séduisit les Romains par ses manières et par sa politique, et les laissa croire à la liberté lorsque déjà son
gouvernement n'était plus qu'une complète tyrannie.
Son siècle fut l'époque des plus beaux génies, soit dans le domaine des lettres, soit dans l'art de
l'administration et de la guerre: les noms des Tite-Live, des Virgile, des Horace et des Mécènes dans la
littérature, des Agrippa, des Drusus, des Tibère dans la science des batailles, répandent un éclat immortel
sur ce règne despotique.
Auguste eut encore l'honneur et le bonheur de faire, pour la troisième fois depuis la fondation de Rome,
fermer le temple de Janus, qui restait ouvert en temps de guerre; mais cette paix ne fut pas obtenue sans
de violents combats: il fallut en livrer en Afrique, en Asie, dans les Gaules et en Espagne, où les légions
eurent bien de la peine à soumettre les Cantabres. Ses armes soumirent encore l'Aquitaine, la Pannonie, la
Dalmatie, l'Illyrie, et continrent les Daces, les Numides, les Éthiopiens. Il fit une alliance avec les Parthes,
qui cédèrent l'Arménie, et rendirent les drapeaux enlevés à Crassus et à Antoine dont les armées avaient
été taillées en pièces. Cet hommage rendu à Auguste par les barbares, fut imputé à celui-ci par les
Romains comme un véritable triomphe. Il eut à combattre aussi les Germains sur lesquels il remporta
divers avantages, mais qui lui firent éprouver un échec terrible par le massacre de l'armée commandée
par Varus. Ce revers causa la plus vive douleur à l'empereur, qui s'écria plus d'une fois: «Varus, Varus,
rends-moi mes légions!» Tibère effaça par ses triomphes la défaite de ce général qu'il vengea cruellement.
Les jours de l'empereur furent deux fois menacés par le fer des conspirateurs: la première fois, au
commencement de son règne, la deuxième vers la fin. Cinna, qu'Auguste avait comblé de ses bienfaits,
était à la tête de cette dernière conjuration. Auguste informé de la chose, fit venir auprès de lui le
coupable, lui pardonna généreusement en lui témoignant beaucoup d'affection, et le fit même consul
pour l'année suivante. Ce noble procédé désarma tous les complices, et porta au plus haut degré l'amour
et l'admiration du peuple romain pour son chef. Dès lors il n'eut plus d'ennemis, ni au dedans ni au
dehors; sa douceur, sa clémence, son amour pour la justice lui avaient gagné tous les cœurs. Nous avons
vu sa conduite à l'égard d'Archelaüs (— Voir: cet article); ce fut encore lui qui fit donner à Hérode, par le
sénat romain, la couronne de la Judée, et il y ajouta plus tard la tétrarchie de Zénodonus: il voulut faire
lui-même l'éducation d'Alexandre et d'Aristobule, fils d'Hérode, et leur donna des appartements dans
son propre palais. On comprend, d'après cela, combien Auguste dut être affligé lorsque, dans la suite,
Hérode versa le sang de ces deux jeunes princes. «Il vaut mieux être le porc d'Hérode que son fils!»
s'écria-t-il dans son indignation.
Quand la paix fut rétablie dans son empire, il fit faire un recensement général de tous ses sujets; il en
ordonna même trois presque consécutivement, et c'est pendant le second qui commença sept ans environ
avant Christ, et qui durait encore à cette époque, que Joseph et Marie vinrent se faire enregistrer dans le
lieu de leur bourgeoisie, Bethléhem, Luc 2:1-6. (Il faut ajouter cependant, que l'impôt qui fut établi par
l'empereur en suite de ce recensement, ne fut prélevé que quelques années plus tard.) Ce fut dans la
vingt-sixième année d'Auguste que naquit le Sauveur du monde; et le même règne qui vit fermer les
portes du temple de Janus, vit naître aussi le prince de la paix, mais d'une paix meilleure et plus durable,
de celle dont l'Éternel a dit: «C'est moi qui la donne.» À côté du fondateur de la monarchie impériale de
Rome, s'élevait celui qui venait fonder le nouveau royaume d'Israël, un empire universel, éternel, qui
devait, quelque chétifs que fussent ses commencements, envahir le monde entier, et dominer les ruines de
l'empire romain.
Auguste mourut à Nole en Campanie, l'an 14 avant J.-C., au retour d'un voyage qu'il avait entrepris pour
sa santé. Il avait atteint sa soixante-treizième année, (selon d'autres sa soixante-dix-septième), et avait
régné quarante ans. Après sa mort, comme pendant sa vie, il fut regardé comme un Dieu par le peuple
romain qui lui éleva des temples, et lui rendit un culte particulier.
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