Le culte du Sacré-Cœur

Fig. 40


Une nouvelle mode de dévotions s'est largement introduite tout dernièrement dans l'Église romaine : le chapelet joue ici encore un rôle important, et nous voyons encore une fois que la papauté se rapproche chaque jour, par ses innovations, de l'ancien paganisme de Babylone. Je veux parler du "rosaire du Sacré-Coeur". Il n'y a pas longtemps que le culte du Sacré-Coeur a été établi, et aujourd'hui c'est partout le culte privilégié. Il en était ainsi dans l'ancienne Babylone, comme le prouve le système Babylonien de l'Égypte. Là aussi on vénérait un coeur sacré. Le coeur était l'un des symboles d'Osiris rendu à la vie, apparaissant comme Harpocrate ou le dieu enfant (7), porté dans les bras de sa mère Isis. Aussi, le fruit du Persée Égyptien lui était-il particulièrement consacré, à cause de sa ressemblance avec le coeur humain (8). C'est pour cela que le dieu enfant était souvent représenté avec un coeur à la main ou avec le fruit de Persée en forme de coeur (fig. 40).

La gravure ci-dessus est tirée des "Pompéiens" ; mais l'extrait suivant de la critique de John Bell sur les antiques de la galerie de peinture à Florence montre que le dieu enfant avait été représenté ailleurs de la même manière dans l'antiquité. Parlant d'une statue de Cupidon, il dit que c'est un bel enfant, épanoui, charmant, florissant, agile et enjoué, et agitant un coeur (9). Ainsi le dieu enfant en vint à être regardé comme le dieu du coeur, en d'autres termes, comme Cupidon ou le dieu de l'amour. Pour identifier ce dieu enfant à son père, le puissant chasseur, on l'équipait d'un arc et de flèches ; et pour l'amusement du profane vulgaire, les poètes chantaient ce dieu enfant qui lançait dans les coeurs des flèches aux pointes dorées. Son vrai caractère cependant, comme on le voit ci-dessus et comme nous avons eu des raisons de le conclure, était bien plus élevé, et d'une tout autre nature. Cet enfant était la semence de la femme. Vénus et son fils Cupidon n'étaient pas autre chose que la Madone et l'enfant (10). Examinant le sujet à ce point de vue, nous comprendrons la véritable force et le sens du langage que Virgile met dans la bouche de Vénus, lorsqu'elle s'adresse au jeune Cupidon :

Mon fils, toi ma force, toi qui fais mon pouvoir suprême, Toi qui seul méprises les traits dont Jupiter foudroya Typhéé

C'est à toi que j'ai recours, et suppliante j'implore ta puissance (11).

Nous avons déjà parlé du pouvoir et de la gloire de la déesse mère fondés entièrement sur le caractère divin de son fils, mais le lecteur s'en rendra mieux compte en voyant le Fils appelé la "Force de sa mère". Si le dieu enfant symbolisé dans un coeur était regardé comme le dieu de l'enfance, cela explique admirablement l'une des coutumes particulières à Rome. Kennett nous dit, dans ses Antiquités que les jeunes Romains dans leur plus tendre jeunesse, portaient un ornement doré suspendu à leur cou et appelé "bulla", en forme de coeur. Barker, dans son ouvrage sur la Cilicie, tout en admettant que la bulla des Romains avait la forme d'un coeur (12), déclare en outre que c'était l'usage à la naissance d'un enfant de lui donner le nom de quelque divinité qui était censée le prendre sous sa

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protection, mais que ce nom n'était plus donné à l'enfant devenu jeune homme 270

quand il ne portait plus la bulla (13). Quel était donc ce dieu sous la garde duquel on mettait les enfants des Romains ? N'était-ce pas le dieu même dont ils portaient le symbole formel sous l'un ou l'autre de ses noms différents, et qui tout en étant reconnu comme le grand et puissant dieu de la guerre, était aussi représenté sous la forme qu'il affectionnait, celle d'un petit enfant ? Le culte du Sacré-Coeur semble aussi s'être répand jusque dans l'Inde. Dans ce pays, en effet, nous voyons Vichnou, le dieu Médiateur, atteint au pied d'une blessure qui causa sa mort (14) (mort dont on célèbre chaque année le souvenir par des scènes de désespoir), portant un coeur suspendu à la poitrine (15) (fig. 41).

Mais dira-t-on, comment se fait-il que le coeur soit devenu le symbole déclaré de l'enfant de la grande Mère ? Voici ma réponse : le coeur en Chaldéen est "Bel" ; or tout d'abord, au lendemain du coup porté à l'idolâtrie, presque tous les éléments importants du système Chaldéen furent introduits sous un voile ; ils continuèrent à être couverts de ce voile aux regards des profanes, quand on n'eut plus à agir sous l'effet de la crainte. Or le culte du Sacré-Coeur était précisément, sous un symbole, le culte du Bel sacré, le puissant de Babylone qui mourut martyr de l'idolâtrie ; on croyait, en effet, qu'Harpocrate, le dieu enfant, avait été comme Bel, rendu à la vie. Ce qui le prouve, c'est l'extrait suivant de Taylor, dans une note de sa traduction des Hymnes Orphiques : "Un jour que Bacchus se regardait dans un miroir ; il fut horriblement mis en pièces par les Titans qui, non contents de cette cruauté, firent bouillir ses membres dans l'eau, puis les firent cuire sur le feu ; mais pendant qu'ils étaient occupés à manger sa chair ainsi préparée, Jupiter, attiré par cette odeur et s'apercevant de cet acte barbare, lança sa foudre contre les Titans, et remit les membres de Bacchus à son frère Apollon afin de les faire ensevelir d'une manière honorable. Puis Dionysus, c'est-à-dire Bacchus, dont le coeur, pendant que le corps était ainsi mis en pièces, fut enlevé et gardé par Minerve, recouvra la vie par une nouvelle naissance, et compléta le nombre des dieux (16)." Ceci montre d'une manière frappante le caractère sacré du coeur de Bacchus ; cela montre aussi que la régénération de son coeur a bien le sens que je lui ai donné, c'est-à-dire la nouvelle naissance ou la nouvelle incarnation de Nemrod ou Bel. Quand Bel cependant revint à la vie comme enfant, il fut, nous l'avons vu, représenté comme une incarnation du soleil. Aussi pour marquer ses rapports avec le soleil ardent, le Sacré-Coeur fut représenté comme un coeur embrasé (17). C'est ainsi que le Sacré-Coeur de Rome est aujourd'hui adoré comme un coeur embrasé, ainsi qu'on peut le voir sur les rosaires consacrés à ce culte. À quoi bon dès lors donner au Sacré-Coeur qu'on adore à Rome le nom de Jésus, puisque non seulement ce culte s'adresse à une statue matérielle empruntée au culte de l'Antéchrist babylonien, mais encore puisque les attributs donnés à ce Jésus sont, non pas ceux du Sauveur vivant et aimant, mais bien les véritables attributs de l'ancien Bel ou Moloch ?

Terribilem quondam fugiens Typhona Dione Tunc cum pro coelo Jupiter arma tulit,

Venit ad Euphraten, comitata Cupidine parvo, Inque Palaestinae margine sedit aquae.

(Fastes, liv. II, v. 461-464)

Chapitre 5

Rites et cérémonies

Article 5

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