fut le prince Frédéric, bien que protestant, qui le releva, en lui procurant une retraite à Steinbach, 1796; en 1807 il fut nommé au Conseil des cultes pour les catholiques, puis au Collège de censure, en 1816 à la direction des écoles, et en 1817 décoré. Il f 16 juillet 1823 en paisible vieillesse. Auteur de nombreux ouvrages et opuscules, contre les vœux indélébiles, contre le célibat forcé, contre l'indissolubilité du mariage, sur la réforme du clergé, pour la messe en langue vulgaire, contre les prétentions de l'Église, contre le culte superstitieux de Marie et des saints; directions sur les écoles, étude sur Pestalozzi, Discours, etc.

WERNER loZacharie-Fréd.-Louis, né 18 nov. 1768 à Kônigsberg, fils d'un prof, d'histoire et d'éloquence et d'une mère intelligente, spirituelle, mais exaltée, étudia le droit et la philos, sous Kant, fut employé dans les bureaux de l'administration prussienne à Berlin et à Varsovie, se fit recevoir franc-maçon; se jeta dans le mysticisme, se mit à voyager, se lia avec les principales sommités littéraires, mena une vie de débauche, et se rendit à Rome, où il se fit catholique 19 avril 1811. En 1805 il s'était déjà divorcé de sa troisième femme. Il continua de vivre dans les plus honteux désordres, quitta Rome en 1813, vint étudier la théol. à Aschaf-fenburg, et reçut en 1814 l'ordination à Vienne, où il fut quelque temps, pendant le congrès, un des prédicateurs à la mode. Après un voyage en Podolie il revint à Vienne, entra chez les rédemptoristes, les quitta bientôt pour se remettre à prêcher, et f Î8 janv. 1823. II est connu surtout par ses poésies, ses Confessions 1801 empreintes de mysticisme, et quelques tragédies: la Croix à la mer Baltique, Luther, Attila, le 24 février.

2° Gustave-Albert, pasteur wurtembergeois, né 12 mars 1809 à Zwiefalten, élève de Tubingue, dut donner sa démission en 1841 comme suspect de ne pas adhérer entièrement à la Confession d'Augsbourg. Il se mit dès lors à voyager, prêchant partout où on le lui demandait, et il réveilla de nombreuses paroisses. Naturellement les autorités constituées s'en inquiétèrent, et le 31 mars 1851 le titre même de candidat lèi fut retiré, ce qui coupa court à ses prédications publiques. Il se décida à tenir de lieu en lieu des assemblées privées, et il obtint de grands succès, malgré les épithètes de fanatique et de swedenborgien dont on essaya de le flétrir. Préoccupé des besoins sociaux de notre époque, il avait ouvert déjà en 1840, à Reutlingen où son père était receveur, une maison de refuge, qui bientôt se développa et compta des ramifications industrielles et agricoles très importantes. C'était un petit monde dans lequel la question sociale était résolue par le dévouement et la bonne volonté des chrétiens qui en avaient accepté la direction. Werner était le père de cette famille; les uns lui devaient le salât de leur âme, les autres la vie et le relèvement matériel; tons travaillaient. Il avait fondé aussi des jardins d'enfants. Ses ennemis crièrent an communisme, au renversement de l'ordre social, de la famille et de la propriété. Mais on n'hésita pas, même en plein parlement, à rendre à son caractère le témoignage le plus honorable, au point que lorsque la catastrophe financière de 1865 menaça aussi les œuvres de Werner, qui n'avaient aucune comptabilité régulière (mais qui n'avaienl point de passif), les gouvernements de Stuttgard et de Francfort autorisèrent la reconstitution de la Société Werner et l'émission d'actions, en lui imposant seulement un conseil de surveillance. L'œuvre prospéra et s'étendit, les industries se multiplièrent, et depuis 1866 une Société du sou, fondée par des demoiselles, lui apporta un appui matériel considérable. Le 12 mars 1884 le 75m* anniversaire de sa naissance et le 50me de son entrée dans le ministère actif ont été célébrés dans la contrée avec une sympathie générale; la ville de Reutlingen lui a conféré la bourgeoisie d'honneur, le minisire de l'Intérieur lui a envoyé ses félicitations, et plusieurs milliers de chanteurs ont exécuté des chœurs sous ses fenêtres.

Auteur de quelques sermons, et d'un petit journal, Le Messager de la Paix; il a réimprimé avec Hofacker quelques écrits de Swedenborg.

WERTHEIM (Bible de), v. Schmidt lo.

WESEL, Jean (de), un des précurseurs de la Réforme, né au commencement du 15me siècle, à Oberwesel; jeunesse inconnue. En 1445 il est maître de philos, à Erfurt, en 1446 docteur en théol. et jouissant d'une certaine influence. Vice-recteur, en 1458, il fut appelé en 1460 comme prédicateur k Mayence, et vint à Worms en 1462. Nominaliste en philos., réformateur en religion, il fut exposé à diverses vexations de la part de l'év. de Worms, Reinhardt de Sic-kingen, cependant peu rigoureux orthodoxe, et sous prétexte de paradoxes extraits de ses sermons, une enquête fut ordonnée contre lui et s'ouvrit à Mayence le 4 février 1479. Elle fut menée par les inquisiteurs de Cologne et quelques théologiens de Heidelberg. Il fut constaté qu'il était nominaliste, qu'il avait eu des rapports avec les frères de Bohême, qu'il faisait procéder le Saint-Esprit du Père seul, qu'il rejetait la tradition, qu'il n'attachait pas d'importance à la transsubstantiation, qu'il condamnait les indulgences, le célibat et le monachis-me, qu'il mettait sur le même rang les évéq. et les prêtres, etc. Enfermé dans la prison du couvent, et soumis à une vraie torture morale, le pauvre vieillard, qui se tenait à peine, rétracta tout ce qu'on voulut; ses ouvrages furent brûlés et lui-même, par grâce, condamné à une prison perpétuelle dans le couvent des augustins; il y f 1481. Il n'avait pas d'idées bien claires sur le péché et la grâce. En revanche il tenait fermement à la Bible comme autorité, et à l'Église comme assemblée des croyants unis par une même foi et une même vie. Presque tous ses écrits sont perdus.

WESLEY lo Samuel, né 1662 àPreston, ministre anglican, aumônier sur un vaisseau de guerre, pasteur à Londres, dénonça les tendances catholiques de Jacques II. + 1735. Auteur de plusieurs ouvrages en vers, et d'un bon Comment. latin sur Job.

2o John, né 17 juin 1703, vieux style, à Ep-worth où son père était pasteur anglican. Avec son fr. Charles il fonda la Soc. méthodiste, q. v. Chrétiennement élevés, c'est cependant à Oxford seulement que leur piété se développa et prit un caractère pratique et actif. En 1729 ils se mirent à étudier le N. T. grec; parmi les jeunes gens qui se joignirent à eux, on cite Morgan, Kirkham, puis 2 ou 3 de leurs élèves. Ils se mirent à visiter les malades et les prisonniers. En 1735 Whitefield, qui avait 18 ans, fut également reçu dans ce petit cercle, qui comptait alors 14 membres. La même année, en octobre, appelé comme chapelain par les directeurs d'une colonie en Georgie, il s'embarqua pour l'Amérique, emmenant avec lui son frère, M. Ingham, et le jeune Delamotte, fils d'un négociant de Londres. Il espérait pouvoir évan-géliser les Indiens, mais il ne put entrer en relations avec eux, et les colons eux-mêmes, peu satisfaits de sa prédication vivante, lui suscitèrent des difficultés de tous genres. Ils revinrent donc en Angleterre, Charles en 1737 et John en 1738, Ils avaient appris à connaître les moraves dont la piété calme avait produit sur eux une vive impression. Dès son retour à Londres John se lia avec le pasteur morave Bohler; il puisa dans sa société une vie nouvelle, et en retira la conviction que c'est seulement du 24 mai 1738 que datait réellement sa conversion. Bientôt après il fit un voyage à Herrnhut, puis revint et commença le cours de ses prédications d'appel partout où il put se faire entendre; il comptait quelquefois jusqu'à 20,000 auditeurs. En 1739 il ouvrit à Bristol sa première chapelle méthodiste. En 1740 ses relations avec les moraves cessèrent, et la congrégation qu'il avait fondée à Fetterlane fut dissoute. Le méthodisme s'organisait en société unie. Il se sépara aussi de Whitefield, trop calviniste pour lui. En juin 1744 l'association des prédicateurs libres tint sa 1« conférence à Londres. Wesley voulait maintenir l'union avec l'Égl. établie, et il demanda aux évêques l'ordination pour ses ministres et des missionnaires. Sur leur refus il s'adressa à un évêque grec, momentanément en séjour à Londres; puis comprenant que l'évêque et le pasteur n'étaient à l'origine qu'une même fonction, il se décida à consacrer lui-même ses envoyés, entre autres Th. Cook, 1784. C'était la rupture avec la haute Église. En 1785 il se mit au bénéfice de l'Acte de tolérance de 1689, ce qui le constituait franchement et officiellement en secte dissidente. Il f 2 mars 1791. Vie par Matth. Lelièvre; Ch. de Rémusat; Punshon, etc.

3o Son fr. Charles, né 18 déc. 1708, élève d'Oxford en 1726, groupa le premier quelques amis en une société fraternelle qu'on appela méthodiste. Il accompagna John en Amérique et fut pendant 17 ans son aide dans ses voyages missionnaires. Marié, il partagea depuis 1756 son temps entre Londres et Bristol, mais ne voulut pas que ses paroisses se séparassent de l'Égl. établie. Depuis 1771 jusqu'à sa f 1788 il se fixa à Londres, pasteur de City-Road. Poète distingué, il a donné à son église le Wesleyan Hymn Book, qui contient 627 cantiques de sa composition. Vie, par Th. Jackson.

WESSEL, Jean, surnommé Gansfort du nom d'un ancien domaine de sa famille, né 1400 ou 1420 à Groningue, fut élevé par une parente pieuse, Odilia Clantes, qui l'envoya à l'école à Zwoll, où il connut les Fr. de la vie commune, entre autres Th. a Kempis. De là il vint à Cologne, où il apprit le grec et l'hébreu, et où il commença à rédiger sa Grande mer, recueil où il notait tout ce qu'il apprenait d'intéressant et qui lui servit plus tard pour la composition de ses propres ouvrages. Il étudia Platon avec délices. Appelé comme prof, à Heidelberg par l'électeur palatin, il aima mieux aller se perfectionner à Louvain, puis à Paris où d'après Har-denberg il passa 16 ans. C'était l'époque, des luttes ardentes; il se mit résolument du côté des nominaux. Il se lia là avec des hommes éminents, le cardinal Bessarion, Reuchlin, Agri-cola. De Paris il se rendit à Rome, mais il en fut vite fatigué. En 1475 il est à Bâle, ville qu'il avait déjà visitée en 1442 lors du concile, avec le cardinal délia Rovere. Il passe à Heidelberg. mais il ne peut obtenir le titre de docteur en théol., parce qu'il n'a pas reçu les ordres. Ses talents de discussion lui ont mérité d'être surnommé le Maître des contradictions. Mais l'âge venait, et fatigué de controverses il finit par rentrer à Groningue; il trouve un asile dans un couvent de femmes; faible et malade il s'y fait soigner, en même temps qu'il échappe aux tracasseries que lui vaudraient ses tendances réformatrices, et qui vont atteindre son quasi-homo-nyme J. de Wesel. Il ne s'occupe plus des choses religieuses qu'au point de vue pratique; des amis enthousiastes font cercle autour de lui et l'appellent la lumière du monde. Il regarde l'Écriture Sainte comme la seule source de la vérité; il ne veut connaître autre chose que Jésus-Christ crucifié, et il annonce comme inévitable une prochaine réformation de l'Église, f 4 oct. 1489; enterré datis la chapelle du couvent. Parmi les réformateurs, c'est à Méianchthon qu'on peut le mieux le comparer. Plusieurs de ses ouvrages ont été brûlés. Parmi cenx qui ont échappé au feu, on cite surtout la collection intitulée Farrago (mélanges, compilation) re-rum theoL uberritna, impr. 1521; elle renferme des traités sur la bonne Providence de Dieu, sur le mystère et les effets de l'Incarnation et de la passion du Sauveur, sur les pouvoirs de l'Église, le Sacrement de la Pénitence, la communion des Saints, des lettres sur les Indulgences; une nouvelle édition, Groningue 1614, renferme en outre une dissertation sur l'Eucharistie.

WESSENBERG, Henri-Ch.-Ignace (baron de), un des plus nohles représentants du catholicisme libéral contemporain. Né 4 nov. 1774 à Dresde (quelques-uns disent à Fribourg en Bris-gau), il appartenait à une famille autrichienne distinguée; son père était ambassadeur en Saxe, son frère Philippe devait représenter l'Autriche au congrès de Vienne et devenir ministre des affaires étrangères en 1848. Lui-même, destiné au sacerdoce, fut pourvu de bonne heure de riches prébendes. Après avoir commencé ses études chez les ex-jésuites du Saint-Sauveur à Augsbourg, il les continua 1792 à Dillingen où Sailer exerça sur lui une influence heureuse et décisive; en 1795, après le départ de Sailer, il se rendit à Wurzbourg où il entendit Oberthur et Seiffart, et enfin 1796-1798 à Vienne, où il fut reçu docteur en théologie. Il était alors plutôt un bel esprit qu'un esprit sérieux, et il s'occupait volontiers de tout, histoire, littérature, philosophie, droit, religion, sans s'attacher spécialement à rien. Mais l'év. de Dalberg, qui l'avait connu à Wurzbourg, savait qu'on pouvait compter sur lui. Il l'appela en 1801 à Constance comme son coadjuteur, et put dès l'année suivante, en reconnaissance des services rendus au diocèse lui en abandonner toute la direction avec le titre de vicaire général. Son activité fut immense et porta sur toutes les branches, instruction du clergé, réformes scolaires, chant, conférences pastorales, bibliothèques, séminaires, etc. Pie VU lui-même rendit hommage à ce zèle apostolique et désintéressé. Mais Wes-senberg, qui travaillait à réformer le clergé, devenait peu à peu suspect de vouloir aussi réformer la religion; il parlait de diminuer le nombre des fêtes; il ne tenait ni aux processions. ni aux pèlerinages, ni aux confréries; il introduisait dans le culte le chant en allemand et publiait une liturgie allemande; il recommandait la prédication et le catéchisme. Les dénonciations contre lui se multiplièrent, et malgré la protection de Dalberg on les enregistrait à Rome, on en faisait un dossier, que le nonce papal en Suisse Testaferrata, se plaisait à grossir au fur et à mesure. Dalberg ayant demandé pour son coadjuteur la survivance, cum spe succedendi, et la cour badoise Payant appuyé, Rome ne répondit pas, mais à peine Dalberg fut-il mort 1817, qu'elle refusa, malgré les instances du chapitre, de ratifier cette élection. Le long catalogue des motifs qu'elle fit valoir pour justifier son refus *st peut-être le plus bel éloge et la plus belle biographie de cet homme remarquable. VVessenberg partit aussitôt pour Rome pour tenter de se justifier, mais Consalvi exigea de lui qu'il se soumît purement et simplement, ce qu'il refusa de faire. Il demanda seulement et il obtint 17 mai 1818, qu'on lui donnât l'énu-mération des fautes qu'on lui reprochait, et de retour dans le grand duché, il communiqua cette pièce au gouvernement, qui lui promit aide et protection, et au public qui mûrit ses réflexions en silence. Nommé 1819 membre de la Chambre badoise, et plusieurs fois réélu, il donna sa démission en 1833, et se retira à Constance pour y travailler et s'y reposer en paix au milieu de ses amis. C'est lui qui en 1838 décida le prince Napoléon à quitter la Suisse, f 6 août 1860 et enterré dans la cathédrale. Nature à la fois douce et forte, d'une activité extrême et qui n'avait rien de fiévreux, il est resté lui-même jusqu'au bout, sans se laisser gagner par les promesses, ni effrayer par les menaces. Il a beaucoup écrit; ses principaux ouvrages sont: Les grands Conciles du 15™ et du 16™ siècle, 4 vol. Constance 1840; l'Éducation primaire du peuple, Zurich 1814; l'Esprit du siècle, Zurich 1801; la Réforme des Univ. allemandes, Constance 1833; les Images chrétiennes, 2 vol. 1826-1828; Dieu et le monde, leurs rapports, 2 vol. Heidelberg 1857; Poésies, 7 vol. Stuttgard, 1834-1854, etc.

WESSOBRUNN, abbaye de bénédictins de la haute Bavière, fondée d'après la légende par les 3 frères Landfroi, Waldram et Éliland; d'après l'histoire, par le duc Thassilon II. Elle a produit quelques savants distingués, et a brillé comme école d'un certain talent au moyen âge. Sécularisée au commencement de ce siècle, elle est devenue la propriété du prof. Sepp. Parmi ses mss. transportés à Munich, on a trouvé une Prière, qui date du 8™ siècle, rédigée dans le plus ancien allemand connu; elle se divise en deux parties, l'une en vers, l'autre en prose. C'est une curiosité littéraire et philologique, mais qui ne jette pas un grand jour sur la théologie de l'époque, v. Grimm.

WESTEN, Thomas (de), né 1682 à Dront-heim, étudia la médecine et, après la mort de son père, la théologie. Ses études finies, il fut nommé à divers postes plus onéreux que rémunérés; il était pasteur à Drontheim en 1716 quand le collège de la mission danoise le nomma vicaire général pour la Laponie et le nord de la Finlande. Il se consacra entièrement à cette œuvre, fit plusieurs voyages chez les Lapons, en ramena quelques jeunes gens qu'il élevait chez lui, et malgré le mauvais vouloir de l'évêque et de son fils le recteur, il put établir à poste fixe quelques missionnaires et quelques instituteurs dans ces contrées déshéritées, dont il était l'apôtre. Épuisé de bonne heure par un travail incessant, il revint en mai 1723, consacra ses dernières forces à écrire les souvenirs de ses missions, et à recommander son œuvre à ses successeurs, + 9 avril 1727.

WESTMINSTER (monastère de l'ouest), abbaye célèbre, dont la chapelle est devenue la sépulture des rois et des grands hommes de l'Angleterre. Elle est surtout connue dans l'hist. ecclés. par la Commission de théologiens qui y fut convoquée en 1643 par le Long parlement dans le but de mettre un terme aux dissensions religieuses. Le moyen était mal choisi. L'assemblée se composait de 150 ecclésiastiques et laïques anglais, auxquels s'étaient joints 5 ecclésiastiques et 3 délégués laïques écossais. Le roi Charles ayant interdit aux évêques de son parti d'y assister, 22 juin 1643, l'Assemblée se constitua sans eux et s'ouvrit le 1" juillet par un discours du D** Twisse, son président, en présence des deux Chambres. Après avoir tenu serment de ne rien voter qui ne fût conforme à la Parole de Dieu, les membres du synode se mirent à l'œuvre; ils siégèrent pendant plus de 6 ans et tinrent 1163 séances. La majorité penchait vers le calvinisme et le presbytérianisme, puisque les purs épiscopaux avaient déserté le terrain. Le résultat de leurs travaux fut une Confession de foi, un grand et un petit Catéchisme, et un Recueil de directions pour le culte, sans formulaires liturgiques. Ratifiés avec peu de changements par les Chambres, ces travaux reçurent force de loi; mais bientôt après, l'Église épiscopale ayant été rétablie par le retour de la monarchie, les résolutions du synode furent de nul effet en ce qui la concernait; elles n'en continuèrent pas moins de rester en vigueur chez les presbytériens d'Angl., d'Écosse et d'Amérique. C'est le 28 févr. 1648 que le synode eut achevé sa tâche; il resta cependant en session jusqu'au moment où Cromwell mit fin à l'existence du Long parlement, 25 mars 1652, mais ses dernières années furent languissantes et misérables. La Conf. de foi de Westminster compte 33 articles, franchement et clairement évangéliques, avec une couleur calviniste prononcée en ce qui touche à la prédestination; les anciens symboles n'y sont pas mentionnés; la cène et le baptême y sont représentés comme signes et sceaux de la grâce, sans valeur en dehors de la foi.

WESTPHAL, Joachim, né 15(0 à Hambourg, fils d'un charpentier, étudia à Wittenberg sous Luther et Mélanchthon, et dans d'autres universités. Il fut appelé comme pasteur à Hambourg 1541, et il y f 16 janv. 1574, surintendant. D'un esprit entier et d'un caractère difficile, il fut constamment en lutte avec tout le monde. Flacien déclaré, il repoussa l'intérim de Leipzig, il combattit les Adiaphora de Mélanchthon, condamna Major et les sacramentaires, persécuta Lasky, attaqua Calvin, se mit mai avec son surintendant, de Eitzen, et non seulement il guerroya contre tous, mais encore il le fit avec une violence qui le fit traiter de furieux. C'est une figure déplaisante au milieu des grands hommes de la Réforme. Comme pasteur il s'est occupé des pauvres, et il a rendu à son église des services qui ne sont pas encore oubliés; quelques fondations portent son nom.

WESTPHALIE, contrée du nord-ouest de l'Allemagne, comprise entre le Weser et le Rhin, mais sans limites fixes et déterminées, comme sans forme de gouvernement bien régulière; elle a été tour à tour duché, cercle de l'empire, royaume pendant la conquête française, province prussienne. Son évangélisation se confond avec celle de la Frise, des Alemani et des Saxons. Les ducs de Clèves et Juliers étaient maîtres absolus dans leurs domaines, et ne relevaient d'aucune juridiction ecclésiastique (Dux Cliviœ est papa in terris suis). La vie religieuse y fut souvent réveillée et entretenue par des chrétiens qui n'appartenaient pas à la hiérarchie, des Vaudois, les Fr. de la vie commune, Tauler, Ruysbrook, Wessel, Thomas a Kempis. Les humanistes, comme Hermann de Busche, et le cfianoine Rodolphe de Langen de Munster, la prédisposèrent à recevoir la Réforme, et plusieurs parties du pays devinrent protestantes, malgré Ernest de Bavière et l'opposition des archev. de Cologne et de plusieurs petits princes. De nombreuses immigrations de Hollande introduisirent l'élément réformé à côté de l'élément luthérien qui prédominait, et jusqu'à ce jour les deux Églises se sont maintenues, soutenant des rapports fraternels, toutes les fois que le gouvernement ne voulait pas leur imposer l'union. — On donne le nom collectif de Traité de Westphalie aux deux traités qui mirent fin à la guerre de Trente ans. Fatigué de tous ses revers, Ferdinand III dut se résigner à à la paix; le 6 août 1648 à OsnabrUck il traita avec la Suède, le 8(17) sept, suivant à Munster avec la France. Les préliminaires en avaient déjà été tracés à Hambourg les 15-25 déc. 1641. Le traité définitif fut signé le 4 oct. 1648. La diète le confirma en 1654. Dès lors et pendant près de 2 siècles il a été la base de l'organisation de l'Allemagne, et avec le traité des Pyrénées 1659 le code de la diplomatie moderne en Europe. Il donna à la Suède une partie de la Poméranie, plusieurs places fortes et une indemnité pécuniaire; à la France il conserva l'Alsace, les Trois-Évêchés (Metz, Toul et Verdun), Phi-lisbourg et Pignerol; il proclama la souveraineté des divers États de l'Allemagne dans l'étendue de leur territoire, l'indépendance des Provinces-Unies et celle des cantons suisses. En matière religieuse le Traité confirma les paix de Passau et d'Augsbourg, en étendant aux calvinistes les conditions, droits et privilèges spécifiés en faveur des luthériens. L'égalité civile el politique des catholiques et des protestants fut proclamée; la juridiction ecclésiastique fut suspendue, non seulement entre États protestants, mais aussi d'État catholique à État protestant; enfin sur les 50 assesseurs de la Chambre impériale, il fut décidé que 24 seraient protestants, et qu'il y aurait toujours 6 protestants au Conseil aulique. Quant à la répartition des biens ecclésiastiques, fondations, prébendes, hôpitaux, couvents, elle fut faite sur la base factice de l'état du 1er avril 1624, avant la guerre, et par conséquent au bénéfice des catholiques; beau possidentes.

WETSTEIN 1* Jean-Rodolphe 1614-1684, prof, de grec et de théol. à Bâle. — 2o Son fils, de même nom, 1647-1711, aussi prof, de grec et de théol., a publié quelques traités inédits d'Origène. — 3° Jean-Henri, fr. du précédent, 1649-1726, s'établit comme imprimeur à Amsterdam, et publia de nombreux ouvrages, accompagnés de savantes notices. — 4° Son fils Ch.-Antoine 1743-1797, enseigna le grec à Leyde, et traduisit en vers latins Hésiode, Théo-crite, etc. —5o Le plus célèbre de cette famille de savants fut Jean-Jacques, né 5 mars 1693 à Bâle, fils du pasteur de l'église Saint-Léonard. Neveu des 2e et 3* qui précèdent, il étudia %ous Buxtorf jeune, Werenfels, Iselin, fit de nombreux voyages en France et en Angleterre, visita les principales biblioth. de l'Europe, fat nommé en Hollande aumônier d'un régiment suisse, et rentra 1717 à Bâle, où il occupa successivement différents postes de diacre et de pasteur, en même temps qu'il donnait chez lui quelques leçons de théologie. La critique du texte, la recherche des mss., le choix des variantes l'intéressait vivement. Il échoua sur cet écueil; non seulement il ne distinguait pas bien les familles des mss., mais contrairement à Mill, Bentley, Bengel, il préférait la famille grecque. Une discussion sur l'âge du mss. E. de Bâle (Évangiles), l'entraîna avec les prof. Iselin et Frey dans nn conflit qui prit bientôt de plus grandes proportions; on voulut voir dans le choix de ses variantes une tendance arminienne et socinienne, on interrogea les cahiers de ses élèves, on éplucha ses sermons, et finalement il fut destitué 13 mai 1730. Werenfels avait refusé d'intervenir dans la lutte. Wetstein avait mis à l'abri le résultat de ses travaux. Il se retira en Hollande, fut nommé à la place de Le Clerc prof, au collège des Remontrants d'Amsterdam, où il f 22 mars 1754 d'un mal à la hanche. Tous les efforts pour le ramener à Bâle avaient été inutiles. Il était membre des académies de Londres et de Berlin, et de la Soc. anglaise pour la propagation du christianisme. Son principal ouvrage est son édition critique du N. T. avec le texte reçu, et l'indication des variantes de plus de 40 mss. Amst. 1751-1752, 2 vol. fol.; il y avait joint des notes explicatives et des citations des pères et d'autres auteurs anciens. Il avait eu aussi l'idée de publier comme texte le Cod. Alex., le plus ancien connu, ou de rédiger un nouveau Texte reçu, d'après les plus anciens mss., mais les arminiens l'en dissuadèrent, comme d'une imprudence qu'on ne manquerait pas d'exploiter contre lui. C'est seulement en 1763 que le libraire anglais Bowyer publia ce mss. avec les corrections et annotations de Wetstein, qui n'ont d'ailleurs pas une grande importance. On a encore de Wetstein; l'ép. de Barnabas ad virgines, des Prolégomènes à la lecture du N. T., une étude sur les Variantes, et quelques petits écrits (li-belli) sur l'interprétation critique du N. T.

WETTE (de), Guill.-Martin-Leberecht, né 14 janv. 1780 à Ulla près Weimar, fils d'un pasteur «.étudia depuis 1796 à Weimar où il connut Herder; en 1799 il vint à Iéna, où il fit sa théol. sous Griessbach et Paulus; docteur en 1805 il commença à donner quelques cours libres et publia ses premières études, sur le Deu-téronome. D'autres ouvrages de critique, sur le Pentateuque, ses Chroniques qu'il retravailla plus tard, parurent les années suivantes. En 1807 il fut nommé prof, à Heidelberg, avec Daub et Marheinecke; en 1810 à Berlin. Une lettre de sympathie, avec toutes réserves, qu'il écrivit à la mère de Sand, exécuté pour avoir assassiné Kotzebue, le fit destituer et exiler 1819. Il se fixa à Weimar, et il était sur le point d'accepter une place de pasteur à Brunswick, lorsque en 1822 il reçut un appel comme prof, de théol. à Bâle, position qui convenait mieux à ses aptitudes et aussi à ses tendances politiques, à la fois conservatrices et libérales. Il s'y rendit, et y resta jusqu'à sa f 16 juin 1849. C'est pendant son séjour à Weimar qu'il publia, sous le nom de Théodore l'histoire de ses doutes et de son développement religieux, espèce de roman auquel Tholuck répondit par son Guido et Jultus. Si De Wette passe à bon droit, non seulement pour un des plus savants théologiens de l'Allemagne, mais encore pour le chef le plus accentué et le plus autorisé du rationalisme critique et exégétique, il est également vrai que par le côté mystique de son esprit et de son caractère, il a toujours eu avec le piétisme et les piétistes d'étranges analogies. Il distinguait d'une manière absolue les deux domaines de la science qui se rapporte au fini et se conquiert par l'intelligence, et de la foi qui embrasse l'infini et ne peut être saisie que par le cœur. 11 n'y avait rien en lui de cette sécheresse qui trop souvent réduit l'étude de la théol. à une espèce d'anatomie, et quaud il analysait, il ne disséquait pas. A Bâle il ne cessa de s'intéresser à l'œuvre des missions, comme à toutes les sociétés religieuses; il fréquentait volontiers les hommes pieux (entre autres Vinet), sans s'effrayer de leurs doctrines, et il redoutait si bien les excès d'un rationalisme irréligieux, qu'il vota contre l'admission de Rupp dans la Soc. de Gustave-Adolphe. Il prêchait volontiers, et a laissé plusieurs volumes de sermons aussi remarquables par la profondeur de la pensée morale que par une grandeur de style qui rappelle les plus belles époques de la littérature. Ses cours de théol. morale étaient de sa part l'objet d'une prédilection particulière. Cependant c'est par J'exégèse et la critique sacrée qu'il a le plus brillé; toute réserve faite quant aux résultats surtout négatifs auxquels il est arrivé, on peut admirer la clarté de son exposition, la limpidité de son style, son étonnante érudition et le talent avec lequel il condense et résume les questions. Le nombre de ses œuvres est considérable. Outre sa traduction de la Bible et une synopse des évangiles, on lui doit des Introductions à l'A. et au N. T., des comment, sur presque tous les livres de la Bible, des manuels de morale, un manuel de dogmatique, des sermons, des études sur une foule de questions religieuses, sur le cathol. et le protestantisme dans leurs rapports avec la Révélation, des Pensées sur la peinture et l'architecture, quelques romans, un drame, une édition des Lettres de Luther, etc.

WETZER, Henri Joseph, né 19 mars 1801 à Anzefahr, Hesse-Électorale, étudia la théol. à Marbourg, surtout l'hébreu et l'arabe, se rendit en 1823 à Tubingue, en 1824 à Fribourg où de brillants examens le firent recevoir docteur en théol. et en droit canon. De là il vint à Paris pour y suivre les cours de Sacy et de Quatre-mère, et en mai 1828 il fut reçu à Fribourg comme privat-docent. En 1830 il est nommé prof, ordinaire de philologie orientale; il décline des appels à Giessen et à Marbourg, et se marie en 1831. Il fut nommé successivement doyen, sénateur, député; son zèle à défendre le catholicisme au milieu des troubles qui survinrent plus tard, lui attira des difficultés, mais sans le décourager; le gouvernement le censura pour s'être justifié d'être intervenu dans les débats politiques; il fut privé de sa place de doyen. Outre une trad. de l'A. T. faiteavec van Ess on a de lui la publication d'un mss. arabe, avec trad. lat. d'une Hist. des chrétiens coptes, de Taki-Eddini Makrizii; l'hist. chronologique des faits relatifs aux controverses ariennes entre 325 et 350; uneHist.de l'univ. de Fribourg (anonyme), où il en défend le caractère essentiellement religieux et catholique; enfin un Dictionn. ecclésiastique, entrepris avec Welte, très confessionnel quoique modéré, mais dont il ne vit pas la fin. Il f 5 nov. 1853 à Fribourg, au retour d'un voyage à Vienne, où il avait assisté à une assemblée générale des associations catholiques. C'était un savant paisible et consciencieux.

WHATELY, Richard, né févr. 4787 à Londres, élevé à Bristol, fit ses études à Oxford où il fut agrégé 1811. D'un esprit vif et hardi, il se jeta dans le libéralisme politique, et arbora un drapeau théol. indépendant, qui ne lui pré* sageait pas une brillante carrière. Aussi l'éton-nement fut-il général quand, après quelques années de pastorat à Haiesworth, Suffolk, et de présidence à Saint-Alban's Hall, on le vit tout à coup promu à l'archevêché de Dublin 1831. Il déploya une grande activité, avec beaucoup de tact, dans cette nouvelle position, vécut en paix avec l'archev. Murray, fit du bien aux catholiques aussi bien qu'aux protestants, mais ne témoigna pas la moindre sympathie pour l'œuvre de la mission intérieure, qui aurait pu éclairer et moraliser la population. Il se prononça pour la séparation de l'Égl. et de l'État, pour la réduction à 12 des 30 évéchés anglicans d'Irlande, pour le paiement des dîmes par les riches propriétaires protestants, pour le bill de Maynooth, pour un système scolaire intercon-fessionnel. et travailla à combattre le mouvement du Rappel par des concessions intelligentes et par le respect mutuel des droits des partis. Mais il ne se concilia pas les catholiqnes et il mit contre lui les orangistes et les orthodoxes, qu'il froissa en outre par ses idées sur les sacrements. Il vota aussi l'émancipation des juifs, l'abolition de la peine de mort et de la déportation, comme n'atteignant pas leur but, le droit pour un veuf d'épouser sa belle-sœur, etc. En théol. il niait l'inspiration, la prédestination, la nécessité de la mort du Sauveur, la valeur traditionnelle des sacrements, l'évidence de la succession apostolique. Son opposition au puséisme et l'avènement de l'archev. Cullen le rapprochèrent des protestants; ce dernier avait fait enlever des écoles cathol. le recueil de chants et plusieurs ouvrages scolaires sur la religion, composés par Whately. Doué de talents supérieurs il eut une fois à remplacer le lord-lieutenant, et le banc des prélats d'Irlande l'envoya plusieurs fois à la Chambre des lords. Il conserva ses facultés et ses forces jusqu'à sa t 8 oct. 1863. Auteur de: Pensées sur le sabbat, Lettres sur l'Église, Doutes relatifs à l'hist. de Napoléon, Doctrine scripturaire sur les sacrements, Essais, Erreursdu romanisme,Le royaume de Christ, Éléments de logique, etc.

WHISTON, William, né 9 déc. 1667 à Norton, Leicester, étudia à Cambridge; maître ès arts en 1690. consacré en 1693. Après quelques années de pastorat, it fut appelé par Newton, son maître, à le suppléer comme prof, de mathématiques 1701; il le remplaça définitivement 1703. Mais il avait passé à l'arianisme, et il s'en fit l'ardent propagateur, continuant de prêcher et de recommander ses nouvelles idées. Il finit par être destitué 1710, et se rendit à Londres, où il vécut de sa plume et de son travail. 11 réunit quelques amis en une société pour le rétablissement du christianisme primitif, mais les vrais ariens refusèrent de se joindre à lui. En 1747 il quitta l'Église établie, fonda une église nouvelle, se posa plus ou moins en prophète, se choisit 12 disciples et tourna à l'anabap-tisme; déjà depuis 1712 il était devenu baptiste. La reine Caroline était au nombre de ses protecteurs. Il f 22 août 1752. Savant distingué, un peu entêté et vaniteux, chiliaste, apocalyptique, arien, passablement excentrique, il ne sut pas se faire la place à laquelle il avait droit, et il resta toujours assez isolé.a de lui une nouvelle théorie de la terre où il prouve que la création en 6 jours, le déluge et la fin du monde par le feu n'ont rien de contraire à la raison; une Chronologie de l'A. T. et eue Harmonie des Évangiles; un Essai sur les Constitutions apostoliques, le christianisme primitif restauré, 5 vol.; une hist. de l'Eucharistie dans les 2 premiers siècles; le N. T. primitif; l'Accomplissement littéral des prophéties, une Autobiographie, une édition des Œuvres de Fl. Josèphe, avec tables, cartes et dissertations, etc.

WHITBY, Daniel, né vers 1638 à Rushden, Northampton, docteur en théol., fellowdu collège de la Trinité à Oxford, chapelain de lev. de Salisbury, prébendaire et chantre, enfin r«y teur de Saint-Edmond de Salisbury. f 1726. D'abord fougneux adversaire du catholicisme, et plutôt bien disposé pour les dissidents, qu'il espérait ramener par quelques concessions, il finit par tourner à l'arminianisme et à l'aria -nisme. Ses principaux ouvrages sont: l'Examen des variantes de Mill sur le N. T.; un Traité de la divinité de J.-C. contre les ariens et les sociniens; une Dissertation sur l'interprétation de l'Écriture, d'après les pères; un Comment, sur le N. T., une Paraphrase sur toutes les épitres du N. T.

WHITEFIELD, Georges, né 16 déc. 1714, fils d'un aubergiste de Bell-Inn, Glocester, eut une jeunesse un peu sauvage, mais toujours avec le respect de la religion et l'arrière-pensée de devenir prédicateur. En 1732 il put se placer à Oxford comme domestique des étudiants, et il profita de sa position pour étudier aussi. Ses relations avec les fr. Wesley décidèrent de sa vocation. Il se joignit 1735 à leur petit groupe, déjà traité de méthodiste, et ne tarda pas à en devenir un des membres les plus influents. Consacré diacre en 1736 il prêcha son premier sermon dans la cathédrale de sa ville natale, se rendit en 1738 en Géorgie auprès de WesJey qui l'appelait, mais revint en 1739 pour une collecte, et fut ordonné prêtre à Oxford. Il se mit aussitôt à tenir des réunions en plein champ pour les mineurs de Kingswood, aucune église n'étant assez vaste pour contenir les auditeurs qui se pressaient autour de lui; on en comptait parfois 20,000.11 retourna en Amérique, fit une tournée de prédications dans toutes les stations où se trouvaient des Anglais, et fonda en Géorgie un hôpital d'orphelins. De retour en 1741, il refit six fois le même voyage, et chaque année vit s'accroître le nombre de ses adhérents. Depuis 1741 il s'était séparé de Wesley, mais les deux églises poursuivant la même œuvre avec un succès égal, l'une en Angleterre, l'autre, Whitefield, en Amérique, ont continué pour le monde de porter le même nom, v. Méthodiste». Whitefield entreprit en 1769 un nouveau voyage aux États-Unis, mais il f 1770 à Newbury-Port, près de Boston. — Il avait trouvé dès 1748 une disciple fervente dans lady Selina Huntingdon, née 1707, f 1791, qu'on avait surnommée la reine des méthodistes; frappée des prédications de W., elle l'avait nommé son chapelain, et convoquait parfois la noblesse d'Angleterre à venir l'entendre chez elle. En 1768 elle fonda à Trevecca, au sud du pays de Galles, un séminaire qui fut plus tard transféré à Cheshunt. On a de W. des Lettres, des sermons et quelques traités de controverse, v. Jackson; M. Lelièvre qui appelle Whitefield le plus puissant prédicateur du siècle; H. Moore, Tholuck, etc.

WICELIUS, ou plutôt Witzel, Georges, né 1501 à Fulde, ou à Vacha, dans la Hesse, prit ses grades à Erfurt, se rendit en 1520 à Wittenberg, où il se décida pour la Réforme, quoiqu'il eût déjà embrassé la vie monastique, puis rentra dans le catholicisme sous l'influence de l'év. de Mersebourg, qui le nomma vicaire à Vacha. Mais W. se mit à prêcher la Réforme et se maria, ce qui lui fit perdre sa place. Pendant la guerre des paysans il essaya de s'interposer, et faillit tomber victime des rebelles. Il rêvait d'une Église pure et ne la voyait réalisée nulle part. Il redevint protestant, fut nommé pasteur à Eisenach, où il connut Lambert. Au colloque de Marbourg il parut pencher vers le zwinglia-nisme, et en 1529 on l'accusa d'unitarisme à cause de ses rapports avec Campanus, ce qui le fit mettre en prison à Wittenberg. L'influence du comte Hoyer de Mansfeld le fit appeler à Eisleben. Balloté dans son esprit, irrité contre Luther, mais touj. désireux d'amener un rapprochement entre les 2 confessions par un concile réformateur, on le vit flotter jusqu'à la fin, allant d'une diète à l'autre, siégeant tour à tour avec Canisius et avec Agricola, écrivant et publiant sans aboutir, f 1573. Ses principaux ouvrages sont: Methodu* concordiœ, De vocando concilio, Via regia, De *acri* nostri temporis controversii*, Typus ecclesiœpriori*; en 1524 il avait aussi écrit contre Luther, et en 1533 une réponse à Jonas.

WICHERN, Jean-Henri, né à Hambourg 21 avril 1808, fils d'un notaire traducteur-juré, étudia à Gôttingue et à Berlin la théologie. Il fonda à Hambourg la mission intérieure, ouvrit une école du dimanche pour 500 enfants pauvres, et finit par s'établir avec sa mère, novembre 1833, dans une maison que son ami Ruge mit à sa disposition, qu'on appelait la Ruge-Haus, et bientôt par corruption la Rauhe Hau*, la maison sévère, ou rustique. Il y réunit des jeunes garçons arrachés à de mauvais milieux, et bientôt l'établissement devint une espèce de village, avec boulangerie, buanderie, bibliothèque, chapelle, cimetière, pensionnats, fermes, ateliers de toutes sortes, imprimerie, etc. En sept. 1848 il exerça une immense influence au premier Kirchentag convoqué en partie par son initiative, à Wittenberg, et la mission intérieure fut fondée, avec une quantité de branches et de sous-divisions. En 1850 il fut nommé docteur en théol. de l'univ. de Halle. En 1851 le gouvernement prussien le chargea d'une enquête sur les maisons de correction, et le consulta sur ce qu'il y avait à faire avec les dix mille enfants de laHaute-Silésie, que le typhus avait fait orphelins. En 1858 il fut nommé membre du Consist. supérieur et conseiller adjoint au Ministère de l'Intérieur, ce qui le fixa à Berlin, mais sans restreindre son activité au dehors. Il continua de diriger la Rauhe Haus, lui donna pour succursale aux portes de Berlin le Johannestift, prépara de bons ouvriers laïques par centaines pour la mission intérieure, organisa des Diaconies de campagne pendant les guerres de 1864, 1866 et 1870, et plaça à la prison cellulaire de Moabit, Berlin, des geôliers choisis parmi les frères de la Rauhe-Haus. Il a trop agi pour pouvoir beaucoup écrire; en dehors de ses Feuilles volantes, on ne signale que son Mémoire sur la mission intér. de l'Égl. allemande. D'une noble figure, il avait un cœur d'or et une volonté de fer. Luthérien sans exagération, il aimait toutes les Églises. Sa théologie, comme élève de Schleiermacher et de Nean-der, était sympathique et vivante, mais ne s'accordait pas avec celle de Spener et de Francke, bien qu'on l'ait souvent compjré à ce dernier. Malgré la largeur de ses principes, ses ennemis ont reproché à son œuvre une tendance confessionnelle réactionnaire. Il était artiste, et l'une de ses filles a publié sous le pseudonyme de C. von Horn, des compositions musicales appréciées. Ses forces diminuèrent à partir de 1874, et il f en avril 1881 à la Rauhe-Haus.

WICLEFF, Jean (de), dont le nom s'écrit de 20 manières différentes: Wicliff, Wickliffe, Wyclif, etc., est le premier des précurseurs de la Réforme. Ses parents étaient de Wicliffe, près Richmond, mais il naquit dans le nord du comte d'York, probablement en 1324. Il étudia à Oxford avec Bradwardine et d'autres jeunes gens qui se distinguèrent également plus tard. Réaliste et platonicien, il s'occupa surtout d'étudier la Bible et mérita d'être appelé le Docteur évangélique. C'est en 1360, dans une discussion entre l'Université et les moines mendiants, qu'il commença sa lutte avec l'Église, et en 1361 il publia sa Poverty of Christ en l'opposant à « l'opulente indigence » de ces religieux. L'Université reconnaissante le nomma maître ès arts et lui donna le bénéfice de Fil-lingham, 16 mai 1363. Peu après il fut nommé recteur-gardien du collège de Cantorbéry à Oxford. par l'archev. Simon d'Islip, mais le successeur de celui-ci, Simon de Langham, le renvoya et rappela Fleury de Wodehall. Sur le conseil de ses amis il en appela à Urbain Y, mais comme il avait pris le parti d'Édouard III contre la hiérarchie, en soutenant que les papes n'avaient aucune autorité légale sur la couronne d'Angleterre, la sentence du pape lui fut défavorable. Wicleff s'appuyait trop sur le bras humain; ce fut un de ses côtés faibles. La cour lui était favorable et l'avait nommé prof, de théol. à Oxford. Il avait aussi pour lui une partie de la noblesse, les poètes Chaucer et Gower, la bourgeoisie et un fort parti dans le peuple. Le roi lui donna le rectorat de Lutterworth et le confirma dans la prébende d'Auste. Il l'envoya même 1374 en mission à Bruges auprès des commissaires romains, pour traiter des griefs de l'Égl. anglicane; mais la mission échoua et il revint en Angleterre, plus éclairé qu'auparavant sur l'ambition, la cupidité et la corruption de la cour papale. Il en parla dans ses leçons et définit celui qu'il appelait l'Antéchrist « le plus maudit des coupeurs de bourses. » Les moines le dénoncèrent en 1376 et envoyèrent à Grégoire XII 19 propositions hérétiques, soi-disant extraites de ses coure. Sans enquête le pape envoya contre lui cinq bulles. 22 mai 1377; l'une au roi, trois à l'archev. <fc» Cantorbéry, Sudbury, et à l'év. de Londres, Courtney, et une à l'Université d'Oxford, qui n'en tint compte. Les deux prélats citèrent W. à comparaître devant leur tribunal, à Saint-Paul, le 23 fév. 1377, mais Henri de Gaunt. duc de Lancaster, fils d'Édouard III, était là. et il s'engagea entre lui et l'év. de Londres un* si violente altercation sur la question de savoir si W. parlerait assis ou debout, que la séance dut être levée sans que rien fût décidé. Une seconde convocation eut lieu à la chapelle de Lambeth: W. comparut, développa, justifia ses thèses, peut-être avec trop d'art, et sir Louis Clifford ayant signifié au tribunal, peut-être au nom de la reine-mère, qu'ils ne prononçassent aucune sentence contre Wicleff, les juges profitèrent de la modération et des réponses évasi-ves de celui-ci pour se déclarer satisfaits, et se bornèrent à lui enjoindre de ne plus propager des doctrines erronées ou téméraires. En 1378 il publia son traité: De la vérité de l'Écriture Sainte, et s'éleva contre la messe, estimant que le sermon était la partie la plus importante du culte. L'activité parait avoir été un des traits principaux de son caractère, et cela explique en partie son hostilité contre les moines mendiants. Il fonda une Société d'évangélistes chargés de parcourir le pays et d'instruire le peuple. La source de tout le mal, selon lui, était l'absence de la Bible en langue vulgaire; chacun, disait-il avec saint Bernard, peut la comprendre en menant une vie sainte. Aussi, après une maladie grave qui mit sa vie en danger 1379, il reprit avec quelques amis, la traduction des Écritures en anglais, première version complète succédant aux travaux partiels qui avaient été faits précédemment (d'abord pour les Psaumes sous Alfred-le-Grand, puis par Richard Fita-Ralph et Jean de Trévise sous Édouard-le-Con-fesseur). Cette version fut répandue avec abondance el généralement adoptée; on en connût encore 150 exemplaires. Mais elle était loin d'être parfaite, et W. en entreprit lui-même la revision: cette deuxième version ne parut qu'après sa mort. A mesure qu'il étudia davantage l'Écriture, sa doctrine devint plus nette et plus précise, sans arriver cependant à la clarté qu'elle revêtit plus tard. Il oppose la doctrine de la grâce à celle des pénitences et des indulgences qu'il appelle un blasphème. Il enseigne la corruption de l'homme, la justification gra-tuiteet la prédestination. Il attaqua enfin, 1381, et peut-être avec peu de mesure, le dogme de la transsubstantiation, question toujours difficile et pleine d'équivoques, et publia sur ce sujet 16 thèses pour établir que dans la Cène il y a le vrai pain et le vrai vin, mais aussi le vrai corps et le vrai sang, sous condition de la foi du communiant. Quant à l'adoration de l'hostie, il y voyait une idolâtrie. De ce moment ses amis et ses protecteurs l'abandonnèrent. Le duc de Lancaster, dont d'ailleurs le crédit baissait, l'engagea à garder plutôt le silence sur cette question. L'université d'Oxford le condamna, et W. pour éluder la vengeance de ses ennemis publia une confession longue et embrouillée, que ceux-ci appelèrent une rétractation. Courtney, devenu archevêque, mit tout en usage pour écraser WiclefT. Il assembla en mai et juin 1382 dans un couvent de dominicains de Londres, un synode, où furent condamnées 24 propositions de Wicleff, entre autres celle-ci: Si un homme est convenablement contrit, toute confession extérieure est superflue en elle-même et inutile. On lui prêta aussi d'avoir dit que Dieu doit obéir au diable. Un tremblement de terre ayant épouvanté les juges le 17 mai, W. appela cette assemblée, Le concile de YHérydène (du tremblement, en vieux anglais). Le 12 juillet le roi permit à l'Égl. d'arrêter tous ceux qui prêcheraient les propositions condamnées. Wicleff accablé de tant de côtés, résigna ses charges académiques, abandonna Oxford et se retira dans sa cure de Lutterworth, où il continua de prêcher l'Évangile. Sommé par Urbain VI, quoique malade, de comparaître à Rome, il répondit qu'il n'avait de compte à rendre qu'à Dieu, et que le pape devrait s'attacher à suivre l'exemple de Christ et des apôtres. Dès lors on laissa tranquille ce témoin à moitié désarmé par une paralysie; le 29 déc. 1384, il eut une nouvelle attaque, comme il allait monter en chaire, et il + le surlendemain 31; il fut enterre dans le cimetière de la paroisse. En 1410 ses ouvrages furent brûlés à Oxford. En 1415 le conc. de Constance ordonna son exhumation, qui eut lieu en 1428 sous le pontificat de Martin V par les soins de Fleming, év. de Lincoln; ses os furent brûlés et les cendres jetées à la rivière. Il a laissé plus de 200 vol. qui se répandirent promptement dans toute l'Europe, où son action fut immense. Bien qu'ils aient été en partie détruits, on en conserve précieusement des exemplaires dans les principales bibliothèques. Le plus important de ces ouvrages est son Trialogus, dialogue entre trois interlocuteurs symboliques, la vérité, le mensonge et la sagesse, où il flagelle les erreurs et les abus du temps.

C'est comme son legs théologique: il est divisé en 4 livres, et il traite successivement lo de Dieu et des idées, 2o des choses créées, 3o des vertus et des vices, 4° des sacrements (il n'en admet que deux: le baptême et la cène). Achevé en 1382 il fut imprimé en 1525, v. Lewis, Londres 1720; Vaughan. Londres 1829; Lechler, Leipzig 1873; Bonnechose, les Précurseurs de la Réforme. — Les adhérents de Wicleff, ou Wicleffites, reçurent, après beaucoup d'autres, le surnom de Lollards, q. v.

WIDUKIND, ou Witikind, ou Wittekind, 1° chef saxon vers 775; v. Saxons. 2o Saxon, moine de Corbie et directeur de l'école de son couvent. Auteur d'un ouvrage capital, écrit vers 967, mais sans doute retravaillé, sur l'hist. des Saxons, leur origine, les règnes d'Henri Ier et Otton 1er; il a pour titre Res gestœ saœonicœ, et passe pour une des meilleures sources à consulter. Son hist. des Othon est malheureusement perdue, f vers 1000.

WIGAND, Jean, un des représentants les plus passionnés du flacianisme. Né 1523, à Mansfeld, philologue et musicien, il fit sa théol. à Wittenberg, fut consacré en 1546 par Span-genberg et commença dès lors sa carrière de controversiste contre l'Intérim, les Adiaphora de Mélanchthon, Major, Agricola, Osiander, les moraves, Slancar, Hesshus, et finalement contre Flacius lui-même. Il fut successivement pasteur à Mansfeld, surintendant à Magdebourg, prof, â Iéna, surintendant à Wismar, prof, et docteur Ihéol. à Rostock, pasteur à Brunswick, prof, à Kônigsberg, et en 1575 év. de Poméranie. Il passa sa vie à disputer, et f 21 oct. 1587. Ses nombreux écrits appartiennent tous aux controverses de l'époque.

WIGBERT lo un des aides de Willibrod, qui travailla 2 ans dans la Frise, mais sans succès; il sema, ses successeurs récoltèrent. — 2o W. abbé de Fritzlar, né dans le Wessex, élevé au couvent de Winbrun, il était prêtre à Glaston quand Boniface l'appela en 732 à passer en Allemagne comme missionnaire avec quelques autres; il lui confia l'école de Fritzlar qui ne tarda pas, grâce à ses talents et à son attachante personnalité, à attirer de nombreux élèves. Boniface lui donna ensuite le même mandat pour l'école d'Ohrdruff, Thuringe, mais tombé malade, W. revint à Fritzlar où il f 13 août 747. Il avait en même temps travaillé avec zèle à l'évangélisation des païens.

WILBERFORCE lo William, né 24 août 1759 à Hull, Angleterre, fils d'un marchand d'une bonne et ancienne famille. Devenu riche et indépendant par la mort d'un oncle, il alla étudier en 1776 à Cambridge, et déjà en 1784 il était envoyé au parlement par sa ville natale. Il y retrouva des amis de l'université, et notamment W. Pitt, avec qui il fit un voyage en France, pendant lequel il apprit à connaître la cour, Franklin, Lafayette, etc. Il avait reçu d'une tante méthodiste une éducation chrétienne, et ces impressions religieuses étaient tombées sur un bon terrain. Quelques voyages avec le doyen Milner 1785 et la connaissance qu'il fit de Lavater ne purent que les fortifier. Wesley lui adressa de son lit de mort une lettre de cordiale affection. Les questions de philanthropie chrétienne et de morale sociale ne cessèrent de le préoccuper. En 1787 il fondait une association pour la lutte contre le vice, et la même année il entreprenait la tâche de combattre la traite des nègres, une idée en faveur de laquelle à 15 ans il avait déjà composé un mémoire. Il gagna Pitt à ses vues et l'aida à préparer le projet qu'il devait présenter au parlement en 1789. La lutte fut longue, dramatique et non sans dangers. Il aida la Société pour Sierra-Leone à fonder des colonies de nègres affranchis, pour prouver que le nègre est susceptible de culture et de développement. Sa vie fut plusieurs fois menacée. En 1792 son bill fut repoussé une première fois. Mais en 1806 il fut appuyé par le gouvernement, et le 23 févr. 1807 il passait à une immense majorité. C'était un commencement. Wilberforce entreprit une seconde campagne: après la suppression de la traite, il demanda l'abolition de l'esclavage. Il eut pour fidèle allié Buxton. L'appui du gouvernement lui fut assuré dès 1823; W. f 27 juill. 1833, le lendemain du jour où le bill d'émancipation avait passé en seconde lecture. Les noirs avaient pour lui un tel respect que Christophe de Haïti, roi sous le nom d'Henri Ier, l'avait prié de venir protestantiser son île. Non content de travailler en Angleterre, il plaida la cause des esclaves en France, en Prusse, en Russie, et c'est grâce à lui que Castlereagh posa la question au congrès de Vienne. Il s'occupa aussi activement du repos dominical, des missions aux Indes, de l'instruction populaire (avec Hannah Moore), de la fondation de la Société biblique, de l'émancipation des catholiques et des dissidents. Une piété fervente, servie par une éloquence entraînante et sympathique, lui assurèrent toujours au parlement une influence incontestée, il fut enterré le 5 août à Westminster. Parmi ses nombreuses publications il faut rappeler son Disc, sur l'abolition de la Traite 1789, son Apologie du dimanche, 1797; et surtout, aussi de 1797, son Christianisme pratique, ou Coup d'œil sur les systèmes religieux des protestants des différentes classes de la société, comparés avec le vrai christianisme, réimpr. plus de 50 fois et trad. en plusieurs langues. De ses 4 fils, tous ecclésiastiques, aucun n'a ajouté à la gloire du nom; le plus connu, Samuel 1805-1873, év. d'Oxford, puis de Winchester, a écrit quelques ouvrages dans le sens ritualiste.

WILD, en latin Fews, Jean, né vers 1494 à Mayence, franciscain, théologien que l'on compte parmi les témoins de la vérité, parce que, tout en restant dans son Église, il ne manqua jamais, ni dans ses discours, ni dans ses écrits, d'en censurer les erreurs et les vices, il prêcha surtout la justification par la foi et combattit le côté extérieur et matériel du catholicisme. f 8 sept. 1554. 11 a écrit de nombreux Comment, sur l'A. et le N. T. dans un beau latin, élégant et clair, pratiques et animés d'un véritable souffle religieux, qui presque tous ont été mis à l'index, jusqu'à correction. Accusé d'hétérodoxie, Férus a été défendu par le franciscain espagnol Michel Médina, et utilisé par Salméron. — Ne pas le confondre avec un autre Férus, jésuite, prédicateur de l'université de Prague, f 1655, auteur de plusieurs écrits ascétiques en langue bohème.

WILFRIED, né 634 dans le Northumberland, élevé 648 à Lindisfarne; habile, ambitieux, désireux de s'instruire, il se rendit à l'établissement des missions de Cantorbéry, passa le canal à 19 ans avec Bénédict Biscop, s'arrêta un an à Lyon, où l'archev. Delphi n aurait voulu lui faire épouser sa nièce, et arriva à Rome 654 où il visita les tombeaux des saints, étudia la discipline romaine et apprit à calculer le cycle de Pâques. Le pape lui donna sa bénédiction et des reliques. Il repassa par Lyon où Delphin lui accorda la tonsure et manifesta le désir de l'avoir pour successeur; mais Delphin fut assassiné 660 et Wilfried repartit pour l'Angleterre; le roi Oswio lui témoigna beaucoup d'affection et lui donna une grande étendue de terres, où il éleva le couvent de Ripon. Il travailla à introduire dans le pays les usages romains; l'opposition qu'il rencontra décida le vieux roi à convoquer 664 à Whitby un synode; le vénérable Cadd présidait. La dispute fut vive et se termina à l'avantage du parti romain, en ce qui concerne la fixation de la Pâ* que et la forme de la tonsure. Comme récompense il reçut l'évêché d'York; ce fut l'év. Agilbert de Paris qui le consacra. Mais un synode présidé par Théodore de Cantorbéry 677 ayant procédé à une nouvelle division des diocèses, et ayant partagé en 3 celui de York, dont les revenus étaient immenses, Wilfried protesta au nom du pape, ce qui parut ridicule, el partit pour Rome, où le pape lui donna gain de cause. Le roi Egfried regarda la bulle comme nou avenue et condamna Wilfried à mort pour avoir été intriguer à l'étranger contre son pa>s, peine commuée en un an de prison et bannissement perpétuel. Banni du Northumberland, de la

Mercie, du Wessex, il trouva dans le Sussex des populations païennes qu'il évangélisa avec succès, ce qui lui valut un retour de faveur de Théodore et du nouveau roi Aldfried. Mais ayant à plusieurs reprises recommencé ses intrigues romaines, et avoir été banni, il profita d'un séjour dans la Frise pour évangéliser les Frisons 693. A la mort d'Aldfried il crut pouvoir revenir, mais un nouveau concile fut unanime à rejeter ses prétentions 705, tout en lui accordant en mémoire du feu roi l'évêché de Hexham, et l'abbaye de Ripon. f 12 oct. 709 au couvent d'Undal. Il avait aidé Dagobert à remonter sur le trône de Sigebert son père. Canonisé pour ses services rendus à la curie romaine. Son corps enterré à Ripon a été transféré 959 à Cantorbéry. On lui prête des miracles. Auteur de quelques lettres et de divers écrits sur le rituel pascal catholique, les règles du monachisme, etc.

WILHELMITES, v. Guillaumites.

WILLEBROD, anglais, né vers 658; quel-ques-uns le font de race royale, moine distingué par sa piété, son zèle et ses talents, fut, à la demande de Pépin, envoyé par Egbert chez les Frisons, avec onze autres missionnaires, entre autres Wigbert, 690 ou 692. Recommandé au pape, il se rendit à Rome et revint à Utrecht 697 comme archev. de la Frise. Il évangélisa aussi le Jutland. Radbod, roi de Frise, persécuta longtemps les chrétiens et refusa jusqu'à la fin de se laisser baptiser, mais à sa mort beaucoup de païens se convertirent. Willebrod t 739 eut pour aide Wulfram, archev. de Sens, qui lui fut d'un grand secours; ils virent 53 temples païens changés en églises chrétiennes. Willebrod avait ramené du Jutland 30 jeunes garçons pour en faire des missionnaires; le plus distingué fut Sinwald, qui évangélisa la Bavière et qui + 750. v. Beda et Alcuin. Son nom s'écrit aussi Willibrord.

WILLEHAD, ou Wilhead, ou Gaillard, né vers 730 d'une famille saxonne du Northum-berland, élève d'Alcuin à York, évangélisa la Frise à la demande de Grégoire, év. d'Utrecht. Dans le pays d'Over-Yssel, plusieurs de ses compagnons furent mis à mort par les païens irrités; lui-même n'échappa que parce que l'épée porta sur une courroie qui, sous ses vêtements, retenait une* boîte de reliques; on crut que c'était un miracle et il fut épargné, ainsi que ses amis survivants. Charlemagne lui confia les Saxons vaincus des environs de Brème, mais leur révolte en 782 l'obligea de retourner en Frise; de là à Rome où il trouva Luidger, avec qui il revint au diocèse de Trêves, dans l'abbaye d'Echternach. En 785, il retourna à sa mission, et le 13 juillet 787 un synode tenu à Worms le nomma év. de Brème. Il y poursuivit ses travaux avec autant de zèle que de dévouement, fit construire sous le nom de Saint-Pierre une église en bois, que son successeur remplaça par un monument plus solide, et f 8 nov. 789 d'une fièvre prise pendant une de ses tournées missionnaires. Il a laissé une bonne réputation à tous égards, comme homme, évêque et missionnaire. Charlemagne l'appelait un saint. Son corps a été conservé dans une chapelle attenante à la cathédrale. Canonisé. Vie par Anschar.

WILLIAMS, John, missionnaire envoyé par la Soc. des missions de Londres, pour évangéliser la Polynésie. Il visita les nombreux archipels de l'Océan Pacifique, et réussit à les classer en groupes distincts, suivant les différentes races auxquelles ils appartenaient. Déjà en 1819 il s'établissait à Tahiti, au milieu d'une population encore idolâtre, et il obtenait des succès remarquables. En 1821 il visita les îles Hervey, qui parlent la même langue que les Tahitiens, et de nombreuses conversions eurent lieu; il en remporta 31 idoles; il arrive en 1823 à Ravo-tonga, qu'il retrouve en 1827 entièrement transformée. Un court et fructueux voyage en Angleterre, lui procure les aides dont il a besoin pour les stations qu'il a fondées dans les îles de Samoa, des Amis, des Navigateurs. Les îles Fidji lui opposent plus de résistance, mais elles cèdent aussi à la parole de vérité, et les cannibales devenus chrétiens sont un des plus beaux fleurons de l'œuvre missionnaire. Enfin Williams se rend aux Nouvelles-Hébrides, mais c'est la fin de sa carrière; il est traîtreusement assassiné par les naturels, 20 nov. 1839, au moment où lui et son ami Harris, qui se rendait aux îles Marquises, venaient d'aborder au rivage. Ce fut un deuil général; le bruit courut que les meurtriers avaient à leur tour été tués par une tribu voisine, jalouse de leur faire expier leur crime. Un simple monument marque la place où furent plus tard enterrés les restes du martyr.

WILLIBALD, né vers 700 en Angleterre, d'une famille noble (une légende appelle son père Richard, et le fait roi d'Angleterre, ou duc de Souabe), fut voué par sa mère à l'Église lors d'une grave maladie qu'il fit à 3 ans. A 20 ans il visita la Palestine, et y passa 7 ans. Il revint par Constantinople, en 729. Sa sœur Walpur-gis a raconté ses aventures de voyage. De 729 à 739 il demeura au mont Cassin, puis, avec-quelques prêtres, se rendit à Rome auprès de Grégoire III, à qui il raconta son pèlerinage. Le pape l'envoya comme aide à Boniface dans la Thuringe, vers un comte Suitgar qui possédait un grand territoire. Willibald alla en passant voir son fr. Wunnebaid, qui venait de fonder avec sa sœur le couvent de Heidenheim.

Il accompagna ensuite Boniface, qui le sacra évêque avec le concours des év. de Wlïrzbourg et de Burgberg; mais comme le pape avait décidé qu'il n'y aurait d'évêques que dans des villes fortifiées, on dut en bâtir une exprès; on abattit une forêt de chênes, et l'on y éleva Eichstœdt, dont le nom rappelle l'origine. Il assista au synode franc convoqué en 742 par Carloman, et à celui d'Attigny 765 sous Pépin, f vers 786.

WILLIRAM, ou Witleram, ou Waltram, né en Franconie, savant et pieux bénédictin, poète, versé dans la scolastique. Il était parent de l'archev. Héribert de Cologne, et de l'év. Héri-bert d'Eichstaedt; il étudia à Paris, fut nommé chanoine à Bamberg, devint moine à Fulde, et enfin abbé d'Ebersberg 1048 par la protection d'Henri III qui reconnut son mérite, f 5 janv. 1085. Auteur d'une trad. et d'une double paraphrase du Cantique, l'une en hexamètres, l'autre en prose; il admet l'interprétation des pères. Travail souvent copié et réimprimé; il était dans le goût du temps. Édition de Hoffmann, Breslau 1827.

WIMPHELING, Jacques, né 26 juill. 1450 à Schelestadt, d'abord élève des fr. de la vie commune, étudia le droit à Fribourg, mais sous l'influence de Wessel, de Dalberg, Geiler, Stnrm, il se tourna vers la théol., étudia à Heidelberg, fut nommé vicaire à Spire où il prêcha avec un grand succès, vint ensuite à Strasbourg où il aida Geiler dans la publication des œuvres de Gerson. Il écrivit aussi quelques ouvrages, étudia les livres saints et se livra à l'enseignement. Il se plaisait à grouper autour de lui en société religieuse ou savante, les hommes distingués qu'il rencontrait. Il était très allemand, et dans un écrit intitulé Germa-nia, il essaya de prouver que la rive gauche du Rhin n'avait jamais appartenu à la France, thèse qu'il ne fut pas difficile de réfuter historiquement et qui trouva en Murner un contradicteur aussi compétent qu'énergique. En 1504 il fut excommunié parce qu'il avait accepté du chapitre de Strasbourg une place que le pape avait destinée à un autre; il eut beau se retirer devant son concurrent, comme le chapitre maintenait son droit, il fut puni de cette opposition et resta en disgrâce. Bientôt après il fut cité k Rome, dénoncé par les augustins pour avoir prétendu dans une de ses leçons qu'Augustin n'avait jamais été moine, pas plus que Moïse, Jésus, les apôtres et les pères, et pour avoir traité de non-sens le proverbe qui met toute la sagesse dans le capuchon. Des attestations portant qu'il était trop âgé pour faire le voyage, lui permirent de se défendre par un mémoire écrit, adressé au public, et Jules II laissa tomber l'affaire. W. écrivit ensuite une

Hist. des év. de Strasbourg; il conduisit à Heidelberg quelques jeunes gens pour surveiller leurs études, rédigea par ordre de Maximilien les dix griefs de la nation, destinés à peser sur le pape, mais qui n'eurent pas de suite) et passa quelques années dans un couvent de femmes, que l'év. de Bâle l'avait prié de réformer, ne se lassant pas de prêcher et d'écrire pour demander la réforme* de l'Égl. et du clergé, ce qui lui valut une place d'honneur dans les Épi-tres des hommes obscurs. Souffrant de la goutte il se retira 1515 chez sa sœur à Schelestadt; en 1518 il conseilla k l'empereur de ne pas intervenir dans les affaires de Luther qui se régleraient entre évêques; mais en voyant les événements se précipiter, il prit peur; il écrivit k Luther et à Zwingle pour les modérer, continua d'en appeler k un concile général, et frémit d'horreur en apprenant la sécularisation des biens ecclésiastiques, f 17 nov. 1528. Il a laissé de nombreux écrits, 30 d'après Nicéron, 89 d'après Riegger: plusieurs relatifs à l'enseignement, des hymnes, des traités de controverse et de dogmatique, et des études historiques, v^ Schmidt, Hist. littér. d'Alsace.

WIMPLVA, ou Wympna, proprement Koeh (cuisinier), Conrad, né 1460 à Buchheim dans l'Odenwald, étudia à Leipzig, et se livra de bonne heure avec succès à renseignement des lettres et de la philosophie. En 1503 il fut reçu docteur en théologie. Accusé d'hérésie par ses ennemis, il se défendit devant l'archev. de Magdebourg et n'eut pas de peine k prouver son orthodoxie, car il prit parti pour la scolastique contre les études philologiques. En 1506 l'électeur de Brandebourg le nomma prof, de théol. et premier recteur de la nouvelle université de Francfort s. l'Oder. Il défendit Tetzel contre Luther dans l'affaire des Indulgences, et soutint énergiquement l'autorité absolue du pape en matière d'interprétation des Écritures et de foi, A la diète d'Augsbourg il fut un des rédacteurs de la Confutation, et dirigea avec Eck et Co-chlœus tes négociations avec Mélanchthon. f 16 juin 1531. On a de lui des Épitres, des Poésies, des Mélanges, des traités de controverse, etc.

WINCKLER, Jean, l'ami de Spener, né 13 juill. 1642 k Gôlzern, près Grimma, fils d'an pauvre meunier, n'arriva que péniblement k finir ses études, fut consacré par Spener en 1671, et fut successivement pasteur à Hambourg, Darmstadt, Mannheim, Wertheimet Hambourg, où il f 5 avril 1705. Il eut beaucoup à souffrir k cause de ses rapports avec les piétistes, à cause de son opposition an théâtre et à cause de ses sympathies pour ceux qu'on appelait des enthousiastes; mais sa tenue toujours humble, noble et bienveillante, lui concilia même ses adversaires. Il rendit de grands services aux écoles de Hambourg, exerça sur Francke une influence considérable, travailla à la fondation d'une Société biblique, et mérita les justes honneurs que son Église lui accorda.

WLNDESHEIM, couvent de chanoines réguliers, fondé 1386 par Radewin et les fr. de la Vie commune, peu après la mort de Gérard Groot. L'institution se développa et s'enrichit. D'autres abbayes se joignirent à la première, et par leur moralité méritèrent d'être appelées à réformer des couvents appartenant à d'autres ordres. Ils avaient un prieur au conc. de Constance; ils en eurent aussi un à Bâle, qui fut particulièrement honoré. D'ailleurs ils ne firent rien pour les lettres et les sciences, se montrèrent plus que froids pour la Réforme, et ne tardèrent pas à disparaître.

WINER, Georges-Bénédict, né 13 avril 1789 à Leipzig, fils d'un boulanger, docteur en théol. depuis 1819, fut successivement prof. àRostock, Halle, Erlangen 1823, et depuis 1832 à Leipzig, où il f 12 mai 1858. Sauf la dogmatique et l'hist. ecclésiast. il a travaillé et rendu des services dans toutes les branches de la théologie. Par son érudition, son talent professoral, sa tenue correcte et strictement scientifique, le sérieux de son caractère religieux et moral, il exerçait sur les étudiants une grande influence. Rationaliste, il resta touj. étranger aux mouvements religieux qui se produisaient autour de lui dans l'Eglise, mais son rationalisme n'avait rien de profane ou d'irréligieux. Il appliqua à l'étude du texte les principes de la nouvelle philologie. Ses principaux ouvrages sont son Real-wcerterbuch biblique, une Grammaire chaldaï-que, les éléments de la Gramm. hébr., une Chrestomatie talmudique et rabbinique; une Gramm. grecque du N. T., des études sur les versions syriaques, le Pentateuque samaritain, Onkélos, Justin Martyr, le dernier repas de Jésus, l'Augustana. etc.

WINFRIED, v. Boniface.

WINKELER, secte peu importante du moyen âge, probablement affiliée aux vaudois, lisant la Bible, ayant des prédicateurs laïques, rejetant le culte des saints et des images, les indulgences et le purgatoire, d'ailleurs pratiquant le catholicisme. Vers 1400 ils furent découverts à Strasbourg; 32 furent arrêtés, dont 16 mis à la torture se reconnurent hérétiques et furent bannis; les autres eurent à payer des amendes. Les dominicains auraient voulu qu'on les brûlât. La secte disparait à ce moment. On leur reproche d'avoir en 1374 fait disparaître un des leurs, devenu apostat, par crainte d'une dénonciation.

WINNO, v. Frères 6<>.

WINTERTHOUR, Jean (de), Vitoduranus, minorité, né vers 1300; il est à Bâle en 1328, à Schaffhouse en 1331, à Lindau en 1340, passant d'un couvent à l'autre; f 1348 probablement à Zurich. Auteur ou compilateur d'une Chronique de l'empire depuis Frédéric II jusqu'en 1348, commencée à Lindau, qui, malgré son absence d'ordre et de chronologie, est consultée comme une bonne source historique, à cause des nombreuses notices, traditions populaires et renseignements qui y sont réunis. Utilisée par Bullinger, elle a passé depuis 1629 à la biblioth. de la ville de Zurich.

WIPPO, bourguignon, nommé chapelain de Conrad II et de Henri III, auteur d'une notice sur Conrad, qui est très appréciée.

WISEMAN, Nicolas-Patrick-Étienne, né 2 août 1802 à Séville, où son père, irlandais, de Waterford, était établi comme négociant. Il fit ses premières études au collège d'Ushaw, près Durham, et passa de là au collège anglais de Rome, où il devint prêtre et docteur en théologie. En 1827 il fut chargé dans ce même collège de la chaire de langues orientales et du vice-rectorat. En 1835 il fut appelé comme recteur à Ushaw, et donna des discours et des conférences qui firent sa réputation. A ce moment Grégoire XVI qui songeait à augmenter le nombre de ses vicaires apostoliques en Angleterre, le nomma coadjuteur de l'év. Walsh, vicaire du diocèse de Londres, avec le titre d'év. de Mellipotamos, et président du Mary-College à Oscott. Wiseman prépara un projet pour le rétablissement de la hiérarchie romaine en Angleterre; ce plan fut approuvé par Pie IX en 1847, et valut à son auteur d'être nommé successivement provicaire apostolique de Londres, vicaire apostolique, et après un voyage à Rome en 1850, cardinal, archev. de Westminster et primat de l'Égl. cathol. d'Angleterre, le premier depuis la Réformation. Par sa prudence et par l'aménité de son caractère personnel, il réussit à calmer un peu l'irritation causée par c l'aggression papale i qui avait divisé l'Angleterre en diocèses. Un acte du parlement, interdisant l'usage de titres délivrés par un souverain étranger, n'aboutit pas. fl continua de faire des lectures publiques et des conférences, fit de la propagande, se rendit à Rome 1853 et 1854 pour des négociations financières, et peut être regardé comme le restaurateur du catholicisme en Angleterre, puissamment secondé d'ailleurs par le ritualisme. f 15 févr. 1865. Ses principaux ouvrages sont ses Horœ Syriacœ, études et anecdotes sur l'hist. et la littérature syriaques; les Principales doctrines et pratiques de l'Égl. catholique; la Stérilité des missions protestantes; des Rapports de la Science et de la Révélation; la Présence réelle du corps et du sang de Christ dans l'eucharistie: Souvenirs des 4 derniers papes, 1858; Fabiola, un roman;

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des sermons, des éloges, des drames religieux, des nouvelles, etc.

WISHART, Georges, homme d'une piété et d'un savoir éminents. Né en Écosse, il y fat d'abord professeur. Banni pour avoir enseigné le grec à Montrose, il alla à Cambridge; de là en Allemagne, où il embrassa le protestantisme: il revint en Écosse en 1544, et prit rang parmi les réformateurs les plus zélés. Il attirait des foules immenses sur lesquelles il produisait la plus vive impressiom; Knox se lia avec lui et l'accompagna souvent dans ses tournées d'évan-gélisation. Wishart, à cause de son zèle, ne pouvait longtemps éviter le martyre. Pris par Bothwell à Ormiston, il fut livré au cardinal Beaton, qui jura de ne lui faire aucun mal et qui le fit brûler le 2 mai 1546. Ce premier martyr amena en Écosse une formidable réaction et provoqua la mort de Beaton, qu'il avait annoncée comme prochaine.

WISLICENUS, Gustave-Adolphe, né 20 nov. 1803 à Battaune, près d'Eilenbourg, étudia à Halle. Fils de pasteur il se laissa entraîner dans la carrière pastorale, mais s'étant compromis dans des sociétés démagogiques, il fut condamné en 1824 à 12 ans de forteresse. Grâcié en 1829, il continua à Berlin ses études de théologie, et occupa successivement plusieurs postes de pasteur. En 1841 il était à Halle et se joignit au mouvement des Amis des lumières. Dénoncé par Guericke pour un discours tenu à Ktfthen le 29 mai 1844, il se défendit dans un écrit intitulé Ob Schrift, ob Geist (la Lettre, ou l'Esprit) ? et après de longues négociations, il finit par être destitué, en 1846. Il se mit à la tête d'une petite église à Halle, mais menacé d'un nouveau procès, qui devait aboutir à 2 ans de prison, il s'enfuit en Amérique et donna des conférences k Boston et à New-York, 1854. Dans cette dernière ville il essaya d'ouvrir une maison d'éducation, mais repartit en 1856 et vint se fixer à Zurich, où il ouvrit également un pensionnat et s'occupa de littérature religieuse. Il a publié entre autres un Comment, pratique sur la Bible, dans lequel, aidé d'une science superficielle, il ne laisse plus rien substituer du christianisme que le nom.

WISSOWATY, latin Wissowatius, André, né 1608 k Philippovie, petit-fils de Fauste So-cin par sa mère, et l'un des principaux chefs sociniens. Après avoir étudié k Racovie et à Leyde, il fit de grands voyages et occupa depuis 1643 divers postes en Ukraine, Volhynie et Petite-Pologne. Banni en 1658 par l'édit contre les sociniens, il revint secrètement en 1661 au péril de sa vie, fut de 1663 à 1666 pasteur des sociniens de Mannheim. De là il passa en Hollande, où il f 1678. On compte de lui 62 ouvrages, dont le plus important est la Religion rationnelle; il a travaillé à l'édition de la Biblioth. des frères polonais, à plusieurs éditions du Catéch. de Racovie, etc. Leibnitz l'a réfuté sur la Trinité.

WITEKIND. v. Widukind.

WITSCHEL, Jean-Henri-Guill., né 9 mai 1769, près de Nuremberg, pasteur, auteur d'un recueil de prières et de méditations en vers, plein de piété, d'une sentimentalité un peu prétentieuse, qui fut un moment assez populaire: Morgen und Abendapfer, etc. t 24 avril 1847.

WITS, Witsin, ou WiUius, Hermann, né 12 févr. 1636 à Enkhuysen, Frise occid., oii son père fut plus tard bourgmestre, étudia à Groningue, Leyde et Utrecht, occupa divers postes de pasteur, fut en 1675 nommé prof, de théol. à Franecker en remplacement de Scho-tan, en 1680 à Utrecht à la place de Burmann (en 1685 il accompagna une députation à la cour de Jacques II), en 1698 à Leyde, comme successeur de Spanheim; en 1699 il fat mis à la tête du collège théologique, donna sa démission 1707 et f 22 oct. 1708. Élève de Leusden pour l'hébreu, il était en dogmatique disciple de Cocceius, et le prédicateur Justas van den Bogaerdt avait exercé sur lui une bonne influence. Ennemi des disputes religieuses, il essaya une transaction entre le fédéralisme et le scolasticisme, mais il maintint avec fermeté la distinction entre l'alliance des œuvres et celle de la grâce. Sans être un penseur profond, il était théologien par le cœur et par la Bible, il avait saisi le vrai sens du christianisme, et son opposition à la théologie courante suffit à soulever contre lui de violentes inimitiés, même parmi ses élèves. Son principal ouvrage: Économie des alliances de Dieu avec les hommes 1685, fut dédié à celui qui devint plus tard Guillaume III. Notons encore le Juif christianisant sur les principes de la foi; la Pratique du christianisme, les sept épîtres de l'Apocalypse; Exercices sur le symbole et l'Oraison dominicale, une trentaine de dissertations, enfin en in-4° une Étude sur FÉgypte, où il prouve contre Spencer et Marsham, que les Hébreux n'ont pas emprunté des Égyptiens leurs lois et leurs institutions; sur les Dix Tribus, où il soutient qu'elles se retrouveront un jour et se réuniront autour de J.-C.; et sur la Légion fulminante, où il défend l'authenticité de la tradition.

WITTENBERG (de Weisse Berge, montagnes blanches), petite ville des États prussiens, qui doit toute son importance à son université, fondée 1502, et à la Réformation qui sortit de ses murailles. Bâtie sur la rive droite de l'Elbe, elle compte environ 12,000 habitants, mais n'en comptait guère en 1508, quand Luther y arriva, que 2,000, et en 1513 seulement

356 pauvres maisons. Elle fut fondée par Bernard, fils d'Albert-l'Ours, duc de Brandebourg, vers 1400. Frédéric-le-Sage y fit bâtir une église, «t le château y attenant 1490-1518; on y conservait plus de mille reliques, la plupart collectionnées par Staupitz. Outre cette église, dite de Tous-les-Saints, une nouvelle aile fut en 1502 ajoutée au couvent des augustins, et l'université fut reconnue par l'empereur et par le pape. Ses commencements furent difficiles; malgré Pollich et Staupitz la petite ville, pauvre et mal entretenue, attirait peu les étudiants. Ce n'est qu'avec l'arrivée de Luther et Mélanchthon qu'elle commença à prospérer; de 179 étudiants, le chiffre s'éleva k 500 ou 600, et bientôt à 2000. Après les thèses et la Réformation, Luther habita le couvent, transformé en collège, où il avait été moine et professeur. Parmi les hommes qui illustrèrent la faculté, après les deux Réformateurs, on distingue Carlstadt, Didyme, Jonas, Bugenhagen, Cruciger, Major, Flacius. De longues luttes théologiques eurent lieu, contre le philippisme, le syncrétisme, le piétisme, jusqu'au moment où le rationalisme l'emporta. La ville fut souvent assiégée et prise: par les impériaux 1547, par les Prussiens 1756, par les Français 1806. L'université fut supprimée 1817 et rattachée à Halle, mais remplacée 1er nov. de la même année par un séminaire de prédicateurs, dirigé d'abord par le vieux Nitzsch, puis par Schleusner, Heubner, Stier; le jeune Nitzsch et en 1828 Rothe y furent aussi professeurs. Ce séminaire, installé dans l'anciep couvent des augustins et dans une partie de l'ancienne université, possède une belle bibliothèque et des revenus considérables. Parmi les curiosités de la ville, on montre les maisons de Mélanchthon, Cranach, Luther, avec chambres, sièges, poêle; Fégl. du château contre les portes de laquelle furent affichées les 95 thèses, 1517; ces portes ont été brûlées par les Français; les portes actuelles sont en bronze, faites d'après un dessin de Quast, et reproduisent en latin les 95 thèses; c'est Fréd.-Guill. IV qui les a données à la ville 1858. On trouve dans la même église les tombes de Frédéric-le-Sage, de Jean-le-Con-stant, de Luther et de Mélanchthon. La cathédrale, avec ses deux tours, n'offre rien de remarquable, sinon les souvenirs; Bugenhagen et Luther y ont souvent prêché. Une statue en bronze du Réformateur, due à Schadow, s'élève depuis 1822, sur la place de l'Hôtel de ville; elle est protégée par un dais gothique en fer forgé; de même une statue de Mélanchthon par Drake. Dans l'Hôtel de Ville on montre un portrait et une épée de Gustave-Adolphe, le couvercle d'un calice, un rosaire de Luther, et i beaucoup d'autres souvenirs authentiques.

On appelle Bible de Wittenberg une édition

de la Vulgate, corrigée d'après l'allemand de Luther, et qui parut 1529 k Wittenberg chez Schirlentz; elle ne renferme qu'une partie de l'A. T., le N. T. et quelques préfaces de Luther; d'ailleurs incorrecte. Elle a été souvent réimprimée, mais on n'est pas fixé sur la part que Luther et Mélanchthon ont prise à sa publication.

La Concorde dite de Wittenberg, ou de Bucer, péniblement élaborée par les théol. strasbour-geois, qui désiraient amener un rapprochement entre les Suisses et les luthériens sur la question de la Cène, fut due aux efforts réunis de Bucer et de Mélanchthon. Les négociations commencées en avril 1531, se poursuivirent en juillet 1534 à Stuttgard; puis à Cassel avec moins de succès; en 1535 le pasteur Huber et le médecin Seiler, d'Augsbourg, se rendirent k Wittenberg auprès de Luther et produisirent sur lui une profonde impression. Une nouvelle réunion devait avoir lieu à Eisenach, mais Luther malade demanda qu'elle se tint k Grimma, tout près de Wittenberg, et finalement on se décida pour Wittenberg même. Après une discussion qui dura du 22 au 26 mai 1536 on tomba d'accord sur les termes, et la formule fut signée avec joie de part et d'autre. Mais la controverse recommença en 1543, Luther même reprit la polémique contre les Suisses, et la Concorde de W. fut oubliée.

W1TTMANN, George-Michel, né 23 janv. 1760 k Finkenhamtner, près Pleistein, Palati-nat supérieur; fit ses études k Amberg et à Heidelberg, et fut depuis 1803 directeur du séminaire épiscopal de Ratisbonne. Il fut en même temps depuis 1821 vicaire général de Sailer, son ami. A la mort de Sailer le roi Louis le nomma son successeur; mais il f 8 mars 1833 avant que sa nomination eût été confirmée par le pape. Pieux, doux et bienveillant, il se distingua par son courage lors du bombardement de Ratisbonne 1809 et lors de l'épidémie ty-phoïque 1813. On a de lui des Notes sur le Pentateuque, et plusieurs ouvrages de piété, de controverse paisible, et d'édification liturgique.

WITZEL, v. Vicelius.

WITZENMANN, Thomas, né 2 nov. 1759 à Ludwigsburg, d'une famille pieuse de paysans, étudia de 1775 à 1777 à Tubingue, sous Storr et Bengel, se familiarisa par la lecture avec Btfhme, Lavater et Herder; accepta une suffra-gance à Essingen, se consacra avec ardeur à ses fonctions, cherchant à réveiller le sentiment religieux dans cette paroisse où il us?t sa santé. Appelé en 1783 à Barmen comme précepteur dans la famille Siebel, il se lia avec Colien-busch, et en 1785 avec Gallitzin. Il fit aussi k Dusseldorf la connaissance de Jacobi, qui se l'attacha; ils philosophèrent ensemble, sondant les mystères de l'infini, voyant en Dieu le grand tout, mais avec une personnalité distincte, et cherchant la religion dans la conciliation du fini avec l'infini, dont le Christ est l'emblème; c'est par le cœur seul qu'on peut en avoir l'intelligence. Malade de la poitrine il se rendit à Mtlhlheim sur le Rhin ponr s'y faire soigner, mais il y t février 4787. Il a laissé des articles de revues, quelques brochures et de nombreux manuscrits.

WOELLNER, Jean-Christophe, né 19 mai 1732 à Dôberitz, près Spandau, théologien un peu amateur, quitta bientôt sa première paroisse pour prendre un préceptorat dans une famille noble, se fit recevoir templier, s'adonna à l'horticulture, chercha des mystères et des prophéties dans les arbres et dans les fleurs, enseigna l'économie politique au prince royal, et finit par devenir ministre des cultes, 3 juill. 1788. On fut fort étonné de le voir mettre sa signature à un édit de Fréd.-Guillaume II contre l'incrédulité, le déisme et le naturalisme; les antécédents du prince et de son ministre n'avaient pas préparé les esprits à une pareille déclaration d'orthodoxie, et l'opposition fut générale. L'édit permettait à chacun de professer librement, mais pas publiquement, ses opinions religieuses, et les pasteurs (comme les instituteurs) ne pouvaient enseigner que celles qui étaient officiellement reçues. Il y a là de la logique, mais que peut la logique contre un courant de l'opinion? Le roi nomma plusieurs commissions d'enquête, mais sauf la destitution de Storck et de Schulz elles n'aboutirent à aucun résultat. Fréd.-Guillaume III 1797 retira l'édit de son prédécesseur, et congédia Wœllner, qui f paisiblement 10 sept. 1800.

WOLFENBUTTEL, v. Fragments.

WOLFF lo Jean-Chrétien, né 24 janv. 1679 à Breslau, fils d'un brasseur, reçut une bonne éducation et se rendit en 1699 à Iéna pour faire sa théologie, mais les mathématiques et la philosophie le captivèrent davantage, et il s'éprit des travaux de Descartes et de Leibnitz. Dès 1703 il s'établit à Leipzig pour y enseigner ces deux branches. En 1707 l'influence de Leibnitz le fit nommer prof, de mathém. et de physique à Halle où il obtint de grands succès. Malheureusement la jalousie de métier s'en mêla, et comme, par un éloge outré de la philosophie des Chinois et de la morale de Confu-cius, il prêta le flanc à de justes critiques, il souleva contre lui l'opinion publique et l'université. Le roi, sur la dénonciation de Lange et à l'instigation de l'autorité militaire, lui donna l'ordre, 8 nov. 1723, de quitter la Prusse dans les 48 heures; la lecture de ses ouvrages fut défendue sous peine de 100 ducats d'amende. Le landgrave de Hesse-Cassel lui donna asile, le nomma prof, de philos, à Marbourg et lui conféra le titre de conseiller aulique, pendant que ses amis travaillaient à Berlin à le réhabiliter. Ils finirent par réussir, et sous Frédéric H, 6 déc. 1740, Wolff faisait sa rentrée à Halle comme prof, de droit, conseiller aulique et vice-chancelier. En 1743 il fut nommé chancelier, et en 1745 baron de l'Empire par l'électeur de Bavière, mais il ne retrouva plus les succès de ses jeunes années. Il f 9 avril 1754. Sans-être philosophe, il était dogmatique, et s'il a eu l'honneur d'être un fondateur d'école, c'est moins à l'originalité de ses idées qu'il le doit qu'à l'art avec lequel il sut populariser et systématiser les idées de Leibnitz, en même temps qu'il recueillit et groupa les matériaux de la science partout où il les trouva. Il réduisait tout en théorèmes et corollaires, affectant 1» formes mathématiques, ce qui fit la fortune, mais aussi le danger de sa méthode; sa philosophie, qui résista aux naturalistes anglais et aux encyclopédistes français, finit par succomber devant celle de Kant. Son influence sur la théol. fut fâcheuse par la sécheresse des formes et la raideur des axiômes, mais il n'eut jamais l'idée d'attaqner le christianisme, et sur son lit de mort il mettait toute sa confiance < dans la miséricorde de Dieu par le sang de Jésus-Christ. » Dans sa Theologia generalis il admet une révélation et en prouve la possibilité en soutenant que Dieu peut tout ce qu'il veut. U distingue les vérités nécessaires, celles dont le contraire est impossible, et les vérités accidentelles, celles dont le contraire n'est impossible que dans certaines conditions. Son Corpus philosophtœ, en latin, dédié au roi, est une revendication des droits de la raison.

2® Jean-Christophe, hébraïsant. né 1683 1 Wernigerode, prof, à Wittenberg, f 1739 à Hambourg, où il avait été nommé prof, et pasteur. Auteur de: Le Manichéisme avant les manichéens, la Chaîne (Catena) des pères grecs, une Notice sur les écrivains hébreux de tous les temps (il en compte 2231), des Anecdotes grecques et latines et des Études philol. et critiques sur le N. T.

WOLFGANG 1® né en Souabe, d'une famille noble, fut confié dès l'âge de 7 ans à un moine, et placé plus tard dans l'abbaye de Reichenau. Il se lia avec un jeune seigneur nommé Henri,, avec lequel il visita l'école de "Wurzbourg, et Henri étant devenu archev. de Trêves 956, l'emmena avec lui et le nomma doyen d'un chapitre de chanoines. Henri étant f 964 en Italie, Wolfgang retourna dans son pays, donna une partie de ses biens aux pauvres et se retira dans le couvent d'Einsiedein où il fut ordonné prêtre par l'év. Ulrich d'Augsbourg.

En 972 il partit avec quelques compagnons pour une mission en Esclavonie et en Autriche, et fit la connaissance de l'év. Piligrim de Passau, qui le recommanda à Othon II pour le siège vacant de Ratisbonne, C'est là qu'il f 31 oct. 994 après un épiscopat de 20 ans, consacré aux bonnes œuvres, à la réforme des couvents et à l'amélioration du clergé.

2° Prince d'Anhalt, un des plus fidèles partisans de la Réforme. Né 1492, il succéda à son père en 1508, se lia avec Luther d'une affection que rien ne troubla; il assista même à son lit de mort. Il signa en 1521 la prolestation de Worms, «t en 1530 la Confession d'Augsbourg. En 1547, après la bataille de Mtihlberg, il perdit son duché et ne le recouvra qu'en 1552. f 23 mars 1566.

3° et 4° v. Musculus, et Schuch.

WOLFRAM, d'Eschenbach, le plus célèbre des poètes troubadours de l'Allemagne au moyen âge; d'une famille de Bavière ayant des attaches parmi la noblesse. Il se donne comme étant au service d'un comte de Wertheim. Plus tard il est à la cour du landgrave Hermann de Thuringe, v. Wartbourg, et marié, f après 1216. On montre son tombeau à Eschenbach.

WOLLEB, Jean, né 30 nov. 1586 à Bâle, où son père était conseiller. II y étudia* la philos, et la théologie, fut consacré en 1606, et successivement nommé diacre, pasteur de Sainte-Éli-sabeth, pasteur de la cathédrale, docteur en théol. et prof, d'exégèse à l'université, f 21 nov. 1629 de la peste, laissant deux fils. Outre quelques sermons de deuil, on a de lui sa thèse doctorale sur la prédestination, qu'il entend, comme presque tous les théol. réformés, dans le sens infralapsaire. Le plus estimé de ses ouvrages est son Abrégé (Compendium) de théologie, qui fut trad. aussitôt en anglais et qui fut adopté comme manuel par plusieurs universités. Ce travail, que Parisot appelle son chef-d'œuvre, se distingue par la clarté du plan et par un style concis et plein de goût. L'auteur a groupé son sujet sous deux chefs: la connaissance de Dieu, ou dogmatique, et le culte qu'il faut lui rendre, ou la morale.

WOLSEY, Thomas, né 1471 à Ipswich, fils d'un riche boucher, étudia à Oxford où il devint bachelier, puis prof, de grammaire, et où Î1 fit la connaissance d'Érasme avec qui il resta longtemps en correspondance. Recteur de Ly-mington en 1500, il fut en 1505 nommé chapelain et aumônier d'Henri VIH, dont il ne tarda pas à gagner la faveur par sa souplesse et par son caractère enjoué. Il entra bientôt au conseil du roi, et reçut coup sur coup plusieurs importants bénéfices, rectorats, décanats, évêchés, d'un grand rapport. Aimable, instruit, bien doué, intrigant, orgueilleux, il sut se faire une nombreuse clientèle d'amis et de créatures. Enfin il fut nommé archev. d'York, lord-grand-chancelier, et avec l'appui de François 1er, cardinal 1515, et l'année suivante, légat du pape, ce qui lui soumettait tout le clergé d'Angleterre, et même les couvents. Pour s'assurer la faveur de son roi, il portait une amulette, mais surtout, avec ses immenses revenus, il avait organisé à la cour un système d'espionnage qui lui permettait de savoir toujours de quel côté soufflait le vent. Il exploitait en outre la rivalité de Charles-Quint et de François I*', qui le comblaient de biens et d'honneurs pour l'avoir dans leurs intérêts, ce qui ne l'empêchait pas en même temps de défendre avec énergie les droits de son Église. Dans la lutte de compétition pour l'empire, Charles et François étant en présence, et aussi Henri quoique à l'arrière-plan, Wolsey, voyant que son roi n'avait pas de chances, favorisa celui des deux concurrents qui parut lui offrir à lui-même le plus de chances pour devenir pape; mais il échoua-, d'abord contre Adrien, puis en 1523 contre Clément VH, le peuple de Rome ne voulant pas d'un pape étranger. L'écrit d'Henri VIII contre Luther est en bonne partie l'œuvre de Wolsey lui-même, qui le 14 mai 1521 lança et fit lire en chaire une espèce de bulle contre le réformateur. Après avoir été pour l'empereur, il se prononça pour la France. Après s'être prononcé contre le divorce du roi, il y donna les mains, quand il vit qu'il ne pouvait pas l'empêcher. Sa fortune égalait presque celle de la couronne. Il créa un tribunal ecclésiastique, sorte d'inquisition dirigée contre la Réforme, et il se montra injuste et cruel envers ses ennemis. Il supprima plusieurs couvents et en confisqua les biens, avec le consentement du roi à qui il avait promis de le faire son héritier. Il fonda aussi à Oxford le collège de Christ-Church, qu'il dota de sept chaires. Mais la question du divorce royal devait lui être fatale, quelque parti qu'il prit, et Anne de Boleyn réussit à le perdre dans l'esprit du roi. Wolsey traînait l'affaire en ion • gueur, sous prétexte de négocier avec Rome, mais en réalité parce qu'il ne pouvait se prononcer contre le roi, ni contre le cardinal-légat Campeggio, venu exprès de Rome pour s'opposer au divorce. Accusé d'avoir dépassé ses pouvoirs, il fut dépouillé de ses sceaux, de ses charges, de tous ses bénéfices, sauf l'archevêché d'York; ses biens furent confisqués, et il fut banni de la cour. Un second procès vint le chercher dans sa retraite d'Asher et dans son diocèse; il ne s'agissait de rien moins que d'une accusation de haute trahison formulée par Anne de Boleyn. Sommé de se rendre à la Tour de Londres, il se mit en route, mais il eut le bonheur de mourir en chemin, dans l'abbaye de Leicester, 29 nov. 1530. Il avait sur la conscience la mort de nombreux martyrs.

WtoLTERSDORF, Ernest-Gottlieb, né 31 mai 1725 à Friederichsfeld près Berlin, où son père était pastenr. Il voulait d'abord devenir pharmacien, mais il finit par se décider pour la théologie et étudia à Halle. Après quelques années de préceptorat et de vicariat, il fut en 1748 nommé pasteur à Bunzlau, où il fonda en 1754 une maison d'orphelins sur le modèle de celle de Halle. Après un ministère fidèle et béni, il succomba à la peine, et f 17 déc. 1761. Plein d'amour et de feu il exhalait sa vie religieuse en cantiques; il en a laissé 212, dont quelques-uns sont devenus populaires, mais on leur reproche en général trop de longueurs.

WOOLSTON, Thomas, déiste anglais, né 1669 à Northampton, étudia à Cambridge, fut membre du Sidney-College, s'attacha à Origène et ne voulut connaître que l'explication allégorique de la Bible. Dès 1705 il déclara que l'histoire de Moïse n'était que le récit typique de la vie de Jésus; il regardait les quakers comme la secte qui se rapprochait le plus du christianisme primitif. Exclu du collège de Sidney 1721, il vint à Londres, où, entretenu par son frère, il commença ses attaques contre le clergé par son livre: Médiateur entre un incrédule et un apostat, qui préluda à son grand ouvrage: Si* discours sur les miracles du Sauveur. Vivement réfuté par un grand nombre d'évêques, il publia 1729 à 1730, la Défense de ses discours, cherchant à prouver que les miracles du N. T. pleins d'invraisemblances et de contradictions, ne peuvent s'expliquer que d'une manière allégorique. Condamné en mai 1728 à 100 livres d'amende, il fut le 28 nov. 1729 condamné à un an de prison, 25 livres d'amende pour chaque discours, et 2,000 livres de caution. Il f en paix dans sa prison, 21 janv. 1731, n'ayant pu déposer sa caution. Voltaire l'a exploité contre le christianisme.

WORMS, l'ancienne Vangiones, ou Barbeto-magus, ville du duché de Hesse-Darmstadt, située sur la rive gauche du Rhin, à peu près à moitié chemin entre Manheim et Mayence, était déjà Sous les Romains le siège d'un préfet militaire. D'après la légende elle aurait été évan-gélisée par Enchère, Valère et Materne que Pierre aurait envoyés à Trêves, et l'on nomme un évêque Victor comme assistant en 346 à l'hypothétique concile de Cologne. Mais l'histoire proprement dite ne commence véritablement qu'au 6»n« siècle avec l'év. Chrotold, et son successeur Rupertqui combattit l'arianisme. En 753 le pape Zacharie rattacha Worms à l'archev. de Mayence. Dagobert I«r dota richement l'Église, Charlemagne y épousa Fastrade, èt plusieurs rois carlovingiens en firent une de leurs résidences. Il s'y est tenu plusieurs conciles, entre autres celui de 1122 où la querelle des investitures fut enfin liquidée entre Henri V et Calixte II par le concordat de Worms. La diète de 1495 établit la paix en Allemagne, une paix « éternelle, i qui fut déjà troublée en 1502, puis rétablie en 1517. Mais la diète la plus célèbre fut celle de 1521 où Luther eut à comparaître les 17 et 18 avril devant l'empereur, six rois ou électeurs, 24 ducs et 204 princes ecclés. ou temporels, parce que le 12 déc. précédent il avait brûlé la bulle du pape. Il refusa toute rétractation de ses écrits, même celle qu'on lui demanda sous la forme la plus adoucie; il craignait avec raison qu'on n'exploitât contre la Réforme la moindre apparence de concession qu'il aurait faite à la diète, et il déclara à la haute assemblée, qu'il ne se laisserait convaincre que par des témoignages de l'Écriture. Les scènes épiques, presque légendaires de cette comparution de Luther à Worms, sont un des épisodes les plus dramatiques de l'histoire de la Réforme. La diète condamna Luther par un édit du 25 mai rédigé par le légat Aléan-dre, mais on le fit dater du 8 mai pour faire croire qu'il avait été prononcé par tous les princes réunis, alors que plusieurs étaient déjà partis. Luther avait quitté Worms le 26 avril. Un splendide monument a été érigé à W. pour rappeler ces souvenirs, et a été inauguré le 25 juin 1868; c'est un ensemble de onze statues de bronze, groupées autour de celle de Luther, avec les armes des princes et des villes qui, le 25 juin 1530, remirent à l'empereur la Confession d'Augsbourg. Deux importants colloques, conférences ou discussions, eurent encore lieu à W. entre protestants et catholiques, pour essayer de maintenir l'unité de l'empire en dépit des diversités religieuses. Quand Charles eut vu presque tout le nord de l'Allemagne embrasser la Réforme, et qu'il eut compris enfin qu'il n'était plus possible de revenir en arrière, il sentit la nécessité de céder sur la question religieuse et d'empêcher que cette division ne s'étendit aussi à la politique. De là un certain nombre d'essais pour arriver à une sorte d'entente entre les princes. Le premier et le dernier eurent lieu à Worms. Le premier colloque, d'abord convoqué à Spire, puis à Haguenau, s'ouvrit finalement à Worms le 25 nov. 1540, sous la présidence de Granvelle; Mélanchthon et Calvin d'un côté, Eck de l'autre, représentaient leurs Églises. Les protestants déposèrent sur le bureau la Conf. d'Augsbourg, édition de 1540; les catholiques refusèrent de la recevoir, en déclarant que ce n'était pas la même que celle de 1530; les protestants répondirent qu'il n'y avait que des différences de rédaction qui ne touchaient pas à la doctrine, et l'on se mit à discuter sur la doctrine du péché originel. Mais Charles coupa court en transférant le colloque 18 janv. 1542, à Ratisbonne où la diète était réunie. Le dernier colloque eut lieu en 1557, mais comme la question politique avait été réglée en 1555, il ne présente aucun intérêt sous ce rapport, et servit surtout à mettre en relief la division qui existait entre les luthériens modérés du parti de Mélanchthon et les intolérants flaciens. Les catholiques exploitèrent ces dissensions, mais sans en retirer d'ailleurs aucun avantage. L'assemblée était nombreuse et imposante; elle était présidée par l'év. de Naumbourg, le savant et pieux prélat Jules de Pflug. Les débats, ouverts le 11 sept., ne tardèrent pas à s'envenimer, grâce à un discours du jésuite Canisius qui trouva moyen d'irriter même le doux Mélanchthon, et les flaciens ayant cru devoir se retirer, parce que les luthériens ne s'entendaient pas avec eux, les catholiques prétendirent à leur tour ne plus pouvoir continuer la discussion avec une partie seulement des protestants. L'assemblée fut ainsi dissoute de fait, mais le président rendit cette justice aux luthériens que ce n'était pas par leur faute.

WOSDYCHATÀLI, secte russe toute moderne, fondée par un cordonnier intelligent et versé dès sa jeunesse dans la connaissance des Écritures. Spiritualistes sans exaltation, à la manière des quakers, ils rejettent toute forme extérieure de culte, sacrements, clergé, cérémonies, et font consister la dévotion dans les soupirs de l'âme. De là leur nom, qui signifie les soupirants.

WULFRÀM, le saint; né 650 àMilly, Gati-nois, chapelain à la cour des fils de Clovis, év. de Sens vers 685, donna sa démission pour aller évangéliser la Frise, et obtint quelques succès; il baptisa entre autres un fils du prince Radbod, quand à Radbod, qui avait eu un moment l'idée de se faire baptiser, il y renonça lorsqu'il apprit de Wulfram que ses ancêtres étaient probablement en enfer; il tenait à ne pas se séparer d'eux. Après un ministère de cinq ans environ, émaillé de plusieurs* miracles, notamment d'enfants ressuscités après avoir été offerts en sacrifice, Wulfram revint en France 692 et se retira dans l'abbaye de Fontenelle, ou Saint-Vandrille, Normandie, f entre 695, 700, 720 et 740. Patron d'Àbbeville.

WUNNEBÀLD, frère de Willibald q. v. D'un an plus jeune que lui, il partit avec lui et son père vers 720 pour Jérusalem. Leur père étant mort en route, à Lucques, il poussa jusqu'à Rome, où il passa l'hiver, et retourna en Angleterre 721. Plus tard il alla rejoindre son oncle Boniface, et il retrouva son frère. Prêtre et directeur de 7 couvents thuringiens, il évangélisa la Bavière sous la protection d'Odilon; il déploya une grande activité pour la conversion des païens, f 18 déc. 761, laissant à sa sœur Walpurgis la direction du cou-v.ent de Heidenheim, qu'ils avaient fondé; 16 ans après, son corps parfaitement conservé était déposé dans l'église de ce couvent.

WURSING, chef d'une famille considérable de la Frise, intervint en faveur des chrétiens auprès du cruel roi Radbod 710-720, et dut s'enfuir au pays des Francs. Il se convertit, ainsi que sa femme et ses enfants, puis retourna dans son pays sous la protection de Charles Martel. Sa maison devint un centre missionnaire. Son second fils, Thiatgrimm, épousa Liafburch, qui avait déjà deux frères missionnaires chez les Frisons, Wallibrad et Thyat-brad, et elle lui donna deux fils, Hildegrimm et Liudger, qui furent aussi missionnaires, puis évêques chez les Saxons, v. Liudger.

WURTEMBERG, ancien comté, puis duché, auj. royaume faisant partie de la confédération d'Allemagne; centre de l'ancienne Souabe. L'Évangile y fut apporté de bonne heure, probablement par des colons, des soldats ou des prisonniers romains; Irénée dit déjà en 177 que le christianisme avait des racines dans l'Alemanie, ce qui est d'autant moins étonnant que plusieurs de ces peuplades, au milieu de leur paganisme, avaient conservé la foi en un Dieu unique. Après la bataille de Tolbiac 496, les vaincus se firent baptiser comme les vainqueurs, et au 6m« siècle on voit un évêque à Constance, et des hommes tels que Pirminius à Reichenau et Kilian à Wurzbourg, se consacrer à l'enseignement et à la prédication de l'Évangile. Une veuve de Calw en 645 fonde le couvent de Hirschau, et une autre veuve charge le moine Otfried de traduire en rimes allemandes des parties de l'A. et du N. T. pour les populariser. Charlemagne fait compléter ce travail, et il y ajoute des fragments de sermons qui devront être lus dans les églises. Les établissements d'éducation se multiplient. Liutbert, qui a affilié le cloître d'Hirschau à l'ordre des bénédictins, s'applique surtout à faire connaître la Bible à ses disciples. Avec le temps le besoin d'une réforme se fait naturellement sentir, et c'est l'abbé Guillaume qui en prend l'initiative, vers 1060, au point que son abbaye devient l'idéal et le modèle des couvents du sud de l'Allemagne. La Souabe relevait du siège de Rome, mais dans les luttes des Hohenstauffen contre le pape, elle prit franchement le parti de ses empereurs. La science, l'intelligence, la poésie, la spiritualité dans le culte caractérisaient cette petite contrée où on lisait la Bible. Ulm avait restreint le culte des images et des reliques; l'excommunication n'entraînait point dfeffets civils; on prêchait contre les prétentions dn pape et contre les ordres mendiants; les vaudois étaient accueillis avec faveur. Les Amis de Dieu, notamment Nordlingen etSuson fondèrent des écoles supérieures, et entreprirent avec énergie la réforme des couvents. En 1477 l'univ. de Tubingue est fondée par Eberhard V, qui en 1482 s'occupe également de réformer le cloître des augustins où Staupitz viendra plus tard trouver la lumière et la vie; une partie de la journée est consacrée à des travaux manuels, l'autre à des exercices religieux, à la lecture et à la copie de la Bible. Le terrain est tout préparé pour la Réformation. Les noms de Reu-chlin, Mélanchthon, Brenz et Schnepf illustrent à cette époque l'université et les principales villes du duché. Les troubles qui surviennent à l'occasion de la Réforme chassent Ulric V qui est mis au ban de l'empire, mais à la suite de la bataille de Laufen, et avec l'appui du landgrave Philippe, il est remis en possession de ses États. Il fait acheter une Bible pour chaque église; la Réforme est définitivement proclamée; il n'y a d'opposition que dans quelques couvents, et ceux qui résistent sont autorisés à se retirer avec des pensions convenables. Pour les couvents de femmes on procède par voie d'extinction. L'intérim, que le duc Ulric refuse d'admettre, fait aux Églises une position difficile et les pasteurs ont beaucoup à souffrir, mais le traité de Passau ramène l'ordre et la paix, surtout pour les luthériens, car les autres dénominations ne sont pas reçues. Le traité de Westphalie affermit ces conquêtes paisibles, et les petites assemblées de Spener, qui se multiplient partout, donnent satisfaction à des besoins religieux divers, en empêchant la formation de sectes hostiles à l'Église. Le chant sacré prend alors un remarquable développement. La foi se traduit en œuvres de bienfaisance; en 4710 un orphelinat se fonde à Stuttgard sur le plan de la maison de Halle; au 19™* siècle on en compte une trentaine dans le pays. Puis viennent les amis des pauvres, la Société biblique, la Soc. de Gustave-Adolphe, sans parler de la mission bâloise qui trouve dans le Wurtemberg son collaborateur et son ami le plus dévoué. Il faut mentionner aussi les œuvres de librairie religieuse de Calw, et la colonie de Kornthal, q. v.

WURZBOURG, Wirceburgum, ou Herbipolis, ancien évêché fondé par Boniface dans le champ de travail de Kilian; plus tard État d'empire, puis grand-duché, donné 1805 à la Bavière. Diète en 1138, où Henri-le-Superbe fut dépouillé de ses États par l'empereur Conrad. Luther y visita 1518 l'abbé Tri thème, la Réforme s'y introduisit en 1519, Speratus prêcha dans la cathédrale, plusieurs prêtres se marièrent. Mais l'opposition catholique fut vigoureuse, et la lutte se prolongea avec des alternatives diverses jusque vers le milieu du 17*e siècle. La retraite des Suédois fit pencher la balance en faveur des catholiques. L'université, un moment célèbre, fut peu à peu remplacée par un séminaire épiscopal, mais des princes éclairés travaillèrent à lui rendre son ancien lustre. En 1803 les protestants obtinrent l'égl. de Saint-Étienne, en 1804 un Consistoire et une faculté de théologie.

WUTTKE, Ch. - Fréd. - Adolphe, né 10 nov. 1819 à Breslau, où il étudia la philos, et la théol.; prof, extraord. à Berlin 1854, titulaire à Halle 1861; journaliste et député conservateur, 1866 et 1867, ennemi du libéralisme (on lui doit cette célèbre maxime: Un démocrate ne peut être chrétien, un chrétien ne peut être démocrate), éditeur des œuvres de Schelling, en collaboration avec le fils du philosophe, f 12 avril 1870. Auteur d'une Hist. du Paganisme, d'un Manuel de morale, d'un traité sur les Superstitions de l'Allemagne contemporaine, une étude sur les Cosmogonies païennes avant Jésus. Homme pieux, mais très luthérien, il a publié aussi quelques brochures de circonstance, sur les vieux-catholiques, la Séparation de l'Égl. et de l'État, etc.

WYTTENBACH lo Thomas, né vers 1482 à Bienne, étudia à Tubingue, et devenu maître ès arts, il donna à Bâle, pour vivre, des conférences très remarquées. Il eut pour élèves et amis Léon Juda et Zwingle; ce dernier rapporte qu'il combattait les indulgences et qu'il apprenait à ses auditeurs à ne pas bâtir sur la puissance des clés de l'Église, mais de voir dans la mort de J.-C., la seule rançon pour les péchés. Chanoine à Bienne en 1507, il fut nommé à Berne en la même qualité, et docteur en théol. à Bâle en 1515. Il se fixa de nouveau à Bienne en 1520, se prononça ouvertement pour la Réforme, se maria en 1524, ainsi que plusieurs prêtres, et perdit sa place, f 1526. Deux ans plus tard Bienne acceptait la Réforme.

2o Daniel, né 26 juin 1706 à Worb, près Berne, fit de bonnes études à Marbourg, en Hollande, à Paris, fut un moment pasteur à Berne, puis prof, de polémique, et enfin professeur, docteur, inspecteur ecclésiastique et conseiller ecclés. à Marbourg, où cependant il ne répondit pas à ce qu'on avait attendu de lui. Très instruit, il ne savait pas se faire valoir, et l'on abusait de sa bonté. Il le sentait, devint sombre, méfiant, peu sociable, et f 29 juin 1779. II a laissé plusieurs ouvrages latins de dogmatique; sa théol. est évangélique réformée, mais l'influence wolfienne se reconnaît dans sa Théol. naturelle. — 3o Son fils Daniel, 1746-1820, prof, en Hollande, était un humaniste distingué.

XAVIER, v. François 3<>.

XÉNAIAS, v. Philoxène.

XIMÉNÈS, François, de son vrai nom Gon-zalès, né 1436 à Torrelaguna, d'une famille de petite noblesse castillane, portant le titre de Cisneros d'nne terre qui lui appartenait, mais pauvre, et le père étant percepteur des dîmes. Il étudia à Alcala et à Salamanque, puis à Rome, et de retour en 1465 se proposa pour une place vacante à Tolède. Mais il rencontra des difficultés, et 6 années de prison le punirent d'avoir pris trop vivement les intérêts du saint-siège. Il finit par se dégoûter du monde, et après avoir été avocat, grand vicaire de l'évêché de Si-guenza et prieur, il se fit franciscain, entra chez les cordeliers de Tolède, puis de Salzeda et se voua à la contemplation. C'est là qu'Élisabeth d'Espagne alla le chercher pour en faire son confesseur 1492, et 3 ans après archev. de Tolède et gouverneur de Castille. Ferdinand lui conserva cette haute position, où Ximénès lui rendit d'importants services. L'archev., devenu cardinal, fit reconnaître Charles-Quint roi de Castille et d'Aragon, mais il en fut récompensé par de l'ingratitude. D'une énergie indomptable, il était aussi cruel; il persécuta les Maures, les Juifs et tous ceux qui aspiraient à quelque Réforme; plus de 2000 hommes périrent sous son administration, sans parler d'Oran, des Canaries, de l'Amérique, où il introduisit les tribunaux de l'Inquisition. Ami de Las Cases, il s'opposa cependant à l'introduction de l'esclavage en Amérique, il combattit les procès de sorcellerie, protégea le pieux Talavera et le savant Lébrija. et fit diverses réformes utiles; il brida l'arbitraire des employés subalternes. On lui doit la fondation de l'université d'Alcala et le collège de Saint-Ildefonse ainsi que la célèbre Bible polyglotte qui porte son nom, un Missel et un Bréviaire mozarabique. Il lit d'ailleurs beaucoup pour les lettres et se consacra corps et âme à ses rois et à sa religion. Il excita cependant, peut-être par ses qualités même, la jalousie de Charles, qui le renvoya dans son diocèse. Il f le 8 nov. 1317 avant d'avoir reçu ta lettre de Charles qui lui retirait ses titres et ses bénéfices. — Un autre prélat du même nom, Rodrigue, archevêque de Tolède, vécut de 1208 à 1247 et combattit les Maures à la suite d'Alphonse et de Ferdinand. Il était l'ami des pauvres, s'occupa avec zèle de la construction de la cathédrale et a laissé plusieurs ouvrages latins sur l'Hist. de l'Espagne.

X

Y

YALES, célèbre collège américain fondé vers 1701 dans le Connecticut par les congrégationa-listes; il doit son nom à l'un de ses bienfaiteurs Elihu Yales de Newhaven qui fut président* de la compagnie des Indes en Angleterre. Parmi ses principaux directeurs il faut nommer Stiles 1777-1795 et Tim. Dwight 1795-1817.

YVO, v. Yvo et Décret.

XYSTE, que quelques-uns confondent avec le pape Sixte I", était probablement syrien d'origine; on lui doit une liturgie orientale et des discours ascétiques. On suppose qu'il f martyr entre 128-139.

YVON, lo docteur de Sorbonne 1714 à 1791, lié avec les encyclopédistes, défendit les vérités de la religion, mais si faiblement qu'on s'est demandé s'il y croyait lui-même. Il dut s'enfuir en Hollande en 1751, revint plus tard en France, fut nommé chanoine à Constance et historiographe du comte d'Artois. On a de lui divers ouvrages et discours qui laissent supposer qu'il ne croyait ni en Dieu ni en l'immortalité de l'âme. — 2° Pierre, disciple de Labadie, né 1646 à Montauban, vint à Genève 1662, passa à Mid-dlebourg en 1666, fut excommunié en 1668 avec son ami dont il partagea tous les dangers. Labadie étant mort 1675 il lui succéda comme chef de la secte et s'établit avec ses partisans à Wiewert dans la Frise, domaine des demoiselles de Sommelsdick dont il finit par épouser une. Dans ses dernières années il renonça à ses exagérations et fréquenta quelquefois le culte réformé, f 1687. La plupart de ses ouvrages, écrits en français ou en latin, ont été traduits en hollandais ou en allemand. Ils traitent de Dieu, de la nouvelle naissance, de la vie chrétienne, du mariage, de la prédestination, etc.

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ZABARELLA lo François de Zabarellis, dit le cardinal de Florence, né 1339 à Padoue, étudia le droit à Bologne, professa à Padoue, fut envoyé 1406 auprès de François le' pour préserver Padoue de tomber entre les mains des Vénitiens, et s'établit à Florence. Les Florentins l'élurent pour archevêque, mais Boniface IX avait déjà fait son choix. Il fut définitivement nommé par Jean XXIII, qui le créa en outre cardinal 1411 et le chargea de préparer le prochain concile. A Constance il déploya autant d'activité que de fermeté. Ses études sur le droit canonique lui donnaient une grande autorité. Il négocia avec le pape Jean les conditions de sa démission, prépara un mémoire sur la Réforme de la cour papale, intervint dans le procès de Jean Huss, pencha dans le sens de la supériorité du pape sur le concile, fut chargé d'instruire dans l'affaire de Jean Petit sur le meurtre des tyrans, et aurait probablement été nommé pape s'il n'était pas mort 1417 par suite d'un excès de travail. Il a laissé de nombreux ouvrages, Comment, sur la Bible, sur les Décrétales et les Clémentines, sur le bonheur, sur les conc. de Pise et de Constance, etc. Son grand Traité sur le Schisme, souvent réimpr., a été mis à l'Index.

2° Barthélémy, son neveu, f 1445, fut l'héritier de sa fortune, de son érudition et de son siège épiscopal.

ÎJo Jacques, de la môme famille, né 1533 à Padoue, où il professa depuis 1564, et où il f 1589, enseigna la philos, et s'est fait une réputation par le talent avec lequel il savait débrouiller les questions, et au besoin les embrouiller. Passionné d'astrologie, il a composé plusieurs ouvrages, entre autres sa Découverte d'un moteur éternel, qui le fit soupçonner de matérialisme, d'autant plus que, sans la nier, il soutenait d'après Aristote que l'immortalité de l'âme ne peut pas se prouver. Il ftit cependant libéré par l'Inquisition.

ZABIENS, ou Sabéens, v. Mendéens.

ZACHARIE, pape 741-752. Quand le majordome Pépin, n'étant encore que maire du palais, voulut ajouter le titre de roi aux prérogatives royales qu'il possédait déjà, il fit demander à Zacharie par deux délégués ecclésiastiques, lequel devait porter le titre de roi, celui qui en avait le nom sans le pouvoir et les capacités, ou celui qui en avait le pouvoir et les capacités sans le nom. La manière dont la question était posée dictait à Zacharie sa réponse; elle fut ce que désirait Pépin; et l'usurpation carlovin-gienne fut ainsi justifiée. Les papes suivants firent de cette circonstance comme un antécédent qui leur accordait le droit de disposer des couronnes.

ZANCHI Girolomo (Jérôme Zanchius), né à Alzano 1516, fils d'un patricien, entré au couvent des augustins à Lucques 1531, étudia les écrits de réformateurs sous Vermigli. Obligé de fuir devant l'Inquisition, en 1551 il se réfugia dans les Grisons, puis à Genève et fut nommé prof, de théologie à Strasbourg. Esprit logique et très indépendant il ne croyait ni à la damnation générale des catholiques, comme les luthériens, ni à la prédestination, comme Calvin. Cependant en 1563 il dut partir et accepter le poste de prédicateur à Chiavenna. En 1564 il se retira devant la peste avec sa communauté sur une montagne près de Piuri, où il écrivit ses Miscellanea, puis à Piuri même après sa séparation d'avec son collègue Fiorillo, el accepta en 1568 la chaire de prof, de dogmatique à Heidelberg. A la mort de Frédéric III il partit pour Neustadt sur la Hardt, où dès 1578 il interpréta le N. T., visita Chiavenna en 1583, et enfin Heidelberg où il + 1890. Ses principaux écrits sont: De tribus Elohim; De naturà Dei s. de divinis attributis; De operibus Dei intra spa-tium sex dierum creatis; De primi hominis lapsu, de Peccato et lege Dei, etc. Genève 1619.

ZEISBERGER, David, un des missionnaires les plus remarquables de l'Égl. morave, né U avril 1721 à Zeurchtenthal, Moravie, vint à Herrnhout 1726 avec ses parents, qui bientôt partirent pour la Georgie. Après de bonnes études, surtout en latin, il alla les rejoindre 1736. La famille s'établit enPensylvanie, d'abord à Nazareth, puis à Bethléhem. Converti en 1743, il se voua de cœur à l'œuvre des missions au milieu des Indiens, se rendit en 1745 à Onon-dago, village des Iroquois, fit de 1750 à 1752 un voyage en Europe, fut solennellement consacré à Herrnhout, et revint prendre son poste à Gna-denhutten. Son œuvre fut plusieurs fois traversée, et souvent renversée, tantôt par les Indiens, tantôt par les blancs; ses stations furent ravagées, ses aides furent mis à mort; lui-même maintes fois sur le point d'être assassiné. Mais il ne perdit jamais courage, et au milieu de toutes ses tribulations, de ses dangers, de ses voyages, il trouva encore le temps de composer deux grammaires, un dictionn. onondago, un abécédaire delaware, de petits discours, 500 cantiques, une traduction de l'Harmonie des 4 Évangiles, etc. Devenu vieux il perdit la vue; sa dernière lettre est datée du 6 août 1807 (au pasteur morave Latrobe, à Londres). Enfin en oct. 1808 une courte maladie l'enleva à ses amis et à son œuvre, à 87 V» ans, après un ministère de 67 ans. — Vie, par Blumhard, Neuchâ-tel 1844.

ZÉLANDE (Nouvelle ), déclarée colonie anglaise en 1840. Sa population, plutôt malaise, ou maori, est belle, intelligente, d'un noir tempéré, cheveux longs; mais violente, passionnée, longtemps anthropophage et infanticide. Ds adoraient des fétiches par des sacrifices humains et des orgies. Des guerres continuelles les décimaient, et le chiffre de 2 ll% millions qui était celui de leur population, a sensiblement baissé. La mission a commencé chez eux en 1810, par Samuel Marsden et 2 autres missionnaires. Ils n'échappèrent à la mort que par la protection du chef Schangee. En 1822 les wesleyens leur vinrent en aide, et bientôt ils purent recueillir les fruits de leur travail; en 1856 la traduction de la Bible était achevée, ainsi que quelques manuels et catéchismes. L'arrivée de prêtres et de religieuses catholiques en 1837, un évêché puséiste en 1842, enfin l'annexion anglaise qui irrita les Maoris, troubla pendant quelques années la mission. Auj. l'œuvre a un peu repris, et l'on compte dans le nord 10 à 12 mille convertis, 16 missionnaires européens, 27 pasteurs, 220 évangélistes indigènes. La mission de Her-mannsbourg a 3 stations dans le pays. Les wes-leyens et la Church miss. Society ont aussi des postes parmi les colons.

ZELL, Matthias, né 1477 à Kaisersberg, Alsace, d'une famille de pauvres vignerons, étudia à Mayence, Erfurt, Fribourg, enseigna quelques années dans cette dernière ville, où il devint bachelier en théol. et, par l'influence de Sturm, fut nommé pasteur de la cathédrale à Strasbourg 1518. Il fut bientôt le prédicateur le plus populaire de la ville, et put se regarder comme le successeur de son compatriote Geiler. Mais le vent soufflait à la Réforme; Zell la prêchait déjà en 1521. L'évéque et les chanoines commencèrent contre lui une opposition violente; le peuple et le magistrat se prononcèrent pour lui, et quand la chaire lui eut été fermée, les bourgeois lui en firent une portative, autour de laquelle ils continuèrent de se réunir. Ses convictions s'affermirent toujours davantage. Le 3 déc. 1523 il épousa Catherine SchUtz (1497-1562), fille d'un honorable menuisier de Strasbourg, qui, élevée dans des sentiments de piété, n'avait trouvé la paix de son cœur que lorsque Luther, à qui elle avait écrit, lui eut fait connaître l'amour de Jésus et les trésors de son Évangile. Zell trouva en elle une aide fidèle et dévouée. Leur maison était ouverte à tous ceux que la foi obligeait à quitter leur patrie, et leurs moyens ne suffisaient pas toujours à leur désir de faire le bien. OEcolampade et Zwingle séjournèrent chez eux, lorsqu'ils allaient rejoindre Luther à Marbourg. Catherine avait mérité le surnom de mère des réformateurs. Zell se prononça énergiquement contre l'émeute des paysans; il combattit aussi les doctrines des anabaptistes, quoiqu'il fût très large sur les questions d'Église, et très indépendant en matière de doctrine. Le premier il introduisit l'allemand dans la formule du baptême, et quant à l'eucharistie il n'admettait la présence de Christ que d'une manière céleste et non terrestre. Homme de cœur avant tout, pratique et plein d'énergie, il ne s'est presque pas mêlé aux luttes thèologiques de son temps; il s'est contenté de rendre la Réforme populaire par sa vie et ses prédications, f 9 janv. 1548. On n'a guère de lui qu'un catéchisme, 1534. Sa veuve, qui lui survécut jusqu'en 1562, continua son œuvre et sut défendre au besoin sa mémoire. Elle aima mieux servir les autres qu'être servie par eux. Schwenckfeld fut pour elle un ami fidèle.

ZELLER lo Christian-Henri, né 29 mars 1779 à Hohenentringen, Wurtemberg, fils d'un conseiller à la cour. Il dut ses tendances religieuses à l'influence de sa grand'mère, et ses idées philanthropiques et pédagogiques à un maître d'école de Ludwigsburg où il vivait en 1787, puis à des amis comme Blumhardt. En 1797 il étudia le droit à Tubingue. En 1803 il fonda une école à Saint-Gall; en 1809 il obtint la direction des écoles de toute la circonscription de Zofingue, et en 1820 des asiles qu'il avait fondés à Beuggen, d'accord avec Spittler, pour enfants abandonnés, et des écoles déguenillées. Ces établissements reçurent en 1826 la pleine approbation de Pestalozzi, et ils devinrent rapidement populaires. Il travailla activement jusqu'à sa f 18 mai 1860. Il eut une nombreuse famille; l'évéque Gobât de Jérusalem, Thiersch, Vôlker et Werner, étaient ses gendres. — Il a laissé des cantiques et de nombreux écrits ayant trait à la théologie, à la littérature et surtout à la pédagogie.

2o Son frère Charles-Auguste, disciple de Pestalozzi, s'est beaucoup occupé de pédagogie et de littérature; il fut inspecteur et conseiller scolaire à KOnigsfeld, puis à Lichtenstern où sa direction prit un caractère plus nettement évangélique.

3o Jean, fils de Z. lo, directeur de la maison de Mânnedorf, le pieux continuateur de l'œuvre de Dorothée Trudel.

4o Édouard, né le 22 janv. 1814, à Klein-bottwar, Wurtemberg; prof, de théol. successivement à Tubingue, Berne, Hambourg, Heidelberg et Berlin; disciple de Banr.

ZEND-AVESTA, le livre sacré des parsis, ou guèbres, dont le nt>m signifie selon les uns la Parole vivante, selon d'autres Allume-feu, parce qu'il est censé remplir d'un zèle ardent pour le divin le cœur de ceux qui s'en nourrissent. C'est Anquetil-Duperron qui le premier l'apporta en France 1762 et le fit connaître par une traduction 1771. Écrit dans la langue zend, ou ancienne bactriane, de la famille des langues indogermaniques et parente du sanscrit, ce vieux document de la religion de Zoroastre se compose de plusieurs parties distinctes, qu'un dialecte différent empêche de regarder comme contemporaines, et qui doivent appartenir à des époques et à des auteurs différents. Ce sont les Sassanides probablement qui ont présidé à la formation de ce recueil, et ils y ont réuni des fragments d'origines diverses, autour desquels se sont groupées des légendes. C'est Zoroastre qui en serait l'unique auteur, et le livre aurait été primitivement écrit sur 1200 peaux. Il devait comprendre Si divisions on mwi, chacune avec un titre particulier, mais le plus grand nombre ont disparu sous l'influence de l'islamisme. Celles qui resten t sont l'Yaçua ou Izechné, hymnes et prières (élévation de l'âme); le Vis-pered, ou chef des êtres, supplications et litanies; le Yescht-Sadès, hymnes en général très longs, en pehlvi et en parsis, et le Vendidad, ou livre de la loi; l'ensemble formant une sorte de bréviaire que les prêtres devaient réciter avant le lever du soleil. Le Vendidad est le plus ancien. La seconde partie du Zend-Avesta est le Bundeheschj sorte d'encyclopédie qui traite de la cosmogonie, de la religion, du culte, de l'astronomie, de l'agriculture, des institutions civiles, etc. Voltaire parle de ces livres comme d'un fatras abominable, et de leur auteur comme d'un fou dangereux; mais on sait qu'il n'était pas compétent et que ses jugements ont dû être réformés sur bien des points. Le Zend-Avesta est un chaos d'idées et de faits, c'est possible, mais c'était un progrès pour le temps et le pays où il parut.

ZÉNON lo év. de Vérone, personnalité très controversée. On connaît sous ce nom l'auteur de 127 sermons, publiés à Venise 1508, mais dont plusieurs sont dus certainement à d'autres prédicateurs, Potamius, Hilaire, Basile. Le seul év. de Vérone authentique est connu par Ambroise, qui l'appelle un évêque de sainte mémoire et le fait vivre sous Valentinien I*r et sous Gratien, sans parler de son martyre, ni de ses miracles. Les bollandistes en mentionnent un autre, d'après le pape Grégoire; il aurait fait des miracles et souffert le martyre au 3™* siècle, sous Gallien; c'est à lui qu'on attribuerait les sermons sus-mentionnés, dont la doctrine trinitaire n'est pas encore fixée, qui ne disent mot des ariens, et qui parlent du paganisme comme étant encore le maître dans l'empire. Mais d'un autre côté ils citent la 1" aux Corinthiens comme datant de 400 ans et plus. Les fr. Ballerini essaient de tout concilier en admettant que Zénon, évêque africain, orthodoxe, après avoir visilé la Syrie, serait venu à Vérone, où il aurait été nommé évêque le 8 déc. 362 et serait f 12 avril 380. Mais le seul dont l'existence soit bien prouvée est celui dont parle Ambroise, et dans ce cas les sermons ne peuvent pas être tous de lui.

2° Z. l'Isaurien, emp. d'Orient. D'abord chef de la garde isaurienne, il fut en 468 appelé à Constantinople par Léon I<"9 dont il épousa la fille Ariane, et il monta sur le trône 474. Chassé en 475 par la révolte de sa belle-mère Verina aidée de son frère, il remonta sur le trône en 477 avec le secours des Isauriens et des Goths, mais souilla son triomphe et son règne par ses excès et ses cruautés. Il joua un rôle important dans les luttes monophysites en imposant la paix aux partis par son édit Hénotikon de482. Passionné, ivrogne, sujet vers la fin à des crises d'épilep-sie, il se fit haïr et mépriser. Sa femme le fit enterrer vivant un jour qu'il était ivre 491, et épousa Anastase, un de ses courtisans.

ZÉPHYRIN, pape de 199 (ou 202) à 218 (20 août?). Presque inconnu; Hippolyte en fait un homme sans culture et intéressé; il se laissa mener par Calliste à qui il fit don des catacombes de ce nom, et qui lui succéda. Il était peu doué; les montanistes lui reprochent son indulgence pour les adultères et ses hésitations en matière de doctrine. Il vit éclater les persécutions de Sévère.

ZIEGENBALG, Barthélémy, né 14 juin 1683 à Pulsnitz, Basse Lusace, le fondateur de la mission chez les Tamules, côte de Coromandel, étudia la théologie à Halle, où l'influence de Francke le détermina à se vouer à la carrière missionnaire, malgré la faiblesse de sa santé. Il partit en 1705 avec Henri Plutschow pour la colonie danoise de Tranquebar, où le roi de Danemark Frédéric IV venait de prendre la résolution d'entretenir une mission. Malgré de nombreuses difficultés, emprisonnement, naufrage, perte d'argent, ils purent célébrer en 1707 les premiers baptêmes parmi les indigènes et établir deux écoles pour les enfants. Entravé par les Danois dans ses voyages missionnaires, Z. entreprit de correspondre avec les païens les plus instruits du pays d'alentour et exerça par ce moyen une grande influence. Il traduisit aussi divers traités, le N. T. et enfin la Bible en langue tamule et parvint à fonder pour la mission l'église dite de Jérusalem qui subsiste encore aujourd'hui. Il fit en 1714 un court voyage en Europe, vit le roi Georges 1er et l'archev. Wake, de Cantorbéry, et repartit en 1716, sous le patronage delà Compagnie des Indes,d'abord pour Madras, puis pour Tranquebar. Accablé de travail, il f 28 févr. 1719 à l'âge de 36 ans après avoir remis la conduite de son œuvre à son successeur Grttndler. Il a composé une Hist. du Malabar, une généalogie de ses dieux, un Dictionn. et une Grammaire tamules. L'Égl. conserve avec respect 2 lettres de Georges I*r à Z. et une de l'archev. Wake.

ZILLERTHAL, v. Tyrol.

ZIMMER, Patrick-Benoît, né 22 février 1752, étudia à Ellwangen la philos, à Dillingen la théol. et le droit-canon. Répétiteur à Dilligen, puis prof, de dogmatique à Ingolstadt; il fut nommé membre de la chambre des députés de Bavière et président du Comité de législation, f 16 oct. 1820 dans sa cure de Steinheim. Très estimé comme professeur, il n'était pas moins recommandable par ses vertus et par sa foi- Sa théologie était celle de son ami Sailer, expérimentale plutôt qne spéculative, et pleine de vues larges et de sentiments élevés. Il a publié en latin et en allemand de nombreux ouvrages, parmi lesquels on remarque: un Système de théol. chrétienne, la Foi en l'existence de Dieu, la Philos, de la religion, des Recherches sur la chute du genre humain, des Recherches sur les prétendus mythes de la Genèse, une Dogmatique chrétienne, divisée en 4 parties: Dieu en lui-même, Dieu dans ses rapports avec l'homme, comme Créateur, Providence (gubernator) et juge.

ZIMMERMANN lo Jean-Jacques, né 1644 à Wayhingen, Wurtemberg, diacrede Bittigheim; porta en chaire, non sans éclat, les doctrines de BOhme, et publia sa Révélation presque complète de l'Apocalypse, qui lui fit perdre sa place. Il se mit à voyager en Allemagne et en Hollande, prêchant et faisant beaucoup de prosélytes. Il fut pendant 4 ans prof, de mathématiques à Heidelberg, passa de là à Hambourg, puis à Rotterdam, et se disposait à partir pour l'Amérique, lorsqu'il f 1693. Il a laissé quelques ouvrages en latin.

2o Jean-Jacques, né 1685 à Zurich, où il fut professeur, et où f il 1756; auteur de quelques ouvrages estimés, réunis sous le titre de Opus-cula histor. et philoset de dissertations publiées dans diverses revues.

3° Ernest, né 18 sept. 1786 à Darmstadt, étudia à Giessen, se distingua comme prédicateur, fit l'éducation des jeunes princes d'Anhalt et de Darmstadt, fut nommé aumônier militaire, chapelain de la cour, et f 24 juin 1832, comme il venait d'être nommé prélat. Il appartenait au rationalisme le plus avancé de la Hesse.

40 Charles, son frère, né 23 août 1803 à Darmstadt, étudia à Giessen la théol. et surtout la philologie, et passa ses premières années dans l'enseignement. Il fit l'éducation des jeunes princes, fut nommé pasteur en 1835, et prélat en 1847. Outre de nombreuses collections de sermons qu'il a publiés, il s'est fait une réputation légitime par son Appel de 1841, qui rattacha à la Soc. de Gustave-Adolphe, fondée en 1832 par Grossmann, une société semblable qu'il avait formée à Darmstadt depuis quelques années. Cette alliance, fondée sur de larges bases, fut le signal d'un développement extraordinaire de l'œuvre. Il collabora longtemps à des journaux rédigés par ses frères, notamment à YAllgem. Kirchenzeitungde Darmstadt, fondée par Ernest en 1822, et dont il finit par prendre la direction. On lui doit une édition de luxe des écrits réformateurs de Luther, une collection de Lettres aux femmes de son temps, une vie de Luther, une édit. popul. des Livres symboliques, etc. En 1872 il dut prendre sa retraite.

ZINZENDORF et Pottendorf, Nicolas-Louis (comte de), né 26 mai 1700 à Dresde, d'une famille noble, datant des croisades, originaire d'Autriche, dont les ancêtres avaient dû émigrer à cause de leur attachement à la Rèformation, déjà vers 1580. Spener fut son parrain. Il perdit son père 6 semaines après sa naissance. Sa mère, baronne de Gersdorf, se remaria et l'enfant confié à son aïeule maternelle reçut des impressions religieuses profondes dans un milieu où se trouvaient Francke, Anton, Kan-slein, et les hommes les pluséminents du réveil. Il se distinguait par sa mémoire et son intelligence. A 10 ans il fut envoyé au Pedagogium de Halle, où sa piété se manifesta d'une façon particulière, et en dehors des collèges de piété. Il aimait à former avec des camarades de petites associations restreintes, consacrées à la prière et à la méditation. L'une d'elles portait le nom de: Esclaves de Christ; une autre celui de: Confesseurs du Christ; une autre s'appelait l'Ordre du grain de senevé. Déjà en 1715 il se préoccupait avec De Watteville de l'évangèlisation des païens. En 1716 son tuteur l'envoya à Wittenberg pour y faire son droit, et dans ce nouveau milieu, orthodoxe, mais surtout luthérien et ennemi du piétisme, il continua de se livrer à ses exercices de dévotion particuliers, au jeûne, à la prière, nourrissant touj. l'arrière-pensée de se consacrer un jour au saint ministère. Il était si respecté de tous, que ses professeurs lui proposèrent d'essayer une médiation entre le piétisme de Halle et le luthéranisme étroit et scolastique de Wittenberg; mais la chose n'aboutit pas, sa mère l'ayant rappelé pour le sortir de ce mouvement théologique où elle regrettait de le voir s'engager (Où donc Bouillet a-t-il trouvé qu'il avait mené une jeunesse scandaleuse? Glaire même n'en parle pas). Il visita en 1719 et 1720, avec son plus jeune frère Frédéric, la Hollande et la France; fut si frappé d'un Ecce homo qu'il vit à Dusseldorf, qu'il en fit l'emblème d'une de ses associations; se lia à Paris avec le cardinal de Noailles, mais rompit avec lui quand ce pauvre vieillard eut fléchi dans l'affaire de la bulle Unigenitus. Fiancé à sa cousine Théodora, il la céda généreusement à son ami Henri XXIX de Reuss-Ebersdorf qui lui paraissait l'aimer davantage, et il épousa en 1722 la sœur de ce dernier, Erdmuthe-Dorothée, qui était bien la femme qu'il lui fallait, et qui lui donna 12 enfants (dont 10 moururent jeunes). En 1721, pour plaire à sa famille, il accepta une place de conseiller de la cour à Dresde, s'occupant surtout des conciliations en justice, et il continua de présider chaque dimanche des réunions d'édification, ce qui lui attira les moqueries de bien des courtisans. Il acheta la Seigneurie de Ber-thelsdorf, qu'il passa en 1732 an nom de sa femme. Il y plaça le pasteur Rothe et un inspecteur pieux. Bientôt des fugitifs de Moravie arrivèrent, et il leur permit de s'établir sur une colline de ses domaines, appelé le Hutberg, qui ne tarda pas à devenir le Hernhut des mo-raves. Les exilés arrivèrent en nombre, quand ils surent qu'ils avaient un refuge. En 1723 il fonda avec Rothe, de Watteville et Schaefer, la ligne des 4 frères, pour propager la religion du cœur et avancer le règne de Christ par tous les moyens. De 1723 à 1724 ils fondèrent le Pœdago-gium, une maison pour les jeunes filles nobles, une école, une imprimerie, une librairie, une pharmacie pour les pauvres, etc. Le gouvernement de la Moravie s'opposant à l'émigration des Frères, qu'il persécutait, le comte se rendit en 1726 à Olmtttz pour plaider leur cause; mais pendant son absence, un conseiller nommé Krtlger troubla l'église naissante par des idées apocalyptiques et séparatistes, et il fallut tout le calme du comte pour remédier au mal. Kru-ger devint tout à fait fou et mourut en 1727. Le 17 mai 1727 les Frères se constituèrent eu communauté théocratique et nommèrent 12 anciens, avec le comte pour Préposé général. Les discussions avaient été laborieuses, car il s'agissait de former une église à part, tout en restant dans l'Égl. luthérienne, et les études de droit qu'il avait faites ne furent pas inutiles à Z, dans celte circonstance. Le comte, qui suivait toujours son idée d'entrer dans le ministère évangélique, se rendit incognito à Stral-sund; sous le nom de Freydeck (une de ses terres) et comme précepteur chez un riche négociant, il prêcha plusieurs fois avec succès et finit par demander, après plusieurs conférences et examens, une attestation d'orthodoxie et d'aptitude pour la consécration. Il remit alors son épée au surintendant, en lui déclarant qu'il n'en voulait plus porter d'autre à l'avenir que celle de la Parole de Dieu, et le 19 déc. 1734 il fut consacré à Tubingue comme pasteur luthérien. En 1736, pendant un voyage en Hollande, il reçut la nouvelle qu'il était banni de la Saxe; mais Frédéric-Guillaume I<" de Berlin lui était favorable. Dès lors commence sa grande activité missionnaire. II envoie des Frères en Laponie et parmi les Samoyèdes; d'autres sont déjà partis pour Saint-Thomas et Sainte-Croix, d'autres pour Ceylan. Lui-même en 1739 va aux Antilles et passe cinq semaines en Amérique. De retour il visite la Hollande, la Suisse, Genève, et repart en 1741 pour l'Amérique, après s'être démis de son titre et de ses fonctions d'évêque; il prépara quelques postes missionnaires, mais son voyage ne présenta rien de marquant. Sous le nom de frère Louis, il assista à quelques synodes en Pensylvanie, missionna un peu parmi les Indiens, et revint en 1743 par l'Angleterre et la Hollande. A peu près vers cette époque on peut constater à regret l'exagération de quelques côtés de son esprit, et l'affectation puérile de la simplicité enfantine qu'il recherchait comme un caractère de la foi chrétienne. 11 fondait l'ordre des simples (naïfs), Matt. 11, 25; il abusait dans ses discours et dans ses poésies, des diminutifs, du petit Jésus, de l'Agnelet de Dieu, des gouttelettes de son sang; il se complaisait outre mesure dans les émanations du cadavre de Jésus, il faisait nommer Jésus ancien en chef de l'église des Frères, etc. Mais ces enfantillages n'eurent qu'un temps et n'ôtent rien à ce qu'il y avait de puissant, de sincère et de profond dans sa piété et dans son activité. En 1747 il put rentrer en Saxe; en 1749 l'église des Frères fut mise au bénéfice du droit commun en Angleterre, et l'œuvre du comte fut consolidée. Des questions d'argent, qui ne touchent en rien à son honorabilité, attristèrent ses dernières années. Le 19 juin 1756 il perdit sa noble compagne, et se remaria le 27 juin 1757 avec Anna Nitschmann. Après quelques voyages il finit par s'établir en 1759 à Herrnhut, où il f le 9 mai 1760 d'une violente fièvre catarrhale. Il lui fut fait de splendides funérailles officielles; le deuil de ses amis ajouta à la solennité. Zin-zendorf est une figure étrange qu'on ne peut juger à la mesure ordinaire; il eut des singularités, parfois quelques bizarreries, mais qu'on a exagérées, et un sentiment très vif de la misère humaine et de l'amour de Dieu pour les pécheurs. A une grande humilité personnelle il joignait des dispositions autoritaires et une certaine tendance à imposer sa volonté. Il a laissé beaucoup d'hymnes et cantiques, et un certain nombre d'ouvrages en prose, parmi lesquels on remarque: La bonne Parole du Seigneur, espèce de catéchisme; le Lait pur de la doctrine de J.-C.; Essai d'un manuel pour la communauté des Fr.; Péri Eautoû, réflexions naturelles sur différents sujets; Forme actuelle de l'Empire de la Croix du Christ, etc. V. Bost, Hist. des Fr. moraves; Vie, par F. Bovet, etc.

ZISKA. Jean de Trocznow, noble bohémien, né vers 1380, surnommé Ziska, le borgne, parce qu'il avait perdu un œil dans une bataille, se mit 1417 à la tête des Hussites quand Sigis-mond, sur l'ordre du pape commença contre eux sa terrible croisade. Il conduisit son armée sur une montagne hérissée de rochers, à 77 ki-lom. S.-E. de Prague et s'y fortifia; v. Tabor. Il prit Prague en 1419, refusa de reconnaître Si-gismond, répondit par de cruelles représailles aux cruautés de l'armée ennemie, résista en 1421 aux armées réunies de l'empereur et de la Hongrie, et, bien qu'ayant perdu son second œil, malade et cerné sur le mont Taurkand, il se fraya un chemin, battit de nouveau l'empereur et finit par se faire agréer de lui comme vice-roi de Bohême, avec un pouvoir absolu sur ce royaume. Il allait lui prêter serment quand il mourut de la peste 1424. On raconte que les Bohémiens firent de sa peau un tambour, dont le bruit seul avait le don de jeter la panique chez les ennemis. Un parti nombreux des ta-borites prit le nom d'Orphelins, s'estimant tels depuis qu'ils avaient perdu leur intrépide général.

ZITTEL, Karl, Dr théol. 1802-1871, étudia la théol. à Iéna, occupa d'abord divers postes, fut pasteur à Bahlingen, puis enfin à Heidelberg 1849, où il fut nommé doyen. Il fut le chef réel du parti libéral du duché de Bade pendant de longues années. Au point de vue politique, comme membre de la représentation nationale, 1842-1849, puis membre du parlement de Francfort et d'Erfurt, il représenta surtout le parti libéral modéré. Il a écrit: Motifs en faveur de la liberté religieuse; État de l'Église évangélique de Bade; et a dirigé la rédaction d'un journal religieux: Der Sonntagabend.

ZIZIME, antipape 824, en concurrence avec Eugène II.

ZOLLIKOFER, Georges-Joachim, célèbre prédicateur allemand. Né 5 août 1730, fils d'un juriste pieux de Saint-Gall il étudia dans cette ville, puis à Brème et à Utrecht; fut précepteur à Francfort s. Mein, commença à prêcher en 1753. Ses succès commencèrent dès Tannée suivante; il fut appelé par l'Église réformée de Leipzig en 1758; il y fut un vrai modèle pour les jeunes théologiens de l'époque jusqu'à sa f 22 janv. 1788. — Supranaturaliste, profondément pieux, pratique, il savait traiter dans ses discours les sujets les plus élevés et les plus difficiles avec beaucoup de vie et de fraîcheur. Son débit était calme et digne comme sa personne. — On a de lui environ 250 sermons imprimés (Leipzig 1789-1804), des considérations sur le mal dans le monde, la dignité de l'homme; des méditations, des prières pour le culte domestique, des cantiques, des traductions de l'anglais, et divers écrits traitant des sujets de morale ou d'édification, etc., etc.

ZONARAS, Jean, chef de la garde impériale et secrétaire d'État sous Jean et Manuel Com-nène, donna sa démission à la mort d'Alexis. Puis, ayant perdu sa femme et ses enfants, il tomba dans une profonde tristesse, dont il ne put se distraire que par le travail, et mourut fort âgé dans le couvent d'Élie du mont Athos. Ses principaux ouvrages sont: un Commentaire sur le Syntagma de Photius; des Annales, ou Hist. du monde, depuis la création jusqu'à la f d'Alexis, d'après l'A. T., Joseph, Eusèbe,

Hérodote, Xénophon; utile surtout pour le règne de Constantin et de ses successeurs; un Comment, sur les Canons des apôtres, un Discours sur l'Impureté, une Hymne à la Vierge, des Lettres, etc.

ZOROASTRE, appelé Zaralhustra dans les livres sacrés des Perses, et Zerduscht par les Perses actuels; fondateur ou réformateur du* magisme ou de l'ancienne religion des Perses et des Guèbres, et l'auteur ou l'un des auteurs du Zend-Avesta, q. v. Sa personne est si légendaire qu'on ne peut affirmer son existence. Quelques-uns le confondent avec Noé, d'autres avec Cam, avec Abraham, Moïse, etc. D'autres le font contemporain de Daniel. Ceux qui prétendent en savoir davantage le font naître dans la partie orientale du Caucase, mais sans préciser aucune date; 500 ans av. C., ou 2500 d'après Bunsen ! La plupart des écrivains persans et arabes prétendent qu'il était juif, qu'il passa plusieurs années à voyager et qu'il fut le disciple d'un prophète, Élie, Elisée, Esdras ou Daniel. On en fait aussi le premier mathématicien et le plus grand philosophe du règne de Darius, fils d'Hystape. On ajoute qu'il se retira dans une caverne pour s'y livrer à la méditation, et que c'est là qu'il composa son fameux livre. Au milieu de toutes ces contradictions on peut admettre qu'il y a eu plusieurs Zoroastre et qu'on a accumulé sur la tête d'un seul diverses traditions relatives à la religion même des Perses ou aux principaux chefs de cette religion.

ZOSIME, v. Sosime.

ZUG, canton suisse, en majorité catholique (22,000 cathol., 1500 prot.), qui a pris parti pour son évêque, de Bâle-Soleure, contre les autorités fédérales 1873, et qui ne s'est décidé qu'en 1876 à proclamer la liberté de conscience. Egl. protest, à Barr.

ZURICH, canton suisse comptant 320,000 habitants; célèbre par le rôle qu'il a joué depuis Zwingle dans l'histoire de la Réforme et des luttes religieuses qui ont suivi. Il fut, avec Berne, un des boulevards du protestantisme, et a compté des professeurs et des théologiens distingués. Depuis un demi-siècle il a pris position en majorité contre les doctrines orthodoxes. La réaction ne s'est pas fait attendre, et de nombreuses sociétés et œuvres religieuses se sont fondées en dehors de l'influence officielle, chapelle Escher, Refuge, Auberge chrétienne, Traités, Église wesleyenne, Soc. du dimanche, etc. Les vieux-catholiques forment à Zurich, à Win-terthur et ailleurs, des Communautés importantes.

ZURKINDEN, ou Zerkintès, Nicolas, né 1506, fils naturel d'un sénateur et banneret bernois, hérita du nom et de la fortune de son père, fut élevé par le chancelier Schaller, reçut les leçons de Wolmar, se fit recevoir notaire, entra 1528 au Conseil souverain, et ne cessa dès lors de servir son pays dans les nombreuses charges qui lui furent confiées. De 1544 à 1547, étant préfet de Nyon, il se lia avec Curione, qui lui dédia ses Paradoxes, et à qui il remit l'éducation de son fils. Il fit aussi la connaissance de Calvin, dont il fut 20 ans l'ami, et quelquefois le censeur. U blâmait l'aigreur des discussions théologiques sur des « questions ambiguës, » refusa de se prononcer sur la prédestination, et blâma le supplice de Servet, les persécutions contre les anabaptistes, et en général l'emploi des voies de rigueur comme moyen de persuasion. Haller et Viret comptaient parmi ses intimes. Il composa un Traité de la tolérance, qu'il envoya à Castalion et qui est malheureusement perdu. Il quitta les affaires en 1572, et f 1588, honoré de tous. Il avait été marié trois fois: avec Apollonie Graswyl, avec Élisabeth Hug 1532, avec Élisabeth Haben 1536; il n'eut d'enfants que de ces deux dernières. — v. J. Bonnet, Récits.

ZWICKAU, petite ville du royaume de Saxe. Après que Luther eut été interné à la Wartbourg, un grand mouvement se fit à Wittenberg, notamment parmi les étudiants. Plusieurs de ceux qui avaient hésité jusque-là se prononcèrent avec énergie; on contesta la validité des vœux perpétuels, plusieurs prêtres se marièrent, on abolit les messes sans communiants, oct. 1521, et les bourgeois envahirent plusieurs couvents. Carlstadt lui-même, que la foule regardait comme un second Élie, intervint pour réclamer l'abolition de tout ce qui était pure forme d'institution humaine, suppression des images, etc. Le trouble augmenta quand à la fin de décembre trois individus, chassés de Zwickau, arrivèrent à Wittenberg, se disant envoyés de Dieu pour rétablir le culte en esprit et en vérité, et se donnant pour prophètes. C'étaient Marc Thomas StUbner, ancien étudiant de Wittenberg; le tisseur Nicolas Storch, et un autre. Pour eux il ne fallait plus d'église, plus de science, plus de Bible; la lumière intérieure devait suffire; le baptême lui-même devait disparaître, et Dieu fonderait une nouvelle église sur les ruines de l'ancienne. Méianchthon discuta avec ces fanatiques, chez lesquels il reconnaissait cependant de bonnes choses. Luther leur écrivait lettre sur lettre pour leur rappeler que Dieu est un Dieu d'ordre. A la fin il quitta sa retraite et apparut en personne à Wittenberg le 7 mars 1522, après avoir écrit au prince-électeur de ne pas s'inquiéter de lui, et, après avoir sommé les prophètes de Zwickau de prouver leur mission par un miracle, il eut le bonheur de les voir au bout de quelques jours se calmer et quitter Wittenberg; Mttnzer s'était joint à eux, mais il dut aussi s'incliner devant la parole puissante du réformateur.

ZWICKER, Daniel, né 1612 à Dantzig, médecin, gagné au socinianisme par Florian Cru-sius; chassé de sa ville natale, il s'en alla dans les Pays-Bas où il f 1678 à Amsterdam. On a de lui « La raison, d'après l'Écriture bien interprétée et la vraie tradition; > Irenicum Ireni-corum; Henoticon christianisons le pseudonyme de Minus Celsus); Ecclesia antiqua inermis; Revelatio dœmonolatriœ inter Christianos.

ZWINGER lo Théodore, né 21 nov. 1597, f 27 déc. 1654, d'une célèbre famille de médecins, destiné lui-même à la médecine, finit par étudier la théologie et devint un calviniste strict. Nommé antistès à Bâle en 1630. On a de lui: Disputatio de fide, an ex ejus prœvisione pen-deat œterna electio; un écrit sur la communion; un comment sur l'ép. aux Romains, etc.

2° Son fils Jean, né 1634, f en chaire 1696, prédestina tien comme son père, et —3° son petit-fils Jean-Rodolphe (1660-1708) auteur de la t Consolation d'Israël » sont aussi connus parmi les théologiens réformés.

ZWINGLE, ou Zwingli, Ulrich, né le l«r janvier 1484 dans le Toggenbourg, Saint-Gall, à Wildhaus où son père remplissait les fonctions d'amman. Il était le 3°* de dix enfants. Un oncle, doyen de Wesen, donna au jeune Ulrich ses premières leçons, puis l'envoya à Bâle, à Berne et à l'université de Vienne où il se lia étroitement avec Glaréan et Vadian. Son caractère était gai et plein d'entrain. Il aimait passionnément la musique et jouait de tous les instruments alors connus, avec tant de talent que les dominicains de Berne auraient bien voulu le retenir dans leur couvent. Il était également versé dans l'étude du grec et du latin, et la lecture des classiques lui fut plus tard fort utile, pour l'interprétation des Livres saints et des pères de l'Église.

Il est professeur à Bâle en 1505; il compte pour amis Capiton et Pellican. Le savant et pieux Thomas Wyttenbach exerce sur lui une influence décisive, en lui apprenant « à ne pas bâtir sur la puissance des clés, mais sur la mort de J.-C., seule rançon pour nos péchés. >

Quoique l'université l'eût nommé magister philosophiœ, pour essayer de le retenir, il accepta la cure de Glaris, qui était vacante, et pendant plusieurs années il s'acquitta fidèlement de son ministère. Deux fois il fut envoyé en Italie comme chapelain des armées suisses; mais comme il désapprouvait le service militaire à l'étranger et qu'il ne se gênait pas pour le dire, il indisposa plusieurs grandes familles glaronnaises qui exploitèrent contre lui la liberté de ses allures et ses manières un peu trop faciles.

Ces différentes raisons l'ayant décidé à quitter Glaris, il se rendit à l'abbaye d'Einsiedeln où il passa deux années, travaillant à étendre le cercle déjà très étendu de ses connaissances classiques et théologiques. Il y gagna en sérieux et en piété, discernant toujours mieux les vices et les plaies de l'Église; et lorsque Myconius et le chapitre lui offrirent en 1518 la place de curé à Zurich, il était prêt pour l'œuvre qui l'attendait. Il accepta, en déclarant tout d'abord qu'il prendrait l'Ecriture sainte comme seule base de son enseignement, et le 1er janvier 1519 il inaugurait son ministère en commençant l'explication de l'Évangile de saint Mathieu. Sa prédication attaquait de front plusieurs doctrines romaines; il critiquait en particulier les prescriptions puériles relatives au jeûne, dans son livre intitulé: t De la liberté dans le droit de choisir ses aliments. » Il publia aussi contre le célibat des prêtres, sa t Prière et démonstration amicale. >

L'évêque de Constance condamna par un édit la prédication de Zwingli, qui répondit par son Archétèlès dans lequel il oppose l'autorité de l'Écriture à celle de l'Église. Une dispute publique eut lieu à Zurich en 1523, le 29 janvier, entre Zwingli et Faber, vicaire de l'évêque de Constance. L'autorité de la Bible étant prise comme base, le résultat de la discussion ne pouvait être douteux. Les deux Conseils autorisèrent Zwingli à prêcher le pur Évangile. La cause de la Réforme était gagnée. Pour en affermir le triomphe, Zwingli publia, le 14 juillet 1523, l'Explication de ses soixante cinq thèses, où sont développées, pour la première fois d'une manière vigoureuse et complète, les doctrines fondamentales de la Réforme. Nous n'avons pas à nous étendre sur les résultats du mouvement à Zurich: cloîtres fermés, réformes dans le chapitre de la cathédrale, abolition graduelle du culte des images et de la messe. Ces deux derniers points furent l'objet d'une nouvelle conférence, 26 octobre 1523, où Zwingli eut moins à lutter contre le catholicisme que contre ceux qui voulaient une abolition immédiate de ces ri les.

A cette époque, 1523, se place le mariage de Zwingli, lequel ne fut d'ailleurs connu que plus tard, avec Anna Reinhardt, femme distinguée par le caractère et la piété. Il eut d'elle deux fils et deux filles. Parmi les amis du Réformateur zurichois à cette époque on peut compter, outre Capiton et Pellican, son collègue Léon Jude et OEcolampade; par contre ses relations avec Érasme s'étaient refroidies; il y avait trop peu de sympathie entre le réformateur actif et ardent et le savant craintif et, au fond, assez indifférent et sceptique.

En 1525, des adversaires presque aussi dangereux que les catholiques s'élevèrent contre Zwingli, les anabaptistes; mais, réfutés dans plusieurs disputes publiques, ils furent contraints de baptiser tous leurs enfants. Dans le même temps, Zwingli, invité à une dispute publique avec le docteur Eck à Baden, refusa, craignant, non sans raison, un guet-apens.

En 1527, une alliance défensive était conclue entre Zurich, Constance et Berne pour résister aux attaques des catholiques, et, en 1528 eut lieu à Berne une dispute publique, où l'élite des réformateurs était présente; par conséquent aussi Zwingli. Celui-ci activait l'œuvre de la Réformation à Zurich, continuait ses prédications, donnait des leçons de théologie et veillait aux intérêts publics; il tendait même en fait à devenir l'âme du gouvernement. Les cinq cantons catholiques ayant fait alliance avec l'Autriche, Zwingli crut la guerre inévitable, y poussa, suivit l'armée à Cappel, mais la paix fut bientôt conclue en ce lieu le 25 juin 1529.

Quelques mois après, Zwingli et Luther eurent à Marbourg une entrevue ménagée par Philippe de Hesse, qui aurait voulu voir l'accord le plus parfait régner entre les réformateurs. Sur les principales doctrines, Zwingli et Luther partageaient les mêmes idées; cependant Zwingli voyait dans le péché plutôt une priva-tion de l'amour divin qu'un mal. II insistait sur l'humanité de Christ, sur l'importance de la régénération, tandis que pour Luther l'essentiel était l'expiation; enfin il enseignait la prédestination absolue. Il avait aussi des vues très larges sur le salut des païens et des hommes de bien morts avant l'avènement du christianisme. Tels sont les points distinctifs de la doctrine de Zwingli. Mais sur la Cène, les deux réformateurs avaient une divergence de vues très marquée: Luther croyait à la consubstandation, c'est-à-dire à une présence réelle du corps de Christ dans les éléments symboliques; Zwingli seulement à une présence spirituelle de Christ, à une manducation spirituelle. Luther et Zwingli discutèrent la question au colloque de Marbourg en termes assez vifs, surtout le réformateur allemand. Ils ne purent arriver à s'entendre; cependant avant de se séparer, ils rédigèrent par écrit 15 propositions que tous deux signèrent comme témoignage de leur accord dans la grande cause de la Réformation.

A son retour de Marbourg, Zwingli fit conclure entre Zurich et Bâle une alliance pour la défense de la foi évangélique; il nourrissait même l'idée d'opposer à l'alliance autrichienne une ligue de tous les États protestants. Mais ces vastes projets ne lui faisaient pas oublier ses devoirs immédiats, la cure d'âmes, la pré-

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dication et l'enseignement. En 1525, onze ans avant Ylmtitution de Calvin, il commençait son Commentaire sur la vraie et la fausse religion, le premier exposé systématique des doctrines de la Réforme. En 1529, il écrivait son Commentaire sur Ésaïe; en 1530 un traité de la Providence; enfin en 1531, la dernière année de sa vie, un Commentaire sur Jérémie, et sa Brève exposition de la Foi chrétienne, adressée au roi François fa.

Cependant les cantons catholiques voyaient avec une irritation mêlée d'inquiétude le rôle prépondérant que prenait Zurich; et d'an autre côté, pour assurer sinon le triomphe, du moins l'existence du protestantisme dans la Confédération, il fallait que Zurich et Berne s'unissent et imposassent leur volonté aux cinq cantons. C'était la guerre; Zurich y poussait, Berne hésitait; les petits cantons s'y préparaient, et comprenant que leur union et leur résolution leur donnait un avantage sur leurs adversaires qui ne savaient à quoi se décider, ils prirent l'initiative des hostilités. Ils attaquèrent un corps de troupes que Zurich avait envoyé en observation à Cappel; l'avant-garde zurichoise arriva trop tard, la déroute avait commencé. Zwingli, en partant, était rempli des plus sombres pressentiments. Il fut tué par un soldat qui ne le connaissait pas, comme il prodiguait les dernières consolations à un mourant. C'était le 11 octobre 1531. Les ennemis ne surent pas respecter mort celui qu'ils avaient haï vivant, et plusieurs assouvirent grossièrement leur vengeance sur son cadavre.

Ainsi périt le grand réformateur de la Suisse allemande. Mais son oeuvre ne descendit pas avec lui dans la tombe. Malgré quelques taches dans son caractère, malgré le côté un peu intellectualiste de sa foi. malgré le trop grand mélange de politique et de religion qu'on a pu lui reprocher, il avait saisi et embrassé la vérité avec une rare énergie. Le protestantisme qui a triomphé non seulement à Zurich, mais aussi dans les cantons voisins, est encore aujourd'hui le plus beau monument qui puisse être élevé à sa mémoire, le témoignage le plus éclatant rendu à la puissance de son action sur son Église et sur son peuple. Le 4* jubilé centenaire de sa naissance a été célébré en Suisse, et dans la plupart des églises de la réforme au commencement de 1884, et un monument lui a été elevé en Hongrie.

ÀRGYLL (duc d'), Georges-Douglas-Camp -bell, né 1823 à Ardencastle, Écosse; était marquis de Lorne lors de la dernière sécession, et prit place à côté de Chalmers parmi les défenseurs de l'indépendance de l'Église; lord en 1847; fut membre successivement des cabinets Aberdeen, Palmerston et Gladstone 1868. Son fils, le marquis de Lorne, a épousé la princesse Louise, fille de la reine. Il a touj. pris un vif intérêt aux questions religieuses.

ARMENGAUD (Madame), née Coraly Hinsch, à Cette, le 8 août 1801; un temps de mort spirituelle, où l'arche sainte était muette et ne rendait plus d'oracle. La fièvre révolutionnaire achevait dans les églises l'œuvre de destruction à laquelle le clergé de Rome avait consacré près de 2 siècles. Elle fut élevée sans connaître aucun chrétien et sans posséder la Bible, mais son cœur cherchait les choses qui sont en haut. Toute jeune elle exposait à Dieu ses besoins et ceux de sa famille, et lorsqu'elle fit sa première communion, à 15 ans, elle reçut l'assurance du pardon de ses péchés. Plus tard elle put se procurer une Bible, la lut avec avidité, et se mit à la faire lire autour d'elle; elle ouvrit une école du dimanche, une école d'adultes, et fonda un culte de famille, réunissant parfois autour de la Bible des personnes sérieuses, dont quelques-unes se convertirent et devinrent le noyau de son église. Ses relations avec l'excellent pasteur Lissignol, de Montpellier, furent rompues sur la question de la prédestination, que le pasteur admettait sans pouvoir l'expliquer, et que Mlïe Hinsch rejetait sous la forme absolue et tranchée que lui donne le calvinisme. M. Ch. Cook, le pieux pasteur et missionnaire wesleyen, sut mieux se faire comprendre d'elle et gagna sa confiance. Elle fut pendant dix ans membre de l'Égl. méthodiste, mais s'en sépara en 1846, n'estimant pas que la discipline du Saint-Esprit fût suffisamment exercée dans cette congrégation, et elle résolut de fonder elle-même une église vraiment apostolique; elle en trouva les premiers éléments dans sa famille et dans son entourage immédiat, et fit peu à peu des prosélytes, soit à Cette et à Nîmes, soit dans les campagnes de l'Hérault, du Tarn et du Gard, qu'elle visite quand ses forces le lui permettent. Elle a poussé jusqu'à Lyon, à Genève, et dans le Mâconnais. Elle s'est mariée en sept. 1850 avec un chrétien de Prades, Tarn, M. Jean-Étienne Armengaud. L'influence qu'elle a su exercer et conserver sur les membres de sa famille, même nationaux, est très remarquable et fait honneur à sa piété comme à son caractère. Une sorte de vie commune, indivision des biens, solidarité, relie entre eux dans la mesure de ce qui est praticable, les membres de cette petite communauté. Le développement en quelque sorte spontané de la vie religieuse chez Mlle Hinsch, et la connaissance tardive qu'elle a eue de la Bible, expliquent peut-être quelques-unes de ses doctrines, et donnent la clé des erreurs de son exégèse sur certains points; la tradition n'a eu sur elle aucune prise, v. Hinsch.

ARNAUD, François-Eugène, né 18 oct. 1826 à Crest, fils du pasteur; étudia à Genève et Strasbourg; pasteur à Crupie, aux Vans, à Crest; président du Consistoire; membre de plus, sociétés savantes, littéraires et historiques. Auteur d'une Version du N. T., d'un Comment, sur le N. T., d'une Géographie biblique, d'une Hist. du Dauphiné, d'Études sur le Pentateuque et sur Jude, et d'un grand nombre d'opuscules et articles de revues.

ARTHUR, William, né 1819 en Irlande;

SUPPLÉMENT

renfermant quelques articles qui avaient été omis à leur place, et de brèves notices sur divers contemporains ayant joué un rôle par leurs écrits historiques ou par leur position officielle dans l'Église ou dans la société.

étudia à Hoxton, missionnaire anx Indes (Mission to the Mysore), pasteur à Paris 1846-1848; secrétaire général de la Soc. des missions wes-leyennes. Auteur de L'heureux marchand, la Langue de feu, l'Italie en transition; Le pape, le roi et le peuple.

ASTIÉ, Jean-Fréd., né 21 sept. 1822 à Né-rac; étudia à Genève (éc. de théol.), Halle et Berlin; pasteur à New-York 1848-1853; prof, depuis 1856 à la faculté libre de Lausanne. Collaborateur de nombreux journaux et revues; auteur de nombreux écrits: Louis XIV et son siècle (anglais); Réveil religieux des États-Unis. Hist. de la République des États-Unis, Pensées de Pascal (dans un ordre nouveau), Esprit de Vinet, Les deux théologies nouvelles dans- le protestantisme français, Théol. allemande, Mélanges de théol. et de philos., Explication de TÉv. selon saint Jean, et réponses diverses à Scherer, Hornung, Bersier, etc.

BEECHER, Henri-Ward, né 24 juin 1813 à Lichtfield, Connecticut, fils du D"* Lyman Bee-cher (pasteur presbytérien qui eut 13 enfants, dont plusieurs très distingués). Il étudia au séminaire de Lane, et fut pasteur en 1837 à Laurenceburg, en 1839 à Indianopolis, et depuis 1847 à Brooklyn, égl. congrégationiste, dite de Plymouth; 2,000 paroissiens; l'égl. contient 3,000 places, qui se louent aux enchères. Traitement 125,000 fr. Talent hors ligne, voix vibrante, intelligence élevée, cœur chaud et sympathique; parole quelquefois virulente et qui lui a fait des ennemis. Il a plaidé avec passion pour l'abolition de l'esclavage. Rédacteur de deux Revues; auteur de 10 vol. de sermons, d'une Vie de Jésus, de 3 vol. sur la prédication, et de nombr. brochures, conférences, etc. Un procès de mœurs qu'un ennemi lui a intenté, a fini à son honneur.

BEECHER-STOWE, sa sœur, née 1815 à Lichtfield. D'abord institutrice, elle épousa M. Calvin Stowe, prof, au séminaire théol. de Lane, qui passa plus tard à Andover. Elle avait vu de trop près les hontes et les horreurs de l'esclavage. Déjà connue par ses Fleurs de mai, 1843, elle se fit dès 1850 une immense réputation par sa Case de l'oncle Tom, dont elle publia la Clé 1852. En 1853, voyage en Europe. Elle publia en 1854 ses Souvenirs des pays étrangers, et dès lors, presque coup sur coup: La fiancée du Ministre, Souvenirs heureux, la Perle de Pile Dorr, A propos d'un sapin, Les petits renards, Ma femme et moi, La tyrannie rose et blanche, etc., presque tous trad. en français.

BERSIER, Eug.-Arthur-François, né 5 févr. 1831 à Morges, Vaud. Il étudia au collège de Genève, partit ensuite pour les États-Unis, d'où, après un court séjour, il revint à Genève et entra à l'école de théologie. Il passa un aa en Allemagne, Halle et Gœttingue. En 1855 il est pasteur au faubourg Saint-Antoine à Paris, en 1858 à la chapelle Taitbout; en 1866 il inaugure à Neuilly un culte du soir, qui deviendra en 1874 l'égl. de l'Étoile. Pendant le siège de Paris il est directeur des brancardiers protestants. Décoré 1871. Auteur de 7 vol. de Sermons, Hist. du synode de 1872, Liturgie 1874, la Solidarité, et de nombreux articles de revues et journaux. Il a mis son initiative, son éloquence et toute son activité au service du monument à élever à Coligny. — M1®* Bersier^ née Marie Hollard, a publié La bonne guerre, Micheline, Tourlède, l'Ermite de Ploërman.

BOIS, Charles, né 26 août 1826 à Die, pasteur à Montmeyran et à Alais; prof, à Montau-ban depuis 1860, membre du synode de 1873, président de la commission d'organisation ecclésiastique, doyen depuis 1875, membre du conseil supér.del'instr. publique jusqu'en 1884. Auteur de plus, articles, brochures, etc. sur le surnaturel, la question sociale, la liberté, etc.

BONNET, lo Louis, né 1805 àDullit, Vaud; auteur de la Famille de Béthanie, l'Homme banni d'Eden, le N. T. expliqué au moyen d'instructions, analyses, etc., étudia à Bâle sous De Wette et Hagenbach; consacré à Bâle 1829, pasteur à Londres 1830 à 1835, puis k Francfort s. Main jusqu'en 1881 pendant 46 ans; retraité avec honneur.

2o Jules, historien, né 30 juin 1820àNimes, où il étudia, obtint au lycée Henri IV le prix d'honneur de rhétorique. Prof, d'hîst. au lyeée de Mâcon, docteur ès lettres. Auteur d'Olympia Morata, Antonio Paleario, 3 vol. de Récits du 16me siècle, (prix Bordin); éditeur des Lettres franç. de Calvin, etc. Collaborateur de la Revue chrét.; directeur du Bulletin du prot. français; Secrétaire de la Soc. d'hist., et membre actif de l'Alliance évang.; a assisté Mata-moros et ses amis dans le procès de Grenade.

BORDIER, Henri-Léonard, né 1817 à Paris, d'une famille genevoise, licencié en droit depuis 1840, attaché à Augustin Thierry, puis à l'école des Chartes et aux Archives nationales; démissionnaire après le coup d'État. Depuis 187$ bibliothécaire à la Bibliothèque nationale. S'est occupé surtout d'histoire et se distingue par son exactitude. Auteur, avec Ed. Charton, d'une Hist. de France populaire. A fait une guerre impitoyable aux déprédateurs de bibliothèques (Guill. Libri), et aux fabricants de faux autographes (Vrain Lucas, qui en vendait de Sapho, Jules César, saint Pierre). Ses derniers travaux, depuis une vingtaine d'années qu'il collabore au Bulletin d'Hist. du protestantisme français, ont spécialement pour objet les temps et lea hommes de la Réforme: le Chansonnier huguenot, la Saint-Barthélémy et la critique moderne, l'École historique de Bolsec, la famille de Boyve, etc. Son principal ouvrage sera cependant la réimpression de la France protestante des fr. Haag, dont il s'est chargé en la complétant et en la refondant, travail énorme qui, en lui donnant de nouveaux titres à la reconnaissance de ses coreligionnaires, n'enlève rien à ce qu'on doit à ses laborieux devanciers. Membre du Consistoire de Paris. Beau-père du professeur Strœhlin, et de l'historien-archiviste Théoph. Dcifour.

BOUVIER, Barthélémy, né 6 janv. 1795 à Genève, d'une famille venue de Wufflens, Vaud, mais descendant de réfugiés français, étudia à Genève; consacré en 1817: précepteur en Russie 1819; groupe en église les protestants français de Moscou, dont il est le pasteur volontaire, 1er janv. 1821-14 janv. 1823; revient au printemps de 1823 atteint d'une affection des poumons dont il ne s'est jamais remis entièrement. Marié en 1825. Nommé 3 fois pasteur, il doit donner 3 fois sa démission pour cause de santé: Genève 17 oct. 1824-mai 1828; Colo-gny 1831-avril 1837; Genève 1842 à 1846. Il voulut remonter en chaire l«r janv. 1848, mais cet effort l'épuisa, il f le 7 du même mois. Un culte qu'il avait fondé à Anières. pour les disséminés, fut troublé par les cathol. ultramon-tains, qui brûlèrent la chaire et les bancs, 31 mai 1835. Le 8 sept. 1842, comme il allait faire le service du Jeûne genevois au temple de Saint-Gervais, les habitants du quartier, qui avaient décidé que ce service serait fait par Chenevière, l'arrêtèrent et le forcèrent à rebrousser chemin. Artiste, littérateur, prédicateur émouvant, homme d'initiative, il a provoqué la souscription pour les vitraux de Saint-Pierre 1835; on lui doit plusieurs liturgies, pour la Restauration, le Jubilé, la consécration d'un prêtre catholique. Auteur de nombreux sermons et opuscules, chants patriotiques et religieux, articles de revues, et spécialement: Doctrine chrét., en 8 sermons, Lettres d'un prédicateur malade à un malade, le Compagnon •de l'âme malade, recueil de prières; sermons (posthumes) avec Notice par Cellérier et Dio-dati.

Son fils Ami-Auguste-Oscar, né à Genève 16 févr. 1826, consacré en déc. 1851; après quelques courses missionnaires et suffragances dans les Hautes-Alpes, à Paris, à Londres, fut nommé pasteur à Céligny 1854 à 1857, puis à Genève, et enfin prof, de théol. 1861, archiviste de la Comp. des pasteurs, et directeur des étudiants français à la faculté de théologie. Nombreuses publications sur des sujets de morale sociale, de dogmatique ou de littérature chrétienne; on remarque surtout: le Divin d'après les épitres de Paul, qui semble être le résumé de sa théologie.

BOVET, Eug.-Victor-Félix, né 7 nov. 1824, prof, de littérature et d'hébreu; auteur d'un Voyage en Terre-Sainte, Vie de Zinzendorf, Hist. du Psautier, <ïe brochures et articles de journaux; membre de plus, sociétés savantes; ne se rattache à aucune église particulière, mais sympathise avec toutes les œuvres et mouvements religieux.

CASALIS, Jean-Eugène, né 21 nov. 1812 à Orthez, étudia d'abord sous la direction d'Henry Pyt, puis à Paris à la maison des missions. Parti de Londres le 11 nov. 1832 avec Arbous-seth et Gosselin pour le pays des Bassoutos auprès de Moshesh; fonda les stations de Mo-rija et Thaba-Bossiou; revint en 1848 pour quelque temps, retourna dans son champ de travail, mais fut rappelé 27 nov. 1856 comme directeur de la maison des missions; retraité en janvier 1882. Auteur d'une Gramm. séchuane, d'une Trad. du N. T. en sessouto, de 23 ans de séjour au sud de l'Afrique, et de Mes souvenirs (pour la jeunesse.)

CHASTEL, Étienne-Louis, né 11 juillet 1801 à Genève, oû il fit ses études, puis visita Paris, l'Italie et l'Angleterre. Nommé pasteur en 1832, chargé en 1835 de conférences à l'occasion du jubilé de la Réformation; prof, d'hist. ecclés. en 1839 jusqu'à 1881; bibliothécaire 1845 à 1848; docteur ès lettres de Genève 1879, docteur en théol. de Strasbourg 1882; décoré 1879; auteur d'un grand nombre d'ouvrages d'hist. ecclés. dont plusieurs ont été couronnés par l'Acad. française 1849, 1851, 1853 et 1854; Confér. sur l'hist. du christianisme, Hist. de la destruction du paganisme dans l'emp. d'Orient, l'Influence de la charité durant les premiers siècles de l'Église, l'Église romaine dans ses rapports avec les développements de l'humanité, les Catacombes, etc; enfin et surtout Hist. du christianisme depuis son origine jusqu'à nos jours. Collaborateur de plusieurs revues.

CLAPARÈDE, 1® David, théologien protestant genevois, né en 1727, appartenait à une famille d'origine languedocienne, qui se réfugia en Suisse au temps de la révocation de l'édit de Nantes et a produit plusieurs pasteurs et savants distingués. Au ministère actif qu'il exerça durant près de trente ans (1761-1790), dans sa ville natale, Claparède joignit, dès 1763, la charge de professeur en théologie, et enseigna avec distinction la critique sacrée et la morale. Il publia en 1765, des Considérations sur les miracles de l'Évangile, en réponse aux objections soulevées par J.-J. Rousseau dans sa troisième Lettre de la Montagne. Prédicateur de mérite, il a laissé des sermons estimés. Il s'employa pins d'une fois d'une manière très honorable an rétablissement de la paix dans sa patrie, souvent déchirée alors par les discordes civiles. 11801.

ifi Parmi ses descendants on remarque le célèbre naturaliste Édouard Claparède t 1871. et son frère Antoine-Théodore, né 18 juin 1828 à Genève, consacré 8 déc. 1850; pasteur a Jussy, Clermont-Ferrand, Chancy, auj. chapelain des prisons; président de la Soc. d'hist. et d'ar-chéol., vice-président de la Soc. des protestants disséminés; auteur de: Hist. des égl. réf. du pays de Gex; Une héroïne protestante (Blanche Gamond), réimpr. avec adjonction des Mémoires de Jeanne Terrasson, sous le titre de: Deux héroïnes de la foi (collabor. M. Goty); Henri Vend; Emmanuel Philibert et l'amiral de Coligny; de nombreux articles de revues, journaux, mémoires, etc.

DARDIER, Ch., né 26 août 1828 à Viane, Tarn; étudia à Genève. Pasteur à Nîmes depuis 1843, titulaire en 1858; membre de plusieurs Sociétés savantes; collaborateur et correspondant de nombreux journaux, s'est distingué oomme historien par des opuscules, des brochures, des articles de revue et quelques ouvrages dont les plus importants sont: Esaïe Gasc, Michel Servet, et les Lettres de Paul Rabaut.

DEL ABORDE, Louis-Jules (comte de), né 13 janv. 1806 à Paris, avocat à la cour de cassation depuis 1836, et président de son ordre 1853 à 1856. Conseiller à la cour impériale 1862, honoraire depuis 1876. Un des fondateurs de la chapelle Taitbout, longtemps prési -dent de la Soc. des missions, vice-prés, de la Soc. d'hist. du protestantisme français; a plaidé plusieurs fois en cassation en faveur de la liberté de conscience de ses coreligionnaires ^Mémoires et plaidoyers 1854). Auteur de plus, brochures de droit, de quelques beaux cantiques populaires, d'articles divers, de Mme l'a-mtrale de Coligny après la Saint-Barthélemy, les Protestants a la cour de Saint-Germain après le colloque de Poissy, Éléonore de Roye, et surtout Gaspard de Coligny (3 vol.)

DEL1TZSCH, François, né 13 févr. 1813 à Leipzig, prof, de théol. à Rostock, Erlangen et Leipzig, luthérien très accentué, donnant pins d'importance aux sacrements qu'à la parole de Dieu, puisque les sacrements agissent invariablement (en bien ou en mal) sur tous ceux qui les reçoivent; mais cœur large, nature sympathique. Auteur d'un grand nombre d'ouvrages, Gomment., Exégèse, Dogmatique, Documents, Introductions; notons surtout: Comment, sur la Genèse, Quatre livres de l'Église, la Théol. bibl. prophétique, Psychologie bibl., Jésurun.

DIDACHÈ, et Diatagai. v Instruction.

D1DON (le père), né 1840 près Grenoble, entra a 18 ans chez les dominicains, sous l'influence de Lacordaire, acheva ses études à Rome, et se fit connaître 1868 par une défense des moines au point de vue social. Nommé prieur des dominicains de la rue Saint-Jean de Beau-vais, il fit 3 séries de conférences sur l'Homme selon la science et la foi, le Mariage et le divorce, et l'Église devant la société moderne. II alla trop loin, dut se rendre à Rome pour se justifier, ne fut pas reçu par le pape et fat in-terné par ses supérieurs au couvent de Corbara, Corse, 1880. En 1882, il fit en Allemagne un séjour comme simple étudiant, et il en a rapporté des notes et des observations aussi curieuses qu'instructives.

ESCALADE. On désigne sous ce nom le coup tenté dans la nuit du 12 décembre 1602 par le duc de Savoie Charles-Emmanuel pour surprendre la ville de Genève. Cette entreprise ne constitue pas seulement un épisode intéressant de l'histoire de la petite république; les circonstances dans lesquelles elle s'accomplit lui donnent un caractère plus général, et en font l'un des événements importants de la grande lutte qui, dès longtemps déjà, se poursuivait entre Rome et les amis de l'Évangile. Capitale d'une grande opinion, selon la remarquable parole d'un historien, Genève, en rompant avec le catholicisme en 1535, était devenue la métropole de la Réforme dans les pays de race latine; aussi était-il inévitable que les papes, la considérant comme leur mortelle ennemie, excitassent leurs adhérents à une croisade contre cette ville rebelle. Rendre Genève à la foi romaine devint l'une de leurs constantes préoccupations. Les ducs de Savoie qui, d'ancienne date, convoitaient la possession de la cité hérétique, se trouvaient les instruments naturels et, pour ainsi dire, les exécuteurs désignés des vengeances du saint-siège. Dès 1560, Pie IV fit offrir à Emmanuel-Philibert une somme de vingt mille écus pour l'aider à reprendre Genève. Vingt-six ans plus tard, Sixte-Quint mit de même à la disposition de Charles-Emmanuel des troupes et de l'argent pour l'engager à détruire ce foyer de l'hérésie; mais ces ouvertures ne furent pas alors suivies d'exécution. Mus par la même politique, Clément VIII et le roi d'Espagne s'opposèrent, en 1598, à ce que Genève fût explicitement comprise dans le traité de paix de Ver-vins, et Henri IV dut déclarer par un acte spécial, confirmé en 1601 par le traité de Lyon, qu'elle y aurait part, bien qu'on ne l'y eût point nommée. Toutefois, la garantie du roi de France n'empêcha pas les adversaires de la Réforme d'ourdir contre elle la conjuration de l'Escalade. Tramée lors du jubilé célébré à Thonon en 1602, elle prit ainsi naissance sous les auspices de l'Église. Comme ses devanciers, Clément VIII offrit au duc son concours pécuniaire pour les frais de l'expédition. Au moment décisif un jésuite, dans les rangs des soldats, stimulait leur zèle par la promesse des récompenses célestes. Mais l'héroïsme des Genevois, leur confiance dans la protection d'En haut, déjouèrent un plan très habilement combiné, et les assaillants, mis en déroute, ne se retirèrent pas sans avoir éprouvé de grandes pertes. La déconvenue fut extrême au Vatican. L'occasion ainsi manquée ne devait plus se représenter, et le duc, humilié non moins que déçu dans ses espérances, se vit contraint, en juillet 1603, de conclure la paix avec Genève. — v. Gaberel.

FREPPEL, Ch.-Émile, né l** juill. 1827 à Obernai, Bas-Rhin; év. d'Angers depuis 1869, fut au Vatican un des plus chauds partisans de l'infaillibilité, et patronne volontiers les pèlerinages. Député de Brest à la Chambre des députés, il tient la tête de l'opposition ultramon-taine. Écrivain abondant, polémiste passionné.

FRIDERICH, Jean, nê 1836 à Poxdorf, Franconie supérieure; prêtre 1859, prof, de théol. à Munich 1862; secrétaire du cardinal de Hohenlohe au conc. du Vatican, refusa de se soumettre au concile et fut excommunié avec ses collègues, 17 avril 1871. Nommé prof, de théol. à Berne 1875 il refusa de se soumettre aux décisions du synode vieux-catholique de 1878. Auteur de plus, écrits importants sur l'Hisl. ecclés. de l'Allemagne, le 13®« siècle, le conc. du Vatican, etc.

GABEREL, Jean, né 1810 à Jussy, Genève; consacré 1837; pasteur à Gênes 1841-1849; a donné de nombreuses conférences historiques dans le midi de la France et en Suisse, et depuis 1856 il a donné chaque année devant des auditoires jamais lassés, au Casino, au Cirque, à la Salle de la Réformation, une confér. sur l'Escalade de 1602. Auteur de Au nord et au midi, Études sur TAllem., la France et l'Italie, Patria, beautés de l'hist. de Genève, Mémoires sur Viret, Saurin, Rousseau, Voltaire; Aima mater, ou l'Italie; les Hommes d'hier, et surtout: Hist. de l'Égl. de Genève, 4 vol., et l'Escalade.

GODET, Frédéric, né 25 oct. 1812 à Neuchâtel, étudia à Berlin et Bonn. Consacré 1837, précepteur du prince de Prusse, auj. prince impérial, 1838-1844, pasteur à Valangin et au Val-de-Ruz, pasteur et prof, d'exégèse 1850 à Neuchâtel; depuis 1866 prof, à la faculté libre; docteur en théol. de Bâle; auteur de Comment.

appréciés sur Jean, Luc, les Romains; Études bibliques, 2 vol.; Hist. de la Réforme et du Refuge dans le pays de Neuchâtel: Confér. apologétiques, etc. Un des chefs les plus sym -pathiques de l'église libre de Neuchâtel, il jouit d'une autorité incontestée parmi les théologiens de langue française.

HINSCH, Coraly, v. Armengaud.

HINSCHISME, nom qu'on donne généralement à cette fraction des chrétiens de Cette, qui se sont constitués en église évangélique sous la direction de Madame Armengaud, q. v. Comme toutes les églises évangéliques ils en appellent uniquement à la Bible. Parmi leurs doctrines, plusieurs leur sont communes avec tous les chrétiens; d'autres leur sont toutes particulières. Voici le résumé de leur enseignement théologique.

La foi en Dieu le Père et en J.-C. son Fils unique, notre Seigneur. Le Saint-Esprit, n'est pas une personne distincte du Père et du Fils, mais la partie communicable de Dieu à l'homme crovant.

Eternité de Satan, père du mensonge, meurtrier dès le commencement.

Création des âmes humaines et des anges avant la fondation du monde.

Chute radicale de toutes les créatures. Toutes ont péché en écoutant le Serpent ancien déguisé en ange de lumière.

Rachat des coupables tombés entre les mains du diable. L'œuvre de la rédemption ne s'applique pas au diable lui-même; le Fils de Dieu a paru pour détruire ses œuvres, non pour le sauver.

Les anges qui acceptèrent la parole de réconciliation sont les anges élus, esprits administrateurs, destinés à servir en faveur de ceux qui obtiennent le salut (1 Tim. 5, 21. Hébr. 1, 14). Les anges demeurés rebelles forment l'armée des esprits malins qui sont dans les airs, et dont Satan est le prince (Ephés.6, 12. 2, 2).

Tous les hommes (qui existent déjà en dehors du monde visible) doivent passer sur la terre pour être éprouvés. On distingue: a. Ceux qui se repentirent envers Dieu dans les lieux célestes et qui ont cru pleinement à la bonne nou -velle du Salut. Ce sont les Nazariens de Dieu, remplis du Saint-Esprit, comme Jean-Baptiste, dès le sein de leur mère; 6. Ceux qui, n'ayant cru qu'en partie, renouvellent plus ou moins sur la terre, à l'exemple d'Adam, le péché originel. Ils doivent s'en humilier ici-bas sous peine de voir leur nom rayé du livre de vie; c. Ceux qui apportent sur la terre et conservent jusqu'à la fin le mépris du Salut gratuit. Ce sont ceux dont les noms n'ont pas été écrits dans le livre de miséricorde (Apoc. 13, 8).

Tous les hommes doivent passer sur la terre pour y être éprouvés. Nul ne portera l'iniquité de son frère. Chacun portera son propre fardeau. Cela est vrai pour les plus petits enfants comme pour les hommes faits.

Par le don du Saint-Esprit, le règne des formes et des cérémonies fut ébranlé, mais il ne cessa entièrement qu'après la ruine de Jérusalem. Avec le temple b&ti par la main des hommes, disparut tout ce qui appartenait au mosaïsme. Les types institués par Jésus lui-même, la Cène, par exemple, ne devaient subsister que jusqu'à sa seconde venue (Jean XXI, 24. 22, 1. Cor. XI, 26). Le plus utile de tous les types, le don des miracles, a pris fin comme les autres.

Depuis l'heure bénie de la première résurrection, le ciel est ouvert, et les hommes sanctifiés par FEsprit, vont directement avec Dieu en quittant la terre, tandis que les < fils de perdition » vont directement dans l'étang ardent de feu et de soufre.

Les autres, — c'est le grand nombre — sont soumis à une nouvelle épreuve après cette vie, même ceux qui ayant posé le fondement du salut, ont négligé la promesse d'un coeur pur.

Dans tous les temps, la femme a pu être appelée aux fonctions les plus élevées, les plus délicates au sein du peuple de Dieu, témoins Dé-bora, Jahel, Hulda, Anne, Marie-Madeleine, etc. Après le don du Saint-Esprit, Pierre rappelle la prophétie de Joël: t Vos fils et vos filles prophétiseront. »

Néanmoins, ce n'est que depuis la ruine de Jérusalem que la femme a été pleinement délivrée du joug delà loi qui la condamnait au silence devant l'homme.

L'appel de la femme au pastorat appartient, comme celui de l'homme, à Dieu seul. La science et l'autorité humaines n'entrent pour rien dans cette œuvre divine. « Simon-Pierre, m'aimes-tu ?» C'est la spule question que Jésus pose à quiconque doit paître ses agneaux et ses brebis.

Tels sont, en abrégé, les principes des hin-schistes. Le nombre des fidèles est d'environ 400; leurs principaux centres sont Cette, Nîmes et le Vigan, Ils ont en outre des auditeurs, non membres de l'église. La communauté entretient à Cette un externat de jeunes filles et une salle d'asile; à Nîmes un pensionnat de demoiselles, un externat et une salle d'asile; un pensionnat de jeunes gens, avec externat. Ils ont à Cette deux Unions chrétiennes, une de jeunes gens, et une de jeunes filles. L'établissement des Bains de mer, fondé en 4847 pour les malades indigents, a reçu dès lors 14,955 baigneurs; l'institution a si bien réussi qu'elle a trouvé des imitateurs (il n'existe auj. pas moins de 30 hospices maritimes en Europe). La maison de refuge, créée en 1857, a recueilli 560 pauvres jeu -nés filles. Ces deux institutions subsistent à l'aide de dons, collectes, modestes pensions, subventions. Le Conseil général du Gard et le Conseil municipal de Nîmes sont au nombre des souscripteurs pour le Refuge, dont le budget annuel est de 36,000 francs. Les autres établissements font à peu près leurs frais. L'église comme telle couvre toutes ses dépenses par les dons volontaires de ses membres.

Ouvrages à consulter: Le Recueil des Lettres pastorales de Mm* Armengaud; le Témoignage rendu à la Vérité, la Vraie Orthodoxie, et plu-sieurs brochures de polémique, par Ed. Kriiger, pasteur; La préexistence des dmes et C Éternité de Satan par C. Gilly, professeur; et les Rapports annuels des œuvres de bienfaisance.

INSTRUCTION DES APOTRES. D a été composé, dans les premiers siècles de l'Église, divers écrits destinés à reproduire et à faire connaître l'enseignement du Christ et des apôtres. On peut nommer entre autres: 1o Le symbole des apôtres, qui est comme un développement de la formule du baptême. 2° La Didaché (Didakè) ou Instruction des apôtres. 3° Les Diatagaï ou Prescriptions des apôtres. 4<> Les Diataxéis oa Constitutions apostoliques.

La Didaché mentionnée et parfois citée par par quelques Pères de l'Église était considérée comme perdue, lorsque, en 1883, parut à Constantinople un volume tout en grec intitulé: Instruction des douze apôtres, d'après le manuscrit de Jérusalem, publiée pour la première fois, avec une introduction et des notes, par Philo-thée Bryennios. archevêque de Nicomédie. Ce livre réapparaissant après tant de siècles dans l'Église, a causé parmi les théologiens des diverses dénominations chrétiennes une immense sensation, à cause du jour tout nouveau qu'il jette sur l'état de l'Église à l'époque où il a été écrit.

Mais à quelle date faut-il le faire remonter? Les uns ont dit entre 120 et 140; d'autres, avant l'an 70; peut-être faut-il dire vers l'an 100. Ce qui est certain, c'est qu'à l'époque où la Didaché a été écrite, les apôtres et les prophètes, dans le sens large de ces mots, c'est-à-dire les hommes directement poussés à l'action par le Saint-Esprit, occupaient la première place dans l'Église, et que les évéques (ou anciens) et les diacres, appelés à leurs fonctions par les congrégations elles-mêmes, occupaient une position inférieure. Il est dit des premiers qu'il sont les grands-prêtres de l'Église; et au sujet des autres, il est recommandé de ne pas les mépriser.

La doctrine chrétienne joue un rôle très effacé dans la Didaché; en effet, elle est plutôt sous-entendue qu'explicitement exprimée.

Aussi bien cet écrit n'est-il, au fond, pas autre chose que le plus ancien des manuels de discipline ecclésiastique. La Didaché ne se propose pas de dire aux chrétiens sortis du paganisme (c'est à eux qu'elle s'adresse) ce qu'il fout croire, mais ce qu'il faut faire, soit comme simples chrétiens dans la vie privee, soit comme membres des congrégations, dans la vie ecclésiastique.

Pour terminer, faisons-en brièvement connaître le contenu. Elle contient 16 courts chapitres, qu'on peut classer en cinq parties. La première, ch. 1-6, décrit les deux chemins, ou le chemin de la vie et le chemin de la mort. La seconde partie, ch. 7-10, traite de ce qu'il faut observer quant au baptême, au jeûne, à la prière et à l'eucharistie. La troisième, ch. 11-13, expose comment les fidèles doivent exercer l'hospitalité et la libéralité chrétiennes, soit envers les apôtres et les prophètes, soit envers les autres chrétiens. La quatrième, traite des assemblées des fidèles, du choix des évêques et des diacres, de la répréhension fraternelle et de quelques autres devoirs encore. La cinquième partie, ch. 16, traite de la fin de l'économie actuelle et du retour du Christ.

La Didaché admet la validité du baptême qui se fait par aspersion, indique comment il faut rendre grâces avant et après l'eucharistie, anéantit par ce qu'elle dit sur l'épiscopat, les prétentions des évêques de l'Église de Rome, et annonce la venue, dans les derniers temps, d'un antéchrist qu'elle nomme le séducteur universel et qui se donnera pour Fils de Dieu.

L'auteur de la Didaché est inconnu. Tout indique que c'était un judéo-chrétien; qu'il avait compris le christianisme bien plus comme un développement de la loi mosaïque, que comme une vie nouvelle et le salut apportés par le sacrifice rédempteur du Christ et par l'œuvre régénératrice et sanctifiante du Saint-Esprit. Aussi la Didaché met-elle en pleine évidence, par son contenu, qu'elle n'a point l'inspiration qui se fait sentir dans les livres de l'ancienne et de la nouvelle alliance. Elle est une composition pieuse, mais humaine, et rien d'étonnant à ce que tout ancienne qu'elle est, elle n'ait point été mise au nombre des écrits du Nouveau Testament, v. l'Église Libre, 1884, n°« 10 et suiv.; l'abbé Duchesne, et Paul Sabatié.

JALABERT, Franç.-Phil.-Victor-Théophile, né 17 août 1823 à Nîmes, avocat à Aix; prof, de droit à Aix, Grenoble et Nancy; auj. prof, de droit constitutionnel à Paris; a fait partie des conseils presbytéraux ou des consistoires, presque dans toutes les villes où il a été appelé comme juriste. Membre des synodes de 1848 et de 1872. Un des chefs les plus religieux et les plus estimés du parti libéral. Auteur de comptes-rendus, mémoires, lettres et brochures sur des questions actuelles, ecclésiastiques ou politiques.

JAL

LICHTENBERGER, Fréd.-Aug., l'auteur de l'Encyclopédie des sciences religieuses, est né 21 mars 1832 à Strasbourg où il a fait ses études. Voyages en Allemagne et à Paris. Docteur en théol. 1860. Pasteur auxiliaire au Temple-Neuf et aumônier au gymnase protestant 1860, prof, de théol. 1864. Après la guerre il vint à Paris; pasteur à la chapelle Taitbout 1873, prof, de théol. à la nouvelle faculté de Paris, 27 mars 1877, et doyen. Auteur d'une Hist. des idées religieuses en Allemagne depuis le milieu du 18œe siècle, de Méditations pour chaque jour de l'année, de la Théol. de Lessing, et de plusieurs autres ouvrages de circonstance.

LUTTEROTH, Ascan-Henri-Théodore, né 29 janv. 1802 à Paris, reconnu français, comme descendant de réfugiés, en vertu du décret du 9-15 déc. 1790. Il s'est associé activement dès sa jeunesse à tout ce qui s'est fait à Paris dans l'intérêt de l'Égl. protestante; rédacteur des Archives et du journal des Missions; du Semeur qu'il dirigea seul de 1831 à 1850. Fondateur depuis 1830, de plusieurs chapelles, membre de presque toutes les sociétés religieuses; défenseur de la liberté des cultes à Orléans (aff. de Montargis) et à Amiens (baptistes de l'Aisne). Auteur de Notices sur Oberlin, O-Tahiti, les Saints inconnus, la Russie et les jésuites; le Jour de la préparation (chronologie pascale), le Recensement de Quirinius, Comment, sur saint Matthieu, etc.Articles dans diverses revues. Éditeur (avec Mme Lutteroth) des Chants chrétiens, qui ont eu plus de dix éditions.

MALEBRANCHE, Nicolas, né à Paris 1638, f 1715; petit, malingre et contrefait; il entra 1660 dans la congrég. de l'Oratoire, se consacrant à la religion et à l'étude. Il fit d'abord de l'histoire et de la philologie sacrée, mais ayant lu le Traité de l'Homme, de Descartes, il se tourna tout entier vers la philos, dont il s'appliqua à démontrer l'accord avec le christianisme. Son livre, La Recherche de la Vérité 1674 eut un grand succès et reste son meilleur ouvrage; ses Entretiens sur la métaphysique et la religion 1688 sont considérés comme son chef-d'œuvre. Il soutient que nous connaissons tout en Dieu et que nous n'avons aucune connaissance hors de lui; qu'il n'y a aucun rapport possible entre l'âme et le corps, la matière et l'esprit. Dans son Traité de l'amour de Dieu il combat la doctrine du pur amour. Plusieurs paradoxes l'engagèrent dans une controverse ardente, tour à tour avec Arnaud, Bossuet, Régis,

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MAL

Féaeton et Lamy. Très cartésien, il eat des amis et des admirateurs, mais peu de disciples, et n'a pas exercé l'influence à laqnelle son caractère, ses talents et sa piété lui auraient donné droit.

NA VILLE, Jules-Ernest, né 13 déc. 1816 à Chancy, Genève; consacré en 1839; passa 6 mois à Florence, et fut à son retour nommé directeur des écoles de la ville; en 1844 prof, de philos.; destitué à la suite de la révolution de 1846 il se retire du clergé officiel. Prof, d'apologétique en 1860, mais démissionnaire en 1861. Dès lors, et déjà plus ou moins depuis 1848, sans attache officielle, il continue de servir librement son pays et l'Église par ses écrits, ses cours publics et de nombreuses conférences à Genève, Lausanne, Neuchâtel et ailleurs. Président de l'Association pour la Réforme électorale, officier du Saint-Sauveur (de Grèce), membre correspondant de l'Institut, de France, depuis 1865. Collaborateur à la Revue des Deux-Mondes, à la Revue scientifique, à la Biblioth. univ., à la Revue chrétienne, au Chrétien évangélique, et à d'autres feuilles, il a composé de nombreux écrits, biographies, philos., questions sociales, politiques, électorales, confessionnelles, etc. On connaît surtout: Maine de Biran (en collab. avec M. Marc Debrit), Mémoire sur Bacon, la Physique moderne, la Logique de l'Hypothèse, la Vie éternelle, le Père céleste, le Problème du Mal, le Christ, l'École chrétienne et l'École laïque, De Saussure, le p. Girard, etc. — Son fils Adrien, né 6 févr. 1845, prof, de philos, à Neuchâtel, a écrit: Saint Augustin et le développement de sa pensée; Julien l'Apostat, et divers articles de revues.

NÈGRE, Louis, né 1842 à Alais, où il commença ses études classiques, qu'il alla terminer ensuite à Paris, étudia la théol. à Montauban et fut consacré dans sa ville natale, en 1866, par le prof. Bois; pasteur au Cailar 1866-1878, président du synode de la 16®« circonscription 1879-1882, actuellement pasteur à Saint-Gilles-du-Gard et président du Consistoire de Vau-tert, auteur de la Carte de la France protestante (Paris, Bonhoure).

Cette carte, sur une grande échelle, dont le bèsoin se faisait vivement sentir depuis plusieurs années, présente un tableau complet des églises réformées, luthériennes, indépendantes, des postes des diverses Sociétés et des localités renfermant des protestants. On y voit aussi, clairement indiquées, les limites dès consiste -riales et des circonscriptions synodales, ainsi qUe les voies ferrées qui les traversent. Cette utile publication, qui permet d'embrasser d'un coup d'œil les divers groupements du protestantisme français, peut rendre de grands services et se recommande non seulement aux pasteurs et aux consistoires, mais1 à fontes les personnes qui s'occupent d'évangélisation et de collectes.

Par suite de la mort de M. de Prat, M. Nègre s'est chargé de la continuation de l'Annuaire protestant que publiait le regretté directeur du séminaire protestant de Montauban.

OLTRAMARE, Marc-Jean-Hugues, né 27 déc. 1813 à Genève, descendant de réfugiés italiens, peut-être de Calabre; étudia à Genève, Tubingue et Bertin. Consacré 1838. Pasteur dès 1845, prof, du N. T. 1854; aumônier dans la campagne du Sonderbund èn 1847; membre du Consistoire 1851-1859. Traducteur du N. T. 1872. Auteur d'un Comment, sur les Romains, et de nombreux discours, catéchismes, sermons, conférences sur Calvin, Mermillod, les sacrements, etc. Prédicateur populaire.

PÉDÉZERT, Jean, né 19 janv. 1814 à Puyoê, B.-Pyrénées; élève de la maison des missions de Paris, 1832, puis sous-directeur; pasteur à Hargicourt, et Bkyonne; prof, de théol. à Montauban depuis avril 1850; modérateur dn synode officieux de Paris 1879; président de la commission permanente nommée par le synode de Marseille 1881; pnbliciste distingué, rédacteur ou collaborateur de l'Espérance, le Semeur, le Christianisme an 19®e siècle, le Moniteur; auteur d'Études ecclés., morales, sociales et littéraires.

PERSÉCUTION (La) en France depuis 1685. Après la Révocation de l'édit de Nantes, l'hérésie était censée ne plus exister. Les pasteurs avaient été expulsés, l'exercice du culte évangélique était interdit; les réformés avaient pris par milliers le chemin de l'exil, et ceux qui restaient devaient être rentrés dans le giron de l'Église romaine; c'était la théorie. Mais bien-tôt les faits infligèrent à ce mensonge officiel un démenti éclatant. Les soi-disant nouveaux convertis du Dauphiné ou des Cévennes réorganisèrent des assemblées religieuses dans leurs montagnes; des pasteurs revinrent, des prédi-cants surgirent pour réchauffer leur zèle, et, par suite, le gouvernement de Louis XIV (ce fut le châtiment de ses cruautés et de son intolérance antérieures) se vit, pour ainsi dire, contraint de terroriser, et de persécuter de plus fort en plus fort les malheureux protestants, et de maintenir en état de siège habituel les provinces où ils se trouvaient. Tel fut, avec diverses alternatives d'accalmie et de redoublement de rigueurs, le régime des trente années de la vie de Louis XIV et celui de la plus grande partie dn règne de Louis XV.

Ce qui imprima à cette conduite insensée de la royauté on caractère particulièrement odieux, c'est que la persécution demeura longtemps plus ou moins clandestine. On savait assez mal à l'étranger ce qui se passait en France, et, à Pin-térieur, l'entourage du souverain s'inquiétait fort peu, au milieu des splendeurs de la cour, des souffrances qu'éprouvaient aux extrémités du royaume, parfois même beaucoup moins loin, les victimes des sévérités royales. On n'aurait eu pourtant qu'à prêter l'oreille pour entendre les gémissements des persécutés. Les assem-bléesde culte surprises, ceux qui y participaient dispersés à coup de fusil, les pasteurs roués ou pendus, les autres victimes que l'on pouvait saisir mises à mort ou plongées dans des cachots, les émigrants arrêtés avant d'avoir franchi la frontière condamnés à la réclusion perpétuelle, à la déportation, aux galères: ainsi se résument, durant près de quatre-vingts ans, les rapports du pouvoir royal avec les réformés. On compte ainsi une trentaine de pasteurs, entre lesquels l'illustre Claude Brousson, livrés au supplice de 1683 à 1700. Sous Louis XV, onze de leurs successeurs subirent le même sort; le dernier, François Rochette, mourut en 1762. Ces martyrs de la cause protestante rendirent glorieusement témoignage de leur foi; la fermeté et la joie chrétienne avec lesquelles Fulcrand Rey, Louis Ranc, Jacques Roger, Desubas et bien d'autres marchèrent à la mort, émurent jusqu'à leurs bourreaux, et impressionnèrent vivement tous les témoins de leur supplice. — Les frères Haag ont dressé une liste, sans doute incomplète, de plus de deux cents protestants, hommes et femmes, qui furent enfermés à la Bastille entre 1685 et 1715. Une foule de leurs coreligionnaires souffrirent également pour leurs convictions dans les cachots de Vincennes, de Nantes, de Saumur, d'Aigues-Mortes, de la tour de Crest, et dans d'autres prisons d'État. En ces tristes jours, les femmes montrèrent fréquemment plus d'énergie et de persévérance que les hommes; aussi s'appliquait-on, avec un soin particulier à vaincre leurs résistances, et dans les hôpitaux, dans les couvents, dans les maisons de la propagation de la foi où beaucoup d'entre elles furent renfermées, elles eurent trop souvent à endurer des traitements indignes. L'hôpital de Valence, notamment, dut une honteuse célébrité aux cruautés raffinées dont y furent l'objet bien des protestants des deux sexes qui, dans d'autres prisons, avaient lassé les efforts des convertisseurs. C'est là que fut détenue l'héroïque Blanche Gamond, qui a laissé une relation de ses souffrances. En 1687, l'encombrement des prisons inspira l'idée de déporter dans les colonies d'Amérique une partie des réformés qui s'y trouvaient entassés. Ce projet fut mis à exécution; mais sur les quelques centaines de malheureux ainsi arrachés à leurs familles et à leur patrie, un bon nombre périrent en route, enlevés soit par la maladie ou les fatigues, soit par suite du naufrage de quelques-uns des vaisseaux qui les transportaient. L'une des pénalités les plus cruelles et que l'on vit appliquées le plus fréquemment aux réformés fut la condamnation aux galères à perpétuité. Il est difficile de se rendre exactement compte du nombre des personnes auxquelles fut infligée cette terrible peine; mais les évaluations les plus récentes le portent à plus de deux mille. Toute tentative d'émigration, l'assistance à une assemblée de culte, la simple possession des Livres saints suffisaient pour la faire prononcer. On n'épargnait ni le rang ni l'âge. Devançant les principes égalitaires de la Révolution, la royauté enchaînait côte à côte sur les bancs des forçats le gentilhomme et le plébéien. On eut parfois l'absurde barbarie d'y envoyer jusqu'à de jeunes garçons au-dessous de quinze ans. Nombreux furent les condamnés qui, chargés de fers, accablés de coups, succombèrent déjà en route avant d'avoir atteint le bagne. D'autres, plus vigoureux, embarqués sur les galères, en supportèrent de longues années l'affreux régime, exposés les premiers, en temps de guerre, aux coups de l'ennemi, soumis, en temps de paix, à toutes les rigueurs d'une barbare discipline. Celle-ci était, du reste, moins rude pour les galériens ordinaires, que pour les réformés. On traita, en bien des cas, ces derniers avec l'inhumanité la plus révoltante, en vue de vaincre leur obstination à ne point embrasser le catholicisme. Mais, puisant leur force en Dieu, ces héros de la foi opposèrent à la méchanceté de leurs ennemis une piété, une douceur, une charité vraiment admirables, comme le prouvent les lettres qui nous ont été conservées d'eux. La sublimité de leurs vertus évangéliques produisit un jour un résultat aussi remarquable qu'imprévu, la conversion au protestantisme de l'un même des aumôniers romains chargés de le leur faire abjurer. — Deux mois avant sa mort, Louis XIV eut l'humiliation de voir la reine Anne d'Angleterre lui demander la libération d'un assez grand nombre de galériens protestants; il n'osa refuser cette requête. Le pouvoir royal ne cessa point cependant de prononcer des condamnations nouvelles, et, sous Louis XV, 220 personnes furent envoyées aux galères pour cause de religion. Vers la fin de ce règne, comme nous l'avons vu ailleurs, un esprit nouveau soufflant sur la société, quelques adoucissements furent apportés à ce honteux régime de barbarie clérico-royale; on jouait l'Honnête criminel, on réhabilitait Calas; on entendait Montesquieu, Voltaire, Malesherbes; les parlements hésitaient; le chevalier Ch.-Juste de Bauveao faisait vider et murer la Tour de Constance, au risque d'une disgrâce; d'Argenson saluait respectueusement Paul Rabaut, au lieu de le faire arrêter; le maréchal de Senneterre, aveugle, affirmait plaisamment n'avoir jamais vu le pasteur Jarousseau ni ses assemblées; les gendarmes eux-mêmes s'arrangeaient quelquefois pour avoir vu trop tard, ou pour laisser évader leurs prisonniers. Évidemment on pouvait espérer une ère nouvelle; mais c'est en 1774 seulement, Tannée de l'avènement de Louis XVI, que la liberté fut rendue aux deux derniers galériens de Marseille. V. Mémoires d'un protestant (JeanMarteillede Bergerac); un Déporté pour la foi, par M. Lelièvre; Deux héroïnes pour la foi (Bl. Gamond et J. Terrasson), par Claparède et Goty; les Larmes de Pineton, etc.

PILATTE, Léon-Rémi, né 2 sept. 1822 à Vendôme, d'une famille catholique. Converti à il ans, il entra à la maison des missions de Paris, mais sa santé ne lui permit pas de donner suite k ses projets missionnaires. Il se consacra à l'évangélisation de la France, notamment du sud-ouest, des deux Charente et du faubourg Saint-Marceau à Paris. Ayant causé de l'ombrage à la police, il partit pour les États-Unis, revint en France en 1853, se fixa à Menton, puis à Nice 1835, où il fut pasteur 20 ans, jusqu'en 1875. Parole incisive, plume alerte et bien trempée, il est à la fois journaliste et polémiste de naissance, controversiste par tempérament. Collaborateur de Girardin k la Presse; fondateur du Phare du littoral k Nice, du Réformateur à Paris, il est surtout connu par l'Église libre qu'il a fondée et qu'il rédige à Nice depuis 1869. Auteur de plusieurs brochures, en particulier contre la maison de jeux de Monaco, et d'un livre sur le synode de 1848 publié avec M. de Pressensé. A réimprimé des œuvres de Calvin, ses Comment, sur le N. T., l'Institution, Comment, sur les Psaumes. Directeur-fondateur depuis 1874 d'une école d'évangélistes k Nice.

PRESSENSÉ, Edmond (Dehault de) né 17 janv. 1824 k Paris, étudia à Lausanne sous Vinet, puis à Halle et Berlin. Pasteur de la chapelle Taitbout, Paris, 1847; docteur de Breslau en 1863, de Montauban en 1876, d'Édimbourg en 1884. Nommé député de la Seine 2 juillet 1871, sénateur inamovible 1884. A constamment voté les mesures libérales avec le parti républicain, et défendu la liberté de conscience aux Chambres et devant les tribunaux. Nombreuses conférences populaires et voyages d'évangélisation. Membre actif du comité de l'Alliance évangélique. Collaborateur à la Revue des Deux Mondes, aux Débats, à la Revue politique et littéraire, à l'Encyclop. des sciences théol.; fondateur-directeur de la Revue chrét., et du Bulletin théol.; auteur d'une Vie de Jésus, le Concile du Vatican, Hist. des 3 premiers siècles de l'Égl. chrétienne, et de nombreuses Études ecclés., politiques, iï-gieuses et littéraires. — Madame de Pres8*fl>sé (Élise-Franç.-Louise du Plessis) est née2inr%.. 1826 à Yverdon, Vaud. Mariée 1846. Fonua-trice de l'œuvre dite de la Chaussée du Maine en faveur des victimes de la Commune et des pauvres du 14m* arrondissement. Écrivain populaire; auteur de: Rosa, la Maison blanche, le Journal de Thérèse, Sabine, Boisgentil, Une joyeuse nichée, Poésies; la Journée de petit Jean, et Ninette, illustrées par Paul Robert.

PUAUX, François-Napoléon, né 24 déc. 1806 à Vallon; étudia le droit à Paris. D'abord avocat, puis notaire, il se consacra dès sa conversion k la carrière ecclésiastique; pasteur k Lnneray, Rochefort, Mulhouse. Controversiste ardent, polémiste serré, predicateur original, auteur fécond. Outre une foule de brochures, on lui doit: l'Anatomie du papisme, la Raison en face du tombeau de J.-C., les Loisirs d'un homme occupé; Hist. de la Réformation française, 7 volumes. — Son fils Frank, né 26 nov. 1844, après un pastorat à Stockholm, est revenu se fixer k Paris, s'occupant de recherches sur la Réforme française. A écrit: les Précurseurs de la tolérance, et plus, articles.

RILLIET, J.-H.-Albert, connu aussi sous le nom de Rilliet-de Candolle depuis son mariage avec une nièce du célèbre botaniste. Né 1809 à Genève, fils d'un conseiller d'État, il fit toutes ses études k Genève et les compléta par un voyage en Allemagne. Consacré en 1832. A la fois théologien, littérateur, savant, historien et homme politique, il se montra supérieur dans tous les domaines, mais ne se fit pas dans son pays la position à laquelle il pouvait prétendre; son caractère absolu, son esprit qui ne connaissait pas les transactions, et les circonstances politiques, l'empêchèrent de jouer un rôle actif, public, mais sans rien enlever à sou influence ni k son activité personnelle. Il collabora à la Biblioth. universelle et au Semeur, et fut nommé prof, de littérature à l'Académie. La révolution de 1846 lui imposa sa démission; il se retira même du clergé national officiel, déclarant qu'il restait fidèle k l'Église k laquelle il avait prêté serment, et qu'il ue connaissait pas la nouvelle qu'on lui avait substituée. Fondateur en 1849 du Gymnase libre, qui subsista jusqu'en 1857. Membre et souvent président de la Soc. de lecture. Il a traduit, avec Bétant, l'Hist. d<3 la guerre de Péloponèse, de Thucydide. Soi Comment, sur les Philippiens, 1841, fonda sa réputation. En 1859 il publia une trad. du N. T. d'après le texte grec le plus ancien (le Vatican, complété par l'Alexandrin; on ne connaissait pas encore le Sinaïticus), avec notes et variantes. Cependant il a peu à peu abk'fïdonné la théol. pour se livrer plus entière- nt aux recherches critiques et historiques. O . l'intérêt spécial qu'il a pris à l'importante publication de la Correspondance des Réformateurs d'Herminjard, on a de lui des études, réimpressions, volumes ou brochures sur: le Procès de Servet, les Homélies d'A vitus, deux points obscurs de la vie de Calvin, Jeanne de # Jussie, Le levain du Calvinisme, Le premier séjour de Calvin à Genève (en collabor. avec M. Th. Dufour), le Rétablissement du catholicisme à Genève il y a deux siècles; Marie Den-tière. Nommons encore son Hist. de la Réunion de Genève à la Conféd.,1866; lesOrigines delà Conféd. suisse, 1868; Lettres à M. H. Bordier, au sujet des Origines de la Conféd. suisse, 1869.

SCHÉRER, Edmond-Henri-Adolphe, né 8 avril 1815 à Paris, où il commença ses études; passa 2 ans en Angleterre, fit sa théol. et prit ses grades à Strasbourg; docteur en 1843. Prof, d'exégèse à l'École de théol. de Genève; rédacteur de la Réform. au 19™ siècle, 1845-1848. Ses idées religieuses ayant complètement changé il donna sa démission dans deux lettres: La Critique et La Foi 1850, se fixa k Paris, puis à Versailles, devint en 1860 un des rédacteurs du Temps, après avoir collaboré au Semeur, k la Revue de théol., et k la Biblioth. universelle. Député de Seine-et-Oise 2 juill. 1871; sénateur inamovible 15 déc. 1875. Auteur de Prolégomènes à la dogmatique réformée, Théorie de l'Église, Vinet, Lettres à mon curé, Thèses théologiques; Mélanges d'hist. religieuse, Études critiques sur la littér. contemporaine.

SCH1CKLER, Fernand, baron (de), né 24 août 1835 k Paris, président de la Soc. d'Hist. du protestantisme français 1865, de la Délégation libérale des égl. réf. 1877, de la Soc. biblique protest. 1878, membre du Conseil central 1879, et du Consistoire de Paris 1881. A fait deux voyages en Orient, publ. 1862. Auteur en outre, de plusieurs discours, notices et articles sur quelques points d'histoire. Un des chefs laïques les plus appréciés du parti libéral.

SECRETAN, Charles, né 19 janv. 1815 k Lausanne, suppléa Vinet k Bâle en 1834, entendit Baader et Schelling k Munich en 1836; prof, à Lausanne en 1838, destitué par la révolution de 1845; prof, d'histoire et de philos, à Neuchâtel 1850; enfin rappelé k Lausanne en 1866. Auteur de: Leçons sur Leibnitz; la Philosophie de la liberté; Recherche de la Méthode; la Raison et le Christianisme; Précis de philosophie: Discours laïques, et d'un grand nombre d'articles dans la Revue suisse (qu'il a fondée 1837), le Semeur, la Biblioth. univ., la Gazette de Lausanne, le Chrétien évangé-liste, etc. Touj. le défenseur des causes libérales.

SEGOND, J.-J.-Louis, né 4 oct. 1810 à Genève, d'une famille française, étudia à Genève, prit ses grades (jusqu'au doctorat) à Strasbourg, passa 18 mois à Bonn, avec Freytag, et un an k Eisenach. Se fit naturaliser genevois 1839, fut nommé pasteur à Chêne, près Genève 1840-1864; prof, suppléant de théol. 1862, prof, ordinaire d'exégèse 1872; voyage en Orient 1873. Connu surtout par sa Version de l'A. T. demandée par la Compagnie des pasteurs, commencée en 1864, finie en six années Trad. du N. T. 1880: Soirées chrétiennes, Monologues de Schleiermacher, Discours et sermons, Catéchisme, etc. — Son fils Victor, pasteur à Sion, est auj. pasteur au canton de Vaud, et a publié un Annuaire des œuvres philanthropiques.

STEEG, Jules, né 1836 à Versailles, étudia la théol. k Bâle, Strasbourg et Montauban. Nommé pasteur à Libourne 1er sept. 1859; rédacteur du Progrès des communes depuis le 1er juillet 1871, se fit en politique de nombreux ennemis et une grande popularité. Dénoncé à Bordeaux, pour un article sur la Fête Dieu, il se défendit lui-même et fut acquitté H sept. 1872. Membre du synode de Paris; un des chefs les plus respectés du protestantisme libéral; il donna sa démission de pasteur en 1879, fonda une imprimerie qui prospéra, et fut nommé député 21 août 1881. Il a fait le rapport sur la séparation des Égl. et de l'État. Auteur de nombreuses et spirituelles brochures, presque toutes d'actualité.

.STROSSMAYER, Joseph - Georges, évêque d'Agram, Croatie, né 4 févr. 1815 à Essek, Sla-vonie; fondateur de l'univ. d'Agram, chef du parti national croate; a fait opposition au conc. du Vatican et a refusé de se soumettre.

VIGUIÉ, Jean-Ariste, né 29 janv. 1827 k Nègre-Pelisse, étudia à Montauban, Berlin, Bonn et Strasbourg. Consacré 1851. Pasteur à Montauban, à Nîmes 1853-1879, enfin pasteur et prof, de théol. k Paris. Président de l'Acad. de Nîmes. Orateur brillant et populaire, auteur d'un grand nombre d'écrits plus ou moins considérables sur des sujets d'édification, de théol. et d'histoire.

VULLIEMIX, Louis, né 7 sept. 1797 à Yver-don, Vaud, où son père était receveur pour le gouvernement do Berne. Il étudia d'abord chez Pestalozzi, puis à Thoune, enfin à Lausanne. L'histoire était son étude de prédilection, et bien jeune il reçut le prix dans un concours sur Tacite. Il fut un des premiers fondateurs de la Soc. de Zofingue 1819. destinée à grouper en un faisceau les étudiants des divers cantons, trop souvent divisés sans motifs par la religion, la politique ou les souvenirs. Consacré en 1821 il fit quelques années de suffragance, à Chex-bres, puis à Nyon chez son oncle Gonthier. Mais sa voix était faible, sa santé délicate et ses goûts le ramenaient à l'histoire. Il revint à Lausanne et y resta jusqu'à sa f 10 août 1879. Bien qu'ayant renoncé au ministère actif, il ne cessa de s'intéresser à l'Église et aux progrès du règne de Dieu. En 1848 il donna sa démission avec la majorité du clergé vaudois, se joignit à l'Église libre, fut nommé président de son Comité des études et professeur d'hist. ecclésiastique; il enseigna pendant 15 ans. Parmi ses publications nous signalerons: un Essai sur l'Évangile, Considér. sur les mœurs des chrétiens dans les trois premiers siècles; la trad.de l'Hist. suisse, de Muller; le Chroniqueur qui, pendant deux ans 1835 et 1836, se transportant à 3 siècles en arrière, publiait tous les 15 jours les nouvelles de ce qui se passait dans le monde politique et religieux, conférences, missions, livres nouveaux; la réimpression de l'Hist. de la Réformation, de Ruchat; la continuation, avec Monnard. de l'Hist. suisse de Hottinger. Plus tard il donna encore un Tableau du canton de Vaud, Étude sur Chillon, le doyen Bridel, le landamman Pidou, la reine Berthe, Aimé Steinlen, Souvenirs pour ses petits enfants, Résumé de l'hist. suisse, sans parler d'une foule d'articles de journaux. En 1837 il avait fondé la Soc. d'hist. de la Suisse romande. A 80 ans il est mort jeune et debout, quoique jamais bien robuste. Il ne voulait savoir qu'une chose, un nom, celui de Jésus-Christ, le Dieu Sauveur.

YORK, l'anc. Eboraeum, vieille ville archiépiscopale d'Angleterre, longtemps rivale de Cantorbéry quant à la primatie, et finalement vaincue dans cette lutte, mais avec les honneurs de la guerre. Bien que sa population soit à peine de 40,000 âmes, elle partage avec Londres l'honneur d'avoir à sa tête un lord-maire. Son histoire, avant l'époque des Anglo-Saxons, est assez obscure. On voit 314 au synode d'Arles un évêque d'York, Eborius, et quelques autres év. anglais. Mais c'est avec le missionnaire Augustin 601 que commence réellement son histoire. Augustin avait reçu de Grégoire 1er \e pallium, et il fonda pour Rome deux sièges archiépiscopaux, Cantorbéry, au lieu de Londres que Grégoire avait désigné, et York (Coforwîe), qui ne reçut cependant de titulaire (Paulin) 627, qu'après la mort du prince Edelfried, l'ennemi des chrétiens et de Rome. Paulin lui-même ne fut confirmé par Honorius qu'en 634, après que Boniface V eut assuré à Juste de Cantorbéry 624 les droits de métropolitain sur toute l'Angleterre. Mais Paulin dut fuir après la mort d'Eadwin, et York redescendit pendant quelques années au rang de simple évêché. Le diocèse fut même partagé en trois sous Théodore, de manière à l'affaiblir d'avance pour le cas où il recouvrerait son titre archiépiscopal. Les circonstances politiques, les guerres d'invasion, les contestations religieuses entravèrent la reconstitution du diocèse, en même temps qu'elles permirent aux évêques de se soustraire momentanément à l'autorité de Cantorbéry, en assurant leur indépendance. Vers 1154 l'ambitieux Roger de Pont-l'Évêque fut nommé, avec l'agrément du pape; mais ce choix ne fut pas heureux; avare, colère et violent, il était désigné sous le nom d'Archidiable par Jean de Salisbury, et on lui attribue une bonne part de responsabilité dans la mort de Becket; l'Écosse refusa de le reconnaître et il la mit à l'interdit. Galfried, ou Gottfried, fils naturel et ancien chancelier de Henri II, est élu en 1189, mais il va se faire sacrer à Tours, malgré son serment, et il n'est confirmé qu'en 1191; il doit quitter l'Angleterre quand Innocent III excommunie le pays à la suite de ses démêlés avec Jean-Sans-Terre. Wicleff apparaît sous Jean de Thorisby f 1373. Parmi ses derniers évêques on nomme W. Boothe t Thomas Rotheram, qui s'intéressa aux universités, f 1500; Christophore Bambridge, qui f 1314 à Rome, cardinal; Wolsey, q. v.; Édouard Lee f 1544, et Nicolas Heatbqui, sous Marie-la-Sanglante, remplaça Robert -Holgate, qui était protestant et marié. Heath dut résigner ses places et honneurs sous Élisabeth, et f 1579, tranquille, dans sa retraite de Gobbam.

YOUNG, v. Mormons.

ZANZIBAR, lie et royaume de la côte orientale d'Afrique, un peu au sud de l'équateur, sans frontières déterminées du côté de l'intérieur. Population, en majorité musulmane, de plus de 2 millions d'habitants; port considérable et voie naturelle pour pénétrer jusqu'à la région des grands lacs; centre important pour le commerce, les explorateurs et les missionnaires. Vasco de Gama s'en empara au nom du Portugal, mais l'iman de Mascate, Arabe, chassa les envahisseurs à la fin du 17m* siècle, et se mit en leur lieu et place. Si-Saïd, qui régna de 1803 à 1856, a favorisé les missionnaires, à condition qu'ils ne s'occupassent que des païens et pas des musulmans. Les cathol. et les protestants y possèdent de nombreux établissements, mais qui sont plutôt un point d'attache pour les missions et les stations fondées sur la route d'Ujiji. C'est aussi un centre, mais honteux et dissimulé, pour l'embarquement clandestin d'esclaves enlevés par des chasseurs d'hommes.