Rome et la crucifixion
dans la littérature de l'époque

 

Ossement de crucifié

Témoignage évident d'une crucifixion, un gros clou de fer est enchâssé dans l'os du talon d'un jeune juif du 1er Siècle ap JC. La pointe est émoussée et courbée : peut-être a-t-elle heurté un nœud lorsqu'on l'a enfoncé dans la poutre verticale de la croix. Cette affreuse relique fut trouvée parmi d'autre ossements dans une grotte sépulcrale au nord-est de Jérusalem.

 

Les crucifiés de Giv'at mivtar:

Les découvertes archéologiques montrent que des crucifiés contemporains de Christ furent exécutés sur une croix. En effet, en 1968, on a découvert près de Jérusalem, à Giv'at mivtar, 15 sarcophages remplis de squelettes humains dont certains avaient subi le supplice de la crucifixion. Le travail d'étude fut exécuté par le Département d'anatomie de la Hebrew University Hassadah School sous la direction de Madame C. Salomon et les restes en question ont été confiés au Israël Museum (Rockefeller section). Les crucifiés avaient les bras étendus à l'horizontale et non comme l'affirme la Société des Témoins de Jéhovah  au-dessus de la tête. Tout un article sur cette importante découverte a été rédigé par le Professeur N. Haas de l'Université hébraïque de Jérusalem et ce dans la revue française Les dossiers de l'archéologie (no lO, page lO7).

Voici la posifion des crucifiés de Giv'at mivtar:                                                 

 

Voici une photo montrant à droite un os de pied perçé d'un clou d'un crucifié de Give'at mivtar.

source: http://membres.lycos.fr/ceops/croixpoteau2.htm

 

La mort de Jésus

 

Mis au nombre des malfaiteurs

Dans cette atmosphère très tendue, la révolte juive menaçait. Outre les bandits motivés seulement par l'appât du gain, la Judée et la Galilée étaient aussi parcourues par des bandes armées, révoltées, refusant toute autorité. Certains chefs de ces groupes armés s'autoproclament même Messie et menacent les institutions gouvernementales en place.

Parmi ces mouvements messianiques, dans le trouble général, Jésus tombe victime de la méfiance des autorités envers les prédicateurs. Il est mis au nombre des agitateurs du peuple et par-là devient une menace pour le pouvoir des sadducéens. Bien qu'il n'ait jamais prêché la révolte, il alimente l'espérance des foules et est présenté comme au fauteur de troubles aux autorités romaines par le sanhédrin (Jean 18.30).

La dimension politique est alors immédiatement donnée à ses prétentions messianiques très peu comprises. Pour les romains, ce Jésus apparaît donc dès le départ comme un rebelle, un fauteur de trouble assimilable aux zélotes, c'est pourquoi Pilate proposera de leur relâcher Barabbas, un véritable brigand, ou Jésus, incapable de faire la différence entre ces deux personnages.

 

La condamnation de Jésus

Après l'avoir interrogé, Pilate avait du mal à reconnaître en Jésus un émeutier, bien qu'il se disait roi des juifs il ne présentait aucune menace pour son pouvoir (Jean 18.36-38). Il comprenait que c'était par peur de perdre leur pouvoir que les sadducéens lui demandaient la mort de Jésus (Matthieu 27.18). Voulant se contenter de le faire battre puis de le relâcher, Pilate s'en remit à la foule.

Le peuple, persuadé par ses chefs religieux, demanda la libération de Barabbas et la mort de Jésus (Matthieu 27.20). Pilate cherchait toujours à libérer cet innocent, mais il fut alors pris à parti par les autorités juives qui lui dirent qu'il ne pouvait être ami de l'Empereur romain s'il relâchait quelqu'un qui se déclarait roi (Jean 19-12). Craignant que son pouvoir ne soit officiellement contesté par les juifs, Pilate livra donc Jésus pour qu'il soit crucifié.

 

A la croix

Les Israélites savaient ce que c'était que de "pendre quelqu'un au bois", ce supplice était pour eux le signe d'une malédiction spéciale (Deutéronome 21.22-23). Les Romains n'appliquaient cette sanction qu'aux esclaves, ou aux hommes libres coupables des crimes les plus abominables; une loi formelle interdisait de crucifier tout citoyen romain, mais à part cela, cet affreux supplice était abondamment employé.

La simple fixation de la victime à la croix, par des liens, n'entraînait pas la mort, qui ne survenait que lorsque la soif et la faim avaient fait leur œuvre. La fixation des mains et des pieds avec des clous ne produisait même pas nécessairement une mort plus rapide. S'il était opportun, pour une raison quelconque, de se débarrasser des condamnés avant que la mort les délivrât de leurs angoisses, on hâtait la fin en brisant les jambes, comme on le fit aux brigands crucifiés en même temps que Jésus (Jean 19.31-33).

Jésus connut la souffrance sur la croix et mourut rapidement, c'est pourquoi les romains n'eurent pas à lui briser les jambes, mais s'assurèrent de sa mort en lui plantant une lance dans le flanc. Il sortit du sang et de l'eau (Jean 19-34). L'eau, avec des caillots de sang, peut provenir d'une rupture du cœur, et d'un flot de sang dans le péricarde, une poche extérieure au cœur, où il y a séparation rapide en eau et en caillots de sang. Il semble donc certain que la cause de la mort de Christ fut une rupture du cœur.

Impression d'artiste - Jésus cloué à la croix par les soldats.

La crucifixion était une expérience atroce -- en réalité, ces termes sont liés. La raison de la mort par la crucifixion était multiple et accompagnée de torture! Ces facteurs incluaient l'épuisement, l'asphyxie, la déshydratation, et l'arrêt cardiaque. Que Jésus ait pu survivre à une telle agonie sur une croix romaine, pour sortir péniblement de la tombe par ses propres moyens, est déjà invraisemblable! 

 

Que son aspect tuméfié et horriblement blessé ait pu être caché au point de tromper ses disciples désespérés pour qu'ils croient qu'il était "Le Seigneur de la Vie ressuscité" et vainqueur de la mort, est absurde! Un homme dans une telle condition n'aurait guère inspiré ses disciples. Jésus aurait été compromis comme charlatan. Seul un Jésus ressuscité de manière surnaturelle était capable de guérir le cœur brisé des disciples. Les soldats romains ont déclaré que Jésus était mort, et il l'était. Le mélange de sang et de l'eau qui jaillit de la blessure qu'ils ont percé dans son côté en est la preuve manifeste.

 

Le crime de lèse-majesté

Les accusations portées contre Jésus et les chrétiens pouvaient tomber sous le coup de la loi de lèse-majesté. Voir Jean 19 :12, Actes 16 :20-21 et Actes 18 :13.

T acite, Annales, I, 72, 2-4

"Tibère refusa le titre de père de la patrie, malgré les instances réitérées du peuple ; et, contre l'avis du sénat, il ne permit pas qu'on jurât sur ses actes, répétant sans cesse que tout ce qui touche aux mortels est incertain et que, plus il aurait de pouvoir, plus il risquait un faux pas. Et cependant il ne faisait pas croire ainsi à des sentiments libéraux, car il avait remis en vigueur la loi de majesté qui, chez les anciens, englobait sous ce nom des accusations différentes, trahison envers l'armée, sédition à l'égard de la plèbe, enfin mauvaise gestion des affaires publiques, nuisible à la majesté du peuple romain : les actes étaient mis en cause, les paroles restaient impunies.

Auguste le premier se couvrit de cette loi pour engager une instruction sur les libelles scandaleux, indigné par la licence de Cassius Severus qui, s'en prenant à des hommes et à des femmes de rang illustre, les avait diffamés dans des écrits insolents ; puis Tibère, consulté par le préteur Pompeius Macer sur la recevabilité des accusations pour lèse-majesté, répondit que les lois devaient être appliquées. Lui aussi avait été exaspéré par des vers anonymes qui couraient sur sa cruauté, son orgueil et sa mésintelligence avec sa mère. "


Suétone, Vies, Tibère, LVIII.

"Vers le même temps, comme un préteur demandait à Tibère s'il voulait faire poursuivre les crimes de lèse-majesté, il répondit "qu'il fallait appliquer les lois ", et il les appliqua de la manière la plus atroce. Quelqu'un avait enlevé la tête d'une statue d'Auguste pour lui en substituer une autre; l'affaire fut débattue au sénat et, comme il y avait doute, on eut recours à la torture. L'inculpé ayant été condamné, ce genre d'accusation fut insensiblement porté si loin qu'on fit un crime capital même d'avoir battu un esclave ou changé de vêtements près d'une statue d'Auguste, d'avoir été aux latrines ou dans un lieu de débauche avec une pièce de monnaie ou une bague portant son effigie, d'avoir critiqué l'une de ses paroles ou de ses actions. Enfin on alla jusqu'à faire périr un citoyen qui s'était laissé investir d'une magistrature dans sa colonie, le même jour où l'on avait autrefois décerné des charges à Auguste. "


La Crucifixion : ce châtiment existe chez presque tous les peuples de l'antiquité, y compris chez les grecs. On voit en elle la dissuasion la plus efficace. Chez les Romains, la crucifixion est appliquée aux criminels qui n'ont pas la citoyenneté romaine, mais il y eut des exceptions.

Pline l'Ancien, Histoire Naturelle, XXXVI, 106-107.

"Et n'oublions pas de mentionner une particularité même plus mémorable, car les plus célèbres historiens l'ont omise. Tarquin l'Ancien (5° roi de Rome, mort en 579 av JC) faisait exécuter cet ouvrage (construction d'un aqueduc) par les mains de la plèbe et, ne sachant ce qui l'emportait de la grandeur du travail ou de sa durée, de toutes parts, pour échapper à la lassitude, les citoyens se donnaient la mort. A cela, le roi trouva un remède nouveau et que nul n'imagina avant lui ni ne reprit : il fit clouer sur une croix le corps de tous ceux qui s'étaient donné la mort, pour en faire à la fois un spectacle pour les citoyens et une proie à déchirer pour les bêtes sauvages et les oiseaux." (Notes de l'historien : pour Tarquin, c'est la privation de sépulture et le corps donné en proie aux animaux qui sont une dissuasion au suicide. Il ne s'agit donc pas ici de supplice mais de l'infamie liée à la crucifixion).


Cicéron, plaidant pour Rabinius, accusé de haute trahison, s'élève violemment contre la crucifixion dont est menacé son client, un citoyen romain en 63 av JC.

Cicéron, Pro Rabirio, 16.

"C'est un malheur que la flétrissure d'une poursuite criminelle, un malheur que la confiscation des biens, un malheur que l'exil, mais dans tous ces malheurs on conserve toujours quelque apparence de liberté. Enfin si c'est de mort qu'on nous menace, mourons du moins en hommes libres. Oui, que le bourreau, que le voile qui enveloppe la tête (allusion aux modalités de l'exécution), que le nom même de croix soient écartés non seulement de la personne des citoyens romains, mais de leurs pensées, de leurs yeux, de leurs oreilles. Car pour de tels supplices, ce n'est pas seulement l'effet et l'exécution, c'est le caractère, l'attente, le nom seul qui sont indignes d'un citoyen romain et d'un homme libre. "


La littérature ancienne ne s'attarde pas sur les souffrances du supplicié. Sénèque voulant justifier la possibilité du suicide, décrit l'horreur de la mort progressive du crucifié.

Sénèque, Lettres à Lucilius, 101, 14.

"Se trouve-t-il donc un homme qui aime mieux fondre dans les tourments, périr membre à membre et répandre autant de fois sa vie goutte à goutte, que de l'exhaler d'un seul coup? Oui, qui attaché au gibet maudit, déjà infirme, déjà informe, les épaules et la poitrine remontée en deux bosses affreuses, ayant ainsi, même avant la croix, mille motifs de mourir, veut prolonger une existence qui prolongera tant de tortures ? "

 

ETAM : Ces lacs étaient autrefois reliées à la Mer Rouge. Ligne de remontée vers la Palestine. Peu-être certaines tribus l'ont-elles empruntées au sortir d'Egypte.