Page 211 - LES DEUX BABYLONES

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Or, dans tous les âges le despotisme spirituel, celui du paganisme comme celui
de la papauté, s'est toujours montré hostile à cette confiance en Dieu, à cette
assurance du salut. Son grand objet a toujours été de tenir les âmes de ses
partisans loin de la communion directe et immédiate d'un Sauveur vivant et
miséricordieux, pour inspirer le sentiment de la nécessité d'une médiation
humaine et pour s'établir ainsi sur les ruines des espérances et du bonheur de
l'homme. Si l'on considère les prétentions de Rome à l'infaillibilité, et les
pouvoirs surnaturels qu'elle attribue aux fonctions de ses prêtres pour la
régénération et le pardon des péchés, on pourrait supposer, comme une chose
naturelle, que tous ses sectateurs seraient encouragés à se réjouir dans l'assurance
continuelle de leur salut personnel. Mais c'est tout le contraire qui a lieu. Après
toute sa forfanterie et ses hautes prétentions, elle enseigne que le doute est pour
l'homme un devoir jusqu'à la fin de sa vie sur la question de son salut. C'est ce
que fait un article de foi du concile de Trente :
"Nul homme ne peut savoir avec
l'assurance infaillible de la foi s'il a obtenu la grâce de Dieu
"
Cette
déclaration de Rome, tout en étant directement opposée à la Parole de Dieu,
imprime sur ses hautaines prétentions le sceau de l'imposture ; car si nul homme,
après avoir été régénéré par le baptême romain et après avoir reçu l'absolution de
ses péchés, ne peut, malgré cela, avoir une assurance certaine de la possession de
la grâce de Dieu, à quoi peut servir son opus operatum ? Cependant, en cherchant
à tenir ses sectateurs dans le doute et l'incertitude naturelle au sujet de leur
condition finale, elle est sage après l'avoir fait naître.
Dans le système païen, le prêtre seul pouvait prétendre à anticiper sur l'action
d'Anubis et, dans le confessionnal, il y avait de temps en temps une répétition
mimique du terrible pesage qui devait avoir lieu le jour du jugement devant le
tribunal d'Osiris. Le prêtre s'asseyait pour juger les bonnes et les mauvaises
actions de ses pénitents ; et comme son pouvoir et son influence étaient fondés
dans une large mesure sur le principe d'une crainte servile, il prenait
ordinairement soin de faire pencher la balance du mauvais côté, afin qu'ils soient
plus dociles à sa volonté en jetant dans l'autre plateau une dette assez ronde de
bonnes actions. Comme il était le grand juge de la nature de ces actions, il était
de son intérêt de désigner celles qui seraient le plus profitables à son élévation