Dagon, la bête qui sort de la mer

Or, ce dieu de la mer, après avoir eu son culte solidement rétabli, après avoir surmonté toutes les formidables oppositions qui s'élevèrent contre lui, fut adoré aussi comme le grand dieu de la guerre, qui, mort pour le bonheur de l'humanité, était maintenant ressuscité et absolument invincible. En mémoire de cette nouvelle incarnation, on célébrait dans la Rome païenne, le 25 décembre, autrement appelé jour de Noël, comme étant natalis invicti solis, "le jour de naissance du soleil invaincu (13)". Nous avons vu aussi que le vrai nom du dieu romain de la guerre était précisément le nom de Nemrod ; car Mars et Mavors,

les deux noms bien connus du dieu romain de la guerre, sont évidemment les formes romaines du chaldéen Mar ou Mavor, le rebelle (14). Aussi terrible et aussi invincible était Nemrod lorsqu'il se montra de nouveau comme Dagon, la bête qui sort de la mer. Si le lecteur consulte l'Apocalypse, il verra exactement la même chose : "Et je vis une de ses têtes comme blessée à mort et sa blessure mortelle fut guérie, et tout le monde étant dans l'admiration, suivit la bête. Et on adora le Dragon qui avait donné son pouvoir à la bête ; on adora aussi la bête en disant : Qui est semblable à la bête, et qui pourra combattre contre elle ?" (Apocalypse XIII, 3, 4). Telle est, à tous égards, l'analogie entre le langage de la prophétie et l'ancien type babylonien.

Y a-t-il donc des rapports entre ces détails et l'histoire religieuse de l'empire romain après la chute de l'ancien paganisme dans cet empire ? Oui, à tous les points de vue. À peine l'ancien paganisme fut-il légalement aboli, le feu éternel des Vestales éteint, l'ancien serpent précipité du siège puissant où il s'était si longtemps assis en sécurité, qu'il essaya des moyens les plus énergiques pour regagner son influence et son autorité. Comprenant qu'il ne suffirait pas de persécuter le christianisme pour détruire l'église symbolisée par la femme entourée du soleil, il essaya d'une autre manière : "Et le serpent jeta de sa gueule de l'eau, comme un fleuve, après la femme, afin qu'elle fût entraînée par le fleuve." (Apocalypse XII, 15). Voilà un symbole vraiment remarquable. Si c'était là le dragon de feu, on devait s'attendre à ce qu'il fût représente suivant les mythes populaires, comme vomissant du feu après la femme. Mais non ! Ce ne fut pas le cas il jeta de sa bouche un fleuve d'eau ! Que signifie donc cela ? Comme l'eau sortait de la gueule du dragon cela veut dire une doctrine et naturellement une fausse doctrine. Mais n'y a-t-il rien de plus distinctif ? Un simple coup d'oeil jeté sur l'ancien type babylonien montrera que l'eau jetée par la bouche du serpent doit être l'eau de la régénération baptismale.